tag:theconversation.com,2011:/africa/topics/transport-aerien-29163/articlestransport aérien – The Conversation2024-03-20T16:05:16Ztag:theconversation.com,2011:article/2260342024-03-20T16:05:16Z2024-03-20T16:05:16ZFaut-il s’inquiéter de voler dans des avions Boeing ?<p>Cela fait des décennies que le géant américain de l’aérospatiale Boeing assure des voyages aériens sûrs. Depuis les années 1990, Boeing et son concurrent européen Airbus dominent le marché des gros porteurs.</p>
<p>Mais cette année, Boeing a fait parler d’elle pour de bien mauvaises raisons. En janvier, une porte <a href="https://www.france24.com/fr/info-en-continu/20240206-incident-737-max-des-boulons-cens%C3%A9s-bloquer-la-porte-%C3%A9taient-manquants-selon-l-enqu%C3%AAte">s’est détachée d’un Boeing 737 MAX</a> en plein vol, déclenchant une enquête des autorités fédérales de régulation des États-Unis.</p>
<p>Plus récemment, un avion de la marque a perdu un pneu au décollage, un autre a dû rebrousser chemin en raison d’une fuite de liquide, un moteur a pris feu, un train d’atterrissage s’est affaissé, et un appareil a « chuté » en vol, blessant des dizaines de passagers. Un ingénieur de Boeing, lanceur d’alerte concernant le contrôle qualité de fabrication des avions 787 et 737 MAX de la société <a href="https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/aeronautique/etats-unis-un-ancien-employe-de-boeing-se-suicide-apres-avoir-alerte-sur-des-problemes-de-construction_AV-202403120030.html">s’est suicidé le 9 mars dernier</a>.</p>
<p>En tant que voyageurs, devons-nous nous inquiéter ?</p>
<h2>Beaucoup d’incidents, mais pas tous imputables à Boeing</h2>
<p>La récente série d’événements a certainement été dramatique, mais tous ne peuvent pas être imputés à Boeing. Cinq incidents se sont produits sur des avions appartenant et exploitées par United Airlines. Ils sont liés à des facteurs échappant au contrôle du constructeur, tels que des problèmes de maintenance, la présence potentielle de débris de corps étrangers et une éventuelle erreur humaine.</p>
<p>Un <a href="https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/nouvel-incident-sur-un-boeing-un-b-777-de-united-perd-une-roue-de-250-kilos-qui-endommage-plusieurs-voitures-991232.html">Boeing 777 de United Airlines</a> reliant San Francisco au Japon a perdu un pneu au décollage, un problème de maintenance qui n’est pas lié à Boeing. L’avion s’est posé sans encombre à Los Angeles.</p>
<p>Un vol <a href="https://www.mercurynews.com/2024/03/12/united-airlines-reports-fifth-flight-incident-in-a-week-as-jet-turns-back-due-to-maintenance-issue/">United Airlines de Sydney</a> à destination de Los Angeles a dû retourner à Sydney en raison d’un problème de maintenance après qu’un liquide se soit échappé de l’avion au moment du départ.</p>
<p>Un <a href="https://www.nbcnews.com/news/us-news/passenger-video-shows-flames-shoot-united-airlines-engine-midflight-rcna142217">United Airlines 737-900</a> reliant le Texas à la Floride s’est retrouvé avec du papier bulle dans le moteur, ce qui a provoqué un <a href="https://skybrary.aero/articles/compressor-stall">décrochage du compresseur</a>. Il s’agit d’une interruption du flux d’air vers un moteur en fonctionnement, qui provoque un retour de flamme et émet des flammes.</p>
<p>Un <a href="https://simpleflying.com/united-boeing-737-max-houston-runway-incident/">United Airlines 737 Max</a> reliant le Tennessee au Texas a subi un affaissement du train d’atterrissage après un atterrissage normal. Le pilote a continué jusqu’au bout de la piste avant de sortir sur une voie de circulation – peut-être à une vitesse trop élevée – et l’avion s’est retrouvé dans l’herbe et le train d’atterrissage principal gauche s’est affaissé.</p>
<p>Le cinquième événement s’est produit lors d’un vol United Airlines 737-8 entre les Bahamas et le New Jersey. Les pilotes ont signalé que les pédales de direction, qui contrôlent les mouvements gauche et droit de l’avion en vol, étaient bloquées en position neutre pendant l’atterrissage.</p>
<h2>Des préoccupations liées au contrôle qualité</h2>
<p>La défaillance, en janvier, de la porte de sortie s’est produite sur un vol d’Alaska Airlines. Les autorités de régulation américaines enquêtent actuellement sur <a href="https://www.vox.com/money/24052245/boeing-corporate-culture-737-airplane-safety-door-plug">l’assurance qualité de la fabrication</a> de Boeing à la suite de cette défaillance.</p>
<p>Cette porte a été installée par un sous-traitant de Boeing, Spirit AeroSystem. Les boulons de la porte n’étaient pas correctement fixés et la porte est tombée en vol. Le même avion avait connu une série d’alarmes de pressurisation lors de deux vols précédents et devait faire l’objet d’une inspection de maintenance à la fin du vol.</p>
<p>Spirit a vu le jour après que Boeing a fermé ses propres usines de fabrication dans le Kansas et l’Oklahoma, et Boeing est actuellement en train de <a href="https://www.cnbc.com/2024/03/01/spirit-aerosystems-boeing.html">racheter la société</a> afin d’améliorer le contrôle qualité. Spirit travaille actuellement avec Airbus, mais cela pourrait changer.</p>
<h2>Ce qui a changé chez Boeing</h2>
<p>Des critiques affirment que la <a href="https://www.washingtonpost.com/business/2024/03/12/boeing-whistleblower-death-plane-issues/">culture de Boeing a changé</a> depuis qu’Airbus est devenu un concurrent majeur au début des années 2000. L’entreprise a été accusée de privilégier le profit au détriment de la qualité de l’ingénierie.</p>
<p>D’anciens membres du personnel ont fait part de leurs préoccupations concernant les calendriers de production serrés, qui augmentaient la pression exercée sur les employés pour qu’ils terminent les avions à temps. Cette situation a conduit de nombreux ingénieurs à remettre en question ces processus et l’administration fédérale de l’aviation (FAA) a infligé une amende à Boeing pour manquement au contrôle de la qualité, après la découverte d’outils et de débris sur des avions en cours d’inspection.</p>
<p>Plusieurs employés ont témoigné devant le Congrès américain sur les problèmes de production liés au contrôle qualité. Sur la base des conclusions du Congrès, la FAA a commencé à inspecter de plus près les processus de Boeing.</p>
<p>Plusieurs employés de Boeing ont fait remarquer que le taux de rotation du personnel était élevé pendant la pandémie de Covid. Cette situation n’est pas propre à l’entreprise, car tous les processus de fabrication et les installations de maintenance des compagnies aériennes dans le monde ont également été touchés par un taux de rotation élevé.</p>
<p>Il en résulte une grave pénurie d’ingénieurs de maintenance qualifiés et de pilotes. Ces pénuries ont créé plusieurs problèmes qui empêchent l’industrie du transport aérien de revenir aux <a href="https://www.aviationbusinessnews.com/mro/critical-shortage-of-engineers-means-looming-crisis-for-aviation-warns-aeroprofessional/">niveaux pré-pandémiques</a> de 2019. Les compagnies aériennes et les centres de formation à la maintenance du monde entier travaillent d’arrache-pied pour former des remplaçants, mais cela prend du temps car on ne devient pas ingénieur qualifié ou pilote de ligne du jour au lendemain.</p>
<p>Alors, peut-on encore voler en toute sécurité sur des avions Boeing ? Oui, c’est le cas. Malgré les incidents dramatiques rapportés par les médias et les messages sur les réseaux sociaux <a href="https://twitter.com/DaveMcNamee3000/status/1767636549288824990">se moquant de l’entreprise</a>, le transport aérien reste extrêmement sûr, y compris pour Boeing.</p>
<p>Nous pouvons nous attendre à ce que ces problèmes concernant les avions Boeing soient maintenant corrigés. L’impact financier a été considérable, de sorte que même une entreprise motivée par le profit exigera des changements.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/226034/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Doug Drury ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’entreprise américaine Boeing est synonyme de sécurité des voyages aériens depuis des décennies, mais ces dernières semaines, elle a été confrontée à une grave série de problèmes.Doug Drury, Professor/Head of Aviation, CQUniversity AustraliaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2251092024-03-07T16:18:48Z2024-03-07T16:18:48Z8 mars 1974 : inauguration de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle, au carrefour de deux époques<blockquote>
<p>« La plus rigoureuse austérité aura présidé à l’inauguration officielle de l’aéroport Charles de Gaulle. Quel contraste avec la grande fête d’Orly il y a treize ans. »</p>
</blockquote>
<p>Tel est ce que l’on pouvait lire dans <em>Le Figaro</em> au lendemain de l’inauguration du <a href="https://theconversation.com/topics/aeroports-de-paris-adp-83584">troisième aéroport de la région parisienne</a>, le 8 mars 1974, il y a tout juste 50 ans. Annoncé à l’origine, le président <a href="https://theconversation.com/topics/georges-pompidou-73653">Georges Pompidou</a> envoie son premier ministre Pierre Messmer pour célébrer sobrement l’achèvement du chantier. Le président ne s’est pas déplacé en signe de deuil. Quelques jours auparavant, un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Vol_Turkish_Airlines_981">DC-10 de la Turkish Airlines</a> s’est écrasé en forêt d’Ermenonville, provoquant la mort des 346 occupants de l’appareil. Surtout, il souffre d’une maladie grave qui l’emportera un mois plus tard.</p>
<p>À cette date, la France a bénéficié de la croissance fulgurante des <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/une_autre_histoire_des__trente_glorieuses_-9782707175472">« trente glorieuses »</a>, avec des succès industriels dont la création franco-britannique du Concorde et la mise en place des premiers réacteurs nucléaires. Pourtant, au moment où s’inaugure Roissy, l’optimisme se voile du doute. Le premier choc pétrolier a redoublé l’instabilité géopolitique mondiale, exacerbant la critique de la société de consommation alors qu’a déjà sonné l’alerte sur les <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/05775132.1973.11469961">limites planétaires</a>.</p>
<p>Le « moment » Roissy, qui a fait l’objet de nos <a href="https://hal.science/hal-02151540">travaux</a>, marque un tournant, un changement radical. Il se matérialise par le surgissement de l’aéroport dans le paysage agricole de la « Vieille France » qui, selon le quotidien <em>France Soir</em> du 12 février 1974, « provoque un choc ». Commémorer aujourd’hui Roissy permet de revenir sur le chemin parcouru par l’aéroport, témoin de la dérégulation d’une <a href="https://theconversation.com/transport-aerien-et-environnement-comment-poser-le-probleme-193672">économie aérienne</a> qui, en un demi-siècle, a connu un essor fulgurant dans le contexte des dérèglements globaux.</p>
<h2>Du silence au coup de tonnerre</h2>
<p>Le nouvel aéroport était dénommé à l’origine « Paris III » puis « Paris Nord », avant de prendre le nom d’un des villages qu’il colonise, Roissy-en-France, accolé à celui du président Charles de Gaulle à la mort de ce dernier. L’infrastructure est envisagée dès 1957, date à laquelle un site est repéré en Plaine de France à 25 kilomètres de Notre-Dame de Paris. Composés de terres agricoles libres de constructions, plus de 3 000 hectares sont préemptés, traduction de l’« appétit dévorant » de l’Aéroport de Paris, selon la formule de 1963 de <a href="http://www.patronsdefrance.fr/?q=sippaf-actor-record/21916">Pierre-Donatien Cot</a>, alors son directeur général.</p>
<p>Décidée par arrêté du 16 juin 1964, trois ans après la modernisation d’Orly dont la saturation est déjà certaine, la <a href="https://www.youtube.com/watch?app=desktop&v=xGqszqcJbDQ&embeds_referring_euri=https%3A%2F%2Fwww.grand-roissy-tourisme.com%2F&source_ve_path=MTM5MTE3LDIzODUx">réalisation</a> de l’aéroport débute en 1966, portée par un État puissant engagé dans un grand mouvement d’aménagement du territoire. Elle participe de <a href="https://books.openedition.org/psorbonne/2426?lang=fr">l’extension régionale</a> du « nouveau Géant Paris-Banlieues », formule que l’on peut lire dans <em>Paris Match</em> en 1971, auquel concourent les réseaux autoroutiers et ferrés, les villes nouvelles, les grandes opérations de modernisation comme La Défense, Montparnasse ou les Halles.</p>
<p>Conçu par les équipes pluridisciplinaires d’Aéroport de Paris dont <a href="https://www.citedelarchitecture.fr/fr/publication/andreu">Paul Andreu</a> est l’architecte en chef, le « super-aéroport » est prévu pour accueillir 30 millions de passagers par an. Il est le premier au monde à être spécialement conçu pour les avions gros porteurs et les supersoniques. Aérogare, château d’eau, tour de contrôle, centrale d’énergie, hôtel, bureaux, voies d’accès : le chantier XXL se réalise en un temps record (huit ans), respectant l’enveloppe fixée des coûts (1,6 milliard de francs) que l’autorité aéroportuaire assume quasi intégralement.</p>
<p>Le silence avec lequel se construit l’aéroport contraste avec le coup de tonnerre que produit son ouverture. Plus d’une centaine d’articles sont publiés, relayés par la presse internationale qui célèbre, non sans ambivalences, le futurisme de l’aéroport. « La fantascienza è realtà » (<em>Il Sole</em>), « Der Koloss aus dem Jahr 2000 » (<em>Abendpost</em>), « Frightening look towards 2001 » (<em>The Sydney Morning Herald</em>). <em>2001 L’Odyssée de l’espace</em>, le film de Stanley Kubrick sorti en 1968, est présent dans les esprits.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/HFB-4qi0fzs?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>L’inauguration est un événement, largement couvert par la télévision et la radio. Le cortège officiel des DS noires salue le Concorde parqué sur le tarmac. Accompagné d’Olivier Guichard, ministre de l’Équipement et de l’Aménagement du territoire, et André Decelle, président d’Aéroport de Paris, Pierre Messmer parcourt en une heure le dédale de l’aérogare avant de prononcer <a href="https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/caf97025131/inauguration-de-l-aeroport-roissy-charles-de-gaulle">son discours</a> en présence de nombreux invités, chefs d’État étrangers et personnalités. Quelques jours plus tard, le 13 mars, atterrit à Roissy le premier avion, un vol transatlantique de la compagnie TWA parti de l’aéroport de John Fitzgerald Kennedy à New York.</p>
<h2>Télescopage des futurs</h2>
<blockquote>
<p>« À peine terminé, on sait déjà qu’il est dépassé »</p>
</blockquote>
<p>Dès son ouverture, <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1974/03/08/une-machine-a-voyages_2513743_1819218.html">Le Monde</a> salue « une machine à prendre l’avion » qui doit absorber, écouler, contrôler des flux dont la croissance est anticipée comme massive (15 % par an).</p>
<p>Cette conscience d’un temps qui s’accélère fascine. Nombreux seront les premiers utilisateurs de Roissy qui chronomètrent leur « voyage » dans l’aéroport, célébrant les quelques minutes seulement qui les séparent de l’avion. <a href="https://www.lemonde.fr/archives/article/1974/03/08/quand-le-train-court-apres-l-avion_2515167_1819218.html">« Quand le train court après l’avion »</a> : les louanges du nouvel aéroport contrastent d’ailleurs avec la critique de ses liaisons terrestres, dont l’insuffisance est déplorée, alors qu’un <a href="https://muse.jhu.edu/article/230906">projet d’aérotrain</a>, envisagé par ADP et porté par l’ingénieur Jean Bertin pour prolonger au sol la grande vitesse aérienne, a été abandonné. De fait, la question de la <a href="https://theconversation.com/hyperloop-les-reves-de-vitesse-a-lepreuve-189336">démocratisation de la vitesse</a> est posée. Est-elle accessible à tous ?</p>
<p>Comment projeter le futur sans modèle ? Cette autre question travaille l’imagination des concepteurs. L’an 2000 est l’horizon du plan d’aménagement de l’aéroport qui déploie en 1967, sur le modèle de Roissy 1, cinq autres terminaux de forme identique dite en « roue de bicyclette ». Mais alors que le chantier s’est engagé, le plan doit se transformer, pour s’adapter aux aléas des trafics.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/579886/original/file-20240305-20-szpfl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/579886/original/file-20240305-20-szpfl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/579886/original/file-20240305-20-szpfl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/579886/original/file-20240305-20-szpfl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/579886/original/file-20240305-20-szpfl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/579886/original/file-20240305-20-szpfl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/579886/original/file-20240305-20-szpfl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/579886/original/file-20240305-20-szpfl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Plan initial de l’aéroport.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Paul Andreu le dira en 1978 :</p>
<blockquote>
<p>« En 1970, tout est fixé du Roissy actuel mais le Roissy futur s’estompe. Un autre présent s’installe dans le futur. »</p>
</blockquote>
<p>Roissy 2 s’étudie dès 1969, dont l’expansion est ouverte et flexible. La nouvelle aérogare ouvrira son premier terminal (B) en 1982, et ne cessera de s’agrandir jusqu’à la mise en service, 40 ans plus tard, du dernier satellite d’embarquement. C’est tout l’enjeu des grands projets d’infrastructure. Du fait de <a href="https://enpc.hal.science/hal-03563645v1/file/2022_LeFuturDesM%C3%A9tropoles.pdf">leur destinée moderne</a>, ils semblent perpétuellement courir après le futur : le futur du passé qu’ils réalisent comme le futur du présent qu’ils anticipent. Ces deux futurs se télescopent.</p>
<p>Cette croissance ne se fait pas sans mal. L’activité de Roissy fait l’objet de nombreuses contestations qui, s’agissant des aéroports, ont une histoire longue. Ainsi, au moment où se réalise Roissy, New York se heurte à des oppositions vives, conduisant à l’abandon en 1971, de son <a href="https://www.nytimes.com/1971/01/09/archives/an-offshore-4th-jetport-is-suggested-by-lindsay.html">projet de 4ᵉ aéroport</a>. À Tokyo, la lutte contre la réalisation de l’aéroport de Narita donne lieu à l’un des <a href="https://jeudepaume.org/evenement/shinsuke-ogawa-ogawa-pro/">mouvements de résistance</a> les plus importants de cette période (1968-1978) dont la répression, violente, fera 10 morts.</p>
<p>En France, dès l’ouverture d’Orly-Sud, les riverains s’étaient mobilisés contre les nuisances de l’aéroport, obtenant un couvre-feu nocturne en 1968. Et, à l’approche de l’ouverture de Roissy, le quotidien <em>France Soir</em> souligne la présence encore invisible mais déjà imposante de l’aéroport.</p>
<blockquote>
<p>« 250 000 personnes autour de Roissy vivent leurs derniers jours de silence. »</p>
</blockquote>
<p>Il ajoute :</p>
<blockquote>
<p>« Les techniciens [du district de la région parisienne] considèrent ces communes comme “sacrifiées”. La leçon d’Orly visiblement n’aura servi à rien. »</p>
</blockquote>
<h2>Conflictualité des intérêts</h2>
<p>Depuis, l’activité de l’aéroport a essaimé au-delà de son périmètre stricto sensu. Les sites et leurs dépendances, les clôtures et leurs rives, les voies terrestres et les routes aériennes ont conduit à la formation d’un <a href="https://blogs.mediapart.fr/j-lorthiois/blog/010722/le-fiasco-du-grand-roissy-en-dix-ans-2012-2022-deux-projets-realises-sur-25">« Grand Roissy »</a> cohabitant non sans mal avec les villes qui lui préexistent. L’écrivain François Maspero et la photographe Anaïk Frantz les avaient arpentées il y a plus de 30 ans, dans leur récit initiatique <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/les-passagers-du-roissy-express-francois-maspero/9782020124676"><em>Les Passagers du Roissy Express</em></a>.</p>
<p>L’intensification aéroportuaire est-elle compatible avec le droit commun de la ville ? Roissy est devenu une centralité métropolitaine alors même que son habitabilité reste à penser et que sa représentation démocratique est posée, comme l’a montré la controverse sur le projet gouvernemental de <a href="https://metropolitiques.eu/Aeroports-de-Paris-un-levier-strategique-pour-l-%C3%89tat.html">privatisation des Aéroports de Paris</a>.</p>
<p>Depuis le choc pétrolier inaugural, les événements de l’histoire n’ont cessé de marquer l’aéroport de ses stigmates (conflits armés, terrorismes, migrations, crises sanitaires), renforçant la dimension géopolitique de ce lieu banal et exceptionnel à la fois. Le demi-siècle écoulé doit enfin nous faire réfléchir à la place qu’occupent ces <a href="https://www.calameo.com/read/004309853100e9df78af2?authid=gMmtBLCKAwWd">infrastructures</a> dans nos devenirs écologiques.</p>
<p>Roissy est un <a href="https://shs.hal.science/halshs-00113275">paysage politique</a>, au sens où il porte une dimension fortement anthropique qui reformule des sols entiers, en même temps qu’il doit se défaire d’une emprise sur la terre dont nous ne sommes que les usufruitiers. <a href="https://www.babelio.com/livres/Merle-Madrapour/6256"><em>Madrapour</em></a>, <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-nuits-de-france-culture/les-iles-de-france-un-auteur-didier-daeninckx-un-roman-lumiere-noire-un-aeroport-roissy-en-france-1ere-diffusion-15-02-1988-1035023"><em>Lumière noire</em></a>, <a href="https://diaphana.fr/film/bird-people/"><em>Bird People</em></a>, <a href="https://www.ateliersmedicis.fr/le-reseau/projet/aeropolis-7570"><em>Aeropolis</em></a> : les multiples contre-regards produits par la littérature, le cinéma, la photographie n’ont cessé de repolitiser ces espaces et leurs usages, aujourd’hui plus que nécessaires pour mieux expliciter les aspirations d’un monde habitable.</p>
<p>La <a href="https://www.citedelarchitecture.fr/fr/agenda/exposition/paul-andreu-larchitecture-est-un-art">Cité de l’architecture et du patrimoine</a> consacre actuellement une rétrospective à l’œuvre architecturale de Paul Andreu, décédé en 2018. L’architecte de Roissy, pour qui l’aéroport devait incarner une expérience unique de l’espace du voyage, regrettait que la valeur du temps de transport soit trop souvent considérée comme faible, réduite à un « tunnel » que le « process » aéroportuaire a exacerbé. Si cette valeur (re) devenait positive, disait-il, alors nous pourrions décélérer et réconcilier les transports avec le paysage, la vie urbaine, l’écologie. Le demi-siècle de Roissy doit nous interroger sur la valeur de la <a href="https://books.openedition.org/pur/50876?lang=fr">vitesse</a>, celle des mobilités et des croissances, dont le coût environnemental est en question.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225109/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Roseau ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si l’aéroport de Roissy a été construit dans une relative discrétion, son inauguration, il y a cinquante ans, a fait grand bruit et soulève des questions qui alimentent encore les débats aujourd’hui.Nathalie Roseau, Professeure d’urbanisme, École des Ponts ParisTech (ENPC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2250382024-03-06T16:09:48Z2024-03-06T16:09:48ZVoici ce que la faillite de Lynx Air nous dit sur la situation de l’industrie aérienne canadienne<p>Lynx Air <a href="https://globalnews.ca/news/10319776/lynx-air-shutdown-low-cost-airline-failures/">est la dernière d’une longue série de compagnies aériennes</a> à bas prix à faire faillite au Canada. Le transporteur a cessé ses activités le 26 février, quatre jours après avoir annoncé s’être placé <a href="https://www.lapresse.ca/affaires/entreprises/2024-02-24/en-defaut-de-paiement-a-montreal-trudeau/lynx-air-ne-payait-plus-les-aeroports.php">sous la protection de ses créanciers</a>.</p>
<p>Ce scénario n’est pas nouveau dans l’aviation commerciale canadienne : le pays a vu son lot de faillites de transporteurs à bas prix en raison d’une mauvaise santé financière.</p>
<p>Au cours des 30 dernières années, des compagnies telles que <a href="https://www.cbc.ca/news/business/canada-3000-timeline-1.298111">Canada 3000</a>, <a href="https://simpleflying.com/nationair-canada-what-happened/">Nationair</a>, <a href="https://www.travelweekly.com/Travel-News/Airline-News/Greyhound-Air-to-Shut-Down">Greyhound Air</a>, <a href="https://www.ctvnews.ca/business/remember-roots-airline-a-list-of-canadian-discount-airlines-that-have-left-the-skies-1.6785045">Roots Air</a> et <a href="https://www.lesaffaires.com/secteurs/aeronautique-et-aerospatiale/skyservice-airlines-fait-faillite/512504">SkyService</a> ont succombé à des difficultés financières et ont disparu de la scène du transport à rabais canadien.</p>
<p>La fin de Lynx nous offre l’occasion de faire le point sur la situation du transport aérien commercial au Canada et d’identifier les défis et les possibilités qui s’offrent pour maintenir, voire améliorer, la durabilité du secteur.</p>
<h2>Pourquoi Lynx a-t-il échoué ?</h2>
<p>Pendant plusieurs semaines, au début de l’année, les <a href="https://www.lapresse.ca/affaires/2024-02-14/transporteurs-aeriens-a-bas-couts/flair-airlines-et-lynx-air-envisagent-un-mariage.php">spéculations allaient bon train sur une fusion imminente entre Flair Airlines et Lynx</a>. Cela aurait signifié que les voyageurs à la recherche de bas prix seraient devant un avenir incertain, avec la disparition d’un transporteur.</p>
<p>Aucun des deux transporteurs n’a reconnu publiquement l’existence d’un tel accord, se contentant de déclarer qu’ils <a href="https://www.aerotime.aero/articles/ynx-air-flair-airlines-merger-talks">ne feraient pas de commentaires sur ces spéculations</a>.</p>
<p>Les <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2052654/lynx-dette-flair-creanciers">difficultés financières de Lynx</a> — une société privée qui n’est pas tenue de rendre publics ses résultats d’exploitation financiers — ont été citées comme le principal facteur à l’origine de la situation actuelle.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Comptoirs d’enregistrement de Flair Airlines" src="https://images.theconversation.com/files/579031/original/file-20240229-20-2lth77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/579031/original/file-20240229-20-2lth77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/579031/original/file-20240229-20-2lth77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/579031/original/file-20240229-20-2lth77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/579031/original/file-20240229-20-2lth77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/579031/original/file-20240229-20-2lth77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/579031/original/file-20240229-20-2lth77.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Comptoirs d’enregistrement de Flair Airlines à l’aéroport international d’Edmonton en mars 2020. Au début de l’année 2024, il a été question d’une fusion entre Flair et Lynx.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>On s’attendrait à ce que l’entreprise susceptible d’acquérir Lynx soit en mesure de répondre à toutes les questions financières liées à la fusion. Mais Flair semblait avoir ses propres problèmes, qu’il s’agisse de la <a href="https://www.thestar.com/business/ceo-says-flair-has-resolved-foreign-ownership-issue-mostly-amid-regulatory-probe/article_2643890f-051d-5f4f-8627-a147681560f4.html">gouvernance d’entreprise</a> ou de ses <a href="https://www.ledevoir.com/economie/806202/flair-airlines-doit-67m-impots-impayes-ottawa">finances</a>.</p>
<p>La fusion n’a pas été conclue, de nombreuses allégations contenues dans les documents judiciaires de Lynx faisant état de la <a href="https://globalnews.ca/news/10321582/lynx-air-debt-flair-airlines-purchase/">nécessité de rembourser la dette d’un de ses actionnaires</a>.</p>
<p>En bref, il s’agissait de deux compagnies aériennes fragiles sur le plan financier qui tentaient de fusionner, sans qu’aucune d’elles ne dispose de la solidité nécessaire. Lynx a préparé rapidement son dépôt de bilan.</p>
<h2>Pourquoi les compagnies aériennes n’ont-elles pas tiré de leçons de tous ces échecs ?</h2>
<p>Les entrepreneurs qui lancent des compagnies aériennes à bas prix sont convaincus que le succès de leur compagnie repose sur leur capacité à attirer un grand nombre de passagers. Elles visent à hausser la demande et à <a href="https://aeroxplorer.com/articles/a-quick-reference-guide-to-starting-your-own-airline.php">maintenir leur position concurrentielle sur les marchés qu’elles desservent</a>.</p>
<p>La plupart de ces compagnies aériennes à vocation entrepreneuriale ont pour point commun d’utiliser la tarification comme une <a href="https://www.cnn.com/travel/article/airline-pricing-secrets/index.html">tactique de base pour stimuler et conquérir le marché</a>.</p>
<p>Pendant une bonne partie de l’année 2022 et au début de 2023, <a href="https://globalnews.ca/news/8973662/how-to-find-cheaper-flights-canada-airfare/">Lynx et Flair ont été les leaders en matière de prix en Amérique du Nord, parfois avec des écarts importants</a>. Ces deux compagnies se sont principalement fait concurrence en introduisant de nouveaux services partout au Canada et aux États-Unis, permettant ainsi aux Canadiens de <a href="https://www.theglobeandmail.com/investing/personal-finance/household-finances/article-price-of-flights-fall-2022-travel/">réaliser des économies sur les tarifs aériens et engendrant de la demande</a>.</p>
<p>Cette concurrence basée sur le prix n’a toutefois pas généré suffisamment de recettes pour assurer une rentabilité, même minime. Le duopole de compagnies aériennes établies au Canada — Air Canada et WestJet — n’a pas réagi activement à cette guerre de prix, car ces compagnies <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1836052/passagers-voyages-departs-pandemie-tourisme">étaient occupées à reconstituer leur capacité à la suite des licenciements liés à Covid</a>.</p>
<p>À l’automne 2023, après l’assimilation de Swoop et de Sunwing à WestJet, Air Canada et WestJet ont pris un certain nombre de mesures tarifaires. Elles ont proposé des liaisons concurrentielles avec celles de Flair et de Lynx, ce qui a permis de <a href="https://www.theglobeandmail.com/business/article-airlines-ramp-up-growth-plans-amid-increased-competition-setting-stage/">réduire l’écart de prix entre les transporteurs canadiens</a>.</p>
<p>Le compte à rebours a alors commencé pour les transporteurs à bas prix. Lynx a manqué de temps et d’argent en février 2024 et le temps de Flair est probablement compté.</p>
<h2>Le duopole est-il à blâmer ?</h2>
<p>Les décisions tarifaires prises à l’automne 2023 semblent indiquer des initiatives visant à diminuer l’attrait des transporteurs au rabais, en particulier pour les clients de WestJet et d’Air Canada.</p>
<p>Malgré le succès des programmes de récompense pour grands voyageurs et l’inclusion d’éléments de voyage considérés comme secondaires dans les offres des transporteurs à bas prix, la <a href="https://globalnews.ca/news/8983216/canada-recession-inflation-leger-poll/">crainte d’une récession a réduit de façon importante la demande de transport aérien</a> au Canada. Des décisions tarifaires s’en sont suivies.</p>
<p>L’attrait tarifaire des compagnies aériennes à bas prix s’est rapidement dissipé et les a contraints à diminuer davantage les tarifs pour <a href="https://globalnews.ca/news/10282017/flair-airlines-2024-travel-forecast/">conserver leur position sur le marché</a>.</p>
<p>Le gouvernement canadien a maintenu son point de vue quant au fait que le marché du transport aérien devait être libre de toute surveillance gouvernementale et que les voyageurs étaient les mieux placés pour <a href="https://globalnews.ca/news/9409483/poilievre-conservatives-safety-inflation-travel/">juger de la capacité de survie des transporteurs</a>.</p>
<h2>Changer de voie</h2>
<p>Le moment est peut-être venu d’envisager un nouveau modèle pour gérer le comportement tarifaire des compagnies aériennes qui fixent des prix inférieurs au niveau de rentabilité. Il convient également de se pencher sur les pratiques de WestJet et d’Air Canada, qui ont adopté des mesures tarifaires agressives destinées à compromettre la viabilité des transporteurs à bas prix.</p>
<p>Un grand nombre de modifications à apporter au modèle canadien de transport aérien commercial ont été proposées, en particulier celles qui visent la création d’une agence de l’aviation civile similaire à la <a href="https://www.faa.gov/about">Federal Aviation Administration aux États-Unis</a> et à la <a href="https://www.gov.uk/government/organisations/civil-aviation-authority">Civil Aviation Authority au Royaume-Uni</a>. Cela permettrait de séparer la surveillance commerciale des mesures de réglementation, qui sont actuellement toutes deux administrées par Transports Canada.</p>
<p>Une autre possibilité consisterait à instaurer une réglementation des tarifs aériens qui établirait un prix plancher pour les transporteurs à bas prix, ainsi que des limites de prix pour les grands transporteurs qui sont en concurrence avec les transporteurs à bas prix. Ces derniers pourraient ainsi disposer d’une marge de manœuvre pour proposer des tarifs sans être menacés par des mesures agressives.</p>
<p>Il est important de tirer des leçons de l’échec des transporteurs à bas prix, de tenir compte de l’angoisse ressentie par les voyageurs et le personnel des compagnies aériennes et de prendre les mesures qui s’imposent pour modifier la situation. La réputation du marché canadien du transport aérien mérite qu’on se penche là-dessus.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225038/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>John Gradek ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La fermeture de Lynx est un moment opportun pour faire le point sur l’état du transport aérien commercial au Canada et pour identifier les défis et les possibilités qui s’offrent.John Gradek, Faculty Lecturer and Academic Program Co-ordinator, Supply Network and Aviation Management, McGill UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2187512023-12-06T17:44:46Z2023-12-06T17:44:46ZTransport aérien, croisières… La piste des « passeports carbone » pour limiter l’impact du tourisme<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/562156/original/file-20231031-15-1auro3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=64%2C0%2C7128%2C4748&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/woman-carries-luggage-airport-terminal-403443151">Shine Nucha/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>L’été 2023 a marqué un tournant pour l’industrie du voyage. À la fin du mois de juillet, les arrivées de touristes internationaux dans le monde <a href="https://www.unwto.org/news/international-tourism-swiftly-overcoming-pandemic-downturn">ont atteint 84 % des niveaux d’avant la pandémie</a>. Dans <a href="https://joint-research-centre.ec.europa.eu/jrc-news-and-updates/eu-tourism-almost-full-recovery-pre-pandemic-levels-2023-10-23_en">certains pays européens</a>, comme la France, le Danemark et l’Irlande, la demande touristique a même dépassé son niveau prépandémique.</p>
<p>C’est peut-être une excellente nouvelle <a href="https://skift.com/insight/state-of-travel/">sur le plan économique</a>, mais il est à craindre que ce retour au <em>statu quo</em> n’ait déjà des conséquences désastreuses sur les plans environnemental et social.</p>
<p>L’été 2023 a été marqué par des vagues de chaleur record dans de nombreuses régions du monde. Les gens ont dû fuir les <a href="https://www.theguardian.com/world/2023/jul/24/greece-wildfires-corfu-evia-rhodes-heatwave-northern-hemisphere-extreme-weather-temperatures-europe">incendies de forêt en Grèce</a> et <a href="https://www.independent.co.uk/climate-change/news/hawaii-fires-update-biden-b2393188.html">à Hawaï</a>, tandis que des <a href="https://www.manchestereveningnews.co.uk/news/world-news/foreign-office-issues-spain-weather-27339111">alertes météorologiques</a> extrêmes ont été émises dans de nombreuses destinations de vacances populaires telles que le Portugal, l’Espagne et la Turquie. Les experts <a href="https://theconversation.com/european-heatwave-whats-causing-it-and-is-climate-change-to-blame-209653">ont conclu à la responsabilité du changement climatique dans ces conditions météorologiques extrêmes</a>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-risques-de-temperatures-extremes-en-europe-de-louest-sont-sous-estimes-213015">Les risques de températures extrêmes en Europe de l’Ouest sont sous-estimés</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Le tourisme fait partie du problème. Le secteur du tourisme génère <a href="https://wttc.org/Portals/0/Documents/Reports/2021/WTTC_Net_Zero_Roadmap.pdf">environ 10 %</a> des émissions de gaz à effet de serre à l’origine de la crise climatique.</p>
<p>Les effets négatifs du tourisme sur l’environnement sont devenus si graves que certains suggèrent que des changements radicaux dans nos habitudes de voyage sont inévitables. Dans un <a href="https://www.intrepidtravel.com/sites/intrepid/files/basic_page/files/A%20Sustainable%20Future%20For%20Travel%20From%20Crisis%20To%20Transformation-231016-02.pdf">rapport</a> de 2023 sur l’avenir des voyages durables, le voyagiste Intrepid Travel a proposé l’idée de « passeports carbone » pour aider l’industrie du tourisme à survivre.</p>
<h2>Qu’est-ce qu’un passeport carbone ?</h2>
<p>L’idée du passeport carbone repose sur l’attribution à chaque voyageur d’un quota annuel de carbone qu’il ne peut pas dépasser. Ces quotas permettent ensuite de « rationner » les déplacements.</p>
<p>Ce concept peut sembler extrême. Mais l’idée de quotas de carbone personnels n’est pas nouvelle. Un <a href="https://publications.parliament.uk/pa/cm200708/cmselect/cmenvaud/565/565.pdf">concept similaire</a> – appelé « échange personnel de droits d’émission de carbone » – a été discuté à la Chambre des communes du Royaume-Uni en 2008, avant d’être abandonné en raison de sa complexité apparente et de la possibilité d’une résistance de l’opinion publique.</p>
<p><em>[Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</em></p>
<p><a href="https://www.nature.org/en-us/get-involved/how-to-help/carbon-footprint-calculator/">L’empreinte carbone annuelle moyenne</a> d’une personne aux États-Unis est de 16 tonnes, l’un des taux les plus élevés au monde. Au Royaume-Uni, ce chiffre s’élève à 11,7 tonnes, soit plus de cinq fois le chiffre recommandé par l’<a href="https://www.openaccessgovernment.org/the-average-british-carbon-footprint-is-five-times-over-paris-agreement-recommendations/152669/">accord de Paris</a> pour maintenir l’augmentation de la température mondiale en deçà de 1,5 °C. (<em>En France, celle-ci est <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/en_SNBC-2_summary.pdf">du même ordre de grandeur</a>, ndlt</em>)</p>
<p>Au niveau mondial, l’empreinte carbone annuelle moyenne d’une personne est plus proche de quatre tonnes. Mais pour avoir les meilleures chances d’empêcher la hausse des températures de dépasser les 2 °C, l’empreinte carbone mondiale moyenne <a href="https://www.nature.org/en-us/get-involved/how-to-help/carbon-footprint-calculator/">doit baisser</a> à moins de deux tonnes d’ici à 2050. Ce chiffre équivaut à environ <a href="https://www.theguardian.com/environment/ng-interactive/2019/jul/19/carbon-calculator-how-taking-one-flight-emits-as-much-as-many-people-do-in-a-year">deux vols aller-retour</a> entre Londres et New York.</p>
<p>Le rapport d’Intrepid Travel prévoit que les passeports carbone seront utilisés d’ici 2040. Cependant, <a href="https://www.politico.eu/article/travel-short-haul-flights-europe-under-fire-climate-change-cop26/">plusieurs lois et restrictions</a> ont été mises en place au cours de l’année écoulée, ce qui suggère que nos habitudes de voyage sont peut-être déjà sur le point de changer.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/556889/original/file-20231031-23-kfakh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Boeing 777 avec Manhattan en arrière-plan à l’aéroport JFK de New York." src="https://images.theconversation.com/files/556889/original/file-20231031-23-kfakh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/556889/original/file-20231031-23-kfakh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=155&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/556889/original/file-20231031-23-kfakh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=155&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/556889/original/file-20231031-23-kfakh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=155&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/556889/original/file-20231031-23-kfakh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=195&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/556889/original/file-20231031-23-kfakh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=195&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/556889/original/file-20231031-23-kfakh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=195&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Un vol Londres-New York génère un peu moins d’une tonne de CO₂ par passager.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/new-york-january-2-boeing-777-93592174">Eliyahu Yosef Parypa/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Pourquoi cibler le transport aérien</h2>
<p>Entre 2013 et 2018, la quantité de CO<sub>2</sub> émise par les vols commerciaux dans le monde <a href="https://theicct.org/sites/default/files/publications/ICCT_CO2-commercl-aviation-2018_20190918.pdf">a augmenté de 32 %</a>. Certes, les améliorations en matière d’efficacité énergétique réduisent lentement les émissions par passager. Mais une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1352231014004889">étude</a> de 2014 a révélé que, quels que soient les efforts déployés par l’industrie pour réduire ses émissions de carbone, ils seront contrebalancés par la croissance du trafic aérien.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/leffet-rebond-quand-la-surconsommation-annule-les-efforts-de-sobriete-197707">L'effet rebond : quand la surconsommation annule les efforts de sobriété</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Pour que les réductions d’émissions aient un effet significatif, les prix des billets devraient augmenter de 1,4 % par an, ceci afin de décourager certaines personnes de prendre l’avion. Or, en réalité, les <a href="https://www.climatecentral.org/news/increase-in-flights-will-outweigh-carbon-cuts-17875">prix des billets sont en baisse</a>.</p>
<p>Certains pays européens commencent à prendre des mesures pour réduire les voyages en avion. En Belgique, depuis le 1<sup>er</sup> avril 2023, les passagers des vols court-courriers et des avions les plus anciens sont <a href="https://www.euronews.com/green/2022/12/12/private-jets-and-short-haul-flights-face-pollution-busting-tax-increases-in-belgium">soumis à des taxes plus élevées</a> afin d’encourager d’autres formes de voyage.</p>
<p>Moins de deux mois plus tard, la France a interdit les <a href="https://www.bbc.co.uk/news/world-europe-65687665">vols intérieurs court-courriers</a> lorsque le même trajet peut être effectué en train en deux heures et demie ou moins. <a href="https://businesstravelerusa.com/news/spain-to-follow-frances-lead-plans-to-ban-short-haul-domestic-flights/">On s’attend à ce que l’Espagne</a> fasse de même prochainement.</p>
<p>Un projet similaire pourrait également voir le jour en Allemagne. En 2021, un <a href="https://www.cleanenergywire.org/news/seventy-percent-germans-favour-banning-short-haul-flights-survey">sondage YouGov</a> a révélé que 70 % des Allemands soutiendraient de telles mesures pour lutter contre le changement climatique si des parcours alternatifs par train ou par bateau étaient disponibles.</p>
<h2>Des croisières qui polluent</h2>
<p>Le transport aérien n’est pas le seul à être sous le feu des critiques. Une <a href="https://www.transportenvironment.org/wp-content/uploads/2023/06/The-return-of-the-cruise-June-2023.pdf">enquête</a> menée en 2023 par la Fédération européenne pour le transport et l’environnement a révélé que les navires de croisière rejettent quatre fois plus de gaz sulfuriques – dont il est prouvé qu’ils provoquent des pluies acides et <a href="https://www.forbes.com/sites/jamesellsmoor/2019/04/26/cruise-ship-pollution-is-causing-serious-health-and-environmental-problems/">plusieurs affections respiratoires</a> – dans l’atmosphère que l’ensemble des 291 millions de voitures en circulation en Europe.</p>
<p>De telles statistiques ont contraint les destinations touristiques européennes à <a href="https://www.ft.com/content/8727387d-590d-43bd-a305-b5ec208a4dfe">prendre des mesures</a> contre l’industrie des croisières. En juillet, le conseil municipal d’Amsterdam a <a href="https://www.bbc.co.uk/news/world-europe-66264226">interdit aux bateaux de croisière</a> d’accoster dans le centre-ville afin de réduire aussi bien le tourisme que la pollution, une initiative qui a fait ses preuves ailleurs.</p>
<p>En 2019, Venise était le port européen le plus pollué, en raison du grand nombre de bateaux de croisière. Mais elle est tombée à la 41<sup>e</sup> place en 2022 après l’interdiction faite aux grands navires de croisière d’entrer dans les eaux de la ville, <a href="https://www.transportenvironment.org/discover/europes-luxury-cruise-ships-emit-as-much-toxic-sulphur-as-1bn-cars-study/">ce qui a permis de réduire de 80 % la pollution atmosphérique à Venise provenant des navires</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Gondoles au premier plan d’un énorme bateau de croisière à Venise." src="https://images.theconversation.com/files/556894/original/file-20231031-23-krj8r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/556894/original/file-20231031-23-krj8r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/556894/original/file-20231031-23-krj8r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/556894/original/file-20231031-23-krj8r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/556894/original/file-20231031-23-krj8r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/556894/original/file-20231031-23-krj8r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/556894/original/file-20231031-23-krj8r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">En 2022, Venise a interdit aux grands navires de croisière d’accoster dans ses eaux.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/gondolas-on-background-huge-cruise-ship-243221659">Ugis Riba/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Changer de destination</h2>
<p>Le rapport d’Intrepid Travel souligne également que le changement climatique aura bientôt un impact non seulement sur la façon dont nous voyageons, mais aussi sur <a href="https://joint-research-centre.ec.europa.eu/jrc-news-and-updates/global-warming-reshuffle-europes-tourism-demand-particularly-coastal-areas-2023-07-28_en">là où nous voyageons</a>. Les températures brûlantes diminueront probablement l’attrait des destinations balnéaires traditionnelles, incitant les touristes européens à rechercher des destinations plus fraîches pour leurs vacances d’été, telles que la Belgique, la Slovénie et la Pologne.</p>
<p><a href="https://www.travelweekly.com/Travel-News/Tour-Operators/Travelers-seek-cooler-destinations-this-summer">Plusieurs agences de voyages</a> ont signalé une augmentation sensible des réservations de vacances vers des destinations européennes plus fraîches comme la Scandinavie, l’Irlande et le Royaume-Uni pendant la saison haute de l’été 2023.</p>
<p>Quelle que soit la solution, changer nos habitudes de voyage semble inévitable. Des destinations du monde entier, de <a href="https://www.theneweuropean.co.uk/barcelonas-war-on-tourism-ada-colau/">Barcelone</a> à la <a href="https://www.dw.com/en/italy-tourism-bans-controls-fees-restrictions/a-66453047">Riviera italienne</a> en passant par <a href="https://theconversation.com/death-on-everest-the-boom-in-climbing-tourism-is-dangerous-and-unsustainable-114033">l’Everest</a>, appellent déjà à limiter le nombre de touristes pour lutter contre la foule et la pollution.</p>
<p>Les vacanciers doivent se préparer à modifier leurs habitudes de voyage dès maintenant, avant que ce changement ne leur soit imposé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218751/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ross Bennett-Cook ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si rien n’est fait pour changer nos habitudes de voyage, le temps de l’industrie du tourisme pourrait être compté. Des « passeports carbone » pourraient-ils faire partie de la solution ?Ross Bennett-Cook, Visiting Lecturer, School of Architecture + Cities, University of WestminsterLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2100722023-08-02T18:07:10Z2023-08-02T18:07:10ZDébat : Décarbonation, quotas… que faire de l’avion, privilège d’une minorité ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/538285/original/file-20230719-27-7s7ch7.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C2%2C1722%2C1120&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Bien qu’il soit réservé à une poignée d’individus, au niveau mondial, l’aérien représente en 2015 environ 11 % des émissions de CO₂ des transports, soit 1,5 % des émissions totales de gaz à effet de serre.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/qK6HAkB91Yc"> Marco López / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le président Emmanuel Macron a récemment affirmé sa volonté d’investir plusieurs milliards d’euros dans la <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/06/16/le-plan-de-macron-pour-developper-un-avion-moins-polluant_6177895_3234.html">décarbonation de l’aviation</a>. Plusieurs voix se sont fait entendre pour souligner le caractère risqué, voire illusoire, de cette ambition et rappeler l’urgence d’une <a href="https://theconversation.com/impact-du-transport-aerien-sur-le-climat-pourquoi-il-faut-refaire-les-calculs-116534">réduction du trafic aérien</a>.</p>
<p>Quelques semaines auparavant, <a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-mardi-30-mai-2023-5670062">l’ingénieur Jean-Marc Jancovici</a> proposait de limiter à quatre le nombre de vols au cours d’une vie, suscitant un débat agité sur la réduction de l’usage de l’avion par les individus.</p>
<p>Ces polémiques éludent toutefois une dimension centrale du <a href="https://theconversation.com/transport-aerien-et-environnement-comment-poser-le-probleme-193672">problème</a> : prendre l’avion est un privilège qui entretient notamment les rapports de domination entre les pays et en leur sein.</p>
<h2>L’avion, un privilège du Nord global</h2>
<p>Le discours d’Emmanuel Macron, la proposition de Jean-Marc Jancovici et la plupart des réactions qu’elles suscitent reposent sur un présupposé : l’avion est un moyen de transport incontournable, le problème est qu’il soit polluant. Or, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959378020307779">entre 80 et 90 % des humains n’ont jamais pris l’avion de leur vie</a>. Au cours de l’année 2018, seuls 4 % de la population mondiale a effectué un <a href="https://theconversation.com/le-kerosene-ne-sera-pas-taxe-mais-pensez-a-bien-fermer-votre-robinet-119420">vol international</a>.</p>
<p>Cette minorité à qui il arrive de voyager en avion <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959378020307779">n’est pas également répartie sur la planète</a> : elle vit dans les pays riches. Ainsi, environ 40 % des habitants des pays les plus aisés ont pris l’avion au moins une fois dans l’année, contre moins de 1 % des habitants des pays les plus pauvres. </p>
<p>Si l'on rapporte les distances parcourues par les avions au départ d'un continent à sa population, cette distance par tête s'élève à 3000 km en Europe contre 100 km en Afrique. La plupart des <a href="https://journals.openedition.org/belgeo/11761">lignes aériennes relient entre eux des pays du Nord global</a>. Elles servent à faire circuler les individus entre ces pays, pour leurs loisirs mais aussi pour alimenter le commerce et les échanges économiques.</p>
<p>L’avion est donc un mode de transport qui soutient une domination économique et politique des pays du Nord et participe en leur sein à une domination de classe.</p>
<p><strong>Nombre de kilomètres par tête parcourus en moyenne par les avions au départ de:</strong> </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/541459/original/file-20230807-29-tohunq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/541459/original/file-20230807-29-tohunq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541459/original/file-20230807-29-tohunq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541459/original/file-20230807-29-tohunq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541459/original/file-20230807-29-tohunq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=272&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541459/original/file-20230807-29-tohunq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=342&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541459/original/file-20230807-29-tohunq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=342&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541459/original/file-20230807-29-tohunq.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=342&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Rapportée à la population vivant sur le continent africain, la distance parcourue par les vols au départ de ce continent s'élève à 123 kms.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959378020307779">Traitements réalises à partir des résultats présentés dans Gössling et Humpe 2020.</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Socialisation des élites</h2>
<p>Prenons l’exemple de la France : <a href="https://www.cairn.info/revue-sociologie-2019-2-page-131.htm">voyager en avion</a> est loin d’être une pratique commune, elle demeure l’apanage des plus aisés et des plus diplômés. Ainsi, plus de la moitié des 10 % des Françaises et des Français les plus riches prend l’avion au moins une fois par an, contre 13 % des 50 % les plus pauvres. C’est le cas d’un tiers des personnes diplômées de l’enseignement supérieur, contre 10 % des moins diplômées.</p>
<p>Depuis longtemps, les voyages ont une place <a href="https://www.cairn.info/revue-actes-de-la-recherche-en-sciences-sociales-2007-5-page-58.htm?contenu=article">importante dans la socialisation des élites</a>. Séjours culturels ou d’études à l’étranger, ils contribuent à les préparer à l’occupation de positions dominantes. Plus tard, ils permettent l’entretien d’un style de vie ou d’une carrière cosmopolite qui indique leur appartenance de classe.</p>
<p>Prendre l’avion est donc un privilège qui permet l’accumulation de ressources durables – ou capitaux – de plusieurs sortes : sociales, culturelles, économiques. De ce fait, les trajectoires sociales des membres des classes dominantes sont marquées par une quantité importante de vols en avion.</p>
<p>Pourtant, la forte sélectivité sociale du voyage aérien est peu visible dans le débat public. C’est que les personnes qui y interviennent, dirigeantes et dirigeants économiques ou politiques, scientifiques, journalistes, parlent depuis leur position de classe.</p>
<p>Pour elles, l’avion est familier, quand bien même <a href="https://journals.plos.org/climate/article?id=10.1371/journal.pclm.0000070">elles considèrent aujourd’hui que cette pratique pose problème</a> ou y ont renoncé. Cela les conduit à diffuser l’idée – fausse – qu’un quota de vols est une limitation pour tout le monde. Sans voir qu’elle l’est principalement lorsque l’avion est capital pour entretenir une position dominante ou la transmettre à ses enfants. Jean-Marc Jancovici peut ainsi généraliser :</p>
<blockquote>
<p>« Quatre vols dans une vie, c’est pas zéro, on pourrait très bien instaurer un système dans lequel, quand on est jeune, on a deux des quatre vols pour aller découvrir le monde. »</p>
</blockquote>
<p><strong>Taux de recours à l’avion (%) sur une année selon le niveau de vie et le niveau de diplôme</strong></p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/538264/original/file-20230719-17-nyschm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/538264/original/file-20230719-17-nyschm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/538264/original/file-20230719-17-nyschm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=281&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/538264/original/file-20230719-17-nyschm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=281&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/538264/original/file-20230719-17-nyschm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=281&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/538264/original/file-20230719-17-nyschm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=353&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/538264/original/file-20230719-17-nyschm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=353&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/538264/original/file-20230719-17-nyschm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=353&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">33 % des diplômés du supérieur ont pris l’avion au moins une fois dans l’année.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.cairn.info/revue-sociologie-2019-2-page-131.htm">Eurobaromètre 2014, Enquête nationale transports 2008, Demoli et Subtil, 2019</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La question de l’empreinte carbone</h2>
<p>Marqueur de la domination de classe, l’avion est excessivement émetteur de gaz à effet de serre (GES), <a href="https://theconversation.com/impact-du-transport-aerien-sur-le-climat-pourquoi-il-faut-refaire-les-calculs-116534">bien plus que n’importe quel autre moyen de transport</a>.</p>
<p>Chaque année, en moyenne, une personne des classes supérieures émet <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0921800922003470">plusieurs tonnes de GES en voyageant en avion</a>. De ce seul fait, l’empreinte carbone de sa trajectoire sociale est sans commune mesure avec celle de la plupart des individus, qui n’ont jamais pris l’avion de leur vie ou ne l’ont pris qu’exceptionnellement.</p>
<p>Ainsi, les ressources durables qu’elle a accumulées grâce à ces voyages ont eu un coût écologique très élevé. Que cette personne ait ou non arrêté de prendre l’avion ces dernières années ne change qu’à la marge le coût de son privilège.</p>
<p>Dans le débat sur l’avenir de l’avion, il est donc avant tout question de l’empreinte écologique des positions sociales dominantes, et non de comportements individuels universels qu’il faudrait corriger.</p>
<h2>Les quotas, une proposition ambivalente</h2>
<p>Depuis cette perspective, comment interpréter l’idée d’un quota de quatre vols en avion dans la vie d’une personne ?</p>
<p>Une première interprétation est progressiste. On peut considérer qu’étendre le privilège de prendre l’avion quatre fois à l’ensemble de la société permettrait à tous les jeunes, sans distinction, d’aller « découvrir le monde ». Une interprétation toutefois écologiquement extrêmement coûteuse.</p>
<p>Car faire voler chaque personne quatre fois dans sa vie consommerait une part très importante du budget carbone qu’il reste à l’humanité. Pour donner un ordre de grandeur, offrir à chaque Française et Français quatre allers-retours Paris–New York dans sa vie consommerait l’équivalent de 6 % du budget carbone <a href="https://bonpote.com/la-france-ignore-la-science-pour-ses-objectifs-climatiques/">pourtant largement surestimé</a> que la Stratégie nationale bas carbone alloue aux transports à la fin de la décennie 2020.</p>
<p>Cela pèserait d’autant plus au fil des années, le budget carbone diminuant : ces vols équivaudraient à 5 à 10 % du budget carbone <em>total</em> de la France en 2050.</p>
<p><strong>Émissions carbone annuelles si l’ensemble des Français•es réalisaient dans leur vie</strong></p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/538270/original/file-20230719-19-hxvrlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/538270/original/file-20230719-19-hxvrlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/538270/original/file-20230719-19-hxvrlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/538270/original/file-20230719-19-hxvrlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/538270/original/file-20230719-19-hxvrlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/538270/original/file-20230719-19-hxvrlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/538270/original/file-20230719-19-hxvrlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/538270/original/file-20230719-19-hxvrlv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Détails du calcul : Un aller-retour : 2 tonnes (ordre de grandeur d’un Paris–New York). Cohorte de 18 ans en 2023 : 800 000 individus. Budget carbone de la France en 2030 selon la Stratégie nationale bas carbone : 300 millions de tonnes au total, 94 millions de tonnes pour les transports.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette interprétation progressiste est peu concevable. Une autre, probablement plus conforme à ce qu’envisage Jean-Marc Jancovici, consisterait à ne pas encourager à voler la population qui ne vole pas, mais à limiter celle qui vole.</p>
<p>Cela signifie, <em>in fine</em>, permettre aux membres des classes supérieures des pays du Nord de bénéficier encore du privilège de prendre un petit peu l’avion. C’est donc bien sur leurs privilèges que devrait porter le débat, comme celui qui émerge autour de la décarbonation de l’aviation.</p>
<h2>Décarboner pour une minorité ?</h2>
<p>Si l’on veut contenir au maximum le réchauffement climatique, continuer à faire voler des avions implique leur décarbonation rapide. C’est le cas même si l’on décide de limiter les vols des classes supérieures des pays les plus riches.</p>
<p>Or, à court terme, il n’y a pas de solution permettant de voler autant sans émettre de GES. Emmanuel Macron a donc proposé un investissement de 8,5 milliards d’euros d’ici 2027 pour développer un « avion ultrasobre » et des carburants durables.</p>
<p>L’ambition <a href="https://www.lemonde.fr/campus/article/2023/06/24/l-aeronautique-fait-rever-les-jeunes-ingenieurs-qui-veulent-inventer-l-avion-de-demain_6179071_4401467.html">séduit le monde des ingénieurs</a>, dont les propriétés entrent en affinité à la fois avec la norme de l’avion <a href="https://www.environmentandsociety.org/perspectives/2017/4/article/excuse-us-while-we-fix-sky-weird-supermen-and-climate-engineering">et avec ce type de raisonnement technologique</a>. Elle provoque également quantité d’oppositions : l’aviation ultrasobre n’existera pas dans un futur proche et elle demanderait quoiqu’il en soit une <a href="https://blogs.mediapart.fr/atelier-decologie-politique-de-toulouse/blog/290920/avion-hydrogene-quelques-elements-de-desenfumage">quantité très importante de surfaces de cultures ou d’électricité bas carbone</a>.</p>
<p>Or, la question n’est pas seulement de savoir si c’est possible, mais si c’est désirable. Avant de décider si un secteur mérite un tel investissement, remettons au cœur du débat des éléments plus épineux que la faisabilité technologique : à qui donne-t-on la possibilité de consommer une part si importante du budget carbone restant à l’humanité ? Dans quels buts collectifs ?</p>
<p><strong>Part des personnes croyant en la possibilité future d’un avion plus écologique</strong></p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/538268/original/file-20230719-25-96tni5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/538268/original/file-20230719-25-96tni5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/538268/original/file-20230719-25-96tni5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=177&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/538268/original/file-20230719-25-96tni5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=177&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/538268/original/file-20230719-25-96tni5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=177&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/538268/original/file-20230719-25-96tni5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=222&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/538268/original/file-20230719-25-96tni5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=222&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/538268/original/file-20230719-25-96tni5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=222&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Gauche : Pourcentage d’individus ayant répondu « Oui, tout à fait » à la question : Croyez-vous à la possibilité qu’il existe un jour un avion plus écologique, moins émetteur de CO₂ ? (Source : IFOP-Fondation jean Jaurès, 2022). Droite : Pourcentage d’individus déclarant être très ou assez favorables l’interdiction des vols entre deux villes européennes dès 2026 pour réduire les émissions de carbone.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.jean-jaures.org/wp-content/uploads/2022/06/Enquete_Avions.pdf">ELABE et BFMlV, 2022</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un nécessaire débat démocratique</h2>
<p>Poser ces questions permettrait d’aborder une dimension centrale de la catastrophe écologique : elle est d’abord le fait des fractions les plus privilégiées de la planète, en termes de classes mais aussi de <a href="https://www.taylorfrancis.com/chapters/edit/10.4324/9781315886572-34/welcome-white-anthropocene-giovanna-di-chiro">genre et de race</a>.</p>
<p>Un tel débat aiderait à rendre plus acceptable la réduction nécessaire de l’activité d’un secteur qui, s’il est un symbole de l’industrie française, est aussi un des plus injustes et des plus carbonés de son histoire récente.</p>
<p>De la rendre plus acceptable, y compris aux yeux des personnes qui en pâtiront le plus : <a href="https://atecopol.hypotheses.org/4062">celles qui y travaillent</a>. Cela serait un exercice démocratique intéressant, qui devrait être suivi de nombreux autres.</p>
<hr>
<p><em>Merci à Elsa Favier, Héloïse Prévost, Julian Carrey et Odin Marc pour leurs commentaires.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210072/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Gros est membre de l'Atelier d'écologie politique de Toulouse (Atécopol).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Yoann Demoli ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les débats sur l’avenir du trafic aérien occultent que le recours à l’avion demeure réservé à une minorité.Yoann Demoli, Maître de conférences en sociologie, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Julien Gros, Chargé de recherche CNRS, affilié au LISST (Université Toulouse Jean-Jaurès), Université Toulouse – Jean JaurèsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2053592023-05-15T14:49:29Z2023-05-15T14:49:29ZAprès le chaos de l’été dernier, les compagnies aériennes canadiennes se préparent à un été de changements<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/526267/original/file-20230515-12467-l9hor3.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un avion d’Air Canada décolle de l’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal le 30 juin 2022.</span> <span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Graham Hughes</span></span></figcaption></figure><p>Le Government Accountability Office (GAO) des États-Unis a récemment publié un rapport sur les <a href="https://www.gao.gov/assets/gao-23-105524-highlights.pdf">causes des perturbations des vols avant et après la pandémie</a>. Le rapport souligne les défis auxquels les compagnies aériennes ont été confrontées pour gérer ces perturbations et y répondre.</p>
<p><a href="https://www.gao.gov/assets/gao-23-105524.pdf">Le rapport</a> fait suite aux demandes adressées par le Congrès américain au GAO pour qu’il examine les changements que la pandémie a engendrés dans l’industrie du transport aérien de voyageurs aux États-Unis.</p>
<p>Pour les personnes qui ont vécu le <a href="https://theconversation.com/air-canada-flight-reductions-faqs-about-the-chaos-in-the-airline-industry-185750">chaos de l’aviation canadienne l’été dernier</a> — en particulier celles qui sont passées par les aéroports Pearson de Toronto et Trudeau de Montréal —, il est difficile d’oublier les <a href="https://www.lapresse.ca/affaires/2022-07-01/chaos-a-montreal-trudeau/il-faudra-attendre-avant-que-cesse-l-attente.php">interminables files d’attente</a>, les <a href="https://www.journaldemontreal.com/2022/06/29/bordel-a-laeroport-sa-valise-perdue-en-ville-depuis-12jours">bagages mal acheminés</a> et le <a href="https://www.lesoleil.com/2022/07/06/air-canada-et-laeroport-pearson-se-classent-encore-au-1er-rang-pour-les-retards-9bb54edf339ec47e3196f63a361b59c3/">nombre sans précédent de retards dans les vols</a>.</p>
<p>Dans un secteur où le gouvernement fédéral exerce une importante surveillance réglementaire, il peut valoir la peine d’examiner et de comparer les <a href="https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/44-1/TRAN/reunion-26/temoignages">efforts parlementaires accomplis au Canada</a> pour remédier aux perturbations des vols avec ceux déployés par le Congrès américain.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/chaos-dans-le-secteur-aerien-canadien-les-prochains-changements-risquent-daggraver-la-situation-187813">Chaos dans le secteur aérien canadien : les prochains changements risquent d’aggraver la situation</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<h2>Réformes des compagnies aériennes</h2>
<p>Le 19 août 2022, le Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités du Canada a tenu une réunion <a href="https://www.noscommunes.ca/DocumentViewer/fr/44-1/TRAN/reunion-27/temoignages">pour entendre les préoccupations d’Omar Alghabra</a>, ministre des Transports, concernant les retards et les annulations de vols.</p>
<p>La rencontre a porté sur la nécessité de mieux protéger les droits des passagers aériens lors de tels événements.</p>
<p>Les droits des voyageurs demeurent d’actualité. <a href="https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/point-du-jour/segments/entrevue/441304/minsitre-transports-loi-c-47-preuves-transporteurs-compensation">Fin avril, M. Alghabra a annoncé des réformes</a> de la procédure de recours de l’Office des transports du Canada et de la Loi sur les transports. Les compagnies aériennes seront tenues de traiter les réclamations et de fournir une réponse aux plaintes dans un délai de 30 jours.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un homme portant un costume et des lunettes parle derrière un microphone posé sur un bureau. Une rangée de drapeaux canadiens se trouve derrière lui" src="https://images.theconversation.com/files/524217/original/file-20230503-17-n9r1yz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524217/original/file-20230503-17-n9r1yz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524217/original/file-20230503-17-n9r1yz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524217/original/file-20230503-17-n9r1yz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524217/original/file-20230503-17-n9r1yz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524217/original/file-20230503-17-n9r1yz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524217/original/file-20230503-17-n9r1yz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Omar Alghabra, ministre des Transports, lors d’une conférence de presse sur les changements proposés aux droits des passagers aériens, à Ottawa, le 24 avril 2023.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Justin Tang</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les amendements, qui sont actuellement déposés à la Chambre des communes dans le cadre d’un projet de loi d’exécution du budget, toucheront les sanctions auxquelles s’exposent les transporteurs aériens en cas de violation des droits des voyageurs.</p>
<p>Plus précisément, l’amende maximale pour violation des droits sera désormais de 250 000 dollars et le coût réglementaire des plaintes sera à la charge des transporteurs.</p>
<p>À titre de comparaison, l’analyse et les recommandations du GAO sont beaucoup plus détaillées.</p>
<h2>Réformes américaines</h2>
<p>Le département américain des Transports <a href="https://www.businessinsider.com/flight-delays-would-mean-compensation-for-customers-under-proposed-rule-2022-8">a récemment lancé l’élaboration d’une réglementation</a> sur la protection des passagers similaire à celle que le Canada a mise en place en 2019.</p>
<p>Le département des Transports n’a toutefois pas encore abordé la question du montant des indemnités à verser aux passagers ayant subi des retards de vol. Le Canada a déjà adopté de telles dispositions qui sont semblables à celles en vigueur dans l’Union européenne.</p>
<p>Le rapport du GAO a ceci d’intéressant qu’il se penche sur la connaissance du département américain des Transports des pratiques en matière d’établissement des horaires des compagnies aériennes et de l’impact de celles-ci sur les retards et les annulations de vols.</p>
<p><a href="https://www.gao.gov/assets/820/819136.pdf">Dans son rapport, le GAO indique</a> que le département des Transports est habilité à « réglementer les pratiques déloyales et trompeuses des compagnies aériennes, notamment leurs pratiques irréalistes en matière de programmation des horaires ».</p>
<p>Le département des Transports définit les pratiques irréalistes comme « une programmation de vols que les compagnies aériennes ne peuvent pas respecter de manière générale et raisonnable ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une femme marche devant un écran affichant les horaires des vols" src="https://images.theconversation.com/files/524216/original/file-20230503-24-1sjo91.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524216/original/file-20230503-24-1sjo91.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524216/original/file-20230503-24-1sjo91.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524216/original/file-20230503-24-1sjo91.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524216/original/file-20230503-24-1sjo91.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524216/original/file-20230503-24-1sjo91.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524216/original/file-20230503-24-1sjo91.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les vols annulés sont indiqués en rouge sur les horaires des vols au terminal Southwest de l’aéroport international de Los Angeles en décembre 2022.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Damian Dovarganes)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le rapport conclut que diverses parties prenantes, dont plusieurs compagnies aériennes et syndicats, ont établi des horaires de vol irréalistes, que les transporteurs ne peuvent pas respecter.</p>
<p>Le département des Transports a déclaré qu’il s’efforcerait, l’année prochaine, de renforcer et de maintenir sa surveillance et son analyse des pratiques des compagnies aériennes en matière de planification des horaires. Cela permettra de s’assurer que ces entreprises proposent des horaires réalistes et minimisent l’impact des perturbations des vols sur les passagers.</p>
<h2>Le Canada peut-il en tirer des leçons ?</h2>
<p>Il est essentiel que des efforts soient faits pour offrir une indemnisation adéquate dans des délais raisonnables aux passagers victimes de retards et d’annulations des compagnies aériennes. Mais il est tout aussi important, sinon plus, de s’attaquer aux causes sous-jacentes de ces perturbations.</p>
<p>Il convient d’assurer une surveillance de la programmation des compagnies aériennes. Les voyageurs canadiens doivent pouvoir se fier aux horaires publiés par les compagnies aériennes, d’autant plus qu’ils achètent souvent leurs billets longtemps avant leur vol.</p>
<p>Transports Canada doit-il assumer ce rôle de supervision ? Il est peut-être temps d’envisager sérieusement la création d’une autorité de l’aviation civile distincte de Transports Canada.</p>
<p>Les Canadiens commencent à perdre patience face aux actions des différentes organisations du secteur de l’aviation au Canada. Parallèlement, des <a href="https://www.commondreams.org/news/united-ceo-airlines-scheduling-flights">rumeurs de retour à la réglementation</a> se font de plus en plus entendre dans le secteur aérien des États-Unis.</p>
<p>Au Canada, la <a href="https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/transport-reglementation-du">déréglementation a eu lieu il y a près de 40 ans</a>, mais la supervision des horaires des compagnies aériennes pourrait constituer l’un des domaines propices à des réformes pour faire face aux perturbations des compagnies aériennes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205359/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>John Gradek ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les passagers aériens doivent être indemnisés pour les retards et les annulations des compagnies aériennes. Mais il est tout aussi important, sinon plus, de s’attaquer aux causes de ces perturbations.John Gradek, Faculty Lecturer and Program Co-ordinator, Supply Chain, Logistics and Operations Management, McGill UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1996982023-02-19T17:05:47Z2023-02-19T17:05:47ZQuel est le siège le plus sûr dans un avion ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/509439/original/file-20230210-18-dt1row.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C49%2C3000%2C1944&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il est temps de choisir votre siège.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Lorsque vous réservez un vol, vous demandez-vous quel siège vous protégera le plus en cas d’urgence ? Probablement pas.</p>
<p>La plupart des gens réservent des sièges pour le confort, comme l’espace pour les jambes, la commodité ou l’accès facile aux toilettes. Les grands voyageurs (dont je fais partie) réservent parfois leur siège le plus près possible de l’avant de l’avion pour pouvoir débarquer plus rapidement.</p>
<p>Nous réservons rarement un vol en espérant obtenir l’un des sièges du milieu de la dernière rangée. Et bien, devinez quoi ? Ces sièges sont statistiquement les <a href="https://time.com/3934663/safest-seat-airplane/">plus sûrs dans un avion</a>.</p>
<h2>Les voyages en avion sont sûrs</h2>
<p>Avant d’entrer dans le vif du sujet, je tiens à rappeler que le transport aérien est le <a href="https://www.sbs.com.au/news/article/how-safe-is-flying-heres-what-the-statistics-say/knzczab06">mode de transport le plus sûr</a>. En 2022, il y a eu un peu moins de <a href="https://www.flightradar24.com/data/statistics">70 millions</a> de vols dans le monde, avec seulement <a href="https://www.pnc-contact.com/2023/01/02/accidents-avions-2022">174 décès</a>.</p>
<p>Selon l’analyse des données de recensement effectuée par le Conseil national de la sécurité américain, les chances de <a href="https://time.com/3934663/safest-seat-airplane/">mourir dans un avion</a> sont d’environ 1 sur 205 552, contre 1 sur 102 dans une voiture. Malgré cela, nous accordons peu d’attention aux accidents mortels de la route, mais lorsque nous entendons parler d’un <a href="https://www.theguardian.com/world/2023/jan/15/nepal-plane-crash-with-72-onboard-leaves-at-least-16-dead">avion qui s’écrase</a>, il fait la une de tous les journaux.</p>
<p>Notre intérêt pour les accidents d’avion peut résider dans notre volonté de comprendre pourquoi ils se produisent, ou quelles sont les chances qu’ils se reproduisent. Et ce n’est peut-être pas une mauvaise chose : notre intérêt permet de s’assurer que ces incidents tragiques font l’objet d’une <a href="https://apnews.com/article/plane-crashes-nepal-singapore-kathmandu-accidents-3b26342109872610d922f515fe94455b">enquête approfondie</a>, ce qui contribue à la sécurité du transport aérien.</p>
<p>Il n’y a pas vraiment lieu de s’inquiéter de la sécurité lorsque vous embarquez sur un vol commercial. Mais si vous avez toujours cette question lancinante en tête, poussée par la pure curiosité, lisez ce qui suit.</p>
<h2>Au milieu, à l’arrière</h2>
<p>Il est bon de rappeler que les accidents, par leur nature même, ne sont pas conformes aux normes. Lors du <a href="https://www.britannica.com/event/United-Airlines-Flight-232">crash du vol United 232</a> à Sioux City (Iowa) en 1989, 184 des 269 personnes à bord ont survécu à l’accident. La plupart des survivants étaient assis derrière la première classe, vers l’avant de l’avion.</p>
<p>Néanmoins, une <a href="https://time.com/3934663/safest-seat-airplane/">enquête du magazine américain <em>Time</em></a> qui a examiné 35 ans de données sur les accidents d’avion a révélé que les sièges arrière centraux d’un avion présentaient le taux de mortalité le plus faible : 28 %, contre 44 % pour les sièges de l’allée centrale.</p>
<p>C’est également logique. S’asseoir à côté d’une rangée où se situe la sortie vous offrira toujours la sortie la plus rapide en cas d’urgence, à condition qu’il n’y ait pas de feu de ce côté. Mais les ailes d’un avion stockent du carburant, ce qui disqualifie les rangées de sortie centrales en <a href="https://www.rd.com/list/flight-safety/">tant qu’option de rangée la plus sûre</a>.</p>
<p>En même temps, le fait d’être plus près de l’avant signifie que vous serez touché avant ceux de l’arrière, ce qui nous laisse la dernière rangée qui compte une sortie. Pour ce qui est de la raison pour laquelle les sièges du milieu sont plus sûrs que ceux de la fenêtre ou de l’allée, c’est, comme on peut s’y attendre, à cause du tampon que constitue la présence de personnes de chaque côté.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/507486/original/file-20230201-24-8p3bpc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Une vue de face de l’aile d’un avion commercial" src="https://images.theconversation.com/files/507486/original/file-20230201-24-8p3bpc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/507486/original/file-20230201-24-8p3bpc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=320&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/507486/original/file-20230201-24-8p3bpc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=320&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/507486/original/file-20230201-24-8p3bpc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=320&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/507486/original/file-20230201-24-8p3bpc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=402&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/507486/original/file-20230201-24-8p3bpc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=402&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/507486/original/file-20230201-24-8p3bpc.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=402&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les ailes des avions commerciaux stockent du carburant, ce qui peut rendre cette zone légèrement plus dangereuse dans le cas très improbable d’une urgence.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Certains accidents sont pires que d’autres</h2>
<p>Le type d’accident déterminera également la capacité de survie. Se heurter à une montagne diminuera les chances de survie de manière exponentielle, comme ce fut le cas lors d’une tragique catastrophe survenue en 1979 en Nouvelle-Zélande. Le vol TE901 d’Air New Zealand s’est écrasé sur les pentes du mont Erebus en <a href="https://nzhistory.govt.nz/culture/erebus-disaster">Antarctique</a>, tuant 257 passagers et membres d’équipage.</p>
<p>Les pilotes sont formés pour minimiser au mieux les risques potentiels en cas d’urgence. Ils essaieront d’éviter de heurter des montagnes et chercheront un endroit plat, comme un champ ouvert, pour atterrir aussi normalement que possible. La technique d’<a href="https://www.aviationsafetymagazine.com/features/the-myths-of-ditching/">atterrissage dans l’eau</a> consiste à évaluer les conditions de surface et à essayer d’atterrir entre les vagues à un angle d’atterrissage normal.</p>
<p>Les avions sont conçus pour être très robustes dans les situations d’urgence. En fait, la principale raison pour laquelle le personnel de cabine nous rappelle de garder nos ceintures attachées n’est pas le risque d’écrasement, mais les <a href="https://www.skybrary.aero/articles/clear-air-turbulence-cat">« turbulences en air clair »</a> que l’on peut rencontrer à tout moment à haute altitude. C’est ce phénomène météorologique qui peut causer le plus de dommages <a href="https://www.usnews.com/news/us/articles/2022-12-20/turbulence-persists-as-a-major-cause-of-injuries-on-flights">aux passagers et aux avions</a>.</p>
<p>Les constructeurs conçoivent de nouveaux avions avec davantage de matériaux composites capables de résister aux contraintes en vol. Dans ces modèles, les ailes ne sont pas rigides et peuvent fléchir pour absorber une <a href="https://www.wired.com/2010/03/boeing-787-passes-incredible-wing-flex-test/">charge extrême</a> afin d’éviter une défaillance structurelle.</p>
<h2>Le type d’avion fait-il une différence ?</h2>
<p>Il est vrai que certaines variables, comme l’impact de la vitesse, peuvent varier légèrement d’un type d’avion à l’autre. Cependant, la <a href="https://www.grc.nasa.gov/www/k-12/UEET/StudentSite/dynamicsofflight.html">physique du vol</a> est plus ou moins la même pour tous les avions.</p>
<p>En général, les avions plus grands ont plus de matériaux structurels et donc plus de résistance pour supporter la pressurisation en altitude. Cela signifie qu’ils peuvent offrir une protection supplémentaire en cas d’urgence, mais cela dépend, là encore, de la gravité de l’urgence.</p>
<p>Cela ne veut pas dire que vous devez réserver votre prochain vol sur le plus gros avion que vous pouvez trouver. Comme je l’ai mentionné, les voyages en avion restent très sûrs.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199698/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Doug Drury ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les voyages en avion sont très sûrs, bien plus que les voyages en voiture. Mais cela ne nous empêche pas de nous demander où il vaut mieux s’installer.Doug Drury, Professor/Head of Aviation, CQUniversity AustraliaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1936722022-11-15T16:51:07Z2022-11-15T16:51:07ZTransport aérien et environnement : comment poser le problème ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/494470/original/file-20221109-2910-ppvblz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1769%2C1180&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Déjà en 2005, pour rendre compte du trafic quotidien, un artiste s’était posté une journée à l’aéroport d’Hanovre, en Allemagne, et avait superposé les images des tous les décollages.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/irisheyes/438936558">Ho Yeol Ryu via Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/avion-56375">transport aérien</a> nourrit nombre de controverses environnementales comme le montre l’actualité en France de ces dernières années. Il y a bien entendu eu le projet nantais d’aéroport de <a href="https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/notre-dame-des-landes-il-y-a-quatre-ans-le-9-avril-2018-l-expulsion-dans-la-zad-debutait-7867e9c2-b75a-11ec-91b4-4cb12076d3f2">Notre-Dame-des-Landes</a> auquel le gouvernement a renoncé en 2018, mais aussi l’arrêt du projet de <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/11/07/emmanuel-macron-annonce-l-abandon-du-megacomplexe-europacity-au-nord-de-paris_6018357_3234.html">mégacentre de loisirs EuropaCity</a> en 2019, envisagé aux abords de l’aéroport de Roissy, puis l’abandon du <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2021/02/11/le-gouvernement-annonce-l-abandon-du-projet-de-nouveau-terminal-a-l-aeroport-de-roissy_6069552_3244.html">Terminal 4</a> en 2021, qui devait augmenter de 50 % sa capacité.</p>
<p>Entre-temps, la question de la privatisation d’Aéroports de Paris s’est invitée durant les débats sur le projet de loi Pacte. À cette occasion, près de 250 parlementaires se sont mobilisés, demandant un référendum d’initiative populaire relatif au maintien du <a href="https://metropolitiques.eu/Aeroports-de-Paris-un-levier-strategique-pour-l-%C3%89tat.html">statut public</a> de l’autorité. Si la requête n’a pu réunir le quorum exigé par la loi, le projet de privatisation s’est vu retarder alors que la pandémie liée au coronavirus mettait à l’arrêt les aéroports.</p>
<p>Cible récurrente du débat public, le développement de l’aviation fait surgir d’autres questions encore : celle d’une sécession des élites qui s’affranchiraient des contingences terrestres (souvenons-nous de la polémique sur les jets privés) ou celle des crises énergétiques qui mettent à jour les obstacles techno-politiques à la sortie des énergies fossiles.</p>
<p>Pourtant, comme l’ont montré nos <a href="https://hal-enpc.archives-ouvertes.fr/hal-00763109/document">travaux</a>, les devenirs du transport aérien ne peuvent être saisis seulement à partir de « crises » dont les « problèmes » nécessiteraient d’être « résolus ». Si des controverses ont permis d’approfondir les enjeux à l’œuvre, en offrant une arène pour le débat public, d’autres sont restées au stade de la polémique. Pour poser le problème dans son ensemble, <a href="https://fr.calameo.com/read/004309853100e9df78af2?authid=gMmtBLCKAwWd">trois questions</a> paraissent cruciales : la mesure des effets du transport aérien, l’empreinte de son infrastructure et le temps de sa transition.</p>
<h2>Des chiffres incomplets</h2>
<p>Pour comprendre le rôle de la mobilité aérienne dans les désordres environnementaux, il convient d’abord d’en mesurer les effets globaux. La tâche n’est cependant pas aisée du fait du caractère mondial des données nécessaires et du mode d’élaboration des indicateurs destinés à apprécier la grandeur du problème. Que compte-t-on dans les sources, les volumes, les natures et les impacts des émissions ?</p>
<p>La contribution du transport aérien au changement climatique est actuellement calculée sous la forme d’un pourcentage estimé autour de 4 % selon les dernières études scientifiques de référence (<a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1352231020305689">Atmospheric Environment</a>, <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/ac286e/meta">Environmental Research</a>, <a href="https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2020/06/2020-05-27_Pr%C3%A9parer-lavenir-de-laviation_Propositions-de-contreparties.._.pdf">The Shift Project</a>). Sa mesure intègre les émissions de dioxyde de carbone mais aussi celles des autres gaz à effet de serre comme les oxydes d’azote, l’ozone ou le méthane. Sont également considérés les effets des cirrus, ces nuages issus des traînées de condensation qui aggravent le forçage radiatif.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Les efforts demandés au secteur aérien pour rester dans la limite d’un réchauffement global de 1.5 °C se heurtent néanmoins à la partialité des chiffres sur lesquels sont fondés les accords internationaux climatiques. D’une part, seules les émissions de CO<sub>2</sub> sont prises en compte et non les émissions hors CO<sub>2</sub> qui sont <a href="https://www.letemps.ch/sciences/meme-emissions-co2-laviation-contribuerait-significativement-rechauffement-climatique">significatives</a>.</p>
<p>D’autre part, le <a href="https://www.sami.eco/blog/les-angles-morts-nos-objectifs-climatiques">trafic aérien international</a> est exclu des objectifs fixés pour les États, qu’il s’agisse du protocole de Kyoto ou des accords de Paris. Les chiffres sont là pour montrer l'ampleur des écarts entre ce qui est pris en compte et ce qui compte. En France, la Direction générale de l’aviation civile a mis au point un outil de mesure nommé <a href="https://eco-calculateur.dta.aviation-civile.gouv.fr/comment-ca-marche">Tarmaac</a> (pour Traitements et analyses des rejets émis dans l’atmosphère par l’aviation civile) qui estime les émissions des vols intérieurs (Métropole et Outre-mer) ainsi que celles des vols internationaux touchant la France (chaque vol étant compté pour moitié de ses émissions). Si les émissions liées aux déplacements intérieurs ont tendance à baisser, celles du trafic international, qui représentent <a href="https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2021/12/TSP_AVIATION_RAPPORT_211116.pdf">80% du volume total</a>, ont augmenté de <a href="https://eco-calculateur.dta.aviation-civile.gouv.fr/les-chiffres-cles">40%</a> entre 2000 et 2019.</p>
<p>La réception des chiffres est quant à elle contrastée. Les uns relativisent l’importance du transport aérien au regard des secteurs de la <a href="https://www.rtbf.be/article/cop26-quel-est-limpact-du-secteur-de-la-construction-sur-les-emissions-de-gaz-a-effet-de-serre-10868512">construction</a> ou des <a href="https://www.notre-environnement.gouv.fr/themes/climat/les-emissions-de-gaz-a-effet-de-serre-et-l-empreinte-carbone-ressources/article/les-emissions-de-gaz-a-effet-de-serre-du-secteur-des-transports#:%7E:text=Le%20transport%20est%20l%E2%80%99activit%C3%A9,transports%20ont%20augment%C3%A9%20de%209%20%25.">transports terrestres</a>, bien plus émetteurs en volumes globaux. Mais la comparaison vaut-elle entre le déplacement dans les airs, non démocratisé car non vital, et l’habiter sur terre qui concerne tout un chacun ? D’autres au contraire soulignent l’importance de ce chiffre, privilégiant sa valeur absolue mise en regard de la question des <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=yiq7DQAAQBAJ">limites planétaires</a>.</p>
<p>Un autre indicateur est parfois utilisé : le <a href="https://bilans-ges.ademe.fr/fr/accueil/contenu/index/page/presentation/siGras/0">taux d’émission par passager par kilomètre parcouru</a>. Comparé au train, l’avion est très émetteur ; avec l’automobile, il est à égalité. La mesure par kilomètre pose toutefois la question de l’impact écologique de l’accélération, car on ne franchit pas les mêmes distances en automobile et en avion.</p>
<p>Comme le soulignent l’économiste des transports <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-03192824/document">Yves Crozet</a> et le sociologue <a href="https://www.revue-projet.com/articles/2016-11-rosa-la-logique-de-croissance-et-d-acceleration-s-empare-de-notre-esprit-et-de-notre-corps/8179">Hartmut Rosa</a>, l’augmentation des vitesses de transport a produit, non pas un « gain » de temps pour les usagers, mais un allongement des distances parcourues. Il serait donc plus juste de comptabiliser le facteur du temps de transport pour mesurer les effets comparés des modes de déplacement. C’est ce que propose l’économiste de l’environnement <a href="https://theconversation.com/impact-du-transport-aerien-sur-le-climat-pourquoi-il-faut-refaire-les-calculs-116534">Aurélien Bigo</a>, dont les calculs font grimper l’aviation en haut des transports les plus émetteurs.</p>
<h2>Infrastructure, territoire et culture</h2>
<p>Toutes ces analyses, en outre, ne tiennent compte que d’une partie du problème car elles ne mesurent que les impacts des vols stricto sensu, oubliant les infrastructures aéroportuaires et la construction aéronautique sans lesquelles les avions ne pourraient pas voler. Comment mesurer la globalité des empreintes du transport aérien, qui comprend les cycles de vie des aéronefs, l’impact des aéroports et l’environnement des vols ?</p>
<p>Scruter la contribution de la mobilité aérienne aux changements globaux suppose de mettre à jour ses « moteurs immobiles » comme l’énonçait <a href="https://books.openedition.org/pur/102123?lang=fr">Bruno Latour</a>. Avec le transport aérien, la construction aéronautique et l’infrastructure aéroportuaire forment les piliers d’un <a href="https://books.openedition.org/psorbonne/76097?lang=fr">macro-système</a> au sein duquel opèrent des entreprises qui agissent sur la scène globale des groupes mondiaux. Désir de mouvement, globalisation des flux, accélération des vitesses, épreuves du risque ont aussi produit une longue traîne d’influences et d’expériences, façonnant une <a href="https://hal-enpc.archives-ouvertes.fr/hal-03107968/document">culture aérienne</a> qui a <a href="https://hal-enpc.archives-ouvertes.fr/hal-03396649/document">métamorphosé nos relations</a> aux territoires, leur espace, leur histoire, leurs échelles.</p>
<p>Ainsi, l’emprise de l’infrastructure aérienne est ample et diffuse. Elle ne saurait être réduite aux seules plates-formes sur lesquelles atterrissent les aéronefs. Il faut aussi compter les sites et leurs dépendances, les clôtures et leurs rives, les voies d’accès qui l’irriguent, les routes aériennes et les territoires qu’elles survolent, les institutions qui la soutiennent, les produits et les dérivés qui l’alimentent.</p>
<p>Dès lors, matérialiser son empreinte permet de comprendre ce qui se joue dans les divergences d’intérêt dont font l’objet les grands projets contestés, d’envisager les alternatives aussi, et les réversibilités.</p>
<h2>Penser le temps de la transition</h2>
<p>Si comprendre les impacts du transport aérien est difficile à mesurer, appréhender ses futurs l’est tout autant. Sa <a href="https://theconversation.com/trafic-aerien-mondial-une-croissance-fulgurante-pas-prete-de-sarreter-116107">croissance</a> mondiale s’annonce florissante, autour de 5 % par an, soit un doublement de son niveau en 15 ans. L’Organisation de l’aviation civile internationale prévoit quant à elle une <a href="https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2020/06/2020-05-27_Pr%C3%A9parer-lavenir-de-laviation_Propositions-de-contreparties.._.pdf">multiplication par quatre</a> des volumes d’émissions d’ici 2050.</p>
<p>À ces trajectoires qui divergent de l’impératif climatique, tentent de répondre les prospectives qui parient sur l’innovation technologique et énergétique. Pourtant, si nous considérons la seule question énergétique, la recherche sur des alternatives non fossiles – biocarburants et carburants de synthèse, électricité et hydrogène – soulève tout un ensemble de questions sur les possibilités d’y parvenir, sur les ressources mobilisables (eau, énergie, cultures intensives), sur l’adéquation des flottes existantes ou sur la durée des amortissements des investissements. L’actualité de la crise, en Europe et en France, montre par ailleurs la persistance d’un « mix » qui agrège les énergies fossiles et renouvelables, modifiant et renforçant en même temps les structures économiques et politiques qui les soutiennent.</p>
<p>Du temps est nécessaire comme le montre le cas de l’automobile dont le modèle électrique est pourtant possible sur le plan technologique. En effet, la <a href="https://theconversation.com/fin-de-la-voiture-thermique-pourquoi-le-tout-electrique-na-rien-dune-solution-miracle-192264">pertinence</a> d’une transition massive soulève bien des questions sur le plan écologique, par ailleurs en butte à maints obstacles : poids des batteries, disponibilité des métaux rares, volumes d’énergie, coûts sociaux… Ces paris incertains ne peuvent donc être exclusifs d’autres options que sont la sobriété, la réduction et la régulation.</p>
<p>Omniprésent et ambigu, le terme de transition est souvent entendu comme un temps linéaire et défini à l’issue duquel seraient surmontées les crises, nous projetant dans un « monde d’après » dont nous peinons peut-être à comprendre <a href="https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/120420/stephane-audoin-rouzeau-nous-ne-reverrons-jamais-le-monde-que-nous-avons-quitte-il-y-un-mois">qu’il ne ressemblera à rien du monde d’avant</a>.</p>
<p>Confrontés à la question de son (in)habitabilité, les citoyens de la terre gagneraient à être mieux éclairés sur notre présent, ce « plasma dans lequel baignent les phénomènes et comme le lieu de leur intelligibilité » nous disait l’historien Marc Bloch. Forte de son histoire pluriséculaire, l’économie aérienne peut-elle y parvenir ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/193672/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Roseau ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Au-delà des controverses, il s'agit de poser le problème à travers la mesure de ses effets, l’empreinte de son infrastructure et le temps de sa transition.Nathalie Roseau, Professeure d’urbanisme, École des Ponts ParisTech (ENPC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1901812022-09-22T18:45:19Z2022-09-22T18:45:19ZPodcast « Facteur (mal)chance » : Survivre, seule, à un crash aérien<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/483268/original/file-20220907-20-45exyk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C49%2C1255%2C800&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Avion de Vietnam Airlines exposé à Hô Chi Minh-Ville, identique à l’appareil accidenté dans lequel se trouvait Annette Herfkens le 14&nbsp;novembre 1992.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Vol_474_de_Vietnam_Airlines#/media/Fichier:VN-A446_Yakolev_Yak.40_VAA_(7879700854).jpg">Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><iframe src="https://embed.acast.com/601af61a46afa254edd2b909/632c0dbbe7377c001224dbf7" frameborder="0" width="100%" height="190px"></iframe>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-ecouter-les-podcasts-de-the-conversation-157070">Comment écouter les podcasts de The Conversation ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Pourquoi certaines personnes ont-elles de la chance et d’autres n’en ont pas ? Est-ce simplement le hasard ? Comment se fait-il que l’on s’estime parfois chanceux dans notre malheur ? Est-il vraiment possible d’attirer la chance à soi ? Et si oui, comment ? </p>
<p>Dans son dernier livre, <em>Provoque ta chance !</em> (Éditions Albin Michel), Christophe Haag, chercheur en <a href="https://theconversation.com/fr/topics/psychologie-comportementale-64120">psychologie sociale</a> et professeur en comportement organisationnel à l’emlyon business school, tente d’apporter des éléments de réponses à ces questions. Comme pour ses précédents travaux sur la <a href="https://theconversation.com/bonnes-feuilles-lemotion-le-virus-le-plus-contagieux-sur-terre-117866">contagion émotionnelle</a> entre les individus, il recourt à la méthode de la « tératologie », autrement dit l’étude de cas extrêmes, du « pas ordinaire », pour mieux comprendre la normalité. </p>
<p>Le deuxième épisode de notre série de podcasts, « Facteur (mal)chance » revient sur l’incroyable histoire d’Annette Herfkens, la seule survivante du vol 474 de la compagnie Vietnam Airlines qui s’est écrasé le 14 novembre 1992. Cette tradeuse de Wall Street parviendra par la suite à survivre huit jours dans la jungle hostile. Elle se définit aujourd’hui comme une « malchanceuse chanceuse ». </p>
<hr>
<p><strong>À écouter aussi</strong><br> Épisode #1 – <a href="https://theconversation.com/podcast-facteur-mal-chance-le-rescape-du-bataclan-devenu-paraplegique-190087">Le rescapé du Bataclan devenu paraplégique</a> –</p>
<hr>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/482976/original/file-20220906-12-pfmb9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/482976/original/file-20220906-12-pfmb9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/482976/original/file-20220906-12-pfmb9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=881&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/482976/original/file-20220906-12-pfmb9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=881&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/482976/original/file-20220906-12-pfmb9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=881&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/482976/original/file-20220906-12-pfmb9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1107&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/482976/original/file-20220906-12-pfmb9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1107&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/482976/original/file-20220906-12-pfmb9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1107&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Crédits, conception et animation, Thibault Lieurade. Réalisation, équipe technique de l’EM Lyon et Romain Pollet. Chargé de production, Rayane Meguenni</em>. </p>
<p><em>Musique : « Episodes », Azoora feat. Graciellita, 2011.</em></p>
<p><em>Le livre « Provoque ta chance ! Pourquoi certains en ont et d’autres pas » de Christophe Haag a été publié le 2 mars 2022 aux <a href="https://www.albin-michel.fr/provoque-ta-chance-9782226450586">Éditions Albin Michel</a> et le 24 août 2022 en <a href="https://www.audiolib.fr/livre/provoque-ta-chance-9791035410698/">livre audio</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190181/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Haag ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En 1992, après un accident d'avion et huit jours dans la jungle hostile, Annette Herfkens a finalement pu être secourue. Dans ce miracle, la chance n'explique pas tout…Christophe Haag, Professeur HDR en comportement organisationnel, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1898232022-09-08T19:20:53Z2022-09-08T19:20:53ZLa grande pagaille de l’été dans l’aérien s’explique (aussi) par la domination du modèle low cost<p>Le secteur du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/transport-aerien-29163">transport aérien</a> est révélateur des chocs subis par les entreprises depuis plus de deux ans. Elles ont dû s’ajuster en permanence, dans un environnement particulièrement incertain, et les cycles d’activité ont été particulièrement marqués pour les compagnies. Souvenons-nous, par exemple, des images de l’aéroport parisien d’Orly, désert durant les premiers mois de pandémie.</p>
<p>L’été 2022 a, lui, été caractérisé par une <a href="https://www.iata.org/en/pressroom/2022-releases/2022-08-04-01/">reprise très forte du trafic</a>, notamment en Europe, sur le court et le moyen-courrier. Une reprise jusqu’à présent synonyme de <a href="http://www.slate.fr/story/231626/transport-aerien-chaos-aeroports-voyage-chaos-bagages-trafic-avions-retards-annulations">chaos</a> avec des passagers qui ont souvent découvert que leur vol était annulé au moment d’embarquer. Le fossé entre demande de transport et capacité des transporteurs était bien visible. Les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/compagnies-aeriennes-56376">compagnies aériennes</a> n’ont pu cacher leur absence d’une ressource matérielle clé : le <a href="https://www.capital.fr/economie-politique/la-penurie-de-main-doeuvre-menace-le-trafic-aerien-1437654">personnel navigant</a>.</p>
<p>Entre embauches gelées et départs en retraite non compensés, celui-ci a progressivement disparu ces deux dernières années. Les directions de nombreuses compagnies aériennes ont fait pression sur leurs pilotes, hôtesses, stewards et agents au sol en leur demandant plus d’effort dans les moments difficiles qu’elles ont traversés. Amener de nouvelles recrues à être opérationnelles demande par ailleurs un temps certain. La tension actuelle peut être ainsi perçue comme momentanée.</p>
<p>Rien ne dit cependant que le déficit de ressources va être comblé. Cette pagaille, nous pouvons l’interpréter à partir de nos <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2013-7-page-33.htm?contenu=resume">travaux</a> sur les bouleversements provoqués ces dernières années par le développement des compagnies <a href="https://theconversation.com/fr/topics/low-cost-46331">low cost</a>. Nous en avons montré deux caractéristiques qui ont été particulièrement pénalisantes dans l’environnement incertain de la pandémie : l’absence de ressources excédentaires et la spécialisation des activités.</p>
<h2>Plus de réserves</h2>
<p>L’Association du transport aérien international, qui unit la plupart des grosses compagnies, alertait dès 2007 sur un <a href="https://www.iata.org/en/pressroom/2007-releases/2007-29-11-01/">vieillissement de la profession</a> de pilote et sur des départs non remplacés, faute de candidats. Du côté des stewards et hôtesses ou du personnel au sol des compagnies, les métiers ne font pas rêver. Les réductions d’effectifs parfois massives opérées par les compagnies sur 2020 et 2021 ne seront peut-être jamais compensées.</p>
<p>En gestion, on parle dans ce cas d’un problème de « slack ». Le « slack », c’est la réserve de ressources, du matériel, du personnel ou même du temps qu’une entreprise a de côté. C’est ce qui lui permet de répondre à l’imprévu.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Les compagnies aériennes font partie de ces entreprises qui, traditionnellement, ont une exigence de fiabilité et qui se doivent de créer du <em>slack</em> pour parer à toute modification, même forte, de l’environnement. Comment alors expliquer que les transporteurs n’y aient pas davantage pris garde ?</p>
<p>Les causes peuvent aussi bien être conjoncturelles, s’adapter à la pandémie, que plus profondes. Le paradigme historique est en effet remis en cause par l’émergence des modèles à bas coût. L’organisation de Ryanair et EasyJet, les deux leaders de l’aérien en Europe, repose sur une approche éliminant toute ressource excédentaire. On utilise l’adjectif anglais <em>lean</em> en gestion pour la désigner.</p>
<h2>Copier-coller</h2>
<p>Une autre caractéristique de ces modèles est l’externalisation des activités qui ne sont pas le cœur de métier, ou bien qui ne sont pas vues essentielles. La spécialisation dont on parle ici concerne bien les activités, pas le personnel qui est souvent très polyvalent (il suffit de regarder travailler un steward ou une hôtesse à bord pour s’en convaincre).</p>
<p>Celle-ci a, certes, amené une performance remarquable pour ces entreprises, avec des économies d’échelle très importantes. Cette logique ne fonctionne cependant que dans un environnement stable.</p>
<p>Ce n’est pas une découverte : on connaît l’importance de ce principe depuis, au moins, les années 1980. En environnement instable, l’entreprise généraliste est <a href="https://journals.aom.org/doi/abs/10.5465/256460">mieux armée</a> par rapport à l’entreprise ultra spécialisée. Elle est plus à même d’explorer de nouveaux terrains, d’innover et de trouver les réponses appropriées aux défis de l’incertitude.</p>
<p>Or, comme nous l’avons montré, les compagnies traditionnelles ont assez vite copié ce modèle à l’exception peut-être d’Air France. Beaucoup ont créé leur propre filiale à bas coût et même intégré directement dans la compagnie d’origine une bonne partie des composantes de ce type de fonctionnement.</p>
<h2>Suppression et entêtement</h2>
<p>Quelles sont alors les pistes de solution pour ces entreprises dépourvues de réserves pour répondre à l’augmentation rapide de la demande côté client ? Cela se joue à plusieurs niveaux. Anticiper les évolutions de l’environnement est clé mais ne suffit pas : ce qui est aussi nécessaire ici, c’est la qualité de décision une fois que les informations sont traitées.</p>
<p>Sur ce point, on a d’ailleurs vu des situations très différentes : British Airways repérait dès mars 2022 une remontée très forte de la demande pour l’été et a rapidement décidé de réduire sa capacité de vol. La compagnie annonçait d’ailleurs récemment <a href="https://www.lefigaro.fr/societes/british-airways-supprime-10-000-vols-dans-la-foulee-des-limites-instaurees-a-heathrow-20220822">supprimer de nouveaux vols</a> depuis Londres. De son côté, <a href="https://www.latribune.fr/entreprises-finance/services/transport-logistique/manque-de-personnel-navigant-easyjet-pourrait-annuler-massivement-ses-vols-cet-ete-921692.html">EasyJet</a> s’est entêté pour finalement annuler 10 000 vols quelques mois plus tard.</p>
<p>Une autre piste, assurément plus délicate pour les entreprises, serait d’oser parler aux investisseurs et actionnaires d’une révision de l’objectif global puisque le modèle à bas coût semble en cause. Il s’agirait de revoir les ambitions et d’investir durablement en ressources humaines, quantitativement mais aussi sur les conditions de travail, pour retrouver un point d’équilibre.</p>
<p>Le low cost était d’abord une niche : il est devenu dominant aujourd’hui. La conjoncture actuelle semble ouvrir une fenêtre d’opportunité pour amender son modèle originel.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/189823/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-François Gagne ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’élimination des ressources excédentaires et la recherche de spécialisation, deux pratiques qui se sont imposées dans le secteur aérien, pénalisent les compagnies face aux crises.Jean-François Gagne, Responsable Programme MBA, Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1900942022-09-08T19:20:50Z2022-09-08T19:20:50ZPourquoi la reprise d’ITA par un fonds américain serait un fait d’armes majeur pour Air France-KLM<p>On pouvait imaginer que le géant italo-suisse MSC et son alliée allemande Lufthansa resteraient favoris dans la course à la reprise d’ITA Airways, créée fin 2020 pour sauver Alitalia de la faillite. Son propriétaire à 100 %, l’État italien, a pourtant choisi à la fin du mois d’août d’entamer des négociations exclusives avec un consortium pour une entrée au capital du fonds d’investissement américain Certarès. On parle d’une cession de <a href="https://information.tv5monde.com/info/rachat-d-ita-airways-rome-choisit-l-offre-de-certares-et-air-france-klm-469779">56 % des parts</a> pour environ 600 millions d’euros.</p>
<p>Certarès s’est présenté avec pour partenaires Delta Airlines et <a href="https://theconversation.com/fr/topics/air-france-klm-120089">Air-France-KLM</a>. Le groupe franco-néerlandais possédait, en 2013, 25 % du capital d’Alitalia avant de s’en dégager progressivement. Désormais, il n’exclut pas de reprendre à terme une « participation minoritaire » dans ITA. Une telle entrée au capital ne pourrait d’ailleurs pas dépasser 10 %, car elle reste contrainte par la Commission européenne en contrepartie de l’aide publique reçue pour surmonter la crise du Covid-19.</p>
<p>En attendant, même comme simples « partenaires commerciaux et opérationnels », la présence de ces <a href="https://theconversation.com/fr/topics/air-france-klm-120089">compagnies aériennes</a> dans le dossier reste hautement stratégique et dépasse le simple jeu des acquisitions dans le secteur du <a href="https://theconversation.com/drafts/190015/edit">transport aérien</a>. Comme nous l’expliquions lors du colloque des 4èmes Rencontres Francophones Transport Mobilité, ce qui se cache derrière cette reprise, c’est une bataille à laquelle se livrent les trois méga-alliances internationales. Bataille dans laquelle ITA s’avère un pion important.</p>
<h2>Peu importe la couleur du métal</h2>
<p>Aujourd’hui, parmi les nombreux transporteurs qui existent dans le monde, 57 font partie de l’une des trois méga-alliances internationales. Skyteam en regroupe 18, Oneworld 13 et StarAlliance 26. Elles représentent plus de 60 % du trafic international mondial, transportant en 2019 plus de deux milliards de passagers.</p>
<p>En recrutant des compagnies majeures aux États-Unis, en Europe, en Asie et en Amérique du Sud ainsi que plusieurs compagnies « secondaires » partout dans le monde, une alliance globale peut offrir au passager la possibilité de se déplacer jusqu’à n’importe quel point du globe. En optimisant les correspondances, elle est à même d’offrir un vol « sans discontinuité » mais aussi d’harmoniser les programmes de fidélisation. Skyteam, c’est ainsi <a href="https://applications.skyteam.com/routemapper/#/flightInput">15 500 vols par jour</a> à travers 170 pays.</p>
<p>Reste que, depuis quelques années, la forte concurrence à laquelle se livrent les trois rivales s’exerce moins par le biais de nouvelles adhésions, qui renforceraient la puissance de leurs réseaux, que par la création de partenariats d’un nouveau type.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/483475/original/file-20220908-9281-sbhkf0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/483475/original/file-20220908-9281-sbhkf0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/483475/original/file-20220908-9281-sbhkf0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/483475/original/file-20220908-9281-sbhkf0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/483475/original/file-20220908-9281-sbhkf0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/483475/original/file-20220908-9281-sbhkf0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/483475/original/file-20220908-9281-sbhkf0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/483475/original/file-20220908-9281-sbhkf0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Trois Metal Neutral Joint-Ventures se partagent les deux côtés de l'Atlantique.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au sein d’une même méga-alliance, certaines compagnies ont en effet décidé d’aller encore plus loin dans leur coopération et de créer ce que l’on appelle dans le jargon de l’aérien des « Metal Neutral Joint-Venture » (MNJV) ou « quasi-fusion ».</p>
<p>Dans un périmètre donné de destinations (un « <em>bundle</em> ») sur lesquelles ils étaient rivaux, les partenaires vont désormais se comporter comme s’ils ne formaient qu’une seule et même compagnie. Selon des règles très clairement établies dans le contrat, ils vont partager leurs revenus, leurs profits et/ou leurs coûts, de sorte que l’identité du métal, c’est-à-dire de l’avion qui va effectuer le vol, importe peu.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd'hui</a>]</p>
<p>Au sein des trois méga-alliances, il existe désormais plus d’une vingtaine de MNJV à la puissance colossale, en particulier sur le juteux marché aérien transatlantique, entre l’Europe et l’Amérique du Nord. Il s’agit alors d’être stratèges et ne pas laisser un des siens passer dans l’équipe adverse.</p>
<h2>La stratégie qu’il fallait jouer</h2>
<p>Avant de faire faillite en 2021, Alitalia était une partenaire privilégiée du tandem Air France-KLM-Delta : non seulement elle était, elle aussi, membre de Skyteam depuis 2001, mais elle avait rejoint en 2010 sa joint-venture transatlantique. Dès la création de sa remplaçante ITA, Skyteam se devait de la récupérer. ITA avait, à ce moment, hésité (pas longtemps certes) à aller voir du côté de StarAlliance. Lufthansa, une des compagnies leaders de cette dernière, la voulait absolument et avait pesé de tout son poids pour la convaincre de les rejoindre. ITA était finalement allée renforcer les rangs de sa rivale Skyteam.</p>
<p>Aussi, lorsque l’État italien a annoncé la privatisation d’ITA, StarAlliance a rapidement vu l’opportunité de prendre sa revanche. Une compagnie aérienne ne peut faire partie que d’une seule alliance et une fois qu’elle en est un membre, il lui est difficile d’en changer. Les rares fois où cela est arrivé, c’était plutôt à la suite d’une fusion, d’acquisition ou de rachat entre compagnies d’alliances rivales.</p>
<p>ITA entre les mains de Lufthansa n’aurait plus eu d’autre choix que de plier bagage et de rejoindre l’équipe de StarAlliance. Cela aurait représenté une énorme perte pour Skyteam et surtout pour sa MNJV transatlantique. En 2020, celle-ci s’était renforcée en « fusionnant » les deux MNJV transatlantiques qu’elle avait (Air France-KLM-Delta et Delta-Virgin, Virgin ne fait pas partie de Skyteam mais est détenue par Delta à 49 %) et reste aujourd’hui très ouverte à y intégrer de nouveaux partenaires. ITA pourrait très bien prendre la place vacante de l’ex-Alitalia.</p>
<p>Voici pourquoi prendre le pas sur Lufthansa dans la reprise d’ITA est un brillant fait d’armes pour le tandem formé par Air France-KLM et Delta. Bien sûr, les négociations ne sont pas terminées et la situation financière d’ITA est loin d’être bonne. Mais à ce stade, c’était, semble-t-il, à coup sûr la stratégie qu’il fallait jouer pour empêcher leurs concurrentes de les amputer d’un atout important. C’était mettre toutes les chances de leur côté pour maintenir leur force sur le marché transatlantique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190094/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gézia Damergy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le rachat de la compagnie détenue par l’État italien constitue un enjeu hautement stratégique dans la lutte à laquelle se livrent trois méga-alliances sur le marché mondial du transport aérien.Gézia Damergy, Maître de Conférences, Réseaux /Transport aérien, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1878132022-08-05T13:04:58Z2022-08-05T13:04:58ZChaos dans le secteur aérien canadien : les prochains changements risquent d’aggraver la situation<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/477455/original/file-20220803-16-tyo5ij.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=10%2C41%2C6892%2C4927&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un passager cherche son vélo parmi un amoncellement de bagages non réclamés à l’aéroport Pierre Elliott Trudeau de Montréal en juin.</span> <span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Ryan Remiorz</span></span></figcaption></figure><p>La pagaille règne dans l’aviation mondiale depuis quelques mois. Les restrictions de voyage liées à la pandémie se sont assouplies et la demande de vols qui en a résulté a exercé une pression énorme sur les compagnies aériennes et les aéroports. Pour les voyageurs canadiens, la situation pourrait en fait empirer après la saison estivale.</p>
<p>Plusieurs raisons expliquent le chaos qui prévaut actuellement dans le secteur aérien en Amérique du Nord et en Europe, principalement liées à la pénurie de personnel dans les compagnies aériennes et les aéroports.</p>
<p>Lorsque les voyages ont cessé au début de la pandémie, de <a href="https://media.aircanada.com/2020-06-30-Air-Canada-Discontinues-Service-on-30-Domestic-Regional-Routes-and-Closes-Eight-Stations-in-Canada">nombreux emplois ont été supprimés dans l’industrie du transport aérien</a>. Mais avec la demande de vols qui a rapidement augmenté cet été, les effectifs aux <a href="https://www.thestar.com/business/2022/05/25/airport-delays-are-here-to-stay-for-the-long-term-due-to-a-shortage-of-workers-in-airport-security-union-says.html">vérifications de sûreté</a>, au <a href="https://www.forbes.com/sites/benbaldanza/2022/07/01/airline-reliability-wont-return-until-air-traffic-control-staffs-up-too/?sh=2acfb9e54bd4">trafic aérien</a> et aux <a href="https://www.cp24.com/news/customs-officer-union-demands-more-hires-as-travel-turbulence-continues-1.5964801?cache=yes%3FclipId%3D1924505">contrôles frontaliers</a> sont demeurés insuffisants.</p>
<p>Les passagers aériens continuent de se heurter à des ratés dans la <a href="https://www.thestar.com/news/gta/2022/06/28/you-think-you-have-baggage-luggage-is-piling-up-at-pearson-perplexing-travellers.html">gestion des bagages</a>, à des <a href="https://www.nytimes.com/2022/07/16/world/canada/toronto-pearson-airport-flights.html">vols retardés</a> et, plus récemment, pour les voyageurs venant au Canada, à un <a href="https://www.theglobeandmail.com/canada/article-random-Covid-19-testing-resumes-for-travellers-at-four-major-canadian/">retour du test de Covid-19</a>.</p>
<h2>Des voyageurs inquiets</h2>
<p>La demande de voyages internationaux a été affectée, plus de 60 % des Canadiens ayant reconsidéré leurs projets de voyage par crainte de voir leurs <a href="https://www.ctvnews.ca/canada/majority-of-canadians-have-no-interest-in-international-summer-travel-nanos-survey-1.5980415">vacances à l’étranger</a> perturbées.</p>
<p>Mais un bouleversement encore plus important se profile à l’horizon au Canada, sans rapport avec les problèmes actuels. Un certain nombre de changements structurels sur le marché de l’aviation commerciale qui se sont produits récemment, ou qui devraient se produire au cours des 12 prochains mois, entraîneront davantage de perturbations dans le secteur du voyage, les compagnies aériennes cherchant à se réajuster face à l’agitation causée par la concurrence et par les activités opérationnelles.</p>
<p>L’annonce par WestJet <a href="https://calgary.ctvnews.ca/westjet-s-new-strategy-will-see-company-invest-majority-of-fleet-in-western-canada-1.5951429">d’un repli stratégique dans l’Ouest canadien</a> est un signe que les <a href="https://www.vancouverisawesome.com/travel/everything-you-need-to-know-about-canadas-new-low-cost-airlines-photos-video-4760124">plus récents transporteurs à très bas prix (connus dans l’industrie sous le nom de TATBP)</a> exercent une influence sur le marché intérieur de l’entreprise en Alberta.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Le PDG de Lynx Air brandit la maquette d’un des jets de la nouvelle compagnie aérienne" src="https://images.theconversation.com/files/475882/original/file-20220725-7606-1mwcwz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/475882/original/file-20220725-7606-1mwcwz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/475882/original/file-20220725-7606-1mwcwz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/475882/original/file-20220725-7606-1mwcwz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/475882/original/file-20220725-7606-1mwcwz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/475882/original/file-20220725-7606-1mwcwz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/475882/original/file-20220725-7606-1mwcwz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Merren McArthur, PDG de Lynx Air, annonce le lancement de la nouvelle compagnie aérienne à bas prix lors d’une conférence de presse à Calgary en novembre dernier.</span>
<span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Jeff McIntosh</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Nouvelles compagnies aériennes à bas prix</h2>
<p><a href="https://flyflair.com/about-us">Flair</a> et <a href="https://www.flylynx.com/fr-ca/whoweare?gclid=Cj0KCQjw8uOWBhDXARIsAOxKJ2GQVykGmw7VYV0GLk_s26eBO_Vf0DnxNM4N1-MFbM_AjvypKIbvhbgaAtONEALw_wcB">Lynx</a>, deux TATBP basés en Alberta, prévoient de déployer 50 nouveaux appareils chacun. Cela obligera WestJet à réagir par d’importantes initiatives en matière de capacité et de prix afin de préserver sa position de force dans l’Ouest canadien.</p>
<p>Porter Airlines deviendra un acteur de poids dans l’est du Canada lorsque les 50 <a href="https://worldairlinenews.com/2022/07/19/porter-airlines-orders-a-further-20-embraer-e195-e2s/">jets Embraer à la fine pointe de la technologie</a> commenceront à être mis en service sur les principaux marchés nord-américains, principalement à partir de l’aéroport Pearson de Toronto. Porter fait actuellement décoller des avions plus petits de l’<a href="https://www.billybishopairport.com/accueil">aéroport Billy Bishop</a> du centre-ville de Toronto, un service qu’elle <a href="https://www.bnnbloomberg.ca/porter-ceo-sees-pearson-challenges-being-temporary-as-airline-plans-expansion-1.1795252">maintiendra lorsque la compagnie aérienne lancera ses opérations à Pearson</a>.</p>
<p>Bien que la stratégie de Porter semble viser Air Canada, une complication supplémentaire se pose pour les vols de Porter en partance de Pearson.</p>
<h2>Limites de l’aéroport Pearson</h2>
<p>Pearson est ce que l’on appelle un <a href="https://www.iata.org/en/iata-repository/pressroom/fact-sheets/fact-sheet---airport-slots/">aéroport à tranches horaires réglementées par créneaux</a>, ce qui signifie qu’il y a des limites au nombre d’atterrissages et de départs que l’aéroport peut accueillir. Ces créneaux sont accordés aux compagnies aériennes sur la base des droits d’exploitation historiques. Les nouveaux transporteurs doivent demander des créneaux pour répondre à leurs opérations régulières, et les droits ne sont accordés que si les créneaux demandés sont disponibles.</p>
<p>Avec l’augmentation de la capacité des compagnies aériennes à Pearson au printemps 2022, les transporteurs ont assuré un nombre beaucoup plus important de vols vers les marchés existants et nouveaux, épuisant ainsi les créneaux vacants.</p>
<p>Ces créneaux étant désormais « protégés » par des droits acquis pour les compagnies aériennes actuelles – et avec un nombre dérisoire de créneaux disponibles commercialement acceptables – tout nouveau venu sur le marché de Pearson devra surmonter des obstacles de taille pour obtenir des heures d’exploitation commercialisables. Les deux TATBP les plus récents du Canada, Flair et Lynx, éprouvent déjà des difficultés à assurer des opérations intérieures aux heures de pointe.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une photo de l’avion Embraer dans le ciel avec des nuages en dessous de l’avion" src="https://images.theconversation.com/files/475879/original/file-20220725-12-f08pxj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/475879/original/file-20220725-12-f08pxj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/475879/original/file-20220725-12-f08pxj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/475879/original/file-20220725-12-f08pxj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/475879/original/file-20220725-12-f08pxj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/475879/original/file-20220725-12-f08pxj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/475879/original/file-20220725-12-f08pxj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Porter Airlines a commandé une flotte de jets Embraer E195-E2 dernier cri et espère décoller de l’aéroport Pearson de Toronto.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Porter Airlines)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Si l’on considère les plans de Porter de baser sa flotte de 50 à 100 avions à Pearson, l’horaire de vol qui en résulterait ajouterait très certainement à la congestion vécue par les voyageurs ces derniers mois. Et il est évident que les installations et les horaires de Porter tenteront de refléter ceux offerts par les transporteurs actuels de Pearson.</p>
<h2>Le dilemme de Porter</h2>
<p>Y aura-t-il suffisamment d’installations commercialement viables et de créneaux horaires disponibles pour pouvoir exploiter un produit concurrentiel à partir de Pearson ? C’est le dilemme auquel sera confronté Porter. L’infrastructure de l’aéroport Pearson – l’exploitation de l’aérogare et des aéronefs, ainsi que le contrôle du trafic – sera-t-elle taxée au-delà de ce que nous avons vu à Pearson <a href="https://www.thestar.com/business/2022/07/22/torontos-airport-is-now-worst-in-the-world-for-delays-heres-how-things-went-so-horribly-wrong.html">au cours de ces derniers mois</a> ?</p>
<p>Bien qu’il existe de nombreuses mesures de protection sur le marché canadien du transport aérien, comme les <a href="https://airpassengerrights.ca/fr/">droits des voyageurs</a>, il est probable que l’accès aux aéroports – en particulier à Pearson, la plaque tournante du transport aérien au Canada – sera au cœur des préoccupations des transporteurs émergents qui cherchent à étendre leurs services.</p>
<p>L’évolution et la survie de l’industrie de l’aviation commerciale au Canada seront mises à rude épreuve, les gouvernements pouvant être amenés à exercer une surveillance supplémentaire de l’attribution des créneaux de l’aéroport Pearson, en fonction des consommateurs, afin de garantir un accès équitable aux nouveaux transporteurs.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un jet d’Air Canada est au premier plan tandis que la tour de contrôle du trafic aérien de l’aéroport Pearson est à l’arrière-plan" src="https://images.theconversation.com/files/475876/original/file-20220725-19-z9zna3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/475876/original/file-20220725-19-z9zna3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/475876/original/file-20220725-19-z9zna3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/475876/original/file-20220725-19-z9zna3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/475876/original/file-20220725-19-z9zna3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/475876/original/file-20220725-19-z9zna3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/475876/original/file-20220725-19-z9zna3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Air Canada est le principal transporteur à desservir l’aéroport international Pearson, mais de nouveaux acteurs comme Porter Airlines pourraient accroître la pression sur l’exploitation de l’aéroport.</span>
<span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Nathan Denette</span></span>
</figcaption>
</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/187813/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>John Gradek ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les changements apportés dans le secteur aérien canadien pourraient alourdir un système qui fonctionne déjà au maximum de sa capacité.John Gradek, Faculty Lecturer and Program Co-ordinator, Supply Chain, Logistics and Operations Management, McGill UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1818592022-06-06T19:41:16Z2022-06-06T19:41:16ZHiérarchie dans le cockpit : comprendre la prise de décision au moment de l’atterrissage<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/462280/original/file-20220510-22-v337jw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=38%2C0%2C4060%2C2775&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><span class="source">Senohrabek</span></span></figcaption></figure><p>La décision d’atterrir ou de remettre les gaz est l’une des plus importantes et risquées du vol. En effet, <a href="https://accidentstats.airbus.com/statistics/accident-by-flight-phase">ces 20 dernières années</a>, la très grande majorité des accidents aériens s’est produite en phase d’approche finale ou d’atterrissage. Bien que ces derniers ne soient pas parmi les accidents les plus mortels (ils sont tout de même responsables de 9 % des décès sur la période 2015-2019), ils génèrent d’énormes coûts financiers pour les compagnies aériennes.</p>
<p><a href="https://www.ukfsc.co.uk/wp-content/uploads/public_pdfs/Acc-Incidents-Aviation-Safety-2011-J-Burin-FSF-Dec-2011.pdf">Une étude</a> a montré que les pilotes choisissent de continuer 95 % des approches non-stabilisées pour lesquelles une remise de gaz devrait être effectuée (les approches non-stabilisées représentant 3,5 % des approches). La <a href="https://flightsafety.org/">Flight Safety Fondation</a> estime que 83 % des sorties de piste et 54 % de tous les accidents survenus durant la période 2000-2015 auraient pu être évités si les pilotes avaient pris la décision de remettre les gaz.</p>
<p>Une <a href="https://flightsafety.org/toolkits-resources/go-around-project-final-report/">vaste étude</a> s’est récemment intéressée aux raisons pour lesquelles les pilotes ont du mal à remettre les gaz durant les approches non-stabilisées. Au-delà de la complexité, du coût et des risques associés à cette manœuvre (l’issue d’une remise de gaz sur dix est incertaine), cette étude a aussi montré que les pilotes hésitaient à demander la remise de gaz parce qu’ils ressentaient une certaine pression de la part du reste de l’équipage pour poursuivre l’atterrissage et que l’idée de remettre en question le jugement des autres pilotes les mettait très mal à l’aise.</p>
<p>Bien que le commandant soit le responsable hiérarchique légal au sein du cockpit et qu’il soit plus expérimenté que le(s) co-pilote(s), l’équipage a obligation de remettre les gaz si l’un des pilotes (indépendamment de son statut) en fait la demande. Or, il a été montré que les co-pilotes demandaient <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0925753520301351?via%3Dihub">moins fréquemment</a> à remettre les gaz comparativement aux commandants.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/467127/original/file-20220606-18-nd13n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/467127/original/file-20220606-18-nd13n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/467127/original/file-20220606-18-nd13n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/467127/original/file-20220606-18-nd13n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/467127/original/file-20220606-18-nd13n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=544&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/467127/original/file-20220606-18-nd13n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=544&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/467127/original/file-20220606-18-nd13n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=544&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le vol Southwest Airlines 1248 a effectué une sortie de piste lors de son atterrissage à Chicago, en décembre 2005.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Influence hiérarchique et prise de risque au moment de l’atterrissage</h2>
<p>Mes collègues et moi-même avons conduit, juste avant la pandémie, une <a href="https://doi.org/10.1016/j.ssci.2021.105536">étude</a> qui avait pour but d’étudier d’une part le comportement de jeunes co-pilotes inexpérimentés durant des approches plus ou moins stabilisées, et d’autre part l’influence des commandants sur la prise de risque des co-pilotes à l’atterrissage.</p>
<p>Les participants étaient des élèves-pilotes sur le point de terminer leur formation. Ils avaient donc toutes les connaissances nécessaires pour piloter un avion, mais n’avaient aucune expérience du métier de pilote de ligne. Le commandant, un pilote d’A380 de la compagnie Air France, était notre complice.</p>
<p>La tâche des participants était de décider, seuls (première partie de l’expérience) puis en équipage (deuxième partie de l’expérience), de poursuivre l’atterrissage ou de remettre les gaz dans différentes situations d’atterrissage : (1) sans risques, (2) modérément risquées, (3) fortement risquées et (4) extrêmement risquées.</p>
<p>Une fois la première partie de l’expérience terminée, il était révélé aux participants qu’ils allaient désormais devoir prendre leurs décisions en tant que co-pilote aux côtés d’un véritable commandant d’A380 d’Air France qui avait accepté de participer à l’expérience.</p>
<p>Après y avoir été invité, le commandant en uniforme rentrait dans la pièce où se trouvait le participant co-pilote et lui serrait fermement la main. Cette <a href="https://doi.org/10.1162/jocn_a_00295">mise en scène</a> avait pour but d’induire une forte asymétrie hiérarchique entre les deux pilotes.</p>
<p>Après s’être présenté, le commandant expliquait aux participants qu’il était parfois difficile de prendre des décisions à l’atterrissage, prenant l’exemple d’une situation dangereuse (vent violent, légère survitesse) dans laquelle il s’était récemment trouvé et expliquant comment il avait finalement réussi à atterrir, malgré les conditions adverses.</p>
<p>Cette histoire (inventée de toutes pièces) avait pour but de faire croire aux participants que le commandant avait une certaine propension à la prise de risques. À la fin de son récit, le commandant quittait la pièce.</p>
<p>Dans la deuxième partie de l’expérience, les participants devaient prendre deux décisions : (1) une pré-décision, non-communiquée au commandant et prise avant de connaître sa décision, puis (2) une décision finale, communiquée au commandant et prise après avoir été informés de la décision de ce dernier.</p>
<p>Le commandant simulait une prise de risque assez importante, choisissant de poursuivre l’atterrissage dans les situations sans risques, modérément risquées et fortement risquées, et de remettre les gaz dans les situations extrêmement risquées.</p>
<h2>Influence directe et indirecte du commandant</h2>
<p>Nos résultats montrent la forte influence du commandant sur les décisions prises par les participants dans les situations d’atterrissage modérément et fortement risquées, avec une augmentation du taux de poursuite d’atterrissage de respectivement 19 % et 15 % (comparativement à la configuration pilote seul).</p>
<p>Dans les situations modérément risquées, les participants ont significativement augmenté leur taux de poursuite d’atterrissage avant même de connaître la décision du commandant (pré-décision). Ce taux n’ayant pas varié au cours du temps, l’augmentation de prise de risque des participants ne résulterait donc pas d’une adaptation au comportement du commandant.</p>
<p>Plusieurs études ont montré que la simple présence d’une ou de plusieurs personnes augmentait la motivation et la volonté des individus observés d’être perçus comme compétents par le(s) observateur(s).</p>
<p>Ce phénomène appelé <a href="https://www.e-marketing.fr/Definitions-Glossaire/Facilitation-sociale-241780.htm">« facilitation sociale »</a> a souvent pour conséquence d’augmenter le <a href="https://bpspsychub.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/bjop.12195">niveau de prise de risque</a>. Plusieurs études ont montré que les co-pilotes faisaient énormément d’efforts pour <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/B9780128129951000038">paraître compétents</a> aux yeux des commandants.</p>
<p>Ainsi, nos résultats suggèrent que l’augmentation de prise de risque observée dans les situations modérément risquées refléterait le désir des participants d’impressionner le commandant.</p>
<p>Dans le cas des situations fortement risquées, l’augmentation de la prise de risque survenait au moment de la décision finale, et donc seulement après que les participants ont été informés de la décision du commandant.</p>
<p>Par ailleurs, plus les participants percevaient ce dernier comme étant autoritaire, plus leur taux d’atterrissage dans ces situations augmentait au moment de la décision finale.</p>
<p>Ces résultats suggèrent que l’augmentation de la prise de risque dans les situations d’atterrissage fortement risquées serait plutôt attribuable à la crainte de s’opposer au commandant.</p>
<h2>Inexpérience et effet Dunning-Kruger</h2>
<p>Bien que le taux de poursuite de l’atterrissage observé dans la configuration pilote seul soit proportionnel au niveau de risque des situations, la prise de risque des participants dans cette configuration n’en reste pas moins élevée (respectivement 57 %, 34 % et 30 % de poursuite d’atterrissage dans les situations modérément, fortement et extrêmement risquées).</p>
<p>Ce résultat est en adéquation avec ceux d’<a href="http://www.cog-tech.com/papers/NASA/avspych.pdf">études précédentes</a> qui avaient déjà montré que les jeunes pilotes peu expérimentés ont souvent du mal à évaluer le niveau de risque des situations d’atterrissage et à prendre la décision de remettre les gaz.</p>
<p>Le comportement des participants dans les situations extrêmement risquées s’est révélé particulièrement intéressant. Ils ont en effet choisi d’insister pour atterrir dans 8 % de ces situations, et cela après avoir appris que le commandant souhaitait remettre les gaz.</p>
<p>Ce résultat est à la fois rassurant et troublant. Rassurant car le retour du commandant a fortement limité la prise de risque des participants, ce qui démontre l’impact positif et l’importance des commandants dans la limitation de la prise de risques des co-pilotes.</p>
<p>Mais aussi troublant car même si ce chiffre peut à première vue paraître faible, il est à mettre en perspective avec les chiffres du trafic aérien annuel mondial (soit <a href="https://www.statista.com/statistics/564769/airline-industry-number-of-flights/">38,9 millions de vols</a> en 2019).</p>
<p>Ce résultat est d’autant plus étonnant que les participants opéraient en tant que pilote en fonction, ce qui signifie qu’ils auraient été aux commandes de l’avion au moment de l’atterrissage. Il semble donc que certains des participants aient eu une vision irréaliste de leurs capacités de pilotage. Ce phénomène (dont j’ai déjà parlé <a href="https://theconversation.com/comment-le-coronavirus-nous-a-tous-biaises-134415">dans d’autres articles</a>) porte le nom de biais de surconfiance ou <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/B9780123855220000056">effet Dunning-Kruger</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/462580/original/file-20220511-17-lw7c8v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/462580/original/file-20220511-17-lw7c8v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=323&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/462580/original/file-20220511-17-lw7c8v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=323&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/462580/original/file-20220511-17-lw7c8v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=323&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/462580/original/file-20220511-17-lw7c8v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=405&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/462580/original/file-20220511-17-lw7c8v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=405&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/462580/original/file-20220511-17-lw7c8v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=405&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Illustration de l’effet Dunning-Kruger représentant le niveau de confiance d’un individu en fonction de sa compétence réelle dans un domaine.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il touche souvent les novices d’un domaine, qui ont tendance à fortement surestimer leurs compétences. Les co-pilotes touchés par l’effet Dunning-Kruger représentent un risque pour la sécurité d’un vol, particulièrement quand ils sont appariés à un commandant manquant d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Assertivit%C3%A9">assertivité</a> et/ou d’autorité, comme l’illustre l’<a href="https://www.ntsb.gov/investigations/AccidentReports/Reports/AAR0706.pdf">accident</a> du vol 1248 de la compagnie Southwest Airlines, où le commandant a cédé aux pressions indirectes du co-pilote pour poursuivre un atterrissage dangereux.</p>
<h2>La communication au sein de l’équipage : pierre angulaire de la sécurité</h2>
<p>La sécurité aérienne repose en grande partie sur la capacité des pilotes à prévenir, détecter et corriger leurs propres erreurs, mais aussi celles des autres pilotes.</p>
<p>Bien que les équipages organisés hiérarchiquement soient de loin les <a href="https://commons.erau.edu/jaaer/vol10/iss1/8/">plus performants</a>, l’asymétrie hiérarchique entre les commandants et les co-pilotes peut représenter un risque pour la sécurité car les co-pilotes éprouvent parfois des difficultés à <a href="https://econtent.hogrefe.com/doi/10.1027/2192-0923/a000021">remettre en question les commandants</a> principalement parce qu’ils les considèrent comme étant plus expérimentés, craignent de dégrader leur relation et/ou redoutent d’être victime de représailles.</p>
<p>Or, malgré leur expertise, les commandants restent humains et donc faillibles. Dans la très grande majorité des accidents attribuables (au moins en partie) au facteur humain, les commandants commettent la <a href="https://www.routledge.com/The-Limits-of-Expertise-Rethinking-Pilot-Error-and-the-Causes-of-Airline/Dismukes-Berman-Loukopoulos/p/book/9780754649656">première erreur</a> à l’origine de l’accident, et les co-pilotes soit ne détectent pas, soit ne corrigent pas cette erreur.</p>
<p>Bien que l’introduction du <a href="https://www.cairn.info/revue-hegel-2014-1-page-75.htm">Crew Resource Management</a> (un ensemble de procédures de formation de l’équipage visant à prévenir les erreurs humaines) ait grandement amélioré la communication entre les pilotes ainsi que la qualité des décisions prises par les équipages, l’asymétrie hiérarchique entre les commandants et les co-pilotes reste une source potentielle de risque.</p>
<p>Notre <a href="https://doi.org/10.1016/j.ssci.2021.105536">étude</a> a permis de mettre en lumière la sensibilité des jeunes pilotes inexpérimentés à l’influence des commandants, quand l’asymétrie hiérarchique est fortement marquée. Elle aidera, nous l’espérons, à faire prendre conscience aux commandants qu’ils peuvent (même sans le vouloir) fortement influencer les décisions des co-pilotes.</p>
<p>Notre protocole pourrait aussi permettre d’estimer l’influençabilité des élèves pilotes de ligne au cours de leur formation, et de les sensibiliser à ce risque. Cela contribuerait à améliorer encore un peu plus la sécurité dans le domaine de l’aviation commerciale, qui reste (n’oublions pas de le souligner) le moyen de transport le plus sûr au monde.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=158&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=158&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=158&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=198&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=198&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=198&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Créé en 2007 pour accélérer et partager les connaissances scientifiques sur les grands enjeux sociétaux, le Axa Research Fund a soutenu près de 700 projets dans le monde entier, menés par des chercheurs originaires de 38 pays. Pour en savoir plus, consultez le site du <a href="https://www.axa-research.org">Axa Research Fund</a> ou suivez-nous sur Twitter <a href="https://twitter.com/axaresearchfund?lang=fr">@AxaResearchFund</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181859/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Eve Fabre a reçu des financements du de la Commission Européenne (Bourse de doctorat Marie Skłodowska-Curie) et du Fond AXA pour la Recherche. Elle travaille pour APSYS.</span></em></p>Une étude analyse l’impact de la relation hiérarchique entre co-pilote et commandant pour mieux évaluer prise de risque au moment, critique, de l’atterrissage.Eve Fabre, Chercheure en Facteur Humain & Neurosciences Sociales, ISAE-SUPAEROLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1814562022-05-01T16:46:22Z2022-05-01T16:46:22ZPourquoi crier au scandale à chaque fois qu’une personnalité utilise un jet privé ?<p>Au lendemain du premier tour de l’élection présidentielle du 10 avril 2022, le <a href="https://vert.eco/articles/jean-castex-fait-un-aller-retour-en-jet-prive-pour-voter-devant-les-cameras">média <em>Vert</em></a> épinglait le choix du Premier ministre Jean Castex d’avoir utilisé un jet privé pour aller voter à Prades, dans les Pyrénées-Orientales. </p>
<p>Des accusations similaires se sont multipliées tout cet été 2022, visant patrons et stars sur les réseaux sociaux. </p>
<p>Ces polémiques surgissent dans un contexte où les appels à baisser la consommation d’énergie des ménages se multiplient, alors que l’Union européenne doit se libérer de sa dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie et que la publication du dernier volet du rapport du GIEC le 4 avril 2022 alerte une nouvelle fois sur l’urgence d’agir drastiquement pour freiner le dérèglement climatique.</p>
<p>Outre l’impact financier pour le contribuable du recours abusif aux jets privés de la part de responsables politiques, quels effets de tels comportements de la part des personnalités publiques peuvent-ils avoir sur les consommateurs en matière de choix énergétiques ?</p>
<p><a href="https://doi.org/10.3917/ror.152.0029">Dans une étude publiée à l’été 2020</a> dans la <em>Revue de L’organisation responsable</em>, j’ai tenté d’explorer les principales raisons qui expliquent pourquoi les individus ne diminuent pas leur consommation d’énergie domestique, malgré les invitations pressantes à le faire.</p>
<p>Dans ces travaux, j’ai établi une typologie des consommateurs en fonction de leur rapport aux économies d’énergie. Si du côté des « résistants », les motivations sont diverses, les discours et attitudes contradictoires des dirigeants apparaissent comme un facteur saillant.</p>
<h2>Ces 1001 raisons d’être réfractaire au changement</h2>
<p>Il y a d’abord ceux qui jugent que les économies d’énergie ne sont qu’un effet de mode qui passera, qu’ils en ont assez d’en entendre parler et de faire des efforts. D’autres s’assument explicitement climatosceptiques : ils ne croient tout simplement pas à la problématique environnementale, ni par conséquent à la nécessité de réduire leur consommation énergétique résidentielle.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La théorie des <em>nudge</em> suggère que l’on peut influencer les choix des individus par des incitations non financières et non contraignantes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sourav Raina</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>D’autres invoquent la préservation de leur liberté individuelle : ils refusent que l’action publique s’immisce dans leur vie quotidienne et les empêchent de consommer ce qu’ils veulent, quand ils veulent et comme ils veulent.</p>
<p>Une autre frange encore présente une réticence générale au changement, qui va au-delà des « habitudes » et <a href="https://psycnet.apa.org/record/2003-99635-011">peut présenter 4 dimensions</a> : la recherche de routine, la réaction émotionnelle, la focalisation sur le court terme et la rigidité cognitive.</p>
<h2>Un sentiment d’injustice</h2>
<p>Mais il existe un autre segment chez ces « résistants » à l’économie d’énergie : celui des révoltés par l’injustice perçue à l’égard des vrais pollueurs, par l’incohérence de l’action publique et son manque de transparence.</p>
<p><em>[Près de 70 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>.]</p>
<p>Eux estiment que les pouvoirs publics s’acharnent sur les ménages tout en se montrant laxistes vis-à-vis des grands groupes pollueurs. Notre recherche qualitative, à travers des entretiens et une netnographie, révèle que ces répondants vont, parce qu’ils jugent l’action de l’État contradictoire, jusqu’à refuser d’adopter un comportement économe en énergie.</p>
<p>Pour eux, l’État incite d’un côté la population à adopter des comportements économes, tout en ne l’informant pas par ailleurs du caractère énergivore des innovations technologiques et des nouveaux appareils.</p>
<h2>La schizophrénie des pouvoirs publics</h2>
<p>L’action publique peut en effet <a href="http://www.afsp.msh-paris.fr/congres2007/ateliers/textes/at1pautard.pdf">apparaître schizophrène</a> sur ce sujet, prise entre les enjeux de la croissance économique et de la dynamique des marchés et ceux d’une régulation des comportements des consommateurs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La barre de gauche représente la moyenne pour le mode, celle du milieu en hachuré seulement pour les déplacements à courte distance, et à droite les déplacements longue distance qui sont plus directement comparables à l’aérien en termes de motifs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/la-mobilite-des-francais-panorama-issu-de-lenquete-nationale-transports-et-deplacements-2008">Aurélien Bigo/Données Ademe et ENTD</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour les répondants révoltés, la résistance à la déconsommation apparaît donc comme une manière d’exprimer leur point de vue et de révéler leur opposition à ce double discours.</p>
<p>« Non pas du tout je ne vais pas faire le con alors que les autres dépensent de l’argent aux frais de la princesse. », « Qu’ils commencent par le haut », exprime une personne interrogée. « Pourquoi les gens au-dessus ne se serrent pas la ceinture. ».</p>
<p>« Le soir, sur les routes nationales, il y a des complexes commerciaux… qui laissent toutes les lumières allumées sur des parkings déserts. La consommation d’énergie de Las Vegas, Les politiciens qui voyagent en Jet Privé… », souligne un autre contributeur anonymisé sur le forum sur-la-toile.com.</p>
<p><em>« Calculer l’empreinte écologique : évaluer la trace laissée sur le passage sur cette Terre (en termes d’épuisement des ressources et pollution) et surtout, pour ceux qui le peuvent (c’est-à-dire les sociétés), le profit tiré de ces prélèvements (gratos), et pointez du doigt les coupables, les vrais. » (Anonymisé, forum : sur-la-toile.com)</em></p>
<p>S’ils veulent convaincre ce groupe de résistants d’agir en faveur de la maîtrise de l’énergie, les acteurs publics devront affiner leur communication et tâcher de corriger l’injustice perçue.</p>
<p>En la matière, les personnalités politiques gagneraient à prouver leur cohérence et à faire en sorte que le message qu’ils diffusent soit reflété dans leurs comportements.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181456/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dhouha El Amri ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’incohérence et le double discours des pouvoirs publics pèsent lourd dans la réticence des citoyens à réduire leur consommation d’énergie.Dhouha El Amri, Maître de conférences en sciences de gestion, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1775192022-02-28T19:32:57Z2022-02-28T19:32:57ZLes nouvelles « routes de la Soie », une viabilité en question<p><a href="https://www.transporeon.com/en/reports/one-belt-one-road">Un million</a>. C’est la barre symbolique franchie en 2021 par le nombre de conteneurs transportés par voie ferroviaire entre la Chine et l’Union européenne. N’en déplaise aux tenants de la relocalisation, la crise sanitaire du Covid-19 a dopé les échanges eurasiatiques et confirmé l’essor des « nouvelles routes de la soie » à l’heure où la guerre éclate en Europe.</p>
<p>Ces conteneurs ont été transportés par 14 000 trains, soit en moyenne 38 convois par jour. Et ce, 10 ans seulement après que le lancement des premiers wagons sur les rails. On compte même depuis 2018 <a href="https://www.actu-transport-logistique.fr/routier/le-trajet-en-camion-vers-la-chine-toujours-plus-populaire-553654.php">quelques dizaines de camions</a> par semaine qui réalisent le trajet via la Biélorussie, la Russie, le Kazakhstan et la Chine.</p>
<p>Dans le monde, la Chine, c’est chaque année depuis 2007 en moyenne <a href="http://french.news.cn/2022-01/03/c_1310406817.htm#:%7E:text=BEIJING%2C%203%20janvier%20(Xinhua),mise%20en%20service%20en%20Chine">2 600 km d’infrastructures</a> ferroviaires nouvelles (contre 200 km en Europe) sur lesquelles les convois peuvent rouler à plus de 200km/h. Ce développement s’inscrit depuis 2013 et l’accession au pouvoir de Xi Jinping dans le plan « One Belt, One Road » (« Une ceinture, Une Route »), qui concerne autant l’Asie centrale que l’Afrique. Son coût restant en 2021 est estimé à 13 000 milliards d’euros par le G20.</p>
<p>Face à ces ambitions, l’Europe a récemment présenté son projet alternatif « <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/12/01/l-europe-presente-son-projet-a-300-milliards-d-euros-pour-contrer-les-routes-de-la-soie-chinoises_6104361_3234.html">Global Gateway</a> ». Mais pourra-t-on parler de succès pour ce que Pékin se plaît à nommer « projet du Siècle » ? Sans même se risquer à essayer d’anticiper les conséquences du conflit ukrainien, la <a href="https://cordis.europa.eu/project/id/234076">viabilité économique et écologique</a> de l’axe eurasiatique interroge déjà fortement.</p>
<h2>Nouveau développement, nouvelles routes</h2>
<p>Pour comprendre l’intérêt porté à cet axe, il faut d’abord regarder du côté du commerce mondial et son considérable essor depuis les années 90. Entre 1990 et 2020, les échanges maritimes ont été <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02196047">multipliés par 4</a>, tandis que la capacité des plus gros porte-conteneurs a été multipliée par 5. L’Asie du Sud-Est et notamment la façade maritime de la Chine se trouve au cœur de ce nouveau système.</p>
<p><a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/actualites/veille/breves/rotterdam-10e-port-mondial-en-2019">L’évolution du top 10</a> des principaux ports dans le monde est, à cet égard, révélatrice. En 1990, la moitié des ports était asiatique mais aucun n’était chinois, l’autre moitié comprenait les ports européens et américains. En 2020, le grand port européen de Rotterdam s’est vu rétrograder à la 11<sup>e</sup> place laissant définitivement le monopole du top 10 à la nouvelle puissance asiatique. On estime désormais que la Chine et ses ports traitent environ un <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/coronavirus-la-chine-traite-un-quart-du-transport-maritime-mondial-de-conteneurs-1169020">quart des conteneurs dans le monde</a>, témoignant de sa puissance industrielle et commerciale.</p>
<p><iframe id="jyC80" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/jyC80/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>L’essor économique chinois des années 2000 constitue la clef de voûte de cette dynamique. Alors que les PIB des États-Unis ou de la France ont doublé entre 2000 et 2020, le PIB chinois a lui été <a href="https://datacommons.org/place/country/CHN?hl=fr">multiplié par 12</a>. En parallèle, la part de la Chine dans les échanges extérieurs de l’Union européenne a triplé pour atteindre <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/cache/infographs/trade/trade_2020/">15 % en 2018</a>. Elle vient d’ailleurs de devenir en 2021 le <a href="https://www.challenges.fr/monde/la-chine-a-detrone-les-etats-unis-en-2020-comme-premier-partenaire-commercial-de-l-ue_751147">premier partenaire commercial de l’UE</a> reléguant en deuxième position les États-Unis.</p>
<p>Au-delà, c’est toute l’Asie du Sud-Est qui a connu un développement économique exceptionnel sur la période. Il y a là un vaste ensemble qui pèse pour 30 % du PIB mondial, réuni à partir du 1<sup>er</sup> janvier 2022 dans la <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/12/31/en-asie-naissance-de-la-plus-vaste-zone-de-libre-echange-du-monde_6107811_3234.html">nouvelle zone de libre-échange asiatique (la <em>Regional Comprehensive Economic Partnership</em> ou RCEP)</a>.</p>
<p>Nouveau développement implique aussi recherche de nouvelles routes. Et ce sont les Européens, plus particulièrement les Allemands, qui ont affrété le <a href="https://corpus.ulaval.ca/jspui/handle/20.500.11794/69863">premier train par-delà le continent</a> en 2008, sous la houlette de la Deutsche Bahn, pour l’acheminement de matériel informatique. Suite à la crise de 2009, le projet de pérenniser ce service régulier a été abandonné. Il a finalement été repris en 2011 et a ouvert la voie à de nouvelles routes terrestres soutenues par les acteurs du Benelux et du Nord de l’Europe comme l’ont mis en avant <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01474042/document">nos travaux</a>.</p>
<h2>Cruciales alternatives</h2>
<p>Ce sont ainsi, avant les gouvernements, le marché et les acteurs économiques qui ont poussé en faveur d’une alternative aux modes maritime et aérien. La politique mise en place par le président chinois Xi Jinping à partir de 2013 n’est venue qu’appuyer et amplifier une dynamique déjà en cours.</p>
<p>L’alternative terrestre permet d’économiser sur le temps d’acheminement nécessaire pour rejoindre les ports d’export. Elle s’inscrit dans le plan de rééquilibrage de l’économie chinoise engagée par le gouvernement dans les années 2000 au profit de villes intérieures comme Chongqing, Chengdu (spécialisée dans l’électronique) ou Lanzhou respectivement situées à 1 400, 1 600 et 1 700 km de Shanghai. Ces trois villes qui forment le <a href="https://www.challenges.fr/monde/asie-pacifique/l-emergence-du-triangle-de-la-croissance_771640">« triangle de croissance »</a> ont tout intérêt à voir se développer l’axe terrestre qu’il soit ferroviaire ou routier dans un pays où les besoins en transport ont été <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/fr/transport/itf-transport-outlook-2021_16826a30-en">multipliés par 6</a> entre 1995 et 2018.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1483816542173208581"}"></div></p>
<p>On comprend alors que la recherche d’alternatives au transport maritime devienne cruciale pour le gouvernement chinois et les acteurs économiques. Ce dernier exerce jusqu’à présent un quasi-monopole sur les échanges eurasiatiques avec <a href="https://fr.sino-shipping.com/commerce-europe-chine/#:%7E:text=Nous%20avons%20consid%C3%A9r%C3%A9%20les%20m%C3%AAmes,elle%20importe%20de%20l%E2%80%99UE28">près de 98 % des marchandises transportée</a>. La solution portuaire se trouve par ailleurs de plus en plus inadaptée face au e-commerce, la logistique en flux tendus et la montée en gamme de la Chine (incarnée par la stratégie <a href="https://www.isemar.fr/wp-content/uploads/2018/05/note-de-synth%C3%A8se-isemar-200-chine-europe.pdf">« made in China 2025 »</a>).</p>
<p>Si l’aérien offre de la vitesse (quelques jours de trajet contre plus de 30 pour la voie maritime), il se trouve fortement pénalisé par son prix élevé en raison de la capacité limitée des avions. Un conteneur se négociait avant la pandémie autour de 3 000 euros par la mer contre plus de 60 000 euros pour l’aérien.</p>
<p>Dans ce contexte, l’offre ferroviaire se distingue à la fois par le prix et le temps : moins d’un mois de transport et un coût d’environ 7 000 euros par conteneur.</p>
<h2>Cinq fois plus d’émissions de CO₂</h2>
<p>Pour autant, le débat persiste sur la viabilité économique du train. Ce prix s’avère en effet moitié moins important que le coût réel en raison des subventions importantes à l’export distribuées par les autorités locales chinoises aux chargeurs. On estime qu’elles étaient de l’ordre de <a href="https://portsetcorridors.com/2021/sitl-routes-de-la-soie/#:%7E:text=De%20gare%20%C3%A0%20gare%2C%20un,actuellement%20%C2%BB%2C%20pr%C3%A9cise%20Xavier%20Wanderpepen">800 millions d’euros en 2021</a>. Leur réduction à venir pourrait tempérer la croissance de l’axe sans l’inverser, avec un <a href="https://www.actu-transport-logistique.fr/ferroviaire/le-trafic-ferroviaire-sur-la-nouvelle-route-de-la-soie-triplerait-dici-2030-668958.php">triplement des flux attendu d’ici à 2030</a>.</p>
<p>Plus étonnant, le transport routier semble également trouver sa place. Il est le plus rapide après l’aérien, la vitesse moyenne pour un camion étant de 60 km/h contre 30 km/h pour le train. Cela représente un gain d’une semaine sur l’ensemble du voyage. Il est aussi le plus agile pour passer les frontières là où le ferroviaire marque des ruptures de parfois plusieurs jours pour transborder les conteneurs, changer de locomotive, etc. Cependant, il ne bénéficie pas des avantages du train en matière de massification et se négocie donc à un prix plus élevé (<a href="https://theloadstar.com/china-europe-landbridge-will-become-one-of-the-worlds-major-tradelanes/">environ 15 000 euros par conteneur</a>).</p>
<p>Enfin, l’argument environnemental ne plaide pas nécessairement en faveur du ferroviaire. Le mode maritime se distingue par sa capacité à massifier le transport de conteneurs : <a href="https://lemarin.ouest-france.fr/secteurs-activites/shipping/21168-des-porte-conteneurs-geants-de-20-000-evp-pour-le-japonais-mol">22 000 sur les plus gros navires</a> contre environ <a href="https://theloadstar.com/china-europe-landbridge-will-become-one-of-the-worlds-major-tradelanes/">90 pour un train</a>. Chaque conteneur pouvant contenir 4 000 boites de chaussures, ce sont 88 millions de paires de chaussures qui peuvent être transportées par un navire contre moins de 400 000 pour un train. Cette différence conduit un train à émettre <a href="https://theloadstar.com/china-europe-landbridge-will-become-one-of-the-worlds-major-tradelanes/">5 fois plus de CO₂ par tonne transportée</a> qu’un porte-conteneur.</p>
<p>Pour comprendre, il faut savoir que les trains fonctionnent à l’essence sur de larges portions non électrifiées de l’axe eurasiatique. Et lorsqu’ils roulent à l’électricité, c’est le <a href="https://www.iea.org/data-and-statistics/data-products">mix énergétique</a> pour produire l’électricité qui leur est défavorable. 90 % de la production électrique vient des énergies fossiles au Kazakhstan, 60 % en Russie et 68 % en Chine. Et il s’agit là des trois pays principaux traversés.</p>
<p>Dans un souci écologique, il pourrait donc être préférable de limiter le développement de ces nouvelles voies et conserver l’option maritime qui reste finalement la plus frugale en énergie et émissions de CO<sub>2</sub> par tonne transportée. Économie, écologie, géopolitique… le jour où la suprématie du transport maritime se trouvera contestée par le ferroviaire ou la route reste ainsi encore lointain.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/177519/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Florent Laroche ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La saturation des routes maritimes encourage la recherche des voies nouvelles entre l’Europe et l’Asie. Dépendance aux subventions, environnement… Tout ne plaide cependant pas en faveur du train.Florent Laroche, Maître de conférence en économie, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1752762022-01-24T21:14:10Z2022-01-24T21:14:10ZVols à vide : un révélateur du bras fer entre compagnies aériennes et aéroports<p>L’<a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/LSU/?uri=CELEX%3A31993R0095">encadrement européen</a> de l’attribution et de la gestion des créneaux horaires d’atterrissage et de décollage des avions repose sur un constat, celui d’une ressource rare qui est à la base de toute l’activité aérienne. Depuis 1993, la règle valide un « droit acquis » attribué aux compagnies aériennes repose sur les relations passées entre compagnies aériennes et gestionnaires d’infrastructures aéroportuaires. Ainsi, Air France reste indétrônable dans les aéroports parisiens, tout comme Lufthansa à Francfort ou Munich.</p>
<p>En contrepartie de ce « droit acquis », le droit de l’Union européenne oblige les compagnies aériennes à utiliser au moins 80 % des créneaux horaires attribués, considérant qu’en deçà de ce seuil, elles n’en avaient pas besoin. Si c’est le cas, d’autres compagnies aériennes peuvent en disposer.</p>
<h2>« Coup de bluff »</h2>
<p>Ce seuil a maintes fois été suspendu, lorsque chaque circonstance l’exigeait, tenant compte par exemple des perturbations causées par l’éruption d’un volcan jusqu’à la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=celex%3A32021R0250">crise du Covid-19</a>. Depuis la reprise du trafic aérien lors de l’été 2021, le seuil minimal d’utilisation est remonté à 50 %. C’est ce rétablissement que conteste Lufthansa en annonçant, en décembre dernier, qu’elle devra organiser <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/aeronautique/polemique-sur-les-vols-a-vide-vers-une-evolution-de-la-regle-europeenne-des-creneaux_4908527.html">environ 18 000 vols à vide</a>. La compagnie aérienne allemande a ainsi <a href="https://theconversation.com/des-avions-qui-volent-a-vide-pour-conserver-les-creneaux-aeroportuaires-retour-sur-la-polemique-133943">relancé une polémique</a> qui révèle les rapports de force entre les différentes parties prenantes comme autant de lignes de fractures dans un secteur économique en plein doute quant à son avenir.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1241845835673067520"}"></div></p>
<p>D’ailleurs, ACI Europe, le syndicat professionnel des gestionnaires aéroportuaires, a estimé dans un <a href="https://www.aci-europe.org/downloads/mediaroom/22-01-06%20EU%20rules%20on%20airport%20slot%20thresholds%20offer%20protection%20for%20airlines%20during%20the%20pandemic%20with%20no%20viable%20reason%20for%20so-called%20ghost%20flights%20says%20airport%20body%20PRESS%20RELEASE.pdf">communiqué</a> qu’il n’y avait « absolument aucune raison » de faire voler les avions à vide et la presse a qualifié l’annonce de Lufthansa de <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/vols-a-vide-le-coup-de-bluff-de-lufthansa-1378347">« coup de bluff »</a>, soulignant que la réglementation européenne n’oblige en rien ces vols.</p>
<p>En effet, les textes européens indiquent que les règles concernant les créneaux ne s’appliquent pas en cas d’une « fermeture partielle ou totale de la frontière », d’une « réduction de la capacité de l’aéroport, pendant une partie substantielle de la période de planification horaire concernée » ou encore « des restrictions de voyage [comme] des interdictions de vols au départ ou à destination de certains pays ou zones géographiques ». Aucune règle n’impose donc à aucune compagnie d’assurer de tels vols.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1480937459957567490"}"></div></p>
<p>Cependant, en arrière-plan de cette polémique se joue une bataille pour influencer les évolutions réglementaires. Depuis 2015, les institutions européennes débattent en effet afin d’établir une <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A52015DC0598">stratégie pour l’aviation civile</a>, tenant compte de la nécessaire transition écologique, des bouleversements concurrentiels dus aux compagnies à bas coûts, et enfin de la compétition internationale incarnée par les compagnies du golfe Persique.</p>
<p>La pandémie actuelle a intensifié ce débat, donnant à cette polémique sur ces vols de la compagnie Lufthansa un intérêt particulier. Elle témoigne en effet que, dans ce contexte sanitaire et économique déprimé, les compagnies aériennes tentent d’imposer leurs vues aux aéroports et aux institutions européennes dans deux dossiers conflictuels.</p>
<h2>Rapport de force</h2>
<p>Le premier porte sur une double réforme en cours, comprenant la refonte de l’attribution des créneaux aéroportuaires ainsi qu’une meilleure protection du consommateur, dont le texte actuel date de 2004. Les propositions de la Commission européenne, formulées il y a 10 ans, restent bloquées dans le processus législatif ordinaire, impliquant à poids égal le parlement européen et le Conseil des ministres. Ces deux institutions ne trouvent pas d’accord politique, malgré l’inscription de ces deux réformes comme priorité d’action en 2021.</p>
<p>Les deux législateurs s’opposent au projet d’augmentation du seuil d’utilisation des créneaux aéroportuaires à 85 %, et souhaitent temporiser quant aux renforcements des droits des passagers, alors que les compagnies aériennes n’ont pas fini de dédommager leurs passagers des annulations faites au printemps 2020. La décision de Lufthansa semble vouloir réactiver les volontés de part et d’autre d’avancer sur ce dossier législatif.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1478369572545826824"}"></div></p>
<p>Le second dossier oppose, dans un contexte de lente et incertaine reprise du trafic aérien, les compagnies aériennes et les aéroports sur le <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=celex%3A32009L0012">calcul des redevances aéroportuaires</a> dues par les premières aux seconds. Les redevances aéroportuaires sont actuellement payées par les compagnies aériennes pour l’utilisation des installations et des services des aéroports. Elles font partie du prix total payé par les passagers et les clients du fret aérien. Les redevances aéroportuaires représentent donc une part importante des revenus des aéroports et une part non négligeable des coûts d’exploitation des compagnies aériennes.</p>
<p>Ce fut le sens de l’une des mesures de soutien au secteur à la suite de la pandémie, qui a amené au report, annoncé le 29 mars 2020, du paiement de certaines taxes et redevances exigibles entre mars et décembre 2020, sur les années 2021 et 2022. La mesure concerna la taxe de l’aviation civile et les taxations annexes comme les redevances sur les services terminaux de la circulation aérienne que recouvre Eurocontrol ou encore la taxe de solidarité sur les billets d’avion.</p>
<p>Cette mesure d’aide d’État, <a href="https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=237882&pageIndex=0&doclang=FR&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=2105560">déclarée compatible avec le droit de l’Union</a>, outre les réactions des compagnies aériennes, tantôt pour dire l’insuffisance de l’aide, tantôt pour en contester le bien-fondé, ramène fondamentalement à une double critique. Celle-ci porte d’une part sur le fait que l’on taxe un accès au territoire, jouant alors contre sa compétitivité dans la concurrence mondiale, et d’autre part, sur une « surtaxation » des compagnies aériennes nationales dont le marché est principalement à destination et au décollage du territoire concerné.</p>
<p>Dès lors, elles sont l’objet d’un véritable rapport de force entre les opérateurs privés, sur fond de pénurie de la ressource et de crise systémique du secteur. C’est ce que vient rappeler en ce début d’année la polémique autour des vols à vide.</p>
<hr>
<p><em>Frédérique Berrod, professeure à Sciences Po Strasbourg, a supervisé la rédaction de cet article</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/175276/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pascal Simon-Doutreluingne ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En arrière-plan de la polémique autour de la compagnie allemande Lufthansa se joue une bataille d’influence pour tenter de faire évoluer la réglementation européenne du secteur aérien.Pascal Simon-Doutreluingne, Professeur agrégé d'économie-gestion, Doctorant en Droit public (droit de la concurrence), Université de StrasbourgLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1644222021-10-24T15:29:11Z2021-10-24T15:29:11ZPeur de l’avion ? Les scientifiques veillent sur votre sécurité<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/428118/original/file-20211024-17-1m54gz4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C38%2C4268%2C2760&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les matériaux qui composent les ailes d'avion doivent être très résistants.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/rf6ywHVkrlY">Ross Parmly / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la prochaine Fête de la science (qui aura lieu du du 1<sup>er</sup> au 11 octobre 2021 en métropole et du 5 au 22 novembre 2021 en outre-mer et à l’international), et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition aura pour thème : « Eureka ! L’émotion de la découverte ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>Au commencement était le feu. Il y a <a href="https://www.histoire-pour-tous.fr/inventions/2909-la-decouverte-du-feu-500000-av-jc.html">environ 1 million d’années</a>, l’homme domestiquait celui qui allait changer définitivement le cours de l’humanité. Et il faut se souvenir que c’est bien pour le progrès de la civilisation que Prométhée a volé le feu aux Dieux. Ce feu qui suscite de nombreux sentiments contradictoires : sécurité, danger, crainte, réconfort, douleur, espoir. Il arrive parfois que cet ami du quotidien échappe à notre contrôle. Des incendies de forêt aux incendies d’habitation, tout le monde redoute ces scénarii catastrophes. Encore davantage quand on prend l’avion ou qu’un incendie se déclare en vol. Qui n’a jamais tremblé devant un film catastrophe dans lequel un avion en feu s’écrase sur fond de musique dramatique ?</p>
<p>Mais pas panique ! Les ingénieurs et les chercheurs travaillent pour choisir des matériaux et concevoir des avions respectant les normes de sécurité parmi les plus exigeantes. Ainsi, les matériaux retenus pour des applications aéronautiques doivent scrupuleusement répondre à de nombreux critères : toxicité, résistance au feu, production de fumée, combustion…</p>
<p>Dans le domaine aéronautique, les matériaux composites sont les plus utilisés (<a href="https://www.industrie-techno.com/article/l-a350-xwb-premier-airbus-avec-plus-de-50-de-composites.23272">50 % de la masse de l’avion</a>) car ils offrent un très bon compromis entre propriétés mécaniques (rigidité, résistance) et légèreté. Ces matériaux dits « composites » associent généralement des renforts fibreux (essentiellement des fibres de carbone comme dans les raquettes de tennis ou les vélos des coureurs du Tour de France) et une matrice (le liant ou la colle entre les fibres) polymère (aussi connue sous le nom de plastique). Le renfort confère au matériau de bonnes propriétés mécaniques tandis que la matrice permet de coller les fibres entre elles.</p>
<p>Un avion est constitué de différentes pièces assemblées les unes aux autres. Le choix du matériau pour ces différentes pièces dépend principalement de la zone où elles se situent. La zone moteur et les pièces attenantes sont parmi les plus critiques de l’avion. Notamment lorsque le moteur prend feu. Dans ce cas, les avions sont conçus pour que le pilote dispose de <a href="https://www.iso.org/standard/23569.html">15 petites minutes</a> pour poser son appareil. Pendant ces 15 minutes, la flamme (issue de la combustion du carburant – le kérosène – et du plastique) ne doit pas traverser les pièces composites et la pièce doit conserver une tenue mécanique suffisante.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428116/original/file-20211024-15-1ccd2tr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428116/original/file-20211024-15-1ccd2tr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=359&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428116/original/file-20211024-15-1ccd2tr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=359&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428116/original/file-20211024-15-1ccd2tr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=359&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428116/original/file-20211024-15-1ccd2tr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=451&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428116/original/file-20211024-15-1ccd2tr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=451&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428116/original/file-20211024-15-1ccd2tr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=451&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Illustration du couplage thermo-mécanique.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour prévenir ces conditions critiques et éviter des conséquences dramatiques potentielles, il est nécessaire d’étudier l’influence de la chaleur et d’un chargement mécanique (les forces qui s’exercent sur les différentes pièces de l’avion) pour bien comprendre leurs interactions. Imaginez ce qu’il se passe quand vous mettez un verre sur une plaque de chocolat (figure ci-dessus) et qu’elle se met à fondre… Concrètement, quand on expose une pièce composite à une flamme, la matière plastique va ramollir, fondre (se transformer en liquide) puis se pyrolyser (se transformer en gaz). Ces gaz vont alors alimenter la flamme et faciliter la propagation de l’incendie. Évidemment, la capacité de la pièce à supporter une force (le poids du moteur par exemple) va être fortement réduite. Et ce sont ces interactions qu’il faut comprendre.</p>
<p>Les dimensions caractéristiques des pièces composites aéronautiques varient de quelques dizaines de cm à des structures de l’ordre du mètre. La difficulté consiste alors à reproduire au mieux à l’échelle du laboratoire (à petite échelle donc) les conditions réelles d’une agression thermique combinée à un chargement mécanique. Les <a href="https://www.iso.org/standard/23569.html">règles de certification</a> (autorisation) aéronautiques définissent une température de flamme de 1150 °C et un flux thermique (la chaleur dégagée par unité de surface) d’environ 120kW/m<sup>2</sup>. Il est donc nécessaire de développer des moyens techniques spécifiques permettant de mesurer toutes les grandeurs physiques (température, force, déformation) impliquées dans les phénomènes physiques mis en jeu lors d’un incendie moteur. Dans ces conditions extrêmes, il y a quand même de bonnes nouvelles. L’humanité a acquis depuis des millénaires des connaissances et outils qui éclairent les ingénieurs et les chercheurs sur la manière de concevoir les pièces composites en aéronautique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428117/original/file-20211024-19-qcyhmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428117/original/file-20211024-19-qcyhmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428117/original/file-20211024-19-qcyhmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428117/original/file-20211024-19-qcyhmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428117/original/file-20211024-19-qcyhmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428117/original/file-20211024-19-qcyhmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428117/original/file-20211024-19-qcyhmd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Banc d’essai reproduisant l’effet simultané d’une flamme et d’un chargement mécanique.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>C’est avec cet esprit que nos laboratoires de recherche <a href="http://gpm.univ-rouen.fr">GPM</a> (Groupe de Physique des Matériaux -) et <a href="https://www.coria.fr">CORIA</a> (Complexe de Recherche Interprofessionnel en Aero-thermo-chimie –) ont mis en commun leurs compétences et conjugué leurs efforts pour développer un banc d’essais (une machine prototype dédiée à l’étude de certains phénomènes – vois ci-dessus) original dans le cadre d’un projet, baptisé Aeroflamme, financé par la région Normandie et l’Europe.</p>
<p>Ce banc associe un bruleur kérosène (imposant une flamme) et un vérin hydraulique (imposant une force). Il intègre également différents outils de mesure : caméra infra-rouge (mesure de température), capteur de déplacement (mesure de la déformation) et de force. Avec ce banc d’essai, il est alors possible de mieux comprendre le comportement au feu des matériaux composites et plus spécifiquement le couplage (les interactions) entre l’effet de la flamme/chaleur sur l’évolution des propriétés/comportement mécanique.</p>
<p>Dans ces conditions, la pièce composite résiste bien pendant 15 minutes… mais elle pourrait résister davantage. La science est à bord, bon vol !</p>
<p>L’utilisation de matériaux composites innovants dans les applications aéronautiques est confrontée aujourd’hui à des normes de sécurité toujours plus exigeantes auxquelles il est impératif d’apporter des réponses fiables et pertinentes. Aussi, permettre aux industriels de l’aéronautique de comprendre/prédire la tenue au feu de leurs matériaux et, in fine de leurs pièces et assemblages est primordial. Nos travaux de recherche sur les matériaux aéronautiques s’inscrivent donc dans la logique de certifier des nouveaux matériaux pour des applications dans un environnement haute-température voire lors d’un événement critique incendie. Ces matériaux sont fournis par des industriels de l’aéronautique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/164422/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Benoît Vieille ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Comment les scientifiques testent-ils les composants des avions pour certifier qu’ils pourront résister à des conditions extrêmes ?Benoît Vieille, Professeur en mécanique des matériaux aéronautiques, INSA Rouen NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1689632021-10-10T16:43:34Z2021-10-10T16:43:34ZAfrique de l’Ouest : la manne financière des tests Covid-19 imposés aux voyageurs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/424547/original/file-20211004-23-ov8ljw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=62%2C8%2C5928%2C2973&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Au Sénégal comme dans les autres pays de l’UEMOA, le dépistage de la Covid-19, obligatoire dans les aéroports, constitue un apport non négligeable aux finances de l’État.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-illustration/flag-senegal-covid19-testing-text-on-1984640675">Aleksey Novikov/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Le paiement du test Covid-19 <a href="http://www.uemoa.int/fr/harmonisation-des-dispositions-sanitaires-relatives-au-depistage-de-la-covid-19-dans-l-espace-uemoa">rendu obligatoire</a> pour chaque voyageur est en passe de devenir un outil de mobilisation de ressources financières pour les États membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Cette institution regroupe le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo.</p>
<p>Sans aborder le débat sur les utiles mesures de protection sanitaire contre la Covid-19, il est néanmoins opportun de prendre conscience de l’émergence de plates-formes de collecte de fonds mises en place par les États ouest-africains après l’ouverture des frontières aériennes le <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/coronavirus-ces-pays-africains-qui-rouvrent-leurs-frontieres-02-08-2020-2386421_3826.php">1ᵉʳ août 2020</a>.</p>
<h2>La chronologie des impacts sur l’économie des mesures anti-Covid</h2>
<p>Au tout début de l’apparition de la pandémie, un certain nombre de <a href="https://www.undp.org/content/dam/rba/docs/Covid-19-CO-Response/Briefing_socioeco_Covid19_BFA_mai_2020.pdf">mesures</a> avaient été prises dans ces pays. Elles ont progressivement évolué : fermeture des marchés, confinement partiel, confinement total, mise en place du travail à distance, etc. Puis, un niveau supérieur de restrictions fut atteint avec la <a href="https://www.aa.com.tr/fr/afrique/coronavirus-le-burkina-ferme-ses-fronti%C3%A8res-et-instaure-un-couvre-feu-/1773855">fermeture des frontières aériennes et terrestres</a>.</p>
<p>Ces mesures avaient peu ou prou <a href="http://www.uemoa.int/sites/default/files/bibliotheque/rapport_final_etude_impact_covid-19_ccr-uemoa.pdf">étouffé les économies</a> de la région si bien que, parfois, les marchés ont été rouverts de façon précoce. Ce fut notamment le cas du <a href="https://information.tv5monde.com/video/covid-19-au-burkina-faso-le-marche-de-ougadougou-rouvre-ses-portes">marché central de Ouagadougou</a>).</p>
<p>La vie active a progressivement repris ses droits dans l’ensemble de ces pays, avec la levée de certaines mesures barrières, jusqu’à l’ouverture des frontières aériennes. Quant aux frontières terrestres, elles restent toujours globalement fermées même si, notons-le, une <a href="http://www.uemoa.int/en/reouverture-des-frontieres-terrestres-de-l-espace-uemoa">réouverture prochaine est envisagée</a>.</p>
<h2>Des tests plus chers pour les passagers prenant l’avion</h2>
<p>Derrière l’ouverture des frontières aériennes se développe un système de collecte de fonds via l’instauration du <a href="https://www.planete-visas.fr/burkina-faso-test-covid-obligatoire-a-larrivee-et-au-depart/">test obligatoire de Covid-19</a> pour chaque voyageur. Ceux ci doivent passer par des plates-formes robustes et – souvent – intuitives, comme c’est le cas au <a href="https://www.burkina24.com/2021/08/31/burkina-faso-possibilite-de-prise-de-rendez-vous-et-de-paiement-en-ligne-des-tests-covid-19/">Burkina Faso</a> ou ailleurs <a href="https://deplacement-aerien.gouv.ci/#/home">dans la sous-région</a>. Les voyageurs qui décident d’utiliser la voie aérienne pour se rendre dans un pays voisin doivent payer chacun <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20210327-covid-19-travail-d-harmonisation-sur-les-tests-dans-l-uemoa-pour-faciliter-les-voyages">25 000 francs CFA ; ce coût sera de 5 000 francs CFA</a> pour ceux qui opteront pour la voie terrestre quand ces frontières seront ouvertes de nouveau.</p>
<p>Une question demeure : pourquoi, pour le même test, faudrait-il payer deux montants différents selon que le voyageur opte pour la voie aérienne ou terrestre ? Les laboratoires mobilisent en effet la même énergie et la même technologie pour réaliser les tests sur les voyageurs empruntant la voie aérienne et sur ceux empruntant la voie terrestre. Ces deux tests ne devraient-ils pas être proposés au même prix ?</p>
<p>L’une des explications réside dans le fait que les coûts des tests ont été stratégiquement fixés en fonction des flux créés par ces deux types de voyageurs. De fait, les voyageurs empruntant les voies terrestres <a href="https://journals.openedition.org/echogeo/13126?lang=en">semblent être plus nombreux</a> que ceux qui prennent l’avion dans cette partie de l’Afrique de l’Ouest. Les tests à 5 000 francs CFA réservés aux voyageurs traversant les frontières terrestres concerneraient donc un grand nombre de personnes, permettant aux États de récolter des montants très élevés malgré le faible prix individuel grâce à l’effet de masse. Ce qui est problématique ici est que, dans certains États, on ne prend pas en compte les résultats des tests réalisés dans les autres pays membres, comme c’est le <a href="https://voyage.gouv.tg">cas au Togo</a>. La règle est que chaque voyageur fasse le test payant, à l’arrivée comme au départ.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/LQH9ok5hjU4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Covid-19 : le Sénégal impose un test de dépistage aux voyageurs/Medi1TV Afrique, 26 juillet 2020.</span></figcaption>
</figure>
<h2>Des laboratoires, des frontières et des flux</h2>
<p>Après s’être dotés de laboratoires de dépistage performants, les pays de l’UEMOA semblent avoir trouvé un vecteur de collecte de fonds auprès des voyageurs. Le flux journalier de voyageurs par voie aérienne dans des pays comme le <a href="https://www.aeroport-ouagadougou.com/fr/aeroport_ouagadougou_passagers.php">Burkina Faso</a>, le <a href="https://www.aeroport-de-lome.com/fr/aeroport_lome_passagers.php">Togo</a>, le <a href="https://www.aeroport-dakar.com/fr/aeroport_dakar_passagers.php">Sénégal</a> ou encore la <a href="https://www.aeroport-abidjan.com/fr/aeroport_abidjan_passagers.php">Côte d’Ivoire</a> montre que ces fonds pourraient être un moyen opportun de combler les déficits budgétaires liés en partie au ralentissement des activités économiques dans le contexte de la Covid-19.</p>
<p>La porosité de fait des frontières terrestres mais aussi l’<a href="https://www.rfi.fr/fr/podcasts/invit%C3%A9-afrique/20210728-afrique-ouest-centre-insecurite-repercussions-enfants-unicef-alerte-marie-pierre-poirier">insécurité</a> croissante pourraient expliquer les réticences à les rouvrir et les atermoiements dont font preuve les gouvernants. Dès lors, face à l’insécurité, les voyageurs appartenant à la classe moyenne optent pour la voie aérienne tandis que les plus pauvres <a href="https://information.tv5monde.com/video/covid-19-au-ghana-la-fin-du-commerce-transfrontalier">traversent discrètement les frontières par voie terrestre</a> sans faire le test Covid-19, sous le regard impuissant des États membres.</p>
<h2>La Covid-19 comme outil de management ?</h2>
<p>La Covid-19, en plus d’offrir des possibilités de collecte de fonds, constitue pour certains États de la zone UEMOA un moyen de convocation de certaines mesures <a href="https://grip.org/covid19-afrique-ouest/">coercitives</a>, notamment à des fins politiques. Nous avons par exemple observé que, pendant des moments de fortes tensions entre les syndicats et certains gouvernements de la région, le durcissement des mesures barrières contre le Covid-19 a permis de maîtriser et/ou de calmer des situations qui auraient pu aboutir à une remise en cause des pouvoirs politiques en place. Ce fut notamment le cas dans la gestion des <a href="https://www.aa.com.tr/fr/afrique/burkina-faso-les-syndicats-maintiennent-leur-gr%C3%A8ve-16-20-mars/1767931">grèves des syndicats des travailleurs au Burkina Faso</a>. De ce point de vue, la crise sanitaire a été utilisée comme un outil de management. Nous pouvons ici reprendre la notion économique d’« effet d’aubaine » pour souligner à la fois cet effet sur <a href="https://www.scidev.net/afrique-sub-saharienne/news/covid-19-could-be-springboard-for-african-innovations/">l’innovation en Afrique</a> mais aussi sur la gouvernance des populations africaines.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/9aLaYFHY8DY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Covid-19 : Les États de l’UEMOA harmonisent le coût du test PCR/RTI Officiel, 8 mai 2021.</span></figcaption>
</figure>
<h2>Une mise en perspective avec le financement participatif</h2>
<p>Finalement nous traversons depuis 2020 une situation pleine d’apprentissages à la fois en termes de santé publique, de technologies mobilisées, de gouvernance des flux, de financement et d’activité socio-économique.</p>
<p>Les populations devraient pouvoir en tirer des leçons en appliquant en leur sein les modèles développés par les États de la région depuis l’apparition de la pandémie. Ceux-ci ont montré qu’il est possible de mobiliser des fonds importants à travers des petites contributions financières individuelles via des <a href="https://startups.sekou.org/outils/4-plateformes-de-crowdfunding-dediees-a-lafrique/">plates-formes robustes et fiables</a>. Tout repose sur le nombre élevé des personnes concernées et mobilisées. Les populations de l’UEMOA devraient s’en inspirer pour, par exemple, renforcer le financement participatif en vue de réaliser des <a href="https://theconversation.com/le-financement-participatif-de-proximite-le-cas-de-la-province-du-soum-au-burkina-faso-89662">projets stratégiques de résilience</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/168963/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Seydou Ramdé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans l’espace de l’Union économique et monétaire ouest-africaine, les voyageurs doivent obligatoirement effectuer, à leurs frais, de coûteux tests de dépistage de la Covid-19.Seydou Ramdé, Docteur en Sciences de Gestion, Université Aube NouvelleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1615972021-05-26T18:52:32Z2021-05-26T18:52:32ZLe coup de force de Loukachenko souligne l’impuissance de l’UE<p>L’<a href="https://www.nouvelobs.com/monde/20210523.OBS44378/le-belarus-intercepte-un-avion-de-ligne-athenes-vilnius-pour-arreter-un-opposant.html">interception</a> d’un avion de ligne Athènes-Vilnius de la compagnie RyanAir par un chasseur Mig-29 de l’armée de l’air biélorusse est d’une extrême gravité. La Biélorussie n’est pas une puissance régionale mais juste une voisine de l’UE et de la Russie. Qu’elle se sente autorisée comme bon lui semble à faire prisonniers durant une journée tous les passagers d’un vol européen envoie un signal désastreux : celui que l’Europe est un pantin diplomatique.</p>
<h2>L’UE ne fait pas peur</h2>
<p>Le régime de Loukachenko avait un objectif circonscrit : mettre la main sur <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/elections-en-bielorussie/qui-est-roman-protassevitch-l-opposant-arrete-par-le-regime-bielorusse-apres-le-deroutage-d-un-avion_4636101.html">Roman Protassevitch</a>, un opposant déterminé qui a quitté son pays en 2019 et qui réside désormais en Lituanie, où il dispose du statut de réfugié politique. Ce n’est hélas pas la première fois, ni la dernière, qu’une dictature parvient à se jouer de la protection accordée en Europe à un de ses opposants. Mais il est totalement inhabituel qu’un État voisin de l’UE fasse prisonnier tout un groupe de ressortissants européens.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/pdv0-2WmeB4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Cet arraisonnement ridiculise en quelques heures tous les discours sur la souveraineté européenne. Il occulte les actes qui lui donnent corps, certes lentement, depuis la désignation de la Chine comme <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/03/20/la-commission-europeenne-appelle-enfin-un-chat-un-chat-et-la-chine-un-rival-systemique_5438531_3232.html">« rival systémique »</a> par les dirigeants de l’UE en mars 2019. Alors que l’idée d’une défense commune bénéficie d’une approbation importante (dans les enquêtes <a href="https://ec.europa.eu/france/news/20210511/eurobarometre_resultats_france_fr">Eurobaromètre</a> par exemple), ce coup de force aérien ruine l’intention proclamée des dirigeants européens de bâtir une armée ou une défense européenne dans l’actuelle décennie.</p>
<p>L’enseignement à tirer de cet événement est hélas très clair : l’UE n’inspire ni respect, ni peur. Elle a beau être une entité territoriale de plus de 450 millions d’habitants, cumuler l’un des plus gros budgets de dépenses militaires du monde, concentrer des acteurs de l’industrie de défense parmi les plus anciens, les plus sophistiqués et les plus exportateurs du globe, elle est un fantoche polémologique.</p>
<h2>Une puissance incapable de se mobiliser</h2>
<p>Il y a un <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=LEGISSUM%3Ar00006">état-major militaire de l’UE</a> sous commandement du Haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Josep Borrell, membre du Conseil européen de l’UE et de la Commission.</p>
<p>Il y a des États membres dont les armées sont équipées, entraînées et commandées par des gouvernements qui proclament la nécessité de savoir se défendre et de se préparer à toute éventualité. C’est le cas par exemple du gouvernement nationaliste <a href="https://institut-thomas-more.org/2018/06/30/la-pologne-acteur-geostrategique-emergent-et-puissance-europeenne/">polonais</a> ; mais aussi de gouvernements de pays plus discrets qui, comme la <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/russie/video-en-lituanie-un-manuel-de-survie-en-cas-d-invasion-russe_2061645.html">Lituanie</a> ou la <a href="https://www.lepoint.fr/europe/inquiete-face-aux-ambitions-russes-la-suede-s-arme-massivement-21-10-2020-2397495_2626.php">Suède</a>, ayant rétabli le service militaire, donnent régulièrement à leur population des consignes sur la conduite à adopter en cas d’invasion ou de guerre hybride venue du nord ou de l’est, à l’instar de ce qui se passe en Ukraine ; c’est aussi le cas du gouvernement <a href="https://www.lefigaro.fr/international/athenes-redoute-que-les-incursions-turques-ne-provoquent-un-embrasement-20200813">grec</a> qui alerte sur une possible guerre avec la Turquie ; le gouvernement français prône, lui, une <a href="https://www.latribune.fr/opinions/les-bouleversements-du-monde-et-leurs-consequences-pour-la-politique-de-defense-de-la-france-8b-10-848457.html">capacité de défense européenne</a> et l’extension des capacités françaises à la protection de l’Europe…</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1383086424031776772"}"></div></p>
<p>En effet, les Européens sont depuis près de dix ans en butte à des conflits de valeurs et à des manifestations inamicales, voire menaçantes, des puissances régionales de leur voisinage : récurrentes violations des espaces <a href="https://www.rfi.fr/fr/emission/20161010-pays-baltes-inquietudes-incursions-militaires-russes-espace-aerien">aériens</a>, <a href="https://www.independent.co.uk/news/world/europe/russia-baltic-agression-navy-latvia-warships-victory-day-a7725261.html">maritimes</a> et <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2017/03/14/l-estonie-premiere-cybervictime-de-moscou_5093948_3210.html">cyber</a> de l’UE dans l’espace baltique par les autorités russes depuis près de dix ans ; annexion de la Crimée en 2014 et quasi-occupation de l’Est de l’Ukraine par l’armée russe depuis 2015 pour empêcher l’accord d’association de celle-ci avec l’UE ; <a href="https://www.lesechos.fr/monde/europe/lescalade-du-conflit-entre-grece-et-turquie-en-quatre-questions-1232502">incursion de la marine turque dans les eaux territoriales grecques</a>, c’est-à-dire européennes, durant plusieurs semaines en 2020 et 2021 pour tester la possibilité de réviser par la force le tracé de la frontière turco-européenne et préempter les gisements sous-marins de gaz.</p>
<h2>Une humiliation de plus</h2>
<p>Les 23 et 24 mai, aucun gouvernement européen, pas plus que leurs chefs réunis en Conseil européen, n’ont semble-t-il envisagé de faire décoller en temps réel des avions de chasse de pays européens pour répondre à l’arraisonnement du vol Athènes-Vilnius par l’armée de l’air biélorusse, pour intimider le gouvernement de Loukachenko, et pour exiger que l’avion civil détourné sur Minsk soit relâché avec tous ses passagers, ressortissants de l’UE et réfugiés politiques biélorusses. Qu’on n’objecte pas que c’eût été inutile, trop risqué ou irréaliste ! C’est exactement l’inverse : mobiliser des avions de chasse européens aurait été utile, hardi et réaliste.</p>
<p>Il ne s’agit pas de donner dans la martialité mais de se faire respecter et de garantir aux ressortissants européens le sentiment de protection qu’ils attendent légitimement de leurs autorités au sein de l’UE. Au passage, il s’agit également de rendre tangible la politique de protection aux opposants politiques menacés et poursuivis dans les dictatures.</p>
<p>Les chefs d’État et de gouvernements réunis en Conseil européen le 24 mai ont <a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2021/05/24/european-council-conclusions-on-belarus-24-may-2021/">renforcé les sanctions à l’encontre du régime de Loukachenko</a>. C’est tout ? Celles-ci ne l’avaient pourtant pas dissuadé d’intercepter le vol Athènes-Vilnius.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1397089671264485376"}"></div></p>
<p>La pente est glissante ; à force d’à-coups, elle pourrait se transformer en toboggan pour la crédibilité des Européens dans leur propre espace régional et en <em>annus horribilis</em> pour la diplomatie européenne. Les masques sont d’abord venus de Chine ; les vaccins ont surtout été trouvés avec le financement des États-Unis ; le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell a été mis en position de grande faiblesse, pour ne pas dire humilié, lors de son dernier <a href="https://www.france24.com/fr/%C3%A9missions/ici-l-europe/20210330-josep-borrell-sur-sa-visite-%C3%A0-moscou-humili%C3%A9-non-j-ai-%C3%A9t%C3%A9-agress%C3%A9-par-les-russes">voyage à Moscou</a> ; lors du <a href="https://theconversation.com/le-sofagate-ou-la-faillite-de-la-politique-etrangere-de-lunion-europeenne-158638">sofagate</a>, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a été rabaissée et déconsidérée durant sa visite de haut rang à Ankara, devant un Charles Michel, président du Conseil européen, impuissant voire adjuvant. Et maintenant, c’est tout un avion de ligne sur un vol intra-européen qui est arrêté par l’armée d’un pays militairement et économiquement modeste, avec lequel l’UE entretient des relations diplomatiques depuis trente ans.</p>
<p>Quelle sera la prochaine occurrence ? Le <a href="http://www.revue-banque.fr/risques-reglementations/breve/plan-relance-europeen-40-milliards-attendus-pour-f">plan de relance</a> financé par des bons du trésor européens témoigne que les dirigeants européens sont capables de réagir ensemble et fort face aux défis intérieurs imprévus. Il est urgent que les dirigeants européens s’autorisent à réagir promptement face aux défis et aux provocations extérieurs sans céder à la peur. Personne ne leur en fera le reproche, au contraire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161597/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sylvain Kahn ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le fait que le régime de Minsk n’ait osé dérouter un vol Athènes-Vilnius rempli de citoyens de l’UE pour intercepter un opposant constitue un nouveau camouflet pour l’Union.Sylvain Kahn, Professeur agrégé d'histoire, docteur en géographie, Centre d'histoire de Sciences Po, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1587972021-04-12T20:35:32Z2021-04-12T20:35:32ZSauvetage d’Air France : les contreparties vont-elles compromettre le redécollage de la compagnie ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/394460/original/file-20210412-13-np27ez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4072%2C2712&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La crise a coûté une perte d’exploitation de 4,5&nbsp;milliards d’euros à la compagnie aérienne en 2020.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/paris-france-march-2018-air-airplanes-1055606795">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Avec un trafic de passagers <a href="https://www.leparisien.fr/economie/transport-aerien-le-trafic-passagers-a-chute-de-66-en-2020-03-02-2021-8422921.php">réduit de deux tiers</a> pour la seule année 2020, les compagnies aériennes paient un <a href="https://www.franceculture.fr/economie/covid19-et-aerien-une-crise-sans-precedent-qui-laissera-des-traces">lourd tribut</a> à la crise de Covid-19.</p>
<p>Lestées de coûts fixes importants, ces dernières subissent de plein fouet un effet de ciseau qui les pousse à se tourner vers la puissance publique pour éviter des <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/covid-19-le-secteur-aerien-americain-pourrait-perdre-90000-emplois-1264615">plans sociaux massifs</a>, voire des faillites en cascade touchant l’ensemble de l’écosystème du transport aérien.</p>
<p>Or, de telles aides d’État n’ont rien d’automatique : au plan national, elles engagent la participation des pouvoirs publics au système productif, engagement qui est réglementé.</p>
<p>En outre, accordées unilatéralement et sans la moindre contrepartie, elles seraient de nature à fausser le jeu de la concurrence dont la Commission européenne est la gardienne. Elles font donc l’objet d’un <a href="https://www.europe-en-france.gouv.fr/fr/aides-d-etat">encadrement strict</a> au titre de <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/ALL/?uri=CELEX%3A12008E107">l’article 107</a> du Traité de fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).</p>
<h2>La mécanique du plan de soutien</h2>
<p>C’est dans le contexte d’une version assouplie (en raison de la crise) de ce cadre, que la Commission européenne <a href="https://www.latribune.fr/entreprises-finance/services/transport-logistique/accord-trouve-avec-la-commission-europeenne-sur-un-nouveau-soutien-financier-a-air-france-le-maire-881620.html">a accepté</a>, le 6 avril 2021, le projet de recapitalisation d’Air France par le gouvernement de Jean Castex. Dans le détail, ce projet vise la transformation d’une partie du prêt accordé l’an dernier à la compagnie aérienne pour faire face à la première vague de Covid-19, en <a href="https://www.ofce.sciences-po.fr/blog/le-parachute-du-renflouement-public-au-secours-dun-secteur-aerien-en-chute-libre/">quasi-fonds propres</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/394456/original/file-20210412-23-11r9p2b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/394456/original/file-20210412-23-11r9p2b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/394456/original/file-20210412-23-11r9p2b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/394456/original/file-20210412-23-11r9p2b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/394456/original/file-20210412-23-11r9p2b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/394456/original/file-20210412-23-11r9p2b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/394456/original/file-20210412-23-11r9p2b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le projet de recapitalisation d’Air France du gouvernement de Jean Castex a été accepté par la Commission européenne début avril.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://u.afp.com/UQmR">Ludovic Marin/AFP</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les <a href="https://www.challenges.fr/entreprise/le-sauvetage-d-air-france-attention-a-la-concurrence-deloyale_707278">7 milliards d’euros alors obtenus</a> par la compagnie se divisaient en 4 milliards au titre des prêts garantis par l’État (PGE) et en 3 milliards d’un prêt d’actionnaire. Le projet du gouvernement était de transformer ce second prêt, dont le remboursement devait se faire sous trois ans, en obligations hybrides.</p>
<p>Ce montage a deux avantages pour la compagnie. Le premier est que ces obligations pourront être remboursées à plus long terme ; le second est qu’elles sont considérées non plus comme de la dette mais comme des <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/la-recapitalisation-dair-france-paree-a-decoller-1304243">quasi-fonds propres</a>. Le remboursement est conditionné aux résultats, ce qui rapproche en effet ces fonds des fonds propres stricto sensu.</p>
<p>Cette transformation déplace la dette (qui n’en est plus, au sens strict) en haut du bilan, ce qui en diminue l’exigibilité. L’amélioration des ratios financiers qui en découle permettra à Air France de se financer plus facilement (et moins coûteusement) sur les marchés.</p>
<p>Outre les 3 milliards d’euros de prêts transformés en quasi-fonds propres, le plan de soutien prévoit une augmentation de capital de 1 milliard d’euros dont la souscription sera ouverte aux actionnaires et au public. L’État ne devra pas augmenter sa part au-delà de 25 % et s’engage à se retirer d’ici 6 ans. Y sont associées des règles de gouvernance strictes en matière de rémunération des actionnaires.</p>
<h2>Une recapitalisation vitale</h2>
<p>Or, l’accès à de nouveaux financements reste vital pour la compagnie nationale. La crise lui a coûté une <a href="https://www.airfranceklm.com/fr/finance/publications/resultats">perte d’exploitation de 4,5 milliards d’euros</a> en <a href="https://www.airfranceklm.com/sites/default/files/q4_2020_press_release_fr_final.pdf">2020</a> et elle anticipe une perte de 2 milliards en 2021. Le groupe Air France-KLM est endetté à hauteur de 11 milliards d’euros en 2020, son résultat est de – 7 milliards d’euros alors que sa capitalisation ne dépasse pas le milliard d’euros.</p>
<p>Cependant, il faut se rappeler que la compagnie a joué un rôle clé durant la pandémie, que ce soit en matière de fret pour les matériels sanitaires ou de rapatriements de nos concitoyens français et européens dans des conditions qui ont été <a href="https://www.vie-publique.fr/en-bref/279083-cour-des-comptes-2021-le-covid-19-au-coeur-du-rapport-public-annuel">saluées par la Cour des Comptes</a>.</p>
<p>Hors ces conditions exceptionnelles, il s’agit d’abord de préserver l’un des acteurs clés de l’aménagement et la connectivité des territoires, <a href="https://www.senat.fr/questions/base/2020/qSEQ200515925.html">comme il l’a encore été récemment rappelé au Sénat</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1369745867914240010"}"></div></p>
<p>D’autant qu’Air France, par ses commandes et son activité, est aussi un relais privilégié de la filière aéronautique, de la construction et la maintenance aéronautique à l’exploitation des infrastructures aéroportuaires, notamment à l’heure où l’effondrement du trafic aérien met à mal l’équilibre des contrats de concession.</p>
<p>Sans omettre l’impulsion qu’Air France peut jouer en matière de verdissement des flottes. Dans ce schéma, la compagnie aérienne est un acteur moteur qu’il s’agit donc de préserver « quoi qu’il en coûte ».</p>
<p>Au-delà, le soutien apporté à Air France doit lui permettre de financer son <a href="https://www.fondapol.org/etude/apres-le-covid-19-le-transport-aerien-en-europe-le-temps-de-la-decision-2/">adaptation à son nouvel environnement concurrentiel</a>. Il s’agit en effet de faire face à la montée en puissance de compagnies à bas coûts, lesquelles sont de moins en moins cantonnées à une clientèle loisir mais sont des concurrentes de plus en plus sérieuses sur les lignes province – Paris.</p>
<p>Sur ces lignes, les compagnies à bas coût doivent récupérer des <em>slots</em>, ces si convoités droits d’usage (créneaux) à quantité limitée autorisant les compagnies à atterrir et décoller à partir des aéroports visés. Air France, tout comme l’ensemble des compagnies historiques européennes, semble condamnée à accélérer le développement de leurs offres complémentaires à bas coûts pour faire face à ces concurrents de plus en plus dangereux.</p>
<h2>La guerre des slots</h2>
<p>Aussi vital soit-il pour Air France (<a href="https://theconversation.com/podcast-air-france-sur-la-mauvaise-pente-115005">et l’écosystème auquel la compagnie appartient</a>), un tel projet de recapitalisation pourrait fausser le jeu de la concurrence. C’est pourquoi la Commission européenne, au terme d’un examen, s’assure que les aides d’État soient nécessaires et proportionnées et que les distorsions concurrentielles qui pourraient en résulter soient compensées par des mesures permettant de renforcer la concurrence.</p>
<p>Ainsi, tout comme la Lufthansa avait dû, en juin 2020, <a href="https://www.aviation24.be/airlines/lufthansa-group/lufthansa/european-commission-agrees-on-lufthansa-rescue-package-the-airline-surrenders-8-aircraft-and-24-slots-in-frankfurt-munich/">abandonner à ses concurrents 24 slots quotidiens</a> pour ses hubs de Francfort et de Munich (aéroports stratégiques situés au cœur du <a href="https://theconversation.com/air-france-en-crise-un-handicap-pour-skyteam-49066">réseau en étoile</a> des opérateurs aériens, jouant le rôle de carrefour de dessertes), Air France est enjointe par la Commission européenne à céder au moins <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/ip_21_1581">18 slots de décollage à l’aéroport de Paris-Orly</a>.</p>
<p>Si la Commission est prompte à exiger des opérateurs historiques qu’ils cèdent des slots en contrepartie des aides reçues, c’est qu’elle n’ignore rien de leur caractère stratégique. En effet, les compagnies aériennes peuvent <a href="https://theconversation.com/des-avions-qui-volent-a-vide-pour-conserver-les-creneaux-aeroportuaires-retour-sur-la-polemique-133943">reporter d’une année à l’autre leurs slots</a> dans un aéroport donné dès lors qu’elles en ont utilisé plus de 80 % l’année précédente.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1241845835673067520"}"></div></p>
<p>Cette pratique, appelée la « règle du grand-père » (aménagée encore du fait de la crise de la Covid-19 pour éviter de faire voler des appareils avec de très faibles taux de remplissage), avantage indubitablement les opérateurs historiques vis-à-vis des nouveaux entrants puisque, naturellement, elles en disposent en plus grande quantité, dans des aéroports de premier plan, et sur des créneaux horaires plus stratégiques. Ces slots sont donc vus par la Commission européenne comme une barrière à l’expansion des concurrents, notamment des opérateurs à bas coûts.</p>
<h2>Nouvelles concurrences (dé)loyales</h2>
<p>Les néo-compagnies, nous l’avons souligné, sont désormais de <a href="https://www.fondapol.org/etude/combe-les-vertus-cachees-du-low-cost-aerien/">redoutables concurrents</a> aux compagnies historiques aux structures de coûts nettement plus lourdes et moins flexibles. Elles peuvent être vues comme une réelle réussite de la libéralisation sectorielle initiée par la Commission.</p>
<p>Mais leur capacité à concurrencer encore plus les opérateurs historiques est freinée par le contrôle que ces derniers exercent sur les slots des aéroports stratégiques. Ces précieux slots pourraient leur permettre de prendre encore des parts de marché aux acteurs historiques, via le développement de nouveaux services de correspondance et du <em>self-connecting</em>.</p>
<p>Car l’idée selon laquelle les compagnies à bas coûts se limiteraient à des liaisons point à point pour une clientèle loisir est peu à peu démentie par les faits. Il n’y a pas une segmentation du marché mais, au contraire, un mouvement de montée en gamme de certaines compagnies à bas coûts et une nécessaire réinvention du modèle économique des opérateurs historiques pour défendre leur présence sur le court et moyen-courrier.</p>
<p>Or, la défense de ce modèle économique repose sur ces fameux slots qui leur permettent d’alimenter leurs vols long-courriers (souvent rentables) depuis des hubs alimentés par des lignes radiales (parfois déficitaires).</p>
<p>Se dessine alors un schéma concurrentiel particulièrement défavorable aux compagnies historiques. Sur le segment du long courrier, elles s’opposent à des <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/aeronautique/golfe-des-compagnies-trop-subventionnees_2655328.html">compagnies</a> bénéficiant de soutiens étatiques parfois massifs. Sur le segment des courts et moyens courriers, le caractère loyal de la concurrence que leur opposent les compagnies à bas coûts peut également être questionné.</p>
<p>D’un côté, l’émergence de ces compagnies a profité aux consommateurs européens. Leur croissance vient en grande partie de leur performance économique : un modèle de minimisation des coûts, une gestion des flux passagers optimisée et une flotte homogène exploitée de la façon la plus efficace possible. Le succès des nouveaux entrants comme Ryanair et EasyJet est indubitable. Leur émergence apparaît comme l’un des effets de la politique de concurrence.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/394452/original/file-20210412-19-109vosi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/394452/original/file-20210412-19-109vosi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/394452/original/file-20210412-19-109vosi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/394452/original/file-20210412-19-109vosi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/394452/original/file-20210412-19-109vosi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/394452/original/file-20210412-19-109vosi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/394452/original/file-20210412-19-109vosi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’émergence des compagnies à bas coûts comme Ryanair et EasyJet a profité aux consommateurs européens.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/tenerife-spain-august-2019-ryanair-easyjet-1511145887">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De l’autre, la croissance de ces compagnies peut aussi s’expliquer par des <a href="https://www.ccomptes.fr/fr/publications/les-aeroports-francais-face-aux-mutations-du-transport-aerien">aides versées par des gestionnaires d’aéroports dits périphériques</a>, mais aussi par des mesures de dumping fiscal et <a href="https://journals.openedition.org/nrt/3527">social</a>… au sein même de l’Union européenne ! Difficile, dans ces conditions, de prétendre que l’expansion des compagnies à bas coûts n’est que le fruit de leurs mérites et que la concurrence intra et extra européenne se soit toujours jouée « à égalité des armes ».</p>
<h2>Contreparties paradoxales</h2>
<p>C’est pourtant au titre de la préservation d’une concurrence libre et non faussée que la Commission européenne exige des opérateurs historiques qu’ils cèdent des slots en contrepartie des aides d’État qu’ils reçoivent.</p>
<p>Pointe alors un curieux paradoxe, souligné dans un récent <a href="https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/pbrief/2021/OFCEpbrief87.pdf">Policy brief</a> de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) : les contreparties exigées par la Commission européenne ne sont-elles pas de nature à affaiblir les perspectives de reprise de l’activité d’Air France (et donc sa capacité même à redéfinir son modèle économique), qui pourtant est la finalité même de la mesure de soutien public ?</p>
<p>Le compromis obtenu sur les contreparties n’est donc pas une concession par rapport à l’application des règles de concurrence mais un équilibre entre l’ouverture du marché, le maintien des chances de restructuration de l’opérateur historique et la prise en compte d’avantages symétriques dont bénéficient les nouveaux entrants.</p>
<p>Autrement dit, pour la Commission européenne, il s’agit donc d’arbitrer entre le renforcement de la concurrence, au bénéfice des consommateurs, et la préservation des opérateurs historiques qui jouent, nous l’avons vu, un rôle d’entraînement économique majeur.</p>
<p>Le nombre présumément inférieur de slots qu’Air France devra céder par rapport à ce que l’Allemagne a dû accepter (18 contre 24) témoigne d’ailleurs de la recherche d’une voie d’équilibre entre contreparties concurrentielles et préservation des chances de succès de la restructuration d’Air France, dans un contexte où la crise de la Covid-19 a exacerbé ses <a href="https://theconversation.com/air-france-ou-comment-se-couper-les-ailes-95758">difficultés structurelles préexistantes</a>.</p>
<p>Une restructuration qui se ferait au prix de l’affaiblissement concurrentiel inexorable de la compagnie induirait le risque de devoir la soutenir dans le futur de façon récurrente ou de l’abandonner et avec elle les milliards injectés. Et personne n’a intérêt à ce qu’Air France s’enlise dans une spirale d’attrition <a href="https://ajot.com/news/alitalia-is-running-out-of-cash-and-italy-canat-help-this-time">comparable à celle d’Alitalia</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1260291791548567553"}"></div></p>
<p>La disparition d’Air France, dont la situation est aujourd’hui extrêmement fragile, ferait partir avec elle non seulement des emplois mais une entreprise de services expérimentée et un levier de la politique territoriale et environnementale du gouvernement. En outre, la concurrence en serait grandement affectée.</p>
<p>La décision de la Commission fera sans doute l’objet de <a href="https://www.france24.com/en/europe/20210406-air-france-gets-european-union-approval-for-%E2%82%AC4-billion-in-aid">recours</a> de la part d’opérateurs à bas coûts à l’instar de ceux qui avaient été vainement <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/02/17/la-justice-europeenne-rejette-les-recours-de-ryanair-contre-les-aides-publiques-a-air-france_6070278_3234.html">engagés</a> contre les programmes de soutien autorisés par la Commission au printemps 2020. La balance d’intérêts antagonistes pèse sur les instances européennes qui doivent réaliser un difficile arbitrage entre intérêts de court terme et intérêts de long terme, entre principes et réalisme.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/158797/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les conditions exigées par la Commission européenne, qui prévoient notamment une réduction des slots dans les aéroports, pourraient affaiblir l'entreprise face à la concurrence.Julien Pillot, Enseignant-Chercheur en Economie et Stratégie (Inseec U.) / Pr. et Chercheur associé (U. Paris Saclay), INSEEC Grande ÉcoleFrédéric Marty, Chargé de recherche CNRS, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Sarah Guillou, Directrice, département Innovation et concurrence à l'OFCE, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1566642021-03-10T18:19:24Z2021-03-10T18:19:24ZLe transport aérien engagé dans une course de survie financière<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/388259/original/file-20210308-21-1evcbrr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=25%2C4%2C958%2C661&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les pertes des 290&nbsp;compagnies aériennes membres de l’IATA s’élèvent à 120&nbsp;milliards de dollars pour l’année 2020.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Mikhail Berkut / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Selon l’IATA (Association internationale du transport aérien), le trafic mondial de passagers transportés par les compagnies aériennes <a href="https://www.iata.org/en/pressroom/pr/2021-02-03-02/">s’est effondré</a> (-66 %) en 2020 par rapport à 2019 en raison de la crise sanitaire. Logiquement, on constate une meilleure résistance du trafic domestique (-48,8 %) qu’international (-75,6 %) et toutes les régions du monde ont été touchées de façon similaire.</p>
<p>Une quarantaine de compagnies ont ainsi déjà fait faillite, sans compter les procédures de redressement judiciaire en cours… En outre, de nombreuses compagnies ne doivent leur survie <a href="https://www.marianne.net/economie/economie-internationale/compagnies-aeriennes-les-gagnants-et-les-perdants-de-la-crise-du-covid">qu’au soutien financier des États</a>.</p>
<p>L’IATA estime par ailleurs que le rythme de la consommation de trésorerie (l’argent immédiatement disponible) des compagnies aériennes ne devrait pas faiblir, avec une prévision située entre <a href="https://www.iata.org/en/pressroom/pr/2021-24-02-01/">75 et 95 milliards de dollars en 2021</a>, sachant que leurs <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/les-compagnies-aeriennes-voient-lhorizon-de-la-reprise-seloigner-1293148">pertes 2020 sont déjà estimées à 120 milliards</a> pour les 290 compagnies aériennes membres de l’association internationale.</p>
<p>Dans ces conditions inédites, quelle est la situation des compagnies aériennes à la fin 2020 ? Nous avons sélectionné sept groupes internationaux : All Nippon Airways (Japon), Air France-KLM (France, Pays-Bas), American Airlines (États-Unis), EasyJet (Royaume-Uni), IAG (Royaume-Uni, qui comprend notamment British Airways et Iberia), Lufthansa (Allemagne, qui intègre également Swiss et Austrian Airlines) et Singapore Airlines (Singapour).</p>
<h2>Une activité extrêmement dégradée</h2>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/388223/original/file-20210308-18-hkn5v6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/388223/original/file-20210308-18-hkn5v6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/388223/original/file-20210308-18-hkn5v6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/388223/original/file-20210308-18-hkn5v6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/388223/original/file-20210308-18-hkn5v6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/388223/original/file-20210308-18-hkn5v6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/388223/original/file-20210308-18-hkn5v6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Figure 1 : Évolution de l’activité des sept compagnies aériennes entre 2019 et 2020 (source : rapports annuels 2020 des entreprises).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur (D.R)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le graphique ci-contre montre que les entreprises sont impactées très négativement par la crise de la Covid-19 avec des baisses de chiffre d’affaires de l’ordre de 50 à 80 % en 2020 par rapport à 2019. C’est l’effondrement du trafic passager qui explique principalement cette chute : jusqu’à – 98,8 % pour Singapore Airlines qui ne peut compter sur une activité domestique tandis que EasyJet qui n’a pas d’activité long-courrier est la compagnie qui souffre le moins.</p>
<p>En revanche, le trafic cargo résiste mieux en raison notamment du transport de produits pharmaceutiques et du développement du e-commerce avec des tarifs et des taux de remplissage en augmentation permettant de compenser la baisse globale des volumes du fret aérien.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/388224/original/file-20210308-24-1tdwl62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/388224/original/file-20210308-24-1tdwl62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/388224/original/file-20210308-24-1tdwl62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/388224/original/file-20210308-24-1tdwl62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/388224/original/file-20210308-24-1tdwl62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/388224/original/file-20210308-24-1tdwl62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/388224/original/file-20210308-24-1tdwl62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/388224/original/file-20210308-24-1tdwl62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 2 : Marge opérationnelle des sept compagnies aériennes (source : rapports annuels 2020 des entreprises).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur (D.R)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette très importante dégradation de l’activité s’est naturellement traduite par des marges opérationnelles (résultat d’exploitation/chiffre d’affaires) très négatives pour l’ensemble des compagnies aériennes (jusqu’à – 95,13 % pour le britannique IAG), des pertes globales extrêmement conséquentes et encore alourdies par des provisions pour restructuration (822 millions d’euros en 2020 chez Air France-KLM), ainsi que des dépréciations de valeur d’avions (837 millions d’euros chez IAG du fait du retrait définitif et anticipé de 32 Boeing 747 de British Airways et de 15 Airbus A340-600 d’Iberia).</p>
<p>Dans ces conditions, on peut légitimement s’interroger sur la capacité financière de ces entreprises à supporter un tel choc.</p>
<h2>Une liquidité améliorée…</h2>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/388225/original/file-20210308-18-nxwixk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/388225/original/file-20210308-18-nxwixk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/388225/original/file-20210308-18-nxwixk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=363&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/388225/original/file-20210308-18-nxwixk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=363&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/388225/original/file-20210308-18-nxwixk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=363&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/388225/original/file-20210308-18-nxwixk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=456&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/388225/original/file-20210308-18-nxwixk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=456&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/388225/original/file-20210308-18-nxwixk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=456&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 3 : Évolution de la liquidité des sept compagnies aériennes entre 2019 et 2020 (source : rapports annuels 2020 des entreprises).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur (D.R)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Contrairement à ce que l’on pouvait anticiper, la plupart des compagnies ont vu la situation de leur trésorerie s’améliorer notablement sur la période (à l’exception de IAG). Sachant, en outre, que ces données ne prennent pas en compte les lignes de crédits non utilisées dont elles disposaient auparavant ou qu’elles ont négociées depuis la survenue de la crise.</p>
<p>Par exemple, American Airlines disposait à la fin décembre 2020 de 7,4 milliards de dollars de prêts non tirés. Compte tenu du montant de ses liquidités (6,9 milliards), cela représente une trésorerie potentielle de plus de 14,3 milliards de dollars.</p>
<p>Certaines compagnies aériennes ont en outre bénéficié de prêts garantis de leurs États respectifs. Ainsi, Air France-KLM avait tiré fin décembre 2020 l’intégralité des 7 milliards d’euros de prêt de l’État français et 0,9 milliard des 3,4 milliards de l’État néerlandais. Ces supports d’État ont fait d’ailleurs l’objet de recours systématiques de la part de concurrents (Ryanair) qui n’en bénéficient pas pour distorsion de concurrence, mais <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/02/17/la-justice-europeenne-rejette-les-recours-de-ryanair-contre-les-aides-publiques-a-air-france_6070278_3234.html">sans succès jusqu’ici</a>.</p>
<p>Enfin, les compagnies ont toutes cessé (au moins à partir du deuxième trimestre 2020) de verser des dividendes et stoppé les programmes de rachat d’actions. Cette amélioration des liquidités est aussi le fait d’un appel massif à l’emprunt non étatique.</p>
<h2>… au prix d’une forte croissance de l’endettement…</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/388227/original/file-20210308-13-6ydnrh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/388227/original/file-20210308-13-6ydnrh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/388227/original/file-20210308-13-6ydnrh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=364&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/388227/original/file-20210308-13-6ydnrh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=364&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/388227/original/file-20210308-13-6ydnrh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=364&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/388227/original/file-20210308-13-6ydnrh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=457&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/388227/original/file-20210308-13-6ydnrh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=457&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/388227/original/file-20210308-13-6ydnrh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=457&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Figure 4 : Évolution du taux d’endettement net des sept compagnies aériennes entre 2019 et 2020 (source : rapports annuels 2020 des entreprises).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur (D.R)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Lorsque l’on observe le taux d’endettement net (endettement financier – trésorerie/total de l’actif) des compagnies aériennes, on constate qu’il a fortement augmenté au cours de l’année 2020, à l’exception de Singapore Airlines.</p>
<p>Seules EasyJet (13 %) et Singapore Airlines (14 %) conservent des niveaux d’endettement raisonnables, mais les raisons diffèrent : EasyJet était très peu endettée avant la crise et l’augmentation comparable aux autres a eu moins d’effets délétères alors que Singapore Airlines a bénéficié d’un renforcement conséquent de ses fonds propres (8,8 milliards de dollars singapouriens) qui lui a évité de recourir dans les mêmes proportions que ses concurrents à l’endettement.</p>
<p>Ceux-ci ont émis de nombreux emprunts, parfois garantis par les États (comme pour Air France-KLM ou dans une moindre mesure pour Lufthansa qui a également bénéficié d’une recapitalisation de la part de l’État allemand) ou directement sur le marché.</p>
<h2>… et de mesures d’économies massives</h2>
<p>Les compagnies aériennes ont déployé des plans de restructuration d’ampleur inégalée pour assurer leur pérennité. En raison de la baisse d’activité, les dépenses ont été automatiquement réduites (notamment les dépenses de carburant), mais des mesures structurelles de réduction des coûts ont été également été mises en œuvre.</p>
<p>Des plans de licenciements ont été lancés : IAG a réduit ses effectifs de 10 000 personnes chez British Airways (environ un quart des effectifs) et de 500 chez Aer Lingus. La compagnie Air-France-KLM s’est quant à elle séparée de 8 700 salariés et a réduit ses coûts de personnel de 35 % en 2020 par rapport à 2019.</p>
<p>Des mesures de gel et de réduction des salaires, de réduction des dépenses de formation, des prises de congés anticipés, etc. ont également contribué à réduire les frais de personnel. La réduction des investissements (moins 7 milliards d’euros chez IAG pour la période 2020-2022, Lufthansa a diminué ses investissements de 3,5 milliards d’euros en 2019 à 1,3 milliard en 2020) avec des reports de commandes et de livraisons d’avions, et une gestion plus stricte du besoin en fonds de roulement ont également contribué à préserver la liquidité de ces entreprises.</p>
<p>Si la position de liquidité des grandes compagnies aériennes reste solide à ce jour, elles continueront à brûler du cash chaque jour tant que la crise sanitaire ne sera pas derrière nous. Elles appellent donc de leurs vœux toutes les mesures qui pourraient permettre un redémarrage rapide <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/covid-les-compagnies-aeriennes-testent-des-certificats-sanitaires-numeriques-1292195">comme les certificats sanitaires numériques</a> à défaut d’un passeport sanitaire.</p>
<p>D’un point de vue financier, l’endettement ne pourra pas pourvoir durablement au maintien de leur solvabilité et un appel aux actionnaires ou aux États sera vraisemblablement nécessaire pour renforcer leurs fonds propres comme cela a déjà été le cas pour certaines d’entre elles, ce qui pourrait se traduire par des <a href="https://theconversation.com/faut-il-nationaliser-les-compagnies-aeriennes-134222">nationalisations rampantes</a>.</p>
<p>D’un point de vue stratégique, cette crise remet même en question <a href="https://theconversation.com/le-transport-aerien-ne-sera-plus-jamais-le-meme-151150">leurs modèles d’affaires</a>. Leur survie passera non seulement par des mesures financières, mais surtout par une recomposition du secteur qui fera forcément des gagnants comme des perdants.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/156664/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérôme Caby est Délégué Général de La FNEGE (Fondation Nationale pour l'Enseignement de la Gestion des Entreprises)</span></em></p>Depuis l’éclatement de la crise, les compagnies se sont massivement endettées pour assurer leurs dépenses. La reprise du trafic devient désormais urgente pour qu’elles restent solvables.Jérôme Caby, Professeur des Universités, IAE Paris – Sorbonne Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1544622021-02-02T20:04:38Z2021-02-02T20:04:38ZLes cas de Covid-19 liés aux voyages sont sous-estimés au Canada. Voici pourquoi<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/382054/original/file-20210202-23-5zbzy2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une passagère passe par l'aéroport Montréal-Trudeau de Montréal, le jeudi 7 janvier 2021. Les cas de Covid-19 rapportés par les voyageurs sont sous-estimés par la Santé publique.
</span> <span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Paul Chiasson</span></span></figcaption></figure><p>Le premier ministre Justin Trudeau a récemment annoncé de <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1766872/covid19-canada-voyages-internationaux-annonce-gouvernement">nouvelles restrictions de vol ainsi que des règles de dépistage de la Covid-19 et de quarantaine obligatoire pour les voyageurs</a> afin de limiter la propagation du coronavirus.</p>
<p>Les arguments contre l’adoption de mesures plus strictes en matière de voyages au Canada pendant la pandémie de Covid-19 s’appuient souvent sur des données suggérant que peu de cas sont liés aux voyageurs. La principale source de ces données est l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), qui publie régulièrement des <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/sante-voyageurs.html">rapports</a> sur les lieux d’exposition potentielle au virus au Canada, y compris les vols intérieurs et internationaux.</p>
<p>Sur la base de ces expositions signalées, l’ASPC estime que les voyages internationaux ont représenté entre 0,4 % (en mai) et 2,7 % (en juillet) du total des cas confirmés au cours des huit derniers mois, <a href="https://www.journaldemontreal.com/2021/01/11/des-centaines-de-milliers-detrangers-sont-entres-au-canada-malgre-la-pandemie">pour une moyenne d'environ 2%</a>. Ces estimations sont ensuite régulièrement citées dans les médias par les représentants de l’industrie, les responsables de la santé publique et le gouvernement.</p>
<p>Sur la base de ces données, qui suggèrent que les voyages présentent un faible risque, les gouvernements ont hésité à mettre en place des mesures plus strictes concernant les voyageurs et les protocoles qu’ils doivent suivre.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/tDoFI8niMes?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le premier ministre Justin Trudeau annonce de nouvelles restrictions de voyage et de nouveaux protocoles d’arrivée.</span></figcaption>
</figure>
<p>Par exemple, le 21 janvier, le premier ministre de la Colombie-Britannique, John Horgan, a défendu sa décision de ne pas restreindre les voyages interprovinciaux en disant que le gouvernement ne peut agir que « <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1766341/horgan-cb-covid-restrictions-voyages-frontieres-quarantaine">s’ils nuisent à la santé et à la sécurité des Britanno-Colombiens</a>. Si nous constatons une augmentation de la transmission… nous imposerons des restrictions plus strictes aux voyageurs non essentiels », a-t-il dit.</p>
<p>Notre équipe analyse le processus décisionnel menant à l’utilisation de mesures liées aux voyages pendant la pandémie de Covid-19 dans différents pays, dont le Canada. En comparant les mesures prises par le Canada avec celles d’autres pays, ainsi que les méthodes de dépistage et de calcul des infections importées, nous soutenons que les chiffres souvent cités sous-estimeraient en fait les cas de Covid-19 liés aux voyages. Le système actuel ne collecte pas systématiquement ou rigoureusement suffisamment de données pour servir de base à des décisions politiques de grande envergure.</p>
<p>Cette situation survient à un moment <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1766844/coronavirus-mutation-nouveau-variant-financement-etude">où l’arrivée de nouvelles variantes de Covid-19 rend l’adoption de bonnes politiques en matière de voyages</a> encore plus importante. Il est urgent de mettre en place un système plus rigoureux, plus rapide et plus précis.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/voici-pourquoi-les-nouveaux-variants-de-la-covid-19-se-repandent-dans-le-monde-entier-153938">Voici pourquoi les nouveaux variants de la Covid-19 se répandent dans le monde entier</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<h2>Calcul des cas</h2>
<p>Les estimations actuelles se basent sur les voyageurs internationaux arrivant par avion. <a href="https://voyage.gc.ca/voyage-covid/voyage-restrictions/isolement?_ga=2.42214637.970715852.1612222164-1247210395.1612222164">Les passagers doivent se mettre en quarantaine, observer leur symptômes pendant 14 jours</a> et se faire tester en cas de doute. S’ils sont positifs et qu’ils déclarent avoir été sur un vol international ou intérieur, une alerte est ajoutée à une liste en ligne d’expositions potentielles.</p>
<p>Les passagers des rangées de sièges voisines sont considérés comme présentant un risque plus élevé et peuvent ainsi être avertis. Tous les autres voyageurs sont tenus de vérifier les alertes et doivent être mis en quarantaine dans tous les cas. Seuls les cas directs impliquant des passagers aériens sont pris en compte. Toute transmission communautaire ultérieure par des voyageurs, retrouvés ou non, n’est pas officiellement comptabilisée.</p>
<p>Il n’y a pas de tests de routine ni de recherche de contacts pour les voyageurs entrant au Canada. Seuls les voyageurs par avion qui s’identifient eux-mêmes comme présentant des symptômes et dont le test est positif sont inclus dans les données actuelles. Les voyageurs par voie terrestre et maritime, ainsi que les voyageurs aériens qui sont infectés, mais non testés ou asymptomatiques, ne le sont pas. Et aucune donnée n’est recueillie sur les voyages interprovinciaux au-delà des expositions détectées sur les vols intérieurs.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/382070/original/file-20210202-23-9fkuzo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/382070/original/file-20210202-23-9fkuzo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/382070/original/file-20210202-23-9fkuzo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/382070/original/file-20210202-23-9fkuzo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/382070/original/file-20210202-23-9fkuzo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/382070/original/file-20210202-23-9fkuzo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/382070/original/file-20210202-23-9fkuzo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une voyageuse, Josée Bertrand, montre le résultat de son test de Covid-19 à l'aéroport Trudeau de Montréal, alors qu'elle arrive de Fort Lauderdale le 7 janvier 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Paul Chiasson</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les méthodes actuelles se basent également sur des données peu fiables concernant la fiabilité des tests, la recherche des contacts et la quarantaine. De multiples tests sont souvent nécessaires pour confirmer l’infection ; il existe de nombreux faux négatifs et les nouvelles variantes s’avèrent particulièrement insaisissables. De même, la capacité de traçage est insuffisante compte tenu des volumes actuels de voyageurs.</p>
<p>On suppose que toutes les arrivées internationales respectent la quarantaine obligatoire de 14 jours. Toutefois, compte tenu de l’application limitée de cette règle, il se peut que certains passagers ne soient pas mis en quarantaine correctement ou ne respectent pas toute la durée de la quarantaine, voire ne la fassent pas du tout.</p>
<h2>Cas non comptés</h2>
<p>Lorsque l’on mesure les infections liées aux voyages, on se concentre sur la transmission du virus dans les avions. En novembre 2020, citant des recherches récentes, l’administratrice en chef de la santé publique Theresa Tam a déclaré qu’<a href="https://www.cbc.ca/news/politics/covid-transmission-flights-extremely-rare-1.5797065">« il y a eu très peu de rapports, extrêmement rares, en fait, de transmission à bord des avions »</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/381504/original/file-20210131-20580-1c1ljo6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Une femme portant un masque et poussant un chariot à bagages complet se promène entre les kiosques d’Air Canada" src="https://images.theconversation.com/files/381504/original/file-20210131-20580-1c1ljo6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/381504/original/file-20210131-20580-1c1ljo6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/381504/original/file-20210131-20580-1c1ljo6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/381504/original/file-20210131-20580-1c1ljo6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/381504/original/file-20210131-20580-1c1ljo6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/381504/original/file-20210131-20580-1c1ljo6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/381504/original/file-20210131-20580-1c1ljo6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’été dernier, les transporteurs aériens ont demandé au gouvernement d’assouplir les restrictions de voyage adoptées pour freiner la propagation de la Covid-19, cette fois en s'appuyant sur une « approche scientifique » qui permettrait de voyager dans des pays à faible risque d’infection.</span>
<span class="attribution"><span class="source">THE CANADIAN PRESS/Nathan Denette</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Toutefois, de nombreuses études qui font état d’un faible risque d’attraper le coronavirus en vol sont parrainées par l’industrie aérienne, <a href="https://www.buzzfeednews.com/article/stephaniemlee/flying-planes-coronavirus-safe">ce qui soulève des inquiétudes quant aux conflits d’intérêts potentiels</a>. Il est important de noter que ces études négligent les risques d’infection au cours d’un voyage.</p>
<p>Depuis le 7 janvier, toute personne arrivant au Canada par avion depuis un autre pays doit fournir un résultat de test négatif (effectué dans les 72 heures suivant le voyage) afin de réduire le nombre de voyageurs infectés par le coronavirus. Bien que cette mesure soit utile, elle ne tient pas compte des expositions qui se produisent pendant les trois jours qui séparent le test du voyage proprement dit.</p>
<p>Ensuite, il y a le voyage vers et depuis les aéroports. Certains voyageurs ont transmis le virus à des chauffeurs de taxi, par exemple. De nombreux passagers internationaux prennent des vols intérieurs en correspondance sans s’isoler lors de leur entrée initiale <a href="https://voyage.gc.ca/voyage-covid/voyage-restrictions/voyager-avion?_ga=2.20662384.970715852.1612222164-1247210395.1612222164">« sauf restrictions provinciales ou territoriales »</a>. Ces passagers transiteront également par les aéroports avant d’embarquer sur des vols domestiques. Les infections hors vol liées à ces scénarios ne sont pas comptabilisées actuellement.</p>
<h2>Rendre les voyages plus sûrs</h2>
<p>Les voyages et la pandémie de Covid-19 sont intimement liés. Le virus a été initialement importé au Canada par les voyages, et de nouvelles infections continuent d’être introduites au pays chaque jour. Cela inclut les variantes du virus.</p>
<p>Même avec les données partielles actuelles, l’ASPC a signalé plus de 160 vols internationaux et 90 vols intérieurs entre le 7 et le 17 janvier, transportant des cas confirmés de Covid-19. Ces cas sont survenus malgré les nouvelles exigences en matière de tests.</p>
<p>Si nous voulons prendre des décisions politiques efficaces pour gérer les voyages et la pandémie, nous avons besoin de données plus robustes. Le système de suivi actuel est surchargé, et il sera donc difficile d’élargir la collecte de données. Réduire le nombre de voyageurs aux seuls voyageurs essentiels est un point de départ important.</p>
<p>Les ressources peuvent ensuite être consacrées à l’amélioration des tests, à la recherche des contacts et à la mise en quarantaine. L’échantillonnage aléatoire pourrait être utilisé pour estimer les infections en fonction du nombre de voyageurs aux différents points d’entrée, dans les modes de transport et destinations d’un voyage. La multiplication et le partage des séquences génomiques des résultats positifs sont alors essentiels pour identifier plus rapidement tout cas importé de nouvelle variante.</p>
<p>Ce n’est qu’alors que nous pourrons avoir une idée précise des risques liés aux voyages et de la meilleure façon de les diminuer.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/154462/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Kelley Lee reçoit un financement du New Frontiers Research Fund pour mener des recherches sur le respect du Règlement sanitaire international de l'OMS et de la norme Covid-19.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Anne-Marie Nicol reçoit un financement en partie du Partenariat canadien contre le cancer.</span></em></p>Les restrictions de voyage annoncées visent à freiner la propagation des variantes du coronavirus. Mais le système actuel ne collecte pas systématiquement ou rigoureusement suffisamment de données.Kelley Lee, Professor of Global Health Policy, Canada Research Chair in Global Health Governance, Simon Fraser UniversityAnne-Marie Nicol, Associate Professor, Health Sciences, Simon Fraser UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1511502020-12-02T19:22:46Z2020-12-02T19:22:46ZLe transport aérien ne sera plus jamais le même…<p>« En 65 jours, le trafic a perdu ce qu’il avait gagné en 65 ans ». Tel était l’accablant <a href="https://www.air-journal.fr/2020-05-06-lufthansa-trafic-remboursements-et-a380-cargo-5219999.html">constat</a> que formulait le PDG de Lufthansa, Carsten Spohr, en s’adressant aux actionnaires de la compagnie allemande le 5 mai dernier.</p>
<p>Au printemps dernier, le nombre de passagers de Lufthansa n’était que de 1 % par rapport à celui de l’année précédente. Un chiffre qui illustre l’ampleur de la crise, à l’instar des sombres perspectives mondiales pour le secteur. L’International Air Transport Association (IATA) prévoit ainsi une <a href="https://www.iata.org/en/pressroom/pr/2020-07-28-02/">baisse de 55 %</a> du nombre de passagers dans le monde par rapport à 2019, incluant les mois où le trafic était encore à un niveau normal.</p>
<p>Malgré cette crise inédite dans son <a href="https://www.icao.int/sustainability/Documents/Covid-19/ICAO_coronavirus_Econ_Impact.pdf">intensité</a>, un avenir sans transport aérien reste impensable. Mais à quoi pourrait-il ressembler après la crise ?</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/371999/original/file-20201130-17-iu8ndm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/371999/original/file-20201130-17-iu8ndm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/371999/original/file-20201130-17-iu8ndm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=280&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/371999/original/file-20201130-17-iu8ndm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=280&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/371999/original/file-20201130-17-iu8ndm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=280&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/371999/original/file-20201130-17-iu8ndm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=351&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/371999/original/file-20201130-17-iu8ndm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=351&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/371999/original/file-20201130-17-iu8ndm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=351&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.icao.int/sustainability/Documents/COVID-19/ICAO_Coronavirus_Econ_Impact.pdf">Organisation de l’aviation civile internationale (novembre 2020)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour répondre à cette question, l’EDHEC Business School a lancé un projet en septembre 2020 sur l’avenir de l’industrie du transport aérien. Dans le cadre de ce projet, 13 partenaires de l’écosystème du transport aérien utilisent différentes méthodes de prévision pour étudier des scénarios concernant l’avenir de cette industrie. Les partenaires comprennent deux grands aéroports, deux compagnies aériennes internationales, deux fabricants d’avions et d’équipements, une association industrielle, ainsi que des agences de voyages et fournisseurs technologiques.</p>
<p>À titre d’étape intermédiaire, le projet a identifié quatre facteurs qui seront déterminants pour l’avenir du secteur du transport aérien : le voyage d’affaires, la régionalisation des trajets, les réseaux « en étoile » et le <em>flight shaming</em> (la « honte de prendre l’avion » pour des raisons environnementales).</p>
<h2>Voyages d’affaires, retour à la normale ?</h2>
<p>Perçus par beaucoup comme un moteur essentiel de la croissance économique, les voyages d’affaires bénéficient depuis de nombreuses années de l’aura magique permettant de transformer des réunions physiques dans le monde entier en une opportunité commerciale et économique. Il a également été un moteur de croissance important pour l’industrie aérienne.</p>
<p>Pourtant, il est possible que les voyages d’affaires ne retrouvent plus jamais leur niveau d’avant la crise. Les interdictions de voyage, imposées par les États et les entreprises, peuvent servir de point de départ à un cycle auto-renforçant, que les stratèges recherchent pour identifier les changements exponentiels.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/372002/original/file-20201130-15-1dm1taz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/372002/original/file-20201130-15-1dm1taz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/372002/original/file-20201130-15-1dm1taz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=347&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/372002/original/file-20201130-15-1dm1taz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=347&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/372002/original/file-20201130-15-1dm1taz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=347&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/372002/original/file-20201130-15-1dm1taz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=436&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/372002/original/file-20201130-15-1dm1taz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=436&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/372002/original/file-20201130-15-1dm1taz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=436&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur.</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Comme le suggère le diagramme en boucle de rétroaction ci-contre, les interdictions de voyager impliquent moins (ou pas) de vols, ce qui entraîne une diminution des budgets, un durcissement des réglementations en matière de voyage dont beaucoup peuvent prévaloir même après la levée des interdictions de voyager.</p>
<p>Si un tel cycle est arrêté dans les 4 semaines, les nouveaux comportements n’auront pas le temps de s’adapter et le système reviendra généralement à son état initial.</p>
<p>Cependant, plus la situation de crise durera longtemps, plus il sera probable que les changements systémiques deviennent permanents. L’absence de voyages d’affaires et de réunions en face à face a maintenant donné lieu à l’adoption d’alternatives en masse, comme la vidéoconférence, la collaboration virtuelle, les tableaux blancs en ligne, etc. Si ces alternatives sont capables de montrer qu’elles peuvent accroître la productivité, les voyages d’affaires deviendraient une exception pour les réunions, comme c’était le cas il y a 65 ans.</p>
<h2>De la mondialisation à la régionalisation ?</h2>
<p>Depuis 2005, la mondialisation montre des <a href="http://pubdocs.worldbank.org/en/207011562781675834/2019-07-10-Global-Value-Chains.pdf">signes de ralentissement</a>. Les stratégies d’internationalisation des entreprises sont de plus en plus axées sur la réactivité locale et de moins en moins sur le contrôle et la dépendance à l’égard des sièges sociaux internationaux.</p>
<p>Les tensions commerciales mondiales, telles que le conflit entre les États-Unis et la Chine, pourraient contribuer à ralentir les déplacements intercontinentaux. La crise de la Covid-19 pourrait accélérer cette tendance et favoriser le commerce et l’approvisionnement régionaux.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/372003/original/file-20201130-23-nxfrkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/372003/original/file-20201130-23-nxfrkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/372003/original/file-20201130-23-nxfrkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/372003/original/file-20201130-23-nxfrkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/372003/original/file-20201130-23-nxfrkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/372003/original/file-20201130-23-nxfrkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/372003/original/file-20201130-23-nxfrkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/372003/original/file-20201130-23-nxfrkd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.icao.int/sustainability/Documents/COVID-19/ICAO_Coronavirus_Econ_Impact.pdf">Organisation de l’aviation civile internationale (novembre 2020)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Une étude récente a montré qu’une réponse importante à la crise Covid-19 était la relocalisation des chaînes d’approvisionnement et notamment l’accent mis sur l’utilisation des <a href="https://doi.org/10.1016/j.techfore.2020.120447">écosystèmes régionaux</a>. Cette réponse pourrait devenir permanente, renforcée par le faible niveau des voyages internationaux.</p>
<p>Des chiffres récents de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) montrent que si les voyages interrégionaux ont repris, passant d’une moyenne de 250 millions de passagers avant la crise à 100 millions aujourd’hui, le nombre de passagers internationaux quant à lui s’élève <a href="https://www.icao.int/sustainability/Documents/Covid-19/ICAO_coronavirus_Econ_Impact.pdf">à 20 millions</a>, soit bien en dessous des 160 millions d’avant la crise.</p>
<h2>La fin du réseau en étoile ?</h2>
<p>Il est intéressant de noter que l’impact de la pandémie du Covid-19 a été ressenti différemment par les compagnies aériennes à bas prix (low-cost), comme Ryan Air ou EasyJet, et les compagnies aériennes traditionnelles de réseau (CATR), comme Air France, Lufthansa ou Singapore Airlines.</p>
<p>Les CATR s’appuient sur des plates-formes centrales où les vols court-courriers sont reliés aux vols long-courriers qui, avec leurs avions de plus grande capacité, sont économiquement plus intéressants. Ce modèle, dit « en étoile » (<em>hub-and-spoke</em>), crée également de puissants effets de réseau, permettant aux grandes compagnies aériennes d’atteindre des économies d’échelle et de créer de puissantes barrières à l’entrée pour les nouveaux arrivants.</p>
<p>Ces avantages pour les CATR se font toutefois au prix de l’acceptation des passagers. En effet, ces itinéraires impliquent des correspondances. En temps normal, cela peut être remis en question pour des raisons environnementales et peut être ressenti comme un inconvénient par les passagers. Mais en temps de crise sanitaire, les hubs sont des zones à risque clés dans le voyage du passager, puisqu’il reste difficile de garantir des normes de distanciation sociale dans les aéroports.</p>
<p>L’interdépendance entre les vols court-courriers et les vols long-courriers est également un immense obstacle à la reprise. Pour les CATR, l’absence de vols long-courriers signifie que les vols court-courriers doivent être réduits. L’absence de vols court-courriers rendra alors impossible le remplissage des grands vols long-courriers.</p>
<p>Les compagnies aériennes à bas coûts et à service complet qui exploitent un modèle point à point peuvent être beaucoup plus réactives en ouvrant et en fermant des routes pour répondre à la fluctuation de la demande. La plupart des CART ont pour stratégie de tenir bon et de redémarrer à terme leur modèle hub-and-spoke. Mais pour éviter une panne de leur système de vols long-courriers de ravitaillement, elles doivent maintenir ouvertes les routes qui ne sont pas rentables. Cela les rend, dans la plupart des cas, dépendantes aux aides de l’État. La question est de savoir combien de temps cette stratégie peut être maintenue et combien de temps les contribuables seront prêts à couvrir les pertes.</p>
<p>Il n’est pas étonnant que certaines CATR redécouvrent les voyages de vacances avec leurs offres point à point. « Jamais auparavant nous n’avions inclus autant de nouvelles destinations de vacances dans notre programme. C’est notre réponse aux souhaits de nos clients », explique par exemple Harry Hohmeister, membre du conseil d’administration de la Deutsche Lufthansa AG.</p>
<h2>Et qu’en est-il du « flight-shaming » ?</h2>
<p>La prise de conscience croissante de l’impact environnemental a conduit à faire naître en Suède un mouvement de <em>flygskam</em> (en anglais <em><a href="https://theconversation.com/flight-shaming-how-to-spread-the-campaign-that-made-swedes-give-up-flying-for-good-133842">flight shaming</a></em>) visant à éviter les voyages en avion qui a désormais largement dépassé les frontières du royaume.</p>
<p>Or, certains signes indiquent également que les mesures liées au confinement, en réponse au Covid-19, ont augmenté l’envie des citoyens d’adopter un mode de vie plus calme. Cela soulève des questions sur le mode de vie cosmopolite que les classes moyennes ont si facilement adopté. Ce point reste aujourd’hui au cœur des préoccupations des acteurs de l’aérien même si son influence réelle sur le comportement des consommateurs reste difficile à mesurer.</p>
<p>En résumé, il ressort de nos travaux que ces quatre facteurs de changement annoncent une transition plus radicale dans le transport aérien que dans d’autres secteurs. S’il faut rester prudent dans les anticipations tant les incertitudes restent importantes, il semble que les scénarios de l’après-Covid se dessineront autour de ces 4 éléments. L’étude de ces différents scénarios possibles fera justement l’objet de la poursuite de notre projet de recherche.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151150/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>René Rohrbeck ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Selon les acteurs du secteur aéronautique, l’après-Covid sera notamment marquée par une forte diminution des voyages d’affaires ou encore par une régionalisation des lignes.René Rohrbeck, Professeur de Stratégie, EDHEC Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1456012020-09-10T13:14:43Z2020-09-10T13:14:43ZL’annulation de vols régionaux d’Air Canada affaiblit les communautés éloignées. Il faut repenser le transport régional<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/356614/original/file-20200904-14-p2n1pa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La vue par le hublot d’un avion faisant le trajet Vancouver-Calgary en juin 2020.</span> <span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Jonathan Hayward</span></span></figcaption></figure><p>Comme le reste de l’industrie aéronautique mondiale, Air Canada <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1723492/air-canada-pertes-deuxieme-trimestre-covid-19-pandemie">a été durement frappée</a> par la pandémie de Covid-19 et elle a dû <a href="https://www.lapresse.ca/affaires/entreprises/2020-06-30/air-canada-accuse-d-abandonner-les-regions.php">mettre fin à 30 lignes régionales</a> au début de l’été.</p>
<p>Au Québec, <a href="https://www.lapresse.ca/affaires/entreprises/2020-06-30/air-canada-accuse-d-abandonner-les-regions.php">Gaspé, Mont-Joli, Sept-Îles, Baie-Comeau et Val-d’Or perdent leur liaison avec Montréal</a>.</p>
<p>Il se pourrait que d’autres réductions soient annoncées dans les prochains mois.</p>
<p>Il s’agit d’une catastrophe pour plusieurs communautés canadiennes éloignées, car cela menace leur droit d’être connectées au système de transport national et compromet gravement leur développement économique.</p>
<p>La crise de la Covid-19 est l’occasion de repenser la politique de transports de notre pays. Elle nous oblige également à évaluer si l’économie de libre marché constitue réellement le meilleur mécanisme pour structurer le transport aérien dans un pays caractérisé par de grandes distances et une faible densité de population.</p>
<h2>La déréglementation</h2>
<p>La déréglementation du transport aérien a commencé aux États-Unis <a href="https://www.airlines.org/blog/40-years-later-how-the-airline-deregulation-act-came-to-pass-part-ii/">sous le président Jimmy Carter</a> à la fin des années 1970. Le Canada n’a pas échappé à ce mouvement : Air Canada est restée une <a href="https://thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/societe-detat">société d’État</a> jusqu’en 1988, quand elle est devenue une société cotée en bourse.</p>
<p>Il est remarquable qu’en dépit du changement radical de sa structure de propriété, Air Canada soit considérée par de nombreux Canadiens comme la compagnie aérienne nationale. Cependant, la manière cavalière dont <a href="https://www.journaldequebec.com/2020/07/02/air-canada-abandonne-les-regions-du-quebec">l’entreprise a annoncé la suspension de ses services régionaux</a> – certaines autorités locales <a href="https://www.cbc.ca/news/canada/sudbury/northbay-airport-mcdonald-reax-1.5634329">ont appris la mauvaise nouvelle dans les médias</a> – a rappelé de façon non équivoque qu’<a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-540-70818-6_14">Air Canada n’a de comptes à rendre</a> qu’à ses actionnaires. Le développement régional ne fait pas partie de sa mission.</p>
<p>En fait, les actionnaires d’Air Canada ont probablement été satisfaits de la décision de réduire les liaisons régionales et accueilleraient favorablement des annulations supplémentaires si elles permettaient de limiter les pertes financières.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="A woman uses an Air Canada self-service kiosk." src="https://images.theconversation.com/files/356193/original/file-20200903-22-1wa94of.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=736%2C57%2C3356%2C2651&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/356193/original/file-20200903-22-1wa94of.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/356193/original/file-20200903-22-1wa94of.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/356193/original/file-20200903-22-1wa94of.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/356193/original/file-20200903-22-1wa94of.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/356193/original/file-20200903-22-1wa94of.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/356193/original/file-20200903-22-1wa94of.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une passagère utilise une borne d’enregistrement libre-service d’Air Canada à l’aéroport international Trudeau de Montréal le 31 juillet 2020.</span>
<span class="attribution"><span class="source">THE CANADIAN PRESS/Paul Chiasson</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La déréglementation du transport aérien a entraîné la création du <a href="https://lesvolsdalexi.com/blog/quest-ce-quune-plateforme-de-correspondance-aeroportuaire/">« système en étoile »</a> : de grandes entreprises choisissent un aéroport comme base, ou pivot, où des vols régionaux transportent des passagers depuis des aéroports secondaires. Le système en étoile protège les anciens transporteurs des nouveaux arrivants, surtout parce que leurs clients ont accès à des réseaux continus vers l’international.</p>
<p>Malgré la menace que les transporteurs à bas prix ont commencé à représenter à la fin des années 1990 et au début des années 2000, le système en étoile se porte très bien aujourd’hui. La principale raison pour laquelle une société comme Air Canada propose des liaisons entre les Îles de la Madeleine et Montréal ou entre Deer Lake et St. John’s, Terre-Neuve, c’est pour alimenter les aéroports-pivots que sont Montréal et Toronto.</p>
<h2>Prêts à perdre de l’argent</h2>
<p>En période de croissance économique, lorsque les vols internationaux sont rentables, les grands transporteurs sont prêts à perdre de l’argent sur les liaisons régionales dans l’espoir de mettre la main sur les voyageurs des régions qui se rendent vers des destinations internationales.</p>
<p>Cependant, la pandémie de Covid-19 a rendu impossible sur le plan financier pour Air Canada de continuer à offrir toutes ses lignes régionales, ce qui a mis en lumière les limites d’un marché du transport aérien déréglementé dans un pays comme le nôtre.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/356198/original/file-20200903-24-ppcpy1.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C0%2C5845%2C3695&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/356198/original/file-20200903-24-ppcpy1.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/356198/original/file-20200903-24-ppcpy1.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/356198/original/file-20200903-24-ppcpy1.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/356198/original/file-20200903-24-ppcpy1.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/356198/original/file-20200903-24-ppcpy1.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/356198/original/file-20200903-24-ppcpy1.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">En mai 2020, au beau milieu de la pandémie de Covid-19, les pare-brise d’avions d’Air Canada Express garés à l’aéroport international d’Ottawa sont couverts.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Justin Tang</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous avons réalisé d’importants projets de recherche pour le ministère des Transports du Québec en <a href="http://www.bv.transports.gouv.qc.ca/mono/0964863.pdf">2008</a> et en <a href="http://www.bv.transports.gouv.qc.ca/mono/1235137.pdf">2019</a>, en plus d’aider le gouvernement du Québec à préparer le <a href="http://www.fil-information.gouv.qc.ca/Pages/Article.aspx?idArticle=2602023653">Sommet sur le transport aérien régional de 2018</a>. Nous connaissons donc très bien les enjeux du transport aérien régional dans notre pays, lesquels sont exacerbés par la position de quasi-monopole dont jouit Air Canada.</p>
<p>Comme les autres gouvernements provinciaux, le Québec n’a aucune autorité sur la réglementation du transit aérien chez lui. Cependant, la province offre certains programmes qui visent à atténuer l’impact négatif de la situation quasi monopolistique.</p>
<p>Ces programmes ont toutefois eu des résultats mitigés.</p>
<p>Ainsi, seulement six pour cent des personnes vivant dans des communautés éloignées que nous avons interrogées en 2019 ont indiqué avoir bénéficié du <a href="https://www.transports.gouv.qc.ca/fr/aide-finan/usagers-transports/programme-reduction-tarifs-aeriens/Pages/reduction-tarifs-aeriens.aspx">Programme de réduction des tarifs aériens</a> du Québec pour voyager sur un vol régional. Cette initiative a été conçue pour rendre les vols régionaux plus abordables.</p>
<h2>Recommandations</h2>
<p>Nos travaux de recherche nous ont amenés à formuler un certain nombre de recommandations stratégiques, notamment la mise en place de conditions qui permettraient aux petits transporteurs de prospérer et d’affaiblir la position monopolistique d’Air Canada.</p>
<p>Il nous est apparu clairement, lors de sondages ou d’entretiens avec des personnes vivant dans des communautés isolées, que les voyageurs <a href="http://www.cjrs-rcsr.org/V33/2/6DOSTALER-TOMBERLIN.pdf">ignorent souvent qu’il existe d’autres options</a> qu’Air Canada. Il serait relativement facile pour les gouvernements provinciaux d’organiser des campagnes de marketing pour promouvoir les attractions touristiques régionales en même temps que le service aérien offert par les petites entreprises de transport.</p>
<p>Les participants aux consultations menées en préparation du Sommet sur le transport aérien régional de 2018 ont même suggéré la mise en place d’un programme de fidélisation régional ou la création d’une marque ombrelle (similaire aux réseaux de compagnies aériennes comme Star Alliance) sous laquelle les transporteurs régionaux pourraient être regroupés.</p>
<p>L’établissement d’un prix plancher pour empêcher Air Canada de s’engager dans une guerre des prix que les petits transporteurs régionaux ne pourront jamais remporter ainsi que la suppression des taxes de vente provinciales sur les vols offerts par les petits transporteurs pourraient être des pistes de solution pour renforcer la durabilité du réseau de transport aérien régional.</p>
<h2>Rendre les régions plus attrayantes</h2>
<p>Certaines communautés éloignées dont nous avons entendu parler lors de notre recherche se sont distinguées par leurs efforts pour stimuler leur économie locale et développer le tourisme afin de rendre leur région attrayante pour les transporteurs aériens.</p>
<p>D’autres communautés ont fait valoir que le transport aérien régional devrait être considéré comme un service public et subventionné de la même manière que le transport public urbain. Mais il est irréaliste de penser que l’on pourrait subventionner entièrement le transport aérien régional, car les déplacements vers et depuis les communautés éloignées sont dispendieux et ne peuvent être entièrement payés par les contribuables.</p>
<p>Le libre marché menace actuellement le droit au transport des gens qui vivent dans des communautés éloignées ainsi que leur vitalité économique. Il serait grand temps d’instaurer des politiques fédérales, provinciales et municipales pour créer une synergie entre le développement économique et touristique ainsi que la mobilité durable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/145601/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Dostaler a reçu un financement du ministère des Transports du Québec.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mohamed Khomsi reçoit des fonds du ministère du Transport du Québec.</span></em></p>Une catastrophe menace les communautés éloignées après qu’Air Canada a annulé 30 liaisons régionales. Elle menace les droits de tous les Canadiens à être connectés au système de transport national.Isabelle Dostaler, Dean of the Faculty of Business Administration, Memorial University of NewfoundlandMohamed Khomsi, Professor, Tourism Governance, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1333902020-06-01T17:21:12Z2020-06-01T17:21:12ZCrashs, conception défectueuse, crise aérienne… Le Boeing 737 Max revolera-t-il un jour ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/322426/original/file-20200323-112657-1w4be5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C4%2C1093%2C726&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le rapport préliminaire accablant de la commission d'enquête du Congrès américain rend improbable le retour du 737 Max dans le ciel.</span> <span class="attribution"><span class="source">Boeing / Craig Larsen / DR</span></span></figcaption></figure><p>Le 27 mai, Boeing a annoncé avoir <a href="https://www.theverge.com/2020/5/27/21272478/boeing-737-max-resumes-production">repris la production</a> du 737 Max, arrêtée en janvier. L’avionneur a ainsi annoncé dans un <a href="https://boeing.mediaroom.com/news-releases-statements?item=130685">communiqué</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Le programme 737 a recommencé à produire des avions à un rythme faible, tout en mettant en place plus d’une douzaine d’initiatives axées sur l’amélioration de la sécurité de l’environnement de travail et de la qualité des produits. »</p>
</blockquote>
<p>Alors que Boeing souhaitait une remise en service mi-2020, l’aviation civile n’a pas encore donné son autorisation. Cet objectif ne sera donc pas atteint et la date devrait être encore reportée. Aux vues des nombreuses difficultés rencontrées, il paraît légitime de se demander si cette autorisation sera donnée un jour.</p>
<p>Il y a un peu plus d’un an, le 10 mars 2019, un <a href="https://www.youtube.com/watch?v=nOIfgmp5Mic">Boeing 737 Max s’écrasait</a> six minutes après son décollage faisant 157 victimes. Ce crash du vol d’Ethiopian Airlines intervenait quelques semaines après <a href="https://www.youtube.com/watch?v=glroNHUZD28">celui du vol de Lion Air en Indonésie</a> dans lequel 189 personnes avaient péri, impliquant lui aussi un Boeing 737 Max. Ces deux catastrophes aériennes conduisent en quelques jours à une interdiction de vol mondiale des 350 Boeing 737 Max en circulation. Depuis, une <a href="https://transportation.house.gov/committee-activity/boeing-737-max-investigation">enquête a été lancée par les autorités américaines</a>, les dirigeants de Boeing ont été auditionnés et des lanceurs d’alerte ont dévoilé des informations cruciales.</p>
<p>Alors que cette enquête est toujours en cours, le <a href="https://transportation.house.gov/imo/media/doc/TI%20Preliminary%20Investigative%20Findings%20Boeing%20737%20MAX%20March%202020.pdf">rapport préliminaire de la commission des transports du Congrès américain</a> considère que les contrôles pour la certification du Boeing 737 Max par la FAA (Federal Aviation Administration) étaient <a href="https://www.cnbc.com/2020/03/06/house-investigation-finds-boeings-737-max-was-marred-by-technical-problems-lack-of-transparency.html">largement insuffisants</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/IYMzIwklwgo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Les enquêteurs publient un rapport sur le crash du 737 Max de Boeing » (ABC News, mars 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>L’agence gouvernementale de réglementation américaine a <a href="https://www.reuters.com/article/us-boeing-737max/u-s-house-panel-faults-faa-review-of-boeing-737-max-plane-design-failures-idUSKBN20T2EL">failli à sa mission</a> d’identifier les problèmes de sécurité de l’avion qui est devenu le best-seller du constructeur américain. Pire encore, après le premier crash de Lion Air en Indonésie, la FAA n’aurait <a href="https://www.nytimes.com/2019/04/02/world/asia/boeing-max-8-lion-air.html">pas pris en considération certaines données alarmantes</a> qui auraient dû conduire à une interdiction de vol immédiate, jouant ainsi avec la sécurité des passagers.</p>
<h2>Une accumulation de dysfonctionnements</h2>
<p>La responsabilité de Boeing est directement engagée, le 737 Max étant qualifié de « fondamentalement défectueux et dangereux », et le groupe aillant fait preuve <a href="https://www.theguardian.com/business/2020/mar/06/boeing-culture-concealment-fatal-737-max-crashes-report">« d’une culture de la dissimulation »</a>. Encore aujourd’hui, le site Internet de Boeing présente le 737 Max comme <a href="https://www.boeing.com/commercial/737max/">« conçu pour proposer la plus grande flexibilité, fiabilité et efficacité »</a>. Ce n’est visiblement pas l’avis de la commission du Congrès américain qui affirme que la conception du 737 Max a principalement été guidée par des préoccupations économiques. Une succession de mauvaises décisions ont abouti à la production d’un avion dont le design est un échec et dont les <a href="https://transportation.house.gov/imo/media/doc/TI%20Preliminary%20Investigative%20Findings%20Boeing%20737%20MAX%20March%202020.pdf">dysfonctionnements ont conduit aux deux crashs</a>.</p>
<p>Alors que Boeing préparait le <a href="https://leehamnews.com/2019/03/20/boeing-didnt-want-to-re-engine-the-737-but-had-design-standing-by/">lancement d’un nouveau modèle d’avion</a> pour <a href="https://theconversation.com/airbus-again-becomes-the-worlds-leading-aircraft-manufacturer-129595">concurrencer Airbus</a>, le groupe américain a préféré gagner du temps en <a href="https://www.challenges.fr/entreprise/pourquoi-airbus-a-vise-juste-avec-l-a320-neo_138918">copiant son concurrent européen</a>. Le choix a été fait de faire évoluer un ancien modèle afin de contrer le plus rapidement possible <a href="https://pdfs.semanticscholar.org/7f06/f0d938e0724eff3f6552e2b63056f5b65e60.pdf">Airbus et les innovations de l’A320neo</a> qui ont diminué de 15 à 20 % sa consommation de carburant. Boeing a remotorisé le 737 NG, avec des moteurs plus grands, positionnés plus haut et plus loin, car la cabine est relativement proche du sol.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/p7d__yk0Phc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">737 Max et l’A320neo : la plus grande rivalité de l’histoire de l’aviation (WSJ).</span></figcaption>
</figure>
<p>Ces modifications ont complètement <a href="https://www.cnet.com/news/boeing-737-max-8-all-about-the-aircraft-flight-ban-and-investigations/">altéré l’aérodynamique de l’avion</a> qui peut pointer du nez vers le haut dans certaines conditions de vol. C’est ce qui a nécessité de mettre en place un <a href="https://theconversation.com/boeing-737-max-air-safety-market-pressures-and-cockpit-technology-113580">nouveau système de contrôle de stabilité pour rabaisser le nez de l’avion</a> : le MCAS (<em>Maneuvering Characteristics Augmentation System</em>).</p>
<p>Selon le rapport préliminaire, la conception du Boeing 737 Max repose dès l’origine sur des « hypothèses erronées » et de <a href="https://www.flightglobal.com/airframers/congress-slams-boeing-and-faa-for-alleged-737-max-failures/137131.article">mauvaises décisions</a>. Par exemple, le MCAS ne fonctionne que sur la base des informations d’un <a href="https://theconversation.com/boeing-737-max-air-safety-market-pressures-and-cockpit-technology-113580">seul capteur d’incidence</a>, également appelé capteur d’angle d’attaque (AOA), sans tenir compte d’un dysfonctionnement potentiel, ce qui va <a href="https://www.youtube.com/watch?v=0jTN0JD4I5M">à l’encontre des règles de bases de l’ingénierie aéronautique</a>.</p>
<p>Dès son lancement, le programme a été précipité en raison de la <a href="https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/20140925trib4972c154a/l-a320-neo-l-innovation-d-airbus-qui-a-dicte-sa-loi-a-boeing.html">compétition avec l’A320neo</a>, ce qui a conduit à des délais intenables et à une réduction des coûts drastique. Boeing a diminué de plusieurs milliers d’heures les temps de développement et de tests. Pour la commission d’enquête, c’est cette pression financière et la volonté d’atteindre des objectifs extrêmes qui ont abouti à la <a href="https://www.flightglobal.com/airframers/congress-slams-boeing-and-faa-for-alleged-737-max-failures/137131.article">mise en péril des passagers potentiels</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Zlz3Cu2lTXI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Boeing toujours en panne un an après les crashs du 737 Max (Money Talks, 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>La performance et la productivité ont donc été favorisées au détriment de la sécurité sur ce marché hyperconcurrentiel. Les plaintes répétées des ingénieurs de Seattle qui ont dénoncé une <a href="https://www.researchgate.net/profile/Murillo_Dias/publication/339018537_CRASHED_BOEING_737-MAX_FATALITIES_OR_MALPRACTICE/links/5e3a53fea6fdccd96587f5eb/CRASHED-BOEING-737-MAX-FATALITIES-OR-MALPRACTICE.pdf">timeline irréaliste</a> n’y ont rien changé.</p>
<h2>Des négligences internes et externes</h2>
<p><a href="https://www.theguardian.com/business/2020/mar/06/boeing-culture-concealment-fatal-737-max-crashes-report">Des informations critiques auraient été dissimulées</a> à la FAA, mais aussi aux compagnies aériennes et aux pilotes. Ces derniers n’étaient pas au courant de l’existence du système MCAS supposé fonctionner sans leur intervention et donner l’illusion que le 737 Max se comporte comme un autre 737, ce qui n’est pas le cas sans assistance logicielle.</p>
<p>Pour réduire les coûts des compagnies aériennes dont les pilotes connaissent les anciens modèles, la <a href="https://youtu.be/QvUpSFGRqEo">formation prévue dure moins de deux jours</a>, sans simulateur de vol, et est centrée sur les différences entre le 737 NG et le 737 Max. Plusieurs compagnies qui souhaitaient avoir recours au simulateur en <a href="https://fortune.com/2020/01/10/designed-clowns-supervised-monkeys-internal-boeing-messages-slam-737-max/">ont été dissuadées par Boeing</a>.</p>
<p>En mars 2020, les autorités canadiennes ont découvert que certains pilotes d’essais avaient <a href="https://airlinerwatch.com/canadian-government-ignored-concerns-of-test-pilots-during-the-approval-of-737-max/">informé le ministère des Transports</a> des défaillances du MCAS dès 2016. Pourtant, malgré l’absence de réponde des autorités fédérales américaines, le Canada a certifié le 737 Max, se soumettant aux décisions des États-Unis et de la FAA. En 2018, des pilotes américains avaient <a href="https://edition.cnn.com/2019/03/13/us/pilot-complaints-boeing-737-max/index.html">rapporté des incidents graves</a> sur une base de données de la NASA. L’activation du pilotage automatique <a href="https://www.abc.net.au/news/2019-03-13/737-max-pilots-reported-two-control-issues-in-2018-to-nasa/10895542">ferait plonger l’avion</a> en quelques secondes.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/qtleUEa8LUY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Des pilotes canadiens avaient alerté sur les dysfonctionnements du système MCAS dès 2016 (KING 5, octobre 2019).</span></figcaption>
</figure>
<p>La même année, un <a href="https://www.aviationtoday.com/wp-content/uploads/2018/11/2018-23-51_emergency.pdf">rapport de la FAA</a> indiquait que les capteurs d’angle d’attaque sont soupçonnés d’être défectueux sur au moins 246 des 330 avions 737 Max en circulation, soit 75 %. Il explique que l’information erronée en provenance des capteurs déclenche une <a href="https://embeddedartistry.com/wp-content/uploads/2019/09/the-boeing-737-max-saga-lessons-for-software-organizations.pdf">commande répétée de piqué de l’avion par le MCAS</a>, qui peut entraîner « des difficultés à contrôler l’avion, une assiette en piqué excessive, et un impact possible avec le relief ».</p>
<p>Le rapport souligne que des défauts de conception technique ont été jugés comme conforme par la FAA ce qui <a href="https://transportation.house.gov/imo/media/doc/TI %20Preliminary %20Investigative %20Findings %20Boeing %20737 %20MAX %20March %202020.pdf">remet en question la qualité des processus de contrôle de l’agence de certification</a>. En effet, « le développement d’un avion de transport commercial conforme à la réglementation de la FAA, mais fondamentalement défectueux et dangereux, met en évidence un système de surveillance de l’aviation qui a désespérément besoin d’être réformé ».</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/0jTN0JD4I5M?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Au cœur du scandale du Boeing 737 Max qui secoue l’aviation (WSJ, mars 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>La FAA a été la <a href="https://theconversation.com/boeing-737-max-air-safety-market-pressures-and-cockpit-technology-113580">dernière agence nationale à réagir aux deux crashs</a>, sous la pression du Canada, avec beaucoup de réticences et deux jours après que la Chine interdise les 737 Max de vol. Pourtant, après le premier crash, une <a href="https://www.youtube.com/watch ?v=0jTN0JD4I5M">analyse de risque menée par la FAA</a> montre que sans son intervention ou celle de Boeing, 15 crashs similaires pouvaient se produire dans les 20 prochaines années, faisant du Boeing 737 Max « l’avion le plus dangereux de l’histoire moderne ».</p>
<h2>Une gestion de crise catastrophique</h2>
<p>La manière dont <a href="https://www.suu.edu/hss/comm/masters/capstone/thesis/heine-t.pdf">Boeing a géré cette crise réputationnelle</a> sans précédent est un cas d’école de tout ce qu’il ne faut pas faire en pareille situation. Après les deux catastrophes aériennes, Boeing a accusé les pilotes de fausses manœuvres, <a href="https://www.dw.com/en/us-congress-slams-boeing-in-searing-737-max-report/a-52671917">défendant la thèse de l’erreur humaine</a>. Puis, après la mise en cause du logiciel MCAS, le PDG de Boeing, Dennis Muilenburg, a fait la promesse <a href="https://www.reuters.com/article/us-ethiopia-airplane-boeing/boeing-ceo-says-737-max-software-update-working-as-designed-idUSKCN1RN2QA">qu’un patch allait résoudre le problème</a> en quelques semaines et faire du 737 Max l’avion le plus sûr qui aura jamais volé. Un an après, le 737 Max est toujours cloué au sol.</p>
<p>Au fur et à mesure, les faits parlent contre le PDG. Bien qu’il affirme rester « confiant dans la sécurité fondamentale du 737 Max » ou que « la priorité numéro un de Boeing est la sécurité », ses dénégations le font paraître irresponsable. Son audition devant le Congrès américain est jugée <a href="https://www.challenges.fr/economie/le-patron-de-boeing-fait-profil-bas-devant-le-congres-americain_682333">catastrophique</a>.</p>
<p>Son comportement de fuite et son choix de poursuivre la production malgré tout conduiront à son <a href="https://edition.cnn.com/2019/12/24/business/boeing-dennis-muilenburg-mistakes/index.html">remplacement annoncé très tardivement</a> en décembre 2019. Il part avec un bonus de 62 millions de dollars, ce qui <a href="https://www.washingtonpost.com/business/2020/01/13/plane-crash-victims-families-sickened-by-fired-boeing-ceos-62-million-payout/">scandalise les familles de victimes</a>. Les dissimulations dévoilées progressivement par la presse incrimineront encore plus le groupe et le comportement du top management est pointé du doigt. Le rapport du Congrès ne laisse aucun doute : Boeing est responsable des deux crashs.</p>
<p>Depuis ces crashs, d’autres bugs logiciels ont été identifiés comme des problèmes d’initialisation de systèmes ou de surcharges de données. Trois logiciels différents sont <a href="https://www.theverge.com/2020/2/6/21126364/boeing-737-max-software-glitch-flaw-problem">jugés défaillants</a>. De nouvelles théories remettent en cause la sécurité d’autres éléments de l’avion indépendants de l’aspect logiciel. Des débris métalliques ont été <a href="https://time.com/5789295/fuel-tank-debris-boeing-737/">trouvés dans les réservoirs</a> de 70 % des 737 Max interdits de vol.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/bn-iYbClQZc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Des débris métalliques trouvés dans les réservoirs des Boeing 737 Max (France 24, février 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>Au-delà du 737 Max, c’est tout le groupe qui est passé d’une image d’excellence industrielle à celle d’une entreprise irresponsable et négligente. Boeing a ainsi <a href="https://www.youtube.com/watch ?v=0jTN0JD4I5M">perdu toute crédibilité</a> auprès des autorités de régulation internationales, des compagnies aériennes et de leurs pilotes, du grand public, et de ses propres employés. Sous pression juridique, des documents internes ont été dévoilés par le groupe en janvier 2020. Ils révèlent des comportements irresponsables et des pratiques non éthiques dénoncées par les pilotes de Boeing. Au sujet du 737 Max, l’un deux affirme : <a href="https://fortune.com/2020/01/10/designed-clowns-supervised-monkeys-internal-boeing-messages-slam-737-max/">« Cet avion est conçu par des clowns, qui à leur tour sont supervisés par des singes »</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/EESYomdoeCs?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Comment Boeing a perdu son chemin » (Bloomberg, mars 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>« Que deux avions flambant neufs, d’un tout nouveau modèle, s’écrasent à cinq mois d’écart l’un de l’autre est extraordinaire et sans précédent dans les temps modernes ». Après les deux crashs du 737 Max qui ont fait 346 morts, beaucoup de passagers ont totalement perdu confiance en cet avion : 40 % des voyageurs sont <a href="https://www.washingtonpost.com/business/when-will-boeing-737-max-fly-again-and-more-questions/2019/12/16/251d2b02-2039-11ea-b034-de7dc2b5199b_story.html">prêts à payer plus cher ou à prendre des vols moins pratiques</a> pour éviter le 737 Max. Selon une autre étude, 70 % des américains déclarent qu’<a href="https://www.ccn.com/why-i-will-never-fly-on-a-737-max/">ils hésiteront à voler dans le 737 Max</a> même s’il est à nouveau certifié. Boeing a privilégié ses actionnaires plutôt que ses clients qui l’ont bien compris.</p>
<h2>Des perspectives peu encourageantes</h2>
<p>La vache à lait est morte et le <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm ?abstract_id=3073987">rêve a tourné au cauchemar</a>. Alors que le 737 est le plus grand succès commercial de tous les temps pour un avion et que le Max battait tous les records de commandes, la marque est désormais <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10551-011-0902-1">associée à une catastrophe dans l’esprit des voyageurs</a>. Toute la stratégie de Boeing reposait sur l’explosion du trafic aérien et la réponse aux besoins croissants des compagnies aériennes pour ce type d’avions. Celles-ci ont pour la plupart annulé ou repoussé leurs commandes et, comme si cela ne suffisait pas, la <a href="https://www.nytimes.com/2020/03/17/business/economy/boeing-coronavirus-economy.html">crise du coronavirus a considérablement diminué la demande</a>.</p>
<p>Le Congrès américain a annoncé que son investigation allait se poursuivre et qu’il mettra en place une <a href="https://www.reuters.com/article/us-boeing-737max-usa-regulations/three-u-s-senate-democrats-propose-sweeping-reforms-after-boeing-737-max-crashes-idUSKBN20J2M3">nouvelle réglementation</a> pour corriger les défaillances dans le processus de certification des avions. Si les agences internationales autorisent à nouveau les 737 Max à voler, ce qui sera très difficile, les 387 avions que les compagnies aériennes ont abandonnés sans maintenance depuis plus d’un an devront être nettoyés, passer toute une batterie de tests, et suivre un processus de mise en conformité complexe. Ces étapes prendront deux semaines par avion.</p>
<p>Comme <a href="https://www.reuters.com/article/us-boeing-737max-training/airlines-scour-the-world-for-scarce-737-max-simulators-idUSKBN1ZL0EH">il y a très peu de simulateurs de 737 Max</a>, former les milliers de pilotes nécessaires dans le monde durera des mois. Pour les 400 autres 737 Max que Boeing a produits, il faudra plus d’un an pour les préparer à la livraison.</p>
<p>La suspicion est de mise et l’avalanche de procès à venir ne va pas améliorer l’image du groupe dont la réputation est détruite. <a href="https://www.investors.com/news/boeing-777x-test-flight-797-goes-back-new-clean-sheet-design/">Les reports multiples du vol inaugural du 777X</a> n’ont pas contribué à rassurer les observateurs. Selon les documents internes à Boeing, cet avion a été développé dans les mêmes conditions et selon les mêmes pratiques que le 737 Max. Plutôt que de s’acharner à ressusciter un modèle que personne ne souhaite revoir dans le ciel, Boeing devrait plutôt retrouver les <a href="https://books.google.fr/books ?hl=fr&lr=&id=U1BnDwAAQBAJ&oi=fnd&pg=PA1&dq=boeing+operational+excellence+responsability">pratiques responsables et l’excellence opérationnelle</a> qui ont fait son succès.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/iJCnJPQYAqs?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Après un an au sol, où va le Boeing 737 Max ? » (11Alive, mars 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>Boeing prévoyait une <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/boeing-nouveaux-doutes-sur-la-remise-en-service-du-737-max-1370686">remise en service</a> du 737 Max en juin 2020, mais c’était sans compter sur la plus grande crise de l’histoire de l’aviation. Depuis le début de l’année, ce sont les commandes de plus de 300 737 Max, et 800 tous modèles confondus, qui ont été annulées. Le vol d’essai avec les autorités américaines et canadiennes ne serait toujours pas planifié en raison des contraintes sanitaires. Le 737 Max n’est donc pas près de revoler.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/133390/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Oihab Allal-Chérif ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Négligences, dissimulations, dysfonctionnements multiples… le Boeing 737 Max est jugé « fondamentalement défectueux et dangereux » par le Congrès américain. Comment pourrait-il voler à nouveau ?Oihab Allal-Chérif, Business Professor, Neoma Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.