tag:theconversation.com,2011:/au/topics/fifa-21439/articlesFIFA – The Conversation2023-11-28T17:11:30Ztag:theconversation.com,2011:article/2186242023-11-28T17:11:30Z2023-11-28T17:11:30ZLoi Pinel, FIFA et titres-restaurant : trois symboles des contradictions de la gestion des niches fiscales<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/561829/original/file-20231127-17-vaazae.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=100%2C0%2C1068%2C790&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En 2022, le ministère de l'Économie et des Finances recensait plus de 450 niches fiscales.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Paris_-_Minist%C3%A8re_de_l%27%C3%89conomie_et_des_Finances_B%C3%A2timent_Sully_%2827835898915%29.jpg"> Fred Romero/Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La Cour des comptes a relancé le débat sur les niches fiscales en publiant en juillet 2024 une <a href="https://www.ccomptes.fr/system/files/2023-07/20230707-note-thematique-Depenses-fiscales.pdf">note thématique</a> pour mieux évaluer et piloter les 465 dispositifs identifiés en 2022 par Bercy. Le manque à gagner des finances publiques est estimé à 86 milliards d’euros, soit 3,6 % du PIB ou 25 % de l’ensemble des recettes fiscales.</p>
<p>Les sages de la rue Cambon préconisaient un mécanisme de plafonnement de leur coût sur la période de la <a href="https://theconversation.com/deficit-public-pourquoi-les-objectifs-affiches-ne-sont-jamais-atteints-215168">loi de programmation des finances publiques 2023-2027</a>, une limitation de la durée des nouvelles mesures à quatre ans et une évaluation exhaustive de toutes les niches par l’Inspection générale des finances d’ici 2027.</p>
<h2>Le retour des carottes locatives ?</h2>
<p>Après avoir inscrit dans la loi de programmation 2023-2027 un plafond des nouvelles dépenses fiscales et leur bornage dans le temps, la <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16t0178_texte-adopte-seance">loi de finances pour 2024</a>, adoptée via le 49.3 en première lecture le 7 novembre 2023, se contente finalement de demander au gouvernement la remise, avant le projet de loi de finances pour 2025, de plusieurs rapports sur le crédit d’impôt recherche (la plus coûteuse et la plus décriée des niches avec un coût de 7 milliards en 2023), le taux réduit d’impôt sur les sociétés (IS) pour les petites et moyennes entreprises (PME), les mesures d’exonération pour l’investissement en outre-mer, etc.</p>
<p>Nouvelle manifestation de l’ambivalence de la classe politique dans la gestion des niches le même texte proroge ou élargit de nombreux dispositifs dérogatoires comme l’exonération des pourboires, la réduction des dons de l’impôt sur le revenu et les réductions Malraux et Denormandie pour l’investissement immobilier.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-est-il-si-difficile-de-reformer-les-niches-fiscales-191801">Pourquoi est-il si difficile de réformer les niches fiscales ?</a>
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<p>Le <a href="https://www.economie.gouv.fr/cedef/pinel-investissement-locatif">dispositif Pinel</a> permet aux résidents fiscaux français – sous certaines conditions très strictes – de réduire leur impôt sur le revenu via l’acquisition d’un bien immobilier neuf à mettre en location. Pour un coût de 1,5 milliard d’euros par an, cette exonération constitue un cas d’école des contradictions insolubles de la gestion des niches dans le cadre de la fiscalité actuelle des particuliers.</p>
<p>En 2019, un <a href="https://www.igf.finances.gouv.fr/igf/pages-hors-navigation/liste-de-tous-les-rapports-de-mi/evaluation-du-dispositif-daide-f.html">rapport</a> commandé en 2019 par le gouvernement à l’Inspection générale des finances déconseillait la suppression de ce dispositif, car il favorise la mise à disposition de logements neufs pour les ménages, tout en militant pour sa limitation.</p>
<p>Par la suite, le rapport annexé au PLF pour 2022 prônait sa <a href="https://investir.lesechos.fr/placements/immobilier/vers-une-extinction-de-la-reduction-dimpot-pinel-des-la-fin-de-2023-1868951">disparition progressive</a> qui a finalement été actée dans le PLF pour 2024. Au plus mauvais moment. En effet, la politique du logement ayant été <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2022/02/01/un-quinquennat-qui-a-delaisse-le-logement_6111910_3224.html">largement délaissée</a> sous le premier quinquennat du président Emmanuel Macron, le nombre de logements mis en chantier est tombé de 437 000 (dont 113 000 dans le parc social) en 1915 à 358 000 en 2022 (dont 48 000 dans le parc social). Pour 2023, on attend encore à une chute de 30 % du fait notamment de la hausse des coûts de construction et des taux d’intérêt.</p>
<p>La France reste donc très loin des 350 000 nouveaux logements nécessaires chaque année pour éviter une crise majeure de l’offre de plus en plus visible chez les locataires et des 500 000 qui permettrait de résoudre la crise du logement. En effet, le <a href="https://www.fondation-abbe-pierre.fr/sites/default/files/2023-01/REML2023_CAHIER4_Les%20chiffresdumallogement.pdf">nombre de ménages mal logés s’élève à plus de 4 millions</a>, les demandeurs en attente d’un logement social atteignent le chiffre inédit de 2,42 millions, et les personnes sans domicile seraient environ 330 000.</p>
<p>Or, on peut d’ores et déjà parier sur la poursuite de la crise dans le secteur de la construction qui devrait perdre 180 000 emplois en 2024. Son poids dans l’économie étant de 5 %, une contraction de 20 % du secteur obérerait le PIB de 1 %, ce qui générerait des pertes fiscales sans commune mesure avec le coût du dispositif Pinel.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1723988486078828577"}"></div></p>
<p>C’est pourquoi une nouvelle niche fiscale compensant la fiscalité la plus lourde des pays riches sur l’immobilier des particuliers semble <a href="https://www.ericpichet.fr/assets/files/v1/Fiscalite-du-patrimoine-avril2016-PICHET.pdf">désormais inévitable</a>…</p>
<h2>Une niche dorée pour la FIFA</h2>
<p>Les avantages fiscaux accordés aux représentations d’États étrangers en France remontent à une longue tradition de courtoisie diplomatique réglementée pour la première fois au Congrès de Vienne en 1815, ville signataire des traités de 1961 et 1963 qui stipulent les exonérations fiscales accordées aux États.</p>
<p>Hormis les États, 23 organisations internationales basées en France ont négocié des privilèges fiscaux <a href="https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/emplois-stages-concours/travailler-dans-les-organisations-internationales/etre-ou-devenir-fonctionnaire-international/statut-de-fonctionnaire-international/article/statut-fiscal-des-fonctionnaires-internationaux">via des accords de sièges bilatéraux</a> comme le conseil de l’Europe en 1952, l’Unesco en 1954 ou Interpol en 1982. Tout comme les conventions fiscales bilatérales, ces dérogations fiscales sont approuvées par un traité dûment ratifié et ont dès lors une autorité supérieure aux lois de finances.</p>
<p>Dans ce cadre, un avantage fiscal destiné à la trentaine de fédérations sportives internationales reconnues par le Comité international olympique a été <a href="https://www.lemonde.fr/sport/article/2023/10/19/le-cadeau-fiscal-de-la-majorite-aux-federations-sportives-internationales_6195460_3242.html">intégré en dernière minute au PLF 2024</a> le 18 octobre par voie d’amendement. Le Sénat a toutefois adopté, samedi 25 novembre, <a href="https://www.lemonde.fr/sport/article/2023/11/25/les-senateurs-annulent-les-exonerations-fiscales-en-faveur-des-federations-sportives-internationales_6202314_3242.html">l’annulation de cette disposition</a> d’exonération fiscale.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1715242428167307526"}"></div></p>
<p>Certes, ces privilèges peuvent être perçus comme peu populaires puisqu’ils s’appliquent à des associations sportives internationales richissimes et à la gouvernance <a href="https://www.novethic.fr/actualite/gouvernance-dentreprise/entreprises-controversees/isr-rse/la-fifa-pourtant-minee-par-la-corruption-leve-le-pied-sur-les-poursuites-146206.html">régulièrement critiquée pour leur opacité</a>. Pourtant, le contribuable peut y voir aussi une excellente affaire pour le pays et les finances publiques. En effet, en fixant leur centre de décision à Paris, l’écosystème de compétences directes et indirectes créé générerait de nouvelles rentrées fiscales, le tout en contribuant au rayonnement du pays.</p>
<h2>L’extension dommageable du domaine des titres-restaurant</h2>
<p>Les très populaires titres-restaurant, créés en 1967, sont en principe destinés à permettre aux salariés qui ne peuvent déjeuner chez eux le midi de pouvoir, en l’absence de cantine d’entreprise de <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F21059">se restaurer de manière modique</a> à proximité de leur lieu de travail.</p>
<p>Ils forment donc une véritable niche socio-fiscale puisque la contribution patronale, comprise selon les entreprises entre 50 et 60 % de la valeur faciale du titre, est exonérée de cotisations sociales dans la limite de 6,50 euros au 1<sup>er</sup> janvier 2023. En outre, cet avantage en nature est expressément <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000047770107">exonéré d’impôt sur le revenu</a> pour les 5 millions de bénéficiaires, le tout pour un coût annuel de 1,5 milliard pour les finances publiques.</p>
<p>Le confinement de 2020 et l’envolée du télétravail ont amené les pouvoirs publics à élargir jusqu’au 31 décembre 2023 le champ d’utilisation des tickets à des produits alimentaires pas directement consommables.</p>
<p>Pour lutter contre l’inflation alimentaire, l’Assemblée nationale a voté en urgence, hors loi de finances et à la quasi-unanimité (117 voix pour une contre) le jeudi 23 novembre une <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/textes/l16b1870_proposition-loi">proposition de loi</a> prévoyant la prorogation jusqu’au 31 décembre 2024 de cette dérogation. Les députés pérennisent ainsi de facto un avantage légitime directement lié à la sujétion sur le lieu de travail en un dispositif de soutien au pouvoir d’achat des salariés – au détriment de la petite restauration qui souffre à la fois du télétravail mais désormais de la concurrence des grandes surfaces qui absorbent 28 % des tickets.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1726520635310887308"}"></div></p>
<h2>Traquer les niches illégitimes</h2>
<p>Dans notre <a href="https://univ-droit.fr/recherche/actualites-de-la-recherche/parutions/9505-theorie-generale-des-depenses-socio-fiscales"><em>Théorie générale des dépenses socio-fiscales</em></a>, nous qualifions de niche, ou de dépense socio-fiscale :</p>
<blockquote>
<p>« Toute disposition, législative, réglementaire ou administrative, dont la mise en œuvre entraîne pour les administrations publiques une perte de recettes, qui peut être remplacée par une dépense budgétaire et qui accorde, directement ou indirectement, à une catégorie de contribuables, un allégement de ses prélèvements obligatoires par rapport à ce qui serait résulté de l’application de la norme issue des principes généraux du droit et appliqué au segment spécifique de référence considéré. »</p>
</blockquote>
<p>Mais seules les mesures fiscales incitatives sont légitimes. Si elles ne le sont pas, il peut toutefois s’agir de simples modalités d’imposition justifiées par la prise en compte d’un préjudice. Par exemple : l’exonération de rentes d’invalidité ou pour simplifier le calcul de l’impôt comme l’abattement de 10 % pour frais professionnels.</p>
<p>À défaut, il faut les éliminer, travail qui reviendra au législateur éclairé par la littérature scientifique et les futurs rapports programmés de l’Inspection générale des finances. Il lui faudra toutefois garder à l’esprit la porosité de la frontière entre dépense fiscale illégitime et simple modalité d’imposition. Ainsi, il est peu probable que le plafond de 13 522 euros autorisé pour les frais professionnels des revenus 2022 (hors remboursement des frais inhérents à l’exercice de leur métier) au-delà d’un revenu annuel net de charges sociales de 135 220 soient vraiment dépensés par les cadres supérieurs conformément à leur objet…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218624/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Éric Pichet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Plusieurs exonérations remises en cause dans le projet de loi de finances pour 2024 illustrent toute la difficulté à réformer les dispositifs existants.Éric Pichet, Professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2097672023-08-01T16:20:03Z2023-08-01T16:20:03ZOù (en) sont les femmes arbitres de football en France ?<p>Pour la première fois dans l’histoire de la Coupe du Monde féminine de football, la FIFA a fait appel à un <a href="https://www.tousarbitres.fr/stephanie-frappart-manuella-nicolosi-et-elodie-coppola-retenues-pour-la-coupe-du-monde-feminine-2023/">trio de femmes arbitres de nationalité française</a> pour diriger certaines rencontres de la compétition qui se déroule du 20 juillet au 20 août 2023, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Pour cette édition, l’arbitre centrale chevronnée Stéphanie Frappart fera équipe avec ses compatriotes arbitres assistantes <a href="https://www.fff.fr/article/10659-manuela-nicolosi-on-a-ouvert-les-portes-.html">Manuela Nicolosi et Élodie Coppola</a>.</p>
<p>Si cette nouvelle apparaît <em>a priori</em> comme un signe de bonne santé de l’arbitrage féminin français, elle met également en lumière l’incapacité de la Fédération française de football (FFF) à « fournir », jusque-là, à la FIFA, trois femmes arbitres pour officier sur des événements de grande ampleur.</p>
<p>Quelle est donc la situation actuelle de l’arbitrage féminin en France ? Quelle est la place des femmes arbitres dans le football ? Quels sont les freins qui les empêchent de faire carrière ?</p>
<h2>La lente évolution de l’arbitrage « féminin »</h2>
<p>À la fin des années 1960, la FFF accepte (enfin) que des femmes <a href="https://www.theses.fr/2018LILUA009">deviennent arbitres officielles de football</a>. Cette entrée dans l’arbitrage ne se fait pas sans mal. Ces pionnières ne sont, par exemple, autorisées qu’à arbitrer des matchs d’enfants ou d’adolescents. Mais qu’importe <a href="https://la1ere.francetvinfo.fr/martinique/marie-anne-bessard-arbitre-football-pionniere-1966-706593.html">Marie-Anne Bessard</a>, Geneviève Zak, ou encore Martine Jayais ont ouvert une porte.</p>
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<p>En 1970, au moment où la FFF reconnaît officiellement le football féminin, cette dernière a déjà délivré le titre d’arbitre à une quinzaine de femmes. Si certaines abandonnent rapidement, d’autres, comme Antoinette Pluet ou Nicole Piveteau, se maintiennent et parviennent même à arbitrer des matchs de Seniors au niveau régional. Dix ans plus tard, en 1980, elles sont près de 120, mais aucune d’elles n’officie au-dessus du niveau local.</p>
<p>Dans les années 1990, la FIFA décide de confier l’arbitrage des matchs internationaux de football féminin à des femmes. Accusant un certain retard en matière de développement de l’arbitrage féminin, la FFF n’est pas en mesure de proposer la candidature d’une Française disposant des compétences nécessaires pour officier sur ces matchs.</p>
<p>Pour remédier au problème, l’ancien arbitre international, alors président de la Commission centrale des arbitres de la FFF de l’époque, Michel Vautrot, réalise un recensement des femmes arbitres susceptibles d’accéder immédiatement au haut niveau en tant qu’arbitre assistante. <a href="https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/football-nelly-viennot-stephanie-frappart-footballeuse-arbitre-juge-de-touche">Nelly Viennot</a> fait partie de ces femmes ayant bénéficié de cette promotion accélérée. Elle devient en 1996 la <a href="https://www.republicain-lorrain.fr/sport/2021/04/07/la-premiere-femme-arbitre">première femme</a> à officier en première division du Championnat de France de football professionnel (PSG-Martigues), en tant qu’arbitre assistante.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1119511281088724992"}"></div></p>
<p>Alors que l’on pensait que Nelly Viennot avait brisé le « plafond de verre », il faudra attendre 23 longues années et l’été 2019 pour qu’une nouvelle femme, en la personne de <a href="https://www.france24.com/fr/20190423-femme-arbitre-premiere-fois-match-ligue-1-stephanie-frappart-mondial-2019">Stéphanie Frappart</a>, soit nommée en Ligue 1, en tant qu’arbitre centrale cette fois. Durant plus d’un demi-siècle, la <a href="https://www.slate.fr/audio/siffles/femmes-arbitres-football-exister-rencontre-3">féminisation de l’arbitrage s’est donc poursuivie</a>, mais les femmes demeurent toujours en faible nombre dans le milieu.</p>
<p>En 2023, on ne dénombre qu’un peu plus de <a href="https://www.fff.fr/article/9805-les-chiffres-cles-du-football-feminin-en-2023.html">1 000 femmes arbitres</a> sur les 20 000 que compte la FFF. En plus d’être rares, les femmes arbitres sont aussi sous-représentées au plus haut niveau du football français puisque seules trois femmes (pour 86 hommes) officient dans les championnats professionnels masculins de Ligue 1 et Ligue 2 : Manuela Nicolosi et Camille Soriano sont arbitres assistantes en Ligue 2 tandis que Stéphanie Frappart est toujours arbitre centrale en Ligue 1. Elle a par ailleurs été la <a href="https://www.cairn.info/revue-staps-2021-1-page-31.htm">première femme à arbitrer un match de Coupe du monde masculine</a> au Qatar en 2022.</p>
<p>Les autres femmes arbitres évoluent dans les plus basses divisions du football masculin ou restent cantonnées à l’arbitrage de matchs de football féminin, jugés moins prestigieux dans le milieu. Cette répartition des femmes dans l’arbitrage laisse penser que derrière les discours institutionnels affichant une bonne volonté en matière de mixité se cache une division sexuelle du travail.</p>
<h2>Des critères de sélection et des conditions d’exercice défavorables aux femmes</h2>
<p>Pour justifier la faible présence des femmes dans l’arbitrage en général et au niveau fédéral en particulier, les dirigeants de l’arbitrage font souvent référence aux exigences physiques que nécessite la pratique.</p>
<p>Les femmes n’arriveraient pas à rivaliser avec les hommes, notamment lors des tests physiques de présélection. L’exemple illustrant le mieux le frein que représente le passage des tests physiques à l’accession et l’ascension des femmes dans l’arbitrage reste sans doute celui de Nelly Viennot, qui, sélectionnée par la FIFA parmi 82 candidats pour participer aux épreuves de sélection des arbitres assistants pour la Coupe du Monde 2006, avait échoué, lors du test de sprint, <a href="https://www.ouest-france.fr/sport/coupe-du-monde/entretien-nelly-viennot-pionniere-des-arbitres-j-ai-rate-le-mondial-pour-deux-dixiemes-7f56d372-70c5-11ed-b658-d40122929dc2">pour deux dixièmes de seconde seulement</a>. Elle aurait été la première femme à officier lors d’une Coupe du monde masculine.</p>
<p>Les dirigeants justifient les écarts de performance entre les hommes et les femmes par les différences biologiques entre les sexes et passent totalement sous silence l’histoire de la pratique féminine qui montre pourtant que <a href="https://www.cairn.info/revue-marche-et-organisations-2016-3-page-131.htm">l’investissement des femmes dans l’arbitrage</a> et le sport en général est tardif, et que ce déficit historique se traduit en déficit institutionnel dans la fabrique des femmes arbitres.</p>
<p>L’ordre établi semble dès lors légitime puisque les qualités tirées de la « nature » permettent de rendre acceptables les inégalités de réussite. Si les dirigeants regrettent publiquement la situation, ils n’envisagent pas pour autant d’adapter ni les critères de sélection ni les barèmes des tests physiques et ont même tendance à les rehausser régulièrement ; d’autant plus que Stéphanie Frappart parvient, <em>elle</em>, à répondre aux obligations.</p>
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<figcaption><span class="caption">Reportage sur Stephanie Frappart, 11 février 2018.</span></figcaption>
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<p>Malgré ces exigences, l’arbitrage n’est pas une activité professionnelle. Les femmes arbitres ont un travail par ailleurs. Elles doivent donc concilier leur activité professionnelle, l’arbitrage et leur vie personnelle. Deux dimensions sont alors déterminantes. La première concerne l’organisation familiale. Les femmes qui se maintiennent à un niveau de responsabilité fort font parfois état de tensions dans leur couple, qu’elles réussissent à réduire en négociant ou redéfinissant les rôles de chacun. Ces situations confortables sont souvent fragilisées par les grossesses et congés maternité, autant de causes d’interruption de carrière, parfois définitive, ou de déclassement lors de la reprise de l’activité. Ces exemples forcent certaines femmes à faire le choix de la carrière plutôt que de la maternité.</p>
<p>La seconde dimension est la stabilité professionnelle des femmes arbitres. Les Françaises ont massivement investi le marché du travail mais restent davantage concernées par les emplois sous-qualifiés et plus exposés aux aléas sociaux. Leur niveau d’investissement dans l’arbitrage varie donc en fonction du contexte professionnel dans lequel elles évoluent.</p>
<p>La plupart des femmes arbitres de haut niveau témoignent d’une situation professionnelle privilégiée. Pour améliorer les conditions de vie des femmes arbitres, la FFF a, au début de la saison 2020/2021, signé un contrat de prestation de service d’une durée de 1 à 3 ans avec huit d’entre elles. Ces dernières perçoivent désormais, en plus des indemnités de match, une rémunération fixe mensuelle censée leur permettre d’évoluer plus sereinement.</p>
<h2>Acceptées… à condition de faire différemment</h2>
<p>Si les femmes arbitres ne sont pas catégoriquement exclues de la pratique de l’arbitrage, c’est à condition qu’elles fassent différemment de leurs homologues masculins et qu’elles répondent à certaines assignations liées à leur genre. La mixité recherchée par les dirigeants fédéraux implique forcément cette différence entre hommes et femmes et aboutit à une vision essentialiste des compétences, selon laquelle les femmes auraient des qualités propres et présupposées différentes de celles des hommes.</p>
<p>Ainsi, les femmes arbitres se voient accorder une capacité particulière à canaliser les émotions des joueurs et des entraîneurs grâce à leur supposé sens développé de la conciliation, de leur écoute et de leur douceur. Elles restent donc toujours des femmes avant d’être des arbitres (compétentes). Lorsqu’elles réalisent de bonnes performances, elles le doivent bien souvent non pas à leurs aptitudes mais à leurs atouts « féminins ». C’est ce qu’explique un dirigeant de la FFF venu superviser une femme arbitre, à l’issue d’un match pourtant engagé, en inscrivant sur le rapport d’évaluation que cette dernière a maîtrisé son match « bien aidée par [son] sourire qui a évité toute contestation ».</p>
<p>Les joueurs et les entraîneurs, dont les propos sont souvent repris par les médias, seraient même prêts à faciliter la tâche des femmes arbitres, ce qui expliquerait qu’elles puissent (parfois) arbitrer convenablement. En 2019, Christophe Galtier, à l’époque à la tête du LOSC, <a href="https://www.lefigaro.fr/sports/football/ligue-1/actualites/premiere-reussie-pour-stephanie-frappart-arbitre-pionniere-955289">vantait par exemple la « diplomatie » de Stéphanie Frappart</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Quand on est entraîneur, homme, on est sous pression, on s’énerve… Il suffit qu’elle sorte un regard, un sourire, un geste… et ça s’arrête […] Est-ce qu’il y aura plus de respect ? Automatiquement, c’est la nature de l’homme, il y aura plus de retenue dans les propos. »</p>
</blockquote>
<p>Si tous ces comportements paraissent <em>a priori</em> bienveillants, en renforçant les stéréotypes de genre ils participent en fait d’une part à l’infantilisation des femmes arbitres et d’autre part à la <a href="https://www.octares.com/serie-colloques-congres/245-variations-sur-le-theme-du-genre-dans-les-groupes-professionnels.html">reproduction d’un ordre genré</a>.</p>
<p>Pour le sociologue <a href="https://journals.openedition.org/sdt/28165?lang=en">Erving Goffman</a>, les pratiques de galanterie et de sollicitude excessive conduisent chacun à rester à sa place. Quant à <a href="https://www.persee.fr/doc/arss_0335-5322_1990_num_84_1_2947">Pierre Bourdieu</a>, il explique que l’attribution aux femmes de dispositions valorisantes ne fait pas disparaître la domination masculine car elle accorde les préjugés favorables au sexe féminin pour mieux le dévaloriser.</p>
<p>D’autant plus qu’un grand nombre de femmes arbitres considèrent les qualités « féminines » qu’on leur attribue comme une ressource : « Un arbitre homme va souvent entrer dans le rôle du gendarme, strict et assez fermé. Le fait de voir une femme qui parle différemment et se montre plus souple est un atout », explique l’une d’entre elles. Les femmes arbitres se parent donc de caractéristiques secondaires comparées à celles qui sont habituellement attribuées et recherchées chez un bon arbitre (homme) de football comme la fermeté, l’autorité, le sang-froid.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209767/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lucie Le Tiec ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Sur les 20 000 arbitres que compte la Fédération française de football, 1 000 sont des femmes. Cette disparité s'explique par de nombreux élements.Lucie Le Tiec, Maître de conférences en sociologie ; Laboratoire Centre de recherche sur l'industrie, les institutions et les systèmes économiques d'Amiens (CRIISEA), Université de Picardie Jules Verne (UPJV)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2094492023-07-31T16:18:57Z2023-07-31T16:18:57ZLe football féminin en France : une réalité qui dérange (encore) ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/539992/original/file-20230728-29-3d8exq.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C11%2C1495%2C970&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des jeunes joueuses de football s'affrontant lors d'un tournoi interclubs.</span> <span class="attribution"><span class="source">Yuri A./PeopleImages</span></span></figcaption></figure><p>Voilà déjà plus d’un siècle que la France a vu se tenir la première rencontre de football opposant des femmes, mais ce sport reste avant tout, dans notre pays, une affaire d’hommes : en 2022, la FFF comptait quelque <a href="https://footamateur.ouest-france.fr/licencies-la-fff-vers-un-record-historique-saison-2022-2023/">2,1 millions de licenciés</a>, dont moins de 200 000 <a href="https://www.fff.fr/article/6934-les-chiffres-cles-du-football-feminin.html">étaient des femmes</a>.</p>
<p>Si les avancées en la matière sont notables (seules 90 000 filles et femmes étaient licenciées en 2010-2011), le déséquilibre demeure patent. L’une des explications tient à la façon dont le football féminin est perçu et géré au niveau des clubs amateurs. Certains d’entre eux, comme l’ont montré mes travaux effectués dans la région Hauts-de-France, accordent au football des femmes une place majeure tandis que d’autres le considèrent encore comme le parent pauvre du football masculin.</p>
<h2>Un siècle de progrès saccadés</h2>
<p>En France, si les footballeuses apparaissent au début des années 1910, il faut attendre 1917 pour voir se dérouler la <a href="https://www.footofeminin.fr/Histoire-Centenaire-du-1er-match-de-football-feminin-en-France_a14052.html">première rencontre féminine à Paris</a> qui oppose deux équipes de la société sportive féminine le Femina Sport.</p>
<p>Le succès fut tel qu’au cours des années suivantes, d’autres équipes se forment et de nouveaux matchs s’organisent. La pratique va progressivement s’implanter sur le territoire : de <a href="https://www.editions-harmattan.fr/livre-histoire_du_football_feminin_au_XXeme_si%C3%A8cle_laurence_prudhomme_poncet-9782747547307-15071.html">11 clubs en 1920, on atteint les 130 un an plus tard</a>. Toutefois, ces manifestations publiques sont la cible des détracteurs de l’activité physique pour les femmes, qui affirment que celles-ci doivent uniquement pratiquer des exercices lents, doux et esthétiques. Les critiques dont elles font l’objet et l’entrée en guerre en 1941 engendrent la disparition des joueuses françaises.</p>
<p>Il faut attendre les années 1960 pour voir le football dit féminin « renaître ». Marquée par de profonds changements sociétaux, cette époque voit les femmes réinvestir les terrains. L’engouement est tel qu’en trois ans (1968-1971), la pratique compte plus de 2 000 joueuses.</p>
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<p>Cette croissance des effectifs féminins incite, entre autres, la Fédération française de football (FFF), en mars 1970, à s’engager en faveur de la pratique et à créer la première commission féminine spécifiquement chargée de veiller au développement du football féminin.</p>
<p>Si l’on assiste à une courte période d’augmentation des effectifs, au milieu des années 1980, ces derniers stagnent, voire diminuent. Il faut dire qu’aucune mesure incitative efficace en faveur de la pratique n’est impulsée par cette commission : la FFF souhaite en effet contrôler cette dernière et non la développer. Ainsi, à l’aube des années 2000, les <a href="https://www.editions-harmattan.fr/livre-etre_une_femme_dans_le_monde_des_hommes_socialisation_sportive_et_construction_du_genre_christine_mennesson-9782747595414-20465.html">footballeuses représentent seulement 3 % des licenciés</a>.</p>
<p>Mais la position de la Fédération à l’égard des joueuses va progressivement être remise en cause. En effet, en 2007, le Conseil de l’Europe publie <a href="https://www.coe.int/fr/web/cultural-routes/about-the-epa">l’<em>Accord Partiel Élargi</em></a> qui a pour objectif d’aider au développement de l’égalité entre les sexes dans le sport. Cet accord incite, l’année suivante, le ministère de la Jeunesse et des Sports à contraindre quatre Fédérations, dont celle de football, à impulser un plan de féminisation. Lancée en 2011, cette première <a href="https://www.fff.fr/16-le-football-feminin/365-football-feminin-nos-actions.html">politique de « développement »</a> d’ampleur en faveur des footballeuses s’articule autour de quatre grands axes : valoriser la place des femmes dans l’activité ; devenir une nation référence des licenciées ; jouer les premiers rôles au niveau européen et mondial ; innover en matière de formation.</p>
<h2>Au niveau régional, cinq approches différentes du football féminin dans les clubs</h2>
<p>Au niveau régional, pour tenter de mener à bien cette féminisation, des plans de développement voient le jour. En 2013, par exemple, la Ligue de football des Hauts-de-France impulse plusieurs grandes actions sur son territoire : labéliser les écoles de football au féminin, former et diplômer les femmes entraîneures ou encore mettre en place des tournois. Toutefois, si ces mesures ont permis à la Ligue de connaître une hausse du nombre de licenciées engagées dans la pratique – de <a href="https://www.fff.fr/80-le-budget-et-les-chiffres-cles.html">7 040 en 2013, on passe à 11 576 en 2017</a> – le taux de féminisation de la pratique dans la région peine encore à dépasser les 6,9 % en 2018.</p>
<p>C’est donc au niveau local, c’est-à-dire au plus près des 99 clubs de football « féminin » ou intégrant une équipe féminine senior que compte la région des Hauts-de-France, que j’ai tenté, lors de la rédaction de <a href="https://www.theses.fr/s274011">ma thèse</a> de comprendre cet écart entre « les dires » et « les faires ». Au total, 111 entretiens avec les présidents, entraîneurs et capitaines ont été réalisés au sein de ces associations. L’analyse des données a permis d’identifier cinq profils de clubs au sein desquels la féminisation de la pratique est vécue différemment.</p>
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<p>Le premier profil, « une féminisation gynécocentrée mais calquée sur le modèle professionnel masculin », se compose de cinq clubs « 100 % féminins ». Ici, les joueuses bénéficient d’un budget conséquent et de bonnes conditions de pratique. Encadrées par des hommes diplômés, elles se déplacent principalement en minibus. Dans ces cinq clubs, dont trois sont présidés par des femmes, tout est mis en œuvre pour que les joueuses se concentrent uniquement sur la production de performances.</p>
<p>Le deuxième profil, « une féminisation contrainte mais encadrée », compte 20 équipes « féminines » qui évoluent dans des clubs mixtes. Dans ces clubs, les joueuses ne bénéficient ni d’un budget conséquent, ni du soutien du président qui ne déploie aucun moyen visant à optimiser leur visibilité. Si l’attention est principalement portée sur l’équipe « masculine » senior, les clubs sont tenus de respecter les « obligations » formulées par la Fédération pour ce qui concerne le football des femmes. Par exemple, pour obtenir le premier niveau de labels masculins, le « label jeune espoir », ces associations doivent disposer d’une équipe de filles engagées en U6F-U9F ou U10F-U13F. Les joueuses sont délaissées et ne bénéficient pas de terrains et d’horaires d’entraînement adaptés.</p>
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<p>Le troisième profil, « une féminisation subie et déléguée », se compose de 15 équipes « féminines » qui évoluent dans des clubs mixtes. Dans ces associations, comme dans le cas du profil précédent, les joueuses ne bénéficient ni du soutien de leurs présidents, ni d’un budget conséquent, ni d’objectifs sportifs. Toutefois, elles réussissent à tenir dans le temps, avant tout grâce au surinvestissement de leur entraîneur.</p>
<p>Le quatrième profil, « une féminisation intégrée et stabilisée », recense 28 équipes « féminines » qui évoluent dans des clubs mixtes. Dans ces associations, les équipes « féminines » bénéficient du soutien du président du club, de conditions correctes de pratique et d’un entraîneur engagé et souvent diplômé. Soutenues et encouragées par les membres de ces clubs, les joueuses bénéficient de conditions d’accueil, d’accès et d’entraînement identiques à leurs homologues masculins.</p>
<p>Le cinquième et dernier profil, « une féminisation basée sur une logique associative qui dépasse la logique sportive », se compose de 31 équipes « féminines » qui évoluent dans des clubs mixtes. Dans ces clubs, les joueuses bénéficient du soutien du président et d’un partage équitable des budgets. Si les entraînements se font dans des conditions peu favorables à la production de performances, les filles ont créé leur propre équipe et viennent ici uniquement pour jouer au football et « s’amuser ».</p>
<p>Ainsi, au sein de la région des Hauts-de-France, si le football des femmes est considéré par certains acteurs comme une véritable condition nécessaire à l’égalité entre les sexes, pour d’autres, <em>a contrario</em>, il est (encore) parfois perçu comme étant problématique, voire inapproprié.</p>
<p>L’analyse croisée de ces cinq profils m’a finalement permis d’identifier trois facteurs décisifs à la féminisation différenciée de la pratique sur notre territoire : la (non) mixité, le (non) soutien du président et le (non) soutien de l’entraîneur. Toutefois, dans cette région étudiée, aucune tendance particulière ne se dessine, aucune logique ne prédomine : chaque club, au regard de son bureau dirigeant, de ses moyens, de son fonctionnement, vit la féminisation du football différemment.</p>
<p>Alors que dans d’autres pays, la pratique enregistre un taux de féminisation élevé – Allemagne (15,5 %), Angleterre (24,6 %), Norvège (29,7 %), Suède (38,4 %) et États-Unis (55 %) – en France (7,4 %), le football des femmes peine encore à sortir de l’ombre de ses homologues masculins. Aujourd’hui, à l’heure où deux chaînes nationales de télévision diffusent l’intégralité de la Coupe du Monde, nous ne pouvons qu’espérer que les performances des Françaises donneront envie à des filles et femmes de chausser les crampons et de fouler les pelouses.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209449/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Audrey Gozillon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une étude conduite dans les Hauts-de-France auprès de 99 clubs amateurs permet de mieux comprendre les différentes approches qu’ont les clubs à l’égard du football féminin.Audrey Gozillon, Maîtresse de conférences en STAPS, Université de Rouen NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2100972023-07-20T18:15:25Z2023-07-20T18:15:25ZCoupe du monde féminine : l’équité des genres dans les sports demeure un problème malgré des avancées majeures<p>La Coupe du monde féminine de la FIFA vient de débuter en Australie et en Nouvelle-Zélande. En tant que plus grand événement sportif féminin au monde, elle donne l’occasion aux footballeuses de représenter leur pays et de compétitionner au plus haut niveau sur la scène mondiale.</p>
<p>Avec une compétition plus forte viennent de <a href="https://www.fifa.com/fr/womens-football/news/gianni-infantino-annonce-une-augmentation-importante-des-fonds-alloues-a-la">plus grands investissements</a> et des <a href="https://canadasoccer.com/fr/news/la-plus-grande-coupe-du-monde-feminine-de-la-fifa-aura-lieu-cet-ete/">augmentations prévues de l’audimat</a> et de l’assistance dans les stades. La Coupe du monde féminine 2023 promet d’être meilleure que jamais.</p>
<p><a href="https://ici.radio-canada.ca/sports/1991542/soccer-coupe-du-monde-sydney-australie-irlande-guichets-fermes">L’Australie a déjà vendu son premier match à guichets fermés (83 500 sièges)</a> et <a href="https://www.fifa.com/fr/tournaments/womens/womensworldcup/australia-new-zealand2023/news/le-president-de-la-fifa-revele-une-etape-importante-dans-la-vente-de-billets">plus d’un million de billets ont été vendus</a> la semaine qui a précédé la compétition. <a href="https://www.bellmedia.ca/fr/salle-de-presse/presse/les-64-matchs-de-la-coupe-du-monde-feminine-de-la-fifa-australie-et-nouvelle-zelande-2023-presentes-sur-les-plateformes-de-rds-des-le-20-juillet/">Avec plus d’options de visionnement que jamais</a>, les possibilités de regarder les matchs sont nombreuses.</p>
<p>Au moins sept équipes ont des chances d’être couronnées championnes. Les nouvelles venues <a href="https://www.fifa.com/fifaplus/fr/articles/usa-profil-coupe-du-monde-feminine-2023-selectionneur-joueuse-cle-a-surveiller">tenteront de déstabiliser la puissante équipe des États-Unis</a>, qui va défendre son titre et essaiera de remporter son troisième championnat FIFA de suite.</p>
<p><a href="https://sportnewsafrica.com/breve/mondial-2023-f-la-zambie-bat-lallemagne-en-amical/">Lors d’un match amical précédant la Coupe, la Zambie a remporté un match contre l’une des équipes favorites, l’Allemagne</a>. Leur victoire inattendue indique que des équipes passées sous le radar pourraient causer des surprises cette année.</p>
<h2>Pour l’amour du jeu</h2>
<p>J’encourage la Jamaïque, le Canada, Haïti, la Zambie et le Maroc. En tant qu’ancienne milieu de terrain et fan, ainsi qu’universitaire féministe noire militant pour l’égalité des sexes dans le sport, je trouve qu’il y a énormément de choses à aimer dans le football. Connu sous le nom de soccer en Amérique du Nord, c’est le plus beau des jeux. Il est simple et magique, et c’est peut-être l’un des sports les plus émouvants. </p>
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<img alt="Une femme en soutien-gorge de sport et en shorts lève son chandail, les poigts serrés, en criant" src="https://images.theconversation.com/files/537908/original/file-20230717-210016-bo97w5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537908/original/file-20230717-210016-bo97w5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=721&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537908/original/file-20230717-210016-bo97w5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=721&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537908/original/file-20230717-210016-bo97w5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=721&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537908/original/file-20230717-210016-bo97w5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=906&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537908/original/file-20230717-210016-bo97w5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=906&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537908/original/file-20230717-210016-bo97w5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=906&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Brandi Chastain célèbre après avoir marqué le but de pénalité ayant mené son équipe à la victoire contre la Chine lors de la Coupe du monde féminine au Rose Bowl à Pasadena, Californie, le 10 juillet 1999.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/The San Francisco Examiner, Lacy Atkins)</span></span>
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<p>Bien que 24 ans aient passé, je me rappelle tout aussi vivement la <a href="https://www.fifa.com/fr/news/la-celebration-devenue-celebre-de-chastain-2907940">célébration mémorable de la joueuse américaine Brandi Chastain</a> suivant la victoire de son équipe à la Coupe du monde féminine, après son tir de pénalité.</p>
<p>Cet instant demeure toujours un moment significatif, autant pour le football féminin que pour les sports féminins. Depuis, le <a href="https://fr.uefa.com/nationalassociations/uefarankings/womensclub/#/yr/2023">football a connu une évolution fulgurante en se développant de manière exponentielle, avec le développement de plusieurs ligues professionnelles féminines en Europe et en Amérique du Nord</a>.</p>
<p>Plus d’investissements que jamais ont été alloués à la Coupe du monde féminine de 2023. VISA est devenue le premier commanditaire officiel et la <a href="https://www.fifa.com/fifaplus/fr/articles/quel-prix-pour-le-vainqueur-coupe-du-monde-feminine-fifa-2023-australie-nouvelle-zelande">FIFA s’est engagée à verser au moins 30 000 dollars à chaque joueuse</a>.</p>
<p>Les équipes représentant la <a href="https://www.fifa.com/fifaplus/fr/articles/8-novices-ligne-de-depart-australie-nouvelle-zelande-coupe-du-monde-feminine-fifa-2023">Zambie, Haïti et le Maroc</a> — dont les parcours jusqu’à la Coupe du monde sont à la fois remarquables et inspirants — démontrent bien la croissance internationale du jeu.</p>
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<img alt="Une femme aux cheveux courts turquoise parle dans un microphone lors d’une conférence de presse" src="https://images.theconversation.com/files/537903/original/file-20230717-218013-y2g95d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537903/original/file-20230717-218013-y2g95d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537903/original/file-20230717-218013-y2g95d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537903/original/file-20230717-218013-y2g95d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537903/original/file-20230717-218013-y2g95d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537903/original/file-20230717-218013-y2g95d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537903/original/file-20230717-218013-y2g95d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La joueuse américaine Megan Rapinoe parle aux reporters au nom de l’équipe nationale féminine des États-Unis à Carson, en Californie, le 27 juin 2023.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Ashley Landis)</span></span>
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<p><a href="https://www.fifa.com/womens-football/news/the-nine-female-coaches-rewriting-the-history">Cette année — une première historique — neuf coachs féminines sont à la tête d’équipes en compétition à la Coupe du monde</a>. Il y a également une plus grande volonté de raconter les histoires inspirantes des femmes, ainsi que leur parcours.</p>
<p>Megan Rapinoe mérite tout particulièrement des éloges, <a href="https://ca.thegistsports.com/article/24d797eb-5056-40e6-8d84-84bdebafb29a">étant une des joueuses de football les plus influentes de son temps</a>. Elle prendra sa retraite au cours de l’année. Elle a pavé le chemin aux filles et aux femmes afin qu’elles ne soient pas que des héroïnes sur le terrain, mais également dans la société en général, en plaidant pour le changement dans le sport et ailleurs.</p>
<h2>On ne peut pas se contenter de « jouer malgré tout »</h2>
<p>Dans le sport, il existe un dicton disant de « jouer malgré tout » (« play through it »). Il signifie que, quels que soient les obstacles rencontrés, il faut persévérer et continuer à aller de l’avant afin atteindre son objectif. </p>
<p>Les joueuses présentes à la Coupe du monde cette année ont eu à surmonter de nombreux problèmes. Plusieurs de ces obstacles persistent, dont le manque de fonds pour la formation et l’équité salariale. </p>
<p>Bien que le fait de jouer pour leur pays soit une source de fierté, les joueuses ont besoin d’un meilleur soutien financier. Il devrait être au moins équivalent à celui de leurs homologues masculins.</p>
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<img alt="Deux joueuses de football sautent pour tenter de frapper un ballon avec leur tête" src="https://images.theconversation.com/files/537907/original/file-20230717-231543-xnewke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537907/original/file-20230717-231543-xnewke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537907/original/file-20230717-231543-xnewke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537907/original/file-20230717-231543-xnewke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537907/original/file-20230717-231543-xnewke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537907/original/file-20230717-231543-xnewke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537907/original/file-20230717-231543-xnewke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’Australienne Sam Kerr, à gauche, saute vers le ballon en même temps que la Jamaïquaine Khadija Shaw, au centre, lors d’un match de la Coupe du monde féminine au Stade des Alpes à Grenoble, France, le 18 juillet 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Laurent Cipriani)</span></span>
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<p>En juin, <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/Les-jamaicaines-denoncent-une-desorganisation-extreme-de-leur-federation-avant-la-coupe-du-monde/1403252">l’équipe jamaïcaine a publié une lettre ouverte soulignant le manque de soutien qu’elle a reçu en amont de la Coupe du monde</a>. Les joueuses ont dû s’entraîner et compétitionner dans des conditions médiocres, voyager de manière désordonnée, et sans les compensations promises dans leurs contrats. </p>
<p><a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/L-afrique-du-sud-championne-d-afrique-en-titre-en-crise-a-trois-semaines-de-la-coupe-du-monde-feminine/1406020">L’équipe sud-africaine a récemment refusé d’entrer sur le terrain</a>, exprimant l’incapacité de leur fédération de football à leur fournir les ressources nécessaires à la formation et à l’équité salariale pour la Coupe du monde. Les équipes féminines du <a href="https://ici.radio-canada.ca/sports/1973011/soccer-feminin-fifa-coupe-du-monde-droits-television">Canada</a>, de <a href="https://time.com/6293087/womens-world-cup-2023-controversies-global/">l’Angleterre et de l’Espagne ont également exprimé des préoccupations</a> concernant l’équité salariale et les disparités en matière de soutien.</p>
<h2>La violence sexuelle dans le sport</h2>
<p>Il y a d’autres conditions déplorables que les femmes ne devraient jamais avoir à subir. Le harcèlement sexuel est l’une des formes les plus répandues de violence à l’égard des femmes et il <a href="https://theconversation.com/abuse-in-canadian-sports-highlights-gender-and-racial-inequities-198869">continue d’être un problème constant et flagrant dans le sport féminin</a>.</p>
<p>La Coupe du monde féminine n’est pas différente et la FIFA a encore beaucoup à faire pour démontrer qu’elle accorde la priorité à la sécurité et au bien-être des athlètes féminines. </p>
<p>Par exemple, des <a href="https://fr.africanews.com/2023/07/12/mondial-feminin-la-zambie-entre-football-et-scandale-sexuel//">allégations d’inconduite sexuelle ont été formulées à l’encontre de l’entraîneur zambien</a>. Ces allégations ont été étouffées, car l’équipe féminine zambienne gagne et obtient des résultats impressionnants. Des allégations d’agression sexuelle ont également été <a href="https://www.hrw.org/fr/news/2020/11/18/haiti-mettre-fin-aux-abus-sexuels-dans-le-monde-du-football">soulevées par l’équipe haïtienne</a>. </p>
<p>Je regarderai la Coupe du monde avec l’amour du sport dans les yeux, mais aussi avec un regard critique sur l’équité et la justice pour les joueuses. La clé d’une Coupe du monde féminine de la FIFA réussie réside dans la résolution des nombreux problèmes systémiques liés au sexisme. Le sport féminin ne pourra pas atteindre son plein potentiel tant que les femmes et les jeunes filles seront exposées à la violence sexuelle.</p>
<h2>Un regard vers l’avenir</h2>
<p>Comment pouvons-nous garantir une meilleure Coupe du monde féminine en 2027 ? Elle doit mettre en lumière les progrès du football féminin en dehors du terrain, où les femmes et les filles sont en sécurité et à l’abri de la violence verbale, émotionnelle et sexuelle. </p>
<p>Les joueuses doivent voir leur pays investir en elles et dans la prochaine génération. Bien des choses dépendent de ce qui est fait maintenant. Tandis que nous soutenons et encourageons les joueuses de la Coupe du monde, nous devons à la fois plaider pour elles en faveur de la justice et de la protection, et poursuivre des réformes dans le sport féminin.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210097/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Treisha Hylton ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La Coupe du monde féminine de 2023 est sans doute la meilleure en termes de niveau sportif, d'investissements et d'audience. Mais l'équité et la reconnaissance ne sont pas encore au rendez-vous.Treisha Hylton, Assistant Professor, Faculty of Social Work, Wilfrid Laurier UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2037152023-05-02T10:44:21Z2023-05-02T10:44:21ZApprendre à gérer un budget grâce… au jeu vidéo FIFA ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/520585/original/file-20230412-28-z6rxhr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2048%2C1366&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">À manipuler la monnaie virtuelle du jeu, il est possible d’acquérir de nombreuses compétences de gestion.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Footy.com / Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le rôle des monnaies virtuelles est devenu central dans les <a href="https://theconversation.com/topics/jeux-video-23270">jeux vidéo</a>. Ces unités de compte qui peuvent être gagnées, achetées ou échangées dans les univers virtuels présentent désormais un impact économique important. Même si elles ne sont pas considérées comme des devises, elles peuvent néanmoins influencer la façon dont les joueurs interagissent les uns avec les autres et même la façon dont les divertissements sont conçus.</p>
<p>Côté joueurs, elles sont souvent nécessaires pour avancer dans une aventure, en achetant des biens virtuels, des équipements, des personnages, des décorations ou autres améliorations. Pour les éditeurs, elles sont une source de revenus devenue essentielle et intégrée aux modèles économiques. C’est d’ailleurs souvent sous cet angle qu’elles sont évoquées dans les médias : les « lootboxes », « coffres à butin » ou « achats intégrés » sont largement <a href="https://www.ladn.eu/media-mutants/jeux-video-lootboxes-jeunes-joueurs/">critiqués</a> comme une source d’addiction à la dépense et comme une transformation des jeux en ligne en jeux d’argent. </p>
<p>Plusieurs firmes ont dû ainsi répondre devant la justice, tel <a href="https://www.lesnumeriques.com/vie-du-net/attaque-pour-vente-de-loot-boxes-dans-fortnite-et-rocket-league-epic-games-trouve-un-arrangement-n160781.html">Epic Games</a> qui a notamment développé Fortnite. La Belgique a ainsi légiféré pour <a href="https://www.ouest-france.fr/gaming/jeux-video-ufc-que-choisir-met-en-demeure-ea-games-fifa-d-afficher-les-prix-de-ses-loot-box-d9ae4162-e253-11ec-a665-c765ae49fc18">interdire ces microtransactions</a>.</p>
<p>On ne peut cependant limiter l’analyse des monnaies virtuelles à ces risques. Et s’il s’agissait aussi, de même que ces loisirs enseignent la <a href="https://theconversation.com/concentration-patience-strategie-ces-competences-que-les-jeux-videos-permettent-de-developper-130808">patience</a>, d’un moyen de socialiser les joueurs à l’argent numérique, de permettre en apprentissage en gestion dans un contexte ludique ? C’est ce que nous suggérons dans nos travaux prochainement publiés dans la revue <em>Réseaux</em> à partir d’un des jeux les plus populaires au monde, <a href="https://theconversation.com/topics/fifa-21439">FIFA</a>.</p>
<p>Ils s’inscrivent notamment dans la continuité des études de la sociologue américaine Viviana Zelizer qui montre qu’il existe une <a href="https://journals.openedition.org/lectures/270#:%7E:text=6Viviana%20Zelizer%20remarque%20que,rejetant%20les%20sentiments%20du%20donateur.">« signification sociale de l’argent »</a>. Elle démontre que les fonds ne sont pas utilisés de la même manière en fonction de leur provenance. Par exemple, un billet reçu à un anniversaire servira à un projet spécial ; des criminels expliquent qu’ils ne mettront pas dans le panier de la quête à l’église de l’argent issu de leurs activités sombres.</p>
<h2>Les cartes dans FIFA, un véritable marché</h2>
<p>FIFA et son mode compétitif en ligne <em>FIFA Ultimate Team</em> (FUT) suscitent la controverse pour ses monnaies. Dans FUT, il s’agit de constituer son équipe de rêve, de préférence plus rapidement que les autres joueurs.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/520549/original/file-20230412-28-o440sw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/520549/original/file-20230412-28-o440sw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/520549/original/file-20230412-28-o440sw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1009&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/520549/original/file-20230412-28-o440sw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1009&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/520549/original/file-20230412-28-o440sw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1009&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/520549/original/file-20230412-28-o440sw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1268&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/520549/original/file-20230412-28-o440sw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1268&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/520549/original/file-20230412-28-o440sw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1268&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
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<p>Ce mode en ligne serait néanmoins devenu un « pay-to-win », terme péjoratif pour qualifier une partie où c’est celui qui paie qui gagne. Il est par exemple possible d’acquérir des packs de footballeurs aléatoires, avec l’espoir d’y trouver un sportif qui renforcera l’équipe du joueur et dont la valeur dans FUT aurait été trop importante pour se le procurer.</p>
<p>Trois monnaies sont utilisables dans ce jeu : les crédits, les points FIFA et les jetons. Les premiers tombent en récompense de matchs remportés ou en spéculant sur les cartes du jeu ; ils permettent d’acheter des cartes de sportifs. Les points FIFA achetables en euros ou en dollars servent, eux, à obtenir des packs de cartes. Les jetons, enfin, permettent d’accéder à des modes de jeu spécifiques.</p>
<p>Toutes ces ressources participent à un marché qui regroupe au plus fort de l’année plusieurs millions de cartes. Il constitue le cadre de nombreuses transactions entre joueurs, réalisées en crédits, via un dispositif proposé par l’éditeur qui régule les enchères entre joueurs, les cours des cartes via différentes promotions et plus largement la masse monétaire en crédit via une taxe de 5 % de crédit par transaction. Cette activité, nommée achat-revente, est une pratique centrale du mode FUT.</p>
<h2>Des concepts de gestion pour être compétitif</h2>
<p>Derrière, c’est néanmoins pour les joueurs tout un processus d’apprentissage. Manipuler ces monnaies engage des logiques d’efficience, d’éthique et de gestion émotionnelle. Les joueurs cherchent à maximiser l’utilisation de leurs crédits pour améliorer leur équipe et ainsi gagner des matchs.</p>
<p>Les crédits sont, aux yeux des joueurs, durement gagnés et considérés comme mérités. Pour certains, ils ne devront d’ailleurs pas être gaspillés dans des packs sur un coup de tête. Des techniques pour gagner des crédits plus rapidement sont partagées sur les réseaux sociaux et forums, transmises par des influenceurs qui présentent autant des astuces propres au jeu que les mécanismes financiers du marché qui impactent les cours.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1645823838922461184"}"></div></p>
<p>Les points FIFA, eux, ne supposent pas de compétences à acquérir. Ces achats sont plus ou moins reconnus comme légitimes. Ils sont pour certains un capital investi en début de jeu pour aller plus vite, pour d’autres, juste de la triche. Dans les deux cas, l’enjeu est d’adopter des usages en accord avec les normes des autres joueurs. Comme nous avons pu l’entendre :</p>
<blockquote>
<p>« Accepter des points FIFA comme cadeau de Noël ou d’anniversaire, ça passe »</p>
</blockquote>
<p>Il s’agit aussi de se plier aux normes de l’éditeur : faire de l’achat-revente oui, obtenir des crédits de manière illégale, c’est l’exclusion.</p>
<p>Une fois les crédits obtenus, reste à les utiliser pour construire la meilleure équipe possible. Ici joue la mobilisation de concepts gestionnaires et financiers qui permettront aux joueurs d’être compétitifs : offre et demande, fixation de prix et équilibre, spéculation, gestion des risques, taxe, régulation, fraude ou encore rôle de l’information. La notion la plus centrale reste celle de la valeur des cartes : elle va guider toutes les décisions.</p>
<p>Celle-ci est liée aux <a href="https://theconversation.com/comment-les-jeux-video-de-football-influencent-la-realite-et-inversement-87117">performances</a> des footballeurs dans la réalité, renforçant le lien entre le jeu et le stade. Certains joueurs tentent même de développer des stratégies d’investissement sur la durée de vie du jeu, planifiant tant leur équipe que les moyens à acquérir pour en disposer.</p>
<h2>Des compétences à faire valoir</h2>
<p>D’autres compétences importantes se développent via les monnaies virtuelles des jeux vidéo, comme le contrôle de soi, même si elles n’en sont pas le seul objet. Pour les monnaies virtuelles, les joueurs apprennent à mettre en place des garde-fous, comme s’interdire de dépasser un certain montant financier dépensé dans le jeu par mois ou année.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/podcast-fortnite-est-il-un-jeu-dargent-125092">Podcast : Fortnite est-il un jeu d'argent ?</a>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Ce contrôle de soi est central autant pour lutter contre la tentation face à l’argent et aux packs, que dans la maîtrise à garder face à la toxicité d’autres joueurs et à la frustration des défaites. Plus généralement, il s’inscrit dans la maîtrise de l’engagement important que suppose la pratique de ce loisir sérieux où il faut à la fois « jouer le jeu » pleinement pour rester compétitif et de ne pas « trop tomber dans le jeu » jusqu’à en perdre le goût. En cela, le cas de FUT permet d’observer une socialisation conjointe à l’argent et au jeu.</p>
<p>Tout cela suggère le rôle des jeux vidéo dans la socialisation à l’argent et l’intérêt de reconnaître les compétences, par exemple en gestion, que les joueurs y développent et parfois étendent hors du jeu. Celles-ci restent encore peu visibles et vues peu légitimes car acquises dans un contexte ludique. Les monnaies dans les jeux vidéo apparaissent pourtant porteuses d’apprentissages, qu’il convient de mieux reconnaître et intégrer.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203715/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les monnaies virtuelles comme celles utilisées dans le célèbre jeu de football apparaissent porteuses d’apprentissages, qu’il convient de mieux reconnaître et intégrer.Sarah Maire, Assistant Professor in Accounting and Control, Ph.D., IÉSEG School of ManagementCaterina Trizzulla, Maître de conférences en Marketing, Université de LorraineRenaud Garcia-Bardidia, Professeur des universités en Sciences de Gestion, Université de Bourgogne – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1960832022-12-12T18:35:55Z2022-12-12T18:35:55ZCoupe du monde : qu’est-ce qui nous pousse à devenir fans de sélections étrangères ?<p>L’organisation de la Coupe du monde au <a href="https://theconversation.com/fr/topics/qatar-39492">Qatar</a> a soulevé de nombreuses controverses, des <a href="https://theconversation.com/coupe-du-monde-2022-le-contre-la-montre-du-qatar-pour-gagner-la-bataille-des-mentalites-193156">droits de l’homme aux droits environnementaux</a>, en passant par des questions moins exigeantes mais toujours importantes, à l’image de <a href="https://www.lemonde.fr/football/article/2022/11/18/coupe-du-monde-2022-la-consommation-d-alcool-aux-abords-des-stades-interdite-a-deux-jours-du-coup-d-envoi_6150504_1616938.html">l’interdiction de la consommation d’alcool</a> aux abords des stades décrétée le 18 novembre dernier, à deux jours de l’ouverture de la compétition.</p>
<p>Dans cette édition pas comme les autres du Mondial de football, qui prendra fin le 18 décembre, les supporters se sont également distingués, notamment au travers un phénomène bien particulier qui a retenu l’attention de plusieurs médias internationaux : celui des « faux fans ».</p>
<p>À première lecture, il semblerait que certaines personnes, notamment d’Asie du Sud-Est et du Moyen-Orient, aient été invitées à prêter main-forte à l’animation de l’événement sportif (<a href="https://sports.orange.fr/football/coupe-du-monde/article/des-faux-fans-au-mondial-le-qatar-dement-exclu-CNT000001UPPXN.html">ce que le Qatar dément</a>). Le phénomène est d’autant plus curieux que ces personnes ont affiché un soutien particulièrement marqué à des équipes européennes et sud-américaines comme la France, l’Allemagne, l’Espagne, l’Argentine ou encore le Brésil.</p>
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<figcaption><span class="caption">Coupe du monde : qui sont vraiment ces supporters indiens d’autres nations au Qatar ? (<em>Le Parisien</em>, 17 novembre 2022).</span></figcaption>
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<p>À la veille des demi-finales, il se pourrait d’ailleurs que nombreux supporters affluent autour des stades habillés aux couleurs argentines, croates, marocaines ou françaises bien qu’ils n’aient aucun rapport avec le pays en question – si ce n’est leur attrait personnel pour l’équipe de football.</p>
<p>Au-delà des polémiques sur la sincérité de leur soutien, la participation de ces supporters s’avère intéressante pour mieux comprendre l’imbrication du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/football-20898">football</a>, de la consommation et de l’identité dans un monde globalisé. Pour comprendre cette intrigue, qui peut également faire, quand leurs équipes ne sont plus dans le jeu (comme c’est le cas des Italiens dans cette édition), d’un Français ou d’un Allemand un supporter du Brésil ou de l’Argentine où il n’est jamais allé (et réciproquement), trois clés de lecture sont nécessaires.</p>
<h2>Une question d’identité</h2>
<p>Les fans sont des consommateurs qui présentent un engagement émotionnel intense envers leurs équipes préférées. Cette implication passionnée n’est pas innée, elle s’articule dans le vécu émotionnel. Elle s’exprime par un travail affectif par lequel les fans partagent et diffusent leur passion pour l’équipe qu’ils soutiennent.</p>
<p>Souvent, plus que pour l’équipe, les fans ont un lien particulier avec un joueur qu’ils érigent en idole. L’<a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/SBM-12-2018-0107/full/html">identification au joueur</a> pousse alors les supporters à s’identifier à l’équipe nationale de ce dernier. Au Qatar, par exemple, des fans indiens déclarent soutenir l’Angleterre parce qu’ils sont, avant tout, des <a href="https://www.telegraph.co.uk/world-cup/2022/11/15/england-greeted-indian-expats-qatar-world-cup-2022/">fans de David Beckham</a> (qui ne joue plus en sélection depuis des années…).</p>
<p>Plus généralement, les fans peuvent utiliser la popularité de telle ou telle équipe nationale, de tel joueur célèbre ou même de la popularité de l’événement de la Coupe du monde lui-même <a href="https://academic.oup.com/jcr/article-abstract/42/5/727/1856841">au profit de leur identité</a>. Par exemple, les fans peuvent exploiter la visibilité de l’événement sur les réseaux sociaux pour gagner eux aussi en visibilité, à travers les mots-clés et les republications.</p>
<p>Ainsi, la participation à la Coupe du monde ou le soutien à une équipe étrangère traditionnellement gagnante permet aux fans d’offrir au public au sens large une meilleure image d’eux-mêmes.</p>
<h2>Une question d’appropriation</h2>
<p>Les consommateurs deviennent fans lorsqu’ils « s’approprient » leur équipe préférée, par exemple en prenant des photos avec le maillot ou les gadgets de l’équipe et en les postant sur les réseaux sociaux.</p>
<p>En général, l’appropriation est l’acte de prendre quelque chose pour son propre usage. En <a href="https://books.google.fr/books?printsec=frontcover&vid=LCCN96016175">anthropologie culturelle</a>, par exemple, l’appropriation évoque la façon dont certains groupes sociaux s’emparent souvent d’objets et d’expressions appartenant à l’origine à une autre culture.</p>
<p>C’est ce qui se passe au Qatar, où des groupes de supporters du Moyen-Orient ou d’Asie du Sud-Est se sont approprié les objets de consommation liés aux équipes nationales européennes et sud-américaines qu’ils soutiennent.</p>
<p>D’un point de vue <a href="https://theconversation.com/fr/topics/marketing-21665">marketing</a>, nous avions identifié dans nos travaux l’appropriation comme l’un des <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/EJM-09-2020-0722/full/html?skipTracking=true">trois moments clés de l’expérience du consommateur</a>, avec l’acquisition et l’appréciation.</p>
<p>Cependant, là où les consommateurs se limitent, pour un bien classique, à l’acquisition, qui fait référence à la production, à la livraison et à l’accès au produit ; et à l’appréciation qui concerne le plaisir et les significations tirés de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/consommation-20873">consommation</a> ; les fans vont au-delà en s’appropriant les biens au travers de pratiques culturelles une fois qu’ils les ont acquis et appréciés.</p>
<h2>Une question de reconnaissance</h2>
<p>Vues de l’extérieur, les communautés de fans (également appelées « fandoms ») apparaissent comme un tout cohérent. En réalité, comme nous l’avons montré dans nos recherches, elles ont cependant tendance à <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/1469540518773822?journalCode=joca">s’organiser autour de hiérarchies sociales</a> basées sur les compétences, les connaissances et la passion des fans pour leur équipe culte.</p>
<p>Cette articulation interne a deux implications principales. Tout d’abord, cela trace une frontière claire entre « nous » et les autres « autres », là où les autres sont précisément les non-fans, c’est-à-dire, toutes les personnes étranges au monde des fans. Deuxièmement, il produit des sous-groupes au sein du fandom lui-même. Ces sous-groupes sont en compétition entre eux pour être reconnu comme les plus légitimes de la culture fandom.</p>
<p>Par exemple, certains groupes de hooligans ont tendance à se définir comme des « hardcore » fans et à cataloguer les autres sous-groupes de « softcore » ou de « faux fans ».</p>
<p>Ces derniers sont donc le produit d’un combat de légitimité, dans lequel la passion des fans est un élément déterminant dans la construction de leur identité.</p>
<h2>Au-delà des nations</h2>
<p>D’un point de vue socioculturel, le phénomène des faux fans semble révéler une contradiction existante dans le monde du football. D’une part, l’organisation de la Coupe du monde est encore vue comme un terrain de compétition entre nations et nationalismes. En d’autres termes, le match agit comme un <a href="https://www.fayard.fr/sciences-humaines/sport-et-civilisation-9782213028569">simulacre d’un conflit</a> dans lequel la violence entre nations (pensez aux guerres menées par des armées nationales) est remplacée par une rencontre sportive.</p>
<p>D’autre part, la Coupe du monde semble <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/14660970.2019.1616264">dépasser la question nationale</a>, se transformant en un outil de participation et d’adhésion de personnes culturellement éloignées du monde du football mais qui souhaitent faire partie d’un événement à résonance planétaire.</p>
<p>C’est ici que le phénomène des « faux fans », et plus généralement des mouvements de fans mondiaux, semble s’inscrire. La FIFA a bien compris l’importance des supporters pour le développement de ses événements. Désormais, les tensions existantes entre l’identité nationale et personnelle des fans devraient donc peser davantage sur les évolutions du <a href="https://theconversation.com/topics/football-20898">football</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196083/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gregorio Fuschillo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le soutien de supporters du Moyen-Orient ou d’Asie du Sud-Est à des équipes comme le Brésil ou l’Allemagne traduit des bouleversements profonds dans le rapport aux équipes nationales de football.Gregorio Fuschillo, Professeur Associé de marketing, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1945872022-11-16T14:27:28Z2022-11-16T14:27:28ZLe boycott de la Coupe du monde aura ses limites, mais le Qatar ne s’en sortira pas indemne<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/495482/original/file-20221115-11-eoau6e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C12%2C8614%2C5716&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un homme se prend en photo sur la corniche de Doha, capitale du Qatar, le 11 novembre 2022. Les multiples scandales dans l'organisation de l'événement vont ternir la réputation du pays hôte.</span> <span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Hassan Ammar)</span></span></figcaption></figure><p>Après 36 ans d’attente, l’équipe masculine canadienne de soccer va participer pour la deuxième fois de son histoire à la Coupe du monde 2022 qui se déroulera au Qatar. La compétition commence le 20 novembre et se conclut le 18 décembre prochain.</p>
<p>L’événement, d’envergure planétaire, qui suscite ferveur et passion, est malencontreusement entaché par la nomination comme pays hôte du Qatar, <a href="https://www.amnesty.org/fr/location/middle-east-and-north-africa/qatar/report-qatar/">jugé liberticide et discriminatoire par Amnesty International</a>, et par les préparatifs de la compétition.</p>
<p>Je suis passionné par le soccer (le football) depuis de nombreuses années. J’ai vécu de grands moments individuels et collectifs lors des Coupes du monde précédentes. Or, celle-ci au Qatar me laisse perplexe. Je m’interroge sur le boycott ou non de la présente édition, à titre d’amateur et de sociologue.</p>
<p>En adoptant une sociologie de l’engagement, je souhaite ainsi décortiquer les principaux scandales qui ont secoué le monde sportif, associatif et politique depuis cette nomination, et les limites des appels au boycott qu’on entend depuis.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/495486/original/file-20221115-13642-wtm1rn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/495486/original/file-20221115-13642-wtm1rn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/495486/original/file-20221115-13642-wtm1rn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/495486/original/file-20221115-13642-wtm1rn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/495486/original/file-20221115-13642-wtm1rn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/495486/original/file-20221115-13642-wtm1rn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/495486/original/file-20221115-13642-wtm1rn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des activistes protestent contre la tenue de la Coupe du monde et appellent au boycott de l’événement lors d’une manifestation devant l’ambassade du Qatar à Paris, le 15 novembre 2022. Les manifestants ont rendu hommage aux travailleurs migrants qui sont morts pendant les travaux de construction.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Francois Mori)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Scandale sportif et politique</h2>
<p>Depuis l’attribution de la Coupe du monde au Qatar, en décembre 2010, <a href="https://www.france24.com/fr/sports/20221019-une-coupe-du-monde-achet%C3%A9e-depuis-2010-des-soup%C3%A7ons-de-corruption-p%C3%A8sent-sur-le-qatar">il existe des soupçons de corruption</a>. L’émirat gazier aurait acheté la prestigieuse compétition. Son <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/cultures-monde/du-palais-de-l-elysee-aux-couloirs-de-la-fifa-une-attribution-sous-influence-6306577">dossier technique était le moins bon de tous les candidats</a>.</p>
<p><a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/cultures-monde/du-palais-de-l-elysee-aux-couloirs-de-la-fifa-une-attribution-sous-influence-6306577">Plusieurs enquêtes de la part des autorités américaines, suisses et françaises</a> corroborent la présence de pot-de-vin.</p>
<p>Cela s’ajoute à la <a href="https://www.lapresse.ca/sports/soccer/2022-11-10/documentaire-sur-netflix/la-corruption-a-la-fifa-exposee.php">longue liste de scandales touchant la gouvernance de la FIFA</a> depuis des décennies.</p>
<h2>Scandale des conditions de travail</h2>
<p>En 2021, le quotidien britannique <a href="https://www.theguardian.com/global-development/2021/feb/23/revealed-migrant-worker-deaths-qatar-fifa-world-cup-2022"><em>The Guardian</em></a> a publié les résultats d’un rapport sur les conditions de travail des travailleurs migrants (majoritairement en provenance du Népal et du Bengladesh). Pour la période de 2011 à 2020, près de 6 750 de ces travailleurs étrangers seraient morts lors des travaux des infrastructures qatariennes (il a fallu construire une dizaine de stades).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/495487/original/file-20221115-21-j9vuxu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/495487/original/file-20221115-21-j9vuxu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/495487/original/file-20221115-21-j9vuxu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/495487/original/file-20221115-21-j9vuxu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/495487/original/file-20221115-21-j9vuxu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/495487/original/file-20221115-21-j9vuxu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/495487/original/file-20221115-21-j9vuxu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Des travailleurs s’affairent aux derniers préparatifs en vue de la Coupe du monde, à Doha, le 12 novembre 2022. Des milliers d’entre eux seraient morts pendant les travaux de construction. Le Qatar nie les abus.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Hassan Ammar)</span></span>
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</figure>
<p>Les conditions de travail ont maintes fois été dénoncées par les <a href="https://www.theguardian.com/global-development/2019/oct/07/sudden-deaths-of-hundreds-of-migrant-workers-in-qatar-not-investigated">médias</a> et les organisations non gouvernementales (ONG), telles que <a href="https://www.hrw.org/news/2022/10/24/will-qatar-and-fifa-remedy-abuse-migrant-workers">Human Rights Watch</a> et <a href="https://www.amnesty.fr/campagnes/qatar-2022-coupe-du-monde-football-ramenez-la-coupe-a-la-raison">Amnesty International</a>. Outre l’extrême chaleur et la rémunération aléatoire, une majorité de travailleurs se sont vu leur passeport confisqué.</p>
<h2>Scandale des droits de la personne</h2>
<p>Outre la discrimination envers les femmes, le Qatar « <a href="https://www.hrw.org/fr/news/2022/07/11/la-coupe-du-monde-de-la-honte-la-fifa-neglige-les-droits-des-lgbt-au-qatar">réprime les droits des personnes LGBT et punit les relations sexuelles entre personnes de même sexe d’une peine pouvant aller jusqu’à sept ans de prison</a>. »</p>
<p>Le Qatar a garanti que les personnes LGBT+ ne seront pas discriminées, mais Human Rights Watch a récemment « <a href="https://www.liberation.fr/societe/droits-des-femmes/mondial-2022-le-qatar-accuse-de-maltraiter-des-personnes-lgbt-20221024_NW63RYGABBGCHHYPUELBVOFHAU/">documenté six cas de passage à tabac sévères et répétés et cinq cas de harcèlement sexuel en garde à vue entre 2019 et 2022</a> » envers des personnes LGBT+.</p>
<p>Par ailleurs, l’ancien footballeur international qatari et ambassadeur de la Coupe du monde 2022, Khalid Salman, <a href="https://www.lemonde.fr/football/article/2022/11/08/un-ambassadeur-qatari-du-mondial-2022-qualifie-l-homosexualite-de-dommage-mental_6148958_1616938.html">a qualifié il y a quelques jours l’homosexualité de « dommage mental »</a>.</p>
<h2>Scandale environnemental</h2>
<p>La compétition se déroulera au milieu du désert et, pour une première fois de son histoire, la Coupe du monde aura lieu en hiver. Malgré cette mesure pour atténuer les conséquences des chaleurs extrêmes du pays, les stades seront climatisés. Ajoutons que plus de 150 trajets quotidiens en avion sont prévus pour déplacer les supporters vers les stades.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/495485/original/file-20221115-17-dvb80b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/495485/original/file-20221115-17-dvb80b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/495485/original/file-20221115-17-dvb80b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/495485/original/file-20221115-17-dvb80b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/495485/original/file-20221115-17-dvb80b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/495485/original/file-20221115-17-dvb80b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/495485/original/file-20221115-17-dvb80b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le stade Khalifa International, à Doha, au Qatar, le 15 octobre 2022. Comme les autres stades neufs qui accueilleront les compétitions, il sera climatisé durant la durée du tournoi, une ‘aberration écologique ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Nariman El-Mofty)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour les défenseurs de l’environnement, cette compétition est <a href="https://www.france24.com/fr/sports/20221028-qatar-derri%C3%A8re-la-neutralit%C3%A9-carbone-la-coupe-du-monde-du-greenwashing">l’une des plus grandes aberrations écologiques</a> de l’histoire de la Coupe du monde.</p>
<h2>Regarder ou pas la Coupe du monde ?</h2>
<p>À quelques jours du début de la compétition, une question éthique ou morale s’impose aux amateurs : <a href="https://www.francetvinfo.fr/coupe-du-monde/c-est-la-coupe-du-monde-du-scandale-sportifs-politiques-supporters-ils-racontent-pourquoi-ils-boycottent-le-mondial-au-qatar_5450416.html">faut-il ou non regarder la Coupe du monde de football au Qatar</a>, dans un contexte marqué par les nombreuses aberrations humaines, sociales et écologiques de l’évènement ?</p>
<p>Eric Cantona, ancien footballeur français, <a href="https://www.dailymail.co.uk/sport/football/article-10393613/Eric-Cantona-delivers-crippling-verdict-Qatar-World-Cup.html">a lancé le débat en janvier dernier</a> :</p>
<blockquote>
<p>Le Qatar, ce n’est pas un pays de football, c’est seulement une histoire d’argent, et la manière dont ils ont traité les gens qui construisent les stades est une horreur, des milliers de gens sont morts.</p>
</blockquote>
<p>D’autres personnalités publiques ou politiques, comme l’ancien président de la République française François Hollande, ont affirmé qu’elles boycotteraient cette compétition. Pour <a href="https://www.francetvinfo.fr/coupe-du-monde/c-est-la-coupe-du-monde-du-scandale-sportifs-politiques-supporters-ils-racontent-pourquoi-ils-boycottent-le-mondial-au-qatar_5450416.html">l’écrivain Olivier Guez</a>, « c’est la Coupe du monde du scandale, celle qui illustre toutes les dérives du football. »</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1572930849972310017"}"></div></p>
<p>Enfin, des <a href="https://ici.radio-canada.ca/sports/1914813/quotidien-boycotter-coupe-monde-qatar-ile-reunion--">médias</a> et des <a href="https://www.france24.com/fr/sports/20221006-boycott-des-%C3%A9crans-g%C3%A9ants-pour-le-mondial-au-qatar-un-choix-politique-%C3%A9conomique-hypocrite">villes</a>, comme <a href="https://www.ouest-france.fr/sport/coupe-du-monde/coupe-du-monde-2022-a-son-tour-paris-ne-diffusera-pas-les-rencontres-sur-ecran-geant-944106ca-4331-11ed-beb6-555db4e87ef8">Paris</a>, Marseille, Bordeaux ou Lille, ont décidé de boycotter la Coupe du monde pour des raisons morales et économiques. Elles ne diffuseront pas les rencontres sur des écrans géants, comme par le passé.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1575981740380016640"}"></div></p>
<p>Une décision qui ne fait pas l’unanimité. Le maire de Dijon, François Rebsamen, qualifie même le boycott de la compétition de démagogique : « <a href="https://www.france24.com/fr/sports/20221006-boycott-des-%C3%A9crans-g%C3%A9ants-pour-le-mondial-au-qatar-un-choix-politique-%C3%A9conomique-hypocrite">curieusement, aucune voix ne s’est élevée en 2018 lors du Mondial en Russie, alors même que l’armée de Poutine avait annexé la Crimée</a>. »</p>
<h2>Boycotter la Coupe du monde peut-il vraiment changer la donne ?</h2>
<p>Selon les auteures belges Ingrid Nyström et Patricia Vendramin, qui ont écrit <em>Le Boycott</em>, celui-ci <a href="https://www-cairn-info.proxy.bib.uottawa.ca/le-boycott--9782724617108-page-51.htm">« est un cas tout à fait singulier d’articulation des niveaux d’action individuelle et collective »</a>.</p>
<p>Le fait de boycotter un événement sportif représente une action individuelle à portée collective, car la somme des actions individuelles se matérialise dans une action collective.</p>
<p>Individuellement, le boycott est une opportunité citoyenne de manifester son désaccord concernant une situation dont il n’a pas le contrôle (nomination du Qatar) et que les autres voies diplomatiques n’ont pas résolu (les nombreux scandales et l’absence de réponse adéquate des associations membres de la FIFA, des commanditaires et des diffuseurs). Toujours selon les auteurs de <em>Le Boycott</em>, le citoyen <a href="https://www-cairn-info.proxy.bib.uottawa.ca/le-boycott--9782724617108-page-51.htm">« veut agir en son nom propre, en cohérence avec ses valeurs »</a>, tout en exerçant un poids économique à une organisation (perte de revenus). Le citoyen veut avant tout consommer un produit qui s’inscrit dans une logique cohérente avec ses valeurs.</p>
<p>Cela dit, le mouvement de boycott risque de ne rien changer au déroulement de la Coupe du monde. Ce mouvement arrive trop tard, selon plusieurs observateurs.</p>
<p>Ainsi, selon <a href="https://theconversation.com/profiles/eric-monnin-1319122">Eric Monnin, sociologue du sport</a>, le boycott <a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/zoom-zoom-zen/zoom-zoom-zen-du-jeudi-22-septembre-2022-3641289">« n’a aujourd’hui plus beaucoup de sens</a>. Arrêtons de rêver. Il n’y aura pas de boycott significatif parce qu’il y a tellement d’enjeux économiques que, globalement, c’est impossible ! »</p>
<p>En revanche, les nombreux débats sur la pertinence du boycott ou non ont permis de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=B6EDQGr7wlQ">mettre en lumière les enjeux sociaux et environnementaux entourant cette Coupe du monde</a>. Le Qatar a ainsi attiré sur lui des projecteurs qui ont révélé des faits qu’il aurait préféré tenir cachés.</p>
<p>D’ici quelques jours, le partisan de soccer devra décider s’il suivra ou non cette compétition. Il risque de se retrouver coincé entre le désir de vivre des émotions fortes associées à la Coupe du monde tout en voulant être cohérent avec ses valeurs personnelles. <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/Avant-la-coupe-du-monde-au-qatar-les-bleus-s-engagent-par-ecrit-pour-les-droits-humains/1364992">Des joueurs ont manifesté leurs malaises</a>. Une question demeure : jusqu’où les partisans, médias, joueurs, fédérations et commanditaires sont-ils prêts à sacrifier leurs valeurs individuelles ou organisationnelles afin de vivre leur passion ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194587/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian J. Y. Bergeron ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des scandales financiers, humains et environnementaux secouent la Coupe du monde de la FIFA. Même si les appels au boycott n’empêcheront pas la compétition d’avoir lieu, l’image du Qatar sera ternie.Christian J. Y. Bergeron, Professeur en sociologie de l’éducation, L’Université d’Ottawa/University of OttawaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1865172022-10-30T19:56:31Z2022-10-30T19:56:31ZLes enjeux sécuritaires de la Coupe du Monde au Qatar<p>Régime <a href="https://www.puf.com/content/Al_Jazeera_Libert%C3%A9_dexpression_et_p%C3%A9tromonarchie">« rentier, oligarchique et clientéliste »</a>), le Qatar a, comme l’explique le chercheur <a href="http://dx.org/10.1080/19406940.2014.966135">Danyel Reiche</a>, mis en place une politique de <em>soft power</em> par le sport. Celle-ci, initiée à partir de 1995 après la prise de pouvoir du cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani, a été renforcée en 2008 par la <a href="https://www.gco.gov.qa/en/about-qatar/national-vision2030/">Qatar National Vision 2030</a>, un programme ayant pour objectif à la fois de renforcer la sécurité nationale et de garantir le maintien au pouvoir de la famille régnante.</p>
<p>C’est dans ce cadre que, du 20 novembre au 18 décembre (<a href="http://www.dohaaccueil.com/IMG/pdf/fete_nationale.pdf">jour de fête nationale</a>), le Qatar accueillera la 22<sup>e</sup> Coupe du monde FIFA. De vives polémiques ont agité les années séparant l’attribution de la compétition (2010) – controversée et entachée de <a href="https://www.lemonde.fr/football/article/2021/11/19/coupe-du-monde-de-football-2022-l-ombre-tenace-du-soupcon-sur-l-attribution-du-mondial-au-qatar_6102856_1616938.html">soupçons de corruption</a> – de son organisation. Ces polémiques portent notamment sur le <a href="http://www.2022mag.com/qatar-les-couts-du-mondial-2022/">coût des travaux</a> estimé à 200 milliards de dollars ; sur <a href="https://www.geo.fr/environnement/coupe-du-monde-de-football-au-qatar-un-signal-desastreux-pour-la-planete-209896">l’empreinte écologique</a> de l’événement, bien que ce sera le Mondial géographiquement le plus ramassé depuis le tout premier, organisé en 1930 à Montevideo ; sur les conditions de travail sur les chantiers, <a href="https://information.tv5monde.com/info/mondial-2022-des-ouvriers-reduits-en-esclavage-au-qatar-25602">quasi esclavagistes</a> et le <a href="https://www.theguardian.com/global-development/2021/feb/23/revealed-migrant-worker-deaths-qatar-fifa-world-cup-2022">nombre de décès d’ouvriers, pointés en particulier par une enquête du <em>Guardian</em></a>… Liste non exhaustive.</p>
<p>Toutes ces questions sont tout à fait pertinentes mais, à l’approche du Mondial, d’autres interrogations importantes émergent, ayant trait à l’accueil des supporters, ainsi qu’à la sécurité globale.</p>
<h2>Un afflux de touristes inédit</h2>
<p>Le Qatar accueillera durant la Coupe du Monde près de 1,5 million de touristes, pour une population totale de 2,9 millions de personnes (dont 90 % d’immigrés, parmi lesquels Gianni Infantino, le président de la FIFA, qui s’y est <a href="https://information.tv5monde.com/info/gianni-infantino-vit-desormais-au-qatar-un-mauvais-signe-pour-le-football-440800">récemment installé</a> !), sur un territoire équivalent à la région Île-de-France.</p>
<p>Ce Mondial est un important enjeu touristique pour un pays qui accueillait près de 3 millions de touristes par an au milieu des années 2010 (avant le blocus de 2017 et la crise du Covid) Ces supporters se concentreront sur un périmètre très réduit : sept des huit stades se trouvent à Doha ou dans un rayon de 20 km (à Al-Rayyan et Al-Wakrah), et seulement 75 km séparent le stade le plus au Nord (à Al-Khor) de celui le plus au Sud (à Al-Wakrah).</p>
<p>La première partie de la compétition (du 21 novembre au 2 décembre) sera très sensible puisque la phase de poules verra se jouer 48 rencontres, soit quatre par jour, impliquant des déplacements massifs et incessants de huit cohortes de supporters, au contraire des Coupes précédentes où seuls deux équipes et leurs fans se trouvaient simultanément dans une même ville.</p>
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<p>La gestion des flux des foules sera donc un gros enjeu. Helmut Spahn, le directeur de la sécurité de la FIFA, estime que 350 000 supporters seront réunis en même temps à Doha, mais <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/Les-foules-plus-gros-enjeu-de-la-coupe-du-monde-au-qatar/1334474">se montre toutefois confiant</a> :</p>
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<p>« Il faut gérer ça. Mais nous pouvons faire l’histoire et je suis presque sûr que nous y arriverons. »</p>
</blockquote>
<p>Alors qu’il se trouvera pendant cinq semaines sous les yeux des médias du monde, le Qatar ne peut se permettre le moindre faux pas en matière de sécurité. De ce point de vue, il y a deux enjeux majeurs : la sécurité dans l’espace public et dans les stades ; et la lutte contre le terrorisme.</p>
<h2>Sécurité dans l’espace public</h2>
<p>Comment contrôler durant plusieurs semaines ces foules qui, à la différence des très nombreux travailleurs immigrés se trouvant en permanence dans le pays, disposeront de liquidités financières conséquentes puisque les prix du transport aérien et des hôtels sont très élevés, et de beaucoup de temps libre ?</p>
<p>Certains éléments de réponse à cette question ont fait l’objet de nombreuses prises de parole, informations et, aussi, fake news. Ainsi du comportement individuel et collectif dans l’espace public : il est vrai que les <a href="https://www.dohaaccueil.com/Savoir-vivre-et-coutumes">traditions vestimentaires locales exigent la couverture du corps</a>, même si une <a href="https://www.familytravel-middleeast.com/what-to-wear-in-doha-qatar/">certaine tolérance est accordée aux touristes</a>, et les démonstrations d’affection en public heurtent les valeurs culturelles locales et sont proscrites ; quant à la consommation d’alcool et l’ébriété sur la voie publique, elles sont punies par la loi. Toutefois, il est possible de se procurer de l’alcool dans certains restaurants et hôtels internationaux, et la FIFA a annoncé qu’il sera <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/Coupe-du-monde-2022-la-vente-de-biere-autorisee-trois-heures-avant-les-matches/1351908">possible de se procurer de la bière</a> du principal sponsor dans les fan zones trois heures avant et une heure après les matches.</p>
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<p>Il y a peu, une information s’est répandue suite à un <a href="https://www.dailystar.co.uk/sport/football/world-cup-sex-ban-horny-27268714">article du tabloïd <em>Daily Star</em></a>, selon lequel les relations sexuelles hors mariage seraient totalement interdites. Elles le sont effectivement, mais dans la réalité bien peu d’hôtels se préoccupent de la question en demandant un certificat de mariage aux couples, car le personnel est quasi exclusivement étranger.</p>
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<p>En revanche, il est vrai que l’homosexualité n’est pas tolérée au Qatar. Elle tombe <a href="https://www.humandignitytrust.org/country-profile/qatar/">sous le coup de la loi</a> et les personnes reconnues coupables sont passibles de sept ans de prison.</p>
<p>La FIFA <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/moyen-orient/desintox-non-le-qatar-ne-prohibera-pas-les-relations-amoureuses-hors-mariage-pendant-la-coupe-du-monde-de-football_5225215.html">assure toutefois</a> qu’elle s’engage avec le Qatar à « garantir la sécurité et l’accueil chaleureux de tous les participants à la Coupe du Monde de la Fifa. Cela implique de veiller à ce que les activités des forces de l’ordre liées à la Coupe du Monde de la Fifa soient strictement nécessaires et proportionnées. Comme cela a été le cas lors de plusieurs événements internationaux que le Qatar a accueillis, la vie privée des personnes sera respectée. »</p>
<p>Toutefois, les autorités qataries ne s’y sont pas formellement engagées, et des démonstrations ostensibles <a href="https://www.liberation.fr/international/moyen-orient/je-me-suis-dit-que-je-serais-tue-si-quelquun-savait-un-qatari-parle-de-son-homosexualite-a-visage-decouvert-une-premiere-20220523_JQO37KUGOBGNBEV5VQWQNJRB2M">heurteraient les nationaux</a> au point de troubler l’ordre public.</p>
<h2>Coopération sécuritaire internationale</h2>
<p>Si la conférence <a href="https://www.marhaba.qa/qatar-hosts-last-mile-security-conference-for-fifa-world-cup-qatar-2022/">« Le dernier mile de la Coupe du Monde Qatar FIFA-2022 »</a> s’est tenue en mai à Doha, en présence de responsables de la sécurité représentant chacun des 32 qualifiés, le Qatar développe de longue date des coopérations pour relever certains défis tels que la gestion de la menace terroriste, le hooliganisme, les mouvements de foule, les cyberattaques, ainsi que certaines problématiques que les autorités locales ont peu l’habitude de gérer : contrefaçon, consommation d’alcool, actions d’organisations contestataires… </p>
<p>Contrairement aux autres pays arabes du Golfe, le Qatar est en bons termes avec l’Iran, avec qui il partage le North Dome, plus grand gisement de gaz au monde, Téhéran étant même venu à son secours alimentaire lors du blocus de 2017, il est a priori peu probable qu’une attaque vienne d’ici, d’autant plus que l’équipe nationale participe au Mondial. Cependant, du fait que le Qatar a joué les médiateurs lors de la prise de pouvoir des talibans en Afghanistan, une éventuelle menace djihadiste pourrait venir de groupes basés dans ce pays tels que l’Organisation de l’État Islamique-Khorasan, redevenue plus active depuis le départ des Américains et qui a récemment perpétré des attentats à Kaboul et Herat et <a href="https://www.france24.com/fr/moyen-orient/20220813-afghanistan-un-an-apr %C3 %A8s-la-chute-de-kaboul-l-organisation- %C3 %A9tat-islamique-en-embuscade">s’oppose au pouvoir taliban</a>. </p>
<p>Toutefois, aucune menace n’a été proférée. Enfin, last but not least, un rapport commandé en 2010 par le Français Jérôme Vlacke, alors Secrétaire général de la FIFA, notait que la proximité du Qatar avec des pays ayant une présence d’Al-Qaida et son projet d’entasser des millions de fans et les joueurs dans une <a href="https://english.alarabiya.net/sports/2014/06/15/Fifa-ignored-Qatar-terror-risk-ranking-report">zone très centralisée en faisait un lieu à haut risque…</a></p>
<p>Sur ce point, la coopération avec la France (initiée dès les Jeux asiatiques de Doha en 2006) se concrétise en 2019 lors d’une visite au Qatar du premier ministre français de l’époque, Édouard Philippe, puis par un <a href="https://www.francsjeux.com/breves/un-accord-entre-paris-et-doha-sur-la-securite">accord signé à Doha le 21 mars 2021</a>. Le Qatar est alors qualifié de « partenaire stratégique pour la France ». Un <a href="https://www.senat.fr/rap/l21-462/l21-4621.pdf">projet de loi au Sénat</a> en résulte, portant sur les aspects suivants : planification, contre-terrorisme, gestion de l’ordre public, renseignement, sécurité des installations sportives, sécurité des mobilités, moyens spéciaux terrestres, moyens aériens, cybersécurité, sécurité civile.</p>
<p>Des missions d’assistance et de formation seront réalisées auprès des forces intérieures locales (échange d’informations, envoi d’experts et de spécialistes, entraînements en commun). Sont prévus aussi le déploiement de gendarmes, policiers et sapeurs-pompiers, et la mise à disposition de matériels, équipements, véhicules et engins.</p>
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<p>Autre coopération, <a href="https://www.trtfrancais.com/actualites/turquie-et-qatar-discutent-de-la-securisation-de-la-coupe-du-monde-9063168">avec la Turquie</a>, qui a formé 677 membres du personnel de sécurité qataris dans 38 domaines, et déploiera 3 000 policiers anti-émeute, 100 membres des forces spéciales, 50 chiens de détection de bombes et leurs opérateurs, et 50 experts en bombes.</p>
<p>De son côté, le <a href="https://afriqueitnews.com/tech-media/maroc-enverra-equipe-experts-cybersecurite-qatar-coupe-monde-football-2022/">Maroc enverra une équipe d’experts en cybersécurité pendant l’événement</a>, ainsi que plusieurs milliers d’agents pour gérer les foules et éviter les débordements.</p>
<p>Par ailleurs, la Royal Air Force et la Royal Navy britanniques <a href="https://www.telegraph.co.uk/news/2022/05/28/british-army-provide-counter-terror-policing-qatar-world-cup/">fourniront la police antiterroriste</a>, et les États alliés que sont le Royaume-Uni et le Qatar uniront leurs forces au sein d’un Joint Typhoon Squadron pour assurer la police de l’air dans le ciel. De leur côté, les États-Unis (qui disposent, à <a href="https://militarybases.com/overseas/qatar/al-udeid/">Al-Udeid, de leur plus grande base militaire au Moyen-Orient)</a>, participeront à la formation des agents dans les aéroports et à la cybersécurité.</p>
<p>Enfin, l’OTAN <a href="https://www.nato.int/cps/fr/natohq/news_196994.htm">apportera son soutien sécuritaire</a> par une formation contre les menaces posées par les matières chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires (CBRN), par une seconde concernant la protection des personnes importantes (VIP), et une troisième pour contrer les menaces posées par les engins explosifs improvisés.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/psg-manchester-city-si-loin-du-golfe-si-proche-du-golfe-168728">PSG–Manchester City : si loin du Golfe, si proche du Golfe</a>
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<h2>La sécurité est aussi un enjeu de communication</h2>
<p>Le Qatar précise que, pendant le tournoi, un centre de coopération policière internationale sera présent afin de prévenir tout incident. Aussi, le directeur de la sécurité de la FIFA estime-t-il que le risque terroriste est « faible et sous contrôle » comparé aux Coupes du monde précédentes :</p>
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<p>« Nous avons eu des menaces d’attaque terroriste avant un Mondial, des grèves dans la sécurité privée et la police, parfois des problèmes d’infrastructures dans des stades qui n’étaient pas prêts. Ça n’est pas le cas ici. »</p>
</blockquote>
<p>L’accueil du Mondial 2022 est un enjeu d’image considérable pour le Qatar, d’où ces coopérations sécuritaires internationales. D’où, aussi, ces discours de tolérance dont on ne sait s’ils se concrétiseront positivement durant l’événement.</p>
<p>Les vives critiques subies depuis des années en ce qui concerne le non-respect des droits humains et des travailleurs ainsi que l’intolérance des mœurs mettent en évidence la face noire du pays. Tout incident relevant de ces questions pourrait <a href="https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2018-2-page-169.htm">brouiller le message</a> que le Qatar destine au monde concernant la qualité de l’accueil et la tolérance, composants essentiels d’une stratégie d’attractivité touristique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/186517/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Raspaud ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À l’approche de la Coupe du Monde 2022 dans un pays aussi controversé que le Qatar, des questions se posent quant aux enjeux sécuritaires et à la coopération internationale.Michel Raspaud, Professeur des Universités, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1746322022-01-16T17:15:28Z2022-01-16T17:15:28Z2022, une année de sport très géopolitique<p>L’année sportive 2022 promet d’être spectaculaire, autant sur les terrains de jeu qu’en dehors. Plusieurs <a href="https://www.ledevoir.com/sports/658917/jeux-de-puissance">méga-événements sportifs</a> seront organisés, notamment les Jeux olympiques d’hiver et la Coupe du monde de la FIFA, qui se dérouleront respectivement en Chine et au Qatar.</p>
<p>En plus de ces événements se dérouleront également les compétitions annuelles, entre grands matchs, ligues nationales, championnats et tournois internationaux. En janvier déjà, le <a href="https://www.dakar.com/fr">rallye Paris-Dakar</a> est en cours en Arabie saoudite et la Coupe d’Afrique des Nations au Cameroun. En mars, la Ligue des Champions de l’UEFA reprend et en avril, le championnat du monde de Formule 1 redémarre.</p>
<p>Pourtant, le contexte dans lequel chacun de ces événements va se tenir est en train de changer, et ce depuis trois décennies. Le monde du sport, comme le monde en général, est très différent de ce qu’il était <a href="https://journals.openedition.org/chrhc/1569">au XXᵉ siècle</a>.</p>
<p>En 1999, la majorité des courses de Formule 1 se déroulaient en Europe ; en 2022, les Grands Prix européens seront en minorité, des pays comme l’<a href="https://f1experiences.com/fr/2022-azerbaijan-grand-prix">Azerbaïdjan</a> ayant commencé à accueillir des courses. De même, l’Arabie saoudite est devenue la patrie du rallye Paris-Dakar, résultat de l’engagement politique du gouvernement de Riyad en faveur d’<a href="https://www.francetvinfo.fr/sports/automobile/rallye-dakar/rallye-dakar-comment-l-arabie-saoudite-a-mis-le-turbo-pour-redorer-son-image-grace-au-sport_3761243.html">investissements à grande échelle</a> dans le sport.</p>
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<h2>Diplomatie des stades</h2>
<p>La Ligue des Champions de l’UEFA sera à nouveau parrainée par la société publique russe d’énergie Gazprom, comme c’est le cas depuis près de <a href="https://www.lepoint.fr/sport/pourquoi-gazprom-drague-le-sport-europeen-24-10-2012-1520508_26.php">dix ans</a>. Gazprom ne vend rien directement aux consommateurs, mais conclut des accords pour vendre du gaz aux pays. Ces derniers mois, alors que les prix de l’énergie en Europe ont considérablement augmenté, des inquiétudes ont été exprimées quant au fait que Gazprom contrôle les approvisionnements énergétiques à des fins politiques. Certains critiques, comme l’ancien président américain Donald Trump, ont même <a href="https://www.reuters.com/article/us-nato-summit-pipeline-idUSKBN1K10VI">fustigé</a> des pays comme l’Allemagne pour leur dépendance au gaz russe.</p>
<p>Au Cameroun, les quatre stades utilisés pendant la Coupe d’Afrique des Nations ont été construits par la Chine, illustration de la « diplomatie des stades » mise en place par l’Empire du Milieu. Ces stades ont été offerts au Cameroun par Pékin ou ont été financés par des prêts à taux réduit (c’est-à-dire des prêts accordés à des taux inférieurs à ceux du marché). La raison en est que le pays africain possède des ressources naturelles dont la Chine a besoin pour assurer sa subsistance et sa croissance économique continue.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1386794177036537856"}"></div></p>
<p>L’organisation des Jeux olympiques d’hiver par la Chine est également importante, car elle a lieu dans un contexte de relations de plus en plus tendues avec l’Occident. Cette situation est due, par exemple, à des préoccupations concernant la <a href="https://www.geo.fr/geopolitique/comprendre-la-repression-des-ouighours-par-le-regime-chinois-207211">minorité ouïghoure</a> du Xinjiang, ainsi qu’à la façon dont la Chine a traité des questions telles que la mystérieuse <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2021/11/20/affaire-peng-shuai-ce-que-l-on-sait-de-la-disparition-de-la-joueuse-de-tennis-chinoise_6102954_3210.html">disparition</a> de la joueuse de tennis Peng Shuai. En effet, en réponse à cette dernière, la Women’s Tennis Association, basée en Floride, s’est <a href="https://theconversation.com/what-the-peng-shuai-saga-tells-us-about-beijings-grip-on-power-and-desire-to-crush-a-metoo-moment-172375">retirée de Chine</a>, ce qui a mis certains sponsors et athlètes dans une position délicate.</p>
<p>Le gouvernement de Pékin ne semble pas être particulièrement perturbé par ces préoccupations. Il s’agit plutôt pour la Chine d’affirmer sa crédibilité en tant qu’hôte de l’événement, en tant que membre important de l’industrie mondiale du sport et en tant que force économique et politique de plus en plus puissante.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-chine-premiere-puissance-sportive-de-demain-173551">La Chine, première puissance sportive de demain ?</a>
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<p>Le Qatar tient à adopter un ton plus conciliant avec le monde dans ses préparatifs en vue de l’organisation de la Coupe du monde de football de 2022, bien que l’importance du tournoi pour le pays ne soit pas moindre que celle des Jeux olympiques d’hiver pour la Chine. Le plus grand événement de football a servi de base à la construction d’une nation, à l’établissement d’une image de marque et à la projection d’une puissance douce, le petit État du Golfe cherchant à redorer <a href="https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2018-2-page-169.htm">son image et sa réputation</a> dans le monde.</p>
<p>Cela n’a pas été simple, car le Qatar fait toujours l’objet d’un <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/11/19/le-mondial-2022-au-qatar-c-est-un-petit-peu-de-sport-enormement-d-argent-et-des-violations-massives-des-droits-humains_6102649_3232.html">examen minutieux</a> de la part de l’Occident, qui s’inquiète des problèmes liés au marché du travail, à l’égalité et au traitement des groupes minoritaires.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1471165417280479238"}"></div></p>
<p>L’organisation par le Qatar de l’événement phare de la FIFA revêt une dimension géographique évidente, car cette toute petite nation cherche à asseoir sa légitimité et à se protéger dans une région sujette aux conflits. De même, le rôle de plus en plus important de Gazprom en tant que sponsor du sport reflète l’avantage géographique de la Russie, qui dispose d’énormes réserves de ressources naturelles.</p>
<p>Outre la géographie, la politique joue également un rôle au XXI<sup>e</sup> siècle, notamment par le biais du rôle accru que jouent les gouvernements et les États. Par exemple, l’Arabie saoudite dépense des milliards de dollars dans le sport, ce que le gouvernement de Riyad considère comme un moyen de promouvoir un programme de réformes nationales tout en donnant une image plus progressiste au reste du monde.</p>
<h2>Une économie géopolitique du sport</h2>
<p>Sur le plan économique, de nombreux pays considèrent désormais le sport comme un secteur industriel important, capable d’accroître le revenu national, de contribuer à la création d’emplois, de générer des recettes d’exportation et des impôts. Le gouvernement chinois cherche à mettre en place la plus grande économie sportive nationale du monde <a href="https://www.lemonde.fr/sport/article/2021/04/26/le-monde-du-sport-international-n-est-que-le-reflet-du-monde-reel-la-chine-se-positionne-pour-devenir-un-poids-lourd-de-la-geopolitique-du-sport_6078067_3242.html">d’ici 2025</a>, d’une valeur de 750 milliards de dollars. Par ailleurs, <a href="https://www.usine-digitale.fr/article/si-israel-ne-brille-pas-en-sport-la-start-up-nation-se-distingue-dans-la-sport-tech.N679604">Israël</a> veut s’imposer comme un centre mondial de la technologie sportive, tout comme la Corée du Sud veut faire de même dans l’industrie de <a href="https://www.erudit.org/en/journals/ritpu/1900-v1-n1-ritpu04609/1060000ar/abstract/">l’e-sport</a>.</p>
<p>La façon dont la géographie, la politique et l’économie interagissent les unes avec les autres rend nécessaire une nouvelle façon de concevoir le sport, que l’on peut appeler l’économie géopolitique du sport. Après trois décennies de profonds changements, dont la mondialisation et la numérisation, le sport n’est plus seulement une question de compétition sur le terrain de jeu.</p>
<p>Ces changements sont le résultat de l’évolution du pouvoir économique et politique mondial, les nations asiatiques, en particulier, exerçant désormais une influence croissante sur le sport. Dans le même temps, des pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni et la France comprennent que le sport peut apporter des <a href="https://www.cairn.info/revue-savoir-agir-2011-1-page-49.htm">avantages considérables à un pays</a>, comme la projection d’un « soft power » (puissance douce) et la mise en place de relations commerciales plus fortes.</p>
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<p><iframe id="tc-infographic-569" class="tc-infographic" height="100" src="https://cdn.theconversation.com/infographics/569/0f88b06bf9c1e083bfc1a58400b33805aa379105/site/index.html" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-ecouter-les-podcasts-de-the-conversation-157070">Comment écouter les podcasts de The Conversation ?</a>
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<p>L’économie géopolitique du sport soulève toutefois des problèmes majeurs. Par exemple, alors que le Qatar croit être engagé dans la construction d’une nation, les critiques soulignent les problèmes permanents du pays avec son <a href="https://www.francesoir.fr/societe-economie/coupe-du-monde-de-football-en-2022-carton-rouge-pour-la-kafala">système de kafala</a>. Dans le cas de l’Arabie saoudite, qui cherche à devenir un important hôte d’événements sportifs mondiaux, beaucoup accusent le pays de blanchir son image et sa réputation par le biais du <a href="https://www.rfi.fr/fr/emission/20200105-sport-washing-arabie-saoudite-seduire-image-dakar-rigoulet-roze">« sport washing »</a>.</p>
<p>Ainsi, lorsque les fans se préparent cette année à profiter de certains de leurs événements et compétitions préférés, il est bon de se rappeler que le sport reste un jeu important. Même si, de nos jours, il se joue de plus en plus en termes géographiques, politiques et économiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174632/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Simon Chadwick ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>JO d’hiver en Chine, Coupe du Monde de football au Qatar, Paris-Dakar en Arabie saoudite… La carte des méga-événements de l’année révèle l’émergence d’une nouvelle économie géopolitique du sport.Simon Chadwick, Global Professor of Sport | Director of Eurasian Sport, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1731142021-12-21T19:14:46Z2021-12-21T19:14:46ZCoupe du Monde tous les deux ans : une chance pour le football africain ?<p>La Confédération africaine de Football (CAF) a confirmé par <a href="https://fr.cafonline.com/press-release/news/les-associations-membres-de-la-caf-soutiennent-a-l-unanimite-la-proposition-de-c">communiqué</a> qu’elle soutiendrait le projet consistant à organiser dorénavant la Coupe du Monde tous les deux ans porté par la FIFA et son président, Gianni Infantino.</p>
<p>Pour ce dernier, qui se trouve à la tête de l’instance internationale depuis 2015, c’est un premier succès en vue de la mise en œuvre de cette réforme majeure, dont le but est surtout d’apporter de nouvelles ressources à la FIFA. Sa principale source de revenus est, en effet, la Coupe du Monde, organisée tous les quatre ans depuis sa création en 1930. Les autres compétitions de la FIFA (Coupe du monde féminine, Coupe du Monde des clubs, Coupes du Monde masculine et féminine U20 et U17) ne sont pas aussi rémunératrices. Ainsi, sur la période 2011-2014, la Coupe du Monde 2014 organisée au Brésil a représenté 4,8 des <a href="https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/culture-loisirs/la-fifa-un-empire-financier-qui-brasse-des-milliards_AN-201505280174.html">5,7 milliards de dollars de revenus de la FIFA</a>, soit 84,2 %. Le cycle actuel, 2019-2022, s’appuie en grande partie sur le rendez-vous qatari de novembre 2022 et ses <a href="https://publications.fifa.com/fr/annual-report-2020/2020-financials-and-2022-budget/2022-budget/">4,6 milliards de revenus</a> prévus.</p>
<p>La <a href="https://www.fifa.com/fr/tournaments/mens/confederationscup">Coupe des confédérations</a>, lancée en 1992 et abandonnée en 2019, n’a pas été couronnée de succès commercial – même si elle aura été importante politiquement pour démontrer l’universalité du football, dans la mesure où elle offrait la possibilité aux nations championnes d’Afrique ou d’Asie de disputer des rencontres face aux mastodontes du football mondial. L’accroissement du nombre d’équipes qualifiées pour la phase finale de la Coupe du Monde (celle de 2026, tenue conjointement aux États-Unis, au Mexique et au Canada, accueillera 48 équipes, contre 32 précédemment) répond d’ailleurs à ce même impératif politique.</p>
<h2>La lutte pour le contrôle du football mondial</h2>
<p>Le communiqué de la CAN et l’engagement des 52 nations qui l’ont signé constituent certainement un pas important franchi par la FIFA dans sa lutte pour le leadership dans le football face à l’UEFA, la très puissante confédération européenne.</p>
<p>En effet, depuis 1974 et l’élection du Brésilien Joao Havelange à la tête de la FIFA, les stratégies de conquête de pouvoir de l’institution mondiale s’établissent contre l’Europe. D’ailleurs, l’UEFA, est logiquement opposée au changement de fréquence de la Coupe du monde, estimant par la voix de Aleksander Céférin, son président, qu’une telle réforme risquerait de <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/L-uefa-repond-sechement-a-la-fifa-sur-l-idee-d-une-coupe-du-monde-tous-les-deux-ans/1287233">dévaluer la compétition</a>. Une position soutenue par la <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/La-conmebol-finalement-opposee-au-projet-de-coupe-du-monde-tous-les-deux-ans/1284357">Comnebol</a>, la confédération sud-américaine de football. En revanche, les confédérations asiatique (AFC) et d’Amérique du Nord, centrale et Caraïbes (Concacaf) <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/La-confederation-asiatique-d-accord-pour-etudier-la-faisabilite-d-une-coupe-du-monde-tous-les-deux-ans/1285338">y sont favorables</a>.</p>
<p>Il faut dire que, longtemps, les derniers tours des Coupes du monde ont consisté essentiellement en des affrontements entre pays européens et sud-américains. Joao Havelange (1974-1998), puis son successeur Sepp Blatter (1998-2015) ont cherché à donner plus de place et de visibilité aux autres continents, notamment en augmentant le nombre d’équipes participant à la phase finale (de 16 à 24 en 1982, puis à 32 en 1998, et donc à 48 à partir de 2026), ce qui permet de diminuer mécaniquement la part européenne, même si celle-ci reste importante (13 équipes sur 32 pour l’édition 2022).</p>
<p>Il faut rappeler à cet égard que même si les fédérations européennes ont plus de moyens financiers, chaque fédération ne dispose que d’une seule voix au sein des congrès et assemblées générales de la FIFA. Autrement dit, la parole de la France ou de l’Allemagne vaut autant que celle du Soudan du Sud ou de la Malaisie.</p>
<p>Mais depuis les années 1990 et les changements provoqués par les <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=ijYv5pMAVGYC">arrêts Bosman et Malaja</a> qui permettent la libre circulation des joueurs en Europe, ainsi que les réformes de la compétition de clubs phare, la Ligue des Champions, qui ont accru le nombre de clubs qualifiés provenant des pays les plus riches, le football de clubs rivalise en termes d’exposition médiatique avec la Coupe du Monde. Dans le cadre de la Ligue des Champions, tous les meilleurs footballeurs du monde se rencontrent désormais tous les ans et assurent à l’Europe une « machine à cash » lui offrant une puissance financière et une résonance médiatique que lui envie la FIFA.</p>
<h2>Les grandes manœuvres de la FIFA</h2>
<p>Une Coupe du Monde tous les deux ans : l’idée avait déjà germé <a href="https://www.letemps.ch/sport/une-coupe-monde-football-deux-ans-2008">sous Sepp Blatter</a>, mais il avait rapidement rétropédalé à la suite de la levée de boucliers des clubs. Cette fois, le projet a une belle chance de passer.</p>
<p>Porté par <a href="https://www.liberation.fr/sports/2020/10/18/canon-encore-fumant_1802765/">Arsène Wenger</a>, une figure du football international, il comprend une refonte du calendrier qui permettrait aux clubs de bénéficier de leurs joueurs <a href="https://rmcsport.bfmtv.com/football/coupe-du-monde/fifa-wenger-detaille-son-projet-de-calendrier-avec-une-coupe-du-monde-tous-les-deux-ans_AV-202109090286.html">vingt jours de plus que dans la formule actuelle</a>.</p>
<p>Un « geste » vers les clubs, un autre vers les pays n’ayant qu’une faible exposition mondiale : le plan pourrait emporter une majorité de voix en assemblée générale FIFA avec un bloc Afrique-Asie-Océanie opposé au bloc Europe-Amérique du Sud (ce dernier rapprochement vient notamment de se manifester par <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/La-ligue-des-nations-integrera-des-pays-d-amerique-du-sud-a-partir-de-2024/1305865">l'inclusion d'équipes sud-américaines</a> dans les prochaines éditions de la Ligue des Nations organisée par l'UEFA et jusqu'ici réservée exclusivement aux sélections européennes). En projet : une Coupe du Monde tous les deux ans et un plateau d’équipes augmenté de 50 % (changement déjà entériné, en vigueur dès 2026), qui permet plus de rentrées d’argent aux fédérations (que la FIFA a par ailleurs <a href="https://www.francsjeux.com/2021/03/23/a-la-fifa-les-comptes-tombent-toujours-juste/74315">soutenues durant la période d’arrêt liée au Covid-19</a>).</p>
<p>Si l’on comprend les enjeux financiers pour les fédérations africaines, on serait légitiment en droit de se poser la question de la position de la CAF, et surtout du devenir de sa compétition phare, la Coupe d’Afrique des Nations (CAN), qui a lieu tous les deux ans, voire du Championnat d’Afrique des nations (<a href="https://www.jeuneafrique.com/166228/societe/football-mais-au-fait-c-est-quoi-le-chan/">CHAN</a>), le même format réservé aux joueurs qui jouent en Afrique.</p>
<h2>Les difficultés du football africain</h2>
<p>La Coupe d’Afrique des Nations est la seule compétition rentable du continent : les droits marketing et télévisuels sont vendus sous forme de packages, en rajoutant toutes les compétitions organisées par la CAF (Ligue des champions africaine, Coupe de la confédération, CAN féminine, CHAN, CAN u20 et CAN U17), mais la plupart des diffuseurs n’utilisent que les droits sur les matchs de la CAN.</p>
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<figcaption><span class="caption">La médiatisation du football africain : enjeux et perspectives, SIREM sports, 3 juillet 2020.</span></figcaption>
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<p>En dehors de la CAN, les compétitions continentales organisées en Afrique coûtent souvent plus d’argent qu’elles n’en rapportent. Par exemple, faute de moyens, les dotations de la Ligue des champions africaine sont souvent <a href="https://www.jeuneafrique.com/639520/societe/football-la-ligue-des-champions-une-competition-rarement-rentable/">trop faibles pour couvrir les frais</a> des clubs qui y participent.</p>
<p>D’autre part, la fréquence biennale de la CAN a longtemps été présentée comme un outil de développement des infrastructures, notamment sportives. Il faut dire qu’avec ses quatre poules (six depuis 2019), ce sont autant de stades qui sont construits ou remis aux normes, et qui devraient permettre de meilleures conditions de pratique.</p>
<p>Pour autant, la compétition phare du football africain se retrouve confrontée à un problème de format et de position sur le calendrier international. Depuis 2012, la compétition ne s’est jamais déroulée dans le pays prévu, que ce soit à cause de situations politiques incertaines (<a href="https://www.bbc.com/afrique/sports/2011/09/110928_can2013">Libye 2013</a> et <a href="https://www.france24.com/fr/20140823-libye-organisation-coupe-afrique-nations-2017-can-football-tripoli-caf">2017</a>), de conflit institutionnel (<a href="https://www.lefigaro.fr/sports/football/can/actualites/can-2015-le-maroc-perd-l-organisation-722096">Maroc, 2015</a>) ou de retard dans la construction des stades (<a href="https://www.jeuneafrique.com/674970/societe/football-la-can-2019-officiellement-retiree-au-cameroun-par-la-caf/">Cameroun, 2019</a>). La 33<sup>e</sup> édition, qui aurait dû se dérouler cette année, a été décalée à janvier et février 2022 pour cause de Covid-19. Et à quelques semaines de l’ouverture d’une compétition déjà perturbée par le retard dans la livraison de son stade principal, l’association des Clubs européens (ECA) <a href="https://rmcsport.bfmtv.com/football/coupe-d-afrique-des-nations/le-courrier-de-menace-des-clubs-europeens-pour-la-can-2022_AV-202112150299.html">menace de ne pas libérer les joueurs</a> en raison d’une absence de protocole sanitaire délivré par la CAF pour éviter des quarantaines à leur retour.</p>
<p>Si de solutions de remplacement ont été trouvées chaque fois, l’édition 2015, prévue au Maroc (avec un remplacement par la Guinée équatoriale au dernier moment) symbolise les difficultés rencontrées par la compétition. Le royaume chérifien, qui venait d’accueillir la Coupe du monde des clubs avec, entre autres le Real Madrid, <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique-foot/20141108-maroc-maintient-demande-report-can2015-coupe-afrique-nations-football-ebola-ca">demandait un report</a> de la CAN au mois de juin pour mieux l’accueillir. Mais en toile de fond se posait le problème de la libération des joueurs internationaux africains évoluant en Europe (57 % lors de l’édition 2019) que les clubs <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique-foot/20210315-%C3%A9liminatoires-can-2021-de-nombreux-clubs-europ%C3%A9ens-bloquent-leurs-internationaux">rechignent à voir partir</a> un mois en pleine saison.</p>
<p>Cette dépendance à l’égard de l’Europe avait déjà entraîné le passage des compétitions des <a href="https://www.eurosport.fr/football/la-can-les-annees-impaires_sto2326697/story.shtml">années paires aux années impaires</a> pour éviter les doublons les années de Coupe du monde. En 2017, la CAF choisit de déplacer la compétition au mois de juin et de l’élargir à 24 équipes <a href="https://www.jeuneafrique.com/459233/societe/ete-a-24-equipes-revolution-de-can-prevue-2019/">dès l’édition de 2019</a>, avant de revenir sur cette décision pour la CAN 2021 au Cameroun, <a href="https://www.eurosport.fr/football/foot-la-can-2021-se-jouera-au-cameroun-en-hiver-et-non-plus-en-ete-federation_sto7611164/story.shtml">pour des raisons climatiques</a>. L’édition 2023 est <a href="https://www.goal.com/fr/news/la-can-2023-programmee-durant-lete/jzkyiomyw2fe1gbo5l9a9yzd8">déjà menacée</a>, la Coupe du monde 2022 au Qatar se terminant au mois de décembre, soit quelques semaines seulement avant une éventuelle compétition africaine.</p>
<p>D’autre part, il faut également tenir compte de la dépendance accrue du football africain à la FIFA depuis cinq ans et <a href="https://www.lexpress.fr/actualites/1/sport/election-caf-le-malgache-ahmad-ahmad-nouveau-patron-du-foot-africain_1889858.html">l’élection à la tête de la CAF d’Ahmad Ahmad</a>, d’abord largement soutenu, puis lâché par Infantino. Exsangue financièrement après la <a href="http://www.tribunedafrique.com/la-caf-annule-son-contrat-dun-milliard-de-dollars-avec-lagardere-sports/">rupture en 2019 (en raison d’une contestation de la procédure) du contrat</a> signé avec l’agence de marketing Lagardère Sport, qui devait assurer à la CAF au minimum un milliard de dollars jusqu’en 2028, l’organisation espère bénéficier des retombées d’une <a href="https://telquel.ma/2020/02/19/mais-ou-va-largent-de-la-fifa-destine-a-la-caf%E2%80%89-4-5_1669573">augmentation des subventions CAF</a> provenant de la FIFA. Dans le cadre de son programme <a href="https://www.fifa.com/fr/football-development/fifa-forward">FIFA Forward</a>, de développement du football, la FIFA finance en effet à hauteur de 12 millions de dollars annuels des projets liés à la pratique du sport-roi (et un million minimum à chaque fédération). Une augmentation des revenus de l’institution augmenterait de fait ces subventions, en plus d’augmenter les montants reversés par les droits TV et marketing. Le 20 décembre, Gianni Infantino a réuni en visioconférence 207 des 211 fédérations membres de la FIFA et a promis une augmentation des subventions de <a href="https://www.ouest-france.fr/sport/football/fifa/coupe-du-monde-tous-les-deux-ans-la-fifa-decide-de-ne-rien-decider-c9bd441e-6234-11ec-8679-ab0fdb9344df">19 millions de dollars</a> par fédération, par cycles de quatre ans.</p>
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<h2>Un coup à jouer pour la CAF</h2>
<p>Quel gage doit donc donner l’Afrique ? Modifier la fréquence de son tournoi, en le passant à un format quadriannuel, comme le demandent un certain nombre d’acteurs, <a href="https://www.lefigaro.fr/sports/scan-sport/actualites/infantino-propose-d-organiser-la-can-tous-les-quatre-ans-991500">dont Gianni Infantino lui-même</a> ?</p>
<p>Paradoxalement, le passage à une Coupe du Monde tous les deux ans pourrait conforter le format biennal actuel. En négociant que la Coupe d’Afrique des Nations devienne qualificative pour la Coupe du Monde, la CAF augmenterait la valeur de sa compétition en bénéficiant de la force commerciale de la maison de Zurich et pourrait continuer de l’organiser les années impaires.</p>
<p>La situation actuelle ouvre donc de nombreuses possibilités. En négociant bien, les neuf places africaines en Coupe du Monde pourraient revenir aux quatre demi-finalistes, les cinq autres places étant réparties à travers un système de barrages avec un mix entre les douze huitièmes de finalistes et des équipes en fonction de leur classement FIFA, ce qui offrirait une deuxième chance aux « grosses » sélections ayant raté leur tournoi.</p>
<p>Une chose est certaine, l’Afrique doit proposer quelque chose, au risque de n’être qu’une arme dans le combat pour la puissance de la FIFA dans la lutte contre les confédérations européenne et sud-américaine. Le match international ouvert au Caire ne fait que commencer. À la CAF de jouer…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173114/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hervé Kouamouo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les dirigeants du football africain ont accepté de soutenir la FIFA dans son projet de Coupe du Monde tous les deux ans. Réelle opportunité ou danger pour le football du continent ?Hervé Kouamouo, Doctorant en sciences sociales du sport, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1724482021-11-23T20:06:56Z2021-11-23T20:06:56ZTransnistrie : exister grâce au football ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/433507/original/file-20211123-21-xy9pp5.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C3%2C1328%2C875&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une affiche en l'honneur du Sheriff, dans le centre de Tiraspol, début novembre 2021. Le slogan proclame : « Sans passé, il n'y a pas d'avenir. »</span> <span class="attribution"><span class="source">L. Aubin</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Phénomène géopolitique et sportif exceptionnel, la présence en Ligue des Champions du Sheriff Tiraspol, qui <a href="https://www.uefa.com/uefachampionsleague/match/2032695--sheriff-vs-real-madrid/">affronte</a> ce mercredi soir le prestigieux Real Madrid, illustre la schizophrénie de la <a href="https://www.jstor.org/stable/26983026">Transnistrie</a>. Ce territoire, qui a fait de facto sécession de la Moldavie en 1992, oscille constamment entre son appartenance juridique à ce pays et sa proximité avec la Russie, qui le soutient financièrement à bout de bras et y dispose d’une <a href="https://www.ege.fr/infoguerre/2019/12/jeux-dinfluence-moldavie">base militaire</a>.</p>
<p>Principale équipe de football de la région séparatiste, construite et financée par la tentaculaire <a href="https://rmcsport.bfmtv.com/football/ligue-des-champions/tiraspol-la-holding-sheriff-le-faiseur-de-rois-de-la-transnistrie_VN-202111020190.html">holding Sheriff</a> contrôlée par l’oligarque Viktor Gouchane, le club joue néanmoins dans le championnat moldave et ses joueurs ont l’autorisation d’évoluer au sein de l’équipe nationale de Moldavie. Le système politico-économico-sportif de la Transnistrie est absolument incomparable. Analyse d’une construction géopolitique inédite, entre sport, corruption et blanchiment d’argent.</p>
<h2>Un « pays qui n’existe pas » ?</h2>
<p>« Toutes les choses que vous verrez ici sont fausses », prévient un passant dans les rues de Tiraspol, la capitale de la Transnistrie. L’arrivée du Real Madrid, <a href="https://sheriff-sport.com/sherif-prinimaet-samyj-titulovannyj-klub-mira/">« le club le plus titré au monde »</a> selon le site Internet officiel du Sheriff, approche et les autorités locales ont donné des consignes. Les bancs sont repeints, les trottoirs sont fleuris, les drapeaux sont hissés. Partout, la faucille et le marteau côtoient les couleurs russes et transnistriennes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/433510/original/file-20211123-23-6rn2az.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/433510/original/file-20211123-23-6rn2az.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=361&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/433510/original/file-20211123-23-6rn2az.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=361&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/433510/original/file-20211123-23-6rn2az.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=361&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/433510/original/file-20211123-23-6rn2az.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=454&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/433510/original/file-20211123-23-6rn2az.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=454&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/433510/original/file-20211123-23-6rn2az.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=454&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Statue de Lénine à Tiraspol. Sur le bâtiment, les drapeaux transnistrien et russe.</span>
<span class="attribution"><span class="source">L. Aubin</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Tout sauf un hasard, l’hôtel de luxe qui accueille l’équipe madrilène s’appelle <a href="https://hotelrussia.md/">« Rossia »</a>. <a href="https://novostipmr.com/ru/news/21-08-13/v-pridnestrove-sozdan-shtab-v-podderzhku-edinoy-rossii">L’antenne locale de Russie unie</a>, le parti de Vladimir Poutine, se trouve dans le bâtiment voisin.</p>
<p>À l’instar des plus belles heures de l’URSS, Tiraspol, où résident 130 000 des 500 000 habitants de la Transnistrie, ressemble à un village Potemkine que les ouvriers cherchent à embellir pour l’occasion. Ici, la plupart des gens disposent de quatre passeports (ukrainien, russe, transnistrien et moldave), comme pour compenser le fait que le passeport transnistrien ne vaut rien à l’échelle mondiale. Et pour cause, la Transnistrie n’est pas reconnue par les Nations unies.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/433515/original/file-20211123-17-19baetd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/433515/original/file-20211123-17-19baetd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/433515/original/file-20211123-17-19baetd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/433515/original/file-20211123-17-19baetd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/433515/original/file-20211123-17-19baetd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/433515/original/file-20211123-17-19baetd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/433515/original/file-20211123-17-19baetd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Devant la Maison des Soviets.</span>
<span class="attribution"><span class="source">L. Aubin</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p><a href="https://www.lejdd.fr/International/voyage-en-transnistrie-le-pays-qui-nexiste-pas-3935025">« Pays qui n’existe pas »</a>, <a href="https://www.lapresse.ca/suite/2019-06-20/voyage/transnistrie-incursion-en-territoire-non-reconnu">« musée soviétique à ciel ouvert »</a>, <a href="https://www.lefigaro.fr/mon-figaro/2014/04/01/10001-20140401ARTFIG00369-dans-l-etat-fantome-de-transnistrie.php">« État fantôme »</a>, « excroissance russe »… les expressions pour qualifier la République moldave pridnestrovienne (PMR), plus connue sous le nom de Transnistrie (littéralement « la terre autour du Dniestr », du nom du fleuve sur la rive gauche duquel elle se situe), ne manquent pas. Pourtant, aucune n’est tout à fait vraie. Si la zone séparatiste dispose de tous les attributs d’un État à l’échelle locale (drapeau, hymne, monnaie, armée), elle possède néanmoins de nombreuses spécificités qui rendent son existence unique.</p>
<p>Tout d’abord, Moscou ne reconnaît pas l’indépendance de la Transnistrie, contrairement à celles des territoires sécessionnistes géorgiens que sont <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/monde/europe/la-russie-reconnait-l-independance-de-l-abkhazie-et-de-l-ossetie-du-sud_554388.html">l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud</a>. Il s’agit, pour le Kremlin, de ne pas froisser un peu plus les autorités moldaves, déjà en proie à des <a href="https://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/rnv_110_vardanean_moldavie_russie_occident_2018.pdf">velléités européennes</a>.</p>
<p>Néanmoins, la présence de la <a href="https://stringfixer.com/fr/14th_Army_involvement_in_Transnistria">14ᵉ armée</a> de la Garde, le Groupe opérationnel des forces russes en Transnistrie, composé de 1 500 soldats et de plus de 22 000 tonnes de matériel militaires et de munitions, laisse penser le contraire. De plus, alors que les banques internationales refusent de s’y installer, Vladimir Poutine reste le principal banquier de la région et son protecteur majeur.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/433514/original/file-20211123-28-1gmqo00.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/433514/original/file-20211123-28-1gmqo00.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/433514/original/file-20211123-28-1gmqo00.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/433514/original/file-20211123-28-1gmqo00.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/433514/original/file-20211123-28-1gmqo00.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/433514/original/file-20211123-28-1gmqo00.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/433514/original/file-20211123-28-1gmqo00.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dans ce magasin, on peut aussi bien acheter des photos de Poutine et de Staline que des jouets pour enfants dérivés de l’application pour smartphone Talking Tom.</span>
<span class="attribution"><span class="source">L. Aubin</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Ce double jeu de la Russie est l’illustration d’une diplomatie à deux vitesses destinée à conserver un contrôle relatif sur la Transnistrie tout en ne rompant pas le contact avec Chișinău, la capitale moldave. Aujourd’hui, l’indépendance de la Transnistrie n’est reconnue par aucun pays au monde.</p>
<p>En outre, <a href="https://www.osw.waw.pl/sites/default/files/punkt_widzenia_26_en.pdf">l’émergence de la Transnistrie des cendres de l’URSS en 1992</a> n’est pas à proprement parler le fruit d’une guerre interethnique – même si la question de la mise en danger du statut de la langue russe est avancée – mais plutôt d’un conflit instrumentalisé par l’élite post-soviétique locale qui voyait d’un mauvais œil l’indépendance de la Moldavie et la rupture des relations avec Moscou. En effet, la province représente 40 % de la production industrielle du pays, et il s’agit pour les élites locales de conserver un contrôle économique sur la région afin de continuer à faire des affaires en paix. Phénomène géopolitique rare dans ce contexte, la Transnistrie ne dispose donc pas de « nation titulaire » mais est composée de Moldaves, d’Ukrainiens et de Russes qui <a href="https://fr.obsfr.ru/report/15204/12059/">cohabitent désormais en paix</a>. L’identité locale repose avant tout sur l’utilisation politique de son passé soviétique, comme l’illustrent les nombreuses références à l’URSS dans les rues de la ville.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/433546/original/file-20211123-24-16pbg3f.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/433546/original/file-20211123-24-16pbg3f.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/433546/original/file-20211123-24-16pbg3f.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/433546/original/file-20211123-24-16pbg3f.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/433546/original/file-20211123-24-16pbg3f.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/433546/original/file-20211123-24-16pbg3f.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/433546/original/file-20211123-24-16pbg3f.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une affiche représentant le Soviétique Iouri Gagarine, premier homme de l’histoire a avoir été dans l’espace, dans le centre de Tiraspol.</span>
<span class="attribution"><span class="source">L. Aubin</span></span>
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<h2>Le Sheriff : l’empire tentaculaire de Viktor Gouchane</h2>
<p>Si, parfois, le temps semble s’être arrêté à l’époque soviétique en Transnistrie, la région est pourtant à la solde d’un conglomérat bien capitaliste : la holding Sheriff. Les rues de Tiraspol sont parsemées de boutiques, d’entreprises ou de supermarchés sur lesquels figure le logo en forme d’étoile de la firme.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/433517/original/file-20211123-25-1s29saw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/433517/original/file-20211123-25-1s29saw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/433517/original/file-20211123-25-1s29saw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/433517/original/file-20211123-25-1s29saw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/433517/original/file-20211123-25-1s29saw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/433517/original/file-20211123-25-1s29saw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/433517/original/file-20211123-25-1s29saw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Publicité pour des cours de natation dispensés au Centre sportif du Sheriff.</span>
<span class="attribution"><span class="source">L. Aubin</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Créée en 1993 par Viktor Gouchane et Ilya Kazmaly, deux anciens des services secrets soviétiques et russes, elle contrôle de nombreux pans cruciaux de l’économie locale. Au milieu des années 1990, elle prend possession du commerce des cigarettes et de l’alcool, avant de lancer en 1996 une chaîne de supermarchés Sheriff, de créer l’année suivante le club de football du Sheriff Tiraspol puis de racheter en 2002 200 entreprises publiques, dont le principal opérateur téléphonique et le seul fournisseur d’accès Internet de la région. Dans la foulée, Igor Smirnov, le premier « président » de Transnistrie au pouvoir entre 1991 et 2011, accorde au Sheriff le statut d’<a href="https://www.kommersant.ru/doc/4593870">« importateur spécial »</a> qui lui permet d’être exonéré de taxes et de droits de douane.</p>
<p>Une dizaine d’années plus tard, en 2012, l’oligarque Viktor Gouchane devient le seul et unique propriétaire de la firme. Il décide de passer à la vitesse supérieure et à prendre le contrôle de l’espace politique local. Dans un premier temps, il se heurte à Evgueni Chevtchouk, président de la PMR entre 2011 et 2016, qui critique ses méthodes. Mais fin 2020, les élections au Conseil suprême de la PMR voient le Parti du Renouveau (Obnovlenie), créé et financé par le Sheriff en 2006, obtenir <a href="https://www.intellinews.com/breakaway-transnistria-fully-under-sheriff-s-control-as-obnovlenie-party-sweeps-board-in-parliament-election-198054/">29 des 33 sièges au Parlement</a>.</p>
<p>En 2021, la firme contrôle donc 60 % de l’économie locale et la quasi-totalité de la politique. Aujourd’hui, la région s’apparente à une matriochka (poupée russe) au sein de laquelle le Sheriff est un <a href="https://www.osw.waw.pl/sites/default/files/punkt_widzenia_26_en.pdf">demi-État</a> dans la Transnistrie, qui est elle-même un État dans l’État moldave.</p>
<h2>Le Sheriff Tiraspol : un club schizophrène ?</h2>
<p>Dans ce contexte, l’univers du sport en Transnistrie est révélateur des enjeux géopolitiques qui parcourent la région.</p>
<p>En 1997, Gouchane et Kazmaly décident de créer le club de football du Sheriff Tiraspol en lieu et place du Tiligul, l’un des premiers clubs privés de l’URSS. Nommé après le conglomérat et la capitale de la région, le Sheriff a pour objectif de nettoyer l’image de la Transnistrie grâce au football et de tenter de faire reconnaître son indépendance à l’échelle mondiale (tout en évoluant, nous l’avons dit, au sein du championnat de Moldavie). Pourtant, les rumeurs de blanchiment d’argent et de corruption qui entourent le jeune club en quête de notoriété lui valent régulièrement d’avoir mauvaise presse.</p>
<p>Face émergée de l’empire de la holding, le Sheriff Tiraspol performe : en 21 saisons dans le championnat moldave, il est sacré champion 19 fois et participe quasiment chaque année aux différentes coupes d’Europe – sa qualification cette saison pour la phase finale de la Ligue des Champions constitue sans doute le plus grand exploit de son histoire, encore magnifié par sa victoire sur le terrain du Real Madrid au match aller, qui a sidéré les observateurs.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1443169955810320388"}"></div></p>
<p>Club phare de la région aux infrastructures ultramodernes et au budget gardé secret, il est le bijou de Viktor Gouchane, son propriétaire officieux, dont les méthodes sportives sont pour le moins musclées. Florin Motroch, milieu de terrain roumain, <a href="https://www.sports.ru/tribuna/blogs/urbanhymns/2964591.html">rapporte</a> à sports.ru qu’un jour Gouchane est entré dans les vestiaires du Sheriff en furie avant de lancer au sol une grenade non dégoupillée pour effrayer les joueurs et les sommer d’augmenter leur niveau de jeu.</p>
<p>En mobilisant des athlètes de haut niveau, des oligarques et des hommes et des femmes politiques pour construire le Sheriff Tiraspol et faire exister la Transnistrie grâce au sport, le système politico-économico-sportif transnistrien mis en place par Viktor Gouchane s’apparente à la <a href="https://theconversation.com/bonnes-feuilles-la-sportokratura-sous-vladimir-poutine-une-geopolitique-du-sport-russe-160805">Sportokratura</a> de Vladimir Poutine, à ceci près que le caractère clientéliste et corrompu du Sheriff semble encore plus notable qu’en Russie. Quand son club phare est en Ligue des Champions et se frotte à des clubs de renom comme l’Inter de Milan ou encore le Real Madrid, le pays qui n’existe pas <em>de jure</em> apparaît <em>de facto</em> « sur la carte » mentale des supporters de football du monde entier. Un premier pas vers la reconnaissance ? La situation est plus complexe.</p>
<p>Depuis sa création, nous l’avons dit, le club participe au championnat moldave – une condition <em>sine qua non</em> pour obtenir l’autorisation de l’UEFA de prendre part aux compétitions européennes. En outre, les meilleurs athlètes de la Transnistrie concourent nationalement sous les couleurs moldaves. De son côté, Chișinău se soumet à cette situation dans la mesure où le niveau et les moyens sportifs de la Transnistrie sont plus élevés qu’ailleurs en Moldavie. Ce jeu de dupes entre la Moldavie et la Transnistrie à travers le sport illustre le <em>statu quo</em> accepté par les deux parties et la nature véritablement schizophrène de leurs relations. Pour l’heure, les uns comme les autres y trouvent leur compte…</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/433535/original/file-20211123-13-z74c99.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/433535/original/file-20211123-13-z74c99.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/433535/original/file-20211123-13-z74c99.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/433535/original/file-20211123-13-z74c99.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/433535/original/file-20211123-13-z74c99.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/433535/original/file-20211123-13-z74c99.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/433535/original/file-20211123-13-z74c99.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dans le centre de Chișinău (Moldavie), les vestiges du sport soviétique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">L. Aubin</span></span>
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</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/172448/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lukas Aubin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le Sheriff Tiraspol est le club phare de la Transnistrie sécessionniste, qui a proclamé en 1992 une indépendance qu’aucun pays au monde ne reconnaît. Le football lui offre une vitrine inespérée.Lukas Aubin, Docteur en Études slaves contemporaines : spécialiste de la géopolitique de la Russie et du sport, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1625712021-06-11T16:15:37Z2021-06-11T16:15:37ZL’Europe de l’Euro<p>En 2020, l’Euro devait fêter ses 60 ans d’existence mais le Covid a retardé d’un an la célébration de cet anniversaire. Comparée à la Copa America (créée en 1916) ou à la Coupe du monde (1930), cette compétition de football quadriennale disputée par des équipes nationales est relativement jeune.</p>
<p>Son <a href="https://halldulivre.com/livre/9782262047122-histoire-du-football-paul-dietschy/">histoire</a> n’en porte pas moins les marques de l’évolution politique, économique et culturelle du vieux continent et constitue un miroir des enjeux contemporains de la mondialisation sportive.</p>
<h2>Européisme footballistique</h2>
<p>L’idée d’un championnat d’Europe des nations est ancienne et remonte aux débuts de l’histoire de la Fédération internationale de football association (FIFA).</p>
<p>Faute de moyens, il ne peut être organisé en 1906. Dans les années 1920, après avoir débattu d’une possible compétition continentale, la Fédération internationale crée finalement la Coupe du monde pensée par le Français Henri Delaunay, secrétaire de la Fédération française de football (FFF), mais dont la paternité est généralement attribuée à son compatriote Jules Rimet, président de la FIFA (1921-1954). La première édition a lieu en 1930.</p>
<p><a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/17460263.2015.1071082">L’Europe du football n’en existe pas moins</a> sous la forme de projets que l’on pourrait qualifier d’européistes au sens où, comme les cartels industriels ou les réunions d’intellectuels de l’entre-deux-guerres, ils ne réunissent que partiellement le continent dans des compétitions internationales et élitaires. En 1927 sont créées la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Coupe_Mitropa">Mitropa Cup</a> et la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Coupe_internationale_europ%C3%A9enne">Coupe Internationale</a>.</p>
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<p>La première oppose chaque année les clubs d’Europe centrale (Autriche, Hongrie, Tchécoslovaquie) et d’Italie. La seconde les équipes nationales des mêmes pays sur une durée bi ou triannuelle. Les deux épreuves qui réunissent le gratin du football européen suscitent les passions nationales et les débordements des supporters, preuve que le football offre un nouveau vecteur au nationalisme.</p>
<h2>La revanche posthume d’Henri Delaunay</h2>
<p>Il faut attendre le milieu des années 1950 pour que des compétitions vraiment continentales voient le jour. Davantage que la construction européenne, ce sont les progrès techniques qui président à leur création.</p>
<p>Les avancées de l’aviation civile, l’installation de l’éclairage nocturne dans les stades et le désir de la presse spécialisée de meubler le milieu de semaine sont en grande partie à l’origine de l’invention de la Coupe des clubs champions (dont la première édition se tient lors de la saison 1955-1956).</p>
<p>La géopolitique du football est aussi en train de changer. Avec la décolonisation, l’Europe et l’Amérique latine risquent de perdre leur magistère sur la FIFA. En 1954, la formation des confédérations continentales est autorisée. L’Union des associations européennes de football (UEFA) <a href="https://www.peterlang.com/view/title/65151">voit alors le jour</a>. Sa première mission consiste à défendre les intérêts des fédérations du vieux continent au sein de la FIFA.</p>
<p>L’UEFA prend aussi en charge les compétitions de clubs (Coupe des clubs champions, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Coupe_des_villes_de_foires">Coupe des villes de foires</a>). Ses dirigeants rechignent toutefois à actualiser le nouveau projet d’Henri Delaunay, promu premier secrétaire général de l’UEFA, d’une Coupe d’Europe des nations.</p>
<p>Après sa mort en 1955, son fils Pierre en défend le principe contre l’Italien Barassi et le l’Anglais Rous, représentants de leurs fédérations nationales respectives, le premier en tant que président, le second comme secrétaire général). Ces derniers arguent de l’encombrement du calendrier et même du « caractère commercial » du projet. En 1958, les résistances tombent : la Coupe d’Europe des nations-Coupe Henri Delaunay est inscrite au calendrier. Son <a href="https://euro-2016-france.net/historique/trophee-uefa-euro">trophée</a>, réalisé par la maison Arthus-Bertrand en forme d’amphore grecque, est offert par la FFF.</p>
<h2>L’Europe de l’Atlantique à l’Oural</h2>
<p>La Coupe d’Europe des nations se déroule en deux temps : une première phase de qualification par matchs aller-retour ; une phase finale comprenant demi-finale et finale dans un même pays.</p>
<p>La première édition a lieu en France devant un public clairsemé et voit le triomphe des footballeurs socialistes : la Tchécoslovaquie, l’URSS et la Yougoslavie ont rejoint le pays hôte. C’est la sélection soviétique qui l’emporte.</p>
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<p>Il est plus facile pour le football de l’Est de s’imposer au niveau des sélections nationales. Les clubs « capitalistes » disposent de moyens nettement supérieurs aux clubs militaires ou ouvriers de l’Est. L’ombre de la guerre froide plane sur les débuts de la compétition. En quart de finale, la fédération espagnole a refusé que son équipe nationale joue contre l’URSS, au motif que prisonniers franquistes <a href="https://www.persee.fr/doc/mat_0769-3206_1985_num_3_1_403928">croupissent encore</a> dans les camps sibériens.</p>
<p>Mais dès 1964, Madrid accueille la phase finale et l’Espagne bat l’URSS en finale, en présence du <em>caudillo</em> Franco. Dès lors, ce qui devient ensuite championnat d’Europe signale la persistance du sentiment national et une Europe du football qui se joue du rideau de fer. Lorsqu’en 1968, les <em>azzurri</em> remportent le titre à domicile, les <em>piazze</em> des villes italiennes se remplissent d’une foule célébrant à nouveau la nation après les années sombres du fascisme.</p>
<p>En 1976, la Yougoslavie de Tito accueille la compétition. L’épreuve des tirs au but, jouée pour la première fois à l’issue de la finale opposant Tchécoslovaques et Allemands de l’Ouest, réunit l’Europe cathodique du football, subjuguée par la « feuille morte » victorieuse du Praguois Panenka.</p>
<h2>L’Euro de 8 à 24</h2>
<p>Le succès télévisuel de la phase finale appelle son élargissement.</p>
<p>À partir de 1980, le championnat d’Europe prend le nom d’Euro et est disputé par huit équipes réparties en deux poules dont les vainqueurs s’affrontent en finale. La compétition devient un haut lieu du tourisme sportif, d’autant que le nombre de participants à sa phase finale augmente : 8 en 1980, 16 en 1996 et 24 à partir de 2016, soit presque la moitié des fédérations membres de l’UEFA – qui compte aussi, parmi ses membres, la <a href="http://lactusport.fr/kazakhstan-israel-turquie-que-font-ils-en-zone-uefa/">Turquie, Israël et le Kazakhstan</a> pour des raisons sportives et politiques.</p>
<p>La confédération a voulu s’adapter aux conséquences de la prolifération étatique post-1991 (éclatement de l’URSS et de la Yougoslavie) et s’ouvrir aux petites fédérations dans une démarche autant clientéliste qu’égalitariste, car elle permet de satisfaire et d’obtenir les votes des petites fédérations, un dessein suivi par Michel Platini, président de 2007 à 2015. L’attribution à deux pays (Belgique-Pays-Bas, 2000), Autriche-Suisse (2008) ou Pologne-Ukraine (2012) permet aussi de satisfaire plus de fédérations candidates à l’organisation.</p>
<h2>Entre patriotisme consumériste et nationalisme agressif</h2>
<p>Les supporters-touristes de l’Euro sont généralement issus des classes moyennes et professent un <a href="https://journals.openedition.org/gc/816">patriotisme</a> festif et bon enfant dans le sillage des <em>roligans</em> danois, pacifiques amateurs de bière et de football.</p>
<p>Mais l’Euro dévoile aussi la face sombre du football. Dès 1980 en Italie, les matchs sont perturbés par des hooligans anglais xénophobes auxquels se joignent à partir de 1988 leurs homologues allemands, néerlandais puis russes, ces derniers étant soupçonnés d’être <a href="https://www.lexpress.fr/actualites/1/societe/euro-2016-l-arrestation-en-france-de-supporters-russes-absolument-inadmissible-selon-lavrov_1802504.html">manipulés par le régime de Poutine</a>.</p>
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<p>Malgré la construction de stades à places assises et une politique sécuritaire entamée en 1996 pour l’Euro anglais, mobilisant polices et services de renseignement de l’Europe occidentale, les agissements de ces groupuscules ultranationalistes constituent encore aujourd’hui, avec le terrorisme, une préoccupation majeure des organisateurs.</p>
<p>Le nationalisme se loge aussi dans le commerce très lucratif des maillots comme l’a révélé la <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/monde/euro-2020-tout-comprendre-a-la-polemique-sur-le-maillot-ukrainien_2152517.html">polémique</a> sur l’écusson ornant la tenue des Ukrainiens et qui constituerait un affront à la Russie. Les supporters des pays des Balkans qualifiés et de la Turquie font assaut de drapeaux, de symboles et de gestes martiaux suggérant que l’Euro est aussi la guerre menée par d’autres moyens.</p>
<h2>Le mega-event sportif en question</h2>
<p>Reste que l’événement est devenu l’une des poules aux œufs d’or de l’UEFA, avec la Ligue des Champions. L’édition 2016 a généré plus de 2 milliards de recettes et produit un bénéfice de 830 millions pour l’UEFA.</p>
<p>En France, elle a fourni l’occasion de construire cinq nouveaux stades (Bordeaux, Lille, Lyon, Marseille, Nice) le plus souvent financés par <a href="https://www.cairn.info/revue-pole-sud-2017-2-page-25.htm">d’ambigus partenariats public-privé</a>.</p>
<p>Comme la Coupe du monde, l’Euro est devenu une fête du printemps, du barbecue et de la promiscuité dans la fanzone, même si, Covid oblige, les stades des douze villes choisies pour fêter son soixantième anniversaire ne seront pas tous remplis. Tout en célébrant toujours la nation sportive, l’édition 2021 sonnera-t-elle le glas des <a href="https://librarysearch.lse.ac.uk/primo-explore/fulldisplay/44LSE_ALMA_DS21161988740002021/44LSE_VU1"><em>mega events</em></a> sportifs, fêtes de la consommation de masse et de la mobilité effrénée ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162571/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Paul Dietschy a reçu des financements de l'Union européenne, du CIES de Neuchâtel, de la FIFA, de la Société Générale.</span></em></p>Retour sur l’histoire de la grande compétition qui oppose les meilleures sélections européennes depuis 1960 et dont la seizième édition vient de débuter.Paul Dietschy, Professeur d'histoire contemporaine, Directeur du Centre Lucien Febvre (EA 2273), Université de Franche-Comté – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1230182019-09-08T18:36:55Z2019-09-08T18:36:55Z« Stades verts », l’intenable promesse de la Coupe du monde au Qatar<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/291082/original/file-20190905-175696-ygbskb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1000%2C702&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Maquette de l'Education City Stadium, à Doha, construit spécialement pour le Mondial.</span> <span class="attribution"><span class="source">Fifg / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>2 décembre 2010, « une date qui restera marquée par l’infamie » pour les générations futures face au désastre écologique qu’elles auront certainement à subir ? S’il est tentant de mobiliser ici la fameuse phrase de Roosevelt, après l’attaque de Pearl Harbor par l’aviation japonaise le 7 décembre 1941, sans doute semble-t-elle un peu excessive. Mais l’est-elle tant que cela si l’on y réfléchit bien ? Le 2 décembre 2010, le comité exécutif de la Fédération internationale de football (FIFA) a effectivement désigné le Qatar comme pays organisateur de la Coupe du monde 2022, donnant lieu au passage à une <a href="https://www.eurosport.fr/football/coupe-du-monde/2022/une-mauvaise-decision_sto2567718/story.shtml">désapprobation publique</a> du président des États-Unis Barak Obama.</p>
<p>Un choix pour de nobles raisons, a-t-on dit avec force : développer le football dans une région peuplée et fervente de football, frustrée de vivre sa passion uniquement par le biais d’écrans TV. Après tout, pourquoi pas ? Très rapidement, toutefois, de multiples controverses n’ont cessé de jeter le doute sur la pertinence du choix politique de la FIFA, d’autant que d’autres pays (dont les États-Unis, mais aussi le Japon et l’Australie), aux infrastructures sportives largement plus développées, étaient également sur les rangs.</p>
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<figcaption><span class="caption">La FIFA a voté : Russie en 2018 et Qatar en 2022 (vidéo AFP, 2010).</span></figcaption>
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<p>Depuis cette désignation, de plus en plus de <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/attribution-du-mondial-2022-au-qatar-platini-laisse-libre-a-l-issue-de-sa-garde-a-vue_2084920.html">zones d’ombre</a> pèsent sur la compétition à venir, qui se déroulera du 21 novembre au 18 décembre 2022, dans l’un des pays les plus riches de la planète, et qui n’aurait probablement pas hésité à recourir à des manœuvres de corruption et de déstabilisation, en bref de manipulation, pour « décrocher la timbale ». Les <a href="https://www.20minutes.fr/sport/2086207-20170614-coupe-monde-2018-ong-denonce-exploitation-ouvriers-impliques-construction-stades">conditions de travail</a> des ouvriers qui construisent les stades ont par ailleurs été dénoncées.</p>
<p>Mais c’est surtout sur l’empreinte écologique de la compétition que les polémiques devraient rapidement se déporter, alors même que l’<a href="http://www.rfi.fr/emission/20190809-une-alerte-giec-epuisement-terres">urgence climatique</a> fait de moins en moins de doute, mois après mois.</p>
<h2>Plus de sueur en 2022</h2>
<p>La critique la plus féroce provient en effet du choix d’une zone géographique marquée par des conditions météorologiques inadaptées pour la pratique du football de très haut niveau. Traditionnellement, les différents mondiaux sont programmés tous les quatre ans à la fin des saisons des championnats européens et sud-américains, soit entre juin et juillet. La température extérieure minimale au Qatar est alors de 30 °C, mais elle peut atteindre 45 °C, voire plus. La FIFA n’a donc eu d’autre choix que d’imposer aux différentes fédérations nationales un déplacement de la Coupe du monde en novembre et décembre, au moment où les températures avoisinent « seulement » les 25 °C, obligeant ainsi tous les championnats européens à introduire une coupure fâcheuse d’au moins sept semaines dans leur propre déroulement.</p>
<p>Malgré tout, il est apparu évident qu’un système de climatisation de chacun des stades s’imposerait pour éviter que les joueurs suffoquent sur le terrain. C’est donc un ensemble de 12 stades avec des ambiances rafraîchies que le Qatar a dû construire ou rénover pour faire face aux exigences de la FIFA, en faisant fi de toute considération écologique. Mais le pays n’est-il pas déjà le roi des émissions massives de CO<sub>2</sub> ?</p>
<p>Selon la Banque mondiale, le Qatar est le pays qui <a href="https://data.worldbank.org/indicator/en.atm.co2e.pc">rejette le plus de CO₂ par habitant</a> dans l’atmosphère, environ 45,4 tonnes par habitant en 2014, alors que la moyenne mondiale s’élève à 5 tonnes par habitant. Ceci est dû à un style de vie (et de consommation) très énergivore, que l’on retrouve dans d’autres pays du Golfe. De ce point de vue, la Coupe du monde 2022 soulève des questions qui ne permettent pas de véritablement rompre avec ce que nous pourrions appeler le <em>syndrome Dubai</em>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291071/original/file-20190905-175696-1yzpyql.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291071/original/file-20190905-175696-1yzpyql.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291071/original/file-20190905-175696-1yzpyql.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291071/original/file-20190905-175696-1yzpyql.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291071/original/file-20190905-175696-1yzpyql.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291071/original/file-20190905-175696-1yzpyql.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291071/original/file-20190905-175696-1yzpyql.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le Qatar rejette presque 10 fois plus de CO₂ par habitant dans l’atmosphère que la moyenne mondiale.</span>
<span class="attribution"><span class="source">EQRoy/Shutterstock</span></span>
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<p>Ainsi, les 12 stades construits ou rénovés témoignent d’une exubérance architecturale et d’une surenchère dans l’usage iconique de l’image comme arme médiatique face aux pays voisins. Ceci est d’autant plus vrai depuis la <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-moyen-orient/pourquoi-le-qatar-est-mis-au-ban-par-l-arabie-saoudite-et-ses-allies_1915121.html">crise diplomatique</a> qui oppose l’Arabie saoudite et le Qatar (juin 2017), avec la menace de créer le canal Salwa qui transformerait le Qatar en île. Face à ces tensions, il apparaît que le Qatar souhaite utiliser la Coupe du monde 2022 pour s’affirmer internationalement au plan géopolitique.</p>
<h2>Presqu’île artificielle</h2>
<p>Si l’exubérance architecturale peut être vue comme une simple vitrine commerciale, avec une conséquence limitée sur l’environnement, il n’en va pas de même pour le fonctionnement proprement dit des stades. En effet, leur usage opérationnel va se heurter au problème majeur de rafraîchissement de l’air qui, par nature, génère des dépenses énergétiques significatives. Gros consommateurs d’électricité, les climatiseurs sont responsables d’une hausse des températures dans les grands centres urbains puisqu’ils rejettent à l’extérieur la chaleur qu’ils ont pompée pour refroidir un logement ou un bureau.</p>
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<figcaption><span class="caption">« The Future of Cooling », vidéo de l’Agence internationale de l’énergie (en anglais).</span></figcaption>
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<p>Certes, le Qatar a cherché à développer des solutions astucieuses pour réduire les dépenses énergétiques liées au rafraîchissement des stades. Par exemple, le Doha Port Stadium est édifié sur une presqu’île artificielle, ce qui permet aux eaux du golfe Persique tout autour d’alimenter le système de climatisation. Il n’en reste pas moins que ces solutions ne peuvent couvrir tous les besoins.</p>
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<figcaption><span class="caption">Présentation du projet de construction du Doha Port Stadium (vidéo 7 Sports, 2018).</span></figcaption>
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<p>Le système de climatisation des stades s’appuie majoritairement sur des <a href="http://www.ecolopop.info/2011/01/qatar-2022-des-stades-climatises-a-l%E2%80%99energie-solaire/12633">panneaux solaires</a>, mais leur rendement obligera certainement à développer des étendues significatives pour créer un confort suffisant à la fois pour les joueurs et pour les plus de 500 000 places disponibles dans les 12 stades.</p>
<p>Des chercheurs britanniques ont réalisé une <a href="http://eprints.whiterose.ac.uk/80962/">modélisation thermique</a> pour évaluer les besoins en termes de climatisation afin d’assurer le respect à la fois de l’indice de stress thermique et des seuils de confort aérothermique. Une estimation de 1 000 km<sup>2</sup> de panneaux solaires paraît ici réaliste pour faire face aux exigences de climatisation, ce qui représente un dixième de la surface totale du Qatar (11 437 km<sup>2</sup>). Ramené à l’échelle de France, cela signifierait recouvrir plus que la région Midi-Pyrénées de panneaux solaires ! Il est donc indubitable que des sources d’énergie rejetant du CO<sub>2</sub> seront nécessaires pour rafraîchir les stades, à moins que le Qatar ne se tourne vers la centrale nucléaire Barakah aux Émirats arabes unis.</p>
<h2>Publicité académique pour les « stades verts »</h2>
<p>On voit par conséquent que l’idée parfois défendue d’une Coupe du monde totalement écologique est avant tout une action efficace de communication qui cherche à vendre un Qatar 2022 respectueux de l’environnement. On pourrait citer par exemple le National Priority Research Programme (NPRP), financé par le Qatar National Research Fund (QNRF), à l’origine d’une contribution académique où les auteurs, pourtant universitaires, se livrent à une présentation quasiment publicitaire des <a href="https://www.europeanjournalofsocialsciences.com/issues/PDF/EJSS_55_4_09.pdf">« stades verts »</a>.</p>
<p>L’un des effets d’annonce les plus médiatiques reste celui de la présence de « stades démontables » après la compétition, ce qui a donné lieu à de très nombreux commentaires élogieux sur différents sites Internet. Or, il s’agit <a href="https://le10sport.com/football/des-stades-demontables-et-climatises-au-qatar-39561">pour l’instant</a> d’un seul stade, le Ras Abu Aboud Stadium, construit avec des matériaux de récupération (dont des conteneurs maritimes), <a href="https://www.linfodurable.fr/environnement/un-stade-tout-en-conteneurs-pour-le-mondial-2022-2194">entièrement démontable</a>, transportable et réutilisable en plusieurs arènes sportives et culturelles. Quid des autres stades ? Le mystère reste entier et les rumeurs courent sur le possible don de l’équivalent de <a href="https://www.ostadium.com/news/1282/le-qatar-va-offrir-170000-sieges-apres-la-cm-2022">170 000 places</a> à l’Afrique après Qatar 2022…</p>
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<figcaption><span class="caption">Le Ras Abu Aboud, un stade démontable (vidéo SportBuzzBusiness, 2017).</span></figcaption>
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<p>On connaît la ferveur populaire, voire la liesse, que génère chaque Coupe du monde. Faut-il ici rappeler que la finale de juillet 2018, opposant la France à la Croatie, a été vue par <a href="http://www.lefigaro.fr/le-scan-sport/2018/12/21/27001-20181221ARTFIG00130-mondial-2018-plus-d-un-milliard-de-telespectateurs-ont-suivi-la-finale.php">1,1 milliard de téléspectateurs</a> à travers le monde ? Les fans se soucient sans doute peu de la « logistique » invisible que sous-entend chaque compétition, et même si <a href="http://www.transition-europe.eu/fr/news/lenvironnement-grand-perdant-de-la-coupe-du-monde-de-football-2018">certaines voix</a> s’élèvent pour stigmatiser le drame écologique qui va se jouer à la fin 2022, il est peu probable qu’elles soient entendues.</p>
<p>Le ministre de l’Environnement du Qatar a d’ailleurs rassuré les esprits chagrins en octobre 2018 : le bilan carbone de Qatar 2022 sera <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/Mondial-2022-le-qatar-promet-un-bilan-carbone-neutre/952595">« neutre »</a>, grâce à un équilibre obtenu entre les émissions de gaz à effet de serre et la capacité des écosystèmes à les absorber. Un discours rôdé, qui satisfait pleinement les instances dirigeantes de la FIFA, mais laisse planer le doute sur la réalité des faits. Est-ce ainsi que les Hommes vivent ? Hélas oui, mon regretté poète…</p>
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<figcaption><span class="caption">« Est-ce ainsi que les hommes vivent ? », Léo Ferré.</span></figcaption>
</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/123018/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gilles Paché ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À elle seule, la climatisation à prévoir pour l’évènement nécessiterait de recouvrir un dixième du pays de panneaux solaires.Gilles Paché, Professeur des Universités en Sciences de gestion , Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1038612018-09-25T13:10:20Z2018-09-25T13:10:20ZDidier Deschamps, ou l’art de capturer la valeur<p>La FIFA a sacré Didier Deschamps <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/Didier-deschamps-elu-entraineur-de-l-annee-par-la-fifa/943309">entraîneur de l’année 2018</a>, lundi 24 septembre. Un trophée honorifique qui vient récompenser la saison du sélectionneur de l’équipe de France de football, sacrée championne du monde à l’issue de la finale remportée face à la Croatie, 4 à 2, le 15 juillet dernier.</p>
<p>Pas sûr pourtant que le choix de la Fédération internationale de football fasse l’unanimité parmi les puristes du ballon rond… Dès la fin du match, certains <a href="http://www.slate.fr/story/164720/coupe-monde-2018-deteste-style-equipe-de-france-football-aime-joueurs">commentateurs</a> pointaient en effet une anomalie : l’équipe de France a gagné avec <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/La-france-sacree-avec-une-faible-possession-historique/923126">« une faible possession historique »</a> : seulement 34,2 %. L’équipe qui a dominé en termes de maîtrise du ballon a donc perdu. Or, si l’on considère que pour gagner, il faut posséder et contrôler toutes les actions, alors ce résultat n’est pas juste.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/237970/original/file-20180925-149961-15j2qrx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/237970/original/file-20180925-149961-15j2qrx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/237970/original/file-20180925-149961-15j2qrx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/237970/original/file-20180925-149961-15j2qrx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/237970/original/file-20180925-149961-15j2qrx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/237970/original/file-20180925-149961-15j2qrx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/237970/original/file-20180925-149961-15j2qrx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="attribution"><span class="source">Rémi Malingrëy</span></span>
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<p>Cette situation peut inspirer une réflexion sur une question essentielle en management stratégique de l’innovation, en l’occurrence les modalités de capture de la valeur créée par une innovation.</p>
<h2>Fermer l’innovation, la réponse classique</h2>
<p>La réponse classique à cette question consiste très souvent à dire que cette capture passe par des droits de propriété intellectuelle, tels que le brevet, les droits d’auteurs, la marque, les dessins et modèles, qu’ils soient utilisés isolément ou bien de manière combinée. L’objectif est alors de chercher à fermer l’innovation aux autres, et de contrôler, via des contrats de licence par exemple, l’entrée de certains acteurs sur le terrain de jeu. En somme, plus l’organisation parvient, premièrement, à détenir une exclusivité de l’ensemble des droits possibles sur une innovation et, deuxièmement, à la protéger en faisant appel au besoin aux arbitres que sont les instances compétentes, plus elle réussit à capturer l’entièreté de la valeur. En d'autres termes, son taux de possession détermine en grande partie la performance de son innovation.</p>
<p>Pourtant, certaines organisations (Flickr, Bandcamp, Wikipédia, Vimeo, etc…) font des choix différents. Elles considèrent l’innovation comme un bien ou un actif dont la propriété et/ou l’usage est partagé et régulé entre plusieurs personnes. À l’instar des Bleus, elles ne possèdent pas l’exclusivité des droits de propriété intellectuelle, en l’occurrence l’<em>usus</em> (l’utilisation de l’objet de la propriété), le <em>fructus</em> (la production à partir de l’objet de la propriété) et l’<em>abusus</em> (ou transformation de l’objet de la propriété). Ces organisations permettent aux autres de contribuer à l’innovation en produisant de nouvelles actions de jeu, qui vont bénéficier à tous ; le parti pris consiste donc à dire que l’accumulation des connaissances apportées par les uns et par les autres améliore le jeu. L’objectif est davantage celui de l’ouverture de l’innovation, de son partage et de sa mise en commun.</p>
<p>En finale, les Bleus ont, semble-t-il, suivi ce modèle d’organisation. Avec une possession moindre du ballon, ils sont néanmoins parvenus à exploiter les occasions pour capturer la valeur et concrétiser leur victoire.</p>
<h2>Encourager la circulation du ballon</h2>
<p>Cela peut paraître surprenant pour une entreprise qui est familière de l’approche de l’innovation par la possession exclusive. Beaucoup moins pour d’autres acteurs, comme ceux du mouvement du logiciel libre, notamment les hackers, pour les membres des nouveaux espaces physiques de conception (FabLabs, makerspaces), ou les participants à des événements tels que les hackathons. Ils développent, codent, conçoivent avec pour finalité la création de nouveautés tout en mettant en commun les résultats avec, au moins, l’ensemble des participants à la conception de l’innovation, et au plus, avec tout un chacun.</p>
<p>L’approche consistant à ne pas posséder exclusivement les droits de propriété d’une innovation peut être rendu possible par les licences <a href="https://creativecommons.org/"><em>Creative Commons</em></a>. Au lieu de considérer les droits de propriété comme un tout monolithique, l’auteur peut choisir quels droits (utilisation, copie, modification, et distribution de l’œuvre) il accorde au public. L’objectif est ainsi d’encourager la circulation du ballon, l’échange et la créativité de l’action entreprise entre le public et l’auteur, selon différents degrés d’ouverture de l’innovation. Ainsi, ce qui prime n’est pas la possession en soi de l’innovation, c’est davantage la transformation du droit accordé et, par là, la créativité avec laquelle cela est fait. Selon cette perspective, que l’équipe de France ait moins possédé le ballon que son adversaire pendant le match importe peu. Notre attention se porte davantage sur le jeu ayant permis la transformation des moments de possession plus que sur le taux de possession en lui-même.</p>
<h2>« Créer, non posséder »</h2>
<p>Les nuances apportées par ces licences à la question de la capture de la valeur créée par l’innovation ouvrent donc des perspectives nouvelles pour les organisations. En revanche, elles poussent à une réflexion plus large sur l’accompagnement réalisé par des experts lors de développement de projets d’innovation. Par exemple, est-ce que les juristes sont sensibilisés à l’existence de cette autre voie ? L’exposent-ils à leurs clients ? En outre, est-elle valorisée par les financeurs au même titre qu’un brevet ? Qu’est-il dit aux managers actuels et futurs sur la capture de la valeur de leur innovation ? Ont-ils conscience de cette diversité des modalités de capture ?</p>
<p>Les réponses à toutes ces questions poussent <em>de facto</em> à interroger les enseignements dispensés sur les bancs des facultés et des écoles, que ce soit en droit privé, en économie et en gestion. Il s’agit, dès lors, d’écouter de près ce que disent les entraîneurs aux joueurs. À quoi sont-ils formés et éduqués ? Sont-ils aussi capables de « créer, non posséder ; œuvrer, non retenir ; accroître, non dominer », comme le dirait le sage chinois Lao Tseu, pour, peut-être, décrocher les étoiles ?</p>
<p>N’attendons pas la prochaine Coupe du Monde pour y réfléchir !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/103861/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bérangère Lauren Szostak est membre des associations scientifiques AIMS, EGOS et RRI. </span></em></p>La victoire de la France en finale de la Coupe du monde malgré une faible possession de balle avait heurté les puristes du football. Les experts en stratégie des organisations, eux, applaudissent.Bérangère Lauren Szostak, Professeur des universités en Sciences de Gestion, Laboratoire BETA, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/997682018-07-12T22:11:29Z2018-07-12T22:11:29ZCoupe du monde de football : pourquoi la Chine et l’Inde sont aux abonnés absents<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/227420/original/file-20180712-27012-ed4eow.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1921%2C1205&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un match amateur à Tilakwadi, en Inde (en 2014).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/juliancorrea/15354912411/in/photolist-poRWva-iyJK7n-c71eNy-6dJq89-99PFpX-He6QHf-nfJER9-s86sNP-oDEn59-p8C9a9-8hmxvS-tSrN5s-d89fmj-ddJtim-G6kcs4-XBw9YG-XzwFx4-HFpQB3-HFq5nu-HM9PVb-GUmaJb-HM9KKC-9kw1R5-oZwTKb-cY7JWW-99xoWY-FpQn1-YiapfJ-9pbfMk-7g7mZX-4x1c25-Jm7dtv-k75LW-c28ihL-GUHysL-c28Ew5-bjQVfX-qBRjFZ-ZgQfMf-JSauvR-qxGPyN-6a77Xd-cY7K3J-pqHzt8-c1UbSS-p8R9PQ-pqHyLM-p9dU2D-foYAdG-p9ezNm">Julian Correa/Flickr</a></span></figcaption></figure><p>Les deux grandes puissances démographiques – 40 % de la population mondiale – sont les grandes absentes de cette Coupe du monde. N’y aurait-il pas de culture et d’amour du foot dans ces pays ? En cette fin de Coupe du monde en Russie, il est intéressant de comprendre pourquoi ils ne sont pas mieux représentés – du moins, pour l’instant – dans l’un des plus grands événements sportifs mondiaux.</p>
<p>Au-delà des aspects culturels, ce sont bien des questions structurelles qui doivent être prises en compte pour comprendre cette situation. À court terme, cependant, celles-ci seraient bien susceptibles de changer pour faire de ces deux géants les nouvelles nations incontournables du foot.</p>
<h2>En Inde,un sport médiatique mais une fédération pauvre</h2>
<p>Quand on pense à l’Inde en matière de sport, le premier réflexe est de penser au cricket, héritage de la colonisation britannique et qui bat des records d’audimat et de revenus. À titre d’exemple, en 2015, les droits de retransmission ont été accordés à 2,5 milliards de dollars et la ligue nationale de cricket aurait contribué pour <a href="https://www.thehindu.com/sport/cricket/2015-indian-premier-league-ipl-contributed-rs115-billion-182-million-to-indias-gross-domestic-product-gdp-says-bcci/article7823334.ece">182 millions de dollars au PIB indien</a>.</p>
<p>Pourtant, le football est un sport médiatiquement populaire puisqu’il est le <a href="https://www.telegraph.co.uk/football/2018/06/10/footballs-new-frontiers-india-china-could-next-global-superpowers/">troisième sport le plus regardé dans le pays</a> (après le cricket et le kabaddi – sport de contact pratiqué dans le sous-continent). 216 millions de personnes auraient ainsi regardé les <a href="https://www.straitstimes.com/asia/south-asia/indias-new-goal">matchs des ligues nationales</a> en 2016.</p>
<p>L’Inde a une ligue nationale de football, la I-Ligue, qui existe depuis 2007 avec 10 clubs participants. Co-existe un championnat professionnel, l’Indian Super League qui regroupe 10 équipes. Toutes deux sont gérées par la <a href="https://www.the-aiff.com/">All-India Football Federation</a> (AIFF), créée au lendemain de l’indépendance en 1948.</p>
<p>Cependant, comparé à d’autres fédérations nationales, l’AIFF est relativement pauvre. Il n’y a d’ailleurs que trois clubs professionnels (Cochin, Mumbai et Pune). En outre, le financement de ces équipes est souvent précaire et contraint. Il est donc actuellement très <a href="http://www.thehardtackle.com/2011/indian-club-football-how-financially-sustainable-is-football-in-india/">difficile de générer des revenus pour le football indien</a>.</p>
<h2>Trezeguet, Anelka et Pires</h2>
<p>Tout d’abord, peu de clubs ont des revenus issus du merchandising, de la vente des tickets ou des droits de télévision (qui vont directement à AIFF et pas aux clubs) et se contentent alors souvent d’un unique sponsor privé. Par ailleurs, l’équipe gagnant la I-League ne reçoit que 5 millions de roupies (soit environ 62 000 euros). Bien peu comparé aux sommes accordées par les autres ligues nationales (en France, le vainqueur de la <a href="https://www.footendirect.com/actualites/combien-gagne-le-vainqueur-de-la-ligue-1-2029.html">Ligue 1 reçoit 17 millions d’euros</a>). Chaque saison est donc une lutte pour le financement et ne permet pas la mise en place de réelles stratégies de développement.</p>
<p>En outre, la <a href="http://www.goal.com/en-in/news/indian-super-league-isl-player-regulations-2018-19-season/z15f1q3ytm0s1bh4abagi97sx">régulation de ces ligues est relativement sévère</a> par rapport aux autres championnats puisque chaque équipe ne peut pas dépenser plus de 175 millions de roupies (soit, environ 2,1 millions d’euros) pour les salaires de ses joueurs.</p>
<p>Par ailleurs, la composition des équipes doit comporter un nombre limité de joueurs étrangers et un seul joueur star (« marquee player »). L’Indian Super League a quand même su recruter quelques joueurs internationalement connus mais plutôt en fin de carrière comme, pour nos stars françaises, David Trezeguet au FC Pune City, Nicolas Anelka au Mumbai FC City ou encore Robert Pires au FC Goa.</p>
<p>Paradoxalement, même dans ce contexte peu favorable, l’Indian Super League attire <a href="https://www.theguardian.com/football/blog/2014/dec/23/india-super-league-fourth-biggest-league">74 millions de téléspectateurs</a> – ce qui la place juste derrière les ligues d’Angleterre, de l’Allemagne et de l’Espagne.</p>
<p>Enfin, l’Inde dispose également d’une équipe nationale, contrôlée par l’AIFF. Mais elle n’a jamais participé à la Coupe du monde et sa dernière qualification à cet événement sportif remonte à 1950. Par ailleurs, aucun joueur de l’équipe nationale n’évolue à l’étranger. L’Inde est, pour l’instant, classée <a href="https://www.financialexpress.com/sports/fifa-rankings-indian-football-team-moves-to-96th-spot-climbs-77-places-in-last-two-years/751983/">96ᵉ équipe mondiale</a>, avec néanmoins une spectaculaire remontée de 77 places en deux ans.</p>
<h2>Manque de motivation du côté du gouvernement… et des familles</h2>
<p>Malgré cette situation précaire, la FIFA regarde l’Inde avec beaucoup d’attention. Le pays a organisé l’année dernière sa première compétition mondiale, la FIFA U-17 World Cup, qui accueille les meilleures équipes mondiales de moins de 17 ans (la Chine, de son côté, avait organisé la première édition en 1985).</p>
<p>Si l’équipe indienne, là non plus, n’a pas réussi à s’imposer sur le podium, le [ <a href="https://www.sportskeeda.com/football/fifa-u17-world-cup-india-2017-breaks-three-attendance-records-on-final-day">record d’affluence de cette compétition</a>] a été battu cette année avec plus d’1,2 millions de spectateurs. Cette compétition a eu aussi pour vertu de renouveler des infrastructures très vieillissantes sur le territoire (26 nouveaux stades ont été construits) et à attirer de nouveaux sponsors pour la I-League.</p>
<p>Pourtant, malgré ce succès et le soutien du premier ministre, on ne relève pas de réelle ambition politique vis-à-vis du développement de ce sport. Les choix liés au développement de la pratique sportive sont peu ambitieux. Si « Mission 11 » (attirer 11 millions d’enfants dans les clubs amateurs, organisé à l’occasion de la FIFA U-17 World Cup) a remporté un franc succès, le nombre d’écoles professionnelles se compte actuellement sur les doigts d’une main.</p>
<p>Ce sont d’ailleurs plus les opérateurs privés et surtout les autres ligues sportives qui soutiennent le projet de développement du football dans le pays. En 2009, la Ligue de Cricket avait même décidé de donner <a href="http://www.goal.com/en-india/news/136/india/2009/08/13/1438041/bcci-grants-rs25-crores-to-all-india-football-federation">250 millions de roupies</a>, soit 3,1 millions d’euros, à l’IAFF. Il en va de même pour les investissements d’infrastructures qui sont incomparablement moins importants qu’en Chine.</p>
<p>Enfin, et c’est également le cas en Chine, les familles indiennes sont en général très réticentes à l’idée que leurs enfants fassent carrière dans le sport, les études étant – notamment pour la classe moyenne – le seul chemin respectable pour s’assurer une vie meilleure. Les familles de ces deux pays préfèrent dépenser leur argent en cours particuliers plutôt qu’en activité extra scolaires et n’encouragent pas du tout leurs enfants dans cette voie.</p>
<h2>En Chine, un sport sur-financé et en cours de régulation</h2>
<p>La situation est très différente en Chine. Le pays cherche à fortement investir dans le développement de sa ligue nationale, la Chinese Super League (à laquelle participent 16 équipes), en offrant des contrats mirobolants pour des joueurs européens et sud-américains – jusqu’à 40 millions d’euros et même <a href="http://www.marca.com/en/football/real-madrid/2018/07/08/5b411e2d268e3e6b538b4651.html">200 millions d’euros pour Cristiano Ronaldo</a>, qui a décliné l’offre – ainsi que pour des coachs de renom afin de former les équipes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/227419/original/file-20180712-27039-17fw7yn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/227419/original/file-20180712-27039-17fw7yn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/227419/original/file-20180712-27039-17fw7yn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/227419/original/file-20180712-27039-17fw7yn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/227419/original/file-20180712-27039-17fw7yn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/227419/original/file-20180712-27039-17fw7yn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/227419/original/file-20180712-27039-17fw7yn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Entraînement en Chine avant un match comptant pour la ligue des Champions d’Asie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/petenowakowski/16336177938/in/photolist-qTzbyj-qTF89x-qem6yi-c9asvS-c9aqFW-5YrTgg-c9atDQ-egmxyB-dX1sbr-qJMUq-99PFpX-9PNn9J-8e1ok9-s86sNP-bsVuV1-tSrN5s-d89fmj-a9JzQt-dVj4JJ-99xoWY-qxGPyN-9GQ84h-da8X1f-dU34Gh-9pbfMk-8w3ARY-qJMWj-qJMZe-qJMZB-qJMVq-qJMUN-oDEn59-dX1e9Q-5XQpk-4KEfX2-tSFgUr-d3AVqb-c1UbSS-qp9tYc-Jm7dtv-ebz7fs-oDEkY1-c28ihL-c28Ew5-bjQVfX-qBRjFZ-pFfECt-spy2DM-r4Aggp-5d3zk2">Pete Nowakowski/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>D’après la FIFA, ces équipes chinoises auraient dépensé durant le mercato hivernal de 2016 environ <a href="https://www.fifatms.com/wp-content/uploads/2016/06/China_fcbusiness_May2016.pdf">300 millions de dollars pour engager des joueurs étrangers</a>, dépassant de 150 millions de dollars le budget des équipes de l’English Premier League (les règles de recrutement et de financement des salaires étant plus flexibles qu’en Inde). Une révolution dans le Landerneau footballistique.</p>
<p>Ces investissements massifs ont fini par engendrer une bulle spéculative ainsi que des phénomènes de <a href="https://sports.vice.com/en_uk/article/qkyp7v/murder-corruption-and-the-demise-of-a-chinese-football-giant">corruption</a> qui <a href="https://www.scmp.com/sport/soccer/article/2063967/why-chinas-fears-over-capital-flight-and-corruption-may-have-dictated">inquiètent d’ailleurs le gouvernement</a> au point de réguler les championnats. En 2012, des matchs truqués ont provoqué l’interruption du championnat pendant quelques mois.</p>
<h2>Une ambition nationale depuis trois ans</h2>
<p>La Chine a clairement fait du football une <a href="https://www.nytimes.com/2017/01/04/world/asia/china-soccer-xi-jinping.html">ambition nationale</a> depuis trois ans, soutenue à grand renfort de déclarations par le Président Xi Jinping, qui vise l’organisation de la Coupe du monde 2034. Depuis ces dernières années, le gouvernement a fait construire des dizaines de milliers de stades de foot à travers le pays et mis en place des programmes de formation dans des centaines de milliers d’écoles et vise la création de 50 000 académies de football. L’idée est de pousser 50 millions de personnes à jouer au foot d’ici 2020, d’avoir 20 000 centres d’entraînement et 70 000 stades.</p>
<p>La Chine a également massivement investi dans les clubs de foots étrangers, notamment européens, en espérant pouvoir capter l’expertise des membres des équipes dirigeantes de ces clubs. Une <a href="https://www.whu.edu/en/public-relations/news-archive/news-singleview/article/report-the-chinese-football-market-1/">étude de la WHU</a> Otto Beisheim School of Management montre que 308 millions de Chinois regarderaient un match de foot au moins une fois par mois et que 237 millions en font leur sport favori (le basket restant encore le sport préféré des Chinois).</p>
<h2>Quand le foot chinois s’éveillera…</h2>
<p>Pour autant, les résultats ne sont pour l’instant par spectaculaires, notamment par rapport à l’Inde qui a investi beaucoup moins d’argent. Si la Chinese Football Association (qui supervise les ligues) date de 1924, la Chine est classée seulement 88<sup>e</sup> au classement de la FIFA. La Chine a certes remporté en 1999 la Coupe du monde féminine de football, mais est actuellement placée à la 13<sup>e</sup> place.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/227417/original/file-20180712-27030-yrkx6g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/227417/original/file-20180712-27030-yrkx6g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/227417/original/file-20180712-27030-yrkx6g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/227417/original/file-20180712-27030-yrkx6g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/227417/original/file-20180712-27030-yrkx6g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/227417/original/file-20180712-27030-yrkx6g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/227417/original/file-20180712-27030-yrkx6g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’équipe féminine chinoise contre le Canada, en 2015, à Edmonton (Canada).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/iqremix/18385409248/in/photolist-u1E2CC-tmqBYH-u1G9GJ-iyJK7n-dhVKem-8yo7ut-d3vRRh-qJMSQ-c9apnW-831h95-82X93P-cavLaE-qTzbyj-qTF89x-qem6yi-c9asvS-c9aqFW-5YrTgg-c9atDQ-egmxyB-dX1sbr-qJMUq-99PFpX-9PNn9J-8e1ok9-s86sNP-bsVuV1-tSrN5s-d89fmj-a9JzQt-dVj4JJ-99xoWY-qxGPyN-9GQ84h-da8X1f-dU34Gh-9pbfMk-8w3ARY-qJMWj-qJMZe-qJMZB-qJMVq-qJMUN-oDEn59-dX1e9Q-5XQpk-4KEfX2-tSFgUr-d3AVqb-c1UbSS">IQRemix/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>L’équipe nationale est, comme en Inde, composée de joueurs qui ne jouent que dans des clubs nationaux et pas à l’étranger, et qui n’ont que peu l’expérience des compétitions internationales. Cette génération a peu été exposée au football dans son enfance et n’a pas eu la chance d’avoir de nombreuses infrastructures et coaching pour développer le travail en équipe (la Chine étant très forte dans les sports individuels).</p>
<p>Avec ces investissements massifs et ce fort soutien politique, le pays a de grandes chances de devenir une nouvelle grande puissance du football en se fixant des objectifs ambitieux, comme elle l’a fait pour les Jeux olympiques et pour exister dans des disciplines dans lesquelles elle était totalement absente il y a vingt ans (comme l’escrime ou la danse classique).</p>
<p>Reste à savoir si le foot en Chine saura réellement susciter un engouement médiatique populaire de long terme. Si l’Inde a largement moins investi, le succès de l’Indian Super League en quelques années d’existence, couplé à un réel intérêt de la part des Indiens pour les championnats européens (et surtout anglais), pourraient ériger le sous-continent comme nouvelle terre d’adoration du ballon rond et de ferveur footballistique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/99768/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Belhoste ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La FIFA lorgne avec intérêt sur ces puissances démographiques, où l’intérêt du public pour le football est croissant, mais où les infrastructures ont encore du mal à suivre.Nathalie Belhoste, Enseignant chercheur, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/986062018-06-25T20:51:15Z2018-06-25T20:51:15ZLe Mondial à Kaliningrad : le football et la « nouvelle Guerre froide » en Baltique<p>Durant la Coupe du monde en Russie, Kaliningrad va accueillir quatre matches de football. Une ville-hôte du Mondial comme les dix autres ? Loin de là : Kaliningrad est un lieu emblématique pour la paix (et la guerre) en Europe. Enclave russe au milieu de l’Union européenne, insérée entre la Pologne et la Lituanie, loin du territoire russe, elle est l’enjeu de rivalités séculaires entre l’Allemagne, la Pologne, la Suède, l’ex-Union soviétique. Depuis quelques années, ce territoire et ses bases militaires sont même au centre de la « nouvelle Guerre froide » que l’OTAN et la Russie se livrent dans la région.</p>
<p>Le choix de cette ville hôte pose, à nouveaux frais, une question classique : le sport peut-il être <a href="http://www.un.org/french/themes/sport/">facteur de paix</a> ?</p>
<h2>Le football, force de paix ?</h2>
<p>L’organisation de la Coupe du Monde de football en Russie a des enjeux géopolitiques conséquents. Ils sont même essentiels <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/0301809112209-le-mondial-nouveau-terrain-du-soft-power-de-poutine-2183631.php">pour la politique extérieure</a> et l’<a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/0301805067779-les-transports-gageure-du-mondial-de-foot-en-russie-2183699.php">économie</a> russes.</p>
<p>Le choix de Kaliningrad lors de ce Mondial peut contribuer à l’abaissement des tensions à plusieurs titres. D’une part, le territoire russe se trouve, comme le site de Pyeongchang en Corée du Sud, à proximité d’une zone de friction stratégique importante. La station de sports d’hiver coréenne des JO 2018 se situait ainsi à une cinquantaine de kilomètres de la ligne de cessez-le-feu intra-coréenne. Kaliningrad est, pour sa part, au contact d’une zone de contact entre l’OTAN, élargi aux États baltes depuis 2004 et à la Pologne depuis 1999, et la Fédération de Russie.</p>
<p>Longtemps négligé, ce territoire est au centre des préoccupations des deux parties, au moins depuis l’annexion de la Crimée en 2014. Organiser une partie de la compétition dans cette zone permettra-t-il d’insuffler un « esprit de Pyeongchang » menant à une reprise du dialogue comme à Singapour entre Kim et Trump ?</p>
<p><a href="http://www.un.org/french/themes/sport/">Le stade rénové de 35 000 places</a> de Kalinigrad accueille <a href="http://jactiv.ouest-france.fr/vie-pratique/transport-voyage/kaliningrad-russes-regardent-vers-louest-86094">des supporters étrangers</a> dans une zone longtemps interdite aux Occidentaux durant l’ère soviétique. Dans la période récente, elle n’était plus accessible aux frontaliers sans visa, achevant d’en faire une forme de « camp retranché » russe au milieu de l’UE.</p>
<p>Le football drainera des fans de Pologne, du Royaume-Uni, de Belgique ou encore de Lituanie dans un territoire qui suscite toutes les inquiétudes au sein des pays riverains en raison du renforcement des bases navales et aériennes dans l’enclave. En l’espèce, c’est donc moins les protagonistes que le décor qui compte en la matière : la Russie peut faire de cette enclave une vitrine destinée à dissiper son image menaçante.</p>
<p>Kaliningrad illustre d’ailleurs les efforts déployés par les autorités russes pour favoriser l’accueil des étrangers durant la compétition : outre le document d’identité spécial prévu pour l’entrée sur le territoire, le <em>supporter ID</em>, les autorités ont lancé un appel à l’hospitalité. C’est notamment le cas de la mairie de Kaliningrad, qui a diffusé un vidéo-clip présentant la ville sous son meilleur jour. <a href="http://fr.fifa.com/worldcup/news/rencontre-de-legendes-a-kaliningrad">Un match des « légendes du football »</a> a été organisé ; un centre hôtelier touristique a été mis en place et une fan zone a été créée.</p>
<p>Tout est fait pour présenter Kaliningrad comme un territoire attrayant et non comme la source de menaces (comme il est perçu dans la région).</p>
<h2>Victime de son intérêt stratégique</h2>
<p>Quatre matches ne suffiront pas pour passer de « la nouvelle Guerre Froide » au dégel dans la région. La tension autour de Kaliningrad a en effet des raisons structurelles.</p>
<p>La ville est victime de son intérêt stratégique : fondée au XIII<sup>e</sup> siècle par les chevaliers teutoniques, l’ancienne Königsberg de Prusse orientale et patrie de Kant est placée à la charnière entre le mondes germanique, polonais, balte et russe. Elle est placée au bord d’eaux libres de glace toute l’année et à l’abri d’une langue de terre, l’isthme de Courlande. Un rêve de stratège…</p>
<p>C’est d’ailleurs pour cette raison que Staline, à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, a veillé à ce qu’elle soit rattachée à la République soviétique de Russie au sein de l’URSS, alors même que la République soviétique de Biélorussie s’intercale entre le territoire et la Russie administrative.</p>
<h2>Le« Grand Jeu » de l’OTAN et de la Russie en Baltique</h2>
<p>Aujourd’hui, dans le dispositif stratégique russe, Kaliningrad et ses bases navales et aéronavales, sont un élément clé pour la Flotte de la Baltique stationnée à Saint-Pétersbourg. Récemment, des bâtiments de guerre équipés de missiles de croisière y ont pris place. La Russie a disposé dans l’enclave les fameuses batteries de missiles de défense anti-aérienne S400 mais aussi <a href="https://fr.sputniknews.com/defense/201806021036637971-baltique-flotte-kalibr/">des missiles Iskander et Kalibr</a>. Elle est donc perçue comme menaçante à Vilnius, Riga, Tallinn, Helsinki et Varsovie.</p>
<p>Du côté de l’Alliance atlantique, les <a href="https://www.huffingtonpost.fr/cyrille-bret/otan-russie-durcissement-blocs-militaires-securite-europe_b_10396566.html">exercices de l’OTAN</a> « BALTOPS », « Anaconda » et « Saber Strike », traditionnels depuis les années 1970, montent en puissance depuis l’annexion de la Crimée en 2014. Et, suite au sommet de l’OTAN à Varsovie en juillet 2016, des troupes occidentales sont déployées en rotation dans les trois Etats baltes et en Pologne.</p>
<p>Tous les schémas militaires de ces exercices intègrent Kaliningrad comme enjeu d’un potentiel conflit hybride ou classique. Ainsi, l’OTAN pointe régulièrement Kaliningrad comme la source des incursions sous-marines, navales et aériennes dans les espaces nationaux des États baltes. Du point de vue de l’OTAN, Kaliningrad est un poste avancé du dispositif militaire russe en plein cœur des territoires de l’Alliance. Cette enclave russe est considérée, à ce titre, comme une source de menaces.</p>
<h2>Pour les Russes, une vigie</h2>
<p>Du point de vue de la Russie, Kaliningrad est, en discontinuité avec le territoire national, une vigie contre l’élargissement puis la remontée en puissance de l’OTAN dans la région. En un mot, Kaliningrad est le <a href="https://fr.sputniknews.com/international/201805271036544098-russie-depute-commentaire-article/">« pire cauchemar de l’OTAN »</a>, selon les termes d’officiels russes. C’est que Kaliningrad est, pour Moscou, un des rares moyens dont elle dispose contre l’élargissement de l’OTAN et l’encerclement américain dont elle s’estime victime, dans la Baltique, en Mer Noire, en Méditerrannée orientale…</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/224694/original/file-20180625-19399-562hzy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/224694/original/file-20180625-19399-562hzy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/224694/original/file-20180625-19399-562hzy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/224694/original/file-20180625-19399-562hzy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/224694/original/file-20180625-19399-562hzy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/224694/original/file-20180625-19399-562hzy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/224694/original/file-20180625-19399-562hzy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=422&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="attribution"><span class="source">IISS</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Par-delà les enjeux sportifs, Kaliningrad est donc au centre du « Grand Jeu » que se livrent Russie et OTAN dans l’espace baltique. Une course aux armements est en cours dans la région : la Suède comme les États baltes ont rétabli la conscription, la Pologne a lancé plusieurs programmes d’armement et consacre plus de 2 % de sa richesse nationale à la défense, la Finlande et la Suède s’interrogent sur leur neutralité historique… Quant à la Russie, elle a engagé un programme décennal de modernisation de ses forces armées en 2009 et a atteint un haut niveau de professionnalisation notamment par l’expédition en Syrie depuis 2015.</p>
<p>Que Kaliningrad apparaisse accueillante aux supporters durant quatre matches est souhaitable. Mais cela ne suffira pas à faire cesser le « Grand Jeu » que se livrent les puissances dans la zone.</p>
<h2>Les fonctions géopolitiques du sport : paix et guerre en Europe</h2>
<p>Quand on aborde les compétitions internationale hautement médiatisées, tous les espoirs se portent sur la fonction pacificatrice du sport : rapprochement des peuples, communion des supporters ou encore sublimation de la concurrence militaire en compétition athlétique. Tous ces phénomènes existent bel et bien même s’ils suscitent des espérances déçues.</p>
<p>Le sommet entre Kim et Trump le souligne, après la « diplomatie du ping-pong » utilisée par Nixon pour se rapprocher de la Chine au début des années 70, et après les résultats obtenus par l’exclusion de l’Afrique du Sud des compétitions internationales pour obtenir la fin de l’Apartheid. Le sport peut contribuer à la paix. Mais il ne suffit pas à arrêter les guerres.</p>
<p>N’oublions pas ses autres fonctions du sport, souvent concurrentes. Les compétitions sportives peuvent tout aussi bien exacerber les tensions que les sublimer et les apaiser. Ainsi, les Jeux olympiques d’été de 2008 organisés à Pékin ont manifesté une puissance chinoise inquiétante pour ses voisins. Kaliningrad peut tout aussi bien servir comme un rappel de la Guerre froide en Baltique.</p>
<p>En définitive, Kaliningrad apparaît comme un bon test sur les pouvoirs (et les impuissances) du sport international.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/98606/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cyrille Bret ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Que Kaliningrad apparaisse accueillante aux supporters durant quatre matches est souhaitable. Mais cela ne suffira pas à faire cesser le « Grand Jeu » que se livrent les puissances dans la zone.Cyrille Bret, Maître de conférences, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/979482018-06-13T22:49:57Z2018-06-13T22:49:57ZPourquoi la Coupe du monde est plus équitable cette année<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/222980/original/file-20180613-32313-1pz0jxh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C112%2C4668%2C2881&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La coupe du monde s'ouvre en Russie.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/ObhCU6Vhoe8">Nathan Rogers/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Il y a quatre ans, j’avais appelé la FIFA à revoir les règles du tirage au sort de la Coupe du monde. Jusqu’alors les 32 équipes qualifiées étaient réparties dans quatre pots essentiellement selon leur zone géographique, chaque groupe étant ensuite composé d’une équipe tirée au sort dans chaque pot. Cette pratique, vieille de 60 ans, produisait des groupes déséquilibrés et pénalisait injustement certaines équipes en augmentant leurs chances de tomber dans un groupe difficile.</p>
<p>A l’époque, ne connaissant aucun journaliste, j’ai simplement proposé mon article au <em>New York Times</em> qui l’<a href="https://www.nytimes.com/2014/06/05/upshot/the-world-cup-draw-is-unfair-heres-a-better-way.html">a publié</a> à ma grande joie ! J’ai ensuite réussi à joindre le rédacteur en chef sports du <em>Monde</em> et le rédacteur en chef digital de <em>El Pais</em>, qui ont eux aussi accepté de publier <a href="https://www.lemonde.fr/coupe-du-monde/article/2014/06/04/il-faut-repenser-le-tirage-au-sort-de-la-coupe-du-monde_4431571_1616627.html">mon texte</a>.</p>
<p>J’ai aussi écrit au président de la FIFA, à tous les vice-présidents de la FIFA, au secrétaire général de la FIFA, ainsi qu’à tous les présidents de confédération, pour les informer de mes travaux. Je n’ai jamais reçu aucune réponse, sauf celle de Michel Platini, alors président de l’UEFA, le 4 juin 2014, jour de la publication de mon article dans le <em>New York Times</em> et <em>Le Monde</em>, par l’intermédiaire de son directeur de cabinet, qui, quelques jours plus tard, a eu la gentillesse de remettre en mains propres mes travaux à l’assistant personnel de Sepp Blatter, alors président de la FIFA. J’espérais bien convaincre la FIFA d’adopter des règles plus équitables.</p>
<h2>Des tirages déséquilibrés</h2>
<p>Les règles du tirage au sort de 2014 étaient particulièrement injustes pour le Chili et les États-Unis. Placés dans des pots relativement faibles pour des raisons géographiques malgré leur bon <a href="https://fr.fifa.com/fifa-world-ranking/ranking-table/men/index.html">classement FIFA</a>, ils allaient automatiquement affronter deux autres bonnes équipes et atterrir dans un groupe relevé.</p>
<p>En simulant des dizaines de milliers de tirages au sort, on pouvait construire les histogrammes de la force du groupe des États-Unis et du Chili. Ceux-ci auraient dû être centrés sur zéro (groupes équilibrés), mais ils penchaient nettement du côté des groupes relevés : États-Unis et Chili avaient atterri dans des groupes difficiles non pas parce qu’ils avaient été malchanceux lors du tirage, mais parce que le tirage était biaisé contre eux.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/223067/original/file-20180613-32342-cboymw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/223067/original/file-20180613-32342-cboymw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/223067/original/file-20180613-32342-cboymw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=252&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/223067/original/file-20180613-32342-cboymw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=252&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/223067/original/file-20180613-32342-cboymw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=252&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/223067/original/file-20180613-32342-cboymw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=316&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/223067/original/file-20180613-32342-cboymw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=316&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/223067/original/file-20180613-32342-cboymw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=316&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les histogrammes représentent un très grand nombre de tirages simulés par ordinateur. Un groupe équilibré serait centré sur 0. En rouge la méthode classique (biaisée et avec un grande variance), en bleue la proposition de nouvelle méthode (plus juste et avec beaucoup moins de variance).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Julien Guyon</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Il est très important que les groupes soient équilibrés : une équipe devrait accéder aux huitièmes de finale non pas parce qu’elle a été chanceuse au tirage en tombant dans un groupe facile, mais parce qu’elle l’a mérité sur le terrain. Il est crucial qu’aucune équipe ne soit désavantagée par les règles du tirage : c’est la condition même d’une compétition juste et équitable.</p>
<h2>La FIFA a entendu le message</h2>
<p>Bonne nouvelle pour les amateurs de football : la FIFA a entendu le message. Cette année, pour la première fois dans l’histoire de la Coupe du monde, la composition des pots a obéi à une logique purement sportive, exception faite du traitement de faveur toujours réservé au pays hôte, la Russie : les 7 meilleures équipes au classement FIFA d’octobre 2017 figuraient dans le pot 1 avec les Russes (formant les 8 têtes de série), les 8 équipes suivantes figureraient dans le pot 2, les 8 suivantes dans le pot 3, et enfin les 8 dernières dans le pot 4, indépendamment de leur confédération (continent) d’appartenance. Par conséquent, cette année, les 8 groupes sont bien équilibrés et aucune équipe ne fut désavantagée, chaque groupe étant toujours composé d’une équipe tirée au sort dans chacun des 4 pots.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"931051929647624192"}"></div></p>
<p>La FIFA a maintenu la règle selon laquelle deux équipes d’une même confédération ne peuvent être tirées au sort dans le même groupe, à l’exception des 14 équipes européennes – un minimum de 1 et un maximum de 2 équipes européennes par groupe est autorisé. Cette contrainte géographique, légitime, explique pourquoi la FIFA a durant plus de 60 ans utilisé des critères géographiques pour former les pots : il devenait alors facile de satisfaire la contrainte lors du tirage, mais au détriment de l’équité et de l’équilibre des groupes.</p>
<p>Comment faire pour imposer la contrainte géographique maintenant que les pots, bâtis par niveau, contiennent des équipes pouvant provenir de tous les continents ? C’est moins évident, surtout si l’on ajoute la contrainte que le tirage doit être simple, utiliser un petit nombre d’urnes et de boules tirées par des mains innocentes, et durer environ une demi-heure. Si l’on vide les pots séquentiellement, sans prêter attention à la contrainte, on risque de placer plusieurs équipes d’un même continent, ou bien trois équipes européennes, dans un même groupe, ce qui est interdit. Il y a quatre ans, <a href="http://ssrn.com/abstract=2424376">dans cet article</a>, j’avais décrit trois méthodes pour résoudre ce problème.</p>
<h2>De nouvelles méthodes plus justes</h2>
<p>La première méthode s’inspire de la manière dont l’UEFA procède pour imposer des contraintes (géographiques et d’exposition télévisuelle) lors du tirage au sort de la phase de groupes de la Ligue des champions. Les pots 1 à 4 sont vidés séquentiellement dans cet ordre, et à chaque fois qu’une équipe est tirée au sort, un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Retour_sur_trace">algorithme de « backtracking »</a> fournit la liste des groupes autorisés pour cette équipe. Un groupe est alors tiré au hasard parmi les groupes autorisés.</p>
<p>Un groupe est admissible si le fait d’y placer l’équipe tirée au sort ne viole pas les contraintes et ne mène pas non plus à une future impasse. Imaginons par exemple que l’Angleterre soit la 7<sup>e</sup> boule tirée du pot 2, que la Colombie soit la dernière boule restant dans le pot 2, et que les deux dernières têtes de série disponibles soient la France et le Brésil. Bien que ces deux adversaires soient a priori admissibles pour l’Angleterre, les Anglais seraient en fait automatiquement placés avec le Brésil, et donc les Bleus avec la Colombie, pour empêcher que Brésil et Colombie se retrouvent ensuite dans le même groupe.</p>
<p>Chacun peut vérifier a posteriori que la liste fournie par l’algorithme était bien correcte. Cette procédure est bonne, bien meilleure que celles utilisées par la FIFA dans le passé. Cependant elle n’est pas parfaite : tous les résultats possibles du tirage au sort ne sont pas équiprobables. Certains tirages sont plus probables qu’ils ne devraient l’être, d’autres moins.</p>
<p>La deuxième méthode corrige ce biais. D’abord une répartition continentale des groupes serait tirée au sort. Par exemple, on saurait à ce stade que la France jouerait contre une équipe sud-américaine du pot 2, une équipe européenne du pot 3 et une équipe asiatique du pot 4. Ensuite seulement les pots 2, 3 et 4 seraient vidés, et chaque équipe tirée au sort irait dans le premier groupe disponible correspondant à son pot et à sa confédération. Contrairement à la précédente, cette procédure n’introduit aucun biais : tous les résultats possibles du tirage au sort seraient maintenant équiprobables. Seul problème : le nombre de répartitions continentales admissibles est si grand (349 920 en 2014 ; 1 672 320 cette année) qu’il est impossible de réaliser le tirage en pratique.</p>
<p>La troisième méthode, que j’avais décrite en 2014 dans <a href="https://www.nytimes.com/2014/06/05/upshot/the-world-cup-draw-is-unfair-heres-a-better-way.html">cet article</a> du <em>New York Times</em> et dans <a href="http://www.lemonde.fr/coupe-du-monde/article/2014/06/04/il-faut-repenser-le-tirage-au-sort-de-la-coupe-du-monde_4431571_1616627.html">cet article</a> du <em>Monde</em>, résout ce problème. Chaque pot serait divisé en deux. Le pot 1a contiendrait les quatre meilleures équipes du pot 1, le pot 1b les quatre autres ; de même pour les autres pots. Pour renforcer l’équilibre des groupes, les équipes du pot 1a seraient tirées au sort contre celles des pots 2b, 3a et 4b ; celles du pot 1b contre celles des pots 2a, 3b et 4a. Pour chacun de ces deux « demi-tirages », le nombre de répartitions continentales admissibles est beaucoup plus faible que pour le tirage complet (24 et 6 en 2014 ; 72 et 18 cette année). On pourrait donc facilement réaliser le tirage en pratique. Autre avantage : couper les pots en deux produirait des groupes encore plus équilibrés. <a href="https://www.nytimes.com/interactive/2014/06/03/upshot/world-cup-draw-simulation.html">Un joli simulateur</a> bâti par le <em>New York Times</em> permet de comparer la procédure 2014 de la FIFA avec la méthode que je suggère.</p>
<p><strong>Pot 1a</strong> : Russie, Allemagne, Brésil, Portugal</p>
<p><strong>Pot 2b</strong> : Colombie, Mexique, Uruguay, Croatie</p>
<p><strong>Pot 3a</strong> : Danemark, Islande, Costa Rica, Suède</p>
<p><strong>Pot 4b</strong> : Maroc, Panama, Corée du Sud, Arabie saoudite</p>
<p><strong>Pot 1b</strong> : Argentine, Belgique, Pologne, France</p>
<p><strong>Pot 2a</strong> : Espagne, Pérou, Suisse, Angleterre</p>
<p><strong>Pot 3b</strong> : Tunisie, Égypte, Sénégal, Iran</p>
<p><strong>Pot 4a</strong> : Serbie, Nigeria, Australie, Japon</p>
<h2>Un tirage plus équilibré mais encore perfectible</h2>
<p>La FIFA a choisi la première méthode, mais au lieu de tirer au sort un groupe parmi les groupes admissibles, elle a choisi le premier groupe admissible dans l’ordre alphabétique des groupes (A à H). Cela a malheureusement faussé les probabilités de tirage pour la Russie, puisqu’elle avait été placée d’office dans le groupe A. La Russie a ainsi eu plus de chances de tomber contre une équipe européenne du pot 2 qu’elle n’aurait dû – ce qui ne l’a pas empêchée de tomber sur l’Uruguay.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"936628925391953920"}"></div></p>
<p>Malgré cela, la procédure garantissait par construction des groupes bien plus équilibrés qu’en 2014, comme le prouve la comparaison des histogrammes de l’écart-type de la distribution de la force des 8 groupes. Plus cet écart-type est faible, plus les 8 groupes sont équilibrés. Les histogrammes sont obtenus en simulant le tirage au sort des milliers de fois. L’histogramme des écarts-type de 2018 est centré sur des plus petites valeurs que celui de 2014. La troisième méthode, en coupant les pots en 2, équilibrerait même encore plus les groupes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/223106/original/file-20180613-32323-1e9f66s.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/223106/original/file-20180613-32323-1e9f66s.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=239&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/223106/original/file-20180613-32323-1e9f66s.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=239&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/223106/original/file-20180613-32323-1e9f66s.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=239&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/223106/original/file-20180613-32323-1e9f66s.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=300&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/223106/original/file-20180613-32323-1e9f66s.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=300&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/223106/original/file-20180613-32323-1e9f66s.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=300&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La méthode suggérée par Julien Guyon, en bleu, assure un écart-type plus faible en moyenne donc des groupes plus équilibrés que la méthode FIFA.e.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Julien Guyon</span></span>
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<h2>Didier Deschamps a-t-il eu de la chance au tirage ?</h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/223100/original/file-20180613-32347-ifni9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/223100/original/file-20180613-32347-ifni9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=486&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/223100/original/file-20180613-32347-ifni9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=486&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/223100/original/file-20180613-32347-ifni9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=486&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/223100/original/file-20180613-32347-ifni9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=611&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/223100/original/file-20180613-32347-ifni9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=611&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/223100/original/file-20180613-32347-ifni9n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=611&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Avec la méthode Guyon, les tirages très faciles et très durs sont moins probables et les groupes bien équilibrés. Le tirage (ligne verticale) montre que la France a en fait été plutôt malchanceuse. Le Pérou peut paraître un adversaire faible, mais a un classement FIFA et Elo élevé. Le Danemark est probablement l’équipe la plus relevée du pot 3.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Julien Guyon</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Pour que les groupes soient encore plus équilibrés, il faudrait remplacer le classement FIFA par un classement plus juste, par exemple le <a href="http://www.eloratings.net/">classement Elo</a> – et traiter le pays hôte comme n’importe quel autre (le tirage au sort a traité la Russie comme une des huit meilleures équipes, alors que c’est la plus faible des 32 équipes en lice d’après le classement FIFA). Voici à quoi auraient alors ressemblé les pots :</p>
<p><strong>Pot 1</strong> : Brésil, Allemagne, Espagne, Portugal, France, Argentine, Angleterre, Colombie</p>
<p><strong>Pot 2</strong> : Belgique, Pérou, Uruguay, Suisse, Croatie, Mexique, Pologne, Danemark</p>
<p><strong>Pot 2</strong> : Suède, Iran, Islande, Sénégal, Serbie, Japon, Costa Rica, Australie</p>
<p><strong>Pot 4</strong> : Corée du Sud, Nigéria, Maroc, Russie, Panama, Égypte, Tunisie, Arabie saoudite</p>
<p>Espagne, Angleterre et Colombie auraient remplacé Russie, Belgique et Pologne comme têtes de série, ce qui semble raisonnable. Les groupes auraient été encore plus équilibrés, surtout si la FIFA avait coupé les pots en deux et avait appliqué la troisième méthode que je suggère. Combiner troisième méthode et classement Elo produirait des groupes extrêmement équilibrés. Une bonne nouvelle ne venant jamais seule, la FIFA <a href="https://resources.fifa.com/image/upload/revision-of-the-fifa-coca-cola-world-ranking.pdf?cloudid=jgxjkdrj1jfwyunjbkha">a récemment annoncé</a> qu’elle allait adopter la formule Elo à partir de juillet 2018. De quoi espérer un tirage au sort de la Coupe du monde 2022 enfin juste et équilibré !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/97948/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Guyon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Après le tirage au sort de la Coupe du monde de football 2018, beaucoup ont dit que Didier Deschamps avait été chanceux. Et si on vérifiait. Les nouveautés de ce tirage.Julien Guyon, Professeur associé, Département de mathématiques, École des Ponts ParisTech (ENPC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/920712018-02-19T22:09:22Z2018-02-19T22:09:22ZLe Kosovo indépendant et le football : « Nous jouons donc nous sommes »<p>Le Kosovo vient de célébrer les dix ans de son indépendance. Si l’euphorie a laissé place à une certaine forme de frustration par rapport aux <a href="https://www.theguardian.com/world/2018/feb/16/kosovo-at-10-challenges-overshadow-independence-celebrations">défis considérables</a> que le pays doit toujours affronter, il est un succès majeur que nul ne peut nier : la reconnaissance du Kosovo par les fédérations internationales de sport, en particulier celle du CIO et de la FIFA en 2015-2016.</p>
<h2>Une stratégie de compensation et d’incitation</h2>
<p>Dans la formule « Nous jouons, donc nous sommes », <em>nous sommes</em> ne renvoie pas à une identité, mais à la certification d’une existence. Un État n’existe sur la scène internationale que s’il est reconnu par les autres États. Or, le Kosovo présente la particularité de ne pas être reconnu par l’ensemble de la communauté internationale (la <a href="http://prishtinainsight.com/barbados-recognizes-kosovo/">Barbade est devenu il y a quelques jours le 116ᵉ État à reconnaître le Kosovo</a>).</p>
<p>Deux tiers de ces reconnaissances sont intervenues rapidement après l’indépendance (le 17 février 2008), pour ensuite devenir décroissantes au fil du temps – ce qui débouche sur une situation figée entre ceux qui ont reconnu le Kosovo et ceux qui n’en ont pas l’intention (la Russie, l’Espagne, etc.).</p>
<p>Cette situation de blocage a conduit à une réorientation de la diplomatie du Kosovo vers des stratégies de reconnaissance alternatives. À partir de 2011-2012, ce petit pays a investi plus massivement d’autres champs de la diplomatie internationale : sportif, culturel ou <a href="http://www.iurisprudentes.it/?p=1064">digital</a> avec l’idée que la reconnaissance du Kosovo par <em>Facebook</em>, par la FIFA, ou par le concours de l’Eurovision revêtait la même importance que la reconnaissance par les chancelleries.</p>
<p>C’est donc à la fois une <a href="http://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/09592296.2016.1169799?journalCode=fdps20&">stratégie de <em>compensation</em> et d’<em>incitation</em></a>. Compensation vis-à-vis du plafond des reconnaissances politiques qui oblige le Kosovo à contourner la difficulté pour rester visible, et incitation en espérant que cette visibilité transversale suscitera de nouvelles reconnaissances politiques.</p>
<p>Le sport représente une arène symbolique de premier ordre dans les relations internationales. Il est considéré comme le moyen le plus rapide et efficace de gagner en notoriété, d’habituer une audience internationale à un drapeau, un maillot, un hymne, des héros etc.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/SZiDeWQERn8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>De fait, le <a href="http://www.lemonde.fr/jeux-olympiques-rio-2016/article/2016/08/07/judo-majlinda-kelmendi-la-septieme-etoile-du-kosovo_4979456_4910444.html">titre olympique de Majlinda Kelmendi aux JO de Rio en 2016</a> a représenté une exceptionnelle vitrine, qui plus est dans un pays – le Brésil – qui ne reconnaît pas le Kosovo. C’est aussi dans ce cadre qu’il faut comprendre les efforts du Kosovo en vue d’adhérer à la FIFA.</p>
<h2>Deux obstacles de taille sur la route de la FIFA</h2>
<p>Dans sa volonté de faire de son pays un membre à part entière de la FIFA, le président de la fédération du Kosovo Fadil Vokrri devait faire face à deux obstacles. Premier d’entre eux : les statuts de la FIFA autorisent les fédérations à adhérer à condition qu’elles émanent d’un pays « reconnu par la communauté internationale ». Dans la pratique, cela signifie être membre de l’ONU. Une formulation assez vague toutefois pour laisser à la FIFA toute sa liberté de décision sans être soumis à des contingences politiques, <a href="http://www.sofoot.com/pour-la-premiere-fois-la-palestine-devance-israel-au-classement-fifa-450539.html">comme l’a montré le cas de la Palestine</a>.</p>
<p>Le second obstacle résidait dans la contre-campagne de lobbying menée par la Serbie et ses alliés pour bloquer le Kosovo dans ses démarches. C’est pourquoi Vokrri a rapidement opéré un changement tactique en ne demandant plus l’adhésion mais, dans un premier temps, mais le droit de jouer des matchs amicaux contre des sélections membres de la FIFA, selon les termes de l’<a href="https://fr.fifa.com/mm/document/affederation/generic/02/14/97/88/fifastatuten2013_f_french.pdf">article 79 des statuts de la FIFA</a>, qui permet théoriquement à la Catalogne ou la Corse de disputer des rencontres internationales.</p>
<h2>Le match FIFA-UEFA</h2>
<p>Par ailleurs, cette bataille du lobbying a été doublée à l’époque d’une bataille entre la FIFA et l’UEFA, au cœur d’enjeux de pouvoir qui dépassent de très loin le sort du Kosovo. Pristina pouvait alors compter sur certaines personnes à la FIFA comme l’ancien directeur des relations internationales Jérôme Champagne, et le président Sepp Blatter.</p>
<p>Dans le camp opposé, le président de l’UEFA Michel Platini avait toujours écarté la possibilité que le Kosovo puisse disputer des matchs, en soulignant que ce serait une décision politique et non sportive. Il avait cependant changé d’avis en 2015, alors qu’il s’apprêtait, en vain, à se lancer dans la course à la présidence de la FIFA.</p>
<p>Après de nombreuses rencontres infructueuses entre Sepp Blatter, Fadil Vokrri et le président de la fédération serbe Tomislav Karadžić, un <a href="https://www.courrierdesbalkans.fr/football-la-fifa-s-active-pour-la-reconnaissance-internationale-du-kosovo">compromis</a> a finalement été trouvé à la fin 2013. Les sélections du Kosovo pourraient disputer des matchs amicaux à condition que le drapeau ne soit pas montré et que l’hymne ne soit pas joué.</p>
<p>De plus, le Kosovo ne pourrait rencontrer aucune des sélections de l’ancienne Yougoslavie. Ce compromis, notamment sur sa partie liée aux restrictions de symboles, révèle toute la dimension politique intrinsèquement attachée au sport. Il révèle aussi la capacité diplomatique de la FIFA dans la recherche d’une solution.</p>
<p>En effet, l’article 79 permettait bien à la FIFA d’autoriser le Kosovo à jouer des matchs amicaux dès 2008. Cependant, il y a eu la volonté de la part de la FIFA de ne pas prendre de décision unilatérale, contre la Serbie et l’UEFA, et de tout faire pour amener Belgrade et Pristina à accepter un compromis sans préjudice du statut final de cette ancienne province yougoslave.</p>
<h2>Déverrouillage par le CIO</h2>
<p>Il ne faut pas, cependant, oublier que ce compromis n’aurait jamais pu avoir lieu sans l’aval des plus hautes autorités politiques serbes. Il s’inscrit dans le sillage des accords de normalisation entre Belgrade et Pristina signés en 2013, parrainés par l’Union européenne. Ce qui fut <a href="https://www.b92.net/eng/news/politics.php?yyyy=2016&mm=01&dd=04&nav_id=96577">rappelé</a> par le ministre des Affaires étrangères Ivica Dačić, lequel fait néanmoins une différence entre des organisations internationales perçues comme « non essentielles » (les organisations sportives), et les organisations liées au système onusien (l’ONU elle-même, ou l’<a href="http://www.lefigaro.fr/international/2015/11/09/01003-20151109ARTFIG00183-unesco-l-adhesion-du-kosovo-rejetee-a-trois-voix-pres.php">Unesco</a>).</p>
<p>Du point de vue de Pristina, pourtant, ces adhésions aux organisations internationales de sport sont bien perçues comme cruciales. L’admission du Kosovo par le CIO en 2015 représente un tournant par sa portée politique car elle signifie qu’aux yeux de cette instance de l’olympisme, le Kosovo est « reconnu par la communauté internationale », comme l’exigent ses statuts.</p>
<p>Par conséquent, l’admission au CIO a déverrouillé toutes les adhésions aux autres fédérations internationales de sport qui ont finalement admis le Kosovo, y compris la FIFA et l’UEFA. Ce qui a permis au pays de participer aux JO de Rio ainsi qu’aux qualifications pour le Mondial de football 2018.</p>
<p>À l’issue de ce processus, il reste à savoir si la stratégie de compensation et d’incitation par le sport du Kosovo va porter ses fruits, autrement dit, si le sport est un bon outil de visibilité qui permettra de susciter de nouvelles reconnaissances politiques. Cela demeure assez improbable.</p>
<p>Si elles devaient avoir lieu, ces reconnaissances auraient plutôt tendance à survenir à la suite d’un accord politique global entre la Serbie et le Kosovo, une obligation pour les deux pays, comme cela a été rappelé dans le récent <a href="http://www.iris-france.org/107190-lunion-europeenne-peut-elle-reussir-lintegration-des-balkans-occidentaux/">document stratégique de la Commission européenne</a> sur l’élargissement.</p>
<p>Pour autant, dix ans après son indépendance, aujourd’hui le Kosovo peut à bon droit dire : « Nous existons puisque nous jouons. »</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/92071/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Loïc Tregoures ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le sport est une arène symbolique de premier ordre dans les relations internationales. Il est considéré comme le moyen le plus rapide et efficace de gagner en reconnaissance et en notoriété.Loïc Tregoures, Docteur en science politique, chercheur au CERAPS, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/592732016-05-12T04:37:45Z2016-05-12T04:37:45ZAffaire Platini : conflit d’intérêt, avantage indu et rivalités politiques<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/122165/original/image-20160511-18135-hs7qce.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’ex-président de l’UEFA, ici en 2009, au temps de sa splendeur.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/klearchos/3761514092/in/photolist-6JoK6f-6jEmXM-7xnVHm-e8Gtd-8xuPXu-nN6K2e-6qrDQL-a7ymSQ-7xnVHs-a7ymwY-a7ykXG-a7yhE3-a7vtQk-7xnVHj-jrnjR7-a7yhsN-7xnVHu-a7vtAM-a7vqVa-a7vseR-a7vtnH-a7vsSV-a7vron-a7yiFL-a7vsr6-a7yi8A-a7yiuS-a7yjYQ-a7yjA5-a7yiWd-6jEk3p-8xrMLt-6jEkSZ-4UyEwc-8xrMMZ-4PXMtk-4ZZNy4-WDqo-rHCthU-4BfPnV-2GR5CP-rVB1xh-mKuDaa-avbAht-avbAnx-dkKdbW-avbAwD-rgPVc-gtjDkY-avbABP">Klearchos Kapoutsis/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Le Tribunal arbitral du sport (TAS) a confirmé, le 9 mai, la suspension de Michel Platini de toute activité liée au football. Cette décision prise à l’unanimité des trois arbitres réunis pour cette affaire marque la fin de la procédure judiciaire sportive.</p>
<p>Le TAS conclut à la culpabilité de Michel Platini <a href="http://www.tas-cas.org/fileadmin/user_upload/Communique_de_presse_4474_final.pdf">pour conflit d’intérêt et avantage indu</a>, tout en réduisant la sanction à quatre années de suspension (au lieu de six). Cette décision, somme toute sans surprise, laisse néanmoins transparaître les complexités de cette affaire.</p>
<h2>La légitimité du TAS</h2>
<p>Michel Platini contestait devant le TAS les décisions de la Commission d’éthique de la FIFA et de son organe d’appel, la Commission des recours, qui l’avaient suspendu huit ans (sanction ramenée en appel à six ans) pour avoir perçu en 2011 une somme de 2 millions de francs suisses versée par le président de la FIFA, Joseph Blatter, pour un travail de « conseiller technique ». L’ancien meneur de jeu des Bleus demandait au TAS l’annulation de sa sanction.</p>
<p>Le <a href="http://www.tas-cas.org/fr/index.html">TAS</a> est la juridiction compétente en cas d’appel contre une décision prise par un organisme sportif. Pour saisir ce Tribunal, il faut d’abord que les voies de recours internes aient été épuisées. De fait, Michel Platini avait d’abord contesté, en vain, sa suspension devant l’instance d’appel de la FIFA, la Commission des recours.</p>
<p>Les statuts de l’organisme sportif concerné doivent ensuite prévoir spécifiquement le recours au TAS (ce qui est le cas de la FIFA à l’article 66.1 des Statuts). Dans cette affaire, le TAS était donc compétent pour trancher en dernière instance la question de la légalité du paiement reçu par Michel Platini.</p>
<h2>Contrat de travail et avantage indu</h2>
<p>Dans sa décision, le TAS reconnaît d’abord l’existence d’un contrat de travail valable entre Michel Platini et la FIFA entre 1999 et 2002 – ce qui était l’un des points contestés (les décisions de la FIFA considérant qu’il n’existait pas de base juridique contractuelle).</p>
<p>Le Tribunal considère, malgré tout, que la somme perçue par Michel Platini relève d’un avantage indu, la durée d’exécution du contrat ayant été beaucoup trop longue. Les arbitres relèvent ainsi que le paiement n’est intervenu qu’en février 2011, soit plus de huit ans après la fin du contrat. Qui plus est à seulement quatre mois des élections présidentielles à la FIFA auxquelles Joseph Blatter était candidat.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/122162/original/image-20160511-18128-wftwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/122162/original/image-20160511-18128-wftwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/122162/original/image-20160511-18128-wftwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/122162/original/image-20160511-18128-wftwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/122162/original/image-20160511-18128-wftwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/122162/original/image-20160511-18128-wftwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/122162/original/image-20160511-18128-wftwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Joseph Blatter, l’ex-président de la FIFA et ex-allié de Michel Platini.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/121483302@N02/14374030425/in/photolist-nUbEsM-eiS7Xa-7xj2Gi-7eSXfR-7eWRid-7eSXiH-7eWRgA-7eSXkX-7eSX78-7modH4-7eWRfb-7eWRd3-7eSXot-7eSXqz-8hntyb-jzihvW-88oHPA-7eSXpg-9yJFzC-wx8nu-wx8nx-8znkJ1-7eDjkD-cc6KWG-i8p1Vg-afmWCU-a81FLS-7eDjrp-9yFELT-afmXaq-afj8Xz-7eDjYt-6sV7YL-7eHfsE-7eHfjN-9yFEJg-jtge8v-9yJFsy-afmXpo-9yJFx7-9yFERv-7eDjQp-nXCSY5-nZA5mi-nZMvRN-a8p8X6-8BftnY-8BcmEg-nHoRfy-6YMwpx">Global Panorama/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Les arbitres laissent ici clairement voir le lien qu’ils établissent entre le versement de la somme de 2 millions de francs suisses à Michel Platini et l’imminence de l’élection ayant mené à la prolongation de Blatter à la tête de la FIFA. Rappelons que Platini était, à l’époque, l’un de ses potentiels rivaux.</p>
<h2>Double violation du Code d’éthique</h2>
<p>La justification avancée par la défense de Michel Platini consistant à présenter cette somme comme un arriéré de salaire n’a pas – loin s’en faut – convaincu les arbitres. C’est la « légitimité » même du versement que le TAS réfute, s’appuyant sur l’absence de personne ayant connaissance de cet accord – à l’exception des seuls Platini et Blatter – ainsi que de document contractuel. Surtout, le TAS souligne que ce paiement ne correspond pas au salaire impayé qui aurait dû être perçu : 2 millions au lieu des 2,7 millions supposément dus…</p>
<p>C’est donc bien d’une double violation du Code d’éthique de la FIFA que Michel Platini s’est rendu coupable, selon le TAS. À travers le versement de cette somme, il a bénéficié d’un avantage indu en argent – une violation de l’article 20 du Code d’éthique interdisant les cadeaux et autres avantages – constitutif d’un conflit d’intérêt. Le Code d’éthique interdit en effet aux personnes liées à la FIFA de « retirer un avantage pour elles-mêmes » de leurs fonctions (article 19).</p>
<p>Le Tribunal n’a, cependant, pas reconnu Michel Platini coupable de violation de son devoir de loyauté vis-à-vis de la FIFA (article 15 du Code d’éthique) ni des règles de conduite générales (éthique, dignité, crédibilité, intégrité, selon l’article 13 du Code d’éthique). Le TAS accède ici partiellement à la demande de Platini, en annulant en ces points les décisions des instances de la FIFA.</p>
<h2>Élection et sanction</h2>
<p>Le Tribunal s’empresse toutefois de préciser qu’il est « loin d’affirmer que le comportement de Michel Platini était éthique et loyal ». Précision étonnante, alors que le TAS écarte ces violations au nom d’un principe juridique classique de droit international, résumé par l’adage latin bien connu des juristes : <em>lex specialis derogat generali</em>. Autrement dit : les règles particulières et spécifiques au litige l’emportent sur les règles à visée générale. En l’espèce, l’application des règles spéciales (les articles 19 et 20 du Code d’éthique) empêche celle des règles générales (les articles 13 et 15). Michel Platini ne peut pas être reconnu coupable de ces deux séries de violation à la fois.</p>
<p>Le Tribunal arbitral a ainsi confirmé la culpabilité de Michel Platini, mais en partie seulement. En conséquence, il a réduit la sanction qui lui avait été infligée par les instances de la FIFA : l’estimant « trop sévère », il l’a fixée à quatre années (au lieu de six) d’interdiction d’exercer toute activité nationale ou internationale liée au football.</p>
<p>Le TAS justifie d’ailleurs cette durée car elle correspond à celle « d’un mandat présidentiel » à la tête de la FIFA. L’instance renvoie au contexte d’une affaire intimement liée aux élections : qu’il s’agisse du versement contesté ayant eu lieu juste <a href="http://lemonde.fr/football/article/2015/05/29/fifa-retour-sur-les-quatre-premieres-elections-de-blatter_4643294_1616938.html">avant le scrutin de 2011</a> ou de la suspension de Michel Platini prononcée lors de la campagne présidentielle pour les élections de 2016 et alors que Platini était lui-même candidat…</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/122176/original/image-20160511-18171-1ezhjqu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/122176/original/image-20160511-18171-1ezhjqu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/122176/original/image-20160511-18171-1ezhjqu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/122176/original/image-20160511-18171-1ezhjqu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/122176/original/image-20160511-18171-1ezhjqu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/122176/original/image-20160511-18171-1ezhjqu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/122176/original/image-20160511-18171-1ezhjqu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">En 2014, avant l’éclatement du conflit ouvert.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/antoon/14305171227/in/photolist-nZA5mi-nZMvRN-nHoRfy-nHoCF6-nXQFZb-o2EFYH-nXQG4u-nZMwbf-nN6K2e">Antoon Kuper/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
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</figure>
<p>Néanmoins, si la sanction a été réduite d’un tiers, elle reste d’une durée non négligeable. Pour l’évaluer, le TAS a pris en compte – de manière classique pour toute juridiction – l’importance des fonctions exercées par Michel Platini (qui était à l’époque des faits vice-président de la FIFA et Président de l’UEFA), son absence de repentir (ce qui en droit pénal a souvent pour effet d’alourdir la peine d’un condamné), ainsi que l’atteinte à la réputation de la FIFA occasionnée par l’affaire.</p>
<p>Mais le TAS prend également le soin de préciser qu’alors « que la FIFA avait été informée du paiement de 2 millions en 2011 […] une investigation concernant Michel Platini n’a été initiée par la Commission d’éthique de la FIFA qu’en septembre 2015. » Élément bien évidemment retenu en faveur de la cause de Michel Platini et qui indique clairement que les arbitres n’ont pas été dupes des visées politiques internes à la FIFA dans le calendrier de l’affaire Platini.</p>
<p><em>La sentence n’étant pas encore publiée, il n’est pas possible d’analyser plus en détail ses motivations.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/59273/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raphaëlle Nollez-Goldbach a reçu des financements publics, notamment du CNRS et de l'École Normale Supérieure.</span></em></p>Décryptage de la décision du Tribunal arbitral du sport (TAS) qui a scellé le destin de l’ancien numéro dix des Bleus dans les instances mondiales du football.Raphaëlle Nollez-Goldbach, Chargée de recherche CNRS, École normale supérieure (ENS) – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/530652016-01-12T16:12:33Z2016-01-12T16:12:33ZLe vote pour le Ballon d’or est à la fois biaisé… et juste<p>Lionel Messi a reçu lundi 11 janvier à Zurich un cinquième Ballon d'or. Sans grande surprise : l’Argentin étant redevenu le meilleur joueur du monde en 2015, remportant notamment cinq trophées avec le Barça.</p>
<p>Cette année les résultats du vote du Ballon d'or sont sans ambiguïté en raison de la différence assez nette entre les votes reçus par les trois finalistes à savoir Lionel Messi : 41,33 %, Cristiano Ronaldo : 27,76 % et Neymar : 7,86 %. Il serait en revanche intéressant que la FIFA engage une réflexion en amont des futures éditions du Ballon d'or afin d’éviter toute ambiguïté en cas de résultat plus serré à l’avenir ; à l’instar de celui de l’an dernier pour les places d’honneur entre Messi (15,76 %) et Neuer (15,72 %).</p>
<p>Une telle réflexion avait été menée par Renato Flores (Fondation Getulio Vargas, Rio de Janeiro), Victor Ginsburgh (Université Libre de Bruxelles) et Jan van Ours (Tilburg University) qui avaient dans deux articles publiés <a href="http://www.jstor.org/stable/2348415?seq=1#page_scan_tab_contents">en 1996</a> et <a href="https://www.hitpages.com/doc/5199529183805440/1#pageTop">2003</a> analysé les déterminants du succès au Concours Reine Elisabeth de piano. Ils ont montré que l’ordre dans lequel les douze finalistes étaient classés était en partie expliqué par l’ordre de passage durant les six soirées où ils se présentaient. Ce qui implique que le succès est en partie aléatoire, mais que les premiers classés font néanmoins de meilleures carrières que les autres. Les règles du concours ont été modifiées par la suite et à l’heure actuelle six finalistes seulement sont classés de 1 à 6. Les six derniers ne sont pas classés, mais sont néanmoins nommés parmi les finalistes.</p>
<h2>Proximité entre votants et joueurs</h2>
<p>Notre équipe, vient de réaliser <a href="https://sites.google.com/a/kse.org.ua/tcoupe/football-papers">une étude</a> démontrant que les votes pour l’élection du Ballon d'or peuvent être biaisés selon différents degrés de proximités entre les votants et les 23 joueurs pré‐sélectionnés.</p>
<p>Comme nous l’avons expliqué dans <a href="http://www.lequipe.fr/Football/Article/Ballon-d-or-un-vote-biaise-mais-juste/622708">l’article du quotidien <em>L’Équipe</em></a> paru avant le vote de cette année, notre objectif était de mesurer le poids de critères non liés à la performance sportive du joueur et de vérifier que le vote FIFA Ballon d'or était juste et exempt de biais.</p>
<p>Associé à la FIFA depuis 2010, le Ballon d'or créé par France Football est depuis cette date décerné par les capitaines des équipes nationales, les sélectionneurs et des journalistes qui affectent respectivement 5, 3 et 1 points à leurs trois joueurs préférés.</p>
<p>Tous les votes étant rendus publics, nous avons analysé les CV des 23 candidats et des votants sur six critères : pays représenté, nationalité, continent d’origine, compétitions disputées, position sur le terrain et âge. Tous les scrutins depuis 2010 (cinq), soit 2 470 votes ont ainsi été examinés (820 votes de capitaines, 822 de sélectionneurs et 828 de journalistes).</p>
<p>Pour chacun des « liens » identifiés entre votants et candidats (par exemple, même nationalité ou même équipe nationale), nous avons comparé les votes réels à ce qu’ils auraient été si les votants s’étaient exprimés de façon aléatoire.</p>
<p>Il apparaît que certains des « liens » entre votants et candidats expliquent bien des votes. Les électeurs sont ainsi quatre fois plus enclins à voter pour des joueurs représentant leur sélection ou leur club (x3.79 en moyenne pour les deux critères) et trois fois plus susceptibles de voter pour un candidat de la même nationalité (x3.23).</p>
<p>Ce résultat n’est pas si surprenant. L’an dernier, le sélectionneur du Portugal, la sélection de Cristiano Ronaldo, n’a pas placé Lionel Messi parmi ses trois choix. Celui de l’Argentine a voté pour trois Argentins et le sélectionneur allemand a choisi trois joueurs de son pays…
Les chercheurs notent également que les votants sont moins enclins à voter pour les candidats qui jouent au même poste qu’eux ou pour les candidats qui sont plus âgés qu’eux. Être originaire du même continent ou jouer la même compétition nationale ne semble pas en revanche affecter le vote.</p>
<h2>L’impact sur le vote final reste limité</h2>
<p>Pour autant, si effectivement les électeurs favorisent en tendance les joueurs de leur sélection ou de leur club, et, à un degré (à peine) moindre, les joueurs partageant la même nationalité qu’eux, et même si la proportion d’électeurs « partiaux » est importante, l’impact sur le décompte final est relativement faible puisque tous les candidats en auront plus ou moins le même nombre.</p>
<p>Cela est vrai que ce soit pour le critère de la sélection – chaque pays est représenté par trois votants, tous les candidats ont donc au maximum trois votants « liés » (deux seulement si le sélectionneur est étranger) –, ou pour la nationalité – entre le moins « lié » des candidats sur ce critère de la nationalité (1 lien avec les votants) et le plus « lié » (12), il n’y aurait, au final, qu’une seule voix de retard pour le moins lié.</p>
<p>La conclusion de notre étude est donc que le vote pour le Ballon d'or est en effet biaisé mais demeure juste… sauf dans le cas où le scrutin est serré. C’était le cas l’an dernier (Ballon d'or 2014) : Cristiano Ronaldo l’avait largement emporté avec 37,66 % des votes, devant Messi (15,76 %) et Neuer (15,72 %). Pour corriger ce biais, nous recommandons aux organisateurs de s’inspirer du concours de l’Eurovision où un pays ne peut pas voter pour le chanteur le représentant.</p>
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<figcaption><span class="caption">Lionel Messi, Ballon d'or 2015.</span></figcaption>
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<p><em>“Biases in Voting for the FIFA Best Player Award” ‐ Décembre 2015 ‐ Tom Coupé (Kiev School of Economics), Olivier Gergaud (KEDGE Business School et LIEPP – Sciences Po) et Abdul Noury (New York University Abu Dhabi)</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/53065/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une étude de trois économistes met en lumière les biais qui peuvent influencer les votants pour le Ballon d’or. Et une piste pour améliorer le mode de scrutin.Olivier Gergaud, Professeur d'économie, Kedge Business SchoolAbdul Noury, Visiting Associate Professor of Politics, New York UniversityTom Coupé, Associate Professor, Economics, Kiev School of EconomicsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/489582015-10-13T04:44:09Z2015-10-13T04:44:09ZScandale à la FIFA, un événement trop prévisible<p>Michel Platini vient d’être condamné par la commission éthique de la FIFA suite à une affaire de corruption. On parle d’une somme de 2 millions de francs suisses en 2011 que le Français aurait touchée, versée directement par Sepp Blatter, président de l’instance internationale.</p>
<p>Ce dernier a lui aussi été sanctionné mais a rapidement fait appel. Blatter refuse de quitter la direction de la fédération internationale malgré les nombreux faisceaux de culpabilité qui pèsent lui.</p>
<p>Quant à Platini, sa défense se base sur la rémunération d’heures travaillées entre 1998 et 2001. En effet, à cette époque il avait été engagé par Blatter comme conseiller spécial mais n’avait reçu aucun salaire.</p>
<p>Malgré les différentes lignes de défense, le football international semble être rentré dans une nouvelle crise de gouvernance, après le scandale lié à l’attribution des coupes du Monde 2018 et 2022. La FIFA apparaît de plus en plus comme une organisation corrompue et incapable de se réformer en profondeur.</p>
<p>Comment peut-on l’expliquer ? La recherche économique fondamentale et les sciences sociales peuvent nous apporter des pistes de réflexion.</p>
<h2>Le sentiment d’impunité des élites</h2>
<p><a href="http://danariely.com/">Dan Ariely</a>, spécialiste d’économie comportementale et professeur à l’Université Duke, a étudié la <a href="http://danariely.com/tag/the-honest-truth-about-dishonesty/">délinquance des cols blancs</a>, celle qui émane des catégories supérieures. Une de ses études montre que des cas de tricherie sont plus courants au sein des universités de la Ivy-league, qui regroupe les plus prestigieux campus nord-américains avec des droits d’inscription de 50 000 dollars l’année en moyenne, qu’au sein des universités publiques américaines, aux coûts bien plus faibles.</p>
<p>Des expériences réalisées sur le terrain ont montré que, lors de tests, si on laissait sciemment les réponses dans la salle d’examen, sans surveillance, les étudiants des prestigieuses universités étaient amenés à les consulter plus souvent que leurs homologues des facs moins reconnues.</p>
<p>D’après Ariely, la délinquance des cols blancs s’explique par le sentiment d’impunité qu’auraient les fautifs. Ils ont l’impression de « pouvoir faire ce qu’ils veulent, du moment qu’ils ont payé pour ». De plus, sociologiquement, la plupart d’entre eux proviennent de classes supérieures et considèrent que « jamais personne ne pourra leur reprocher leur comportement déviant ».</p>
<p>Pour les sociologues Pierre Lascoumes et Carla Nagels, auteurs du livre <a href="http://www.armand-colin.com/sociologie-des-elites-delinquantes-de-la-criminalite-en-col-blanc-la-corruption-politique"><em>Sociologie des élites délinquantes</em></a>, les classes aisées « ne reconnaissent pas leurs torts et, au contraire, les légitiment ». Il y a une situation de « déni collectif ».</p>
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<figcaption><span class="caption">Sociologie des élites délinquantes.</span></figcaption>
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<p>D’après ces chercheurs, les cols blancs auraient intériorisé leur statut de classe dominante et ne se rendraient plus compte des comportements qui devraient pourtant être déviants ou délinquants. Précisément ce qu’il se passe au sein de la FIFA, au sein d’institutions internationales salies par des scandales à répétition.</p>
<h2>Bénévoles, passionnés ou managers ?</h2>
<p>Mais au-delà de la fraude, ce qui frappe c’est la sensation que tout le monde, au sommet de la FIFA, soit soupçonné. À tous les niveaux, chaque dirigeant porte un poids lourd de culpabilité.</p>
<p>Cela peut s’expliquer par le statut même de l’organisation : c’est une association, d’après le Code civil suisse. Ce qui implique un fonctionnement basé sur un corps bénévole très important.</p>
<p>Dans sou ouvrage <a href="http://classiques.uqac.ca/classiques/Weber/savant_politique/Le_savant.html"><em>Le savant et le politique</em></a>, le sociologue allemand Max Weber distingue deux façons de faire la politique : « vivre de » et « vivre pour ». D’après lui, c’est la première proposition qui l’emporte. La politique doit devenir un métier à part entière et non une passion. « Il faut vivre de la politique ». En effet, si l’agent vit pour la politique, c’est un loisir qu’il s’accorde et suppose qu’il a suffisamment de moyens pour se permettre d’arrêter de travailler.</p>
<p>Le pouvoir incomberait alors seulement aux gens fortunés, ceux qui auraient la fortune nécessaire pour ne plus avoir d’activité le temps de la politique. Inversement, « vivre de la politique » suppose que la fonction devienne un métier rémunérateur et soit donc destinée à tous les passionnés quel qu’ils soient, pas seulement ceux qui ont les capacités financières d’arrêter de travailler.</p>
<p>Il ne faudrait donc pas des passionnés à la tête de la FIFA voir de l’UEFA, comme l’ancien numéro 10 Michel Platini ou le fan absolu de football, Sepp Blatter, mais avant tout des gens qualifiés, compétents et totalement objectifs.</p>
<h2>Une organisation sans contrôle</h2>
<p>Le budget de la FIFA est estimé à 3.7 milliards d’euros sur la période 2015-2018. En hausse de 1 900 % depuis 20 ans. Les fonds propres sont évalués à 1.4 milliard d’euros, en excédent budgétaire depuis 10 ans. Et il n’y a aucun contrôle.</p>
<p>C’est précisément ce à quoi <a href="http://afrique.lepoint.fr/sport/football-sylvere-henry-cisse-il-faut-sauver-la-fifa-09-07-2015-1943362_2265.php">Sylvère-Henry Cissé</a>, président de Sport & Démocratie, veut remédier : il faut que les dirigeants de l’instance deviennent des professionnels de la politique, payés pour leurs tâches, et non des « bénévoles » avides de corruption et de malversation, influencés par leur statut de « cols blancs ».</p>
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<figcaption><span class="caption">“Le combat du sport pour la démocratie”</span></figcaption>
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<p>Il faut réformer en profondeur la FIFA. Il faut qu’elle devienne une organisation internationale (comme la Banque Mondiale, le FMI ou l’ONU) avec des salariés « grassement » rémunérés (mais déclarés) et non des bénévoles incités à frauder.</p>
<h2>Faire de la FIFA une organisation internationale</h2>
<p>Pourquoi le président du FMI est-il le fonctionnaire le mieux payé du monde ? Pourquoi les économistes travaillant en économie du développement sont-ils très bien payés alors même qu’ils doivent établir des politiques d’aides aux populations les plus pauvres ? Parce qu’ils sont amenés à gérer de très grosses sommes d’argent. Il faut alors éviter toute forme d’incitation à la corruption.</p>
<p>D’après Raymond Fisman et Edward Miguel, auteurs du livre <a href="http://www.nouveau-monde.net/livre/?GCOI=84736100411110"><em>Les gangsters de l’économie</em></a>, celle-ci est importante là où « les systèmes de gouvernance sont opaques et empêchent la libre circulation de l’information et la visibilité de la direction », « là où rien n’est fait pour lutter efficacement contre la tricherie et le vol ». Lorsqu’on est amené à gérer plusieurs milliards de dollars dans l’organisation d’événements sportifs vus dans le monde entier mais qu’on a le seul statut de bénévole ou de consultant, les incitations à la fraude sont nombreuses. Les économistes soutiennent la mise en place de moyens à la fois intrinsèques (la dénonciation symbolique de la corruption) et extrinsèques (des sanctions lourdes, des salaires élevés et des primes de situation transparentes).</p>
<p>La FIFA doit donc absolument être réformée, c’est une évidence. Le football doit être sauvé de la folie et de l’irrationalité de quelques-uns, il doit retrouver toute sa splendeur et sa respectabilité.</p>
<p>Car sans cela, le sport le plus populaire du monde risque d’en prendre un sacré coup…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/48958/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre Rondeau ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Comment l’histoire, le fonctionnement et la structure même de la FIFA peuvent expliquer le scandale actuel. Économistes et sociologues nous éclairent.Pierre Rondeau, Professeur d'économie et doctorant, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.