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ADN – The Conversation
2024-02-28T15:39:07Z
tag:theconversation.com,2011:article/224662
2024-02-28T15:39:07Z
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Une nouvelle étude décortique l’origine des mutations génétiques
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/578622/original/file-20240228-24-a8p97n.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C5%2C1689%2C949&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les arbres accumulent des mutations somatiques au cours de leur croissance. Pour les étudier chez des arbres tropicaux, des grimpeurs, dont Valentine Alt ici sur la photo, ont échantillonné différents échantillons au sein de deux arbres (ici l'angélique).</span> <span class="attribution"><span class="source">Sylvain Schmitt</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>À l’occasion de la parution dans la revue <em>PNAS</em> de <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2313312121">notre article scientifique sur les origines des mutations héritables</a> chez deux espèces d’arbres tropicaux de la forêt guyanaise, plongeons dans le processus fascinant de la mutation. <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2005/09/medsci20052111p969/medsci20052111p969.html">Les mutations</a> sont des modifications accidentelles de l’ADN. Bien qu’accidentelles, les mutations génétiques sont essentielles. En ce sens, la mutation peut même être considérée comme le <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2022/08/msc220076/msc220076.html">terreau de l’évolution</a>. Toutes ces modifications contribuent à accroître la diversité génétique des espèces.</p>
<h2>Les mutations chez les animaux</h2>
<p>Chez les êtres humains, comme chez la majorité des animaux, nous pouvons distinguer deux grands types de mutations : celles qui se produisent sur les lignées cellulaires conduisant à la formation des gamètes (spermatozoïdes et ovules), appelées mutations germinales, et celles qui se produisent sur tous les autres organes, appelées mutations somatiques.</p>
<p>Seules celles se produisant sur les lignées germinales sont héritables chez ces animaux, toutes les autres, dites somatiques, sont donc perdues à chaque génération et n’ont donc <a href="https://www.cairn.info/revue-etudes-sur-la-mort-2003-2-page-43.htm">aucun impact du point de vue de l’évolution</a>.</p>
<p>Les mutations somatiques peuvent avoir différentes origines, soit environnementales en lien avec l’action d’un mutagène (par exemple les <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.aab4082">UVs dans le cas des cellules de la peau</a>), soit intrinsèques, en raison d’une erreur lors de la réplication de l’ADN ou de la réparation d’une de ses cassures. Bien qu’échappant aux règles de l’hérédité, ces mutations peuvent avoir des conséquences importantes pour l’organisme qui les porte, expliquant par exemple la <a href="https://theconversation.com/dou-vient-le-cancer-et-pourquoi-na-t-il-pas-ete-elimine-par-levolution-153428">survenue de certains cancers</a>.</p>
<p>Les mutations germinales sont extrêmement rares, mais ce sont elles qui comptent au regard de l’évolution. Il a été estimé que le taux de mutations des humains est de <a href="https://planet-vie.ens.fr/thematiques/evolution/mecanismes-theories-et-concepts-de-l-evolution/a-quel-rythme-les-mutations-se">l’ordre de 12 mutations par milliard de bases d’ADN par génération</a>, soit environ 75 mutations nouvelles sur l’ensemble du génome en moyenne. Bien que faibles en nombre, ces mutations peuvent être à l’origine de <a href="https://www.20minutes.fr/sciences/983147-20120808-peres-ages-plus-risque-transmettre-maladies-genetiques-enfants">maladies rares très invalidantes voire mortelles</a> chez les enfants, en particulier lorsqu’ils touchent des gènes clés de l’organisme.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/578616/original/file-20240228-20-ee3y3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578616/original/file-20240228-20-ee3y3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578616/original/file-20240228-20-ee3y3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578616/original/file-20240228-20-ee3y3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578616/original/file-20240228-20-ee3y3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578616/original/file-20240228-20-ee3y3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578616/original/file-20240228-20-ee3y3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578616/original/file-20240228-20-ee3y3o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Schéma expliquant la différence de transmissibilité des mutations somatiques entre les modèles dits animaux et végétaux, liée à la différenciation précoce (modèle animal) ou tardive (modèle végétal) de la lignée germinale (germen) au cours du développement.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Thibault Leroy</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<h2>Les mutations chez les végétaux</h2>
<p>Chez la majorité des plantes, en particulier les arbres, l’hypothèse générale est qu’il n’y a pas séparation précoce des lignées cellulaires produisant les gamètes et les autres organes. En effet, la production de tous les organes est assurée par les méristèmes, une population de cellules embryonnaires qui assure la croissance des plantes sur les différents axes de croissance (tronc, branches, racines, etc.). Les cellules reproductives (le pollen et les ovules) sont produites par ces mêmes tissus au bout des axes de croissance, typiquement au niveau des fleurs chez les plantes à fleurs.</p>
<p>La conséquence de cette différenciation tardive des cellules germinales est qu’une mutation se produisant au sein des méristèmes, à un moment donné entre des millions et des millions de divisions cellulaires d’un arbre de plusieurs dizaines de mètres de haut, a <em>in fine</em> une chance d’être transmise à la génération suivante. Par rapport aux animaux, où il n’y a pas que les mutations somatiques non héritables et mutations germinales héritables, les plantes présentent aussi une autre classe : les mutations somatiques héritables. La mutation est d’origine somatique, apparaissant à un moment donné au cours de la croissance de l’arbre, mais dispose d’une probabilité d’être transmise aux descendants.</p>
<p>À la différence des animaux où, étant donné les implications médicales majeures (cancers, maladies rares notamment), la mutation a été plus étudiée, les connaissances sur les mutations des plantes sont très parcellaires. Depuis la publication de la <a href="https://hal.science/hal-02402748/">séquence du génome du chêne</a> en 2018, nous savons que ce type de mutation existe, puisque nous avions démontré l’existence de mutations somatiques transmises, en identifiant des mutations somatiques au sein d’un chêne près de Bordeaux et en les retrouvant au cœur du génome des embryons de certains fruits, prouvant ainsi la <a href="https://hal.science/hal-02402748/">transmission de ces mutations somatiques à la génération suivante</a>. Ce résultat a ensuite été confirmé par Long Wang et son équipe sur un autre arbre, le <a href="https://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.3000191">pêcher du Tibet</a>. En ce qui concerne l’origine des mutations, leur accumulation et la fréquence de leur transmission, les inconnues restent majeures chez les plantes. Toutefois, différentes hypothèses prédominent.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/578655/original/file-20240228-22-ekmbsz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578655/original/file-20240228-22-ekmbsz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578655/original/file-20240228-22-ekmbsz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=910&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578655/original/file-20240228-22-ekmbsz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=910&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578655/original/file-20240228-22-ekmbsz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=910&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578655/original/file-20240228-22-ekmbsz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1143&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578655/original/file-20240228-22-ekmbsz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1143&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578655/original/file-20240228-22-ekmbsz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1143&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Sélection des branches à échantillonner dans la couronne du Grignon franc.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Hadrien Lalagüe</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>La première hypothèse, qui est relativement intuitive, est que les arbres de par leur besoin en lumière pour la photosynthèse sont exposés aux UVs. Une hypothèse forte est que les UVs sont un agent mutagène important des plantes, à l’image de ce qui est déjà bien décrit de l’impact des <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.aab4082">UVs sur les cellules de la peau humaine</a>.</p>
<p>La seconde hypothèse fréquemment avancée est que les mutations somatiques héritables offriraient un excès de mutations avantageuses aux plantes. L’idée est que les plantes pourraient acquérir de nombreuses mutations somatiques avantageuses et ainsi s’adapter « en temps réel » à leurs environnements, ce qui pourrait être particulièrement avantageux pour des espèces à très longue espérance de vie. Cette hypothèse particulièrement panglossienne de l’évolution des plantes s’est beaucoup appuyée sur une interprétation des <a href="https://hal.science/hal-02402748/">premiers travaux sur les mutations somatiques des chênes</a>. Elle a été très largement relayée par des magazines de vulgarisation scientifique tels que <a href="https://www.science-et-vie.com/article-magazine/chaque-arbre-cache-une-foret">Science & Vie</a> ou <a href="https://www.uniqueheritage.fr/fr/epsiloon-le-nouveau-magazine-dactualite-scientifique-en-kiosque-le-23-juin-2021/">Epsiloon</a>, et même par la prestigieuse <a href="https://societebotaniquedefrance.fr/livre-blanc-sur-lintroduction-dessences-exotiques-en-foret/">société botanique de France</a>.</p>
<p>Comme auteurs de <a href="https://hal.science/hal-02402748/">l’article sur les chênes</a>, nous avons alerté sur le fait qu’il s’agissait d’une interprétation erronée de nos travaux et que cette hypothèse était peu vraisemblable, par exemple dans un article publié récemment dans <a href="https://theconversation.com/changement-climatique-la-diversite-genetique-a-lorigine-de-ladaptation-des-arbres-203093">The Conversation</a>. Bien que peu vraisemblable, cette hypothèse nécessite néanmoins d’être rigoureusement testée.</p>
<p>La troisième et dernière hypothèse est plus subtile et tacite. Elle nécessite de comprendre qu’un méristème est une population de cellules embryonnaires assurant la croissance des plantes. Au sein de celui-ci, une seule cellule va muter. Au regard de l’ensemble des cellules du méristème, la mutation apparaît donc en fréquence très faible. Ces mutations rares <a href="https://www.inrae.fr/actualites/detecter-mutations-arbres-laide-dune-methode-utilisee-medecine-humaine">ont longtemps été ignorées</a> par omission ou méconnaissance de la structure des méristèmes et pour des raisons méthodologiques. L’hypothèse tacite était donc que les mutations rares étaient négligeables, notamment pour la transmission à la descendance.</p>
<h2>Un pas supplémentaire vers la compréhension du processus de mutation chez les végétaux</h2>
<p>Afin de pouvoir tester ces différentes hypothèses, nous nous sommes intéressées à deux espèces tropicales présentes dans la forêt tropicale guyanaise, choisies pour leur importance écologique et économique locale : l’angélique (<em>Dicorynia guianensis</em>) et le grignon franc (<em>Sextonia rubra</em>). <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2313312121">Notre étude</a> s’est focalisée sur des espèces tropicales afin de pouvoir mieux étudier le rôle des UVs dans l’acquisition des mutations, puisque les tropiques offrent un fort contraste entre les branches à la lumière, qui sont plus exposées aux UVs, et les branches à l’ombre.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/578644/original/file-20240228-9322-udkpmn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/578644/original/file-20240228-9322-udkpmn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/578644/original/file-20240228-9322-udkpmn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=902&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/578644/original/file-20240228-9322-udkpmn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=902&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/578644/original/file-20240228-9322-udkpmn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=902&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/578644/original/file-20240228-9322-udkpmn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1133&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/578644/original/file-20240228-9322-udkpmn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1133&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/578644/original/file-20240228-9322-udkpmn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1133&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Découverte de l’Angélique collectée lors d’une mission dans le sud de la Guyane. Son tronc ressort au milieu du sous bois dense et ombragé de la forêt tropicale guyanaise. De gauche à droite Saint Omer Cazal, Niklas Tysklind, Ilona Clocher.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sylvain Schmitt</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Concrètement, nous avons séquencé des feuilles provenant de différentes branches de deux arbres, dont certaines ont poussé vers la lumière, et d’autres à l’ombre. Contrairement à l’attendu sous l’hypothèse d’un effet des UVs, nous n’avons pas observé un plus grand nombre de mutations au sein des branches exposées à la lumière comparativement aux branches à l’ombre.</p>
<p>Les mutations que nous avons observées ne présentent pas de signatures spécifiques aux UVs, <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.aab4082">contrairement ce qui est décrit dans les cancers de la peau</a>. Ces résultats suggèrent que le rayonnement UV ne serait pas un contributeur aussi important que suspecté dans l’accumulation de mutations chez les plantes. Ces résultats nécessiteront toutefois d’être confortés par de nouvelles études.</p>
<p>Si aucun lien aux UVs n’a été établi, notre étude a permis d’identifier un très grand nombre de mutations somatiques, plus de 15 000 chez l’angélique et plus de 3 000 chez le grignon franc, un nombre bien plus élevé que dans les précédentes études. Ce nombre plus élevé n’est pour autant pas une spécificité des espèces tropicales que nous avons étudiées, puisqu’on a retrouvé des patrons similaires par la réanalyse de données d’espèces tempérées (chênes, hêtre). Ce résultat s’explique par <a href="https://www.inrae.fr/actualites/detecter-mutations-arbres-laide-dune-methode-utilisee-medecine-humaine">l’utilisation de méthodes d’analyse plus sensibles initialement développées pour de la cancérologie humaine</a>.</p>
<p>Bien que nous ayons pu décrire une plus grande diversité que dans les précédentes études, nous n’avons pas trouvé de soutien pour l’hypothèse d’une adaptation en temps réel des plantes. Au contraire, nous avons observé que les mutations qui changent la structure des protéines, sont observées en plus basse fréquence que les mutations ne changeant pas leurs structures (mutations dites synonymes), un résultat qui suggère que les mutations somatiques sont globalement un fardeau, en d’autres termes, qu’elles sont bien plus souvent défavorables qu’avantageuses pour les plantes.</p>
<p>Enfin, nous avons démontré que non seulement les mutations en forte fréquence chez les deux arbres tropicaux peuvent être transmises à la descendance, comme cela avait déjà été démontré chez certains arbres comme le chêne. Mais nous avons montré que les mutations en basse fréquence peuvent aussi l’être. Or, comme les mutations en basse fréquence sont des milliers de fois plus abondantes que les mutations en forte fréquence, les mutations en basses fréquences seraient de nature à expliquer une bien plus forte proportion des mutations transmissibles des plantes. Cela suggère que ce type de mutation, qui est spécifique aux plantes, pourrait être particulièrement important dans l’évolution des plantes.</p>
<p><a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2313312121">Nos travaux</a>, tout autant que d’autres travaux récents, à la fois chez les animaux ou chez les végétaux, permettent de décrire un <a href="https://ecoevorxiv.org/repository/view/5943/">lien beaucoup plus complexe qu’actuellement supposé entre la croissance des plantes, leur vieillissement et le nombre de mutations, notamment héritables</a>. Nos travaux sont de nature à montrer la subtilité du processus de mutation, et la nécessité de financer et conduire plus d’études fondamentales sur ce sujet.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/224662/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>
Une étude venant de paraître s’intéresse aux mécanismes spécifiques des mutations chez les végétaux et permet de mieux les comprendre.
Thibault Leroy, Biologiste, chercheur en génétique des populations, Inrae
Myriam Heuertz, généticienne des populations, Inrae
Niklas Tysklind, Chargé de Recherche en Écologie Évolutive, Inrae
Sylvain Schmitt, Chercheur en écologie forestière tropicale et changement climatique, Cirad
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/222822
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Où, quand et comment la syphilis est-elle apparue ? La réponse est dans l’ADN ancien
<p>Il est rare que l’on dispose de données historiques aussi précises sur l’origine d’une maladie infectieuse que celles qui existent sur la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Syphilis">syphilis</a> : en 1493, lors du siège de la ville de Naples par les troupes françaises. De là, la syphilis s’est rapidement propagée en Europe et en Asie, provoquant l’une des épidémies les plus dévastatrices pour l’humanité pendant plusieurs siècles. Cette épidémie prendra fin grâce à la pénicilline, qui permettra au XX<sup>e</sup> siècle de la traiter de manière efficace.</p>
<p><em>(La syphilis est une infection sexuellement transmissible très contagieuse qui est due à la bactérie Treponema pallidum. Si elle n’est pas dépistée et traitée, elle peut affecter tous les organes et avoir de graves conséquences, indique <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/infections-sexuellement-transmissibles/syphilis">Santé publique France</a>, ndlr.)</em></p>
<p>La coïncidence temporelle entre le retour des Amériques de la première expédition de Christophe Colomb et certaines infections chroniques indirectes ont conduit à l’hypothèse selon laquelle cette maladie serait originaire du continent américain. Des travaux de recherche <a href="https://link.springer.com/article/10.1038/s41586-023-06965-x">que nous venons de publier dans la revue <em>Nature</em></a>, basés sur des squelettes provenant d’une nécropole vieille de 2 000 ans à Jabuticabeira (Brésil), pourraient éclairer cette controverse.</p>
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<h2>Génomes anciens et phylogénies modernes</h2>
<p>En collaboration avec des chercheurs des universités de Zurich, Bâle, Vienne, ETH Zurich, Autónoma de Barcelona et São Paulo, nous présentons l’analyse d’un génome de la bactérie <em>Treponema pallidum</em> obtenu à partir d’échantillons vieux de 2 000 ans provenant d’un monticule funéraire de la côte sud du Brésil (Jabuticabeira, Santa Catarina).</p>
<p>Ce génome, de grande qualité pour un génome aussi ancien, appartient au même groupe que les génomes modernes de <em>T. pallidum endemicum</em> (TEN), la lignée responsable du bejel, une infection actuellement limitée aux zones chaudes et arides et jusqu’alors non décrite dans les Amériques. Cette lignée, tout comme <em>T. pallidum pertenue</em> (TPE), responsable d’une autre infection tréponémique tropicale appelée pian, est étroitement liée à la lignée responsable de la syphilis, <em>T. pallidum pallidum</em> (TPA).</p>
<p><em>(Le bejel et le pian sont d’autres pathologies de la <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/syphilis/definition-evolution-transmission">famille des tréponématoses</a>, comme la syphilis. Toutefois, leurs modes de transmission diffèrent. En effet, le bejel et le pian se transmettent par contact avec des lésions cutanées ou muqueuses, ndlr.)</em></p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/571301/original/file-20240124-15-3bmfyz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/571301/original/file-20240124-15-3bmfyz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571301/original/file-20240124-15-3bmfyz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1550&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571301/original/file-20240124-15-3bmfyz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1550&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571301/original/file-20240124-15-3bmfyz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1550&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571301/original/file-20240124-15-3bmfyz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1948&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571301/original/file-20240124-15-3bmfyz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1948&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571301/original/file-20240124-15-3bmfyz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1948&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La syphilis selon Alberto Durero.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.historicalresearchupdate.com/stories/science-history-syphilis-and-christopher-columbus/">Wikimedia</a></span>
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<p>L’apparition soudaine de la syphilis à la fin du XV<sup>e</sup> siècle a conduit à l’hypothèse, connue sous le nom d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_syphilis">hypothèse colombienne</a>, d’une origine américaine. Mais ce n’est pas la seule hypothèse.</p>
<p>L’hypothèse précolombienne fait partie des propositions alternatives les plus populaires. D’après cette hypothèse, toutes les tréponématoses auraient accompagné l’humanité depuis ses origines, avec des manifestations différentes au fur et à mesure que ces maladies se répandaient dans différentes régions. On citera aussi l’hypothèse unitaire, qui est une légère variante de l’hypothèse précolombienne, selon laquelle l’apparition des différentes tréponématoses correspond à des adaptations d’une même bactérie à des conditions écologiques différentes.</p>
<p>Jusqu’à présent, ces hypothèses butaient face au manque de données concrètes pour les réfuter ou les valider, étant donné que les lésions cutanées spécifiques de ces maladies ne laissent aucune trace après la décomposition des corps et que les lésions osseuses qu’elles occasionnent sont communes à différentes infections. Cela a conduit à rechercher des traces biologiques de la bactérie dans des restes anciens.</p>
<h2>Utiliser les mêmes techniques que pour les restes de Neandertal</h2>
<p>La bactérie n’a pas été retrouvée jusqu’à présent. Mais grâce aux mêmes techniques de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/sequencage-82916">séquençage</a> que celles appliquées aux restes des <a href="https://www.mpg.de/13894984/neandertal-genome-project">Néandertaliens</a> ou des <a href="https://lejournal.cnrs.fr/articles/un-grand-pere-moderne-pour-les-neandertaliens">Dénisoviens</a>, certains génomes complets de <em>T. pallidum</em> ont été obtenus.</p>
<p>La plupart de ces génomes proviennent de <a href="https://doi.org/10.1016/j.cub.2020.07.058">l’Europe centrale et septentrionale</a> et certains du <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pntd.0006447">Mexique</a>. Mais leur datation ne permet pas d’exclure la possibilité qu’ils datent d’après le retour de Christophe Colomb. Ces génomes appartiennent au même groupe que les lignées TPA et TPE, ce qui laisse ouverte la question de l’origine de la syphilis.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/571417/original/file-20240125-19-9qmtny.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/571417/original/file-20240125-19-9qmtny.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/571417/original/file-20240125-19-9qmtny.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/571417/original/file-20240125-19-9qmtny.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/571417/original/file-20240125-19-9qmtny.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/571417/original/file-20240125-19-9qmtny.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/571417/original/file-20240125-19-9qmtny.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/571417/original/file-20240125-19-9qmtny.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les maladies tréponémiques sont apparues environ 10 000 ans plus tôt qu’on ne le pensait.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Nature</span></span>
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<p>Le nouveau génome étend la portée géographique et temporelle de la distribution de <em>T. pallidum</em> au continent américain à l’époque précolombienne et avant les expéditions vikings qui ont atteint les côtes de l’Amérique du Nord. Notre analyse le place clairement dans la lignée TEN (<em>T. pallidum endemicum, ndlr</em>). En effet, sa faible distance génétique avec les quelques génomes disponibles de cette lignée est surprenante, un détail qui confirme son assignation à cette lignée.</p>
<p>La provenance de ces restes est également surprenante. Aujourd’hui, le bejel se trouve dans des régions chaudes et arides, très différentes sur le plan climatique et écologique, des rivages atlantiques du Brésil subtropical.</p>
<h2>Alors, Christophe Colomb a-t-il joué un rôle dans la propagation de la syphilis ?</h2>
<p>Que nous apprend le nouveau génome sur l’origine de la syphilis ? À la fois peu et beaucoup de choses. Son appartenance à la lignée TEN (<em>T. pallidum endemicum, ndlr</em>) signifie que des bactéries tréponèmes étaient présentes sur le continent américain avant l’arrivée de Christophe Colomb, mais pas nécessairement que l’un d’entre eux ait causé la syphilis.</p>
<p>De manière empirique, toutes les hypothèses énoncées ci-dessus se voient quelque peu renforcées. Les nouvelles datations repoussent légèrement l’origine de la lignée TPA (<em>T. pallidum pallidum, ndlr</em>) à environ 1 000 ans avant J.-C. Mais leur précision pourrait s’améliorer au fur et à mesure que de nouveaux génomes anciens seront intégrés aux analyses.</p>
<p>L’étude des génomes de cette bactérie a révélé la grande plasticité de <em>T. pallidum</em> pour échanger des gènes. En particulier, la lignée TPA a reçu de nombreux apports des autres lignées TPE et TEN.</p>
<p>Il est possible qu’à l’occasion d’un de ces cas de transfert horizontal de gènes, ait été incorporée à une lignée de tréponèmes la capacité de se transmettre plus facilement par voie sexuelle et de provoquer des symptômes inconnus jusqu’alors. Cela a-t-il pu se produire en Europe après le retour de Christophe Colomb ? C’est une possibilité fascinante que nous voulons explorer plus avant.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222822/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fernando González Candelas a reçu des financements du ministère des universités et de la recherche et de la Generalitat Valencia (Conselleria de Educación y Ciencia, Conselleria de Sanidad).</span></em></p>
Les génomes modernes et anciens du « Treponema pallidum », ont permis de situer cette bactérie, dont la lignée est responsable de la syphilis, dans l’Amérique précolombienne.
Fernando González Candelas, Catedrático de Genética. Responsable de la Unidad Mixta de Investigación "Infección y Salud Pública" FISABIO-Universitat de València I2SysBio. CIBER Epidemiología y Salud Publica, Fisabio
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/221331
2024-01-25T14:49:02Z
2024-01-25T14:49:02Z
De la brebis Dolly au singe rhésus : une brève histoire du clonage
<p>Nous venons d’apprendre le <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-023-43985-7">clonage d’une nouvelle espèce de primate, un singe rhésus</a> (<em>Macaca mulatta</em>). Ce travail a été réalisé par une équipe de chercheurs en Chine, le même laboratoire qui, il y a six ans, avait déjà démontré le clonage d’une autre espèce de primate : le <a href="https://montoliu.naukas.com/2018/01/25/21-anos-despues-clonados-los-primeros-macacos-con-el-metodo-usado-para-la-oveja-dolly/">macaque mangeur de crabe</a>. C’est à ce jour les deux seules espèces de primates clonées.</p>
<h2>Dolly, une star de la science</h2>
<p>Cette recherche, ainsi que le mot <em>clonage</em> font immédiatement penser à la brebis Dolly. Si vous demandez à n’importe qui dans la rue s’il connaît Dolly, je suis sûr que la plupart répondront par l’affirmative, car ils ont certainement entendu parler du premier animal cloné à partir de cellules adultes. Cela n’arrive qu’à un petit nombre de recherches scientifiques : les rares qui parviennent à franchir le seuil de l’intérêt spécialisé et à atteindre l’ensemble de la société. Selon moi, il y a un avant et un après dans la popularisation de la science avec Dolly.</p>
<p>La publication dans le magazine <em>Nature</em> de la naissance de Dolly, en <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/9039911">février 1997</a>, a provoqué une multitude de réactions et d’articles, des plus sensés et raisonnables aux plus imaginatifs, craignant que le clonage animal n’atteigne l’homme, ce qui a été rapidement interdit et ne s’est pas produit.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/569633/original/file-20240116-22672-23rk4a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/569633/original/file-20240116-22672-23rk4a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/569633/original/file-20240116-22672-23rk4a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/569633/original/file-20240116-22672-23rk4a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/569633/original/file-20240116-22672-23rk4a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/569633/original/file-20240116-22672-23rk4a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=539&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/569633/original/file-20240116-22672-23rk4a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=539&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/569633/original/file-20240116-22672-23rk4a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=539&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La brebis Dolly a été empaillée et peut maintenant être vue au Musée national d’Écosse à Édimbourg.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Juraj Kamenicky/Shutterstock</span></span>
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<p>Ce qui est certain, c’est que l’équipe de chercheurs écossais du Roslin Institute à l’origine de ce travail a prouvé ce que <a href="https://es.wikipedia.org/wiki/Hans_Spemann">Hans Spemann</a>, embryologiste allemand et lauréat du prix Nobel, avait anticipé 70 ans plus tôt, lorsqu’il avait réalisé une expérience pour montrer que le noyau d’une cellule ne perdait pas ses composants lorsqu’il se transformait en une cellule plus spécialisée. Que tout noyau d’une cellule du corps d’un animal conservait la capacité d’entretenir à nouveau un développement embryonnaire complet, ce qui permettait d’obtenir un <a href="https://montoliu.naukas.com/2017/11/07/la-otra-cara-de-dolly/">animal cloné</a>.</p>
<p>Au cours des années 1950 et 1960, plusieurs chercheurs ont démontré que le clonage était possible, en utilisant différentes espèces d’amphibiens. Les travaux de <a href="https://es.wikipedia.org/wiki/John_Gurdon">John Gurdon</a>, un embryologiste britannique qui a utilisé des grenouilles africaines pour démontrer qu’il pouvait obtenir des animaux adultes à partir des noyaux des cellules intestinales de têtards, sont particulièrement remarquables.</p>
<p>Cependant, le travail a été beaucoup plus long avec les mammifères. Il a fallu attendre plus de 30 ans pour que l’équipe de chercheurs dirigée par <a href="https://montoliu.naukas.com/2023/09/11/fallece-sir-ian-wilmut-investigador-que-posibilito-el-nacimiento-de-la-oveja-dolly/">Ian Wilmut et Keith Campbell</a> annonce au monde la naissance de Dolly.</p>
<h2>Après 300 tentatives</h2>
<p>La technique utilisée pour produire la brebis Dolly était relativement simple. Le matériel génétique d’un ovule a été vidé et le noyau d’une cellule adulte a été inséré. Après une étincelle électrique et l’implantation de l’embryon reconstruit dans l’utérus d’une femelle, un animal cloné a pu être obtenu avec un très faible rendement. Dolly a été la seule brebis née <a href="https://montoliu.naukas.com/2018/01/25/21-anos-despues-clonados-los-primeros-macacos-con-el-metodo-usado-para-la-oveja-dolly/">après près de 300 embryons reconstruits</a>.</p>
<p>Après le mouton, d’autres espèces de mammifères ont été clonées, en adaptant à chaque fois la méthode aux spécificités de la biologie reproductive de chaque espèce, ce qui était loin d’être simple.</p>
<p>Les premières vaches et souris ont été clonées en 1998. Un an plus tard, c’était le tour de la première chèvre. Le premier porc cloné est né en 2000 et deux ans plus tard, c’était un chat et un lapin. En 2003, les premiers clones de rats et de chevaux ont été obtenus, tandis que le chien n’a été cloné qu’en 2005.</p>
<h2>L’heure des primates</h2>
<p>La crainte que la technique du clonage ne parvienne jusqu’à l’homme a progressivement perdu de son intérêt au fur et à mesure que l’on s’apercevait de la difficulté de l’essayer chez les espèces de primates (dont l’humain fait partie). En effet, ce n’est qu’en 2018 qu’une équipe de chercheurs chinois a annoncé le <a href="https://www.cell.com/cell/fulltext/S0092-8674(18)30057-6">clonage du macaque crabier</a>, la même équipe qui vient d’annoncer celui du singe rhésus.</p>
<p>Tant dans l’expérience de 2018 que dans celle en cours, ce laboratoire fait état de <a href="https://montoliu.naukas.com/2018/01/25/21-anos-despues-clonados-los-primeros-macacos-con-el-metodo-usado-para-la-oveja-dolly/">très faibles efficacités de clonage</a>, inférieures à 1 %. Ces résultats sont similaires à ceux obtenus avec Dolly, 27 ans plus tard. Cela confirme qu’il est possible de cloner des primates, mais la méthode reste très inefficace pour une éventuelle utilisation en recherche biomédicale.</p>
<p>De plus, de telles expériences sur les primates non humains sont interdites en Europe, sauf si elles concernent des maladies très graves et mortelles qui nous affectent ou touchent ces espèces.</p>
<h2>Une utilité limitée</h2>
<p>À quoi a donc servi le clonage animal ? Tout d’abord pour étudier les premiers stades du développement embryonnaire des mammifères. <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/medicine/2012/summary/">En 2012, le prix Nobel de médecine</a> a été décerné à John Gurdon, le cloneur de grenouille, et à Shinya Yamanaka, qui a déchiffré les gènes nécessaires pour reprogrammer un noyau de n’importe quelle cellule en cellule souche. Le prix n’a pas reconnu les mérites de l’équipe écossaise responsable de Dolly, probablement en raison d’une série <a href="https://montoliu.naukas.com/2017/11/07/la-otra-cara-de-dolly/">d’incidents malheureux et d’allégations</a> entourant l’expérience, qui était destinée à être l’un des jalons du siècle.</p>
<p>Le clonage d’animaux de ferme (vaches, moutons, chèvres, porcs, lapins…) a permis d’obtenir des animaux génétiquement modifiés d’une manière beaucoup plus simple et efficace, en utilisant des noyaux de cellules génétiquement modifiées précédemment qui ont donné naissance à ces animaux avec la même modification génétique.</p>
<p>Les porcs actuellement utilisés <a href="https://theconversation.com/un-corazon-de-cerdo-late-por-vez-primera-en-el-cuerpo-de-una-persona-174911">pour la xénotransplantation</a> ont été obtenus grâce au clonage. Et aussi de nombreux autres modèles animaux pour l’étude des maladies humaines dans d’autres espèces que la souris, qui était jusqu’alors l’une des rares à pouvoir être facilement modifiée génétiquement.</p>
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Leer más:
<a href="https://theconversation.com/la-revolucion-de-la-biologia-sintetica-ingenieria-para-domesticar-la-complejidad-de-la-vida-202865">La revolución de la biología sintética: ingeniería para domesticar la complejidad de la vida</a>
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<p>Cependant, la pertinence des techniques de clonage a considérablement diminué après 2013, avec l’apparition des <a href="https://theconversation.com/la-crispr-mas-precisa-hasta-la-fecha-convierte-la-tijera-genetica-en-una-navaja-suiza-125696">outils d’édition de gènes CRISPR</a>, capables de modifier le génome de n’importe quel animal d’une manière extrêmement simple et très efficace. Il n’était plus nécessaire d’utiliser des techniques de clonage sophistiquées et peu efficaces pour obtenir des animaux ayant subi certaines modifications génétiques : les outils CRISPR y parvenaient plus facilement et plus directement.</p>
<p>Nous accueillons donc une nouvelle espèce dans le club des mammifères clonés : le singe rhésus, un primate comme nous. Mais une fois de plus, nous constatons la très faible efficacité de la technique, car il est difficile de la reproduire en dehors du laboratoire qui a réalisé cette percée. Dans ce cas, les chercheurs ont dû modifier à nouveau la méthode de clonage, en remplaçant les cellules de l’embryon qui donnera naissance au placenta, pour réussir.</p>
<p>Cette dernière expérience ne fait que nous convaincre, une fois de plus, de l’inutilité, du caractère techniquement inabordable et éthiquement injustifiable, ainsi que de l’illégalité, d’une expérience de clonage sur des êtres humains.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221331/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lluís Montoliu no recibe salario, ni ejerce labores de consultoría, ni posee acciones, ni recibe financiación de ninguna compañía u organización que pueda obtener beneficio de este artículo, y ha declarado carecer de vínculos relevantes más allá del cargo académico citado.</span></em></p>
L’auteur retrace les étapes des techniques de clonage chez les mammifères et rappelle qu’elles restent inefficaces et inutilement applicables à l’homme.
Lluís Montoliu, Investigador científico del CSIC, Centro Nacional de Biotecnología (CNB - CSIC)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/204477
2023-11-26T15:33:15Z
2023-11-26T15:33:15Z
ADN : un atlas pour mieux connaître les régions non codantes
<p>Dans notre génome, seulement environ 1 % est responsable de la production de protéines. Cependant, la majeure partie du génome, souvent appelée génome non-codant, joue également un rôle crucial dans la régulation des gènes. Il contient des séquences d’ADN spéciales appelés régions régulatrices, qui contrôlent quand et où les gènes sont activés ou désactivés dans notre corps.</p>
<p>Il faut imaginer notre génome comme un orchestre avec des milliers de musiciens, chacun représentant un gène. Tous les musiciens ne jouent pas en même temps ou avec la même intensité. Certains musiciens jouent fort dans certaines parties de la partition, tandis que d’autres jouent doucement ou se taisent complètement à différents moments. Les régions régulatrices sont comme les chefs d’orchestre invisibles qui indiquent à chaque musicien quand et comment jouer, et à quelle intensité.</p>
<p>Ces régions régulatrices, bien qu’étant situées en dehors des parties codantes du génome, sont essentielles pour contrôler le fonctionnement des gènes. Elles interagissent avec des facteurs de transcription, des molécules qui se fixent à ces régions régulatrices et influencent l’activité des gènes environnants.</p>
<h2>Des séquences encore mystérieuses</h2>
<p>Cependant, l’identification et la compréhension complètes de ces régions restent encore des défis pour les chercheurs en génomique. Depuis le séquençage du génome humain, et même avant, les scientifiques s’efforcent de démêler ces mystérieuses séquences pour comprendre comment elles contrôlent finement l’expression des gènes.</p>
<p>Ces séquences régulatrices ont été étudiées à l’échelle du génome entier depuis une décennie grâce au développement du séquençage à haut débit, qui a donné lieu à la technique d’immunoprécipitation de la chromatine ChIP-seq.</p>
<p>La technique ChIP-seq, ou immunoprécipitation de la chromatine couplée au séquençage à haut débit, est une méthode puissante utilisée en génomique pour étudier les régions de l’ADN qui contrôlent l’activité de nos gènes. Elle nous permet de découvrir quels acteurs, appelés facteurs de transcription, interagissent avec ces régions spécifiques de l’ADN et comment ces interactions peuvent influencer la façon dont les gènes fonctionnent. Pensez à l’ADN comme un immense puzzle, dont les facteurs de transcription sont des pièces importantes. Ils se lient à des parties spécifiques de l’ADN, un peu comme des aimants qui se fixent à des zones précises.</p>
<p>Ces pièces peuvent allumer ou éteindre les gènes à proximité en fonction de leurs interactions. La technique <a href="https://www.france-genomique.org/expertises-technologiques/regulome/cartographie-des-sites-des-interactions-adn-proteines-chip-seq-2/">ChIP-seq</a> nous permet de découvrir quelles parties de l’ADN sont directement en interaction avec les facteurs de transcription. Cela se fait en isolant ces parties spécifiques de l’ADN liées aux facteurs de transcription, puis en les séquençant pour déterminer leur position exacte dans le génome. En comprenant quelles régions de l’ADN sont liées à quels facteurs de transcription, nous pouvons mieux comprendre comment ces interactions influencent la régulation des gènes. Cela nous aide à comprendre les mécanismes qui contrôlent la croissance, le développement, le fonctionnement de notre système immunitaire et d’autres processus biologiques.</p>
<p>Cette méthode permet donc aux chercheurs de découvrir de nouvelles séquences régulatrices dans le génome, d’identifier les facteurs de transcription impliqués dans leur régulation et de comprendre comment ces régions régulatrices contribuent au développement normal et pathologique des cellules.</p>
<p>Depuis lors, cette technique est devenue un outil de choix dans la recherche en génomique, permettant des avancées significatives dans notre compréhension des mécanismes de régulation du génome.</p>
<p>Grâce à nos efforts d’analyses, notre équipe a décrit l’intégration de près de 15 000 expériences ChIP-seq, dont 8 103 portaient sur des échantillons humains, 5 503 sur des échantillons de souris et 1 205 sur des échantillons de drosophile. Ces données ont été compilées <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31665499/">dans un atlas nommé ReMap</a>, qui fournit un accès global et compilé à une vaste quantité de données génomiques en open access. L’atlas ReMap complète le projet ENCODE et permet une meilleure compréhension de la régulation génétique à l’échelle du génome. Cela offre également une opportunité pour les scientifiques du monde entier d’utiliser ces données pour leurs propres recherches et découvertes en génomique.</p>
<h2>L’annotation du génome non-codant grâce à l’open data</h2>
<p>La ressource ReMap <a href="https://remap.univ-amu.fr/">est accessible en ligne</a> et est également intégrée au navigateur de génome UCSC. Pour le génome humain seul, ReMap propose 182 millions de pics issus de plus de 15 000 expériences ChIP-seq effectuées pour 1 200 régulateurs transcriptionnels. Ici le terme <em>pic ChIP-seq</em> fait référence à ces endroits spécifiques sur l’ADN où les protéines se lient fortement. Ces endroits sont souvent des régions génétiques importantes, comme des promoteurs de gènes ou des régions régulatrices, qui contrôlent l’activité des gènes.</p>
<p>Nous avons traité l’équivalent de plusieurs dizaines de millions d’euros de données ChIP-seq, tout ça grâce à l’open data. Prises collectivement, les données génomiques générées par les laboratoires ont une valeur scientifique phénoménale. Les données génomiques peuvent avoir plusieurs cycles de vie, c’est un enjeu scientifique, économique et écologique.</p>
<p>L’analyse du projet ReMap a permis d’identifier entre 3 millions de régions régulatrices candidates chez l’homme et 2 millions chez la souris. L’atlas identifie également un grand nombre de régions régulatrices sans cibles connues, révélant ainsi l’énorme étendue du paysage régulateur du génome qui reste encore à explorer.</p>
<p>Depuis Avril 2022, le projet ReMap est devenu encore plus accessible à la communauté scientifique grâce à son intégration dans le navigateur de génome UCSC, aux côtés de grands consortiums internationaux tels que ENCODE, GTEx et 1000 Genomes. Cette intégration facilite l’utilisation de l’atlas ReMap pour les chercheurs et les biologistes qui souhaitent étudier les régions régulatrices du génome humain et de la souris. Cela permet également une analyse plus intégrée et une meilleure compréhension de la régulation génique. En bref, l’intégration de ReMap dans le navigateur de génome UCSC contribue à faire avancer la recherche en génomique en permettant un accès plus facile et une analyse plus complète des données de régulation génique.</p>
<h2>Investir dans l’Open data : la clé pour accélérer la recherche en génomique</h2>
<p>La création de ressources de référence telles que ReMap est essentielle pour la recherche interdisciplinaire en science des données génomiques. Avec le déploiement du séquençage du génome entier dans différents pays et le lancement en France du Plan France Médecine Génomique 2025, l’identification précise des régions régulatrices, et donc de l’impact des variants régulateurs, est devenue centrale.</p>
<p>Il est crucial de prendre conscience que la science est riche en données, mais que leur exploitation nécessite un engagement institutionnel, un savoir-faire humain et une technologie adéquate pour révéler les découvertes cachées. C’est pourquoi je crois que la création de ressources de références telles que ReMap est incontournable pour la recherche interdisciplinaire en science des données génomiques.</p>
<p>Les données ReMap offrent des informations complémentaires au mastodonte qu’est le projet ENCODE. Investir dans l’Open Data, dans les chercheurs en sciences des données (en bioinformatique, data analystes) et dans le développement d’outils logiciels est essentiel pour la science. Les projets d’apprentissage automatique en génomique ont besoin de données qualitatives telles que ReMap.</p>
<p>Dans un éditorial de 2016, le New England Journal of Medicine qualifiait ce type de travail de « research parasites ». Mais les temps ont changé : la reproduction des travaux scientifiques est un défi qui prend du temps, en partie à cause de la nature hétérogène des données scientifiques, ainsi que du manque de reconnaissance pour la reproduction de ressources. Cependant, la reproductibilité des expériences est vitale pour la science. La possibilité de reproduire, intégrer et regrouper des travaux antérieurs accélère également les nouveaux projets de recherche.</p>
<p>L’Atlas ReMap créé par l’équipe du TAGC a pu tirer parti de la richesse et du volume des données génomiques. L’identification de millions de régions régulatrices illustre que l’exploitation des données hétérogènes, couplée au développement d’approches en recherche scientifique en science des données, est un moyen précieux de faire progresser le domaine. La science est riche en données, mais elle nécessite un engagement institutionnel, un savoir-faire humain et la technologie nécessaire pour exploiter les données et révéler les découvertes cachées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204477/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Benoit Ballester a reçu des financements de INSERM-Région SUD, pour une bourse de thèse. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Fayrouz Hammal ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
99 % de notre ADN ne sert pas directement à produire des protéines, pourtant il est très utile pour réguler cette production. Mieux connaître cette partie du génome est un défi majeur.
Benoit Ballester, Chercheur en Bioinformatique à l’Inserm, Unité Inserm 1090 TAGC, Théories et Approches de la Complexité Génomique, Aix-Marseille Université, Marseille., Inserm
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tag:theconversation.com,2011:article/216857
2023-11-06T15:22:51Z
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Traiter les maladies génétiques, c’est du gâteau… ou presque
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/557179/original/file-20231101-27-722eas.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C992%2C561&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une erreur dans l’ADN s’appelle une mutation.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>J’ai toujours été fascinée par la génétique, une branche de la biologie qui permet à la fois d’expliquer la ressemblance frappante entre différents membres d’une famille et le fait que des plants de fraises résistent au gel. C’est assez impressionnant ! </p>
<p>J’ai aussi un lien assez personnel avec la génétique. J’ai appris, en grandissant, que des membres de ma famille étaient atteints de dysferlinopathie, une <a href="https://doi.org/10.3390/jcm12186011">dystrophie musculaire</a>. J’ai vu ma mère ne plus pouvoir monter d’escalier et devoir utiliser une canne, une marchette, puis un fauteuil roulant pour se déplacer. Ses muscles des jambes arrivaient de moins en moins à se réparer et devenaient de plus en plus faibles. </p>
<p>Mes parents m’ont expliqué que tous ces changements étaient dus à une erreur d’une seule lettre dans une immense séquence d’ADN, elle constituée de milliards de lettres. Cette erreur empêche la fabrication de la protéine <a href="https://doi.org/10.3390/jcm12144769">responsable de la réparation des muscles des bras et des jambes</a>. </p>
<p>Aujourd’hui, je suis étudiante chercheuse au doctorat en médecine moléculaire et j’étudie le traitement des maladies héréditaires pour pouvoir aider des familles comme la mienne. Dans cet article, je propose de démystifier les maladies héréditaires et ce qui est fait en recherche pour les traiter.</p>
<h2>C’est du gâteau ? Pas tout à fait</h2>
<p>Imaginons l’ADN comme un livre de recettes, où chaque gène représente une recette différente. À la page de la recette de gâteau au chocolat, il y a une belle image, mais il manque certaines informations. Il y est bien indiqué de préchauffer le four et de mesurer de la farine, mais le reste de la page est déchiré. Il est donc impossible de confectionner ce gâteau. On servira alors un festin composé de toutes les autres recettes, mais sans gâteau au chocolat, qui a pourtant une importance bien particulière. </p>
<p>C’est la même chose pour les maladies héréditaires. Le corps peut fabriquer toutes les protéines dont il a besoin, sauf une. Dans le cas de la dystrophie musculaire qui affecte ma famille, c’est celle qui répare les muscles des bras et des jambes dont la recette est manquante. Chaque maladie héréditaire a sa propre page endommagée dans son livre de recettes. </p>
<p>Plus concrètement, une erreur dans l’ADN s’appelle une mutation. Il en existe différents types. Certaines sont causées par l’ajout de lettres, comme si on ajoutait un ingrédient à la recette. Cette addition peut mener à un délicieux gâteau au chocolat avec des fraises ou alors à un gâteau qui n’est plus comestible, car on y a ajouté de l’huile à moteur. </p>
<p>D’autres mutations sont causées par le retrait (ou délétion) d’une ou plusieurs lettres (ou ingrédients), ou alors par des substitutions qui remplacent une lettre par une autre. Toutes ces modifications peuvent mener à des changements favorables ou sans impact, comme l’apparition des premiers yeux bleus dans l’évolution ou l’habileté de respirer hors de l’eau. Mais elles peuvent également causer des changements défavorables, comme une maladie héréditaire ou un cancer. </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/557129/original/file-20231101-17-kfz51p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="schéma" src="https://images.theconversation.com/files/557129/original/file-20231101-17-kfz51p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/557129/original/file-20231101-17-kfz51p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/557129/original/file-20231101-17-kfz51p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/557129/original/file-20231101-17-kfz51p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=483&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/557129/original/file-20231101-17-kfz51p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/557129/original/file-20231101-17-kfz51p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/557129/original/file-20231101-17-kfz51p.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=607&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Il existe différents types de mutations.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Camille Bouchard), Fourni par l’auteur</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Réparer l’ADN</h2>
<p>Dès mon jeune âge, je comprenais que ma mère était malade en raison d’une erreur dans son gène, mais que je ne développerai pas la maladie, car mon père n’a pas d’erreur dans le sien. C’est ce qu’on appelle une maladie récessive, puisqu’elle nécessite une erreur dans le gène de chacun des deux parents pour se manifester. D’autres maladies héréditaires sont dominantes, ce qui veut dire qu’une mutation dans l’ADN transmis par un seul parent est suffisante pour nuire à la production d’une protéine. </p>
<p>Dans le cadre de mes recherches, j’observe la séquence d’ADN de chaque patient atteint de dysferlinopathie pour voir où se trouve l’erreur.</p>
<p>Pour tenter de la corriger, j’utilise le <a href="https://doi.org/10.3390/cells12040536"><em>Prime editing</em></a>, une technique qui permet de couper l’ADN près de la mutation et de réécrire la séquence correctement. Le <em>Prime editing</em> est une version de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Clustered_Regularly_Interspaced_Short_Palindromic_Repeats">CRISPR-Cas9</a>, une technique qui permet de couper l’ADN à un endroit particulier.</p>
<p>Le <em>Prime editing</em> utilise une protéine appelée Cas9, qui se retrouve naturellement chez les bactéries. Elle leur permet de détruire la séquence d’ADN des virus qui pourraient les infecter. La mission de la protéine Cas9 est de reconnaître une séquence et de la couper. </p>
<p>Lorsqu’on l’utilise dans nos cellules humaines, on l’attache à une autre protéine, qui va réécrire l’ADN à partir d’un modèle. On lui fournira donc une séquence sans erreur pour que la cellule puisse ensuite fabriquer la protéine. C’est un peu comme retrouver la page originale du livre de recettes, pour enfin pouvoir servir le gâteau au chocolat. </p>
<h2>Un pas dans la bonne direction</h2>
<p>Pourquoi n’avons-nous donc pas entendu parler de <em>Prime editing</em>, s’il peut traiter diverses maladies ? Parce que la technique n’est pas encore tout à fait au point. En fait, nous arrivons à réparer l’ADN directement dans des cellules en laboratoire, mais il nous manque un moyen d’acheminer les deux grosses protéines (Cas9 et celle qui réécrit) jusqu’aux cellules à traiter (par exemple, jusqu’au centre des muscles touchés). </p>
<p>En d’autres termes, nous avons retrouvé la recette de gâteau, mais son format est trop volumineux pour entrer dans un courriel ou dans une enveloppe. De nombreux laboratoires, dont le mien, sont à la recherche d’un véhicule de livraison efficace et sécuritaire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216857/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Camille Bouchard a reçu des financements de Jain Foundation et de la Fondation du CHU de Québec.</span></em></p>
Plusieurs personnes connaissent une personne atteinte de maladie génétique mais peu comprennent comment fonctionnent les mutations.
Camille Bouchard, Étudiante au doctorat en médecine moléculaire (correction génétique de maladies héréditaires), Université Laval
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tag:theconversation.com,2011:article/210143
2023-11-02T21:02:16Z
2023-11-02T21:02:16Z
Protéger nos protéines pour prévenir le vieillissement : une piste prometteuse ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/557309/original/file-20231102-21-co328v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C6%2C4643%2C3079&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Et si protéger nos protéines permettait de bien vieillir ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/donna-sorridente-VMGAbeeJTKo">Ravi Patel/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>C’est notamment grâce à une petite bactérie ultra-résistante capable de « revenir à la vie » après des attaques extrêmement nocives, que les théories existantes sur la chimie du vieillissement sont en train d’être rebattues.</p>
<p>Il s’agit de <a href="https://presse.inserm.fr/wp-content/uploads/2017/01/2006_09_27_CP_Deinococcus_Resurrec.pdf"><em>Deinococcus radiodurans</em></a>, une des bactéries les plus résistantes connues à ce jour, qui vit dans des environnements arides comme le sable du désert. Elle survit dans les conserves de viande après le traitement de « choc » que constitue une stérilisation par rayonnement gamma. Elle peut également survivre à une dose d’irradiation 5000 fois plus importante que la dose mortelle pour les humains.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/553213/original/file-20231011-25-suiwlh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="microscopie électronique à transmission d’une bactérie extrêmophile" src="https://images.theconversation.com/files/553213/original/file-20231011-25-suiwlh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/553213/original/file-20231011-25-suiwlh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=690&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/553213/original/file-20231011-25-suiwlh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=690&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/553213/original/file-20231011-25-suiwlh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=690&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/553213/original/file-20231011-25-suiwlh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=867&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/553213/original/file-20231011-25-suiwlh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=867&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/553213/original/file-20231011-25-suiwlh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=867&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"><em>Deinococcus radiodurans</em> est une bactérie extrêmophile et l’un des organismes les plus résistants aux radiations que l’on connaisse. Ici elle est vue par microscopie électronique à transmission.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Deinococcus_radiodurans#/media/Fichier:Deinococcus_radiodurans.jpg">Michael Daly, Uniformed Services University, US Department of Energy</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les études ont montré que <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26871429/">cette bactérie survit même si son ADN est endommagé et brisé en plusieurs centaines de fragments à cause d’un stress violent</a>. En seulement quelques heures, elle reconstitue entièrement son patrimoine génétique et revient à la vie. Son ADN n’est pas plus résistant, il est simplement réparé immédiatement par des protéines indestructibles face à cette radiation extrême.</p>
<p>Ainsi, le secret de la robustesse de cette bactérie extrêmophile dépend de la robustesse de son « protéome » – l’ensemble de ces protéines – et notamment de ses protéines de réparation de l’ADN.</p>
<p>Ceci suggère un nouveau paradigme : pour augmenter la longévité, et notamment celle des humains, c’est le protéome – plus que l’ADN – qu’il nous faut protéger.</p>
<p>En effet, la survie de l’organisme dépend de l’activité de ses protéines. Si on agit contre l’altération du protéome, qui est à l’origine du vieillissement, on intervient simultanément sur l’ensemble de ses conséquences : par exemple la survie et le fonctionnement cellulaire ; et on évite les mutations induites par les radiations.</p>
<h2>Les clefs du vieillissement</h2>
<p>Le <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2020/11/msc200258/msc200258.html">vieillissement</a> se caractérise par l’accumulation d’évènements qui détériorent les fonctions de nos organes, et par une <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30914006/">augmentation exponentielle des risques de décès et des maladies au fil du temps</a>.</p>
<p>De nombreux modèles ont été proposés pour expliquer la base moléculaire du vieillissement, tels que la théorie de la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8344376/">sénescence cellulaire</a>, la diminution de la capacité de réparation de l’ADN, le <a href="https://www.inserm.fr/c-est-quoi/ca-use-ca-use-c-est-quoi-telomeres/">raccourcissement des télomères</a>, le dysfonctionnement mitochondrial et le <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2006/04/medsci2006223p266/medsci2006223p266.html">stress oxydant</a> ou encore <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2020/11/msc200019/msc200019.html">l’inflammation chronique</a>.</p>
<p>Ces différents modèles s’attachent tous à tenter de comprendre les conséquences du vieillissement, et non les causes. Le dogme central « ADN -> ARN -> protéines », qui désigne les relations entre l’ADN, l’ARN et les protéines et qui renvoie à l’idée que cette relation est unidirectionnelle (c’est-à-dire que de l’ADN vers les protéines en passant par l’ARN), mérite aujourd’hui d’être reconsidéré.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/553215/original/file-20231011-24-r1aap0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/553215/original/file-20231011-24-r1aap0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/553215/original/file-20231011-24-r1aap0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/553215/original/file-20231011-24-r1aap0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/553215/original/file-20231011-24-r1aap0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/553215/original/file-20231011-24-r1aap0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/553215/original/file-20231011-24-r1aap0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Triple hélice de collagène, une protéine structurelle qui contribue à la résistance de la peau.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Naos</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En effet, si plutôt que de s’intéresser d’abord à notre ADN et de rechercher à le protéger pour freiner notre vieillissement, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36660191/">nous protégions notre protéome</a> ?</p>
<h2>Qu’est-ce que le protéome ?</h2>
<p>Le terme <a href="https://www.inserm.fr/actualite/proteomique-code-vie-traduit-plus-90/">« protéome »</a> désigne l’ensemble des protéines présentes dans une cellule ou dans un organisme. Les protéines – du grec <em>protos</em> qui signifie « premier » – représentent le second principal constituant du corps humain, après l’eau, soit <a href="https://legacy.foresight.org/Nanomedicine/Ch03_1.html">environ 20 %</a> de sa masse.</p>
<p>Le terme « protéome » a été construit par analogie avec le génome : le protéome étant aux protéines ce que le génome est aux gènes, c’est-à-dire l’ensemble des gènes/protéines d’un individu – cet ensemble protéique variant en fonction de l’activité des gènes.</p>
<p>En effet, le protéome est une entité dynamique, qui s’adapte en permanence aux besoins de la cellule face à son environnement. Les protéines sont des molécules essentielles à la construction et au fonctionnement de tous les organismes vivants. <a href="https://www.aquaportail.com/definition-15276-interactome.html">Environ 650 000 réseaux interactifs protéine-protéine</a> ont été identifiés dans divers organismes, dont environ 250 000 chez l’humain.</p>
<p>Les protéines exécutent une <a href="https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/biologie-proteine-237/">grande variété de fonctions</a> :</p>
<ul>
<li><p>Un rôle structurel : de nombreuses protéines assurent la structure de chaque cellule, et le maintien et la cohésion de nos tissus. Par exemple, l’actine et la tubuline participent à l’architecture de la cellule. La kératine à celle de notre épiderme, de nos cheveux et de nos ongles. Le collagène est une protéine qui joue un rôle important dans la structure des os, des cartilages et de la peau.</p></li>
<li><p>Un rôle fonctionnel : enzymatique (par exemple, les protéases participent au nettoyage des protéines dysfonctionnelles et à la desquamation), hormonal (par exemple, l’insuline régule la glycémie), de transport (par exemple, les aquaporines transportent l’eau dans les différentes couches de la peau) ou de défense (par exemple, les immunoglobulines participent à la réponse immunitaire). Ainsi, l’ensemble des fonctions vitales est assuré par l’activité des protéines.</p></li>
</ul>
<h2>La « carbonylation », première cause d’altération irréparable de notre protéome</h2>
<p>L’équilibre entre la synthèse de nouvelles protéines et leur dégradation s’appelle la <a href="https://cordis.europa.eu/article/id/435462-maintaining-proteostasis-may-slow-ageing-and-related-diseases/fr">protéostasie</a>. Celle-ci est nécessaire au fonctionnement de notre organisme.</p>
<p>Mais cet état d’équilibre est sensible. Il est même constamment menacé, car la synthèse et la dégradation des protéines dépendent… de protéines. Avec le temps et les agressions extérieures, le protéome est soumis à <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2017/02/medsci20173302p176/medsci20173302p176.html">diverses altérations</a>, dont la plus redoutable est la « carbonylation », dommage irréversible lié à l’oxydation des protéines.</p>
<p>Les protéines carbonylées sont modifiées de façon permanente. Elles ne peuvent plus assurer correctement leurs fonctions biologiques ; et acquièrent même parfois des fonctions toxiques sous forme de petits agrégats.</p>
<p>Lorsqu’elles sont endommagées de façon irréparable, les protéines doivent être recyclées ou éliminées. Avec l’âge, cette élimination se fait plus difficilement, ce qui peut causer leur accumulation sous forme d’agrégats toxiques qui entravent la physiologie cellulaire et accélèrent le vieillissement. Au-delà d’un certain seuil, ces agrégats sont néfastes pour l’organisme : un état de <a href="https://www.sciencedirect.com/topics/biochemistry-genetics-and-molecular-biology/proteotoxicity">protéotoxicité</a> s’installe alors.</p>
<p>La <a href="https://www.nature.com/articles/s41580-019-0101-y">perte de la protéostasie</a>, c’est-à-dire l’équilibre entre la synthèse de nouvelles protéines et leur dégradation, due à l’accumulation d’agrégats protéiques, constitue la cause centrale dans le vieillissement et les maladies dégénératives. Ces agrégats de protéines carbonylées se retrouvent dans la plupart des maladies liées à l’âge, ainsi que dans les principaux signes de vieillissement de la peau.</p>
<p>Ainsi, alors que <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26871429/">notre vision du vieillissement était jusqu’à présent centrée sur le génome</a>, les recherches récentes sur le protéome introduisent l’importance de l’accumulation des protéines endommagées comme un facteur-clef du processus de vieillissement dans son ensemble.</p>
<h2>Les molécules chaperonnes antioxydantes, pour agir sur les causes du vieillissement</h2>
<p>Pour se replier correctement, la plupart des protéines ont besoin de l’aide de protéines spécialisées appelées « chaperonnes ». Les molécules chaperonnes sont de petites protéines qui aident et assistent au repliement normal des protéines après leur synthèse par les ribosomes, ou à leur bon repliement après un stress, tel un stress thermique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/553218/original/file-20231011-23-at0nwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/553218/original/file-20231011-23-at0nwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/553218/original/file-20231011-23-at0nwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/553218/original/file-20231011-23-at0nwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/553218/original/file-20231011-23-at0nwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/553218/original/file-20231011-23-at0nwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/553218/original/file-20231011-23-at0nwd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Illustration de l’extraction de bactériorubérines à partir de la bactérie <em>Arthrobacter agilis</em> – les bactériorubérines sont des pigments biologiques antioxydants et à effet chaperon, protégeant le protéome. NAOS.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Naos</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le terme de molécule chaperonne – d’origine française bien que proposé par <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/2695089/">John Ellis et Sean Hemmingsen</a> – a été adopté car leur rôle est d’empêcher les interactions indésirables et de rompre les liaisons incorrectes qui peuvent se former, à l’instar d’un chaperon humain. Bref, les chaperonnes (protéiques ou chimiques) sont les médecins des protéines mal-formées !</p>
<p>Revenons à la bactérie <em>Deinococcus radiodurans</em>, chez elle, les chaperonnes jouent un rôle clé dans la protection des protéines contre la carbonylation, en évitant que leurs acides aminés ne soient exposés aux radicaux libres ou ROS. Ainsi, elles réduisent leur susceptibilité aux altérations et limitent la formation d’agrégats. En parallèle, leur efficacité antioxydante neutralise les causes de la carbonylation.</p>
<p>En collaboration avec les laboratoires NAOS, il a été établi que ces protéines chaperonnes antioxydantes constituent donc un moyen efficace de protéger le protéome, en apportant à la fois une protection physique de la structure fonctionnelle des protéines, et un bouclier antioxydant lié aux protéines qui protège contre les dommages tels que la carbonylation.</p>
<p>Chez <em>Deinococcus radiodurans</em>, grâce à une protection efficace de son protéome contre les dommages oxydatifs par les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23818498/">molécules chaperonnes chimiques</a>, plutôt que de son génome, son protéome intact est alors capable de réparer les dommages causés à son génome et <em>in fine</em> de lui permettre de ressusciter en quelques heures.</p>
<p>Au-delà du génome, la protection de notre protéome, c’est-à-dire de nos protéines, peut être considérée aujourd’hui comme la clé de notre santé et de notre longévité. Toute autre théorie du vieillissement est compatible avec cette théorie, et se laisse interpréter par celle-ci.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210143/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Miroslav Radman est fondateur et directeur scientifique de l'Institut Méditerranéen des Sciences de la Vie (MedILS). Le MedILS a pu bénéficier de financements de l’Entreprise NAOS dans le cadre de plusieurs collaborations de recherche. Il est consultant et membre du Comité Scientifique de NAOS.
</span></em></p>
Des bactéries résistantes à des quantités phénoménales de radiation poussent à repenser notre compréhension des mécanismes qui sous-tendent le vieillissement.
Miroslav Radman, Professeur, Inserm
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/216195
2023-10-23T16:24:19Z
2023-10-23T16:24:19Z
Homo sapiens : comment deux crânes réécrivent l’histoire de son apparition en Europe –
Nouvelle recherche
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/555352/original/file-20231023-21-v0px95.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C10%2C1823%2C941&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Localisation des sites Buran Kaya III (1), Zlatý Kůň (2), Fournol (3), Serinyà (4), Krems-Wachtberg (5) et Věstonice (6) dont les génomes ont été analysés dans l’étude. Sont montré aussi un fragment de crâne analysé et une des perles percées découvertes avec les fragments d’os du site de Buran Kaya III ainsi que les statuettes des vénus de Věstonice, Willendorf et la Dame de Brassempouy (de droite à gauche)</span> <span class="attribution"><span class="source">E-M. Geigl</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Comment notre espèce, <em>Homo sapiens</em>, est-elle arrivée jusqu’en Europe de l’Ouest ? Notre nouvelle étude, basée sur l’analyse génétique de deux morceaux de crânes, datant de 37 000 et 36 000 ans, démontre que nos ancêtres sont issus d’Europe de l’Est et ont migré vers l’ouest. Ces deux individus sont issus d’un métissage avec les Néanderthaliens et avec les tous premiers <em>Homo sapiens</em> européens arrivés il y a environ 45 000 ans que l’on pensait éteints suite à une catastrophe climatique majeure.</p>
<p>Nous avons réussi à déchiffrer ces génomes à partir de vestiges osseux trouvés en Crimée, un défi technique puisque l’ADN était très mal préservé. Leur analyse nous a permis de générer un modèle large et actualisé des mouvements, interactions et remplacements de populations durant le peuplement de l’Europe pendant le Paléolithique supérieur (période entre environ -40 000 et -12 000 ans caractérisée par l’expansion des humains anatomiquement modernes à travers le monde). <a href="https://www.nature.com/articles/s41559-023-02211-9">Nos résultats viennent d’être publiés</a> dans la revue <em>Nature Ecology & Evolution</em> et montrent que ces individus sont les plus anciens représentants des Européens de l’Ouest s’étant implantés durablement en Europe et ayant laissé des traces dans les génomes des Européens actuels.</p>
<p>De petits fragments de deux crânes provenant d’un site archéologique en Crimée, Buran Kaya III, et datés d’environ -37 000 et -36 000 ans, côtoyant des outils lithiques et des perles percées en ivoire de mammouth, témoignent de la présence d’humains anatomiquement modernes en Europe de l’Est. Ce site a été fouillé sous la direction d’Alexandr Yanevich de l’Académie des sciences de l’Ukraine à Kiev et les <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0020834">fragments d’os analysés ont été trouvés en 2009</a>. Grâce à une collaboration entre notre équipe et des archéologues français et ukrainiens, nous avons pu mettre en place un protocole de prélèvement respectant des précautions particulières qui évitent les contaminations par de l’ADN humain actuel. Ces précautions ont permis l’analyse de l’ADN ancien dans ces bouts d’os.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/555326/original/file-20231023-29-gkr3o5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/555326/original/file-20231023-29-gkr3o5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/555326/original/file-20231023-29-gkr3o5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/555326/original/file-20231023-29-gkr3o5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/555326/original/file-20231023-29-gkr3o5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/555326/original/file-20231023-29-gkr3o5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=414&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/555326/original/file-20231023-29-gkr3o5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=414&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/555326/original/file-20231023-29-gkr3o5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=414&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">(A) Perle percée en ivoire de mammouth découverte dans la couche du (B) fragment d’os analysé dans l’étude actuelle.</span>
<span class="attribution"><span class="source">L. Crépin/E.-M. Geigl</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces individus se sont installés à cet endroit après une période glaciaire entre -40 000 et -38 000 ans qui a été accompagnée par <a href="https://www.nature.com/articles/srep45940">l’éruption d’un super-volcan</a> dans la région des Champs Phlégréens près de Naples et qui a couvert de cendres l’Europe du sud-est et de l’est.</p>
<p>Ces événements ont déclenché une <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0065839">véritable crise écologique</a> qui aurait fait disparaître aussi bien les dernières populations néanderthaliennes que les premières populations d’humains <em>sapiens</em> associés au Paléolithique supérieur initial. Ces dernières étaient les descendants des populations d’<em>Homo sapiens</em> venus d’Afrique il y a environ 60 000 et qui ont laissé des <a href="https://academic.oup.com/gbe/article/14/4/evac045/6563828">vestiges archéologiques en Europe</a> à partir d’environ 45 000 ans, possiblement même avant.</p>
<p>Au niveau archéologique, c’est la période de la transition entre le Paléolithique moyen et le Paléolithique supérieur car l’industrie lithique des derniers Néanderthaliens est remplacée par celle des premiers <em>H. sapiens</em>. Leurs restes de squelettes sont rares, mais on en connaît quelques sites archéologiques, par exemple en République tchèque, en Roumanie et en Bulgarie dont les génomes ont pu être déchiffrés en partie. Les Européens actuels ne portent <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-021-03335-3">pas de traces des génomes</a> de ces premiers Européens <em>sapiens</em>, contrairement aux populations humaines ayant vécu en Europe après la crise écologique de -40 000 ans dont quelques génomes ont été séquencés.</p>
<h2>Des <em>Homo sapiens</em> issus de métissages</h2>
<p>Bien que les informations génomiques obtenues à partir des deux fragments de crâne du site de Buran Kaya III soient fragmentaires, nous avons pu analyser 740 000 variations génétiques partagées avec les génomes d’autres individus anciens, un nombre suffisant pour détecter leurs affinités et leurs ascendances partagées.</p>
<p>Notre analyse paléogénomique de ces deux fragments, séparés d’environ 700 ans, a mis en évidence que ces individus faisaient partie de la deuxième vague du peuplement d’Europe par <em>H. sapiens</em>, la vague qui s’est produite après cette crise écologique, et qu’ils sont parmi les plus anciens ancêtres des Européens. Tous les deux sont des descendants d’un métissage lointain avec les Néanderthaliens. Notre étude a aussi montré que l’individu plus récent portait des traces d’un métissage avec des individus de la première vague de peuplement qu’on croyait exterminés par la période glaciaire de -40 000 ans, représenté par l’individu de Zlatý Kůň (-45 000 ans). Nous avons donc pu conclure que le remplacement des premiers <em>H. sapiens</em> n’était pas total et qu’il a dû y avoir des survivants de la crise écologique.</p>
<p>Les génomes des individus de Buran Kaya III ont aussi révélé un lien génétique avec les populations du Caucase, contemporaines et beaucoup plus tardives, en accord avec des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S004724842030169X">similitudes identifiées par les archéologues</a> entre les outils lithiques trouvés au sud du Caucase et ceux trouvés à Buran Kaya III à la même période. Ce lien indique la directionnalité de la migration des ancêtres de Buran Kaya III en Europe : du Moyen-Orient via le Caucase vers le territoire de l’Ukraine actuelle.</p>
<h2>Des liens avec des fossiles retrouvés en France</h2>
<p>Le lien génétique le plus fort a été identifié entre les génomes des individus de Buran Kaya III et ceux de France du Sud-ouest (Fournol -29 000 ans) et d’Espagne du nord-est (Serinyà -27 000 ans) et, dans une moindre mesure, ceux d’Autriche (Krems-Wachtberg -30 500 ans) et de République tchèque (Věstonice -31 000 ans) ayant vécu 5 000 à 7 000 ans plus tard. Ces individus proches des individus de Buran Kaya III faisaient partie de la population associée au Gravettien classique qui a produit les statuettes féminines en ivoire connues sous le nom de « vénus gravettiennes » qu’on trouve aussi bien en France qu’en Allemagne, en Autriche et en République tchèque (les vénus « impudique » et de Lespugue en France, la vénus de Věstonice en République tchèque ou encore la vénus de Willendorf en Autriche). La célèbre « Dame de Brassempouy » originaire du département français des Landes a été sculptée à cette époque.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Dame de Brassempouy ou Dame à la capuche." src="https://images.theconversation.com/files/555355/original/file-20231023-23-m1ej3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/555355/original/file-20231023-23-m1ej3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=477&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/555355/original/file-20231023-23-m1ej3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=477&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/555355/original/file-20231023-23-m1ej3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=477&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/555355/original/file-20231023-23-m1ej3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=599&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/555355/original/file-20231023-23-m1ej3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=599&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/555355/original/file-20231023-23-m1ej3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=599&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Dame de Brassempouy ou Dame à la capuche.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jean-Gilles Berizzi/Wikipedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ce lien génétique entre les individus de Buran Kaya III et les individus associés à la culture gravettienne suggère que les individus de Buran Kaya III étaient des ancêtres des individus associés au Gravettien et pratiquaient déjà une culture qu’on peut qualifier comme proto-gravettienne. Cette affinité génétique indique que les populations correspondantes ont diffusé de l’est vers l’ouest. Les outils lithiques produits par les individus de Crimée ont été attribué par les archéologues ukrainiens, en <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0003552114000879">particulier Alexandr Yanevich</a> : au complexe gravettien, mais cette attribution a été rejetée par d’autres archéologues, surtout à cause de leur date précoce et leur localisation à l’est, loin de la culture classique « Gravettienne » qui a été produite en Europe centrale et de l’ouest entre -34 000 et -26 000 ans, donc 5 000 à 7 000 ans plus tard et 3 000 km plus à l’est. Nos résultats génétiques donnent raison aux archéologues ukrainiens : les individus de Buran Kaya III étaient les ancêtres des Européens de l’Ouest, producteurs de la culture gravettienne et artistes des célèbres vénus gravettiennes.</p>
<hr>
<p><em>Le projet <a href="https://anr.fr/ProjetIA-17-EURE-0013">« Génétique et epigénétique nouvelle ecole »</a> est soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui finance en France la recherche sur projets. Elle a pour mission de soutenir et de promouvoir le développement de recherches fondamentales et finalisées dans toutes les disciplines, et de renforcer le dialogue entre science et société. Pour en savoir plus, consultez le site de l’<a href="https://anr.fr/">ANR</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216195/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Eva-Maria Geigl a reçu des financements de CNRS, EUR G.E.N.E. (ANR-17-EURE-0013 ; IdEx #ANR-18-IDEX-0001 l'Université de Paris ; Programme d’Investissements d’Avenir) </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Thierry Grange a reçu des financements de Fondation pour la Recherche Médicale (DGE20111123014), Région Ile-de-France (11015901), CNRS, EUR G.E.N.E. (ANR-17-EURE-0013 ; IdEx #ANR-18-IDEX-0001 l'Université de Paris ; Programme d’Investissements d’Avenir)</span></em></p>
L’analyse génétique de deux fragments de crânes datant de près de 40 000 ans démontre que notre espèce a colonisé l’Europe depuis l’est et s’est métissée avec nos cousins néandertaliens.
Eva-Maria Geigl, Directrice de recherche CNRS, Université Paris Cité
Thierry Grange, Directeur Scientifique Adjoint CNRS INSB Génétique Génomique Bioinformatique, Université Paris Cité
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/210942
2023-10-07T11:00:12Z
2023-10-07T11:00:12Z
Analyser le sang des poissons pour déterminer leur état de santé
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/551777/original/file-20231003-21-bibw4p.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=30%2C12%2C3995%2C3005&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'industrialisation de la pêche et les changements de l'environnement ont amené beaucoup de problématiques sur la gestion de nos pêches.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Fanny Fronton)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Le golfe du Saint-Laurent est une ressource inestimable pour le Canada. Les pêcheries de poissons et de crustacés y ont débuté au XVI<sup>e</sup> siècle, et demeurent, encore aujourd’hui, une source de revenus essentielle pour plusieurs communautés, comme celles de la Côte-Nord, de la Gaspésie ou des Îles-de-la-Madeleine. </p>
<p>Par exemple, aux <a href="https://publications.gc.ca/collections/collection_2019/mpo-dfo/Fs124-10-2018-fra.pdf">Îles-de-la-Madeleine</a>, près de 1 800 emplois (sur 12 500 habitants) étaient liés à la pêche en 2015. </p>
<p>Mais l’industrialisation de la pêche et les changements de l’environnement ont amené beaucoup de problématiques sur la gestion de nos pêches. L’abondance des différentes espèces de poissons dans le golfe a beaucoup fluctué dans les 20 dernières années. </p>
<p>Notamment, le nombre de flétans du Groenland a diminué drastiquement. Et même son de cloche du côté du turbot. Cette année, les <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1995066/fletan-groenland-turbot-peche-declin-rarete">débarquements</a> sont six fois plus bas pour les pêcheurs par rapport à l’année dernière. </p>
<p>Mais d’autres espèces profitent de la situation. C’est le cas du flétan de l’Atlantique, qui accuse des niveaux record aujourd’hui. </p>
<p>À quoi sont dus ces changements ? Et peut-on les prédire ?</p>
<p>Doctorante en biologie à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), je tente d’apporter des pistes de réponses à ces questions dans le cadre de mes travaux de recherche.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/468898/original/file-20220615-19-9zk4uk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><strong><em>Cet article fait partie de notre série <a href="https://theconversation.com/ca-fr/topics/fleuve-saint-laurent-116908">Le Saint-Laurent en profondeur</a></em></strong>
<br><em>Ne manquez pas les nouveaux articles sur ce fleuve mythique, d'une remarquable beauté. Nos experts se penchent sur sa faune, sa flore, son histoire et les enjeux auxquels il fait face. Cette série vous est proposée par La Conversation.</em></p>
<hr>
<h2>Une nouvelle technique de suivi de l’état de santé</h2>
<p>Les moyens permettant d’étudier l’état de santé d’un poisson – à l’échelle de l’individu – sont limités. D’une part, on peut calculer des indices à partir du poids et de la taille des individus. Mais ces derniers sont trop vagues et peu informatifs. </p>
<p>D’autre part, les biopsies effectuées sur les tissus des poissons, qui consistent à prendre une partie de leur muscle ou de leurs organes, impliquent une logistique coûteuse et complexe. Mine de rien, il faut aller récolter des échantillons en pleine mer et les ramener jusqu’au laboratoire ! Et c’est sans parler des considérations éthiques, puisqu’évidemment, le poisson doit être sacrifié.</p>
<p>De plus, ces méthodes sont peu sensibles pour détecter les stress induits par les changements environnementaux. Ils ne permettent pas non plus de détecter efficacement ces stress à des stades précoces, c’est-à-dire bien avant que les effets se manifestent. </p>
<p>Pourtant, dans un contexte où l’abondance de certaines espèces décline rapidement, une analyse de leur état de santé globale est nécessaire. Heureusement, un nouvel outil est en cours de développement : le <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-023-32690-6">microbiome circulant</a>. </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/551779/original/file-20231003-15-6ou9xh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="virus dans le sang" src="https://images.theconversation.com/files/551779/original/file-20231003-15-6ou9xh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551779/original/file-20231003-15-6ou9xh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551779/original/file-20231003-15-6ou9xh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551779/original/file-20231003-15-6ou9xh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551779/original/file-20231003-15-6ou9xh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551779/original/file-20231003-15-6ou9xh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551779/original/file-20231003-15-6ou9xh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">On pense souvent, à tort, que le sang est stérile.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une pratique méconnue</h2>
<p>Le microbiome circulant est un biomarqueur, soit un signal d’alarme qu’on peut détecter chez les poissons avant même que leur santé ne commence à dégrader. Un bon biomarqueur est sensible, facile à échantillonner et peu coûteux. </p>
<p>L’analyse du microbiome circulant, constitué de l’ADN des bactéries que l’on retrouve dans le sang, est directement inspirée de <a href="https://theconversation.com/ladn-circulant-une-nouvelle-arme-simple-et-rapide-dans-le-diagnostic-et-le-suivi-des-cancers-206786">ce qui est réalisé en médecine chez l’humain</a>. Et il regorge d’informations. </p>
<p>Il permet notamment de détecter des anomalies découlant de l’effet d’un facteur de stress sur l’organisme ou du développement d’une maladie. </p>
<p>Des changements de l’environnement sont aussi détectables à partir de l’étude du microbiome circulant. Mais ici émerge un problème majeur – un poisson, ce n’est pas un humain. L’humain est tellement étudié, que les connaissances sur sa santé pavent la voie à un nombre infini de recherches. Or, l’échantillonnage du sang des poissons n’est pas une pratique courante. Tout reste donc à faire pour estimer leur santé. </p>
<p>L’analyse du microbiome circulant chez le poisson n’ayant jamais été étudiée auparavant, nous avons beaucoup de pain sur la planche afin de mettre la technique au point.</p>
<h2>Des traces de bactéries dans le sang ?</h2>
<p>Comme le sang circule dans tout l’organisme, il est notamment en contact avec des bactéries qui composent les autres microbiomes (intestinal, oral, dermique). Tant chez le poisson que chez l’humain, ces derniers sont essentiels à la bonne santé. </p>
<p>Lorsqu’on analyse l’ADN bactérien dans le sang, il est donc possible de retrouver des bactéries de l’intestin, de la bouche, ou de la peau. Mais l’hypothèse que ce soient des bactéries propres au sang ne peut pas non plus être totalement écartée. </p>
<p>Alors que certains croient que le sang est stérile, et donc qu’il ne contient aucune bactérie, on sait depuis les années 70 que cette hypothèse est fausse – elle a même été confirmée <a href="https://doi.org/10.1128/jcm.39.5.1956-1959.2001">dans les années 2000 par des études génomiques</a>. Il se pourrait même que le microbiologiste hollandais Antonie Van Leeuwenhoek ait observé des bactéries dans le sang de saumon en <a href="https://doi.org/10.3389/fcimb.2019.00148">1674 au microscope</a>. </p>
<p>Aujourd’hui, on peut analyser ces bactéries en détail en ciblant un gène bactérien bien particulier, le gène de l’ARN ribosomal 16S. Présent chez toutes les bactéries du monde, ce gène varie légèrement d’une espèce à une autre. Il permet ainsi d’identifier et d’analyser la biodiversité du microbiome. </p>
<h2>Je mange, donc je suis</h2>
<p>Nos travaux récents ont permis de caractériser, pour la première fois, les <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-023-32690-6">microbiomes circulant du turbot et du flétan</a>. Nous avons notamment démontré que les deux espèces de poissons ont des microbiomes circulants dominés par la présence des espèces <em>Pseudoalteromonas</em> et <em>Psychrobacter</em>. Ces bactéries sont connues pour coloniser les milieux froids, par exemple le fond du Saint-Laurent qui avoisine les 5 °C. Elles sont également connues pour produire des composés bioactifs (des antibactériens et des antifongiques). Elles sont plus tenaces que les autres bactéries. </p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/551768/original/file-20231003-29-qhulgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="personne avec des gants bleus tient un poisson" src="https://images.theconversation.com/files/551768/original/file-20231003-29-qhulgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551768/original/file-20231003-29-qhulgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551768/original/file-20231003-29-qhulgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551768/original/file-20231003-29-qhulgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551768/original/file-20231003-29-qhulgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551768/original/file-20231003-29-qhulgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551768/original/file-20231003-29-qhulgz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Flétan du Groenland.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Fanny Fronton)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Cependant, on observe des différences entre les deux espèces. Le turbot a plus de bactéries appelées <em>Vibrio</em>, dont certaines métabolisent la chitine, molécule qui compose les carapaces d’invertébrés dont il se nourrit. Le flétan, quant à lui, présente davantage de bactéries <em>Acinetobacter</em>, typique de régimes piscivores dans les microbiomes intestinaux. Le microbiome circulant chez ces deux espèces de poissons semble donc influencé par les bactéries de l’intestin, comme c’est le cas chez l’humain. On pourrait donc potentiellement lier un microbiome sanguin au régime alimentaire du poisson, qui est souvent difficile à estimer. </p>
<h2>Une technique embryonnaire, mais prometteuse</h2>
<p>Cette première cartographie bactérienne du sang de ces deux espèces reflète donc probablement leur microbiome intestinal respectif. À partir de cette caractérisation, une simple détection d’une variation de la composition des bactéries pourrait être reliée à un stress, à un changement de l’environnement ou à un changement physiologique de l’animal. </p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/540859/original/file-20230802-23891-ctgz3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="bande dessinée" src="https://images.theconversation.com/files/540859/original/file-20230802-23891-ctgz3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540859/original/file-20230802-23891-ctgz3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=907&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540859/original/file-20230802-23891-ctgz3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=907&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540859/original/file-20230802-23891-ctgz3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=907&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540859/original/file-20230802-23891-ctgz3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1140&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540859/original/file-20230802-23891-ctgz3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1140&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540859/original/file-20230802-23891-ctgz3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1140&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Bande dessinée illustrant le principe de l’analyse du microbiome circulant.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Fanny Fronton)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par exemple, on sait que chez l’humain, la perte d’<em>Actinobacteria</em> dans le microbiome circulant est associée à une <a href="https://doi.org/10.3389/fcimb.2018.00005">pancréatite</a> aiguë sévère. Et des exemples comme celui-ci, il en existe des dizaines chez l’humain.</p>
<p>Cette étude, issue d’une collaboration entre des chercheurs universitaires de l’INRS, de l’Université du Québec à Rimouski et le ministère Pêches et Océans Canada, donne un petit aperçu du potentiel informatif qu’offriraient les microbiomes sanguins des poissons de notre golfe. </p>
<p>Des recherches plus poussées permettront d’estimer leur santé, et de mieux prédire l’évolution de leur population. L’effondrement dramatique du stock de la morue des années 80 a beaucoup marqué les pêcheurs. Plusieurs d’entre eux redoutent même que cette situation se reproduise avec une autre espèce. Comme le turbot reste une espèce à risque, il est primordial d’assurer une meilleure gestion des espèces du Saint-Laurent. </p>
<p>Ce n’est qu’en peaufinant nos techniques d’analyse et en approfondissant nos connaissances scientifiques que l’on pourra éviter que ce type d’effondrement ne se reproduise dans le futur.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210942/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fanny Fronton a reçu des financements de la Bourse Armand Frappier. </span></em></p>
Non, le sang n’est pas stérile. Et analyser les bactéries qui s’y trouvent pourrait permettre d’évaluer la santé des poissons et d’éviter l’effondrement de leurs populations.
Fanny Fronton, Doctorante en Écologie halieutique et biologie moléculaire, Institut national de la recherche scientifique (INRS)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/212315
2023-09-28T17:15:16Z
2023-09-28T17:15:16Z
Une nouvelle étude pave la voie à un meilleur dépistage des maladies génétiques
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/545060/original/file-20230828-122759-gfmxl9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C1%2C988%2C559&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Nous pouvons observer le processus d’évolution en laboratoire dans des conditions parfaitement contrôlées.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Prenons une cellule vivante, qui comporte des milliers de gènes. Maintenant, imaginons que ces gènes sont des boutons qui peuvent être réglés pour changer la façon dont la cellule se développe dans un environnement donné. L’ajustement d’un gène pourrait augmenter ou diminuer sa croissance, et le processus est d’autant plus complexe que les boutons sont connectés les uns aux autres, comme les engrenages d’une machine.</p>
<p>Si les scientifiques peuvent aujourd’hui modifier les gènes en laboratoire et essayer de produire des résultats dans le but d’obtenir des traitements, l’évolution, quant à elle, fonctionne ainsi depuis des milliards d’années. L’évolution est un phénomène naturel qui règle les gènes et permet aux populations de s’adapter. Toutefois, contrairement aux scientifiques, elle effectue les ajustements de manière aléatoire, à mesure que les mutations affectent la fonction des gènes.</p>
<p>L’une des hypothèses sous-jacentes de la théorie de l’évolution – celle de la contingence évolutive – avance que ce réglage peut avoir des comportements chaotiques. Ainsi, des réglages qui ont eu lieu au début du processus peuvent modifier radicalement le potentiel évolutif ultérieur.</p>
<p>Stephen Jay Gould est un célèbre partisan de cette théorie. Dans son livre <a href="https://www.babelio.com/livres/Gould-La-Vie-est-belle--Les-Surprises-de-levolution/15771">La vie est belle</a>, publié en 1989, il affirme que, puisque les mutations bénéfiques se produisent de façon aléatoire, le hasard doit jouer un rôle important dans la diversification de l’évolution.</p>
<p>Si son hypothèse est vraie, cela influence la manière dont les scientifiques doivent éditer les gènes en laboratoire, car ils devront composer avec les interconnexions chaotiques de nos cellules. Notre travail a consisté à tester cette hypothèse.</p>
<h2>Paradoxe évolutif</h2>
<p>Nous pouvons observer le processus d’évolution en laboratoire dans des conditions parfaitement contrôlées. Nous l’avons fait en cultivant des populations de micro-organismes <a href="https://doi.org/10.7554/eLife.63910">pendant des centaines, voire des milliers de jours</a>.</p>
<p>Comme ces organismes se divisent et se reproduisent très rapidement, cela représente des milliers de générations. Nos expériences nous ont permis de <a href="https://doi.org/10.1038/s41586-019-1749.3">déterminer avec précision quand</a> et comment les mutations bénéfiques coïncident et entrent en compétition entre elles pour conquérir une population.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Image d’un génome humain" src="https://images.theconversation.com/files/543310/original/file-20230817-41912-psfxhj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/543310/original/file-20230817-41912-psfxhj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/543310/original/file-20230817-41912-psfxhj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/543310/original/file-20230817-41912-psfxhj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/543310/original/file-20230817-41912-psfxhj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/543310/original/file-20230817-41912-psfxhj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/543310/original/file-20230817-41912-psfxhj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Lecture d’image d’un génome humain.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(NHGRI via AP)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’une des constatations les plus frappantes de chacune de ces expériences est que l’augmentation de la valeur adaptative ralentit au fil du temps à un rythme qui est étonnamment reproductible. Bien qu’elles aient accumulé des mutations différentes, les diverses populations présentent une diminution éminemment prévisible des performances en ce qui concerne leur rapidité adaptative.</p>
<p>Contrairement au comportement apparemment chaotique des mutations, les changements de valeur adaptative ou de croissance sont hautement prévisibles. De nombreuses personnes ont émis l’hypothèse que l’ordre des mutations est une <a href="https://doi.org/10.3389/fgene.2015.00099">conséquence inhérente</a> à la manière dont les systèmes biologiques ont évolué.</p>
<p>Cette hypothèse surprenante entre en contradiction avec l’idée que les <a href="https://doi.org/10.1038/s41559-020-01286-y">caractéristiques biologiques d’un organisme importent pour leur évolution</a>. En d’autres termes, il a été difficile de prouver que l’ordre dans lequel l’évolution ajuste les boutons a une incidence sur l’avenir de l’organisme.</p>
<h2>Réponse au paradoxe</h2>
<p>Mon équipe a pu montrer qu’on trouve la réponse à ce paradoxe dans le réseau de gènes interconnectés de la cellule.</p>
<p>Pour que l’évolution fonctionne, le réglage des boutons doit être précis : même si le résultat net est bénéfique, l’ajustement d’un ensemble de boutons interconnectés peut se répercuter et affecter d’autres boutons auparavant réglés correctement. Au fil de l’évolution, la probabilité de dérégler des boutons s’accroît. Ce principe, simple en apparence, explique pourquoi le rythme des améliorations évolutives diminue généralement avec le temps.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="A tray containing human DNA samples ready for genetic sequencing" src="https://images.theconversation.com/files/543312/original/file-20230817-23-a743da.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/543312/original/file-20230817-23-a743da.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=521&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/543312/original/file-20230817-23-a743da.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=521&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/543312/original/file-20230817-23-a743da.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=521&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/543312/original/file-20230817-23-a743da.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=654&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/543312/original/file-20230817-23-a743da.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=654&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/543312/original/file-20230817-23-a743da.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=654&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Plateau contenant des échantillons d’ADN humain prêts pour le séquençage génétique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Patricia McDonnell)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Résoudre ce paradoxe de manière expérimentale n’a pas été facile. Comment montrer l’enchevêtrement des boutons à l’intérieur de la cellule ? <a href="https://doi.org/10.1126/science.abm4774">Dans notre récente étude</a>, nous avons relevé ce défi en essayant systématiquement toutes les combinaisons possibles de 10 mutations bénéfiques clés et en examinant la manière dont elles affectent la croissance des cellules.</p>
<p>En testant des combinaisons de mutations, nous avons pu comprendre quelles mutations étaient reliées entre elles (lien connu sous le nom d’épistasie). Pour seulement 10 mutations, nous avons dû générer plus de 1 000 combinaisons.</p>
<h2>Comment cela affecte la médecine génétique de précision</h2>
<p>Les technologies futuristes actuelles se targuent de pouvoir générer des mutations uniques précises au sein de nos génomes, dans l’espoir que cela puisse servir à réparer des variantes génétiques non fonctionnelles. À titre d’exemple, <a href="https://doi.org/10.1038/s41586-019-1711-4"><em>Prime Editing</em></a> est une technologie efficace d’édition génomique par « recherche et remplacement ».</p>
<p>L’une des principales préoccupations liées à ce type d’approches est qu’elles peuvent introduire des mutations indésirables. Cependant, même si les scientifiques ont su résoudre certains problèmes, le domaine de la génétique humaine a souvent <a href="https://doi.org/10.1038/s41576-019-0127-1">négligé l’importance de l’interconnexion des gènes</a>.</p>
<p>Notre étude démontre que les bioingénieurs doivent réfléchir non seulement à l’effet d’une mutation sur le gène dans lequel elle se trouve, mais aussi à son effet sur toutes les autres variations génétiques. La modification de la fonction de n’importe quel gène peut affecter les réseaux cellulaires interconnectés.</p>
<p>À cela s’ajoute le fait que nous sommes tous porteurs de centaines de variantes génétiques extrêmement rares, ce qui signifie que chaque personne est porteuse d’un réseau unique de gènes interconnectés. Ces réseaux personnalisés font de nous qui nous sommes.</p>
<p>L’interprétation génomique est au cœur des tests génétiques de dépistage des maladies. Si les scientifiques ont progressé dans l’identification des principales variantes génétiques pathogènes (qui peuvent provoquer une maladie), nos résultats montrent qu’avant de classer une variante comme pathogène ou non, nous devons comprendre comment sont réglés les autres boutons génétiques de nos cellules.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212315/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Alex Nguyen Ba bénéficie d'un financement du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.</span></em></p>
Une nouvelle étude met en lumière la nature interconnectée du génome humain et ce que cela signifie pour les futures thérapies géniques.
Alex Nguyen Ba, Assistant Professor, Biology, University of Toronto
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/209148
2023-09-04T18:29:05Z
2023-09-04T18:29:05Z
Des vers de terre qui ne vivent pas dans la terre découverts en Martinique
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/537081/original/file-20230712-27-s7lyzk.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C0%2C2261%2C1704&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Photographie d’un ver de terre en Martinique (genre Dichogaster) dans une Broméliacée.</span> <span class="attribution"><span class="source"> Mathieu Coulis, Fourni par l'auteur</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Avec l’accélération de la perte de biodiversité, certaines espèces pourraient disparaître avant que les scientifiques n’aient eu le temps de les découvrir et de les décrire, et sans nous laisser le temps de pouvoir agir pour leur conservation. Ce problème est encore plus critique pour les espèces qui vivent dans des habitats improbables et peu étudiés. C’est le cas de certaines espèces de vers de terre qui ne vivent pas dans le sol, comme la majorité de leurs congénères, mais dans les arbres des forêts tropicales et plus particulièrement dans des plantes épiphytes de la famille des Broméliacées.</p>
<p>Cette famille de plantes est spécifique de la zone néotropicale (région couvrant l’Amérique du Sud, l’Amérique centrale et les Caraïbes). Les Broméliacées ont souvent un mode de vie épiphyte, c’est-à-dire qu’elles sont accrochées de manière non parasite aux branches et sur les troncs des grands arbres, grâce à des racines crampon, pour chercher la lumière de la canopée. Beaucoup de ces espèces sont menacées par la destruction de leur habitat, notamment la <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/ece3.5296">déforestation</a> mais aussi par leur récolte dans les milieux naturels, car ce sont des plantes ornementales.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/537083/original/file-20230712-18-a25vzb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537083/original/file-20230712-18-a25vzb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537083/original/file-20230712-18-a25vzb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537083/original/file-20230712-18-a25vzb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537083/original/file-20230712-18-a25vzb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537083/original/file-20230712-18-a25vzb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537083/original/file-20230712-18-a25vzb.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Photographie de Broméliacées épiphytes en Martinique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Mathieu Coulis</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>En Martinique il existe 24 espèces de Broméliacées, une des plus connues et répandues est <em>Guzmania lingulata</em>, un <a href="https://zenodo.org/record/7607486">guide</a> récemment paru permet leur identification. Chez de nombreuses espèces, les feuilles se chevauchent à la base et constituent des réservoirs qui se remplissent d’eau de pluie et de débris végétaux, constituant progressivement un habitat similaire au sol pouvant accueillir toutes sortes d’organismes et formant ainsi un microécosystème où la plante puise ses nutriments grâce à d’autres types de racines (les racines à absorption) qui poussent entre ses feuilles. C’est dans ce microhabitat que nous avons découvert des vers de terre.</p>
<p>Des vers de terre ont déjà été signalés dans des Broméliacées <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-tropical-ecology/article/abs/earthworms-inhabiting-bromeliads-in-mexican-tropical-rainforests-ecological-and-historical-determinants/B67C5B15AEA196DE73A45064F1D99052">notamment au Mexique</a> et en <a href="https://www.biotaxa.org/Zootaxa/article/view/zootaxa.4178.3.5">Guadeloupe</a> mais, pour le moment ce sont surtout des travaux de taxonomie (description des espèces) qui mentionnent leur présence dans ces habitats arboricoles. Aucun travail sur l’écologie des vers de Broméliacées n’a été mené, ainsi nous ignorons si les vers sont capables d’y vivre en permanence ou si leur présence y est temporaire. La présence de vers de terre dans cet habitat est probablement beaucoup plus répandue qu’actuellement documentée.</p>
<h2>Des vers de terre arboricoles en Martinique</h2>
<p>Dans <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0038071723001001">notre étude</a> récemment parue sur la diversité des vers de terre en Martinique, nous avons révélé l’existence de sept espèces différentes de vers de terre vivant presque exclusivement dans les habitats épiphytes de cette île des Petites Antilles. Deux de ces espèces (<em>Dichogaster annae</em> et <em>Dichogaster andina</em>) sont dites exotiques, c’est-à-dire natives d’une autre région du monde et introduites en Martinique tandis que les cinq autres espèces étaient à ce jour inconnues, elles sont donc nouvelles pour la science et probablement endémiques de Martinique. Nous avons montré que l’abondance de ces cinq espèces était significativement corrélée à la proportion de couverture forestière (quantité de forêt qui couvre une zone géographique particulière) dans cette île volcanique caractérisée par une importante diversité de milieux, avec une forte proportion de zones agricoles au Sud et une région montagneuse au Nord recouverte d’anciennes forêts tropicales humides et dominée par le volcan de la montagne Pelée.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/537085/original/file-20230712-25-uhz7rz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/537085/original/file-20230712-25-uhz7rz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537085/original/file-20230712-25-uhz7rz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537085/original/file-20230712-25-uhz7rz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537085/original/file-20230712-25-uhz7rz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537085/original/file-20230712-25-uhz7rz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537085/original/file-20230712-25-uhz7rz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537085/original/file-20230712-25-uhz7rz.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Photographie d’un ver de terre d’une espèce probablement endémique de Martinique (genre <em>Dichogaster</em>) dans une Broméliacée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Mathieu Coulis</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>D’autres espèces ont été trouvées de manière plus opportuniste dans les arbres, alors qu’elles étaient plus fréquemment observées dans d’autres habitats tels que la litière ou le sol. Cela suggère que ces habitats arboricoles peuvent être colonisés par des vers de terre se déplaçant depuis le sol, confirmant ainsi que la canopée fournit un habitat attrayant pour ces invertébrés. Nos résultats suggèrent donc qu’au cours de leur histoire évolutive, certaines espèces ont fini par occuper presque exclusivement cette niche écologique et ainsi devenir des spécialistes des Broméliacées.</p>
<h2>Des espèces nouvelles révélées par la technique de code-barre ADN</h2>
<p>La biodiversité des vers de terre des régions tropicales est mal connue et probablement sous-estimée. Cette méconnaissance s’explique par un faible nombre d’études dans ces régions et par une identification des espèces basée sur la morphologie particulièrement difficile en raison d’un nombre restreint de caractères diagnostiques externes permettant de les distinguer. Afin de lever cet obstacle taxonomique, la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0038071715003685">technique de code-barre ADN</a> est particulièrement appropriée. Cette méthode, que nous avons choisi d’utiliser dans notre étude, repose sur la détermination des bases de l’ADN (ou séquençage) d’un court fragment du génome d’un organisme. Cette séquence est ensuite comparée à celles stockées et référencées dans une <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rspb.2002.2218">base de référence</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/537087/original/file-20230712-23-51utri.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/537087/original/file-20230712-23-51utri.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537087/original/file-20230712-23-51utri.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=139&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537087/original/file-20230712-23-51utri.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=139&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537087/original/file-20230712-23-51utri.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=139&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537087/original/file-20230712-23-51utri.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=175&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537087/original/file-20230712-23-51utri.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=175&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537087/original/file-20230712-23-51utri.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=175&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Principe de la technique du code-barres ADN.</span>
<span class="attribution"><span class="source"> Illustration par Lise Dupont</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Cependant, cette base de données n’est pas toujours disponible, ce qui était le cas dans notre étude. Par conséquent, nous avons construit notre propre base de données de 684 code-barres ADN de vers de terre de Martinique <a href="http://www.boldsystems.org/index.php/Public_SearchTerms?query=DS-CARMT">disponible en ligne</a>. Les spécimens qui n’ont pas pu être affiliés à une espèce connue d’après leurs caractères anatomiques et moléculaires ont été regroupés en unités taxonomiques sur la base de leur ressemblance génétique et morphologique. Notre hypothèse est que ces unités taxonomiques correspondent à des espèces nouvelles pour la Science.</p>
<h2>Une diversité menacée</h2>
<p>Notre étude a permis de montrer que la biodiversité insoupçonnée abritée au sein des Broméliacées épiphytes est principalement menacée par deux types de pressions. L’altération et la fragmentation des habitats naturels notamment liées à l’anthropisation des sols représentent une première menace importante pour cette diversité. En effet, nous avons montré que l’abondance des espèces endémiques des habitats épiphytes était significativement corrélée à la proportion de forêt en Martinique soulignant que les activités humaines, telles que la déforestation, en réduisant la taille de l’habitat de ces espèces, peuvent mener à leur extinction.</p>
<p>L’introduction d’espèces exotiques via les activités humaines constitue une autre menace à laquelle sont soumises ces espèces. Dans les régions les plus agricoles de Martinique, nous avons montré l’omniprésence de l’espèce introduite <em>Dichogaster andina</em> dans les habitats épiphytes. L’absence de diversité génétique parmi 203 séquences obtenues pour cette espèce suggère une reproduction par parthénogénèse à partir d’un gamète femelle non fécondé, qui est reconnue comme particulièrement avantageuse pour le succès d’une invasion biologique.</p>
<p>Ce résultat met en exergue le risque que des espèces endémiques spécialistes d’un habitat précis (ici les Broméliacées) soient progressivement remplacées par des espèces exotiques envahissantes qui sont généralement plus compétitives dans un contexte de dégradation des habitats.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209148/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lise DUPONT et Mathieu COULIS ont reçu pour le projet REBIOS (MQ0023806) des financements de l'Europe (fonds FEDER) et de la Collectivité Territoriale de Martinique (CTM). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mathieu Coulis ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Aussi surprenant que cela puisse paraître, certains vers de terre ne vivent pas dans la terre. Partons à leur rencontre en Martinique.
Lise Dupont, Enseignante-chercheuse en écologie moléculaire, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)
Mathieu Coulis, Docteur en écologie du sol, Cirad
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/212399
2023-08-29T16:28:49Z
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Séquençage du génome humain : le chromosome Y livre ses derniers secrets
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/545059/original/file-20230828-252907-flbsna.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C20%2C1905%2C1256&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le chromosome Y cache de nombreux secrets.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-illustration/xychromosomes-on-background-medical-symbol-gene-559732429">Rost9/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Il y a plus de vingt ans, le <a href="https://www.nature.com/articles/35057062">génome humain était séquencé (autrement dit, « lu ») pour la première fois</a>. Le « texte » de cette version initiale comportait de multiples « trous », car de nombreuses séquences d’ADN étaient manquantes, faute d’avoir pu être déchiffrées correctement. Au fil des années, la qualité du décodage a été <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.abj6987">progressivement améliorée</a>, chaque nouvelle itération du séquençage permettant de remplir certains des trous qui empêchaient la lecture complète de notre matériel génétique.</p>
<p>La difficulté fondamentale à laquelle sont confrontés les chercheurs qui tentent de <a href="https://planet-vie.ens.fr/thematiques/manipulations-en-laboratoire/la-revolution-de-la-genomique-les-nouvelles-methodes-de">lire le génome humain dans son intégralité</a> est liée à l’énorme quantité de séquences répétées présentes en son sein. En effet, les quelque 20000 gènes humains constituent à peine 2 % de l’ensemble de notre génome. Les 98 % restants sont essentiellement constitués de diverses familles de séquences répétées, d’éléments mobiles appelés <a href="https://www.nature.com/scitable/topicpage/transposons-the-jumping-genes-518/">« transposons »</a> et « rétrotransposons » ainsi que – dans une moindre mesure – de séquences d’une grande importance fonctionnelle, qui régulent l’expression génétique en fonctionnant comme des interrupteurs déterminant où et quand les gènes doivent être activés et désactivés.</p>
<p>En mars 2022, une <a href="https://doi.org/10.1126/science.abj6987">révision majeure</a> du génome humain a été publiée dans la revue scientifique <em>Science</em>. Pour obtenir cette nouvelle version, le <a href="https://www.genome.gov/about-genomics/telomere-to-telomere">consortium international de chercheurs « T2T »</a> (<em>telomere-to-telomere</em>, les télomères étant les extrémités des chromosomes) avait utilisé une stratégie inédite, basée sur l’utilisation d’un type de cellule (CHM13) qui ne conserve qu’une seule copie de chaque chromosome.</p>
<p>En combinant cette approche aux dernières techniques de séquençage d’ADN, ces scientifiques avaient réussi à ajouter quelque 200 millions de bases (les « lettres » du texte génétique) à la séquence existante, comblant ainsi la plupart des lacunes qui persistaient sur les chromosomes 1 à 22.</p>
<p>Le dernier chromosome qui restait à décoder était aussi le plus petit de tous les chromosomes humains : le chromosome Y. Porteur d’une séquence spécifique impliquée dans la différenciation sexuelle des mâles, c’est aussi le plus complexe de nos chromosomes, car il contient de nombreuses séquences répétitives de types variés.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/544273/original/file-20230823-25-q2kx0y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Cellule, chromosome, molécule d’ADN (double hélice) et paires de bases" src="https://images.theconversation.com/files/544273/original/file-20230823-25-q2kx0y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/544273/original/file-20230823-25-q2kx0y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=257&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/544273/original/file-20230823-25-q2kx0y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=257&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/544273/original/file-20230823-25-q2kx0y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=257&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/544273/original/file-20230823-25-q2kx0y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=323&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/544273/original/file-20230823-25-q2kx0y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=323&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/544273/original/file-20230823-25-q2kx0y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=323&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-vector/diagram-cell-structure-chromosome-dnadeoxyribonucleic-acid-2175697245">Dee-sign/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>23 paires de chromosomes</h2>
<p>Petit rappel, chacun de nous possède <a href="https://www.genome.gov/genetics-glossary/Chromosome">46 chromosomes</a> dans ses cellules, disposés en 23 paires : 22 paires de chromosomes « autosomiques » (1 à 22) et une paire de chromosomes sexuels (qui peuvent être X ou Y).</p>
<p>Chacune de nos paires de chromosomes est constituée d’un chromosome hérité de notre père et d’un chromosome hérité de notre mère. La plupart des femmes ont une configuration chromosomique 46XX, ce qui signifie que la dernière paire de chromosomes, la 23<sup>e</sup>, est constituée de deux copies du chromosome X. La plupart des hommes ont une configuration chromosomique 46XY, ce qui signifie que la paire de chromosomes sexuels est constituée d’un chromosome X et d’un chromosome Y.</p>
<p>Étant donné qu’il n’est présent que chez les hommes, le chromosome Y ne peut pas contenir de gènes essentiels aux deux sexes. Comme mentionné précédemment, il contient en revanche les gènes responsables du développement des organes sexuels masculins, et en particulier le <a href="https://es.wikipedia.org/wiki/SRY">gène maître <em>SRY</em></a>.</p>
<p>Celui-ci déclenche une cascade d’événements qui finissent par transformer une gonade initiale indifférenciée en testicules, où sont produits les spermatozoïdes. En l’absence du gène <em>SRY</em> (comme chez les femelles 46XX), cette gonade primordiale finit par se transformer en ovaires, où sont produits les ovules.</p>
<h2>Le chromosome Y enfin complet</h2>
<p>Le consortium T2T vient de résoudre les problèmes techniques qui empêchaient de décoder la séquence du chromosome Y. <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-023-06457-y">Publiés fin août 2023 dans la revue <em>Nature</em></a>, les résultats de ces travaux ont permis d’ajouter 30 millions de lettres au génome humain connu – lequel compterait désormais 3,23 milliards de lettres. Ils ont aussi permis de découvrir 40 gènes codant pour des protéines, jusqu’ici inconnus. Le nouveau génome de référence s’appelle T2T-CHM13+Y et a été mis à la disposition de l’ensemble de la communauté des chercheurs par les auteurs de l’étude.</p>
<p>En plus de la séquence complète du chromosome Y, <em>Nature</em> a publié une <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-023-06425-6">seconde étude</a> portant sur les séquences de 43 chromosomes Y d’êtres humains qui ont vécu lors des 183 000 dernières années. Leur analyse révèle qu’au fil de l’évolution, la taille et la structure du chromosome Y ont beaucoup varié. Les chercheurs ont notamment détecté de grandes inversions de séquences (des fragments d’ADN retournés et insérés à l’envers).</p>
<p>Le fait que nous en apprenions davantage sur le chromosome Y constitue une excellente nouvelle. Pour ne citer qu’un seul exemple, rappelons cette autre avancée scientifique survenue il y a environ un an, qui établissait une corrélation entre la perte (fréquente) du chromosome Y dans de nombreuses cellules et <a href="https://www.science.org/doi/epdf/10.1126/science.abn3100">l’espérance de vie plus courte des hommes par rapport à celle des femmes</a>. Il est clair que nos gènes recèlent encore bien d’autres précieuses informations.</p>
<h2>Il n’y a pas qu’un génome humain : l’initiative pangénomique</h2>
<p>Ces deux nouvelles études améliorent considérablement notre connaissance du génome humain. Ces contributions font suite à <a href="https://www.nature.com/collections/aebdjihcda">l’initiative pangénome</a>, qui vise à rendre compte de la variabilité génétique qui existe entre les êtres humains. En effet, bien que nous ayons en commun une grande partie de notre génome, on constate une variabilité d’environ 0,1 % d’un individu à l’autre. Cela signifie qu’il existe plus de 3 millions de paires de bases différentes entre deux personnes.</p>
<p>L’initiative pangénome permettra de passer d’une seule séquence génomique de référence (actuellement) à plusieurs centaines. Celles-ci illustreront de manière plus fiable nos similitudes et nos différences génétiques. Cela devrait permettre, entre autres, de détecter plus facilement les mutations associées aux milliers de maladies héréditaires recensées jusqu’à présent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212399/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Le contenu de cette publication et les opinions exprimées sont ceux de l'auteur. Ce document ne doit pas être considéré comme représentant une position officielle de la CSIC et n'engage pas la responsabilité de la CSIC de quelque manière que ce soit.</span></em></p>
La séquence complète du plus petit chromosome de l’homme, le chromosome Y, vient d’être obtenue – une fois franchis de nombreux obstacles.
Lluís Montoliu, Investigador científico del CSIC, Centro Nacional de Biotecnología (CNB - CSIC)
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tag:theconversation.com,2011:article/210387
2023-07-26T18:19:06Z
2023-07-26T18:19:06Z
Grâce à l’ADN, rencontre avec une famille « française » du Néolithique
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/539537/original/file-20230726-25-ll11yv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=985%2C0%2C931%2C638&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Représentation d'une des habitantes de la communauté.</span> <span class="attribution"><span class="source">Images peintes par Elena Plain</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>À partir des restes de près de 100 individus retrouvés dans la nécropole française de la commune de Gurgy (Yonne) vieille de 6 700 ans, nous avons reconstitué deux vastes arbres généalogiques préhistoriques révélant ainsi de nouvelles informations sur une communauté du Néolithique (5<sup>e</sup> millénaire avant J.-C.).</p>
<p>Nos nouveaux résultats, <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-023-06350-8">publiés aujourd’hui dans <em>Nature</em></a>, montrent un groupe d’agriculteurs préhistoriques qui vivaient au sein d’un réseau formé de plusieurs communautés. </p>
<p>Ce groupe s’est installé à Gurgy en apportant avec lui les ossements d’un « père fondateur », établissant ainsi une lignée sur sept générations, structurée par les hommes. </p>
<p>Ces derniers restaient dans la communauté alors que les femmes se déplaçaient vers d’autres groupes pour fonder de nouvelles familles.</p>
<h2>Il n’est pas si facile de comprendre les comportements sociaux des sociétés passées</h2>
<p>Il y a environ 9 000 ans, le « mode de vie néolithique » <a href="https://theconversation.com/european-invasion-dna-reveals-the-origins-of-modern-europeans-38096">s’est répandu de l’Anatolie</a> (la grande péninsule composée principalement de l’actuelle Turquie) vers l’Europe occidentale, transporté par de grandes migrations humaines.</p>
<p>De chasseurs-cueilleurs nomades, les gens se sont sédentarisés et ont commencé à cultiver. Avec la capacité de produire et de stocker de la nourriture supplémentaire, les Néolithiques ont développé de nouveaux fonctionnements sociaux fondés sur la richesse, la gestion des terres et l’accès aux ressources, formant notamment des <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.2120786119">hiérarchies sociales</a>.</p>
<p>Les sépultures anciennes peuvent nous en apprendre beaucoup sur la manière dont les hommes préhistoriques traitaient leurs morts. Cependant, il a toujours été difficile pour les chercheurs de comprendre comment ces sociétés se comportaient au quotidien. Ces difficultés sont dues à l’absence de documents écrits et à des données matérielles qui peuvent être difficiles à interpréter (réseaux d’échanges de matières premières ou de biens manufacturés, etc.).</p>
<p>Le Bassin parisien est bien connu pour ses <a href="https://doi.org/10.12766/jna.2010.37">structures funéraires monumentales</a> (longs tertres funéraires construits pour des personnes importantes). En parallèle, il n’y a que de rares sites regroupant des sépultures sans monument, qui sont possiblement les habitants « normaux » de la région, et le site de Gurgy représente la plus grande de ces nécropoles non monumentales. L’étude de ces sépultures est un moyen de comprendre qui étaient ces gens, enterrés plus simplement.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/539541/original/file-20230726-25-t8cqps.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/539541/original/file-20230726-25-t8cqps.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/539541/original/file-20230726-25-t8cqps.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=740&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/539541/original/file-20230726-25-t8cqps.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=740&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/539541/original/file-20230726-25-t8cqps.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=740&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/539541/original/file-20230726-25-t8cqps.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=930&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/539541/original/file-20230726-25-t8cqps.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=930&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/539541/original/file-20230726-25-t8cqps.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=930&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Photographie de la femme GLN270A (à droite, pas de résultats génétiques) avec laquelle les os longs de l’ancêtre principal GLN270B du grand arbre généalogique (à gauche) ont été ré-enterrés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Stéphane Rottier</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous avons échantillonné majoritairement les os pétreux (la partie la plus dense de l’os temporal dans laquelle se situe l’oreille interne), élément osseux qui préserve le mieux l’ADN ancien dans le corps humain, et nous avons appliqué les méthodes les plus récentes d’obtention de l’ADN ancien. Parmi ces techniques, celle dite de la « capture » permet d’accéder à de l’ADN plus dégradé sur un grand nombre d’individus. Elle cible des portions spécifiques et informatives du génome, permettant de comparer ces mêmes régions d’un individu à l’autre sans avoir besoin de la totalité du génome.</p>
<p>Nous avons également utilisé des techniques spécialisées et novatrices pour estimer le degré de parenté de ces individus. Grâce à l’échantillonnage de presque tous les individus de cette nécropole de Gurgy, nos nouveaux résultats révèlent ainsi deux grands arbres généalogiques qui ouvrent une fenêtre sur la vie des membres de cette communauté préhistorique.</p>
<h2>Un réseau de communautés</h2>
<p>Dès la fouille du site, nous avons observé que les tombes ne se chevauchaient pas, ce qui signifie qu’il y avait peut-être des marques sur le sol (un peu comme les pierres tombales utilisées aujourd’hui). Cela suggérait également que des personnes étroitement liées savaient où leurs proches étaient enterrés.</p>
<p>Grâce au croisement de différentes approches génomiques et anthropologiques, nous avons pu reconstituer deux des plus grands arbres généalogiques jamais réalisés à partir d’une nécropole préhistorique. L’un des arbres généalogiques relie 63 individus sur sept générations, tandis que l’autre relie 12 individus sur cinq générations.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Interprétation artistique du grand arbre généalogique de Gurgy avec des portraits dessinés à la main" src="https://images.theconversation.com/files/534954/original/file-20230630-29-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/534954/original/file-20230630-29-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=200&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/534954/original/file-20230630-29-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=200&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/534954/original/file-20230630-29-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=200&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/534954/original/file-20230630-29-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=251&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/534954/original/file-20230630-29-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=251&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/534954/original/file-20230630-29-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=251&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les portraits peints des individus sont basés sur des traits physiques (pigmentation) estimés à partir de l’ADN (lorsqu’il est disponible), ainsi que sur l’âge et le sexe génétique. Les carrés en pointillés (génétiquement masculin) et les cercles (génétiquement féminin) représentent les individus qui n’ont pas été trouvés sur le site ou qui n’ont pas fourni suffisamment d’ADN pour l’analyse.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Images peintes par Elena Plain ; reproduites ici avec l’autorisation de l’Université de Bordeaux/UMR 5199 PACEA</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’exploration de ces arbres généalogiques a révélé une claire tendance à la descendance via la lignée masculine (appelée patrilinéarité). Il s’agit d’une pratique selon laquelle chaque génération est presque exclusivement liée à la génération précédente par l’intermédiaire de son père biologique et que les statuts sont transmis d’une génération à la suivante.</p>
<p>Nos résultats suggèrent également la pratique de la virilocalité à Gurgy. Cela signifie que les fils sont restés là où ils sont nés et ont eu des enfants avec des femmes extérieures à Gurgy.</p>
<p>En appliquant sur les dents les <a href="https://doi.org/10.3109/03014461003649297">analyses isotopiques du strontium</a>, qui s’attachent à déterminer la mobilité au cours de la vie d’un individu grâce à la signature chimique de l’environnement enregistrée par les tissus lors de leur croissance, nous avons confirmé que les femmes exogènes (non reliées génétiquement au reste de la communauté) ont une origine non locale.</p>
<p>Il est intéressant de noter que certaines des femmes « nouvellement arrivées » n’avaient qu’un lien de parenté distant, voire inexistant, les unes avec les autres, ce qui signifie qu’elles viennent d’un large réseau de communautés.</p>
<p>Enfin, nous avons également observé que les descendantes adultes de la lignée principale de Gurgy n’étaient pas enterrées sur le site, impliquant qu’elles avaient probablement quitté le groupe pour rejoindre elles-mêmes d’autres communautés voisines (à partir d’un certain âge).</p>
<h2>Un père fondateur</h2>
<p>Nous avons également découvert la tombe du « père fondateur » du cimetière : un homme dont presque tous les membres du principal arbre généalogique sont issus.</p>
<p>Nous avons remarqué que cet individu avait été déplacé de l’endroit où il avait été inhumé à l’origine et qu’il avait été réinhumé à Gurgy (aux côtés d’une femme dont nous n’avons pas pu obtenir l’ADN). Seuls ses os longs (de ses bras et de ses jambes) ont été apportés, et il a dû représenter un ancêtre important pour les premiers arrivés dans ce nouveau lieu de sépulture de la communauté.</p>
<p>Nous avons observé qu’un groupe entier, composé de plusieurs générations, est arrivé à Gurgy dès le début. Ce groupe a dû quitter une précédente nécropole, laissant derrière lui les enfants décédés en bas âge et absents de Gurgy dans les premières générations, mais emportant tout de même les restes de l’ancêtre fondateur. De même, dans les dernières générations de Gurgy, nous avons observé de nombreux enfants sans parents enterrés sur place. Ainsi, comme le groupe fondateur, ces dernières générations ont quitté Gurgy, ensemble, laissant derrière elles leurs propres enfants. Par conséquent, Gurgy n’a probablement été utilisé que pendant 3 à 4 générations, soit environ un siècle. </p>
<p>Cette recherche représente un point de départ pour l’étude interdisciplinaire de l’organisation sociale des sociétés préhistoriques, car ces grands arbres généalogiques permettent de nouvelles interprétations de la vie et des pratiques sociales des communautés préhistoriques.</p>
<p>Au fur et à mesure que nous découvrirons et analyserons ces nécropoles, nous pourrons peut-être comparer et opposer les pratiques sociales d’une région à l’autre et d’une époque à l’autre, ouvrant ainsi une véritable nouvelle fenêtre sur notre passé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210387/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Maïté Rivollat est membre de l'Institut Max Planck de Leipzig (Allemagne), de l'Université de Gand (Belgique) et de l'Université de Durham (Angleterre). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Adam "Ben" Rohrlach ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Des analyses ADN ont permis de reconstituer un arbre généalogique de sept générations ayant vécu il y a 7 000 ans et de comprendre l’organisation de cette petite société.
Maïté Rivollat, Archaeologist, Université de Bordeaux
Adam "Ben" Rohrlach, Mathematics Lecturer and Ancient DNA Researcher, University of Adelaide
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/206786
2023-06-05T15:54:47Z
2023-06-05T15:54:47Z
L’ADN circulant : une nouvelle arme simple et rapide dans le diagnostic et le suivi des cancers
<p>L’ADN est, normalement, confortablement niché dans un noyau au cœur de nos cellules. Par contre, quand celles-ci viennent à mourir, toute cette organisation se désagrège peu à peu. Notre matériel génétique n’échappe pas à cette débandade cellulaire. Alors que le noyau se dégrade, l’ADN se fragmente et ses morceaux se retrouvent libres.</p>
<p>L’ADN peut ainsi se retrouver dans la circulation sanguine : ces fragments constituent ce qu’on appelle l’« ADN circulant », ou ADNc. Longtemps ignoré ou sous-estimé, il est désormais de plus en plus scruté par les spécialistes qui lui découvrent de nombreux intérêts.</p>
<p>Une simple prise de sang (« biopsie liquide ») suffit en effet aux médecins pour le recueillir et l’étudier – un millilitre de plasma permet de le récolter par milliers voire par millions !</p>
<p>Et après ? Chez les sujets sains, l’ADNc est surtout relargué par les cellules du sang (les globules blancs, par exemple) qui arrivent en fin de vie. Par contre, chez les sujets atteints de cancer, il va en partie être d’origine tumorale. Or, comme la molécule d’ADN entière, il code des informations génétiques : certes très parcellaires, mais néanmoins précieuses pour le diagnostic.</p>
<p>Depuis le développement de techniques particulièrement sensibles pour le détecter, l’ADNc est devenu un <a href="https://presse.inserm.fr/adn-tumoral-circulant-dans-le-sang-un-nouveau-biomarqueur-du-cancer/1831/">allié précieux des chercheurs et des oncologues</a> !</p>
<h2>Un marqueur du cancer facile à détecter</h2>
<p>Le plus souvent, un diagnostic de cancer est posé suite à l’apparition de symptômes ou à la découverte d’une masse au scanner. Une biopsie (ou exérèse) de la tumeur n’est pas toujours possible, et c’est là que ce type d’analyse entre en scène.</p>
<p>Les biologistes peuvent séquencer le texte génétique (lire les lettres) porté par ce fragment d’ADN : cela leur permet de repérer les mutations présentes et, parfois, d’identifier le cancer dont il est issu. Ils peuvent ainsi caractériser plus précisément la tumeur et déterminer le pronostic de la maladie.</p>
<p>Parfois également, le cancer associé à cet ADNc n’est pas connu (chez un patient jusqu’alors en bonne santé) ou est bien caché (cancer dit « occulte ») : cette caractérisation peut aider les médecins à trouver la tumeur d’origine.</p>
<p>Ces informations sont aussi utiles pour <a href="https://jamanetwork.com/journals/jamaoncology/article-abstract/2797725">choisir les traitements les plus adaptés</a>. Chaque type de cancer présente en effet des vulnérabilités spécifiques, qui le rendent sensible à certains médicaments plutôt qu’à d’autres.</p>
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<h2>Des intérêts multiples</h2>
<p>Mais ce n’est pas tout. Chez les patients ayant un antécédent de cancer ou particulièrement à risque d’en développer un, l’analyse de l’ADNc peut aider à dépister la maladie avant l’apparition de symptômes.</p>
<p>De plus, son étude au cours du suivi d’un cancer chez un patient déjà diagnostiqué est utile à plusieurs niveaux. Avec une simple prise de sang, rapide et aisée à réaliser lors d’une consultation, l’oncologue peut :</p>
<ul>
<li><p><strong>Évaluer l’efficacité des traitements</strong> : la quantité d’ADNc associé à la tumeur diminue dans le sang quand celle-ci régresse ; si son taux reste stable, c’est que le traitement ne marche pas. S’il devient indétectable, c’est que le patient est en rémission.</p></li>
<li><p><strong>Assurer un suivi plus simple des patients</strong>, sans avoir à répéter les scanners (qui délivrent des rayons X toxiques sur le long cours) et les biopsies de la tumeur ou de ses métastases. Les biopsies tissulaires sont invasives et présentent un risque d’hémorragie, d’infection… notamment en cas de tumeur des organes profonds. L’oncologue peut suivre l’évolution de la maladie de façon plus régulière tout en étant moins invasif. Point important, surtout chez l’enfant.</p></li>
<li><p><strong>Guetter une éventuelle rechute</strong>. La réapparition de l’ADNc est synonyme de récidive, qu’il est ainsi possible de diagnostiquer précocement, avant même l’apparition d’une tumeur détectable cliniquement ou par imagerie – le scanner n’est pas très performant pour détecter des micrométastases (< 3 mm).</p></li>
<li><p><strong>Détecter toutes les anomalies génétiques de la tumeur</strong>. Contrairement à l’ADN obtenu via une biopsie, qui ne va concerner qu’un petit fragment de la tumeur, ici c’est l’ADN issu de toutes les cellules cancéreuses, où qu’elles soient, qui peut être analysé. L’ADNc porte de ce fait les anomalies génétiques du cancer et de toutes ses métastases.</p></li>
<li><p><strong>Suivre l’évolution des mutations</strong>. Ce point est particulièrement crucial car, sous la pression des traitements (chimiothérapie, radiothérapie), qui créent un environnement toxique pour la tumeur, les anomalies présentes dans l’ADN des cellules cancéreuses évoluent : de nouvelles mutations apparaissent qui leur permettent parfois d’acquérir de nouvelles capacités et de résister. Identifier ces mutations de résistance est nécessaire pour adapter les chimiothérapies.</p></li>
<li><p><strong>Mieux comprendre la maladie sur le plan génétique</strong>. Ce qui est important pour faire avancer la recherche et contribuer au développement de traitements innovants, plus efficaces.</p></li>
</ul>
<p>Les scientifiques analysent aussi – grâce à des techniques qui sont encore du domaine de la recherche – des modifications à la surface de l’ADNc qui servent à <a href="https://www.nature.com/articles/s41587-022-01447-3">réguler l’expression des gènes présents, dont certains sont des accélérateurs de la croissance tumorale</a>.</p>
<h2>Au-delà du plasma et du cancer</h2>
<p>L’ADNc peut également être recueilli dans des liquides autres que le plasma, tels que les urines où il est efficace pour le diagnostic de cancers de la vessie, du rein ou de la prostate <a href="https://www.nature.com/articles/s41571-022-00660-y">mais aussi de cancers non urologiques</a>. Et le recueil des urines est encore plus aisé que celui du plasma !</p>
<p>Chez les patients présentant une tumeur du cerveau, il peut être détecté dans le liquide céphalo-rachidien – liquide baignant le cerveau et la moelle épinière. Il y est présent en plus grandes quantités que dans le sang, mais le <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34999836/">prélèvement y est complexe et nécessite une ponction dans le dos</a> (entre deux vertèbres).</p>
<p>Enfin, ces précieuses molécules ne sont pas utiles uniquement dans les cancers. Elles ont également prouvé leur <a href="https://www.has-sante.fr/jcms/c_2768510/fr/place-des-tests-adn-libre-circulant-dans-le-sang-maternel-dans-le-depistage-de-la-trisomie-21-foetale">efficacité dans le dépistage de la trisomie 21</a> au cours de la grossesse. L’<a href="https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMcibr2209405">ADNc du fœtus peut être recueilli dans le sang maternel</a>, sans besoin donc de pratiquer une amniocentèse – cette ponction de liquide amniotique qui est à la fois invasive pour le fœtus et redoutée par les futures mamans…</p>
<p>Des usages, donc, en plein développement et qui vont encore se multiplier ! Au grand intérêt des chercheurs, et au bénéfice des patients.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206786/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Audrey Rousseau ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
L’ADN circulant dans le sang peut être recueilli par simple prise de sang. Mieux, son analyse permet d’établir rapidement le diagnostic de plusieurs cancers et de suivre l’évolution de la maladie.
Audrey Rousseau, Professeur en Anatomie Pathologique - Médecin enseignant-chercheur au CHU d'Angers, Université d'Angers
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/205436
2023-05-28T15:36:04Z
2023-05-28T15:36:04Z
Maladies génétiques : comment un champignon comestible pourrait corriger notre ADN
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/528570/original/file-20230526-19-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4475%2C2965&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le clitocybe inversé (Lepista inversa) contient une molécule capable de corriger certains types de mutations.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Roodbruine_schijnridderzwammen_(Lepista_flaccida)._22-01-2021_(d.j.b.)_01.jpg">Dominicus Johannes Bergsma / Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Mucoviscidose, myopathies, hémophilies… <a href="https://www.plateforme-maladiesrares.org/presentation/les-maladies-rares.html">Les maladies génétiques touchent une personne sur vingt dans le monde</a>. En règle générale, elles apparaissent durant l’enfance, et sont liées à l’absence ou au dysfonctionnement d’une protéine. Leur issue est malheureusement souvent fatale, car les traitements permettant d’y remédier sont encore trop rares.</p>
<p>Nos travaux pourraient cependant ajouter une corde à l’arc des scientifiques qui cherchent à réparer certaines anomalies de l’ADN impliquées dans ces maladies. </p>
<p>Nous avons en effet identifié, dans un champignon commun qui pousse notamment dans les forêts françaises (le clytocybe inversé), une molécule capable <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29131862/">de corriger des mutations particulières appelées mutations « STOP »</a>, non seulement dans des cellules en culture, mais aussi chez la souris. Et peut-être, demain, chez l’être humain… Explications.</p>
<h2>Les mutations « STOP » ou mutations « non sens »</h2>
<p>Parmi les problèmes moléculaires qui peuvent mener au développement d’une maladie génétique figurent notamment certaines mutations particulières appelées mutations « non-sens » ou « STOP ». De telles mutations touchent environ 10 % des patients atteints de maladies génétiques. Or, à l’heure actuelle, aucun traitement ne permet de les soigner, même si quelques pistes thérapeutiques sont à l’étude.</p>
<p>Pour comprendre le problème, penchons-nous brièvement sur notre ADN. Celui-ci compose nos chromosomes ; il peut être considéré comme une longue chaîne constituée d’une succession de plus petites molécules, les nucléotides. Ces « maillons » sont de quatre types, symbolisés par les lettres A (Adénine), T (Thymine), G (Guanine) et C (Cytosine). L’enchaînement de ces quatre nucléotides constitue la « séquence » de l’ADN.</p>
<p>Certaines portions de cette séquence correspondent à des gènes, autrement dit des régions qui contiennent les informations nécessaires à la fabrication de protéines.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/pnYNsbCWBLg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>En temps normal, la séquence d’un gène permet de produire une protéine qui fonctionne correctement. Mais il arrive que l’ADN soit endommagé ou modifié. Dans certains cas, les modifications de séquence des gènes (ou « mutation ») qui en résulte font que les protéines correspondantes ne peuvent plus être fabriquées correctement. C’est par exemple le cas lorsqu’une mutation « non sens » (aussi appelée mutation « STOP ») est introduite dans l’ADN.</p>
<p>Ce type de mutation fonctionne comme un signal d’arrêt : lorsque le gène muté est utilisé pour produire la protéine correspondante, la fabrication de cette dernière s’interrompt prématurément. Conséquence : soit la protéine n’est pas produite, soit elle est trop courte, et ne fonctionne pas correctement.</p>
<p>Or, les protéines jouent d’innombrables rôles dans notre organisme. Les hormones, les anticorps, les récepteurs cellulaires, les enzymes, entre autres, sont des protéines. Si certaines d’entre elles sont non fonctionnelles, absentes ou anormales, des maladies peuvent donc rapidement survenir.</p>
<h2>Corriger les mutations non-sens grâce à un champignon ?</h2>
<p>Créée en 2003, la <a href="https://chembiofrance.cn.cnrs.fr/fr/composante/chimiotheque">chimiothèque nationale</a> est à la chimie ce que la bibliothèque nationale est à la littérature : une immense collection de plus de 80 000 composés chimiques et 15 000 extraits naturels originaux, mis à la disposition des équipes de recherche.</p>
<p>En 2012, 20 000 extraits de plantes, micro-organismes et champignons issus de cette chimiothèque nationale ont été testés via un protocole permettant d’identifier les composés capables de corriger efficacement les mutations non-sens dans des cellules humaines cultivées en laboratoire.</p>
<p>Ce criblage a permis de détecter une activité correctrice de mutations non-sens intéressante <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29131862/">dans un extrait provenant de <em>Lepista inversa</em> (ou clitocybe inversé)</a>. Ce champignon commun, comestible quoique peu savoureux, peut être ramassé dans les forêts d’Europe, d’Amérique du Nord ou d’Afrique du Nord.</p>
<p>Suite à cette découverte, nous avons entamé une collaboration avec les scientifiques du Muséum national d’histoire naturelle de Paris (qui avaient initialement préparé cet extrait pour le mettre en collection) afin de purifier la molécule impliquée dans cette activité.</p>
<p>C’est ainsi que nous avons identifié la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7083880/pdf/41467_2020_Article_15140.pdf">2,6-diaminopurine, ou DAP</a>. Étonnamment, cette molécule n’était pas connue pour posséder une telle capacité de correction.</p>
<h2>La DAP, un puissant correcteur de mutations non-sens</h2>
<p>Après avoir purifié la DAP, nous avons comparé son activité à celle d’autres molécules correctrices de mutations non-sens déjà connues. La molécule de champignon s’est montrée bien plus efficace que ses concurrentes pour corriger des mutations dans des cellules en culture.</p>
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<img alt="Schéma de la 2,6-diaminopurine" src="https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La 2,6-diaminopurine présente la capacité de corriger les mutations « non-sens »</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/2,6-Diaminopurine">Yikrazuul / Wikimedia Commons</a></span>
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<p>L’étape suivante a été d’évaluer sa toxicité : bonne nouvelle, la DAP ne présente pas ou peu de toxicité sur les cellules en culture. Enfin, il a fallu élucider son mode d’action, autrement dit, la façon dont elle fonctionne. Ce dernier point est très important, car il permet d’anticiper de possibles effets secondaires.</p>
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<p>Nous avons découvert que la DAP inhibe l’activité d’une enzyme qui agit sur la machinerie cellulaire impliquée dans la fabrication des protéines. Sans entrer dans les détails : l’inhibition de cette enzyme a pour conséquence de rendre « lisible » la séquence de mutation « STOP ».</p>
<p>En absence de DAP, une telle séquence est perçue comme un signal d’arrêt par la machinerie cellulaire qui fabrique les protéines. Mais après l’ajout de DAP, la machinerie cellulaire qui fabrique les protéines n’est plus arrêtée par la présence d’une séquence « STOP ».</p>
<p>Point particulièrement intéressant, ce mécanisme fonctionne seulement lorsque la séquence « STOP » résulte d’une mutation. Les « stops » physiologiques, qui sont normalement présents à la fin des séquences destinées à produire les protéines, ne sont pas affectés par la DAP. La production des protéines « normales » ne devrait donc pas être modifiée.</p>
<p>Après ces premières recherches menées sur des cellules en culture, nous avons poursuivi l’étude de cette molécule. Nous avons notamment cherché à savoir si elle pouvait corriger des mutations non-sens responsables d’une maladie génétique, la mucoviscidose.</p>
<h2>La DAP comme approche thérapeutique de la mucoviscidose</h2>
<p>La mucoviscidose est une maladie génétique rare qui touche principalement les voies respiratoires et le système digestif. En France, et plus généralement dans les pays occidentaux, c’est l’une des maladies génétiques les plus fréquentes. Elle affecte environ <a href="https://www.inserm.fr/dossier/mucoviscidose/">6000 personnes dans notre pays, où 200 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année</a>.</p>
<p>La mucoviscidose est due à une mutation du gène qui permet de fabriquer la protéine CFTR. Présente dans la membrane des cellules de diverses muqueuses (muqueuse respiratoire, muqueuse digestive…), CFTR forme un canal qui permet la sécrétion d’ions chlorure vers l’extérieur des cellules. Chez les personnes atteintes de mucoviscidose, ce canal dysfonctionne.</p>
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<img alt="Photo d’une mère aidant un jeune enfant doté d’une chambre d’inhalation à l’utiliser." src="https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les poumons des malades atteints de mucoviscidose sont peu à peu détruits par une inflammation anormale.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>En conséquence, les cellules sécrètent moins de chlorure et, surtout, moins d’eau. Moins hydraté, le mucus qui recouvre les muqueuses devient visqueux, collant, et ne remplit plus correctement sa fonction de protection vis-à-vis des microbes. Bactéries et champignons restent piégés dans les bronches, ce qui provoque des infections répétées et une inflammation durable qui dégrade peu à peu les poumons, entraînant des difficultés à respirer et, à terme, le décès des malades.</p>
<p>Avec l’aide de l’association <em>Vaincre la mucoviscidose</em>, nous avons dans un premier temps évalué le potentiel thérapeutique de la DAP sur des cellules en culture.</p>
<p>Nos résultats ont révélé que l’ajout de DAP corrige effectivement les mutations non-sens présentes dans le gène CFTR de telles cellules et permet de restaurer la fonction de la protéine correspondante. Sur des cellules de patients atteints de mucoviscidose due à une mutation non-sens, le rétablissement de la fonction de CFTR a été observé en moins de 24 heures.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/mucoviscidose-pourquoi-les-femmes-sont-elles-plus-vulnerables-que-les-hommes-195467">Mucoviscidose : Pourquoi les femmes sont-elles plus vulnérables que les hommes ?</a>
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<p>L’étape suivante a consisté à tester la capacité de la molécule à corriger les mutations non-sens au sein d’une organisation cellulaire s’approchant de celle d’un organe.</p>
<h2>Des résultats encourageants</h2>
<p>Grâce à une collaboration avec l’équipe de Jeff Beekman, aux Pays-Bas, nous avons pu tester la DAP sur des <a href="https://www.inserm.fr/actualite/organoides-quelle-place-dans-recherche-demain/">organoïdes intestinaux</a>.</p>
<p>Ces <a href="https://theconversation.com/les-compagnons-biologiques-un-atout-pour-la-medecine-du-futur-109304">« mini-organes »</a> sont des assemblages de cellules dont l’organisation rappelle celle de l’organe dont ils sont issus (dans notre cas, l’intestin, car les cellules utilisées dérivaient de cellules issues d’une biopsie rectale). L’intérêt est d’obtenir une architecture et des fonctionnalités proches de celle de l’organe originel.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C175%2C1146%2C785&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=578&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=578&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=578&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=726&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=726&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=726&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Organoïde intestinal cultivé à partir de cellules souches Lgr5+</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.1002149">Meritxell Huch</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’ajout de DAP dans le milieu de culture de ces organoïdes a permis, là encore, de restaurer la fonction de la protéine CFTR. Et ce, avec une efficacité comparable à celle d’un médicament déjà utilisé pour traiter des patients atteints de formes de mucoviscidose dues à un autre type de mutation que des mutations non-sens.</p>
<p>Ce résultat corrobore l’hypothèse que la DAP pourrait constituer un candidat médicament pertinent pour le traitement des mucoviscidoses liées à des mutations non-sens.</p>
<p>Enfin, pour se rapprocher encore davantage de la physiologie rencontrée chez les patients, nous avons effectué des expérimentations chez la souris.</p>
<h2>La DAP est aussi efficace chez l’animal</h2>
<p>Chez ce rongeur, l’absence de protéine CFTR conduit à une forte mortalité non seulement durant la gestation, mais aussi pendant les premiers jours qui suivent la naissance.</p>
<p>En nourrissant quotidiennement avec de la DAP, trois jours durant, des souris adultes porteuses d’une mutation non-sens dans le gène CFTR, nous avons montré que nous effacions les conséquences de cette dernière : ce traitement a en effet permis de <a href="https://www.cell.com/molecular-therapy-family/molecular-therapy/fulltext/S1525-0016(23)0 0014-X">restaurer la production et la fonction de la protéine CFTR</a>.</p>
<p>De manière encore plus remarquable, ces travaux ont révélé qu’il est possible de restaurer l’expression et la fonction de CFTR chez le fœtus, en administrant de la DAP à une femelle gestante. À la naissance, la protéine CFTR était présente chez les souriceaux, et le pourcentage de souris porteuses de la mutation correspondait au pourcentage attendu pour une mutation non mortelle. Ces résultats indiquent que la DAP est donc capable de passer la barrière du placenta.</p>
<p>Nous nous sommes aussi aperçus que nous pouvions prolonger l’exposition des petits après la naissance en poursuivant le traitement de la mère. En effet, la DAP passe aussi dans le lait maternel. Les souriceaux sont donc exposés à la molécule pendant toute la période d’allaitement.</p>
<p>Enfin, la DAP est également connue pour sa capacité à traverser la barrière hémato-encéphalique, qui protège le cerveau, ce qui laisse entrevoir la possibilité de l’utiliser afin de traiter des mutations non-sens dans cet organe.</p>
<p>Ce type d’intervention n’est cependant pas encore à l’ordre du jour : plusieurs étapes restent à franchir avant de pouvoir envisager d’utiliser la DAP comme médicament chez l’être humain.</p>
<h2>Et maintenant ?</h2>
<p>On peut aujourd’hui raisonnablement considérer la DAP comme une candidate solide pour la mise au point d’un traitement des formes de mucoviscidose dues aux mutations non-sens. Cependant, elle ne peut pas encore être administrée en l’état à l’être humain. Avant d’en arriver là, deux étapes majeures doivent encore être franchies.</p>
<p>Il faudra tout d’abord trouver une formulation pharmacologique qui permettra de rendre la DAP facilement administrable, et qui optimisera sa distribution dans l’organisme au cours du traitement.</p>
<p>Surtout, il faudra tester sa toxicité potentielle chez l’animal et l’être humain. Des tests réglementaires permettront de déterminer si la DAP peut entrer en <a href="https://theconversation.com/essais-cliniques-pratiques-et-reglementation-en-france-53331">phase d’essais cliniques</a> (durant laquelle elle sera administrée à des patients) ou si elle est au contraire trop dangereuse pour être administrée aux malades.</p>
<p>Ces deux étapes nécessitant des budgets très importants, elles seront entreprises par une jeune start-up, Genvade Therapeutics.</p>
<p>Jusqu’à présent, seules deux molécules correctrices de mutations non-sens ont atteint la phase des essais cliniques (ataluren et ELX-02). Malheureusement, ni l’une ni l’autre n’a permis d’améliorer significativement les symptômes des patients. Une des raisons avancées pour expliquer cet échec est que l’efficacité de ces molécules pourrait être trop faible pour se traduire par un bénéfice thérapeutique.</p>
<p>La DAP présente toutefois un profil plus prometteur, puisque son efficacité est très largement supérieure à celle de ces composés. Si les espoirs qu’elle soulève s’avèrent fondés, elle pourrait en théorie être utilisée pour traiter d’autres maladies génétiques, comme la myopathie de Duchenne ou l’hémophilie par exemple. Mais pour cela, de nombreux travaux complémentaires seront nécessaires.</p>
<p>Une chose est certaine : quelle que soit l’issue de ces recherches, elles auront été riches d’enseignements. Elles nous auront notamment rappelé que la biodiversité qui nous entoure est une richesse à préserver. En effet, qui aurait pu prévoir qu’un champignon aussi banal que le clitocybe inversé abritait une molécule potentiellement capable de corriger notre ADN ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205436/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabrice Lejeune est fondateur de la start-up Genvade Therapeutics. Fabrice Lejeune a reçu des financements de Vaincre la mucoviscidose, la Fondation maladies rares, la Fondation les Ailes, l'Agence Nationale de la Recherche et l'AFM-Téléthon. De plus, le laboratoire a reçu un financement du Contrat Plan Etat Région 2015-2020. </span></em></p>
En cuisine, le clitocybe inversé, un champignon comestible de nos forêts, est médiocre. Mais son intérêt est ailleurs : capable d’agir sur l’ADN, il pourrait un jour soigner des maladies génétiques.
Fabrice Lejeune, Chercheur Inserm au sein du laboratoire CANcer Heterogeneity, Plasticity and Resistance to THERapies (Inserm/ CNRS/ Université de Lille/Institut Pasteur de Lille/CHU Lille), Université de Lille
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/204838
2023-05-22T16:37:31Z
2023-05-22T16:37:31Z
Fouiller dans l’estomac des araignées pour savoir si elles mangent les insectes ravageurs de cultures
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/523789/original/file-20230502-3092-t0wg6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C5%2C1908%2C1270&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">De nouvelles méthodes d’analyse ADN permettent de déterminer ce que mangent les araignées — même si elles liquéfient leurs proies.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Dans les exploitations agricoles, les araignées sont d’importants prédateurs : elles contribuent à contrôler les populations d’insectes, y compris ceux qui ravagent les cultures. Elles pourraient ainsi être utilisées comme <a href="https://www.nj.gov/agriculture/divisions/pi/prog/buglab/what-is-biological-control/">« agent de biocontrôle »</a> pour limiter intentionnellement les populations de ces ravageurs des cultures. Mais nous devons pour cela mieux comprendre leurs rôles dans les écosystèmes agricoles.</p>
<p>Les zones semi-naturelles autour des champs d’une exploitation agricole sont des refuges <a href="https://doi.org/10.1111/rec.13485">pour les araignées</a> et d’autres arthropodes. Ces habitats leur fournissent des abris et des sources de nourriture alternatives à leurs proies habituelles, notamment lors des labours ou lorsque l’utilisation de pesticides est importante.</p>
<h2>Le régime alimentaire des araignées</h2>
<p>Pour déterminer si les araignées pourraient être des agents de biocontrôle efficaces, il faut déterminer leur régime alimentaire et ses saisonnalités : est-ce qu’elles mangent des insectes ravageurs de cultures, quand, etc.</p>
<p>Mais il s’avère difficile de savoir ce qu’ont mangé des araignées, car elles liquéfient les restes de leurs proies. En effet, certaines sont trop grosses pour être mâchées, voire trop dures à cause de leur exosquelette. Afin de décomposer les tissus corporels, les araignées <a href="https://doi.org/10.1186/s12864-017-3987-9">expulsent donc des enzymes digestives</a> sur leurs proies.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/523785/original/file-20230502-28-ykol2l.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="illustration de l’anatomie d’une araignée" src="https://images.theconversation.com/files/523785/original/file-20230502-28-ykol2l.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/523785/original/file-20230502-28-ykol2l.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=259&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/523785/original/file-20230502-28-ykol2l.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=259&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/523785/original/file-20230502-28-ykol2l.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=259&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/523785/original/file-20230502-28-ykol2l.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=326&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/523785/original/file-20230502-28-ykol2l.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=326&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/523785/original/file-20230502-28-ykol2l.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=326&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Anatomie d’une araignée femelle à deux poumons.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Spider_internal_anatomy-fr.svg">J.H. Comstock et R.F. Felix/Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<p>Pour les scientifiques, une solution consiste à analyser le contenu stomacal des araignées à l’aide du <em>barcoding</em> de l’ADN (ou « codage à barres »), une technique qui consiste à identifier une espèce en séquençant un fragment d’ADN, court et standardisé, d’un gène particulier. Cette méthode fonctionne même si les restes de proies sont liquéfiés.</p>
<p>La technique du codage à barres de l’ADN a 20 ans : Paul Hebert <a href="https://doi.org/10.1098/rspb.2002.2218">l’a appliqué aux arthropodes</a> en 2003 (avec certains d’entre nous), et a montré qu’il était possible de distinguer les espèces animales en séquençant l’ADN d’un spécimen. Depuis, la technologie a évolué grâce aux progrès dans les domaines du séquençage d’ADN et de la bio-informatique : il est maintenant possible d’identifier rapidement et avec précision les espèces présentes dans de nombreux échantillons.</p>
<h2>Analyse ADN de l’estomac d’une araignée</h2>
<p>Il est ainsi devenu de plus en plus fréquent – et populaire –, d’<a href="https://doi.org/10.1002/edn3.62">analyser le contenu stomacal des araignées grâce au barcoding de l’ADN</a> : l’ADN trouvé dans l’intestin d’une araignée permet de savoir ce qu’elle a mangé, et quel rôle elle tient dans l’écosystème.</p>
<p>Le <a href="https://doi.org/10.1139/gen-2018-0093">processus d’analyse</a> commence par la capture d’araignées sur le terrain. On les broie ensuite en une « soupe d’ADN », afin d’extraire l’ADN contenu dans leur estomac. En effet, l’estomac des araignées est très étendu, et traverse différentes parties du corps. Broyer des <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pone.0196589">araignées entières peut aider à détecter l’ADN de leurs proies</a>.</p>
<p>On peut ainsi déterminer si une araignée est généraliste – c’est-à-dire si elle se nourrit de nombreuses proies différentes, ou spécialiste – si elle se nourrit d’une espèce ou d’un groupe d’espèces particulier, qui peut inclure ou non des insectes ravageurs des cultures. Ces informations pourraient permettre de déployer des araignées comme agents de biocontrôle, une solution de lutte contre les ravageurs qui est plus durable, moins coûteuse et plus respectueuse de l’environnement que les insecticides.</p>
<p>Les prédateurs généralistes, dont certaines araignées, mangent en fait <a href="https://doi.org/10.1038/s41598-018-26191-0">ce qu’ils trouvent</a> : des espèces ravageuses comme les <a href="https://theconversation.com/quand-leurs-microbes-aident-ou-pas-les-pucerons-a-survivre-a-la-hausse-des-temperatures-186413">pucerons</a> ainsi que des espèces qui ne s’attaquent pas aux cultures comme les <a href="https://theconversation.com/les-insectes-ces-super-heros-148956">collemboles</a>.</p>
<p>C’est grâce à cette technique que les chercheurs ont constaté que les échantillons prélevés en début de saison de culture révélaient des « estomacs vides », et une augmentation du contenu de l’estomac plus tard dans la saison agricole. Mais ces recherches précédentes avaient analysé le contenu de l’estomac de trois espèces d’araignées seulement, et uniquement au début et à la fin de la saison de culture.</p>
<p>Nous cherchons actuellement à combler ces lacunes.</p>
<h2>Des communautés d’araignées qui évoluent au fil de la saison des cultures</h2>
<p>Nous menons nos recherches dans des exploitations agricoles qui comportent toutes un habitat restauré adjacent aux cultures, comme des prairies d’herbes hautes et des zones humides.</p>
<p>La présence de ces différents types d’habitats dans les exploitations agricoles modifie la structure du réseau trophique, avec des groupes de proies et de prédateurs qui se relayent au fil de la saison. Les habitats aquatiques (zones humides) et terrestres (prairies) sont connus pour favoriser les populations d’araignées, et donc la fonction de biocontrôle que nous cherchons à étudier.</p>
<p>Nous avons échantillonné les communautés d’araignées de manière intensive pendant quatre mois, entre mai et août, et à différentes distances des champs, afin d’étudier les mouvements des araignées tout au long de la saison de croissance des cultures. La connaissance des populations d’araignées et de leurs mouvements intervient dans la gestion des systèmes agricoles, par exemple pour déterminer le meilleur moment pour répandre des pesticides dans les champs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/515973/original/file-20230317-22-znihry.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C17%2C1200%2C779&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="un zoom d’une minuscule araignée sur une feuille" src="https://images.theconversation.com/files/515973/original/file-20230317-22-znihry.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C17%2C1200%2C779&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/515973/original/file-20230317-22-znihry.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/515973/original/file-20230317-22-znihry.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/515973/original/file-20230317-22-znihry.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/515973/original/file-20230317-22-znihry.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/515973/original/file-20230317-22-znihry.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/515973/original/file-20230317-22-znihry.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les araignées sauteuses sont plus actives entre juin et août.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(A. Dolezal)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Plusieurs groupes fonctionnels d’araignées</h2>
<p>Sur les exploitations agricoles avec des habitats restaurés à côté des champs de culture, nos données préliminaires révèlent la présence de plusieurs groupes fonctionnels d’araignées : des araignées tisseuses de toiles, des araignées de sol, des araignées embusquées, des chasseuses.</p>
<p>Au total, nous avons identifié vingt familles d’araignées au long de la période d’échantillonnage. Certaines étaient plus présentes dans certains habitats que dans d’autres. Ce nombre de familles présentes au sein d’exploitations agricoles est assez conséquent : il y a en effet <a href="https://www.toronto.ca/wp-content/uploads/2017/08/8f2a-Biodiversity_SpiderBook-Division-Planning-And-Development.pdf">environ vingt-cinq familles d’araignées au total dans cette région</a> (autour de Toronto, au Canada).</p>
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<p>Nous avons constaté une plus grande abondance d’araignées et de leurs proies dans les zones semi-naturelles entourant les champs de culture et à proximité de ces zones restaurées (zones humides ou prairies).</p>
<p>Les données préliminaires montrent également que les mois de juin et d’août sont la haute saison pour l’activité des araignées dans ces exploitations agricoles, où elles se déplacent beaucoup plus qu’en mai et en juillet.</p>
<h2>Mieux protéger les araignées, leurs écosystèmes… et la production agricole</h2>
<p>En étudiant le contenu de l’estomac des araignées, nous espérons mieux comprendre le rôle qu’elles jouent dans leurs écosystèmes, ce qui pourrait permettre de promouvoir des modèles de protection des cultures respectueux de l’environnement et inspirés de la lutte naturelle contre les ravageurs.</p>
<p>Selon une méta-analyse de 58 études publiées, les <a href="https://doi.org/10.1111/geb.12927">araignées ont supprimé les insectes nuisibles agricoles dans 79 % des études</a>, ce qui a permis d’améliorer les performances agricoles. Le recours excessif aux produits chimiques pour lutter contre les ravageurs des cultures n’est pas une option durable et il est urgent d’utiliser des approches écologiques.</p>
<p>Ainsi, le barcoding d’ADN ouvre de nouvelles voies pour étudier l’<a href="https://doi.org/10.3390/insects11050294">écologie des araignées et leur potentiel en tant qu’agents de biocontrôle dans les paysages agricoles</a>. Et grâce aux progrès des technologies de séquençage de l’ADN et de la bio-informatique, cela pourrait contribuer à rendre les pratiques agricoles plus durables.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204838/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>
Des recherches pour comprendre comment les araignées régulent les populations d’insectes ravageurs de cultures.
Aleksandra Jessica Dolezal, PhD Candidate, Integrative Biology, University of Guelph
Andrew MacDougall, Professor, Integrative Biology, University of Guelph
Dirk Steinke, Adjunct Professor, Integrative Biology, University of Guelph
Jeremy deWaard, Adjunct Professor, Centre for Biodiversity Genomics, University of Guelph
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/203719
2023-05-04T20:17:45Z
2023-05-04T20:17:45Z
Le protée : un amphibien des cavernes pouvant vivre plus de 100 ans grâce à son ADN particulier
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/523874/original/file-20230502-1478-qw05ft.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C3844%2C2528&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le protée : un amphibien pouvant vivre 100 ans.</span> <span class="attribution"><span class="source">Patrick Cabrol, CNRS Moulis</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Qu’est-ce que vieillir ? Biologiquement parlant, vieillir c’est subir un processus continu et progressif d’altération naturelle des performances autant en termes de survie que de reproduction. </p>
<p>Depuis longtemps les scientifiques recherchent des mesures fiables du <a href="https://theconversation.com/fr/search?q=vieillissement">vieillissement</a>. S’il peut se mesurer grâce à différents marqueurs comme la force musculaire, la fonction pulmonaire, les taux hormonaux, la longueur des télomères reste un standard reconnu. <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rspb.2023.0503">Nous venons de publier une étude</a> qui s’intéresse à cette variable chez le protée, un petit amphibien qui défie notre compréhension de la longévité chez les animaux au regard de ces télomères. </p>
<p><a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1077932/">Découverts dans les années 30</a>, ces séquences particulières d’ADN constituent des sortes de capuchons aux extrémités des chromosomes. Ces morceaux d’ADN sont constitués de répétitions de séquences non codantes (elles ne sont pas la base de production de protéines).</p>
<p>L’ADN est composé de 4 bases nommées Adénosine (A), Thymine (T), Cytosine (C) et Guanine (G). Les séquences des télomères sont différentes en fonctions des groupes d’organismes (TTAGG chez les arthropodes, TTAGGG chez les vertébrés et TTTAGGG chez les plantes) et le nombre de répétitions est également variable. Chez l’homme, par exemple la séquence TTAGGG est répétée sur environ 1 000 paires de bases. </p>
<h2>Chez l’humain, les télomères raccourcissent avec l’âge</h2>
<p>On sait maintenant clairement que la <a href="https://www.cell.com/fulltext/S0092-8674(13)00645-4">longueur des télomères diminue avec l’âge</a> et les télomères plus courts sont associés à une augmentation du risque de mortalité. Pourquoi ? Car à chaque division cellulaire, 25 à 200 bases sont perdues aux extrémités des télomères de chaque chromosome mais, grâce aux télomères, sans affecter les séquences codantes (servant de base à la formation des protéines). Sans télomères, des séquences de cet ADN codant seraient perdues chaque fois qu’une cellule se divise (généralement environ 50 à 70 fois) et cela conduirait éventuellement à des mutations et/ou la perte de gènes entiers.</p>
<p>Lorsque le télomère est devenu trop court, le chromosome atteint une « longueur critique » et ne peut plus être répliqué ; l’apoptose (ou mort cellulaire programmée) est alors déclenchée.</p>
<p>À l’inverse, si la télomérase (l’enzyme qui synthétise les télomères) a une activité forte, la longueur des télomères est maintenue, et le vieillissement de la cellule est retardé, par exemple dans les cellules de la lignée germinale (ovules et spermatozoïdes) et dans les cellules cancéreuses.</p>
<p>Cette relation étant générale et de nombreuses fois démontrée <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.1113306109">chez les mammifères et les oiseaux</a>, les télomères sont devenus une sorte d’horloge moléculaire universelle.</p>
<h2>Chez le protée, les télomères s’allongent avec l’âge</h2>
<p>Pourtant, chez les ectothermes (reptiles, amphibiens, insectes, mollusques, etc.) qui sont des animaux qui des croissances continues et conservent généralement des activités « télomérase » importantes dans toutes les cellules même somatiques (toutes cellules d’un organisme à part ovule ou spermatozoïdes) et ce tout au long de la vie. Les diminutions des télomères avec l’âge chez ces animaux deviennent <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24394156/">beaucoup moins claires, voire inexistantes</a> comme chez certains mollusques.</p>
<p>Une telle variabilité parmi les espèces ectothermes a souvent été attribuée aux <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2112235118">effets de la température environnementale</a> qui déterminent le <a href="https://www.researchgate.net/publication/51222502_Temperature_Growth_Rate_and_Body_Size_in_Ectotherms_Fitting_Pieces_of_a_Life-History_Puzzle">métabolisme, la croissance et même la mortalité</a> chez ces animaux. En effet, des températures plus basses entraînent généralement chez les ectothermes des taux de croissance plus faibles mais des tailles adultes plus grandes et des longévités plus importantes. </p>
<p>Or, il existe quelques espèces d’animaux ectothermes vivant naturellement à des températures stables sur l’ensemble de leur vie. Parmi ces espèces particulières, on trouve le protée (Proteus anguinus) qui est un amphibien cavernicole.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Photographie d’un protée" src="https://images.theconversation.com/files/524354/original/file-20230504-29-xpkgjl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524354/original/file-20230504-29-xpkgjl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=903&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524354/original/file-20230504-29-xpkgjl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=903&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524354/original/file-20230504-29-xpkgjl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=903&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524354/original/file-20230504-29-xpkgjl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1134&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524354/original/file-20230504-29-xpkgjl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1134&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524354/original/file-20230504-29-xpkgjl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1134&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les télomères du protée ne raccourcissent pas avec l’âge comme chez l’humain.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Patrick Cabrol, CNRS Moulis</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans une grotte à la température constante, cet urodèle d’une vingtaine de centimètre, blanc, sans yeux et avec des branchies externes rouges peut vivre pendant plus de 100 ans et ne se reproduit que tous les 7 ans en moyenne. Ces données proviennent de l’unique élevage au monde commencé juste après la Seconde Guerre mondiale dans une grotte des Pyrénées (à Moulis, France) équipée de multiples bassins approvisionnés avec l’eau courante à 12 °C d’une rivière souterraine naturelle reproduisant fidèlement l’habitat naturel de cet animal. </p>
<p>Voilà donc un organisme qui vit longtemps et avec lequel il n’y a pas d’effet de la température ! Nous avons donc mesuré la longueur des télomères sur des protées allant de 4 à 41 ans et ils… augmentent avec l’âge, et ce aussi bien chez les femelles que les mâles ! Est-ce là la clef de sa longévité ? En tout cas cela montre que certains organismes ont sélectionné des mécanismes qui brisent le schéma classique de raccourcissement des télomères lié à l’âge.</p>
<p>Fait intéressant, le protée, comme le <a href="https://theconversation.com/droles-danimaux-le-rat-taupe-nu-ce-rongeur-qui-ne-vieillit-pas-130088">rat-taupe</a>, certains poissons des grands fonds et certains mollusques arctiques, semblent appartenir à un petit groupe d’organismes qui sont de petite taille mais avec des durées de vie très importantes. Le rat-taupe (Heterocephalus glaber) pèse 35 grammes et vit plus de 30 ans ; un des champions de la longévité étant le mollusque appelé praire d’Islande (Arctica islandica) qui peut vivre jusqu’à 400 ans en ne pesant que quelques centaines de grammes.</p>
<p>L’extrême longévité de ces petits organismes s’explique en partie par leur habitat en général très stable et leur aptitude à réduire le risque de prédation, mais des télomères qui restent de même longueur qui augmenterait avec l’âge pourraient également être une de leur signature. </p>
<p>Mais cela aurait également des conséquences surprenantes. En effet, si les télomères longs protègent de la sénescence cellulaire, la surutilisation des processus de maintenance des télomères pourrait augmenter le risque d’immortalisation cellulaire et donc de cancer. Cela pourrait expliquer pourquoi il a été montré des mécanismes anticancéreux spécifiques chez le rat-taupe.</p>
<p>Est-ce le cas chez le protée ? Cela reste une question ouverte mais l’étude de la biologie d’animaux à longue durée de vie restant en bonne santé et capables de maintenir des niveaux élevés de reproduction jusque tard dans leur vie contribuera à notre meilleure compréhension de la façon dont les processus de vieillissement ont évolué en réponse aux facteurs environnementaux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203719/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yann Voituron a reçu des financements du CNRS et de l'Université Claude Bernard Lyon 1. </span></em></p>
Chez l’humain, la longueur des télomères, structures à l’extrémité de l’ADN diminue avec le temps, causant un vieillissement, alors que chez le protée, elle augmente. La clé de sa longévité ?
Yann Voituron, Enseignant-chercheur en physiologie, Inrae
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tag:theconversation.com,2011:article/204503
2023-04-26T17:01:48Z
2023-04-26T17:01:48Z
Le rôle des scientifiques canadiens dans le projet du génome humain montre pourquoi il est crucial de financer la recherche
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/522819/original/file-20230425-2394-800nf4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C5%2C1917%2C1003&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La recherche et la vision des scientifiques canadiens ont été fondamentaux dans le projet du génome humain. Aujourd'hui, le manque de financement menace la recherche sur les découvertes au Canada.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Pixabay)</span></span></figcaption></figure><p>Le 25 avril, le monde a célébré la <a href="https://www.unige.ch/biblio/fr/infos/sites/cmu/actus/journee-de-ladn/#:%7E:text=Le%2025%20avril%20se%20c%C3%A9l%C3%A8bre,Maurice%20Wilkins%20et%20Rosalind%20Franklin.">Journée de l’ADN</a> qui coïncide cette année avec le 70<sup>e</sup> anniversaire de la découverte de la structure en double hélice, et le 20<sup>e</sup> anniversaire de l’achèvement du <a href="https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/projet-human-genome">Projet du génome humain</a>.</p>
<p>Les Canadiens ont été au premier plan de ce Projet. En 1986, le Montréalais <a href="https://lebulletel.mcgill.ca/a-la-memoire-de-charles-r-scriver/">Charles Scriver, un éminent généticien de l’Université McGill</a> récemment décédé, avait convaincu le célèbre Howard Hughes Medical Institute (HHMI), aux États-Unis, de réunir les groupes qui pourraient financer et exécuter le projet du génome humain. Les lauréats du prix Nobel Walter Gilbert et James Watson ont assisté à cette réunion <a href="https://books.google.ca/books/about/The_Book_of_Man.html?id=ys5qAAAAMAAJ&redir_esc=y">et cela a été déterminant pour la suite</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/TCnG7R50IlU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le séquençage du génome.</span></figcaption>
</figure>
<p>Charles Scriver était bien conscient de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK234203/">l’importance du séquençage du génome humain</a> sur la génétique clinique et son impact sur la santé humaine. La réunion a été un catalyseur majeur <a href="https://books.google.ca/books/about/The_Book_of_Man.html?id=ys5qAAAAMAAJ&redir_esc=y">pour le développement du projet du génome humain</a>.</p>
<p>S’inspirant de Charles Scriver, un projet pour établir une preuve de concept, ou validation de principe, était nécessaire. Elle a été fournie par la découverte du gène de la <a href="https://www.inserm.fr/dossier/mucoviscidose/">mucoviscidose</a>, une maladie génétique qui touche l’appareil respiratoire et digestif, par Lap-Chee Tsui et Jack Riordan, alors à l’Université de Toronto, et Francis Collins, alors à l’Université du Michigan. En 1990, ils ont écrit : </p>
<blockquote>
<p><a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/21548331.1990.11704019">Plus largement, le clonage du gène CF fournit un démarrage rapide dans l’effort international pour cloner et cartographier l’ensemble du génome humain</a></p>
</blockquote>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/resoudre-le-casse-tete-de-la-mucoviscidose-et-de-ses-traitements-une-percee-digne-dun-prix-nobel-175486">Résoudre le casse-tête de la mucoviscidose et de ses traitements, une percée digne d’un prix Nobel</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Ces pionniers avaient accompli la <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.2475911">tâche herculéenne d’identifier le gène chez les sujets normaux porteurs d’une seule mutation causant la mucoviscidose chez les patients homozygotes</a>. Aujourd’hui, grâce à ces découvertes scientifiques canadiennes, les <a href="https://www.fibrosekystique.ca/uploads/RapportsDeDonneesAnnuel2021-WEB.pdf">patients atteints de mucoviscidose ont une experience de vie de 57 ans</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/DpOA94FA4H4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Dr Charles Scriver, Lauréat du Temple de la renommée médicale canadienne. 2001.</span></figcaption>
</figure>
<h2>Les formidables possibilités de l’ADN</h2>
<p>Un seul de ces pionniers, cependant, a été en mesure de diriger le projet extrêmement difficile du génome humain. <a href="https://www.gairdner.org/winner/francis-s-collins">Francis Collins a reçu le prix Gairdner International du Canada en 2002</a> pour son leadership exceptionnel dans ce projet, et en particulier pour l’effort international visant à cartographier et séquencer les génomes humains et autres espèces.</p>
<p>Un autre lauréat du prix Gairdner International, reconnu pour son leadership dans le projet du génome humain, est <a href="https://www.gairdner.org/winner/james-d-watson">James Watson</a>. Sa découverte de la double hélice lui a valu un <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/medicine/1962/watson/facts/">prix Nobel en 1962</a>.</p>
<p>Il y a cependant eu controverse : les données expérimentales sur la double hélice étaient en fait une radiographie d’un cristal d’ADN faite par la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Rosalind_Franklin">physicochimiste britannique Rosalind Franklin</a>, morte prématurément à l’âge de 38 ans, et privée de la reconnaissance de ses recherches.</p>
<p>Les conséquences de la découverte de l’ADN et du séquençage du génome humain ont été fondamentales pour la recherche médicale à l’échelle mondiale. Comme le <a href="https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMp2030694">résume Francis Collins en 2021</a>, les gènes de plus de 5 000 maladies rares ont été découverts, de même que pour l’Alzheimer, la schizophrénie, les maladies cardiaques et le cancer.</p>
<p>C’est aussi grâce à l’ADN que nous pouvons retracer les origines de nos familles, grâce à la généalogie génétique. Le prix Nobel en 2022 a été décerné à Svante Pääbo, de l’Institut Max Planck, de Leipzig, pour le <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/medicine/2022/press-release/%22%22">nouveau domaine de la paléogénomique</a>. Ses découvertes impliquant le séquençage complexe de l’ADN génomique de nos ancêtres disparus ont conduit à la découverte d’une nouvelle branche d’humains primitifs, maintenant connue sous le nom de Dénisoviens.</p>
<p>Aujourd’hui, la généalogie génétique des humains modernes et anciens a été développée par l’analyse de l’ADN de plus de 7 000 génomes différents. Ces nouvelles études ont défini la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC10027547/">localisation géographique du cheminement de nos ancêtres</a>, remontant à plus de 800 000 ans ! </p>
<h2>La Journée de l’ADN peut-elle avoir une importance au Canada ?</h2>
<p>Le dévouement de nos remarquables chercheurs, Lap-Chee Tsui, Jack Riordan et Charles Scriver, a inspiré et conduit au projet du génome humain. Cependant, le projet n’impliquait pas le Canada. La principale raison en était le financement. Le projet du génome humain a été largement financé par les National Institutes of Health (NIH) des États-Unis, pour les laboratoires du <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.042692499?url_ver=Z39.88-2003&rfr_id=ori:rid:crossref.org&rfr_dat=cr_pub%2520%25200pubmed">Dr Waterston, à l’Université de Washington, et du Dr Eric Lander, au MIT</a>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/des-scientifiques-canadiens-ont-contribue-au-vaccin-arnm-mais-la-recherche-fondamentale-est-en-peril-au-pays-190942">Des scientifiques canadiens ont contribué au vaccin ARNm. Mais la recherche fondamentale est en péril au pays</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>L’un des éminents journalistes et commentateurs politiques du Canada, Paul Wells, a récemment déploré la <a href="https://paulwells.substack.com/p/building-pyramids-from-the-top-down">détérioration, depuis des décennies, du financement de la recherche au Canada</a>.</p>
<p>Le pays continuera de perdre le talent dont il était fier. En 2019, le Canada se classait au 18<sup>e</sup> rang mondial pour le nombre de chercheurs par 1 000 habitants, alors qu’il était au 8<sup>e</sup> rang en 2011. Une telle perte est insoutenable pour relever les défis d’une inévitable prochaine pandémie, des changements climatiques et des ravages des maladies.</p>
<p>Charles Scriver, Lap-Chee Tsui et Jack Riordan ont démontré la valeur de la recherche exploratoire au Canada. Elle sauve des vies humaines à l’échelle mondiale. Le Canada devrait se souvenir de son héritage.</p>
<p><em>John Bergeron remercie Kathleen Dickson en tant que co-auteure et Francis Glorieux (Hôpital Shriners pour enfants de Montréal et le Centre universitaire de santé McGill) pour ses idées, corrections et modifications.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204503/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>John Bergeron ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Les chercheurs canadiens ont été à l’avant-plan de la recherche sur l’ADN. Cependant, le manque de financement menace leur capacité à relever les défis de l’avenir.
John Bergeron, Emeritus Robert Reford Professor and Professor of Medicine, McGill University
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/203977
2023-04-24T13:58:35Z
2023-04-24T13:58:35Z
Un esprit sain dans un corps sain ? Voici ce qu’en dit la science
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/522189/original/file-20230420-26-nosmra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C0%2C988%2C666&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’exercice physique serait-il inutile au fonctionnement cognitif ?</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Les effets positifs de l’activité physique sur la santé sont indéniables. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lexercice-bon-pour-le-corps-certes-mais-egalement-pour-le-cerveau-174429">L’exercice, bon pour le corps, certes, mais également pour le cerveau !</a>
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<p>Cependant, une étude récente remet en cause le célèbre adage <em>Mens sana in corpore sano</em>, ou « un esprit sain dans un corps sain ». Les auteurs y contestent l’importance de l’exercice physique pour la santé de notre cerveau et de notre cognition.</p>
<p>Chercheurs en santé, neurosciences et psychologie, nous avons publié, quelques jours plus tard, une étude qui vient alimenter ce débat scientifique.</p>
<p>Qui a tort, qui a raison ? La réponse n’est pas si simple. Voici ce qu’il en est. </p>
<h2>L’exercice physique serait-il inutile au fonctionnement cognitif ?</h2>
<p>La <a href="https://www.nature.com/articles/s41562-023-01554-4">première étude</a> a été publiée le 27 mars 2023. Il s’agit d’une revue de 24 méta-analyses qui réexamine les données de 11 266 personnes en bonne santé, en utilisant une approche plus rigoureuse que les analyses antérieures. </p>
<p>Bien que la quasi-totalité des 24 méta-analyses incluses dans cette étude ait démontré un effet positif de l’exercice physique régulier sur les fonctions cognitives, les auteurs soutiennent que ces analyses manquaient d’ajustements. Ils soulignent par exemple que le niveau d’activité physique en début d’intervention ainsi que la tendance de la communauté scientifique à ne publier que les résultats significatifs étaient rarement pris en compte. Une fois ces ajustements effectués, les auteurs aboutissent à des résultats suggérant que les bénéfices de l’exercice physique sont en réalité plus faibles que ceux estimés dans les précédentes méta-analyses, voire négligeables. </p>
<p>Sur la base de ces résultats, les auteurs se disent convaincus que les organismes de santé publique tels que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) devraient retirer l’amélioration de la santé cognitive et de la réussite scolaire de la <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/physical-activity">liste</a> des bienfaits de l’activité physique. </p>
<p>Dans la dernière phrase du résumé de l’article, les auteurs mettent notamment le lecteur en garde contre les affirmations et les recommandations liant l’exercice physique régulier aux bénéfices cognitifs chez les personnes en bonne santé, tout du moins, jusqu’à ce que des preuves scientifiques plus fiables s’accumulent. </p>
<p>Il n’a pas fallu attendre longtemps.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1641810112154140672"}"></div></p>
<h2>Une approche génétique : la randomisation mendélienne</h2>
<p>La <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-023-32150-1">seconde étude</a>, la nôtre, est une étude génétique incluant près de 350 000 personnes, publiée 4 jours plus tard, soit le 31 mars. Nous y apportons des preuves scientifiques à l’appui des bénéfices cognitifs de l’activité physique d’intensité modérée et élevée. </p>
<p>Ces preuves sont basées sur la méthode de randomisation mendélienne à deux échantillons, qui exploite les variations aléatoires de notre ADN survenant lors de la conception, donc avant la naissance. </p>
<p>Lorsqu’on compare deux humains, 99,9 % de leur matériel génétique est identique. On peut considérer l’ADN comme une longue chaîne de briques, appelées nucléotides. Il y a quatre types de briques, agencées de manière aléatoire : la thymine, l’adénine, la guanine et la cytosine. Ainsi, une fois sur 1 000, la brique d’ADN varie entre ces deux humains. Ces variations génétiques, appelées « snips », peuvent par exemple donner une brique de cytosine à un certain endroit de l’ADN d’une personne et une brique de thymine au même endroit chez une autre personne.</p>
<p>Le premier échantillon de notre étude, comptant 91 084 personnes, a été utilisé pour identifier les variations génétiques qui aboutissaient à des différences d’activité physique, mesurée à l’aide de <a href="https://axivity.com/product/ax3">capteurs de mouvement</a> portés au poignet. </p>
<p>Le second échantillon de notre étude, qui comptait 257 854 personnes, a été utilisé pour tester si ces variations génétiques associées au niveau d’activité physique influençaient le fonctionnement cognitif de manière proportionnelle. Si c’était le cas, nous pouvions conclure à un effet causal de l’activité physique sur la fonction cognitive.</p>
<h2>Preuves génétiques des bienfaits cognitifs de l’activité physique</h2>
<p>Dans notre étude utilisant une nouvelle méthode de <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-021-26970-w">randomisation mendélienne</a>, plus précise et plus robuste que les versions précédentes, les résultats montrent que des niveaux d’activité physique modérés et élevés conduisent à une amélioration du fonctionnement cognitif. </p>
<p>Il est d’ailleurs intéressant de noter que l’effet de l’activité physique modérée (marche rapide, vélo) était 1,5 fois plus important que celui de l’activité physique d’intensité élevée (course à pied, basketball, ski de fond). L’intensité de l’activité physique que nous pratiquons est donc importante. Et, surtout, nos résultats soulignent qu’il n’est pas nécessaire de se pousser jusqu’à l’épuisement pour obtenir les bénéfices cognitifs d’une activité physique régulière.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/522211/original/file-20230420-24-a4l2ia.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="femme sur un vélo" src="https://images.theconversation.com/files/522211/original/file-20230420-24-a4l2ia.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/522211/original/file-20230420-24-a4l2ia.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/522211/original/file-20230420-24-a4l2ia.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/522211/original/file-20230420-24-a4l2ia.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/522211/original/file-20230420-24-a4l2ia.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/522211/original/file-20230420-24-a4l2ia.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/522211/original/file-20230420-24-a4l2ia.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les bénéfices cognitifs de l’activité physique modérée sont 1,5 fois supérieurs à ceux de l’activité physique soutenue.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>L’importance de la durée et de l’intensité de l’exercice</h2>
<p>Quand l’ensemble de l’activité physique des participants était considéré (incluant les activités sédentaires et les activités physiques d’intensité légère), nos résultats ne montraient plus d’effet sur le fonctionnement cognitif. Ce résultat confirme l’importance d’atteindre des intensités suffisantes pour profiter des bénéfices cognitifs de l’exercice physique. </p>
<p>Ces résultats concordent avec ceux d’une <a href="https://physoc.onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1113/JP283582">étude récente</a> qui souligne l’importance de la durée et de l’intensité de l’exercice pour la libération d’une protéine appelée BDNF dans le cerveau. Cette protéine est impliquée dans la création de nouveaux neurones, de nouvelles connexions entre ces neurones et de nouveaux vaisseaux sanguins permettant de nourrir ces neurones. </p>
<p>Cette protéine, dont la <a href="https://cdnsciencepub.com/doi/abs/10.1139/apnm-2018-0192">production augmente au cours de l’exercice</a>, est donc un des mécanismes physiologiques permettant d’expliquer les effets bénéfiques de l’activité physique sur le fonctionnement cognitif. L’existence même de ce mécanisme explicatif renforce les résultats soutenant ces effets bénéfiques.</p>
<h2>Pourquoi les résultats divergent ?</h2>
<p>Plusieurs différences peuvent expliquer la divergence de résultats entre la méta-analyse basée sur des essais contrôlés randomisés et notre étude basée sur la génétique. </p>
<p>Tout d’abord, la méta-analyse s’intéresse uniquement aux personnes en bonne santé, ce qui n’est pas le cas de notre étude. Ensuite, notre étude différencie les activités physiques d’intensité modérée et élevée alors que la méta-analyse ne fait pas cette distinction. Enfin, la randomisation mendélienne évalue des effets à long terme, tout au long de la vie, alors que la méta-analyse se base sur des interventions durant entre 1 mois et 2 ans. </p>
<p>Puisque nous abordons ici les aspects temporels de l’activité physique, il nous parait important de rappeler qu’il n’est jamais trop tard pour s’y mettre. En effet, une <a href="https://jamanetwork.com/journals/jamanetworkopen/fullarticle/2727269">étude</a> de 2019 avait montré que commencer à être actif tard dans la vie procurait les mêmes effets positifs sur la santé qu’avoir été actif toute sa vie.</p>
<h2>Un esprit sain dans un corps sain</h2>
<p>Sur la base de nos résultats, il semble que l’amélioration du fonctionnement cognitif ait encore sa place sur la liste des bienfaits de l’activité physique. Comme c’est souvent le cas en sciences, il est plus raisonnable de ne pas prendre de décision hâtive et d’attendre les résultats des études scientifiques à venir avant de modifier les lignes directrices de promotion de l’activité physique. </p>
<p>Dans le climat sociopolitique actuel de méfiance envers la science, il est important de ne pas se précipiter sur la base d’une seule étude analysant différemment des données déjà existantes, et aboutissant à des conclusions contredisant des années de recherche basées sur ces mêmes données. </p>
<p>L’accumulation de preuves convergentes provenant de différentes équipes de recherche doit être un prérequis incontournable avant toute modification du message de santé publique. Comme le montre cet article, nous n’en sommes pas du tout là, et les effets de l’activité physique sur de très nombreux versants de la santé physique et mentale restent indéniables.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203977/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Matthieu P. Boisgontier est chercheur principal à la Bruyère Research Institute (BRI) d'Ottawa, membre et ancien co-président de la Society for Transparency, Openness, and Replication in Kinesiology (STORK), éditeur en chef de Communications in Kinesiology (CiK), membre de Peer Community In (PCI) et fondateur de PCI Health & Movement Sciences. Il a reçu des financements du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), de la Banting Research Foundation (BRF), de Mitacs, et de la Fondation Canadienne pour l'Innovation (FCI).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Boris Cheval a reçu des financements du fonds national suisse (FNS)</span></em></p>
Une nouvelle étude met en lumière les bénéfices cognitifs de l’activité physique alors qu’une autre semble dire le contraire, alimentant le débat scientifique sur la question. Voici ce qu’il en est.
Matthieu P. Boisgontier, Associate Professor, L’Université d’Ottawa/University of Ottawa
Boris Cheval, PhD. Neuropsychologie de l'activité physique, Université de Genève
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/204293
2023-04-21T12:43:25Z
2023-04-21T12:43:25Z
Dossier : Les 1 001 destins de la double hélice d’ADN
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/522336/original/file-20230421-28-efi9sh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C16%2C5463%2C3399&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La double hélice d'ADN est aussi devenue une icône culturelle.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pxhere.com/fr/photo/1528177">pxhere</a></span></figcaption></figure><p>En 1953, James Watson et Francis Crick publiaient leur <a href="https://www.nature.com/articles/171737a0">légendaire article</a> sur la structure de l’ADN, la fameuse double hélice. </p>
<p>Ces recherches ont marqué l’histoire de la biologie, et bien au-delà, l’histoire des êtres vivants, nous offrant une fenêtre sur la variété des formes de vie sur Terre et leur évolution, mais nous donnant aussi les moyens d’intervenir intentionnellement dans le code de programmation du vivant.</p>
<p>Soixante-dix ans plus tard, les applications de cette découverte ont complètement changé la société. Voici une sélection d’applications très différentes de la génétique et de la génomique, qui permet de mieux en comprendre les enjeux.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/edition-genomique-humaine-quels-espoirs-et-quelles-peurs-203215">Édition génomique humaine : quels espoirs et quelles peurs</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="Image en carte à gratter de Bill Sanderson, 1990" src="https://images.theconversation.com/files/522329/original/file-20230421-881-1qhoo2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/522329/original/file-20230421-881-1qhoo2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/522329/original/file-20230421-881-1qhoo2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/522329/original/file-20230421-881-1qhoo2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/522329/original/file-20230421-881-1qhoo2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=537&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/522329/original/file-20230421-881-1qhoo2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=537&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/522329/original/file-20230421-881-1qhoo2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=537&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La famille de Laocoon en proie à des doubles hélices d’ADN.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://wellcomecollection.org/works/n5nyj788/images?id=ap3d2z87">Wellcome Trust Limited 1990</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Soixante-dix ans après la découverte de la structure de l’ADN, on sait modifier les génomes humains. Zooms sur trois enjeux majeurs : héritabilité, régulation, équité dans l’accès aux soins.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/decouvrir-de-nouvelles-especes-grace-a-ladn-quelles-laissent-derriere-elles-181861">Découvrir de nouvelles espèces grâce à l’ADN qu’elles laissent derrière elles</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="Poissons, planctons, méduses, et autres espèces colorées, sur fond noir" src="https://images.theconversation.com/files/522330/original/file-20230421-28-pdoiw1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/522330/original/file-20230421-28-pdoiw1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/522330/original/file-20230421-28-pdoiw1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/522330/original/file-20230421-28-pdoiw1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/522330/original/file-20230421-28-pdoiw1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/522330/original/file-20230421-28-pdoiw1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/522330/original/file-20230421-28-pdoiw1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La biodiversité marine est toujours méconnue. Ici, des espèces d’eaux intermédiaires, qui pourraient être affectées par les activités minières dans les abysses.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pnas.org/cms/10.1073/pnas.2011914117/asset/3571810c-ff7e-4751-b5b4-32680272f70e/assets/images/large/pnas.2011914117fig01.jpg">E. Goetze, K. Peijnenburg, D. Perrine, B. Takenaka, J. Kaneko, S. Haddock, J. Drazen, B. Robison, Danté Fenolio, avec l’autorisation de l’Université de Hawaii.)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’ADN environnemental révèle que la biodiversité des grands fonds est bien plus importante que ce que l’on pensait, avec plus d’un tiers des espèces encore inconnues.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/comment-fabriquer-de-ladn-et-creer-de-nouveaux-genomes-203249">Comment fabriquer de l’ADN et créer de nouveaux génomes</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="Double hélice en forme de 53" src="https://images.theconversation.com/files/522333/original/file-20230421-18-1o6rtz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/522333/original/file-20230421-18-1o6rtz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=322&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/522333/original/file-20230421-18-1o6rtz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=322&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/522333/original/file-20230421-18-1o6rtz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=322&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/522333/original/file-20230421-18-1o6rtz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/522333/original/file-20230421-18-1o6rtz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/522333/original/file-20230421-18-1o6rtz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La double hélice d’ADN a été découverte en 1953, il y a 70 ans. Depuis, on sait fabriquer de l’ADN à partir de ses briques de base, et même créer de nouveaux génomes (de petites tailles, mais quand même).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://wellcomecollection.org/works/hg3eqrjd">Peter Artymiuk, Wellcome Trust Images</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Depuis la découverte de la double hélice, on a appris à lire, modifier et écrire l’ADN – jusqu’à créer des génomes nouveaux.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/comment-fonctionnent-les-vaccins-a-arn-et-a-adn-125267">Comment fonctionnent les vaccins à ARN et à ADN ?</a></h2>
<p>Le laboratoire Pfizer a mis au point un vaccin contre le coronavirus SARS-CoV-2, qui a été le premier a être administré dans plusieurs pays dont la France. Retour sur son principe de fonctionnement.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/ladn-sera-t-il-lavenir-du-stockage-de-donnees-159387">L’ADN sera-t-il l’avenir du stockage de données ?</a></h2>
<p>Peut-on se servir de la double hélice d’ADN pour stocker la quantité croissante de données que nous générons ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204293/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Depuis la découverte de la structure de l’ADN, de nombreuses applications ont vu le jour. Une sélection des articles de la rédaction.
Elsa Couderc, Cheffe de rubrique Science + Technologie, The Conversation France
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/203249
2023-04-19T16:55:59Z
2023-04-19T16:55:59Z
Comment fabriquer de l’ADN et créer de nouveaux génomes
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/520565/original/file-20230412-14-9ewiq4.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C0%2C1452%2C798&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La double hélice d'ADN a été découverte en 1953, il y a 70 ans. Qu'en a-t-on tiré depuis?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://wellcomecollection.org/works/hg3eqrjd">Peter Artymiuk, Wellcome Trust Images</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Il y a 70 ans, le 25 avril 1953, trois articles publiés dans la revue <em>Nature</em> ont changé notre vision du monde. La <a href="https://www.nature.com/articles/171737a0">découverte de la structure de la molécule origine de l’hérédité</a>, l’ADN en double hélice, représente l’une des plus grandes découvertes en biologie du XX<sup>e</sup> siècle.</p>
<p>L’organisation de la molécule siège de la vie est somme toute assez simple : l’ADN est constitué d’unités répétitives, les nucléotides, qui forment une <a href="https://www.msdmanuals.com/fr/professional/multimedia/figure/structure-de-ladn">chaîne chimique</a>. Un <a href="https://www.supagro.fr/ress-tice/ue1-ue2_auto/Bases_Biologie_Moleculaire_v2/co/_gc_briques_elementaires.html">nucléotide</a> est une molécule issue de la combinaison de trois composants chimiques : une base azotée, un sucre et de l’acide phosphorique. Quatre types de bases azotées déterminent quatre types de nucléotides, qui se combinent à l’infini dans l’ADN et sont à la base de la diversité du vivant (A : adénosine ; T : thymine ; G : guanine ; C : cytosine). Enfin, dans l’ADN, chaque nucléotide est lié à ses deux voisins par une liaison chimique dite « phosphodiester ». Dans le vivant, ce sont des enzymes, catalyseurs des réactions biochimiques, qui réalisent ces liaisons chimiques.</p>
<p><a href="https://www.senat.fr/rap/r11-378-1/r11-378-115.html">Depuis que cette structure a été élucidée</a>, les humains ont appris à lire l’ADN, de plus en plus vite et des brins de plus en plus longs. Parallèlement, nous avons trouvé comment fabriquer (synthétiser) de l’ADN à partir de bases azotées (1972) – ce qui nous permet aujourd’hui d’aller jusqu’à inventer des ADN comme un écrivain invente un livre à partir de l’alphabet (en respectant quelques règles de grammaire tout de même). Nous savons également « amplifier » de l’ADN (1983), c’est-à-dire cibler une région bien déterminée sur l’ADN et la recopier en milliers d’exemplaires, notamment avec la désormais bien connue PCR. Et bien sûr, nous savons éditer le génome (à partir de 1973 grâce à l’« ADN recombinant », où on combine différents morceaux d’ADN), c’est-à-dire le modifier localement pour en modifier ses fonctions – la technique d’édition du génome la plus connue est désormais celle des « ciseaux moléculaires » CRISPR-Cas9, né en 2012.</p>
<p>Ainsi, depuis 70 ans, l’amélioration des techniques de lecture de l’ADN, puis de fabrication et d’édition, ont conduit à développer notre capacité à comprendre le vivant.</p>
<h2>Pourquoi fabriquer de l’ADN alors qu’il y en a partout dans la nature ?</h2>
<p>Les synthèses à grande échelle et à faible coût sont sources de progrès tant en recherche fondamentale qu’appliquée. Par exemple, la reconstruction de <a href="https://productions-animales.org/article/view/3383#">génomes viraux</a> (c’est-à-dire la re-création en laboratoire de génomes viraux identiques) – virus de la grippe espagnole, VIH, SARS-CoV-2 par exemple – ont permis des avancées spectaculaires, comme l’accélération de la production de vaccins ou la génération de cellules résistantes aux infections liées à ces virus (tomates résistantes aux potyvirus par exemple).</p>
<p>Désormais, nous savons même écrire et concevoir de l’information génétique en nous inspirant du génome naturel, pour le reproduire en partie sur des régions intéressantes, ou bien dans sa globalité en l’optimisant.</p>
<p>Ceci est possible grâce à des progrès technologiques récents, comme les <a href="https://www.supagro.fr/ress-tice/PCR/5/co/puces.html">« puces à ADN »</a>, microdispositifs permettant de manipuler simultanément plusieurs séquences d’ADN, ou encore les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2860119/">technologies microfluidiques</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/520623/original/file-20230412-16-rygdt9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/520623/original/file-20230412-16-rygdt9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=364&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/520623/original/file-20230412-16-rygdt9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=364&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/520623/original/file-20230412-16-rygdt9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=364&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/520623/original/file-20230412-16-rygdt9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=458&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/520623/original/file-20230412-16-rygdt9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=458&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/520623/original/file-20230412-16-rygdt9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=458&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une puce à ADN avec 37500 tests (et un zoom), permettant d’analyser de grandes quantités de données.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/Microarray_analysis_techniques#/media/File:Microarray2.gif">Paphrag/Wikipedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ainsi, la génomique synthétique a désormais le potentiel de créer de <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2019/09/msc190082/msc190082.html">nouveaux génomes</a> et aussi des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/anie.201708741">cellules rudimentaires</a>, à l’exemple de la bactérie JCVI-syn3.0, une bactérie de synthèse possédant le plus petit génome jamais observé chez un organisme indépendant. Issue de <em>Mycoplasma genitalium</em>, une bactérie sexuellement transmissible, cette bactérie dont le génome a été synthétisé par des scientifiques ne contient que les gènes nécessaires à la vie.</p>
<p>Nous pouvons même créer de <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/anie.201708741">nouvelles formes de vie artificielle</a> comme les <a href="https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/robotique-vie-artificielle-chercheurs-creent-premier-robot-dote-metabolisme-53648/">robots ADN</a>, capables de se déplacer et de transporter des « colis » de molécules. Cette dernière technologie est à l’étude pour amener des médicaments vers des cellules ciblées dans le corps humain, telles que les cellules cancéreuses.</p>
<h2>Faire avancer la recherche et la médecine</h2>
<p>La synthèse de génomes permet d’aborder des questions de recherche ouvertes et accélère les avancées dans un large éventail de domaines. Par exemple, il est désormais possible de construire une super cellule immunologique en programmant sa séquence d’ADN. C’est le cas des <a href="https://www.gustaveroussy.fr/fr/les-cellules-car-t">cellules CAR-T</a> (<em>chimeric antigenic receptor-T</em>), des lymphocytes T modifiés génétiquement en 2012 dans le but de détecter et d’éliminer les cellules cancéreuses. D’autres champs d’applications consistent à produire des gènes non défectueux pour la thérapie génique, ou encore à développer un génome minimal avec les gènes essentiels pour aborder les principes de base de la vie, explorer la conception du génome entier et l’ingénierie métabolique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="illustration de l’action des cellules CAR-T dans le traitement de leucémie" src="https://images.theconversation.com/files/520625/original/file-20230412-26-xhnjar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/520625/original/file-20230412-26-xhnjar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=515&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/520625/original/file-20230412-26-xhnjar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=515&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/520625/original/file-20230412-26-xhnjar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=515&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/520625/original/file-20230412-26-xhnjar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=647&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/520625/original/file-20230412-26-xhnjar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=647&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/520625/original/file-20230412-26-xhnjar.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=647&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Illustration d’un lymphocyte T modifié génétiquement (en bleu) reconnaissant et attaquant une cellule leucémique (en vert). La molécule CAR (en rouge) s’accroche à la protéine CD19 que l’on trouve à la surface des cellules leucémiques. Ceci active le lymphocyte T, qui relâche de la perforine (violet), ce qui rend la membrane cellulaire poreuse et laisse pénétrer des molécules cytotoxiques (granzymes en magenta) qui déclenchent la mort cellulaire.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pdb101.rcsb.org/motm/214">David Goodsell/Protein Database</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Mais malgré les améliorations continues des techniques de synthèse, les capacités de lecture de l’ADN restent aujourd’hui très supérieures aux capacités d’écriture (en termes de temps requis par échantillon, nombre d’échantillons étudiés en même temps, analyse des résultats et automatisation).</p>
<p>Ainsi, la <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2019/09/msc190082/msc190082.html">synthèse de l’ADN</a> figure parmi les étapes les plus contraignantes de l’étude du vivant, limitée par les taux d’erreur (qui augmentent avec la taille de l’ADN à synthétiser) et les difficultés d’assemblage des fragments pour la synthèse de génomes complets.</p>
<h2>Comment a-t-on appris à synthétiser de l’ADN</h2>
<p>Suite à la découverte de la structure chimique de l’ADN, les chercheurs se sont intéressés à synthétiser de l’ADN au laboratoire : il s’agit de préparer les nucléotides à partir de leurs ingrédients, puis de les assembler.</p>
<p>La génomique synthétique est née avec le premier « dinucléotide » synthétisé au laboratoire en 1955. Ensuite, en 1963, <a href="https://theconversation.com/har-gobind-khorana-the-chemist-who-cracked-dnas-code-and-made-the-first-artificial-gene-was-born-into-poverty-100-years-ago-in-an-indian-village-178390">H. Gobind Khorana</a> et son équipe ont synthétisé un ADN bicaténaire beaucoup plus long de 77 « paires de bases » (les bases azotées vont par deux : une sur chaque brin de la double hélice).</p>
<p>Les <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fbioe.2019.00086/full">techniques de synthèse</a> se sont progressivement améliorées dans les décennies qui ont suivi, mais sont restées limitées en termes de longueur de chaîne, de qualité et de rendement, en raison de réactions instables qui généraient des séquences ramifiées, tronquées ou mutées, c’est-à-dire des molécules non conformes à la structure en double hélice, qui assure que l’ADN est fonctionnel.</p>
<p>Au début des années 80, un étudiant de Khorana, Marvin Caruthers, a introduit des réactifs plus efficaces, les phosphoramidites, et a ainsi révolutionné la synthèse de l’ADN. Cette synthèse comprend quatre étapes et aboutit à l’addition d’un seul nucléotide au brin d’ADN, qui croît en étant fixé à un support solide (du verre ou du polystyrène par exemple). Cette méthode a été encore améliorée grâce à différents supports, puis automatisée, ce qui a permis de réduire le temps de synthèse.</p>
<h2>Comment fabrique-t-on aujourd’hui de l’ADN ?</h2>
<p>Aujourd’hui, de nombreuses versions modifiées des <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-021-22945-z">phosphoramidites</a> ont vu le jour, avec des propriétés optimisées pour des synthèses d’ADN spécifiques.</p>
<p>La chimie des phosphoramidites reste la méthode de référence pour la fabrication d’ADN, utilisée dans l’industrie depuis près de 40 ans avec une efficacité aujourd’hui supérieure à 99 % et une rapidité de synthèse de quelques minutes. Sa simplicité et sa haute efficacité permettent de synthétiser de grandes longueurs de séquences, jusqu’à 200 paires de bases, dont <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/anie.201708741">l’assemblage aboutit à la construction d’ADN encore plus grands</a>, pour produire des gènes simples jusqu’à des génomes synthétiques entiers, tel que le génome de la levure de boulanger, <em>Saccharomyces cerevisiae</em>.</p>
<p>Si la chimie des phosphoramidites résiste à l’épreuve du temps, elle a des limites techniques. Par exemple, des erreurs peuvent se produire lors de synthèses successives résultant de réactions secondaires, comme des couplages incomplets, quand la liaison entre nucléotides complémentaires ne se produit pas, ou des incorporations erronées, par exemple un G au lieu d’un A.</p>
<h2>Fabriquer de l’ADN, demain</h2>
<p>Nous devons être conscients que les capacités de synthèse de l’ADN disponibles aujourd’hui ont pris beaucoup de retard par rapport aux progrès réalisés dans le domaine du séquençage de l’ADN. Les technologies actuelles de fabrication de l’ADN ne sont pas suffisamment mûres pour permettre l’ingénierie pratique et économique de génomes de grande taille.</p>
<p>Des efforts interdisciplinaires continus sont déployés pour utiliser de nouvelles chimies et stratégies pour synthétiser de l’ADN et assembler des gènes. De nouvelles stratégies inspirées des systèmes biologiques émergent mais pour l’instant, aucune technologie ne permet d’accéder à des séquences aussi grandes que celles trouvées dans la nature.</p>
<p>Les défis techniques actuels concernent l’assemblage de régions de la chaîne d’ADN qui sont hautement répétitives ou complexes. Quand ces verrous techniques seront surmontés, avec des stratégies de synthèse plus optimales, de nouvelles perspectives s’ouvriront pour résoudre les défis majeurs auxquels nous sommes confrontés en matière de ressources, d’énergie, de santé et d’environnement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203249/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Amina Ben Abla ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Depuis la découverte de la double hélice, on a appris à lire, modifier et écrire l’ADN – jusqu’à créer des génomes nouveaux.
Amina Ben Abla, Enseignante Chercheure en Biologie Moléculaire, École de Biologie Industrielle (EBI)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/203215
2023-04-16T16:03:26Z
2023-04-16T16:03:26Z
Édition génomique humaine : quels espoirs et quelles peurs
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/520353/original/file-20230411-16-k0cstc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C5%2C1718%2C1121&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La famille de Laocoon en proie à des doubles hélices d'ADN. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://wellcomecollection.org/works/n5nyj788/images?id=ap3d2z87">©Wellcome Trust Limited 1990 </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>L’édition génomique humaine consiste à modifier de façon ciblée le génome humain. Ses <a href="https://theconversation.com/crispr-cas9-comment-modifier-les-genomes-va-changer-la-societe-66320">applications potentielles</a>, notamment thérapeutiques, sont nombreuses. Mais alors que plusieurs réalisations existent déjà, les discussions scientifiques, médicales et éthiques vont bon train.</p>
<p>Ainsi, un congrès mondial sur l’édition génomique a eu lieu à Londres début mars, et la première thérapie génique basée sur les modifications ciblées du génome <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-022-04444-3">pourrait être validée cette année par la <em>Food and Drug Administration</em> américaine</a>. Cette <a href="https://www.wired.com/story/a-gene-therapy-cure-for-sickle-cell-is-on-the-horizon/">thérapie vise la drépanocytose</a>, une maladie sanguine génétique « rare », qui affecte des millions de personnes à travers le monde. Là où les précédentes thérapies ont connu peu de succès, la nouvelle thérapie pourrait se montrer plus efficace.</p>
<p>L’édition génomique soulève de nombreux enjeux, qui rappellent les discussions sur l’ADN recombinant à la conférence d’Asilomar en 1975, ou ceux sur le clonage suite à la naissance de Dolly le mouton en 1996. Concentrons-nous sur trois de ces enjeux, particulièrement saillants dans les discussions actuelles : la question de l’héritabilité des modifications du génome humain, celle de la régulation, et celle de l’équité dans l’accès aux thérapies géniques.</p>
<h2>Peut-on éditer le génome de ses descendants ?</h2>
<p>Il faut distinguer deux champs dans l’édition génomique humaine. D’un côté, il y a les recherches sur les cellules « somatiques », des cellules qui ne sont pas héréditaires. De l’autre, il y a des recherches sur des cellules germinales, qui portent l’information qui est transmise à la génération suivante. Les recherches sur ces cellules « héréditaires » soulèvent d’autres types de questions, souvent plus complexes, car elles auront des effets sur la descendance d’un individu.</p>
<p>En effet, en ce qui concerne l’édition du génome humain héréditaire, la sûreté et l’efficacité des techniques n’ont pas encore été démontrées, un débat sociétal fait défaut, tout comme une gouvernance responsable sur le sujet. La communauté scientifique estime actuellement que les <a href="https://royalsociety.org/news/2023/03/statement-third-international-summit-human-genome-editing/">conditions ne sont pas remplies pour éditer des cellules héréditaires</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/520348/original/file-20230411-14-klu3k2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Reconstruction 3D d’un embryon de souris" src="https://images.theconversation.com/files/520348/original/file-20230411-14-klu3k2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/520348/original/file-20230411-14-klu3k2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=553&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/520348/original/file-20230411-14-klu3k2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=553&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/520348/original/file-20230411-14-klu3k2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=553&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/520348/original/file-20230411-14-klu3k2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=694&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/520348/original/file-20230411-14-klu3k2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=694&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/520348/original/file-20230411-14-klu3k2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=694&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Reconstruction 3D d’un blastocyste de souris (embryon de 3-4 jours). Les cellules sont encore pluripotentes et peuvent se différencier, notamment en cellules germinales.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://wellcomecollection.org/works/c4349yxj">Agnieszka Jedrusik and Magdalena Zernicka-Goetz, Gurdon Institute</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’édition génomique de cellules somatiques, par contre, pose moins de problèmes éthiques, politiques et techniques et son futur s’annonce plus prometteur. Ainsi, les scientifiques explorent <a href="https://www.nature.com/articles/s41392-019-0089-y">différents sujets</a>, comme les maladies du cœur et des muscles, l’ingénierie de cellules donneuses pour éviter leur rejet par le système immunitaire d’un hôte, des maladies comme l’<a href="https://www.inserm.fr/dossier/hemophilie">hémophilie B</a>, les mucopolysaccharidoses ou encore la Beta-thalassémie. En tout, plusieurs centaines de patients sont engagés <a href="https://www.technologyreview.com/2023/03/10/1069619/more-than-200-people-treated-with-experimental-crispr-therapies/">dans des protocoles expérimentaux</a>. L’édition génomique a le potentiel de guérir des maladies jusqu’ici incurables.</p>
<p>À cet engouement pour les applications s’ajoute un enthousiasme pour la technologie elle-même. C’est en 2012 que CRISPR-Cas9, la plus célèbre des techniques d’édition génomique, commence à être utilisée. Depuis, son efficacité et sa précision ont été continuellement améliorées.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/crispr-comment-ca-marche-158581">CRISPR : comment ça marche ?</a>
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<p>De plus, d’autres techniques sont dorénavant utilisées, comme le <a href="https://www.science-et-vie.com/corps-et-sante/base-editing-genome-90842.html"><em>base editing</em></a> ou le <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/fondamental/biologie-cellulaire/prime-editing-une-nouvelle-revolution-pour-l-edition-du-genome_138490"><em>prime editing</em></a>, qui promettent encore plus de précision. Les scientifiques espèrent, à terme, pouvoir éviter les <a href="https://theconversation.com/crispr-et-les-effets-hors-cible-des-risques-encore-peu-controlables-108214">effets dits <em>off-target</em></a> (c’est-à-dire hors du gène visé). Mais aussi ceux, moins connus, qui posent des problèmes sur la cible (effets <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-021-25190-6"><em>on-target</em></a>) et montrent que les effets de CRISPR-Cas9 sont <a href="https://doi.org/10.1089/crispr.2021.0120">« plus chaotiques que prévu »</a>.</p>
<h2>Les « bébés CRISPR » : une controverse toujours chaude et une régulation qui reste fragile</h2>
<p>Malgré cet engouement, difficile d’oublier le trouble-fête majeur dans le champ de l’édition génomique : He Jiankui. Son annonce, via des vidéos postées sur YouTube fin novembre 2018, de la <a href="https://theconversation.com/les-tres-graves-rates-de-lexperience-chinoise-des-bebes-crispr-128728">naissance de deux jumelles dont il avait modifié le génome à l’état d’embryon par édition génomique</a>, avait créé une onde de choc au sein et au-delà de la communauté scientifique. « Irresponsable », « illégal », « pas éthique » : la <a href="https://doi.org/10.1177/03063127211025631">condamnation de la communauté scientifique de l’expérimentation fut unanime et immédiate</a>. En qualifiant l’expérience de He ainsi, ce travail de démarcation – on peut même parler d’excommunication – était un moyen pour la communauté scientifique de réaffirmer et de protéger son autorité morale, et de rassurer la communauté scientifique, tout comme le public.</p>
<p>Cinq ans plus tard, la controverse causée par He Jiankui n’est pas éteinte. Au <a href="https://royalsociety.org/science-events-and-lectures/2023/03/2023-human-genome-editing-summit/">troisième sommet international sur l’édition génomique humaine</a>, qui se tenait à Londres du 6 au 8 mars 2023, les scientifiques rappelaient ces travaux, évoquant un événement « dramatique » et rappelant comment l’annonce de He Jiankui « dominait » les discussions en 2018 (Robin Lovell-Badge, organisateur du sommet londonien). David Baltimore, prix Nobel, co-organisateur des deux premiers sommets, soulignait que probablement la « régulation internationale avait échouée », tout en rassurant qu’il s’agissait d’un « événement singulier qui ne s’est jamais reproduit depuis » (notons toutefois que <a href="https://doi.org/10.15252/embr.202050307">Denis Rebrikov avait annoncé son intention d’éditer des embryons humains en 2019</a> et que des <a href="https://www.science.org/content/article/creator-crispr-babies-nears-release-prison-where-does-embryo-editing-stand">recherches sur des embryons humains excédentaires provenant de cliniques de fécondation in vitro sont en cours</a>).</p>
<p>Une session entière du sommet à Londres fut par conséquent dédiée à la question de la régulation en Chine. Un membre de l’Académie des Sciences Chinoise (Yaojin Peng) présentait les lois, régulations et codes éthiques en la matière. Tout en expliquant que le pays avait « accéléré » et « amélioré » la régulation, il soulignait que l’édition génomique héréditaire est légalement interdite et que la Chine est fondamentalement « conforme » aux normes internationales. La présentatrice suivante (Joy Zhang, sociologue à l’Université du Kent) se montrait moins optimiste. Malgré la bienvenue de discussions sur la sécurité et l’éthique, celles-ci ne s’appliqueraient qu’à la médecine et à la science publique, mais pas aux entreprises. En Chine, la participation des scientifiques dans les prises de décisions – ces premiers demandant plus de transparence et de débat public – reste un processus « fragile » selon Zhang.</p>
<p>Si l’édition de cellules germinales est techniquement possible, elle est éthiquement, politiquement et légalement problématique, d’où les <a href="https://theconversation.com/le-droit-et-crispr-quel-encadrement-juridique-pour-ledition-des-genomes-120542">débats actuels sur sa régulation</a>. En Europe, la <a href="https://www.geneticsandsociety.org/biopolitical-times/european-convention-continues-ban-germline-editing">convention Oviedo</a> (Convention pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine) l’interdit. <a href="https://www.liebertpub.com/doi/10.1089/crispr.2020.0082">Au niveau mondial</a>, aucun pays ne semble l’autoriser, trois quarts des pays l’interdisent, et seulement trois pays ont des positions indéterminées sur le sujet (Burkina Faso, Singapour, Ukraine).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/520277/original/file-20230411-797-8r33fw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="carte du monde des politiques publiques sur l’édition du génome" src="https://images.theconversation.com/files/520277/original/file-20230411-797-8r33fw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/520277/original/file-20230411-797-8r33fw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/520277/original/file-20230411-797-8r33fw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/520277/original/file-20230411-797-8r33fw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/520277/original/file-20230411-797-8r33fw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/520277/original/file-20230411-797-8r33fw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/520277/original/file-20230411-797-8r33fw.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=526&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les politiques publiques sur l’édition du génome humain « héritable » à des fins reproductives (rouge : interdit ; orange : interdit avec exceptions ; vert : permis ; violet : indéterminé ; gris foncé : pas d’informations pertinentes ; gris clair : non inclus dans l’étude).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.liebertpub.com/doi/10.1089/crispr.2020.0082">Françoise Baylis et coll. 2020 ; Published by Mary Ann Liebert, Inc</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>À la fin du sommet cette année, on sentait malgré cela une certaine frustration de la part des organisateurs : « Souvenez-vous que ce sommet a beaucoup porté sur l’édition génomique de cellules somatiques et tout l’engouement qu’elle suscite. Alors, où sont les questions à ce sujet ? » demandait Robin Lovell-Badge.</p>
<h2>Quel accès et quels prix pour les thérapies géniques ?</h2>
<p>Revenons donc à l’utilisation de l’édition génomique pour les thérapies géniques.</p>
<p>La thérapie génique est une stratégie thérapeutique qui consiste à introduire du matériel génétique afin de traiter une maladie, soit en prélevant, transformant et réinjectant des cellules au patient (méthode <em>ex vivo</em>), soit en introduisant directement le vecteur dans un tissu (méthode <em>in vitro</em>). Ce processus est cependant complexe et de nombreux essais cliniques ont connu des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1525001616311741">échecs dans le passé</a>.</p>
<p>Le développement de thérapies géniques nécessite des investissements conséquents, ce qui soulève la question de l’équité et de l’accès aux traitements. Nombreux sont ceux qui pointent du doigt les <a href="https://www.statnews.com/2023/03/07/crispr-sickle-cell-access/">prix très élevés de certains produits</a> existants : il faut dépenser plusieurs millions d’euros pour certaines thérapies géniques (comme <em>Zolgensma</em> ou <em>Libmeldy</em>).</p>
<p>D’où la nécessité de réfléchir à la régulation des prix ou à des modèles alternatifs non commerciaux (philanthropie, consortiums entre acteurs universitaires, licences dites « humanitaires »). Les associations de patients ont un rôle important à jouer ici, car elles ne s’intéressent pas seulement au développement de ces thérapies, mais <a href="https://doi.org/10.1093/oso/9780198865223.003.0003">« s’attaquent à leurs obstacles économiques et explorent des solutions qu’elles jugent souhaitables ou justes pour les patients et la société dans son ensemble »</a>.</p>
<p>L’arrivée sur le marché américain d’un traitement contre la drépanocytose soulève de nombreuses questions : « Je ne sais pas comment on peut créer des prix, des payements, des innovations dans la propriété intellectuelle […]. Un traitement pour la drépanocytose arrive cet été, mais personne n’est prêt » estimait Steve Pearson, président du <em>Institute for Clinical and Economic Review</em>, lors du sommet à Londres.</p>
<p>Des prix trop élevés pour les thérapies géniques entraînent le risque d’un <a href="https://www.theguardian.com/science/2023/mar/06/forthcoming-genetic-therapies-serious-ethical-questions-experts">« eugénisme technique »</a>. Comment éviter que le traitement ne soit seulement accessible aux plus riches ? Comment assurer une équité au niveau international et que le traitement soit abordable dans les régions du monde où la maladie est fréquente (Afrique subsaharienne, Antilles, Brésil, Inde) ?</p>
<p>L’édition génomique humaine soulève donc toute une panoplie de questions : scientifiques, éthiques, politiques, sociétales, réglementaires, économiques et démocratiques.</p>
<p>Face à ces enjeux, il faudra trouver des réponses plus concrètes en matière de gouvernance et de régulation. Comment traduire des principes comme la responsabilité, la transparence, l’accessibilité, l’équité, l’inclusion, et le dialogue sociétal en impératifs politiques ? Comment, en gros, prendre la politique de la génétique au sérieux ? L’enjeu est de taille.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203215/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Morgan Meyer ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Soixante-dix ans après la découverte de la structure de l’ADN, on sait modifier les génomes humains. Zooms sur trois enjeux majeurs : héritabilité, régulation, équité dans l’accès aux soins.
Morgan Meyer, Directeur de recherche CNRS, sociologue, Mines Paris
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/198080
2023-02-01T19:10:57Z
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Notre ADN détermine-t-il vraiment notre intelligence et nos risques de maladies ?
<p>Les auteurs d’un article récemment <a href="https://www.nature.com/articles/s41588-022-01242-5">publié dans la revue scientifique <em>Nature Genetics</em></a> s’inquiètent de l’impact sociétal des avancées de la génomique (l’étude des génomes, autrement dit, du matériel génétique d’un individu ou d’une espèce). Ils évoquent les visions, à leurs yeux prémonitoires, du film <a href="https://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=17079.html"><em>Bienvenue à Gattaca</em></a> : la possibilité de lire dans notre ADN nos capacités physiques et intellectuelles et, même, de pouvoir concevoir <em>in vitro</em> des enfants quasi parfaits, exempts de maladie future.</p>
<p>Grâce aux progrès réalisés dans le domaine de la génomique, la réalité a en effet rattrapé la fiction. Il est désormais possible d’analyser l’entièreté du génome, à la recherche de causes génétiques de maladies complexes.</p>
<p>Appelés <em>genome-wide association studies</em> (GWAS, ou « étude d’association pangénomique »), ce type de travaux a donné lieu à une multitude de publications scientifiques annonçant la découverte de nombreux variants génétiques qui augmenteraient ou diminueraient le risque d’une maladie, voire la propension à de nombreux traits, comme certains comportements ou aptitudes intellectuelles.</p>
<p>À en croire certains auteurs, notre avenir médical et social serait réellement inscrit dans notre génome. Cette vision est erronée car elle repose sur une série d’erreurs et d’incompréhensions que nous allons étudier.</p>
<h2>Qu’est-ce qu’une étude GWAS ?</h2>
<p>Les études GWAS consistent à établir une corrélation entre l’expression d’un trait chez un groupe d’individus et des marqueurs sur leur génome. Ces marqueurs peuvent être vus comme des petits drapeaux balisant tout le génome. L’idée sous-jacente aux études GWAS est qu’une association entre un marqueur et un trait permet de détecter des facteurs génétiques indépendamment des facteurs d’environnement dans le trait étudié.</p>
<p>Ceci peut se faire sur un trait quantitatif (comme la taille) ou sur une maladie. Dans ce dernier cas, on comparera ces marqueurs dans un groupe de personnes malades avec ceux d’un groupe de personnes non malades. On affecte alors à chaque différence génétique identifiée un coefficient censé représenter la force de son association avec le trait considéré, puis on calcule un score global (le « score polygénique ») qui représente l’intensité du risque encouru.</p>
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<img alt="Affiche du film « Bienvenue à Gattaca » réalisé par Andrew Niccol" src="https://images.theconversation.com/files/507616/original/file-20230201-9483-xvmqx2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/507616/original/file-20230201-9483-xvmqx2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/507616/original/file-20230201-9483-xvmqx2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/507616/original/file-20230201-9483-xvmqx2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/507616/original/file-20230201-9483-xvmqx2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/507616/original/file-20230201-9483-xvmqx2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/507616/original/file-20230201-9483-xvmqx2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Affiche du film <em>Bienvenue à Gattaca</em> réalisé par Andrew Niccol.</span>
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<p>De nombreuses études GWAS ont été engagées sur des maladies dont les causes (on parle d’« étiologie » de la maladie) sont notoirement complexes : schizophrénie, cancer du sein, maladie coronarienne…</p>
<h2>Un nouveau marché</h2>
<p>Dès 2007, des entreprises ont commencé à vendre en ligne des prédictions de risque sur un simple envoi de salive. La société 23andme a ainsi récolté plus d’un million d’ADN avant d’être sommée par la FDA, en <a href="https://www.businessinsider.com/fda-sends-warning-letter-to-23andme-2013-11?r=US&IR=T">2013</a>, d’arrêter ses activités faute de preuves de validité.</p>
<p>23andme a continué ses activités en changeant sa démarche et en recueillant des ADN pour une nouvelle utilisation : dresser la carte des origines géographiques des ancêtres de leur propriétaire. Ces ADN peuvent ensuite être mis à disposition d’équipes scientifiques qui peuvent mener des études GWAS et les publier.</p>
<p>D’abord menées sur des centaines d’individus, ces recherches se sont rapidement étendues à des milliers, puis à des millions de personnes et conduisent à la publication de certaines études aux résultats questionnables.</p>
<p>Ces dernières années, des centaines d’articles scientifiques assurent avoir détecté – via des associations – les facteurs génétiques dont les effets se cumulent dans un score. Ces scores sont censés prédire non seulement nos risques de maladie, mais aussi nos aptitudes intellectuelles ou d’adaptation sociale.</p>
<p>À en croire ces travaux, une simple lecture de notre ADN permettrait donc de savoir si l’on est à risque de développer une maladie ou si notre intelligence sera plus ou moins élevée. Ce qui promeut la thèse selon laquelle tous nos traits seraient « prédéterminés génétiquement »…</p>
<p>En 2018, une <a href="https://www.nature.com/articles/s41588-018-0152-6">étude</a> portant sur les nombres d’années d’études de près de 270 000 individus dit avoir identifié plus d’un millier de facteurs génétiques impliqués dans « l’intelligence ». Quatre ans plus tard, en passant à <a href="https://www.nature.com/articles/s41588-022-01016-z">3 millions d’individus</a>, ce nombre de facteurs génétiques est multiplié par 4. In fine, par une simple lecture de votre ADN, on pourrait donc prédire votre nombre d’années d’études ou <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-022-05477-4">si vous allez devenir fumeur ou alcoolique</a>. Et cela sans prendre en compte votre environnement familial ou culturel…</p>
<h2>Hypothèses erronées des calculs de score prédiction</h2>
<p>Le problème est que les conclusions de ces études sont tout simplement fausses car basées sur des hypothèses erronées et sur une interprétation abusive des associations entre les traits à prédire et des marqueurs génétiques…</p>
<p>Les calculs de score de prédiction reposent sur des hypothèses proposées en 1965 par <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1469-1809.1965.tb00500.x">Douglas Scott Falconer</a> pour calculer l’héritabilité de certaines maladies. Parmi ces hypothèses, il est exclu d’emblée qu’un facteur d’environnement puisse jouer un rôle important dans l’expression du trait, alors qu’on sait combien notre alimentation, la consommation d’alcool ou de tabac et plus largement notre hygiène de vie ont un impact sur notre santé.</p>
<p>On suppose aussi que l’individu sera soumis aléatoirement aux facteurs d’environnement et,ce, indépendamment de ses conditions familiales, sociales et professionnelles. On suppose enfin que les facteurs d’environnement vont agir sur lui indépendamment de son génome alors qu’on sait pertinemment que la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1855137/">régulation et l’expression de nos gènes dépendent de notre environnement</a>.</p>
<p>Ces hypothèses sont en totale contradiction avec les connaissances biologiques acquises depuis qu’elles ont été proposées et d’ailleurs questionnées par Falconer lui-même, dès 1967, pour le <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/6056557/.">diabète</a></p>
<h2>Les interprétations abusives des études GWAS</h2>
<p>Un autre problème est que les scores de prédiction reposent sur une interprétation abusive des études GWAS. L’association d’un trait avec un marqueur génétique peut, certes, refléter l’action d’un facteur génétique ; mais ceci reste à confirmer par des études familiales et fonctionnelles ultérieures, seules capables de le démontrer. Des associations peuvent en effet refléter des différences environnementales ou culturelles parmi les personnes étudiées.</p>
<p>Ainsi, une telle étude GWAS qui comparerait, en France, des personnes mettant du beurre doux sur leurs tartines et des individus tartinant plutôt du beurre salé identifierait un grand nombre de marqueurs génétiques associés à cette dernière préférence… Non pas parce qu’elle révélerait des facteurs génétiques conférant un goût particulier pour le beurre salé, mais parce que ces marqueurs ont une fréquence différente en Bretagne et dans les autres régions de France !</p>
<p>De la même façon, sachant que le cancer du sein est plus fréquent chez les femmes ayant un <a href="https://theconversation.com/lindice-de-masse-corporelle-un-bon-outil-pour-savoir-si-son-poids-est-sain-104113">indice de masse corporelle</a> (IMC) élevé, les associations trouvées entre femmes atteintes et non atteintes de cancer du sein peuvent refléter des facteurs environnementaux impliqués dans l’IMC… et non dans l’étiologie du cancer du sein !</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/507620/original/file-20230201-14-eonm5f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/507620/original/file-20230201-14-eonm5f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=259&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/507620/original/file-20230201-14-eonm5f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=259&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/507620/original/file-20230201-14-eonm5f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=259&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/507620/original/file-20230201-14-eonm5f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=326&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/507620/original/file-20230201-14-eonm5f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=326&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/507620/original/file-20230201-14-eonm5f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=326&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Exemple de représentation graphique d’une étude GWAS portant sur les calculs rénaux.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Manhattan_plot_from_a_GWAS_of_kidney_stone_disease.png">Sarah A. Howles/Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Ces fausses conclusions ont de lourdes conséquences au plan clinique, car des outils de calcul de risque incorporant ces scores de risque erronés commencent à être mis à disposition des cliniciens. La validation de ces scores est faite uniquement sur les données en population, sans se soucier du fait qu’on a mélangé, pour les établir, des malades avec des étiologies différentes.</p>
<h2>Les conséquences sur le plan sociologique</h2>
<p>Les interprétations et comparaisons aberrantes qui ont trait au quotient intellectuel (QI) (<a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.1198102">dénoncées dès 1975 par Feldman et Lewontin</a> et en 1978 <a href="https://eudml.org/doc/198864">par Jacquard</a> dans « l’inné et l’acquis »)), sont un exemple frappant de dérive.</p>
<p>La variable QI avait été proposée à l’origine comme une mesure d’adéquation d’un enfant d’un âge donné à un programme scolaire donné : elle n’a de sens que lorsqu’elle est normée et moyennée dans un contexte homogène donné. Il ne s’agit pas d’une mesure universelle et intemporelle des capacités cognitives, voire de l’intelligence.</p>
<p>Même en se restreignant à la France, on ne peut pas comparer les performances en calcul mental d’enfants ayant aujourd’hui 9 ans avec ceux d’il y a un siècle, pour la simple raison qu’ils n’y ont pas été entraînés de la même façon… Par ailleurs, la différence entre deux enfants de même âge soumis à un même apprentissage scolaire dépend non seulement de leurs gènes, mais aussi de leur milieu culturel et des apprentissages antérieurs, préscolaires ou extrascolaires, etc. Le tout sans qu’il soit possible d’en évaluer les contributions respectives.</p>
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<p>Malheureusement, de nombreuses études dites de « socio-génomique » font progresser, en s’appuyant sur les études GWAS, l’idée que nous sommes génétiquement prédéterminés à faire des études ou pas (l’idée étant que les variations génétiques influeraient sur la variable QI, dont on vient de rappeler les limites…).</p>
<p>Selon ce courant de pensée, nos capacités intellectuelles sont écrites dans notre génome. Largement diffusées tant par la presse scientifique que par les médias généralistes ou certains ouvrages comme ceux des psychologues Kathryn Paige Harden ou Robert Plomin, par exemple. Ces idées conduisent inéluctablement à se demander à quoi bon promouvoir une éducation pour tous quand certains y seraient, pour ainsi dire, « génétiquement imperméables »…</p>
<h2>Des conséquences sur le plan éthique</h2>
<p>Les scores polygéniques sont aussi utilisés par certains pour différencier des populations sur des traits tels que l’intelligence, justifiant ainsi des visions racistes ou des comportements eugénistes.</p>
<p>On peut ainsi lire dans la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0160289615001087">revue « Intelligence »</a> que les scores moyens de QI sont différents suivant les populations étudiées (4,4 pour les Chinois, 4 pour les Japonais, 3,7 pour les Européens et 2,3 pour une population d’Afrique). L’auteur en conclut que les facteurs génétiques contribuant à l’intelligence ont été soumis, lors des migrations, à une pression de sélection expliquant des taux d’intelligence différents dans différentes zones géographiques.</p>
<p><a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26942276/ref">Lors de son discours présidentiel à l’American Society of Human Genetics, en 2015</a>, son président le généticien Neil Risch a malicieusement souligné le manque de solidité de cette approche. Il a en effet calculé les scores de Craig Venter (pionnier du séquençage du génome humain) et de James Watson (co-découvreur de la structure de l’ADN) avec les SNPs de cette étude.</p>
<p>Résultat : le score de James Watson s’est avéré légèrement inférieur à la moyenne européenne, tandis que celui de Craig Venter était égal à la moyenne de la population africaine… Neil Risch concluait avec humour qu’un score en dessous de la moyenne était suffisant pour obtenir un prix Nobel ou la Médaille des Sciences (médaille équivalente à notre médaille Field) !</p>
<p>Sur les mêmes concepts erronés, des entreprises privées donnent à de futurs parents la possibilité de choisir, parmi plusieurs embryons, celui qui minimise le risque de développer telle ou telle maladie (cancer du sein, schizophrénie, diabète…) et promettent même que, bientôt, il sera possible de sélectionner parmi ces embryons celui qui sera <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2020/03/msc200007/msc200007.html">doté de la meilleure intelligence</a>.</p>
<h2>Un modèle génétique erroné</h2>
<p>Un certain nombre d’auteurs, comme ceux du commentaire de <em>Nature Genetics</em> mentionné dans l’introduction de cet article, s’émeuvent à juste titre des dérives engendrées par cette vision de déterminisme génétique. Mais ils pointent uniquement les aspects éthiques et idéologiques, sans souligner que le problème est, à la racine, celui de l’acceptation aveugle d’un modèle génétique erroné et de l’interprétation abusive de marqueurs génétiques avec des associations.</p>
<p>Le débat scientifique peut être caricaturé en qualifiant d’« environnementalistes » ceux qui contestent la validité de prédictions génétiques. Pourtant, nier le bien-fondé de prédictions génétiques pour des traits ou maladies à étiologie complexe, ce n’est pas nier l’effet de facteurs génétiques sur nos traits. C’est seulement <a href="https://www.mdpi.com/2075-4426/12/8/1266">contester les hypothèses sur lesquelles reposent ces prédictions</a>.</p>
<p>Pour terminer sur une note plus positive, soulignons que cette dérive de la génétique ne doit pas faire oublier l’apport précieux de ces nouvelles technologiques lorsqu’elles sont utilisées correctement. En particulier, des études qualifiées de « post-GWAS » ont permis de mettre en évidence le rôle de certains gènes ou de réseaux de gènes <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34689168/">agissant en interaction dans la physiopathologie de maladies à étiologie complexe (cancers, maladies neurologiques…)</a>. Bien intégrées aux autres sources d’information, elles enrichissent les connaissances sur les processus pathologiques, et révèlent ainsi de nouvelles cibles thérapeutiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198080/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>
De nouvelles études génétiques prétendent pouvoir déterminer notre intelligence ou nos risques de développer des maladies, mais tout n’est pas inscrit dans notre ADN.
Françoise Clerget-Darpoux, Directeur de recherches émérite en génétique statistique, Inserm
Emmanuelle Genin, Directrice de Recherche en génétique statistique et des populations, Inserm
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/195836
2023-01-23T18:54:49Z
2023-01-23T18:54:49Z
Le chien descend-il vraiment du loup ?
<p>Confortablement assis sur votre canapé, vous regardez votre chien dormant paisiblement auprès de vous. Est-il en train de rêver de son dernier bol de croquettes ? Ou s’imagine-t-il peut-être la grande saga odysséenne de ses ancêtres, parcourant en meute les vastes steppes du dernier « Âge de Glace » à la poursuite des rennes qui constitueraient leur prochain repas ?</p>
<p>L’histoire des liens ancestraux entre le chien (le premier animal à avoir été domestiqué) et le loup est l’une des aventures évolutionnaires les plus passionnantes de l’histoire humaine. Non seulement nous interroge-t-elle sur la relation que nous avons au reste de la nature, mais elle nous renvoie aussi, par extension, à la question de tout ce que nous <em>sommes</em> en tant qu’être humain.</p>
<p>Les dernières avancées en génétique commencent à livrer des détails clés qui nous permettent d’esquisser l’histoire connexe de nos fidèles compagnons de maison, et de ces fiers canidés sauvages qui repeuplent peu à peu nos campagnes.</p>
<h2>À l’origine fut le loup</h2>
<p>Aujourd’hui, le chien (<em>Canis familiaris</em>) est le carnivore le <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1365-2907.2009.00148.x">plus répandu sur la planète</a>. Il fait partie de notre aventure humaine depuis le temps où nous étions encore des chasseurs-cueilleurs nomades, 20 000 ou même 30 000 ans avant l’invention de l’agriculture.</p>
<p>On recense près de 350 races de chien officielles dans le monde et ils sont aujourd’hui <a href="https://fr.statista.com/statistiques/1014881/population-chiens-france/">près de 7 millions</a> dans les foyers français. Si sa fidèle présence à nos côtés est depuis longtemps considérée comme allant de soi, le chien est pourtant un élément relativement récent de l’évolution humaine. Mais l’histoire et la chronologie de la domestication du chien se révèlent très complexes et alimentent tout autant les débats scientifiques, que mythes ou autres croyances au sein de nos sociétés. À la question : « de quel animal le chien descend-il ? » la plupart des adultes comme des enfants répondront sans hésiter : « le loup, bien sûr ! » Oui, mais voilà, de quel loup parle-t-on ici ?</p>
<p>Le loup gris (<em>Canis lupus</em>) est un superprédateur présent dans tout l’hémisphère nord. En d’autres termes, le loup est une espèce qui se situe en haut de la chaîne alimentaire, qui n’a pas vraiment de prédateurs naturels, et qui régule l’équilibre de son écosystème par la prédation. Son origine est nébuleuse mais assurément très ancienne, et remonte probablement à quelque 800 000 ans. Les lupidés sont génétiquement très diversifiés, et environ quarante sous-espèces actuelles <a href="http://www.departments.bucknell.edu/biology/resources/msw3/">ont déjà été décrites</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505645/original/file-20230120-12-3u7o18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505645/original/file-20230120-12-3u7o18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505645/original/file-20230120-12-3u7o18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505645/original/file-20230120-12-3u7o18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505645/original/file-20230120-12-3u7o18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505645/original/file-20230120-12-3u7o18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505645/original/file-20230120-12-3u7o18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Meute de loups gris.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Maxime Marrimpoey</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Malgré les restrictions d’habitat et de niche écologique engendrées par les êtres humains depuis la Préhistoire, les loups sont parmi les seuls des grands carnivores à avoir survécu l’extinction de masse de la fin du Pléistocène (il y a entre 50 000 et 10 000 ans), et ce notamment grâce à leur grande résilience écologique et à la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0277379121004194">flexibilité</a> de leurs comportements prédateurs. Au cours de ces deux derniers siècles, les pressions indirectes liées à l’urbanisation ainsi que les nombreuses campagnes d’exterminations ont mené à une disparation quasi complète de ses formes sauvages en Europe. Mais depuis quelques années, sa présence se rétablit lentement grâce à des programmes de conservation. Le loup gris est actuellement réintroduit dans nos contrées européennes aux côtés de <a href="https://theconversation.com/mieux-connaitre-le-lynx-boreal-grace-a-lecologie-statistique-147241">trois autres espèces de carnivores</a> : l’ours brun, le lynx boréal et le glouton.</p>
<h2>Entre chien et loup</h2>
<p>La chronologie de la domestication du loup préhistorique est probablement l’un des débats les plus animés des sciences de l’évolution. Si la paléontologie apporte évidemment des composantes importantes à ce débat, les analyses ostéo-morphologiques (l’étude de la taille et de la morphologie des os) qui sont en mesure de discriminer les proto-chiens restent difficiles à identifier.</p>
<p>Depuis les travaux de Charles Darwin, nous savons qu’une série de changements phénotypiques (caractéristiques physiques observables) sont observés sur les animaux qui subissent un processus de domestication, du moins après de nombreuses générations de traits scrupuleusement sélectionnés (souvent favorisant les individus les plus dociles). Au fil des millénaires, les canidés domestiqués ont par exemple vu une réduction de la longueur de leur museau et de la taille de leurs dents, mais aussi une diminution de leur squelette appendiculaire (membres avant et arrière). </p>
<p>En revanche, l’apparition isolée d’un seul de ces traits sur un spécimen ne peut pas prouver son caractère domestique. De ce fait, soit une série de variables significatives doit être observée sur un même individu, soit ce trait nouveau doit être observé de manière répétée à l’échelle d’une population ou d’un contexte donné. Le problème est que les squelettes complets de canidés paléolithiques sont extrêmement rares.</p>
<figure class="align- ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505649/original/file-20230120-16-oomhc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505649/original/file-20230120-16-oomhc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=288&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505649/original/file-20230120-16-oomhc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=288&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505649/original/file-20230120-16-oomhc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=288&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505649/original/file-20230120-16-oomhc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=362&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505649/original/file-20230120-16-oomhc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=362&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505649/original/file-20230120-16-oomhc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=362&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Frise au loups : Os gravé, grotte de La Vache (Alliat, Ariège). Daté du Magdalénien supérieur, vers 14 000.</span>
<span class="attribution"><span class="source">MNP/Thierry Le Mage)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En complément de cette approche purement ostéologique, l’<a href="https://reader.elsevier.com/reader/sd/pii/S0305440315001600?token=CD21D9862197E3EA812AA5F071BFFA78D36F6DED713055972D999AB3BDA89AF12ACEF8D8FF6B41C2DDB1FFA7A0728EAE&originRegion=eu-west-1&originCreation=20220201142355">archéologie</a> entre ainsi en jeu pour s’atteler à récolter toute information concernant les premières relations directes entre les humains et les canidés, information qui pourrait démontrer un lien spécial qui commençait à se tisser entre ces deux formes de grands prédateurs à partir du Paléolithique supérieur (par exemple, on note l’utilisation de canines pour réaliser des bijoux, ou sa présence dans l’art pariétal). Mais là encore, difficile de comprendre la réelle signification de ces maigres indices.</p>
<h2>Le loup est-il l’ancêtre du chien ?</h2>
<p>Avec les grandes avancées que la génétique a connues ces dernières années, de nombreuses études portant sur l’ADN ancien viennent maintenant prêter main-forte aux paléontologues et aux archéologues qui tentent d’élucider le mystère de l’origine du « premier chien ». Des échantillons de canidés anciens comme modernes sont maintenant prélevés sur tous les continents, et la diversité de leur patrimoine génétique est analysée. L’avantage majeur de cette méthode est de taille : nul besoin de squelettes parfaitement conservés pour obtenir des informations capitales, un simple fragment d’os suffit. Si la grande partie de ces études se focalisent sur l’ADN mitochondrial (ADN uniquement hérité de la lignée maternelle, mais moins sujet à la dégradation), certaines, plus rares, portent également sur le <a href="https://genome.cshlp.org/content/26/2/163">génome complet</a> (donc sur les chromosomes hérités de la lignée maternelle et paternelle, mais qui se conservent beaucoup moins bien lors de la fossilisation).</p>
<p>Grâce à ces résultats, une trame de l’histoire phylogénétique globale des canidés commence à s’esquisser. Et sans surprise, ces analyses révèlent une histoire démographique et phylogénétique très complexe du loup gris au travers des âges. Elles révèlent notamment que les populations lupines paléolithiques ont dû <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22144626/">s’adapter</a> à la fois à la géographie changeante des évènements glaciaires successifs en Eurasie, mais aussi à la présence humaine qui n’a eu de cesse de modifier leur habitat. Ces changements environnementaux et écologiques au cours du Quaternaire ont mené à des cycles d’expansions/rétractations de leurs populations, des fluctuations démographiques probablement importantes, et des fragmentations diverses de leur <em>pool</em> génétique.</p>
<p>Malgré cela, les informations issues de ces analyses sont extrêmement enthousiasmantes. On estime maintenant que la divergence génétique (c’est-à-dire la séparation d’une population en plusieurs lignées distinctes) des loups eurasiens modernes s’est passée il y a environ <a href="https://genome.cshlp.org/content/26/2/163">40 000</a> à <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/mec.15329">20 000 ans</a>. Ceci impliquerait que la population de ces loups paléolithiques se soit fortement fragmentée au cours de cette période, qui correspond d’ailleurs au dernier maximum glaciaire (autrement dit, le « pic » de l’Âge de Glace).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505624/original/file-20230120-18-3no87.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505624/original/file-20230120-18-3no87.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505624/original/file-20230120-18-3no87.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505624/original/file-20230120-18-3no87.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505624/original/file-20230120-18-3no87.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505624/original/file-20230120-18-3no87.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505624/original/file-20230120-18-3no87.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Personne avec son chien regardant le mirage d’un loup au loin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">E.-L. Jimenez/Midjourney</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette date est d’autant plus intéressante qu’elle coïncide avec la période durant laquelle <em>Homo sapiens</em> migre depuis l’Est et colonise l’Europe de l’Ouest, et où les compétitions interspécifiques entre grands prédateurs s’accroissent fortement.</p>
<p>Plus intéressant encore, plusieurs études s’accordent à dire que tous les loups eurasiens modernes descendent d’une <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rspb.2020.1206">unique petite population ancestrale</a> qui se serait vraisemblablement <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/mec.15329">isolée en Béringie</a> (Sibérie du Nord-Est) au cours du dernier pic glaciaire, il y a environ 20 000 ans, notamment pour <a href="https://www.pnas.org/content/109/19/E1134">échapper aux grandes instabilités climatiques</a> ayant cours dans le reste de l’Eurasie. Ce drastique « goulot d’étranglement » aurait donné naissance à une nouvelle lignée qui aurait ensuite recolonisé le reste du monde. Ce remplacement de population lupine se serait probablement passé <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rspb.2020.1206">au détriment d’autres formes de loup anciennes</a>, adaptées alors à d’autres formes d’environnement ailleurs en Eurasie. C’est pourquoi il semblerait que tous les loups d’aujourd’hui aient un ancêtre commun relativement « récent », ou en tout cas pas plus ancien que le début du Paléolithique supérieur, vers <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rspb.2020.1206">36 000 ans</a>.</p>
<p>Mais l’histoire se corse avec la question de l’apparition des chiens domestiques. L’histoire complexe du loup gris eurasien fait ici obstacle dans notre quête pour retracer l’exacte origine du chien. Néanmoins, des travaux fournissent quelques clés de réponse. Une étude portant sur des séquences de génome complet de chiens primitifs d’Asie et d’Afrique, ainsi qu’une collection d’échantillons de 19 races de chien diverses du monde entier a permis d’identifier que les <a href="https://www.nature.com/articles/cr2015147">chiens d’Asie de l’Est ont une diversité génétique largement supérieure aux autres</a>. Cette modélisation montrerait que les premiers chiens seraient ainsi apparus dans cette région, après une divergence entre le loup gris et le chien domestique il y a environ 33 000 ans. Cependant, une autre étude génétique avait affirmé en 2013 que le foyer de domestication aurait plutôt été l’Europe, quelque part entre <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.1243650">32 000 et 19 000</a> ans avant le présent.</p>
<p>Enfin, une tierce étude réconciliant les deux premières hypothèses, propose que la domestication du loup se soit déroulée indépendamment en <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27257259/">Asie de l’Est et en Europe</a>, avant que les chiens primitifs asiatiques ne voyagent vers l’Ouest aux côtés des populations humaines où ils auraient remplacé la population de chien indigène entre 14 000 et 6 400 ans. Quelle que soit l’hypothèse, nous pouvons retenir qu’au moment où l’on voit apparaître les premières traces de sédentarisation et les premières techniques liées à l’agriculture il y a environ 11 000 ans, il existait déjà au moins <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.aba9572">cinq lignées distinctes</a> de chien, démontrant ainsi que les sociétés humaines avaient déjà profondément modifié les populations canines avant la fin du Paléolithique.</p>
<p>Et loin d’être compartimentée, la co-évolution des canidés ne s’est d’ailleurs jamais arrêtée. Aujourd’hui encore, le loup ne cesse de faire l’objet d’hybridations avec d’autres canidés tels que les chiens, mais aussi le coyote (<em>Canis latrans</em>) avec lequel il est également <a href="https://journals.plos.org/plosgenetics/article?id=10.1371/journal.pgen.1007745">interfécond</a>.</p>
<p>En conclusion, même si la détermination de <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-022-04824-9">l’origine géographique du chien domestique</a> et les circonstances et la chronologie de sa domestication restent toujours en suspend, les avancées dans les études de l’ADN ancien nous offrent aujourd’hui les moyens de suivre les pistes enchevêtrées de ces canidés passés et présents. À la question « les chiens descendent-ils du loup ? », la réponse est donc oui, mais la génétique nous offre aujourd’hui les moyens de clarifier : les chiens modernes, aussi variés soient-ils, dérivent tous d’une lignée de loup préhistorique aujourd’hui éteinte, et n’aurait finalement que de liens très lointains avec le loup moderne.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/195836/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Elodie-Laure Jimenez est également affiliée à l'Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique. Elle a reçu des financements de Belspo via le projet ICHIE (Interconnectivity of large Carnivores, Humans and Ice Age Environments).</span></em></p>
Le chien fait partie de nos vies depuis l’époque des chasseurs-cueilleurs et serait issu de la domestication du loup préhistorique. Oui, mais de quel loup parle-t-on ?
Elodie-Laure Jimenez, Chercheure en archéologie préhistorique et paléoécologie, University of Aberdeen
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/196454
2022-12-16T14:40:15Z
2022-12-16T14:40:15Z
La race d’un chien influence sa personnalité – mais son propriétaire aussi
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/500476/original/file-20221212-111107-hulkq8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=55%2C27%2C6134%2C4435&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un bouvier bernois est assis sur un porche d'entrée de Toronto, le 6 juillet 2019. </span> <span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Graeme Roy</span></span></figcaption></figure><p>Au cours des milliers d’années d’amitié entre les humains et les chiens, nous avons réussi à créer environ 350 races différentes. Nous avons compté sur les terriers pour la chasse, les chiens-bergers pour s’occuper des troupeaux et sur toutes les races pour nous tenir compagnie. Mais dans quelle mesure la personnalité des chiens est-elle définie par leur race ?</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/votre-chien-peut-comprendre-ce-que-vous-dites-jusqua-un-certain-point-175111">Votre chien peut comprendre ce que vous dites – jusqu'à un certain point</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Dans un <a href="https://www.cell.com/cell/fulltext/S0092-8674(22)01379-4?_returnURL=https%3A%2F%2Flinkinghub.elsevier.com%2Fretrieve%2Fpii%2FS0092867422013794%3Fshowall%3Dtrue">article récent</a>, des chercheurs américains analysent les codes génétiques de plus de 4 000 chiens et interrogent 46 000 propriétaires d’animaux. Ils y relèvent de nombreux gènes associés à des comportements typiques de certaines races, comme la tendance des terriers à attraper et à tuer des proies.</p>
<p>Leurs conclusions indiquent que le type de race détermine en effet de nombreux aspects de la personnalité d’un chien.</p>
<p>Cependant, les propriétaires jouent également un rôle important dans le caractère de l’animal, qu’il soit du type joueur, tolérant envers les autres, en quête d’attention ou enclin à aboyer. Examinons de plus près comment élever un bon citoyen canin.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/499910/original/file-20221209-24715-uu5no9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Lévrier endormi couché sur le sol" src="https://images.theconversation.com/files/499910/original/file-20221209-24715-uu5no9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/499910/original/file-20221209-24715-uu5no9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/499910/original/file-20221209-24715-uu5no9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/499910/original/file-20221209-24715-uu5no9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/499910/original/file-20221209-24715-uu5no9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/499910/original/file-20221209-24715-uu5no9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/499910/original/file-20221209-24715-uu5no9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le lévrier anglais fait partie de la grande famille des lévriers, des chiens qui ont une vue perçante et qui sont extrêmement rapides.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Derek Story/Unsplash</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<h2>Ce que nous dit la recherche</h2>
<p>Les races de chiens nous permettent de découvrir beaucoup d’informations sur la reproduction sélective, et certains comportements observés dans des groupes de races – comme conduire des troupeaux et rapporter des proies – sont difficiles à expliquer. L’article américain cité plus haut nous donne des indices sur la manière dont certains de ces comportements ont pu apparaître.</p>
<p>Les chercheurs ont analysé des échantillons d’ADN provenant de plus de 200 races de chiens. Sur la base de ces données, ils sont parvenus à établir dix grandes lignées génétiques, dont les terriers, les bergers, les rapporteurs, les lévriers (chiens qui chassent à vue), les chiens qui chassent à l’odorat et les chiens d’arrêt/épagneuls.</p>
<p>Chaque lignée correspond à une catégorie utilisée pour des tâches précises, telles que la chasse au flair plutôt qu’à la vue ou la conduite du troupeau plutôt que la protection du bétail.</p>
<p>Cela signifie que des races qui ne sont pas très proches, mais qui ont été élevées dans le même but, peuvent avoir des séries de gènes en commun. Cela avait été jusqu’ici très difficile à démontrer.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/499913/original/file-20221209-25553-ffnxf6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="jack russel qui creuse un trou" src="https://images.theconversation.com/files/499913/original/file-20221209-25553-ffnxf6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/499913/original/file-20221209-25553-ffnxf6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/499913/original/file-20221209-25553-ffnxf6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/499913/original/file-20221209-25553-ffnxf6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/499913/original/file-20221209-25553-ffnxf6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/499913/original/file-20221209-25553-ffnxf6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/499913/original/file-20221209-25553-ffnxf6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les terriers Jack Russell possèdent un très fort instinct de chasseur.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>L’article mentionne par exemple que les races de chiens de troupeaux, comme le kelpie et le border collie, sont caractérisées par une forte « peur non sociale », c’est-à-dire une peur des stimuli environnementaux tels que les bruits forts, le vent ou les véhicules. Les terriers, comme le Jack Russel, se distinguent par un fort instinct de prédation. Et les chiens d’odorat, comme le beagle, par une faible aptitude au dressage.</p>
<p>Ces caractéristiques correspondent à ce pour quoi ces chiens ont été créés : les chiens de troupeaux pour leur grande sensibilité à l’environnement, les terriers pour leur capacité à poursuivre et à tuer des proies, et les chiens comme les beagles pour leur capacité à se concentrer sur les informations non visuelles (odeurs).</p>
<p>Les chercheurs se sont intéressés de plus près aux chiens de troupeau, en raison de leur comportement facilement identifiable et généralement inné de gardien.</p>
<p>Il est intéressant de noter qu’un gène commun aux chiens-bergers, appelé EPHA5, a également été associé à des comportements de type anxieux chez d’autres mammifères, ainsi qu’au trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité (TDAH), chez les humains. Selon l’équipe de chercheurs, cela pourrait expliquer la grande énergie de ces chiens et leur tendance à l’hyperfocalisation sur des tâches.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/lAjc502ALOM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Chiens qui conduisent des canards lors d’une foire dans le Tennessee, aux États-Unis.</span></figcaption>
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<h2>Ce que doivent savoir les propriétaires de chiens</h2>
<p>Les scientifiques admettent depuis un certain temps que le comportement d’un chien dépend, à des degrés divers, de sa race. Mais il ne faut pas négliger le fait que son éducation façonne également sa personnalité.</p>
<p>Une autre <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.abk0639">étude génétique</a> publiée plus tôt cette année a révélé que si la lignée d’un chien est un facteur d’influence du comportement, ce n’est probablement pas le plus important.</p>
<p>Ceux qui l’ont réalisée soulignent que le comportement canin est influencé par de nombreux gènes qui existaient chez les chiens avant le développement des races et qui sont présents chez toutes les races. Ils affirment que les races modernes se distinguent principalement par leur apparence et que leur comportement est probablement davantage influencé par des facteurs environnementaux, tels que l’éducation et le dressage, que par la génétique.</p>
<p>Qu’est-ce que cela signifie pour un propriétaire de chien ? Eh bien, si le comportement est influencé par la race, reste qu’il y a beaucoup de choses que l’on peut faire pour avoir un bon compagnon.</p>
<p>Ce travail est particulièrement important au cours des deux premières années de vie. D’abord, une socialisation précoce est importante. Un chiot doit être exposé à tous les stimuli que l’on souhaite qu’il accepte en grandissant, comme des enfants, des véhicules, d’autres animaux, des rues pleines de piétons, le sport, les voyages et le toilettage.</p>
<p>L’on doit ensuite continuer à dresser et à guider son chien à mesure qu’il grandit pour qu’il se comporte de manière à assurer sa sécurité et celle des autres. Tout comme les enfants et les adolescents humains ont besoin d’être orientés pour arriver à prendre de bonnes décisions et à s’entendre avec les gens, les chiens ont besoin de soutien pour passer de l’adolescence à l’âge adulte (vers deux ans environ).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/499914/original/file-20221209-19531-846vn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="chiot dans les fleurs" src="https://images.theconversation.com/files/499914/original/file-20221209-19531-846vn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/499914/original/file-20221209-19531-846vn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/499914/original/file-20221209-19531-846vn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/499914/original/file-20221209-19531-846vn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/499914/original/file-20221209-19531-846vn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/499914/original/file-20221209-19531-846vn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/499914/original/file-20221209-19531-846vn5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">C’est dans sa première ou ses deux premières années qu’on peut dresser un chien pour en faire un bon compagnon.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Hendo Wang/Unsplash</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<p>Si la race n’est pas l’unique indicateur du comportement d’un chien en particulier, il est certainement judicieux de prêter attention à ce pour quoi une race a été élevée à l’origine. La nouvelle étude confirme ce point de vue. Les comportements qui ont permis aux chiens de faire le travail pour lequel les humains les ont sélectionnés sont probablement encore forts au sein d’une race.</p>
<p>Cela signifie, par exemple, que si vous possédez des poules ou de petits animaux de compagnie comme des lapins, vous devriez y penser à deux fois avant d’adopter un terrier, et prévoir ce que vous ferez si le terrier veut chasser vos animaux.</p>
<p>Si vous vivez en ville ou dans un immeuble d’habitation où il se passe toujours beaucoup de choses, cela risque de ne pas être agréable pour un chien-berger. Et si vous voulez un chien très obéissant, les chiens d’odorat ne sont probablement pas un bon choix.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/499920/original/file-20221209-24867-k8glwk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="chien assis avec des poules" src="https://images.theconversation.com/files/499920/original/file-20221209-24867-k8glwk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/499920/original/file-20221209-24867-k8glwk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/499920/original/file-20221209-24867-k8glwk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/499920/original/file-20221209-24867-k8glwk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/499920/original/file-20221209-24867-k8glwk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/499920/original/file-20221209-24867-k8glwk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/499920/original/file-20221209-24867-k8glwk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le choix d’un chien qui s’adaptera à votre style de vie est une affaire de probabilité.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>Le choix d’un chien qui s’adaptera à votre style de vie est une affaire de probabilité. Il est tout à fait possible de trouver un chien d’odorat très obéissant et facile à dresser, ou un terrier qui peut vivre en paix avec des rats de compagnie…</p>
<p>Toutefois, s’il y a un comportement précis que vous attendez d’un chien, mettez toutes les chances de votre côté en vous procurant une race connue pour ce style de comportement. Puis consacrez beaucoup de temps et d’efforts à sa socialisation et à son dressage.</p>
<p>Les chiens sont avant tout ce que nous en faisons, et ils nous rendent au centuple les efforts que nous déployons pour forger leur comportement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196454/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Melissa Starling est propriétaire de Creature Teacher, une entreprise de conseil en comportement animal.</span></em></p>
La race des chiens détermine de nombreux aspects de leur personnalité. Mais les propriétaires jouent également un rôle important dans le caractère de l’animal.
Melissa Starling, Postdoctoral researcher, University of Sydney
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/195955
2022-12-07T16:43:16Z
2022-12-07T16:43:16Z
Conversation avec Guillaume Vogt : « Pour faire avancer la génétique, arrêtons de jeter les génomes après une seule analyse »
<p><em>Intervenant aux <a href="https://www.tribunesdelapresse.org/">Tribunes de la presse 2022</a> à Bordeaux, Guillaume Vogt, généticien à l’Inserm et docteur en génétique humaine (UMR Inserm 1283), explique comment un service français de test ADN, aujourd’hui interdit, pourrait voir le jour.</em></p>
<hr>
<p><strong>Pourquoi avons-nous besoin de chercher en permanence nos origines ? Existe-t-il un fantasme au sujet des tests ADN ?</strong></p>
<p><strong>Guillaume Vogt :</strong> Je ne crois pas que ce soit un fantasme. Il existe des gens qui désirent connaître leurs origines pour des raisons variées, comme découvrir ses parents biologiques, un apparenté ou encore connaître ses origines ethniques. Les passionnés de généalogie peuvent également être fascinés par le fait de pouvoir remonter plus de 200 ans en arrière, se découvrir des aînés jusqu’aux rois de France. Il existe cette possibilité de faire des tests ADN pour pas cher avec la certitude d’apprendre quelque chose.</p>
<p>Évidemment, certains tests sont de mauvaise qualité. Des erreurs sont toujours possibles, et les résultats peuvent varier en fonction des banques des données. Les résultats sur les origines ethniques sont relatifs car ils sont autodéclaratifs et dépendent de la représentativité des origines ethniques contenues dans les banques. Aujourd’hui, les clients sont majoritairement caucasiens et très peu africains, avec certains marqueurs génétiques peu ou pas représentés dans les banques de données, ce qui crée déjà un biais en soi.</p>
<h2>Quelles sont les principales critiques que vous faites au système américain ?</h2>
<p><strong>G.V :</strong> Les tests ADN sont autorisés aux États-Unis et font l’objet d’un marché important incarné par les sociétés de biotechnologie <em>MyHeritage</em> et <em>23andme</em>. En France, la revente de données génétiques est interdite. Malgré tout, ces sociétés livrent des kits en France, permettant à des citoyens de faire des tests ADN sans être inquiétés.</p>
<p>Or, d’un point de vue médical, ces tests proposés par le marché américain sont de très mauvaise qualité. Ils ne regardent que certaines variations génétiques et la multiplicité des conditions rend les tests salivaires peu fiables, même quand les variations sont très connues. Par exemple, cela peut devenir très grave quand il s’agit de déclarer à la personne testée si elle n’a pas de prédisposition au cancer, alors qu’en réalité elle en a une. La société <em>23andme</em> ne détecte que cinq des mutations du cancer du sein les plus fréquentes alors qu’il en existe des centaines. Contrairement à la France, aux États-Unis comme dans n’importe quel autre pays, vous devez payer vos frais médicaux et cela crée des situations d’autant plus problématiques.</p>
<p>En revanche, les biobanques américaines autorisent la comparaison des données entre elles pour identifier des personnes, à partir du moment où le client donne son accord lors du test. En France, cette pratique est, à l’inverse, interdite, ce qui altère l’efficacité de la recherche.</p>
<p><strong>Vous défendez la création d’un modèle à la française et avez développé <em>e-CohortE</em>, quels sont les enjeux d’un tel projet ?</strong></p>
<p><strong>G.V :</strong> <em>e-CohortE</em> est avant tout un protocole de recherche qui permet d’analyser le génome d’un individu à partir d’un questionnaire très dense. Cet individu va signer un formulaire de consentement, non plus pour une finalité précise et réduite à un seul objectif, mais autant de thématiques auxquelles il désirait répondre permettant le traitement de son génome entier en faveur d’une recherche plus large. À ce jour, comme la finalité est unique en France, nous n’avons pas le droit de rechercher une autre finalité sur le génome obtenu qui terminera donc à la poubelle, alors qu’il pourrait servir a d’autres chercheurs.</p>
<p>Pour faire avancer la génétique, il faut considérer que toute recherche est bonne et conserver les génomes au lieu de les jeter. Le projet <em>e-CohortE</em> vise à proposer à l’individu de recevoir régulièrement des questions de différents instituts pour faire avancer la recherche fondamentale en génétique. Si plusieurs individus passent du temps à répondre à des questionnaires divers et variés, cela aidera considérablement la science et permet de découvrir l’implication des gènes dans telle ou telle caractéristique humaine.</p>
<p>Ce projet est d’autant plus intéressant qu’il assure au médecin de conserver un lien avec son patient et de le recontacter pour d’autres études. Il s’agit d’une dimension que l’on ne retrouve pas dans les hôpitaux par exemple. L’intérêt est que si un patient accepte une étude sur le cancer, il ne sera pas surpris d’être contacté pour une étude sur la Covid-19. Ce dernier peut décider de ne pas répondre à toutes les questions, et peut éventuellement retirer son consentement.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Ce lien est important puisqu’avec <em>e-CohortE</em>, nous allons pouvoir aider certaines personnes à qui nous avons détecté une maladie rare, du diabète ou encore un cancer, en mettant en place des moyens de surveillance. Beaucoup de détracteurs disent que certains ne veulent pas savoir s’ils sont atteints d’une maladie. Pour ma part, je considère que c’est au libre arbitre de chacun, et qu’il faut donner aux individus l’opportunité de décider. Enfin, il y a une possibilité de le faire à moindre coût, puisqu’<em>e-CohortE</em> a pour but d’être développé au travers de protocoles de recherches qui sont déjà financés. En France nous faisons déjà de la recherche de haute qualité mais monothémathique et coûteuse, et là nous passerions au protocole multithématiques grâce à e-CohortE.</p>
<h2>Le système français bloque-t-il ces progrès ?</h2>
<p><strong>G.V :</strong> Le monde entier considère que les tests génétiques ne sont qu’une information supplémentaire, une sorte de radiographie ou d’un marqueur sanguin. Cela représente une donnée comme une autre, sauf en France et en Pologne.</p>
<p>En France, l’article 16.1 et 16.10 du code civil interdit de vendre les organes du corps humain et donc de son ADN. Mais les tests ADN ne sont pas à proprement parler interdits en France, l’article 16.10 [qui garantit que l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne ne peut être entrepris qu’à des fins médicales ou scientifiques, <em>ndlr</em>]. Il n’est donc pas utile de modifier la loi pour faire e-CohortE car la modifier ouvrirait la possibilité aux entreprises étrangères de piller en quelques années nos données génétiques. Car les entreprises françaises ne pourraient pas se faire de place, du jour au lendemain, à côté des géants américains déjà rodés. Mais la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) bloque cette pratique multithématique « d’étudier le génome au travers de questionnaires ».</p>
<p>Pourtant, le fait que de nombreux Français se fassent déjà tester prouve qu’il existe une certaine tolérance envers cette pratique. Ils ne s’opposeraient pas à l’utilisation des données à des fins scientifiques. Ce qui, par ailleurs, est déjà le cas en France. Depuis la loi Jardé de 2012 relative aux recherches impliquant la personne humaine, lorsque vous allez dans un hôpital, toutes vos données peuvent être utilisées pour la recherche si vous ne vous y opposez pas. Ce qui est dommage, c’est l’utilisation d’un génome, sans en avoir informé la personne concernée, pour ensuite le jeter.</p>
<h2>Où en est aujourd’hui le projet e-CohortE ?</h2>
<p><strong>G.V :</strong> Nous avons trouvé un promoteur public et nous allons de nouveau soumettre notre projet à la CNIL. Dans le cas d’un refus, il restera le Conseil d’État, mais il est probable qu’il existe un certain consensus entre ces deux organismes. Or, le Conseil d’État ou la CNIL peut statuer sur de nombreux points. Elle peut décider de notre consentement, dire que nous n’avions pas le droit et donc refuser que des potentiels patients donnent des informations dans le cadre du soin. Malheureusement, le protocole de <em>e-CohortE</em> avait été accepté en 2018 sans qu’il n’y ait de suite.</p>
<p>La Covid-19 a exposé les failles du système en place et a montré que la gestion des données génétiques était trop monothématique. Dans le cas de cette crise sanitaire, cela a conduit à de véritables dérives éthiques. Je pense aux plans nationaux qui visaient à contacter massivement les personnes de cohortes nationales (dont des personnes âgées) pour savoir si elles avaient la Covid-19, car on disposait de leurs données pour une autre thématique (nutrition, cancer…). Si <em>e-CohortE</em> avait été opérationnel durant cette période, les recherches auraient été plus faciles. Je ne cherche pas à remplacer la totalité du système actuel, mais à trouver une nouvelle catégorie de patients qui prendraient le temps de nous répondre pour faciliter la recherche. La création embryonnaire actuelle du dispositif « Mon espace santé », pourrait accueillir un consentement de <em>e-CohortE</em>, par exemple.</p>
<p>Nous privilégions actuellement un système coûteux dans les hôpitaux qui refusent d’utiliser un consentement express en faveur de la non-opposition qui empêche une réutilisation des exomes ou des génomes dans le cadre du soin.. Avec <em>e-CohortE</em>, les patients auraient l’assurance que leurs génomes ne seraient pas utilisés de n’importe quelle façon, et la communication avec eux serait totalement transparente.</p>
<hr>
<p><em>Propos recueillis par Arthur Picard et Emma Guillaume, étudiant·e·s en master de journalisme professionnel à l’Institut de journalisme de Bordeaux Aquitaine (IJBA) dans le cadre des Tribunes de la presse dont The Conversation France est partenaire.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/195955/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>
En France, les tests génétiques sont très encadrés et permettent seulement de rechercher une pathologie par test. Pourquoi ne pas réutiliser ces données pour faire avancer d’autres études ?
Guillaume Vogt, Chercheur en génétique humaine, Inserm
Marie-Christine Lipani, Maitre de conférences en Sciences de l’Information et de la Communication habilitée à diriger des recherches à l'Institut de Journalisme Bordeaux Aquitaine (IJBA), Université Bordeaux Montaigne
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.