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cuisine – The Conversation
2024-03-17T15:34:05Z
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2024-03-17T15:34:05Z
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Comment le Guide Michelin rebat les cartes des restaurants qu’il récompense
<p>Le 6 mars 2023, quelques minutes après 10 heures du matin, les lumières du Palais de la musique et des congrès de Strasbourg s’éteignent. Un compte à rebours, sur un air très martial, annonce l’ouverture officielle de la cérémonie des étoiles. Plus de 600 chefs, vêtus de leurs uniformes immaculés, remplissent l’amphithéâtre, attendant avec impatience l’annonce des nouvelles <a href="https://theconversation.com/topics/etoiles-21189">étoiles</a> <a href="https://theconversation.com/topics/michelin-78362">Michelin</a>.</p>
<p>Après une brève allocution du président du Conseil général d’Alsace, Gwendal Poullenec, directeur international du Guide Michelin, entre en scène. Il annonce qu’un message très spécial va être diffusé. Le président de la République Emmanuel Macron apparaît sur un écran géant. Il fait l’<a href="https://www.bfmtv.com/politique/ceremonie-du-guide-michelin-emmanuel-macron-affirme-se-tenir-aux-cotes-de-ceux-qui-nourrissent-la-france_VN-202303060238.html">éloge du Guide Michelin</a>, « bible de notre <a href="https://theconversation.com/topics/gastronomie-32489">gastronomie</a> », et félicite les chefs pour leur contribution au monde culinaire et à la société dans son ensemble :</p>
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<p>« Les restaurants, qu’ils soient grands ou petits, créent de la vie. »</p>
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<p>Malgré la longueur du discours et l’impatience croissante de l’auditoire, l’excitation est palpable, car ces professionnels attendent le dévoilement des prestigieux prix.</p>
<p>Ce moment fort se rejoue ce <a href="https://www.lefigaro.fr/gastronomie/guide-michelin-2024-ou-et-quand-aura-lieu-la-ceremonie-des-etoiles-20230911">lundi 18 mars à Tours</a>, date à laquelle le destin de quelques établissements pourra radicalement changer, les catapultant vers de nouveaux sommets de prestige et de succès. Toutefois, un tel succès peut également s’accompagner d’une pression et d’une insécurité immenses, comme le montre l’histoire de <a href="https://foodandsens.com/made-by-f-and-s/chefs-on-parle-de-vous/marco-pierre-white-le-rebelle-de-la-cuisine-le-bad-boy-genial-la-rock-star-des-fourneaux/">Marco Pierre White</a> qui, en 1999, rend ses trois étoiles, suivi par d’autres chefs, en invoquant la pression insupportable subie pour maintenir le statut d’élite que tant s’efforcent d’obtenir.</p>
<h2>Des menus qui se transforment</h2>
<p>Le statut est une force puissante dans le monde des affaires, promesse d’une visibilité accrue, d’un accès facilité à des ressources et d’avantages en termes de performances. La nature instable et très visible des hiérarchies de statut peut cependant également être une source d’insécurité pour ceux qui se retrouvent au sommet. Elle peut conduire à des actions compensatoires et à des tentatives de se conformer aux attentes associées à une position élevée. Dans une <a href="https://pubsonline.informs.org/doi/abs/10.1287/mnsc.2021.4210">étude récente</a>, nous avons examiné comment les organisations qui subissent un choc de statut positif réagissent à leur nouvelle position. Nous nous sommes plus particulièrement concentrés sur la sortie de la première édition du Guide Michelin pour la ville de Washington, à l’automne 2016.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"785087938774245377"}"></div></p>
<p>Le nouveau guide avait pour but de positionner la capitale américaine comme une destination gastronomique de premier plan. Avant sa publication, la ville souffrait de la réputation d’être avant tout le temple de <em>steakhouses</em> démodés. Grâce à la publication du guide le 13 octobre 2016, Washington est devenu à l’époque la quatrième ville américaine, après New York, San Francisco et Chicago, à la carte du prestigieux guide, club qui s’est élargi depuis. Cette inclusion s’est accompagnée d’une augmentation soudaine et positive du statut des restaurants sélectionnés, les propulsant dans l’élite de l’industrie au niveau mondial.</p>
<p>Nous avons analysé les menus des restaurants et leur évolution avant et après la publication du Guide Michelin. Leurs cartes fournissent en effet des informations riches et précieuses sur la façon dont se conçoivent les établissements. Ils constituent le principal outil de communication entre le professionnel et ses clients : ils présentent ses offres culinaires, ses prix et ses arguments de vente différenciants. Les menus reflètent les choix effectués par les gérants et les chefs, choix qui peuvent être influencés par la perception qu’ils ont de leur position dans le secteur.</p>
<p>Nous avons comparé les 106 restaurants récompensés à Washington en comparant leurs trajectoires à celles de deux autres groupes : les non récompensés de la ville qui remplissaient les conditions minimales pour entrer dans le guide (143 restaurants) et ceux d’une ville comparable (Boston) où Michelin n’est pas présent sélectionnés sur la base du type de cuisine, du niveau de prix et de l’évaluation Yelp moyenne (106 restaurants).</p>
<p>Trois changements principaux ont été observés dans les menus des néo-récompensés. Premièrement, ils ont modifié les caractéristiques descriptives de leurs menus afin de les aligner sur les attentes associées aux restaurants de haut niveau. La longueur des descriptions des plats a augmenté de 10 % et la moitié des références à la taille des portions avaient disparu. Deuxièmement, ces restaurants ont mis l’accent sur l’authenticité, caractéristique des restaurants d’élite : les références aux techniques de cuisson ont augmenté de 20 % et l’utilisation d’ingrédients biologiques, d’origine locale ou produits par de petits producteurs a été mise en avant. Enfin, les restaurants ont adapté leur stratégie de prix, principalement en augmentant les prix de leurs menus d’environ 5 %, ce qui témoigne d’une prise de conscience de la valeur qu’ils créent pour leurs clients.</p>
<h2>Justifier son statut</h2>
<p>La tendance à effectuer ces changements, fait notable, était plus marquée dans les restaurants qui figuraient dans le guide sans pour autant avoir reçu d’étoiles. Comme si ceux qui n’étaient pas en tête du classement ressentaient un plus grand besoin de justifier leur statut élevé. Nous avons aussi examiné comment la position d’un établissement (établie à partir des évaluations des critiques locaux) avant le choc de statut influençait les modifications des attributs de l’autoprésentation. Contrairement aux attentes, les restaurants jouissant d’un statut antérieur élevé, qui auraient dû être moins soucieux de montrer leur valeur, ont aussi mis l’accent sur les attributs liés à l’authenticité et à la valeur.</p>
<p>L’étude suggère également que les changements ne concernaient pas que la présentation de soi mais également des modifications matérielles dans les activités : changements dans les techniques de cuisson ou dans l’approvisionnement en ingrédients par exemple. Toutefois, les données disponibles ne nous ont pas permis de confirmer avec certitude l’ampleur des changements opérationnels.</p>
<p>On voit ici combien il est complexe de naviguer dans des positions de haut rang. Dans le contexte de l’industrie de la gastronomie, l’insécurité liée au fait de conserver son étoile d’année en année peut conduire à des changements dans la présentation de soi et, éventuellement, à des ajustements opérationnels.</p>
<p>D’autres de nos recherches soulignent l’impact de l’évolution des hiérarchies et des évaluations de statut dans d’autres secteurs à la fois sur les organisations et sur les individus. Toutes soulignent l’importance de bien appréhender, pour des dirigeants d’entreprises, les implications des chocs de statut afin d’en tirer le positif pour naviguer dans un paysage commercial dynamique et compétitif.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221279/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Saverio Favaron ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Recevoir une étoile au Michelin est-il une si bonne nouvelle pour un chef ?
Saverio Favaron, Assistant Professor of Strategy, SKEMA Business School
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tag:theconversation.com,2011:article/218633
2023-11-29T17:18:56Z
2023-11-29T17:18:56Z
Le gluten, ou la chimie secrète des pâtisseries aériennes
<p>Le pain et les viennoiseries contiennent une substance extraordinaire : le gluten. Sa chimie unique rend ces aliments aériens et extensibles.</p>
<p>Je suis chimiste et je donne un <a href="https://chemistry.richmond.edu/faculty/knolin/">cours de chimie culinaire</a>. Chaque année, je demande à mes étudiants : « Qu’est-ce que le gluten ? » Les réponses les plus courantes sont « un sucre » ou « un hydrate de carbone ». Mais il est rare que quelqu’un réponde correctement.</p>
<h2>Alors, qu’est-ce que le gluten ?</h2>
<p>Le gluten est un <a href="https://doi.org/10.3389/fnut.2019.00101">mélange complexe de protéines</a>. Il représente <a href="https://doi.org/10.1111/jgh.13703">85 à 90 % des protéines de la farine</a>. Les protéines sont des macromolécules biologiques naturelles composées de <a href="https://www.britannica.com/science/amino-acid">chaînes d’acides aminés</a> qui se replient sur elles-mêmes pour adopter diverses formes.</p>
<p>Le gluten provient de l’endosperme du <a href="https://doi.org/10.1093/aob/mcr098">blé, du seigle, de l’orge et des plantes apparentées</a>, un tissu des graines de la plante qui stocke l’amidon et les protéines. Le processus de mouture qui crée la farine libère le contenu de l’endosperme, y compris le gluten.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-pain-une-longue-histoire-dinnovations-techniques-et-sociales-178039">Le pain, une longue histoire d’innovations techniques et sociales</a>
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<p>Les principales protéines qui composent ce mélange appelé gluten sont la <a href="https://www.sciencedirect.com/topics/medicine-and-dentistry/gliadin">gliadine</a> et la <a href="https://www.sciencedirect.com/topics/biochemistry-genetics-and-molecular-biology/glutenin">gluténine</a>. Ces protéines constituent une grande partie de la <a href="https://modernistcuisine.com/mc/gluten-how-does-it-work/">structure des produits alimentaires à base de farine</a>. Pendant la phase de pétrissage ou de mélange de la pâte, ces protéines forment un maillage élastique, souvent appelé réseau de gluten.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/560047/original/file-20231116-27-zi3eck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Gros plan sur une tranche de pain, montrant le réseau de gluten blanc avec des trous plus foncés." src="https://images.theconversation.com/files/560047/original/file-20231116-27-zi3eck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/560047/original/file-20231116-27-zi3eck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/560047/original/file-20231116-27-zi3eck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/560047/original/file-20231116-27-zi3eck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/560047/original/file-20231116-27-zi3eck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/560047/original/file-20231116-27-zi3eck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/560047/original/file-20231116-27-zi3eck.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La texture de votre pain dépendra de la façon dont vous pétrissez et travaillez la pâte et de la façon dont le réseau de gluten se forme.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/photo/cut-loaf-of-round-shaped-wheat-bread-royalty-free-image/1468126179?phrase=bread">ligora/iStock via Getty Images</a></span>
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<h2>Créer un réseau de gluten</h2>
<p>La formation d’un réseau de gluten est essentielle pour faire lever la pâte. Le réseau agit comme un ballon qui emprisonne les gaz pendant les processus de levée, de fermentation et de cuisson. Pendant la <a href="https://www.theperfectloaf.com/guides/proofing-bread-dough/">levée et la fermentation</a> – qui donnent à la pâte le temps de gonfler, la levure présente dans la pâte libère du dioxyde de carbone en mangeant et en digérant les sucres présents. Ce processus est appelé <a href="https://doi.org/10.3390/microorganisms8081142">fermentation</a>.</p>
<p>Le processus de cuisson produit un certain nombre de <a href="https://www.campdenbri.co.uk/blogs/bread-dough-rise-causes.php">différents gaz</a>, tels que le dioxyde de carbone, l’eau sous forme de vapeur, les vapeurs d’éthanol et l’azote. Le réseau de gluten emprisonne ces gaz et la pâte se dilate comme un ballon. Si le réseau de gluten est trop fort, les gaz ne produiront pas assez de pression pour faire lever la pâte. S’il est trop faible, le ballon éclatera et la pâte ne restera pas levée. La solidité du réseau de gluten dépend de la durée du pétrissage et du mélange de la pâte.</p>
<p>Pour que le <a href="https://www.seriouseats.com/what-is-gluten-free-bread-dough-pasta">réseau de gluten se forme</a>, il faut pétrir ou mélanger la pâte avec de l’eau, ce qui permet d’aligner les protéines.</p>
<p>Les protéines de la gluténine se présentent sous la forme de chaînes longues et courtes qui adoptent des structures enroulées, comme des bobines de fil. Ces bobines sont maintenues ensemble par des liaisons chimiques entre les boucles des bobines, connues sous le nom de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Liaison_hydrog%C3%A8ne">liaisons hydrogène</a> intramoléculaires. Le pétrissage et le mélange brisent certaines de ces liaisons et alignent les protéines de gluténine.</p>
<p>Ce sont d’autres liaisons chimiques qui se forment entre les différentes chaînes de gluténine, par l’intermédiaire d’atomes de soufre sur certains des acides aminés qui composent la gluténine. Lorsque ces acides aminés – appelés cystéines – sont mis en contact les uns avec les autres, les atomes de soufre se lient les uns aux autres, créant une liaison appelée <a href="https://www.sciencedirect.com/topics/biochemistry-genetics-and-molecular-biology/disulfide-bond">liaison disulfure</a>.</p>
<p>Au fur et à mesure que de plus en plus de cystéines forment des liaisons disulfures avec les cystéines des protéines voisines, le réseau se développe. Ainsi, plus il y a de protéines présentes et plus le processus de pétrissage est long, plus le réseau de gluten est solide. La farine à pain a des <a href="https://www.healthline.com/nutrition/high-gluten-flour">concentrations de protéines plus élevées</a> – 12 % à 14 % – que les autres farines : c’est ainsi qu’elle permet de créer un réseau de gluten plus fort et une levée plus importante.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/gluten-mythe-ou-realite-a-la-recherche-des-personnes-hypersensibles-91945">Gluten : mythe ou réalité ? À la recherche des personnes hypersensibles</a>
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<p>Les protéines de gliadine sont plus petites et plus compactes que les protéines de gluténine. Au cours du processus de pétrissage, la gliadine se disperse dans les polymères de gluténine. Alors que la gluténine confère élasticité et résistance à la pâte, les <a href="https://doi.org/10.1007/s12551-017-0367-2">protéines de gliadine</a> rendent la pâte plus ou moins visqueuse et dense.</p>
<h2>Renforcer et raccourcir</h2>
<p>L’<a href="https://www.cargill.com/salt-in-perspective/salt-in-bread-dough">ajout de sel</a> neutralise les charges électriques qui peuvent être présentes sur les protéines. Cela minimise la répulsion entre protéines, et permet de les rapprocher. Ce processus force l’eau à sortir d’entre les protéines, ce qui et stabilise le réseau de gluten. Par conséquent, l’ajout de sel crée un réseau plus solide qui augmente la quantité d’étirement et de traction que la pâte peut supporter.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/industriel-ou-paysan-quels-pains-et-pates-privilegier-pour-les-hypersensibles-au-gluten-180821">« Industriel » ou « paysan » : quels pains et pâtes privilégier pour les hypersensibles au gluten ?</a>
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<p>Au contraire, les matières grasses comme le beurre ou la margarine <a href="https://www.ifst.org/lovefoodlovescience/resources/fats-and-oils-shortening">affaiblissent ou « raccourcissent »</a> le réseau de gluten. En général, les recettes demandent de mélanger les matières grasses à la farine avant d’ajouter l’eau ou le lait. Cela permet aux graisses d’enrober la farine. Et comme les graisses sont hydrophobes, ce processus empêche l’eau qui contribue à la formation du réseau de gluten d’atteindre les protéines. On obtient une brioche ou une viennoiserie plus tendre et plus moelleuse.</p>
<p>En somme, sans la formation de ces réseaux de gluten, les produits de boulangerie ne seraient pas aussi légers et moelleux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218633/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Kristine Nolin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Quelle farine utiliser ? À quoi sert le sel dans la pâte ? Quand ajouter de l’eau ou du gras ? Tous les secrets de la chimie du gluten.
Kristine Nolin, Associate Professor of Chemistry, University of Richmond
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/216320
2023-10-27T13:25:06Z
2023-10-27T13:25:06Z
Je suis microbiologiste. Voici ce que je surveille quand vient le temps de manger
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/555635/original/file-20230928-17-d1ixap.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=20%2C0%2C6689%2C4476&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Quand on mange dans un buffet, on court le risque d’être victime d’une intoxication alimentaire.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/chafing-dish-food-1020163570">(Shutterstock)</a></span></figcaption></figure><p>Environ <a href="https://www.ukri.org/news/food-safety-network-to-tackle-9-billion-food-poisoning-challenge/#:%7E:text=Food%20poisoning%20key%20facts%3A,foodborne%20illness%20in%20the%20UK">2,4 millions de personnes</a> sont victimes d’intoxication alimentaire chaque année au Royaume-Uni, principalement à la suite d’une contamination virale ou bactérienne. La plupart d’entre elles <a href="https://www.nhsinform.scot/illnesses-and-conditions/infections-and-poisoning/food-poisoning/">se rétablissent en quelques jours sans traitement</a>, mais <a href="https://bmjopengastro.bmj.com/content/7/1/e000377">ce n’est pas le cas de toutes</a>.</p>
<p>En tant que microbiologiste, je suis sans doute plus consciente que la majorité des gens du risque d’infection d’origine alimentaire. Voici quelques-unes des choses auxquelles je suis attentive.</p>
<h2>En plein air</h2>
<p>Je mange rarement en plein air, que ce soit dans le cadre de pique-niques ou de barbecues, car le risque d’intoxication alimentaire augmente à l’extérieur.</p>
<p>Pour ne pas tomber malade, il est essentiel de se laver les mains lorsqu’on manipule de la nourriture, mais on ne trouve pas souvent de l’eau courante chaude et du savon dans un parc ou sur une plage. On peut utiliser du gel désinfectant (c’est mieux que rien), mais cela n’élimine pas tous les germes.</p>
<p>En outre, la nourriture attire toutes sortes de créatures volantes et rampantes – mouches, guêpes, fourmis, etc. – qui peuvent transmettre des germes, comme <em>E. coli</em>, <em>Salmonella</em> et <em>Listeria</em>, à vos aliments.</p>
<p>Il est essentiel de conserver les denrées périssables au froid et couvertes, car les germes peuvent doubler en nombre si on laisse les aliments se réchauffer à 30 °C pendant plus de deux heures. Pour les barbecues, la viande doit être bien cuite et l’on recommande l’utilisation d’un thermomètre pour éviter les intoxications. Ne consommez pas de viande hachée (burger) dont la température interne <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/conseils-generaux-salubrite/temperatures-securitaires-cuisson-interne.html">est inférieure à 71 °C</a>.</p>
<h2>Buffets</h2>
<p>Sachant dans quelles conditions les bactéries se développent dans les aliments, je suis très soucieuse de la sécurité alimentaire des buffets chauds et froids.</p>
<p>À l’intérieur, les aliments peuvent être exposés à la contamination par des insectes, de la poussière et, surtout, des personnes. Quand on mange dans un <a href="https://www.fda.gov/food/buy-store-serve-safe-food/serving-safe-buffets">buffet</a>, on court le risque d’être victime d’une intoxication alimentaire.</p>
<p>La contamination résulte du contact des convives avec la nourriture, et les germes peuvent être pulvérisés par des personnes qui éternuent ou toussent à proximité des aliments. Même à l’intérieur, il faut tenir compte de la contamination par les insectes, tels que les mouches ou les guêpes, qui se posent sur des mets non couverts. Les germes peuvent également provenir de l’air, qui renferme des bactéries, des champignons et des virus.</p>
<p>Je regarde toujours l’heure lorsque je participe à un buffet, car il existe une <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/salubrite-aliments-saisonniers/salubrite-aliments-pendant-fetes.html">règle des deux heures</a> en matière de restauration : les aliments périssables deviennent impropres à la consommation en deux heures s’ils ne sont pas conservés couverts et réfrigérés. Le problème, c’est que les buffets sont souvent disposés avant l’arrivée des convives, si bien qu’il est difficile de savoir quand les plateaux de viande cuite, de fruits de mer, de salades, de desserts et de fruits et légumes présentés de manière appétissante ont été placés sur les tables.</p>
<p>Pour les buffets chauds, tels que ceux que proposent certains hôtels pour le petit-déjeuner, j’évite la nourriture tiède, car les bactéries responsables des intoxications se développent rapidement si les aliments sont conservés à une température inférieure à 60 °C. Les mets chauds doivent être servis chauds, c’est-à-dire <a href="https://www.fda.gov/food/buy-store-serve-safe-food/serving-safe-buffets">à 60 °C minimum</a>. En cas de doute sur la sécurité de la nourriture, je choisis à contrecœur du pain fraîchement grillé et de la marmelade emballée individuellement.</p>
<h2>Les huîtres</h2>
<p>Il y a des aliments que je ne mange jamais, et les fruits de mer crus, comme les huîtres, en font partie. Les huîtres se nourrissent par filtration et peuvent accumuler des germes, tels que la bactérie Vibrio et le norovirus, dans leurs tissus.</p>
<p>L’aspect, l’odeur et le goût d’une huître contaminée par Vibrio n’ont rien de particulier, mais on peut tomber gravement malade en la consommant. Les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies américains estiment qu’environ 80 000 personnes contractent une infection à cette bactérie en mangeant des huîtres crues et que, rien qu’aux États-Unis, 100 personnes <a href="https://www.cdc.gov/foodsafety/communication/oysters-and-vibriosis.html">meurent de la vibriose</a> chaque année.</p>
<p>Il est également possible de développer une intoxication alimentaire avec des coquillages crus (palourdes, moules, bourgots, coques). Je les consomme toujours bien cuits, car la chaleur tue les germes nocifs.</p>
<h2>Salades en sachet</h2>
<p>Je ne mange jamais de salades en sachet, étant donné que la sécurité des salades fraîches constitue un de mes domaines de recherche. On a trouvé que la salade en sachet peut contenir des germes responsables d’intoxications alimentaires tels qu’<em>E. coli</em>, <em>Salmonella</em> et <em>Listeria</em>.</p>
<p>Mon équipe <a href="https://journals.asm.org/doi/10.1128/aem.02416-16">a constaté</a> que lorsqu’on donne du jus de feuilles de salade à ces agents pathogènes, cela multiplie leur prolifération par mille, même si le sac de salade est réfrigéré. En outre, le jus de salade rend les germes plus virulents et donc plus aptes à provoquer une infection.</p>
<p>Pour les amateurs de salade alarmés par cette information, la plupart des salades en sachet sont sûres si on les conserve au réfrigérateur, qu’on les lave (même celles prêtes à l’emploi) et qu’on les mange le plus rapidement possible après l’achat.</p>
<p>S’il y a du « jus » de salade, il faut la jeter.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="An open bag of lettuce" src="https://images.theconversation.com/files/550872/original/file-20230928-15-irzk45.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/550872/original/file-20230928-15-irzk45.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/550872/original/file-20230928-15-irzk45.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/550872/original/file-20230928-15-irzk45.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/550872/original/file-20230928-15-irzk45.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/550872/original/file-20230928-15-irzk45.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/550872/original/file-20230928-15-irzk45.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">S’il y a du « jus » de salade, il faut la jeter.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/open-bag-salad-lettuce-carrots-white-528025258">(Shutterstock)</a></span>
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</figure>
<h2>Pratiques culinaires</h2>
<p>J’ai ma liste de choses à faire et à ne pas faire.</p>
<p>Pour les denrées périssables, je vérifie régulièrement la date limite de consommation. Si celle-ci n’est pas dépassée et que l’emballage semble gonflé, ou si, après l’avoir ouvert, je constate que l’aspect ou l’odeur de l’aliment est étrange, je le jette, car il pourrait avoir été contaminé.</p>
<p>Je n’utilise jamais les mêmes planches à découper pour les aliments crus et cuits, et je me lave automatiquement les mains avant et après la manipulation de la nourriture.</p>
<p>Une des pratiques que j’évite à tout prix, c’est réchauffer du riz cuit. Le riz cru peut contenir des spores de <em>Bacillus cereus</em>, un germe responsable d’intoxications alimentaires.</p>
<p>Bien que la cuisson tue les cellules de <em>Bacillus</em>, les spores survivent. Si on laisse le riz refroidir et reposer à température ambiante, les <a href="https://www.nhs.uk/common-health-questions/food-and-diet/can-reheating-rice-cause-food-poisoning/#:%7E:text=Yes%2C%20you%20can%20get%20food,been%20stored%20before%20it%E2%80%99s%20reheated">spores se transforment en bactéries</a>, dont le nombre augmentera rapidement, car le riz est un bon milieu de culture pour le <em>Bacillus</em> à température ambiante.</p>
<p>Le <em>Bacillus</em> issu du riz produit des toxines qui, quelques heures après l’ingestion, provoquent des vomissements et des diarrhées pouvant durer jusqu’à 24 heures.</p>
<h2>Et le resto ?</h2>
<p>Ma grande connaissance de la sécurité alimentaire m’incite à faire la queue en premier aux buffets, à être prudente lorsque je mange mon petit-déjeuner à l’hôtel et à surveiller l’horloge pour savoir à quelle fréquence les aliments périssables sont remplacés. Je ne rapporte jamais les restes de mon repas au restaurant dans un <em>doggy bag</em> (le délai de deux heures est généralement dépassé), même s’ils sont destinés à un animal de compagnie.</p>
<p>L’avantage d’être microbiologiste est que nous savons comment éviter les intoxications et, de ce fait, les gens ne sont jamais inquiets de manger ce que nous avons préparé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216320/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Primrose Freestone a déjà bénéficié d'un financement du BBSRC pour ses travaux de recherche sur la salade.</span></em></p>
Vous ne verrez plus jamais la salade en sachet de la même façon.
Primrose Freestone, Senior Lecturer in Clinical Microbiology, University of Leicester
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/208793
2023-08-10T21:18:31Z
2023-08-10T21:18:31Z
« Snack Masters », quand les grands chefs font recette avec la malbouffe
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/541978/original/file-20230809-14-9gcmy3.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=20%2C2%2C1912%2C1286&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Reproduire le burger d'une grande enseigne de junk food, une fausse bonne idée ? </span> <span class="attribution"><span class="source">M6 / Capture d'écran</span></span></figcaption></figure><p>Avec <em>Snack Masters</em>, dont le second épisode sera diffusé mardi 16 août 2023, M6 présente <a href="https://youtu.be/zYxW_k-iX_8?si=o3Ev2EoyJs8E_Eli">sa nouvelle émission culinaire</a> venue tout droit de Grande-Bretagne. Son concept est pour le moins surprenant, voire déroutant. Il s’agit en effet de demander à de grands noms de la gastronomie française – chefs étoilés et/ou Meilleurs Ouvriers de France (MOF) – de reproduire à l’identique des produits issus de la « junk food », comme des hamburgers, des frites ou des cornets glacés industriels. Au-delà de l’aspect divertissant de l’émission, menée comme une enquête policière, de la confrontation de deux univers culinaires qui, par principe, ne se rencontrent jamais, ces grands chefs sont-ils à leur place dans ce jeu ? En se montrant ainsi, ne prennent-ils pas le risque de légitimer la malbouffe ?</p>
<h2>Les grands chefs : Artisanat d’excellence, créativité et innovation</h2>
<p>Obtenir le statut de <a href="https://toutpourleresto.fr/carte-restaurants-etoiles/">chef étoilé</a> et/ou de <a href="https://www.lexpress.fr/styles/plaisirs/saveurs/tout-ce-qu-il-faut-savoir-sur-le-titre-de-meilleur-ouvrier-de-france-ou-mof_1648941.html">Meilleur ouvrier de France</a> est loin d’être aisé. Seule une petite élite y parvient au terme d’années d’un labeur extrême, d’un engagement total, d’heures de travail non comptées. Ce sont des artisans d’excellence qui maîtrisent leur art à la perfection, doublés de créatifs capables d’innover, que ce soit en associant de nouvelles saveurs, en revisitant des mets traditionnels, en remettant au goût du jour des produits tombés dans l’oubli, ou en créant de nouveaux plats.</p>
<p>Ces artisans insistent aussi sur de la qualité des produits qu’ils utilisent, principalement de saison, mettent en avant les relations qu’ils entretiennent avec leurs producteurs, souvent locaux, et vantent les avantages des <a href="https://www.huffingtonpost.fr/life/article/les-chefs-adaptent-de-plus-en-plus-leurs-menus-aux-produits-locaux-et-de-saison_71904.html">circuits courts</a>. Ils sont les garants de la réputation de la gastronomie française, d’un savoir-faire spécifique, d’un art de vivre envié. Ce statut leur confère une forte légitimité aussi bien auprès des autres acteurs de la profession que du grand public. Et c’est bien cette légitimité que recherchent les producteurs de l’émission. Cependant, derrière ce discours se cache une autre réalité : celle des liens des chefs avec l’industrie agroalimentaire.</p>
<h2>Une relation ancienne et fructueuse</h2>
<p>En effet, les liens entre l’industrie agroalimentaire et les chefs existent, sous différentes formes, depuis des années. Dans son ouvrage <em>Histoire des cuisiniers en France XIXe-XX<sup>e</sup> siècle</em> (2004), Alain Drouard explique que dès le XIX<sup>e</sup> siècle les chefs et les industriels de l’alimentation se mettent à tisser des relations. C’est ainsi que le <a href="https://disciples-escoffier.com/fr/histoire/auguste-escoffier-biographie">célèbre chef Auguste Escoffier</a> (1846-1935) après avoir longuement cherché à obtenir un produit capable toute l’année de remplacer la tomate fraîche, fut à l’origine de la conserve de tomates concassées. Ce nouveau produit, qui rencontra un vif succès suite à son utilisation dans les cuisines du célèbre palace londonien le Savoy dont il gérait les cuisines, était en fait fabriqué dans une conserverie dans laquelle il possédait des parts.</p>
<p>Mais c’est surtout dans le dernier quart du XX<sup>e</sup> siècle que les grands cuisiniers, en plus d’être des artisans du luxe et des restaurateurs haut de gamme sont aussi devenus des consultants pour les grands groupes alimentaires. C’est à partir de 1976 que le chef multi étoilé Michel Guérard, membre du mouvement « nouvelle cuisine » et chantre de la cuisine « légère », développa le premier partenariat en signant un contrat avec la marque Findus du groupe Nestlé. Il élabora pour eux des plats surgelés parmi lesquels le « Pithiviers de poisson au beurre blanc » qui est resté en rayon… plus de 35 ans. Il justifia cette collaboration en expliquant que l’observation industrielle lui avait énormément apporté sur le plan culinaire, qu’il avait découvert la « dimension scientifique » de l’agroalimentaire et qu’il était important de bien s’entendre avec les professionnels de cet univers là pour les aider à s’améliorer.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/539386/original/file-20230725-23-m3x988.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/539386/original/file-20230725-23-m3x988.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/539386/original/file-20230725-23-m3x988.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/539386/original/file-20230725-23-m3x988.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/539386/original/file-20230725-23-m3x988.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=531&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/539386/original/file-20230725-23-m3x988.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=531&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/539386/original/file-20230725-23-m3x988.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=531&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Publicité montrant la collaboration entre la marque de surgelés Findus et le chef multi étoilé Michel Guérard.</span>
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<p>Depuis, très rares sont les grands chefs qui n’ont pas développé de partenariat avec les acteurs de l’industrie agroalimentaire. Parmi eux on trouve – pour un temps plus ou moins long – la collaboration de Marc Veyrat avec le jambon <em>Madrange</em>, Joël Robuchon avec <em>Fleury Michon</em>, Cyril Lignac, avec <em>Findus</em> lui aussi ou Philippe Etchebest pour l’accord mets et bière avec la <em>1664 de Kronembourg</em>.</p>
<p>Cet été, le <a href="https://www.slate.fr/story/248677/collaboration-burger-king-michel-sarran-experience-culinaire-decevante-fast-food-master-boeuf-mozzarella-top-chef">chef Michel Sarran</a>, ancien juré de <em>Top Chef</em> est allé un peu plus loin encore dans les partenariats en s’associant avec la chaîne de restauration rapide <em>Burger King</em> pour laquelle il a imaginé trois nouvelles recettes, les « Masters du chef ». C’est, en effet, la première fois qu’un chef étoilé s’associe à un fast-food, ce qu’il justifie en expliquant la mise en commun d’expertises et l’utilisation de produits frais tandis que le directeur France de l’enseigne parle de « proposer des burgers de chef étoilé à un prix accessible pendant plus d’un mois dans toute la France […] notamment en période d’inflation ». Les problèmes liés à la malbouffe ne sont, eux, pas du tout mentionnés.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/540979/original/file-20230803-19-rtzeo7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/540979/original/file-20230803-19-rtzeo7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/540979/original/file-20230803-19-rtzeo7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/540979/original/file-20230803-19-rtzeo7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/540979/original/file-20230803-19-rtzeo7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=418&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/540979/original/file-20230803-19-rtzeo7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=418&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/540979/original/file-20230803-19-rtzeo7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=418&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Michel Sarran premier chef à signer un partenariat avec une chaine de fast food.</span>
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</figure>
<h2>Restaurants gastronomiques en quête de rentabilité</h2>
<p>Si le fait de comprendre les enjeux et d’aider l’industrie agroalimentaire à s’améliorer sont les principaux motifs évoqués par les chefs pour expliquer leurs différents partenariats, il y a d’autres explications. Les raisons financières sont, elles aussi, déterminantes, bien que jamais évoquées. En effet, gérer un restaurant étoilé se révèle très <a href="https://www.neorestauration.com/article/restaurants-gastronomiques-la-difficile-equation-de-la-rentabilite,29832">onéreux et pas vraiment rentable</a>. Entre les frais de personnel et d’infrastructure en hausse constante, l’univers très concurrentiel dans lequel ils évoluent, plus dernièrement la crise du Covid-19 ainsi que l’inflation, leurs bénéfices sont maigres.</p>
<p>Selon la revue <a href="https://www.entreprendre.fr/les-etoiles-michelin-une-pression-insupportable-pour-les-chefs/"><em>Entreprendre</em></a> de mai dernier, le taux de marge oscillerait entre 5 et 10 %, ce qui est peu. C’est pourquoi les divers partenariats pour de la publicité ou du consulting avec des <a href="https://www.leparisien.fr/economie/quand-ils-pretent-leur-nom-aux-plats-cuisines-13-12-2010-1188374.php">marques de l’agro-alimentaire</a> s’avèrent très lucratifs et permettent souvent d’aider à combler le manque à gagner des restaurants étoilés.</p>
<p>Les émissions télévisées sont aussi l’occasion, pour les chefs qui y participent, de faire connaître leurs restaurants et d’augmenter ainsi leur popularité. Hélène Darroze expliquait à Cécilia Delporte dans <a href="https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/emissions-culinaires-la-poule-aux-oeufs-dor-de-la-television-1158094"><em>Les Echos</em></a> que dès les premières minutes de <em>Top Chef</em> les coups de téléphone avaient afflué dans son restaurant pour des réservations. Elle ajoutait que si parfois elle envisageait d’arrêter l’émission, cette décision était difficile à prendre à cause de la visibilité que cette dernière lui apportait.</p>
<h2>Snacking et obésité</h2>
<p>Le marché du snacking (ou celui du « prêt à manger » ou de la restauration rapide avec par exemple les sandwichs, les hamburgers ou les plats préparés) connaît depuis quelques années une réelle croissance avec un chiffre d’affaires proche des <a href="https://www.businessfrance.fr/les-francais-de-plus-en-plus-seduits-par-le-snacking">18,5 milliards d’euros en 2022</a>. Les français souhaitent, en effet, trouver des moyens pratiques et rapides pour se nourrir. Même si les snacks sains et bio sont de plus en plus recherchés, la majeure partie d’entre eux restent peu équilibrés avec trop de matières grasses, de sel ou de sucre. Or la <a href="https://presse.inserm.fr/obesite-et-surpoids-pres-dun-francais-sur-deux-concerne-etat-des-lieux-prevention-et-solutions-therapeutiques/66542/">moitié de la population française est aujourd’hui en excès de poids</a> et 17 % des personnes concernées par l’obésité. De plus, ce sont surtout les plus jeunes qui sont touchés.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/539833/original/file-20230727-19593-46c6up.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/539833/original/file-20230727-19593-46c6up.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/539833/original/file-20230727-19593-46c6up.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/539833/original/file-20230727-19593-46c6up.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/539833/original/file-20230727-19593-46c6up.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/539833/original/file-20230727-19593-46c6up.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/539833/original/file-20230727-19593-46c6up.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Évolution des prévalences de l’obésité selon l’âge entre les enquêtes Obépi-Roche 1997-2012 et l’enquête Obépi 2020 (source Inserm).</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans ce contexte, on peut se demander si ce n’est pas jouer avec la santé de certains de nos concitoyens, en particulier les plus jeunes, que de proposer en prime time une émission qui promeut plus ou moins indirectement et sous forme ludique le snacking, le tout légitimé par deux grands chefs. En effet, jusqu’à présent dans des émissions comme <em>Top Chef</em> il s’agissait parfois de reproduire des plats de la steet food ou de revisiter des burgers, mais avec des produits frais. Or, dans <em>Snack Masters</em>, il s’agit de réaliser à l’identique des produits issus de la junk food, de montrer les usines dans lesquelles ils sont produits, comme si ce n’était finalement pas si mauvais que cela, qu’il ne s’agissait pas presque systématiquement de produits trop gras, trop salés, trop sucrés. Difficile de ne pas penser au documentaire de Morgan Spurlock <a href="https://youtu.be/JsMwvTnu5Bc?si=KjCgb1v-g9zWVejk"><em>Supersize me</em></a> (2004) qui dénonçait la malbouffe et ses conséquences néfastes pour la santé.</p>
<p>Avec ce programme, les shows culinaires ne viennent-ils pas, sous couvert d’un jeu divertissant avec des chefs reconnus et appréciés, de franchir une limite ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/208793/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Louisgrand ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Quand les grands chefs reproduisent à l’identique des produits issus de la « junk food », la gastronomie et la santé n’en sortent pas forcément gagnantes.
Nathalie Louisgrand, Enseignante-chercheuse, Grenoble École de Management (GEM)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/205090
2023-07-11T14:48:11Z
2023-07-11T14:48:11Z
Course à pied, fabrication de pain : traverser la pandémie grâce à de nouvelles passions
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/526903/original/file-20230517-18592-xkares.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C0%2C995%2C666&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Lors de périodes de vie difficiles, avoir une passion peut aider les personnes à rebondir des épreuves et à surmonter les obstacles auxquels elles sont confrontées.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Au cœur de la pandémie, alors que de nombreuses personnes ont développé une nouvelle passion pour la course à pied et la fabrication du pain, d’autres ont dû mettre de côté leur amour du voyage. </p>
<p>Chercheuses en psychologie, nous avons mené avec notre équipe de recherche <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S019188692300140X">trois études durant la pandémie de Covid-19</a> afin d’examiner les bienfaits reliés au développement de nouvelles passions en contexte d’adversité. </p>
<p>Nous avons trouvé que les personnes ayant développé une passion harmonieuse ont vécu des émotions agréables et ont réussi à se désengager d’une activité passionnante irréalisable, ce qui les a amenés à ressentir du bien-être psychologique. </p>
<p>Les personnes ayant développé une passion obsessive, quant à elles, ont vécu un peu de bien-être, mais majoritairement des émotions désagréables et du mal-être (symptômes anxieux et dépressifs). </p>
<h2>Les passions ne sont pas toutes égales</h2>
<p>Prenons l’exemple d’Alex et de Charlie, deux personnages fictifs, afin d’illustrer les différents types de passion. Durant la pandémie, Alex a développé une passion pour la cuisine. Chaque soir, il adorait préparer une nouvelle recette et passer du temps en famille autour de bons repas. Dans la ville voisine, Charlie a quant à elle développé une passion pour le ski. Souhaitant participer à des compétitions, elle s’entraînait sur une base régulière et elle se sentait coupable les jours où elle ne skiait pas. Elle négligeait également ses études afin d’optimiser sa performance et se sentir fière d’elle dans son sport favori.</p>
<p>Alex et Charlie ont tous deux développé une passion pour une nouvelle activité, c’est-à-dire que cette activité aimée est devenue une partie de leur identité et ils y ont investi beaucoup de temps et d’énergie. Toutefois, ils ne se sont pas engagés dans cette activité de la même manière, ce qui a affecté différemment leur santé mentale. En effet, il existe <a href="https://psycnet.apa.org/doiLanding?doi=10.1037%2F0022-3514.85.4.756">deux types de passion</a>. </p>
<p>La <a href="https://academic.oup.com/book/12063?login=false">passion harmonieuse</a> est bien intégrée aux autres sphères de vie des individus. Ainsi, elle interfère peu avec leur travail, leurs loisirs ou leurs relations interpersonnelles. C’est le cas d’Alex, qui passe du temps en famille tout en poursuivant sa passion pour la cuisine. De plus, les personnes ayant une passion harmonieuse sont en mesure de se désengager de leur activité passionnante au besoin, par exemple lors d’un confinement qui les empêche de la pratiquer. </p>
<p>Au contraire, la <a href="https://academic.oup.com/book/12063?login=false">passion obsessive</a> est caractérisée par un besoin incontrôlable de pratiquer l’activité aimée. Les personnes ayant une passion obsessive basent souvent leur estime de soi sur leur performance dans leur activité passionnante, comme Charlie qui ne peut s’empêcher de skier.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/528060/original/file-20230524-22-wrjmsu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="personne debout sur une piste de ski" src="https://images.theconversation.com/files/528060/original/file-20230524-22-wrjmsu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/528060/original/file-20230524-22-wrjmsu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/528060/original/file-20230524-22-wrjmsu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/528060/original/file-20230524-22-wrjmsu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/528060/original/file-20230524-22-wrjmsu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/528060/original/file-20230524-22-wrjmsu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/528060/original/file-20230524-22-wrjmsu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Durant la pandémie, les personnes ayant développé une passion obsessive ont vécu un peu de bien-être, mais majoritairement des émotions désagréables et du mal-être.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Le rôle des émotions agréables et désagréables</h2>
<p>Alors que la passion harmonieuse d’Alex risque de lui procurer de nombreux bienfaits, la passion obsessive de Charlie pourrait engendrer des conséquences négatives sur sa santé mentale. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S019188692300140X">Nos études</a> ont montré que les liens entre les types de passion et la santé psychologique peuvent être partiellement expliqués par la présence d’émotions agréables et désagréables. </p>
<p>Les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/B9780124072367000012">émotions agréables</a> permettent d’ouvrir ses horizons et de développer des ressources personnelles (p. ex., la présence attentive, qui réfère à la capacité d’être conscient de ses états internes et de son environnement) qui pourront être utilisées pour faire face aux situations stressantes. Les émotions désagréables ont également leurs fonctions. Par exemple, la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0749597818305193">culpabilité</a> nous permet de reconnaître des comportements immoraux. Cependant, elles peuvent être associées à un repli sur soi et à des problèmes de santé psychologique.</p>
<p>Nos résultats indiquent que les personnes qui ont poursuivi une passion harmonieuse préexistante durant la pandémie et ceux qui en ont développé une nouvelle vivaient davantage d’émotions agréables, ce qui menait à un bien-être psychologique accru (satisfaction de vie, bonheur et trouver un sens à son existence). Au contraire, les personnes qui ont poursuivi une passion obsessive (préexistante et nouvelle) vivaient un peu de bien-être, mais surtout des émotions désagréables et des symptômes anxieux et dépressifs. </p>
<h2>Développer sa capacité à se désengager d’une passion</h2>
<p>La capacité à se désengager d’une passion est importante pour la santé mentale. Durant la pandémie, les personnes qui se désengageaient plus facilement de leur passion irréalisable, comme le voyage ou l’entraînement en salle, vivaient moins de symptômes d’anxiété et de dépression. </p>
<p>Nos résultats indiquent que le développement d’une nouvelle passion harmonieuse pourrait faciliter le désengagement face à une ancienne passion irréalisable qu’il est nécessaire de délaisser.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/528064/original/file-20230524-22-sasd9x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="femme assise dans un avion" src="https://images.theconversation.com/files/528064/original/file-20230524-22-sasd9x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/528064/original/file-20230524-22-sasd9x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/528064/original/file-20230524-22-sasd9x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/528064/original/file-20230524-22-sasd9x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/528064/original/file-20230524-22-sasd9x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/528064/original/file-20230524-22-sasd9x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/528064/original/file-20230524-22-sasd9x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Au cœur de la pandémie, alors que de nombreuses personnes ont développé une nouvelle passion pour la course à pied et la fabrication du pain, d’autres ont dû mettre de côté leur amour du voyage.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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</figure>
<h2>Favoriser la résilience grâce à la passion</h2>
<p>Il est important de souligner que les passions peuvent être des facteurs de résilience. Lors de périodes de vie difficiles, avoir une passion peut aider les personnes à rebondir des épreuves et à surmonter les obstacles auxquels elles sont confrontées. Pendant la pandémie, le développement de nouvelles passions (surtout harmonieuses) était un facteur de protection important pour la santé mentale. </p>
<p>Cela appuie les <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/jopy.12774">résultats d’autres études récentes</a> portant sur l’importance des passions harmonieuses pour promouvoir la résilience. En période de stress, il est donc bénéfique de prioriser les activités que l’on aime et de développer de nouveaux intérêts pour promouvoir sa santé mentale tout en veillant à ce que ces activités passionnantes soient intégrées de façon harmonieuse aux autres sphères de vie.</p>
<p>Bien que nos recherches ne se soient pas poursuivies après les confinements reliés à la pandémie, d’autres études ont montré que les passions harmonieuses ont tendance <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10902-018-0059-z">à perdurer dans le temps</a>. Ainsi, il est fort probable que les passions harmonieuses développées durant la pandémie se maintiennent et continuent d’être bénéfiques à la santé psychologique encore aujourd’hui !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205090/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Catherine Cimon-Paquet a reçu des financements du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada et des Fonds de recherche du Québec - Société et culture.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Anne Holding a reçu des financements de Canadian Social Sciences and Research Council.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Virginie Paquette ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Durant la pandémie, de nombreuses personnes ont développé une passion alors que d’autres ont dû abandonner une activité passionnante. Ces passions ont joué un rôle dans la santé psychologique.
Catherine Cimon-Paquet, Candidate au doctorat, conférencière et chargée de cours, Département de psychologie, Université du Québec à Montréal (UQAM)
Anne Holding, Chercheuse postdoctorale en motivation humaine, New York University
Virginie Paquette, Stagiaire postdoctorale en psychologie organisationnelle/industrielle, Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/201135
2023-04-06T16:25:59Z
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Comment les chefs cuisiniers sont devenus de véritables rock stars
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/519879/original/file-20230406-14-muhsvp.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=225%2C16%2C2308%2C1503&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les chefs Glenn Viel et Paul Pairet dans _Top Chef_. </span> <span class="attribution"><span class="source">M6/ Capture d'écran</span></span></figcaption></figure><p>Pour sa 14<sup>e</sup> édition, l’émission <em>Top Chef</em>, diffusée sur M6, rassemble chaque semaine plusieurs millions de téléspectateurs pour voir de grands chefs et cheffes cuisiniers en tenue impeccable donner des conseils ou émettre des critiques.</p>
<p>Sur Netflix, la série documentaire « Chef’s table » met en scène des cuisiniers virtuoses du monde entier depuis 2015, à grand renfort de storytelling et de plans sophistiqués.</p>
<p>Les chefs ont atteint aujourd’hui un statut de rock stars, et le métier fait rêver. Mais il aura fallu de nombreuses années aux cuisiniers, même de renom, pour acquérir leur stature actuelle.</p>
<h2>Saleté, chaleur, charbon et alcoolisme</h2>
<p>De l’ouverture des premiers restaurants vers 1860, à la première moitié du XX<sup>e</sup> siècle, le métier de <a href="https://www.francebleu.fr/emissions/des-mets-des-mots/107-1/le-chef">chef cuisinier</a>, à quelques exceptions près, ne suscitait pas vraiment de vocations. Le chef exerce sa profession dans des lieux obscurs et insalubres.</p>
<p>Les cuisines d’alors, souvent dissimulées à l’entresol, se trouvent quasiment dépourvues d’aération, ce qui, associé à la chaleur du charbon utilisé pour la cuisson, rend l’atmosphère suffocante. Inhaler ainsi, plusieurs heures par jour, <a href="https://books.openedition.org/editionscnrs/9498?lang=fr,page20">d’importantes quantités de fumées toxiques</a> réduit considérablement l’espérance de vie, ce que le célèbre chef Antonin Carême (1783-1833) dénonce en disant : « C’est le charbon qui nous tue ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/519257/original/file-20230404-15-7pkhv4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/519257/original/file-20230404-15-7pkhv4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=742&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/519257/original/file-20230404-15-7pkhv4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=742&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/519257/original/file-20230404-15-7pkhv4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=742&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/519257/original/file-20230404-15-7pkhv4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=932&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/519257/original/file-20230404-15-7pkhv4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=932&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/519257/original/file-20230404-15-7pkhv4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=932&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Alfred Arthur Brunel de Neuville (1852-1941) A Kitchen Interior with Two Young Chefs playing with Kittens.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par ailleurs, à l’image de l’univers difficile dans lequel ils évoluent, les <a href="https://www.brepolsonline.net/doi/pdf/10.1484/J.FOOD.5.116330">chefs cuisiniers sont généralement présentés comme des personnages crasseux et gras</a>, avec un penchant pour l’alcool. Dans son autobiographie intitulée <em>Dans la dèche à Paris et à Londres</em> (1933), Georges Orwell dépeint au vitriol son quotidien dans les cuisines d’un des plus grands hôtels de la capitale dont il a préféré taire le nom. Selon lui, le chef cuisinier « est un artiste, mais la notion de propreté est totalement étrangère à son art. Au contraire, c’est précisément parce qu’il est un artiste qu’il se complaît dans la saleté car un plat, pour avoir l’air réussi, doit être exécuté salement. »</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/a-quoi-ressemblaient-les-premiers-restaurants-161714">À quoi ressemblaient les premiers restaurants ?</a>
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<p>Enfin, à cette époque, seuls de très rares chefs cuisiniers sont propriétaires de leur restaurant, et même s’ils bénéficient d’une excellente réputation, ils ne quittent pas leur cuisine et demeurent des exécutants, sous l’autorité du restaurateur et du maître d’hôtel.</p>
<h2>Le XXᵉ siècle, siècle de la reconnaissance</h2>
<p>Suite au développement du tourisme gastronomique dans la première moitié du XX<sup>e</sup> siècle, des chefs renommés comme André Pic, Fernand Point ou la mère Brazier s’installent à leur compte. C’est aussi le début de la reconnaissance professionnelle avec le concours du Meilleur Ouvrier de France (MOF) dès 1924, ou l’apparition des étoiles Michelin dès 1931, qui récompensent les meilleurs d’entre eux.</p>
<p>Mais c’est à partir des années 50 que la télévision va les révéler au grand public grâce aux émissions culinaires. <a href="https://youtu.be/YbxWMDdVSPY"><em>Art et Magie de la cuisine</em></a>, animée de 1954 à 1967 par le chef étoilé Raymond Oliver et Catherine Langeais, est le premier d’une longue série de programmes télévisés qui ont permis d’améliorer l’image des chefs, de faire connaître leur expertise, et de propulser les plus grands d’entre eux au rang de stars.</p>
<p>Ces derniers, désormais propriétaires de leur restaurant auquel ils commencent même à donner leur nom, à l’instar de Paul Bocuse – qui s’enorgueillit d’ailleurs d’avoir fait sortir les cuisiniers de leur cuisine – savent alors habilement utiliser les médias comme la télévision et la radio, ou publient des livres de recettes, pour accroître leur visibilité auprès du grand public. Les chefs de <a href="https://youtu.be/Bp9hpXUrcsU">« la Nouvelle Cuisine »</a>, comme Michel Guérard par exemple, surfent habilement sur cette tendance. À partir de cette période, nombre d’entre eux s’associent aussi avec des marques industrielles pour faire de la publicité.</p>
<p>Au fur et à mesure des années, les plus grands d’entre eux – à l’image de Paul Bocuse ou plus tard d’<a href="https://www.ducasse-paris.com/fr">Alain Ducasse</a>, de <a href="https://www.thierrymarx.com/">Thierry Marx</a>, d’<a href="https://anne-sophie-pic.com/">Anne-Sophie Pic</a> ou de <a href="https://www.yannick-alleno.com/fr/yannick-alleno.html">Yannick Alléno</a> – réussissent à surfer sur leur notoriété pour construire des « empires ». Ils acquièrent ainsi, en dehors de leur restaurant, des brasseries, ouvrent des restaurants à l’étranger, créent des instituts de formation ou lancent leur propre magazine gastronomique. Cet accès à la célébrité est étroitement lié à l’excellence : ils portent le col bleu blanc rouge des MOF, ou gèrent des restaurants multi-étoilés. Ce sont avant tout leurs compétences professionnelles qui leur ont permis d’atteindre cette renommée et d’être appréciés du grand public.</p>
<h2>Gastronomie 2.0 : Les chefs à l’assaut des réseaux sociaux</h2>
<p>Le passage au XXI<sup>e</sup> siècle et l’avènement des réseaux sociaux ont bousculé l’accès à la notoriété des grands chefs. Être excellent en cuisine ne suffit plus. Il faut désormais aussi savoir gérer son image. Ils sont donc dorénavant présents sur les réseaux sociaux, car ces derniers leur permettent de diffuser leur histoire, de la façonner à leur image, d’avoir de l’influence. Hélène Darroze compte ainsi 671 000 followers sur Instagram et Philippe Etchebest plus de 1 million.</p>
<p>Dans de nombreux cas aussi, ils se font accompagner par des <a href="https://www.welcometothejungle.com/fr/articles/agent-de-chef-cuisine-marketing">agences de presse spécialisées</a>. C’est ainsi que l’agence Melchior, dirigée par Clarisse Ferreres-Fréchon, permet à ses clients – les chefs trois étoiles Éric Fréchon ou Emmanuel Renaut – de construire leur stratégie marketing et d’obtenir la meilleure visibilité médiatique possible.</p>
<p>Un nouveau type de jeunes chefs, tel Jean Imbert, est aussi apparu ces dernières années. Parfait inconnu avant son passage dans l’émission Top Chef en 2012, il a ensuite su jouer des médias et des <a href="https://www.lesechos.fr/weekend/gastronomie-vins/cuisine-cinq-chefs-stars-des-reseaux-sociaux-1871341">réseaux sociaux</a> en s’affichant régulièrement sur son compte Instagram en compagnie de célébrités telles que Madonna ou Marion Cotillard. Il est d’ailleurs appelé « le chef des stars ». Ce n’est que plus tard, en partie grâce à cette notoriété médiatique, qu’on lui a confié les commandes des cuisines du Plaza Athénée (2021), ou qu’il a signé la carte du restaurant Monsieur Dior (2022).</p>
<p><div data-react-class="InstagramEmbed" data-react-props="{"url":"https://www.instagram.com/p/ByW7qq6C7ei","accessToken":"127105130696839|b4b75090c9688d81dfd245afe6052f20"}"></div></p>
<p>Aujourd’hui, les grands chefs sont donc devenus des célébrités ; ils sont invités, célébrés, adulés et écoutés. Ils font désormais partie du classement des cinquante personnalités préférées des Français, à l’image des chanteurs, acteurs ou footballeurs. En 2023 Philippe Etchebest et Cyril Lignac y figurent respectivement à la 7<sup>e</sup> et à la 13<sup>e</sup> place. Cependant, derrière toutes ces paillettes, il ne faut pas oublier que ce métier reste très exigeant, difficile, demande un profond dévouement et une discipline de fer – ce que nous rappelle la série <em>The Bear</em> – et que seule une infime minorité atteint le statut de « star ».</p>
<h2>Mais où sont les cheffes ?</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/519376/original/file-20230404-14-kljyxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/519376/original/file-20230404-14-kljyxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/519376/original/file-20230404-14-kljyxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/519376/original/file-20230404-14-kljyxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/519376/original/file-20230404-14-kljyxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=579&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/519376/original/file-20230404-14-kljyxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=579&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/519376/original/file-20230404-14-kljyxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=579&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Andrée Rosier, première femme MOF cuisinière.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Que dire du rôle et de la place <a href="https://theconversation.com/gastronomie-quand-les-cheffes-mettent-du-care-en-cuisine-188033">des grandes cheffes</a> ? Si elles affirment de plus en plus leur présence en cuisine, aujourd’hui encore elles obtiennent sensiblement moins d’honneurs ou de reconnaissance que leurs homologues masculins. En France, en un siècle, seules quatre femmes ont obtenu trois étoiles pour leur restaurant : la mère Brazier en 1924, Marie Bourgeois en 1933, Marguerite Bise en 1951 et Anne-Sophie Pic en 2007.</p>
<p>Cette année, moins de 10 % de femmes sont étoilées au guide Michelin. Andrée Rosier (en 2007) et Virginie Basselot (en 2015) sont les deux seules MOF cuisinière à avoir remporté un concours qui compte des centaines d’hommes primés depuis sa création. Dans les médias et sur les réseaux sociaux, les cheffes sont là encore sous-représentées. S’il est indéniable que <a href="https://blog-histoire.fr/2000-ans-histoire/2228-les-cuisiniers.html">l’image du chef a considérablement évolué</a> au cours de ces deux derniers siècles et que les plus grands d’entre eux sont de véritables vedettes, les cheffes attendent toujours leur tour et sont encore trop souvent victimes de <a href="https://www.50-50magazine.fr/2020/07/06/sexisme-en-cuisine-ou-sont-les-cheffes/">comportements machistes</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201135/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Louisgrand ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Aujourd’hui, les chefs cuisiniers – quelques cheffes aussi – sont écoutés, admirés, respectés. Mais il n’en a pas toujours été ainsi.
Nathalie Louisgrand, Enseignante-chercheuse, Grenoble École de Management (GEM)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/194143
2022-12-09T13:58:52Z
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La Covid-19 a remodelé notre façon d’acheter, de préparer et de consommer les aliments
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/494694/original/file-20221110-18-lrgnri.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C992%2C666&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La pandémie a eu un impact à la fois sain et malsain sur nos relations avec la nourriture.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Au début de l’année 2020, alors que les <a href="https://www.statcan.gc.ca/fr/quo/bdd/nec/mar2020">provinces canadiennes déclaraient tour à tour l’état d’urgence</a> et que diverses restrictions sanitaires entraient en vigueur, nos sorties routinières à l’épicerie ont été grandement bouleversées.</p>
<p>Devant l’incertitude causée par la Covid-19, plusieurs personnes <a href="https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/62f0014m/62f0014m2020005-fra.htm">au Canada</a> et <a href="https://doi.org/10.3390/nu13010020">à travers le monde</a> ont fait des réserves de nourriture et d’autres produits.</p>
<p>Ce fut le début d’une série d’impacts de la pandémie sur nos expériences avec la nourriture.</p>
<p>Pour mieux comprendre les décisions liées à l’alimentation durant la pandémie, notre équipe de recherche a mené une étude en ligne auprès d’un échantillon d’adultes vivant au Québec. Cette étude a couvert trois périodes différentes entre le confinement initial au printemps 2020 et le <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1850929/couvre-feu-quebec-etude-science-annonce-gouvernement-ministere">couvre-feu instauré dans la province</a> à l’hiver 2021.</p>
<h2>Achats d’aliments : comment et pourquoi ?</h2>
<p>Notre étude a montré qu’au début de la pandémie, les <a href="https://doi.org/10.3389/fpubh.2021.752204">gens ont réduit la fréquence avec laquelle ils achetaient des aliments en magasin</a>. Cette diminution s’est produite en parallèle avec une <a href="https://heia.com.au/wp-content/uploads/2021/09/HEIA_V26No2_Food-purchasing-patterns-in-Quebec.pdf">augmentation de l’utilisation des services de cueillette et de livraison d’épicerie</a>. Cette hausse générale de la popularité des méthodes d’épicerie sans contact <a href="https://doi.org/10.1002/agr.21679">a également été observée ailleurs dans le monde</a>, et était probablement due au fait que les gens tentaient de limiter leur exposition au virus.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/492378/original/file-20221028-60938-5kpxxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Une personne portant un t-shirt rouge met des denrées dans le coffre d’une voiture noire" src="https://images.theconversation.com/files/492378/original/file-20221028-60938-5kpxxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/492378/original/file-20221028-60938-5kpxxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/492378/original/file-20221028-60938-5kpxxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/492378/original/file-20221028-60938-5kpxxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/492378/original/file-20221028-60938-5kpxxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=467&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/492378/original/file-20221028-60938-5kpxxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=467&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/492378/original/file-20221028-60938-5kpxxs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=467&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La popularité de la cueillette d’épicerie et de la livraison à domicile a augmenté pendant les périodes de confinement, alors que moins d’individus faisaient leur épicerie en magasin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Notre étude suggère que la fréquence des achats en magasin est revenue à son niveau prépandémique au milieu de l’année 2020. Toutefois, il est attendu que l’utilisation des méthodes d’épicerie sans contact <a href="https://doi.org/10.1111/cjag.12237">persiste dans le temps chez une portion considérable de la population</a>.</p>
<p>La pandémie a non seulement changé notre façon d’acheter les aliments, mais également les motivations derrière ces achats. <a href="https://www.researchgate.net/publication/364811680_Food_values_food_purchasing_and_eating-related_outcomes_among_a_sample_of_Quebec_adults_during_the_Covid-19_pandemic">Tel qu’indiqué dans un article qui sera publié prochainement</a>, plus des trois quarts de nos répondants ont exprimé que leur désir de soutenir les commerces alimentaires locaux avait augmenté par rapport à 2019. De plus, 68 % d’entre eux ont affirmé accorder une importance plus grande au pays d’origine des aliments.</p>
<p>Les répondants ont également rapporté que leurs décisions d’achat étaient motivées par la <a href="https://doi.org/10.1111/ijcs.12691">sécurité et le prix</a> des produits, ainsi que par leur impact <a href="https://doi.org/10.3390/su13063056">environnemental</a> et éthique.</p>
<h2>Davantage de repas faits maison</h2>
<p>Les changements sociétaux majeurs comme la fermeture des restaurants, l’école à domicile et le télétravail ont été accompagnés par une <a href="https://doi.org/10.1016/j.seps.2021.101107">augmentation de la fréquence de la cuisine maison ainsi qu’une augmentation des compétences en matière d’alimentation telles que les aptitudes de cuisine et de planification des repas</a>. De nombreux Canadiens <a href="https://doi.org/10.3390/ijerph18105485">ont appris de nouvelles recettes</a>, et l’augmentation <a href="https://www.cbc.ca/news/canada/north/sourdough-popular-Covid-19-1.5529649">très médiatisée de la popularité de la boulangerie</a> est corroborée par une <a href="https://trends.google.com/trends/explore?date=2020-01-01%202020-12-31&geo=CA&q=bread%20recipe%2Brecette%20de%20pain">augmentation spectaculaire des recherches de recettes de pain en ligne</a> au cours des premières semaines de la pandémie (recherches qui sont demeurées plus nombreuses qu’avant la pandémie pour bonne partie de 2021).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/493993/original/file-20221108-14-57bra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/493993/original/file-20221108-14-57bra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/493993/original/file-20221108-14-57bra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/493993/original/file-20221108-14-57bra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/493993/original/file-20221108-14-57bra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/493993/original/file-20221108-14-57bra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/493993/original/file-20221108-14-57bra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/493993/original/file-20221108-14-57bra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Popularité des recherches Google pour le terme « recette de pain » (ou son équivalent anglais « bread recipe ») en 2019, 2020 et 2021 au Canada. Les recherches ont atteint un sommet en avril 2020, pendant le premier confinement pandémique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Google Trends), Fourni par l’auteur</span></span>
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</figure>
<p>L’amélioration des compétences liées à l’alimentation était <a href="https://search.informit.org/doi/abs/10.3316/informit.365014239384456">particulièrement prononcée chez les familles</a>, ce qui est probablement dû à une <a href="https://doi.org/10.1017/S1368980021001932">augmentation de la participation des enfants aux activités culinaires pendant les confinements</a>. En outre, plus du tiers des personnes interrogées dans le cadre de notre étude ont indiqué que l’amélioration des compétences au sein de leur ménage était due à une augmentation du temps et de la motivation pour cuisiner, du réconfort et du plaisir tirés de la nourriture, et de l’intérêt pour la nourriture.</p>
<p>Bien que l’amélioration des compétences culinaires et l’augmentation de la fréquence de la cuisine maison puissent être considérées comme bénéfiques, il y a un revers à cette médaille. Certaines personnes ont semblé se fatiguer de préparer des repas au fil du temps, ce qui s’est traduit par une augmentation des commandes à emporter ou des livraisons d’aliments préparés au début de 2021 par rapport à 2020.</p>
<h2>Tentation et santé</h2>
<p>L’effet de la pandémie sur les comportements alimentaires était variable d’un individu à l’autre. D’une part, la nourriture semble avoir été utilisée comme une source de réconfort et une façon d’éviter l’ennui pendant les confinements. Plus du quart de nos répondants ont rapporté une <a href="https://www.researchgate.net/publication/364811680_Food_values_food_purchasing_and_eating-related_outcomes_among_a_sample_of_Quebec_adults_during_the_Covid-19_pandemic">augmentation de leur désir de manger pendant la pandémie</a> comparativement à la période prépandémique. Selon leurs dires, cette augmentation est due au fait qu’ils étaient toujours à la maison et entourés de nourriture.</p>
<p>D’autre part, une faible proportion de répondants ont rapporté que leur désir de manger avait diminué. Les principales raisons invoquées pour expliquer ce changement sont des sentiments de stress et d’anxiété ainsi qu’une diminution de la motivation à cuisiner.</p>
<p>Les confinements ont également eu des effets mitigés sur le caractère sain des choix alimentaires. <a href="https://doi.org/10.1093/advances/nmab130">Une étude résumant des données recueillies à travers le monde</a> a révélé que, de façon générale, les gens ont déclaré avoir consommé davantage d’aliments malsains tels que des grignotines et des sucreries pendant les périodes de confinement.</p>
<p>Toutefois, certains individus semblent également avoir profité des confinements pandémiques pour faire des <a href="https://doi.org/10.1016/j.foodqual.2020.104145">choix alimentaires plus sains</a>. Les changements malsains pourraient donc avoir été compensés par une consommation accrue d’aliments plus nutritifs tels que les fruits et légumes, les légumineuses et les céréales.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/492371/original/file-20221028-58735-cq8dx0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un homme confus regardant des produits dans les rayons d’une épicerie" src="https://images.theconversation.com/files/492371/original/file-20221028-58735-cq8dx0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/492371/original/file-20221028-58735-cq8dx0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/492371/original/file-20221028-58735-cq8dx0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/492371/original/file-20221028-58735-cq8dx0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/492371/original/file-20221028-58735-cq8dx0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/492371/original/file-20221028-58735-cq8dx0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/492371/original/file-20221028-58735-cq8dx0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=520&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La pandémie a eu des résultats mitigés sur nos choix alimentaires. Les gens ont déclaré avoir consommé davantage d’aliments malsains tels que des grignotines et des sucreries pendant les périodes de confinement.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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</figure>
<p>La grande variabilité des changements liés à l’alimentation peut en partie s’expliquer par les impacts variés de la pandémie sur la situation personnelle des individus. <a href="https://doi.org/10.1093/ajcn/nqaa336">Davantage de changements dans les comportements alimentaires ont probablement été observés chez les individus dont les conditions de travail ont été perturbées</a> par la pandémie, en raison notamment de la perte d’un emploi ou d’une transition vers le télétravail.</p>
<p>De plus, compte tenu de la survenue inattendue de la Covid-19, la plupart des études ont dû comparer les habitudes alimentaires des participants pendant les confinements avec les souvenirs qu’avaient ces participants de leurs habitudes prépandémiques. <a href="https://dictionary.apa.org/recall-bias">Ces souvenirs ne correspondent toutefois pas toujours à la réalité</a>.</p>
<h2>Plus de recherches sont nécessaires</h2>
<p>Les groupes vulnérables ont probablement été sous-représentés dans la plupart des études à propos des impacts de la pandémie sur l’alimentation. De plus amples recherches sont nécessaires afin de comprendre comment les changements d’habitudes alimentaires induits par la pandémie évolueront au fil du temps en fonction du groupe d’âge des individus, de leur statut socio-économique, et de la structure du ménage dans lequel ils vivent.</p>
<p>Le temps nous dira si les changements dans nos valeurs et dans nos compétences liées à l’alimentation seront permanents ou s’ils se dissiperont à mesure que nous retournerons à nos vies prépandémiques. La pandémie a possiblement apporté quelques changements positifs dans nos relations avec la nourriture et nos compétences alimentaires.</p>
<p>Un soutien continu aux produits alimentaires locaux pourrait contribuer à promouvoir une alimentation saine ainsi que la durabilité de notre système alimentaire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194143/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Daiva Nielsen a reçu du financement de l’Initiative interdisciplinaire en infection et immunité de l’Université McGill (MI4) pour l'étude décrite dans l'article.
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Katherine Labonté ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
La Covid-19 a eu un impact considérable sur nos façons d’acheter et de consommer les aliments. Mais ces impacts seront-ils permanents ?
Katherine Labonté, Postdoctoral Fellow/Stagiaire postdoctorale, School of Human Nutrition, McGill University
Daiva Nielsen, Assistant Professor, School of Human Nutrition, McGill University
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/189608
2022-09-19T18:40:32Z
2022-09-19T18:40:32Z
La cuisine solaire, quand la décarbonation devient un plaisir
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/483962/original/file-20220912-18-quidtk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C1%2C1017%2C570&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un four solaire très basique. Il en existe plusieurs types, dont certains qui permettent de monter en température et de cuire du pain ou des gâteaux par exemple.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/13470115@N08/4902971737">Erik Burton, Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Avec un cuiseur solaire, on peut faire une ratatouille, de la brioche, des cookies. Les fours solaires prennent leur place dans quelques restaurants professionnels, des boulangeries, et au <a href="https://polytech.univ-amu.fr/concours-cuisine-solaire-2022">festival de cuisine solaire</a> à Marseille.</p>
<p>La cuisine solaire aborde aussi des enjeux majeurs. Aujourd’hui, 2,6 milliards d’êtres humains n’ayant pas accès à un système de cuisson « propre » et <a href="https://iea.blob.core.windows.net/assets/98909c1b-aabc-4797-9926-35307b418cdb/WEO2019-free.pdf">utilisent du bois ou du charbon pour l’un de leurs besoins essentiels</a>, avec des conséquences désastreuses : déforestation, émission de gaz à effet de serre ainsi que de polluants menants à la mort prématurée d’environ 2,5 millions de personnes par an, sans compter l’obligation des populations à consacrer une grande partie de leur journée à la recherche de combustible, les mettant en danger et limitant leur temps disponible pour aller à l’école ou l’université.</p>
<p>Le cuiseur solaire pourrait donc sembler une solution technologique, écologique, économique et sociale. Les cuiseurs solaires remplissent bien leur fonction, ils utilisent une énergie gratuite et largement disponible dans de nombreuses régions du monde pour subvenir à un besoin primordial.</p>
<p>Alors, pourquoi les cuiseurs solaires ne sont-ils pas plus répandus en France comme dans le reste du monde ?</p>
<h2>Comment ça marche ?</h2>
<p>Le principe d’un cuiseur solaire est assez simple : on essaie de faire rentrer un maximum d’énergie solaire à l’aide de miroirs et de surfaces absorbant très bien la lumière solaire (noires), et on essaie d’avoir un minimum de pertes de chaleur à l’aide d’isolants comme la laine de roche ou une vitre.</p>
<p>Il existe plusieurs technologies de cuiseurs solaires, comme les <a href="https://solarcooking.fandom.com/wiki/Category:Solar_box_cooker_plans">cuiseurs boîtes</a>, les <a href="https://solarcooking.fandom.com/wiki/Category:Parabolic_solar_cooker_plans">cuiseurs paraboliques</a>, les <a href="https://solarcooking.fandom.com/wiki/Category:Solar_trough_cooker_plans">cuiseurs à tube sous vide</a> et les <a href="http://www.solare-bruecke.org/index.php/en/die-scheffler-reflektoren">paraboles de Scheffler</a>. À chaque technologie sa température, sa facilité de construction ou d’utilisation, ses avantages et ses inconvénients.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Marmites et paraboles" src="https://images.theconversation.com/files/483988/original/file-20220912-1755-xdgmqh.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/483988/original/file-20220912-1755-xdgmqh.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/483988/original/file-20220912-1755-xdgmqh.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/483988/original/file-20220912-1755-xdgmqh.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/483988/original/file-20220912-1755-xdgmqh.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/483988/original/file-20220912-1755-xdgmqh.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/483988/original/file-20220912-1755-xdgmqh.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Trois cuiseurs solaires sous la neige.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/1/1c/Solar_cooker_systems-1.JPG/1280px-Solar_cooker_systems-1.JPG">Fringe2013, Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Une première explication de leur adoption très limitée pourrait être leur inefficacité, ou leur incapacité à atteindre les températures nécessaires aux diverses méthodes de cuisson. Il est vrai que les cuiseurs de type <a href="https://static.wikia.nocookie.net/solarcooking/images/0/0b/Minimum_Solar_Box_Cooker_Photo_small_reversed.jpg/revision/latest/scale-to-width-down/1000?cb=20160417181948">« boîte »</a>, généralement en carton ou en bois, qui sont les plus simples et les meilleurs marchés, atteignent difficilement des températures supérieures à 150 °C et sont longs à monter en température.</p>
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<p>Pour accélérer le chauffage et/ou augmenter la température atteinte par un cuiseur solaire, il faut augmenter la concentration des rayons du Soleil à l’aide de miroirs supplémentaires et diminuer les pertes thermiques du plat de cuisine en améliorant l’isolation du cuiseur.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un four solaire « boîte » pour le diner de Thanksgiving" src="https://images.theconversation.com/files/483961/original/file-20220912-1755-4v997m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=13%2C5%2C1123%2C891&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/483961/original/file-20220912-1755-4v997m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=474&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/483961/original/file-20220912-1755-4v997m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=474&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/483961/original/file-20220912-1755-4v997m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=474&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/483961/original/file-20220912-1755-4v997m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=595&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/483961/original/file-20220912-1755-4v997m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=595&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/483961/original/file-20220912-1755-4v997m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=595&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un four solaire. Il en existe plusieurs types, chacun avec ses avantages et inconvénients – ici, le type « boîte ».</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/13470115@N08/6396200661">Erik Burton, Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les cuiseurs à tube sous vide sont un compromis extrêmement prometteur. Ils sont constitués de deux tubes en verre emboîtés l’un dans l’autre : le tube extérieur est transparent tandis que le tube intérieur est peint en noir. Ils sont séparés d’une petite couche de vide : le meilleur isolant que l’on connaisse ! Pour cuire de la nourriture, il suffit de l’insérer dans le tube intérieur. Ce type de cuiseur a si peu de pertes thermiques que la température interne d’un tube seul laissé au Soleil peut atteindre plus de 110 °C. Avec un système simple de miroirs pour concentrer quelques rayons supplémentaires sur leur surface, on peut aisément atteindre 300 °C en une heure.</p>
<p>Les deux inconvénients de ces systèmes sont la sensibilité aux chocs thermiques du verre (il faut éviter les plats en sauce non couverts pour les projections) et le fait qu’il est obligatoire de cuisiner en extérieur. Les <a href="http://www.solare-bruecke.org/index.php/en/die-scheffler-reflektoren">paraboles de Scheffler</a> sont des cuiseurs dits indirects et permettent de s’affranchir de ce dernier problème, mais pour une complexité plus importante.</p>
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<img alt="Un tube sous vide et ses paraboles pour rediriger les rayons du soleil" src="https://images.theconversation.com/files/483985/original/file-20220912-5769-k9qpi9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/483985/original/file-20220912-5769-k9qpi9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/483985/original/file-20220912-5769-k9qpi9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/483985/original/file-20220912-5769-k9qpi9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/483985/original/file-20220912-5769-k9qpi9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/483985/original/file-20220912-5769-k9qpi9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/483985/original/file-20220912-5769-k9qpi9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un four solaire à tube sous vide, atteignant 260 °C grâce à son concentrateur.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Thomas Fasquelle, Université d’Aix Marseille</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Une seconde raison valable pourrait être le prix : les cuiseurs solaires nécessitent un investissement initial potentiellement important mais non prohibitif – quelques dizaines d’euros pour un cuiseur-boîte, environ 200 € pour un cuiseur à tube sous vide, et plusieurs centaines ou milliers d’euros pour les cuiseurs paraboliques.</p>
<h2>L’énergie solaire, trop complexe à gérer ?</h2>
<p>Une troisième raison, bien connue, est l’intermittence de l’énergie solaire. Lorsque l’on cuisine, il est très désagréable de ne pas être maître du temps, dans les deux acceptions de ce dernier. C’est donc le manque de système de stockage simple et bon marché qui est le principal défaut de la technologie solaire.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-les-low-tech-se-font-une-place-en-france-186963">Comment les « low tech » se font une place en France</a>
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<p>De nombreux efforts de recherche sont effectués dans ce sens, comme <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0038092X18305620">l’utilisation de matériaux à changement de phase</a>, c’est-à-dire des matériaux solides qui fondent à la température d’utilisation du cuiseur (par exemple 200 °C), absorbant une très grande quantité de chaleur, puis se resolidifient et libèrent la chaleur lorsqu’il n’y a plus de soleil. La problématique du stockage est alors de trouver le bon compromis entre efficacité et capacité de stockage d’un côté, et prix et complexité de l’autre côté.</p>
<h2>Les cuiseurs solaires, pas assez « cools » ?</h2>
<p>Enfin, la lente propagation des cuiseurs solaires peut s’expliquer par l’image qu’ils véhiculent et la sociologie.</p>
<p>En effet, les cuiseurs solaires paraissent aujourd’hui contraignants à utiliser par rapport aux alternatives : la plupart d’entre nous désirent cuisiner à toute heure, par tout temps et à l’intérieur.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/faire-griller-une-saucisse-au-barbecue-est-une-affaire-de-chimiste-164407">Faire griller une saucisse au barbecue est une affaire de chimiste</a>
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<p>Mais n’y aurait-il pas au moins une activité de cuisine pratiquée en extérieur, uniquement quand il fait beau, et consommant une énergie pas toujours décarbonée ? Le fameux barbecue ! Le cuiseur solaire a toute sa place pour remplacer ou compléter celui-ci, à condition d’être efficace, facile d’utilisation et à forte valeur sociale ajoutée.</p>
<p>L’association <a href="https://solarcooking.fandom.com/fr/wiki/Les_Festins_Photoniques">Les Festins Photoniques</a>, basée à Marseille, pense que plusieurs technologies de cuiseurs solaires, notamment les tubes, peuvent remplir ce service. Une optimisation de l’isolation et des optiques, notamment à l’aide de la technologie dite <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Nonimaging_optics">non imageante</a>, pourrait également mener à des planchas solaires.</p>
<p>La <a href="http://www.solare-bruecke.org/index.php/fr/die-scheffler-reflektoren">parabole de Scheffler</a> est une technologie simple à construire et à utiliser pour faire de la cuisine collective professionnelle et de qualité. Bien que coûtant plusieurs milliers d’euros, cette parabole a l’avantage de permettre la cuisine solaire professionnelle en intérieur et à haute température (400 °C pour la plaque de cuisson d'un restaurant professionnel). Ainsi, peut-être qu’avec la démocratisation d’outils performants, conviviaux, et permettant de cuisiner des mets raffinés, les cuiseurs solaires passeront de la solution contraignante à l’outil d’utilité sociale !</p>
<p>En ce qui concerne les pays en voie de développement, la question sociale porte davantage sur une mauvaise communication entre les promoteurs de la cuisine solaire et les populations à qui cela pourrait profiter : <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2214629617301019">non prise en compte des besoins et méthodes de cuisine locales dans les solutions proposées</a> (par exemple la taille des cuiseurs de type familial, ou la température désirée pour le plat traditionnel local), manque de formation et de démonstration des performances des cuiseurs, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301421513008793">manque d’exemplarité des pays développés recourant massivement aux énergies fossiles ou à l’électricité pour la cuisine</a>, etc.</p>
<h2>Et alors, que faut-il faire pour accélérer les choses ?</h2>
<p>Pour accélérer ce processus, les institutions de recherche et de développement travaillent sur quatre aspects : le stockage de l’énergie (pas encore mature car trop complexe et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0038092X20307581">trop cher</a>, le développement de cuiseurs bon marché et faciles à construire par et pour les particuliers (en cours de développement rapide, avec souvent des plans/notices proposés en open source en <a href="https://solarcooking.fandom.com/wiki/Category:Solar_cooker_plans">différentes langues</a>, comme en <a href="https://www.solarbrother.com/en/open-source/">France</a>, l’amélioration des technologies les plus prometteuses comme les paraboles de Scheffler (à Marseille, le restaurant Le Présage <a href="https://www.capenergies.fr/portfolio_page/crocs/">est associé</a> au laboratoire IUSTI pour améliorer leur fourneau solaire basé sur cette technologie), et surtout la <a href="https://solarcooking.fandom.com/wiki/Most_significant_solar_cooking_projects">prise en compte des besoins des populations en amont d’un projet de développement de la cuisine solaire</a>.</p>
<p>En parallèle, les acteurs de ce domaine tentent, tout du moins en France, de transformer la « contrainte » liée à l’utilisation des cuiseurs solaires en plaisir pour les yeux et pour les papilles, mais aussi en <a href="https://polytech.univ-amu.fr/concours-cuisine-solaire-2022">jeu</a>. C’est ainsi que nous espérons décarboner les usages tout en créant du plaisir.</p>
<p>Enfin, il y a besoin de davantage de financement des projets de développement des cuiseurs solaires qui sont portés par les associations humanitaires et certains <a href="https://www.solarcookers.org/">programmes spécifiques</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/189608/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Fasquelle a reçu des financements de l'Institut de Mécanique et d'Ingénierie (IMI) de l'université d'Aix-Marseille (AMU), ainsi que de la Région Sud et du restaurant Le Présage pour financer la thèse de doctorat de Gabriel Guillet.
Thomas Fasquelle est membre de l'association "Les Festins Photoniques".</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Le doctorat de Gabriel GUILLET est cofinancé par la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur (90%) et par la Société Le Présage (10%) dans le cadre du dispositif "Emplois Jeunes Doctorants".</span></em></p>
Cuire son repas en concentrant la chaleur du soleil, c’est possible… même sous la neige.
Thomas Fasquelle, Enseignant-Chercheur à PolytechMarseille et à l'IUSTI, Aix-Marseille Université (AMU)
Gabriel Guillet, Doctorant en Sciences de l'Ingénieur, Aix-Marseille Université (AMU)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/186768
2022-08-02T20:11:07Z
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Petite histoire rafraîchissante des glaces et artisans glaciers
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/477148/original/file-20220802-17-3r1835.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=13%2C4%2C998%2C673&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un plaisir régressif de l'été. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.rawpixel.com/image/447605/free-photo-image-ice-cream-flavor-food">Rawpixel</a></span></figcaption></figure><p>La glace, douceur gentiment régressive qui s’impose à la période estivale… Produit éphémère par excellence, synonyme de moments hédonistes et le plus souvent partagés, elle évoque une forme de nostalgie liée à l’enfance. Les Français en consomment environ 6 litres par an, et 50 % des ventes sont réalisées sur une dizaine de semaines, en été, selon la <a href="http://lemondedudessert.fr/">Confédération Nationale des Glaciers de France</a> (CNGF).</p>
<p>Il y a les sorbets (sans matières grasses) ou les crèmes glacées (qui contiennent du lait ou des œufs), que l’on peut déguster en pot, en bac, en cône ou en bâtonnet. Toujours d’après la CNGF, organisme qui soutient et accompagne les glaciers depuis 80 ans, les parfums plébiscités seraient la vanille, le chocolat et le café pour les crèmes glacées et la fraise, le citron et la poire pour les sorbets.</p>
<h2>Histoires et légendes</h2>
<p>Beaucoup d’histoires et de légendes entourent ses origines. La plupart des chercheurs s’accordent cependant pour dire que la <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=i7s7BAAAQBAJ">glace aurait été inventée en Chine</a>. Son apparition, elle, s’échelonne entre 3 000 et 200 avant Jésus-Christ, selon les sources.</p>
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<p>Certains documents expliquent que les Chinois utilisaient du lait de jument ou d’ânesse qui était fermenté et chauffé avec de la farine et du camphre pour être ensuite glacé puis consommé. Dans d’autres textes, on aromatisait du lait de chèvre avec du miel et des plantes et la technique de refroidissement consistait en un mélange d’eau et de salpêtre.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/475142/original/file-20220720-18-tn6fxp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/475142/original/file-20220720-18-tn6fxp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/475142/original/file-20220720-18-tn6fxp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/475142/original/file-20220720-18-tn6fxp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/475142/original/file-20220720-18-tn6fxp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/475142/original/file-20220720-18-tn6fxp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/475142/original/file-20220720-18-tn6fxp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le faludeh ou Faloudeh, boisson glacée perse.</span>
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<p>Les Perses, eux, auraient créé le <em>faludeh</em> ou <em>faloudeh</em>, une boisson glacée à base d’eau de rose et de vermicelles auxquels on ajoutait du safran et des fruits, et alors réservée aux plus riches. Dans la même région, on aurait trouvé des boissons aux fruits refroidies avec de la neige, s’appelant <em>sharbet</em>. Ce mot, d’origine Perse, a par la suite donné le mot français « sorbet ».</p>
<p>Beaucoup d’informations imprécises voire contradictoires circulent concernant l’évolution des glaces et des sorbets au cours des siècles suivants. Par exemple, et contrairement à une idée reçue, <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=fjxfkqnSFiQC">ni Marco Polo, ni Catherine de Médicis ne seraient à l’origine de l’apparition des crèmes glacées en Italie</a> puis en France. Mais les crèmes glacées qui ressemblent à celles que l’on mange aujourd’hui sont bien nées en Italie. Ce sont les fameuses <em>gelati</em>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/top-chef-lemission-qui-eleve-les-plaisirs-sensoriels-au-rang-dart-184572">« Top Chef », l’émission qui élève les plaisirs sensoriels au rang d’art</a>
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<p>En France, en 1686, le sicilien Francesco Procopio dei Coltelli achète à Paris le <em>Café Procope</em> dans lequel il proposera plus de 80 parfums de glaces, devenant ainsi le premier café-glacier de la capitale. Le succès est total : les membres de l’aristocratie et les plus riches se rendent chez lui pour déguster une coupe glacée. A l’époque, il est compliqué de se procurer puis de conserver de la glace. Le produit est donc coûteux et réservé à une élite.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/477171/original/file-20220802-18-bn2ywu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/477171/original/file-20220802-18-bn2ywu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/477171/original/file-20220802-18-bn2ywu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=766&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/477171/original/file-20220802-18-bn2ywu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=766&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/477171/original/file-20220802-18-bn2ywu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=766&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/477171/original/file-20220802-18-bn2ywu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=963&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/477171/original/file-20220802-18-bn2ywu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=963&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/477171/original/file-20220802-18-bn2ywu.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=963&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Procopio de Coltelli.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Francesco_Procopio_dei_Coltelli#/media/Fichier:Procopio-de-Coltelli2_opt2.jpg">Wikimedia</a></span>
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<p>Au cours du XIX<sup>e</sup> siècle, les techniques de fabrication et de conservation de la glace s’améliorent considérablement. En effet, dans les années 1840, l’Américaine Nancy Johnson invente la première sorbetière à manivelle, améliorée en 1885 par l’anglaise Agnes Bertha Marshall, surnommée « la reine des glaces ». En 1860, le français Charles Tellier crée la première machine frigorifique permettant ainsi la fabrication du froid artificiel. L’apparition et le développement de l’électricité permettent aussi la conservation des produits. Le nombre de glaciers se multiplie alors, et le succès des glaces va grandissant.</p>
<h2>Un attrait croissant pour glaces artisanales et pour les artisans glaciers</h2>
<p>Selon l’étude <a href="https://www.xerfi.com/presentationetude/La-fabrication-et-le-marche-des-glaces-et-sorbets"><em>Xerfi classic</em> sur La fabrication et le marché des glaces et sorbets</a> publiée en avril 2022, la France est aujourd’hui le premier pays producteur de glaces et de sorbets en Europe et le 2<sup>e</sup> exportateur mondial derrière l’Allemagne. Dans l’hexagone, deux acteurs s’imposent : les fabricants industriels et les artisans glaciers. Les premiers dominent largement avec 1,2 milliard d’euros de chiffres d’affaires en 2021, grâce principalement à la vente aux grandes et moyennes surfaces. Les artisans glaciers, en grande majorité propriétaires de leur magasin, vendent leurs produits directement aux consommateurs et, toujours selon les estimations de <em>Xerfi</em>, auraient un chiffre d’affaires d’environ 400 millions d’euros en 2021.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/depuis-les-annees-1950-les-emissions-culinaires-faconnent-limage-des-chefs-184798">Depuis les années 1950, les émissions culinaires façonnent l’image des chefs</a>
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<p>Or les Français plébiscitent de plus en plus les produits des artisans glaciers et cette profession est en pleine évolution. D’ailleurs, le nombre d’établissements artisanaux et de petits industriels a augmenté de 31 % entre 2012 et 2020 et ce, pour diverses raisons : tout d’abord, les consommateurs sont de plus en plus exigeants concernant la composition des produits qu’ils mangent. Grâce aux applications comme <a href="https://yuka.io/"><em>Yuka</em></a> par exemple, ils peuvent instantanément prendre connaissance des stabilisateurs et additifs que contiennent leurs glaces. C’est pourquoi ils se tournent souvent vers des <a href="https://www.rtbf.be/article/cremes-glacees-certaines-contiennent-autant-d-air-que-de-matieres-premieres-10257165">produits de meilleure qualité</a>, alliant plaisir et santé, et principalement artisanaux.</p>
<p>On assiste également à un fort engouement pour des produits écoresponsables. Grand nombre d’artisans glaciers font appel aux circuits courts et aux produits de saison, supprimant colorants, sucre ultra-transformé et autres conservateurs. Julia Canu (une des rares femmes possédant le titre d’artisan glacier en France, même si la tendance évolue) et Tiago Barbosa, cofondateurs du <a href="https://www.unicoglacier.com/">glacier écoresponsable <em>Único</em> à Lyon</a>, travaillent en direct avec leurs producteurs et leurs sorbets ne sont faits qu’à partir de produits frais. C’est pourquoi de nombreux restaurateurs font appel à eux pour réaliser des glaces de qualité qui accompagnent leurs menus. Ils en ont déjà créé une à l’artichaut par exemple et élaboré un sorbet vinaigre, échalote et poivre concassé pour accompagner les huîtres en période de fêtes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/475149/original/file-20220720-21-l5cmnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/475149/original/file-20220720-21-l5cmnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=470&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/475149/original/file-20220720-21-l5cmnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=470&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/475149/original/file-20220720-21-l5cmnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=470&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/475149/original/file-20220720-21-l5cmnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=591&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/475149/original/file-20220720-21-l5cmnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=591&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/475149/original/file-20220720-21-l5cmnn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=591&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Julia Canu, une des rares femmes artisan glacier de France, et Tiago Barbosa, cofondateurs du glacier Único à Lyon.</span>
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<p>Les petits industriels de la glace surfent eux aussi sur ces nouvelles tendances ainsi que sur les nouveaux modes de consommation. Cécilia Thomas et Laura Faeh, créatrices de la marque Lapp ont innové en créant les les <a href="https://poptailsbylapp.com/fr/blog-fr/"><em>poptails</em></a>, des cocktails glacés, alcoolisés ou non, réalisés avec des produits naturels et végans. Elles expliquent que leur choix s’est effectué en lien avec leurs modes de consommation et leurs convictions écologiques, choix partagés par de plus en plus de consommateurs.</p>
<p>Parallèlement à ces artisans indépendants, rares sont les pâtissiers de renom qui ne produisent pas leur propre glace, avec des positionnements marketing – prix, packaging – souvent très luxueux.</p>
<p>Enfin, être artisan glacier comporte aussi une part artistique, à l’image de la pâtisserie. La palette d’invention est vaste : jeu sur les textures, les couleurs, possibilité de créer des parfums salés ou d’oser des associations inédites… Parmi les divers concours gastronomiques, celui de Meilleur Ouvrier de France (MOF) dans la catégorie glacier porte le savoir-faire artisanal français de la profession à son paroxysme. La maîtrise du geste, des goûts et des textures de ceux qui obtiennent, après des années de préparation et une grande dose d’abnégation, le col bleu blanc rouge, suscitent l’admiration de beaucoup d’apprentis artisans et des consommateurs en quête de qualité.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/iUqoWvcTZH4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Si la profession d’artisan glacier demeure à ce jour moins populaire que celle de pâtissier, elle est cependant en pleine évolution, et connaît un engouement de plus en plus grand.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/186768/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Louisgrand ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
L’engouement pour les glaces et les sorbets semble plus grand chaque année, en France. Mais connaît-on les origines de ce produit ? Et pourquoi plaît-il autant ?
Nathalie Louisgrand, Enseignante-chercheuse, Grenoble École de Management (GEM)
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2022-04-21T18:03:37Z
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Quand la gastronomie en vient à se digitaliser…
<p>Pour la première fois depuis la création de <em>Top Chef</em>, émission phare de M6, le menu des gagnants de l’épreuve « La guerre des restos » en 2022 est proposé à la livraison à domicile sur la plate-forme Uber Eats. Poussé aussi par la pandémie, le monde de la gastronomie a dû innover en développant des services de vente à emporter et de livraison à domicile, qui étaient jusqu’alors l’apanage de la restauration rapide.</p>
<p>Des chefs triplement étoilés comme <a href="https://www.sortiraparis.com/hotel-restaurant/restaurant/articles/233771-les-plats-de-guy-savoy-en-livraison-et-a-emporter">Guy Savoy</a>, <a href="https://www.ubereats.com/fr/store/ducasse-chez-moi/64klPdMATPa3R8kumw8Adg">Alain Ducasse</a> et <a href="https://anne-sophie-pic.com/envie-de-rester-a-la-maison-pic/">Anne-Sophie Pic</a> se sont mis à digitaliser leur offre, en proposant en ligne des plats gastronomiques ou bistronomiques pour une dégustation à domicile. En décembre dernier, on pouvait ainsi entendre au <a href="https://www.tf1info.fr/conso/video-tendance-votre-repas-du-reveillon-livre-a-domicile-2205918.html">20 heures de TF1</a> :</p>
<p>« De nombreux Français ont décidé de passer le réveillon chez eux, mais cela n’empêche pas de se faire plaisir. Certains restaurants et traiteurs l’ont bien compris. Depuis le confinement, ils vous livrent, clé en main, des dîners parfois gastronomiques. »</p>
<p>La conception de ces dispositifs reste cependant particulièrement difficile pour la haute gastronomie, connue pour sa prudence vis-à-vis de l’utilisation des technologies et pour l’importance qu’elle accorde à la tradition et à l’héritage.</p>
<p>Notre <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0148296322003290?CMX_ID=&SIS_ID=&dgcid=STMJ_AUTH_SERV_PUBLISHED&utm_acid=29887939&utm_campaign=STMJ_AUTH_SERV_PUBLISHED&utm_in=DM245737&utm_medium=email&utm_source=AC_">travail de recherche</a>, mené auprès des professionnels du secteur et de consommateurs, montre cependant qu’il y a là une véritable opportunité de développement. À condition de concentrer ses efforts au bon endroit.</p>
<h2>« Perdre le contrôle » ?</h2>
<p>Une première étude qualitative, réalisée auprès de 15 chefs de restaurant et experts de la haute gastronomie, nous a permis de mieux comprendre la notion d’expérience gastronomique digitalisée. Cinq étapes du parcours client lui sont associées : la commande en ligne, le <em>click and collect</em>, le déballage du paquet, le réchauffage et, enfin, l’expérience de dégustation.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/457971/original/file-20220413-26-4ml9ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/457971/original/file-20220413-26-4ml9ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/457971/original/file-20220413-26-4ml9ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/457971/original/file-20220413-26-4ml9ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/457971/original/file-20220413-26-4ml9ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/457971/original/file-20220413-26-4ml9ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/457971/original/file-20220413-26-4ml9ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/457971/original/file-20220413-26-4ml9ew.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Déguster à domicile des plats d’Anne-Spohie Pic est maintenant chose possible.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Anne-Sophie_Pic_par_Claude_Truong-Ngoc_mars_2014.jpg">Claude Truong-Ngoc/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Face à ce parcours singulier, chefs et experts interrogés ont exprimé leurs craintes d’une « perte de contrôle ». L’expérience gastronomique en restaurant commence, en effet, par la découverte du menu, qui invite à la discussion avec le personnel en salle, est suivie par l’attente des plats, la dégustation dans l’ordre choisi par le chef, et se termine par le paiement de l’addition. Dans le cas d’une expérience gastronomique digitalisée, l’étape du paiement a lieu avant la dégustation, ce qui laisse présager un plus grand risque pour le client qui commande en ligne. Julien Guèze, chef pâtissier chez Pierre Gagnaire le formule ainsi :</p>
<blockquote>
<p>« Nous aimons connaître les gens, nous nous adaptons à ce qu’ils aiment. Et passer par une plate-forme va à l’encontre de cela, car nous sommes moins en contact direct avec les clients. »</p>
</blockquote>
<p>Les enquêtés se sont également exprimés sur quatre dimensions fondamentales de l’expérience gastronomique digitalisée : l’<em>informativité</em>, qui couvre les informations fonctionnelles acquises par les consommateurs tout au long du parcours ; le <em>divertissement</em>, qui se réfère au plaisir immédiat issu de l’expérience ; la <em>présence sociale</em>, qui fait référence à la chaleur et à la sociabilité ressenties lors de l’expérience ; et les <em>aspects sensoriels</em>, qui se rapportent aux qualités esthétiques des stimuli impliqués dans l’expérience.</p>
<h2>Pour quoi se donner du mal ?</h2>
<p>Celles-ci ont aussi été questionnées quantitativement auprès de 217 Français consommateurs de gastronomie. Nous avons pour cela créé un site fictif de commande en ligne d’un repas gastronomique.</p>
<p>L’étude confirme l’influence positive de la présence d’éléments verbaux et surtout visuels du site web sur l’évaluation de l’expérience gastronomique digitalisée. Les consommateurs considèrent que ce type d’expérience devrait à la fois provoquer des réactions cognitives (liées à l’informativité du site), affectives (en particulier, le divertissement), sociales et sensorielles.</p>
<p>De manière plus inattendue, les résultats indiquent que les impressions sont influencées positivement par les étapes de réchauffage et de dégustation des plats, mais qu’elles sont influencées négativement par la commande en ligne. Autre résultat surprenant, bien que les chefs et experts interrogés dans l’étude qualitative aient déclaré se donner beaucoup de mal pour rendre extraordinaire le moment de déballage du paquet, les consommateurs ne semblent prêter que peu d’attention à cet aspect. En somme, leur attention semble davantage focalisée sur les difficultés liées à la commande en ligne.</p>
<h2>Le chef, et seulement le chef</h2>
<p>Ces dernières années, les chefs ont compris l’intérêt de communiquer sur les réseaux sociaux afin d’attirer les clients et de créer des liens pour les fidéliser. Le service de livraison apparaît comme un moyen supplémentaire de diversifier la clientèle. Nos recherches montrent en effet que le numérique permet au consommateur non habitué de se familiariser avec certains codes de la gastronomie. Cela l’incite par la suite à prendre la décision de vivre une expérience gastronomique dans un restaurant.</p>
<p>Ce service semble finalement répondre au désir d’immédiateté et de simplicité de l’individu post-moderne. Mais cela suppose que la navigation sur le site de commande en ligne soit une expérience agréable. Les chefs doivent prendre conscience qu’il ne s’agit pas seulement de proposer un service de livraison, mais qu’il faut penser le digital comme une expérience gastronomique totalement intégrée.</p>
<p>Les chefs semblent devoir mettre en avant leurs plats comme des œuvres d’art et exprimer leurs valeurs via des éléments visuels et verbaux dont nos travaux ont montré l’influence. Nous suggérons même d’inclure des vidéos à chaque étape du parcours client. Et le choix des contenus ne doit pas être laissé aux concepteurs de sites, car seul le chef est à même de transmettre à ses clients l’expérience gastronomique qu’il souhaite leur offrir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181290/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Eline Jongmans a reçu des financements de l’Agence nationale de la recherche dans le cadre du programme "Investissements d’avenir" (ANR-15-IDEX-02) ainsi que des financements liés à des appels à projets de l'Université Grenoble Alpes (ex. Initiatives de Recherche Stratégiques ).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Maud Dampérat est membre de la Chaire Transition Alimentaire de l'Université Lyon 2 et de l'Institut Paul Bocuse. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Florence Jeannot, Marielle Salvador et Mariem El Euch Maalej ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>
Les grands chefs restent dans l’ensemble réticents, mais les nouvelles pratiques en ligne présentent pourtant des opportunités pour conquérir de nouveaux clients !
Florence Jeannot, Associate Professor in Marketing, INSEEC Grande École
Eline Jongmans, Maitre de conférences en marketing, Université Grenoble Alpes (UGA)
Marielle Salvador, Enseignant chercheur, comportement du consommateur, marketing de l'alimentation, Institut Paul Bocuse
Mariem El Euch Maalej, Associate professor of marketing, PSB Paris School of Business
Maud Dampérat, Professeur, Université Lumière Lyon 2
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2022-03-03T19:57:44Z
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Les confréries gastronomiques sont-elles dépassées ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/449788/original/file-20220303-17-u85gtl.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=28%2C161%2C1162%2C680&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un rassemblement de 35 confréries au Puy-en Velay, en 2017. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ambassadedesconfreriesauvergnerhonealpes.net/">Ambassade des confréries Rhône-Alpes</a></span></figcaption></figure><p><a href="https://www.conseil-francais-confreries.fr/les-confreries/">Les confréries gastronomiques et œnologiques</a> existent depuis le Moyen-âge. Dès leur origine, les notions d’entraide et de transmission sont fondamentales. Après avoir quelque peu disparu, elles refont surface dans la seconde moitié du XX<sup>e</sup> siècle, en particulier au cours des années 60, pour lutter contre l’uniformisation des pratiques alimentaires, la défense des savoir-faire et des produits locaux, face à l’industrie agroalimentaire. Aujourd’hui, la France en compte environ 1 500. Bien que d’autres pays, comme la Suisse et la Belgique, comptent aussi des confréries gastronomiques, le phénomène demeure très majoritairement français.</p>
<h2>Défense des produits, folklore médiéval et fraternité</h2>
<p><a href="https://www.editions-harmattan.fr/livre-les_confreries_identites_et_discours_patrimoine_immateriel_entre_terroir_et_territoire_anne_parizot-9782343234243-70661.html">Les confréries se distinguent grâce à plusieurs éléments</a> se référant au passé et aux traditions, pour mieux asseoir leur légitimité. Tout d’abord, leurs membres utilisent un langage particulier, empli d’une terminologie moyenâgeuse et chevaleresque (leurs présidents se nomment par exemple « grand maître »). Ensuite, leur costume, leur médaille, leurs rites, leur objet – toujours en lien avec le produit du terroir qu’ils défendent – sont facilement reconnaissables. Enfin, tous ces éléments témoignent, au-delà de l’imaginaire médiéval et symbolique dans lesquels ils s’inscrivent, de l’authenticité des confréries représentées.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1049727827128520705"}"></div></p>
<p>Le but de ces confréries, aujourd’hui laïques et constituées en association loi 1901, est tout d’abord de défendre des produits liés à un territoire, de sauvegarder des gestes ancestraux, des recettes, et de les transmettre aux jeunes générations pour éviter que ce patrimoine gastronomique ne sombre dans l’oubli. C’est aussi un moyen de le promouvoir et de se faire connaître hors de leur région d’origine grâce à la formation d’initiés qui sauront perpétuer ses règles et ses rites et valoriser ex-situ ses produits gastronomiques.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/445955/original/file-20220211-15-1hk7b8d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/445955/original/file-20220211-15-1hk7b8d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/445955/original/file-20220211-15-1hk7b8d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/445955/original/file-20220211-15-1hk7b8d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/445955/original/file-20220211-15-1hk7b8d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/445955/original/file-20220211-15-1hk7b8d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/445955/original/file-20220211-15-1hk7b8d.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Confrérie des Chevaliers du Livarot – « Faire connaître et apprécier le fromage Livarot et la gastronomie normande.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Une autre particularité d’une confrérie gastronomique est le regroupement de femmes et d’hommes prônant la convivialité, l’amitié, la fraternité et l’entraide. Le jour du chapitre d’une confrérie est un jour de rassemblement durant lequel des membres d’autres confréries sont aussi invités. Tout le monde se retrouve ensuite, dans la bonne humeur, autour d’un bon repas. Le grand maître en profite pour introniser les nouveaux membres, qu’ils soient actifs ou à titre honorifique.</p>
<p>Tous seront ensuite de fervents défenseurs de la confrérie à laquelle ils appartiennent. L’événement se déroule en suivant scrupuleusement tout un cérémonial.</p>
<p>Les confréries sont essentiellement présentes lors d’animations culturelles, commerciales ou religieuses. Cependant, au-delà de <a href="https://www.cairn.info/revue-ethnologie-francaise-2003-3-page-435.htm">l’aspect folklorique</a> qui accompagne ces événements, à quel futur sont-elles promis ? En effet, nombre d’entre elles se plaignent du vieillissement de leurs membres – majoritairement masculins – de la difficulté de recruter des plus jeunes, futurs membres actifs et engagés, et d’avoir des chapitres de plus en plus désertés.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/445971/original/file-20220211-17-1ou1qla.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/445971/original/file-20220211-17-1ou1qla.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/445971/original/file-20220211-17-1ou1qla.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/445971/original/file-20220211-17-1ou1qla.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/445971/original/file-20220211-17-1ou1qla.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/445971/original/file-20220211-17-1ou1qla.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/445971/original/file-20220211-17-1ou1qla.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’astronaute Thomas Pesquet intronisé par la Confrérie des Chevaliers du Tastevin.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>En regardant de plus près, force est de constater que les actes de nombreuses confréries gastronomiques et œnologiques ne se limitent pas à quelques manifestations costumées, au verbe fleuri, vestiges d’un autre temps, ni à des banquets de bons vivants. Mais quels sont leurs pouvoirs et comment se manifestent-ils ?</p>
<h2>Une influence politique et économique</h2>
<p>Tout d’abord, les confréries mènent une action déterminante dans la sauvegarde du patrimoine gastronomique. En effet, elles ont évité que nombre de produits ou recettes ne disparaissent à jamais. Le safran, par exemple a été sauvé de l’oubli par la <a href="https://www.keldelice.com/guide/specialites/le-safran-du-gatinais">Confrérie des chevaliers du safran du Gâtinais</a>. L’épice, disparue depuis plusieurs décennies, a de nouveau été cultivée et protégée.</p>
<p>Elles permettent ensuite de promouvoir le travail bien fait et de valoriser certaines professions. Il y a une trentaine d’années, les pâtés en croûte étaient majoritairement de fabrication industrielle. Grâce à la <a href="https://www.championnatdumondepatecroute.com/#">confrérie du Pâté croûte</a> qui a lancé son concours en 2009, le produit – de nouveau artisanal – est désormais le nouvel étendard du savoir-faire charcutier. Ces manifestations favorisent donc aussi la remise au goût du jour de classiques de la gastronomie française.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1465710109233856519"}"></div></p>
<p>C’est aussi grâce à l’action des confréries que le <a href="https://ich.unesco.org/fr/RL/le-repas-gastronomique-des-francais-00437">« repas gastronomique des Français »</a> a été inscrit au patrimoine immatériel de l’humanité en 2010. De plus, étant donné que les confréries apparaissent comme avocates du patrimoine gastronomique dans le <a href="https://www.confreriesdulanguedocroussillon.com/ceuco-ficb-unesco/unesco/">dossier présenté à l’Unesco</a>, elles ont été de fait reconnues comme appartenant patrimoine, elles aussi.</p>
<p>Ensuite, le pouvoir politique de certaines confréries est réel. Il suffit que parmi les membres se trouvent des personnes influentes comme des élus locaux, des gens de renom, ou des avocats, pour que ces dernières aillent défendre leur produit, leur savoir-faire ou <a href="https://www.lejdd.fr/Style-de-vie/Gastronomie/oeuf-mayo-pate-en-croute-ou-camembert-les-confreries-culinaires-se-multiplient-4023319#:%7E:text=En%202021%2C%20l%E2%80%99esprit%20chevaleresque,en%20Normandie%22%20sur%20leurs%20produits.">leur appellation devant les tribunaux</a>. C’est ainsi que depuis 2021, au terme d’une longue bataille juridique, seuls les « vrais » camemberts au lait cru AOP sont autorisés à recevoir la mention « fabriqué en Normandie », et non plus les camemberts industriels.</p>
<p>De plus, si les confréries sont très populaires et que les manifestations qu’elles organisent attirent du monde, elles peuvent obtenir des subventions de la mairie ou des collectivités territoriales. Plus elles sont populaires, plus elles reçoivent d’argent. Derrière le folklore se cache donc bien un pouvoir réel associé à de vrais enjeux économiques locaux ou régionaux.</p>
<h2>Mise en valeur touristique</h2>
<p>Enfin, les confréries participent au développement du tourisme local. En jouant sur la transparence des produits, en prônant le bien manger et le bien boire d’une région ou d’une ville, elles inscrivent le territoire dans une dimension historique qui lui donne plus de pouvoir et de légitimité. D’ailleurs, consommer des produits locaux, permet aussi aux touristes de répondre à cette quête d’<a href="https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2018-6-page-57.htm">authenticité</a> qu’ils recherchent. Aujourd’hui, avec le tourisme écologique, le développement durable et l’écotourisme, le rôle des confréries prend une réelle ampleur. En effet les marchés, foires et festivités locales, permettent de <a href="https://journals.openedition.org/bagf/4107">valoriser des produits et, au-delà, des territoires</a>. Cela peut d’ailleurs leur permettre d’attirer des membres plus jeunes, désireux de s’investir dans des causes en lien avec leurs valeurs. Les confréries semblent donc avoir encore de beaux jours devant elles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172005/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Louisgrand ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Au-delà du folklore, les confréries jouent un rôle à la fois de mise en valeur touristique des territoires et de préservation du patrimoine gastronomique.
Nathalie Louisgrand, Enseignante-chercheuse, Grenoble École de Management (GEM)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/177655
2022-03-03T19:55:52Z
2022-03-03T19:55:52Z
Cuisiner en famille, un autre apprentissage du goût
<p>Dans un contexte où les repas tendent à se déstructurer, où les plats préparés envahissent les rayons et où l’obésité gagne du terrain, comment apprendre aux enfants à bien manger ? Dans <a href="https://www.cnrseditions.fr/catalogue/sciences-politiques-et-sociologie/lalimentation-a-decouvert/"><em>L’alimentation à découvert</em></a>, le sociologue Jean-Pierre Corbeau plaide pour une éducation alimentaire qui dépasse la simple éducation nutritionnelle. Il rappelle aussi que :</p>
<blockquote>
<p>« le rôle de la famille, la découverte des goûts par des activités en classe ou des manières de faire et d’agir alimentaires transmises à l’enfant constituent plusieurs dimensions des processus de socialisation liés à l’alimentation ».</p>
</blockquote>
<p>Un point sur lequel insistent aussi Nathalie Rigal et Sophie Nicklaus. Dans le même ouvrage, elles notent que, dans l’apprentissage des goûts, les expériences alimentaires, sociales et émotionnelles sont fondamentales. Si l’école a un rôle à jouer comme le souligne le récent <a href="https://www.openagrifood-orleans.org/wp-content/uploads/manifeste_education_a_lalimentation_VF-1.pdf">Manifeste pour une éducation à l’alimentation partout, pour tous</a>, la transmission des codes et des habitudes alimentaires se joue d’abord au sein de la famille. Au-delà de partager la table, il s’agit également de partager la préparation d’un repas.</p>
<h2>Pain et confinement</h2>
<p>La crise économique de 2008 s’est accompagnée par une valorisation du « do It Yourself » qui a trouvé un regain avec le confinement, en mars 2020. Les tutos d’activité et de cuisine avec ses enfants se sont alors multipliés et faire son pain est devenu le must de l’activité familiale.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1419633750284115979"}"></div></p>
<p><a href="https://www.santepubliquefrance.fr/presse/2020/confinement-quelles-consequences-sur-les-habitudes-alimentaires">Une étude de Santé Publique France</a> parue en mai 2020 souligne que 37 % des Français ont déclaré cuisiner plus pendant le confinement. En outre,le <a href="https://www.ifop.com/wp-content/uploads/2020/10/Synthese-etude-Ifop-European-Fraich-Fantasy-octobre-2020_def_MAJ.pdf">sondage IFOP</a> pour le programme Fraich’Fantaisy réalisé en octobre 2020 relève que 14 % des Français déclarent cuisiner davantage qu’avant le confinement.</p>
<p>Cette même enquête souligne que 84 % des personnes interrogées, toutes catégories sociales confondues, déclarent cuisiner avec leurs enfants et 22 % au moins une fois par semaine. En outre, un cercle vertueux semble se mettre en place puisque les enfants ayant cuisiné avec leurs parents cuisineraient eux-mêmes davantage avec leur descendance.</p>
<hr>
<p>
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<a href="https://theconversation.com/maths-lecture-et-nutrition-tout-ce-que-la-cuisine-apprend-aux-enfants-140099">Maths, lecture et nutrition : tout ce que la cuisine apprend aux enfants</a>
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<p>Cette étude relève également les sources d’inspiration pour les plats et les recettes avec, dans le trio de tête, les émissions de cuisine, les tutos sur Internet et les recettes qui figurent dans les magazines. À cela s’ajoutent également les blogs, les applications ou bien encore les livres de recettes.</p>
<h2>Nouvelles mises en scène</h2>
<p>Comme le <a href="https://www.cairn.info/revue-de-la-bibliotheque-nationale-de-france-2015-1-page-32.htm">note Françoise Hache-Bissette</a>, le livre de cuisine s’est considérablement transformé ces 40 dernières années et, dans les écrits portant sur l’éveil au goût des enfants, plusieurs valeurs se sont agrégées : le ludique et l’originalité, la gourmandise et la simplicité. Ce qu’il est intéressant de relever aujourd’hui dans la médiation culinaire, c’est la continuité entre la production de contenus en ligne et la sortie de livres de cuisine.</p>
<p>C’est ainsi qu’une ancienne participante du Meilleur pâtissier en 2015, célèbre émission de M6 a ensuite ouvert une <a href="https://www.youtube.com/c/latelierderoxane">chaîne YouTube</a>, <em>L’atelier de Roxane</em> qui compte désormais plus de 4 millions d’abonnés. Son credo ? Un univers très rose, des recettes familiales, réalisées pour certaines avec sa petite fille face caméra. Elle a ensuite sorti successivement trois ouvrages, où l’on retrouve la tonalité de sa chaîne YouTube, mais aussi des photos de famille.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1095629368297172992"}"></div></p>
<p>Le livre de recettes devient alors aussi un objet de mise en scène de soi. Cette cuisine quotidienne qui s’incarne dans une famille idéalisée est aussi la ligne éditoriale développée par la <a href="https://www.marieclaire.fr/,5-choses-a-savoir-sur-mimi-thorisson-blogueuse-culinaire-a-succes-et-premiere-ambassadrice-l-occitane,826353.asp">blogueuse Mimi Thorisson</a> entre livres de cuisine et compte Instagram très léché où l’idéal culinaire et l’idéal familial se rencontrent.</p>
<h2>Une transmission maternelle ?</h2>
<p>Si l’étude IFOP de 2020, parle de l’entité « parents » sans distinguer le père ou la mère, <em>Les cahiers de recherche du CREDOC</em> publiés en 2004 fondent toute leur étude sur la transmission en cuisine autour de <a href="https://www.credoc.fr/publications/de-la-transmission-a-lapprentissage-des-savoir-faire-culinaires-regards-croises-de-filles-et-de-meres">« regards croisés filles et mères »</a>. Force est de constater par ailleurs que, dans la mise en scène très contemporaine des réseaux sociaux, c’est bien la figure de la mère qui s’impose dans une forme soit idéalisée et esthétisée soit dans une perspective de partage de trucs et astuces au quotidien.</p>
<p>Dans <a href="https://www.theses.fr/2019UBFCH011">sa thèse de doctorat</a> soutenue en 2019, Sarah Bastien note d’ailleurs que les femmes restent majoritairement responsables de la cuisine au quotidien et rappelle qu’au début du XX<sup>e</sup> siècle les femmes apprenaient à cuisiner par la transmission générationnelle mais aussi via les enseignements en Arts ménagers. Dans le cahier de recherche de 2004, la figure de la grand-mère est également convoquée.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-enfants-a-table-lecons-alimentaires-en-confinement-136579">« Les enfants, à table ! » : leçons alimentaires en confinement</a>
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<p>La transmission culinaire du quotidien serait alors encore et toujours une affaire de femmes avant tout. Pour autant, développer le faire ensemble, le cuisiner ensemble peut-être un outil d’émancipation et non pas seulement de reproductions des schémas de domination domestique. Alors, cuisinons toutes et tous avec nos enfants pour le plaisir de faire ensemble, de co-exister et d’agir ensemble.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/177655/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Clémentine Hugol-Gential a reçu des financements de ANR</span></em></p>
L’éducation à l’alimentation doit dépasser la simple éducation nutritionnelle. Et pour cela, rien de tel que la cuisine.
Clémentine Hugol-Gential, Maître de conférences en sciences de l'information et de la communication, Université de Bourgogne – UBFC
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/176097
2022-02-28T14:50:32Z
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Voici trois bonnes raisons de consommer des protéines d’origine végétale
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/448078/original/file-20220223-23-wm88yc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=24%2C6%2C4013%2C2608&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Malgré un intérêt mondial pour les régimes alimentaires durables, nous ne sommes pas très nombreux à emboîter le pas - seuls 5 % des Canadiens ont indiqué suivre un régime à base de plantes.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://guelphfamilyhealthstudy.com/wp-content/uploads/2021/11/Proteines-D-Origine-Vegetale-Facile-A-Faire-Nov-2021-Web.pdf">(Maude Perreault)</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Manger davantage de protéines d’origine végétale peut avoir de nombreux effets positifs pour notre santé et celle de notre planète. On estime en effet que <a href="https://journals.plos.org/plosone/article/file?id=10.1371/journal.pone.0165797&type=printable">l’agriculture représente jusqu’à 30 % des émissions des gaz à effets de serre</a>, avec la production animale comme principal facteur contribuant à ces impacts néfastes sur l’environnement.</p>
<p>Adopter un régime alimentaire durable, et ainsi favoriser un système alimentaire durable, est par conséquent une <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(18)31788-4/fulltext">priorité mondiale</a>.</p>
<p>Bien que la définition d’un régime alimentaire durable soit en évolution, la <a href="https://www.fao.org/food-systems/fr/">FAO le définit comme un régime</a> qui « assure la sécurité alimentaire et la nutrition pour tous de manière à ne pas compromettre les bases économiques, sociales et environnementales nécessaires pour assurer la sécurité alimentaire et la nutrition des générations futures ».</p>
<p>La consommation de protéines d’origine végétale est un thème central aux recommandations alimentaires, telles que les <a href="https://guide-alimentaire.canada.ca/fr/directrices/">Lignes directrices canadiennes en matière d’alimentation</a> ou encore le <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(18)31788-4/fulltext">rapport EAT-Lancet</a>, qui est un rapport scientifique qui propose une alimentation saine issue d’un système alimentaire durable.</p>
<p>Nutritionniste et scientifique dans le domaine de l’alimentation saine et durable, j’aborderai les principaux avantages d’adopter une alimentation à base de protéines d’origine végétale. Notre équipe de recherche, la <a href="https://guelphfamilyhealthstudy.com/"><em>Guelph Family Health Study</em></a>, travaille à mieux comprendre les facteurs qui rendent l’alimentation durable difficile à adopter pour les familles canadiennes. Je vous proposerai donc des astuces pratiques pour faire un premier pas vers l’alimentation d’origine végétale.</p>
<h2>Manger des protéines végétales comporte de nombreux avantages</h2>
<p>Les protéines d’origine végétale sont des aliments contenant des protéines qui proviennent des plantes plutôt que des animaux. Les sources alimentaires de protéines végétales comprennent les légumineuses, les noix et les graines, ou encore le tofu et les produits du soya. Bien que les légumes fassent partie du règne végétal, ils contiennent peu de protéines. Pour cette raison, ils ne font pas partie des sources alimentaires de protéine d’origine végétale.</p>
<p>Malgré un intérêt mondial pour les régimes alimentaires durables, nous ne sommes pas très nombreux à emboîter le pas. Seulement <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/public-health-nutrition/article/plantbased-dietary-practices-in-canada-examining-definitions-prevalence-and-correlates-of-animal-source-food-exclusions-using-nationally-representative-data-from-the-2015-canadian-community-health-surveynutrition/593132BC0ABD7C1FA616A8688DC12D54">5 % des Canadiens</a> ont indiqué suivre un régime alimentaire partiellement ou strictement à base de plantes, alors que seulement <a href="https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/11-627-m/11-627-m2018004-fra.htm">14 % des Canadiens</a> ont déclaré manger des légumineuses une fois par semaine.</p>
<p>Pourtant, l’ajout de protéines d’origine végétale à notre alimentation peut nous aider à :</p>
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<li><p><strong>Améliorer notre santé</strong> : <a href="https://guide-alimentaire.canada.ca/fr/directrices/">Les lignes directrices canadiennes en matière d’alimentation</a> recommandent de consommer des protéines d’origine végétale, qui ont tendance à contenir une plus grande quantité de fibres et une plus faible quantité de gras que les aliments d’origine animale. Le type de nutriments peut avoir des bienfaits sur plusieurs organes de notre corps. En effet, les fibres aident à la régulation du taux de sucre dans le sang et la pression sanguine, alors que les nombreux antioxydants peuvent empêcher les cellules cancéreuses de se développer. En ce sens, les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33316249/">recherches montrent que la consommation de protéines d’origine végétale est associée à divers avantages</a> pour la santé, notamment une réduction du risque de décès causés par le cancer et les maladies cardiovasculaires. En intégrant des protéines végétales graduellement dans notre alimentation, et ce même sans devenir 100 % végétarien, nous pouvons améliorer notre santé générale !</p></li>
<li><p><strong>Améliorer la santé de notre planète</strong> : Manger davantage de protéines d’origine végétale peut également contribuer à protéger notre environnement. Par exemple, dans les pays à revenu élevé comme le Canada, la consommation d’un régime équilibré et « faible en viande » peut <a href="https://www.thelancet.com/journals/lanplh/article/PIIS2542-51961830206-7/fulltext">réduire les impacts environnementaux du système alimentaire</a> en diminuant les émissions de gaz à effets de serre, l’utilisation d’engrais azotés et phosphorés, ainsi que l’utilisation des terres agricoles et de l’eau. Favoriser les produits végétaux plutôt que ceux d’origine animale représente une façon de protéger notre planète en utilisant moins de ressources agricoles pour se nourrir.</p></li>
<li><p><strong>Réduire notre facture d’épicerie</strong> : Selon le <a href="https://cdn.dal.ca/content/dam/dalhousie/pdf/sites/agri-food/Food%20Price%20Report%202022%20FR.pdf">Rapport annuel sur les prix alimentaires 2022</a>, le coût des aliments devrait augmenter de 5 à 7 % cette année. Bien que leur prix varie d’une région à l’autre au Canada, les protéines d’origine végétale comme les légumineuses et le tofu sont généralement plus abordables que celles d’origine animale comme la viande rouge. Par exemple, <a href="https://www.dispensaire.ca/wp-content/uploads/Cout-PPN-base-FR-mai-2021.pdf">on estime le prix des légumineuses à 5,76$/kg et celui de la viande à 11,90$/kg</a>, soit la moitié du prix pour la même quantité. En achetant plus souvent des protéines d’origine végétale, nous pouvons donc réduire notre facture d’épicerie malgré l’augmentation du coût des aliments.</p></li>
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<h2>Les Canadiens mangent peu de protéines végétales</h2>
<p>Si l’alimentation à base de plantes est associée à des avantages importants, pourquoi ne consommons-nous pas davantage d’aliments à base de plantes ? Bien que de nombreux facteurs influencent les habitudes alimentaires, l’obstacle clé demeure notre culture alimentaire actuelle. <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34411486/">Nos recherches montrent que les familles canadiennes ne savent pas comment préparer les protéines d’origine végétale</a>. Dans notre étude récente, nous avons interrogé 40 parents quant à leur impression et appréciation du <a href="https://guide-alimentaire.canada.ca/fr/">Guide alimentaire canadien</a>, qui met l’emphase sur les protéines végétales. Plusieurs parents ont rapporté que leurs principaux défis pour mettre en pratique le guide alimentaire demeuraient les contraintes de temps et le manque de connaissances pour cuisiner les protéines végétales.</p>
<p>Afin de remédier à cet obstacle, nous avons élaboré un livre de recettes pour aider les familles canadiennes à remplacer certains aliments d’origine animale par des aliments d’origine végétale. <a href="https://guelphfamilyhealthstudy.com/wp-content/uploads/2021/11/Proteines-D-Origine-Vegetale-Facile-A-Faire-Nov-2021-Web.pdf">Notre livre de recettes, en ligne et gratuit</a>, « Les protéines d’origine végétale : des recettes faciles à faire ! », fournit des informations sur les protéines d’origine végétale et comprend des recettes faciles à préparer, adaptées aux besoins de la famille. Ce livre a pour but de vous inspirer à cuisiner les protéines végétales et à les incorporer graduellement au menu familial. Il ne comporte donc pas que des recettes exclusivement végétariennes ou véganes. On mise plutôt sur une approche « flexitarienne », qui est plus réaliste et invitante pour la majorité des familles.</p>
<h2>Des astuces pratico-pratiques pour intégrer les protéines végétales</h2>
<p>Voici quelques conseils qui pourront vous inspirer à intégrer davantage de protéines végétales dans votre alimentation :</p>
<p><strong>Essayez le lundi sans viande</strong>. Les lundis sans viande peuvent être une stratégie gagnante pour apprivoiser les protéines végétales en vous encourageant à planifier un jour par semaine où vous essayez une nouvelle recette. La recette de pâtes <a href="https://guelphfamilyhealthstudy.com/wp-content/uploads/2021/11/Proteines-D-Origine-Vegetale-Facile-A-Faire-Nov-2021-Web.pdf">« bolognaise aux lentilles »</a> est un excellent exemple.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/448080/original/file-20220223-15-5byzsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Plat de pâtes avec de la sauce" src="https://images.theconversation.com/files/448080/original/file-20220223-15-5byzsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/448080/original/file-20220223-15-5byzsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=386&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/448080/original/file-20220223-15-5byzsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=386&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/448080/original/file-20220223-15-5byzsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=386&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/448080/original/file-20220223-15-5byzsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=485&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/448080/original/file-20220223-15-5byzsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=485&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/448080/original/file-20220223-15-5byzsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=485&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La consommation de protéines d’origine végétale comporte de nombreux avantages pour la santé, pour l’environnement et pour le portefeuille.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://guelphfamilyhealthstudy.com/wp-content/uploads/2021/11/Proteines-D-Origine-Vegetale-Facile-A-Faire-Nov-2021-Web.pdf">(Maude Perreault)</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p><strong>Ajoutez des protéines d’origine végétale à vos recettes préférées</strong>. Ajoutez quelques protéines d’origine végétale aux aliments d’origine animale plus familiers. Il s’agit d’une approche utile pour ceux qui souhaitent essayer de manger davantage d’aliments d’origine végétale sans éliminer complètement la viande de leurs repas. Par exemple, notre <a href="https://guelphfamilyhealthstudy.com/wp-content/uploads/2021/11/Proteines-D-Origine-Vegetale-Facile-A-Faire-Nov-2021-Web.pdf">« Hamburger au bœuf et aux haricots »</a> est une option savoureuse qui fournit à la fois des protéines animales et des bienfaits d’origine végétale.</p>
<p><strong>Remplacez les collations hautement transformées par des alternatives maison à bases de protéines végétales</strong>. Essayez notre recette maison de <a href="https://guelphfamilyhealthstudy.com/wp-content/uploads/2021/11/Proteines-D-Origine-Vegetale-Facile-A-Faire-Nov-2021-Web.pdf">barre granola avec pépites de chocolat</a> ! Ces barres sont une délicieuse source de fibres et de protéines, sans le surplus de sucre et de sel que l’on trouve souvent dans les barres achetées. Les fibres et les protéines végétales vous aideront à vous sentir rassasié entre les repas.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/448081/original/file-20220223-19-1xgtjdo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="barre granola" src="https://images.theconversation.com/files/448081/original/file-20220223-19-1xgtjdo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/448081/original/file-20220223-19-1xgtjdo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/448081/original/file-20220223-19-1xgtjdo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/448081/original/file-20220223-19-1xgtjdo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/448081/original/file-20220223-19-1xgtjdo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/448081/original/file-20220223-19-1xgtjdo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/448081/original/file-20220223-19-1xgtjdo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Une recette maison de barre granola qui contient des protéines végétales pour vous rasassiez entre les repas.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://guelphfamilyhealthstudy.com/wp-content/uploads/2021/11/Proteines-D-Origine-Vegetale-Facile-A-Faire-Nov-2021-Web.pdf">(Maude Perreault)</a>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p><strong>Remplacez la viande rouge par des protéines animales plus respectueuses de l’environnement, comme le poulet ou la dinde.</strong> <a href="https://static.ewg.org/reports/2011/meateaters/pdf/methodology_ewg_meat_eaters_guide_to_health_and_climate_2011.pdf">Les émissions de carbone</a> provenant de la production de poulet et de dinde sont beaucoup plus faibles que celles de leurs homologues à base de viande rouge. Non seulement ces protéines sont meilleures pour la planète, mais elles sont aussi meilleures pour notre organisme. Les viandes blanches sont des protéines plus maigres et contiennent moins de gras que la plupart des viandes rouges.</p>
<p>En plus de générer des bénéfices pour notre santé et celle de notre planète, les sources alimentaires d’origine végétale peuvent être délicieuses. Variez, explorez et laissez-vous tenter par diverses recettes. Qui sait quelles découvertes vous ferez ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/176097/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Maude Perreault est membre de l'Ordre des Diététistes de l'Ontario et de la Société Canadienne de Nutrition. Ses recherches post-doctorales sont financées par la Helderleigh Foundation.</span></em></p>
Adopter une alimentation qui contient des protéines d’origine végétale peut comporter de nombreux bénéfices. Découvrez des astuces pratiques pour les intégrer à votre menu.
Maude Perreault, Registered dietitian and Postdoctoral fellow, University of Guelph
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/171980
2021-11-16T18:49:37Z
2021-11-16T18:49:37Z
Nutri-score, NOVA, bio… Comment mieux informer sur les effets « santé » des aliments ?
<p>Au fil des années, les recherches en épidémiologie et en nutrition ont permis de dégager trois dimensions des aliments qui influencent particulièrement la santé des consommateurs : la composition nutritionnelle, le degré de transformation et la présence de contaminants, notamment de résidus de pesticides.</p>
<p>Si chacune de ces dimensions peut influencer la santé, aucune ne résume, à elle seule, la « valeur santé » globale des aliments. Pourtant, on entend parfois affirmer que le fait d’être « non ultra-transformé » suffirait à garantir une qualité nutritionnelle favorable à un aliment. D’autres vantent la qualité nutritionnelle, réfutant les dangers de l’ultra-transformation et des additifs. L’effet de « halo » du bio est quant à lui parfois utilisé pour donner une image globalement « santé » à un produit gras, sucré ou salé. Mais même bio, le produit reste gras, sucré ou salé !</p>
<p>Compte tenu de leurs enjeux de santé publique, comment peut-on informer au mieux les consommateurs sur l’ensemble de ces différentes dimensions santé des aliments ? Quels sont, à l’heure actuelle, les indicateurs les plus fiables scientifiquement ?</p>
<h2>Nutrition, ultratransformation, contaminations : trois dimensions essentielles</h2>
<p>La recherche scientifique a identifié plusieurs dimensions des aliments susceptibles d’influencer la santé.</p>
<p>C’est le cas, en premier lieu, de leur composition nutritionnelle et de leur densité énergétique. Certains nutriments (fibres, protéines, minéraux, vitamines…) sont favorables à la santé, tandis que d’autres (sucres, graisses saturées, sel…) lui sont plutôt défavorables. L’impact délétère d’une alimentation trop énergétique, et trop riche en sel, sucre, acides gras saturés ainsi que pauvre en fibres, en fruits et légumes, légumineuses, sur le risque de plusieurs maladies (cancers, pathologies cardio-vasculaires, obésité, hypertension, diabète de type 2), ainsi que sur la mortalité <a href="https://www.thelancet.com/article/S0140-6736(19)30041-8/fulltext">est aujourd’hui bien documenté</a>.</p>
<p>Parmi les autres dimensions importantes pour la santé, on peut aussi citer leur degré de transformation, et particulièrement le fait d’être « ultra-transformé » (expression désignant les aliments qui ont fait l’objet de multiples processus industriels avec ajouts d’additifs). Enfin, la présence possible de résidus de pesticides utilisés lors de la production peut aussi avoir des conséquences sur la santé.</p>
<p>Les travaux épidémiologiques ont confirmé l’importance de chacune de ces trois dimensions, indépendamment les unes des autres, dans le développement des maladies chroniques. Ainsi, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29444771/">plusieurs études</a> ont démontré que <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30742202/">l’effet délétère</a> des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31142457/">aliments ultra-transformés</a> <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31841598/">restait significatif</a>, même après ajustement sur la qualité nutritionnelle de l’alimentation.</p>
<p>En miroir, l’effet défavorable de la composition nutritionnelle persiste également indépendamment du niveau de transformation/ultra-transformation : les associations entre le score de qualité nutritionnelle qui sous-tend le Nutri-score et le risque de cancer <a href="https://www.nutricionhospitalaria.org/articles/03483/show#!">restent toujours significatives après ajustement sur la part des aliments ultra-transformés dans l’alimentation</a>.</p>
<p>Au final, il apparaît clairement que la composition nutritionnelle et le niveau d’ultra-transformation sont susceptibles d’impacter, chacune et de façon indépendante, le risque de maladies chroniques par des mécanismes spécifiques différents et vraisemblablement de façon complémentaire. Il en est de même, pour le rôle des pesticides, lorsqu’on prend en compte la qualité nutritionnelle du régime alimentaire.</p>
<p>Même si les niveaux de preuve sont variables, le poids de chacune de ces dimensions en termes de risque de maladies chroniques justifie donc pleinement que les consommateurs soient informés de la façon dont chaque aliment se caractérise par rapport à chacune de ces dimensions.</p>
<p>Concrètement, lorsqu’il s’agit de choisir les aliments, les recommandations sont relativement simples : mieux vaut consommer des aliments « non ultra-transformés », en privilégiant ceux qui ont la meilleure composition nutritionnelle. Si l’on souhaite malgré tout consommer un aliment ultra-transformé, là encore mieux vaut privilégier ceux ayant la composition nutritionnelle la plus favorable. Enfin, il vaut mieux privilégier autant que possible les aliments bio (particulièrement pour les aliments végétaux).</p>
<p>Mais comment informer les consommateurs de façon simple et compréhensible sur ces trois dimensions ?</p>
<h2>Informer sur la dimension nutritionnelle</h2>
<p>De nombreux comités d’experts nationaux et internationaux, dont l’OMS, ont proposé la mise en place de systèmes d’information nutritionnelle simplifiée sur les emballages des aliments, afin d’aider les consommateurs à identifier d’un coup d’œil la qualité nutritionnelle des aliments et pouvoir comparer les produits entre eux. C’est pour répondre à cette demande que le logo nutritionnel Nutri-score a été conçu (<em>par l’équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle (EREN), une équipe de chercheurs académiques indépendants travaillant pour l’Inserm, l’Inrae, le CNAM et l’Université Paris 13, ndlr</em>).</p>
<p>Officiellement adopté en France, en Belgique, en Allemagne, en Espagne, aux Pays-Bas au Luxembourg et en Suisse, ce logo repose sur un algorithme intégrant les nutriments et éléments dont la consommation a été démontrée <a href="https://www.researchgate.net/publication/344847285_Uptake_of_Nutri-Score_during_the_first_year_of_implementation_in_Belgium">comme ayant un impact sur la santé</a>. Ledit algorithme a fait l’objet de multiples études visant à l’évaluer, dans le cadre de grandes cohortes françaises, espagnoles, et dans la cohorte européenne EPIC (réalisée dans 10 pays européens). Toutes ces études ont mis en évidence que la consommation d’aliments moins bien classés par l’algorithme du Nutri-score était prospectivement associée, à un risque accru de maladies chroniques (cancers, maladies cardiovasculaires, gain de poids, syndrome métabolique, etc.) et de mortalité.</p>
<p>De nombreux travaux ont également validé la méthode de calcul du Nutri-score ainsi que <a href="https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/nutri-score_follow-up_report_3_years_26juillet2021.pdf">son format graphique</a> (logo graduel à cinq couleurs couplées aux lettres de A à E), et son efficacité a elle aussi été démontrée, en accord avec la <a href="https://www.who.int/publications/m/item/guidingprinciples-labelling-promoting-healthydiet">méthodologie d’évaluation</a> des <a href="https://apps.who.int/iris/handle/10665/336988">logos nutritionnels</a> <a href="https://apps.who.int/iris/handle/10665/336989">telle que recommandée par l’OMS</a>.</p>
<p>Mais si le Nutri-score renseigne sur le profil nutritionnel global des aliments, comment informer le consommateur sur leurs autres dimensions santé ?</p>
<h2>Informer sur le fait qu’un aliment soit ultra-transformé</h2>
<p>Durant les dernières décennies, les habitudes alimentaires se sont modifiées. La consommation d’aliments ultra-transformés, en particulier, a beaucoup augmenté : dans de nombreux pays occidentaux, ces aliments contribuent aujourd’hui à plus de la moitié des apports énergétiques. Ils se caractérisent souvent (mais pas toujours) par une qualité nutritionnelle plus faible que les autres, et par la présence d’additifs alimentaires, de composés néoformés (produits durant les processus de transformation) et de composés provenant des emballages et autres matériaux de contact.</p>
<p>Pour évaluer le niveau de transformation des aliments, la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28322183/">classification NOVA</a> a été proposée en 2009 et modifiée en 2016. Elle catégorise les aliments selon 4 groupes, en fonction de leur degré de transformation industrielle : aliments peu ou pas transformés (NOVA1), ingrédients culinaires comme le sucre, le sel, l’huile ou le beurre (NOVA2), aliments transformés (NOVA3), aliments ultra-transformés (NOVA4). De nombreuses études ont mis en évidence des liens entre la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32630022/">consommation d’aliments ultra-transformés</a> <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33167080/">selon la classification NOVA4</a> <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s13679-021-00460-y">et un risque accru</a> de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34299832/">différentes pathologies chroniques</a>.</p>
<p>Les dimensions nutritionnelles et ultra-transformation se recouvrent partiellement : les aliments ultra-transformés sont, en moyenne, de moindre qualité nutritionnelle. Cependant, le niveau d’ultra-transformation ne suffit pas à lui seul pour connaître le potentiel effet santé d’un aliment. Parmi les aliments considérés comme « non ultra-transformés » selon NOVA, certains sont effectivement de moins bonne qualité nutritionnelle (riches en graisses saturées, en sucre ou en sel…). C’est par exemple le cas des purs jus de raisin, catégorisés NOVA1 et classés E par Nutri-score (car ils contiennent plus de 160g de sucre par litre). Au total, 19,2 % des aliments NOVA1 sont classés C, 7,4 % D et 3,3 % E par le Nutri-score. Mais à l’inverse, certains produits ultra-transformés peuvent avoir une meilleure qualité nutritionnelle. C’est notamment le cas des compotes de fruits sans sucre ajouté ou des pains de mie complets, classés A par Nutri-score. Une analyse de 220 522 aliments ultra-transformés (NOVA 4) issus de la base de données Open Food Facts (2020) a mis en évidence que si 79 % des aliments ultra-transformés sont classés C, D et E, 13 % se classent en B et 8 % en A.</p>
<p>De fait, la classification NOVA n’intègre pas la variabilité de composition nutritionnelle des produits au sein de chacune de ses catégories. Par exemple, pour les produits ingrédients culinaires (NOVA2), aucune différenciation entre les matières grasses végétales et animales n’est faite, ni même entre les différentes huiles végétales. Ce qui ne permet pas de reconnaître celles dont la composition nutritionnelle est la plus favorable et doit être privilégiée (huile d’olive ou de colza plutôt que tournesol, maïs, arachide, coco, palme, etc.). Cette information est en revanche fournie par le Nutri-score.</p>
<p>On voit bien l’intérêt de croiser plusieurs indicateurs. La France, comme d’autres pays, a d’ailleurs intégré la notion d’aliment ultra-transformé dans ses recommandations nutritionnelles pour la population. Il est proposé d'en limiter la consommation. Malheureusement, l’information sur les produits « ultra-transformés » n’a pas encore été directement transposée au niveau des étiquettes des aliments. Pour diminuer la part des aliments ultra-transformés, on peut conseiller de choisir les aliments qui ont des listes d’ingrédients les plus courtes possibles avec le moins d’additifs ou de substances que le consommateur n’a pas habituellement dans sa cuisine.</p>
<h2>Comment informer sur les résidus de pesticides ?</h2>
<p>Un nombre croissant d’études (notamment dans le cadre de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33720364/">la cohorte française NutriNet-Santé</a>) observe un <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28166859/">moindre risque de pathologies chroniques</a> <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28770334/">chez les plus forts consommateurs de bio</a> <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30422212/">ou ceux moins exposés</a> <a href="https://link.springer.com/epdf/10.1186/s12966-020-01038-y">aux résidus de pesticides</a>.</p>
<p>Il existe déjà en Europe un logo d’information, le label bio de l’Union européenne, correspondant à un label de qualité certifiant qu’un produit commercialisé est conforme au règlement de l’Union européenne sur l’agriculture biologique, fondé sur l’interdiction des engrais et pesticides de synthèse.</p>
<p>Enfin, il faut retenir qu’en ce qui concerne la présence de résidus de pesticides, le fait qu’un aliment soit issu de l’agriculture biologique ne veut pas dire qu’il soit nécessairement de bonne qualité nutritionnelle. De plus, il peut être bio, mais également ultra-transformé. C’est par exemple le cas des formes bio des pâtes à tartiner, des salades traiteurs, des gâteaux, des saucisses ou des céréales pour le petit-déjeuner… Un biscuit bio contient certes en principe moins de résidus de pesticides, mais sa qualité nutritionnelle restera limitée, et il est le plus souvent ultra-transformé.</p>
<h2>Faire évoluer les logos d’information sur les aliments, mais pas n’importe comment</h2>
<p>Récemment, plusieurs initiatives visant à combiner dans un seul indicateur au moins deux des dimensions santé des aliments, si ce n’est les trois, ont vu le jour.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/432380/original/file-20211117-27-1lhau5j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/432380/original/file-20211117-27-1lhau5j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/432380/original/file-20211117-27-1lhau5j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/432380/original/file-20211117-27-1lhau5j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/432380/original/file-20211117-27-1lhau5j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/432380/original/file-20211117-27-1lhau5j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=559&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/432380/original/file-20211117-27-1lhau5j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=559&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/432380/original/file-20211117-27-1lhau5j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=559&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Exemple d’évolution possible du Nutri-score.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Si elles ne peuvent être combinées dans le même algorithme, elles peuvent par contre, être associées sous forme graphique. Il serait par exemple envisageable de rajouter au Nutri-score un bord noir pour les aliments ultra-transformés, tout en faisant figurer à côté, pour les aliments bio, le label officiel correspondant.</p>
<p>De cette façon, le consommateur disposerait, en un coup d’œil, des informations concernant les principales dimensions santé des aliments, toutes importantes à prendre en compte, sans en occulter aucune. Il pourrait ainsi choisir, en connaissance de cause, les aliments qui sont les plus favorables à sa santé: 1) ceux non ultra-transformés (sans bordure noire) en privilégiant les mieux notés par Nutri-Score, 2) si malgré tout pour des raisons de goût, de coût ou de praticité, il souhaite sélectionner un aliment ultra-transformé (avec bordure noir), choisir ceux avec le Nutri-Score le plus favorable, et 3) privilégier dans la mesure du possible les aliments Bio lorsque cette alternative existe (particulièrement pour les aliments végétaux).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171980/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuelle Kesse-Guyot a reçu des financements publics : de ANR, INRAE, Ademe, Ecophyto, FRM. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mathilde Touvier a reçu des financements de l'Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale, Inserm (salaire), et, concernant les projets de recherche sur le NutriScore: de la Fondation pour la Recherche Médicale, FRM (ARF201809007046) et de l'Institut National du Cancer, INCa (No 2017-1-PL SHS-01-INSERM ADR 5-1).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pilar Galan et Serge Hercberg ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>
On sait aujourd’hui que certains aliments sont à privilégier pour limiter le risque de maladies chroniques. Mais dans les rayons, il n’est pas toujours simple de trier le bon grain de l’ivraie…
Serge Hercberg, Professeur Emérite de Nutrition Université Sorbonne Paris Nord (Paris 13) - Praticien Hospitalier Département de Santé Publique, Hôpital Avicenne (AP-HP), Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, U1153 Inserm,Inra,Cnam, Université Sorbonne Paris Nord
Emmanuelle Kesse-Guyot, Directrice de recherche en épidémiologie nutritionnelle, Inrae
Mathilde Touvier, Directrice de l'Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, U1153 Inserm,Inra,Cnam, Université Sorbonne Paris Nord, Inserm
Pilar Galan, Médecin nutritionniste, Directrice de Recherche INRAe, Equipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, U1153 Inserm, Université de Paris, Université Sorbonne Paris Nord, Cnam, Inrae
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tag:theconversation.com,2011:article/171287
2021-11-14T16:41:11Z
2021-11-14T16:41:11Z
Des souvenirs à l’imaginaire, comment se transmet le goût du chocolat
<p>Si, en France, historiquement, le chocolat est d’abord une boisson de luxe, il est aujourd’hui démocratisé et présent sous de multiples formes : tablettes, confiseries, entremets, gâteaux, crèmes, boissons… Un ballet de déclinaisons qui s’enrichit chaque année à l’approche de Noël et de Pâques, où les figurines en chocolat envahissent les rayons des magasins. De quoi souligner le lien à l’enfance de cet aliment ?</p>
<p>Le chocolat s’accompagne de tout un univers lié aux jeunes années de la vie, en témoigne la place de <em>Charlie et la chocolaterie</em> au panthéon des œuvres appréciées des enfants, mais les mythologies, vertus et croyances qui l’entourent vont bien au-delà. Il s’agit d’un objet de communication particulièrement fécond pouvant mobiliser de nombreuses valeurs mais également différents discours entre plaisir, santé, éthique, ou bien encore transmission.</p>
<h2>Le goût, une communication complexe</h2>
<p>Communiquer le goût revient à communiquer une expérience sensible et par là même labile, fugace et subjective. Dans notre perspective des sciences de l’information et de la communication, il s’agit non seulement de saisir les dimensions sensibles mais aussi de réfléchir à la manière de les transmettre, d’en faire une réalité qui se communique.</p>
<p>Au-delà d’une sémantique sensorielle autour du goût, les industries agroalimentaires ont recours à d’autres dispositifs communicationnels pour nous faire ressentir notre alimentation. Des discours construits autour de valeurs sont alors mobilisés visant à unir des dimensions sensibles mais aussi et surtout symboliques car comme le note avec beaucoup de justesse le sociologue Claude Fischler dans son ouvrage <em>L’homnivore</em>, manger c’est « incorporer non seulement de la substance nutritive mais aussi de la substance imaginaire, un tissu d’évocations, de connotations et donc de significations ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1419913372531937294"}"></div></p>
<p>Le chocolat est apparu dans mes recherches dans le cadre d’un projet autour de <a href="https://www.projet-alims.fr">l’alimentation-cancer</a>. Si celui-ci est noir et riche en cacao, il est traité par certains consommateurs comme un aliment vertueux pouvant permettre de maintenir une bonne santé et de se prémunir contre les maladies. Le chocolat a d’ailleurs pendant très longtemps été <a href="https://www.cairn.info/l-alimentation-en-europe-a-l-epoque-moderne--9782200244071-page-95.htm">vendu par des apothicaires et en pharmacie</a>.</p>
<p>Pour autant, le chocolat a aussi été cité comme un aliment potentiellement très calorique et devant être consommé avec modération car pourvoyeur de différentes maladies (diabètes, maladies cardio-vasculaires, etc.). Le chocolat est alors au cœur d’une dichotomie aujourd’hui très récurrente dans nos représentations alimentaires opposant sain et malsain, santé et plaisir.</p>
<h2>Images, éthique et publicité</h2>
<p>Du côté de l’industrie agroalimentaire et des chocolatiers, la santé n’est pas un axe communicationnel privilégié, c’est surtout le plaisir qui est très largement valorisé et communiqué. Se construit alors un imaginaire sensible allant du sensoriel au sensualisme. Car la communication du chocolat a mobilisé et mobilise encore la sensualité pour donner à voir le plaisir exacerbé des cinq sens. Le chocolat est alors chaud, voluptueux, aphrodisiaque. C’est ainsi que la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=enIl0KjZdYo">publicité Nestlé Dessert de 1977</a> nous susurre « Le plaisir, tous les plaisirs », et nous dévoile dans un jeu d’ombres un homme et une femme qui partagent une poire délicatement enrobée de chocolat.</p>
<p>En 1987, la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=4wRGyB4RaHQ">publicité Rocher Suchard</a> joue à plein l’image de la femme tentatrice. Ici c’est bien l’imaginaire de la Genèse qui est convoqué avec le fruit défendu et un homme prétendument vertueux qui cède au plaisir de chère et de chair. Si la dichotomie santé – plaisir est toujours très présente, on observe une nouvelle voie communicationnelle se dessiner autour de l’éthique en écho notamment à un contexte où l’urgence climatique et environnementale est de plus en plus médiatisée.</p>
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<figcaption><span class="caption">Bande-annonce du film <em>Chocolat</em>, qui joue sur les multiples symboliques de cet aliment (Miramax).</span></figcaption>
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<p>Dans leur revue de la littérature portant sur les recherches en communication environnementale, <a href="https://journals.openedition.org/communication/10559">Catellani et al</a>. soulignent le succès de l’expression « développement durable ». Les auteurs notent par ailleurs que la thématique de la communication environnementale connaît une forte montée en puissance depuis 2014. Cette expression a également pénétré la communication alimentaire avec une nouvelle valeur qui apparaît : l’éthique. Celle-ci est présente de manière transversale dans la majorité des discours alimentaires valorisant la santé, la gastronomie ou bien le terroir.</p>
<p>Riche de sens, cette valeur permet de réduire la dichotomie entre plaisir et santé. C’est ainsi que plusieurs thématiques reliées entre elles émergent : qualité, souci de l’environnement, prise en considération des conditions de travail dans des logiques de développement de commerces équitables. Le chocolat n’échappe pas à cette modalité communicationnelle <a href="https://www.youtube.com/watch?v=0QfmkEn02xk">à l’image d’Alter Eco</a> et permet dans un souci de transparence de « faire savoir » les conditions de production et d’acheminement mais aussi de valoriser des savoir-faire comme ceux des producteurs et pas seulement des illustres chocolatiers. Une communication qui permet également de valoriser la transmission.</p>
<h2>Le chocolat, entre transmission et enfance</h2>
<p>La thématique de la transmission amène à décliner différents discours afin de communiquer aussi bien l’histoire familiale que le savoir-faire ou bien encore le goût. En toile de fond de la transmission, il y a l’enfance : la boisson chocolatée du matin, les moustaches de lait, les gâteaux confectionnés dans la cuisine maternelle. Il s’agit alors de montrer la construction des sociabilités et des souvenirs alimentaires.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/431103/original/file-20211109-19-1wvswbf.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/431103/original/file-20211109-19-1wvswbf.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/431103/original/file-20211109-19-1wvswbf.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/431103/original/file-20211109-19-1wvswbf.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/431103/original/file-20211109-19-1wvswbf.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/431103/original/file-20211109-19-1wvswbf.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/431103/original/file-20211109-19-1wvswbf.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Publicité de 1892.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Les_Ma%C3%AEtres_de_l%27Affiche_-_47_-_Chocolat_Menier_(bgw20_0379).jpg">Firmin Bouisset, Public domain, via Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>C’est ainsi que, dès 1892, le chocolat Menier met en scène une petite fille dessinant sur un mur. Cette affiche réalisée par Firmin Bouisset a traversé les époques et sera plusieurs fois revisitée, incarnant l’espièglerie mais envisageant aussi l’enfant comme prescripteur d’achat. Cette espièglerie est largement mobilisée dans les publicités pour les <a href="https://www.youtube.com/watch?v=rm5LwHXgnTU">mousses au chocolat de Nestlé en 1999</a>, puis en <a href="https://www.youtube.com/watch?v=YXoWXQ15lGw">2001</a> avec le fameux « tu pousses le bouchon un peu trop loin, Maurice » soulignant la transgression enfantine. </p>
<p>La gourmandise se décline également comme une possibilité offerte à tous, il est aussi vecteur de partage, de convivialité gourmande <a href="https://www.youtube.com/watch?v=HK8WCSWFgtY">« les enfants aiment Kinder chocolat et moi aussi »</a>. Parfois l’adulte transgresse et retourne en enfance, <a href="https://www.dailymotion.com/video/xioej1">Lu en 1997</a> le met en scène avec ses Petits écoliers. La transmission mais surtout le lien à l’enfance construit une passerelle entre passé et présent permettant de valoriser le goût, la transgression, la transmission et en filigrane, la mémoire individuelle et collective.</p>
<p>En effet, notre alimentation marque durablement notre corps entre traces biologiques, traces corporelles mais aussi et surtout traces mémorielles. Ces dernières couplées avec les symboliques alimentaires sont largement utilisées pour communiquer et donner du goût mais surtout du sens aux discours alimentaires et, par extension, à notre alimentation. Il s’agit alors de saisir et transmettre le sens, la réalité sensible alimentaire en l’incarnant dans du sensualisme, des souvenirs, des expériences antérieures et des enjeux à venir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171287/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Clémentine Hugol-Gential a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche</span></em></p>
Si, à l’origine, le chocolat est une boisson de luxe, il est aujourd’hui présent sous de multiples formes : tablettes, gâteaux, crèmes… Et la symbolique qui l’entoure est tout aussi variée.
Clémentine Hugol-Gential, Maître de conférences en sciences de l'information et de la communication, Université de Bourgogne – UBFC
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/170339
2021-11-01T18:27:22Z
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Bonnes feuilles : « L’art de la performance »
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/427819/original/file-20211021-17-19mvuwq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2048%2C1536&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le chef Alain Ducasse doit ses étoiles à son talent, mais aussi à des pratiques qui peuvent inspirer chacun d’entre nous.
</span> <span class="attribution"><span class="source">kattebelletje / FlickR</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>L’Art de la performance, <em>publié par Jérôme Brisebourg, Christophe Hannezo et Thierry Picq aux éditions Dunod, souhaite vous faire plonger dans divers univers de haute performance. Les auteurs partent à la rencontre de l’ex-leader de la patrouille de France Bertrand Nivard, s’adressent à des virtuoses, cuisiniers étoilés, chefs d’orchestre, sportif de haut niveau à l’instar du basketteur Tony Parker ou de l’athlète handisport multimédaillée olympique Amélie le Fur…</em></p>
<p><em>Nombreux sont ceux qui ont bien voulu livrer leurs pratiques d’excellence. Elles semblent riches d’inspirations et d’enseignements pour des organisations plus ordinaires confrontées à des impératifs de performance. L’ouvrage ambitionne aussi de permettre à chacun de trouver dans ces témoignages exceptionnels des clés de réflexion et d’action dans sa vie personnelle. Nous vous en proposons quelques bonnes feuilles, à thématique culinaire.</em></p>
<hr>
<p>Lundi matin, 9 h 30. La réunion de cadrage commercial dans cette grande entreprise de distribution de matériel industriel commence juste. Jean, le directeur commercial, a réuni son équipe pour faire le point sur l’activité. Les résultats sont décevants. « Vous ratez beaucoup trop d’affaires ! », lance-t-il à froid sur un ton sec.</p>
<p>Dans les jours qui ont suivi, chaque commercial s’est exécuté et a rappelé méthodiquement chacun de ses interlocuteurs. Ces derniers, plutôt gênés de se justifier, ont souvent évoqué les raisons suivantes : « trop chers », « solutions proposées pas suffisamment pertinentes », « concurrents mieux placés ».</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/427821/original/file-20211021-17-103d8ln.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427821/original/file-20211021-17-103d8ln.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427821/original/file-20211021-17-103d8ln.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427821/original/file-20211021-17-103d8ln.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427821/original/file-20211021-17-103d8ln.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427821/original/file-20211021-17-103d8ln.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1035&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427821/original/file-20211021-17-103d8ln.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1035&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427821/original/file-20211021-17-103d8ln.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1035&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Comme il arrive souvent dans les organisations commerciales, certains collaborateurs, découragés, ont fini par partir et le directeur commercial a été finalement remplacé. Son successeur, ancien sportif de haut niveau, a proposé une autre approche : « Vous avez déjà réussi un certain nombre de ventes. Je vous propose d’aller questionner vos clients, ceux qui vous ont choisis, pour savoir ce qui a motivé leur choix. Peut-être que ça nous permettra d’identifier deux ou trois points qu’il faudra mettre en œuvre pour conquérir de nouveaux clients… »</p>
<p>Les commerciaux, se sentant plus à l’aise avec la démarche, ont sondé leurs clients. Les retours étaient très positifs, les interlocuteurs se sont largement ouverts. Forts de ces constats, plutôt source de confiance, les commerciaux ont cherché à systématiser leurs bonnes pratiques et les ventes ont décollé !</p>
<p>Quels enseignements peut-on tirer de cette situation, somme toute assez fréquente dans les entreprises ? Il fallait juste qu’ils comprennent que savoir identifier les bonnes pratiques pour les reproduire est bien plus efficace que de concentrer son attention et énergie sur les dysfonctionnements et les points faibles.</p>
<p>Ce principe, simple dans sa formulation mais souvent oublié dans les entreprises, est pourtant intégré depuis longtemps chez certaines populations qui font de la confiance un moteur de leur action : les sportifs de haut niveau, les explorateurs ou tous ceux qui sont confrontés à des situations extrêmes ou nécessitant des performances hors normes. Et pourquoi ne pas aller chercher d’autres enseignements de ce type auprès de ces populations ?</p>
<p>Quand on observe avec quelle vitesse et précision Kilian Mbappé dribble ses adversaires, comment Mike Horn enchaîne les projets les plus extrêmes, comment le quatuor Amadeus parvient à dégager autant d’harmonie et d’émotion, comment Alain Ducasse invente de nouveaux plats… on est ébloui, voire on se sent un peu démuni devant tant de virtuosité.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/427814/original/file-20211021-19-1ryp3dc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427814/original/file-20211021-19-1ryp3dc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427814/original/file-20211021-19-1ryp3dc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=753&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427814/original/file-20211021-19-1ryp3dc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=753&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427814/original/file-20211021-19-1ryp3dc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=753&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427814/original/file-20211021-19-1ryp3dc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=947&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427814/original/file-20211021-19-1ryp3dc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=947&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427814/original/file-20211021-19-1ryp3dc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=947&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">L’ancien basketteur Tony Parker, devenu multi-entrepreneur a signé la préface de l’ouvrage avec Denis Mercier qui s’est lui aussi reconverti en dirigeant d’entreprise après avoir été pilote de chasse et chef d’état major de l’armée de l’air.</span>
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<p>On se doute bien qu’ils ont aussi beaucoup travaillé pour arriver à une telle maîtrise de leur discipline. Mais au-delà de ces compétences innées et acquises, et de leurs traits de caractère, comment font les meilleurs ? Que font-ils au quotidien pour exploiter tout leur talent ? Nous avons voulu en savoir plus et, depuis quelques années, nous avons eu la chance de pouvoir les rencontrer de façon régulière, dans le cadre de nos activités.</p>
<p>Plutôt que de nous appuyer sur des études conceptuelles, nous avons préféré interroger directement les virtuoses qui nous paraissaient les plus performants dans leur milieu. Pris individuellement, nous avons collecté leurs secrets – très concrets – et nous avons voulu vous les faire découvrir, et vous inspirer pour les mettre en œuvre dans votre quotidien professionnel et personnel.</p>
<p>Chacune des personnes rencontrées nous a impressionnés par sa parfaite connaissance de soi. Les virtuoses ne se reposent pas sur leur supposé talent, ne font pas les choses au feeling, mais mettent en place des actions très concrètes, quotidiennes, pour exploiter tout leur potentiel.</p>
<p>Six univers sont abordés au travers de six chapitres. Cet article se concentre sur l’un d’entre eux : la Grande Cuisine.</p>
<h2>Les pratiques de haute performance de la gastronomie</h2>
<p><strong>Pratique #1 : Entretenir la motivation et la passion</strong></p>
<p>Guy Martin est un fan absolu des Rolling Stones. Adolescent, il rêvait de devenir musicien, guitariste plus particulièrement, pour « imiter » ses idoles. Heureusement pour les fins gourmets, il se rendit à l’évidence, il n’avait pas le talent de Keith Richards.</p>
<blockquote>
<p>« J’étais jeune et je voulais travailler »</p>
</blockquote>
<p>Il commença donc son voyage dans l’univers de la restauration en tant que pizzaiolo. En parallèle, tous les soirs, il s’essayait à réaliser une recette du livre d’Ali Bab, <em>Gastronomie pratique</em>, en suivant l’ordre alphabétique. À l’instar de Guy Martin, la grande majorité des chefs ont commencé leur relation « d’amour » avec la gastronomie en se centrant sur l’acquisition de bases techniques.</p>
<p>Ils répètent leurs gammes encore et encore, que ce soit dans le cadre de leur formation initiale mais aussi et surtout en côtoyant des chefs différents au cœur des cuisines des restaurants gastronomiques […].</p>
<p>Une deuxième étape est extrêmement marquée chez les grands chefs : développer sa propre signature, sa singularité, sa différence. Alain Ducasse raconte ainsi :</p>
<blockquote>
<p>« Quand je pars en voyage, je fais le pari d’être surpris une fois par voyage : ce qui m’intéresse c’est ceux qui ont créé une identité propre dans cette planète mondialisée. Cultiver sa différence dans un monde globalisé : ne pas raconter une histoire mais raconter son histoire. »</p>
</blockquote>
<p>Cette question de la singularité est légitime également en entreprise : qu’est-ce qui fait ma différence, ma valeur ajoutée ? Qu’est-ce que j’apporte de plus ou de différent ? Quel est mon propre style et comment le mettre en œuvre ?</p>
<p>Il existe une autre phase, encore plus motivante : mettre en correspondance, en relation, son travail avec une thématique qui nous inspire, qui nous est chère, qui dépasse notre intérêt personnel.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/427812/original/file-20211021-17-vluc8h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427812/original/file-20211021-17-vluc8h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427812/original/file-20211021-17-vluc8h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427812/original/file-20211021-17-vluc8h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427812/original/file-20211021-17-vluc8h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427812/original/file-20211021-17-vluc8h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427812/original/file-20211021-17-vluc8h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427812/original/file-20211021-17-vluc8h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La majorité du personnel des cafés joyeux est atteinte de trisomie 21.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Cafés Joyeux</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Les <em>Cafés Joyeux</em>, créés par Yann Bucaille-Lanrezac, ont pour objectif de « remettre les personnes porteuses d’un handicap mental ou cognitif au cœur de nos villes et de nos vies ». Le slogan de ces cafés résume la démarche : « Servi avec le cœur ».</p>
<p>Si vous souhaitez développer votre motivation, vous pouvez vous inspirer de ces chefs qui ont su associer leur métier à des projets qui leur tiennent à cœur. La passion n’en est que renforcée.</p>
<p><strong>Pratique #5 : Affiner son propre processus créatif</strong></p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/427813/original/file-20211021-25-leu6u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427813/original/file-20211021-25-leu6u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427813/original/file-20211021-25-leu6u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427813/original/file-20211021-25-leu6u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427813/original/file-20211021-25-leu6u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427813/original/file-20211021-25-leu6u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427813/original/file-20211021-25-leu6u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427813/original/file-20211021-25-leu6u6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">C’est loin des fourneaux que le Meilleur ouvrier de France Éric Frechon puise son inspiration.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Twitter</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>La question nous brûle les lèvres. Quel est le processus mis en œuvre par ces chefs pour créer des plats signatures qui feront un jour peut-être partie de notre patrimoine culinaire ?</p>
<p>Nous avons commencé à y répondre. Nous allons maintenant chercher à y ajouter la touche personnelle qui en fera un plat à part.</p>
<p>La cheffe canadienne Marie-Chantal Lepage a ainsi tenté de répondre, à sa façon, à la question : d’où provient l’inspiration ?</p>
<blockquote>
<p>« Mes inspirations culinaires jaillissent quant à moi lors de moments de plaisir, souvent entre amis, dans l’effervescence d’une conversation, un verre de vin dans une main pendant que, de l’autre, je saisis les aliments comme on s’empare de précieux trésors, tentant de les marier les uns aux autres pour qu’ils explosent de nuancées saveurs sur le palais de mes convives. Ces douces soirées mitonnent l’amitié. Pour la servir bien chaude dans un large bol de complicité, et jamais je ne m’en lasserai ! »</p>
</blockquote>
<p>Pour d’autres, il s’agit avant tout de s’évader, de laisser fonctionner son imaginaire, souvent de façon solitaire. Éric Frechon précise :</p>
<blockquote>
<p>« On peut créer à partir d’une photo, d’un tableau, d’une pièce, d’un produit. On se dit : “Tiens, mais je pourrais faire ça avec ça… ” Ça n’a souvent rien à voir avec la cuisine. »</p>
</blockquote>
<p>L’ouverture d’esprit, la curiosité peuvent aussi faire toute la différence. Alain Ducasse dit notamment :</p>
<blockquote>
<p>« Je suis curieux de tout, pas seulement dans mon métier. »</p>
</blockquote>
<p>Aussi étonnant que cela puisse paraître, la plupart des chefs précisent enfin que l’inspiration ne surgit pas dans les cuisines de leur restaurant. Et encore moins pendant le service. L’inspiration se déclenche surtout lors de moments de détente, de plaisir, lorsque le stress, la précision et la rigueur ne sont pas de mise. Autrement dit, un chef doit s’éloigner de son restaurant, du coup de feu, rompre avec la perfection attendue sur chacun des plats qui seront servis à ses convives pour s’ouvrir au monde, se retrouver avec ses proches, se détendre, se laisser surprendre, laisser son imaginaire s’envoler, voire enfin s’amuser à cuisiner.</p>
<p>Et vous ? Dans quelles conditions surgissent vos meilleures idées ?</p>
<hr>
<p><em>Les pratique #2 (se créer ou s’appuyer sur un écosystème d’exception), #3 (proposer une expérience totale) et #4 (manager avec son temps) sont à retrouver au chapitre 4 de l’ouvrage</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170339/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thierry Picq ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Sportifs médaillés, chefs étoilés, musiciens, pilote de chasse, stars de l’antenne… Quelles leçons tirer de ces virtuoses dans notre quotidien, souvent soumis à des impératifs de performance ?
Thierry Picq, Professeur et Directeur de l'Innovation, EM Lyon Business School
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/159550
2021-05-14T15:01:42Z
2021-05-14T15:01:42Z
Homard bleu et macaron à la rose… Ces aliments rois de la politique
<p>Du homard bleu, de la volaille de Bresse et du macaron à la rose… Le tout servi dans une porcelaine de Sèvres dans la galerie des Glaces du château de Versailles. </p>
<p>C'est un menu royal qui a été servi à Charles III et à Camilla pour leur visite officielle en France de trois jours. </p>
<p>Mais au delà du faste et du prestige, l’alimentation a toujours entretenu un <a href="https://www.librairie-gallimard.com/livre/9782200354701-aux-tables-du-pouvoir-des-banquets-grecs-a-l-elysee-albert-j-m/">lien étroit</a> avec la politique. Aussi bien pour les simples <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-actu/diners-clandestins-marlene-schiappa-pour-sanctionner-des-ministres-s-ils-y-participaient-20210404">dîners en ville</a> que pour les banquets républicains.</p>
<p>La table est un espace de pouvoir qui sert à mobiliser des réseaux, afficher sa puissance et porter un <a href="http://www.persee.fr/issue/rfsp_0035-2950_1998_num_48_3">discours politique</a> à travers ce que l’on mange et ce que l’on boit.</p>
<p>Pour le <a href="https://data.bnf.fr/fr/16605002/jean_anthelme_brillat-savarin_la_physiologie_du_gout/">célèbre gastronome Anthelme Brillat-Savarin</a></p>
<blockquote>
<p>« Les repas sont devenus un moyen de gouvernement, et le sort des peuples s’est décidé dans un banquet. Ceci n’est ni un paradoxe, ni même une nouveauté, mais une simple observation des faits. Qu’on ouvre tous les historiens, depuis Hérodote jusqu’à nos jours, et on verra que, sans même en excepter les conspirations, il ne s’est jamais passé un grand événement qui n’ai été conçu, préparé et ordonné dans les festins. »</p>
</blockquote>
<p>Dès lors, au fil des siècles et des régimes politiques, des aliments et des plats ont été revêtus d’un sens politique fort dont les évolutions s’inscrivent tout à la fois dans les transformations de la gastronomie française et de l’histoire politique de la France.</p>
<h2>Afficher son pouvoir</h2>
<p>La profusion des mets est considérée pendant des siècles comme un signe évident de puissance. Sur les tables royales au Moyen-Âge, l’abondance et la prodigalité permettent au roi de montrer qu’il est le premier des seigneurs. La profusion de nourriture impose une hiérarchie. Mais, la rareté des aliments servis participe aussi du prestige de la table pour les différents pouvoirs, notamment à travers <a href="https://www.persee.fr/doc/medi_0751-2708_1983_num_2_5_933">l’emploi d’épices en nombre</a> (girofle, cannelle, muscade).</p>
<p>Il s’agit d’avoir ce que les autres n’ont pas. Lorsque <a href="http://www.potager-du-roi.fr/site/pot_histoire/table_royale.htm">Louis XIV réclame des petits pois</a> en primeurs cultivés dans le potager du roi à Versailles, il montre ainsi qu’il peut tout contrôler, même la nature. Pendant longtemps, le luxe fut une caractéristique majeure des tables des politiques.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/397350/original/file-20210427-21-w9sa0w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/397350/original/file-20210427-21-w9sa0w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/397350/original/file-20210427-21-w9sa0w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=957&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/397350/original/file-20210427-21-w9sa0w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=957&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/397350/original/file-20210427-21-w9sa0w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=957&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/397350/original/file-20210427-21-w9sa0w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1203&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/397350/original/file-20210427-21-w9sa0w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1203&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/397350/original/file-20210427-21-w9sa0w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1203&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les Grandes Chroniques de France de Charles V.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Banquet_Charles_IV.jpg">Wikimedia</a></span>
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<p>Les mets les plus recherchés, les plus rares, les plus prisés se devaient d’y figurer. Au Moyen-Âge, paons, hérons, cygnes ou marsouins sont présentés comme des mets d’exception, véritables spectacles, lors des banquets princiers comme ceux donnés au milieu du XV<sup>e</sup> siècle à la <a href="https://sup.sorbonne-universite.fr/sites/default/files/public/files/Ducs-Bourgogne_2009-05-23_HISTOIRE_ET_IMAGES_MEDIEVALES_.pdf">cour de Bourgogne</a> par Philippe le Bon puis Charles le Téméraire pour <a href="https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_2002_num_57_5_280111_t1_1367_0000_3">éblouir leurs invités</a>.</p>
<p>Toutes les institutions politiques assoient leur prestige sur des repas d’apparat. Dans la France du XVIII<sup>e</sup> siècle, les <a href="https://feret.com/livre/banquets-gastronomie-et-politique-dans-les-villes-de-province-xive-XXe-siecles/">corps de ville donnent des banquets</a> où sont présentés les plats à la mode du temps comme des poulardes aux huîtres, des tourtes de pigeons garnies de truffes et de champignons ou des pâtés chauds de bécasses.</p>
<p>Ils affichent ainsi leur pouvoir et le prestige de la cité. Au moment de la Révolution, ces fastes culinaires suscitent néanmoins des critiques. Les caricatures de Louis XVI le présentent ainsi comme un affameur du peuple contraint de lui fournir les nourritures les plus précieuses (vins de Bordeaux, Champagne, pâtés de canards d’Amiens, etc.).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/397032/original/file-20210426-13-b4d42e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/397032/original/file-20210426-13-b4d42e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=462&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/397032/original/file-20210426-13-b4d42e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=462&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/397032/original/file-20210426-13-b4d42e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=462&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/397032/original/file-20210426-13-b4d42e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=581&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/397032/original/file-20210426-13-b4d42e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=581&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/397032/original/file-20210426-13-b4d42e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=581&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le Ci devant Grand Couvert de Gargantua Moderne en Famille vers 1791.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.parismuseescollections.paris.fr/fr/musee-carnavalet/oeuvres/le-ci-devant-grand-couvert-de-gargantua-moderne-en-famille#infos-principales">parismuseescollections.paris.fr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Se distinguer</h2>
<p>Les aliments ont une dimension symbolique forte dans une société d’ordres marquée par les hiérarchies. La consommation de gibiers à plumes représente ainsi un trait distinctif des tables des élites politiques de l’Ancien Régime. Les perdrix, les grives ou les cailles sont placées au sommet d’une hiérarchie des aliments fondée, dans une perspective religieuse, sur la proximité avec le ciel. Dictée par un <a href="https://www.armand-colin.com/lalimentation-en-europe-lepoque-moderne-9782200244071">principe d’incorporation et d’élévation spirituelle</a>, leur consommation, comme celle des fruits, est jugée plus raffinée que celle des nourritures qui poussent dans la terre (légumes, tubercules).</p>
<p>Mais ces oiseaux renvoient aussi aux privilèges nobiliaires et à l’exercice de droits seigneuriaux à travers la chasse, synonyme de pouvoir, qui différencie la noblesse du peuple.</p>
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<figcaption><span class="caption">Maité explique comment manger l’ortolan à la serviette (INA, 1987).</span></figcaption>
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<p>Cette valorisation gastronomique lorsqu’elle est associée au goût de l’interdit, comme, à la fin du XX<sup>e</sup> siècle, dans le cas de François Mitterrand et des <a href="https://www.commentaire.fr/boutique/achat-d-articles/le-petit-oiseau-du-paradis-6290">ortolans</a> (petits oiseaux interdits de chasse, engraissés, puis rôtis qu’il fallait manger en entier), devient l’illustration d’un pouvoir politique hors du droit commun.</p>
<h2>Entretenir ses réseaux d’influence</h2>
<p>Le choix des aliments par et pour les hommes de pouvoir intervient aussi dans l’entretien des réseaux d’influence. Durant l’Ancien Régime, il est ainsi d’usage pour les villes de province d’honorer la famille royale, le contrôleur général des finances, les ministres ou les intendants par des présents en début d’année ou lors de visites officielles.</p>
<p>Pour les villes, <a href="https://www.persee.fr/doc/hes_0752-5702_2006_num_25_1_2579">ces dons</a> auxquels sont consacrées parfois des sommes importantes, sont un moyen de s’assurer la protection et la bienveillance des puissants. Chacune offre alors des aliments jugés emblématiques de la gastronomie locale et dignes d’être envoyés à de grands personnages : Périgueux offre ainsi des pâtés de perdrix aux truffes, Bayonne des jambons, Amiens des pâtés de canards, Montélimar des nougats blancs, Reims des vins de Champagne, etc.</p>
<p>La table peut également servir à montrer la cohésion politique de la nation comme lors du <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/histoire-de-la-cuisine-34-les-banquets-republicains">célèbre banquet des maires</a> de France dans les jardins des Tuileries à l’occasion de l’Exposition universelle de 1900 en pleine période troublée de <a href="https://www.lemonde.fr/un-jour-un-festin/article/2020/08/18/un-jour-un-festin-en-1900-le-banquet-des-maires_6049195_6046388.html">l’affaire de Dreyfus</a> et de contestations de la République. Les plats servis aux 22 000 convives symbolisent une <a href="https://www.persee.fr/doc/rfsp_0035-2950_1998_num_48_3_395283">démarche fédératrice</a> en rassemblant les plats emblématiques de la grande cuisine française de l’époque (darnes de saumon glacées parisiennes, filet de bœuf en Bellevue) et les aliments qui font la réputation des régions françaises (canetons de Rouen, poulardes de Bresse).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/397157/original/file-20210426-17-151yieu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/397157/original/file-20210426-17-151yieu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/397157/original/file-20210426-17-151yieu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/397157/original/file-20210426-17-151yieu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/397157/original/file-20210426-17-151yieu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/397157/original/file-20210426-17-151yieu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/397157/original/file-20210426-17-151yieu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">22 000 convives ont pris part au grand banquet des maires de France, le 22 septembre 1900.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.parismuseescollections.paris.fr/fr/musee-carnavalet/oeuvres/grand-banquet-1900-maires-de-france#infos-principales">www.parismuseescollections.paris.fr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Cuisine et communication politique</h2>
<p>L’alimentation sert de point d’appui à un discours politique ; elle peut être porteuse d’un message ou bien support de critiques comme contre Louis XVI.</p>
<p>Les nombreux banquets organisés sous la III<sup>e</sup> République au lendemain de la défaite de 1870 et de la perte de l’Alsace-Lorraine témoignent souvent d’un choix politique des mets.</p>
<p>Saumons du Rhin ou écrevisses de la Meuse figurent, par exemple, au menu du banquet offert par la ville de Cahors à Léon Gambetta, président de la Chambre des députés le 28 mai 1881. La dénomination des plats sert à ancrer malgré tout les provinces perdues dans la gastronomie nationale.</p>
<p>Avec la V<sup>e</sup> République et la médiatisation des chefs étoilés, les liens entre la cuisine et la politique demeurent toujours très étroits. Suivant les évolutions de l’art culinaire, le luxe et l’abondance ne sont plus seulement les fondements de la distinction. La dimension politique s’exprime surtout dans les valeurs associées aux nourritures choisies. En 1975, à l’occasion de la remise de sa Légion d’honneur par Valérie Giscard d’Estaing, le chef Paul Bocuse crée une soupe aux <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/lhistoire-derriere-la-celebre-soupe-aux-truffes-vge-concue-pour-valery-giscard-destaing_fr_5fc8e158c5b66bc57467e50b">truffes noires</a> qu’il baptise « Soupe aux truffes VGE » en l’honneur du président.</p>
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<figcaption><span class="caption">La recette de la soupe « VGE ».</span></figcaption>
</figure>
<p>Cet épisode montre que l’alimentation des présidents de la République devient un <a href="https://gallica.bnf.fr/blog/28042017/les-menus-presidentiels?mode=desktop">objet politique</a>. Ceux-ci savent alors s’en emparer pour façonner leur image, soit du côté du raffinement et de l’excellence française, soit, à l’inverse, en affichant l’image plus populaire d’un amateur de <a href="https://www.lhistoire.fr/au-club-de-la-t%C3%AAte-de-veau-0">tête de veau</a> comme Jacques Chirac, <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/les-tripiers-de-france-rendent-hommage-a-leur-meilleur-ambassadeur-de-la-tete-de-veau_fr_5d8cb4c8e4b0e9e760486862">promoteur de la cuisine de terroir</a>, expression politique de l’ancrage et de la proximité.</p>
<p>Aliments et spécialités culinaires deviennent alors support d’une communication politique, plus ou moins maîtrisée, que l’on retrouve des campagnes électorales aux visites médiatiques au salon de l’agriculture.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/159550/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Meyzie a reçu des financements du Conseil Régional Nouvelle-Aquitaine</span></em></p>
Au fil des siècles et des régimes politiques, les aliments ont été revêtus d’un sens politique fort, lié aux évolutions tant gastronomiques que politiques.
Philippe Meyzie, Maître de conférences HDR en histoire moderne, Université Bordeaux Montaigne
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/160216
2021-05-14T15:01:41Z
2021-05-14T15:01:41Z
De la sauce Worcestershire au fish and chips : des aliments-fétiches réconfortent les expats confinés
<p>Avec le phénomène grandissant de la mondialisation, le développement des moyens de transport et de communication, il n’a jamais été aussi facile et rapide de se déplacer aux quatre coins du monde. Londres, Barcelone, Rome ou encore Dubaï, New York, Sydney n’ont jamais été aussi accessibles et plébiscitées pour le plaisir de voyager ou les affaires.</p>
<p>Selon l’un des derniers rapports sur la <a href="http://hdr.undp.org">mobilité humaine</a>, les déplacements transnationaux ont explosé. De plus en plus de personnes ont quitté leur pays d’origine pour s’installer à l’étranger, que ce soit pour un motif personnel ou professionnel, voire économique. Ainsi, plus de 214 millions de personnes ont <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=2294688">tenté l’aventure de l’expatriation</a>, un chiffre qui a triplé ces dernières décennies alors que la population mondiale n’a fait que doubler dans le même temps.</p>
<h2>Expatriation et acculturation alimentaire</h2>
<p>Quitter son pays d’origine, ses amis, sa famille n’est jamais facile ! Quand des personnes de cultures différentes entrent en contact de manière directe et continue, différents changements se produisent au niveau individuel et comportemental renvoyant au phénomène <a href="https://psycnet.apa.org/record/1991-97078-004">« d’acculturation psychologique »</a>, appelée également <a href="https://psycnet.apa.org/record/2009-06761-002">« acculturation individuelle »</a>.</p>
<p>Celle-ci fait référence à la fois au processus d’adaptation des migrants au contact d’un nouvel environnement culturel d’accueil, mais également à l’ensemble des modifications au niveau individuel (comportements, valeurs, attitudes, etc.) qui résultent des contacts culturels prolongés avec les membres de la société d’accueil. Ces changements peuvent affecter tous les aspects de la vie des individus. Parmi eux, et non des moindres, figurent ceux liés à l’alimentation renvoyant au phénomène et au processus sous-jacent « d’acculturation alimentaire ». </p>
<p>Cette dernière peut être définie comme l’ensemble des modifications qui touchent les comportements alimentaires des individus au contact d’une autre culture. En outre, l’acculturation alimentaire englobe le processus d’apprentissage des comportements, des normes, des valeurs, des savoirs et savoir-être liés à la consommation alimentaire d’autres cultures.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/ElOJUalYU-M?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Aux États-Unis, certains expatriés français décident de célébrer Thanksgiving pour montrer leur adaptation à la culture américaine.</span></figcaption>
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<p>Les <a href="https://www.lemangeur-ocha.com/ouvrage/manger-francais-europeens-et-americains-face-a-lalimentation-2/">spécialistes de l’anthropologie et de la sociologie de l’alimentation</a> ont montré que le choix des produits alimentaires et les méthodes de préparation culinaire sont étroitement liés à la « culture ». Ils jouent notamment un rôle important dans un contexte d’acculturation dans la mesure où ils sont le miroir de l’identité culturelle. </p>
<p>Plus spécifiquement, la consommation alimentaire est un « instrument identificateur » qui permet de recréer l’identité des individus dans le cadre d’une migration. Selon <a href="https://www.lemangeur-ocha.com/auteur/annie-hubert">Annie Hubert</a> (2000), anthropologue de l’alimentation,</p>
<blockquote>
<p>« Les habitudes alimentaires sont les dernières à disparaître et les préférences alimentaires se conservent plus que la langue maternelle. »</p>
</blockquote>
<p>Les experts du domaine notent, en outre, un lien étroit entre l’alimentation et l’identité des migrants soulignant plus particulièrement son caractère persistant dans le temps.</p>
<p>Dans le domaine du marketing, des études en comportement du consommateur se sont intéressées à l’acculturation alimentaire de ces derniers. Ces études ont considéré les préférences alimentaires et les comportements d’achat et de consommation qui en découlent comme : soit la volonté de maintenir son identité d’origine, et/ou soit le désir de s’adapter à la culture d’accueil.</p>
<p>Dès lors, la consommation alimentaire représente un indicateur puissant et fécond pour appréhender les stratégies identitaires des consommateurs expatriés dans le cadre d’une migration.</p>
<h2>Dis-moi ce que tu manges, je te dirai qui tu es…</h2>
<p>Au travers d’une <a href="https://www.researchgate.net/publication/351516122_Experiences_d'expatriation_multiacculturation_et_comportements_de_consommation_cas_de_l'acculturation_alimentaire_des_expatries_professionnels_et_de_leurs_familles">étude</a> que nous avons menée en 2018 auprès de 16 foyers d’expatriés professionnels hautement qualifiés d’origine américaine, britannique et allemande, temporairement installés en France, quatre positions identitaires ont été relevées à travers l’analyse de leurs habitudes alimentaires.</p>
<p>Elles ont donné lieu à l’élaboration d’une typologie de consommateurs expatriés :</p>
<p><strong>1. Les « traditionnels »</strong></p>
<p>Ces expatriés restent encore très attachés à leur identité culturelle qu’ils perpétuent en maintenant une grande part des habitudes alimentaires de leur culture d’origine durant le séjour d’expatriation. Néanmoins, l’ouverture vers les nouvelles pratiques alimentaires de la culture hôte est bien présente et se fait progressivement dans le temps. </p>
<p>Pete, expatrié britannique depuis une quinzaine d’années en France, reste encore très attaché à l’incontournable « English breakfast » qu’il ne remplacerait pour rien au monde tout comme son épouse Diana qui n’est pas prête de troquer son thé anglais contre du café français à l’heure du petit-déjeuner !</p>
<p><strong>2. Les « expatriés dans leur bulle »</strong></p>
<p>Ces personnes ont un réseau de socialisation très clanique (associations d’expatriés) et apprécient se retrouver entre concitoyens autour d’un verre ou d’une table avec des plats typiques du pays d’origine. Ils ont également tendance à consommer des plats emblématiques de leur culture d’origine lors de la célébration de fêtes culturelles ou religieuses. Quand l’occasion se présente, certains expatriés n’hésitent pas à revêtir leurs plus belles tenues traditionnelles affichant de manière ostentatoire leur identité culturelle ! </p>
<p>Ainsi, à l’occasion de la fête nationale américaine du 4 juillet, <a href="https://share.america.gov/fr/le-4-juillet-aux-usa-une-fete-danniversaire-spectaculaire/">l’Independence Day</a>, les expatriés américains n’hésitent pas à arborer les couleurs du drapeau national américain. Ils se retrouvent entre concitoyens pour partager un bon moment autour de grillades et de gâteaux traditionnels.</p>
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<figcaption><span class="caption">Célébration de l’Independence Day, fête nationale américaine, par les expatriés américains.</span></figcaption>
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<p><strong>3. Les « intégrés voyageurs »</strong></p>
<p>Durant leur séjour en France, ces expatriés plébiscitent et adoptent très vite les nouvelles habitudes alimentaires françaises. En outre, ils sont très friands de cuisines ethniques à l’image de leur profil cosmopolite. Ces personnes ne se définissent pas sur la base de leur identité culturelle d’origine, mais au travers de celle qui a été façonnée au cours de leurs voyages et rencontres interculturelles :</p>
<blockquote>
<p>« Mes voyages en Italie, en Espagne et en Grèce ont beaucoup influencé mes habitudes alimentaires qui se sont diversifiées au fil du temps. J’adore cuisiner toutes sortes de plats méditerranéens. » (Margaret, expatriée britannique)</p>
</blockquote>
<p><strong>4. Les « intégrés nostalgiques »</strong></p>
<p>Ces expatriés, bien qu’ils aient très largement adopté les habitudes alimentaires françaises et qu’ils soient pleinement intégrés à la société d’accueil, ressentent par moments un fort sentiment de nostalgie. Ce dernier leur rappelle souvent leur origine culturelle voire leur douce enfance au pays et déclenche la consommation de mets du pays d’origine qui apportent réconfort, à l’image de la fameuse madeleine de Proust :</p>
<blockquote>
<p>« En hiver, j’ai souvent envie de manger des saucisses anglaises que ma maman me préparait, mais qui sont introuvables ici en France, alors je les cuisine moi-même… » (William, expatrié britannique en France depuis 20 ans)</p>
</blockquote>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/400751/original/file-20210514-19-1t00oci.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/400751/original/file-20210514-19-1t00oci.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/400751/original/file-20210514-19-1t00oci.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/400751/original/file-20210514-19-1t00oci.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/400751/original/file-20210514-19-1t00oci.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/400751/original/file-20210514-19-1t00oci.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/400751/original/file-20210514-19-1t00oci.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le « full English breakfast » : Toasts, œufs, bacon, <em>baked beans</em>, saucisses, tomates, champignons, pommes de terre.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Petit_d%C3%A9jeuner_anglais#/media/Fichier:Full_English_breakfast_at_the_Chalet_Cafe,_Cowfold,_West_Sussex,_England.jpg">Acabashi/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par ailleurs, les résultats de notre recherche montrent la volonté des parents expatriés de véhiculer auprès de leurs enfants une part de leur identité culturelle à travers la cuisine. Cela se traduit par la confection de plats typiques du pays d’origine et la perpétuation de recettes traditionnelles de famille transmises oralement de génération en génération :</p>
<blockquote>
<p>« Avec mes enfants, le mercredi j’aime préparer des plats que faisait ma grand-mère en Allemagne, ça me rappelle mon enfance, les bonnes odeurs dans la cuisine… Les enfants cuisinent avec moi et ils adorent ça ! »</p>
</blockquote>
<p>Par ailleurs, alors que la sphère publique est plus propice à consommer des mets du pays d’accueil, la sphère privée est marquée par la volonté de maintenir des habitudes alimentaires du pays d’origine :</p>
<blockquote>
<p>« Le soir, à la maison, mon épouse et moi, nous continuons à proposer à nos enfants un dîner typiquement anglais, c’est important de garder ça et de le perpétuer ici pour nos enfants… »</p>
</blockquote>
<p>D’autres parents vont au-delà et éprouvent le désir d’ouvrir leurs enfants aux cuisines du monde à l’image de leur identité cosmopolite :</p>
<blockquote>
<p>« C’est également mon rôle en tant que parent d’ouvrir mes enfants à de nouvelles choses que soit à travers les voyages, l’apprentissage de nouvelles langues, ou encore leur faire découvrir de nouvelles cuisines… »</p>
</blockquote>
<h2>Crise sanitaire, frontières fermées et moi et moi… ?</h2>
<p>Une <a href="https://www.researchgate.net/project/Food-acculturation-of-expatriates-in-the-time-of-COVID-19">seconde étude</a> que nous avons menée au premier trimestre 2021 sur la base d’une netnographie et d’un questionnaire auprès d’une centaine d’expatriés révèle que le contexte sanitaire actuel a une incidence sur le processus d’acculturation alimentaire des expatriés.</p>
<p>En effet, les confinements à répétition depuis un an, la fermeture des frontières et le sentiment d’incertitude ont redessiné la dynamique globale de l’acculturation alimentaire des expatriés. L’éloignement du pays d’origine, accentué par l’impossibilité de s’y déplacer et de recevoir dans le pays d’accueil ses amis et ses proches, a exacerbé le sentiment d’appartenance culturel chez certains expatriés interrogés qui se reflète au travers de leur consommation alimentaire.</p>
<p>Sur les forums d’expatriés, les questions fusent pour trouver certains produits du pays d’origine notamment les condiments et sauces dont les expatriés américains et britanniques sont très friands en France à l’image des mythiques <a href="https://www.hellmanns.com/us/en/new-hellmanns-drizzle-sauces.html">Hellmann’s sauces</a>, la fameuse <a href="https://www.franksredhot.com/en-us/franks-flavored-goldfish">Frank’s red hot sauce</a>, ou encore l’incontournable <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/French%27s">French’s yellow mustard</a>…</p>
<blockquote>
<p>« We’re almost out of it ! No imminent chance to restock from UK. Has anyone seen it sold in the area ? Thanks ! »</p>
</blockquote>
<p>Certaines associations organisent même des masterclass ou des apéros en ligne autour de la préparation de plats typiques du pays d’origine, parfois confectionnés avec les moyens du bord.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/398402/original/file-20210503-23-15on5wb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/398402/original/file-20210503-23-15on5wb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/398402/original/file-20210503-23-15on5wb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=607&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/398402/original/file-20210503-23-15on5wb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=607&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/398402/original/file-20210503-23-15on5wb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=607&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/398402/original/file-20210503-23-15on5wb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=763&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/398402/original/file-20210503-23-15on5wb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=763&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/398402/original/file-20210503-23-15on5wb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=763&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Atelier de cuisine en ligne organisé par l’association d’expatriés « American in Alsace ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Facebook</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces événements sont également l’occasion de se retrouver entre expatriés d’ici et d’ailleurs et de créer des liens en partageant les mêmes préoccupations et besoins. Quand ça n’est pas les associations, ce sont les membres de la famille et les amis restés au pays qui prennent le relais pour organiser des « happy hours » ou « tea time » en ligne permettant ainsi de partager un moment de convivialité.</p>
<p>Autant de moyens de perpétuer son appartenance culturelle et le sens du « chez soi » au travers de la cuisine par-delà les frontières et malgré les contraintes.</p>
<hr>
<p><em>Les données de la première étude mentionnées dans cet article ont été collectées dans le cadre de la thèse de l'autrice, dirigée par Sihem Dekhili, université de Strasbourg.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/160216/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raficka Hellal-Guendouzi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
L’alimentation permet aux expatriés de garder leur identité culturelle, surtout en période de crise sanitaire lorsque le retour dans le pays d’origine n’est plus possible.
Raficka Hellal-Guendouzi, Enseignante-chercheuse en Sciences de Gestion, EM Strasbourg Business School, Université de Strasbourg
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/159868
2021-04-28T18:29:59Z
2021-04-28T18:29:59Z
Le dilemme des aliments moisis : peut-on consommer des fromages « bleus » sans risques ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/397365/original/file-20210427-21-1flsudm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5740%2C3357&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Fromage Cabrales.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-photo/cabrales-cheese-wrapped-vine-leaves-1797712387">Joe McUbed/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Pour certaines personnes, ouvrir un réfrigérateur qui embaume le roquefort, le cabrales ou le camembert est comme une évocation des senteurs du Paradis. En revanche, y trouver une tomate ou un yaourt abîmés par la moisissure ne fait généralement pas la même impression. </p>
<p>Les fromages sont des aliments très populaires, il en existe plusieurs centaines de variétés. Parmi cette multitude, les fromages à pâte persillée (autrement dit les bleus) et ceux à croûte blanche retiennent incontestablement l’attention : ils doivent leur aspect et leur arôme particuliers aux moisissures qui les composent. </p>
<p>Pour ceux qui ne sont pas familiers de ces produits laitiers, ces champignons qui les parsèment peuvent être à l’origine de nombreux questionnements. Sont-ils sans risque pour la santé ? Pourquoi consommer de tels fromages, alors que nous évitons de manger les aliments moisis ? Pour y répondre à cette question, il faut comprendre comment vivent ces micro-organismes et comment ils se développent dans les fromages qu’ils colonisent.</p>
<h2>Quel rôle jouent les moisissures dans le fromage ?</h2>
<p>Les champignons sont un groupe d’organismes qui n’appartiennent ni au règne animal (ce qui est assez évident), ni au règne végétal (ce qui l’est moins : en raison de leur apparence, la confusion est plus aisée). Ils font partie d’un règne distinct du vivant, le règne des <em>Fungi</em>. </p>
<p>On y trouve notamment les organismes microscopiques que nous connaissons sous le nom de « moisissures » (qui sont des organismes multicellulaires filamenteux) et les « levures » (qui sont des organismes unicellulaires, c’est-à-dire composés d’une seule cellule). Nous ne traiterons pas ici de ces dernières, car leur rôle dans les processus alimentaires est principalement lié à leurs capacités de fermentation : on les utilise pour fabriquer des aliments comme la bière, le vin ou le pain, par exemple.</p>
<p>Les moisissures jouent quant à elles un rôle double dans l’élaboration des aliments. Comme nous l’avons déjà mentionné, les fromages à pâte persillée (comme le cabrales, le picón ou le valdeón en Espagne, ou le roquefort français, l’un des plus connus) et les fromages à croûte blanche « fleurie » (comme les traditionnels camembert ou brie, ainsi que les rouleaux de fromage de chèvre, plus récents) doivent leurs caractéristiques au développement de moisissures. </p>
<p>Dans les fromages bleus, la moisissure <em>Penicillium</em> <em>roqueforti</em>, avec sa forme en brosse caractéristique et son mycélium bleu-vert, se développe dans les cavités de la pâte. Dans ceux à croûte blanche, la moisissure qui croît en surface est <em>P. camemberti</em>, reconnaissable à son mycélium blanc cotonneux procurant à la croûte son aspect caractéristique. </p>
<p>En plus de donner leur couleur aux fromages, ces champignons produisent diverses enzymes qui dégradent les protéines et les graisses de la pâte. Ce faisant, ils génèrent toute une variété de composés qui confèrent à ces produits laitiers leurs odeurs et leurs goûts si particuliers. C’est la conséquence de la dégradation du substrat où se développent les moisissures (la matière organique de la pâte). Celles-ci y puisent les éléments dont elles ont besoin pour leur croissance. </p>
<p>Les autres espèces qui se développent parfois spontanément sur les fromages produisent aussi ces taches bleues familières (qui n’a jamais eu un morceau de fromage moisi dans son réfrigérateur ?), mais elles détériorent le produit, provoquant le rejet du consommateur. Les champignons bleus en question sont également des <em>Penicillium</em> mais appartiennent à d’autres espèces.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"><em>Penicillium roqueforti</em>, le champignon utilisé dans la production de fromages à pâte persillée (illustration 3D).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-illustration/fungi-penicillium-roqueforti-fungus-used-production-1370340023">Shutterstock / Kateryna Kon</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Est-il dangereux de manger du fromage avec des moisissures ?</h2>
<p>La réponse à cette question est « cela dépend ». Dans le cas des fromages mentionnés précédemment, les moisissures utilisées ont été sélectionnées et <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1080/10915810050074964">leur consommation est considérée comme étant sans risque</a> pour le consommateur. </p>
<p>Cependant, les champignons qui se développent sans contrôle <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308814616307439">à la surface d’autres fromages</a>, ou suite à la détérioration naturelle des produits, peuvent présenter un danger. En effet, de nombreuses moisissures, notamment celles qui poussent fortuitement sur les fromages affinés, produisent des substances toxiques appelées mycotoxines. Consommer des fromages contaminés par de tels micro-organismes <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S002203028182869X">pourrait entraîner des problèmes de santé</a>. </p>
<p>Nos <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0740002018312292#">travaux</a> ont mis en évidence que l’altération des fromages à pâte pressée de type castellano/zamorano peut mener à la prolifération d’une espèce de moisissure (un <em>Penicillium</em>) capable de produire, si elle est présente en grande quantité et selon la souche considérée, <a href="https://www.researchgate.net/publication/279650771_Polyphasic_taxonomy_of_Penicillium_subgenus_Penicillium_A_guide_to_identif_cation_of_food_and_airborne_terverticillate_Penicillia_and_their_mycotoxins">des mycotoxines</a>. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0740002095800948">D’autres études</a> l’ont également mise en évidence dans différentes variétés de fromage.</p>
<h2>Manger ou jeter des aliments moisis</h2>
<p>Isoler et identifier les champignons du fromage n’est pas une tâche facile. Cela requiert d’y consacrer beaucoup de temps, de matériel, d’équipement et de personnel spécialisé. À la lumière des connaissances actuelles, il est donc préférable d’éviter de consommer des fromages présentant des moisissures qui se sont développées de façon spontanée et incontrôlée (notamment s’ils sont bleus). </p>
<p>Si vous trouvez un tel champignon sur votre fromage, que faire ? S’il se développe à sa surface, sur sa croûte, il suffit de la retirer. En revanche s’il est sous la croûte, il faut veiller à enlever, en plus du champignon, au moins 2,5 cm de matière autour de l’endroit où il s’est développé.</p>
<p>En ce qui concerne les <a href="https://www.routledge.com/Food-Mycology-A-Multifaceted-Approach-to-Fungi-and-Food/Dijksterhuis-Samson/p/book/9780849398186">aliments solides</a>, on considère généralement que retirer la partie moisie suffit. En effet, les mycotoxines migrent difficilement à l’intérieur de tels aliments.</p>
<p>Le cas des fruits est particulier. Généralement, la moisissure affecte leur goût (les composés produits par son métabolisme se diffusent facilement dans une orange ou une pomme), et cela ne vaut pas la peine de conserver la partie non moisie, sauf si elle est vraiment conséquente. </p>
<p>Il est cependant difficile de généraliser la conduite à tenir. Chaque cas est particulier, et nécessite d’être évalué selon l’aliment et les risques liés à sa consommation. Ainsi, mieux vaut éviter de consommer des pommes moisies, car la principale cause de pourriture est un <em>Penicillium</em> producteur de toxines. Leur consommation présente donc un risque. </p>
<p>Enfin, il est déconseillé de consommer les aliments semi-solides (tels que les yaourts ou le concentré de tomates, par exemple) s’ils sont moisis, car les mycotoxines s’y répandent plus facilement.</p>
<p>Pour en revenir aux produits laitiers dont il a été question dans cet article, les amateurs de fromage bleus peuvent continuer à déguster les moisissures qui les parsèment en toute sécurité, tant qu’ils s’abstiennent de consommer les intrus qui s’y installeraient spontanément.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/159868/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Teresa María López Díaz no recibe salario, ni ejerce labores de consultoría, ni posee acciones, ni recibe financiación de ninguna compañía u organización que pueda obtener beneficio de este artículo, y ha declarado carecer de vínculos relevantes más allá del cargo académico citado.</span></em></p>
De nombreux fromages doivent leurs saveurs aux moisissures. Pourquoi les consomme-t-on, alors qu’on évite de manger des aliments moisis ? Sont-ils tous sûrs, ou faut-il parfois se méfier ?
Teresa María López Díaz, Profesora de Universidad, Doctora en Veterinaria, Facultad de Veterinaria, Universidad de León, Universidad de León
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tag:theconversation.com,2011:article/153913
2021-02-01T19:39:59Z
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Manger, boire… et vomir dans la Rome antique
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/380504/original/file-20210125-21-12jjvji.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=36%2C45%2C6004%2C3559&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Thomas Couture, *Les Romains de la décadence*, 1847, Paris, Musée d’Orsay.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/a6/THOMAS_COUTURE_-_Los_Romanos_de_la_Decadencia_%28Museo_de_Orsay%2C_1847._%C3%93leo_sobre_lienzo%2C_472_x_772_cm%29.jpg">Wikipedia</a></span></figcaption></figure><p>Dans un essai très original, <em>L’Empire romain par le menu</em> (2018), Dimitri Tilloi d’Ambrosi, chercheur en histoire romaine, <a href="https://www.arkhe-editions.com/magazine/le-mythe-de-lorgie-romaine/">nous convie à la table des Romains</a>.</p>
<p>Il mène un examen critique de toutes les sources antiques disponibles sur le sujet : textes littéraires à manier avec précaution ; fresques montrant des banquets et des victuailles ; précieuses données fournies par l’archéologie sur le régime alimentaire des populations de l’Empire.</p>
<p>Cette riche étude permet de faire la part entre la réalité historique et les fantasmes souvent associés à l’orgie romaine, cette prétendue débauche de nourriture, popularisée <a href="https://www.npcmagazine.it/satyricon-la-cena-di-trimalcione-secondo-fellini/">par le film <em>Fellini Satyricon</em> en 1969</a> et par la bande dessinée <em>Astérix chez les Helvètes</em>.</p>
<h2>Les orgies romaines : mythe ou réalité ?</h2>
<p>Il ne fait aucun doute que de somptueux festins aient été organisés à Rome par certains empereurs, comme Caligula, Claude, Néron et Vitellius ; ou encore, plus tard, Elagabal. Mais les textes antiques les évoquent toujours dans un but moral : il s’agit, notamment pour des auteurs comme Suétone et Tacite, de condamner des excès de gloutonnerie et de luxe vus comme indécents.</p>
<p>Selon l’idéal romain, un bon chef doit savoir contrôler son corps, qu’il s’agisse de désirs alimentaires ou sexuels. Les « mauvais » empereurs ont d’ailleurs une fâcheuse tendance à associer ces deux plaisirs charnels. Selon Suétone, au cours de ses dîners, Caligula faisait l’amour avec les femmes de ses invités, ou encore avec ses propres sœurs, au milieu des plats et « devant tout le monde » (Suétone, <em>Caligula</em>, 24 et 36). Néron, lui, se faisait servir en public par des courtisanes et des joueuses de flûte dont on imagine que la fonction n’était pas uniquement de jouer de leur instrument (Suétone, <em>Néron</em>, 27).</p>
<p>Mais si ces « débauches » sont évoquées avec tant d’insistance, c’est justement par ce qu’elles ne constituaient pas la norme dans le monde romain. Les orgies impériales, toujours dénoncées, et sous certains empereurs seulement, ne concernaient qu’une part infime de la population. Il ne s’agissait donc nullement d’une « tradition » <a href="https://antiquipop.hypotheses.org/2593">propre à la société romaine dans son ensemble</a>.</p>
<p>Il en est de même du vomissement qu’on associe souvent à ces festins. Les médecins avaient coutume d’enfoncer une plume dans le gosier des convives qui souffraient d’indigestion. Mais, « cette pratique reste limitée aux individus de haut rang et cantonnée à quelques exemples rapportés par les sources », précise Dimitri Tilloi d’Ambrosi.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/380516/original/file-20210125-21-p8c0co.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/380516/original/file-20210125-21-p8c0co.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/380516/original/file-20210125-21-p8c0co.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/380516/original/file-20210125-21-p8c0co.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/380516/original/file-20210125-21-p8c0co.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/380516/original/file-20210125-21-p8c0co.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/380516/original/file-20210125-21-p8c0co.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Goscinny et Uderzo, <em>Astérix chez les Helvètes</em>, 1970.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.letournepage.com/livre/asterix-chez-les-helvetes/">Le tourne page</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>L’Empire frugal</h2>
<p>C’est au contraire la simplicité alimentaire, voire la frugalité, qui caractérisait l’Empire romain. L’immense majorité de la population se nourrissait surtout de légumes et de céréales, sous la forme de bouillies et de galettes ; ou encore de fruits : figues, pêches, raisins… C’était donc un régime très végétal qui prédominait. Les soldats, privilégiés par rapport à la moyenne, y ajoutaient de la viande séchée.</p>
<p>Le vin était très répandu. C’était une boisson épaisse que l’on mélangeait avec de l’eau, parfois chaude. On y mettait aussi volontiers du poivre ou du miel. La <em>posca</em>, très populaire, avait un goût de vinaigre.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/380518/original/file-20210125-19-1jyqp7n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/380518/original/file-20210125-19-1jyqp7n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/380518/original/file-20210125-19-1jyqp7n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/380518/original/file-20210125-19-1jyqp7n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/380518/original/file-20210125-19-1jyqp7n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/380518/original/file-20210125-19-1jyqp7n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/380518/original/file-20210125-19-1jyqp7n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"><em>Fellini Satyricon</em>, 1969.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Des riches qui ne mangent pas seulement pour se nourrir</h2>
<p>Seule une minorité de riches consommaient avec ostentation, non par goût des aliments, mais d’abord pour affirmer leur appartenance à l’élite. En bon historien du « fait alimentaire », Dimitri Tilloi d’Ambrosi est parfaitement conscient des enjeux autres que nutritifs que représente la nourriture. « L’alimentation, écrit-il, permet aussi de mieux saisir les mentalités de l’époque, en particulier celles des membres les plus aisés de la société ».</p>
<p>Manger n’est pas un acte anodin : le repas s’inscrit dans un cadre social codifié. « Outre l’aliment, ajoute Dimitri Tilloi d’Ambrosi, le mangeur consomme aussi du symbole, construit autour d’une hiérarchie normée. Un aliment n’est pas bon uniquement pour ses critères gustatifs, mais aussi pour ce qu’il révèle sur l’identité du consommateur ».</p>
<p>La littérature latine nous offre un magnifique exemple de cette stratégie de distinction, à travers le personnage de Trimalcion dans le <em>Satyricon</em>, roman satirique attribué à Pétrone. Trimalcion, ancien esclave affranchi, figure du nouveau riche, adopte avec boulimie tous les codes de la haute société romaine. Il organise de <a href="https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1961_num_16_2_420704">somptueux festins pour affirmer son rang et épater ses convives</a>.</p>
<p>Ainsi, le dîner s’insère dans un esprit de compétition entre membres de l’élite. C’est à qui dépensera le plus d’argent et offrira les mets les plus inattendus ou exotiques. Les textes antiques évoquent des plats étonnants : crêtes de coqs, langues de paons, têtes de perroquets, vulves de truie, langues ou cervelles de flamants roses… Mais l’aliment le prestigieux au I<sup>er</sup> siècle apr. J.-C. était sans conteste le surmulet (ou rouget-barbet), un poisson dont le prix pouvait atteindre plusieurs milliers de sesterces.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/380514/original/file-20210125-17-1gx1wxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/380514/original/file-20210125-17-1gx1wxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/380514/original/file-20210125-17-1gx1wxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/380514/original/file-20210125-17-1gx1wxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/380514/original/file-20210125-17-1gx1wxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/380514/original/file-20210125-17-1gx1wxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/380514/original/file-20210125-17-1gx1wxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Poissons, mosaïque romaine de Lod, Israël.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/6/60/Detail_of_the_Lod_Mosaic%2C_fish_%28perch%3F%29_and_moray_eel%2C_mosaic_believed_to_belong_to_a_large_and_well-appointed_Roman_house_and_is_dated_to_about_A.D._300%2C_found_in_Lod%2C_Israel_%2813670638265%29.jpg">Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Du marché jusqu’aux latrines</h2>
<p>Dimitri Tilloi d’Ambrosi a conçu son livre comme un parcours culinaire en trois étapes qu’il a intitulées : « Préparer », « Manger » et « Digérer ». Il nous guide d’abord à travers les étals des marchés de Rome où le client pouvait faire l’acquisition de fruits, légumes, viandes, poissons et fruits de mer. On pouvait aussi s’y procurer le fameux <em>garum</em>, sauce à base de poisson macéré (un peu comme le nuoc-mâm), qui donnait aux plats une saveur aigre-douce.</p>
<p>Le chercheur nous entraîne ensuite en cuisine. Les recettes romaines nous sont connues grâce au livre d’Apicius, <em>L’Art culinaire</em> (<em>De re coquinaria</em>). Mais nous savons malheureusement peu de choses sur la vie de ce grand cuisinier qui vécut au I<sup>er</sup> siècle apr. J.-C., sous l’empereur Tibère. On raconte qu’il se suicida lorsqu’il découvrit <a href="http://latogeetleglaive.blogspot.com/2016/05/apicius-masterchef-de-la-rome-antique.html">qu’il n’avait plus assez d’argent pour organiser de nouveaux banquets</a>.</p>
<p>Les Romains se mettaient à table trois fois par jour. D’abord pour un petit-déjeuner très simple, puis un déjeuner rapide et, enfin, pour le dîner ou <em>cena</em>, principal repas de la journée. La <em>cena</em> était constituée d’une entrée, d’un plat principal et d’un dessert, successivement servis, du moins pour les plus riches, dans le triclinium, salle à manger où hommes et femmes dînaient ensemble, étendus sur des lits disposés autour d’une table basse.</p>
<p>Ces repas en position couchée étaient assez salissants. On mangeait avec les doigts, sauf les œufs pour lesquels on disposait de cuillères. Des aliments atterrissaient sur les mosaïques qui ornaient le triclinium. Souvent, les convives jetaient volontairement au sol les os, coquilles de mollusques, ou arêtes de poisson qu’ils venaient de retirer de leur bouche. Un geste vu comme propitiatoire. Les restes de nourriture tombés au sol étaient considérés comme une offrande faite aux morts.</p>
<p>Le parcours proposé par Dimitri Tilloi d’Ambrosi se termine logiquement aux latrines, les WC des Romains, bien identifiées sur plusieurs sites archéologiques. L’étude des coprolithes, c’est-à-dire des restes d’excréments minéralisés, retrouvés par les fouilleurs, a révélé la mauvaise hygiène des Romains qui ne se lavaient guère les mains avant de tremper leurs doigts dans les plats. En témoigne la présence <a href="http://www.slate.fr/story/112525/thermes-romains-hygiene-publique">très fréquente de vers intestinaux dans leurs déjections</a>.</p>
<p>Mais que ces parasites ne vous empêchent pas de consommer sans modération le livre succulent et croustillant de Dimitri Tilloi d’Ambrosi !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153913/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian-Georges Schwentzel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Voyage temporel à la table des Romains, à travers l’essai de Dimitri Tilloi d’Ambrosi.
Christian-Georges Schwentzel, Professeur d'histoire ancienne, Université de Lorraine
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/152802
2021-01-24T17:23:43Z
2021-01-24T17:23:43Z
Alimentation : comment consommer du soja sans risques pour la santé
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/378111/original/file-20210111-21-kpj2a9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Graines de soja</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/soja-haricots-alimentaire-c%C3%A9r%C3%A9ales-182295/">© Jing / Pixabay </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Riche en protéines, en fibres et en acides gras oméga-6 et oméga-3, le soja est une légumineuse de grand intérêt nutritionnel. </p>
<p>Mais pour tirer parti des nutriments de cette plante, il faut limiter les risques pour la santé de certains de ses composés, notamment ceux du aux <a href="https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/064000580.pdf#page=13">phytoestrogènes</a>, des analogues d’hormones sexuelles féminines.</p>
<h2>Comestible après cuisson</h2>
<p>Pour résister à ses prédateurs herbivores, le soja a développé tout un arsenal de composés antinutritionnels (interférant avec l’absorption des nutriments), voire toxiques. Résultat : il n’est du reste que très peu attaqué par les rongeurs lors de son stockage, mais ces molécules ont réduit son intérêt à l’état cru : .</p>
<p>En Chine, où le soja est utilisé depuis au moins 4 000 ans dans les rotations des cultures, pour enrichir les sols en azote, on a cherché à le consommer en s’appuyant sur divers procédés – dont la cuisson et le trempage.</p>
<p>La chaleur de la cuisson détruit ou désactive en effet les inhibiteurs des protéases (qui réduisent la digestibilité des protéines), les hémagglutinines (qui font coaguler le sang), les lipoxygénases (qui oxydent les acides gras polyinsaturés), les saponines (qui altèrent les membranes cellulaires), les tannins (qui freinent l’absorption des minéraux et la digestion des protéines), etc.</p>
<p>Reste deux problèmes : celui des allergènes du soja (comme la <a href="https://biochim-agro.univ-lille.fr/proteines/co/ch2_II_b.html">glycinine</a> ou la β-conglycinine), et celui des <a href="https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/064000580.pdf#page=16">isoflavones</a> – des substances que l’on classe parmi les phytoestrogènes. Le premier n’a pas vraiment de parade. Mais le second peut-être résolu <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02458900/document">par le trempage et la cuisson prolongée des recettes asiatiques traditionnelles</a> – les isoflavones, solubles dans l’eau, sont ainsi éliminées pour une grande part. </p>
<p>En revanche, les procédés de transformation utilisés par l’industrie agroalimentaire depuis les années 1960, qui réduisent parfois la cuisson à quelques dizaines de secondes sous un jet de vapeur, n’éliminent pas les isoflavones. Or, celles-ci ont une activité biologique.</p>
<h2>Des composés qui perturbent la fertilité</h2>
<p>L’activité hormonale des isoflavones présentes dans le soja est avérée depuis les années 1940 en Australie. Ainsi des brebis que l’on faisait paître sur des champs de trèfle rouge ou souterrain (riches en isoflavones) <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21028682/">développaient un syndrome d’infertilité</a>. Le phénomène était spectaculaire. En l’espace de trois à quatre saisons sur ces pâtures, la fertilité des animaux s’effondrait. Il fut alors mis fin à un nombre important d’élevages. </p>
<p>Il fallut attendre la fin des années 1950 pour que des études vétérinaires expliquent enfin le syndrome des brebis : les isoflavones perturbent plusieurs mécanismes endocriniens, et notamment la sécrétion de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hormone_folliculo-stimulante">FSH</a> et de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hormone_lut%C3%A9inisante">LH</a>, des hormones de l’hypophyse contrôlant la reproduction.</p>
<p>Dans les années 1990, l’impact chez l’être humain finit par être envisagé. À l’époque, on considèrait les effets du soja sous un angle positif, en imaginant qu’il pourrait limiter la sécrétion d’estradiol et peut-être réduire le risque de cancer du sein. On a alors constaté, sur un petit nombre de jeunes femmes britanniques, que la consommation quotidienne de 60 g de soja (soit 45 mg d’isoflavones pendant un mois) peut allonger le cycle menstruel de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/8074062/">28 à 30 jours en réduisant la production de FSH et LH</a>.</p>
<p>Quelques années plus tard, une <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/11216491/">étude d’intervention menée avec 40 jeunes étudiantes japonaises</a> aboutit à des conclusions similaires : une consommation quotidienne de 20 à 40 mg d’isoflavones s’est traduite par des cycles menstruels plus irréguliers et plus longs que ceux des femmes occidentales (30 jours versus 28). En ajoutant à leur alimentation du jus de soja contenant 50 mg d’isoflavones, ledit cycle pouvait atteindre 32 jours.</p>
<p>Des travaux à mettre en perspective avec ceux d’une équipe américaine qui avait noté, dans les années 1970, que <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/167146/">60 % des plantes traditionnellement utilisées en occident pour leurs vertus contraceptives sont riches en isoflavones</a>.</p>
<h2>Premières recommandations</h2>
<p>En 2005, répondant à une auto-saisine et à une saisine de la direction de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (aujourd’hui ANSES) se prononce sur la <a href="https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/064000580.pdf">sécurité et les bénéfices des phytoestrogènes apportés par l’alimentation</a>.</p>
<p>Son rapport préconise de ne pas utiliser les formules infantiles à base de soja contenant de fortes quantités de phytoestrogènes. Il déconseille par ailleurs aux femmes enceintes, tout comme à celles ayant des antécédents personnels ou familiaux de cancers du sein, de consommer du soja. Enfin, il est demandé aux industriels d’indiquer les teneurs en isoflavones sur leurs produits, et recommandé de ne pas dépasser 1 mg/kg/jour.</p>
<p>Trois ans plus tard, le National Toxicology Program Américain, qui fait autorité au plan mondial, mettait en avant chez le rongeur la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/18685713/">toxicité de la génistéine</a>, principale isoflavone du soja, sur la reproduction. En soumettant quatre générations de rats à différentes doses de génistéine, cette étude révélait qu’une dose de 35 mg/kg/j provoquait des retards de croissance et l’apparition de malformations génitales chez les jeunes, tout en perturbant les cycles des femelles et en provoquant une baisse de la fertilité pour la deuxième génération exposée.</p>
<p>Problème : cette dose se traduit, chez les animaux, par des taux sanguins comparables à ceux d’un consommateur régulier de soja (deux portions quotidiennes d’aliments industriels à base de soja). Or en pratique, selon les règles qui permettent d’élaborer les <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/SUBSTANCES2017SA0016Ra.pdf">limites à ne pas dépasser chez l’humain</a>), la valeur toxique de référence doit être cent fois moins élevée que la dose active chez le rongeur (35 mg/kg/jour) : on ne devrait donc pas consommer plus de 0,35 mg/kg/jour (un steak de soja pour un adulte de 60 kg, un demi pour un enfant de 30 kg).</p>
<h2>Qu’observe-t-on en population ?</h2>
<p>Aujourd’hui, il semble que dans les pays asiatiques industrialisés, la <a href="https://www.indexmundi.com/g/r.aspx?v=31">fertilité est malmenée</a>. Ces populations consomment depuis toujours du soja, mais suite à la généralisation des aliments transformés, elles sont exposées depuis deux générations, de façon régulière, à d’importantes quantités d’isoflavones. Le problème est que l’on ne dispose pas de populations témoins pour réellement relier l’exposition aux isoflavones aux problèmes de fertilité.</p>
<p>Pas moins de cinq études ont cependant révélé l’existence <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/18650557/">d’une corrélation</a> entre les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26423741/">fortes teneurs en isoflavones</a> des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21958682/">fluides biologiques</a> et <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23820060/">l’altération</a> de la quantité et de la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31128434/">qualité du sperme chez l’homme</a>. Aucune ne permet d’exclure des effets synergiques entre les phytoestrogènes et d’autres perturbateurs endocriniens de l’environnement. Mais ces derniers étant présents partout, ces études restent pertinentes.</p>
<p>Côté femmes, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/18396257/">trois cas cliniques de surconsommation de soja</a> ont été rapportés en 2008, avec des fibromes utérins, de l’endométriose, et pour celles qui étaient sous pilule contraceptive, un traitement perturbé. Tout est rentré dans l’ordre à l’arrêt du soja. Voilà sept ans, une <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24741329/">étude menée auprès de 11 688 Américaines</a> a montré qu’une consommation de 50 mg/jour d’isoflavones diminue la probabilité de donner naissance à un enfant. Des données <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26082480/">confortées l’année suivante</a> par le suivi d’un plus petit nombre de femmes. Il est alors observé un défaut de la phase lutéale, augmentant le risque de fausse couche, quand l’apport d’isoflavones s’accroit.</p>
<h2>Qu’en est-il des enfants ?</h2>
<p>S’agissant des enfants, et plus particulièrement des tout petits, on manque de données pour se prononcer. Si plusieurs équipes scientifiques se sont inquiétées des conséquences d’une alimentation à base de soja dans les premiers mois de vie, leurs résultats ne sont pas toujours probants.</p>
<p>Chez les petits garçons, il a par exemple été constaté une <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19846109/">diminution du volume des testicules</a> après qu’ils aient été nourris par du lait à base de soja plutôt que par du lait maternel. Mais c’était aussi le cas à la suite d’une alimentation infantile à base de lait de vache.</p>
<p>Chez les petites filles, il a été noté un <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21813368/">comportement de jeu</a> « moins féminin », mais aussi des différences dans la maturation des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29506126/">cellules vaginales et dans le volume utérin</a>. Enfin, trois études américaines font état de <a href="https://academic.oup.com/humrep/article/34/1/148/5146638">règles plus douloureuses</a>, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/11497534/">plus longues</a> et anarchiques, mais aussi d’éventuels <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26565393/">fibromes de taille plus importante</a>, chez ces petites filles devenues femmes.</p>
<h2>Quelques conseils pour réduire les doses</h2>
<p>Si les plantes produisent des phytoestrogènes, c’est avant tout pour <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/62660/">limiter la reproduction de leurs prédateurs</a>. La présence dans l’alimentation humaine de ces composés, qui ressemblent à la principale hormone sexuelle féminine - l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Estradiol">estradiol</a>, n’est donc pas anodine.</p>
<p>Chez les jeunes femmes, les estrogènes sont utilisés à des fins contraceptives. Au moment de la ménopause, à condition que soit exclu tout risque de cancer du sein ou de l’utérus, ils permettent aussi de réduire les bouffées de chaleur et la perte osseuse. Toutefois, en pratique, ces hormones ou leurs analogues pharmaceutiques sont délivrés sur prescription médicale et ne sont pas laissés à la disposition de tous. Ce qui n’est pas le cas des phytoestrogènes…</p>
<p>Dans les faits, à travers une enquête de consommation conduite auprès de 270 femmes, et doublée de l’analyse des sources d’isoflavones dans l’offre alimentaire française, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31569435/">notre équipe a récemment conclu que 12 % des consommatrices de soja</a> avaient un apport d’isoflavones dépassant 50 mg par jour, et donc susceptible d’allonger la durée des cycles menstruels. Dans ces conditions, nous estimons qu’il est prudent de revenir aux préparations traditionnelles du soja, pour limiter les risques et profiter de ses bienfaits.</p>
<p>Concrètement, avant de consommer des graines de soja, il s’agit de les faire tremper dans une première eau, puis de les blanchir en commençant la cuisson dans de l’eau froide, et enfin de jeter cette deuxième eau. On le fait d’ailleurs, pour toutes sortes d’autres graines (haricots, pois chiches…).</p>
<p>À ce propos, notons que certains industriels de l’agroalimentaire proposent déjà des produits à teneur réduite en isoflavones, qui conservent de bonnes qualités nutritionnelles et gustatives. Et l’on ne peut qu’encourager la consommation de ces nouveaux aliments, qui permettent de s’affranchir des limites imposées aux autres préparations.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152802/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Catherine BENNETAU-PELISSERO a reçu des financements de la Région Nouvelle Aquitaine</span></em></p>
Parce qu’il renferme des composés homologues aux hormones sexuelles féminines, le soja ne doit pas être consommé à la légère. Mais à la juste dose, on peut tirer parti de tous ses bienfaits.
Catherine Bennetau-Pelissero, Professeur Physiologiste, endocrinologiste de la reproduction, pertubateurs endocrinien, nutrition, Université de Bordeaux
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/152024
2020-12-23T20:18:30Z
2020-12-23T20:18:30Z
En cuisine : comprendre pour réussir, ou comment obtenir le soufflé parfait
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/376516/original/file-20201223-19-1w9nup4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=18%2C6%2C2026%2C1526&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Découvrez comment, enfin, réussir vos soufflés.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Souffl%C3%A9_with_Green_Tea_Ice_Cream.jpg">Ceeseven / Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Accepterions-nous vraiment de partir pour un voyage dont nous ignorerions la destination, et sans savoir à l’avance de quoi nous avons besoin et quel moyen de transport nous devons emprunter ? Vers où diriger nos pas ? Irions-nous à pied, en vélo, en avion ? La <em>cuisine</em>, au sens de la préparation des mets, jusqu’à présent, nous met pourtant dans une telle position. Pas étonnant qu’il y ait des ratés… sans compter que la personne qui nous donne des indications les unes après les autres n’a pas toujours la connaissance des effets des gestes qu’elle prescrit de faire.</p>
<p>En matière d’enseignement culinaire, aussi, on en est resté à de l’enseignement par « reproduction », au lieu d’un enseignement par compréhension… D’ailleurs, comment choisir ce qu’il faut reproduire, quand on voit quelqu’un cuisiner ? Quels gestes sont essentiels, et quels gestes sont personnels, idiosyncratiques ?</p>
<p>Sans compter, enfin, que les prescriptions classiques sont… « fragiles ». C’est d’ailleurs ainsi que j’ai commencé mes travaux, le 16 mars 1980, alors que je faisais un soufflé au roquefort, avec une « fiche recette » : il était écrit d’ajouter les jaunes d’œufs deux par deux dans la préparation à base de béchamel et de fromage qui était initialement préparée. J’ai eu l’occasion de voir que cette « précision culinaire » était insensée, alors qu’elle figurait dans les livres de cuisine depuis plus d’un siècle ! Car, en réalité, ce n’est pas cela la question ; peu importe que les jaunes d’œufs soient ajoutés un par un, ou deux par deux, ou tous ensemble ! La seule chose importante, en l’occurrence, c’est que les jaunes d’œufs soient mis dans la béchamel au fromage quand cette dernière est à moins de 60 °C, afin que les jaunes ne soient pas coagulés (« cuits ») à cette étape !</p>
<h2>Le soufflé à la vanille</h2>
<p>Mais examinons une recette de soufflé à la vanille (pour un dessert festif), pour ceux qui en ont besoin. L’objectif, tout d’abord, c’est de faire une préparation qui gonfle beaucoup à la cuisson, et qui ne tient que jusqu’au moment du service. Car, soit dit en passant, une préparation qui resterait gonflée serait un gâteau, et pas un soufflé.</p>
<p>Pour obtenir un soufflé, donc, il y une façon classique de faire, qui consiste à faire une préparation pâteuse, salée ou sucrée selon les cas, qui contient des jaunes d’œufs (non coagulés, comme on l’a vu), et à laquelle on ajoute des blancs d’œufs battus en neige. Le mélange des deux préparations est versé dans un ramequin beurré et fariné (pour les soufflés salés) ou sucré (pour les soufflés sucrés).</p>
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<figcaption><span class="caption">Recette traditionnelle de soufflé à la vanille. M. Patisserie.</span></figcaption>
</figure>
<p>Ici, pour notre soufflé à la vanille, partons donc d’une préparation intermédiaire entre une crème anglaise et une crème pâtissière : la crème anglaise est obtenue par cuisson d’un mélange de lait, de jaunes d’œufs et de sucre (elle épaissit en cuisant), tandis que la crème pâtissière est le même type de préparation, mais avec de la farine. Ici, il est sans doute préférable d’utiliser une quantité de farine intermédiaire entre rien et la quantité de la crème pâtissière.</p>
<p>Cette crème anglaise « batarde » (on nomme ainsi les sauces détournées par la farine) étant faite, et refroidie, on y ajoute donc des jaunes d’œufs, tandis que l’on bat les blancs en neige d’autant plus ferme que l’on a ajouté du sucre pendant le battage, après qu’ils sont montés. Puis on mélange les deux préparations, et on met l’ensemble dans un moule beurre et sucré, et l’on enfourne au four préchauffé à 180 °C pendant un temps qui dépend de la taille du soufflé (disons 20 minutes pour un petit soufflé, et jusqu’à 45 minutes pour un gros soufflé).</p>
<h2>Ce que l’on ne vous a pas dit</h2>
<p>Jusque ici, nous n’avons vu que le principe du soufflé, mais nous n’avons pas considéré les détails de la préparation. Par exemple :</p>
<ul>
<li><p>Pour obtenir une bonne crème à la vanille, il faudra… de la vanille ! Cela peut être une gousse que l’on ouvre en deux et dont on gratte l’intérieur pour le faire tomber dans du lait chaud, où la matière solide infusera, mais cela peut-être, plus simplement, un dé à coudre de « vanille liquide » (une solution de vanilline, souvent avec du sucre et du caramel) !</p></li>
<li><p>Pour avoir une belle crème anglaise, il est bon de commencer par fouetter les jaunes d’œufs avec le sucre (tant pour tant), jusqu’à ce que le mélange blanchisse : en effet, ce battage fait comme un « jaune en neige », tandis que le sucre se dissout dans l’eau qui est apportée par les jaunes d’œufs (un jaune, c’est 50 pour cent d’eau).</p></li>
<li><p>Pour obtenir ce blanchissement des jaunes, il est bon de ne pas stocker les jaunes avec le sucre sans battre, car les protéines du jaune seraient alors coagulées autour des cristaux de sucre, qui deviendraient plus difficiles à dissoudre.</p></li>
<li><p>Nous n’avons pas dit, surtout, comment cuire ! Or c’est cela qui est essentiel, car, quand j’ai commencé mes travaux, en 1980, il y avait des cuisiniers triplement étoilés qui prétendaient qu’il fallait des blancs en neige bien fermes pour avoir des soufflés bien gonflés, tandis que d’autres, également triplement étoilés, prétendaient qu’il fallait des blancs pas fermes. En réalité, les expérimentations ont établi que tout cela n’a pas beaucoup d’importance ; le premier facteur est de cuire par le fond, par exemple en plaçant le ramequin sur la « sole » du four (la partie inférieure, que l’on doit chauffer).</p></li>
</ul>
<h2>Pourquoi les soufflés gonflent-ils ?</h2>
<p>On voit, dans la longue description précédente, qu’il y a lieu de bien rénover la technique culinaire, et cela a été – et reste – une des applications de la « gastronomie moléculaire ».</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/v4lRGKRbcBY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le soufflé d’Hervé This. MOOC factory by CRI.</span></figcaption>
</figure>
<p>Oui, je parle bien de « gastronomie moléculaire », à savoir cette discipline scientifique qui cherche les mécanismes des phénomènes, à bien distinguer de la « cuisine moléculaire », laquelle est de la cuisine rénovée techniquement. D’ailleurs, pour les soufflés, nous n’avons pas tout expliqué, parce que cela serait bien long, et je propose que nous nous limitions à la cuisson par le fond.</p>
<p>Dans les années 1980, quand j’ai commencé mes études de gastronomie moléculaire, il était indiqué que les soufflés auraient gonflés parce que les bulles d’air des blancs en neige auraient été dilatées par la chaleur. Oui, les bulles d’air se dilatent à la chaleur, lors de la cuisson, mais cela ne produit un gonflement que de 20 pour cent, alors que les cuisiniers font du 200 ou du 300 pour cent !</p>
<p>Une de mes premières découvertes a été le fait que les soufflés gonflent en réalité parce qu’une partie de l’eau de la préparation s’évapore : or 1 gramme d’eau qui s’évapore fait 1,5 litre de vapeur, et un petit soufflé de 100 grammes perd jusqu’à 10 grammes ! Cela dit, on comprend alors – et alors seulement – que c’est au fond du récipient que cette évaporation doit avoir lieu : la vapeur formée au fond pousse les couches du soufflé vers le haut. Alors que si l’on chauffait par dessus, la vapeur formée serait perdue en pure perte !</p>
<p>Ajoutons qu’il y a maintenant ce que le cuisinier mondialement connu Pierre Gagnaire nomme les « règles de Hervé pour la cuisson des soufflés » :</p>
<ul>
<li><p>Faire des blancs fermes (la vapeur formée aura plus de mal à s’échapper)</p></li>
<li><p>Si possible utiliser un récipient de cuisson métallique (afin que le contact avec le four soit meilleur, et que, surtout pour le fond, la chaleur puisse rapidement évaporer l’eau, avant que la masse du soufflé ne coagule)</p></li>
<li><p>Commencer la cuisson en faisant rapidement une croûte sur le dessus (ainsi, la vapeur s’échappera plus difficilement)</p></li>
<li><p>Cuire par le fond, pour la raison exposée précédemment.</p></li>
</ul>
<h2>Des séminaires de gastronomie moléculaire</h2>
<p>Terminons en signalant que, lors d’un des séminaires de gastronomie moléculaire que nous organisons, nous avons fait encore mieux que ce que les cuisiniers imaginaient…</p>
<p>Mais il faut d’abord présenter ces séminaires : ce sont des rencontres publiques et gratuites, qui se tiennent chaque mois depuis vingt ans, au Lycée hôtelier Guillaume Tirel, à Paris. Et ceux qui ne peuvent y assister peuvent recevoir gratuitement les comptes rendus, en les demandant à icmg@agroparistech.fr.</p>
<p>Dans ces séminaires, chaque mois donc, nous testons expérimentalement des précisions culinaires, en partant de ce qui est écrit dans les livres de cuisine, ou les manuels, ou les déclarations des cuisiniers : est-il vrai que les haricots blancs se fissurent moins à la cuisson quand on les a fait tremper ? Non. Est-il vrai que des bouchons de liège dans l’eau de cuisson des poulpes rendent ces derniers plus tendres ? Non ! Est-il vrai que le flambage rende le cognac ou le vin moins acide ? Non, et c’est même le contraire pour le cognac. Combien de temps faut-il ébouillanter des tomates pour enlever facilement leur peau : 5 secondes, ou 10 secondes, ou 15 secondes, ou 20 secondes, ou 25, secondes, ou 30 secondes ? On a entendu de tout, mais finalement, c’est un temps de 20 secondes qui donne le meilleur résultat, et quelles que soient les tomates que nous avons utilisées !</p>
<p>Arrêtons-là cette liste qui comporte environ 200 entrées, et revenons au soufflé, testé dans un séminaire : j’ai cuit un soufflé sans même battre les blancs en neige, mais en chauffant très spécifiquement par le fond… et il a gonflé autant que le même soufflé avec blancs battus en neige ! Les professionnels qui étaient présents n’en croyaient pas leurs yeux, alors qu’ils avaient eux-mêmes préparé les soufflés, et je me souviens très bien de celui qui était assis derrière moi dans l’amphithéâtre et qui répétait : « Ce n’est pas possible, ce n’est pas possible… ».</p>
<p>Oui, il y lieu de contribuer à faire évoluer la technique culinaire, en la débarrassant de toutes les scories de son développement ! Et cela passe par des tests, par des questionnements, au lieu de supporter l’enseignement par reproduction qui a été évoqué précédemment. Il y a lieu de ne pas céder à l’argument d’autorité des chefs étoilés ou pas. Ces derniers, d’ailleurs, ont reçu une formation empirique, et leur compétence est plus artistique (le bon, c’est le beau à manger) que technique. Faisons comme pour les grands ouvrages civils : confions le dessin des ponts à des architectes qui sont des artistes, mais confions la solidité des ouvrages à des ingénieurs qui connaissent la résistance des matériaux (et d’ailleurs, évitons de laisser entre les mains des ingénieurs les dessins, ou entre les mains des artistes la solidité !).</p>
<p>Bref, la gastronomie moléculaire a encore beaucoup à faire : j’ai dans mes dossiers 25 000 précisions culinaires, rien que pour la cuisine française ! Les questions sont innombrables, et il faudra le concours de tous, dans un esprit de recherche, pour arriver à les explorer.</p>
<p>Pour autant, la cuisine ne deviendra jamais scientifique, contrairement à ce que le cuisinier Auguste Escoffier a écrit, de façon tout à fait insensée. Car la cuisine est une technique, doublée d’une composante artistique, et elle le restera : la cuisine doit produire des mets, ce qui est précisément un travail technique + artistique.</p>
<p>La science, elle, – disons plus justement les sciences de la nature – doit plutôt chercher les mécanismes des phénomènes ; et elle fait avec la méthode suivante :</p>
<ul>
<li><p>identifier un phénomène (et rien de pire que de chercher les mécanismes de phénomènes si ceux-ci n’existent pas, d’où les études expérimentales des séminaires de gastronomie moléculaire) ;</p></li>
<li><p>le caractériser quantitativement : la mesure de nombreux aspects du phénomène produit des nombres, des résultats de mesures ;</p></li>
<li><p>réunir ces résultats de mesures en équations, nommées des « lois » ;</p></li>
<li><p>réunir des lois et introduire des concepts nouveaux pour produire une « théorie » (ou « modèle ») qui, en quelque sorte, donne les mécanismes du phénomène ;</p></li>
<li><p>chercher des conséquences de la théorie ;</p></li>
<li><p>et tester expérimentalement ces conséquences théoriques, surtout en vue de réfuter la théorie (ce qui permettra de l’améliorer).</p></li>
</ul>
<p>On voit bien que cette méthode n’a rien à voir avec la cuisine, et que la cuisine, production de mets, de plats, ne fera jamais ce travail… qui, en revanche, est celui de la gastronomie moléculaire.</p>
<p>Évitons donc des expressions comme « science culinaire » (sauf si l’on parle du savoir des cuisiniers) ; évitons de confondre sciences de la nature et cuisine ; évitons de confondre technique, technologie et sciences de la nature. Ne confondons pas gastronomie moléculaire (de la science de la nature, notamment de la physico-chimie) et cuisine moléculaire (de la cuisine).</p>
<p>Surtout, bien plus positivement, disons que la cuisine moléculaire a été un immense renouveau artistique… qui est aujourd’hui dépassé par la « cuisine note à note » (une autre histoire, que je n’ai pas la place d’expliquer ici, même si c’est la cuisine du futur), tandis que la gastronomie moléculaire, elle, ne cesse de se développer depuis 1980, et ne cessera de le faire : nous en sommes à 34 laboratoires dans des universités du monde entier… et la publication d’un <em>Handbook of molecular gastronomy</em>, qui paraît en avril prochain !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152024/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hervé This, vo Kientza ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Initiez-vous à la gastronomie moléculaire, pour comprendre les processus chimiques derrière vos plats préférés, et ne plus jamais les rater.
Hervé This, vo Kientza, Physico-chimiste Inra, directeur du Centre international de gastronomie moléculaire AgroParisTech-Inra, AgroParisTech – Université Paris-Saclay
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/152047
2020-12-18T14:53:44Z
2020-12-18T14:53:44Z
Mangerez-vous de la tourtine à Noël ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/375837/original/file-20201218-21-nhmcv9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4757%2C2667&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">poutinetort</span> </figcaption></figure><p>J’ai vu récemment une invention culinaire qui m’a laissée songeuse, la <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1756235/restaurant-pate-viande-patates-saguenay">tourtine</a>. Le plat, comme son nom l’indique, est un hybride de tourtière et de poutine. Du fromage en grains et de la sauce typiques de la poutine sont ajoutés à la garniture de la tourtière, en plus d’ingrédients festifs comme la viande effilochée et l’incontournable foie gras.</p>
<p>La tourtine connaît un succès tel que ses créateurs, les propriétaires du restaurant Baron BBQ, à Saint-Ambroise au Saguenay, ont été dépassés par la demande. Ils <a href="https://www.tvanouvelles.ca/2020/12/11/la-folie-de-la-tourtine-sempare-des-quebecois">ont dû réorienter toute leur production et ont doublé leur personnel</a>.</p>
<p>Au-delà du <em>buzz</em> marketing (que l’on souhaite à tous les acteurs de la restauration en ces temps de crise), le phénomène demande à être interprété. Le plat, proposé juste au moment des fêtes de fin d’année, semble réinventer deux de nos classiques culinaires. Comment comprendre cette réinvention, quel rapport traduit-elle au patrimoine gastronomique québécois ?</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/en-temps-de-pandemie-voici-ce-que-dit-notre-engouement-pour-les-conserves-146636">En temps de pandémie, voici ce que dit notre engouement pour les conserves</a>
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<p>Dans le cadre de mes recherches, je m’intéresse aux représentations culturelles de la nourriture et de la cuisine. Comment cet imaginaire gastronomique résonne-t-il avec nos identités individuelles et collectives, avec nos aspirations et nos quêtes de sens ?</p>
<h2>Pas le premier croisement culinaire</h2>
<p>La tourtine n’est pas le premier exemple d’un mets qui combine des préparations existantes. Dans le registre populaire, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pizza-ghetti">pizzaghetti</a> a connu des heures fastes il y a quelques décennies dans les restaurants de cuisines dites « italienne et canadienne ». Une vérification sur Internet permet de constater que cette invention québécoise est toujours proposée par plusieurs établissements et qu’on en trouve même dans la section des produits surgelés des supermarchés.</p>
<p>Un autre croisement inventif, le <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Cronut">cronut</a>, connaît un succès qui ne se dément pas depuis 2013. C’est une pâtisserie dont la pâte feuilletée comme celle d’un croissant est passée à la friture et garnie comme un beigne – évidemment appelé <em>donut</em> aux États-Unis… et en France. Le cronut est à l’image de son créateur Dominique Ansel, un Français vivant aux États-Unis qui a opté pour le métissage des traditions.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374868/original/file-20201214-20-pgsgqq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un cronut d’octobre fourré de confiture de canneberges maison et de ganache de pistache de la boulangerie Dominique Ansel New York.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le croisement de préparations culinaires distinctes est toujours révélateur. Le pizzaghetti dévoile sans doute un enthousiasme naïf face aux traditions gastronomiques italiennes que nous n’hésitions pas à jeter pêle-mêle dans la même assiette. Le cronut présente quant à lui la rencontre de la France et du Nouveau Monde, de la longue durée historique et de l’innovation, de la boulange artisanale et du snack.</p>
<h2>Un mets traditionnel</h2>
<p>Mais que dit la combinaison que propose la tourtine ? Pour le comprendre, il faut examiner les deux plats qui la composent. La tourtière autant que la poutine sont emblématiques de la tradition culinaire du Québec, et on peut même y voir des plats nationaux. Elles portent cependant des significations bien distinctes.</p>
<p><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tourti%C3%A8re">La tourtière</a> constitue une des pièces de résistance de nos tables de Noël et du Nouvel An. Elle repose sur les ressources locales et, selon la région, on peut la préparer à la viande d’élevage, au gibier ou même au poisson. Elle semble ainsi liée à un territoire, et même à un terroir.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374863/original/file-20201214-19-1sw9iio.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La tourtière est un mets incontournable du temps des fêtes et peut certainement être hissé au rang de plat national québécois.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De plus, le mets suscite des débats, ce qui est un signe de son importance culturelle. Son nom vient-il vraiment des oiseaux aujourd’hui disparus appelés tourtes qui servaient supposément à la confectionner, ou plutôt du récipient dans lequel était moulé la pâte ? Son origine est-elle française ou britannique ? La vraie tourtière est-elle celle du Lac-Saint-Jean, qui contient des patates, celle qui ne renferme que du hachis de porc et de veau (parfois appelée « pâté à la viande »), ou encore la cipâte du Bas-du-Fleuve ? Il y a autour de la tourtière un travail des représentations qui indique <a href="https://www.erudit.org/en/journals/rabaska/2012-v10-rabaska0402/1013567ar.pdf">que le mets occupe une vraie place dans la gastronomie québécoise</a>.</p>
<p>C’est aussi un plat qui, à défaut d’être cuisiné dans les foyers, est encore aujourd’hui très aimé par les consommateurs, surtout lors des Fêtes. Le marché saisonnier de la tourtière prête-à-manger (fraîche ou congelée) traverse les catégories, rassemblant des producteurs artisanaux, des joueurs intermédiaires comme les épiceries de niche, et évidemment le secteur de la grande distribution. Le mets est un incontournable et peut certainement être hissé au rang de plat national québécois.</p>
<h2>Un plat canaille</h2>
<p>Le cas de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Poutine_(plat)">poutine</a> est bien différent. Son histoire est beaucoup plus récente, puisqu’elle naît à la fin des années 50 dans la région agricole du Centre-du-Québec, berceau du fromage en grains qui en est l’ingrédient indispensable. Elle ne devient populaire que dans les années 80, à la faveur d’une diffusion urbaine qui en change aussi les conditions de consommation. Elle acquiert à ce moment le statut iconique qui est encore le sien : c’est un aliment de restauration rapide sans prétention et même un peu canaille, une éponge à bière que l’on engloutit volontiers après une soirée arrosée avant d’aller dormir.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374862/original/file-20201214-17-1dolxs0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La poutine est un aliment de restauration rapide, convivial, joyeux et associé à la vie nocturne.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les significations que porte la poutine sont très éloignées de celles de la tourtière. Elle est empreinte d’un certain imaginaire rural <em>vintage</em>, mais aussi de valeurs telles que l’américanité, l’excès joyeux et la vie nocturne. Bien que son histoire soit récente, la poutine fait désormais partie du patrimoine culinaire québécois.</p>
<h2>Quand la modernité rencontre la tradition</h2>
<p>Qu’arrive-t-il quand on mêle la tourtière et la poutine ? Ce geste peut heurter les puristes, et je ne suis pas convaincue qu’il soit gastronomiquement probant. Mais il a toutefois l’intérêt de conjoindre des représentations liées à chacun des plats : l’histoire de plus longue durée rencontre la modernité, le repas familial croise la collation nocturne prise entre amis. La tourtine modernise la tourtière, ou elle traditionnalise la poutine.</p>
<p>Mais bien sûr tout cela n’est pas simple. L’invention culinaire est une réinterprétation du patrimoine, mais elle manifeste un désir plutôt qu’un fait, et il faut y voir un travail de l’imaginaire bien plus que des significations arrêtées.</p>
<p>La tourtine, et son succès auprès des consommateurs, révèlent peut-être qu’en cette année pandémique, nous sentons le besoin de repenser les plats emblématiques du temps des fêtes. Il n’y aura pas de grandes tablées familiales et de ripailles interminables. Nos festins seront plus modestes. Pour certains, les fêtes seront marquées par des conditions personnelles et professionnelles difficiles, voire par la maladie ou le deuil.</p>
<p>Dans ce contexte, nous voulons garder la tradition qui nous lie au passé, si précieuse et rassurante en des temps incertains. Mais pourquoi ne pas y ajouter quelque chose de ludique, un peu d’humour et d’invention, l’excès joyeux et le souvenir des repas amicaux pris au-dehors… C’est ce que propose la tourtine.</p>
<p>Je serais bien étonnée qu’elle devienne notre nouveau plat national, mais pour l’instant, elle répond à un besoin. J’ai presque envie de dire qu’elle donne à rêver.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152047/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Geneviève Sicotte a reçu du financement du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) et du Fonds de recherche du Québec – Société et culture (FRQSC)</span></em></p>
L’invention culinaire est une réinterprétation du patrimoine. Le succès de la tourtine révèle qu’en cette année de Covid, nous sentons le besoin de repenser les plats emblématiques du temps des fêtes.
Geneviève Sicotte, Professeure, Études françaises, Concordia University
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/148846
2020-11-04T21:07:53Z
2020-11-04T21:07:53Z
Steak végé, dinde halal : petite leçon de marketing
<blockquote>
<p>« Ça m’a toujours choqué de rentrer dans un hypermarché et de voir qu’il y avait un rayon de telle cuisine communautaire et de telle autre à côté […] C’est comme ça, que ça commence le communautarisme. »</p>
</blockquote>
<p><a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/alimentation/viande-halal/gerald-darmanin-une-declaration-polemique-sur-les-rayons-communautaires-des-supermarches_4150941.html">Les propos</a> du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin sur les « rayons communautaires » en supermarché ont alimenté par la controverse les débats actuels sur le « communautarisme ».</p>
<p>Par ses propos, le ministre a opposé le communautarisme à la République française tout en posant le capitalisme comme l’une des portes d’entrée du communautarisme, et le supermarché, l’une de ses icônes, un médiateur de comportements « communautaires ».</p>
<p>Le ministre suggérerait-il que le marketing « ethnique » est contraire à l’esprit du vivre ensemble républicain français ?</p>
<h2>Le marketing à l’appui du communautarisme anglo-saxon ?</h2>
<p>Le marketing, né aux États-Unis à la suite de la Seconde Guerre mondiale, pratique la segmentation en <a href="https://www.e-marketing.fr/Definitions-Glossaire/Segmentation-marche-238854.htm">groupes de consommateurs</a> aux comportements comparables ou homogènes, et pour ce faire, use et abuse des variables démographiques et psychographiques dont le genre, l’ethnicité ou encore la religion pour affiner ses cibles.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/zN7rFFTu-DM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le Père Noël a-t-il été créé par Coca-Cola ?</span></figcaption>
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<p><a href="https://creg.ac-versailles.fr/le-marketing-ethnique-une-strategie-pour-repondre-a-une-societe-pluriculturelle">L’ethnomarketing</a> en particulier « consiste à segmenter le marché local ou international en s’appuyant sur l’homogénéité d’une souche ethnique d’un groupe de consommateurs ».</p>
<p>La division en communautés de consommateurs qui se reconnaissent dans des offres du marché relève en effet d’une <a href="https://creg.ac-versailles.fr/le-marketing-ethnique-une-strategie-pour-repondre-a-une-societe-pluriculturelle">vision structurante</a> de ce dernier qui, depuis longtemps, a compris que les valeurs identitaires sont des ressorts gagnants pour créer un lien affinitaire profond et durable entre marques et consommateurs.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367038/original/file-20201102-17-1cyuaxb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367038/original/file-20201102-17-1cyuaxb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367038/original/file-20201102-17-1cyuaxb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367038/original/file-20201102-17-1cyuaxb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367038/original/file-20201102-17-1cyuaxb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367038/original/file-20201102-17-1cyuaxb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367038/original/file-20201102-17-1cyuaxb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Aux États-Unis, l’ethnomarketing fait partie intégrante de la stratégie des marques.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/nourriture-femme-interieur-noir-4177731/">RF studio</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Phénomène grandissant aux États-Unis dans les années 80, l’ethnomarketing cherchait à répondre aux besoins d’une société multiculturelle, propice à la segmentation ethnique en ciblant en particulier une clientèle afro-américaine jusqu’alors invisibilisée, avant de s’étendre à d’autres communautés.</p>
<p>En France, la <a href="https://www.jstor.org/stable/40592936?seq=1">pratique</a> est initialement taboue car prône l’idée d’universalisme républicain où les marqueurs ethniques ou religieux se font discrets. Elle se développe à partir du millénaire.</p>
<h2>Une norme de fonctionnement sociétal</h2>
<p>Dans le cadre des stratégies marketing, le communautarisme n’est pas perçu négativement mais bien comme une norme de fonctionnement sociétal, sur lesquelles marques et enseignes s’appuient pour générer du profit. <a href="http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/Democratie-communaute-et-communautarisme-l-exceptionnalisme-des-USA">Le communautarisme aux États-Unis</a> constitue un mode d’organisation de la vie sociale, entre le désir de conserver une appartenance ethnique spécifique, tout en partageant une fierté nationale. Il s’agit d’un communautarisme accepté et apprécié en ce qu’il enrichit la collectivité sans la diviser et donne aux individus le confort d’un lien qu’ils peuvent maintenir avec leurs origines.</p>
<p>De fait, le communautarisme est <a href="https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/communautarisme/17550">défini</a> comme une « tendance du multiculturalisme américain qui met l’accent sur la fonction sociale des organisations communautaires ».</p>
<p>Dans ce sens le marketing accompagne la société de consommation qui est structurée en communautés et répond aux besoins des consommateurs.</p>
<h2>La France et son rapport à l’ethnicité</h2>
<p>La France dans son rapport aux particularismes constitue une exception par rapport aux États-Unis. <em>Le Petit Robert</em> (2004), définit dans le contexte français le communautarisme comme un</p>
<blockquote>
<p>« système qui développe la formation de communautés pouvant diviser la nation au détriment de l’intégration ».</p>
</blockquote>
<p>Les <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/03/19/la-difficile-utilisation-des-statistiques-ethniques-en-france_5438453_4355770.html">statistiques ethniques</a> y sont fortement <a href="https://www.insee.fr/fr/information/2108548">déconseillées</a>, on ne jure pas sur la Bible lorsque l’on devient président.</p>
<p>Depuis la fin du XIX<sup>e</sup> siècle le prisme de la nation à la <a href="https://www.gouvernement.fr/partage/9007-conference-d-ernest-renan-a-la-sorbonne-quest-ce-qu-une-nation">Ernest Renan</a>, où chaque individu se fond dans le roman national collectif, rend le communautarisme péjoratif.</p>
<p>À quoi la continuité de la nation France tient-elle ? Dans sa fameuse conférence de 1882, <a href="https://www.gouvernement.fr/partage/9007-conference-d-ernest-renan-a-la-sorbonne-quest-ce-qu-une-nation"><em>Qu’est-ce qu’une nation ?</em></a>, Renan l’affirmait : la France n’est pas une « race », mais, dès Charlemagne, « un empire composé ». Il poursuit :</p>
<blockquote>
<p>« La considération ethnographique n’a rien à voir dans la constitution de nations modernes »</p>
</blockquote>
<p>et</p>
<blockquote>
<p>« le Français n’est ni un Gaulois, ni un Franc, ni un Burgonde. Il est sorti de la grande chaudière où sous la présidence du roi de France ont fermenté ensemble les éléments les plus divers ».</p>
</blockquote>
<p>Ajoutons également que le <a href="https://www.contrepoints.org/2018/05/18/316313-le-jacobinisme-demmanuel-macron-est-une-impasse-retrouvons-lesprit-girondin">centralisme jacobin</a> a tendance à promouvoir un différentialisme minimal pour un succès du vivre ensemble.</p>
<h2>Un glissement vers la logique anglo-saxonne</h2>
<p>Si chaque communauté « ethnique » et/ou religieuse assumée et organisée ajoute au creuset de la société aux États-Unis, c’est chaque individu qui est appelé à s’approprier la nation française indépendamment de son origine ethnique ou religieuse.</p>
<p>Par conséquent, les propos du ministre font en effet écho avec la logique de communautarisme à l’anglo-saxonne, illustrée par des rayons de supermarchés où, via l’offre culinaire, les communautés sont juxtaposées et non pas mélangées.</p>
<p>Après un engouement pour le marketing international où la cuisine exotique avec l’apparition des mets chinois, thaïlandais, japonais, mexicains en rayon, signes de la <a href="https://www.cairn.info/revue-l-information-geographique-2007-2-page-71.htm">mondialisation des goûts</a> ; le marketing pratique désormais également un ciblage plus fin au croisement de plusieurs catégories telles que le sushi cacher, la charcuterie halal, le couscous ou plat indien végétarien pour répondre à des injonctions alimentaires issues de communautés de consommateurs.</p>
<p>Dès lors rappelons ici que le dérapage est dans la perception d’altérité que constitueraient certaines traditions culinaires par rapport au « manger républicain », après le <a href="https://www.liberation.fr/debats/2020/09/19/14-septembre-derriere-la-regle-floue-de-la-tenue-normale-se-cachent-les-discriminations_1799917">« vêtement républicain »</a>.</p>
<p>Cette vision normative, clivante et caricaturant le réel apparaît comme contre-productive à la <a href="https://hal-univ-paris10.archives-ouvertes.fr/hal-01674328/document">représentation française</a> : « La France, une et indivisible ».</p>
<h2>Les pratiques culturelles comme outil marketing</h2>
<p>Néanmoins, le ministre occulte que le marketing n’est que le reflet de valeurs minoritaires ou instituées qui circulent dans la société, et qu’il n’est pas à l’origine de l’expression des identités. Les marques capturent les comportements et valeurs qui irriguent suffisamment de consommateurs pour adapter leurs offres.</p>
<p>Ce fut par exemple le cas de la marque Décathlon qui proposa « un hijab de running » pour les femmes voilées souhaitant le porter durant leurs pratiques sportives, ce qui avait suscité la polémique en France.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1100056279186321408"}"></div></p>
<p><a href="https://www.semanticscholar.org/paper/Culture-and-Consumption%3A-A-Theoretical-Account-of-Mccracken/0c2030b54ffb098b206773f420e84438e0d04f64">L’anthropologue Grant McCracken</a> a proposé une analyse, avec son <a href="https://celebritymarketingbrochadoanthony.wordpress.com/lendossement/">modèle de transfert de significations</a>, qui résume la manière dont le sens circule entre les cultures, les biens/produits/marques et les consommateurs.</p>
<p>Ce processus comporte deux étapes centrées autour de la création de sens.</p>
<h2>Créer du sens, l’objectif phare des marques</h2>
<p>Les marques usent des médias (publicités, design, packaging, mode…) pour créer du sens autour des biens en transmettant des valeurs sociétales pertinentes pour leurs cibles.</p>
<p>Elles disposent aussi de biens et discours qu’elles portent aux consommateurs au travers de rituels explicités dans leurs communications. Par exemple, les pubs de Nike montrant des Femmes sportives héroïques portant le hidjab incitant à une normalisation de la pratique.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/T1Qyg8l-l8U?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Nike unveils new « Pro Hijab ».</span></figcaption>
</figure>
<p>Le sens réside dans la culture, qui catégorise et différencie les gens comme appartenant à des groupes en fonction de leur classe sociale, de leur sexe, de leur l’âge, etc.</p>
<p>McCracken explique que l’appartenance à un groupe est fluide et non pas fixe, ce qui oblige les experts en marketing à scruter les changements sociétaux complexes pour adapter leurs stratégies. Les individus ne sont pas assignés à une identité ou à une communauté, leurs valeurs et pratiques évoluent, des végétariens ou pratiquants de telle religion vont intégrer de nouvelles pratiques, et induire des innovations marketing.</p>
<p>La catégorie « charcuterie halal » ou steak « vegetarien » en rayon de supermarché est par exemple intéressante dans sa proximité de codes visuels de produits, packagings avec le reste du rayon de charcuterie si bien que cela interroge sur le fond de séparatisme versus intégration.</p>
<h2>Une polémique qui vise également les cuisines exotiques et le terroir ?</h2>
<p>Ces tendances accompagnent aussi l’agacement de certains consommateurs qui dénonce une « standardisation des goûts », ou le <a href="https://www.persee.fr/doc/rfsoc_0035-2969_1996_num_37_3_5721">risque de MacDonaldization du monde</a> comme l’écrit le sociologue américain George Ritzer.</p>
<p>En effet, le mouvement de globalisation a généré une résistance et un déploiement de l’offre locale.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1091059818184491010"}"></div></p>
<p>Ainsi, un supermarché regorge à la fois de mets célébrant des traditions étrangères et des rayons où l’on y flatte le terroir, faisant appel aux identités et goûts complexes des consommateurs. Il ne semble pas que le ministre ciblait ces offres « communautaires » dans son propos alors qu’ils procèdent pourtant d’une même logique marchande.</p>
<h2>Darmanin et le couscous « français »</h2>
<p>Dès lors, <a href="https://news.konbini.com/societe/le-grand-nimporte-quoi-des-reseaux-special-darmanin-et-rayons-de-cuisine-communautaire/">nombre d’internautes</a> ont tourné en dérision le propos du ministre prenant l’exemple de l’achat de pâtes comme communautaire ou les références excessives à l’identité bretonne dans le packaging des crêpes ou autres beurres salés.</p>
<p>Que faire également des préférences « bien françaises » pour certains plats relevant d’un processus historique, multiculturel et identitaire complexe comme le couscous ?</p>
<p>Dans nos <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/cb.1478">travaux</a> nous avions montré que ce plat est classé comme l’un des préférés des Français, bien souvent juste après la blanquette de veau. Or en France, on consomme du couscous pour des raisons et selon des modalités variées, à la fois chez les Maghrébins et les non-Maghrébins. Un phénomène qui met à mal les propos réducteurs du ministre.</p>
<h2>Donner le choix</h2>
<p>Pour les marques, l’enjeu est surtout de donner le choix aux consommateurs, celui de rester dans un cadre de références culturelles ou religieuses connues ou d’en sortir. On peut acheter des produits halal ou kasher parce qu’on les trouve bons, ou parce qu’on est pratiquant, sans verser dans un séparatisme absolu comme le sous-entendent certains, dont le ministre.</p>
<p>Le rôle du politique face au marketing, c’est l’éducation à l’appréciation de la variété culturelle comme constitutive de la richesse commune nationale et la capacité de naviguer avec sérénité dans différents registres culinaires et culturels.</p>
<p>Il est donc plus opportun de questionner le rôle et la faiblesse des récits politiques face à ceux du marché plutôt que de demander aux opérateurs économiques de réformer leurs pratiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/148846/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nacima Ourahmoune ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
À en croire les propos de Gérald Darmanin, les rayons de produits ethniques de supermarchés poussent au communautarisme. Le marketing ethnique serait-il contraire à l’esprit du vivre ensemble ?
Nacima Ourahmoune, Professeur / Chercheur/ Consultant en marketing et sociologie de la consommation, Kedge Business School
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/141798
2020-08-04T15:43:57Z
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D’Abidjan à Djakarta, comment la ville réinvente nos repas
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/350489/original/file-20200730-23-8hsf2k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C21%2C1599%2C1118&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Anthony Bourdain et Barack Obama dans une cantine à Hanoi au Vietnam (23 mai 2016).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/13476480@N07/27144294422">Pete Souza/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>« Mal-bouffe », « junk-food », <a href="https://www.cabdirect.org/cabdirect/abstract/19931803342">« McDonald’s-isation »</a> du monde : les imaginaires les plus péjoratifs sur l’alimentation sont souvent liés à l’espace urbain.</p>
<p>La ville serait ainsi le lieu par excellence de la <a href="https://doi.org/10.1016/S0305-750X(99)00094-7">transition alimentaire, nutritionnelle et épidémiologique</a>, des « calories vides » et des produits ultra-transformés. Elle serait, par association, responsable de l’obésité, des maladies cardio-vasculaires, du diabète, de l’hypertension, des cancers liés à l’alimentation, et de l’intoxication croissante aux résidus chimiques.</p>
<p>Espace privilégié de la consommation marchande, de l’industrialisation de l’alimentation via ses supermarchés où se battent nombre produits importés depuis des marchés internationaux, la ville incarnerait la « walmartisation » du monde.</p>
<p>Parce que l’Occident a connu ce processus avant d’autres régions du monde, et parce que les grandes entreprises du système alimentaire en sont originaires, certains assimilent cette évolution à une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0306919206000893?casa_token=7dX_-d4rmJgAAAAA:m1_b2lynl5gEhqU_FzKsGUzF6bmLKUfGoi6gKNnN_4AgKNPQhT9_eV0wLpYNVj3neZQrZARAGnH4rA">occidentalisation de l’alimentation</a>. La structure nutritionnelle de la ration évolue certes partout dans le même sens, à des vitesses variables : la part des glucides dans l’apport énergétique diminue, celle des lipides augmente et les protéines animales remplacent les protéines végétales, tandis que la consommation de produits transformés industriels décolle.</p>
<p>Pour autant, manger ne se limite pas à consommer. Ainsi, bien qu’influencées par des tendances globales, les pratiques alimentaires des individus sont également tributaires de leurs représentations, de leurs espaces et de leurs ancrages locaux.</p>
<p>Les <a href="https://www.quae.com/produit/1621/9782759230914/manger-en-ville">enquêtes socioanthropologiques</a> qui privilégient les échelles fines d’observation ne portent pas seulement sur ce que les gens mangent mais aussi sur la façon dont ils s’organisent pour le faire, ce qu’ils en disent et ce qu’ils en pensent. Car manger est bien plus que se nourrir, y compris pour les populations les plus précaires. C’est prendre du plaisir, entretenir des liens avec les autres, tisser des relations à son environnement, construire et marquer identités individuelles et collectives.</p>
<h2>Les citadins soumis à des injonctions contradictoires</h2>
<p>Les citadins, en matière d’alimentation, sont sous l’influence de multiples prescriptions normatives entre lesquelles ils naviguent sans cesse et qui peuvent même être contradictoires.</p>
<p>Par exemple, les Mexicains sont soumis à une injonction paradoxale. Ainsi, le ministère du Tourisme et de l’Économie a pour stratégie de valoriser la cuisine mexicaine de rue, <a href="https://ich.unesco.org/fr/RL/la-cuisine-traditionnelle-mexicaine-culture-communautaire-vivante-et-ancestrale-le-paradigme-de-michoacan-00400">inscrite au patrimoine immatériel de l’humanité par l’Unesco en 2019</a>.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="Combien de tacos vas-tu manger ?" src="https://images.theconversation.com/files/350484/original/file-20200730-17-13ywmky.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/350484/original/file-20200730-17-13ywmky.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=799&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/350484/original/file-20200730-17-13ywmky.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=799&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/350484/original/file-20200730-17-13ywmky.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=799&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/350484/original/file-20200730-17-13ywmky.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1004&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/350484/original/file-20200730-17-13ywmky.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1004&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/350484/original/file-20200730-17-13ywmky.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1004&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Campagne de prévention contre l’obésité du ministère de la Santé au Mexique.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En même temps, de nombreux discours véhiculent des normes sanitaires et nutritionnelles qui entrent parfois en collision avec cette cuisine, la rendant responsable de maladies cardio-vasculaires et d’obésité. On imagine aisément l’inquiétude que peut produire la contradiction entre ces deux registres normatifs.</p>
<p>Mais à y regarder de plus près, on s’aperçoit que les normes nutritionnelles sont interprétées différemment selon les milieux sociaux, et que les individus composent avec cette contradiction nutrition/patrimoine selon les situations alimentaires, dans un contexte général où manger mexicain reste très prisé.</p>
<h2>Des chaînes « Sud-Sud »</h2>
<p>Il est vrai que les villes d’Afrique, Amérique latine et Asie voient se développer des chaînes internationales de supermarchés et de restauration rapide.</p>
<p>Le premier supermarché de Hanoï, par exemple, a ouvert en 1998. Aujourd’hui, la ville en compte des dizaines, dont un immense centre commercial regroupant près de 150 boutiques, de la chaîne coréenne Aeon, ouvert en 2015.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Chaine de restauration Hungry Lion" src="https://images.theconversation.com/files/350486/original/file-20200730-17-1xawpl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/350486/original/file-20200730-17-1xawpl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/350486/original/file-20200730-17-1xawpl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/350486/original/file-20200730-17-1xawpl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/350486/original/file-20200730-17-1xawpl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/350486/original/file-20200730-17-1xawpl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/350486/original/file-20200730-17-1xawpl2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une enseigne Hungry Lion, chaîne de fast food sud-africaine, ici à Cape Town, Afrique du Sud, 2019.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Hungry_Lion_restaurant.jpg">Discott/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<p>Autre exemple, celui d’Hungry Lion, une chaîne de fast-food sud-africaine créée sur le modèle de KFC en 1997, qui compte aujourd’hui près de 200 restaurants en Afrique australe. Elle est la propriété de la holding Shoprite, le plus gros détaillant de produits alimentaires en Afrique avec près de 3000 points de vente, également d’origine sud-africaine. Mais l’évolution de leurs systèmes alimentaires est loin de se réduire à cette industrialisation.</p>
<h2>L’économie populaire urbaine invente de nouvelles cuisines</h2>
<p>L’économie populaire urbaine reste largement dominante pour nourrir la population des villes et invente constamment de nouvelles pratiques et de nouvelles cuisines, loin des stratégies des grands acteurs économiques.</p>
<p>À Djakarta, en Indonésie, les <em>kampung</em> (littéralement : « villages ») sont des quartiers pauvres où domine une économie dite « informelle ».</p>
<p>Ces espaces sont marqués par une forte circulation et un brassage constant des populations, pour beaucoup immigrées de fraîche date en provenance des zones rurales, ainsi que par une grande promiscuité. Nombre d’habitants n’y cuisinent pas chez eux, faute d’équipement, de compétences, d’espace ou de temps.</p>
<p>Un type particulier d’établissement alimentaire s’est développé dans ces quartiers : les <a href="https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-02865216"><em>warung makan</em></a>, qui offrent des plats bon marché et faits maison.</p>
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<img alt="nourriture traditionnelle en Indonésie" src="https://images.theconversation.com/files/349963/original/file-20200728-17-9pblng.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/349963/original/file-20200728-17-9pblng.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=422&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/349963/original/file-20200728-17-9pblng.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=422&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/349963/original/file-20200728-17-9pblng.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=422&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/349963/original/file-20200728-17-9pblng.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=530&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/349963/original/file-20200728-17-9pblng.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=530&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/349963/original/file-20200728-17-9pblng.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=530&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un établissement de « warung makan sate kerbau/sapi Jepara » en Indonésie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Warung_makan_sate_kerbau_sapi_Jepara.JPG">Midori</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Ces négoces, sorte de cuisines publiques où l’on se sert soi-même, où l’on apporte sa vaisselle et où les conditions de paiements sont souples, permettent de conserver des modes d’alimentation perçus comme traditionnels et domestiques, tout en facilitant l’entretien des sociabilités alimentaires communautaires.</p>
<p>Les distinctions entre monde domestique et monde marchand, espace public et espace privé s’y trouvent brouillées, invitant à reconsidérer l’échelle d’analyse de l’alimentation, qui relève ici moins du foyer ou du ménage que du bloc d’habitation ou du quartier.</p>
<h2>L’invention de cuisines proprement urbaines</h2>
<p>La restauration populaire est un creuset d’innovations culinaires où se combinent et se construisent des compromis entre diverses injonctions normatives.</p>
<p>Souvent issus des couches populaires de la population, ces nouveaux plats de la cuisine urbaine gagnent aussi les classes moyennes et deviennent, pour certains, des marqueurs identitaires de toute une ville, voire d’un pays. C’est le cas de l’<em>attiéké-garba</em> à Abidjan, en Côte d’Ivoire.</p>
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<figcaption><span class="caption">Un garbadrome à Cocody, YouTube.</span></figcaption>
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<p>Ce plat populaire, né dans des restaurants fréquentés par la jeunesse près des universités, les <em>garbadromes</em>, s’est initialement construit en opposition aux normes d’hygiène perçues comme non africaines. Les mangeurs revendiquent ainsi une identité urbaine, ivoirienne et transgressive en mangeant <em>garba</em>. Ce plat est composé d’<em>attiéké</em> (couscous de manioc) de piètre qualité, garni de morceaux de thon salé frit et servi « mouillé », c’est-à-dire généreusement arrosé d’huile de friture, idéalement brunie par les cuissons successives, en gage de qualité !</p>
<p>Malgré les critiques régulières le qualifiant de « malbouffe » ivoirienne, notamment en raison des accusations sur l’hygiène douteuse du plat et des <a href="https://www.oeildafrique.com/politique_et_soci_t/enqu_te_exclusive_c_te_d_ivoire_derri_re_le_succ_s_des_garba_haoussa_d_abidjan">établissements où il est servi</a>, le <em>garba</em> est reconnu comme un plat de choix dans la restauration populaire.</p>
<p>Vendu à l’origine par des immigrés nigériens attirés par le dynamisme de la capitale ivoirienne et porté par la jeunesse étudiante urbaine, le <em>garba</em> est aujourd’hui devenu emblématique de <a href="https://www.radiojam.biz/agenda/le-plus-grand-garbadrome-de-cote-d-ivoire-109">l’identité abidjanaise, voire ivoirienne</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/KNRfTB4OlWc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Préparation du babendâ.</span></figcaption>
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<p>À Ouagadougou, au Burkina Faso, c’est le <em>bâbenda</em>, à l’origine plat rural spécifique à l’ethnie mossi, qui gagne peu à peu un statut de plat identitaire à l’échelle de la ville tout entière, mais selon un autre parcours.</p>
<p>Il s’agissait d’un plat de soudure, une bouillie associant les derniers restes de mil aux premiers légumes feuilles de la nouvelle saison des pluies. Des versions améliorées, utilisant du maïs pilé ou du riz brisé à la place du mil, grâce à leur accessibilité facilitée en ville, sont aujourd’hui proposées et consommées par d’autres ethnies que les seuls Mossi.</p>
<h2>Des plats se perdent, d’autres se créent</h2>
<p>Faire valoir la créativité des villes d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie, leur capacité d’inventer leur alimentation peut conduire à s’opposer à une vision qui insiste plus sur la dépendance de ces villes aux marchés et aux capitaux internationaux et à une occidentalisation du monde.</p>
<p>En réalité, ces deux tendances s’articulent. Certes des plats dits « traditionnels » se perdent, mais de nouveaux mets s’inventent.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/350493/original/file-20200730-33-12nxsby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Menu restaurant à Hanoi" src="https://images.theconversation.com/files/350493/original/file-20200730-33-12nxsby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/350493/original/file-20200730-33-12nxsby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/350493/original/file-20200730-33-12nxsby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/350493/original/file-20200730-33-12nxsby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/350493/original/file-20200730-33-12nxsby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/350493/original/file-20200730-33-12nxsby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/350493/original/file-20200730-33-12nxsby.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">« Combo Obama », menu du restaurant populaire où a déjeuné Barack Obama à Hanoi.</span>
<span class="attribution"><span class="source">O. Lepiller</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Certes, des cultures et des pratiques alimentaires globalisées sont visibles dans les villes du sud global, mais cela ne correspond pas à une simple érosion des répertoires alimentaires locaux.</p>
<p>Certes des produits mondialisés se diffusent, mais ils sont utilisés différemment selon les villes et, en leur sein, les milieux sociaux. En Inde par exemple, les nouilles instantanées Maggi, associées à une modernité occidentale désirable, ont trouvé leur place dans les pratiques de la classe moyenne en s’appuyant sur la figure commerciale de la « maman Maggi », qui a permis de <a href="https://www.researchgate.net/publication/335162409_Gendered_Boundaries_Cultured_Lives_The_Underexplored_Dimensions_of_Duty_Kartavya_in_the_Indian_Family_Context">déculpabiliser</a> un gain de temps qui pouvait être jugé comme une transgression du rôle de mère nourricière et aimante.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/wd9kBpea9As?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">En 2009, publicité pour des nouilles Maggi (Nestlé) aux légumes, un produit « sain » et nutritionnel préparé par la mère.</span></figcaption>
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<p>Ces processus d’adaptation/réinterprétation locale des produits mondialisés ont été analysés dans le cas emblématique de la <a href="https://www.cnrseditions.fr/catalogue/sciences-politiques-et-sociologie/pizza/">pizza</a>.</p>
<h2>Des systèmes qui co-existent</h2>
<p>L’évolution des systèmes alimentaires liée à l’urbanisation ne peut se lire simplement comme le passage de systèmes de type domestique et artisanal vers des systèmes de type industriel.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/350491/original/file-20200730-15-q8yvlx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/350491/original/file-20200730-15-q8yvlx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/350491/original/file-20200730-15-q8yvlx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/350491/original/file-20200730-15-q8yvlx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/350491/original/file-20200730-15-q8yvlx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/350491/original/file-20200730-15-q8yvlx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/350491/original/file-20200730-15-q8yvlx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/350491/original/file-20200730-15-q8yvlx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Editions Quae, février 2020.</span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Ces systèmes co-existent, se combinent. Ils offrent des ressources pour faire face aux multiples défis alimentaires de ces villes à la croissance démographique souvent galopante. Souvent forgées sous fortes contraintes, dans des contextes urbains <a href="https://journals.openedition.org/hommesmigrations/2572?lang=fr#tocto1n4">« de débrouille et de circulation »</a>, ces ressources constituent des outils d’adaptation aux situations d’épreuve et d’incertitude. Plutôt que d’imaginer des solutions venant de l’extérieur et de la technologie, il est possible de puiser dans ce trésor pour promouvoir des pratiques et des normes favorables à la justice sociale et économique, à la <a href="https://journals.openedition.org/hommesmigrations/4044">cohabitation apaisée des altérités culturelles</a>, à la santé ou à l’environnement.</p>
<hr>
<p><em>Cet article s’appuie sur les travaux des auteurs et leur ouvrage collectif récemment paru <a href="https://www.quae.com/produit/1621/9782759230914/manger-en-ville">« Manger en ville, Regards socioanthropologiques d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie »</a> aux éditions Quae, regroupant des contributions de chercheuses et chercheurs de ces trois continents</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/141798/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas BRICAS est salarié du Cirad, organisme français de recherche au statut d'EPIC qui a un intérêt à ce que ses chercheurs fassent connaître leurs travaux. Il a participé à un partenariat de recherche avec Danone Nutricia Research (sans rémunération supplémentaire ni spécifique). Le livre "Manger en ville. Regards socio-anthropologiques d'Afrique, d'Amérique latine et d'Asie" (Quae) a bénéficié du soutien financier du Centre national interprofessionnel de l'économie laitière (Cniel), de l'Observatoire Cniel des habitudes alimentaires (OCHA), de Danone Nutricia Research, du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) et de la Chaire UNESCO Alimentations du monde de Montpellier SupAgro</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Olivier LEPILLER est salarié du Cirad, organisme français de recherche au statut d'EPIC qui a un intérêt à ce que ses chercheurs fassent connaître leurs travaux. Il a participé à un partenariat de recherche avec Danone Nutricia Research (sans rémunération supplémentaire ni spécifique). Le livre "Manger en ville. Regards socio-anthropologiques d'Afrique, d'Amérique latine et d'Asie" (Quae) a bénéficié du soutien financier du Centre national interprofessionnel de l'économie laitière (Cniel), de l'Observatoire Cniel des habitudes alimentaires (OCHA), de Danone Nutricia Research, du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad) et de la Chaire UNESCO Alimentations du monde de Montpellier SupAgro.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Audrey Soula ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Parcourue d’injonctions contradictoires, façonnée localement, sans cesse réinventée : l’alimentation dans les villes du Sud global échappe au récit d’une uniformisation occidentale.
Audrey Soula, Anthropologue, Cirad, UMR Moisa, Université de Montpellier
Nicolas Bricas, Socio-économiste, chercheur Univ. Montpellier, Cirad, et titulaire de la Chaire Unesco Alimentations du monde, Cirad
Olivier Lepiller, Sociologue, chercheur au Cirad, UMR Moisa, Université de Montpellier, Cirad
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.