tag:theconversation.com,2011:/africa/topics/collaboration-20521/articlescollaboration – The Conversation2023-01-25T14:37:19Ztag:theconversation.com,2011:article/1974972023-01-25T14:37:19Z2023-01-25T14:37:19ZGarantir l’inclusion des personnes en situation de handicap : la douce magie d’un espace habilitant<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/505188/original/file-20230118-11-69v9i0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C0%2C991%2C667&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'espace habilitant est un espace sécuritaire, confortable, stimulant, collaboratif, flexible et permettant le pouvoir d’agir.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Imaginez être Harry Potter, jeune humain étudiant à l’école de sorcellerie Poudlard. Vous décidez de rendre visite à votre ami Hagrid, gardien semi-géant de l’école. En arrivant chez lui, tout vous paraît beaucoup trop grand, trop lourd, inaccessible. Vous vous sentez terriblement petit, vulnérable et impuissant dans cet espace, pourtant parfaitement adapté à Hagrid. </p>
<p>À l’inverse, ce dernier se retrouve bien embarrassé lorsqu’il doit partager une table avec les autres employés de l’école. Il est trop grand, trop gros, renverse tout sur son passage… Il se sent terriblement encombrant, isolé et maladroit. Harry et Hagrid vivent, chacun leur tour, une situation de handicap qu’ils auraient aimé éviter.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"521712526841507841"}"></div></p>
<p>Respectivement doctorant en sciences biomédicales et chercheur en ergothérapie à l’UQTR, nous avons travaillé à l’élaboration d’un concept, celui d’<a href="https://www.researchgate.net/publication/338066762_Le_concept_d%E2%80%99espace_habilitant_une_avenue_theorique_prometteuse_en_ergonomie">espace habilitant</a>, qui permettrait d’améliorer ces situations, encore bien présentes dans le monde des magiciens comme du commun des mortels… </p>
<p>Le concept d’espace habilitant identifie les principaux attributs nécessaires à la conception et l’adaptation des espaces. Nous vous le présentons ici dans une approche ludique, autour de l’univers d’Harry Potter.</p>
<h2>Une question d’espace</h2>
<p>Plusieurs courants se sont intéressés à la possibilité de rendre les espaces de vie plus <a href="https://inrs.ca/linrs/equite-diversite-et-inclusion/">inclusifs</a>, permettant ainsi à chacun d’y réaliser ses activités. Lorsque l’on parle d’espace, on ne pense pas seulement à un environnement physique, mais également à tout ce que cela implique : les gens qui y évoluent, le matériel présent, les conditions environnementales, les activités que chacun veut faire, la signification que ce lieu peut avoir, etc. C’est ce que l’on appelle une <a href="https://www.cnrtl.fr/definition/holistique">vision holistique</a> de l’espace. </p>
<p>Plusieurs outils théoriques de disciplines diverses (architecture, philosophie, ergothérapie, sociologie, urbanisme, psychologie) peuvent aider à comprendre ces situations et la complexité de ces espaces. À titre d’exemple, le concept d’<a href="https://www.irsst.qc.ca/en/publications-tools/video/i/100167/n/concept-environnement-capacitant">environnement capacitant</a> s’attarde aux aspects inclusif, sécuritaire et développemental d’un espace. Le concept de l’<a href="https://caot.ca/document/4210/L%20-%20Les%20occupations%20et%20la%20sant%C3%A9%20(2008).pdf">habilitation aux occupations</a> va quant à lui s’intéresser à l’accompagnement individuel des personnes afin de les aider à effectuer les activités qu’ils souhaitent. Dans une vision plus collective, le concept d’<a href="https://www.inspq.qc.ca/sites/default/files/publications/2775-accessibilite-universelle-conception-environnements.pdf">accessibilité universelle</a> va chercher davantage à garantir, par l’adaptation des espaces, une sécurité et une liberté d’action pour tous.</p>
<p>Afin d’englober tous ces concepts, nous nous sommes penchés sur le développement du concept d’espace habilitant.</p>
<h2>Les ingrédients nécessaires à l’espace habilitant</h2>
<p>Nous avons proposé ce concept afin d’identifier les critères fondamentaux nécessaires à l’habilitation d’un espace, c’est-à-dire favorisant le bien-être, l’inclusion et le développement de tous. C’est un peu comme si l’on décidait de concevoir une potion dans le but d’aider les professeurs de Poudlard à adapter l’école. Après concertation, <a href="https://www.researchgate.net/publication/338066762_Le_concept_d%E2%80%99espace_habilitant_une_avenue_theorique_prometteuse_en_ergonomie">six ingrédients</a> ont été sélectionnés pour préparer la potion d’espace habilitant :</p>
<ul>
<li><p>de la sécurité </p></li>
<li><p>du confort</p></li>
<li><p>de la stimulation, afin de maintenir nos sens éveillés et encourager notre développement</p></li>
<li><p>de la collaboration, qui doit favoriser la communication, le partage et la transparence entre les personnes. En effet, si chacun peut s’exprimer, être entendu, mais également entendre les réalités, besoins, envies des autres, la cohabitation sera plus aisée</p></li>
<li><p>du pouvoir d’agir, qui permettra à chacun de décider, d’être l’acteur principal et le décisionnaire de ce qu’il fait et de la façon dont il occupe l’espace </p></li>
<li><p>de la flexibilité, qui va permettre à la personne de se réapproprier son espace et de l’adapter en fonction des envies et besoins</p></li>
</ul>
<p>Mais l’être humain est complexe. Il faut donc accepter le fait qu’il est impossible de le cerner complètement et que la première version de l’espace ne sera habilitante que temporairement. C’est pour cette raison que l’ingrédient de flexibilité devient indispensable. Il faut que l’espace puisse nous permettre de le modifier en fonction de notre propre évolution.</p>
<p>Le meilleur exemple de cette flexibilité est l’aménagement d’une maison intergénérationnelle. Selon l’âge et les besoins spécifiques de ses résidents (apparition ou évolution d’un handicap, passage à l’adolescence, besoin d’agrandissement), elle sera amenée à s’adapter.</p>
<h2>Une potion réussie n’est pas suffisante</h2>
<p>Un espace sécuritaire, confortable, stimulant, collaboratif, flexible et permettant le pouvoir d’agir serait donc un espace habilitant. C’est bien, mais le problème n’est pourtant pas encore complètement résolu. Il faut d’abord et avant tout s’intéresser à la politique et à la législation du contexte dans lequel l’espace se trouve. </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/506179/original/file-20230124-14-u6qsnd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="grand-père tient son petit fils" src="https://images.theconversation.com/files/506179/original/file-20230124-14-u6qsnd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/506179/original/file-20230124-14-u6qsnd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/506179/original/file-20230124-14-u6qsnd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/506179/original/file-20230124-14-u6qsnd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/506179/original/file-20230124-14-u6qsnd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/506179/original/file-20230124-14-u6qsnd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/506179/original/file-20230124-14-u6qsnd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’aménagement d’une maison intergénérationnelle est un bon exemple de flexibilité, ingrédient nécessaire à la conception d’un espace habilitant.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Unsplash/Jimmy Cohen)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par exemple, au Québec, la <a href="https://www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/lc/e-20.1">loi assurant l’exercice des droits des personnes handicapées en vue de leur intégration scolaire, professionnelle et sociale</a> ou encore le <a href="https://www.quebec.ca/gouvernement/ministere/securite-publique/publications/plan-action-personnes-handicapees-2021-2022">plan d’action à l’égard des personnes handicapées du ministère de la Sécurité publique</a> cadrent, responsabilisent, orientent, soutiennent l’organisation de l’accompagnement des instances. </p>
<p>Ensuite, il importe de mobiliser l’<a href="https://ceppp.ca/actualite/quest-ce-que-le-partenariat-avec-les-patients-et-le-public-7-articles-scientifiques-incontournables/">expérience vécue des personnes comme équivalente à celles des différents professionnels</a> qui vont penser et concevoir les espaces. Et oui, si le professeur Rogue est expert des potions et le professeur Flitwick des sortilèges, ils ne pourront rien faire sans l’expertise acquise par le vécu des personnes qui vivent une situation de handicap au quotidien. Cette expertise située est le facteur central à la bonne mise en place d’un espace habilitant.</p>
<p>Si, lors de la conception de Poudlard, des semi-géants, des nains, des centaures, des étudiants avaient pu s’exprimer et participer à la conception de l’école, il est certain que ni Harry ni Hagrid n’auraient à revivre ce genre de situation. Ils auraient le sentiment d’être dans les meilleures dispositions pour réaliser leurs occupations et poursuivre leur combat contre les forces du mal !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197497/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lefay Galaad a reçu des financements du Centre de recherche et d'expertise en gérontologie sociale (CREGES).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pierre-Yves Therriault a reçu des financements du Centre de recherche et d'expertise en gérontologie sociale (CREGES).</span></em></p>La volonté des politiques publiques d’améliorer l’inclusion et le maintien des personnes en situation de handicap dans leurs espaces de vie est soumise à nombreux défis.Lefay Galaad, Candidat au doctorat en sciences biomédicales, Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR)Pierre-Yves Therriault, Professeur titulaire au Département d'ergothérapie, Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1869692022-09-04T15:21:12Z2022-09-04T15:21:12ZUn Wiktionnaire sémantique pour les sciences humaines et sociales<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/482065/original/file-20220831-22-fsxm32.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=46%2C0%2C5129%2C3445&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><span class="source">Pexels</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La création et le développement d'un dictionnaire numérique franco-arabo-berbère des sciences sociales s'inscrit dans le cadre du <a href="http://www.fsp.maghreb-france.msh-paris.fr/">Programme FSP-Maghreb</a>,</p>
<p>Ce programme vise à appuyer la recherche en SHS au Maghreb et à développer les échanges entre les institutions de recherche et les chercheurs maghrébins et leurs partenaires français dans une logique de réseaux et d'ouverture à l'international, notamment dans un cadre euro-méditerranéen. Il vise également à mettre en commun, par une meilleure maîtrise partagée de l'arabe, du berbère et du français, et par une politique d'incitation à la traduction, un ensemble de savoirs sur les deux cultures et les deux sociétés, et à en assurer la diffusion internationale la plus large possible. Il s'agit à terme de favoriser le débat d'idées entre les deux rives de la Méditerranée, et de conforter une communauté scientifique franco-maghrébine engagée dans un dialogue continu.</p>
<p>Trois objectifs principaux ont été retenus pour y parvenir :</p>
<ul>
<li><p>Mettre en place des réseaux de chercheurs des deux rives de la Méditerranée dans le cadre de programmes de recherche conjointe (réseaux intramaghrébins et Maghreb-France) ;</p></li>
<li><p>Aider au renforcement et au développement de communautés de jeunes chercheurs en sciences humaines et sociales au Maghreb, mieux intégrées au sein de la communauté scientifique internationale ;</p></li>
<li><p>Développer l'accès à l'information scientifique récente et l'échange de connaissances.</p></li>
</ul>
<p>D'un point de vue informatique, cette dernière exigence peut se traduire par la mise en place d'un espace et d'une base de connaissances du même domaine partagés et reconnus par la communauté des chercheurs français et maghrébins.</p>
<h2>La nécessité d'un tel outil</h2>
<p>Aujourd'hui, il n'existe aucun dictionnaire des sciences sociales et humaines franco-maghrébin reflétant l'état de la coopération scientifique et culturelle entre la France et le Maghreb dont les lexiques et concepts pourraient évoluer de manière indépendante</p>
<p>[<em>Plus de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd'hui</a>]</p>
<p>Par ailleurs, le déséquilibre entre disponibilité des ressources numériques est très grand, entre le français et les langues du Maghreb. Les dictionnaires qui existent sont peu nombreux et incomplets ; les traducteurs existants (également peu nombreux) simplifient la traduction en faisant du «mot-à-mot», autrement dit les traductions ne prennent pas en compte tous les aspects liés aux contextes des définitions des concepts. Les corpus potentiels pouvant constituer des sources de données sont rares, et enfin les travaux sur les nouvelles technologies et la normalisation des données des langues du Maghreb sont encore balbutiants…</p>
<h2>Le fonctionnement du Wiktionnaire sémantique</h2>
<p>L'analyse des besoins nous a permis de déduire un premier modèle fonctionnel de l'application. <a href="https://hal-hceres.archives-ouvertes.fr/KEWI/hal-01154473v1">Le Wiktionnaire</a> des SHS doit ainsi :</p>
<ul>
<li><p>Permettre une rédaction distribuée selon les localisations géographiques (France et Maghreb) des différentes équipes participant au programme. En effet, le Wiktionnaire sémantiques des SHS est conçu sous forme d'un espace de travail collaboratif doté de fonctionnalités et de processus de création ou Workflows permettant aux chercheurs de coopérer, de cocréer et de cogérer les contenus du Wiktionnaire. Cette fonctionnalité relative à la création collaborative des contenus de la recherche est un des aspects importants de la science ouverte et exigé <a href="http://www.mediawiki.org/wiki/Special:ExtensionDistributor">par le projet</a>.</p></li>
<li><p>Être extensible et évolutif, sachant que de nouveaux besoins peuvent apparaître lors de la conception, l'implémentation et <a href="https://semantic-mediawiki.org/">l'exploitation du dictionnaire</a>.</p></li>
<li><p>Être extensible de sorte à englober l'anglais, le français, l'arabe et le berbère dans un premier temps puis une extension à toutes les langues du bassin méditerranéen.</p></li>
<li><p>Supporter les différents alphabets et graphies des langues retenues.</p></li>
<li><p>Intégrer les différentes disciplines scientifiques du programme FSP et offrir des passerelles entre celles-ci. La définition d'un même terme employé dans plusieurs disciplines est très difficile ; cela revient généralement à préciser la première discipline qui a utilisé ou créé le terme, puis comment les autres disciplines l'ont emprunté et utilisé en changeant souvent son sens initial. Étudier comment le sens d'un terme ou d'un concept varie d'une d'un domaine à un autre ainsi que son évolution dans le temps revient à recenser et à <a href="http://www.w3.org/DesignIssues/LinkedData.html">identifier les liens</a> et les passerelles entre les disciplines ainsi que les apports mutuels entre elles. Parmi les disciplines scientifiques étudiées, on peut citer la sociologie, le droit, l'histoire, l'économie, l'anthropologie, l'ethnologie, etc.</p></li>
<li><p>Intégrer les fonctions d'import/export pour la compilation des contenus. Les fonctionnalités d'import/export permettent d'importer des contenus d'autres dictionnaires respectant les normes dictionnairiques dans le Wiktionnaire et réciproquement. On peut grâce à ces fonctionnalités intégrer des contenus de l'open data (compatibles et normalisées) dans le Wiktionnaire et inversement. C'est une autre des fonctionnalités importantes des sciences ouvertes qui permet des enrichissements mutuels entre les plates-formes numériques, favorisés par le respect des dites normes.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/481082/original/file-20220825-14-nka7pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/481082/original/file-20220825-14-nka7pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/481082/original/file-20220825-14-nka7pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/481082/original/file-20220825-14-nka7pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/481082/original/file-20220825-14-nka7pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/481082/original/file-20220825-14-nka7pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/481082/original/file-20220825-14-nka7pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">le fonctionnement des enrichissements automatiques.</span>
</figcaption>
</figure>
<ul>
<li><p>Permettre l'alimentation de la base dictionnaire dans un format structuré suivant la définition d'une entrée et de sa traduction, et vice versa afin de faciliter l'alimentation, les échanges et la génération des contenus. Le Wiktionnaire étant compatible <a href="https://lod-cloud.net/">avec le Web de données</a>, les entrées peuvent être traduites, enrichies et complétées en interrogeant le Web de données avec le langage SPARQL._</p></li>
<li><p>Être doté d'interfaces et de techniques lui assurant une grande ergonomie qui facilitera son utilisation par des chercheurs.</p></li>
<li><p>Prendre en charge l'aspect sémantique des définitions des entrées et de leurs traductions afin de permettre des renvois intelligents d'une langue à une autre, ou encore d'un parler à un autre.</p></li>
<li><p>Être <a href="https://linguistics.okfn.org/2011/05/20/the-open-linguistics-working-group/">libre d'accès</a> en consultation, mais réservé en gestion.</p></li>
<li><p>Être compatible avec les normes dictionnairiques existantes afin de faciliter les échanges entre les chercheurs et entre les plates-formes numériques. Dans notre cas, la norme dictionairique exploitée est très détaillée et complexe (plusieurs centaines de pages), car elle prend en charge plusieurs domaines et répond à différents besoins du domaine des dictionnaires.</p></li>
</ul>
<p>Pour la conception du Wiktionnaire, dans un premier temps, nous avons procédé à une simplification des spécifications et des exigences initiales de la norme afin de répondre aux besoins du projet. A l'issu de cette première simplification, nous avons retenu un schéma permettant d'associer à une entrée source (mot, locution, etc.) un ou plusieurs sens (définitions) qui renvoient à une ou plusieurs entrées cibles ; puis revenir du terme traduit, pris cette fois-ci comme entrée source. Par la suite, d'autres améliorations s'imposaient ; étant donné la complexité des SHS dans un contexte multilingue, multiculturel et multidisciplinaire.</p>
<h2>Une tâche complexe</h2>
<p>On dit toujours que «le traducteur est un menteur qui dit toujours la vérité» car il est impossible de traduire avec exactitude le sens d'une langue vers une autre, toute traduction est approximative ; le défi est donc de se rapprocher au mieux d'une traduction idéale qu'on ne connaît pas !</p>
<p>Si on s'intéresse par exemple au terme «entrepreneur», le champ sémantique qui permet de le définir est caractérisé par une personne qui court un risque, indépendante, responsable de ses actes. Son équivalent en arabe est «مقاو ou mou9awil» qui est caractérisé par un champ sémantique totalement différent : c'est celui qui parle, «tchatche», négocie, etc. Dans ce cas, on peut considérer que ce rapprochement et cette traduction sont approximatifs. Dans d'autres cas, on peut tout simplement <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/vocabulaire-europeen-des-philosophies-collectif/9782021433265">ne pas avoir d'équivalents</a> d'une langue à l'autre.</p>
<p>Prenons un autre exemple, celui du «mariage parfait» qui existe en Français, où deux frères, ou deux sœurs ou un frère et une sœur sont mariés avec deux frères, ou deux sœurs ou un frère et une sœur ; ce terme n'existe ni en Berbère, ni en Arabe, ni en Anglais. Dans d'autres cas, on peut avoir plusieurs équivants et/ou plusieurs spécialisations du sens ; c'est le cas du terme “cousin ou cousine” en Français qui a plusieurs équivants en arabe et en Berbère qui distinguent le fils ou la fille de l'oncle ou de la tante.</p>
<p>Pour répondre à cette complexité des renvois entre la langue source et la langue cible, il a fallu définir un schéma spécifique au Wiktionnaire des SHS adapté à chaque langue et doté d'un système de gestion des correspondances quand elles existent (simples ou multiples) en les rendant optionnelles quand elles n'existent pas.</p>
<p>En plus de l'accès libre au Wiktionnaire, les fonctionnalités cités et décrites précédemment concernant l'ouverture des données, la création collaborative de la recherche, les enrichissements, la diffusion partagée des données, etc. font du Wiktionnaire un outil intéressant et enrichissant pour le nouveau monde de la science ouverte au service de la recherche collaborative.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Cet article fait partie de la série « Les belles histoires de la science ouverte », publiée avec le soutien du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation. Pour en savoir plus, veuillez consulter la page <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/">Ouvrirlascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/186969/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hammou Fadili ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour favoriser le débat d'idées entre les deux rives de la Méditerranée, un outil collaboratif permettant de partager un même vocabulaire scientifique s'imposait.Hammou Fadili, Responsable de la Mission Numérique Recherche, Fondation Maison des Sciences de l'Homme (FMSH)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1859122022-07-21T16:28:52Z2022-07-21T16:28:52ZLes bouleversements contemporains nous rappellent que le travail est une activité politique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/473400/original/file-20220711-14-n961e8.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C12%2C2037%2C1213&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Quel sens donner à la valeur travail? il est urgent d’appréhender le travail autrement que sous le seul prisme quantitatif. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/hoyvinmayvin/5166095952">Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Dans un contexte politique, économique et social tendu autour des questions du pouvoir d’achat, du recul de l’âge de la retraite et du changement climatique (entre autres), le travail revêt plus que jamais une dimension politique. C’est d’ailleurs le message que semblent nous envoyer les jeunes diplômés de grandes écoles qui revendiquent le droit à une activité professionnelle en phase avec les enjeux <a href="https://www.lemonde.fr/campus/article/2022/06/16/avec-l-urgence-climatique-des-ruptures-plus-politiques-chez-les-jeunes-diplomes_6130536_4401467.html">du changement climatique</a> ou les <a href="https://theconversation.com/le-mystere-de-la-grande-demission-comment-expliquer-les-difficultes-actuelles-de-recrutement-en-france-173454">salariés qui démissionnent</a> en masse en partie à cause du manque de sens dans leur travail.</p>
<p>Loin de constituer un milieu étanche aux troubles du monde et de la société, le monde du travail occupe dans ses différentes dimensions – individuelles, collectives, organisationnelles – une place centrale à la fois comme révélateur des désordres mondiaux, comme espace de luttes et comme voie <a href="https://www.jean-jaures.org/publication/plus-rien-ne-sera-jamais-comme-avant-dans-sa-vie-au-travail/">d’émancipation individuelle et collective</a>.</p>
<p>Un temps éclipsés par la domination des doctrines politique et économique néo-libérales, les débats politiques relatifs au travail (particulièrement vifs aux XIX<sup>e</sup> et XX<sup>e</sup> siècles où s’opposaient les doctrines libérales, associationnistes, anarchosyndicalistes, communistes, etc.) se trouvent ainsi réactualisés devant les enjeux contemporains.</p>
<p>Cela étant, on peut observer que les débats actuels sur le travail – notamment à l’occasion des campagnes présidentielles et législatives – se focalisent principalement sur le nombre de trimestres à cotiser et l’âge de départ à la retraite, débats au sein desquels le travail semble perçu comme une forme de souffrance inévitable mise au service d’une économie productiviste. C’est notamment le sens donné à la fameuse <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/11/10/emmanuel-macron-met-la-valeur-travail-au-centre-de-son-action_6101617_823448.html">« valeur travail »</a>, maintes fois défendue par le président de la république ces dernières années et dont elle semble principalement renvoyer au nombre d’années qu’il nous faudrait travailler.</p>
<p>Si les débats sur le temps et la productivité du travail sont importants, il est urgent d’appréhender le travail autrement que sous le seul prisme quantitatif. Dans un contexte de bouleversements environnementaux, sociaux et technologiques, le travail réapparaît comme bien plus qu’une simple activité de production : il participe à écrire notre histoire commune.</p>
<p>Ceci est l’un des enseignements principaux que nous retirons d’un programme de recherche ayant mobilisé 31 universitaires durant quatre années et ayant donné lieu à l’ouvrage <a href="https://www.pulaval.com/produit/pratiques-de-travail-et-dynamiques-organisationnelle"><em>Nouvelles pratiques de travail et nouvelles dynamiques organisationnelles</em></a> publié aux éditions des Presses de l’Université de Laval.</p>
<h2>Le travail comme levier de transformation</h2>
<p>La dimension politique du travail s’observe dans de nombreuses pratiques et secteurs. Par exemple, les personnes exerçant dans des espaces collaboratifs – comme les espaces de coworking – ne cherchent pas uniquement un enrichissement économique. Leur activité relève souvent d’une démarche politique, c’est-à-dire d’un engagement particulier dans la cité. C’est ce que relève Christelle Baron, auteure d’un chapitre sur les <a href="https://flipbook.cantook.net/?d=%2F%2Fwww.entrepotnumerique.com%2Fflipbook%2Fpublications%2F124140.js&oid=1276&c=&m=&l=fr&r=https://www.pulaval.com&f=pdf">communautés de travailleurs dans les espaces de coworking</a>.</p>
<p>Cette dernière nous explique qu’en cherchant à créer ou à rejoindre une communauté, les « co-workers » étudiées souhaitent faire de leur activité professionnelle un levier de transformation de leurs vies et de la société. Dans certains espaces collaboratifs, il est ainsi difficile de discerner les activités qui relèvent du travail, de la vie privée et du militantisme.</p>
<p>Réactivant d’anciens projets fondés sur le management participatif voire autogestionnaire, de nouvelles dynamiques organisationnelles et pratiques de management se développent : raccourcissement des lignes hiérarchiques, création des espaces de délibération, autogouvernance, etc. On observe ainsi divers mouvements qui se réfèrent à la nécessaire émancipation du travail.</p>
<p>Par exemple, les coopératives, que l’on croyait un temps oubliées, connaissent aujourd’hui un fort regain d’intérêt. Selon la <a href="https://www.les-scop.coop/chiffres-cles">Confédération générale des Scop</a>, le nombre de sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) a augmenté de 88 % en cinq ans avec une augmentation de 160 % des effectifs, atteignant 13 190 salariés à la fin 2021.</p>
<p>[<em>Près de 70 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Cependant, ces tentatives ne produisent pas toujours les effets escomptés et les résultats sont parfois contrastés. C’est notamment ce que constate la chercheuse Antonella Corsani, dans un <a href="https://flipbook.cantook.net/?d=%2F%2Fwww.entrepotnumerique.com%2Fflipbook%2Fpublications%2F124140.js&oid=1276&c=&m=&l=fr&r=https://www.pulaval.com&f=pdf">chapitre</a> interrogeant les nouvelles formes de travail : ces dernières peuvent certes déboucher sur des espaces d’autonomie renouvelés mais également construire de nouvelles dynamiques de précarisation des emplois.</p>
<p>D’ailleurs, toutes les évolutions du travail ne sont pas motivées par l’émancipation des travailleurs. C’est ce que montre, par exemple, le chercheur Yoann Bazin dans son chapitre sur le <a href="https://flipbook.cantook.net/?d=%2F%2Fwww.entrepotnumerique.com%2Fflipbook%2Fpublications%2F124140.js&oid=1276&c=&m=&l=fr&r=https://www.pulaval.com&f=pdf">management algorithmique</a> et ses effets délétères sur le travail des livreurs indépendants à vélo.</p>
<h2>Les pratiques de management et de travail sont politiques</h2>
<p>Ce que nous faisons dans le cadre de notre activité professionnelle a des conséquences politiques et participe à définir la société dans laquelle nous vivons. Les réponses qu’il s’agit d’apporter aux grands enjeux contemporains ne relèvent donc pas uniquement de la représentation politique ou de la société civile. Elles engagent également les travailleurs et en premier lieu celles et ceux qui occupent des postes de management et de direction dans les entreprises.</p>
<p>La lutte contre le réchauffement climatique dans les entreprises, par exemple, appelle le développement de nouvelles façons de collaborer et d’exploiter les ressources naturelles. L’erreur consisterait à penser que cette lutte reposerait uniquement sur l’usage de nouvelles technologies. Comme le soulignent les chercheurs Alexis Catanzaro et Hervé Goy dans leur chapitre sur le <a href="https://flipbook.cantook.net/?d=%2F%2Fwww.entrepotnumerique.com%2Fflipbook%2Fpublications%2F124140.js&oid=1276&c=&m=&l=fr&r=https://www.pulaval.com&f=pdf">management et le risque d’effondrement</a>, la lutte contre le réchauffement climatique est aussi affaire de pratiques de management et d’organisation.</p>
<p>Ce constat invite ainsi à questionner les positions qu’adoptent les entreprises face aux grands enjeux technologiques, sociaux ou environnementaux, car la question du travail et de son organisation pose toujours celle du monde commun dans lequel nous voulons vivre. En cela, le travail n’est jamais neutre. Il est toujours une forme d’engagement dans la vie sociale.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-les-grandes-entreprises-prennent-elles-en-compte-les-enjeux-climatiques-183739">Comment les grandes entreprises prennent-elles en compte les enjeux climatiques ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<img src="https://counter.theconversation.com/content/185912/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jonathan Sambugaro est administrateur de la MACIF au sein d'Aéma Groupe.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Anthony Hussenot, Emilie Lanciano et Philippe Lorino ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Le travail apparaît comme bien plus qu’une simple activité de production : il participe à écrire notre histoire commune.Anthony Hussenot, Professor in Organization Studies, Université Côte d’AzurEmilie Lanciano, Professeure des Universités, chercheure au laboratoire Coactis, Université Lumière Lyon 2 Jonathan Sambugaro, Maître de conférences en sciences de gestion, Université de LillePhilippe Lorino, Emeritus Professor, ESSEC Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1821652022-05-01T16:44:22Z2022-05-01T16:44:22ZEspaces de coworking : comment se forme (ou pas) la collaboration ?<p>Malgré les restrictions liées à la pandémie du Covid-19 et une adoption plus pérenne du télétravail, les espaces de coworking ont prouvé leur résilience face à la crise. Ces espaces de travail partagés suscitent en effet de plus en plus d’intérêt. Dans le monde, on comptabilise plus de <a href="https://www.statista.com/statistics/554273/number-of-coworking-spaces-worldwide/">23 000 espaces</a> en 2021 et ce chiffre devrait s’élever à près de 42 000 d’ici fin 2024.</p>
<p>Cette tendance s’explique notamment par le besoin des entreprises de mettre en place des écosystèmes collaboratifs qui favorisent notamment l’innovation, au travers les échanges d’idées et les interactions avec les autres occupants appartiennent à des organisations différentes.</p>
<p>Aux États-Unis, Microsoft a par exemple offert à plus de <a href="https://expansive.com/why-are-companies-moving-to-coworking-office-spaces/">30 % de ses employés new-yorkais</a> des accès à un espace de coworking local. Toujours outre-Atlantique, une étude a montré que les espaces de coworking aidaient les collaborateurs à être plus innovants, plus connectés et plus productifs, et <a href="https://sloanreview.mit.edu/article/coworking-spaces-offer-a-post-pandemic-office-alternative/">facilitaient l’émergence de nouvelles idées</a> et de nouvelles solutions.</p>
<p>Mais comment, plus précisément, la dynamique de collaboration se met-elle en place dans les espaces de coworking ? Quels sont les mécanismes qui fonctionnent et pourquoi, dans certains cas, échoue-t-elle à s’enclencher ? Comment collaborer efficacement avec les autres dans les espaces de coworking et éventuellement faire <a href="https://theconversation.com/les-espaces-de-coworking-nouveaux-intermediaires-de-linnovation-ouverte-85038">émerger l’innovation</a> ?</p>
<p>Pour répondre à ces questions, nous avons mené une <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/13505084221074037">étude</a> qui s’appuie notamment sur l’observation d’un espace de coworking constitué de start-up dans la Fintech et la Tech à Londres. Nous avons tout d’abord pu constater que la mise en place de cette dynamique n’allait pas de soi. Au contraire : une fois installées dans l’espace de coworking, les entreprises ont tendance à adopter une posture de méfiance vis-à-vis d’une compétition qui pourrait se mettre en place. D’où l’importante d’une phase d’exploration collective avant la matérialisation d’une collaboration plus précise et pérenne dans le temps.</p>
<h2>« Beaucoup de choses peuvent se passer »</h2>
<p>Pour surmonter cette méfiance, les entreprises peuvent s’appuyer sur l’informalité, qui désigne les activités qui demandent un temps limité et occasionnel en dehors des obligations formelles vis-à-vis de l’entreprise de rattachement : pause-café, réunions avec un mentor désigné, événements organisés dans l’espace. La facilité à s’entretenir avec d’autres personnes de façon informelle est alors de plus en plus appréciée, comme en témoigne une personne interrogée dans nos recherches : « C’est génial, car si j’ai un problème de développement, je peux demander à d’autres développeurs : “Hé, vous pouvez regarder ça ?” ».</p>
<p>Comme l’informalité, l’aspect spatial, qui désigne l’aménagement de l’espace et la proximité physique des acteurs dans l’espace de coworking, a un effet facilitateur sur l’exploration collective. Nos résultats ont ainsi confirmé les conclusions d’une recherche menée en <a href="https://doi.org/10.1016/j.bushor.2020.09.010">Chine</a> sur l’importance d’une infrastructure partagée pour promouvoir l’exploration conjointe et le partage des compétences.</p>
<p>D’un côté, la configuration d’un espace ouvert permet diverses interactions dans la salle de pause, le lounge, la cuisine commune, et les zones de détente par exemple, facilitant ainsi les échanges. De l’autre, un aménagement intérieur harmonieux, à l’image des les incubateurs de start-up <a href="https://stationf.co/">Station F</a> à Paris ou <a href="https://www.level39.co/">Level 39</a> à Londres, encouragent les interactions sociales et la perspective d’une exploration collective entre différents acteurs.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1131565887260176386"}"></div></p>
<p>La proximité physique de personnes appartenant à d’autres entreprises contribue également à élargir les réseaux des employés. « Beaucoup de choses peuvent se passer lorsque vous êtes proche de personnes travaillant dans des domaines similaires », confirme une personne que nous avons rencontrée dans le cadre de nos recherches. Par exemple, un grand cabinet d’audit a déplacé des employés dans les espaces de coworking dans le but de gagner de nouveaux clients.</p>
<h2>« Ils nous ont vraiment aidés »</h2>
<p>Cependant, la croissance rapide de l’espace de coworking pour des raisons de rentabilité ou des changements récurrents dans la disposition spatiale des entreprises risquent d’entrainer moins d’interactions et donc un impact négatif sur la collaboration. De même, les moindres interactions informelles, lorsqu’elles ne sont pas renforcées et soutenues dans la durée, entravent la construction de valeurs et de sens communs partagés dans l’espace.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/460269/original/file-20220428-16-y7rv1l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/460269/original/file-20220428-16-y7rv1l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/460269/original/file-20220428-16-y7rv1l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=455&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/460269/original/file-20220428-16-y7rv1l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=455&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/460269/original/file-20220428-16-y7rv1l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=455&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/460269/original/file-20220428-16-y7rv1l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=572&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/460269/original/file-20220428-16-y7rv1l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=572&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/460269/original/file-20220428-16-y7rv1l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=572&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/13505084221074037">Yacoub and Haefliger (2022)</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Notre étude met également en évidence le rôle clé que joue les « catalyseurs » dans les espaces de coworking dans la matérialisation de la collaboration. Ces catalyseurs facilitent et encouragent les activités qui soutiennent les interactions et induisent la coopération. Par exemple, ils peuvent être des modérateurs, des hôtes ou l’équipe de management qui gère l’espace de coworking.</p>
<p>Ils coordonnent et dynamisent les activités communes dans l’espace de coworking, aidant ainsi à la construction d’un sens partagé, de confiance et d’exploration collective. Les catalyseurs vont ensuite s’assurer que les interactions restent soutenues et stimulent la collaboration entre les différents acteurs de l’espace de coworking au fil du temps.</p>
<p>Le fondateur d’une start-up dans la Tech à Londres reconnaît l’importance de leur rôle : « l’équipe de management de l’espace créé environnement propice. Le personnel ici est vraiment top. Nous avons lancé un produit, ce qui est fantastique. Ils nous ont vraiment aidés. Nous avons commencé à faire partie de cet écosystème ici et ceci nous a permis de décrocher un contrat avec une grande entreprise en octobre ».</p>
<p>En revanche, l’incapacité de ces catalyseurs à pérenniser et formaliser les interactions sociales réduit l’utilité de l’espace de coworking. À ce sujet, nous avons également identifié des situations où les interactions de l’espace de coworking n’ont pas abouti à une collaboration et ont même poussé certaines entreprises à quitter l’espace. Ceci est principalement dû à un désalignement de priorités stratégiques entre les entreprises et la société gestionnaire de l’espace.</p>
<p>Pour créer cet environnement favorable, l’équipe de management de l’espace doit donc veiller à bien jouer son rôle avec les acteurs de l’espace. Les responsables ont en outre intérêt à forger des liens stratégiques avec l’ensemble des parties prenantes comme les régulateurs, décideurs politiques <a href="https://theconversation.com/le-coworking-une-vraie-revolution-pour-la-mobilite-des-travailleurs-169801">et pouvoirs publics</a>, et autres entreprises en dehors de l’espace dans divers secteurs d’activité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182165/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ghassan Paul Yacoub ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’organisation spatiale et l’animation de l’espace de travail partagé entre collaborateurs de différentes entreprises constituent des clés pour enclencher une dynamique qui facilite l’innovation.Ghassan Paul Yacoub, Professor of Innovation, Strategy, and Entrepreneurship, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1659152021-09-05T16:55:51Z2021-09-05T16:55:51ZCoopération au travail : la machine à café ne fait pas tout !<p>A-t-on réellement tiré toutes les leçons du télétravail « sanitaire » ? Malgré 18 mois d’expérimentation, les questions sur le travail à distance ne sont pas encore tranchées. Les représentations des employeurs, qui assimilaient plus le télétravail « à la télé qu’au travail », ont certes beaucoup changé. Mais de nombreuses idées reçues persistent. Parmi elles, celle d’une coopération qui serait <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/c-est-mon-boulot/teletravail-bon-pour-la-productivite-moins-pour-la-creativite-selon-plusieurs-etudes_4183043.html">plus performante sur site qu’à distance</a>, justifiant pour nombre d’employeurs le retour au bureau dans l’espoir de retrouver les pouvoirs magiques de la machine à café.</p>
<p>En juin 2020, un sondage de l’Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH) et du Boston Consulting Group (BCG) révélait ainsi que, en France, plus <a href="https://www.andrh.fr/actualites/1093/le-teletravail-post-Covid-vu-par-les-drh-resultats-enquete-andrh-bcg">d’un DRH sur deux</a> redoutait une moindre créativité dans l’entreprise. De même, selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les « clusters » de type Silicon Valley, déclinés en France en pôles de compétitivité, « semblent clairement indiquer que partager le même espace physique est <a href="https://www.oecd.org/coronavirus/policy-responses/effets-positifs-potentiels-du-teletravail-sur-la-productivite-a-l-ere-post-Covid-19-quelles-politiques-publiques-peuvent-aider-a-leur-concretisation-a43c958f/">essentiel pour l’innovation</a> ».</p>
<p>Les recherches menées sur le travail à distance conduisent pourtant à des constats bien différents, et souvent contre-intuitifs. Nous les avons répertoriées dans l’ouvrage <a href="https://www.la-fabrique.fr/fr/publication/le-travail-a-distance-dessine-t-il-le-futur-du-travail-2/"><em>Le travail à distance dessine-t-il le futur du travail ?</em></a>, dont l’enjeu est précisément de tordre le cou à quelques préjugés qui entachent encore notre représentation du travail à distance.</p>
<h2>Co-présence et coopération, la confusion</h2>
<p>Une <a href="https://sloanreview.mit.edu/article/how-to-manage-virtual-teams/">étude</a> réalisée il y a plus de 10 ans auprès de 80 équipes de développement de logiciels réparties dans 28 laboratoires du monde entier a par exemple abouti à des résultats étonnants : les équipes situées dans un même bâtiment, mais à des étages différents, se révèlent moins performantes que les équipes dispersées dans une même ville, un même pays ou un même continent. Quant aux équipes localisées à un même étage, elles ne font guère mieux que celles dispersées dans un pays.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=410&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=410&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=410&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=515&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=515&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/415470/original/file-20210810-13-1erp4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=515&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Performance des équipes de travail en fonction de leur localisation.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://sloanreview.mit.edu/article/how-to-manage-virtual-teams/">Siedbrat F., Hoegel M., Ernst H. ; « How to manage virutal team », MIT Sloan Management Review (2009).</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Selon les auteurs, cet étonnant constat trouve une explication simple : les équipes situées à un même étage ou dans un même bâtiment sous-estiment souvent les obstacles à la communication et à la collaboration, comme si la co-présence suffisait à assurer une harmonieuse coopération. Au contraire, les équipes dispersées sont beaucoup plus conscientes de ces obstacles et y remédient grâce à des processus structurés tant au niveau organisationnel (organisation et suivi des tâches, communication formelle) que socio-affectif (entraide et cohésion, communication informelle).</p>
<p>Bref, la coopération ne s’opère pas de manière magique par la simple présence physique, et les échanges informels à la machine à café ne suffiront pas à la garantir : d’autres mécanismes doivent être pensés pour la susciter et la maintenir dans la durée.</p>
<h2>La présence ne garantit pas le lien social</h2>
<p>La coopération à distance paraît donc tout à fait possible à deux conditions : structurer l’organisation du travail collectif et maintenir la cohésion du collectif de travail. Si la première renvoie aux compétences traditionnelles du manager, la seconde représente un défi que beaucoup semblent juger impossible à relever sans le concours de la machine à café, qui semble avoir volé la vedette au baby-foot.</p>
<p>Dans un <a href="https://www.la-fabrique.fr/fr/projet/le-travail-a-distance/">groupe de réflexion</a> mis en place par la Chaire Futurs de l’industrie et du travail de Mines ParisTech, un <a href="https://www.la-fabrique.fr/wp-content/uploads/2021/04/2021.03.15-Audition-4managers.pdf">manager de proximité</a> regrettait ainsi l’avant-crise :</p>
<blockquote>
<p>« Avant, les gens se racontaient leurs petites histoires en tête-à-tête près de la machine à café ».</p>
</blockquote>
<p>Pourtant, plusieurs <a href="https://www.cairn.info/revue-rimhe-2017-3-page-3.htm">recherches</a> indiquent que la co-présence physique ne garantit nullement la qualité et l’intensité du lien social, car le « manque de temps ou la focalisation sur la tâche de travail n’autorisent pas toujours l’échange d’informations informelles, personnelles ».</p>
<p>Inversement, la distance physique n’est pas antinomique avec le lien social, comme le souligne le témoignage de ce dirigeant d’une équipe de consultants, interrogé dans une <a href="https://www.cairn.info/revue-gestion-2009-2-page-10.htm">étude</a> menée en 2009 au Canada :</p>
<blockquote>
<p>« Je dirige des employés qui se trouvent à Paris et avec qui j’ai l’impression d’être beaucoup plus proche que d’autres qui se trouvent, tout comme moi, à Montréal. Il y a même des collègues avec qui je travaille qui se trouvent dans le même édifice que moi, que je vois régulièrement, de qui j’ai l’impression d’être plus éloigné que de mes employés qui sont à l’étranger. Le fait que nous soyons sur deux continents ne m’empêche pas d’avoir le sentiment qu’il y a très peu de distance entre nous. Parce que nous sommes proches, ça devient facile de communiquer, de travailler en équipe, d’échanger des informations, de nous entraider, etc. »</p>
</blockquote>
<p>En effet, être proche physiquement n’assure pas d’être automatiquement proche émotionnellement. Un voisin de palier exécrable en est souvent la preuve ! Et il en est de même au bureau, le télétravail permettant justement <a href="https://www.cairn.info/revue-gerer-et-comprendre-2021-2-page-38.htm">d’échapper aux situations conflictuelles</a> et <a href="https://journals.openedition.org/interventionseconomiques/706">d’atténuer les divergences</a> entre collègues.</p>
<h2>La distance, facteur de proximité</h2>
<p>La distance temporelle et géographique pourrait paradoxalement favoriser le développement <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/leadership-management/covid-visio-teletravail-distance-et-tutoiement-generalise-1292111">d’une forme de proximité</a>. Il semble donc tout à fait envisageable de creuser au travail une notion très fertile qui est la sociabilité numérique à distance. D’ailleurs, les fournisseurs de solutions informatiques ont communiqué des chiffres selon lesquels <a href="https://enterprise.verizon.com/resources/reports/recreating-work-as-a-blend-of-virtual-physical-experiences.pdf">52 % des personnes interrogées</a> avaient constaté une amélioration de la collaboration pendant le premier confinement dans le monde, ou encore que <a href="https://fr.insight.com/content/dam/insight-web/fr_FR/images/2020/10/655785_WW_21Q3_GLB_CONTSYND_MULTI_CTA_DW_FRW_ENGLISH_REG_20220918_UPDATED.pdf">72 % des salariés français interrogés</a> estimaient que leurs relations avec leurs collègues s’étaient améliorées.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1036&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1036&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/415475/original/file-20210810-15-1n8c7ra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1036&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le travail à distance dessine-t-il le futur du travail ?</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pressesdesmines.com/produit/le-travail-a-distance-dessine-t-il-le-futur-du-travail/">Presses des Mines.</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pourtant, au cours de ces 18 derniers mois, plutôt que des réviser des processus de travail parfois flous ou inefficients, les entreprises semblent s’être plutôt contentées de plaquer les routines propres au travail sur site dans le monde virtuel, en attendant que ça se termine. Ainsi en est-il des tunnels de visio censés reproduire les échanges face-à-face. Ces réunions virtuelles se sont révélées, sur le long terme, <a href="https://tmb.apaopen.org/pub/nonverbal-overload/release/1">éreintantes</a>, perturbant les tâches nécessitant une concentration individuelle, et donc, en bout de chaîne… la <a href="https://bfi.uchicago.edu/working-paper/2021-56/">productivité des équipes</a>.</p>
<p>Certes, les « synergies de la machine a café » restent précieuses pour la convivialité et la sérendipité, ces idées qui fusent dans la discussion, mais elles ne font pas tout. Actuellement, elles pourraient même se révéler un prétexte commode pour faire revenir les salariés au bureau et éviter ainsi aux entreprises de penser la révision des modes opératoires et des processus que l’adoption large du travail hybride suppose.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/165915/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Suzy Canivenc ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Plusieurs études montrent que le lien entre une collaboration efficace et le travail en présentiel, qui favorise les échanges informels, n’est pas aussi fort que les ressources humaines ne le pensent.Suzy Canivenc, Chercheure associée à la Chaire Futurs de l'Industrie et du Travai, Mines Paris - PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1412952020-06-24T21:18:08Z2020-06-24T21:18:08ZTémoignage : comment la généralisation du télétravail pénalise les malvoyants<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/343446/original/file-20200623-188921-yxhfjg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C6763%2C4474&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'accessibilité numérique et la sensibilisation au handicap restent des problématiques mal considérées dans les entreprises aujourd'hui. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://image.shutterstock.com/image-photo/visually-impaired-man-wireless-earphones-600w-1579965649.jpg">LightField Studios / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Une récente <a href="https://www.liberation.fr/debats/2020/04/30/teletravail-une-opportunite-pour-reduire-les-inegalites-liees-aux-handicaps_1786933">tribune</a> publiée dans le journal Libération présentait le télétravail comme une opportunité pour réduire les inégalités liées aux handicaps et expérimenter de nouvelles relations au travail plus égalitaires et inclusives.</p>
<p>En effet, en enlevant les contraintes liées aux déplacements, et à l’inverse en rajoutant parfois des contraintes d’environnement aux travailleurs à domicile, le télétravail peut permettre une meilleure égalité entre les personnes en situation de handicap et les personnes valides.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1255946486002724867"}"></div></p>
<p>Cependant, comme toujours en matière de handicap, tout dépend du type d’invalidité. Nous présentons ici le témoignage de Sylvain*, ingénieur en informatique et déficient visuel, qui perd doucement pied dans un environnement de plus en plus visuel.</p>
<h2>Malentendus et frustrations</h2>
<p>Sylvain est le « mouton à cinq pattes » dont rêverait tout directeur des ressources humaines cherchant à améliorer son taux de travailleurs handicapés. Atteint de cécité partielle à l’âge de 16 ans, il fera un rapide passage à l’Institut national des jeunes aveugles (INJA) le temps d’apprendre le braille avant de reprendre une scolarité « normale » : bac scientifique, classe préparatoire, grande école d’ingénieurs.</p>
<p>Il travaille ensuite dans plusieurs grands groupes. En parallèle de son activité d’ingénieur en recherche et développement, il effectue également un doctorat en informatique et quelques années plus tard, obtient son habilitation à diriger les recherches.</p>
<p>Dans son entreprise, l’adaptation au poste consiste en un terminal Braille qu’il utilise peu, car peu compatible avec les outils informatiques et mettant trop en évidence sa différence. Sans canne blanche ni lunettes aux verres épais, son handicap visuel est quasi invisible.</p>
<p>Dans ces conditions, il est difficile d’expliquer aux collègues qu’à distance normale d’un écran, il distingue seulement dans la largeur trois caractères en police 11, ou que sa vitesse de lecture d’un article scientifique est d’une page par heure.</p>
<p>Frustrations et malentendus sont son quotidien. Lorsqu’un chauffeur de bus lui dit qu’il aimerait bien lui aussi avoir une carte d’invalidité pour bénéficier de la gratuité dans les transports. Lorsque son manager lui refuse une note de frais dépassant le plafond autorisé de quelques euros : il n’avait pu lire la carte du restaurant et avait suivi les conseils du serveur ; ou lorsqu’un déplacement seul à l’étranger, où il se perd dans la ville (c’était avant Google maps), se solde par une forte migraine. Il prend sur lui et s’efforcera d’éviter les déplacements.</p>
<p>Le télétravail apparaît dans ce cas comme une aubaine. Mais de nouvelles contraintes apparaissent rapidement avec l’usage permanent de la « visio » quand justement la vue, on ne l’a que très peu et avec la popularité des méthodes collaboratives, où la pression sociale exercée par le groupe peut être importante.</p>
<h2>Sensibiliser ses collègues, une épreuve</h2>
<p>Membre d’une équipe agile de développeurs informatiques, le « mob programming » – ce mode de programmation collaboratif où un membre de l’équipe est au clavier et note les instructions données par les autres – tourne vite au cauchemar pour Sylvain.</p>
<p>Certes, ses collègues ont connaissance du problème de vue et sont de bonne volonté, mais dans le feu de l’action, ils l’oublient souvent.</p>
<blockquote>
<p>« Tout le monde utilise un langage peu descriptif parce qu’il y a des curseurs, qui font qu’on peut dire “là sous la souris… ”. Je ne sais pas s’ils ont changé de ligne dans le même fichier, ou s’ils ont changé de fenêtre. »</p>
</blockquote>
<p>Sylvain suggère plusieurs actions pour lui permettre de collaborer à l’égal de ses collègues et les sensibiliser à ses difficultés. Il propose tout d’abord de s’exprimer en tenant compte de ses contraintes. « Aucun effet, on revient à la situation précédente en moins de deux minutes. Personne n’est capable de tenir l’effort ».</p>
<p>Il les invite ensuite à s’essayer au mob en aveugle, c’est-à-dire sans écran, en expliquant le plus explicitement possible les choses : « ils ont tenu une heure ou deux, après ils étaient épuisés, ce qui est cohérent ».</p>
<p>Enfin, il leur propose d’installer l’application Eye view, développée par la Fédération des aveugles de France, qui simule les effets des principales maladies de l’œil : « les seuls retours que j’ai eus, c’est ceux qui m’ont dit qu’ils n’arrivaient pas à l’installer ».</p>
<p>Finalement, Sylvain trouvera deux adaptations avec l’accord tacite de ses collègues :</p>
<blockquote>
<p>« Je travaille en binôme plutôt qu’en mob. L’avantage c’est que, quand il y en a un qui a un problème, l’autre voit tout de suite qu’il parle dans le vide et que ça ne réagit pas. Et aussi, je prends le clavier parce que quand je suis perdu, j’arrête de taper. »</p>
</blockquote>
<p>Dans les méthodes agiles, le développement s’accompagne de « rétros », ces réunions d’amélioration continue qui permettent de faire le point sur ce qui a fonctionné et ce qu’il faut modifier. L’outil utilisé, non sans ironie appelé « miro » (miro.com), est uniquement visuel.</p>
<blockquote>
<p>« Je n’arrive pas à lire les post-its (virtuels). Ils me disent “Il faut nous le dire, on te lira”, mais je préférerais qu’ils changent d’outil et qu’ils me parlent ».</p>
</blockquote>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/343450/original/file-20200623-188916-xuu8pu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/343450/original/file-20200623-188916-xuu8pu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/343450/original/file-20200623-188916-xuu8pu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/343450/original/file-20200623-188916-xuu8pu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/343450/original/file-20200623-188916-xuu8pu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/343450/original/file-20200623-188916-xuu8pu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/343450/original/file-20200623-188916-xuu8pu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Dans l’informatique, les méthodes de gestion de projet dites « agiles » utilisent beaucoup d’outils visuels.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://image.shutterstock.com/image-photo/scrum-task-board-on-dark-600w-1337303492.jpg">Pixel-Shot/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Quant à la nouvelle manager, arrivée dans l’équipe juste avant le confinement :</p>
<blockquote>
<p>« Elle prend des nouvelles tous les 7 à 10 jours pour voir comment ça va. Je pense qu’elle ne sait pas le gérer et qu’elle est bien embêtée d’avoir quelqu’un dont le moral ne va pas très fort ».</p>
</blockquote>
<h2>Renforcer l’inclusion des travailleurs handicapés</h2>
<p>La généralisation du télétravail soulève la question de l’accessibilité numérique, l’un des chantiers menés par l’<a href="https://www.avh.asso.fr/fr">association Valentin Haüy</a> (AVH) d’aide aux aveugles et malvoyants. Manuel Pereira, responsable du pôle accessibilité numérique, souligne la difficulté de son rôle de sensibilisation auprès des entreprises :</p>
<blockquote>
<p>« La déficience visuelle est un handicap lourd. À compétences égales, une entreprise va être tentée de recruter un handicap plus léger pour se simplifier la vie ».</p>
</blockquote>
<p>Il plaide pour faire de l’accessibilité numérique un prérequis dans les appels d’offres, et rappelle que la prise en compte de l’accessibilité fait partie des critères de référencement et de visibilité des moteurs de recherche :</p>
<blockquote>
<p>« Il y a tout un écosystème à sensibiliser, il faut intégrer les marchés, les services Achats, les DSI (directions des systèmes d’information)… Comment voulez-vous qu’un directeur des systèmes d’information qui n’a jamais entendu parler d’accessibilité ait cette fibre dans son travail ? »</p>
</blockquote>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1271384156413530113"}"></div></p>
<p>Si le témoignage de Sylvain est difficilement généralisable à l’ensemble des situations de handicap, il permet d’interroger l’ergonomie des outils et des méthodes de travail du point de vue de l’inclusion. Il questionne aussi l’importance croissante du management visuel.</p>
<p>Les méthodes agiles, inspirées du « lean management » (système d’organisation visant l’amélioration de la performance en se focalisant sur les processus), revendiquent en effet l’affichage de post-its et tableaux en tout genre qui permettent de saisir en un clin d’œil l’avancement d’un projet.</p>
<p>Quant au travail collaboratif, socle des méthodes agiles, il est paré de toutes les vertus : intelligence collective, créativité, engagement. En aplatissant les hiérarchies au sein de l’équipe, en mettant en valeur l’autonomie et la compétence de chacun, l’agilité peut créer une surenchère à la performance et faire ressortir les faiblesses de ceux qui n’arrivent pas à être aussi efficaces.</p>
<p>Ainsi, les fameuses entreprises libérées, qui misent sur la responsabilisation des collaborateurs, en n’étant pas adaptées à tous les profils, constituent parfois des <a href="https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2017-3-page-161.htm?contenu=resume">sources de mal-être</a>.</p>
<p>De façon plus générale, ce témoignage souligne aussi la difficulté à sensibiliser au handicap à tous les niveaux de l’entreprise. Le seul indicateur du taux de travailleurs handicapés est insuffisant pour juger de l’inclusion dans les situations concrètes de travail.</p>
<hr>
<p><em>*Le prénom a été changé</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/141295/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Corbett-Etchevers ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le travail à distance mais aussi l’essor des méthodes collaboratives renforcent les inégalités, comme l’illustre le cas de Sylvain, informaticien et déficient visuel.Isabelle Corbett-Etchevers, Enseignant-chercheur en gestion des ressources humaines, Grenoble IAE Graduate School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1357072020-06-22T17:13:31Z2020-06-22T17:13:31ZPourquoi les chercheurs ouvrent-ils leurs recherches ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/342447/original/file-20200617-94036-1uc9hk1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=156%2C0%2C6791%2C3968&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">On peut vouloir ouvrir pour partager les savoirs, être plus transparents, faire progresser la recherche plus rapidement... </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-vector/freedom-concept-hand-drawn-man-flying-722190496">Drawlab19/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Aux origines de la science ouverte, il y a une convergence de la pensée des <a href="https://fr.scribd.com/doc/270306844/A-Note-on-Science-and-Democracy-by-Robert-K-Merton">intellectuels d’après-guerre</a> favorables à la libre diffusion des savoirs scientifiques vers la société, comme <a href="https://www.nsf.gov/od/lpa/nsf50/vbush1945.htm">rempart aux totalitarismes</a>. La science ouverte, ou <a href="https://journals.openedition.org/cdst/277"><em>open science</em></a> aujourd’hui, <a href="https://books.openedition.org/oep/1707">se présente</a> d’abord par des valeurs de partage, de collaboration, de libre circulation des savoirs, de reproductibilité, de libre débat d’idées, de transparence et d’intégrité scientifique.</p>
<p>Qualifiés par certains d’utopie, <a href="https://royalsociety.org/topics-policy/projects/science-public-enterprise/report/">ses principes deviennent possibles</a> grâce au développement sans précédent des outils de communication et infrastructures numériques de la recherche. Mais sa mise en œuvre par les chercheurs reste, sans mauvais jeu de mots, une question ouverte. Car entre l’engagement des chercheurs dans des pratiques ouvertes et la reconnaissance de ces dernières pour l’évolution de leur carrière par leurs instances scientifiques et institutionnelles, un chemin reste à parcourir.</p>
<h2>Une tension entre pratiques des chercheurs et critères d’évaluation</h2>
<p>La science ouverte est le lieu d’une tension entre les injonctions des décideurs de la recherche et les pratiques réelles des chercheurs. Elle est souvent présentée à partir d’une approche « top-down » : des managers recommandent, rédigent des politiques dédiées et développent des discours prescriptifs. La rhétorique ainsi construite permet de justifier les efforts consentis à la mise en place d’infrastructures numériques, nationales ou <a href="https://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=ES_041_0177">européennes</a>, et permet de comprendre les <a href="https://www.wiley.com/en-fr/Re+Thinking+Science%3A+Knowledge+and+the+Public+in+an+Age+of+Uncertainty-p-9780745657073">dynamiques contemporaines complexes entre science et société</a>.</p>
<p>Une approche « bottom-up » décrit les pratiques des chercheurs dans leur travail quotidien. Elle prend en compte les intentions et les représentations individuelles ou collectives des chercheurs pour la mise en œuvre concrète de ce qu’ils estiment, eux, être une « science ouverte ». Car lorsqu’ils commentent les politiques en faveur de l’<a href="https://muse.jhu.edu/article/556221">« openness »</a>, les chercheurs pointent souvent des injonctions contradictoires : libérer la circulation des publications et des données peut s’opposer frontalement au principe de l’<a href="https://theconversation.com/chercheurs-_vs_-managers-la-guerre-des-mots-138384">évaluation des travaux de recherche</a> fondée sur la production de résultats originaux, positifs, exclusifs et publiés dans des revues de prestige. L’injonction à l’ouverture achoppe d’autant plus avec les domaines disciplinaires où la recherche repose sur des partenariats industriels (par exemple la chimie) requérant la confidentialité, tant pour les protocoles de recherche, les résultats et <em>a fortiori</em> les <a href="https://www.collexpersee.eu/projet/datacc/">données produites</a>.</p>
<h2>Au fondement des pratiques des chercheurs : éthique et intégrité de la science</h2>
<p>En Chine, en Europe et aux États-Unis, les premiers arguments avancés par les chercheurs pour expliquer leurs pratiques « ouvertes » sont d’ordre éthique. D’abord comme un contre-pied aux dérives provoquées par l’<a href="https://theconversation.com/chercheurs-_vs_-managers-la-guerre-des-mots-138384">hypercompétition</a> de la science, la course aux financements et la loi du <a href="https://theconversation.com/recherche-publish-or-perish-vers-la-fin-dun-dogme-128191"><em>Publish or Perish</em></a>. Les chercheurs présentent donc leurs pratiques d’ouverture comme une contribution à une science intègre et éthique : <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/leap.1169">ceux qui publient en Libre Accès</a> le font pour permettre à toutes et à tous d’<a href="https://theconversation.com/acces-a-la-litterature-scientifique-des-inegalites-encore-inacceptables-134848">accéder aux résultats de la recherche scientifique</a>, y compris dans les pays du Sud. Ceux qui décrivent de manière détaillée et exhaustive leur protocole de recherche le font pour en permettre la reproductibilité et donc le partage de leur expertise. Ceux qui participent à des processus d’évaluation ouverte (<a href="https://theconversation.com/science-ouverte-en-temps-de-coronavirus-publication-en-temps-reel-136397"><em>open peer reviewing</em></a>), ou acceptent de rendre publics leurs rapports, adhèrent à une vision transparente de la discussion scientifique.</p>
<p>Indifférents ou ignorants des arguments politiques faisant valoir la <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/amsterdam-call-for-action-on-open-science/">stimulation et l’accélération de l’économie</a>, les praticiens de la science ouverte sont soucieux d’une science « propre », qui véhicule des valeurs auxquelles ils s’identifient (diversité, accessibilité, reproductibilité, réutilisation). Dans ces cas de figure, les chercheurs ne se disent pas militer pour une science ouverte, mais pour une science intègre et éthique.</p>
<h2>La manufacture de la science ouverte</h2>
<p>Les disciplines ne sont pas homogènes en termes de pratiques ouvertes. Il existe des disciplines où l’ouverture se pose naturellement, car inscrite dans les structures et normes sociales de la communauté, par exemple la physique des hautes énergies est pionnière dans les pratiques de partage de pré-publications et de données de la recherche. <em>A contrario</em>, des disciplines plus « conservatrices », comme la chimie, qui en raison des enjeux économiques de ses avancées, accueille moins favorablement les invitations d’ouverture. Or, la recherche est aujourd’hui menée dans des collectifs, souvent pluridisciplinaires. L’observation des pratiques dans ces collectifs montre sur quels arguments la discussion – parfois l’âpre négociation – se fait pour intégrer des possibilités d’ouverture. Car les chercheurs disent ne pas décider de monter un projet de « science ouverte », mais faire « de la science » en y incluant de l’ouverture, là où c’est possible, sans compromettre leurs chances de reconnaissance scientifique.</p>
<p>Le projet de recherche est ainsi le creuset, la « manufacture », dans lequel sont mises en œuvre des pratiques d’ouvertures, dont certaines sont rodées (déposer une pré-publication dans une <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Archive_ouverte">archive ouverte</a>) et d’autres sont plus expérimentales (mettre en place un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Plan_de_gestion_des_donn%C3%A9es">plan de gestion de données</a>, apprendre à paramétrer un <a href="https://edutechwiki.unige.ch/fr/Cahiers_de_Laboratoire_%C3%89lectroniques">carnet de laboratoire numérique</a>). Quelle que soit leur discipline, les chercheurs acquièrent leurs pratiques d’ouverture <a href="https://content.iospress.com/articles/information-services-and-use/isu190069">toujours en regard d’une expérience</a>, dans l’interaction avec le collectif, et dans la contrainte circonscrite au projet.</p>
<h2>Des sciences ouvertes, et non une seule</h2>
<p>L’ouverture ne s’avère <a href="https://journals.openedition.org/rfsic/5522">ni homogène ni pérenne</a> : certains favorisent l’ouverture dans <a href="https://jussieucall.org/">leurs modes</a> de communication scientifique (réseaux sociaux, archives ouvertes ou serveurs de pré-publications) ; d’autres se mobilisent autour des données (enrichissement par des métadonnées, partage sur des archives pour en permettre la réutilisation…), ou bien l’ouverture et de la mise à disposition des codes.</p>
<p>Selon le contexte de recherche, l’étape de leur carrière, le niveau de formation aux outils numériques, les chercheurs se spécialisent aussi dans leurs pratiques d’ouverture, comme ils se spécialisent dans un domaine scientifique. Ils <a href="https://www.talyarkoni.org/blog/2019/07/13/i-hate-open-science/">réfutent</a> donc souvent la dénomination <a href="https://content.iospress.com/articles/information-services-and-use/isu190069">estimée trop floue</a> d’« open scientists ».</p>
<p>L’exemple des données de la recherche est le plus illustratif : le chercheur peut opter pour des stratégies différentes pour « ouvrir » ses données selon le financement (ou son absence), l’objet de recherche, le collectif impliqué, l’avancement de sa carrière, le besoin de reconnaissance, le niveau de connaissance et de maîtrise des principes éthiques et techniques de l’ouverture des données. Et plus fondamentalement, selon la conviction du chercheur de la <a href="https://hdsr.mitpress.mit.edu/pub/jduhd7og/release/7">valeur de réutilisation de ses propres données</a>. Autant de paramètres qui entrent en compte dans la constitution de pratiques, qui se révéleront dans la forme et dans le temps.</p>
<h2>L’avenir de la science ouverte dépend de la reconnaissance des pratiques d’ouverture dans l’évaluation des carrières</h2>
<p>Même si des pratiques ouvertes se développent, le défi du déploiement de la science ouverte à large échelle relève encore du projet pour la plupart des domaines disciplinaires. Nos travaux nous apprennent que le chemin à parcourir ne dépend pas tant de la défense des valeurs de la science ouverte auxquelles les chercheurs adhèrent ou de la maîtrise des infrastructures numériques dans leur travail. Le chemin dépend surtout de la reconnaissance par les politiques d’évaluation de leurs <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/types-de-documents-productions-et-activites-valorisees-par-la-science-ouverte-et-eligibles-a-une-evaluation/">efforts pour l’ouverture</a> même s’il ne donne pas lieu à des résultats.</p>
<p>L’observatoire international des pratiques que nous avons mené a permis de <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01973467/document">pointer ce nœud gordien</a> de manière particulièrement prégnante <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/leap.1284">chez les jeunes chercheurs</a>. Alors que ces derniers adhèrent et partagent les valeurs de la science ouverte, alors qu’ils montrent une réelle maîtrise des infrastructures numériques associées et qu’ils en voient le potentiel, ils n’envisagent pas d’y souscrire tant que les critères d’évaluation ne changent pas. L’avenir réaliste de la science ouverte dépend donc de l’intégration des pratiques et principes d’<em>openness</em> par les instances d’évaluation officielles et institutionnelles de la recherche.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Cet article fait partie de la série « Les belles histoires de la science ouverte » publiée avec le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Pour en savoir plus, visitez le site <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/">Ouvrirlascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/135707/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Chérifa Boukacem-Zeghmouri ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les motivations des chercheurs pour ouvrir leurs recherches sont multiples, mais les jeunes s’interrogent sur la prise en compte de ces pratiques dans l’évaluation, en particulier à l’embauche.Chérifa Boukacem-Zeghmouri, Professeure des Universités, Université Claude Bernard Lyon 1Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1395862020-05-31T16:53:41Z2020-05-31T16:53:41ZEt si on cherchait autrement ? Plaidoyer pour une science de la durabilité<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/338277/original/file-20200528-51456-1slgdrr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Au Gabon, prélèvement sur les chauves-souris dans le cadre du projet EBOSURSY. L’objectif est de favoriser l'amélioration des systèmes de détection précoces chez les animaux sauvages pour prévenir Ebola et d’autres maladies émergentes.</span> <span class="attribution"><span class="source">IRD/Pierre Becquart</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Pour rester connectés à leur époque, être entendus et avoir un rôle déterminant dans les grandes orientations futures, les chercheurs doivent prendre le virage de la « science de la durabilité ».</p>
<p>Dans les innombrables articles publiés depuis le début de l’épidémie Covid-19 par les scientifiques, le constat est toujours le même : le risque d’une pandémie mondiale existait ; les communautés scientifiques n’ont cessé de tirer la sonnette d’alarme ; les États ne se sont pas assez préparés alors que nous avons déjà connu des <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/04/17/jean-francois-guegan-en-supprimant-les-forets-primaires-nous-sommes-en-train-de-debusquer-des-monstres_6036871_3232.html">crises sanitaires, écologiques graves et qu’il y en aura de plus violentes</a>.</p>
<p>Ces épisodes sont le résultat de nos excès et répondent à des logiques économiques et politiques dépassant les sphères de nos laboratoires. Pourtant, cette situation ne réclame-t-elle pas aussi que les communautés scientifiques revoient la façon dont elles construisent les savoirs et proposent des solutions concrètes pour relever les défis planétaires ?</p>
<p>Pour reprendre les mots du philosophe Edgar Morin dans un <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/04/19/edgar-morin-la-crise-due-au-coronavirus-devrait-ouvrir-nos-esprits-depuis-longtemps-confines-sur-l-immediat_6037066_3232.html">récent entretien</a>, ne faut-il pas avoir le courage, en ces temps de crise sanitaire, de « voir les grandeurs de la science contemporaine en même temps que ses faiblesses » ?</p>
<h2>Dépasser les intérêts disciplinaires</h2>
<p>La science est aujourd’hui interpellée pour apporter des solutions, de nombreuses voix se font entendre, s’opposant parfois. Mais il faut aller vite, conseiller les politiques publiques et résoudre les problèmes. Si ces exigences sont légitimes, il est temps de mieux se préparer pour éviter les crises à venir.</p>
<p>La recherche contemporaine reste parcellaire, disciplinaire et manque singulièrement d’articulation entre les résultats qu’elle propose et l’ampleur des problèmes à résoudre. Éteindre « le feu Covid-19 » grâce à la recherche de traitements et de vaccins est indispensable pour sauver des vies… mais n’oublions pas que le reste de la planète brûle ! Nous devons travailler différemment, ensemble, si nous voulons avoir une chance de résoudre les crises environnementales.</p>
<p>Dans ce contexte, l’avènement récent de la « science de la durabilité » est un signe de changement radical dans la construction de nouveaux systèmes de savoirs. Elle se caractérise par le fait que ses problématiques de recherche trouvent d’abord leur source dans la confrontation aux problèmes du monde réel, plutôt que dans la dynamique propre des disciplines scientifiques qu’elle mobilise.</p>
<p>Il s’agit de favoriser des savoirs transdisciplinaires, co-construits entre les scientifiques et les acteurs de la société, dont la finalité dépasse des intérêts disciplinaires. Cette approche encore marginale, notamment en France, est essentielle pour une meilleure compréhension de la complexité du monde moderne et pour trouver des solutions plus globales aux défis économiques, sociaux et environnementaux de nos sociétés.</p>
<h2>Développer des projets fédérateurs</h2>
<p>En partant des objectifs du développement durable (<a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/objectifs-de-developpement-durable/">ODD</a>) établis en 2015 par les Nations unies, il est possible d’inventer de nouveaux cadres de recherche pour faire dialoguer les experts des différentes disciplines scientifiques et créer un savoir collectif.</p>
<p>C’est ce que tentent déjà de réaliser les experts de panels internationaux (<a href="http://www.ipcc.ch">GIEC</a>, <a href="https://sustainabedevelopment.un.org/gsdr2019">GSDR</a>, <a href="http://www.ipbes.net">IPBES</a>), qui proposent un consensus scientifique pluridisciplinaire sans lequel nous serions incapables de comprendre et d’agir sur les évolutions futures de la planète.</p>
<p>Toutefois, pour répondre aux problèmes posés, il est urgent de renforcer la co-construction de nos systèmes de savoirs en intégrant mieux l’ensemble des expertises scientifiques et ce, en lien étroit avec les décideurs politiques et la société civile. Dans cette démarche, la gestion des maladies émergentes est peut-être l’une des illustrations les plus convaincantes des atouts de la science de la durabilité.</p>
<p>Répondre à la crise Ebola a nécessité un <a href="https://journals.plos.org/plospathogens/article?id=10.1371/journal.ppat.1004992">travail coordonné, convergeant vers un même objectif</a>, d’écologues spécialistes de la dynamique des populations d’animaux réservoirs, de sociologues et économistes étudiant les cercles vicieux de la pauvreté, <a href="https://journals.openedition.org/jda/6452">d’anthropologues</a> spécialistes de la construction des représentations de la maladie et bien sûr d’infectiologues et de médecins coopérant avec les instituts publics de santé et les populations concernées.</p>
<p>En France, si certains laboratoires sont organisés de façon pluridisciplinaire, les silos thématiques et la compétition entre les disciplines restent trop prégnants. Regrouper des chercheurs aux expertises différentes ne suffit pas ; il faut travailler sur un objectif commun, montrer de la curiosité pour d’autres disciplines et réfléchir à l’épistémologie des interfaces afin de repenser l’élaboration des questions posées et la synergie des différents savoirs.</p>
<p>Dans ce contexte, il existe un besoin urgent de définir de nouveaux projets scientifiques ambitieux et fédérateurs, financés par des fonds publics qui rassemblent l’expertise mondiale vers un objectif commun (dans la lignée du <a href="https://home.cern/">CERN</a>, du <a href="https://www.genome.gov/human-genome-project">Human genome project</a> ou du <a href="http://www.seaaroundus.org/">Sea Around Us</a> en écologie marine). Ces projets orientés vers le développement de solutions sont complémentaires d’une recherche de rupture, fondée sur la curiosité et la créativité de scientifiques.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/TTjs7vVpzsw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Une vidéo présentant des résultats de recherche sur la pêche illégale dans le cadre du programme <em>Sea Around Us</em> (2020).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Des actions concrètes</h2>
<p>La crise Covid-19 nous amène à réfléchir à des solutions concrètes pour promouvoir la science de la durabilité. Il apparaît nécessaire de renforcer la place de la recherche en partenariat, participative et citoyenne. Une attention particulière doit être portée à l’éthique du partenariat, notamment au Sud, et à la construction du savoir, en respectant toutes ses formes, comme les savoirs traditionnels.</p>
<p>La recherche participative avec les acteurs locaux n’est pas nouvelle, mais elle doit être favorisée afin de renforcer les capacités locales à se préparer et lutter contre les futures crises, notamment dans les régions du monde les plus défavorisées. L’implication croissante des acteurs de la société peut également permettre de combler le fossé entre chercheurs et citoyens, de les rapprocher autour d’un objectif commun.</p>
<p>Un exemple d’actualité concerne le projet <a href="https://framaforms.org/silentcities-1584526480">« Silent Cities »</a>, qui permet d’évaluer l’impact du confinement sur la biodiversité (oiseaux, amphibiens et insectes) à travers l’évolution des ambiance sonores.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338279/original/file-20200528-51449-1c4ulhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338279/original/file-20200528-51449-1c4ulhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338279/original/file-20200528-51449-1c4ulhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338279/original/file-20200528-51449-1c4ulhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338279/original/file-20200528-51449-1c4ulhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338279/original/file-20200528-51449-1c4ulhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338279/original/file-20200528-51449-1c4ulhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Exemple d’installation d’un enregistreur AudioMoth sur un balcon, à Toulouse, dans le cadre du projet Silent Cities.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://osf.io/h285u/">Silent Cities</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Promouvoir la science de la durabilité nécessite également de repenser les indicateurs utilisés dans les instances d’évaluation de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il est nécessaire d’allier le maintien d’un haut niveau d’exigence de qualité de la science produite à une pratique en cohérence avec les défis globaux.</p>
<p>Il faut permettre aux scientifiques de valoriser les activités qu’ils ont développées en interaction directe avec la société, comme c’est le cas dans de nombreux pays – aux États-Unis notamment, avec les <em>land grant universities</em> impliquées dans l’amélioration de la qualité de vie dans leur région, heures dédiées aux activités « communautaires » en Amérique du Sud, ou co-construction des cursus universitaires avec les acteurs locaux dans certains certains centres d’excellence africains (<a href="http://ceaagrisan.sn/">AGRISAN</a>, par exemple).</p>
<p>Il est enfin indispensable d’appliquer à nos propres institutions de recherche les principes de la science de la durabilité, à travers la mise en place, par exemple, d’espaces de co-construction des savoirs entre les communautés scientifiques et porteuses d’enjeux (<em>innovation labs</em>), des mesures favorisant la sobriété énergétique des pratiques de recherche. Il est également urgent de réfléchir à la responsabilité que nous avons de former les prochaines générations à une recherche engagée sur les grands défis, les sensibiliser à une science fondamentalement ouverte aux autres.</p>
<hr>
<p><em>Les auteurs vous donnent rendez-vous ce mardi 2 juin 2020 pour un webinar sur le thème des enjeux de la science de la durabilité. <a href="https://bit.ly/3cjR1D1">Cliquez ici</a> pour plus d’infos.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139586/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La période est propice à la réflexion pour co-construire de nouveaux systèmes de savoirs et penser la recherche autrement.Valérie Verdier, Phytopathologiste, présidente-directrice générale, Institut de recherche pour le développement (IRD)Olivier Dangles, Écologue, Institut de recherche pour le développement (IRD)Philippe Charvis, Directeur Délégué à la Science de l'IRD, Institut de recherche pour le développement (IRD)Philippe Cury, Senior research scientist, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1393312020-05-27T18:15:40Z2020-05-27T18:15:40ZD’un laboratoire universitaire à 40 millions d’utilisateurs, l’aventure d’un logiciel libre<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/337627/original/file-20200526-106836-1dcxmwr.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C326%2C1024%2C559&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une représentation graphique de dépendances dans des problèmes « SAT » </span> <span class="attribution"><span class="source">Daniel Le Berre</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Le numérique est devenu un outil indispensable de la science et l’accès aux programmes informatiques est un enjeu important. Pour la <a href="https://theconversation.com/reproduire-un-resultat-scientifique-plus-facile-a-dire-qua-faire-129848">reproductibilité de la recherche</a> bien sûr, mais plus encore pour diffuser des informations, des « détails », que l’on trouve <a href="https://paperswithcode.com">rarement</a> dans les articles scientifiques eux-mêmes.</p>
<p>Les logiciels ont pour particularité d’être exploitables sans en comprendre tous les détails s’ils sont suffisamment bien conçus, à la différence des articles scientifiques. On peut considérer qu’il s’agit de « connaissances exécutables ». Leur diffusion en dehors des laboratoires a donc un potentiel d’impact important sur la société. Une autre particularité des logiciels est qu’ils évoluent, ne serait-ce que pour s’adapter à leur environnement qui évolue sans cesse. Comment permettre l’essaimage de ces outils uniques ?</p>
<h2>Les laboratoires de recherche créent des logiciels</h2>
<p>La complexité d’un logiciel varie : du script utilitaire (l’équivalent d’un marteau dans un atelier) à un environnement complet (l’atelier complet du forgeron, avec tous ses outils), en passant par des preuves de concept créées à l’occasion de master ou de thèses (les nouveaux outils, qui n’ont pas encore été optimisés et dont l’usage n’est pas encore répandu). Dans bien des cas, un code n’est pas initialement conçu pour perdurer ou être réutilisé… alors qu’il pourrait être utile à d’autres, et que sa diffusion pourrait avoir de la valeur.</p>
<p>Nombre de logiciels créés dans les laboratoires de recherche ne sont pas écrits par des spécialistes du développement logiciel, mais par les chercheurs eux-mêmes, quelle que soit leur spécialité. La priorité est alors d’écrire des programmes qui correspondent aux formules, algorithmes, processus, modèles qu’ils étudient, avant toute considération de génie logiciel. Ce qui caractérise ces logiciels, c’est la complexité du sujet traité : ce qu’ils font est généralement compréhensible des spécialistes uniquement. C’est ce qui rend difficile leur maintenance par une tierce personne.</p>
<p>Enfin, les logiciels développés dans le cadre d’un travail de recherche sont avant tout conçus pour être utilisés dans un environnement contrôlé : celui du laboratoire. De fait, leur utilisation dans un autre environnement peut s’avérer compliqué : matériel, système d’exploitation, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Compilateur">compilateurs</a> (qui permettent de passer du code source au code exécutable par la machine), fonctionnement dépendant de matériels ou de logiciels qu’on ne peut pas diffuser, etc.</p>
<h2>Les logiciels sont des outils qui évoluent sans cesse</h2>
<p>Un logiciel évolue, c’est dans sa nature. Si son périmètre fonctionnel ne change pas, il faudra l’adapter au fur et à mesure de sa diffusion à de nouveaux systèmes d’exploitation, nouvelles architectures, nouveaux compilateurs, etc. Mais aussi et surtout corriger les bugs trouvés lors de l’usage du logiciel dans un environnement différent de celui du laboratoire.</p>
<p>Idéalement, il faut aussi permettre aux utilisateurs de contacter les auteurs du logiciel : de la simple adresse mail à la liste de diffusion, du forum de discussion à un outil spécifique pour gérer les demandes d’évolution ou de correction du logiciel.</p>
<p>Pour mettre à disposition un logiciel, il faut déterminer les conditions d’utilisation, c’est-à-dire choisir une licence. Une des solutions pour partager l’effort de maintenance des logiciels de laboratoire est de choisir une licence libre, pour permettre à l’utilisateur d’adapter lui-même le logiciel a ses besoins.</p>
<h2>Les logiciels libres</h2>
<p>Les <a href="https://www.gnu.org/philosophy/free-sw.fr.html">logiciels libres</a> sont des logiciels pour lesquels le ré-utilisateur dispose de quatre droits fondamentaux : les utiliser, les étudier (leur code source), les modifier et les redistribuer. On trouve souvent des logiciels dont le code source est disponible dans le monde académique, mais pour un usage académique uniquement. Ce ne sont pas, par définition, des logiciels libres, qui sont libres pour tous.</p>
<p>Comme l’utilisation est libre pour tous, l’accès au logiciel est gratuit. Ce sont généralement les services autour du logiciel qui sont payants (le support, l’intégration, le développement de fonctionnalités spécifiques, etc.).</p>
<p>Comme un logiciel évolue, l’idéal est de diffuser à l’aide d’un dépôt de code dit « incrémental », qui permet de facilement comparer les différentes versions, et de les maintenir. Il existe actuellement bon nombre de solutions, appelées des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Forge_(informatique)">« forges »</a> permettant d’intégrer un dépôt incrémental de code, un système de gestion de tickets et des procédures de construction automatique du logiciel à partir de son code source. Ces forges facilitent l’échange de code entre développeurs à l’aide de propositions de modifications sur le dépôt de code. Ces contributions ne sont pas anodines et doivent être prises en compte dans la gestion de la <a href="https://www.persee.fr/doc/rei_0154-3229_2002_num_99_1_3021">propriété intellectuelle</a>.</p>
<p>En réalité, donner accès au code source d’un logiciel n’est généralement pas suffisant pour permettre son adoption : il faut idéalement disposer de tests automatiques (vérifier automatiquement que pour un certain nombre d’entrées, les sorties attendues sont obtenues) et d’un moyen simple de construire l’application à partir de son code source. C’est ce qui permet de vérifier qu’une modification du code n’entraîne pas de dysfonctionnement évident dans l’application, et, pour un futur utilisateur, de s’assurer qu’il aura la possibilité de maintenir lui-même le logiciel en cas de nécessité.</p>
<h2>Sat4j : d’un laboratoire universitaire à une utilisation indirecte massive par des développeurs</h2>
<p><a href="https://www.sat4j.org/">Sat4j</a> est une bibliothèque d’outils permettant de résoudre « le plus simple des problèmes difficiles », le problème SAT et ses variantes. Il s’agit d’un problème « pivot », qui permet de résoudre beaucoup d’autres problèmes.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/ils-ne-savaient-pas-que-cetait-insoluble-alors-ils-lont-resolu-124624">Ils ne savaient pas que c’était insoluble, alors ils l’ont résolu</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Ces outils ne sont pas destinés au grand public, plutôt aux chercheurs, aux étudiants de master ou à des ingénieurs spécialisés. Contrairement aux autres outils développés dans la communauté scientifique orientés vers la performance pure – la vitesse de résolution des problèmes, Sat4j a été conçue dès le départ comme une brique réutilisable pour les utilisateurs du langage Java.</p>
<p>Sat4j <a href="https://sonarqube.ow2.org/dashboard?id=org.ow2.sat4j%3Aorg.ow2.sat4j.pom">comporte</a> actuellement 45 000 lignes de code et pratiquement 2900 tests automatiques. Sat4j a été développée initialement en 2004 par deux enseignants-chercheurs de l’université d’Artois, une « petite » université de 11 000 étudiants située dans le bassin minier, au sein du <a href="http://www.cril.univ-artois.fr">Centre de Recherche en Informatique de Lens</a>. Elle a été dès le départ conçue pour être réutilisable hors du monde académique, notamment en la diffusant sous une <a href="https://www.gnu.org/licenses/lgpl-3.0.en.html">licence libre permettant son utilisation dans tout type de logiciel</a>. Sat4j a été diffusée dès ses premières versions par le <a href="http://www.ow2.org/">consortium ObjectWeb</a> qui fournissait le dépôt de code, les listes de diffusion et la gestion de tickets nécessaire à son évolution.</p>
<p>En 2007, la plate-forme ouverte <a href="https://www.eclipse.org">Eclipse</a> cherchait une solution pour résoudre le problème de dépendances de ses greffons (ou <em>plugin</em>, en anglais). Eclipse est une plate-forme qui fournit et produit des outils pour réaliser des logiciels – elle est souvent utilisée comme base pour des outils développés par de grandes sociétés, comme IBM, Oracle ou SAP. Chaque module dépend d’autres modules, ou est incompatible avec d’autres. Quand on installe un « greffon », c’est-à-dire un ou plusieurs modules complémentaire, il faut veiller à respecter les dépendances et incompatibilités entre modules.</p>
<p>Il s’agit en fait de résoudre le problème SAT. Si les outils ad hoc développés initialement fonctionnaient correctement quand le nombre de greffons était réduit, le succès de la plate-forme a nécessité une refonte complète de la gestion des dépendances. La bibliothèque Sat4j a été sélectionnée car elle répondait au besoin fonctionnel d’Eclipse, était maintenue et parce que la licence a pu être adaptée pour les besoins d’Eclipse.</p>
<p>En juin 2008, Eclipse 3.4 sortait avec un nouveau système de gestion de ses greffons basé sur Sat4j. Un seul bug dans ce contexte a été trouvé dans la bibliothèque depuis (très rapidement, et corrigé dans la version de septembre 2008). L’intégration a été affinée pendant deux ans, avec notamment la mise en place d’un mécanisme d’explication quand l’installation d’un « greffon » n’est pas possible, dans le cadre d’un contrat avec la société Genuitec. En juin 2010, une « place de marché pour greffons » (un <em>app store</em> spécialisé pour développeurs informatiques) <a href="https://marketplace.eclipse.org">a été ouverte pour Eclipse</a> – basée sur Sat4j.</p>
<p>Toutes les installations de greffons sur ce marché se font à l’aide de Sat4j, soit plus de 40 millions d’installations à ce jour. C’est aussi le cas de toute mise à jour, toute installation manuelle dans Eclipse ou dans les logiciels basés sur Eclipse. Cependant, ce travail est caché. Pratiquement aucun utilisateur d’Eclipse ne connaît l’existence de Sat4j.</p>
<p>Si la dernière version officielle de Sat4j, intégrée dans Eclipse, est sortie il y a sept ans, la bibliothèque continue d’évoluer au fil de nos travaux de recherche.</p>
<p>Sat4j a dès le départ été développé à l’aide du logiciel libre Eclipse : un juste retour des choses, qui souligne le potentiel de co-construction des logiciels libres.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Cet article fait partie de la série « Les belles histoires de la science ouverte » publiée avec le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Pour en savoir plus, visitez le site <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/">Ouvrirlascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139331/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Daniel Le Berre ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Développés par une communauté pionnière du « libre » et de l’ouverture, les logiciels sont des outils bien particuliers en science. Le mode de diffusion peut faire la différence.Daniel Le Berre, Professeur en informatique, CRIL CNRS UMR 8188, Université d'ArtoisLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1380932020-05-07T19:47:37Z2020-05-07T19:47:37ZPoids et usages de la Seconde Guerre mondiale en Belgique<p>Le cas belge partage une caractéristique commune à tous les États qui ont été dévastés par la Seconde Guerre mondiale. Il démontre qu’après une guerre, on ne compte pas en années, mais en générations. <a href="https://theconversation.com/70-80-et-90-dites-moi-comment-vous-les-prononcez-je-vous-dirai-qui-vous-etes-87387">Septante-cinq</a> ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, celle-ci demeure bel et bien présente dans le débat public. À côté de cette caractéristique propre à l’Europe entière, le <a href="https://www.youtube.com/watch?v=rzeZcdW4Pbo">plat pays</a> a certaines spécificités propres, à commencer par son caractère profondément divisé. Depuis des décennies, l’identité nationale belge est fragilisée par un conflit linguistique qui s’enracine à maints égards dans l’histoire, d’où le caractère potentiellement explosif de toute référence au passé. Sous cet angle, les souvenirs liés à la Seconde Guerre mondiale posent une question fondamentale : comment représenter le passé quand il continue de diviser ?</p>
<h2>Représentations incompatibles de la collaboration</h2>
<p>Parmi tous les contentieux liés à la Seconde Guerre mondiale, la mise en récit de la collaboration semble cristalliser les conflits mémoriels qui déchirent la Belgique. Quelques données historiques méritent ici d’être rappelées. Le pourcentage de Belges <a href="https://www.belgiumwwii.be/5-questions-essentielles/collaboration.html">condamnés pour faits de collaboration</a> s’élève à 0,64 % de la population (0,73 % de la population néerlandophone et 0,52 % de la population francophone). À la fin de la guerre, près de 100 000 individus (1,20 % de la population) font l’objet d’une procédure pénale ou d’une autre forme de sanction telle que la privation des droits civiques.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/xvYOhdZ-1QU?wmode=transparent&start=18" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Dès 1945, des voix s’élèvent en Flandre pour réclamer la prise en compte de circonstances atténuantes pour les collaborateurs flamands qualifiés non pas de traîtres mais d’idéalistes. Du côté francophone, à l’inverse, on exige une répression sévère et sans concession, toute proposition d’amnistie étant systématiquement rejetée. Les milieux nationalistes flamands présentent cette intransigeance francophone comme la confirmation que l’État belge – longtemps représenté par l’élite francophone – est <a href="https://next.liberation.fr/livres/2002/08/22/jose-gotovitch-et-chantal-kesteloot-collaboration-repression-un-passe-qui-resiste_413250">injustement sévère vis-à-vis des Flamands</a>. Cette représentation se base sur un sentiment d’injustice et de mépris. Elle gagne progressivement toute une frange de l’opinion publique néerlandophone.</p>
<p>Cette polarisation révèle l’existence de représentations non seulement divergentes, mais aussi incompatibles du passé. Les historiens (qu’ils soient <a href="https://www.belgiumwwii.be/belgique-en-guerre/articles/repression.html">belges</a> ou <a href="https://journalbelgianhistory.be/nl/system/files/article_pdf/009_Conway_Martin_2012_2_3.pdf">étrangers</a>) ont déconstruit la fausse dichotomie qui séparerait d’une part une Flandre collaborationniste et d’autre part un monde francophone unanimement résistant. Mais rien n’y fait. Les émotions associées à la Seconde Guerre mondiale, qu’il s’agisse d’humiliation, de ressentiment, de honte ou encore de culpabilité, perdurent. Ce qui apparaît comme un mythe sur le plan historiographique garde donc une efficacité redoutable sur la scène politique.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/UZ_0BMOT4iU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Des deux côtés de la frontière linguistique, la simple évocation de la Seconde Guerre mondiale permet la disqualification de l’adversaire politique. En octobre 2014, pour ne prendre qu’un exemple, l’évocation du « bruit de bottes » au sein du gouvernement belge nouvellement formé déclenche une véritable <a href="https://www.lalibre.be/belgique/politique-belge/onkelinx-denonce-le-bruit-des-bottes-dans-le-gouvernement-543e4f5935706c717689754c">polémique</a>. La critique, formulée par une représentante socialiste francophone, repose sur les liens qui existent entre certains membres du parti nationaliste flamand N-VA et d’anciens collaborateurs.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1032289082070708225"}"></div></p>
<p>Sur le plan idéologique, le fossé qui sépare les deux grandes communautés du pays est particulièrement manifeste depuis les <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/belgique-percee-extreme-droite-flandre-ecologistes-bruxelles-1675871.html">dernières élections de mai 2019</a> qui ont vu la victoire de la gauche en Wallonie et de la droite nationaliste en Flandre. Depuis lors, <a href="https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_belgique-y-aura-t-il-un-nouveau-gouvernement-federal-en-septembre?id=10486173">aucune coalition gouvernementale n’a pu être formé</a> e en dépit d’une année entière de négociations politiques.</p>
<h2>Croisement des données</h2>
<p>Sachant que les récits publics de la Seconde Guerre mondiale ressemblent à un jeu d’ombres chinoises qui varie selon le niveau de pouvoir (fédéral ou régional) et les partis en présence, une question principale se pose : dans quelle mesure les récits publics du passé ont-ils une quelconque portée ? Influencent-ils, en d’autres mots, les souvenirs vécus et transmis par les individus ?</p>
<p>Pour répondre à cette interrogation, une <a href="https://www.cegesoma.be/fr/project/transmemo">équipe</a> de recherche pluridisciplinaire (histoire, psychologie, sciences politiques) s’est mise en place dans les deux principales communautés du pays (Université catholique de Louvain, Université de Gand et <a href="https://www.cegesoma.be/fr">CegeSoma</a>, centre de recherche fédéral essentiellement consacré à l’histoire du XX<sup>e</sup> siècle). Les recherches menées par cette équipe permettent de croiser les données récoltées à partir de deux méthodes heuristiques principales, à savoir les enquêtes et les entretiens. Pour mesurer les décalages ou, au contraire, les recouvrements entre récits publics du passé et mémoires individuelles, une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/ejsp.2664">enquête</a> fut menée des deux côtés de la frontière linguistique.</p>
<p>Les résultats de l’enquête confirment que les positions adoptées à l’égard de la Seconde Guerre mondiale varient non seulement en fonction des générations, des appartenances politiques, mais aussi des appartenances communautaires. L’une des données les plus intéressantes concerne l’attitude de la génération la plus jeune (individus nés après 1983) à l’égard de la question de l’amnistie des collaborateurs. Contrairement aux individus plus âgés pour lesquels la polarisation est nette entre Flamands largement favorables à l’amnistie et francophones presque unanimement opposés à celle-ci, les jeunes Flamands soutiennent de moins en moins les appels à l’amnistie, tandis que les jeunes francophones se positionnent de manière nettement moins tranchée que leurs aînés. Une forme de convergence entre les deux côtés de la frontière linguistique est donc perceptible à l’égard de cette question. Bien qu’elle semble a priori contradictoire avec l’intensité des polémiques qui se succèdent sur la scène politique, cette évolution des représentations sociales laisse penser qu’une forme d’apaisement n’est pas totalement exclue.</p>
<p>Ces réflexions sont aujourd’hui confrontées à une série d’entretiens menés auprès de trois générations de néerlandophones et de francophones issus de familles directement liées à la résistance ou à la collaboration durant la Seconde Guerre mondiale. Au final, ce sont 196 individus qui ont témoigné de leur passé familial pendant parfois plus de deux heures. Ces données particulièrement riches permettent de mieux comprendre les mécanismes de transmission intergénérationnelle et par là, les lignes de fracture qui secouent régulièrement le pays.</p>
<p>Parmi les résultats les plus frappants de cette étude, signalons la difficulté de trouver des familles francophones liées à la collaboration. Alors que de nombreuses familles néerlandophones étaient facilement repérables et ouvertes à la discussion, les familles francophones ont souligné combien la question relevait toujours du tabou. Ainsi, dans de nombreuses familles francophones, certains membres refusaient de participer alors que d’autres n’avaient simplement jamais été mis au courant du passé collaborationniste de leur aïeul. Ce type de réactions montre que si la collaboration est perçue par un grand nombre de néerlandophones comme un phénomène ambivalent, elle demeure l’objet d’une stigmatisation ressentie comme très élevée du côté francophone.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"913169308968157184"}"></div></p>
<p>Un autre enseignement du projet résulte des limites d’une division stricte entre néerlandophones et francophones. De nombreux cas de familles bilingues ne peuvent rentrer dans ces cases. De la même façon, le cas des familles germanophones (77 000 sur une population de 1 146 0000 Belges), extrêmement marquées par la Seconde Guerre mondiale, mérite quant à lui une recherche tout à fait spécifique. Enfin, le cas des personnes qui ont immigré en Belgique après la Guerre montre vite les limites d’un exercice braqué sur une division binaire.</p>
<h2>Quand le « post-conflit » s’achève-t-il ?</h2>
<p>En Belgique comme ailleurs, c’est bien dans le temps long qu’il s’agit d’observer les enjeux de mémoire. L’expression <a href="https://www.cairn.info/revue-herodote-2015-3-page-6.htm">« post-conflit »</a> fait certes l’objet d’un large consensus dans le champ des relations internationales. Les manuels s’y réfèrent. Praticiens et chercheurs l’utilisent pour distinguer ce qui relève de la prévention, de la résolution et de la transformation des conflits. Le cas belge comme d’autres nous pousse à nous interroger. Quand se situe-t-on dans l’après-conflit ? Quand les vainqueurs et les vaincus cessent-ils de l’être ? Combien de décennies sont-elles nécessaires pour échapper à la tyrannie du passé ? Ces questions essentielles nous incitent à multiplier les jeux d’échelle, à dépasser les barrières disciplinaires et à franchir les frontières – qu’elles soient linguistiques ou nationales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/138093/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>En Belgique, les deux principales communautés, les Wallons et les Flamands, ont longtemps cultivé des mémoires différentes de la Seconde Guerre mondiale. Cette divergence s’atténue progressivement.Valérie Rosoux, Professeur de relations internationales - Memory Studies, maître de recherches FNRS, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Aline Cordonnier, Chercheuse postdoctorante SSH/IPSY -- Psychological Sciences Research Institute, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Pierre Bouchat, Chargé de cours à la faculté de psychologie et des sciences de l'éducation, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1367782020-04-22T19:55:35Z2020-04-22T19:55:35ZS’imposer dans un monde concurrentiel : les trois leçons des rappeurs de la série « Validé »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/329196/original/file-20200420-152607-1dibr5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C6%2C1482%2C884&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Comment faire sa place au sein du _rap game_ ? C'est l'un des thèmes abordés dans cette nouvelle série.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://twitter.com/canalplus/status/1240927056617189380/photo/1">Canal+</a></span></figcaption></figure><p>La première saison en 10 épisodes de la série télévisée <em>Validé</em>, créée par Franck Gastambide, Charles Van Tieghem, Xavier Lacaille et Giulio Callegari aborde l’ascension d’un jeune rappeur, Apash, incarné par le (vrai) rappeur Hatik, au sein du <a href="https://www.cairn.info/une-histoire-du-rap-en-france--9782707181985-page-191.htm"><em>rap game</em></a>, terme désignant l’univers (impitoyable) de l’industrie musicale du rap.</p>
<p>Entre collaborations plurielles, stratégies de visibilité et gestion du buzz, l’industrie du rap s’avère une nouvelle fois être <a href="https://www.youtube.com/watch?v=zt5xN3seYLI">source</a> d’inspiration(s) et de respiration(s) stratégiques.</p>
<h2>La collaboration au cœur des parcours</h2>
<p>Le <em>rap game</em> est un milieu hyperconcurrentiel, aux temporalités de plus en plus courtes, chaque nouvel artiste ou nouveau projet tendant à éclipser le précédent :</p>
<blockquote>
<p>« Le rap c’est embouteillé gros… Chaque semaine y’a Booska-P ou Daymolition (médias spécialisés) qui sortent de nouvelles têtes, des mecs avec des looks de ouf, des flows qu’t’as jamais entendu de ta vie. » (épisode 3)</p>
</blockquote>
<p>Cette hyperconcurrence est structurelle : les places sur le devant de la scène sont à la fois convoitées et éphémères.</p>
<p>L’un des premiers enseignements stratégiques de la série est l’importance des collaborations : il paraît utopique de « percer dans le rap » tout seul. Ces collaborations débutent dès le premier cercle du rappeur : son entourage proche génère tout à la fois opportunités et menaces.</p>
<p>Le premier réflexe d’Apash a été de s’entourer de ses deux fidèles amis, William – devenu son manager improvisé – et Brahim, assurant le rôle de <em>community manager</em> en charge des réseaux sociaux de l’artiste. Parallèlement, Apash doit composer, malgré lui, avec le gérant du réseau de drogue de son quartier et son équipe, revendiquant violemment la paternité de la carrière du rappeur, ainsi que les « galériens » du quartier, lui reprochant de « ne pas les faire croquer » et de « se la raconter » depuis ses premiers succès.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/ordXN722RDw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Bande annonce de la série <em>Validé</em> (Canal+).</span></figcaption>
</figure>
<p>Les collaborations entre rappeurs sont également décisives : parfois sincères et sans réel calcul stratégique (quand Soprano, jouant son propre rôle, « donne de la force » à Apash, épisodes 5 et 9), la frontière entre coopération et compétition est toutefois beaucoup plus floue qu’il n’y paraît, nous amenant à parler de coopétition (combinant coopération et compétition).</p>
<p>Les <em>featuring</em>, désignant la participation d’un artiste sur le projet d’un autre, sont rarement anodins : volonté de Mastar de surfer sur le buzz naissant autour d’Apash (épisode 1), détermination à être le meilleur du duo (épisode 2), ou encore stratégie d’alliance avec Lacrim, ennemi juré de Mastar (épisode 4)… jusqu’aux fameux <em>clashs</em> (Karnage à Apash, épisode 8). Nous pouvons également citer le cas de vol d’instrumental (épisode 4), de menaces (Mastar à Apash : « Ce game tu l’oublies… j’vais t’faire une guerre t’es pas prêt », épisode 4) ou de moqueries sur les ventes cumulées (épisode 5) : l’allié de la veille peut devenir l’ennemi du jour, au service, essentiellement, de la visibilité et du buzz (que nous aborderons plus loin).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1245689401482543104"}"></div></p>
<p>Les collaborations avec les maisons de disque, majors ou labels affiliés, sont souvent incontournables : avec pour principal baromètre les ventes physiques et <em>streams</em> de l’artiste (épisode 2), elles l’accompagnent, participent à la réflexion stratégique et artistique des projets, versent des avances à la signature du contrat, et prennent en charge la distribution des CDs…</p>
<p>Cet accompagnement peut d’ailleurs donner lieu à des luttes de territoires avec l’artiste (Mastar au responsable du label Jangle : « Contente-toi de mettre les CDs dans les bacs, et moi je m’occupe de l’artistique c’est bon ? », épisode 2). La volonté de William de faire monter les enchères en faisant le tour des maisons de disque (épisode 3), de renégocier le contrat au vu du succès d’Apash (épisode 8) ou de créer son propre label au sein d’Omega (épisode 10) illustre également une collaboration essentiellement basée sur la recherche du rendement le plus rapide en un minimum de temps. Les places sont chères, le rendement doit être maximisé.</p>
<h2>Occuper l’espace médiatique</h2>
<p>Dans le <em>rap game</em>, il faut être visible, et tous les moyens semblent bons pour y parvenir. Les réseaux sociaux apparaissent ainsi comme LE média prioritaire et incontournable des rappeurs : performances ou <em>freestyles</em> (sorte d’improvisation libre) diffusés en live, enregistrements en studio, annonce de la sortie d’un projet, soutien d’un artiste ou simple volonté d’échanger avec son public. Ils constituent, grâce à l’usage exponentiel des smartphones, la meilleure caisse de résonance des rappeurs, leur permettant d’occuper au mieux l’espace médiatique, dans une époque marquée par le culte de l’instantanéité et la recherche du moment inédit, au cœur de l’évènement.</p>
<p>Les médias spécialisés sont également incontournables, notamment durant les périodes de promotion : émissions spéciales chez Skyrock (épisodes 1 et 7) ou Mouv’ (épisodes 5 et 8), interactions directes avec les auditeurs via des <em>hashtags</em> dédiés, diffusion de morceaux en exclusivité, etc. Le passage d’un morceau en « haute rotation », généralement après un succès en <em>stream</em>, apparaît comme une forme d’aboutissement, du moins un passage obligé dans une stratégie de visibilité nationale, voire internationale :</p>
<blockquote>
<p>« Laurent Bouneau (patron de Skyrock) adore le morceau, il le passe à 5 rotations par jour. » (épisode 2)</p>
</blockquote>
<p>Ces médias sont d’autant plus importants qu’ils tendent à adopter une approche généralement bienveillante et centrée sur la dimension artistique (Booska-P, Rapelite etc.). Les médias généralistes quant à eux s’intéressent moins au contenu artistique qu’au phénomène médiatique incarné par le rappeur (cas de l’émission TPMP, épisode 5), mais sont incontournables dans l’optique d’une visibilité globale, au-delà de la sphère rap.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/329198/original/file-20200420-152563-vfz4s4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/329198/original/file-20200420-152563-vfz4s4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/329198/original/file-20200420-152563-vfz4s4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/329198/original/file-20200420-152563-vfz4s4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/329198/original/file-20200420-152563-vfz4s4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=380&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/329198/original/file-20200420-152563-vfz4s4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=380&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/329198/original/file-20200420-152563-vfz4s4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=380&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Site Booska-P, rubrique rap français.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.booska-p.com/news-rap.html">Capture d’écran</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’occupation de l’espace médiatique peut également s’opérer via la sortie de nombreux morceaux en streaming (« Avec le stream plus on a de morceaux mieux c’est », épisode 4) ou la participation à des évènements sponsorisés par de grandes marques (cas de la « soirée Adidas »), regroupant des artistes de premier plan et notamment couverts par des influenceurs, disposant d’une importante exposition médiatique et pouvant jouer le rôle de relais d’opinion (épisode 5). Entre le rap et les médias, c’est une <a href="https://aoc.media/opinion/2018/10/16/rap-medias-longue-histoire-de-defiance/">longue histoire</a>.</p>
<h2>Gestion du buzz : voie vers le succès ou l’oubli</h2>
<p>Au-delà des collaborations et de l’occupation de l’espace médiatique, la gestion du buzz est toute aussi importante qu’indécise. Ce bouche-à-oreille virtuel, évalué par le nombre de vues, de likes et de partages sur les réseaux sociaux ou plates-formes digitales est un baromètre du succès, pouvant faire et défaire des carrières.</p>
<p>Le succès fulgurant d’Apash (épisodes 1 et 2), la volonté de « clipper le morceau qui buzz » (épisode 2), de « signer tant qu’il y a du buzz » (épisode 3), la bagarre de Mastar à Aubervilliers et son entrée en prison le jour de la réédition de son album (épisode 5), le concert surprise d’Apash (épisode 6) sont autant d’exemples qui le prouvent : le buzz est partout. Il peut s’agir également d’un <em>bad buzz</em> : une émission grand public qui tourne mal (épisode 5), une salle de concert vide (épisode 6), des appels au boycott et des dates annulées (épisode 9).</p>
<p>Plus que le buzz en lui-même, peu évident à contrôler, l’important est de le gérer, de « surfer dessus », de rebondir en faisant preuve de créativité et d’ingéniosité au profit de son image et de sa carrière, par exemple en trouvant le bon concept, le « truc » qui fera parler (Mastar : « Aujourd’hui, tous les p’tits font des coups de pub », épisode 10).</p>
<p>Collaborations, visibilité et buzz : ce triptyque apparaît ainsi décisif dans le processus de « validation » par le <em>rap game</em>. La seconde saison, actuellement en cours d’écriture, pourrait éclairer sous un jour nouveau ce triptyque. Elle pourrait aussi aborder, entre autres, la gestion d’un label indépendant, celle d’une communauté ou <em>fanbase</em>, la place des femmes dans le rap, la gestion du succès et la question de la pérennité, ou encore l’incompatibilité probable entre <em>street-credibility</em> (niveau de respect que la rue attribue à une personne par rapport à son attitude, son passé) et succès commercial.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136778/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tarik Chakor est enseignant-chercheur universitaire et co-créateur de l'agence La Firme, spécialisée dans les partenariats entre artistes et marques.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Hugo Gaillard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’industrie du rap est un secteur hyperconcurrentiel où seules la collaboration, la gestion de la visibilité et la création du buzz permettent de réussir et de se faire… « valider ».Tarik Chakor, Maître de conférences en sciences de gestion - Université Savoie Mont Blanc, Membre de la chaire Management et Santé au travail, Université Grenoble Alpes (UGA)Hugo Gaillard, Docteur en Sciences de Gestion et enseignant en GRH, Le Mans UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1334082020-04-09T19:26:25Z2020-04-09T19:26:25ZLa science ouverte : refaire circuler le savoir librement<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/326875/original/file-20200409-157537-1ysyxng.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C7951%2C5297&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La science est une affaire de collectif.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/CnDBjaddRWs">ThisisEngineering RAEng / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Au Muséum national d’histoire naturelle, les échanges entre savants du pays et du monde entier ont toujours été des vecteurs essentiels de la production et de la diffusion de la connaissance scientifique. Les archives administratives et scientifiques de l’établissement témoignent d’une conversation ininterrompue entre chercheurs aux quatre coins de la planète : relations de voyages, journaux d’expéditions, correspondances, envois croisés entre spécialistes de caisses ou colis de spécimens, d’enveloppes garnies de graines, de photographies, de tirés à part, d’ouvrages… Un incessant ballet d’idées, d’indices et d’objets qu’on n’appelait pas encore des données et qui se dispensait souvent de toute tractation financière. Cette ouverture au monde s’est accompagnée d’une ouverture aux personnes.</p>
<p>Des premières sociétés savantes jusqu’aux sciences participatives qui aident à enrichir les inventaires et bases de données contemporaines, l’histoire naturelle s’est co-construite avec des amateurs et des passionnés de tout bord sans qui les collections, matériau essentiel de la recherche, n’auraient jamais pu être assemblées ni décrites.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1149311629584142337"}"></div></p>
<p>Bref, bien avant la révolution numérique qui a été un formidable accélérateur de ces échanges, on faisait de la science ouverte sans le savoir. Car la notion même de science est fondamentalement indissociable de l’ouverture des esprits, qui conditionne celle des publications et des données.</p>
<p>Science ouverte ! Ce devrait donc être un pléonasme, mais cela fait des décennies que cela ne l’est plus. Comment en est-on arrivé là alors que pendant des siècles la communauté scientifique avait réussi à échanger, à s’organiser à travers de multiples réseaux ?</p>
<h2>Quand le privé s’accapare et monétise le savoir</h2>
<p>Disons que le coup de grâce est venu de l’archange « bibliométrie ». Les éditeurs privés, non contents de créer, voire de récupérer moult revues, ont forgé des outils comme l’<em>impact factor</em> (indice qui quantifie la qualité d’une revue à partir du nombre moyen de citations de ses articles) ou le <em>H-index</em> (autre indice qui quantifie la réputation d’un chercheur sur la base des citations de ses articles) sur lesquels les scientifiques eux-mêmes se sont précipités pour s’évaluer entre eux.</p>
<p>Magie d’une arithmétique simpliste qui, en dépit de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0099133316301732">critiques bien étayées</a>, continue d’être utilisée et qui a cadenassé la science en lui fournissant une liste des « bonnes » revues, les plus chères bien sûr dont les abonnements pour 12 numéros peuvent coûter plusieurs milliers d’euros, voire dépasser les 10 000 euros.</p>
<p>Seulement voilà, après avoir demandé aux scientifiques, la plupart du temps payés par les pouvoirs publics, d’écrire leurs articles, de les éditer, de valider gratuitement ceux de leurs pairs, puis de payer pour les lire, les éditeurs ont aussi souhaité faire payer pour publier, simplement en proposant des accès facilités et accélérés à la publication contre rétribution.</p>
<p>Bref, une forme d’asservissement consenti s’est installée, où il fallait passer trois fois à la caisse. Certes, il faut reconnaître le travail et la valeur ajoutée de l’éditeur qui a des compétences propres à la valorisation et à la diffusion de l’activité scientifique : éditer, structurer et diffuser un livre, une revue, une base de données, a un coût et un entrepôt de PDF est loin d’être une revue scientifique. Encore faut-il apprécier et monnayer ce travail à son juste prix, et dans bien des cas, les comptes ne sont plus bons.</p>
<h2>Refaire circuler librement les connaissances</h2>
<p>À trop vouloir gagner, un vent contraire s’est levé, celui de la science ouverte. À l’heure des réseaux et du numérique, pourquoi la connaissance scientifique, bien de tous, ne pourrait-elle pas circuler librement ? Poser la question, c’est y répondre, surtout à une époque où l’acquisition de nouvelles données et connaissances n’est plus le coup d’éclat de quelque savant isolé, mais le fruit de collaborations multiples. La connaissance avance comme une vague collective où tout se partage et où chacun bénéficie de l’influence de tous. Dans un monde économiquement fracturé, la libre circulation des connaissances scientifiques est un indéniable levier de rééquilibrage et de développement, y compris dans les rapports Nord-Sud. Tout ce qui facilite les échanges fait donc sens et est même devenu une nécessité impérieuse.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1245599721411903488"}"></div></p>
<p>L’avènement du numérique permet cela : au-delà des publications, le croisement et l’agrégation des données de la recherche issues de silos disciplinaires variés permet d’accélérer les possibilités de calcul, de fouille et d’analyse par l’utilisation des machines et de l’intelligence artificielle. Pour que l’innovation scientifique se déploie à cette nouvelle échelle, encore faut-il que les données soient ouvertes et interopérables, tant techniquement que juridiquement.</p>
<p>Malheureusement la seule restriction qui se soit imposée est celle des moyens financiers dévolus à cette circulation d’information, moyens réclamés et captés par quelques gros éditeurs privés qui ont eu l’astuce de faire des titres de leurs revues scientifiques le critère d’évaluation de l’activité des chercheurs. Car l’évaluation est ainsi reportée sur la seule notoriété d’une revue qui, sans nier sa qualité scientifique, a d’abord ses contraintes éditoriales et financières. Lors d’une évaluation, ce ne sont plus les contenus scientifiques qui sont regardés et scrutés de manière approfondie, mais les seuls titres et impact factor. L’absurdité est devenue telle que j’ai pu assister dans un pays voisin à des classements de projets sur la base de la somme des <em>if</em> de leurs porteurs. Plus encore, les mêmes acteurs ont entrepris de fidéliser les chercheurs en mettant en avant leur avance technologique pour commencer à privatiser les données de la recherche publique dans des applications et réseaux académiques résolument propriétaires.</p>
<p>On voit bien que le système implose et que la science ouverte est désormais une nécessité économique, déontologique et même pragmatique car elle permettra de desserrer le frein qui limite la diffusion large des connaissances acquises, entre scientifiques d’abord et vers un large public ensuite. Toutefois, ne nous leurrons pas, la réponse n’est pas simple car il faut concilier le souhait de cette large diffusion et d’immédiateté avec la nécessité d’une validation. Il faut faire en sorte que la société dispose de bases fiables et que la diffusion de connaissances validées répondant aux critères scientifiques ne tourne pas à la diffusion d’opinions ou de croyances non étayées. C’est tout l’enjeu de cette science ouverte qui doit faire avec les forces et faiblesses de la science, une capacité à remettre en cause ce qui était tenu pour acquis, ce qui ne pose pas de problème dans un monde lent, mais qui peut donner l’apparence d’une agitation perpétuelle dans le monde rapide d’aujourd’hui.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Cet article fait partie de la série « Les belles histoires de la science ouverte » publiée avec le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Pour en savoir plus, visitez le site <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/">Ouvrirlascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/133408/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bruno David ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La science ouverte pourrait être un changement majeur de paradigme dans le partage du savoir scientifique : ne plus le faire payer, partager tout simplement.Bruno David, Président du Muséum national d'Histoire naturelle, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1354652020-04-04T16:45:19Z2020-04-04T16:45:19ZComment le coronavirus a réveillé l’intelligence collective mondiale<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/324961/original/file-20200402-74900-45jt1r.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C19%2C1233%2C734&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Réseau des compétences des projets Covid-19 sur la plateforme JOGL.</span> <span class="attribution"><span class="source">Marc Santolini/JOGL</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Partout dans le monde, <a href="https://www.nytimes.com/2020/03/13/science/coronavirus-social-networks-data.html">épidémiologistes</a>, praticiens, ingénieurs (et tant d’autres) exploitent sans relâche le flot de données sur l’épidémie pour <a href="https://www.epicx-lab.com/covid-19.html">modéliser</a> sa progression, prédire <a href="https://www.mobs-lab.org/2019ncov.html">l’impact des interventions</a> possibles ou <a href="https://app.jogl.io/project/130">développer des solutions</a> aux pénuries de matériel médical. </p>
<p>Ils génèrent des modèles et des codes ouverts et réutilisés par d’autres laboratoires.</p>
<p>Le monde de la recherche et de l’innovation semble s’être pris d’une frénésie de collaboration et de production de connaissances ouvertes tout aussi contagieuse que le coronavirus. </p>
<p>Serait-ce donc ça, la fameuse « intelligence collective » censée résoudre nos problèmes planétaires majeurs ?</p>
<h2>La science, un réseau bâti sur les épaules des géants</h2>
<p>En 1675, Newton écrivait déjà : « Si j’ai vu plus loin, c’est en me tenant sur les épaules des géants. » </p>
<p>Depuis, la reconnaissance de cet héritage intellectuel collectif est devenue standard dans la recherche scientifique. En science et ingénierie, aujourd’hui, 90 % des publications sont d’ailleurs <a href="https://science.sciencemag.org/content/316/5827/1036">écrites par des équipes</a>. </p>
<p>Ces trois dernières décennies, l’avènement d’internet puis des réseaux sociaux a participé à l’effacement des limitations traditionnelles de l’intelligence collective, des sociétés « des savants » exclusives aux revues à accès payant, en passant par l’opacité du système de revue par les pairs. </p>
<p>La recherche académique vit une facilitation technologique et une ouverture sans précédent permettant à une grande diversité d’acteurs d’interagir de manière immédiate et distribuée. On observe une croissance sans précédent des revues en accès ouvert et de sites d’archivage d’articles.</p>
<p>Hors du système académique, des communautés non institutionnelles voient le jour : <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hacker_(sous-culture)">hackers</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Biologie_participative">bio-hackers</a> ou encore <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_maker">makers</a> s’auto-organisent en ligne et participent à l’effort collectif de production de connaissance. C’est ce terreau fertile qui permet une réaction sans précédent à la crise de Covid-19.</p>
<h2>Le Covid-19 réveille l’intelligence collective</h2>
<p>Au départ de l’épidémie, on a pu voir la recherche « traditionnelle » s’accélérer et ouvrir considérablement ses moyens de production. Des journaux prestigieux, comme <a href="https://www.sciencemag.org/coronavirus-research-commentary-and-news">Science</a>, <a href="https://www.springernature.com/gp/researchers/campaigns/coronavirus">Nature</a>, ou encore <a href="https://www.thelancet.com/coronavirus">The Lancet</a>, qui font d’habitude payer pour l’accès à leurs articles, ont ouvert l’accès aux publications sur le coronavirus et le Covid-19. </p>
<p>Des données sur la progression de l’épidémie sont mises à jour quotidiennement – celles de l’Université John Hopkins par exemple sont le fruit d’un <a href="https://github.com/CSSEGISandData/Covid-19">travail ouvert et collaboratif</a> et ont déjà été réutilisées près de 9 000 fois sur la plate-forme de collaboration <a href="https://github.com/">Github</a> par des projets tiers. </p>
<p>Des résultats sont publiés immédiatement sur des serveurs de pré-publication en accès ouvert ou sur les <a href="https://www.epicx-lab.com/covid-19.html">sites des laboratoires</a> mêmes. Algorithmes et <a href="https://picorana.github.io/align_covid/index.html?fbclid=IwAR24Tj3Njeo0dZTJUoFKBOGI6MBIljMkq39WWxUnGKSRh8UczHjGA__-6Ho">visualisations interactives</a> sont en ligne sur GitHub ; vidéos éducatives et de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=gxAaO2rsdIs">vulgarisation</a> sur YouTube. </p>
<p>Les chiffres donnent le vertige, avec à ce jour plus de <a href="https://www.kaggle.com/allen-institute-for-ai/CORD-19-research-challenge">45,000 articles académiques</a> académiques publiés sur le sujet.</p>
<p>Plus récemment, des <a href="https://opencovid.care/category/citizen-science-project/">initiatives populaires</a> réunissant des acteurs variés ont émergé hors des cadres institutionnels, utilisant des plates-formes en ligne. Par exemple, une communauté de biologistes, d’ingénieurs et de développeurs a émergé sur la plate-forme de collaboration <a href="https://app.jogl.io/program/opencovid19">Just One Giant Lab</a> (JOGL) afin de développer des outils à bas coût et open-source contre le virus. Cette plate-forme, que nous avons conçue avec Léo Blondel (Harvard) et Thomas Landrain (La Paillasse, PILI) au cours de ces trois dernières années, a pour vocation d’être un institut de recherche virtuel, ouvert et distribué autour de la planète. </p>
<p>La plate-forme permet à des communautés de s’auto-organiser pour apporter des solutions innovantes à des problématiques urgentes et requérant des compétences fondamentalement interdisciplinaires ainsi que des connaissances « de terrain ». Elle agit comme clé de voûte afin de faciliter la coordination par la mise en relation entre besoins et ressources au sein de la communauté, l’animation autour de programmes de recherche, et l’organisation de challenges. </p>
<p>En particulier, l’utilisation d’algorithmes de recommandation permet de filtrer l’information pour que les contributeurs puissent suivre l’activité et les besoins de la communauté les plus pertinents, fluidifiant la collaboration et facilitant la mise en place d’une intelligence collective.</p>
<p>Lorsque le <a href="https://app.jogl.io/project/118">premier projet</a> lié au Covid-19, un test de diagnostic open source et à bas coût, y est né il y a quatre semaines, on a pu assister à une véritable ruée sur la plate-forme. Le nombre de contributions par minute n'a cessé d'augmenter : des centaines d’interactions, création de projets, échanges… Si bien que le serveur hébergeant la plate-forme ne tenait plus ! En seulement un mois, ce furent plus de 60 000 visiteurs venant de 183 pays, dont 3000 contributeurs actifs générant plus de 90 projets, allant de designs de masques de protection à des prototypes de ventilateurs à bas coût.</p>
<p>Cette communauté massive s’est rapidement organisée en sous-groupes de travail, mêlant des compétences et des univers variés : data scientists de grandes entreprises, chercheurs en anthropologie, ingénieurs et biologistes se côtoient ainsi dans cet univers virtuel. </p>
<p>La personne la plus active, coordinatrice émergente de la communauté s’avère même être… une lycéenne de 17 ans de Seattle ! Cette initiative est aujourd’hui un programme de recherche à part entière, <a href="https://app.jogl.io/program/opencovid19">OpenCOVID19</a>, avec 100 000 euros de financements de Axa Research Fund à redistribuer aux projets émergents selon un système de revue par la communauté, en partenariat avec l’AP-HP pour faciliter l’évaluation et la validation des designs destinés à un usage hospitalier, et plusieurs axes majeurs : diagnostique, prévention, traitement, ou encore analyse de données et modélisation.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=529&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=529&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=529&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=664&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=664&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=664&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Carte des compétences partagées par les participants à la plate-forme JOGL sur les projets Covid-19, et leurs interactions.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marc Santolini, JOGL, CRI</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’auto-organisation de communautés a été l’apanage du monde open-source et l’origine de projets massifs tel que Linux. Elle devient aujourd’hui apparente dans la résolution de problèmes globaux et multi-disciplinaires, mettant la diversité des compétences au service de la complexité.</p>
<h2>L’intelligence collective, c’est quoi ?</h2>
<p>Si nous pouvons mesurer une intelligence individuelle via la performance à diverses tâches et ainsi dériver un « quotient intellectuel » individuel (le fameux QI), alors pourquoi ne pas mesurer l’intelligence d’un groupe d’individus par leur performance à des tâches collectives ?</p>
<p>Des chercheurs <a href="https://science.sciencemag.org/content/330/6004/686">ont</a> <a href="https://science.sciencemag.org/content/330/6004/686">démontré</a> en 2010 l’existence d’un « facteur c » d’intelligence collective prédictif de la performance de groupe aux diverses tâches. </p>
<p>Pour qu’un groupe maximise son intelligence collective, nul besoin d’y regrouper des gens avec un fort QI. Ce qui compte, c’est la sensibilité sociale des membres, c’est-à-dire leur <em>capacité à interagir efficacement</em>, leur capacité à prendre la parole de manière équitable lors des discussions, ou encore la diversité des membres, notamment la proportion de femmes au sein du groupe. </p>
<p>Autrement dit, un groupe intelligent n’est pas un groupe formé d’individus intelligents, mais d’individus variés qui interagissent convenablement. Et les auteurs de conclure : « il semblerait plus facile d’augmenter l’intelligence d’un groupe que celle d’un individu. Pourrait-on augmenter l’intelligence collective, par exemple, grâce à de meilleurs outils de collaboration en ligne ? »</p>
<p>C’était l’esprit à l’instauration de la plate-forme JOGL : on peut mesurer en temps réel l’évolution de la communauté et l’avancée des projets, ce qui permet de mettre en place une meilleure coordination des différents programmes, dont bien sûr les programmes Covid-19. </p>
<p>Les données offrent aussi un étalon quantitatif de « bonnes pratiques » facilitant l’intelligence collective, permettant l’avancée de recherches fondamentales sur les collaborations que nous menons au sein de <a href="https://research.cri-paris.org/teampage?id=5cde7f999a474e4a9f93b281">mon équipe de recherche</a> au Centre de Recherches Interdisciplinaires de Paris. En effet, en mettant en action les outils de la science des réseaux, nous étudions <a href="https://science.sciencemag.org/content/359/6379/eaao0185">comment ces dynamiques collaboratives</a> sous-tendent l’avancée des connaissances.</p>
<h2>Réveil éphémère ou bouleversement à long terme ?</h2>
<p>Comment faire en sorte que ces révolutions se pérennisent ? S’il est un enseignement que nous apprennent les « hackathons », ces événements mettant en œuvre les principes de l’intelligence collective pour générer des projets sur un ou deux jours, c’est qu’il est difficile de stabiliser l’activité de ces projets dans le temps, après l’effervescence de l’événement. </p>
<p>Même s’il est tôt pour tirer des conclusions à ce sujet dans le cas d’OpenCOVID19, plusieurs pistes existent pour penser le futur de telles collaborations massives.</p>
<p>Un <a href="https://press.princeton.edu/books/paperback/9780691160191/reinventing-discovery">point commun</a> des communautés qui deviennent rapidement immenses est qu’on y est rapidement perdus ! Qui contacter pour résoudre tel problème ou répondre à telle question ? La solution : une « architecture de l’attention » permettant de guider les individus là où leur talent serait le plus apte à la progression du projet. Autrement dit, c’est dans les <em>systèmes de recommandation</em>, ces mêmes algorithmes qui ont fait le succès des réseaux sociaux tels que Twitter, Instagram ou Facebook, que réside le graal de ces communautés.</p>
<p>Une telle approche, basée sur les fondamentaux de la <a href="https://hci.stanford.edu/publications/2017/flashorgs/flash-orgs-chi-2017.pdf">science des équipes</a> et la <a href="https://arxiv.org/abs/2001.01296">science des réseaux</a>, permet d’utiliser les traces digitales laissées par la communauté (interactions, discussions, projets réalisés, compétences déclarées) pour présenter dans un flux d’activité quelle serait la meilleure personne à contacter, le projet le plus pertinent à aider, ou encore la tâche la plus logique à produire par la suite. </p>
<p>Au cœur de l’architecture de JOGL, de tels algorithmes permettent ainsi de favoriser <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/S%C3%A9rendipit%C3%A9">ces rencontres hasardeuses qui s’avèrent être de manière inattendue bénéfiques à un projet</a>.</p>
<p>Le développement de tels algorithmes de recommandation au profit de collaborations massives nécessite l’apport de disciplines variés, allant de l’informatique aux sciences sociales, en passant par les mathématiques ou l’éthique. Finalement, le futur de l’intelligence collective se retourne sur lui-même : car c’est bien l’intelligence collective qui devra se mettre au service de son propre devenir.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Cet article fait partie de la série « Les belles histoires de la science ouverte » publiée avec le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Pour en savoir plus, visitez le site <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/">Ouvrirlascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/135465/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Santolini est co-fondateur et Directeur Recherche de Just One Giant Lab.</span></em></p>Individuellement, nous sommes tous démunis devant la crise du coronavirus. Un boom collaboratif mondial est en train de changer la manière dont la science se fait.Marc Santolini, Research Fellow, UMR1284 INSERM et Université de Paris au CRI, chercheur invité au Center for Complex Network Research (Northeastern University), et co-fondateur de Just One Giant Lab, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1246062019-10-07T21:25:36Z2019-10-07T21:25:36ZGestion des ressources humaines en PME : une question de dirigeant<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/295194/original/file-20191002-49383-1obtrfc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C19%2C995%2C646&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le dirigeant de PME, directeur des ressources humaines dans les faits.
</span> <span class="attribution"><span class="source"> Photographee.eu / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Depuis une dizaine d’années, nous menons des <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/ri/2018-v73-n1-ri03563/1044427ar/">recherches sur la gestion des ressources humaines</a> (GRH) au sein des petites et moyennes entreprises (PME) françaises. Un premier constat est l’existence d’une GRH informelle et intuitive. Compte tenu de la proximité spatiale et sociale existant entre les divers acteurs de la PME, le dirigeant occupe une place centrale. Il se révèle même être souvent le directeur des ressources humaines dans les faits.</p>
<p>De façon arbitraire, il prend des décisions concernant la GRH, qui ne sont donc pas toujours légitimes aux yeux des salariés. À titre d’exemple, la politique de rémunération est le plus souvent discrétionnaire : il en découle notamment une attribution de primes se faisant à la guise du dirigeant. Ces décisions subjectives peuvent faire l’objet de contestations de la part des salariés. Il en est de même pour les promotions, ce qui entraîne là aussi une perte de sens, et un désengagement de certains collaborateurs.</p>
<p>Nous avons notamment étudié le cas d’une PME iséroise de 76 salariés spécialisée dans la géométrie au sein de laquelle la GRH repose principalement sur le dirigeant et le directeur général. Ainsi, le recrutement dépend le plus souvent du réseau du dirigeant, qui n’a pas ailleurs pas établi de grille de rémunération : des primes et des augmentations sont ponctuellement allouées selon des critères subjectifs. Nous qualifions ce type de GRH d’autocentrée sur le dirigeant.</p>
<h2>Complexité et richesse des relations</h2>
<p>Nous avons en outre constaté que le caractère informel des pratiques peut également aboutir, dans des cas plus rares, à l’effet inverse et laisser place à une GRH partagée entre le dirigeant et les salariés. Celle-ci, coconstruite par les membres de l’entreprise, se veut bienveillante et souhaitée par l’ensemble des acteurs, ce qui va entraîner une plus forte adhésion au projet de l’entreprise. Contre-intuitive a priori en raison des spécificités de la PME tournée vers la centralisation du pouvoir, cette forme de GRH rend pourtant compte de la complexité et de la richesse des relations dans ce type de structure.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/295200/original/file-20191002-49369-18tl4f9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/295200/original/file-20191002-49369-18tl4f9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/295200/original/file-20191002-49369-18tl4f9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=168&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/295200/original/file-20191002-49369-18tl4f9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=168&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/295200/original/file-20191002-49369-18tl4f9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=168&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/295200/original/file-20191002-49369-18tl4f9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=211&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/295200/original/file-20191002-49369-18tl4f9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=211&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/295200/original/file-20191002-49369-18tl4f9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=211&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Tableau synthétique des grandes formes de GRH en PME.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Afin d’impliquer et de responsabiliser ses salariés, le dirigeant d’une autre PME iséroise, comptant 95 collaborateurs, a par exemple construit, avec l’ensemble des acteurs de son entreprise, un pacte social en 2011. Il s’agit d’un document qui renseigne les règles définies concernant la politique d’emploi, de rétribution, de relations sociales, et précisant également les engagements des salariés. Il s’appuie sur ses managers pour transmettre les informations, être à l’écoute des collaborateurs et plus particulièrement pour donner du sens au travail. La relation entre le dirigeant et les salariés repose sur un contexte propice à l’échange et au partage. La solidarité, l’engagement et le respect sont des valeurs prégnantes dans cette PME.</p>
<h2>Poids de certains facteurs</h2>
<p>Nos recherches montrent que l’adoption de l’un ou de l’autre modèle, GRH autocentrée ou partagée, dépend de la taille de l’entreprise, du profil du dirigeant.</p>
<p>Tout d’abord, lorsque l’entreprise franchit le cap des 100 salariés, la fonction RH tend à se structurer et le dirigeant se voit obliger de déléguer son pouvoir à un responsable des ressources humaines ou encore à un responsable administratif. Ainsi, la GRH pourra être décentralisée et plus organisée car elle s’avère pilotée par une personne possédant de véritables compétences en la matière. Pour autant, cette GRH peut rester autocentrée si les lignes directrices de la politique de GRH sont dictées par le dirigeant. Par ailleurs, si nous considérons que le dirigeant délègue totalement cette fonction à son responsable des ressources humaines, il ne s’agira pas pour autant d’une GRH partagée au sens strict dans la mesure où les salariés ne seront pas acteurs de sa coconstruction dans les faits.</p>
<p>Nous avons observé que le type de profil du dirigeant était un autre déterminant essentiel du choix de la forme de GRH. Ainsi, pour ce qui est de sa formation, un dirigeant hautement qualifié aura tendance à formaliser sa GRH ou encore à se faire accompagner par des spécialistes du domaine pour l’aligner sur sa stratégie. A contrario, un dirigeant autodidacte aura tendance à suivre son instinct et à organiser sa GRH de façon très informelle. Pour autant, cette GRH pourra également se construire en accord avec les salariés.</p>
<p>Concernant ses expériences passées, un dirigeant, ayant travaillé dans un grand groupe, pourra s’inspirer de certaines méthodes de structuration ou d’organisation. À l’inverse, déçu de certaines approches, il pourra décider de favoriser la co-construction et le partage de la GRH afin d’aller à l’encontre de ce qu’il a précédemment vécu.</p>
<h2>Valeurs et collaborations</h2>
<p>Nous avons également relevé l’importance du réseau du dirigeant, qui est susceptible d’instaurer des pratiques de GRH similaires à celles de ses concurrents pour attirer et fidéliser des individus hautement qualifiés. Les réseaux au sein desquels est inséré le dirigeant exercent en effet une influence sur l’adoption des pratiques de GRH. Il s’agit principalement des syndicats ou encore des grands donneurs d’ordres, tous deux assimilés à des réseaux coercitifs. Associées à des réseaux de conseils, les associations de dirigeants d’entreprises influent en revanche plus faiblement.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"928799157678157824"}"></div></p>
<p>Nos résultats soulignent aussi que les valeurs personnelles du dirigeant, dont la latitude est certaine, sont à l’origine de l’instauration d’une GRH partagée. Il peut s’agir de valeurs tournées vers le respect, la solidarité ou encore le dialogue.</p>
<p>Il convient enfin de prendre en compte le rôle des managers intermédiaires, qui peuvent constituer de véritables relais RH en matière de traduction de la vision du dirigeant ou encore de partage d’informations. Ils peuvent aussi alerter le dirigeant sur les changements de comportement des collaborateurs à l’égard de l’entreprise qui pourraient dénoter d’un possible désengagement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124606/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Qu’elle prenne une forme autocentrée ou partagée, le choix du type de gestion des ressources humaines dépend en grande partie du profil et du réseau du dirigeant.Ludivine Adla, Maître de conférences en sciences de gestion et du management, Grenoble IAE, Grenoble IAE Graduate School of ManagementVirginie Gallego-Roquelaure, Professeur des universités, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1199152019-09-01T18:45:31Z2019-09-01T18:45:31Z« Vous voulez quitter notre entreprise ? Mais pourquoi ?! »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/289612/original/file-20190827-184222-gae09q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=34%2C38%2C958%2C627&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'entreprise ne doit surtout pas considérer le départ d'un collaborateur comme une trahison.
</span> <span class="attribution"><span class="source">George Rudy/Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>À l’heure où l’on parle de <a href="https://theconversation.com/guerre-des-talents-pas-de-competitivite-sans-attractivite-sur-le-marche-du-travail-118609">« guerre des talents »</a>, la rétention des employés hautement qualifiés est devenue un défi majeur pour de nombreuses entreprises. La <a href="https://www.youtube.com/watch?v=_q8pano-u34">théorie des ressources</a> nous enseigne d’ailleurs que la pérennité d’une organisation repose sur sa capacité à attirer, développer et retenir ses ressources internes.</p>
<p>Du côté des employeurs, on oublie trop souvent que les collaborateurs compétents peuvent avoir envie de partir. C’est sans doute lié à une confusion entre les notions de vie professionnelle et de parcours professionnel. La différence de terme n’est pourtant pas neutre. En effet, un parcours recouvre l’idée de traversée, d’étapes délimitées dans le temps, alors que la notion de vie signifie physiologiquement un ensemble de fonctions, dont la fonction de relation à autrui.</p>
<p>Ainsi, lorsqu’on parle de parcours, on envisage aisément des stratégies individuelles d’évolution. Certains collaborateurs peuvent adopter un comportement parfois opportuniste en faisant des sauts de puce d’une entité à une autre.</p>
<h2>Voilà pourquoi c’est fini</h2>
<p>Souvent, les motivations de ces départs sont liées à des choix personnels, à des ambitions ou des crises de confiance et parfois à une forme de rupture du <a href="https://promettreenentreprise.wordpress.com/2016/01/19/la-notion-de-contrat-psychologique/">« contrat psychologique »</a>, qui englobe toutes les attentes non-écrites des deux parties, employeur et employé, l’une envers l’autre.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/WtyADFgM8H8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Du contrat juridique au contrat psychologique », interview d’Yvon Pesqueux, professeur au CNAM (Xerfi Canal, 2014).</span></figcaption>
</figure>
<p>Ainsi, les salariés quittent leur entreprise pour différents motifs :</p>
<ul>
<li><p>les conditions de travail (temps de trajet, environnement géographique, salaire, temps de travail, stress, etc.) ;</p></li>
<li><p>le souhait d’équilibrer vie professionnelle et vie privée ;</p></li>
<li><p>le souhait d’évoluer (rémunération, fonction ou contenu des missions).</p></li>
</ul>
<p>Quand l’employeur ne peut plus répondre aux attentes du salarié, celui-ci peut donc être amené à aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs. Mais au-delà de ces attentes relativement évidentes, la littérature managériale en matière de <a href="https://www.bdc.ca/fr/articles-outils/boite-outils-entrepreneur/gabarits-documents-guides-affaires/glossaire/pages/comportement-organisationnel.aspx">comportement organisationnel</a> insiste sur la notion de justice organisationnelle et des attentes des employés en la matière. Certaines situations peuvent en effet paraître injustes aux collaborateurs qui adapteront alors leur comportement, par exemple en quittant tout simplement l’entreprise.</p>
<p>Les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S006526010860283X">travaux</a> sur le concept de justice organisationnelle (qui ont succédé aux <a href="https://www.lesmotivations.net/spip.php?article79">contributions sur l’équité</a>) révèlent trois formes principales de justice :</p>
<ul>
<li><p>la justice distributive (perceptions et réactions individuelles quant aux rétributions reçues suite à une allocation des ressources) ;</p></li>
<li><p>la justice procédurale (équité perçue des processus et procédures permettant la répartition des rétributions, comportant à la fois la capacité perçue par l’individu d’exprimer son avis et son argumentation durant la procédure de prise de décision ainsi que la capacité d’influencer le résultat de la décision) ;</p></li>
<li><p>la justice interactionnelle (l’équité perçue du traitement interpersonnel reçu par l’employé de la part des figures d’autorité).</p></li>
</ul>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1068408280752537602"}"></div></p>
<p>Si les salariés perçoivent une injustice à l’un de ces niveaux, ils vont alors exprimer leurs sentiments de manière « invisible », comme l’explique Thierry Nadisic, professeur en comportement organisationnel à l’EM Lyon Business School dans une <a href="https://www.lci.fr/open-space/lorsqu-il-y-a-un-sentiment-d-injustice-les-salaries-deviennent-des-mercenaires-comment-etre-un-manager-juste-2110235.html">interview accordée à lci.fr</a>, ce qui va se traduire par « des retards, des pauses allongées, des négligences, un manque de respect des règles, voire des vols de matières premières ». Et lorsque plusieurs de ces injustices s’accumulent peuvent naître des « phénomènes de contagion émotionnelle, qui sont incontrôlables », précise l’auteur du livre « Le management juste ».</p>
<h2>Réussir l’outboarding</h2>
<p>Autre point souvent négligé par les employés : accompagner au mieux le départ, du collaborateur (quel que soit le motif de ce départ), de la même façon qu’il a été accompagné lors de son arrivée dans l’organisation. C’est ce qu’on appelle <em>l’outboarding</em>. Le piège serait de considérer la séparation comme une trahison. Cela reviendrait à rester sur le terrain de l’affectif. L’émotion doit donc être écartée, et ce pour plusieurs raisons :</p>
<ul>
<li><p>le collaborateur pourra à l’avenir revenir dans l’entreprise ;</p></li>
<li><p>le collaborateur est peut-être un futur client ;</p></li>
<li><p>le collaborateur, une fois parti, peut nuire à l’image de l’entreprise, etc.</p></li>
</ul>
<p>On veillera donc à échanger avec un collaborateur démissionnaire pour comprendre les raisons de son départ, écourter éventuellement son préavis. Cela permettra, dans un climat apaisé, d’assurer la transmission des informations et le recrutement dans les meilleures conditions de son remplaçant.</p>
<p>Il serait par exemple tout à fait inadapté de trop anticiper ce départ en attribuant le bureau du démissionnaire à un nouvel arrivant avant que ce dernier n’ait définitivement quitté l’entreprise. Lui demander de rendre son matériel informatique trop tôt pourrait aussi conduire le salarié sortant à penser que, finalement, son départ était attendu. La vie professionnelle étant constituée de parcours qui se croisent, il est opportun d’accompagner le collaborateur jusqu’à la fin effective de son contrat de travail.</p>
<p>L’entreprise a tout à y gagner. En effet, lorsqu’une organisation traite un salarié de façon positive, ce dernier ressent, en retour, le besoin d’adapter sont comportement afin de rendre un traitement similaire à son employeur et <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=2239393">s’investir au maximum</a> jusqu’au dernier jour de son contrat.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/119915/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Si les collaborateurs perçoivent que la justice, sous différentes formes, n’est pas respectée dans l’organisation, ils vont avoir tendance à aller voir ailleurs. Un principe trop souvent oublié.Caroline Diard, Professeur associé en Management des Ressources Humaines et Droit - Laboratoire Métis - Membre de l'AGRH, EM NormandieNicolas Dufour, Professeur affilié, PSB Paris School of BusinessLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1107582019-02-06T16:52:41Z2019-02-06T16:52:41ZLe design thinking est-il pour votre entreprise?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/257523/original/file-20190206-174851-1mshzab.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour qu’une entreprise fasse bon usage du Design Thinking, elle doit tout d’abord faire preuve de bon sens en déterminant des objectifs clairs et des cibles précises.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Le design thinking, c’est la recette du jour en matière d’innovation. C’est pour certains le chemin d’une transformation radicale de la pensée et la clef d’un changement révolutionnaire. Pour d’autres, ce n’est qu’un fouillis pour milléniaux qui recouvrent les murs d’autocollants tout en jouant au Nerf et au Lego. D’autres encore y voient une <a href="https://www.fastcompany.com/1663558/design-thinking-is-a-failed-experiment-so-whats-next">mode passagère ayant échoué</a>.</p>
<p>Mode ou pas, le design thinking, qui consiste à résoudre des problèmes de façon créative, a été adopté par des gouvernements, des compagnies de technologie, des fabricants de produits de consommation et des organisations œuvrant dans le domaine de la santé et bien d’autres encore. Dans mon livre, <a href="https://www.designthinkingatwork.net/"><em>Design Thinking at Work: How Innovative Organizations Are Embracing Design</em></a>, j’ai interviewé des dirigeants de grandes organisations qui l’ont utilisé.</p>
<p>Je cherchais à comprendre pourquoi elles avaient adopté cette approche de l’innovation et quelle avait été leur expérience.</p>
<p>J’ai entendu le narratif habituel sur ses avantages - comment cette approche fluide et itérative (soit l'action de répéter un processus) leur avait donné de nouvelles perspectives et fait découvrir des opportunités cachées. Mais j’ai également entendu parler des obstacles réels qui nuisent à la réussite de cette approche.</p>
<p>Les organisations qui ont adopté le design thinking l’ont fait pour de multiples raisons, et pas seulement pour mieux innover. Certains programmes ont été implantés parce que de précédents projets avaient échoué. D’autres étaient issus de la frustration éprouvée par la haute direction face à une organisation lente et bureaucratique. D’autres encore cherchaient à améliorer leur service à la clientèle, à encourager l’esprit de collaboration, ou encore à attirer et retenir le talent. Et d’autres poursuivaient tous ces objectifs, et davantage encore.</p>
<h2>Pour combler le fossé culturel</h2>
<p>Dans le cas d’un grand hôpital, le contraste était flagrant entre l’équipe du design thinking et les autres membres de l’organisation.</p>
<p>Au sein de la culture scientifique professionnelle, leur tenue décontractée tranchait avec celle, plus conventionnelle, du personnel médical. Leur vocabulaire même était différent: pour un designer, le terme « expérimentation » voulait simplement dire qu’on essayait quelque chose, alors que pour un médecin, le même mot revêtait la mise en place d’un processus formel comprenant groupes de contrôle placebo et protocoles formels.</p>
<p>Ces différences illustrent un fossé culturel, lequel peut nuire à la capacité d’innover de l’équipe. Comme me l’a confié un designer en chef:</p>
<blockquote>
<p>« Quand tu arrives à la clinique un lundi matin pour mener une expérience, le personnel ne veut même pas te parler, ils ne savent pas pourquoi tu es là, et ils ne vont pas réellement te faire confiance. »</p>
</blockquote>
<p>Sous la pression de démontrer ce qu’elles savaient faire, les équipes de design se sont pliées en quatre afin de communiquer avec le reste de l’organisation et construire leur légitimité.</p>
<p>Dans bien des cas, cela voulait dire travailler sur des petits projets pour démontrer leur savoir. Cependant, ces changements graduels se sont vite avérés accablants. Selon le chef de projet d’une multinationale pharmaceutique:</p>
<blockquote>
<p>« L’équipe d’innovation passait beaucoup de temps à courir à droite et à gauche dans l’entreprise. On passait plus de temps sur des questions de structure organisationnelle et de répartition des responsabilités plutôt que de faire la démonstration du potentiel de l’approche de design thinking. »</p>
</blockquote>
<p>Certaines organisations ont résolu le problème en mettant en place des laboratoires indépendants à distance de leur quartier général. Mais il y a un risque à cela, celui de s’isoler de la maison mère, et, chez un gros détaillant, d’y avoir été perçu comme une une bande de « cowboys cinglés » et non comme des vecteurs d’innovation.</p>
<h2>Certains projets n’ont jamais décollé</h2>
<p>De nombreuses innovations au potentiel prometteur n’ont pas pu décoller du fait que certains départements à l’interne étaient soit peu coopératifs, ou incapables de les mettre en oeuvre.</p>
<p>D’une certaine façon, ce n’est pas surprenant. En général, les organisations ne sont pas programmées pour accepter les interrogations fondamentales soulevées par ceux qui pratiquent le design thinking. Pour un laboratoire gouvernemental danois, il a été essentiel de remettre en question la pensée organisationnelle:</p>
<blockquote>
<p>« Dans quel cadre travaillons-nous? Quel est le niveau de compréhension du problème? D’où nous vient cette compréhension? Comment déduisons-nous que cette solution ou approche en apparence simple va fonctionner? »</p>
</blockquote>
<p>Dans une culture organisationnelle où les employés sont constamment sous pression de résoudre des problèmes pour ensuite passer à autre chose, ce genre de questions sont perçues comme une distraction, voire une menace.</p>
<h2>Comment le design thinking peut-il fonctionner?</h2>
<p>Il est cependant possible pour une entreprise d’adopter avec succès le design thinking. Elles peuvent utiliser cette approche pour véhiculer un changement culturel et une collaboration créative au sein de l’entreprise, que ce soit pour une innovation de rupture ou une innovation incrémentielle. Il s'agit d'une sauvegarde dans laquelle des copies successives des données ne contiennent que la partie qui a été modifiée depuis la création de la copie de sauvegarde précédente.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/255727/original/file-20190127-108370-1bfh50i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/255727/original/file-20190127-108370-1bfh50i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/255727/original/file-20190127-108370-1bfh50i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/255727/original/file-20190127-108370-1bfh50i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/255727/original/file-20190127-108370-1bfh50i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=467&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/255727/original/file-20190127-108370-1bfh50i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=467&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/255727/original/file-20190127-108370-1bfh50i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=467&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le design thinking n’est pas un remède miracle pour toutes les entreprises, mais sous certaines conditions, il peut créer beaucoup de valeur.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Mais il est peu probable qu’une entreprise puisse mener à bien tous ces objectifs à la fois. Il y a plusieurs manières d’implanter l’approche du design thinking - centralisée ou distribuée par exemple - et la direction à privilégier dans l’entreprise dépend de ses objectifs.</p>
<h2>L’approche est-t-elle valable pour toute organisation?</h2>
<p>Si la culture d’entreprise est entièrement centrée sur l’efficacité, le mariage peut s’avérer difficile. Les aspects brouillons et itératifs de design thinking pourrait désarçonner une organisation qui repose sur les aspects répétitifs d’un processus.</p>
<p>Il existe cependant des alternatives valables à une implantation à l’interne: beaucoup de consultants se servent du design thinking pour résoudre des problèmes, et beaucoup de firmes de design proposent d’excellentes solutions en innovation.</p>
<p>En passant, le gouvernement danois <a href="https://apolitical.co/solution_article/how-denmark-lost-its-mindlab-the-inside-story/">a fermé son laboratoire en 2018.</a> Ses fondateurs voulaient bouleverser la bureaucratie, mais leur impact a été difficile à évaluer.</p>
<p>En fin de compte, ce projet a été remplacé par un projet centré sur la technologie numérique. Beaucoup, moi y compris, ont ressenti son abandon comme un choc. Car nous croyons au design thinking.</p>
<p>Il n’est ni un remède universel, pas plus qu’une mode passagère: dans de bonnes conditions, c’est un outil de grande valeur.</p>
<p>Mais pour que les entreprises s’en servent avec succès, elles doivent faire preuve de bon sens en exprimant clairement leurs objectifs et en opérant des choix réalistes. Ce concept n’est ni transformateur ni révolutionnaire. Malheureusement, le bon sens dans le monde des affaires n’est pas toujours si fréquent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/110758/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David Dunne ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le design thinking, qui consiste à résoudre des problèmes de façon créative, n’est ni un remède universel, pas plus qu’une mode passagère: dans de bonnes conditions, c’est un outil de grande valeur.David Dunne, Professor and Director, MBA Programs, University of VictoriaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1078572018-12-02T20:44:34Z2018-12-02T20:44:34ZPour lutter contre le changement climatique, inspirons-nous de Linux !<p>Les différentes COP (pour « Conférences des parties »), dont la 24<sup>e</sup> édition s’est ouverte ce dimanche à Katowice en Pologne, ont permis des avancées majeures en termes d’action collective autour du changement climatique. Mais les dispositifs intergouvernementaux, aussi indispensables soient-ils, ne pourront à eux seuls résoudre la question climatique. Longtemps objet scientifique, aujourd’hui sujet politique, la protection du climat est plus que jamais l’affaire de tous.</p>
<p>De quels leviers disposons-nous pour rendre cette complexité intelligible et cette entreprise humaine possible ?</p>
<h2>« Tout commentaire sera le bienvenu, tout apport aussi »</h2>
<p>Lorsque Linus Torvalds, étudiant finlandais de 21 ans, se lance dans le projet fou de développer <a href="https://www.learnlinux.ie/content/linus-torvalds-original-announcement-usenet">son propre système d’exploitation</a> pour son micro-ordinateur 386, c’est par jeu et pour défier les systèmes propriétaires de Microsoft et d’Apple, coûteux et complexes. En 1991, il poste un noyau de code et lance un appel à contribution. Linux devient en quelques années l’une des plus grandes réalisations communautaires du logiciel libre.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/247934/original/file-20181129-170229-ng04yi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/247934/original/file-20181129-170229-ng04yi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/247934/original/file-20181129-170229-ng04yi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/247934/original/file-20181129-170229-ng04yi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/247934/original/file-20181129-170229-ng04yi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/247934/original/file-20181129-170229-ng04yi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=460&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/247934/original/file-20181129-170229-ng04yi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=460&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/247934/original/file-20181129-170229-ng04yi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=460&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le post de Linus Torvald qui fit naître l’aventure Linux.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.learnlinux.ie/content/linus-torvalds-original-announcement-usenet">Learn Linux</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>C’est le prototype de la <a href="http://blogfr.p2pfoundation.net/2017/06/17/pair-a-pair-nouveau-modele-de-societe-centre-communs/">production par les pairs</a>, qui a donné naissance à un paradigme social ayant inspiré de nombreux projets collaboratifs, dont Wikipedia ou encore les revues scientifiques en libre accès telles que <a href="http://www.economics-ejournal.org/"><em>Economics</em></a> ou <a href="https://journals.openedition.org/geocarrefour/"><em>Géocarrefour</em></a>.</p>
<p>Le processus de construction collaborative s’étend bien au-delà du numérique : la démarche constitue un renouveau social que les anglophones désignent sous le terme de <em>commoning</em> (« faire commun »). Popularisé par l’historien <a href="http://www.utoledo.edu/al/history/faculty/plinebaugh.html">Peter Linebaugh</a>, ce concept nous autorise à un apprentissage par expérimentation et un processus d’essais et d’erreurs collectifs, mis en avant par la politologue <a href="https://blog.mondediplo.net/2012-06-15-Elinor-Ostrom-ou-la-reinvention-des-biens-communs">Elinor Ostrom</a>.</p>
<p>Qu’en est-il de la protection du climat ? Quelle communauté est à même de la décréter et de la pratiquer ?</p>
<h2>Un savoir sous tutelle scientifique</h2>
<p>On ne s’improvise pas climatologue ou glaciologue. Ce sont donc d’obscurs modèles globaux et de bien complexes travaux académiques qui sont les vecteurs d’alerte des décideurs et de l’opinion publique.</p>
<p>Dès 1972, la publication de <a href="https://collections.dartmouth.edu/teitexts/meadows/diplomatic/meadows_ltg-diplomatic.html"><em>The Limits to growth</em></a> (aussi appelé « rapport Meadows ») par une équipe de scientifiques du Massachusetts Institute of Technology, met déjà en avant la <a href="https://theconversation.com/la-collapsologie-est-elle-une-science-87416">possibilité d’effondrement</a> du système planétaire sous la pression de la croissance industrielle et démographique.</p>
<p>En 1988, le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) est créé. Son dernier rapport <a href="http://ipcc.ch/report/sr15/">publié en octobre 2018</a>, synthèse de 6 000 articles scientifiques, est sans appel. Le changement climatique affecte déjà nos écosystèmes et les populations partout dans le monde. Limiter nos émissions est donc une nécessité et il est urgent d’amorcer une transition rapide et d’une ampleur sans précédent dans toute la société et dans tous les secteurs.</p>
<p>C’est sur la base de cette connaissance que les processus politiques internationaux se sont mis en route.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1067742724638605312"}"></div></p>
<h2>Les prémices du changement, la voie politique</h2>
<p>Dès 1988, « l’évolution du climat » et ses effets négatifs sont qualifiés par les États de « préoccupation commune de l’humanité ». L’Accord de Paris de 2015, résultat d’un processus politique sans précédent, vient consolider cette position. Cette qualification renvoie à la nature vitale du climat pour l’humanité et donc à l’importance de l’action ; à sa nature globale et donc à l’importance de la coopération ; à la nécessité de l’action collective et donc à l’importance de l’universalité de l’action.</p>
<p>L’invocation du commun traduit ici un besoin de dépassement des logiques individuelles au profit d’une cause supérieure. Ce dépassement a ses limites car la responsabilité de protéger le climat est différenciée.</p>
<p>Cette formule est commode : elle légitime l’action collective des États, tout en s’assurant que les implications juridiques associées restent limitées. L’insuffisance des contributions à la lutte contre le réchauffement prévues par les pays au regard des objectifs de l’Accord de Paris en <a href="https://www.novethic.fr/actualite/environnement/climat/isr-rse/climat-des-contributions-nationales-encore-loin-d-atteindre-les-2-c-143907.html">témoigne</a> aujourd’hui. Il faut donc voir dans cette référence davantage un point de départ qu’un point d’arrivée.</p>
<h2>Un bien commun global, entendre la voix de tous</h2>
<p>La préservation du climat est en passe de devenir un bien commun global. Il ne s’agit pas ici d’un glissement sémantique : les efforts, traditionnellement portés par la communauté internationale, s’ouvrent à l’humanité. On passe ainsi d’acteurs étatiques aux individus et groupes, quelle que soit leur appartenance nationale. On ne s’inscrit plus uniquement dans le présent et l’actuel, on se projette dans le futur, en incluant les générations de demain.</p>
<p>Avec le <a href="https://talanoadialogue.com/">dialogue Talanoa</a> – instauré à la COP23 en référence à cette tradition du Pacifique de dialogues participatifs et transparents pour prendre des décisions collectives –, entreprises, villes, société civile, citoyens, nous devenons tous les artisans du climat.</p>
<p><a href="http://amp.dw.com/en/four-climate-change-lawsuits-to-watch-in-2018/a-42066735">Par la protestation</a>, notamment, comme aux Pays-Bas où les autorités publiques ont été récemment enjointes de <a href="https://theconversation.com/larret-urgenda-un-espoir-face-a-linertie-des-politiques-climatiques-105869">renforcer leur politique</a> de lutte contre les émissions de GES sur la demande d’une fondation et de quelques 886 citoyens. Aux États-Unis, où une action a été jugée recevable par la <a href="https://www.actu-environnement.com/ae/news/climat-justice-plainte-politique-americaine-USA-Trump-27854.php4">Cour de district de l’Oregon fin 2016</a>, alors qu’elle était menée par des enfants de 8 à 20 ans, agissant au nom des générations futures, pour faire reconnaître la responsabilité de l’administration Obama pour défaillance dans la lutte contre les émissions de GES.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"846056255877758981"}"></div></p>
<p>Par l’action aussi. Les dispositifs planétaires, comme les COP, ne pourront à eux seuls résoudre la question climatique. La construction de nouvelles utopies collectives, locales, porteuses de modes de vie durables, est ainsi devenue aussi indispensable qu’urgente. L’ensemble de ces initiatives forme le noyau d’une gouvernance climatique qualifiée par <a href="https://laviedesidees.fr/Elinor-Ostrom-par-dela-la-tragedie-des-communs.html">Elinor Ostrom de « polycentrique »</a>. Ces réponses multiples et variées participent au processus apprenant du changement climatique permettant de faire émerger une cohérence globale de l’action.</p>
<h2>D’une science à un savoir du climat</h2>
<p>Les connaissances ne prennent sens qu’en se partageant et en étant reprises et modifiées par leurs usagers. La science climatique a permis de construire des diagnostics et des modèles globaux complexes, qui restent illisibles pour nombre d’entre nous. L’humanité peut-elle devenir une communauté apprenante et développer un savoir du climat, plus horizontal et multiforme ?</p>
<p>L’expérience Linux nous est précieuse car une piste consiste en la création et la production de connaissances en mode ouvert et intégrant. Des initiatives émergent autour du climat : la plate-forme du <a href="https://talanoadialogue.com/">dialogue Talanoa</a>, les <a href="https://www.paris.fr/actualites/volontaires-du-climat-a-paris-on-agit-1000-volontaires-reunis-a-l-hotel-de-ville-6142">Volontaires du Climat à Paris</a>, <a href="https://alternatiba.eu/">Alternatiba</a>, le <a href="https://transitionnetwork.org/">mouvement des villes en transitions</a>, etc.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Xl-fRQ2Tgr8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« J’peux pas, j’ai climat », une vidéo de mobilisation lancée en novembre 2018 par des YouTubeurs et des personnalités belges. (Le Biais Vert/YouTube).</span></figcaption>
</figure>
<p>Ces dernières partent de l’hypothèse suivante : nous sommes tous concernés par le changement climatique, nous sommes tous légitimes pour agir à toutes les échelles territoriales, nous sommes tous artisans d’un savoir commun autour du climat. Tel Linus Torvalds voyant arriver de nombreux développeurs participant à son projet, l’humanité bénéficiera des apports de chacun dans la construction d’un savoir autour d’une trajectoire de transition bas carbone et résiliente.</p>
<p>Cette construction par les pairs de la transition met en exergue sa nature protéiforme et polycentrique. La prise en compte des différentes échelles territoriales, et donc de leurs spécificités, ancrera la transition dans la réalité sociale et institutionnelle de chacune de ces échelles. La mise en œuvre des réponses aux défis climatiques, ancrés dans ces réalités, participera à un processus transformatif écologique global, traduisant les chiffres scientifiques en mots et les mots en actions. La transition sera aussi sociale et institutionnelle, ou ne sera pas, faute de cohésion autour de sa réalisation.</p>
<p>Nous le voyons, les défis climatiques sont immenses et la tâche semble presque impossible mais l’expérience des communs nous propose une approche. Il n’est pas nécessaire de construire la réponse unique et universelle à ce problème complexe, le simple fait de commencer à traiter la question en communauté dessine déjà une trajectoire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/107857/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Antoine Godin a reçu des financements de MISTRA. Il est membre du Centre d’économie de l’Université de Paris Nord (CEPN). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Stéphanie Leyronas ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les dispositifs intergouvernementaux comme la COP24 ne pourront à eux seuls résoudre la crise climatique. La protection du climat est plus que jamais l’affaire de tous.Stéphanie Leyronas, Chargée de recherche sur les communs, Agence française de développement (AFD)Antoine Godin, Économiste-modélisateur, Agence française de développement (AFD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1072952018-11-21T20:49:00Z2018-11-21T20:49:00ZLe long chemin vers la généralisation des méthodes agiles<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/246429/original/file-20181120-161644-hxhrhw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=172%2C25%2C5277%2C3802&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les méthodes agiles reposent sur un processus de développement itératif, incrémental et adaptatif aux contingences du projet.</span> <span class="attribution"><span class="source">Pixel-Shot / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Initialement mises en place pour des projets de développement de logiciels, les méthodes agiles de gestion de projet ont, durant les 25 dernières années, gagné du terrain dans différents domaines d’application (chez Saab par exemple, dans la construction d’avions d’après un article de <a href="https://www.scruminc.com/wp-content/uploads/2015/09/Release-version_Owning-the-Sky-with-Agile.pdf">Furuhjelm et coll., 2017</a>). Cela a contribué à l’essor d’un nouveau paradigme de gestion de projet où les approches agiles sont différenciées des approches dites traditionnelles de gestion de projet. Ces dernières désignent principalement, dans la littérature en systèmes d’information, le développement en cascade ou le développement via le <a href="https://www.supinfo.com/articles/single/6278-cycle-v">cycle en V</a>. Quant aux méthodes agiles, ce sont des méthodologies légèrement formalisées qui permettent de prendre en compte des besoins et des solutions évoluant tout au long d’un projet, en s’appuyant sur des équipes pluridisciplinaires avec une certaine forme d’autogestion. Elles reposent sur un processus de développement itératif, incrémental et adaptatif aux contingences du projet.</p>
<h2>Effet de mode</h2>
<p>Selon une récente <a href="https://explore.versionone.com/state-of-agile/versionone-11th-annual-state-of-agile-report-2">étude</a>, 96 % des acteurs projets de grandes organisations (chef de projet et développeur entre autres), déclarent mettre en place des méthodes agiles. Or, cette même étude comporte un paradoxe qui s’explique, sans doute, par un effet de mode autour de l’agilité. À la question « combien d’équipes mettent en place les approches agiles ? », seulement 7 % répondaient que l’ensemble des équipes de leurs organisations mettait en œuvre fidèlement ce genre de méthode.</p>
<p>La question du processus d’adoption des méthodes agiles est donc importante. Comme le suggèrent les résultats de l’étude, la tendance n’est plus d’expérimenter ce mode de fonctionnement, mais plutôt de le généraliser. Ce qui débouche sur de nouvelles problématiques : comment faire ? Quelle approche généraliser ? Jusqu’à quel niveau de l’organisation ? Le processus d’adoption se limite-t-il exclusivement à la direction des systèmes d’information ? Les réponses sont d’autant plus difficiles à trouver que, ces deux dernières décennies, les méthodes agiles sont devenues très hétérogènes.</p>
<h2>La genèse des approches agiles</h2>
<p>La démocratisation du concept provient notamment de la parution, en 2001, du <a href="http://agilemanifesto.org/iso/fr/manifesto.html">« Manifeste agile »</a> par un groupe de 17 experts du génie logiciel provenant principalement des États-Unis. Ces derniers cherchaient à établir une meilleure façon de développer les logiciels. Pour dépasser les méthodes traditionnelles, ils mobilisaient une philosophie de base composée de quatre valeurs (et 12 principes sous-jacents) pour mettre en avant « les individus et leurs interactions plus que les processus et les outils ; des logiciels opérationnels plus qu’une documentation exhaustive ; la collaboration avec les clients plus que la négociation contractuelle et l’adaptation au changement plus que le suivi d’un plan ».</p>
<p>On ne peut toutefois considérer ce manifeste comme l’origine des méthodes agiles. Quelques années auparavant, en 1994, le Standish Group, société internationale de conseil en recherche informatique, sortait son <a href="http://www.umsl.edu/%7Esauterv/7892/Standish/standish-IST.pdf">premier rapport</a> intitulé « Chaos Report ». Cette étude était à l’époque l’une des premières à tenter de chiffrer le taux de réussite des projets de développement de logiciel aux États-Unis. La méthodologie de l’étude, <a href="http://alain.battandier.free.fr/spip.php?article14">peu transparente</a>, est critiquable. Il en ressort néanmoins un taux considérable d’échecs des projets.</p>
<p>À cette même époque, Ken Schwaber et Jeff Sutherland, tous deux experts du développement de logiciels, proposèrent le cadre méthodologique Scrum pour contrer cette « crise du développement de logiciel ». Ils ont, dans cette optique, mis au point un processus de développement conçu pour apporter énergie, concentration, clarté et transparence aux équipes de projet développant des systèmes logiciels. L’approche Scrum est par ailleurs devenue aujourd’hui le cadre méthodologique le <a href="https://www.versionone.com/about/press-releases/versionone-releases-11th-annual-state-of-agile-report/">plus mis en œuvre</a> dans le monde.</p>
<p>Depuis ces travaux des années 1990, une variété de méthodes ont vu le jour, comme on peut le voir dans le tableau ci-dessous :</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/246426/original/file-20181120-161638-1j0qls7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/246426/original/file-20181120-161638-1j0qls7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/246426/original/file-20181120-161638-1j0qls7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/246426/original/file-20181120-161638-1j0qls7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/246426/original/file-20181120-161638-1j0qls7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/246426/original/file-20181120-161638-1j0qls7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/246426/original/file-20181120-161638-1j0qls7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/246426/original/file-20181120-161638-1j0qls7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Historique des approches agiles.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il est aujourd’hui possible de classer ces approches en deux grandes catégories :</p>
<ul>
<li><p>Les approches à petites échelles (APE), qui désignent les méthodes du type scrum ou <a href="https://www.planzone.fr/blog/quest-ce-que-la-methodologie-kanban">kanban</a>, ayant été créées pour des petites équipes (4 à 9 personnes) ;</p></li>
<li><p>Les approches agiles à grande échelle (AGE), qui désignent les modèles scaled agile framework (<a href="https://www.scaledagileframework.com/about/">SAFe</a>) large scale scrum (<a href="https://less.works/less/framework/index.html">LeSS</a>), disciplined agile delivery (<a href="http://www.disciplinedagiledelivery.com/dae/">DaD</a>), créées pour étendre l’agilité et coordonner des projets composés de plusieurs grandes équipes (10 à 150 personnes).</p></li>
</ul>
<p>La multiplication des approches traduit bien l’engouement pour les méthodes agiles dans des organisations qui en retirent un certain nombre de bénéfices. Selon les <a href="https://www.semanticscholar.org/paper/Empirical-studies-of-agile-software-development%3A-A-Dyb%C3%A5-Dings%C3%B8yr/05e592bac1b2efeb358f9c7e0c73561055d47598">travaux sur le sujet</a>, elles favorisent notamment la réduction du délai de mise sur le marché d’un produit, augmentent la productivité des équipes, ou améliorent la qualité du produit livré. Il est par ailleurs à noter que ces types de bénéfices ont principalement été observés au sein de <a href="https://dl.acm.org/citation.cfm?id=1937326">projets SI</a>.</p>
<h2>L’agilité au-delà des aspects techniques</h2>
<p>Convaincues de ces apports, les grandes entreprises sont entrées dans une phase de généralisation de ces approches au niveau de l’ensemble des projets Système d’information comme en témoigne l’<a href="https://www.cigref.fr/fil?id=132">appel</a> du délégué général du Club informatique des grandes entreprises françaises (CIGREF) auprès de la communauté des chercheurs français en SI. Étant donné que ces approches sont nées dans le développement de logiciels, c’est principalement au niveau des <a href="https://www.hbrfrance.fr/magazine/2017/07/16087-adoptez-methodes-agiles/">projets touchant à la conception et au développement de SI</a> qu’elles sont mises en place.</p>
<p>On pourrait donc croire que ces approches concernent uniquement les aspects techniques des projets. Or, cette vision, très réductrice, fait souvent obstacle à la généralisation des méthodes agiles auprès des acteurs non techniques. Par ailleurs, chez ces acteurs, la relation « client – fournisseur » entre les départements métiers et la <a href="https://ieeexplore.ieee.org/document/6613078">DSI favorise une perception des méthodes agiles</a> comme des méthodes exclusivement informatiques.</p>
<p>Près de 18 ans après la sortie du <a href="http://agilemanifesto.org/iso/fr/manifesto.html">« Manifeste agile »</a>, les approches agiles se sont donc imposées. Mais le chemin vers leur généralisation est encore long.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/107295/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Akim Berkani a reçu des financements de l'association nationale recherche en technologie </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sébastien Tran ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Près de 20 ans après la sortie du manifeste agile, les entreprises, dont les plus grandes, ont beaucoup fait évoluer les méthodes agiles. Mais de nombreux obstacles à leur généralisation subsistent.Akim Berkani, doctorant à l'université Paris-Dauphine, Université Paris Dauphine – PSLSébastien Tran, Directeur de l'École de Management Léonard de Vinci (EMLV), Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1062642018-11-13T01:07:52Z2018-11-13T01:07:52ZLa coopétition, moteur de l’évolution des espèces<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/244770/original/file-20181109-116838-kqki22.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C83%2C2101%2C1436&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans le code Hammurabi, qui date du 18e siècle avant J.-C, on trouve des lois afférentes à des contrats de longue durée entre marchands bailleurs de fonds qui confiaient un capital à un mandataire pour que celui-ci le fasse fructifier.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/37351539@N05/3681068075/">John Ross / Wikipedia</a></span></figcaption></figure><p>Les études confirment le <a href="http://www.larsg.fr/conseils/coopetition/#.W-WQkpNKiUk">lien étroit entre performance et collaboration</a> de firmes concurrentes, mais le monde académique continue de qualifier ces relations « coopétitives » (contraction des mots de <em>coopération</em> et de <em>compétition</em>) de <a href="https://journals.openedition.org/fcs/148">paradoxales ou risquées</a>.</p>
<p>La raison réside sans doute dans la domination de cette vision économique libérale issue du dogme de l’égoïsme universel stipulant que l’homme est un loup pour l’homme (<a href="https://la-philosophie.com/homme-loup-pour-homme-hobbes">Thomas Hobbes</a>), que l’intérêt individuel doit prévaloir (<a href="https://www.leconomiste.eu/decryptage-economie/218-la-main-invisible-d-adam-smith.html">Adam Smith</a>) ou que l’<em>Homo œconomicus</em> ne cherche qu’à maximiser sa propre utilité (<a href="https://www.economie.gouv.fr/facileco/vilfredo-pareto">Vilfredo Pareto</a>). Or, le monde du vivant et l’histoire de l’humanité nous offrent un tout autre enseignement.</p>
<p>Dans son ouvrage avant-gardiste <em>La Vie secrète des arbres</em> (éditions Les Arènes, 2015), l’ingénieur forestier allemand Peter Wohlleben dévoile que les forêts sont des superorganismes structurés au sein desquels des arbres d’une même espèce, reliés entre eux, adoptent des <a href="https://next.liberation.fr/livres/2017/03/15/peter-wohlleben-les-arbres-ne-voteraient-pas-a-droite_1555933">comportements sociaux</a>. Des congénères partagent des substances nutritives par les racines, entretenant ainsi la bonne santé de leurs concurrents pour l’accès à la nourriture. Un tel comportement « empathique » s’explique par la garantie collective d’un écosystème favorable à la survie individuelle. Certains individus sont si intimement liés qu’ils veillent à ne pas empiéter sur l’accès à la lumière de leur « ami ». D’autres vont jusqu’à mourir ensemble. Ces comportements sociaux ne sont pas le fait de rencontres souterraines fortuites. D’autres arbres réfractaires à toute collaboration font d’ailleurs des choix solitaires. Néanmoins, comme le défend Wohlleben, l’intervention d’arbres voisins en cas de besoin serait plus la norme que l’exception au sein des forêts.</p>
<h2>Coopération et perpétuation de l’espèce</h2>
<p>Les animaux développent également des relations collaboratives diverses comme la symbiose, mutuellement bénéfique par essence (entre le <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/animaux/la-guerre-des-pom-pom-crabes_110470">crabe boxeur et l’anémone</a>, par exemple) ou le commensalisme, dont une seule espèce tire profit (le <a href="http://www.requins.eu/html/compagnons.html">poisson-pilote qui récupère les restes de nourriture du requin</a>).</p>
<p>L’étude des animaux dits « sociaux » d’une même espèce montre que la coopération entre individus favorise la perpétuation de l’espèce. Le sociobiologiste américain Edward Osborne Wilson a distingué en 1971 plusieurs stades de relations de coopération entre animaux sociaux :</p>
<ul>
<li><p>Le grégarisme, comme chez les blattes, qui relève d’une simple agrégation d’individus qui ne coopèrent pas mais synchronisent leurs activités de sommeil ou de nutrition.</p></li>
<li><p>Le stade colonial qui conduit à coopérer seulement pour certaines fonctions spécifiques comme le partage d’un habitat pour les chenilles processionnaires des pins.</p></li>
<li><p>Le communal, premier stade de l’adoption d’un comportement subsocial consistant à coopérer dans l’éducation des plus jeunes, comme pour établir un nid chez le Républicain social (petit oiseau du sud de l’Afrique), sans pour autant se spécialiser dans les tâches.</p></li>
<li><p>Le dernier stade, l’eusocial, consiste en une coopération durable entre adultes dans l’éducation des progénitures comme chez les lionnes. À ce stade complexe, certains individus peuvent se spécialiser dans la reproduction comme chez les fourmis. Ainsi, la coopération engendre une action positive sur la <em>fitness</em>, c’est-à-dire la capacité à survivre et à se reproduire des animaux.</p></li>
</ul>
<h2>Aux prémices de l’Histoire, la coopétition</h2>
<p>Concernant l’évolution de l’humanité, l’historien Yuval Noah Harari précise que le passage en position debout de l’Homo sapiens a engendré un revers majeur finalement salvateur. Pour les femelles, la position redressée nécessitait des hanches plus fines, resserrant de fait le canal utérin, alors que le crâne d’Homo sapiens grossissait. La sélection naturelle favorisa ainsi les femelles qui accouchaient plus tôt. Les nouveau-nés prématurés, totalement dépendants de leurs mères, réduisaient les chances de celles-ci de trouver seules de la nourriture. In fine, l’évolution a donc favorisé les groupes capables de nouer de puissants liens sociaux en vue de nourrir et éduquer les enfants.</p>
<p>Aux prémices de l’Histoire, en Mésopotamie, les premiers codes de loi tel le célèbre d’<a href="https://www.louvre.fr/oeuvre-notices/code-de-hammurabi-roi-de-babylone">Hammurabi</a> du XVIII<sup>e</sup> siècle avant J.-C. régissait la société babylonienne. Parmi ses 282 articles, on y trouve des lois afférentes à des contrats de longue durée entre marchands bailleurs de fonds qui confiaient un capital à un mandataire pour que celui-ci le fasse fructifier. Les travaux de l’archéologue Cécile Michel sur les <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/halshs-01186438">archives de Kanis</a> confirment par ailleurs l’existence d’associations commerciales datant de 2 000 avant J.-C. Par exemple, plusieurs marchands se regroupaient en une entreprise pour sécuriser les transports de longue distance en caravane. Autrement dit, les plus anciennes archives de l’humanité évoquent des relations de coopétition contractualisées.</p>
<h2>Des animaux aux entreprises</h2>
<p>Rien d’étonnant alors à ce que nos premiers récits racontent des histoires de collaborations entre adversaires. C’est en Mésopotamie que <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/epopee-de-gilgamesh/">« L’épopée de Gilgamesh »</a>, première œuvre littéraire de l’humanité, s’écrit en langue sumérienne 18 siècles avant J.-C. L’histoire narre les aventures du Gilgamesh, roi de la ville d’Uruk, dont on soupçonne l’existence historique. Dans son épopée fantasmée, il transite de la haine la plus féroce envers Enkidu, l’alter ego qu’il ne parviendra jamais à terrasser, à une amitié des plus robuste menant les deux héros à s’allier pour combattre monstres mythologiques et mener travaux titanesques. L’<a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/iliade/">Iliade</a>, 12 siècles avant J.-C., œuvre majeure de l’Antiquité, raconte l’union des rois achéens contre la cité de Troie. Certains parmi eux se détestaient à mort, comme Achille et Agamemnon, mais s’unifièrent pour accomplir leur dessein individuel.</p>
<p>Dans l’économie contemporaine, l’engouement pour les alliances stratégiques a connu son apogée dans les années 1990 avec des succès comme celui de l’éditeur américain de logiciel Novell, dont le fondateur Ray Noorda inventa le néologisme « coopétition » pour qualifier sa philosophie des affaires. De nouveaux modèles théoriques d’analystes jusqu’ici myopes, car biberonnés au paradigme de la libre concurrence, s’imposèrent enfin pour valider l’évidence empirique. C’était mal connaître le monde des affaires que de considérer ces relations comme contradictoires voire dangereuses. Au même titre que pour les animaux sociaux, nos recherches nous ont permis d’observer divers stades de relations de coopération entre firmes concurrentes au regard de leur degré de complexité :</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/244364/original/file-20181107-74760-1b1mmvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/244364/original/file-20181107-74760-1b1mmvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/244364/original/file-20181107-74760-1b1mmvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=79&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/244364/original/file-20181107-74760-1b1mmvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=79&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/244364/original/file-20181107-74760-1b1mmvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=79&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/244364/original/file-20181107-74760-1b1mmvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=99&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/244364/original/file-20181107-74760-1b1mmvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=99&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/244364/original/file-20181107-74760-1b1mmvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=99&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au stade du grégarisme, il est surprenant de constater à quel point des concurrents directs, comme des agents immobiliers ou des négociants en véhicules d’occasion, peuvent se regrouper par mimétisme sans concertation préalable dans une même zone de chalandise. Pourtant, il reste flagrant qu’une zone géographique constituée d’un grand nombre de professionnels attire <a href="https://blogs.mediapart.fr/cartographe-encarte/blog/270317/la-petite-histoire-du-marchand-de-glaces">plus de clients potentiels</a>.</p>
<p>Le stade colonial apparaît comme le premier stade de coopétition concertée. C’est le cas des clubs de football de Ligue 1 qui collaborent depuis 1986 pour mettre les chaînes de télévision en concurrence. Cette coopétition a boosté les montants des droits de retranscription passant de 250 000 francs en 1984 à 106 millions d’euros en 1998 pour sans doute <a href="http://www.europe1.fr/sport/droits-tv-bientot-un-milliard-pour-la-ligue-1-3461849">dépasser le milliard en 2020</a>.</p>
<p>Notre <a href="https://journals.openedition.org/fcs/1489">étude des AOC viticoles</a> montre que les plus performantes pratiquent la coopétition communale, celle-ci prenant effet dans l’accompagnement des jeunes vignerons dans des formations techniques ou des temps d’échange de pratiques avec des anciens expérimentés. Le <a href="https://www.usine-digitale.fr/article/a-montpellier-dell-coache-les-start-up-de-la-french-tech.N589613">programme Dell</a> for entrepreneurs, visant à accélérer la croissance de jeunes pousses, relève lui du stade eusocial. C’est également le cas du dirigeant de la PME française Raidlight, entreprise pionnière du trail (course à pied dans la nature) qui, au sein d’une association qu’il a initié, pouponne des projets de stations concurrentes à la sienne.</p>
<p>Loin d’être absente du monde des affaires, la coopétition s’impose, au même titre que dans le monde du vivant, comme l’un des principaux facteurs de l’évolution d’une espèce.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/106264/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Granata ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ce néologisme n’est apparu que dans les années 1990. Pourtant, les exemples qui mêlent coopération et compétition remontent aux prémices de l’humanité et ont joué un rôle décisif dans l’Histoire.Julien Granata, Professeur à Montpellier Business School - Enseignant-chercheur - Coach Professionnel - Startuper, Montpellier Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/831212017-09-11T21:10:34Z2017-09-11T21:10:34ZLes plates-formes d’innovation : des communautés porteuses de nouvelles relations de travail<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/184979/original/file-20170906-18486-hx1i85.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C1%2C1024%2C708&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Fab lab au sein d'une bibliothèque contemporaine à South Shields au Royaume-Uni.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/135302410@N02/33923572260/in/photolist-TFHb9U-WGqHgh-R922yJ-SN4jo4-QSmqfa-Ts5zar-SZhG1b-KAEztS-U2KAXH-KAEzgC-KjTPnb-KDafwx-KjTLrb-KAEyBG-JPCeX2-KAEz2j-KL2cJg-KjTLQh-JPCePB-KAEy2J-KAEwJJ-KAEwUJ-KL2ckv-KH8atm-JPsmR3-TfnKXf-TrJ57W-TrJ59Q-SN4jLZ-TrJ9r7-SN4jU4-TrJ5Gd-JPsmHN-KL2bqz-KL2bDR-KjTMuy-KH8b51-KAExXq-KjTM8S-KjTMm7-KjTLY3-KAEwwQ-U2KwU2-TQcGDZ-U2KBhR-TrJ7kJ-U2KwP2-U2Kx4k-TrJ94U-TrJ8eY">Julia Chandler/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>La digitalisation de l’économie offre aujourd’hui de nouvelles opportunités pour l’innovation. Elle oblige aussi à une accélération du développement des projets, voire à une transformation des modes de travail. Ces opportunités émergent en mobilisant de nouveaux outils technologiques (<em>data analytics</em>, visualisation, imprimantes 3D…) ou se matérialisent en construisant de nouveaux <em>business models</em>.</p>
<p>De nouveaux acteurs économiques émergent dans cette perspective. Qu’on les appelle <a href="http://www.newpic.fr/02group2015openlabsdownload.html"><em>fab lab</em>, <em>open labs</em>, <em>makerspaces</em>, <em>coworking spaces</em></a> ou encore incubateurs, ces nouveaux lieux d’innovation se multiplient aujourd’hui un peu partout en France. Ils répondent à un besoin concret : gagner en flexibilité et en transdisciplinarité. Ils utilisent les outils du monde des <em>makers</em> pour matérialiser plus vite les idées. Ces nouveaux lieux sont à la mode mais leur fonctionnement et leur valeur ajoutée sont encore mal compris.</p>
<p>Dans une <a href="http://www.newpic.fr/02proj2016openlabsidf.html">étude récente</a> cofinancée par l’<a href="http://www.innovationfcty.fr/">Innovation Factory</a>, <a href="http://www.bpifrance-lehub.fr/">Bpifrance le Hub</a> et <a href="https://www.parisandco.com/">Paris&Co</a>, nous avons analysé et comparé une quinzaine de lieux d’innovation en île-de-France.</p>
<h2>Au-delà du foisonnement, une définition commune</h2>
<p>La plupart des lieux ne coïncident pas avec les grilles traditionnelles qui distinguent <em>fab lab</em>, <em>coworking spaces</em>, <em>hacker spaces</em>, ou encore accélérateurs et incubateurs. Ces grilles sont incomplètes car elles ont tendance à les réduire à une activité unique. Elles ne reflètent ni l’étendue des services proposés, ni les dynamiques qu’ils suscitent.</p>
<p>Les nouveaux lieux sont portés par des entrepreneurs et/ou des associations. Ils reposent toujours sur des démarches ouvertes et collaboratives. Leur dynamique repose sur une communauté d’individus qui partagent les mêmes valeurs et expérimentent au quotidien de nouvelles démarches d’innovation. Le lieu physique est primordial car il cristallise la rencontre et l’émergence de nouveaux modèles de collaboration.</p>
<p>Au final, ces lieux représentent de véritables plates-formes d’innovation dans lesquelles les modes de travail se différencient nettement des organisations classiques et cette logique a été mis en évidence par de nombreux autres chercheurs sur <a href="https://theconversation.com/les-tiers-lieux-2-0-une-nouvelle-facon-dapprehender-le-monde-76723">The Conversation France</a>.</p>
<p>La vie quotidienne permet d’y avoir des collègues de travail, mais pas de lien hiérarchique. Les rencontres, les échanges, les centres d’intérêt commun et une curiosité partagée pour la nouveauté vont permettre de faire avancer les projets de chaque membre (ou équipe).</p>
<p>Le fonctionnement des plates-formes permet de casser les silos au quotidien, à la fois à l’intérieur de la plate-forme et dans l’écosystème. La flexibilité et l’agilité permettent de mixer les compétences. Cela se manifeste dans la mobilisation de méthodes d’idéation ou de prototypage rapide.</p>
<p>Ces méthodes sont par essence inclusives : tout le monde peut y participer, même ceux qui ne font pas formellement partie du projet, qui pensent ne pas détenir de compétences justifiant leur présence, ou qui veulent seulement promouvoir une thématique qui leur tient à cœur. C’est le principe même des <em>hold-ups</em> pratiqués chez <a href="http://www.sensespace.cc/">Makesense</a>.</p>
<h2>Trois catégories principales de plates-formes</h2>
<p>Ces plates-formes se distinguent pour l’essentiel par leur orientation <em>business</em>, <em>social business</em> ou <em>not for profit</em>.</p>
<p><strong>Les plates-formes <em>business oriented</em></strong> peuvent être généralistes ou thématiques, c’est-à-dire qu’elles proposent de renouveler les modèles économiques dans un monde numérique, elles peuvent proposer des modèles d’organisation alternatifs dans un secteur spécifique.. Reposant sur un modèle d’organisation différent de celui d’une agence de création, Digital Village permet à ses membres de conserver leurs statuts d’indépendants tout en bénéficiant d’une mutualisation de moyens.</p>
<p>Certaines plates-formes se définissent par les dynamiques collectives qu’elles impulsent au sein d’écosystèmes existants ou en devenir. C’est le cas du <a href="http://www.lecargo.paris/">Cargo</a> et de <a href="http://www.residencecreatis.fr/">Creatis</a> qui se situent à l’intersection entre contenu numérique et activités culturelles, ou du <a href="http://welcomecitylab.parisandco.paris/">Welcome City Lab</a> qui situe son activité entre contenu numérique et tourisme urbain</p>
<p><strong>Les plates-formes <em>social-business oriented</em></strong> cherchent à concilier la performance économique avec les enjeux associés au développement durable, ou à la création (ou au renouvellement) de biens collectifs. C’est le cas de La Ruche, de Makesense ou encore de <a href="https://liberte.paris/">Liberté Living Lab.</a> Leur objectif est de faire entrer l’économie sociale et solidaire comme une référence pour le développement de toutes activités.</p>
<p><strong>Les plates-formes <em>not-for-profit oriented</em></strong> portent des modèles alternatifs qui visent à réformer des activités existantes. Ainsi, <a href="https://lapaillasse.org/">La Paillasse</a> se donne mission de faire de la science autrement de manière plus ouverte et partagée fondée sur des dynamiques d’<em>open source</em> sans préalable de diplôme ou de titre. <a href="http://www.electrolab.fr/">Electrolab</a>, un <em>hacker space</em> spécialisé dans l’électronique, veut redonner envie aux citoyens de s’engager dans la technologie « par le faire ».</p>
<h2>Des plates-formes construites par et pour une communauté</h2>
<p>Au-delà de la mission qui reste spécifique à chaque plate-forme, les communautés qui s’y développent partagent des valeurs précises : réciprocité, bienveillance, collaboration, entrepreneuriat et passion. La culture entrepreneuriale est omniprésente dans la communauté et se trouve aussi chez ceux qui ont été à l’origine de la plate-forme et de la communauté. Ces communautés sont de tailles diverses (quelques dizaines à plusieurs centaines voire milliers de membres dans le cas du <a href="https://paris.numa.co/en/">NUMA</a>) mais elles sont toutes caractérisées par la diversité : diversité de projets, diversité sociale, diversité de compétences, diversité générationnelle et/ou diversité culturelle.</p>
<p>La diversité y constitue un atout stratégique car elle permet de décaler les points de vue et d’offrir une richesse dans l’expertise.</p>
<blockquote>
<p>« Le fait d’avoir une communauté hétérogène est très vertueux parce que du coup les [membres] sont complémentaires et [ils] se donnent des coups de main entre eux. » (Laurent Queige, Welcome City Lab).</p>
</blockquote>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/184674/original/file-20170905-28095-1rwg2bc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">_La diversité des communautés dans les plates-formes d’innovation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bpifrance Le Hub, Innovation Factory, Paris&Co</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour la plupart des plates-formes, les communautés entretiennent des relations de collaboration fondées sur la réciprocité. Cela n’exclut pas pour autant les relations marchandes. Les membres y intègrent les codes permettant de passer d’un modèle de relation à l’autre. La dynamique est le plus souvent guidée par la nature du projet et les types de contributions. Les relations collaboratives sont fondées sur « le don contre don ». Ces relations sont asynchrones, sans contrepartie directe ou monétaire.</p>
<p>Certaines relations collaboratives prennent parfois la forme de troc : une activité ou un conseil en échange d’un autre service, la mutualisation de certains outils, un « dépannage » technique. La contrepartie tire parti d’une autre compétence, parfois sur un plan totalement différent. Le plus souvent, la démarche fait partie des valeurs promues par le lieu et de la norme de comportement. Dans certains cas, elle permet d’obtenir des réductions sur le tarif de l’hébergement dans l’espace de coworking.</p>
<p>Dans les plates-formes, la communauté s’ouvre aussi sur les relations marchandes car les connexions entre membres font émerger des opportunités d’affaires. Cela peut survenir entre les membres de la communauté ou avec une entreprise de l’écosystème, ou autour d’un événement tenu dans le lieu.</p>
<p>Dans certains cas, les relations business occupent une place centrale parce que les artisans d’<a href="http://www.icimontreuil.com/">ICI Montreuil</a> ou les indépendants du web de <a href="http://digital-village.fr/">Digital Village</a> viennent réaliser leurs activités au sein de ces plates-formes. La solidarité entre ces acteurs existe mais la dynamique repose aussi sur le fait que les demandes des clients requièrent de plus en plus une combinaison de leurs expertises.</p>
<p>Comment font les individus pour gérer le passage d’un modèle de relations à l’autre ? La nature du projet et le temps consacré dictent leurs choix. Dans l’échange, chacun se rend compte assez vite si le projet en question apporte ou pas quelque chose. Lorsque l’échange se manifeste par un conseil ou une aide ponctuelle rapide, les relations de dons contre dons ou de troc s’imposent. Dans les autres cas, le troc ou les relations marchandes s’imposent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/83121/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Mérindol a reçu des financements de l'Innovation Factory et le HUB BBIfrance </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>David W. VERSAILLES a reçu des financements de Innovation Factory et Bpifrace le Hub pour cette recherche. </span></em></p>Analyse des plates-formes d’innovation au travers de leurs missions, la diversité de leurs communautés,et leurs modes de travail.Valérie Mérindol, Enseignant chercheur en management de l'innovation et de la créativité, PSB Paris School of BusinessDavid W. Versailles, Chair professor, strategic management and management of innovation, PSB Paris School of BusinessLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/792152017-06-12T20:13:40Z2017-06-12T20:13:40ZEntre exploitations, collaborations et épurations, les vins de Bordeaux pendant le Second Conflit mondial<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/173162/original/file-20170609-4794-rg52mz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C12%2C653%2C427&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les Bömers et les Eschenauer (négociants) en 1941 au Chateau Beychevelle dans le Médoc.</span> <span class="attribution"><span class="source">Archives familiales</span></span></figcaption></figure><p><em>Sébastien Durand, historien spécialisé de la Seconde Guerre mondiale, propose depuis plusieurs années une écriture apaisée sur une période encore marquée par des fragilités mémorielles. Dans son deuxième ouvrage <a href="http://bit.ly/2sb2vpG">consacré à l’histoire des vins de Bordeaux de 1938 à 1950</a>, l’auteur développe trois aspects essentiels à ses yeux : le positionnement politique ambigu des acteurs de la filière face au maréchal Pétain et à son administration, les relations commerciales à la fois fécondes et heurtées des négociants de la place avec les occupants et, enfin, les enjeux multiples et contradictoires de l’épuration lors de l’après-Libération. Extraits de son ouvrage.</em></p>
<hr>
<h2>Les vins de Bordeaux et Vichy : une intégration réelle mais fragile</h2>
<p>« Dès ses premiers mois d’existence, le régime de Vichy ne lésine pas sur les moyens, en vue de faire de l’entreprise une vitrine politique et idéologique […]. La terre – en l’occurrence ici la vigne et le vin – offre au chef de l’État et à sa Révolution nationale sa surface d’accroche la plus solide avec le monde des entreprises girondines. L’implication des propriétaires de domaines viticoles et de leurs représentants, certains des notables ruraux et communaux, dans les manifestations agrestes et la promotion de l’enseignement agricole, est réelle et même authentique.</p>
<p>Elle ne se comprend qu’en ayant en tête les concernant, une certaine fidélité à Vichy et un enracinement dans les campagnes françaises du mythe Pétain, le plus célèbre des fils de paysans. Le monde bordelais du négoce n’est pas en reste et se mobilise à son tour, en particulier en faveur du Secours national. Certains négociants, comme d’autres, cheminent même vers des menées plus idéologiquement marquées, voire des formes plus graves de compromission politique, qui les amènent à assister à des manifestations et à prendre une part plus active dans l’organisation de mouvements collaborationnistes et pétainistes. Attention cependant à n’en exagérer ni l’ampleur, ni la durée.</p>
<p>Que les élites vitivinicoles, les notables ruraux, les responsables professionnels manifestent un certain attachement à la personne du chef de l’État […] est une chose. Que l’ensemble des acteurs de la filière fassent preuve d’une confiance sans faille à l’égard du gouvernement de Vichy en est une autre, tant il est vrai que ce dernier insère la production et le commerce du vin dans un cadre particulièrement strict […].</p>
<p>Il leur impose une discipline économique et de nouvelles habitudes (taxation des vins d’appellation, blocage des vins à la propriété…), qui les éloignent trop de leur terre ou de leurs chais et suscitent des réactions guère positives, allant de la méfiance à la plus franche hostilité.</p>
<p>Le monde des vins de Bordeaux est traversé par une réelle dissociation […] une distinction entre la personne [du chef de l’État] et son œuvre. L’excès de la réglementation, l’introduction non consentie de multiples intermédiaires […] et surtout l’aggravation des conditions générales de l’occupation à partir de la fin 1942 […] provoquent un décrochement plus large et de plus en plus marqué entre les entreprises du vin et Vichy. »</p>
<h2>Les négociants face aux occupants : une relation sous contrainte ?</h2>
<p>« Au cours des nombreuses procédures épuratoires visant les négociants, a été très souvent soulignée la continuité de travail et d’hommes entre les marchés français et allemand, continuité prenant ses racines commerciales bien avant le premier XX<sup>e</sup> siècle. La « proximité » entre les acheteurs nazis et les négociants bordelais, en serait un signe tangible.</p>
<p>Cette « proximité » peut présenter bien des avantages, lorsqu’il s’agit, en particulier pour les Chartrons, de retrouver la position commerciale des vins de Bordeaux outre-Rhin, de rétablir un débouché extérieur traditionnel […]. Mais, attention, le contexte a radicalement changé. Ces « proches » sont devenus entretemps des personnalités allemandes, civiles et militaires, haut placées et, à ce titre, acteurs clefs de la machine administrative et de l’économie de guerre nazies.</p>
<p>Cela rend plus qu’inopportuns les instants de convivialité et les mondanités, que certains grands noms du négoce bordelais, membres éminents du patriciat urbain, ont cru bon de rétablir. En ces temps de restrictions et de limitation des quantités […], cette attitude est parfaitement inconséquente […]. C’est cette « proximité » qui provoque […] la désapprobation de la mémoire résistante à Bordeaux […].</p>
<p>Si l’attitude de certains professionnels des vins de Bordeaux est marquée par une macule indélébile (celle de la Collaboration), si certains ont fait preuve d’un affairisme médiocre dans le cadre d’opérations frauduleuses, si certains ont donné à leurs affaires, certes licites, une ampleur exagérée, si d’autres, enfin, une minorité infime, ont mis leurs activités entre parenthèse pour ne pas travailler avec l’occupant et même pour mener des actions courageuses, voire subversives, dans le cadre de la Résistance, une grande majorité des propriétaires, chefs d’exploitation, négociants et courtiers ont souhaité […] défendre avant tout les intérêts supérieurs de leur entreprise.</p>
<p>Proposer leurs services aux autorités d’occupation est, pour eux, l’opportunité de maintenir l’emploi, de garantir a minima des ressources suffisantes à leurs salariés et de préserver tant bien que mal leur domaine, leur outil de travail, leurs sources d’approvisionnement et leur clientèle, dont ils auront un besoin impérieux, pensent-ils, une fois la période de paix revenue.</p>
<p>En devenant des offreurs d’affaires, assumés, ils devancent en quelque sorte les contraintes des occupants et souhaitent échapper aux vicissitudes auxquelles ils sont déjà confrontés ou qu’ils craignent rencontrer dans un futur proche. Ils se montrent ainsi très sensibles aux atouts et aux contraintes des occupants, notamment quand ces derniers procèdent à une orchestration de la pénurie, basée sur une ventilation sélective et hiérarchisée des ressources et des moyens de production encore disponibles.</p>
<p>C’est donc […] un pragmatisme et un opportunisme implacables, qui caractérisent majoritairement, de notre point de vue, les comportements des acteurs de la filière des vins de Bordeaux sous l’Occupation, face aux occupants. »</p>
<h2>Un absence d’épuration(s) ?</h2>
<p>« L’histoire de l’épuration occupe une place à part dans l’historiographie de la Seconde Guerre mondiale et de la Libération à Bordeaux. Pour d’aucuns, cette histoire reste aujourd’hui encore un des sujets tabous de la période. Les recherches, à dire vrai, sont encore rares […]. Il en est ressorti une certitude : l’épuration a failli. Le monde du vin ne dérogerait pas à la règle. Au contraire administrerait-il la preuve implacable d’une épuration manquée, pour ne pas dire sabotée […].</p>
<p>L’épuration du monde du vin a-t-elle été manquée en Gironde ? La réponse doit être nuancée, mais négative. Parler d’une épuration manquée ou imparfaite relève à la fois d’une certaine méconnaissance des réalités locales du processus épuratoire et d’une certaine distorsion des faits, qui ne semble pourtant pas délibérée, ni malveillante.</p>
<p>Elle s’inscrit dans un contexte sensible et émotionnellement chargé, celui de l’instruction puis du procès de l’affaire Papon. Affirmer que l’épuration n’a pas été très sévère, voire déficiente, sous-entend l’idée d’un seuil au-dessous duquel l’épuration serait considérée comme insatisfaisante. Or, il semble bien difficile de pouvoir établir un seuil sur des critères scientifiques et objectifs valables.</p>
<p>Le bilan de l’épuration judiciaire [et professionnelle] est certes très modeste, mais les confiscations des profits illicites, eu égard au nombre de citations, au montant de sanctions prononcées […] à l’émoi suscité dans les milieux patronaux, connaissent […] une ampleur certaine. Alors que l’opinion publique a longtemps douté de l’existence même d’un phénomène épuratoire, de son efficacité, de sa probité, le Comité de confiscation des profits illicites (CCPI) accomplit une importante opération de rééquilibrage fiscal au profit du Trésor.</p>
<p>La sévérité de l’épuration fiscale et financière s’explique par des finalités autant politiques qu’économiques. S’en prendre au porte-monnaie des négociants, fragiliser leur position au sein de la représentation syndicale mais ne pas menacer durablement leur place ni dans la société (les mesures d’indignité nationale sont réservées aux cas les plus graves), ni dans leur société (les arrestations, fermetures et mises sous séquestre n’ont que des effets temporaires et les interdictions de conserver un poste de commandement sont rarement décidées) offrent à la puissance publique l’opportunité de trouver un compromis et de concilier tant bien que mal le temps de l’épuration et la phase de reconstruction […].</p>
<p>Malgré cette continuité, nous ne devons pas douter de l’existence de l’épuration à Bordeaux, même si elle est traversée, il est vrai, par de profonds gradients. Nous préférons parler moins d’une épuration manquée, que d’une épuration inégale et contrastée. Inégale dans le temps, les enjeux et les préoccupations de l’automne 1944 n’étant plus les mêmes qu’en 1946 ou 1947 […]. Signalons que les possibilités d’appel des décisions peuvent prolonger l’épuration et certains cas, très limités en nombre, sont examinés pendant plusieurs années, jusqu’à la décennie 1960.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/173146/original/file-20170609-4806-xhewqh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/173146/original/file-20170609-4806-xhewqh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/173146/original/file-20170609-4806-xhewqh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=768&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/173146/original/file-20170609-4806-xhewqh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=768&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/173146/original/file-20170609-4806-xhewqh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=768&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/173146/original/file-20170609-4806-xhewqh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=965&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/173146/original/file-20170609-4806-xhewqh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=965&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/173146/original/file-20170609-4806-xhewqh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=965&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les vins de Bordeaux durant l’occupation.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Inégale dans l’espace : l’épuration touche davantage Bordeaux que les villes moyennes et les zones rurales de la région […]. Contrastée, enfin, dans son fonctionnement : les conflits de compétences, la lourdeur des procédures […], le manque de personnel, les luttes d’influence, la détermination personnelle du commissaire régional et du préfet sont des données essentielles à une approche territorialisée de l’épuration. Sans que cela relève d’une quelconque spécificité bordelaise, ces contraintes ont très certainement participé à la construction d’une image encore prégnante aujourd’hui, celle d’une épuration économique incomplète et inachevée. »</p>
<hr>
<p><em>Sébastien Durand, « Les vins de Bordeaux à l’épreuve de la Seconde Guerre mondiale (1938-1950). Une filière et une société dans la guerre, l’occupation et l’épuration », Bordeaux, <a href="http://bit.ly/2sb2vpG">Éditions Memoring, 2017, 428 p</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/79215/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sébastien Durand ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’économie des vins de Bordeaux pendant la Seconde Guerre mondiale. Une enquête historique.Sébastien Durand, Historien, chargé de cours, Université Bordeaux MontaigneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/758852017-04-13T19:46:56Z2017-04-13T19:46:56ZQuand l’écriture mémorielle se heurte à un mur<p>À quelques kilomètres seulement de l’un des neuf « hauts lieux de la mémoire nationale du ministère de la défense », l’ancien camp de concentration nazi de <a href="http://www.struthof.fr/home/">Natzweiler-Struthof</a>, c’est en empruntant un chemin délibérément pentu et en zigzags que les visiteurs peuvent accéder, à pied, au <a href="http://www.memorial-alsace-moselle.com/f/pourquoi.html">Mémorial de l’Alsace-Moselle</a>.</p>
<p>Philippe Richert, président de la région Grand Est, explique ce choix :</p>
<blockquote>
<p>« L’accès à l’histoire et à la mémoire de cette province tourmentée, exige une approche lente, impliquant un minimum d’efforts, et invitant à un retour sur soi. »</p>
</blockquote>
<p>C’est dans l’un des renfoncements de cette montée que devait débuter, en mai prochain, l’érection d’un <a href="http://www.lemonde.fr/societe/article/2017/03/14/en-alsace-un-mur-des-noms-pour-rendre-hommage-aux-victimes-de-la-seconde-guerre-mondiale-cree-l-emoi_5094289_3224.html">« Mur des noms »</a> qui, depuis le 6 février dernier, fait couler beaucoup d’encre et s’est rapidement transformé en un « Mur des non ».</p>
<p>En effet, si, pour Philippe Richert, le « Mur des noms » de Schirmeck, d’une hauteur de 5 mètres et d’une longueur de 80 mètres, doit constituer « un moment de rassemblement et de partage des mémoires », pour d’autres, notamment Robert Hébras, dernier survivant d’Oradour-sur-Glane et Philippe Breton, chercheur au CNRS et universitaire, il représente un mur de la honte.</p>
<h2>Les incorporés de force, pierre d’achoppement</h2>
<p>Les noms, prénoms et dates de naissance d’environ 52 000 civils et militaires alsaciens et mosellans, morts entre 1939 et 1945 victimes du nazisme, seront gravés sur ce mur, par ordre alphabétique. Aussi, les personnes ayant choisi de s’enrôler dans l’armée nazie seront-elles exclues de cette liste, tandis que celles « incorporées de force dans l’armée allemande », en d’autres termes les « Malgré-nous », y figureront.</p>
<p>L’histoire des Malgré-nous (100 000 Alsaciens et 30 000 Mosellans) ne constitue aucunement un « trou de mémoire officiel ». En effet, au niveau national, l’Éducation nationale met de nombreux <a href="http://www.crdp-strasbourg.fr/data/histoire/alsace-39-45b/textes/incorporation.pdf">documents à la disposition des enseignants</a> grâce aux centres régionaux de documentation pédagogique – notamment celui de Strasbourg. Qui plus est, le <a href="http://www.liberation.fr/france/2010/05/08/celebrations-du-8-mai-sarkozy-rend-hommage-aux-malgre-nous_625061">8 mai 2010</a>, l’État français a officiellement reconnu les Malgré-nous comme étant des victimes du nazisme.</p>
<p>Cette page de l’histoire n’est pas non plus passée sous silence par le mémorial de l’Alsace-Moselle. Son <a href="http://www.memorial-alsace-moselle.com/f/index2.html">site Internet</a> y consacre une page d’explications, de nombreuses références bibliographiques et filmographiques. Ce mémorial a également organisé, de mai à décembre 2013, une <a href="http://www.republicain-lorrain.fr/actualite/2013/05/05/schirmeck-une-expo-pour-rendre-justice-aux-malgre-elles">exposition</a> sur les « Malgré-elles ». De surcroît, dans ce mémorial dont l’objectif est clairement affiché (« reconstituer les mosaïques infinies des situations vécues depuis 1871, et tout particulièrement la période 1939/45 »), le visiteur est convié à se sentir plongé dans l’ambiance d’épisodes clés – notamment celle <a href="https://www.franceinter.fr/emissions/la-marche-de-l-histoire/la-marche-de-l-histoire-02-mars-2015">du procès</a>, à Bordeaux en janvier-février 1953, du massacre d’Oradour-sur-Glane, au cœur duquel se trouvent des Malgré-nous.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/165271/original/image-20170413-25886-ntgm9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/165271/original/image-20170413-25886-ntgm9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/165271/original/image-20170413-25886-ntgm9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/165271/original/image-20170413-25886-ntgm9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/165271/original/image-20170413-25886-ntgm9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/165271/original/image-20170413-25886-ntgm9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/165271/original/image-20170413-25886-ntgm9h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">« Mur du souvenir » de Natzweiler-Struthof.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.cndp.fr/crdp-reims/memoire/enseigner/natzweiler_struthof/images_struthof/fosse_02.jpg">CNDP</a>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Oradour-sur-Glane et les Malgré-nous</h2>
<p>Pour Henri Ménudier, Professeur des universités à Paris-III-Sorbonne nouvelle, le massacre et la destruction d’<a href="http://www.oradour.org/fr/content/recit-du-massacre">Oradour-sur-Glane</a> (Limousin), qui ont fait 642 victimes, constituent « le sommet de la barbarie nazie en France le 10 juin 1944 ». Lors du procès qui s’ensuivra, parmi les 21 assis au banc des accusés, 13 sont des Malgré-nous alsaciens. Ces derniers seront condamnés aux travaux forcés, puis relaxés, suite à la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.do?id=JORFTEXT000000313959">loi d’amnistie</a> de 1953 et ce, « au nom de la réconciliation » et de « l’intérêt supérieur de l’unité nationale ».</p>
<p>Récemment, en <a href="http://www.liberation.fr/societe/2012/09/14/un-survivant-d-oradour-condamne-en-appel-pour-des-propos-sur-les-malgre-nous_846302">2012</a>, la cour d’appel de Colmar a rappelé que l’incorporation de force constitue une « vérité historiquement et judiciairement établie » et ce, dans le cadre d’un procès dont les plaignants, deux associations de Malgré-nous alsaciens, accusaient Robert Hébras – l’un des rares survivants du massacre – d’avoir, dans son livre, émis des doutes sur le caractère forcé de l’enrôlement des Malgré-nous.</p>
<p>Souhaitant être le passeur d’une mémoire apaisée et réconciliatrice, Robert Hébras a expliqué :</p>
<blockquote>
<p>« Pendant longtemps, j’ai cru que ces jeunes Alsaciens étaient tous des engagés volontaires. […]. Je m’excuse d’avoir pensé cela à une époque de ma vie. Aujourd’hui je sais que, vous comme moi, nous avons beaucoup souffert ; serrons-nous la main. »</p>
</blockquote>
<p>Robert Hébras a de nouveau déclaré, suite à l’annonce du projet du « Mur des noms » de Schirmeck, qu’il existe « des Malgré-nous, beaucoup de Malgré-nous qui sont des victimes du nazisme ». Toutefois, il a justifié son désaccord à l’encontre dudit projet en déclarant « par contre, il y a les autres, il ne faut pas les mélanger, c’est tout ».</p>
<p>Il s’est élevé avec force contre ce qu’il considère être « une réécriture politique de l’histoire » de la part de certains qui, selon lui, « veulent se dédouaner du massacre d’Oradour-sur-Glane ». Pour Philippe Breton comme pour lui, « ce mélange des mémoires est insupportable » : il est, pour eux, inconcevable que des noms de Malgré-nous cohabitent avec ceux de victimes du nazisme.</p>
<p>C’est là un sentiment qui doit être entendu et qui peut se comprendre. Toutefois, cet argument est-il juridiquement recevable puisque le statut de « victimes du nazisme » a été étendu aux Malgré-nous ?</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/165075/original/image-20170412-25878-12p1o5i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/165075/original/image-20170412-25878-12p1o5i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/165075/original/image-20170412-25878-12p1o5i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/165075/original/image-20170412-25878-12p1o5i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/165075/original/image-20170412-25878-12p1o5i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/165075/original/image-20170412-25878-12p1o5i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/165075/original/image-20170412-25878-12p1o5i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Oradour sur Glane.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Oradour-sur-Glane-Hardware-1342.jpg">Dennis Nilssonn/Wikipedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Le « Mur des noms », symbole de rassemblement et de partage des mémoires ?</h2>
<p>Afin de faire taire la polémique, Philippe Richert a mis en avant la rigueur avec laquelle la sélection des noms a été effectuée par un conseil scientifique, de même que la richesse du dialogue qu’ont engagé toutes les parties prenantes consultées, et leur accord unanime sur la double mission du « Mur des noms » : « redonner un nom à ceux qui, bien souvent, ont été privés de sépulture » et « œuvrer à la réconciliation des mémoires ». En outre, dans un esprit de conciliation et de dialogue, Philippe Richert a opté pour une nouvelle phase de concertation.</p>
<p>Sera-t-elle suffisante pour apaiser cette « guerre des mémoires » et permettre à ce « Mur des noms » de ne plus symboliser la « concurrence de mémoires victimaires » mais, au contraire, de devenir un « lieu de mémoire » consensuelle ?</p>
<p>Comme le rappelle le philosophe et historien Tzvetan Todorov, « tous les usages de la mémoire ne sont pas bons » et les mémoires qui demeurent « littérales », c’est-à-dire recroquevillées sur elles-mêmes et intransigeantes, constituent un exemple de mauvais usage de la mémoire – la mémoire devant plutôt se mettre au service du présent et du futur.</p>
<p>Ce que Benjamin Stora, historien spécialiste du Maghreb contemporain, appelle les « retours de mémoire » sont, certes, rarement indolores ; cependant, ils provoquent le dialogue entre les mémoires, et peuvent, dès lors, faciliter leur décloisonnement.</p>
<p>Afin que ce « Mur des noms » ne soit pas le vecteur de la transmission inter et intra-générationnelles de mémoires communautarisées, il convient de ne pas diluer, voire nier, les mémoires et traumas spécifiques. Partant, une lecture « en contrepoint » et une écriture polyphonique du récit complexe qu’est le massacre d’Oradour-sur-Glane s’imposent. Toutes deux s’attarderont davantage sur la complémentarité des mémoires que sur leurs singularités. Sans cette approche, le « Mur des noms » risque fort de demeurer à l’état de « Mur des non » et ne jamais voir le jour.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/75885/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Géraldine D Enjelvin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le projet de « Mur des noms » voué à honorer la mémoire des 52 000 civils et militaires alsaciens et mosellans victimes du nazisme entre 1939 et 1945 provoque une vive polémique.Géraldine D Enjelvin, Associate Lecturer in French, University of YorkLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/736362017-03-01T21:34:39Z2017-03-01T21:34:39ZL’entrepreneuriat-alterné : en finir avec le mythe d’une société post-salariale ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/158751/original/image-20170228-29929-sx5r1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Espace de co-working (Hub Vilnius). Il n'y a plus d'un côté les salariés et de l'autre les entrepreneurs... </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/mindaugasdanys/5869798689/in/album-72157626920269679/">Mindaugas Danys/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Nous sommes entrés dans une nouvelle ère, plus collaborative, plus communautaire. Cela conduit notamment à l’émergence de nouvelles pratiques de travail indissociables de nouvelles spatialités et temporalités pour les managers.</p>
<p>Au sein du réseau académique <a href="http://bit.ly/1AnFHhI">RGCS</a>, créé il y a deux ans, des chercheurs en management, en économie et en sociologie ont analysé ces nouvelles relations au travail et à l’espace de travail dans le contexte de l’économie collaborative. À la différence des recherches qui comparent les évolutions conjointes de l’entrepreneuriat et du salariat (et qui avancent parfois la disparition de l’un au profit de l’autre), ils ont choisi de questionner les catégories mêmes du débat sur les transformations du travail.</p>
<p>Leurs travaux montrent que les nouveaux statuts du travailleur sont plus cumulés ou alternés qu’il n’y paraît, en particulier dans le contexte des espaces collaboratifs. La distinction des deux catégories dans le temps et dans l’espace doit vraisemblablement être davantage questionnée par les chercheurs, les consultants comme les managers.</p>
<h2>Demain tous salariés <em>et</em> entrepreneurs !</h2>
<p>Au moment d’orienter sa carrière, il semblerait qu’il faille systématiquement choisir entre « être un salarié » ou « devenir un entrepreneur ». Pourquoi cette prétendue scission ? Contrairement à ce que nous pousse à croire notre pensée occidentale, habituée à classer les éléments en catégories exclusives, il s’agit là d’un ensemble de pratiques non dualistes. Pour le comprendre, nous devons sortir des schémas de pensée qui opposent, pour aller vers des approches intégratives et inclusives qui embrassent les possibles. Car c’est de cela dont il s’agit au fond, de l’émergence d’une société du travail plus libertaire, fondée sur la possibilité de cumuler les options de vie et les possibles bifurcations.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/158752/original/image-20170228-29945-1qzove5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/158752/original/image-20170228-29945-1qzove5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/158752/original/image-20170228-29945-1qzove5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/158752/original/image-20170228-29945-1qzove5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/158752/original/image-20170228-29945-1qzove5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/158752/original/image-20170228-29945-1qzove5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/158752/original/image-20170228-29945-1qzove5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/158752/original/image-20170228-29945-1qzove5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Espace de co-working (Hub Vilnius).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/mindaugasdanys/5870370996/in/album-72157626920269679/">Mindaugas Danys/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces deux formes de travail ne peuvent en effet que s’enrichir et constituent ainsi une « boucle vertueuse » dans le processus de développement des compétences individuelles. Les recherches menées en 2015 et 2016 par RGCS montrent ainsi que certains étudiants voient l’entrepreneuriat comme une nouvelle compétence transversale à acquérir pour… séduire les entreprises et développer de l’employabilité ! Il s’agit alors de « Devenir entrepreneur pour devenir salarié », une logique inversée que résumait en ces termes une ancienne étudiante ingénieure.</p>
<p>Ainsi, à l’instar du cycle de vie, se fait jour un cycle du travail alternant (ou cumulant pour certains, notamment ceux que l’on qualifie de <a href="http://bit.ly/2lPzhIE">« slashers »</a> et qui sont déjà <a href="http://bit.ly/2bLbZQ4">plus de deux millions en France</a>) des périodes de salariat et d’expériences entrepreneuriales. Ces deux modes de travail sont en effet liés par une préoccupation commune à l’égard de la gestion du temps (la <a href="http://bit.ly/2lk4qk1">question du temps de travail</a> est d’ailleurs souvent clivante en la matière)… mais semblent se distinguer sur le <a href="http://bit.ly/2mAvZaH">sentiment du bonheur au travail</a>.</p>
<p>Face à cette problématique d’épanouissement professionnel et dans une quête grandissante de sens et de créativité au travail, ce modèle d’hybridation s’observe aussi en entreprise où les managers doivent être plus intrapreneurs et <a href="http://bit.ly/2fnm4FJ"><em>makers</em></a> que jamais.</p>
<p>C’est au cœur des <a href="http://bit.ly/2m2X7kF">espaces collaboratifs</a> que cette boucle du salariat-entrepreneuriat alterné semble la plus prégnante. En effet, ces lieux regroupent à la fois des entrepreneurs, des salariés « excubés », des salariés en transition (en déplacement loin de leur zone de travail habituelle), des salariés en situation de télétravail ou (pour les <em>maker spaces</em> et les <em>fab labs</em>) de simples bricoleurs de passage. L’enjeu est alors de faire cohabiter ces populations aux attentes hétérogènes. Le développement d’un <a href="http://bit.ly/2luMSm1">« sens de la communauté »</a> est alors crucial afin de favoriser des logiques d’entre-aide et des modes de régulation.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/158754/original/image-20170228-29906-pxkb0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/158754/original/image-20170228-29906-pxkb0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/158754/original/image-20170228-29906-pxkb0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/158754/original/image-20170228-29906-pxkb0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/158754/original/image-20170228-29906-pxkb0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/158754/original/image-20170228-29906-pxkb0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/158754/original/image-20170228-29906-pxkb0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/158754/original/image-20170228-29906-pxkb0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Espace de co-working (Hub Vilnius).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/mindaugasdanys/5869644031/in/album-72157626920269679/">Mindaugas Danys/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>L’importance du hacking en matière de management, de politiques publiques et d’ouverture</h2>
<p>Les recherches du réseau RGCS montrent que les <em>hackers spaces</em> et certains <em>maker spaces</em> offrent des modes de gouvernance et de régulation (loin du chaos) pouvant être intéressants pour les managers comme pour les politiques publiques.</p>
<p>Dans une dynamique d’autogestion et sans hiérarchie, les <em>hackers</em> se régulent par et avec la communauté. Ces espaces constituent des <a href="http://bit.ly/2lkjr5c">mondes intermédiaires</a> où s’élaborent de nouvelles <em>agora</em> qui multiplient les opportunités d’échanges collectifs et de jugements croisés.</p>
<p>Ils représentent des modèles d’ouverture, sur les autres et sur le monde, fondés sur le partage de connaissances, de procédures… très inspirants pour les démarches d’innovation ouverte des entreprises. Et plus loin que cela, ils s’inscrivent dans un mouvement social où la production d’un bien commun et le « faire ensemble » dépassent l’impératif d’innovation, perçu par certains comme une idéologie. L’ambition collective côtoie souvent l’ambition sociétale dans ces espaces qui s’inscrivent à contre-courant de la consommation effrénée et passive. Prolonger la durée de vie des objets, réindustrialiser un territoire voire régénérer toute une économie sont les idéaux affichés de nombreux <em>makers</em> et <em>hackers</em> rencontrés.</p>
<p>Quand le réalisme cède la place à l’idéalisme, nous pouvons entrevoir la possibilité d’une société plus épanouissante et résiliente.</p>
<h2>Mouvements collaboratifs : muse ou contre-culture ?</h2>
<p>De ce point de vue, les mouvements collaboratifs sont autant des muses que des contre-cultures pour la refonte des pratiques de travail.</p>
<p>En ce sens, ils incitent les entreprises à s’engager dans la voie de la « non-conformité constructive », c’est-à-dire vers la recherche de comportements déviants au profit de l’entreprise, source de créativité et de nombreux bénéfices (dont la création d’une <a href="http://bit.ly/2mGLkFF">« culture de l’originalité »</a>). Bien sûr, on peut s’interroger sur la finalité (être au service de la transformation de l’entreprise). La plupart des <em>hackers</em> indépendants que nous avons rencontrés se sont dits plutôt au service de valeurs et d’une communauté. L’importation des pratiques de <em>hacking</em> dans un environnement <em>corporate</em> est cependant une véritable innovation dans son esprit (on s’éloigne plus que jamais d’un contrôle hiérarchique et planifié de l’organisation).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/158755/original/image-20170228-29924-1q5kw4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/158755/original/image-20170228-29924-1q5kw4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/158755/original/image-20170228-29924-1q5kw4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/158755/original/image-20170228-29924-1q5kw4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/158755/original/image-20170228-29924-1q5kw4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/158755/original/image-20170228-29924-1q5kw4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/158755/original/image-20170228-29924-1q5kw4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/158755/original/image-20170228-29924-1q5kw4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Vu dans l’espace de co-working Hub Vilnius.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/mindaugasdanys/5869641537/in/album-72157626920269679/">Mindaugas Danys/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette contre-culture pousse à la déconstruction de nos raisonnements pour les faire entrer dans des logiques intégratives, concentriques, communautaires. Le symbole du cercle est d’ailleurs emblématique de l’ère collaborative qui unit consommateurs et producteurs, salariés et entrepreneurs, <a href="http://bit.ly/2mGJRPS">sachant et apprenant</a>, politiques et citoyens, etc. Cette forme est d’ailleurs au cœur de certains espaces collaboratifs. C’est le cas de l’<a href="http://bit.ly/2m2WrMf"><em>hacker space</em> C-Base</a> à Berlin dont la mythologie des lieux s’inscrit dans un système de sept cercles concentriques tous reliés entre eux. Le groupe décisionnaire se nomme d’ailleurs le <em>« Circle »</em>.</p>
<h2>Faire évoluer nos politiques publiques pour accompagner l’hybridation</h2>
<p>Dans le temps (entrepreneuriat-alterné), dans l’espace (pour les <em>slashers</em>), au sein de certains types de communautés et de modes de gouvernance mêlant salariés et entrepreneurs (excubation, transition, <em>open innovation</em>, nouvelles formes de <em>community management</em>) ou encore dans la relation aux mouvements sociaux collaboratifs (de plus en plus importés dans un cadre organisationnel), les deux mondes interagissent, se nourrissent.</p>
<p>Les ambitions des individus, le <a href="http://bit.ly/2lSkefx">retour des communautés et la transformation de la société</a> (comme retour d’une vision isonomique et horizontale du collectif) nous incitent ainsi à dépasser de vaines dichotomies afin de mieux comprendre et de prendre en compte les nouvelles pratiques de travail. L’économie collaborative, c’est peut-être ça. Autant qu’une révolution pour aujourd’hui, la capacité à penser et repenser les catégories d’hier comme celles de demain.</p>
<p>Mais cette révolution de nos schémas de pensée doit naturellement s’accompagner d’une transformation de nos systèmes éducatifs, économiques et sociaux. La question n’est donc pas de savoir si nous tendons à évoluer vers une société avec <a href="http://bit.ly/1vE7rQD">plus d’indépendants</a> que de salariés mais de savoir comment accompagner ce potentiel d’hybridation entre ces deux formes de travail qui émerge. Cela pose en particulier, pour les politiques publiques, la question du revenu (et non salaire) universel et celle de la fluidité du contrat (engagement ?) de travail.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/158756/original/image-20170228-29924-j62wud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/158756/original/image-20170228-29924-j62wud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/158756/original/image-20170228-29924-j62wud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/158756/original/image-20170228-29924-j62wud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/158756/original/image-20170228-29924-j62wud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/158756/original/image-20170228-29924-j62wud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/158756/original/image-20170228-29924-j62wud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/158756/original/image-20170228-29924-j62wud.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Dans l’espace de co-working Hub Vilnius.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/mindaugasdanys/5870201324/in/album-72157626920269679/">Mindaugas Danys/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’idée d’une « entité à durée déterminée », d’une « firme-apprentissage » est relativement contre-intuitive (tant d’ailleurs pour les politiques que pour les managers ou les académiques). Il s’agit pourtant d’une possibilité qui peut créer des externalités positives pour la société dans son ensemble.</p>
<p>Comment les politiques publiques qui ont contribué à rendre possible ce genre de trajectoires (par le statut d’étudiant-entrepreneur, par le regroupement des universités et la création d’espaces de savoirs partagés : <em>labs</em>, hubs, incubateurs, accélérateurs…) peuvent désormais en accompagner leur développement ?</p>
<hr>
<p><em>Pour en savoir plus sur ces travaux et réflexions, nous vous invitons à lire la note de synthèse publiée par le groupe RGCS sur ce sujet, <a href="http://bit.ly/2mpdglE">« Nouvelles pratiques de travail : la fin du clivage salariat-entrepreneuriat ? »</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/73636/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Xavier de Vaujany est président du réseau académique et think tank RGCS (Research Group on Collaborative Spaces). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julie Fabbri est vice-présidente du réseau académique et think tank RGCS (Research Group on Collaborative Spaces)</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Amélie Bohas ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Au-delà des courbes sur l’évolution du nombre de salariés et d’entrepreneurs. Une réflexion sur l’ hybridation du salariat et de l’entrepreneuriat par les acteurs du collaboratif.Amélie Bohas, Maître de Conférences en Sciences de Gestion, Aix-Marseille Université (AMU)François-Xavier de Vaujany, Professeur, PSL-Université Paris-Dauphine (DRM), Université Paris Dauphine – PSLJulie Fabbri, Professeur en stratégie et management de l'innovation, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/698262017-02-01T20:47:19Z2017-02-01T20:47:19ZRelations humaines : l’impact des nouveaux outils collaboratifs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/154973/original/image-20170131-19869-7hmjso.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En réunion…</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/frnetz/8192377079/in/photolist-dtW5hF-oyvehU-a6BM2e-qBMQyX-cP6uef-i9NRfc-p3tQBN-nxeRe7-nhNH58-qCHP3c-nziGrM-8eJvU4-ibZwwg-rp8otm-b6Qo8k-fezAZN-qurrwA-pF2vAX-cTnPSY-oQ8F6E-b6Qoa4-eJW8PP-r9Yjck-bUE7C6-9ZQbb7-oYUiEL-8eMPbJ-oWR5UN-8eJvJR-oYzVwx-nhP8ES-asdxZx-oGr4cy-oWTZQJ-nhPbVZ-oWYbuS-nB4ipZ-asfWX5-nz2Yb1-8eJwnp-asgaNY-8eJw76-9RgfaB-asdx84-nB4qD8-qzvu5f-oYQkJy-8eJvbD-asdmtR-asg9Yb">Maik Meid/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><em>Ce texte est tiré de la conférence « Au secours, les relations humaines reviennent ! » organisée par XERFI, la FNEGE, l’AGRH et l’<a href="http://bit.ly/2iZV6Rz">ANDRH à Paris le 1ᵉʳ décembre 2016</a>.</em></p>
<hr>
<p>Tous les observateurs, académiques et praticiens, s’accordent aujourd’hui à reconnaître que la révolution digitale est bien plus que la mise en œuvre d’outils technologiques pour certains « disruptifs » comme les imprimantes 3D à l’origine du mouvement des <a href="https://theconversation.com/le-role-des-open-labs-dans-les-processus-creatifs-des-organisations-69455"><em>fab labs</em></a> ou la réalité augmentée permettant à des opérateurs de réparer des machines sans en avoir même les plans. Elle porte, en effet, en elle la remise en cause des fondements du travail et de l’ organisation qui ont fait le succès du modèle de l’entreprise depuis plus d’un siècle.</p>
<h2>Le nouveau travail et la révolution digitale</h2>
<p>Sur le plan du travail, tout d’abord, la révolution digitale est susceptible de le rendre plus virtuel, jusqu’à ce qu’il devienne invisible pour reprendre la belle analyse de notre collègue <a href="http://pierre-yves-gomez.fr/le-travail-invisible/">Pierre-Yves Gomez</a>. Travail plus connecté et plus nomade aussi avec la banalisation de l’usage des smartphones, plus instantané et plus flexible permettant à l’entreprise de devenir plus agile.</p>
<p>Et enfin, un travail plus transparent et plus collaboratif avec la généralisation de la mise en œuvre d’outils tels que les réseaux sociaux d’entreprise comme l’a fait Orange en déployant le réseau Plazza réunissant aujourd’hui près de 45 000 collaborateurs selon l’un des dirigeants du groupe dans un colloque récent au Collège des Bernardins.</p>
<p>Sur le plan de l’organisation, ensuite, la révolution digitale est susceptible de détruire les silos qui caractérisent trop souvent l’entreprise confrontée à la nécessité de créer de la différenciation en interne tel que le suggéraient il y a près de 50 ans <a href="http://bit.ly/2kNkBus">Lawrence & Lorsch</a>, de casser les hiérarchies en renversant les structures traditionnelles de pouvoir et de savoir comme le soulignait il y a quelques années Michel Serres dans son livre <a href="http://bit.ly/2kmJnQR"><em>Petite Poucette</em></a> et de briser les frontières temporelles et géographiques de l’entreprise en réduisant considérablement les coûts de transaction mis en évidence par <a href="http://bit.ly/2jPqm9i">Ronald Coase et Oliver Williamson</a>.</p>
<p>Mais tous ces effets, pour la plupart très positifs, de la révolution digitale ne cachent-ils pas des zones d’ombre largement occultées par ses ardents défenseurs ? Comment ne pas reconnaître, par exemple, les risques de précarisation et de re-taylorisation du travail avec le <a href="http://bit.ly/2cEkKcE">développement de plates-formes</a> offrant des services comme le transport de personnes avec Uber ou la fourniture de plats chauds à domicile avec Deliveroo ? De même l’organisation digitalisée n’est-elle pas source de tensions nouvelles dans la mesure où l’innovation technologique, dans un certain nombre de cas, prend assez peu en compte le système social qu’est l’entreprise oubliant ainsi les principes fondateurs de l’<a href="http://bit.ly/2jPyXbL">École Socio-Technique</a>.</p>
<h2>Outils collaboratifs : de quoi parle-t-on ?</h2>
<p>En s’intéressant maintenant à certains des outils parmi les plus emblématiques de cette révolution digitale – les outils collaboratifs – nous allons tenter de montrer comment ils impactent, positivement et négativement, les relations humaines entre les acteurs de l’entreprise et quelles peuvent être, face à ces constats, les exigences de relations humaines pour permettre à ces outils de tenir leurs promesses.</p>
<p>Mais auparavant il semble nécessaire de clarifier ce que sont précisément ces outils : en dehors du <strong>courrier électronique</strong>, premier outil collaboratif né il y a plus de deux décennies avec Internet, il faut mentionner les outils traditionnels de partage de connaissance, de <strong>conversation instantanée</strong> – les fameux chats – et plus récemment les applications comme WhatsApp ou WeChat en Chine, <strong>les réseaux sociaux</strong> publics comme Facebook et Linkedln, les réseaux sociaux d’entreprise à l’image de Yammer ou Chatter…</p>
<p>Cette liste n’est évidemment pas limitative car la créativité de start-up, comme Zewaow ou Beclips en France, est sans limites pour proposer aux entreprises, petites et grandes, des solutions collaboratives toujours plus innovantes.</p>
<p>Parmi les impacts très positifs de ces outils collaboratifs sur les relations humaines, on peut citer, entre autres :</p>
<ul>
<li><p><strong>la facilitation</strong>, voire la possibilité nouvelle, de communication instantanée ou asynchrone entre les acteurs internes et externes de l’entreprise ;</p></li>
<li><p><strong>la création de communautés</strong> de travail ou d’intérêts partagés en dehors des structures traditionnelles traduisant ainsi dans la réalité l’organisation informelle mise en évidence par de nombreux chercheurs depuis les travaux pionniers d’Elton Mayo père de l’Ecole des relations humaines ;</p></li>
<li><p><strong>l’identification et la valorisation</strong> de personnes ayant des talents non mobilisés ou cachés dans les systèmes traditionnels de management des talents mis en œuvre par les DRH ;</p></li>
<li><p><strong>la capacité de développer l’innovation</strong> en mettant en relation les acteurs internes et/ou externes sur des projets qui peuvent être disruptifs pour l’entreprise ;</p></li>
<li><p><strong>le rassemblement des personnes</strong> autour d’une vision relevant du bien commun tout en réduisant, dans la mesure du possible, les inévitables jeux politiques internes par le développement d’une plus grande transparence dans les relations entre les acteurs.</p></li>
</ul>
<p>Mais face à cette vision un peu idyllique de l’impact des outils collaboratifs sur les relations humaines dans l’entreprise, il faut bien, comme l’exige la posture du chercheur, mettre l’accent sur certains impacts potentiellement négatifs de ces outils.</p>
<p>Les outils collaboratifs risquent, en effet, entre autres :</p>
<ul>
<li><p>de mettre en difficulté des personnes ou des groupes qui ne sont pas disposés, pour des raisons légitimes, à collaborer conduisant à une nouvelle forme de fracture numérique ;</p></li>
<li><p>de transformer la transparence attendue des échanges en une injonction à tout révéler ce qui peut être en définitive nuisible au fonctionnement harmonieux de l’entreprise ;</p></li>
<li><p>de faire émerger de nouveaux jeux de pouvoir entre des acteurs sachant, pour certains d’entre eux, beaucoup mieux gérer leur e-réputation notamment par leur niveau de centralité dans les réseaux collaboratifs ;</p></li>
<li><p>de créer de nouveaux clans avec l’apparition de communautés hors du contrôle de l’entreprise et pouvant résulter dans des situations de communautarisme très éloignées de la notion de bien commun.</p></li>
</ul>
<h2>Cinq exigences</h2>
<p>À la suite à ces constats, quelles peuvent être alors les exigences sur le plan des relations humaines pour assurer le succès de la mise en œuvre des outils collaboratifs dans l’entreprise ? On peut en citer cinq sans en exclure d’autres qui seraient plus spécifiques du contexte :</p>
<ul>
<li><p>toujours considérer que la technologie n’est qu’une condition nécessaire mais jamais suffisante pour renforcer la collaboration eu sein de l’entreprise, la dimension des relations humaines représente cette condition suffisante ;</p></li>
<li><p>prendre en compte le fait que l’on ne décrète pas la nécessité de collaborer dans l’entreprise encore faut-il que le corps social en soit convaincu ce qui se suppose un travail important préalable sur le plan des relations humaines ;</p></li>
<li><p>s’assurer que la mise en place des outils collaboratifs s’appuie sur une démarche de gestion du changement en apportant des réponses aux questions classiques d’une telle démarche : pourquoi ? qui ? comment ? et quand ? ;</p></li>
<li><p>montrer, par l’exemplarité des comportements des dirigeants, que la collaboration est pratiquée au plus haut niveau de l’entreprise ;</p></li>
<li><p>renforcer les pratiques collaboratives entre les acteurs par des dispositifs RH cohérents : recrutement, formation, évaluation, rémunération, carrières…</p></li>
</ul>
<p>Pour conclure, la collaboration n’est pas naturelle dans l’entreprise même avec les plus beaux outils digitaux. Seule, la qualité des relations humaines au sein de l’entreprise peut faire la différence entre le succès et l’échec des outils collaboratifs. C’est ce qu’avait bien compris le dirigeant la société Indienne HCL Technologies, Vineet Nayar, lorsqu’il a entrepris en 2005 la transformation profonde de son entreprise décrite dans son best-seller <em>Employees First, Customers Second</em></p>
<figure>
<iframe src="https://player.vimeo.com/video/195639138" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Intervention de Charles-Henri Besseyre des Horts.</span></figcaption>
</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/69826/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Charles-Henri Besseyre des Horts ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Analyse des impacts des nouveaux outils collaboratifs sur les relations humaines… et les exigences de relations humaines pour faire fonctionner ces nouveaux outils.Charles-Henri Besseyre des Horts, Professeur Emérite Management & Ressources Humaines, HEC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/714942017-01-22T21:18:12Z2017-01-22T21:18:12ZDu collaboratif à l’université : les académiques doivent-ils devenir des « makers » ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/153733/original/image-20170121-30970-1v4bu7t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=128%2C27%2C1379%2C821&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">ACM Hackathon 2012, à l'Université de Tulsa, Oklahoma.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/bburky_/9001126917/in/photolist-eHp8rp-eeLtD8-eacNGC-3oVL78-bsDnNA-ppzkSh-9EmjFr-g4X9C6-g4WA5S-g4Wub8-ea79ar-eeSczh-ea79fT-ea79jx-eacPiC-eacP7f-ea79zg-eacPju-eeS81G-eeLpg6-ea79s4-ea798D-ea796Z-eacP9U-eacPbN-eacPkG-eeSaE9-bsDeho-bFy15p-4DqVWJ-9EmPTe-h25rG5-57QDcs-gZV3yd-4DqWKd-gZV38y-8Fyjba-buL1JQ-gBfYmz-gBgmnr-4DmEdK-bW5vqP-h1Eq7X-h24LkP-gBfo9A-9EpUES-gBfr9y-5iEX31-4DqVQU-h1EpsR">Blake Burkhart/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Avec l’économie collaborative et l’économie du partage, le capitalisme est en train de connaître une mutation profonde. Plus que jamais, on entreprend, on expérimente, on bricole ensemble, on co-produit, on co-créé de la valeur pour le plus grand nombre, alimentant par-là même de <a href="http://bit.ly/2jjvCPJ">nouvelles pratiques de travail</a>.</p>
<p>Comment nos universités vivent-elles ce retournement ? Deviennent-elles plus collaboratives et ancrées <a href="http://bit.ly/2jjd4za">dans le « faire »</a> ? Faut-il les faire entrer de plain-pied dans ce « nouveau » monde ? A la fin du clivage entre producteurs et clients, salariés et entrepreneurs, faut-il également ajouter celui entre « sachant » et « apprenant » ?</p>
<h2>Les universités : des communautés collaboratives très anciennes</h2>
<p>Pour commencer, j’aimerais rappeler que le fonctionnement en communautés, l’horizontalité (évaluation par les « pairs ») et la préoccupation pour le développement d’un savoir « bien commun » font partie de l’histoire et de la culture du monde universitaire. Il ne faut d’ailleurs pas oublier qu’une partie des acteurs et des pratiques du « nouveau » monde collaboratif ont été façonnées dans la culture voire dans les murs de l’université (cf. notamment l’<a href="http://bit.ly/1ET0tZu">histoire des fab labs</a>).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/153729/original/image-20170121-30959-1ax8l51.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/153729/original/image-20170121-30959-1ax8l51.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/153729/original/image-20170121-30959-1ax8l51.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/153729/original/image-20170121-30959-1ax8l51.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/153729/original/image-20170121-30959-1ax8l51.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/153729/original/image-20170121-30959-1ax8l51.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/153729/original/image-20170121-30959-1ax8l51.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/153729/original/image-20170121-30959-1ax8l51.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Fablab – University of California, Berkeley (octobre 2013).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/kinetoskop/12065521326/in/photolist-jobX8L-6YrS3M-6YrDma-9kHueB-6Ys7Hg-6V7kau-6YrKUt-6YvQXy-5VEfVd-6YrAEi-6YvMXY-5VzTHt-6YrMeF-6Yw9L9-6YvYiy-6YvK9A-6Yw2eW-6Yw325-5VzT9V-6YrN4X-6Ysden-6YvUSw-6YrViK-6YvU5y-6YvREf-6YvLHd-5VzVc8-6YvL1m-5VEgs1-6YrYU2-6YrUqK-6YrNRe-6YwbZy-6YvDPw-6YsiK2-6YvGyy-6YwcNG-6YvHvJ-6Ys3ek-6Ys2vp-6YvZkE-6YwoK5-6Ysptr-6YrRan-6YshRR-6Yscmx-6Ysov6-6YwbbU-7AvSqH-6YsfNP">Manuel Schmalstieg/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Mais en quoi les techniques et les valeurs contemporaines du collaboratif, du partage et du faire peuvent-elles ou doivent-elles être des sources d’inspiration et de régénération ? Faut-il inciter les académiques (et leurs étudiants) à devenir des « makers » ?</p>
<p>La réponse que j’aimerais apporter sera positive, et même très positive. Le faire et plus largement, la <a href="http://bit.ly/2iNPXk2">culture du collaboratif</a> doivent trouver une place plus grande dans nos universités, notamment dans les filières de management et d’économie. Les évolutions actuelles du monde du travail supposent incontestablement des managers plus entrepreneurs et <em>makers</em> que jamais. Cependant, il est primordial de cultiver conjointement au faire une culture de la concentration et de la vigilance qui est d’ailleurs une composante possible de la culture <em>maker</em>.</p>
<h2>De la nécessité d’une plus grande culture du « faire » à l’université</h2>
<p>Oui, la culture du « faire » ensemble et ses traductions contemporaines sous forme d’ateliers de co-création, de co-design, de démarches liées au design thinking, doivent plus que jamais avoir leur place dans nos universités. Pas seulement (point essentiel) parce qu’elles collent à des tendances économiques fortes : <a href="http://bit.ly/2j84eGt">DIY, do-ocracy</a>, entrepreneuriat collaboratif, processus d’innovations ouvertes, pratiques de travail plus créatives, relance de nos économies par les initiatives locales… Mais aussi parce qu’elles contribuent à façonner des collectifs d’entraide, des apprentissages horizontaux et des réflexes de vie et de travail en communautés. Ces communautés, du moment qu’elles préservent des mécanismes transparents d’échanges et de discussion, sont des points de régulation essentiels du capitalisme et de ses nécessaires transgressions.</p>
<p>Par ailleurs, le faire permet des pédagogies plus continues et horizontales. On apprend en permanence ensemble, dans tous les espaces de l’université. Chaque couloir, cafétéria, bureau, parking ou cour intérieure, peut être repensé par ses gestionnaires et ses occupants comme un espace de partage et d’expérimentation. Des espaces connexes comme les résidences étudiantes sont de plus en plus intégrés dans le mouvement. Avec les MOOC et les <em>serious games</em>, le numérique introduit également des possibilités d’apprentissages collectifs qui dépassent l’espace et le temps habituels de l’université.</p>
<p>Ainsi, développer des opportunités d’innovation et d’entrepreneuriat sur le campus (des fab labs, des espaces de coworking, des <em>maker spaces</em>, des learning hubs, des hackatons, des labs éphémères, du place-making…) permet incontestablement d’ouvrir et de régénérer les pratiques de l’université. L’effet sera d’autant plus fort si les nouveaux lieux et les événements dépassent la communauté locale d’enseignants et d’étudiants pour s’ouvrir à la ville, ses citoyens, ses entrepreneurs, ses innovateurs, ses chômeurs, des retraités, des handicapés, ses exclus… Le plus des précieux des savoirs restera toujours celui qui relie et inclue.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/153730/original/image-20170121-30970-1iadc0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/153730/original/image-20170121-30970-1iadc0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/153730/original/image-20170121-30970-1iadc0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/153730/original/image-20170121-30970-1iadc0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/153730/original/image-20170121-30970-1iadc0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/153730/original/image-20170121-30970-1iadc0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/153730/original/image-20170121-30970-1iadc0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/153730/original/image-20170121-30970-1iadc0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Geophysics hackathon à Houston, septembre 2013.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/kwinkunks/9889934116/in/photolist-g4WuRs-g4Wvk3-g4WtLa-g4WvAn-g4WvkH-g4Wrbv-g4WzLh-g4Wzn1-g4Wrwk-g4Wywm-g4X6Gg-g4WrEg-g4WzQ3-g4XaAP-g4Wriz-ea798n-ea79AK-g4WB7o-eacNLf-eeSoLU-ea79FX-g4XcnV-3863Be-eeLBJB-g4WBt5-eeSnWJ-ea7996-eeSst1-ea792Z-eeSbFW-g4WwA9-g4X5KB-g4WwMv-g4WBks-g4Wwwv-g4WtZ6-g4WsDa-g4WAnY-g4WB4A-g4WxMh-ea79LM-eeLkcX-g4WxwX-eacNNC-eeSeYL-eacNPS-ea79gR-eeSgG5-eacPnY-g4WDk9">Matt/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Cultiver les capacités d’attention et de vigilance, le pendant du « faire »</h2>
<p>Si je reste profondément enthousiaste à l’idée du collaboratif et face au développement d’une économie de plus en plus collaborative, j’aimerais lancer une invitation qui peut-être essentielle pour le succès même du collaboratif dans nos universités.</p>
<p>Oui, il est très heureux que nos étudiants assistent encore (peut-être moins) à des <a href="http://bit.ly/2d8OC0X">cours en présentiel</a>, à une parole immédiate, partagée ensemble. Qu’ils suivent des enseignements parlés de deux voire trois heures, en particulier en sciences humaines et sociales. Assis dans un petit amphithéâtre, avec le très éphémère (mais utile) inconfort de l’immobilité.</p>
<p>Plus que jamais, dans un monde qui va vers le « faire » (et auquel il serait irresponsable de ne pas adapter nos étudiants), pouvoir comprendre par, avec et contre une parole est essentiel. Avoir des discussions animées par une personne qui assume parfois le caractère « expérimenté » de sa médiation également. Ce processus n’est pas seulement crucial pour des raisons cognitives, notamment l’apprentissage de la concentration. Il l’est aussi et surtout parce qu’agir ensemble et réguler cet agir ensemble (contre des dérives locales de harcèlement ou l’émergence plus sociétale d’un totalitarisme) suppose une forme de transcendance qui dépasse le seul faire et sa conscience immédiate.</p>
<p>Bien sûr, une partie des techniques, du vocabulaire et des valeurs du collaboratif peuvent s’inscrire pleinement dans cette logique. Mais les cours de sciences humaines et sociales doivent garder ou retrouver une place dans les cursus de formation, en particulier en management et en économie. Sans doute avec des adaptations de contenus. Les nouvelles pratiques de travail et le nouveau monde dans lequel nous entrons supposent des concepts et des théories à même d’en saisir toute la fluidité, la connectivité, la performativité, la matérialité et la corporalité.</p>
<h2>Par le faire, dans la parole : une université entrepreneuriale, conscience de nos sociétés</h2>
<p>En conclusion, il serait dangereux d’opposer les deux tendances : une université qui devient (ou doit devenir) collaborative et constitutive d’apprentissages en communautés, et une autre qui devrait laisser l’étudiant responsable de ses choix individuels (en le formant à et par les sciences sociales). L’une et l’autre ne peuvent que s’enrichir, prendre plus de sens par leur coprésence. Si l’université est historiquement une communauté, donnons-lui les moyens de s’adapter au temps présent sans abandonner une ambition essentielle : être une des consciences de nos sociétés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/71494/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Xavier de Vaujany est président du réseau académique et Think Tank RGCS (<a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/">https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/</a>). . </span></em></p>Faut-il faire entrer plus systématiquement la culture du « faire » et des makers à l’université ? Oui, mais de quelle façon ?François-Xavier de Vaujany, Professeur, PSL-Université Paris-Dauphine (DRM), Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.