tag:theconversation.com,2011:/ca-fr/topics/big-data-23298/articlesbig data – La Conversation2024-01-15T11:09:12Ztag:theconversation.com,2011:article/2199212024-01-15T11:09:12Z2024-01-15T11:09:12ZBig data, IA, ChatGPT… Dans les PME aussi, la donnée est devenue incontournable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/565763/original/file-20231214-29-rb0t1k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=19%2C0%2C1155%2C747&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Environ 80% des dirigeants de PME considèrent que le numérique représente un réel bénéfice.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pxhere.com/fr/photo/1443941">Pxhere/Mohammed Hassan</a></span></figcaption></figure><p>Dès <a href="https://theconversation.com/big-data-big-money-qui-profite-de-lexplosion-des-donnees-77906">l’irruption massive des données</a> dans la société au tournant des années 2010, les grandes entreprises se sont saisies des technologies numériques. Une décennie plus tard, le big data, le cloud ou encore l’intelligence artificielle (IA) occupent également une grande place dans les activités des petites et moyennes entreprises (PME). Le <a href="https://www.francenum.gouv.fr/guides-et-conseils/strategie-numerique/comprendre-le-numerique/barometre-france-num-2023-ou-en-sont">baromètre France Num 2023</a> montre qu’environ 80 % des dirigeants d’organisations de moins de 250 salariés considèrent que le numérique représente un réel bénéfice.</p>
<p>Notre dernier <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S016649722300161X">article de recherche</a>, paru dans la revue <em>Technovation</em>, démontre plus particulièrement une forte accélération de l’adoption de logiciels d’analyse des données. Ces outils d’analyse des données apparaissent même dans des secteurs traditionnellement non technophiles. Par exemple, nous avons identifié, dans l’ouvrage <a href="https://www.istegroup.com/fr/produit/management-et-marketing-du-vin-2/"><em>Management et marketing du vin 2</em></a> (ISTE Group) des usages stratégiques dans le secteur vitivinicole. Certaines PME avaient ainsi commencé par utiliser Excel avant d’investir dans des outils comme SQL Server, Amazon Redshift ou BigQuery afin de stocker et organiser leurs données à mesure que leur volume augmentait.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/big-data-big-money-qui-profite-de-lexplosion-des-donnees-77906">Big data, big money : qui profite de l’explosion des données ?</a>
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<p>Pour l’analyse, beaucoup choisissent Power BI qui fournit des tableaux de bord interactifs dont les courbes évoluent en temps réel. Ce logiciel facilite le reporting financier, améliore les prédictions des tendances futures et aide les dirigeants à prendre des décisions.</p>
<p>D’autres PME exploitent Google Analytics pour améliorer leur connaissance client, analyser les performances de leur site web, paramétrer leur stratégie de référencement ou concevoir des communications marketing ciblées. Elles collectent plus de données sur les usages de leurs clients et développent des services numériques innovants pour satisfaire de nouveaux besoins.</p>
<h2>Quand ChatGPT détrône Google</h2>
<p>Plus récemment, <a href="https://theconversation.com/chatgpt-pourquoi-tout-le-monde-en-parle-197544">ChatGPT</a> a fait irruption dans les PME. Développé par l’entreprise OpenAI, cet assistant virtuel s’est diffusé dès son lancement, fin 2022, dans de nombreux métiers. Nos recherches en cours révèlent ainsi que, dans certaines PME, ChatGPT a détrôné les navigateurs les plus populaires comme Google pour des requêtes du type « quelles sont les meilleures pratiques pour réussir une publication sur Instagram ? » ou encore « quelles mesures légales le site e-commerce d’une PME doit-il respecter pour être conforme au RGPD directive européenne sur la protection des données) ? »</p>
<p>Dans certaines PME, les salariés utilisent ChatGPT pour la création de contenu. Un directeur commercial génère par exemple des propositions commerciales pour des prospects ou des réponses à des appels d’offres. Une directrice marketing l’utilise pour rédiger des publications sur son blog ou les réseaux sociaux. Avec l’IA, les salariés réduisent leur charge de travail en optimisant la génération d’idées et l’écriture de textes, et ce à moindre coût.</p>
<p>ChatGPT est également capable de résoudre des problèmes techniques. Dans les PME spécialisées dans l’édition de logiciels, certains programmeurs lui demandent, par exemple, de détecter les erreurs dans leurs lignes de code et de fournir une solution afin que leur programme fonctionne correctement. Dans une autre entreprise, un directeur administratif et financier lui pose régulièrement des questions d’ordre comptable.</p>
<h2>Nouveaux défis</h2>
<p>Cependant, il s’agit pour l’instant plus de démarches individuelles que d’une prise de conscience collective. D’ailleurs, ChatGPT reste un tabou dans certaines petites entreprises car son usage peut être perçu comme une façon de tromper l’employeur en faisant effectuer son travail à l’IA. Son utilisation soulève également des questions fondamentales sur la création de valeur dans certains métiers dont les tâches peuvent désormais être confiées à la machine. L’IA s’avère néanmoins stratégique en exécutant des tâches quotidiennes et libérant du « temps », la ressource la plus précieuse pour innover et créer de la valeur ajoutée.</p>
<p>L’adoption de ces outils d’analyse de la donnée entraine néanmoins d’importants défis à relever pour les PME : préoccupations en matière de sécurité et de confidentialité des données, considérations éthiques, besoin de personnel qualifié pour gérer et interpréter les données, etc.</p>
<p>En outre, le <a href="https://www.francenum.gouv.fr/guides-et-conseils/strategie-numerique/comprendre-le-numerique/barometre-france-num-2023-ou-en-sont">baromètre France Num 2023</a> révèle que la moitié des dirigeants doute du retour sur investissement dans les technologies numériques. La crainte de passer à côté d’une innovation technologique mobilisée par des concurrents peut parfois constituer une possible motivation.</p>
<p>Ce phénomène révèle que l’adoption de ces nouveaux outils s’accompagne d’une courbe d’apprentissage. Les PME doivent donc aujourd’hui investir dans la <a href="https://theconversation.com/lintelligence-artificielle-inquiete-il-est-temps-deduquer-la-population-a-la-programmation-202025">formation et l’éducation</a> des employés pour s’assurer de leur compétence à exploiter tout le potentiel de l’analyse de la donnée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219921/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Des outils d'analyse de « big data », le cloud ou encore ChatGPT sont de plus en plus utilisés dans les petites structures, y compris dans des secteurs traditionnellement peu technophiles.Théo Justy, Doctorant, Attaché d'enseignement et de recherche, Big Data analytics et PME, Montpellier Management, Université de MontpellierDenis Lescop, Professeur en stratégie et transformation digitale, Montpellier Business SchoolEstelle Pellegrin-Boucher, Maître de conférences en sciences de gestion à l'Institut Montpellier Management, Université de MontpellierJulien Granata, Professeur à Montpellier Business School - Responsable d'axe de la Chaire MIND, Montpellier Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2147312023-10-11T10:49:57Z2023-10-11T10:49:57ZPourquoi aller au stade si c’est pour passer son temps sur son smartphone ?<p>Le 7 février 2023, en inscrivant à 38 ans le 38 888<sup>e</sup> de sa carrière, le basketteur LeBron James devient le meilleur marqueur de l’histoire de la NBA, la ligue d’élite américaine. Le précédent record détenu par Kareem Abdul-Jabbar aura tenu presque 40 ans. Le moment historique a été capturé par le photographe Andrew D. Bernstein. Au second plan, les fans vivent l’instant par l’intermédiation de l’écran de leur smartphone faisant barrière entre leur visage et le fait historique.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1623187957820555266"}"></div></p>
<p>S’ils donnent le sentiment de ne savoir apprécier authentiquement le moment présent, c’est que tout se passe comme s’ils contrevenaient à ce qu’on attend d’eux dans le cadre d’un spectacle sportif. Le mot <em>spectacle</em> tire son étymologie du latin <em>spectare</em>, qui signifie en effet en latin regarder avec attention. Le spectacle serait donc fait pour retenir l’attention. Le smartphone devient alors un outil de diversion. Accaparé par son écran, le fan manquerait à ce qu’on attend de lui : regarder le terrain et encourager son équipe.</p>
<h2>« F*ck wifi »</h2>
<p>Depuis une décennie, les critiques se sont ainsi multipliées contre les spectateurs accros à l’écran. En 2014, des supporters du PSV Eindhoven, club de football des Pays-Bas, avaient déployé une banderole sans équivoque : <a href="https://www.theguardian.com/football/2014/aug/18/psv-fans-protest-against-wifi-access">« F*ck wifi, support the team »</a>. Ils envisageaient l’émergence de la technologie dans les tribunes comme une nouvelle expression de la gentrification du public de stades.</p>
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<figcaption><span class="caption">Des supporters du club de football néerlandais du PSV Eindhoven déploient une banderole « F*ck wifi, support the team » (PSV Support, 2014).</span></figcaption>
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<p>En France, un supporter niçois militait en 2017 pour une <a href="https://www.20minutes.fr/nice/2137295-20170922-ogc-nice-supporter-nicois-veut-laisser-telephones-touche">tribune sans selfie</a>, estimant que cela nuisait à l’ambiance. Aux États-Unis la même année, des étudiantes se sont vues <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ngt1JK3DyOU&t=4s">moquées par les commentateurs d’un match de baseball</a> pour avoir pris des selfies alors que le public était appelé à participer aux encouragements.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/ngt1JK3DyOU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Des commentateurs se moquent de spectatrices rivées sur leurs téléphones lors d’un match de baseball (MLB, 2015).</span></figcaption>
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<p>Le repli sur son smartphone semble en effet aller à l’encontre de la <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/0163443716635862">célébration collective qu’on attend d’un évènement sportif</a>. Rivé à l’écran du smartphone, le public connecté serait « seul avec du monde autour ».</p>
<h2>Regarder Netflix au Super Bowl</h2>
<p>Pourtant, cinq attributs de l’évènement sportif favorisent le recours au smartphone :</p>
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<li><p>Les émotions ressenties ne valent que parce qu’elles sont partagées, ce que permettent les réseaux sociaux.</p></li>
<li><p>Unique et éphémère, le <a href="http://hell-of-a-sport.blogspot.com/2017/02/voir-ou-vivre-quest-ce-quetre-un.html">match invite à en faire l’expérience du souvenir</a>. Par ses stories, on apporte donc la preuve « j’y suis/j’y étais ».</p></li>
<li><p>L’évènement sportif n’a d’intérêt que s’il est vu dans l’instant présent. Or, les médias sociaux sont des outils de l’instantanéité.</p></li>
<li><p>Le smartphone permet de partager en direct un contenu lié à un évènement à ceux qui n’ont pas pu/voulu y assister.</p></li>
<li><p>Il est créateur de données et permet aux spectateurs d’obtenir une <a href="https://theconversation.com/la-realite-virtuelle-le-futur-de-la-retransmission-sportive-193551">couche de réalité augmentée</a> directement sur leur smartphone comme lors de la Coupe du monde de football au Qatar en 2022 avec l’application FIFA+.</p></li>
</ul>
<p>Ainsi, depuis l’apparition de l’iPhone en 2007 et le <a href="https://www.researchgate.net/publication/305490421_Connected_Stadiums_in_the_US_issues_and_opportunities_Stades_connectes_aux_%C3%89tats-Unis_%C3%89tats_des_lieux_enjeux_et_perspectives">développement dans la foulée de « stades connectés »</a> aux États-Unis, le comportement des fans dans les enceintes sportives s’est considérablement transformé et le smartphone figure bien au cœur de ce bouleversement.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-realite-virtuelle-le-futur-de-la-retransmission-sportive-193551">La réalité virtuelle, le futur de la retransmission sportive ?</a>
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<p>Il est possible de prendre la mesure de ces usages grâce aux données partagées occasionnellement par des opérateurs. Par exemple, la 57<sup>e</sup> édition du Super Bowl, la grande finale du championnat de football américain qui s’est déroulée début 2023, détient le record de données consommées sur le wifi d’un stade <a href="https://stadiumtechreport.com/feature/super-bowl-lvii-sees-31-5-tb-of-wi-fi-data-sets-new-record-for-per-device-data-used/">avec 31,5 téraoctets</a>. C’est l’équivalent de 700 000 heures de musique sur une plate-forme de streaming. Le pic d’utilisation a eu lieu au moment de l’entrée des deux équipes sur le terrain. Pendant le show de Rihanna à la mi-temps, l’utilisation de la bande passante a augmenté de 450 %.</p>
<p>Par ailleurs, Facebook a été le média social le plus utilisé devant Instagram, Twitter, Snapchat et Reddit. Mais les personnes dans le stade semblent combler les moments d’attente par des services de streaming (Apple, YouTube, Disney ou Netflix). Ils sont par ailleurs nombreux à consulter Ring, une application de surveillance de son foyer.</p>
<p>Dans un <a href="https://www.researchgate.net/publication/345814413_Social_Media_Usage_During_Live_Sport_Consumption_Generation_Gap_and_Gender_Differences_Among_Season_Ticket_Holders">article</a> académique publié en 2020, des chercheurs ont essayé de comprendre comment 400 abonnés d’une franchise NBA consultaient leurs smartphones pendant un match. L’usage des médias sociaux reste globalement répandu (29 % des abonnés consultent au moins une fois Twitter et Facebook, 27 % consultent au moins une fois Instagram et Snapchat), même s’ils sont 53 % à relever au moins une fois leurs e-mails !</p>
<p>Selon les auteurs :</p>
<blockquote>
<p>« Les abonnés utilisent les médias sociaux pour partager de l’information et en obtenir au sujet du match avec leurs amis sur Instagram et Snapchat. Ce faisant, ils satisfont leur besoin d’interaction sociale, d’expression d’une opinion et de partage d’information. »</p>
</blockquote>
<h2>« Sans connectivité, nous allons perdre les millennials »</h2>
<p>Les stades connectés doivent également permettre de convaincre un nouveau public plus jeune et plus familial d’assister à des rencontres sportives, y compris en Europe. En 2017, Javier Tebas, le président de la <em>Liga</em> espagnole de football <a href="https://www.sofoot.com/breves/la-liga-veut-le-wi-fi-dans-tous-ses-stades">expliquait</a> ainsi :</p>
<blockquote>
<p>« S’il n’y a pas de connectivité dans les stades, nous allons perdre des spectateurs comme les « millennials » qui ont besoin d’un double écran. [Or], il y a deux publics que nous voulons toucher : les femmes, qui sont pour l’instant un marché de niche, et les nouvelles générations, pour qui la connectivité est très importante. »</p>
</blockquote>
<p>Ces usages étant de plus en plus ancrés, les promoteurs de spectacle sportif y voient également depuis des années une opportunité pour lutter contre la concurrence de la télévision. Roger Goodell, le commissaire de la NFL,</p>
<blockquote>
<p>« L’expérience du téléspectateur à la maison est exceptionnelle, et c’est dorénavant une concurrence que nous devons surmontant en nous assurant de créer le même genre d’environnement dans nos stades en permettant l’accès à la même technologie. Nous voulons nous assurer que nos fans, lorsqu’ils viennent dans les stades, n’ont pas à éteindre leur téléphone. »</p>
</blockquote>
<h2>Un (faux) corbeau géant à Baltimore</h2>
<p>Au-delà des possibilités de partage, le smartphone intègre aussi le spectacle. En effet, des start-up conçoivent des chorégraphies lumineuses grâce à la lumière du téléphone ou animent le stade par la réalité augmentée, à l’image du corbeau géant (virtuel) qui survole la pelouse de la franchise de football américain des Ravens de Baltimore.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/NebxhBmzteQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La franchise des Baltimore Ravens propose une expérience de réalité virtuelle à ses fans (en anglais).</span></figcaption>
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<p>Soucieux de satisfaire les aspirations digitales des publics, les exploitants de stade intègrent donc les innovations technologiques successives – plutôt que de freiner les usages. En France, l’Orange Vélodrome de Marseille est devenu en 2019 le premier stade européen <a href="https://reseaux.orange.fr/actualites/5g-orange-velodrome">à intégrer la 5G</a> et à mettre en place un programme d’accompagnement de start-up pour repenser l’expérience du fan.</p>
<p>Aux États-Unis en 2020, le géant du numérique <a href="https://www.nba.com/news/nba-microsoft-announce-new-partnership-deal-analysis">Microsoft s’est engagé auprès de la NBA</a> à créer, selon Chris Benyarko, vice-président exécutif de la ligue :</p>
<blockquote>
<p>« Une nouvelle plate-forme qui rassemble toutes les choses qui composent la vie d’un fan de la NBA – qu’il s’agisse de regarder des matchs, d’acheter un billet, de participer à des ligues Fantasy ou d’acheter des produits. L’un de nos principaux domaines d’intérêt sera d’innover et de repenser la façon dont nous présentons les matchs. L’objectif principal reste de tirer parti de la technologie au mieux pour approfondir ces expériences et les rendre plus attrayantes. »</p>
</blockquote>
<p>Le concurrent de Microsoft, Apple, vient lui de lancer début 2023 un <a href="https://www.sportbuzzbusiness.fr/fan-experience-de-la-realite-mixte-pour-les-fans-de-sport-avec-le-casque-apple-vision-pro.html">casque de réalité mixte</a> qui pourrait modifier la façon dont on regarde du sport. La question n’est donc plus tant de savoir s’il faut ou non sortir son smartphone au stade mais quel appareil pourrait à terme le remplacer – voire de permettre de « vivre » une expérience au stade sans avoir à se déplacer.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science (qui a lieu du 6 au 16 octobre 2023 en métropole et du 10 au 27 novembre 2023 en outre-mer et à l’international), et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition porte sur la thématique « sport et science ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214731/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Boris Helleu ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le téléphone, qui détourne l’attention du terrain, présente paradoxalement un certain nombre de caractéristiques qui renforce l’expérience du spectateur lors d’un match. Explications.Boris Helleu, Maitre de conférences, spécialiste de marketing du sport, laboratoire NIMEC, Université de Caen NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2077412023-06-26T09:50:45Z2023-06-26T09:50:45ZL’impact environnemental du numérique, un enjeu encore mal pris en compte par les entreprises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/532002/original/file-20230614-17-w5lvhi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=156%2C91%2C997%2C695&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En quelques années, les outils comme les ordinateurs portables ou les smartphones se sont imposés dans le travail. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.wallpaperflare.com/person-in-front-of-laptop-computer-on-table-technology-office-wallpaper-zbwth">Wallpaperflare.com</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>L’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/internet-des-objets-21322">Internet des objets</a> (IoT), la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/blockchain-28780">blockchain</a>, <a href="https://theconversation.com/fr/topics/intelligence-artificielle-ia-22176">l’intelligence artificielle</a> (IA) ou encore le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/big-data-23298">big data</a> sont devenus incontournables dans notre société. Ces dernières années, les organisations ont ainsi largement accompagné cet essor des technologies en menant à bien la <a href="https://theconversation.com/transformation-numerique-et-intelligence-artificielle-deux-revolutions-a-ne-pas-rater-pour-les-entreprises-96598">transformation numérique</a> de leurs activités.</p>
<p>Or, la diffusion massive de ces nouveaux outils a un <a href="https://theconversation.com/informatique-frugale-a-quand-un-numerique-compatible-avec-les-limites-planetaires-204625">impact direct sur notre empreinte carbone</a>. Les organisations se retrouvent donc confrontées à un dilemme : la digitalisation est perçue comme essentielle à leur survie, mais semble être en contradiction avec une approche de sobriété numérique nécessaire à l’heure où les exigences en matière de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/responsabilite-societale-des-entreprises-rse-21111">responsabilité sociétale des entreprises (RSE)</a> se renforcent.</p>
<p>Comment se dilemme est-il résolu en entreprise ? Pour le savoir, nous avons rencontré, dans le cadre d’un récent <a href="https://www-sciencedirect-com.sidnomade-2.grenet.fr/science/article/pii/S0040162523003554">travail de recherche</a>, 33 individus au sein d’entreprises de services numériques (ESN). Il ressort notamment de l’analyse des pratiques existantes que la prise de conscience de l’impact environnemental des outils numériques reste particulièrement limitée à l’heure actuelle.</p>
<h2>Perceptions diverses</h2>
<p>Tout d’abord, nous relevons que le terme « sobriété numérique » demeure équivoque pour nos participants, laissant place à l’ambiguïté. Si certains répondants semblent en avoir une vision éclairée, pour d’autres, le concept n’évoque « pour l’instant pas grand-chose », comme l’admet une ingénieure pédagogique lors d’un entretien.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comprendre-les-3-dimensions-de-la-sobriete-cette-notion-cle-de-notre-epoque-197660">Comprendre les 3 dimensions de la sobriété, cette notion-clé de notre époque</a>
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<p>La diversité de ces perceptions laisse transparaître différents niveaux de maturité de sobriété que l’on observe dans les organisations interrogées. Nous en avons identifié cinq principaux.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/532977/original/file-20230620-21-sg6s76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/532977/original/file-20230620-21-sg6s76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/532977/original/file-20230620-21-sg6s76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=262&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/532977/original/file-20230620-21-sg6s76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=262&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/532977/original/file-20230620-21-sg6s76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=262&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/532977/original/file-20230620-21-sg6s76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=329&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/532977/original/file-20230620-21-sg6s76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=329&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/532977/original/file-20230620-21-sg6s76.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=329&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Sobriété numérique : les 5 niveaux de maturité.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Tout d’abord, le niveau de <strong>réfutation,</strong> qui désigne une résistance à la sobriété numérique. Les participants dans cette situation se montrent peu convaincus par l’intérêt de la démarche. À l’inverse, certaines entreprises se caractérisent par une <strong>inaction</strong> malgré la prise de conscience des enjeux.</p>
<p>Les répondants qui se situent à ce niveau se disent prêts à s’engager si l’État ou leur entreprise prennent des mesures incitatives en faveur de la sobriété numérique. Comme le souligne le référent RSE d’une entreprise que nous avons rencontré :</p>
<blockquote>
<p>« À notre échelle, c’est pas nous qui pourrons changer quoi que ce soit. »</p>
</blockquote>
<p>Au-delà de cette inaction, on observe un niveau de <strong>substitution</strong> qui se distingue par une prise de conscience plus marquée de l’utilité de la sobriété numérique. Les participants à notre enquête se caractérisent par la réalisation de petites actions concrètes, comme le nettoyage régulier des boîtes e-mail.</p>
<p>Ensuite, au niveau de l’<strong>optimisation</strong>, les participants à notre enquête s’engagent activement à modérer, voire réduire la fréquence d’utilisation des technologies de l’information, dans le but de minimiser leurs effets négatifs. Un consultant justifie sa démarche :</p>
<blockquote>
<p>« Le numérique est une ressource non renouvelable et du coup il faut l’économiser. […] C’est une solution […] mais c’est aussi un problème si on en fait n’importe quoi. »</p>
</blockquote>
<p>Enfin, le niveau de <strong>désadoption</strong> ou de <strong>décroissance</strong> se caractérise par une volonté de mettre fin à l’utilisation des technologies de l’information ou d’éviter leur utilisation et leur adoption. Cette démarche radicale reflète une réelle prise de conscience et un choix de réduire drastiquement l’empreinte numérique. Un responsable RSE que nous avons interrogé explique qu’il tente ainsi de réduire l’adoption de nouveaux outils numériques dans son entreprise :</p>
<blockquote>
<p>« Une fois qu’on a adopté un truc, on s’habitue et il devient quasiment impossible de le “désadopter”. »</p>
</blockquote>
<h2>Pourquoi mener une démarche de sobriété numérique ?</h2>
<p>En plus de <a href="https://www.notre-environnement.gouv.fr/actualites/breves/article/loi-sur-la-reduction-de-l-empreinte-environnementale-du-numerique-quelles">répondre aux exigences environnementales</a>, l’adoption d’une démarche de sobriété numérique offre un double avantage : d’abord, dans un contexte où le recrutement devient de <a href="https://travail-emploi.gouv.fr/actualites/presse/dossiers-de-presse/article/plan-de-reduction-des-tensions-de-recrutement-phase-2">plus en plus compétitif</a> pour de nombreuses organisations, la sobriété numérique constitue un atout majeur pour leur <a href="https://www.researchgate.net/publication/263326597_The_employer_brand">image de marque en tant qu’employeur</a> ; ensuite, selon nos participants, l’adoption d’une approche de sobriété numérique génère un impact positif sur le bien-être des employés, notamment via la diminution du nombre d’e-mails reçus.</p>
<hr>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<hr>
<p>La sobriété numérique représente un défi majeur pour catalyser un changement écologique et social. Cependant, notre étude révèle des résistances de certains individus face aux changements nécessaires qui permettent de réduire leur empreinte numérique. Face à l’urgence liée à la crise climatique, il devient impératif d’explorer en profondeur ces enjeux au sein des organisations mais aussi dans les milieux académiques qui les accompagnent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207741/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Céline Perea a reçu des financements de L'université Grenoble Alpes. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jessica Gérard a reçu des financements de l'Université Grenoble Alpes.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julien de Benedittis ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une étude a identifié des prises de conscience variables face aux conséquences de l’essor des outils numériques dans les organisations.Céline Perea, Professeure associée en sciences de gestion, Université Grenoble Alpes (UGA)Jessica Gérard, Maitre de Conférences, Grenoble IAE Graduate School of ManagementJulien de Benedittis, Maître de Conférences en Management des Systèmes d'Information, Mines Saint-Etienne – Institut Mines-TélécomLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2072352023-06-12T18:41:17Z2023-06-12T18:41:17ZInnover avec l’IA dans le secteur automobile : les entreprises historiques risquent-elles de caler ?<p>Sous le feu des projecteurs avec la nécessaire <a href="https://www.mazars.fr/Accueil/Insights/Publications-et-evenements/Etudes/L-industrie-automobile-accelere-sa-transition">transition verte</a> à opérer, l’<a href="https://theconversation.com/topics/automobile-20801">industrie automobile</a> semble en pleine mue. On attend beaucoup de la <a href="https://www.mckinsey.com/industries/automotive-and-assembly/our-insights/a-long-term-vision-for-the-european-automotive-industry">voiture connectée, de la conduite autonome, du véhicule électrique ou de l’autopartage</a> pour nos mobilités futures.</p>
<p>Pour <a href="https://theconversation.com/topics/innovation-21577">innover</a> et rester compétitif, le secteur pourrait notamment s’appuyer sur le <a href="https://theconversation.com/topics/big-data-23298">big data</a> et les technologies d’<a href="https://theconversation.com/topics/intelligence-artificielle-ia-22176">intelligence artificielle (IA)</a>. Certains nouveaux entrants tels que <a href="https://theconversation.com/topics/tesla-30804">Tesla</a> semblent l’avoir bien intégré et ont déjà <a href="https://www.usinenouvelle.com/editorial/tesla-les-8-technologies-les-plus-innovantes-des-voitures-electriques-d-elon-musk.N1857602">adopté ces technologies avec succès</a>. Quid néanmoins des entreprises historiques du secteur qui doivent composer avec la complexité de leurs systèmes en place ?</p>
<p>Certes, les constructeurs et les fournisseurs ont largement investi dans l’IA ces dernières années comme le montrent le projet <a href="https://www.valeo.com/en/valeo-ai/">Valeo.ai</a> ou les <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/proceedings-of-the-design-society-design-conference/article/identification-and-exploitation-of-new-design-paths-by-breakthrough-innovation-experts-in-a-generative-design-partnership/07C66EB7627E62C6854F827959E656EC">partenariats Renault-Google</a> et <a href="https://www.businesswire.com/news/home/20220714005065/en/SoundHound-Delivers-In-Car-Voice-Experiences-to-the-Most-Popular-Stellantis-Vehicle-Brands-in-Europe">Stellantis-SoundHound</a>. Avec quel objectif néanmoins ? S’agit-il d’approches d’innovation radicale, de remettre en cause l’architecture des véhicules telle qu’on la connaît ou plutôt d’automatiser des tâches et d’améliorer l’existant ?</p>
<p>Comprendre les processus d’innovation autour de la donnée dans le monde automobile reste essentiel pour assurer la pérennité de ce secteur clé pour l’économie française. C’est ce à quoi s’est attelée notre équipe de chercheurs et chercheuses, issus de <a href="https://www.tbs-education.fr/tbs/experience-etudiante/career-starter-pilotez-votre-carriere/">TBS Education</a> et du <a href="https://www.cgs.minesparis.psl.eu/">Centre de Gestion Scientifique (CGS)</a> de <a href="https://www.tbs-education.fr/tbs/experience-etudiante/career-starter-pilotez-votre-carriere/">l’École des Mines de Paris – PSL</a>, dans une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0166497223000743?dgcid=author">étude récente</a>. Elle repose sur une analyse de plus de 46 000 brevets chez les 19 plus gros acteurs du domaine ainsi que sur une campagne d’entretiens avec les déposants de 22 brevets en lien avec les technologies IA.</p>
<p>En essayant de lever le voile sur les pratiques d’innovation dans ce secteur, nous montrons que c’est bien l’option « améliorer l’existant » qui semble avoir été retenue. Si elle semble permettre de maîtriser les coûts à court terme et d’apprendre pas à pas, cette approche peut toutefois limiter le potentiel d’innovation de ces entreprises. D’autant que l’articulation des acteurs le long des chaînes de valeur s’en mêle et apporte aussi son lot de freins quand chacun pense que c’est à un autre d’innover.</p>
<h2>Un apprentissage prudent des ingénieurs</h2>
<p>On aurait pu penser que l’intégration de l’IA allait être un prérequis de la conception de nouveaux véhicules. Pourtant, les ingénieurs semblent surtout en faire usage pour résoudre des problèmes qui émergent lors des dernières phases de développement des produits : améliorer le confort des passagers en phase de test des véhicules, résoudre les problèmes de capteurs ou encore, de façon plus surprenante, négocier avec des équipementiers.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1663923134141980673"}"></div></p>
<p>Les entreprises du secteur adoptent ainsi une approche progressive et prudente dans l’intégration de ces technologies. Elles sont d’abord appliquées à des systèmes d’aide à la conduite existants (ADAS) puis développées par étapes. Si cette manière de faire a de quoi surprendre, elle a le mérite de permettre aux équipes d’apprendre progressivement et de s’adapter à l’IA, tout en évitant de remettre en cause l’architecture de la voiture. Cela risquerait de se traduire par une hausse importante des coûts de fabrication. Comme l’indique un ingénieur expert des <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Adaptive_cruise_control">systèmes de régulateur de conduite adaptatifs</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Il y a environ 3 à 4 ans, nous pensions que, dans les années à venir, nous aurions des véhicules autonomes… Aujourd’hui, ce n’est toujours pas le cas. Pour l’instant, nous travaillons sur le développement de nouvelles fonctions pour lesquelles nous pouvons dire qu’il n’y a pas beaucoup de disruption. »</p>
</blockquote>
<p>Un autre expert, en ADAS pour systèmes de freinage, poursuit :</p>
<blockquote>
<p>« Ce n’est pas nécessairement un manque d’honneur pour l’IA, mais… l’IA a tendance à résoudre des problèmes déjà existants, pas des problèmes qui n’existent pas. Le véhicule autonome parfait n’est rien de plus qu’un conducteur. ».</p>
</blockquote>
<h2>Des données de qualité insuffisante</h2>
<p>Tout cela présente néanmoins des limites évidentes en termes de potentiel d’innovation. Nos travaux révèlent en particulier des problèmes de richesse des données. Bien que les véhicules en collectent un nombre gigantesque, elles nécessiteraient d’être par exemple labélisées pour être exploitables. Un expert véhicule autonome nous a ainsi expliqué :</p>
<blockquote>
<p>« Mes équipes ont des heures et des heures de tests en continu, mais si vous voulez créer un algorithme pour des mouvements multidirectionnels, vous avez besoin d’une personne qui regarde la caméra lorsque ces mouvements adviennent, c’est-à-dire à chaque virage, pour noter cela dans la base de données, et c’est très chronophage. »</p>
</blockquote>
<p>Un autre frein réside dans la capacité technique à croiser des données de différentes sources (visuelles, radar, sonores, etc.) pour prendre par exemple, une décision dans une logique algorithmique. Ces technologies restent en cours de développement.</p>
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<p>Ces éléments semblent problématiques alors qu’il s’agit de rester compétitif à la fois sur le marché mondial où opèrent de nouveaux acteurs comme Tesla, mais aussi sur le marché des nouvelles mobilités face aux développements par exemple des taxis volants <a href="https://www.mckinsey.com/featured-insights/the-next-normal/air-taxis">annoncés pour 2030</a>. Il est nécessaire d’innover en proposant des fonctionnalités radicalement nouvelles ou en adressant des besoins nouveaux des consommateurs.</p>
<h2>Des enjeux qui sont aussi organisationnels</h2>
<p>Il s’agit ainsi de développer les expertises des ingénieurs en place autour des sciences de la donnée, et certains ont d’ailleurs largement envie d’en apprendre davantage. Il ne suffit donc pas de développer une nouvelle entité avec des <em>data scientists</em>, mais plutôt d’assurer une montée en compétence progressive des ingénieurs en place. Comme l’indique l’un des interviewés, expert en conduite des véhicules autonomes :</p>
<blockquote>
<p>« On ne développe pas un brevet en se disant “on fait un brevet IA” ».</p>
</blockquote>
<p>S’il faut développer ces compétences liées aux sciences de la donnée, il faudra aussi mieux les reconnaître pour encourager les ingénieurs à compléter leurs expertises préalables. Cela nécessite un travail d’identification de ces « communautés IA », au-delà de ceux spécifiquement recrutés en tant que <em>data scientists</em>, et qui ne s’identifient pas nécessairement eux-mêmes comme contributeurs. Cela s’explique aussi par une définition de l’IA parfois restrictive, par exemple uniquement restreinte à l’utilisation de réseaux de neurones, alors qu’ils existent une <a href="https://www.wipo.int/tech_trends/en/artificial_intelligence/patentscope.html">vaste typologie de technologies possibles</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1666187651802705921"}"></div></p>
<p>Un autre obstacle organisationnel réside dans les relations entre les constructeurs de véhicules et les équipementiers d’origine (OEM). Au long de la chaîne de valeur, des sous-traitants aux assembleurs, les acteurs, pour l’heure, paraissent surtout se renvoyer la responsabilité de l’innovation par l’IA. Chacun semble adopter des stratégies d’innovation similaires. Un interviewé salarié d’un constructeur explique ainsi :</p>
<blockquote>
<p>« Ce sont plutôt les fournisseurs qui sont responsables du développement de la partie intelligente du capteur. Ce sont eux les consommateurs des méthodes d’IA. »</p>
</blockquote>
<p>Les <a href="https://dumas.ccsd.cnrs.fr/ENSMP_CGS/hal-03745176v1">cellules d’experts en méthode du management de l’innovation</a> dans les départements de R&D des entreprises (<a href="https://online.hbs.edu/blog/post/what-is-design-thinking">Design Thinking</a>, <a href="https://www.tmci.minesparis.psl.eu/airbus-and-c-k-theory/">méthodologie C-K</a>, etc.) ont un rôle clé à jouer pour insuffler un nouveau souffle pour l’innovation avec la donnée.</p>
<p>Les entreprises historiques du secteur automobile doivent ainsi trouver un équilibre entre l’exploration de nouvelles possibilités et l’exploitation de leurs compétences existantes. L’approche incrémentale actuelle a le mérite de fournir des résultats rapides et d’habituer progressivement les équipes à ces nouvelles technologies. La manière dont elle est actuellement mise en place entrave cependant l’adoption d’approches plus radicales et l’apparition d’innovations technologiques véritablement originales et qui permettront aux entreprises de rester compétitives sur le marché mondial.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207235/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Quentin Plantec a mené des projets de recherche collaborative avec plusieurs entreprises (y compris dans le secteur du monde automobile), et qui sont pour certaines membres et financeurs d'une chaire de recherche associée à son ancienne institution de rattachement (Théorie & Méthodes de la Conception Innovante de l'Ecole des Mines de Paris). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Benoit Weil mène des recherches partenariales régulières avec l'industrie dans le cadre des travaux de recherche qu'il mène aux Mines de Paris et au sein de la Chaire TMCI (financement public ou partenariat public-privé).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Marie-Alix Deval a mené des projets de recherche collaborative avec plusieurs entreprises (y compris dans le secteur du monde automobile), et qui sont pour certaines membres et financeurs d'une chaire de recherche associée à son ancienne institution de rattachement (Théorie & Méthodes de la Conception Innovante de l'Ecole des Mines de Paris). En tant qu'ancienne employée de Renault où elle a réalisé une thèse CIFRE, elle détient des parts de manière très minoritaire.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sophie Hooge mène des recherches partenariales régulières avec l'industrie dans le cadre des travaux de recherche qu'elle mène aux Mines de Paris et au sein de la Chaire TMCI (financement public ou partenariat public-privé).</span></em></p>Une analyse de 46 000 brevets montre que les grands constructeurs cherchent davantage à intégrer les technologies à l’existant qu’à innover radicalement.Quentin Plantec, Professeur Stratégie & Management de l'Innovation, TBS EducationBenoit Weil, Professeur, Mines Paris - PSLMarie-Alix Deval, Enseignante-chercheuse, Mines Paris - PSLSophie Hooge, Professeur en Sciences de Gestion, Mines Paris - PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1993182023-03-01T19:55:47Z2023-03-01T19:55:47ZFootball : quand les données se mettent au service de la performance<p>Notre société est de plus en plus numérisée grâce à l’utilisation d’un large éventail de technologies qui génèrent d’importants flux de données regroupés sous le terme de mégadonnées. C’est notamment le cas des données liées au sport collectées par le biais de montres connectées, d’applications pour smartphones, de systèmes de suivi par satellites, ou encore via des textiles intelligents.</p>
<p>Ces données permettraient notamment d’identifier les indicateurs clés de la performance tout comme les mouvements des sportifs sur le terrain : nombre et grandeur des sprints et des changements de direction, distance parcourue à certaines vitesses, évolution de la fréquence cardiaque ou trajectoire du joueur.</p>
<p>Elles peuvent ainsi guider la stratégie d’entraînement. De là à devenir un outil essentiel pour améliorer les performances ou prévenir les blessures, il n’y a qu’un pas. Ce type d’informations peut donc intéresser un large éventail d’acteurs : athlète, entraîneur, préparateur physique, professeur en activités physiques adaptées, médecin ou agent sportif. Ces données, et les méthodologies qui les accompagnent, ouvrent de nouvelles perspectives pour la recherche en sciences du sport et dans les sciences du numérique.</p>
<p>Les récents développements en matière de capteurs portables et connectés, de stockage de la donnée et d’outils d’intelligence artificielle ont été les piliers d’un changement majeur dans la manière d’effectuer les analyses des données liées au sport. Cette dernière décennie, les travaux de recherche en sciences du sport ont bénéficié de la réduction de la taille des capteurs et de l’augmentation conséquente de la capacité à recueillir, puis analyser des mesures simultanées, insufflée par les immenses progrès de la transmission sans fil.</p>
<p>Le football est l’un des sports les plus populaires au monde, et au fil des années, de plus en plus d’informations sont disponibles, ce qui a accru l’intérêt des analystes de données pour ce sport. Les métiers associés, <em>data scientist</em>, se sont développés avec des compétences spécifiques en statistiques et informatique afin de recueillir, traiter, analyser et faire parler les données massives… dans le but de trouver des informations utiles à la prise de décision. </p>
<p>Dans le sport, on parle de Data Analyst du Sport et plusieurs <a href="https://www.sfds.asso.fr/fr/statistique_et_sport/618-statistique_et_sport/">groupes de réflexion</a>, <a href="https://digisport.univ-rennes.fr/">écoles universitaires</a> et thématiques au sein d’unités de recherche (<a href="https://dhm.euromov.eu/mib/">EuroMov Digital Health in Motion</a>) réunissant des expertises pluridisciplinaires se sont mises en place. Comment les sciences du sport et les sciences du numérique, de la collecte à la modélisation prédictive d’une performance ou d’une blessure en passant par la gestion des données, peuvent-elles impacter le domaine du sport ?</p>
<h2>La prolifération des données du mouvement</h2>
<p>Ces dernières années ont vu l’essor des systèmes de détection de position pour fournir des données de suivi spatio-temporel des joueurs sur le terrain. Bien que des systèmes de caméra semi-automatiques aient été utilisés pour suivre la position des joueurs lors de matchs professionnels en football, des systèmes de suivi automatique utilisant des systèmes de positionnement par satellites (GNSS pour Géolocalisation et navigation par un système de satellites) ou des systèmes de mesure de positionnement local sont couramment adoptés par les structures et équipes professionnelles en sports collectifs (football, rugby, basketball, handball, hockey sur glace). Certains systèmes de positionnement ont même équipé des <a href="https://kinexon.com/technology/ball-tracking/">ballons avec des capteurs intégrés</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/512941/original/file-20230301-18-k6jqp5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/512941/original/file-20230301-18-k6jqp5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/512941/original/file-20230301-18-k6jqp5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/512941/original/file-20230301-18-k6jqp5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/512941/original/file-20230301-18-k6jqp5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/512941/original/file-20230301-18-k6jqp5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/512941/original/file-20230301-18-k6jqp5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Mesures de différentes séquences de mouvement chez des stagiaires en formation de préparation physique avec des capteurs portables intégrés dans une brassière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Stephane Perrey</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Une des avancées les plus visibles dans de nombreuses disciplines sportives est l’introduction des centrales inertielles autonomes (IMU pour Inertial Measurement Unit) permettant la mesure des accélérations linéaires (accéléromètres), des vitesses de rotation (gyroscopes) et le champ magnétique terrestre pour l’orientation de la centrale (magnétomètres) d’un point en trois dimensions.</p>
<p>La fusion de ces capteurs portables (IMU-GNSS) est une tendance constante dans le développement des systèmes de suivi et détection du mouvement humain avec des applications dans le domaine sportif comme en football pour suivre les actions motrices des joueurs. De manière générale, les déplacements (vitesse, distance et mesures dérivées) sont quantifiés prioritairement à partir de données GNSS, alors que la détection des chocs/impacts et leur caractérisation est réservée aux données IMU. Malgré ces progrès, est-il possible de libérer le joueur de ces capteurs dans la quantification du mouvement ? Il semblerait que oui.</p>
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<p>Les systèmes et algorithmes de capture de mouvement sans marqueur ont été constamment améliorés au cours des cinq dernières années pour mesurer la cinématique (c.-à-d. la description du mouvement en termes de position, vitesse ou accélération) dans le sport. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1077314221001193">Les algorithmes modernes de vision par ordinateur utilisant des réseaux de neurones</a> ont été adaptés pour évaluer différentes formes d’actions motrices, fournissant des moyens pratiques pour une analyse plus rapide des données avec une validité en conditions réelles, c’est-à-dire en dehors de l’environnement restrictif des laboratoires.</p>
<p>La classification des typologies des activités locomotrices humaines sous l’angle de la performance sportive peut être améliorée lorsque les signaux acquis sont utilisés comme les entrées d’algorithmes d’apprentissage automatique. La capacité des algorithmes actuels à analyser et extraire de la connaissance de tels jeux de données peut par exemple identifier les changements de direction, souvent décisifs en match. L’exploitation d’algorithme d’apprentissage profond (sous-domaine de l’apprentissage automatique qui s’intéresse aux algorithmes inspirés de la structure et du fonctionnement du cerveau, appelés réseaux neuronaux artificiels) sur des images vidéo, permettrait avec une grande précision de <a href="https://doi.org/10.1155/2022/9330798">reconnaître différents types de frappe au football</a>. </p>
<p>À l’aide de plusieurs capteurs fusionnés IMU-GNSS et de différents algorithmes d’apprentissage automatique, Reilly et coll. ont développé un <a href="https://doi.org/10.3390/s21144625">modèle de classification automatisé pour identifier avec précision les mouvements des joueurs avec changements de direction</a> pendant les matchs de compétition. Les améliorations des modèles de classification dans le sport comme le football sont toujours mises à mal par la variabilité des schémas de mouvement, celle-ci a un impact direct sur la qualité et la quantité des jeux de données disponibles.</p>
<h2>De la donnée à la prédiction d’un état de performance ou de blessure</h2>
<p>Alors comment les mégadonnées pourraient-elles augmenter la performance du sport de haut niveau ? Les données collectées par les outils et équipements précités permettent de caractériser avec détail les mouvements produits puis d’en déterminer la dose d’entraînement physique du sportif. Largement utilisée pour le suivi des joueurs de football, la demande physique peut être déterminée grâce à des paramètres mécaniques objectifs, calculés à partir de signaux GNSS-IMU couplés à ceux de la fréquence cardiaque par exemple. Les données collectées à partir de ces dispositifs portables fournissent des informations utiles pour comprendre l’activité d’un joueur, sa performance en compétition ou prévenir les risques de blessures à l’entraînement.</p>
<p>Pour ce faire, une approche consiste à réaliser des analyses descriptives, de sorte à caractériser les intensités d’exercice cibles en lien avec les performances physiques au fil du temps et d’en faire émerger des relations analytiques interprétables. Avec suffisamment d’informations recueillies sur plusieurs mois voire plusieurs années, des analyses prédictives peuvent être déployées pour estimer une performance le jour « J » ou encore apporter des informations utiles aux entraîneurs, à l’équipe ou aux joueurs dans le but d’orienter les protocoles d’entraînement pour optimiser la prescription (volume, intensité et type d’exercices) et ainsi la performance.</p>
<p>Concernant la performance physique individuelle chez le footballeur professionnel, des chercheurs ont présenté une <a href="https://doi.org/10.1038/s41598-022-19484-y">approche prédisant les profils individuels d’accélération-vélocité à partir des mesures de données GNSS</a> dans des situations réelles de match. Ces profils peuvent fournir des informations pertinentes concernant la force maximale théorique des extenseurs de la hanche et la capacité à produire une force horizontale importante à des vitesses de course élevées ; ces facteurs étant des déterminants clés de l’apparition de blessures musculaires, ou encore de la performance au sprint.</p>
<p>Dans le contexte des blessures sportives, la capacité à prédire les facteurs de risque et d’évaluer l’état de préparation d’un athlète après une opération ou toute autre intervention est essentielle. L’application de techniques d’apprentissage automatique apparait être en mesure d’informer sur les <a href="https://doi.org/10.1186/s40634-021-00346-x">risques de blessures</a> sans contact en prenant en compte les évolutions des doses d’entraînement sur une semaine (court terme) et un mois (moyen terme) basées sur des données collectées par GNSS et IMU couplées à des questionnaires. Les résultats d’une étude au cours <a href="https://www.mdpi.com/2076-3417/10/15/5261">d’une saison sportive chez des joueurs de football professionnels en Ligue 2</a> montrent qu’en fonction de la complexité du modèle prédictif, la performance de classification pour prédire les risques de blessures peut approcher 100 %, en particulier à un horizon temporel d’un mois.</p>
<p>En outre, il apparaît que les variables subjectives (telles que la qualité du sommeil, la forme, l’humeur, la satisfaction et le plaisir) s’avèrent être des facteurs importants dans la prédiction des risques de blessure, tout comme peut l’être la distance parcourue. Ces premières informations permettent de guider la programmation individualisée des entraînements de façon à réduire le risque de blessure.</p>
<p>Aujourd’hui, les dispositifs mobiles portables permettent d’obtenir les informations nécessaires à l’analyse des performances réalisées par les joueurs à l’entraînement et en compétition. De plus, de nouveaux algorithmes d’apprentissage automatique, notamment l’apprentissage profond et d’exploration de données permettent un mode d’évaluation de la progression des joueurs dans toutes les phases de leur entraînement.</p>
<p>Cependant, il reste à déterminer si les avancées technologiques et scientifiques actuelles sont d’ores et déjà suffisamment matures pour matérialiser en direct des systèmes de prise de décision automatisés en conditions réelles de compétition et influencer l’issue de la rencontre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199318/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Même sans capteur, il est possible de récupérer beaucoup de données sur les sportifs pour optimiser leurs performances et éviter les blessures.Stéphane Perrey, Professeur des Universités en Physiologie de l'Exercice / Neurosciences Intégratives, Directeur Unité Recherche EuroMov Digital Health in Motion, Université de MontpellierGérard Dray, Professeur, IMT Mines Alès – Institut Mines-TélécomJacky Montmain, Professeur - EuroMov Digital Health in Motion, IMT Mines Alès – Institut Mines-TélécomLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1990382023-02-27T18:12:22Z2023-02-27T18:12:22ZExploitation des données : un changement de contrat social à bas bruit<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/511913/original/file-20230223-2904-rvumv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des systèmes technologiques supposés apolitiques ont un impact de plus en plus grand sur nos démocraties.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/gpjvRZyavZc">EV / Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Sélection à l’université, contenus mis en avant sur les réseaux sociaux, <a href="https://theconversation.com/la-justice-predictive-et-legalite-devant-la-loi-95116">justice</a> et <a href="https://theconversation.com/medecine-police-justice-lintelligence-artificielle-a-de-reelles-limites-170754">médecine prédictive</a>, <a href="https://theconversation.com/des-vehicules-autonomes-mais-pas-infaillibles-69106">véhicules autonomes</a>, surveillance des foules… Aujourd’hui les algorithmes sont <a href="https://arenes.fr/livre/algorithmes-la-bombe-a-retardement/">massivement utilisés</a> dans de nombreux pans de la vie politique, sociale et économique.</p>
<p>Les termes d’« algorithme », de « donnée » ou d’« intelligence artificielle » (IA) sont souvent assimilés à des mots magiques. Certains voient dans ces « outils » des êtres infaillibles, parfaitement rationnels et dont l’aide pourrait se révéler précieuse afin de déléguer certaines tâches – voire certaines responsabilités.</p>
<p>Mais la collecte massive des données et l’utilisation généralisée d’algorithmes constituent aussi une menace pour la société, la démocratie et <em>in fine</em> le contrat social, qui est pourtant <a href="https://www.cairn.info/revue-le-philosophoire-2005-2-page-167.htm">à la fondation de la conception moderne de l’État</a>. En échange d’un service (le plus souvent gratuit), les utilisateurs délèguent alors consciemment ou inconsciemment une partie de leur pouvoir de décision ainsi que la possibilité d’agir sur leurs choix et leurs opinions.</p>
<h2>L’aboutissement du culte de la raison</h2>
<p>Les systèmes d’IA sont construits de manière à pouvoir traiter d’immenses quantités de données. La finalité étant de faire les choix les plus avertis et objectifs possibles. Loin d’être une fatalité, ce déploiement à grande échelle répond à des choix politiques et à la mise en avant de ce que la chercheuse en sciences juridiques Antoinette Rouvroy nomme une <a href="https://theconversation.com/autour-de-linformatique-les-algorithmes-et-la-disparition-du-sujet-53515">« rationalité algorithmique »</a>.</p>
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<p>Héritières de la révolution scientifique et philosophique du XVII<sup>e</sup> siècle, nos sociétés occidentales se sont construites autour des notions de liberté et de progrès. Dans son <a href="https://gallica.bnf.fr/essentiels/condorcet/esquisse-tableau-historique-progres-esprit-humain"><em>Esquisse d’un tableau historique de l’esprit humain</em> (1793)</a>, Condorcet proclamait ainsi l’harmonie entre l’émancipation de l’être humain et le développement technique.</p>
<p>Sur le plan politique, la théorie du contrat social se fonde sur les idées de liberté, de démocratie et de vie privée. Toutes les perspectives du <a href="http://classiques.uqac.ca/classiques/hobbes_thomas/leviathan/leviathan_partie_1/leviathan_1e_partie.pdf">contrat social</a> cherchent à comprendre les raisons pour lesquelles des individus échangeraient une part de leur liberté contre un ordre politique. Le <a href="http://classiques.uqac.ca/classiques/Rousseau_jj/contrat_social/Contrat_social.pdf">contrat social</a> présuppose donc l’existence d’agents rationnels qui se réunissent par intérêt.</p>
<p>Dès lors, quoi de plus rationnel que la gestion de divers secteurs par l’intelligence artificielle ?</p>
<p>Dans cette conception, l’être humain est vu comme faillible face à une IA infaillible car fondée sur des « données » considérées comme des objets mathématiques. L’avènement d’une <a href="https://www.cairn.info/revue-reseaux-2013-1-page-163.htm">« gouvernementalité algorithmique »</a> – les décisions se fondent désormais sur le traitement des données plutôt que sur la politique, le droit ou les normes sociales – rendrait enfin possible le règne de la raison.</p>
<p>Ainsi, toute décision deviendrait irréfutable car elle serait appuyée sur des arguments statistiques. C’est oublier les nombreux <a href="https://theconversation.com/emploi-securite-justice-dou-viennent-les-biais-des-ia-et-peut-on-les-eviter-154579">biais qui existent dans la saisie des données et dans leur exploitation par des algorithmes</a>.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les nouveaux pouvoirs à l’ère de l’intelligence artificielle Asma Mhalla.</span></figcaption>
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<p>La logique du contrat social (notamment depuis la révolution industrielle puis le développement de l’État providence au XX<sup>e</sup> siècle) était une logique assurantielle. Ignorant le futur, les individus avaient intérêt à s’assurer collectivement contre le risque. Désormais, le développement de l’analyse prédictive rend caduque cette version du contrat. Les offres d’assurances peuvent être adaptées aux risques précis que chacun encourt.</p>
<p>Les géants du numérique connaissent nos préférences, nos opinions, nos envies et nous enferment dans ce que l’essayiste Eli Pariser nomme une <a href="https://www.penguin.co.uk/books/181850/the-filter-bubble-by-pariser-eli/9780241954522">« bulle de filtre »</a>. Le contenu en accord avec nos idées y est surreprésenté et les avis contradictoires y font défaut, augmentant alors la diffusion des fake news – <a href="https://www.science.org/doi/full/10.1126/sciadv.aau4586">à plus fort potentiel de réactions et donc de diffusion</a>. Nous partageons dès lors de moins en moins de vérités et d’expériences communes, pourtant nécessaires au fonctionnement de la démocratie.</p>
<h2>Troquer la démocratie contre des app</h2>
<p>En analysant nos données pour prédire notre comportement, le capitalisme devient un <a href="https://www.zulma.fr/livre/lage-du-capitalisme-de-surveillance/">« capitalisme de surveillance »</a> pour reprendre les mots de l’universitaire Shoshana Zuboff. Pour ces entreprises, les individus ne sont plus des clients mais des produits pour les annonceurs. Le philosophe <a href="http://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-Dans_la_disruption-484-1-1-0-1.html">Bernard Stiegler explique</a> ainsi que les individus se sont transformés en « fournisseurs de data ». Déjà individualisés, ils sont en outre désindividués : leurs données permettent de les déposséder de leur volonté.</p>
<p>A titre d’exemple, le fait que nous sommes exposés à de publicité ciblée témoigne d’une anticipation de nos désirs. Nous ne savons plus réellement si nous avons désiré l’objet que nous avons acheté puisqu’il nous a été montré avant même que nous l’ayons désiré. Notre désir est automatisé.</p>
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<img alt="Femme absorbée par son écran de téléphone" src="https://images.theconversation.com/files/511901/original/file-20230223-26-thmd3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=34%2C0%2C3794%2C2494&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/511901/original/file-20230223-26-thmd3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=395&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/511901/original/file-20230223-26-thmd3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=395&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/511901/original/file-20230223-26-thmd3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=395&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/511901/original/file-20230223-26-thmd3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=497&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/511901/original/file-20230223-26-thmd3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=497&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/511901/original/file-20230223-26-thmd3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=497&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des systèmes technologiques supposés apolitiques ont un impact de plus en plus grand sur nos démocraties.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/hJ5uMIRNg5k">Mahdis Mousavi/Unsplash</a></span>
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<p>Accoutumés au progrès technique, les individus se sont habitués à un environnement où la quête du confort, de la rapidité, du divertissement, permet la généralisation et la pérennisation de systèmes techniques invasifs, <a href="https://theconversation.com/la-reconnaissance-faciale-du-deverrouillage-de-telephone-a-la-surveillance-de-masse-184484">au détriment de certaines libertés fondamentales</a> (droit à la vie privée, à l’anonymat, à l’indépendance de la pensée…), garanties de nos sociétés démocratiques.</p>
<p>En fournissant nos données, nous transférons une partie de notre libre arbitre et la faculté d’agir sur nos opinions jusqu’à <a href="https://theconversation.com/comment-lusage-de-vos-donnees-peut-influencer-les-elections-140001">influencer des élections</a>. Le cas de <a href="https://journals.openedition.org/conflits/19779">Cambridge Analytica</a> a été le plus médiatisé : il a montré au monde la capacité de manipulation politique que possédaient les réseaux sociaux dans des élections aussi déterminantes que la présidentielle Américaine de 2016 ou le référendum britannique sur l’appartenance à l’Union européenne la même année. <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2020/03/11/christopher-wylie-cambridge-analytica-a-ferme-mais-ses-tactiques-n-ont-pas-disparu_6032552_4408996.html">Si l’entreprise a été fermée en 2018, rien n’a véritablement changé</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pister-son-enfant-avec-une-appli-une-fausse-bonne-idee-126401">Pister son enfant avec une appli, une fausse bonne idée</a>
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<p>Ciblés par les annonceurs, individualisés et profilés par les assureurs, influencés politiquement et soumis aux décisions opaques et arbitraires d’algorithmes, nous nous isolons et ne partageons plus la volonté générale que Rousseau définit comme la somme des volontés particulières et considère comme préalable au sentiment de société.</p>
<h2>Politiser la question de l’usage des technologies</h2>
<p>Ce changement de contrat se fait à bas bruit et les individus peuvent alors être victimes d’usages abusifs de leurs données par ces systèmes technologiques supposés apolitiques. <a href="https://theconversation.com/comment-lintelligence-artificielle-reproduit-et-amplifie-le-racisme-167950">D’autant plus s’ils sont déjà victimes de discriminations</a>.</p>
<p>La technologie semble toujours se situer hors du débat politique et s’imposer aux sociétés qui n’ont d’autre choix que l’acceptation (plus ou moins partielle). Conscients des risques, les parlements et les institutions internationales se mettent à légiférer sur la question, à rédiger des chartes éthiques, des règlements. C’est le cas des divers règlements européens dont le règlement général sur la protection des données (<a href="https://theconversation.com/fr/topics/rgpd-54271">RGPD</a>) est le plus connu.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-anonymiser-des-donnees-personnelles-199922">Comment anonymiser des données personnelles ?</a>
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<p>Pourtant, ces questions restent souvent très techniques et juridiques, excluant d’emblée les individus qui subissent les dommages causés par le traitement de leurs données (ciblage, amoindrissement du libre arbitre, discriminations, surveillance, notation, influence…).</p>
<p>Pour Rousseau, seuls des individus libres peuvent construire une société libre. Or, le manque de recul critique et d’une prise de conscience des enjeux du numérique ainsi que l’absence d’une éducation numérique menacent les fondements de nos sociétés démocratiques. Il serait nécessaire de politiser la question, que les citoyens se saisissent de ces sujets et en débattent afin de dessiner ensemble les contours d’un futur technologique enviable pour et par tous.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199038/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Adrien Tallent a reçu des financements de SNCF Réseau dans le cadre d'un contrat doctoral CIFRE. </span></em></p>L’exploitation des données dans de nombreux domaines mine les fondements de la démocratie.Adrien Tallent, Doctorant en philosophie politique et éthique, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1998302023-02-15T23:10:44Z2023-02-15T23:10:44ZBonnes feuilles : Transformation digitale et politiques publiques<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/509814/original/file-20230213-20-fqnm73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C24%2C1211%2C682&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le numérique contribue aujourd’hui à redessiner les rapports entre gouvernants et gouvernés.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/argonne/14557566204">Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Dans nos sociétés contemporaines, l’ampleur de la digitalisation n’est plus à démontrer. Alors que les entreprises ont intégré les enjeux du numérique depuis plus de vingt ans, le secteur public s’y trouve aujourd’hui confronté de plein fouet.</em></p>
<p><em>Comment cette nouvelle donne « numérique », portée principalement par les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/plates-formes-31157">plates-formes</a> et le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/big-data-23298">big data</a>, entre-t-elle en résonnance avec les nouvelles politiques publiques ? Et comment le numérique contribue-t-il à redessiner les rapports entre gouvernants et gouvernés ? L’ouvrage collectif coordonné par Valérie Revest et Isabelle Liotard</em>, <a href="https://www.istegroup.com/fr/produit/transformation-digitale-et-politiques-publiques/">Transformation digitale et politiques publiques : les enjeux actuels</a> <em>(Éditions ISTE), étudie la manière dont l’utilisation des outils digitaux affecte certaines politiques publiques.</em></p>
<p><em>Dans cette recherche, dont The Conversation France publie ci-dessous des extraits, deux grandes questions sont soulevées : si les acteurs publics mobilisent de manière croissante ces outils, quels sont concrètement les instruments/mécanismes choisis ? Les catégories d’outils digitaux utilisés influencent-elles les objectifs et la mise en œuvre des politiques publiques ? Ces problématiques sont abordées au travers de trois terrains : les plates-formes et les politiques d’innovation, les modèles de microsimulation et les politiques sociales, et les big data et les politiques de la santé.</em></p>
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<h2>Une analyse impérative</h2>
<p>Selon un large consensus, les technologies digitales sont en cours de restructurer radicalement des industries entières. La multiplication et la mise à disposition de vastes ensembles de données numériques provenant de sources hétérogènes, couplées à une capacité d’analyse de plus en plus rapide et de moins en moins coûteuse, ouvrent en effet la voie à de nouvelles expertises dans des domaines très variés. Dans le secteur privé, ces technologies sont à l’origine de nouveaux business models et de nouveaux modes d’organisations et d’interactions.</p>
<p>Dans le prolongement de cette tendance, le soutien à la production et à l’exploitation des données numériques est appréhendé par les États comme un des piliers de leur développement économique et social, ainsi qu’en témoignent les investissements massifs réalisés ces dernières années dans des secteurs aussi variés que la santé ou la sécurité intérieure.</p>
<p>Les promoteurs de la révolution numérique voient dans l’émergence d’une « nouvelle » politique de la donnée, une transformation de la conception traditionnelle de l’État et de ses modes d’intervention. Le déploiement de cette « nouvelle forme d’action publique » basée sur la régulation par la donnée susciterait de profondes recompositions dans les modes de gouvernance existants.</p>
<p>C’est ainsi qu’émergent de nouveaux concepts – e-government, <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-des-sciences-administratives-2012-2-page-367.htm">open-government</a> ou <a href="https://www.economie.gouv.fr/igpde-editions-publications/analyse-comparative-n6">citizen sourcing</a>. Ces derniers permettent de concrétiser la venue de nouveaux acteurs, l’émergence de nouveaux savoirs et instruments davantage dépolitisés ciblant la conduite individuelle, ainsi que de nouvelles formes d’action collective.</p>
<p>Se déployant dans un contexte marqué par une forte défiance à l’égard du pouvoir politique traditionnel, ces technologies digitales sont présentées par certains acteurs comme un moyen de répondre au déficit démocratique des sociétés contemporaines.</p>
<p>D’un côté la production et l’accès à des données massives de la part des décideurs publics permettraient d’améliorer l’efficacité des politiques publiques, ainsi que la démocratie. Ces technologies leur offriraient ainsi la possibilité de prendre des décisions rapides et de résoudre des problèmes d’une manière beaucoup plus flexible. Elles amélioreraient ainsi l’efficacité de la prise de décision.</p>
<p>D’un autre côté, les effets des outils numériques sur l’action publique seraient plus complexes à analyser et ambivalents. Le cas du recours aux <a href="https://www.etalab.gouv.fr/retour-sur-lopen-data-maturity-index-2021-politique-gouvernance-de-lopen-data-en-france-1-4/">open data</a> (données ouvertes) est particulièrement révélateur de cette complexité. Ces dernières désignent, de manière synthétique, des données auxquelles n’importe qui peut accéder, que tout le monde peut utiliser ou partager.</p>
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<p>Parallèlement, on observe également un recours croissant de l’État à des bases de données possédées par des entreprises privées : on pense par exemple à l’utilisation des données de téléphonie mobile pour mesurer la répartition de la population sur le territoire en période de confinement.</p>
<p>Deux thématiques apparaissent comme primordiales. Premièrement, les interactions entre les producteurs de données publiques et privées, en lien avec la notion de propriété, nécessitent une réflexion approfondie. Deuxièmement, les questions de l’accès, du coût, et de l’utilisation des données constituent un enjeu majeur pour les usagers.</p>
<h2>Une intégration accrue… mais difficile</h2>
<p>Les études de terrain nous ont permis de mettre en lumière deux grands enseignements. Il n’existe pas une réponse unique aux questions posées, et la spécificité des politiques conduites dans des domaines bien particuliers nécessite des outils adaptés, reflétant les objectifs de la politique concernée, ses enjeux et ses obstacles.</p>
<p>Dans le contexte de la politique d’innovation européenne, nous soulignons que deux forces sont à l’œuvre : d’un côté la volonté des autorités européennes de « faire » de la politique d’innovation différemment, au travers de <a href="https://www.mdpi.com/2071-1050/15/4/3240">concours</a> et de plates-formes, et de l’autre les limites vis de vis de l’inclusivité des parties prenantes, et donc de la démocratisation du processus. Le défi pour les pouvoirs publics consiste à apprendre à dominer l’outil des plates-formes digitales, ainsi que le souligne Claudine Gay, afin que le design de ces dernières soit en accord avec les objectifs politiques.</p>
<p>Dans le domaine de la santé, Audrey Vézian montre que l’engouement des acteurs publics français pour l’accès aux données de santé génère une tension entre les effets bénéfiques (faciliter l’accès aux données, stimuler la recherche, etc.), et la complexité des mécanismes de gouvernance. Enfin, dans le contexte des politiques sociofiscales Franck Bessis et Paul Cotton étudient les stratégies déployées par les agents de l’administration et les chercheurs pour l’ouverture des données et des codes, dans le cadre des modèles de microsimulation utilisés pour évaluer des réformes. Ils questionnent les enjeux du maintien d’une pluralité et d’un partage des capacités d’évaluation entre administrations et universitaires.</p>
<h2>Des réflexions incontournables pour demain</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/509820/original/file-20230213-30-bx5ubh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/509820/original/file-20230213-30-bx5ubh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/509820/original/file-20230213-30-bx5ubh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=902&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/509820/original/file-20230213-30-bx5ubh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=902&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/509820/original/file-20230213-30-bx5ubh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=902&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/509820/original/file-20230213-30-bx5ubh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1134&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/509820/original/file-20230213-30-bx5ubh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1134&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/509820/original/file-20230213-30-bx5ubh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1134&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.istegroup.com/fr/produit/transformation-digitale-et-politiques-publiques/">Éditions ISTE</a></span>
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<p>Les politiques publiques font face actuellement à de grands défis sociétaux (« <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11024-017-9332-2">grand challenge</a> » en anglais) de plus en plus complexes, incluant notamment dimension technologique, environnementale et sociale (le réchauffement de la planète, la préservation de la biodiversité ou le vieillissement de la population). Aujourd’hui, un grand nombre de chercheurs converge vers l’argument selon lequel, la nature même des grands défis de société bouscule les approches traditionnelles des politiques publiques.</p>
<p>Des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/13662716.2016.1146124">pistes de réflexion</a> sur la nécessité de concevoir de nouvelles formes de politiques publiques de l’innovation sont apparues. Selon cette perspective, une vision tournée vers la co-création et le co-design entre gouvernants et gouvernés fait son chemin par exemple la citizen science (portée par exemple par la <a href="https://www.nasa.gov/sites/default/files/atoms/files/2019_nasa_open_innovation_report_final.pdf">NASA</a>). Cette dernière traduit la capacité du citoyen à s’impliquer dans des programmes de recherche tournés vers la science. L’idée générale est que les amateurs (le grand public) peuvent contribuer à la production de connaissances scientifiques (par exemple la remontée de données venant du terrain), avec en filigrane la volonté de renforcer des actions d’éducation et de sensibilisation.</p>
<p>L’autre mouvement à l’œuvre concerne l’impact croissant de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/intelligence-artificielle-ia-22176">l’intelligence artificielle (IA)</a>. Si les plates-formes privées ont été les premières à mettre l’IA au cœur de leur stratégie, les acteurs publics commencent à se saisir également des opportunités offertes par cette technologie. L’arrivée de l’IA affecte notamment les frontières entre les domaines d’intervention des acteurs privés et publics. D’une part, son usage par le secteur privé peut conduire ce dernier à considérer d’un œil nouveau des services jusqu’alors délivrés par le secteur public, et à y trouver une forme nouvelle de rentabilité. Si le <a href="https://www.conseil-etat.fr/publications-colloques/etudes/puissance-publique-et-plateformes-numeriques-accompagner-l-uberisation">périmètre du service public est connu pour être évolutif</a>, l’arrivée de cette technologie a accéléré cette tendance.</p>
<p>D’autre part, à l’inverse, de nouvelles activités de service public ou bien le renforcement de certaines autres peuvent en résulter. Les applications en termes de traitement des données de santé, de défense, d’agronomie, de météo, d’éducation, de justice, de transport et de mobilité en sont une illustration. Ainsi, le défi majeur pour les politiques publiques de demain sera de tenter de concilier les avancées technologiques avec les besoins et souhaits exprimés par la société, tout en satisfaisant aux principes d’efficacité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199830/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Liotard a reçu des financements de la MSH-LSE
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Valérie Revest a reçu des financements de la MSH-LSE et du programme H2020 GROWINPRO.</span></em></p>Un ouvrage publié récemment dresse un panorama des enjeux actuels de la transformation digitale des organisations publiques. Extraits.Isabelle Liotard, Maître de Conférences et chercheure en économie de l'innovation, des plateformes et des réseaux, Université Sorbonne Paris NordValérie Revest, Professeure des universités en sciences économiques, centre de recherche Magellan, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1983562023-01-29T17:00:22Z2023-01-29T17:00:22ZLes nouvelles technologies bouleversent le secteur de la finance<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/505901/original/file-20230123-5967-eqsjzj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C102%2C1196%2C691&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Et si les données générées par les transactions rapportaient un jour davantage que les transactions elles-mêmes ?
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/marketing-mains-smartphone-internet-7567443/">Tima Miroshnichenko/Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>L’avènement des technologies numériques a renouvelé et remodelé le paysage financier. Aujourd’hui, l’achat et la vente de titres s’effectuent principalement par le biais de programmes informatiques qui réagissent en quelques nanosecondes (plus vite qu’un humain ne le pourrait) aux plus infimes fluctuations du marché.</p>
<p>Côté vente, la constitution et la liquidation des portefeuilles de titres ont connu d’énormes changements en raison principalement de l’informatisation des opérations de ces cinquante dernières années et, plus récemment, de l’émergence du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/big-data-23298">big data</a>. Les fameuses scènes dans lesquelles une foule de courtiers vêtus de couleurs vives se bousculent, agitant fébrilement les mains et hurlant leurs ordres sur le parquet de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/bourse-25542">bourse</a>, quoique parfois encore reproduites à des fins de marketing, appartiennent désormais au passé.</p>
<h2>Deux nouveaux types de technologies</h2>
<p>L’« électronisation » des opérations boursières repose au moins sur deux types de technologies. D’abord, les bourses ont automatisé le processus de mise en relation des acheteurs et des vendeurs de titres. Imaginons, par exemple, que vous souhaitez acheter 1 000 actions L’Oréal. Votre banque ou votre courtier passera alors votre ordre via Euronext, l’un des marchés sur lesquels L’Oréal est coté. Euronext reçoit, achète et vend en permanence des ordres de ce type, en les faisant correspondre grâce à des ordinateurs et des algorithmes.</p>
<p>Il s’agit déjà là d’un changement profond, mais il faut savoir qu’Euronext recueille également d’énormes quantités de données sur les ordres passés, les transactions réalisées… qui peuvent ensuite être revendues à d’autres intermédiaires et investisseurs. À cet égard, les plates-formes de trading ressemblent de plus en plus aux autres <a href="https://theconversation.com/fr/topics/plates-formes-31157">plates-formes</a> numériques, comme Facebook, Google ou Twitter, et la part de leurs revenus provenant de la vente de données augmente vertigineusement (+13 % par an environ depuis 2012).</p>
<p>Le deuxième type de technologie concerne l’automatisation des décisions d’achat ou de vente de titres de la part des acteurs du secteur. Le recours à des algorithmes pour prendre des décisions de portefeuille est appelé <em>trading algorithmique</em>. En une journée, un gestionnaire d’actifs peut ainsi acheter ou vendre des millions d’actions d’un titre donné en réponse aux entrées et sorties des investisseurs de son fonds. Ce processus d’automatisation est le même que celui que l’on observe dans d’autres secteurs, où les humains sont remplacés par des machines.</p>
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<img alt="Salle de marché en ébullition" src="https://images.theconversation.com/files/505909/original/file-20230123-19-jt54c6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505909/original/file-20230123-19-jt54c6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505909/original/file-20230123-19-jt54c6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505909/original/file-20230123-19-jt54c6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505909/original/file-20230123-19-jt54c6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505909/original/file-20230123-19-jt54c6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505909/original/file-20230123-19-jt54c6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le monde de la finance ressemble de moins en moins à cette photo prise à Wall Street en 2008.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/83532250@N06/7651028854">Thetaxhaven/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p>Certaines sociétés spécialisées dans le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/trading-haute-frequence-34668">trading haute fréquence</a> utilisent des algorithmes qui s’appuient sur un accès extrêmement rapide aux informations (moins d’une milliseconde), notamment aux données de marché vendues par les plates-formes électroniques de trading. Grâce à leur accès privilégié à ces données, ces sociétés peuvent tirer parti de petites différences de prix pour une même action entre deux plates-formes. Certaines d’entre elles paient même pour que leurs serveurs informatiques soient hébergés près de ceux des plates-formes de trading, voire louent un espace dans la même pièce pour gagner quelques précieuses nanosecondes, qui peuvent faire toute la différence dans la transmission d’informations clés.</p>
<p>L’impact de ces évolutions sur les coûts de négociation des autres acteurs du marché est un sujet controversé, et soulève de nombreuses problématiques qui sont aujourd’hui au cœur des débats politiques dans l’Union européenne et en Amérique du Nord.</p>
<h2>Une réglementation à mettre en place</h2>
<p>L’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) et divers organismes nationaux, comme l’Autorité des marchés financiers (AMF) en France, sont les principales instances de régulation des marchés de valeurs mobilières dans l’UE. La <em>Securities and Exchange Commission</em> (SEC) et la <em>Commodity Futures Trading Commission</em> (CFTC) couvrent quant à elles les marchés américains.</p>
<p>Un certain nombre de questions liées à l’impact des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/nouvelles-technologies-20827">nouvelles technologies</a> doivent être examinées par ces instances. Par exemple, l’électronisation des marchés financiers réduit-elle réellement le coût de constitution et de liquidation des portefeuilles pour les investisseurs ? Les investisseurs pourraient ainsi obtenir des rendements bien plus importants sur leur épargne. Le trading algorithmique rend-il les marchés financiers plus ou moins stables ? Les plates-formes de trading ont-elles trop de poids dans la tarification de leurs données de marché ?</p>
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<p>Dans notre récent <a href="https://cepr.org/publications/books-and-reports/barcelona-4-technology-and-finance">article</a> de recherche, nous posons également la question de savoir si le trading doit être ralenti. Le problème est que les traders à haute fréquence pourraient réaliser des profits excessifs, au détriment des autres participants.</p>
<p>Certaines plates-formes ont aussi des exigences de transparence moins strictes que celles des principales bourses, ce qui peut susciter des inquiétudes. Le volume de ce que l’on appelle le « dark trading » (réseaux d’échanges privés) est en hausse, et représente aujourd’hui environ 40 à 50 % des négociations d’actions dans l’UE, ce qui amène à s’interroger sur la nécessité de réglementer plus strictement les « dark pools ». Enfin, se pose également la question de savoir dans quelle mesure les algorithmes risquent de déstabiliser les marchés financiers et d’entraîner de fortes variations de prix.</p>
<h2>Ce que l’avenir nous réserve</h2>
<p>Dans les années à venir, le modèle économique des bourses devrait donc reposer de plus en plus sur la monétisation des données générées par le trading. Il pourrait alors régner une certaine concurrence entre les plates-formes de trading pour attirer les utilisateurs, qui génèrent ces données, à l’instar de ce que font les géants de la Tech.</p>
<p>Cette tendance, qui s’est accélérée pendant la pandémie de Covid-19, si elle se poursuit, exercera une forte pression concurrentielle sur les courtiers et finira par faire baisser les coûts de négociation pour les investisseurs. Peut-être qu’à un certain stade, les données générées par les transactions rapporteront davantage que les transactions elles-mêmes. Il se pourrait donc qu’à un moment donné, les plates-formes de trading doivent faire plus d’efforts pour attirer les utilisateurs, par exemple en vous payant pour y passer vos ordres, juste pour que vous les utilisiez et génériez davantage de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/donnees-23709">données</a> !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198356/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thierry Foucault ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’essor de l’automatisation des échanges conduit notamment les plates-formes de trading à tirer de plus en plus de revenus de la revente des données qu’elles collectent.Thierry Foucault, Professeur de Finance, HEC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1913212022-11-21T19:35:18Z2022-11-21T19:35:18ZForêts en péril : comment l’imagerie et la big data peuvent contribuer à les protéger ?<p>Avec plus de <a href="https://www.liberation.fr/environnement/climat/une-cinquantaine-dinterpellations-en-france-apres-un-ete-catastrophique-sur-le-front-des-incendies-20220923_4O6DB72VBFDXJB2ZO6GZH2HQLM/">65 000 hectares de végétation</a> partis en fumée, l’été 2022 aura été celui des incendies et s’inscrit parmi les pires de ces dernières décennies, avec 2003 et 2019.</p>
<p>Ces feux, qui ne se limitent plus à la seule zone méditerranéenne, provoquent leur lot de victimes au sein de la population et chez les pompiers, de destructions, de pertes économiques et environnementales. Des assauts répétés du climat qui engendrent aussi une dégradation progressive de la santé des arbres.</p>
<p>Au fil du siècle dernier, des outils de diagnostic ont émergé pour suivre de près l’état des forêts. Aujourd’hui, les progrès de l’imagerie offrent un potentiel immense.</p>
<h2>Forêts fragiles, la lente prise de conscience</h2>
<p>Dès le début du XX<sup>e</sup> siècle, les forestiers constatent l’émergence de nouveaux pathogènes des arbres – oïdium du chêne, chancre du châtaignier, dendroctone… Mais il faudra attendre 1958 pour que soit créé l’inventaire forestier national, institut destiné à récolter des statistiques sur les forêts.</p>
<p>Ce n’est que dans les années 1960 que se mettent en place les premiers observatoires puis les premiers suivis de l’état des forêts métropolitaines. La sécheresse de 1976, la mortalité des chênes de la forêt de Tronçais ou encore les dépérissements des résineux dans l’Est entraînent la création d’un département santé des forêts (DSF) au sein du ministère de l’Agriculture en 1989. Est alors établi un suivi de l’état d’environ 12 000 arbres sur 600 placettes permanentes installées de façon systématique tous les 16 km sur l’ensemble du territoire métropolitain.</p>
<p>Chacun de ces arbres est scruté à la loupe, pour repérer d’une part les mortalités de branches pour toutes les essences et d’autre part, le manque de ramifications pour les <a href="https://agriculture.gouv.fr/la-methode-deperis-pour-quantifier-letat-de-sante-de-la-foret">feuillus et le déficit d’aiguilles pour les résineux</a>. Les observations menées depuis la mise en place de ce dispositif et sur des placettes non permanentes dressent un tableau inquiétant de la santé de nos forêts. Si moins de 1 % des arbres suivis meurent chaque année, la <a href="https://theconversation.com/secheresses-incendies-et-maladies-les-risques-en-cascade-qui-menacent-les-forets-francaises-157448">mortalité est en constante progression depuis 2010</a>.</p>
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<p>Dans le houppier, c’est-à-dire la partie sommitale des arbres, le constat est encore plus net : la perte de feuilles – dite déficit foliaire – y a crû de manière constante depuis le début des mesures en 1997. Pour la mortalité comme le déficit foliaire, pratiquement toutes les espèces d’arbres sont touchées.</p>
<p>Le <a href="https://theconversation.com/climat-dici-2050-71-des-especes-darbres-en-situation-de-risque-a-paris-bordeaux-montpellier-grenoble-et-lyon-190511">« dépérissement forestier »</a> est évoqué lorsque ce phénomène de dégradation affecte un peuplement entier, voire des massifs. Généralement, il implique plusieurs facteurs environnementaux, qui peuvent se succéder ou agir de concert.</p>
<h2>Cercle vicieux et course contre la montre</h2>
<p>On distingue des facteurs prédisposants (la nature des sols, l’identité et l’origine génétique des arbres en place, la densité du peuplement et/ou considérées), des facteurs déclenchants (des événements de sécheresse et de canicule sévères ou répétés, des défoliations successives à la suite d’attaques de phytophages) induisant une perte de vigueur des peuplements, et enfin des facteurs aggravants (des ravageurs des parties aériennes ou racinaires) contribuant à la mort des arbres affaiblis.</p>
<p>Connus de longue date, ces phénomènes se manifestent actuellement avec une intensité et une ampleur sans précédent. Or les modélisations n’incitent pas à l’optimisme : le climat continuera de se dégrader, mettant à mal la capacité de nombreuses essences d’arbres à se maintenir et adapter leur répartition naturellement.</p>
<p>Cela menace les multiples services que nous offrent les forêts : une forêt qui dépérit stocke de moins en moins de carbone et devient plus sensible au feu.</p>
<p>Le carbone étant relargué sous forme de CO<sub>2</sub> dans l’atmosphère lors des incendies, cela renforce l’intensité, la durée et la fréquence des sécheresses et des canicules, et donc le risque de feu. Un cercle vicieux auquel s’ajoute un risque accru de tempêtes et d’attaques de ravageurs favorisés par le changement climatique.</p>
<p>Des arbres qui dépérissent perdant très vite leur valeur économique, il est crucial de détecter le phénomène rapidement pour sauver ce qui peut l’être et récolter le bois.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/486734/original/file-20220927-16-dvj6xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/486734/original/file-20220927-16-dvj6xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/486734/original/file-20220927-16-dvj6xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=327&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/486734/original/file-20220927-16-dvj6xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=327&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/486734/original/file-20220927-16-dvj6xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=327&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/486734/original/file-20220927-16-dvj6xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=411&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/486734/original/file-20220927-16-dvj6xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=411&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/486734/original/file-20220927-16-dvj6xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=411&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">À gauche, parcelle de chênes en forêt d’Orléans en juillet 2022, à droite parcelle mixte de chênes et pins en juin 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Cécile Vincent-Barbaroux</span></span>
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<h2>La forêt vue du ciel</h2>
<p>Ce faisant, il est aussi indispensable de <a href="https://theconversation.com/pourquoi-la-foret-francaise-a-besoin-dun-traitement-de-fond-177006">mieux appréhender</a> le rôle relatif des facteurs prédisposants, aggravants et déclenchants pour proposer d’autres pratiques de gestion forestière. Les observations au sol, comme les suivis du DSF, sont à cet égard nécessaires pour alerter et comprendre le phénomène du dépérissement. Mais elles ne permettent pas de couvrir tout le territoire.</p>
<p>Le développement de satellites ouvre quant à lui de nouveaux horizons. Le premier dédié à l’observation de la Terre, Landsat-1, est lancé le 23 juillet 1972 par les États-Unis. La France se dote des satellites SPOT (Système Probatoire d’Observation de la Terre) à partir de 1985. S’ils fournissent des images de haute résolution, le coût prohibitif de traitement des images limite leur utilisation.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/487236/original/file-20220929-17-hgnv3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487236/original/file-20220929-17-hgnv3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487236/original/file-20220929-17-hgnv3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=334&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487236/original/file-20220929-17-hgnv3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=334&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487236/original/file-20220929-17-hgnv3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=334&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487236/original/file-20220929-17-hgnv3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=419&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487236/original/file-20220929-17-hgnv3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=419&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487236/original/file-20220929-17-hgnv3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=419&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Orthophoto au drone sur le massif de Tronçais dans le nord-ouest de l’Allier.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Unisylva</span></span>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/487237/original/file-20220929-1555-b4oqas.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487237/original/file-20220929-1555-b4oqas.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487237/original/file-20220929-1555-b4oqas.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=286&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487237/original/file-20220929-1555-b4oqas.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=286&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487237/original/file-20220929-1555-b4oqas.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=286&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487237/original/file-20220929-1555-b4oqas.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487237/original/file-20220929-1555-b4oqas.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487237/original/file-20220929-1555-b4oqas.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Image satellite Sentinel 2 en infra rouge couleurs sur le massif d’Orléans.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Theia</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Les images ne sont pas seulement dans le domaine visible mais aussi dans l’infrarouge, car ce domaine spectral renseigne précisément sur la structure interne des feuilles (proche infrarouge) ou encore sur l’humidité des sols et des végétaux (moyen infrarouge), et permet de distinguer correctement les feuillus des résineux, un feuillage sain d’un feuillage sénescent.</p>
<p>Il existe aujourd’hui une batterie de métriques qui intègrent dans leur calcul différentes bandes spectrales pour un pixel donné. La plus connue d’entre elles est sans conteste le NDVI (<em>normalised difference vegetative index</em>) basé sur la réflectance des canaux rouge (R) et proche infrarouge (PIR).</p>
<h2>Dépérissement à l’heure du big data</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/486730/original/file-20220927-14-d4x8wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="satellite volant au-dessus de la planète" src="https://images.theconversation.com/files/486730/original/file-20220927-14-d4x8wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/486730/original/file-20220927-14-d4x8wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/486730/original/file-20220927-14-d4x8wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/486730/original/file-20220927-14-d4x8wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/486730/original/file-20220927-14-d4x8wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/486730/original/file-20220927-14-d4x8wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/486730/original/file-20220927-14-d4x8wp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Vue d’artiste d’un satellite Sentinel 3.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sentinel_(satellite)#/media/Fichier:Satellitte_Sentinel_3_inng%C3%A5r_i_GMES-programmet_(Foto-_ESA_-_J._Huart,_2008).jpg">ESA -- J. Huart/Wikimedia</a></span>
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</figure>
<p>Aujourd’hui, les satellites SPOT ont laissé place aux satellites européens Sentinel du programme européen Copernicus, avec des avancées majeures. La résolution des images au sol est au minium de 10m×10m et les appareils, qui embarquent des capteurs optiques et/ou radars, repassent aux mêmes endroits tous les cinq jours. Cerise sur le gâteau, les images sont gratuites.</p>
<p>La recherche s’est lancée depuis longtemps dans l’exploitation de ces images. Et l’augmentation spectaculaire des capacités informatiques pour les traiter offre la possibilité de suivis à grande échelle et haute résolution encore inimaginables il y a dix ans.</p>
<p>Dans le domaine de la télédétection forestière, les acteurs de la recherche (ONF, CNPF, DSF, IGN, CNES, INRAE, Université d’Orléans, entre autres) ont mis leurs forces en commun au sein du Centre d’expertise scientifique changements et santé des forêts tempérées.</p>
<h2>Les couleurs de l’épicéa</h2>
<p>Ils ont ainsi développé une routine informatique (<a href="https://www.onf.fr/onf/+/cec::les-rendez-vous-techniques-de-lonf-no69-70.html">ForDead, Dutrieux et coll., 2021</a>) pour quantifier la mortalité des forêts d’épicéas à partir des images Sentinel.</p>
<p>La France a en effet connu à partir de 2018 des attaques massives sur des épicéas, d’abord dans le Grand Est, puis les années suivantes dans la quasi-totalité de la moitié nord de la France. La faute au typographe, un coléoptère d’un demi-centimètre, capable de tuer des épicéas lors de ses pullulations, en agressant les vaisseaux conducteurs de l’arbre. On estime que cette <a href="https://agriculture.gouv.fr/crise-scolytes-sur-epiceas-quel-est-le-bilan-fin-2021">crise</a>, qui commence seulement à marquer le pas, a touché environ 55 000 ha, obligeant à récolter en urgence 19 millions de m<sup>3</sup> d’épicéas en France.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/486726/original/file-20220927-24-1t2wx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="main sur un arbre abîmé" src="https://images.theconversation.com/files/486726/original/file-20220927-24-1t2wx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/486726/original/file-20220927-24-1t2wx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/486726/original/file-20220927-24-1t2wx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/486726/original/file-20220927-24-1t2wx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/486726/original/file-20220927-24-1t2wx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/486726/original/file-20220927-24-1t2wx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/486726/original/file-20220927-24-1t2wx3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Dans la forêt de Villiers-les-Nancy, un épicéa dépérissant.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marielle Brunette</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p>Un épicéa en bonne santé est d’un vert sombre, un épicéa tout juste mort prend une coloration diagnostique orangée tendant vers le gris à fur et à mesure que tombent les aiguilles. C’est ce changement radical de couleur du houppier, mesuré par différentes métriques de végétation, qu’exploite ForDead.</p>
<p>Cette chaîne de traitement, qui a prouvé son efficacité dans le cas de l’épicéa, est en cours d’évaluation pour suivre l’état de santé d’autres essences. C’est le cas notamment des chênaies.</p>
<h2>Hécatombe de chênes pédonculés</h2>
<p>Des mortalités massives de chênes pédonculés et, dans une moindre mesure, de chênes sessiles sont observées dans plusieurs grandes forêts de plaine comme à Chantilly et à Vierzon. Les premières études ont montré que la télédétection permettait de bien identifier les peuplements sains et les plus touchés mais peinait à prédire correctement les taux d’attaques intermédiaires. L’exercice s’avère plus délicat que pour l’épicéa.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/486732/original/file-20220927-18-69nv8q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/486732/original/file-20220927-18-69nv8q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/486732/original/file-20220927-18-69nv8q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=333&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/486732/original/file-20220927-18-69nv8q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=333&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/486732/original/file-20220927-18-69nv8q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=333&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/486732/original/file-20220927-18-69nv8q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=418&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/486732/original/file-20220927-18-69nv8q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=418&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/486732/original/file-20220927-18-69nv8q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=418&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Mise au point d’une méthode cartographique couplant observations de terrain et analyse d’images Sentinel 2 pour l’évaluation de l’état sanitaire des chênaies.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Florian Mouret, Aurore Alarcon et Cécile Vincent-Barbaroux</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En effet, le dépérissement des chênes est un processus lent qui peut prendre plusieurs décennies avant d’aboutir à la mort des arbres, les chênes pouvant même récupérer les bonnes années. Le changement de coloration est également moins spectaculaire que pour l’épicéa. Enfin, ils sont souvent en mélange avec d’autres essences, avec un sous-étage et un sous-bois qui peuvent masquer, vu du ciel, la dégradation de l’état de santé des chênes.</p>
<p>Les études s’orientent aujourd’hui vers l’identification des métriques les plus pertinentes ou l’utilisation de l’intelligence artificielle dont l’intérêt n’est plus à démontrer pour l’exploitation des séries temporelles d’images. C’est ce que s’attache à faire le <a href="https://www.fibois-cvl.fr/recherche-et-developpement/sycomore/">programme de recherche Sycomore</a>. Les attentes des forestiers sont grandes et le pari scientifique et technique est en passe d’être gagné. Pour que nos forêts ne partent pas en poussières ou en fumée.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science (qui a lieu du 7 au 17 octobre 2022 en métropole et du 10 au 27 novembre 2022 en outre-mer et à l’international), et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition aura pour thème : « Le changement climatique ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/191321/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Archaux a reçu des financements de la Région Centre Val de Loire pour le programme ARD SyCoMore. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Cécile Vincent-Barbaroux a reçu des financements de l’organisation de la région Centre Val de Loire pour le programme ARD SyCoMore.</span></em></p>Les progrès technologiques en matière d’imagerie et d’intelligence artificielle peuvent nous aider à mieux évaluer l’état de santé de nos forêts… et à en tirer les conséquences pour agir.Frédéric Archaux, Chercheur, InraeCécile Vincent-Barbaroux, Chercheuse, Université d’OrléansLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1753572022-03-23T19:18:54Z2022-03-23T19:18:54ZLe geoint, nouveau processus de connaissance des lieux et des hommes<p>La connaissance des lieux et des hommes sur leurs territoires a toujours été l’un des préalables de toute activité humaine, voire de toute-puissance. Il suffit de considérer la guerre en Ukraine, en mars 2022, pour prendre conscience que les plus grandes puissances sont informées en temps réel de la situation opérationnelle de l’avancée des troupes russes et de la résistance ukrainienne. Cette connaissance précise des faits dans leur environnement global dépend de technologies et de processus d’analyse de plus en plus évolués. Si Sun Tse, dans <em>L’Art de la guerre</em> au VI<sup>e</sup> siècle av. J.-C., pouvait déjà recommander « Connais le Ciel et la Terre, et la victoire viendra », les moyens de connaissance sont longtemps restés très limités, voire incertains. Le décideur, qu’il soit prince, stratège ou commerçant, se fiait le plus souvent à des informations géographiques imprécises ou inexistantes.</p>
<p>Or, depuis la Première Guerre mondiale, ces moyens de connaissance, comme la photographie aérienne, se sont diversifiés et atteignent aujourd’hui un niveau inégalé de précision d’information. Cette dynamique prend le nom de <a href="https://www.cairn.info/revue-defense-nationale-2016-10-page-103.htm">« Geoint »</a> (pour <em>geospatial intelligence</em>, ou renseignement géospatial). Ce terme, jusqu’alors inconnu en langue française en dehors d’un groupe de spécialistes, désigne le processus de fusion de données géolocalisées à partir de tous les capteurs envisageables et de toutes les sources disponibles et, souvent, de très grande précision. Un nouveau paradigme de la connaissance émerge pour le décideur au point d’apparaître comme une discipline totale et de convergence de tous les savoirs.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/smartphone-en-poche-tous-geographes-96233">Smartphone en poche ? Tous géographes !</a>
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<h2>L’essor d’un nouveau modèle de la connaissance</h2>
<p>Dès les années 2000, les États-Unis définissent une <a href="https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-du-numerique-2002-1-page-61.htm">nouvelle stratégie de l’<em>Information Dominance</em></a>. Le perfectionnement de nouveaux capteurs, comme les <a href="https://www.csug.fr/menu-principal/csug/les-nanosatellites/les-nanosatellites-73899.kjsp">nanosatellites</a>, et l’adoption d’une nouvelle culture d’emploi de la connaissance au profit de l’anticipation et de la gestion de crise ont conduit à produire une nouvelle discipline totale. Le Geoint devient la spécialité de la <a href="https://www.nga.mil/">National Geospatial Agency</a> (NGA) créée en 2003. Il désigne alors l’usage de l’imagerie satellitaire complétée par d’autres sources d’informations pour collecter, traiter, produire et diffuser un renseignement à haute valeur ajoutée, notamment géoréférencé et géolocalisé.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/xawo4fBU13Q?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Destiné à l’origine au renseignement militaire au profit des unités et des autorités politico-militaires, son emploi s’est diffusé à toutes les activités économiques et publiques (la santé, l’éducation, etc.) ainsi qu’à la gestion de crise, comme lors de <a href="https://e-vocable.com/geoint-position-in-addressing-hurricane-katrina/">l’ouragan Katrina</a> en 2006. Il devient alors synonyme de surveillance (approche descriptive par la production d’une donnée vérifiée multisources), de prédiction et de prévision (approche liée à l’anticipation), et de recommandation dans la mesure où il permet de proposer des prescriptions.</p>
<p>Grâce aux progrès des nouvelles technologies numériques depuis les années 1990, les capacités de connaissance se sont élargies pour répondre à des besoins toujours plus étendus, aussi bien pour les opérations militaires (Irak et Afghanistan, Sahel et Moyen-Orient) que pour toutes activités humaines (gestion des embouteillages dans les métropoles, surveillance des milieux naturels, gestion des activités agricoles, etc.).</p>
<p>Le Geoint est ainsi devenu source d’un pouvoir de nouvelle nature, en créant un nouveau modèle de connaissance grâce à la précision de la localisation, la fusion des données et la performance de l’analyse des informations retenues. Toutes les puissances mondiales tendent à l’acquérir : les États-Unis et ses alliés historiques depuis les années 2000, les grandes organisations internationales comme les Nations unies ou l’Union européenne, les puissances émergentes depuis les années 2010 comme l’Inde ou la Chine.</p>
<h2>La donnée géolocalisée et l’analyse, fondement du retour de la géographie comme savoir stratégique</h2>
<p>L’intérêt du Geoint est sa capacité à géoréférencer et à géolocaliser tout type d’information suscitant un intérêt pour un décideur militaire, économique ou politique. Dans le domaine militaire, par exemple, il permet de répondre aux besoins de <a href="https://www.washingtonpost.com/technology/2022/01/06/jan6-algorithms-prediction-violence/">l’anticipation stratégique</a>, la planification prédécisionnelle, la planification opérationnelle ou encore la conduite des opérations en temps réel.</p>
<p>De toute évidence, la fusion des données géolocalisées dépend d’un ensemble de capteurs, d’outils et de techniques. Par exemple, le traitement de la donnée s’appuie sur la <a href="https://www.esrifrance.fr/geomatique.aspx">géomatique</a>, les systèmes d’informations géographiques et la géovisualisation des données collectées dans un cadre temporel comme les risques naturels sur dix années ou la criminalité urbaine pendant une semaine dans tel quartier.</p>
<p>La question du big data s’est ainsi imposée dans les années 2010, amenant au premier plan plusieurs problématiques à la fois techniques et intellectuelles.</p>
<p>Celles-ci soulignent l’importance de la maîtrise de différents secteurs clés du Geoint comme la science cartographique, la télédétection, les systèmes d’information géographique (SIG) et l’analyse spatiale. D’autres aspects sont venus s’ajouter à la fin des années 2010 comme la production participative, la géographie humaine, l’analyse visuelle, l’anticipation. En 2019, la <a href="https://www.nga.mil/about/strategy.html">stratégie de la NGA pour 2025</a> accentue ses priorités vers l’analyse et la visualisation des données, l’exploitation du Geoint avancé (ce qu’on appelle le triple A : Automatisation, Augmentation, intelligence Artificielle), la modélisation des activités et de la Terre et la production des données.</p>
<p>L’intérêt du Geoint repose également dans son exploitation à des fins d’analyse et d’aide à la décision. De fait, dans les <a href="https://eda.europa.eu/what-we-do/all-activities/activities-search/eu-satcom-market">centres de fusion</a> Geoint, qu’ils soient nationaux ou internationaux, son activité est associée au domaine de l’exploitation des données. Celle-ci relève de l’analyse géographique et géopolitique qui requiert des compétences précises à la fois en termes de méthodologie, de raisonnement et de connaissances régionales (le Sahel, la Syrie, etc.).</p>
<p>En d’autres termes, la discipline Geoint, qui apparaît incontournable dans nombre d’activités humaines, est à la source d’une nouvelle science de l’information géospatiale en s’appuyant sur la donnée image, mais aussi sur la topographie et la toponymie, la cartographie, la géographie physique et la géographie humaine. Entre autres exemples, le Geoint développé au <a href="https://european-union.europa.eu/institutions-law-budget/institutions-and-bodies/institutions-and-bodies-profiles/satcen_fr">Centre satellitaire de l’Union européenne (SatCom)</a>, créé en 2004, réalise des produits de gestion civile des crises en matière d’aide humanitaire (camps de réfugiés par exemple), de planification d’urgence (catastrophe naturelle), de surveillance générale de la sécurité (migrants clandestins en Méditerranée).</p>
<h2>Vers une science de l’information géospatiale</h2>
<p>Depuis la fin des années 2010, le Geoint renouvelle la connaissance géographique et géopolitique, notamment dans le contexte de la multiplication des opérations de gestion de crises dans le monde. La structuration d’un raisonnement/la conception d’une méthodologie d’analyse, qui relève de l’exploitation dans le processus Geoint, prend forme pour exploiter les meilleures possibilités des outils et en extraire les informations essentielles, le plus souvent centrées sur la géographie humaine.</p>
<p>Les domaines du « big data analytics » (données analysées à la suite du processus de fusion) et des analyses visuelles (interface visuelle associant géomatique, big data et analyse) émergent comme des spécialisations professionnelles.</p>
<p>Parallèlement, l’élaboration du Geoint actuel tend à décloisonner les savoirs au point de devenir une discipline totale au-delà de ce qui était appelé jusqu’alors « les Int ». L’Osint (source ouverte) constitue, par exemple, l’un de ces « Int » qui apparaît comme une partie du Geoint, lui-même situé au centre du processus de convergence globale des données.</p>
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<p>Le Geoint tend à se renouveler en permanence par la profusion des données accessibles et par la technicité croissante des outils. Il suppose de relever des défis techniques liés à l’exploitation des données, la saturation des réseaux d’information, l’interopérabilité de systèmes ainsi que la capacité de transmission. L’une des solutions apportées porte sur l’emploi de l’Intelligence artificielle, du <a href="https://www.journaldunet.fr/web-tech/guide-de-l-intelligence-artificielle/1501333-deep-learning-definition-et-principes-de-l-apprentissage-profond/"><em>deep learning</em></a> et du <a href="https://www.journaldunet.fr/web-tech/guide-de-l-intelligence-artificielle/1501881-machine-learning-definition-algorithmes-et-langage/"><em>machine learning</em></a>.</p>
<p>Ces nouveaux moyens techniques améliorent la qualité et la performance du Geoint dans quantité d’activités comme l’aide à la décision pour les entreprises en matière de connaissance sur un site d’intérêt (<em>geospatial business intelligence</em> ou marché de la recherche) ou la gestion de crise (Geoint Strategic ou l’étude des risques géopolitiques d’un site). Toutefois, la technicité ne remplace pas la compétence de l’analyste pour répondre à la finalité du Geoint, qui reste l’aide à la décision.</p>
<p>Un autre défi majeur tient à la question de la formation des analystes, qui reste souvent le sujet le plus méconnu et le plus stratégique du développement de cette nouvelle science de l’information géospatiale.</p>
<p>La stratégie de la NGA en fait l’une de ses priorités pour les années 2020. En France, à Sorbonne Université Lettres, un master <a href="http://vof.paris-sorbonne.fr/fr/index/master-XB/sciences-humaines-et-sociales-SHS/master-gaed-geopolitique-program-mgaed1l-613.html">Géopolitique-Geoint</a>, ouvert depuis 2020, vise à former les futurs analystes par l’hybridation des savoirs. En partenariat avec le ministère des Armées, cette formation prépare les cadres dans le domaine de l’imagerie spatiale, la fusion de données géolocalisées et l’analyse géopolitique.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/en-france-des-services-de-renseignement-sans-vrais-contre-pouvoirs-163040">En France, des services de renseignement sans vrais contre-pouvoirs</a>
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<p>L’exploitation du Geoint soulève également bien d’autres problématiques à la fois éthiques (intrusion du Geoint dans la vie privée par exemple), juridiques (accès aux données, souveraineté des données) et économiques (rentabilité, structuration de l’écosystème). Initié aux États-Unis depuis les années 1990, le Geoint s’impose progressivement comme une science globale fondée sur le processus de fusion d’informations géographiques multisources. Il devient central bien au-delà du renseignement dont il est issu, et incontournable pour les États aspirant à devenir ou redevenir des puissances mondiales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/175357/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Boulanger ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Conçu pour apporter une aide à la décision, le Geoint (« geospatial intelligence ») est un processus de renseignement basé sur la collecte de toutes les données géolocalisées.Philippe Boulanger, Professeur des universités en géographie, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1784622022-03-08T19:05:24Z2022-03-08T19:05:24ZComment mieux préparer l'écosystème de santé aux menaces sanitaires ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/450406/original/file-20220307-83984-fezcq9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C7%2C1165%2C788&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La modélisation prospective d'un ensemble de paramètres, données de santé et extrinsèques, apparait comme une piste prometteuse pour anticiper les risques.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixnio.com/media/coronavirus-covid-19-health-care-influenza-syringe">Pixinio</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Comme nous l'avions souligné dans un précédent <a href="https://theconversation.com/laboratoires-pharmaceutiques-une-industrie-aujourdhui-encore-plus-reactive-que-prospective-174624">article</a>, les industries du médicament sont naturellement aux avant-postes de l'innovation scientifique et des traitements de l'urgence, davantage que de la veille à long terme. En témoigne encore le temps très court, moins d'un an, qui se sera écoulé entre la découverte des premiers cas d'une maladie inconnue à Wuhan et le lancement de la campagne vaccinale à grande échelle du Royaume-Uni.</p>
<p>En effet, l'ampleur et la complexité des phénomènes prospectifs – au-delà de leurs composantes scientifiques et logistiques – nécessitent de mutualiser veille et anticipation en croisant expertises et talents, et l'exercice ne peut être confié aux seuls laboratoires dont les contraintes et les exigences limitent naturellement des lectures intégratives et systémiques.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1484198044690264068"}"></div></p>
<p>Compte tenu des sommes requises en recherche (plus encore en développement clinique), de la nécessité de mobiliser des moyens, notamment humains, et face à la difficulté d'appréciation de phénomènes multifactoriels comme ceux des menaces pandémiques, le principe même de la prospective, exercice difficile et incertain, met notamment en exergue l'indispensable soutien des acteurs publics dans un effort à l'interface de plusieurs disciplines, mobilisant de nombreux savoir-faire.</p>
<h2>Le défi du changement climatique</h2>
<p>Il est donc finalement peu surprenant que la veille requise autour d'aspects macro-sociétaux soit l'apanage d'organismes publics, nationaux voire supranationaux, de fondations ou de think tanks indépendants du secteur industriel (Organisation Mondiale de la Santé, Biomedical Advanced Research and Development Authority, Gates Foundation, <a href="https://onehealthinitiative.com/">One Health Initiative</a>, etc.).</p>
<p>À analyser, par exemple, les processus et les <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1111/j.1365-2796.2011.02415.x">facteurs d'influence du changement climatique sur la santé humaine</a>, on peut se rendre compte que ce <a href="https://www.nejm.org/doi/10.1056/NEJMra1109341?url_ver=Z39.88-2003&rfr_id=ori:rid:crossref.org&rfr_dat=cr_pub%20%200www.ncbi.nlm.nih.gov">tableau d'ensemble</a> sort assez largement du cadre strict de réponses en termes d'innovations thérapeutiques et concerne, à de très nombreux égards, les politiques territoriales, agricoles, environnementales et sanitaires, les décisions géopolitiques et la coopération internationale – apanage des dirigeants, des acteurs de santé publique, des associations, des ONGs bien davantage que des acteurs privés.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/450410/original/file-20220307-84357-1tncrf2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/450410/original/file-20220307-84357-1tncrf2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/450410/original/file-20220307-84357-1tncrf2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=594&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/450410/original/file-20220307-84357-1tncrf2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=594&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/450410/original/file-20220307-84357-1tncrf2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=594&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/450410/original/file-20220307-84357-1tncrf2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=746&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/450410/original/file-20220307-84357-1tncrf2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=746&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/450410/original/file-20220307-84357-1tncrf2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=746&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.nejm.org/doi/10.1056/NEJMra1109341">Nejm.org</a></span>
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<p>C'est sans doute la lettre et l'esprit qui anime la récente mise en place <a href="https://esante.gouv.fr/actualites/parisante-campus-le-nouveau-berceau-dinnovation-en-e-sante-inaugure">du campus PariSanté</a>, inauguré en grande pompe en décembre dernier. PariSanté Campus s'est donné les moyens de devenir un incubateur d'innovation, de recherche et de formation en santé numérique, grâce à la convergence de nombreux acteurs selon une dynamique d'écosystème, au croisement de nombreuses compétences : croisements bénéfiques entre acteurs publics et privés, acteurs du numérique et du soin, entrepreneurs et chercheurs…</p>
<p>Vecteur de synergies et d'interdisciplinarité, PariSanté Campus se propose de donner matière à un fertile terreau d'innovations tout autant que de référentiels pour le système de santé de demain.</p>
<p>Comme le promeut avec justesse et humour, le professeur Antoine Tesnière, son directeur général, la «sérendipité de la machine à café» permet, par la rencontre et l'échange informels, l'étincelle nécessaire à l'intelligence collective et une grammaire renouvelée de la prospective et de l'innovation.</p>
<h2>Combinatoire de données</h2>
<p>Accroître les solidarités entre secteurs et la multidisciplinarité des équipes fait partie des défis à relever, à notre sens, pour mieux préparer les industriels de santé aux nouvelles menaces. Pour cela, elles pourront également trouver un atout précieux dans la donnée.</p>
<p>La combinaison de modèles prédictifs, l'analyse de données statistiques associant conditions climatiques, sanitaires et transmission des maladies sur un plan régional, voire mondial, devrait ainsi faire l'objet d'attentions de plus en plus poussées et donner lieu à la mise en place d'outils de suivi et d'anticipation indispensables à l'analyse de futurs scénarii des maladies infectieuses à mesure que les conditions climatiques se modifient.</p>
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<figcaption><span class="caption">Inauguration PariSanté Campus (PariSanté Campus, décembre 2021).</span></figcaption>
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<p>Comme nous avions pu le montrer dans un <a href="https://thechoice.escp.eu/tomorrow-choices/how-can-big-data-help-to-understand-apprehend-and-control-a-pandemic/">récent article</a>, gouvernants, acteurs de santé publique, personnel médical et hospitalier tireraient profit de la modélisation fine et prospective d'un ensemble de paramètres, résultat d'une combinatoire de données de santé et de données extrinsèques plus générales, souvent issues des sciences sociales, dont il leur revient d'organiser l'architecture d'ensemble et de favoriser les échanges.</p>
<p>Il pourrait notamment s'agir de mettre à disposition les données de veille et d'anticipation des crises sanitaires au service des progrès thérapeutiques. Si les causes de la rapidité du développement de vaccins par des opérateurs privés sont multiples, on ne peut qu'être impressionné par l'incroyable systématique de la collecte et du traitement de données rendues possibles grâce à la puissance, nouvellement apprise, du big data et de l'intelligence artificielle en santé.</p>
<p>Ingénierie génomique, essais cliniques, plates-formes de production, optimisation logistique, instruments de pilotage et de suivi des campagnes de vaccination, détection précoce des risques de contamination, éducation thérapeutique des populations constituent autant de moyens, de méthodes, de métriques qui se nourrissent, depuis l'origine de la pandémie, de la collecte et de l'analyse de données massives.</p>
<p>Mais il convient aussi, dans le respect des règles de confidentialité requises, que les acteurs publics donnent davantage de liberté d'accès à des industriels à l'initiative de l'innovation thérapeutique, lorsque l'analyse de signaux faibles ou l'étude des scénarii futurs le réclament.</p>
<p>Il est, à ce titre, symptomatique et rassurant que PariSanté Campus – dont il a été question plus haut – compte le <a href="https://www.cnil.fr/fr/la-plateforme-des-donnees-de-sante-health-data-hub">Health Data Hub</a>, plate-forme nationale des données de santé, parmi ses cinq partenaires fondateurs.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/178462/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Jallat ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les acteurs de la santé peuvent notamment miser sur les apports du big data et de la modélisation pour améliorer leurs capacités de prospective aux côtés des pouvoirs publics.Frédéric Jallat, Professeur de marketing, directeur scientifique du mastère spécialisé en management pharmaceutique et des biotechnologies , ESCP Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1744382022-01-13T20:03:21Z2022-01-13T20:03:21ZDeepfake, racisme, armes autonomes : comment donner une éthique à l’IA<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/440427/original/file-20220112-17-1sxwkct.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2000%2C1598&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Peut-on mettre au point des intelligences artificielles éthiques ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/152824664@N07/42271822770">Mike MacKenzie/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Le 24 novembre dernier, l’Unesco a adopté un <a href="https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000379920_fre.page=15">projet de recommandation</a> sur l’éthique de l’intelligence artificielle (IA) dans le but de donner des fondements éthiques à vocation universelle à ses états membres. Cette annonce, importante comme nous le verrons, peut de prime abord interroger. En effet, en quoi l’éthique peut-elle concerner l’IA ? Ce concept n’est-il pas réservé aux individus ? Pour répondre à cette interrogation, commençons tout d’abord par revenir aux fondements de ce qu’est l’éthique, ainsi qu’à la compréhension de ce qu’est l’IA.</p>
<h2>L’éthique, prescripteur des valeurs et des lois</h2>
<p>Rappelons que l’éthique est synonyme de morale, en plus actuel, les deux signifiant « les mœurs ». On compte principalement trois doctrines philosophiques permettant de définir et penser l’éthique. Résumées de manière lapidaire, on peut dire que l’éthique du philosophe de la Grèce antique <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89thique_%C3%A0_Nicomaque">Aristote</a> consiste en un perfectionnement des vertus, conjugué à une manière d’être prudente, ayant le souci du respect des mœurs de la cité. Pour le philosophe prussien Emmanuel Kant, en revanche, l’éthique est un devoir, celui de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Imp%C3%A9ratif_cat%C3%A9gorique">l’impératif catégorique</a>, qui consiste à n’agir que si l’action en jeu est universalisable, c’est-à-dire pourrait servir de modèle pour les autres hommes. Enfin, dans la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Utilitarisme">pensée utilitariste</a>, dont les précurseurs sont les penseurs britanniques Jeremy Bentham et John Stuart Mill, l’éthique consiste à choisir les actions en fonction de leurs conséquences, bonnes ou mauvaises, en visant le bonheur du plus grand nombre.</p>
<p>Ces trois doctrines historiques, étoffées par nombre de philosophes plus actuels (J. Habermas, H. Jonas, J. Derrida, P. Ricœur, etc.) ont façonné l’acception contemporaine du concept d’éthique tel qu’il est usité dans le débat public. Aujourd’hui, le concept éthique est généralement associé aux avis rendus par des comités consultatifs d’éthique à propos de dilemmes moraux, à l’issue de processus délibératifs, plus ou moins inclusifs et démocratiques.</p>
<p>Ces avis peuvent définir des valeurs, des principes voire des normes de comportements, évitant de nuire à autrui et visant le bonheur des hommes dans une société juste. Les normes, en particulier, ont une vocation pratique par leur transposition naturelle dans la loi, la réglementation ou encore les codes de déontologie, en définissant les droits et devoirs des citoyens, c’est-à-dire en fixant des limites à leurs comportements.</p>
<h2>L’IA, science sans conscience d’elle-même</h2>
<p>L’intelligence artificielle, quant à elle, est une technologie protéiforme visant à reproduire ou simuler l’intelligence humaine. À la croisée entre mathématiques et informatique, cette discipline connaît aujourd’hui un essor phénoménal permis par l’avènement du big data et les capacités de calculs vertigineux des microprocesseurs. L’IA permet notamment de faire des regroupements homogènes d’ensembles d’objets abstraits sur la base de données d’apprentissage. Cette fonctionnalité, a priori simple, trouve paradoxalement des applications surprenantes pour lesquelles on imaginerait des mécanismes plus complexes.</p>
<p>Ainsi, regrouper des images homogènes, par exemple des photos de chats, permet la reconnaissance d’image. De la même façon, regrouper les sons (phonèmes) composant des mots permet la reconnaissance vocale. Enfin, associer des objets sur la base d’un critère donné permet aux machines de raisonner et prendre des décisions, par exemple en regroupant les candidats admissibles à une embauche, c’est-à-dire en les distinguant de ceux dont la candidature est rejetée.</p>
<p>Cependant, quelle que soit la sophistication de l’IA et le <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-020-03051-4.epdf?sharing_token=kTk-xTZpQOF8Ym8nTQK6EdRgN0jAjWel9jnR3ZoTv0PMSWGj38iNIyNOw_ooNp2BvzZ4nIcedo7GEXD7UmLqb0M_V_fop31mMY9VBBLNmGbm0K9jETKkZnJ9SgJ8Rwhp3ySvLuTcUr888puIYbngQ0fiMf45ZGDAQ7fUI66-u7Y%3D">caractère impressionnant de ses performances</a>, l’IA actuelle est dite « faible », car elle ne permet « que » l’exécution d’une unique tâche spécifique : jouer au jeu de Go, identifier une tumeur sur une radio, détecter des transactions bancaires frauduleuses, noter le risque de défaut des emprunteurs, etc. Une intelligence artificielle générale, capable d’effectuer toutes les tâches cognitives propres aux humains, même limitées aux capacités d’un enfant de deux ans, n’est pas à l’ordre du jour, tandis que la création d’une IA dotée d’une forme de conscience de soi et de pensée reste encore un doux rêve au regard des connaissances actuelles en neurosciences.</p>
<p>Une IA n’est finalement rien d’autre qu’un programme informatique adaptatif (qui s’adapte à ses données d’entraînement en Machine Learning ou à son contexte en apprentissage par renforcement), sans conscience, sans valeurs, sans pensées, sans libre arbitre, incapable de discerner le bien du mal et donc d’agir volontairement et consciemment de manière conforme à la morale ou à la loi. Aussi, si une IA peut mécaniquement produire des résultats légaux, c’est-à-dire conformes à la loi, parler de comportement éthique pour une IA relève d’un non-sens, puisqu’agir de façon éthique nécessite la possibilité d’un choix en conscience, rendu possible par le libre arbitre.</p>
<p>L’IA est donc amorale, au même titre que toutes les technologies. Mais de la même manière que la maîtrise de l’électricité a débouché sur des applications devenues indispensables à l’humanité (se chauffer, s’éclairer…) comme néfastes (la gégène a aussi été utilisée à des fins de torture), l’IA offre des usages bénéfiques mais aussi potentiellement nuisibles pour l’humanité.</p>
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<img alt="Partie de Go entre AlphaGo et le joueur Lee Sedol ; un cadre de l’image montre le plateau de go vu de dessus, un autre cadre filme le joueur Lee Sedol" src="https://images.theconversation.com/files/440429/original/file-20220112-13-1bxf1bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/440429/original/file-20220112-13-1bxf1bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/440429/original/file-20220112-13-1bxf1bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/440429/original/file-20220112-13-1bxf1bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/440429/original/file-20220112-13-1bxf1bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/440429/original/file-20220112-13-1bxf1bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/440429/original/file-20220112-13-1bxf1bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">AlphaGO est une IA faible : elle sait jouer au Go… mais est incapable de reconnaître une image de chat.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/prachatai/25708381781">Prachatai/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De fait, si les applications bénéfiques de l’IA sont indiscutables (amélioration des diagnostics médicaux, freinage automatique d’urgence des véhicules, maintenance prédictive, traduction automatique…), les risques qui lui sont associés existent bel et bien. On songe d’abord au risque démocratique, avec les bulles informationnelles des réseaux sociaux qui polarisent le débat, ou avec les deepfakes, ces vidéos contrefaites permettant de faire dire n’importe quoi à n’importe qui de façon très réaliste. Ensuite, l’IA permet l’émergence d’une surveillance généralisée, avec la reconnaissance faciale, voire l’analyse de nos discussions privées. On peut penser également à toutes les décisions prises automatiquement par des IA sans qu’il soit possible d’en expliquer les raisons. Ces dernières peuvent aussi être biaisées avec, en particulier, un risque de discrimination avéré. Des travaux menés aux États-Unis illustrent ce dernier point, et montrent que les <a href="https://www.propublica.org/article/machine-bias-risk-assessments-in-criminal-sentencing">populations afro-américaines</a> de l’étude étaient davantage pénalisées par des juridictions recourant à des IA de justice prédictive. On peut y ajouter la question des armes létales autonomes, celle des <a href="https://theconversation.com/apprentissage-profond-et-consommation-energetique-la-partie-immergee-de-lia-ceberg-172341">externalités de l’IA en matière d’empreinte carbone</a> ou encore de son impact sur l’emploi et les inégalités…</p>
<h2>Encadrer l’usage de l’IA</h2>
<p>On le voit, les risques liés aux applications de l’IA sont nombreux, manifestes et sérieux. Mais si l’on y réfléchit, ce n’est pas tant l’IA, en tant que technologie, qui est ou n’est pas éthique, mais bien davantage ses usages, imaginés et développés par des humains, car seuls ces derniers disposent d’une liberté de choix en conscience.</p>
<p>Alertés sur ces problèmes, les industriels et la communauté scientifique se sont lancés, assez récemment, dans des projets de recherche en IA Éthique (Fair Machine Learning), visant notamment à corriger les biais de discrimination des modèles mais aussi à rendre explicables les résultats des algorithmes. L’explicabilité a pour objet de rendre les résultats des modèles intelligibles pour les utilisateurs. Or, bien que tout algorithme soit compris par son développeur, les résultats de certaines IA ne peuvent être expliqués et justifiés de façon argumentée au regard de la complexité du modèle entraîné. On peut alors parler de boîte noire, inacceptable pour les décisions impactant la vie des individus (recrutement, crédit…). Cette question concerne tout particulièrement les réseaux de neurones, modèles inspirés des neurones biologiques, et de ses avatars les plus populaires et performants, l’apprentissage profond (ou Deep Learning) et les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/GPT-3">réseaux convolutifs</a> pour lesquels le nombre de paramètres peut se compter en milliards. L’explicabilité est donc une condition nécessaire à l’acceptation sociale des décisions basées sur les modèles d’IA. En outre, son avènement renforcerait la confiance du citoyen dans cette technologie.</p>
<p>Mais si ces projets vont dans le sens d’une justice et d’une confiance accrues, cela ne suffit pas à couvrir l’étendue des risques liés à l’IA mais uniquement de ceux relevant de la légalité des modèles. Ainsi, les questions, déjà mentionnées, liées au risque démocratique, à la surveillance généralisée ou encore aux armes létales autonomes échappent à ces solutions techniques car elles sont d’une autre nature, éthique (est-il moral d’autoriser l’application concernée ?), juridique (quels sont les droits et les devoirs associés à l’application, une fois celle-ci autorisée), ou encore politique (comment gérer les conséquences économiques, sociétales et environnementales des applications concernées ?).</p>
<p>Précisément, le <a href="https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000379920_fre.page=15">projet de recommandation pour une éthique de l’IA</a>, adopté par les 193 membres de l’Unesco le 24 novembre dernier, pose un cadre normatif de valeurs et de principes qui constitue un socle commun, préalable à la formulation de lois et règlements par les états membres. Par exemple, une recommandation précise concerne la question de la discrimination :</p>
<blockquote>
<p>« Les états membres doivent veiller à ce que les stéréotypes fondés sur le genre et les préjugés discriminatoires ne soient pas transposés dans les systèmes d’IA, mais plutôt repérés et corrigés de manière proactive. »</p>
</blockquote>
<p>En outre, ce texte prône des garde-fous à toutes les étapes du cycle de vie des IA, responsabilisant les parties prenantes, les individus comme les organisations (et non pas les IA comme nous l’avons vu), concernées par la légalité, la conception, le développement et l’exploitation des applications adossées à cette technologie.</p>
<p>Cet évènement représente donc une avancée utile et importante mais il faut toutefois mentionner deux bémols :</p>
<ul>
<li><p>Tout d’abord, ces recommandations sont juridiquement peu contraignantes dans la mesure où les états membres ne s’engagent, au titre de la constitution de l’Unesco (art. IV, B, §4 et §6), qu’à soumettre les recommandations aux autorités nationales compétentes puis à rendre compte des suites qui leur sont données par la remise d’un rapport ultérieur.</p></li>
<li><p>Ensuite, l’IA est considérée comme l’instrument de la prochaine révolution économique, c’est donc un enjeu géostratégique majeur, sur le plan économique mais aussi militaire.</p></li>
</ul>
<p>Or, dans un contexte international de compétition économique exacerbée et de tensions entre grandes puissances (on pense d’abord aux relations Sino-Américaines), on peut s’interroger sur le poids de ces recommandations…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174438/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian Goglin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En novembre 2021, l’Unesco a adopté un projet de recommandation visant à donner des fondements éthiques aux travaux et à l’utilisation des intelligences artificielles.Christian Goglin, Professeur en Finance et Intelligence Artificielle, ICD Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1707542021-12-01T18:55:03Z2021-12-01T18:55:03ZMédecine, police, justice : l’intelligence artificielle a de réelles limites<p>Les systèmes d’IA (intelligence artificielle), qui envahissent nos quotidiens, sont des <a href="http://statistique-et-societe.fr/article/view/719">algorithmes d’apprentissage automatique</a> consommant de grandes masses de données pour leur entraînement. De nombreux exemples montrent que ceux-ci ne sont pas aussi performants que nous pourrions l’espérer (ou le craindre). La compréhension de leurs limites éclaire le choix de leur déploiement et préalablement celui de l’accès à des données personnelles.</p>
<p>Les médias ont largement communiqué sur les performances d’AlphaZero pour jouer aux échecs ou au go, sur celles, <a href="https://www.bmj.com/content/374/bmj.n1872">parfois discutables</a>, des algorithmes de <a href="https://www.digitalcorner-wavestone.com/2018/10/deep-learning-lia-de-google-detecte-mieux-cancer-sein-medecins/">détection de tumeurs</a>, la <a href="https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/2018/10/09/32001-20181009ARTFIG00079-l-intelligence-artificielle-peu-a-peu-incontournable-dans-la-sante.php">médecine 4p</a> (personnalisée, prédictive et participative, préventive), sur les craintes suscitées par les projets de <a href="https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-surveillance/20160913.RUE3816/les-logiciels-de-police-predictive-aggravent-la-discrimination.html">police prédictive</a> (<em>PredPol</em>).</p>
<p>On communique moins sur les succès réels de la détection de défaillances sur une <a href="https://www.researchgate.net/publication/344622785_Conditional_Anomaly_Detection_for_Quality_and_Productivity_Improvement_of_Electronics_Manufacturing_Systems">chaîne de production industrielle</a>, l’<a href="https://www.latimes.com/california/story/2020-04-21/lapd-ends-predictive-policing-program">abandon de PredPol</a> par la police de Los Angeles, la faible performance des recommandations publicitaires et déjà la <a href="https://www.journaldunet.com/ebusiness/publicite/1144531-calcul-de-la-rentabilite-de-la-publicite-numerique-attention-terrain-piege/">difficulté de l’évaluer</a>. Trois points éclairent ces questions de performance de prévision et donc d’aide, bénéfique ou non, à la décision : prévision personnalisée <em>vs</em> de population, complexité et dimension du domaine d’application, représentativité du test d’évaluation des performances.</p>
<h2>IA empirique et apprentissage automatique</h2>
<p>La prévision d’une valeur ou de la probabilité d’occurrence d’un événement (ruine, défaillance, pathologie, récidive, acte violent, acte d’achat, embauche…) est basée sur l’observation de données historiques personnelles issues de l’observation de <em>p</em> caractéristiques ou variables (biologiques, génomiques, comptables, socio-économiques, comportementales, CV…) de <em>n</em> situations ou individus ainsi que celles de la réponse recherchée : valeur ou occurrence de l’événement. L’entraînement de l’algorithme consiste à quantifier les relations selon le <a href="https://www.math.univ-toulouse.fr/%7Ebesse/pub/Appren_stat.pdf">type d’algorithme</a> utilisé entre les variables et la réponse.</p>
<p>Cette étape réalisée et ayant observé les <em>variables</em> pour une nouvelle situation ou individu, une aide à la décision est la conséquence de la prévision de sa <em>réponse</em>. Cette prévision est construite en <em>combinant</em>, à l’aide des paramètres, les réponses prises par les individus les <em>plus proches</em> du nouvel individu au sens du type d’algorithme utilisé. Rappelons qu’un tel algorithme ne crée rien, il fournit une prévision la plus <em>conforme</em> à l’historique observé à condition que le nouvel individu, la nouvelle situation, soit bien issue du domaine concerné.</p>
<p>Schématiquement, la conception d’un système d’IA passe par des étapes essentielles</p>
<ol>
<li><p>les définitions de l’objectif et du domaine d’application,</p></li>
<li><p>le dimensionnement et choix du modèle ou type d’algorithme,</p></li>
<li><p>l’acquisition des données d’entraînement, leur évaluation,</p></li>
<li><p>l’entraînement avec optimisation d’hyper paramètres,</p></li>
<li><p>le test afin d’en évaluer rigoureusement les performances.</p></li>
</ol>
<p>Les points 1 et 3 soulèvent la question fondamentale mais classique en statistique : les données d’entraînement sont-elles représentatives de l’objectif et du domaine visés ? Le point 4 technique est quasiment automatisé. Nous allons illustrer les points 1, 2 et 5 en prenant pour exemple d’actualité la médecine 4_p_ en montrant en quoi, personnalisée et prédictive peuvent être antinomiques pour un système d’IA empirique.</p>
<h2>Prévision individuelle et moyenne</h2>
<p>Plus la taille <em>n</em> d’un échantillon est importante, meilleure est la prévision d’une moyenne (médecine de population, santé publique). Plus précisément, l’erreur décroît avec la racine carrée de <em>n</em>. En revanche, une prévision individuelle (médecine personnalisée) reste entachée d’une erreur, quelle que soit la taille <em>n</em> considérée. Cette erreur incompressible est une conséquence des erreurs aléatoires, bruits, de mesure et des effets inconnus de facteurs non pris en compte. Ceci explique en partie les très mauvaises performances de la prévision d’un comportement humain en justice (<a href="https://www.propublica.org/article/how-we-analyzed-the-compas-recidivism-algorithm">30 à 40 % d’erreur</a>) ou <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/Delivery.cfm/SSRN_ID3418855_code3178140.pdf">police prédictive</a>.</p>
<p>En médecine de population, des modèles statistiques élémentaires (régression logistique), permettent de prouver (significativité statistique), quantifier, expliquer l’influence de facteurs (tabac, alcool, pesticides…) sur la santé publique. C’est un objectif de la cohorte <a href="https://www.constances.fr/"><em>Constances</em></a> rassemblant <em>n</em>=200 000 personnes afin d’atteindre la puissance statistique nécessaire pour mettre en évidence des impacts inconnus de facteurs ou de leurs interactions.</p>
<p>En médecine personnalisée, réduire l’erreur de prévision d’une pathologie multifactorielle complexe incite à associer de nombreux facteurs génétiques et environnementaux. C’est un objectif du plan <a href="https://solidarites-sante.gouv.fr/systeme-de-sante-et-medico-social/recherche-et-innovation/france-genomique"><em>France Génomique 2025</em></a> qui finance le séquençage annuel massif de milliers de génomes. Les avancées des biotechnologies permettent de détecter, pour chaque individu, des occurrences de millions de SNPs (<em>single-nucleotide polymorphism</em>) ou mutations, de mesurer les expressions (ARN) de dizaines de milliers de gènes, de quantifier des centaines de milliers de protéines… Autant de facteurs <em>omiques</em> et leurs interactions susceptibles d’influencer, comprendre, prévoir, une pathologie complexe et que les technologies numériques permettent de stocker, analyser.</p>
<h2>Le fléau de la très grande dimension</h2>
<p>Comme en reconnaissance d’images composées de millions de pixels, le concepteur d’un système d’IA est alors confronté à un <a href="https://press.princeton.edu/books/hardcover/9780691652214/adaptive-control-processes">problème de très grande dimension</a> où <em>p</em> le nombre de variables peut être beaucoup plus grand que la taille <em>n</em> de l’échantillon ; <em>p</em> très grand signifie <em>plus d’informations</em> mais aussi plus d’<em>indéterminations</em> pour estimer les paramètres d’un algorithme.</p>
<p>En effet, en très grande dimension, les individus se trouvent explosés dans un espace essentiellement vide, tous uniques, isolés et finalement tous aussi éloignés les uns des autres, mettant en défaut la stratégie d’apprentissage.</p>
<p>En reconnaissance d’images, des empilements de couches spécifiques (<em>convolutionnelles</em>) de neurones contournent le problème en exploitant les proximités géométriques des pixels. Les données omiques n’offrent pas ces capacités. Même s’il est techniquement possible de manipuler de très gros ensembles de données, le fléau de la dimension égare tout algorithme ; les GWAS (<em>genomic wide association studies</em>) appliquées à la prédictibilité de maladies multifactorielles sont <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0154387">mises en échec</a>.</p>
<p>Seule une sélection drastique des variables lors de <em>procédures indépendantes</em> permet une réduction pertinente de la dimension. En effet, un piège consiste à présélectionner des variables (gènes, protéines…) puis entraîner un algorithme sur le <em>même</em> jeu de données. Ceci est la cause de résultats trop optimistes déjà dénoncés en <a href="https://www.pnas.org/content/99/10/6562">2002</a> mais <a href="http://statistique-et-societe.fr/article/view/801">toujours d’actualité</a>. La prévision d’une pathologie multifactorielle ou même la seule mise en évidence de combinaisons de facteurs de risques de cette pathologie n’est alors qu’un <a href="https://journals.plos.org/plosmedicine/article?id=10.1371/journal.pmed.1002049"><em>artefact non reproductible</em></a> sur un autre jeu de données indépendant.</p>
<p>En résumé, il est nécessaire de discerner entre domaines d’opération d’un système d’IA : <em>milieu clos</em> (jeu, process industriel sous contrôle, véhicule en site propre) de dimension déterminée ou <em>milieu ouvert</em> complexe de dimension très grande ou indéterminée (comportement humain).</p>
<h2>Estimation de performance et test représentatif</h2>
<p>Une estimation fiable des performances d’un système d’IA est basée sur la construction rigoureuse d’un échantillon test, indépendant de celui qui a servi à l’apprentissage et <em>représentatif</em> du domaine d’exploitation : anticiper les différentes technologies ou modes d’acquisition, leurs usures ou dégradations…</p>
<p>Surfant sur la mode de l’apprentissage profond (<em>deep learning</em>) appliqué à la reconnaissance d’images et soumis à la pression académique de publication, beaucoup trop d’articles annoncent des <a href="https://www.digitalcorner-wavestone.com/2018/10/deep-learning-lia-de-google-detecte-mieux-cancer-sein-medecins/">résultats étonnants</a> mais non reproductibles pour la <a href="https://www.bmj.com/content/374/bmj.n1872">détection de tumeurs</a> ou celle précoce du <a href="https://doi.org/10.1038/s42256-021-00307-0">Covid</a>. Avant commercialisation aux USA, la <a href="https://www.fda.gov/medical-devices/software-medical-device-samd/artificial-intelligence-and-machine-learning-software-medical-device"><em>FDA</em></a> contrôle la rigueur de ces tests en vue de la certification de systèmes d’IA d’aide au diagnostic. En France c’est le rôle du <a href="https://lne-gmed.com/fr">GMED</a> anticipant le projet de réglementation européenne sur l’IA (<a href="https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/library/proposal-regulation-european-approach-artificial-intelligence"><em>AI Act</em></a>).</p>
<p>En résumé, ouvrir l’accès à des données personnelles (<em>e.g</em>. <a href="https://www.health-data-hub.fr/"><em>Health Data Hub</em></a>, <a href="https://www.justice.fr/donnees-personnelles/datajust">DataJust</a>) comporte un risque de confidentialité qui est atténué par une procédure d’anonymisation par <em>floutage</em> des données : classe d’âge, région de résidence… pour éviter une réidentification. Ce risque est d’autant plus important en santé que des données génomiques ne sont pas anonymisables et permettent même une identification comme une <a href="https://www.mdpi.com/2073-4425/9/10/481">empreinte génétique</a>.</p>
<p>En contrepartie, le bénéfice attendu (intérêt public), légitime pour un objectif prédictif de population (modèles épidémiologiques) doit être attentivement estimé pour des objectifs de prévision personnalisée. En santé c’est le rôle en France du comité d’expertise sur l’intérêt public de l’<a href="https://www.snds.gouv.fr/SNDS/Actualites/Actu-1">INDS</a>. En très grande dimension, médecine personnalisée et médecine prédictive par système d’IA ne font pas bon ménage. Le consensus de recherches <em>indépendantes</em> ou la prise en compte d’autres informations sous forme de contraintes : régularité (problèmes inverses dits mal posés), <a href="https://journals.plos.org/ploscompbiol/article?id=10.1371/journal.pcbi.1008819">réseaux de régulation biologique</a>, permet de contrôler la dimension d’un domaine, le nombre de facteurs influents, pour garantir les performances suite à une évaluation rigoureuse et donc l’intérêt public.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170754/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Besse ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Et si l’IA n’était pas si intelligente que ça ? Dans beaucoup de domaines, il est complexe d’obtenir de bonnes données pour entraîner les algorithmes et avoir donc de bonnes réponses de la machine.Philippe Besse, Professeur émérite de Mathématiques, chercheur à l'ObvIA, INSA ToulouseLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1716222021-11-21T16:51:36Z2021-11-21T16:51:36ZVidéo-surveillance : où vont nos données ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/432350/original/file-20211117-23-1e9snl9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C560%2C1899%2C1350&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ne souriez plus, vos données s'envolent et... vous ne pourrez pas les récupérez. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/imeuble-mur-structure-2598899/">Stocksnap/pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Remise au-devant de l’actualité récente sous la forme d’une <a href="https://www.lci.fr/justice-faits-divers/tirs-contre-la-police-a-lyon-darmanin-reclame-plus-de-cameras-de-surveillance-2200105.html">injonction au maire de Lyon</a>, la vidéosurveillance sur la voie publique ne s’est jamais aussi bien portée. Pour autant, quel est son encadrement juridique en France et quels en sont ses usages réels ?</p>
<p>Juridiquement, la possibilité d’installer des caméras de surveillance sur la voie publique (qu’il s’agisse de rues ou de routes voire autoroutes) ou dans les lieux publics (transports en commun, bâtiments administratifs, etc.) <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F2517">relève de la compétence des autorités publiques</a>. La décision peut donc être prise par un maire, le président d’une communauté de communes, le directeur d’une prison ou le responsable d’un service de transports par exemple.</p>
<h2>Un cadre juridique restreint</h2>
<p>Si la caméra filme la rue, l’installation du système est subordonnée à une autorisation du préfet (valable cinq ans), et nécessite un avis de la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037825998">« commission départementale de vidéoprotection »</a>, présidée par un magistrat. En cas d’urgence liée par exemple à un projet terroriste, cet avis peut être repoussé temporairement.</p>
<p>La mise en place de la vidéo-surveillance doit répondre de <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599395/">finalités prévues par la loi</a>. Celles-ci sont néanmoins, comme souvent en la matière, rédigées de manière particulièrement large : « protection des bâtiments et installations publics », « prévention des atteintes à la sécurité », etc.</p>
<p>Depuis 2011, les acteurs privés comme les commerçants peuvent également mettre en place de tels caméras aux abords immédiats de leur établissement, <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041599395/">après autorisation du maire</a>.</p>
<p>Dans tous les cas, une limite importante se trouve dans l’interdiction formelle de filmer, même accidentellement, des <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000025505412">lieux d’habitation</a>. Les caméras doivent être orientées de telle manière à ne pas viser de maisons ou d’immeubles, ou, à défaut, équipées de système de floutage des façades.</p>
<p>La <a href="https://www.cnil.fr/fr/la-loi-informatique-et-libertes">Loi Informatique et Libertés</a>, également d’application pour ces dispositifs lorsqu’ils permettent la collecte et l’enregistrement de <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000037825998">données identifiantes</a>, c’est-à-dire permettant de reconnaître des individus dans la rue ou dans les commerces, <a href="https://www.cnil.fr/fr/la-videosurveillance-videoprotection-sur-la-voie-publique">impose également un processus particulier</a>, nécessitant parfois l’autorisation de la CNIL.</p>
<p>Les établissements privés ouverts aux publics (bars, restaurants, etc.) peuvent également mettre en place ces dispositifs à l’intérieur de leurs locaux mais selon des <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/LEGIARTI000020150477/2009-01-25/">modalités plus rigoureuses</a>.</p>
<p>Enfin, en dehors de ces règles et même si ce n’est pas prévu par la loi, la Cour de cassation autorise la mise en place de <a href="https://www.dalloz-actualite.fr/flash/videosurveillance-sur-voie-publique-durant-l-enquete-conditions-d-autorisation">vidéo-surveillance spéciale et ponctuelle</a> pour les besoins d’une enquête judiciaire.</p>
<h2>Le développement d’une vidéo-surveillance parallèle</h2>
<p>Ces systèmes classiques de vidéo-surveillance par caméras installées se doublent aujourd’hui de nouveaux dispositifs qui ne répondent pas de cet encadrement juridique classique. Il s’agit d’une part de l’usage des drones, et d’autre part des caméras individuelles utilisées par les forces de l’ordre.</p>
<p>L’utilisation des drones comme dispositif de vidéo-surveillance par les forces de l’ordre fait l’objet d’une véritable saga juridique débutée notamment <a href="https://www.vie-publique.fr/en-bref/278140-drones-de-surveillance-la-cnil-sanctionne-le-ministere-de-linterieur">lors du confinement</a>, passant par plusieurs interdictions données par le <a href="https://www.conseil-etat.fr/ressources/decisions-contentieuses/dernieres-decisions-importantes/conseil-d-etat-18-mai-2020-surveillance-par-drones">Conseil d’État</a>, une intégration dans la loi <a href="https://www.usine-digitale.fr/article/que-prevoit-la-loi-securite-globale-definitivement-adoptee-sur-les-drones-de-surveillance.N1082964">Sécurité globale</a> et enfin une censure par le <a href="https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2021/2021817DC.htm">Conseil constitutionnel</a>.</p>
<p>Si le gouvernement tient autant à autoriser le recours à ces dispositifs, c’est qu’ils permettent, désormais équipés de caméras de très haute résolution, une couverture virtuellement illimitée en vidéo-surveillance de tout le territoire. Leur usage, très périlleux pour les libertés fondamentales, doit néanmoins <a href="https://www.franceinter.fr/avec-une-nouvelle-loi-les-drones-pour-filmer-les-manifestations-reviennent-par-la-petite-porte">encore trouver un équilibre juridique</a>.</p>
<p>En parallèle, se généralise également le déploiement de <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/article_jo/JORFARTI000043530293?r=0W5GS0kMVZ">« caméras-piétons »</a> qui équipent les forces de l’ordre et même les agents assermentés de sociétés de transport, autorisant l’enregistrement des images et du son de certaines interventions ou contrôles.</p>
<h2>Un devenir incertain des données</h2>
<p>Que deviennent toutes les images ainsi collectées, qu’il s’agisse des outils classiques de vidéo-surveillance sur la voie publique ou de celles des nouveaux dispositifs de captation vidéo ?</p>
<p>La première catégorie d’images est traitée par le service qui a demandé l’installation des caméras, qu’il s’agisse d’une <a href="https://www.lemonde.fr/fragments-de-france/article/2021/10/20/libourne-ville-sous-surveillance_6099190_6095744.html">municipalité</a> ou d’une autre structure publique. Cela doit être prévu explicitement, ainsi que la durée de conservation des images <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000025505435">qui ne peut excéder un mois</a>.</p>
<p>Les vidéos collectées par les caméras individuelles des forces de l’ordre sont quant à elles transmises aux services de police ou de gendarmerie et conservées six mois.</p>
<p>Durant leur temps de conservation, l’ensemble de ces données peut faire l’objet de <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/642140/requisition-des-images-de-videoprotection-quelles-sont-les-regles/">réquisitions</a>, c’est-à-dire de demandes par les services de police ou de gendarmerie dans le cadre d’une enquête ou d’une instruction. Dans ce cas, <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000025505435">plus de durée maximum</a> car les vidéos intègrent le dossier pénal.</p>
<p>Depuis l’adoption de la loi <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/04/15/les-principaux-articles-de-la-loi-securite-globale-definitivement-adoptee-par-l-assemblee-nationale_6076884_3224.html">Sécurité globale</a>, les images captées par les caméras individuelles des forces de l’ordre peuvent également, en parallèle de leur enregistrement, être transmises en flux direct au centre de commandement.</p>
<h2>Une exploitation limitée</h2>
<p>Comment assurer le traitement efficace de ces milliers d’heures d’enregistrement ? Si certaines villes décident de s’équiper de centres de traitement voyant <a href="https://www.nice.fr/fr/securite/le-centre-de-supervision-urbain">se relayer un personnel 24h/24</a>, la difficulté est bien réelle. Ce n’est pas tout d’avoir des caméras, encore faut-il avoir des humains derrière les écrans.</p>
<p>Cette problématique est-elle en passe de se voir résolue par les nouveaux usages de la vidéosurveillance, fondés sur les outils algorithmiques, la reconnaissance faciale voire l’intelligence artificielle ?</p>
<p>Le recours à de tels outils a en tout cas de quoi séduire les décideurs publics, et ce à l’ère des <a href="https://www.nicecotedazur.org/europe/ville-intelli/smart-city-innovation-center">« smart cities »</a> ou « villes intelligentes ». Pourtant, ils constituent bien davantage une forme nouvelle de <a href="https://technopolice.fr/">« techno-police »</a> et posent de vrais problèmes sur nos libertés fondamentales.</p>
<h2>De nouveaux usages problématiques</h2>
<p>Que penser en effet de la <a href="https://droit.developpez.com/actu/313581/France-les-senateurs-disent-non-a-un-amendement-visant-a-interdire-la-reconnaissance-faciale-via-des-cameras-embarquees-dans-le-cadre-de-la-proposition-de-loi-sur-la-securite-globale/">possibilité laissée</a> aux policiers et aux gendarmes d’utiliser leurs outils de reconnaissance faciale (<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000025818428">prévus notamment dans le cadre du principal fichier de police</a>) sur les images obtenues par les caméras embarquées ?</p>
<p>Rien n’interdira ainsi que demain, lors d’une manifestation, les nombreux policiers présents, tous équipés de telles caméras (<a href="https://www.interieur.gouv.fr/fr/Actualites/Communiques/Gerald-Darmanin-confirme-le-deploiement-d-une-nouvelle-generation-de-cameras-pietons-a-compter-du-1er-juillet">qui ont vocation à être généralisées</a>) reçoivent dans leurs oreillettes, en direct, l’identité et les informations relatives aux personnes qui se trouvent en face d’eux, leur signalant tel ou tel individu déjà connu. Cette pratique se réaliserait en dehors du cadre juridique relativement contraint des <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006071154/LEGISCTA000006151880/#LEGISCTA000006151880">contrôles d’identité</a>.</p>
<p>De même, les expérimentations de recours à la <a href="https://www.franceinter.fr/reconnaissance-faciale-officiellement-interdite-elle-se-met-peu-a-peu-en-place">reconnaissance faciale</a> par les caméras de vidéosurveillance classiques se multiplient, même si la CNIL reste encore, heureusement, <a href="https://www.usine-digitale.fr/article/reconnaissance-faciale-la-cnil-adresse-un-avertissement-a-la-ville-de-valenciennes.N1130989">très vigilante et si l’interdiction reste le principe</a>. La question de son utilisation lors des prochains Jeux olympiques de Paris <a href="https://www.ouest-france.fr/leditiondusoir/2021-03-18/drones-reconnaissance-faciale-la-technologie-sera-au-c%C5%93ur-de-la-securite-des-jo-de-paris-en-2024-e0227705-48df-4593-806a-08acf3f66a1b">a d’ailleurs été évoquée</a>, même si elle semble <a href="https://www.20minutes.fr/sport/3146951-20211013-jeux-olympiques-paris-2024-securite-passera-reconnaissance-faciale">aujourd’hui écartée</a>.</p>
<p>La reconnaissance faciale n’est pas la seule technologique pouvant se nourrir des images de vidéosurveillance. L’utilisation de <a href="https://www.cnil.fr/fr/verbalisation-par-lecture-automatisee-des-plaques-dimmatriculation-lapi-la-cnil-met-en-garde">techniques de reconnaissance automatique de plaque</a> (LAPI) permettant la vidéo-verbalisation de nombreuses infractions et l’identification immédiate de véhicules est <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000020665029/">désormais possible dans notre droit</a> et tend, là aussi, à se généraliser.</p>
<p>Enfin, le recours à des formes d’intelligence artificielle, de « police prédictive », peut également contribuer à l’exploitation de ces données, au moins, pour le moment, en <a href="https://www.lemonde.fr/fragments-de-france/article/2021/10/20/libourne-ville-sous-surveillance_6099190_6095744.html">suggérant aux forces de l’ordre où regarder parmi le flux d’images</a>.</p>
<h2>Nombreux risques et faible efficacité</h2>
<p>Pourtant, ces outils constituent des risques très importants pour nos libertés individuelles, au premier rang desquels figure la <a href="https://www.vie-publique.fr/fiches/23877-quest-ce-que-la-liberte-de-circulation-ou-liberte-daller-venir">liberté d’aller et venir</a>. Demain, en effet, la généralisation des caméras couplées à la reconnaissance faciale et à la lecture automatique des plaques pourra permettre, au moins virtuellement, la géolocalisation de tout individu sur le territoire. Or, l’exercice plein de cette liberté nécessite une forme d’anonymat : je n’irais en effet sans doute pas aussi librement rencontrer une personne ou me rendre à une réunion politique si je sais que mon déplacement peut être enregistré.</p>
<p>Tous les outils techniques sont déjà en place pour cela, même si l’encadrement juridique y fait encore, heureusement, en partie barrage. Le <a href="https://www.cnil.fr/fr/le-fichier-des-titres-electroniques-securises-tes">fichier des cartes d’identité et des passeports</a> contient ainsi une photographie de chacun d’entre nous, mais n’est pas accessible aux forces de l’ordre et n’autorise pas la reconnaissance faciale. Un simple texte réglementaire pourrait néanmoins modifier ce point, même si ce n’est, pour le moment, pas à l’ordre du jour.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/432355/original/file-20211117-21-1xsvjfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/432355/original/file-20211117-21-1xsvjfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/432355/original/file-20211117-21-1xsvjfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/432355/original/file-20211117-21-1xsvjfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/432355/original/file-20211117-21-1xsvjfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/432355/original/file-20211117-21-1xsvjfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/432355/original/file-20211117-21-1xsvjfo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">D’une solution miracle, la vidéo-surveillance, semble constituer l’illustration d’une technologisation des formes de contrôle et de surveillance, à l’efficacité douteuse, mais aux dangers réels.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/mer-oc%c3%a9an-l-eau-vagues-nature-2560912/">Stocksnap/pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces transformations sont d’autant plus préoccupantes que l’efficacité réelle de la vidéo-surveillance sur la délinquance et la criminalité n’a jamais été démontrée. Une longue étude récente menée notamment par <a href="https://www.cairn.info/l-enseignement-universitaire-en-milieu-carceral%20--%209791034606399-page-254.htm">Laurent Muchielli</a> en atteste :</p>
<blockquote>
<p>« Les résultats soulignent la grande faiblesse de la contribution de la vidéosurveillance à la lutte contre la criminalité. »</p>
</blockquote>
<p>Au mieux, elle ne fait que <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/05/17/la-videosurveillance-est-elle-efficace_5300635_4355770.html">déplacer la délinquance</a> d’un quartier à un autre.</p>
<p>L’efficacité sur la résolution des enquêtes est également difficile à évaluer, mais semble marginale, comme le pointait l’année dernière la <a href="https://www.lagazettedescommunes.com/703132/la-videosurveillance-dans-le-viseur-de-la-cour-des-comptes/">Cour des comptes</a> qui en dénonçait le prix exorbitant pour un résultat très limité. Cela est notamment dû à la quantité d’images et aux faiblesses structurelles des outils (<a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/02/12/une-etude-demontre-les-biais-de-la-reconnaissance-faciale-plus-efficace-sur-les-hommes-blancs_5255663_4408996.html">dont certains subissent même des biais racistes</a>).</p>
<p>D’une solution miracle, la vidéo-surveillance, <a href="https://www.interieur.gouv.fr/Videoprotection">renommée habilement depuis quelques années déjà vidéo-protection</a>, semble ainsi constituer l’illustration d’une technologisation des formes de contrôle et de surveillance, à l’efficacité douteuse, mais aux dangers réels.</p>
<p>Elle incarne ce <a href="https://www.lemonde.fr/blog/internetactu/2018/06/02/videosurveillance-paradigme-du-technosolutionnisme/">« paradigme du techno-solutionnisme »</a>, plus empreint de considérations politiques et industrielles que de souci véritable du bien commun.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171622/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yoann Nabat ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le déploiement exponentiel des caméras conduit corrélativement à une production et à un enregistrement toujours plus important de données vidéo dont l’exploitation interroge.Yoann Nabat, Doctorant en droit privé et sciences criminelles, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1610282021-11-08T20:36:41Z2021-11-08T20:36:41ZDe l’électron au photon, le silicium fait sa (seconde) révolution<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/426399/original/file-20211014-17-1dhfcd6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C41%2C1101%2C906&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Utiliser la lumière pour faire des calculs et transmettre l’information présente certains avantages par rapport à l’utilisation des électrons.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Silicon_Photonics_300mm_wafer.JPG">Ehsanshahoseini, wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le saviez-vous ? Chacune de vos connexions Internet est aujourd’hui traitée par des circuits qui allient l’<a href="https://www.fibrefr.com/data-center">efficacité de l’électronique avec celle de l’optique</a>. Et la convergence de ces deux domaines scientifiques prend un nouveau tournant avec l’apparition de dispositifs encore plus efficaces pour s’adapter à la forte demande des consommateurs, principalement en termes de rapidité de traitement de l’information. Il est en effet peu concevable aujourd’hui de réduire l’utilisation que nous faisons d’Internet ou d’en dégrader ses performances, car les infrastructures ne sont plus capables de répondre à la demande.</p>
<p>Cette révolution numérique qui a débuté au XX<sup>e</sup> siècle avec le déploiement à grande échelle de l’électronique prend sa source grâce à l’utilisation d’un matériau : le silicium, le semi-conducteur de référence qui permet de réaliser des circuits électroniques. Cependant, depuis quelques années, les progrès fulgurants de l’électronique atteignent des limites fondamentales : la puissance électrique consommée pour réaliser les calculs et les communications <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-018-06610-y">est gigantesque</a>, et les vitesses d’opération et de traitement de l’information deviennent trop faibles <a href="https://www.cisco.com/c/en/us/solutions/collateral/executive-perspectives/annual-internet-report/white-paper-c11-741490.html">par rapport à une demande toujours croissante</a>.</p>
<p>Depuis quelques années, des circuits utilisant à la fois l’électronique et la photonique – qui consiste à remplacer les signaux électroniques par des signaux lumineux – sont <a href="https://www.intel.fr/content/www/fr/fr/architecture-and-technology/silicon-photonics/silicon-photonics-overview.html">disponibles commercialement</a>. Ces circuits <a href="https://ee.stanford.edu/%7Edabm/100.pdf">permettent de limiter la puissance énergétique</a> consommée dans les systèmes de communications, <a href="https://venturebeat.com/2021/04/12/intel-advances-in-silicon-photonics-can-break-the-i-o-power-wall-with-less-energy-higher-throughput/">principalement dans les <em>data centers</em></a>, forts consommateurs de puissances électriques.</p>
<p>Il faut noter qu’il est difficile de comparer quantitativement les communications optiques aux technologies actuelles sur un seul paramètre (ici, l’énergie consommée), étant donné que les autres paramètres ne sont pas fixes (la vitesse de communication est très largement augmentée par exemple).</p>
<h2>Le silicium peut répondre aux nouveaux défis de l’intégration optique sur puce</h2>
<p>Le silicium, matériau de référence en électronique, est devenu en seulement quelques années le matériau de base de l’« optique sur puce », avec le développement de circuits intégrés où les électrons sont remplacés par des photons, les particules élémentaires de lumière. L’optique intégrée à base de silicium, communément appelée « photonique silicium », apporte de nouvelles solutions pour répondre d’une part à la saturation du trafic Internet <a href="https://www.phonandroid.com/internet-le-trafic-mondial-sera-multiplie-par-trois-dici-2022-a-cause-de-la-5g-netflix-et-le-svod.html">due à une demande toujours plus forte</a>, et d’autre part à la réduction de l’impact énergétique des systèmes de communications actuels.</p>
<p>En effet, l’augmentation de la vitesse de propagation de l’information rencontre des <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Optical_interconnect">limitations fondamentales</a> si elle est effectuée par uniquement des connexions électriques : les lignes électriques n’arrivent pas à suivre la cadence imposée par l’augmentation de la vitesse des signaux. Une première solution a déjà été déployée depuis de nombreuses années en utilisant des fibres optiques pour toutes les communications longues distances (de plusieurs mètres à plusieurs centaines de kilomètres). Malheureusement, cela ne suffit pas, car les communications courtes distances (de quelques centimètres à quelques dizaines de centimètres) au sein même des circuits intégrés, effectuées par des interconnexions métalliques, rencontrent également des limitations. Une des solutions est donc d’<a href="https://ee.stanford.edu/%7Edabm/100.pdf">intégrer l’optique au sein même du circuit</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-la-5g-gonflera-notre-consommation-denergie-147492">Pourquoi la 5G gonflera notre consommation d’énergie</a>
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<p>La convergence de l’électronique et de la photonique sur un même circuit passe par la convergence de la technologie. Dans cet objectif, l’utilisation du silicium pour l’électronique et la photonique semble évidente. Cela permet de donner accès à l’ensemble des infrastructures déjà mises en place pour la microélectronique. De plus, le silicium possède des propriétés optiques fondamentales très intéressantes pour propager la lumière sur puce dans des structures optiques appelées « guides d’onde », qui permettent d’intégrer de nombreux composants optiques sur les circuits électroniques afin d’exploiter les avantages de la photonique en <a href="https://www.photoniques.com/articles/photon/pdf/2018/05/photon201893p18.pdf">gardant les points forts de l’électronique</a>. En particulier, pour réaliser une communication optique sur puce, il est nécessaire de développer à minima des sources de lumière (laser), des modulateurs optiques pour le codage de l’information et des détecteurs de lumière pour retranscrire l’information au sein du circuit électronique.</p>
<p>Ces circuits photoniques silicium sont aujourd’hui produits par les principaux acteurs de la microélectronique et des télécommunications optiques, par exemple STMicroelectronics, Intel, CISCO, NEC, Huawei, Fujitsu ou Hewlett Packard et sont <a href="https://www.photonics.com/Articles/Data_Centers_and_More_for_Silicon_Photonics/a64879">aujourd’hui présents dans les centres de données</a> (<em>data center</em> en anglais). En France, les principaux acteurs sont <a href="https://www.st.com/content/st_com/en.html">STMicroelectronics</a>, le <a href="http://www.3-5lab.fr/index.php">III-V Lab</a>, <a href="https://www.scintil-photonics.com">Scintil Photonics</a>, le <a href="https://www.leti-cea.fr/cea-tech/leti/Pages/Accueil.aspx">CEA/Leti</a>, le <a href="https://www.c2n.universite-paris-saclay.fr/fr/">Centre de nanosciences et nanotechnologies, C2N</a> (CNRS, Université Paris-Saclay) et l’<a href="https://inl.cnrs.fr">Institut des nanotechnologies de Lyon, INL</a> (CNRS, Université de Lyon).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/414346/original/file-20210803-17-1thjuov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/414346/original/file-20210803-17-1thjuov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=506&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/414346/original/file-20210803-17-1thjuov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=506&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/414346/original/file-20210803-17-1thjuov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=506&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/414346/original/file-20210803-17-1thjuov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=636&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/414346/original/file-20210803-17-1thjuov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=636&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/414346/original/file-20210803-17-1thjuov.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=636&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Du substrat silicium de 300 millimètres de diamètre utilisé pour la fabrication des circuits photoniques et électroniques au circuit lui-même de quelques centimètres carrés et jusqu’à la structure photonique (guide d’onde) de quelques centaines de nanomètres où la lumière se propage.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Laurent Vivien, C2N, STMicroelectronics, CEA-Leti</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Le silicium a néanmoins quelques petits défauts…</h2>
<p>La perfection n’existant pas, le silicium présente cependant plusieurs inconvénients intrinsèques pour son utilisation en optique. L’un est de nature électronique, c’est sa <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Semi-conducteur">structure de bandes d’énergie</a> dite « indirecte ». L’autre cristallin, c’est sa <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Maille_(cristallographie)">maille cristalline</a> « centrosymmétrique ». Ces deux caractéristiques conduisent à une très faible efficacité du processus d’émission de photons – un problème pour la réalisation de sources de lumière – et l’absence de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_%C3%A9lectro-optique">« effet électro-optique de type Pockels »</a> – couramment exploité pour le codage rapide de l’information dans les systèmes de télécommunications (d’un codage électronique à un codage lumineux, grâce à l’utilisation d’un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_%C3%A9lectro-optique#Modulateurs_%C3%A9lectro-optiques">« modulateur électro-optique »</a>).</p>
<p>De plus, la transparence du silicium, avantage incontesté pour la propagation de la lumière, devient un inconvénient pour la détection de celle-ci. C’est-à-dire pour la transformation du signal optique en signal électrique et permettre le traitement de l’information sur puce. En effet, une des principales propriétés physiques pour détecter la lumière est l’absorption, qui est nulle si le matériau est transparent.</p>
<h2>Mais la photonique a de la ressource</h2>
<p>Malgré ces inconvénients, la possibilité d’intégrer de nombreux composants photoniques (on parle de « densité d’intégration ») et de les « co-intégrer » avec des composants électroniques, sur une même puce, est une force indéniable, et de nombreux efforts de recherche académique et industrielle ont été déployés pour <a href="https://www.photoniques.com/articles/photon/pdf/2018/05/photon201893p18.pdf">atteindre aujourd’hui des performances remarquables</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/au-xxi-siecle-la-lumiere-sinvite-dans-les-nouvelles-technologies-152019">Au XXIᵉ siècle, la lumière s’invite dans les nouvelles technologies</a>
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<p>L’intégration d’autres matériaux semi-conducteurs sur des puces silicium a également ouvert de nombreuses perspectives pour répondre aux limitations du silicium en photonique. Par exemple, des sources lasers à base de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Semi-conducteur_III-V">semi-conducteurs III-V</a> peuvent être intégrées sur silicium – ce type de semi-conducteur est l’élément phare de toutes les sources lasers utilisées aujourd’hui en télécom. D’autres composants optiques, comme des <a href="https://www.osapublishing.org/oe/fulltext.cfm?uri=oe-21-19-22471&id=264593">modulateurs</a> jouant sur la variation de la densité de porteurs (électrons et trous) dans le silicium et des <a href="https://www.degruyter.com/document/doi/10.1515/nanoph-2020-0547/pdf">photodétecteurs en germanium</a>, ont également été développés. Cette complémentarité et cette intégration sur la plate-forme silicium apportent des solutions solides et matures pour répondre aux grands défis des communications optiques sur puce.</p>
<p>Dans ce contexte où les enjeux scientifiques, technologiques et applicatifs sont immenses, le <a href="https://www.c2n.universite-paris-saclay.fr/fr/">Centre de Nanosciences et Nanotechnologies, C2N</a>, pionnier dans le domaine de la photonique silicium, a démontré avec ses partenaires des composants innovants clés pour la <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-019-40497-7">propagation</a>, l’<a href="https://www.c2n.universite-paris-saclay.fr/fr/science-societe/actualites/actu/24">émission</a>, la <a href="https://www.osapublishing.org/oe/fulltext.cfm?uri=oe-27-7-9740&id=407610">modulation</a> et la <a href="https://www.degruyter.com/document/doi/10.1515/nanoph-2020-0547/pdf">détection optique</a> sur puce.</p>
<h2>Un futur prometteur pour la photonique silicium</h2>
<p>La « photonique silicium » ne s’arrête pas seulement à trouver des solutions pour les communications optiques sur puces. Elle est aujourd’hui considérée comme la plate-forme scientifique et technologique idéale pour le développement des circuits de demain dans <a href="https://www.photoniques.com/articles/photon/pdf/2018/05/photon201893p18.pdf">tous les systèmes de communications optiques</a> (télécom, 5G, 6G…), les <a href="https://www-degruyter-com.proxy.scd.u-psud.fr/document/doi/10.1515/nanoph-2018-0113/pdf">capteurs</a> (LIDAR, détection de molécules biologiques et chimiques, spectroscopie dans le proche et le moyen infrarouge, gyroscope, systèmes de visualisation…) et les <a href="https://www.c2n.universite-paris-saclay.fr/fr/science-societe/actualites/actu/141">circuits quantiques</a> (sécurisation des données, ordinateur quantique).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161028/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laurent Vivien a reçu des financements de l'ERC (European Research Council), de l'Agence Nationale de la Recherhce (ANR) et la Direction générale des entreprises (DGE) - Nano2022. </span></em></p>On peut maintenant intégrer des signaux optiques et électroniques sur les puces en silicium. De quoi réduire la puissance électrique consommée dans les systèmes de communication.Laurent Vivien, Directeur de recherche CNRS au Centre des Nanosciences et Nanotechnologies, Université Paris Saclay, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1670082021-09-22T22:22:25Z2021-09-22T22:22:25ZDiscrimination et IA : comment limiter les risques en matière de crédit bancaire<p>L’intelligence artificielle (IA), cet ensemble de technologies visant à reproduire les capacités cognitives et affectives humaines, a envahi notre quotidien. Si certaines applications médiatisées de l’IA inquiètent, telles que la reconnaissance faciale ou les drones de combat autonomes, une application moins sensationnelle prend néanmoins une place croissante dans nos vies : l’IA comme aide à la décision.</p>
<p>Couplé au <em>big data</em> – ce concept qui fait référence à de grandes masses de données – les algorithmes de <em>machine learning</em> apprennent à prédire des phénomènes sur le fondement des relations (corrélations mathématiques), reliant le phénomène considéré à une grande masse de données appelée « jeu d’apprentissage ».</p>
<p>Ces modèles contribuent par exemple à prédire la météorologie du lendemain, sur la base de nombreuses données (température, pression, densité de l’air…). Mais ce type d’aide à la décision permet aussi de prédire si tel candidat à une formation est susceptible d’obtenir son diplôme, ou bien si tel autre candidat à l’embauche sera performant à l’avenir dans son nouveau poste, ou encore si tel emprunteur, sollicitant sa banque dans le cadre d’un crédit immobilier sera, au final, en mesure de le rembourser. On comprend dès lors l’importance sociale de ces décisions guidées par les données.</p>
<h2>Le risque de discrimination</h2>
<p>L’un des risques de dérive éthique majeure de ces modèles d’aide à la décision concerne la discrimination d’une personne physique sur la base d’un attribut protégé par la loi, c’est-à-dire une caractéristique de la personne qui ne peut en aucun cas être utilisée par respect des valeurs de justice et d’égalité. Par exemple, pour la France, le genre ne peut être un critère recevable pour toute prise de décision regardant la personne.</p>
<p>Aussi, le risque de discrimination algorithmique existe dès lors que les données du jeu d’apprentissage présentent des corrélations entre le phénomène que l’on cherche à prédire et l’attribut protégé, tel le genre.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1404431692312416257"}"></div></p>
<p>Pour expliquer ce risque discriminatoire, plaçons-nous dans le cadre de la distribution de crédit bancaire. Supposons, à des fins d’illustration, que les emprunteurs femmes, clientes historiques d’une banque, aient en moyenne et par le passé, moins remboursé leur crédit que les hommes : alors le lien entre le genre et la prédiction du défaut (ne pas avoir remboursé l’intégralité de son crédit) sera « appris » par le modèle de <em>machine learning</em>, qui s’en servira pour ses prédictions futures.</p>
<p>En clair, les emprunteuses seront automatiquement moins bien notées (note appelée <em>credit score</em>) que leurs homologues masculins, toutes choses égales par ailleurs, ce qui constitue une discrimination d’après le genre, prohibée par la loi.</p>
<p>En première analyse, la solution à ce problème semble triviale, il suffit de supprimer tous les attributs protégés par la loi du jeu de données d’apprentissage. Pourtant, par le truchement des corrélations entre attributs protégés et non protégés, le problème demeure sous une forme indirecte, plus subtile à identifier et nécessitant des analyses statistiques.</p>
<p>Illustrons ce cas : en droit français, il est interdit de discriminer un individu d’après son âge. En revanche, rien ne semble interdire, a priori, de fonder la prédiction de défaut d’un client sur son ancienneté dans la banque. Or, cette variable est potentiellement liée (corrélée) à l’âge de l’individu, ce qui entraîne de facto une discrimination indirecte, bannie également en droit français.</p>
<h2>Une proposition de règlement européen pour limiter les risques</h2>
<p>Consciente de l’importance prise par l’IA dans la vie des citoyens européens et des risques associés, la Commission européenne a proposé un premier cadre légal pour l’IA le <a href="https://digital-strategy.ec.europa.eu/en/news/europe-fit-digital-age-commission-proposes-new-rules-and-actions-excellence-and-trust-artificial">21 avril 2021 dernier</a>.</p>
<p>L’approche retenue est fondée sur les risques, avec une gradation des exigences en quatre niveaux selon l’activité considérée. Le <em>credit scoring</em> bancaire est classé dans la catégorie des risques élevés, ce qui implique que l’IA satisfasse aux exigences définies dans le <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX%3A52021PC0206">titre III, chapitre 2 du règlement</a>, préalablement à toute mise sur le marché, afin de réduire au minimum les risques, jusqu’à un niveau résiduel jugé acceptable.</p>
<p>Or, si le jugement de l’acceptabilité d’un niveau de risque constitue déjà une contrainte floue, la commission accorde en outre aux fournisseurs de systèmes d’IA une flexibilité en matière de solution technique de mise en conformité.</p>
<h2>L’équité algorithmique</h2>
<p>Ainsi, pour minimiser autant que possible le risque discriminatoire, il faut disposer d’un indicateur de mesure approprié. Or la discrimination est associée au <a href="https://www.telecom-paris.fr/wp-content-EvDsK19/uploads/2019/02/Algorithmes-Biais-discrimination-equite.pdf">concept protéiforme d’équité algorithmique</a>, développé dans le champ du <em>fair machine learning</em>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1384152307034509318"}"></div></p>
<p>On distingue trois formes d’équité algorithmique : individuelle, de groupe et contrefactuelle. La première correspond à la discrimination telle que définie dans les textes légaux (chaque individu est évalué indépendamment des attributs protégés) ; la seconde se situe au niveau du groupe et exige une classification identique pour les individus appartenant à même groupe (par exemple le groupe des femmes) ; la troisième forme impose que les résultats de classification soient insensibles à la modification des valeurs des attributs protégés.</p>
<p>Pour un motif de complexité, l’équité de groupe est privilégiée par les chercheurs comme moyen opérationnel de mesure de l’intensité discriminatoire d’un modèle prédictif. Mais là encore, plusieurs indicateurs entrent en concurrence.</p>
<h2>Quelle mesure pertinente du risque de discrimination ?</h2>
<p>Considérons les <a href="https://arxiv.org/abs/2103.01907">deux principaux indicateurs, pertinents dans le cadre du « credit scoring »</a> :</p>
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<li><p>L’indicateur d’indépendance impose une prédiction identique pour les groupes définis par l’attribut protégé, ce qui revient à dire, avec l’exemple du genre, que les proportions de femmes et d’hommes obtenant un crédit devraient être strictement égales.</p></li>
<li><p>Au contraire, l’indicateur de séparation autorise des proportions différentes de crédits alloués entre hommes et femmes, mais exige des proportions d’erreurs de prédiction identiques pour les femmes et les hommes.</p></li>
</ul>
<p>Ce dernier indicateur semble davantage adapté au cas qui nous intéresse, car le fait d’imposer une stricte égalité dans les proportions de crédits alloués entre hommes et femmes (indicateur d’indépendance parfait) n’est ni une conséquence nécessaire ni une conséquence souhaitable de l’équité individuelle.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1357633440271773696"}"></div></p>
<p>Cette idée contre-intuitive s’explique ainsi : si une corrélation empirique réelle existe entre le genre et le défaut, alors ne pas en tenir compte conduirait à allouer des crédits en excès à des individus qui ne pourraient honorer leur dette, les faisant tomber dans la spirale du surendettement, ou bien à ne pas prêter à des personnes pourtant solvables, les menant à une situation d’exclusion bancaire, ces deux résultats étant coûteux socialement.</p>
<p>On comprend dès lors que, dans le cadre du crédit bancaire, le choix d’un indicateur de mesure de la discrimination n’est ni évident, ni neutre.</p>
<h2>Un cadre légal qui nécessite davantage de précisions</h2>
<p>Aussi, si le cadre légal proposé par la Commission européenne représente une avancée précisant les lignes directrices du futur cadre réglementaire, des <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/06/09/sur-l-intelligence-artificielle-l-europe-peine-a-dessiner-sa-troisieme-voie-face-aux-etats-unis-et-a-la-chine_6083403_3232.html">conflits d’interprétation inévitables</a> demeurent.</p>
<p>Et certains points, tels les indicateurs de mesure de la discrimination admissibles ainsi que les seuils qui leur sont associés, mériteraient davantage de précisions.</p>
<p>Notons qu’une fois ce cadre réglementaire finalisé et le calendrier d’entrée en vigueur fixé, le secteur bancaire devra se mettre en conformité urgemment car <a href="https://acpr.banque-france.fr/gouvernance-des-algorithmes-dintelligence-artificielle-dans-le-secteur-financier">l’APCR notait en juin 2020</a> que très peu d’institutions financières s’étaient engagées jusque-là dans l’identification et la remédiation des biais de leurs modèles d’IA.</p>
<p>Si l’enjeu de la discrimination par les IA est peu médiatisé, il est pourtant crucial tant les décisions de ces modèles affectent les citoyens à des moments clés de leur vie, déterminants pour leur intégration à la société comme pour l’amélioration de leur niveau de vie : accès à un établissement d’enseignement, accès à l’embauche, distribution de crédit…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/167008/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian Goglin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Parmi les nombreuses possibilités offertes par l’IA, l’aide à la décision prend une place croissante dans nos vies. Avec le risque de créer ou d’amplifier certaines discriminations.Christian Goglin, Professeur en Finance et Intelligence Artificielle, ICD Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1614782021-06-01T19:19:33Z2021-06-01T19:19:33ZLe stockage des données à distance, gage de sécurité ou pari risqué ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/403556/original/file-20210531-22-1agwrka.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C276%2C2744%2C2476&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Quel degré de sécurité pour les données dans les data centers?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/3wPJxh-piRw">Jason Dent, Unsplash </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>En mars dernier, un incendie dans un entrepôt de données de la société OVH a provoqué des problèmes d’accessibilité pour de nombreux sites Internet. OVH est le <a href="https://w3techs.com/">sixième hébergeur mondial de sites Internet</a>, et les différents entrepôts de données de l’entreprise hébergent 3,1 % de l’Internet mondial. Suite à cet incendie, 3,6 millions de sites web ont été indisponibles <a href="https://www.lemondeinformatique.fr/actualites/lire-panique-chez-les-clients-d-ovh-en-defaut-de-sauvegarde-82299.html">pour des durées plus ou moins importantes</a>. </p>
<h2>Le stockage de données à distance</h2>
<p>De plus en plus d’entreprises utilisent des services de stockage de données à distance. Ces services peuvent concerner des sites Internet, mais également les bases de données des entreprises ou encore leurs serveurs de messagerie électronique. Ces serveurs de stockage à distance sont communément appelés <em>data centers</em> ou centres de données. Il s’agit d’emplacements dédiés regroupant de très nombreux serveurs et proposant une infrastructure réseau et des dispositifs de sécurité.</p>
<p>Certaines entreprises possèdent leurs propres data centers, mais il s’agit principalement de très grandes structures, comme celles du CAC40 en France, Facebook ou Google. Le recours à des centres de données en location présente de nombreux avantages pour les entreprises de taille plus réduite. Cette solution leur permet de ne pas investir en interne, que ce soit au niveau du matériel ou des compétences humaines nécessaires. Les solutions proposées apportent des garanties de sécurité souvent plus importantes que celles qui pourraient être mises en place en utilisant leurs propres ressources.</p>
<h2>Où se situent les data centers ?</h2>
<p>Les emplacements de ces serveurs restent souvent confidentiels, et l’entreprise cliente n’a pas toujours cette information. Google et Amazon, les deux principaux fournisseurs du secteur, présentent sur leurs sites des cartes indiquant les emplacements de leurs serveurs. Les États-Unis et l’Europe du Nord sont les deux emplacements les plus prisés par ces fournisseurs. Les États-Unis à eux seuls comptent plus du tiers des centres de données existants.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-rehabiliter-le-cloud-regional-de-la-pertinence-des-data-center-locaux-et-globaux-83556">Pourquoi réhabiliter le cloud régional ? De la pertinence des data center locaux et globaux</a>
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<p>De multiples facteurs expliquent le positionnement des serveurs. Afin d’optimiser la vitesse de connexion, les serveurs doivent se situer au plus près des clients. C’est la raison pour laquelle, en France, la région parisienne est très prisée. Des motivations fiscales peuvent aussi influer sur la décision d’implantation. C’est pourquoi l’Irlande accueille de nombreux data centers. Enfin, le climat est un facteur important à prendre en considération, une bonne partie de l’énergie utilisée étant dédiée au procédé de refroidissement. Les pays du nord de l’Europe présentent un avantage sur ce point.</p>
<p>Bien que peu affichée par les fournisseurs, la localisation des serveurs est très importante pour des raisons juridiques. En effet, sauf indication contraire dans le contrat, les règles de confidentialité qui s’appliquent sont celles du pays dans lequel les données sont stockées ! Au-delà d’une éventuelle perte de contrôle de l’usage fait des données, une telle situation peut amener l’entreprise cliente à ne plus être en conformité avec la <a href="https://www.cnil.fr/fr/comprendre-le-rgpd">loi RGPD</a> (Règlement général sur la protection des données). Cette loi a pour objectif de garantir l’usage fait des données personnelles et s’applique pour l’ensemble de l’Union européenne. Les propriétaires des données personnelles doivent être informés de l’usage fait de leurs données et doivent pouvoir s’y opposer le cas échéant. Le respect de cette loi est rendu difficile par le <em>Patriot Act</em> américain, qui permet aux autorités américaines d’accéder aux données européennes hébergées sur des infrastructures de stockage américaines, quel que soit leur emplacement géographique.</p>
<h2>Comment assurer la sécurité des données stockées ?</h2>
<p>Suite à l’incendie survenu chez OVH, de nombreux clients ont accusé l’entreprise de ne pas avoir suffisamment protégé leurs données. Quelles sont les précautions à mettre en place pour éviter toute perte de données ? Et quelle est la responsabilité du fournisseur ?</p>
<p>La sécurisation des données stockées comporte deux facettes : tout d’abord, les données doivent être protégées en cas d’incident physique sur les serveurs. Les protections mises en place doivent permettre d’éviter les risques d’intrusion, ou encore les conséquences d’un incendie ou d’une catastrophe naturelle. La conception du bâtiment représente déjà un premier niveau de protection : matériaux utilisés, absence de fenêtres, absence de poignées de portes à l’extérieur, épaisseur des murs, installation d’un paratonnerre, présence d’un système de refroidissement ou encore dispositifs anti-incendie sont des éléments clés de ce dispositif. Le fournisseur de service a, dans ce domaine, une <a href="https://smaltavocats.com/publications/datacenter-quelle-obligation-legale-de-securite-pour-les-prestataires-dhebergement/">obligation de moyen, et non de résultat</a>. En complément, une surveillance stricte et un contrôle des accès <a href="https://www.oodrive.com/fr/blog/securite/la-securite-des-datacenters/">sont mis en place</a>, garantissant une réactivité forte en cas d’incident.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-realite-physique-du-monde-numerique-158884">La réalité physique du monde numérique</a>
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<p>La protection des données repose également sur un contrôle des accès à distance. Seules les personnes autorisées doivent pouvoir accéder aux données et une politique stricte de gestion des mots de passe doit être élaborée (règles strictes sur les mots de passe acceptés, changement de mot de passe à intervalles réguliers). Les serveurs sont équipés d’antivirus et de pare-feu (outil qui permet de filtrer le trafic entrant dans un serveur ou un ordinateur) pour éviter les piratages. Les systèmes mis en place proposent par ailleurs des solutions pour lutter contre les attaques par <a href="https://www.cybermalveillance.gouv.fr/tous-nos-contenus/fiches-reflexes/attaque-en-deni-de-service-ddos">déni de service (DDos)</a> : il s’agit d’une hyper sollicitation des serveurs pour nuire à leur bon fonctionnement. Ces solutions ne sont malheureusement pas proposées par tous les prestataires. Enfin, la gestion du centre de données repose sur des mises à jour très régulières du matériel pour éviter toute faille de sécurité.</p>
<p>Un incident peut survenir en dépit de toutes ces précautions. Comme la mésaventure de l’entreprise OVH le démontre, les clients victimes de pertes de données se retournent facilement vers leur fournisseur de service. Mais quelle est la responsabilité du fournisseur dans une telle situation ?</p>
<p>La responsabilité de la conception d’un Plan de Reprise d’Activité <a href="https://www.journaldunet.com/web-tech/cloud/1499119-les-lecons-a-tirer-de-l-incendie-du-data-center-ovhcloud/">incombe aux entreprises clientes</a>, et non au fournisseur de service cloud ou à l’hébergeur. Ce dernier n’est engagé que dans les limites fixées par le contrat, et avec une obligation de moyen et non de résultat. Le Plan de Reprise d’Activité permet d’anticiper les actions à effectuer en cas de rupture d’un service, et d’optimiser la durée nécessaire pour remettre en service les équipements et logiciels informatiques essentiels pour l’entreprise. Un tel plan envisage la reconstruction de l’infrastructure informatique ainsi que les besoins humains, matériels et financiers pour y parvenir.</p>
<p>Au-delà de ce plan, il est primordial pour l’entreprise utilisatrice de s’assurer que les données sont dupliquées, et sur des sites géographiques différents. Les fournisseurs de cloud proposent de nombreuses offres, et il convient pour l’entreprise de bien lire les différentes caractéristiques des contrats pour s’assurer de choisir la solution la plus adaptée à leurs besoins.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161478/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Delphine Billouard-Fuentes ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>De plus en plus de sociétés stockent leurs données dans des centres, loin de leurs locaux. Mais est-ce vraiment une bonne idée ?Delphine Billouard-Fuentes, Professeur associé, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1571932021-05-19T16:36:36Z2021-05-19T16:36:36ZRetour sur l’incendie des serveurs d’OVH : la sobriété numérique est-elle possible ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/401612/original/file-20210519-13-1iu10bt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Photo prise le 10 mars 2021 montrant les dégâts provoqués par le feu dans le datacenter strasbourgeois d’OVH. </span> <span class="attribution"><span class="source">PATRICK HERTZOG / AFP</span></span></figcaption></figure><p>Les dégâts irréversibles causés par l’incendie, début mars 2021, du <a href="https://www.journaldunet.com/web-tech/cloud/1500611-arnaud-de-bermingham-scaleway-podcast/">data center SGB2 d’OVH</a>, le numéro 1 français du <em>cloud computing</em>, n’en finissent pas de provoquer des remous. Le terme de « cataclysme » a même souvent été employé pour qualifier cet accident touchant un secteur d’activité en forte croissance et dont les <a href="https://www.journaldunet.com/web-tech/cloud/1498567-incendie-d-ovh-tout-n-est-pas-entierement-retabli-deux-mois-apres/">conséquences</a> sont toujours sensibles.</p>
<p>Quels enseignements pouvons-nous en tirer aujourd’hui ?</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/BrGsCD2nVrk?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Incendie OVH Strasbourg : 3,5 millions de sites web impactés. (StrasTV/Youtube, mars 2021).</span></figcaption>
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<h2>Premier enseignement : le nuage n’existe pas</h2>
<p>Le vocabulaire fantasmé et infantilisant du <a href="https://www.cairn.info/revue-communication-et-langages1-2014-4-page-77.htm"><em>cloud computing</em></a> – « l’informatique en nuage » en français – est durablement mis à mal par cet incendie ayant frappé OVH. Car il n’existe en fait pas plus de nuage que de dématérialisation des données.</p>
<p>Il faudrait plutôt parler ici d’un déplacement physique de l’hypermatérialité des infrastructures qui supportent le réseau Internet d’un point A – le téléphone portable, l’ordinateur sur la table du bureau, le serveur dans l’armoire au bout du couloir, etc. – vers un point B, où elles sont rassemblées et agrégées, à savoir, le <a href="https://www.lebigdata.fr/definition-data-center-centre-donnees">datacenter</a> avec ses salles, ses serveurs et ses baies de stockages.</p>
<p>Globalement, il est faux, voire mensonger, de parler de dématérialisation quand il faudrait plus simplement parler d’une « autre matérialisation » ; celle-ci mobilise toujours <a href="https://www.lemoniteur.fr/article/seine-saint-denis-mise-en-service-du-mega-data-center-de-la-courneuve-en-2021.2113314">du ciment, du béton, du verre, des ventilateurs, des câbles, du cuivre, de l’eau, du bitume, etc</a>. !</p>
<p>Le <em>cloud computing</em> n’est qu’une externalisation des données, des applications et des systèmes des terminaux domestiques et/ou professionnels vers des opérateurs distants, dont c’est devenu le métier de stocker, sécuriser, traiter et diffuser les informations confiées par leurs clients.</p>
<p>L’Internet <a href="https://www.futura-sciences.com/tech/definitions/internet-internet-3983/">reste un réseau qui relie des ordinateurs entre eux</a> en passant par un protocole commun (TCP/IP). Le ciel et les nuages n’ont rien à voir avec tout cela… si ce n’est pour accueillir les satellites, sachant que ces satellites ne représentent qu’une petite partie du trafic si l’on regarde tout ce qui circule sur terre et sous les mers <a href="https://usbeketrica.com/fr/article/cables-sous-marins-internet-risques-tension-reels">au travers des câbles</a> qui maillent le globe.</p>
<p>La question est donc : quand arrêterons-nous de parler de « ciel » et de « nuage » comme si nous nous adressions à des enfants ?</p>
<p>La réponse n’est pas simple, car enfants, petits et grands, consomment et <a href="https://www.cairn.info/revue-systemes-d-information-et-management-2016-3-page-63.htm">produisent des données en grande quantité</a> et veulent continuer à rêver d’immortalité, d’immédiateté et de gratuité.</p>
<p>Et la crise sanitaire que nous traversons depuis mars 2020 a même accentué les usages distants – télétravail, visioconférence, coworking, etc. – en <a href="https://management-datascience.org/articles/12835/">renforçant le pouvoir d’adoption des utilisateurs</a>.</p>
<p>La pandémie de Covid-19 a aussi accentué les dépendances aux réseaux, qui n’ont pour la plupart pas encore amorcé le virage de la sobriété numérique. Mais réjouissons-nous qu’une partie du « nuage syntaxique » soit déjà partie en fumée !</p>
<h2>Second enseignement : intégrer la vulnérabilité du data center</h2>
<p>Les data centers, quelle que soit leur taille, sont devenus incontournables dans la gestion et la circulation de nos données, publiques ou privées, professionnelles ou domestiques, sensibles ou anecdotiques. Ces cyberstructures ont finalement la lourde responsabilité de piloter le <a href="https://www.cairn.info/revue-constructif-2019-3-page-53.htm">cinquième fluide</a> qu’est Internet.</p>
<p>Il est donc indispensable d’en repenser la sécurité et la vulnérabilité, en intégrant la possibilité de leur disparition physique. Si la plupart des risques naturels ont été intégrés et modélisés pour assurer la pérennité de ces installations coûteuses et stratégiques, reste qu’un incendie, une inondation, un tremblement de terre, un <a href="https://datacenter-magazine.fr/le-controle-dacces-des-datacenters-securite-physique-critique-des-infrastructures/">acte de malveillance, une intrusion</a>, voire une déflagration lors d’un attentat restent possibles.</p>
<p>Cette prise en compte du risque majeur de disparition de l’usine à données doit être intégrée au niveau individuel – c’est déjà largement le cas <a href="https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2017-3-page-65.html">lorsqu’un client professionnel signe son contrat d’infogérance avec un fournisseur</a> et qu’il y envisage sa réversibilité – mais aussi au niveau collectif.</p>
<p>Or c’est moins le cas si l’on pense ces installations en termes de « bien commun », comme en témoigne le désarroi de certains clients publics et parapublics d’OVH.</p>
<p>Pour tout utilisateur, ce qui compte, c’est finalement de savoir <a href="https://www.partitio.com/cloud-computing-stockees-vos-donnees/">où sont donc stockées ses données</a> à un instant T et ce qui se passe si elles venaient à disparaître à tout jamais…</p>
<p>Pour beaucoup d’utilisateurs du cloud – y compris des PME et PMI –, la réponse à cette double interrogation n’a rien d’évident ; se la poser constitue même un premier pas.</p>
<p>La relocalisation des données est parfois envisageable, la <a href="https://www.journaldunet.com/solutions/dsi/1490717-le-mainframe-maillon-fort-des-enjeux-de-securite-mondiaux/">vente de mainframe</a> et de serveurs hébergés est d’ailleurs en forte croissance, notamment pour des aspects sécuritaires et de souveraineté.</p>
<h2>Troisième enseignement : produire moins de données</h2>
<p>L’impact environnemental de telles infrastructures est énorme et il ne <a href="https://greenspector.com/fr/accueil/">cessera de croître au fur et à mesure de l’explosion mécanique des données</a> à traiter. On ne parle pas de <em>big data</em> par hasard !</p>
<p>De loin, c’est bien leur construction et la mobilisation de milliers de matériaux et ressources variés qui s’avèrent énergivores ; vient ensuite leur maintenance et fonctionnement, avec une forte consommation d’eau et d’électricité, notamment pour assurer le refroidissement en continu.</p>
<p>Même si les projets sont de plus en <a href="https://www.lebigdata.fr/equinix-premier-data-center-bordeaux">plus efficients énergétiquement</a> et n’ont plus grand-chose à voir avec les premières <a href="https://www.latribune.fr/technos-medias/internet/la-californie-attaque-elle-aussi-le-monopole-de-google-en-justice-866278.html">usines à données californiennes</a> des années 2000 à 2010, les gigantesques data centers demeurent des gouffres énergétiques.</p>
<p>L’enjeu ici n’est pas tant de repenser ces infrastructures que la production des données. Ce qui nous amène à de nouvelles questions : quand penserons-nous la mortalité des données (leur durée de vie) ? Quand envisagerons-nous de ne pas produire de données, qui demeurent dans la plupart des cas bien <a href="https://www.cairn.info/depenser-la-consommation--9782376871262-page-63.htm">inutiles, insipides et inexploités</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/151534/original/image-20170102-18650-16bkozs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/151534/original/image-20170102-18650-16bkozs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/151534/original/image-20170102-18650-16bkozs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/151534/original/image-20170102-18650-16bkozs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/151534/original/image-20170102-18650-16bkozs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/151534/original/image-20170102-18650-16bkozs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/151534/original/image-20170102-18650-16bkozs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/151534/original/image-20170102-18650-16bkozs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Un des data centers d’Amazon à Sterling, en Virginie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/eroc/5863167909/in/photolist-9W7gxT-dywiFP-kY5Rcf-dywNuP-4Q8kcq-A8zQK-9GC8KB-dnf1dp-dAKH4M-dARaXA-dAKH4g-8ocGXW-8ocGUm-8npeKW-8ocGW5-8ocGTG-Ews2ai-D5coqS-b8n6Fg-baS4Kn-b8ehq4-xTyAD9-qSaexp-HH1Pu8">Eric Hunsaker/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
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<h2>Vers une plus grande sobriété numérique ?</h2>
<p>Plutôt que de renforcer la sécurité et la taille des data centers, plutôt que d’attendre l’avènement d’une <a href="https://siecledigital.fr/2021/01/22/macron-informatique-quantique/">lointaine informatique quantique</a>, ne vaudrait-il pas mieux produire moins de données ?</p>
<p>C’est tout à fait possible pour faire un pas vers la <a href="https://www.cairn.info/l-imperatif-de-la-sobriete-numerique--9782373612585.htm">sobriété numérique</a> et la responsabilité digitale.</p>
<p>Les e-déchets <a href="https://www.europarl.europa.eu/news/fr/headlines/society/20201208STO93325/e-dechets-dans-l-union-europeenne-faits-et-chiffres-infographie">sont en forte croissance</a> : or, comme pour beaucoup d’autres choses, les moins chers à recycler sont ceux que nous n’aurons pas produits.</p>
<p>Dans ce contexte, c’est la question de la pertinence même de dispositifs, innovations ou systèmes – qui vont mécaniquement créer des données, fabriquer des métadonnées et impulser du trafic sur le web – qui se pose. On pense ici à la <a href="https://www.01net.com/actualites/pourquoi-la-5g-est-une-mauvaise-nouvelle-pour-l-environnement-1846716.html">5G</a>, à <a href="https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/la-crise-sanitaire-devrait-accelerer-la-montee-en-puissance-de-l-internet-des-objets-856702.html">l’Internet des objets</a>, à l’intelligence artificielle, à la <a href="https://ecoinfo.cnrs.fr/2020/02/11/consommation-energetique-des-technologies-blockchain/">crypto économie (et plus largement l’économie du token</a>), voire à <a href="https://www.cairn.info/revue-d-economie-industrielle.htm">l’industrie 4.0</a> dans son ensemble.</p>
<p>Si le data center constitue un outil essentiel, il ne fait en général que stocker et traiter des données créées ailleurs. Rappelons que ce même datacenter est souvent la propriété de géants du web –, <a href="https://www.lemondeinformatique.fr/actualites/lire-aws-explore-la-correction-d-erreur-en-informatique-quantique-82597.html">Amazon</a>, Facebook, Microsoft ou <a href="https://cloud.google.com/security/deletion?hl=fr">Google</a>.</p>
<p>Le <a href="https://www.maddyness.com/2021/01/06/je-taime-moi-non-plus-la-difficile-relation-entre-les-gafam-et-les-etats/">business model de ces plates-formes</a> reposant justement sur la création, l’exploitation et la monétisation des données, on peut douter de leur intérêt à une quelconque sobriété numérique… Ce sera par défaut au citoyen, au politique et au législateur de se prononcer.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/157193/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Bidan est membre du CNU section sc. de gestions et du management </span></em></p>La récente destruction d’un datacenter strasbourgeois rebat les cartes d’un cloud computing un peu trop fantasmé et encore très éloigné de la nécessaire sobriété numérique.Marc Bidan, Professeur des Universités - Management des systèmes d’information - Polytech Nantes, Auteurs historiques The Conversation FranceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1588842021-04-21T19:53:15Z2021-04-21T19:53:15ZLa réalité physique du monde numérique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/395226/original/file-20210415-24-hpcna1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=542%2C3%2C1853%2C697&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le Magasin Vauban, un vieil entrepôt au port de Strasbourg, réaménagé en centre de données.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Magazin_Vauban_E.jpg?uselang=fr">Michael Kauffmann, Wikipédia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Umberto Eco décrit dans son roman <em>Le nom de la rose</em> l’organisation, la conservation des données et l’accès au savoir, il y a sept siècles dans la bibliothèque d’une abbaye, qui finira par brûler, détruisant ainsi le travail des moines copistes, premiers artisans de la redondance avant l’invention de l’imprimerie puis de l’informatique.</p>
<p>Ce type d’événement s’est reproduit au travers des époques avec à chaque fois des pertes de connaissances. L’épisode le plus récent dans notre époque de dématérialisation, est l’incendie spectaculaire à Strasbourg le 10 mars 2021 d’un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Centre_de_donn%C3%A9es">« data center »</a> – c’est-à-dire d’un centre de stockage et de traitement de données – qui a eu des conséquences importantes pour les utilisateurs. Cet incident est révélateur de la fragilité des infrastructures numériques (ordinateurs, serveurs, racks de stockage, réseaux de communications, alimentations électriques, climatisation…), qui amène à des pertes de données parfois irréversibles, et des services interrompus (systèmes d’information, applications informatiques, messageries, sites Web…).</p>
<p>Un tel accident industriel nous interpelle en fait sur la réalité physique du monde numérique. Celui-ci s’est construit depuis une quarantaine d’années autour de machines informatiques concentrées dans des réseaux de <em>data centers</em> qui constituent le nuage numérique ou « cloud ». Ce « nuage », d’apparence immatérielle, repose en fait sur des infrastructures distribuées et interconnectées à l’échelle de la planète. On recense à ce jour près de 5 000 data centers dédiés ou mutualisés répartis dans <a href="https://www.datacentermap.com/datacenters.html">127 pays dans le monde</a>, certains pouvant héberger des dizaines de milliers de serveurs.</p>
<p>L’histoire de l’informatique est faite d’alternances du local au global entre des infrastructures centralisées et distribuées : centralisées au siècle dernier autour d’un ordinateur unique, puis distribuées avec l’avènement de l’informatique nomade (PC, tablettes, smartphones, objets connectés…), puis mixte de nos jours avec des services de plus en plus externalisés vers des sociétés spécialisées (GAFAM par exemple) pour sauvegarder et traiter des données, ou communiquer au travers des réseaux sociaux, ou dans le télétravail par visioconférences et documents partagés.</p>
<h2>Comment stocke-t-on des données de manière sécurisée aujourd’hui ?</h2>
<p>Si on regarde l’usage individuel, il y a 30 ans les données étaient stockées sur des disquettes de capacité de 1 méga-octet (10<sup>6</sup> octets) puis des CD, des clés USB… Aujourd’hui un disque dur magnétique personnel de 1 téra-octet (10<sup>12</sup> octets, soit mille milliards) – qui a la taille d’un smartphone – représente l’équivalent d’un million de disquettes pour un coût de quelques dizaines d’euros. La sauvegarde des données de manière pérenne est une évidence depuis les débuts de l’informatique, avec au départ des matériels et des logiciels peu fiables.</p>
<p>Aujourd’hui, l’heure est à l’explosion des données liées à nos usages, par exemple la sauvegarde instantanée dans le cloud de photos et vidéos saisies sur un smartphone. L’heure est aussi à toutes les formes actuelles connues de piratage, et de cybercriminalité. Sauvegarder ses données nécessite des précautions, par exemple dans des lieux de stockage sûrs.</p>
<p>Au niveau professionnel, beaucoup d’usagers et de sociétés n’ont pas les moyens de disposer d’une infrastructure informatique autonome et robuste, compte tenu des coûts d’acquisition, de maintenance, de sécurisation, de mise à jour, et des ressources humaines associées. Ils font donc appel à des sociétés spécialisées qui vendent leur maîtrise de la sécurisation des données, que ce soit en termes de confidentialité, de protection de savoir-faire ou de vie privée. Notons aussi que les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/USA_PATRIOT_Act">enjeux de souveraineté des États</a> dans l’accès aux données sont cruciaux. La distribution des données et de leurs traitements à l’échelle de la planète – et un jour de l’espace avec des grappes de satellites établissant les communications entre serveurs – offre de nombreux avantages sous réserve d’une bonne compréhension des limites physiques des infrastructures utilisées, notamment en cas d’accident.</p>
<p>Un regard critique sur les offres actuelles est donc indispensable : où sont stockées mes données ? Comment sont-elles protégées, sécurisées et sauvegardées ? Quelle empreinte carbone pour mes usages numériques ?</p>
<h2>Quels coûts pour cette virtualisation de nos systèmes informatiques ?</h2>
<p>Certains opérateurs offrent des services clés en main répondant à ces exigences. D’autres offrent à des coûts moindres des possibilités d’accès à des machines, en laissant aux clients la responsabilité de leurs choix, par exemple dans la gestion des sauvegardes – les contrats entre les parties régissent les détails de ces usages. La notion de qualité de service <a href="https://www.journaldunet.com/web-tech/cloud/1498567-incendie-d-ovh-a-strasbourg-la-cnil-monte-au-creneau/">est donc essentielle</a>.</p>
<p>Une bonne communication sur les technologies utilisées et leurs limites parfois insaisissables pour les usagers est indispensable : quels sont les niveaux de protection de mes données dans le contrat souscrit ? À quelle fréquence se font les sauvegardes, et comment ? La CNIL rappelle en particulier les <a href="https://www.cnil.fr/fr/incendie-ovh-faut-il-notifier-la-cnil">obligations en matière de notification</a>, en cas d’indisponibilité ou dans le pire cas de destruction de données personnelles déposées dans un data center.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/395224/original/file-20210415-17-zui9ap.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/395224/original/file-20210415-17-zui9ap.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/395224/original/file-20210415-17-zui9ap.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/395224/original/file-20210415-17-zui9ap.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/395224/original/file-20210415-17-zui9ap.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/395224/original/file-20210415-17-zui9ap.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/395224/original/file-20210415-17-zui9ap.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le data center de l’agence Reuteurs, à Londres, en 2005.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Reuters.london.arp.jpg?uselang=fr">Adrian Pingstone/Wikipedia</a></span>
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</figure>
<p>La réalité physique du monde numérique pose aussi la question des ressources énergétiques nécessaires à ces infrastructures et à nos usages les plus voraces en énergie (vidéos en streaming, gestion de la monnaie virtuelle, les bitcoins). L’empreinte environnementale de nos périphériques numériques connectés et des infrastructures de communications, calcul et stockage ne peut être ignorée : la part globale du « numérique » dans les émissions de gaz à effet de serre augmente chaque année et <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-018-06610-y">dépassera bientôt les 5 %</a>, avec une consommation en énergie de 2000 térawatts-heures soit 10 % de la demande mondiale d’électricité.</p>
<h2>Des solutions techniques</h2>
<p>Des solutions scientifiques et technologiques émergent pour <a href="https://qarnot.com">fiabiliser</a> et <a href="https://www.datacenterknowledge.com/regulation/europe-edges-closer-green-data-center-laws">accompagner</a> les transitions numériques et énergétiques qui sont indissociables.</p>
<p>Cela pourrait par exemple conduire à des « circuits courts numériques » de fiabilisation et de sauvegarde, associés à chaque data center et valorisant des générations de machines informatiques plus anciennes <a href="https://mpra.ub.uni-muenchen.de/104507/1/MPRA_paper_104507.pdf">fonctionnant exclusivement avec des énergies vertes</a>. Ces machines pourraient être distribuées à l’échelle d’une région, ce qui limiterait l’impact d’un accident industriel sur un site donné, en jouant sur la redondance des machines pour assurer des sauvegardes.</p>
<p>En effet, un service basé sur une redondance de ressources informatiques est en cas d’accident toujours bien meilleur qu’une perte irréversible de données numériques, que ce soit pour des usages privés ou professionnels. Pour beaucoup d’applications ne nécessitant pas de calculs hautes performances, ou pour la gestion locale des données et des services offerts aux usagers à l’échelle d’un <a href="https://www.banquedesterritoires.fr/smart-city-linnovation-au-service-des-territoires">territoire</a> ou d’une <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ville_intelligente">ville intelligente</a>, il est envisageable de coupler en « circuit court numérique » la production et le stockage des données avec les énergies vertes, que ce soit en termes de <a href="https://www.lesechos.fr/partenaires/enedis-la-transition-connecte/vers-des-data-centers-plus-verts-1016045">récupération de chaleur</a> ou de production d’<a href="https://www.datacenterknowledge.com/energy/new-google-cloud-data-show-how-green-its-global-data-center-regions-are">électricité d’origine renouvelable</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/158884/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Robert ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Loin de flotter dans l’éther, nos données sont hébergées dans des data centers qui sont soumis à des risques industriels et consomment énormément d’électricité. Quelles évolutions ? Quelles solutions ?Michel Robert, Professeur des Universités, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1583182021-04-08T18:31:00Z2021-04-08T18:31:00ZDes milliards d’arbres cartographiés dans le désert grâce à des satellites et des supercalculateurs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/393151/original/file-20210401-23-1ypgfe8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=16%2C3%2C1182%2C794&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’informatique moderne permet de traiter les grandes quantités de données des satellites d’imagerie à haute résolution. Repérer les arbres et arbustes isolés dans des zones arides et semi-arides permet mieux évaluer et comprendre l’évolution du couvert végétal.</span> <span class="attribution"><span class="source">Martin Brandt</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Les zones arides et semi-arides sont à l’étude depuis longtemps, pour savoir si leur couvert végétal régresse. En effet, la théorie selon laquelle le Sahara s’étendait et la végétation ligneuse reculait a été émise pour la première fois dans les années 1930. Puis, la <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/11/12/au-sahel-le-climat-durablement-perturbe-depuis-la-grande-secheresse_5382513_3212.html">« grande sécheresse »</a> des années 1970 au Sahel a mis l’accent sur la désertification causée par la surexploitation et par le changement climatique. Au cours des dernières décennies, c’est l’impact potentiel du changement climatique sur la végétation qui a été la principale préoccupation – et l’effet rétroactif de la végétation sur le climat, lié au rôle de la végétation dans le cycle global du carbone.</p>
<p>Pour mieux comprendre l’état du couvert végétal et son évolution dans des zones arides et semi-arides, nous avons récemment cartographié des milliards d’arbres et d’arbustes individuels en Afrique de l’Ouest. Un défi relevé en associant images satellites haute résolution et techniques d’apprentissage machine (<em>machine learning</em>), grâce à des supercalculateurs.</p>
<h2>Trouver un arbuste dans le désert – depuis l’espace</h2>
<p>Depuis les années 1970, la végétation dans les zones semi-arides du monde entier est cartographiée grâce à des données satellites. Les images disponibles sont soit de « hautes » résolutions spatiales (avec les satellites de la NASA, <a href="https://landsat.gsfc.nasa.gov/multispectral-scanner-system">Landsat MSS</a> et <a href="https://www.usgs.gov/centers/eros/science/usgs-eros-archive-landsat-archives-landsat-4-5-thematic-mapper-tm-level-1-data">TM</a>, et de l’ESA, <a href="https://earth.esa.int/eogateway/missions/spot">Spot</a> et <a href="https://sentinels.copernicus.eu/web/sentinel/home">Sentinel</a>), soit de « moyennes ou basses » résolutions spatiales (satellites <a href="https://earth.esa.int/eogateway/missions/noaa">NOAA AVHRR</a> et <a href="https://modis.gsfc.nasa.gov/about/">MODIS</a>).</p>
<p>Pour analyser avec précision le couvert végétal à l’échelle continentale ou mondiale, il faut utiliser les images de la plus haute résolution disponible, avec une résolution d’un mètre ou moins. Jusqu’à présent, les coûts d’acquisition et d’analyse de ces données étaient prohibitifs et la plupart des études se sont appuyées sur des données de moyenne ou faible résolution, qui ne permettent pas d’identifier des arbres individuels. Ces études ne donnent donc que des estimations du couvert végétal agrégé et de la productivité, mélangeant de plus végétations herbacées et ligneuses.</p>
<p>Une nouvelle étude <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-020-2824-5">publiée dans <em>Nature</em></a> en octobre 2020, couvrant une grande partie de la zone semi-aride des Sahara, Sahel et Soudan en Afrique de l’Ouest, surmonte ces limites. En combinant une immense quantité de données satellites haute résolution, des capacités de calcul avancées au sein d’un supercalculateur, des techniques d’apprentissage automatique et de nombreuses données de terrain recueillies au fil des décennies, nous avons pu identifier des arbres et des arbustes individuels dont la surface de la couronne est supérieure à 3 m<sup>2</sup> avec une grande précision. Le résultat est une base de données comprenant 1,8 milliard d’arbres dans la région étudiée, disponible pour tous les intéressés.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/391659/original/file-20210325-21-1nbg76x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/391659/original/file-20210325-21-1nbg76x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=556&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/391659/original/file-20210325-21-1nbg76x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=556&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/391659/original/file-20210325-21-1nbg76x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=556&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/391659/original/file-20210325-21-1nbg76x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=699&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/391659/original/file-20210325-21-1nbg76x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=699&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/391659/original/file-20210325-21-1nbg76x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=699&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Supercalculateur, apprentissage automatique, données satellitaires et évaluations sur le terrain permettent de cartographier des milliards d’arbres individuels en Afrique occidentale.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Martin Brandt</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Actuellement, ce travail est étendu pour couvrir la ceinture semi-aride au sud du Sahara à travers le continent africain jusqu’à la mer Rouge. Le nombre d’arbres cartographiés à ce jour est de 13 milliards, et la méthodologie est en cours d’amélioration. La couverture géographique devrait être élargie, d’abord au reste des zones semi-arides d’Afrique, puis à d’autres continents.</p>
<p>Pour couvrir l’ensemble de la zone sahélienne de l’Afrique, de l’Atlantique à la mer Rouge, nous avons utilisé environ 100 000 images satellites, soit un volume total de données de plusieurs centaines de téraoctets. Grâce aux superordinateurs de la NASA et de Blue Waters (Université d’Illinois à Urbana-Champaign), les images ont été assemblées pour créer une mosaïque continue. Les arbres ont ensuite été identifiés à l’aide de l’<a href="https://theconversation.com/intelligence-artificielle-les-defis-de-lapprentissage-profond-111522">apprentissage profond</a>, une technique d’intelligence artificielle dans laquelle l’ordinateur est entraîné à reconnaître des arbres individuels. Au cours de son entraînement, des dizaines de milliers d’arbres ont été « montrés » à l’ordinateur par un opérateur, qui a utilisé ses connaissances du terrain en combinaison avec ses compétences en matière d’interprétation d’images. Ensuite, les résultats de l’identification par la machine ont été vérifiés. Dans l’ensemble, la précision s’est avérée être fortement corrélée aux mesures sur le terrain.</p>
<h2>Des informations inattendues sur les arbres individuels</h2>
<p>Notre base de données d’arbres et d’arbustes contient des informations sur chaque arbre, sa localisation exacte (généralement avec une incertitude de quelques mètres), la taille de sa couronne, la date d’acquisition de l’image satellite sur laquelle il a été identifié, ainsi que des estimations de sa masse ligneuse au-dessus du sol et son contenu en carbone. À l’avenir, d’autres informations pourront être ajoutées, par exemple sa hauteur et sa <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ph%C3%A9nologie">phénologie</a>, c’est-à-dire ses événements périodiques comme la feuillaison.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/391660/original/file-20210325-21-rsnscr.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/391660/original/file-20210325-21-rsnscr.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/391660/original/file-20210325-21-rsnscr.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/391660/original/file-20210325-21-rsnscr.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/391660/original/file-20210325-21-rsnscr.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/391660/original/file-20210325-21-rsnscr.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/391660/original/file-20210325-21-rsnscr.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les populations du Sahel semi-aride sauvegardent et promeuvent les arbres au sein des peuplements et des terres agricoles. La relation entre les humains et les arbres n’engendre pas toujours des pertes de couverture arborée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Martin Brandt</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ce n’est que le début du projet de recherche, mais des implications importantes sont déjà évidentes. Dans l’étude ouest-africaine, nous avons trouvé beaucoup plus d’arbres que ce à quoi nous nous attendions. Alors que d’autres sources de données indiquent que les arbres sont quasiment absents du Sahara et de la zone nord-sahélienne, nous avons trouvé des centaines de millions d’arbres. Le stock de carbone associé à ces arbres serait plus grand et plus stable que les stocks de carbone dans la végétation herbacée. De plus, les arbres des terres agricoles sont généralement plus grands que ceux des savanes vierges, et la couverture arborée globale est élevée dans les zones peuplées ou exploitées. Cela montre qu’une forte densité de population humaine n’est pas toujours liée à une perte de couverture arborée, car les habitants du Sahel semi-aride protègent et encouragent les arbres dans les zones habitées et les terres agricoles.</p>
<h2>À quoi servira la base de données ?</h2>
<p>Cette base de données sert différents objectifs. Elle constitue une base de référence qui permettra d’étudier l’évolution temporelle de la végétation ligneuse à grande échelle, peut-être même aux échelles continentales ou mondiales.</p>
<p>Elle permettra aussi d’analyser les facteurs qui contrôlent la présence des arbres dans les zones arides, comme l’occupation humaine, les précipitations, les sols ou la géomorphologie. Ces informations alimenteront la modélisation des écosystèmes et du « système Terre », puisque les arbres jouent des rôles importants dans les interactions entre l’atmosphère et la surface terrestre, en contrôlant à la fois l’échange de carbone, l’évapotranspiration et la rugosité aérodynamique.</p>
<p>Enfin, les informations de la base de données pourraient être utilisées pour informer et soutenir les politiques environnementales aux niveaux national et international.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=158&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=158&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=158&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=198&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=198&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=198&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Créé en 2007 pour accélérer les connaissances scientifiques et leur partage, le Axa Research Fund a apporté son soutien à environ 650 projets dans le monde menés par des chercheurs de 55 pays. Pour en savoir plus, visitez le site <a href="https://www.axa-research.org/en">Axa Research Fund</a> ou suivez sur Twitter @AXAResearchFund.)</em></p>
<p><em>Article traduit par Elsa Couderc avec l’aide de DeepL</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/158318/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Martin Brandt a reçu des financements du AXA Postdoctoral Research Fund. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Kjeld Rasmussen ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des technologies de pointe permettent de construire une base de données ouverte de milliards d’arbres individuels, pour mieux comprendre la végétation en zone aride, loin des idées reçues.Martin Brandt, Assistant professor of geography, University of CopenhagenKjeld Rasmussen, Associate professor emeritus, University of CopenhagenLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1567932021-03-11T17:52:02Z2021-03-11T17:52:02ZDonnées personnelles : les Français parmi les moins préoccupés de leur utilisation<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/388544/original/file-20210309-21-1kworsx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5458%2C3355&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les applications de traçage des déplacements des citoyens pour lutter contre l’épidémie de Covid-19 ont relancé le débat sur la sécurité des données.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-illustration/user-data-privacy-abstract-personal-private-1062285074">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Depuis plusieurs années, des entreprises de tous les secteurs pratiquent la collecte de nombreux types de données sur ses clients. Nous en sommes conscients, à l’ère du numérique et du big data : nos habitudes et nos comportements sont de plus en plus enregistrés, souvent par des systèmes automatiques que l’on n’aperçoit pas forcement.</p>
<p>La décision de fournir volontairement nos données personnelles, souvent sensibles, à des sujets tiers ouvre à des questionnements légitimes sur le stockage et l’utilisation que les entreprises en feront ensuite. On observe d’ailleurs des préoccupations grandissantes sur ces questions.</p>
<p>Dans la dernière <a href="https://www.ipsos.com/en/2019-cigi-ipsos-global-survey-internet-security-and-trust">étude</a> de l’entreprise de sondage française Ipsos sur le sujet, plus d’un répondant sur deux déclarait se soucier davantage de ses données personnelles qu’un an plus tôt. Les affaires de fuite de données, à l’image du scandale <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/04/04/cambridge-analytica-87-millions-de-comptes-facebook-concernes_5280752_4408996.html">Cambridge Analytica</a> de 2018 qui concernait 87 millions de comptes Facebook, ont sans doute pu contribuer à cette prise de conscience.</p>
<p>Plus récemment, la question de la sécurité des données est revenue dans le débat lorsque les gouvernements ont mis en place des applications de traçage des déplacements des citoyens pour lutter contre l’épidémie de Covid-19. Le <a href="https://www.latribune.fr/technos-medias/comment-le-gouvernement-manipule-les-chiffres-de-tous-anti-covid-863808.html">faible taux d’adhésion</a> à cette initiative dans la plupart des pays, comme celle pour l’application TousAntiCovid (anciennement StopCovid), a encore montré l’évidente préoccupation des individus par rapport à leurs données.</p>
<h2>Disparités mondiales</h2>
<p>Pourtant, ces préoccupations ne sont pas toutes au même niveau dans le monde. C’est ce que nous avons pu observer à l’occasion d’une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0022435920300440">étude</a> menée auprès de 22 050 consommateurs dans 14 pays.</p>
<p>Nos résultats montrent que les préoccupations des clients concernant leurs données personnelles sont liées à 4 dimensions :</p>
<ul>
<li><p>La collecte des données de la part des entreprises, en termes de facilité de la collecte et de quantité de données collectées.</p></li>
<li><p>L’accès à leurs données de la part de tiers externes à l’entreprise avec laquelle ils partagent leurs données.</p></li>
<li><p>La précision des données en possession des entreprises, suite par exemple au manque de mise à jour ou à des erreurs dans les bases de données.</p></li>
<li><p>L’utilisation des données de la part des entreprises une fois qu’elles ont été partagées, ex. suggestions non désirées, spamming des boites mail, etc.</p></li>
</ul>
<p>Le graphique 1 montre les différences entre les pays sur ces 4 dimensions de préoccupation des clients. Les pays avec le niveau de préoccupation plus bas sur les 4 dimensions sont l’Italie, l’Espagne, le Japon et la France tandis que le Royaume-Uni, le Mexique, l’Australie, le Canada, les États-Unis et l’Afrique du Sud sont les pays avec un niveau de préoccupation plus élevé.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/388540/original/file-20210309-21-1prrouu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/388540/original/file-20210309-21-1prrouu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/388540/original/file-20210309-21-1prrouu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=341&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/388540/original/file-20210309-21-1prrouu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=341&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/388540/original/file-20210309-21-1prrouu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=341&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/388540/original/file-20210309-21-1prrouu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=428&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/388540/original/file-20210309-21-1prrouu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=428&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/388540/original/file-20210309-21-1prrouu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=428&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Graphique 1 : Niveau de préoccupation de plusieurs pays face aux 4 dimensions de la collecte de données.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur (D.R)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les résultats concernant les pays européens, dont la France où la population se montre moins préoccupée que les autres, apparaissent cohérents avec l’introduction, mi-2018, du règlement général sur la protection des données (<a href="https://ec.europa.eu/info/law/law-topic/data-protection/reform/rules-business-and-organisations/principles-gdpr_fr">RGPD</a>). Ce nouveau cadre législatif, particulièrement précis et strict par rapport à ceux d’autres pays, a imposé aux entreprises d’être plus transparentes sur la collecte des données personnelles et sur leur utilisation, ce qui peut expliquer le moindre niveau des préoccupations dans ces pays.</p>
<h2>Le « paradoxe » de la vie privée</h2>
<p>Après avoir analysé les préoccupations des clients, nous pouvons nous focaliser sur leur volonté à fournir des informations personnelles avec les entreprises. Nos résultats démontrent que l’avis des clients sur ce sujet n’est pas le même pour tous les types de données qu’ils peuvent être amenés à partager avec une entreprise.</p>
<p>On peut classifier les données personnelles en deux grandes catégories :</p>
<ul>
<li><p>Des <strong>données non sensibles</strong>, c’est-à-dire auxquelles les clients n’accordent pas beaucoup d’importance. Les entreprises ont en effet généralement la possibilité de les collecter en forme anonyme même si le client fait le choix de ne pas les partager. Par exemple ses caractéristiques démographiques (sexe, âge, etc.), ses hobbies, ses habitudes d’achat, ses préférences sur les produits, les marques et les médias de communication, etc.</p></li>
<li><p>Des <strong>données sensibles</strong>, c’est-à-dire des informations privées auxquelles les clients accordent plus d’importance, par exemple, son adresse, son téléphone, ses données financières (revenus, numéro de carte de crédit, etc.), son état de santé, etc.</p></li>
</ul>
<p>Le graphique 2 montre les différences dans la volonté des clients à partager ces deux typologies d’information entre les pays. Il est intéressant de noter que les Français qui, comme nous l’avons vu, se distinguent par un niveau de préoccupation général moins élevé, se montrent parmi les plus réticents à livrer leurs données sensibles.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/388541/original/file-20210309-23-1ozy7gt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/388541/original/file-20210309-23-1ozy7gt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/388541/original/file-20210309-23-1ozy7gt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=186&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/388541/original/file-20210309-23-1ozy7gt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=186&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/388541/original/file-20210309-23-1ozy7gt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=186&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/388541/original/file-20210309-23-1ozy7gt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=233&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/388541/original/file-20210309-23-1ozy7gt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=233&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/388541/original/file-20210309-23-1ozy7gt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=233&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Graphique 2 : Disponibilité des individus à partager des données non sensibles (gauche) et des données sensibles (droite) avec les entreprises.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur (D.R)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>A contrario, les pays avec un niveau de préoccupation général plus élevé, comme l’Afrique du Sud, se retrouvent parmi les plus enclins à partager leurs données sensibles. Ces comportements s’apparentent à un phénomène du <a href="https://theconversation.com/facebook-et-le-paradoxe-de-la-vie-privee-94684">« paradoxe de la vie privée »</a>, que souligne la contradiction entre l’attachement à la protection de ses données personnelles et un comportement de partage volontaire d’informations privées avec des sujets tiers.</p>
<p>En tenant compte de ce paradoxe, on pourrait donc qualifier les Français de clients « prudents » : même s’ils déclarent ne pas se soucier beaucoup de leurs données, cela ne veut pas dire qu’ils ne s’interrogent pas sur le devenir de ces dernières, notamment les plus sensibles, lorsqu’une entreprise les leur demande.</p>
<p>Les entreprises ont tout intérêt à intégrer ces différentes sensibilités dans leur activité, notamment en travaillant sur la confiance qu’elle génère auprès de ses clients. En effet, comme l’explication de la mise en place du RGPD le suggère, un cadre jugé sûr permet de faire baisser le niveau de préoccupation.</p>
<p>Les résultats de notre étude viennent ainsi confirmer l’importance de cette confiance du client et précisent qu’elle intervient à trois niveaux : dans la culture du pays (qui intègre la dimension institutionnelle et juridique), au sein de l’entreprise en question, ainsi qu’au niveau du personnel de l’entreprise.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/156793/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Monica Grosso ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une étude mondiale montre que la France fait partie des pays où les usagers ont le moins de réticences à partager une partie de leur vie privée avec des entreprises tierces.Monica Grosso, Professeur de Marketing, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1473022020-10-08T17:51:15Z2020-10-08T17:51:15ZDossier : 5G, des ondes de choc ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/361107/original/file-20201001-22-h5sbtq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=18%2C6%2C4169%2C2788&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Que va changer la 5G ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/LqKhnDzSF-8">Joshua Sortino / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>On pense à la 5G comme une amélioration du réseau de téléphonie mobile, mais la rapidité des communications 5G devrait permettre de connecter bien plus que nos téléphones. Une rapidité suffisante pour un Internet des objets, connectés entre eux, permettant captation et analyse de données ou applications de réalité virtuelle. Face à de telles annonces, pas étonnant que technophiles et sceptiques s’affrontent, car ce n’est pas tant la technologie elle-même que ses conditions d’utilisation qui posent question.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/la-5g-quest-ce-que-cest-comment-ca-marche-146864">La 5G : qu’est-ce que c’est ? Comment ça marche ?</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/361077/original/file-20201001-18-ba1wye.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/361077/original/file-20201001-18-ba1wye.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/361077/original/file-20201001-18-ba1wye.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/361077/original/file-20201001-18-ba1wye.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=396&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/361077/original/file-20201001-18-ba1wye.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/361077/original/file-20201001-18-ba1wye.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/361077/original/file-20201001-18-ba1wye.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=498&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">En 5G, il sera possible de diffuser en direct des vidéos de très haute qualité.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/ieinhZHP3Do">Alex Bracken/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Xavier Lagrange (IMT Atlantique) nous explique comment fonctionne cette nouvelle technologie. La 5G permet d’accélérer la transmission des données, mais en se basant que les mêmes protocoles que la 4G : il s’agit d’une communication en parallèle. Le réseau est « configurable », et sera même, à terme, « virtualisé ». Un autre changement par rapport aux générations précédentes : l’utilisation de nouvelles bandes de fréquences, nécessitant l’installation de nouvelles antennes.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/tout-est-il-a-jeter-dans-la-5g-122210">Tout est-il à jeter dans la 5G ?</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/361083/original/file-20201001-24-xlaipc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/361083/original/file-20201001-24-xlaipc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/361083/original/file-20201001-24-xlaipc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/361083/original/file-20201001-24-xlaipc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/361083/original/file-20201001-24-xlaipc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=528&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/361083/original/file-20201001-24-xlaipc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=528&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/361083/original/file-20201001-24-xlaipc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=528&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">FrankHH/Shutterstock</span></span>
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<p>Sylvain Colombero, Federico Pigni et Pierre Dal Zotto (GEM) expliquent comment la modification des infrastructures numériques devrait notamment permettre de réduire les zones qui ne sont pas couvertes par le réseau actuel.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/la-5g-une-nouvelle-phase-de-la-revolution-digitale-mais-plutot-pour-2025-2035-145339">La 5G, une nouvelle phase de la révolution digitale – mais plutôt pour 2025-2035</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/361087/original/file-20201001-18-1ao6suz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/361087/original/file-20201001-18-1ao6suz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/361087/original/file-20201001-18-1ao6suz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/361087/original/file-20201001-18-1ao6suz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/361087/original/file-20201001-18-1ao6suz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/361087/original/file-20201001-18-1ao6suz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/361087/original/file-20201001-18-1ao6suz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/eYwn81sPkJ8">Jack Sloop/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour l’instant, il y a en fait peu de certitudes sur ce que la 5G va changer dans nos interactions sociales et nos rapports au monde, et Valéry Michaud (Neoma Business School) nous rappelle que si nous avons tendance à surestimer l’impact à court terme des nouvelles technologies, nous sous-estimons leurs effets sur le long terme.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/vie-privee-et-risque-dun-capitalisme-de-la-surveillance-loublie-des-debats-sur-la-5g-146326">Vie privée et risque d’un « capitalisme de la surveillance », l’oublié des débats sur la 5G</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/361088/original/file-20201001-22-1hlq59l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/361088/original/file-20201001-22-1hlq59l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/361088/original/file-20201001-22-1hlq59l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/361088/original/file-20201001-22-1hlq59l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/361088/original/file-20201001-22-1hlq59l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/361088/original/file-20201001-22-1hlq59l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/361088/original/file-20201001-22-1hlq59l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/antenne-relais-5g-signal-wi-fi-5390644/">F. Muhammad/Pixabay</a></span>
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</figure>
<p>Yannick Chatelain (GEM) regarde les projets de « villes intelligentes » que pourraient permettre les hauts débits de la 5G au prisme du « capitalisme de la surveillance », dans lequel nos données sont entre les mains de quelques multinationales.</p>
<h2><a href="https://theconversation.com/les-enjeux-geopolitiques-de-la-5g-146494">Les enjeux géopolitiques de la 5G</a></h2>
<p>C’est aussi la possibilité de captage et de transfert massif de données qui sous-tend l’irruption de la 5G dans les relations internationales, décrypte Christine Dugoin-Clément (IAE).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147302/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
De nombreuses questions se posent sur la route vers la 5G.Benoît Tonson, Chef de rubrique Science + Technologie, The Conversation FranceElsa Couderc, Cheffe de rubrique Science + Technologie, The Conversation FranceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1463262020-09-23T17:34:15Z2020-09-23T17:34:15ZVie privée et risque d’un « capitalisme de la surveillance », l’oublié des débats sur la 5G<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/359047/original/file-20200921-22-1a952ni.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=13%2C3%2C1264%2C846&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le déploiement du réseau 5G doit débuter d’ici la fin de l’année en France.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/antenne-relais-5g-signal-wi-fi-5390644/">F. Muhammad / Pixabay</a></span></figcaption></figure><p>La rentrée parlementaire du 15 septembre dernier aura été marquée par de <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/09/16/le-deploiement-de-la-5g-electrise-l-assemblee-nationale_6052389_3244.html">vives discussions</a> sur le développement du réseau 5G. Une rentrée d’autant plus « électrique » que le président de la République avait, pas plus tard que la veille, confirmé sa volonté de « prendre le tournant » de la cinquième génération des standards pour la téléphonie mobile.</p>
<p>Emmanuel Macron avait de surcroît tourné en dérision la <a href="https://fr.euronews.com/2020/09/15/macron-torpille-la-demande-de-moratoire-sur-la-5g-en-france">demande de moratoire d’élus de l’opposition</a> en évoquant des opposants à cette volonté qui préféreraient le <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/macron-defend-la-5g-contre-ceux-qui-prefereraient-le-modele-amish_fr_5f602120c5b68d1b09c67d27?utm_hp_ref=fr-homepage">modèle « amish » et le « retour à la lampe à huile »</a>.</p>
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<figcaption><span class="caption">Emmanuel Macron défend la 5G devant des entreprises du numérique (Ouest-France, 15 septembre 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>Si la 5G fait autant débat, c’est qu’elle interroge ! Elle « hystérise » à tel point qu’elle a même été prise en otage pour nourrir des thèses conspirationnistes, à l’image des, contenus sur ses <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/ces-theories-du-complot-qui-connectent-la-5g-et-le-coronavirus_3903681.html">liens supposés avec la propagation du coronavirus</a>.</p>
<p>Cette situation exige de tous les acteurs des réponses étayées, fondées sur des faits, aux nombreuses questions que pose son déploiement sur le territoire national, qui devrait débuter en <a href="https://www.numerama.com/politique/312368-deploiement-de-la-5g-quel-est-le-calendrier-defini-par-leurope.html">fin d’année</a>.</p>
<h2>De plus en plus d’appareils connectés</h2>
<p>Les enjeux autour de la mise en place de la 5G sont en effet multiples. Par-delà les problématiques <a href="https://theconversation.com/tout-est-il-a-jeter-dans-la-5g-122210">économiques</a> et <a href="https://theconversation.com/huawei-en-ordre-de-bataille-face-aux-sanctions-americaines-144590">géopolitiques</a>, certains s’interrogent notamment des <a href="https://www.inspq.qc.ca/pdf/publications/2119_evaluation_champs_electromagnetiques_radiofrequences.pdf">possibles impacts sur la santé</a>.</p>
<p>De manière moins spectaculaire dans les débats, la 5G questionne également sur la vie privée. Ce déploiement ne peut pourtant pas se passer d’une réflexion approfondie sur ses factuelles faiblesses actuelles en la matière et les moyens à mettre en œuvre pour préserver les libertés individuelles.</p>
<p>Dès le 5 mars 2019, le consultant en sécurité Filip Chytrý <a href="https://www.nextpit.fr/5g-vie-privee-danger">appelait à la vigilance</a> dans une interview accordée au site Nexpit. Il soulignait que le déploiement de la 5G irait de pair avec une augmentation du nombre d’appareils connectés conjuguée à une centralisation des données de l’utilisateur.</p>
<p>Il pointait que cette technologie surpuissante (jusqu’à 1,4 Gbit/s en téléchargement) allait être en mesure de confier à un seul opérateur (choisi par le consommateur) toutes ses données personnelles.</p>
<p>Fort de ces constats, il s’inquiétait que personne au plus haut niveau ne s’occupe alors d’essayer de <a href="https://www.nextpit.fr/5g-vie-privee-danger">« créer un processus et une structure de soutien »</a> pour éviter que le pouvoir ne soit concentré entre les mains de quelques entreprises. Les propos alarmistes de Filip Chytrý ont été corroborés par d’autres (outre-Atlantique) en des termes encore plus alarmistes qui ont engendré des actes forts.</p>
<iframe src="https://content.jwplatform.com/players/23R69iml-M5v8pC1c.html" width="100%" height="360" frameborder="0" scrolling="auto"></iframe>
<p>Quelques mois plus tard, en septembre 2019, le projet <a href="https://www.waterfrontoronto.ca/nbe/portal/waterfront/Home">Waterfront Toronto</a> – « ville intelligente » (<em>smart city</em>) s’appuyant sur la technologie 5G – développé par une filiale de la société mère de Google, Alphabet, a été ainsi sévèrement remis en cause pour ce qui concerne sa politique de confidentialité et sa collecte de données.</p>
<p>Le projet de modernisation de cette ancienne friche industrielle de la ville canadienne prévoyait notamment l’installation de nombreux capteurs, en particulier pour mesurer les déplacements de la population.</p>
<h2>« Remplacer la démocratie »</h2>
<p>Dans un rapport de 99 pages, un groupe d’experts en technologie avait qualifié le plan directeur du projet de « quelque peu lourd et répétitif » et estimé que ce plan « <a href="https://www.smartcitiesdive.com/news/critics-slam-sidewalk-labs-frustratingly-abstract-quayside-master-plan/562938/">ne semblait pas placer le citoyen au centre du processus</a> de conception des innovations numériques, comme cela avait été promis au début et qui était nécessaire à la légitimité ».</p>
<p>Dans la foulée, Roger McNamee, l’un des premiers investisseurs des sociétés Google et Facebook, a exhorté les responsables à abandonner le projet en soulignant le risque « de <a href="http://bigtechtopia.com/2019/06/big-tech-investor-urges-toronto-to-abandon-smart-city-development/">remplacer la démocratie</a> par une prise de décision algorithmique ». Selon Roger McNamee :</p>
<blockquote>
<p>« Le projet de “ville intelligente” sur le front de mer de Toronto est la version la plus évoluée à ce jour de ce que la sociologue Shoshana Zuboff, professeure émérite à Harvard, appelle le “<a href="https://esprit.presse.fr/article/shoshana-zuboff/le-capitalisme-de-la-surveillance-42084">capitalisme de surveillance</a>”. »</p>
</blockquote>
<h2>Une nouvelle forme de capitalisme</h2>
<p>Selon Shoshana Zuboff, ce « capitalisme de surveillance », dans lequel les capacités à orienter et à tirer profit de nos préférences personnelles constitueraient le moteur de l’économie, est appelé à remplacer à terme le capitalisme industriel.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/KTASJKhceC0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Les menaces du capitalisme de la surveillance (Xerfi canal, juillet 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>Mais finalement, le 7 mai 2020, le projet de <em>smart city</em> sise à Toronto <a href="https://theconversation.com/sidewalk-labs-smart-city-plans-for-toronto-are-dead-whats-next-138175">était abandonné</a>.</p>
<p>Fort de cette expérimentation outre-Atlantique, à l’instar du projet de « ville intelligente », un « pays intelligent » gagnerait dans le déploiement de cette nouvelle technologie à se doter d’un plan directeur pour éviter que ces projets n’évoluent en potentiels outils de surveillance généralisée au service d’une poignée de grandes entreprises. Un plan plaçant le citoyen au centre du processus de conception des innovations numériques afférentes permises par la 5G.</p>
<hr>
<blockquote>
<p>« Avant de critiquer les erreurs d’autrui, prenez le temps de compter jusqu’à dix, dix pour compter les vôtres ! » (proverbe amish)</p>
</blockquote><img src="https://counter.theconversation.com/content/146326/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yannick Chatelain est Expert auprès de l'UNODC, (Office des Nations unies contre la drogue et le crime) dans le cadre du programme E4J : The First Expert Group Meeting to Peer-Review the E4J University Module Series on Cybercrime.</span></em></p>Outre-Atlantique, les experts en technologie s’inquiètent du devenir des nombreuses données personnelles que pourront bientôt recueillir les objets connectés.Yannick Chatelain, Enseignant Chercheur. Head of Development. Digital I IT, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1467182020-09-22T20:45:38Z2020-09-22T20:45:38Z« Les mots de la science » : IA comme intelligence artificielle<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/393240/original/file-20210402-21-12uosxk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">.</span> </figcaption></figure><p>Anthropocène, génétique, intersectionnalité, essentialisation, décroissance… Ce jargon vous dit quelque chose, bien sûr ! Mais nous utilisons parfois, souvent, ces mots sans bien savoir ce qu’ils veulent dire. Dans l’émission Les mots de la science, nous revenons donc sur l’histoire et le sens de ces mots clés avec des chercheuses et chercheurs capables de nous éclairer.</p>
<p>Cet épisode est dédié à l’intelligence artificielle. La notion d’IA, forgée dès les années 1950, est devenue une source d’espérances autant que d’excès comme nous l’explique Laurence Devillers, chercheuse et professeur en informatique appliquée aux sciences sociales à Sorbonne Université. Dans cet épisode, elle revient avec simplicité sur l’histoire et le sens de l’IA, qui désigne un ensemble de théories et techniques de simulation de certains traits de l’intelligence humaine grâce à des programmes informatiques. Laurence Devillers détaille les pistes de recherche prometteuses, par exemple en matière de détection de maladies psychiatriques, mais alerte également sur les risques de gadgétisation de l’IA. Elle insiste sur l’importance de l’éducation et de l’éthique pour aborder intelligemment ce vaste champ de recherche.</p>
<iframe src="https://player.acast.com/5f63618a37b1a24c4ff25896/episodes/ia-comme-intelligence-artificielle?theme=default&cover=1&latest=1" frameborder="0" width="100%" height="110px" allow="autoplay"></iframe>
<p><a href="https://open.spotify.com/episode/6trrgayRzxuRLgZgMXWx9W?si=n3eMVtXwQfSNQZZlMNGG2w"><img src="https://images.theconversation.com/files/321535/original/file-20200319-22606-1l4copl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=183&fit=crop&dpr=1" width="268" height="70"></a>
<a href="https://soundcloud.com/theconversationfrance/ia-comme-intelligencee"><img src="https://images.theconversation.com/files/359064/original/file-20200921-24-prmcs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=218&fit=crop&dpr=2" alt="Listen on Soundcloud" width="268" height="80"></a>
<a href="https://podcasts.apple.com/au/podcast/ia-comme-intelligence-artificielle/id1532724019?i=1000492163628"><img src="https://images.theconversation.com/files/321534/original/file-20200319-22606-q84y3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=182&fit=crop&dpr=1" alt="Listen on Apple Podcasts" width="268" height="68"></a>
<a href="https://deezer.page.link/QCgqyC6ZtJiD5JRY9"><img src="https://images.theconversation.com/files/370281/original/file-20201119-15-jxert0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=218&fit=crop&dpr=2" alt="Listen on Deezer" width="268" height="80"></a></p>
<p><em>L'émission Les mots de la science est animée par Iris Deroeux, journaliste à The Conversation, notamment en charge de la rubrique Fact Check US dédiée à la politique américaine.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146718/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laurence Devillers ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les mots de la science, le podcast qui décrypte les mots clés de la recherche pour mieux comprendre l’époque.Cet épisode est dédié à l’intelligence artificielle.Laurence Devillers, Professeur en Intelligence Artificielle, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1451992020-09-08T18:47:31Z2020-09-08T18:47:31ZQuelles limites pour le traçage numérique ? StopCovid et au-delà<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/356935/original/file-20200908-18-3r2lfk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C15%2C1280%2C779&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le traçage numérique est limité par des facteurs technologiques et humains, dans sa conception et son utilisation.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.piqsels.com/en/public-domain-photo-jjwch">Piqsels</a></span></figcaption></figure><p>Le traçage des contacts des personnes atteintes de la Covid-19 est un des <a href="https://www.ecdc.europa.eu/sites/default/files/documents/Contact-tracing-Public-health-management-persons-including-healthcare-workers-having-had-contact-with-Covid-19-cases-in-the-European-Union%E2%80%93second-update_0.pdf">moyens les plus efficaces</a> pour casser les chaînes de transmission et ainsi freiner la diffusion du virus. Cela a amené l’État à favoriser le développement d’une application, <a href="https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus/stopcovid">StopCovid</a>, et à mettre en place des équipes chargées de prévenir aussi rapidement que possible les contacts identifiés des personnes contagieuses.</p>
<p>Le but de l’opération est donc évident et positif, accepté par tous. Cependant, on remarque une situation paradoxale. D’une part, StopCovid est relativement inefficace, avec <a href="https://www.rtl.fr/actu/debats-societe/stopcovid-l-application-n-a-envoye-que-72-notifications-alertes-depuis-son-lancement-7800732697">très peu d’alertes émises</a>. D’autre autre part, StopCovid est faiblement adopté, avec <a href="https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/stopcovid-2-3-millions-de-telechargements-et-seulement-72-notifications-envoyees-20200819">2,3 millions de téléchargements et de nombreuses désinstallations</a>. Enfin, lors des enquêtes des brigades sanitaires, il y a eu des <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/08/24/coronavirus-en-france-le-tracage-des-contacts-peine-a-freiner-la-reprise-epidemique_6049761_3244.html">refus de communiquer sa liste de contacts aux enquêteurs</a>.</p>
<p>Au-delà des positions extrêmes en matière de traçage, du refus systématique à l’acceptation béate, fondée sur des arguments de type <a href="https://www.franceculture.fr/conferences/bibliotheque-publique-dinformation/collectez-mes-donnees-je-nai-rien-cacher">« pourquoi refuser si on n’a rien à cacher ? »</a>, l’expérience en cours devrait pousser à s’interroger sur les technologies déployées. Le traçage est-il seulement un problème technique ? Pourquoi y a-t-il des réticences, si le suivi permet de stopper la maladie, comme on l’a parfois entendu ? Est-ce juste un <a href="https://www.larecherche.fr/chronique-%C3%A9thique/la-surveillance-de-la-pand%C3%A9mie-demande-une-%C3%A9thique-de-responsabilit%C3%A9">manque d’« éthique de responsabilité » de la part des Français</a> ?</p>
<h2>Le traçage, une technique encore très approximative</h2>
<p>Le point de départ est StopCovid, une application de traçage fondée sur le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bluetooth#:%7E:text=Bluetooth%20est%20une%20norme%20de,fr%C3%A9quence%20de%202%2C4%20GHz.">Bluetooth</a> et non sur la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9olocalisation#:%7E:text=La%20g%C3%A9olocalisation%20est%20un%20proc%C3%A9d%C3%A9,%E2%80%99espace%20%2D%20en%203D">géolocalisation</a> de l’utilisateur. Le Bluetooth permet seulement d’avoir accès aux contacts proches, tandis que la géolocalisation est une technologie plus intrusive, permettant de localiser le propriétaire du téléphone en temps réel. Le Bluetooth est moins intrusif, mais aussi relativement peu efficace, n’étant <a href="https://medium.com/personaldata-io/inferring-distance-from-bluetooth-signal-strength-a-deep-dive-fe7badc2bb6d">pas conçu pour estimer les distances</a>, surtout quand le téléphone est dans un sac ou au fond d’une poche.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/stopcovid-une-application-prometteuse-mais-qui-questionne-137092">StopCovid : une application prometteuse mais qui questionne</a>
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<p>Et surtout, l’accès au Bluetooth est fortement limité par Google (Android) et surtout Apple (iOS), suite à des <a href="https://la-rem.eu/glossary/trackers/">abus à répétition de la part de développeurs d’applications</a>.</p>
<p>Le gouvernement français s’est en fait engagé dans une <a href="https://www.numerama.com/tech/619446-stopcovid-vs-apple-pourquoi-la-france-sest-mise-dans-une-impasse.html">bataille perdue d’avance</a> pour obtenir l’accès aux données du Bluetooth « en arrière-plan », c’est-à-dire quand l’application StopCovid n’est pas active au premier plan. En effet, alors que l’État français souhaitait pouvoir centraliser les informations récoltées sur un seul serveur, afin de pouvoir mieux suivre l’évolution de l’épidémie, Apple et Google ont bien fourni une <a href="https://www.journaldunet.fr/web-tech/dictionnaire-du-webmastering/1203559-api-application-programming-interface-definition-traduction/">API</a> – une interface permettant l’accès à certaines informations de traçage – mais cette API était limitée, décentralisée, et non conforme aux demandes de l’État.</p>
<p>Cet épisode a souligné à quel point l’accès à ces données est soumis au bon vouloir et aux conditions des GAFA, en l’occurrence Google et Apple. Les États qui ont refusé d’utiliser l’API proposée ont alors dû développer des applications moins efficaces, du fait des limites imposées sur le Bluetooth – c’est le cas de la France – voire pour certains de changer leur fusil d’épaule et finir par se plier à la solution proposée par Google et Apple – c’est le cas du Royaume-Uni qui a ainsi <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/coronavirus-nos-voisins-britanniques-nouvelle-version-application-tracage-testee-au-royaume-uni-1862778.html">mis une première application à la poubelle du fait de son inefficacité liée au bridage du Bluetooth</a>.</p>
<h2>Le traçage est utile, mais pas suffisant, pour éliminer le virus</h2>
<p>Au-delà de la dépendance aux GAFA, le discours sur le traçage, et plus généralement la reconstitution des contacts et des chaînes de transmission, lui-même a été peu étudié. Le traçage permet de rompre les chaînes de transmission, mais seule une partie de la réalité est visible. En effet, il n’y a pas de bouton magique permettant d’identifier tous les malades à un instant <em>t</em>. On sait par ailleurs qu’il y a des malades asymptomatiques, d’autres qui ne se font pas connaître, etc. Enfin, les modes de transmission de la maladie, de même que la <a href="https://www.cdc.gov/coronavirus/2019-ncov/hcp/duration-isolation.html">durée de la contagiosité</a>, restent encore aujourd’hui assez mal connus.</p>
<p>Ainsi, lorsque la France était en phase 2 en février 2020, le traçage des premiers malades connus, dans l’Oise notamment, visait à remonter au fameux « patient 0 » : il s’agit effectivement d’une pratique connue du monde médical, afin de comprendre comment une maladie s’est diffusée. Les reportages en forme d’enquête policière, en particulier les reportages télévisés de février 2020, <a href="https://www.lefigaro.fr/sciences/coronavirus-qui-est-le-patient-zero-de-l-oise-20200227">pouvaient laisser penser que l’identification du fameux patient 0 permettrait d’éradiquer complètement le virus</a>, comme l’identification du coupable permet de refermer une enquête policière.</p>
<p>On sait depuis que la maladie <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0924857920301643?via%3Dihub">circulait en fait déjà à bas bruit depuis la fin 2019 en France</a>. Or, il est assez évident que si tracer les contacts est utile, c’est loin d’être suffisant pour éliminer un virus invisible, dont les modes de transmission restent très imparfaitement connus. Par ailleurs, et on le voit davantage chaque jour, tracer implique d’agir rapidement, d’avoir des équipes disponibles, nombreuses et réactives, d’isoler les malades, etc. Choses simples en apparence, mais difficiles à mettre en place en pratique quand surviennent des milliers de nouveaux cas chaque jour et qu’on peine à joindre les contacts des personnes infectées.</p>
<h2>L’adoption du traçage dépend de manière fondamentale de facteurs humains</h2>
<p>Pourquoi seule une très faible minorité de Français a-t-elle installé l’application StopCovid ? Pourquoi ne pas installer une application ouverte, utile et gratuite dans un contexte d’angoisse quant à la situation sanitaire ? Pourquoi avoir peur du traçage alors qu’on sait que nos portables nous « tracent » en permanence dans tous nos déplacements ?</p>
<p>Peut-être, tout simplement, parce que l’application est, paradoxalement et à rebours de son but premier, <a href="https://www.aclu.org/report/aclu-white-paper-limits-location-tracking-epidemic?redirect=aclu-white-paper-limits-location-tracking-epidemic">anxiogène</a>. En effet, elle contribue à faire sentir à celui qui l’a installée qu’il court un risque à tout moment – risque de croiser un porteur de la Covid-19, de recevoir une notification, de se sentir traqué et toujours en sursis. Ne pas installer l’application peut être vu comme égoïste, dans la mesure où il s’agit, comme avec le masque, que « tout le monde protège tout le monde » en adoptant de nouvelles pratiques. En fait, au-delà des doutes sur l’efficacité de l’application et sur son caractère intrusif – même si les <a href="https://www.cnil.fr/fr/application-stopcovid-la-cnil-tire-les-consequences-de-ses-controles">données personnelles sont soigneusement protégées</a>, c’est probablement son caractère anxiogène qui est son principal frein. Sans omettre la peur d’être désigné comme celui qui a contaminé les autres : les garanties d’anonymat ne peuvent empêcher ce type de crainte, qu’elle soit rationnelle ou non.</p>
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<a href="https://theconversation.com/stopcovid-un-million-dutilisateurs-et-quelques-reserves-non-dissipees-140110">StopCovid : « un million d'utilisateurs » et quelques réserves non dissipées</a>
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<p>Évidemment, tout le monde souhaite que cette pandémie se termine, qu’il n’y ait plus ni malade ni mort et, même si on peut rêver à un « monde d’après » meilleur, le monde d’avant, où on pouvait se rencontrer et faire la fête, n’était pas si mal. Il ne s’agit donc pas ici de critiquer le traçage et l’idée de briser les chaînes de transmission du virus, mais de comprendre pourquoi le traçage n’est pas plus efficace et pourquoi il suscite parfois des réticences.</p>
<h2>Le traçage au-delà de la Covid-19</h2>
<p>La crise actuelle est une nouvelle occasion de nous interroger sur notre dépendance aux GAFA d’une part, et de souhaiter une meilleure prise en compte des facteurs humains dans les dispositifs techniques et les modèles scientifiques d’autre part.</p>
<p>Le traçage pose enfin d’autres problèmes, encore plus fondamentaux, en matière de <a href="https://theconversation.com/donnees-de-sante-larbre-stopcovid-qui-cache-la-foret-health-data-hub-138852">souveraineté</a>, et de libertés individuelles et collectives notamment : quelle information doit être partagée ? Avec qui ? À quelle fin ? Ces questions sont toujours d’une actualité brûlante, même si on a l’impression qu’en la matière, l’éthique court souvent après la technologie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/145199/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thierry Poibeau est membre de l'institut 3IA PRAIRIE (PaRis Artificial Intelligence Research InstitutE, <a href="http://prairie-institute.fr/">http://prairie-institute.fr/</a>). </span></em></p>Le traçage via nos smartphones est une technique encore approximative. En cause : des facteurs technologiques, commerciaux, et humains.Thierry Poibeau, DR CNRS, École normale supérieure (ENS) – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.