Menu Close
Personnes marchant en ville pendant un épisode caniculaire
À Nantes, en juillet 2022. Loïc Venance/AFP

Bonnes feuilles : « Climat, 30 mots pour comprendre et agir »

Réchauffement climatique, gaz à effet de serre, forçage radiatif, convention climat, pacte vert, mais aussi normes ou bla-bla-bla, voici quelques-uns des 30 termes que Christian de Perthuis se propose de décrypter dans son nouvel ouvrage paru en mai 2022 aux éditions De Boeck Supérieur. Dans ce glossaire pédagogique, on fait le point en une série de courts chapitres sur ces dérèglements qui affectent nos vies. Dans cet extrait, l’auteur revient sur les « scénarios climatiques » pour tenter d’imaginer le monde de demain avec des degrés en plus.


Scénario : « Document décrivant l’action (d’un film), comprenant indications techniques et dialogues » (Dictionnaire Petit Robert en ligne).
Scénario climatique : « Une représentation plausible et souvent simplifiée du climat futur, basée sur un ensemble cohérent de relations climatologiques qui a été construit pour expliciter les conséquences potentielles du changement climatique d’origine anthropique » (GIEC, 6e rapport d’évaluation, Glossaire).

Le scénariste du film est maître du récit qu’il produit, notamment de l’issue finale. Une longue tradition filmographique a privilégié le « happy end ». Les scénarios font souvent preuve d’une grande créativité pour retourner les situations les plus désespérées.

En matière climatique, les règles sont bien différentes. Ce sont les lois de la physique et de la biologie qui fixent les contraintes et décideront de l’issue finale. Les scénarios du GIEC explorent les climats du futur en considérant le stock de gaz à effet de serre que les hommes ont déjà rejeté dans l’atmosphère et en faisant des hypothèses sur leurs trajectoires d’émission futures. Ici, aucune place pour les retournements miraculeux de situation. Pour que le récit ne vire pas à la catastrophe, il faut vite amplifier la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Un réchauffement de 1,5 °C d’ici 2040 dans tous les scénarios

Dès son premier rapport d’évaluation (1990), le GIEC a introduit des scénarios climatiques qui sont des représentations stylisées du futur. Le scénario tendanciel, dénommé « business as usual », conduisait à un réchauffement d’un peu plus de 4 °C en 2100 relativement à l’ère préindustrielle. Trois variantes B, C, D étaient proposées, avec un freinage des émissions permettant de limiter le réchauffement dans une fourchette de 2 à 3 °C à ce même horizon.

Le sixième rapport d’évaluation du GIEC regroupe les scénarios climatiques en trois familles suivant les trajectoires futures d’émission. Compte tenu du stock de gaz à effet de serre déjà rejeté dans l’atmosphère, les scénarios de réduction rapide des émissions ne se traduisent qu’avec des délais sur la température moyenne. Dans tous les cas, un réchauffement de l’ordre de 1,5 °C devrait être atteint aux alentours de 2030.

[Plus de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde. Abonnez-vous aujourd'hui]

C’est à partir de 2050 que l’action ou l’inaction d’aujourd’hui commencent à produire leurs effets. Le GIEC projette ainsi trois futurs possibles pour la température moyenne de notre planète d’ici la fin du siècle.

Trois futurs possibles à partir de 2050

Dans les scénarios fortement émissifs, le GIEC suppose une absence totale de coordination internationale. Les pays pratiquent une course au chacun pour soi en prolongeant l’utilisation des énergies fossiles. Le pic d’émission n’est pas atteint avant 2050. La stabilisation du stock de CO2 dans l’atmosphère semble dès lors hors d’atteinte d’ici la fin du siècle. On s’oriente vers un réchauffement supérieur à 3 ou 4 °C d’ici 2100, qui se poursuivra au XXIIe siècle.

À l’opposée, deux scénarios à faible émission reposent sur une coordination internationale renforcée permettant d’amorcer la réduction des émissions mondiales de CO2 dès la décennie 2020. La neutralité carbone peut alors être atteinte entre 2050 et 2070 grâce aux fortes baisses d’émissions opérées entre 2020 et 2050. Dans ces scénarios, on conserve l’espoir de stabiliser le réchauffement en dessous de 2 °C d’ici la fin du siècle, et même vers 1,5 °C grâce à des émissions nettes négatives après 2050. La neutralité carbone n’y est en effet pas un objectif final, mais un point de passage après lequel l’action de réduction des émissions doit se poursuivre.

GIEC, CC BY-NC-ND

Entre ces deux représentations du futur, le scénario intermédiaire suppose que les engagements pris par les différents pays dans le cadre de l’accord de Paris sont tenus, mais qu’on ne va pas plus loin. Les émissions mondiales de CO2 continuent de progresser entre 2020 et 2030, pour se stabiliser sur un plateau avant de décliner après 2050. Ces efforts sont insuffisants pour stabiliser le stock de CO2 dans l’atmosphère. Le GIEC anticipe dès lors un réchauffement un peu inférieur à 3 °C à la fin du siècle.

Les scénarios pour la France

Éditions De Boeck Supérieur. CC BY-NC-ND

En se basant sur les scénarios de référence du GIEC, Météo-France produit régulièrement des projections climatiques pour la France. Les scénarios les plus récents ont été publiés en 2020. Ils anticipent que le réchauffement moyen d’ici la fin du siècle sera plus prononcé que la moyenne mondiale calculée par le GIEC. Cette moyenne intègre en effet les températures à la surface des océans qui augmentent plus lentement que sur les terres émergées.

Les modèles permettent désormais d’anticiper les variations du climat à l’échelle locale. Sur le territoire métropolitain, ils anticipent un réchauffement d’autant plus marqué qu’on s’éloigne des façades maritimes du nord-ouest et qu’on progresse vers le sud-est. Les massifs montagneux seront plus affectés que les zones de plaine. Enfin, les modèles anticipent un réchauffement plus fort en été et moindre au printemps, ce qui laisse augurer une accentuation des canicules estivales.

Want to write?

Write an article and join a growing community of more than 182,100 academics and researchers from 4,941 institutions.

Register now