tag:theconversation.com,2011:/africa/topics/maladies-rares-33282/articlesmaladies rares – The Conversation2023-12-07T17:28:44Ztag:theconversation.com,2011:article/2189682023-12-07T17:28:44Z2023-12-07T17:28:44ZRevivre après le traitement d’une maladie génétique rare : l’exemple de la drépanocytose<p>Cette année, le Téléthon se tiendra les 8 et 9 décembre. Cet évènement consacré aux <a href="https://theconversation.com/fr/topics/maladies-rares-33282">maladies rares</a> est l’occasion de lever le voile sur la drépanocytose qui est la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/maladies-genetiques-35669">maladie génétique</a> <a href="https://sante.gouv.fr/soins-et-maladies/prises-en-charge-specialisees/maladies-rares/article/les-maladies-rares">rare</a> la plus fréquente en France, avec environ <a href="https://www.larevuedupraticien.fr/article/epidemiologie-de-la-drepanocytose-en-france-et-dans-le-monde">30 000 personnes</a> atteintes.</p>
<p>Cette pathologie reste pourtant insuffisamment connue de certains professionnels de santé et, plus généralement, de la société. La drépanocytose est également très répandue dans le monde, notamment en <a href="https://theconversation.com/la-drepanocytose-sevit-en-afrique-de-louest-une-nouvelle-approche-est-necessaire-pour-la-combattre-211168">Afrique</a>, dans les Antilles et au Moyen-Orient.</p>
<h2>Anémie, crises douloureuses et impact majeur sur la qualité de vie</h2>
<p>La <a href="https://www.inserm.fr/dossier/drepanocytose/">drépanocytose</a> est due à une anomalie de l’hémoglobine, principal composant des globules rouges, qui sont des cellules du sang permettant le transport de l’oxygène aux organes.</p>
<p>Cette anomalie cause une déformation des globules rouges qui prennent une forme de faucille (d’où son autre nom d’anémie falciforme). Cela entraîne leur destruction (anémie) et des occlusions des petits vaisseaux sanguins responsables de crises très douloureuses appelées « crises vaso-occlusives ».</p>
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<img alt="Photo de globules rouges. Certains présentent une forme normale, d’autres une forme de faucille caractéristique de la drépanocytose." src="https://images.theconversation.com/files/563690/original/file-20231205-21-h7a71c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/563690/original/file-20231205-21-h7a71c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=456&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/563690/original/file-20231205-21-h7a71c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=456&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/563690/original/file-20231205-21-h7a71c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=456&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/563690/original/file-20231205-21-h7a71c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=573&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/563690/original/file-20231205-21-h7a71c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=573&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/563690/original/file-20231205-21-h7a71c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=573&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Photo de globules rouges. Certains présentent une forme normale, d’autres une forme de faucille caractéristique de la drépanocytose.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nihgov/24170591501/in/album-72157656657569008/">National Center for Advancing Translational Sciences (NCATS), National Institutes of Health</a></span>
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<p>De plus, la drépanocytose peut atteindre les vaisseaux de tous les organes conduisant à des lésions graves et multiples (atteintes des artères cérébrales, atteintes pulmonaires, cardiaques, rénales, hépatiques, etc.). Cette maladie est responsable de décès précoces et a un impact majeur sur la qualité de vie des patients qui est à ce jour mal évalué.</p>
<h2>Se construire entre les crises</h2>
<p>Alors que, dans d’autres maladies génétiques, les symptômes peuvent s’exprimer de manière continue, les personnes atteintes de drépanocytose se construisent dans l’alternance entre des périodes de « vie normale » et des épisodes de crises, dont ils qualifient la douleur d’« insoutenable », « invivable », « traumatique ».</p>
<p>En crise ils se sentent malades, le reste du temps ils se savent malades, anxieux de l’advenue de ces crises menaçantes et soumis aux contraintes à respecter pour les éviter (s’hydrater, ne pas s’exposer au froid, aux émotions fortes, ne pas faire trop de sport, etc.).</p>
<p>La drépanocytose peut ainsi être qualifiée de « maladie chronique de l’aigu » du fait des ruptures répétées et imprévisibles que ces crises occasionnent. Celles-ci paralysent physiquement, mais hypothèquent aussi tout projet de vie, même minime ou à court terme. De plus, le fait que ce soit une maladie mortelle engage les patients dans une lutte pour la survie.</p>
<p>Finalement, ces crises impactent le <a href="https://www.researchgate.net/publication/352544405_Tap_P_Tarquinio_C_Sordes-Ader_F_2002_Sante_maladie_et_Identite_in_GN_Fisher_Traite_de_Psychologie_de_la_Sante_pp_135-162Paris_Dunod">sentiment de continuité de l’existence</a> ou la <a href="http://philosophicalenquiries.fr/numero3Hamou.pdf">continuité de la conscience</a> (la perception d’être le même dans l’espace et dans le temps), socle de l’identité personnelle. Pour faire face psychologiquement aux douleurs extrêmes qu’elles génèrent, de nombreux patients mettent en place des mécanismes qui consistent à se déconnecter de leurs corps et de leurs émotions.</p>
<h2>La greffe de moelle, seul traitement curatif</h2>
<p>Les principaux traitements (médicaments par voie orale et échanges transfusionnels consistant à retirer du sang du patient et à le transfuser avec des globules rouges sains) permettent d’atténuer la maladie, sans toutefois la faire disparaître. De plus, chez certains patients, ces traitements sont inefficaces.</p>
<p>À l’heure actuelle, le seul traitement curatif est la <a href="https://www.sfgm-tc.com/harmonisation-des-pratiques/52-indications/3903-2020-allogreffe-de-cellules-souches-hematopoietiques-dans-la-drepanocytose-de-l-enfant-et-de-l-adulte-indications-et-modalites">greffe de moelle osseuse</a>. Présente à l’intérieur des os, celle-ci fabrique toutes les cellules du sang. La greffe permet de remplacer la moelle du patient qui fabrique des globules rouges malades, par celle d’un donneur qui fabrique des globules rouges sains.</p>
<p>Ce traitement permet d’améliorer les symptômes et de guérir la maladie de la majorité des patients. Cependant la greffe peut être responsable de complications qui sont plus fréquentes lorsqu’elle est réalisée chez les adultes. Ainsi, 75 % des greffes de moelle (sur environ 700) pratiquées à ce jour en France chez des patients atteints de drépanocytose, l’ont été chez des enfants de moins de 15 ans, selon la Société francophone de greffe de moelle et de thérapie cellulaire.</p>
<h2>Effets psychosociaux inattendus de la « guérison »</h2>
<p>L’évolution des techniques de greffe permet aujourd’hui de greffer des patients adultes avec une <a href="https://www.chu-nantes.fr/allogreffe-la-preparation-ou-le-conditionnement-du-patient-en-attente-de-greffe">moindre toxicité</a> et d’envisager des greffes chez des patients n’ayant pas de donneur parfaitement <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0007455120303179">compatible</a>. Ainsi, des patients adultes, ayant vécu des années avec cette maladie très lourde et considérée comme incurable, se retrouvent « guéris ».</p>
<p>Il a été constaté que cette guérison somatique (c’est-à-dire avec une diminution voire une disparition des symptômes) s’accompagnait chez certains patients d’effets inattendus sur le plan psychosocial et de difficultés à se réapproprier leur vie.</p>
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<p>Cet apparent paradoxe, entre la promesse de guérison offerte par la médecine et certains vécus relatés par les patients, est un des objets de l’étude <a href="https://u-paris.fr/la-personne-en-medecine/enjeux-psychosociaux-des-nouveaux-traitements-pour-la-mucoviscidose-et-la-drepanocytose/">« Revivre »</a> initiée par des chercheurs en sciences humaines et sociales et des équipes médicales, à partir des récits de vie de malades.</p>
<p>La greffe de moelle osseuse est ainsi l’occasion de penser ce que signifie vivre ou revivre après avoir fait l’expérience d’une maladie génétique dont les symptômes altèrent lourdement l’espérance et la qualité de vie, parfois dès la naissance.</p>
<h2>Revivre après la greffe</h2>
<p>La greffe de moelle osseuse n’est proposée, le plus souvent, qu’en dernier recours, après un épisode qui peut avoir fait frôler la mort. C’est un choix contraint, « quand on n’a plus rien à perdre » comme le disent certains patients. En dépit des informations données par les médecins et d’autres patients greffés, elle représente un « saut dans le vide ». Elle constitue à la fois une épreuve et une renaissance.</p>
<p>La vie après la greffe est décrite par les patients comme la possibilité de déployer et d’éprouver une « liberté de mouvement » ou une puissance d’agir toutes nouvelles. Revivre, c’est faire ce dont ils étaient incapables, s’autoriser à ressentir des émotions et faire des projets jusqu’ici interdits, gagner en confiance en soi, se sentir « comme les autres ».</p>
<p>Cependant, ces possibilités sont déstabilisantes parce que totalement inédites et survenant dans une temporalité accélérée qui ne permet pas de les intégrer psychologiquement ou émotionnellement. Elles bousculent les défenses psychiques mises en place pour faire face à la maladie, provoquant parfois des états de sidération. S’ouvre une temporalité nouvelle : un avenir définitivement libéré de l’imprévisibilité des crises, mais dans lequel il n’est pas évident de se projeter.</p>
<h2>Un état de déséquilibre au moins transitoire</h2>
<p>La greffe conduit ainsi à un état de déséquilibre au moins transitoire. Elle n’efface pas le passé ni les expériences corporelles, relationnelles, sociales liées à la maladie. Du fait des séquelles physiques, de la prise de médicaments et du suivi médical, la maladie demeure sous d’autres formes (stérilité, ostéonécrose – qui correspond à la destruction progressive de certains os, l’une des <a href="https://sosglobi.fr/en/drepanocytose/complications/">complications</a> de la maladie –, addiction aux antidouleurs, etc.). Parfois, des douleurs (appelées « douleurs fantômes ») ressurgissent, faisant craindre aux patients un retour de la maladie et manifestant une anxiété toujours active.</p>
<p>Certains patients s’aperçoivent qu’ils ne peuvent pas faire « comme tout le monde », l’entrée dans la vie active en particulier s’avère complexe en raison de « tout ce qu’on n’a pas pu faire à cause de la maladie » (études, expériences professionnelles…).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/et-si-gaston-lagaffe-avait-en-realite-un-syndrome-dehlers-danlos-130907">Et si Gaston Lagaffe avait en réalité un syndrome d’Ehlers-Danlos ?</a>
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<p>Enfin, la maladie reste transmissible, complexifiant la vie amoureuse et les projets parentaux. En effet, la drépanocytose est une <a href="https://www.inserm.fr/dossier/drepanocytose/">maladie génétique héréditaire</a>. Même traitée par greffe, une personne qui porte les gènes mutés responsables de la drépanocytose les transmet à son enfant.</p>
<p>L’après-greffe est le moment parfois douloureux de prendre la mesure de tout ce que la vie avec la drépanocytose a empêché et de tout ce qu’il semble difficile de rattraper dans une vie sans elle.</p>
<h2>Être « autrement le même » : ni malade, ni en bonne santé</h2>
<p>La question « Qui suis-je ? » émerge chez beaucoup de patients et montre une tension entre trois dimensions : une présence du passé qui est constitutif du soi, une « perte de soi » marquée par une sensation de vide, et le besoin de construire une « nouvelle identité ».</p>
<p>Les personnes se trouvent pour la plupart dans un entre-deux : ni malades – elles n’ont plus les symptômes de leur pathologie initiale –, ni en bonne santé – « ex-drépanocytaires » et pouvant toujours transmettre la maladie.</p>
<p>Certains préfèrent ne plus parler de la maladie, comme si l’oubli était <a href="https://editions.flammarion.com/revivre/9782081314993">« une réponse de la vie à ce qui en elle est invivable », nécessaire pour continuer ou recommencer à vivre</a>. D’autres culpabilisent d’avoir été greffés.</p>
<h2>L’apport des sciences humaines et sociales pour penser un soin global</h2>
<p>Dans ce processus de transformation, il faut apprendre à se (re)connaître et se reconstruire, à devenir <a href="https://ec56229aec51f1baff1d-185c3068e22352c56024573e929788ff.ssl.cf1.rackcdn.com/attachments/original/6/9/7/002624697.pdf">« autrement le même »</a> ou « malade autrement », selon l’expression d’un patient greffé.</p>
<p>Être « autrement » évoque l’effort à déployer pour apprendre à vivre sans la maladie initiale mais avec d’autres vulnérabilités qui ne lui seront pas nécessairement liées ; être « le même » renvoie à la <a href="https://www.utep-besancon.fr/content/uploads/2021/12/La-representation-de-soi-au-coeur-du-la-relation-soignants-soignes-24.pdf">« nécessité vitale pour un individu d’avoir un sentiment de cohésion et de continuité quant à la perception de ce qu’il est »</a>.</p>
<p>L’étude <a href="https://u-paris.fr/la-personne-en-medecine/enjeux-psychosociaux-des-nouveaux-traitements-pour-la-mucoviscidose-et-la-drepanocytose/">« Revivre »</a> illustre l’apport indispensable des sciences humaines et sociales pour penser un soin global de la personne malade.</p>
<p>En éclairant les limites de la notion de guérison et la complexité du revivre, elle contribue, de manière utile aussi à d’autres maladies rares, à définir des filières, des réseaux et des pratiques (médicales et non médicales) de soin adaptés et susceptibles de soutenir l’<a href="https://dial.uclouvain.be/pr/boreal/object/boreal:5226"><em>empowerment</em></a> ou la <a href="https://www.puf.com/content/Le_normal_et_le_pathologique">normativité des malades</a>.</p>
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<p><em>Cet article a été co-écrit par les trois auteures mentionnées et le Dr Nathalie Dhédin, médecin hématologue (Unité d’hématologie Adolescents et Jeunes Adultes, APHP- hôpital Saint-Louis) spécialisée dans la greffe de moelle osseuse en particulier des patients drépanocytaires, et à l’initiative du protocole de recherche mené en SHS sur cette thématique. Nous remercions tous les patients et soignants qui soutiennent et participent à cette étude.</em></p>
<p><em>Le projet <a href="https://anr.fr/ProjetIA-18-IDEX-0001">IDEX</a> est soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui finance en France la recherche sur projets. Elle a pour mission de soutenir et de promouvoir le développement de recherches fondamentales et finalisées dans toutes les disciplines, et de renforcer le dialogue entre science et société. Pour en savoir plus, consultez le site de l’<a href="https://anr.fr/">ANR</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218968/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>L’Institut La Personne en médecine de l’Université Paris Cité est financé par l’IDEX (ANR-18-IDEX-0001).
Le projet « Revivre » est co-financé par l’Institut La Personne en médecine, la Fondation Maladies Rares et l’Association Vaincre la Mucoviscidose.
Nous remercions tous les patients, les soignants et les institutions partenaires pour leur participation à l’étude « Revivre ».</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>L’Institut La Personne en médecine de l’Université Paris Cité qui est financé par l’IDEX (ANR-18-
IDEX-0001).
Le projet Revivre est co-financé par l’Institut La Personne en médecine, la Fondation Maladies Rares et l’Association Vaincre la Mucoviscidose.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Le projet Revivre est co-financé par l'Institut La Personne en médecine, la Fondation Maladies Rares et l'Association Vaincre La Mucoviscidose</span></em></p>Des patients ayant vécu des années avec la drépanocytose se retrouvent « guéris » grâce à la greffe de moelle osseuse. Cela entraîne, chez certains, des effets inattendus sur le plan psychosocial.Elise Ricadat, Elise Ricadat est psychologue clinicienne, Maitre de Conférences à l’Université Paris Cité (IHSS/Études Psychanalytiques) et chercheuse au Laboratoire CERMES 3, UMR 8211. Elle co-dirige l’Institut interdisciplinaire « La Personne en Médecine »., Université Paris CitéCéline Lefève, Professeure des universités en philosophie (UMR 7219, Université Paris Cité). Co-directrice de l'Institut interdisciplinaire "La Personne en médecine", Université Paris CitéMilena Maglio, Chercheuse post-doctorante en philosophie, Institut La Personne en médecine, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1586672021-04-08T15:19:43Z2021-04-08T15:19:43ZQu’est-ce que la thrombocytopénie, cette maladie rare du sang qui serait liée au vaccin d’AstraZeneca ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/394054/original/file-20210408-23-ac2fkx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=134%2C0%2C4598%2C3150&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La thrombocytopénie est un état dans lequel le nombre de thrombocytes (très petites particules de sang, ou plaquettes) est nettement réduit.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>La vaccination a débuté cette semaine au Québec pour les personnes de 55 ans et plus qui acceptent de recevoir le vaccin d’AstraZeneca. Les Québécois <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1783108/55-ans-plus-clinique-sans-rendez-vous-covid">sont très nombreux à avoir répondu à l'appel</a> et s'être rués sur les lieux de vaccination sans rendez-vous.</p>
<p>Mercredi, l’Agence européenne des médicaments a conclu que <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1782810/agence-europeenne-medicaments-astrazeneca-caillots-sanguins-effets-secondaires">la formation de caillots sanguins doivent être répertoriés comme un effet secondaire « très rare » du vaccin AstraZeneca</a>, tout en estimant que la balance entre les bénéfices et les risques reste « positive ». </p>
<p>Ces conclusions découlent de rapports faisant étant ces dernières semaines de cas de thromboses chez un petit nombre de personnes dans le monde qui avaient reçu le vaccin d’AstraZeneca. Les scientifiques ont appelé cette affection « thrombocytopénie immunitaire prothrombotique induite par le vaccin » (<a href="https://www.afr.com/policy/health-and-education/scientists-name-clotting-syndrome-associated-with-astrazeneca-vaccine-20210406-p57guv">TIPIV</a>).</p>
<p>Mais qu’est-ce que cela signifie réellement ? Quelle est l’importance du risque et quelles sont les implications pour le déploiement de ce vaccin ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1379826603367235595"}"></div></p>
<h2>Un déficit de plaquettes</h2>
<p>Comme son nom l’indique, la TIPIV est une forme de thrombocytopénie.</p>
<p>La thrombocytopénie est un état dans lequel le nombre de thrombocytes (très petites particules de sang, ou plaquettes) <a href="https://www.healthline.com/health/thrombocytopenia">est nettement réduit</a>. Les plaquettes forment des caillots pour arrêter les saignements. Lorsque votre sang ne contient pas suffisamment de plaquettes, votre organisme ne peut pas former de caillots. Cela peut entraîner des saignements excessifs.</p>
<p>Cette condition a une <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31275945/">composante génétique</a>, mais elle peut également être provoquée par plus de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/20008194/">300 médicaments courants</a>, notamment la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16872245/">pénicilline</a> et <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/15588119/">certains analgésiques</a>. La <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24092609/">quinine</a>, qui est ajoutée à l’eau tonique pour lui donner du goût, peut aussi, mais très rarement, provoquer une thrombocytopénie.</p>
<p>Les <a href="https://www.thanz.org.au/documents/item/577">symptômes de la TIPIV peuvent inclure</a> de graves maux de tête, des douleurs abdominales, des convulsions et des troubles de la vision. Ils sont similaires aux symptômes d’une thrombocytopénie non liée au vaccin.</p>
<p>Dans de <a href="https://www.ema.europa.eu/en/news/covid-19-vaccine-astrazeneca-benefits-still-outweigh-risks-despite-possible-link-rare-blood-clots">rares cas</a> de thrombocytopénie, des caillots peuvent se former dans les vaisseaux drainant le sang du cerveau. L’Agence européenne des médicaments a déclaré avoir reçu des rapports faisant état de <a href="https://www.abc.net.au/news/2021-04-08/astrazeneca-vaccine-linked-to-rare-blood-clots-ema/100054774">169 cas</a> de caillots sanguins cérébraux chez des personnes qui avaient été vaccinées avec le vaccin d’AstraZeneca.</p>
<p>Dans les cas graves, la thrombocytopénie peut être fatale. Des décès dus à des caillots sanguins auraient été associés au vaccin d’AstraZeneca, <a href="https://www.bbc.com/news/world-europe-56665150">dont 19</a> au Royaume-Uni.</p>
<p>La TIPIV semble se manifester de <a href="https://www.thanz.org.au/documents/item/577">4 à 20 jours</a> après la vaccination, et jusqu’à présent, le problème a été largement associé aux <a href="https://www.sciencemag.org/news/2021/03/rare-clotting-disorder-may-cloud-worlds-hopes-astrazenecas-covid-19-vaccine">femmes de moins de 65 ans</a>.</p>
<p>Comment ce vaccin peut-il potentiellement provoquer une thrombocytopénie ? Le terme « immunitaire prothrombotique » indique qu’elle est causée par une suractivation du système immunitaire, ce qui nous donne un indice.</p>
<h2>Les plaquettes et la Covid-19</h2>
<p>Le vaccin d’AstraZeneca incite les cellules à fabriquer une partie spécifique du SARS-CoV-2 (le virus responsable de la Covid-19), appelée protéine Spike, que le virus utilise pour se fixer aux cellules lorsqu’il nous infecte.</p>
<p>Le vaccin stimule notre système immunitaire pour qu’il produise des anticorps contre la protéine Spike, ce qui prépare l’organisme à structurer une réponse immunitaire contre le SARS-CoV-2, s’il rencontre le virus à l’avenir.</p>
<p>Mais <a href="https://www.reuters.com/article/us-health-coronavirus-science-idUSKBN2BL2R3">chez certaines personnes</a>, le vaccin d’AstraZeneca semble produire des anticorps qui réagissent avec les plaquettes, les collant ensemble, entraînant ainsi la coagulation du sang. Cela réduit le nombre de plaquettes en circulation, d’où la thrombocytopénie.</p>
<p>Ces anticorps sont similaires à ceux que l’on trouve chez certaines personnes prenant un médicament anticoagulant appelé héparine. La réponse immunitaire à l’héparine génère des anticorps qui se lient aux plaquettes. Cela peut entraîner la formation de caillots sanguins chez certaines personnes. Il s’agit de la <a href="https://www.bmj.com/content/350/bmj.g7566#:%7E:text=Heparin%20induced%20thrombocytopenia%20(HIT)%20is,and%20produce%20a%20hypercoagulable%20state.">thrombocytopénie induite par l’héparine</a>. Jusqu’à un patient sur 20 <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/17400685/">recevant de l’héparine</a> développe une thrombocytopénie.</p>
<p>En gardant à l’esprit que nous devons encore établir la relation de cause à effet, il est possible que le mécanisme biologique par lequel nous pensons que l’héparine conduit à la thrombocytopénie soit le même pour le vaccin AstraZeneca.</p>
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<img alt="Personnes faisant la file" src="https://images.theconversation.com/files/394112/original/file-20210408-19-qcj7g6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/394112/original/file-20210408-19-qcj7g6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/394112/original/file-20210408-19-qcj7g6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/394112/original/file-20210408-19-qcj7g6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/394112/original/file-20210408-19-qcj7g6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/394112/original/file-20210408-19-qcj7g6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/394112/original/file-20210408-19-qcj7g6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des personnes attendent en ligne pour recevoir une dose du vaccin AstraZeneca, jeudi le 8 avril, au Stade olympique de Montréal. La vaccination est ouverte pour les gens âgés de 55 ans et plus.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Paul Chiasson</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Quelle est sa fréquence ?</h2>
<p>La thrombocytopénie d’origine naturelle touche environ un <a href="https://rarediseases.org/rare-diseases/immune-thrombocytopenia/">adulte sur 30 000</a> par an aux États-Unis.</p>
<p>Quant à la thrombocytopénie présumée induite par le vaccin, selon les données recueillies par la Thrombosis and Haemostasis Society of Australia and New Zealand, la TIPIV est aussi rare qu’une <a href="https://www.thanz.org.au/documents/item/577">personne sur 500 000</a>. Mais la société note que les données sont incomplètes.</p>
<p>Différents pays ont rapporté des taux différents. La Norvège, par exemple, a signalé jusqu’à présent qu’une <a href="https://www.sciencemag.org/news/2021/03/rare-clotting-disorder-may-cloud-worlds-hopes-astrazenecas-covid-19-vaccine">personne sur 25 000</a> adultes vaccinés âgés de moins de 65 ans a présenté une diminution des plaquettes, des saignements et des thromboses généralisées (caillots sanguins).</p>
<p>Bien sûr, la possibilité que certains de ces cas de thrombocytopénie soient survenus indépendamment du vaccin complique la compréhension des cas induits par le vaccin. Mais dans l’ensemble, la thrombocytopénie semble être plus fréquente dans la population générale que chez les personnes ayant été vaccinées.</p>
<p>Comme nous continuons à vacciner la population partout dans le monde, il est probable que de petits sous-ensembles de personnes continueront à souffrir de cette complication. La question de savoir si nous pouvons établir un lien de causalité entre le vaccin AstraZeneca et la thrombocytopénie fait l’objet d’une enquête continue.</p>
<h2>Soyez vigilants, mais ne vous alarmez pas</h2>
<p>Dans le cadre de l’enquête en cours, certains pays, <a href="https://www.aljazeera.com/news/2021/3/26/norway-extends-astrazeneca-vaccine-suspension-for-3-weeks">comme la Norvège</a>, ont interrompu le déploiement du vaccin d’AstraZeneca. D’autres ont restreint l’utilisation du vaccin à certains groupes, comme le <a href="https://www.aljazeera.com/news/2021/3/29/canada-to-pause-use-of-astrazeneca-vaccine-for-those-under-55">Canada</a>, qui ne l’utilise que pour les adultes de plus de 55 ans, qui peuvent présenter un risque plus élevé de Covid et un risque plus faible de caillots sanguins. Entre-temps, le Royaume-Uni s’est engagé à rendre <a href="https://www.theguardian.com/society/2021/apr/07/under-30s-in-uk-should-be-offered-alternative-covid-vaccine-to-astrazeneca-jab-says-regulator">d’autres options vaccinales disponibles</a> pour les personnes plus jeunes.</p>
<p>Pour la population adulte générale, nous sommes d’accord avec les <a href="https://www.abc.net.au/news/2021-04-08/astrazeneca-vaccine-linked-to-rare-blood-clots-ema/100054774">recommandations actuelles</a> d’organismes tels que l’Agence européenne des médicaments et l’Organisation mondiale de la santé, selon lesquelles les avantages du vaccin d’AstraZeneca sont supérieurs aux risques.</p>
<p>Cela dit, il n’est pas déraisonnable d’être prudent. Vous devez <a href="https://www.ema.europa.eu/en/news/astrazenecas-covid-19-vaccine-ema-finds-possible-link-very-rare-cases-unusual-blood-clots-low-blood">surveiller ces symptômes</a> jusqu’à 28 jours après avoir reçu le vaccin :</p>
<ul>
<li><p>essoufflement</p></li>
<li><p>douleur dans la poitrine ou l’estomac</p></li>
<li><p>gonflement ou froideur de la jambe</p></li>
<li><p>maux de tête sévères ou qui s’aggravent</p></li>
<li><p>vision floue</p></li>
<li><p>saignement persistant</p></li>
<li><p>multiples petites ecchymoses, taches rougeâtres ou violacées, ou cloques de sang sous la peau.</p></li>
</ul>
<p>Si vous présentez l’un de ces symptômes et que vous êtes inquiet, consultez un médecin.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/158667/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Anthony Zulli a reçu des financements du NHMRC et du NHF dans le passé.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Maximilian de Courten a reçu des fonds du NHMRC dans le passé. Il est affilié à l'Institut Mitchell pour l'éducation et la politique de santé. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Vasso Apostolopoulos a reçu des fonds du NHMRC dans le passé. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Maja Husaric ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La « thrombocytopénie immunitaire prothrombotique induite par le vaccin », ou TIPIV, comme l’appellent les scientifiques, se caractérise par un manque de plaquettes dans le sang.Anthony Zulli, Associate professor, Victoria UniversityMaja Husaric, Senior Lecturer; MD, Victoria UniversityMaximilian de Courten, Professor in Global Public Health and Director of the Mitchell Institute, Victoria UniversityVasso Apostolopoulos, Professor of Immunology and Associate Provost, Research Partnerships, Victoria UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1474342020-10-13T18:11:52Z2020-10-13T18:11:52ZMaladie du sommeil : une bataille de gagnée mais la lutte continue…<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/362639/original/file-20201009-23-z091is.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C248%2C5184%2C3437&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Séance de dépistage de la maladie du sommeil par une équipe mobile « sous le manguier », foyer de Bonon (localité du centre-ouest de la Côte d'Ivoire), octobre 2019.</span> <span class="attribution"><span class="source">IRD</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Enfin une bonne nouvelle en matière de Santé ! Le bureau régional Afrique de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) <a href="https://www.who.int/fr/news-room/detail/27-08-2020-togo-is-first-african-country-to-end-sleeping-sickness-as-a-public-health-problem#:%7E:text=Le%20Togo%20a%20re%C3%A7u%20la,Afrique%20%C3%A0%20franchir%20cette%20%C3%A9tap">annonçait</a> le 27 août 2020 l’élimination de la maladie du sommeil comme problème de santé publique (EPSP) au Togo. Enthousiastes, les <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20200824-togo-eradication-maladie-sommeil-trypanosomiase-africaine">journalistes n’ont pas hésité à parler d’« éradication »</a>.</p>
<p>Mais attention ! Il ne faut pas vendre la peau du trypanosome (le parasite qui cause la maladie) avant de l’avoir « traité » : celui-ci a déjà montré de quoi il était capable si on lui en laisse l’occasion. En effet, si les efforts considérables de lutte menés dans la première moitié du XX<sup>e</sup> siècle ont permis d’endiguer une épidémie qui a fait <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1046/j.1365-3156.2001.00753.x">plusieurs millions de morts dans les années 1920 et 1930</a>, et de déclarer la maladie « résiduelle » dans les années 1960, le relâchement qui a suivi, dans un contexte de nouvelles interactions entre l’homme et son environnement, a été responsable d’une réémergence puis d’une situation épidémique de nouveau très meurtrière dans les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2253612/">années 1990</a>.</p>
<p>Grâce à une riposte efficace qui s’est organisée autour de structures nationales dédiées à la lutte contre la maladie, avec le soutien de l’OMS et l’appui de la recherche, le nombre de cas rapportés annuellement est passé en <a href="https://journals.plos.org/plosntds/article?id=10.1371/journal.pntd.0008261">2018 sous la barre des 1 000 pour la première fois de l’histoire</a>. À l’image de cette évolution, aucun cas n’a été déclaré au Togo depuis 1996 malgré un système de surveillance jugé efficace par un comité d’experts qui a donc validé l’EPSP sur la base d’un dossier soumis par le ministère de la Santé.</p>
<h2>Un processus d’élimination bien défini</h2>
<p>La maladie du sommeil ou [trypanosomiase humaine africaine](https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/trypanosomiasis-human-african-(sleeping-sickness) (THA) est causée par un parasite, le <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736%2817%2931510-6/fulltext">trypanosome</a>. Elle sévit en Afrique intertropicale dans l’aire de répartition de la mouche tsé-tsé (glossine), qui assure la transmission du parasite à l’homme en le piquant après s’être elle-même infectée à partir d’êtres humains ou d’animaux porteurs. Si les premiers symptômes sont souvent bénins (fièvres et céphalées récurrentes, signes cutanés), la maladie évolue lentement (parfois sur plusieurs années) vers une atteinte neurologique généralisée (dont des troubles du sommeil) qui est fatale en absence de traitement. Elle touche les populations rurales les plus vulnérables dans des zones appelées du « bout de la piste », parce que difficiles d’accès et éloignées des centres de santé. Elle est classée dans le groupe des <a href="https://www.who.int/features/qa/58/fr/">maladies tropicales négligées</a> pour attirer l’attention des décideurs et bailleurs.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/VwDv5uQhyR0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La maladie du bout de la piste.</span></figcaption>
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<p>Pour éviter une nouvelle réémergence, l’OMS et ses partenaires publics et privés ont défini des indicateurs permettant de suivre le processus d’élimination de la THA et de s’assurer que les objectifs fixés sont bien atteints. Ce processus se déroule en trois étapes :</p>
<ol>
<li><p>l’EPSP avec des cibles mesurables qui, lorsqu’elles sont atteintes, nécessitent de mettre en place des mesures visant à parvenir à</p></li>
<li><p>l’interruption de la transmission définie par une incidence nulle (aucun nouveau cas) puis à</p></li>
<li><p>l’éradication qui se traduit par l’absence permanente du parasite sans risque de réintroduction.</p></li>
</ol>
<p>Ces étapes sont évaluées par un comité d’experts indépendants qui formule des recommandations pour atteindre l’objectif suivant. Les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24709291/">objectifs fixés en 2012</a> par l’OMS étaient la validation de l’EPSP en 2020 et la vérification de l’interruption de la transmission en 2030.</p>
<p>La route vers l’éradication est donc encore longue pour une maladie comme la THA qui implique des trypanosomes, des vecteurs et de potentiels réservoirs animaux. Il faut d’ailleurs se rappeler que dans l’histoire des maladies infectieuses, <a href="https://www.who.int/topics/smallpox/fr/">seule la variole a atteint ce statut</a>. On comprendra alors que le choix des mots utilisés à chaque étape du processus est vraiment important.</p>
<h2>Une transition épidémiologique « réussie », soutenue par la recherche</h2>
<p>En l’absence de vaccin et de chimioprophylaxie – administration d’une substance chimique pour prévenir une maladie –, les stratégies de lutte contre la maladie du sommeil visent à dépister, à traiter les cas et à lutter contre la glossine vectrice pour limiter le risque de transmission. En passant en vingt ans d’un contexte épidémique à un contexte d’élimination, la maladie du sommeil a subi une transition épidémiologique sans précédent à laquelle les stratégies et les outils de lutte ont dû s’adapter.</p>
<p>Cela a notamment été le cas en Côte d’Ivoire grâce à un appui important de la recherche multidisciplinaire au service du Programme national d’élimination, qui a permis de combattre la maladie sur tous les fronts. Plusieurs stratégies et outils actuellement utilisés en Afrique pour lutter contre la maladie du sommeil y ont été développés et/ou évalués, par exemple les <a href="https://www.ditect-hat.eu/">tests de diagnostic rapide</a> qui ont considérablement facilité l’accès au dépistage dans les centres de santé des zones rurales, et les pièges Vavoua (du nom d’une ville du centre ouest ivoirien où ils ont été évalués pour la première fois) ou les écrans imprégnés d’insecticide pour <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1567134819301819">lutter contre les glossines</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/362646/original/file-20201009-21-owxjo4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/362646/original/file-20201009-21-owxjo4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/362646/original/file-20201009-21-owxjo4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/362646/original/file-20201009-21-owxjo4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/362646/original/file-20201009-21-owxjo4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/362646/original/file-20201009-21-owxjo4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/362646/original/file-20201009-21-owxjo4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Pose d’un écran imprégné d’insecticide pour lutter contre les glossines, foyer de Sinfra (chef-lieu de département en Côte d’Ivoire), octobre 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">IRD</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Les résultats spectaculaires obtenus – seulement neuf cas rapportés entre 2015 et 2019 – ont aussi permis à la Côte d’Ivoire de soumettre en août 2020 à l’OMS son dossier de demande de validation de l’EPSP.</p>
<h2>Relever le défi de l’élimination en renforçant la surveillance passive</h2>
<p>L’itinéraire complexe d’un des derniers cas dépistés en Côte d’Ivoire et récemment décrit <a href="https://journals.plos.org/plosntds/article?id=10.1371/journal.pntd.0008588">dans un article scientifique publié</a> dans la revue <em>Plos Neglected Tropical Diseases</em>, illustre bien le fait que la route vers l’éradication de la THA est encore longue. Il s’agit d’une jeune fille de 11 ans qui a probablement été infectée quand elle était enfant dans le foyer endémique de Sinfra. Suite à l’apparition des symptômes en octobre 2014, déscolarisée, stigmatisée, accusée d’être possédée par un « démon » à cause des troubles neurologiques dus à la maladie, c’est dans un état comateux qu’elle sera finalement dépistée et traitée en septembre 2017. Accompagnée de sa mère qui avait dû cesser son activité pour s’occuper de sa fille, elle avait pourtant consulté plusieurs dizaines de centres de santé publics ou privés et sollicité plus d’une centaine d’agents de santé, qui lui ont prescrit des traitements non adaptés sans poser le bon diagnostic.</p>
<p>Ce retard dans le diagnostic est en grande partie dû à la situation actuelle de la maladie, qui a été progressivement oubliée par le corps médical et qui n’est plus ressentie comme une menace par les populations. Les équipes de recherche et de lutte ont donc adapté leurs stratégies en renforçant la surveillance passive dans des sites « sentinelles » à l’échelle nationale et en mettant l’accent sur la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=VwDv5uQhyR0">formation des agents de santé</a>. Une étude socio-anthropologique est en cours pour nous permettre d’améliorer la sensibilisation de ces acteurs incontournables ainsi que des populations qui le sont tout autant.</p>
<p>La fillette, aujourd’hui en pleine forme physique, garde des séquelles neurologiques qui l’empêchent de vivre pleinement sa vie d’adolescente. Elle devra donc être suivie plusieurs années afin d’être définitivement guérie. Cette histoire individuelle souligne la difficulté de parvenir à l’élimination de la maladie du sommeil en Côte d’Ivoire et dans les pays qui ont réussi à diminuer fortement la transmission ces dernières années. Elle rappelle surtout que les efforts de recherche, de lutte et de surveillance doivent être maintenus afin de parvenir un jour à <a href="https://www.rfi.fr/fr/podcasts/20200703-maladies-tropicales-n%C3%A9glig%C3%A9es-ulc%C3%A8re-buruli-et-maladie-sommeil">éradiquer la maladie du continent africain</a>. Vaincre durablement une maladie permettrait aux pays en développement de pouvoir prioriser leurs efforts pour faire face aux multiples risques sanitaires qui peuvent subitement focaliser l’attention des autorités sanitaires comme c’est le cas actuellement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147434/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>The partnership involved in the HAT elimination process in Côte d'Ivoire receives funding from Bill and Melinda Gates Foundation and European Union. </span></em></p>Le Togo a éliminé la maladie du sommeil comme problème de santé publique. Mais dans le pays et sur le continent, la route vers l’éradication est encore longue.Vincent Jamonneau, Chercheur et Médecin, Institut de recherche pour le développement (IRD)Dramane Kaba, Chercheur et Médecin, Institut Pierre Richet de BouakéMathurin Koffi, Généticien, Maître de Conférences, Université Jean Lorougnon GUEDE Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1393272020-05-26T21:53:30Z2020-05-26T21:53:30ZComment organiser le retour des élèves atteints de maladies chroniques ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/337337/original/file-20200525-106862-14u3j86.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C8%2C974%2C657&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les enfants et jeunes affectés de maladies chroniques ne se résument pas à leur pathologie, ce sont aussi des élèves et des camarades de classe !</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>À mesure que les établissements scolaires rouvrent leurs portes émerge la question de l’accueil réservé aux enfants les plus vulnérables.</p>
<p>L’utilisation généralisée de ce terme « vulnérable » pour décrire un groupe très diversifié d’enfants et de jeunes traduit l’attention particulière qu’il convient de prêter à ceux qui ont le plus besoin de l’école pour réussir. Néanmoins, il n’est pas sans poser de problème, du fait de la variété des sources de cette vulnérabilité.</p>
<p>Beaucoup a été écrit sur la vulnérabilité sociale, économique et culturelle <a href="https://www.education.gouv.fr/coronavirus-covid-19-reouverture-des-ecoles-colleges-et-lycees-303546">liée au handicap</a>. Mais l’accueil des enfants et des jeunes atteints de maladies chroniques, comme l’asthme, le diabète, l’arthrite juvénile, ou souffrant de problèmes de santé mentale, a été peu abordé.</p>
<p>Il s’agit pourtant d’un enjeu de premier ordre, <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2016/sante-des-collegiens-en-france-nouvelles-donnees-de-l-enquete-hbsc-2014">plus de 20 % des élèves</a> étant concernés, selon les données de la dernière enquête <a href="http://www.hbsc.org/">HBSC</a> – « Health Behaviour in School-Aged Children » – et risquant de se voir exclus a priori du retour à l’école.</p>
<p>Les données publiées par les équipes de recherche, les savoirs des personnes concernées et de leurs familles, les expériences d’autres pays et la pratique des professionnels peuvent éclairer ce processus complexe.</p>
<h2>Socialisation et apprentissages</h2>
<p>La socialisation et les apprentissages sont des pivots de la réussite éducative. Le fait de scolariser les enfants et de les encourager à rester le plus longtemps possible à l’école contribue à améliorer leur santé.</p>
<p>La réussite éducative améliore les conditions de vie tout au long de la vie. Au-delà de l’éducation délivrée à l’école, rappelons qu’une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7154517/">activité physique</a> encadrée est un facteur de protection ou de stabilisation essentiel vis-à-vis d’un large ensemble de maladies. D’autre part, les interactions avec d’autres enfants sont essentielles au bon développement du corps comme du cerveau, tandis que les échanges directs avec des adultes de confiance, en dehors de la sphère familiale, permettent d’élargir le regard sur la pandémie et sur notre vie quotidienne avec le virus.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1256228292446883841"}"></div></p>
<p>De plus, pour un groupe restreint mais non négligeable, l’éloignement durable de l’école génère un risque de souffrance psychique lié à l’isolement ou à la maltraitance. Cela vaut pour tous les enfants, et d’autant plus pour ceux qui souffrent de maladies chroniques.</p>
<p>Les enfants et jeunes affectés de maladies chroniques ne se résument pas à leur pathologie ! C’est ce que souligne <a href="https://afpa.org/recommandation/propositions-de-societe-francaise-de-pediatrie-favoriser-retour-enfants-maladie-chronique-etablissement-scolaire/">l’avis</a> de la société française de pédiatrie, déclarant :</p>
<blockquote>
<p>« Il faut favoriser le retour dans leur établissement scolaire de tous les enfants ayant une pathologie chronique, car bénéfique pour leur santé, leur bien-être et leur avenir. Différer ce retour apparaît sans avantage pour la prise en charge de leur maladie. »</p>
</blockquote>
<p>Cependant, ce retour peut interroger les enfants et jeunes eux-mêmes, comme leurs familles. Certains ayant des besoins complexes en matière de soins ont constaté que les fermetures d’écoles allègent leur quotidien, et pourraient préférer poursuivre l’enseignement à domicile.</p>
<p>D’autres au contraire attendent avec impatience le retour à l’école, ayant bénéficié de la créativité et de l’engagement d’établissements investis dans des pratiques d’enseignement inclusives. Les enfants et les jeunes ont aussi leur mot à dire dans cette décision et peuvent donner l’avantage à l’une ou l’autre des solutions.</p>
<h2>Point de vue éducatif</h2>
<p>La réouverture des écoles exerce également une très forte pression sur les professionnels et génère des inquiétudes qu’il est indispensable de prendre en compte. <strong>La première situation</strong>, très largement majoritaire, concerne l’enfant ou le jeune dont l’état est stable – asthme léger ou modéré, diabète bien équilibré, <a href="https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2011-10/reco2clics_obesite_enfant_adolescent.pdf">surpoids simple</a> par exemple.</p>
<p>Les données disponibles montrent que le Covid-19 produit des symptômes plus légers et moins de cas graves chez les enfants et les jeunes que chez les adultes plus âgés, et que les enfants et les jeunes asthmatiques sont moins susceptibles de souffrir d’une forme grave de Covid-19 que les adultes souffrant de <a href="https://europepmc.org/article/pmc/pmc7172836">maladies respiratoires</a>. Au Danemark, ces élèves ont très bien supporté la reprise de l’école, peut-être mieux que d’autres élèves, car ils sont attentifs aux variations de leur système respiratoire.</p>
<p>Une application rigoureuse des mesures d’hygiène et des mesures barrières recommandées pour tous les enfants permet leur retour à l’école. Ces élèves bénéficiant d’un projet d’accueil individualisé, ce sont les professionnels de santé de l’éducation nationale qui constituent la référence pour les équipes d’école et d’établissement dans le cas ou des précautions complémentaires seraient nécessaires.</p>
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<figcaption><span class="caption">Réouverture des écoles au Danemark (Euronews, avril 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>Pour une minorité, c’est <strong>la seconde situation</strong>, il n’est pas encore possible de revenir à l’école. Certains pays comme l’Angleterre, ont mis en place un dispositif national spécifique de protection des enfants par le service national de santé. Il paraît raisonnable par exemple que certains enfants et jeunes <a href="https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/Telecharger?NomFichier=hcspa20200420_covperrisetmesbarspccesper.pdf">présentant un risque reconnu</a> de forme grave de Covid-19 restent isolés pour l’instant.</p>
<p>Une telle décision relève du médecin référent. Les équipes éducatives ont alors à s’assurer de la continuité de l’enseignement à distance et de l’accompagnement éducatif des élèves concernés.</p>
<p>Pour les directeurs d’écoles, chefs d’établissement et enseignants ces deux premiers cas de figure sont bien définis. <strong>Une troisième situation</strong> existe, celle qui concerne les enfants et les jeunes dont la prise en charge reste complexe. À titre d’exemple, l’obésité et l’hyperglycémie chronique sont associées à des formes plus graves d’infection par le SARS-CoV-2 affectant les enfants et les jeunes atteints d’un diabète de type 1 insuffisamment équilibré.</p>
<p>Ces situations, peu fréquentes, nécessitent un discernement spécifique intégrant les dimensions médicales mais également éducatives et sociales. L’enjeu est celui d’une rescolarisation précoce du fait de ses bénéfices potentiellement importants tant sur plan psychologique que comportemental.</p>
<h2>Projet d’accueil individualisé</h2>
<p>La clé de la réussite du retour à l’école des enfants et des jeunes atteints de maladies chroniques réside dans une collaboration efficace entre les différents acteurs qui les entourent. Un dispositif de suivi – impliquant un partenariat entre le jeune, sa famille, les équipes de direction, enseignants, médecins, infirmiers, travailleurs sociaux, et psychologues de l’éducation nationale en lien avec les spécialistes en charge du suivi de la pathologie de l’enfant – doit permettre de répondre aux inquiétudes, de renforcer la confiance.</p>
<p>Le <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F21392">projet d’accueil individualisé</a> en France, les programmes « Éducation, Santé et Soins » en Angleterre et les programmes 504 aux États-Unis constituent le socle indispensable à l’accueil de ces élèves. Outre la question des mesures à prendre au quotidien (aménagements d’horaires, dispenses de certaines activités, organisation des actions de soins…) ou en cas de difficulté spécifique, ils permettent de clarifier la responsabilité des différents acteurs.</p>
<p>Cette question de la responsabilité des professionnels de l’éducation est une de leurs préoccupations majeures, elle conditionne largement l’accueil des enfants atteints de maladies chroniques.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/DZhr5cb0qoY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Retour à l’école dans la Sarthe, vu par les enfants (France 3 Pays-de-la-Loire, 14 mai 2020).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Dispositifs hybrides</h2>
<p>Le rôle des professionnels de santé de l’éducation nationale apparaît ici comme central à plus d’un titre. D’abord à l’échelon individuel, en permettant d’articuler les enjeux médicaux et éducatifs et de garantir que le retour à l’école de chacun des enfants se fait dans des conditions adéquates. À l’échelle collective, ensuite, en accompagnant les équipes des établissements.</p>
<p>Leur rôle d’interface entre école, famille et système de soin constitue le pivot de l’accueil de ces élèves. Le projet d’accueil individualisé permet de définir les adaptations nécessaires du point de vue éducatif en veillant au respect du secret médical tout en partageant les explications nécessaires avec les professionnels de l’éducation.</p>
<p>Pour les élèves atteints de maladies chroniques, le développement de la télémédecine ouvre de nouvelles perspectives, il permet à ces élèves d’éviter de longs trajets et de réduire le nombre de jours de cours manqués. Les technologies d’apprentissage à distance rendent plus aisée la continuité des apprentissages pendant les phases d’absence de l’école.</p>
<p>Pour autant, il serait dangereux de penser l’arrivée de ces technologies dans une logique de substitution. L’éducation comme le soin sont avant tout fondés sur la relation humaine et l’accompagnement des personnes. C’est une logique de complémentarité qui doit prévaloir. Des dispositifs de scolarisation comme de prise en charge hybride permettront de s’adapter à chaque enfant et à chaque jeune.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1257119191649394689"}"></div></p>
<p>La crise de la Covid-19 a mis en avant les enjeux de la scolarisation de TOUS les enfants. Elle a permis de vérifier à grande échelle que les modalités d’apprentissage hybrides pouvaient se développer et, sans aucun doute, être bénéfique aux enfants porteurs de maladies chroniques. À nous de faire bon usage des enseignements de cette crise au service de tous les élèves, en particulier de ceux qui ont le plus besoin de l’école pour réussir.</p>
<hr>
<p><em>Remerciements à Corinne Maincent, infirmière conseillère technique auprès du Recteur de l’académie de Nice, Fleur Rouveyrol, médecin conseiller technique auprès du Recteur de l’académie de Clermont-Ferrand, Janet McDonagh, consultant en rhumatologie pédiatrique et adolescente, Manchester University NHS Foundation Trust, Gill Turner et Gail Dovey-Pearce, Northumbria Healthcare NHS Foundation Trust, Angleterre ; Marie Hauerslev, présidente de NCD Child et du département de pédiatrie, Hôpital Herlev, Copenhague, Danemark</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139327/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>La chaire UNESCO et centre collaborateur OMS "EducationS & Santé" est soutenu par la MGEN et le groupe VYV.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Nicola Gray est membre du Labour Party en Angleterre, Vice-président (Europe) de l'Association Internationale pour la Santé des Adolescents (IAAH) et membre du conseil d'administration de la coalition de plaidoyer NCD Child.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Rémi Laporte ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Alors que rouvrent les écoles, l’accueil des enfants atteints de maladies chroniques, ou souffrant de problèmes de santé mentale, a encore été peu abordé. Quelques points de repère.Didier Jourdan, Professor, holder of the UNESCO chair and WHO collaborating center for Global Health & Education, Université Clermont Auvergne (UCA)Nicola Gray, Affiliated Researcher, UNESCO Chair for Global Health & Education, Université Clermont Auvergne (UCA)Rémi Laporte, Doctorant, enseignant, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1309072020-02-27T19:54:25Z2020-02-27T19:54:25ZEt si Gaston Lagaffe avait en réalité un syndrome d’Ehlers-Danlos ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/316423/original/file-20200220-92551-1rqzr57.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2172%2C1632&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Louvain-la-Neuve (Belgique), Rue des Wallons : peinture murale de la rampe inclinée </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Belgique_-_Louvain-la-Neuve_-_Rue_des_Wallons_-_10.jpg">EmDee/ Wiki Loves Heritage in Belgium in 2018 /image recadrée</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gaston_Lagaffe">Gaston Lagaffe</a> refait parler de lui, 66 ans après son embauche par le journal Spirou : <a href="https://www.ouest-france.fr/culture/bande-dessinee/entretien-gaston-lagaffe-obeit-a-sa-propre-loi-delaf-redonne-vie-a-ce-personnage-mythique-190615ba-83e8-11ee-9b65-2282e6d4bdd9">le dessinateur canadien Delaf</a> signe en effet le retour de l’un des plus célèbres « olibrius » de la bande dessinée.</p>
<p>L’occasion de se poser une question : et si ce gaffeur patenté était en réalité atteint d’une maladie génétique rare affectant le tissu conjonctif ? À bien l’observer, on peut en effet déceler chez lui un ensemble de symptômes caractéristiques du <a href="https://www.chuv.ch/fr/ial/ial-home/patients-et-familles/maladies-rares/syndrome-ehlers-danloss">Syndrome d’Ehlers-Danlos</a>.</p>
<p>À quelques jours du <a href="https://www.afm-telethon.fr/fr">Téléthon</a>, faisons le point sur cette maladie du tissu conjonctif… Et ses conséquences sur l’inimitable <a href="https://www.actualitte.com/video/gaston-lagaffe-le-heros-sans-emploi-a-la-bpi/68504">« héros sans emploi »</a>.</p>
<h2>Un tissu de soutien omniprésent</h2>
<p>Le <a href="http://histoblog.viabloga.com/texts/le-tissu-conjonctif--cours-n-1-et-n-2--2009-">tissu conjonctif</a> est un tissu de soutien qui maintient les autres tissus ensemble, assure la cohésion des organes, et leur sert « d’emballage ».
Il n’est donc pas surprenant qu’il représente 70 à 80 % de la masse du corps humain, et qu’on le trouve partout : dans les muscles, la peau, les nerfs, les os, les parois des vaisseaux sanguins, les yeux… </p>
<p>Il est constitué de cellules non jointives (cellules graisseuses, fibroblastes, etc.), de fibres (élastiques et collagènes) et d’une sorte de « gel » qui les englobe et rempli les espaces laissés libres entre elles, <a href="https://www.academie-medecine.fr/le-dictionnaire/index.php?q=substance%20fondamentale">la substance fondamentale</a> (l’association des fibres et de cette dernière constitue ce que l’on appelle la matrice extracellulaire). </p>
<p>La quantité et la nature des constituants (fibres, cellules, eau…) du tissu conjonctif peut varier, ce qui lui confère différentes propriétés (par exemple, une résistance mécanique ou des capacités d’échange métabolique), et permet de le classer en différentes catégories. Sa qualité et sa quantité varient en fonction des organes : il est ainsi peu présent dans le cerveau, mais son collagène est très abondant dans le muscle – d’où la formation de gélatine au-delà d’une température de 60 °C, et donc lors de la cuisson d’un pot-au-feu…</p>
<h2>Un syndrome multiforme</h2>
<p>C’est parce que le tissu conjonctif est présent dans nombre d’organes que le <a href="https://www.edimark.fr/riip/2018/fi-1/que-penser-epidemie-maladie-ehlers-danlos">Syndrome d’Ehlers-Danlos</a> (SED) qui l’affecte rassemble, sous un terme générique, plusieurs maladies différentes. </p>
<p>Pour tâcher d’y voir plus clair et proposer une prise en soin adapté, la communauté scientifique et médicale a proposé plusieurs classifications, en fonction des manifestations cliniques. </p>
<p>La <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/ajmg.1320290316">première a été établie en 1988 à Berlin</a>, puis une seconde a été élaborée en <a href="http://www.reumatologia-dr-bravo.cl/Villefranche/Ehlers-Danlos_Syndrome_Revised_Nosology.pdf">1997</a>. Ces deux classifications ne parvenaient cependant pas à circonscrire tout le spectre de cette affection, les critères diagnostiques n’étant pas toujours pertinents. Une autre <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/ajmg.c.31552">classification internationale</a>, la classification dite « de New York », a donc été proposée en 2017, définissant 13 sous-types de SEDs.</p>
<p>Tous les SEDs se caractérisent par une hyperextensibilité cutanée, une hypermobilité articulaire, et une fragilité des tissus qui est source de difficultés de cicatrisation. </p>
<p>À l’exception du type <a href="https://www.louvainmedical.be/fr/article/syndrome-dehlers-danlos-de-type-hypermobile-mise-au-point-des-signes-symptomes-et">hypermobile</a> (SEDh), Chacun d’entre eux correspond à une affection distincte, et est définie par des mutations d’un seul ou d’un petit ensemble de gènes, d’où un diagnostic très fiable. </p>
<p>Le cas du syndrome d’Ehlers-Danlos hypermobile est particulier. Faute de gènes incriminés et donc de test génétique, son diagnostic s’appuie sur un faisceau d’arguments cliniques, bien que les symptômes soient multiples, hétérogènes, et que les atteintes et répercussions fonctionnelles puissent prendre de nombreuses formes. Certaines manifestations cliniques peuvent ressembler à des manifestations somatoformes, c’est-à-dire sans causes identifiées avec certitude.</p>
<p>Le SEDh est apparemment la forme la plus fréquente des SEDs : les estimations vont pour la France de 1 personne sur 5000 à 1 sur 20 000. Cette prévalence semblant augmenter depuis 2012, la communauté médicale a pointé la nécessité de disposer de critères précis – pour éviter les diagnostics erronés et les errances diagnostiques.</p>
<h2>Trois critères diagnostiques</h2>
<p>En l’absence de confirmation génétique possible actuellement, le diagnostic se fait par un médecin spécialiste en s’appuyant sur la présence <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/ajmg.c.31552">concomitante</a> de plusieurs faisceaux d’arguments et signes cliniques présents (classification de New York).</p>
<p>Le premier d’entre eux est une hypermobilité articulaire généralisée, qui peut être <a href="https://www.ehlers-danlos.com/assessing-joint-hypermobility/">évaluée</a> par le score de Beighton. Cet examen s’appuie sur cinq manœuvres cliniques cotées sur 9 points.</p>
<ul>
<li><p>La dorsiflexion passive de l’articulation métacarpophalangienne du cinquième doigt (auriculaire) au-delà de 90° (1 point pour chaque main)</p></li>
<li><p>L’hyperextension du coude au-delà de 10° (1 point pour chaque coude)</p></li>
<li><p>L’apposition passive des pouces sur la face antérieure de l’avant-bras (1 point pour chaque pouce)</p></li>
<li><p>L’hyperextension du genou au-delà de 10° (1 point pour chaque genou)</p></li>
<li><p>Une flexion du tronc vers l’avant, les genoux complètement étendus, de sorte que les mains reposent à plat sur le sol lors (1 point)</p></li>
</ul>
<p>Selon les auteurs et l’âge du patient, l’hypermobilité articulaire est reconnue pour un score de Beighton à 4 ou 5.</p>
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<figcaption><span class="caption">L’examen du score de Beighton.</span></figcaption>
</figure>
<p>Un second point doit aussi être examiné : la présence de deux indices, à choisir entre l’atteinte systémique du tissu conjonctif, les complications musculo-squelettiques, l’atteinte cutanée, et l’histoire familiale. On prêtera ainsi une attention particulière à une peau extraordinairement douce ou veloutée, une hyperextensibilité cutanée, un rapport envergure des bras sur hauteur important (supérieur ou égal à 1,05), des douleurs chroniques, des complications musculo-squelettiques, une instabilité franche des articulations (luxation/subluxation), etc. </p>
<p>Enfin, troisième point important, les manifestations cliniques ne doivent pas être expliquées par un autre diagnostic ou une autre forme de SED.</p>
<p>Le diagnostic de SEDh est donc porté si les 3 points sont réunis. Le tableau clinique est souvent associé à une fatigue chronique et des douleurs (parfois liées aux instabilités articulaires), qui peuvent altérer la qualité de vie. S’y ajoutent parfois d’autres signes cliniques – frilosité, reflux gastro-œsophagien, transpiration excessive, etc. – qui ne sont pas, toutefois, des critères diagnostiques.</p>
<h2>Et Gaston Lagaffe dans tout ça ?</h2>
<p>La lecture de cette description clinique n’est pas sans nous faire nous interroger sur le cas de Gaston Lagaffe, l’un de nos antihéros préférés. En 2017, une édition <a href="https://www.dupuis.com/gaston-integrale/bd/gaston-integrale-gaston-l-integrale/30974">intégrale recolorisée</a> est sortie regroupant par ordre de numéros croissants les gags de Gaston. Cette édition nous permet d’illustrer les probables critères diagnostiques du SEDh chez lui.</p>
<p>Dans son cas, le critère de fatigue chronique n’est plus à démontrer : il est de notoriété publique ! Ainsi, en feuilletant les pages de l’intégrale, il n’est pas rare de voir Gaston s’endormir debout, même en « sursaut » (gags 110b, 114, 130b, pages 93,91 et 112) ou lors d’une apnée prolongée (gag 239, page 182). Cette fatigue et son hypersomnie avaient fait penser à certains que Gaston pouvait être narcoleptique. Mais ne sont-elles pas plutôt en lien avec un SEDh ? Qu’en est-il des autres critères diagnostiques chez notre gaffeur ?</p>
<p>On le sait, Fantasio considère que Gaston n’est pas souple (gag 135a, page 120) mais « mou ». Reste que tout au long de l’œuvre de Franquin, on décèle aisément chez Gaston une hypermobilité articulaire. Ses amplitudes articulaires sont en effet très importantes, allant même au-delà des possibilités physiologiques. De plus, bien que les genoux et les coudes fléchis soient ses positions préférées, ses articulations sont parfois capables d’hyperextension, par exemple lorsqu’il joue au football.</p>
<h2>Gaston Lagaffe : un score de Beighton entre 5 et 9 !</h2>
<p>En l’absence d’examen clinique formel, il est évidemment compliqué de réaliser un score de Beighton. Mais au vu des différentes planches des gags, on peut l’estimer à 5, voire 7 ou 9. On note en effet une flexion à plus de 90° des auriculaires (2 points, gag 740, page 672), lorsque notre Gaston devenu gardien de but se relâche. </p>
<p>Mais on observe aussi une hyperantéflexion du tronc importante (dessin de couverture pour la reliure du journal de Spirou n°85 parue en 1963 et gag 26b, page 39), des mains qui reposent à plat sur le sol lors d’une flexion de tronc vers l’avant (1 point, gag 26b, page 43 ; et gag 536b, page 548), des hyperextensions de coudes passif à droite (gag 859, page 798) et à gauche (gag 875, page 814, 860) soit un total de 5 points.</p>
<p>Certes, l’hyperextension – ou recurvatum – du genou chez Gaston est plus discutable. Mais un coup du foulard infligé par Lebrac lors d’un match de rugby (gag 716, page 648), ainsi qu’une chute dans les escaliers (gag 536b, page 448) ou un saut avec un cerf-volant (gag 577b, page 499) en attestent (2 points), portant le score de Beighton à 7 points. </p>
<p>Enfin, s’il n’existe pas d’illustration formelle, on doit admettre au vu de scènes évocatrices (comme le gag 159b, page 132) qu’il existe chez Gaston un probable signe du pouce (à droite et à gauche, 2 points), ce qui pourrait porter le score à 9 points.</p>
<p>Cette hypermobilité articulaire est bien illustrée dans le <a href="http://www.toutspirou.fr/Calendriers/menu%20calendrier.html">calendrier de 1967</a> dessiné par Franquin (on y voit Gaston se contorsionner pour regarder les mois du calendrier), ou encore dans le gag 283 (page 208) où notre antihéros s’emberlificote avec son homologue en latex. </p>
<p>Cette laxité permet à notre garçon de bureau de se mettre dans des positions invraisemblables, comme lorsqu’il joue du trombone à coulisse dans une cabine téléphonique (gag 570b, page 486), ou quand il se cache pour dormir dans son armoire (gag 237, page 181). Fantasio profite de cette particularité articulaire pour glisser Gaston dans des tiroirs (gag 27b, page 44 ; gag 125b, page 109).</p>
<h2>Il semble bel et bien présenter tous les critères</h2>
<p>S’agissant du deuxième point nécessaire pour poser un diagnostic de SEDh, plusieurs constats peuvent être faits. Il y a d’abord chez Gaston une hyperextensibilité cutanée, qui lui permet d’utiliser un Mastigaston (Mastigaston page 138), mais aussi une peau douce et veloutée que met en évidence la restauration des couleurs de Frédéric Jannin dans l’intégrale des gags parue en 2017. C’est d’ailleurs sa peau de pêche (voir la couverture et la page de garde de l’album « le repos du gaffeur » pages 494 et 495) qui permet à Lagaffe de devenir modèle pour une publicité de PetroleScalp (gag 193, page 154).</p>
<p>Ensuite, on note chez Gaston un rapport bras / jambes supérieur à 1,05 (particulièrement bien illustré dans le gag 364, page 255). De plus, il est capable de recouvrir son pouce dans sa paume avec ses autres doigts, de manière bilatérale, ce qui peut témoigner d’une <a href="https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/arachnodactylie/4913">arachnodactylie</a> : il n’est qu’à le voir pratiquer le bicyclown (gag 877, page 816) et sa façon de tenir la corde à sauter. </p>
<p>Et Gaston, tout au long de l’œuvre de Franquin, est également sensible aux ecchymoses, bosses ou cicatrices étranges après des chocs et autres traumatismes sportifs ou de bureau (par exemple gag 877, page 816). Il s’en protège avec toutes sortes de dispositifs anti-chute : en s’enroulant dans un matelas (page 236), ou bien avec un « déambulateur » (gag 10A, page 37), ou encore un lance-flamme (gag 285, page 209) en présence de verglas.</p>
<p>À ce tableau déjà bien fourni, on peut ajouter que les complications musculo-squelettiques et les probables luxations/subluxations articulaires sont bien présentes dans l’histoire de Gaston, comme en témoignent ses nombreuses immobilisations par plâtre et autres passages à l’hôpital : par exemple, une fracture ou une luxation du poignet gauche après avoir voulu cassé un biscuit lors d’un entraînement de karaté (gag 418b, page 314), ou une noix (gag 539b, page 451). </p>
<p>Enfin, son hypermobilité articulaire semble familiale, si l’on en croit les dessins de l’oncle de Gaston (page 909) et de son neveu (page 909, publicité pour dilektron parue dans le Spirou n°1805, et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gastoon">« Gastoon »</a> aux éditions Marsu production).</p>
<h2>Un fort faisceau d’arguments</h2>
<p>Avant dernier indice sur lequel s’attarder : les nombreuses onomatopées qu’utilise Gaston pour exprimer des phénomènes douloureux, allant de « Aïe !Aïe ! » à « Gargll RRâââââh » ou « AOUHH » sont présentes de manière régulière dans tous les albums. « M’enfin »… on peut difficilement en conclure que notre garçon de bureau présente des douleurs chroniques quotidiennes depuis plus de 3 mois. </p>
<p>En revanche, certains auteurs rapportent dans le SEDh une frilosité dont souffre aussi Gaston. Or, Gaston explique que le « froid l’engourdit » (gag 273, page 203), ce qui le pousse à utiliser de nombreux gadgets pour se réchauffer (gag 380, page 267).</p>
<p>Pour terminer, tentons de vérifier si ces potentielles manifestations cliniques pourraient être expliquées par un autre diagnostic. Parmi les antécédents médicaux connus de Gaston, on retiendra une simple allergie au mot « effort », diagnostiqué dans un gag (le 422b, page 318). Aucun élément supplémentaire ne nous conduit sur la piste d’autres maladies, et il n’y a pas davantage de fragilité excessive de la peau (même à l’épreuve des flammes et autres traumatismes et brûlures chimiques) qui pourrait nous orienter vers une autre forme de SED. Enfin, on ne doutera pas du fait que Gaston ne présente probablement pas de troubles somatoformes.</p>
<p>Pour conclure, si, faute de test génétique disponible (et d’un examen clinique bien conduit…), il est impossible de conclure avec certitude à la présence d’un SEDh chez Gaston, un fort faisceau d’arguments permet néanmoins de penser que notre antihéros souffrait d’un tel syndrome… Ou, à tout le moins, d’une hypermobilité articulaire importante !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/130907/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mickaël Dinomais ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des articulations hypermobiles, une peau de pêche hyperextensible, des bras démesurés, des douleurs récurrentes, etc. À l’évidence, Gaston souffrait d’un syndrome rare touchant le tissu conjonctif…Mickaël Dinomais, Professeur de médecine en Médecine Physique et Réadaptation, Université d'AngersLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1224942019-12-11T19:58:46Z2019-12-11T19:58:46ZLes troubles psychiatriques peuvent cacher des maladies rares<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/306367/original/file-20191211-95159-1p19qhl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5414%2C3620&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les maladies rares provoquant des troubles psychiatriques sont parfois difficiles à mettre en évidence.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/womans-head-hidden-by-soft-cloud-636371048?src=b2ec3d11-a0b0-4832-9852-70be99dc8c89-1-31">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Myopathies, maladie des os de verre, amaurose congénitale de Leber, lupus érythémateux… Dans l’opinion, l’expression « maladie rare » évoque souvent des maladies dont les symptômes seraient avant tout physiques.</p>
<p>On sait cependant aujourd’hui qu’un grand nombre de ces maladies génèrent aussi des symptômes neurologiques ou psychiatriques. Les anomalies de l’interaction sociale et les comportements stéréotypés observés dans les <a href="https://www.autismspeaks.org/autism-diagnosis-criteria-dsm5">troubles du spectre autistique</a> sont par exemple présents dans un large éventail de maladies rares : X-fragile, mutation du gène ADNP, mutation du gène SHANK3…</p>
<p>Le corollaire de ce constat est que certains troubles psychiatriques pourraient aussi avoir pour origine des maladies rares non identifiées. Ainsi, on sait que plus de <a href="https://www.sfari.org/resource/sfari-gene/">1 000 gènes différents peuvent être impliqués dans les troubles du spectre autistique</a>. Il est possible qu’une fraction non négligeable de ce trouble résulte de l’addition de nombreuses maladies rares.</p>
<p>En identifiant ces maladies, qui sont rares individuellement, mais nombreuses collectivement, on peut espérer préciser le diagnostic pour un grand nombre de patients.</p>
<h2>Quand les maladies rares provoquent des troubles psychiatriques</h2>
<p>Une maladie est dite rare lorsqu’elle concerne moins d’une personne sur 2 000. Plus de 7 000 affections correspondant à cette définition <a href="https://fondation-maladiesrares.org/les-maladies-rares/les-maladies-rares-bis/la-definition-des-maladies-rares/">ont été décrites à ce jour</a>, et cette liste s’allonge un peu plus chaque semaine. Aujourd’hui, au total, 3 à 4 millions Français sont concernés par l’une ou l’autre de ces maladies rares, dont la plupart (environ 80 %) <a href="https://fondation-maladiesrares.org/les-maladies-rares/les-maladies-rares-bis/la-definition-des-maladies-rares/">ont une origine génétique</a>.</p>
<p>Un certain nombre d’entre elles se traduisent par des troubles psychiatriques. Grâce aux avancées considérables réalisées dans le champ de la psychiatrie génétique, plusieurs sont désormais bien connues. C’est le cas par exemple de la <a href="http://www.generation22.fr/actualites/5-fiches-points-cles-pour-la-prise-en-charge-psychiatrique-dans-la-deletion-22q11/">délétion d’une partie du chromosome 22</a> (del22q11), qui ont 40 % de risque de développer une schizophrénie à l’adolescence.</p>
<p>Par ailleurs, certaines formes extrêmes de troubles psychiatriques sont en elles-mêmes des maladies rares. Par exemple, la schizophrénie se déclenche généralement entre 15 et 30 ans, mais elle peut parfois débuter dans l’enfance. Ces <a href="https://www.chu-nantes.fr/schizophrenies-a-debut-precoce-chez-l-enfant--37445.kjsp">schizophrénies très précoces</a> affectent environ 0,03 % de la population, bien loin des 1 % de la forme classique.</p>
<p>Mais les liens entre maladie rare et trouble psychique vont bien au-delà. On sait que certaines maladies métaboliques rares peuvent aussi se traduire par des symptômes psychiatriques. Ainsi, le <a href="http://www.tousalecole.fr/content/d%C3%A9ficit-en-cr%C3%A9atine#simple-table-of-contents-5">déficit en créatine</a> maladie rare dans laquelle la créatine, molécule permettant de fournir une réserve d’énergie au cerveau et aux muscles, est insuffisamment produite, peut entraîner des symptômes autistiques ou une déficience intellectuelle. Administrer aux patients la molécule manquante pourrait améliorer les symptômes.</p>
<p>Il arrive enfin que certaines maladies inflammatoires rares <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27063957">provoquent des dépressions ou de l’anxiété</a>, ou encore que certaines maladies auto-immunes, voire certaines infections, engendrent des troubles psychiatriques. Pour preuve, le <a href="https://www.lemonde.fr/blog/realitesbiomedicales/2019/03/22/sa-schizophrenie-etait-due-au-chat-%E2%80%A8%E2%80%A8/">cas de ce jeune patient américain</a> qui, atteint par une évolution atypique de la maladie des griffes du chat, <a href="https://theconversation.com/podcast-lorsque-la-folie-est-soignee-par-un-dermatologue-121572">a développé une schizophrénie</a>. Après une longue et pénible errance diagnostique, son trouble psychiatrique a finalement pu être traité efficacement par des antibiotiques.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/podcast-lorsque-la-folie-est-soignee-par-un-dermatologue-121572">Podcast : Lorsque la folie est soignée par un dermatologue !</a>
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</p>
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<p>Avant de poser un diagnostic de trouble psychiatrique et de prescrire un traitement, les médecins doivent donc s’assurer que ce trouble ne résulte pas d’une autre maladie, qui serait non psychiatrique. Une tâche singulièrement compliquée par la profusion des maladies rares existantes.</p>
<h2>Le défi du dépistage</h2>
<p>Le principal obstacle auquel font face les médecins est la quantité de maladies rares identifiées. Comment passer en revue l’ensemble des 7 000 affections répertoriées sans multiplier les examens inutiles pour le patient ?</p>
<p>Dans certains cas, il est possible d’identifier des symptômes non psychiatriques : par exemple, les patients avec <a href="https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2016-02/pnds_-_deletion_22q11_2.pdf">délétion 22q11</a>, à haut risque de schizophrénie, sont parfois repérés car ils souffrent également d’anomalie cardiaque. Cependant d’autres maladies rares ne s’expriment que par des symptômes psychiatriques.</p>
<p>La réalisation d’un bilan large systématique quand certaines caractéristiques sont présentes est une autre possibilité de dépistage : troubles psychiatriques résistants aux traitements classiques, formes précoces ou atypiques, formes familiales…</p>
<p>Enfin, l’arrivée de techniques d’analyse permettant de rechercher des anomalies génétiques à grande échelle pourrait permettre d’identifier efficacement et rapidement les patients dont les troubles sont dus à des maladies rares.</p>
<h2>Des bénéfices médicaux et psychologiques</h2>
<p>Identifier une maladie rare sous-jacente à un trouble psychiatrique présente des intérêts médicaux évidents. Savoir que l’on est porteur d’une délétion 22q11 offre par exemple l’opportunité d’intervenir précocement en cas de développement d’une schizophrénie à l’adolescence. Agir tôt est important, car ce trouble répond d’autant mieux au traitement que les symptômes sont pris en charge rapidement.</p>
<p>L’identification d’une maladie rare permet parfois aussi de mieux prévenir la survenue de complications. La délétion 22q11, qui augmente le risque de schizophrénie, s’accompagne notamment d’un taux de calcium anormalement bas durant les premières semaines de vie. Parfois, ce problème peut perdurer ou réapparaître, au cours des phases importantes de la croissance. Identifier la délétion permet de dépister du même coup le problème de calcium, qui serait passé inaperçu.</p>
<p>Dans certains cas, l’information sur la maladie rare fournit aussi des indications sur les façons <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/31685813">d’adapter le traitement du trouble psychiatrique</a>. Ainsi, une dépression causée par une maladie inflammatoire rare peut parfois bénéficier d’un traitement comme la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0889159119304386">kétamine</a>, qui n’est habituellement pas utilisé en première intention. Le médecin peut aussi décider de changer de traitement s’il en existe un spécifique de la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17689147">maladie rare concernée</a>.</p>
<p>Outre les bénéfices purement médicaux, le fait de poser un diagnostic précis peut aussi s’accompagner de bénéfices psychologiques. Les familles ont parfois tendance à surévaluer le poids de l’environnement et de leur propre rôle dans l’apparition des troubles psychiatriques. Informer l’entourage et le patient sur les causes biologiques des troubles permet de les déculpabiliser, car personne n’est responsable de sa génétique. Le diagnostic peut alors être source de soulagement psychique.</p>
<p>De plus, alors que les troubles psychiatriques s’accompagnent souvent d’un déni, objectiver l’anomalie sous-jacente permet à certains patients de mieux accepter leur maladie. Et en réaffirmant la prépondérance de la biologie sur la responsabilité de l’individu, on peut espérer changer l’opinion des citoyens envers les maladies psychiatriques, qui restent encore trop stigmatisées.</p>
<h2>Poursuivre les recherches en associant médecins, chercheurs, patients et familles</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/305723/original/file-20191207-90580-1rlqd5g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305723/original/file-20191207-90580-1rlqd5g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305723/original/file-20191207-90580-1rlqd5g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=776&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305723/original/file-20191207-90580-1rlqd5g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=776&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305723/original/file-20191207-90580-1rlqd5g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=776&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305723/original/file-20191207-90580-1rlqd5g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=975&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305723/original/file-20191207-90580-1rlqd5g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=975&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305723/original/file-20191207-90580-1rlqd5g.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=975&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Répartition des centres de référence et les centres de compétences pour les maladies rares à expression psychiatriques.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.defiscience.fr/filiere/organisation/">DefiScience</a></span>
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</figure>
<p>En France, la prise en charge des maladies rares à expression psychiatrique et la recherche sur le sujet sont assurées par la <a href="http://www.defiscience.fr/">filière DefiScience</a>. Celle-ci regroupe trois <a href="https://fondation-maladiesrares.org/les-maladies-rares/les-maladies-rares-bis/les-centres-de-references-et-de-competences/">centres de références</a> (CRMR) et plusieurs centres de compétences répartis sur le territoire.</p>
<p>Ces structures ont des missions de diagnostic et de soins mais aussi de recherche, de formation, de discussion entre les différents partenaires, les malades et leurs familles. Les médecins traitants et les psychiatres peuvent demander des avis aux psychiatres de ces centres. De plus en plus souvent, les projets de recherche mis en place dans les CRMR sont menées dans une perspective participative, les chercheurs travaillant avec les associations de patients et les familles.</p>
<p>Grâce à ces travaux, on peut espérer mieux appréhender les liens entre maladies rares et troubles psychiatriques, et ainsi mieux personnaliser les soins afin de traiter les causes plutôt que les symptômes. Les maladies plus fréquentes pourraient aussi bénéficier de ces recherches, à l’image de ce qui s’est passé pour la maladie d’Alzheimer : l’identification de gènes impliqués dans les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22312439">formes familiales rares</a> a permis de mieux comprendre la biologie des formes fréquentes.</p>
<hr>
<p><em>Pour en savoir plus :<br>
– les sites des CRMR de <a href="http://speapsl.aphp.fr/#/cref/mr">La Pitié Salpêtrière en pédopsychiatrie</a>, du groupe hospitalier universitaire <a href="http://www.ch-sainte-anne.fr/Actualites/Le-CH-Sainte-Anne-labellise-Centre-de-reference-des-maladies-rares-a-expression-psychiatrique">Paris Psychiatrie et Neurosciences à Sainte Anne</a> et du <a href="http://www.ch-le-vinatier.fr/offre-de-soins/la-recherche/genopsy-2098.html">Vinatier</a>, à Lyon ;<br>
– le site du programme européen <a href="https://www.cost.eu/actions/CA17130">COST Action 17130</a>, mis en place pour promouvoir les tests génétiques et le conseil génétique en psychiatrie.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/122494/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Boris Chaumette a reçu au cours des trois dernières années des rémunérations du laboratoire Janssen pour la participation à des manifestations scientifiques. Il reçoit des financements de la fondation Bettencourt-Schueller pour ses recherches.</span></em></p>En identifiant les maladies rares responsables de troubles psychiatriques, on peut espérer améliorer leur diagnostic et mieux adapter les traitements. Explications.Boris Chaumette, Psychiatre, neurobiologiste, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1138832019-03-21T23:05:24Z2019-03-21T23:05:24ZUn médicament sans brevet pour vaincre enfin la maladie du sommeil<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/264669/original/file-20190319-60982-iskwbc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En RDC, des équipes mobiles mènent des campagnes de diagnostic, comme ici en juin 2018.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Neil Brandvold/DNDi</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em><a href="https://www.dndi.org/about-dndi/our-people/leadership/jean-francois-alesandrini/">Jean‑François Alesandrini</a>, conseiller auprès de la direction générale de DNDi, est co-auteur de cet article.</em></p>
<hr>
<p>En novembre 2018, l’Agence européenne du médicament a rendu un <a href="https://www.dndi.org/2018/media-centre/langues-press-releases/ema-recommande-approbation-fexinidazole-premier-traitement-entierement-oral-maladie-du-sommeil/">avis favorable</a> pour l’enregistrement du Fexinidazole, un nouveau médicament contre la <a href="https://sleep.dndi.org/fr.html">maladie du sommeil</a> (ou trypanosomiase humaine africaine).</p>
<p>En décembre de la même année, l’agence réglementaire de la République démocratique du Congo enregistrait cette nouvelle entité chimique qui permettra d’enrayer, voire contribuera à éliminer, cette affection transmise par les mouches tsé-tsé, qui compte parmi les plus anciennes maladies tropicales.</p>
<p>Les conditions dans lesquelles cette molécule a été produite, singulières à bien des égards, témoignent de la puissance de l’innovation « en communs » dans le <a href="https://www.afd.fr/en/dndi-distinctive-illustration-commons-area-public-health">domaine de la santé publique</a>.</p>
<h2>La maladie du sommeil, une affection fatale</h2>
<p><a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/trypanosomiasis-human-african-(sleeping-sickness)">65 millions de personnes</a>, vivant principalement au sein des régions rurales les plus pauvres et les plus reculées d’Afrique subsaharienne, sont des victimes potentielles de la maladie du sommeil.</p>
<p>Après une phase peu symptomatique caractérisée par des fièvres, la pathologie évolue irrémédiablement vers un stade neurologique. Les malades souffrent alors de graves perturbations du cycle du sommeil, de paralysies et d’une détérioration mentale progressive, évoluant, en l’absence de traitement, vers le coma et la mort. Les malades et leur famille sont immédiatement stigmatisés, affaiblis, incapables de travailler, ce qui accentue encore leur pauvreté.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/gXdNy0Ketuk?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Un rêve de médecin », vidéo sur le combat contre la maladie du sommeil (DNDi/YouTube, 2019).</span></figcaption>
</figure>
<p>Le seul traitement disponible à ce jour reposait sur 14 perfusions, combinées à un traitement oral pendant 7 jours, nécessitant que les patients soient hospitalisés. Seule une ponction lombaire douloureuse et complexe permettait de déterminer le stade de la maladie. Difficile à transporter et à stocker, le traitement posait de vrais défis dans des zones peu accessibles.</p>
<p>Le Fexinidazole, en se présentant uniquement sous la forme de comprimés, constitue une avancée majeure dans le traitement de la maladie. L’histoire de ce médicament mérite qu’on s’y arrête.</p>
<h2>Une plate-forme collaborative et ouverte</h2>
<p>Cette molécule est l’aboutissement d’un partenariat public-privé d’un genre nouveau. C’est autour d’une plate-forme de recherche « ouverte » qu’ont collaboré la fondation internationale Initiative médicaments contre les maladies négligées <a href="https://www.dndi.org/">(DNDi)</a>, Sanofi, géant de l’industrie pharmaceutique, et des experts originaires des pays endémiques.</p>
<p>Située à Kinshasa en République démocratique du Congo, cette plate-forme (appelée <a href="https://www.dndi.org/strengthening-capacity/hat-platform/">HAT</a>) a permis pendant une décennie de créer ou de réhabiliter des centres d’essais cliniques, de former du personnel de santé et d’assurer le transfert de technologie et de savoir-faire.</p>
<p>Avec l’équipe de DNDi, les professionnels congolais de la santé ont conduit les essais cliniques et constitué les données cliniques ; ces dernières ont permis de former un dossier réglementaire, évalué et validé par l’agence européenne du médicament. Le Fexinidazole résulte ainsi d’un modèle innovant, centré sur la collaboration Nord/Sud.</p>
<h2>Une offre thérapeutique fortement déséquilibrée</h2>
<p>Depuis une vingtaine d’années, les maladies tropicales dites <a href="https://www.who.int/topics/tropical_diseases/factsheets/neglected/fr/">« négligées »</a>, selon la terminologie des experts de l’Organisation mondiale de la santé, ne bénéficient pas de l’attention des laboratoires pharmaceutiques. L’absence de marché et de retour sur investissement (avec les marges habituelles des laboratoires) ont dans ce domaine tari la recherche scientifique et médicale.</p>
<p>Au début des années 2000, l’expression <a href="http://announcementsfiles.cohred.org/gfhr_pub/assoc/s14792e/s14792e.pdf">« 10/90 gap »</a> alerte sur le déséquilibre majeur des investissements de la recherche en santé en faveur des maladies touchant les pays les plus riches. Des pans immenses de la population mondiale <a href="https://www.jle.com/fr/revues/mst/e-docs/derriere_les_maladies_tropicales_negligees_il_y_a_des_malades..._trop_negliges_307564/article.phtml">sont laissés à l’écart des progrès scientifiques</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264692/original/file-20190319-60969-1v4i2aa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264692/original/file-20190319-60969-1v4i2aa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264692/original/file-20190319-60969-1v4i2aa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264692/original/file-20190319-60969-1v4i2aa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264692/original/file-20190319-60969-1v4i2aa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264692/original/file-20190319-60969-1v4i2aa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264692/original/file-20190319-60969-1v4i2aa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jusqu’à présent, une ponction lombaire systématique était nécessaire pour déterminer le choix du traitement.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Neil Brandvold/DNDi</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette faille de l’offre et de l’accès aux soins est dramatiquement aggravée le 1<sup>er</sup> janvier 1995 avec la signature des Accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, les <a href="https://www.wto.org/french/tratop_f/trips_f/t_agm0_f.htm">ADPIC</a>. Cet accord international rend obligatoire le brevetage des molécules thérapeutiques dans tous les pays signataires. Un marché mondial unifié de médicaments brevetés se met en place, au détriment des pays en développement.</p>
<p>Cette extension sans précédent de la propriété intellectuelle nourrit des débats vigoureux et motive la création au début des années 2 000 d’entités de développement de produits d’un nouveau type : les <em>product development partnerships</em> (PDP).</p>
<h2>Laboratoires virtuels</h2>
<p>Structures flexibles et souples, les PDPs opèrent comme des laboratoires virtuels. Elles assurent la mise en commun de compétences et de savoirs issus d’institutions privées comme publiques, pour conduire des programmes de recherche en santé publique.</p>
<p>Les PDPs permettent une circulation efficace des savoirs, depuis l’identification initiale de molécules possédant un potentiel thérapeutique à leur enregistrement en tant que médicament (soit une durée de développement s’étendant sur 10 à 13 ans). Ce fonctionnement en mode ouvert (ou <em>open source</em>) sert un objectif commun : la mise au point d’un médicament, d’un vaccin ou d’un diagnostic.</p>
<p>DNDI est l’un de ces partenariats. Lancée en 2003 par cinq institutions de recherche publiques originaires d’Inde, du Brésil, du Kenya, de Malaisie et de France, et avec le soutien de l’OMS, cette fondation a pour objectif de promouvoir l’innovation pour favoriser l’accès des plus pauvres à des traitements adaptés pour les maladies négligées.</p>
<p>Le rôle de Médecins sans frontières – autre membre fondateur de DNDI – est en ce sens crucial pour assurer le lien entre l’innovation scientifique et l’accès rapide des patients aux produits.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264691/original/file-20190319-60972-1r5seb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264691/original/file-20190319-60972-1r5seb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264691/original/file-20190319-60972-1r5seb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264691/original/file-20190319-60972-1r5seb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264691/original/file-20190319-60972-1r5seb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264691/original/file-20190319-60972-1r5seb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264691/original/file-20190319-60972-1r5seb7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Xavier Vahed/DNDi</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<h2>La dynamique des communs change la donne</h2>
<p>Bien qu’encore en phase de consolidation, le modèle de R&D proposé par DNDi bouscule déjà les pratiques qui prévalaient jusqu’ici dans l’industrie de production des médicaments.</p>
<p>Il place d’abord le patient au centre de ses objectifs. Sans déroger aux standards internationaux de recherche clinique, cela se traduit par des produits adaptés aux besoins et aux conditions sanitaires, abordables et distribués à prix coûtant, sans brevet, destinés au plus grand nombre et aux plus démunis. Dans cet objectif, DNDi a déployé <a href="https://www.dndi.org/strengthening-capacity/">quatre plates-formes cliniques</a> destinées à renforcer les potentiels locaux du Sud, à l’image de celle sur la maladie du sommeil.</p>
<p>Comme le montre la genèse du Fexinidazole, DNDi déploie un modèle inédit qui ne va pas sans rappeler les dynamiques de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=CXwNNLPQEuM">communs</a> qui se construisent autour d’une variété de ressources, naturelles (eaux souterraines, pâturages, etc.) ou <a href="http://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-Le_retour_des_communs-9791020902726-1-1-0-1.html">informationnelles</a> (logiciels libres, encyclopédies en libre accès, etc.). Les médicaments contre les maladies négligées sont traités comme des ressources autour desquelles DNDi et les plates-formes s’organisent en vue de leur enrichissement.</p>
<p>La propriété intellectuelle exclusive est ici abandonnée et remplacée par un <a href="http://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers14-03/010061135.pdf">faisceau de droits</a> : un ensemble d’outils juridiques qui lient les partenaires, permettent l’accès à de l’information partagée et écartent les clauses d’exclusivité. En ce sens, DNDi et ses partenaires pratiquent un modèle fortement original d’innovation ouverte et en communs.</p>
<h2>Quelles perspectives pour ces nouveaux modèles ?</h2>
<p>DNDi a déjà mis sur le marché <a href="https://www.dndi.org/achievements/">huit nouveaux traitements</a>, mais le Fexinidazole est la première entité chimique complètement nouvelle et entièrement développée par l’organisation et ses partenaires. Avec ses objectifs, son fonctionnement, la gouvernance de ses projets, DNDi concourt à faire de la santé publique un bien commun.</p>
<p>L’efficacité des modèles pharmaceutiques traditionnels est aujourd’hui fortement <a href="https://editionsladecouverte.fr/catalogue/index-__conomie_du_m__dicament-9782707196149.html">questionnée</a> : le manque de rentabilité est mis en avant par les laboratoires, malgré les prix exorbitants des nouveaux médicaments sur des pathologies comme le cancer ou l’Hépatite C par exemple. Dans ce contexte, l’aboutissement du développement du Fexinidazole montre que le modèle mis en œuvre par DNDi et ses partenaires pourrait servir d’autres expérimentations.</p>
<p>Après 15 ans d’expérience, DNDi élargit son champ d’action des maladies négligées aux patients négligés au Nord comme au Sud. Ce faisant, DNDi s’invite <em>de facto</em> à la table des grands acteurs de l’innovation pharmaceutique, pour proposer d’autres manières de faire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/113883/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’histoire du tout nouveau médicament contre la maladie du sommeil mérite qu’on s’y arrête. Elle illustre la puissance des innovations « en communs » dans le domaine de la santé publique.Stéphanie Leyronas, Chargée de recherche sur les communs, Agence française de développement (AFD)Benjamin Coriat, Professeur Sciences Economiques, Université Sorbonne Paris NordNadège Legroux, Consultante en recherche sur les communs, Agence française de développement (AFD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1041992018-10-02T15:47:41Z2018-10-02T15:47:41ZMaladie de Charcot : 150 ans après sa découverte, que savons-nous ?<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2018 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a></em></p>
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<p>Quel est le lien entre le physicien théoricien et cosmologiste <a href="https://theconversation.com/stephen-de-cambridge-visionnaire-de-linfini-93391">Stephen Hawking</a>, l’écrivain et scénariste <a href="https://www.telerama.fr/cinema/le-scenariste-dramaturge-et-metteur-en-scene-sam-shepard-est-mort,161290.php">Sam Shepard</a>, et l’acteur et gentleman britannique <a href="http://www.premiere.fr/Star/David-Niven">David Niven</a> ? Tous ont fait preuve de génie ou de talent, et ont été récompensés par de prestigieux prix scientifiques, un Prix Pulitzer, ou un Academy Award. Tous ont également souffert d’une même maladie, la sclérose latérale amyotrophique (SLA).</p>
<h2>La plus courante des maladies rares</h2>
<p>Une maladie est dite « rare » si elle affecte moins d’une personne sur 2 500, ce qui équivaut en France à moins de 30 000 personnes atteintes. C’est ce que l’on appelle la <a href="https://www.ined.fr/fr/lexique/prevalence-d-une-maladie/">prévalence</a> de la maladie. Aujourd’hui la SLA affecte en France 8 000 personnes. La SLA est donc bien une maladie rare, mais il s’agit toutefois de la plus fréquente des maladies rares. Plus de 1 000 nouveaux cas de SLA sont diagnostiqués chaque année dans notre pays, ce qui représente 4 nouveaux cas par jour (ces chiffres correspondent à l’<a href="https://www.ined.fr/fr/lexique/incidence-d-une-maladie/">incidence</a> de la maladie).</p>
<p>Cette maladie est aussi appelée Maladie de Charcot, du nom du neurologue et professeur d’anatomie pathologique <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/j-m-charcot-enseigne-la-neurologie-a-la-salpetriere/">Jean Martin Charcot</a>, qui l’a décrite dans les années 1860 en France. Aux États-Unis elle est aussi connue sous l’appellation de maladie de <a href="https://quebec.huffingtonpost.ca/jacques-beaulieu/sclerose-laterale-amyotrophique_b_9991248.html?guccounter=1&guce_referrer_us=aHR0cHM6Ly93d3cuZ29vZ2xlLmZyLw&guce_referrer_cs=ZLAbLkaIVZM5N7eEqINaHQ">Lou Gehrig</a> (<em>Lou Gehrig’s disease</em>), du nom du fameux joueur de base-ball des Yankees décédé de cette maladie en 1939.</p>
<p>La SLA est une maladie neurodégénérative se caractérisant <a href="https://youtu.be/1uGDarQU4x0">par la mort des neurones impliqués dans la motricité</a> : les neurones moteurs (ou motoneurones), qui relient le cerveau et la moelle épinière aux muscles du corps. Ces cellules nerveuses sont localisées soit dans le cerveau (motoneurones centraux), soit dans le <a href="https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/biologie-tronc-cerebral-13001/">tronc cérébral</a> et la moelle épinière (motoneurones périphériques). Leur mort se traduit par un durcissement (Sclérose) de la partie latérale (latérale) de la moelle épinière et une fonte des muscles (Amyotrophique).</p>
<p>Il ne faut pas confondre la SLA avec une autre maladie dont le nom est en partie similaire, la sclérose en plaques (SEP).</p>
<h2>SLA et SEP : des symptômes et des causes qui diffèrent</h2>
<p>Si la sclérose latérale amyotrophique et la sclérose en plaques sont toutes deux des maladies neurodégénératives, la comparaison s’arrête là : leurs symptômes et leurs causes sont en effet différents.</p>
<p>Les premiers symptômes d’une SLA sont souvent des crampes et des secousses musculaires (<a href="https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/medecine-fasciculation-3360/">fasciculations</a>), ou parfois des difficultés à avaler ou à parler. La maladie évolue ensuite vers des difficultés d’usage des bras et des jambes, puis une paralysie. Chez 80 % des patients, la dégénérescence est rapide, et la maladie est responsable d’un décès dans les 3 à 5 ans après la manifestation des premiers symptômes.</p>
<p>La SEP, quant à elle, associe divers symptômes, comme des sensations de picotements, d’engourdissements, de faiblesse musculaire, des pertes d’équilibre, lesquels sont souvent accompagnés de fatigue. Contrairement à la SLA, la SEP n’est pas fatale. L’espérance de vie d’une personne atteinte de SEP est en effet proche de celle de la population générale.</p>
<p>Les causes de la dégénérescence des neurones dans la SLA et la SEP sont également différentes. La SLA résulte de la mort des neurones moteurs, aussi appelés motoneurones, dans le cerveau et la moelle épinière. Les causes de cette mort sont encore mal connues, elles apparaissent multiples. Les motoneurones présenteraient en effet des problèmes de production d’énergie, de transport de substances à l’intérieur de leurs longs prolongements (axones), et de communication (<a href="https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/biologie-synapse-261/">synapses</a>) avec les neurones voisins et les muscles.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/238937/original/file-20181002-85629-ii8e6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/238937/original/file-20181002-85629-ii8e6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/238937/original/file-20181002-85629-ii8e6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/238937/original/file-20181002-85629-ii8e6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/238937/original/file-20181002-85629-ii8e6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/238937/original/file-20181002-85629-ii8e6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=368&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/238937/original/file-20181002-85629-ii8e6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=368&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/238937/original/file-20181002-85629-ii8e6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=368&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Anatomie d’un neurone. L’axone est entouré d’une gaine de myéline, substance grasse qui augmente la vitesse de propagation de l’influx nerveux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>La SEP se définit quant à elle par l’apparition de lésions, aussi appelées plaques, qui apparaissent dans le cerveau, la moelle ou les nerfs optiques, et affectent donc diverses catégories de neurones. Il s’agit d’une maladie <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/maladies-auto-immunes">auto-immune</a> : le système immunitaire dysfonctionne et s’attaque aux composants normaux de l’organisme, en l’occurrence la couche graisseuse qui entoure les axones, ce qui entraîne la mort des neurones. Cette couche, appelée gaine de myéline, joue un rôle d’isolant qui permet d’accélérer le transport du signal électrique le long des axones.</p>
<h2>Une seule maladie, mais des causes multiples</h2>
<p>La SLA est une maladie dite complexe. Elle résulte en effet de diverses causes, qui s’ajoutent les unes aux autres jusqu’à atteindre un seuil déclencheur de la maladie. Les scientifiques parlent alors d’<a href="http://www.cnrtl.fr/definition/%C3%A9tiologie">étiologie</a> multifactorielle, et nomment « facteurs de risques » ces causes qui s’additionnent chez un individu donné. Les facteurs de risques de la SLA sont :</p>
<ul>
<li><p>un âge avancé : la SLA apparaît souvent entre 55 et 60 ans, un âge associé à une certaine « fatigue » des neurones caractérisée par une communication moins efficace entre neurones, du fait de connexions altérées ;</p></li>
<li><p>des facteurs environnementaux : ceux-ci sont encore mal identifiés. On peut toutefois citer l’exposition à <a href="http://www.bdsp.ehesp.fr/Base/482291/">des métaux lourds et à certaines toxines</a>, mais cela doit être confirmé ;</p></li>
<li><p>des facteurs génétiques propres à chaque individu : ces facteurs ont vu leur nombre croître de manière exponentielle depuis 1993, date de la découverte du premier gène impliqué dans la maladie.</p></li>
</ul>
<h2>La SLA n’est généralement pas familiale</h2>
<p>Dans 9 cas sur 10, la SLA apparaît isolée dans une famille, chez une seule personne. On parle alors de SLA sporadique. Les causes de ces SLA sporadiques combinent l’âge, des facteurs environnementaux, métaboliques et des facteurs génétiques.</p>
<p>Dans 1 cas sur 10, la maladie correspond à une forme familiale : on considère qu’une SLA est familiale lorsqu’au moins deux personnes au sein d’une même famille ont une SLA (ou l’ont eu et en sont décédées). Ces SLA dites familiales sont causées par une anomalie d’un ou de quelques gènes, parmi la vingtaine de gènes connus pour être impliqués dans la maladie. Dans la moitié des familles dont des membres ont présenté une SLA, une cause génétique est identifiée.</p>
<h2>La lutte se poursuit</h2>
<p>La mobilisation de nombreux acteurs autour des chercheurs, comme les associations impliquant les patients (telles que l’<a href="https://www.arsla.org/">ARSLA</a>), a permis de mieux cerner la maladie et ses causes. Ces nouvelles connaissances aboutissent à la mise en place de nombreux programmes de recherche, comme le programme Intrabals de l’<a href="https://ibrain.univ-tours.fr/">Unité 1253 de l’Inserm, Université de Tours</a>. Financé par la Région Centre Val-de-Loire en lien avec le Laboratoire d’Excellence (Labex) <a href="http://mabimprove.univ-tours.fr/">MabImprove</a>, il a pour objectif de bloquer l’accumulation toxique d’une protéine dans les motoneurones grâce à des anticorps particuliers, appartenant à la catégorie des <a href="https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01219807/document#page=43">intracorps</a> (anticorps produits et demeurant à l’intérieur des cellules).</p>
<p>Par ailleurs, des études internationales sont en cours pour identifier de nouveaux facteurs génétiques de la maladie, telle que l’<a href="https://www.projectmine.com/">étude MINE</a> à laquelle participe l’Unité 1253 et les Centres Maladies Rares sur la SLA du <a href="https://www.chu-tours.fr/">CHU de Tours</a> et de Limoges (<a href="https://portail-sla.fr/">Filière de soins Filslan</a>.</p>
<p>Plus de 150 ans après sa description par Jean Martin Charcot, la SLA demeure incurable. Néanmoins, grâce à cette mobilisation, de nouvelles pistes de recherche sont explorées en vue d’aboutir le plus rapidement possible à des traitements efficaces.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/104199/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Patrick Vourc'h a reçu des financements de l'ARSLA.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christian Andres a reçu des financements de l'Inserm, de l'université de Tours ainsi que du programme hospitalier de recherche clinique METABALS . Il est membre de l'association Biotechnocentre, qui promeut la recherche en région Centre-Val de Loire.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Philippe Corcia a reçu des financements de Fondation Brou de Laueriere. II est membre de Conseil d''administration de l'ARSla, membre de l'ENCALS. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Hélène Blasco et Philippe Couratier ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Aussi connue sous le nom de sclérose latérale amyotrophique, la maladie de Charcot est aujourd’hui encore incurable. Mais la recherche progresse.Patrick Vourc'h, Professeur des Universités - Praticien Hospitalier (PU-PH), Inserm U1253, Université de ToursChristian Andres, Enseignant chercheur, Université de ToursPhilippe Corcia, Enseignant chercheur, Université de ToursPhilippe Couratier, Coordinateur de centre expert, Université de LimogesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/894622018-01-17T21:39:36Z2018-01-17T21:39:36ZBioéthique : doit-on soigner les embryons ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/201707/original/file-20180111-101495-13x3uvx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=647%2C0%2C4258%2C3206&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Certaines techniques permettent de corriger des anomalies génétiques sur l'embryon. Ici, manipulation sous microscope dans un cours d'embryologie. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/zeissmicro/9258850055/in/album-72157634586497769/">Zeiss/Flickr</a></span></figcaption></figure><p>En France, les tests génétiques sont autorisés avant la naissance pour certaines pathologies héréditaires graves comme la maladie de Hungtinton ou la mucoviscidose. Ils peuvent être réalisés sur un fœtus – on parle alors d’un diagnostic « prénatal » car réalisé dans l’utérus. Si les mêmes tests sont réalisés sur un embryon, il s’agit d’un diagnostic dit « préimplantatoire » car pratiqué après la Fécondation in vitro (FIV) et avant l’implantation dans l’utérus. Jusqu’à tout récemment, la seule action possible en cas de détection de l’anomalie génétique était de pratiquer un avortement sur le fœtus ou de ne pas transférer l’embryon dans l’utérus.</p>
<p>Sur le fœtus, certaines interventions ont déjà pu être <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/261230132">pratiquées avec succès</a> et sont aujourd’hui envisageables. En ce qui concerne l’embryon, on n’en est pas là. Cependant, des techniques encore expérimentales ont été développées, permettant de soigner un embryon plutôt que de l’éliminer. Deux enfants sont déjà nés à la suite de telles interventions et sont – pour autant qu’on le sache – en bonne santé.</p>
<p>Un groupe du comité d’éthique de l’Inserm se penche depuis plusieurs années sur les nouvelles techniques de thérapie embryonnaire. Ses membres examinent les questions qu’elles soulèvent et, plus généralement, celles posées par les progrès scientifiques permettant d’intervenir sur les embryons humains. Les résultats de cette réflexion ont pu être communiqués <a href="https://www.inserm.fr/sites/default/files/media/entity_documents/Inserm_Note_ComiteEthique_GroupeEmbryon_decembre2017.pdf">dans une note</a>, en décembre 2017.</p>
<p>Le 18 janvier seront lancés les <a href="http://www.lemonde.fr/societe/article/2018/01/06/bioethique-des-etats-generaux-pour-ouvrir-le-debat-le-plus-largement-possible_5238174_3224.html">États généraux de la bioéthique</a>. Cette vaste consultation des citoyens précède la révision des lois de bioéthique prévue pour 2019. Elle porte sur des sujets aussi différents que l’extension de la procréation médicalement assistée (PMA) aux femmes en couple et aux femmes seules, les tests génétiques, mais aussi le dépistage de maladies avant la conception ou chez l’embryon.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/201922/original/file-20180115-101508-1apz6b5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/201922/original/file-20180115-101508-1apz6b5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/201922/original/file-20180115-101508-1apz6b5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/201922/original/file-20180115-101508-1apz6b5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/201922/original/file-20180115-101508-1apz6b5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/201922/original/file-20180115-101508-1apz6b5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/201922/original/file-20180115-101508-1apz6b5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/201922/original/file-20180115-101508-1apz6b5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Embryon au stade de 8 cellules, stade auquel est couramment pratiqué le diagnostic pré-implantatoire.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierre Jouannet</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>L’une des techniques permettant de soigner les embryons est le don de mitochondries. Elle a conduit récemment à la naissance de deux enfants, un garçon né au Mexique en septembre 2016, puis un <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/sante/grossesse/naissance-d-un-deuxieme-enfant-avec-trois-parents-biologiques_109929">autre né en Ukraine</a> en janvier 2017. Les mitochondries sont des éléments qui produisent l’énergie de nos cellules. Elles sont situées dans le cytoplasme, l’espace autour du noyau contenant les 23 paires de chromosomes porteurs des gènes dits nucléaires. Les mitochondries possèdent leur propre génome, qui peut être à l’origine de maladies héréditaires comme le <a href="http://www.orpha.net/consor/cgi-bin/OC_Exp.php?Lng=FR&Expert=255210">syndrome de Leigh</a>, lequel entraîne une dégénérescence du système nerveux central.</p>
<h2>L’enfant « à trois parents »</h2>
<p>Lors de la fécondation, seules les mitochondries de l’ovule sont transmises à l’embryon. Ainsi, les maladies mitochondriales se transmettent par la mère. Pour éviter ce risque, il est envisagé d’utiliser l’ovule d’une donneuse (contenant les mitochondries) dont on retirerait le noyau pour le remplacer par celui de la femme atteinte de la maladie. D’où l’expression d’enfant « aux trois parents » employée dans les médias, puisqu’en plus du père, deux femmes contribueraient génétiquement à la création de cet enfant.</p>
<p>Cette opération peut être réalisée juste avant la fécondation (<em>spindle transfer</em>) ou juste après, quand les pronoyaux contenant l’ADN et donc les génomes d’origine paternelle et maternelle sont bien visibles et plus facilement transférables (<em>pronuclear transfer</em>). Dans le premier cas, c’est un ovocyte (ovule) qui est énucléé, alors que dans le second, c’est un embryon précoce (à savoir la première cellule de l’embryon au stade zygote).</p>
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<span class="caption">Embryon humain au tout premier stade, une seule cellule avec 2 pronoyaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierre Jouannet</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Un médecin américain, John Zhang, a utilisé le mode de transfert avant fécondation pour aider une femme atteinte du syndrome de Leigh à avoir un enfant en bonne santé, le premier au monde né d’un don de mitochondries. Toutefois, en août 2017, l’Agence américaine du médicament (FDA) est intervenue auprès de ce médecin afin qu’il cesse ses recherches cliniques, dans la mesure où elles impliquaient la création d’un embryon génétiquement modifié. Par contre, les autorités britanniques ont autorisé le passage de la phase expérimentale à l’application clinique depuis 2015, sans naissance connue à ce jour. En France, le débat n’a pas encore débuté.</p>
<h2>Des recherches préalables sur des embryons d’espèces animales</h2>
<p>Si l’on doit un jour généraliser les techniques permettant de soigner les embryons, il faut s’assurer auparavant qu’elles ne comportent pas de risque pour les enfants futurs. Le préalable incontournable, d’un point de vue éthique, est donc d’entreprendre des recherches sur des embryons d’espèces animales, mais aussi sur des embryons humains qui ne seront pas transférés dans l’utérus dans un premier temps. En effet, les premières ne peuvent suffire, car le développement embryonnaire précoce est différent d’une espèce à une autre.</p>
<p>Concernant le don de mitochondries et bien que deux enfants soient déjà nés, toutes les questions ne sont pas résolues. <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29121011">La recherche expérimentale doit être poursuivie</a> tant sur des embryons d’animaux que sur des embryons humains. Au fur et à mesure que les techniques deviendront plus sûres et plus efficaces, le nombre d’embryons utilisés pour la recherche diminuera. À terme, le bénéfice pour les enfants futurs – et leurs parents – devrait se révéler considérable.</p>
<p>Le côté irréversible des changements induits chez l’embryon par ces techniques suscite une inquiétude légitime pour la santé de l’enfant futur. Il faut toutefois relever qu’il y a toujours une certaine prise de risque quand on agit sur les processus de la fécondation ou du développement embryonnaire précoce. Il en est ainsi de la FIV, qui a conduit à la naissance de Louise Brown, le premier « bébé éprouvette » en 1978. Les pionniers de cette technique ont fait l’objet de vives critiques pour n’avoir pas réalisé suffisamment d’expérimentations auparavant. <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23449642">Rien de grave n’est apparu</a> chez les millions d’enfants nés depuis à la suite d’une FIV, heureusement. S’il y a donc bien toujours une prise de risque dans ce domaine, elle doit cependant être réduite au minimum pour chaque nouvelle technique, grâce à des études suffisamment nombreuses.</p>
<h2>Quelle sûreté, pour le don de mitochondries ?</h2>
<p>En médecine, la sûreté d’un traitement s’évalue habituellement par une comparaison entre les bénéfices et les risques. Mais dans le don de mitochondries, il convient, dans un souci éthique, d’aborder la question de manière plus large : la technique cause-t-elle, en elle-même ou en vertu de ses conséquences directes, un tort à ceux qui sont impliqués dans le processus ? On a de bonnes raisons de penser que ce n’est pas le cas.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/lsjlVu7W6M8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Passons en revue les parties prenantes, à commencer par les médecins. Soigner constitue la vocation même de la médecine. Soigner un embryon est donc en accord avec leur déontologie. De leur côté, les parents sont demandeurs de l’intervention thérapeutique. L’enfant futur – en admettant qu’on puisse causer un tort à une entité qui n’existe pas encore – devrait en bénéficier après sa naissance et, en principe, tout au long de sa vie.</p>
<p>Quant aux embryons, ils ne sont pas des personnes comme l’a souligné le Comité consultatif national d’éthique <a href="http://www.ccne-ethique.fr/fr/publications/avis-sur-les-prelevements-de-tissus-dembryons-et-de-foetus-humains-morts#.WleBSZOdW1s">dans son avis de 1984</a>. De toute façon, loin de subir un préjudice, ils bénéficieront au contraire du traitement.</p>
<h2>La parentalité, notion biologique… ou sociale ?</h2>
<p>Une autre source d’interrogations, avec le don de mitochondries, touche à la parentalité. L’enfant, génétiquement issu de trois personnes différentes, aurait dans l’esprit de certains « trois parents ». Sur le fond, cette manière de voir les choses repose sur une conception uniquement biologique de la parentalité – exclusivement génétique, même – qui apparaît discutable. Celle-ci s’oppose à la conception sociale de cette fonction, où le projet d’enfant joue le rôle essentiel. De plus, elle sous-estime le rôle joué par la gestation (la grossesse), ainsi que l’importance de la relation qui se tisse entre les parents et l’enfant avant la naissance, puis durant l’enfance.</p>
<p>La nouvelle forme de parentalité rendue possible grâce à un don de mitochondries est-elle susceptible de causer un tort à l’enfant ? Personne ne peut le prédire, car la situation est inédite. Les deux enfants nés de cette manière n’ont… même pas deux ans. Toutefois, il existe aujourd’hui une grande variété dans les parentalités, incluant l’adoption, la procréation avec tiers donneur, les familles recomposées ou monoparentales. Et les études menées à leur sujet, comme <a href="https://www.researchgate.net/publication/316274048_Les_meres_lesbiennes_les_meres_celibataires_et_leurs_enfants_l%E2%80%99etat_des_lieux_de_la_recherche">celle publiée en 2016</a> par Michael Stambolis-Ruhstorfer de l’université Bordeaux Montaigne dans le livre <em>Procréation, médecine et don</em> (Lavoisier), ne montrent pas de préjudice pour l’enfant.</p>
<p>Une dernière préoccupation, plus métaphysique, est parfois avancée, celle d’une menace sur l’identité de la personne. En effet, pense-t-on parfois, si on modifie le génome d’un individu – et on le fait si l’on substitue les mitochondries d’une donneuse à celle de la mère –, il ne sera plus la même personne. Mais peut-on considérer que l’identité et l’essence d’une personne se réduisent à son génome ? Non, le génome n’est pas l’équivalent moderne de « l’âme », affirmait dès 2001 <a href="http://science.sciencemag.org/content/291/5505/831">dans la revue Science</a> Alex Mauron, <a href="https://www.unige.ch/medecine/ieh2/alumni/alexandremauron/">professeur en bioéthique</a> à l’Université de Genève. Il faut se méfier de « l’essentialisme génétique », avertit pour sa part la chercheuse britannique <a href="https://www.ndph.ox.ac.uk/team/camillia-kong">Camillia Kong</a>, de l’Université d’Oxford, dans <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28328372">son article paru en avril 2017</a>. L’environnement naturel et social joue un rôle décisif dans ce que nous sommes, tant dans la globalité de notre être que dans chacune de nos cellules.</p>
<p>Aussi, soigner des embryons plutôt que les éliminer apparaît comme un projet porteur d’espoir. La technique du don de mitochondries, en particulier, devrait permettre à des parents à risque de transmission de pathologies héréditaires graves d’avoir des enfants en bonne santé et ce, dans un futur proche.</p>
<hr>
<p><em>Le groupe de travail « Embryon et développement » du <a href="https://www.inserm.fr/recherche-inserm/ethique/comite-ethique-inserm-cei/groupes-reflexion-thematique-comite-ethique">comité d’éthique de l’Inserm</a> est à l’origine de la réflexion qui a nourrit cet article. Il réunit, outre son auteur, Marc Brodin (AP-HP, Université Paris 7), Christine Dosquet (AP-HP, Université Paris 7), Pierre Jouannet (Université Paris 5), Anne-Sophie Lapointe (association Vaincre les Maladies lysosomales), Jennifer Merchant (Université Paris 2) et Grégoire Moutel (Université de Normandie et CHU Caen)</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/89462/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bernard Baertschi fait partie du comité d'éthique de l'Inserm. </span></em></p>Au moment, où s’ouvrent les États généraux de la bioéthique, il est utile de réfléchir à l'utilisation des nouvelles techniques permettant de corriger des anomalies génétiques de l’embryon.Bernard Baertschi, Maître d'enseignement et de recherche en philosophie à l'université de Genève, comité d'éthique, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/881402017-11-29T20:38:37Z2017-11-29T20:38:37ZUne nouvelle piste pour expliquer les effets indésirables du Levothyrox<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/196399/original/file-20171126-21795-180u4g8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ancienne et nouvelle formule du levothyrox, un médicament notamment prescrit dans l'hypothyroïdie. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/marseille-france-august-23-2017-new-703213291?src=QcTqPYfc_7RkT5PIjyL-KQ-1-0">Gerard Bottino/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Environ 3 millions de personnes prennent, en France, du Levothyrox. On a réalisé à quel point ces patients étaient nombreux à l’occasion de la crise déclenchée par le <a href="https://eurekasante.vidal.fr/actualites/21000-levothyrox-levothyroxine-sodique-comprime-secable-nouvelle-formule-nouvelles-couleurs.html">changement de la formule de ce médicament</a> au mois de mars. 2 500 dossiers ont déjà été enregistrés dans une action collective pour « défaut d’information » <a href="http://www.leparisien.fr/aef/chutier/levothyrox-une-action-collective-s-organise-a-marseille-29-11-2017-7421556.php">qui sera engagée au civil contre le fabricant, Merck</a>, tandis que des plaintes ont <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/levothyrox/levothyrox-c-est-l-urgence-qui-me-fait-deposer-plainte-rapidement-selon-l-avocate-des-plaignants_2372603.html">été déposées</a> au pénal pour « non-assistance à personne en danger et mise en danger de la vie d’autrui ».</p>
<p>De nombreux patients se plaignent d’effets secondaires avec ce médicament, destiné à remplacer l’hormone produite par la thyroïde en cas <a href="https://www.forum-thyroide.net/">d’ablation de cette glande</a> située à la base du cou, ou bien à compenser une baisse de cette hormone – ce qu’on nomme l’<a href="https://eurekasante.vidal.fr/maladies/metabolisme-diabete/hypothyroidie.html">hypothyroïdie</a>. En attendant que les enquêtes menées par la justice aboutissent, plusieurs pistes <a href="http://sante.lefigaro.fr/article/levothyrox-des-pistes-pour-comprendre-la-crise/">ont été avancées</a> pour tenter de comprendre la survenue, avec la formule modifiée, de troubles du rythme cardiaque, de crampes musculaires, de problèmes intestinaux, de maux de tête ou de vertiges, par exemple une <a href="http://www.atoute.org/n/article362.html">différence dans la biodisponibilité</a> du médicament c’est-à-dire dans la diffusion du principe actif dans l’organisme. Mais à ce jour, ces hypothèses peinent à expliquer l’ampleur du phénomène.</p>
<p>Notre expérience dans le suivi à l’hôpital, sur 22 années, de plus de 5 000 patients touchés par une maladie héréditaire méconnue, le <a href="http://www.vivre-avec-le-sed.fr/le-sed-article-prof-hamonet.html">syndrome d’Ehlers-Danlos</a>, nous amène à formuler une nouvelle hypothèse. Des personnes traitées par Levothyrox pour une hypothyroïdie pourraient être porteuses de ce syndrome, sans avoir été diagnostiquées. Cette maladie serait alors à l’origine des effets indésirables observés, du moins pour certains patients.</p>
<h2>Le syndrome d’Ehlers-Danlos, maladie méconnue mais fréquente</h2>
<p>Le syndrome d’Ehlers-Danlos est fréquent, bien qu’il soit encore rangé par certains chercheurs dans les <a href="http://www.orpha.net/consor/cgi-bin/OC_Exp.php?Lng=FR&Expert=287">maladies rares</a>. Il concerne environ 2 % de la population <a href="http://claude.hamonet.free.fr/fr/sed_commentaires-classification-geneticiens.htm">selon l’estimation</a> de notre groupe de médecins, le <a href="http://www.gersed.com/notre-association">Groupe d’étude et de recherche du syndrome Ehlers-Danlos</a>, même si cette proportion peut varier en <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28906340">fonction de la classification retenue</a>. La maladie touche l’ensemble des tissus conjonctifs, qui représentent environ 80 % des tissus du corps humain, par exemple la peau ou les os. Ces tissus sont plus fins et plus fragiles, en raison notamment d’une modification du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Collag%C3%A8ne">collagène</a>, l’armature de ces tissus. Les symptômes apparaissent habituellement dans les premières années de la vie ; pourtant ces signes ne conduisent jamais au diagnostic, ou alors avec un retard considérable de… <a href="http://www.gersed.com/">21 ans en moyenne</a>.</p>
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<p>Les difficultés à reconnaître le syndrome d’Ehlers-Danlos chez un patient sont liées à la <a href="http://www.vivre-avec-le-sed.fr/cariboost_files/Plaquette__20symptome_2016.pdf">diversité des symptômes</a> et à l’absence de test biologique, à l'exception de certaines formes particulières.</p>
<p>Les descriptions initiales de la maladie ont été réalisées par des dermatologues, d’abord Nicolai Alexandrovich Chernogubow à Moscou (Russie) en 1891, puis Edvard Ehlers à Copenhague (Danemark) en 1900. Elles se concentraient <a href="http://www.gersed.com/images/doc-technique/doc-actu/SEDACTION_Def.pdf">sur l’hypermobilité des articulations</a> – une souplesse articulaire bien supérieure à la moyenne – et l’étirabilité de la peau.</p>
<p>Au cours des vingt dernières années, la conception de la maladie a beaucoup évolué sous l’influence de chercheurs de plusieurs pays, notamment Rodney Grahame à l’université de Londres (Grande-Bretagne), Daniel Manicourt à l’Université catholique de Louvain (Belgique), Antonio Bulbena à l’université autonome de Barcelone (Espagne) et Pradeep Chopra à l’université de Brown, à Rhode Island (États-Unis). Leurs travaux ont permis d’identifier de nombreuses autres manifestations de la maladie, par exemple des difficultés respiratoires qui peuvent être confondues avec l’asthme, ou des manifestations cardiaques comme la tachycardie. Le système endocrinien, dont la thyroïde fait partie, est aussi concerné.</p>
<h2>Un diagnostic fondé sur neuf signes caractéristiques</h2>
<p>La présence, chez un patient, de 5 au moins des 9 signes caractéristiques du syndrome d’Ehlers-Danlos permet de poser le diagnostic de manière fiable, comme montré <a href="http://www.academie-medecine.fr/wp-content/uploads/2017/03/17.2.28-HAMONET-site.pdf">dans notre communication à l’Académie de médecine</a>, le 28 février. L’absence de l’un d’entre eux ne peut l’éliminer, étant donnée la variabilité des tableaux cliniques.</p>
<p>Nous reprenons ici la description de ces neuf signes.</p>
<ol>
<li><p><a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28186390">Des douleurs</a> des articulations et autour des articulations, avec des localisations multiples (cou, épaules, coudes, poignets, doigts, dos, bassin, hanches, genoux, chevilles, pieds) de type chronique ou, à l’inverse, brèves et très violentes. Elles sont variables en intensité (souvent très fortes) selon la localisation, évoluant habituellement par crises sur un fond continu. Elles sont aggravées par l’activité physique, avec souvent un décalage au lendemain, et peuvent persister longtemps.</p></li>
<li><p>Une sensation de fatigue importante, présente dès le réveil, avec l’impression de pesanteur du corps, exagérée lors de crises imprévisibles, avec parfois des accès de somnolence dans la journée.</p></li>
<li><p>Des troubles du contrôle des mouvements volontaires, avec des maladresses et des heurts d’obstacles comme le chambranle de la porte, une déviation de la marche et parfois des chutes.</p></li>
<li><p>Une instabilité des articulations responsable de pseudo entorses (qui ne durent pas, contrairement aux entorses véritables), de blocages articulaires, de luxations ou de subluxations c’est-à-dire des débuts de luxation (incluant les craquements des articulations).</p></li>
<li><p>Une peau amincie, pâle, transparente, laissant voir le réseau veineux sur les avant-bras, au-dessus des seins et dans le dos. La peau est douce au toucher. Elle ne protège pas contre l’électricité statique, ce qui entraîne des sensations de décharge électrique au contact d’objets métalliques comme la portière d’une voiture, un caddy, ou lors du contact physique avec une autre personne.</p></li>
<li><p>Une hypermobilité des articulations, au moins dans l’enfance. Elle est plus ou moins diffuse, permettant par exemple de mettre un pied derrière la tête ou de faire le grand écart facial. Cette souplesse extrême a pu disparaître par la suite, ou bien être masquée par les douleurs ou les contractures. Son absence n’exclut pas le diagnostic. Des rétractions des muscles, par exemple des muscles fléchisseurs des genoux, des triceps ou des muscles fléchisseurs plantaires, sont même fréquentes, surtout chez l’enfant.</p></li>
<li><p>Des reflux gastro-œsophagiens, ou vomissements, qui peuvent survenir tôt dans la vie, par exemple lors de la prise des biberons.</p></li>
<li><p>Des ecchymoses étendues, ce qu’on appelle des « bleus », survenant pour des traumatismes minimes bien souvent passés inaperçus, ou <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Purpura">du purpura</a>, un semis de petites taches rouges sur la peau.</p></li>
<li><p>Des sens exacerbés, ce qu’on nomme l’hypersensorialité. Cela se traduit notamment par une intolérance aux bruits et une perception très fine des sons, ou <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hyperacousie">hyperacousie</a>. Cela entraîne également des vertiges, survenant aux changements de position de la tête, compromettant l’équilibre postural.</p></li>
</ol>
<h2>Les pieds et les mains froids, des fièvres inexpliquées, des vergetures</h2>
<p>D’autres signes peuvent coexister et contribuent à l’identification du syndrome d’Ehlers-Danlos. Les pieds et les mains froids, signe d’une <a href="http://dictionnaire.academie-medecine.fr/?q=dysautonomie">dysautonomie</a>, souvent confondus avec un syndrome de Raynaud ; des palpitations, des sueurs, de la frilosité, des fièvres inexpliquées ; une grande sensibilité olfactive et au toucher ; une constipation ; des douleurs dans l’abdomen ou dans les côtes ; des troubles du sommeil ; de la dystonie, c’est-à-dire des tremblements ou des secousses musculaires, des contractures ; de la fragilité cutanée avec des troubles de cicatrisation ou des vergetures ; une étirabilité cutanée excessive ; des gencives qui saignent facilement ; des blocages respiratoires, des essoufflements ; des troubles de la vision binoculaire (capacité à utiliser les deux yeux pour voir nettement) ; des dents mal positionnées ou qui bougent ; le besoin d’uriner souvent ; pour les femmes, des douleurs lors des rapports sexuels, des accidents lors des accouchements ; des troubles cognitifs liés à la mémoire, l’attention, la concentration, l’orientation ; des troubles de l’affectivité ou du comportement comme l’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/8464956">anxiété</a>, l’émotivité ; des troubles du spectre autistique.</p>
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<p>Si nous avons dressé ici cette longue liste, c’est dans le but de mettre des personnes concernées – ou leurs médecins – sur la piste du syndrome. L'absence de diagnostic peut en effet avoir de <a href="https://juniperpublishers.com/tbd/pdf/TBD.MS.ID.555591.pdf">lourdes conséquences</a> pour la santé de ces personnes. Quand d’autres membres de la famille présentent des tableaux identiques – plus ou moins expressifs – cela vient renforcer la suspicion.</p>
<p>On le voit, les manifestations cliniques sont multiples et de ce fait, aboutissent à bien des erreurs de diagnostic. Certaines personnes touchées par la maladie ont un diagnostic psychiatrique, comme montré dans notre article <a href="https://www.omicsonline.org/open-access/ehlersdanlostschernogobow-syndrome-a-frequent-rarely-diagnoseddisease-whose-patients-are-often-the-victim-of-an-abusivepsychiatriz-2167-1044-1000275.php?aid=86653">publié en mars dans la revue <em>Journal of Depression and Anxiety</em></a> ou encore un diagnostic, là aussi erroné, d’une autre maladie physique. </p>
<p>Un diagnostic de fibromyalgie peut aussi être posé. Il s'agit en fait d'une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/BF03007247">appellation impropre</a> donnée par les rhumatologues au syndrome d’Ehlers-Danlos. Cette catégorisation a été réalisée par des chercheurs abusés par une conception ancienne du syndrome d’Ehlers-Danlos, longtemps vu comme une simple curiosité de la nature permettant de faire des numéros de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Contorsion">contorsionnisme</a>, et sans douleurs. Et malheureusement, elle perdure. </p>
<h2>L’hypothèse d’une confusion diagnostique entre deux maladies</h2>
<p>Pour en revenir à la crise du Levothyrox, il convient donc de se poser la question suivante : pourrait-il exister une confusion diagnostique entre l’hypothyroïdie et le syndrome d’Ehlers-Danlos ? Un nombre important des symptômes décrits se retrouvent en effet dans les deux maladies.</p>
<p>L’hypothyroïdie est caractérisée par la fatigue importante dès le réveil, les troubles du sommeil, les ronflements nocturnes, les troubles de la thermorégulation (extrémités froides, frilosité, hypothermie), la sécheresse de la peau et les modifications des phanères (ongles cassants, chute des cheveux), la constipation, la prise de poids, les douleurs articulaires, les crampes musculaires, les difficultés à avoir un enfant et la fréquence des fausses couches, les troubles de la sexualité, l’anémie, les troubles de la mémoire, de la concentration, un état dépressif.</p>
<p>Ces symptômes sont tous retrouvés, plus ou moins groupés, chez des patients avec un syndrome d’Ehlers-Danlos. Leur présence peut être à l’origine d’une erreur d’interprétation donnant lieu à un diagnostic erroné d’insuffisance thyroïdienne.</p>
<p>A l'inverse, on observe dans le syndrome d’Ehlers-Danlos des modifications morphologiques visibles à l’échographie, comme l’atrophie de la thyroïde. Par ailleurs, des nodules sont très banals dans cette maladie du conjonctif, tout comme les kystes. Il est donc possible que des diagnostics d’hypothyroïdie soient posés à tort devant un tableau de syndrome d’Ehlers-Danlos, notamment chez les sujets les plus jeunes.</p>
<h2>L’hypothyroïdie, l’une des expressions du syndrome d’Ehlers-Danlos ?</h2>
<p>Notre expérience auprès des patients et nos publications scientifiques nous conduisent à proposer, en plus, une autre hypothèse. L’hypothyroïdie pourrait être, en fait, l’une des modalités d’expression du syndrome d’Ehlers-Danlos. Autrement dit, la première relèverait du second, il ne s’agirait pas de deux maladies différentes. Le tissu conjonctif serait peut-être, là aussi, en cause.</p>
<p>En effet, arrêtons-nous un instant sur les principaux symptômes décrits par une partie des patients après la prise du nouveau Levothyrox. Ils ont été rendus publics en octobre par l’Agence nationale de sécurité du médicament <a href="http://ansm.sante.fr/S-informer/Actualite/Point-d-actualite-sur-le-Levothyrox-et-les-autres-medicaments-a-base-de-levothyroxine-Communique">sur la base des déclarations de pharmacovigilance envoyées par les patients</a>. Fatigue, insomnie, maux de tête, vertiges, douleurs articulaires et musculaires, chute des cheveux : ces signes se retrouvent dans le syndrome d’Ehlers-Danlos. On observe également parmi les déclarants une nette prédominance des femmes (<a href="http://www.leparisien.fr/societe/levothyrox-les-effets-indesirables-ne-sont-pas-dus-a-la-nouvelle-formule-selon-l-ansm-11-10-2017-7325268.php">soit 90,7 %</a>), comme dans le syndrome.</p>
<p>Il convient donc de s’interroger : les effets indésirables observés chez certains avec le nouveau Levothyrox ne sont-ils pas le fait de patients ayant un syndrome d’Ehlers-Danlos méconnu ? Il resterait, encore, à comprendre pourquoi ces réactions n’ont été signalées qu’avec le changement de formule. Étant donnée la population très importante de personnes atteintes non diagnostiquée en France, l’hypothèse mérite en tout cas d’être explorée. Les médecins formés à cette maladie voient en effet venir à eux de nombreux patients qui ont trouvé seuls, avec l’aide d’Internet, l’explication à leurs douleurs et autres problèmes de santé. Les interrogations autour de la nouvelle formule du Levothyrox sont, peut-être, une occasion de mettre certains patients sur la bonne voie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/88140/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Claude Hamonet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les effets observés avec le changement de formule de ce médicament pourraient être, chez certains patients, en lien avec un diagnostic d’hypothyroïdie erroné.Claude Hamonet, Professeur émérite de médecine, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/847882017-10-02T19:18:37Z2017-10-02T19:18:37ZSyndrome de Rett : de nouvelles pistes pour retrouver le souffle<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/187877/original/file-20170927-24173-1ec13gh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un traitement est à l'étude pour lutter contre les arrêts respiratoires souvent présents chez les filles touchées par le syndrome de Rett, une maladie génétique rare. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/search/photos/dandelion?photo=9JV2X2ZrXXQ">Roya Ann Miller/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>En dépit des progrès de la médecine, certaines maladies rares comme le <a href="http://www.orpha.net/consor/cgi-bin/OC_Exp.php?Lng=FR&Expert=778">syndrome de Rett</a>, une affection génétique touchant uniquement les filles, ne peuvent pas encore être guéries. L’espoir de découvrir un traitement repose sur une collaboration étroite entre les médecins suivant les malades et les chercheurs travaillant en laboratoire sur les mécanismes en cause à l’échelle des cellules. C'est le cas dans beaucoup de maladies rares, dont la 11ème journée mondiale se tient le 28 février.</p>
<p>Les fillettes touchées par le syndrome de Rett ne parlent pas ou quasiment pas, souffrent souvent d’épilepsie et de scoliose. Ces problèmes peuvent être améliorés par différents traitements. Par contre, il n’existe pas de solution satisfaisante pour lutter contre leurs troubles respiratoires. En effet, la maladie peut provoquer aussi bien des arrêts respiratoires (apnées) que des accélérations de la respiration (hyperventilation). C’est un enjeu majeur, sachant qu’à ce jour, environ 20 % des malades décèdent subitement en <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/9487980">raison de ces arythmies cardio-respiratoires chroniques</a>.</p>
<p>Les recherches de notre équipe Inserm de neurogénétique humaine, au sein du Centre de génétique médicale de Marseille situé à la faculté de médecine de Marseille, portent sur les maladies rares du cerveau de l’enfant conduisant à une déficience intellectuelle, parmi lesquelles le syndrome de Rett. Les liens tissés avec les équipes médicales partout en France nous ont permis d’ouvrir la voie à un traitement améliorant la survie des malades.</p>
<h2>Une maladie qui se déclare après l’âge de six mois</h2>
<p>Initialement décrit par le neuropédiatre autrichien Andreas Rett dans les années 1960, ce grave désordre neurologique est causé par des mutations dans un gène situé sur le chromosome X. Les filles touchées présentent un développement normal <em>in utero</em> et pendant les 6 à 18 premiers mois de leur vie. Puis celui-ci s’arrête, entraînant un profond handicap mental et physique. Entre 25 et 40 filles porteuses de ce syndrome <a href="https://www.orpha.net/data/patho/Pub/fr/Rett-FRfrPUB91v01.pdf">naissent chaque année en France</a>.</p>
<p>Dans notre équipe, nous avons mené nos travaux sur des souris représentant un modèle de ce syndrome, pour lesquelles le gène en cause (Mecp2) a été rendu totalement inopérant. Nous avons <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16354910">mis en évidence</a> des déficits en <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cat%C3%A9cholamine">catécholamines</a> au niveau de plusieurs structures majeures du système nerveux central et du système nerveux périphérique. Les catécholamines les plus courantes sont l’adrénaline, la noradrénaline et la dopamine. En particulier nous avons observé des anomalies des contenus en noradrénaline dans le tronc cérébral, la partie du cerveau impliquée dans la mise en place et la régulation des rythmes respiratoires. Nos résultats ont montré que l’intensité des troubles respiratoires est intimement liée à une diminution des niveaux de noradrénaline dans le cerveau.</p>
<p>À la suite de cette découverte, nous avons pu mettre au point chez les souris un traitement pharmacologique stimulant les neurones producteurs de noradrénaline, dit noradrénergiques, par un mécanisme bien précis (en inhibant le processus de recapture dans la fente synaptique). De cette façon, nous avons pu améliorer leurs fonctions respiratoires et motrices, et donc, leur survie.</p>
<h2>Une molécule pour agir sur les troubles respiratoires</h2>
<p>La molécule retenue, la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9sipramine">désipramine</a>, l’a été parmi le grand nombre d’agents pharmacologiques capables d’agir sur l’activité des neurones noradrénergiques, pour la plupart des médicaments antidépresseurs. Cette molécule agit de manière très spécifique sur la noradrénaline, et pas sur d’autres neurotransmetteurs. Autre avantage : elle possède déjà une autorisation de mise sur le marché dans le traitement de la dépression, facilitant ainsi les futures étapes pour obtenir l’autorisation de traiter des humains, et non plus des souris.</p>
<p>Pour évaluer les effets de la désipramine, nous avons traité des souris modèles du syndrome de Rett dès qu’elles présentaient une augmentation significative du nombre d’apnées. Nous avons constaté une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17439480">amélioration notable de leur rythme respiratoire</a> durant plusieurs semaines, avec un niveau d’apnée maintenu à un seuil très bas. De manière encore plus intéressante, le traitement a prolongé la durée de vie des souris d’environ 50 % par rapport aux souris non traitées, ou traitées par un placebo (ressemblant au médicament mais sans principe actif).</p>
<p>Avec nos collègues praticiens, le Pr Josette Mancini (alors responsable du service de neurologie pédiatrique à l’hôpital de la Timone), et les médecins du centre de pharmacologie clinique et d’évaluations thérapeutiques (CPCET) de Marseille dirigé par le Pr Joëlle Micaleff, nous avons décidé de mettre en place un essai clinique permettant de traiter 36 patientes âgées de 6 à 18 ans. Nous avons obtenu pour cet essai de phase II un financement de 500 000 euros provenant du ministère de la Santé, sous la forme d’un Programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) national.</p>
<h2>Des patientes de Lyon, Lille, Marseille, Tours, Toulouse et Paris</h2>
<p>Au vu de la rareté de la maladie, et afin de faciliter le recrutement des volontaires, nous avons impliqué six hôpitaux dans cet essai, à Lyon, Lille, Marseille, Tours, Toulouse et Paris. Il a démarré en 2010 et s’est terminé en 2016.</p>
<p>Les participantes ont effectué trois passages à l’hôpital, le premier avant de prendre la désipramine, le deuxième après trois mois de traitement et le dernier après six mois. À chacune de leurs visites, des enregistrements respiratoires, moteurs et une prise de sang ont été effectués. À la maison, elles ont vu enregistré leur rythme cardiaque, ce qui demandait le maintien de l’appareillage pendant 24 heures – sans doute l’examen le plus contraignant pour elles, et pour leurs parents.</p>
<p>Par ailleurs les parents remplissaient une grille avec des critères permettant d’apprécier leur propre qualité de vie, un moyen d’évaluer le comportement général de leurs filles.</p>
<p>Cet essai n’a pas permis de montrer directement une amélioration des troubles respiratoires chez les patientes en fonction de la dose de désipramine prise. Nous nous sommes en effet heurtés à deux difficultés. Un nombre trop faible de patientes ont pu réaliser l’essai jusqu’au bout. Par ailleurs, les patientes ont assimilé la molécule dans des proportions variables, selon leur métabolisme. Cependant, nous avons mis en évidence un lien entre la dose de médicament présente dans le sang des patientes et la diminution de leurs troubles respiratoires, comme indiqué dans l’article <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/store/10.1002/acn3.468/asset/acn3468.pdf;jsessionid=4FDBF8D21D47EF026F26FC64F58B67CA.f01t02?v=1&t=je6ssrc9&s=30b66f735aff2b0de1ef4972076402ef9fe145fe">paru dans le journal <em>Annals of Clinical and Translational Neurology</em></a>. Ce qui nous conforte dans l’idée que l’hypothèse de départ est juste.</p>
<h2>Passer le plus rapidement possible de la recherche fondamentale à l’essai chez les malades</h2>
<p>Ainsi, notre équipe a pu, sur une période s’étalant sur douze années, passer de résultats obtenus chez l’animal à un essai chez l’homme, un mode de recherche dit translationnel. L’idée étant de réussir à reproduire auprès des malades, le plus rapidement possible, des résultats fondamentaux obtenus en laboratoire. Ces travaux ont généré, aussi, un grand nombre de mesures chez les filles Rett, un avantage dans la perspective d’un nouvel essai clinique.</p>
<p>La création en 2015 de la fédération hospitalo-universitaire (FHU) maladies rares et chroniques de l’enfant et de l’adolescent (Marche) doit permettre d’accélérer ces recherches. Le <a href="http://www.fhu-marche.fr/fr/">FHU Marche</a> regroupe en effet, autour d’un même campus situé à Marseille, des chercheurs de plusieurs disciplines (biologie, physique) et des médecins en charge de ces pathologies.</p>
<p>Nous avons cependant constaté, dans le syndrome de Rett, les limites d’une approche centrée uniquement sur des médicaments. Aussi, nous avons mis en place un autre projet relevant de la thérapie génique, visant à apporter un gène sain pour compenser la mutation du gène Mecp2 sur le chromosome X, à l’origine de la maladie. Ce travail s’effectue en partenariat avec l’AFM-Telethon. Nos premiers résultats, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27974239">publiés en 2017</a>, sont très encourageants car ils montrent, chez l’animal, une correction importante des atteintes respiratoires. Cette approche novatrice doit d’abord être optimisée avant de pouvoir être proposée à des patientes, mais constitue un réel espoir dans cette maladie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/84788/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Christophe Roux a reçu, pour ces études sur le syndrome de Rett, des financements de l'AFM-Téléthon, de l'Association Française du Syndrome de Rett, de l'Agence Nationale de la Recherche, d'Aix Marseille Université, de l'Inserm, de la Région Provence Alpes Côte d'Azur, de la Communauté Européenne.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Laurent Villard a reçu, pour ces études sur le syndrome de Rett, des financements de l'AFM-Téléthon, de l'Association Française du Syndrome de Rett, de l'Agence Nationale de la Recherche, d'Aix Marseille Université, de l'Inserm, de la Région Provence Alpes Côte d'Azur, de la Communauté Européenne et de l'Association Vendéenne de Soutien aux Maladies Orphelines.</span></em></p>Dans cette maladie génétique rare touchant uniquement les filles, la respiration peut aussi bien s’accélérer que s’arrêter brutalement. Des chercheurs testent un médicament pour la régulariser.Jean-christophe Roux, Directeur de recherche à l'INSERM, faculté de médecine Timone, université Aix-Marseille, InsermLaurent Villard, Directeur de recherche à l'INSERM, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/685212016-11-17T01:13:54Z2016-11-17T01:13:54ZPerdre l’odorat, un handicap négligé mais non négligeable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/146104/original/image-20161115-31123-bpgop8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C73%2C2592%2C1672&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une rose sans odeur serait-elle toujours aussi attirante ? </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/ocherdraco/4666274846/in/photolist-87kSWA-8UMREX-wpvia-muDBFv-6Q61cK-4AB2G6-cv45N1-2VWHcA-4voyGm-7XBhHr-668eC-kqX3V-6zazqB-B1iDj-82HF93-5yarhX-498Fs5-39zUoS-4EAv8G-JDTGJX-6eRBU3-aqffK4-7TXQ9S-rCUvW-5qZ3nT-5AEhLG-dm2hAK-Hevs1-4cSr1-bG778K-9TRjqT-7xN1Wv-4k6CKu-7EyXPg-9R8Yt-fE6EqZ-euMwVJ-cv45dG-9EBf7Y-bVgxR-76B5b6-e7a7Kb-8kfWoX-6kqYe-ynCs-8ec9bB-fFS67-8nQ7e3-e7pn9G-podgCc">Margaret Maloney/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Vous vous souvenez sans doute de Louis de Funès dans son film culte <a href="http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19463605&cfilm=47573.html"><em>L’Aile ou la cuisse</em></a>, en 1976. Il incarnait un éminent critique gastronomique dans l’incapacité d’exercer son métier après avoir perdu aussi bien le goût que l’odorat. Maintenant, tentez de vous imaginer incapable de détecter l’odeur du brûlé ou celle d’une fuite de gaz, incapable de sentir votre propre odeur et celle de votre petit(e) ami(e) ? Vous voilà inquiet. Ou alors déboussolé. Vous êtes, en fait, dans la peau d’une personne touchée par l’anosmie, c’est-à-dire dépourvue d’odorat, un handicap invisible et méconnu.</p>
<p>L’anosmie peut se manifester dès la naissance, ou bien survenir à l’occasion d’une autre pathologie. Elle se définit comme une déficience sensorielle entraînant la perte totale de l’odorat – une perte partielle de ce sens étant qualifiée d’hyposmie. La perte de l’odorat peut paraître anodine, comparée par exemple à la perte de la vue ou de l’ouïe. Il n’en est rien. L’absence de capacités olfactives complique les relations aux autres et pousse à l’isolement, entraînant souvent une désocialisation. Comment s’engager dans une relation avec quelqu’un que l’on ne peut pas « sentir », au sens premier du terme ? En fait, l’anosmie affecte profondément la vie quotidienne des personnes atteintes, au point que certaines ne sortent plus de chez elles. La maladie accroît le niveau de stress, augmente le sentiment de vulnérabilité physique et d’anxiété sociale.</p>
<p>On peut estimer la proportion de personnes touchées par l’anosmie ou l’hyposmie en France à 5 % de la population, en se référant aux <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25201900">données publiées en 2014 pour la Grande-Bretagne</a>. Parmi celles-ci, 57 % souffrent d’isolement et 54 % éprouvent des difficultés relationnelles. Plus sérieux encore, on compte 43 % d’anosmiques dépressifs, 45 % de fortement anxieux et 92 % qui présentent des troubles alimentaires, comme l’anorexie mentale. Et pourtant, en dépit de ces effets induits importants, la maladie demeure aujourd’hui largement ignorée.</p>
<h2>Plus fréquent avec l’âge</h2>
<p>Ainsi, il n’existe pour l’instant ni diagnostic fiable ni traitement pertinent. Et un petit nombre de médecins ORL seulement s’intéressent à cette pathologie. Les anosmiques se sentent à juste titre abandonnés car leur handicap n’est pas reconnu comme tel, alors qu’il provoque une forte détérioration de leur qualité de vie. Or l’anosmie pourrait devenir rapidement un problème important à l’échelle de la société, avec le vieillissement de la population. En effet, ce symptôme accompagne souvent les pathologies neurodégénératives, comme la maladie d’Alzheimer ou Parkinson. Plus fréquente à mesure qu’on avance en âge, l’anosmie ou l’hyposmie affectent 10 % des personnes jeunes et 40 % des personnes âgées <a href="http://link.springer.com/article/10.1007/s00405-015-3536-6">selon une étude publiée en 2015</a>.</p>
<p>Notre équipe à Grenoble École de Management s’intéresse à l’anosmie, et cela surprend souvent nos interlocuteurs. Il ne s’agit pas, pour nous, de lancer une action caritative, mais bien d’ouvrir un champ d’investigation nouveau dans notre discipline, la recherche en sciences de gestion. Selon nous, l’une des missions des écoles de management est de contribuer à l’amélioration de la société en formant les futurs acteurs socio-économiques pour qu’ils conçoivent et développent des activités et des organisations responsables. Créer un monde meilleur peut prendre plusieurs formes et se pencher sur le bien-être des personnes souffrant de maladies rares en est une.</p>
<p>Plus concrètement, notre objectif est de mettre à la portée des patients anosmiques des outils leur permettant de mieux vivre. Nous souhaitons réfléchir aux moyens de rendre disponibles des traitements ou des prothèses remplaçant l’odorat à des prix raisonnables, penser des modes d’actions collectives efficaces pour promouvoir la reconnaissance de ce handicap invisible. Autant de sujets relevant de la compétence de chercheurs en management qui, comme nous, s’attachent à donner corps à cet apparent paradoxe : rendre visible l’invisible.</p>
<h2>La première association de patients</h2>
<p>Avant d’être caractérisé, un phénomène doit d’abord être tangible et mesurable. Jusqu’à une période récente, il existait peu de données et il aura fallu attendre juillet 2015 pour voir se constituer la première association de patients atteints d’anosmie, l’<a href="http://www.afaa-sos-anosmie.com/">Association Française pour l’Anosmie et l’Agueusie (AFAA), ou SOS-Anosmie</a>. Association avec laquelle notre équipe échange désormais et dont nous avons rencontré les membres le 22 octobre, à Marseille, lors de leur dernière journée de « rencontres ».</p>
<p>Les nouvelles technologies connectées promettent la création d’un nez électronique universel. On peut donc imaginer qu’une prothèse pourrait être bientôt développée, autorisant de fait les médecins à diagnostiquer plus largement l’anosmie et la société, à mieux considérer et appréhender cette pathologie. L’innovation technologique est une condition au progrès social, cependant elle n’est pas suffisante. C’est aux futurs managers de s’en emparer pour la rendre accessible et utile pour les intéressés. Le défi consiste à satisfaire simultanément la juste rémunération de l’innovation et le besoin des anosmiques pour une assistance fiable et peu onéreuse. Le progrès technologique, d’accord. Mais pour quels usages ? Et sur la base de quels modèles économiques ?</p>
<p>Penser qu’une seule et même technologie remplaçant l’odorat conviendra pour tous est illusoire. Il est nécessaire de comprendre comment les anosmiques vivent la perte de ce sens – généralement associée avec celle du goût – pour apporter une réponse adaptée. Ainsi, les échanges que nous avons pu avoir avec des personnes touchées lors de la réunion de l’AFAA révèlent que la perte d’odorat n’est pas seulement un problème mécanique à résoudre. Restaurer ce sens ou le suppléer avec un capteur n’est pas forcément l’essentiel. Car humer, sentir est en fait un réflexe chargé d’affectif. Plus qu’une simple prothèse, l’anosmique recherche une interaction avec la machine qui puisse le guider dans une appréciation plus fine d’une odeur ou d’un goût. Il apprécierait, même, une certaine forme de dialogue. Le symbole d’un « smiley » souriant ou un « like » façon Facebook pourraient par exemple apparaître sur l’appareil électronique pour lui signifier qu’il sent bon, et donc qu’il peut sortir de chez lui.</p>
<h2>Un proche peut suppléer la perte d’odorat</h2>
<p>La plupart des personnes atteintes ont déjà trouvé, seules, des astuces pour identifier les odeurs environnantes – elles demandent par exemple à un proche de leur décrire ce qu’il sent. D’autres ont appris à se passer d’odorat en développant davantage leurs autres sens.</p>
<p>Ainsi, la démarche d’innovation, à laquelle participe le chercheur en management, confronte une technologie et un ensemble d’usages possibles, compte tenu des pratiques existantes ou anticipées. Avant toute théorisation, étudier l’anosmie et les anosmiques, c’est l’occasion de comprendre comment l’invisible – ici l’absence d’un sens et les diverses incompréhensions associées – peut être appréhendé pour définir ensuite des objets et des pratiques en adéquation avec les besoins. De rendre le problème enfin visible, pour mieux le résoudre. Si notre travail de recherche y contribue, alors ce que nous aurons expérimenté pourra être appliqué à d’autres maladies rares, avec le même objectif.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/68521/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sylvain Colombero a reçu, sur des précédents sujets de recherche, des financements de l'Agence nationale de la recherche, du Danish Council for Independent Research, de la Fondation Mines ParisTech et de la Région Île-de-France.</span></em></p>La déficience sensorielle olfactive, appelée anosmie, touche aujourd’hui un nombre croissant de personnes. Des chercheurs en management s’emparent du sujet pour que leurs besoins soient satisfaits.Sylvain Colombero, Post-Doc - Lecturer, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.