tag:theconversation.com,2011:/au/topics/habitat-22368/articleshabitat – The Conversation2024-03-13T15:57:43Ztag:theconversation.com,2011:article/2251082024-03-13T15:57:43Z2024-03-13T15:57:43ZPlanter une nouvelle haie ne compense pas la destruction d’une haie ancienne<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/581348/original/file-20240312-29-dfogyv.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C13%2C4672%2C3084&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Paysage avec haies</span> <span class="attribution"><span class="source">Guillaume Decocq</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>La haie est revenue sur le devant de la scène médiatique : tandis que les victimes des inondations dans le Pas-de-Calais déplorent leur arrachage intempestif, les agriculteurs en colère dénoncent les mesures réglementaires entravant leur destruction. Au-delà de ces positions médiatiques, les haies sont accusées de tout et son contraire, tantôt considérées comme un obstacle au développement agricole ou érigées comme une infrastructure agroécologique au rôle protecteur, taxées de zones enfrichées peuplées de nuisibles ou présentées comme des réservoirs de biodiversité utiles à l’agriculture. Alors qu’en est-t-il ? Les haies sont-elles les reliques d’un modèle paysan frappé d’obsolescence ou bien un levier pour engager l’agriculture dans une nécessaire transition écologique ?</p>
<p>Universitaires, chercheurs et botanistes travaillant de longue date sur les haies, nous nous sommes rassemblés en un groupe de travail au sein de la <a href="https://societebotaniquedefrance.fr/">Société botanique de France</a> pour synthétiser les connaissances sur cet écosystème très particulier. En réalité, toutes les haies ne se valent pas. Si replanter des haies là où elles ont disparu est une avancée écologique indéniable, protéger les haies anciennes là où elles subsistent devrait être une priorité absolue.</p>
<h2>Aux origines des haies, une vocation oubliée ?</h2>
<p>Pour comprendre les débats actuels sur les haies, il est d’abord nécessaire de revenir à leur raison d’être initiale. Car les haies d’aujourd’hui sont <a href="https://revueforestierefrancaise.agroparistech.fr/article/view/5105">issues de plantations plus ou moins anciennes</a>, répondant à des objectifs précis : délimiter des parcelles, empêcher la divagation des troupeaux, protéger les chemins et les cultures du vent ou encore limiter l’érosion des terres arables.</p>
<p>Les haies étaient aussi, à l’origine, pourvoyeuses de biens : fruits sauvages (mûres, noisettes, voire fruits d’arbres fruitiers) ou bois de chauffage à l’origine de la taille « en têtard » des arbres, dont la silhouette typique inspira de nombreux peintres. </p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/581310/original/file-20240312-22-f31n8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/581310/original/file-20240312-22-f31n8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/581310/original/file-20240312-22-f31n8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/581310/original/file-20240312-22-f31n8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/581310/original/file-20240312-22-f31n8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/581310/original/file-20240312-22-f31n8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/581310/original/file-20240312-22-f31n8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/581310/original/file-20240312-22-f31n8t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>La motivation initiale de la création des haies était donc purement utilitaire. Elles ont accompagné, entre la fin du 18ème et la fin du 19ème siècle, le développement des grands systèmes bocagers français, en complétant une trame jusque-là concentrée autour des villages, remontant parfois au Haut Moyen Âge.</p>
<p>Aujourd’hui, leur vocation a été oubliée ; plus de 1,4 million de kilomètres de haies anciennes ont été arrachées, perçues comme un obstacle à la circulation des engins agricoles et comme une perte de surface cultivable. Selon le <a href="https://agriculture.gouv.fr/la-haie-levier-de-la-planification-ecologique">Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux [MOU2]</a> « depuis 1950, 70 % des haies ont disparu des bocages français ». Le phénomène s’accélère même puisque, d’après le même rapport, 23 500 km de haies ont été annuellement détruits entre 2017 et 2021, contre 10 400 km entre 2006 et 2014.</p>
<p>Paradoxalement, dans le même temps, on replante des haies là où il n’y en avait pas, pour compenser la destruction d’autres haies ou pour réintroduire un peu de « naturalité » dans des paysages de grandes cultures. Mais les politiques d’incitation à la création de haies se sont traduites par la replantation de seulement 3 000 km de haies par an, avec parfois des espèces peu adaptées ou exotiques.</p>
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<h2>La haie ancienne est un réservoir de biodiversité</h2>
<p>Maintenant, observons un peu ce qui se passe à l’intérieur d’une haie. La haie est un objet hybride : une création humaine artificielle qui se naturalise au fil du temps, et dont l’ensauvagement progressif efface peu à peu l’artificialité au point qu’elle devienne un habitat presque « naturel ». <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/jvs.12845">Un nombre croissant d’espèces végétales, animales et microbiennes la colonise alors spontanément</a> : d’abord des espèces « généralistes », participant à la biodiversité ordinaire, puis, au fil des siècles, des espèces de plus en plus « spécialistes », notamment forestières, à la valeur patrimoniale importante. </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/581253/original/file-20240312-28-v7a8cf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/581253/original/file-20240312-28-v7a8cf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/581253/original/file-20240312-28-v7a8cf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/581253/original/file-20240312-28-v7a8cf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/581253/original/file-20240312-28-v7a8cf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/581253/original/file-20240312-28-v7a8cf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/581253/original/file-20240312-28-v7a8cf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Parallèlement, la structuration verticale et horizontale de la haie se complexifie, créant autant de micro-habitats pour une grande diversité d’espèces. Ni ouverte, ni forestière, la haie constitue un habitat semi-naturel unique : entre 60 et 80 % des espèces animales des campagnes s’y nourrissent ou s’y reproduisent. Si la haie est implantée sur un talus ou au bord d’un chemin creux, abeilles sauvages solitaires et mammifères fouisseurs y creusent leur terrier. Les tas de pierres attirent lézards, serpents et amphibiens. L’exploitation et l’entretien des haies contribuent également à en accroître la biodiversité, en favorisant par exemple la formation de cavités dans les troncs des vieux arbres de la haie, propices à de nombreux invertébrés, oiseaux et mammifères parmi les plus menacés dans les paysages agricoles.</p>
<p>À l’échelle du paysage, les haies forment également un réseau relié à des éléments forestiers ou à des zones humides, facilitant ainsi la circulation de nombreux organismes d’un milieu à l’autre et abritant par-là une diversité plus importante. Les haies les mieux préservées des usages agricoles adjacents, souvent les plus larges et les plus hautes, sont les plus riches et doivent être conservées prioritairement. Il existe en effet une relation entre l’ancienneté d’une haie et sa biodiversité : une nouvelle haie n’offrira pas avant longtemps la richesse en espèces d’une haie ancienne détruite ailleurs ; il faudra plusieurs siècles, si les espèces n’ont pas disparu entre-temps.</p>
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<a href="https://theconversation.com/climat-biodiversite-le-retour-gagnant-des-arbres-champetres-174944">Climat, biodiversité : le retour gagnant des arbres champêtres</a>
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<h2>La haie ancienne rend de multiples services à l’Homme</h2>
<p>Si la haie a donc été créée pour répondre à des objectifs humains, avant de devenir un important réservoir de biodiversité, elle demeure aujourd’hui pourvoyeuse de nombreux services bénéfiques à l’Homme et au fonctionnement des écosystèmes.</p>
<p>Pour comprendre cela, il faut notamment s’intéresser à la partie souterraine des haies. </p>
<p>L’enracinement des arbres et arbustes est plus profond que pour leurs congénères forestiers : la <a href="https://www.decitre.fr/livres/le-defi-alimentaire-9782701175836.html">majorité des racines des arbres forestiers</a> se trouvent dans le premier mètre cinquante du sol, tandis que les racines des arbres agroforestiers se concentrent entre 1 et 3 m. Les végétaux des haies freinent de ce fait l’écoulement de l’eau en surface et favorisent son infiltration dans les sols, ainsi que sa remontée par capillarité lors d’épisodes de sécheresse.</p>
<p>Les haies stabilisent également les sols, réduisent la lixiviation des particules limoneuses les plus fines et le lessivage des engrais et pesticides. L’actualité récente a démontré comment la disparition de haies aggravait les inondations lors d’épisodes pluvieux exceptionnels… Alliée des populations locales, mais aussi des agriculteurs, la haie limite l’érosion des sols et les enrichit en matière organique et en nutriments via son tapis de feuilles et de bois morts. Les produits de taille peuvent aussi, après broyage, servir de couvre-sol remplaçant les herbicides.</p>
<p>Les haies peuvent aussi contribuer à améliorer la qualité de l’eau, en fixant certains polluants tels les nitrates ou les métaux lourds lorsqu’ils sont présents dans l’eau de ruissellement. Elles participent aussi à une meilleure qualité de l’air, en interceptant les pesticides volatilisés lorsqu’ils sont épandus par temps chaud.</p>
<p>Les haies, enfin, créent des conditions microclimatiques favorables, par un effet « climatiseur » qui met les cultures et le bétail à l’abri des vagues de chaleur, du vent sec et des gelées tardives. Leur effet « brise-vent » s’étend jusqu’à une distance de dix à vingt fois leur hauteur. À l’heure des changements climatiques, cet effet « tampon » salvateur est plus que bienvenu. Dans ce contexte, selon l’<a href="https://librairie.ademe.fr/changement-climatique-et-energie/5388-stocks-de-bois-et-de-carbone-dans-les-haies-bocageres-francaises.html">ADEME</a>, les haies fixent et stockent au moins 100 tonnes de carbone par kilomètre linéaire, via les troncs, les branches et les feuilles mais aussi leur système racinaire.</p>
<p>Face à l’étendue de ces services écosystémiques, on objecte parfois que les haies seraient des réservoirs de maladies et de bioagresseurs des cultures. Si ce fait est indéniable, l’impact actuel sur les rendements des cultures reste cependant très limité et bien inférieur aux bénéfices apportés par les organismes auxiliaires vivant dans les haies : pollinisateurs des cultures ou prédateurs des bioagresseurs (insectes, araignées, rapaces, chauve-souris…). Or ces auxiliaires sont d’autant plus nombreux et abondants que la haie est ancienne, et de ce fait riche en espèces. Ainsi, selon un <a href="https://www.inrae.fr/actualites/augmenter-diversite-vegetale-espaces-agricoles-proteger-cultures">rapport de l’INRAE de 2022</a>, une haie réduit de 84 % l’abondance de bioagresseurs dans les cultures adjacentes.</p>
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<h2>Préserver les haies anciennes avant d’en planter de nouvelles</h2>
<p>Combinés, tous ces services améliorent le rendement des cultures et le potentiel fourrager des prairies, avec une intensité qui dépend des types de sol, de la composition et de l’ancienneté des haies et des modes de culture. La possible baisse de productivité liée à la surface de production occupée par la haie et à l’effet « lisière » en bordure de celle-ci, est insignifiante au regard de l’augmentation des services apportés par la biodiversité qu’elle renferme, mais une haie nouvellement plantée mettra plusieurs décennies voire siècles à rendre les mêmes services qu’une haie ancienne. Malheureusement, les acteurs du monde agricole et les décideurs méconnaissent cette réalité : l’arrachage d’une haie amène, à moyen terme, davantage de pertes que de gains.</p>
<p>De fait, le <a href="https://agriculture.gouv.fr/pacte-en-faveur-de-la-haie">« pacte en faveur de la haie »</a> du gouvernement, qui vise à « arrêter la saignée » en plantant « en quantité et qualité » 50 000 km de haies d’ici 2030, ne pourra jamais compenser la destruction des haies anciennes qui se poursuit, car un kilomètre de haies nouvelles n’équivaut pas à un kilomètre de haies anciennes. « Déplacer » une haie ne conserve ni la biodiversité qu’elle hébergeait, ni la qualité et la quantité des services qu’elle rendait. La préservation des haies anciennes est donc une urgence, au nom de la sauvegarde d’un patrimoine historique, culturel et naturel inestimable, non seulement compatible mais vital pour l’agriculture du 21ème siècle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225108/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Guillaume Decocq est vice-président de la Société botanique de France</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Arnaud Mouly est membre du conseil d'administration de la Société botanique de France. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Déborah Closset est membre du conseil d'administration de la Société Botanique de France</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Marc-André Selosse est membre du conseil d'administration de la Société botanique de France. Son laboratoire a reçu des financements de l'ANR, du NCN (fond polonais pour la recherche) et de la Fondation de France. Il est membre des conseils scientifique de Mycophyto et Pour une Agriculture du Vivant.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Michel Botineau est membre de la Société botanique de France</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pierre-Antoine Précigout est membre du conseil scientifique de la Société botanique de France. Ses travaux sur les haies au sein de l'INRAE ont été en partie financés par le projet TRAVERSéES (TRAjectoires de transition VErtueuses pour la Réduction des usages des pesticides aSsociant les leviers Ecologiques, Economiques, Sociaux et institutionnels à l’échelle du territoire, 2020-2024) soutenu par le Ministère de la Transition Ecologique, le Ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation, le Ministère des Solidarités et de la Santé, le Ministère de l'Enseignement Supérieur de la Recherche et de l'Innovation et l'Office Français de la Biodiversité (Appel à projets "Leviers territoriaux pour réduire l’utilisation et les risques liés aux produits phytopharmaceutiques" du plan Ecophyto II+).</span></em></p>Une nouvelle haie n'offrira pas avant longtemps la richesse en espèces d’une haie ancienne détruite ailleurs ; il faudra pour cela plusieurs siècles, si les espèces n’ont pas disparu entre-temps.Guillaume Decocq, Professeur en sciences végétales et fongiques, directeur de l’UMR EDYSAN, Université de Picardie Jules Verne (UPJV)Arnaud Mouly, Maître de Conférences en Systématique et Ecologie Végétales, Université de Franche-Comté – UBFCDéborah Closset, Maitre de conférences en écologie forestière, Université de Picardie Jules Verne (UPJV)Marc-André Selosse, Professeur du Muséum national d'Histoire naturelle, Professeur invité aux universités de Gdansk (Pologne) & Viçosa (Brésil), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Michel Botineau, professeur de botanique, Université de LimogesPierre-Antoine Précigout, Chargé de recherche en agroécologie, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2213622024-02-27T15:41:23Z2024-02-27T15:41:23ZComment migrent les flétans ? Une petite structure dans leur crâne permet de mieux le comprendre<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/576890/original/file-20240220-18-5yndy5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=24%2C18%2C3953%2C2999&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les habitats utilisés tout au long de la vie du flétan et les mouvements effectués entre ceux-ci sont difficiles à caractériser.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Charlotte Gauthier)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Hausse des températures, modification des grands courants, diminution de l’oxygène en profondeur : le golfe du Saint-Laurent a subi de <a href="https://theconversation.com/lestuaire-maritime-du-saint-laurent-est-a-bout-de-souffle-180069">grands changements au niveau de ses conditions environnementales</a> dans les dernières décennies. Résultat ? De nombreuses espèces se retrouvent en difficulté et sont donc plus sensibles aux effets de la pêche.</p>
<p>Ces changements se font toutefois au profit de certaines autres espèces, comme le flétan de l’Atlantique, qui bat présentement des records d’abondance avec les valeurs les plus élevées des <a href="https://waves-vagues.dfo-mpo.gc.ca/library-bibliotheque/41206708.pdf">60 dernières années</a>.</p>
<p>Chercheuse en biologie, je propose d’apporter un éclairage sur certains mystères qui planent encore sur cette espèce qui détonne.</p>
<h2>Le flétan de l’Atlantique : champion du golfe du Saint-Laurent</h2>
<p>Le flétan de l’Atlantique est un poisson plat qui habite le fond des eaux du fleuve Saint-Laurent. Il est exploité pour sa chair blanche fine et ferme, très appréciée des consommateurs.</p>
<p>Le flétan peut atteindre des tailles impressionnantes de <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/23308249.2021.1948502">plus de deux mètres</a>. En raison de la qualité de sa chair et de sa popularité dans les assiettes, il représente actuellement le poisson à la plus haute valeur commerciale de tout le golfe du Saint-Laurent.</p>
<p>Mais cette tendance n’a pas toujours été la même. Dans les années 1950, la portion adulte et exploitable des populations de flétan, que l’on nomme le stock, <a href="https://academic.oup.com/icesjms/article/73/4/1104/2458915?login=false">a subi un déclin majeur en raison de la surpêche</a>.</p>
<p>Dans l’idée de vouloir continuer d’exploiter cette ressource pour une période prolongée, il est impératif de ne pas répéter les mêmes erreurs que dans le passé. Pour y arriver, il est primordial d’avoir une bonne compréhension du cycle de vie du flétan et des effets que la pêche peut avoir sur le stock. Cependant, ce n’est pas complètement chose faite.</p>
<h2>Des enjeux pour une exploitation durable</h2>
<p>On connaît assez bien la biologie de base du flétan de l’Atlantique. Toutefois, les habitats utilisés tout au long de sa vie et les mouvements effectués entre ceux-ci sont plus difficiles à caractériser.</p>
<p>De <a href="https://academic.oup.com/icesjms/article/77/7-8/2890/5923787?login=false">récentes études</a> ont installé des étiquettes satellites sur des flétans pour enregistrer des données sur la profondeur et la température de l’eau où ils se trouvent et ainsi permettre de calculer précisément leurs déplacements. Grâce à cette méthode, les chercheurs ont pu identifier des trajectoires de flétans adultes sur une période d’un an et découvrir qu’ils se reproduisent en hiver dans les chenaux profonds du golfe.</p>
<p>Dans les différentes trajectoires annuelles, les chercheurs ont observé que, l’été, certains flétans demeurent dans les chenaux profonds, alors que d’autres entreprennent des migrations vers les zones moins profondes.</p>
<p>Même avec ces nouvelles informations, plusieurs questions demeurent, spécifiquement sur les plus jeunes stades de vie qui ne sont capturés que de façon anecdotique dans le golfe. Aussi, les étiquettes satellites fournissent des informations précises, mais uniquement sur une période d’un an, ce qui n’offre pas toute l’histoire pour un poisson qui peut vivre jusqu’à 50 ans.</p>
<p>C’est dans cette optique que l’utilisation d’un nouvel outil permettant d’étudier toute la vie des poissons devient fort pertinente.</p>
<h2>Les « os » des oreilles à la rescousse</h2>
<p>Tous les poissons osseux possèdent de petites structures calcaires dans leur oreille interne qu’on nomme otolithes, ou os d’oreilles, et qui remplissent des fonctions d’équilibre et d’audition.</p>
<p>Les otolithes se développent au tout début de la vie des poissons et grandissent au même rythme qu’eux. Les otolithes forment des cernes de croissance annuels qui sont comparables à ceux visibles dans le tronc des arbres.</p>
<p>Pour croître, les otolithes accumulent des éléments chimiques qui se retrouvent dans le milieu dans lequel baigne le poisson. Ainsi, lorsque le poisson se déplace, les éléments chimiques accumulés dans les otolithes seront différents d’un endroit à un autre. Chaque endroit est caractérisé par une combinaison unique de différentes concentrations d’éléments chimiques. C’est ce qu’on appelle une empreinte élémentaire. L’identification de ces empreintes peut donc nous fournir des informations cruciales sur les déplacements des poissons à différents endroits, et ce, tout au long de leur vie.</p>
<p>C’est cette méthode de caractérisation des éléments chimiques des otolithes que j’ai utilisée pour me pencher sur les patrons migratoires du flétan de l’Atlantique dans le golfe du Saint-Laurent.</p>
<h2>Un large spectre de stratégies migratoires</h2>
<p>Pour pouvoir savoir à quelles concentrations d’un élément chimique correspond le lieu de capture du poisson, on utilise l’empreinte de la marge de l’otolithe, c’est-à-dire la matière de la fin du cerne le plus à l’extérieur de l’otolithe, qui a été accumulée en dernier.</p>
<p>On considère que les concentrations des éléments qu’on y retrouve sont caractéristiques du lieu où le poisson a été capturé. En analysant les marges de près de 200 otolithes de flétans provenant d’un peu partout dans le golfe, j’ai pu distinguer deux empreintes élémentaires : une représentative des eaux de surface (moins de 100 mètres de profondeur) et une caractérisant les eaux plus profondes (plus de 100 mètres de profondeur).</p>
<p>Une fois ces empreintes identifiées, j’ai observé la concentration des éléments chimiques sur toute la vie des poissons pour pouvoir associer chaque moment de la vie soit à l’empreinte des eaux de surface, soit à celle des eaux profondes.</p>
<p>En ayant séparé la vie de chacun des individus entre moments passés en eaux de surface ou profondes, j’ai pu ressortir les patrons récurrents et les regrouper en trois stratégies migratoires différentes : les résidents, les migrants annuels et les migrants irréguliers.</p>
<p>Ainsi, j’ai pu observer que les flétans capturés dans le sud du golfe étaient majoritairement des migrants annuels, et donc qu’ils entreprennent des migrations entre les eaux profondes et peu profondes chaque année. Au contraire, dans la partie nord du golfe, on y retrouve une majorité de résidents. Les résidents correspondent à des poissons qui peuvent avoir migré au début de leur vie, mais qui ont fini par s’installer définitivement dans les eaux profondes avant d’avoir atteint la maturité. Les migrants irréguliers, quant à eux, montrent des migrations sur une fréquence plus sporadique, et se retrouvent en proportions similaires partout dans la zone d’étude.</p>
<h2>Sur la bonne voie pour une gestion optimale</h2>
<p>Mon étude est la première à offrir une vision globale des mouvements effectués par les flétans sur toute leur vie.</p>
<p>Ces nouvelles informations permettent de mieux comprendre la structure du stock et la diversité des stratégies migratoires qu’on peut y retrouver.</p>
<p>Considérant que ces stratégies sont réparties différemment selon les zones du golfe, on peut s’assurer de ne pas cibler de manière disproportionnelle les flétans utilisant la même stratégie migratoire et éviter la surpêche d’une seule composante du stock.</p>
<p>De cette manière, il est possible de conserver cette diversité qui bénéficie à la résilience du stock face aux différents changements qui peuvent survenir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221362/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Charlotte Gauthier a reçu des financements du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) et de la fondation de l'Université du Québec à Chicoutimi. </span></em></p>Le flétan de l’Atlantique revient en force dans le golfe du Saint-Laurent. Mais comment savoir où il se déplace pendant toute sa vie ?Charlotte Gauthier, Étudiante au doctorat, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2226622024-02-18T15:48:42Z2024-02-18T15:48:42ZPénurie de logements pour les étudiants : et si la France s’inspirait du modèle coopératif ?<p>Dans un contexte où la <a href="https://basta.media/podcast-speculation-immobiliere-logement-airbnb">spéculation immobilière</a> et les <a href="https://www.mediapart.fr/journal/politique/310124/crise-du-logement-le-rapport-de-la-fondation-abbe-pierre-denonce-l-inertie-du-gouvernement">pénuries de logements sociaux</a> – notamment <a href="https://theconversation.com/les-jeunes-en-premiere-ligne-face-a-la-crise-du-logement-217317">étudiants</a> – créent de nombreuses difficultés pour une part croissante de la population française, considérer des <a href="https://www.cairn.info/l-archipel-residentiel--9782200633769-page-205.htm">modèles alternatifs</a> de logements s’impose. Les coopératives d’habitants développées en Amérique du Nord depuis le début du XIX<sup>e</sup> siècle, notamment celles pour étudiants, sont un modèle qui <a href="https://keeplearning.em-lyon.com/project/reorganiser-le-logement-apres-la-Covid-19%E2%80%AF-vivre-ensemble-pour-lutter-contre-lisolement-et-la-precarite/">mériterait d’être davantage développé en France</a>.</p>
<h2>Des femmes à l’origine du modèle</h2>
<p>Issues de projets pour promouvoir l’autonomie des classes populaires, <a href="https://books.google.fr/books/about/Hasten_Slowly_and_You_Will_Soon_Arrive.html?id=ADHbxwEACAAJ">l’éducation et l’émancipation des femmes et des paysans</a>, aux États-Unis, les premières coopératives de logement ont émergé dans les années 1830. Les balbutiements du mouvement de logement coopératif aux États-Unis sont liés à <a href="https://sites.northwestern.edu/northwesternlibrary/2020/05/22/on-the-same-terms-housing-northwesterns-women-1872-1993/">l’émancipation des femmes</a>. Le développement d’un modèle d’habitat en autogestion coopérative est associé au travail de la militante Mary Lyon pour rendre les études supérieures accessibles aux femmes sans accès aux ressources de la bourgeoisie. Entre 1837 et 1849, celle-ci promeut le développement d’une communauté de femmes basée sur des <a href="https://www.massmoments.org/moment-details/first-students-arrive-at-mt-holyoke-seminary.html">principes coopératifs de partage des tâches domestiques</a> pour les étudiantes de l’université Mount Holyoke, ce qui permet aux résidentes issues du monde rural de poursuivre leurs études.</p>
<p>Ce système de partage des tâches reste encore aujourd’hui très présent dans de nombreux modèles coopératifs aux États-Unis, et notamment dans les coopératives où tous les espaces sauf les chambres sont mutualisés : cuisines, salles de bains, salles communes, bureaux, etc. Cette <a href="https://theconversation.com/leconomie-circulaire-stagne-et-si-le-modele-cooperatif-servait-dinspiration-206641">mutualisation</a> des espaces, l’achat de nourriture collectif et le partage des charges ainsi que des tâches de ménage et de préparation des repas, permet de réduire les coûts par rapport à un logement classique. Cela permet non seulement une résilience, mais un <a href="https://us.sagepub.com/en-us/nam/encyclopedia-of-community/book220816">déploiement des logements coopératifs</a>.</p>
<h2>Chicago, déjà précurseuse au XIXᵉ siècle</h2>
<p>Ce modèle s’affine jusqu’à mener à un contrôle autogéré du logement par ses membres, qui émerge en 1892 au sud de Chicago. Sept femmes louent alors collectivement un étage dans un immeuble pour mettre en pratique le mode de vie coopératif. Elles sont proches de <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/peace/1931/addams/biographical/">Jane Addams</a>, une féministe pionnière du travail social aux États-Unis et prix Nobel de la Paix en 1931. Ce lieu de vie, surnommé le « Jane Club », passe de 7 à 33 membres en moins d’un an, occupant rapidement tout l’immeuble, avant de déménager dans un autre édifice proche de <a href="https://www.britannica.com/topic/Hull-House">Hull House</a>, un centre d’innovations sociales majeures du tournant du XIX<sup>e</sup> et XX<sup>e</sup> siècle. Logeant certaines des femmes pionnières dans les mouvements syndicalistes à Chicago, cette coopérative de logement est décrite comme un lieu de vie très peu cher qui permet à ces femmes de <a href="https://www.jstor.org/stable/41179156">vivre en autonomie</a>, même quand leur participation à des grèves met en péril leurs sources de revenus. Les modestes loyers que ces femmes paient permettent de surcroît de <a href="https://digital.janeaddams.ramapo.edu/items/show/1589">financer la crèche organisée</a> par <a href="https://journals.lww.com/ajnonline/citation/1901/11000/the_jane_club_of_hull_house.4.aspx">Hull House</a>. Cette coopérative fonctionnera pendant 45 ans, jusqu’en 1937, et elle inspirera le modèle d’une coopérative en autogestion, où les membres se réunissent pour prendre toutes les décisions sur leur logement.</p>
<h2>La Grande Dépression accélère l’essor des coopératives</h2>
<p>Après ces premières coopératives développées pour <a href="https://search.library.wisc.edu/digital/AKHUTRNH2BOIEV84/pages/AQZDZFYHSX5MR58I">rendre accessibles les études supérieures aux femmes</a>, la Grande Dépression est une période cruciale d’expérimentations. Le modèle coopératif s’ouvre de plus en plus aux <a href="https://search.library.wisc.edu/digital/AZTYXY452FEBLJ8N/pages/AEOPIRFSYPGYLB9E">hommes</a> issus des milieux populaires, notamment autour des campus où il y a d’importants besoins de <a href="https://vcencyclopedia.vassar.edu/notable-events/cooperative-living-projects/">logements accessibles pour les étudiants</a>. Ces coopératives étudiantes – souvent soutenues par les universités (dons ou prêts de bâtiments, soutiens d’alumni, de professeurs ou doyens impliqués <a href="https://michigantoday.umich.edu/2010/09/08/a7851/">contre la précarité</a> des étudiants) – s’appuient sur la culture paysanne du monde rural.</p>
<p>Un rapport du <a href="https://fraser.stlouisfed.org/title/student-cooperatives-united-states-1941-4227">United States Department of Labor de 1943</a> fait le point sur l’effervescence des coopératives étudiantes recensées en 1941 : au début des années trente, des groupes d’étudiants issus du monde agricole ont fondé de nombreuses coopératives. Certains louent un terrain à bas prix et construisent et gèrent eux-mêmes leur maison selon les principes coopératifs, mutualisant les denrées alimentaires venant de leur famille située dans les campagnes alentour, créant un potager collectif, et cuisinant à tour de rôle. Ayant de faibles revenus, ces membres s’entraident en partageant des aliments issus de leur famille, en jardinant, et en bricolant.</p>
<p>D’autres négocient de restaurer d’anciens bâtiments tombant en ruine, bricolent pour les équiper en eau et en électricité, et en échange multiplient les logements coopératifs autour de différents campus. Un groupe partageant un petit appartement et mettant en commun leurs ressources a fini par être à l’origine d’un système coopératif hébergeant 650 membres en 1941, s’appropriant progressivement jusqu’à cinq immeubles convertis peu à peu en espaces coopératifs. Ce <a href="https://fraser.stlouisfed.org/title/student-cooperatives-united-states-1941-4227">rapport</a> de 1943 dénombre 510 coopératives sur 144 campus et dans 44 états.</p>
<h2>Une expansion du modèle à d’autres secteurs</h2>
<p>Les années 30 sont aussi un moment où les coopératives agricoles, les coopératives de consommateurs et de travailleurs se déploient aux États-Unis, sous la pression d’un contexte économique très dur. Le promoteur des coopératives de logement <a href="https://books.google.fr/books/about/Hasten_Slowly_and_You_Will_Soon_Arrive.html?id=ADHbxwEACAAJ">Jim Jones</a> documente avec soin ces collaborations multiples entre différentes formes de coopératives : parrainages, publicité, financement de la part des coopératives agricoles et de consommateur. À New-York, la mouvance coopérative naît en <a href="https://press.princeton.edu/books/hardcover/9780691234748/working-class-utopias">collaboration avec des mouvements syndicalistes</a>. Les campus sont aussi des hubs coopératifs, où se déploient non seulement des logements, mais aussi des barbiers, des librairies, des magasins de vélo et des supermarchés coopératifs. Cela permet souvent une collaboration entre ces différentes structures – l’un des <a href="https://www.nasco.coop/resources/rochdale-principles">sept principes</a> établis par une coopérative pionnière à Rochdale en 1844, et qui restent <a href="https://www.madisoncommunity.coop/cooperative-community">encore aujourd’hui</a> la feuille de route de nombreuses <a href="https://cloyne.org/rochdale-principles/">coopératives de logement</a>.</p>
<p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Méconnue mais loin d’avoir reculé, la culture coopérative <a href="https://www.nasco.coop/">continue de se déployer</a> aux États-Unis. Aujourd’hui, il est estimé qu’entre <a href="https://betterworld.coop/sectors/sector-housing/">1,5 et 2 millions de personnes</a> vivent en coopérative de logement aux États-Unis. Si les modèles financiers des coopératives sont <a href="https://www.nasco.coop/fr/development/handbook/equity">variés</a>, elles ont souvent vocation à se déployer pour <a href="https://www.safetyandhealthfoundation.org/BadgerSummer2009.pdf">lutter contre la spéculation immobilière</a> et maintenir des logements abordables pour le plus de personnes possible. À New York City, c’est l’ambition de Co-op City, aujourd’hui considérée comme la <a href="https://press.princeton.edu/books/hardcover/9780691234748/working-class-utopias">plus large coopérative de logement au monde</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1600780717600157696"}"></div></p>
<p>De même, les coopératives étudiantes se sont structurées en mouvement et continuent de se <a href="https://www.nasco.coop/resources/expansion">déployer dans de nombreuses villes</a> nord-américaines. Certaines coopératives démarrées dans les années 1930 se sont mises en réseau, elles achètent de nouveaux bâtiments, font construire de nouvelles coopératives, et ont offert un logement à bas prix dans de plus en plus de villes au fil du XX<sup>e</sup> siècle (par exemple autour des universités à <a href="https://www.austincooperatives.coop/">Austin</a>, <a href="https://www.madisoncommunity.coop/">Madison</a> ou <a href="https://icc.coop/">Ann Arbor</a>). À Berkeley, plus de <a href="https://bsc.coop/about-us/our-mission">1300 étudiants</a> sont actuellement hébergés au sein de coopératives – soit environ 2,8 % des étudiants de l’Université, et il est estimé que ces coopératives étudiantes permettent aux étudiants de payer leur logement <a href="https://betterworld.coop/sectors/sector-housing/">50 % moins cher</a> que le marché classique.</p>
<p>Promouvant la non-spéculation immobilière, <a href="https://us.sagepub.com/en-us/nam/encyclopedia-of-community/book220816">l’expansion de l’accès aux logements peu onéreux</a> – notamment pour les étudiants, les femmes, et les minorités les moins privilégiées – et une révolution du <a href="https://icor.ieseg.fr/wp-content/uploads/sites/12/2023/02/ABSTRACT-Lisa-Buchter.pdf">partage des tâches domestiques</a>, la culture coopérative pourrait-elle <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2009/12/28/l-habitat-groupe-ou-comment-vivre-ensemble-chacun-chez-soi_1285440_3224.html">se développer</a> en France ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222662/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lisa Buchter ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans un contexte où la spéculation immobilière et les pénuries de logements sociaux créent de nombreuses difficultés pour les étudiants, considérer des modèles alternatifs de logements s’impose.Lisa Buchter, Professeure associée en sociologie, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1974802023-05-03T13:38:17Z2023-05-03T13:38:17ZMigrer sans pattes ni ailes ? Le défi de la migration assistée des arbres<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/510177/original/file-20230214-24-as6jr0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C1%2C992%2C664&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">S'il est vrai que les arbres individuels sont immobiles, à l’échelle de l’espèce ils peuvent se déplacer et migrer aussi bien que les oiseaux, mais sur une période différente.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>S’il est vrai que les arbres individuels sont immobiles, à l’échelle de l’espèce ils peuvent se déplacer et migrer aussi bien que les oiseaux ! Mais sur une fenêtre temporelle différente. </p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><strong>Cet article fait partie de notre série <a href="https://theconversation.com/ca-fr/topics/foret-boreale-138017">Forêt boréale : mille secrets, mille dangers</a></strong></p>
<p><br><em>La Conversation vous propose une promenade au cœur de la forêt boréale. Nos experts se penchent sur les enjeux d’aménagement et de développement durable, les perturbations naturelles, l’écologie de la faune terrestre et des écosystèmes aquatiques, l’agriculture nordique et l’importance culturelle et économique de la forêt boréale pour les peuples autochtones. Nous vous souhaitons une agréable – et instructive – balade en forêt !</em></p>
<hr>
<p>C'est ce que nous allons approfondir dans cet article, le premier de notre nouvelle série estivale. En tant que chercheurs en écophysiologie forestière, nous étudions le fonctionnement des arbres en relation avec des dynamiques écologiques à plus large échelle. Le climat en rapide changement présente de nombreux défis à affronter pour assurer la durabilité des écosystèmes forestiers. Face à ces nouveaux problèmes, nous cherchons de nouveaux outils. Parmi ceux-ci, la migration assistée des arbres. </p>
<p>Et pour nous inspirer, cet extrait d'une chanson de notre poète national, Gilles Vigneault. </p>
<blockquote>
<p>J’ai planté un chêne au bout de mon champ,</p>
<p>perdrerai-je ma peine ?</p>
<p>perdrerai-je mon temps ?</p>
</blockquote>
<p>Débarrassons-nous d’abord des définitions : la migration assistée réfère au <a href="https://pubs.cif-ifc.org/doi/10.5558/tfc2011-089">« mouvement d’espèces, assisté par l’humain, en réponse aux changements climatiques »</a>. Nous avons l’habitude d’associer le terme « migration » au déplacement des personnes ou aux vols saisonniers des oiseaux. </p>
<p>Il peut donc paraître étrange d’associer la migration aux arbres, qui sont typiquement enracinés au sol et ne bougent pas. Mais est-ce vraiment le cas ?</p>
<h2>La forêt mouvante</h2>
<p>La migration des arbres se produit par la dispersion des semences, la germination, puis l’établissement de nouveaux semis. Ceux-ci, après un certain temps, produisent de nouvelles semences et contribuent à une lente expansion géographique.</p>
<p>Les stratégies de migration peuvent différer selon les espèces d’arbres : les <a href="https://www.zoom-nature.fr/les-samares-des-erables-des-autogires-tres-performants/">samares d’érable</a>, transportées par le vent, peuvent voyager plus vite et plus loin que les glands d’un chêne, limitées par leur poids imposant. Cependant, les nouveaux semis ont besoin d’années, souvent de décennies, pour pousser et produire des semences qui peuvent migrer plus loin que leurs parents.</p>
<p>Ce mouvement, qui se met en place à l’échelle des siècles, généralement trop lent pour notre conception du temps, peut <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/j.1752-4571.2007.00013.x">devenir limitant</a> face aux changements rapides induits par l’homme dans les systèmes climatiques.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/510181/original/file-20230214-1870-o5vnke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="glands de chêne" src="https://images.theconversation.com/files/510181/original/file-20230214-1870-o5vnke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/510181/original/file-20230214-1870-o5vnke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/510181/original/file-20230214-1870-o5vnke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/510181/original/file-20230214-1870-o5vnke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/510181/original/file-20230214-1870-o5vnke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/510181/original/file-20230214-1870-o5vnke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/510181/original/file-20230214-1870-o5vnke.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les samares d’érable, transportées par le vent, peuvent voyager plus vite et plus loin que les glands d’un chêne, limités par leur poids imposant.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Changements rapides, arbres lents</h2>
<p>Les changements climatiques actuels induisent des <a href="https://www.ipcc.ch/report/sixth-assessment-report-working-group-ii/">modifications rapides</a> des conditions environnementales ; <a href="https://www.nature.com/articles/ngeo2681">aucun événement</a> de réchauffement naturel du passé ne s’est produit à une vitesse comparable. Ces changements climatiques exercent ainsi de fortes pressions sur les écosystèmes forestiers, notamment en modifiant les conditions des habitats.</p>
<p>La grande majorité des arbres ont des vitesses de migration <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/ddi.13630">inférieures à la rapidité de déplacement des habitats favorables</a>. Cela signifie que leur migration vers de nouveaux habitats favorables (par exemple, des régions froides devenant plus chaudes au nord) ne pourra pas compenser la perte d’habitats dans d’autres zones (par exemple, des régions chaudes devenant plus sèches au sud).</p>
<p>Ce décalage entre la modification des conditions d’habitats et la migration naturelle des arbres entraîne une perte de vigueur des forêts. Pour beaucoup d’espèces, <a href="https://academic.oup.com/bioscience/article/57/11/939/234280">on prévoit un déclin</a> qui peut compromettre les écosystèmes forestiers locaux.</p>
<h2>Aider les arbres à migrer</h2>
<p>Nous sommes appelés à trouver des stratégies pour harmoniser les forêts aux nouvelles conditions climatiques. Cela motive les chercheurs et les gestionnaires à envisager de nouvelles approches pour solutionner ce problème, en recourant par exemple à la <a href="https://doi.org/10.5849/jof.13-016">migration assistée</a>. </p>
<p>Le déplacement artificiel et la plantation de semences peuvent accélérer le processus de migration naturel et aider à surmonter les barrières géographiques, telles que les chaînes de montagnes ou les grandes surfaces d’eau.</p>
<p>La migration assistée peut donc être appliquée pour maintenir des écosystèmes forestiers fonctionnels dans le futur. Ce n’est pas seulement important pour la conservation des espèces, mais aussi pour le maintien de l’ensemble des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/B9780080983493000244">services</a> offerts par les forêts, par exemple la production du bois ou la séquestration du carbone de l’atmosphère.</p>
<p>En général, les transferts sur de courtes distances sont plus faciles à réaliser, tandis que la migration sur de plus longues distances nécessite une planification plus minutieuse. Comme cette dernière présente des risques écologiques plus élevés, elle n’est généralement considérée <a href="https://pubs.cif-ifc.org/doi/10.5558/tfc2011-089">que pour des actions de conservation</a>. </p>
<p>Mais assez parlé de théorie, passons à des exemples concrets.</p>
<h2>Un exemple canadien</h2>
<p>L’érable à sucre (<em>Acer saccharum</em>) est une espèce d’arbre emblématique au Canada. À mesure que les changements climatiques s’intensifient, les érablières méridionales (au sud) <a href="https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1890/ES15-00238.1">souffrent d’une concurrence accrue</a> de la part des arbres qui tolèrent mieux les conditions plus chaudes et sèches, comme le hêtre d’Amérique (<em>Fagus grandifolia</em>).</p>
<p>Parallèlement, des chercheurs ont constaté que les régions au nord de l’aire de répartition de l’érable deviennent de <a href="https://academic.oup.com/forestscience/article/67/4/446/6270781">plus en plus propices à cette espèce</a>. Dans ce cas, la migration assistée pourrait favoriser une adaptation plus rapide des forêts nordiques aux nouvelles conditions, et rendre des services appréciés des propriétaires forestiers locaux, comme la production de sirop d’érable. Alors, pourquoi ne pas simplement aller de l’avant avec cette technique ?</p>
<h2>Pionniers</h2>
<p>En 2019, l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) a établi une plantation expérimentale d’érable à sucre à la limite nord de son aire de répartition, dans la région du Saguenay, au Québec. L’expérience est menée en partenariat avec une entreprise agricole familiale de la région, qui a choisi de consacrer une partie de ses terres à la recherche scientifique et à sa vision d’une érablière productive pour les générations futures.</p>
<p>La plantation, qui compte environ 500 jeunes arbres issus de plusieurs populations du Québec et des États-Unis, fêtera sa quatrième année de vie au printemps 2024. D’ici quelques décennies, de l’excellent sirop d’érable pourrait être produit, en plus des précieuses données scientifiques recueillies jusqu’alors.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/510184/original/file-20230214-14-v0cnk3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="érable à sucre" src="https://images.theconversation.com/files/510184/original/file-20230214-14-v0cnk3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/510184/original/file-20230214-14-v0cnk3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/510184/original/file-20230214-14-v0cnk3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/510184/original/file-20230214-14-v0cnk3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/510184/original/file-20230214-14-v0cnk3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/510184/original/file-20230214-14-v0cnk3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/510184/original/file-20230214-14-v0cnk3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">À mesure que les changements climatiques s’intensifient, les érablières méridionales (au sud) souffrent d’une concurrence accrue de la part des arbres qui tolèrent mieux les conditions plus chaudes et sèches, comme le hêtre d’Amérique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Essais de migration</h2>
<p>Des études similaires ont été réalisées par le réseau de recherche <a href="https://dream-forests.org/membres/">DREAM</a>, un projet du gouvernement du Québec (MRNF), du USDA Forest Service et de l’Université Laval. Les essais, incluant une dizaine d’espèces d’arbres plantées en mélange, se situent dans la région de Portneuf au Québec et au Wisconsin (États-Unis). On y teste les effets des différents facteurs, tels que le microclimat, le broutement et la concurrence végétale, sur l’acclimatation des plants. De plus, on compare la performance des plants de populations méridionales, adaptées à des conditions similaires aux prédictions du climat futur, à celle des populations locales.</p>
<p>Réaliser ce type d’étude expérimentale permet d’obtenir des informations précieuses sur les caractéristiques qui peuvent aider ou nuire à la réussite des projets de migration assistée. Par exemple, on peut comprendre quelles espèces ou populations sont plus sensibles aux <a href="https://academic.oup.com/bioscience/article/58/3/253/230872">évènements de gel tardif</a> ou au <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s40725-021-00148-5">broutement des herbivores</a>.</p>
<p>La mise en place d’essais scientifiques aujourd’hui peut aider à bien comprendre les dynamiques et les risques liés à la migration assistée, afin que nous puissions faire les meilleurs choix d’aménagement forestier pour les années et les générations futures. </p>
<p>Les changements climatiques progressent vite et les forêts ne poussent pas au même rythme : il est donc important de commencer à planter aujourd’hui les forêts de demain. </p>
<hr>
<p><em>Les auteurs remercient Emilie Champagne de la Direction de Recherche Forestière du Québec (Ministère des Ressources Naturelles et des Forêts) pour les contributions et commentaires au texte écrit et les Jardins Gobeil pour la collaboration et l’aide matérielle avec le maintien de la plantation expérimentale.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197480/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Claudio Mura a reçu des financements du Conseil de Recherches en Sciences Naturelles et en Génie du Canada (CRSNG) dans le cadre du projet Alliance-Érable, partenaires le gouvernement du Québec (ministère des Ressources naturelles et des Forêts), le Centre Acer, les Productrices et Producteurs acéricoles du Québec, le Syndicat des Producteurs de bois du Saguenay Lac-Saint-Jean et l'Université du Québec en Outaouais (UQO). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Patricia Raymond est membre de l'Ordre des ingénieurs forestiers du Québec (QC, Canada). Elle a reçu du financement du Plan pour une économie verte du Ministère de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs du Gouvernement du Québec.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sergio Rossi est membre de l'Ordre des Ingénieurs Forestiers du Québec (QC, Canada) et de l'Ordine dei Dottori Agronomi e Forestali di Padova (Italie).
Sergio Rossi a reçu des financements par des programmes publiques: le Fonds de recherche du Québec - Nature et technologie (FRQNT) et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG)</span></em></p>Le climat en rapide changement présente de nombreux défis à affronter pour assurer la durabilité des écosystèmes forestiers. La migration assistée est un outil qui permet de faire face à ces enjeux.Claudio Mura, PhD student in Forest Ecophysiology, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Patricia Raymond, Chercheuse scientifique et professeure associée, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Sergio Rossi, Professor, Département des Sciences Fondamentales, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1906172022-09-22T18:43:08Z2022-09-22T18:43:08ZAu Bénin, construire à tout prix<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/485563/original/file-20220920-18-em2inb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5455%2C3631&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Vue de Cotonou.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/cityscape-sunset-view-cotonou-benin-republic-1719771760">sope Adelaja/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Construire et habiter « chez soi » sont, au Bénin comme dans bien d’autres pays d’Afrique – du <a href="https://journals.openedition.org/com/6443">Togo</a> à la <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-modern-african-studies/article/middle-class-construction-domestic-architecture-aesthetics-and-anxieties-in-tanzania/121A60413113E3609D7F6E55D4844722">Tanzanie</a> et du <a href="https://www.cairn.info/revue-cahiers-d-etudes-africaines-2020-1-page-115.htm?contenu=article">Mali</a> au <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/africa/article/morality-in-the-middle-choosing-cars-or-houses-in-botswana/7314905F3E781CC64B2DAB40DE6A50C5">Botswana</a> –, des ambitions largement partagées par tous ceux qui, des classes populaires aux élites, parviennent à s’assurer des revenus un minimum stables et suffisants pour dégager une certaine épargne.</p>
<p>La construction artisanale est ici la norme, le propriétaire engageant un maçon et son équipe pour édifier la maison. Seule la construction d’un bâtiment à étages demande l’intervention de techniciens en bâtiment qualifiés. De tels projets ne concernent fondamentalement que l’élite et les fractions supérieures des classes moyennes, concentrées dans les grandes agglomérations que sont Cotonou, Porto-Novo ou Parakou, même si leur présence est aussi visible ailleurs, au travers des quelques maisons à étages et petits immeubles des agglomérations plus modestes.</p>
<p>Dans les villes secondaires et les campagnes, et même dans les périphéries des grandes villes, une nette majorité des projets de construction en restent au niveau du rez-de-chaussée, et se négocient entre un propriétaire auto-promoteur et un maçon. La croissance urbaine importante du pays, où les statistiques officielles estiment désormais que la <a href="https://donnees.banquemondiale.org/indicator/SP.URB.TOTL.IN.ZS?locations=BJ">moitié des quelque 12 millions de Béninois vivent en ville</a>, se nourrit largement de cette <a href="https://www.cairn.info/revue-l-information-geographique-2019-2-page-85.htm?ref=doi&contenu=article">dynamique d’auto-construction</a> dans laquelle chacun s’engage corps et biens. Dépôts de ciment et de matériaux de construction, mais aussi chantiers d’habitations, sont d’ailleurs <a href="https://archive-ouverte.unige.ch/unige:145150">omniprésents</a> dans un pays littéralement en chantier.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/485570/original/file-20220920-21-u47n90.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’avancée du front urbain à Togbin, dans la banlieue de Cotonou, où quelques constructions déjà achevées cohabitent avec chantiers d’ampleurs diverses et parcelles de maraîchers.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Noret</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les enjeux de cette croissance urbaine sont <a href="https://journals.openedition.org/poldev/3352">multiples</a>, et sa planification délicate. Mais pour les gens mobilisés par ces projets, l’investissement dans la construction et l’accès à la propriété sont à la fois une question de conditions d’existence et de possibilités ultérieures d’accumulation, et une question de reconnaissance sociale fondamentale.</p>
<h2>Les voies tortueuses de la construction</h2>
<p>En juillet 2022, dans Abomey, une petite ville de province, je repassai voir Guy (les prénoms ont été modifiés), une vieille connaissance que j’avais fréquentée il y a une douzaine d’années. La quarantaine bien engagée, celui-ci s’était vu allouer il y a une quinzaine d’années un emplacement dans la parcelle de son père, afin d’y construire son propre logement. Plombier de profession, il disposait à l’époque de revenus lui permettant un niveau suffisant d’épargne pour s’engager dans un tel projet, et il se mit donc au travail. Il conçut le plan d’un bâtiment de quatre petites chambres et un salon, et parvint en quelques années à faire élever les murs jusqu’au niveau où viendrait se poser la charpente.</p>
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<p>Au début des années 2010, sa mère tombe malade et ses affaires commencent à péricliter, sous l’effet, dit-il, d’une concurrence accrue au sein de la profession de plombier dans la petite ville de province où il réside, Abomey. En 2014, il décide de s’engager dans une formation pour devenir instituteur. Un emploi salarié lui garantirait au moins des revenus réguliers. Toutefois, le niveau de revenus qui est le sien aujourd’hui ne lui permet plus de poursuivre son projet de construction.</p>
<p>Des 60 000 francs CFA par mois qu’il gagne (un peu plus de 90 euros) pendant l’année scolaire, il doit en effet d’abord retirer 10 000 francs pour payer l’essence de ses trajets en moto jusqu’au village où il a été affecté, et le reste est entièrement absorbé par les soins que demande l’état de sa maman – « cela me ruine », glisse-t-il –, la scolarisation de ses deux adolescents dans une école privée, et par les frais du ménage, auxquels sa femme, vendeuse de sucre sur le marché local, contribue de façon marginale. Guy habite toujours aujourd’hui dans un bâtiment construit par son père, qu’il partage avec certains de ses frères. Il y a une dizaine d’années désormais que son projet de maison est à l’arrêt, et se transforme doucement en la ruine inachevée d’un rêve brisé…</p>
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<img alt="Maison inachevée abandonnée" src="https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484848/original/file-20220915-22-clbqtp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La maison inachevée de Guy à Abomey.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Noret</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>C’est assurément dans les classes populaires, où se côtoient petits indépendants, artisans, paysans et petits employés, que le défi de la construction se pose avec la plus grande acuité.</p>
<p>Chez l’ensemble des propriétaires de milieux modestes que j’interroge depuis plus d’un an lors de mes séjours au Bénin sur les motivations et les contours de leurs projets de construction, j’entends des récits soulignant la persévérance et les privations que requiert l’édification d’une maison, et les stratégies d’épargne parfois radicales qu’ils mettent en place pour y parvenir, consacrant parfois plus de la moitié de leurs revenus à leur projet de construction au moment de la fabrique des parpaings et de l’édification des murs.</p>
<h2>Construction et réalisation de soi</h2>
<p>C’est que les enjeux sont considérables, à la mesure des investissements réalisés et des sacrifices consentis. L’édification d’une maison est un accomplissement majeur et une source fondamentale de <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/02723638.2017.1286839">reconnaissance sociale</a>. La consécration, aussi, d’une certaine indépendance économique et statutaire. En particulier, dans une société où l’on répète volontiers que « si tu n’as rien, tu n’es rien », construire et habiter son « chez soi » est une manière essentielle de s’affirmer en tant qu’homme.</p>
<p>Les projets de construction, en effet, se conçoivent le plus souvent de manière individuelle dans un pays où les finances restent gérées de manière <a href="https://odagnelie.github.io/docs/lemay_dagnelie_jid.pdf">très largement séparée</a> au sein du couple. Et même si l’on croise parfois un couple ayant mis ses ressources en commun pour construire ensemble, c’est d’abord aux hommes que revient le devoir d’édifier l’habitation familiale. Les femmes peuvent certes, elles aussi, construire leur propre maison. C’est même là un signe de réussite auquel aspirent en particulier les cadres et les grandes commerçantes, mais aussi celles qui s’avèrent capables de dégager une épargne, et que les liens conjugaux rompus ou distendus ont rendues cheffes de ménage. D’une femme qui a construit, on pourra d’ailleurs dire pour souligner son mérite qu’elle « a agi comme un homme »…</p>
<p>L’enjeu toutefois n’est pas de la même nature, et touche moins directement à l’accomplissement d’un idéal féminin. Car pour ce qui est des hommes, « il a construit », « il est chez lui », ou au contraire « il n’a jamais fabriqué une brique dans sa vie », sont autant de manières dont peut être rapportée au quotidien la valeur des individus et jaugée leur réalisation de l’idéal masculin. Et le jugement est d’autant plus sévère sur ceux qui, salariés ou cadres dans la fonction publique ou dans le secteur privé, ont été en position de construire mais n’ont « rien réalisé », et que la doxa populaire accuse alors typiquement d’avoir dilapidé leur argent dans les plaisirs des femmes et de la fête…</p>
<p>C’est ainsi que chacun investit dans une maison qui peut devenir une véritable mise en scène de sa réussite. Dans les couches supérieures de la population, on construit volontiers de grandes maisons à étages, de plus en plus souvent entourées de murs d’enceinte surmontés de barbelés, avant de rivaliser dans la qualité des finitions et des équipements, des jeux de lumières des plafonniers à la qualité du carrelage, au confort du salon et à la taille des écrans plats.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=735&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=735&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=735&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=924&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=924&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484850/original/file-20220915-14325-9fdmp0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=924&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’aménagement progressif du salon dans les classes populaires, où l’on investit souvent les lieux avant la réalisation des finitions. L’embellissement des lieux pourra encore s’étaler sur plusieurs années.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Noret</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Dans les milieux populaires, les préoccupations esthétiques passent au second plan, mais on s’efforce de plafonner puis éventuellement de peindre les murs de parpaings, d’installer un faux plafond qui isolera un peu de la chaleur du toit de tôles, et peut-être plus tard de carreler la pièce de vie. La possession d’un salon meublé et d’une télévision viendront compléter ce que parents, voisins et amis apprécieront à sa juste valeur comme une belle réalisation. Mais les aléas de l’existence et les imprévus des trajectoires les mieux planifiées prélèveront aussi leur tribut sur les projets engagés, et bon nombre de constructions en resteront finalement à un niveau d’aménagement plus sommaire…</p>
<h2>Construction et accumulation</h2>
<p>La maison, toutefois, n’est pas seulement un lieu crucial d’accomplissement social, à travers lequel se donne à voir un jeu subtil de distinction entre classes et fractions de classes. Elle peut aussi devenir, en particulier dans les milieux populaires et les classes moyennes, un site non moins crucial d’accumulation. Un certain nombre de petits propriétaires construisent en effet dans leur parcelle d’autres logements, avec l’intention de les louer et d’en tirer des revenus complémentaires, susceptibles aussi de devenir leur « assurance vieillesse » une fois qu’ils auront cessé de travailler.</p>
<p>Christian est un mécanicien approchant désormais la quarantaine et vivant lui aussi à Abomey, que j’ai connu en 2021 par l’intermédiaire d’un ami. En 2019, il a revendu sa modeste maison à un voisin qui voulait agrandir sa propre parcelle, réalisant au passage une petite plus-value qui lui a permis de construire l’habitation où il vit désormais.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/quelles-sources-de-financement-pour-les-pme-beninoises-du-secteur-informel-102027">Quelles sources de financement pour les PME béninoises du secteur informel ?</a>
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<p>Sa nouvelle construction est plus grande que la précédente, et la plus-value lui a aussi permis de construire à côté de sa propre maison une habitation plus petite, formée d’une chambre et d’un salon, qu’il destine à la location. Christian s’auto-contraint à l’épargne pour un peu plus d’un demi-million de francs CFA par an (soit un peu plus de 800 euros), via des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/j.1468-0084.2011.00641.x">systèmes d’épargne rotative</a> connus en Afrique sous le nom de « tontines ». Une telle somme représente sans doute un peu plus du tiers de ses revenus. À son agenda des prochaines années figure en bonne place la réalisation d’autres logements de ce type, avec lesquels il partagera une partie de sa cour, et qui lui fourniront progressivement des revenus complémentaires non négligeables.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484851/original/file-20220915-19-a0abjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La maison de Christian. A gauche, un logement en cours de finition qu’il destine à la mise en location. Au premier plan, le tas de ciment témoigne de la volonté de Christian de ne pas s’arrêter à ce stade de la construction.</span>
<span class="attribution"><span class="source">J. Noret</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Dans les fractions supérieures des classes moyennes et parmi les élites, on investit volontiers dans l’achat de parcelles, à des fins spéculatives – croissance démographique et croissance urbaine font monter rapidement le prix des terrains à bâtir – ou pour y construire des logements destinés à la mise en location. Dans les classes populaires et fractions inférieures des classes moyennes, c’est davantage la parcelle d’habitation elle-même qui accueille ces projets d’accumulation et de diversification de ses sources de revenus.</p>
<p>Au final, dans une société béninoise où la construction se révèle être une passion sociale majeure, l’édification d’une maison constitue un moment clé dans la <a href="https://www.berghahnbooks.com/title/NoretSocial">stabilisation d’une position sociale</a> et la concrétisation d’une forme de réalisation de soi. Entre ceux qui seront parvenus à bâtir leur propre édifice et ceux qui, pour des raisons diverses, y auront échoué, passe une double ligne de partage, qui distingue les uns des autres à la fois dans l’ordre matériel des conditions d’existence et dans l’ordre symbolique de la reconnaissance sociale. Logée au cœur des investissements et des désirs de larges pans de la population, la construction des maisons s’avère ainsi un lieu privilégié d’exploration des rapports sociaux et des aspirations qui font la dynamique d’une société africaine d’aujourd’hui.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190617/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joël Noret a reçu des financements du Fonds de la Recherche Scientifique (FRS-FNRS, Belgique).</span></em></p>Au Bénin, construire sa propre maison est un accomplissement social majeur, dans lequel ceux qui en ont les moyens s’engagent avec passion, chacun à la mesure de ses possibilités et de ses ambitions.Joël Noret, Professeur d'anthropologie, Université Libre de Bruxelles (ULB)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1849832022-06-21T19:19:55Z2022-06-21T19:19:55ZJoseph : « Pourquoi habite-t-on dans des maisons et non dans des grottes comme à la préhistoire ? »<p>Durant la préhistoire, les êtres humains n’habitaient pas que dans des grottes. Il est vrai que de nombreux sites préhistoriques sont situés à l’entrée de grottes. C’est le cas, par exemple, du très fameux abri de la Madeleine, situé en Dordogne, où les archéologues ont mis à jour, entre autres, des outils en pierre ou en os de rennes vieux de plus de 10 000 ans. Mais, il existe aussi de nombreux sites dits « de plein air » où ont été mises à jour les traces de tentes ou de cabanes.</p>
<p>Sur le site de Pincevent en Seine-et-Marne, par exemple, l’archéologue André Leroi-Gourhan et ses collaborateurs ont mis à jour des pierres disposées en cercle qui pourraient avoir délimité l’emplacement de tentes, plantées là il y a quelque 12 300 ans.</p>
<p>Sur le site Gontsy en Ukraine, les fouilles conduites sous la direction de Lioudmila Iakovleva et François Djindjian ont permis d’exhumer les vestiges de six cabanes vieilles de 15 000 ans, construites en os de mammouth !</p>
<p>Durant la préhistoire, les êtres humains habitaient ainsi au moins deux types d’habitats : des cavernes ou des cabanes, et ils pourraient même avoir construit des cabanes dans des cavernes !</p>
<p>De nos jours, les êtres humains n’habitent pas que des maisons. Certes, en de nombreuses régions du globe, la maison, souvent associée à un jardin, compte parmi les types d’habitats domestiques courants. Mais, certaines populations vivent encore dans des grottes (habitats troglodytes), comme la communauté gitane qui réside dans les grottes du quartier du Sacromonte à Grenade (Espagne) depuis le Moyen-Âge.</p>
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<img alt="Intérieur d’une grotte du Sacromonte, dans la ville de Grenade, en Espagne" src="https://images.theconversation.com/files/470046/original/file-20220621-23-d93f6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/470046/original/file-20220621-23-d93f6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=804&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/470046/original/file-20220621-23-d93f6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=804&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/470046/original/file-20220621-23-d93f6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=804&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/470046/original/file-20220621-23-d93f6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1010&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/470046/original/file-20220621-23-d93f6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1010&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/470046/original/file-20220621-23-d93f6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1010&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Grotte du Sacromonte, dans la ville de Grenade, en Espagne.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Museo-cuevas_del_Sacromonte#/media/Fichier:Vivienda_gitana_reconstituida,_Museo-cuevas_del_Sacromonte_(Granada)_-_2.jpg">Eunostos/Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Tandis que d’autres vivent sous des tentes, dans des cases, dans des igloos, dans des caravanes, à bord de sampan (bateaux chinois), dans des châteaux, dans des barres de logements, en haut de gratte-ciel, dans des stations polaires, etc.</p>
<p>À ces habitats bien réels s’ajoutent ceux qui existent dans notre imagination. Certains ne seront sans doute jamais construits, comme la maison en pain d’épices d’Hansel et Gretel ou le palais de la Reine des Glaces, tandis que d’autres le seront peut-être un jour, comme la station spatiale <em>Lunar Gateway</em> que la NASA projette de placer en orbite autour de la lune. Finalement, ce qui frappe c’est la très grande diversité de nos habitats !</p>
<p>Comment se fait-il que les êtres humains construisent et habitent des habitats si différents ? Une première explication pourrait être que la variété des habitats découle de la variété des contextes naturels. Une telle explication repose sur l’hypothèse que les formes d’habitats sont déterminées, sinon adaptées à la température, à la pluviosité, aux vents, aux sols, à la flore, à la faune propres à chaque environnement.</p>
<p>Une deuxième explication pourrait être que la variété des habitats découle de la diversité des contextes culturels, cette fois. L’hypothèse est alors que les formes d’habitats sont déterminées, sinon influencées par les savoirs, les techniques, les usages et les valeurs propres à chaque société.</p>
<p>Une troisième explication est que la diversité de l’habitat découle de l’intelligence technique des êtres humains, qui sont capables d’utiliser différemment un même lieu (l’ancien palais du Louvre, l’ancienne gare d’Orsay, l’ancienne piscine de Roubaix sont utilisés aujourd’hui pour y exposer des œuvres d’art) ou d’affecter des lieux différents à une même activité (on expose des œuvres d’art aussi bien dans un palais que dans une gare ou dans une piscine). Une telle intelligence fait que même dans des contextes naturels et culturels très exigeants il y a toujours, aux yeux des êtres humains, plusieurs possibilités en matière d’habitat.</p>
<p>Au fond, on pourrait dire que les humains n’ont pas d’habitat spécifique, et qu’il n’y a pour eux que des habitats possibles. De ce fait, il peuvent aussi bien se loger dans des cabanes, des cabines ou des cabinets que dans des grottes, des roulottes ou des châteaux de Camelot !</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dianerottner.com/">Diane Rottner</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p><em>Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : <a href="mailto:tcjunior@theconversation.fr">tcjunior@theconversation.fr</a>. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/184983/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Renaud Pleitinx ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les humains ne vivent pas que dans des maisons, mais sont capables de s’adapter à beaucoup d’environnements.Renaud Pleitinx, Professeur de théorie et de projet d'architecture / Professor of architectural theory and design, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1797362022-03-24T18:42:01Z2022-03-24T18:42:01ZLa taille des aires protégées, un critère déterminant<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/454228/original/file-20220324-27-xogs9c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un gardien et son troupeau, dans le parc national de Waza, au Cameroun. </span> <span class="attribution"><span class="source">Paul Scholte</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><em>Avec le réchauffement climatique, le recul de la biodiversité représente l’une des plus grandes menaces pour la vie sur Terre… Dans notre série d'été « Protéger la nature, mais comment ? », nous mettons le cap sur les aires protégées, ces zones où l’on tente de préserver les ressources naturelles. Après <a href="https://theconversation.com/protection-de-la-biodiversite-retour-sur-levolution-des-aires-protegees-dans-le-monde-167495">le panorama mondial de ces espaces</a>, on s’intéresse dans ce second épisode à la question centrale de leur taille.</em> </p>
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<p>Le déploiement d’un réseau d’aires protégées reste aujourd’hui le principal outil à disposition des États pour développer des politiques visant à inverser la courbe du déclin de la biodiversité.</p>
<p>Identifier des territoires ayant de forts enjeux écologiques et leur donner un statut de protection plus ou moins contraignant <a href="https://theconversation.com/protection-de-la-biodiversite-retour-sur-levolution-des-aires-protegees-dans-le-monde-167495">n’est pas nouveau</a>.</p>
<p><a href="https://www.researchgate.net/profile/Mark-Spalding-3/publication/288178320_Role_and_Trends_of_Protected_Areas_in_Conservation/links/5a38d131458515919e7275f8/Role-and-Trends-of-Protected-Areas-in-Conservation.pdf">En 1960</a>, on comptait environ 10 000 aires protégées qui s’étendaient sur environ 2 000 000 km<sup>2</sup>. En 2010, la base de données sur les aires protégées de l’IUCN (WDPA) recensait <a href="https://www.iucn.org/theme/protected-areas/our-work/world-database-protected-areas">177 547 zones</a> ayant un statut de conservation sur 17 millions de km<sup>2</sup> des terres émergées (12,7 % des continents et îles, hors antarctique) et 6 millions de km<sup>2</sup> dans les océans et côtes (1,6 % de leur surface).</p>
<p>En 2021, 16,6 % des terres et des écosystèmes aquatiques intérieurs bénéficient d’un statut de conservation, contre 7,7 % pour les milieux maritimes et côtiers.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/419815/original/file-20210907-14-130igsm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/419815/original/file-20210907-14-130igsm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/419815/original/file-20210907-14-130igsm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=349&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/419815/original/file-20210907-14-130igsm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=349&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/419815/original/file-20210907-14-130igsm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=349&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/419815/original/file-20210907-14-130igsm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/419815/original/file-20210907-14-130igsm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/419815/original/file-20210907-14-130igsm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Carte présentant la répartition des aires protégées au niveau mondial. Actuellement, plus de 22,5 millions de km² sur terre et 28 millions de km² en milieux marins et côtiers sont aujourd’hui protégés.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.protectedplanet.net/en">protectedplanet.org</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<h2>À chaque État de construire sa stratégie</h2>
<p>Chaque pays adopte sa propre stratégie nationale pour la délimitation de ses aires protégées. Ce faisant, les dénominations et les niveaux de protection de la biodiversité peuvent fortement fluctuer d’un pays à l’autre.</p>
<p>Afin de pouvoir évaluer l’efficacité des aires protégées sur la conservation de la biodiversité, l’IUCN propose un classement en fonction du niveau de protection qu’elles assurent. Sur les 6 classes proposées, les 3 premières (réserve naturelle intégrale/zone de nature sauvage, parc national et monument naturel) impliquent que la législation nationale doit prévoir une exclusion de toute action humaine en dehors de certaines activités touristiques.</p>
<p>La première classe implique même une limitation très stricte des entrées dans la zone, souvent exclusivement pour des motifs d’études scientifiques. Les trois autres classes (aire de gestion des habitats/espèces, paysage terrestre/marin protégé et zone de gestion de ressources protégées), incluent des espaces où la conservation de la biodiversité est assurée par des pratiques d’utilisation des ressources naturelles réglementée afin d’en assurer la durabilité (agriculture, urbanisme, collectes, chasse).</p>
<p>Ainsi, chaque État peut construire sa propre stratégie en fonction de ses contraintes législatives, sociales, économiques et écologiques, tout en s’assurant qu’il respecte bien les orientations de la Convention sur la bioversité biologique (CDB), ratifiée par 196 pays.</p>
<h2>La question centrale de la taille des aires protégées</h2>
<p>Construire un réseau national d’aires protégées dépend de nombreux facteurs comme la représentativité de la diversité des écosystèmes, l’endémisme et/ou le statut de conservation des espèces, les interactions avec les autres modes d’utilisation des terres, la dimension symbolique et patrimoniale de certains espaces ou, parfois, espèces, les moyens institutionnels et financiers du pays…</p>
<p>Toutefois, un grand nombre d’aires protégées historiques a été délimité en se basant sur les <a href="https://www.cairn.info/revue-annales-de-geographie-2006-5-page-569.htm?contenu=article">paradigmes de l’écologie insulaire</a>, théorisant la taille minimum d’une population et la diversité d’une communauté pour assurer le bon fonctionnement de l’écosystème.</p>
<p>Vu sous cet angle, la géométrie, notamment la taille et la forme des aires protégées ont souvent été des <a href="https://bio.libretexts.org/Bookshelves/Ecology/Conservation_Biology_in_Sub-Saharan_Africa_(Wilson_and_Primack)/13%3A_The_Importance_of_Protected_Areas/13.05%3A_Designing_Protected_Areas">éléments de choix décisifs</a>.</p>
<p>D’autant plus que les objectifs d’Aichi, issue de la Convention sur la diversité biologique, mettent l’accent sur la surface minimum en aires protégées que les pays signataires s’engagent à classer. Fixée à 17 % pour 2020, elle sera revue à 30 % à horizon 2030 lors de prochaines négociations (COP15), régulièrement reportées à cause de la pandémie.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/biodiversite-proteger-30-de-la-planete-quid-des-70-restants-175779">Biodiversité : protéger 30 % de la planète… quid des 70 % restants ?</a>
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<p>Même si la communauté internationale s’accorde à dire que la surface en aires protégées n’est pas le seul indicateur permettant de s’assurer de l’efficacité des politiques de conservation de la biodiversité, il est massivement utilisé et pilote l’évaluation des pays en matière de volonté à contribuer à la lutte globale contre l’érosion de la biodiversité.</p>
<p>Il paraît ainsi pertinent de se demander si cet indicateur n’a pas eu, dans certains cas, un effet négatif sur la capacité des États à mettre en place une politique cohérente et appropriée de conservation et gestion de leur patrimoine écologique.</p>
<h2>Des initiatives à double tranchant dans les pays pauvres</h2>
<p>Pourquoi cette question, apparemment irrévérencieuse ? Gérer une aire protégée <a href="https://papaco.org/fr/wp-content/uploads/2019/03/etudesAP_configAP_FR.pdf">coûte de plus en plus cher</a>. Mettre en place des activités économiques qui permettraient à ce territoire de jouer son rôle dans l’économie nationale peut devenir un vrai fardeau, voire une tâche insurmontable pour certains pays ayant déjà du mal à organiser l’accès aux services essentiels pour sa population.</p>
<p>Bien que toutes les aires protégées n’impliquent pas une exclusion totale des activités humaines, notamment l’agriculture ou la collecte de ressources naturelles, elles restent un <a href="https://www.iied.org/social-environmental-trade-offs-african-agriculture">frein réel au développement</a> de certaines activités considérées comme les plus destructrices (mine, infrastructures lourdes, villes, agriculture intensive…), mais qui sont aussi celles qui pourraient potentiellement être les plus intéressantes au développement des pays les plus pauvres.</p>
<p>Au-delà donc des coûts de gestion et de valorisation de ces espaces, les conflits d’usages issus d’arbitrages socio-économiques en faveur de la conservation de la biodiversité peuvent venir contredire les impératifs de développement local sur de larges espaces nationaux, voire nier la dimension culturelle et traditionnelle de ces écosystèmes.</p>
<p>Ces ambiguïtés sont particulièrement saillantes dans les <a href="https://pubs.iied.org/14675iied">pays les moins développés de la zone tropicale</a>. La pression internationale pour qu’ils atteignent les objectifs de surface d’aires protégées est maximale, car ils abritent une grande partie des points chauds de biodiversité.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/454226/original/file-20220324-17-1s58kv9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/454226/original/file-20220324-17-1s58kv9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/454226/original/file-20220324-17-1s58kv9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/454226/original/file-20220324-17-1s58kv9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/454226/original/file-20220324-17-1s58kv9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/454226/original/file-20220324-17-1s58kv9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/454226/original/file-20220324-17-1s58kv9.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cobes de Buffon dans le parc national de Waza (Cameroun).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Paul Scholte</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>En Afrique, des dizaines de milliers de km² à gérer</h2>
<p>Pour certains pays, gérer efficacement ces espaces, immenses et souvent isolés, se révèle être totalement illusoire tant leurs moyens budgétaires et humains sont structurellement insuffisants.</p>
<p>C’est notamment le cas sur le continent africain. Malgré cette équation complexe, la zone subsaharienne a atteint les objectifs d’Aichi, avec <a href="https://data.worldbank.org/indicator/ER.LND.PTLD.ZS?locations=ZG">16,4 % des territoires classés</a> en aires protégées. Mieux, la moitié de ces pays ont un taux de couverture en aires protégées supérieur au taux global. Sept d’entre eux, dont la République centrafricaine, pays parmi les plus pauvres de la planète, ont <a href="https://www.protectedplanet.net/region/AF">même déjà atteint l’objectif</a> qui sera fixé pour 2030.</p>
<p>Dans le même temps, les indices de développement humain (IDH) du continent figurent parmi les moins élevés. En dehors de trois pays (Afrique du Sud, Botswana et Gabon), tous les états ont un IDH révélant un développement humain moyen à faible. Si certains pays d’Afrique australe et de l’Est ont réussi à valoriser leurs aires protégées, ce n’est pas le cas en Afrique centrale où, en dehors du secteur de la chasse sportive, les opportunités économiques sont quasi inexistantes ou très localisées.</p>
<p>Entre difficulté d’accès, insécurité régionale et manque de capitaux pour investir, le secteur touristique n’a jamais réussi à réellement percer. Fait aggravant, probablement reflet historique dans l’imaginaire collectif des grands espaces sauvages, l’Afrique (et particulièrement l’Afrique centrale) organise son réseau d’aires protégées autour de zones immenses dont la surface donne le vertige.</p>
<p>Plus de <a href="https://wedocs.unep.org/bitstream/handle/20.500.11822/33388/18LPAFR.pdf">20 % des aires protégées</a> de plus de 10 000 km<sup>2</sup> se trouvent en Afrique. Les parcs Manovo-Gounda St Floris et Bamingui Bangoran, formant une partie du complexe d’aires protégées du Nord de la République centrafricaine font, à eux seuls, plus de 28 000 km<sup>2</sup>, soit la taille de la Belgique.</p>
<p>Au total, selon nos calculs, ce sont plus de 42 000 km<sup>2</sup> qui ont un statut de conservation, soit presque la moitié de la superficie des deux préfectures du Nord de la RCA.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/I2Q34a0LXfU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">En République centrafricaine, le défi des écogardes face à la guerre et au braconnage (France24/Youtube, 2021).</span></figcaption>
</figure>
<h2>La bataille des herbivores</h2>
<p>Dans ce contexte, est-il raisonnable d’imposer un modèle de conservation basé sur une surface minimale à protéger ?</p>
<p>Le projet Afrobiodrivers a permis l’analyse des <a href="https://www.fondationbiodiversite.fr/la-frb-en-action/programmes-et-projets/le-cesab/afrobiodrivers/">données d’inventaires fauniques</a> dans les principales aires protégées de savane d’Afrique centrale montrant que ces vastes territoires se sont progressivement vidés de leurs grands herbivores. En dehors du parc national de Zakouma au Tchad, la biomasse d’herbivores a été <a href="https://www.fondationbiodiversite.fr/la-frb-en-action/programmes-et-projets/le-cesab/afrobiodrivers/">divisée par un facteur 2, 3 voire 4 au cours des 50 dernières années</a>.</p>
<p>Pour <a href="https://www.fondationbiodiversite.fr/la-frb-en-action/programmes-et-projets/le-cesab/afrobiodrivers/">certains parcs nationaux</a>, la faune sauvage se retrouve isolée dans des petites poches de biodiversité, avec quelque centaines ou milliers d’individus comme reliquat de communautés jadis prospères pouvant avoir plusieurs centaines de milliers d’individus il y a 60 ou 70 ans.</p>
<p>Parallèlement, l’activité touristique associée à ces espaces a aussi été <a href="https://www.fondationbiodiversite.fr/la-frb-en-action/programmes-et-projets/le-cesab/afrobiodrivers/">drastiquement réduite</a>, hypothéquant la principale voie de valorisation de la faune sauvage afin que les États puissent financer le développement rural et assumer sa responsabilité dans la gestion de ces zones.</p>
<p>Le constat est donc sans appel : ces espaces jadis considérés comme l’archétype d’une Afrique sauvage, riche en diversité biologique et culturelle, sont maintenant quasi vidés de leurs animaux sauvages emblématiques, laissant place à des groupes armés ou des éleveurs. L’inversion de la biomasse d’herbivores sauvages au profit des herbivores domestiques est devenue la norme dans quasiment toutes les aires protégées des savanes d’Afrique centrale.</p>
<h2>Mettre en place une « retraite stratégique »</h2>
<p><a href="https://conbio.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/cobi.13860">Nous proposons une option de « retraite stratégique »</a> pour concentrer le peu de moyens de ces États sur les poches résiduelles de biodiversité afin de pouvoir les conserver efficacement.</p>
<p>Retraite stratégique n’implique pas de délaisser ou déclasser ces aires protégées mythiques. Les zones vidées de faune sauvage doivent être gérées avec de nouveaux outils de la conservation, notamment les AMCE, afin de définir une zonation d’usage des terres plus en adéquation avec la situation actuelle et les moyens à disposition ; afin d’assurer aussi que ces territoires perdus pourront, à l’avenir, retrouver un potentiel de valorisation issu des noyaux effectivement conservés lors de la retraite stratégique.</p>
<p>Ce modèle de concentration des moyens sur une plus petite zone, mais néanmoins suffisante et surtout, plus réaliste, puis d’expansion de la faune sur un territoire plus vaste semble fonctionner au parc national de Zakouma (Tchad).</p>
<p>Au-delà du dépoussiérage des modèles de conservation de la biodiversité, la communauté internationale, si elle souhaite imposer des objectifs globaux basés sur la surface, doit être consciente de l’effort d’investissement que cela impose aux pays les plus pauvres.</p>
<p>Elle doit notamment prendre à bras le corps la problématique de la sécurité régionale dans les savanes d’Afrique centrale afin que ces États puissent retrouver une situation propice à ces investissements, sans en spolier leur identité et leur souveraineté.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/179736/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre-Cyril Renaud a reçu des financements de FRB-CESAB (projet Afrobiodrivers).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Hervé Fritz a reçu de FRB-CESAB (projet Afrobiodrivers).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Paul Scholte a reçu des financements de FRB-CESAB (projet Afrobiodrivers).</span></em></p>Pour certains pays, notamment en Afrique, gérer ces espaces, immenses et souvent isolés, se révèle être illusoire tant leurs moyens budgétaires et humains sont structurellement insuffisants.Pierre-Cyril Renaud, Maitre de conférences - Gestion des Aires Protégées et des interfaces agriculture/biodiversité, Université d'AngersHervé Fritz, Directeur de recherche CNRS / IRL REHABS, écologie des savanes tropicales, Nelson Mandela UniversityPaul Scholte, Ecologist leading programs and organizations in conservation, The Ohio State UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1724142021-12-02T19:17:56Z2021-12-02T19:17:56Z« Le numérique et nous » : La maison comme nouveau monde<iframe src="https://embed.acast.com/601af61a46afa254edd2b909/619d2c09f76ca100131aed94" frameborder="0" width="100%" height="190px"></iframe>
<p><iframe id="tc-infographic-569" class="tc-infographic" height="100" src="https://cdn.theconversation.com/infographics/569/0f88b06bf9c1e083bfc1a58400b33805aa379105/site/index.html" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-ecouter-les-podcasts-de-the-conversation-157070">Comment écouter les podcasts de The Conversation ?</a>
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<p><em>Comment définir et mieux comprendre les rapports que nous entretenons avec le numérique et ses outils ? Quelles interactions avons-nous vraiment avec notre téléphone et nos tablettes ? Dans une série de quatre podcasts intitulée « Le numérique et nous » réalisé avec le Collège des Bernardins nous allons essayer de mieux définir les lies qui nous rattachent au numérique dans notre vie quotidienne.</em></p>
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<p>Dans ce premier épisode sur la notion de maison, nous examinons notamment la façon dont le confinement a changé nos vies. Le monde s’est considérablement rétréci avec la pandémie. La maison est devenue monde avec pour environnement principal un environnement numérique désormais indispensable à notre quotidien.</p>
<p>Le numérique peut-il changer la façon dont nous entrevoyons notre maison et notre monde ? Le numérique est-il notre prochaine maison ?</p>
<p>Afin de répondre à ces questions, nous recevons Gemma Serrano, docteure en théologie et codirectrice du département Humanisme et numérique du Collège des Bernardins.</p>
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<p><em>Pour aller plus loin, ne manquez pas la journée étude <a href="https://www.collegedesbernardins.fr/content/journee-detude-dieux-et-numeriques">Dieu(x) et numérique</a>.</em></p>
<p><em>Crédits, conception, Fabrice Rousselot et Sonia Zannad. Réalisation, Romain Pollet. Chargé de production, Rayane Meguenni.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172414/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Avec la pandémie et confinement, la maison s’est placée au centre de notre environnement numérique.Gemma Serrano, Professeur de théologie à la la Faculté Notre-Dame, co-directrice du séminaire de recherche Ecole et république du Collège des Bernardins, Collège des BernardinsFabrice Rousselot, Directeur de la rédaction, The Conversation FranceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1687702021-10-04T18:46:07Z2021-10-04T18:46:07ZSuppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales : les impensés de la réforme<p>Cet automne débute l’<a href="https://www.capital.fr/votre-argent/taxe-dhabitation-les-abattements-pour-les-plus-riches-en-2021-et-2022-1415003">allègement progressif de la taxe d’habitation</a> pour les derniers ménages qui s’en acquittaient. La <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000036339197">loi de finances initiale pour 2018</a> avait initié la démarche, promesse du candidat Macron, avec pour première cible les 80 % des foyers les plus modestes. La loi de finances initiale pour 2021 l’a conclue, avec une disparition effective de la taxe d’habitation pour les résidences principales à l’horizon 2023. Mais toutes les répercussions de cette réforme ont-elles bien été anticipées par le législateur ?</p>
<p>Avec la taxe d’habitation disparaît en effet ce qui fut longtemps l’un des piliers des finances locales : certes, <a href="https://www.vie-publique.fr/fiches/21918-quelles-sont-les-ressources-fiscales-des-collectivites-territoriales">pas le premier impôt direct en volume</a>, puisque la taxe professionnelle puis la taxe foncière ont successivement occupé ce rang, mais à coup sûr le plus symbolique.</p>
<p>Malgré les critiques légitimes dont elle était l’objet, notamment concernant sa <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/604577/pour-un-impot-local-progressif/">faible progressivité</a>, la taxe d’habitation participait bien à un subtil équilibre sociétal qui se trouve, par sa disparition, perturbé.</p>
<p>Trois dimensions ont, nous semble-t-il, été sous-estimées par ses contempteurs.</p>
<h2>Clientélisme tarifaire ?</h2>
<p>La Cour de justice de l’Union européenne ne badine pas avec la discrimination, et elle en a une appréciation extensive : traitement différent de situations similaires, tout naturellement, mais aussi <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/ALL/?uri=CELEX%3A61963CJ0013">traitement identique de situations différentes</a>. Autant vous dire que, dès qu’il y a préférence tarifaire en faveur des résidents pour les services publics mis en œuvre par la commune, ça coince.</p>
<p>Selon sa jurisprudence, seules des raisons impérieuses d’intérêt général peuvent le justifier, comme la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A62001CJ0388">« nécessité de préserver la cohérence du système fiscal »</a> ou l’existence d’un « lien direct » entre l’imposition et le tarif préférentiel.</p>
<p>La taxe d’habitation sur les résidences principales jouait jusqu’ici ce rôle discret de clé de voûte entre ce droit communautaire exigeant et le <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000007643192/">droit public français</a>, beaucoup moins regardant sur la préférence tarifaire fondée sur la domiciliation.</p>
<p>En effet, sans cet impôt local à vocation universelle, la gratuité ou le tarif préférentiel offerts aux résidents, dans les cantines ou les écoles de musique, ne s’apparenteraient plus qu’à une forme primaire de discrimination ou de clientélisme : le résident de la commune B, qui passe pourtant l’essentiel de son temps dans la commune A, paierait plus cher les services publics qu’un résident de ladite commune, non pas parce qu’il serait un passager clandestin du budget communal, mais bien parce qu’il n’en est pas électeur.</p>
<p>Si la préservation de la cohérence et de l’équilibre de systèmes fiscaux locaux ne peut plus justifier la différenciation tarifaire, qu’en dira demain le juge de l’Union européenne ? Les paris sont ouverts.</p>
<h2>Le rôle sociétal de l’impôt</h2>
<p>La disparition programmée de la taxe d’habitation, c’est aussi un argument de moins en faveur de l’obtention du droit de vote aux élections locales pour les étrangers hors Union européenne. Le <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000025241373/">durcissement des conditions d’accès à la nationalité française</a>, constaté depuis quelques années, avait pourtant redonné une certaine légitimité à cette vieille revendication. En effet, s’il était désormais plus difficile de devenir français, comment s’opposer plus longtemps à la participation à l’élection du conseil municipal pour des étrangers vivant sur le territoire de la commune et s’acquittant régulièrement de l’impôt local ?</p>
<p>Avec la fin de cet impôt local à vocation universaliste, c’est bien tout un pan de l’argumentaire bâti jusqu’ici qui disparaît.</p>
<p>Dans un étrange mouvement de posture – contre-posture, c’est un débat diamétralement opposé qui a connu ses premiers atermoiements cet été. L’existence de la taxe d’habitation aurait pu justifier le vote des étrangers locataires résidents, sa fin ne pourrait-elle pas justifier un vote des étrangers propriétaires non résidents ?</p>
<p>C’est l’idée défendue par Éric Woerth, président Les Républicains de la Commission des Finances à l’Assemblée nationale, au micro d’Europe 1, le 30 août dernier.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1432337580654215171"}"></div></p>
<p>Selon l’ancien ministre du Budget, puisque les propriétaires non-résidents sont désormais amenés à payer plus d’impôts locaux que les locataires résidents, il devient problématique de les maintenir totalement à l’écart des choix quant à l’usage fait desdits impôts :</p>
<blockquote>
<p>« Participer financièrement à l’accomplissement de service public, c’est quand même […] avoir le droit de choisir à un moment donné qui les met en œuvre. »</p>
</blockquote>
<p>Au-delà de l’agitation qui a suivi cette proposition, entre dénonciation d’un nouveau suffrage censitaire et analyse à la va-vite de la <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/2018/03/28/20002-20180328ARTFIG00012-la-suppression-de-la-taxe-d-habitation-n-a-aucun-interet-pour-l-economie-francaise.php">sociologie électorale des propriétaires</a>, ces déclarations ont le mérite d’illustrer pour nous l’absence de prise en compte, dans la décision de supprimer la taxe d’habitation sur les résidences principales, du rôle sociétal de l’impôt.</p>
<h2>La collectivité réinterrogée</h2>
<p>Avec la disparition de la taxe d’habitation sur les résidences principales, ce sont aussi un peu les communes qui s’effacent. Les conseils régionaux peuvent en témoigner, eux qui ont progressivement perdu tous les impôts directs qui leur avaient été alloués par la décentralisation des années 1980 (taxe d’habitation supprimée à la fin des années 1990, taxe professionnelle supprimée en 2010, taxe foncière sur les propriétés bâties transférées aux conseils départementaux, taxe foncière sur les propriétés non bâties transférées au bloc communal). Or, ne plus figurer sur aucun avis d’imposition ne peut que contribuer à fragiliser la relation au citoyen.</p>
<p>À cela s’ajoute un risque de renforcement de la préférence française pour la dépense publique. Un président de conseil départemental le soulignait il y a tout juste 10 ans, à l’occasion de la <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/59469/lavis-de-philippe-adnot-senateur-ni-et-president-du-conseil-general-de-laube/">grande réforme de la fiscalité locale</a> introduite par la loi de finances pour 2010 :</p>
<blockquote>
<p>« Lorsqu’une entreprise demandait une route hors gel, par exemple, je leur répondais par l’affirmative, en leur indiquant néanmoins que cela justifierait une hausse de l’impôt économique local […]. Cela rendait la demande des entreprises raisonnables. […] Cela se révèle également valable pour les citoyens. Lorsque nous bénéficiions d’une part de taxe d’habitation, le citoyen, en formulant une demande de service public supplémentaire, prenait le risque de provoquer une augmentation des impôts. »</p>
</blockquote>
<p>Pas certain donc, au regard du double risque ici énoncé d’effacement ou de sursollicitation, que la disparition de la taxe d’habitation soit dans l’immédiat une bonne affaire pour les administrations locales qui la percevaient.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/168770/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Eisinger est membre du Bureau de l'AFIGESE. </span></em></p>Il ne faut toucher aux vieux impôts que d’une main tremblante, leur rôle dans les équilibres sociaux étant souvent complexes à appréhender. Exemple avec l'une des mesures phares de quinquennat.Thomas Eisinger, Professeur associé en droit, gestion financière et management des collectivités, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1642052021-08-16T17:43:59Z2021-08-16T17:43:59ZHabitat : la révolution virale<p>Le 16 mars 2020 au soir, maisons, appartements, hébergements collectifs, villas… se ferment ; les voitures et les vélos sont garés, les transports publics pratiquement arrêtés et les déplacements encadrés ; les villes, les parcs, les places, les rues se vident. Tous se replient dans le domicile pour vivre une expérience sans précédent historique. Le confinement suscite un nombre incroyable de témoignages, de commentaires, ou d’enquêtes des « Français » <a href="https://www.leroymerlinsource.fr/habiter/vivre-chez-soi-en-temps-de-confinement/">sur leur vécu</a>.</p>
<p>Les conséquences de cet évènement hors normes paraissent <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/4797670?sommaire=4928952">principalement négatives</a> dans les cas de violences familiales, d’isolement social, de conditions matérielles précaires, de logements minuscules. Mais ce premier confinement suscite également chez certains des espoirs de transformation pour une société traversée de multiples crises, tout en permettant l’émergence d’un discours insistant sur les capacités d’adaptation humaines ou personnelles.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/AYLcMSNaGz4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Les conditions de vie, les avantages et les inconvénients de chaque habitat sont auscultés par les aventuriers « malgré eux » que constituent les individus confinés. Promoteurs immobiliers, constructeurs, architectes et urbanistes ne sont pas <a href="https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2021/01/15/technologie-hygiene-et-bien-etre-la-maison-ideale-a-l-ere-du-covid_6066432_4497916.html">avares de suggestions</a> pour améliorer ce quotidien restreint, comme l’usage de drones ou de robots pour ravitailler les occupants, ou éventuellement la mise en œuvre de systèmes de désinfection automatisés.</p>
<p>Près de huit mois après la dernière occurrence de cet épisode, une question se pose : le Covid-19 modifiera-t-il durablement la représentation de l’habitat dans la société, son architecture et les pratiques de ses occupants ? </p>
<p>Donnons ici quelques pistes de réponse à cette interrogation loin d’être tranchée.</p>
<h2>La santé et l’habitat</h2>
<p>La problématique sanitaire n’était pas un thème majeur dans les réflexions sur le logement contemporain. Pourtant, on retrouve cette question dans l’histoire de l’habitat. Elle a été au cœur de la révolution hygiéniste et sociale dans l’entre-deux-guerres en Europe, diffusant le <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/1371983?sommaire=1372045">confort pour tous</a>.</p>
<p>Actuellement, cancers, allergies, perturbateurs endocriniens, effets délétères des pollutions inquiètent les habitants plus qu’ils ne conditionnent leur projet résidentiel. Au nom de la santé humaine et environnementale, des contraintes sont imposées au secteur de la construction, notamment sur les localisations à risques (sites inondables, risques sismiques), sur les méfaits ignorés ou cachés des matériaux (comme dans le cas de l’amiante) ou sur les effets systémiques du changement climatique (raréfaction des énergies, de l’eau).</p>
<p>Des alternatives d’habitat sont médiatisées, imaginées comme plus vertueuses dès lors qu’elles se rapprochent de démarches frugales : entre autres, la maison à la campagne, « la tiny house », les collocations communautaires autosuffisantes ou les écoquartiers. Toutes ces solutions de logement sont mises en avant par la <a href="http://www.ecoquartiers.logement.gouv.fr/">puissance publique</a> et les promoteurs, et revêtent une image plus verte, moins bétonnée.</p>
<h2>La maison, gagnante de la pandémie</h2>
<p>La maison individuelle périurbaine, un <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/2412780">habitat majoritaire</a> en France, n’avait pas bonne presse auprès des experts de l’urbanisme avant la pandémie, car peu adaptée à ces nouveaux modèles environnementalistes. Pourtant, elle est une expérience d’habitat fondatrice dans la société française. Populaire, symbole de progrès, de bien-être, de réussite, de gain de confort, la maison individuelle illustre la possibilité de former une famille et de transmettre un patrimoine.</p>
<p>Aujourd’hui, elle <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/04/27/immobilier-le-confinement-renforce-l-appel-du-vert-et-le-desir-de-maison_6037839_3224.html">regagne en popularité</a> en raison de sa compatibilité avec l’obligation de rester à demeure, malgré la dépendance à l’extérieur et l’envie de mobilité des habitants. Elle bénéficie d’un jardin, un attribut fondamental érigé en <a href="https://www.eyrolles.com/BTP/Livre/maison-individuelle-architecture-urbanite-9782752601629/">phénomène social et culturel</a> dans les années 1970, dans la tradition d’une vie « à la campagne », réservoir d’un air « sain », bon pour tous, où les corps et les esprits se régénèrent.</p>
<p>Dans cet univers paisible, déconnecté du monde du travail et des contraintes d’une vie sociale intense, s’est formé un cadre de vie <a href="https://journals.openedition.org/sociologies/5886">toujours apprécié des populations</a>, notamment en raison de l’accès à la propriété qu’il représente, marque d’ascension sociale.</p>
<p>Les pratiques de bricolage et de jardinage se sont amplifiées pendant le confinement : refonte du décor intérieur, rénovation d’installations, réaménagement des pièces ; amélioration du jardin jusqu’à imaginer pour certains l’autosuffisance <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01197936/document">grâce aux potagers, à la permaculture ou aux circuits courts</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1413407835661164545"}"></div></p>
<h2>Le télétravail et l’univers domestique</h2>
<p>De manière générale, la culture domestique valorise le bien-être. Celui-ci peut être défini par un <a href="https://journals.openedition.org/lectures/14355">ressenti global positif des personnes dans leur lieu de vie</a>, qui s’exprime de multiples manières : la sensation de se reposer, d’être libre, de décider de faire ou de ne rien faire, d’avoir une sociabilité choisie, de contrôler l’éducation de ses enfants. Plusieurs éléments spatiaux, promus par les architectes, ont accompagné le mouvement de priorisation de l’habitat bien être, à partir du milieu des années 1990 : les pièces de jour et les cuisines, dédiées à la détente, les grandes baies vitrées, les terrasses ou les jardins. L’objectif à l’époque était de se démarquer de l’idée selon laquelle un logement se réduisait à sa surface ou à des critères normés (note thermique, acoustique, d’accessibilité aux personnes handicapées).</p>
<p>Le télétravail, concomitant au confinement, pousse à une nouvelle appropriation du logement. Il est <a href="https://www.paris-normandie.fr/id163418/article/2021-02-08/quand-je-vais-revenir-au-bureau-je-vais-etre-insociable-la-parole-de">satisfaisant pour certains</a>, qui s’évitent des déplacements journaliers pénibles et stressants, tout en s’organisant à leur guise, avec l’impression d’être plus libres. D’autres individus défendent le travail à distance par peur de la maladie, pour eux-mêmes et leurs proches.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-teletravail-moins-bien-vecu-par-les-jeunes-les-femmes-et-les-employes-163190">Le télétravail, moins bien vécu par les jeunes, les femmes et les employés</a>
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<p>Pourtant, même pour ses plus fervents supporters, le télétravail vient mêler deux mondes traditionnellement séparés dans la société française : l’univers domestique et celui du travail. Le télétravail est par nature invasif, puisqu’il contraint la vie domestique et la reconfigure. Ainsi, « se préparer pour aller au bureau », c’est-à-dire se laver, choisir sa tenue, s’habiller, s’apprêter, pour ensuite « retourner dans sa chambre » afin de travailler devant son ordinateur, bouscule la pratique et la représentation de la domesticité.</p>
<p>L’arrangement du mobilier et l’organisation de l’intérieur en « coins » (travail, détente, sommeil, repas) constituent des solutions temporaires. Si elles semblent pratiques pour gérer les tensions relationnelles et la révolution personnelle qu’il faut opérer pour faire cohabiter dans un espace minimaliste plusieurs fonctions, elles n’en sont pas moins sources de conflits autour de l’appropriation de l’espace lorsque cette organisation s’inscrit dans le temps long.</p>
<p>Au travers du confinement, l’enjeu est en effet la cohabitation permanente de personnes qui ont habituellement des rythmes de vie, des manières de faire et d’être singulières, même si elles partagent des liens familiaux, amicaux ou intimes. Le télétravail se révèle ainsi non seulement invasif, mais également aliénant, puisqu’il dérègle la vie privée au profit des contraintes de l’emploi.</p>
<p>Dans l’habitat individuel, <a href="http://www.urbanisme-puca.gouv.fr/IMG/pdf/Entre_confort_desir_normes.pdf">au regard de sa taille et de sa flexibilité</a>, il est plus facile de réserver une pièce au télétravail. Ceux qui avaient prévu un bureau, un studio pour leurs enfants ou leurs parents vivent mieux une coprésence forcée, voire l’apprécient. D’autres morphologies sont également idéales pour séparer les fonctions et les temps d’occupation. Celles en duplex ou triplex, bien que limitées en nombre, individualisent les espaces de vie à l’intérieur de la cellule familiale.</p>
<p>Pour répondre à l’indétermination croissante des pratiques domestiques et aux recompositions des structures familiales, les architectes avaient inventé autour des années 2000 <a href="https://docplayer.fr/115069160-Evaluation-de-deux-operations-experimentales-villas-de-pre-gras-saint-nazaire-serillan-floirac-premiere-partie-villas-de-pre-gras-saint-nazaire.html">« la pièce en plus »</a>, sans fonction prédestinée. Le confinement lui en a trouvé une, celle de bureau du télétravailleur.</p>
<h2>Des confinés profondément inégaux devant l’habitat</h2>
<p>Ainsi, selon la morphologie du logement, une maison ou un appartement, selon le statut des occupants, locataires ou propriétaires, selon les modes d’habiter, en colocation individuelle ou familiale, en habitat partagé, en ville ou à la campagne, la vie à domicile face au télétravail est <a href="https://www.ined.fr/fr/publications/editions/population-et-societes/le-travail-et-ses-amenagements-ce-que-la-pandemie-de-covid-19-a-change-pour-les-francais/">profondément inégale</a>.</p>
<p>La situation particulièrement difficile des habitants des villes s’explique par des déterminants historiques : au cours des 50 dernières années, une grande majorité des « petits » appartements (T2 voire T3), plutôt occupés par de jeunes ménages, a subi une cure d’amaigrissement drastique, les privant d’entre dix et quinze mètres carrés. Dans le même temps, le prix de logement a <a href="https://www.observatoire-des-territoires.gouv.fr/">fortement augmenté</a>. Ces deux dynamiques contrarient l’impératif principal du confinement, à savoir le besoin d’espace.</p>
<p>De ce point de vue, les étudiants ont dû faire un effort colossal : vivant pour la plupart dans de petits logements, parfois dotés d’un mobilier fixe dans les résidences universitaires, ils n’ont pas pu bénéficier des marges de manœuvre associées à la vie dans un espace « familial ». Lorsqu’ils sont <a href="https://www.ined.fr/fichier/rte/General/ACTUALIT%C3%89S/Covid19/note-synthese-Cocovi-finale.pdf">retournés au domicile parental</a>, ils ont dû ajuster leur espace de vie enfantin aux contraintes de l’enseignement à distance. Le tout en faisant face avec difficultés à un <a href="http://www.ove-national.education.fr/enquete/la-vie-detudiant-confine/#:%7E:text=L%E2%80%99enqu%C3%AAte%20men%C3%A9e%20par%20l,le%20choix%20de%20rejoindre%20leur">déficit de sociabilité</a>.</p>
<p>Ce déficit, particulièrement criant chez les étudiants, peut se généraliser à toutes les personnes confinées. Les réseaux sociaux ne remplacent pas une sociabilité de voisinage même superficielle ni l’appropriation des espaces de proximité (la rue, l’impasse, la cour), extension du « chez-soi ». Les « urbains » ont finalement plus besoin qu’ils ne pouvaient le penser des extérieurs pour vivre pleinement leur habitat. Les personnes âgées, par exemple, ont pu mal vivre un enfermement qui les privait des liens avec leur quartier et ses activités, épicentre de leur histoire (voir, à ce sujet, le livre <em>Habitat et vieillissement, des hommes et des lieux</em> à paraître en 2022 aux éditions <em>Le bord de l’eau</em>, en coécriture avec Mael Gauneau et Manon Labardèche).</p>
<h2>La transhumance des urbains</h2>
<p>La transhumance des « urbains » des centres métropolitains vers leurs résidences secondaires (<a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/3303460?sommaire=3353488">3,6 millions en 2020 selon l’Insee</a>), plutôt critiquée car démonstrative d’un pouvoir de classe, a focalisé l’attention sur les <a href="https://www.google.fr/books/edition/Paradis_verts/muESAQAAMAAJ?hl=fr&gbpv=0&bsq=Paradis%20verts,%20d%C3%A9sirs%20de%20campagne%20et%20passions%20r%C3%A9sidentielles">stratégies résidentielles des ménages</a> et sur leurs aspirations. Si le terme « d’exode urbain » amplifie artificiellement le processus, sa médiatisation a fait de la publicité à des manières de vivre en alternance entre résidence principale et secondaire.</p>
<p>Pour une partie de ces habitants, la volonté est de mieux gérer les séquences de confinement, par un nouvel usage d’une bilocalisation déjà existante auparavant. La résidence secondaire confirme ce qu’elle était, un lieu agréable de repli, pour rompre avec l’insécurité sanitaire et répondre à l’injonction de rester à domicile.</p>
<p>L’épreuve du confinement a pu enjoindre d’autres catégories de population à s’engager dans de nouveaux choix résidentiels, en s’éloignant des lieux de vie denses et des flux et en privilégiant l’habitat individuel. Mais les motifs de ces individus englobent également l’accès à la nature, à des modes de vie paisibles, à la solidarité locale, en somme, à une sorte de <a href="https://www.google.fr/books/edition/L_exode_urbain/JeDRzQEACAAJ?hl=fr">modèle de vie villageoise</a>, représentation toujours vivace dans la société française.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1309129232900149249"}"></div></p>
<p>Lorsque la crainte du futur prend le pas sur les autres motivations de cette « mise au vert », les individus peuvent basculer dans des choix radicaux, avec un repli spectaculaire <a href="https://www.la-croix.com/Famille/partait-vivre-loin-grandes-villes-2021-01-05-1201133223">sur un mode survivaliste</a>. Ce n’est pas le plus fort contingent de personnes affectées dans leurs choix résidentiels par la pandémie, mais leur stratégie pèse dans le débat public et dans l’imaginaire social.</p>
<p>Dans les sociétés contemporaines, l’habitat répond à des besoins anthropologiques (se protéger, exister), mais aussi identitaires (avoir une adresse, réaliser son mode de vie). Le confinement rend visible une contradiction contemporaine sous-estimée : le logement est une base de repli appréciée, qui perd cependant de sa force dès lors que les activités hors de la sphère privée sont contrôlées ou interdites. La vie sous cloche n’est pas la vie, y compris dans des <a href="https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/publications/les-dossiers-de-la-drees/les-inegalites-sociales-face-lepidemie-de-covid-19-etat-des">espaces de qualité</a>, avec l’appui des réseaux numériques, qui ne restent que de pâles ersatz de la sociabilité « réelle ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/164205/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Guy Tapie ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En limitant nos vies à l’enceinte de l’habitation, les confinements nous ont poussés à porter un nouveau regard sur elle, voire à revoir totalement nos stratégies résidentielles.Guy Tapie, Professeur de sociologie, École nationale supérieure d’architecture de Paris Val de Seine (ENSAPVS) – USPCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1641092021-08-02T20:48:26Z2021-08-02T20:48:26ZLe sport à domicile, une pratique qui ne date pas d’hier<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/414161/original/file-20210802-20-6nuc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C0%2C5973%2C3988&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La pandémie a intensifié la pratique du sport à domicile. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/femme-en-chemise-a-manches-longues-blanche-a-genoux-sur-un-tapis-de-yoga-bleu-6453430/">Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Depuis les débuts de l’épidémie de Covid-19, les exhortations à se livrer quotidiennement à l’exercice physique sont pléthores. Elles proviennent des institutions publiques, <a href="https://quefaire.paris.fr/104557/paris-chez-vous-des-videos-pour-rester-en-forme">mais aussi des collectivités locales</a>. Dès le mois de mars 2020 le Ministère des Sports met à la disposition du grand public un <a href="https://www.sports.gouv.fr/accueil-du-site/zoom-sur/article/faire-du-sport-a-la-maison-en-ligne">ensemble de ressources pour « faire du sport à la maison »</a>. En avril, il franchit un nouveau pas en lançant <a href="https://bougezchezvous.fr/">sa propre application : BougezChezVous.fr</a>.</p>
<p>Ces incitations sont également portées par les différents acteurs du marché de la santé et de la forme. « coronavirus. Bougez chez vous malgré le confinement : la folie du sport à la maison », peut-on lire <a href="https://www.ouest-france.fr/sport/bouger-chez-vous-en-temps-de-confinement-la-folie-du-sport-la-maison-6787790">chez <em>Ouest-France</em> le 21 mars 2020</a>. Les différents médias ne sont pas en reste d’ailleurs, qu’ils soient spécialisés ou non. Conseils nutritionnels et séances d’exercices physiques, schémas ou vidéos à l’appui, viennent ponctuer ou clore les articles consacrés aux conséquences du confinement. </p>
<p>Sur les sites Internet des médias concernés, on se fend cette fois de vidéos. Pour reprendre le cas de <em>Ouest-France</em>, ce sont près de 24 séances qui sont ainsi offertes au grand public dans une série intitulée « Bougez chez vous » qui court <a href="https://www.ouest-france.fr/sport/fitness/crossfit/video-bougez-chez-vous-50-voici-le-dernier-episode-de-notre-serie-de-sport-la-maison-6830330">sur les mois d’avril et de mai 2020</a>. Difficile donc voire impossible d’échapper à <a href="https://www.sportstrategies.com/le-sport-at-home-grand-vainqueur-de-la-pandemie/">cette lame de fond du sport à domicile</a> que les confinements successifs ont conforté sur sa lancée.</p>
<p>L’enquête INJEP parue en février 2021 montre ainsi que la pratique sportive à domicile est passée de <a href="https://injep.fr/publication/la-pratique-physique-et-sportive-des-francais-sous-le-signe-du-premier-confinement/">24 à 47 % lors du premier confinement</a>. Partant de là, on peut s’interroger sur les caractéristiques de ce phénomène et ce qu’il révèle de notre société ? Enfin, qu’est-ce que l’histoire du corps et du sport peut nous enseigner à ce sujet ?</p>
<h2>La sportivisation des espaces du quotidien</h2>
<p>Premier constat, le confinement révèle tout comme il accélère un processus complexe déjà à l’œuvre : la sportivisation des espaces du quotidien. « Chez soi », « à domicile » : voilà le nouveau lieu de pratique qui s’impose. Fini le temps où le sport s’enfermait dans des gymnases, stades, salles de remise en forme. Agrès, appareils de musculations investissent largement le domicile. Sur l’année 2020, l’enseigne <em>Go Sport</em> a vu ainsi <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/03/04/sueur-et-larmes-pour-le-marche-du-fitness-a-l-epreuve-du-covid-19_6071875_3234.html">ses ventes d’haltères augmenter de 160 %, de tapis de sol de 112 % et de machines de fitness de 90 %</a>. </p>
<p>Ce phénomène ne s’arrête pas d’ailleurs <a href="https://www.lequipe.fr/Athletisme/Actualites/Wtf-pour-l-entrainement-a-la-maison-renaud-lavillenie-revient-en-deuxieme-semaine/1123241">au fait de consacrer une pièce de vie, ou son jardin</a>, à l’entraînement physique. Le sport s’immisce dans toutes les pièces, particulièrement dans le cas des appartements à la superficie restreinte. Le salon, aux dimensions souvent plus confortables, est un emplacement privilégié, mais non limitatif. Cuisine et chambres sont également colonisées. Le moindre espace peut se révéler finalement propice à un certain type d’exercices, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=DfukNTXsawo">par exemple un escalier</a>. Il est tout aussi instructif d’observer comment le mobilier est détourné pour servir de support à l’entraînement physique. Chaises, canapé, mais aussi <a href="https://www.youtube.com/watch?v=38g4Uv_9sdM">objets divers et variés comme les packs d’eau</a>, se transforment en appareils de renforcement ou en agrès.</p>
<h2>Une éducation sportive 2.0</h2>
<p>Le coaching sportif s’inscrit dans cette évolution, <a href="https://www.lesechos.fr/weekend/perso/covid-lessor-du-coaching-a-distance-1285469">qu’il se déroule en présentiel ou en distanciel</a>. Le confinement a eu pour effet de le démocratiser. Par ailleurs, nombre de clubs sportifs ont mis en place des séances d’entraînement en visioconférence <a href="https://ffepgv.fr/programmes-sport-sante-chez-soi">durant les confinements successifs</a>. Des géants du numérique tels qu’Apple, avec son programme « Fitness + » ou Amazon se sont saisis du phénomène. Outre-Atlantique, l’application <em>Peloton</em> s’impose comme un des <a href="https://www.blog-nouvelles-technologies.fr/174306/peloton-offre-application-entrainement-domicile-gratuitement-pendant-90-jours/">leaders du marché du « sport connecté »</a>.</p>
<p>Entraînement, mais aussi performances se déploient à domicile. Le 18 mars 2020, Elisha Nochomovitz réalise ainsi en 6 heures et 48 minutes un <a href="https://www.youtube.com/watch?v=9WlBnHZIBYY">marathon sur son balcon de sept mètres de long sur un de large</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/9WlBnHZIBYY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Les défis sportifs et autres challenges physiques, individuels ou collectifs, accompagnent cette évolution par le truchement des téléphones mobiles qui les publicisent largement. Les clubs sportifs s’efforcent de jouer sur cette corde afin de maintenir la motivation de leurs adhérents tout en tentant d’impliquer leurs proches avec <a href="https://www.youtube.com/watch?v=yc9rxwA6V2I">« des défis famille »</a>. </p>
<p>Comme on a pu l’entrevoir, les réseaux sociaux participent pleinement de ce phénomène. Profitant de ce contexte, ils médiatisent largement les youtubeurs fitness, comme <em>Tibo InShape</em> <a href="https://www.purebreak.com/news/tibo-inshape-le-youtubeur-propose-des-cours-de-sport-durant-le-confinement-mais-attention/192538">avec ses 1,6 million d’abonnés</a>, qui opèrent une véritable éducation au sport et à la santé.</p>
<p>Conséquence de cette mobilisation, le néophyte découvre tout un vocabulaire chargé d’anglicismes (dips, burpee, moutain climber, jumping jack…), jusque là réservé aux professionnels, mais également la physiologie de l’exercice, la biomécanique. </p>
<p>Il est également confronté à l’exposition massive de corps surentraînés, ce qui vient renforcer la norme de la musculature saillante pour les hommes comme pour les femmes, pour les jeunes et les moins jeunes. Phénomène à dimension internationale, les personnes âgées ont, elles aussi, leurs modèles comme Wang Deshun, <a href="https://www.aufeminin.com/news-style/deshun-wang-est-mannequin-a-80-ans-et-le-plus-sexy-des-grands-peres-s2014128.html">mannequin au physique athlétique âgé de 80 ans</a>, ou Jim Arrington, qualifié de <a href="https://www.objectifs-fitness.com/jim-arrington-plus-vieux-bodybuilder-du-monde/">« plus vieux bodybuilder du monde »</a>.</p>
<h2>Un révélateur de la montée de l’individu et de l’apparence</h2>
<p>Ce tableau étant dressé, quels enseignements peut-on en tirer, à la lumière notamment de l’histoire ? Il nous semble ainsi que la Covid-19, avec ses inséparables confinements, vient si ce n’est catalyser tout au moins mettre au premier plan des tendances qui ne font que monter en puissance depuis près de deux siècles. D’une façon générale, <a href="http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Bibliotheque-des-Sciences-humaines/Le-desenchantement-du-monde">l’affirmation du sport chez soi, pour soi, souligne la « montée de l’individu » (Gauchet, 1985)</a>. Il illustre, notamment, le processus de personnalisation qui se déploie de plus en plus rapidement. </p>
<p>De fait, l’individu revisite les sports pour les adapter à son espace de vie tout comme il adapte cet espace à ses envies, ses besoins. Ce faisant, il participe au renouvellement et à la diversification des pratiques physiques. Par ailleurs, le confinement met sous le feu des projecteurs l’importance grandissante accordée au corps et à l’apparence. <a href="https://www.scienceshumaines.com/sous-le-regard-des-autres_fr_2658.html">La quête de soi et de reconnaissance</a>, propre à la <a href="https://www.fayard.fr/sciences-humaines/la-societe-des-individus-9782213022642">« société des individus »</a>, va de pair avec l’investissement croissant de la sphère privée, <a href="https://www.puf.com/content/Anthropologie_du_corps_et_modernit%C3%A9">mais aussi de la sphère corporelle</a>.</p>
<p>Le sport à domicile devient dès lors le prétexte à une mise en scène de soi rendue possible par une habitation interconnectée avec le monde et pensée comme telle. Une sportive médiatisée qui publicise l’espace intime, illustrant la tendance croissante à l’extimité, entendu comme le désir qui <a href="https://www.cairn.info/revue-psychotropes-2011-2-page-99.htm">« nous incite à montrer certains aspects de notre soi intime pour les faire valider par les autres, afin qu’ils prennent une valeur plus grande à nos propres yeux »</a>.</p>
<h2>Un précédent : « la gymnastique de chambre »</h2>
<p>Pourtant, l’idée de pratiquer le sport à domicile ne date pas de 2020. Elle prend sa source au XIX<sup>e</sup> siècle, alors que sports et gymnastiques se diffusent massivement et que se dessinent les premières politiques de santé publique <a href="https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=50400">organisée par l’État</a>. L’argument sanitaire, déjà motivé par les épidémies, ouvre en effet les foyers aux nouvelles pratiques d’hygiène. Se déploie alors une littérature spécialisée destinée à faire pénétrer l’exercice physique dans tous les foyers. À cette occasion, on plaide en faveur d’une « gymnastique de chambre ». </p>
<p>En France, un de tous premiers ouvrages sur le sujet paraît en 1856 sous la plume du Dr. Schreber. Au tournant du XIX<sup>e</sup> siècle, se distinguent sur ce créneau les médecins culturistes et sportifs. Mais, face aux ravages de la tuberculose et aux conséquences sanitaires de la guerre de 1914, la grande presse s’empare également du sujet. L’entre-deux-guerres voit les conseils pour organiser une pratique physique et sportive à domicile se démultiplier. L’heure est cependant au <a href="https://www.editions-harmattan.fr/livre-naturisme_et_education_corporelle_XIXe_milieu_du_XXe_siecles_sylvain_villaret-9782747596152-20987.html">retour à la nature</a>.</p>
<p>Si la pratique en « chambre » n’est pas délaissée, loin de là, le jardin privatif devient le lieu privilégié d’entraînement sportif.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/410830/original/file-20210712-70541-10w1z29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/410830/original/file-20210712-70541-10w1z29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/410830/original/file-20210712-70541-10w1z29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1003&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/410830/original/file-20210712-70541-10w1z29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1003&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/410830/original/file-20210712-70541-10w1z29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1003&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/410830/original/file-20210712-70541-10w1z29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1260&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/410830/original/file-20210712-70541-10w1z29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1260&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/410830/original/file-20210712-70541-10w1z29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1260&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">revue L’éducation physique, n°1 janvier 1927, p. 40. Archives personnelles.</span>
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<p>En 1931, le Dr Gaston Durville détaille la façon d’aménager dans son jardin un « stade chez soi » de 4m<sup>2</sup>.</p>
<p>La radio n’est pas en reste, diffusant journellement des cours de culture physique. Plus proche de nous, grâce à une émission de télévision comme <em>Gym Tonic</em>, en septembre 1982, l’aérobic investit les salons chaque dimanche matin.</p>
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<p>Le sport à domicile n’est donc pas le fruit impromptu d’une rencontre entre les confinements liés à la Covid-19 et les réseaux sociaux. Son enracinement progressif dans le quotidien des Français est étroitement lié à l’essor de la culture de masse : presse, radio, télévision, ordinateur, téléphone s’en font au fil du temps les catalyseurs. </p>
<p>Si diverses motivations président à l’essor du sport à domicile, l’argument sanitaire est une permanence, porté par les pandémies, comme jadis la tuberculose ou la grippe espagnole, et aujourd’hui la Covid-19. Renforcer ses immunités par l’exercice physique et sportif est déjà une préoccupation centrale entre les deux guerres. Mais on ne saurait également minimiser le rôle identitaire prêté à cette pratique physique <em>at home</em>, et ce dès le XIX<sup>e</sup> siècle. Le foyer devient un lieu de développement de soi et de réalisation. De plus, avec ses interconnexions, il fonctionne de plus en plus comme un espace total, protecteur et ouvert à la fois. On peut d’ailleurs y voir une des raisons de l’exode urbain qui se dessine actuellement : celle de pouvoir bénéficier d’un espace approprié, en termes notamment de surface, à de tels enjeux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/164109/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sylvain Villaret ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Depuis les débuts de l’épidémie de Covid-19, la pratique du sport à domicile a pris de l’ampleur.Sylvain Villaret, Maître de conférence en histoire du sport et de l'éducation physique, Le Mans UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1610152021-06-22T19:16:02Z2021-06-22T19:16:02ZImages de science : Des yeux pour voir les poissons dans leurs habitats<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/404828/original/file-20210607-27-bwao21.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=16%2C4%2C2695%2C2492&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le STAVIRO déposé sur un fond de sable à proximité des récifs de l’Astrolabe en Nouvelle-Calédonie.</span> <span class="attribution"><span class="source">Dominique Pelletier, IFREMER</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p><em>Le format « Images de science » vous propose de décrypter une photographie particulièrement signifiante d’un point de vue scientifique, de la décrire et d’en comprendre les enjeux.</em></p>
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<p>Se faire discret pour observer les animaux sans les déranger est le rêve de beaucoup de naturalistes. Pouvoir le faire sous l’eau est un défi. Pour la recherche, cette discrétion présente deux avantages : découvrir de nouveaux comportements des animaux, mais aussi pouvoir les dénombrer de façon aussi neutre que possible.</p>
<p>Habituellement, les poissons sont observés et comptés par des pêches ou par des comptages visuels opérés par des plongeurs. Depuis 2007, nous utilisons aussi la vidéo sous-marine avec les systèmes STAVIRO et MICADO, que nous avons mis au point à l’IFREMER. Le STAVIRO est déposé sur le fond de la mer depuis un bateau. C’est la première méthode d’observation aussi discrète et aussi passe-partout qui récolte autant de données compréhensibles par tous grâce à l’image. Nous avons aussi développé une version automatique du système, le MICADO, qui permet d’étudier les animaux dans la durée. Dans les deux cas, aucun éclairage n’est utilisé pour ne pas perturber les observations, mais les caméras utilisées restent efficaces lorsque la lumière diminue.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les systèmes STAVIRO et MICADO ont permis d’étudier des écosystèmes dans les océans pacifique (Parc Marin de la mer de Corail et lagons autour de la Grande Terre en Nouvelle-Calédonie) et Indien (Banc du Geyzer, Parc Naturel de Mayotte, Réserve naturelle de la Réunion), en Méditerranée (Parc Marin de la Côte Bleue, Réserve naturelle de Banyuls, Corse, Var), et plus récemment dans l’océan Atlantique (Baie de Concarneau, archipel des Glénan).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Dominique Pelletier, IFREMER</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Le protocole ainsi que les données sont partagés avec le grand public et s’inscrivent dans une politique de science ouverte. En particulier, nous développons actuellement avec un fab lab le <a href="https://wikifactory.com/@konkarlab/kosmos-20kal">prototype « KOSMOS »</a>, la version libre et reproductible du STAVIRO, dans l’optique d’un programme de science participative.</p>
<h2>Que nous apprennent ces systèmes ?</h2>
<p>Les animaux se comportent « au naturel », bien souvent en nage lente ou vaquant à leurs occupations sans se soucier de la caméra. Ce sont surtout des poissons, mais les tortues, les serpents ou un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dugong">dugong</a> s’invitent régulièrement, ainsi que des seiches, poulpes ou lièvres de mer que nous découvrons dans les images de Méditerranée essentiellement.</p>
<p>Nous comptons les espèces moyennes ou grandes sur les vidéos selon une procédure toujours identique et bien rodée pour obtenir des données chiffrées fiables et comparables d’une séquence à l’autre. Les petites espèces ne sont pas dénombrées car elles ne sont pas détectables à distance de la caméra, seule leur présence est relevée.</p>
<p>La vidéo nous montre aussi le cadre de vie de ces animaux, ce qu’on appelle leur habitat. Comme les humains, les animaux marins et en particulier ceux qui dépendent du fond de la mer pour leur nourriture (on les appelle animaux « démersaux » ou « benthiques ») ont leurs préférences en matière de logement : certaines espèces sont nombreuses sur les herbiers, d’autres préfèrent les rochers. Comme nos systèmes sont déployés dans tous les habitats ou presque (la visibilité doit être suffisante, les observations dans les zones turbides comme les estuaires sont difficiles), les images nous renseignent sur ces préférences des espèces. Nous avons donc aussi mis au point une procédure pour caractériser l’habitat à partir des images.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/hVLbb-GhxYo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">À la découverte des récifs du parc naturel de la mer de Corail.</span></figcaption>
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<p>Dans une passe du lagon de Nouvelle-Calédonie, des images récoltées sur des périodes plus longues grâce au MICADO nous ont indiqué quelles espèces venaient se reproduire et à quelle époque, quels étaient leurs comportements en lien avec la reproduction, par exemple des parades nuptiales ou des poissons qui venaient se nourrir des œufs émis par d’autres espèces. En Méditerranée, nous avons pu filmer, au sein des zones protégées, des phénomènes spectaculaires de chasse de petits poissons par leurs prédateurs et observer de jeunes mérous bruns (<em>Epinephelus marginatus</em>), une espèce menacée en Europe.</p>
<p>La principale vocation du système STAVIRO est de multiplier les observations sur des zones étendues pour en cartographier les habitats et les peuplements de poissons.</p>
<h2>Comprendre et protéger les environnements marins</h2>
<p>Cette connaissance est précieuse pour la protection de l’environnement marin. Les zones côtières subissent des pressions très intenses et diverses en raison des activités humaines en mer, le long du littoral et sur les bassins versants, principalement industries, agriculture, pêche, urbanisation.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Paysage corallien préservé des récifs de l’Astrolabe (Parc Marin de la Mer de Corail, Nouvelle-Calédonie). Au premier plan, des nasons loupe (<em>Naso tonganus</em>), une perche blanche et noire (<em>Macolor niger</em>) et à l’arrière-plan de nombreux poissons-perroquets (<em>Scaridae</em>) ainsi que d’autres espèces.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Dominique Pelletier, IFREMER</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les données des STAVIRO servent à quantifier les habitats et les poissons, y compris les espèces pêchées, et ainsi elles aident à comprendre et suivre leur évolution en fonction des impacts des activités humaines et des mesures de protection comme les <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/patrimoine-marin-et-aires-marines-protegees-francaises">aires marines protégées</a> ou des mesures de gestion des pêches. Est-ce que l’aire marine protégée arrive à protéger les poissons en son périmètre ? Est-ce qu’elle fournit des poissons à l’extérieur de ses limites ? Quel est l’impact de l’ancrage de ce paquebot sur les fonds marins et leurs habitants ? Quel est l’impact de la pêche sur les poissons de cette baie ? Les questions sont nombreuses, et pour y répondre, répartir judicieusement les observations sur la zone d’étude est indispensable car il faut comparer les données en fonction de leurs positions, par exemple un endroit pêché par rapport à une zone sans pêche.</p>
<p>Ces observations des poissons n’engendrent aucun impact sur l’écosystème, au contraire de données de capture et d’effort. Du reste, les données halieutiques sont rares dans les zones très côtières. Au fil des ans, nous avons veillé à standardiser le protocole de bout en bout : collecte des données, analyse des images, analyse des données et publications scientifiques et non scientifiques des résultats. Nous espérons donc que ce protocole puisse être réutilisé le plus largement possible pour la recherche et pour la préservation des écosystèmes marins.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161015/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dominique Pelletier a reçu des financements des Provinces et du Gouvernement de Nouvelle-Calédonie pour le projet AMBIO pendant lequel de nombreuses données vidéo ont été collectées. </span></em></p>Observer les poissons sans perturber leurs comportements est primordial pour mieux protéger l’environnement marin.Dominique Pelletier, Directrice de recherches, Ecologie et Modèles pour l'Halieutique, IfremerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1611102021-05-27T18:24:44Z2021-05-27T18:24:44ZEt vous, connaissez-vous vos voisins ?<p>La crise sanitaire de 2020 éclaire d’un nouveau jour les relations de voisinage. Mais quelles sont-elles en France ? En prenant appui sur l’enquête « Mon quartier, mes voisins » que nous avons réalisée en <a href="https://mon-quartier-mes-voisins.site.ined.fr/%20">2018</a>, nous examinons si l’on voisine tous de la même façon. Quelles sont les différences selon le type d’habitat ? Selon le niveau d’instruction, le revenu, la catégorie socioprofessionnelle ?</p>
<p>Dans les années 1980, François Héran <a href="https://www.persee.fr/doc/estat_0336-1454_1987_num_195_1_5049">avait analysé</a>, à partir de l’enquête « Contacts » comment les Français voisinaient. Trente-cinq plus tard, l’enquête « Mon quartier, mes voisins » s’est intéressée aux relations que les individus entretiennent (sous la forme de visites, d’échanges de services…) avec les personnes qui habitent leur immeuble (ou les maisons alentour) et avec les autres habitants de leur quartier. D’une enquête à l’autre, les pratiques de voisinage apparaissent étonnamment stables. Mais nous ne voisinons pas tous de la même manière ni avec n’importe qui. Tout dépend des contextes sociaux et résidentiels.</p>
<h2>Le voisinage : une affaire qui reste importante</h2>
<p>En 2018, les visites et les échanges de services entre voisins sont pratiqués par une part importante de la population, proche de celle observée il y a 35 ans : 75 % des personnes interrogées dans l’enquête « Mon quartier, mes voisins »sont entrées chez un voisin (d’immeuble ou de quartier) dans les douze derniers mois et 76 % ont reçu un voisin chez eux (contre 73 % et 74 % dans l’enquête Contacts) ; 68 % ont rendu un service et 63 % en ont reçu (contre 62 % et 62 %). Les motifs de visites et les services les moins engageants (une simple discussion, prêter des ingrédients) sont les plus fréquemment cités, mais les deux tiers des visites impliquent des échanges de sociabilité (allant du café au repas) et près d’un tiers des enquêtés s’entraident pour garder, conduire ou récupérer les enfants.</p>
<p>Dans le même sens, seuls 10 % des enquêtés de 2018 n’ont aucune conversation dans leur voisinage immédiat (voisins d’immeubles ou des maisons alentour) et 6 % seulement ne parlent ni à leurs voisins immédiats ni aux autres habitants du quartier. Si les conversations se résument souvent à des banalités (comme la météo), d’autres thèmes sont évoqués : le cadre de vie, la vie privée, plus rarement la politique ou la religion (tableau 1). Plus encore, loin d’être anodines, les conversations entre voisins sont pour beaucoup (74 %) l’occasion d’échanger des informations – sur les commerces du quartier (64 %), les établissements scolaires (40 %), des opportunités d’emploi (23 %) ou des contacts pour des services à domicile (32 %).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/401236/original/file-20210518-17-14b8vp9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/401236/original/file-20210518-17-14b8vp9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/401236/original/file-20210518-17-14b8vp9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=681&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/401236/original/file-20210518-17-14b8vp9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=681&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/401236/original/file-20210518-17-14b8vp9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=681&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/401236/original/file-20210518-17-14b8vp9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=856&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/401236/original/file-20210518-17-14b8vp9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=856&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/401236/original/file-20210518-17-14b8vp9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=856&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Tableau repris de Jean‑Yves Authier et Joanie Cayouette-Remblière, 2021, Voisiner, une pratique qui demeure… sélective.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.cairn.info/revue-population-et-societes-2021-5-page-1.htm">Population et Sociétés n° 589, p. 1-4</a>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Le voisinage s’accompagne parfois de conflits. Depuis les années 1980, ces derniers n’ont pas progressé. Seule une personne enquêtée en 2018 sur quatre en déclare au moins un depuis son installation dans le logement actuel. En revanche, 86 % se plaignent de gênes ou de nuisances, telles que le bruit (66 %), des saletés ou dégradations (45 %), des impolitesses (28 %)… Ces gênes n’occasionnent, une fois sur deux, ni conflit, ni jugement, ni évitement. En fait, les conflits constituent une forme particulière de relations de voisinage : moins on voisine, moins on a de difficultés avec ses voisins.</p>
<h2>Voisiner : une pratique socialement différenciée</h2>
<p>Très répandue, la relation de voisinage reste néanmoins très différenciée. Elle culmine aux âges intermédiaires (30-44 ans), chez les familles avec enfants, les propriétaires et les habitants fixés dans le quartier depuis au moins 10 ans ; elle est peu répandue chez les jeunes (18-29 ans), les personnes vivant seules, les locataires et les nouveaux venus (moins de deux ans) ; par contre les hommes voisinent autant que les femmes, les natifs autant que les immigrés.</p>
<p>Les pratiques de voisinage augmentent avec le niveau de diplôme et les revenus :</p>
<p>90 % des personnes sans diplôme et 89 % des membres d’un ménage gagnant moins de 1 000 euros par mois ont <em>a minima</em> des conversations avec leurs voisins, alors que c’est le cas de 96 % des « bac+5 et plus » et plus de 99 % des hauts revenus (plus de 6 000 euros par mois).</p>
<p>La hiérarchie sociale marque surtout les visites de convivialité (café, thé, apéritif, repas) et les échanges de services (tableau 2), avec deux exceptions, les petits indépendants qui voisinent davantage que les cadres, et les employés de services directs aux particuliers, qui le font plus que les ouvriers et les employés de la fonction publique et policiers, pourtant mieux dotés. Ces deux groupes partagent le fait de travailler auprès du public et, plus souvent que les autres, dans ou près de leur quartier.</p>
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<span class="caption">Tableau 2 repris de Jean‑Yves Authier et Joanie Cayouette-Remblière, 2021, Voisiner, une pratique qui demeure… sélective.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.cairn.info/revue-population-et-societes-2021-5-page-1.htm">Population et Sociétés n° 589, p. 1-4</a>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Les discussions entre voisins sont plus variées en haut de la hiérarchie sociale. Les cadres abordent plus souvent des sujets politiques et s’informent davantage sur les commerces du quartier et les services à domicile (baby-sitter, femmes de ménage, plombier…).</p>
<h2>Des réseaux de relations sélectifs</h2>
<p>Les propriétés sociales influencent aussi le choix des personnes fréquentées. En étudiant les réseaux de contacts des personnes interrogées, on peut identifier les critères de sélection. Dans 84 % des cas, elles lient des voisins ayant le même statut d’occupation du logement (tableau 3), très au-delà des 51 % qu’aurait donnés une répartition aléatoire.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/401238/original/file-20210518-17-y77mmr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/401238/original/file-20210518-17-y77mmr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/401238/original/file-20210518-17-y77mmr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/401238/original/file-20210518-17-y77mmr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/401238/original/file-20210518-17-y77mmr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=358&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/401238/original/file-20210518-17-y77mmr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/401238/original/file-20210518-17-y77mmr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/401238/original/file-20210518-17-y77mmr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=450&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Tableau 3 repris de Jean‑Yves Authier et Joanie Cayouette-Remblière, 2021, Voisiner, une pratique qui demeure… sélective.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.cairn.info/revue-population-et-societes-2021-5-page-1.htm">Population et Sociétés n° 589, p. 1-4</a>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>À cela plusieurs raisons : le cloisonnement des cages d’escalier dans les logements sociaux, des intérêts disjoints entre propriétaires et locataires, des affinités entre résidents proches par le cycle de vie, les origines, le mode de vie ou les goûts. Une des conséquences de cela est la faible mixité sociale des relations de voisinage dans les <a href="https://www.cairn.info/revue-sociologie-2020-1-page-1.htm">quartiers de mixité sociale programmée</a>, ces derniers juxtaposant des immeubles aux statuts d’occupation différenciés.</p>
<p>Dans 72 % des cas, les relations de voisinage concernent deux personnes de même sexe, mais les relations des femmes sont plus exclusives que celles des hommes (78 % contre 60 %). L’appartenance sociale est également structurante : dans 44 % des cas, les relations se tissent entre membres du même groupe socioprofessionnel (une répartition aléatoire aurait donnée 39 %). De surcroît, quand il ne s’agit pas du même groupe, il s’agit de groupes proches : 40 % des relations de voisinage des cadres sont des cadres, 32 % sont de profession intermédiaire ou indépendante et 20 % seulement sont employés ou ouvriers ; inversement, 11 % des relations des employés et ouvriers sont cadres, 22 % relèvent des professions intermédiaires ou indépendants et 51 % sont employés ou ouvriers.</p>
<p>En revanche, on n’observe guère de repli ou d’entre-soi lié au pays de naissance. Alors que 27 % de la population des quartiers enquêtés est née à l’étranger, seules 5 % des relations de voisinage associent deux personnes nées dans un même pays étranger. Ce sont les personnes nées en France qui sélectionnent le plus leurs relations en fonction de leur origine : 84 % d’entre elles sont nées en France – un écart de six points par rapport à la composition moyenne de leur voisinage.</p>
<h2>Les variations locales du voisinage</h2>
<p>L’intensité et la nature des relations de voisinage varient en fonction des contextes résidentiels. Les visites de convivialité et les échanges de services sont plus fréquentes dans les quartiers bourgeois et gentrifiés ainsi que dans les communes rurales (tableau 4) ; des écarts qui ne sont pas la simple traduction des caractéristiques sociales des habitants. Les habitants des quartiers de mixité sociale programmée échangent des services mais peu d’invitations.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/401240/original/file-20210518-19-1wgtk9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/401240/original/file-20210518-19-1wgtk9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/401240/original/file-20210518-19-1wgtk9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/401240/original/file-20210518-19-1wgtk9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/401240/original/file-20210518-19-1wgtk9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/401240/original/file-20210518-19-1wgtk9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/401240/original/file-20210518-19-1wgtk9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/401240/original/file-20210518-19-1wgtk9q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Tableau 4 repris de Jean‑Yves Authier et Joanie Cayouette-Remblière, 2021, Voisiner, une pratique qui demeure… sélective.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.cairn.info/revue-population-et-societes-2021-5-page-1.htm">Population et Sociétés n° 589, p. 1-4</a>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Les configurations territoriales influencent également le choix des voisins fréquentés. Par exemple, c’est dans les communes rurales (84 %), les quartiers gentrifiés (79 %) et bourgeois (78 %) qu’on a le plus de chances de fréquenter des voisins nés dans le même pays, du fait de la faible diversité des origines dans ces espaces ; à l’inverse, dans les grands ensembles la proportion s’élève à 46 % – un résultat qui met à mal le mythe des relations de voisinage communautaires dans ce type de quartier.</p>
<p>Ces « effets de quartier » n’affectent pas tous les habitants au même degré ; ils interagissent avec les propriétés sociales des individus.</p>
<p>Ainsi, la probabilité d’avoir au moins un cadre dans son réseau de voisinage dépend à la fois du contexte de résidence et du milieu social (figure). Si bien que les cadres d’Ainay à Lyon comptent trois fois plus souvent un cadre dans leur réseau que les employés ou ouvriers du même quartier.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/401241/original/file-20210518-21-njkv33.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/401241/original/file-20210518-21-njkv33.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/401241/original/file-20210518-21-njkv33.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/401241/original/file-20210518-21-njkv33.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/401241/original/file-20210518-21-njkv33.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/401241/original/file-20210518-21-njkv33.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/401241/original/file-20210518-21-njkv33.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/401241/original/file-20210518-21-njkv33.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Figure reprise de Jean‑Yves Authier et Joanie Cayouette-Remblière, 2021, Voisiner, une pratique qui demeure… sélective.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.cairn.info/revue-population-et-societes-2021-5-page-1.htm">Population et Sociétés n° 589, p. 1-4</a>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Le voisinage est donc loin d’être aujourd’hui un cadre résiduel des relations sociales ; il n’est pas non plus un lieu surinvesti dans des logiques de séparatisme social ou de communautarisme. Les relations de voisinage demeurent toutefois très inégalitaires socialement et territorialement. Sur ce dernier point, la crise sanitaire et ses différentes séquences de confinement ne semblent pas avoir profondément changé la <a href="https://www.cairn.info/revue-population-et-societes-2020-6-page-1.htm">donne</a>.</p>
<hr>
<p><em>Ce texte est adapté d’un article publié par les auteurs dans <a href="https://www.cairn.info/revue-population-et-societes-2021-5-page-1.htm">Population et Sociétés n° 589, « Voisiner, une pratique qui demeure… sélective »</a></em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161110/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>La recherche Voisinages a été financée par l'Union sociale de l'habitat (USH) et les bailleurs sociaux partenaires, l'Agence nationale de la cohésion territoriale (ANCT), l'institut pour la recherche de la Caisse des dépots et consignations (CDC), le Plan Urbanisme Construction Architecture (PUCA), la Métropole de Lyon et la Ville de Paris.</span></em></p>Résultats d’une enquête sur le voisinage : nous ne voisinons pas tous de la même manière ni avec n’importe qui.Jean-Yves Authier, Professeur de sociologie à l'Université Lyon 2, Université Lumière Lyon 2 Joanie Cayouette-Remblière, Sociologue, Institut National d'Études Démographiques (INED)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1574772021-03-24T19:32:22Z2021-03-24T19:32:22ZEn Afrique du Sud, le logement social peut-il aider à dépasser enfin l’héritage de l’apartheid ?<p>Les villes d’Afrique du Sud connaissent encore une forte ségrégation entre populations blanches et noires et entre riches et pauvres. Depuis 1994, le gouvernement a pourtant distribué <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/08/28/en-afrique-du-sud-des-logements-gratuits-pour-les-plus-pauvres_5503886_3212.html">3,5 millions de maisons</a>, mais celles-ci se situaient souvent en lointaine périphérie. En 2006, la nouvelle politique de logement social a voulu rompre avec ce modèle, en offrant des logements abordables mieux localisés.</p>
<p>Quinze ans plus tard, des chercheurs du <a href="http://www.hsrc.ac.za/en">Human Science Research Council</a> (HSRC) évaluent les impacts de ce programme, dans une étude financée par la Commission européenne. Les résultats sont mitigés.</p>
<h2>Les politiques de logement post-apartheid</h2>
<p>Le logement était la pierre angulaire des politiques publiques post-apartheid, dans le but de corriger la ségrégation et la discrimination raciale. Les programmes <a href="https://omalley.nelsonmandela.org/omalley/index.php/site/q/03lv02039/04lv02103/05lv02120/06lv02126.htm">Reconstruction et Développement</a> (RDP) dès 1994 puis <a href="https://www.gov.za/about-government/sustainable-human-settlements-breaking-new-ground">Breaking New Ground</a> (BNG) en 2011 ont conduit, nous l’avons dit, à la construction de près de 3,5 millions de maisons subventionnées pour les ménages noirs défavorisés.</p>
<p>Néanmoins, le choix du modèle de la maison gratuite, en propriété individuelle, a conduit à installer la plupart des lotissements en lointaine périphérie urbaine, pour des raisons de coûts de terrain. Ceci a renforcé les divisions spatiales et les inégalités économiques. Certains lotissements se sont vidés d’une partie de leurs résidents, qui ont préféré retourner vers les centres-villes, quitte à habiter dans des appartements insalubres ou à louer des <a href="http://www.hsrc.ac.za/en/review/hsrc-review-january-2015/backyard-schaks-and-urban-housing-crisis"><em>backyard shacks</em></a>, c’est-à-dire des abris de fortune.</p>
<p>De plus, malgré cette construction massive et rapide, l’offre est inférieure aux besoins. Ainsi, aujourd’hui dans les grandes villes, comme Johannesburg, Le Cap et Ekurhuleni, <a href="http://www.statssa.gov.za/?p=11241">un habitant sur cinq</a> vit encore dans un logement précaire.</p>
<h2>L’espoir renouvelé de la politique de logement social</h2>
<p>Bien que la propriété individuelle ait été centrale dans les politiques post-apartheid, des programmes de logement locatif ont aussi vu le jour dès 1995. Des organisations de la société civile ont ainsi aménagé et géré un parc de logement social, en recevant l’appui du gouvernement. Parallèlement, des promoteurs immobiliers privés ont récupéré des bâtiments désaffectés, parfois squattés, en <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/06/a-la-reconquete-du-centre-ville-de-johannesburg_5393519_3210.html">particulier à Johannesburg</a>, et les ont convertis en appartements à louer.</p>
<p>À la suite de ces initiatives pilotes, une nouvelle politique publique a été mise en place en 2006, qui associe la construction subventionnée de logements sociaux locatifs et la délimitation de zones de <a href="http://www.dhs.gov.za/sites/default/files/documents/publications/Social_Housing.pdf">« restructuration urbaine »</a>, un peu comme les <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/1521317">« zones franches urbaines »</a> en France. Le but était de ramener la classe ouvrière noire près des lieux d’activité économique, en s’appuyant sur l’hypothèse que ce rapprochement faciliterait l’accès à l’emploi. Or l’effet d’entraînement n’est pas systématique.</p>
<p>Cependant, depuis, l’économie sud-africaine a connu un ralentissement et une forte inflation. Les subventions gouvernementales versées aux organismes de logement social n’ont pas suivi l’inflation, et ces derniers n’ont pas pu atteindre les objectifs quantitatifs qui avaient été fixés. On compte donc aujourd’hui seulement 35 000 logements sociaux environ pour une population nationale de 60 millions d’habitants. Depuis 2017, néanmoins, les efforts du gouvernement se sont accentués dans ce secteur.</p>
<h2>Glissement vers les lointaines banlieues</h2>
<p>Grâce à la constitution d’une base de données inédite couvrant les sept principales métropoles en 2020, <a href="https://www.afd.fr/en/ressources/role-social-housing-reducing-inequality-south-african-cities">l’étude du HSRC</a> révèle un glissement des programmes d’habitat social vers les périphéries. Entre 1995 et 2005, les projets pilotes étaient implantés majoritairement dans les centres-villes. Dans les années qui suivent la nouvelle politique de 2006, plus de la moitié des projets se situent encore dans les centres-villes ou dans les banlieues proches. Mais, dès 2011, une part croissante se déplace vers les périphéries et même dans les <em>townships</em>, notamment ceux dans lesquels la population noire était cantonnée durant l’apartheid (cf. carte).</p>
<p>Ce glissement est dû à plusieurs facteurs. Le premier est la <a href="https://ideas4development.org/financiarisation-immobilier-tri-social/">hausse des valeurs immobilières</a> sur le marché privé. Les organismes de logement social ne trouvaient alors plus de terrains centraux à bas coût. Le second est la stagnation des subventions gouvernementales. Le troisième est la trop faible mise à disposition de terrains publics.</p>
<h2>Les locataires ressentent-ils un progrès social ?</h2>
<p>Le logement social a pour objectif de promouvoir une mixité sociale et raciale en ciblant les ménages qui gagnent entre 1 500 et 15 000 rands par mois (de 85 à 850 euros). Les <a href="https://www.afd.fr/en/ressources/social-housing-and-upward-mobility-south-africa">enquêtes menées en 2019</a> ont montré qu’un quart des locataires touchaient moins de 2 500 rands par mois, ce qui est proche du seuil de pauvreté. Le niveau des loyers est adapté aux tranches de revenus, mais l’inflation et la hausse du coût des services collectifs (eau, électricité, chauffage) les rendent trop onéreux pour les ménages pauvres, ce qui accentue le risque d’éviction pour non-paiement du loyer.</p>
<p>D’où viennent les bénéficiaires ? La plupart habitaient auparavant dans un rayon de moins de 5 km. Pas de transformation urbaine radicale, donc, ni de disparition de la ségrégation spatiale. Pas davantage de brassage ethnique (cf. graphique). À noter cependant qu’une plus grande mixité raciale ne constitue pas une attente prioritaire pour les habitants, <a href="https://www.afd.fr/en/ressources/social-cohesion-and-inequality-south-africa">d’après les enquêtes d’opinion</a>, dans un contexte de discriminations persistantes. La mixité sociale, mesurée par les revenus, n’est pas non plus au rendez-vous, mais <a href="https://theconversation.com/pourquoi-vouloir-vivre-dans-les-quartiers-riches-quand-on-est-pauvre-94355">son impact</a> sur l’amélioration des conditions de vie ailleurs dans le monde <a href="https://www.cairn.info/le-quartier--9782707150714-page-181.htm?contenu=resume">fait de toute façon débat</a>.</p>
<p>Comment mesurer, alors, l’amélioration des conditions de vie ? Le logement social a-t-il sorti ses bénéficiaires des bidonvilles ? Non, ceux-ci habitaient le plus souvent dans un appartement formel ou dans une maison construite en dur, rarement dans des <em>shacks</em> ou logements précaires. Néanmoins, parmi les causes invoquées pour leur demande de logement social, on note le souhait du ménage d’obtenir un habitat indépendant, et donc de quitter une cohabitation avec des proches les hébergeant, ce qui suggère des conditions de surpeuplement des logements antérieurs.</p>
<p>Le bénéfice principal cité par les locataires est le faible coût des loyers, très inférieur à celui du marché immobilier privé. Un autre avantage exprimé est le sentiment de sécurité dans la nouvelle résidence. Les immeubles sont en effet souvent équipés de systèmes de protection, et surveillés par un gardien. Des services collectifs sont proposés : centres de santé, équipements informatiques, jardins d’enfants sécurisés (voir photo ci-dessous). Ce sentiment de sécurité s’arrête toutefois au seuil de la résidence. Le quartier environnant apparaît rarement sûr aux yeux des locataires.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/390955/original/file-20210322-21-wvo0bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/390955/original/file-20210322-21-wvo0bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/390955/original/file-20210322-21-wvo0bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/390955/original/file-20210322-21-wvo0bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/390955/original/file-20210322-21-wvo0bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/390955/original/file-20210322-21-wvo0bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/390955/original/file-20210322-21-wvo0bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jardin d’enfants sur le toit d’un immeuble de logement social, Johannesburg, 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Irène Salenson</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Bien que les ménages expriment un ressenti positif, les résultats en termes d’accès à l’emploi et à l’éducation sont plutôt modestes. Les enquêtes montrent que le taux de chômage est similaire à la moyenne nationale (29 %), et que le revenu des ménages n’a pas augmenté. Par ailleurs, de façon surprenante, les enfants sont le plus souvent restés scolarisés dans les établissements de leur quartier d’origine. Néanmoins, des différences considérables apparaissent en fonction de la localisation du projet et de la gestion mise en place par l’organisme de logement social.</p>
<p>Finalement, il semble que les objectifs de la politique de logement social, en Afrique du Sud comme ailleurs, soient souvent trop ambitieux ou irréalistes. Des évaluations socio-économiques d’impact régulières permettraient d’une part de vérifier les résultats en termes de changement social, et d’autre part de définir des finalités plus adaptées aux besoins. Par ailleurs, des efforts pourraient être fournis à la fois du côté du financement et de la localisation, en resserrant davantage les « zones de restructuration », qui ont eu tendance à couvrir progressivement l’ensemble des agglomérations (cf. carte).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/157477/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cet article est le résultat d'un programme de recherches sur les inégalités, piloté par l'Agence française de Développement et financé par la Commission Européenne (DEVCO). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Andreas Scheba reçoit un financement de la Commission européenne par le biais d'une facilité de recherche sur les inégalités. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Ivan Turok reçoit un financement de la Commission européenne par le biais d'une facilité de recherche sur les inégalités.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Justin Visagie Ivan reçoit un financement de la Commission européenne par le biais d'une facilité de recherche sur les inégalités.</span></em></p>Analyse des effets d’un ambitieux programme de logement social mis en place en Afrique du Sud en 2006.Irène Salenson, PhD, chargée de recherches, Agence française de développement (AFD)Andreas Scheba, Research Specialist in the Economic Performance and Development unit, Human Sciences Research CouncilIvan Turok, Executive Director, Human Sciences Research CouncilJustin Visagie, Research Specialist: Human Sciences Research Council, Human Sciences Research CouncilLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1548912021-02-18T20:31:09Z2021-02-18T20:31:09ZVit-on mieux dans les écolieux qu’ailleurs ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/384512/original/file-20210216-17-vthlhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=81%2C27%2C1807%2C1155&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ecohameau du Plessis</span> </figcaption></figure><p>Les épisodes de confinement et le travail à distance liés à la pandémie mondiale de Covid-19 rappellent le caractère fondamental des relations humaines (familiales, amicales…) dans le bien-être individuel et collectif. Dans ce contexte, l’idée d’un retour à un mode de vie plus sobre, plus local, et donc plus résilient devient très attirante.</p>
<p>Les habitats partagés et les écolieux, dont c’est précisément la raison d’être, connaissent ainsi une <a href="https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/dossier_tour_de_france_colibris_ademe.pdf">forte croissance de leur nombre</a>.</p>
<p>Ces écolieux se définissent selon <a href="https://cooperative-oasis.org/definition-ecolieux/">trois grandes caractéristiques</a> : la vie collective, la recherche de sobriété et l’ouverture sur l’extérieur. On en recense <a href="https://cooperative-oasis.org/les-oasis/#oasis-map">près de 1 000 en France</a>, soit autant de laboratoires pour réfléchir sur les tendances et scénarios à venir dans le cadre de la transition écologique et sociale.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/383305/original/file-20210209-15-1w0sd62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/383305/original/file-20210209-15-1w0sd62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/383305/original/file-20210209-15-1w0sd62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/383305/original/file-20210209-15-1w0sd62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/383305/original/file-20210209-15-1w0sd62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/383305/original/file-20210209-15-1w0sd62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/383305/original/file-20210209-15-1w0sd62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/383305/original/file-20210209-15-1w0sd62.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Partout en France, des Oasis fleurissent.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Coopérative Oasis</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’impact environnemental positif de ces lieux est en outre de mieux en mieux <a href="https://www.colibris-lemouvement.org/sites/default/files/article/etude-carbone4.pdf">documenté</a>. En revanche, aucun outil de référence n’existe pour mesurer leur impact social.</p>
<h2>Le RCI, un indicateur pertinent</h2>
<p>Depuis un an, cette question a fait l’objet d’une étude dans quatre écolieux en France, en partenariat avec la Coopérative Oasis et l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Cette recherche s’inscrit dans la continuité des travaux du <a href="https://irene.essec.edu/rubrique-2/codev">programme CODEV de l’ESSEC</a> et du <a href="https://campus-transition.org/">Campus de la Transition</a> autour d’un <a href="https://hal-essec.archives-ouvertes.fr/hal-00815586/document">indicateur de capacité relationnelle</a> ou RCI.</p>
<p>Composite, ce RCI mesure la qualité des relations sociales selon 4 dimensions :</p>
<ul>
<li><p>l’accès à des réseaux socio-économiques,</p></li>
<li><p>les relations personnelles,</p></li>
<li><p>la dimension civique ou politique,</p></li>
<li><p>la qualité du lien au milieu de vie.</p></li>
</ul>
<p>Au sein de ces dimensions, les critères et seuils retenus sont adaptés au contexte à partir d’une approche mixte combinant qualitatif et quantitatif.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/383308/original/file-20210209-13-1ah77sv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/383308/original/file-20210209-13-1ah77sv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/383308/original/file-20210209-13-1ah77sv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/383308/original/file-20210209-13-1ah77sv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/383308/original/file-20210209-13-1ah77sv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/383308/original/file-20210209-13-1ah77sv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=430&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/383308/original/file-20210209-13-1ah77sv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=430&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/383308/original/file-20210209-13-1ah77sv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=430&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le RCI : Exemple des critères et pondérations (application sur un territoire).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs (D.R)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’hypothèse principale de cette recherche consiste à relier la qualité relationnelle dans les écolieux avec des modes de vie fortement soutenables. Ces deux éléments conjugués sont des caractéristiques d’une <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/soi-meme-comme-un-autre-paul-ric-ur/9782020114585">« vie bonne, avec et pour autrui, dans des institutions justes »</a> au sens du philosophe Paul Ricœur.</p>
<h2>Dynamiques de vie positives</h2>
<p>Les 4 premiers lieux étudiés avec « l’approche RCI » présentent des caractéristiques très différentes. Le <a href="https://www.lemonde.fr/campus/article/2019/10/31/en-seine-et-marne-le-chateau-pour-etudiants-en-quete-de-sens_6017646_4401467.html">Campus de la Transition</a>, en Seine-et-Marne, est à la fois écolieu et centre de recherche et de formation. Le <a href="https://www.etw-france.org/les-centres-en-france/la-ferme-du-plessis/">Centre Amma, Ferme du Plessis</a>, en Eure-et-Loir, est un lieu de formation mais également un centre spirituel hindouiste. Le <a href="http://www.lechateaupartage.fr/">Château Partagé</a>, en Isère, est un lieu de vie collaboratif et rural. Enfin, <a href="https://colibris-lemouvement.org/magazine/mascobado-une-oasis-centre-montpellier">Mascobado</a> est un habitat partagé urbain au cœur de Montpellier.</p>
<p>Dans ces quatre lieux, des points communs sont ressortis concernant la qualité des relations sur chacune des dimensions du RCI :</p>
<ul>
<li><strong>Dimension 1</strong>, conditions socio-économiques du lien social :</li>
</ul>
<p>Au-delà d’un certain seuil, les relations peuvent jouer un rôle de « capital social » et ainsi remplacer d’autres formes de ressources.</p>
<p>Un acteur du Campus de la Transition explique que :</p>
<blockquote>
<p>« Le revenu n’est pas si important si on a d’autres types d’investissements, notamment les investissements sociaux. »</p>
</blockquote>
<ul>
<li><strong>Dimension 2</strong>, relations interpersonnelles :</li>
</ul>
<p>La force du collectif dépasse la somme des individus, comme en témoigne un habitant du Château Partagé :</p>
<blockquote>
<p>« Que ce soit le château ou n’importe quelle structure collective, le fait de faire ensemble, permet de faire plus. Il y a une mutualisation des biens et des moyens qui ouvrent beaucoup de possibles. »</p>
</blockquote>
<ul>
<li><strong>Dimension 3</strong>, engagement civique :</li>
</ul>
<p>Les dynamiques portées par un lieu (quand celui-ci a une mission), ou simplement discutées sur place, sont un facilitateur d’engagement comme le précise un résidant du Mascobado :</p>
<blockquote>
<p>« Habiter ici m’a permis de vraiment construire une pensée civique et politique, et permettre un passage à l’action sans quoi rien ne peut vraiment changer. »</p>
</blockquote>
<ul>
<li><strong>Dimension 4</strong>, lien à la nature :</li>
</ul>
<p>Les relations des personnes entre elles et avec la nature sont étroitement connectées. Un ancien occupant de la Ferme du Plessis en témoigne :</p>
<blockquote>
<p>« Mon séjour ici m’a fait changer ma vision des choses. Je ne respectais pas la nature et c’est ici que j’ai appris à reconsidérer la nature, et plus généralement la vie. »</p>
</blockquote>
<p>Une cinquième dimension est apparue importante, celle du lien à soi et de sa dynamique personnelle : vivre et/ou travailler en écolieu semble contribuer fortement à une reconnexion à soi, à une réflexion forte sur les parcours de vie engagés.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/383302/original/file-20210209-15-1vjppr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/383302/original/file-20210209-15-1vjppr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/383302/original/file-20210209-15-1vjppr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/383302/original/file-20210209-15-1vjppr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/383302/original/file-20210209-15-1vjppr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/383302/original/file-20210209-15-1vjppr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/383302/original/file-20210209-15-1vjppr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un acteur du Campus de la Transition estime que les relations sociales sont une ressource plus importante que le revenu..</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs (D.R)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour l’un des acteurs du Centre Amma – Ferme du Plessis, son lien étroit à ce lieu lui « permet d’avoir une très grande cohérence consciente entre toutes les dimensions de sa vie, de faire une expérience d’une vie complète ! ». Dans ce contexte, la <a href="https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2020/08/21/dans-les-ecolieux-on-reinvente-des-rituels-pour-se-retrouver_6049512_3451060.html">dimension spirituelle</a> de la personne, qui tient notamment à la quête de sens, apparaît comme structurante de cette dynamique.</p>
<h2>Un terreau fécond à entretenir</h2>
<p>Des points d’attention émergent et montrent aussi les fragilités potentielles de tels modèles. Par exemple, l’accompagnement de personnes présentant des vulnérabilités extrêmes (psychiques ou économiques) ne peut se faire uniquement au sein de l’écolieu mais nécessite des partenariats avec des acteurs spécialisés. De même, la gouvernance des lieux peut s’avérer un sujet permanent de controverses.</p>
<p>De ces constats, il est déjà possible de pressentir la caractérisation des écolieux en fonction de leurs missions, du type de public qu’ils accueillent et de leur situation géographique. De là, il sera envisageable de réaliser une première cartographie de cet écosystème.</p>
<p>Dans un contexte sanitaire et social difficile, les écolieux semblent favoriser des liens combinés aux autres et à la nature, très fructueux pour le bien-vivre individuel et collectif.</p>
<p>Peut-on pour autant les considérer comme des modèles ou des sources d’inspiration pour promouvoir une société du bien vivre centrée sur la qualité des liens ? Cette hypothèse – encore à étayer – invite en tout cas à <a href="https://theconversation.com/comment-concevoir-collectivement-le-bien-etre-soutenable-141469">mesurer autrement la qualité de vie</a> et à explorer diverses manières de nous relier aux autres et à notre milieu naturel.</p>
<p>Dans cette optique, nos travaux confirment l’intérêt de l’usage du RCI. Depuis 10 ans, cet indicateur a déjà été appliqué à plusieurs contextes : évaluation de <a href="http://www.theses.fr/2017LIL12010">projets de RSE</a> dans des pays du Sud ; effets d’une <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/13600818.2017.1328046">catastrophe naturelle</a> ; comparaisons <a href="http://theses.fr/2018PA01E015">macroéconomiques</a> ; prise en compte accrue des dimensions sociales et relationnelles <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2020-2-page-51.htm">dans l’entreprise</a> ; développement de nouvelles méthodes d’évaluation d’impact social <a href="http://www.lelabo-ess.org/aux-captifs-la-liberation-mesurer-la-relation-aux.html">dans l’Économie sociale et solidaire</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/383311/original/file-20210209-15-16a675q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/383311/original/file-20210209-15-16a675q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/383311/original/file-20210209-15-16a675q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/383311/original/file-20210209-15-16a675q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/383311/original/file-20210209-15-16a675q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/383311/original/file-20210209-15-16a675q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/383311/original/file-20210209-15-16a675q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/383311/original/file-20210209-15-16a675q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Comparaisons macroéconomiques sur le RCI.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.afd.fr/en/ressources/relational-capability-index-20">AFD</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces applications ont notamment mis en avant l’intérêt de l’utilisation du RCI dans des évaluations, notamment avec les résultats empiriques suivants :</p>
<ul>
<li><p>Les programmes sociétaux menés par les <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/14720701211267810/full/html">pétroliers dans le delta du Niger</a> permettent dans l’ensemble de diminuer la pauvreté multidimensionnelle, mais aux dépens de certaines formes de cohésion sociale, dont la confiance au sein des communautés.</p></li>
<li><p>Améliorer les conditions de travail des <a href="https://www.cairn.info/revue-mondes-en-developpement-2017-4-page-87.htm">chiffonniers mexicains</a> n’augmente pas nécessairement leur revenu, mais favorise leur <em>empowerment</em> (émancipation) sociopolitique.</p></li>
<li><p>Ou encore, le <a href="https://www.afd.fr/en/ressources/relational-capability-index-20">classement des pays</a> selon le RCI diffère de celui que l’on obtient en comparant leur PIB ou leur IDH, avec toutefois des corrélations.</p></li>
</ul>
<p>Si elle s’inscrit dans la continuité de ces travaux menés dans les pays du sud pour évaluer la qualité du lien social, l’étude en cours donne aussi une autre dimension à l’indicateur.</p>
<p>Jusque-là, le RCI était plutôt utilisé pour mettre en lumière des aspects du développement généralement mis de côté car moins quantifiable par les acteurs publics et privés. Le contexte de cette application aux écolieux est différent puisque l’indicateur est en complète cohérence avec les valeurs des structures évaluées : il prend une autre vocation qui pourra certainement inspirer d’autres acteurs dans leur démarche évaluative.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/154891/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cécile Ezvan est membre du Campus de la Transition </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Cécile Renouard est co-fondatrice et présidente du Campus de la Transition, un des éco-lieux mentionnés dans l'article. Le Campus reçoit différents financements publics et privés. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Hélène L'Huillier est membre du Campus de la Transition.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pierre-Jean Cottalorda travaille pour le Campus de la Transition. Le Campus reçoit divers financements publics et privés, dont l'ADEME.</span></em></p>Dans quatre de ces sites qui cherchent à concilier recherche de sobriété et vie collective, les habitants témoignent d’une amélioration des relations sociales.Cécile Ezvan, Enseignant-chercheur à Excelia, chercheur associée à l'Université de Lyon, ExceliaCécile Renouard, Enseignant-chercheur à l'ESSEC et déléguée du Laboratoire du Campus de la Transition, ESSEC Hélène L'Huillier, Chercheuse et évaluatrice indépendante, partenaire du Campus de la Transition, ESSEC Pierre-Jean Cottalorda, Enseignant-chercheur, ESSEC Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1470742020-11-02T19:59:09Z2020-11-02T19:59:09ZLa perception des risques d’érosion côtière et de submersion marine par la population du littoral : les cas de Wissant et Oye-Plage<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/361924/original/file-20201006-22-1ilqpk7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">A Oye-Plage aux Ecardines, les bunkers, autrefois sur la digue, sont maintenant en haut de plage. Les maisons sont juste derrière le cordon dunaire.</span> <span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science 2020 (du 2 au 12 octobre 2020 en métropole et du 6 au 16 novembre en Corse, en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Planète Nature ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<p><em>Le présent article a été coécrit avec Philippe Deboudt (Univ. Lille, Univ. Littoral Côte d’Opale, ULR 4477 – TVES – Territoires, Villes, Environnement & Société), Florian Lebreton, (Univ. Littoral Côte d’Opale, Univ. Lille, ULR 4477 – TVES – Territoires, Villes, Environnement & Société), Arnaud Héquette, François Schmitt, Denis Marin, Rachel Révillon et Lucie Le Goff (Univ. Littoral Côte d’Opale, Univ. Lille, CNRS, Laboratoire d’Océanologie et de Géosciences, UMR CNRS 8187).</em></p>
<hr>
<p>Les côtes sont des territoires à enjeux forts : on trouve par exemple 60 % de la population mondiale sur une bande de 150 km de large le long des rivages <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/fichier/1379044/aq_oldcol_23.pdf">d’après l’Insee</a>. En France métropolitaine, s’il ne représente que 4 % de la surface du territoire national, le littoral accueille 10 % des habitants, d’après l’<a href="https://www.onml.fr/accueil/">Observatoire National de la Mer et du Littoral</a>. Il concentre également des activités économiques essentielles : ports, zones industrielles, pôles touristiques, etc. Les habitants et les infrastructures peuvent être menacés par endroits par l’érosion côtière. Dans un <a href="http://www.geolittoral.developpement-durable.gouv.fr/premiers-enseignements-r476.html">rapport technique de 2018</a>, le <a href="https://www.cerema.fr/fr">Centre d’Études et d’Expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement</a> indique qu’en France métropolitaine 37 % des côtes sableuses sont en érosion, soit un linéaire de 700 km environ et qu’une surface de territoire d’à peu près 30 km<sup>2</sup> a déjà été perdue depuis 50 ans.</p>
<p>Dans le contexte actuel d’accélération de la montée du niveau de la mer et d’incertitude quant à l’évolution du régime futur des tempêtes, l’inquiétude des populations exposées aux aléas littoraux est légitime. Elles seront de plus en plus vulnérables à l’avenir. La gestion des risques littoraux en France a été jusqu’à présent un sujet dont les citoyens avaient été tenus à l’écart, sans qu’ils soient associés directement à la prise de décision. Pourtant, l’acculturation et la connaissance de la perception des risques côtiers par les populations locales sont un préalable indispensable à la co-construction et à l’acceptabilité des stratégies d’aménagement du territoire à mettre en place dans les années à venir.</p>
<p>Dans le cadre d’un projet intitulé « Quel littoral dans cinquante ans ? Co-construction de stratégies d’adaptation au changement climatique en Côte d’Opale » (<a href="https://cosaco.univ-littoral.fr/">COSACO</a>, financé par la Fondation de France), une équipe pluridisciplinaire de chercheurs (géographes, géomorphologues, sociologue et océanographe) a travaillé pendant trois ans (2016-2019) avec les habitants de deux communes littorales du Pas-de-Calais en région Hauts de France, Wissant et Oye-Plage.</p>
<p>Dans ces deux communes, des lotissements ont été construits dans les années 1970 directement en arrière d’un cordon dunaire, respectivement le lotissement de la dune d’Aval et celui des Ecardines. Ces deux sites sont affectés par l’érosion côtière depuis plusieurs décennies : <a href="https://cosaco.univ-littoral.fr/wp-content/uploads/2017/02/Pres-Wissant-mars-2017-MHR.pdf">recul moyen de 147 m entre 1949 et 2015 dans le centre de la baie de Wissant</a> ; <a href="https://cosaco.univ-littoral.fr/wp-content/uploads/2017/02/Pres-Oye-Plage-mars-2017-MHR.pdf">recul de 50 m au droit des Ecardines pendant la même période</a>. Ces zones sont donc menacées à court ou moyen terme.</p>
<p><strong>Figure 1 : localisation et présentation des sites étudiés</strong></p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/360363/original/file-20200928-16-78skbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/360363/original/file-20200928-16-78skbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=522&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/360363/original/file-20200928-16-78skbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=522&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/360363/original/file-20200928-16-78skbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=522&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/360363/original/file-20200928-16-78skbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=656&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/360363/original/file-20200928-16-78skbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=656&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/360363/original/file-20200928-16-78skbw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=656&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<figure class="align-center ">
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<span class="caption">Wissant.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Google Earth</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<span class="caption">Lotissement des Ecardines.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Google Earth</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Ces projets s’inscrivent dans une démarche participative et collaborative mise en place par l’équipe de chercheurs dont l’objectif était d’impliquer les habitants dans le devenir de leur littoral.</p>
<p>Afin d’entamer une réflexion sur les stratégies d’aménagement du littoral souhaitées par les habitants, dans un premier temps a eu lieu une phase pédagogique d’acculturation aux risques côtiers. Elle s’est concrétisée par des réunions publiques pendant lesquelles les universitaires ont apporté aux participants de l’information scientifique sur les évolutions passées et futures de leurs rivages. Puis des débats et des ateliers ont permis aux habitants de faire émerger leur expérience du terrain et leur perception face aux risques côtiers. Certains habitants de Oye-Plage ont aussi souhaité collaborer à l’étude de l’évolution du trait de côte grâce à des outils simples d’utilisation : suivi photographique, application sur smartphone et mesures de profils topographiques de plage. Ce suivi du trait de côte avait pour but de leur permettre d’objectiver et de mettre à jour leur connaissance du terrain.</p>
<p>Pour compléter l’étude, une enquête a été menée auprès de 285 foyers (123 à Oye-Plage, 162 à Wissant) entre juin et juillet 2018, période la plus favorable pour interroger les résidents à l’année et les propriétaires de résidences secondaires. Les groupes de questions portaient sur 1) leur logement, 2) le rapport personnel au territoire et à ses activités, 3) les risques côtiers, 4) la connaissance et le sentiment d’exposition au risque, 5) les risques passés et à venir, 6) les connaissances sur les tempêtes et le changement climatique, 7) les connaissances sur les techniques et les stratégies d’aménagement souhaitées.</p>
<p>Les personnes interrogées pouvaient choisir parmi quatre stratégies de gestion du littoral : fixer le trait de côte (par exemple avec des digues) ; s’adapter en fonction des enjeux locaux (par exemple : laisser les zones naturelles reculer, utiliser des solutions dites douces de type rechargement de plage au niveau des zones peuplées et temporiser) ; relocaliser les biens et les activités vers l’intérieur des terres ; ne rien faire (abandonner le territoire à la mer).</p>
<p>À la question « Pensez-vous que votre lieu de résidence soit concerné par le risque d’érosion/submersion ? », les résultats diffèrent nettement dans les deux communes. À Oye-Plage, 35 % des habitants pensent que leur maison n’est pas menacée et 64 % qu’elle l’est.</p>
<p>À Wissant, 59 % pensent qu’elle n’est pas à risque et 41 % qu’elle l’est. Le croisement du type de réponse avec la localisation du logement montre que, logiquement, les personnes se pensant exposées sont celles qui vivent à proximité du rivage. À Wissant, le sentiment d’exposition varie nettement dans l’espace : les habitants vivant sur les hauteurs se sentent moins concernés que ceux résidant près de la plage et derrière la dune d’Aval. À Oye-Plage, où tout le territoire est très bas (situé sur un polder ?), le constat est moins tranché : les habitants se sentent donc plus souvent (64 %) et partout menacés.</p>
<p><strong>Figure 2 : sentiment d’exposition au risque</strong></p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/360366/original/file-20200928-24-15osxg7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/360366/original/file-20200928-24-15osxg7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=298&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/360366/original/file-20200928-24-15osxg7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=298&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/360366/original/file-20200928-24-15osxg7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=298&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/360366/original/file-20200928-24-15osxg7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=375&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/360366/original/file-20200928-24-15osxg7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=375&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/360366/original/file-20200928-24-15osxg7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=375&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le sentiment d’exposition au risque varie en fonction de la localisation des logements (A, Wissant ; B, Oye-Plage).</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p><strong>Figure 3 : stratégies d’aménagement souhaitées</strong></p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/360367/original/file-20200928-16-141t1p2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/360367/original/file-20200928-16-141t1p2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=298&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/360367/original/file-20200928-16-141t1p2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=298&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/360367/original/file-20200928-16-141t1p2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=298&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/360367/original/file-20200928-16-141t1p2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=375&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/360367/original/file-20200928-16-141t1p2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=375&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/360367/original/file-20200928-16-141t1p2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=375&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Figure 3 : les stratégies d’aménagement souhaitées (A, Wissant ; B, Oye-Plage).</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour ce qui est des stratégies d’aménagement souhaitées, à Wissant 53 % des sondés choisissent les mesures d’adaptation et 25 % envisagent de fixer le trait de côte. À Oye-Plage, c’est cette dernière solution qui remporte la majorité des suffrages (43 %) juste devant l’adaptation (41 %). Sans doute cela peut-il s’expliquer par le fait qu’une partie du littoral wissantais soit déjà équipé d’une digue, derrière laquelle les habitants se sentent en sécurité. Au Platier d’Oye, le littoral est constitué d’un cordon dunaire en érosion, le sentiment de sécurité est moindre, l’expression d’un besoin de protection est donc plus fréquente. Rares sont ceux qui envisagent la relocalisation des biens et des activités (17 et 11 %) et encore moins l’abandon du territoire (4 et 5 %). On trouve le même type de réponses rapporté dans la littérature scientifique ailleurs dans le monde, par exemple dans la <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11027-011-9340-8">région de Boston aux USA</a>.</p>
<p>À la différence du sentiment d’exposition aux risques, les réponses ne semblent pas ici liées à la localisation des résidences. Cependant à Wissant, c’est derrière la dune d’Aval, à l’ouest du village, secteur fortement exposé à l’érosion, que l’on trouve le plus de réponses pour la fixation du trait de côte et l’adaptation (triangles rouge et orange).</p>
<p>Les éléments de l’enquête rapportés ici montrent donc que les résidents de Oye-Plage et Wissant sont conscients des risques côtiers dans leurs communes. Ils pourraient donc être mieux associés à leur gestion. Paradoxalement, même dans un contexte de dérèglement climatique, de montée du niveau de la mer et d’accentuation des risques, ils préfèrent majoritairement continuer à y habiter comme aujourd’hui. Ils sont peu nombreux à avoir intégré la nécessité d’envisager d’autres stratégies d’aménagement du territoire. Dans ce domaine, des efforts de pédagogie de la part des pouvoirs publics et des scientifiques sont encore à réaliser.</p>
<hr>
<p><em>Toute l’équipe du projet tient à remercier sincèrement la <a href="https://www.fondationdefrance.org/fr">Fondation de France</a> qui a financé le projet COSACO. L’équipe remercie également les maires des deux communes, l’association « Les Amis de Wissant », les habitants de Oye-Plage et de Wissant qui ont participé aux réunions publiques, aux ateliers et au suivi du trait de côte.</em></p>
<p><em>Pour aller plus loin : Ruz, M.-H. ; Rufin-Soler, C. ; Héquette, A. ; Révillon, R. ; Hellequin, A.-P. ; Deboudt, P. ; Herbert, V. ; Cohen, O. ; Lebreton, F. ; Le Goff, L. ; Schmitt, F.G., and Marin, D., 2020. « Climate change and risk perceptions in two French coastal communities », _in :</em> Malvárez, G. and Navas, F. (eds.), <em>Global Coastal Issues of 2020</em>. <em>Journal of Coastal Research</em>, Special Issue No. 95, pp. 875–879. Coconut Creek (Florida), ISSN 0749-0208._</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147074/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marie-Hélène Ruz a reçu des financements de La Fondation de France. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Anne-Peggy Hellequin a reçu des financements de La Fondation de France.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Caroline Rufin-Soler a reçu des financements de Fondation de France. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Olivier Cohen a reçu des financements de la Fondation de France. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Philippe Deboudt a reçu des financements de ANR ; Fondation de France. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Vincent Herbert a reçu des financements de La Fondation de France.</span></em></p>Une équipe pluridisciplinaire de chercheurs a étudié la réaction des habitants de deux communes du Pas-de-Calais face à l’érosion du littoral qui menace leurs lieux d’habitation.Marie-Hélène Ruz, Professeur des universités, Université Littoral Côte d'Opale Anne-Peggy Hellequin, Professeur des Universités, Laboratoire Dynamiques Sociales et Recomposition des Espaces, UMR CNRS 7533, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresCaroline Rufin-Soler, Maître de Conférences de Géographie, ULR 4477 -- TVES -Territoires, Villes, Environnement & Société, Université du Littoral Côte d'Opale, Université Littoral Côte d'Opale Olivier Cohen, Maître de Conférences de Géographie, Laboratoire d'Océanologie et de Géosciences, UMR CNRS 8187, Université Littoral Côte d'Opale, Université Littoral Côte d'Opale Philippe Deboudt, Professeur des Universités, Directeur du Laboratoire Territoires, Villes, Environnement & Société (TVES) ULR 447, Université de LilleVincent Herbert, Maître de conférences à l'Université du Littoral Côte d'Opale, ULR 4477 -- TVES -Territoires, Villes, Environnement & Société, Université Littoral Côte d'Opale Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1461442020-11-02T19:57:13Z2020-11-02T19:57:13ZLes minéraux argileux, sources d’innovation depuis des millénaires<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/365039/original/file-20201022-13-u515n3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1714%2C287%2C6280%2C3703&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La citadelle de Bam en Iran est la plus grande structure en adobe du monde, datant d'au moins 500 avant JC.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/bc/Fortaleza_de_Bam%2C_Ir%C3%A1n%2C_2016-09-23%2C_DD_09.jpg">Wikipédia, Diego Celso</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=243&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=243&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=243&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=305&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=305&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/349128/original/file-20200723-35-4r1lck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=305&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la prochaine Fête de la science qui aura lieu du 2 au 12 octobre prochain en métropole et du 6 au 16 novembre en outre-mer et à l’international et dont The Conversation France est partenaire.
Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>Les minéraux argileux sont l’une des premières ressources naturelles utilisées par l’espèce humaine. Ils ont accompagné le développement de nombreux domaines : habitat, outillage, art, communication, santé, hygiène, matériaux. Un mélange d’argile, de sables et de paille hachée, nommé (<a href="https://theconversation.com/le-plus-vieux-materiau-de-construction-au-monde-est-aussi-le-plus-ecoresponsable-133587">adobe</a>) fait ainsi partie des premiers matériaux de construction et <a href="http://www.kere-architecture.com/projects/primary-school-gando/">est toujours utilisé</a> dans le monde entier.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367243/original/file-20201103-13-74xo80.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367243/original/file-20201103-13-74xo80.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=370&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367243/original/file-20201103-13-74xo80.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=370&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367243/original/file-20201103-13-74xo80.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=370&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367243/original/file-20201103-13-74xo80.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=465&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367243/original/file-20201103-13-74xo80.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=465&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367243/original/file-20201103-13-74xo80.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=465&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Ecole primaire de Gando, au Burkina Faso, architecte Francis Kéré.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Photo Siméon Duchoud</span></span>
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<p>Les argiles ont aussi largement contribué à l’essor de la communication. Les Sumériens, Babyloniens, Assyriens et Hittites ont dès 4000 ans av. J.-C. gravé leurs sceaux dans des tablettes d’argiles à l’aide d’un roseau taillé en pointe et ont aussi constitué le premier support de l’écriture cunéiforme, support recyclable. Séchées à l’air ou au soleil, ces tablettes non cuites restaient fragiles ; un simple trempage dans l’eau permettait de les réutiliser. En revanche, après cuisson dans un four, elles pouvaient être conservées, <a href="https://www.louvre.fr/oeuvre-notices/tablettes-archaiques">donnant ainsi naissance aux premières bibliothèques</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/367242/original/file-20201103-19-lr9iyv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367242/original/file-20201103-19-lr9iyv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367242/original/file-20201103-19-lr9iyv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367242/original/file-20201103-19-lr9iyv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367242/original/file-20201103-19-lr9iyv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=545&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367242/original/file-20201103-19-lr9iyv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=545&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367242/original/file-20201103-19-lr9iyv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=545&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Tablette à écriture précunéiforme.</span>
<span class="attribution"><span class="source">2011 Musée du Louvre / Thierry Ollivier</span></span>
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<p>Leurs propriétés absorbantes en font également des matériaux de choix dans le domaine de la <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007%2F978-94-007-4375-5_18">santé</a>, sous forme de cataplasmes, dans des pansements à usage externe, ou encore en tant que pansement gastrique. Les argiles rentrent également dans la composition de nombreux produits cosmétiques (savons, masques, maquillage) ou sont appliquées directement comme dans le cas du ghassoul. Le ghassoul, absorbe les corps gras ; les autres argiles peuvent contribuer à l’hydratation de la peau, sa purification, sa reminéralisation. L’action de l’argile peut aussi être antiseptique et cicatrisante.</p>
<h2>La structure des minéraux argileux</h2>
<p>Les minéraux argileux sont présents depuis des millénaires dans l’histoire humaine, mais leur structure n’a été ou comprise que dans les années 1920 après l’invention des techniques de <a href="http://culturesciencesphysique.ens-lyon.fr/ressource/Diffraction-rayons-X-techniques-determination-structure.xml">diffraction des rayons X</a>.</p>
<p>La notion d’« argiles » est utilisée pour nommer toutes les particules minérales qui font moins de deux micromètres. Cette taille est de l’ordre de la résolution du microscope optique. Les cristaux de minéraux argileux sont donc très petits, et pour examiner en détail leur structure, il a fallu attendre le développement d’équipements ayant une résolution plus importante. Il se trouve que la longueur des rayons X est de la même échelle que les distances entre les atomes dans les cristaux. Suite à la découverte du phénomène de la diffraction des rayons X et de la relation entre la longueur d’onde des rayons X et la distance entre les atomes, il est donc devenu possible d’étudier la structure cristalline, y compris celle des minéraux argileux.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/365047/original/file-20201022-16-1gr2wcr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/365047/original/file-20201022-16-1gr2wcr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=135&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/365047/original/file-20201022-16-1gr2wcr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=135&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/365047/original/file-20201022-16-1gr2wcr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=135&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/365047/original/file-20201022-16-1gr2wcr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=170&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/365047/original/file-20201022-16-1gr2wcr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=170&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/365047/original/file-20201022-16-1gr2wcr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=170&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>En 1927, le scientifique français <a href="https://www.persee.fr/doc/bulmi_0366-3248_1928_num_51_5_4050">Charles Maugin</a> détermina avec une précision exacte la taille de mailles cristallines des micas et leur composition chimique. Puis en 1930 le célèbre chimiste <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC526695/pdf/pnas01010-0027.pdf">Linus Pauling</a> fut le premier à résoudre les structures des minéraux argileux : talc, pyrophyllite, muscovite et chlorite. Ainsi, nous connaissons aujourd’hui la structure exacte de ces cristaux minuscules. Leur structure est composée des couches siliciques et magnésiennes ou alumineuses qui forment des feuillets qui à leur tour sont empilés pour former des cristaux lamellaires. Les principaux éléments qui entrent dans la structure des minéraux argileux sont le Si, Al, Mg, O et H, mais de nombreux autres éléments peuvent s’y trouver tels que Fe, Ni et Zn.</p>
<p>La grande variété des minéraux argileux provient de la possibilité de combiner ces éléments de plusieurs façons bien définies via notamment des substitutions d’un élément par un autre au sein d’un feuillet. Ceci en revanche va conférer des propriétés particulières et bien différentes en fonction de la quantité et la position des substitutions dans la structure des minéraux argileux. Différents autres éléments tels que le sodium, le potassium ou encore le calcium peuvent également se trouver entre les feuillets.</p>
<h2>Mimer la nature : synthèse des minéraux argileux dans le laboratoire</h2>
<p>Présentes sur la quasi-totalité de la surface de la Terre, les argiles ont des compositions et propriétés dépendantes des conditions géologiques dans lesquelles elles se sont formées. Pour une même argile, des caractéristiques très diverses à la fois en matière de compositions chimiques, coloration, cristallinité, nature des phases associées peuvent être observées en fonction de la nature du gisement.</p>
<p>Ces hétérogénéités peuvent être un frein pour certaines applications industrielles dans lesquelles il est nécessaire d’utiliser des composés purs. Des recherches ont ainsi été initiées afin de synthétiser ces matériaux, qui dans les conditions géologiques, mettent plusieurs millions d’années à se former.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1002/chem.201702763">L’histoire de la synthèse de talc</a> illustre à la fois la manière dont les chercheurs ont réussi à préparer un talc pur et l’évolution des méthodes de préparation via des méthodes de plus en plus douces.</p>
<p>Alors que les <a href="https://pubs.geoscienceworld.org/gsa/gsabulletin/article-abstract/60/3/439/4281/THE-SYSTEM-MgO-SiO2-H20?redirectedFrom=PD">premiers essais de synthèse</a> ont été faits à des températures voisines de 1000 °C et des pressions allant jusqu’à 2800 bars et pour des durées de cristallisation de quelques jours, il est aujourd’hui possible d’obtenir des talcs en quelques dizaines de secondes par un <a href="https://doi.org/10.1002/anie.201604096">procédé continu en eau supercritique</a> – les propriétés de l’eau en état supercritique (au-delà de 374 °C et 218 bar) sont intermédiaires entre celles de l’état gazeux et liquide.</p>
<p>Hormis le talc, d’autres minéraux argileux ont à présent des analogues synthétiques. Les méthodes de préparation permettent outre la maîtrise de la composition chimique, la modulation de la longueur des feuillets, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles applications.</p>
<p>Parmi les dernières voies de synthèse mises au point, figure également la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=CCdywP9-9CQ">voie sol-gel</a> permettant de former, à température et pression ambiante et en une seule étape, des composés de type talc comportant des groupements fonctionnels, évitant ainsi les traitements post-synthèse nécessaires pour conférer certaines propriétés aux matériaux.</p>
<h2>Les minéraux argileux, matériaux durables pour le futur</h2>
<p>Les argiles employées depuis des millénaires sont des matériaux versatiles. Les développements actuels dans le domaine de l’environnement (<a href="https://doi.org/10.1016/j.jhazmat.2019.02.003">piégeage de polluants organiques et minéraux</a>, <a href="https://doi.org/10.1016/j.cattod.2018.12.030">catalyse</a>…) de matériaux multifonctionnels tels les composites polymères argiles permettant par exemple de conférer des <a href="https://doi.org/10.1080/15583724.2018.1450756">propriétés anti-feu</a>. <a href="https://doi.org/10.3390/pharmaceutics12010051">Les systèmes de relargage contrôlé de molécules d’intérêt</a> sous l’action d’une modification de pH, de la lumière ou d’un champ magnétique ouvrent la voie à de nouvelles applications dans le futur et ce notamment dans les applications biomédicales.</p>
<p>Elles connaissent également un regain d’intérêt dans le domaine de la construction avec notamment, le renouveau des techniques de construction en terre crue, apportant des propriétés thermiques et acoustiques tout en n’engendrant pas d’émission de Composés Organiques Volatils (COV), caractéristiques importantes à la fois dans la conception d’habitations répondant à la certification HQE (Haute Qualité Energétique) et la réduction de la pollution de l’air intérieur. Enfin, la possibilité de préparer des argiles de composition chimique bien définie, par des voies de synthèse respectueusement de l’environnement élargit encore l’éventail d’applications.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146144/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les minéraux argileux ont accompagné le développement de l'espèce humaine depuis des millénaires. Pourtant, on ne comprend leur composition que depuis peu.Liva Dzene, Maîtresse de conférence en chimie, Université de Haute-Alsace (UHA)Jocelyne Brendlé, Directrice de l’Ecole Nationale Supérieure de Chimie de Mulhouse, Université de Haute-Alsace (UHA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1471472020-10-19T19:33:47Z2020-10-19T19:33:47ZLe confinement, révélateur de l’attrait de la nature en ville<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science 2020 (du 2 au 12 octobre 2020 en métropole et du 6 au 16 novembre en Corse, en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Planète Nature ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<p><em>Cet article a été co-écrit avec Camille Reidt, Designer plasticienne, diplômée de l'École nationale supérieure d'art de Limoges et Idelette Plazanet, Docteure de l'Université de Limoges, responsable R&D SAS InPlanta.</em> </p>
<hr>
<p>Au cours du confinement, de nombreux articles ont traité des changements opérés dans l’espace urbain. Ils ont souligné le <a href="https://www.youtube.com/watch?v=LjyJOa3cS5M">vide apparu</a> dans l’espace public, notamment le dépeuplement des grandes places emblématiques des villes françaises, et insisté sur le <a href="https://www.bruitparif.fr/suivi-des-modifications-de-l-environnement-sonore-en-lien-avec-le-confinement-et-le-deconfinement/">calme</a> survenu en ville ou sur la baisse de la <a href="https://theconversation.com/covid-et-baisse-des-emissions-de-co-une-nouvelle-etude-fait-le-point-secteur-par-secteur-138971">pollution atmosphérique</a>.</p>
<p>Puis ce fut au tour de ceux qui se penchaient sur le <a href="https://www.lemonde.fr/sciences/article/2020/09/27/le-confinement-laisse-le-chant-libre-aux-oiseaux_6053813_1650684.html">chant des oiseaux</a>, la <a href="https://www.lemonde.fr/smart-cities/article/2020/03/30/nicolas-gilsoul-la-faune-ne-revient-pas-dans-les-villes-avec-le-confinement-mais-on-la-voit-et-on-l-entend_6034867_4811534.html">présence de certains animaux</a> comme le renard au Père-Lachaise à Paris, la colonisation des végétaux et leur diversité. Peu se sont demandé si cet espace habité pouvait encore être qualifié de ville, s’il remplissait encore ses fonctions, en particulier celle d’échanges, les citadins étant assignés à résidence et restreints dans leurs déplacements. Pourtant, ce qui fait une ville, n’est-ce pas ses habitants ?</p>
<h2>Ville à l’arrêt et prise de conscience écologique</h2>
<p>Ce qui est remarquable au cours de cette période, c’est l’accent mis sur le lien entre la <a href="https://www.lemonde.fr/smart-cities/article/2020/03/30/nicolas-gilsoul-la-faune-ne-revient-pas-dans-les-villes-avec-le-confinement-mais-on-la-voit-et-on-l-entend_6034867_4811534.html">nature et la ville</a>, comme si une prise de conscience s’opérait dans la société française, comme si les individus découvraient qu’ils faisaient partie de la nature, qu’ils ne pouvaient pas s’en extraire, que la faune et la flore étaient bien présentes autour d’eux. Peut-être cela s’explique-t-il par le fait que cette crise sanitaire a conduit les Français à s’interroger sur <a href="https://theconversation.com/covid-19-ou-la-pandemie-dune-biodiversite-maltraitee-134712">l’origine de la Covid-19 et la responsabilité des hommes dans la transmission</a> de cette maladie et, par voie de conséquence, sur le rapport de la société à l’environnement.</p>
<p>Les résultats de <a href="http://www.cpu.fr/actualite/le-confinement-et-ses-effets-sur-le-quotidien/">l’enquête « Le confinement et ses effets sur le quotidien »</a> que nous avons menée entre le 23 mars et le 10 mai 2020 en France, sur un échantillon de 10 976 personnes, représentatif de la population française métropolitaine en genre, âge, diplômes et région de résidence vont dans ce sens.</p>
<p>En effet, 69,4 % des personnes interrogées ont déclaré qu’elles pensaient que la période de confinement changerait quelque chose dans notre manière de prendre en compte l’environnement et de le préserver. Ce sont ces Français qui semblent avoir moins bien vécu le confinement. Alors qu’ils déclaraient en moyenne avant le confinement un niveau de satisfaction de vie plus élevé que les autres Français (7,10 contre 7,01 sur une échelle de 1 à 10), leur bien-être a diminué de 1,54 contre 1,31 pour les autres Français. Cette prise de conscience semble donc avoir eu un effet anxiogène sur les Français. Le confinement aurait ainsi participé, en quelque sorte, au développement de l’<a href="https://www.franceinter.fr/emissions/chacun-sa-route/chacun-sa-route-13-aout-2020-0">éco-anxiété</a>.</p>
<h2>La découverte du calme et du vert au cours du confinement</h2>
<p>Cette période du confinement a également révélé à certains et rappelé à d’autres qu’ils vivaient au sein d’un environnement artificialisé, peu amène, et qu’en leur absence, la faune et la flore reprenaient leurs droits. Elle a été le moment de nouvelles expériences.</p>
<p>Ainsi, 81,7 % des 10 976 Français interrogés ont ressenti au cours du confinement un ralentissement général dans leur environnement de vie. Plus de la moitié des 3 470 Français qui, avant le confinement, déclaraient subir des nuisances sonores (bruits de la rue, des voisins,etc.) quand ils étaient chez eux ont affirmé ne plus en subir au cours du confinement. Ces Français ont expérimenté, d’une certaine manière, les vertus du calme. Sans grande surprise, les Français ne subissant pas de nuisances sonores avant et/ou au cours du confinement ont déclaré des niveaux de bien-être supérieurs (7,08 et 5,29) à ceux subissant des nuisances sonores (7,04 et 5,64). Ce sont ceux qui ont enregistré la plus faible perte de bien-être au cours du confinement : 1,44 contre 1,66 pour les autres.</p>
<p>Cette période de confinement a été difficile pour la population française métropolitaine, mais la présence d’un espace vert ou extérieur de plain-pied l’a aidée à la traverser. En moyenne, le niveau de satisfaction de vie des Français métropolitains a chuté de 1,47, passant de 7,07 (avant le confinement) à 5,6 (au cours du confinement) sur une échelle de 1 à 10. Toutefois, les personnes vivant dans une maison avec jardin ou un espace extérieur sont celles qui, en moyenne, ont déclaré au cours du confinement le niveau de satisfaction de vie le plus élevé (5,67) par rapport à celles habitant dans un appartement avec terrasse ou balcon (5,45), avec vue (5,58) ou sans vue (5,49)</p>
<p>Alors que le contact avec le sol (l’élément terre) et les possibilités qu’il offre notamment en termes d’activités (jardinage, barbecue, relaxation, jeux, sortie en extérieur…) a agi favorablement sur le bien-être des Français au cours du confinement, la présence d’animaux de compagnie ou de végétaux chez eux a eu l’effet inverse. Les Français ayant des animaux de compagnie qu’ils doivent sortir ont enregistré une chute de leur bien-être plus importante que ceux n’en ayant pas (1,98 contre 1,34). Leur niveau de satisfaction de vie est passé de 7,14 à 5,02 contre 7,09 à 5,74 pour ceux n’ayant pas d’animaux de compagnie à sortir. Le même phénomène a été observé concernant la présence de plantes ou d’animaux chez soi qui ne nécessitent pas d’être sortis. Cela s’explique peut-être par le fait que les Français possédant des animaux se sont inquiétés pour ces derniers, et/ou ont une conscience écologique plus importante et un rapport à la nature plus fort que les autres, ce qui a généré du mal-être au cours de cette crise sanitaire.</p>
<h2>Un coup de projecteur sur les vertus de la nature…</h2>
<p>Ces observations nous conduisent à nous demander ce qu’a réellement révélé cette période de confinement sur la société française métropolitaine et son rapport à la nature.</p>
<p>Le grand confinement a eu plusieurs effets. D’abord, il a exacerbé le débat sur l’impact des activités humaines sur l’environnement et l’impératif écologique. Ensuite, en révélant certains maux de la ville (pollutions sonores, atmosphériques et lumineuses, îlots de chaleur urbain, inégalités socio-spatiales…). Il a 1) mis en exergue l’urgence à agir ; et 2) placé au centre du débat la santé et le bien-être des citadins, grands oubliés de l’aménagement urbain. Ainsi, il a conduit à renouveler les réflexions sur la manière d’aménager les villes en insistant sur l’importance de prendre en compte la santé des citadins, de préserver la biodiversité, d’économiser les ressources. En quelque sorte, un nouvel hygiénisme a surgi et l’éco-urbanisme s’est affirmé.</p>
<p>De plus, en mettant en évidence les effets négatifs du mode de vie urbain actuel — rythme effréné et déconnexion par rapport au monde physique, perte de contact en face à face dans les actions et pratiques quotidiennes, étouffement par l’excès d’information, manque de lien social, environnement artificiel —, certaines mesures de distanciation sociale ont conduit à un renforcement de la demande de nature en ville et à une prise de conscience des vertus des végétaux sur la santé et le bien-être des citadins (voir tableau ci-dessous) pour lutter contre les surcharges environnementale et virtuelle. Ainsi, en quelque sorte, l’<em>homo urbanus</em> français est devenu un <a href="https://metropolitiques.eu/Nature-s-en-ville.html"><em>homo qualitus</em></a>, c’est-à-dire un être humain qui ne cherche pas à satisfaire seulement son bien-être matériel et immatériel, mais fait également de la satisfaction de son désir de nature et de la préservation de l’environnement un élément de son bien-être.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/361906/original/file-20201006-18-1wfemf0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/361906/original/file-20201006-18-1wfemf0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=506&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/361906/original/file-20201006-18-1wfemf0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=506&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/361906/original/file-20201006-18-1wfemf0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=506&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/361906/original/file-20201006-18-1wfemf0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=636&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/361906/original/file-20201006-18-1wfemf0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=636&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/361906/original/file-20201006-18-1wfemf0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=636&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>… Mais rien de vraiment nouveau</h2>
<p>Rien de vraiment nouveau, mais une prise de conscience de l’urgence de la situation et un coup de projecteur mis sur l’intérêt croissant en milieu urbain pour la nature (en particulier pour les <a href="https://www.researchgate.net/publication/338768767_De_l%E2%80%99interet_pour_la_nature_en_ville_Cadre_de_vie_sante_et_amenagement_urbain">végétaux</a>) et les <a href="https://theconversation.com/lutter-contre-les-inondations-grace-au-genie-vegetal-83653">solutions fondées sur la nature</a> (SFN). En effet, les collectivités territoriales connaissent les <a href="http://www.observatoirevillesvertes.fr/">avantages à végétaliser l’espace urbain</a> et développent des infrastructures vertes. De leur côté, les citadins ont pris conscience des bienfaits de la nature. Ils en font un élément constitutif de leur bien-être.</p>
<p>Plusieurs enquêtes en témoignent comme celle de 2017, <a href="https://www.researchgate.net/publication/329138670_Nature_en_ville_Desis_controverses">conduite auprès de 240 habitants du 6ᵉ et du VIIᵉ arrondissement de Lyon</a> constituant un échantillon représentatif de la population ; qui révèle que, pour 71 % des personnes interrogées, un environnement sain et sans nuisance est l’un des dix éléments les plus importants parmi un panel de vingt-neuf éléments dans la constitution de leur niveau de bien-être. De plus, 90 % des Français considèrent que le contact quotidien au végétal est très important ou important, et <a href="https://www.lesentreprisesdupaysage.fr/base-documentaire/enquetes-de-lunep/">75 %</a> déclarent prendre en compte les espaces verts dans leur choix de résidence.</p>
<h2>Éco-urbanisme, nouvel hygiénisme, quel futur pour les villes françaises ?</h2>
<p>Une chose est sûre : le déconfinement a offert aux municipalités l’opportunité de poursuivre certaines actions engagées et d’en mettre en place d’autres pour améliorer le cadre de vie de leurs concitoyens.</p>
<p>Les <a href="http://enlargeyourparis.blogs.liberation.fr/2020/09/20/les-coronapistes-marquent-un-tournant-decisif-dans-la-pratique-du-velo-en-ile-de-france/">coronapistes</a> qui ont vu le jour dans de nombreuses villes françaises en sont un exemple, les campagnes de <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/07/23/paris-veut-adapter-son-plu-a-l-urgence-climatique_6047019_3234.html">végétalisation urbaine</a> pour lutter contre le réchauffement climatique aussi.</p>
<p>Cependant, de nombreuses questions demeurent : les collectivités sauront-elles aller plus loin et saisir l’occasion qui se présente à elles pour répondre aux désirs des citadins qui souhaitent vivre dans un milieu urbain apaisé, plus vert et plus respectueux de l’environnement, et aspirent à une vie de quartier et à habiter dans des appartements avec un espace extérieur ? La crise sanitaire que nous traversons laissera-t-elle des traces sur les villes françaises ? L’éco-urbanisme émergent se déploiera-t-il en France, un nouveau modèle hygiéniste verra-t-il le jour ? Quelle sera l’utilisation des NTIC et des objets communicants dans l’aménagement urbain post-Covid-19 (quid de la <em>smart city</em>) ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147147/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lise Bourdeau-Lepage a reçu des financements de l'IDEX de Lyon pour le projet INTERLUDE (enquête sur le confinement et ses effets sur le quotidien) et du FEADER et de l'INRAE pour le projet européen BRRISE (Bien-être, attractivité des territoires ruraux et inégalités socio-spatiales)</span></em></p>Une enquête conduite auprès de près de 11 000 personnes en France montre à quel point le confinement a favorisé la prise de conscience de la nécessité de mieux se connecter à la nature.Lise Bourdeau-Lepage, Professeur des Universités - géographie, Université Jean-Moulin Lyon 3Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1311032020-02-25T20:27:56Z2020-02-25T20:27:56ZRacisme de bas étage dans l’immobilier privé ?<p>En 2016, l’affaire avait fait fureur sur Twitter. L’agence Laforêt met alors en ligne une annonce précisant « attention, important pour la sélection des locataires : nationalité française obligatoire, pas de noir » pour un logement à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine) avant de la retirer en présentant ses excuses publiquement.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"813700455222091776"}"></div></p>
<p>Ce cas révèle l’existence d’une discrimination aux logements qui reste cependant, en règle générale, de nature plus discrète et difficile à saisir clairement.</p>
<p>Une enquête réalisée en mai 2019 par SOS-Racisme a dénoncé la réalité des personnes non blanches lorsqu’elles cherchent un logement. Leur étude conclut qu’un actif d’origine ultra-marine ou subsaharienne a 40 % de chances en moins d’avoir un logement qu’un jeune actif d’origine française ancienne. Un jeune actif d’origine maghrébine a lui, <a href="https://www.francebleu.fr/infos/societe/sos-racisme-teste-les-annonces-de-location-de-particulier-a-particulier-le-resultat-est-accablant-1557214779">37 % de chances en moins</a>.</p>
<p>De nombreux propriétaires et agences ont été épinglés pour avoir refusé le logement sous prétextes raciaux ou religieux. Ces décisions sont illégales mais les populations d’origine étrangère continuent d’en être les victimes. Les visites sont difficiles à décrocher et les contrats sont réservés aux populations d’origine européenne. Cela se traduit dans le paysage urbain. Exclus du logement privé, 28 % des personnes d’origine africaine se retrouvent dans des zones urbaines sensibles (ZUS), contre 6 % pour le reste de la population. Une ghettoïsation qui réduit leur mobilité géographique et les opportunités de travail qui s’offrent à eux.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/6tGJaKYs2ew?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Enquête sur les discriminations dans l’accès au logement : « On appelle ça du racisme, en réalité » (Franceinfo, 2019).</span></figcaption>
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<p>Avec Pierre Philippes Combes, Benoît Schmutz et Alain Trannoy, nous avons enquêté sur la discrimination dans le marché locatif des biens immobiliers. Toutes choses égales par ailleurs, les individus d’origine africaine sont <a href="https://sos-racisme.org/discrimination-au-logement-un-rapport-edifiant/">26 % à se loger</a> dans des logements sociaux et HLMs, contre 17 % pour le reste de la population ; c’est 9 points de pourcentage qui les séparent. Pour les auteurs, cette prépondérance peut s’expliquer de diverses manières. Soit ils ont une préférence pour les logements publics, soit ils y restent plus longtemps. Ou bien ils font face à une discrimination sur le marché immobilier privé.</p>
<p>Le racisme dans le marché privé n’est plus à prouver. Nous nous sommes donc penchés sur la raison de ces discriminations et renouvellent le regard porté sur la question.</p>
<h2>Une discrimation contagieuse</h2>
<p>Et si les propriétaires discriminaient pour satisfaire les voisins de palier racistes ? Cette forme de discrimination est particulièrement insidieuse car elle est motivée par des arguments économiques. L’acceptation de locataires d’origine africaine peut en effet conduire à la diminution de la valeur du logement en raison de la désaffection des personnes racistes du groupe majoritaire.</p>
<p>Mais comment identifier cette forme de discrimination ? L’idée consiste à comparer le comportement de propriétaires qui possèdent tout un immeuble à celui de propriétaires qui ne possèdent qu’un appartement. Un propriétaire qui possède plusieurs appartements dans le même immeuble a tout intérêt à ce que les locataires voisins y restent.</p>
<p>Ces derniers seraient moins enclins à emménager dans un immeuble où habitent déjà des étrangers. Et pire encore, ils seraient même capables de déménager. Une affaire qui n’arrangerait pas les propriétaires d’immeuble ! Ils auraient tendance à refuser plus facilement les populations étrangères afin de conserver un maximum de locataires.</p>
<p>C’est une enquête qu’il est possible de réaliser en France où, à la différence du reste des pays européens, une part considérable des immeubles appartiennent à une personne unique. Les propriétaires d’immeuble forment <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/3620894">40 % du total des propriétaires</a>. Parmi eux, beaucoup sont aussi des personnes morales, en la qualité d’entreprises ou de sociétés. Ce phénomène perpétué par les logiques d’héritage contribue à renforcer les inégalités patrimoniales.</p>
<h2>Racisme de palier</h2>
<p>« J’ai toujours préféré aux voisins les voisines » <a href="https://www.youtube.com/watch?v=hSdpfzS_Y1g">chantait Renan Luce</a>. Il n’a pas précisé leur couleur de peau… et l’analyse des économistes suggère un remix moins joyeux.</p>
<p>Si le racisme des voisins déteint sur les propriétaires qui ont plusieurs appartements, cela veut dire qu’il y a moins d’individus d’origines étrangères occupant des logements appartenant à un propriétaire d’immeuble. Dans ce cas, on peut supposer que le voisinage a un impact sur le choix du propriétaire. Pour le vérifier, les auteurs comparent deux groupes de locataires dans le parc privé des logements. Le premier est constitué d’immigrants d’origine africaine présents sur le territoire français depuis plus de quatre ans, et le second de personnes nées en France.</p>
<p>Pour faire cette hypothèse il faut s’accorder sur le fait que les propriétaires d’immeubles ne sont pas plus racistes que les propriétaires uniques. L’inverse pourrait biaiser le résultat. En exploitant <a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/source/operation/s1370/presentation">l’enquête Patrimoine de l’Insee</a>, nous montrons que les caractéristiques des propriétaires possédant plusieurs appartements sont très proches de celles des propriétaires n’en possédant qu’un seul.</p>
<p>Nous tenons compte de l’hétérogénéité des caractéristiques observables entre les deux groupes de locataires au travers de régressions et de méthodes d’appariement basées sur le score de propension. Ces méthodes consistent à homogénéiser les deux groupes en pondérant chaque individu de sorte à créer deux groupes aux caractéristiques semblables. Nous interrogeons notamment l’influence que peut avoir la géographie entre zone urbaine et rurale. Il est primordial de tenir compte de cette différence quand on sait que les propriétaires d’immeubles se situent plus en zone rurale alors que les populations d’origines étrangères habitent plutôt en zone urbaine.</p>
<p>Notre étude conclut que, toutes choses égales par ailleurs, les locataires d’origines africaines ont 15 % de chance en moins de trouver un appartement auprès d’un propriétaire qui détient un immeuble entier qu’une personne de nationalité française. Cette différence montre qu’au-delà des discriminations qu’ils peuvent subir par les propriétaires en règle générale, il existe une <a href="https://www.francebleu.fr/infos/societe/sos-racisme-teste-les-annonces-de-location-de-particulier-a-particulier-le-resultat-est-accablant-1557214779">discrimination plus insidieuse</a> qui est générée par les voisins.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/313518/original/file-20200204-41532-1aqiovr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/313518/original/file-20200204-41532-1aqiovr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/313518/original/file-20200204-41532-1aqiovr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/313518/original/file-20200204-41532-1aqiovr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/313518/original/file-20200204-41532-1aqiovr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/313518/original/file-20200204-41532-1aqiovr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/313518/original/file-20200204-41532-1aqiovr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les locataires d’origine étrangère ont davantage tendance à habiter dans un logement tenu par un propriétaire d’appartement unique.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dialogueseconomiques.fr/sites/default/files/styles/article_image_simple/public/2020-01/christian-stahl-8S96OpxSlvg-unsplash.jpg?h=f1e5561b&itok=ykqYS-hb">Christian Stahl/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Plus précisément, 39 % des locataires de nationalité française louent un appartement détenu par un propriétaire multiple, contre 33 % pour les immigrants africains. La différence de 6 points de pourcentage représente ainsi près de 15 % de la probabilité moyenne pour l’ensemble de la population. Elle est donc statistiquement significative. Cela signifie qu’une personne d’origine africaine à 15 % de chance en moins de trouver un appartement auprès d’un propriétaire qui détient un immeuble entier qu’une personne de nationalité française.</p>
<p>Ce chiffre ne représente donc qu’une partie succincte du phénomène de discrimination par le voisinage. En effet, nous n’identifions que la différence de comportements entre les propriétaires d’immeubles et les propriétaires d’un unique appartement. Il est tout à fait possible que ces derniers discriminent également les personnes d’origine africaine, mais avec une intensité moindre que ne le font les propriétaires d’immeuble.</p>
<p>Les locataires d’origine étrangère ont plus tendance à habiter dans un logement tenu par un propriétaire d’appartement unique. Ce serait donc le racisme sous-jacent des voisins qui, une fois anticipée par les propriétaires, pèserait dans la balance. De notre avis, cette dynamique est beaucoup plus insidieuse. Difficile à repérer, difficile à dénoncer, mener des politiques antidiscriminatoires contre ce phénomène s’avère particulièrement hasardeux.</p>
<h2>HLM et banlieue ghettoïsée</h2>
<p>Le marché locatif privé est si difficile à pénétrer pour les personnes noires que beaucoup se reportent ipso facto vers le parc HLM. Cela engendre une surreprésentation de populations d’origines étrangères dans les logements sociaux. Cet écart s’expliquerait en grande partie par la proportion des propriétaires d’immeubles.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/313524/original/file-20200204-41507-1b4c5e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/313524/original/file-20200204-41507-1b4c5e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/313524/original/file-20200204-41507-1b4c5e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/313524/original/file-20200204-41507-1b4c5e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/313524/original/file-20200204-41507-1b4c5e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/313524/original/file-20200204-41507-1b4c5e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/313524/original/file-20200204-41507-1b4c5e7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">HLM dans le XIIᵉ arrondissement de Paris.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/paris-hlm-towers-sunset-12th-arrondissement-1015399471">Stephane Debove/Shutterstock</a></span>
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<p>La probabilité individuelle de résider en HLM est en moyenne de 15 %, mais elle monte à 35 % pour les personnes d’origine africaine. Lorsque l’on tient compte des différences de caractéristiques observables, l’écart est encore de 10 points de pourcentage. L’intégralité de cet écart résiduel s’explique par la proportion des propriétaires d’immeuble au niveau départemental !</p>
<p>La ségrégation urbaine, comme le racisme du voisinage, est aux frontières du visible. Mais ces logiques ont un impact concret et considérable sur le quotidien des discriminés. Concentrés dans des quartiers ségrégués, ils sont éloignés des centres dynamiques. Leur mobilité se réduit pendant que les disparités sociales s’accroissent. Notre étude met au jour un phénomène difficilement observable au premier abord. Elle pose la question des limites des politiques de lutte contre les discriminations et renseigne sur le racisme – invisible et pourtant lourd de conséquences – qui persiste au sein de la société française.</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=283&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=283&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=283&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/256813/original/file-20190201-127151-1h8ld7q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article a été rédigé par Claire Lapique en collaboration avec Bruno Decreuse, et publié dans la revue <a href="https://www.dialogueseconomiques.fr">« Dialogues économiques »</a> de l’AMSE, l’école d’économie d’Aix-Marseille, en partenariat avec The Conversation France.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/131103/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bruno Decreuse ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour expliquer les discriminations dans le marché locatif privé, une étude avance que le racisme insidieux de certains locataires pourrait déteindre sur les propriétaires.Bruno Decreuse, Professeur de Science économique, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1282092019-12-05T19:31:52Z2019-12-05T19:31:52ZEt si stocker du CO₂ permettait aussi de chauffer nos maisons ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/305382/original/file-20191205-38997-1ceki.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C223%2C5332%2C2913&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’activité industrielle, fortement émettrice de CO₂. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Reconnue par la communauté scientifique comme principale responsable du réchauffement climatique, la teneur en CO<sub>2</sub> dans l’atmosphère est pourtant toujours en hausse, comme le confirme le récent rapport de <a href="https://public.wmo.int/en/media/press-release/greenhouse-gas-concentrations-atmosphere-reach-yet-another-high">L’Organisation météorologique mondiale</a>.</p>
<p>Cause principale de cette augmentation : l’activité industrielle et économique, émettrice à l’échelle planétaire d’environ <a href="https://www.globalcarbonproject.org/carbonbudget/19/files/GCP_CarbonBudget_2019.pdf">35 milliards de tonnes</a> (35 Gt) de CO<sub>2</sub> par an, à laquelle s’ajoutent les effets de la déforestation et de l’urbanisation des terres (<a href="https://www.globalcarbonproject.org/carbonbudget/19/files/GCP_CarbonBudget_2019.pdf">6 Gt par an</a>).</p>
<p>Certes, la végétation et les océans jouent leur rôle de régulateurs en absorbant <a href="https://www.globalcarbonproject.org/carbonbudget/19/files/GCP_CarbonBudget_2019.pdf">plus de la moitié de ces quantités</a>, mais l’excédent s’accumule dans l’atmosphère et y provoque, année après année, une augmentation de la teneur en CO<sub>2</sub>.</p>
<h2>Le stockage géologique du CO₂</h2>
<p>La solution passe impérativement par une diminution des émissions de CO<sub>2</sub>, nécessitant une réduction drastique de notre utilisation des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon), en partie remplaçables par des sources et vecteurs d’énergie alternatifs (solaire, éolien, géothermie, biomasse, hydrogène, etc.).</p>
<p>Mais ce changement ne s’opérera pas instantanément et nécessite des mesures d’accompagnement. Parmi ces mesures, on trouve le captage et le stockage en réservoir profond du CO<sub>2</sub> atmosphérique (CSC).</p>
<p>Le CSC consiste à capter le CO<sub>2</sub> contenu dans les fumées d’installations industrielles (sources concentrées en CO<sub>2</sub>) puis à le compresser afin de l’injecter, par un puits dédié, vers un réservoir profond (au-delà de 1 000 m) rempli d’eau salée (impropre à la consommation) ou d’une quantité résiduelle de pétrole et/ou de gaz. Le CO<sub>2</sub> se trouve alors dans un état gazeux dense permettant son injection en grande quantité. Ainsi injecté, le CO<sub>2</sub> reste définitivement piégé dans la structure géologique sélectionnée (réservoir poreux chapeauté par une roche imperméable empêchant la remontée du gaz vers les couches supérieures).</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/nVUZWZFatOQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le stockage du CO₂, comment ça marche ? (Club CO₂ CSCV, 2015).</span></figcaption>
</figure>
<p>À ce jour, 18 sites de CSC sont opérationnels à travers le monde, permettant d’éviter l’émission d’environ 40 millions de tonnes (40 Mt) de CO<sub>2</sub> par an. Bien qu’opérationnelle depuis plus de 40 ans, cette approche « classique » du stockage du CO<sub>2</sub> tarde toutefois à se déployer à la hauteur des besoins planétaires et de l’urgence climatique. Le coût des opérations et la relative lourdeur des infrastructures à mettre en place expliquent en partie cette situation.</p>
<p>Depuis 2013, le <a href="https://www.brgm.fr/">BRGM</a> et ses partenaires travaillent sur une autre option du CSC, plus simple à mettre en œuvre, moins coûteuse et plus adaptée à une implantation locale visant à réduire les émissions de CO<sub>2</sub> des petites installations industrielles.</p>
<h2>Pour les « petits » émetteurs</h2>
<p>En France, les émissions représentent aujourd’hui près de 1 % des émissions mondiales (soit <a href="http://www.globalcarbonatlas.org/en/CO2-emissions">338 Mt de CO₂ par an</a>) et <a href="https://www.hautconseilclimat.fr/wp-content/uploads/2019/09/hcc_rapport_annuel_grand_public_2019.pdf">se répartissent</a> à hauteur de 31 % pour l’industrie, la transformation d’énergie et les déchets (sources concentrées, seules exploitables pour le CSC), 31 % pour le transport, 19 % pour l’agriculture et 19 % pour l’habitat.</p>
<p>Or, dans l’Hexagone, près de 84 % des émetteurs industriels sont petits, avec moins de 150 000 tonnes (150 kt) de CO<sub>2</sub> par an – la moyenne se situant à <a href="http://www.georisques.gouv.fr/dossiers/irep/form-polluant/resultats?annee=2017&rejet=/1&polluant=131">38 kt CO₂ annuels</a>. Pour ces petits, voire très petits émetteurs, qui pèsent à eux tous près de 32 Mt CO<sub>2</sub> par an, la solution CSC « classique » n’est pas adaptée.</p>
<p>La dispersion des sites sur l’ensemble du territoire rend en effet inenvisageable la mutualisation de plusieurs petites unités de captage, coûteuses, afin d’acheminer des quantités significatives de CO<sub>2</sub> vers un site de stockage unique et forcément distant.</p>
<p>Aujourd’hui, tel qu’il est mis en œuvre à l’échelle mondiale, le CSC vise clairement le stockage de quantités de l’ordre du million de tonnes de CO<sub>2</sub> par an et par site, soit au moins 25 fois plus que les émissions moyennes des petites installations typiques du paysage industriel français.</p>
<h2>Stocker et chauffer</h2>
<p>La solution <a href="http://co2-dissolved.brgm.fr/">« CO₂-Dissolved »</a> sur laquelle travaillent le BRGM et ses partenaires, permet de proposer une nouvelle option de CSC, adaptée aux petits émetteurs industriels.</p>
<p>Il s’agit ici de stocker non plus du CO<sub>2</sub> gazeux mais du CO<sub>2</sub> entièrement dissous dans l’eau salée d’un réservoir aquifère profond. Pour cela, l’eau est préalablement pompée dans le réservoir via un puits producteur avant d’y être réinjectée via un deuxième puits (injecteur) après dissolution du CO<sub>2</sub> capté en surface.</p>
<p>L’ensemble de ces deux puits constitue ce que l’on appelle un « doublet », identique aux doublets des installations de géothermie profonde largement répandues en Île-de-France. Et justement, cette similitude d’infrastructure rend possible l’exploitation simultanée de la chaleur contenue dans l’eau extraite du réservoir.</p>
<p>Cette double utilisation du sous-sol – pour stocker le CO<sub>2</sub> et extraire de la chaleur – change la donne en termes d’économie de l’opération par rapport au CSC classique, à condition que l’énergie récupérée puisse être exploitée localement.</p>
<p>Ainsi, alimenter un réseau de chaleur pour chauffer des bâtiments (habitations collectives, individuelles, tertiaire) reste la solution la plus immédiate pour tirer parti de la chaleur produite. On pourrait donc stocker du CO<sub>2</sub> industriel tout en chauffant nos habitations grâce à une énergie très largement décarbonée permettant de remplacer des moyens de chauffage plus conventionnels et émetteurs de CO<sub>2</sub> ; rappelons que le chauffage compte en France pour près de 20 % de nos émissions de CO<sub>2</sub>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/305404/original/file-20191205-39018-1sw14ny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305404/original/file-20191205-39018-1sw14ny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305404/original/file-20191205-39018-1sw14ny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305404/original/file-20191205-39018-1sw14ny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305404/original/file-20191205-39018-1sw14ny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305404/original/file-20191205-39018-1sw14ny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305404/original/file-20191205-39018-1sw14ny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305404/original/file-20191205-39018-1sw14ny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Représentation schématique d’un site CO₂-Dissolved.</span>
<span class="attribution"><span class="source">BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Le fonctionnement de CO₂-Dissolved</h2>
<p>La solution CO<sub>2</sub>-Dissolved visait initialement à simplifier la gestion du stockage, du fait de l’absence de CO<sub>2</sub> à l’état gazeux. En effet, dans l’approche CSC classique, l’augmentation de la pression du réservoir induite par l’injection massive de CO<sub>2</sub> gazeux nécessite une surveillance continue du site afin de s’assurer qu’on ne dépasse pas certaines limites.</p>
<p>De même, la moindre densité du gaz par rapport à l’eau du réservoir augmente le risque potentiel de fuite d’une partie du CO<sub>2</sub> vers la surface, impliquant un contrôle rigoureux de l’état des puits et de la couverture imperméable qui constituent les voies de fuites privilégiées.</p>
<p>L’approche CO<sub>2</sub>-Dissolved permet donc d’éliminer pratiquement tout risque de remontée accidentelle du CO<sub>2</sub> vers les couches géologiques supérieures (l’eau contenant le CO<sub>2</sub> dissous est en effet légèrement plus dense que l’eau du réservoir) susceptible, notamment, de contaminer des aquifères superficiels exploités pour l’alimentation en eau potable. En outre, le fait de pomper l’eau puis de la réinjecter intégralement dans le même réservoir évite le phénomène de montée en pression.</p>
<p>Une autre difficulté liée à l’approche CSC « classique » concerne la plus grande complexité de son infrastructure : il faut acheminer le CO<sub>2</sub> depuis les sites industriels émetteurs jusqu’au site de stockage. Ce transport s’effectue dans la plupart des cas via un réseau de pipelines qu’il n’est pas toujours aisé de mettre en place, notamment dans des environnements urbains.</p>
<p>L’approche CO<sub>2</sub>-Dissolved s’affranchit également de cette problématique en stockant le CO<sub>2</sub> sur le lieu même de son émission. Ce qui suppose évidemment des caractéristiques géologiques locales adéquates.</p>
<h2>Un réel potentiel en France</h2>
<p>La technologie CO<sub>2</sub>-Dissolved doit répondre à deux conditions pour pouvoir être mise en place.</p>
<p>Premièrement, disposer sous les pieds de l’usine émettrice d’un sous-sol dont les caractéristiques hydrogéologiques (possibilité d’atteindre des débits d’eau de pompage/injection de l’ordre de 200 à 350 m<sup>3</sup>/h) et thermiques (température de l’eau comprise entre 40 et 90 °C) permettent son exploitation pour la géothermie.</p>
<p>Deuxièmement, rester à une concentration en CO<sub>2</sub> dissous inférieure à la limite de solubilité (qui est de l’ordre de 50 kg CO<sub>2</sub>/m<sup>3</sup> d’eau) afin de garantir que le CO<sub>2</sub> reste stocké sous forme entièrement dissoute (donc, sans apparition de bulles de gaz), conformément au principe de base du concept CO<sub>2</sub>-Dissolved.</p>
<p>Ces contraintes techniques imposent ainsi de limiter la quantité de CO<sub>2</sub> injecté en deçà de 10 à 17 tonnes par heure (en fonction des débits d’eau), ce qui correspond, au maximum, à environ 150 kt CO<sub>2</sub>/an.</p>
<p>On comprend donc pourquoi cette technologie s’avère adaptée aux petits émetteurs évoqués plus haut, offrant ainsi des perspectives de développement dans un secteur industriel pour lequel peu d’alternatives pour réduire les émissions existent aujourd’hui.</p>
<p>Afin de mieux cerner le potentiel de mise en œuvre de CO<sub>2</sub>-Dissolved à l’échelle de la France, nous avons matérialisé sur une même carte les sites industriels faiblement émetteurs de CO<sub>2</sub> (moins de <a href="http://www.georisques.gouv.fr/dossiers/irep/form-polluant/resultats?annee=2017&rejet=/1&polluant=131">150 kt/an</a>) et les zones de réservoirs profonds exploitables pour la géothermie (en bleu).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/305330/original/file-20191205-39001-bfl5ae.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305330/original/file-20191205-39001-bfl5ae.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305330/original/file-20191205-39001-bfl5ae.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=670&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305330/original/file-20191205-39001-bfl5ae.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=670&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305330/original/file-20191205-39001-bfl5ae.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=670&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305330/original/file-20191205-39001-bfl5ae.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=843&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305330/original/file-20191205-39001-bfl5ae.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=843&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305330/original/file-20191205-39001-bfl5ae.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=843&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Localisation des sites industriels français faiblement émetteurs de CO₂ et des zones les plus propices à l’exploitation géothermique profonde (en bleu).</span>
<span class="attribution"><span class="source">BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces sites (voir la figure ci-dessus) sont très largement répartis à l’échelle du territoire. Parmi eux, 437 sont localisés sur les zones bleues et donc a priori compatibles avec l’approche CO<sub>2</sub>-Dissolved. L’ensemble de ces sites émet annuellement près de 17 Mt de CO<sub>2</sub>, soit plus de 12 % des émissions industrielles françaises.</p>
<p>Stocker ces émissions améliorerait donc significativement le bilan carbone de ces industries, sachant que l’utilisation combinée de la géothermie comme moyen de chauffage – en substitution à des énergies carbonées (gaz, fioul) – permettrait de réduire encore davantage la facture environnementale.</p>
<p>Les derniers travaux en cours visent à préparer les premiers tests d’injection de CO<sub>2</sub> dans un doublet géothermique existant. Il s’agit ainsi de valider le cœur du concept CO<sub>2</sub>-Dissolved, en testant notamment le dispositif d’injection et les méthodes de suivi en continu de la dissolution du CO<sub>2</sub> dans l’eau du puits injecteur. L’étape suivante consistera à mettre en œuvre, sur un site industriel, un premier démonstrateur de l’ensemble de la technologie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/128209/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les différents projets ayant permis le développement de l'approche CO2-Dissolved ont reçu les financements publics successifs suivants:
- Agence Nationale de la Recherche (2013-2016)
- GIS "Geodenergies" (2016-2018 et 2018-2020)
- Région Centre-Val de Loire (2018-2020)</span></em></p>Gros plan sur une méthode innovante de stockage en réservoir profond du CO₂.Christophe Kervevan, Ingénieur, chef de projet, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1137962019-04-02T22:52:59Z2019-04-02T22:52:59ZEfficacité énergétique : est-il vraiment possible de faire mieux avec moins ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/264694/original/file-20190319-60956-d97i34.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=83%2C115%2C6758%2C3782&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le remplacement des lampes à incandescence, très énergivores, par des LED, est un exemple d’efficacité énergétique.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Bien isoler sa maison, utiliser des ampoules basse consommation, investir dans des appareils électroménagers performants : autant de façons pour les particuliers de réduire leur consommation d’énergie. On parle ici de mesures d’« efficacité énergétique ». Portée au niveau d’un pays, cette efficacité se mesure via l’intensité énergétique, soit le rapport entre la consommation énergétique nationale et le produit intérieur brut.</p>
<p>L’efficacité énergétique joue un rôle clé dans la transition écologique, qui vise un recours moindre aux énergies fossiles : elle rendrait possible, selon le <a href="https://www.iea.org/weo/weomodel/sds/">scénario « développement durable »</a> de l’Agence internationale de l’énergie de novembre 2017, 44 % de réduction des émissions de CO<sub>2</sub> en 2040 – contre 36 % pour les énergies renouvelables et 6 % pour le nucléaire.</p>
<p>Un tel scénario permettrait ainsi de limiter la hausse des températures à +2 °C d’ici la fin du siècle et d’atteindre les objectifs de développement durable adoptés par les Nations unies, parmi lesquels figure l’accès universel à l’électricité.</p>
<p>Conscients de ce potentiel de l’efficacité énergétique, les États européens se sont fixés <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/action-france-lefficacite-energetique">des objectifs</a> pour diminuer leur consommation énergétique et leur empreinte carbone. La directive européenne sur l’efficacité énergétique établit un cadre commun de mesures pour sa promotion dans l’Union. L’objectif étant de l’accroître de 20 % d’ici 2020.</p>
<p>Mais qu’en est-il réellement ?</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=287&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=287&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=287&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Facteurs de réduction des émissions de CO₂ entre le scénario « nouvelles politiques et développement durable ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Perspectives énergétiques mondiales (World Energy Outlook) 2017 de l’AIE (Figure 3.15).</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>« Faire mieux avec moins »</h2>
<p>Grâce aux politiques incitatives – comme le <a href="https://www.impots.gouv.fr/portail/particulier/le-credit-dimpot-transition-energetique">crédit d’impôt à la transition énergétique</a> – ou réglementaires – comme la <a href="https://www.ademe.fr/expertises/batiment/elements-contexte/politiques-vigueur/reglementation-thermique">réglementation thermique</a> –, mises en œuvre depuis plus de vingt ans, cette efficacité est devenue l’un des principaux facteurs influençant notre consommation énergétique.</p>
<p>Mais d’autres déterminants sont aussi à l’œuvre : citons l’activité économique qui, si elle est florissante, booste la consommation (et inversement en période de crise). Il y a également l’évolution démographique et la composition des ménages qui entrent en ligne de compte.</p>
<p>Les comportements individuels peuvent également initier une baisse de la consommation, que ce soit dans une démarche de sobriété volontaire, ou une situation subie de précarité. Si les structures économiques se modifient, par la tertiarisation par exemple, la consommation diminuera également. Enfin, les aléas climatiques ont un impact, notamment sur le chauffage en hiver ou la climatisation en été.</p>
<p>Entre 2000 et 2016, l’efficacité énergétique a permis d’économiser en France 307 TWh, selon <a href="http://www.odyssee-mure.eu/">Odyssee</a>, l’outil européen de mesure de cette efficacité. Autrement dit, sans ces efforts, le niveau de consommation de 2016 aurait été 18 % plus élevé.</p>
<p>Malheureusement, ces gains ont quasiment été compensés par les autres effets évoqués, comme la démographie et l’augmentation du nombre de ménages, les niveaux de vie et d’activité, impliquant une réduction réelle de consommation énergétique de 2 % seulement au cours de cette période.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Variation de la consommation d’énergie finale en France entre 2000 et 2016 (en TWh).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Odyssee</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un instrument tous secteurs</h2>
<p>Les mesures d’efficacité énergétique peuvent se décliner dans nombre de secteurs d’activité.</p>
<p>Dans l’industrie, où les <a href="http://ympact.fr/blog/2017/10/18/les-moteurs-electriques-le-gisement-defficacite-energetique-industrielle-par-excellence/">moteurs électriques</a> utilisés pour transformer de l’énergie électrique en énergie mécanique, consomment jusqu’à 70 % de l’électricité du secteur, élaborer des normes permettant d’imposer des classes d’efficacité énergétique minimale, peut rendre possible d’importantes économies.</p>
<p>Pour les transports, différentes actions ont été mises en place pour les secteurs routier (de marchandises ou de particuliers), ferroviaire, fluvial et aérien. Parmi les mesures les plus emblématiques en France, on peut citer la prime à la conversion, accordée lorsque l’on remplace un ancien véhicule (diesel ou essence) par l’achat ou la location d’un <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32487">véhicule peu polluant</a>.</p>
<p>Dans le secteur du bâtiment (résidentiel et tertiaire), l’efficacité énergétique cible différents usages : promouvoir des chaudières plus performantes, une meilleure isolation thermique du logement, l’usage de chauffe-eau pour l’eau chaude, ou encore le remplacement d’appareils électriques peu performants (éclairage, réfrigérateur, lave-linge, etc.).</p>
<p>Si l’on évoque moins souvent les sites de production d’électricité, ils sont toutefois très consommateurs et peuvent avoir des rendements très variables – de <a href="https://www.worldenergy.org/wp-content/uploads/2016/10/EnergyEfficiencyAStraightPathFullReport.pdf">100 % de rendement</a> pour la production d’électricité à partir de renouvelable à 30-40 % de rendement pour les centrales thermiques conventionnelles (fonctionnant au charbon, par exemple). Parmi les mesures mises en œuvre dans ce secteur, on peut citer la conversion de centrales thermiques conventionnelles vers des technologies plus performantes, ou l’évolution du mix électrique vers une plus forte concentration de renouvelables.</p>
<h2>Réduire la consommation (pas le confort)</h2>
<p>On entend souvent dire que l’énergie la moins chère est celle que nous ne consommons pas. Mais à niveau de service égal, est-ce vrai ?</p>
<p>En cas de remplacement d’un équipement peu onéreux, l’achat de la nouvelle technologie performante est rapidement amorti grâce aux économies d’énergie engendrées. C’est le cas lorsqu’on privilégie des lampes fluorescentes ou même mieux, <a href="https://www.geo.fr/environnement/les-lampes-led-sont-elles-meilleure-pour-la-planete-193570">des LED</a>, aux lampes à incandescence très énergivores.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1108186488758566914"}"></div></p>
<p>Dans d’autres cas, l’investissement est freiné par un <a href="https://theconversation.com/un-parc-immobilier-decarbone-pour-2050-la-route-sera-longue-102992">coût fixe très élevé</a>, que l’on ne rentabilisera qu’à long terme. L’isolation thermique ou le changement de chaudière permettent une réduction significative de la consommation énergétique à niveau de confort égal, mais à un prix très conséquent. Par exemple, le coût d’une chaudière à condensation gaz varie entre 3 000 et 7 000 euros ; les travaux d’isolation thermique entre 40 et 120 euros par m<sup>2</sup>.</p>
<p>Dans les situations les plus extrêmes, certains ménages n’ont plus les moyens de payer leur facture énergétique : ils sont alors contraints de moins chauffer leur logement, au risque de tomber dans la <a href="https://theconversation.com/la-dependance-energetique-source-dinegalites-entre-les-menages-francais-108212">précarité énergétique</a>.</p>
<p>L’enjeu est donc de proposer des mesures d’accompagnement permettant de surmonter ces contraintes et de réduire la consommation sans modifier le niveau de confort des ménages. Bien pilotée, l’efficacité énergétique peut alors générer d’importantes réductions d’émissions de CO<sub>2</sub> à faibles coûts.</p>
<h2>Un potentiel important d’économies</h2>
<p>Si beaucoup s’accordent à dire que l’efficacité énergétique représente un fort potentiel d’économies d’énergie, et qu’elle doit être à ce titre <a href="http://europa.eu/rapid/press-release_STATEMENT-18-3997_en.htm">« la première énergie »</a>, les résultats sont plutôt décevants. Les progrès enregistrés jusqu’à présent sont loin d’être à la hauteur des attentes et les objectifs européens d’efficacité énergétique de 2020 – qui pour rappel sont d’accroître d’au moins 20 % l’efficacité énergétique – seront difficilement atteignables.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Consommation d’énergie primaire et finale de l’UE et tendance linéaire jusqu’à l’objectif de 2020.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Eurostat</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Depuis la reprise économique en 2014 au niveau de l’Union européenne, on observe une <a href="https://www.euractiv.com/section/energy/opinion/eu-at-risk-of-missing-2020-energy-efficiency-targets-lessons-for-2030/">augmentation de la consommation énergétique</a>. Elle demeure donc très sensible au niveau d’activité économique.</p>
<p>Aujourd’hui, nous ne parvenons pas encore à « découpler » la croissance économique de notre niveau de consommation énergétique. En plus de l’adoption de comportements plus vertueux, économes en énergie, et avec le déploiement des énergies décarbonées, l’efficacité énergétique doit prendre plus de place dans la transition énergétique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/113796/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Carine Sebi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si l’efficacité énergétique recèle un potentiel important en matière d’économies d’énergie, ses résultats demeurent tributaires de la croissance économique.Carine Sebi, Assistant Professor - Economics, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1114462019-03-05T19:58:38Z2019-03-05T19:58:38ZÀ la recherche des derniers lieux sauvages de la planète<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/262218/original/file-20190305-48447-w3fp2f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C202%2C1200%2C761&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le lac de Grand-Lieu (Loire-Atlantique) vu du ciel. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lac_de_Grand-Lieu#/media/File:Lake_Grand-Lieu_SPOT_1249.jpg">Cnes/Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Rares sont les coins du monde encore laissés intacts par l’humain. Une étude récente a ainsi mis en lumière que seuls 23 % de la <a href="https://www.nature.com/articles/sdata2017187">surface terrestre</a> de la planète – en dehors de l’Antarctique – et <a href="https://www.cell.com/current-biology/fulltext/S0960-9822(18)30772-3?_returnURL=https%3A%2F%2Flinkinghub.elsevier.com%2Fretrieve%2Fpii%2FS0960982218307723%3Fshowall%3Dtrue">13 % de l’océan</a> peuvent aujourd’hui être considérés comme « sauvages » ; cela représente un déclin d’environ 10 % sur les vingt dernières années.</p>
<p>Et 70 % des espaces encore sauvages sont concentrés dans seulement cinq zones, comme l’ont montré des chercheurs américains et australiens en mettant au point une <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-018-07183-6">carte du monde</a> pour illustrer ce déclin (voir ci-dessous).</p>
<p>Pour ce faire, ils ont combiné plusieurs types de données : densité de population, lumière artificielle de nuit, types de végétation. Il y a cependant une limite à cette démarche : savoir où débute et où prend fin la nature sauvage n’est pas une mince affaire !</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/258003/original/file-20190208-174864-1esy7xu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/258003/original/file-20190208-174864-1esy7xu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/258003/original/file-20190208-174864-1esy7xu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=299&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/258003/original/file-20190208-174864-1esy7xu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=299&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/258003/original/file-20190208-174864-1esy7xu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=299&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/258003/original/file-20190208-174864-1esy7xu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=375&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/258003/original/file-20190208-174864-1esy7xu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=375&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/258003/original/file-20190208-174864-1esy7xu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=375&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Des chercheurs ont cherché à cartographier ce qu’il reste du monde sauvage. Leur carte est parue dans la revue <em>Nature</em> en octobre 2018.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.nature.com/articles/d41586-018-07183-6">Nature</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une question d’échelle</h2>
<p>Les données utilisées pour cartographier la nature sauvage sont souvent récoltées de différentes manières dans les différentes parties du monde. Certains jeux de données, par exemple, recensent toutes les routes, jusqu’aux moindres chemins forestiers ou fermiers, quand d’autres n’incluent que les principaux réseaux routiers.</p>
<p>Définir à quelle distance de ces routes on doit se situer pour considérer un espace comme sauvage peut aussi largement varier à l’échelle mondiale. Ainsi, tricoter toutes ces données dans une carte unique exige souvent des compromis – par exemple, exclure certains espaces sauvages en-dessous d’une taille minimum. Cela aura pour effet d’amoindrir la pertinence d’une telle représentation.</p>
<p>Si les cartes mondiales ont le mérite d’interpeller sur l’érosion des zones restées sauvages, seules des cartographies plus détaillées – aux échelles nationale et locale – peuvent véritablement nous permettre de comprendre et faire face aux menaces qui pèsent sur les derniers espaces sauvages.</p>
<p>La preuve en trois exemples concrets.</p>
<h2>En France</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/259015/original/file-20190214-1721-1q7w2q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/259015/original/file-20190214-1721-1q7w2q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/259015/original/file-20190214-1721-1q7w2q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/259015/original/file-20190214-1721-1q7w2q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/259015/original/file-20190214-1721-1q7w2q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/259015/original/file-20190214-1721-1q7w2q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/259015/original/file-20190214-1721-1q7w2q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Zones de naturalité sur un site d’étude en Loire-Atlantique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Steve Carver, Alexis Comber, Jonathan Carruthers-Jones, Adrien Guetté</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>À l’image de l’Écosse, qui dispose probablement des cartographies d’espaces sauvages les plus précises au monde, nous avons récemment initié un travail similaire de grande ampleur en France, en partenariat avec le comité hexagonal de l’Union internationale pour la conservation de la nature (<a href="https://www.iucn.org/fr">UICN</a>).</p>
<p>En adaptant la méthodologie et les critères utilisés à l’échelle mondiale, il s’agit ici de mobiliser les données homogènes les plus précises dont nous disposons pour restituer localement tout un gradient spatial de « naturalité ».</p>
<p>À l’échelle mondiale, la France apparaît comme totalement dépourvue d’espaces sauvages. Mais lorsque l’on resserre l’emprise et que l’on affine l’échelle spatiale, on peut mettre en lumière tout un <em>continuum</em> de « naturalité ». Le travail préliminaire réalisé sur deux secteurs – en Loire-Atlantique et dans les Hautes-Pyrénées – illustre cette variabilité du « sauvage », même sur des espaces de taille restreinte.</p>
<p>On voit ainsi clairement, sur le site d’étude de Loire-Atlantique, des zones qui se distinguent par un niveau plus élevé de « naturalité », telles que le lac de Grand-Lieu, le marais de Brière ou encore le secteur de Notre-Dame-des-Landes. Ces zones à fort enjeu de conservation échappent pourtant aux cartographies européennes et mondiales.</p>
<p>On le voit, ce changement d’échelle et d’analyse apparaît fondamental pour une meilleure prise en compte de la protection de la nature dans les territoires.</p>
<h2>En Chine</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/254524/original/file-20190118-100285-zi74m0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/254524/original/file-20190118-100285-zi74m0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/254524/original/file-20190118-100285-zi74m0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/254524/original/file-20190118-100285-zi74m0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/254524/original/file-20190118-100285-zi74m0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/254524/original/file-20190118-100285-zi74m0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/254524/original/file-20190118-100285-zi74m0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Étendues sauvages en Chine.</span>
<span class="attribution"><span class="source">International Journal of Wilderness</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Sur le même modèle, nous nous sommes intéressés à la Chine en utilisant une cartographie à l’échelle nationale, afin de définir les contrées sauvages et aider à imaginer un nouveau réseau de parcs nationaux.</p>
<p>On peut nettement diviser le pays en deux, grâce à la ligne imaginaire dite « Heihe-Tengchong », qui lie Ai-hui dans le Nord-Est à Teng-Chong dans le Sud-Est. À l’est de cette ligne, le pays est densément peuplé et intensément cultivé. À l’ouest, la population humaine est plus éparse et les espaces demeurent très sauvages.</p>
<p>Les géographes chinois développent actuellement des méthodes pour faire face à cette polarité marquée dans la répartition des étendues sauvages du pays. Il leur faut identifier les petites poches d’écosystèmes sauvages encore présents au cœur des paysages fragmentés et développés de l’est.</p>
<h2>En Amazonie</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/254543/original/file-20190118-100282-djqhfi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/254543/original/file-20190118-100282-djqhfi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=742&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/254543/original/file-20190118-100282-djqhfi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=742&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/254543/original/file-20190118-100282-djqhfi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=742&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/254543/original/file-20190118-100282-djqhfi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=933&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/254543/original/file-20190118-100282-djqhfi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=933&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/254543/original/file-20190118-100282-djqhfi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=933&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Déforestation autour des routes à Rondonia, au Brésil, 1984-2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Google Earth</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La cartographie nous montre particulièrement bien la façon dont les terres sauvages sont peu à peu grignotées pour satisfaire les besoins en nourriture, carburant, eau, bois et autres ressources ; une demande croissante à mesure que la population humaine augmente.</p>
<p>Les cartes montrent que cela se produit principalement via la construction de routes relative à l’exploitation du bois, du pétrole, du gaz ou des minerais. Les images de la fragmentation dont témoigne la forêt amazonienne fournissent un exemple parlant de la manière dont les routes, une fois construites, ouvrent le paysage à l’agriculture et autres interventions humaines sur l’environnement.</p>
<h2>Regarder de plus près</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/254544/original/file-20190118-100261-4opd7y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/254544/original/file-20190118-100261-4opd7y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=625&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/254544/original/file-20190118-100261-4opd7y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=625&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/254544/original/file-20190118-100261-4opd7y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=625&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/254544/original/file-20190118-100261-4opd7y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=786&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/254544/original/file-20190118-100261-4opd7y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=786&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/254544/original/file-20190118-100261-4opd7y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=786&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Étendues sauvages en Europe.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://ec.europa.eu/environment/nature/natura2000/wilderness/pdf/Wilderness_register_indicator.pdf">Steve Carver</a>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Malgré les problèmes inhérents aux cartographies globales, il y a eu quelques tentatives prometteuses pour faire face à l’hétérogénéité des données transfrontalières.</p>
<p>Dans le cadre d’un projet visant à recenser les <a href="http://ec.europa.eu/environment/nature/natura2000/wilderness/pdf/Wilderness_register_indicator.pdf">zones sauvages au sein de l’Union européenne</a>, conduit il y a quelques années, un degré de « nature sauvage » a été cartographié de manière homogène à travers l’Europe.</p>
<p>Le résultat montre notamment qu’il est bien plus fréquent de trouver des espaces sauvages en hautes latitudes – trop froides et trop sèches pour l’agriculture et l’exploitation forestière – ou à haute altitude, où les terres sont trop rudes pour être travaillées. Il ne serait donc pas surprenant de constater des phénomènes similaires à l’échelle mondiale.</p>
<p>L’échelle de ce type de cartes affecte à la fois les formes que nous voyons et la manière dont nous comprenons la destruction des espaces sauvages. Cela influence ensuite la manière dont nous devrions répondre et gérer les menaces qui pèsent sur les derniers espaces sauvages.</p>
<p>Si les cartes globales attirent immanquablement l’œil, elles risquent de masquer les causes sous-jacentes et de n’avoir au final qu’un intérêt limité. Elles peuvent être très pertinentes pour pointer le problème général, mais elles restent un point de départ. Elles doivent donc nous inciter à aller plus loin pour comprendre les multiples pressions qui mènent à la disparition des espaces sauvages.</p>
<hr>
<p><em><a href="https://www.univ-nantes.fr/site-de-l-universite-de-nantes/m-adrien-guette-1164501.kjsp?RH=INSTITUTIONNEL">Adrien Guetté</a> (Université de Nantes) a participé à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/111446/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Zoomer sur les zones vulnérables nous aide à déterminer comment mieux protéger les étendues vierges de la planète.Steve Carver, Senior Lecturer in Geography, University of LeedsAdrien Guetté, chercheur postdoctorant, Université de NantesJonathan Carruthers-Jones, Marie Skłodowska Curie Doctoral Research Fellow, University of LeedsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1070482019-02-03T21:27:50Z2019-02-03T21:27:50ZLe bidonville, un objet politique à géométrie variable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/256939/original/file-20190203-110834-4fpdsc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C5%2C1198%2C894&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">«Les Bulgares de la N3», à Bobigny (Seine-Saint-Denis), en 2010.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/mbarbier/4476742153/in/photolist-pLRTcv-ZLpy3L-7nz9Qj-E4gQEV-q44rXB-pLTQtd-p7ucoP-q28Ayo-p7rxRj-p7uhwK-pLNJmH-7PAttx-29YCYLw-2cXahi5-25P4pWe-2bXFn4X-22Rvsj4-27HKXVA-DK1V2b-EGK7gH-E9g8D4-DKmRWn-EEqVYs-22RD6mx">Marie Barbier</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Il y a un an, le 25 janvier 2018, le gouvernement français édictait une <a href="http://circulaires.legifrance.gouv.fr/pdf/2018/01/cir_42949.pdf">« instruction du gouvernement »</a> visant à « donner une nouvelle impulsion à la résorption des campements illicites et des bidonvilles ». Ce texte induit, selon le gouvernement, un réel <a href="https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2018/09/plaquette_instruction_en_francais.pdf">« changement d’approche »</a>, dans la manière d’aborder la question des squats et bidonvilles en France, en mobilisant de nouvelles notions (dont celle de « bidonvilles »), en semblant privilégier une approche davantage centrée sur la situation sociale des familles que sur leur situation administrative ou la légalité de l’habitat.</p>
<p>Surtout, cette approche permettrait de prendre en compte l’ensemble des situations sans cibler une population particulière, en l’occurrence les familles européennes précaires, souvent qualifiées de « roms migrants ».</p>
<p>Mais au-delà des mots et des intentions, ce texte entérine-t-il réellement un « changement de paradigme » quant à la définition d’un problème public ? L’emploi de la notion de « bidonville » est-il le marqueur d’une approche renouvelée de l’action publique, et d’une dilution de la « question rom » dans des problématiques plus larges de sans-abrisme et de lutte contre la grande précarité ?</p>
<p>Sans entrer ici dans le détail des actions et du contenu du texte, cet article se propose de se concentrer uniquement sur les contours que dessine ce texte autour de l’objet politique du bidonville.</p>
<h2>Une politique de circulaires</h2>
<p>Cette « instruction gouvernementale » se situe dans la lignée d’une série de textes de même nature juridique produits depuis 2010, et qui visent à donner aux services déconcentrés de l’État des orientations quant à la gestion de ces « campements » et de leurs habitants au niveau local. Nommés aussi « circulaires » ou « instruction gouvernementale », ces textes <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/Aide/A-propos-de-l-ordre-juridique-francais">n’ont pas de valeur législative ou réglementaire</a>, mais sont assimilables à de simples notes de services de l’administration à ses agents.</p>
<p>Les <a href="https://www.gisti.org/spip.php?article2042">trois premières circulaires</a> furent produites en 2010, en amont, pendant et en aval de ce qu’on a appelé la <a href="https://www.academia.edu/11420858/Politicization_of_Roma_as_an_Ethnic_Other_Security_Discourse_in_France_and_the_Politics_of_Belonging">« French roma crisis »</a>, notamment marquée par le <a href="https://www.dailymotion.com/video/xf0ih7">discours de Grenoble</a> du Président Nicolas Sarkozy et par la mise à l’agenda politique de la « question rom ».</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/fgBna2pfuBM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Malgré des différences sensibles, ces circulaires sont structurées autour de deux axes identiques : d’une part, le démantèlement des sites ; d’autre part, l’éloignement des personnes en situation irrégulière. La définition du problème public est centrée sur la <a href="https://www.metropolitiques.eu/IMG/pdf/met-cousin.pdf">violation du droit de propriété et le caractère illégal de l’occupation</a>. La situation sociale des familles n’est nullement mentionnée, ni a fortiori les réponses à apporter en matière d’accompagnement.</p>
<h2>Une feuille de route en quatre parties</h2>
<p>En 2012, le gouvernement de François Hollande fraîchement élu produit une <a href="https://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2014/09/2_dihal_circulaire_du_26_aout_2012.pdf">nouvelle circulaire</a>, « relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites ». Malgré le maintien de la notion de « campement illicite », ce texte marque un premier glissement dans la conception du problème public en insistant sur « les situations humaines souvent très difficiles » et la nécessaire mise en place d’un accompagnement social à différents niveaux (scolarisation, santé, hébergement, insertion professionnelle) basé sur un diagnostic social.</p>
<p>Par ailleurs, le suivi de cette politique publique est confié à la <a href="https://www.gouvernement.fr/presentation-de-la-dihal">Délégation interministérielle à l’hébergement et l’accès au logement</a> (DIHAL), confirmant ce déplacement vers le champ de la lutte contre le mal-logement.</p>
<p>Début 2016, la DIHAL initie une démarche de consultation d’un ensemble d’acteurs publics, associatifs ou académiques, afin de produire un document devant « prolonger la circulaire de 2012 et conforter les acteurs de terrain », sans préciser la nature prévue du texte.</p>
<p>Ce n’est qu’un an et demi plus tard, en janvier 2018 (après, donc, l’élection présidentielle de 2017), que le texte est publié sous le titre d’« instruction gouvernementale », signé par huit ministres. Il fixe la feuille de route des préfets en quatre parties :</p>
<ul>
<li><p>Mettre en place une stratégie territoriale pour le traitement des campements illicites et des bidonvilles en vue de leur résorption ;</p></li>
<li><p>Apporter des réponses différenciées en fonction des caractéristiques des campements et des personnes ;</p></li>
<li><p>Lutter contre la grande précarité et assurer le respect des lois de la République ;</p></li>
<li><p>Mobiliser les financements de l’État et rechercher les co-financements.</p></li>
</ul>
<h2>Du « campement illicite » au « bidonville »</h2>
<p>L’instruction gouvernementale de 2018 est le premier texte officiel, depuis les années 1970, à mobiliser le terme de « bidonville » pour désigner un problème public réapparu depuis les années 1990 : celui d’habitats très précaires de populations migrantes, <a href="https://www.cairn.info/roms-en-bidon-villes--9782728837632.htm">d’abord principalement originaires des pays de l’Est</a>, puis originaires de zones géographiques plus lointaines marquées par les conflits ou des crises chroniques (Syrie, Érythrée, Afghanistan…).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/256937/original/file-20190203-112314-1vyveo3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C0%2C2026%2C1137&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/256937/original/file-20190203-112314-1vyveo3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/256937/original/file-20190203-112314-1vyveo3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/256937/original/file-20190203-112314-1vyveo3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/256937/original/file-20190203-112314-1vyveo3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/256937/original/file-20190203-112314-1vyveo3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/256937/original/file-20190203-112314-1vyveo3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un bidonville de migrants européens près de l’Université de Marne-la-Vallée (ici en 2013).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/66944824@N05/10741588016">Uhmus/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<p>De l’avis de plusieurs acteurs associatifs impliqués dans le processus de concertation, l’usage du terme serait le fruit d’un long travail de plaidoyer (dont la <a href="http://www.25ansbidonvilles.org">campagne « 25 ans de bidonvilles »</a>) visant à faire reconnaître – avant tout autre aspect – la dimension sociale du phénomène, replaçant donc le problème public dans le giron de la lutte contre la pauvreté et le mal-logement.</p>
<p>Le texte de 2018 marquerait alors un tournant important dans le <a href="https://www.cairn.info/sociologie-politique-des-problemes-publics--9782200291648.htm">« processus définitionnel », ou dans l’« étiquetage » du problème public</a> autour de ces habitats précaires : en passant du « campement illicite » au « bidonville », le gouvernement reconnaîtrait la primauté des situations humaines et sociales sur le caractère illicite des installations, et sur l’irrégularité des situations administratives.</p>
<h2>L’option du flou</h2>
<p><a href="https://www.cairn.info/sociologie-politique-l-action-publique--9782200259990-page-43.htm?contenu=article">Selon de nombreux auteurs</a>, cette étape de définition ou de construction d’un problème public est centrale en ce qu’il transporte avec lui un corpus spécifique de solutions et mesures amenées à structurer la politique publique.</p>
<p>Or une analyse précise du texte vient, selon nous, atténuer la radicalité de cette évolution sous au moins deux aspects. D’une part, le titre lui-même n’abandonne pas la notion de « campements illicites », qui reste accolée à celle de « bidonvilles ». Deux hypothèses peuvent donc être ici formulées :</p>
<ul>
<li><p>soit les deux notions désignent deux réalités différentes (en termes de types d’habitat par exemple) ;</p></li>
<li><p>soit elles décrivent les mêmes situations, vues en même temps sous l’angle des situations sociales des personnes et du caractère illicite de l’habitat.</p></li>
</ul>
<p>Il semble bien que ce soit cette seconde option qu’il faille retenir, aucune référence n’étant finalement faite dans le texte à deux situations distinctes, ou deux types d’habitats différents.</p>
<p>Par ailleurs, si le texte ne fournit aucune définition précise de l’objet concerné par la politique publique, le résumé introductif donne des éléments sur les réalités prises en compte. Celui-ci indique ainsi que « la France compte près de 570 bidonvilles où vivent 16 000 personnes, pour une grande partie d’entre elles ressortissantes roumaines et bulgares ». Par cette mention, le texte se centre donc exclusivement sur les migrants européens, en l’occurrence les citoyens principalement roumains et souvent désignés comme Roms. Il évacue <em>de facto</em> les milliers de migrants extra-communautaires vivant en bidonvilles ou campements, notamment à Calais, Paris et dans certaines autres agglomérations.</p>
<p>Apparaît ainsi – en parallèle à l’approche par situation sociale ou sanitaire – le maintien d’une approche qui cloisonne l’action publique en fonction des statuts administratifs et des nationalités : d’une part, les migrants « communautaires », potentiels destinataires de la politique publique ; d’autre part les « extra-communautaires » renvoyés à la légalité ou non de leur présence sur le territoire, et exclus de cette politique.</p>
<p>Ainsi, loin de l’affirmation franche d’un nouvel objet de politique publique, l’instruction gouvernementale fait le choix de maintenir une certaine ambivalence quant à cet objet. Cette option du flou semble plus liée à des raisons politiques qu’à une vision du problème publique : de l’avis de plusieurs parties prenantes au processus d’élaboration du texte, il s’agissait de ne pas créer de <em>casus belli</em> avec le ministère de l’Intérieur, acteur central dans le processus de validation du texte, et qui désirait ne pas ajouter de la confusion aux actions menées vis-à-vis des « camps de migrants » à Calais, Paris ou ailleurs.</p>
<p>Regroupés au sein d’une <a href="https://www.persee.fr/doc/polix_0295-2319_1998_num_11_41_1718">« coalition de cause »</a>, partageant une vision relativement proche du problème public, les acteurs publics et associatifs se seraient donc ralliés à une stratégie commune permettant une adoption du texte au prix de certains aménagements. Il s’agira donc, par la suite, de suivre les évolutions possibles dans l’interprétation donnée au texte, et la progressive intégration d’autres publics dans le giron de l’instruction.</p>
<h2>Une ambiguïté qui dépasse la sphère des acteurs publics</h2>
<p>Mais cette raison politique ne saurait expliquer à elle seule l’approche restrictive du bidonville <em>in fine</em> présente dans le texte. Selon nous, celle-ci reflète également les difficultés de positionnement des principales associations et collectivités concernées autour de la dimension ethnique et/ou statutaire du phénomène.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/256938/original/file-20190203-103164-147yp2u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/256938/original/file-20190203-103164-147yp2u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/256938/original/file-20190203-103164-147yp2u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/256938/original/file-20190203-103164-147yp2u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/256938/original/file-20190203-103164-147yp2u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/256938/original/file-20190203-103164-147yp2u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/256938/original/file-20190203-103164-147yp2u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un bidonville au nord de Paris (en 2017).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/jmenj/37914856984/in/photolist-ZLpy3L-JMbqxQ-JJQnFE-25v5Sqg-Fh68ig-epZg9W-E4gQEV-2e57SnG-bSA3cD-9vcuyi-26LA7kJ-EtTagg-EwaBGD-dtrBUc-EwaHcB-E5XSDR-7nz9Qj-bP5bAr-q44rXB-pLTQtd-ER58sY-bAawHU-L2wrQ7-Hgaf1M-8jypih-25xwaiT-8jvvgz-TA71ug-UMZ2UY-JMbwcq-2dX5o93-26NDQDw-2aut1PE-NrmzH1-JMb9KC-JJQoZw-ZQcucE-imaLa2-p7ucoP-nyc579-PZWqXJ-gGJh3S-65Cmp9-4P4vY9-9Gk9GZ-23xj88i-q28Ayo-2cvSS6N-25xvYNK-VjHp33">Jeanne Menjoulet/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les entretiens menés auprès de plusieurs responsables associatifs – nationaux ou locaux – confirment un positionnement hésitant entre une mise en avant de la situation spécifique de populations européennes (dont le statut a un impact sur fort sur l’accès au droit commun), voire de populations roms (notamment en matière de discriminations), et une approche plus transversale des populations – migrantes ou non – vivants en squats, campement ou bidonvilles en France.</p>
<p>Concernant les aspects ethniques, notons que si la plupart des associations promeuvent aujourd’hui la mise à distance politique de cette dimension, nombre d’entre elles se sont historiquement construites autour de la « question rom », identifiée comme telle, et qui se retrouve dans les noms même de certaines structures (Romeurope, la Voix des Rroms, collectifs roms, projet Roms civic…).</p>
<p>La question demeure encore aujourd’hui un sujet de débats, voir de tensions, au niveau des associations ou collectifs locaux comme des réseaux nationaux : si pour certains l’enjeu se situe sur la reconnaissance d’une minorité rom discriminée, pour les autres il s’agit de faire reconnaître avant tout des situations de grande précarité, qui priment sur toute autre considération.</p>
<p>Par ailleurs, il est intéressant de noter que ces hésitations quant à la définition du problème public sont également présentes dans la recherche scientifique, qui connaît en grande partie ce même cloisonnement entre travaux portant sur les Roms vivant en bidonvilles, recherches portant sur les autres populations migrantes vivant dans des conditions similaires (à Calais et en région parisienne notamment), et travaux portant sur les populations françaises vivant en squats.</p>
<p>De même, on observe une frontière encore relativement étanche entre recherches portant sur les squats et bidonvilles, et celles centrées sur la grande précarité et le <a href="https://publications.univ-st-etienne.fr/product.php?id_produit=859">sans-abrisme</a> alors même que de nombreux ponts nous sembleraient pertinents à effectuer entre ces champs de recherche, afin d’éviter l’<em>essentialisation</em> des phénomènes, et d’enrichir utilement chacun des domaines.</p>
<p>Certains travaux récents (notamment ceux de <a href="https://www.cairn.info/les-mondes-du-squat--9782130573296.htm">Florence Bouillon</a>, <a href="https://www.dalloz-bibliotheque.fr/bibliotheque/Gouverner_les_illegalismes_urbains._Volume_34-60626.htm">Thomas Aguilera</a> ou <a href="https://www.cairn.info/revue-vingtieme-siecle-revue-d-histoire-2018-2-page-109.htm?contenu=resume">Axelle Brodiez-Dolino</a>) tentent ainsi une approche plus transversale en termes de publics, allant dans le sens d’une analyse globale du problème public.</p>
<h2>Un travail de définition inachevé</h2>
<p>La manière dont un problème public est nommé, « étiquetté », est une étape centrale dans le cycle d’une politique publique, tant du point de vue du processus (qui a été impliqué, à quel moment, dans quelles conditions, et avec quels rapports de forces ?), que du résultat, qui détermine en partie les solutions qui seront élaborées.</p>
<p>En ce sens, la réémergence de la notion de « bidonville » au détriment d’autres termes (« campements illicites » ; « camps de Roms » ; « camps de migrants »…) dans l’instruction du 25 janvier 2018 est loin d’être anodine : elle crée une forme de lien avec des situations <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ht5Qc0MPpDM">déjà connues dans le passé</a> (les bidonvilles des années 30 aux années 60), et induit une prise en compte des conditions de vies et situations sociales plus que de la légalité des installations ou de la présence sur le territoire.</p>
<p>Cependant, nous avons pu montrer que ce travail définitionnel demeurait inachevé, le texte demeurant finalement ambigu sur les réalités couvertes par le terme de « bidonville », et sur la prise en compte ou non de l’ensemble des sites – quelle que soit la nationalité ou la situation administrative de leurs occupants.</p>
<p>Cette option du flou, si elle trouve une explication dans le contexte politique et social de production de la circulaire, sera nécessairement amenée à évoluer vers plus de clarté, dans la confrontation avec les réalités très diverses vécues par les migrants précaires dans nos grandes agglomérations.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/107048/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Louis Bourgois a participé en tant que chercheur aux groupes de travail coordonnés par la Délégation interministérielle à l'hébergement et l'accès au logement (DIHAL) pour l'élaboration de l'instruction gouvernementale du 25 janvier 2018. Il a également contribué à une étude financée par la DIHAL et la Fondation Abbé Pierre en 2015 (étude de l'association TRAJECTOIRES). </span></em></p>Depuis janvier 2018, le gouvernement se résout à employer ce terme disparu depuis des années, affichant une approche plus sociale qu’administrative ou sécuritaire, non sans quelques ambiguïtés.Louis Bourgois, Doctorant en Sciences Politiques au Laboratoire PACTE (CNRS / UGA), Sciences Po GrenobleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1015392018-11-13T00:59:12Z2018-11-13T00:59:12ZBéton, ciment : de nouvelles pistes pour mieux recycler les déchets du bâtiment<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/369084/original/file-20201112-15-lmwlo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">À Saint-Ghislain (Belgique), une plate-forme de recyclage permettant de concasser, cribler et laver les granulats issus du recyclage.</span> <span class="attribution"><span class="source">Romain Trauchessec</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>En 2014 en France, le secteur du bâtiment et des travaux publics a produit à lui seul près des deux tiers des déchets du pays. Cela représente plus de <a href="http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/publications/p/2764/848/recyclage-dechets-produits-lactivite-btp-2014.html">211 millions de tonnes</a> de matériaux (l’équivalent de 3 tonnes par habitant).</p>
<p>Ces reliquats sont issus des travaux de construction, de démolition et de déblaiement. On les qualifie d’<a href="https://www.ademe.fr/expertises/dechets/quoi-parle-t/types-dechets/dechets-inertes">« inertes »</a> : ce sont des déchets minéraux qui ne se décomposent pas mais ne sont pas susceptibles de subir ou d’entraîner des réactions dangereuses pour l’environnement ou la santé.</p>
<h2>Beaucoup de déchets non recyclés</h2>
<p>Dans ce secteur, une grande part des déchets (<a href="http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/fileadmin/documents/Produits_editoriaux/Publications/Datalab/2018/datalab-44-recyclage-dechets-btp-2014-octobre2018.pdf#page=20">23 %</a>) est réutilisée directement pour les besoins des chantiers, comme les opérations de terrassement par exemple. Une autre partie (20 %) est envoyée vers des installations et plates-formes de recyclage. En résulte la production de granulats recyclés essentiellement réutilisés dans les travaux publics, pour la réalisation des sous-couches des chaussées notamment.</p>
<p>Le reste de ces déchets peut être utilisé pour la réhabilitation des carrières (14 %), remis à des collecteurs agrées (13 %), des déchetteries (7 %) ou encore envoyé directement dans des installations de stockage de déchets inertes (12 %) où des millions de tonnes de déchets inertes sont définitivement éliminés sans être valorisés.</p>
<p>Afin de répondre aux besoins des chantiers de construction tout en préservant les ressources naturelles, il devient indispensable de consolider les filières existantes, voire d’en créer de nouvelles qui permettront de mieux valoriser ces déchets et d’éviter leur enfouissement.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/aWtq2LQZZ_E?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Vidéo présentant le potentiel du recyclage du béton. (Actu environnement/YouTube, 2014).</span></figcaption>
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<h2>Réutiliser les granulats dans le béton</h2>
<p>L’utilisation de ces déchets du bâtiment pour la fabrication de bétons est une voie intéressante qui permettrait de diversifier les voies de recyclage existantes.</p>
<p>Au cours des dernières années, l’utilisation de granulats recyclés comme matière première pour la fabrication de béton a fait l’objet de nombreux projets et travaux de recherche, notamment en <a href="https://www.pnrecybeton.fr/">France</a>. Ils ont permis d’étudier les procédés de production, de traitement, de caractérisation des granulats recyclés, ainsi que les performances des nouveaux bétons contenant ces ressources secondaires.</p>
<p>Les normes ont aussi évolué, permettant d’incorporer dans certains bétons des granulats recyclés en proportions définies. <a href="https://www.infociments.fr/betons/norme-nf-en-206-cn-presentation-generale">Une norme</a> autorise ainsi depuis 2014, jusqu’à 50 % de gravillons recyclés dans les bétons selon la classe d’exposition du béton et la qualité du granulat recyclé.</p>
<p>L’utilisation de ces gravillons présente toutefois certaines difficultés : des granulats en trop forte proportion, particulièrement poreux ou contenant des impuretés, affectent parfois les propriétés des bétons, modifiant leur maniabilité, leur résistance ou encore leur durabilité.</p>
<h2>Le ciment, un autre moyen de valorisation</h2>
<p>Pour ces granulats recyclés de moindre qualité, une voie alternative de recyclage a été développée : la fabrication du ciment Portland.</p>
<p>Mélangé à de l’eau, ce ciment est un liant hydraulique qui assure la cohésion des granulats contenus dans le béton. Ce ciment a été découvert il a près de 200 ans, notamment grâce aux travaux de l’ingénieur français Louis Vicat. La production annuelle de ce ciment s’élève actuellement en France à <a href="https://www.infociments.fr/infociments-2016-lessentiel">16 millions de tonnes par an</a>, et atteint plus de 4 milliards de tonnes à l’échelle mondiale.</p>
<p>Obtenu par cuisson de calcaire et d’argile à 1450°C, le ciment Portland est ainsi à l’origine de 5 % des <a href="http://www.wri.org/resources/charts-graphs/world-greenhouse-gas-emissions-2005">émissions</a> mondiales des gaz à effet de serre.</p>
<p>Afin de réduire <a href="https://www.infociments.fr/reduire-les-emissions-de-co2/lindustrie-cimentiere-francaise-et-la-reduction-des-emissions-de-co2">cet impact environnemental</a>, des combustibles de substitution (résidus d’huile, pneus, etc.) sont de plus en plus utilisés pour la cuisson du ciment Portland, en substitution des combustibles fossiles traditionnellement utilisés (charbon, coke de pétrole).</p>
<p>Dans les cimenteries, de nombreux matériaux alternatifs (sable de fonderie, terres polluées, etc.) sont aussi utilisés pour partiellement remplacer les matières premières traditionnelles (calcaire, marnes, etc.). Les granulats recyclés trouvent donc naturellement leur place dans ce processus de valorisation.</p>
<h2>Renforcer la qualité des ciments recyclés</h2>
<p>Dans dans ce contexte que le projet européen <a href="http://www.nweurope.eu/projects/project-search/seramco-secondary-raw-materials-for-concrete-precast-products/">Seramco</a> (Secondary Raw Materials for Concrete Precast Products) a été développé.</p>
<p>Il s’intéresse au recyclage des déchets de bonne qualité dans l’industrie des produits préfabriqués en béton – parpaings, dalles, blocs de coffrage – et à celui des produits de moindre qualité pour fabriquer du ciment.</p>
<p>Dans le cadre de ce projet, les chercheurs de l’<a href="https://ijl.univ-lorraine.fr/a-la-une/">Institut Jean Lamour</a> travaillent sur la caractérisation chimique des matériaux recyclés ainsi que sur leur variabilité spatiale ou temporelle, afin de définir les conditions de synthèse optimale associées au taux d’incorporation et à la température de cuisson. Ces travaux sont menés en partenariat avec le cimentier Vicat, permettant ainsi la réalisation d’essais à l’échelle industrielle à la cimenterie de Créchy.</p>
<p>Les performances et la durabilité des ciments « recyclés » obtenus sont comparées à celles du ciment Portland traditionnel, à la fois en laboratoire et sur des produits types préfabriqués. En 2020, ces produits seront testés sur trois sites pilotes – Seraing en Belgique, Saarlouis en Allemagne et le long d’une route départementale de Moselle en France –, ce qui permettra de démontrer la viabilité de ces ressources secondaires pour la création de nouveaux éléments préfabriqués en béton.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/244836/original/file-20181109-38449-qqjmc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/244836/original/file-20181109-38449-qqjmc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/244836/original/file-20181109-38449-qqjmc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/244836/original/file-20181109-38449-qqjmc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/244836/original/file-20181109-38449-qqjmc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/244836/original/file-20181109-38449-qqjmc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/244836/original/file-20181109-38449-qqjmc0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cimenterie de Créchy (Allier) où sont conduites des recherches sur le recyclage des déchets.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Groupe Vicat</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Le projet Seramco permet au béton et aux déchets mixtes (brique, céramique, maçonnerie, etc.) d’être recyclés pour refaire du béton. Ainsi, les déchets du BTP peuvent-ils entrer dans les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/economie-circulaire-26694">boucles vertueuses de l’économie circulaire</a>.</p>
<p>Il faut rappeler qu’au-delà des bonnes pratiques permettant d’assurer la fiabilité des bétons et des ciments recyclés, l’utilisation des déchets du BTP dépendra fortement du contexte économique local – demande en granulats, disponibilité des ressources primaires (naturelles) et secondaires (recyclés) – mais également des politiques publiques mises en œuvre (marché public, fiscalité, etc.) et de l’acceptabilité sociale de ces produits.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/101539/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Trauchessec ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Depuis une dizaine d’années, le secteur de la construction a progressé dans la valorisation de ses déchets.Romain Trauchessec, Maître de conférences, chercheur à l’Institut Jean Lamour, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1040302018-10-12T09:14:20Z2018-10-12T09:14:20ZUne maison « intelligente » pour faire des économies d’électricité<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/240323/original/file-20181011-154555-ff2drf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock </span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2018 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>En France, le bâtiment, qu’il soit tertiaire ou résidentiel, reste de loin le plus gros consommateur d’énergie devant les transports, l’industrie et l’agriculture.</p>
<p>Selon les derniers chiffres du ministère de la Transition écologique et solidaire, cela représente <a href="http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/publications/p/2764/969/chiffres-cles-lenergie-edition-2018.html">près de 45 %</a> de la consommation finale d’énergie. Paradoxalement, le bâtiment est l’un des secteurs les moins émetteurs de gaz à effet de serre (20 %). L’industrie (29 %) et les transports (28 %) sont de bien plus mauvais élèves.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=446&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=446&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=446&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=561&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=561&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=561&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Répartition de la consommation finale d’énergie en France par secteurs d’activités.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/fileadmin/documents/Produits_editoriaux/Publications/Datalab/2018/datalab-43-chiffres-cles-de-l-energie-edition-_2018-septembre2018.pdf">Ministère de la Transition écologique et solidaire</a></span>
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<p>Dans un contexte de transition énergétique – qui vise notamment à préparer « l’après-pétrole » – et pour faire face aux enjeux d’approvisionnement en énergie, à l’épuisement des ressources, à l’augmentation des prix et aux impératifs de la protection de l’environnement, il est primordial que chacun d’entre nous parvienne à mieux gérer sa consommation d’électricité.</p>
<p>Quels sont les moyens pour y parvenir ? On peut commencer chez soi !</p>
<h2>Les systèmes de gestion de l’électricité</h2>
<p>Les <a href="http://eduscol.education.fr/sti/ressources_techniques/revue-3ei-sommaire-du-ndeg-89">systèmes de gestion de l’énergie électrique</a> offrent aujourd’hui la possibilité de maîtriser de manière dite « intelligente » aussi bien la consommation d’un bâtiment que le coût de cette consommation.</p>
<p>Ces systèmes ont pour but d’économiser l’électricité et d’optimiser le confort des usagers en adaptant le fonctionnement des équipements. Par exemple, lorsque le bâtiment est inoccupé, le système peut arrêter le chauffage de manière automatique ou le ralentir durant la nuit. Ces actions « intelligentes » peuvent intervenir en toute transparence pour les usagers afin de donner de la priorité de fonctionnement à certains équipements.</p>
<p>Cette hiérarchisation du fonctionnement des appareils permet de diminuer la puissance appelée par l’installation électrique et ainsi soulager le réseau de distribution lors des pointes de consommation.</p>
<h2>Un exemple concret de gestion « intelligente »</h2>
<p>Dans le cadre du <a href="https://certem.univ-tours.fr/activites-scientifiques/axes-de-recherche-et-projets/ecco-581684.kjsp?RH=GREMAN">projet « ECCO »</a> financé par la région Centre Val-de-Loire, le groupe de recherche en matériaux, microélectronique, acoustique et nanotechnologies de l’Université de Tours (<a href="https://greman.univ-tours.fr/">GREMAN</a>) travaille sur l’optimisation du coût de la consommation d’électricité dans l’habitat individuel.</p>
<p>Ce dispositif est réalisé à l’aide d’un système de stockage (des batteries), un convertisseur d’énergie, des capteurs (de température, de présence, etc.), un <a href="https://www.mdpi.com/1996-1073/10/11/1701">système de prédiction et de gestion de l’électricité</a> (un algorithme informatique est mis en œuvre) ainsi que des prises « intelligentes » pour piloter tous les équipements présents dans la maison.</p>
<p>Deux objectifs sont ici visés : « effacer » la consommation électrique ou la reporter via un système de stockage.</p>
<p>Durant les périodes « creuses », l’utilisateur fait fonctionner ces équipements électriques directement sur le réseau de distribution. Durant les périodes de pointe de consommation, le système de stockage « soulage » le réseau de distribution.</p>
<p>Ce système permet ainsi de garantir, à tout instant, un équilibre entre la production d’électricité et sa consommation. Le dialogue entre le système de stockage et le réseau de distribution est réalisé dans ce cas par l’intermédiaire d’un <a href="http://www.icrepq.com/icrepq18/257-18-bissey.pdf">convertisseur statique d’énergie</a>. Ce dernier est bidirectionnel, car l’électricité doit pouvoir transiter dans les deux sens : du système de stockage vers le réseau de distribution et du réseau de distribution vers le système de stockage.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=371&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=371&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=371&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Système de prédiction et de gestion de la consommation d’électricité proposé par le groupe de recherche en matériaux, microélectronique, acoustique et nanotechnologies (GREMAN) de l’université de Tours.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sebastien Jacques/Université Tours</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<h2>Des prises « intelligentes »</h2>
<p>Dans ce système mis au point par les chercheurs du GREMAN, le pilotage des appareils électriques d’un logement peut être réalisé à l’aide d’un petit appareil, appelé « prise intelligente » (ou <em>smart plug</em>), que l’on branche directement sur les prises électriques « classiques ». Son utilisation ne nécessite aucune modification de l’installation électrique de la maison.</p>
<p>L’ordre de commande de cette prise « intelligente » provient du système de prédiction et de gestion de l’électricité. Le <em>smart plug</em> doit donc pouvoir être commandé à distance de deux façons.</p>
<p>Dans un premier cas, l’utilisateur donne lui-même l’ordre de pilotage à partir d’une application installée sur son <em>smartphone</em> ou sa tablette numérique. Il pourra par exemple créer une ambiance sonore, baisser les volets roulants de sa chambre ou encore simuler une présence en allumant et en éteignant une lumière à des intervalles de temps réguliers.</p>
<p>Dans un second cas, l’usager n’intervient pas dans la gestion du coût de la consommation d’électricité. Lors des périodes de pointe par exemple (notamment entre 19h et 22h), le réfrigérateur pourra s’éteindre quelques minutes, sans que son utilisateur s’en aperçoive, pour diminuer la puissance appelée à ce moment-là par l’installation électrique.</p>
<h2>Les défis scientifiques</h2>
<p>La mise en œuvre des systèmes « intelligents » de gestion de l’électricité ne repose pas uniquement sur les prises « intelligentes ». Trois défis scientifiques doivent être aujourd’hui relevés.</p>
<p>Il y a d’abord la maîtrise du stockage de l’électricité à des coûts d’installation raisonnables pour l’usager ; celle du système de prédiction et de gestion de l’électricité ; enfin, la mise au point d’un convertisseur bidirectionnel à hautes performances énergétiques.</p>
<p>L’équipe du GREMAN tente d’apporter des solutions pour répondre à ces défis. Et la maquette d’une maison « intelligente » <a href="https://www.univ-tours.fr/site-de-l-universite/fete-de-la-science-2018-633931.kjsp">sera présentée par les chercheurs</a> au public lors de cette 27e édition de la Fête de la science.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Démonstrateur d’une maison connectée « intelligente ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sebastien Jacques/Université Tours</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/104030/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sébastien Jacques a reçu des financements de la région Centre Val-de-Loire (projet de recherche d’intérêt régional n°2015-00099656). </span></em></p>Des chercheurs travaillent sur des systèmes de gestion de la consommation d’électricité pour l’habitat.Sébastien Jacques, Enseignant-chercheur en génie électrique, Université de ToursLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.