tag:theconversation.com,2011:/africa/topics/logement-28772/articleslogement – The Conversation2024-02-18T15:48:42Ztag:theconversation.com,2011:article/2226622024-02-18T15:48:42Z2024-02-18T15:48:42ZPénurie de logements pour les étudiants : et si la France s’inspirait du modèle coopératif ?<p>Dans un contexte où la <a href="https://basta.media/podcast-speculation-immobiliere-logement-airbnb">spéculation immobilière</a> et les <a href="https://www.mediapart.fr/journal/politique/310124/crise-du-logement-le-rapport-de-la-fondation-abbe-pierre-denonce-l-inertie-du-gouvernement">pénuries de logements sociaux</a> – notamment <a href="https://theconversation.com/les-jeunes-en-premiere-ligne-face-a-la-crise-du-logement-217317">étudiants</a> – créent de nombreuses difficultés pour une part croissante de la population française, considérer des <a href="https://www.cairn.info/l-archipel-residentiel--9782200633769-page-205.htm">modèles alternatifs</a> de logements s’impose. Les coopératives d’habitants développées en Amérique du Nord depuis le début du XIX<sup>e</sup> siècle, notamment celles pour étudiants, sont un modèle qui <a href="https://keeplearning.em-lyon.com/project/reorganiser-le-logement-apres-la-Covid-19%E2%80%AF-vivre-ensemble-pour-lutter-contre-lisolement-et-la-precarite/">mériterait d’être davantage développé en France</a>.</p>
<h2>Des femmes à l’origine du modèle</h2>
<p>Issues de projets pour promouvoir l’autonomie des classes populaires, <a href="https://books.google.fr/books/about/Hasten_Slowly_and_You_Will_Soon_Arrive.html?id=ADHbxwEACAAJ">l’éducation et l’émancipation des femmes et des paysans</a>, aux États-Unis, les premières coopératives de logement ont émergé dans les années 1830. Les balbutiements du mouvement de logement coopératif aux États-Unis sont liés à <a href="https://sites.northwestern.edu/northwesternlibrary/2020/05/22/on-the-same-terms-housing-northwesterns-women-1872-1993/">l’émancipation des femmes</a>. Le développement d’un modèle d’habitat en autogestion coopérative est associé au travail de la militante Mary Lyon pour rendre les études supérieures accessibles aux femmes sans accès aux ressources de la bourgeoisie. Entre 1837 et 1849, celle-ci promeut le développement d’une communauté de femmes basée sur des <a href="https://www.massmoments.org/moment-details/first-students-arrive-at-mt-holyoke-seminary.html">principes coopératifs de partage des tâches domestiques</a> pour les étudiantes de l’université Mount Holyoke, ce qui permet aux résidentes issues du monde rural de poursuivre leurs études.</p>
<p>Ce système de partage des tâches reste encore aujourd’hui très présent dans de nombreux modèles coopératifs aux États-Unis, et notamment dans les coopératives où tous les espaces sauf les chambres sont mutualisés : cuisines, salles de bains, salles communes, bureaux, etc. Cette <a href="https://theconversation.com/leconomie-circulaire-stagne-et-si-le-modele-cooperatif-servait-dinspiration-206641">mutualisation</a> des espaces, l’achat de nourriture collectif et le partage des charges ainsi que des tâches de ménage et de préparation des repas, permet de réduire les coûts par rapport à un logement classique. Cela permet non seulement une résilience, mais un <a href="https://us.sagepub.com/en-us/nam/encyclopedia-of-community/book220816">déploiement des logements coopératifs</a>.</p>
<h2>Chicago, déjà précurseuse au XIXᵉ siècle</h2>
<p>Ce modèle s’affine jusqu’à mener à un contrôle autogéré du logement par ses membres, qui émerge en 1892 au sud de Chicago. Sept femmes louent alors collectivement un étage dans un immeuble pour mettre en pratique le mode de vie coopératif. Elles sont proches de <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/peace/1931/addams/biographical/">Jane Addams</a>, une féministe pionnière du travail social aux États-Unis et prix Nobel de la Paix en 1931. Ce lieu de vie, surnommé le « Jane Club », passe de 7 à 33 membres en moins d’un an, occupant rapidement tout l’immeuble, avant de déménager dans un autre édifice proche de <a href="https://www.britannica.com/topic/Hull-House">Hull House</a>, un centre d’innovations sociales majeures du tournant du XIX<sup>e</sup> et XX<sup>e</sup> siècle. Logeant certaines des femmes pionnières dans les mouvements syndicalistes à Chicago, cette coopérative de logement est décrite comme un lieu de vie très peu cher qui permet à ces femmes de <a href="https://www.jstor.org/stable/41179156">vivre en autonomie</a>, même quand leur participation à des grèves met en péril leurs sources de revenus. Les modestes loyers que ces femmes paient permettent de surcroît de <a href="https://digital.janeaddams.ramapo.edu/items/show/1589">financer la crèche organisée</a> par <a href="https://journals.lww.com/ajnonline/citation/1901/11000/the_jane_club_of_hull_house.4.aspx">Hull House</a>. Cette coopérative fonctionnera pendant 45 ans, jusqu’en 1937, et elle inspirera le modèle d’une coopérative en autogestion, où les membres se réunissent pour prendre toutes les décisions sur leur logement.</p>
<h2>La Grande Dépression accélère l’essor des coopératives</h2>
<p>Après ces premières coopératives développées pour <a href="https://search.library.wisc.edu/digital/AKHUTRNH2BOIEV84/pages/AQZDZFYHSX5MR58I">rendre accessibles les études supérieures aux femmes</a>, la Grande Dépression est une période cruciale d’expérimentations. Le modèle coopératif s’ouvre de plus en plus aux <a href="https://search.library.wisc.edu/digital/AZTYXY452FEBLJ8N/pages/AEOPIRFSYPGYLB9E">hommes</a> issus des milieux populaires, notamment autour des campus où il y a d’importants besoins de <a href="https://vcencyclopedia.vassar.edu/notable-events/cooperative-living-projects/">logements accessibles pour les étudiants</a>. Ces coopératives étudiantes – souvent soutenues par les universités (dons ou prêts de bâtiments, soutiens d’alumni, de professeurs ou doyens impliqués <a href="https://michigantoday.umich.edu/2010/09/08/a7851/">contre la précarité</a> des étudiants) – s’appuient sur la culture paysanne du monde rural.</p>
<p>Un rapport du <a href="https://fraser.stlouisfed.org/title/student-cooperatives-united-states-1941-4227">United States Department of Labor de 1943</a> fait le point sur l’effervescence des coopératives étudiantes recensées en 1941 : au début des années trente, des groupes d’étudiants issus du monde agricole ont fondé de nombreuses coopératives. Certains louent un terrain à bas prix et construisent et gèrent eux-mêmes leur maison selon les principes coopératifs, mutualisant les denrées alimentaires venant de leur famille située dans les campagnes alentour, créant un potager collectif, et cuisinant à tour de rôle. Ayant de faibles revenus, ces membres s’entraident en partageant des aliments issus de leur famille, en jardinant, et en bricolant.</p>
<p>D’autres négocient de restaurer d’anciens bâtiments tombant en ruine, bricolent pour les équiper en eau et en électricité, et en échange multiplient les logements coopératifs autour de différents campus. Un groupe partageant un petit appartement et mettant en commun leurs ressources a fini par être à l’origine d’un système coopératif hébergeant 650 membres en 1941, s’appropriant progressivement jusqu’à cinq immeubles convertis peu à peu en espaces coopératifs. Ce <a href="https://fraser.stlouisfed.org/title/student-cooperatives-united-states-1941-4227">rapport</a> de 1943 dénombre 510 coopératives sur 144 campus et dans 44 états.</p>
<h2>Une expansion du modèle à d’autres secteurs</h2>
<p>Les années 30 sont aussi un moment où les coopératives agricoles, les coopératives de consommateurs et de travailleurs se déploient aux États-Unis, sous la pression d’un contexte économique très dur. Le promoteur des coopératives de logement <a href="https://books.google.fr/books/about/Hasten_Slowly_and_You_Will_Soon_Arrive.html?id=ADHbxwEACAAJ">Jim Jones</a> documente avec soin ces collaborations multiples entre différentes formes de coopératives : parrainages, publicité, financement de la part des coopératives agricoles et de consommateur. À New-York, la mouvance coopérative naît en <a href="https://press.princeton.edu/books/hardcover/9780691234748/working-class-utopias">collaboration avec des mouvements syndicalistes</a>. Les campus sont aussi des hubs coopératifs, où se déploient non seulement des logements, mais aussi des barbiers, des librairies, des magasins de vélo et des supermarchés coopératifs. Cela permet souvent une collaboration entre ces différentes structures – l’un des <a href="https://www.nasco.coop/resources/rochdale-principles">sept principes</a> établis par une coopérative pionnière à Rochdale en 1844, et qui restent <a href="https://www.madisoncommunity.coop/cooperative-community">encore aujourd’hui</a> la feuille de route de nombreuses <a href="https://cloyne.org/rochdale-principles/">coopératives de logement</a>.</p>
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<p>Méconnue mais loin d’avoir reculé, la culture coopérative <a href="https://www.nasco.coop/">continue de se déployer</a> aux États-Unis. Aujourd’hui, il est estimé qu’entre <a href="https://betterworld.coop/sectors/sector-housing/">1,5 et 2 millions de personnes</a> vivent en coopérative de logement aux États-Unis. Si les modèles financiers des coopératives sont <a href="https://www.nasco.coop/fr/development/handbook/equity">variés</a>, elles ont souvent vocation à se déployer pour <a href="https://www.safetyandhealthfoundation.org/BadgerSummer2009.pdf">lutter contre la spéculation immobilière</a> et maintenir des logements abordables pour le plus de personnes possible. À New York City, c’est l’ambition de Co-op City, aujourd’hui considérée comme la <a href="https://press.princeton.edu/books/hardcover/9780691234748/working-class-utopias">plus large coopérative de logement au monde</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1600780717600157696"}"></div></p>
<p>De même, les coopératives étudiantes se sont structurées en mouvement et continuent de se <a href="https://www.nasco.coop/resources/expansion">déployer dans de nombreuses villes</a> nord-américaines. Certaines coopératives démarrées dans les années 1930 se sont mises en réseau, elles achètent de nouveaux bâtiments, font construire de nouvelles coopératives, et ont offert un logement à bas prix dans de plus en plus de villes au fil du XX<sup>e</sup> siècle (par exemple autour des universités à <a href="https://www.austincooperatives.coop/">Austin</a>, <a href="https://www.madisoncommunity.coop/">Madison</a> ou <a href="https://icc.coop/">Ann Arbor</a>). À Berkeley, plus de <a href="https://bsc.coop/about-us/our-mission">1300 étudiants</a> sont actuellement hébergés au sein de coopératives – soit environ 2,8 % des étudiants de l’Université, et il est estimé que ces coopératives étudiantes permettent aux étudiants de payer leur logement <a href="https://betterworld.coop/sectors/sector-housing/">50 % moins cher</a> que le marché classique.</p>
<p>Promouvant la non-spéculation immobilière, <a href="https://us.sagepub.com/en-us/nam/encyclopedia-of-community/book220816">l’expansion de l’accès aux logements peu onéreux</a> – notamment pour les étudiants, les femmes, et les minorités les moins privilégiées – et une révolution du <a href="https://icor.ieseg.fr/wp-content/uploads/sites/12/2023/02/ABSTRACT-Lisa-Buchter.pdf">partage des tâches domestiques</a>, la culture coopérative pourrait-elle <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2009/12/28/l-habitat-groupe-ou-comment-vivre-ensemble-chacun-chez-soi_1285440_3224.html">se développer</a> en France ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222662/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lisa Buchter ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans un contexte où la spéculation immobilière et les pénuries de logements sociaux créent de nombreuses difficultés pour les étudiants, considérer des modèles alternatifs de logements s’impose.Lisa Buchter, Professeure associée en sociologie, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2201112024-02-06T18:35:33Z2024-02-06T18:35:33ZQuébec interdit aux villes de s’entendre avec Ottawa sans son autorisation, notamment en matière de transport et de logement. Un exemple à suivre ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/572237/original/file-20240130-15-owgadi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C3731%2C2482&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Québec et Ottawa ont longuement négocié avant de conclure une entente pour débloquer 900 millions de dollars provenant du Fonds pour accélérer la construction de logements, ce qui a occasionné des délais supplémentaires, en pleine crise du logement.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Les provinces canadiennes devraient-elles suivre l’exemple du Québec et interdire aux villes de signer des ententes directement avec le gouvernement fédéral, <a href="https://www.cbc.ca/news/politics/premiers-carbon-tax-federal-housing-policy-1.7020068">comme le suggèrent certains premiers ministres</a> ? </p>
<p>Cette question m’a été posée lors <a href="https://canurb.org/initiatives/citytalk-canada/">d’une conférence organisée par l’Institut urbain du Canada (IUC)</a>. J’y étais invitée en ma qualité de professeure en administration municipale et régionale à l’École nationale d’administration publique et spécialiste des politiques visant l’intégration des transports et de l’aménagement du territoire.</p>
<p>Selon la <a href="https://www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/lc/M-30">Loi sur le ministère du conseil exécutif</a>, appelée communément « M-30 », il est interdit à un organisme municipal québécois de conclure une entente avec un autre gouvernement au Canada, sans l’autorisation préalable du gouvernement du Québec. Cette disposition, adoptée en 1984 par l’Assemblée nationale du Québec, alors que le Parti québécois de René Lévesque formait le gouvernement, visait à faire respecter la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_constitutionnelle_de_1867">Loi constitutionnelle de 1867</a> qui stipule que les institutions municipales relèvent exclusivement des provinces. En imposant la nécessité de conclure une entente au préalable entre Québec et Ottawa, M-30 tente d’empêcher l’ingérence du fédéral dans ce champ de compétence provinciale.</p>
<p>Ma réponse spontanée à cette question a été catégorique : « Absolument pas. Cette situation ne fait que des perdants. Le Québec devrait opter soit pour l’indépendance, soit accepter le jeu du fédéralisme canadien, même s’il est dysfonctionnel, en permettant aux municipalités de recevoir directement les fonds d’Ottawa, malgré que cela puisse empiéter sur ses compétences ». <a href="https://canurb.org/fr/team/mary-rowe/">Mary Rowe</a>, la présidente et directrice générale de l’IUC, qui animait la conférence, a répondu avec humour que cette position pourrait m’exclure de plusieurs invitations à dîner…</p>
<h2>Le bilan peu reluisant du Québec</h2>
<p>Ma réponse était teintée d’une certaine frustration face au fait que Québec et Ottawa ont longuement négocié avant de conclure une entente pour débloquer 900 millions de dollars provenant du <a href="https://www.cmhc-schl.gc.ca/professionnels/financement-de-projets-et-financement-hypothecaire/programmes-de-financement/toutes-les-opportunites-de-financement/fonds-pour-accelerer-la-construction-de-logements">Fonds pour accélérer la construction de logements</a>. L’<a href="https://www.pm.gc.ca/fr/nouvelles/communiques/2023/11/09/canada-et-quebec-annoncent-la-conclusion-dune-importante-entente">entente</a>, qui permettra aux villes québécoises de bénéficier de la contribution fédérale via la Société d’habitation du Québec, est intervenue en octobre 2023, alors que d’autres villes canadiennes ont pu profiter du FALC dès le mois de juin 2023. Bien que le délai puisse paraître court, il est considérable pour les personnes en attente d’un logement.</p>
<p>Par ailleurs, cette entente en matière de construction accélérée de logement est assortie de l’engagement du gouvernement du Québec à investir autant qu’Ottawa — <a href="https://www.ledevoir.com/politique/800136/pas-conditions-quebec-entente-ottawa-logement">ce seront donc 1,8 G$ qui serviront à résoudre la crise du logement</a>. Les premiers ministres des autres provinces sont-ils prêts à en faire autant ? La question se pose. </p>
<p>Ma patience est également mise à l’épreuve par le bilan peu reluisant du Québec (et le mot est faible) en <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2035123/transport-commun-routes-investissements">matière de gouvernance, de planification et d’investissements dans les infrastructures de transports collectifs</a>. Ce retard ne date pas d’hier. Alors que d’autres provinces canadiennes investissaient dans le développement d’infrastructures lourdes en transport collectif grâce au programme fédéral <a href="https://www.infrastructure.gc.ca/prog/bcf-fcc-fra.html">Fonds Chantiers Canada</a>, le gouvernement du Québec a plutôt choisi de <a href="https://www.transitquebec.org/2012/02/developpement-des-infrastructures-quebec-doit-se-servir-du-fonds-chantiers-canada-pour-financer-les-transports-collectifs/">privilégier son réseau routier</a>. </p>
<p>Dans ce contexte, le régime québécois de planification des transports pourrait bénéficier d’exigences fédérales en matière de planification des infrastructures à l’échelle métropolitaine, à l’instar des États-Unis où les agglomérations urbaines de plus de 50 000 habitants <a href="https://www.transit.dot.gov/regulations-and-guidance/transportation-planning/metropolitan-planning-organization-mpo">doivent répondre à plusieurs critères pour recevoir des fonds du gouvernement</a>. </p>
<p>Jusqu’à maintenant, aucun ministre des Infrastructures fédéral n’a osé imposer de telles exigences de planification et de priorisation aux grandes régions métropolitaines du Canada, puisqu’elles sont sous la juridiction exclusive des provinces.</p>
<h2>Des villes plus autonomes</h2>
<p>La protection jalouse de ses compétences a permis au Québec de se développer de manière unique, avec des institutions, des infrastructures et des programmes qui lui sont propres, comme les Centres de la petite enfance, le régime d’assurance médicaments, le réseau de l’Université du Québec, les cégeps, la Caisse de dépôt et placement du Québec et Hydro-Québec.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Des enfants tenant une corde déambulent sur un trottoir, en compagnie de deux adultes" src="https://images.theconversation.com/files/572238/original/file-20240130-29-3r2a3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/572238/original/file-20240130-29-3r2a3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/572238/original/file-20240130-29-3r2a3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/572238/original/file-20240130-29-3r2a3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/572238/original/file-20240130-29-3r2a3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/572238/original/file-20240130-29-3r2a3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/572238/original/file-20240130-29-3r2a3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des enfants d’un CPE montréalais déambulent dans la rue. La protection jalouse de ses compétences a permis au Québec de se développer de manière unique, avec des institutions, des infrastructures et des programmes qui lui sont propres, comme les Centres de la petite enfance.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>En matière d’affaires municipales, on pourrait même avancer que le Québec est la province où les villes ont le plus d’autonomie et de reconnaissance depuis l’adoption récente de la <a href="https://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-39-43-1.html">Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale et d’autres dispositions législatives</a> qui leur offre davantage de latitude et de possibilités en matière de financement, notamment avec l’octroi d’une part de la croissance d’un point de la taxe de vente du Québec (TVQ). </p>
<p>À cela s’ajoutent les dispositions de la <a href="https://www.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/fileadmin/Fichiers_client/lois_et_reglements/LoisAnnuelles/fr/2017/2017C13F.PDF">Loi</a> visant principalement à reconnaître que les municipalités sont des gouvernements de proximité et à augmenter à ce titre leur autonomie et leurs pouvoirs en termes de taxation et de redevances. Les villes québécoises ont ainsi la possibilité de <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/capa.12521">diversifier leurs sources de revenus et de répondre à certains objectifs de politique publique, notamment via l’écofiscalité</a>. </p>
<p>En somme, une plus grande autonomie vient avec de plus grandes responsabilités et avec une certaine obligation d’efficacité et de performance, qu’elle soit sociale ou environnementale, sans quoi l’ingérence du fédéral pourrait paraître légitime, comme dans certaines provinces dirigées par des gouvernements qui peinent à reconnaître la crise du logement. Le gouvernement du Québec aurait-il investi 900 millions de dollars, n’eût été l’initiative du gouvernement du Canada ?</p>
<h2>Les bons — et mauvais côtés de l’autonomie des provinces</h2>
<p>Le Québec a fait le choix de rester dans le Canada, bien que l’histoire aurait pu être différente <a href="https://www.gallimardmontreal.com/catalogue/livre/les-secrets-d-option-canada-lester-normand-philpot-robin-9782895492238">si la Loi québécoise des consultations populaires avait été respectée par le camp du NON</a> lors du dernier référendum sur la souveraineté, en 1995. Dans ce contexte, un front commun des provinces pour une décentralisation accrue pourrait renforcer la position du Québec et sa capacité d’autodétermination, quoique ce qu’on a appelé <a href="https://lactualite.com/politique/nuit-des-longs-couteaux-la-vraie-histoire/">« la Nuit des longs couteaux »</a> (la conférence entre premiers ministres provinciaux et Ottawa en 1981) a prouvé le contraire. </p>
<p>Au final, le degré de succès de l’autonomie des provinces dépendra des valeurs portées par les gouvernements fédéral et provinciaux élus, et de la réelle capacité d’action des gouvernements provinciaux. Si l’ingérence fédérale peut être perçue comme salvatrice lorsque les gouvernements provinciaux faillent à la tâche, comme dans le cas du logement et du transport collectif, par exemple, elle peut représenter une menace au bon fonctionnement des programmes ou à l’atteinte de cibles environnementales, comme la possibilité pour le gouvernement fédéral d’abolir la taxe carbone.</p>
<p>La même analyse peut être appliquée aux interventions du gouvernement fédéral dans ses propres champs de compétences, comme la gestion de la frontière et des permis de travail, qui ont des conséquences sur les objectifs politiques des provinces. </p>
<p>Actuellement, avec le <a href="https://www.ledevoir.com/politique/quebec/803290/pq-devance-nouveau-caq-sondage">Parti Québécois en tête dans les sondages au Québec</a> et le <a href="https://abacusdata.ca/conservatives-lead-by-19-abacus-data-poll/">Parti conservateur en avance au Canada</a>, le moment semble propice pour rouvrir cette conversation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220111/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fanny Tremblay-Racicot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’interdiction aux villes québécoises de signer des ententes directement avec le gouvernement fédéral a nui au développement du transport collectif, ainsi qu’à la construction de logements.Fanny Tremblay-Racicot, Professeure agrégée, administration municipale et régionale, École nationale d'administration publique (ENAP)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2213902024-02-01T18:59:23Z2024-02-01T18:59:23ZLes classements des villes sur leur qualité de vie nous informent souvent mal sur leur développement durable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/569946/original/file-20240108-27-dzn9ni.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C0%2C2751%2C1553&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les palmarès des villes se concentrent souvent sur les facteurs économiques et de développement et négligent la durabilité et l'environnement.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Chaque année, des indices sont publiés afin de classer les villes du monde selon leur <a href="https://www.theglobeandmail.com/investing/article-most-livable-cities-canada-2023/">habitabilité</a>, leur <a href="https://www.arcadis.com/en/knowledge-hub/perspectives/global/sustainable-cities-index">durabilité</a>, leur <a href="https://innovation-cities.com/worlds-most-innovative-cities-2022-2023-city-rankings/26453/">innovation</a> et leur qualité de vie en général. Les grandes villes canadiennes comme Vancouver, Calgary et Toronto sont <a href="https://www.cicnews.com/2023/12/3-canadian-cities-ranked-among-the-most-liveable-in-the-world-1241721.html">souvent</a> en <a href="https://www.cicnews.com/2023/12/3-canadian-cities-ranked-among-the-most-liveable-in-the-world-1241721.html">tête de ces listes</a>, en dépit de leur <a href="https://www.vancouverisawesome.com/local-news/vancouver-ranks-3rd-most-expensive-city-in-north-america-5490661">coût élevé de la vie</a>.</p>
<p>Le classement des <a href="https://macleans.ca/canadas-best-communities-in-2021-full-ranking/">meilleures collectivités du Canada</a> établi par le magazine <em>Maclean’s</em> évalue 415 collectivités en fonction de divers indicateurs, notamment la prospérité économique, l’accessibilité du logement, la fiscalité, la mobilité durable, la sécurité publique ainsi que l’accès aux services de santé et aux activités culturelles et de loisirs.</p>
<p>Ces indicateurs et indices de qualité de vie peuvent être utiles pour comparer les villes ou choisir un lieu de résidence. Néanmoins, si les villes basent leurs politiques sur de tels critères, cela pourrait conduire à un développement non durable.</p>
<h2>Différences entre durabilité et qualité de vie</h2>
<p>Une <a href="https://doi.org/10.1016/j.ecolind.2020.106879">étude récente</a> a mis en lumière les critères environnementaux et socio-économiques couramment utilisés, en utilisant des indicateurs tels que les espaces verts, le recyclage, l’utilisation des transports publics, le taux de chômage et le taux de criminalité.</p>
<p>Une autre récente <a href="https://www.espon.eu/programme/projects/espon-2020/applied-research/quality-of-life">étude internationale</a> réalisée par l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Observatoire_en_r%C3%A9seau_de_l%27am%C3%A9nagement_du_territoire_europ%C3%A9en#:%7E:text=L%27Observatoire%20en%20r%C3%A9seau%20de,de%20la%20politique%20r%C3%A9gionale%20europ%C3%A9enne.">Observatoire en réseau de l’aménagement du territoire européen</a> a évalué les villes selon des critères comme l’emploi, le logement, l’accès aux soins de santé et la sécurité. Les indicateurs comprenaient, entre autres, le coût de la vie, le revenu des ménages et la qualité des services publics.</p>
<p>Beaucoup des indicateurs de ces classements sont utilisés pour mesurer à la fois le développement durable et la qualité de vie dans une ville. Cette convergence peut s’expliquer par la <a href="https://www.iisd.org/articles/deep-dive/pathways-sustainable-cities">base commune de ces deux concepts</a> : il s’agit essentiellement de la manière dont une ville satisfait les besoins essentiels de ses habitants, que ce soit en matière de logement, de transport, de santé, d’éducation et de loisir.</p>
<p>La capacité à satisfaire ces besoins dépend fortement de facteurs économiques, comme le revenu, la richesse et le coût de la vie, qui jouent un rôle clé dans l’évaluation de la durabilité et de la qualité de vie des villes. </p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/568733/original/file-20240110-21-uisy1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un couple de personnes âgées se promenant dans un parc avec un vélo" src="https://images.theconversation.com/files/568733/original/file-20240110-21-uisy1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568733/original/file-20240110-21-uisy1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568733/original/file-20240110-21-uisy1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568733/original/file-20240110-21-uisy1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568733/original/file-20240110-21-uisy1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568733/original/file-20240110-21-uisy1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568733/original/file-20240110-21-uisy1i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le développement visant à améliorer la vie urbaine peut parfois se faire au détriment de la durabilité.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Malgré ces points communs, des <a href="https://researcharchive.lincoln.ac.nz/server/api/core/bitstreams/81da68e3-f4cb-4b2c-a67b-506d41bd84e4/content">contradictions</a> apparaissent. Des initiatives visant à améliorer la vie urbaine — l’expansion des infrastructures par exemple — peuvent parfois se faire au détriment de l’environnement, ce qui va à l’encontre des principes du développement durable.</p>
<p>En outre, l’accent mis sur la durabilité ne garantit pas nécessairement l’amélioration des conditions de vie. En effet, la durabilité peut requérir la réduction de la consommation de certains biens et services, une diminution de la taille des logements pour densifier les quartiers, ou l’instauration de taxes pour diminuer la pollution. </p>
<p>Ces mesures, quoique bénéfiques pour l’environnement, peuvent réduire le confort individuel et augmenter le coût de la vie, impactant ainsi la qualité de vie des habitants.</p>
<h2>Les caractéristiques des villes durables et agréables à vivre</h2>
<p>Nous avons récemment mené une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0264275123004201">étude visant à répondre à la question suivante</a> : quelles sont les caractéristiques des villes les plus performantes en termes de qualité de vie et de durabilité ?</p>
<p>Pour répondre à cette question, nous avons analysé les similitudes et les différences entre les facteurs qui sous-tendent les classements en matière de durabilité et de qualité de vie pour 171 villes canadiennes de plus de 25 000 habitants.</p>
<p>Nos résultats révèlent une corrélation positive et statistiquement significative entre la qualité de vie urbaine et les indicateurs de développement durable dans les villes canadiennes. Cependant, des contradictions importantes existent concernant la durabilité des modes de vie dans les trois principales dimensions du développement durable : économique, sociale et environnementale.</p>
<p>Par exemple, Wood Buffalo, en Alberta, se classe dans les 20 % des villes les plus performantes en matière de durabilité, principalement en raison de ses revenus élevés et de sa population instruite, malgré une faible performance environnementale. En revanche, elle se situe dans les 20 % inférieurs pour la qualité de vie à cause du coût élevé de la vie et du manque d’équipements culturels. </p>
<p>Kamloops, en Colombie-Britannique, a obtenu de bons résultats en matière de qualité de vie, grâce à son abordabilité, la qualité de l’éducation et des soins de santé, et sa richesse culturelle. En revanche, elle se situe dans les 20 % inférieurs pour la durabilité, en raison des défis liés à la gestion des déchets, de l’énergie et de l’écologisation.</p>
<p>Les évaluations de la qualité de vie sont principalement basées sur des dimensions économiques et prennent en compte des indicateurs tels que le taux de chômage et le revenu moyen. Certains indicateurs concernent également la dimension sociale du développement durable, notamment la criminalité, l’accessibilité du logement, la santé et les arts. </p>
<p>Toutefois, certains aspects sociaux fondamentaux du développement durable, comme la répartition de la richesse et l’éducation, ne sont pas abordés directement.</p>
<p>La dimension environnementale est également largement négligée, à l’exception de la mobilité durable (par exemple, combien de personnes utilisent les transports publics). Il y a également absence de mesures directes des émissions de gaz à effet de serre, de la qualité des espaces verts ou de la qualité de l’eau d’une ville.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/568734/original/file-20240110-21-au3gwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un trottoir de ville très fréquenté" src="https://images.theconversation.com/files/568734/original/file-20240110-21-au3gwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568734/original/file-20240110-21-au3gwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568734/original/file-20240110-21-au3gwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568734/original/file-20240110-21-au3gwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568734/original/file-20240110-21-au3gwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568734/original/file-20240110-21-au3gwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568734/original/file-20240110-21-au3gwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les indices de qualité de vie peuvent être utiles pour comparer les villes. Toutefois, si les villes fondent leur politique sur de telles mesures, cela pourrait conduire à un développement non durable.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Les villes devraient donner la priorité à la durabilité</h2>
<p>Ces différences entre la qualité de vie et le développement durable sont préoccupantes pour deux raisons principales. Tout d’abord, comme les gens peuvent utiliser ces classements pour décider où vivre, les villes bien classées, mais dont la durabilité est faible peuvent paraître attrayantes. </p>
<p>Deuxièmement, comme les villes cherchent généralement à attirer des résidents, elles peuvent être tentées de prendre des décisions basées sur des variables qui améliorent leur classement en matière de qualité de vie au détriment du développement durable. </p>
<p>Les villes les mieux classées sont susceptibles de maintenir le statu quo en ce qui concerne leur stratégie de développement afin de rester en tête de liste. En outre, les villes moins bien classées sont susceptibles d’imiter les façons de faire des villes les plus performantes.</p>
<p>Toutefois, ces objectifs ne sont pas toujours compatibles avec la durabilité urbaine, qui prend en compte des préoccupations environnementales et collectives plus larges, telles que la préservation de la qualité de l’environnement et la réduction de la pression sur les ressources naturelles et les espaces verts.</p>
<p>Cela signifie que la qualité de vie n’est pas durable si elle ne tient pas compte des impacts environnementaux tels que la gestion des déchets et l’utilisation de la voiture. Il en va de même pour la répartition de la richesse. </p>
<p>Donner la priorité à la durabilité, même si cela signifie un classement inférieur en termes de qualité de vie à court terme, garantit que les villes resteront viables. Intégrer des mesures de durabilité dans les politiques publiques, telles que l’amélioration des transports publics et la conservation d’espaces verts, est essentiel pour répondre aux besoins actuels et anticiper les défis futurs, garantissant ainsi un bien-être à long terme.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221390/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les indicateurs qui mesurent la qualité de vie d’une ville dans les palmarès ne disent pas tout, notamment en ce a trait à son développement durable.Georges A. Tanguay, Professeur titulaire, Université du Québec à Montréal (UQAM)Juste Rajaonson, Professeur agrégé, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2173172023-11-29T17:22:07Z2023-11-29T17:22:07ZLes jeunes en première ligne face à la crise du logement<p>La crise du logement se donne particulièrement à voir au travers de ce que l’on nomme en statistiques le <a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1809">« taux d’effort »</a>. Il s’agit du pourcentage du revenu des ménages consacré à l’habitation principale. Chez les jeunes ménages locataires de moins de trente ans, parmi lesquels souvent des étudiants, il atteindrait plus de 60 % selon un <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion-eco/l15b4817_rapport-information">rapport d’information</a> de l’Assemblée nationale alors qu’il est en moyenne de 23 % pour l’ensemble de la population.</p>
<p>Même en tenant compte des aides, ce taux reste deux fois supérieur à celui de l’ensemble de la population de l’Assemblée nationale de décembre 2021 sur le logement et la précarité́ des étudiants, apprentis et jeunes actifs. Il était mesuré en effet à 22 % pour les 18-25 ans, 18,5 % pour les 25-29 ans et 10,3 % pour la population générale.</p>
<p>La crise immobilière actuelle, marquée par un ralentissement des transactions en raison notamment d’un renchérissement du crédit, masque en réalité une crise plus large d’accès au logement, dont les plus jeunes sont aujourd’hui les premières victimes. Les difficultés des « 18-29 ans », c’est-à-dire plus de 9,2 millions de personnes en 2021, <a href="https://injep.fr/publication/les-chiffres-cles-de-la-jeunesse-2021/">14 % de la population française</a>, ne sont certes pas nouvelles mais la tension locative semble aujourd’hui atteindre son paroxysme : il ne suffit plus d’avoir un emploi pour espérer trouver et accéder à un logement.</p>
<h2>L’offre ne suit pas la demande</h2>
<p>Il s’agit autant d’une crise de la demande que d’une crise d’offre. Du côté de la demande, les jeunes locataires ont de moins en moins les moyens de se loger. Hormis le taux d’effort cité plus haut, cette classe d’âge de la population reste marquée par une fragilité, pour une part structurelle en raison du délai entre la fin des études et le premier emploi : le chômage concerne <a href="https://fr.statista.com/statistiques/474246/chomage-des-jeunes-en-france/">plus de 15 % des 15-24 ans</a> (contre 8,5 % pour la population générale) en 2023. De surcroît, les jeunes sont majoritairement face à un marché de l’emploi qui ne leur est pas favorable et qui s’est dégradé : 12,9 % des 15-29 ans (17,8 % pour les 25-29 ans) ne se trouvaient ni en emploi, ni en étude ou formation en 2021.</p>
<p><iframe id="7Vq4M" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/7Vq4M/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Le logement des jeunes (étudiants ou jeunes actifs notamment) reste une problématique récurrente en France depuis longtemps. Alors que le parc social a été conçu à l’origine pour accueillir les jeunes ménages, la <a href="https://www.vie-publique.fr/eclairage/19462-comment-faciliter-lacces-au-logement-social">baisse du taux de rotation</a> et le vieillissement de la population occupante limitent aujourd’hui son accès aux plus jeunes, les conduisant à se reporter par défaut vers le parc privé locatif beaucoup plus cher.</p>
<p>Ainsi, le parc social enregistre une diminution importante et de long terme des locataires de moins de 30 ans, <a href="https://www.union-habitat.org/sites/default/files/articles/pdf/2019-09/conseil_social_-_jeunes_-_avis_n3_1.pdf">passant de 24 à 8 %</a> entre 1984 et 2013, au profit notamment des plus de 65 ans qui sont, au contraire, de plus en plus nombreux à y trouver une place. On observe une hausse de 7 points parmi les titulaires des baux sociaux (22 % en 2013) à appartenir à cette tranche d’âge et de 10 points chez les 50-64 ans (30 % en 2013) sur la même période.</p>
<p>Aujourd’hui, le premier logement d’un jeune en décohabitation est majoritairement un logement locatif dans le parc privé, le secteur social offrant <a href="https://www.union-habitat.org/actualites/quels-logements-pour-les-jeunes-dans-le-parc-social">peu de places aux nouvelles générations</a>. En 2020, l’Insee recensait autour de <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/7666867?sommaire=7666953">72 % de locataires</a> parmi les ménages de moins de 25 ans dans le parc locatif privé (contre 22 % pour la population générale) presque essentiellement de logements de petite taille très demandés et de plus en plus rares et onéreux et entre 16 et 20 % dans le parc social (17 % pour la population générale). Pour les jeunes de moins de 25 ans, ce ratio concernant le locatif privé s’est accru très fortement, passant successivement de 57 % en 2013 à plus de 72 % en 2020.</p>
<p><iframe id="VcSg1" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/VcSg1/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La crise liée aux tensions sur le pouvoir d’achat du côté de la demande se double ainsi d’une crise de l’offre, liée à une insuffisance du nombre de logements. Cette tendance est encore plus marquée pour la population étudiante. Selon l’Observatoire de la vie étudiante (OVE), l’offre élargie de logements aux étudiants ne répondait en réalité aux besoins que de <a href="https://www.vie-publique.fr/en-bref/283178-lacces-au-logement-pour-les-jeunes-une-urgence-absolue">18 % de ceux ne vivant pas chez leurs parents en 2019</a>.</p>
<p>Le Crous, notamment, l’opérateur historique de l’État, accueillant avec des loyers plafonds des étudiants sous plafonds de ressources et prioritairement boursiers, logeait 35 % des 215 000 étudiants dans les années 1960 (dénominateur plus large que celui cité auparavant car il intègre les étudiants logeant chez leurs parents : ils sont <a href="https://www.ove-national.education.fr/wp-content/uploads/2022/08/Fiche-CDV2020-Logement.pdf">32 %</a> dans ce cas aujourd’hui). Ces résidences ne peuvent, en 2019, loger que <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion-eco/l15b4817_rapport-information#_Toc256000014">25 % des boursiers de l’État</a>.</p>
<p><iframe id="ht9bI" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/ht9bI/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Par ailleurs, les résidences sociales pour jeunes actifs conventionnés – qui répondent aux enjeux de précarité et de mobilité professionnelle des jeunes (notamment les résidences sociales et foyers de jeunes travailleurs, les résidences jeunes actifs) – ne satisfont selon l’Union professionnelle du logement accompagné (Unafo) qu’une trop faible part de la <a href="https://www.unafo.org/app/uploads/2022/07/UNAFO-Chiffres-nationaux-Jeunes-juin-22-toweb.pdf">demande exprimée</a> et ne peuvent s’adresser qu’aux personnes les plus en précarité.</p>
<p>Le phénomène concerne à la fois la région Île-de-France, qui concentre 26 % de la population estudiantine (733 000 étudiants dont 367 000 dans Paris), mais également aujourd’hui toutes les autres régions et notamment les métropoles et villes moyennes. Ainsi, à <a href="https://www.capital.fr/immobilier/logements-etudiants-decouvrez-les-villes-ou-la-tension-immobiliere-est-la-plus-forte-1438644">Lyon et à Rennes</a>, ce sont plus de quatre demandes pour une offre tandis que le marché locatif des petites surfaces reste tendu et souvent échappe pour les résidences étudiantes avec service à l’encadrement de loyers.</p>
<p><iframe id="sW66s" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/sW66s/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<h2>L’État veut accélérer le rythme</h2>
<p>Dans le parc social, et dans la continuité du « plan 60 000 logements étudiants » lancé en 2018, les <a href="https://www.union-habitat.org/actualites/quels-logements-pour-les-jeunes-dans-le-parc-social">bailleurs sociaux</a> tentent de renforcer depuis quelque temps une offre de logements destinée aux jeunes (résidences sociales, foyers de jeunes travailleurs ou résidences universitaires en gestion directe ou indirecte). Plus récemment, la première ministre Élisabeth Borne a annoncé un <a href="https://www.ouest-france.fr/societe/logement/crise-du-logement-le-gouvernement-prete-main-forte-a-la-construction-1c2cfeb8-8481-11ee-9b65-2282e6d4bdd9">plan d’action pour favoriser la construction de logements, notamment pour les étudiants</a>, au travers d’un <a href="https://www.selexium.com/actualites/crise-logement-plan-soutien-construction/">plan de relance des logements sociaux</a>.</p>
<p>La situation reste néanmoins très critique et complexe dans le parc locatif privé, conséquence de la <a href="https://www.cairn.info/revue-d-economie-financiere-2013-2-page-189.htm">financiarisation de l’immobilier</a> observée depuis deux décennies qui a conduit à une envolée des prix immobiliers, entretenue par une période de taux bas, et des loyers en déconnexion avec les revenus des ménages. Les nombreux dispositifs fiscaux, développés depuis plus d’une décennie, notamment en faveur de l’investissement locatif en LMNP (loueur de meublé non professionnel) ont réorienté majoritairement le parc résidentiel privé vers une offre locative de petits meublés de courte durée. Ceux-ci sont de surcroît non soumis à l’encadrement des loyers, offrant des taux de rentabilité comparativement bien plus élevés, <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/11/26/crise-du-logement-face-a-la-proliferation-des-meubles-de-type-airbnb-le-gouvernement-pret-a-serrer-la-vis_6202424_3234.html">déséquilibrant et raréfiant structurellement le parc résidentiel locatif</a>, notamment dans les villes universitaires et touristiques.</p>
<p>Le dispositif très attractif de l’investissement locatif en LMNP est en train de se rabattre sur la niche de marché du logement des étudiants et des jeunes actifs alors que la crise des bureaux et du logement en accession à la propriété menace l’activité immobilière des promoteurs. Plusieurs programmes immobiliers de résidences services étudiantes privées et de résidences de <em>coliving</em> non conventionnées, mises en location sous le statut LMNP, ou non, voient le jour. Si elles apportent une réponse partielle à la demande <a href="https://ingridnappi.com/2021/11/03/la-reconversion-des-bureaux-en-logements-peut-elle-repondre-a-la-crise-du-logement/">et à la crise du bureau</a> post-Covid, elles concourent néanmoins paradoxalement à renforcer la crise du logement des plus démunis, dans un contexte de forte pénurie et de surenchère du foncier. Cela compromet dans de nombreux cas, le développement et la faisabilité économique de l’offre publique de logements conventionnés dédiée aux jeunes.</p>
<hr>
<p><em>L’autrice tient à remercier Tommy Veyrat, Directeur de l’URHAJ Île-de-France et Nicolas Delesque, Universités & Territoires, pour leurs contributions à la réflexion et à la documentation de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/217317/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ingrid Nappi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les jeunes, plus souvent locataires, peinent de plus en plus à se loger. Le parc social en particulier paraît plus difficile d’accès pour ce public structurellement plus en situation de précarité.’.Ingrid Nappi, Économiste, professeur HDR au département SEGF (Sciences économiques, Gestion, Finance), École des Ponts ParisTech (ENPC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2165692023-11-20T17:09:50Z2023-11-20T17:09:50ZLa pollution de l’air intérieur, un danger négligé ? Voici comment améliorer la qualité de l’air chez soi<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/558764/original/file-20231110-21-l7bqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=31%2C31%2C2964%2C1935&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Si aérer son domicile le matin est une pratique bien ancrée, la seconde aération quotidienne l’est beaucoup moins.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/fenetre-a-guillotine-blanche-ouverte-g5CUmZHUp48">Alistair MacRobert / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Au cours de la pandémie de Covid-19, l’aération de nos espaces intérieurs a conquis le statut de <a href="https://twitter.com/Sante_Gouv/status/1443108286933307392">geste barrière</a> et des appareils comme les détecteurs de CO<sub>2</sub> et les purificateurs d’air ont fait une <a href="https://theconversation.com/Covid-comment-se-proteger-simplement-de-la-transmission-aerienne-du-virus-167222">entrée polémique</a> dans les salles de classe.</p>
<p>Depuis une vingtaine d’années, la <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/DP-AIR-ET-SANTE.pdf">recherche scientifique</a> a avancé sur le sujet de la qualité de l’air intérieur en cernant mieux les <a href="https://theconversation.com/comment-respirer-un-air-sain-a-linterieur-160402">différentes sources de pollution</a>. Elles se cumulent à celles de la pollution atmosphérique et se concentrent à l’intérieur des bâtiments, dans lesquels nous passons 80 % de notre temps.</p>
<p>Mais la qualité de l’air intérieur reste aujourd’hui un sujet d’experts, qui ne fait pas encore l’objet <a href="https://theconversation.com/etude-la-pollution-de-lair-interieur-un-probleme-meconnu-par-un-francais-sur-deux-118279">d’une appropriation citoyenne</a>. Pourtant, chacun dispose chez lui de marges de manœuvre pour respirer un sain plus sain.</p>
<h2>Une recherche pour mobiliser le public</h2>
<p>Une <a href="https://www.leroymerlinsource.fr/sante-bien-etre/ethnographie-de-la-qualite-de-lair-interieur/">recherche</a> à laquelle j’ai participé, soutenue par l’Ademe et <a href="https://www.leroymerlinsource.fr/qui-sommes-nous/">Leroy Merlin Source</a>, a souhaité approcher la qualité de l’air intérieur des logements du point de vue des habitants, pour comprendre comment mobiliser le grand public sur ce sujet. Associant une équipe de sociologues (<a href="https://gbrisepierre.fr/">cabinet GBS</a>) et d’expertes techniques (<a href="https://www.medieco.fr/">Médiéco</a>), cette recherche a adopté une approche inédite mêlant ethnographie et accompagnement des habitants.</p>
<p>Douze familles ont ainsi participé en ouvrant la porte de leur domicile aux chercheurs pour une demi-journée, partagée entre un temps d’observation (entretien, visite commentée) et une séquence de conseils personnalisée, ludique et engageante.</p>
<p>Durant les trois mois suivants, ces familles ont expérimenté la mise en place des conseils d’amélioration de la qualité de l’air, encouragées par leur participation à un groupe WhatsApp animé par les expertes.</p>
<p>Un entretien final a permis <a href="https://www.leroymerlinsource.fr/sante-bien-etre/qualite-de-lair-interieur-accompagner-les-habitants/?idU=1">d’évaluer la démarche et les changements</a> mis en œuvre grâce à cet accompagnement.</p>
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<h2>Déni autour de la pollution intérieure</h2>
<p>Nous avons qualifié de <em>déni ordinaire</em> le rapport que les Français entretiennent à la qualité de l’air intérieur de leur logement. Elle ne fait pas partie de leurs préoccupations, contrairement aux économies d’énergie par exemple.</p>
<p>Les habitants se focalisent sur la pollution atmosphérique qui bénéficie d’une forte exposition médiatique depuis plusieurs années maintenant.</p>
<p>Surtout, reconnaître que l’air chez soi est plus pollué que l’air du dehors revient à mettre en danger l’une des principales fonctions anthropologiques du chez soi – la protection : s’il est contaminé, il ne peut plus être un « <em>cocon</em> ».</p>
<p>La perception de la qualité de l’air intérieur au quotidien passe par des signes sensibles rarement cohérents avec la détection des polluants. « L’odeur de propre », par exemple, est en fait celle de polluants chimiques dans l’air.</p>
<h2>L’aération, une pratique bien ancrée</h2>
<p>Du côté des pratiques, la situation paraît plus encourageante au premier abord car le rituel d’aération matinale est une routine bien intégrée, même en hiver.</p>
<p>En revanche, la seconde aération quotidienne recommandée est beaucoup plus aléatoire, elle entre en tension avec la préoccupation pour le confort et les économies d’énergie.</p>
<p>Le constat le plus frappant de l’étude est la distance que les ménages entretiennent avec leur système de ventilation. Ils n’ont souvent même pas les mots pour le décrire et n’en comprennent pas le fonctionnement : plusieurs habitants ont ainsi découvert l’existence d’entrées d’air dans leurs fenêtres.</p>
<p>Il n’est pas étonnant alors que son entretien – par le dépoussiérage – soit irrégulier voire inexistant, et que les habitants mettent en œuvre des pratiques contre-productives – comme l’obstruction des bouches – quand ils sont gênés par le bruit ou le froid.</p>
<h2>Changer ses habitudes de consommation</h2>
<p>L’accompagnement proposé a permis d’élargir le champ de vision et d’action des ménages sur la qualité de l’air de leur logement.</p>
<p>En plus de la discipline d’aération et le maintien d’une ventilation en bon fonctionnement, l’amélioration de l’air chez soi implique une révolution des <a href="https://theconversation.com/notre-air-interieur-est-pollue-mais-de-nouveaux-materiaux-pourraient-apporter-des-solutions-161016">habitudes de consommation</a> courante, afin de réduire à la base les émissions de polluants : choisir des produits ménagers et cosmétiques sains, se détacher des parfums d’ambiance (bougies, diffuseur…), bannir le tabac en intérieur, limiter l’utilisation de la cheminée, adapter ses choix d’aménagements (éviter les tapis, privilégier les meubles en bois brut)…</p>
<p>Si une partie des habitants avaient déjà entamé ces changements, de fortes marges de progression existent afin d’adopter ces réflexes préventifs. Même les plus renseignés jugent ainsi la javel comme un produit inoffensif, ce qui est loin d’être le cas.</p>
<h2>Gare aux solutions technologiques</h2>
<p>Au-delà de ces habitudes quotidiennes, que faire pour améliorer durablement la qualité de l’air de son logement ? En premier lieu, ne pas tomber dans le piège des baguettes magiques technologiques que représentent les purificateurs d’air et les capteurs.</p>
<p>La pression marketing suscite la tentation d’achat de purificateur, alors que leurs <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/AIR2012SA0236Ra.pdf">effets assainissants</a> en situation réelle sont limités, et dans certains cas, <a href="https://www.quechoisir.org/actualite-purificateurs-d-air-des-resultats-mitiges-n79363/">controversés</a>.</p>
<p>Quant aux capteurs de qualité de l’air, leur possession n’est pas suffisante pour enclencher une posture réflexive chez la plupart des ménages.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/558766/original/file-20231110-27-cjdzs4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/558766/original/file-20231110-27-cjdzs4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/558766/original/file-20231110-27-cjdzs4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/558766/original/file-20231110-27-cjdzs4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/558766/original/file-20231110-27-cjdzs4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/558766/original/file-20231110-27-cjdzs4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/558766/original/file-20231110-27-cjdzs4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/558766/original/file-20231110-27-cjdzs4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Plantes dépolluantes, purificateurs… le marketing nous pousse parfois à adopter de fausses solutions en matière d’amélioration de l’air intérieur.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/feuilles-blanches-et-vertes-pendant-la-journee-dxXIImOQwF4">Diana Polekhina/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span>
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<p>Tout comme le <a href="https://gbrisepierre.fr/wp-content/uploads/2019/11/GBS-Blog-articles-20.pdf">suivi des consommations d’énergie</a>, ces outils de mesure ont un effet dans le cadre de dispositifs d’accompagnement. Or ceux-ci n’existent que de manière très marginale sur la qualité de l’air ou s’adressent à des populations spécifiques (malades, précaires énergétiques).</p>
<h2>Des rénovations nécessaires</h2>
<p>Les stratégies d’amélioration de la qualité de l’air les plus efficaces s’inscrivent en réalité dans le cadre de travaux. Elles paraissent néanmoins encore bien laborieuses aux habitants et leurs résultats assez incertains.</p>
<p>Utiliser une peinture non toxique (« naturelle », bio, écolabellisée…), par exemple, est une aspiration de plus en plus courante : mais la choisir reste difficile et son coût plus élevé aboutit à une utilisation partielle – souvent les chambres.</p>
<p>L’amélioration de la ventilation devrait être intégrée à toute rénovation, mais elle est trop souvent repoussée. En maison, son installation est hasardeuse : de nombreux dysfonctionnements sont constatés, y compris quand elle est <a href="https://www.cerema.fr/fr/actualites/ventilation-enjeu-cle-batiments-performants-protocole">réalisée par un professionnel</a>.</p>
<p>En immeuble, les efforts requièrent des décisions collectives trop difficiles à obtenir, par exemple lors de l’assemblée générale de copropriété.</p>
<h2>Accompagner la prise de conscience</h2>
<p>La démarche d’accompagnement expérimenté fait la preuve que des changements sont possibles du côté des habitants, à condition de dépasser une approche normative des comportements (comme les guides de bonnes pratiques) et de s’adapter à leur situation et à leurs préoccupations (propreté, cohabitation, copropriété, travaux…).</p>
<p>Chez les plus novices, l’accompagnement a produit une prise de conscience, « un choc » conduisant à l’abandon immédiat de nombreux produits nocifs. Chez les mieux renseignés, il a renforcé les dynamiques d’amélioration déjà à l’œuvre, et les a légitimés dans une position de porte-parole au sein de leur foyer, auprès de leur entourage voire au travail, conduisant à une diffusion des conseils.</p>
<p>Gageons que cette expérience, dont les outils sont librement accessibles, inspirera de nouvelles démarches portées par des professionnels au contact des habitants, qui n’identifient pour le moment aucun interlocuteur légitime sur le sujet.</p>
<h2>Outiller les professionnels</h2>
<p>La lutte pour un air plus sain dans les logements ne peut toutefois pas reposer exclusivement sur les habitants.</p>
<p>L’<a href="https://www.leroymerlinsource.fr/sante-bien-etre/qualite-de-lair-interieur-des-logements-francais/">état de l’art</a> dressé au démarrage du projet a révélé qu’elle requiert une approche globale associant des politiques publiques plus ambitieuses, une offre de produits sains mieux développée et davantage de prescriptions par les professionnels.</p>
<p>Il serait utile de mettre en situation de conseil les professionnels présents tout au long du parcours des ménages : artisans, agents immobiliers, conseillers France Renov’, magasins de bricolage, travailleurs sociaux, sages-femmes…</p>
<p>Des projets travaillent déjà sur la posture des professionnels et tentent de mieux les outiller (<a href="https://librairie.ademe.fr/urbanisme-et-batiment/5649-ecrains-engagement-a-construire-pour-un-air-interieur-sain.html">ECRAINS</a>, <a href="https://www.renovation-doremi.com/fr/blog/justair-qualite-d-air-interieur/">Just’Air</a>, <a href="https://unice-my.sharepoint.com/personal/vincent_meyer_unice_fr/_layouts/15/stream.aspx?id=%2Fpersonal%2Fvincent%5Fmeyer%5Funice%5Ffr%2FDocuments%2FFLARE%20V3%20DEF%2Emp4&ga=1&referrer=StreamWebApp%2EWeb&referrerScenario=AddressBarCopied%2Eview">FLARE</a>).</p>
<p>Ces changements deviennent urgents à l’heure de l’intensification de la politique de rénovation énergétique des logements, si l’on ne veut pas transformer un progrès dans la lutte contre le réchauffement climatique en scandale sanitaire de l’air intérieur.</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Science et Société se nourrissent mutuellement et gagnent à converser. La recherche peut s’appuyer sur la participation des citoyens, améliorer leur quotidien ou bien encore éclairer la décision publique. C’est ce que montrent les articles publiés dans notre série « Science et société, un nouveau dialogue », publiée avec le soutien du <a href="https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr">ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216569/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gaëtan Brisepierre a reçu des financements pour cette étude de l’Ademe et de Leroy Merlin Source.</span></em></p>Trop souvent négligée, la pollution de l’air intérieur est pourtant un enjeu majeur. Certaines pratiques, travaux et changements d’habitude peuvent être nécessaires pour l’améliorer.Gaëtan Brisepierre, Sociologue indépendant, École des Ponts ParisTech (ENPC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2143212023-10-16T13:57:12Z2023-10-16T13:57:12ZLe logement est bien plus qu’un bien marchand. Et la crise actuelle ne se réduit pas à équilibrer l’offre et la demande<p>La crise du logement est un défi mondial : près de 1,6 milliard de personnes vivent dans des conditions précaires ou inadéquates. Et ce nombre pourrait même doubler d’ici 2030, selon l’<a href="https://unhabitat.org/news/13-jul-2023/the-world-is-failing-to-provide-adequate-housing">UN Habitat</a>. </p>
<p>Le Canada n’est pas épargné. Amplifiée par la pandémie de Covid-19, la demande de logements y surpasse largement l’offre. D’ici 2030, <a href="https://www.cmhc-schl.gc.ca/professionnels/marche-du-logement-donnees-et-recherche/recherche-sur-le-logement/rapports-de-recherche-en-habitation/accroitre-loffre-de-logements/penurie-de-logements-au-canada--resoudre-la-crise-de-labordabilite">3,5 millions de logements supplémentaires seront nécessaires</a>. Et pour y faire face, les initiatives gouvernementales se multiplient. </p>
<p>En tant que professeur en études urbaines à l’Université du Québec à Montréal, je m’intéresse à la manière dont les villes canadiennes contribuent aux <a href="https://www.sosve.org/objectifs-de-developpement-durable-post-2015/">17 Objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies</a>, notamment le 11<sup>e</sup>, qui vise à rendre les villes inclusives, sûres, résilientes et durables.</p>
<h2>Les gouvernements se mobilisent</h2>
<p>En septembre 2023, le gouvernement du Canada a annoncé une <a href="https://www.canada.ca/fr/ministere-finances/nouvelles/2023/09/bonification-du-remboursement-de-la-tps-pour-immeubles-dhabitation-locatifs-afin-de-construire-plus-dappartements-pour-les-locataires.html">exonération de la TPS</a> pour la construction de nouveaux immeubles locatifs, dans l’optique d’alléger les coûts pour les constructeurs. Cette initiative s’ajoute à celles de la <a href="https://www.cmhc-schl.gc.ca/strategie-nationale-sur-le-logement/questce-que-la-strategie#strategyfr">Stratégie nationale sur le logement</a> lancée en 2018, un plan de 82 milliards de dollars étalé jusqu’en 2028. Ce plan englobe des subventions pour de nouveaux logements abordables, la rénovation, le soutien au logement communautaire et la promotion de la recherche en matière de logement. </p>
<p>Les gouvernements provinciaux et municipaux sont également à pied d’œuvre. Par exemple, l’<a href="https://news.ontario.ca/mmah/en">Ontario</a> multiplie les soutiens financiers aux projets immobiliers. Le Québec propose, entre autres, une <a href="https://www.revenuquebec.ca/fr/citoyens/votre-situation/faible-revenu/programme-allocation-logement/">Allocation-Logement</a> aux ménages les moins aisés. Et la Colombie-Britannique a instauré la <a href="https://news.gov.bc.ca/releases/2023HOUS0059-000851">Housing Supply Act</a>, adoptée en 2022, visant à mieux cibler les besoins en logement en collaboration avec les municipalités. </p>
<p>Plusieurs villes, comme <a href="https://globalnews.ca/news/9738121/toronto-multiplex-policy-housing/">Toronto</a>, <a href="https://www.cbc.ca/news/canada/british-columbia/multiplex-housing-vancouver-1.6967977">Vancouver</a>, <a href="https://montreal.ca/articles/metropole-mixte-les-grandes-lignes-du-reglement-7816">Montréal</a> et <a href="https://www.lesoleil.com/actualites/actualites-locales/la-capitale/2023/09/27/un-plan-ambitieux-pour-contrer-la-crise-du-logement-UHZAPO6FXFGIDHBI255E4KY2E4/">Québec</a>, adoptent des stratégies pour augmenter la densité et favoriser la construction de logements sociaux et locatifs, collaborant souvent avec des <a href="https://www.cmhc-schl.gc.ca/professionnels/financement-de-projets-et-financement-hypothecaire/programmes-de-financement/toutes-les-opportunites-de-financement/fonds-dinnovation-pour-le-logement-abordable#:%7E:text=Le%20Fonds%20d%27innovation%20a,municipaliti%C3%A9s%2C%20provinces%20et%20territoires">entités communautaires</a> pour innover.</p>
<p>L’objectif de ces mesures ? Faire passer le taux d’inoccupation des logements de <a href="https://assets.cmhc-schl.gc.ca/sites/cmhc/professional/housing-markets-data-and-research/housing-research/research-reports/2022/housing-shortages-canada-solving-affordability-crisis-fr.pdf">1,9 % au Canada et de 1,7 % dans les grandes villes du Québec à une fourchette de 3 à 4 %</a>, considérée comme un équilibre entre l’offre et la demande de logements.</p>
<h2>La valeur sociétale du logement</h2>
<p>Cependant, la crise du logement ne se réduit pas simplement à une équation où il suffit d’équilibrer l’offre et la demande. Agir sur l’offre, en stimulant la construction et sur la demande, en fournissant des aides financières aux ménages, peut avoir un impact temporaire. Mais ces mesures ne ciblent que les symptômes de la crise, et non ses causes fondamentales. </p>
<p>Pourquoi ? Parce que le logement est bien plus qu’un bien marchand : il représente un foyer, un espace de vie et un élément structurant du tissu urbain, social et économique. Sa valeur sociétale dépasse ainsi sa valeur marchande, avec des implications sur l’accès aux services et aux lieux d’emploi, sur la stabilité de la population et l’attractivité urbaine, sur la santé physique et mentale ainsi que sur la compétitivité des entreprises locales.</p>
<p>La crise actuelle ne provient pas seulement d’un manque absolu de logements, mais surtout d’une pénurie relative de logements adaptés aux revenus de la majorité des habitants de chaque ville. À <a href="https://assets.cmhc-schl.gc.ca/sites/cmhc/professional/housing-markets-data-and-research/market-reports/rental-market-report/rental-market-report-2022-fr.pdf">Montréal</a>, par exemple, le taux d’inoccupation pour les logements abordables pour les ménages les moins fortunés est seulement de 1 %. En revanche, pour les ménages à revenus moyens et élevés, il est de 5,4 %. À <a href="https://assets.cmhc-schl.gc.ca/sites/cmhc/professional/housing-markets-data-and-research/market-reports/rental-market-report/rental-market-report-2022-fr.pdf">Québec et à Gatineau</a>, la situation est similaire, montrant que la compétition pour accéder à un logement est plus rude pour les individus et les familles les plus exposés à la crise.</p>
<p>La vision mercantile de la propriété a érodé sa valeur sociétale, transformant ce qui était autrefois un rêve en un simple outil d’investissement où l’objectif est d’acheter, rénover, fixer un loyer en fonction de l’investissement et séduire une population plus aisée.</p>
<h2>Des conséquences pour les citoyens et les entreprises</h2>
<p>Les conséquences sont nombreuses. D’une part, les prix élevés des propriétés ont transformé beaucoup de citoyens en locataires à long terme, écartant leur rêve de propriété. Cette situation crée une tension sur le nombre de logements locatifs disponibles, particulièrement pour les étudiants et les nouveaux arrivants. L’écart croissant entre les loyers des logements vacants et ceux occupés a aussi ralenti le taux de roulement, comme illustré à <a href="https://assets.cmhc-schl.gc.ca/sites/cmhc/professional/housing-markets-data-and-research/market-reports/rental-market-report/rental-market-report-2022-fr.pdf">Québec et à Gatineau</a>. </p>
<p>Les populations économiquement précaires subissent les effets les plus sévères, devant opter pour des logements basés sur leur capacité financière plutôt que leurs besoins. Cela se traduit par une baisse de la qualité de vie, des trajets plus longs vers les lieux de travail et de services ainsi que des coûts de transport augmentés. </p>
<p>Enfin, cette situation impacte directement le développement économique régional. L’augmentation rapide des loyers par rapport aux salaires peut diminuer la compétitivité des entreprises locales qui peinent à attirer et retenir les talents. Cette situation peut entraîner une baisse de la productivité (par exemple, des employés stressés par leurs finances), des temps de trajet plus longs pour les employés (choisissant de vivre en périphérie où le coût de logement est moindre), un frein à l’innovation régionale (avec moins d’entrepreneurs prêts à prendre des risques dans des zones chères) et la migration des talents vers des régions plus abordables.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="homme noir travaille de la maison" src="https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/550443/original/file-20230926-23-f01g5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les employeurs pourraient contribuer financièrement aux coûts du logement des employés en télétravail.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Des solutions existent</h2>
<p>Pour aborder la crise, le logement doit avant tout être considéré comme un service sociétal essentiel et non seulement comme un bien marchand. Quatre pistes de solution peuvent compléter les interventions publiques actuelles.</p>
<p><strong>Ajuster les loyers aux réalités économiques locales.</strong> En plus des mesures gouvernementales actuelles visant à stimuler l’offre (par plus de constructions) et la demande (par l’aide financière aux ménages), l’idée est d’établir une fourchette de loyers acceptable en fonction des capacités financières des résidents locaux. Les propriétaires dépassant cette fourchette pourraient être soumis à des mesures fiscales, dont les recettes permettraient de soutenir des logements plus abordables. Un tel calcul peut paraître complexe, mais pas impossible à réaliser en travaillant, par exemple, avec le milieu universitaire. C’est pourquoi l’instauration d’un registre des loyers, comme le suggèrent <a href="https://www.lesoleil.com/opinions/point-de-vue/2023/09/17/crise-du-logement-manque-de-vision-des-gouvernements-LUYQVANSXVHTDAOV5FVKEGDH4A/">14 maires et mairesses au Québec</a>, est pertinente.</p>
<p><strong>Faire des employeurs des alliés.</strong> L’accès à un logement est devenu un atout pour attirer et retenir la main-d’œuvre. Les employeurs pourraient offrir des primes « logement » aux employés à faibles revenus. Pour ceux en télétravail, les employeurs pourraient contribuer financièrement aux coûts du logement (loyers et dépenses liées au travail). Comme de telles mesures contribuent au succès des entreprises, elles pourraient être appuyées par les agences de développement économique.</p>
<p><strong>Soustraire les groupes vulnérables de la compétition.</strong> Les jeunes, les familles monoparentales, les personnes âgées, les Premières Nations et les nouveaux arrivants doivent être soustraits de la compétition pour le logement, car ils ne sont pas en position de concurrence équitable. Des taxes sur certains logements de luxe, par exemple, permettraient de générer des fonds dédiés aux logements de ces groupes. </p>
<p>Enfin, des alternatives comme les résidences intergénérationnelles ou les micrologements temporaires pourraient être encouragées. Ces modèles offrent des solutions abordables et adaptées à divers besoins temporaires, surtout en milieu urbain. </p>
<p>Considérer le logement simplement comme un bien marchand à la merci des forces du marché est réducteur. Il a une profonde valeur sociétale, et c’est en la reconnaissant et en la préservant que nous aborderons la crise de front.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214321/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Juste Rajaonson ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La crise du logement ne peut pas être résolue simplement en équilibrant l’offre et la demande. Il faut plutôt repenser le logement comme un service sociétal plutôt que comme un simple bien marchand.Juste Rajaonson, Professeur en études urbaines, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2133002023-09-13T19:52:34Z2023-09-13T19:52:34ZHausse de la taxe foncière : vers l’infini et au-delà ?<p>La seule véritable incertitude avec un « marronnier », ce n’est naturellement pas sa survenance, mais bien la taille des marrons. Et cette année, en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB pour les intimes), ils sont d’un fort beau gabarit. La presse économique n’hésite pas à parler d’une <a href="https://www.latribune.fr/economie/france/la-taxe-fonciere-explose-51-25-dans-certaines-villes-pour-les-proprietaires-974414.html">« explosion »</a> de cet impôt, avec dans certaines grandes villes des augmentations à deux chiffres dépassant très largement le niveau de l’inflation (+51,9 % à Paris, +31,5 % à Grenoble, +21,2 % à Troyes, +20,5 % à Metz, +19,6 % à Issy-les-Moulineaux, etc.).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1696923699419529427"}"></div></p>
<p>Même si la <a href="https://www.impots.gouv.fr/sites/default/files/media/9_statistiques/data_colloc/analyse_fdl/2023/taux_votes_2023_communes_epci_synthese.pdf">communication</a> de la Direction générale des finances publiques publiée en août dernier nous rappelle bien que des augmentations spectaculaires et médiatisées ne font pas statistiquement une tendance, il se passe incontestablement quelque chose du côté de cet impôt. Retour sur les ressorts d’une hausse qui pourrait bien être tendancielle.</p>
<h2>Une assiette prise en étau</h2>
<p>Attention, nous ne parlerons ici que de votre seule taxe foncière sur les propriétés bâties, qui ne représente, aussi contre-intuitif que cela puisse paraître, qu’une partie de la somme à payer figurant sur la première page de votre avis d’imposition. En effet, d’autres prélèvements sont effectués avec la TFPB : la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (à l’objet éponyme), la <a href="https://investir.lesechos.fr/placements/impots/quest-ce-que-la-taxe-gemapi-qui-fait-gonfler-les-prelevements-fonciers-1925514">taxe dite Gemapi</a> (visant à financer la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations), certaines taxes spéciales d’équipement… Ces impôts annexes ont leur propre dynamique, et contribuent de leur côté à la hausse de la facture globale.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/5q9WuG8i-PQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Gemapi, c’est quoi ? (Communauté de Communes du Briançonnais, 2020).</span></figcaption>
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<p>Concernant votre taxe foncière sur les propriétés bâties, son mode de calcul est assez simple : elle est le résultat du produit d’une assiette, en l’espèce l’estimation de la valeur de votre bien <a href="https://theconversation.com/fr/topics/immobilier-23232">immobilier</a>, par un taux d’imposition. La responsabilité de l’évolution annuelle de ces deux composantes est, cela ne vous surprendra pas, partagée :</p>
<p>La valeur locative cadastrale (l’estimation évoquée plus haut, dans son appellation administrative) fluctue chaque année en fonction d’un indice de révision qui, jusqu’à récemment, était voté par les parlementaires dans le cadre de la loi de finances.</p>
<p>Le taux lui relève, <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000000886764">depuis le début des années 1980</a>, des collectivités locales récipiendaires de l’impôt (aujourd’hui, les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/communes-78900">communes</a> et les intercommunalités), qui le votent chaque année en parallèle de l’adoption de leur budget primitif.</p>
<p>En 2023, l’assiette de la taxe foncière sur les propriétés bâties a augmenté de <a href="https://www.banquedesterritoires.fr/les-bases-des-impositions-locales-devraient-etre-revalorisees-de-71-en-2023">7,1 %</a>. Une hausse record, après une augmentation déjà inédite de 3,4 % en 2022. Pour mémoire, la hausse annuelle était en moyenne de 1,6 % entre 2005 et 2015. C’est là le premier ressort de la hausse de votre taxe foncière.</p>
<h2>Tant qu’il y aura de l’inflation…</h2>
<p>Comment expliquer une telle augmentation, alors que l’on pourrait pourtant imaginer les parlementaires soucieux de préserver le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/pouvoir-dachat-33467">pouvoir d’achat</a> de leurs concitoyens ? Depuis le début des années 1980, comme on l’a dit, les parlementaires déterminaient l’indexation annuelle de cette assiette : officiellement <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000038686806">« en tenant compte de la variation des loyers »</a>, en réalité en étant toujours attentif au contexte économique et social.</p>
<p>Dans le cadre de la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000033734169">loi de finances pour 2017</a>, les parlementaires, dans une démarche positiviste qui collait bien à l’esprit (initial) de la législature, ont fait le choix d’automatiser et donc de dépolitiser cette hausse : elle se fera désormais sur la base de l’indice des prix à la consommation. S’il était impossible à l’époque d’anticiper le retour de l’inflation que nous connaissons aujourd’hui, on peut reconnaître que les parlementaires ont été bien malheureux de renoncer à l’époque à cette prérogative (discutable certes) qui était historiquement la leur.</p>
<p>Tant qu’il y aura de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/inflation-28219">l’inflation</a>, dans le cadre réglementaire actuel, l’assiette de votre taxe foncière continuera donc d’augmenter.</p>
<h2>Une hausse plus ou moins justifiée</h2>
<p>On pourrait légitimement se dire que, si l’assiette augmente au niveau de l’inflation comme nous venons de le voir, le taux de la taxe foncière pourrait lui rester stable. Il n’en est rien, pour plusieurs raisons.</p>
<p>D’une part, parce que les autres recettes de fonctionnement des communes et de leurs intercommunalités augmentent elles bien moins vite que l’inflation. Les dotations versées par l’État, qui, rappelons-le, augmentaient il y a encore une quinzaine d’années <a href="https://www.vie-publique.fr/discours/218454-lionel-jospin-09071998-contrat-de-croissance-et-de-solidarite">du niveau de l’inflation et d’une partie de la croissance</a>, se stabilisent après avoir connu quelques années de baisse (contribution du secteur local à la maîtrise des finances publiques).</p>
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<p>D’autre part, parce que nous sommes encore dans la première partie du bien connu <a href="https://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwi7-sL-pqCBAxV1T6QEHdfaAIIQFnoECB8QAQ&url=https%3A%2F%2Fwww.cairn.info%2Fload_pdf.php%3Fdownload%3D1%26ID_ARTICLE%3DECOP_174_0113&usg=AOvVaw0flGQzyzp4HHWudmXm9F2y&opi=89978449">cycle électoral</a> pour les communes. Les maires élus en 2020, rééligibles en 2026, ont naturellement augmenté les taux des impôts locaux en 2022 ou en 2023 pour financer la mise en œuvre de leurs programmes… et ne pas avoir à le faire à une ou deux années de leur retour devant les électeurs.</p>
<p>Enfin, parce que la taxe d’habitation a disparu, comme une décennie avant elle la taxe professionnelle. Bien qu’elle ait été <a href="https://www.vie-publique.fr/en-bref/285505-suppression-de-la-taxe-dhabitation-quel-effet-sur-les-finances-locales">compensée à l’euro près</a> dans les budgets locaux, <a href="https://theconversation.com/suppression-de-la-taxe-dhabitation-sur-les-residences-principales-les-impenses-de-la-reforme-168770">aucun nouveau levier fiscal n’est venu combler le vide qu’elle laissait</a>. Résultat, quand il s’agit d’augmenter les ressources budgétaires, les exécutifs locaux ne peuvent plus mettre en œuvre de réelle stratégie fiscale (quelle catégorie de contribuables solliciter davantage cette année ?) et n’ont presque plus qu’une seule option : augmenter la taxe foncière. En football, c’est un peu comme de passer de Pep Guardiola à Igor Tudor…</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1446014066321813511"}"></div></p>
<p>Et ce ne sont là que les principales explications. Nécessité mettre les investissements publics au niveau des attentes des citoyens, restaurer les équilibres budgétaires après quelques années de <a href="https://www.collectivites-locales.gouv.fr/files/Finances%20locales/OFGL_cap_sur_17_effet_crise_Covid_sur_fin_locales_22-06-2022.pdf">« quoi qu’il en coûte » à la sauce locale</a>, absorber les augmentations budgétaires imposées par l’État comme la <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/818721/point-dindice-comment-compenser-la-hausse/?abo=1">hausse de la rémunération des fonctionnaires</a>… Autant de raisons, plus ou moins légitimes, que les <a href="https://www.ledauphine.com/economie/2023/08/31/isere-grenoble-votre-taxe-fonciere-vient-de-tomber-eric-piolle-explique-la-hausse">élus locaux</a> mobilisent pour justifier la hausse des taux qu’ils ont décidée.</p>
<h2>Et demain ?</h2>
<p>Alors, 2023 sera-t-il une année record ou bien une étape de plus dans la hausse tendancielle de votre taxe foncière ? Soyons prudents en matière de prévision, même les meilleurs s’y cassent les dents (on rappellera que, lorsqu’on lui a annoncé la fin de la guerre froide pendant son sommeil hypothermique, <a href="https://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=10367.html">Austin Powers</a> s’exclama « Enfiiin ! Ces porcs capitalistes vont payer pour leurs crimes ! N’est-ce pas <em>tovarisch</em> ? »…).</p>
<p>Dans le cadre réglementaire actuel, c’est-à-dire sans révision des modalités de calcul et d’évolution des valeurs locatives cadastrales (aux dernières nouvelles, ce ne sera pas avant 2028) et <a href="https://tnova.fr/economie-social/territoires-metropoles/quel-avenir-pour-limpot-local-quel-financement-des-services-publics-locaux/">sans changement dans les leviers à la disposition des élus locaux pour moduler leurs ressources</a>, il est peu probable que la facture ne s’alourdisse pas dans les prochaines années. Notamment parce que les mairies et leurs intercommunalités, plus encore que les autres strates de collectivités, sont face à un mur d’investissement pour adapter à moyen terme nos villes aux conséquences du changement climatique. À suivre…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213300/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Eisinger est administrateur de l'AFIGESE (réseau de professionnels des collectivités territoriales en finances publiques locales, gestion publique locale et évaluation des politiques publiques)</span></em></p>Privées du levier fiscal de la taxe d’habitation, les communes et les intercommunalités se tournent notamment vers les propriétaires pour trouver des recettes de fonctionnement.Thomas Eisinger, Professeur associé en droit, gestion financière et management des collectivités, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2077572023-06-14T16:43:03Z2023-06-14T16:43:03ZCrise du logement : le Conseil national de la refondation, une occasion manquée ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/531998/original/file-20230614-23-783j7i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4242%2C2813&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Olivier Klein, ministre délégué chargé de la Ville et du Logement, a récemment présenté avec Elisabeth Borne les mesures retenues par le gouvernement à la suite de la consultation du Conseil national de la refondation sur le logement</span> </figcaption></figure><p>Les <a href="https://www.gouvernement.fr/actualite/cnr-logement-des-solutions-pour-construire-lavenir">annonces</a> sur le <a href="https://theconversation.com/topics/logement-28772">logement</a> issues du Conseil national de la refondation (CNR), dévoilées le 5 juin dernier par le gouvernement, ont suscité de vives <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/immobilier/crise-du-logement-pourquoi-les-annonces-du-gouvernement-decoivent-les-professionnels-du-secteur_5869328.html">déceptions</a> parmi les quelques 200 acteurs invités depuis le 28 novembre 2022 à plancher sur le sujet. « C’est tout un secteur qui est méprisé » a déploré la fédération des <a href="https://theconversation.com/topics/immobilier-23232">promoteurs immobiliers</a> dans un <a href="https://fpifrance.fr/presse/cnr-logement-tout-un-secteur-meprise">communiqué</a> ; « Il n’y a pas “rien”, mais ce n’est pas cela qui va nous permettre de rebooster la politique du logement », a déploré <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/l-invite-e-des-matins/acces-au-logement-les-limites-du-plan-borne-1046983">Christophe Robert</a>, délégué général de la Fondation Abbé Pierre qui a malgré tout pu se réjouir de voir un <a href="https://twitter.com/larenarde24/status/1665990299728986113">alignement inédit</a> de tous les acteurs sur les solutions.</p>
<p>Pour répondre à la <a href="https://theconversation.com/immobilier-la-propriete-devient-de-moins-en-moins-abordable-meme-dans-les-zones-les-plus-pauvres-203255">crise du logement</a>, avec <a href="https://www.tf1info.fr/societe/video-immobilier-2-4-millions-de-menages-en-attente-d-un-logement-social-du-jamais-vu-2257012.html">2,4 millions de demandes de logement social</a> en attente, un record et <a href="https://www.ouest-france.fr/societe/logement/hebergement-d-urgence-le-gouvernement-renonce-a-supprimer-des-places-pour-les-sans-abris-b57acfd7-944f-40d4-a3a3-134d46013954">200 000 personnes en hébergement d’urgence</a> tous les soirs, en plus d’entreprises du secteur en difficulté, cinq piliers ont été retenus par le gouvernement. Il s’agit de « favoriser l’accès à la propriété », « favoriser l’accès à la location », « soutenir la production et la rénovation des logements sociaux », « relancer la production de logements » et « amplifier la rénovation énergétique du parc privé ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1665988538138087426"}"></div></p>
<p>Parmi les mesures prévues pour atteindre ces objectifs, certaines n’émanent pas du CNR. Il semblerait que celui-ci n’ait servi que de véhicule pour le gouvernement afin d’avaliser des économies budgétaires, de l’ordre de <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/immobilier-btp/plan-logement-comment-bercy-a-reussi-a-faire-des-economies-1949314">deux milliards d’euros à terme</a>. Pareil objectif semble d’ailleurs paradoxal dans un contexte de crise. Le <a href="https://www.economie.gouv.fr/cedef/pinel-investissement-locatif">dispositif Pinel</a>, niche fiscal dont peut bénéficier qui achète un logement neuf afin de le mettre en location, certes <a href="https://politiquedulogement.com/2022/10/dispositif-pinel-stop-ou-encore/">très critiquable</a>, est par exemple supprimé mais sans compensation. Des économies budgétaires importantes sont réalisées mais les moyens dégagés auraient pu (dû) être réorientés vers d’autres dispositifs servant les mêmes objectifs.</p>
<p>D’autres annonces semblent suffisamment intuitives pour ne pas nécessiter sept mois de réflexion. Le fait de maintenir le <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F10871">prêt à taux zéro</a> pour les ménages les plus modestes est par exemple curieusement présenté comme une mesure de soutien alors même que sa voilure est réduite. Le dispositif, qui, certes, devait s’éteindre au 31 décembre, ne s’appliquera plus aux maisons individuelles. Si d’un point de vue de la lutte contre l’étalement urbain la limitation peut s’entendre (<a href="https://www2.sgfgas.fr/documents/100157/2129709/PTZ_Bilan_de_production.pdf/5210186f-8cbe-44e2-a5df-7ef78a9103a2/PTZ%20-%20Bilan%20de%20production%20(Annuel).pdf">3 prêts distribués sur 4 en 2021</a> l’ont été pour la construction d’une maison individuelle), une fois encore les marges budgétaires dégagées auraient dû être redéployées pour favoriser l’accession à la propriété des ménages. Il aurait par ailleurs été étrange de faire disparaître cet outil de solvabilité des ménages dans un contexte où les taux augmentent, c’est-à-dire au moment où il trouve sa pleine pertinence.</p>
<h2>Une crise des inégalités</h2>
<p>Il était attendu du CNR des réponses d’urgence à la conjoncture pour éviter des faillites d’entreprises dans le bâtiment et faciliter les mises en chantiers. En 2008, la crainte du krach immobilier avait ainsi donné lieu à un grand plan de relance de la construction de plus de <a href="https://www.lefigaro.fr/immobilier/2008/10/02/05002-20081002ARTFIG00280-sarkozy-lance-un-plan-de-soutien-a-l-immobilier-.php">5 milliards d’euros</a> avec des mécanismes de défiscalisation pour inciter les ménages à investir et un élargissement sensible du prêt à taux zéro ainsi qu’un fort soutien aux bailleurs sociaux.</p>
<p>Il était aussi attendu, dans la mesure où la consultation s’inscrivait dans le temps long avec 200 acteurs d’horizons divers, des solutions à des problématiques anciennes. Pour nombre de participants, le gouvernement n’a pas pris conscience de la gravité de la situation actuelle et semble penser qu’elle n’est que passagère. Il y a bien une dimension conjoncturelle à la crise, avec la hausse des taux d’intérêt conjuguée à celle coût des matières premières. Cependant, la conjoncture ne fait qu’ébranler un équilibre très précaire, révélant une crise plus structurelle que nos <a href="https://www.ofce.sciences-po.fr/blog/logement-une-crise-pas-si-neuve-que-ca/">travaux</a> tentent de caractériser.</p>
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<p>Miser ainsi sur un ajustement par les prix grâce à la main invisible du marché et minimiser le besoin de mesures d’urgence peut paraître hasardeux. Ces derniers mois, les prix des biens immobiliers ont peu évolué malgré les contractions du crédit. Ceux-ci apparaissent généralement assez <a href="https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/elasticite-prix-immobilier-nombre_cle093f5d.pdf">peu sensibles au rythme des constructions</a> (« inélastiques », dans le langage de la science économique).</p>
<p>Cette crise est d’abord une crise des inégalités. Selon l’<a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/6665809">Insee</a>, le prix des logements a été multiplié par 2,6 entre 2000 et 2022, une évolution déconnectée de celle des revenus des ménages et des prix des autres biens. Ils ont crû, eux, de 40 % environ. En 1980, le patrimoine immobilier représentait en moyenne 2,5 années de revenu disponible brut. En 2020, celui-ci représentait près de 5,5 années.</p>
<p><iframe id="lTiZS" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/lTiZS/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La proportion de propriétaires a évolué différemment dans la population selon les tranches de revenus. Selon <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/microdata/european-union-statistics-on-income-and-living-conditions">Eurostat</a>, en deçà de 60 % du <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php?title=Glossary:Equivalised_disposable_income/fr">revenu équivalent médian</a> (qui tient compte de la composition du ménage, des impôts et autres potentielles allocations) la part des propriétaires est passée de 40 % en 2005 à 30 % en 2021. Au-delà, les propriétaires sont passés de 65 à 70 % de la population.</p>
<p><iframe id="ASaTe" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/ASaTe/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La mobilité résidentielle, c’est-à-dire le nombre d’emménagements et de déménagements, est par ailleurs en <a href="https://hal-sciencespo.archives-ouvertes.fr/hal-03403777">forte baisse</a>. Elle constitue pourtant le principal pourvoyeur de logements sur le marché chaque année. Pour les locataires de biens privés, les sauts de loyers au moment de changer d’adresse constituent un frein de plus en plus important. Le nombre de sorties du parc des logements sociaux pour accéder à la propriété est également en nette diminution.</p>
<h2>Les logements « hors résidences principales » parmi les grands oubliés</h2>
<p>Depuis le début des années 2000, les gouvernements successifs, quelle que soit leur couleur politique, ont voulu répondre à la problématique par une politique d’offre neuve. La <a href="https://blogs.alternatives-economiques.fr/madec/2018/04/05/loi-elan-les-risques-d-une-impulsion-mal-maitrisee">loi Élan</a> de 2018 promettait, par exemple, de « construire plus, mieux et moins cher ». Un groupe de travail du CNR s’intitulait d’ailleurs « Réconcilier les Français avec l’acte de construire ».</p>
<p>La France n’est néanmoins peut-être pas si fâchée avec cela. Elle a même le ratio nombre de logements par habitant le plus élevé de l’OCDE (0,59) et c’est dans l’hexagone qu’il a le plus augmenté au cours de la dernière décennie. À l’issue des réflexions, le gouvernement semble envoyer le message qu’il n’y a pas tant besoin de construire que cela. Des idées consensuelles au sein du CNR pour inciter à construire n’ont pas été retenues. Il proposait par exemple un encadrement des prix du foncier, la mobilisation du foncier privé et public ou encore la création d’un statut fiscal du bailleur privé.</p>
<p>Certes, il est possible de mettre l’accent sur le parc existant avec un nombre de logements vacants qui a augmenté de 20 % entre 2012 et 2022. L’évolution est cependant fortement corrélée avec l’<a href="https://www.observatoire-des-territoires.gouv.fr/part-des-logements-vacants">attractivité des territoires</a>. Dans les territoires aujourd’hui sous tension, la vacance est majoritairement frictionnelle. L’enjeu y semble bien de proposer du neuf à un prix abordable.</p>
<p>Le nombre de résidences secondaires a lui augmenté de 15 % sur la même période. En 2022, sur 30,7 millions de logements en France (hors Mayotte), 3,1 millions sont vacants (8,3 % du parc) et 3,7 millions des résidences secondaires (9,8 %). Ces deux types de logements ont contribué pour un tiers à la hausse du nombre de logements au cours des 10 dernières années.</p>
<p><iframe id="Cvet6" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/Cvet6/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La démarche semble alors inaboutie. Si tel était ce sur quoi le gouvernement voulait mettre l’accent, il aurait fallu proposer davantage pour réguler les meublés touristiques et lutter contre la sortie massive de logements du parc des « résidences principales » afin, dans les territoires en tension, de permettre un « choc d’offre » de logement sans forcément en construire de nouveaux. Aujourd’hui, il semble autant manquer ce cap que des mesures fortes pour le soutenir. Comme le formule le maire de Villeurbanne <a href="https://twitter.com/cvansty/status/1666047128626495488">Cédric Van Styvendael</a> : « Après le “en même temps”, le gouvernement fait dans le “ni-ni” ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207757/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre Madec a participé à un groupe de travail du CNR.</span></em></p>Les mesures proposées pour résoudre la crise du logement ne semblent pas avoir intégré sa dimension structurelle et déçoivent les acteurs du secteur.Pierre Madec, Economiste au département analyses et prévision de l’OFCE, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2070412023-06-07T19:39:05Z2023-06-07T19:39:05ZLogement : un enjeu de santé publique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/530376/original/file-20230606-22-6qgq9x.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C48%2C4031%2C2969&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les Olympiades, Paris 13e, un des sites d'étude du programme SAPHIR (2023).</span> <span class="attribution"><span class="source">SAPHIR</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Le gouvernement vient de proposer des <a href="https://www.lepoint.fr/societe/crise-du-logement-le-gouvernement-devoile-des-mesures-techniques-05-06-2023-2522994_23.php">mesures</a> pour relancer la construction, la rénovation et l’accession à la propriété. Mais ces mesures prendront-elles en compte les pollutions que présentent certains habitats ? En effet on considère souvent – à tort – les logements comme des abris à l’écart des toxicités de la vie urbaine. Celles-ci sont par ailleurs élevées. Selon le <a href="https://www.thelancet.com/journals/lanplh/article/PIIS2542-5196(22)0 0090-0/fulltext">The _Lancet_Planetary Health</a> du 18 mai 2022, neuf millions de personnes meurent ainsi chaque année dans le monde à cause de la pollution, de l’air, de l’eau ou des sols soit trois fois plus que les morts cumulés des suites du sida, de la tuberculose et du paludisme. En Île-de-France, le nombre de décès évitable est estimé à <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/pollution-et-sante/air/documents/article/mortalite-attribuable-a-la-pollution-atmospherique-en-ile-de-france.-quelle-evolution-depuis-10-ans-et-quels-benefices-d-une-amelioration-de-la-qua">8000 par an</a>.</p>
<p>Or, l’<a href="https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/276001/9789241550376-eng.pdf">Organisation mondiale de la Santé (OMS)</a> a montré le rôle primordial de la qualité du logement dans la prise en charge de ces questions. Ainsi les maladies respiratoires et cardiovasculaires, les dépressions et le stress sont aussi à mettre en rapport avec la qualité de l’air et des matériaux, l’humidité, l’isolation phonique et thermique, le manque d’espace de nos logements.</p>
<p>Depuis une dizaine d’années, plusieurs équipes d’experts réfléchissent à la mise au point <a href="https://ehjournal.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12940-022-00866-8">d’un index</a> des qualités de l’habitat en matière de santé.</p>
<p>Cependant, les mesures établies par ces chercheurs, qu’il s’agisse de l’Indice de salubrité du logement (2014), Healthy Homes Barometer (2015), HEQI (2019), ou Domiscore (2020), considèrent peu la santé comme un état de bien-être physique et mental (définition de l’OMS de 1946), et ne s’intéressent pas aux immeubles ordinaires non classés comme insalubres.</p>
<p>De plus les études nécessitent de tenir compte des évolutions démographiques comme le vieillissement de la population, ou l’augmentation des familles monoparentales qui montrent que les qualités attendues de l’habitat sont aussi plurielles que liées à la santé physique et mentale (chutes, accidents domestiques, stress…).</p>
<h2>La qualité architecturale des logements… sans la santé !</h2>
<p>Le problème de la qualité des logements est en effet général. Depuis une dizaine d’années, les architectes et les constructeurs réfléchissent à cette question. Après la loi <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/loi-portant-evolution-du-logement-lamenagement-et-du-numerique-elan">Élan</a> (2018) qui propose de « construire plus, mieux et moins cher », trois rapports officiels abordent le sujet.</p>
<ul>
<li><p>Le rapport <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/remise-du-rapport-lemas-sur-qualite-des-logements-sociaux">Lemas/Badia (2020)</a>, met l’accent sur la question des surfaces des logements sociaux, leur modularité et leur adaptabilité, leur luminosité et leur rapport à l’extérieur.</p></li>
<li><p>Le rapport <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Rapport%20Mission%20Logement%20210904.pdf">Laurent Girometti et François Leclerq (2021)</a> qui soutiennent « un référentiel destiné à améliorer la qualité d’usage des logements pour répondre aux nouveaux besoins des occupants et retrouver le désir d’habiter en ville ».</p></li>
<li><p>Le rapport de l’Institut des Hautes Études pour l’Action dans le Logement <a href="https://www.faire-face.fr/wp-content/uploads/2021/09/etude-Idheal-appartements-2021.pdf">IDHEAL (2021)</a> souligne la méconnaissance des usages et modes de vie de la part des concepteurs. Sur la base d’une analyse de 200 plans d’appartements construits depuis vingt ans, il constate une détérioration des surfaces aménageables dans les appartements, notamment la surface des pièces, les cuisines ouvertes, et les espaces extérieurs.</p></li>
</ul>
<p>En 2021, le gouvernement a lancé un vaste appel d’idées et d’expérimentations sur <a href="https://www.engages-pour-la-qualite-du-logement-de-demain.archi.fr/">« la qualité du logement de demain »</a> et désigné une centaine de lauréats faisant l’objet d’un <a href="https://www.chaire-logementdemain.fr/recherche/recherches-de-la-chaire.html">suivi scientifique et technique</a>.</p>
<p>Cependant, dans ces consultations, la notion de santé n’apparaît pas ou peu, du moins de façon explicite. Ceci illustre les difficultés des deux domaines du logement et de la santé à dialoguer, ce qui n’a pas toujours été cas.</p>
<h2>Santé et confort de l’habitat ont une longue histoire</h2>
<p>Le XIX<sup>e</sup> siècle correspond à l’entrée du logement comme question politique. En France, la loi sur l’habitat insalubre, adoptée en 1850, vise les appartements loués dont les caractéristiques sont « susceptibles de nuire à la vie ou à la santé des habitants ». En 1891, le docteur Jacques Bertillon, qui publie le <a href="https://www.cogitatiopress.com/urbanplanning/article/view/4706">premier recensement</a> des conditions de logement et cartographie le surpeuplement des ménages, compare cette carte avec <a href="https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb30096478q">celle des décès</a> (Bertillon, 1894).</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/530375/original/file-20230606-19-f3szcd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Docteur Jacques Bertillon, qui a parmi les premiers au XIXᵉ siècle conçu l’idée de logement sains" src="https://images.theconversation.com/files/530375/original/file-20230606-19-f3szcd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/530375/original/file-20230606-19-f3szcd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=816&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/530375/original/file-20230606-19-f3szcd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=816&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/530375/original/file-20230606-19-f3szcd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=816&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/530375/original/file-20230606-19-f3szcd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1025&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/530375/original/file-20230606-19-f3szcd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1025&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/530375/original/file-20230606-19-f3szcd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1025&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Docteur Jacques Bertillon, qui a parmi les premiers au XIXᵉ siècle conçu l’idée de logement sains.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Bertillon#/media/Fichier:Jacques_Bertillon_(1851-1922).png">Wikimedia</a></span>
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</figure>
<p>Les architectes du mouvement moderne, guidé par Le Corbusier, mettront à profit ces constats. Au nom de l’hygiène, ils préconisent des logements aérés, lumineux et respectant des dimensions standardisées devant procurer à l’habitant un <a href="http://www.fondationlecorbusier.fr/corbuweb/morpheus.aspx?sysInfos=1&sysLanguage=fr-fr&sysName=home">sentiment de bien-être et de confort</a>.</p>
<p>De son côté, la statistique publique des conditions de logement se fonde depuis l’après-guerre sur la présence d’équipements sanitaires comme indice de salubrité. À partir de 2000, observant que plus de 90 % des logements sont équipés, des chercheurs de l’Insee <a href="https://www.insee.fr/en/statistiques/1380823">ont montré</a> que d’autres défauts affectent l’habitat et la santé.</p>
<p>Ainsi, la qualité de l’habitat ne se réduit pas à des dimensions techniques. Elle comprend la possibilité pour l’habitant de partir ou de déménager (principe de mobilité) ; le principe d’adaptabilité du logement à tous les âges et cycles de la vie ; le principe d’identité qui permet ou non à l’habitant de <a href="https://sciences-et-bonheur.org/2017/09/18/yankel-fijalkow-du-confort-au-bonheur-dhabiter/">se reconnaître dans son lieu de vie et d’en parler</a> (principe de narrativité).</p>
<p>Ces éléments correspondent à la notion de santé dans le sens de l’OMS (un sentiment de bien-être physique et mental) on peut étudier l’effet de la représentation par les habitants de leur habitat sur leur santé. La qualité des habitats peut-elle être évaluée à partir de la notion de santé ?</p>
<h2>Impliquer les habitants</h2>
<p>La qualité des habitats peut-elle être évaluée à partir de la notion de santé ? Tel est le projet du programme SAPHIR, soutenu par <a href="https://www.crh.archi.fr/Projet-SAPHIR-Agence-Regionale-Sante-Paris-Habitat">L'Agence Régionale pour la Santé</a>. Il consiste en une recherche-action dans le cadre d’un partenariat entre le bailleur social Paris Habitat et IDHEAL.</p>
<p>Il s’appuie sur une typologie de 12 immeubles représentatifs, par leur taille, l’époque de construction du Nord-est parisien. Ils reflètent une gamme diversifiée de logements sociaux et très sociaux. Auprès des habitants de ces immeubles, il s’agit de mesurer la capacité des habitants à se saisir des questions d’habitat par le biais de la santé, qu’il s’agisse du chauffage, de l’humidité, de la qualité de l’air, des nuisances sonores, etc.</p>
<p>La recherche de la santé et le bien-être dans le logement sont ainsi des occasions d’évoquer le rapport des habitants à l’architecture qu’ils habitent, aux dispositifs techniques, et au gestionnaire.</p>
<p>Concrètement, dans chaque immeuble l’intervention des chercheurs correspond à plusieurs étapes :</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/530358/original/file-20230606-15-hmyor5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/530358/original/file-20230606-15-hmyor5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/530358/original/file-20230606-15-hmyor5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/530358/original/file-20230606-15-hmyor5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/530358/original/file-20230606-15-hmyor5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/530358/original/file-20230606-15-hmyor5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/530358/original/file-20230606-15-hmyor5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Focus group 2 à Champigny-sur-Marne.</span>
<span class="attribution"><span class="source">SAPHIR 2022</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<ul>
<li><p>Un « café pédagogique » où les habitants sont abordés dans l’espace d’accueil au moyen d’une affiche grand format présentant la recherche et les affections probables dans le logement</p></li>
<li><p>Une campagne d’entretiens individuels amenant les locataires à expliciter leurs parcours résidentiels, leurs pratiques de l’habitat et du quartier, leurs difficultés et le lien qu’ils font ou non avec les questions de santé.</p></li>
<li><p>Un premier focus group d’habitants dressant des éléments de diagnostics et de bilan partagés sur la qualité des logements. Il développe, amplifie ou minimise les éléments apparus lors des entretiens individuels.</p></li>
<li><p>Un second focus avec les équipes techniques.</p></li>
</ul>
<p>Les premiers résultats de la recherche montrent que si la préoccupation de la santé dans l’habitat se développe, elle n’aborde pas les mêmes thèmes selon les types d’immeubles et les phases du cycle de vie. De nouveaux critères de qualité de l’habitat émergent (comme la qualité de l’air, l’isolation phonique et thermique) à la fois plus subjectifs et techniques.</p>
<p>Des modalités de dialogues entre habitants et gestionnaires sont à inventer, les chercheurs ayant joué un rôle d’éveilleur, en posant la question de la santé comme un problème collectif. Cependant le rôle de la recherche ne s’arrête pas là. Elle consiste aussi à interroger les concepteurs, car si le consommateur d’aujourd’hui est exigeant à l’égard des produits qui lui sont proposés, il est permis de penser que l’habitant de demain le sera vis-à-vis de son cadre de vie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207041/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yankel Fijalkow a reçu des financements de l'Agence Régionale pour la Santé</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Yaneira WILSON a reçu des financements de l'Agence Régionale pour la Santé. </span></em></p>Les atteintes de l’environnement à la santé humaine sont bien connues. Mais si l’intérieur des logements est aussi affecté, les habitants en sont plus en plus conscients.Yankel Fijalkow, Professeur, sociologue et urbaniste, Laboratoire LAVUE UMR 7218 CNRS, École nationale supérieure d’architecture de Paris Val de Seine (ENSAPVS) – USPCYaneira Wilson, Architecte - Docteure en Urbanisme, École nationale supérieure d’architecture de Paris Val de Seine (ENSAPVS) – USPCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2032552023-04-11T17:00:47Z2023-04-11T17:00:47ZImmobilier : la propriété devient de moins en moins abordable, même dans les zones les plus pauvres<p>Selon le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre, publié en février dernier, on compterait en France 330 000 sans-abris, <a href="https://www.fondation-abbe-pierre.fr/nos-publications/etat-du-mal-logement">au moins 4 millions de personnes mal logées</a> et 15 millions de personnes touchées par la crise du logement. Face à cette situation dramatique, l’un des enjeux porte sur les leviers de l’action sur les marchés du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/logement-28772">logement</a>. Ces dernières années, la production neuve a ralenti (430 000 logements en 2012 à 370 000 en 2022) et la production de logements sociaux continue de se résidualiser (126 000 logements sociaux financés en 2016, 95 000 en 2021, 96 000 en 2022).</p>
<p>Au-delà de ces chiffres, la situation s’explique aussi par le blocage de la chaîne du logement du fait du <a href="https://www.puf.com/content/Les_crises_du_logement">ralentissement de l’accession à la propriété</a> dans un contexte de hausse des prix. La <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/3676698?sommaire=3696937">part des primo-accédants tend à diminuer</a> au profit de celle des propriétaires ayant fini de rembourser leur emprunt.</p>
<p>Dans ce contexte, nous avons mené une enquête financée par le programme <a href="https://wisdhom.hypotheses.org">ANR WIsDHoM</a> (<em>Wealth Inequalities and the Dynamics of Housing Markets</em>) portant sur les aires urbaines de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/paris-21728">Paris</a>, <a href="https://theconversation.com/fr/topics/lyon-52163">Lyon</a> et Avignon. Nous relevons que dans ces trois zones, l’accès à la propriété est devenu la norme, tout en étant moins abordable, <a href="https://doi.org/10.1111/tesg.12460">creusant ainsi les inégalités</a>.</p>
<h2>Une diminution générale de l’abordabilité</h2>
<p>Dans chacune des trois agglomérations, nous avons sélectionné quatre communes aux tendances de marché contrastées et nous y avons mené une enquête par voie postale auprès des propriétaires résidents (1 427 réponses). Les résultats tirés de cette enquête ne concernent donc pas l’ensemble des trois agglomérations mais des secteurs de marché spécifiques.</p>
<p>Le sens général de l’évolution ressort sans équivoque : <a href="https://doi.org/10.4000/cybergeo.36478">l’abordabilité</a>, entendue comme le rapport entre les prix et les revenus, a diminué partout.</p>
<p>Dans les trois agglomérations, les communes où un mois de revenu suffit pour acquérir un mètre carré sont de plus en plus reléguées dans les périphéries alors que le périmètre de celles où il faut plus de deux mois de revenu pour un mètre carré ne cesse de s’étendre.</p>
<p>Le processus est le plus marqué pour l’agglomération parisienne, dont la ville centre et la première ceinture étaient déjà peu abordables en 2002. Les niveaux d’abordabilité sont un peu meilleurs dans les deux autres agglomérations (plus pour Lyon que pour Avignon toutefois), mais la situation se détériore significativement.</p>
<p><strong>Abordabilité des maisons : ratios prix – revenus localisés de 2002 à 2018</strong></p>
<iframe src="https://giphy.com/embed/UnrwMKDoJsv2LPbcGP" width="100%" height="416" frameborder="0" class="giphy-embed" allowfullscreen=""></iframe>
<p><a href="https://giphy.com/gifs/UnrwMKDoJsv2LPbcGP"></a></p>
<p>Cette diminution de l’abordabilité a eu pour conséquence une triple évolution : une plus grande sélectivité sociale des marchés, une mobilisation plus importante des propriétaires pour leur parcours d’accession, et une recomposition de la géographie des parcours patrimoniaux.</p>
<p>La sélectivité sociale peut être mesurée par la hausse de la part des ménages à dominante cadre parmi les acquéreurs, part qui passe de 27 % avant l’inflation immobilière à 43 % après 2008. Cette hausse est surtout importante dans la première période de hausse des prix de l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/immobilier-23232">immobilier</a> à Paris et à Lyon, alors qu’elle est plus continue à Avignon.</p>
<p><iframe id="UpTci" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/UpTci/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>On observe également une certaine convergence : les écarts entre les terrains de l’enquête dans les trois agglomérations sont moins élevés après 2008. Même si les niveaux de prix sont très différents d’une agglomération à l’autre, l’évolution de l’abordabilité produit des résultats assez similaires en termes de filtrage social par le marché du logement.</p>
<h2>Le poids des transmissions intergénérationnelles</h2>
<p>La deuxième conséquence porte sur les ressources mobilisées par les ménages pour devenir propriétaires, <a href="https://doi.org/10.1080/02673037.2022.2141205">dans des logiques d’accumulation patrimoniale</a>. Les catégories sociales qui parviennent encore à devenir propriétaires doivent s’engager dans des parcours d’accession à la fois plus longs et plus contraignants que par le passé.</p>
<p>La durée moyenne des emprunts ne cesse de s’allonger dans les trois agglomérations : 15,7 ans pour les acquéreurs d’avant 2000, 20 ans après 2015. Dans le même temps, la part de ceux dont l’apport est inférieur à 25 % du prix d’achat passe de 30 % avant 2000 à 25 % après 2008. Ce rôle déterminant de l’apport initial renvoie à la proportion croissante d’acquéreurs bénéficiant de la revente d’un autre bien immobilier.</p>
<p><iframe id="mvqHq" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/mvqHq/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Un tiers des acquéreurs des années 1980 et 1990 étaient déjà propriétaires avant d’acheter. Ils sont près de 60 % après 2008. <a href="https://www.igedd.developpement-durable.gouv.fr/tunnel-de-friggit-et-courbe-de-friggit-qu-est-ce-a3578.html">Le découplage des prix et des revenus</a> n’est ainsi tenable que par cette réinjection du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/patrimoine-20390">patrimoine</a> issu de la revente de biens immobiliers pour financer les acquisitions suivantes, au détriment des primo-accédants. Dans cette dynamique, l’agglomération d’Avignon comble progressivement l’écart avec les métropoles parisienne et lyonnaise, et les dépasse même après 2008.</p>
<p>Dans ce contexte, le maintien des primo-accédants sur le marché passe par deux canaux distincts : les prêts aidés comme le prêt à taux zéro ou le prêt à l’accession sociale d’une part, les transmissions intergénérationnelles d’autre part. Les premiers connaissent surtout un essor entre 2000 et 2007 où 41 % (contre 19 % auparavant) des primo-accédants enquêtés en bénéficient. Ils refluent ensuite à 31 %, reflet de l’évolution des terrains étudiés (certains sortant du zonage de ces dispositifs) et de du niveau social des acquéreurs (ces prêts aidés étant versés sous condition de revenus).</p>
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<p>Le poids des transmissions intergénérationnelles pour les primo-accédants augmente quant à lui surtout après 2008. Alors que 18 % en bénéficiaient pour constituer un apport avant 2000 et 14 % entre 2000 et 2007, ce sont 33 % des primo-accédants qui mobilisent cette source après 2008. Sur des secteurs spécifiques de marché, les retournements des modes d’acquisition peuvent être rapides et la substitution des transferts intergénérationnels aux politiques d’aides à l’accession est un facteur renforçant les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/inegalites-20617">inégalités</a>.</p>
<h2>Les inégalités sociospatiales se redessinent</h2>
<p>L’évolution de l’abordabilité affecte aussi, et c’est la troisième conséquence, la géographie des mobilités résidentielles. 39 % des acquéreurs d’avant 2000 ont acheté dans la commune où ils résidaient, 29 % après 2008.</p>
<p><iframe id="UgS1d" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/UgS1d/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Ce mouvement est continu dans les agglomérations de Lyon et d’Avignon, alors qu’il semble se retourner après 2008 à Paris. Un élément d’explication tient au fait que les ménages déjà propriétaires de l’agglomération parisienne réinvestissent plus souvent dans la même commune que ceux des deux autres agglomérations. 67 % des acquéreurs issus de la même commune étaient déjà propriétaires dans les communes autour de Paris, contre 46 % à Lyon et 30 % à Avignon.</p>
<p>Une partie des propriétaires franciliens semblent parvenir à mieux tirer parti des hausses de prix pour se maintenir dans leur commune alors qu’à Lyon et Avignon ils changent de localisation pour poursuivre leur parcours résidentiel. Les différentiels d’abordabilité enclenchent donc des mobilités géographiques et redessinent les inégalités sociospatiales. Ces effets ne peuvent être saisis qu’en étant attentifs aux interactions avec les autres déterminants des trajectoires patrimoniales.</p>
<p>En combinant une approche systématique des marchés dans trois agglomérations différentes, mais aux dynamiques convergentes, à une enquête plus ciblée sur des secteurs de marché contrasté, on peut voir comment la réduction générale de l’abordabilité, passant par la médiation de facteurs patrimoniaux (durée d’emprunt, apport initial, transmissions intergénérationnelles, revente d’un logement précédent), affecte les profils et les parcours des propriétaires. Ce faisant, on peut mieux caractériser le blocage de l’accession à la propriété en y distinguant trois dimensions : un filtre social de plus en plus puissant, un surcroit de mobilisation de ressources et une contrainte de localisation grandissante.</p>
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<p><em>Le projet <a href="https://anr.fr/Projet-ANR-18-CE41-0004">Inégalités patrimoniales et dynamiques du marché du logement : Comprendre le Régime d’Inégalités Spatiales liées au marché IMMObilier (CRISIMMO) – WIsDHoM</a> est soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui finance en France la recherche sur projets. Elle a pour mission de soutenir et de promouvoir le développement de recherches fondamentales et finalisées dans toutes les disciplines, et de renforcer le dialogue entre science et société. Pour en savoir plus, consultez le site de l’<a href="https://anr.fr/">ANR</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203255/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Renaud Le Goix a reçu des financements de l'Institut Universitaire de France (IUF). Le programme WIsDHoM a été financé par l'Agence Nationale de la Recherche (ANR-18-CE41-0004) entre 2019 et 2022.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Loïc Bonneval ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La part de la population en mesure d’acquérir un logement se réduit partout, comme le montre une étude récente qui observe des dynamiques similaires à Paris, Lyon et Avignon.Renaud Le Goix, Professeur en géographie urbaine et économique, Université Paris CitéLoïc Bonneval, Maître de conférences en sociologie, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2019142023-03-22T23:53:08Z2023-03-22T23:53:08ZÀ l’université, le cercle vicieux de la précarité étudiante<p>À l’heure où le recours aux <a href="https://www.liberation.fr/economie/les-points-daide-alimentaire-de-plus-en-plus-sollicites-20230227_75UBS5SWTVFOBD62TCGLMBKWIY/">banques alimentaires</a> explose et où la <a href="https://theconversation.com/bourses-etudiantes-comment-corriger-les-inegalites-du-systeme-francais-191611">réforme des bourses étudiantes</a> se fait attendre, la <a href="https://theconversation.com/une-jeunesse-des-jeunesses-peut-on-vraiment-parler-de-generation-Covid-171165">précarité de la jeunesse</a> devient un sujet central. Celui-ci a été mis sur le devant de la scène avec la pandémie et les confinements successifs. Les analyses de l’<a href="https://www.ove-national.education.fr/publication/ove-infos-n45-une-annee-seuls-ensemble/">Observatoire de la vie étudiante</a> ont montré la dégradation de la situation économique des étudiantes et étudiants, alors placés à l’écart du marché du travail, et la progression des difficultés psychologiques. Et, pour la rentrée 2023, les organisations étudiantes sont pessimistes. Dans son enquête annuelle dévoilée mercredi 16 août, la FAGE a pointé <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/08/16/le-cout-de-la-vie-etudiante-atteint-un-nouveau-record_6185505_3234.html?random=4464626">une hausse du coût de la vie étudiante « historique »</a>, dans le sillage <a href="https://www.leparisien.fr/economie/consommation/jamais-on-navait-atteint-de-tels-sommets-le-cout-de-la-rentree-etudiante-en-hausse-de-647-D53C2NDLWJG6RN5J4YSCL7AKXU.php">des prévisions faites par l'UNEF</a>.</p>
<p>Pour autant, peu de recherches permettent de bien cerner l’étendue de cette précarité et son évolution dans le temps. La mesurer objectivement à partir des ressources dont disposent les jeunes pose de nombreuses difficultés étant données la variété de leurs sources et de leurs formes, à commencer par les aides des familles, versées directement ou indirectement.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-la-crise-sanitaire-affecte-la-sante-mentale-des-etudiants-163843">Comment la crise sanitaire affecte la santé mentale des étudiants</a>
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<p>Réalisée à l’échelle de l’Université Paris-Nanterre au printemps 2022, <a href="https://www.parisnanterre.fr/enquete-sur-les-conditions-de-vie-des-etudiants-de-luniversite-paris-nanterre">l’enquête <em>Conditions de vie étudiantes</em></a> coordonnée par la mission précarité et santé de l’établissement nous apporte un éclairage de terrain sur l’ampleur de cette précarité et le caractère multidimensionnel du phénomène. Voici les enseignements qu’on peut tirer de près de 2500 réponses – redressées sur critères de bourse, sexe, catégorie socioprofessionnelle des parents, nationalité, série et mention du baccalauréat, niveau d’étude, discipline et formation.</p>
<h2>Une précarité qui pèse sur la santé des jeunes</h2>
<p>22 % des étudiantes et des étudiants interrogés déclarent avoir eu des difficultés financières telles qu’il leur a été impossible de faire face à leurs besoins (alimentation, loyer, EDF…) depuis le début de l’année universitaire. 12 % ont des factures impayées ou des retards de paiement. Par conséquent, la place de l’emploi étudiant dans leur vie est cruciale : plus d’un étudiant et d’une étudiante sur deux travaillent en parallèle de ses études (contre <a href="https://www.ove-national.education.fr/wp-content/uploads/2022/03/OVE-INFOS-46-Une-uberisation-du-travail-etudiant.pdf">40 % à l’échelle nationale</a> selon l’Observatoire de la vie étudiante), et parmi celles et ceux qui travaillent, 61 % déclarent que cette activité leur est indispensable pour vivre.</p>
<p>Les difficultés à boucler les fins de mois se répercutent sur d’autres dimensions, à commencer par leur alimentation : depuis la rentrée, 13 % déclarent ne pas avoir mangé à leur faim pour des raisons financières et un sur 10 a eu recours à une aide alimentaire (bon CROUS, distribution de colis, banque alimentaire, épicerie sociale et solidaire, e-carte…).</p>
<p>Ces restrictions de budget ont des répercussions aussi sur leur santé : plus d’une personne interrogée sur 10 a renoncé à voir un médecin ou un autre professionnel de santé pour des raisons financières, et respectivement 21 % et 41 % d’entre elles perçoivent leur état de <a href="https://theconversation.com/comment-la-crise-sanitaire-affecte-la-sante-mentale-des-etudiants-163843">santé physique et psychologique</a> comme « très mauvais » ou « mauvais », ce qui va de pair avec un sentiment de nervosité intense pour 16 %.</p>
<p>Les situations de logement étudiant sont parfois d’une extrême précarité : 1,3 % n’ont pas de logement pérenne et sont hébergées gratuitement mais temporairement, parfois contre paiements en nature. Plus généralement, 16 % disent rencontrer de grandes difficultés concernant leur logement actuel. Sur l’ensemble de l’échantillon, 25 % déclarent des difficultés de logement en lien avec son coût, 23 % en lien avec la surface, 5 % sur l’accessibilité, 10 % sur l’insalubrité et 9 % sur le chauffage. Seulement 6 % des étudiantes et étudiants de l’université habitent un logement CROUS, quand 72 % déclarent ne pas en avoir besoin, preuve du manque criant de logement social étudiant.</p>
<h2>Des étudiantes et étudiants étrangers en grande précarité</h2>
<p>Pour analyser les profils des étudiantes et étudiants précaires, nous nous appuyons sur un score d’expérience de la précarité étudiante construit selon la méthode proposée par <a href="https://resosup.fr/IMG/pdf/Cahier_de_Resosup_no5.pdf">Resosup (2016)</a>. Ce score, variant de 0 à 12, combine les différentes dimensions de la précarité mentionnées plus haut (économies, emploi, isolement, renoncement aux soins, expérience de la faim, perception de l’état de santé). Le score moyen s’élève à 2,5 (sur une échelle de 0 à 12), et 20 % des étudiants ont un score supérieur ou égal à 5. Cette mesure de la précarité varie selon les situations sociale et résidentielle des étudiantes et étudiants.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/precarite-etudiante-un-vecu-lie-a-lage-et-au-soutien-familial-127070">Précarité étudiante : un vécu lié à l’âge et au soutien familial</a>
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<p>La cohabitation avec les parents joue un rôle protecteur. Les étudiants et étudiantes vivant chez leurs parents ont en effet le score de précarité le plus bas. Les plus précaires sont celles et ceux qui n’ont pas de logement pérenne (score de 6,1), ainsi que celles et ceux habitant en résidence collective, en foyer, internat ou logement CROUS, avec un score de 4,2. Les femmes décohabitantes connaissent des niveaux de précarité plus élevés que les hommes.</p>
<p>41 % des étudiantes et étudiants étrangers connaissent une situation de grande précarité, avec un score supérieur ou égal à 5, soit deux fois plus élevé que celui des étudiantes et étudiants français. La nationalité étrangère est donc sans conteste un déterminant fort de la précarité, de même que l’origine sociale : les enfants de cadres ont un score deux fois plus faible que ceux d’origine très défavorisée. <a href="https://theconversation.com/precarite-etudiante-un-vecu-lie-a-lage-et-au-soutien-familial-127070">Les ressources économiques des parents</a>, saisies à travers la bourse, déterminent aussi la vulnérabilité étudiante : les boursières et boursiers font plus souvent l’expérience de la précarité, et en tendance, plus les ressources économiques familiales des étudiantes et étudiants sont faibles (et donc plus les montants des bourses s’élèvent avec l’échelon de bourse), plus les scores de précarité s’élèvent.</p>
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<p>Sur le plan scolaire, les étudiantes et étudiants les plus vulnérables étudient dans les formations de langues et sont titulaires d’un équivalent au baccalauréat. Inversement, les étudiantes et étudiants en BUT et DUT et dans une moindre mesure, celles et ceux en première année de licence et de doctorat, ainsi que celles et ceux dans des formations de sciences fondamentales et AES, sont moins précaires. Et chez les étudiantes et étudiants ayant quitté le domicile parental, à caractéristiques sociales contrôlées, celles et ceux des filières de langues, sciences humaines et Staps font partie des plus précaires.</p>
<h2>Des aides institutionnelles méconnues et insuffisantes</h2>
<p>La bourse permet-elle de réduire les inégalités étudiantes devant la précarité ? Et qu’en est-il des autres aides institutionnelles, comme le lien avec les assistantes sociales du Crous, l’accès à un logement Crous ou une aide alimentaire ? Pour y répondre, nous utilisons des méthodes d’analyse qui permettent d’isoler différents facteurs participant de la précarité chez les étudiants et étudiantes décohabitants, lesquelles font davantage l’expérience de la précarité que les autres.</p>
<p>Notre enquête montre que ces aides sont efficaces, dans la mesure où elles réduisent les inégalités sociales, mais très insuffisantes à plusieurs égards. Les plus précaires restent, après redistribution <em>via</em> les aides, les plus précaires, ce qui traduit l’insuffisance des montants versés pour la bourse et la faiblesse des moyens mis en œuvre dans la lutte contre la précarité plus largement.</p>
<p>Les modèles soulignent en outre les biais de méconnaissance des dispositifs dans l’accès aux aides. Par exemple, un tiers des étudiantes et étudiants étrangers déclarent qu’ils ou elles auraient eu besoin d’une aide mais ne savaient pas qu’ils ou elles pouvaient en faire la demande. C’est le cas d’un dixième des étudiantes et étudiants de nationalité française.</p>
<p>De plus, outre l’épreuve de la précarité, les bénéficiaires des aides peuvent faire l’expérience du stigmate associé, qui accroît peut-être la perception de la précarité vécue ou la capacité à la dire. De fait, l’expérience vécue aux guichets lors des démarches administratives est souvent difficile pour les demandeurs et demandeuses. Et quand ils et elles obtiennent les aides, les bénéficiaires sont alors étiquetés comme tels, pas toujours avec une image positive, ce qui peut augmenter leur identification à une population précaire.</p>
<p>Une enquête qualitative qui débute pourra permettre de mieux appréhender ces expériences de précarité et de sollicitation d’aides, en les replaçant dans des trajectoires longues.</p>
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<p><em>Cet article a été écrit avec l’appui de la mission Précarité et santé des étudiant·e·s de l’université Paris-Nanterre.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201914/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Alors que le recours aux banques alimentaires explose et que la réforme des bourses étudiantes tarde, les enquêtes de terrain nous renseignent sur l’ampleur de la précarité qui touche la jeunesse.Fanny Bugeja, MCF en sociologie à l’Université Paris Nanterre, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLeila Frouillou, Maîtresse de conférences en sociologie, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1976602023-01-26T11:44:52Z2023-01-26T11:44:52ZComprendre les 3 dimensions de la sobriété, cette notion-clé de notre époque<p><em>Sobriété, j’écris ton nom ! Ce pourrait être le slogan pour notre époque soucieuse de s’affranchir du gaspillage et de la surconsommation. Mais quelles réalités recouvre cette notion devenue incontournable ? Dans ce texte, extrait légèrement adapté de son récent ouvrage <a href="https://editionsdelaube.fr/catalogue_de_livres/bifurcations/">« Bifurcations : réinventer la société industrielle par l’écologie ? »</a>, (Éditions de l’aube, octobre 2022), l’économiste et sociologue Pierre Veltz, tente de se frayer un chemin pour nous éclairer.</em></p>
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<p>La notion de sobriété souffre d’un handicap énorme par rapport à celle d’efficacité. Cette dernière peut être objectivée, mesurée, alors que la sobriété dépend fondamentalement des choix et des valeurs que nous décidons d’adopter. </p>
<p>Le mot renvoie à une forme de vertu – même si on le dépouille de ses connotations puritaines – plus qu’à des obligations précises. […]</p>
<p>Mon avis est qu’il est préférable de ne pas enfermer la sobriété dans une définition précise ou réglementée, mais de lui laisser le sens ouvert d’une réinvention de nos façons de vivre, individuelles et collectives, fondée sur de nouvelles hiérarchies dans nos valeurs, sur l’instauration de nouvelles libertés autant et plus que de nouvelles contraintes. </p>
<p>Il est surtout nécessaire de comprendre que la sobriété n’est pas d’abord une question de comportement, mais d’organisation collective de nos sociétés.</p>
<h2>Les « bons gestes », ou le quart du chemin</h2>
<p>Le premier niveau de sobriété est celui de nos choix individuels. Chacun connaît maintenant plus ou moins les fameux « bons gestes » écoresponsables : manger moins de protéines animales, prendre l’avion seulement si c’est vraiment nécessaire, acheter moins de vêtements et les porter plus ou les offrir à d’autres, etc. Il y a souvent un côté moralisateur, dans ces bréviaires de la vertu écologique, qui suscite le rejet de certains ; et il ne faut pas oublier que, pour d’autres, ces comportements sont tout simplement contraints par la maigreur des revenus.</p>
<p>Les comportements de consommation comptent, incontestablement. Quel est leur impact ? L’étude la plus fouillée que j’aie trouvée, coordonnée par l’université de Trondheim, en Norvège, a estimé l’effet de 91 (!) de ces bons gestes sur notre empreinte carbone, en remontant les chaînes de valeur correspondantes. Le résultat donne un ordre de grandeur : si tout le monde est parfaitement vertueux, on fait <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/14693062.2018.1551186">environ un quart du chemin nécessaire</a>. </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/287070/original/file-20190806-84249-1ttrbuc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/287070/original/file-20190806-84249-1ttrbuc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/287070/original/file-20190806-84249-1ttrbuc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/287070/original/file-20190806-84249-1ttrbuc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/287070/original/file-20190806-84249-1ttrbuc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/287070/original/file-20190806-84249-1ttrbuc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/287070/original/file-20190806-84249-1ttrbuc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Faire ses courses différemment permet de réduire la quantité de déchets envoyés à la décharge.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>Comme on s’y attend, les domaines de la mobilité, du logement et de l’alimentation sont ceux qui permettent les gains les plus substantiels. Un quart, c’est beaucoup. Mais c’est loin de suffire.</p>
<p>Quelle est la probabilité d’une adoption assez large, et surtout assez rapide, de ces nouveaux comportements sobres ? Diverses études ont pointé les contradictions et les incohérences de nos choix, y compris dans les milieux qualifiés de « bobos » les plus prolixes en discours enflammés sur le sujet.</p>
<p>Les enquêtes montrent aussi que les gens ne hiérarchisent pas clairement les « bons gestes ». Certains placent le remplacement des ampoules anciennes par des LED avant la modération dans l’alimentation carnée, alors que les impacts réels sont très différents. On peut espérer qu’une nouvelle esthétique de vie s’impose progressivement, notamment chez les plus aisés, responsables d’une grande partie des émissions.</p>
<p>Ce n’est pas impossible. Regardons la manière dont notre ameublement a évolué, devenant plus léger, plus discret, moins durable aussi. Nos voitures, en sens inverse, sont devenues plus baroques, <a href="https://theconversation.com/automobile-lessor-du-suv-un-choix-avant-tout-politique-149781">plus lourdes</a>. </p>
<p>Des basculements peuvent se produire. Au fond, nous attendons une révolution du <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/une-vie-une-oeuvre/ludwig-mies-van-der-rohe-1886-1969-la-simplicite-est-un-long-voyage-1143866"><em>less is more</em></a>, selon la formule employée par Ludwig Mies Van der Rohe lorsque l’architecture a abandonné, il y a longtemps déjà, les sur charges baroques ou néoclassiques.</p>
<h2>Une question de choix collectifs</h2>
<p>Le deuxième niveau est celui de la sobriété systémique. C’est le plus important. Il est difficile de demander de la sobriété individuelle dans une société organisée autour de l’abondance et du gaspillage. Ce n’est pas seulement une question de dissonance des valeurs. Le constat de base est que nos comportements sont formatés par les cadres physiques, organisationnels et réglementaires que la société nous impose.</p>
<p>De nombreux choix sociétaux implicites ou sédimentés s’imposent à nos propres choix. Pour faire du vélo, il faut des pistes cyclables, et pour que le vélo devienne un moyen de déplacement majeur, il faut que la répartition spatiale de l’emploi, de l’habitat, des services, ne soit pas trop éclatée.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Pour télétravailler, il est préférable de disposer de locaux adaptés. L’aménagement de nos territoires, de nos villes, de nos mobilités, l’organisation du temps, dans les entreprises, les écoles, les commerces, façonnent en profondeur nos consommations. Ils nous obligent à de vastes gaspillages à notre corps défendant. Et ils sont une source potentielle d’économies de ressources largement inexplorée.</p>
<p>La pandémie a rendu sensible l’importance de ces contraintes, tout en révélant la flexibilité étonnante de nos sociétés à l’égard de normes que l’on croyait beaucoup plus rigides. C’est donc le bon moment pour repenser ces normes, du point de vue du confort de chacun, mais aussi sous l’angle des effets collectifs.</p>
<p>La sobriété systémique appelle des investissements, et même des investissements importants. Elle demande aussi de quitter les raisonnements en silos, secteur par secteur. Elle mérite son nom parce qu’elle ne peut pas se satisfaire des découpages habituels : le logement, l’urbanisme commercial, la mobilité, l’emploi, etc. Elle engage l’ensemble de nos organisations sociales, temporelles et spatiales. Il ne sert à rien de prêcher l’abandon de la voiture au ménage qui habite (par choix ou par nécessité, peu importe) un pavillon éloigné de tout transport collectif.</p>
<p>En l’occurrence, la non-sobriété est le résultat de décennies de politiques (ou plutôt de non-politiques) ayant conduit à l’étalement urbain que nous connaissons.</p>
<h2>S’éloigner des discours culpabilisants</h2>
<p>Prenons un autre exemple. Dans le domaine du logement, faut-il vraiment réduire les surfaces disponibles, continuer à entasser les gens dans des logements minuscules, pour utiliser moins de matériaux, de chauffage ? </p>
<p>C’est la réponse, peu exaltante, que donnent ceux qui limitent leur regard à ce seul domaine. Ne serait-il pas plus sobre, en définitive, de proposer des logements plus spacieux (en suivant la demande générale que révèlent absolument toutes les enquêtes), permettant du télétravail vraiment confortable et incitatif, facilitant aussi des mutualisations diverses d’activités dans les immeubles ou les quartiers ?</p>
<p>Ce sont là des questions pratiques, concrètes, que les grands discours culpabilisants (haro sur les maisons individuelles, sur les lotissements périphériques) ou mécanistes (réduire la taille des logements pour utiliser moins de ciment) empêchent d’aborder intelligemment.</p>
<p>La sobriété systémique ouvre ainsi un champ de réflexion et d’action très large, qui recoupe souvent ceux de l’efficacité, à ceci près qu’un gain de sobriété systémique, par exemple un meilleur aménagement du territoire, n’entraîne pas d’effet rebond ! </p>
<p>J’ajoute que l’on pourrait aussi étendre ce concept aux formes « immatérielles » comme les réglementations et les formes de comptabilités, publiques et privées, technologies invisibles qui ont un impact considérable sur nos organisations. De nombreuses réflexions sont engagées sur la <a href="https://theconversation.com/la-comptabilite-entame-sa-mue-socio-environnementale-196410">« comptabilité écologique »</a>, notamment au niveau local. Elles mériteraient d’être mieux partagées et inscrites dans les agendas nationaux.</p>
<p>Reste un troisième niveau de sobriété, celui de la sobriété que j’appelle « structurelle ». </p>
<p>La différence avec la sobriété systémique est que cette dernière prend comme un donné la composition de l’économie, ses priorités sectorielles, la liste des biens et des services qui dominent la production, la consommation, et les budgets publics.</p>
<p>La sobriété structurelle, dans ma définition, est celle qui, au contraire, résulte de cette composition de l’économie et de la nature des activités qu’elle privilégie (quelle place est donnée aux industries très intensives en énergie et en matières ? Aux dépenses militaires ? Aux dépenses de santé et d’éducation ? Aux loisirs ?). Mon idée est que la tendance allant vers le développement de l’économie humano-centrée […] ouvre ici une perspective très intéressante, pour une sobriété inscrite dans les priorités profondes de l’économie et de la société. […]</p>
<h2>Une sobriété différente en fonction des revenus</h2>
<p>Toutes les formes de sobriété ne sont pas également accessibles. Elles ne le sont pas au même coût. Et leur impact peut être très variable. On peut réduire nos achats de vêtements ou de chaussures, désencombrer nos placards de myriades d’objets inutiles, manger moins de viande rouge, réduire la vitesse sur autoroute. Cela peut être fait vite, sans traumatisme excessif, et avec un impact climatique fort !</p>
<p>En revanche, il est difficile d’être sobre en mobilité automobile quand on n’a pas d’autre choix, compte tenu de l’endroit où l’on habite. Dans ce cas, il faut privilégier, au moins à titre transitoire, les politiques d’efficacité, comme la voiture électrique.</p>
<p>Les politiques publiques et les recommandations d’experts qui ignorent cela ne réussiront qu’à attiser le ressentiment et le rejet. Inversement, dans les domaines où la décarbonation par l’offre paraît particulièrement difficile, comme le transport aérien, il n’y a sans doute pas d’autre solution qu’une forme de modération de la consommation, sans aller jusqu’à l’abstinence.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1122&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1122&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1122&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1410&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1410&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/504009/original/file-20230111-15-6zrfrs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1410&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://editionsdelaube.fr/catalogue_de_livres/bifurcations/">Paru en octobre 2022 aux Éditions de l’aube</a></span>
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<p>À cet égard, il faut rappeler que la sobriété n’a pas le même sens selon les niveaux de revenus. Les plus riches d’entre nous, à l’échelle nationale et internationale, sont à l’origine d’une part disproportionnée des émissions. En matière de mobilité, les ménages du premier décile de revenus (les 10 % ayant les revenus les plus bas) parcourent cinq fois moins de kilomètres pour des déplacements de loisir à plus de 80 kilomètres que ceux du dernier décile.</p>
<p>Il serait tragique que des politiques de sobriété plus ou moins imposées par des incitations ou des réglementations diverses accentuent ces inégalités. Prêcher la sobriété à des catégories de la population qui ont du mal à joindre les deux bouts et à des pays pauvres serait, à juste titre, choquant.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197660/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre Veltz ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans son essai « Bifurcations », le sociologue et économiste Pierre Veltz distingue dans cette notion relativement floue des dimensions individuelles, systémiques et structurelles.Pierre Veltz, Professeur émérite, spécialiste de l’organisation des entreprises et des dynamiques territoriales, École des Ponts ParisTech (ENPC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1955062023-01-19T16:00:09Z2023-01-19T16:00:09ZLa fiscalité, un outil précieux pour résoudre la crise du logement<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/505177/original/file-20230118-16-izbt03.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2995%2C2061&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des manifestants réclament davantage de logements sociaux et abordables à Montréal, le 24 avril 2021. Une des manières d'y parvenir serait grâce à la fiscalité.</span> <span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Graham Hughes</span></span></figcaption></figure><p>La Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) a adopté le 24 novembre dernier sa <a href="https://cmm.qc.ca/communiques/la-cmm-se-dote-dune-premiere-politique-en-habitation/">première politique d’habitation</a>.</p>
<p>Celle-ci arrive dans un contexte de <a href="https://www.nbc.ca/content/dam/bnc/taux-analyses/analyse-eco/logement/housing-affordability.pdf">dégradation importante de l’abordabilité du logement dans de nombreuses villes canadiennes</a>. En effet, les coûts supportés par les ménages pour se loger dans les grandes villes canadiennes, dont Montréal, augmentent bien plus vite que leurs revenus.</p>
<p>Face à cet enjeu, la CMM propose plusieurs mesures visant à accroître l’offre de logements aux ménages montréalais, dont l'insuffisance est de plus en plus souvent signalée comme une des <a href="https://www.cmhc-schl.gc.ca/fr/lobservateur-du-logement/2022/retablir-labordabilite-dici-2030">causes de l’envolée de leurs prix</a>. Cette politique est donc bienvenue. Elle repose toutefois essentiellement sur la construction de nouveaux logements sociaux et privés, et sur la rénovation des logements plus anciens.</p>
<p>Professeur d’économie à l’ESG-UQAM et spécialiste des questions d’économie urbaine, je pense qu’une dimension importante est ignorée dans cette première politique métropolitaine d’habitation : l’utilisation de la fiscalité afin de s’assurer que tous les logements déjà existants soient effectivement mis à la disposition des Montréalais.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505178/original/file-20230118-7953-usmvs7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505178/original/file-20230118-7953-usmvs7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=454&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505178/original/file-20230118-7953-usmvs7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=454&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505178/original/file-20230118-7953-usmvs7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=454&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505178/original/file-20230118-7953-usmvs7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=571&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505178/original/file-20230118-7953-usmvs7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=571&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505178/original/file-20230118-7953-usmvs7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=571&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une femme brandit une pancarte réclamant plus de logements sociaux et abordables lors d’une manifestation à Montréal, le 24 avril 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Graham Hughes</span></span>
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<h2>Construire et rénover des logements, pas si simple aujourd’hui</h2>
<p>Accroître le stock de logements de qualité en rénovant les anciens et en en construisant de nouveaux est sans aucun doute nécessaire. Mais dans le contexte actuel, <a href="https://www.cmhc-schl.gc.ca/fr/lobservateur-du-logement/2022/offre-logements-dans-6-grandes-villes-canada">il s’agit d’une avenue difficile et incertaine</a>.</p>
<p>En effet, les pénuries de main-d’œuvre n’épargnent pas le secteur de la construction. De plus, l’inflation et les perturbations dans les chaînes d’approvisionnement durant la pandémie ont engendré une augmentation importante des coûts de construction. Enfin, la hausse récente des taux d’intérêt risque de conduire les <a href="https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/230116/dq230116b-eng.htm">promoteurs à mettre certains projets sur la glace</a>.</p>
<p>Compte tenu des difficultés de recrutement dans le secteur de la construction, les <a href="https://www.cmhc-schl.gc.ca/fr/salle-de-presse/news-releases/2022/penurie-logements-canada-capacite-main-doeuvre-qualifiee">estimations sont peu optimistes</a> : il sera impossible pour la Colombie-Britannique, l’Ontario et le Québec de rétablir l’abordabilité d’ici 2030. De plus, des <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/grand-montreal/2022-12-03/crise-de-l-habitation/des-chantiers-sur-pause-malgre-la-penurie.php">lenteurs dans les processus administratifs d’octroi des permis de construire et des freins mis par les municipalités</a> <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/grand-montreal/2022-12-03/crise-de-l-habitation/des-chantiers-sur-pause-malgre-la-penurie.php">à certains projets immobiliers</a> sont parfois à regretter. D’autres leviers doivent donc être mobilisés en parallèle de la construction de nouveaux logements.</p>
<h2>Des logements existants indisponibles pour les résidents</h2>
<p>Le recensement de la population permet d’identifier le nombre de logements qui ne sont pas occupés par des « résidents habituels » : cela inclut les logements inoccupés, ceux détenus par des personnes dont la résidence principale se situe ailleurs au Canada ou à l’étranger, ou encore offerts sur les plates-formes de location à court terme, telles Airbnb. À Montréal, ce sont <a href="https://censusmapper.ca/maps/3055#8/45.346/-73.943">7,1 % des logements qui seraient dans cette situation en 2021</a>.</p>
<p>Des <a href="https://financialpost.com/real-estate/busting-the-myth-of-canadas-million-or-more-vacant-homes">débats existent concernant la part de ces logements qui pourraient être réellement rendus disponibles pour les résidents</a>. On sait que certains propriétaires préfèrent ne pas mettre les logements qu’ils détiennent sur le marché locatif à long terme. À cela plusieurs raisons : ils occupent temporairement ces logements à titre de résidences secondaires, ils trouvent plus rentable de les louer pour des courtes périodes, ou ils ne souhaitent pas avoir à gérer les parfois difficiles relations propriétaire-locataire. Dans tous les cas, le retrait de ces logements de l’offre immobilière peut conduire à aggraver les problèmes d’abordabilité.</p>
<p>De nombreuses études montrent qu’à <a href="https://www.bde.es/f/webpi/SES/seminars/2019/Fich/sie20191210.pdf">Barcelone</a>, <a href="https://www.diw.de/documents/publikationen/73/diw_01.c.796620.de/dp1890.pdf">Berlin</a>, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0094119021000383">Los Angeles</a> et dans l’ensemble des <a href="https://marketing.wharton.upenn.edu/wp-content/uploads/2019/08/09.05.2019-Proserpio-Davide-Paper.pdf">villes américaines</a>, l’arrivée d’Airbnb a contribué à l’augmentation des loyers et du prix de vente des logements.</p>
<h2>La taxation des logements vacants, un outil qui a fait ses preuves</h2>
<p>Afin d’inciter les propriétaires à mettre leurs logements vacants en vente ou en location de long terme, plusieurs villes ou pays ont eu recours à la fiscalité.</p>
<p>Au Canada, <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/national/2022-11-26/ottawa-commence-a-taxer-les-logements-vacants.php">Ottawa vient de mettre en place</a> une taxe sur les logements vacants dont les recettes serviront à financer la construction de logements abordables. Toronto, où le <a href="https://www.theglobeandmail.com/business/article-vacant-homes-are-on-the-rise-in-toronto-census-indicator-suggests/">nombre de logements vacants tend à augmenter</a>, aura également une <a href="https://www.toronto.ca/services-payments/property-taxes-utilities/vacant-home-tax/">taxe de ce type en 2023</a>. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0047272719301409?fr=RR-2&ref=pdf_download&rr=7748ff1e28434bd1">L’évaluation d’une taxe sur les logements vacants mise en œuvre en France</a> à la fin des années 1990 montre qu’elle a permis de faire significativement baisser le taux de vacance.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Vue extérieure d’un immeuble à condos" src="https://images.theconversation.com/files/505179/original/file-20230118-14-5sy7jz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505179/original/file-20230118-14-5sy7jz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505179/original/file-20230118-14-5sy7jz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505179/original/file-20230118-14-5sy7jz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505179/original/file-20230118-14-5sy7jz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505179/original/file-20230118-14-5sy7jz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505179/original/file-20230118-14-5sy7jz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Plusieurs appartements montréalais restent vacants ou louer seulement sur des plates-formes comme Airbn. Afin d’inciter les propriétaires à mettre leurs logements vacants en vente ou en location de long terme, plusieurs villes ou pays ont eu recours à la fiscalité.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Son impact a été particulièrement fort dans les villes où le taux de vacance était élevé et pour les logements qui étaient vacants depuis longtemps. En Colombie-Britannique, une taxe sur la spéculation et les logements vacants a été mise en place en 2018. La Ville de Vancouver a pris au même moment d’autres mesures sur les logements vacants et sur les locations à court terme. <a href="https://www.bcrea.bc.ca/wp-content/uploads/Speculation-and-Vacancy-Tax.pdf">Une étude montre un ralentissement des prix de l’immobilier peu de temps après</a>, surtout à Vancouver, où la situation était particulièrement critique.</p>
<h2>Taxer aussi les terrains vacants</h2>
<p>Par ailleurs, il arrive que les promoteurs immobiliers achètent des terrains, mais n'y construisent pas immédiatement. Ils attendent pour le faire des conditions de marché plus favorables afin de réaliser des profits plus élevés. C’est ce que l’on appelle le « land banking », et cela contribue également à aggraver la pénurie de logements.</p>
<p>Afin de contrer ce phénomène, une taxe exceptionnelle sur les terrains vacants pourrait être utile. De manière générale, une réforme de la fiscalité foncière conduisant à un <a href="https://www.ledevoir.com/opinion/idees/699180/point-de-vue-reformer-l-impot-foncier-pour-accroitre-l-offre-de-logements">taux de taxe (beaucoup) plus élevé sur les terrains que sur les bâtiments</a> stimulerait la <a href="https://www.journals.uchicago.edu/doi/abs/10.1086/NTJ41789240">construction de logements et la densification de ces derniers</a>.</p>
<p>En effet, lorsque le taux de taxe sur les terrains est plus élevé, il devient avantageux de construire plus de logements sur chaque parcelle afin de répartir la taxation du terrain entre un nombre plus élevé de propriétaires. Cette évolution est préférable à la <a href="https://www.ledevoir.com/societe/transports-urbanisme/773973/ces-villes-qui-taxent-la-densite">taxation majorée des immeubles de six étages ou plus que plusieurs municipalités du Grand Montréal mettent ou souhaitent mettre en œuvre</a>. Cette dernière décourage en effet la densification urbaine, qui est pourtant souhaitable pour accroître l’offre de logements tout en respectant au mieux les limites environnementales.</p>
<p>Il est certain que de tels changements de la fiscalité foncière ne feraient pas que des heureux. <a href="https://doodles.mountainmath.ca/blog/2020/12/07/what-to-expect-from-an-empty-homes-tax/">De plus, la fiscalité ne résoudra pas à elle seule la pénurie de logements</a>.</p>
<p>Mais taxer les logements et les terrains vacants est un moyen efficace de s’assurer que le stock de logements et de terrains existants est utilisé au mieux. La fiscalité fait partie des outils à activer pour créer un écosystème du logement qui favorise l’abordabilité. Cela permettrait par ailleurs, le temps que les propriétaires adaptent leur comportement, de dégager des ressources utiles pour le financement de nouveaux logements abordable pour les ménages.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/195506/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Florian Mayneris a reçu des financements du Conseil de recherches en sciences humaines. </span></em></p>Les coûts supportés par les ménages pour se loger dans les grandes villes canadiennes augmentent bien plus vite que leurs revenus. Une fiscalité innovante pourrait aider à résoudre la crise du logement.Florian Mayneris, Professor, Urban Economics, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1976512023-01-17T17:49:19Z2023-01-17T17:49:19ZImmobilier : comment les mobilités post-Covid rebattent les cartes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/504047/original/file-20230111-35143-mdyx52.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C25%2C1068%2C772&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La part des télétravailleurs réguliers de la région parisienne, estimée aujourd'hui à 42%, a doublé par rapport à la période pré-pandémique.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/117994717@N06/49813817532">Flickr/École polytechnique</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La pandémie de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/Covid-19-82467">Covid-19</a> a eu de nombreuses répercussions sur la société tant du point de vue sanitaire que sociale et économique. En particulier, elle a modifié les façons d’habiter et de travailler, avec la mise en place de confinements successifs et le recours massif au <a href="https://theconversation.com/fr/topics/teletravail-34157">télétravail</a>. Ces changements ont pu conduire les ménages à reconsidérer leur choix de localisation résidentielle et/ou les caractéristiques des logements recherchés, et ainsi avoir des conséquences sur les dynamiques urbaines et territoriales.</p>
<p>Ces évolutions concernent non seulement ceux qui choisissent effectivement de changer de lieu de vie mais également ceux dont le voisinage connaîtra des transformations.</p>
<p>Si des éléments provenant de sondages ou d’agents immobiliers ont assez rapidement commencé à mettre en lumière des modifications dans les caractéristiques des logements recherchés et le <a href="https://backyard-static.meilleursagents.com/press/6b615242cec200af47aec27515746e25a8174bf6.pdf">dynamisme immobilier</a> accru des territoires ruraux ou peu denses, il commence à être possible, près de trois après le début de la pandémie, d’avoir une vue d’ensemble des transformations opérées.</p>
<h2>Des intentions de mobilités en hausse de 20 %</h2>
<p>La volonté de vivre en milieu peu urbanisé existait déjà avant la pandémie. Ainsi le baromètre de l’association indépendante <a href="https://www.qualitel.org/barometre-qualitel/resultats-2019/">Qualitel de 2019</a> mettait en évidence qu’une majorité de la population souhaiterait habiter en commune rurale ou en ville moyenne plutôt que dans une grande ville. Ce sentiment est partagé par les résidents de communes rurales et moyennes (91 % et 90 %) mais aussi, bien que dans une moindre mesure, par les résidents de métropoles (78 %) et de l’agglomération parisienne (59 %). La qualité du logement apparaît comme une des raisons principales de cette valorisation des espaces peu ou moyennement denses.</p>
<p>La pandémie de Covid-19 et les restrictions d’activités qui l’ont accompagné ont accru la demande de logements plus spacieux et plus ouverts sur l’extérieur, particulièrement pour les personnes <a href="https://www.qualitel.org/barometre-qualitel/resultats-2020/">vivant en appartement</a>. Ces caractéristiques étant plus souvent celles de logements situés hors des métropoles, cela a conduit à un accroissement des intentions de relocalisation dans les zones moins urbanisées et d’achat de maison.</p>
<p>Une étude récente, basée sur les données de navigation sur Le Bon Coin, propose une représentation des projections de mobilité résidentielles et met en avant une <a href="https://www.urbanisme-puca.gouv.fr/IMG/pdf/popsuterritoires-exodeurbain_v12.pdf">hausse des intentions de mobilités de 20 %</a> depuis les grandes <a href="https://theconversation.com/fr/topics/villes-23233">villes</a> vers les communes de petites et grandes couronnes.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Dans la même veine, en reconstituant des flux d’intentions de mobilité sur la base d’estimations immobilières de propriétaires et d’acheteurs sur la plate-forme MeilleursAgents, les chercheuses Marie-Laure Breuillé, Julie Le Gallo et Alexandra Verlhiac montrent que les intentions de relocalisation dans le rural et d’achat d’une maison ont <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/6667293?sommaire=6667356">augmenté de respectivement 5 points et 7,4 points</a> pendant le premier confinement par rapport à la période pré-Covid. Elles démontrent une tendance claire vers un possible exode urbain suite à la pandémie.</p>
<p>Concrètement, la probabilité pour un résident urbain de rechercher une résidence dans une ville urbaine plutôt que rurale est plus faible depuis le début de la pandémie, et en particulier depuis la fin du deuxième confinement.</p>
<h2>Le télétravail lève une barrière au déménagement</h2>
<p>Le souhait de vivre dans une maison ou en milieu rural ne se retranscrit cependant pas nécessairement dans un changement de résidence effectif. Un certain nombre de contraintes peuvent freiner ou empêcher un déménagement dans une zone peu dense. L’une des principales <a href="https://www.ifop.com/publication/le-retour-a-la-campagne/">étant le manque d’emplois</a>.</p>
<p>La théorie économique permet en effet d’expliquer que les localisations proches des emplois sont les plus valorisées. Ainsi, les prix immobiliers deviennent les plus élevés dans le centre des agglomérations, et dans les agglomérations ayant des salaires plus élevés. De ce point de vue, la pandémie de Covid-19, en accroissant le recours au télétravail, a néanmoins pu en partie lever la barrière de l’accessibilité à l’emploi, et donc faire baisser le poids de ce critère dans les choix de localisations résidentielles.</p>
<p>Cet accroissement du télétravail, qui fut massif lors des confinements, semble par ailleurs durable. Plus d’un an après le début de la pandémie, la part des télétravailleurs réguliers de la région parisienne était de 42 %, soit un <a href="https://www.institutparisregion.fr/nos-travaux/publications/le-teletravail-sinstalle-durablement/">doublement par rapport à 2019</a>, selon une étude de l’Institut Paris Région. En revanche, contrairement aux périodes de confinement, une semaine complète de télétravail reste rarement autorisée : la formule majoritaire, adoptée par 6 employeurs sur 10, est de 2 à 3 jours de télétravail par semaine.</p>
<h2>Une recomposition à l’intérieur des agglomérations</h2>
<p>Si la hausse durable du télétravail semble pouvoir permettre à certains ménages de réaliser leurs aspirations à plus d’espace, il reste à vérifier que cela s’est traduit en mouvements de populations. Les données permettant de suivre ces évolutions, comme le recensement de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), n’étant pas encore disponibles pour la période post-Covid, une alternative consiste à observer les évolutions du marché <a href="https://theconversation.com/fr/topics/immobilier-23232">immobilier</a>. Une hausse des prix immobiliers dans certains lieux traduirait en effet une hausse de la demande et <em>in fine</em> une hausse des relocalisations dans ces mêmes lieux.</p>
<p>Sur ce plan, notre <a href="https://www.insee.fr/en/statistiques/6667539?sommaire=6667557">récente étude</a> montre, en se basant sur les données DVF (Demande de valeurs foncières) qui recensent de façon exhaustive les transactions immobilières et les prix associés, qu’un changement de dynamique est perceptible entre les aires urbaines françaises : les agglomérations moins productives, au revenu moyen plus faible, bénéficient d’un regain d’attractivité par rapport aux métropoles les plus productives.</p>
<p>Les effets de la crise sont encore plus importants lorsque l’analyse est menée au sein des agglomérations : les prix immobiliers ont le plus augmenté dans les communes moins denses, et plus distantes du centre d’emploi principal de l’agglomération dans laquelle elles se trouvent. Une recomposition importante s’opère donc à l’intérieur des grandes agglomérations : les ménages valorisent plus les logements dans les communes peu denses et plus distantes du centre d’emploi relativement à avant la pandémie, traduisant ainsi une périurbanisation accrue.</p>
<p>Ce constat est assez similaire à celui fait dans d’autres pays comme les États-Unis. En effet, une <a href="https://www.nber.org/papers/w28876">étude</a> menée en 2021 démontrait d’abord que la pérennisation d’un télétravail à temps partiel a permis à certains ménages de s’éloigner de leur emploi pour bénéficier d’un logement plus spacieux. Ensuite, ils révèlent que ce changement s’est principalement réalisé à l’intérieur des agglomérations, dans la mesure où il reste généralement nécessaire de se rendre sur son lieu de travail quelques jours dans la semaine.</p>
<p>Ainsi, la crise sanitaire provoquée par le Covid-19 a bel et bien eu des répercussions sur les choix résidentiels des individus, se traduisant à la fois dans leurs intentions de relocalisations et sur les dynamiques des prix immobiliers. Néanmoins, la récente crise énergétique (avec en corollaire la hausse des prix de l’énergie) pourrait venir freiner cet éloignement des centres d’emploi en augmentant les coûts de déplacement entre le domicile et le lieu de travail.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197651/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’essor du télétravail a relancé l’intérêt des ménages pour les zones rurales et conduit à une recomposition importante à l’intérieur des grandes agglomérations.Sylvain Chareyron, Maître de conférences en Sciences économiques, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Camille Régnier, Maître de Conférences, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Florent Sari, Professeur des Universités, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1894342022-10-31T13:35:11Z2022-10-31T13:35:11ZLa densification des villes est bonne pour l’environnement… et l’économie<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/483077/original/file-20220906-18-gf26dg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C1%2C998%2C664&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Lorsqu'elle s'inscrit dans une stratégie de développement urbain et régional plus large, la densification des espaces déjà urbanisés devient un vecteur de développement économique et de qualité de vie.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>C’est payant pour une ville de se densifier, à condition que cette densification soit planifiée et adaptée à chaque contexte territorial.</p>
<p>La transformation des milieux urbains en espaces plus compacts de vie, de travail et de loisirs peut suivre des trajectoires très différentes d’une ville et d’un quartier à l’autre – en fonction de leurs caractéristiques actuelles, leur rythme de croissance démographique et leurs ambitions. Il existe de nombreux exemples innovants de densification pour des <a href="https://www.oecd.org/regional/greening-cities-regions/compact-city.htm">grandes villes</a> comme Québec et Montréal, mais aussi pour des <a href="https://vivreenville.org/media/739997/Petites-et-moyennes-collectivites-viables.pdf">villes de taille moyenne et de petites villes</a> avec des choix d’aménagement, de design et d’architecture potentiels de grande qualité très diversifiés.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/densifier-la-ville-oui-mais-de-maniere-verte-et-socialement-acceptable-184122">Densifier la ville ? Oui, mais de manière verte et socialement acceptable</a>
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<p>Les arguments les plus populaires en faveur des villes plus compactes sont généralement environnementaux : <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg3/downloads/report/IPCC_AR6_WGIII_Chapter_08.pdf">soutenir des mesures de densification serait une façon efficace pour les États d’accélérer la réduction des émissions de GES sur leur territoire</a>. En effet, les villes étalées, peu denses et compartimentées seraient propices à une consommation individuelle élevée de ressources, d’énergie et d’espaces menant à un niveau élevé d’émissions de GES nationales.</p>
<p>Mais à ces arguments environnementaux en faveur de la densification s’ajoute une série d’arguments économiques, que l’on attribue entre autres aux <a href="https://www.oecd.org/cfe/regionaldevelopment/49330120.pdf">économies d’agglomération</a>. On parle ici des profits et des gains de productivité dont les entreprises, les commerces et les consommateurs bénéficient en étant regroupés dans un même lieu.</p>
<p>Professeur au Département d’études urbaines et touristiques de l’Université du Québec à Montréal, mes recherches portent entre autres sur les indicateurs de développement durable des villes et des régions.</p>
<h2>Des sources de revenus plus diversifiées et pérennes pour les villes</h2>
<p>D’abord, contrairement à la construction de simples tours à logements sur un terrain aléatoire en périphérie de la ville, le développement de quartiers mixtes de haute qualité contribue à <a href="http://eprints.lse.ac.uk/83638/1/sercdp0215.pdf">rendre la ville plus attractive auprès de futurs citoyens</a>. Ces derniers sont en effet prêts à payer plus cher pour bénéficier de localisations centrales caractérisées par la qualité des espaces de bureaux, des cafés, des commerces et des services, par exemple. Et cette attraction permet à la ville de bénéficier d’un bassin plus important de contribuables.</p>
<p>Ensuite, lorsqu’elle est bien planifiée, la densification suivant une approche axée sur la mixité <a href="http://eprints.lse.ac.uk/83638/1/sercdp0215.pdf">rend également la ville plus attractive à des entreprises et des commerces</a> de biens et de services spécialisés et de meilleure qualité. Ceci permet à la ville de bénéficier de revenus fiscaux provenant de diverses sources directes (bureaux, commerces) et indirectes (utilisation plus fréquente des services publics). La densification pourrait ainsi faire partie d’un cocktail de solutions <a href="https://www.lesoleil.com/2022/05/20/le-monde-municipal-plaide-lequite-b53ad13d1a02cc4b309f30aaca2c5965">au besoin manifesté par de nombreuses villes de trouver de nouvelles sources de revenus</a>.</p>
<p>Finalement, comme la majorité de la croissance démographique dans le monde se produira dans les villes de petite et moyenne taille selon les <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg3/downloads/report/IPCC_AR6_WGIII_Chapter_08.pdf">estimations du Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat (GIEC)</a>, ces milieux urbains de plus en plus convoités seront un jour inévitablement saturés. Ce n’est qu’une question de temps.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/483079/original/file-20220906-20-k2fu8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="immeubles en construction" src="https://images.theconversation.com/files/483079/original/file-20220906-20-k2fu8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/483079/original/file-20220906-20-k2fu8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/483079/original/file-20220906-20-k2fu8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/483079/original/file-20220906-20-k2fu8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/483079/original/file-20220906-20-k2fu8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/483079/original/file-20220906-20-k2fu8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/483079/original/file-20220906-20-k2fu8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Lorsqu’elle est bien planifiée, la densification suivant une approche axée sur la mixité rend la ville plus attractive à des entreprises et des commerces.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>En commençant à mieux organiser et préparer le territoire dès maintenant, les villes éviteront de subir ce flux démographique et pourront plutôt planifier une offre urbaine continue en fonction de la demande sur un horizon de long terme. En d’autres termes, elles bénéficieront de nouvelles opportunités de revenu sur une plus longue période de temps qu’une ville qui aura rapidement atteint son niveau de saturation par manque de planification de l’occupation future du territoire.</p>
<h2>Diminution des dépenses publiques</h2>
<p>En étant plus compactes, les villes économisent sur leurs dépenses. Il est certain qu’il est plus facile de construire sur des territoires encore vierges pour les promoteurs immobiliers. Mais pour les villes, ce type de construction implique <a href="https://www.cairn.info/revue-flux1-2010-1-page-34.htm">l’ajout d’infrastructures, d’équipements et de services qu’elles auraient pu épargner en encourageant la densification des espaces déjà desservis par de tels dispositifs</a>. Ces dépenses additionnelles peuvent atteindre <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/sites/9789264189881-en/1/2/3/1/index.html?itemId=/content/publication/9789264189881-en&_csp_=0058662d2c0fd533a9440ec1d9687cb9&itemIGO=oecd&itemContentType=book#chap00004">jusqu’à 60 % des coûts d’opération des services existants dans les pays industrialisés</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pour-favoriser-la-mixite-sociale-il-faut-construire-des-ecoles-dans-les-centres-villes-mais-differemment-177014">Pour favoriser la mixité sociale, il faut construire des écoles dans les centres-villes. Mais différemment</a>
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<p>Il s’en suit alors un cercle vicieux : les logements construits à l’extérieur de la ville finiront à long terme par créer une plus grande demande en transport, qui générera à son tour plus de congestion urbaine, obligeant la construction de nouvelles routes dont le potentiel sera rapidement atteint. Et c’est sans parler de la prise en charge de nouvelles dépenses d’entretien et d’opération des services municipaux, qui crée une augmentation inévitable des frais et des taxes afin de couvrir ces nouvelles dépenses.</p>
<h2>Soutien au développement économique local et régional</h2>
<p>Finalement, lorsqu’elle s’inscrit dans une stratégie de développement urbain et régional plus large, la <a href="https://www.oecd.org/regional/greening-cities-regions/compact-city.htm">densification des espaces déjà urbanisés devient un vecteur de développement économique et de qualité de vie</a>.</p>
<p>De nombreuses municipalités de la Communauté métropolitaine de Montréal peuvent en témoigner, avec des <a href="https://cmm.qc.ca/wp-content/uploads/2019/02/cahiersMetropolitains_no07.pdf">développements de quartiers mixtes autour des stations de transport collectif</a>. En devenant plus denses, elles comptent davantage d’entreprises et de commerces qui pourront bénéficier d’un bassin plus large de consommateurs potentiels. Ces entreprises et ces commerces créent à leur tour des emplois pour la main-d’œuvre locale ou en attirent sur leur territoire.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/483080/original/file-20220906-24-g025vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="nouveau développement au bord de l’eau" src="https://images.theconversation.com/files/483080/original/file-20220906-24-g025vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/483080/original/file-20220906-24-g025vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/483080/original/file-20220906-24-g025vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/483080/original/file-20220906-24-g025vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/483080/original/file-20220906-24-g025vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/483080/original/file-20220906-24-g025vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/483080/original/file-20220906-24-g025vs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le développement de quartiers mixtes de haute qualité contribue à rendre la ville plus attractive auprès de futurs citoyens.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Plus d’emplois diversifiés signifient plus de possibilités pour les jeunes aux compétences et aux ambitions variées de trouver du travail à une distance raisonnable de leur domicile, ce qui leur permet de participer activement à l’économie locale.</p>
<p>Le cycle se poursuit, puisqu’avec plus de contribuables et d’entreprises sur leur territoire, les villes bénéficient de revenus plus substantiels provenant des taxes pour financer les travaux publics, les infrastructures et les services. Elles deviennent aussi susceptibles de disposer d’un plus large éventail d’offres culturelles, ce qui attire à la fois les touristes et des résidents potentiels.</p>
<p>En somme, densifier ne signifie pas condenser plus de personnes dans un espace plus restreint. Il s’agit plutôt de tirer parti de tout l’espace urbain déjà disponible et de l’utiliser de façon créative et innovante en anticipant les besoins sociaux et économiques ainsi que les préoccupations environnementales à court, moyen et long terme.</p>
<p>C’est aussi ça, un développement urbain durable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/189434/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Juste Rajaonson a reçu du financement des Fonds de recherche du Québec pour étudier les stratégies de développement durable des municipalités du Québec.</span></em></p>La densification urbaine permet de générer des sources de revenus plus diversifiées et pérennes pour la ville, de diminuer les dépenses publiques et de soutenir le développement économique local.Juste Rajaonson, Professeur en études urbaines, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1906172022-09-22T18:43:08Z2022-09-22T18:43:08ZAu Bénin, construire à tout prix<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/485563/original/file-20220920-18-em2inb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5455%2C3631&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Vue de Cotonou.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/cityscape-sunset-view-cotonou-benin-republic-1719771760">sope Adelaja/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Construire et habiter « chez soi » sont, au Bénin comme dans bien d’autres pays d’Afrique – du <a href="https://journals.openedition.org/com/6443">Togo</a> à la <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-modern-african-studies/article/middle-class-construction-domestic-architecture-aesthetics-and-anxieties-in-tanzania/121A60413113E3609D7F6E55D4844722">Tanzanie</a> et du <a href="https://www.cairn.info/revue-cahiers-d-etudes-africaines-2020-1-page-115.htm?contenu=article">Mali</a> au <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/africa/article/morality-in-the-middle-choosing-cars-or-houses-in-botswana/7314905F3E781CC64B2DAB40DE6A50C5">Botswana</a> –, des ambitions largement partagées par tous ceux qui, des classes populaires aux élites, parviennent à s’assurer des revenus un minimum stables et suffisants pour dégager une certaine épargne.</p>
<p>La construction artisanale est ici la norme, le propriétaire engageant un maçon et son équipe pour édifier la maison. Seule la construction d’un bâtiment à étages demande l’intervention de techniciens en bâtiment qualifiés. De tels projets ne concernent fondamentalement que l’élite et les fractions supérieures des classes moyennes, concentrées dans les grandes agglomérations que sont Cotonou, Porto-Novo ou Parakou, même si leur présence est aussi visible ailleurs, au travers des quelques maisons à étages et petits immeubles des agglomérations plus modestes.</p>
<p>Dans les villes secondaires et les campagnes, et même dans les périphéries des grandes villes, une nette majorité des projets de construction en restent au niveau du rez-de-chaussée, et se négocient entre un propriétaire auto-promoteur et un maçon. La croissance urbaine importante du pays, où les statistiques officielles estiment désormais que la <a href="https://donnees.banquemondiale.org/indicator/SP.URB.TOTL.IN.ZS?locations=BJ">moitié des quelque 12 millions de Béninois vivent en ville</a>, se nourrit largement de cette <a href="https://www.cairn.info/revue-l-information-geographique-2019-2-page-85.htm?ref=doi&contenu=article">dynamique d’auto-construction</a> dans laquelle chacun s’engage corps et biens. Dépôts de ciment et de matériaux de construction, mais aussi chantiers d’habitations, sont d’ailleurs <a href="https://archive-ouverte.unige.ch/unige:145150">omniprésents</a> dans un pays littéralement en chantier.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’avancée du front urbain à Togbin, dans la banlieue de Cotonou, où quelques constructions déjà achevées cohabitent avec chantiers d’ampleurs diverses et parcelles de maraîchers.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Noret</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les enjeux de cette croissance urbaine sont <a href="https://journals.openedition.org/poldev/3352">multiples</a>, et sa planification délicate. Mais pour les gens mobilisés par ces projets, l’investissement dans la construction et l’accès à la propriété sont à la fois une question de conditions d’existence et de possibilités ultérieures d’accumulation, et une question de reconnaissance sociale fondamentale.</p>
<h2>Les voies tortueuses de la construction</h2>
<p>En juillet 2022, dans Abomey, une petite ville de province, je repassai voir Guy (les prénoms ont été modifiés), une vieille connaissance que j’avais fréquentée il y a une douzaine d’années. La quarantaine bien engagée, celui-ci s’était vu allouer il y a une quinzaine d’années un emplacement dans la parcelle de son père, afin d’y construire son propre logement. Plombier de profession, il disposait à l’époque de revenus lui permettant un niveau suffisant d’épargne pour s’engager dans un tel projet, et il se mit donc au travail. Il conçut le plan d’un bâtiment de quatre petites chambres et un salon, et parvint en quelques années à faire élever les murs jusqu’au niveau où viendrait se poser la charpente.</p>
<p>[<em>Plus de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Au début des années 2010, sa mère tombe malade et ses affaires commencent à péricliter, sous l’effet, dit-il, d’une concurrence accrue au sein de la profession de plombier dans la petite ville de province où il réside, Abomey. En 2014, il décide de s’engager dans une formation pour devenir instituteur. Un emploi salarié lui garantirait au moins des revenus réguliers. Toutefois, le niveau de revenus qui est le sien aujourd’hui ne lui permet plus de poursuivre son projet de construction.</p>
<p>Des 60 000 francs CFA par mois qu’il gagne (un peu plus de 90 euros) pendant l’année scolaire, il doit en effet d’abord retirer 10 000 francs pour payer l’essence de ses trajets en moto jusqu’au village où il a été affecté, et le reste est entièrement absorbé par les soins que demande l’état de sa maman – « cela me ruine », glisse-t-il –, la scolarisation de ses deux adolescents dans une école privée, et par les frais du ménage, auxquels sa femme, vendeuse de sucre sur le marché local, contribue de façon marginale. Guy habite toujours aujourd’hui dans un bâtiment construit par son père, qu’il partage avec certains de ses frères. Il y a une dizaine d’années désormais que son projet de maison est à l’arrêt, et se transforme doucement en la ruine inachevée d’un rêve brisé…</p>
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<img alt="Maison inachevée abandonnée" src="https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La maison inachevée de Guy à Abomey.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Noret</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>C’est assurément dans les classes populaires, où se côtoient petits indépendants, artisans, paysans et petits employés, que le défi de la construction se pose avec la plus grande acuité.</p>
<p>Chez l’ensemble des propriétaires de milieux modestes que j’interroge depuis plus d’un an lors de mes séjours au Bénin sur les motivations et les contours de leurs projets de construction, j’entends des récits soulignant la persévérance et les privations que requiert l’édification d’une maison, et les stratégies d’épargne parfois radicales qu’ils mettent en place pour y parvenir, consacrant parfois plus de la moitié de leurs revenus à leur projet de construction au moment de la fabrique des parpaings et de l’édification des murs.</p>
<h2>Construction et réalisation de soi</h2>
<p>C’est que les enjeux sont considérables, à la mesure des investissements réalisés et des sacrifices consentis. L’édification d’une maison est un accomplissement majeur et une source fondamentale de <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/02723638.2017.1286839">reconnaissance sociale</a>. La consécration, aussi, d’une certaine indépendance économique et statutaire. En particulier, dans une société où l’on répète volontiers que « si tu n’as rien, tu n’es rien », construire et habiter son « chez soi » est une manière essentielle de s’affirmer en tant qu’homme.</p>
<p>Les projets de construction, en effet, se conçoivent le plus souvent de manière individuelle dans un pays où les finances restent gérées de manière <a href="https://odagnelie.github.io/docs/lemay_dagnelie_jid.pdf">très largement séparée</a> au sein du couple. Et même si l’on croise parfois un couple ayant mis ses ressources en commun pour construire ensemble, c’est d’abord aux hommes que revient le devoir d’édifier l’habitation familiale. Les femmes peuvent certes, elles aussi, construire leur propre maison. C’est même là un signe de réussite auquel aspirent en particulier les cadres et les grandes commerçantes, mais aussi celles qui s’avèrent capables de dégager une épargne, et que les liens conjugaux rompus ou distendus ont rendues cheffes de ménage. D’une femme qui a construit, on pourra d’ailleurs dire pour souligner son mérite qu’elle « a agi comme un homme »…</p>
<p>L’enjeu toutefois n’est pas de la même nature, et touche moins directement à l’accomplissement d’un idéal féminin. Car pour ce qui est des hommes, « il a construit », « il est chez lui », ou au contraire « il n’a jamais fabriqué une brique dans sa vie », sont autant de manières dont peut être rapportée au quotidien la valeur des individus et jaugée leur réalisation de l’idéal masculin. Et le jugement est d’autant plus sévère sur ceux qui, salariés ou cadres dans la fonction publique ou dans le secteur privé, ont été en position de construire mais n’ont « rien réalisé », et que la doxa populaire accuse alors typiquement d’avoir dilapidé leur argent dans les plaisirs des femmes et de la fête…</p>
<p>C’est ainsi que chacun investit dans une maison qui peut devenir une véritable mise en scène de sa réussite. Dans les couches supérieures de la population, on construit volontiers de grandes maisons à étages, de plus en plus souvent entourées de murs d’enceinte surmontés de barbelés, avant de rivaliser dans la qualité des finitions et des équipements, des jeux de lumières des plafonniers à la qualité du carrelage, au confort du salon et à la taille des écrans plats.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=735&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=735&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=735&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=924&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=924&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=924&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’aménagement progressif du salon dans les classes populaires, où l’on investit souvent les lieux avant la réalisation des finitions. L’embellissement des lieux pourra encore s’étaler sur plusieurs années.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Noret</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Dans les milieux populaires, les préoccupations esthétiques passent au second plan, mais on s’efforce de plafonner puis éventuellement de peindre les murs de parpaings, d’installer un faux plafond qui isolera un peu de la chaleur du toit de tôles, et peut-être plus tard de carreler la pièce de vie. La possession d’un salon meublé et d’une télévision viendront compléter ce que parents, voisins et amis apprécieront à sa juste valeur comme une belle réalisation. Mais les aléas de l’existence et les imprévus des trajectoires les mieux planifiées prélèveront aussi leur tribut sur les projets engagés, et bon nombre de constructions en resteront finalement à un niveau d’aménagement plus sommaire…</p>
<h2>Construction et accumulation</h2>
<p>La maison, toutefois, n’est pas seulement un lieu crucial d’accomplissement social, à travers lequel se donne à voir un jeu subtil de distinction entre classes et fractions de classes. Elle peut aussi devenir, en particulier dans les milieux populaires et les classes moyennes, un site non moins crucial d’accumulation. Un certain nombre de petits propriétaires construisent en effet dans leur parcelle d’autres logements, avec l’intention de les louer et d’en tirer des revenus complémentaires, susceptibles aussi de devenir leur « assurance vieillesse » une fois qu’ils auront cessé de travailler.</p>
<p>Christian est un mécanicien approchant désormais la quarantaine et vivant lui aussi à Abomey, que j’ai connu en 2021 par l’intermédiaire d’un ami. En 2019, il a revendu sa modeste maison à un voisin qui voulait agrandir sa propre parcelle, réalisant au passage une petite plus-value qui lui a permis de construire l’habitation où il vit désormais.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/quelles-sources-de-financement-pour-les-pme-beninoises-du-secteur-informel-102027">Quelles sources de financement pour les PME béninoises du secteur informel ?</a>
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<p>Sa nouvelle construction est plus grande que la précédente, et la plus-value lui a aussi permis de construire à côté de sa propre maison une habitation plus petite, formée d’une chambre et d’un salon, qu’il destine à la location. Christian s’auto-contraint à l’épargne pour un peu plus d’un demi-million de francs CFA par an (soit un peu plus de 800 euros), via des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/j.1468-0084.2011.00641.x">systèmes d’épargne rotative</a> connus en Afrique sous le nom de « tontines ». Une telle somme représente sans doute un peu plus du tiers de ses revenus. À son agenda des prochaines années figure en bonne place la réalisation d’autres logements de ce type, avec lesquels il partagera une partie de sa cour, et qui lui fourniront progressivement des revenus complémentaires non négligeables.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La maison de Christian. A gauche, un logement en cours de finition qu’il destine à la mise en location. Au premier plan, le tas de ciment témoigne de la volonté de Christian de ne pas s’arrêter à ce stade de la construction.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Noret</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Dans les fractions supérieures des classes moyennes et parmi les élites, on investit volontiers dans l’achat de parcelles, à des fins spéculatives – croissance démographique et croissance urbaine font monter rapidement le prix des terrains à bâtir – ou pour y construire des logements destinés à la mise en location. Dans les classes populaires et fractions inférieures des classes moyennes, c’est davantage la parcelle d’habitation elle-même qui accueille ces projets d’accumulation et de diversification de ses sources de revenus.</p>
<p>Au final, dans une société béninoise où la construction se révèle être une passion sociale majeure, l’édification d’une maison constitue un moment clé dans la <a href="https://www.berghahnbooks.com/title/NoretSocial">stabilisation d’une position sociale</a> et la concrétisation d’une forme de réalisation de soi. Entre ceux qui seront parvenus à bâtir leur propre édifice et ceux qui, pour des raisons diverses, y auront échoué, passe une double ligne de partage, qui distingue les uns des autres à la fois dans l’ordre matériel des conditions d’existence et dans l’ordre symbolique de la reconnaissance sociale. Logée au cœur des investissements et des désirs de larges pans de la population, la construction des maisons s’avère ainsi un lieu privilégié d’exploration des rapports sociaux et des aspirations qui font la dynamique d’une société africaine d’aujourd’hui.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190617/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joël Noret a reçu des financements du Fonds de la Recherche Scientifique (FRS-FNRS, Belgique).</span></em></p>Au Bénin, construire sa propre maison est un accomplissement social majeur, dans lequel ceux qui en ont les moyens s’engagent avec passion, chacun à la mesure de ses possibilités et de ses ambitions.Joël Noret, Professeur d'anthropologie, Université Libre de Bruxelles (ULB)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1885552022-08-19T13:40:08Z2022-08-19T13:40:08ZSix façons de se préparer à la prochaine récession<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/479706/original/file-20220817-15-6sjwfd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1000%2C664&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les économistes canadiens prévoient une récession dans le courant de l’année 2023.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Malgré les apparences, <a href="https://www.nationalobserver.com/2022/07/12/news/most-canadians-think-country-recession-prices-rising">et c’est ce que de nombreuses personnes croient</a>, nous ne sommes pas encore en récession. Une récession est définie comme deux trimestres successifs de croissance négative du PIB, mais il s’agit essentiellement <a href="https://www.dallasfed.org/research/economics/2022/0802/">d’une période où la croissance économique chute de manière considérable avec une augmentation du taux de chômage</a>.</p>
<p>En raison de l’absence d’une définition précise, on ne s’accorde pas toujours à dire qu’une économie est en récession. Au Canada, le gouvernement n’a pas fait de déclaration récente, mais le <a href="https://www.cdhowe.org/">C.D. Howe Institute</a>, un organisme canadien de recherche politique à but non lucratif, suit les récessions de façon indépendante.</p>
<p>Selon l’Institut, la dernière récession <a href="https://www.cdhowe.org/council-reports/cd-howe-institute-business-cycle-council-declares-end-Covid-19-recession">a commencé en mars 2020 au plus fort de la première vague de Covid-19</a>. L’Institut a déclaré la fin de la récession en août 2021. La <a href="https://www.cbc.ca/news/canada/canadians-shopping-rising-food-costs-1.6483250">crise actuelle liée au coût de la vie</a> pousse de nombreux Canadiens à se demander quand aura lieu la prochaine.</p>
<h2>Une inflation galopante</h2>
<p>Les économistes sont unanimes à penser qu’une <a href="https://www.theglobeandmail.com/business/article-canada-to-enter-moderate-and-short-lived-recession-in-2023-warns-rbc/">récession se produira probablement en 2023</a>. Cette prévision s’explique en grande partie par la hausse vigoureuse des taux d’intérêt par les <a href="https://www.nytimes.com/2022/07/17/business/economy/global-central-banks-inflation.html">banques centrales du monde entier pour lutter contre l’inflation</a>.</p>
<p>Les taux d’inflation — le taux d’augmentation des prix que nous payons pour les biens et services — ont <a href="https://www.cbc.ca/news/business/canada-inflation-rate-1.6526060">atteint des niveaux jamais vus depuis quatre décennies</a>. Les taux d’inflation élevés affectent le pouvoir d’achat et les gens ont de plus en plus de mal à se procurer les produits de première nécessité, comme les denrées alimentaires. L’inflation <a href="https://www.nber.org/digest/dec97/does-inflation-harm-economic-growth">a également des répercussions négatives sur l’efficacité économique, entraînant une diminution globale de la croissance</a>.</p>
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<img alt="Un gros plan d’une pompe à essence avec un prix de 208,9 visible en arrière-plan" src="https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’inflation a fait grimper le coût de la vie pour de nombreux Canadiens, se répercutant sur le prix de l’essence, de la nourriture et du loyer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Sean Kilpatrick</span></span>
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</figure>
<p>Lorsque les taux d’intérêt augmentent, il devient plus difficile de <a href="https://www.cnbc.com/2022/07/27/how-the-federal-reserve-fights-inflation-through-interest-rate-hikes.html">financer l’achat de biens plus importants, comme les voitures, les maisons et les vacances</a>. La hausse des taux d’intérêt rend plus coûteux tout achat nécessitant un financement.</p>
<p>Les dettes existantes assorties de taux d’intérêt variables entraînent également une majoration du coût de portage de ces dettes. Par conséquent, la demande de nombreux biens et services diminue, tout comme l’inflation.</p>
<h3>Que se passe-t-il lors d’une récession ?</h3>
<p>Pendant une récession, les entreprises sont obligées de réduire l’embauche, de licencier des travailleurs et de diminuer les heures de travail. Si une récession survient, des dizaines de milliers de Canadiens se retrouveront au chômage ou verront leurs heures de travail réduites.</p>
<p>Un grand nombre de ces pertes d’emploi seront concentrées dans le secteur des services, en particulier dans l’économie de petits boulots où les <a href="https://theconversation.com/workers-in-the-gig-economy-feel-lonely-and-powerless-127188">revenus ont tendance à être plus faibles et l’emploi est précaire</a>.</p>
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<img alt="Un homme portant un masque transporte une boîte d’effets personnels devant une rangée de cubicules" src="https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une récession entraînera des pertes d’emploi pour de nombreux Canadiens.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Une perte de revenu signifie que les gens doivent puiser dans leurs économies — en supposant qu’ils en aient — pour payer les articles essentiels comme la nourriture, le logement et le transport. Les pertes d’emploi potentielles ou la réduction des heures de travail constituent donc la plus grande conséquence d’une récession ; la plupart des gens doivent s’y préparer.</p>
<h2>Comment se préparer</h2>
<p>Avec une récession qui semble imminente, de nombreux Canadiens s’inquiètent à juste titre de l’état de leurs finances. Voici six conseils à suivre pour y faire face :</p>
<ol>
<li><p><strong>Réduisez immédiatement vos dépenses, en particulier celles consacrées aux articles non essentiels.</strong> Profitez de l’occasion pour revoir votre budget et reconsidérer les habitudes d’achat quotidiens qui se multiplient. Plutôt que de dîner au restaurant chaque jour, pensez à préparer un repas. Réexaminez ces abonnements qui sont prélevés automatiquement de votre compte chaque mois. C’est le moment idéal pour analyser et justifier vos habitudes d’achat, et pour remanier votre budget.</p></li>
<li><p><strong>Remboursez votre dette de carte de crédit maintenant.</strong> Il est important de rembourser les dettes à intérêt élevé autant que possible, le plus tôt possible. Au cours des prochains mois, les taux d’intérêt continueront à augmenter, ce qui rendra la gestion des dettes plus ardue. Des soldes moins élevés contribuent a réduire le montant des versements d’intérêts pendant toute période de perte de revenu ou d’emploi, ce qui permet de traverser plus facilement les moments difficiles pour le portefeuille.</p></li>
<li><p><strong>Prêtez une attention particulière au paiement des factures et évitez les frais de retard.</strong> Ces frais s’accumulent également avec le temps. Établissez un plan pour vous assurer que les paiements de factures sont effectués à la date d’échéance ou avant. Payer ses factures en retard entraîne des sanctions pécuniaires, ce que vous voulez toujours éviter, mais surtout en période de récession.</p></li>
<li><p><strong>Soyez prêt à perdre votre emploi</strong>. Assurez-vous que vos CV et lettres de présentation sont à jour et que vous êtes prêt à chercher un emploi. En cas de licenciement, soyez préparés à trouver un autre poste rapidement.</p></li>
<li><p><strong>Devenez plus facilement embauchable</strong>. Comme les récessions frappent généralement plus durement les personnes ayant moins d’expérience et moins de qualifications, vous devriez mettre à jour vos compétences professionnelles. Explorez les <a href="https://learning.linkedin.com/certification-and-continuing-education-programs">options virtuelles qui offrent d’excellentes possibilités de perfectionnement</a>, ou les formations en présentiel dans les collèges et universités du pays, pour parfaire votre éducation et accroître vos compétences.</p></li>
<li><p><strong>Si possible, essayez d’obtenir un emploi à l’abri de la récession.</strong> Les emplois les mieux adaptés à un ralentissement économique dépendent du niveau de compétences, mais on les trouve généralement dans le secteur public, les soins de santé et l’éducation. Bien entendu, ces emplois ne conviennent pas à tout le monde. Chacun doit envisager les options qui correspondent à ses habiletés et à ses préférences. Cette stratégie est beaucoup plus efficace lorsque vos compétences et votre CV sont mis à jour et que vous êtes bien préparé.</p></li>
</ol>
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<img alt="Un homme est interviewé en virtuel sur un ordinateur" src="https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Soyez prêt à commencer à chercher un nouvel emploi dans l’éventualité d’un licenciement.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Prévoir le pire, espérer le meilleur</h2>
<p>Certaines de ces stratégies sont plus faciles à mettre en œuvre que d’autres. Mais la plus grande leçon de toutes est peut-être de toujours se préparer au pire. Les récessions, ou ralentissements économiques, font partie de ce que l’on appelle le <a href="https://www.businessinsider.com/personal-finance/what-is-business-cycle">cycle économique</a>, qui décrit les hauts et les bas de l’économie. Elles <a href="https://www.cdhowe.org/sites/default/files/attachments/research_papers/mixed/Commentary_366_0.pdf">se produisent généralement une fois par décennie</a> et parfois plus souvent.</p>
<p>Les gens devraient toujours être bien préparés à de tels ralentissements. Il est beaucoup plus facile d’appliquer les stratégies ci-dessus bien avant une récession, au lieu d’attendre le dernier moment. Plus on s’approche d’une récession et plus il est difficile de bien se préparer en appliquant ces stratégies.</p>
<p>Même en prévoyant le coup, les récessions peuvent être très pénibles à vivre. Mais la bonne nouvelle est qu’elles ne durent pas éternellement. La seule chose que nous pouvons faire est de prévoir le pire et d’espérer le meilleur.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/188555/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Avec une récession qui semble imminente, de nombreux Canadiens s’inquiètent à juste titre de l’état de leurs finances. Voici quelques moyens de vous y préparer.Walid Hejazi, Professor of International Business, Rotman School of Management, University of TorontoGeorge Georgopoulos, Associate Professor, York University, CanadaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1850952022-07-03T17:09:50Z2022-07-03T17:09:50ZMieux utiliser les bâtiments existants, un enjeu clé de la transition<p>Rénovation thermique, adaptation au vieillissement et au changement climatique… le 21<sup>e</sup> siècle demande un investissement inédit dans la gestion de notre parc de bâtiments existants pour l’adapter aux enjeux de demain. Mais qu’en est-il pour la construction neuve ?</p>
<p>Construire n’est pas un acte anodin sur le plan environnemental. En effet, même si les bâtiments neufs sont aujourd’hui très efficaces sur le plan énergétique une fois construits, la majeure partie de leur impact environnemental concerne la construction. On estime par exemple que les produits de construction et équipements représentent de <a href="https://conseils.xpair.com/analyse_reglementation/bilan-programme-obec-batiment-energie-carbone.htm">65 à 85 %</a> de la totalité des émissions carbone liées au cycle de vie d’un bâtiment neuf. Les conséquences en matière d’artificialisation des sols sont aussi à souligner : <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/3280938?sommaire=3280952#:%7E:text=Entre%202005%20et%202013%2C%2015,par%20l%E2%80%99artificialisation%20de%20masse.">entre 2006 et 2014, la surface au sol dédiée à l’habitat a progressé plus vite que la population</a>.</p>
<p>Dans ce contexte, la question se pose : peut-on répondre aux besoins de bâtiments en utilisant mieux le parc existant ? Dans le cadre de <a href="https://transitions2050.ademe.fr">« Transition(s) 2050 »</a>, un vaste travail de prospective, l’Agence de la transition écologique (Ademe) a élaboré 4 scénarios, du plus sobre au plus technologique, qui permettraient d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Les scénarios les plus frugaux explorent des manières de répondre au besoin de bâtiment autres que la construction neuve.</p>
<h2>8 % de logements vacants</h2>
<p>Tentons en premier lieu d’éclairer en chiffres le débat. En France, l’Insee relève en 2021 que 8 % des logements (soit 3 millions) sont <a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1059">vacants</a>, c’est-à-dire inoccupés pour des raisons diverses (mise en location, en attente de règlement de succession, sans affectation précise…). Certes, avoir un taux de vacance nul n’est pas envisageable, car il ne serait plus possible de déménager, mais l’augmentation récente de la vacance de courte durée ouvre des pistes de réflexion.</p>
<p>Le panorama de la sous-occupation du parc se renforce lorsqu’on prend en compte également les logements habités de façon occasionnelle, par exemple les résidences secondaires <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/5761272">(10 % du parc)</a>, ou les logements considérés comme sous-occupés (<a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/fichier/2586377/LOGFRA17.pdf">88 % des maisons individuelles et 45 % des logements collectifs</a>). Ainsi, si le surpeuplement est un phénomène bien réel et aux conséquences sociales délétères, le sous-peuplement d’une partie du parc de logements français est également un enjeu, en particulier au regard des défis de la transition.</p>
<p>Dans le tertiaire, peu de données existent sur les bureaux vacants et sur leur potentiel de transformation en logement. Les perspectives sur leur taux d’occupation sont largement bousculées par la transformation actuelle des pratiques, et notamment le télétravail.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/XER_OpLx0Qs?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Transition(s)2050 : les 4 scénarios prospectifs de l’Ademe (Ademe/YouTube, 28 mars 2022).</span></figcaption>
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<h2>4 millions de nouveaux logements d’ici à 2050</h2>
<p>Dans ce panorama, le scénario le plus frugal des 4 élaborés par l’Ademe prévoit la construction neuve, entre 2015 et 2050, de 4 millions de logements. Le scénario où la construction neuve est poussée à son maximum, en imaginant un vaste programme de déconstruction-reconstruction de logements rendus obsolètes (notamment à cause de la métropolisation) implique quant à lui d’en créer 12 millions – plus de trois fois plus, donc. À titre de comparaison, notons que nous avons construit depuis trente ans environ 11 millions de logements.</p>
<p>Le calcul se fonde sur plusieurs hypothèses. Tout d’abord, un ralentissement démographique, en écho aux projections de l’Insee. Le contexte est en effet bien différent de celui des années d’après guerre, marquées par un boom démographique.</p>
<p>Ensuite, un ralentissement de la décohabitation, ce qui viendrait freiner une tendance historique. Trois phénomènes ont contribué ces dernières décennies à la baisse du nombre de personnes par ménage et tendent désormais à stagner : la baisse du nombre de familles nombreuses, la tendance à divorcer et le départ de chez leurs parents des enfants nombreux du baby-boom. Le vieillissement de la population pourrait prendre en partie le relais. <a href="https://www.insee.fr/fr/information/2546485">Les plus de 75 ans, dont la proportion dans la population va doubler d’ici 2050, passant de 9 % à 16 %</a>, vivent en effet plus souvent seules dans de grands logements. Les choix de vie des personnes âgées sont donc également un enjeu de transition écologique.</p>
<p>Dans les scénarios de rééquilibrage territorial, il est ainsi envisageable de transformer des résidences secondaires en résidences principales, par exemple pour y accueillir les nouveaux retraités ou télétravailleurs, ou de les utiliser toute l’année en associant un usage par les touristes ou les travailleurs saisonniers et un usage par les étudiants. On peut également imaginer réinvestir des logements vacants situés actuellement dans des zones en déprise. Réinvestir ces zones implique de rééquilibrer l’activité, un défi ambitieux en matière d’aménagement du territoire.</p>
<h2>Réutiliser l’existant, une diversité de solutions</h2>
<p>Mieux utiliser l’existant s’impose donc comme une piste à creuser. Comment le faire advenir concrètement ? Pour cela, il faudra s’adapter à la diversité des ménages et des territoires.</p>
<p>Dans des zones périurbaines, où l’habitat est souvent homogène et composé de maisons individuelles, largement sous-occupées, et de propriétaires occupants, il est nécessaire de diversifier le parc pour y créer du locatif et des petits logements pensés pour des populations qui apprécient ce mode de vie périurbain. <a href="http://www.revuesurmesure.fr/issues/habiter-des-desirs-au-projet/habiter-appartement-periurbain-francilien">Un maire le décrit ainsi</a> :</p>
<blockquote>
<p>« J’avais besoin de logements pour les employés de l’hôpital. J’avais besoin de logements pour les vieux qui ne peuvent plus garder leur grande baraque, et pour des jeunes qui sont encore à 26 ans chez papa et maman. »</p>
</blockquote>
<p>Le remodelage des maisons individuelles constitue une option à développer dans ces zones.</p>
<p>Dans les zones urbaines très tendues, les difficultés d’accès au logement sont importantes. Les transformations d’usage permettant de mieux valoriser chaque mètre carré sont envisageables (colocation étudiante, locations touristiques, division résidentielle, transformations de bureaux…). Le principal défi porte sur les règles de partage de cet espace rare. La puissance publique essaie avec difficulté de maintenir des équilibres qui permettent aux différents acteurs qui font la vie d’un territoire de pouvoir cohabiter.</p>
<p>Dans les zones peu tendues à dominante rurale, le défi est de rendre ces zones attractives en s’appuyant sur un bâti existant souvent disponible mais parfois obsolète. Quelles pistes ? La rénovation des bâtiments et des îlots dégradés, la revitalisation du commerce, de l’artisanat, des services, ou encore le développement des activités culturelles en s’appuyant sur un patrimoine existant à réinventer. Dans ces zones, le risque serait en effet de penser la construction neuve comme une manière d’attirer au prix d’une artificialisation importante alors qu’elle peut être utilisée à toute petite dose comme un catalyseur, par exemple, pour repenser un centre bourg.</p>
<h2>Vers une nouvelle économie du bâtiment</h2>
<p>Construire seulement lorsque nécessaire et après optimisation de l’existant aura des conséquences sur la filière économique de la construction neuve. Par exemple, si les entreprises du second œuvre peuvent imaginer un avenir où la rénovation prendra une place plus importante, les actifs du gros œuvre verront leur activité fortement impactée.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/470902/original/file-20220625-24-25domu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/470902/original/file-20220625-24-25domu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/470902/original/file-20220625-24-25domu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/470902/original/file-20220625-24-25domu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/470902/original/file-20220625-24-25domu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/470902/original/file-20220625-24-25domu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/470902/original/file-20220625-24-25domu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">À Malakoff, la tour de l’Insee doit être détruite pour faire place au ministère des Affaires sociales. Un collectif, soutenu par le Conseil régional de l’ordre des architectes, s’y oppose et réclame sa réhabilitation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Thomas Samson/AFP</span></span>
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<p>Quels relais de croissance ? À côté de la rénovation massive du parc, incontournable de toute trajectoire de neutralité carbone à 2050, c’est un ensemble de nouvelles activités qu’il faut dès à présent imaginer : restructuration en masse de logements obsolètes ou vacants, changements d’usage des bureaux en logement, mais aussi déconstruction ou production de services aux occupants… Ainsi, la filière de la construction neuve est sans doute à l’aube d’une mue majeure qu’il faut anticiper dès maintenant.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/185095/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Christophe Visier est salarié du Centre scientifique et technique du bâtiment et est détaché à temps partiel à l’Ademe.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Albane Gaspard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une meilleure utilisation du parc bâti existant est un enjeu clé pour répondre aux nouveaux besoins tout en limitant la construction neuve. Mais le défi est ambitieux.Albane Gaspard, Chargée d’études, prospective, service bâtiment, Ademe (Agence de la transition écologique)Jean-Christophe Visier, Conseiller prospective bâtiment et immobilier, CSTB, Ademe (Agence de la transition écologique)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1845882022-06-19T23:35:38Z2022-06-19T23:35:38Z3,5 millions de réfugiés ukrainiens sur son sol : comment la Pologne absorbe-t-elle le choc ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/468238/original/file-20220610-28309-4wc88x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C6669%2C4446&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Trois mois après de début de l’invasion russe, 3,5&nbsp;millions d’Ukrainiens ont traversé la frontière pour se réfugier en Pologne. Ils sont accueillis dès la frontière, comme ici à Medyka le 6&nbsp;mars.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Trois mois après l'invasion russe, 3,5 millions d'Ukrainiens ont traversé la frontière pour se réfugier en Pologne, comme cet enfant au poste frontière de Medyka, le 15 mars 2022.</span></span></figcaption></figure><p>L’invasion de l’Ukraine par la Russie le 24 février 2022 a provoqué un déplacement de population sans précédent en Europe depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Selon le Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations unies (HCR), l’Ukraine compte <a href="http://data2.unhcr.org/en/situations/ukraine">8 millions de déplacés internes</a> et 6,6 millions d’habitants se sont réfugiés à l’étranger, dont 3,5 millions en Pologne. Ces chiffres sont toutefois difficiles à vérifier car, une fois entrés en Pologne, une partie des Ukrainiens ont poursuivi leur route vers d’autres destinations, principalement l’Allemagne et la République tchèque ; d’autres sont rentrés en Ukraine (un peu plus de 2 millions selon le HCR en mai 2022).</p>
<p>Le <a href="https://www.cairn.info/revue-civitas-europa-2016-1-page-203.htm">parti nationaliste Droit et Justice</a>, au pouvoir depuis 2015, qui avait résolument refusé l’accueil de Syriens lors de la « crise des migrants », a adopté cette fois une posture tout à fait différente, ouvrant grand les frontières du pays aux réfugiés ukrainiens. Pour comprendre ce revirement, il est utile de revenir sur l’évolution qu’ont connue les relations polono-ukrainiennes en matière migratoire depuis la chute du bloc communiste au début des années 1990.</p>
<h2>Des années 1990 à 2014 : mobilités circulatoires et migrations de travail</h2>
<p>L’immigration économique ukrainienne vers la Pologne débute dès le début des années 1990. La dislocation du bloc de l’Est en Europe a eu comme conséquence une ouverture radicale des frontières, en plus de la libéralisation de l’économie. Dans ce contexte très turbulent, les passages de frontières explosent, notamment sur les frontières Est et Ouest de la Pologne. Depuis les années 1990, les Ukrainiens sont nombreux à être venus travailler en Pologne, où ils trouvent des salaires plus élevés. Par un effet de vases communicants, ils prennent ainsi la place de <a href="https://www.cairn.info/revue-migrations-societe-2015-2-page-131.htm">nombreux Polonais émigrés eux-mêmes</a> en Europe occidentale.</p>
<p>Cependant, peu s’installent légalement en Pologne, qui est encore fondamentalement un pays d’émigration : dans les années 1990, chaque année, environ 20 000 Polonais quittent le pays tandis que moins de 8 000 étrangers y arrivent. Si l’on raisonne <a href="https://ec.europa.eu/home-affairs/pages/glossary/migrant-stock_fr">« en stock »</a>, on constate qu’au milieu des années 1990, seulement 50 000 Ukrainiens environ étaient légalement enregistrés comme immigrés, détenteurs d’un permis de résidence (pour travail, études, ou comme réfugiés). Le plus souvent, ils réalisaient ce qu’on appelle des <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/circulation">« mobilités circulatoires »</a> de part et d’autre de la frontière, dans une économie souvent « grise ». Toutes les frontières de la Pologne ont connu cette explosion : le nombre d’entrées sur le territoire est passé de quelques millions dans les années 1980 à 18 millions dès 1990, puis a culminé à presque 90 millions à la fin de la décennie, dont environ 6 millions d’entrées par an à la frontière avec l’Ukraine.</p>
<p>L’année 1997 est un tournant : la Pologne se dote d’une <a href="https://mjp.univ-perp.fr/constit/pl1997.htm">nouvelle Constitution</a> garantissant le statut de réfugié, et entame la phase de négociations pour intégrer l’Union européenne. Dans cette perspective, elle se prépare à être la garante d’une des plus longues frontières externes de l’Union.</p>
<p>La première loi post-communiste sur les étrangers est votée en 1997, et rétablit un régime de visas pour les pays frontaliers. En 2004, la <a href="https://www.cairn.info/revue-outre-terre1-2004-2-page-263.htm">Pologne entre dans l’UE</a>, puis dans l’espace Schengen en 2007. Les options libérales du gouvernement et une croissance économique soutenue plaident en faveur d’une ouverture des frontières pour pourvoir les emplois quittés par les millions de Polonais partis au Royaume-Uni et en Irlande.</p>
<p>Dans ce contexte, la Pologne obtient le droit de créer en 2009 des zones de « petite mobilité », c’est-à-dire une bande de 30 km de part et d’autre de la frontière, dans laquelle les résidents circulent sans visa, parfois de manière quotidienne, pour travailler et commercer. Sur la frontière ukrainienne, elle permet d’entretenir une économie grise vitale dans ces confins orientaux du pays, oubliés par les investisseurs.</p>
<p>Cette économie grise est surtout vitale pour les Ukrainiens : le différentiel de salaires et de niveau de vie s’est creusé entre les deux pays <a href="https://www.lesechos.fr/2009/09/la-pologne-seule-rescapee-de-la-crise-au-sein-de-lunion-463864">après l’accession de la Pologne à l’Europe communautaire</a>. Ces mobilités circulatoires, les mesures gouvernementales assouplissant l’embauche de travailleurs ukrainiens (et d’autres pays de l’ex-URSS) dès 2006, la multiplication d’agences d’intérim et l’amélioration des conditions de circulation entre les deux pays ont favorisé le passage de mobilités circulatoires à la résidence temporaire ou permanente : l’immigration.</p>
<p>Au début des années 2010, la Pologne commence à réaliser qu’elle devient un pays de transit, voire d’immigration, un phénomène tout à fait nouveau. Un document élaboré en 2012 pose d’ailleurs les jalons d’une possible stratégie migratoire. Il était prémonitoire, étant donné le tournant de 2014.</p>
<h2>De 2014 à 2022 : une immigration ukrainienne croissante</h2>
<p>La population ukrainienne installée en Pologne <a href="https://www.academia.edu/62071587/LUkraine_de_lind%C3%A9pendance_%C3%A0_la_guerre">a crû de façon exponentielle</a> depuis 2014, en raison de l’<a href="https://www.la-croix.com/Monde/Europe/En-Ukraine-flamme-revolution-Maidan-seteint-pas-2018-11-30-1200986619">Euromaïdan</a> à Kiev, de l’<a href="https://www.robert-schuman.eu/fr/questions-d-europe/0382-l-annexion-de-la-crimee-lecons-pour-la-securite-europeenne">annexion de la Crimée</a> par la Russie et du début de la <a href="https://theconversation.com/ukraine-la-guerre-ne-fait-que-commencer-178198">guerre dans l’Est du pays</a>.</p>
<p>Le nombre annuel d’Ukrainiens s’installant en Pologne, défini comme le nombre d’individus ayant obtenu un permis de résidence permanente ou temporaire, est passé de 16 081 en 2013 à 296 525 en 2021. C’est avant tout du fait de cette croissance spectaculaire que le solde migratoire de la Pologne est devenu positif après 2015. Compte tenu du fait que beaucoup restent une fois arrivés, la population ukrainienne présente en Pologne est estimée en 2021 à près de 1,5 million d’individus selon l’Office des étrangers. Cette année-là, les Ukrainiens représentent 57 % des étrangers résidant en Pologne. Pendant les dix dernières années, seule l’immigration biélorusse a également connu une légère augmentation.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/469195/original/file-20220616-16-5j2u30.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/469195/original/file-20220616-16-5j2u30.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/469195/original/file-20220616-16-5j2u30.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/469195/original/file-20220616-16-5j2u30.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/469195/original/file-20220616-16-5j2u30.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/469195/original/file-20220616-16-5j2u30.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/469195/original/file-20220616-16-5j2u30.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/469195/original/file-20220616-16-5j2u30.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les principales nationalités parmi la population immigrée en Pologne, de 2010 à 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Cette ouverture migratoire fait toutefois exception. En effet, 2015 est aussi l’année du retour au pouvoir du parti <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMParti?codePays=POL&codeParti=dj">Droit et Justice</a> (qui avait brièvement gouverné le pays de 2005 à 2007) après une longue phase de pouvoir libéral.</p>
<p>Le gouvernement nationaliste enterre la stratégie migratoire élaborée en 2012 et se distingue, avec d’autres pays d’Europe centrale, par le <a href="https://www.cairn.info/revue-population-et-avenir-2017-3-page-14.htm">refus d’accueillir les populations réfugiées</a> de la guerre en Syrie en 2015, que ce soit dans le cadre du plan de relocalisation mis en place par l’UE ou dans le cadre du <a href="https://www.vie-publique.fr/parole-dexpert/277029-quest-ce-que-le-pacte-de-marrakech-sur-les-migrations">Pacte de Marrakech</a> adopté en 2018 sous la férule de l’ONU et destiné à promouvoir une vision commune de la migration à l’échelle mondiale et à mieux protéger les migrants.</p>
<p>Quoi qu’il en soit, à mesure que la population ukrainienne s’installe dans l’espace polonais, elle s’éloigne de ses bases traditionnelles que constituait la bande frontalière, pour investir toutes les voïvodies – les régions du pays –, au point de constituer dans certaines d’entre elles 80 % des étrangers résidant de manière temporaire ou permanente en 2021, comme dans la région d’Opole dans le Sud-Ouest du pays.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/469196/original/file-20220616-11-6tatfi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/469196/original/file-20220616-11-6tatfi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/469196/original/file-20220616-11-6tatfi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=168&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/469196/original/file-20220616-11-6tatfi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=168&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/469196/original/file-20220616-11-6tatfi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=168&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/469196/original/file-20220616-11-6tatfi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=212&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/469196/original/file-20220616-11-6tatfi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=212&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/469196/original/file-20220616-11-6tatfi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=212&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La part des Ukrainiens dans l’immigration de 2010 à 2021 (en % du total des immigrés dans les régions polonaises). Cliquer pour zoomer.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Jusqu’en 2021, les motivations qui attirent les Ukrainiens en Pologne sont diverses mais centrées autour du travail, à la fois parce que l’économie du pays présente un dynamisme sans commune mesure avec celui de l’Ukraine (le rapport salarial est environ du simple au double), et parce que l’émigration polonaise avait laissé énormément de postes vacants.</p>
<p>Selon le rapport de l’Office des étrangers de 2020, les principales raisons d’arrivée des Ukrainiens avant la guerre étaient, pour une écrasante majorité, le travail, puis l’éducation et la famille. C’est pourquoi parmi la population ukrainienne résidant en Pologne, 95 % travaillent ; le nombre d’étudiants ukrainiens a lui aussi augmenté. Une estimation alternative de l’immigration, donnée par le nombre de permis de travail accordé à des étrangers, confirme ce tournant de 2014 et la place prépondérante des Ukrainiens dans la composition de l’immigration. Les employeurs polonais ont accordé en 2010 presque 13 000 permis, dont 35 % à des Ukrainiens ; en 2019, ils en ont accordé 330 000, dont plus de 70 % à des Ukrainiens.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/469198/original/file-20220616-21-10wutp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/469198/original/file-20220616-21-10wutp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/469198/original/file-20220616-21-10wutp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/469198/original/file-20220616-21-10wutp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/469198/original/file-20220616-21-10wutp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/469198/original/file-20220616-21-10wutp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/469198/original/file-20220616-21-10wutp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/469198/original/file-20220616-21-10wutp.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les permis de travail accordés aux Ukrainiens de 2010 à 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les hommes sont plus nombreux : ils représentent 62 % des permis de résidence permanente en 2018, et travaillent essentiellement dans les secteurs du transport, de la restauration, de l’industrie. Les femmes occupent également des emplois dans l’éducation. Par ailleurs, si ce sont principalement des Ukrainiennes jeunes, entre 20 et 24 ans, qui arrivent en Pologne, les hommes sont un peu plus âgés, entre 25 et 35 ans. Autre différence : les Ukrainiens embauchés près de la frontière le sont sur des postes saisonniers, ce qui suggère qu’ils ont conservé des habitudes de mobilité plus fréquentes. Dans le reste du pays, ils travaillent avec des contrats de plus longue durée.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/469199/original/file-20220616-16-i08z8y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/469199/original/file-20220616-16-i08z8y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=350&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/469199/original/file-20220616-16-i08z8y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=350&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/469199/original/file-20220616-16-i08z8y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=350&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/469199/original/file-20220616-16-i08z8y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=440&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/469199/original/file-20220616-16-i08z8y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=440&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/469199/original/file-20220616-16-i08z8y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=440&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les emplois saisonniers des travailleurs ukrainiens dans les voïvodies de Pologne en 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Qui sont les réfugiés ukrainiens depuis le début de la guerre de 2022 ?</h2>
<p>On comprend bien pourquoi la Pologne est la première destination des réfugiés ukrainiens : voilà trente ans que des millions de personnes y ont tissé des liens plus ou moins durables, y ont des attaches, parfois des parents installés, connaissant bien le pays, sa langue, et pouvant les héberger. Le socle de plus d’un million d’Ukrainiens immigrés a donc servi de point d’appui.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/qoj_Xm9BiJw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Reportage à Przemyśl en Pologne, confrontée à un afflux continu de réfugiés ukrainiens (Euronews, 7 mars 2022).</span></figcaption>
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<p>L’hébergement fut donc résolu avec l’appui d’organisations non gouvernementales locales, nationales et internationales, des collectivités territoriales mais surtout des citoyens, qui hébergent la grande majorité des personnes réfugiées. Selon plusieurs estimations, 70 % sont en effet hébergées chez des particuliers, le reste dans des locaux aménagés à cet effet (résidences hôtelières, étudiantes, gymnases, etc.). La diaspora ukrainienne présente en Pologne a donc absorbé en priorité le choc de ces arrivées aussi massives que soudaines, immédiatement secondée par l’ensemble de la société polonaise.</p>
<p>Les personnes arrivées en Pologne depuis le 24 février 2022 ont un profil très différent de la population ukrainienne présente avant la guerre. Ce sont presque exclusivement des femmes, accompagnées de leurs enfants. Les hommes de 18 à 60 ans sont en effet <a href="https://www.bfmtv.com/international/guerre-en-ukraine-les-hommes-de-18-a-60-ans-ne-peuvent-plus-quitter-le-pays_AN-202202250306.html">retenus par la mobilisation</a>, et beaucoup de personnes âgées n’ont pas pu ou souhaité quitter leur pays.</p>
<p>De plus, en raison de cette même mobilisation, 100 000 hommes ukrainiens ont dû quitter du jour au lendemain le poste de travail qu’ils occupaient en Pologne, selon les estimations de l’organisation des employeurs polonais. Le résultat est une inversion du <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/glossaire/sex-ratio"><em>sex ratio</em></a> et un déficit de main-d’œuvre dans les emplois qu’occupaient les hommes ukrainiens.</p>
<p>La première vague de réfugiés était constituée de personnes parties de leur propre initiative, ayant des contacts en Pologne, et qui ont pu assez vite s’intégrer au marché du travail, ou aller dans d’autres pays d’Europe. Mais une enquête sur les <a href="https://www.eecpoland.eu/2022/pl/panel/5053.html">réfugiés ukrainiens présents en Pologne</a> montrait que seulement 44 % sont des femmes en âge de travailler, le reste se composant essentiellement d’enfants et de personnes âgées.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/469202/original/file-20220616-16-xm9b9n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/469202/original/file-20220616-16-xm9b9n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/469202/original/file-20220616-16-xm9b9n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=860&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/469202/original/file-20220616-16-xm9b9n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=860&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/469202/original/file-20220616-16-xm9b9n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=860&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/469202/original/file-20220616-16-xm9b9n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1081&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/469202/original/file-20220616-16-xm9b9n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1081&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/469202/original/file-20220616-16-xm9b9n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1081&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les supérettes polonaises recrutent : « Tu cherches du travail ? Rejoins-nous ! ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">L. Coudroy, Univ Lumière Lyon 2, UMR EVS -- 2022</span></span>
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<p>Environ <a href="https://www.eecpoland.eu/2022/pl/panel/5053.html">100 000 des femmes ukrainiennes</a> arrivées depuis le début du conflit ont pu trouver un emploi, principalement dans les services comme l’hôtellerie et la restauration, ou encore les métiers de l’esthétique. La deuxième vague, à partir d’avril environ, contient surtout des femmes et enfants évacués par des ONG devant la violence du feu. Elles n’avaient pas préparé leur départ, et rencontrent davantage de difficultés car elles butent sur deux obstacles principaux : la maîtrise de la langue, et la scolarisation de leurs enfants. Ces derniers, pour des raisons également linguistiques, sont restés scolarisés en ligne dans le système éducatif ukrainien, ce qui les place sous la surveillance de leurs mères, indisponibles pour aller travailler.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lue-face-au-defi-de-lafflux-de-refugies-ukrainiens-181005">L’UE face au défi de l’afflux de réfugiés ukrainiens</a>
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<h2>Le défi de l’hébergement</h2>
<p>À court terme, le défi que doivent résoudre les autorités et les organisations humanitaires est l’hébergement. Elles visent tout d’abord une meilleure répartition des réfugiés dans le territoire : les flux ont convergé vers les grandes villes, au marché immobilier extrêmement tendu, alors que de nombreuses villes moyennes offrent des conditions de vie et d’emploi tout aussi intéressantes. Tel est le message qui s’affiche dans la gare centrale de Varsovie :</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/467489/original/file-20220607-32118-ztgxwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/467489/original/file-20220607-32118-ztgxwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=554&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/467489/original/file-20220607-32118-ztgxwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=554&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/467489/original/file-20220607-32118-ztgxwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=554&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/467489/original/file-20220607-32118-ztgxwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=696&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/467489/original/file-20220607-32118-ztgxwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=696&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/467489/original/file-20220607-32118-ztgxwg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=696&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cette carte de la Pologne affichée dans la gare centrale de Varsovie en avril 2022 désigne les multiples points d’accueil dans le territoire polonais.</span>
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<p>Par ailleurs, au bout de trois mois de conflit, et a fortiori si celui-ci s’éternise, l’hébergement chez des personnes privées deviendra épuisant, en raison du volume du parc disponible et de ses qualités. On compte en effet seulement 392 logements pour 1 000 habitants en Pologne (comparé à 534 en France) et leur taille moyenne est de 74 m<sup>2</sup> (contre 90 m<sup>2</sup> en France). C’est pourquoi de nombreuses familles ukrainiennes ont cherché à louer un logement. Or le <a href="https://journals-openedition-org.bibelec.univ-lyon2.fr/belgeo/27157#tocto2n1_">marché immobilier locatif privé est très rare en Pologne</a> (sans parler du logement social, quasi inexistant), et les prix des loyers depuis le début du conflit ont augmenté de parfois 20 à 30 % ! Cela peut expliquer, entre autres, les mouvements de retour en Ukraine qui se sont esquissés en avril 2022, alors que la guerre semble loin d’être finie.</p>
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<p><em>Cet article a été co-écrit avec Margaux Baudoux, étudiante en Master 1 Études Européennes et Internationales à l’ENS de Lyon</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/184588/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lydia Coudroy de Lille ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pourquoi les Ukrainiens sont-ils si nombreux à avoir afflué en Pologne et comment la société polonaise parvient-elle à gérer ce choc démographique ?Lydia Coudroy de Lille, Professeure des universités, Département de Géographie et aménagement Laboratoire Environnement, ville, société (UMR 5600, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1820982022-05-09T18:34:54Z2022-05-09T18:34:54ZCantine, transport, logement… la contribution méconnue des territoires à la lutte contre la pauvreté<p>Les aides accordées aux ménages pauvres par les collectivités territoriales forment un domaine peu exploré par les chercheurs spécialistes de la protection sociale et de la lutte contre la pauvreté.</p>
<p>Leurs études se focalisent sur les aides nationales et légales, telles que le RSA et les allocations logement, alors que le système français de soutien aux bas revenus comprend aussi un vaste ensemble d’aides sociales secondaires qu’on regroupe sous l’appellation de <a href="https://www.vie-publique.fr/rapport/30464-mission-parlementaire-sur-les-droits-connexes-locaux-dans-le-cadre-de-la">« droits connexes »</a>.</p>
<p>Ces prestations rassemblent des aides à caractère national tels la prime de Noël, les exonérations de la contribution à l’audiovisuel public, l’abonnement et la réduction sociale du tarif du téléphone, la couverture maladie universelle (CMU) et la CMU complémentaire (remplacée par la Complémentaire santé solidaire depuis le 1<sup>er</sup> novembre 2019).</p>
<p>Elles comprennent aussi des aides locales accordées par les départements, les communes et leurs regroupements, les régions, les caisses locales d’allocations familiales dans différents domaines de l’action sociale : restauration scolaire, centres de loisirs, aide aux vacances, prise en charge d’impayés, aide au transport et à la mobilité, tarifs sociaux des équipements collectifs (piscine, musée…).</p>
<p>Même s’ils sont individuellement d’un montant faible, de quelques dizaines d’euros chaque mois, les droits connexes se cumulent et peuvent apporter un supplément de revenu non négligeable pour les ménages à bas revenus. Comme ces aides sont fortement dégressives avec les ressources des ménages, elles sont rapidement perdues lors d’un retour à l’emploi, et peuvent jouer un rôle important dans les incitations monétaires à une reprise d’activité et pénaliser le retour à l’emploi. Leur prise en compte peut donc modifier sensiblement les diagnostics des nombreuses études sur l’incidence des transferts sociaux, qui négligent ce versant de la redistribution.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/discriminations-dans-lacces-au-logement-en-france-un-etat-des-lieux-181858">Discriminations dans l’accès au logement en France : un état des lieux</a>
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<p>Pour autant, ces prestations sont mal connues, sans doute en grande partie en raison de la difficulté à les observer. Les aides extra-légales et/ou locales recouvrent des dispositifs extrêmement variés dans leurs modalités d’attribution, tout en mettant en jeu une pluralité d’acteurs, à différents niveaux géographiques d’intervention.</p>
<h2>Des régularités dans les conditions d’attribution des aides</h2>
<p>Il n’existe que deux études qui ont recensé les aides sociales et/ou facultatives pour analyser leurs effets sur le niveau de vie des ménages pauvres.</p>
<p><a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/1375832?sommaire=1375847">La première</a> a été publiée au début des années 2000 et recense dans dix villes et pour six configurations familiales types, l’ensemble des prestations sociales dont les conditions d’attribution sont explicites. Elle montre que le cumul de ces aides peut représenter, en moyenne, près d’un cinquième des ressources pour un ménage sans revenu d’activité et peut augmenter de plus d’un quart celles qu’il tire des transferts nationaux.</p>
<p>Cette première étude a mis en évidence des régularités dans les conditions d’attribution des aides. Dans toutes les villes, ces prestations sont stables avec le revenu d’activité jusqu’au plafond du RMI (Revenu minimum d’insertion), alors que les prestations nationales et légales sont très décroissantes.</p>
<p>Au-delà du RMI, les prestations locales et extra-légales diminuent fortement avec des effets de seuil parfois brutaux alors que les prestations nationales deviennent moins décroissantes. Aussi les prestations locales augmentent considérablement la durée du travail minimale pour que l’emploi apporte un gain monétaire à celui qui l’occupe : il faut, en moyenne, travailler 13 heures de plus chaque semaine pour compenser la perte de ces prestations locales – ce que l’on a appelé la « durée de réservation », et cet effet est particulièrement sensible pour les ménages avec enfants.</p>
<p>L’étude établit ainsi une responsabilité forte des prestations locales et extra-légales dans l’existence de trappes à pauvreté, correspondant à des zones de faible revenu dont il est coûteux de sortir, même au prix d’un supplément de temps de travail.</p>
<h2>Des réformes pour quels effets ?</h2>
<p><a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/1377400?sommaire=1377406">La deuxième étude</a> sur les droits connexes repose sur un nouvel inventaire des barèmes des aides sociales locales et/ou extra-légales offertes en 2007 dans 13 villes françaises, dont Paris, Lyon et Marseille. Elle dresse un bilan des effets des multiples réformes des prestations nationales et légales depuis la fin des années quatre-vingt-dix, en particulier celles de la prime pour l’emploi en 2001.</p>
<p>L’étude montre que dans la plupart des localités et pour la plupart des configurations familiales, un emploi à mi-temps rémunéré au salaire minimum fait perdre des revenus relativement à une situation d’assistance tandis qu’un emploi à temps complet ne garantit pas toujours un gain net à celui qui l’occupe.</p>
<p>Il est montré que les effets positifs de certaines réformes ont été neutralisés par ceux d’autres mesures telles que la généralisation des aides aux transports distribuées par les régions, le développement des tarifs sociaux du téléphone et de l’électricité, ou l’exonération de la contribution à l’audiovisuel public.</p>
<p>Malgré leur faible montant, les droits connexes continuent à exercer un effet important sur les durées de réservation, pour la presque totalité des configurations familiales. Dans un second temps, l’étude propose une simulation de la mise en œuvre du RSA (Revenu de Solidaité Active) en substitution du Revenu minimum d’Insertion et de l’Allocation Parent Isolé. Il est montré que le RSA rend le retour à l’emploi rémunérateur dans la quasi-totalité des villes et des configurations familiales, ce que ne permettait pas le RMI même en prenant en compte l’intéressement (qui permettait de conserver temporairement une partie de l’allocation du RMI en cas de reprise d’emploi). La simulation couvre plusieurs barèmes théoriques de RSA et a été utilisée par le gouvernement pour déterminer le barème définitif du RSA.</p>
<h2>L’évolution longue des aides</h2>
<p><a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/6328073?sommaire=6328092">Une troisième étude</a> vient d’être publiée pour les aides de 2020 sur un échantillon de 20 villes, dont Paris, Lyon et Marseille, correspondant à l’ensemble des villes étudiées précédemment, ce qui permet d’observer pour la première fois l’évolution longue des barèmes, sur deux décennies.</p>
<p>Elle révèle une transformation dans le profil général des aides entre les premiers inventaires et ce nouvel état des lieux. Cette transformation va clairement dans le sens d’une érosion des effets de seuil associés aux barèmes antérieurs. Les barèmes des aides locales ont évolué vers une plus grande dégressivité, au sens où le montant des aides ne diminue que faiblement avec le niveau du revenu d’activité, à l’image du passage du RMI au RSA. De fait, tout se passe comme si les barèmes locaux s’étaient inspirés du barème national du revenu minimum. Les barèmes avec une marche d’escalier s’accordaient au RMI, dont le montant diminuait d’un euro pour chaque euro supplémentaire de revenu d’activité. Désormais, ce sont des barèmes plus dégressifs qui sont mis en œuvre, à l’image de celui du RSA.</p>
<p>Les dispositifs nationaux de revenu minimum semblent ainsi exercer un rôle directeur pour les barèmes des aides sociales locales. Comme le RMI, le RSA a influencé les modalités d’attribution des aides sociales locales facultatives. Les montants des conditions de ressources sont couramment basés sur les seuils du RSA lorsque celui-ci ne constitue pas une condition de statut pour les obtenir. L’étude montre que le rôle directeur des réformes nationales concerne également la forme même des barèmes des aides sociales locales.</p>
<p>Depuis la mise en œuvre du RSA, les aides locales sont devenues globalement moins généreuses pour les ménages les plus pauvres et les conditions de ressource pour en bénéficier ont été élargies.</p>
<p>Le montant des aides locales a effectivement diminué dans l’absolu, en euros courants. À budget constant, la baisse du niveau des aides pour les ménages sans ressources rend possible un élargissement de la fenêtre d’éligibilité. Le changement s’est effectué au prix d’une ingénierie croissante et d’une complexité plus grande des conditions de distribution des aides (dont le montant est plus difficile à calculer par les offreurs d’aide). En outre, des barèmes qui adaptent le montant des aides à chaque variation du revenu d’activité peuvent être moins directement lisibles par les bénéficiaires, ce qui peut potentiellement renforcer le non-recours aux aides locales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182098/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yannick L’Horty a reçu des financements de la Cour des Comptes qui a pris en charge les coûts associés à la collecte des données permettant de réaliser cette étude. Les études précédentes que nous avons réalisées sur le même thème et qui sont citées dans l'article ont bénéficié d'un soutien du ministère de l'économie et des finances et du Hat Commissariat aux solidarités actives et à la lutte contre la pauvreté.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Denis Anne a reçu des financements de la Cour des Comptes qui a pris en charge les coûts associés à la collecte des données permettant de réaliser cette étude. Les études précédentes que nous avons réalisées sur le même thème et qui sont citées dans l'article ont bénéficié d'un soutien du ministère de l'économie et des finances et du Haut Commissariat aux solidarités actives et à la lutte contre la pauvreté</span></em></p>Même s’ils sont individuellement d’un montant faible, quelques dizaines d’euros chaque mois, les droits connexes cumulés apportent un supplément de revenu non négligeable pour les ménages pauvres.Yannick L’Horty, Économiste, professeur des universités, Université Gustave EiffelDenis Anne, Professeur associé, Université Gustave EiffelLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1818582022-05-03T18:38:47Z2022-05-03T18:38:47ZDiscriminations dans l’accès au logement en France : un état des lieux<p>Un propriétaire ne peut pas refuser un locataire en raison de son origine ethnique, de son âge, de son sexe, de son orientation sexuelle ou de l’un des autres critères prohibés par le droit. Il s’agit d’une atteinte à la dignité des personnes qui est contraire au principe d’égalité. C’est pourquoi les discriminations sont réprimées par l’article 225-2 du code pénal.</p>
<p>Malgré ce cadre répressif, les <a href="https://defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/171213_ddd_ead_discrimination_logement_num_0.pdf">enquêtes du Défenseur des Droits</a> indiquent que le logement est perçu par près d’un Français sur deux comme l’un des principaux domaines de discriminations, suivant en cela l’emploi ou les contrôles de police.</p>
<p>Les études consacrées à la mesure des discriminations ethnoraciales portent essentiellement sur le <a href="https://journals.sagepub.com/eprint/CIMUV6GDBKJ7HDGSFDWI/full">marché du travail</a>. Celles qui abordent le domaine de l’accès au logement sont plus rares et se focalisent sur le parc locatif privé mais elles permettent néanmoins de faire un état des lieux de la situation. </p>
<p>Toutes ces études utilisent la méthode du test par correspondance, ou <em>testing</em>, qui consiste à comparer les chances de succès de deux candidats fictifs semblables en tous points à l’exception du critère de discrimination testé. En l’occurrence les chercheurs envoient, pour chaque offre de logement testé, deux candidatures qui diffèrent par la consonance des noms et prénoms des candidats. </p>
<p><a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1051137718300457">Un survol extensif de cette littérature</a> recense 29 études qui ont utilisé cette méthode dans 15 pays différents. Et, selon ces travaux, les candidats qui suggèrent leur origine ethnique par un nom de famille à consonance étrangère ont en moyenne deux fois moins de chances que les candidats issus de l’ethnie majoritaire d’être invités à visiter un logement locatif.</p>
<h2>Des résultats convergents sur données françaises</h2>
<p>En France métropolitaine, quatre études de portée scientifique ont mesuré les discriminations sur le marché immobilier locatif. Les <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0042098015596107">deux</a> <a href="https://econpapers.repec.org/article/eeejuecon/v_3a95_3ay_3a2016_3ai_3ac_3ap_3a49-63.htm">premières</a> concluent à l’existence de fortes discriminations dans l’accès au logement sans en interpréter les causes.</p>
<p>Les deux autres études ont de surcroît testé des hypothèses permettant d’analyser les déterminants des discriminations. <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-d-economie-2021-1-page-185.html">L’une</a> a mesuré l’ampleur de la discrimination dans l’accès au logement de candidats d’origine maghrébine à Paris entre début avril et fin mai 2016. Quatre messages sollicitant la visite d’un logement ont été envoyés en réponse à 504 annonces immobilières émanant de particuliers ou d’agences immobilières, soit un envoi de 2016 réponses.</p>
<p>L’étude conclut que les discriminations à l’encontre des personnes d’origine maghrébine sont fortes dans l’accès au logement parisien et qu’elles sont peu liées à la fragilité financière supposée de ces personnes. Le candidat de référence d’origine française a un taux de réponse de 18,7 % à ses demandes. Pour le candidat d’origine maghrébine, ce taux est de 12,9 %, soit un tiers de chances en moins de recevoir une issue favorable. Si le candidat maghrébin précise qu’il est fonctionnaire, son taux de réponse est de 15,5 % ce qui reste inférieur au candidat d’origine française qui ne fait pas mention de sa situation. Lorsque c’est le candidat d’origine française qui envoie le même signal de stabilité, son taux de réponse atteint 42,9 %. Un signal de stabilité professionnelle et financière n’augmente fortement les chances d’accès au logement que pour les candidats d’origine française, ce qui suggère une forte discrimination liée aux préférences des particuliers ou des agences pour les candidats d’origine française.</p>
<p>Enfin, l’étude des économistes <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/4467358?sommaire=4467460">Julie Le Gallo, Yannick L’Horty, Loïc du Parquet et Pascale Petit</a> repose sur un test de couverture nationale, couvrant les 50 plus grandes aires urbaines de France métropolitaine, pour cinq motifs de discriminations : l’âge, l’origine, le lieu de résidence et leurs combinaisons.</p>
<p>Entre juin et décembre 2016, cinq candidatures fictives ont été envoyées en réponse à une sélection de 5 000 annonces de locations dans le parc privé réparties sur l’ensemble du territoire métropolitain, soit 100 annonces par aire urbaine ou encore 25 000 réponses à des annonces immobilières. Les auteurs ne parviennent pas à mettre en évidence de discriminations en raison de l’âge du loueur ou de son lieu de résidence, mais ils trouvent d’importantes discriminations selon l’origine qui pénalisent les candidats signalant par leurs noms et prénoms une origine maghrébine ou une origine d’Afrique subsaharienne. Relativement au candidat de référence présumé d’origine française, Sébastien Petit, le candidat maghrébin Mohamed Chettouh a 26,7 % de chances en moins de voir ses démarches d’accès au logement aboutir.</p>
<p>Les auteurs trouvent aussi que les discriminations sont très différentes selon les territoires. Elles sont patentes dans un petit nombre d’aires urbaines dont ils établissent la liste. Perpignan, Limoges, Avignon et Nancy sont en tête des classements établis à partir d’indicateurs différents. Les dix villes où l’intensité des discriminations est la plus forte ne sont ni les plus grandes ni les plus petites. Aucune n’est une capitale régionale. Toutes sont des préfectures ou des sous-préfectures. Leur taille est proche de la médiane des grandes aires urbaines et elles sont dispersées dans l’espace métropolitain.</p>
<h2>La discrimination limite la mixité sociale des quartiers</h2>
<p>Malgré des tailles d’échantillon et des méthodologies parfois différentes, les résultats de ces travaux convergent sur plusieurs points. Les discriminations sont élevées dans tous les territoires testés, à l’encontre des candidats français originaires d’Afrique subsaharienne tout autant que pour ceux originaires d’Afrique du Nord. Elles sont plus fortes lorsque l’offre de location émane d’un particulier mais elles sont significatives aussi pour les offres publiées par des agences immobilières. Elles sont peu sensibles au degré local de tension sur le marché immobilier et aux prix pratiqués localement. Elles ne sont que faiblement atténuées lorsque le candidat à la location ajoute un signal de qualité en précisant qu’il est fonctionnaire.</p>
<p>De telles discriminations sont susceptibles de produire des conséquences durables. Les personnes discriminées subissent des coûts de recherche élevés et elles sont limitées dans leur choix de localisation ce qui réduit leur mobilité résidentielle. Ces contraintes peuvent alimenter les processus de ségrégation urbaine, limiter la mixité sociale des quartiers et pénaliser en retour l’accès à l’emploi et à la formation.</p>
<p>En Nouvelle-Calédonie, l’un des seuls territoires de l’espace républicain français, avec la Polynésie, où il existe des statistiques ethniques, une <a href="http://www.tepp.eu/doc/users/268/bib/seekingfortippingpoint.pdf">étude complémentaire a été réalisée</a>. Dans ce territoire, ce sont les candidats kanaks et wallisiens qui sont discriminés par rapport aux candidats européens. Le niveau de discrimination varie, par ailleurs, avec la composition du quartier dans lequel se trouve le logement : la discrimination diminue significativement lorsque la part des minorités dépasse 40 %. L’étude suggère la présence d’un point de basculement dans la composition ethnique des quartiers qui peut conduire les propriétaires à discriminer davantage pour éviter ce basculement.</p>
<h2>Comment lutter contre ces discriminations ?</h2>
<p>Une <a href="http://www.tepp.eu/doc/users/268/bib/reducingethnicdiscrimination.pdf">dernière étude</a> par test par correspondances fournit une réponse originale. Elle consiste à évaluer l’effet d’un courrier nominatif de rappel du cadre légal adressé à des agences immobilières.</p>
<p>L’étude porte sur 343 agences immobilières réparties au hasard en deux groupes. Le premier groupe a été destinataire d’un courrier de sensibilisation signé par le Défenseur des Droits leur indiquant qu’elles font l’objet d’un <em>testing</em> et leur rappelant le cadre légal et les sanctions auxquelles elles s’exposent. Le deuxième groupe ne reçoit aucun courrier.</p>
<p>L’évaluation consiste à tester l’ensemble de ces agences durant les deux années suivant la réception du courrier. Les résultats indiquent que le <em>testing</em>, qui rend la menace de sanction juridique crédible, est un puissant réducteur de discriminations. Il réduit significativement la discrimination à l’encontre du candidat appartenant au groupe minoritaire pendant les deux années qui suivent l’envoi du courrier.</p>
<p>A notre connaissance, cette étude est la seule évaluation qui montre de façon rigoureuse qu’une action de lutte contre les discriminations peut être efficace si elle rend crédible l’application du cadre juridique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181858/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Certaines études présentées dans cet article ont reçu des financements institutionnels (ANCT, ANR, Défenseur des Droits). Les financements éventuels sont indiqués dans les articles. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Yannick L’Horty a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche, du CNRS, de l'ANCT, du Ministère du logement et du Défenseur des Droits pour ses travaux sur les discriminations dans l'accès au logement. </span></em></p>De récentes études prouvent qu’il existe de fortes discriminations ethnoraciales dans l’accès au logement.Sylvain Chareyron, Maître de conférences en Sciences économiques, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Yannick L’Horty, Économiste, professeur des universités, Université Gustave EiffelLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1755392022-01-24T09:32:34Z2022-01-24T09:32:34ZPortrait(s) de France(s) : Alerte sur l’aggravation des inégalités françaises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/442196/original/file-20220124-21-8adkow.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1252%2C702&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les bouleversements nés de la crise ont contribué à creuser le fossé entre les plus pauvres et les plus riches.
</span> <span class="attribution"><span class="source">AFP / Visual hunt</span></span></figcaption></figure><p><em>Portrait(s) de France(s), un rendez-vous bi-mensuel et thématique réunissant articles inédits, cartographies et podcasts, pour aborder les grands enjeux de l’élection présidentielle de 2022.</em></p>
<hr>
<p><strong>L’édito de Florence Weber</strong></p>
<p>La classe politique mondiale, suivant en cela les travaux des économistes et des sociologues, s’accorde généralement sur le constat d’une aggravation des inégalités, à l’échelle mondiale et au sein même des anciens pays riches (OCDE).</p>
<p>Mais l’analyse s’arrête souvent à l’idée que le fossé se creuse entre les pauvres qui s’appauvrissent et les riches qui s’enrichissent. Ce constat est juste, mais il masque un autre phénomène très important : le fossé se creuse également entre les gagnants et les perdants des bouleversements en cours, ce qui entraîne des effets de déclassement d’autant plus douloureux que les gagnants sont plus proches et plus visibles.</p>
<p>Cette instabilité est bien documentée dans certains pays et à l’échelle transnationale. Mais quelles sont les spécificités du cas de la France, qui se distingue par son <a href="http://theconversation.com/en-graphique-contribuez-vous-plus-a-letat-que-vous-nen-beneficiez-168038">modèle social à part</a> ? C’est la question que nous nous posons dans cette deuxième livraison de notre newsletter spéciale « 2022 : Portrait(s) de France(s) », qui décrypte les grands enjeux de la campagne présidentielle.</p>
<p><a href="http://theconversation.com/les-inegalites-entre-les-territoires-deviennent-des-inegalites-au-sein-des-territoires-168215">Au sein des territoires</a> comme parmi les ménages, on peut aujourd’hui regrouper les spécificités françaises autour du logement mais aussi de la jeunesse.</p>
<p><a href="http://theconversation.com/logement-comment-la-crise-sanitaire-amplifie-les-fractures-135762">Côté logement</a>, après vingt ans de politique d’encouragement à l’accès à la propriété, la France a connu une <a href="http://theconversation.com/la-covid-accelerateur-des-inegalites-de-revenus-et-de-patrimoine-en-france-168493">inversion de l’équilibre</a> entre ménages locataires et propriétaires occupants, entraînant un fort enrichissement dans certains environnements des propriétaires-occupants et, dans les poches de pauvreté, un violent appauvrissement des propriétaires-occupants, leur bien devenu invendable et coûteux.</p>
<p>Côté jeunesse enfin, les <a href="http://theconversation.com/bonnes-feuilles-une-jeunesse-sacrifiee-166761">inégalités se creusent</a> entre les salariés des grandes entreprises et les jeunes précaires, mais aussi entre les jeunes selon leurs diplômes, leurs réseaux et leurs lieux de vie.</p>
<p>L’édition de ce jour ne peut qu’alerter sur ce fossé qui divise toujours plus les Français, à quelques semaines du scrutin électoral.</p>
<hr>
<h2>Le Covid, accélérateur des inégalités de revenus et de patrimoine en France</h2>
<p>Malgré les amortisseurs sociaux, le fossé s’est creusé entre les ménages les plus aisés, qui ont pu épargner, et les plus modestes, dont le pouvoir d’achat a baissé.</p>
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<p><a href="https://theconversation.com/la-covid-accelerateur-des-inegalites-de-revenus-et-de-patrimoine-en-france-168493"><em>Lire l’article</em></a></p>
</blockquote>
<h2>Les inégalités entre les territoires deviennent des inégalités au sein des territoires</h2>
<p>En quelques années, l’influence du facteur mobilité s’est renforcée, fragmentant l’attractivité d’un même espace en fonction de la proximité des voies routières et ferroviaires.</p>
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<p><a href="https://theconversation.com/les-inegalites-entre-les-territoires-deviennent-des-inegalites-au-sein-des-territoires-168215"><em>Lire l’article</em></a></p>
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<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/442188/original/file-20220124-27-nzbgew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/442188/original/file-20220124-27-nzbgew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/442188/original/file-20220124-27-nzbgew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/442188/original/file-20220124-27-nzbgew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/442188/original/file-20220124-27-nzbgew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/442188/original/file-20220124-27-nzbgew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/442188/original/file-20220124-27-nzbgew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Au-delà des superficies, les écarts dans les conditions de vie se jouent aussi sur l’accessibilité et l’environnement des logements. (Ici, immeuble dans le quartier St-Blaise, à Paris).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://visualhunt.com/washers-dryers">O.Mabelly/VisualHunt</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Logement : comment la crise sanitaire amplifie les fractures</h2>
<p>Si le confinement imposé par l’épidémie de Covid-19 fait ressortir le drame du mal-logement, il exacerbe aussi les écarts entre les 65 millions de Français vivant dans des logements dits ordinaires.</p>
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<p><a href="https://theconversation.com/logement-comment-la-crise-sanitaire-amplifie-les-fractures-135762"><em>Lire l’article</em></a></p>
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<h2>Bonnes feuilles : « Une jeunesse sacrifiée ? »</h2>
<p>On part souvent du principe qu’à chaque formation correspond un emploi et que l’expansion scolaire est la clé contre les inégalités. Est-ce aussi simple ? Extrait du livre « Une jeunesse sacrifiée ? »</p>
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<p><a href="https://theconversation.com/bonnes-feuilles-une-jeunesse-sacrifiee-166761"><em>Lire l’article</em></a></p>
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<h2>L’infographie</h2>
<iframe title="Redistribution élargie moyenne selon les revenus annuels" aria-label="Graphique à barres groupées" id="datawrapper-chart-6R8Nc" src="https://datawrapper.dwcdn.net/6R8Nc/5/" scrolling="no" frameborder="0" style="width: 0; min-width: 100%!important; border: none;" height="522" width="100%"></iframe>
<p><br></p>
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<p><a href="https://theconversation.com/en-graphique-contribuez-vous-plus-a-letat-que-vous-nen-beneficiez-168038"><em>Lire l’article</em></a></p>
</blockquote><img src="https://counter.theconversation.com/content/175539/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Portrait(s) de France(s), un rendez-vous thématique pour aborder les grands enjeux de la présidentielle 2022. Dans cet épisode, focus sur le creusement des inégalités.Florence Weber, Sociologue , École normale supérieure (ENS) – PSLAnne Lambert, Sociologue, directrice de l’unité de recherche Logement, Inégalités Spatiales et Trajectoires (INED), Institut National d'Études Démographiques (INED)Daniel Behar, Géographe Professeur des Universités, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)David Bourghelle, Maître de conférences en finance, laboratoire LUMEN, Université de LilleFanny Bugeja, MCF en sociologie à l’Université Paris Nanterre, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresFredj Jawadi, Professeur des Universités en finance et en économétrie, Laboratoire LUMEN, Université de LilleJulien Pillot, Enseignant-Chercheur en Economie (Inseec) / Pr. associé (U. Paris Saclay) / Chercheur associé (CNRS), INSEEC Grande ÉcoleNicolas Charles, Sociologue, Université de BordeauxPhilippe Rozin, Maître de conférences en finance, laboratoire LUMEN, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1730202021-12-23T20:07:50Z2021-12-23T20:07:50ZQuel est le territoire de vie idéal des Français ? Quelques réponses aux questions que tout le monde se pose<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/436432/original/file-20211208-23-2wgmwz.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C15%2C5112%2C2858&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Roscoff est une commune française du Léon située sur la côte nord de la Bretagne, dans le département du Finistère.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/50879678@N03/51415870114">Bernard Blanc/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Qu’ils s’agissent d’entrepreneurs nomades, d’indépendants ou de salariés, la crise sanitaire et les confinements successifs redessinent la carte de l’attractivité résidentielle des territoires. Il est question ici d’un enjeu majeur pour les stratégies de marketing territorial. En effet, <a href="http://www.theses.fr/2020AIXM0592">l’attractivité résidentielle</a> correspond à la capacité d’un territoire d’attirer et de retenir des populations. </p>
<p>Les villes petites et moyennes, les territoires plus ruraux et moins urbanisés ont une carte à jouer pour se positionner sur le nouvel échiquier de l’attractivité résidentielle, face à des individus qui plébiscitent le changement de vie et souhaitent <a href="https://theconversation.com/tous-au-vert-scenario-retro-prospectif-dun-exode-urbain-137800">« se mettre au vert »</a>. De plus, le développement du télétravail a permis de renouveler les ressorts de l’attractivité d’un territoire en opérant une disjonction entre qualité de vie et opportunité d’emploi. Désormais, un individu peut travailler sur un territoire économiquement attractif et résider sur un autre territoire, perçu comme attrayant pour sa qualité de vie.</p>
<h2>Une enquête exploratoire</h2>
<p>La quête d’une meilleure qualité de vie semble guider les comportements de cette nouvelle mobilité résidentielle. Ces observations, récemment relayées dans la <a href="https://www.lefigaro.fr/entrepreneur/teletravail-ces-salaries-qui-s-installent-au-vert-20200916">presse nationale</a>, interrogent : quels sont les territoires idéaux selon ces individus ? Sur quels attributs se fondent l’image des territoires qu’ils ont ? Des éléments de réponse peuvent être apportés par les <a href="https://drive.google.com/file/d/1yYC-3aq2FzzLTJjT9Ba_yXE1In2Ma1y6/view?usp=drivesdk">travaux de recherche</a> conduits par la <a href="https://anmt.univ-amu.fr/">Chaire attractivité et nouveau marketing territorial</a> (A&NMT) de l’<a href="https://impgt.univ-amu.fr/fr">Institut de management public et gouvernance territoriale</a> d’Aix-Marseille Université.</p>
<p>Cette enquête exploratoire cherche à connaître d’une part les images mentales des Français relatives aux territoires idéaux de l’attractivité résidentielle. D’autre part, elle cherche à connaître les images spontanées, dirigées et les intentions comportementales associées à certains territoires français et européens (villes, métropoles, départements et régions), ainsi que les fondements de cette réputation.</p>
<p>Un questionnaire auto-administré en ligne a été diffusé auprès d’un échantillon national représentatif (sur des critères d’âge, de sexe, de catégorie socioprofessionnelle, de région d’habitation, de taille d’agglomération) de 1 505 personnes, âgées de 18 ans et plus. L’administration du questionnaire de l’étude a été confiée à l’institut <a href="https://csa.eu/">Consumer Science Analytics</a> (CSA) pour le recueil des données auprès d’un échantillon représentatif de la population française.</p>
<h2>Où souhaitent vivre les Français ?</h2>
<p>À la question, « idéalement, dans quel territoire souhaiteriez-vous vivre ? », il est intéressant de noter que les Français sont en grande partie attirés par des lieux de vie de taille modeste : 78 % sont attirés par des territoires de taille inférieure aux grandes villes. Plus précisément, 26 % aspirent à vivre dans un village, 23 % dans une petite ville et 29 % dans une ville moyenne.</p>
<p>On remarque donc que la répartition est plutôt équilibrée et qu’une taille de territoire ne se détache pas clairement même si le duo petite ville/ville moyenne représente plus de la moitié des réponses.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/438051/original/file-20211216-23-y5rg4q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/438051/original/file-20211216-23-y5rg4q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/438051/original/file-20211216-23-y5rg4q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/438051/original/file-20211216-23-y5rg4q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/438051/original/file-20211216-23-y5rg4q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/438051/original/file-20211216-23-y5rg4q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/438051/original/file-20211216-23-y5rg4q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un village du Lubéron. 78 % des Français sont attirés par des territoires de taille inférieure aux grandes villes.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pxhere.com/fr/photo/549004">Pxhere</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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</figure>
<p>On observe une inertie pour les habitants des territoires de moins de 20 000 habitants qui souhaitent majoritairement rester sur un territoire de même taille.</p>
<p>On voit ensuite que 44 % des habitants des villes moyennes et 64 % des habitants des villes de plus de 100 000 habitants perçoivent les villes de taille inférieure comme leurs lieux de vie idéaux.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/436324/original/file-20211208-23-1hth2tb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/436324/original/file-20211208-23-1hth2tb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=265&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/436324/original/file-20211208-23-1hth2tb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=265&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/436324/original/file-20211208-23-1hth2tb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=265&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/436324/original/file-20211208-23-1hth2tb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=334&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/436324/original/file-20211208-23-1hth2tb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=334&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/436324/original/file-20211208-23-1hth2tb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=334&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Source : extrait de l’étude IMAGETERR20 menée par la Chaire A&NMT.</span>
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<h2>Qui souhaite « encore » vivre dans les grandes villes ?</h2>
<p>Les 22 % des Français qui souhaitent vivre dans une grande ville sont plutôt des CSP+ (42 % vs 24 % dans une petite ville) ou des étudiants (8 % vs 5 % dans une petite ville) et largement jeunes (40 % des répondants ont moins de 35 ans vs 21 % pour une petite ville).</p>
<p>À l’opposé, plus on avance en âge et plus on aspire à vivre dans une petite ville ou un village (58 % et 56 % des plus de 50 ans souhaitent respectivement vivre dans un village ou une petite ville. Les villes moyennes séduisent davantage les actifs et les 35-49 ans.</p>
<p>Ces résultats confirment l’enjeu générationnel de l’attractivité résidentielle des territoires et notamment pour l’attraction de jeunes générations qui plébiscitent davantage les grandes villes.</p>
<p>La question « pourquoi souhaiteriez-vous vivre dans ce type de territoire ? » a permis par ailleurs de recueillir des données qualitatives sur les motivations des Français pour habiter un type de territoire plutôt qu’un autre. Les résultats obtenus permettent de dresser des catégories distinctes de motivation selon la taille du territoire.</p>
<p>Alors que les villages et les petites villes sont appréciés pour leur tranquillité, leur calme et leur convivialité, les villes moyennes sont également appréciées pour les aménités offertes et leur dynamisme, proposant ainsi « les avantages d’une grande ville, sans les inconvénients ». Enfin le choix des grandes villes est motivé par leur dynamisme, leur aménité et leur potentiel (facilité pour trouver un emploi, avoir accès aux soins de santé ou poursuivre des études supérieures). Si les jeunes sont davantage attirés par les grandes villes, un des éléments de motivation de leur attrait peut alors s’expliquer en partie par des enjeux d’insertion professionnelle. À l’inverse, on observe que les actifs de plus de 35 ans se tournent vers des territoires de taille inférieure, préférant le cadre de vie et la tranquillité.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/436325/original/file-20211208-136652-14g55qa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/436325/original/file-20211208-136652-14g55qa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=341&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/436325/original/file-20211208-136652-14g55qa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=341&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/436325/original/file-20211208-136652-14g55qa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=341&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/436325/original/file-20211208-136652-14g55qa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=429&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/436325/original/file-20211208-136652-14g55qa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=429&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/436325/original/file-20211208-136652-14g55qa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=429&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">extrait de l’étude IIMAGETERR20 menée par la Chaire A&NMT.</span>
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<h2>Quels sont les territoires les plus cités par les Français ?</h2>
<p>Il a également été demandé aux Français de citer les noms de territoires (ville, département ou région) où ils souhaiteraient vivre, en offrant la possibilité de donner jusqu’à cinq réponses. Les territoires les plus cités sont Paris et la Bretagne, suivis par Bordeaux, Lyon, Toulouse, Nantes, Nice, la Normandie et Montpellier.</p>
<p>À noter que celles et ceux qui vivent déjà en agglomération parisienne citent très largement Paris, suivi par de grandes métropoles comme Bordeaux, Lyon, Nice et Marseille qui apparaît.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/436326/original/file-20211208-13-jifv2f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/436326/original/file-20211208-13-jifv2f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=279&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/436326/original/file-20211208-13-jifv2f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=279&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/436326/original/file-20211208-13-jifv2f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=279&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/436326/original/file-20211208-13-jifv2f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=350&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/436326/original/file-20211208-13-jifv2f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=350&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/436326/original/file-20211208-13-jifv2f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=350&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Source : extrait de l’étude IMAGETERR20 menée par la Chaire A&NMT.</span>
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<p>L’enquête menée en décembre 2020 a permis d’objectiver certains éléments sur le territoire de vie idéal des Français.</p>
<p>Tout d’abord, il existe de fortes composantes générationnelle et/ou sociale (âge, CSP) pour expliquer les préférences des Français. De même, l’aspiration à la mobilité n’est pas la même selon la taille du territoire dans lequel on habite.</p>
<p>Ensuite, les grandes villes ne semblent pas non plus en déclin d’attractivité. En effet, Paris reste attractive, surtout pour les Franciliens et les villes les plus citées restent de grandes métropoles (Bordeaux, Lyon, Toulouse, Nantes, Nice).</p>
<p>Les petites villes et les villes moyennes ont clairement une opportunité à saisir car elles apparaissent idéales, notamment pour les habitants des grandes villes. Dans ce contexte, des villes comme La Rochelle émergent spontanément de l’étude, ou encore des régions comme la Bretagne et la Normandie qui sont bien dotées sur ces tailles de territoires.</p>
<p>Il faudra néanmoins attendre les chiffres réels de cette mobilité résidentielle afin de les confronter aux tendances issues de cette étude relative au lieu de vie idéal.</p>
<p>De plus, rappelons que l’attractivité des territoires résulte de stratégies de marketing territorial au long cours. Certaines stratégies visent ainsi à construire une <a href="https://www.erudit.org/en/journals/mi/2020-v24-mi06051/1077439ar/">réputation positive reconnue comme un levier d’attractivité territoriale</a>. D’autres se concentrent plus spécifiquement sur l’offre de services et l’accompagnement des futurs habitants. Charge aux managers territoriaux et aux élus de se saisir de ces leviers en travaillant l’attractivité résidentielle du territoire selon les grands principes du <a href="https://anmt.univ-amu.fr/sites/anmt.univ-amu.fr/files/public/le_manifeste_compressed.pdf">Manifeste de l’attractivité et du marketing territorial</a>.</p>
<hr>
<p><em>La Chaire universitaire de territoires financée par 35 territoires français, mène tous les 3 ans l’enquête IMAGETERR de perception des territoires auprès du grand public. Les résultats de la dernière étude, réalisée en décembre 2020, permettent de dresser le profil de ces individus en quête d’une meilleure qualité de vie et de mieux comprendre les contours du territoire de vie idéal pour les Français</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173020/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe ALAUX a reçu des financements des fondateurs et partenaires de la Chaire Attractivité et nouveau Marketing territorial, IMPGT, Aix-Marseille Université</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Laura Carmouze a reçu des financements des fondateurs et partenaires de la Chaire A&NMT.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sarah Serval a reçu des financements des fondateurs et partenaires de la Chaire A&NMT. </span></em></p>Les petites villes et les villes moyennes apparaissent idéales pour un grand nombre de Français.Christophe Alaux, Professeur des Universités, Institut de management Public et Gouvernance Territoriale, Chaire Attractivité et Nouveau Marketing Territorial, Aix Marseille Université, Aix-Marseille Université (AMU)Laura Carmouze, Maître de Conférences en Sciences de Gestion et du Management, Institut de management Public et Gouvernance Territoriale, Chaire Attractivité et Nouveau Marketing Territorial, Aix-Marseille Université (AMU)Sarah Serval, Directrice adjointe de la Chaire A&NMT (Attractivité et Nouveau Marketing Territorial), Maître de Conférences en Sciences de Gestion, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1702262021-10-28T18:58:32Z2021-10-28T18:58:32ZAu Bénin, le développement urbain se nourrit d’expulsions<p>Construite sur une bande de terre de quelques kilomètres de large s’étirant entre la lagune et la mer, Cotonou, capitale économique du Bénin, est depuis longtemps un <a href="https://drive.google.com/file/d/19y4EHAwGnfyCM4oELjOVrRL5LhG8-j18/view">site d’implantation de pêcheurs</a> issus des populations côtières de la région. Aujourd’hui devenues le substrat de certains quartiers de la ville, ces communautés ont vu au cours des dernières décennies leurs lieux de vie progressivement gagnés par l’avancée du front urbain.</p>
<p>Dans les dernières années, les plans de réaménagement du littoral portés par le président Patrice Talon (en poste depuis 2016) ont globalement fait peu de cas des gens de peu ayant construit là leur existence. Arguant d’une nécessaire planification urbaine pour déloger parfois des quartiers entiers, cette politique du mépris menée au nom du développement fragilise en fait des fractions parmi les plus vulnérables de la population urbaine.</p>
<h2>Devenir réfugié dans son propre pays ?</h2>
<p>Peu après la mi-août 2021, assis au comptoir de la cafétéria « Carrefour des jeunes », à quelques mètres de la clôture de l’aéroport, je discutais avec quelques jeunes et moins jeunes hommes assis là d’un <a href="http://www.cadredevie.bj/informations/communiques-avis/item/301-communique-conjoint-mcvdd-mdgl-relatif-a-la-liberation-du-domaine-maritime-de-fiyegnon-1">communiqué ministériel</a> soudainement sorti mi-juillet et donnant un délai d’un peu plus d’un mois et demi aux habitants du quartier, connu comme « Fiyegnon 1 », pour plier bagage.</p>
<p>Entre colère et résignation, le petit groupe s’interrogeait sur la signification de leur citoyenneté face à une telle absence de concertation, tout en rappelant l’ancienneté du quartier : certaines familles étaient établies là depuis un demi-siècle, bien avant la construction des villas qui leur faisaient face désormais, à une époque où il n’y avait aux alentours que cocoteraies et parcelles de maraîchers… Comptant 623 ménages recensés et environ 3 000 habitants, le quartier était en 2021 densément peuplé, construit aussi bien « en dur » qu’en « matériaux précaires », selon la condition économique des ménages.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427218/original/file-20211019-24-617de4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427218/original/file-20211019-24-617de4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427218/original/file-20211019-24-617de4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427218/original/file-20211019-24-617de4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427218/original/file-20211019-24-617de4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427218/original/file-20211019-24-617de4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427218/original/file-20211019-24-617de4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La cafétéria « Carrefour des jeunes » à quelques mètres de la clôture de l’aéroport en août 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Noret</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>« Nous ne sommes quand même pas des coqs et des poules », suggérait Marius, étudiant en droit et tenancier de la cafétéria, exprimant le sentiment général des habitants d’être traités comme des animaux dont on pourrait disposer à sa guise…</p>
<p>« Dans mon propre pays, je vais devenir un réfugié ? C’est-à-dire, il n’y a pas la guerre ici, il n’y a pas la famine… mais quand on va déguerpir les gens, ils vont faire quoi ? Mettre les matelas sur la tête et partir et commencer à chercher un peu partout là où dormir ? Là tu deviens un réfugié, dans ton propre pays… », renchérissait un autre… « Quand on pense à ça, ça nous tape sur les nerfs »… Le petit groupe oscillait entre sentiments d’impuissance et de révolte.</p>
<h2>Très brève histoire d’un quartier de Cotonou</h2>
<p>En fait, ce qui était présenté dans le communiqué ministériel comme un quartier « illégal » avait été formé à l’origine par une communauté de pêcheurs. Ceux-ci avaient été installés en ces lieux au tournant de l’indépendance de 1960, après avoir été délogés du site qui devait abriter le palais présidentiel.</p>
<p>Ces pêcheurs (et travailleurs du port, situé non loin) et leurs ménages avaient alors rejoint là, en bout de piste de l’aéroport, et en concertation avec les autorités de l’époque, quelques familles déjà établies sur le site dans les décennies précédentes. L’ancienneté de leur occupation des lieux est notamment attestée par l’installation à cet endroit, en 1958, de divinités protectrices, des <em>vodoun</em> auprès desquels on pouvait venir chercher protection et solution aux problèmes du quotidien.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427219/original/file-20211019-20-1glzhom.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427219/original/file-20211019-20-1glzhom.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=275&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427219/original/file-20211019-20-1glzhom.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=275&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427219/original/file-20211019-20-1glzhom.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=275&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427219/original/file-20211019-20-1glzhom.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=345&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427219/original/file-20211019-20-1glzhom.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=345&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427219/original/file-20211019-20-1glzhom.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=345&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Entourée d’un trait rouge, la zone de Fiyegnon 1, aujourd’hui détruite, soit environ huit hectares.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Capture d’écran Google Maps</span></span>
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</figure>
<p>La communauté relogée là s’y était trouvée suffisamment bien pour désigner leur nouveau quartier du nom de « Fiyegnon », c’est-à-dire « Ici est bon ». En 2021, le quartier continuait d’ailleurs d’être habité par de nombreux pêcheurs dépendant étroitement de la proximité avec la mer pour leurs moyens de subsistance, même si on y trouvait également d’autres profils de travailleurs et travailleuses de l’économie dite « informelle ».</p>
<p>Avec l’urbanisation progressive de la zone, le quartier a connu différentes opérations de viabilisation et de recasement depuis le début des années 2000, faisant en fait bel et bien partie à l’époque des plans d’aménagement urbain des autorités nationales et communales : le quartier bénéficie de raccordements à l’électricité et à l’eau, les habitants ont obtenu en 2004 et 2005 des « fiches de recasement » attestant des limites de leurs parcelles respectives, des voies rectilignes ont été tracées il y a une dizaine d’années et les contours des terrains revus en conséquence… Autant d’actes d’aménagement urbain et de reconnaissance étatique de la légitimité de l’occupation du lieu par ses habitants.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427221/original/file-20211019-26-1ar3qu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427221/original/file-20211019-26-1ar3qu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427221/original/file-20211019-26-1ar3qu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427221/original/file-20211019-26-1ar3qu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427221/original/file-20211019-26-1ar3qu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427221/original/file-20211019-26-1ar3qu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427221/original/file-20211019-26-1ar3qu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">À l’avant-plan, le quartier de « Fiyegnon 1 », visé par l’opération de déguerpissement.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Noret</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>La zone a, il est vrai, été déclarée d’utilité publique en 2006 dans le cadre de la « Route des Pêches », projet d’aménagement au long cours de cette portion du littoral.</p>
<p>Mais les différentes moutures du projet prévoyaient, jusqu’aux rapports d’études d’il y a quelques années, l’intégration du quartier « Fiyegnon 1 » au projet, le tracé de la nouvelle route côtière ayant même été modifié à cette fin. Une expropriation ultérieure restait bien entendu possible, mais elle devrait alors être réalisée « contre juste et préalable indemnisation », selon la formule consacrée dans les textes juridiques béninois. Or, le communiqué ministériel de la mi-juillet évoquait la situation en de tout autres termes : il y était question d’occupation « illégale » des lieux, et de leur « libération » « sans délai »…</p>
<p>Contrairement aux déclarations médiatiques postérieures des autorités, aucun contact préalable n’avait été pris avec le chef du quartier, ni a fortiori avec les habitants. Aucune proposition de relogement ni d’indemnisation n’avait été formulée. Dans les semaines suivantes, les demandes d’entrevues du chef de quartier et de représentants des habitants auprès des autorités politiques et administratives concernées, de la commune de Cotonou à la présidence de la République, rencontrèrent un succès pour le moins mitigé. Aucune réponse ne vint de la présidence, de la mairie, ni des ministères concernés. Les seuls officiels qui acceptèrent de recevoir la délégation n’avaient en fait pas de véritable prise sur le dossier.</p>
<h2>Un traitement autoritaire des pauvres</h2>
<p>À Cotonou, l’arrivée au pouvoir du président Patrice Talon en 2016 a correspondu avec un élan nouveau donné au développement urbain. Sa présidence, aujourd’hui largement considérée comme marquée par un <a href="https://www.econstor.eu/bitstream/10419/205259/1/KOHNERT%26PREUSS2019.Benin%27s%20stealthy%20democracide.WP.10.10.19.pdf">virage autoritaire assumé</a>, a en effet correspondu à la mise en œuvre de <a href="https://www.jeuneafrique.com/mag/1062011/economie/benin-cotonou-petite-metropole-deviendra-grande/">chantiers urbains emblématiques</a>, engagés au pas de charge.</p>
<p>L’asphaltage des voies a été accéléré, les projets de redéploiement des quartiers centraux se sont multipliés, et l’aménagement du littoral a été repensé, avec l’idée de faire de Cotonou la « vitrine du Bénin ». Comme dans d’autres capitales ouest-africaines, <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/09/14/a-abidjan-des-habitants-deguerpis-par-la-construction-du-metro_6094554_3212.html">Abidjan</a> ou <a href="https://www.theguardian.com/world/2021/mar/12/class-divide-mass-demolitions-drive-poor-from-valuable-land-in-lagos">Lagos</a> notamment, ces projets ont abouti depuis 2017 à une série de « déguerpissements », visant à la fois des empiètements de constructions privées sur l’espace public, mais aussi des quartiers entiers, parfois parmi les plus vieux de la ville, ou construits dans des <a href="https://www.jeuneafrique.com/890319/societe/benin-au-marche-dantokpa-a-cotonou-tristesse-et-colere-apres-le-deguerpissement/">zones visées par des projets de développement urbain</a>.</p>
<p>Ce n’est que dans certains des projets les plus récents, menés dans les tout derniers mois, que le gouvernement a fini par prévoir des <a href="https://lanouvelletribune.info/2021/09/benin-ce-que-lexecutif-propose-aux-deguerpis-de-xwlacodji-et-de-la-route-des-peches/">dédommagements réels</a>, même si loin d’être alignés sur le prix du foncier à Cotonou.</p>
<p>Dans les dernières années, qu’il s’agisse de casser l’extension d’une boutique mordant sur le trottoir, de détruire un petit commerce occupant sans autorisation ce même trottoir (<a href="https://www.jeuneafrique.com/400856/societe/long-format-benin-a-cotonou-jungle-deguerpis/">tout en payant malgré tout simultanément une redevance à la mairie</a> lors du passage de ses agents collecteurs…), ou de déloger un quartier entier sans que le relogement des habitants ne soit véritablement planifié, ces entreprises ont systématiquement été promues par le gouvernement comme relevant de la « libération des espaces publics »… La formule prêterait à sourire si elle n’était pas en fait le masque d’une violence d’État s’exerçant sur les classes populaires et l’euphémisme vertigineux d’une politique urbaine du mépris.</p>
<p>La croissance urbaine représente bien entendu aujourd’hui pour bon nombre d’États d’Afrique subsaharienne un défi majeur. Il n’est évidemment pas question ici de contester à l’État béninois ses légitimes ambitions de développement urbain. Pour autant, le « développement » ne peut pas non plus devenir l’alibi d’une politique hostile aux citadins les plus pauvres, qui leur dénie leur droit à la ville. Ou, pour le dire avec les mots d’un désormais ex-habitant de Fiyegnon recontacté mi-octobre :</p>
<blockquote>
<p>« Développement, oui, infrastructures, oui, mais pas au prix de la déshumanisation… »</p>
</blockquote>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427222/original/file-20211019-16-t6ae9j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427222/original/file-20211019-16-t6ae9j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427222/original/file-20211019-16-t6ae9j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427222/original/file-20211019-16-t6ae9j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427222/original/file-20211019-16-t6ae9j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427222/original/file-20211019-16-t6ae9j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427222/original/file-20211019-16-t6ae9j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Fiyegnon dans les jours suivant la destruction. Au loin, des habitants fouillent les décombres. (photo prise par un habitant).</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Le 13 septembre au matin, la zone déclarée « illégale » commença à être détruite, avec l’appui d’un important déploiement policier. Trois personnes décédèrent d’un problème cardiaque pendant la démolition, une situation analogue à celle qui s’était déjà produite <a href="https://www.academia.edu/37197597/GOUVERNEMENT_DES_ESPACES_PUBLICS_EN_BORDURE_D_EAU_AU_BENIN_UNE_ANALYSE_ORIENTEE_DANS_LA_PERSPECTIVE_DE_L_INEGALITE_ENVIRONNEMENTALE_A_COTONOU_pdf?auto=download">lors de la destruction du quartier Enagnon</a>, sur une autre portion du littoral cotonois, en 2017.</p>
<p>Dans les jours suivants, en dépit de fortes pluies, beaucoup d’habitants logeaient encore parmi les décombres, ne sachant où aller. Début octobre, avant l’évacuation complète des gravats, quelques dizaines de personnes étaient encore dans cette situation, revenant pour certaines d’entre elles seulement à la nuit tombée, afin de ne pas être vues. D’autres avaient trouvé à s’abriter temporairement dans les cours d’autres maisons du voisinage, d’autres encore étaient hébergées de façon provisoire par des parents ou des amis. Les mieux lotis avaient réussi à louer dans l’urgence un nouveau logement.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/427223/original/file-20211019-28-150thrz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427223/original/file-20211019-28-150thrz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427223/original/file-20211019-28-150thrz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427223/original/file-20211019-28-150thrz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427223/original/file-20211019-28-150thrz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427223/original/file-20211019-28-150thrz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427223/original/file-20211019-28-150thrz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427223/original/file-20211019-28-150thrz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le site de la cafétéria « Carrefour des jeunes » aujourd’hui. Le sol est détrempé par la saison des pluies qui commence. (photo prise par un habitant). Cliquer pour zoomer.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>« Je n’arrive pas à oublier », « j’ai du mal à dormir la nuit », « bien sûr que je suis en colère », « les gens souffrent énormément »… Les habitants avec lesquels je continue à correspondre sont manifestement éprouvés. Les forces de l’ordre surveillent toujours les lieux pour s’assurer qu’aucune construction temporaire ne réémerge, qu’aucune forme de petit commerce ne reprenne. Les habitants n’ont, à ce stade, été informés d’aucune possibilité de dédommagement.</p>
<p>Voulant croire que « le père ne saurait abandonner ses enfants », les représentants du quartier se sont désormais engagés dans une tentative d’interpellation médiatique du président, « Père de la Nation », qu’ils estiment mal informé et induit en erreur. Le cas de « Fiyegnon 1 » est pourtant loin d’être unique depuis l’arrivée au pouvoir de Patrice Talon, dont les projets de développement urbain semblent avant tout tournés vers le <a href="https://www.jeuneafrique.com/mag/1061964/politique/benin-jose-tonato-cotonou-doit-etre-une-etape-incontournable-sur-le-corridor-abidjan-lagos/">renforcement de l’attractivité internationale de la ville</a>.</p>
<p>En fait, la politique urbaine engagée depuis 2016 donne à voir une déclinaison africaine éloquente des contours tragiques que peut prendre une politique néolibérale de la ville, <a href="https://libcom.org/files/Lo%C3%AFcWacquant--PunishingthePoor.pdf">au sens que lui donne Loïc Wacquant</a> : complaisante à l’égard des riches, dure avec les pauvres. Au final, il est à craindre que le développement urbain de Cotonou ne converge avec un scénario, <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0956247813513705">déjà bien connu dans les grandes villes africaines</a>, d’approfondissement, au travers des politiques urbaines, des inégalités sociales d’accès à la ville. Les désormais ex-habitants de « Fiyegnon 1 » n’ont pas fini de s’interroger sur le sens et les contours de leur citoyenneté…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170226/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joël Noret a reçu des financements du Fonds de la Recherche Scientifique (FRS-FNRS, Belgique).</span></em></p>À Cotonou, la capitale économique du Bénin, un quartier entier vient d’être rasé par les autorités, sans compensation pour les habitants. Illustration d’un phénomène fréquent dans la région.Joël Noret, Professeur d'anthropologie, Université Libre de Bruxelles (ULB)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1646392021-09-13T17:53:55Z2021-09-13T17:53:55ZÉlectroménager : comment encourager le consommateur à l’efficacité énergétique<p>Premier poste de dépense d’énergie, le logement représente 52 % du budget énergétique moyen par foyer, selon des <a href="https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/infographie-economiser-eau-energie.pdf">données de l’Ademe</a> rendues publiques en décembre 2020. L’usage quotidien de l’électroménager, notamment, engendre des consommations significatives, en particulier lorsque les équipements sont peu performants ou inadaptés aux besoins réels des ménages.</p>
<p>Les consommateurs en sont pourtant rarement conscients et peinent à hiérarchiser les sources de surconsommation. Ils n’ignorent généralement pas qu’un réfrigérateur exige plus d’électricité à l’année qu’un lave-linge, mais ils ne perçoivent pas ce qui caractérise l’ensemble de leur utilisation domestique, tous appareils confondus.</p>
<p>Ceci conduit à des surconsommations et à des pertes évitables, surtout lorsque l’on sait, à travers <a href="https://www.ecologic-france.com/professionnels/collectivites-locales-et-bailleurs/les-appareils-electriques-dans-les-foyers-francais-etude.html">l’étude menée par Ipsos</a> pour la filière DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques), qu’un foyer accumule en moyenne une centaine d’appareils électriques et électroniques.</p>
<p>La valeur énergétique consommée ne se reflète alors qu’à travers la facture d’énergie du foyer qui représenterait <a href="https://selectra.info/energie/guides/conso/appareils-electriques">jusqu’à 10 % du budget global des ménages</a> (ce dernier pouvant inclure les dépenses alimentaires, de transport, de loisir, etc.).</p>
<p>Améliorer l’efficacité énergétique chez soi et mieux choisir ses équipements en fonction de ses besoins permet non seulement de réduire sa facture énergétique, mais aussi de restreindre son impact écologique tout en encourageant les fabricants d’appareils à s’engager dans la transition.</p>
<p>Encore faut-il sauter le pas…</p>
<h2>Quand le changement est porté par les consommateurs</h2>
<p>La tendance à la hausse de l’équipement des consommateurs en électroménager est notamment due à la multiplication d’appareils à durée de vie limitée voués au remplacement. Or celle-ci peut difficilement être vue comme durable compte tenu des urgences climatiques et écologiques actuelles.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1205399889221496832"}"></div></p>
<p>Dans cette optique, l’implication des ménages dans la transition écologique peut représenter l’une des clés du changement. En effet, ils peuvent d’abord agir en augmentant la durée de vie de leurs appareils <a href="https://www.gifam.fr/wp-content/uploads/2019/04/Guide-ecogestes.pdf">avec des écogestes</a> souvent simples, mais également avec leur pouvoir d’achat en optant pour les <a href="https://www.guidetopten.fr/">modèles d’électroménager</a> qui permettent de réduire significativement la consommation énergétique. Les marges de progrès sont encore élevées, notamment en France.</p>
<h2>Les Français freinés par le prix</h2>
<p>Diverses études, synthétisées dans le cadre du projet <a href="https://gbrisepierre.fr/wp-content/uploads/2020/07/%C3%89tat-de-lart-Bibliographie-MECAPERF-diffusable.pdf">Mecaperf</a> montrent que les Français achètent encore peu d’appareils de la meilleure classe énergétique malgré leur bonne volonté affichée. La demande reste faible et dépasse à peine les 10 % en France, contre plus de 20 % dans des pays voisins comme l’Allemagne, l’Italie ou l’Autriche.</p>
<p>La principale raison de cet écart serait le prix, jugé trop haut en comparaison à ces modèles moins performants et moins écologiques… Or, ce prix plus élevé peut en réalité souvent être amorti sur la durée de vie du produit, grâce aux économies sur la facture énergétique si les appareils sont bien dimensionnés et optimisés, et leurs usagers bien informés.</p>
<h2>Le manque d’information, un obstacle à l’achat</h2>
<p>L’une des clés de voûte de l’efficacité énergétique dans les foyers est l’information transmise aux consommateurs. Il a été montré que les personnes qui ont le moins de connaissances en la matière sont les moins disposées à aller vers les appareils performants. Augmenter le niveau de savoir des usagers peut les aider à faire des choix plus informés et judicieux.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1366918844095336448"}"></div></p>
<p>La <a href="https://ec.europa.eu/info/energy-climate-change-environment/standards-tools-and-labels/products-labelling-rules-and-requirements/energy-label-and-ecodesign/about_fr">mise en place de l’étiquette énergétique</a> par l’Union européenne depuis plus de 25 ans a été, dans ce sens, un vrai soutien aux consommateurs pour les guider dans leurs choix. Elle leur permet de comparer les capacités des modèles en affichant des informations utiles et facilement identifiables sur une échelle de A (meilleur) à G (moins bon).</p>
<p>Toutefois, le manque d’actualisation des échelles de performance a, au fil des années, questionné la lisibilité des classifications (avec des étiquettes pour certains produits où tous les modèles sur le marché obtenaient des classes A+, A++ ou A+++).</p>
<h2>Nouvelle étiquette, aide ou source de confusions ?</h2>
<p>Pour pallier cela et remettre à niveau les informations aux consommateurs, une <a href="https://fr.label2020.eu/la-nouvelle-etiquette-energie/objectif-et-interets/">nouvelle étiquette énergétique</a> est entrée en vigueur en mars 2021 avec comme principales évolutions : le retour à une échelle de performance énergétique plus stricte de A à G, l’absence de modèles dans la classe A (et parfois B) au moment du lancement et l’apparition d’un QR code permettant aux consommateurs d’accéder à des informations complémentaires.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1336343593196400644"}"></div></p>
<p>Les consommateurs peuvent donc s’appuyer sur ces nouvelles informations qui doivent obligatoirement apparaître sur les étiquettes des réfrigérateurs, congélateurs, lave-linge, machines lavantes-séchantes, lave-vaisselle, caves à vin et écrans.</p>
<p>Ces récentes modifications peuvent toutefois créer une confusion temporaire chez les consommateurs habitués aux anciennes classifications et qui ne connaissent pas nécessairement bien les autres critères techniques à prendre en considération pour s’assurer d’un achat réellement performant.</p>
<p><a href="https://www.ecoconso.be/fr/content/une-nouvelle-etiquette-energie-pour-les-electromenagers">Pour l’association ecoconso</a>, les consommateurs devront s’accoutumer à ce qu’un appareil très performant soit classé au départ B, C ou même D sur les nouvelles étiquettes.</p>
<h2>Une partie de la solution dans la distribution</h2>
<p><a href="https://gbrisepierre.fr/wp-content/uploads/2020/07/%C3%89tat-de-lart-Bibliographie-MECAPERF-diffusable.pdf">Selon la synthèse effectuée dans le cadre du projet Mecaperf</a>, 55 % des consommateurs achètent leurs appareils ménagers dans la grande distribution, ce qui place les distributeurs en première ligne.</p>
<p>Il leur incombe de jouer un rôle d’accompagnateur vers la transition énergétique au sein des foyers, en aidant par exemple à lever la confusion des acheteurs pour qu’ils s’approprient l’étiquette énergétique et en les orientant vers les appareils les plus performants.</p>
<p>Ils peuvent se reposer sur les différents points de contact entre consommateurs et distributeurs (affichage, vendeur, chatbot, etc.), mais pour bien informer les premiers, il est nécessaire qu’ils soient eux-mêmes impliqués et organisés dans des stratégies responsables en faveur de la transition énergétique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/164639/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cette recherche bénéficie d’un financement Ademe dans le cadre du projet « Mécanique de la décision d’équipement des consommateurs en électroménager performant » (Mecaperf).</span></em></p>L’électroménager occupe une place importante dans la consommation énergétique du logement. Plusieurs obstacles restent à lever pour encourager les Français à choisir des appareils plus performants.Nil Özçaglar-Toulouse, Professeure des universités, LUMEN (ULR 4999), Université de LilleIlana Bouhafs, Chercheuse, Université de LilleMarie Beck, Maître de conférences - LUMEN (ULR 4999), Université de LilleYasmine Allouat, Doctorante en sciences de gestion - Marketing, LUMEN (ULR 4999), Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.