tag:theconversation.com,2011:/ca/topics/antibiotiques-22004/articlesantibiotiques – The Conversation2024-03-05T15:59:53Ztag:theconversation.com,2011:article/2238972024-03-05T15:59:53Z2024-03-05T15:59:53ZComment les antibiotiques fonctionnent-ils ?
<p><em>Chaque semaine, nos scientifiques répondent à vos questions.</em></p>
<p><em><a href="https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSdior67a7Z5bsoJKoMtltxJ-q9EUW1WneDbrNIWpNZUMJsxkA/viewform">N'hésitez pas à nous écrire</a> pour poser la vôtre et nous trouverons la meilleure personne pour vous répondre.</em></p>
<p><em>Et bien sûr, les questions bêtes, ça n'existe pas !</em></p>
<hr>
<p>Partout sur Terre vivent de minuscules créatures invisibles à l’œil nu : les bactéries. Elles sont 100 fois plus petites qu’un millimètre et ne comptent qu’une seule cellule. On les trouve en grand nombre sur et dans notre corps. La plupart d’entre elles ne nous font pas de mal et nous donnent même un coup de main. Par exemple, elles digèrent certains composants alimentaires que nous ne pouvons pas digérer nous-mêmes, comme les fibres des fruits et des légumes.</p>
<p>Mais très occasionnellement, des bactéries plus dangereuses croisent notre chemin. Et celles-ci n’ont qu’un seul but : utiliser nos cellules, le plus petit élément de notre corps, pour se multiplier. C’est alors qu’elles nous rendent malades.</p>
<p>Normalement, notre corps est assez fort pour faire face à un tel intrus indésirable. Nous disposons d’un <a href="https://www.cea.fr/comprendre/Pages/sante-sciences-du-vivant/essentiel-sur-systeme-immunitaire.aspx">système immunitaire</a> composé de soldats puissants qu’on appelle les globules blancs, dotés d’un arsenal d’armes chimiques. Ils reconnaissent l’envahisseur et le détruisent. Ils trouvent facilement leurs cibles grâce à des anticorps qui marquent l’intrus comme un post-it moléculaire. Et pourtant, parfois, même ces armes ne parviennent pas à tuer la bactérie !</p>
<p>Heureusement, les médecins disposent d’un outil spécial pour donner un coup de pouce à notre corps : les antibiotiques. Ce mot signifie littéralement contre (« anti ») et organisme vivant (« biote »). Les antibiotiques sont des substances chimiques spéciales qui se présentent sous de nombreuses formes. Nous avons découvert la plupart d’entre eux en étudiant l’interaction entre des bactéries et d’autres organismes.</p>
<p>C’est comme ça que le médecin écossais <a href="https://www.legiondhonneur.fr/fr/decores/alexander-fleming/724">Alexander Fleming</a> a découvert le premier antibiotique en 1928. Il est parti pour deux semaines de vacances, en oubliant une plaque de bactéries dans son laboratoire. À son retour, il constate qu’un champignon s’est développé sur la plaque. Mais autour de ce champignon, aucune trace de bactéries ! Ce champignon produisait donc une substance qui stoppe la croissance des bactéries. Ce champignon porte le nom de <em>Penicillium</em>, le nom du premier antibiotique était donc tout trouvé : la pénicilline.</p>
<p>Depuis, un <a href="https://www.sante.fr/les-antibiotiques-0">grand nombre d’antibiotiques différents a été découvert</a>. Les scientifiques les classent principalement en deux groupes. Ceux qui tuent les bactéries ou ceux qui les empêchent de se multiplier, ce qui permet à notre système immunitaire de gagner plus facilement la bataille.</p>
<hr>
<p><em>Pour satisfaire votre curiosité :</em></p>
<p><em>- <a href="https://theconversation.com/comment-un-bebe-peut-il-apprendre-deux-langues-en-meme-temps-225929">Comment un bébé peut-il apprendre deux langues en même temps ?</a></em></p>
<p><em>- <a href="https://theconversation.com/pourquoi-la-biere-mousse-t-elle-moins-quand-on-penche-le-verre-223691">Pourquoi la bière mousse-t-elle moins quand on penche le verre ?</a></em></p>
<p><em>- <a href="https://theconversation.com/pourquoi-a-t-on-des-courbatures-apres-une-seance-de-sport-221643">Pourquoi a-t-on des courbatures après une séance de sport ?</a></em></p>
<hr>
<p>Les antibiotiques agissent sur des molécules ou des structures uniques aux bactéries et qui n’existent pas chez l’humain. C’est pour cela que les antibiotiques sont aussi efficaces et qu’ils ne rentrent que très peu en conflit avec les cellules du corps humain.</p>
<p>Les bactéries ont une paroi cellulaire qui est construite par des protéines spéciales qui travaillent ensemble, comme dans une petite usine. Chaque protéine a sa tâche, et si l’une d’entre elles manque, les choses tournent mal pour la bactérie. Un grand nombre d’antibiotiques comme la <a href="https://pharmacomedicale.org/medicaments/par-specialites/item/beta-lactamines-penicillines-cephalosporines">pénicilline cible donc certaines de ces protéines et empêche la production et l’intégrité de la paroi cellulaire</a>. Cela crée des trous et la bactérie meurt.</p>
<p>D’autres antibiotiques empêchent la duplication du plan de construction d’une nouvelle bactérie. En l’absence d’un tel plan, une bactérie ne peut pas se développer. Un exemple est la <a href="https://pharmacomedicale.org/medicaments/par-specialites/item/quinolones">classe des quinolones</a> dont la ciprofloxacine fait partie, qui sont des antibiotiques efficaces contre les infections de la vessie, de la peau ou des oreilles.</p>
<p>Si on a un rhume ou une grippe, il faut savoir que ces maladies sont causées par des envahisseurs encore plus petits que l’on appelle des virus. <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/medicaments/comprendre-les-differents-medicaments/antibiotiques-antiviraux">Et les antibiotiques ne peuvent rien contre eux</a>) car ils ne contiennent pas leurs cibles. Dans ce cas, il ne reste qu’à être patient.</p>
<p>Bien que les antibiotiques permettent de se débarrasser de toute une série de bactéries hostiles, certaines d’entre elles ont trouvé des moyens d’y échapper ou de les éliminer. Par exemple, en mettant au point de petites pompes qui éliminent directement les antibiotiques ! <a href="https://sante.gouv.fr/prevention-en-sante/les-antibiotiques-des-medicaments-essentiels-a-preserver/des-antibiotiques-a-l-antibioresistance/article/l-antibioresistance-pourquoi-est-ce-si-grave">On parle de résistance aux antibiotiques</a>, un problème qui est exacerbé, entre autres, par une mauvaise utilisation ou surutilisation des antibiotiques.</p>
<p><a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/infographics/antimicrobial-resistance/">Il est estimé qu’en Europe, environ 35 000 personnes meurent chaque année d’infections résistantes aux antibiotiques</a>. Heureusement, pour l’instant, nous disposons de tout un arsenal divers et varié qui permet de se débarrasser de ces envahisseurs, dans la plupart des cas. Néanmoins, les médecins recommandent fortement qu’il va falloir être plus prudent dans notre utilisation des antibiotiques afin d’éviter que les bactéries ne deviennent résistantes à tout type d’antibiotique à l’avenir.</p>
<p>Les chercheurs continuent à travailler méticuleusement pour avoir toujours une longueur d’avance sur les bactéries. Quoi qu’il en soit, il faut reconnaître que ces créatures invisibles sont capables de beaucoup !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223897/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pieter Vancamp ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>« Les antibiotiques c’est pas automatique », mais ce sont des médicaments très efficaces contre les bactéries.Pieter Vancamp, Post-doctorant, neurobiologiste et spécialiste en physiologie, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2217952024-02-04T15:35:01Z2024-02-04T15:35:01ZRésistances aux antibiotiques : comment nous pouvons tous agir<p>Virus de la Covid-19, de la variole du singe, hausse des infections fongiques, multiplication des cas d’infections bactériennes sexuellement transmissibles… Les maladies infectieuses font leur grand retour dans l’actualité, alors qu’on les pensait vaincues grâce à la vaccination, aux progrès de l’hygiène, et à notre puissant arsenal thérapeutique, au premier rang duquel figurent les antibiotiques, les antiviraux et les antifongiques.</p>
<p>Malheureusement, après avoir un temps marqué le pas, ces microscopiques envahisseurs semblent contre-attaquer, et certaines nouvelles en provenance du front ne sont pas très bonnes pour nous. L’antibiorésistance, autrement dit la résistance des bactéries aux antibiotiques, inquiète tout particulièrement les spécialistes. Voici ce qu’il faut en savoir.</p>
<h2>L’antibiorésistance, un phénomène naturel</h2>
<p>Pour comprendre d’où vient l’antibiorésistance, il faut revenir sur l’origine de nos antibiotiques. Nombre d’entre eux proviennent, à l’origine, de molécules produites par des champignons ou des bactéries. En effet, dans l’environnement, les êtres vivants sont en compétition les uns avec les autres pour occuper une place (on parle aussi de « niche ») dans les écosystèmes, et en exploiter les ressources.</p>
<p>Dans ce contexte, certaines espèces produisent des molécules qui s’avèrent toxiques pour d’autres espèces, leur procurant un avantage sur leurs concurrentes.</p>
<p>C’est justement après avoir constaté fortuitement les effets dévastateurs du champignon <em>Penicillium notatum</em> sur les cultures de bactéries qu’il entretenait dans son laboratoire que Sir Alexander Fleming, biologiste écossais, <a href="https://www.pasteur.fr/fr/journal-recherche/dossiers/antibiotiques-quand-bacteries-font-resistance">isola la pénicilline en 1928</a>, puissant antibiotique s’il en est.</p>
<p>Mais au sein d’une même culture, toutes les bactéries ne sont pas vulnérables : certaines d’entre elles peuvent s’avérer insensibles à l’antibiotique qui décime leurs congénères. Une fois que les bactéries sensibles ont été éliminées, les survivantes qui résistent à l’antibiotique peuvent alors se développer. Ce dernier est alors devenu inefficace.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Hyht7jwsJg4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Dès 1945, autrement dit quatre ans seulement après la <a href="https://www.lequotidiendumedecin.fr/archives/le-premier-patient-traite-par-penicilline">première utilisation médicale de la pénicilline</a>, Sir Alexander Fleming avertissait quant au risque de voir émerger des souches de bactéries résistantes :</p>
<blockquote>
<p>« Cela aboutirait à ce que, au lieu d’éliminer l’infection, on apprenne aux microbes à résister à la pénicilline et à ce que ces microbes soient transmis d’un individu à l’autre, jusqu’à ce qu’ils en atteignent un chez qui ils provoqueraient une pneumonie ou une septicémie que la pénicilline ne pourrait guérir. »</p>
</blockquote>
<p>L’avenir allait lui donner raison. On l’a vu, les bactéries se défendent contre les antibiotiques, en devenant résistantes, depuis des milliards d’années. Dès que les humains ont commencé à utiliser largement les antibiotiques, dans les années 1940, des bactéries résistantes ont été identifiées, comme prédit par Fleming.</p>
<p>Plus on a utilisé d’antibiotiques, plus les résistances se sont développées et propagées. L’antibiorésistance a commencé à atteindre un niveau préoccupant dans les années 1990, ce qui a entraîné la mobilisation d’un grand nombre de pays.</p>
<p>Ce phénomène est aujourd’hui identifié par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) <a href="https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/antimicrobial-resistance">comme l’une des menaces majeures pesant sur la santé de l’humanité</a>.</p>
<p>Rien qu’en France, chaque année, <a href="https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/health-burden-infections-antibiotic-resistant-bacteria-2016-2020">environ 4500 personnes décèdent en raison d’une infection à bactérie multirésistante</a>, c’est-à-dire résistante à de nombreux antibiotiques. Pour mettre ce chiffre en perspective : dans notre pays, ces bactéries tuent beaucoup plus que les accidents de la route, qui avaient fait <a href="https://www.onisr.securite-routiere.gouv.fr/etat-de-linsecurite-routiere/bilans-annuels-de-la-securite-routiere/bilan-2022-de-la-securite-routiere">3550 victimes en 2022</a>. </p>
<p>Dans le monde, <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(21)02724-0/fulltext">ce sont près de 1,3 million de personnes qui sont mortes en 2019 de telles infections</a>, soit plus que les décès dus au paludisme ou au VIH. Si rien n’est fait, le problème de l’antibiorésistance va continuer à s’aggraver : certaines projections suggèrent même que dès 2050, <a href="https://amr-review.org/sites/default/files/160525_Final%20paper_with%20cover.pdf#page=7">elle pourrait causer plus de morts dans le monde que le cancer</a>.</p>
<h2>Quelles conséquences peut avoir l’antibiorésistance sur notre santé ?</h2>
<p>Le phénomène d’antibiorésistance compromet l’efficacité des traitements antibiotiques, nuisant à la santé humaine ainsi qu’à celle des animaux. Cela veut dire concrètement qu’on a de fortes chances de mourir d’une infection due à une bactérie qui ne peut pas être traitée par les antibiotiques disponibles, lorsque cette infection est grave.</p>
<p>De manière générale, la durée des soins est souvent plus longue lorsqu’une infection bactérienne est résistante aux antibiotiques, et il faut parfois être pris en charge à l’hôpital.</p>
<p>Par ailleurs, l’antibiorésistance augmente le risque de séquelles liées à l’infection, car l’infection devient plus difficile, voire impossible, à traiter.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/yqv0I59wXuc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Un exemple caractéristique est celui des infections à gonocoque, l’une des bactéries les plus fréquemment impliquées dans les infections sexuellement transmissibles. Jusque dans les années 1990, on pouvait traiter de telles infections par des comprimés d’antibiotiques (de la famille des fluoroquinolones). Depuis, les gonocoques sont devenus de plus en plus résistants à ces antibiotiques, et il faut désormais systématiquement administrer un traitement antibiotique par piqûre (de ceftriaxone).</p>
<p>On a même décrit dans le monde <a href="https://www.cnr-ist.fr">des souches de gonocoque résistantes à presque tous les antibiotiques disponibles</a>. Les patients atteints présentaient une infection ne guérissant pas sous traitement habituel et ont dû recevoir des antibiotiques dits <a href="https://sante.gouv.fr/prevention-en-sante/les-antibiotiques-des-medicaments-essentiels-a-preserver/professionnels-de-sante/article/professionnels-votre-role-pour-preserver-l-efficacite-des-antibiotiques#:%7E:text=Les%20antibiotiques%20dits%20%22de%20dernier,Leur%20utilisation%20est%20principalement%20hospitali%C3%A8re.">« de dernier recours »</a> ; des cas de transmission de ces souches ont aussi été rapportés. Ces infections gonococciques très résistantes aux antibiotiques restent heureusement extrêmement rares à ce jour.</p>
<p>Les infections urinaires à des bactéries résistantes à de multiples antibiotiques sont aussi très problématiques. Quand on a est victime d’une infection urinaire due à une telle bactérie, on s’en aperçoit souvent plusieurs jours après le début des symptômes, le temps d’avoir les résultats de l’examen d’urine.</p>
<p>Cela retarde d’autant l’initiation d’un traitement antibiotique efficace, ce qui veut dire que l’on souffre plus longtemps. Cela peut aussi augmenter le risque de complications, comme l’atteinte des reins.</p>
<p>Et là aussi, on doit parfois être traité par piqûres d’antibiotiques, à la place du traitement antibiotique par la bouche qu’on prend habituellement quand la bactérie est sensible aux antibiotiques.</p>
<h2>Tout le monde est concerné</h2>
<p>Il est important de comprendre que l’antibiorésistance nous concerne tous : chacun d’entre nous peut être atteint d’une infection à bactérie résistante aux antibiotiques, <a href="https://theconversation.com/les-infections-resistantes-aux-antibiotiques-ca-narrive-pas-quaux-autres-78143">même s’il ne prend lui-même que peu ou pas d’antibiotiques</a>.</p>
<p>En effet, les bactéries, qu’elles soient résistantes ou sensibles aux antibiotiques, circulent et se transmettent en permanence entre humains, animaux (de compagnie ou d’élevage), et au sein de l’environnement (sol, eau, surfaces diverses…).</p>
<p>Les résidus d’antibiotiques que les humains et animaux éliminent peuvent aussi contaminer l’environnement, avec un risque variable selon les familles d’antibiotiques. Certains, comme les pénicillines, se dégradent rapidement. D’autres, comme les fluoroquinolones, peuvent au contraire persister dans l’environnement, <a href="https://www.anses.fr/fr/content/avis-et-rapport-de-lanses-relatif-%C3%A0-%C2%AB%C2%A0antibior%C3%A9sistance-et-environnement-%C3%A9tat-et-causes">et donc y favoriser l’émergence de bactéries résistantes</a>.</p>
<p>Encore pire, les bactéries sont aussi capables de transmettre très facilement les gènes qui leur confèrent les résistances aux antibiotiques, et ce non seulement au sein d’une même espèce, mais aussi d’une espèce à l’autre !</p>
<h2>Des niveaux variables d’antibiorésistance sur le territoire</h2>
<p>Comme de nombreux d’indicateurs de santé (obésité, taux de vaccination, etc.), l’antibiorésistance varie beaucoup d’un territoire à l’autre. On observe des différences importantes entre les régions, voire les départements.</p>
<p>Un exemple parlant est celui d’<em>Escherichia coli</em>, la bactérie la plus fréquemment responsable d’infections urinaires, dont certaines souches sont très résistantes aux antibiotiques en France.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Carte indiquant les pourcentages de bactéries E. coli résistantes aux antibiotiques détectées sur le territoire français." src="https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=581&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=581&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=581&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=730&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=730&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/573067/original/file-20240202-27-difrnd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=730&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cette carte indique les pourcentages de détection de bactéries <em>E. coli</em> multirésistantes aux antibiotiques en France.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://geodes.santepubliquefrance.fr">Sites GEODES / Santé publique France</a></span>
</figcaption>
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<p>De telles variations existent aussi pour les autres bactéries, ou pour les consommations d’antibiotiques. Elles peuvent s’expliquer par de multiples facteurs, tels que les habitudes des professionnels de santé ou des patients, les actions régionales et locales menées pour améliorer les pratiques, ou encore l’incidence des infections, qui peut varier en fonction de l’état de santé de la population.</p>
<p>Une déclinaison régionale et territoriale des actions est donc essentielle, pour tenir compte des spécificités locales et accompagner la politique nationale au plus proche du terrain. Ce sont les Agences Régionales de Santé (ARS) qui sont aux commandes, et elles bénéficient pour cela de l’appui de centres régionaux experts du sujet, comme <a href="https://sante.gouv.fr/prevention-en-sante/les-antibiotiques-des-medicaments-essentiels-a-preserver/des-politiques-publiques-pour-preserver-l-efficacite-des-antibiotiques/article/prevention-des-infections-et-de-l-antibioresistance-a-l-echelle-regionale">les centres régionaux en antibiothérapie</a>.</p>
<h2>Concrètement, comment lutter contre l’antibiorésistance ?</h2>
<p>En France, depuis plus de 20 ans, les gouvernements successifs ont mis en place des plans de lutte contre l’antibiorésistance. Ceux-ci ont permis de faire diminuer la consommation des antibiotiques. Néanmoins, beaucoup reste encore à faire, car <a href="https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/surveillance-antimicrobial-consumption-europe-2022">la France reste l’un des pays qui consomme le plus d’antibiotiques en Europe</a> : près de trois fois plus que les pays les plus vertueux, comme les Pays-Bas, l’Autriche ou la Suède.</p>
<p>Coordonné par le ministère en charge de la santé, le <a href="https://sante.gouv.fr/prevention-en-sante/les-antibiotiques-des-medicaments-essentiels-a-preserver/">dernier plan en date pour la santé humaine court sur 2022-2025</a>. Nous sommes tous concernés, car nous avons tous besoin de recourir à des antibiotiques au cours de notre existence. Pour lutter contre l’antibiorésistance, il faut à la fois :</p>
<ul>
<li><p>Prévenir les infections et réduire leur transmission, grâce aux mesures d’hygiène, comme le lavage ou la friction des mains, et à la vaccination ;</p></li>
<li><p>N’utiliser les antibiotiques que quand il faut et comme il faut, car <a href="https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/dossier_presse_prevention_des_infections_et_de_l_antibioresistance_fevrier_2022.pdf">même une seule prise d’antibiotique sélectionne des bactéries résistantes dans nos microbiotes</a>, dans la flore intestinale par exemple.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Schéma de la doctrine du Haut Conseil de la Santé Publique sur les 10 mesures universelles d’hygiène pour une prévention individuelle et collective des maladies infectieuses." src="https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/573082/original/file-20240202-17-bqkbrh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La doctrine du Haut Conseil de la Santé Publique sur les 10 mesures universelles d’hygiène pour une prévention individuelle et collective des maladies infectieuses.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/AvisRapportsDomaine?clefr=1351">Haut Conseil de la Santé Publique</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous pouvons tous agir pour y parvenir, pas besoin d’être soignant pour jouer un rôle dans la lutte contre l’antibiorésistance. Voici quelques recommandations importantes et simples à mettre en œuvre au quotidien :</p>
<ul>
<li><p>Utiliser les bons gestes <a href="https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/AvisRapportsDomaine?clefr=1351">afin de prévenir les infections courantes</a>, comme le lavage ou la friction des mains ;</p></li>
<li><p>Se vacciner et promouvoir <a href="https://vaccination-info-service.fr">la vaccination</a> autour de soi ;</p></li>
<li><p>Rapporter les antibiotiques restants à la pharmacie, pour éviter de contaminer l’environnement ;</p></li>
<li><p>Ne pas s’automédiquer ni partager ses antibiotiques, car un traitement antibiotique est adapté à un cas précis ;</p></li>
<li><p>Poser des questions à <a href="https://www.ameli.fr/sites/default/files/Documents/2022288_AntibiotiquePatient_v4_0.pdf">son professionnel de santé</a> ;</p></li>
</ul>
<p>Quand on a une infection ou qu’on prend un antibiotique, se renseigner en consultant notamment <a href="https://www.sante.fr/antibiomalin">Antibio’Malin</a>, l’espace dédié aux antibiotiques du site <a href="https://www.sante.fr/">santé.fr</a>, qui contient des informations pratiques, des fiches sur les antibiotiques, les infections courantes ainsi qu’une foire aux questions.</p>
<h2>Pour renforcer l’implication de tous, des pistes à explorer</h2>
<figure class="align-right ">
<img alt="Affiche de sensibilisation à destination du grand public quant à l’usage des antibiotiques." src="https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/573066/original/file-20240202-19-e77kjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cette affiche rappelle que les antibiotiques ne sont pas efficaces contre les maladies virales telles que la bronchite.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/infections-associees-aux-soins-et-resistance-aux-antibiotiques/resistance-aux-antibiotiques/documents/affiche/zoe-peut-vous-le-confirmer-les-antibiotiques-ca-ne-marche-pas-contre-sa-bronchite.-affiche-40x60cm">Santé publique France</a></span>
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<p>La stratégie nationale 2022-2025 de prévention des infections et de l’antibiorésistance citée précédemment mentionne de nombreuses actions, notamment la <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/infections-associees-aux-soins-et-resistance-aux-antibiotiques/resistance-aux-antibiotiques/outils/#tabs">campagne nationale sur les antibiotiques menée par Santé publique France</a> et la <a href="https://e-bug.eu/fr-fr">promotion des ressources e-Bug auprès des enfants et des adolescents</a>.</p>
<p>Il faut cependant aller plus loin pour que l’antibiorésistance fasse partie du quotidien des Français. Il pourrait être intéressant de s’inspirer d’expériences menées à l’étranger, ainsi que de pistes qui avaient été suggérées dès 2015 <a href="https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_antibiotiques.pdf">dans un rapport rédigé par un large groupe d’experts</a>.</p>
<p>Le monde de la fiction et de la culture a ainsi, par exemple, un rôle essentiel à jouer. Intégrer des messages de prévention dans des séries audiovisuelles, des romans, ou une comédie musicale (<a href="https://www.mouldthatchangedtheworld.com">comme au Royaume-Uni</a>), mettre l’accent sur le monde des microbes dans certains musées (<a href="https://www.micropia.nl/en/">aux Pays-Bas, un musée leur est même consacré</a>), promouvoir les nombreux jeux sérieux qui ont été créés sur la thématique… Les pistes sont multiples, n’hésitez pas à contribuer !</p>
<p>Au même titre que la lutte contre le changement climatique, autre grand défi de notre époque, la lutte contre l’antibiorésistance nécessite la mobilisation de tous. C’est la condition <em>sine qua non</em> si l’on veut parvenir à changer les comportements sur le long terme et préserver l’efficacité de nos antibiotiques, pour nous et pour les autres, en France et à l’international, maintenant et pour les générations futures.</p>
<p><em><strong>- Pour en savoir plus :</strong> la série d’animations courtes <a href="https://www.youtube.com/playlist?list=PLfT0X0LfNabpspLvNIwtLoi61HivajGTY">Antibiostories</a>, pour comprendre les bases du bon usage des antibiotiques et les enjeux de la lutte contre l’antibiorésistance.</em></p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=926&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=926&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=926&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1164&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1164&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/573087/original/file-20240202-17-1sjql7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1164&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p><em>Céline Pulcini est l’auteur du roman <a href="https://www.amazon.fr/Dans-tourbillon-m%C3%A9decine-C%C3%A9line-Pulcini-ebook/dp/B0CRS7VRTC">« Dans le tourbillon de la médecine »</a>, qui aborde notamment le sujet des études de médecine, de la prévention, des infections et de l’antibiorésistance.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221795/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Céline Pulcini ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’augmentation du nombre d’espèces de bactéries résistantes aux antibiotiques constitue une préoccupation de santé publique majeure, qui nous concerne tous, partout sur la planète.Céline Pulcini, Professeur de médecine, infectiologue, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2220312024-01-31T16:01:30Z2024-01-31T16:01:30ZHausse des cas d’infection invasive au streptocoque A : comment il se propage, et les symptômes à surveiller<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/571469/original/file-20240122-27145-c07mvm.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C48%2C1968%2C1488&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une augmentation des cas d’infection causée par le streptocoque du groupe A a été observée dans plusieurs pays, dont le Canada.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIAID))</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Une hausse rapide des cas de maladies graves à streptocoque du groupe A — également appelé Streptococcus pyogenes ou streptocoque A — a récemment fait la une des médias. Le <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2042368/grippe-Covid-symptome-maldie-infection">nombre de décès</a> dus à cette infection est aussi plus élevé que d’habitude, y compris chez les enfants, et les gens se demandent pourquoi et comment ces infections se propagent, et quels sont les symptômes à surveiller.</p>
<p>Peu après la diminution du nombre d’infections par la Covid-19 dans le monde, on a assisté à une <a href="https://www.bbc.com/news/health-64122989">hausse considérable</a> du nombre de patients diagnostiqués avec des maladies causées par le streptocoque du groupe A dans différentes régions de la planète.</p>
<p>Au Canada, Santé publique Ontario signale actuellement une forte augmentation des cas <a href="https://www.publichealthontario.ca/-/media/Documents/I/2023/igas-enhanced-epi-2023-2024.pdf">d’infections invasives à streptocoque du groupe A</a>. Une <a href="https://www.who.int/fr/emergencies/disease-outbreak-news/item/2022-DON429">hausse similaire</a> a été constatée dans plusieurs pays d’Europe, touchant principalement les enfants de moins de 10 ans.</p>
<p>Pourquoi cette bactérie est-elle soudainement devenue un enjeu mondial ?</p>
<p>Pour répondre à cette question, il est essentiel de connaître certaines caractéristiques de la maladie. Le streptocoque du groupe A affecte exclusivement les humains et se propage par des <a href="https://doi.org/10.1016/S2666-5247(21)00332-3">gouttelettes en suspension dans l’air ainsi que par contact de personne à personne</a>. <a href="https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"></a></p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Vue microscopique d’une bactérie du groupe A Streptococcus" src="https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=938&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=938&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=938&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1179&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1179&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/570753/original/file-20240122-23-nvfuw5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1179&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le streptocoque du groupe A possède plusieurs facteurs qui favorisent l’infection et lui permettent d’envahir et de coloniser différents tissus, et d’y survivre.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(NIAID)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<p>Parmi les maladies causées par cet organisme, on trouve des infections des voies respiratoires telles que l’amygdalite et la pharyngite (symptômes de <a href="https://www.cdc.gov/groupastrep/diseases-public/strep-throat.html">l’angine streptococcique</a> classique), ainsi que des infections cutanées superficielles et d’autres, connues sous le nom de <a href="https://doi.org/10.4103%2F1947-2714.101997">pyodermite</a>.</p>
<p>Dans certains cas, le streptocoque A peut engendrer des infections invasives mettant la vie des patients en danger, telles que la <a href="https://www.healthlinkbc.ca/sites/default/files/documents/healthfiles/hfile60-f.pdf">fasciite nécrosante</a>, la <a href="https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/medecine-septicemie-8149/">septicémie</a> (empoisonnement du sang) et le <a href="https://www.cdc.gov/groupastrep/diseases-public/streptococcal-toxic-shock-syndrome.html">syndrome de choc toxique streptococcique</a>.</p>
<p>Pour causer un aussi large éventail de maladies dans différentes parties du corps, la bactérie dispose de plusieurs facteurs qui favorisent l’infection et lui permettent d’envahir et de coloniser différents tissus et d’y survivre. Il s’agit notamment de molécules, telles que les superantigènes, les exotoxines et les adhésines, qui aident les agents pathogènes à échapper au système immunitaire de l’hôte.</p>
<p>Un nouveau variant du streptocoque du groupe A, nommé M1UK, <a href="https://doi.org/10.1016/S1473-3099(19)30446-3">a été d’abord rapporté au Royaume-Uni</a>, où il a été associé à une augmentation des cas de scarlatine et d’infections invasives.</p>
<p>Les <a href="https://doi.org/10.1038/s41467-023-36717-4">bactéries de la sous-lignée M1UK</a> possèdent la capacité de stimuler l’expression du superantigène SpeA grâce à une seule mutation génétique. La surproduction de SpeA pourrait être responsable de la hausse de la transmission et de la survie du pathogène, ainsi que de l’agressivité de la maladie, bien que cela soit encore à l’étude.</p>
<h2>Comment expliquer le pic de cas actuel ?</h2>
<p><a href="https://doi.org/10.1542/peds.2009-2648">Environ 10 % des enfants d’âge scolaire</a> sont porteurs de cette bactérie dans la gorge et les voies respiratoires supérieures, sans présenter de symptômes, et développent avec le temps une certaine immunité contre le streptocoque A.</p>
<p>Pendant la pandémie de Covid-19, il est probable que les enfants n’aient pas été exposés autant qu’à l’habitude à cette bactérie, de sorte que leur système immunitaire n’est <a href="https://doi.org/10.1016%2FS0262-4079(21)00716-8">sans doute pas aussi performant pour lutter</a> contre celle-ci et qu’ils pourraient y être plus vulnérables.</p>
<p>La propagation de la nouvelle souche M1UK pourrait être également à l’origine de l’augmentation du nombre de cas, mais cela demeure à vérifier.</p>
<h2>Doit-on s’inquiéter de cette hausse ?</h2>
<p>De manière générale, les Canadiens n’ont pas à s’inquiéter outre mesure, car les infections graves dues au streptocoque du groupe A sont rares.</p>
<p>Toutefois, il est important de prendre l’angine à streptocoque au sérieux, de consulter un médecin et de se méfier des symptômes qui pourraient indiquer une infection invasive. Sans traitement, cette bactérie peut engendrer divers problèmes, tels que des infections invasives.</p>
<p>Comment se protéger et quand consulter un médecin ?</p>
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<img alt="Un professionnel de la santé hors cadre prélève un échantillon de la gorge d’une jeune fille" src="https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/570754/original/file-20240122-24-has9cu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un test de dépistage rapide permet de diagnostiquer l’angine à streptocoque. En cas de résultat positif, on peut prescrire des antibiotiques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Comme le streptocoque du groupe A est courant et que de nombreux porteurs sont asymptomatiques, il est difficile de ne pas y être exposé. On recommande une bonne hygiène des mains, de se couvrir quand on tousse et qu’on éternue, de rester à la maison si on est malade et de ne pas envoyer ses enfants à l’école s’ils ont très mal à la gorge.</p>
<p>Si vous pensez souffrir d’une <a href="https://www.aboutkidshealth.ca/Article?contentid=11&language=French">infection à streptocoque</a>, notamment si vous avez la gorge douloureuse et de la difficulté à avaler, si vous avez de la fièvre, un gonflement des amygdales ou une éruption cutanée, consultez un médecin de famille afin de déterminer s’il s’agit d’une infection à streptocoque du groupe A. Un <a href="https://www.healthlinkbc.ca/tests-treatments-medications/medical-tests/rapid-strep-test-strep-throat">test de dépistage rapide</a> peut être effectué en prélevant un échantillon dans la gorge. S’il s’avère positif, le médecin peut prescrire des antibiotiques.</p>
<p>Les infections invasives à streptocoque du groupe A sont très dangereuses et constituent une urgence médicale, même si les premiers symptômes ne sont pas toujours clairs. Il peut s’agir de fièvre, de frissons, de symptômes grippaux, de nausées ou de vomissements, mais surtout d’infections cutanées rouges et chaudes qui peuvent être très douloureuses et se répandre rapidement.</p>
<p>Des données solides indiquent que des <a href="https://doi.org/10.1542/peds.105.5.e60">maladies virales antérieures, telles que la varicelle</a>, peuvent prédisposer à l’infection invasive au streptocoque A. On devrait surveiller de près les enfants atteints de varicelle pour s’assurer qu’ils n’en souffrent pas.</p>
<p>Actuellement, il n’y a pas de vaccin contre le streptocoque du groupe A, alors qu’il en existe un contre la varicelle. De nombreuses équipes de recherche dans le monde, <a href="https://www.mccormicklab.ca/">dont la nôtre</a>, travaillent à la mise au point d’un vaccin contre le streptocoque A.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222031/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>John McCormick reçoit des fonds des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), du Conseil des sciences naturelles et de l'ingénierie du Canada (CRSNG) et de la Fondation Leducq.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Juan Manuel Diaz reçoit des fonds des Instituts de recherche en santé du Canada.
</span></em></p>L’augmentation du nombre de maladies graves causées par les streptocoques du groupe A est préoccupante. Voici pourquoi et comment elle se propage, et quels sont les symptômes à surveiller.John McCormick, Professor of Microbiology and Immunology, Western UniversityJuan Manuel Diaz, Postdoctoral Associate, department of Microbiology and Immunology, Western UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2183712023-11-28T13:01:09Z2023-11-28T13:01:09ZLa résistance aux antibiotiques cause plus de décès que le paludisme et le VIH/sida réunis : ce que fait l'Afrique pour lutter contre cette épidémie silencieuse<p><em>Chaque année, la <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/antimicrobial-resistance#:%7E:text=L'OMS%20a%20d%C3%A9clar%C3%A9%20que,de%20pathog%C3%A8nes%20r%C3%A9sistants%20aux%20m%C3%A9dicaments.">résistance aux antimicrobiens</a> - la capacité des microbes à survivre aux agents conçus pour les tuer - fait plus de victimes que le paludisme et le VIH/sida réunis. L'Afrique subit de plein fouet cette évolution, qui se nourrit d'inégalités et de pauvreté. Nadine Dreyer a demandé à Tom Nyirenda, chercheur scientifique ayant plus de 27 ans d'expérience dans le domaine des maladies infectieuses, ce que les organismes de santé du continent font pour lutter contre cette menace qui pèse sur le progrès médical.</em></p>
<h2>Qu'est-ce que la résistance aux antimicrobiens ?</h2>
<p>La résistance aux antimicrobiens se produit lorsque les bactéries, les virus, les champignons et les parasites changent au fil du temps et ne répondent plus aux médicaments (y compris les antibiotiques). Cela rend les infections plus difficiles à traiter et augmente le risque de propagation des maladies, de maladie grave et de décès. </p>
<p>En Afrique, la résistance aux médicaments est déjà un problème avéré pour <a href="https://africacdc.org/document-tag/amr/#:%7E:text=In%20Africa%2C%20AMR%20has%20already,%2C%20meningitis%2C%20gonorrhoea%20and%20dysentery.">le VIH, le paludisme, la tuberculose, la typhoïde, le choléra, la méningite, la gonorrhée et la dysenterie</a>. </p>
<h2>Quelle est l'ampleur du problème de la résistance aux antimicrobiens ?</h2>
<p>C'est l'une des <a href="https://www.who.int/fr/news-room/spotlight/ten-threats-to-global-health-in-2019">10 principales menaces mondiales</a> pour la santé publique qui risque de compromettre des années de progrès médical.</p>
<p>Près de <a href="https://www.fao.org/animal-health/our-programmes/antimicrobial-resistance-(amr)/fr">5 millions de décès</a> ont été associés à la résistance aux antimicrobiens en 2019. </p>
<p>C'est sur le continent africain que le fardeau est le plus lourd. </p>
<p>La première <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(21)02724-0/fulltext">évaluation complète</a> de la charge mondiale de la résistance aux antimicrobiens a estimé qu'en 2019, plus de 27 décès pour 100 000 étaient directement imputables à la résistance aux antimicrobiens en Afrique. Plus de 114 décès pour 100 000 personnes y ont été associés à cette résistance. </p>
<p>Dans les pays à revenu élevé, la résistance aux antimicrobiens a été directement à l'origine de 13 décès pour 100 000. Elle est associée à 56 décès pour 100 000 personnes.</p>
<p><a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(21)02724-0/fulltext">L'étude</a> a montré que les jeunes enfants sont particulièrement exposés. La moitié des décès survenus en Afrique subsaharienne en 2019 concernaient des enfants de moins de 5 ans.</p>
<h2>Comment les inégalités et la pauvreté interviennent-elles ?</h2>
<p>Dans de nombreux pays africains, la pauvreté et les inégalités favorisent la résistance aux antimicrobiens.</p>
<p>L'accès à une eau courante propre, à un assainissement adéquat et à une gestion sûre de l'eau est un défi majeur dans de nombreux hôpitaux et cliniques des pays africains. </p>
<p>De plus, il y a souvent un grave manque drastique de personnel de santé. Les services sont souvent débordés. En conséquence, les infections se propagent plus rapidement. Certaines de ces infections sont résistantes aux antibiotiques. </p>
<p>L'utilisation inappropriée des antibiotiques, l'insuffisance des ressources sanitaires et l'accès limité aux médicaments appropriés ont également alimenté la résistance aux antibiotiques en Afrique subsaharienne. </p>
<p>Les médicaments <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/14787210.2023.2259106">de qualité inférieure et falsifiés</a>, en raison de leurs doses inférieures, peuvent permettre aux bactéries de s'adapter, de résister, de se développer et de se propager. Des études montrent que le continent africain est touché par ces produits médicaux. </p>
<p>La pénurie mondiale d'antibiotiques encourage également l'utilisation de médicaments de qualité inférieure.</p>
<p>En raison d'une faible réglementation, la prescription d'antibiotiques <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/14787210.2023.2259106">en vente libre</a> est très répandue en Afrique subsaharienne. Les taux les plus élevés de prescription d'antibiotiques en vente libre ont été relevés en Érythrée (jusqu'à 89,2 %), en Éthiopie (jusqu'à 87,9 %), au Nigeria (jusqu'à 86,5 %) et en Tanzanie (jusqu'à 92,3 %). En Zambie, jusqu'à 100 % des pharmacies ont délivré des antibiotiques sans ordonnance. </p>
<h2>Y a-t-il de bonnes nouvelles ?</h2>
<p>Si la lutte contre la résistance aux antimicrobiens sur le continent africain est plus difficile que dans d'autres régions, de nombreux décès peuvent sont évitables. </p>
<p>Il y a eu quelques initiatives encourageantes pour protéger les systèmes de santé et les communautés contre la résistance aux antimicrobiens.</p>
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<li><p>L'Union africaine a mis en place le <a href="https://africacdc.org/download/african-union-framework-for-antimicrobial-resistance-control-2020-2025/">Cadre de l'Union africaine sur la lutte contre la résistance aux antimicrobiens</a>. Ce cadre vise à renforcer la recherche, à promouvoir les politiques, les lois et la bonne gouvernance, à améliorer la sensibilisation et à impliquer les organisations de la société civile.</p></li>
<li><p>La lutte contre la résistance aux antimicrobiens implique le développement de nouveaux antibiotiques tout en s'assurant qu'ils atteignent les personnes qui en ont besoin. C'est pour cela que des organisations comme le <a href="https://gardp.org/">Partenariat mondial de recherche-développement d'antibiotiques</a> ont été créées. Nous constatons des progrès encourageants pour un antibiotique contre la gonorrhée résistante aux médicaments, un <a href="https://www.who.int/news/item/22-06-2023-who-outlines-40-research-priorities-on-antimicrobial-resistance">agent pathogène hautement prioritaire</a>. </p></li>
</ol>
<p>Six sites sud-africains ont participé à l'essai clinique.</p>
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<li><p>La mesure et le suivi de la résistance aux antimicrobiens et de l'utilisation des antimicrobiens jouent un rôle essentiel. Là aussi, des progrès ont été accomplis. Le consortium <a href="https://africacdc.org/download/mapping-antimicrobial-resistance-and-antimicrobial-use-partnership-maap-country-reports/">Mapping AMR and AMU Partnership</a> a récemment publié 14 nouveaux rapports nationaux sur la situation en Afrique. </p></li>
<li><p>Le <a href="https://www.edctp.org/">Partenariat d'essais cliniques entre l'Europe et les pays en développement</a> finance la recherche clinique d'outils médicaux permettant de détecter, traiter et prévenir les maladies infectieuses liées à la pauvreté en Afrique subsaharienne. Le domaine vital de la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK531478/#:%7E:text=Neonatal%20sepsis%20refers%20to%20an,middle%20and%20lower%2Dincome%20countries">septicémie néonatale</a> en fait partie.</p></li>
<li><p>Il est essentiel de modifier les comportements à l'égard des antibiotiques afin qu'ils soient utilisés à bon escient. Des organisations telles que <a href="https://www.reactgroup.org/news-and-views/news-and-opinions/2023-2/react-africa-conference-2023/">ReAct Africa and the South Centre</a> ont bien progressé sur cet aspect. </p></li>
</ol>
<p>Elles plaident pour une utilisation responsable des antibiotiques ainsi que pour des moyens de prévenir et de contrôler les infections bactériennes. </p>
<p>Au Kenya et dans d'autres pays africains, les champions de la résistance aux antimicrobiens sensibilisent les écoles, les universités, les cliniques et les communautés. </p>
<p>6.<a href="https://www.afro.who.int/regional-director/speeches-messages/strategic-imperative-boosting-local-pharmaceutical-production">Une initiative audacieuse</a> des pays africains pour établir et développer la fabrication locale de produits médicaux nécessite une réglementation stricte afin de ne pas alimenter la résistance aux médicaments avec des produits de qualité inférieure ou des contrefaçons. </p>
<h2>Que nous réserve l'avenir ?</h2>
<p>Les défis posés par la résistance aux antimicrobiens dans les pays africains sont énormes. Mais la dynamique de lutte contre ce phénomène est en train de se mettre en place. </p>
<p>Les étapes cruciales sont les suivantes</p>
<ul>
<li><p>un investissement accru</p></li>
<li><p>l'expansion des programmes de prévention et de contrôle des infections, y compris les bonnes pratiques de prescription clinique</p></li>
<li><p>l'amélioration de l'accès aux antibiotiques essentiels et aux outils de diagnostic</p></li>
<li><p>le développement de nouveaux antibiotiques capables de traiter les infections multirésistantes. </p></li>
</ul>
<p><em>Cet article fait partie d'un partenariat médiatique entre The Conversation Africa et la Conférence 2023 sur la santé publique en Afrique. L'auteur remercie Carol Rufell du Partenariat mondial pour la recherche et le développement des antibiotiques en Afrique pour sa précieuse contribution.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218371/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tom Nyirenda does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>L'Afrique est plus touchée par la résistance aux antimicrobiens, largement alimentée par la pauvreté, mais des signes encourageants montrent que le continent prend des mesures pour la combattre.Tom Nyirenda, Extraordinary Senior Lecture in the Department of Global Health, Stellenbosch UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2134842023-10-10T21:16:44Z2023-10-10T21:16:44ZTransmission de l’antibiorésistance à l’être humain : quelles bactéries surveiller chez l’animal ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/552346/original/file-20231005-19-6xuzjf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C7%2C4920%2C3268&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’usage d’antibiotiques en médecine vétérinaire doit être surveillé, car il soulève la question de l’émergence de bactéries résistantes et de leur passage à l’être humain.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/TlVNZvr_lf0">Jo-Anne McArthur / Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>La résistance des bactéries aux antibiotiques ou « antibiorésistance », est devenue un sujet de préoccupation majeure. Selon un rapport britannique repris par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), on estime que d’ici à 2050, le nombre de décès liés à la résistance aux antibiotiques pourrait atteindre <a href="https://amr-review.org/sites/default/files/160518_Final%20paper_with%20cover.pdf">10 millions par an dans le monde</a>.</p>
<p>Fin juin, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a publié un avis concernant la <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/SABA2020SA0066Ra.pdf">liste prioritaire des couples bactérie/famille d’antibiotiques</a> à surveiller chez les animaux en raison de leur impact sur la santé publique. Voici ce qu’il faut en retenir.</p>
<h2>Comment émergent les résistances ?</h2>
<p>Toute utilisation d’antibiotique, que ce soit chez les êtres humains ou chez les animaux, exerce une pression de sélection : initialement très efficaces, les antibiotiques éliminent massivement les bactéries sensibles. </p>
<p>Il arrive cependant que quelques bactéries s’avèrent capables de leur résister. Celles-ci survivent et, favorisées par la disparition des bactéries sensibles, se multiplient sans concurrence. C’est ainsi qu’émergent des populations résistantes contre lesquelles les antibiotiques deviennent inefficaces.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/antibiotiques-lantibioresistance-est-une-pandemie-silencieuse-194799">Antibiotiques : « l’antibiorésistance est une pandémie silencieuse »</a>
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<p>De telles bactéries résistantes aux antibiotiques peuvent non seulement se développer chez les personnes soignées par des antibiotiques, mais aussi dans l’environnement (lorsque celui-ci est contaminé par des rejets contenant des antibiotiques) ou chez les animaux d’élevage et de compagnie, lorsque les antibiotiques sont utilisés en médecine vétérinaire.</p>
<p>Dans ce dernier cas, des bactéries résistantes peuvent être transmises aux êtres humains soit par le biais de contacts rapprochés avec lesdits animaux, soit de manière indirecte, par l’intermédiaire de l’environnement ou via la consommation de produits alimentaires contaminés.</p>
<h2>Des couples bactérie/famille d’antibiotiques à surveiller en priorité chez l’animal</h2>
<p>Onze couples bactérie/famille d’antibiotiques à surveiller en priorité chez les animaux en France figurent sur la première liste élaborée par l’Anses. Parmi eux, cinq sont classés hautement prioritaires :</p>
<ul>
<li><p><strong>Enterobacterales/carbapénèmes :</strong> les Enterobacterales sont un ordre bactérien qui comprend plusieurs espèces par exemple <em>Escherichia coli</em> ou les bactéries du genre <em>Salmonella</em>, couramment trouvées dans l’intestin des êtres humains et d’autres animaux. Diverses espèces d’Enterobacterales peuvent causer des infections, notamment urinaires, intestinales, ou respiratoires. Or, certaines de ces bactéries ont développé une résistance aux antibiotiques. C’est le cas par exemple de souches résistantes aux carbapénèmes qui sont des antibiotiques à large spectre, utilisés uniquement en milieu hospitalier pour traiter les infections les plus graves. L’émergence des Enterobacterales résistantes aux carbapénèmes est un problème majeur de santé publique. La résistance de ces bactéries à plusieurs classes d’antibiotiques peut conduire à des impasses thérapeutiques.</p></li>
<li><p><strong>Enterobacterales/céphalosporines de troisième et quatrième générations (C3G/C4G) :</strong> certaines souches d’Enterobacterales ont développé une résistance aux C3G/C4G, des antibiotiques d’importance critique utilisés pour traiter des infections sévères à la fois chez l’être humain et l’animal. En médecine vétérinaire, la réalisation d’un antibiogramme préalable à leur prescription est requise.</p></li>
<li><p><strong><em>Staphylococcus aureus</em>/méticilline (SARM) :</strong> <em>S. aureus</em> (ou staphylocoque doré) est une bactérie qui peut se trouver sur la peau et dans les voies nasales des êtres humains, sans provoquer de problème de santé. Cependant, dans certaines conditions (<a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/staphylocoque">blessure, intervention chirurgicale, affaiblissement immunitaire…</a>), elle peut causer diverses infections, telles que des infections cutanées, des infections des voies respiratoires, ou même des infections sanguines. Le <em>Staphylococcus aureus</em> résistant à la méticilline, aussi appelé SARM, est un staphylocoque ayant développé une résistance à plusieurs antibiotiques, dont la méticilline. Puisque cette dernière est inefficace pour traiter une infection causée par le SARM, cela limite le choix des traitements.</p></li>
<li><p><strong>Enterobacterales/fluoroquinolones :</strong> tout comme les C3G/C4G, les fluoroquinolones sont des antibiotiques d’importance critique chez l’être humain et l’animal.</p></li>
<li><p><strong>Enterobacterales/polymyxines :</strong> la colistine est l’antibiotique le plus connu parmi ceux appartenant aux polymyxines. Elle est utilisée en médecine vétérinaire, notamment dans les filières animales de production. En médecine humaine, en raison de sa toxicité, la colistine n’est prescrite que pour le traitement d’infections humaines sévères liées à des bactéries résistantes à toutes les autres options thérapeutiques. La résistance de certaines souches à la colistine est problématique du fait de la forte capacité de dissémination d’un gène de résistance, <em>mcr-1</em>, identifié chez les animaux et les êtres humains dans le monde entier.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="Des cochons dans un élevage." src="https://images.theconversation.com/files/552378/original/file-20231005-21-gpj0dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/552378/original/file-20231005-21-gpj0dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/552378/original/file-20231005-21-gpj0dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/552378/original/file-20231005-21-gpj0dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/552378/original/file-20231005-21-gpj0dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/552378/original/file-20231005-21-gpj0dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/552378/original/file-20231005-21-gpj0dz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La circulation des staphylocoques dorés résistants à la méticilline doit être surveillée, notamment dans les élevages de porcs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/tlJ_5jVHMF4">Diego San/Unsplash</a></span>
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<h2>Évolution des résistances</h2>
<p>Une analyse des données épidémiologiques collectées en France permet actuellement de nuancer la transmission de souches bactériennes résistantes aux antibiotiques entre les animaux et les êtres humains.</p>
<p>Les données d’épidémiosurveillance montrent que si la résistance aux carbapénèmes est occasionnellement détectée chez les chiens et les chats, elle est vraisemblablement liée à un contact avec les êtres humains porteurs de cette bactérie résistante, car cette famille d’antibiotique n’est pas utilisée en médecine vétérinaire.</p>
<p>Les résistances aux autres familles d’antibiotiques chez les animaux de production (bovins, porcs, volailles) et de compagnie (chiens et chats) sont en baisse au cours des dix dernières années, grâce aux efforts de maîtrise de l’utilisation d’antibiotiques dans le secteur animal.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/podcast-zootopique-la-resistance-aux-antibiotiques-une-pandemie-silencieuse-207657">Podcast « Zootopique » : La résistance aux antibiotiques, une pandémie silencieuse</a>
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<p>Une vigilance devra toutefois être apportée concernant les souches de <em>Staphylococcus aureus</em> <a href="https://www.efsa.europa.eu/fr/topics/topic/meticillin-resistant-staphylococcus-aureus-mrsa">résistantes à la méticilline</a>, un important antibiotique de la famille des pénicillines. En 2006, des cas d’infections dans plusieurs hôpitaux aux Pays-Bas ont mis en évidence que <a href="https://theconversation.com/antibiotiques-lantibioresistance-est-une-pandemie-silencieuse-194799">ces bactéries résistantes provenaient en fait d’élevages de porcs</a>.</p>
<p>En France, une enquête menée dans plusieurs élevages porcins a montré que les niveaux de cette résistance ont significativement augmenté entre 2008 et 2021, <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/SABA2020SA0066Ra.pdf#page=11">passant de 3 % à plus de 40 %</a>. Par ailleurs, les données de surveillance révèlent, pour l’année 2021, des proportions élevées chez le chien, avec une tendance à l’augmentation depuis 2018.</p>
<p>Dans son avis, l’Anses recommande d’améliorer cette épidémiosurveillance en utilisant des méthodes de séquençage permettant des analyses du génome entier des cinq couples bactérie/famille d’antibiotiques hautement prioritaires, afin de pouvoir évaluer la contribution du réservoir animal dans la transmission aux êtres humains de telles bactéries résistantes, et d’évaluer la présence d’éléments génétiquement mobiles pouvant favoriser la transmission des gènes codants pour cette résistance aux antibiotiques.</p>
<p>Concernant les staphylocoques dorés résistants à la méticilline, l’Anses souligne la nécessité d’apporter une vigilance au SARM dans le secteur animal à travers la mise en place d’enquêtes ponctuelles, afin de détecter les animaux pouvant jouer un rôle de porteurs transitoires et qui risquent d’être impliqués dans la dissémination et la persistance du SARM dans la population humaine.</p>
<h2>Attention aux aliments importés</h2>
<p>En France, la transmission des résistances bactériennes entre les animaux et les êtres humains est contrôlée grâce à des mesures de biosécurité dans les élevages, aux bonnes pratiques d’hygiène dans les cliniques vétérinaires et via la cuisson des aliments (la chaleur tue les bactéries résistantes aux antibiotiques).</p>
<p>Cependant, le commerce international, les déplacements de personnes, d’animaux et de produits alimentaires intensifient le risque de dissémination rapide des bactéries résistantes aux antibiotiques. C’est le cas par exemple de crevettes d’élevage importées d’Asie, <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1157923/bacteries-resistantes-antibiotiques-crevettes-epicerie-alimentation">qui peuvent être contaminées par des bactéries résistantes aux antibiotiques</a>. Pour y faire face, la décision <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32020D1729">(UE) 2020/1729</a> impose la surveillance de l’antibiorésistance, mais uniquement dans les viandes importées depuis des pays hors de l’Union européenne.</p>
<p>L’Anses recommande donc d’élargir cette surveillance aux produits issus de la pêche, afin d’éviter l’introduction en France de nouvelles bactéries résistantes, voire de bactéries multirésistantes (autrement dit, résistantes à plusieurs familles d’antibiotiques), qui représentent une menace majeure pour la santé publique.</p>
<h2>L’antibiorésistance, c’est l’affaire de tous !</h2>
<p>En médecine humaine, tout le monde se souvient du slogan « Les antibiotiques, ce n’est pas automatique », employé dans les campagnes de sensibilisation visant à réduire le recours systématique aux antibiotiques.</p>
<p>Son pendant en médecine vétérinaire, « les antibios, comme il faut, quand il faut », a permis d’attirer l’attention des professions du secteur animal sur le bon usage des antibiotiques vétérinaires.</p>
<p>La problématique de l’antibiorésistance est particulièrement emblématique du concept <em>One Health</em> (« Une seule santé »), selon lequel santé humaine, animale et environnementale sont interconnectées et interdépendantes.</p>
<p>Pour lutter contre ce problème majeur, il est en effet nécessaire de renforcer les mesures de prévention et de contrôle de la transmission de l’antibiorésistance entre les êtres humains, les animaux et l’environnement. C’est à ce prix que nous pouvons espérer réussir à préserver l’efficacité des antibiotiques, et donc notre capacité à lutter contre les infections bactériennes à l’avenir.</p>
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<p><em>Cet article a été écrit avec l’appui d’Eric Oswald, président du groupe de travail Anses « antiborésistance chez les animaux »</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213484/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Elissa Khamisse ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le risque que des bactéries résistantes aux antibiotiques passent des animaux à l’humain (et vice-versa) est réel. Quels sont les couples de bactéries et d’antibiotiques à surveiller en priorité ?Elissa Khamisse, Coordinatrice scientifique d’expertise en santé et alimentation des animaux, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2103552023-08-16T14:22:51Z2023-08-16T14:22:51ZVers une valorisation des ressources végétales boréales<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/541991/original/file-20230809-27838-bwvns3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C1%2C1011%2C680&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le kalmia à feuilles étroites est une plante envahissante typique des écosystèmes boréaux. Sa prolifération peut nuire au reboisement de zones soumises à des perturbations</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.inaturalist.org/observations/28905420">Jacques Ibarzabal/iNaturalist</a></span></figcaption></figure><p>Les plantes produisent des molécules pour interagir avec leur environnement et pour se protéger contre les menaces extérieures. Ces molécules peuvent également présenter des propriétés – antioxydantes, anti-inflammatoires, antibactériennes – qui sont bénéfiques pour la santé humaine. Ces propriétés sont valorisées par les médecines traditionnelles et inspirent le développement de médicaments par les chimistes contemporains. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/plantes-de-la-foret-boreale-de-la-medecine-traditionnelle-autochtone-a-la-medecine-moderne-200154">Plantes de la forêt boréale : de la médecine traditionnelle autochtone à la médecine moderne</a>
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<p>La majorité des médicaments sur le marché sont des <a href="https://www.nature.com/articles/nchem.2479">produits naturels ou en dérivent</a>. Entre autres, plusieurs classes d’antibiotiques utilisées pour combattre les infections bactériennes sont basées sur la structure chimique de produits naturels.</p>
<p>Par exemple, l’érythromycine A est un antibiotique naturel, produit par un micro-organisme. Elle est utilisée pour combattre différentes infections bactériennes. On prépare un autre antibiotique, la clarithromycine, en modifiant la structure de l’érythromycine A. </p>
<p>Les produits biosourcés, qui tirent leur origine du vivant, trouvent aussi des applications dans des domaines variés incluant les <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/ics.12564">produits cosmétiques</a>, les compléments alimentaires, les phytosanitaires et <a href="https://pubs.acs.org/doi/full/10.1021/acs.jafc.2c06938">l’alimentation animale</a>. </p>
<p>Notre groupe de recherche au laboratoire LASEVE de l’Université du Québec à Chicoutimi s’intéresse à la valorisation des produits naturels issus de la forêt boréale. Le choix des espèces étudiées s’appuie en partie sur les usages traditionnels des plantes, par les communautés autochtones. </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/523895/original/file-20230502-16-gbwpsg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><strong>Cet article fait partie de notre série <a href="https://theconversation.com/ca-fr/topics/foret-boreale-138017">Forêt boréale : mille secrets, mille dangers</a></strong></p>
<p><br><em>La Conversation vous propose une promenade au cœur de la forêt boréale. Nos experts se penchent sur les enjeux d’aménagement et de développement durable, les perturbations naturelles, l’écologie de la faune terrestre et des écosystèmes aquatiques, l’agriculture nordique et l’importance culturelle et économique de la forêt boréale pour les peuples autochtones. Nous vous souhaitons une agréable – et instructive – balade en forêt !</em></p>
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<h2>À la découverte de molécules fascinantes</h2>
<p>Les molécules d’intérêt sont souvent extraites en macérant les plantes dans différents solvants (eau, éthanol, glycérine). Des tests biologiques permettent d’évaluer rapidement les bienfaits des extraits. Il est par exemple possible de mesurer le pouvoir antibiotique de produits naturels en traitant des bactéries cultivées au laboratoire. </p>
<p>Les tests biologiques permettent également de faciliter la sélection et l’isolation des molécules ayant les propriétés les plus intéressantes ; on parle alors de « fractionnement bio-guidé ». </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/542407/original/file-20230811-15-wiokuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="schéma" src="https://images.theconversation.com/files/542407/original/file-20230811-15-wiokuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/542407/original/file-20230811-15-wiokuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=169&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/542407/original/file-20230811-15-wiokuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=169&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/542407/original/file-20230811-15-wiokuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=169&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/542407/original/file-20230811-15-wiokuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=212&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/542407/original/file-20230811-15-wiokuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=212&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/542407/original/file-20230811-15-wiokuj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=212&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Schéma de principe de l’approche de découverte de nouvelles substances bioactives à partir de la biomasse forestière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Jérôme Alsarraf)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<h2>Le peuplier baumier comme antibactérien</h2>
<p>Le staphylocoque doré résistant à la méticilline (SARM) compte parmi les six bactéries causant la majorité des décès liés à la résistance aux antibiotiques à l’échelle mondiale. La résistance des bactéries aux antibiotiques <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(21)02724-0/fulltext">compromet notre capacité à combattre les infections bactériennes</a>. Dans ce contexte, la découverte de nouvelles classes d’antibactériens devient un enjeu de santé publique. </p>
<p>Nous avons notamment identifié une famille de molécules antibactériennes extraites des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0040403912021338">bourgeons de peuplier baumier (<em>Populus balsamifera</em>)</a>. Ces composés originaux, nommés balsacones, sont actifs contre le SARM. De plus, contrairement à <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fmicb.2019.02341/full">d’autres antibiotiques</a>, leur usage ne semble pas induire de résistance chez les bactéries traitées. </p>
<p>Cependant, les rendements d’isolation des balsacones à partir du bourgeon de peuplier baumier sont faibles. En d’autres termes, pour un kilogramme de plante, nous n’arrivons à obtenir qu’environ 10 milligrammes de molécules ; des quantités bien trop faibles pour étudier les propriétés de ces molécules dans le détail. </p>
<p>Les balsacones demeurent néanmoins des produits prometteurs dans la lutte contre la résistance des bactéries.</p>
<h2>Une production plus verte</h2>
<p>Les molécules d’intérêt sont habituellement obtenues par synthèse, c’est-à-dire en assemblant successivement différents « blocs de construction » pour aboutir à la molécule souhaitée. Les approches classiques utilisent des « blocs de construction » simples issus de l’industrie pétrolière. Ces méthodes sont fastidieuses et nécessitent plusieurs étapes de synthèse qui reposent sur l’emploi de matières premières nocives et non renouvelables. </p>
<p>La pénurie à venir des ressources fossiles, combinée avec les enjeux environnementaux entourant la pétrochimie, appelle au <a href="https://pubs.rsc.org/en/content/articlelanding/2006/gc/b604483m">développement d’alternatives plus durables</a>. Pour pallier ces limitations, une stratégie consiste à employer des produits naturels comme « blocs de construction » pour la synthèse de molécules à haute valeur ajoutée. Ces blocs de constructions remplacent avantageusement les produits issus du pétrole. </p>
<p>Cette approche, dite de xylochimie lorsque les « blocs de construction » <a href="https://pubs.rsc.org/en/content/articlelanding/2020/gc/d0gc01484b">proviennent du bois</a>, contourne l’usage de matières premières non renouvelables. L’idée derrière cette méthode est de simplifier la séquence de synthèse en utilisant des molécules biosourcées. De plus, la variété des précurseurs naturels disponibles permet de diversifier les produits accessibles et de découvrir de nouveaux dérivés. </p>
<p>En nous appuyant sur ce principe, nous avons synthétisé plusieurs balsacones en une seule étape de synthèse, en <a href="https://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/acssuschemeng.0c01545">combinant deux molécules biosourcées</a>. </p>
<p>La procédure mise en œuvre repose sur plusieurs principes de la <a href="https://pubs.rsc.org/en/content/articlelanding/2010/CS/B918763B">chimie dite « verte »</a>. Elle a aussi permis de produire des molécules inédites apparentées aux balsacones afin de mieux comprendre les paramètres structuraux qui confèrent aux balsacones leurs <a href="https://www.mdpi.com/2079-6382/10/6/620">vertus antibactériennes</a>. </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/542404/original/file-20230811-4652-8jnelf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="schéma" src="https://images.theconversation.com/files/542404/original/file-20230811-4652-8jnelf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/542404/original/file-20230811-4652-8jnelf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=169&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/542404/original/file-20230811-4652-8jnelf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=169&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/542404/original/file-20230811-4652-8jnelf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=169&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/542404/original/file-20230811-4652-8jnelf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=212&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/542404/original/file-20230811-4652-8jnelf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=212&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/542404/original/file-20230811-4652-8jnelf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=212&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Principe de l’approche de synthèse xylochimique (droite) comparativement à l’approche de synthèse classique (gauche).</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Jérôme Alsarraf)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Valoriser les trésors de la forêt boréale</h2>
<p>L’industrie forestière génère annuellement plus de 1,7 million de tonnes d’écorces au Québec. </p>
<p>Ces résidus demeurent peu exploités, malgré leur forte teneur en molécules aux propriétés intéressantes. </p>
<p>Notre laboratoire travaille au développement de méthodes pour valoriser ces sous-produits de l’exploitation forestière, en identifiant les molécules qu’ils contiennent et en caractérisant leurs propriétés biologiques. </p>
<p>Nous nous intéressons également à d’autres espèces végétales issues de la forêt boréale et impliquées indirectement dans l’aménagement de cette dernière. Par exemple, le kalmia à feuilles étroites (<em>Kalmia angustifolia</em>) est une plante envahissante typique des écosystèmes boréaux. Sa prolifération peut nuire au reboisement de zones soumises à des perturbations telles que des épidémies d’insectes ravageurs ou des feux, dont la fréquence et la sévérité sont <a href="https://cdnsciencepub.com/doi/10.1139/cjfr-2019-0094">susceptibles de s’accentuer dans le contexte actuel de changement climatique</a>. </p>
<p>Les travaux de notre équipe ont montré que cette espèce contient une molécule pouvant être utilisée pour produire la balsacone A, un composé aux propriétés antibactériennes. </p>
<p>En procédant à la récolte du kalmia à feuilles étroites, nos approches d’extraction et de transformation de biomolécules pourraient permettre d’augmenter la valeur ajoutée de cette biomasse, dans une démarche d’économie circulaire. </p>
<p>Ainsi, les extraits végétaux provenant de la forêt boréale peuvent conduire à la découverte de nouvelles substances contribuant notamment à répondre à des enjeux de santé publique mondiaux. </p>
<p>L’utilisation de molécules naturelles comme blocs de constructions pour préparer des dérivés plus complexes permet aussi de générer des produits à haute valeur ajoutée de façon plus respectueuse de l’environnement. </p>
<p>Dans ce contexte, l’étude des produits naturels permettra de contribuer de manière importante au développement durable et à la productivité des forêts.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210355/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérôme Alsarraf est membre du Centre de recherche sur la boréalie (CREB).
Jérôme Alsarraf a reçu des financements du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) et du Mathematics of Information Technology and Complex Systems (Mitacs). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>André Pichette est membre de l’Ordre des chimistes du Québec (OCQ) André Pichette a reçu des financements de Fonds de recherche du Québec - Santé (FRQS) Conseil de Recherches en Sciences Naturelles et Génie du Canada (CRSNG)- Alliance - Mathematics of Information Technology and Complex Systems (MITACS) - Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jean Legault est membre de l'ordre des chimistes du Québec. Il a reçu des financements du FQRNT, FRQS, CRSNG et MITACS.
</span></em></p>Les plantes boréales produisent des molécules qui sont valorisées par les médecines traditionnelles et qui inspirent le développement de médicaments par les chimistes contemporains.Jérôme Alsarraf, Professeur de Chimie, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Andre Pichette, Professeur en chimie des produits naturels, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Jean Legault, Professeur-chercheur en biochimie et pharmacologie, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2076572023-06-14T16:41:09Z2023-06-14T16:41:09ZPodcast « Zootopique » : La résistance aux antibiotiques, une pandémie silencieuse<iframe src="https://embed.acast.com/7f7f5b1b-ba8f-4be1-833e-f8c62a47f850/64882c1d373c810011a63dd5" frameborder="0" width="100%" height="190px"></iframe>
<p>« Zootopique » est une série de podcasts réalisés en partenariat avec l’Anses (Agence nationale sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) qui interroge nos relations avec les animaux au prisme de la santé. Après une première saison portant sur des thèmes aussi variés que le déclin des abeilles ou les maladies portées par les moustiques et les tiques, nous vous proposons une deuxième saison.</p>
<p>Pour ce troisième épisode, Jean‑Yves Madec, directeur scientifique de l’axe antibiorésistance de l’Anses et Claire Harpet, anthropologue de la santé, ingénieur recherche à l’Université Lyon 3 nous éclairent sur un phénomène inquiétant : l’antibiorésistance. C’est le phénomène qui décrit la résistance des bactéries aux antibiotiques. En faisant reculer de nombreuses maladies bactériennes, les antibiotiques ont transformé les médecines humaine et animale. Mais leur utilisation s’est accompagnée de l’émergence de souches résistantes qui menacent aujourd’hui notre santé. Selon l’OMS, l’antibiorésistance sera à l’origine de 10 millions de morts par an dans le monde, à l’horizon 2050.</p>
<p>Demain, pourrons-nous toujours nous soigner ? Des infections banales pourront-elles devenir de graves menaces ? Est-il possible de lutter contre ce phénomène ?</p>
<hr>
<p><em>Crédits : Conception : Anses et The Conversation France. Réalisation : <a href="https://www.moustic-studio.com/">Moustic Studio</a>. Animation : Benoît Tonson.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207657/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’antibiorésistance ou quand les bactéries deviennent résistantes aux antibiotiques. Un problème majeur de santé publique décortiqué dans ce podcast.Benoît Tonson, Chef de rubrique Science + Technologie, The Conversation FranceClaire Harpet, Ingénieure de Recherche, Dr en Anthropologie, Université Jean-Moulin Lyon 3Jean-Yves Madec, Directeur Scientifique Antibiorésistance de l'ANSES, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2064312023-06-01T16:17:40Z2023-06-01T16:17:40ZTuberculose en France : la bataille n’est pas gagnée<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/528566/original/file-20230526-17-gi3asw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C3%2C1047%2C787&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La tuberculose reste présente en France (poumons atteints, avec détail de la bactérie Mycobactrieum tuberculosis)</span> <span class="attribution"><span class="source">NIAID, Images courtesy of Clifton Barry/ Laboratory of Clinical Immunology & Microbiology</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Elle s’est appelée « phtisie », « consomption » ou « peste blanche », on parle aujourd’hui de tuberculose. Cette maladie infectieuse, causée par la bactérie <em>Mycobacterium tuberculosis</em>, nous accompagne depuis des millénaires.</p>
<p>Particulièrement contagieuse, elle fut le fléau des sociétés industrialisées occidentales au XIX<sup>e</sup> siècle et durant la première moitié du XX<sup>e</sup> siècle. À la Belle Époque, on estimait ainsi qu’elle était responsable du décès de près de 150 000 personnes chaque année en France avec près de 9 millions de décès au cours du XIX<sup>e</sup> siècle.</p>
<p>Si elle a causé des ravages, on l’associe désormais au passé. C’est une erreur : on meurt toujours de tuberculose, y compris en France. Et, au niveau mondial, elle a récemment <a href="https://www.who.int/fr/news/item/27-10-2022-tuberculosis-deaths-and-disease-increase-during-the-Covid-19-pandemic">progressé pour la première fois depuis vingt ans</a> indiquait l’OMS en 2021. Comment expliquer ce retour ?</p>
<p>Revenons un instant à ce qui avait permis son recul…</p>
<p>L’identification de son agent pathogène par le médecin allemand Robert Koch en 1882 (d’où son surnom de « bacille de Koch », un bacille étant une bactérie de forme allongée) fut une première étape décisive puisqu’elle allait ouvrir la voie à des moyens de lutte efficace. L’amélioration des conditions de vie et d’hygiène, puis le développement de la vaccination (le fameux BCG, pour Bacille de Calmette et Guérin) avec pour finir la mise en place de l’antibiothérapie ont considérablement changé le pronostic de la maladie. Elle allait ainsi refluer dans les pays industrialisés tout au long du XX<sup>e</sup> s.</p>
<p>Refluer mais pas disparaître : la tuberculose reste une menace, et un fléau à l’échelle mondial. Selon l’OMS, en 2021, près de <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/tuberculosis">1,6 million de personnes en sont mortes</a> et elle est la deuxième cause de mortalité par maladie infectieuse, derrière le Covid-19 (et avant le Sida), et la treizième toutes causes confondues.</p>
<p>L’objectif de l’OMS de l’éradiquer d’ici 2030 se heurte à de nombreuses difficultés, dont celles croissantes de la <a href="https://theconversation.com/resistance-aux-antibiotiques-comment-lutter-contre-la-pandemie-silencieuse-168008">résistance aux antibiotiques</a> et la persistance des inégalités socio-économiques sur lesquelles elle prospère.</p>
<h2>Tuberculose en France : les chiffres</h2>
<p>La tuberculose est une des 36 maladies à <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/tuberculose/notre-action/#tabs">déclaration obligatoire auprès de Santé publique France</a>.</p>
<p>Ce suivi a permis de constater que, sur 20 ans, son incidence (nombre de cas apparus sur une année) est en recul avec <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2021/tuberculose-en-france-les-chiffres-2020">6,4 cas pour 100 000 habitants en 2021 contre 11 en 2000 – soit environ 4300 cas contre 4600 20 ans plus tôt</a>. Le nombre de cas de tuberculoses multirésistantes (MDR) a également diminué : 43 cas en 2021 contre 67 en 2020 (environ 1 % des cas).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/528563/original/file-20230526-27-5faty3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="La baisse générale est régulièrement interrompue par des ressauts ; à noter également que la répartition de la tuberculose n’est pas homogène sur le territoire" src="https://images.theconversation.com/files/528563/original/file-20230526-27-5faty3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/528563/original/file-20230526-27-5faty3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/528563/original/file-20230526-27-5faty3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/528563/original/file-20230526-27-5faty3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/528563/original/file-20230526-27-5faty3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/528563/original/file-20230526-27-5faty3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/528563/original/file-20230526-27-5faty3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Nombre total de cas et taux de déclaration de tuberculose en France entre 2000 et 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Santé publique France ; DO tuberculose ; données de population : ELP, Insee</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ce qui n’empêche pas les ressauts comme en 2007-2008 et en 2017-2019… Quant à la baisse en cours, elle découle en partie des mesures de confinement et de port du masque de la pandémie Covid-19, mais aussi d’une possible baisse des diagnostics du fait d’un accès aux soins limité.</p>
<p>Si le territoire Français est considéré comme une zone de faible incidence par l’OMS de façon générale, on constate de fortes disparités selon les régions avec les outre-mer et l’Île-de-France en principaux épicentres :</p>
<ul>
<li><p>Mayotte compte 12,0 cas pour 100 000 habitants ;</p></li>
<li><p>L’Île-de-France, 13,2 cas pour 100 000 habitants (38 % des cas). La Seine-Saint-Denis est le département de Métropole le plus affecté avec 24,3 cas pour 100 000 habitants ;</p></li>
<li><p>La Guyane, 25,5 cas pour 100 000 habitants.</p></li>
</ul>
<p>Trois catégories de personnes sont particulièrement affectées : les personnes sans domicile (68 cas pour 100 000 habitants), celles détenues (44/100 000 habitants) et celles nées hors de France (32/100 000 habitants) – principalement les jeunes (25-39 ans) nés dans un pays à forte endémie.</p>
<p>Par ailleurs, il est à noter qu’être immunodéprimé (en raison du VIH, d’une transplantation d’organes, de biothérapies…) est un facteur majeur de développement de la maladie.</p>
<h2>En Europe, une situation contrastée</h2>
<p>Europe de l’Ouest et de l’Est sont dans des situations sanitaires très différentes.</p>
<p>À l’Ouest, la prévalence (nombre de cas à un moment donné) de la tuberculose est faible, et l’incidence de nouveaux cas inférieure à 10 pour 100 000 habitants. Dans l’Union européenne, <a href="https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/tuberculosis-surveillance-and-monitoring-europe-2022-2020-data">l’ECDC (<em>European Control disease center</em>)</a> l’évaluait ainsi à 7,3 cas pour 100 000 habitants en 2020 – soit environ 33 000 nouveaux cas.</p>
<p>Dans l’ancien bloc soviétique, prévalence et incidence sont de modérées à fortes. La Fédération de Russie présentait, en 2020, un taux d’incidence de 58,2 pour 100 000 habitants.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/528314/original/file-20230525-19-y3f8rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="L’ex-bloc de l’Est a des chiffres supérieurs à 20 ; l’UE se situe plutôt autour de 10" src="https://images.theconversation.com/files/528314/original/file-20230525-19-y3f8rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/528314/original/file-20230525-19-y3f8rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/528314/original/file-20230525-19-y3f8rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/528314/original/file-20230525-19-y3f8rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/528314/original/file-20230525-19-y3f8rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/528314/original/file-20230525-19-y3f8rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/528314/original/file-20230525-19-y3f8rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Carte des taux d’incidence (nb de cas/100 000 habitants/an) de la tuberculose en Europe.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Données : European Surveillance System (TESSy) et WHO Global TB data-collection system</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’OMS estimait en 2021 à plus de 21 000 le nombre de décès dus à la tuberculose en Europe (2,3 décès pour 100 000 personnes), dont environ 3 800 dans l’UE (0,8 décès pour 100 000). Une augmentation, la première en plus de vingt ans comme indiqué plus haut, qui s’explique notamment par un retard ou une absence de diagnostic à la suite de perturbations des services de lutte contre la maladie.</p>
<h2>Une maladie aux multiples visages</h2>
<p>La transmission se fait par voie aérienne, via des gouttelettes chargées de bactéries projetées par un malade ; elle est favorisée par la toux et l’expectoration. Seules les formes pulmonaires (et les exceptionnelles formes laryngées) sont donc contagieuses.</p>
<p>Le bacille gagne les poumons de son nouvel hôte, où il va entraîner une réponse inflammatoire. Les cellules immunitaires impliquées (des macrophages) peuvent se retrouver infectées et, en se déplaçant ensuite dans le corps via le système lymphatique, transporter la bactérie dans des ganglions. Le malade est au stade dit de <strong>« primo-infection tuberculeuse »</strong>.</p>
<p>Dans 90 % des cas, cette primo-infection sera pas ou peu symptomatique. S’installe une <strong>« infection tuberculeuse latente »</strong> (ITL). Si, dans 90 % des cas l’évolution est favorable (hors immunodépression et très jeunes enfants, plus vulnérables), des formes avec symptômes peuvent se développer :</p>
<ul>
<li><p><strong>Tuberculose pulmonaire commune</strong> : Elle se caractérise par des signes respiratoires (gênes, douleurs thoraciques, toux prolongée parfois sanglante…) et parfois amaigrissement, fatigue, fièvre, sueurs nocturnes, etc. Plus fréquente lorsque la maladie est active, l’hémoptysie (cracher du sang venant des bronches) survient dans 5 à 15 % des cas dans les pays industrialisés mais est plus fréquente dans les pays à forte endémie.</p></li>
<li><p><strong>Formes extra-pulmonaires</strong> : Elles représentent 25 % des cas en France, et peuvent apparaître secondairement. La forme la plus fréquente est la <strong>tuberculose ganglionnaire</strong>, caractérisée par des ganglions enflés et enflammés. La <strong>tuberculose osseuse</strong> est également répandue (avec formation d’abcès au niveau des vertèbres ou autres articulations) comme l’atteinte hépatique (rarement symptomatique). D’autres formes, moins fréquentes, existent : des pleurésies, péricardites et méningites tuberculeuses ainsi que les rares tuberculoses laryngées, urogénitale (risque de stérilité), digestive et surrénalienne. En cas d’immunodépression sous-jacente, elle peut toucher de multiples organes.</p></li>
<li><p><strong>Tuberculose du sujet âgé</strong> : La prévalence dans la population âgée est importante. Les signes cliniques sont aspécifiques et souvent peu bruyants, entraînant parfois un retard diagnostique et thérapeutique.</p></li>
</ul>
<h2>Quelle prise en charge thérapeutique en France ?</h2>
<p>Bien codifiée en France, la prise en charge de la tuberculose est assurée à 100 % par la Sécurité sociale (via les Affections de longue durée, ALD, ou l’Aide médicale d’État, AME). Cela permet une <a href="https://theconversation.com/maladies-chroniques-pourquoi-est-ce-si-difficile-de-suivre-un-traitement-sur-le-long-terme-201994">bonne observance des traitements, particulièrement longs</a> : deux mois de prise de quatre molécules antibiotiques, puis quatre mois avec deux antibiotiques (Recommandations OMS 2018) à l’exception des tuberculoses neuroméningées, qui exigent 9 à 12 mois de traitement.</p>
<p>Les deux principaux antituberculeux, la <a href="https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/3e_bat_rifadine.pdf">rifampicine</a> et l’<a href="https://www.vidal.fr/medicaments/substances/isoniazide-1913.html">isoniazide</a>, sont utilisés sur les six mois ; s’y ajoutent au début <a href="https://www.vidal.fr/medicaments/substances/pyrazinamide-2974.html">pyrazinamide</a> et <a href="https://www.vidal.fr/medicaments/substances/ethambutol-15563.html">éthambutol</a>. Dans les formes respiratoires, les patients sont isolés pendant au moins deux semaines après initiation du traitement.</p>
<p>Cette association permet une guérison dans plus de 85 % des cas. Un bon résultat dû à l’adhésion des patients, obtenu grâce au suivi des effets secondaires et des adaptations de posologies qui en découlent. Aux États-Unis, le <a href="https://academic.oup.com/cid/article/63/7/e147/2196792?login=false">taux de succès est de l’ordre 66 %</a> du fait des difficultés à financer les traitements (permettant l’observance) et au manque de suivi (clinique, biologique et des effets secondaires) dans les populations les plus touchées.</p>
<p>La lutte contre la tuberculose passe par les <a href="https://splf.fr/clat/">Centre de lutte anti-tuberculose (CLAT)</a> qui maillent le territoire. Ils organisent et coordonnent le dépistage des cas, leur suivi et la recherche des cas contacts.</p>
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<h2>Résistance, co-infection : les principales menaces</h2>
<p>Même si des progrès majeurs ont été accomplis depuis un siècle, le reflux de la tuberculose n’est pas global. Il s’observe principalement dans les pays offrant une bonne protection sociale et sanitaire. L’Europe de l’Ouest, par ses acquis sociaux et un meilleur accès à des structures de santé performantes, est à la pointe. Les mesures de protection sociale ont fait leurs preuves en aidant à casser les chaînes de contamination et à diminuer la morbi-mortalité.</p>
<p>Malheureusement, la tuberculose reste endémique dans bien des régions du globe. Les raisons sont multiples et complexes : manque de financement des offres de soins et dans la formation des personnel, difficultés dans le diagnostic, l’accès et le suivi du traitement (coût, effets secondaires), etc.</p>
<p>Or les arrêts de traitements prématurés présentent un double risque : pour le malade, et d’émergence de souches résistantes. On parle de tuberculose multi-résistante (MDR en anglais) lorsque rifampicine et isoniazide deviennent moins efficaces. Lorsque la résistance se développe également contre les médicaments de deuxième intention les plus efficaces (fluoroquinolones, aminosides, etc.), la tuberculose est dite « extrêmement résistante » (XDR en anglais).</p>
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<img alt="Point sur les traitements encore efficaces et inefficaces contre la tuberculose" src="https://images.theconversation.com/files/528580/original/file-20230526-15-hhj43i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/528580/original/file-20230526-15-hhj43i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/528580/original/file-20230526-15-hhj43i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/528580/original/file-20230526-15-hhj43i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=448&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/528580/original/file-20230526-15-hhj43i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/528580/original/file-20230526-15-hhj43i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/528580/original/file-20230526-15-hhj43i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=563&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La bactérie responsable de la tuberculose est de plus en plus résistante aux traitements. On parle de formes multirésistantes quand les deux principaux antibiotiques, rifampicine et isoniazide, deviennent inefficaces. Il faut alors se reporter sur les autres molécules.</span>
<span class="attribution"><span class="source">NIAID</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>La tuberculose multirésistante est une des principales menaces en termes de santé publique et la sécurité sanitaire au niveau mondial.</p>
<p>Selon l’OMS, en 2021, seul un tiers des patients diagnostiqués avec une tuberculose MDR ont eu accès à un traitement. Plusieurs pistes ont été explorées afin d’améliorer la prise en charge : tests de dépistage de résistance rapide, traitement plus court ou simplifié afin d’améliorer l’observance, etc.</p>
<p>Mais la persistance de la maladie et la progression des formes résistantes sont également associées à une autre pathologie infectieuse majeure : le Sida (Syndrome de l’immunodéficience acquise), causé par le Virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Les sujets touchés ont en moyenne 16 fois plus de risque de développer une tuberculose (OMS 2021), qui est la première cause de décès parmi les personnes vivant avec le VIH (environ 187 000 personnes en 2021). L’Afrique et les pays de l’ancienne URSS sont les plus concernés du fait d’un manque d’accès aux soins et d’une stigmatisation de ces populations.</p>
<p>Des solutions existent, par l’amélioration des diagnostics et des traitements. Mais il ne faut pas oublier la base du problème : la tuberculose est un révélateur de l’état de nos sociétés. Avec les autres maladies infectieuses, elles mettent en exergue nos failles et nos faiblesses. Inégalités socio-économiques, accès aux soins et exclusion font leur lit. Aucune politique d’éradication ne pourra faire l’économie de cette réflexion, y compris dans une Europe occidentale parfois tentée par des solutions démagogiques en ces temps d’incertitudes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206431/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Simon Bessis est membre de SPILF, socitété de pathologie infectieuse en langue Française.
Simon Bessis à reçu une bourse de thèse de la Fondation pour la Recherche Médicale</span></em></p>La tuberculose sonne comme une maladie du passé. On en meurt pourtant toujours en France… Quels sont les territoires les plus touchés, et comment cette menace est-elle traitée aujourd’hui ?Simon Bessis, Médecin infectiologue et chercheur au Centre international de recherche en infectiologie (CIRI) - ENS de Lyon, Institut PasteurLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2044582023-05-17T18:12:48Z2023-05-17T18:12:48ZLa tolérance aux antibiotiques, un problème mais aussi une piste pour comprendre et combattre la résistance aux antibiotiques<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/523265/original/file-20230427-16-5jw9jq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C5%2C1194%2C551&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les bactéries tolérantes aux antibiotiques entrent dans un état de dormance puis se réveillent quand l’antibiotique n’est plus présent.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/jimsurkamp/51046277722/">Jim Surkamp, Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span></figcaption></figure><p>Avez-vous déjà eu une vilaine infection qui ne semble pas vouloir disparaître ? Ou d’un nez qui coule et qui revient sans cesse ? Il se peut que vous ayez eu affaire à une bactérie qui tolère les antibiotiques, mais qui n’y est pas encore résistante.</p>
<p>La résistance aux antibiotiques est un problème majeur : elle a contribué à <a href="https://doi.org/10.1016/S0140-6736(21)0 2724-0">près de 1,27 million de décès dans le monde en 2019</a>. La tolérance aux antibiotiques, quant à elle, est un sujet de recherche plus récent.</p>
<p>La <a href="https://doi.org/10.1371/journal.ppat.1008892">tolérance aux antibiotiques</a> se produit lorsqu’une bactérie survit longtemps après son exposition à des antibiotiques. Alors que les bactéries <a href="https://doi.org/10.1128/microbiolspec.VMBF-0016-2015">résistantes aux antibiotiques</a> prospèrent même en présence d’un antibiotique, les bactéries tolérantes vivent plutôt dans un état de dormance – elles ne se développent pas, ni ne meurent, mais supportent l’antibiotique jusqu’à ce qu’elles puissent se « réveiller », une fois le stress disparu. La tolérance a été <a href="https://www.doi.org/10.1126/science.aaj2191">liée à la propagation de la résistance aux antibiotiques</a>.</p>
<p>Je suis une <a href="https://doerr.wicmb.cornell.edu/current-lab-members/">microbiologiste</a>. J’étudie la tolérance aux antibiotiques et je cherche à découvrir ce qui pousse les bactéries tolérantes à entrer dans cet état de dormance.</p>
<p>En comprenant pourquoi les bactéries ont la capacité de devenir tolérantes, les chercheurs espèrent développer des moyens d’éviter la propagation de cette capacité. Le mécanisme exact qui différencie la tolérance de la résistance n’est pas encore clair, mais une des pistes réside dans la façon dont les bactéries <a href="https://doi.org/10.3389/fmicb.2020.577564">créent leur énergie</a> – un processus négligé pendant des décennies.</p>
<h2>Le choléra et la tolérance aux antibiotiques</h2>
<p>De nombreux antibiotiques sont conçus pour <a href="https://doi.org/10.1039/C6MD00585C">percer les défenses extérieures de la bactérie</a> comme un boulet de canon dans une forteresse de pierre. Les bactéries résistantes sont immunisées contre les boulets de canon, parce qu’elles peuvent soit le détruire avant qu’il n’endommage leur mur extérieur, soit modifier leurs propres murs pour pouvoir résister à l’impact.</p>
<p>De leur côté, les bactéries tolérantes peuvent supprimer entièrement leur mur et éviter tout dommage : pas de mur, pas de cible pour le boulet de canon. Si la menace disparaît rapidement, la bactérie peut reconstruire son mur pour se protéger d’autres dangers environnementaux et reprendre ses fonctions normales. Cependant, on ne sait toujours pas comment les bactéries savent que la menace antibiotique a disparu ni ce qui déclenche exactement leur réveil.</p>
<p>Avec mes collègues du <a href="https://doerr.wicmb.cornell.edu/">laboratoire Dörr de l’université Cornell</a>, nous essayons de comprendre les processus d’activation et de réveil de la bactérie tolérante responsable du choléra, <em>Vibrio cholerae</em>.</p>
<p>En effet, les médecins sont inquiets car la bactérie <em>Vibrio cholerae</em> <a href="https://doi.org/10.3389/fitd.2021.691604">est en train de développer rapidement une résistance à divers types d’antibiotiques</a>. Ainsi, en 2010, <em>Vibrio cholerae</em> était déjà <a href="https://doi.org/10.1016/j.vaccine.2019.06.031">résistante à 36 antibiotiques différents</a>, et on s’attend à ce que ce nombre augmente encore.</p>
<p>Pour étudier comment <em>Vibrio cholerae</em> développe une résistance, nous avons choisi une <a href="https://doi.org/10.3389/fpubh.2016.00231">souche tolérante à une classe d’antibiotiques appelés bêta-lactames ou bêta-lactamines</a>. Les bêta-lactamines sont le boulet de canon envoyé pour détruire la forteresse de la bactérie, et <em>Vibrio cholerae</em> s’adapte en activant deux gènes qui suppriment temporairement sa paroi cellulaire – un phénomène que j’ai pu observer au microscope. Après avoir supprimé sa paroi cellulaire, la bactérie active d’autres gènes, qui la transforment en « globules », fragiles mais capables de survivre aux effets de l’antibiotique. Une fois l’antibiotique éliminé ou dégradé, <em>Vibrio cholerae</em> reprend sa forme normale de bâtonnet et continue à se développer.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les <em>Vibrio cholerae</em> normalement en forme de bâtonnet enlèvent leurs parois cellulaires et se transforment en globules en présence de pénicilline, ce qui leur permet de survivre plus longtemps.</span></figcaption>
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<figcaption><span class="caption"><em>Vibrio cholerae</em> reprend sa structure en bâtonnets une fois la menace antibiotique écartée.</span></figcaption>
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<p>Chez l’homme, ce processus de tolérance est observé lorsqu’un médecin prescrit un antibiotique, généralement la doxycycline, à un patient infecté par le choléra. L’antibiotique semble temporairement arrêter l’infection. Mais les symptômes réapparaissent ensuite, car les antibiotiques n’ont jamais complètement éliminé les bactéries.</p>
<p>La capacité de revenir à la normale et de se développer après la disparition de l’antibiotique est la clé de la survie des bactéries tolérantes.</p>
<p>Exposer <em>Vibrio cholerae</em> à un antibiotique pendant une période suffisamment longue finirait par le tuer. Mais un traitement antibiotique standard n’est souvent pas assez long pour se débarrasser de toutes les bactéries, même dans un état fragile. De plus, la prise d’un médicament pendant une période prolongée peut nuire aux bactéries et aux cellules saines, ce qui peut provoquer une aggravation de l’inconfort et de la maladie. En outre, le <a href="https://doi.org/10.3389/fcimb.2020.572912">mauvais usage et l’exposition prolongée aux antibiotiques peuvent augmenter les risques de résistance des autres bactéries présentes dans l’organisme</a>.</p>
<h2>D’autres bactéries développent une tolérance</h2>
<p>La bactérie <em>Vibrio cholerae</em> n’est pas la seule espèce à faire preuve de tolérance à des antibiotiques, et les chercheurs ont récemment identifié de nombreuses bactéries infectieuses qui ont développé une tolérance. Une famille de bactéries appelée <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pbio.1001928">entérobactéries</a>, qui comprend les principaux agents pathogènes des maladies d’origine alimentaire <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pbio.1001928"><em>Salmonella</em></a>, <a href="https://doi.org/10.1128/AAC.01282-08"><em>Shigella</em></a> et <a href="https://doi.org/10.1038/s41598-021-85509-7"><em>E. coli</em></a>, n’est qu’une partie des nombreux types de bactéries capables de tolérer les antibiotiques.</p>
<p>Comme chaque bactérie est unique, la façon dont elle développe la tolérance semble l’être également. Certaines bactéries, comme <em>Vibrio cholerae</em>, <a href="https://doi.org/10.1128/AAC.00756-19">effacent leurs parois cellulaires</a>. D’autres peuvent <a href="https://doi.org/10.1038/nchembio.1754">modifier leurs sources d’énergie, augmenter leur capacité à se déplacer ou simplement évacuer</a> l’antibiotique.</p>
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<p>J’ai récemment découvert que le <a href="https://doi.org/10.1128/jb.00476-22">métabolisme d’une bactérie, c’est-à-dire la façon dont elle décompose sa « nourriture » pour produire de l’énergie, peut jouer un rôle important dans sa capacité à devenir tolérante</a> aux antibiotiques. En effet, les différentes structures d’une bactérie, y compris sa paroi extérieure, sont constituées d’éléments spécifiques tels que des protéines. En empêchant la bactérie de fabriquer ces éléments, on affaiblit sa paroi, ce qui la rend plus susceptible d’être endommagée par l’environnement extérieur avant qu’elle ne puisse l’abattre.</p>
<h2>La tolérance et la résistance sont liées</h2>
<p>Bien que de nombreuses recherches aient été menées sur la manière dont les bactéries développent des tolérances aux antibiotiques, il reste une pièce essentielle du puzzle à explorer : la manière dont la tolérance conduit à la résistance.</p>
<p>En 2016, des chercheurs ont découvert comment <a href="https://doi.org/10.1038/nmicrobiol.2016.20">rendre les bactéries tolérantes en laboratoire</a>. Après une exposition répétée à différents antibiotiques, des cellules d’<em>E. coli</em> ont pu s’adapter et survivre. L’ADN, le matériel génétique contenant les instructions pour le fonctionnement des cellules, est une molécule fragile. Lorsque l’ADN est rapidement endommagé par un stress – par exemple l’exposition à un antibiotique, les mécanismes de réparation de la cellule ont tendance à se dérégler et à provoquer des mutations susceptibles de créer une résistance et une tolérance.</p>
<p>Comme <em>E. coli</em> est similaire à de nombreux types de bactéries, les résultats de ces chercheurs montrent ironiquement que presque toutes les bactéries peuvent développer une tolérance… si elles sont poussées à leurs limites par les antibiotiques censés les tuer.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les bactéries vivent en communautés dans les biofilms. Source : BIOASTER, Institut d’Innovation Technologique en Microbiologie.</span></figcaption>
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<p>Une autre découverte récente très importante est que plus les bactéries restent longtemps tolérantes aux antibiotiques, plus elles sont susceptibles de <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.2209043119">développer des mutations menant à la résistance</a>. En effet, la tolérance permet aux bactéries de développer une mutation de résistance qui réduit leurs chances d’être tuées lors d’un traitement antibiotique.</p>
<p>Ce phénomène est particulièrement important pour les communautés bactériennes qui sont souvent observées dans les <a href="https://doi.org/10.2147/IDR.S379502">biofilms qui ont tendance à recouvrir les surfaces souvent touchées dans les hôpitaux</a>. Ces biofilms sont des couches gluantes de bactéries qui suintent une gelée protectrice qui rend difficile le traitement antibiotique et facilite le partage de l’ADN entre les microbes. Ainsi, ils peuvent faciliter le développement d’une résistance aux antibiotiques. On pense que ces conditions sont en fait similaires à ce qui pourrait se produire lors d’infections traitées aux antibiotiques, dans lesquelles de nombreuses bactéries vivent les unes à côté des autres et partagent leur ADN.</p>
<p>Les chercheurs appellent à une intensification des recherches sur la tolérance aux antibiotiques dans l’espoir qu’elles débouchent sur des <a href="https://doi.org/10.1128/mBio.02095-19">traitements plus robustes</a>, tant pour les maladies infectieuses que pour les cancers. Et il y a des raisons d’espérer. Une étude sur des souris a montré que la <a href="https://doi.org/10.1126/science.1211037">diminution de la tolérance aux antibiotiques réduit également la résistance</a>.</p>
<p>Entre-temps, chacun peut prendre des mesures pour contribuer à la lutte contre la tolérance et la résistance aux antibiotiques : en <a href="https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/antibiotic-resistance">prenant un antibiotique exactement comme il a été prescrit par le médecin</a>, et en terminant tout le flacon. Une exposition brève et irrégulière à un médicament incite les bactéries à devenir tolérantes et finalement résistantes. Une utilisation plus rigoureuse des antibiotiques par l’ensemble de la population contribuerait à stopper l’évolution des bactéries tolérantes aux antibiotiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204458/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Megan Keller a reçu des financements de la National Science Foundation américaine, via le Graduate Research Fellowship Program et du National Institutes of Health (NSF GRFP #DGE-1650441 et NIH R01-AI143704).</span></em></p>La résistance aux antibiotiques provoque des millions de morts. Les recherches montrent que la tolérance aux antibiotiques peut mener à la résistance.Megan Keller, Ph.D. Candidate in Microbiology, Cornell UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2017152023-03-28T19:36:00Z2023-03-28T19:36:00ZComment le gel hydroalcoolique tue les microbes ?<p>Depuis le début de l’épidémie de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/Covid-19-82467">Covid-19</a>, le <a href="https://theconversation.com/podcast-objets-cultes-le-gel-hydroalcoolique-182979">gel hydroalcoolique</a> est devenu incontournable pour se désinfecter les mains. Mais au fait, comment ça marche ?</p>
<p>Chaque jour lors de nos différentes activités, nous touchons plein de surfaces différentes avec nos mains que d’autres personnes ont touchées (dans les transports en commun par exemple), la main de quelqu’un d’autre ou encore un mouchoir par exemple.</p>
<p>Sur ces surfaces, il y a des saletés (poussières, graisses, tâches…), mais aussi des microorganismes qu’on appelle communément des microbes. Ce sont de petits organismes microscopiques (invisibles à l’œil nu), comme des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/bacteries-22006">bactéries</a> et des virus, qui peuvent nous rendre malades (comme le fameux virus qui provoque le Covid).</p>
<p>Donc quand nos mains vont être en contact avec les surfaces, des saletés et des microbes vont s’y déposer, et si nous nous touchons ensuite le visage par exemple les microbes peuvent rentrer dans notre organisme et l’infecter.</p>
<h2>Le savon et le gel ne servent pas à la même chose</h2>
<p>On peut se laver les mains avec de l’eau et du savon. Les molécules de savon ont une extrémité qui adhère à l’eau et l’autre extrémité qui colle à la graisse des saletés : le savon fait comme un pont entre l’eau et les saletés.</p>
<p>En se frottant les mains, le savon décolle les saletés des surfaces et les molécules de savon qui ont accroché les saletés partent avec l’eau de rinçage, nos mains sont propres. Le savon peut aussi agir sur les microbes : ils sont entourés d’une enveloppe (appelée aussi paroi chez les bactéries) qui est là pour les protéger. Comme cette enveloppe est aussi composée de gras (comme les saletés), le savon va s’accrocher à l’enveloppe qui entoure le microbe, le décoller des surfaces et tout part avec l’eau de rinçage. Cet accrochage peut aussi abîmer cette enveloppe et certains microbes, comme des virus, ne pourront pas survivre avec une enveloppe abîmée.</p>
<p>De son côté, le gel hydroalcoolique désinfecte les mains, c’est-à-dire qu’il tue les microbes, mais il ne lave pas les mains et ne décolle pas les saletés qui seraient ensuite éliminées par le rinçage, comme le ferait un savon.</p>
<p>Si les mains sont sales, il ne faut pas utiliser de gel car il ne retire pas les saletés et il sera aussi moins efficace, la saleté va « cacher » les microbes en faisant une barrière autour d’eux.</p>
<h2>De l’alcool pour se débarrasser des microbes</h2>
<p>Le savon est déjà très utile et doit donc être utilisé en priorité. Mais quand nous sommes à l’extérieur, il n’est pas possible d’utiliser de l’eau et du savon. Dans ces cas-là, nous pouvons utiliser du gel hydroalcoolique.</p>
<p>Ce gel, c’est un mélange principalement d’eau et de composés chimiques qu’on appelle des alcools (facile pour les reconnaître, ils ont des noms en « -ol » comme l’éthanol ou l’isopropanol). Quand on se frotte les mains avec le gel, les molécules d’alcool vont se coller aux microbes.</p>
<p>Nous avons déjà vu que l’enveloppe des microbes est composée de gras, mais il y a aussi d’autres composés appelés protéines. Les molécules d’alcool vont modifier la structure des enveloppes des microbes en abîmant ces protéines, c’est-à-dire que les protéines vont se désorganiser et laisser passer les molécules d’alcool à l’intérieur des microbes. Les microbes seront alors complètement détruits.</p>
<h2>Comment bien utiliser le gel hydroalcoolique</h2>
<p>Pour qu’il soit bien efficace, le gel doit contenir au moins 65 % d’alcool (à vérifier sur l’étiquette), il faut mettre l’équivalent d’une grosse noisette dans le creux des mains (qui doivent être visiblement propres) et bien se frotter les doigts, les paumes et le dos des mains jusqu’au début des poignets pendant 30 secondes, les mains doivent être sèches à la fin.</p>
<p>Le gel hydroalcoolique reste un produit chimique qu’il ne faut pas tout le temps utiliser, car il va abîmer la peau, de plus le contenant en plastique peut polluer l’environnement.</p>
<p>Enfin le gel n’aime pas la chaleur donc il faut éviter de laisser le flacon au fond d’une poche ou en plein soleil, les composés alcools vont s’évaporer et le gel sera moins efficace.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201715/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Attig ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Contre le virus du Covid ou les bactéries, le gel hydroalcoolique est très utile pour se désinfecter, mais attention, il ne lave pas les mains.Isabelle Attig, Chef d'unité Evaluation Efficacité Biocides et Résistance, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1996432023-02-12T17:26:57Z2023-02-12T17:26:57ZAntibiotiques, antidépresseurs… Absorbons-nous des résidus de médicaments sans le savoir ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/509230/original/file-20230209-16-ntvaex.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C233%2C4080%2C2482&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Antibiotique, hormones, antidépresseurs… sont retrouvés dans les eaux de surface.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-photo/effervescent-tablet-thrown-into-water-384084406">Aleksey Shyshkin / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>La consommation mondiale de médicaments a enregistré une <a href="https://www.iqvia.com/insights/the-iqvia-institute/reports/the-global-use-of-medicines-2022">tendance à la hausse au cours de la dernière décennie</a>. Quelques exemples frappants permettent d’en prendre concrètement conscience : la consommation de traitement hypocholestérolémiant a presque quadruplé, celle d’antidépresseurs et d’antidiabétiques a doublé et celle d’antihypertenseurs a augmenté de 65 % <a href="https://read.oecd-ilibrary.org/social-issues-migration-health/health-at-a-glance-2021_5689c05c-en#page1">dans les pays de l’OCDE entre 2000 et 2019</a>.</p>
<p>Les dépenses de médicaments en France ont représenté <a href="https://www.data.gouv.fr/fr/reuses/consommation-des-medicaments-age-sexe-quel-profil-type/">30 milliards d’euros en 2020</a>, soit une moyenne de 445€ par habitant. Plus une population vieillit, plus sa consommation médicamenteuse augmente.</p>
<p>Mais la vie d’un médicament ne s’arrête pas à son ingestion. Une partie des composés actifs qui le composent est en effet excrétée par notre corps, par l’urine ou les fèces – soit intacts, soit transformés en métabolites (petites molécules organiques utilisables par les organismes vivants). Ces médicaments et leurs métabolites finissent dans les stations d’épuration des eaux usées, qui, n’étant pas conçues pour les traiter, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0048969718330948">ne sont pas en mesure de les éliminer complètement</a>.</p>
<p>Par conséquent, une <a href="https://theconversation.com/limpact-des-medicaments-sur-lenvironnement-etudie-dans-des-rivieres-artificielles-150976">quantité importante de produits pharmaceutiques est rejetée chaque jour dans les eaux de surface</a> par le biais des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2590332222004870#fig1">effluents d’eaux usées</a>. Ces médicaments peuvent parcourir de longues distances et passer des rivières aux eaux souterraines et aux sols agricoles, où ils peuvent être absorbés par les <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/698_2020_622">plantes cultivées</a> et entrer dans la chaîne alimentaire.</p>
<h2>Des polluants non réglementés</h2>
<p>L’amélioration des équipements de détection et la mise au point de méthodes analytiques plus puissantes nous ont donné la possibilité de détecter dans les eaux de surface et d’autres matrices environnementales ce qui, il y a quelques années, était un monde invisible et complexe.</p>
<p>La <a href="https://theconversation.com/asi-seguimos-la-pista-a-los-contaminantes-emergentes-156672">présence de résidus de médicaments dans les ressources en eau</a> n’est pas encore réglementée. Cependant, l’Union européenne (UE) a établi des listes de surveillance (<a href="https://www.boe.es/doue/2015/078/L00040-00042.pdf">décisions d’exécution 2015/495</a>, <a href="https://www.boe.es/doue/2018/141/L00009-00012.pdf">2018/840</a>, <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/es/TXT/?uri=CELEX%3A32020D1161">2020/1161</a> et <a href="https://www.boe.es/buscar/doc.php?id=DOUE-L-2022-81149#">2022/1307</a>) dans le but de collecter des données de surveillance sur les substances pour lesquelles il existe une suspicion de risque significatif pour l’environnement aquatique et, à travers lui, pour l’Homme.</p>
<p>Plusieurs médicaments courants figurent sur ces listes, par exemple l’antibiotique sulfaméthoxazole (Bactrim, etc.), l’antidépresseur Venlafaxine et l’antidiabétique oral Metformine.</p>
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<h2>Impact sur l’écosystème</h2>
<p><a href="https://www.unep.org/explore-topics/chemicals-waste/what-we-do/emerging-issues/environmentally-persistent-pharmaceutical">Les médicaments sont des molécules biologiquement actives</a> conçues pour avoir un effet pharmacologique sur les organismes vivants : il n’est donc pas surprenant que l’exposition constante des organismes aquatiques aux résidus de médicaments puisse avoir un impact négatif sur leur santé.</p>
<p>Un <a href="https://www.oecd.org/publications/pharmaceutical-residues-in-freshwater-c936f42d-en.htm">rapport 2019 de l’OCDE</a> énumère certains de ces effets observés en laboratoire :</p>
<ul>
<li><p>Les <strong>analgésiques</strong> peuvent provoquer une génotoxicité (toxique pour l’ADN) et une neurotoxicité chez les mollusques et une perturbation endocrinienne chez les grenouilles.</p></li>
<li><p>Les <strong>antiépileptiques</strong> provoquent un retard de croissance chez les poissons et sont délétères pour le système reproducteur des invertébrés.</p></li>
<li><p>Les <strong>antipsychotiques</strong> provoquent des troubles du comportement chez les poissons.</p></li>
<li><p>Les <strong>antidiabétiques oraux</strong> ont des effets potentiels sur le système endocrinien des poissons.</p></li>
<li><p>Les <strong>hormones</strong> provoquent des altérations du système reproducteur chez les poissons et les grenouilles.</p></li>
</ul>
<p>Sur la base de données scientifiques et techniques concernant leur présence, leur persistance et leur toxicité, <a href="https://environment.ec.europa.eu/system/files/2022-10/Proposal%20for%20a%20Directive%20amending%20the%20Water%20Framework%20Directive%2C%20the%20Groundwater%20Directive%20and%20the%20Environmental%20Quality%20Standards%20Directive.pdf">l’UE a récemment publié une proposition</a> visant à réglementer la concentration de certains antibiotiques, analgésiques et hormones dans les eaux de surface, ainsi que de l’antiépileptique carbamazépine et de l’antibiotique sulfaméthoxazole dans les eaux souterraines.</p>
<h2>De la station d’épuration à nos tables</h2>
<p>L’une des principales sources de produits pharmaceutiques dans l’environnement est constituée par les effluents des stations d’épuration, où <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0957582021002317">ces molécules apparaissent à des concentrations faibles</a> – allant des nanogrammes par litre aux microgrammes par litre – mais constantes.</p>
<p>Une fois libérés dans les eaux de surface, ils peuvent être soumis à des processus d’atténuation qui se produisent naturellement dans l’environnement : photodégradation, biodégradation, dilution… Ce qui entraîne une diminution de leur concentration ou de leur toxicité. L’ampleur de cette baisse dépend, entre autres facteurs, de leurs propriétés physico-chimiques.</p>
<p>Malheureusement, certaines molécules vont résister à ces mécanismes d’atténuation naturelle, persister dans l’environnement et parcourir de longues distances – et atteindre souvent des sols agricoles.</p>
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Leer más:
<a href="https://theconversation.com/limpact-des-medicaments-sur-lenvironnement-etudie-dans-des-rivieres-artificielles-150976">L'impact des médicaments sur l'environnement étudié dans des rivières artificielles</a>
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</p>
<hr>
<p>En 2016, un <a href="https://www.umweltbundesamt.de/en/publikationen/pharmaceuticals-in-the-environment-global">examen de la littérature scientifique mondiale</a> des études mesurant les concentrations de polluants pharmaceutiques persistants dans l’environnement (dont les antibiotiques, analgésiques, hypolipémiants, œstrogènes, etc.) a détecté un total de <strong>631 composés différents (ou leurs produits de transformation) dans 71 pays</strong>.</p>
<p>L’eau de surface <a href="https://www.fao.org/3/cb7654es/cb7654es.pdf">est l’une des ressources en eau les plus utilisées en agriculture</a>. Lorsque des résidus de médicaments s’y trouvent dissous, résultat, en partie, de la consommation humaine, il existe un risque pour la sécurité alimentaire en raison de leur possible pénétration dans les plantes cultivées qui finissent sur notre table, telles que les céréales, les légumes, les fruits, etc.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Champs de maïs arrosés" src="https://images.theconversation.com/files/507540/original/file-20230201-24-zs6ml2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/507540/original/file-20230201-24-zs6ml2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/507540/original/file-20230201-24-zs6ml2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/507540/original/file-20230201-24-zs6ml2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/507540/original/file-20230201-24-zs6ml2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/507540/original/file-20230201-24-zs6ml2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/507540/original/file-20230201-24-zs6ml2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’eau d’irrigation des terres agricoles peut être chargée en molécules médicamenteuses.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-photo/corn-field-countryside-being-irrigated-by-2213633865">Enol sutil/Shutterstock</a></span>
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</figure>
<h2>Détection de médicaments dans l’eau d’irrigation</h2>
<p>Les résultats de nos travaux, publiés dans les revues <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0160412021004608"><em>Science of the Total Environment</em></a> et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0048969719358206"><em>Environmental International</em></a>, montrent que 42 des 50 médicaments étudiés sont détectés dans l’eau utilisée pour irriguer le maïs dans une zone agricole du sud de la Communauté de Madrid.</p>
<p>Parmi eux, la Metformine (antidiabétique oral figurant sur la liste de surveillance 2022) se distingue par ses niveaux de concentration (jusqu’à 13 µg/l). Ces données sont liées à sa <a href="https://pubs.acs.org/doi/10.1021/acs.est.2c02495">forte consommation et au fait que la quasi-totalité de la dose ingérée est excrétée par l’urine et les fèces</a>.</p>
<p>Les processus naturels d’atténuation dans le sol sont très efficaces pour réduire la concentration (jusqu’à de plus de 60 %) de la plupart des médicaments. Cependant, l’antiépileptique Carbamazépine et l’antibiotique Sulfaméthoxazole présentent un caractère persistant et sont donc susceptibles d’atteindre les eaux souterraines. La persistance de ces composés est l’une des raisons de leur inclusion dans la proposition de règlement européen.</p>
<p>Nos analyses montrent que la plupart des médicaments étudiés sont retenus dans les racines. Seule une petite quantité (0,02 %) s’accumule dans l’épi de maïs, ce qui représente un risque négligeable pour la sécurité alimentaire lors de la consommation… Il faut néanmoins garder à l’esprit que de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S001393511830687X">nombreux aliments d’origine végétale susceptibles d’accumuler davantage de substances</a> font partie de notre alimentation et sont également consommés crus.</p>
<h2>Quelles suites ?</h2>
<p>L’un des plus grands défis dans l’évaluation du risque lié à la présence de produits pharmaceutiques dans les aliments est de disposer de données fiables sur les niveaux de concentration – et donc d’études réalisées dans des conditions de terrain et de techniques analytiques performantes.</p>
<p>Il est toutefois établi que des produits pharmaceutiques se retrouvent bien relargués dans notre environnement, notamment dans l’eau. Et l’on parle d’un grand nombre et d’une grande diversité de substances telles que des métaux à l’état de traces, des pesticides, des biocides, des additifs chimiques et des <a href="https://theconversation.com/exposition-alimentaire-au-plastique-mefions-nous-des-fausses-solutions-de-remplacement-196894">nanoplastiques</a>, qui, ensemble, peuvent avoir un effet négatif décuplé. La prise en compte du mélange complexe de substances dissoutes dans l’eau en raison de l’activité anthropique est à la fois essentielle et difficile pour l’évaluation des risques.</p>
<p>Malheureusement, les données sur la présence de produits pharmaceutiques dans l’environnement ne sont pas encourageantes… Mais il existe des <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/environment/pharmaceutical-residues-in-freshwater_c936f42d-en">options clés pour atténuer ce problème</a> en agissant dans les différents secteurs de la production de médicaments et au niveau de l’élimination des déchets et du traitement des eaux usées. En outre, il est essentiel d’encourager une <a href="https://theconversation.com/antibiotiques-lantibioresistance-est-une-pandemie-silencieuse-194799">utilisation plus raisonnée des médicaments</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199643/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raffaella Meffe a reçu des financements des projets CTM2017-89995-R, financé par le Ministère espagnol des Sciences et de l'Innovation, l'Agence Nationale de la Recherche et le FEDER A way of doing Europe, et PID2020-118521RB-I00, financé par le ministère des Sciences et de l'Innovation et l'Agence nationale de la recherche.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Ana de Santiago Martín a reçu des financements des projets CTM2017-89995-R, financé par le ministère des Sciences et de l'Innovation, l'Agence nationale de la recherche et le FEDER A way of doing Europe, et PID2020-118521RB-I00, financé par le Ministère espagnol des Sciences et de l'Innovation et l'Agence Nationale de la Recherche. Et du Programa de Atracción de Talento de la Comunidad de Madrid (2016-T2/AMB-1426).</span></em></p>Nombre des médicaments que nous consommons se retrouvent dans notre environnement. Les risques concernent à la fois la biodiversité… et notre sécurité alimentaire. Quels sont les constats actuels ?Raffaella Meffe, Investigadora del Grupo Calidad de Agua y Suelo, IMDEA AGUAAna de Santiago Martín, Investigadora del Grupo de Calidad de Agua y Suelo, IMDEA AGUALicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1961922023-01-04T14:17:03Z2023-01-04T14:17:03ZGreffe de matières fécales : on vous explique ce que c’est et à quoi ça sert<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/499655/original/file-20221207-12-cn92lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C2%2C991%2C663&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La greffe de matières fécales consiste ni plus ni moins à remplacer le microbiote intestinal d'un receveur malade par du matériel fécal provenant d'un donneur sain. </span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Le corps humain abrite une variété considérable de microorganismes. Un grand nombre de bactéries, de champignons, de virus interagissent entre eux et avec notre organisme, coexistant sur les surfaces humaines et dans <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7043356/">toutes les cavités du corps</a>. Cette communauté microbienne complexe est appelée le microbiote. Et ce dernier joue un rôle essentiel dans les fonctions physiologiques globales et la santé de chaque individu.</p>
<p>Plus de 98 % des microorganismes présents chez l’humain résident dans le tractus gastro-intestinal. C’est ce qu’on appelle le microbiote intestinal. Si on le mettait sur une balance, il pèserait environ <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30567928/">2 kilogrammes</a>, soit presque le poids d’un organe. Le microbiote intestinal est impliqué dans la digestion des aliments, la régulation de la fonction des hormones intestinales et la signalisation neurologique. Il joue également un rôle dans la modification de l’action et du métabolisme des médicaments, l’élimination des toxines et la production de nombreux composés qui influencent l’hôte.</p>
<p>Chaque individu possède un microbiote intestinal qui lui est propre et qui est relativement stable et résilient dans le temps. Sa composition est influencée par le type d’accouchement (par voie vaginale ou par césarienne), le régime alimentaire du nourrisson, le mode de vie et les gènes.</p>
<p>Toutefois, certains facteurs environnementaux peuvent modifier sa composition au fil du temps. On parle par exemple de la consommation de probiotiques et de prébiotiques, du régime alimentaire, des infections virales et de la prise de médicaments (notamment les antibiotiques).</p>
<h2>Lorsque l’équilibre est perturbé, les problèmes commencent</h2>
<p>Lorsque le microbiote intestinal est perturbé ou que sa composition est inadéquate, une <a href="https://cdhf.ca/fr/dysbiose-et-syndrome-du-colon-irritable-sci/">dysbiose</a> se produit, entraînant des infections et des <a href="https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/NEJMra1600266">troubles métaboliques courants</a>. On parle notamment de l’obésité, du diabète de type 2, des maladies hépatiques non alcooliques et des maladies cardiovasculaires.</p>
<p>En réponse aux problèmes liés à la dysbiose intestinale, la <a href="https://crohnetcolite.ca/A-propos-de-ces-maladies/Parcours-de-la-MII/Traitement-et-medicaments/Greffedematierefecale">greffe de matières fécales</a> s’est avérée être une stratégie thérapeutique prometteuse. Elle consiste ni plus ni moins à remplacer le microbiote intestinal d’un receveur malade par du matériel fécal provenant d’un donneur sain.</p>
<p>L’ère moderne des études sur la greffe de matières fécales a débuté en 1958. Cette année-là, pour la première fois dans la littérature scientifique, on mentionnait son caractère prometteur. Le chirurgien américain Ben Eisman discutait du cas de quatre patients souffrant de diarrhée associée à des antibiotiques et dont l’état s’est rapidement amélioré à la suite de l’utilisation de lavements <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/13592638/">avec des matières fécales provenant d’un donneur sélectionné</a>.</p>
<p>Cette technique est particulièrement efficace pour traiter les infections récurrentes dues à la <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/maladies-infectieuses/fiche-renseignements-clostridium-difficile-difficile.html">bactérie <em>Clostridium difficile</em></a>, la fameuse <em>C. difficile</em>, lorsque les antibiotiques se sont révélés inefficaces. Ce microorganisme provoque une inflammation du côlon et des diarrhées mortelles – et son impact sur la santé publique est estimé très important.</p>
<p>Des données récentes indiquent qu’aux États-Unis, l’infection récurrente par la bactérie <em>Clostridium difficile</em> est à l’origine de <a href="https://www.cdc.gov/cdiff/what-is.html">près d’un demi-million d’infections</a> et de quelque 30 000 décès chaque année. Aux unités soins intensifs, elle entraîne des coûts annuels de soins de santé de <a href="https://bmcinfectdis.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12879-022-07594-x">4,8 milliards de dollars</a>.</p>
<h2>La greffe de matière fécale, étape par étape</h2>
<p>Lors d’une greffe de matières fécales, ces dernières doivent être traitées et préparées avant d’être transplantées chez le patient receveur. La méthode peut varier. Mais, en général, on recueille 100 à 150 grammes de matières fécales, auxquelles on ajoute une solution saline stérile pour une homogénéisation préliminaire afin d’obtenir une suspension fécale.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/WNQB8ujKoP4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La matière fécale peut être utilisée pour guérir des infections de la flore intestinale.</span></figcaption>
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<p>Les plus grosses particules, les fibres et les aliments non digérés sont ensuite éliminés par filtration à l’aide d’un tamis métallique. L’échantillon fécal frais liquide homogène peut être <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32326509/">transféré dans des seringues stériles</a>.</p>
<p>Récemment, la Food and Drug Administration (FDA) américaine a franchi une nouvelle étape en approuvant <a href="https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT03244644?term=NCT03244644&draw=2&rank=1">Rebyota</a>, le premier produit à base de microbiote fécal. Il est préparé à partir de fèces qui sont préalablement testées afin d’exclure une panoplie d’agents pathogènes transmissibles. Il est approuvé pour prévenir les infections récurrentes à <em>Clostridium difficile</em> chez les personnes de plus de 18 ans après l’échec d’une antibiothérapie, et est administré par voie rectale en une seule dose.</p>
<h2>La prudence avant tout</h2>
<p>Le traitement n’est pas sans risque. Comme il est fabriqué à partir de matières fécales humaines, il peut comporter un risque de transmission d’agents infectieux. En outre, le Rebyota peut contenir des allergènes alimentaires.</p>
<p>La greffe de matières fécales a démontré un taux remarquablement faible d’effets indésirables graves. Les essais cliniques suggèrent également qu’il s’agit d’une option thérapeutique efficace pour le traitement du <em>Clostridium difficile</em> et d’autres affections, telles que la colite ulcéreuse. Mais le transfert de microorganismes vivants de donneurs sains à des patients malades comporte des risques inhérents. On parle, par exemple, de la transplantation de bactéries multirésistantes qui peuvent entraîner de graves problèmes de santé, voire la mort du receveur.</p>
<p>À l’heure actuelle, il importe d’identifier les méthodes de traitement optimales et de définir les facteurs de risque. De cette manière, la greffe de matières fécales pourra être administrée de la manière la plus fiable possible.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196192/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raúl Rivas González ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le transfert de microorganismes vivants de donneurs sains à des patients malades comporte certains risques.Raúl Rivas González, Catedrático de Microbiología, Universidad de SalamancaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1947992022-11-17T17:25:53Z2022-11-17T17:25:53ZAntibiotiques : « l’antibiorésistance est une pandémie silencieuse »<p><em>Depuis leur découverte au début du XX<sup>e</sup> siècle, les antibiotiques ont transformé la médecine, humaine comme animale, en permettant de faire reculer de nombreuses maladies bactériennes. Mais leur utilisation s’est accompagnée de l’émergence de souches résistantes qui menacent leur efficacité.</em></p>
<p><em>Pour freiner le grave risque que représente l’antibiorésistance pour la santé publique mondiale, certains pays ont pris des mesures drastiques, notamment en ce qui concerne les pratiques d’élevage. D’autres, au contraire, tardent à agir.</em></p>
<p><em>Jean-Yves Madec, directeur scientifique antibiorésistance de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et Florent Parmentier, secrétaire général du Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) font le point sur la situation et nous expliquent pourquoi il est si difficile de prendre des mesures à la hauteur de la menace.</em></p>
<hr>
<p><strong>The Conversation : Pourquoi utilise-t-on des antibiotiques en élevage ?</strong></p>
<p><strong>Jean-Yves Madec :</strong> On donne des antibiotiques aux animaux pour les mêmes raisons qu’on en donne aux êtres humains : pour soigner leurs maladies bactériennes.</p>
<p>Parmi les maladies d’importance en élevage, citons les infections de la mamelle chez les bovins. Une vache développe une mammite quasiment chaque année. Il est aussi très fréquent que les jeunes animaux soient victimes de diarrhées au moment où ils passent d’une alimentation lactée à une alimentation diversifiée. Ces périodes de transition alimentaires sont très problématiques, les animaux subissent des infections et doivent être traités par des antibiotiques.</p>
<p>Au-delà des grandes maladies d’élevage, l’emploi d’antibiotiques en médecine vétérinaire concerne également les animaux de compagnie, qui vont être traités pour certaines pathologies, suite à des chirurgies, ou parce qu’ils développent des maladies dues à la vieillesse, puisque contrairement aux animaux d’élevage, qui sont abattus bien avant leur durée de vie maximale, chiens et chats sont menés jusqu’au bout de leur vie.</p>
<p><strong>TC : Mais dans certains pays, les antibiotiques sont également utilisés comme « promoteurs de croissance ». Pourquoi ?</strong></p>
<p><strong>JYM :</strong> Dans de nombreux pays, les antibiotiques sont en effet administrés alors que l’animal n’est pas malade. Il s’agit d’une sorte de béquille destinée à soutenir un élevage déficient, notamment en raison de mauvaises pratiques d’hygiène.</p>
<p>Il se trouve que lorsqu’on donne un antibiotique à des poulets qui vivent dans des conditions d’élevage dégradé, il va avoir un effet assainissant. La question de savoir si l’antibiotique à un réel effet sur la croissance reste très débattu, il n’y a pas vraiment de preuve scientifique pour l’instant. Mais il est certain qu’il va aider les animaux à survivre malgré de mauvaises conditions d’élevage.</p>
<p><strong>TC : Cet usage déviant est particulièrement problématique, car la grande majorité des molécules antibiotiques utilisées chez l’être humain et chez l’animal sont les mêmes…</strong></p>
<p><strong>JYM :</strong> Oui. On estime généralement qu’environ 80 % des antibiotiques sont communs aux médecines vétérinaire et humaine. Parmi ces antibiotiques communs figurent cependant des antibiotiques à large spectre d’intérêt pour l’être humain.</p>
<p>Les 20 % restant comprennent des antibiotiques restreints à l’usage humain dont on préserve ainsi l’efficacité à l’hôpital, comme les carbapénèmes, de puissants antibiotiques à large spectre, ou des antibiotiques qui ne sont plus utilisés en médecine humaine parce que l’on a trouvé mieux, mais qui continuent à être utilisé en médecine vétérinaire.</p>
<p><strong>TC : Le risque est donc que des bactéries résistantes émergent chez l’animal et se transmettent à l’être humain ?</strong></p>
<p><strong>JYM :</strong> Oui. Quelques cas ont été documentés. Au début des années 2000, par exemple, on a constaté aux Pays-Bas et au Danemark que des souches de staphylocoques dorés résistants aux antibiotiques, isolées à l’hôpital, provenaient en fait d’élevages de porc.</p>
<p>Des exemples de salmonelles à l’origine d’infections alimentaires et résistantes aux antibiotiques provenant elles-aussi d’élevages ont également été documentés. Le nombre de cas connus est cependant limité, probablement parce que l’on n’arrive pas à tous les retracer.</p>
<p>C’est d’ailleurs un problème : de nombreux pays, dont les États-Unis, qui utilisent encore les antibiotiques comme facteurs de croissance, demandent pour changer leurs pratiques à ce que l’on prouve que la diminution de l’emploi des antibiotiques en médecine vétérinaire peut faire baisser les antibiorésistances à l’hôpital. Or ce lien n’est pas évident à établir. Il n’a pas été mis en évidence en France, par exemple.</p>
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<p>Dans notre pays, l’exposition des animaux aux antibiotiques d’importance critique pour l’humain a été diminuée de 90 % au cours des dernières années. Or si l’on a vu une forte diminution des résistances à ces antibiotiques chez les animaux, cela ne s’est pas traduit par une diminution des résistances à l’hôpital. Toutefois, cela ne signifie pas que l’impact soit nul. Cela indique surtout que de nombreux facteurs sont à l’origine de l’émergence de résistances.</p>
<p>Ces quelques exemples connus démontrent cependant que lorsqu’on utilise des antibiotiques, on sélectionne forcément des résistances. Pour agir, il n’est pas nécessaire d’attendre d’avoir des preuves absolues et définitives pour chaque antibiotique…</p>
<p><strong>TC : La possibilité que des résistances émergent dans les élevages et se propagent est d’autant plus préoccupante que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) considère l’antibiorésistance comme une menace majeure pour la santé publique.</strong></p>
<p><strong>JYM :</strong> Oui. Selon un rapport britannique repris par l’OMS, à l’horizon 2050, l’antibiorésistance sera à l’origine de 10 millions de morts par an dans le monde, soit cinq fois plus qu’à l’heure actuelle. Il s’agit véritablement <a href="https://theconversation.com/resistance-aux-antibiotiques-comment-lutter-contre-la-pandemie-silencieuse-168008">d’une pandémie silencieuse</a>, qui aura des conséquences qui s’étendront bien au-delà du traitement des maladies infectieuses. Faire de la chirurgie pourrait devenir plus difficile, par exemple, puisque le risque de complications postopératoires suite à des infections pourrait augmenter.</p>
<p>Le problème est que développer de nouveaux antibiotiques est une tâche difficile, très onéreuse, de longue haleine, pour laquelle le retour sur investissement potentiel est très long. Mieux vaut donc préserver ceux dont on dispose.</p>
<p>Dans cette optique, l’OMS a reclassé les antibiotiques en trois catégories (<a href="https://www.who.int/southeastasia/news/opinion-editorials/detail/access-watch-reserve-how-a-key-policy-tool-can-accelerate-the-fight-against-antimicrobial-resistance"><em>access</em>, <em>watched</em> et <em>reserved</em></a>). Cette dernière catégorie concerne des antibiotiques qui ne devraient être utilisés qu’en médecine humaine.</p>
<p>Mais selon les pays et les continents, les usages des antibiotiques sont plus ou moins régulés. Si la réglementation européenne est très claire sur ce qu’il faut utiliser comme antibiotique, dans quelle indication, certains pays, comme le Brésil, cadrent moins les usages. On peut ainsi parfois trouver des antibiotiques de dernière génération dans l’alimentation des poulets…</p>
<p><strong>TC : Les scientifiques ont tiré la sonnette d’alarme depuis longtemps déjà pour alerter sur les conséquences de l’antibiorésistance. Comment expliquer que les décideurs politiques semblent tarder à réagir ?</strong></p>
<p><strong>Florent Parmentier :</strong> On peut effectivement se demander pourquoi une catastrophe sanitaire de cette ampleur ne figure pas sur l’agenda politique. Pour répondre à cette question, il faut comprendre comment un sujet, quel qu’il soit, devient un objet de préoccupation pour les responsables des politiques publiques.</p>
<p>L’analyse des dites politiques publiques nous apprend qu’une première étape importante est le processus de « mise en visibilité ». Clairement, dans le cas de l’antibiorésistance, il est difficile à mettre en œuvre, car il s’agit d’un phénomène qui se développe à bas bruit. Certes, la menace est déjà là, mais elle ne deviendra visible qu’à mesure que l’arsenal d’antibiotiques efficaces diminuera… Or, pour que la mise en visibilité fonctionne, il faut qu’un certain nombre d’acteurs prennent conscience des enjeux.</p>
<p>Les littératures de l’imaginaire (les <a href="https://www.futuribles.com/fr/article/la-fiction-speculative-par-virginie-tournay/">« fictions spéculatives » selon la politologue Virginie Tournay</a>) nous disent à quel point nous sous-estimons cette menace : si une vaste littérature a pour sujet le risque que représente pour l’humanité l’émergence d’un virus très pathogène, l’antibiorésistance n’apparaît guère que dans un seul ouvrage, <a href="https://tcrouzet.com/resistants/">Résistants</a>, de Thierry Crouzet…</p>
<p><strong>TC : Un autre problème est que les enjeux liés à l’antibiorésistance sont également géopolitiques…</strong></p>
<p><strong>FP :</strong> Effectivement. L’antibiorésistance est un enjeu de politique intérieure essentiel, qui pèse sur notre contrat social, autrement dit notre capacité à faire face à des risques collectifs, ou à des risques individuels de manière collective. Mais c’est aussi un enjeu de positionnement des puissances les unes par rapport aux autres.</p>
<p>La pandémie de Covid a rappelé que les questions de santé et la géopolitique sont fortement liées : disponibilité des masques, des vaccins, voire des substances qui entrent dans leur composition. Un vaccin, ce sont 200 substances qui sont agrégées. En fonction de qui les détient, la géopolitique joue un rôle.</p>
<p>Les questions géopolitiques influent aussi sur la lutte contre l’antibiorésistance. Il faut rappeler par exemple rappeler que la mauvaise utilisation des antibiotiques dans les élevages a commencé dans les pays industrialisés. Difficile aujourd’hui de reprocher aux pays du Sud de les employer de la même façon, alors qu’ils cherchent à augmenter leur production de viande pour faire face aux demandes de leurs populations.</p>
<p><strong>JYM :</strong> Le problème est que l’usage d’antibiotiques dans un pays peut entraîner des résistances dans un autre, si des animaux porteurs de bactéries résistantes sont ensuite exportés. C’est arrivé en Suède, par exemple. Dans ce pays, il n’existait pas de résistance aux antibiotiques de la famille des céphalosporines, critiques pour la santé humaine. Jusqu’au jour où les autorités en ont détecté dans 20 à 40 % des poulets élevés dans le pays. La raison : une importation de poussins depuis l’Angleterre, qui avait une pratique d’administration de ce type d’antibiotiques…</p>
<p><strong>TC : Quelles sont selon vous les mesures à mettre en œuvre pour limiter les risques, et parvenir à la « mise en visibilité » mentionnée précédemment ?</strong></p>
<p><strong>JYM :</strong> Il existe deux leviers principaux. Le premier est évidemment d’utiliser moins d’antibiotiques. De façon intéressante, la diminution drastique de l’usage de certains antibiotiques en France n’a pas été associée à une augmentation de la mortalité dans les élevages, ce qui signifie que beaucoup de ces usages étaient probablement superflus.</p>
<p>Le second levier est de travailler sur des alternatives non médicamenteuses. De gros progrès ont été faits sur la zootechnie, la biosécurité : éviter que les microbes n’entrent dans les élevages, construire des circuits isolés, propres, sains…</p>
<p>Dans les pays à faibles revenus, où le fardeau de l’antibiorésistance est très fort, comme en Asie du Sud-Est, en Inde ou en Chine, on n’arrivera pas à résoudre le problème si l’on ne traite pas en même temps les questions liées à l’élevage lui-même. Autrement dit, on ne pourra pas demander aux éleveurs d’arrêter les antibiotiques sans résoudre les problèmes de conduite d’élevage. Au contraire, c’est une fois que les pratiques d’élevages auront été transformées que l’utilisation d’antibiotiques diminuera.</p>
<p>Au plan politique, nous sommes à la croisée des chemins : le constat est qu’il faudrait définir les antibiotiques comme un bien commun, et à ce titre mettre en place une stratégie pour les préserver. Celle-ci ne devrait toutefois pas être centrée uniquement sur les besoins médicaux.</p>
<p>Il faudrait avoir une discussion intersectorielle sur la base du constat que l’antibiotique est important pour tout le monde : non seulement pour soigner les gens, mais aussi pour leur donner une sécurité alimentaire, ou encore maintenir le tissu industriel du médicament vétérinaire et ainsi s’assurer que ces médicaments continueront à être produits.</p>
<p><strong>FP :</strong> Si l’on veut faire de l’antibiotique un bien public mondial, le corollaire est qu’il faut établir une coalition internationale sur le sujet. Dans ce contexte, l’Union européenne peut devenir une puissance normative, selon le concept popularisé en France par <a href="https://www.cairn.info/la-norme-sans-la-force--9782724610888-page-63.htm">Zaki Laïdi</a>. Il faudrait pour cela que les dirigeants européens se mettent d’accord, comme ils ont pu le faire en matière climatique, dans les années 1990 : à cette époque, ils ont été capables de mettre à l’agenda mondial les problématiques de changement climatique, alors même que les États-Unis n’étaient pas mobilisés.</p>
<p>L’Europe a tout récemment fait figurer dans son règlement vétérinaire l’interdiction d’importer des denrées alimentaires issues d’animaux <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/LSU/?uri=CELEX:32019R0006">provenant de pays qui utilisent encore les antibiotiques comme facteurs de croissance</a>. En imposant des normes de ce type à son marché intérieur, et à ceux qui veulent y accéder, l’Europe peut encore peser.</p>
<p>Cependant, son poids dans la richesse mondiale tend à diminuer relativement au niveau mondial, ce qui veut dire que sa capacité à influer baisse également. Il faut donc qu’elle trouve d’autres acteurs avec lesquels travailler, particulièrement dans son voisinage.</p>
<p>Considérer les antibiotiques comme un bien commun signifie aussi de mettre en place des financements conséquents pour soutenir la recherche et inciter les industriels à s’intéresser à ce domaine, dont les retours sur investissement sont de long terme.</p>
<p><strong>JYM :</strong> Pour conclure, un point intéressant à souligner est que les consommateurs ont aussi un rôle important à jouer. Aux États-Unis, ce sont eux qui ont le plus fait bouger les choses. En souhaitant changer leur alimentation, ils ont fait pression sur les fast-foods, les industriels, qui ont modifié leurs comportements avant que ne se fasse sentir une quelconque pression politique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194799/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Utilisés en médecine humaine, les antibiotiques sont aussi administrés aux animaux d’élevage. Avec parfois des mésusages favorisant l’émergence de bactéries résistantes transmissibles à l’être humain.Jean-Yves Madec, Directeur Scientifique Antibiorésistance de l'ANSES, Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses)Florent Parmentier, Secrétaire général du CEVIPOF. Enseignant à Sciences Po. Chercheur-associé au Centre HEC Paris de Géopolitique, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1821842022-05-15T16:02:28Z2022-05-15T16:02:28ZEaux littorales : la contamination par les pesticides favorise-t-elle les bactéries résistantes aux antibiotiques ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/461751/original/file-20220506-14-gp2c6a.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4025%2C3024&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Table ostréicole, étang de Thau, Occitanie</span> <span class="attribution"><span class="source">Caroline Montagnani</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Quels impacts les produits phytopharmaceutiques ont-ils sur l’environnement et la biodiversité ? Pour tenter de répondre à cette question, un groupement d’experts menés par l’INRAE et l’Ifremer vient de publier un rapport dressant le bilan de l’ensemble des effets directs et indirects des produits phytopharmaceutiques sur la <a href="https://wwz.ifremer.fr/Espace-Presse/Communiques-de-presse/Impacts-des-produits-phytopharmaceutiques-sur-la-biodiversite-et-les-services-ecosystemiques-resultats-de-l-expertise-scientifique-collective-INRAE-Ifremer">biodiversité et les services écosystémiques en France</a>.</p>
<p>Basé sur 4000 rapports et articles parus dans la littérature scientifique au cours des 20 dernières années, ce bilan synthétise notamment les impacts de ces substances sur la biodiversité et révèle un manque de connaissance criant dès qu’il s’agit de biodiversité marine.</p>
<p>Au-delà des impacts confirmés par l’expertise collective sur la biodiversité, il en est un autre assez inattendu et encore mal compris : certains pesticides favorisent l’émergence de bactéries résistantes aux antibiotiques. Or, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) considère la résistance aux antibiotiques comme <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/antibiotic-resistance">« l’une des plus graves menaces pesant sur la santé mondiale, la sécurité alimentaire et le développement »</a>.</p>
<h2>Microbiotes et résistance aux antibiotiques</h2>
<p>Les écosystèmes sont peuplés d’une multitude de micro-organismes, les « microbiotes », parmi lesquels on retrouve les bactéries. Adaptées à différents types de conditions environnementales, les bactéries sont constituées de nombreuses espèces qui sont présentes partout, associées aux organismes vivants (dont l’humain). Généralement, les bactéries participent à la bonne santé de leur(s) hôte(s), mais dans certains cas, elles peuvent causer des maladies.</p>
<p>À cause de la menace qu’elle fait peser sur la médecine moderne, la prolifération dans l’environnement de <a href="https://theconversation.com/resistance-aux-antimicrobiens-la-pandemie-silencieuse-168008">bactéries résistantes aux antibiotiques</a> est un phénomène de plus en plus inquiétant.</p>
<p>L’usage abusif et/ou mal approprié des antibiotiques (agissant sur la sélection et l’échange de gènes de résistance avec les microbiotes environnementaux) est un déterminant majeur de la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0140673615004730?via%3Dihub">propagation des bactéries résistantes aux antibiotiques</a>.</p>
<h2>Les pesticides, sélectionneurs de bactéries résistantes aux antibiotiques</h2>
<p>Cette prolifération de bactéries résistantes aux antibiotiques dans l’environnement a d’abord été mise en évidence au niveau de <a href="https://academic.oup.com/femsec/article/92/5/fiw060/2470064">rejets de stations d’épuration</a>, ou dans des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0304389421021233?via%3Dihub">eaux souterraines</a> alimentées par des infiltrations d’eaux usées utilisées pour l’irrigation des cultures, ou encore sur des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S030438941730479X?via%3Dihub">sols agricoles traités avec du lisier de porcs</a>. Elle a également été documentée au niveau des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0025326X13001173">zones aquacoles littorales</a>.</p>
<p>Or, plusieurs études récentes ont révélé le <a href="https://iris.paho.org/handle/10665.2/52311">rôle des pesticides</a> dans le développement d’une résistance aux antibiotiques chez certaines communautés bactériennes naturelles de sols agricoles.</p>
<p>Le cuivre, en particulier, utilisé comme fongicide pour protéger les cultures (notamment de vigne) ou comme biocide antisalissure sur les coques de bateaux, s’avère être un puissant <a href="https://doi.org/10.3389/fmicb.2012.00399">sélectionneur de bactéries antibio-résistantes</a>. Il élimine certaines familles peu résistantes aux antibiotiques, au bénéfice d’autres familles plus tolérantes qui peuvent alors proliférer.</p>
<p>En outre, plusieurs herbicides testés dans leur formulation commerciale, parmi lesquels on retrouve le glyphosate, <a href="https://journals.asm.org/doi/10.1128/mBio.00009-15">activent des mécanismes cellulaires de résistance aux antibiotiques</a> chez des bactéries. Ces herbicides rendent alors les bactéries plus tolérantes aux antibiotiques qu’elles ne l’étaient avant l’exposition, et ce même à des doses inférieures aux doses recommandées d’application.</p>
<h2>Qu’en est-il dans les milieux marins ?</h2>
<p>Un autre résultat de l’ESCo est que le milieu marin littoral français est <a href="https://wwz.ifremer.fr/Espace-Presse/Communiques-de-presse/Pesticides-dans-les-lagunes-de-Mediterranee-un-nouvel-indicateur-permet-de-mieux-evaluer-le-risque-ecologique">contaminé de manière ubiquiste par les pesticides</a>. Ces substances sont ainsi présentes partout, sous forme de mélanges, généralement à faibles doses mais pouvant malgré tout constituer un risque pour les espèces vivantes.</p>
<p>En revanche, on sait encore peu de choses sur la présence d’antibiotiques dans les eaux littorales, et très peu également sur la présence de bactéries antibiorésistantes.</p>
<p>Pourtant, parmi les bactéries testées en laboratoire, certaines bactéries pathogènes pour les coquillages (bactéries <em>Vibrio sp.</em>) révèlent une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00248-015-0705-5">tolérance élevée aux antibiotiques</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/461753/original/file-20220506-12-4kpnq8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/461753/original/file-20220506-12-4kpnq8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/461753/original/file-20220506-12-4kpnq8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/461753/original/file-20220506-12-4kpnq8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/461753/original/file-20220506-12-4kpnq8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/461753/original/file-20220506-12-4kpnq8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/461753/original/file-20220506-12-4kpnq8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Échantillonage d’huîtres après imprégnation dans l’environnement (étang de Thau, Occitanie).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Caroline Montagnani</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>On sait aujourd’hui que la <a href="https://theconversation.com/huitres-et-algues-partenaires-pour-le-meilleur-et-pour-le-pire-dans-un-ocean-en-mutation-176322">richesse du microbiote interne des huîtres</a> est un facteur influençant <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-018-06659-3">leur santé</a>, comme chez l’humain.</p>
<p>Or, si la présence de pesticides et d’antibiotiques dans les eaux littorales modifie les communautés microbiennes de l’environnement, est-il possible que cela entraîne aussi un impact négatif sur la diversité du microbiote des coquillages ?</p>
<h2>Le cas des écosystèmes conchylicoles</h2>
<p>Ainsi, les écosystèmes marins conchylicoles pourraient être des sites particulièrement sensibles à la problématique de l’antibiorésistance à plusieurs niveaux.</p>
<p>D’abord parce que si certaines bactéries pathogènes et résistantes aux antibiotiques prolifèrent dans les écosystèmes marins, elles pourraient altérer la santé des espèces qui les habitent, et dans le cas des espèces d’élevage, conduire à des impasses thérapeutiques.</p>
<p>Ensuite, parce que les bactéries résistantes aux antibiotiques ainsi sélectionnées représentent également un risque pour la santé humaine. Pouvant être transmises dans la chaîne alimentaire, elles pourraient <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0740002016309704?via%3Dihub">contaminer l’humain</a> par l’ingestion d’aliments contaminés ou par contact direct avec les animaux.</p>
<p>Ceci est d’autant plus vrai pour la consommation de coquillages crus, qui représente une <a href="https://doi.org/10.36877/pmmb.a0000029">source connue d’infections d’origine alimentaire</a>, et est donc susceptible de véhiculer des gènes de résistances aux antibiotiques dans les microbiotes humains.</p>
<p>C’est pourquoi mieux comprendre le lien entre antibiorésistance et pollution chimique dans les écosystèmes marins conchylicoles est fondamental pour anticiper de futures crises écologiques et sanitaires.</p>
<p>C’est précisément l’objet des récents projets AntibioThau et <a href="http://www.waterjpi.eu/joint-calls/joint-call-2020-aquaticpollutants/aquaticpollutants-rdi-funded-projects-booklet/spare-sea">SPARE-SEA</a> auxquels nous participons.</p>
<p>Pour cela, des expérimentations mêlant analyses chimiques, microbiologiques, génétiques, et écologiques sont actuellement menées par les laboratoires de l’Ifremer et de ses organismes partenaires en France (CNRS, Univ. Montpellier, UPVD, UBO) et à l’étranger (AWI, CNR, IRTA, UNIGE) sur quatre sites conchylicoles européens, dont deux en France (rade de Brest et étang de Thau), un en Allemagne et un en Espagne.</p>
<h2>One Health</h2>
<p>Cette rétroaction possible de la biodiversité microbienne sur l’humain à la suite de la contamination des zones côtières par des pesticides et antibiotiques illustre parfaitement le concept <a href="https://theconversation.com/le-concept-one-health-doit-simposer-pour-permettre-lanticipation-des-pandemies-139549">« One Health »</a> (« Une seule santé »), c’est-à-dire l’imbrication complexe et forte qui existe entre la <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fvets.2018.00014/full">santé de l’environnement, celle des organismes vivants (dont les microbiotes), et celle de l’être humain</a>.</p>
<p>Ainsi, limiter les usages de produits chimiques est essentiel pour préserver la biodiversité au sens large, mais également nous préserver nous-mêmes.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a également été co-écrit avec Julie Danet (Ifremer) et Wilfried Sanchez (Ifremer).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182184/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dominique Munaron a reçu des financements de l'Agence de l'Eau Rhône Méditerranée et Corse, et du programme Européen JPI Aquatic Pollutant</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Caroline Montagnani a reçu des financements de Ifremer, EU program JPI Aquatic Pollutants</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Delphine Destoumieux-Garzon a reçu des financements du programme européen SPARE-SEA</span></em></p>La contamination des eaux littorales par des antibiotiques et des pesticides pourrait conduire au développement de bactéries résistantes aux antibiotiques dans les populations de coquillages.Dominique Munaron, Chercheur en Océanologie Chimique et Environnement, IfremerCaroline Montagnani, Chercheuse Interactions Hôtes Pathogènes Environnements, IfremerDelphine Destoumieux-Garzon, Directrice de Recherche CNRS, Interactions Hôtes-Pathogènes-Environnements, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1680082021-11-18T21:32:34Z2021-11-18T21:32:34ZRésistance aux antibiotiques : comment lutter contre la « pandémie silencieuse »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/432698/original/file-20211118-14-1mdp485.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=62%2C53%2C5928%2C3529&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Micrographie électronique de bactéries responsables de la peste bubonique (Yersina pestis, en jaune, fausses couleurs) proliférant dans le tube digestif d’un rat.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://images.nigms.nih.gov/pages/DetailPage.aspx?imageid2=3576">B. Joseph Hinnebusch, Elizabeth Fischer and Austin Athman, National Institute of Allergy and Infectious Diseases, National Institutes of Health</a></span></figcaption></figure><p>S’il y a une chose que la pandémie de Covid-19 nous a apprise, c’est que les virus ne connaissent pas les frontières… Ni aucun microbe, d’ailleurs : avec plus de 30 millions de vols d’avion par an, soit plus de 80 000 par jour, les déplacements de l’être humain et le transport de marchandises sont autant de moyens de dissémination des bactéries, champignons, parasites et autres virus – y compris de ceux qui provoquent des maladies.</p>
<hr>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/virus-bacterie-parasite-connaissez-vos-microbes-sur-le-bout-des-doigts-57157">Virus, bactérie, parasite ? Connaissez vos microbes sur le bout des doigts !</a>
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<p>Si soigner les infections virales n’est pas facile, car il n’existe pas de traitement universel, les choses sont différentes en ce qui concerne les bactéries. Nous disposons en effet, depuis les années 1940, de traitements accessibles et souvent efficaces contre la grande majorité d’entre elles : les antibiotiques, des substances d’origine naturelle, semi-synthétiques ou synthétiques. Malheureusement, aujourd’hui on craint que cette efficacité ne soit bientôt reléguée au rang de beau souvenir.</p>
<p>En effet, l’utilisation excessive et non adaptée des antibiotiques, conjuguée aux formidables capacités évolutives des bactéries, a mené au développement de souches résistantes à ces médicaments. Plus grave, cette « antibiorésistance » se répand, car les bactéries sont capables de s’échanger les gènes qui leur permettent de se débarrasser des antibiotiques. Et ce, même quand elles appartiennent à des espèces différentes !</p>
<p>En 2002, les pouvoirs publics et la Caisse nationale d’assurance maladie tentaient de sensibiliser les Français à la gravité de la situation. Si le slogan martelé alors (« Les antibiotiques, c’est pas automatique ») est entré dans toutes les têtes, les choses ne se sont pas améliorées pour autant, bien au contraire. Au point qu’en 2018 le ministère de la Santé proposait un nouveau slogan : « Les antibiotiques sont précieux, utilisons-les mieux ». Aujourd’hui, l’Organisation mondiale de la santé elle-même tire la sonnette d’alarme, appelant les chercheurs du monde entier à engager des recherches pour améliorer les traitements existants et, surtout, en mettre au point de nouveaux.</p>
<p>Deux décennies après les premiers cris d’alarme, où en est-on vraiment ? Quelles sont les stratégies mises en place pour lutter contre l’antibiorésistance ?</p>
<h2>Près d’un siècle de succès</h2>
<p>En 1928, Alexander Flemming découvre par hasard la pénicilline. Mais ce n’est que dans les années 1940, par le travail d’Howard Walter Florey et Ernst Boris Chain, que sa production industrielle sera mise en place. Et changera le cours de l’histoire : <a href="https://www.kingsfund.org.uk/reports/thenhsif/what-if-antibiotics-stopped-working/">Ces médicaments « miracles » ont ainsi ajouté en moyenne 20 ans à l’espérance de vie à travers le monde</a>. Suivront 20 années de découvertes sensationnelles durant lesquelles la majorité des antibiotiques encore utilisés aujourd’hui sont découverts.</p>
<p>Le problème est que les bactéries s’adaptent et développent des <a href="https://theconversation.com/la-folle-course-aux-armements-des-bacteries-contre-les-antibiotiques-97304">mécanismes de résistance</a> contre chaque nouvel antibiotique découvert et utilisé. Les antibiotiques agissent au niveau de divers composants de la cellule bactérienne : la membrane, l’ADN, etc. Malheureusement, il arrive que certaines bactéries acquièrent une résistance à ces molécules. Diverses mutations peuvent par exemple leur permettre d’acquérir la capacité de détruire un antibiotique donné, de le rejeter dans le milieu extérieur, ou encore modifier sa cible initiale pour le rendre inopérant.</p>
<p>Au fil des années, la multiplication de ces stratégies de défense a résulté en un nombre croissant de bactéries résistantes, voire multirésistantes à des traitements jusque-là efficaces – entraînant chaque jour plus de décès.</p>
<p>Dans un premier temps, le grand nombre de molécules découvertes a permis de pallier ce problème. Mais dans le courant des années 1970, les travaux académiques se sont peu à peu détournés de la recherche de nouveaux antibiotiques. Les chimistes travaillant pour l’industrie pharmaceutique continueront à produire de nouvelles générations d’antibiotiques, en modifiant des antibiotiques connus, afin de cibler les bactéries résistantes.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/la-genomique-reine-du-big-data-84155">L’avènement de l’ère de la génomique</a>, la science des génomes, qui a pour objet l’étude de l’ADN notamment, a soulevé de grands espoirs. Malheureusement, malgré les efforts et investissements des grands laboratoires pharmaceutiques, aucun nouveau traitement efficace n’émergera. À leur tour, les grands groupes pharmaceutiques désertent ce domaine de recherche… Les départs successifs des chercheurs académiciens et de l’industrie se traduiront par 30 années blanches en termes de développement thérapeutique.</p>
<p>Conséquence : aujourd’hui, la menace d’une impasse thérapeutique, dans laquelle les bactéries finiraient par résister à tous les antibiotiques connus, n’est plus une vue de l’esprit…</p>
<h2>Les freins au développement de nouvelles stratégies anti-infectieuses</h2>
<p>À la fin des années 2000, les principaux freins au développement de nouveaux antibiotiques sont bien identifiés : outre le fait que la mise au point de nouvelles molécules représente un défi scientifique compliqué, les exigences réglementaires, coûteuses, rebutent les investisseurs, et ce d’autant plus que le marché est défaillant.</p>
<p>Publications, rapports d’experts et journalistes exhortent à cette période les pouvoirs publics et les grandes institutions à inscrire la crise de la résistance aux antimicrobiens en haut de leurs agendas. À force de persuasion, le sujet finit enfin par s’imposer comme une préoccupation mondiale. En 2016, l’<a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/antibiotic-resistance">Assemblée des Nations-Unies</a>, se penche sur la question de l’antibiorésistance. Une victoire, car c’est seulement la quatrième fois depuis sa création que cette organisation se consacre à un thème relevant de la santé !</p>
<p>Des discussions et propositions sont faites afin d’établir des <a href="https://www.fda.gov/media/78504/download">exigences réglementaires</a> éthiquement et scientifiquement plus adaptées. Des modèles pionniers de financement (<a href="https://www.folkhalsomyndigheten.se/the-public-health-agency-of-sweden/communicable-disease-control/antibiotics-and-antimicrobial-resistance/availability-of-antibiotics/">suédois</a> ou <a href="https://www.gov.uk/government/news/world-first-scheme-underway-to-tackle-amr-and-protect-uk-patients">anglais</a>) sont proposés pour dynamiser ce marché défaillant et attirer à nouveau les grandes compagnies dans la course à l’armement contre les bactéries.</p>
<p>Signe que la mesure du problème a été prise, en septembre 2021, le rapport des ministres de la Santé du G20 affirme clairement le besoin de continuer à innover dans le domaine. Si tout n’est pas réglé, de grandes avancées ont été obtenues cette dernière décennie pour pallier deux des freins majeurs de la lutte contre l’antibiorésistance. Mais si les freins administratifs et financiers se sont desserrés, les défis scientifiques restent encore à relever.</p>
<p>Comment mettre au point de nouveaux antimicrobiens ? Peut-être en explorant d’autres pistes que les antibiotiques <em>stricto sensu</em>…</p>
<h2>L’innovation comme espoir</h2>
<p>Il existe des alternatives aux antibiotiques. Parmi les pistes explorées, citons par exemple la phagothérapie, qui consiste à utiliser un ennemi naturel des bactéries pour les tuer, en l’occurrence les phages, des virus qui les infectent. La vaccination, ou le recours à des anticorps monoclonaux, constituent d’autres approches possibles. Ces traitements permettent de cibler un pathogène en particulier, ce qui, contrairement aux antibiotiques à large spectre, limite l’impact sur le microbiote de l’hôte et le risque d’émergence d’une résistance généralisée.</p>
<p>Mais les antibiotiques eux-mêmes n’ont sans doute pas dit leur dernier mot.</p>
<p>En sondant des environnements encore non étudiés, où pourraient vivre des organismes produisant des molécules inédites, on peut espérer découvrir de nouvelles classes d’antibiotiques. La plupart des antibiotiques sont en effet issus de molécules naturellement produites par d’autres microorganismes. Or on estime qu’à peine 1 % des microorganismes sont cultivables en laboratoire… c’est dire qu’on les connaît mal, sinon pas !</p>
<p>Pour accéder à la partie immergée de cet iceberg microbien, les chercheurs disposent depuis quelques années de nouvelles technologies, comme la <a href="https://theconversation.com/metagenomique-interactomique-proteomique-lipidomique-quest-ce-que-cest-84013">métagénomique</a>, qui permet d’analyser l’ensemble des génomes des organismes vivant dans des environnements donnés, ou <a href="https://www.statnews.com/2015/12/03/antibiotics-bacteria-research/">l’isolation chip</a> (iChip, « puce d’isolement »), un dispositif qui permet d’isoler des bactéries grâce à des membranes perméables puis de les replacer dans le milieu dont elles proviennent – le sol par exemple, afin qu’elles continuent à pousser dans les conditions qui leur conviennent.</p>
<iframe src="https://embed.acast.com/614c47bce7e75c00112afb98/6152c8017a432800131fe721" frameborder="0" width="100%" height="190px"></iframe>
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<p>Une autre stratégie est de contourner les stratégies de résistances des bactéries pour les rendre à nouveau vulnérables à des antibiotiques actuellement dépassés. La première étape est de trouver ce qui, chez une bactérie, lui donne sa résistance ; la deuxième est de les contrer. L’informatique permet aujourd’hui de parcourir les bases de données regroupant les médicaments existants, à la recherche d’un composé visant les cibles identifiées chez les bactéries. Ce composé, administré en complément de l’antibiotique, permettra le succès de celui-ci. L’Augmentin®, constitué d’Amoxicilline et d’acide clavulanique, est un exemple du succès de cette approche.</p>
<p>Le <a href="https://theconversation.com/soigner-la-maladie-dalzheimer-en-reutilisant-dautres-medicaments-163539">repositionnement de médicament</a> ou la réévaluation de composés dont le développement a été arrêté sont aussi explorés. De nombreux composés abandonnés pourraient en effet susciter un regain d’intérêt grâce à l’évolution des méthodes de synthèse, par exemple. La daptomycine est un bon exemple : découvert au début des années 1980 dans une bactérie du sol et abandonné pendant 20 ans, il n’a été commercialisé qu’au début des années 2000, comme antibiotique de dernier recours contre les infections au staphylocoque doré. Il est devenu l’antibiotique intraveineux le plus rentable aux États-Unis…</p>
<p>Enfin, une autre piste est d’administrer des composés qui empêcheront le caractère pathogène de la bactérie (autrement dit, sa virulence) de s’exprimer. On parle alors d’« antivirulents ». Plutôt que d’éliminer la bactérie qui risque de causer une infection, cette approche privilégie la restauration d’un équilibre microbiote-hôte afin de moduler sa pathogénicité. Étant donné que les antivirulents exercent une faible pression de sélection naturelle, on espère que l’apparition de résistance à leur encontre sera limitée. Les premiers traitements liés à cette stratégie sont aujourd’hui en phase d’essai clinique.</p>
<p>Notre équipe de recherche s’appuie sur ces stratégies pour tenter de mettre au point de nouvelles solutions thérapeutiques, et ainsi contribuer à la lutte contre l’antibiorésistance. Une priorité, car les conséquences de cette pandémie silencieuse se feront sentir sur toute la planète : en 2016, la Banque mondiale avertissait que d’ici à 2050, la résistance aux antimicrobiens pourrait faire basculer 28,3 millions de personnes supplémentaires dans l’extrême pauvreté et avoir sur le PIB mondial les mêmes effets que la crise de 2008, tandis que l’OMS estimait que sur la même période, elle pourrait entraîner <a href="https://www.who.int/antimicrobial-resistance/interagency-coordination-group/IACG_final_report_FR.pdf">2,4 millions de morts rien que dans les pays à haut revenu</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/168008/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La découverte des antibiotiques puis leur production industrielle a révolutionné la lutte contre les maladies bactériennes. Malheureusement, 80 plus tard, les résistances se multiplient…Florie Desriac, Maître de Conférences en Microbiologie, Université de Caen NormandieEliette Riboulet-Bisson, Maître de Conférences en Microbiologie, Université de Caen NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1685232021-10-07T18:16:49Z2021-10-07T18:16:49ZParoles de chercheurs : Transformer la frustration en quelque chose de positif<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/423164/original/file-20210924-46597-1y6xfz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=80%2C8%2C5910%2C3979&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Rendre visible l'invisible procure une émotion toute particulière, entre magie et émerveillement.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/silhouettes-people-observing-stars-night-sky-586441904">vchal, Shutterstock</a></span></figcaption></figure><iframe src="https://embed.acast.com/614c47bce7e75c00112afb98/6152c8017a432800131fe721" frameborder="0" width="100%" height="190px"></iframe>
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<p><em>Une série de podcasts pour transmettre l’émotion de la découverte scientifique.</em></p>
<p><em>Rencontrez des scientifiques qui vous racontent l’émotion de la découverte, la passion de la recherche et comment elle se pratique au quotidien. Moments en solo, travail en équipe, implication d’une communauté internationale, pratiquer la démarche scientifique est plein de rebondissements, de surprises et de doutes.</em></p>
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<p>Éliette Riboulet-Bisson et Florie Desriac sont enseignantes-chercheuses à l’Université de Caen Normandie et étudient les bactéries pour combattre leur résistance aux antibiotiques.</p>
<p>Elles nous parlent à deux voix d’une vie de laboratoire riche en émotions : de la déception et la frustration – que l’on rencontre très tôt dans une carrière de chercheur, à l’émotion de la découverte et la capacité à transformer la frustration en quelque chose de positif – que l’on acquiert avec le temps.</p>
<p>Pour elles, rendre visible l’invisible (l’ADN par exemple) procure des émotions toutes particulières, entre le côté magique d’un objet qui se révèle alors que l’on ne soupçonnait pas l’instant d’avant et émerveillement devant des objets biologiques magnifiques.</p>
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<p><em>Crédits : Une production Making Noise par Making Waves et The Conversation France. Conception, Elsa Couderc, Françoise Marmouyet et Fabrice Rousselot. Direction artistique, Alexandre Plank. Coordination, Hervé Marchon. Production et réalisation, Pauline Josse. Mixage, Martin Delafosse. Musique, Emma Esdourrubailh. Lecture de texte, Hervé Marchon</em></p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=222&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/418707/original/file-20210831-15-1io1ckg.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=279&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science, qui a lieu du 1<sup>er</sup> au 11 octobre 2021 en métropole et du 5 au 22 novembre 2021 en outre-mer et à l’international, et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Eureka ! L’émotion de la découverte ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/168523/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Un podcast pour transmettre l’émotion de la découverte scientifique. Dans cet épisode, découvrez les évolutions des émotions des chercheurs avec Éliette Riboulet-Bisson et Florie Desriac.Eliette Riboulet-Bisson, Maître de Conférences en Microbiologie, Université de Caen NormandieFlorie Desriac, Maître de Conférences en Microbiologie, Université de Caen NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1535572021-01-26T20:36:23Z2021-01-26T20:36:23ZInfections bactériennes incurables : un nouvel espoir venu des arbres ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/380727/original/file-20210126-15-15m6mco.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C0%2C2038%2C1532&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Contre les bactéries, la solution pourrait venir des merisiers.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Merisier_en_fleurs.jpg">Amalo / Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Dans un contexte sanitaire particulier et inquiétant, les virus ne sont pas les seuls microorganismes qui peuvent représenter une menace sérieuse. Les bactéries (et les champignons dans une moindre mesure) sont responsables de très nombreuses infections, en particulier dans les établissements de santé où un <a href="https://www.ecdc.europa.eu/en/healthcare-associated-infections-acute-care-hospitals/surveillance-disease-data/report">patient sur vingt contracte une infection nosocomiale</a>.</p>
<p>Bien que la plupart de ces infections puissent être traitées aujourd’hui, cela pourrait ne plus être le cas dans un futur relativement proche. En effet, les pathogènes acquièrent progressivement et inéluctablement des résistances aux antibiotiques qu’on leur oppose. Le mauvais usage des antibiotiques (surutilisation, mauvaise posologie…) sélectionne les bactéries les plus résistantes qui vont donc pouvoir survivre puis transmettre leurs gènes de résistance à leurs congénères. </p>
<p>Les résistances aux antibiotiques peuvent donc s’accumuler chez certaines espèces bactériennes, et des bactéries multirésistantes émergent déjà depuis de nombreuses années. Désormais, le risque de voir se développer des bactéries panrésistantes (c’est-à-dire résistantes à tous les antibiotiques connus) provoquant des infections incurables est une épée de Damoclès qui menace la santé humaine. Si un tel scénario se produisait, ces infections bactériennes pourraient redevenir la <a href="https://www.oecd.org/fr/france/Enrayer-l-antibior%C3%A9sistance-en-France.pdf">première cause de mortalité d’ici 2050</a>.</p>
<h2>L’ennemi dans l’ombre : le biofilm</h2>
<p>À ce phénomène de résistance s’ajoute un autre mécanisme développé par les bactéries. Lorsque celles-ci subissent un stress, la plupart des bactéries modifient leur comportement en venant adhérer à une surface. Elles vont ensuite produire une matrice, un ensemble de polymères qui va se consolider et protéger les bactéries des attaques extérieures.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/380721/original/file-20210126-13-nomy6a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/380721/original/file-20210126-13-nomy6a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/380721/original/file-20210126-13-nomy6a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/380721/original/file-20210126-13-nomy6a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/380721/original/file-20210126-13-nomy6a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/380721/original/file-20210126-13-nomy6a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/380721/original/file-20210126-13-nomy6a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/380721/original/file-20210126-13-nomy6a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Biofilm de <em>Staphylococcus aureus</em> observé en microscopie électronique à balayage.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marius Colin</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cet ensemble de bactéries adhérées et de matrice constitue ce que l’on appelle un biofilm. Bien qu’ils existent dans de nombreux écosystèmes, les biofilms attirent particulièrement l’attention au niveau médical, car leur implication dans les infections était fortement sous-estimée jusqu’à récemment.</p>
<p>La fameuse plaque dentaire est probablement l’exemple le plus imagé de biofilm se formant sur nos propres tissus, et celle-ci reste sans danger tant qu’elle est sous contrôle. En revanche, des biofilms surviennent fréquemment dans des infections osseuses en s’accrochant sur la surface de l’os ou des prothèses (de hanches, de genoux…), mais aussi dans des infections pulmonaires notamment chez les patients atteints de mucoviscidose, ou encore dans des infections cardiaques.</p>
<p>Sous forme de biofilm, les bactéries sont mieux protégées des attaques du système immunitaire, mais aussi de l’action des antibiotiques. En effet, de nombreuses bactéries dans le biofilm se trouvent dans un état métabolique ralenti (voire arrêté) et les antibiotiques sont efficaces contre les bactéries actives, donc les bactéries les « esquivent ». Les traitements antibiotiques se révèlent alors inefficaces, voire pire, ils peuvent stresser les bactéries (au lieu de les tuer) et celles-ci vont produire davantage de biofilm. Le seul recours possible est alors de réaliser un retrait de la prothèse et/ou une ablation des tissus colonisés par le biofilm. Le défi médical actuel est donc de mettre au point des solutions antibiofilms et notamment des méthodes de prévention de la formation de biofilms.</p>
<p>Alors, où chercher ces nouvelles molécules ? Plusieurs possibilités existent, car des molécules antimicrobiennes peuvent être d’origine synthétique, biologique ou hybride. Parmi les ressources biologiques envisageables, l’une d’entre elles attire particulièrement l’attention : les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27352384/">écorces d’arbres</a>.</p>
<p>Tout d’abord, l’écorce représente la première ligne de défense physique, mais aussi chimique, de l’arbre contre les pathogènes, et il est donc possible d’envisager que des molécules antimicrobiennes soient présentes dans les écorces de certaines essences forestières. Ensuite, les écorces ne sont quasiment pas exploitées par l’industrie forestière et sont, au mieux, utilisées en tant que combustible, quand elles ne sont pas simplement considérées comme des déchets et éliminées. Elles représentent donc des produits valorisables et non polluants qui peuvent être récupérés en quantités importantes.</p>
<h2>Des écorces d’arbres contre les microbes</h2>
<p>C’est dans cette optique de revalorisation que les laboratoires <a href="https://bios-reims.fr/">Biomatériaux et inflammation en site osseux</a> (BIOS) et <a href="https://www.univ-reims.fr/icmr/">Institut de chimie moléculaire de Reims</a> (ICMR) de l’Université de Reims Champagne-Ardenne se sont associés pour étudier un panel de 10 espèces d’arbres caractéristiques du nord-est de la France : le hêtre commun, le chêne pédonculé, l’aulne glutineux, le merisier, l’érable sycomore, le frêne commun, le peuplier du Canada (Robusta), le mélèze d’Europe, l’épicéa commun et le peuplier tremble.</p>
<p>Pour chaque essence d’arbre, l’écorce a été utilisée pour produire une poudre ou « extrait » grâce à diverses méthodes chimiques et chaque extrait a été testé sur un ensemble de microorganismes, parmi lesquels des bactéries et des champignons microscopiques. Pour cela, une culture du microorganisme est mélangée à l’extrait en différentes concentrations puis, après 24 heures d’incubation, la croissance des microorganismes est évaluée. Ainsi, il a été observé que, pour trois des dix extraits, la <a href="https://www.mdpi.com/2079-6382/9/3/111">croissance de la plupart des microorganismes était inhibée</a>. Il s’agissait du chêne pédonculé (<em>Quercus robur</em>), de l’aulne glutineux (<em>Alnus glutinosa</em>) et du merisier (<em>Prunus avium</em>).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/380724/original/file-20210126-23-1lbe0e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/380724/original/file-20210126-23-1lbe0e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/380724/original/file-20210126-23-1lbe0e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/380724/original/file-20210126-23-1lbe0e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/380724/original/file-20210126-23-1lbe0e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/380724/original/file-20210126-23-1lbe0e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/380724/original/file-20210126-23-1lbe0e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les extraits se présentent sous la forme de poudres qui sont ensuite mises en solution.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marius Colin</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>La suite de l’étude s’est focalisée sur ces trois espèces les plus prometteuses, en visant à évaluer la nature de l’effet antimicrobien des extraits. En d’autres termes : les extraits d’écorces inhibent-ils simplement la croissance des microorganismes (on parlera alors d’effet bactériostatique pour les bactéries ou fongistatique pour les champignons) ou vont-ils jusqu’à détruire ces microorganismes (on parlera alors d’effet bactéricide ou fongicide) ?</p>
<p>Les tests effectués ont montré que les trois extraits présentaient effectivement des activités bactéricides et fongicides sur certains microorganismes. L’extrait qui s’est alors avéré le plus intéressant est celui provenant du merisier, car il présentait une activité létale sur neuf des souches de microorganismes testés. En particulier, l’extrait de merisier a montré une action bactéricide sur des pathogènes appartenant aux genres Enterococcus (infections urinaires, endocardites…) et Listeria (listériose), mais aussi, et surtout sur les souches de <em>Staphylococcus aureus</em>, le tristement célèbre staphylocoque doré responsable de plus de 14 % des infections nosocomiales. L’effet antibactérien du merisier a été observé même pour des concentrations relativement faibles en extrait.</p>
<h2>Des molécules naturelles empêchant la formation de biofilm</h2>
<p>Toutefois, le problème des agents antibactériens provient de leurs effets délétères lorsqu’ils ne sont pas utilisés correctement, notamment en conduisant à la formation de biofilm. Il est donc apparu essentiel de vérifier si l’extrait de merisier, à des doses faibles, ne favorisait pas la formation de biofilm par les staphylocoques dorés. Pour cela, des cultures de staphylocoques dorés ont été mélangées à l’extrait puis la quantité de biofilm formée sur des parois en plastique a été analysée. Il a ainsi été constaté que, même à des concentrations faibles, l’extrait de merisier n’entraînait pas l’apparition de biofilm, mais que, au contraire, elle permettait de prévenir sensiblement sa formation.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/380726/original/file-20210126-19-2sn7g5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/380726/original/file-20210126-19-2sn7g5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1067&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/380726/original/file-20210126-19-2sn7g5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1067&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/380726/original/file-20210126-19-2sn7g5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1067&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/380726/original/file-20210126-19-2sn7g5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1341&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/380726/original/file-20210126-19-2sn7g5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1341&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/380726/original/file-20210126-19-2sn7g5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1341&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les biofilms formés sur le plastique sont colorés en violet. Lorsque les bactéries sont en présence de l’extrait d’écorce, la coloration violette est moins importante.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marius Colin</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Forts de ces résultats engageants, les investigations se sont ensuite centrées sur l’identification de la molécule à l’origine de ces effets antibactérien et antibiofilm. Des analyses par résonance magnétique nucléaire ont permis d’identifier une quinzaine de molécules présentes dans l’extrait de merisier, et l’extrait a ensuite été décomposé en fractions contenant les diverses molécules. Des essais supplémentaires ont montré que les fractions présentant les effets antibactérien et antibiofilm les plus marqués étaient celles contenant une espèce chimique bien particulière : la dihydrowogonine, une molécule appartenant à la classe des flavonoïdes, un groupe de molécules connu pour ses effets antimicrobiens.</p>
<p>La découverte de nouvelles molécules d’intérêt est un atout indispensable à une époque où les infections sont de plus en plus complexes à traiter. L’origine végétale et renouvelable de la dihydrowogonine est un argument supplémentaire qui encourage la recherche autour ces ressources, d’autres essences d’arbres abritant potentiellement des molécules efficaces dont le rôle à jouer dans la lutte contre les pathogènes multirésistants pourrait s’avérer crucial dans les années à venir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153557/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marius Colin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des bactéries résistantes à tous nos antibiotiques existent, il est donc crucial de chercher de nouvelles pistes de traitement.Marius Colin, Docteur et Maître de Conférences en Microbiologie, Université de Reims Champagne-Ardenne (URCA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1534322021-01-17T17:31:58Z2021-01-17T17:31:58ZPourquoi la résistance aux vaccins est-elle plus rare que la résistance aux antibiotiques ?<p>La résistance aux antibiotiques est un problème mondial dans la mesure où il existe un risque grave que les infections courantes <a href="https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/antibiotic-resistance">ne puissent bientôt plus être soignées</a>.</p>
<p>Les bactéries se sont en effet avérées capables de devenir résistantes à <a href="https://www.gov.uk/government/publications/health-matters-antimicrobial-resistance/health-matters-antimicrobial-resistance">tous les antibiotiques jamais mis au point</a>, parfois, très peu de temps après leur introduction. Il a ainsi fallu <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5369031/">seulement six ans</a> pour que la résistance à la pénicilline, le premier antibiotique identifié, se répande dans les hôpitaux britanniques.</p>
<p>De leur côté, les vaccins, qui nous ont aidés à éradiquer la variole et qui, espérons-le, viendront bientôt aussi à bout de la polio, ne font que <a href="https://www.pnas.org/content/115/51/12878">rarement l’objet de résistance</a>. Mis au point <a href="https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/816174/Vaccine_Timeline_2019.pdf">il y a près d’un siècle</a>, ils continuent à être capables de nous protéger contre de nombreuses maladies mortelles. Comment s’explique cette différence ?</p>
<p>Une étude a proposé <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rspb.2016.2562">deux arguments convaincants pour expliquer ce phénomène</a>, en mettant en évidence les différences cruciales qui existent entre les mécanismes d’action des médicaments et des vaccins.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/379152/original/file-20210117-17-o0d27h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/379152/original/file-20210117-17-o0d27h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379152/original/file-20210117-17-o0d27h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=439&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379152/original/file-20210117-17-o0d27h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=439&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379152/original/file-20210117-17-o0d27h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=439&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379152/original/file-20210117-17-o0d27h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=552&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379152/original/file-20210117-17-o0d27h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=552&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379152/original/file-20210117-17-o0d27h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=552&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Délai entre le début du développement d’un antibiotique/vaccin et la première détection de la résistance.</span>
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<p>Commençons par préciser ce que nous entendons par résistance, et comment elle prend naissance. Lors d’une infection, les virus et les bactéries se multiplient rapidement. Au cours de ce processus, ils copient leur matériel génétique des millions de fois. Ce faisant, des erreurs se produisent souvent, chaque erreur altérant légèrement leur génome. Ces erreurs sont appelées des mutations.</p>
<p>Le plus souvent, les mutations n’ont que peu ou pas d’effet ou sont très préjudiciables à l’efficacité du pathogène, entraînant un désavantage qui l’empêche de se propager. Mais parfois – très rarement – les agents pathogènes peuvent avoir de la chance : une mutation peut par exemple empêcher un antibiotique de pénétrer dans une cellule, ou modifier l’endroit où un médicament ou un anticorps se lierait, les empêchant ainsi d’agir. Nous appelons ces mutations des mutations « de résistance » ou « d’échappement ».</p>
<h2>Première différence : le nombre de cibles</h2>
<p>Les vaccins fonctionnent en <a href="https://www.who.int/news-room/feature-stories/detail/how-do-vaccines-work">introduisant une partie inoffensive d’un agent pathogène</a>, appelée antigène, dans notre corps, ce qui amène notre système immunitaire à produire des anticorps, des protéines en forme de Y capable de se lier spécifiquement auxdits antigènes. Les vaccins stimulent également la production de globules blancs spécifiques appelés lymphocytes T, qui peuvent détruire les cellules infectées et aider à produire des anticorps.</p>
<p>En se liant aux antigènes, les anticorps peuvent aider à détruire les agents pathogènes ou à les empêcher de pénétrer dans les cellules. En outre, notre système immunitaire ne fabrique pas une seule sorte d’anticorps, mais jusqu’à des centaines d’anticorps différents chacun ciblant différentes parties de l’antigène (aussi appelées « épitopes »).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-notre-corps-se-defend-il-contre-les-envahisseurs-143072">Comment notre corps se défend-il contre les envahisseurs ?</a>
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<p>En comparaison, les médicaments, tels que les antibiotiques ou les antiviraux, sont généralement de petites molécules qui inhibent une enzyme ou une protéine spécifique, sans laquelle un agent pathogène ne peut survivre ou se répliquer. Par conséquent, la mutation d’un seul site suffit généralement pour que la résistance à un médicament se développe. À l’inverse, dans le cas de la plupart des vaccins, il est très peu probable que des mutations d’échappement concernant tous les épitopes ciblés par les nombreux anticorps que produit notre organisme (ou même une grande partie d’entre eux) – même si ce n’est théoriquement pas impossible. On peut voir les anticorps produits par notre organisme <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rspb.2016.2562">comme un très complexe cocktail thérapeutique</a> constitué de centaines de médicaments différant légèrement les uns des autres, ce qui réduit la probabilité d’apparition d’une résistance.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/379153/original/file-20210117-13-1jpheau.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Graphique montrant qu’alors que les antibiotiques n’ont généralement qu’une seule cible, les vaccins induisent la production de multiples anticorps se liant à diverses parties d’un antigène, rendant ainsi l’évolution de résistances plus difficile" src="https://images.theconversation.com/files/379153/original/file-20210117-13-1jpheau.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379153/original/file-20210117-13-1jpheau.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=531&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379153/original/file-20210117-13-1jpheau.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=531&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379153/original/file-20210117-13-1jpheau.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=531&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379153/original/file-20210117-13-1jpheau.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=667&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379153/original/file-20210117-13-1jpheau.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=667&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379153/original/file-20210117-13-1jpheau.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=667&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Alors que les antibiotiques n’ont généralement qu’une seule cible, les vaccins induisent la production de multiples anticorps se liant à diverses parties d’un antigène, rendant ainsi l’évolution de résistances plus difficile.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Célia Souque</span></span>
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</figure>
<p>Dans le cas des médicaments, on peut réduire la probabilité de résistance en utilisant plusieurs médicaments en même temps – une stratégie appelée « thérapie combinée » – qui est utilisée pour traiter le VIH et la tuberculose.</p>
<h2>Seconde différence : le nombre de pathogènes</h2>
<p>Une autre différence essentielle entre les antibiotiques et les vaccins est le moment où ils sont utilisés et le nombre d’agents pathogènes qui sont présents à cet instant. Les antibiotiques sont utilisés pour traiter une infection déjà établie, alors que des millions d’agents pathogènes sont déjà dans l’organisme. Les vaccins sont au contraire utilisés à titre préventif. Les anticorps qu’ils créent peuvent agir au tout début d’une infection, lorsque le nombre de pathogènes est encore faible.</p>
<p>Cela a des conséquences importantes, car le risque d’émergence de résistance est justement lié au nombre de micro-organismes. S’il est peu probable qu’une mutation de résistance survienne lors de la réplication de quelques agents pathogènes, les risques augmentent à mesure que leur nombre augmente.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/379154/original/file-20210117-23-mk5ljd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Graphique montrant que plus il y a de pathogènes présents lors d’une infection, plus il est probable qu’une mutation de résistance se produise" src="https://images.theconversation.com/files/379154/original/file-20210117-23-mk5ljd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379154/original/file-20210117-23-mk5ljd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=500&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379154/original/file-20210117-23-mk5ljd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=500&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379154/original/file-20210117-23-mk5ljd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=500&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379154/original/file-20210117-23-mk5ljd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379154/original/file-20210117-23-mk5ljd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379154/original/file-20210117-23-mk5ljd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Plus il y a de pathogènes présents lors d’une infection, plus il est probable qu’une mutation de résistance se produise.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Célia Souque</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La résistance aux vaccins peut cependant survenir malgré tout, comme le montre l’exemple de la grippe. Grâce à son taux de mutation élevé, le virus de la grippe peut rapidement accumuler suffisamment de mutations pour que les anticorps ne soient plus capables de le reconnaître – un processus appelé <a href="https://www.cdc.gov/flu/about/viruses/change.htm">« dérive antigénique »</a>. Cela explique en partie pourquoi le vaccin antigrippal doit être modifié chaque année.</p>
<p>Quels enseignements pouvons-nous tirer de ces informations en ce qui concerne les vaccins contre le SARS-CoV-2 ? Devrions-nous nous inquiéter de leur perte d’efficacité potentielle ? </p>
<p>Heureusement pour nous, ce nouveau coronavirus <a href="https://www.cell.com/molecular-cell/pdf/S1097-2765(20)30518-9.pdf">dispose d’un mécanisme de correction</a> qui réduit les erreurs qu’il commet lors de la réplication de son génome. Cela signifie que ce virus est beaucoup moins sujet aux mutations <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-020-02544-6">que les virus de la grippe</a>. Il a également été confirmé que le vaccin d’<a href="https://www.nature.com/articles/s41591-020-01194-5">Oxford/AstraZeneca</a> et celui de <a href="https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.12.09.20245175v1.full">Pfizer/BioNTech</a> sont tous deux capables de stimuler efficacement la production d’anticorps, aboutissant ainsi à la reconnaissance de multiples épitopes, ce qui devrait ralentir l’émergence de résistance.</p>
<p>Nous devons cependant rester prudents. Comme mentionné précédemment, lorsqu’il s’agit de résistance, le nombre de pathogènes est important. Plus le nombre de virus dans l’environnement est élevé – comme c’est le cas durant une pandémie en croissance rapide telle que celle que nous vivons – plus la probabilité que l’un d’entre eux touche le gros lot et développe des mutations qui pourraient avoir un impact significatif sur l’efficacité des vaccins augmente.</p>
<p>Si tel était le cas, nous devrions mettre au point de nouvelles versions des vaccins disponibles, qui soient capables de produire de nouveaux anticorps spécifiques de ce ou de ces virus mutants. C’est une des raisons pour lesquelles il est nécessaire de faire en sorte que le nombre d’infections reste au niveau le plus faible possible dans la population. Dans la situation actuelle, le traçage des contacts est donc essentiel pour espérer préserver au maximum l’efficacité des vaccins disponibles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153432/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Celia Souque reçoit des financements de UK Research and Innovation.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Louis du Plessis est soutenu par Oxford Martin School.</span></em></p>Comment se met en place la résistance aux médicaments ? Pourquoi la résistance aux vaccins est-elle si rare ?Celia Souque, Postdoctoral Researcher, Microbiology, University of OxfordLouis du Plessis, Postdoctoral Research Associate, University of OxfordLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1499512021-01-06T17:56:50Z2021-01-06T17:56:50ZRésistance aux antibiotiques : l’autre pandémie<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/377229/original/file-20210105-23-1g3f9vo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=44%2C22%2C5000%2C3188&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Alors que la mise au point de nouvelles molécules se fait de plus en plus lentement, l’acquisition de résistances par les bactéries est au contraire de plus en plus rapide. C'est une véritable course contre la montre.</span> <span class="attribution"><span class="source">shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Dix millions de morts par an d’ici 2050 liés à la résistance aux antimicrobiens. C’est la prévision d’une <a href="https://amr-review.org/sites/default/files/AMR%20Review%20Paper%20-%20Tackling%20a%20crisis%20for%20the%20health%20and%20wealth%20of%20nations_1.pdf">vaste étude britannique menée en 2014</a> si la tendance se maintient. Malgré les efforts importants déployés dans les dernières années, ces chiffres sont hélas <a href="https://www.chathamhouse.org/2019/10/review-progress-antimicrobial-resistance#introduction">toujours d’actualité</a>.</p>
<p>Contrairement aux nouvelles pandémies virales qui font les manchettes de tous les médias de façon ponctuelle, celle-ci ne concerne pas un seul agent pathogène (pouvant causer une maladie), mais plutôt une multitude de virus, parasites, champignons, et surtout des bactéries.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/374545/original/file-20201211-13-14zz4cm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374545/original/file-20201211-13-14zz4cm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374545/original/file-20201211-13-14zz4cm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374545/original/file-20201211-13-14zz4cm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374545/original/file-20201211-13-14zz4cm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374545/original/file-20201211-13-14zz4cm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374545/original/file-20201211-13-14zz4cm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374545/original/file-20201211-13-14zz4cm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Bactéries de la famille des <em>Neisseriaceae</em> photographiées par microscopie électronique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Laboratoire Veyrier, Institut national de la recherche scientifique (INRS)</span></span>
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<p>Les antimicrobiens sont des substances tuant ou ralentissant la croissance de microorganismes, incluant les virus (antiviraux), parasites (antiparasites), champignons (antifongiques) et bactéries (antibiotiques). Les antibiotiques représentent une catégorie d’antimicrobiens spécifiques contre les bactéries.</p>
<p>Depuis la commercialisation de la pénicilline, dans les années 1940, le développement de nouveaux antibiotiques a systématiquement été suivi de près par la découverte de bactéries résistantes à ces derniers.</p>
<p>Alors que la mise au point de nouvelles molécules se fait de plus en plus lentement, l’acquisition de résistances par les bactéries est au contraire de plus en plus rapide. C’est une véritable course contre la montre. À terme, ce problème pourrait nous faire tomber dans une ère post-antibiotique, où la moindre blessure ou chirurgie constituerait un risque important d’infection.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/375516/original/file-20201216-23-lk2p2x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/375516/original/file-20201216-23-lk2p2x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=221&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/375516/original/file-20201216-23-lk2p2x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=221&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/375516/original/file-20201216-23-lk2p2x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=221&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/375516/original/file-20201216-23-lk2p2x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=278&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/375516/original/file-20201216-23-lk2p2x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=278&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/375516/original/file-20201216-23-lk2p2x.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=278&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Résistance aux antimicrobiens au Canada.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Conseil des académies canadiennes, 2019</span></span>
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<h2>Une priorité mondiale</h2>
<p>Depuis plusieurs décennies, le monde scientifique dénonce l’ampleur du problème de la résistance aux antimicrobiens. Tout comme face aux changements climatiques, c’est malheureusement le temps qu’il aura fallu pour sensibiliser les gouvernements et la population générale à la gravité de la situation.</p>
<p>Acteur clé dans ce domaine, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a identifié en 2019 la résistance aux antimicrobiens comme une des <a href="https://www.who.int/fr/news-room/spotlight/ten-threats-to-global-health-in-2019">10 plus grandes menaces en santé publique</a> auxquelles l’humanité fait face. Plus récemment, l’OMS a également publié une liste de <a href="https://www.who.int/fr/news-room/photo-story/photo-story-detail/urgent-health-challenges-for-the-next-decade">défis cruciaux en santé pour les dix prochaines années</a>, parmi lesquels figurent non seulement l’extinction des maladies infectieuses, mais aussi la préservation des médicaments antimicrobiens.</p>
<p>La lutte contre la résistance aux antimicrobiens concerne l’ensemble des micro-organismes. Cependant, quelques bactéries sont responsables à elles seules d’une grande partie des problèmes causés par ces résistances. On parle alors plus spécifiquement de résistances aux antibiotiques. L’<a href="https://www.who.int/medicines/publications/WHO-PPL-Short_Summary_25Feb-ET_NM_WHO.pdf">OMS</a> et le <em>Centre for Disease Control and Prevention</em> (<a href="https://www.cdc.gov/drugresistance/pdf/threats-report/2019-ar-threats-report-508.pdf">CDC</a>) ont récemment identifié les bactéries les plus problématiques afin de concentrer les efforts face à ce fléau.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/374534/original/file-20201211-21-1i5r12q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374534/original/file-20201211-21-1i5r12q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374534/original/file-20201211-21-1i5r12q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=554&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374534/original/file-20201211-21-1i5r12q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=554&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374534/original/file-20201211-21-1i5r12q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=554&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374534/original/file-20201211-21-1i5r12q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=697&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374534/original/file-20201211-21-1i5r12q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=697&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374534/original/file-20201211-21-1i5r12q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=697&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Bactéries menaçantes selon le CDC et priorités de recherche selon l’OMS.</span>
<span class="attribution"><span class="source">OMS, CDC</span></span>
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<h2>D’où viennent ces résistances ?</h2>
<p>Toutes les bactéries peuvent devenir résistantes, pas seulement celles pathogènes. Le développement de résistance à un antibiotique est un phénomène naturel qui survient à la suite d’une <em>mutation</em> dans l’ADN de la bactérie, ou par l’acquisition d’un <em>gène de résistance</em>. Ce phénomène, assez rare, n’est pas problématique tant que les bactéries résistantes ne prolifèrent pas et ne transmettent pas leur résistance à un pathogène.</p>
<p>En revanche, lorsque les bactéries sont exposées à un antibiotique, celles sensibles vont mourir et celles résistantes vont se multiplier. C’est le principe de <em>sélection</em>. L’exposition à une faible quantité d’antibiotique ou de façon répétée accélère grandement la sélection des bactéries résistantes. Paradoxalement, l’usage d’antibiotiques est donc un facteur majeur de propagation de résistantes à ces derniers. C’est exactement pourquoi il est important de limiter leur utilisation au maximum, mais aussi de s’en servir correctement.</p>
<p>Malheureusement, il ne suffit parfois que d’une seule bactérie résistante pour causer de graves problèmes. Bien que la mutation spontanée de l’ADN mène très rarement à une résistance, les bactéries sont beaucoup plus efficaces à s’échanger des gènes, y compris des gènes de résistance. Certaines espèces ont même développé une caractéristique qui favorise grandement les échanges de gènes : la <a href="https://www.lasyntheseinrs.com/post/article-13-ces-bact%C3%A9ries-qui-d%C3%A9vorent-l-adn"><strong>compétence naturelle</strong></a>.</p>
<p>La compétence naturelle permet à certains microorganismes d’attraper de l’ADN de leur environnement et de l’utiliser comme si c’était le leur, par un mécanisme appelé transformation.</p>
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<span class="caption">Les gènes contenus dans l’ADN peuvent être recyclés par les bactéries naturellement compétentes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Martin Chenal, fait avec BioRender</span></span>
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<p>À la mort d’une cellule, son matériel génétique (ADN) est relâché aux alentours. Puisque notre corps abrite plusieurs milliards de bactéries qui se multiplient et meurent sans arrêt, nous représentons une gigantesque réserve d’ADN. Si un gène de résistance à un antibiotique se trouve parmi cet ADN et qu’une bactérie compétente s’en empare, ce gène sera transmis à toute sa descendance, en plus d’être potentiellement transféré à son tour à d’autres espèces.</p>
<p>Comme par hasard, bien qu’il s’agisse d’une caractéristique relativement rare, la compétence naturelle est retrouvée chez bon nombre d’espèces pathogènes. Parmi celles-ci, on retrouve celle responsable du choléra (<em>V. cholerae</em>), de pneumonies (<em>S. pneumoniae</em>), de la légionellose (<em>L. pneumophila</em>), d’ulcères gastriques (<em>H. pylori</em>), mais surtout de la méningite (<em>N. meningitidis</em>) et de la gonorrhée (<em>N. gonorrhoeae</em>).</p>
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<span class="caption">Bactéries pathogènes naturellement compétentes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Centre for Disease Control and Prevention (CDC)</span></span>
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<h2>La gonorrhée en forte hausse</h2>
<p>Les bactéries du genre <em>Neisseria</em> sont de véritables expertes à s’échanger de l’ADN. Contrairement aux autres espèces naturellement compétentes, elles peuvent attraper des gènes de leur environnement à tout moment et à une fréquence très élevée. C’est une des raisons principales pourquoi les deux seules <em>Neisseria</em> pathogènes chez l’humain, <em>N. meningitidis</em> et <em>N. gonorrhoeae</em>, évoluent très rapidement.</p>
<p>Sa forte compétence naturelle est également une des raisons pourquoi <em>N. gonorrhoeae</em> accumule énormément de résistances aux antibiotiques, la classant comme une <a href="https://www.cdc.gov/drugresistance/pdf/threats-report/2019-ar-threats-report-508.pdf">menace urgente selon le CDC</a> et une <a href="https://www.who.int/medicines/publications/WHO-PPL-Short_Summary_25Feb-ET_NM_WHO.pdf">priorité de recherche élevée selon l’OMS</a>.</p>
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<figcaption>
<span class="caption">Tandis que d’autres maladies infectieuses sont en baisse, la gonorrhée est en expansion fulgurante au Canada.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Agence de la santé publique du Canada (ASPC)</span></span>
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</figure>
<p>Au Canada, l’<a href="https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/publications/medicaments-et-produits-sante/surveillance-nationale-sensibilite-antimicrobiens-neisseria-gonorrhoeae-rapport-sommaire-annuel-2018.html">incidence de la gonorrhée</a> a plus que doublé dans les cinq dernières années, atteignant près de 30 000 cas en 2017. Au fil du temps, la bactérie responsable de cette infection transmise sexuellement est devenue <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/publications/medicaments-et-produits-sante/surveillance-nationale-sensibilite-antimicrobiens-neisseria-gonorrhoeae-rapport-sommaire-annuel-2018.html">résistante à de nombreux antibiotiques</a>, dont la ciprofloxacine (57 % des isolats en 2018), l’érythromycine (56 %), la tétracycline (47 %) et la pénicilline (9 %).</p>
<p>Les antibiotiques recommandés, dits de première ligne, ont dû être substitués de nombreuses fois pour garantir des traitements efficaces malgré ces résistances. Aujourd’hui, seuls trois antibiotiques sont encore recommandés pour traiter la gonorrhée, soit l’azithromycine, le ceftriaxone, et le céfixime. Pourtant, <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/publications/medicaments-et-produits-sante/surveillance-nationale-sensibilite-aux-antimicrobiens-neisseria-gonorrhoeae-rapport-sommaire-annuel-2017.html">13 % des souches isolées en 2017</a> étaient déjà résistantes à au moins un de ces traitements. Si la progression de ces résistances continue, il n’y aura bientôt plus aucun traitement efficace contre cette infection, d’où l’importance de <a href="https://aac.asm.org/content/early/2020/11/03/AAC.00254-20">développer de nouveaux antibiotiques</a> et de freiner cette propagation.</p>
<h2>Un plan d’action au Canada</h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/374543/original/file-20201211-20-k1tkuy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/374543/original/file-20201211-20-k1tkuy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/374543/original/file-20201211-20-k1tkuy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/374543/original/file-20201211-20-k1tkuy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/374543/original/file-20201211-20-k1tkuy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/374543/original/file-20201211-20-k1tkuy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/374543/original/file-20201211-20-k1tkuy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Photographie en microscopie électronique à balayage de la bactérie Neisseria gonorrhoeae.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Laboratoire Veyrier, Institut national de la recherche scientifique (INRS)</span></span>
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<p>D’importants efforts sont mis en place dans le monde entier pour développer de nouveaux antibiotiques pour lesquels il n’existerait pas (encore) de résistances connues. Ces traitements ont également pour objectif d’être les plus sélectifs possible, afin d’éliminer uniquement les bactéries néfastes et limiter la propagation de résistances. Outre les antibiotiques, d’autres types de traitements sont étudiés comme la <a href="https://www.wjgnet.com/2150-5349/full/v8/i3/162.htm">phagothérapie</a>, qui utilise des virus tuant spécifiquement les bactéries. Cependant, les scientifiques n’arriveront pas seuls à limiter la catastrophe en santé publique qui se profile sous nos yeux.</p>
<p>Au Canada, le gouvernement fédéral a élaboré en 2015 un <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/publications/medicaments-et-produits-sante/plan-action-federal-resistance-recours-antimicrobiens-canada.html">plan d’action</a> pour lutter contre la résistance aux antimicrobiens. Dans le but d’agir sur tous les fronts, ce plan fait intervenir plusieurs organisations, dont les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), mais aussi le ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire. Cette collaboration pancanadienne a entre autres permis de <a href="https://cihr-irsc.gc.ca/f/51720.html">nombreux investissements en recherche</a>, en plus de mettre l’accent sur la surveillance et la prévention.</p>
<p>Malgré sa discrétion, en comparaison à certaines maladies virales comme la Covid-19, la résistance aux antibiotiques et aux antimicrobiens peut bel et bien être qualifiée de pandémie. À long terme, ses impacts économiques et en santé publique risquent d’être bien pires que la crise sanitaire actuelle. Cependant, les défis que nous traversons nous ont appris qu’une coopération mondiale est possible. Si la communauté scientifique ainsi que l’ensemble de la société travaillent de pair comme ils l’ont fait contre la Covid-19, nous pouvons espérer enrayer cette autre pandémie, ou du moins en limiter l’impact.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149951/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Le laboratoire dans lequel Martin Chenal fait ses études a reçu des financements des Fonds de la Recherche en Santé du Québec (FRSQ), des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG), de l'Institut national de la recherche scientifique (INRS) et de l'institut Pasteur.</span></em></p>Tandis que le monde entier est obnubilé par la pandémie de Covid-19, une autre menace tout aussi mortelle passe inaperçue : la résistance aux antibiotiques.Martin Chenal, Étudiant au Doctorat en biologie (microbiologie), Institut national de la recherche scientifique (INRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1463372020-11-04T21:07:48Z2020-11-04T21:07:48ZUn nouvel outil de lutte contre les bactéries à l’hôpital : le laiton<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/363695/original/file-20201015-15-41fbqn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dépôt de l'inoculum bactérien sur le laiton AB+®</span> </figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science 2020 (du 2 au 12 octobre 2020 en métropole et du 6 au 16 novembre en Corse, en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Planète Nature ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
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<p>Les infections associées aux soins combinées à l’antibiorésistance bactérienne sont un enjeu majeur de santé publique. Une infection associée aux soins (IAS) se définit comme une infection survenue au cours d’une prise en charge (diagnostique, thérapeutique, palliative, préventive ou éducative) d’un patient, et si elle n’était ni présente, ni en incubation au début de la prise en charge. Les personnes infectées possèdent généralement une immunité affaiblie : séniors, enfants prématurés, ou encore atteintes de maladies ou recevant un traitement entraînant une déficience immunitaire (cancer, infection par le virus de l’immunodéficience humaine…) ou ayant récemment subi une opération. Différents types de microorganismes sont responsables de ces infections : virus, champignons ou encore bactéries.</p>
<p>Les IAS représentent un <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/epidemiology-and-infection/article/evaluating-the-clinical-and-economic-burden-of-healthcareassociated-infections-during-hospitalization-for-surgery-in-france/47F40B2BF4623A686A2C0F291CCC5DA0">coût</a> non négligeable à l’échelle économique mais également à l’échelle humaine. En effet, elles ont pour conséquences de prolonger le séjour du patient infecté, d’augmenter les coûts liés aux soins et d’accroître le risque de transfert du microorganisme responsable de l’IAS au sein de l’hôpital. Ainsi, un <a href="https://www.senat.fr/rap/r05-421/r05-4213.html">rapport du Sénat</a> de 2006 estimait l’allongement moyen de la durée de séjour à 4 jours. Le coût supplémentaire était quant à lui évalué entre 340 euros (infection urinaire) et 40 000 euros (bactériémie sévère avec admission en réanimation).</p>
<p>De plus, d’après la dernière <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/infections-associees-aux-soins-et-resistance-aux-antibiotiques/infections-associees-aux-soins/documents/enquetes-etudes/enquete-nationale-de-prevalence-des-infections-nosocomiales-et-des-traitements-anti-infectieux-en-etablissements-de-sante-mai-juin-2017">enquête nationale de prévalence des IAS et des traitements anti-infectieux</a> en établissements de santé de 2017, les IAS touchent 1 patient sur 20 et engendrent 3500 à 9000 décès chaque année en France.</p>
<p>Parmi les microorganismes qui en sont à l’origine, intéressons-nous aux bactéries. Celles-ci peuvent être naturellement résistantes ou avoir acquis de nouvelles résistances aux antibiotiques. En secteur hospitalier, l’importance de ces résistances se traduit parfois par une impasse thérapeutique si un patient est infecté par une bactérie les ayant accumulées. La bactérie est alors qualifiée de multirésistante. Au sein des bactéries multirésistantes, sept espèces ont plus particulièrement été pointées du doigt car majoritairement à l’origine d’IAS pouvant déboucher sur d’importantes difficultés de traitement, constituant ainsi un enjeu majeur de santé publique. Elles sont qualifiées de bactéries ESKAPEE (<em>Enterococcus faecium</em>, <em>Staphylococcus aureus</em>, <em>Klebsiella pneumoniae</em>, <em>Acinetobacter baumannii</em>, <em>Pseudomonas aeruginosa</em>, <em>Enterobacter spp. et Escherichia coli</em>) en raison de leur propension à échapper aux traitements antibiotiques actuels.</p>
<p>Cette thématique est l’un des sujets phares des projets de recherche du laboratoire <a href="https://agir.u-picardie.fr/programmes-de-recherche/bacteries-eskapee/bacteries-eskapee-495502.kjsp">AGIR</a> (Agents infectieux et chimiothérapie de l’Université de Picardie Jules Verne) et est au cœur d’une collaboration public/privé avec la société <a href="http://www.favi.com/">FAVI</a>.</p>
<p>La transmission des microorganismes responsables d’IAS peut avoir de multiples origines. Les surfaces de contacts sont l’une d’entre elles. En effet, les bactéries ont la capacité de <a href="https://bmcinfectdis.biomedcentral.com/articles/10.1186/1471-2334-6-130">survivre</a> de quelques jours à quelques mois sur une surface inerte (poignées de porte, chariots d’hôpital, rails de lits, siphons d’évier…) et ainsi être source d’infection. Aux méthodes déjà existantes pour contrer ce type de contaminations comme le <a href="https://www.delcourt.fr/blog/qu-est-ce-que-le-bionettoyage-n15">bionettoyage</a> régulier des surfaces et les protocoles d’hygiène des mains, une autre mesure complémentaire envisagée repose sur des surfaces antimicrobiennes « auto-nettoyantes » à base de cuivre.</p>
<h2>Le cuivre : une substance à activité antibactérienne</h2>
<p>L’utilisation du cuivre comme antimicrobien en santé humaine est retrouvée dès l’Antiquité avec des mentions dans d’anciens ouvrages comme le papyrus Edwin Smith (environ 2400 avant Jésus Christ) ou encore le papyrus Ebers (environ 1500 avant Jésus Christ). Actuellement, de nombreuses études axées sur l’hygiène hospitalière s’intéressent aux propriétés antimicrobiennes du cuivre et de ses alliages (laiton et bronze plus particulièrement) utilisés comme matériau de substitution de l’acier inoxydable pour des <a href="http://www.abevia.fr/wp-content/uploads/2016/01/HygieneS-2014.pdf">surfaces de contact</a> dans l’environnement hospitalier.</p>
<p>Une surface renfermant du cuivre va, au contact de la bactérie, provoquer un phénomène appelé <a href="https://sfamjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1111/jam.13681"><em>contact killing</em></a> induisant la mort de la bactérie. Ce phénomène, par le biais des ions de cuivre émanant de la surface, engendre un <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2011/04/medsci2011274p405/medsci2011274p405.html">stress oxydatif</a> et induit la perméabilité de la cellule bactérienne mais aussi l’oxydation de protéines et du matériel génétique.</p>
<p>Si ces mécanismes clefs ont pu être démontrés, l’ordre dans lequel ils se tiennent reste encore à établir clairement. Les essais rapportés dans l’ensemble de la littérature pour différents alliages de cuivre confirment <a href="https://www.antimicrobialcopper.org/fr/node/14336">leur efficacité</a> antimicrobienne en laboratoire avec des protocoles très divers sur des souches de plusieurs espèces bactériennes, principalement issues de collections. Toutefois, ces souches ne sont pas forcément représentatives des souches de l’environnement hospitalier et, dans la littérature, des variations de « comportement » (profil de résistances, par exemple) entre différentes souches cliniques au sein d’une même espèce bactérienne peuvent être observées.</p>
<p>Aussi, afin de limiter la diversité des protocoles pour évaluer l’effet antibactérien de surfaces non poreuses telles que celles en alliages de cuivre, la standardisation de la méthodologie s’est avérée nécessaire. Avant mai 2019, l’absence de méthodes standardisées en France a ainsi induit une multitude d’essais utilisant des conditions expérimentales et des souches différentes aboutissant à des résultats sur l’activité antibactérienne de ces surfaces non comparables d’une étude à l’autre.</p>
<p>De nombreux <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1438463916300669">facteurs</a> importants tels que la température et l’hygrométrie pendant la période d’exposition à la surface, la présence d’une charge organique simulant une salissure, la rugosité ou encore l’oxydation de l’alliage peuvent impacter l’efficacité de la surface antimicrobienne. Certaines études reprenaient le protocole standardisé émis par l’EPA (Agence de protection de l’environnement des États-Unis) en <a href="https://copperalloystewardship.com/sites/default/files/upload/media-library/files/pdfs/us/epa_sanitizer_test_method_copper_alloy_surfaces.pdf">2008</a> et actualisé en <a href="https://www.epa.gov/pesticide-registration/updated-draft-protocol-evaluation-bactericidal-activity-hard-non-porous">2016</a>. Cependant, ce protocole restait difficile à mettre en place techniquement en routine au sein d’un laboratoire. En mai 2019, l’association française de normalisation (AFNOR) a publié la <a href="https://norminfo.afnor.org/norme/NFS90-700/surfaces-a-proprietes-biocides-methode-devaluation-de-lactivite-bactericide-de-base-dune-surface-non-poreuse/126063">norme NF S90-700</a> afin d’évaluer de façon standardisée l’effet bactéricide de surfaces non poreuses.</p>
<h2>Le laiton AB+ : un alliage antibactérien complémentaire au bionettoyage</h2>
<p>La collaboration entre la société FAVI et le laboratoire AGIR s’est inspirée des méthodes de l’EPA et de l’AFNOR pour valider une <a href="https://www.mdpi.com/2079-6382/9/5/245">méthode</a> mesurant l’efficacité antibactérienne des alliages de cuivre dans des conditions de « worst case » (la pire des conditions) adaptées à un environnement hospitalier.</p>
<p>Cette méthode a permis la vérification de l’efficacité réalisée sur le laiton AB+ sur 12 souches bactériennes antibiorésistantes issues de l’environnement hospitalier avec un temps de contact bref (5 min) et le dépôt d’une quantité équivalente à un million d’unités formant colonies bactériennes pour un microlitre mimant par exemple une contamination par postillon. Les résultats d’efficacité du laiton AB+ sur ces souches bactériennes ont montré une réduction atteignant au minimum 99 % de la quantité bactérienne déposée pour l’ensemble du panel de souches testé. Ces résultats sont en adéquation avec le seuil d’efficacité recommandé par la norme NF S90-700 et confirment un effet antibactérien en cinq minutes du laiton AB+ sur les souches bactériennes antibiorésistantes ainsi que l’absence de résistances croisées entre cuivre et antibiotiques pour ces souches.</p>
<p>En pratique, l’utilisation de surfaces en alliage de cuivre reste encore minoritaire en milieu hospitalier. Les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1198743X18302969?via%3Dihub">études</a> rapportant leur efficacité en termes de réduction de la quantité de bactéries présentes sur les surfaces et/ou d’incidence des IAS dans les services hospitaliers sont peu nombreuses et leurs résultats <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/27318524/">controversés</a>. Des études de terrain menées avec une méthodologie rigoureuse restent indispensables afin de confirmer l’usage du laiton comme une arme supplémentaire dans la lutte contre les IAS.</p>
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<p><strong>Cet article a été co-écrit avec Corinne Lacquemant, chef de Projet R&D chez FAVI</strong></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146337/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emilie Dauvergne a reçu des financements de l'ANRT (bourse CIFRE 2018/0659). Contrat de collaboration entre FAVI S.A et le laboratoire Agents Infectieux Résistance et Chimiothérapie (AGIR) UR 4294.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Catherine Mullié ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les infections liées à des passages à l’hôpital posent un vrai problème de santé publique. Découvrez une solution possible pour les diminuer.Emilie Dauvergne, Doctorante en Microbiologie, Université de Picardie Jules Verne (UPJV)Catherine Mullié, Microbiologie, Université de Picardie Jules Verne (UPJV)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1358652020-04-20T17:27:04Z2020-04-20T17:27:04ZAvec la hausse des températures, l’aquaculture bientôt un point chaud de l’antibiorésistance ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/326884/original/file-20200409-87491-16zd4xb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C304%2C2283%2C1403&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Tilapias rouges en bassins d’élevage intensif à Sumatra (Indonésie). </span> <span class="attribution"><span class="source">IRD</span></span></figcaption></figure><p>L’antibiorésistance, c’est-à-dire l’émergence de bactéries résistantes aux antibiotiques, constitue un problème mondial majeur qui tue chaque année plus de 700 000 personnes dans le monde. En 2050, les spécialistes prévoient qu’elle pourrait faire jusqu’à <a href="https://www.who.int/news-room/detail/29-04-2019-new-report-calls-for-urgent-action-to-avert-antimicrobial-resistance-crisis">10 millions</a> de victimes par an.</p>
<p>Les sources d’antibiorésistance sont diverses, mais la production animale y est très impliquée. Compte tenu des projections démographiques, qui prédisent pour 2050 une population mondiale de près de 10 milliards d’individus, les besoins en production animale vont s’intensifier. Et, avec eux, les risques d’antibiorésistance.</p>
<h2>Subvenir aux besoins d’une population mondiale croissante</h2>
<p>L’aquaculture joue un rôle clé dans la sécurité alimentaire et la réduction de la pauvreté dans le monde. Plusieurs études ont montré que réorienter l’alimentation humaine vers une consommation accrue de poisson et de fruits de mer pourrait être une solution pour <a href="https://academic.oup.com/tas/article/3/2/903/5487790">pallier aux besoins en protéines</a>. Pour 2,9 milliards d’individus, la consommation de crustacés et de poissons représente 20 % de l’apport en protéines animales et <a href="https://www.researchgate.net/publication/294288801_Aquatic_food_security_Insights_into_challenges_and_solutions_from_an_analysis_of_interactions_between_fisheries_aquaculture_food_safety_human_health_fish_and_human_welfare_economy_and_environment">16,7 % lorsque cela est ramené à l’ensemble de la population mondiale</a>. L’aquaculture devrait <a href="http://documents.worldbank.org/curated/en/458631468152376668/pdf/831770WP0P11260ES003000Fish0to02030.pdf">croître de 62 % à l’horizon 2030</a>.</p>
<p>Aujourd’hui, ce secteur fournit près de 50 % des ressources en poisson à travers le monde. L’Asie du Sud-Est accueille <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/23308249.2019.1649634">90 %</a> de l’aquaculture mondiale et plus de <a href="http://www.fao.org/3/i9540en/i9540en.pdf">100 millions de personnes dépendent de cette activité</a>. L’aquaculture au Vietnam a, par exemple, augmenté de 12,7 % entre 1995 et 2018, faisant de ce pays le quatrième producteur aquacole au monde, avec 1,42 million de tonnes de Pangasius (poisson-chat) produits dans le delta du Mékong en 2018.</p>
<p>En <a href="http://www.fao.org/fishery/countrysector/naso_indonesia/en">Indonésie</a>, 6,15 millions de tonnes issues de l’aquaculture ont été produites en 2017 avec, en eau douce, une production de carpes (Cyprinus carpio), de poissons-chats (Clarias spp., Pangasius spp.) ou encore de tilapias (Oreochromis niloticus), ainsi que de crevettes en eau saumâtre.</p>
<h2>Intensification de l’aquaculture et antibiorésistance</h2>
<p>L’aquaculture recourt aujourd’hui massivement aux antibiotiques pour lutter contre les maladies infectieuses menaçant les animaux d’élevage. Associée à la contamination d’origine terrestre des cours d’eau, cette utilisation médicamenteuse – qui ira croissante – contribue à la sélection, à l’émergence et à la propagation de pathogènes (bactéries) résistants aux antibiotiques.</p>
<p>Dans les pays du Sud, l’utilisation d’antibiotiques dans la production animale <a href="https://www.pnas.org/content/112/18/5649">dépasse désormais l’utilisation de ces médicaments pour l’être humain</a>. Ceci contribue de manière significative à l’émergence et à la propagation de bactéries résistantes aux antibiotiques, l’une des principales menaces du XXI<sup>e</sup> siècle, rappelle l’OMS.</p>
<p>Sur 60 antibiotiques actuellement utilisés en <a href="https://curis.ku.dk/ws/files/71432815/1_s2.0_S0044848613003542_main.pdf">aquaculture</a>, 40 sont listés par l’OMS comme étant <a href="https://europepmc.org/article/med/28131482">« extrêmement importants »</a> : leur utilisation doit rester contrôlée et limitée afin de minimiser l’antibiorésistance et donc de préserver leur efficacité. On le comprend, il est urgent de renforcer, de contrôler et de signaler l’utilisation de ces antibiotiques en aquaculture.</p>
<h2>Réservoir de bactéries résistantes</h2>
<p>Bien que les quantités précises d’antibiotiques utilisés en aquaculture soient pour la plupart inconnues, <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-020-15735-6">nous avons récemment montré</a>, et cela pour la première fois, que l’indice « Multi-Antibiotic Resistance » (MAR) – indice de résistance bactérienne à plus de 2 antibiotiques – dans les aquacultures et l’indice MAR des bactéries cliniques humaines étaient fortement corrélés.</p>
<p>Ceci montre que l’utilisation d’antibiotiques chez l’homme, le bétail et en aquaculture contribue à un pool commun de bactéries résistantes à de multiples antibiotiques (voir la figure ci-dessous).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/326164/original/file-20200407-85423-5dxn5u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/326164/original/file-20200407-85423-5dxn5u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/326164/original/file-20200407-85423-5dxn5u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=284&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/326164/original/file-20200407-85423-5dxn5u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=284&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/326164/original/file-20200407-85423-5dxn5u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=284&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/326164/original/file-20200407-85423-5dxn5u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=357&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/326164/original/file-20200407-85423-5dxn5u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=357&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/326164/original/file-20200407-85423-5dxn5u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=357&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Indice global de résistance bactérienne à de multiples antibiotiques (MAR), calculé à partir de bactéries dérivées de l’aquaculture. Aucun indice MAR n’a été calculé pour les pays en blanc en raison du manque de données.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Reveter et coll. 2020, _Nature Communications_</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ce réservoir de bactéries résistantes dans les fermes aquacoles représente une menace majeure pour la production locale, en réduisant l’efficacité des médicaments contre les agents pathogènes ; pour l’environnement sauvage, en répandant des résidus d’antibiotiques, des bactéries et des gènes de résistance ; et de façon encore plus importante pour l’être humain, via la transmission directe, par contact, de ces bactéries multirésistantes ou indirecte, via l’exportation et la redistribution des produits de consommation d’origine animale à l’échelle mondiale.</p>
<h2>Y a-t-il des liens entre réchauffement climatique et antibiorésistance ?</h2>
<p>La réponse est oui. Globalement, on observe une augmentation de l’émergence de maladies infectieuses avec l’augmentation de la température. C’est le cas, par exemple, de l’émergence chez les poissons de l’edwardsiellose (causée par la bactérie <em>Edwardsiella tarda</em>), de la streptococcose (bactéries <em>Streptococcus agalactiae</em> et <em>S. iniae</em>) ou encore de la nécrose hépatopancréatique aiguë (bactéries <em>Vibrio parahaemolyticus</em>) chez les crustacés.</p>
<p>De <a href="https://www.nature.com/articles/s41558-018-0161-6">récentes études</a> ont montré que des températures plus chaudes sont associées à des taux d’antibiorésistance plus élevés chez les bactéries terrestres, ce qui offre une perspective sombre quant à l’impact du réchauffement climatique mondial.</p>
<p>Dans ce contexte, nous avons étudié l’effet de la température sur la mortalité des animaux aquatiques infectés par des bactéries pathogènes couramment présentes en aquaculture.</p>
<h2>L’Asie en première ligne</h2>
<p>Nos résultats montrent que les taux de résistance bactérienne multi-antibiotiques (MAR) les plus élevés sont corrélés avec des températures plus chaudes et appartiennent aux pays les plus vulnérables au changement climatique et à l’augmentation de la température : Vietnam, Inde, Pakistan et Bangladesh.</p>
<p>Nous observons également que les taux de mortalité des animaux aquatiques qui ont été infectés de façon expérimentale par des bactéries pathogènes (par exemple <em>Aeromonas spp.</em>, <em>Edwardsiella spp.</em>, <em>Flavobacterium spp.</em>, <em>Streptococcus spp.</em>, <em>Lactococcus spp.</em>, <em>Vibrio spp.</em> et <em>Yersinia spp.</em>) sont plus élevés à des températures plus chaudes (voir la figure ci-dessous).</p>
<p>Cette augmentation des maladies infectieuses animales avec le réchauffement climatique constitue une menace supplémentaire pour la sécurité alimentaire. Les maladies des animaux aquatiques sont en effet l’un des principaux facteurs limitant l’expansion de l’aquaculture.</p>
<p>Ceci souligne la nécessité d’interventions urgentes coordonnées aux niveaux national et international pour limiter l’utilisation des antibiotiques et la propagation mondiale de la résistance antimicrobienne.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/326166/original/file-20200407-85423-1f2vudj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/326166/original/file-20200407-85423-1f2vudj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/326166/original/file-20200407-85423-1f2vudj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=532&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/326166/original/file-20200407-85423-1f2vudj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=532&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/326166/original/file-20200407-85423-1f2vudj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=532&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/326166/original/file-20200407-85423-1f2vudj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=669&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/326166/original/file-20200407-85423-1f2vudj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=669&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/326166/original/file-20200407-85423-1f2vudj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=669&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Prévisions de la variation de la mortalité (%) des animaux aquatiques d’élevage infectés expérimentalement par des bactéries pathogènes (<em>Aeromonas spp.</em>, <em>Edwardsiella spp.</em>, <em>F. columnare</em>, <em>Lactococcus spp.</em>, <em>Streptococcus spp.</em>, <em>Vibrio spp.</em> et <em>Yersinia spp.</em>) en réponse aux augmentations de température ( °C) (P <0,001). En rouge : espèces hôtes tropicales et subtropicales. En bleu : espèces hôtes tempérées. Les points représentent les données brutes et les lignes les prédictions du modèle.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Reveter et al. 2020, _Nature Communications_</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un problème global</h2>
<p>Environ <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/004896979290411K">80 % des antibiotiques</a> administrés via l’alimentation aux animaux aquatiques d’élevage se disséminent dans les <a href="https://pubs.acs.org/doi/pdf/10.1021/es102725n">environnements voisins</a> (eau et sédiments) ; ils y restent actifs pendant des mois à des concentrations permettant une pression sélective sur les communautés bactériennes, favorisant ainsi le développement de l’antibiorésistance.</p>
<p>Les environnements aquatiques, souvent contaminés par des bactéries résistantes provenant de sources terrestres, concentrent bactéries et gènes de résistance aux antibiotiques, qui peuvent par la suite se transférer à l’homme ou à l’animal.</p>
<p>Une meilleure gestion des cultures, des systèmes de production animale et des eaux usées s’impose pour éviter la contamination croisée entre les milieux terrestre et aquatique. De nombreuses stratégies ont été proposées pour limiter l’utilisation des antibiotiques en aquaculture : une meilleure surveillance et gestion des maladies, l’amélioration de la forme physique des animaux par l’utilisation de plantes médicinales, une plus grande durabilité des écosystèmes.</p>
<p>Comme nous le montre actuellement la pandémie de Covid-19, les émergences infectieuses dans les pays du Sud sont désormais un problème de santé publique à l’échelle mondiale, et pas seulement locale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/135865/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une étude récente souligne les effets du réchauffement climatique sur l’antibiorésistance dans les fermes aquacoles. Une situation qui constitue une menace pour la sécurité alimentaire mondiale.Rodolphe Gozlan, Directeur de recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD)Marine Combe, Chargée de Recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1268932019-11-14T20:23:23Z2019-11-14T20:23:23ZLes infections résistantes aux antibiotiques pourraient mettre en péril notre mode de vie<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/301842/original/file-20191114-26259-1t3xgel.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le nouveau rapport propose quatre stratégies pour faire face à la crise imminente de la résistance aux antimicrobiens.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Les défenses de l’humanité contre les infections s’affaiblissent de jour en jour, tandis que les microbes qui en sont responsables deviennent de plus en plus forts.</p>
<p>Une infection sur quatre est désormais résistante aux antibiotiques et à d’autres formes connues de traitement. L’an dernier, 5 400 Canadiens sont morts de maladies qui, jusqu’à récemment, étaient curables. C’est ce qu’indique un <a href="https://rapports-cac.ca/reports/les-incidences-socioeconomiques-potentielles-de-la-resistance-aux-antimicrobiens-au-canada/">rapport exhaustif évalué par des pairs</a> et présenté cette semaine par le Conseil des académies canadiennes.</p>
<p>Cela constitue environ le double du nombre conjugué d’homicides et de décès par accidents de la route chaque année au Canada.</p>
<p>Ces maladies incluent tant la pneumonie que des infections sanguines, cutanées ou des voies urinaires. Et leur nombre augmente partout puisque le trafic international permet le transport des microbes pathogènes aux quatre coins du monde.</p>
<p>Le rapport, <em>Quand les antibiotiques échouent</em>, a été préparé pour le gouvernement fédéral par un comité d’experts présidé par <a href="https://www.msl.ubc.ca/people/dr-brett-finlay/">Brett Finlay</a>, de l’Université de la Colombie-Britannique, et dont j’étais membre. Il décrit en détail les impacts de la résistance aux antimicrobiens (RAM) sur notre économie, notre qualité de vie et notre santé.</p>
<p>L’an dernier, la RAM a réduit le PIB du Canada de 2 milliards de dollars ; nous nous attendons à ce que ce montant se situe entre 13 et 21 milliards de dollars d’ici 2050.</p>
<p>J’espère que ce rapport permettra de faire prendre conscience aux décideurs et au public de l’existence d’une crise de la résistance aux antimicrobiens.</p>
<h2>Les miracles des antibiotiques</h2>
<p>La bonne nouvelle dans tout cela, c’est que le Canada est dans une excellente position pour prémunir le monde de la catastrophe. Nous pouvons le faire si nous concentrons immédiatement nos formidables ressources à la résolution de ce problème.</p>
<p><a href="https://gairdner.org/events/fuelling-fight-antimicrobial-resistance-global-innovations-research-discovery/">Le Symposium de la fondation Gairdner de 2019</a>, un rassemblement scientifique international autour de cette question, a lieu ces jours-ci à l’Université McMaster.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/300789/original/file-20191107-10905-142tyif.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/300789/original/file-20191107-10905-142tyif.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/300789/original/file-20191107-10905-142tyif.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/300789/original/file-20191107-10905-142tyif.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/300789/original/file-20191107-10905-142tyif.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/300789/original/file-20191107-10905-142tyif.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/300789/original/file-20191107-10905-142tyif.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Sans antibiotiques, les chirurgies à cœur ouvert ne seraient pas possibles.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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</figure>
<p>Il est primordial que tout le monde se rende compte de la gravité et de l’urgence de la RAM. Le problème exige des mesures sur tous les fronts – que ce soit dans l’intensification de la recherche et l’utilisation plus judicieuse des antibiotiques ou le développement de la vigilance <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/r%C3%A9sistance-aux-antibiotiques">pour ce qui est du lavage des mains, de l’habitude de rester chez soi quand on est malade et d’avoir une vaccination à jour</a>.</p>
<p>Nous <a href="https://doi.org/10.3389/fmicb.2010.00134">utilisons des antibiotiques depuis près d’un siècle</a>, et ils ont accompli des miracles. Notre espérance de vie a augmenté grâce à eux. À leur période de gloire, les antibiotiques <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/resistance-aux-antibiotiques-antimicrobiens/antibiotiques.html">offraient un remède pratiquement à tous les maux, de la pharyngite à streptocoque aux infections des voies urinaires</a>. Leur existence a encouragé les médecins à réaliser des exploits extraordinaires, comme la <a href="https://www.sciencedaily.com/releases/2013/12/131223100737.htm">chirurgie à cœur ouvert</a> et le <a href="https://longitudeprize.org/blog-post/antibiotics-and-cancer-personal-story-world-cancer-day-2015">traitement du cancer par chimiothérapie</a>.</p>
<p>Les antimicrobiens ont rendu la société plus productive et <a href="https://rapports-cac.ca/reports/les-incidences-socioeconomiques-potentielles-de-la-resistance-aux-antimicrobiens-au-canada/">ajouté des milliards de dollars à l’économie</a>, nous donnant non seulement une vie plus longue, mais aussi une vie meilleure.</p>
<h2>13 700 décès de plus d’ici 2050</h2>
<p>Cependant, pendant ces décennies où nous vivions mieux grâce aux antibiotiques, les bactéries ont évolué pour contrer chacune de nos avancées. C’était naturel et prévisible.</p>
<p>Les humains ont accéléré ce processus en ayant recours librement, et <a href="https://www.who.int/westernpacific/news/detail/10-11-2017-stop-overuse-and-misuse-of-antibiotics-combat-resistance">souvent sans réelle nécessité, à des antibiotiques en agriculture, en médecine et en soins vétérinaires</a>. Plus nous en utilisons, plus les microbes s’adaptent rapidement.</p>
<p>Pendant tout ce temps, nous avons fait confiance aux compagnies pharmaceutiques pour qu’elles créent de nouveaux médicaments qui nous permettent de rester en santé, sans être conscients du fait qu’elles n’avaient pas vraiment intérêt à remplacer les antibiotiques bon marché qui existent déjà. Le développement et la mise en marché de nouveaux médicaments comportent des risques et coûtent terriblement cher, et le secteur privé <a href="https://medcitynews.com/2019/05/new-antibiotics-are-urgently-needed-but-economics-stand-in-the-way/">n’est pas particulièrement motivé à relever ce défi de santé publique</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/300793/original/file-20191107-10915-51eey5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/300793/original/file-20191107-10915-51eey5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/300793/original/file-20191107-10915-51eey5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/300793/original/file-20191107-10915-51eey5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/300793/original/file-20191107-10915-51eey5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/300793/original/file-20191107-10915-51eey5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/300793/original/file-20191107-10915-51eey5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les prématurés sont particulièrement vulnérables aux maladies résistantes aux antibiotiques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au Canada, 26 pour cent des infections sont aujourd’hui résistantes aux traitements antimicrobiens. On retrouve parmi celles-ci la pneumonie, des infections sanguines, cutanées et des voies urinaires ainsi que de nombreuses autres maladies. Le rapport prévoit que, d’ici 2050, 40 % des infections seront résistantes, ce qui causera par année 13 700 décès qui auraient été évités auparavant.</p>
<p>Les hôpitaux seront débordés. Les patients sous chimiothérapie dont le système immunitaire est affaibli par le traitement seront pratiquement sans défense contre les bactéries. Il en sera de même pour les prématurés.</p>
<p>Comme les remplacements de la hanche et du genou représenteront un trop grand risque, les Canadiens ne pourront rester mobiles pendant les années supplémentaires que l’usage d’antibiotiques leur a offertes.</p>
<p>Tout le monde, et pas seulement les malades et les handicapés, souffrira.</p>
<h2>Discrimination, érosion des libertés civiles</h2>
<p>Les coûts des soins de santé vont grimper en flèche. La productivité et la qualité de vie diminueront à mesure que la maladie et la mort vont dévaster la population.</p>
<p>Le rapport prédit que, avec l’augmentation de la résistance aux antimicrobiens, le tissu social canadien pourrait s’affaiblir en raison de la discrimination à l’égard des personnes atteintes d’infections résistantes, de la réduction de la connectivité sociale, de la réticence à voyager et des appels à fermer les frontières du Canada.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/300791/original/file-20191107-10961-1yw0tir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/300791/original/file-20191107-10961-1yw0tir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=431&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/300791/original/file-20191107-10961-1yw0tir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=431&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/300791/original/file-20191107-10961-1yw0tir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=431&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/300791/original/file-20191107-10961-1yw0tir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=542&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/300791/original/file-20191107-10961-1yw0tir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=542&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/300791/original/file-20191107-10961-1yw0tir.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=542&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les voyages en avion permettent un transport rapide des microbes infectieux dans le monde entier. Sur la photo, Aéroport Trudeau, Montréal, 15 juillet 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Ryan Remiorz</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Comme l’indique le rapport, les inégalités qui rendent déjà les personnes marginalisées plus vulnérables à la maladie ne feront qu’empirer à mesure que ceux qui en ont les moyens s’isoleront, alimentant la peur et la méfiance.</p>
<p>Avec la croissance des infections, la mise en quarantaine pourrait restreindre les libertés civiles. La confiance dans les hôpitaux et les soins de santé pourrait s’effriter. Toutes ces menaces ne sont pas lointaines.</p>
<h2>De l’innovation au contrôle des infections</h2>
<p>Le rapport propose quatre stratégies pour réagir à cette crise imminente.</p>
<p>La première stratégie est l’innovation – soit créer de nouveaux moyens de vaincre la RAM. La deuxième est la gestion – utiliser de façon judicieuse les traitements qui fonctionnent encore. La troisième, la surveillance, propose de suivre la consommation totale des antibiotiques. Enfin, on doit aussi mettre l’accent sur la prévention et le contrôle des infections.</p>
<p>Nous avons un excellent système de soins de santé publique au Canada ainsi qu’un système d’éducation publique efficace. Nos institutions regorgent de scientifiques, de cliniciens, d’ingénieurs, d’économistes, de sociologues, d’humanistes et d’autres personnes qui peuvent ouvrir la voie pour sortir le monde de cette crise – si nous travaillons tous ensemble.</p>
<p>Il nous faut toutefois d’abord comprendre ce qui se produira si nous ne le faisons pas.</p>
<p>[<em>Ne manquez aucun de nos articles écrits par nos experts universitaires</em>. <a href="https://theconversation.com/ca-fr/newsletters">Abonnez-vous à notre infolettre hebdomadaire</a></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/126893/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gerry Wright Gerry Wright reçoit des fonds des Instituts de recherche en santé du Canada, du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, de la Fondation Bill et Melinda Gates et du Fonds pour la recherche en Ontario.</span></em></p>Un nouveau rapport estime que d’ici 2050, 40 % de toutes les infections seront résistantes aux traitements antimicrobiens. Cela causera directement 13 700 décès qui auraient pu être évités auparavant.Gerry Wright, Professor of Biochemistry and Biomedical Sciences, McMaster UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1202602019-09-25T18:49:53Z2019-09-25T18:49:53ZMaladie de Lyme : vers une reconnaissance de la forme chronique ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/293760/original/file-20190924-54754-1jm2g3n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C14%2C4747%2C3139&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les conséquences à long terme de la maladie de Lyme font encore débat au sein des communautés scientifique et médicale.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/download/confirm/639997912?src=lqW7f73J3ZASdb8E08zViQ-1-39&size=huge_jpg">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>En août 2017, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) a classé la borréliose de Lyme <a href="https://ecdc.europa.eu/sites/portal/files/documents/Tool-for-disease-priority-ranking_handbook_0_0.pdf">parmi les 30 maladies les plus menaçantes pour la santé publique</a>. En juin 2018, la Haute autorité de santé (HAS) française a publié une recommandation de bonne pratique concernant la <a href="https://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2018-06/reco266_rbp_borreliose_de_lyme_cd_2018_06_13__recommandations.pdf">borréliose de Lyme et les autres maladies vectorielles à tiques</a>. Le 15 novembre de la même année, le Parlement européen a voté à l’unanimité une résolution de mobilisation <a href="http://www.europarl.europa.eu/news/fr/press-room/20181106IPR18328/le-parlement-demande-que-l-on-s-attaque-a-la-propagation-de-la-maladie-de-lyme">contre la maladie de Lyme et les co-infections</a>.</p>
<p>La conséquence positive de cette reconnaissance progressive est que la recherche dans le domaine décolle, notamment aux États-Unis. L’industrie pharmaceutique, qui avait pourtant ignoré le champ du Lyme pendant trois décennies, reconsidère la maladie. Cependant, la polémique au sujet de l’existence d’une forme chronique de la maladie de Lyme continue de diviser la communauté médicale. Pourquoi ?</p>
<h2>Une maladie qui peut passer inaperçue</h2>
<p>La maladie de Lyme est due à une bactérie du genre <em>Borrelia</em>, transmise par piqûre de tique. Souvent, la personne piquée ne remarque pas la tique. La maladie peut d’autant plus passer inaperçue que, dans un cas sur deux, la lésion cutanée rouge centrifuge qui se développe autour de la piqûre (l’érythème migrant), <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/0002934386901853">n’apparaît pas</a>. Les personnes concernées ne se savent pas infectées. Elles peuvent pourtant <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/30456435">développer des troubles variés</a> des jours, des semaines, des mois ou des années après la piqûre.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/284205/original/file-20190716-173334-jylgbt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/284205/original/file-20190716-173334-jylgbt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/284205/original/file-20190716-173334-jylgbt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=435&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/284205/original/file-20190716-173334-jylgbt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=435&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/284205/original/file-20190716-173334-jylgbt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=435&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/284205/original/file-20190716-173334-jylgbt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=547&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/284205/original/file-20190716-173334-jylgbt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=547&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/284205/original/file-20190716-173334-jylgbt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=547&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’érythème migrant caractéristique de la maladie de Lyme n’est pas toujours présent en cas d’infection.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/lyme-disease-borreliosis-borrelia-typical-rash-537518422?studio=1">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16040645">Une méta-analyse publiée en 2005</a> a révélé que les patients atteints de « syndrome post-borréliose de Lyme », souffrent plus souvent que les autres d’une grande fatigue, de douleurs souvent importantes qui touchent les muscles ou les articulations, de troubles cutanés, articulaires, cardiaques, neurologiques, et/ou psychiques, etc. Les troubles de mémoire et de concentration sont fréquents.</p>
<p>Ces signes cliniques peuvent être très invalidants et empêcher de mener une vie professionnelle ou sociale normale. Faute de preuve du diagnostic, dans la majorité des cas le médecin et la famille considèrent que l’origine de ces troubles est purement psychique. Les patients concernés peuvent finir par se trouver rejetés par le système de soins et par leurs proches. En grande souffrance et en errance médicale, certains perdent leur emploi, voire finissent en psychiatrie.</p>
<p>Comment peut-on en arriver là ?</p>
<h2>Un diagnostic difficile à établir</h2>
<p>La maladie de Lyme est difficile à diagnostiquer car il s’agit d’une pathologie complexe, qui peut simuler beaucoup d’autres maladies. En effet, ses symptômes sont peu spécifiques. Le diagnostic se base actuellement sur la sérologie (recherche des anticorps dans le sérum). Or ces tests <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/sante/maladie-de-lyme-pourquoi-les-tests-ne-sont-pas-fiables_125559">manquent de sensibilité</a>. Ainsi, en 2016 une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27920571">méta-analyse</a> (c’est-à-dire une analyse de toutes les publications sur le sujet) réalisée par l’Imperial College de Londres a montré que la sensibilité des tests disponibles, soit le pourcentage de malades effectivement dépistés, était en moyenne de 59,5 %.</p>
<p>De plus, ces tests ne prennent en compte que trois espèces de <em>Borrelia</em>. Or il existe des dizaines d’espèces de <em>Borrelia</em> transmissibles : non seulement celles du complexe <em>Borrelia burgdorferi sensu lato</em> (qui donnent la maladie de Lyme), mais aussi les <em>Borreliae</em> qui donnent des fièvres récurrentes (<em>relapsing fever</em> en anglais). Or on n’a développé des tests sérologiques que pour trois espèces, celles du <em>complexe Borrelia burgdorferi sensu lato</em> : <em>B. burgdorferi sensu stricto</em>, <em>B. afzelli</em> et <em>B. garinii</em>. Il n’existe pas de test disponible pour les <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fcimb.2014.00074/full">autres espèces du complexe <em>Borrelia burgdorferi sensu lato</em>, ni pour les fièvres récurrentes</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/294123/original/file-20190925-51452-jylekz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/294123/original/file-20190925-51452-jylekz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/294123/original/file-20190925-51452-jylekz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/294123/original/file-20190925-51452-jylekz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/294123/original/file-20190925-51452-jylekz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=408&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/294123/original/file-20190925-51452-jylekz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/294123/original/file-20190925-51452-jylekz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/294123/original/file-20190925-51452-jylekz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=513&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Image au microscope électronique à balayage (en fausses couleurs) d’un amas de Borrelia burgdorferi issues d’une culture pure. Cette bactérie est responsable de la maladie de Lyme, qui peut être transmise à l’être humain par piqûre de tique.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://phil.cdc.gov/Details.aspx?pid=13170">CDC/Claudia Molins</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Un rapport du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), a en outre montré en avril 2016 qu’il n’est <a href="http://ecdc.europa.eu/en/publications/Publications/lyme-borreliosis-diagnostic-accuracy-serological-tests-systematic-review.pdf">pas possible de calibrer de façon fiable les tests sérologiques</a>. En effet, il n’est pas possible de savoir avec certitude, dans une population donnée, qui a la maladie ou qui est un témoin en bonne santé, non infecté. Les raisons sont, là encore, l’absence de critère clinique spécifique (sauf quelques exceptions comme l’érythème migrant, le lymphocytome borrélien et ou l’acrodermatite chronique atrophiante), et la culture de la bactérie à partir du sang est trop souvent négative pour pouvoir servir d’étalon-or du diagnostic.</p>
<p>En outre, dans les formes chroniques, la <em>Borrelia</em> est souvent associée à <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-018-34393-9">d’autres infections inapparentes</a> (ou crypto-infections) dues à des bactéries, à des parasites comme <em>Babesia</em> (responsable de la <a href="http://docnum.univ-lorraine.fr/public/SCDPHA_T_2010_STEF_BETTY.pdf#page=15">piroplasmose</a> chez les animaux) et probablement, dans certains cas, à des virus.</p>
<h2>Des traitements inadaptés</h2>
<p>Les rares patients qui reçoivent un traitement antibiotique ne reçoivent qu’un traitement court (souvent 3 semaines). Or plusieurs articles montrent que la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22802606">persistance des signes et symptômes</a> après un <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/8085687">traitement antibiotique</a> <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21303350">court « classique »</a> est observée chez 16 à 62 % des patients. Ces données cliniques <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24619223">sont confortées</a> <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29662016">par des données bactériologique</a> s.</p>
<p>En outre, la persistance de <em>Borrelia</em> est démontrée, aussi bien chez l’animal (comme la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18316520">souris</a>, le <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/8968890">chien</a> ou le <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0189071">macaque</a> que chez l’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29662016">être humain</a>.</p>
<p>En outre, les études cliniques faisant appel à une bonne méthodologie font défaut. À ce jour, il n’y a eu aucune étude prospective avec tirage au sort chez des patients volontaires (étude randomisée) pour évaluer un traitement antibiotique réellement prolongé, d’une durée minimum de 4 mois, pour la maladie de Lyme chronique.</p>
<p>Dans ce contexte, la publication en août 2018 par la Haute Autorité de Santé (HAS) d’une recommandation de bonne pratique représente une avancée.</p>
<p><a href="http://videos.senat.fr/frame2.1105916_5ca29006b9b3d">
<img alt="Audition commune sur la stratégie thérapeutique face à la borréliose de Lyme" src="https://images.theconversation.com/files/284196/original/file-20190716-173334-2a4rzu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=1" width="auto"></a></p>
<h2>Le SPPT : « Symptomatologie/syndrome persistant polymorphe après une possible piqûre de tique »</h2>
<p>Après avoir pris acte de « l’absence de consensus du groupe de travail sur le choix du terme symptomatologie ou syndrome », le groupe de travail missionné par la HAS a proposé de garder les deux termes derrière l’abréviation SPPT, pour <a href="https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2018-06/fiche_rbp_4_sppt-v1-180618.pdf">« symptomatologie/syndrome persistant polymorphe après une possible piqûre de tique »</a>.</p>
<p>La HAS souligne que le groupe de travail est néanmoins en accord sur le fait que les patients doivent pouvoir « bénéficier d’un bilan étiologique et d’une prise en charge adaptée à leurs symptômes. ». Le SPPT est défini par :</p>
<ul>
<li><p>une piqûre de tique possible ;</p></li>
<li><p>la triade clinique associant, plusieurs fois par semaine, depuis plus de six mois : un syndrome polyalgique (douleurs musculo-squelettiques et/ou d’allure neuropathique et/ou céphalées), à une fatigue persistante avec réduction des capacités physiques, et à des plaintes cognitives (troubles de la concentration et/ou de l’attention, troubles mnésiques, lenteur d’idéation) ;</p></li>
<li><p>avec ou sans antécédent d’érythème migrant.</p></li>
</ul>
<p>Le diagnostic de SPPT est donc essentiellement clinique : fatigue, douleurs, troubles neuro-cognitifs associés à des signes et symptômes touchant plusieurs organes (cutanés, cardiaques, articulaires, neurologiques, etc.).</p>
<p>Il faut souligner que le SPPT peut être dû à la maladie de Lyme, à d’autres crypto-infections et/ou à d’autres facteurs (viraux, génétiques, immunologiques, métaboliques,carentiels, environnementaux, toxiques, psychologiques). La sérologie pour la maladie de Lyme ou les co-infections peut par ailleurs être négative. Ce SPPT est proche du « syndrome post-traitement de la maladie de Lyme » (<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4847307/">post-treatment Lyme disease syndrome, PTLDS</a>), reconnu aux États-Unis.</p>
<h2>Quelle prise en charge ?</h2>
<p>En termes de prise en charge, le médecin doit tout d’abord rechercher un autre diagnostic (comme une maladie auto-immune). En cas de suspicion de SPPT, chaque médecin généraliste peut prescrire un traitement antibiotique d’épreuve comme test diagnostique, à savoir un mois de doxycycline. Une réponse au traitement confirme l’origine bactérienne, la réponse initiale pouvant être une aggravation de l’état du patient (due à la réaction de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5239707/">Jarisch-Herxheimer</a>, qui correspond à une inflammation déclenchée par la mort des bactéries).</p>
<p>Les soins médicaux doivent être définis par le médecin en concertation avec un centre hospitalier expert (soit les centres de compétences et les <a href="https://solidarites-sante.gouv.fr/actualites/presse/communiques-de-presse/article/plan-national-de-prevention-et-de-lutte-contre-la-maladie-de-lyme-et-les-428253">cinq centres de référence</a>). Ces centres seront nommés par le Ministère de la Santé courant 2019. Les traitements et les résultats doivent être enregistrés afin de collecter des données pour la recherche.</p>
<p>Cette recherche doit nécessairement être pluridisciplinaire, étant donné l’origine de la maladie de Lyme et les facteurs environnementaux qui influencent sa propagation (répartition des tiques, dissémination par faune sauvage…). Pour la contenir, l’Organisation mondiale de la santé recommande d’ailleurs une approche <a href="http://www.inra.fr/Grand-public/Alimentation-et-sante/Tous-les-dossiers/Maladie-de-Lyme-et-infections-a-tiques/One-Health">« Une seule santé »</a> (« One Health »), partant du constat que l’être humain et les animaux partagent le même environnement, notamment microbien.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/299040/original/file-20191028-113991-5w3olq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/299040/original/file-20191028-113991-5w3olq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=348&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/299040/original/file-20191028-113991-5w3olq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=348&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/299040/original/file-20191028-113991-5w3olq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=348&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/299040/original/file-20191028-113991-5w3olq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/299040/original/file-20191028-113991-5w3olq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/299040/original/file-20191028-113991-5w3olq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article reprend et développe une intervention tenue dans le cadre d’une formation sur les controverses en santé. Cette conférence sur la maladie de Lyme a été donnée lors du cycle national de formation 2018-2019 de l’IHEST, l’Institut des hautes études pour la science et la technologie, par Christian Perronne.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120260/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian Perronne ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’existence d’une maladie de Lyme chronique fait encore polémique, mais les données scientifiques récentes pourraient aboutir à la reconnaissance de cette forme.Christian Perronne, Professeur des Universités - Praticien hospitalier, (AP-HP), Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1150442019-04-10T16:52:43Z2019-04-10T16:52:43ZEnfin un nouvel antibiotique ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/267937/original/file-20190407-115773-v6fs7y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C65%2C4000%2C2592&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'étude des poissons pourrait bien nous sauver la vie.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/iDkiP2GXlR8">Annie Spratt/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Un jour, il se peut que vous preniez une pilule et que vous deviez votre rétablissement aux microbes minuscules qui fleurissent dans la couche glissante de mucus qui enrobe les poissons.</p>
<p>Il est d’une importance cruciale de trouver la prochaine génération d’antibiotiques. L’incidence des infections bactériennes résistantes aux antibiotiques actuels continue d’augmenter. L’Organisation mondiale de la santé a averti que <a href="https://doi.org/10.1038/nature.2014.15135">cette question ne fera que s’aggraver</a> et une étude récente prévoit que d’ici 2050, les infections résistantes aux médicaments toucheront <a href="https://amr-review.org/sites/default/files/AMR%20Review%20Paper%20-%20Tackling%20a%20crisis%20for%20the%20health%20and%20wealth%20of%20nations_1.pdf">plus de personnes que le cancer</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/266580/original/file-20190329-70996-1on9n6n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/266580/original/file-20190329-70996-1on9n6n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/266580/original/file-20190329-70996-1on9n6n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/266580/original/file-20190329-70996-1on9n6n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/266580/original/file-20190329-70996-1on9n6n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/266580/original/file-20190329-70996-1on9n6n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/266580/original/file-20190329-70996-1on9n6n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/266580/original/file-20190329-70996-1on9n6n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">On prévoit que le nombre de décès attribuables à la résistance aux antimicrobiens (AMR) augmentera à l’échelle mondiale au cours des prochaines décennies.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://amr-review.org/infographics.html">Review on Antimicrobial Resistance</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Comment trouver un nouvel antibiotique ?</h2>
<p>Vousserez peut-être surpris d’apprendre que plus de 70 % des anti-infectieux actuellement utilisés <a href="https://doi.org/10.1021/acs.jnatprod.5b01055">proviennent de produits naturels</a>. Les plantes et les microbes produisent un large éventail de produits chimiques complexes, dont certains ont des propriétés antibiotiques ou antivirales, voire toxiques pour les cellules. Par exemple, l’amoxicilline, l’un des antibiotiques les plus couramment prescrits est un dérivé d’un produit chimique isolé à partir de <a href="https://doi.org/10.1016/j.ijantimicag.2007.07.015">moisissures de <em>Penicillium</em></a>.</p>
<p>Les microbes sont tout autour de nous. En fait, ils sont partout sur nous et en nous. Les animaux, y compris les humains, sont l’hôte d’une communauté diverse de microbes sur leur peau et dans leur système gastro-intestinal.</p>
<p>Ces microbes peuvent interagir avec leurs organismes hôtes de <a href="https://doi.org/10.1038/nrg3182">façon positive et négative</a>, notamment en favorisant la digestion et en réduisant les infections pathogènes, mais aussi en contribuant à certains types de maladies. Ces microbes peuvent également être une <a href="https://theconversation.com/starting-with-mother-natures-designs-will-speed-up-critical-development-of-new-antibiotics-89217">source de nouveaux antibiotiques</a>. Par exemple, des chercheurs ont récemment identifié un nouvel antibiotique à partir d’une <a href="https://doi.org/10.1038/nature18634">bactérie trouvée dans notre nez</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/266585/original/file-20190329-71006-pvlofi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/266585/original/file-20190329-71006-pvlofi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/266585/original/file-20190329-71006-pvlofi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/266585/original/file-20190329-71006-pvlofi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/266585/original/file-20190329-71006-pvlofi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/266585/original/file-20190329-71006-pvlofi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/266585/original/file-20190329-71006-pvlofi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/266585/original/file-20190329-71006-pvlofi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le mucus à la surface des poissons peut être visqueux et constitue également une mine d’or potentielle pour les composés bioactifs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/myfwc/18433719224">FWC Fish and Wildlife Research Institute</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Dans mon laboratoire de l’Oregon State University, nous travaillons pour identifier la prochaine génération d’antibiotiques à partir des microbes associés aux animaux. Nos efforts actuels se concentrent sur le groupe le plus diversifié de vertébrés : les poissons marins et d’eau douce. <a href="https://www.fishbase.in/home.htm">Plus de 33 000 espèces de poissons</a> ont été identifiées soit plus que la somme de tous les autres vertébrés de la Terre. Ces animaux vivent souvent dans des environnements difficiles et sont susceptibles d’abriter des microbes qui les aident à résister aux infections.</p>
<p>Nous collaborons avec le biologiste marin <a href="https://scholar.google.com/citations?user=8oxLEyYAAAAJ&hl=en&oi=ao">Misty Paig-Tran</a> de la <em>California State University Fullerton</em> pour obtenir des échantillons de mucus de différentes espèces de poissons du Pacifique. Sur plusieurs chaluts, son équipe a pu récolter des poissons côtiers et quelques poissons d’eau profonde, au total environ 17 espèces. Par exemple, ils ont ramené plusieurs perches roses des eaux côtières, et des eaux plus profondes ou des anguilles de mer.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/266606/original/file-20190329-71012-1p4rw3i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/266606/original/file-20190329-71012-1p4rw3i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/266606/original/file-20190329-71012-1p4rw3i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/266606/original/file-20190329-71012-1p4rw3i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/266606/original/file-20190329-71012-1p4rw3i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/266606/original/file-20190329-71012-1p4rw3i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/266606/original/file-20190329-71012-1p4rw3i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/266606/original/file-20190329-71012-1p4rw3i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Gisela Gonzalez Montiel et Ross Overacker travaillent sur des échantillons de poisson et de boue fournis par Misty Paig-Tran.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Loesgen Lab</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span>
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<p>Le mucus visqueux qui enrobe les poissons sert de protection. Lorsque l’animal se déplace dans l’eau, il peut entrer en contact avec toutes sortes de bactéries, champignons ou virus ; le mucus agit comme une barrière physique. Les chercheurs pensent que le microbiome du poisson produit également un composant chimique qui aide à prévenir les infections.</p>
<p>Mes collaborateurs et moi cherchions des bactéries intéressantes que nous pourrions isoler du poisson. Notre but était d’explorer la bioactivité de l’extrait bactérien dans l’espoir de l’exploiter pour nos propres usages.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/266205/original/file-20190327-139374-1n0crul.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/266205/original/file-20190327-139374-1n0crul.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/266205/original/file-20190327-139374-1n0crul.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/266205/original/file-20190327-139374-1n0crul.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/266205/original/file-20190327-139374-1n0crul.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/266205/original/file-20190327-139374-1n0crul.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/266205/original/file-20190327-139374-1n0crul.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/266205/original/file-20190327-139374-1n0crul.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Paige Mandelare et Molly Austin avec des bactéries dérivées du microbiome du poisson.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Loesgen Lab</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span>
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<p>Nous explorons actuellement la taxonomie ds bactéries, c’est-à-dire, comment sont-elles apparentées et comment devraient-elles être classées sur l’arbre de la vie ?</p>
<p>De quelles espèces s’agit-il ? Nous avons réussi à isoler 47 souches bactériennes différentes de ces écouvillons de mucus de poisson. Nous les avons cultivées, extraits les produits chimiques qu’elles produisaient, puis nous les avons testés pour voir s’ils inhibaient les agents pathogènes humains courants.</p>
<p>Fait intéressant, nous avons constaté que plusieurs extraits bactériens avaient une forte activité antimicrobienne et que 15 extraits présentaient une forte inhibition du <a href="https://www.cdc.gov/mrsa/index.html"><em>Staphylococcus aureus</em> résistant à la méthicilline</a>. Le SARM est un agent pathogène humain résistant aux médicaments qui est responsable de nombreuses infections difficiles à traite.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/266203/original/file-20190327-139368-a2sf6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/266203/original/file-20190327-139368-a2sf6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/266203/original/file-20190327-139368-a2sf6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=177&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/266203/original/file-20190327-139368-a2sf6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=177&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/266203/original/file-20190327-139368-a2sf6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=177&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/266203/original/file-20190327-139368-a2sf6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=223&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/266203/original/file-20190327-139368-a2sf6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=223&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/266203/original/file-20190327-139368-a2sf6z.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=223&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les microbes présents sur les poissons marins produisent divers composés qui pourraient être efficaces pour combattre les infections chez les humains.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Loesgen Lab</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span>
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<p>Nous avons effectué des tests et des analyses supplémentaires sur l’un des extraits les plus puissants et avons découvert que les microbes produisaient de multiples analogues d’un composé aromatique hétérocyclique particulier appelé phénazine qui avait une activité antibiotique. Motivés par ces résultats, nous avons testé si les composés contenus dans ces extraits pouvaient également affecter les cellules cancéreuses. Nous avons découvert que cette bactérie <em>Pseudomonas</em> dérivée du poisson, isolée d’une perche rose du littoral, produisait également un métabolite qui inhibait la croissance des cellules carcinomes du côlon humain.</p>
<p>Cette recherche est en cours, dans mon laboratoire <a href="https://linington.chem.sfu.ca">et d’autres</a>, et la question de savoir si un composé actif est un médicament efficace dépend de nombreux facteurs. Cependant, ces résultats suggèrent que les microbes associés aux poissons produisent un large éventail de produits chimiques divers et complexes et sont une excellente source pour les efforts de découverte de médicaments.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/115044/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sandra Loesgen a reçu des fonds du National Science Foundation</span></em></p>Nous avons cruellement besoin de nouveaux antibiotiques pour lutter contre des bactéries devenues multirésistantes. L’étude du mucus de la peau des poissons semble être une excellente piste.Sandra Loesgen, Assistant Professor of Chemistry, Oregon State UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1151062019-04-08T19:58:12Z2019-04-08T19:58:12ZRésistance microbienne : à l’hôpital, les désinfectants devraient être aussi contrôlés que les antibiotiques<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/268205/original/file-20190408-2927-arae3c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C3%2C2413%2C1723&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Micrographie électronique à balayage de staphylocoques dorés (fausses couleurs).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/niaid/8436193898/">NIAID/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Une <a href="https://rdcu.be/borVA">nouvelle étude</a> publiée dans la revue <em>Nature Microbiology</em> révèle que la résistance des bactéries à deux désinfectants largement employés pour contrôler la propagation des infections à l’hôpital est fortement associée à la résistance à plusieurs antibiotiques utilisés pour traiter les infections courantes.</p>
<h2>Des bactéries cutanées communes mais pas anodines</h2>
<p>Notre analyse portait sur l’étude de la résistance aux désinfectants de la bactérie <em>Staphylococcus epidermidis</em>. Celle-ci vit sur la peau des personnes en bonne santé. En temps normal, elle ne cause aucun dommage. En revanche, elle peut être à l’origine de graves infections sanguines chez les patients en soins intensifs, en particulier chez ceux qui souffrent d’une paralysie du système immunitaire : leur système immunitaire ne peut récupérer, malgré l’utilisation d’antibiotiques pour éliminer les bactéries qui les infectent.</p>
<p>Autre problème : Staphylococcus epidermidis_ peut aussi transférer des gènes à la bactérie <em>Staphylococcus aureus</em> (le staphylocoque doré), un pathogène majeur. Ce transfert de gène peut conférer à <em>Staphylococcus aureus</em> une résistance à la méthicilline (SARM), ce qui peut en faire une « superbactérie » capable de survivre à plusieurs antibiotiques couramment utilisés.</p>
<p>Jusqu’à présent, la recherche sur la résistance aux antibiotiques s’est largement concentrée sur le SARM, <em>Staphylococcus epidermidis</em> ne recevant qu’une attention limitée. Notre étude suggère pourtant que <em>Staphylococcus epidermidis</em> peut également constituer une menace. Dans les environnements à forte concentration de désinfectant, comme le sont les unités de soins intensifs, cette bactérie « inoffensive » peut en effet développer une résistance aux médicaments couramment utilisés pour traiter les infections.</p>
<p>Nous avions initialement examiné la résistance dans une unité de soins intensifs à Aberdeen, en Écosse. Toutefois, lorsque nous avons analysé les génomes de bactéries du monde entier, nous avons constaté la même tendance : chez les <em>Staphylococcus epidermidis</em> nocifs, la résistance à plusieurs antibiotiques était fortement associée à la résistance aux désinfectants. Dans les unités de soins intensifs individuelles, ces microbes sont à l’origine d’environ 10 à 15 infections par mois, les patients touchés développant des septicémies multirésistante aux médicaments.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/263443/original/file-20190312-86678-vbdxzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/263443/original/file-20190312-86678-vbdxzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/263443/original/file-20190312-86678-vbdxzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/263443/original/file-20190312-86678-vbdxzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/263443/original/file-20190312-86678-vbdxzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/263443/original/file-20190312-86678-vbdxzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/263443/original/file-20190312-86678-vbdxzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dans les unités de soins intensifs, il faut revoir les pratiques de désinfection.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/confirm/532149166?size=medium_jpg">napocska/Shutterstock</a></span>
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</figure>
<h2>Revoir les principes de désinfection</h2>
<p>En 2013, un vaste essai clinique mené aux États-Unis a comparé l’avantage de désinfecter tous les patients admis dans une unité de soins intensifs avec de la chlorhexidine (un désinfectant pour la peau), plutôt que de simplement désinfecter les patients à risque d’infections graves. Les résultats de cette étude, publiés dans le <a href="https://www.hqinstitute.org/sites/main/files/file-attachments/huang_decolonization_icu_nejm_5_29_13_0.pdf"><em>New England Journal of Medicine</em></a>, ont montré que la désinfection de tous les patients est meilleure pour réduire les infections hospitalières que la désinfection de patients sélectionnés. Les auteurs de cet article se sont prononcés en faveur de cette approche. Mais cette étude n’avait pas examiné la résistance aux antimicrobiens chez <em>Staphylococcus epidermidis</em>. En fait, aucune étude ne l’avait fait jusqu’ici.</p>
<p>La désinfection à la chlorhexidine de tous les patients d’une unité de soins intensifs est très efficace pour contrôler un large éventail d’infections hospitalières. Néanmoins, il faudrait selon nous accorder beaucoup plus d’attention à l’impact à long terme de cette pratique sur l’émergence et la propagation de la résistance aux antimicrobiens.</p>
<p>Il est important de noter qu’en Angleterre, l’une des plus importantes unités de soins intensifs (celle du St Thomas’ Hospital à Londres) a remplacé la chlorhexidine par un autre désinfectant (l’octénidine), après une épidémie de staphylocoque doré multirésistant aux antibiotiques et à la chlorhexidine qui a duré deux ans. Les responsables craignaient que la chlorhexidine n’augmente encore la résistance aux antimicrobiens.</p>
<p>Les résultats que nous avons obtenus suggèrent qu’il faut changer la façon dont nous envisageons l’utilisation des désinfectants, en particulier dans les hôpitaux. La lutte contre la résistance aux antimicrobiens demeure une priorité mondiale en matière de santé. Si la plupart des gens ont aujourd’hui compris que la mauvaise utilisation des antibiotiques (ou leur emploi excessif) est à l’origine du problème, notre étude suggère que nous devrions également prêter attention aux désinfectants utilisés dans les hôpitaux, et que ceux-ci devraient être réglementés de la même manière que les antibiotiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/115106/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Karolin Hijazi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>À l’hôpital, l’utilisation de désinfectants pourrait également créer des bactéries multirésistantes. Des résultats qui suggèrent qu’il faut revoir la façon dont la désinfection est envisagée.Karolin Hijazi, Senior Clinical Lecturer, University of AberdeenLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.