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champignons – The Conversation
2024-03-05T16:00:36Z
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Les mycotoxines dans les céréales et autres aliments : une menace pour la santé, un défi pour la sécurité alimentaire
<p>C’est quoi les mycotoxines, en bref ? Les <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/mycotoxins">mycotoxines</a> sont des molécules naturelles toxiques susceptibles de contaminer les aliments. Elles sont sécrétées par des champignons ubiquitaires microscopiques tels que <em>Penicillium</em>, <em>Aspergillus</em> ou <em>Fusarium</em>, entre autres. Communément appelées moisissures, elles prospèrent dans des environnements chauds et humides, rendant les pays au climat tropical particulièrement vulnérables.</p>
<p>Les mycotoxines posent des risques sérieux pour la santé humaine et animale, ainsi que des <a href="https://publications.iarc.fr/_publications/media/download/1378/cf18c35802429a1f50a2d434340e848cb6d26f28.pdf">pertes économiques considérables</a> (du fait des récoltes détruites mais aussi de problèmes de santé animale et humaine).</p>
<p>La <a href="https://theconversation.com/fr/topics/toxicite-66344">toxicité</a> des mycotoxines va de <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/mycotoxins">symptômes aigus à des maladies chroniques graves</a>. Certaines mycotoxines comme les aflatoxines, les ochratoxines et les fumonisines, sont particulièrement problématiques car fréquemment présentes dans l’alimentation et <a href="https://doi.org/10.1016/j.toxicon.2020.04.101">toxiques même à faible dose</a>.</p>
<p>Difficilement détectables à l’œil nu, l’identification et la quantification des mycotoxines dans les produits alimentaires s’effectuent essentiellement en laboratoire.</p>
<h2>Dans les céréales, fruits à coque, épices, aliments pour animaux</h2>
<p>Les microorganismes qui produisent les mycotoxines ont la particularité de pouvoir se développer sur différentes cultures, à deux moments clés : dans les champs, lorsque les conditions climatiques sont favorables à leur croissance (chaleur et humidité importantes) ; et après récolte, pendant le stockage des denrées alimentaires.</p>
<p>Ces contaminants toxiques peuvent se retrouver dans <a href="https://www.anses.fr/fr/content/les-mycotoxines">divers aliments de base</a>, tels que les céréales, les fruits à coque, les épices, etc. mais également dans les aliments pour animaux ou dérivés des animaux (lait, viande).</p>
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<p>La présence de mycotoxines dans l’alimentation est un problème de santé publique majeur qui nécessite une attention urgente. Malgré leur impact significatif sur la santé mondiale, les mycotoxines restent méconnues du grand public et des autorités, en particulier dans les pays les moins avancés. Il est donc crucial de sensibiliser davantage les populations à cette menace invisible dans notre chaîne alimentaire pour limiter l’exposition humaine et animale.</p>
<h2>Une situation maîtrisée en France et en Europe</h2>
<p>En Europe et en Amérique du Nord, des réglementations strictes limitent la présence de mycotoxines dans les aliments. Cependant, de nombreux autres pays, notamment en Afrique, n’ont pas de limites réglementaires pour les mycotoxines, ce qui expose les populations vulnérables à des <a href="https://doi.org/10.3390/toxins15090583">risques sanitaires et économiques</a>.</p>
<p>En France, un système de traçabilité efficace et des seuils réglementaires stricts assurent la sécurité des consommateurs. Les produits contaminés sont rapidement <a href="https://rappel.conso.gouv.fr/categorie/0/1/mycotoxines">retirés du marché</a>.</p>
<h2>Des épidémies silencieuses en Afrique</h2>
<p>Parmi les problèmes majeurs qui entravent la sécurité alimentaire en Afrique, la contamination des aliments par les mycotoxines est considérée comme l’un des principaux dangers. Les épidémies de mycotoxicoses récentes, telles que l’ergotisme ou l’aflatoxicose, ont des <a href="https://doi.org/10.3390/toxins14070442">taux de mortalité élevés</a>. En Afrique, les cultures de base, notamment le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/ma-s-36047">maïs</a>, les arachides, le sorgho et le mil, sont souvent fortement contaminées par une ou plusieurs mycotoxines.</p>
<p>L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que <a href="https://www.who.int/docs/default-source/resources/the-need-for-integrated-approaches-to-address-food-safety-risk---the-case-of-mycotoxins-in-africa-en.pdf">plus de 500 millions de personnes dans le monde, principalement en Afrique subsaharienne, sont exposées à des niveaux dangereux de mycotoxines</a>. Les conditions climatiques, les pratiques agricoles et les systèmes de stockage des aliments contribuent à ce problème. Les fortes pluies, les températures élevées et l’humidité favorisent la croissance des champignons producteurs de mycotoxines.</p>
<p>Les exemples qui suivent, non exhaustifs et qui relatent des épidémies survenues au XXI<sup>e</sup> siècle, illustrent l’ampleur et la persistance de l’enjeu lié aux métabolites fongiques (c’est-à-dire issus des champignons) dans les cultures et les produits alimentaires africains.</p>
<p>Ainsi, la <a href="https://doi.org/10.1081/TXR-120024094">mort de 12 personnes dans le district de Meru North au Kenya en 2001</a> a été attribuée à la consommation de grains de maïs contaminés par l’aflatoxine.</p>
<p>Pour cette même raison, plus tard, en 2004, le Kenya a connu l’un des <a href="https://doi.org/10.1128/AEM.02370-06">épisodes les plus graves d’intoxications humaines jamais enregistrés dans l’histoire des mycotoxines</a>. Cette épidémie aiguë a provoqué 125 décès sur 317 cas signalés au 20 juillet 2004, soit un taux de mortalité de 39 %.</p>
<p>Malheureusement, l’épidémie d’aflatoxicose s’est poursuivie au cours des années suivantes (2005-2008 et 2010), en particulier chez les agriculteurs de subsistance d’Afrique de l’Est. Il s’agit d’agriculteurs dont la production est essentiellement destinée à les nourrir eux-mêmes ainsi que leur famille, sans qu’ils puissent dégager de surplus commercialisable.</p>
<p>Une étude approfondie menée dans l’est du Kenya a révélé que <a href="https://doi.org/10.1289/ehp.1003044">plus de 470 cas d’empoisonnement étaient survenus entre 2004 et 2010</a> à la suite de l’ingestion d’aliments contaminés par l’aflatoxine, avec un taux de mortalité de 40 %.</p>
<p>Plus récemment, une <a href="https://doi.org/10.3920/WMJ2018.2344">épidémie d’aflatoxicose a été signalée entre mai et novembre 2016 en Tanzanie centrale</a>, entraînant un taux de mortalité de 30 %.</p>
<p>Bien que ces cas aient été largement documentés, la possibilité que ces chiffres soient sous-estimés est élevée. En effet, l’inadéquation ainsi que le manque d’organisation du système de suivi coordonné et de la surveillance médicale conduisent souvent à de nombreux cas non signalés.</p>
<p>Il convient de noter que la grande majorité des foyers de mycotoxicoses documentés en Afrique ne concerne que celles dues aux aflatoxines, malgré le large éventail d’autres mycotoxines qui contaminent les denrées alimentaires. Ces intoxications aiguës ne sont donc que la partie émergée de l’iceberg.</p>
<h2>Des causes climatiques, agricoles et individuelles</h2>
<p>La lutte contre les mycotoxines pose de nombreuses difficultés en raison de la multiplicité des facteurs à prendre en compte. Ces contaminations résultent de l’interaction de causes climatiques, agricoles et individuelles, dans un contexte où les données scientifiques et les moyens de détection restent insuffisants.</p>
<p>Pour prévenir les contaminations, plusieurs méthodes existent : en champs, entre autres, recourir à des rotations de cultures et utiliser des variétés résistantes ; pour le stockage, éviter les lieux chauds et humides, bien aérer les moissons ou récoltes, etc.</p>
<p>Mais le changement climatique pourrait aggraver le problème des mycotoxines en Afrique, en créant des conditions encore plus favorables aux moisissures, <em>via</em> une alternance de sécheresses et de fortes précipitations.</p>
<p>Il s’agit de gérer un aléa sanitaire dont les effets sur le long terme sont mal cernés. Une approche pluridisciplinaire, systémique et concertée est nécessaire pour une maîtrise durable de ce problème. Les épidémies passées soulignent la nécessité de renforcer la surveillance et le contrôle de la contamination par les mycotoxines, de développer des techniques de culture et de stockage adaptées, d’intensifier les programmes de détection et de sensibiliser la population aux risques de consommation de produits contaminés.</p>
<h2>L’urgence : produire des données sur les mycotoxines en Afrique</h2>
<p>Les mycotoxines sont un problème mondial, particulièrement grave dans les pays moins avancés, notamment en Afrique, où la surveillance et le rappel des produits contaminés sont insuffisants. Les seuils réglementaires sont souvent inexistants ou plus élevés, et la traçabilité des aliments est déficiente, contribuant aux épidémies régulières. Le manque de données sur la contamination, la toxicité et l’exposition aux mycotoxines entrave l’établissement de réglementations protectrices.</p>
<p>La production de ces données est essentielle pour identifier les mycotoxines les plus dangereuses. Mais elle dépend de la disponibilité de fonds de recherche, d’installations technologiques et d’une main-d’œuvre qualifiée, souvent inadéquats ou inexistants dans les pays les moins avancés.</p>
<h2>À terme, réduire de l’impact sanitaire et socio-économique sur les populations vulnérables</h2>
<p>Ainsi, nos travaux de recherche se concentrent sur la compréhension des facteurs favorisant la croissance de moisissures produisant des mycotoxines, mais aussi l’identification de mycotoxines locales, l’évaluation de la contamination des cultures, ainsi que l’estimation de l’exposition et des risques sanitaires des populations.</p>
<p>Ces travaux visent à produire des données fiables au niveau local, en étroite collaboration avec les chercheurs africains. L’objectif est de co-concevoir avec les parties prenantes africaines des solutions adaptées, telles que des méthodes de détection et de prévention durables. Il s’agit également de renforcer les capacités analytiques nationales et de coopérer avec la recherche internationale selon une logique de co-développement.</p>
<p>Ces efforts de recherche viendront fournir une base factuelle solide aux pays africains pour élaborer des réglementations nationales efficaces. L’objectif final est de réduire de manière durable l’impact sanitaire et socio-économique des mycotoxines sur les populations vulnérables du continent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222773/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mohamed Haddad a reçu des financements de l'IRD et de l'Université Toulouse 3 Paul Sabatier</span></em></p>
En Europe, des réglementations strictes limitent la présence de mycotoxines dans les aliments. Mais en Afrique, des épidémies et des décès sont liés à la consommation de céréales contaminées.
Mohamed Haddad, Chercheur, chimiste des produits naturels, Institut de recherche pour le développement (IRD)
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2024-01-21T14:38:57Z
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Les décès dus aux infections fongiques ont doublé en dix ans
<p>Il y a onze ans, mes collègues et moi-même <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23253612/">avions estimé</a> qu’environ 2 millions de personnes dans le monde mouraient chaque année des suites d’infections fongiques. Mes nouvelles estimations révèlent que ce nombre a presque doublé, puisque qu’il serait aujourd’hui <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/38224705/">d’environ 3,8 millions</a>.</p>
<p>Pour mettre ce résultat en perspective, soulignons que cela représente environ 6,8 % du total des décès mondiaux. On considère généralement que les maladies coronariennes sont responsables d’environ 16 % des décès qui surviennent annuellement dans le monde (<a href="https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/the-top-10-causes-of-death">55,4 millions de décès en 2019 selon l’Organisation mondiale de la Santé</a>, suivies de près par les accidents vasculaires cérébraux à 11 %. Les maladies pulmonaires liées au tabac (MPOC), qui comprennent la bronchite chronique et la bronchopneumopathie chronique obstructive (<a href="https://www.inserm.fr/dossier/bronchopneumopathie-chronique-obstructive-bpco/">BPCO</a>, autrefois appelée emphysème) représentent quant à elles 6 % des décès au total. Or, sur ces 3 228 000 décès, un tiers surviendrait en raison d’infections fongiques.</p>
<p>Selon d’autres statistiques mondiales, le nombre de décès dus à la pneumonie (dont certaines sont d’origine fongiques) serait de 2 600 000, tandis que la tuberculose serait responsable de 1 208 000 morts par an (on considère qu’environ 340 000 de ces décès seraient probablement dus à une maladie fongique non diagnostiquée dans ce contexte de tuberculose).</p>
<p>Pour parvenir à cet nouvelles estimations, publiées dans <a href="https://www.thelancet.com/journals/laninf/article/PIIS1473-3099(23)00692-8/fulltext">The <em>Lancet_Infectious Diseases</em></a>, j’ai évalué la proportion de cas fongiques réellement diagnostiqués et traités, et ceux qui passent inaperçus.</p>
<h2>Aspergillus, Candida, Histoplasma : des dangers mortels</h2>
<p>Certains champignons du genre <em>Aspergillus</em> font partie des champignons les plus dangereux pour la santé humaine. C’est notamment le cas d’<em>Aspergillus fumigatus</em> et <em>Aspergillus flavus</em>, qui provoquent des infections des poumons. Les personnes déjà victimes de certaines affections pulmonaires telles que l’asthme, la tuberculose ou le cancer du poumon, y sont particulièrement sensibles, tout comme les patients souffrant de leucémie, ceux qui ont reçu une greffe d’organe ou ceux qui sont hospitalisés en services de soins intensifs.</p>
<p>Or, un grand nombre de ces personnes décèdent parce que leur médecin ne réalise pas qu’elles sont atteintes d’une infection fongique, ou s’en aperçoivent trop tard. Il faut savoir que même si les méthodes de diagnostics des maladies fongiques ont considérablement progressé au cours des dix à quinze dernières années, l’accès à ces tests et leur utilisation effective demeurent limités, et pas seulement dans les pays à faible revenu.</p>
<p>Ainsi, si l’Afrique du Sud dispose d’une offre de diagnostic efficace pour dépister la méningite fongique (<a href="https://www.pasteur.fr/fr/journal-recherche/actualites/meningite-cryptocoque-nouveau-traitement-efficace-moins-effets-secondaires">méningite à cryptocoque ou cryptococcose neuro-méningée</a>) et les infections du sang par des champignons du genre <em>Candida</em>, ce pays n’a pas les moyens de diagnostiquer correctement les infections causées par un autre champignon très courant, <em>Aspergillus</em>. Cette carence en service diagnostique est responsable de nombreux décès qui pourraient être évités : un dépistage rapide des infections graves à <em>Aspergillus</em>, idéalement dans les 48 heures, pourrait sauver chaque année des millions de vies.</p>
<p>À ce sujet, la lenteur des tests diagnostiques – quand ils sont disponibles… – constitue un autre problème : elle est en effet responsable de nombreux décès. En outre, il faut savoir que les tests se basant sur la mise en culture des champignons ne sont capables d’identifier qu’environ un tiers des infections.</p>
<p>Par ailleurs, on manque de médicaments antifongiques permettant de traiter efficacement les infections causées par les champignons. Plus grave encore : à l’image de ce qui se passe dans la lutte contre les bactéries, l’émergence de souches de champignons résistants aux antifongiques constitue un problème de plus en plus préoccupant. Celui-ci est encore accru par la pulvérisation de certains types de fongicides sur les cultures, une pratique qui augmente considérablement les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1749461320300415">taux de résistance</a> vis-à-vis d’une famille de médicaments antifongiques appelés azoles.</p>
<p>Les champignons du genre <em>Candida</em> sont eux aussi particulièrement problématiques. En temps normal, ces champignons se trouvent notamment dans le microbiote intestinal, mais dans certains cas (maladie), ils peuvent traverser la paroi des intestins et passer dans le sang, causant des <a href="https://theconversation.com/maladies-infectieuses-de-nouveaux-resultats-eclairent-les-mecanismes-de-la-septicemie-197290">septicémies</a>. Ils sont également à l’origine de problèmes chez les personnes diabétiques, et peuvent engendrer des dysfonctionnements de la fonction rénale (insuffisance rénale). Il arrive que des infections à <em>Candida</em> surviennent après des interventions chirurgicales ou des blessures.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/candida-auris-que-sait-on-de-ce-champignon-mortel-qui-se-repand-dans-les-hopitaux-des-etats-unis-203260">Candida auris : que sait-on de ce champignon mortel qui se répand dans les hôpitaux des États-Unis ?</a>
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<p>Chaque année, plus de <a href="https://www.thelancet.com/journals/laninf/article/PIIS1473-3099(23)00692-8/fulltext">1,5 million de personnes</a> dans le monde sont victimes d’une infection à <em>Candida</em> qui met leur vie en danger. Près d’un million en décède. Or, à l’heure actuelle, les tests disponibles (consistant en des mises en culture à partir d’échantillons sanguins) ne sont capables de détecter qu’environ 40 % des infections à <em>Candida</em>. Il est donc essentiel de mettre au point des tests plus efficaces de toute urgence.</p>
<p>Soulignons qu’environ 50 % des quelque 600 000 décès annuels dus au sida sont <a href="https://theconversation.com/fungal-infections-cause-more-aids-deaths-than-tuberculosis-heres-what-we-can-do-about-it-175002">attribuables</a> à des infections fongiques. L’Organisation mondiale de la Santé et les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis coordonnent en particulier au niveau mondial les importants efforts mis en œuvre pour éradiquer la méningite à cryptocoque.</p>
<p>En ce qui concerne la problématique du sida, un important effort doit aussi être réalisé pour lutter contre l’histoplasmose en Afrique et en Asie du Sud-Est, une maladie infectieuse du poumon causée par un champignon appelé <em>Histoplasma</em>. Le déploiement des meilleurs tests est notamment nécessaire. En effet, un trop grand nombre de patients se voit mal diagnostiqué, les médecins confondant leur infection avec la tuberculose, ou – dans le cas où les patients ont effectivement la tuberculose – ne détectant pas l’infection fongique létale qui les affecte également.</p>
<h2>Le problème du champignon noir</h2>
<p>En Inde, suite à la pandémie de Covid-19, la première épidémie à grande échelle de <a href="https://theconversation.com/Covid-19-quest-ce-que-la-mucormycose-linfection-fongique-qui-frappe-les-malades-indiens-161788">mucormycose</a> s’est produite. Cette maladie est parfois appelée « champignon noir », car les champignons qui la causent bloquent l’approvisionnement en sang des tissus, provoquant leur noircissement et leur mort.</p>
<p>En 2012, mes collègues et moi-même <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1156523323000379">avions estimé</a> le nombre de cas annuels de mucormycose dans le monde à environ 10 000. Or, suite à la pandémie de Covid-19, environ 51 000 cas ont été signalés en Inde. Cette augmentation massive semble attribuable à des facteurs tels que l’utilisation excessive de stéroïdes pour traiter la Covid-19 (administration à des doses trop élevées, sur de trop longues durées), ainsi qu’à l’existence de nombreux cas de diabète mal contrôlé.</p>
<p>Durant la pandémie de Covid-19, les patients admis en soins intensifs partout sur la planète ont aussi été fréquemment touchés par des infections à <em>Aspergillus</em> et <em>Candida</em>. Le pic de maladies fongiques liées à la pandémie n’ayant pas été pris en compte dans l’élaboration de nos nouvelles données d’incidence et de mortalité dues aux maladies fongiques, il est possible que ces dernières aient été responsables d’un nombre de décès encore plus élevé.</p>
<h2>La crainte d’une double épidémie grippe et d’<em>Aspergillus</em></h2>
<p>Les infections à <em>Aspergillus</em> sont aussi problématiques pour les personnes infectées par le virus de la grippe, dont l’état nécessite une hospitalisation en soins intensifs. L’incidence des infections mortelle dues à ce champignon est en effet particulièrement élevée dans ce contexte, le risque de décès des patients étant doublé, et ce même si <em>Aspergillus</em> est diagnostiqué. Médecins et scientifiques appréhendent donc particulièrement de voir se développer une double épidémie associant grippe (ou tout autre virus respiratoire) et infections fongiques.</p>
<p>Par ailleurs, il existe aussi une forte association entre allergie aux champignons et asthme sévère ou mal contrôlé. Or l’asthme est une affection courante, qui devient de plus en plus problématique à mesure que l’on vieillit. Les personnes dont l’asthme est d’origine fongique ont généralement besoin de prendre plusieurs médicaments, et sont régulièrement victimes de poussées de la maladie nécessitant visites aux urgences et hospitalisations.</p>
<p>Malgré les nombreux efforts mis en œuvre pour contrôler l’asthme, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1323893023000734">environ 461 000 personnes en meurent chaque année</a>, directement ou indirectement (l’asthme pouvant venir agraver une situation liée à une autre maladie).</p>
<p>Pour finir, rappelons quand même que les maladies fongiques surviennent généralement chez des personnes déjà malades, même s’il existe quelques exceptions touchant des personnes en bonne santé, et des individus vivant ou travaillant dans des environnements problématiques, tels que des <a href="https://www.bbc.co.uk/news/uk-england-manchester-67914836">habitats particulièrement envahis de moisissures</a>.</p>
<p>Soulignons aussi que ces infections ne vont pas disparaître, car les champignons sont présents non seulement dans notre environnement, mais également sur nous et en nous, à la surface de notre peau et dans nos intestins. Or, il n’existe pas de vaccins contre eux. Dans un tel contexte, le développement de méthodes de diagnostic précises et rapides, pouvant être déployées au moment opportun, est désespérément nécessaire. Il faut absolument que nous prenions les champignons plus au sérieux…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221506/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Le Dr Denning et sa famille détiennent des parts dans F2G Ltd, une société de découverte antifongique issue de l'Université de Manchester, et des options d'achat d'actions dans TFF Pharma. Il est ou a été récemment consultant pour Pulmatrix, Pulmocide, Biosergen, TFF Pharmaceuticals, Rostra Therapeutics, Mucpharma PTY et Lifemine Therapeutics. Au cours des trois dernières années, il a été rémunéré pour des conférences au nom de Mundipharma, BioRad, Basilea, Gilead, Avir et Pfizer. Il a participé à de nombreux groupes d'orientation, principalement axés sur les questions de diagnostic et sur l'aspergillose. Il a fondé Global Action For Fungal Infections en 2013, dont il a été le directeur général non rémunéré jusqu'en 2023.</span></em></p>
Diagnostiquer mieux et plus rapidement les maladies fongiques pourrait permettre de sauver chaque année des millions de vies.
David W. Denning, Principal Investigator, Manchester Fungal infection Group, University of Manchester
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2023-09-15T13:15:55Z
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Donnez-vous des bisous à votre animal de compagnie ? Si oui, lisez ceci
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/546463/original/file-20230829-19-r94gri.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C314%2C4886%2C3197&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En embrassant votre chat ou votre chien, vous courez certains risques de contracter des maladies -quoique minimes!
</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Notre relation avec les animaux de compagnie a changé radicalement au cours des dernières décennies. Les gens n’ont jamais autant eu de chiens et de chats, mais aussi des oiseaux, des tortues ou des poissons.</p>
<p>Si vivre avec un animal domestique présente de nombreux <a href="https://www.onehealth.org/blog/10-mental-physical-health-benefits-of-having-pets">bienfaits pour la santé mentale et physique</a>, ces compagnons sont parfois porteurs de maladies infectieuses qui peuvent nous être transmises. Toutefois, le risque est faible pour la plupart des gens.</p>
<p>Mais certaines personnes, comme celles dont le système immunitaire est affaibli ou les femmes enceintes, courent un <a href="https://www.cdc.gov/healthypets/specific-groups/high-risk/index.html">risque accru</a> de contracter une maladie d’origine animale. Il est donc important d’être conscient des risques et de prendre les précautions nécessaires pour éviter les infections.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/un-parasite-mangeur-de-chair-transporte-par-les-chiens-fait-son-apparition-en-amerique-du-nord-148618">Un parasite mangeur de chair transporté par les chiens fait son apparition en Amérique du Nord</a>
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<h2>De quelles maladies parle-t-on ?</h2>
<p>Les maladies infectieuses qui passent de l’animal à l’humain sont appelées maladies zoonotiques ou <a href="https://www.quebec.ca/agriculture-environnement-et-ressources-naturelles/sante-animale/maladies-animales/transmission-animaux-humains">zoonoses</a>. On connaît plus de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3668296/#B18">70 agents pathogènes</a> des animaux de compagnie qui sont transmissibles à l’humain.</p>
<p>Dans certains cas, un animal atteint d’un agent pathogène zoonotique semblera malade. Mais souvent, il ne présentera aucun symptôme visible, ce qui facilite la transmission, car on ne soupçonnera pas que son compagnon est porteur de germes.</p>
<p>Les zoonoses peuvent passer directement des animaux domestiques aux humains, par contact avec la salive, les fluides corporels ou les excréments, ou indirectement, par contact avec de la litière, de la terre, de la nourriture ou de l’eau contaminées.</p>
<p>Des études indiquent que la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4500695/">prévalence des zoonoses associées aux animaux de compagnie est faible</a>. Toutefois, le nombre réel d’infections est probablement <a href="https://www.mdpi.com/1660-4601/17/11/3789">sous-estimé</a>, car de nombreuses zoonoses ne sont pas <a href="https://educaloi.qc.ca/capsules/les-maladies-a-declaration-obligatoire-les-mado/">« à déclaration obligatoire »</a>, ou peuvent posséder des voies d’exposition multiples ou des symptômes génériques.</p>
<h2>Virus, bactéries, champignons, parasites…</h2>
<p>Les chiens et les chats sont d’importants réservoirs d’infections zoonotiques (les agents pathogènes vivent naturellement dans leur population) causées par des virus, des bactéries, des champignons et des parasites. <a href="https://www.who.int/data/gho/data/themes/topics/rabies">Dans les régions endémiques d’Afrique et d’Asie</a>, les chiens sont la principale source de la rage, qui se transmet par la salive.</p>
<p>Les chiens sont également porteurs de la <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/biosecurite-biosurete-laboratoire/fiches-techniques-sante-securite-agents-pathogenes-evaluation-risques/capnocytophaga.html">bactérie <em>Capnocytophaga</em></a> dans la bouche et la salive. Celle-ci peut être transmise à l’humain par contact étroit ou morsure. La grande majorité des personnes n’en seront pas infectées, mais chez les gens dont le système immunitaire est affaibli, cela peut occasionnellement provoquer une <a href="https://www.cdc.gov/capnocytophaga/signs-symptoms/index.html">maladie grave</a>, voire mortelle. Un décès de ce type a été signalé <a href="https://thewest.com.au/news/wa/tracy-ridout-perth-mum-dies-11-days-after-rare-bacterial-infection-from-minor-dog-bite-c-11748887">cet été en Australie-Occidentale</a>. Au Canada, un homme de Sudbury, en Ontario, <a href="https://www.vidal.fr/actualites/29481-au-canada-un-homme-meurt-d-une-infection-rare-a-capnocytophaga-apres-une-morsure-de-chien.html">est mort à l’été 2022, quelques jours après avoir été accidentellement mordu par son propre chien</a>.</p>
<p>Un certain nombre de maladies transmises par voie fécale-orale, telles que la giardiase, la campylobactériose, la salmonellose et la toxoplasmose, nous sont transmises par les chats. Il est donc particulièrement important de se laver les mains après avoir manipulé le bac à litière ou d’utiliser des gants pour le faire.</p>
<p>Les chats peuvent aussi transmettre des infections par morsure ou griffure, notamment la <a href="https://www.merckmanuals.com/fr-ca/professional/maladies-infectieuses/bacilles-gram-n%C3%A9gatifs/maladie-des-griffes-du-chat">maladie des griffes du chat</a>, causée par la bactérie <em>Bartonella henselae</em>.</p>
<p>Les chiens et les chats sont également des réservoirs de la bactérie <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC10122942/"><em>Staphylococcus aureus</em>, résistante à la méthicilline</a> (SARM), pour laquelle un contact étroit avec des animaux de compagnie est considéré comme un facteur de risque important de transmission zoonotique.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/545415/original/file-20230829-27-mpgatg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Une femme aux cheveux bouclés se fait lécher le visage par un Staffordshire terrier" src="https://images.theconversation.com/files/545415/original/file-20230829-27-mpgatg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/545415/original/file-20230829-27-mpgatg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/545415/original/file-20230829-27-mpgatg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/545415/original/file-20230829-27-mpgatg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/545415/original/file-20230829-27-mpgatg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/545415/original/file-20230829-27-mpgatg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/545415/original/file-20230829-27-mpgatg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Une bactérie qui peut provoquer des maladies graves, voire mortelles, chez certaines personnes se retrouve dans la salive des chiens.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/girl-kissing-dog-breed-staffordshire-terrier-200987354">Shutterstock</a></span>
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<p>Les chiens et les chats ne sont pas les seuls animaux de compagnie à pouvoir contaminer des humains. Les oiseaux transmettent occasionnellement la <a href="https://www.cdc.gov/pneumonia/atypical/psittacosis/">psittacose</a>, une infection bactérienne qui cause la pneumonie. On a établi que les <a href="https://www.futura-sciences.com/sante/actualites/medecine-reptiles-domestiques-transportent-salmonelles-51444/">tortues de compagnie</a> pouvaient transmettre la Salmonella à l’humain, en particulier aux jeunes enfants. On a même observé un lien entre les poissons d’aquarium e t <a href="https://www.cdc.gov/healthypets/pets/fish.html">diverses infections bactériennes</a> chez l’humain, notamment la vibriose, la mycobactériose et la salmonellose.</p>
<h2>Certains comportements sont plus à risque</h2>
<p>Des contacts étroits avec les animaux — et certains comportements — accroissent le risque de transmission zoonotique. <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19398275/">Une étude</a> menée aux Pays-Bas a constaté que la moitié des propriétaires d’animaux de compagnie laissent ceux-ci leur lécher le visage et que 18 % d’entre eux autorisent leurs chiens à partager leur lit (ce qui augmente la durée d’exposition aux agents pathogènes dont les animaux sont porteurs). La même étude a révélé que 45 % des gens qui possèdent des chats leur permettent de sauter sur l’évier de la cuisine.</p>
<p>On a également établi un lien entre le fait d’embrasser des animaux de compagnie et certaines infections zoonotiques. <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3298380/">Au Japon, une femme</a> a développé une méningite causée par une infection à <em>Pasteurellamultocida</em> après avoir embrassé fréquemment le visage de son chien. Cette bactérie est souvent présente dans la cavité buccale des chiens et des chats.</p>
<p>Les jeunes enfants ont communément des comportements qui <a href="https://www.cdc.gov/healthypets/specific-groups/high-risk/children.html?CDC_AA_refVal=https%3A%2F%2Fwww.cdc.gov%2Fhealthypets%2Fspecific-groups%2Fchildren.html">augmentent le risque</a> de contracter des maladies zoonotiques, par exemple lorsqu’ils se mettent les mains dans leur bouche après avoir touché leur animal de compagnie. Les enfants ont également tendance à ne pas se laver les mains de façon adéquate après avoir touché leur compagnon.</p>
<p>Bien que toute personne ayant eu un contact avec un agent pathogène zoonotique par l’intermédiaire de son animal de compagnie puisse tomber malade, certaines sont plus à risque de développer une maladie grave. Il s’agit notamment des jeunes, des personnes âgées, immunodéprimées ou des femmes enceintes.</p>
<p>Si la plupart des gens infectés par le parasite de la toxoplasmose souffriront d’une maladie bénigne, celle-ci peut être <a href="https://www.passeportsante.net/famille/grossesse?doc=toxoplasmose-pendant-grossesse-risques">mortelle pour le fœtus ou provoquer des malformations congénitales</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/546103/original/file-20230904-27-lzhdw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Une petite fille blonde allongée sur le sol embrassant un grand chien blond" src="https://images.theconversation.com/files/546103/original/file-20230904-27-lzhdw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/546103/original/file-20230904-27-lzhdw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/546103/original/file-20230904-27-lzhdw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/546103/original/file-20230904-27-lzhdw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/546103/original/file-20230904-27-lzhdw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/546103/original/file-20230904-27-lzhdw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/546103/original/file-20230904-27-lzhdw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les jeunes enfants de moins de 5 ans sont plus exposés aux maladies zoonotiques et adoptent souvent des comportements qui augmentent le risque de contracter une infection de leur animal de compagnie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<h2>Que faire pour éviter d’attraper une maladie de mon animal de compagnie ?</h2>
<p>Un certain nombre de bonnes pratiques d’hygiène et d’élevage peuvent réduire le risque de maladie. En voici quelques-unes :</p>
<ul>
<li><p>se laver les mains après s’est amusé avec son animal ou avoir manipulé sa litière ou ses jouets, ou après avoir nettoyé ses excréments ;</p></li>
<li><p>ne pas laisser un animal domestique lécher notre visage ou une plaie ouverte ;</p></li>
<li><p>surveiller les jeunes enfants lorsqu’ils jouent avec des animaux domestiques et qu’ils se lavent les mains après ;</p></li>
<li><p>porter des gants pour changer une litière ou nettoyer un aquarium ;</p></li>
<li><p>humecter les surfaces des cages d’oiseaux avant le nettoyage afin de minimiser les aérosols ;</p></li>
<li><p>empêcher les animaux domestiques d’entrer dans la cuisine (surtout les chats qui peuvent sauter sur les surfaces de préparation des aliments) ;</p></li>
<li><p>se tenir informé des soins vétérinaires préventifs, y compris la vaccination et les traitements contre les vers et les tiques ;</p></li>
<li><p>consulter un vétérinaire si l’on croit que son animal ne va pas bien.</p></li>
</ul>
<p>Les personnes présentant un risque élevé de maladie doivent plus particulièrement prendre des précautions pour réduire leur exposition aux agents pathogènes zoonotiques. Et avant de se procurer un animal de compagnie, on devrait demander à un vétérinaire quel type d’animal convient le mieux à sa situation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212938/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>
Les animaux, y compris ceux qui vivent dans nos maisons, peuvent être porteurs de toutes sortes de maladies. La plupart du temps, cela ne pose pas problème. Mais il y a quelques précautions à prendre.
Sarah McLean, Lecturer in environmental health, Swinburne University of Technology
Enzo Palombo, Professor of Microbiology, Swinburne University of Technology
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/208872
2023-07-20T15:56:44Z
2023-07-20T15:56:44Z
Le jardinage, une activité à risques multiples !
<p><em>Les vacances ne se passent pas toujours comme prévu… Dans notre série « Une semaine en enfer ! », nous décryptons ce qui peut aller de travers, depuis le <a href="https://theconversation.com/serie-1-pourquoi-est-on-plus-malade-en-voiture-lorsque-lon-part-en-vacances-208258">mal des transports amplifiés lors des départs en vacances</a> aux piqûres de moustiques désormais capables de <a href="https://theconversation.com/virus-de-la-dengue-en-france-metropolitaine-a-quoi-faut-il-sattendre-cette-annee-209339">transmettre des virus tropicaux</a>, en passant par les <a href="https://theconversation.com/serie-1-des-draps-a-la-telecommande-tele-la-verite-sur-les-microbes-qui-peuplent-les-chambres-dhotel-208329">dangers microbiologiques méconnus des hôtels</a>, les « traditionnels » <a href="https://theconversation.com/le-retour-douloureux-des-coups-de-soleil-et-leurs-consequences-209059">coups de soleil</a>, ou les dangers insoupçonnés… <a href="https://theconversation.com/le-jardinage-une-activite-a-risques-multiples-208872">du jardinage</a>, si vous pensiez rester tranquillement chez vous.</em></p>
<hr>
<p>Beaucoup considèrent le jardinage comme un passe-temps relaxant, une façon tranquille de s’occuper dehors quelques heures lorsqu’il fait beau. Et c’est vrai ! Mais pas seulement… En tant que spécialiste en médecine d’urgence, je suis régulièrement confronté à toutes sortes de blessures résultant de ce qui était vu comme un inoffensif hobby.</p>
<p>Il y a les classiques, qui viennent immédiatement à l’esprit : les innombrables petites piqûres et morsures, sans parler des pesticides. Et au fil des ans, je me suis aussi occupé de plaies et lésions à la main causées par des outils de coupe, allant de la hache au sécateur, comme au pied, dues cette fois plutôt à des tondeuses à gazon et des fourches.</p>
<p>Rien que ces dernières semaines, j’ai vu arriver des personnes suite à des chutes d’échelles, avec des blessures à la tête dues à des chutes sur le béton. Malheureusement, j’ai aussi confirmé le décès d’une personne âgée dont l’enthousiasme à pelleter s’est avéré trop fort pour son cœur.</p>
<p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Et si nous disposons aujourd’hui de nombreux traitements pour la plupart de ces plaies et traumatismes, par le passé, le jardin pouvait être un véritable danger. L’un des <a href="https://www.ox.ac.uk/news/science-blog/penicillin-oxford-story">premiers patients</a> à avoir été traité à la pénicilline, en 1941, était un officier de police qui avait apparemment contracté une septicémie après avoir été griffé par une épine de rosier. À l’époque, la plus petite des blessures pouvait avoir des conséquences mortelles…</p>
<p>Et il s’avère que cela peut encore être le cas. Une femme britannique est décédée en 2016 d’une septicémie après s’être <a href="https://www.telegraph.co.uk/news/2016/10/03/solicitor-dies-from-sepsis-five-days-after-injuring-her-hand-gar/">égratignée la main en jardinant</a>. (<em>En France, toutes causes confondues <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/sepsis-septicemie">plus de 250 000 cas de septicémie sont enregistrés chaque année, dont plus de 50 000 sont mortels</a>, ndlr</em>)</p>
<p>Mais ce ne sont pas les seuls dangers qui se cachent dans votre jardin. Voici quelques conseils à suivre avant d’aller vous occuper de vos plantes :</p>
<h2>Attention au tétanos</h2>
<p>Le <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/tetanus">tétanos est une infection particulièrement dangereuse</a> – et impressionnante. Tous les muscles sont pris de spasmes sous l’effet de la toxine libérée par la bactérie <em>Clostridium tetani</em>, ce qui provoque des crampes très douloureuses, des convulsions, un blocage de la mâchoire et souvent une cambrure du dos très prononcée. Lorsque les muscles respiratoires sont touchés, la mort se fait par asphyxie.</p>
<p>La <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK459217/">souffrance provoquée par cette maladie</a> est aussi intense que difficile à décrire.</p>
<p>Beaucoup associent le tétanos à des objets tels que des clous rouillés. C’est vrai, mais ce micro-organisme est très répandu et il se trouve également dans le sol, en particulier s’il y a du fumier – les bactéries du genre <em>Clostridium</em> vivent en effet dans l’intestin. Les roses aiment les sols contenant du fumier, ce qui pourrait rendre ces fleurs bien-aimées mortelles si vous vous coupiez avec des épines contaminées ou si de la terre souillée entrait au contact avec une coupure. <a href="https://www.chu-montpellier.fr/fr/vaccination/histoire-des-epidemes-et-de-la-vaccination/le-tetanos">Dans 75 % de cas, une lésion minime est à l’origine de l’infection</a>.</p>
<p>La vaccination est particulièrement efficace contre cette infection, d’où l’importance de vérifier que votre vaccin (et son rappel) est à jour. Rappelons que chez les personnes non vaccinées, le taux de létalité du tétanos peut dépasser 50 %.</p>
<p>(<em>En France, on meurt encore du tétanos : <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2022/tetanos-en-france-donnees-epidemiologiques-2021">entre 2011 et 2020, une dizaine de cas ont été enregistrés chaque année, avec un taux de létalité de 29 %</a>, ndlr</em>)</p>
<h2>Bactéries et champignons sont omniprésents</h2>
<p>Dans un humble sac d’engrais se cache un ingrédient auquel beaucoup d’entre nous ne s’attendent pas : la famille de bactéries <em>Legionella</em>, dont le risque est plus connu via les systèmes de climatisation ou les systèmes d’alimentation en eau.</p>
<p>Cette bactérie peut provoquer une infection appelée <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/legionellose">maladie du légionnaire, ou légionellose</a> qui est particulièrement dangereuse, et potentiellement mortelle, notamment pour les personnes âgées et les personnes dont le système immunitaire est affaibli. En cas d’inhalation, elle peut entraîner infections pulmonaires aiguës et pneumonies. L’eau chaude et stagnante utilisée dans le processus de compostage peut expliquer sa présence.</p>
<p>L’engrais préemballé n’est pas le seul à être dangereux. Votre propre tas de compost est également rempli de bactéries et de champignons divers qui, s’ils sont correctement entretenus, ne devraient toutefois pas vous causer de problèmes.</p>
<p>Mais il arrive souvent que la moisissure <a href="https://www.nature.com/articles/s41564-022-01091-2"><em>Aspergillus</em></a> se développe lorsqu’il fait chaud à l’extérieur. Elles peuvent donner lieu à de <a href="https://thorax.bmj.com/content/70/3/270">lourdes lésions pulmonaires</a> et peuvent même se répandre dans l’organisme, en particulier chez les personnes âgées et immunodéprimées. Là encore, on connaît des cas mortels.</p>
<p>Les spores de moisissures peuvent également déclencher une affection connue sous le nom d’<a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/7719883/">alvéolite allergique extrinsèque</a> ou <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK557580/">« poumon de fermier »</a> : une hypersensibilité provoquant une inflammation des alvéoles pulmonaires. Cette affection était classiquement due à l’exposition au foin moisi, mais les tas de compost peuvent également faire de même en raison de la présence d’organismes tels que <em>Aspergillus</em> (champignons filamenteux) et les bactéries du genre <em>Actinomycetes</em>.</p>
<h2>Gare aux rats et à la leptospirose</h2>
<p><em>Leptospira</em> est une bactérie que l’on peut trouver dans l’eau contaminée par l’urine de rats. Les rats construisant souvent des habitats à proximité des humains, il est préférable de faire attention lorsque l’on se trouve à proximité d’étang ou de citernes d’eau de pluie lorsque l’on jardine.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un rat dans un jardin regardant une clôture en bois" src="https://images.theconversation.com/files/529078/original/file-20230530-23-iaic5a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/529078/original/file-20230530-23-iaic5a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/529078/original/file-20230530-23-iaic5a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/529078/original/file-20230530-23-iaic5a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/529078/original/file-20230530-23-iaic5a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/529078/original/file-20230530-23-iaic5a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/529078/original/file-20230530-23-iaic5a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Méfiez-vous si vous avez des rats dans votre jardin.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/rat-garden-1842737110">battybattrick/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces bactéries peuvent profiter de lésions cutanées ou de gouttelettes atteignant nos muqueuses pour coloniser notre organisme. Elles provoquent la leptospirose, une <a href="https://sante.gouv.fr/soins-et-maladies/maladies/maladies-infectieuses/article/leptospirose">infection (zoonose, car venant d’un animal)</a> qui entraîne des maux de tête, des fièvres, des frissons, des vomissements, une jaunisse et, dans certains cas, une insuffisance hépatique, une insuffisance rénale et une méningite.</p>
<h2>Méfiez-vous de vos outils électriques</h2>
<p>Tronçonneuse, taille-haie, tondeuse… Si les outils électriques ont clairement facilité notre travail dans le jardin, ils ont tout aussi clairement augmenté le risque de blessure.</p>
<p>Les taille-haies peuvent être un excellent moyen de dompter les arbres et les buissons, mais ils peuvent amputer au passage des doigts et <a href="https://www.dailymail.co.uk/news/article-9441081/Tragedy-man-dies-injuring-hedge-trimmer-Sydneys-leafy-northern-suburbs.html">infliger des blessures</a> de manière très efficace aux membres comme au torse – il y a une <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/alpes-maritimes/cagnes-sur-mer/jardinage-deux-roues-bricolage-avec-l-ete-les-accidents-de-la-main-se-multiplient-2569992.html">hausse de 30 % des accidents de la main en été dans le sud de la France</a> par exemple. Les taille-haies et les tondeuses à gazon peuvent également couper facilement les câbles électriques, ce qui peut entraîner une électrocution.</p>
<p>Faites preuve de bon sens : adoptez gants, chaussures fermées et attendez que le taille-haie soit arrêté avant de dégager les branches que vous avez coupées pour limiter les risques.</p>
<h2>Restez en sécurité</h2>
<p>Bien sûr, nombre de ces dangers paraissent rares, ou évidents. Oui, mais le risque est réel… Il existe heureusement des mesures simples, souvent évidentes elles aussi, à prendre pour les éviter :</p>
<ul>
<li><p>Vous avez des plaies, même minimes sur les mains ou des zones de peau qui seront exposées à la terre par exemple ? Nettoyez-les et couvrez-les pendant que vous sortez jardiner.</p></li>
<li><p>Assurez-vous que vos <a href="https://vaccination-info-service.fr/?gclsrc=aw.ds&gclid=CjwKCAjwzJmlBhBBEiwAEJyLu1PWrewafMsFuoQb1_XPNQA7du38jJ476MBts-RDXix1qyojJciuxBoCWnsQAvD_BwE&gclsrc=aw.ds&adfcd=1688647981._70CNyJhBkKm4e74EAZHow.Mjg2NzM5MywxOTEzMzMx">vaccinations</a> sont à jour (en particulier pour le tétanos).</p></li>
<li><p>Tenez tout ce qui est <a href="https://www.rhs.org.uk/advice/health-and-wellbeing/minimising-health-risks-in-the-garden">compost et engrais</a> éloignés de votre visage lorsque vous ouvrez les sacs.</p></li>
<li><p>Évitez d’attirer les rats en ne mettant pas d’aliments cuits sur votre <a href="https://www.growveg.com/guides/how-to-keep-rats-out-of-your-compost/">tas de compost</a>, <a href="https://www.ciphe.org.uk/public/plumbing-health-hazards/gardens/">couvrez vos réservoirs d’eau</a> et installez des pièges en cas d’infestation.</p></li>
<li><p>Calez les échelles avec attention, sur un sol plat, à l’écart des lignes électriques.</p></li>
<li><p>Appréciez la présence d’animaux sauvages… mais <a href="https://www.theguardian.com/environment/2014/aug/07/man-bitten-three-times-adder">laissez-les tranquilles</a>. Les serpents peuvent être dangereux, comme les renards notamment – qui transmettent l’<a href="https://theconversation.com/les-echinococcoses-des-maladies-parasitaires-en-expansion-181276">échinococcose</a>, une maladie parasitaire due à un ver plat.</p></li>
</ul>
<p>Et un dernier conseil de ma part. Chaque année, le service des brûlés de mon hôpital reçoit des personnes qui ont essayé d’accélérer le processus d’allumage de leur barbecue en <a href="https://www.brulures.be/fr/prevention/loisirs/barbecue">utilisant de l’essence</a>. Tous ne survivent pas. Alors si vous avez l’intention de faire cuire le fruit de votre travail sur un barbecue dans votre jardin, faites-le prudemment. Et assurez-vous d’avoir une <a href="https://www.anses.fr/fr/content/cuisson-au-barbecue-comment-pr%C3%A9venir-les-risques-pour-la-sant%C3%A9">cuisson adéquate</a> – ni rosée (viandes et poissons doivent être cuits à cœur pour les débarrasser de leurs éventuels parasites), ni brûlée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/208872/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stephen Hughes ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Profiter de son jardin est plaisant… et risqué. Chaque été, les accidents se multiplient et les risques d’infections diverses augmentent. Quels sont les plus fréquents ? Quels gestes simples adopter ?
Stephen Hughes, Senior Lecturer in Medicine, Anglia Ruskin University
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tag:theconversation.com,2011:article/205436
2023-05-28T15:36:04Z
2023-05-28T15:36:04Z
Maladies génétiques : comment un champignon comestible pourrait corriger notre ADN
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/528570/original/file-20230526-19-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4475%2C2965&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le clitocybe inversé (Lepista inversa) contient une molécule capable de corriger certains types de mutations.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Roodbruine_schijnridderzwammen_(Lepista_flaccida)._22-01-2021_(d.j.b.)_01.jpg">Dominicus Johannes Bergsma / Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Mucoviscidose, myopathies, hémophilies… <a href="https://www.plateforme-maladiesrares.org/presentation/les-maladies-rares.html">Les maladies génétiques touchent une personne sur vingt dans le monde</a>. En règle générale, elles apparaissent durant l’enfance, et sont liées à l’absence ou au dysfonctionnement d’une protéine. Leur issue est malheureusement souvent fatale, car les traitements permettant d’y remédier sont encore trop rares.</p>
<p>Nos travaux pourraient cependant ajouter une corde à l’arc des scientifiques qui cherchent à réparer certaines anomalies de l’ADN impliquées dans ces maladies. </p>
<p>Nous avons en effet identifié, dans un champignon commun qui pousse notamment dans les forêts françaises (le clytocybe inversé), une molécule capable <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29131862/">de corriger des mutations particulières appelées mutations « STOP »</a>, non seulement dans des cellules en culture, mais aussi chez la souris. Et peut-être, demain, chez l’être humain… Explications.</p>
<h2>Les mutations « STOP » ou mutations « non sens »</h2>
<p>Parmi les problèmes moléculaires qui peuvent mener au développement d’une maladie génétique figurent notamment certaines mutations particulières appelées mutations « non-sens » ou « STOP ». De telles mutations touchent environ 10 % des patients atteints de maladies génétiques. Or, à l’heure actuelle, aucun traitement ne permet de les soigner, même si quelques pistes thérapeutiques sont à l’étude.</p>
<p>Pour comprendre le problème, penchons-nous brièvement sur notre ADN. Celui-ci compose nos chromosomes ; il peut être considéré comme une longue chaîne constituée d’une succession de plus petites molécules, les nucléotides. Ces « maillons » sont de quatre types, symbolisés par les lettres A (Adénine), T (Thymine), G (Guanine) et C (Cytosine). L’enchaînement de ces quatre nucléotides constitue la « séquence » de l’ADN.</p>
<p>Certaines portions de cette séquence correspondent à des gènes, autrement dit des régions qui contiennent les informations nécessaires à la fabrication de protéines.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/pnYNsbCWBLg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>En temps normal, la séquence d’un gène permet de produire une protéine qui fonctionne correctement. Mais il arrive que l’ADN soit endommagé ou modifié. Dans certains cas, les modifications de séquence des gènes (ou « mutation ») qui en résulte font que les protéines correspondantes ne peuvent plus être fabriquées correctement. C’est par exemple le cas lorsqu’une mutation « non sens » (aussi appelée mutation « STOP ») est introduite dans l’ADN.</p>
<p>Ce type de mutation fonctionne comme un signal d’arrêt : lorsque le gène muté est utilisé pour produire la protéine correspondante, la fabrication de cette dernière s’interrompt prématurément. Conséquence : soit la protéine n’est pas produite, soit elle est trop courte, et ne fonctionne pas correctement.</p>
<p>Or, les protéines jouent d’innombrables rôles dans notre organisme. Les hormones, les anticorps, les récepteurs cellulaires, les enzymes, entre autres, sont des protéines. Si certaines d’entre elles sont non fonctionnelles, absentes ou anormales, des maladies peuvent donc rapidement survenir.</p>
<h2>Corriger les mutations non-sens grâce à un champignon ?</h2>
<p>Créée en 2003, la <a href="https://chembiofrance.cn.cnrs.fr/fr/composante/chimiotheque">chimiothèque nationale</a> est à la chimie ce que la bibliothèque nationale est à la littérature : une immense collection de plus de 80 000 composés chimiques et 15 000 extraits naturels originaux, mis à la disposition des équipes de recherche.</p>
<p>En 2012, 20 000 extraits de plantes, micro-organismes et champignons issus de cette chimiothèque nationale ont été testés via un protocole permettant d’identifier les composés capables de corriger efficacement les mutations non-sens dans des cellules humaines cultivées en laboratoire.</p>
<p>Ce criblage a permis de détecter une activité correctrice de mutations non-sens intéressante <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29131862/">dans un extrait provenant de <em>Lepista inversa</em> (ou clitocybe inversé)</a>. Ce champignon commun, comestible quoique peu savoureux, peut être ramassé dans les forêts d’Europe, d’Amérique du Nord ou d’Afrique du Nord.</p>
<p>Suite à cette découverte, nous avons entamé une collaboration avec les scientifiques du Muséum national d’histoire naturelle de Paris (qui avaient initialement préparé cet extrait pour le mettre en collection) afin de purifier la molécule impliquée dans cette activité.</p>
<p>C’est ainsi que nous avons identifié la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7083880/pdf/41467_2020_Article_15140.pdf">2,6-diaminopurine, ou DAP</a>. Étonnamment, cette molécule n’était pas connue pour posséder une telle capacité de correction.</p>
<h2>La DAP, un puissant correcteur de mutations non-sens</h2>
<p>Après avoir purifié la DAP, nous avons comparé son activité à celle d’autres molécules correctrices de mutations non-sens déjà connues. La molécule de champignon s’est montrée bien plus efficace que ses concurrentes pour corriger des mutations dans des cellules en culture.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="Schéma de la 2,6-diaminopurine" src="https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=458&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/528700/original/file-20230528-23-1x5wxe.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=576&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La 2,6-diaminopurine présente la capacité de corriger les mutations « non-sens »</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/2,6-Diaminopurine">Yikrazuul / Wikimedia Commons</a></span>
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</figure>
<p>L’étape suivante a été d’évaluer sa toxicité : bonne nouvelle, la DAP ne présente pas ou peu de toxicité sur les cellules en culture. Enfin, il a fallu élucider son mode d’action, autrement dit, la façon dont elle fonctionne. Ce dernier point est très important, car il permet d’anticiper de possibles effets secondaires.</p>
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<p>Nous avons découvert que la DAP inhibe l’activité d’une enzyme qui agit sur la machinerie cellulaire impliquée dans la fabrication des protéines. Sans entrer dans les détails : l’inhibition de cette enzyme a pour conséquence de rendre « lisible » la séquence de mutation « STOP ».</p>
<p>En absence de DAP, une telle séquence est perçue comme un signal d’arrêt par la machinerie cellulaire qui fabrique les protéines. Mais après l’ajout de DAP, la machinerie cellulaire qui fabrique les protéines n’est plus arrêtée par la présence d’une séquence « STOP ».</p>
<p>Point particulièrement intéressant, ce mécanisme fonctionne seulement lorsque la séquence « STOP » résulte d’une mutation. Les « stops » physiologiques, qui sont normalement présents à la fin des séquences destinées à produire les protéines, ne sont pas affectés par la DAP. La production des protéines « normales » ne devrait donc pas être modifiée.</p>
<p>Après ces premières recherches menées sur des cellules en culture, nous avons poursuivi l’étude de cette molécule. Nous avons notamment cherché à savoir si elle pouvait corriger des mutations non-sens responsables d’une maladie génétique, la mucoviscidose.</p>
<h2>La DAP comme approche thérapeutique de la mucoviscidose</h2>
<p>La mucoviscidose est une maladie génétique rare qui touche principalement les voies respiratoires et le système digestif. En France, et plus généralement dans les pays occidentaux, c’est l’une des maladies génétiques les plus fréquentes. Elle affecte environ <a href="https://www.inserm.fr/dossier/mucoviscidose/">6000 personnes dans notre pays, où 200 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année</a>.</p>
<p>La mucoviscidose est due à une mutation du gène qui permet de fabriquer la protéine CFTR. Présente dans la membrane des cellules de diverses muqueuses (muqueuse respiratoire, muqueuse digestive…), CFTR forme un canal qui permet la sécrétion d’ions chlorure vers l’extérieur des cellules. Chez les personnes atteintes de mucoviscidose, ce canal dysfonctionne.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Photo d’une mère aidant un jeune enfant doté d’une chambre d’inhalation à l’utiliser." src="https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/528701/original/file-20230528-189676-31uypm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les poumons des malades atteints de mucoviscidose sont peu à peu détruits par une inflammation anormale.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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</figure>
<p>En conséquence, les cellules sécrètent moins de chlorure et, surtout, moins d’eau. Moins hydraté, le mucus qui recouvre les muqueuses devient visqueux, collant, et ne remplit plus correctement sa fonction de protection vis-à-vis des microbes. Bactéries et champignons restent piégés dans les bronches, ce qui provoque des infections répétées et une inflammation durable qui dégrade peu à peu les poumons, entraînant des difficultés à respirer et, à terme, le décès des malades.</p>
<p>Avec l’aide de l’association <em>Vaincre la mucoviscidose</em>, nous avons dans un premier temps évalué le potentiel thérapeutique de la DAP sur des cellules en culture.</p>
<p>Nos résultats ont révélé que l’ajout de DAP corrige effectivement les mutations non-sens présentes dans le gène CFTR de telles cellules et permet de restaurer la fonction de la protéine correspondante. Sur des cellules de patients atteints de mucoviscidose due à une mutation non-sens, le rétablissement de la fonction de CFTR a été observé en moins de 24 heures.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/mucoviscidose-pourquoi-les-femmes-sont-elles-plus-vulnerables-que-les-hommes-195467">Mucoviscidose : Pourquoi les femmes sont-elles plus vulnérables que les hommes ?</a>
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<p>L’étape suivante a consisté à tester la capacité de la molécule à corriger les mutations non-sens au sein d’une organisation cellulaire s’approchant de celle d’un organe.</p>
<h2>Des résultats encourageants</h2>
<p>Grâce à une collaboration avec l’équipe de Jeff Beekman, aux Pays-Bas, nous avons pu tester la DAP sur des <a href="https://www.inserm.fr/actualite/organoides-quelle-place-dans-recherche-demain/">organoïdes intestinaux</a>.</p>
<p>Ces <a href="https://theconversation.com/les-compagnons-biologiques-un-atout-pour-la-medecine-du-futur-109304">« mini-organes »</a> sont des assemblages de cellules dont l’organisation rappelle celle de l’organe dont ils sont issus (dans notre cas, l’intestin, car les cellules utilisées dérivaient de cellules issues d’une biopsie rectale). L’intérêt est d’obtenir une architecture et des fonctionnalités proches de celle de l’organe originel.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C175%2C1146%2C785&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=578&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=578&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=578&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=726&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=726&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/252235/original/file-20190102-32133-1nzat8f.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=726&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Organoïde intestinal cultivé à partir de cellules souches Lgr5+</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.1002149">Meritxell Huch</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’ajout de DAP dans le milieu de culture de ces organoïdes a permis, là encore, de restaurer la fonction de la protéine CFTR. Et ce, avec une efficacité comparable à celle d’un médicament déjà utilisé pour traiter des patients atteints de formes de mucoviscidose dues à un autre type de mutation que des mutations non-sens.</p>
<p>Ce résultat corrobore l’hypothèse que la DAP pourrait constituer un candidat médicament pertinent pour le traitement des mucoviscidoses liées à des mutations non-sens.</p>
<p>Enfin, pour se rapprocher encore davantage de la physiologie rencontrée chez les patients, nous avons effectué des expérimentations chez la souris.</p>
<h2>La DAP est aussi efficace chez l’animal</h2>
<p>Chez ce rongeur, l’absence de protéine CFTR conduit à une forte mortalité non seulement durant la gestation, mais aussi pendant les premiers jours qui suivent la naissance.</p>
<p>En nourrissant quotidiennement avec de la DAP, trois jours durant, des souris adultes porteuses d’une mutation non-sens dans le gène CFTR, nous avons montré que nous effacions les conséquences de cette dernière : ce traitement a en effet permis de <a href="https://www.cell.com/molecular-therapy-family/molecular-therapy/fulltext/S1525-0016(23)0 0014-X">restaurer la production et la fonction de la protéine CFTR</a>.</p>
<p>De manière encore plus remarquable, ces travaux ont révélé qu’il est possible de restaurer l’expression et la fonction de CFTR chez le fœtus, en administrant de la DAP à une femelle gestante. À la naissance, la protéine CFTR était présente chez les souriceaux, et le pourcentage de souris porteuses de la mutation correspondait au pourcentage attendu pour une mutation non mortelle. Ces résultats indiquent que la DAP est donc capable de passer la barrière du placenta.</p>
<p>Nous nous sommes aussi aperçus que nous pouvions prolonger l’exposition des petits après la naissance en poursuivant le traitement de la mère. En effet, la DAP passe aussi dans le lait maternel. Les souriceaux sont donc exposés à la molécule pendant toute la période d’allaitement.</p>
<p>Enfin, la DAP est également connue pour sa capacité à traverser la barrière hémato-encéphalique, qui protège le cerveau, ce qui laisse entrevoir la possibilité de l’utiliser afin de traiter des mutations non-sens dans cet organe.</p>
<p>Ce type d’intervention n’est cependant pas encore à l’ordre du jour : plusieurs étapes restent à franchir avant de pouvoir envisager d’utiliser la DAP comme médicament chez l’être humain.</p>
<h2>Et maintenant ?</h2>
<p>On peut aujourd’hui raisonnablement considérer la DAP comme une candidate solide pour la mise au point d’un traitement des formes de mucoviscidose dues aux mutations non-sens. Cependant, elle ne peut pas encore être administrée en l’état à l’être humain. Avant d’en arriver là, deux étapes majeures doivent encore être franchies.</p>
<p>Il faudra tout d’abord trouver une formulation pharmacologique qui permettra de rendre la DAP facilement administrable, et qui optimisera sa distribution dans l’organisme au cours du traitement.</p>
<p>Surtout, il faudra tester sa toxicité potentielle chez l’animal et l’être humain. Des tests réglementaires permettront de déterminer si la DAP peut entrer en <a href="https://theconversation.com/essais-cliniques-pratiques-et-reglementation-en-france-53331">phase d’essais cliniques</a> (durant laquelle elle sera administrée à des patients) ou si elle est au contraire trop dangereuse pour être administrée aux malades.</p>
<p>Ces deux étapes nécessitant des budgets très importants, elles seront entreprises par une jeune start-up, Genvade Therapeutics.</p>
<p>Jusqu’à présent, seules deux molécules correctrices de mutations non-sens ont atteint la phase des essais cliniques (ataluren et ELX-02). Malheureusement, ni l’une ni l’autre n’a permis d’améliorer significativement les symptômes des patients. Une des raisons avancées pour expliquer cet échec est que l’efficacité de ces molécules pourrait être trop faible pour se traduire par un bénéfice thérapeutique.</p>
<p>La DAP présente toutefois un profil plus prometteur, puisque son efficacité est très largement supérieure à celle de ces composés. Si les espoirs qu’elle soulève s’avèrent fondés, elle pourrait en théorie être utilisée pour traiter d’autres maladies génétiques, comme la myopathie de Duchenne ou l’hémophilie par exemple. Mais pour cela, de nombreux travaux complémentaires seront nécessaires.</p>
<p>Une chose est certaine : quelle que soit l’issue de ces recherches, elles auront été riches d’enseignements. Elles nous auront notamment rappelé que la biodiversité qui nous entoure est une richesse à préserver. En effet, qui aurait pu prévoir qu’un champignon aussi banal que le clitocybe inversé abritait une molécule potentiellement capable de corriger notre ADN ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205436/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabrice Lejeune est fondateur de la start-up Genvade Therapeutics. Fabrice Lejeune a reçu des financements de Vaincre la mucoviscidose, la Fondation maladies rares, la Fondation les Ailes, l'Agence Nationale de la Recherche et l'AFM-Téléthon. De plus, le laboratoire a reçu un financement du Contrat Plan Etat Région 2015-2020. </span></em></p>
En cuisine, le clitocybe inversé, un champignon comestible de nos forêts, est médiocre. Mais son intérêt est ailleurs : capable d’agir sur l’ADN, il pourrait un jour soigner des maladies génétiques.
Fabrice Lejeune, Chercheur Inserm au sein du laboratoire CANcer Heterogeneity, Plasticity and Resistance to THERapies (Inserm/ CNRS/ Université de Lille/Institut Pasteur de Lille/CHU Lille), Université de Lille
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tag:theconversation.com,2011:article/203260
2023-04-10T19:24:07Z
2023-04-10T19:24:07Z
Candida auris : que sait-on de ce champignon mortel qui se répand dans les hôpitaux des États-Unis ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/519612/original/file-20230405-28-orfs27.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C9%2C3295%2C2534&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le champignon Candida auris est difficile à combattre.</span> <span class="attribution"><span class="source">Stephanie Rossow/CDC</span></span></figcaption></figure><p>Un « supermicrobe » du nom de <em>Candida auris</em>, un champignon pathogène, est en train de se propager rapidement dans les hôpitaux et les maisons de retraite des États-Unis. Au point qu’une <a href="https://www.cdc.gov/media/releases/2023/p0320-cauris.html">alerte vient d’être diffusée par le CDC (Centers for Disease Control and Prevention)</a>.</p>
<p>Depuis la découverte du premier cas en 2016, ce micro-organisme s’est répandu dans la <a href="https://www.cdc.gov/fungal/candida-auris/tracking-c-auris.html">moitié des 50 États du pays</a>. Selon un <a href="https://www.acpjournals.org/doi/10.7326/M22-3469">nouveau rapport</a>, les infections qu’il cause ont triplé entre 2019 et 2021.</p>
<p>Mais les États-Unis ne sont pas les seuls concernés. Depuis qu’elle a été identifiée pour la première fois au Japon en 2009, cette levure a été découverte dans <a href="https://www.cdc.gov/fungal/candida-auris/candida-auris-qanda.html">plus de 30 pays</a>, parmi lesquels le Royaume-Uni, l'Inde, la Corée du Sud… et la France (<a href="https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=730">dans une moindre mesure, actuellement</a>).</p>
<p>Cette situation est extrêmement préoccupante, car l’infection par <em>Candida auris</em> est l’une des plus difficiles à traiter à l’heure actuelle : ce champignon est en effet résistant à de nombreux traitements fongicides.</p>
<p>Ce <em>Candida</em> est apparenté à d’autres types de levures qui peuvent entraîner des infections fongiques, comme <em>Candida albicans</em> – responsable du « muguet buccal » (reconnaissable à la prolifération blanchâtre locale de ce microorganisme sur la langue et les muqueuses). <em>Candida auris</em> est cependant très différent et, à certains égards, très inhabituel.</p>
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<h2>Les dangereuses particularités de <em>Candida auris</em></h2>
<p>Alors que de nombreuses autres espèces de <em>Candida</em> aiment se développer dans nos intestins en tant qu’éléments du <a href="https://theconversation.com/microbiote-intestinal-et-sante-une-alliance-que-chacun-peut-optimiser-168965">microbiote (la « flore intestinale »)</a>, ce n’est pas le cas de <em>Candida auris</em>, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/33385336/">qui semble préférer la peau humaine</a>. La peau des personnes ainsi « colonisées » peut excréter beaucoup de nouvelles levures, ce qui est à l’origine de la forte <a href="https://journals.plos.org/plospathogens/article?id=10.1371/journal.ppat.1008563">contamination de leurs vêtements et des surfaces alentour</a>.</p>
<p>De ce fait, <em>Candida auris</em> peut être à l’origine d’épidémies, en particulier dans les unités de soins intensifs et les maisons de retraite, où, d’une manière générale, les personnes sont plus susceptibles de contracter des infections fongiques. Cette situation est inhabituelle, car généralement les infections fongiques ne se propagent pas d’un individu à l’autre.</p>
<p>Ce champignon peut également survivre sur les surfaces pendant <a href="https://www.cdc.gov/fungal/candida-auris/c-auris-drug-resistant.html">plusieurs semaines</a>, et il peut être difficile de s’en débarrasser. À cet effet, il est nécessaire de <a href="https://www.gov.uk/government/publications/candida-auris-infection-control-in-community-care-settings">renforcer le nettoyage et le lavage des mains</a> pour tenter de limiter sa propagation et l’exposition des patients à risque (immunodéprimés, etc.).</p>
<p>Il faut savoir que la plupart des personnes colonisées par <em>Candida auris</em> ne seront pas malades et ne s’apercevront même pas de sa présence… Par contre, cette levure <a href="https://www.gov.uk/government/publications/candida-auris-a-guide-for-patients-and-visitors">provoque des infections graves</a> lorsqu’elle pénètre dans l’organisme, via des plaies chirurgicales ou suite à la pose d’une intraveineuse. Une fois à l’intérieur du corps, elle peut infecter les organes et le sang, provoquant ainsi des atteintes sévères et potentiellement mortelles.</p>
<h2>Un risque mortel</h2>
<p>Le <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC9344200/">taux de mortalité</a> chez les personnes infectées par ce champignon (par opposition aux personnes simplement colonisées) se situe entre 30 et 60 %. Il s’agit d’une fourchette large, car déterminer un taux de mortalité précis est difficile. En effet, les personnes infectées par <em>Candida auris</em> sont souvent déjà gravement malades, et souffrent d’autres affections.</p>
<p>En outre, diagnostiquer une infection par cette levure n’est pas aisé, car elle peut engendrer un <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7211321/#S0004title">large éventail de symptômes peu spécifiques</a>, notamment de la fièvre, des frissons, des maux de tête et des nausées.</p>
<p><em>Candida auris</em> doit donc être étroitement surveillé, car l’infection qu’il provoque peut aisément être confondue avec d’autres maladies. Ces dernières années, de nouveaux tests ont été mis au point pour faciliter son dépistage.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un professionnel de santé pose une intraveineuse sur la main d’un patient" src="https://images.theconversation.com/files/517943/original/file-20230328-480-mklbx5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/517943/original/file-20230328-480-mklbx5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/517943/original/file-20230328-480-mklbx5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/517943/original/file-20230328-480-mklbx5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/517943/original/file-20230328-480-mklbx5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/517943/original/file-20230328-480-mklbx5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/517943/original/file-20230328-480-mklbx5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Candida auris peut pénétrer dans l’organisme via une intraveineuse.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/cropped-image-female-nurse-attaching-iv-224584333">Tyler Olson/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au Royaume-Uni, le premier cas d’infection à <em>Candida auris</em> a été signalé en 2013. Toutefois, il est possible que d’autres infections se soient produites avant cette date – il semblerait en effet que certains des premiers cas aient été <a href="https://journals.plos.org/plospathogens/article?id=10.1371/journal.ppat.1008563">mal identifiés</a>, et attribués à des levures non apparentées à celle-ci.</p>
<p>Jusqu’à présent, les autorités sanitaires du Royaume-Uni <a href="https://journals.plos.org/plospathogens/article?id=10.1371/journal.ppat.1008563">ont réussi à stopper toute épidémie majeure et la propagation de la plupart des cas a été limitée</a>. La plupart des patients tombés malades à cause de <em>Candida auris</em> avaient voyagé dans des régions du monde où cette levure <a href="https://journals.plos.org/plospathogens/article?id=10.1371/journal.ppat.1008563">se rencontre plus fréquemment ou circule depuis plus longtemps</a>.</p>
<h2>Sous l’impulsion du Covid</h2>
<p>L’augmentation du nombre d’infections à <em>Candida auris</em> serait en partie liée à la pandémie de Covid-19. Les malades qui font des formes graves de Covid peuvent en effet avoir besoin d’une ventilation mécanique et nécessiter un séjour prolongé en unité de soins intensifs. Or il s’agit là de <a href="https://journals.plos.org/plospathogens/article?id=10.1371/journal.ppat.1008563">facteurs de risque de colonisation et d’infection par <em>Candida auris</em></a> lorsque la souche est présente à l’hôpital.</p>
<p>Déterminer précisément comment la pandémie a affecté les taux et le nombre d’infections fongiques dans le monde prendra du temps. Connaître la réponse à ces questions est cependant important si l’on veut pouvoir prédire comment pourraient à l’avenir fluctuer les cas de colonisation et d’infection par <em>C. auris</em>.</p>
<p>Comme pour la plupart des maladies potentiellement mortelles causées par des champignons, celles dues à <em>Candida auris</em> sont difficiles à traiter et les options, limitées. Nous ne disposons que d’une poignée de médicaments antifongiques pour les combattre, de sorte que lorsqu’une espèce est résistante à un ou plusieurs de ces médicaments, les options thérapeutiques deviennent rapidement extrêmement restreintes.</p>
<p>Or, certaines infections à <em>Candida auris</em> sont résistantes aux <a href="https://www.cdc.gov/fungal/candida-auris/c-auris-drug-resistant.html">trois types de médicaments antifongiques</a> actuellement disponibles.</p>
<p>Les professionnels de la santé doivent donc rester vigilants face à cette levure, car sans une surveillance étroite et une sensibilisation accrue à cette infection, nous pourrions assister à l’avenir à une augmentation des épidémies et des maladies graves qu’elle provoque.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203260/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Rebecca A. Drummond est financée par le Conseil de la recherche médicale.</span></em></p>
Une levure multirésistante aux traitements antifongiques, Candida auris, se répand aux États-Unis et dans de nombreux autres pays. Un appel à la vigilance est lancé. Quels sont les risques ?
Rebecca A. Drummond, Associate Professor, Immunology and Immunotherapy, University of Birmingham
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/199478
2023-02-17T14:55:09Z
2023-02-17T14:55:09Z
Champignons, virus, bactéries… Voici ce qu’a trouvé une microbiologiste dans les spas – et ce n’est pas ragoûtant
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/510131/original/file-20230214-22-2mqek9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C21%2C3600%2C2376&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Quand on entre dans un jacuzzi, tout ce qu'on a sur notre peau se dépose dans l’eau chaude qui tourbillonne autour de nous.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Pendant des siècles, les humains se sont baignés dans des eaux publiques. Parfois pour se laver, mais plus souvent pour le plaisir. Dans la Grèce antique, les bains étaient pris dans de l’eau douce, ou dans la mer, perçue comme un lieu sacré dédié aux dieux locaux et s’y baigner était considéré comme un <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2557448/pdf/medhistsuppl00037-0011.pdf">acte de culte</a>.</p>
<p>Ce sont toutefois les Romains qui ont créé des aqueducs d’État pour permettre la construction de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/11830439/">bains publics à grande échelle</a>. Ceux-ci étaient principalement utilisés pour la relaxation, mais aussi pour des plaisirs intimes. Eh oui, c’est souvent dans les bains publics que les Romains s’adonnaient à des <a href="https://www.dailymail.co.uk/news/article-399017/The-steamy-truth-Roman-Bath.html">actes coquins</a>, parfois avec les esclaves préposés aux bains.</p>
<p>Deux millénaires plus tard, nous aimons toujours les bains publics, même si beaucoup de gens ont désormais leur propre spa, ou bains à remous, dont les ventes ont connu une <a href="https://www.theguardian.com/news/2021/apr/12/bubble-trouble-thieves-hot-tub-craze-whirlpool-baths">forte hausse</a> <a href="https://www.lesoleil.com/2022/05/14/un-autre-gros-ete-pour-les-pisciniers-db7abfb1597e6c86e82a82ff805b6f7a">pendant la pandémie</a>.</p>
<p>Pour ceux qui n’en ont pas à la maison, il y a la salle de sport ou le spa du coin. Et de nombreux hôpitaux en possèdent un. En effet, les bains à remous sont communément utilisés à des fins thérapeutiques pour soulager et traiter l’inflammation des articulations chez des personnes atteintes de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1754027/">rhumatisme ou d’arthrose</a>. L’usage d’un spa est souvent considéré comme une expérience de luxe, à la fois relaxante et régénératrice.</p>
<p>La chaleur de l’eau du bain dilate naturellement les vaisseaux sanguins, ce qui aide les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4049052/">muscles à se détendre</a> et soulage les articulations douloureuses. En plus d’être apaisantes physiquement, l’eau chaude bouillonnante et la compagnie de personnes qui partagent l’expérience avec nous peuvent également engendrer un bien-être psychologique.</p>
<h2>Bactéries, virus et champignons</h2>
<p>Il ne faut toutefois pas oublier que quand on entre dans un bain à remous, tout ce qu’on a sur notre peau se dépose dans l’eau chaude qui tourbillonne autour de nous. <a href="https://www.huffingtonpost.co.uk/entry/hot-tub-germs_n_5268919">Cela inclut</a> les quelque 100 mg de <a href="https://www.cuh.nhs.uk/patient-information/bowel-control/">matières fécales</a> qui se trouvent généralement entre nos fesses. Ainsi, lorsqu’on se détend dans l’eau chaude, il est fort probable qu’on respire ou avale les <a href="https://www.medicinenet.com/what_diseases_can_you_get_from_a_hot_tub/article.htm">bactéries, les virus et les champignons</a> du corps de son compagnon de spas.</p>
<p>Plus il y a de personnes dans le bain, plus le taux de matières fécales et de sueur (et d’urine si quelqu’un a fait pipi dans l’eau) est élevé. Et ces dépôts servent de nutriments aux bactéries.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une femme prend des photos dans un bain à remous" src="https://images.theconversation.com/files/507856/original/file-20230202-4223-3a6cvg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/507856/original/file-20230202-4223-3a6cvg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/507856/original/file-20230202-4223-3a6cvg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/507856/original/file-20230202-4223-3a6cvg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/507856/original/file-20230202-4223-3a6cvg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/507856/original/file-20230202-4223-3a6cvg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/507856/original/file-20230202-4223-3a6cvg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">« J’adore quand on échange des matières fécales. ».</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.alamy.com/small-group-of-female-friends-enjoying-a-weekend-away-they-are-taking-a-group-selfie-while-sitting-in-a-hot-tub-image244340274.html?imageid=B3F3C810-62AA-4E14-B14A-5B0EF34D7C59&p=386705&pn=1&searchId=1766fcdba780ec00b8395ff08531181f&searchtype=0">(DGLimages/Alamy Stock Photo)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Comme on recommande aux propriétaires de spas de ne changer l’eau que <a href="https://www.piscinespa.com/actualites-reportages/comment-changer-leau-de-son-spa#:%7E:text=La%20r%C3%A8gle%20est%20de%20changer,utilis%C3%A9%20de%20fa%C3%A7on%20tr%C3%A8s%20r%C3%A9guli%C3%A8re.">tous les trois mois</a> environ, les bactéries se développent. Pour la sécurité microbiologique, la plupart de bains à remous qui font recirculer l’eau sont équipés de filtres qui éliminent les microbes et leur eau est traitée avec des microbicides (pour éliminer les germes) tels que le chlore, le brome ou d’autres désinfectants qui <a href="https://www.canada.ca/content/dam/canada/health-canada/migration/healthy-canadians/publications/healthy-living-vie-saine/water-recreational-recreative-eau/alt/pdf/water-recreational-recreative-eau-fra.pdf">contrôlent le nombre de bactéries</a>.</p>
<p>Ces produits chimiques sont toxiques et peuvent irriter la peau et les yeux. C’est pourquoi il est conseillé de prendre une douche après le bain à remous (avant aussi). La température de l’eau dans un bain à remous (environ 40 °C) peut également causer des problèmes de santé potentiellement graves, comme une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8548817/">surchauffe du corps</a>, qui peut entraîner une sensation de faiblesse ou même une perte de conscience, voire la noyade.</p>
<p>C’est particulièrement risqué pour les <a href="https://www.nhs.uk/common-health-questions/pregnancy/is-it-safe-to-use-a-sauna-or-jacuzzi-if-i-am-pregnant/">femmes enceintes</a> et les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8548817/">enfants</a>, ainsi que les personnes souffrant de problèmes de santé sous-jacents, qui doivent toujours consulter leur médecin avant d’utiliser un spa. C’est pourquoi l’on conseille de ne pas faire des séances de plus de 15 minutes dans un spa et jamais sans surveillance.</p>
<h2>Sale ou dégoûtant ?</h2>
<p>Si les bains à remous privés sont relativement sûrs d’un point de vue microbiologique, les spas publics (dans des hôtels ou spas) peuvent être contaminés <a href="https://www.inspq.qc.ca/pdf/publications/960_ContaminationMicroSpasQc.pdf">par des bactéries infectieuses</a> (germes), surtout si l’eau est recyclée.</p>
<p>Le problème provient du fait que les usagers ne respectent pas les consignes d’hygiène personnelle et que le traitement de l’eau est inadéquat. Les bains publics mal entretenus peuvent causer des épidémies d’infections dues à des bactéries associées au corps humain qui survivent dans l’eau.</p>
<p><a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/11095998/">Parmi celles-ci</a> figurent <a href="https://www.cdc.gov/ecoli/index.html">E.coli</a>, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK441868/#:%7E:text=Staphylococcus%20aureus%20is%20a%20gram,acquired%20and%20hospital%2Dacquired%20settings."><em>Staphylococcus aureus</em></a>, <a href="https://www.gov.uk/government/collections/pseudomonas-aeruginosa-guidance-data-and-analysis#:%7E:text=Pseudomonas%20aeruginosa%20is%20a%20Gram,it%20rarely%20affects%20healthy%20individuals."><em>Pseudomonas aeruginosa</em></a> et <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK7619/"><em>Legionella pneumoniae</em></a>. Ces agents pathogènes du bain à remous <a href="https://www.cdc.gov/healthywater/swimming/swimmers/rwi.html">peuvent provoquer</a> des infections intestinales, des diarrhées, des septicémies, des <a href="https://www.cdc.gov/healthywater/swimming/swimmers/rwi/rashes.html">infections cutanées</a>, des infections des voies urinaires et respiratoires, telles que la maladie du légionnaire. La <a href="https://www.cdc.gov/legionella/wmp/control-toolkit/hot-tubs.html">bactérie Legionella</a> se retrouve régulièrement dans les gouttelettes d’eau présentes dans la vapeur des spas, et l’inhalation de cette vapeur contaminée peut causer une pneumonie potentiellement fatale.</p>
<p>Le risque d’infection lié aux spas est si important que les Centers for Disease Control américains ont publi des <a href="https://www.cdc.gov/healthywater/swimming/swimmers/hot-tub-user-information.html">recommandations</a> sur la manière de s’en prémunir.</p>
<p>Si l’on souhaite quand même profiter d’un bain à remous, peut-on vérifier s’il est sans danger pour la santé ? Certains signes manifestes nous permettent de savoir qu’un bain à remous est rempli de germes. Lorsque de l’urine et d’autres fluides corporels tels que la sueur se mélangent au chlore utilisé pour désinfecter l’eau des spas, cela crée un irritant, un produit chimique à l’odeur âcre appelé chloramine, qui provoque des douleurs aux yeux quand on se baigne dans une <a href="https://piscineinfoservice.com/traitement-eau/comment-eliminer-chloramines">piscine publique</a>.</p>
<p>Plus il y a de personnes qui laissent leurs fluides corporels dans l’eau, plus l’odeur de la <a href="https://poolonomics.com/chloramines/">chloramine</a> (semblable à celle de l’eau de Javel) sera forte et plus il y a de risques que le spa ne contienne pas assez de désinfectant et trop de bactéries. Par conséquent, si une forte odeur se dégage d’un bain à remous, il vaut peut-être mieux ne pas y entrer, même si l’eau semble propre et claire, bien que l’eau finit par devenir plus trouble quand elle n’est pas suffisamment traitée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199478/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Primrose Freestone ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Lorsqu’on se détend dans l’eau chaude d’un spa, il est fort probable qu’on respire ou avale les bactéries, les virus et les champignons des personnes qui partagent le bain avec vous.
Primrose Freestone, Senior Lecturer in Clinical Microbiology, University of Leicester
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/197971
2023-01-31T15:13:35Z
2023-01-31T15:13:35Z
Le Canada devient un chef de file dans le traitement des troubles de santé mentale par des psychédéliques
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/504771/original/file-20230116-12856-ajf04l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C0%2C1982%2C1308&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les drogues psychédéliques sont présentées comme une solution potentielle aux besoins croissants en santé mentale. Mais les champignons magiques ne sont pas une solution magique.</span> <span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Peter Dejong)</span></span></figcaption></figure><p><a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1922804/reglement-drogues-psychedeliques-acces-expert-alberta">En Alberta</a>, il sera désormais possible d’ajouter la thérapie assistée par les psychédéliques à la liste des traitements offerts pour les troubles de santé mentale.</p>
<p>Les psychiatres et les législateurs albertains affirment prendre une longueur d’avance en créant une réglementation visant à garantir un usage sûr de substances hallucinogènes dans un cadre thérapeutique. Depuis le 16 janvier, les <a href="https://www.alberta.ca/psychedelic-drug-treatment-service-provider-licensing.aspx">psychiatres enregistrés et autorisés</a> de la province peuvent les prescrire.</p>
<p>Cette nouvelle politique albertaine pourrait constituer un premier pas vers l’acceptation des psychédéliques comme substances médicinales au Canada. Par le passé, ces drogues étaient principalement recherchées à des fins récréatives et non cliniques. Et, si le cannabis nous a appris quelque chose, c’est que la médicalisation peut mener directement à la décriminalisation et à la commercialisation.</p>
<p><a href="https://www.camh.ca/fr/info-sante/index-sur-la-sante-mentale-et-la-dependance/les-hallucinog%C3%A8nes">Les drogues psychédéliques</a> – comme le LSD, la psilocybine (champignons magiques), la MDMA (ecstasy) et la DMT (ayahuasca) – sont des substances criminalisées dans la plupart des juridictions du monde. Mais de nombreuses personnes pensent qu’on devrait les considérer pour un usage thérapeutique. À certains endroits, on envisage de <a href="https://bc.ctvnews.ca/stigma-against-psychedelics-could-fade-with-b-c-decriminalization-experts-say-1.6035470">décriminaliser complètement les psychédéliques</a>, car des plantes comme les champignons, même « magiques », ne devraient pas faire l’objet de restrictions sur le plan légal.</p>
<p>Après les réformes relatives au cannabis, les psychédéliques pourraient être la prochaine cible dans le démantèlement de la guerre contre les drogues. <a href="https://www.justice.gc.ca/fra/jp-cj/cannabis/">En décriminalisant le cannabis</a>, le Canada a joué un rôle de pionnier à l’échelle internationale. Mais ses citoyens sont-ils prêts à avoir le même rôle dans le cas des psychédéliques ?</p>
<h2>Premières recherches sur les psychédéliques</h2>
<p>Le Canada a déjà fait office de précurseur. Dans les années 1950 et 1960, des chercheurs ont lancé la première vague de la science psychédélique. Parmi eux se trouvaient des psychiatres canadiens qui ont <a href="https://www.mqup.ca/psychedelic-prophets-products-9780773555068.php">inventé le mot « psychédélique »</a> et fait la une des journaux avec des percées spectaculaires dans le <a href="https://doi.org/10.1093/shm/hkl039">traitement de l’alcoolisme par le LSD</a>.</p>
<p>Des thérapeutes de Vancouver ont également utilisé le LSD et la psilocybine des champignons pour traiter la <a href="https://www.anvilpress.com/books/the-acid-room-the-psychedelic-trials-and-tribulations-of-hollywood-hospital">dépression et l’homosexualité</a>. Si l’homosexualité était considérée à la fois comme illégale et comme un trouble de santé mentale jusqu’à la fin des années 1970, les thérapeutes psychédéliques ont lutté contre ces étiquettes, car les personnes qu’ils ont traitées pour une attirance envers le même sexe développaient une meilleure acceptation de soi – ce qui se trouvait en ligne avec le mouvement des droits des personnes homosexuelles.</p>
<p>Vers la fin des années 1960, malgré des rapports positifs sur leurs bénéfices cliniques, les psychédéliques étaient surtout réputés pour leur usage récréatif et pour avoir donné lieu à des abus sur le plan clinique. En effet, les drogues psychédéliques étaient passées du stade des essais pharmaceutiques à la culture populaire, et certains chercheurs s’étaient vu reprocher des <a href="https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/experiences-medicales-mkultra-a-montreal">pratiques contraires à l’éthique</a>.</p>
<h2>Réglementation et criminalisation</h2>
<p>La plupart des psychédéliques autorisés ont cessé de l’être dans les années 1970, en raison d’une série d’interdictions réglementaires et d’un ressac culturel. Dans les rapports de santé publique publiés depuis les années 1970, les psychédéliques ont été décrits comme des <a href="https://www.unodc.org/unodc/en/Resolutions/resolution_1968-05-23_6.html">objets de recherche non éthiques, entraînant des abus récréatifs et des risques personnels</a>, comprenant des blessures et même la mort.</p>
<p>Des chimistes clandestins et des consommateurs ont essayé de lutter contre cette image en déclarant que les substances psychédéliques donnent lieu à des révélations sur le plan intellectuel et spirituel et qu’elles <a href="https://www.artsy.net/article/artsy-editorial-psychedelics-offer-artists-creative-boost">stimulent la créativité</a>.</p>
<p>Un peu partout dans le monde, on a criminalisé les psychédéliques, que ce soit pour la recherche clinique ou l’expérimentation personnelle. L’utilisation des plantes hallucinogènes par des <a href="https://doi.org/10.2307/20067845">Autochtones et des non-Occidentaux</a> remonte encore plus loin dans l’histoire. Elle a également fait l’objet <a href="https://www.encyclopedia.com/history/united-states-and-canada/north-american-indigenous-peoples/native-american-church">d’un contrôle juridique</a> en raison de l’effet conjugué des pressions coloniales visant l’assimilation et d’une guerre contre les drogues qui ne faisait pas de distinction entre pratiques religieuses et comportements toxicomanes.</p>
<h2>Le retour des psychédéliques</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="Vue rapprochée de champignons à longue tige et au chapeau brun rougeâtre" src="https://images.theconversation.com/files/503188/original/file-20230105-105030-6isavs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/503188/original/file-20230105-105030-6isavs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/503188/original/file-20230105-105030-6isavs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/503188/original/file-20230105-105030-6isavs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/503188/original/file-20230105-105030-6isavs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/503188/original/file-20230105-105030-6isavs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/503188/original/file-20230105-105030-6isavs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">À l’heure actuelle, la recherche scientifique sur les psychédéliques accuse toujours un retard par rapport à l’enthousiasme que génèrent ces substances dans le grand public.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Peter Dejong)</span></span>
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</figure>
<p>Au cours de la dernière décennie, les lois interdisant les psychédéliques ont commencé à s’assouplir. La Food and Drug Administration américaine a accordé le statut de traitement innovant à la <a href="https://maps.org/news/media/press-release-fda-grants-breakthrough-therapy-designation-for-mdma-assisted-psychotherapy-for-ptsd-agrees-on-special-protocol-assessment-for-phase-3-trials/">MDMA</a> et à la <a href="https://www.livescience.com/psilocybin-depression-breakthrough-therapy.html">psilocybine</a>, en se fondant sur les résultats d’essais cliniques portant respectivement sur le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) et la dépression résistante.</p>
<p>Santé Canada a accordé des exemptions pour l’utilisation de la <a href="https://www.ledevoir.com/societe/sante/731412/sante-un-premier-patient-traite-avec-des-champignons-magiques-au-quebec">psilocybine chez les patients en fin de vie</a> souffrant d’anxiété et a approuvé des fournisseurs et des thérapeutes intéressés par la psychothérapie assistée par les psychédéliques. Des <a href="https://michener.ca/ce_course/fpp/">programmes de formation</a> en thérapie psychédélique font leur apparition partout au Canada, en prévision sans doute d’un changement de réglementation et étant donné le <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1870503/psilocybin-sante-formation-essais-clinic-nouvelle-ecosse">manque de professionnels</a> qualifiés pour pratiquer dans ce domaine.</p>
<p>À l’heure actuelle, la recherche scientifique sur les psychédéliques accuse un retard par rapport à l’enthousiasme que génèrent ces substances dans le grand public. On peut trouver de nombreux <a href="https://www.smh.com.au/lifestyle/health-and-wellness/the-unparalleled-greatest-feeling-or-risky-drug-inside-the-celebrity-loved-psychedelic-20220331-p5a9oa.html">témoignages de célébrités</a> et <a href="https://open-foundation.org/hear-about-psychedelic-clinical-studies-from-the-perspective-of-patients/">récits de patients convaincus</a>.</p>
<p>Pendant ce temps, le fardeau des troubles de santé mentale continue de <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1875096/sante-mentale-enveloppe-100-millions-liste-attente-prive">surcharger nos systèmes de soins de santé</a>. Les psychédéliques sont présentés comme une solution possible. Mais les champignons magiques ne sont pas des solutions magiques.</p>
<h2>Au-delà des besoins thérapeutiques</h2>
<p>Depuis toujours, les substances hallucinogènes ne sont pas faciles à classer : médicaments, stimulants spirituels, toxines, substances sacrées, drogues pour rave, etc. Que Santé Canada, ou la province de l’Alberta, choisisse ou non de considérer les psychédéliques comme des options de traitement, ces substances psychoactives continueront d’attirer les gens en dehors des cadres cliniques.</p>
<p>Le Canada a la possibilité de jouer un rôle de précurseur dans ce que certains appellent la renaissance psychédélique. Cela pourrait constituer une occasion d’investir dans des solutions durables de réduction des risques et dans l’inclusion des perspectives autochtones, plutôt que de nous précipiter pour introduire les psychédéliques sur le marché médical.</p>
<p><a href="https://www.culturalsurvival.org/publications/cultural-survival-quarterly/hallucinogenic-plants-and-their-use-traditional-societies">Les pratiques autochtones liées aux plantes sacrées</a> ne se limitent pas à la consommation de substances, elles comprennent aussi une préparation, une intention et une intégration, le tout souvent structuré dans un contexte rituel qui concerne autant la santé spirituelle que la santé physique ou mentale.</p>
<p>Cette approche est difficile à inscrire dans la loi canadienne, et il n’est pas évident de décider qui doit être responsable de la réglementation ou de l’administration de rituels qui se situent en dehors de notre système de soins de santé. Ces différences dans la façon dont nous concevons la valeur des psychédéliques offrent la possibilité de repenser la place du savoir autochtone dans nos systèmes de santé.</p>
<p>Nous sommes bien placés pour adopter une attitude sobre face à l’engouement pour les psychédéliques, qui a été motivé en grande partie par des intérêts financiers, et pour réfléchir aux aspects de l’expérience psychédélique que nous voulons préserver.</p>
<p>C’est peut-être le moment de réinvestir dans nos institutions publiques pour faire en sorte que les psychédéliques ne deviennent pas simplement une autre option pharmaceutique qui profite aux investisseurs privés. Cela peut aussi être l’occasion de réfléchir à la façon dont la guerre contre les drogues a nui aux individus et aux communautés et de trouver comment établir un meilleur rapport avec les produits pharmaceutiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197971/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Erika Dyck est financée par le Social Sciences and Humanities Research Council. Elle est membre du conseil d'administration de l'institut américain à but non lucratif Chacruna Institute for Psychedelic Plant Medicines.</span></em></p>
En décriminalisant le cannabis, le Canada a joué un rôle de pionnier à l’échelle internationale. Mais ses citoyens sont-ils prêts à avoir le même rôle dans le cas des psychédéliques ?
Erika Dyck, Professor and Canada Research Chair in the History of Health & Social Justice, University of Saskatchewan
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/196399
2022-12-13T18:59:37Z
2022-12-13T18:59:37Z
Arbres et champignons, une alliance sous nos pieds
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/500351/original/file-20221212-96198-wvvb7h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=18%2C11%2C2443%2C1332&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Section transversale d’une racine courte de Pin colonisée par le champignon ectomycorhizien _Cenococcum geophilum_ observée au microscope confocal.
</span> <span class="attribution"><span class="source">©Maira de Freitas Pereira, INRAE</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Quelle est donc cette forme surprenante, un soleil en éruption ? En fait, il s’agit de la pointe racinaire d’une jeune plantule de pin, colonisée par un champignon symbiotique, <em>Cenococcum geophilum</em>. C’est un organe chimérique minuscule – moins de deux millimètres – alliant cellules végétales et filaments mycéliens. Dénommée « ectomycorhize », soit racine-champignon, cette symbiose mutualiste joue un rôle fondamental dans la biologie des arbres et l’écologie des forêts depuis plus de 180 millions d’années.</p>
<p>À travers l’oculaire du microscope confocal, la racine transformée par la présence du champignon symbiotique se distingue par trois composantes structurales.</p>
<p>À la surface de la racine, on distingue d’abord un dense manteau vert (c’est la couleur de la sonde fluorescente) constitué de plusieurs couches de mycélium fongique entrelacées qui encerclent totalement la racine courte. Ce manteau joue un rôle majeur dans le stockage des nutriments produits par l’activité métabolique du champignon et de sa plante-hôte : éléments minéraux, sucres, acides aminés, lipides notamment.</p>
<p>Puis, un réseau de mycélium qui colonise l’intérieur de la racine en progressant entre les cellules de l’hôte, dont les parois sont ici colorées par une sonde fluorescente rouge. C’est au niveau de cette interface plante/champignon que se déroule l’échange symbiotique des éléments nutritifs : glucose et acides aminés circulent de la plante vers le mycélium, alors que les éléments minéraux transitent du mycélium vers la plante.</p>
<p>Enfin, émergeant du manteau, des projections du mycélium s’éloignent de la racine et se projettent dans le sol. Ce mycélium extérieur absorbe les éléments minéraux disponibles et les transporte vers la racine, stimulant la nutrition de l’arbre. De ce fait, la symbiose exerce une forte influence sur la croissance et la santé de la plante hôte.</p>
<p>Dans quelques années, il <a href="https://www.nature.com/articles/s41564-022-01228-3">sera vraisemblablement possible de semer ou de planter des arbres « fortifiés » par des champignons sélectionnés</a>. Ces arbres, protégés par leurs alliés microbiens, seront plus aptes à résister aux conditions environnementales stressantes imposées par les dérèglements climatiques.</p>
<h2>Interagir avec de nombreuses espèces de champignons</h2>
<p>Un arbre peut interagir simultanément avec plusieurs centaines d’espèces de champignons symbiotiques, par exemple des bolets, des lactaires, des cortinaires ou des amanites. En forêt, toute perturbation environnementale a un impact néfaste sur cette diversité.</p>
<p>En effet, les champignons symbiotiques sont très sensibles aux diverses interventions de gestion sylvicole couramment pratiquées dans les forêts aménagées. Par exemple, les <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02657392/">éclaircies et les « coupes rases » de régénération provoquent la disparition massive</a> de ces espèces symbiotiques. Les <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02657392/">substitutions d’essences sylvicoles</a> ont également un effet néfaste sur les communautés fongiques. Dans de nombreux boisements, le taillis-sous-futaie d’origine est de loin l’état sylvicole le plus favorable à la diversité fongique et toutes les <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02657392/">plantations mono-spécifiques</a>, feuillues ou résineuses, conduisent à une forte diminution de la biodiversité fongique. Le tassement des sols par le passage des engins forestiers, le piétinement excessif ou l’exportation des bois morts sont d’<a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02657392/">autres facteurs liés à l’exploitation forestière</a> qui affectent fortement les communautés fongiques des sols forestiers.</p>
<p>Ces études démontrent que toutes perturbations, d’origine naturelle ou anthropique, retentissent sur les interactions symbiotiques en équilibre plus ou moins instable. Les connaissances actuelles sur les relations forêt-champignons montrent donc clairement que tout projet à long terme de gestion durable des ressources forestières doit se préoccuper de la stabilité des interactions complexes entre champignons et végétaux. Toute réduction de la biodiversité fongique d’un sol représente donc une menace réelle pour la stabilité et la durabilité d’un écosystème forestier.</p>
<p>À l’heure de la COP28, il est urgent de rappeler qu’à peine 5 % des cinq millions d’espèces fongiques de notre planète sont identifiés et répertoriés. Il est donc indispensable de multiplier les expéditions mycologiques dans les <a href="https://fr.spun.earth">« points chauds de biodiversité »</a> afin de parfaire notre connaissance de la stupéfiante diversité des champignons. Ainsi, nous pourrons les protéger et mieux comprendre leurs rôles biologiques et écologiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196399/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Francis Martin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
À la découverte de l’ectomycorhize, un organe mi-arbre mi-champignon, qui permet à ces espèces de combattre les agressions.
Francis Martin, Directeur de recherche INRAE, Inrae
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/194579
2022-12-01T17:23:15Z
2022-12-01T17:23:15Z
Les amanites, ces champignons tisseurs de liens
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/495119/original/file-20221114-25-z5k7ih.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C7%2C1272%2C843&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les amanites tue-mouche tissent des liens à travers les écosystèmes forestiers, mais aussi entre les humains et les esprits.</span> <span class="attribution"><span class="source">Francis Martin</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p><em>Les amanites tue-mouches, très abondantes cet automne, provoquent en forêt une inquiétude respectueuse. Comme beaucoup d’autres champignons, elles ont une vie secrète, que les humains explorent depuis longtemps pour leurs propriétés hallucinogènes, et, depuis moins longtemps, pour leurs rôles dans les écosystèmes forestiers. Francis Martin, expert des interactions symbiotiques entre les champignons et les arbres, explore dans son livre <a href="https://www.salamandre.org/article/nouveau-livre-la-foret-hyperconnectee/">publié aux éditions Salamandre</a> les liens que tissent les champignons – entre les hommes et les esprits, mais aussi avec les plantes. En voici un extrait.</em></p>
<hr>
<p>Impossible de rater ce beau champignon. Il se reconnaît entre mille avec son long pied blanc cerclé d’un anneau, sa volve et son large chapeau plat, rouge, tacheté de verrues blanches. Cette amanite abonde dans les forêts de feuillus et de résineux, souvent en compagnie des cèpes. Belle et élégante, elle est pourtant devenue l’un des symboles de la sorcellerie dans l’imagerie traditionnelle.</p>
<p>C’est vrai, elle contient en abondance des poisons toxiques, mais même écrasée dans le lait, elle ne tue pas les mouches. La muscarine, la toxine potentiellement mortelle qu’elle contient en faible quantité, ne résiste pas à la cuisson. Sa consommation est donc rarement mortelle. En revanche, elle contient de fortes concentrations de composés psychoactifs proches de neurotransmetteurs majeurs du système nerveux central dont ils miment les effets, le muscimole et l’acide iboténique. Ces substances perturbent la transmission neuronale du cerveau des mammifères et, de ce fait, elles stimulent le psychisme et provoquent des modifications sensorielles. L’ingestion malencontreuse ou volontaire de l’amanite tue-mouches conduit à des hallucinations, puis à un endormissement empli de puissantes visions oniriques.</p>
<p>En raison de ses propriétés hallucinogènes, l’amanite séchée était déjà consommée lors des cultes dédiés à Dionysos en Grèce. Chez les Koriaks du Kamtchatka, les états psychiques provoqués par l’amanite tue-mouches étaient si appréciés qu’ils se livraient à un singulier trafic. La poudre d’amanite séchée était consommée par le sorcier et les nobles du clan lors des cérémonies chamaniques ; l’urine de ces consommateurs privilégiés, enrichie en principes actifs, était alors bue par les autres membres de la tribu. Le rapport des ethnologues ne nous dit pas si le nombre de lapins en redingote ou de chats du Cheshire rencontrés lors de ces voyages hallucinatoires variait avec le nombre de passages dans les urines. Les champignons sont souvent craints car ils peuvent être mortels ou liés aux pratiques magiques que je viens d’évoquer.</p>
<p>D’ailleurs, depuis des milliers d’années, les sorciers des tribus amérindiennes utilisent à des fins religieuses, spirituelles ou chamaniques des plantes et des champignons riches en substances psychotropes induisant un état de conscience modifié. Certaines vesses-de-loup sont encore utilisées à des fins divinatoires du fait de leurs propriétés hallucinogènes par les sorciers mixtèques d’Oaxaca. Ces champignons ont un effet essentiellement hypnotique. Ils provoquent un état de demi-sommeil pendant lequel les sorciers affirment percevoir le chant des dieux. Chez les Tarahumaras du nord du Mexique, les sorciers absorbent le kalmoto, une autre espèce de vesse-de-loup, pour approcher leurs victimes sans être vus afin de leur jeter un sort. Dans le chamanisme des Papous des hauts plateaux de Nouvelle-Guinée, on retrouve l’usage des champignons hallucinogènes comme le psilocybe ou encore le bolet qui rend fou. En effet, l’ingestion de ce dernier peut conduire à une démence meurtrière.</p>
<h2>Une alliance ancestrale avec les arbres</h2>
<p>L’amanite tue-mouches permettrait donc de tisser des liens avec les esprits – c’est une croyance répandue chez de nombreux peuples forestiers. C’est sans aucun doute un sujet d’étude passionnant pour les anthropologues. Biologiste, j’ai passé une bonne partie de ma vie à étudier cet organisme sylvestre car c’est un prince parmi les champignons. Il sait dialoguer avec les racines des arbres. Invisible sous nos pieds, il tisse sa toile de filaments souterrains dans le sol et l’humus des forêts et il produit à l’automne ces belles fructifications au chapeau rouge piqueté de verrues blanches. Il est encore plus extraordinaire que vous ne pourriez l’imaginer. </p>
<p>Au cours de dizaines de millions d’années de coévolution, l’amanite et ses arbres hôtes – chêne, épicéa ou bouleau – ont développé un partenariat sophistiqué. Les deux organismes – plante et champignon – forment une symbiose mutualiste, une alliance à bénéfices mutuels. Dans les ténèbres telluriques, ils ont créé une « joint-venture" pour explorer, prospecter et exploiter les ressources du sous-sol, les gisements d’azote, de phosphates et de micro-éléments, indispensables à leur croissance.</p>
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<p>Parmi les 5 millions d’espèces de champignons qui peuplent notre planète, l’amanite tue-mouches est l’un de ceux qui est, avec une vingtaine de milliers d’autres mycètes forestiers, capable de dialoguer et de coopérer avec les arbres. En effet, ses filaments mycéliens souterrains sont associés aux racines courtes des arbres où il forme un organe mixte, chimérique, appelé « mycorhize » (du grec múkês, « champignon », et rhiza, « racine ») – une racine-champignon. La présence du champignon symbiotique sur les radicelles de l’arbre favorise l’absorption par les racines des éléments minéraux du sol, ce qui améliore considérablement sa nutrition. </p>
<p>Les amanites, mais également les cortinaires, les russules, les bolets ou les truffes, transforment les petites racines absorbantes de l’arbre hôte. La racine mycorhizée est alors prolongée par un vaste réseau de filaments mycéliens se propageant dans le sol. Si vous soulevez l’amas de feuilles mortes et de litière qui recouvrent le sol au pied des arbres, vous pourrez observer ce feutrage blanchâtre enrobant les particules de sol et les détritus végétaux. Les filaments, interconnectés et entremêlés, projettent leurs ramifications dans la moindre anfractuosité du sol, de l’humus et de la litière. Ils assurent un rôle essentiel d’exploration et d’absorption (jusqu’à 1 000 mètres de mycélium par mètre de racine).</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/495665/original/file-20221116-145-myme8h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/495665/original/file-20221116-145-myme8h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/495665/original/file-20221116-145-myme8h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=779&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/495665/original/file-20221116-145-myme8h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=779&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/495665/original/file-20221116-145-myme8h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=779&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/495665/original/file-20221116-145-myme8h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=978&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/495665/original/file-20221116-145-myme8h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=978&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/495665/original/file-20221116-145-myme8h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=978&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La forêt hyperconnectée est paru aux éditions Salamandre en octobre 2022.</span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La symbiose mycorhizienne n’est pas seulement formée de la petite racine de l’arbre prolongée par son immense réseau de filaments mycéliens. Au cours de leur partenariat immémorial, racine et champignon ont développé un organe chimérique très complexe. Des filaments mycéliens s’enchevêtrent à la surface de la racine, puis s’agglomèrent autour de la petite racine avant de l’enrober entièrement d’un manchon dense de feutrage mycélien. Au microscope, on a vraiment l’impression d’observer un doigt de gant cotonneux sur chacune des radicelles.</p>
<p>Encore plus surprenant, le microscope nous permet de distinguer des filaments mycéliens de l’amanite s’insinuant dans l’espace qui sépare les cellules de l’épiderme de la racine. La pointe des filaments mycéliens s’enfonce comme un coin entre les grosses cellules racinaires de l’hôte sans jamais y pénétrer. Chaque cellule de l’épiderme de la racine finit par être entièrement encerclée par les très fins filaments du champignon – après tant d’années à étudier et observer ces racines mycorhizées, je reste époustouflé par cette image de la grosse cellule racinaire ; un gros cube de 0,1 millimètres de côté, enrobée de son maillage de filaments dont la taille est dix fois plus petite. </p>
<p>C’est au niveau de ces cellules habillées de champignon que s’effectue l’échange d’éléments nutritifs (sucres, acides aminés, éléments minéraux) entre les deux symbiotes. Dans ce commerce équitable, le champignon échange les éléments minéraux qu’il a absorbés dans le sol et transportés le long de son réseau de filaments mycéliens contre des sucres solubles, comme le glucose. Pour les deux partenaires, cet échange – ce troc – est crucial. Les éléments minéraux, comme l’azote, le phosphate et le potassium (le fameux mélange NPK des engrais des jardineries), sont nécessaires à la croissance et à la bonne santé de l’arbre. Le glucose, fourni par les racines de la plante, est le sucre qui permet au champignon d’alimenter son métabolisme, de vivre, de respirer et de construire son réseau souterrain de filaments. Pour lui et son arbre hôte, comme pour nous, le glucose est le combustible de la vie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194579/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Francis Martin a reçu des financements de l'Agence nationale de la recherche via le Laboratoire d'excellence ARBRE, ainsi que des financements de l'Université forestière de Pékin, Chine. </span></em></p>
Les amanites tue-mouche poussent bien cet automne. Utilisée depuis la Grèce antique comme substance hallucinogène, elle surprend aujourd’hui par les liens qu’elle tisse avec les arbres.
Francis Martin, Directeur de recherche INRAE, Inrae
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tag:theconversation.com,2011:article/184993
2022-10-28T14:00:36Z
2022-10-28T14:00:36Z
Les champignons Trichoderma, des bienfaiteurs pour notre société
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/492272/original/file-20221028-41626-55p90h.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C0%2C1350%2C661&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Photo d’un Trichoderma en train de parasiter le champignon Fusarium graminearum, agent pathogène des céréales.</span> <span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Le règne des champignons regroupe des organismes diversifiés et intrigants. Parmi les quelques 120 000 espèces décrites à ce jour, le genre Trichoderma a particulièrement retenu l’attention des scientifiques et des industriels. S’ils sont très présents tout autour de nous, notamment dans les sols et sur débris végétaux, ils restent peu connus des promeneurs et cueilleurs de champignons. Ce sont en effet des micromycètes qui se développent sous forme de filaments microscopiques et forment des fructifications à peine visibles à l’œil nu.</p>
<h2>Des mycoparasites d’exception</h2>
<p>Pourquoi s’intéresser à ces organismes non consommés et peu spectaculaires ? Leur secret réside avant tout dans leur stratégie nutritive très versatile. Comme une grande partie des mycètes, les Trichoderma sont des saprobes : ils se nourrissent à partir de matières organiques mortes notamment au niveau de la litière végétale et des sols.</p>
<p>Néanmoins, ils ont ajouté à leur régime alimentaire le mycoparasitisme pour se nourrir au dépend d’autres mycètes bien vivants. Chez les Trichoderma, cette aptitude a quasiment été élevée au rang d’art, car elle concerne la quasi-intégralité des membres de ce genre (<a href="https://trichoderma.info/">plus de 350 espèces</a> à ce jour et elle n’est pas sélective, c’est-à-dire qu’ils parasitent un grand nombre de mycètes appartenant à divers embranchements.</p>
<p>Cette absence de sélectivité est une exception au sein du règne fongique, d’autant que certains peuvent parasiter des espèces particulièrement proches, notamment d’autres congénères du même genre ! Ce mycoparasitisme a des conséquences négatives au sein des champignonnières par le développement de moisissure verte sur les sporophores (la partie comestible du champignon cultivé) à l’origine de <a href="https://doi.org/10.3390/jof8060554">pertes économiques</a> importantes chaque année.</p>
<h2>Des intrants pour l’agriculture</h2>
<p>À l’inverse, il est possible de tirer profit des Trichoderma en agriculture en les appliquant sur les cultures pour cibler des champignons parasitant des plantes (dits « phytopathogènes »). Certains sont donc considérés comme des agents de contrôle biologique (ou antagonistes) et font partie d’un éventail de pratiques présentées comme des alternatives aux produits phytosanitaires conventionnels, par les agrofournisseurs et les scientifiques.</p>
<p>À ce jour, les produits à base de Trichoderma représentent plus de <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/ffunb.2021.716511/full">60 % des biopesticides</a> homologués au niveau mondial, ce qui reste néanmoins très minoritaire par rapport à la part de marché des pesticides de synthèse (les biopesticides représentent un quart des produits vendus).</p>
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<p>Le mécanisme mycoparasitaire implique d’abord un contact direct avec la proie qui est tuée ensuite par l’action conjointe d’enzymes lytiques et de métabolites secondaires issus de l’antagoniste. À l’œil nu, la confrontation entre un Trichoderma performant et un autre mycète se termine généralement par le recouvrement de ce dernier, le mycoparasite s’en nourrissant et sporulant pour se disséminer (Vidéo 1). Outre ce parasitisme direct, d’autres mécanismes plus subtils interviennent, comme l’antibiose qui consiste en une inhibition à distance de la croissance microbienne par le biais de métabolites (parfois volatils) sécrétés dans le milieu environnant (Vidéo 2).</p>
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<figcaption><span class="caption">Vidéo 1 : Ce timelaps montre la confrontation entre l’agent pathogène Botrytis cinerea BO01 et l’agent de biocontrôle Trichoderma.INRAE-PaysdelaLoire.</span></figcaption>
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<figcaption><span class="caption">Vidéo 2 : Timelapse antibiose.</span></figcaption>
</figure>
<p>Un dernier point qu’il ne faut pas passer sous silence est la capacité de certains Trichoderma à interagir avec les plantes. Les formes que peuvent prendre ces interactions sont variables et dépendent notamment du degré d’intimité établi entre le champignon et les parties souterraines de la plante. Dans certains cas, ils peuvent agir comme des inducteurs des défenses des plantes, améliorant la protection de celles-ci contre une attaque d’un réel agresseur. Dans d’autres cas, leur présence se traduit par un bénéfice nutritif pour la plante, ce qui en fait des fertilisants naturels particulièrement intéressants dans un contexte de promotion d’agriculture durable plus économe en intrants chimiques.</p>
<p>L’utilisation des Trichoderma en tant que biointrants dans les pratiques agricoles est quand même à envisager avec prudence. Ces dernières années par exemple, des <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fagro.2020.547758/full">infestations</a> par Trichoderma afroharzianum sur épis de maïs ont été observées en Europe. Ce type d’évènement ne remet pas en cause l’usage global des Trichoderma mais risque de rejeter à terme l’application de cette espèce qui entre dans la composition de certains produits commerciaux.</p>
<h2>Des producteurs industriels d’enzymes</h2>
<p>Se nourrir efficacement à partir de la biomasse végétale morte nécessite que le champignon soit équipé en enzymes (appelées CAZymes) capables de dégrader les sucres (cellulose et hémicellulose en particulier) constitutifs des parois végétales. Des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29630596/">travaux de génomique évolutive</a> menés sur divers Trichoderma montrent que ce genre aurait évolué à l’époque de l’extinction du Crétacé et du Paléogène (soit 66 millions d’années) à partir d’ancêtres qui étaient initialement limités pour la production de CAZymes et qui se nourrissaient principalement à partir d’insectes et de champignons. Cette période correspond à une extinction massive d’espèces animales (dont les dinosaures) et végétales.</p>
<p><a href="https://journals.plos.org/plosgenetics/article?id=10.1371/journal.pgen.1007322">L’hypothèse la plus probable</a> serait que Trichoderma a participé à la forte poussée des populations fongiques qui se sont nourries de la biomasse en décomposition des plantes tuées par ce phénomène. De façon intéressante, ces travaux montrent que certains de ces Trichoderma primitifs se seraient enrichis progressivement en CAZymes par un processus de transfert latéral (processus dans lequel un organisme intègre du matériel génétique provenant d’un autre organisme sans en être le descendant) en intégrant au sein de leur génome respectif des dizaines de gènes codant ces enzymes provenant d’autres champignons, en particulier des parasites des plantes.</p>
<p>Ce processus a abouti à l’existence d’individus parmi les plus prolifiques en tant que producteurs d’enzymes de dégradation. C’est le cas de T. reesei, initialement isolée dans les îles Salomon pendant la Seconde Guerre mondiale, qui avait suscité l’intérêt pour ses capacités hors-norme à s’attaquer aux toiles et aux vêtements de l’armée américaine et qui est devenue une espèce pionnière en biotechnologie.</p>
<p>Ainsi des cellulases (enzyme capable de dégrader la cellulose) provenant d’espèces de Trichoderma sont directement appliquées aux processus de production de bioéthanol, de production de la pâte à papier ou de traitement des textiles.</p>
<p>Comme les cellules fongiques sont des usines polyvalentes et efficaces pour la production de protéines et métabolites, il était tout naturel que des Trichoderma soient finalement utilisées comme des sites privilégiés pour produire à grande échelle des protéines d’intérêt issues naturellement d’autres organismes. La production de ces protéines dites « hétérologues » nécessite que le gène codant la protéine d’intérêt soit introduit dans le génome de l’espèce productrice (en l’occurrence ici des Trichoderma). L’utilisation industrielle de T. reesei comme producteur de protéines hétérologues a ainsi débuté il y a plus de 30 ans avec la production de chymosine qui est autorisée dans certains pays pour la fabrication de fromage et qui remplace la molécule originellement produite par le veau dans la présure pour de déstabiliser la caséine (protéine du lait), ce qui provoque la coagulation du lait. Il s’agissait là de la première utilisation de l’ingénierie moléculaire dans l’agroalimentaire. De nos jours, T. reesei est toujours l’un des champignons filamenteux les plus utilisés pour la production de protéines recombinantes en tout genre.</p>
<p>Le genre Trichoderma constitue un exemple particulièrement marquant traduisant l’intérêt certain qu’il y a à étudier la diversité fongique dans le but d’en retirer des bienfaits pour la société. Même si l’utilisation de ces mycètes est ancienne, on est loin d’être au bout de l’histoire, car le genre s’enrichit de nouvelles espèces pour lesquelles il apparaît primordial de tester leur potentiel industriel.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/184993/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas GUILLEMETTE a reçu le soutien de la Région Pays de La Loire et du Ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire pour développer ses projets de recherche. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Franck Bastide ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Aide pour l’agriculture ou producteurs d’enzymes, ces champignons nous sont vraiment bénéfiques.
Thomas Guillemette, Professeur de Microbiologie, Université d'Angers
Franck Bastide, Technicien de recherche en microbiologie, Université d'Angers
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2022-10-07T13:12:58Z
2022-10-07T13:12:58Z
Apprivoiser le bleuetier sauvage (et ses microbes !)
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/488545/original/file-20221006-22-5cvfi0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=24%2C18%2C4128%2C3095&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les bleuetiers appartiennent à la famille des Éricacées, tout comme les rhododendrons ou la canneberge.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Simon Morvan)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Avez-vous déjà résisté à un appétissant muffin aux bleuets ? Moi non plus !</p>
<p>Mais vous êtes-vous déjà demandé comment poussent ces petites baies bleues ?</p>
<p>L’essentiel des bleuets que l’on retrouve sur le marché provient du bleuetier en corymbe (<em>Vaccinium corymbosum</em>), un arbuste pouvant atteindre plus d’un mètre d’envergure. Le bleuetier en corymbe est planté en verger, comme les pommiers.</p>
<p>Cependant, mon projet de doctorat s’attarde sur la petite sœur de cette espèce : le bleuetier sauvage, ou bleuetier nain (<em>Vaccinium angustifolium</em>).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/488361/original/file-20221005-24-4u7d8m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/488361/original/file-20221005-24-4u7d8m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/488361/original/file-20221005-24-4u7d8m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/488361/original/file-20221005-24-4u7d8m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/488361/original/file-20221005-24-4u7d8m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/488361/original/file-20221005-24-4u7d8m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/488361/original/file-20221005-24-4u7d8m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/488361/original/file-20221005-24-4u7d8m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Bleuetier sauvage prêt à être récolté.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Simon Morvan), Fourni par l’auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Comme son nom l’indique, cette espèce est beaucoup plus petite – les buissons ne dépassent pas les 40 cm. On la retrouve à l’état natif à l’est de l’Amérique du Nord et elle est essentiellement cultivée dans le Maine aux États-Unis ainsi qu’au Québec et <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/15538362.2011.619130">dans les provinces maritimes du Canada</a>.</p>
<p>Contrairement aux bleuetiers en corymbe, il n’y a pas de plantation de bleuetiers sauvages. Les bleuetières sont établies dans des zones où les arbustes sont déjà implantés, typiquement en forêt boréale. Résistant bien au feu de forêt grâce à leur rhizome (organe souterrain semblable à une grosse racine), les bleuetiers sauvages sont parmi les premières plantes à repousser à la suite d’un incendie. Les exploitants profitent donc de ces feux, qui éliminent la plupart des autres végétaux, pour établir des bleuetières.</p>
<p>Au Québec, en 2015, 35 500 hectares étaient consacrés à la culture de ce fruit, soit un peu moins que la superficie de la ville de Sherbrooke (QC, Canada) ! La grande majorité des fruits sont congelés après la récolte et exportés à l’international. D’ailleurs, en 2020, le bleuet sauvage représentait la première exportation fruitière du pays, totalisant <a href="https://agriculture.canada.ca/sites/default/files/documents/2021-08/fruit_report_2020-fra.pdf">312 millions de dollars</a></p>
<p>Dans cet article, j’apporterai un éclairage sur cette culture particulière et sur le monde invisible, mais ô combien important, du souterrain végétal.</p>
<h2>Mais d’où vient cet engouement pour le bleuet ?</h2>
<p>Les qualités de ce fruit sont indéniables : un goût sucré et acidulé, une couleur bleue profonde, la taille d’un petit bonbon. Comment ne pas craquer ?</p>
<p>Le bleuet se situe également dans le top des fruits qui contiennent le plus haut taux d’antioxydants, ces molécules maintenant bien connues du grand public qui ont de nombreuses propriétés bénéfiques sur le <a href="https://academic.oup.com/advances/article/11/2/224/5536953">système vasculaire, cognitif, et glucorégulatoire</a> ! Cette caractéristique, le bleuet le doit aux anthocyanes, les molécules qui donnent la couleur bleutée à la peau du fruit. En raison de ce fort potentiel antioxydant, le bleuet est très populaire, notamment en Asie.</p>
<p>Pour faire face à une demande accrue, les exploitants sont donc à la recherche de pratiques agricoles permettant d’augmenter leur rendement en fruit.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/488363/original/file-20221005-26-vo5tb3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/488363/original/file-20221005-26-vo5tb3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/488363/original/file-20221005-26-vo5tb3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/488363/original/file-20221005-26-vo5tb3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/488363/original/file-20221005-26-vo5tb3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/488363/original/file-20221005-26-vo5tb3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/488363/original/file-20221005-26-vo5tb3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/488363/original/file-20221005-26-vo5tb3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Machine agricole permettant l’épandage dans les bleuetières.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Simon Morvan), Fourni par l’auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Le pouvoir des micro-organismes</h2>
<p>Il faut dire qu’à première vue, le bleuetier sauvage ne se facilite pas la vie. En effet, le sol dans lequel il s’épanouit n’est pas des plus accueillants.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/488364/original/file-20221005-17-qmpzra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/488364/original/file-20221005-17-qmpzra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/488364/original/file-20221005-17-qmpzra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/488364/original/file-20221005-17-qmpzra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/488364/original/file-20221005-17-qmpzra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/488364/original/file-20221005-17-qmpzra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/488364/original/file-20221005-17-qmpzra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/488364/original/file-20221005-17-qmpzra.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Bleuetier sauvage (réellement sauvage) poussant quasiment à même la roche !</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Simon Morvan), Fourni par l’auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La plupart des nutriments essentiels à la plante (azote, phosphore et potassium) sont sous forme organique, c’est-à-dire que les atomes sont bloqués dans des molécules avec un squelette de carbone, <a href="https://www.canr.msu.edu/news/what_organic_fertilizers_mean_to_plants_and_soil">ne pouvant pas être directement absorbées par les plantes</a>.</p>
<p>De plus, le sol est acide avec un pH généralement autour de 4 ou 5, comparable à celui d’une <a href="https://www.clemson.edu/extension/food/food2market/documents/ph_of_common_foods.pdf">mangue pas mûre</a>. Ce faible pH augmente la disponibilité de minéraux tels que le fer ou l’aluminium. À pH neutre (pH = 7), ces métaux se fixent à des molécules organiques et sont ainsi bloqués, ou non disponibles. Cependant, quand le pH est faible, ils sont décrochés des molécules organiques, et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0016706116300908">deviennent disponibles</a>. Le problème, c’est qu’à trop forte concentration, ces métaux deviennent toxiques pour les végétaux. Dans ces conditions, on peut se demander comment cette plante fait pour survivre et, de surcroît, produire une baie aussi délicieuse.</p>
<p>Une partie de la réponse se trouve dans le sol, mais elle est invisible à l’œil nu. Il s’agit du monde fascinant des micro-organismes (dont les bactéries et champignons microscopiques). Dans ma recherche, je me suis intéressé aux communautés de champignons et de bactéries qui vivent dans le sol à proximité des racines. Cette zone est appelée <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11104-008-9568-6">rhizosphère</a>. Dans cette fine couche de sol, la plante travaille très fort. En effet, bien qu’on ait l’impression que les plantes sont passives parce qu’immobiles, on se trompe !</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/488365/original/file-20221005-25-37sw9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/488365/original/file-20221005-25-37sw9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/488365/original/file-20221005-25-37sw9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/488365/original/file-20221005-25-37sw9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/488365/original/file-20221005-25-37sw9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/488365/original/file-20221005-25-37sw9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/488365/original/file-20221005-25-37sw9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/488365/original/file-20221005-25-37sw9y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Échantillon de sol contenant le rhizome et les racines d’un bleuetier sauvage. C’est à partir de ce type d’échantillon que l’ADN est extrait afin d’étudier les communautés microbiennes peuplant ce milieu.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Simon Morvan), Fourni par l’auteur</span></span>
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</figure>
<p>Au niveau des racines, les plantes libèrent des molécules qui ont le pouvoir d’attirer ou de <a href="https://reader.elsevier.com/reader/sd/pii/S1360138517301991?token=75FDA57C9AB0D9B0395CD3755FDBCF5967AFF4BB921F737F480A299512CE7A80D3B4DE907FA818DD38939D87D2EF927A&originRegion=us-east-1&originCreation=20221004195524">repousser certains micro-organismes</a>. Mais cette relation n’est pas unilatérale. Les bactéries et les champignons peuvent également influencer la plante, et tout le monde en profite. On parle alors de symbiose. En d’autres termes, la plante et ses micro-organismes ne font qu’un, comme une équipe !</p>
<h2>Une symbiose indispensable</h2>
<p>Les bleuetiers appartiennent à la famille des Éricacées, tout comme les rhododendrons ou la canneberge. Cette famille à la particularité d’établir une <a href="https://www.elsevier.com/books/mycorrhizal-symbiosis/smith/978-0-12-370526-6">symbiose mycorhizienne</a> qui lui est propre. Du grec myco (champignon) et rhiza (racine), une mycorhize est une association entre un champignon et une racine de plante.</p>
<p>Dans le cadre de cette symbiose, les filaments du champignon (appelés hyphes) pénètrent à l’intérieur des racines et forment une sorte de pelote de laine, qui va occuper la quasi-totalité de l’espace racinaire. C’est au niveau de cette pelote que se joue le pourquoi de la symbiose : <a href="https://www.elsevier.com/books/mycorrhizal-symbiosis/smith/978-0-12-370526-6">l’échange de bons procédés</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/488367/original/file-20221005-23-gmvgv8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/488367/original/file-20221005-23-gmvgv8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=234&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/488367/original/file-20221005-23-gmvgv8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=234&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/488367/original/file-20221005-23-gmvgv8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=234&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/488367/original/file-20221005-23-gmvgv8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=294&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/488367/original/file-20221005-23-gmvgv8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=294&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/488367/original/file-20221005-23-gmvgv8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=294&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Photographie et schéma de la colonisation mycorhizienne éricoïde. (a) Émergence d’hyphes du champignon Rhizoscyphus ericae de cellules racinaires épidermiques de Calluna vulgaris (Callune) (b) Diagramme d’un complexe d’hyphes à l’intérieur des cellules racinaires externes, typique d’une colonisation mycorhizienne éricoïde. La paroi externe (*) des cellules racinaire de surface est épaissie. Barre d’échelle = 25 μm.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(a) Photographie de DJ Read provenant de Smith and Read, 2008. (b) Diagramme tiré de Peterson et Massicotte, 2004</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces champignons possèdent un arsenal d’enzymes, des protéines capables de découper des molécules organiques et ainsi de libérer les nutriments qu’elles contiennent. Ces nutriments sont captés par les champignons, transportés jusqu’à la pelote à l’intérieur de la racine, puis échangés à la plante. En échange, la plante fournit du sucre qu’elle produit par photosynthèse. Cette association est si importante que certains chercheurs affirment que c’est grâce à elle que les plantes de la famille des Ericaceae peuvent pousser dans des conditions <a href="https://cpb-us-e1.wpmucdn.com/blogs.uoregon.edu/dist/c/8944/files/2014/10/Mitchell_ericoid-1hwn44o.pdf">peu adaptées aux plantes</a>.</p>
<p>D’autre part, ces champignons peuvent également protéger les bleuetiers des métaux toxiques (aluminium, fer) soit en les stockant, soit en <a href="https://cpb-us-e1.wpmucdn.com/blogs.uoregon.edu/dist/c/8944/files/2014/10/Mitchell_ericoid-1hwn44o.pdf">empêchant leur absorption par la plante</a>.</p>
<h2>Un travail de détective</h2>
<p>Le but de ma recherche était donc de dresser un portrait de ces micro-organismes et tenter de comprendre quels paramètres pouvaient avoir un impact sur leur présence. Grâce au séquençage de l’ADN présent dans le sol et les racines, nous avons pu avoir un aperçu global des champignons et bactéries présents dans ces milieux.</p>
<p>Nos résultats indiquent une prédominance du groupe de champignons capable de former des mycorhizes. Ce ne sont pas tous les champignons qui ont cette capacité ! Notre découverte suggère donc leur importance dans l’écosystème racinaire des bleuetiers.</p>
<p>Au niveau des bactéries, des espèces ayant un potentiel de fixation de l’azote atmosphérique ont également été trouvées en abondance. L’azote joue en rôle primordial dans le monde vivant, puisque toutes les protéines en sont constituées. Sans azote, pas de chlorophylle, donc pas de photosynthèse, et pas de croissance pour la plante. La fixation de l’azote atmosphérique par les bactéries consiste à capter l’azote présent dans l’air et de le rendre disponible, <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fmicb.2021.628379/full">autant pour elles-mêmes que pour la plante</a>. Dans un contexte de sol appauvri en nutriments, le bleuetier bénéficie ainsi grandement de ce type de bactéries à proximité de ses racines.</p>
<p>De futures études sont nécessaires afin de mieux comprendre l’écologie de ces microbes pour pouvoir un jour espérer bénéficier au maximum de leur service écosystémique et, ultimement, améliorer les rendements des cultures.</p>
<p>La prochaine fois que vous mangerez un muffin aux bleuets, vous l’apprécierez d’autant plus maintenant que vous connaissez la vie rude que ce petit arbuste mène !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/191552/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Simon Morvan est membre du Centre de la Science de la Biodiversité du Québec (CSBQ). </span></em></p>
Le bleuet sauvage, cette petite baie bleue qui ravit les papilles est très populaire en raison de ses qualités gustatives, mais aussi de ses bienfaits pour la santé. Mais comment est produit ce fruit ?
Simon Morvan, Doctorant en Sciences Biologiques, Université de Montréal
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/181277
2022-07-01T16:15:40Z
2022-07-01T16:15:40Z
Faire du tourisme vert et nourrir les animaux : quels risques pour notre santé… et la leur ?
<p>Observer de près la faune sauvage, s’approcher d’animaux que l’on ne voit habituellement que dans des documentaires… De nombreux sites touristiques proposent aux visiteurs des excursions leur permettant d’entrer en contact avec des animaux sauvages.</p>
<p>Pour attirer des espèces qui, autrement, ne seraient que très difficilement et très aléatoirement observées, souvent des points de nourrissage sont créés. Si elles satisfont un besoin profond d’<a href="https://www.seuil.com/ouvrage/la-part-sauvage-du-monde-virginie-maris/9782021332544">altérité</a>, la concentration artificielle en espèces et l’abondance d’individus au contact ou à proximité des humains qui résulte de ce marché touristique d’espèces « <a href="https://doi.org/10.1016/j.gecco.2020.e01422">prêtes à voir</a> » ne sont cependant pas sans danger, pour les touristes comme pour les espèces observées.</p>
<p>Afin de bien vivre cette situation particulière, il est donc important d’acquérir le savoir-vivre permettant d’en éliminer tant que faire se peut les dangers, tout en gardant un maximum des bonheurs escomptés. </p>
<p>Ce savoir-vivre s’applique aussi aux espèces sauvages que nous côtoyons dans des endroits plus communs, telles que nos villes, colonisées depuis quelques années par des animaux inattendus, certains de taille modeste ou moyenne (ragondin, castor, renard, sanglier, etc.) et d’autres beaucoup plus impressionnants, tels qu’<a href="https://www.nationalgeographic.com/animals/article/black-bears-adapt-cities-animals">ours</a>, <a href="https://wildlife.org/big-cats-adapt-to-city-life/">puma</a> ou <a href="https://www.nationalgeographic.com/magazine/article/leopards-moving-to-cities">léopard</a>…</p>
<h2>Des microbes dangereux pour l’être humain</h2>
<p>Les risques encourus à attirer de grands carnivores tels que des ours ou de grands félins, ou encore des animaux tels que des éléphants sur des points d'eau est évident. Des accidents graves, parfois mortels, ont lieu tous les ans sur pratiquement tous les continents, le plus souvent liés à l’inconscience de touristes ou de citadins peu avertis du comportement de ces espèces dans le monde réel, et des précautions à prendre pour les observer. Mais il existe aussi des risques plus subtils. </p>
<p>Il ne faut pas oublier que si les touristes viennent observer des espèces animales qui symbolisent la richesse de la biodiversité de notre planète, lesdites espèces sont elles-mêmes porteuses d’une importante <a href="https://www.liberation.fr/forums/les-micro-organismes-auront-toujours-une-mutation-davance-sur-les-autres-20210903_47X3WFQYENC7TOM45NVCIRHIRY/">diversité microbienne</a>. Or, si la plupart des microbes sont nos alliés et sont <a href="https://www.actes-sud.fr/node/59704">essentiels au fonctionnement des écosystèmes</a>, une fraction minime de <a href="https://doi.org/10.1002/9781119902911.ch11">quelques milliers d’entre eux sont potentiellement pathogènes</a>.</p>
<p>La visite touristique <a href="https://www.wemjournal.org/article/S1080-6032(21)00055-7/fulltext">de grottes où séjournent des centaines de milliers de chauves-souris</a>, sur le continent sud-américain par exemple, pose la question de la transmission de leurs pathogènes aux humains, non seulement directement, mais aussi par aérosols ou via les immenses couches de guano déposées que foulent les visiteurs. </p>
<p>C’est le cas de l’<a href="http://campus.cerimes.fr/parasitologie/enseignement/histoplasmose/site/html/cours.pdf">histoplasmose</a>, une maladie causée par un champignon ou, sur d’autres continents, des virus Nipah et Marburg. On compte également au moins 14 « espèces » de virus de la rage (virus rabiques), la plupart pouvant affecter les chauves-souris : au Texas, dans une grotte habitée par 110 millions de chauves-souris, où circule un de ces virus, deux cas <a href="https://academic.oup.com/jid/article/195/8/1144/816583">d’infection de spéléologues via une transmission par aérosol</a> ont été documentés.</p>
<p>Par ailleurs, dans les villes et sites touristiques d’Amérique du Sud et d’Asie, la proximité de la population humaine avec des primates non humains, macaques et tamarins principalement, <a href="https://journals.plos.org/plosntds/article?id=10.1371/journal.pntd.0002863">conduit à des dizaines de morsures chaque année</a>. Or ces primates peuvent être porteurs du virus de la rage « classique », <a href="https://academic.oup.com/jtm/article/23/4/taw028/2748109">hérité de leur contacts avec des canidés</a>, ce qui oblige les personnes non-vaccinées à suivre une prophylaxie post-exposition complète contre cette maladie.</p>
<p>L’existence de ces microbes pathogènes pour l’être humain, <a href="https://www-science-org.inee.bib.cnrs.fr/content/article/new-killer-virus-china">connus ou encore inconnus</a>, justifie donc d’adopter des comportements d’évitement permettant de minimiser les risques d’exposition. </p>
<p>Mais si les animaux peuvent contaminer l’être humain, l’inverse est également vrai.</p>
<h2>Les humains sont aussi source d’infection</h2>
<p>Dans le parc national de Taï, en Côte d’Ivoire, <a href="https://doi.org/10.1002/ajp.22619">les études</a> ont montré non seulement l’existence d’agents pathogènes présents naturellement chez les chimpanzés (virus lymphotrophique T, virus foamy simien, <a href="https://www-nature-com.inee.bib.cnrs.fr/articles/s41564-020-0706-0">variole du singe</a>) et dans leur habitat (virus Ebola ou bactérie <em>Bacillus cereus</em> biovar <em>anthracis</em>, responsable d’une forme d’anthrax, une grave maladie infectieuse), mais aussi de pathogènes introduits par les humains, tels que le virus respiratoire syncytial humain (HRSV) et le métapneumovirus humain (HMPV), qui peuvent eux-mêmes contaminer les chimpanzés.</p>
<p>À partir de 1992, un système de gestion des déchets et de quarantaine des scientifiques étudiants les chimpanzés et des visiteurs a été mis en place. Pourtant, depuis 1999, au moins six épidémies majeures de maladies respiratoires d’origine humaine, avec des pertes allant jusqu’à 19 % des communautés de chimpanzés ont été observées.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/472060/original/file-20220701-20-kanaga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Photo en gros plan d’un gorille des montagnes (photo prise au Rwanda)." src="https://images.theconversation.com/files/472060/original/file-20220701-20-kanaga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/472060/original/file-20220701-20-kanaga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=702&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/472060/original/file-20220701-20-kanaga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=702&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/472060/original/file-20220701-20-kanaga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=702&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/472060/original/file-20220701-20-kanaga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=883&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/472060/original/file-20220701-20-kanaga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=883&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/472060/original/file-20220701-20-kanaga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=883&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Des mesures pour protéger les gorilles des montagnes du Covid-19 ont été prises en 2020.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/pJGA1LYp_lc">Bob Brewer / Unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La pandémie de COVID-19 chez les humains a justifié le renforcement de tels types de « distanciation » avec les <a href="https://doi.org/10.1002/ajp.23291">gorilles de montagne</a>, en République démocratique du Congo, au Rwanda et en Ouganda. Fin mars 2020, tout le tourisme lié aux gorilles avait été suspendu, et des protocoles stricts ont été ensuite mis en place avant réouverture : port obligatoire d’un masque facial et augmentation de la distance minimale avec les animaux, notamment.</p>
<p>Les contaminations par certains pathogènes peuvent donc se faire de l’animal à l’humain ou de l’humain à l’animal. Mais pour certains microbes qui sont à l’aise dans plusieurs espèces, le sens de contamination peut s’avérer plus difficile à déterminer. Il peut être à double sens, voire passer par d’autres animaux. </p>
<h2>Une circulation à sens multiples</h2>
<p>Le sens de circulation des microbes n’est pas toujours facile à établir, et le système écologique complet, incluant sa composante humaine, peut être dans son entier considéré comme un système privilégié de transmission.</p>
<p>Dans le nord-ouest du Yunnan en Chine, sur un site d’écotourisme, un groupe de <a href="https://gdri-ehede.univ-fcomte.fr/spip.php?article12">Rhinopithèques de Biet</a>, un singe vivant en haute altitude, est régulièrement nourri à proximité du village. <a href="https://doi.org/10.1038/s41598-021-95166-5">Nous avons identifié 13 espèces ou lignées d’amibes</a> dans leurs fèces. Ces amibes, qui infectent aussi les humains et leurs animaux domestiques (porcs, bovins et poulets) peuvent passer d’une espèce à l’autre. On sait peu de choses de leur pathogénicité, mais elles fournissent un intéressant modèle de transmission.</p>
<p>Nous avons notamment constaté que le pourcentage de crottes infectées chez les singes fréquentant le site de nourrissage était de près de 90 %, alors qu’il n’était que d’un peu plus de 30 % chez ceux qui ne s’y rendaient pas. De plus, l’isolement d’une petite fraction, celle nourrie, de la population sauvage, a abouti <a href="https://doi.org/10.1016/j.gecco.2020.e01422">à son appauvrissement génétique</a>.</p>
<p>Le nourrissage d’une sous-population de singes à des fins touristiques a donc pour effet conjoint d’augmenter la consanguinité du groupe nourri, sa sensibilité et son exposition aux infections amibiennes. </p>
<p>De façon avisée, sur ce site (et contrairement à d’autres sites du même type situés ailleurs dans le monde), l’observation des singes par les touristes au moment du nourrissage se fait à distance stricte, matérialisée par une corde tendue, et est surveillée par les gardiens. Mais le contact entre animaux domestiques, habitants et singes, direct ou via leurs déjections à proximité des sites de nourrissage, constitue par ailleurs un système qui amplifie considérablement la circulation des amibes.</p>
<p>Et ce type de problème ne se rencontre pas uniquement sur des sites touristiques situés à l’autre bout du monde…</p>
<h2>La faune sauvage en ville</h2>
<p>La valeur monétaire du pelage du renard roux, encore importante au milieu du XXe siècle, puis l’épidémie de rage sylvatique qui a touché ses populations sur le continent européen ont maintenu le nombre d’individus à des niveaux relativement bas jusqu’au début des années 1980. </p>
<p>Depuis, suite au désintérêt pour la fourrure et à aux campagnes de vaccination qui ont fait reculer la rage (<a href="https://solidarites-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/maladies/maladies-infectieuses/article/rage">la France en est indemne depuis 2001</a>), les populations de renard ont augmenté. Depuis la fin des années 1990, elles atteignent la <a href="https://doi.org/10.1111/mam.12289">capacité d’accueil</a> de leurs écosystèmes. Les renards ont aujourd’hui conquis jusqu’aux villes, où ils trouvent les ressources qui leur sont nécessaires. </p>
<p>Si certains citadins déplorent leurs « incivilités » occasionnelles (ouverture de sacs poubelles, visites de poulaillers, terriers creusés sous les bâtiments, etc.) d’autres sont ravis du voisinage de ce joli petit canidé. Ils le nourrissent même parfois, que ce soit involontairement, quand les renards viennent manger les croquettes destinées au chien ou au chat de la maison, ou volontairement. </p>
<p>Il n’en reste pas moins que cette proximité de fait représente un réel danger vis-à-vis de la transmission d’une maladie parasitaire gravissime pour les humains, l’<a href="https://theconversation.com/les-echinococcoses-des-maladies-parasitaires-en-expansion-181276">échinococcose alvéolaire</a>. D’évolution lente (dix ans, voire plus), silencieuse et de pronostic sombre lorsqu’elle est détectée tardivement, cette maladie peut entraîner une insuffisance hépatique parfois mortelle, et nécessiter une greffe de foie dans les cas graves.</p>
<p>Or, une fraction importante de la population de renards peut être porteuse du parasite responsable de la maladie : c’est le cas de plus de 50 % des renards qui vivent aux abords de la <a href="https://doi.org/10.1017/S0031182099005351">ville de Zurich</a>, en Suisse ! Cette fraction d’animaux infectés est d’autant plus grande que les <a href="https://doi.org/10.1016/j.pt.2015.04.007">paysages urbains sont riches en espaces verts</a>. Or, les renards contaminés dispersent le parasite via les crottes qu’ils <a href="https://doi.org/10.1051/parasite/2021073">déposent dans les jardins</a> et près des sites de nourrissage.</p>
<p>Dans certains cas, la promiscuité avec leurs congénères peut aussi être problématique pour les animaux eux-mêmes.</p>
<h2>Distanciation sociale pour les oiseaux</h2>
<p>Qui, surtout en hiver, n’a jamais songé à nourrir les oiseaux ? Fréquente en hiver, cette pratique n’est pas elle-même sans risque, car leur concentration au point de nourrissage peut augmenter la <a href="https://doi.org/10.1016/j.biocon.2016.10.034">transmission de bactéries, champignons et virus</a> responsables de salmonelloses, aspergilloses, trichomonase, variole aviaire, etc. Or, certains de ces micro-organismes sont aussi pathogènes pour les humains.</p>
<p>Aux États-Unis, il a été démontré que le retrait des mangeoires pour oiseaux réduit considérablement les <a href="https://doi.org/10.1098/rspb.2015.1429">épidémies de mycoplasmose oculaire</a> chez le roselin familier, une maladie causée par la bactérie <em>Mycoplasma gallisepticum</em>, et que le nettoyage régulier des bains d’oiseaux et des mangeoires prévient également le développement des salmonelles. En 2021, pendant plusieurs mois, plus d’une dizaine d’États américains ont d’ailleurs demandé aux habitants de retirer les mangeoires, les bassins et les autres éléments susceptibles d’attirer les oiseaux sur leurs propriétés, en réponse à <a href="https://www.audubon.org/news/scientists-still-searching-pathogen-behind-easts-songbird-epidemic">une épidémie d’une mystérieuse maladie aviaire</a>. Son origine exacte n’a pas été élucidée, mais c’est bien une forme de « distanciation sociale » chez les oiseaux qui était recherchée. </p>
<p>Dans ce pays, une attention particulière est également portée au virus <a href="https://news.cornell.edu/stories/2002/10/watch-bird-feeders-impact-west-nile-virus">West Nile</a> ainsi qu’à celui de la <a href="https://www.southernliving.com/culture/activities-and-entertainment/outdoor-recreation/animals-and-wildlife/bird-flu-remove-backyard-bird-feeders">grippe aviaire</a>, dont les oiseaux sont porteurs, et qui peuvent se transmettre à l’être humain.</p>
<h2>Savoir vivre avec la faune sauvage et ses microbes</h2>
<p>On sait aujourd’hui qu’une biodiversité élevée, à tous les niveaux où elle peut être mesurée (génétique, des espèces, des écosystèmes), est garante de la <a href="https://www.wiley.com/en-us/The+Ecological+and+Societal+Consequences+of+Biodiversity+Loss-p-9781119902904">résistance et de l’adaptabilité des écosystèmes aux changements</a>, et donc de l’habitabilité de la terre pour les humains.</p>
<p>Par ailleurs, un grand nombre de recherches ont mis en évidence les effets positifs de la biodiversité sur le <a href="https://doi.org/10.1016/j.ecolecon.2020.106917">bien-être humain ressenti</a>. En Europe, il a notamment été montré que divers indicateurs de la biodiversité (nombre d’espèces d’oiseaux, d’écosystèmes, etc.) sont positivement associés au sentiment de bien-être, voire <a href="https://doi.org/10.1186/s12942-015-0009-5">à la santé elle-même</a>, au même niveau que le revenu des habitants. </p>
<p>Il ne s’agit donc pas d’éliminer tout contact avec la biodiversité, dont il est essentiel que les citoyens perçoivent concrètement la réalité et l’importance. <a href="https://www.fondationbiodiversite.fr/tourisme-animalier-quelles-consequences-pour-la-faune-sauvage/">L’entretien de points d’observation d’espèces difficilement accessibles</a>, ou la préservation de la biodiversité urbaine sont autant de manières de se familiariser avec elle. </p>
<p>Il ne faut cependant pas oublier que cette biodiversité inclut aussi celle des micro-organismes, qui constituent <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.1711842115">17 % du total de la matière vivante (biomasse) de notre planète</a>. <a href="https://www.actes-sud.fr/node/59704">Beaucoup sont des alliés</a>, et <a href="https://doi.org/10.1002/9781119902911.ch11">une infime minorité seulement représente un réel danger</a>. Tout le défi est de vivre avec eux, tout en profitant des bienfaits matériels et moraux apportés par l’existence même de la diversité du vivant (microbes compris !).
La « <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/la-part-sauvage-du-monde-virginie-maris/9782021332544">part sauvage du monde</a> » si chère à la philosophe Virginie Maris…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181277/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>
Les voyages sont l’occasion d’approcher une faune que l’on a rarement l’occasion de voir. Mais il faut se souvenir que cette proximité n’est pas sans risque pour notre santé et pour celle des animaux.
Patrick Giraudoux, Professeur émérite d'écologie, Université de Franche-Comté – UBFC
Eve Afonso, Maître de conférences en écologie, Université de Franche-Comté – UBFC
Li Li, Professor of ecology, Yunnan University of Finance and Economics
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tag:theconversation.com,2011:article/176751
2022-02-24T18:54:37Z
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Au Moyen Âge, les champignons avaient très mauvaise réputation
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/448314/original/file-20220224-33175-vepelb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption"></span> </figcaption></figure><p>A l’époque médiévale, les champignons poussent en grande quantité dans les forêts et dans les champs ; paradoxalement ils sont très peu présents dans les ouvrages encyclopédiques. Quelques articles leur sont consacrés, classés parmi les herbes, surtout pour insister sur leur dangerosité. Il est bien fait allusion à quelques espèces comestibles, comme le bolet ou la truffe, mais très rapidement. Le règne fongique semble être rejeté d’un seul bloc par la mentalité médiévale. Pourquoi le champignon médiéval a-t-il une si mauvaise réputation ?</p>
<h2>Une suspicion héritée de l’Antiquité</h2>
<p>Le savoir médiéval s’appuie sur les sources antiques. Pline l’Ancien, avec sa somme encyclopédique <em>Historia naturalis</em>, fait autorité pour la description de la nature. Quand il aborde les champignons, c’est surtout pour insister sur leur nocivité (livre XXII, chapitre 47) : il prend pour exemple l’empoisonnement de l’empereur Claude par son épouse Agrippine à l’aide d’un <a href="http://agoraclass.fltr.ucl.ac.be/concordances/pline_hist_nat_22/lecture/23.htm">bolet vénéneux</a>. Pline reconnaît cependant que tous les champignons ne sont pas dangereux mais il ne voit pas l’intérêt de consommer un <a href="http://agoraclass.fltr.ucl.ac.be/concordances/pline_hist_nat_22/lecture/24.htm">aliment aussi suspect</a>. L’encyclopédisme médiéval hérite donc d’une forte suspicion vis-à-vis des champignons.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/448340/original/file-20220224-13-nq00ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/448340/original/file-20220224-13-nq00ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/448340/original/file-20220224-13-nq00ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/448340/original/file-20220224-13-nq00ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/448340/original/file-20220224-13-nq00ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/448340/original/file-20220224-13-nq00ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/448340/original/file-20220224-13-nq00ap.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Jehan de Cuba, <em>Le Jardin de Santé</em> translaté du latin, édition Philippe le Noir, 1539.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bibliothèque nationale de France, département Réserve des livres rares</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un axe ciel-terre</h2>
<p>La religion chrétienne, qui influence tous les domaines de la pensée médiévale, va encore alourdir le lourd passif du champignon. L’ensemble des créatures sont classées selon un ordre hiérarchique, organisé autour de l’axe ciel-terre : plus les créatures sont proches du ciel, donc symboliquement du domaine divin, plus elles sont valorisées ; à l’inverse, plus les créatures sont proches de la terre, plus elles sont perçues comme négatives. </p>
<p>Par conséquent les champignons, qui poussent au ras du sol, se retrouvent au plus bas de cette hiérarchie – c’est encore pire pour la truffe, qui pousse directement dans la terre. Les champignons émaneraient directement de la terre : Hildegarde de Bingen, dans son encyclopédie <em>Physice</em>, développe une pharmacopée en partie <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00608791/document">validée par la postérité</a>. Dans son Livre I, sur les plantes, elle consacre un long article aux champignons, qu’elle compare à l’écume et à la sueur de la terre (<a href="http://www.clerus.org/bibliaclerusonline/it/jxf.htm">CLXXII, <em>De fungis</em></a>).</p>
<p>Cette <a href="http://expositions.bnf.fr/gastro/arret_sur/imaginaire/index.htm">échelle des êtres</a> est utilisée pour régir l’alimentation des nobles, qui ne doivent pas consommer ce qui pousse trop près de la terre : ces aliments sont considérés comme indignes de leur rang social. Dans le <a href="http://expositions.bnf.fr/gastro/recettes/hely.htm"><em>Mesnagier de Paris</em></a>, ouvrage d’intendance domestique du XV<sup>e</sup> siècle, une seule recette mentionne des champignons, et il s’agit d’un pâté (Livre II, chapitre V).</p>
<p>Cette classification symbolique échappe bien sûr à la grande majorité de la population : les paysans consommaient les champignons, source alimentaire abondante et gratuite, comme les fruits et les baies qu’ils trouvaient dans les bois.</p>
<h2>La théorie des humeurs</h2>
<p>Les champignons souffrent également d’une mauvaise réputation au regard de la théorie médicale qui prévaut depuis Hippocrate : la <a href="http://expositions.bnf.fr/gastro/arret_sur/medecine/texte.htm">théorie des humeurs</a>. Selon cette théorie, le corps humain serait parcouru par quatre fluides, [quatre humeurs dont l’équilibre permet de rester en bonne santé]. Ces humeurs sont composées de quatre qualités, qui vont par paire : chaud, froid, sec et humide.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/448345/original/file-20220224-25-1bbmpjn.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/448345/original/file-20220224-25-1bbmpjn.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=808&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/448345/original/file-20220224-25-1bbmpjn.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=808&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/448345/original/file-20220224-25-1bbmpjn.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=808&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/448345/original/file-20220224-25-1bbmpjn.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1015&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/448345/original/file-20220224-25-1bbmpjn.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1015&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/448345/original/file-20220224-25-1bbmpjn.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1015&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Approche alchimique des quatre humeurs en relation avec les quatre éléments et les signes zodiacaux. Illustration dans Quinta Essentia par Leonhart Thurneisser zum Thurn, 1574.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Quinta_Essentia_(Thurneisse)_illustration_Alchemic_approach_to_four_humors_in_relation_to_the_four_elements_and_zodiacal_signs.jpg">Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces qualités se retrouvent dans les espèces végétales, selon des degrés d’intensité qui vont de 1 à 4. Dans cette classification, le champignon est froid et humide au 3<sup>e</sup> degré (au 4<sup>e</sup> degré dans certains textes). Voici ce qu’en dit <em>Le grant herbier En francoys</em>, au XVI<sup>e</sup> siècle :</p>
<blockquote>
<p>« Ilz sont frois et moites au tiers degré. Et ce est monstré par la violence qu’ilz ont et moiteur aussi. Il en est de deux manieres car les ungz sont mortelz et font mourir ceulx qui les menguent, les autres ne le sont pas. »</p>
</blockquote>
<p>Les champignons sont classés en deux groupes : les mortels et les autres, mais les seconds sont indigestes et rendent malades.</p>
<p>Une seule espèce semble vraiment bénéfique : l’agaric (l’amadou, classé comme chaud et sec), qui pousse sur le tronc des arbres, et donc loin du sol. Dans les articles qui lui sont consacrés, l’agaric est doté de vertus médicinales, notamment hémostatiques. L’agaric n’est pas mentionné dans les articles sur les champignons, comme pour ne pas le dévaloriser.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/448343/original/file-20220224-23-1fzf09u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/448343/original/file-20220224-23-1fzf09u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=623&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/448343/original/file-20220224-23-1fzf09u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=623&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/448343/original/file-20220224-23-1fzf09u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=623&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/448343/original/file-20220224-23-1fzf09u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=783&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/448343/original/file-20220224-23-1fzf09u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=783&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/448343/original/file-20220224-23-1fzf09u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=783&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le grant herbier En francoys, imprimé à Paris par Jacques Nyverd, XVIᵉ s..</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bibliothèque nationale de France, département Réserve des livres rares, RES FOL-TE142-22 (B), folio Lr (détail)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Les herbiers médiévaux</h2>
<p>Les champignons sont <a href="http://dfsm.elan-numerique.fr/entry/display/5515">présentés globalement</a> comme si c’était une espèce aux caractéristiques uniques et homogènes. Cette absence de distinction entre les champignons se retrouve au niveau de l’iconographie : dans ces herbiers, la gravure représente toujours quelques champignons type bolet, avec pied et chapeau. Tout se passe comme si l’encyclopédiste médiéval ne s’intéressait pas du tout au champignon : il ne cherche pas à distinguer les différentes variétés, ni dans les textes ni dans les illustrations. Le règne fongique, trop lié à la terre, ne semblait pas digne d’intérêt, d’autant plus que les textes insistent sur sa dangerosité.</p>
<p>Premier livre d’histoire naturelle à être imprimé, <em>Le Jardin de Santé</em> de Jehan de Cuba est une somme encyclopédique ; la première partie, consacrée <em>aux herbes et autres choses à usage médicinal</em>, propose seulement trois articles sur les champignons : l’un sur les champignons en général (<em>fungus</em>), l’autre sur l’agaric (<em>agaricus</em>), le dernier sur la truffe (<em>tubera</em>). Le Moyen Âge, qui utilise l’étymologie plus ou moins fantaisiste comme clé de compréhension du monde, voit dans ce mot latin <em>fungus</em> une indication du caractère mortel des champignons : <em>fungi</em> viendrait de <em>defuncti</em>, qui signifie « défunts ».</p>
<p><em>Le Jardin de Santé</em> énumère les maux engendrés par l’ingestion des champignons vénéneux :</p>
<blockquote>
<p>« D’iceulx sont espèces mauvaises et mortiferes. Et ay veu homme qui a souffert par iceulx anxieté et angoisse de l’alainer et coartation et sincope, c’est-à-dire pasmoison et aussi douleur froide. […] Certes a celluy qui mangue champignons luy advient passion, colique et suffocation. »</p>
</blockquote>
<p>Les textes conseillent de faire cuire les champignons, du moins les comestibles, pour en faciliter la digestion. En cas d’ingestion de champignon vénéneux, il faut prendre un antidote – <em>Le Grand Herbier</em>, monument botanique de la fin du Moyen Âge, donne plusieurs recettes à base d’herbes et d’épices.</p>
<p>Avec ce rapide parcours dans l’univers des champignons médiévaux (champ de recherche qui reste encore à défricher), il apparaît que la médecine traditionnelle occidentale n’utilise pas les champignons, considérés comme toxiques (à l’exception de l’agaric).</p>
<p>Cette aversion se retrouve dans la gastronomie médiévale. La mauvaise réputation du champignon tient, nous l’avons vu, à des éléments culturels. En effet, la médecine traditionnelle orientale, et notamment chinoise, valorise au contraire les champignons dans sa pharmacopée (mycothérapie).</p>
<p>C’est bien ici la culture qui impose le rapport à la nature. Ce rapport des peuples aux champignons a été étudié par l’ethnologie, plus exactement par l’ethnomycologie dont <a href="https://journals.openedition.org/lettre-cdf/222">Claude Levi-Strauss</a> rappelle les fondements : les peuples se classent en deux catégories dans leur rapport aux champignons, les mycophobes et les mycophiles. Les mycophobes n’éprouvent au mieux aucun intérêt pour les champignons, et vont jusqu’à les détester ; les mycophiles les intègrent tout naturellement dans leur univers culturel et culinaire. Tout semble montrer que le Moyen Âge occidental a été mycophobe dans ses ouvrages encyclopédiques jusqu’à la Renaissance, où le changement des mentalités permit de redécouvrir le champignon, ce mal-aimé des forêts.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/176751/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Gontero-Lauze ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Entre nature et culture, quelques pistes pour expliquer pourquoi le champignon était si mal aimé au Moyen Âge.
Valérie Gontero-Lauze, Maître de conférences en langue et littérature du Moyen Age, Aix-Marseille Université (AMU)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/168597
2021-09-23T20:20:08Z
2021-09-23T20:20:08Z
Les micro-organismes peuvent-ils nous aider à mieux nourrir la population mondiale ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/422926/original/file-20210923-27-1qdptyr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C7%2C5180%2C3749&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Présents dans l’immense majorité des environnements, les micro-organismes peuvent améliorer l’efficacité de la production alimentaire.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-photo/contaminated-food-concept-tainted-meal-poisoning-1422733514">Shutterstock / Giovanni Cancemi</a></span></figcaption></figure><p>Au cours du XXI<sup>e</sup> siècle, nous allons devoir relever un triple défi en matière de production alimentaire : nourrir une population toujours plus importante, tout en <a href="http://www.fao.org/3/ca2079en/CA2079EN.pdf">minimisant l’impact sur l’environnement</a> et en garantissant aux consommateurs la sécurité et la qualité des aliments qui arrivent sur leurs tables.</p>
<p>Il faudra pour cela accroître l’efficacité de la production. Pour y parvenir, des travaux de recherche ont révélé des alliés inattendus qui pourraient nous apporter leur aide : les micro-organismes. Voyons comment.</p>
<h2>Microbiomes et chaînes alimentaires</h2>
<p>Bactéries, archées, champignons, algues, virus… Dans tout environnement, différents micro-organismes coexistent, interagissant entre eux et avec leur environnement. Ils forment de ce fait des communautés microbiennes qui contrôlent de nombreux processus environnementaux fondamentaux (cycles du carbone, de l’azote, etc.). La compréhension de la façon dont ces communautés s’organisent peut nous aider à contrôler et à améliorer les processus les plus pertinents pour l’être humain.</p>
<p>Pour cette raison, l’étude des microbiomes suscite un intérêt scientifique important. Ces travaux s’appuient sur les nouvelles technologies de séquençage, lesquelles permettent d’identifier rapidement et de façon automatisée les micro-organismes présents dans les environnements d’intérêt ainsi que de leurs fonctions.
Ils fournissent les informations nécessaires pour comprendre les processus mis en œuvre par ces communautés en vue de tirer parti de leur potentiel biotechnologique.</p>
<p>Petite précision : on parle de microbiote pour désigner l’ensemble des micro-organismes <a href="https://www.eufic.org/fr/production-alimentaire/article/quest-ce-que-le-microbiome-et-pourquoi-est-il-important/">qui cohabitent en un même endroit</a>. Le terme microbiome a de son côté une <a href="https://microbiomejournal.biomedcentral.com/articles/10.1186/s40168-020-00875-0">dimension « écosystémique »</a> tenant compte des interactions entre eux, de leurs dynamiques, des conditions environnementales qui les entourent, etc.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/423051/original/file-20210923-17-womgel.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/423051/original/file-20210923-17-womgel.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/423051/original/file-20210923-17-womgel.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/423051/original/file-20210923-17-womgel.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/423051/original/file-20210923-17-womgel.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/423051/original/file-20210923-17-womgel.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=460&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/423051/original/file-20210923-17-womgel.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=460&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/423051/original/file-20210923-17-womgel.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=460&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Si l’attention se concentre souvent sur les micro-organismes qui vivent dans notre organisme (comme ceux qui forment le microbiote intestinal), les microbiomes qui existent dans l’environnement sont eux aussi importants pour notre bien-être, qu’il soit individuel ou collectif. C’est en particulier le cas des microbiomes associés à la chaîne agroalimentaire, de la production primaire au consommateur. On les trouve dans les sols, les plantes, les animaux, les industries de transformation et, dans une moindre mesure, dans le produit final.</p>
<p>Comprendre leur organisation et leurs fonctions peut aider à relever certains des défis auxquels est confrontée la production alimentaire.</p>
<h2>Microbiomes et traçabilité des aliments</h2>
<p>La surveillance des microbiomes dans les environnements de production alimentaire permet d’identifier les incidents à un stade précoce. C’est par exemple le cas des contaminations qui risquent de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2214799320301405">compromettre la qualité et la sécurité des produits</a>.</p>
<p>Par ailleurs, étant donné que le type de micro-organismes présents dans certaines matières premières ou produits est conditionné par leur origine et leur environnement de transformation, le microbiome pourrait permettre de vérifier l’origine et l’authenticité de certains aliments.</p>
<p>Des scientifiques ont par exemple montré qu’il est possible de <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0184615">différencier l’origine de certains cépages</a> utilisés dans la production de vin ou de <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-017-00549-2">produits à base de levain</a> de celle d’autres cépages dont le processus de production est différent. Ces demandes pourraient être particulièrement pertinentes pour surveiller les produits bénéficiant d’une appellation d’origine protégée.</p>
<h2>Augmenter la valeur ajoutée des aliments grâce aux microbiomes</h2>
<p>Des micro-organismes peuvent également être utilisés pour contribuer à améliorer la qualité et la sécurité de la production alimentaire. On peut ainsi envisager d’utiliser comme <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32542314/">biopréservateurs et agents de biocontrôle</a> ceux qui sont capables d’inhiber la croissance d’autres micro-organismes, indésirables.</p>
<p>Ces biopréservateurs peuvent non seulement limiter les risques de contamination dans les chaînes de production de l’industrie alimentaire, mais aussi prévenir les maladies dans les cultures, le bétail et l’aquaculture. Ils peuvent également prolonger la durée de conservation des denrées.</p>
<p>Leur utilisation réduit l’impact économique et environnemental des maladies ou des contaminations, et rationalise l’emploi des désinfectants et des additifs alimentaires. Elle contribue à améliorer l’efficacité des systèmes de production, un impératif pour répondre à la demande alimentaire d’une population mondiale en croissance.</p>
<p>Parmi les micro-organismes intéressants, ceux utilisés pour produire des aliments fermentés comme la bière, le fromage, le yaourt, le kéfir ou les olives, entre autres, <a href="https://redbal.net/">méritent une mention spéciale</a>.</p>
<p>Traditionnellement, la fermentation visait uniquement à modifier les propriétés organoleptiques des aliments et à prolonger leur durée de conservation. Aujourd’hui, nous pouvons déterminer quelles sont les combinaisons de micro-organismes les plus optimales pour chaque processus de fermentation, en étudiant la façon dont ils se comportent au sein de communautés microbiennes complexes.</p>
<p>L’objectif est d’identifier des micro-organismes à la fois robustes et inoffensifs, capables de conférer au produit final les propriétés qui nous intéressent, que ce soit au point de vue organoleptique, nutritionnel, voire de la santé. En effet, les aliments fermentés contiennent un <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32542314/">grand nombre de micro-organismes vivants</a>, dont certains peuvent être des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24912386/">probiotiques</a>, autrement dit apporter des bénéfices pour la santé une fois consommés.</p>
<h2>Des micro-organismes pour réduire les déchets alimentaires</h2>
<p>Accroître l’efficacité de la production alimentaire passe également par la réduction du volume de déchets générés tout au long de la chaîne de production. Là encore, les micro-organismes ont un rôle à jouer.</p>
<p>Comprendre comment les micro-organismes de notre microbiote intestinal métabolisent les composés présents dans certains déchets alimentaires peut aider à concevoir de nouveaux aliments sains à partir desdits déchets. L’inclusion de différents processus de fermentation dans les étapes de traitement des sous-produits de la chaîne de production alimentaire constitue également une option intéressante pour produire de nouveaux aliments.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/421575/original/file-20210916-27-1iy08tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/421575/original/file-20210916-27-1iy08tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/421575/original/file-20210916-27-1iy08tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/421575/original/file-20210916-27-1iy08tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/421575/original/file-20210916-27-1iy08tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/421575/original/file-20210916-27-1iy08tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/421575/original/file-20210916-27-1iy08tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/421575/original/file-20210916-27-1iy08tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les micro-organismes utilisés pour produire de la bière, du fromage, du yaourt et du kéfir peuvent augmenter la valeur ajoutée des aliments.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-photo/cabrales-cheese-handmade-bread-red-wine-256391629">Aidart/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Certains sous-produits de l’industrie agroalimentaire contiennent en effet des ingrédients aux propriétés nutritionnelles intéressantes, bénéfiques à la santé, qui peuvent être valorisés. C’est par exemple le cas du lactosérum, riche en protéines. Certaines recherches se sont penchées sur la possibilité de l’utiliser pour fabriquer des <a href="http://valorizaciondesuero.es/">aliments à haute valeur ajoutée</a>. Les résidus provenant de la transformation des céréales, des fruits et des légumes, sont quant à eux riches en polyphénols et en fibres, des composés qui peuvent avoir une influence positive sur <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fmicb.2020.581997/full">notre microbiote intestinal et notre santé</a>.</p>
<h2>L’alimentation du futur passera-t-elle par les micro-organismes ?</h2>
<p>Les micro-organismes ont souvent mauvaise réputation dans l’opinion générale. Considérés comme des ennemis, ils sont perçus comme synonymes d’infection et de contaminations. Pourtant, certains d’entre eux <a href="https://www.nature.com/articles/s41564-020-00857-w">ouvrent d’innombrables perspectives biotechnologiques</a>. À tel point qu’ils pourraient contribuer à apporter des réponses aux grands défis mondiaux, notamment ceux liés aux systèmes alimentaires.</p>
<p>Comprendre les capacités de certains micro-organismes et des microbiomes associés aux systèmes alimentaires peut aider à restructurer ces derniers pour produire des aliments sûrs et de qualité de manière durable, qui nourrissent et protègent la santé d’une population mondiale en croissance.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/168597/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lorena Ruiz García reçoit des fonds de recherche par l'intermédiaire du ministère des sciences, de l'innovation et des universités.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Abelardo Margolles reçoit ou a reçu des fonds de différents organismes de financement : plans régionaux de R&D de la Principauté des Asturies, plans de recherche de l'État, Programme H2020 et autres programmes de recherche de l'Union Européenne et du CSIC. Abelardo Margolles a reçu des fonds de plusieurs entreprises pour le développement de contrats de recherche. Abelardo Margolles détient des actions de la société technologique MicroViable Therapeutics (<a href="http://www.microviable.com">www.microviable.com</a>).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Carlos Sabater Sánchez reçoit des fonds du Ministère de la Science et de l'Innovation (MICINN) - Ayudas para contratos Juan de la Cierva-formación 2019 (référence du contrat : FJC2019-042125-I).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Patricia Ruas Madiedo reçoit des fonds des Plans nationaux et régionaux de recherche et de développement, par le biais d'un concours.</span></em></p>
Les micro-organismes pourraient diminuer le risque de contamination des produits alimentaires, corroborer leur origine, leur authenticité, améliorer leur valeur ajoutée ou même réduire les déchets.
Lorena Ruiz García, Investigadora, Microbología, Alimentos y Salud, Instituto de Productos Lácteos de Asturias (IPLA - CSIC)
Abelardo Margolles Barros, Instituto de Productos Lácteos de Asturias (IPLA - CSIC)
Carlos Sabater Sánchez, Postdoctoral research fellow, Instituto de Productos Lácteos de Asturias (IPLA - CSIC)
Patricia Ruas Madiedo, Investigadora Científica, Instituto de Productos Lácteos de Asturias (IPLA - CSIC)
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tag:theconversation.com,2011:article/161788
2021-05-30T20:42:08Z
2021-05-30T20:42:08Z
Covid-19 : qu’est-ce que la mucormycose, l’infection fongique qui frappe les malades indiens ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/403461/original/file-20210530-16-mrhhz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C0%2C1220%2C815&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un médecin s’enquiert de l’état d’un patient Covid-19 atteint de mucormycose, une infection fongique mortelle rare, à l'hôpital NSCB de Jabalpur, le 20 mai 2021.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Uma Shankar Mishra / AFP</span></span></figcaption></figure><p><em>Depuis quelques semaines, en Inde, de nombreux patients se rétablissant de la Covid-19 sont touchés par une grave maladie due à des champignons, la mucormycose. Spécialiste des maladies fongiques, Fanny Lanternier est professeure au département des maladies infectieuses et tropicales de l’Hôpital Universitaire Necker-Enfants malades (AP-HP, Université de Paris) ainsi qu’à l’Institut Pasteur, au Centre National de Référence des Mycoses invasives. Elle revient sur les origines de cette affection et sur sa prise en charge.</em></p>
<hr>
<p><strong>The Conversation : La vague de Covid-19 d’ampleur exceptionnelle qui s’abat sur l’Inde depuis plusieurs semaines s’accompagne d’une épidémie de mucormycose qui aurait déjà causé la mort <a href="https://www.hindustantimes.com/india-news/219-black-fungus-deaths-reported-from-13-states-101621536884875.html">de plus de 200 patients</a>. À quoi est due cette maladie ?</strong></p>
<p><strong>Fanny Lanternier :</strong> La mucormycose est une maladie causée par des champignons microscopiques appartenant à l’ordre des Mucorales. Ces champignons filamenteux, appelés ainsi parce qu’ils forment des filaments lorsqu’ils se développent, vivent dans l’environnement dit « tellurique », autrement dit dans les sols, les poussières.</p>
<p>On peut lire un peu partout que la mucormycose est le fait de champignons noirs (« black fungus »), mais ce n’est pas le cas. Si les champignons noirs sont bien des champignons pathogènes, eux aussi, et si l’on en trouve également en Inde, ils ne provoquent en revanche pas de mucormycose. Et pour cause : ils n’appartiennent pas à l’ordre des Mucorales ; ce sont des Phaeohyphomycètes. Cette méprise est peut-être liée au fait que les lésions développées par les Mucorales peuvent être noires, en raison de la nécrose provoquée.</p>
<p><strong>TC : Quels sont les symptômes de ces infections ? Comment est posé le diagnostic ? Quels sont les traitements ?</strong></p>
<p><strong>FL :</strong> Lorsque l’infection est contractée par voie aérienne, elle concerne initialement les sinus de la face, et les premiers symptômes constatés sont une douleur au niveau du visage et de l’œil. Des saignements de nez peuvent aussi survenir. L’œil peut devenir rouge, et il peut y avoir une exophtalmie (l’œil devient protubérant). </p>
<p>L’infection peut progresser jusqu’au cerveau, et lors des stades les plus avancés on observe une nécrose cutanée au niveau de la face. D’autres sites peuvent être atteints, comme le poumon ou la peau et les muscles. Les signes évocateurs sont respectivement une fièvre, une toux et des douleurs du thorax ou une nécrose d’un site cutané, après un traumatisme.</p>
<p>La mucormycose est une infection dont le diagnostic est difficile, car on dispose d’assez peu de marqueurs sanguins pour détecter les champignons qui la provoquent. La recherche de génomes de Mucorales dans le sang, par PCR, est une bonne approche, car cela permet de diagnostiquer l’infection assez tôt. Il est nécessaire d’effectuer un prélèvement (biopsie) au site d’infection, puis de le mettre en culture pour vérifier s’il contient des Mucorales. Cette approche peut s’avérer compliquée à mettre en œuvre dans un contexte épidémique tel que celui que vit l’Inde, avec des malades potentiellement dans un état sévère. Cela demande des moyens importants. </p>
<p><strong>TC : Comment traite-t-on la mucormycose ?</strong></p>
<p><strong>FL :</strong> Le traitement est difficile. Le problème principal auquel on se retrouve confronté lorsqu’il s’agit de traiter les formes les plus avancées est que les tissus sont alors complètement nécrosés. Ils ne sont donc plus vascularisés correctement, ce qui signifie que les antifongiques, administrés par voie sanguine, ne vont pas diffuser jusqu’au site d’infection.</p>
<p>La chirurgie doit être systématique dans les infections des sinus et de l’oeil : il faut opérer les malades pour enlever les tissus nécrotiques, en complément du traitement antifongique de référence (polyènes tels que l’amphothéricine B et ses dérivés lipidiques).</p>
<p><strong>TC : Comment se font les contaminations par les Mucorales ?</strong> </p>
<p><strong>FL :</strong> Les contaminations se produisent principalement de deux façons.
Le plus fréquemment, l’entrée du champignon dans l’organisme résulte de l’inhalation de spores. Dans ce cas, le champignon s’attaque aux sinus et aux poumons. Les personnes les plus touchées par ces formes sont les patients dont l’immunité est déficiente, par exemple les patients sous chimiothérapie.</p>
<p>Outre les problèmes d’immunité, on sait que certaines pathologies peuvent prédisposer à la maladie. Le cas du diabète est très bien documenté : cette affection est très associée au risque de développer une mucormycose, en particulier la forme sinusienne, avec une extension vers l’œil. </p>
<p>Le champignon peut également pénétrer dans l’organisme suite à un traumatisme important, en cas d’accident par exemple, notamment agricole. </p>
<p><strong>TC : Pourquoi les cas explosent-ils en Inde ?</strong></p>
<p><strong>FL :</strong> Plusieurs facteurs expliquent comment l’épidémie de Covid-19 a pu aggraver la situation indienne. </p>
<p>En temps normal, il y a déjà davantage de cas de mucormycoses en Inde qu’ailleurs.
(<em>ndlr : certains auteurs estiment qu’en Inde la prévalence de la maladie pourrait être d’environ <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8000977/#sec2-microorganisms-09-00523title">14 cas par 100 000 habitants</a>, ce qui signifie qu’elle serait jusqu’à 70 fois plus élevée que la prévalence globale</em>). En outre, la population indienne est plus affectée par le diabète. Et qui plus est, les infections respiratoires sont connues pour favoriser les infections à champignons. </p>
<p>Cela a bien été montré dans le cas des formes graves de grippe : les patients qui sont hospitalisés en réanimation, intubés et ventilés, ont un risque important d’être atteints d’aspergillose, une maladie causée par d’autres champignons filamenteux. C’est aussi le cas des patients Covid qui sont intubés et ventilés (ceci dit, dans ce dernier cas le risque est moindre qu’avec la grippe - précisons également que l’aspergillose ne se transmet pas de patients à patients). </p>
<p>Cette susceptibilité accrue aux infections fongiques s’explique par le fait que les poumons sont abîmés par les virus respiratoires, ce qui favorise l’infection fongique (celle-ci n’est pas forcément acquise à l’hôpital : les gens peuvent avoir inhalé des spores avant d’y être admis). Certes, les mucormycoses décrites en Inde sont surtout des atteintes des sinus, mais il est difficile de savoir si les champignons ont aussi été systématiquement recherchés au niveau des poumons.</p>
<p>Enfin, dernier point : la corticothérapie, indiquée pour traiter les formes graves de Covid, est responsable d’une immunodépression, ce qui favorise aussi les infections à champignon. Mucorales dans l’environnement plus nombreuses qu’ailleurs, grand nombre de patients diabétiques qui ont reçu des corticoïdes et dont les muqueuses respiratoires sont abîmées par le Covid : la situation indienne actuelle est particulièrement favorable au développement de mucormycoses.</p>
<p><strong>TC : Cette situation est-elle spécifique à l’Inde, ou constate-t-on la même chose ailleurs ? Qu’en est-il en France ?</strong></p>
<p><strong>FL :</strong> Quelques cas ont été rapportés ailleurs, mais dans des proportions bien moindres. </p>
<p>En France, on ne dénombre en temps normal que 50 cas de mucormycose par an environ, les formes cutanées représentant 18 % des cas. Les Mucorales que l’on retrouve dans notre pays ne sont pas exactement les mêmes qu’en Inde, les espèces les plus fréquentes diffèrent notamment, mais a priori, cela ne change pas la virulence ni la prise en charge en cas d’infection. </p>
<p>Quoi qu’il en soit, la France est peu concerné par la mucormycose en tant que complication de l’épidémie de Covid-19. En matière d’infections fongiques, il a juste été constaté une hausse des aspergilloses, ce qui n’est pas surprenant étant donné ce que l’on sait des liens entre infections respiratoires et infections fongiques. Mais quoi qu’il en soit, cette hausse reste moindre que lors des cas de grippes sévères.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161788/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Conférence rémunérée Gilead, MSD, Basilea, F2G.</span></em></p>
Des milliers de patients indiens convalescents du Covid-19 sont frappés par une grave infection fongique souvent mortelle, la mucormycose. De quoi s’agit-il, et pourquoi une telle flambée ?
Fanny Lanternier, Chercheuse, Centre National de Référence Mycoses Invasives et Antifongiques. Unité de Mycologie Moléculaire, CNRS UMR2000 - Institut Pasteur ; PU-PH - Service de maladies infectieuses et tropicales Hôpital Universitaire Necker Enfants malades - APHP, Université Paris Cité
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2021-05-27T18:27:55Z
2021-05-27T18:27:55Z
Quel est ce « tigre » dans mon chêne ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/399318/original/file-20210506-24-12p8iw8.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Chênes attaqués par _Corythucha arcuata_, à côté d’érables. Le contraste des couleurs est saisissant. </span> <span class="attribution"><span class="source">Gyory Csoka</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>La liste des espèces d’insectes herbivores associées au chêne était déjà longue ; elle s’est récemment allongée. La nouvelle venue est une petite punaise de la famille des Tingidae. Son nom : <em>Corythucha arcuata</em>, plus communément appelée la punaise réticulée du chêne, ou le tigre du chêne.</p>
<p>Est-ce une bonne nouvelle pour la biodiversité ? Pas vraiment, la nouvelle venue ayant tout pour devenir une espèce exotique envahissante.</p>
<p>Mais que sait-on exactement de cet insecte et des dégâts qu’elle cause ?</p>
<h2>Un minuscule insecte à collerette</h2>
<p>Son « apparition » n’a pas fait beaucoup de bruit, en 2017, quand pour la première fois la présence d’une espèce d’insecte herbivore exotique a été documentée sur un chêne <a href="https://agriculture.gouv.fr/la-punaise-reticulee-ou-le-tigre-du-chene-decouverte-dun-nouvel-insecte-identifie-sur-chene-dans-la">dans la région de Toulouse</a>. Il s’agissait de notre punaise réticulée du chêne, (<em>Corythucha arcuata</em>). Aujourd’hui, son aire de distribution s’étend en France.</p>
<p><em>Corythucha arcuata</em> est une petite punaise de 3-4 mm de long, reconnaissable à sa collerette qui rappelle la fraise qu’arbore Elisabeth I dans le <a href="https://www.wikiwand.com/fr/Le_Portrait_de_l%27Armada">portrait de l’Armada</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Gyorgy Csoka" src="https://images.theconversation.com/files/399317/original/file-20210506-19-nrqte4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/399317/original/file-20210506-19-nrqte4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=602&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/399317/original/file-20210506-19-nrqte4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=602&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/399317/original/file-20210506-19-nrqte4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=602&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/399317/original/file-20210506-19-nrqte4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=756&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/399317/original/file-20210506-19-nrqte4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=756&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/399317/original/file-20210506-19-nrqte4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=756&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"><em>Corythucha arcuata</em> sur une feuille de chêne.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’insecte lui-même passe souvent inaperçu. Ces dégâts, eux, attirent immédiatement l’œil ! les feuilles attaquées virent au jaune, parfois dès le mois de juillet. La décoloration peut être spectaculaire, surtout quand l’espèce végétale hôte – celle sur laquelle l’insecte peut s’alimenter – se trouve à proximité d’une espèce non hôte et donc pas attaquée.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=620&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=620&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=620&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=779&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=779&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/399316/original/file-20210506-13-9enmml.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=779&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dégâts de <em>Corythucha arcuata</em> sur chêne pédonculé.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bastien Castagneyrol</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les décolorations provoquées s’expliquent par le mode d’alimentation des nymphes et des adultes. <em>Corythucha arcuata</em> est un insecte qu’on qualifie de « piqueur-suceur » : ses pièces buccales consistent en un stylet servant à percer le contenu des cellules des feuilles avant de l’aspirer le contenu.</p>
<h2>Une espèce exotique envahissante</h2>
<p>En Europe, <em>C. arcuata</em> est une espèce exotique : elle a été introduite accidentellement en Italie, en 2000, depuis l’Amérique du Nord. Son aire de distribution s’est ensuite étendue à la Turquie, l’Europe de l’Est, les Balkans. En 2017, elle était signalée, on l’a vu plus haut, dans la région de Toulouse ; en 2018, à Bordeaux. Il s’agit d’une <a href="https://theconversation.com/1-288-milliards-de-dollars-chiffrer-les-degats-causes-par-les-invasions-biologiques-pour-enfin-agir-158204">espèce envahissante, aux effets préoccupants</a>.</p>
<p>Comme son nom l’indique, la punaise réticulée du chêne s’<a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/afe.12362">attaque essentiellement aux chênes</a>, même si elle a été signalée sur d’autres espèces d’arbres (châtaigner, érable, noisetier) ou de buissons (ronce).</p>
<p>Parmi les chênes, ce sont les chênes européens qui sont les plus touchés – notamment le chêne pédonculé (<em>Quercus robur</em>), le chêne sessile (<em>Q. petraea</em>) et le chêne chevelu (<em>Q. cerris</em>).</p>
<p>En Europe, les chênes nord-américains – comme le chêne rouge (<em>Q. rubra</em>) ou le chêne des marais (<em>Q. palustris</em>) – ne semblent pas être attaqués, ou très exceptionnellement.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/399314/original/file-20210506-19-1cdabpr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/399314/original/file-20210506-19-1cdabpr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=442&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/399314/original/file-20210506-19-1cdabpr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=442&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/399314/original/file-20210506-19-1cdabpr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=442&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/399314/original/file-20210506-19-1cdabpr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=555&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/399314/original/file-20210506-19-1cdabpr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=555&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/399314/original/file-20210506-19-1cdabpr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=555&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Deux chênes photographiés en octobre 2020 dans un parc de la ville de Bordeaux. À gauche, un chêne rouge, non attaqué ; à droite, un chêne pédonculé dont les feuilles présentent des décolorations typiques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bastien Castagneyrol</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Les capacités photosynthétiques attaquées</h2>
<p>Dans son aire native, <em>C. arcuata</em> ne cause pas de dégâts majeurs sur les arbres, de sorte que l’on connaît encore très peu de choses sur sa biologie. C’est un problème récurrent avec les invasions biologiques : souvent, on ne commence à s’intéresser à une espèce que quand elle pose déjà des problèmes.</p>
<p>Des travaux sont en cours dans plusieurs laboratoires de recherche en Europe pour en apprendre plus. <a href="https://www.researchgate.net/publication/345508479_Known_and_predicted_impacts_of_the_invasive_oak_lace_bug_Corythucha_arcuata_in_European_oak_ecosystems_-_a_review">Voilà ce que l’on sait, et ce que l’on suspecte aujourd’hui</a>.</p>
<p>Les décolorations causées par l’alimentation des nymphes et des adultes peuvent <a href="https://www.researchgate.net/publication/329776371_Physiological_responses_of_Pedunculate_oak_Quercus_robur_L_to_Corythucha_arcuata_Say_1832_attack">réduire de près de 60 % les capacités photosynthétiques des feuilles attaquées</a>. Or, la photosynthèse est le point d’entrée de l’énergie et du carbone dans l’arbre, ce qui lui permet d’assurer sa croissance, son entretien, et sa défense contre les stress et les agressions.</p>
<p>Bien que la majeure partie de la croissance des chênes s’effectue au printemps – avant que les décolorations ne soient trop importantes –, il serait surprenant que des décolorations massives n’aient pas de conséquences sur la croissance des chênes, surtout si les attaques de <em>C. arcuata</em> sont concomitantes d’autres stress comme la sécheresse.</p>
<h2>Une régulation sporadique</h2>
<p>Une des clés du succès des insectes ravageurs exotiques, c’est qu’ils voyagent souvent seuls, sans leurs ennemis naturels. Dans leur aire d’introduction, seuls les prédateurs et parasites généralistes peuvent réduire les niveaux de population des ravageurs exotiques.</p>
<p>Des observations confirment que plusieurs espèces de coccinelles, de <a href="https://www.wikiwand.com/fr/Chrysope_verte">chrysopes</a> ou encore d’araignées peuvent s’alimenter sur la punaise réticulée du chêne, mais seulement de manière sporadique.</p>
<p>Actuellement, <em>C. arcuata</em> est essentiellement présente dans le sud de l’Europe. On pourrait soupçonner que son expansion vers le nord serait limitée par le froid.</p>
<p>Des travaux récents ont malheureusement montré que <a href="https://web.nlcsk.org/wp-content/uploads/2021/03/Paulin.pdf">ce n’est pas le cas</a> : les nymphes et les adultes qui passent l’hiver dans la mousse au pied des arbres ou les anfractuosités de l’écorce résistent à plusieurs jours de gel consécutif.</p>
<p>Pour attirer davantage l’attention et lancer l’alerte, ajoutons un dernier élément : comme son cousin le tigre du platane (<em>Corythucha ciliata</em>), <em>C. arcuata</em> pique occasionnellement l’homme. Rien d’insoutenable, mais c’est désagréable.</p>
<h2>Agir très tôt</h2>
<p>Les insectes ravageurs exotiques envahissants sont une grave menace pour la santé des forêts.</p>
<p>À l’automne 2019, la Croatie, la Hongrie, la Roumanie, la Serbie et la partie européenne de la Russie totalisaient plus de 1,7 million d’hectares de chênes touchés. C’est presque deux fois la surface de la forêt des Landes de Gascogne.</p>
<p><a href="https://www.researchgate.net/profile/Giovanni-Caudullo/publication/299471357_Quercus_robur_and_Quercus_petraea_in_Europe_distribution_habitat_usage_and_threats/links/570b71aa08ae8883a1fe1b7a/Quercus-robur-and-Quercus-petraea-in-Europe-distribution-habitat-usage-and-threats.pdf">Une grande partie de la forêt européenne est aussi menacée</a> : les deux principales espèces de chênes couvrent en effet une surface allant du nord de l’Espagne au sud de la Suède, et de l’Irlande à la Russie.</p>
<p>Il est très probable que la dispersion longue distance de <em>C. arcuata</em> se fasse grâce au transport des troncs d’arbre, lequel doit être surveillé puisqu’à ce jour, il n’existe pas de méthode de lutte qui soit applicable à l’échelle d’un massif forestier.</p>
<p>Une étude récente suggère que les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0378112721002814?dgcid=raven_sd_via_email">champignons entomopathogènes (parasites des insectes) du genre <em>Beauveria</em> infectent et tuent <em>C. arcuata</em></a> mais leur potentiel de biocontrôle dans des conditions naturelles doit encore être étudié.</p>
<p>L’exemple de la punaise réticulée du chêne nous rappelle qu’il est crucial de pouvoir <a href="https://plurifor.efi.int/fr/">repérer les introductions d’insectes exotiques très tôt</a>, avant qu’ils ne se propagent et deviennent envahissants. Des outils de signalement existent, comme l’application <a href="https://silvalert.net/"><em>Silvalert</em></a>, mais ils ne sont utiles que si l’on est prêts à les utiliser. Soyons vigilants !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/160509/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bastien Castagneyrol a reçu des financements de l’Union européenne dans le cadre du programme Horizon 2020 pour le projet No. 771271, HOMED (Holistic Management of Emerging forest pests and Diseases, homed-project.eu).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Alex Stemmelen a reçu des financements de l’Union européenne dans le cadre du programme Horizon 2020 pour le projet No. 771271, HOMED (Holistic Management of Emerging forest pests and Diseases, homed-project.eu).</span></em></p>
Repérée pour la première fois en France en 2017, la punaise réticulée du chêne étend depuis son aire de distribution. Ses dégâts menacent les chênes européens.
Bastien Castagneyrol, Chercheur en écologie, Inrae
Alex Stemmelen, Doctorant en écologie, Inrae
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/157452
2021-05-04T17:35:45Z
2021-05-04T17:35:45Z
Comme votre intestin, la forêt a besoin de son microbiote
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/397112/original/file-20210426-19-1xrp6f5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2533%2C1705&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un brin de mousse grossi 400&nbsp;fois, vu en microscopie électronique à balayage après un séchage qui permet de préserver l’intégrité architecturale de la mousse et de son microbiote.</span> <span class="attribution"><span class="source">V. Baton et K. Comte</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Et oui, les mousses aussi ont un microbiote, mais à défaut d’être interne, comme celui de nos intestins, il est à la surface de la mousse. Celle-ci est colonisée notamment par des bactéries, des champignons, des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Protista">protistes</a> et des invertébrés.</p>
<p>Ce brin de mousse terrestre par exemple, de l’espèce <em>Thuidium tamariscinum</em>, a été prélevé dans la forêt de Fontainebleau en avril 2017. Autour de sa tige centrale, on voit des feuilles couvertes de petites protubérances arrondies, les « mamilles ». Sur la tige, de fines ramifications apparaissent : ce sont des structures photosynthétiques secondaires, les « paraphylles », dont le rôle et l’origine sont sujets à controverse depuis plusieurs décennies. Et ce qui brille ici par sa relative absence, c’est le microbiote de la mousse, que l’on appelle la « bryosphère ». Ces différentes composantes biologiques sont dépendantes des conditions environnementales et météorologiques, et en particulier de la pollution alentour.</p>
<h2>Les mousses terrestres pour évaluer la pollution localement</h2>
<p>Les mousses sont d’excellents <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bioindicateur">bio-indicateurs</a> de la qualité de l’air. En effet, contrairement aux végétaux « supérieurs », elles ne possèdent pas de racines et doivent donc se procurer les éléments dont elles ont besoin en les absorbant dans l’atmosphère. Elles sont donc particulièrement exposées à la pollution atmosphérique en métaux lourds et en azote, et en utilisant des facteurs de conversion appropriés, les concentrations analysées dans les mousses peuvent être comparées aux teneurs en éléments traces dans les zones contaminées.</p>
<p>Cette capacité de « bioaccumulation », c’est-à-dire d’accumuler des substances polluantes organiques ou inorganiques à partir du milieu ambiant, est utilisée dans plusieurs programmes nationaux et européens de surveillance et dans le cadre de la convention de Genève sur la <a href="https://www.actu-environnement.com/ae/dictionnaire_environnement/definition/convention_sur_la_pollution_atmospherique_transfrontiere_a_longue_distance.php4">pollution atmosphérique transfrontière à longue distance</a>.</p>
<p>L’objectif majeur du dispositif français <a href="http://bramm.mnhn.fr/category/bramm/">BRAMM</a>, pour « Biosurveillance des retombées atmosphériques métalliques par les mousses », est de surveiller l’évolution de 26 éléments chimiques polluants. Sur 445 sites français, tous les 5 ans depuis 1996, le contenu en éléments traces de cinq types de mousses Bryopsidées, dont <em>T. tamariscinum</em>, est analysé par <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Spectrom%C3%A9trie_de_masse">spectrométrie de masse</a>. Cette approche globale de surveillance biologique est complémentaire à celle utilisant des capteurs physico-chimiques. Elle permet de dresser une cartographie à l’échelle nationale identifiant les zones qui, bien qu’elles soient souvent éloignées des sources de contamination, sont exposées aux polluants présentant un risque sanitaire pour les populations.</p>
<p>Cette surveillance montre que la concentration en polluants mesurée dans les mousses et dans l’atmosphère varie avec les saisons, de façon parfois importante, et aussi imprévisible. Plusieurs causes ont été proposées, par exemple l’âge et la morphologie de la mousse ou les conditions météorologiques et microclimatiques.</p>
<h2>Notre brin de mousse, la météo et la pollution de l’air</h2>
<p>Avril 2017 était un printemps sec, et la présence de ces paraphylles corrobore l’<a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00378941.1967.10838522">hypothèse</a> selon laquelle ces structures se développeraient pour accroître la capacité de photosynthèse en période sèche. Le développement des paraphylles forme de plus un feutrage épais à la surface de la tige, ce qui permettrait aussi – secondairement – de retenir un maximum d’eau pour la survie de la mousse. Les paraphylles seraient un des mécanismes de protection pour survivre aux conditions arides.</p>
<p>Bien que cette hypothèse soit actuellement controversée, nous avons effectivement pu observer de très fortes variations des paraphylles entre un hiver pluvieux et doux et un printemps sec et doux sur la même espèce de mousse issue du même site d’étude.</p>
<p>Nous ajoutons une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10021-010-9336-3">hypothèse</a> d’étude qui reste à vérifier. Nous pensons que la « bryosphère » – le microbiote de la mousse – pourrait être responsable des variations saisonnières en absorbant et bioaccumulant une partie des contaminants atmosphériques. Par exemple, plusieurs études montrent que le groupe très présent des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cyanobacteria">cyanobactéries</a> est capable de transformer l’azote atmosphérique en azote organique et de former une véritable symbiose avec la mousse. D’autres sont capables de bioaccumuler certains métaux lourds, tels que le plomb et le cuivre.</p>
<p>Les paraphylles que nous voyons sur cette photo ont donc un double intérêt. D’une part, elles pourraient influer sur un processus biologique, en réduisant drastiquement l’habitat disponible pour le développement de la bryosphère : on ne voit que très peu de microorganismes sur la tige et les feuilles. D’autre part, elles pourraient affecter un mécanisme physique, en perturbant le ruissellement des dépôts humides métalliques le long de la tige et par conséquent diminuer la capacité d’absorption extracellulaire de la mousse.</p>
<p>Ces prochaines années, un des enjeux sera de distinguer les variations inhérentes aux processus physiologiques de la mousse et de son microbiote et celles liées aux facteurs dits « abiotiques », c’est-à-dire la quantité des polluants et la météo. Ainsi, on pourra renforcer la fiabilité des résultats et mieux évaluer la valeur réelle des mousses comme bio-indicateurs de la qualité de l’air aux niveaux national et européen.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été co-écrit par Géraldine Toutirais, ingénieure d’étude au MNHN. L’image est issue du travail de master 2 de Valentin Baton de 2017.</em></p>
<p><em>Le dispositif français BRAMM (Biosurveillance des retombées atmosphériques métalliques par les mousses) est sous l’égide du Muséum national d’histoire naturelle et la direction scientifique de Sébastien Leblond depuis 2005</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/157452/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Katia Comte ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Ce brin de mousse ressemble à une forêt microscopique qui abrite tout un écosystème.
Katia Comte, Maitre de conférences HDR, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/159868
2021-04-28T18:29:59Z
2021-04-28T18:29:59Z
Le dilemme des aliments moisis : peut-on consommer des fromages « bleus » sans risques ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/397365/original/file-20210427-21-1flsudm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5740%2C3357&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Fromage Cabrales.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-photo/cabrales-cheese-wrapped-vine-leaves-1797712387">Joe McUbed/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Pour certaines personnes, ouvrir un réfrigérateur qui embaume le roquefort, le cabrales ou le camembert est comme une évocation des senteurs du Paradis. En revanche, y trouver une tomate ou un yaourt abîmés par la moisissure ne fait généralement pas la même impression. </p>
<p>Les fromages sont des aliments très populaires, il en existe plusieurs centaines de variétés. Parmi cette multitude, les fromages à pâte persillée (autrement dit les bleus) et ceux à croûte blanche retiennent incontestablement l’attention : ils doivent leur aspect et leur arôme particuliers aux moisissures qui les composent. </p>
<p>Pour ceux qui ne sont pas familiers de ces produits laitiers, ces champignons qui les parsèment peuvent être à l’origine de nombreux questionnements. Sont-ils sans risque pour la santé ? Pourquoi consommer de tels fromages, alors que nous évitons de manger les aliments moisis ? Pour y répondre à cette question, il faut comprendre comment vivent ces micro-organismes et comment ils se développent dans les fromages qu’ils colonisent.</p>
<h2>Quel rôle jouent les moisissures dans le fromage ?</h2>
<p>Les champignons sont un groupe d’organismes qui n’appartiennent ni au règne animal (ce qui est assez évident), ni au règne végétal (ce qui l’est moins : en raison de leur apparence, la confusion est plus aisée). Ils font partie d’un règne distinct du vivant, le règne des <em>Fungi</em>. </p>
<p>On y trouve notamment les organismes microscopiques que nous connaissons sous le nom de « moisissures » (qui sont des organismes multicellulaires filamenteux) et les « levures » (qui sont des organismes unicellulaires, c’est-à-dire composés d’une seule cellule). Nous ne traiterons pas ici de ces dernières, car leur rôle dans les processus alimentaires est principalement lié à leurs capacités de fermentation : on les utilise pour fabriquer des aliments comme la bière, le vin ou le pain, par exemple.</p>
<p>Les moisissures jouent quant à elles un rôle double dans l’élaboration des aliments. Comme nous l’avons déjà mentionné, les fromages à pâte persillée (comme le cabrales, le picón ou le valdeón en Espagne, ou le roquefort français, l’un des plus connus) et les fromages à croûte blanche « fleurie » (comme les traditionnels camembert ou brie, ainsi que les rouleaux de fromage de chèvre, plus récents) doivent leurs caractéristiques au développement de moisissures. </p>
<p>Dans les fromages bleus, la moisissure <em>Penicillium</em> <em>roqueforti</em>, avec sa forme en brosse caractéristique et son mycélium bleu-vert, se développe dans les cavités de la pâte. Dans ceux à croûte blanche, la moisissure qui croît en surface est <em>P. camemberti</em>, reconnaissable à son mycélium blanc cotonneux procurant à la croûte son aspect caractéristique. </p>
<p>En plus de donner leur couleur aux fromages, ces champignons produisent diverses enzymes qui dégradent les protéines et les graisses de la pâte. Ce faisant, ils génèrent toute une variété de composés qui confèrent à ces produits laitiers leurs odeurs et leurs goûts si particuliers. C’est la conséquence de la dégradation du substrat où se développent les moisissures (la matière organique de la pâte). Celles-ci y puisent les éléments dont elles ont besoin pour leur croissance. </p>
<p>Les autres espèces qui se développent parfois spontanément sur les fromages produisent aussi ces taches bleues familières (qui n’a jamais eu un morceau de fromage moisi dans son réfrigérateur ?), mais elles détériorent le produit, provoquant le rejet du consommateur. Les champignons bleus en question sont également des <em>Penicillium</em> mais appartiennent à d’autres espèces.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/391249/original/file-20210323-14-1o7hjeb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"><em>Penicillium roqueforti</em>, le champignon utilisé dans la production de fromages à pâte persillée (illustration 3D).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/es/image-illustration/fungi-penicillium-roqueforti-fungus-used-production-1370340023">Shutterstock / Kateryna Kon</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Est-il dangereux de manger du fromage avec des moisissures ?</h2>
<p>La réponse à cette question est « cela dépend ». Dans le cas des fromages mentionnés précédemment, les moisissures utilisées ont été sélectionnées et <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1080/10915810050074964">leur consommation est considérée comme étant sans risque</a> pour le consommateur. </p>
<p>Cependant, les champignons qui se développent sans contrôle <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308814616307439">à la surface d’autres fromages</a>, ou suite à la détérioration naturelle des produits, peuvent présenter un danger. En effet, de nombreuses moisissures, notamment celles qui poussent fortuitement sur les fromages affinés, produisent des substances toxiques appelées mycotoxines. Consommer des fromages contaminés par de tels micro-organismes <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S002203028182869X">pourrait entraîner des problèmes de santé</a>. </p>
<p>Nos <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0740002018312292#">travaux</a> ont mis en évidence que l’altération des fromages à pâte pressée de type castellano/zamorano peut mener à la prolifération d’une espèce de moisissure (un <em>Penicillium</em>) capable de produire, si elle est présente en grande quantité et selon la souche considérée, <a href="https://www.researchgate.net/publication/279650771_Polyphasic_taxonomy_of_Penicillium_subgenus_Penicillium_A_guide_to_identif_cation_of_food_and_airborne_terverticillate_Penicillia_and_their_mycotoxins">des mycotoxines</a>. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0740002095800948">D’autres études</a> l’ont également mise en évidence dans différentes variétés de fromage.</p>
<h2>Manger ou jeter des aliments moisis</h2>
<p>Isoler et identifier les champignons du fromage n’est pas une tâche facile. Cela requiert d’y consacrer beaucoup de temps, de matériel, d’équipement et de personnel spécialisé. À la lumière des connaissances actuelles, il est donc préférable d’éviter de consommer des fromages présentant des moisissures qui se sont développées de façon spontanée et incontrôlée (notamment s’ils sont bleus). </p>
<p>Si vous trouvez un tel champignon sur votre fromage, que faire ? S’il se développe à sa surface, sur sa croûte, il suffit de la retirer. En revanche s’il est sous la croûte, il faut veiller à enlever, en plus du champignon, au moins 2,5 cm de matière autour de l’endroit où il s’est développé.</p>
<p>En ce qui concerne les <a href="https://www.routledge.com/Food-Mycology-A-Multifaceted-Approach-to-Fungi-and-Food/Dijksterhuis-Samson/p/book/9780849398186">aliments solides</a>, on considère généralement que retirer la partie moisie suffit. En effet, les mycotoxines migrent difficilement à l’intérieur de tels aliments.</p>
<p>Le cas des fruits est particulier. Généralement, la moisissure affecte leur goût (les composés produits par son métabolisme se diffusent facilement dans une orange ou une pomme), et cela ne vaut pas la peine de conserver la partie non moisie, sauf si elle est vraiment conséquente. </p>
<p>Il est cependant difficile de généraliser la conduite à tenir. Chaque cas est particulier, et nécessite d’être évalué selon l’aliment et les risques liés à sa consommation. Ainsi, mieux vaut éviter de consommer des pommes moisies, car la principale cause de pourriture est un <em>Penicillium</em> producteur de toxines. Leur consommation présente donc un risque. </p>
<p>Enfin, il est déconseillé de consommer les aliments semi-solides (tels que les yaourts ou le concentré de tomates, par exemple) s’ils sont moisis, car les mycotoxines s’y répandent plus facilement.</p>
<p>Pour en revenir aux produits laitiers dont il a été question dans cet article, les amateurs de fromage bleus peuvent continuer à déguster les moisissures qui les parsèment en toute sécurité, tant qu’ils s’abstiennent de consommer les intrus qui s’y installeraient spontanément.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/159868/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Teresa María López Díaz no recibe salario, ni ejerce labores de consultoría, ni posee acciones, ni recibe financiación de ninguna compañía u organización que pueda obtener beneficio de este artículo, y ha declarado carecer de vínculos relevantes más allá del cargo académico citado.</span></em></p>
De nombreux fromages doivent leurs saveurs aux moisissures. Pourquoi les consomme-t-on, alors qu’on évite de manger des aliments moisis ? Sont-ils tous sûrs, ou faut-il parfois se méfier ?
Teresa María López Díaz, Profesora de Universidad, Doctora en Veterinaria, Facultad de Veterinaria, Universidad de León, Universidad de León
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/146335
2020-12-06T23:03:34Z
2020-12-06T23:03:34Z
Les Mycorhizes : réseaux sociaux des écosystèmes terrestres
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/373193/original/file-20201206-23-1dyj0f7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C1%2C928%2C580&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Hyphes (filaments permettant l’exploration et la croissance du champignon dans les racines des plantes et dans le sol) observés dans une racine de noyer.</span> <span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science 2020 (du 2 au 12 octobre 2020 en métropole et du 6 au 16 novembre en Corse, en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Planète Nature ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
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<p>Dans les écosystèmes terrestres, les plantes sont associées à des communautés microbiennes très denses autour de leurs racines. Si les bactéries constituent, de loin, la plus grande diversité d’espèces dans ces communautés microbiennes, les champignons sont aussi très présents.</p>
<p>Ainsi un gramme de sol naturel contiendrait près de <a href="https://cdnsciencepub.com/doi/full/10.1139/cjb-2013-0290">200 mètres d’hyphes</a> (filaments) fongiques. Parmi ceux-ci, plusieurs mètres sont constitués d’hyphes de champignons symbiotiques des plantes (association à bénéfices réciproques entre la plante et le champignon).</p>
<p>Ces champignons symbiotiques sont associés aux racines des plantes pour former des mycorhizes (du grec « myco » pour champignon et « rhize » pour racine). Les mycorhizes sont les symbioses végétales les plus répandues dans les écosystèmes naturels ou cultivés. L’interaction symbiotique se traduit par la mise en place d’un réseau d’hyphes extra-matriciel (autour de la racine) qui augmente la surface d’absorption de l’eau et de nutriments (ex : phosphore, azote…) des racines. Les champignons reçoivent des sucres issus de la photosynthèse, par la racine de la plante hôte, énergie qu’ils utilisent pour leur propre survie. Il s’agit d’une relation bilatérale de partage des ressources entre deux espèces, donc d’un mutualisme symbiotique classique. Il existe plusieurs types de mycorhizes, mais les plus étudiées sont les ectomycorhizes et les endomycorhizes.</p>
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<span class="caption">Structures des ectomycorhizes et des endomycorhizes.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Les ectomycorhizes (du grec ektos : à l’extérieur) chez lesquelles les champignons se développent essentiellement autour de la racine, en formant un manteau mycélien d’où partent des hyphes qui s’organisent entre les cellules corticales de la racine pour former le réseau dit de Hartig sans jamais traverser la paroi de ces dernières. Les champignons ectomycorhiziens appartiennent aux embranchements des Basidiomycètes (ex : Bolets, Russules…) et des Ascomycètes (ex. Truffes). Environ 5 % des végétaux essentiellement des arbres forestiers et des arbustes (pin, charme, chêne, hêtre…) forment ce type de symbiose.</p>
<p>Les endomycorhizes ou mycorhizes à arbuscules (du grec endon : à l’intérieur) sont caractérisées par l’absence de manchon mycélien externe et par la pénétration des hyphes fongiques dans l’espace périplasmique des cellules corticales. Les hyphes croissent dans la racine de façon intercellulaire et intracellulaire, pour former des vésicules et des arbuscules.</p>
<p>Les mycorhizes à arbuscules constituent le type de mycorhize le plus répandu et le plus ancien remontant à la première apparition des plantes terrestres il y a environ 450 millions d’années. <a href="https://www.sciencedirect.com/book/9780123705266/mycorrhizal-symbiosis">Au moins 85 % des plantes terrestres</a> forment ce type de symbiose dont de nombreuses cultures importantes pour l’agriculture (blé, riz, maïs, pois, haricot, soja…). Appartenant à l’embranchement des Gloméromycètes, ces champignons mycorhiziens sont des symbiotes obligatoires non cultivables en l’absence de la plante-hôte et ils sont ubiquitaires des écosystèmes terrestres.</p>
<p>Chez les plantes terrestres, la mycorhization est la règle, la non-mycorhization l’exception. Un très grand nombre d’espèces sont capables d’interagir avec les champignons mycorhiziens à arbuscules (CMA) notamment les Bryophytes, les Lycopodes, les Monilophytes, les Gymnospermes et les Angiospermes : la majorité des arbres fruitiers, les plantes herbacées, les légumes, les fougères terrestres, les mousses, les plantes à fleurs (asters…), les plantes aquatiques, quelques conifères, les plantes à graines (Ginkgo…). Il existe, malgré tout, des familles de plantes incapables de réaliser cette symbiose comme les Brassicaceae. Si la symbiose mycorhizienne à arbuscules est autant répandue dans le monde végétal, c’est parce qu’elle est bénéfique à la plante. En effet, les CMA favorisent la croissance et le développement des plantes grâce à une amélioration de la nutrition minérale et en particulier le phosphore biodisponible. Ils permettent aussi aux plantes d’explorer au mieux les ressources en eau et de résister à des stress abiotiques.</p>
<h2>Des autoroutes souterraines pour la nutrition des plantes</h2>
<p>Le champignon colonise la racine par son mycélium (un épais tissu de filaments) en formant des organes de réserves (les vésicules), des organes d’échange (les arbuscules) et des hyphes et des spores dans le sol. Toutes ces structures (spores, hyphes, vésicules, arbuscules, fragments de racines colonisées) sont appelées propagules. La colonisation des racines de plantes s’effectue donc à partir des propagules fongiques et en particulier des spores présentes dans le sol.</p>
<p>Les filaments fongiques microscopiques étendent considérablement le système racinaire grâce à leur capacité incroyable à se connecter aux racines des plantes jusqu’à plusieurs kilomètres dans le sol.</p>
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<span class="caption">Etablissement de la symbiose mycorhizienne.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Ils puisent l’eau et les éléments nutritifs d’un grand volume de sol environnant, et les apportent à la plante, améliorant sa nutrition et sa croissance. Mais l’une des capacités les plus importantes des champignons mycorhiziens est qu’ils restent attachés aux racines et soutiennent la plante pendant toute sa vie. Beaucoup de chercheurs ont montré que la plupart des plantes dépendent des mycorhizes pour leur développement. Par conséquent, chaque espèce végétale s’associe préférentiellement aux CMA qui lui sont le plus favorables en termes de stimulation de croissance. Les plantes ayant un réseau mycorhizien fort ont tendance à être <a href="https://cdnsciencepub.com/doi/10.4141/P03-159">plus saines et à mieux se développer et se défendre</a>. Elles nécessitent donc moins de ressources pour pousser, ce qui est bon pour les agriculteurs et l’environnement.</p>
<h2>Une application en zone tropicale</h2>
<p>Les champignons mycorhiziens constituent une composante clef dans les relations plante – sol. Dans les systèmes forestiers et agroforestiers, il est bien connu que les arbres à forts taux de colonisation mycorhizienne peuvent être utilisés pour reconstituer le potentiel mycorhizien des sols. C’est pourquoi en zone tropicale, l’une des principales stratégies d’ingénierie écologique pouvant être utilisée pour permettre à la symbiose mycorhizienne de développer ses propriétés au profit du développement de la plante, est la mycorhization contrôlée. Il s’agit d’un ensemble de techniques qui permet d’optimiser la symbiose à partir d’un processus d’isolement, de culture, de sélection, de multiplication, d’inoculation et de suivi d’un champignon dans le sol afin de produire des plants « biologiquement améliorés ».</p>
<p>Dans ces écosystèmes, des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0925857418304816?via%3Dihub">chercheurs ont montré</a> que des plants inoculés avec des champignons mycorhiziens mobilisent mieux le phosphore et ont un taux de survie plus élevé au champ que les plants non inoculés.</p>
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<span class="caption">Mycorhizes d’un jujubier (fruitier forestier sahélien) âgé de 13 mois sur le tracé de la Grande Muraille Verte (Sénégal), et spores de champignon mycorhizien à arbuscules <em>Rhizophagus irregularis</em>_.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>L’hypothèse la plus couramment admise pour expliquer ce résultat est que les plantes mycorhizées ont une plus grande capacité d’absorption du phosphore que les plantes non mycorhizées grâce au réseau d’hyphes extra-matriciels qu’elles développent et qui leur permet d’explorer un volume de sol plus important. L’utilisation de cette technologie est donc particulièrement adaptée aux opérations de réhabilitation des sols dégradés qui présentent généralement de fortes carences en éléments minéraux et plus particulièrement en phosphore assimilable.</p>
<h2>Une application en zone tempérée</h2>
<p>Les mycorhizes peuvent être envisagées comme un potentiel agroécologique et reconnues en tant que support de services écosystémiques pour les cultures. Pour autant, elles sont sensibles à certains facteurs défavorables au développement mycélien comme les fongicides, le travail intensif du sol, la sur-fertilisation en azote et en phosphore (minéral ou organique), les herbicides et parfois les systèmes de cultures et pratiques agricoles sans couvert végétal entre deux cultures. Il est bien établi qu’une couverture végétale diversifiée vivante constitue un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0048969719301123?via%3Dihub">véritable relais à mycorhizes</a>.</p>
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<span class="caption">Mycorhizes du noyer (arbre fruitier) et de la féverole (Légumineuses) dans une noyeraie en Dordogne (Projet CASDAR MycoAgra 2017-2020).</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>C’est pourquoi, la présence de couverts végétaux tels que les Légumineuses en interculture constitue une pratique innovante pouvant servir de relais à la mycorhization pour peu que les espèces introduites y soient favorables. C’est le cas de la culture de la vesce, de la féverole, etc. Dans un tel écosystème, les couverts végétaux vont fournir un hôte pour les CMA pendant l’automne et le début du printemps, période durant laquelle ils pourraient perdre leur viabilité. Le mycélium fongique va former un réseau souterrain inter-connectant les racines des plantes entre elles, permettant ainsi un échange direct entre elles. Ceci montre l’importance de l’intégrité du mycélium fongique pour la santé des plantes, et il est évident que le travail du sol peut entraîner une destruction de ce réseau mycélien, réduisant d’autant les services écosystémiques fournis.</p>
<p>Les effets bénéfiques des CMA contribuent à de nombreux services écosystémiques cruciaux pour la durabilité des agroécosystèmes. Pour ces raisons, les CMA sont des acteurs de choix dans la formulation de biofertilisants pour le développement d’une agriculture durable. Ainsi, favoriser les communautés spécifiques des champignons mycorhiziens pourrait représenter une contribution importante en vue d’un système cultural garantissant une absorption efficiente de l’eau et des nutriments. Même si les mycorhizes ont fait l’objet de nombreuses études, un manque de connaissances approfondies subsiste chez les agriculteurs. De même, les potentialités réellement offertes par la symbiose mycorhizienne en conditions de cultures en plein champ, et les facteurs environnementaux et culturaux l’influençant nécessitent encore beaucoup d’attention.</p>
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science 2020 (du 2 au 12 octobre 2020 en métropole et du 6 au 16 novembre en Corse, en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Planète Nature ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146335/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Babacar Thioye participe à des projets de recherche issus de fonds nationaux (CASDAR MycoAgra). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Marc Legras et Marie-Pierre Bruyant ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>
Plongez dans nos sols à la découverte des mycorhizes, les symbioses végétales les plus répandues dans les écosystèmes naturels ou cultivés.
Babacar Thioye, Enseignant-chercheur en agroécologie, unité de recherche AGHYLE, UniLaSalle
Marc Legras, Directeur des Formations - UniLaSalle, UniLaSalle
Marie-Pierre Bruyant, Sciences végétales, UniLaSalle
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/148130
2020-11-05T20:07:08Z
2020-11-05T20:07:08Z
Bactéries, champignons… Comment les habitants du sol peuvent bénéficier aux cultures
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/364453/original/file-20201020-17-1qtonbk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/fjj7lVpCxRE">Roman Synkevych / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science 2020 (du 2 au 12 octobre 2020 en métropole et du 6 au 16 novembre en Corse, en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Planète Nature ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
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<p>Tous les jours, dans leur environnement, les plantes font face à de <a href="https://www.annualreviews.org/doi/abs/10.1146/annurev-phyto-081211-172902">nombreuses agressions</a>.</p>
<p>On distingue habituellement deux grandes catégories de stress. S'il est le fait d’organismes vivants tels qu’insectes, bactéries, champignons, virus, etc. on parle de stress « biotique ». Si le stress est lié à des paramètres du milieu environnant, comme la température, le vent, ou l’humidité par exemple, on parle de stress abiotique.</p>
<p>Ces stress sont potentiellement à l’origine de <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s12571-012-0200-5">pertes de rendement</a>, lesquelles peuvent être lourdes d’impacts lorsqu’il s’agit de cultures destinées à l’alimentation des hommes ou du bétail. Heureusement, les plantes ont la possibilité d’y résister, et en règle générale, elles parviennent à rester en bonne santé.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364229/original/file-20201019-19-72541o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364229/original/file-20201019-19-72541o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=349&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364229/original/file-20201019-19-72541o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=349&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364229/original/file-20201019-19-72541o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=349&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364229/original/file-20201019-19-72541o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364229/original/file-20201019-19-72541o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364229/original/file-20201019-19-72541o.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les plantes subissent deux types de stress, abiotiques et biotiques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">A. Gauthier</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Comment se défendent les plantes ?</h2>
<p>Comme tous les êtres vivants, les plantes ont en effet développé un <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6071103/">système de défense sophistiqué</a> pour lutter contre les agents pathogènes et résister aux maladies. Un véritable système immunitaire capable de détecter la présence de ces ennemis, puis de les combattre avec une armada de composés chimiques. La résistance se décline selon trois axes.</p>
<p>Au niveau local, les cellules infectées par un agent pathogène optent pour un suicide collectif, tout comme leurs voisines, ce qui débarrasse la plante de son agresseur et limite sa propagation au site d’infection. De plus, cette première attaque va permettre à la plante de résister de manière globale, si d’aventure le même agent pathogène attaque une seconde fois.</p>
<p>Grâce à un ensemble de capteurs, <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/tpj.13807">notamment situés au niveau de la paroi végétale qui entoure les cellules</a>, la plante dispose en effet d’un vaste système de surveillance grâce auquel elle <a href="https://www.annualreviews.org/doi/abs/10.1146/annurev-phyto-080614-120114">détecte d’éventuels envahisseurs</a> et peut y faire face à l’aide d’une panoplie de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S136952661830116X">composés</a>. Et des microorganismes bénéfiques colonisent par ailleurs les racines de la plante et contribuent à la protéger, en <a href="https://www.nature.com/articles/nature22009">facilitant sa nutrition et en stimulant son système immunitaire</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364266/original/file-20201019-23-12u02dg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364266/original/file-20201019-23-12u02dg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364266/original/file-20201019-23-12u02dg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364266/original/file-20201019-23-12u02dg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=425&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364266/original/file-20201019-23-12u02dg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364266/original/file-20201019-23-12u02dg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364266/original/file-20201019-23-12u02dg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=534&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La résistance se décline en trois axes : locale, globale et induite (microorganismes non pathogènes colonisant les racines).</span>
<span class="attribution"><span class="source">A. Gauthier</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>On a coutume de dire qu’il y a en moyenne davantage de microorganismes dans une cuillère à café de terre qu’il n’y a d’êtres humains sur la planète. C’est que le sol héberge quantité de microbes : si l’abondance et la diversité des microorganismes auquel il fournit le gîte est <a href="http://www.biotope-editions.com/index.php?article425/atlas-francais-des-bacteries-du-sol">éminemment variable</a>, on peut trouver jusqu’à 1,5 tonnes de bactéries dans un hectare de sol cultivé, et entre <a href="http://fiererlab.org/wp-content/uploads/2014/09/Fierer_Nat_Rev_Micro_2017.pdf">100 000 et un million d’espèces différentes</a> dans un gramme.</p>
<p>Dans le sol, les éléments minéraux nécessaires à la croissance des plantes se présentent souvent sous une forme qui leur est difficile, voire impossible à utiliser. C’est par exemple le cas pour le phosphore, qui très rapidement <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0048969717320934">adsorbé sur les complexes argilo-humiques</a> des sols, ou lié à différents éléments (calcium, fer, aluminium), se présente rarement sous la forme assimilable par la plante. Or certaines bactéries et champignons vont contribuer à <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11104-009-9895-2">faciliter l’accès à ces minéraux</a> en les rendant plus disponibles.</p>
<p>Parfois, l’association avec un micro-organisme va même se révéler obligatoire. C’est notamment le cas pour des légumineuses comme le pois, le haricot vert ou la lentille, qui vivent en <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Symbiose">symbiose</a> avec des bactéries qui leur sont <a href="https://nph.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/nph.15222">spécifiques</a>. Hébergées au niveau des racines dans des nodules visibles à l’œil nu, ces bactéries fournissent à la plante l’azote qu’elles ont capté dans l’air circulant dans le sol. Et en échange, elles peuvent profiter des sucres que la plante produit lors de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Photosynth%C3%A8se">photosynthèse</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364323/original/file-20201019-17-o8eqwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364323/original/file-20201019-17-o8eqwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364323/original/file-20201019-17-o8eqwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364323/original/file-20201019-17-o8eqwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364323/original/file-20201019-17-o8eqwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=309&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364323/original/file-20201019-17-o8eqwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=309&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364323/original/file-20201019-17-o8eqwm.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=309&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">A gauche, nodules des racines du pois. À droite, vésicules (lieu de stockage, flèche du haut) et le réseau mycélien au niveau des racines de la féverole (flèche du bas).</span>
<span class="attribution"><span class="source">A. Gauthier (à gauche), et B. Thioye (à droite)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De fait, la plupart des plantes vivent aussi en étroite association avec des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mycorhize">mycorhizes</a>, c’est-à-dire des champignons microscopiques installés dans leurs racines. Formant sous terre de vastes réseaux de filaments, ces champignons aident la plante à capter de l’eau et des éléments minéraux comme le phosphore ou l’azote, indispensables à sa croissance, et obtiennent en retour des sucres issus de la photosynthèse. Et certains micro-organismes présents dans le sol ont aussi la capacité de conférer à la plante une certaine résistance contre les maladies…</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/ces-microorganismes-qui-nourrissent-et-protegent-les-plantes-103580">Ces microorganismes qui nourrissent et protègent les plantes</a>
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<p>Des bactéries et champignons microscopiques sont en effet capables d’agir directement ou indirectement sur des agents pathogènes. Parmi les 607 produits autorisés en France et <a href="https://ecophytopic.fr/proteger/liste-des-produits-de-biocontrole">reconnus comme agents de biocontrôle</a>, on compte ainsi divers composés chimiques d’origine végétale, mais aussi 101 micro-organismes, dont notamment des <em>Aureobasidium</em>, <em>Bacillus</em> et <em>Trichoderma</em>.</p>
<p>Ces agents microbiens ont différents moyens d’action. Ils vont notamment rentrer en compétition spatiale avec les pathogènes au niveau de la rhizosphère, réalisant ainsi une sorte de bouclier. Mais ils vont aussi les priver des nutriments nécessaires à leur développement. Ou bien, agir à leurs dépens en <a href="https://doi.org/10.1016/S0007-1536(76)80098-8">les parasitant</a>. Ou encore, les attaquer avec des <a href="https://apsjournals.apsnet.org/doi/pdfplus/10.1094/PHYTO.1999.89.2.141">composés antimicrobiens</a>. Enfin, ils améliorent l’absorption des nutriments et donc l’état de santé général des plantes, tout en <a href="https://doi.org/10.1016/j.biocontrol.2011.04.006">activant de l’expression de gènes clés des réactions de défense</a>.</p>
<p>Toutes ces caractéristiques font aujourd’hui l’objet de recherches très intenses dans le but de valoriser l’énorme potentiel des micro-organismes, en <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10658-018-1495-7">alternative ou en complément à l’utilisation des pesticides</a>. Reste toutefois à évaluer au mieux leur efficacité sur le terrain pour optimiser leur utilisation, ce à quoi travaille l’unité de recherche <a href="https://www.unilasalle.fr/aghyle">AGHYLE</a> (UniLaSalle).</p>
<p>L’un de ses projets de recherche (BCA-Protect), développé en partenariat avec l’<a href="https://www.astredhor.fr/programmes-65741.html">ASTREDHOR</a>, vise ainsi à mieux comprendre l’influence des pratiques culturales (mode d’arrosage, substrat utilisé, dose) sur le maintien des micro-organismes de biocontrôle au niveau de la rhizosphère des plantes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/364447/original/file-20201020-18-rtvodk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/364447/original/file-20201020-18-rtvodk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/364447/original/file-20201020-18-rtvodk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/364447/original/file-20201020-18-rtvodk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/364447/original/file-20201020-18-rtvodk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/364447/original/file-20201020-18-rtvodk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/364447/original/file-20201020-18-rtvodk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Pour protéger l’oranger du Mexique contre <em>Phytophthora parasitica</em> (attaque visible à droite sur un plant non traité), en partenariat avec ASTREDHOR, l’équipe AGHYLE de Rouen a appliqué soit un produit phytosanitaire classique (à gauche), soit des microorganismes de biocontrôle (milieu).</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Outre un traitement basé sur l’apport de bactéries ou de champignons, on peut aussi envisager de modifier les pratiques culturales pour modeler les communautés microbiennes et <a href="https://microbiomejournal.biomedcentral.com/articles/10.1186/s40168-017-0389-9">favoriser l’abondance des micro-organismes bénéfiques dans les sols</a>. Les modifications induites pourraient permettre de protéger la culture suivante notamment au sein de la rotation.</p>
<p><em>In fine</em>, toutes ces recherches le confirment : loin d’être un substrat inerte, les sols hébergent quantité d’habitants dont il faut se préoccuper pour maintenir les plantes que l’on y cultive en bonne santé…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/148130/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Adrien Gauthier est membre du RMT BESTIM</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mélanie Bressan participe à des projets de recherche ayant reçu des financements de la région Normandie ou encore issus de fonds nationaux (France Agrimer). </span></em></p>
L’apport de microorganismes dits agents de biocontrôle constitue une solution prometteuse pour protéger les plantes des maladies de manière durable.
Adrien Gauthier, Enseignant-chercheur en Phytopathologie - Responsable de la formation i-SAFE, UniLaSalle
Mélanie Bressan, Chargée de Recherche en écologie microbienne, microbiologie environnementale et phytopathologie, UniLaSalle
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/147667
2020-10-20T19:57:44Z
2020-10-20T19:57:44Z
Les bâtiments de demain seront… vivants !
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/362111/original/file-20201007-20-pyth32.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=22%2C7%2C4916%2C3490&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Vue imaginaire de l’intérieur d’un « bâtiment vivant ».</span> <span class="attribution"><span class="source">Assia Stefanova/Hub for Biotechnology in the Built Environment</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Et si nos logements étaient des êtres vivants ? Je ne parle pas ici de maisons intelligentes dans lesquelles la voix désincarnée d’Alexa décide où installer les nouvelles lampes du salon.</p>
<p>Je veux dire vraiment vivants – qui grandissent, vivent, respirent et même se reproduisent. L’idée peut sembler farfelue, mais face à la crise climatique, nous avons besoin de repenser radicalement notre façon d’habiter et de concevoir notre environnement.</p>
<p>La biologie réalise aujourd’hui des prouesses en matière d’ingénierie. Et, dans le domaine de la construction, la prochaine étape pourrait être de créer des bâtiments qui font partie intégrante de la nature. Avec mes confrères et consœurs des universités de Newcastle et de Northumbria (Grande-Bretagne), nous avons lancé un <a href="http://www.bbe.ac.uk/">nouveau centre de recherches</a> dédié à ces possibilités.</p>
<p>Voici cinq manières dont nous pensons que les bâtiments du futur pourraient évoluer pour devenir des choses vivantes et respirantes !</p>
<h2>Des bâtiments qui poussent</h2>
<p>Du calcaire coquillier au bois des arbres morts, nous utilisons déjà nombre de matériaux naturels pour construire ; cette palette pourrait être radicalement étendue. Le magazine <em>Scientific American</em> a récemment présenté le mycélium, qui désigne l’appareil végétatif des champignons, comme un <a href="https://blogs.scientificamerican.com/observations/the-mycelium-revolution-is-upon-us/">matériau du futur</a>.</p>
<p>Et c’est vrai, le mycélium a besoin d’à peine plus que des copeaux de bois ou du marc de café pour pousser, et ce en très peu de temps, créant ainsi des matériaux aux excellentes performances structurelles.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/nuvd7bxpjIg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>À New York, <a href="https://www.archdaily.com/521266/hy-fi-the-organic-mushroom-brick-tower-opens-at-moma-s-ps1-courtyard">l’installation Hi-fi</a> présentait une tour de 13 mètres de haut, construite à l’aide de briques de mycélium. Le prochain défi consisterait à concevoir une structure dans laquelle ce mycélium demeurerait en partie vivant, restant capable de pousser et d’évoluer.</p>
<p>Le projet de <a href="https://www.nasa.gov/directorates/spacetech/niac/2018_Phase_I_Phase_II/Myco-architecture_off_planet/">myco-architecture</a>, mené par Lynn Rothschild à la NASA, a exploré cette possibilité en imaginant, dans la perspective de voyages sur d’autres planètes, des habitats qui se reproduiraient d’eux-mêmes.</p>
<h2>Des bâtiments qui guérissent</h2>
<p>Les fissures dans le béton d’un bâtiment marquent généralement le début de la fin. L’eau s’infiltre, finissant par rouiller les renforts métalliques qui maintiennent la structure.</p>
<p>Mais des chercheurs ont commencé à expérimenter un béton qui peut s’autoguérir. Une méthode prometteuse – actuellement développée par un groupe dirigé par <a href="https://www.tudelft.nl/en/2015/tu-delft/tu-delft-self-healing-bio-concrete-nominated-for-european-inventor-award/">Henk Jonkers à l’Université de technologie de Delft</a> (Pays-Bas) – entend incorporer des spores bactériennes (soit des graines de bactéries) dans le mélange avec lequel se fabrique le béton.</p>
<p>Dès que l’eau commence à s’infiltrer dans les fissures microscopiques, la bactérie se réactive. Le matériau devient alors littéralement vivant, déclenchant un processus chimique qui fait croître de nouveaux cristaux de calcite « guérissant » le béton. L’utilisation de cette technique peut prolonger la vie d’un bâtiment de plusieurs décennies, voire davantage.</p>
<h2>Des bâtiments qui respirent</h2>
<p>De nombreuses constructions – et tout particulièrement les <a href="https://theconversation.com/glass-skyscrapers-a-great-environmental-folly-that-could-have-been-avoided-116461">gratte-ciels vitrés</a> présents dans les grandes villes du monde – sont lourdement équipés pour assurer un bon fonctionnement.</p>
<p>Des systèmes de climatisation mécaniques, semblables à des poumons, font circuler l’air pour réchauffer et rafraîchir les pièces. Bien sûr, on peut toujours penser à ouvrir une fenêtre pour faciliter une ventilation naturelle mais ne serait-ce pas mieux si les murs pouvaient respirer ?</p>
<p>À l’Institut de technologie du Massachusetts (États-Unis), l’équipe d’Hironshi Ishii a développé des <a href="https://tangible.media.mit.edu/project/biologic/">matériaux dont la forme peut varier</a> en présence de l’eau. Ces matériaux consistent en autant de couches de spores bactériennes (similaires à celles utilisées dans le béton autocicatrisant évoqué précédemment) et de latex. Lorsque le matériau sèche, il se contracte et change de forme. Ces scientifiques ont montré de possibles applications dans notre quotidien, comme ces vêtements capables de « réagir » à la transpiration.</p>
<p>Mon équipe a commencé à explorer la possibilité <a href="http://www.synbio.construction/2019/07/05/active-origami-project-presented-at-caltech/">d’étendre cette méthode</a> à la construction, pour créer au sein des bâtiments des membranes capables de « transpirer » à mesure que l’humidité intérieure augmente. En utilisant des membranes en latex, recouvertes de spores bactériennes, le matériau s’assouplira et ouvrira ses pores – comme les glandes qui sécrètent la sueur –, permettant à l’air de circuler à travers les parois.</p>
<h2>Des bâtiments avec un système immunitaire</h2>
<p>Nous sommes entourés de milliards de microorganismes, présents partout sur les surfaces de nos maisons, de nos corps et dans l’air. Alors que nous dépensons chaque année des fortunes en nettoyants antibactériens pour tuer ces écosystèmes complexes, nous savons désormais que les personnes <a href="https://www.bbc.co.uk/news/science-environment-17952320">vivant à la campagne souffrent moins d’allergies</a> que les urbains. Et il semble qu’être exposé à de « bonnes » bactéries aiderait les enfants à construire leur système immunitaire.</p>
<p><a href="https://www.ucl.ac.uk/bartlett/architecture/news/2017/aug/bartlett-researchers-are-awarded-funding-tackle-anti-microbial-resistance">Dans le cadre d’un projet pilote très intéressant</a>, des chercheurs de la University College de Londres ont commencé à étudier comment concevoir des surfaces pour nos cuisines (par exemple) qui soient bioréceptives – c’est-à-dire qui favorisent la croissance de bactéries connues pour offrir une résistance aux insectes causant des maladies. Sans doute pourrons-nous bientôt manger nos yaourts probiotiques… dans des cuisines probiotiques !</p>
<h2>Des bâtiments avec un estomac</h2>
<p>La plupart des bâtiments nécessitent une énorme quantité de matériaux et d’énergie, tout en rejetant des déchets qui doivent ensuite être enlevés et traités à l’échelle industrielle.</p>
<p>De nouvelles recherches suggèrent cependant que ces déchets pourraient devenir une source d’énergie pour la construction. Une équipe de chercheurs du <a href="https://livingarchitecture-h2020.eu/">projet européen Living Architecture</a> travaille à la mise au point d’un nouveau type de pile à combustible microbienne, utilisant les déchets domestiques pour générer de petites quantités d’énergie ; ces travaux interviennent dans le cadre d’un projet plus vaste, explorant la puissance de traitement des microbes dans les bâtiments.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=504&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=504&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=504&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Piles à combustible microbiennes développées dans le cadre du projet européen Living Architecture.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Photographe du consortium Living Architecture</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Ces piles à combustible seraient intégrées aux briques qui, en plus d’en être l’estomac, feraient partie intégrante de la structure du bâtiment. Elles absorberaient les eaux usées et les bactéries, elles convertiraient, au fur et à mesure de la décomposition des déchets, l’énergie chimique en énergie électrique. Dans un tel scénario, les toilettes pourraient aussi recharger votre téléphone portable.</p>
<p>Aussi excitante que soit la promesse de bâtiments « vivants », des inconvénients existent ici ; à commencer par l’inévitable disparition de ces constructions. Mais c’est déjà le cas des logements actuels, dont la démolition s’avère coûteuse et polluante.</p>
<p>Imaginons plutôt une ville où les immeubles pourraient mourir tranquillement pour s’en retourner à la terre, fournissant une précieuse nourriture pour les suivants, capables de grandir, évoluer, s’adapter. N’est-ce pas plus excitant qu’une maison intelligente dont le réfrigérateur range automatiquement vos brocolis ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147667/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Martyn Dade-Robertson a reçu des financements du EPSRC (EP/R003629/1) pour le Thinking Soils Project. The Hub, for Biotechnology in the Built Environment a reçu des financements de Research England dans le cadre du programme Expanding Excellence in England (E3).</span></em></p>
Des blocs de construction en champignons au béton auto-cicatrisant, l’architecture utilise la biotechnologie pour donner vie aux bâtiments.
Martyn Dade-Robertson, Professor of Emerging Technology, Co-director of the Hub for Biotechnology in the Built Environment, Newcastle University
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/143468
2020-07-27T19:18:27Z
2020-07-27T19:18:27Z
Les microbes parcourent le monde via des autoroutes aériennes
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/349643/original/file-20200727-23-jmr7ps.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C12%2C4145%2C2751&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le ciel grouille de vie</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/ig-lw0Dtz34">Anthony Cantin / Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Les microbes sont le groupe dominant des formes de vie sur Terre. Ces morceaux invisibles de matière gèrent notre planète depuis des milliards d’années. Les plantes et les animaux sont apparus comme des sous-produits de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0022519317303612">fusions microbiennes</a> relativement récemment dans l’histoire de notre planète.</p>
<p>Il n’est pas facile de comprendre les microbes. Il nous a fallu un certain temps pour découvrir l’existence du <a href="https://theconversation.com/uk/topics/microbiome-3734">microbiote humain</a>, collection de virus, de bactéries et de champignons à l’intérieur et à l’extérieur de notre corps qui nous relie au reste du nuage microbien qui existe partout où la vie peut survivre.</p>
<h2>Des autoroutes dans le ciel</h2>
<p>Nous savons maintenant qu’il existe même un microbiote du ciel. Ils résident dans les parties basses de l’atmosphère : la moyenne et la haute troposphère qui culminent entre 8 et 12 km au-dessus du sol, et la basse stratosphère (autour de 15 km d’altitude). En rejoignant les vents et la circulation atmosphérique planétaire, ces formes de vie créent des <a href="https://www.researchgate.net/profile/Shane_Ross/publication/277817424_Highways_in_the_Sky_Scales_of_Atmospheric_Transport_of_Plant_Pathogens/nks/55c26bf008aea2d9bdbfe9a8.pdf">autoroutes du ciel</a> microbiennes qui les transportent autour du monde.</p>
<p>Les scientifiques ont signalé l’existence de bactéries dans le ciel pour la première fois dans deux études pionnières publiées en <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3574924/pdf/pnas.201212089.pdf">2013</a> et <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fmicb.2018.01752/full">2018</a>. Il ne s’agissait pas de microorganismes isolés trouvés par hasard. Au contraire, les communautés bactériennes chevauchent le ciel en grand nombre, de l’ordre de centaines de milliers de bactéries pour chaque mètre cube d’air dans la troposphère.</p>
<p>Entre 60 % et 100 % des bactéries contenues dans les échantillons collectés étaient vivantes et elles résidaient généralement dans le ciel depuis plus de cinq jours. L’analyse de leur matériel génétique a confirmé la présence de dizaines d’espèces bactériennes différentes. Cependant, les communautés bactériennes troposphériques étaient moins complexes que certains habitats terrestres.</p>
<p>Les bactéries ne sont pas les seules minuscules formes de vie dans le ciel. Nous connaissons maintenant ce microbiome qui est aussi constitué de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5864199/pdf/41396_2017_Article_42.pdf">virus</a> et même de champignons. La basse atmosphère est comme vivante, elle grouille de microbes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Diverses espèces de bactéries et de virus." src="https://images.theconversation.com/files/348627/original/file-20200721-23-12p4q29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/348627/original/file-20200721-23-12p4q29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/348627/original/file-20200721-23-12p4q29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/348627/original/file-20200721-23-12p4q29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/348627/original/file-20200721-23-12p4q29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/348627/original/file-20200721-23-12p4q29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/348627/original/file-20200721-23-12p4q29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Des dizaines d’espèces de microbes peuvent être trouvées dans l’atmosphère.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/pink-blue-viruses-bacteria-various-shapes-749203252">ImageFlow/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces microbes sont bien adaptés à leur nouvel environnement. Seules les bactéries qui disposent déjà de mécanismes leur permettant de faire face aux rayons UV, au manque d’eau et aux niveaux élevés d’oxydants dangereux tels que l’ozone survivent au voyage dans le ciel, où elles se nourrissent des composés carbonés disponibles dans l’atmosphère. Compte tenu de cet environnement difficile, la recherche sur le comportement des bactéries dans le ciel peut être utile pour comprendre la survie des microbes dans l’espace.</p>
<h2>Faiseuses de pluie</h2>
<p>Les bactéries <a href="https://pdfs.semanticscholar.org/a9ba/59644810fbce020e0992adc852438a2cbd20.pdf">se développent activement dans les nuages</a> et jouent un rôle important dans les processus qui sous-tendent la chimie de l’atmosphère terrestre. Par exemple, certaines bactéries aéroportées favorisent la congélation de l’eau dans l’air.</p>
<p>Sur Terre un mécanisme analogue est utilisé par certaines bactéries. Ces dernières <a href="https://www.theverge.com/2016/4/22/11486644/ice-crystal-bacteria-process-study#:%7E:text=The%20bacteria%2C%20Pseudomonas%20syringae%2C%20have,abilities%20to%20cause%20frost%20damage.">utilisent des protéines spécifiques</a> pour permettre à la glace de se former sur les feuilles et de les endommager, ouvrant ainsi la voie aux bactéries pour les infecter. Les bactéries en suspension dans l’air et les particules de glace que certaines d’entre elles peuvent transporter peuvent même devenir les noyaux nécessaires à la formation des nuages.</p>
<h2>Voie de la maladie ?</h2>
<p>Comprendre le microbiome atmosphérique et ses autoroutes célestes pourrait également nous aider à apprendre comment les microbes pathogènes sont transportés autour de la planète. Dans une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5864199/pdf/41396_2017_Article_42.pdf">étude récente</a>, les scientifiques ont découvert des virus tombant du ciel en grand nombre, comme les flocons de neige invisibles couvrant les montagnes de la Sierra Nevada en Espagne où des détecteurs de virus ont été placés. Grâce aux autoroutes microbiennes dans le ciel, des virus génétiquement identiques peuvent être trouvés à des endroits différents et éloignés de la planète.</p>
<p>Ce type de route pourrait être responsable de la propagation de la mystérieuse maladie de Kawasaki, qui peut causer des problèmes cardiaques chez les enfants mais dont la cause exacte est inconnue. Un groupe de scientifiques japonais a <a href="https://www.pnas.org/content/pnas/111/22/7952.full.pdf">produit des preuves</a> qui incrimineraient une toxine fongique transportée dans le ciel sur de longues distances de la Chine au Japon. L’analyse d’échantillons d’air au-dessus du Japon à la période de l’année où la maladie de Kawasaki est la plus répandue a révélé que l’espèce microbienne la plus dominante était le champignon <em>Candida</em>. <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/25242023/">Des expériences en laboratoire ont montré</a> que ce champignon peut produire un état semblable à la maladie de Kawasaki chez les souris.</p>
<p>Aujourd’hui, le monde entier suit la saga Covid-19. Nous savons que le virus se propage par contact humain, mais un groupe de médecins a récemment averti l’Organisation mondiale de la santé que la particule virale pourrait voyager <a href="https://theconversation.com/is-the-airborne-route-a-major-source-of-coronavirus-transmission-141198">dans l’air</a>. Certains scientifiques ont <a href="https://www.hilarispublisher.com/open-access/intercontinental-spread-of-covid19-on-global-wind-systems.pdf">même spéculé</a> que le SARS-CoV-2 pourrait avoir été transporté entre des pays situés à des latitudes similaires par un <em>jet stream</em> à travers l’atmosphère.</p>
<p>Comme nous commençons à peine à comprendre le rôle des microbes ici sur Terre, il semble probable qu’il y ait encore beaucoup à découvrir sur ceux qui vivent au-dessus de nos têtes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143468/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Predrag Slijepcevic a reçu des fonds de diverses organisations, dont le ministère de la santé britannique, l'UE, la Royal Society et le British Council.</span></em></p>
L’atmosphère possède un microbiote composé de bactéries, virus et champignons qui font le tour du monde sur des autoroutes dans le ciel.
Predrag Slijepcevic, Senior Lecturer in Biology, Brunel University London
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/124828
2019-11-21T20:51:11Z
2019-11-21T20:51:11Z
La recherche participative au Sénégal, une bonne recette pour booster l’agriculture
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/300232/original/file-20191105-88368-7m3vlz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1024%2C768&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Site pilote de production locale de biofertlisants à base de champignons mycorhiziens par les producteurs à Darou Mousty (Sénégal)</span> <span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>L’activité agricole de la région ouest-africaine est caractérisée par une production fluctuante. Elle est souvent limitée par l’effet combiné de différents facteurs. Il s’agit, en l’occurrence, de l’insuffisance et de l’irrégularité des pluies, de la pauvreté ou salinisation des sols, des faibles niveaux d’intrants, du parasitisme, etc. D’où des défis pressants à relever en matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle, de lutte contre la pauvreté rurale et de recherche d’une agriculture durable.</p>
<p>Pour faire face à de tels défis, la recherche recommande différentes pratiques culturales visant à accroître la productivité et à améliorer la production agricole et forestière. Parmi celles-ci figure en bonne place l’utilisation de <a href="https://www.aquaportail.com/definition-4138-organisme-symbiotique.html">micro-organismes symbiotiques</a> – en tant que <a href="http://www.biofertilisants.fr/comprendre-les-biofertilisants/biofertilisant-quest-ce-cest-ca-sert/">biofertilisants</a>. Ils vivent en association avec les plantes avec lesquelles ils développent une interaction mutuellement profitable.</p>
<h2>L’inoculation, une technique qui permet d’augmenter naturellement la productivité</h2>
<p>L’<a href="https://pfongue.org/IMG/pdf/fiche_inoculum-vf.pdf">inoculation</a> est une technique simple mais sous-exploitée au Sénégal. Elle consiste à apporter, en général au moment du semis, des champignons et/ou bactéries sélectionnés pour favoriser le développement des plantes associées. Ce procédé stabilise et améliore les rendements agricoles. En effet, il approvisionne les plantes en éléments nutritifs (azote, phosphore, minéraux) qui sont très souvent insuffisants dans les sols des régions arides et semi-arides.</p>
<p>L’inoculation est bien adaptée à l’agriculture familiale, notamment vivrière. Cela en raison de son faible coût et de sa relative facilité d’emploi. Les recherches menées au sein du <a href="http://www.lcm.ird.sn/">Laboratoire Commun en Microbiologie</a>, qui regroupe des chercheurs de l’<a href="https://senegal.ird.fr/l-ird-au-senegal/presentation">Institut de Recherche pour le Développement</a>, de l’<a href="https://www.isra.sn/">Institut sénégalais de recherches agricoles</a> et de l’<a href="https://www.ucad.sn/">Université Cheikh Anta Diop de Dakar</a>, ont été conduites en Afrique de l’Ouest, notamment, au Sénégal.</p>
<p>L’objectif est d’améliorer la connaissance des micro-organismes symbiotiques et d’exploiter pleinement leur potentiel dans les systèmes de culture.</p>
<p>En dépit des atouts de cette technologie, son usage ne s’est pas encore développé. Cela est dû notamment à la faible implication des producteurs dans les programmes de recherche appliquée. Il s’y ajoute l’indisponibilité de l’inoculum au niveau local et à un défaut de diffusion auprès des agriculteurs.</p>
<h2>Le partenariat avec les producteurs agricoles</h2>
<p>Sous l’impulsion du Laboratoire Commun de Microbiologie et du <a href="http://www.cncr.org/">Conseil National de Concertation et de Coopération des Ruraux du Sénégal</a>, une démarche de partenariat innovante et inclusive a été initiée entre les chercheurs et les organisations de producteurs. Cette approche s’est appuyée sur des ateliers de mise à niveau mutuelle et sur un travail collaboratif dans les champs des producteurs. L’appui et le conseil des techniciens agricoles de l’<a href="http://www.servicepublic.gouv.sn/index.php/demarche_administrative/services/2/386">Agence nationale du conseil agricole et rural</a> et de diverses ONG ont également contribué à intégrer les résultats de la recherche dans les pratiques culturales.</p>
<p>De plus, les chercheurs et les producteurs ont mis en place un réseau de parcelles expérimentales rassemblant agriculteurs, chercheurs et conseillers agricoles. Tous ces acteurs sont en train de construire un dispositif à distance d’échanges, de renforcement des capacités et de capitalisation par le développement d’une base de données. Les premières expérimentations ont été menées cet été par les producteurs du réseau sur 14 communes afin de tester le dispositif. Un atelier de restitution regroupant les différents acteurs a permis d’identifier collectivement les actions à mener afin de renforcer et d’améliorer le fonctionnement du réseau.</p>
<p>Avec ce dispositif, les micro-organismes les mieux adaptés aux spéculations sols et zones agro-écologiques seront sélectionnés. Il sera aussi mis à profit pour tester et promouvoir d’autres innovations ou pratiques, comme la lutte biologique.</p>
<p>Cette approche constructive basée sur la collaboration des acteurs concernés est inscrite dans la durée. Celle-ci permet aujourd’hui de confirmer l’effet positif de l’inoculation sur certaines spéculations et accroît la demande d’inoculum. La réflexion collective a débouché sur une solution innovante de production délocalisée d’<a href="https://www.supagro.fr/ress-pepites/sol/co/1_4_3mycorhizes.html">inoculum mycorhizien</a> par les agriculteurs sur une unité pilote à <a href="https://www.google.com/maps/d/embed?mid=1jNqlYUTEgNZ8lU7QrF7hXd5vvJY&ie=UTF8&hl=fr&msa=0&t=h&om=1&ll=15.046967600342276%2C-16.046604000000002&spn=0.031994%2C0.020555&output=embed&s=AARTsJo4fSpBrcxvwSeW6uFTDfrJbNPS1g&z=14">Darou Mousty</a> – une localité située dans une zone de production agricole.</p>
<p>Dans ce modèle, les champignons mycorhiziens « starters » sont produits et contrôlés au Laboratoire Commun de Microbiologie de Dakar. Ils seront ensuite fournis au producteur d’inoculum qui se charge de les multiplier localement sur des racines de maïs en utilisant un procédé valorisant la coque d’arachide, un résidu agricole sur lequel les plants de maïs symbiotiques sont cultivés. La production de bio-fertilisant est enfin contrôlée avant utilisation par les agriculteurs de la zone.</p>
<p>Ce projet a démontré qu’il était possible de produire ce type de bio-fertilisant localement. La mise en place de nouvelles unités de production est prévue dès cette année.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/300235/original/file-20191105-88372-klbae8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Équipe intersectorielle impliquée dans le développement du semoir « yookoutef » permettant semis et épandage du biofertilisant.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La solution d’épandage : le semoir « yookoutef »</h2>
<p>Le deuxième frein majeur identifié collectivement est la méthode d’<a href="https://www.futura-sciences.com/planete/definitions/developpement-durable-epandage-6853/">épandage</a> du bio-fertilisant produit. L’implication d’acteurs de différents secteurs réunis a abouti au développement d’une machine adaptée dite « yookoutef ». Il s’agit d’un semoir classique intégrant une fonction de co-localisation d’inoculum et de semences (Brevet d’innovation OAPI). Elle est fabriquée par des artisans sénégalais de l’Association pour la Promotion des Artisans et Ouvriers (APRAO).</p>
<p>La machine est conçue pour réduire la pénibilité du travail agricole et promouvoir la technologie de l’inoculation. Elle a été testée pour la première fois sur de grandes surfaces cette année, d’où l’intérêt que cette innovation a suscité auprès de plusieurs organisations de producteurs.</p>
<p>Forts de ces réussites, les partenaires nourrissent une nouvelle ambition commune : la mise en place d’une filière de bio-fertilisants à base de micro-organismes symbiotiques certifiée « système participatif de garantie » (SPG). Ce sont des systèmes d’assurance qualité prenant en compte l’ensemble de la chaîne de valeur.</p>
<p>Celle-ci rassemble les producteurs agricoles, les producteurs et fournisseurs d’inoculum, les conseillers agricoles, les chercheurs, les partenaires du développement et les consommateurs. De tels systèmes permettent de placer les organisations paysannes au cœur du dispositif et favorisent une bonne appropriation locale des innovations.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124828/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>
La région ouest-africaine connaît des défis pressants à relever en matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle, de lutte contre la pauvreté rurale et de recherche d’une agriculture durable.
Antoine Le Quéré, Chercheur en écologie microbienne, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Tatiana Krasova Wade, Chercheur en biologie végétale, Institut de recherche pour le développement (IRD)
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tag:theconversation.com,2011:article/110042
2019-01-17T20:29:25Z
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Qu’est-ce qui fait qu’un arbre est un arbre ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/254321/original/file-20190117-32831-48qunm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les arbres sont capables de vivre des siècles. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/wsHwYxu-rkc">Kai Dorner/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p><em>Nous publions ici un extrait de l’ouvrage de Francis Martin, <a href="https://www.belin-editeur.com/sous-la-foret#anchor1">« Sous la forêt. Pour survivre il faut des alliés »</a> qui vient de paraître aux éditions Humensciences. À la tête du <a href="http://mycor.nancy.inra.fr/ARBRE/">laboratoire d’excellence « Arbre »</a> (INRA Nancy), Francis Martin a notamment découvert comment les arbres et les champignons communiquent entre eux. Il revient dans le texte ci-dessous sur la façon dont notre perception des arbres et des plantes a évolué au gré des découvertes scientifiques</em>.</p>
<hr>
<p>On me pose souvent la question : qu’est-ce qui fait qu’un arbre est un arbre ? La réponse n’est pas aussi simple qu’elle paraît.</p>
<p>L’étude de la quarantaine de génomes d’arbres séquencés n’a pas mis en évidence de caractéristiques génétiques uniques à ces organismes. Aucun des gènes constituant leur patrimoine génétique ne peut rendre compte de leurs propriétés biologiques
si particulières.</p>
<p>Je pourrais bien entendu argumenter et vous affirmer que les arbres sont capables de vivre des siècles, qu’ils fabriquent du bois et qu’ils peuvent atteindre de grandes tailles. Les arbres sont apparus dans de nombreuses lignées de plantes et ils se distinguent des autres plantes essentiellement par leur pérennité, leur incroyable capacité à traverser les siècles. Nous avons tous à l’esprit les magnifiques séquoias ou les peupliers trembles millénaires.</p>
<p>Un enfant vous dirait qu’un arbre est un arbre car il fabrique du bois. C’est juste. Les « vrais arbres » fabriquent l’écorce et le bois grâce à une couche de cellules particulières, le cambium. Année après année, les cellules souches qui constituent cette fine structure génèrent les cellules du bois dont les parois sont formées des microfibres entremêlées de cellulose et de lignine. Ces cellules meurent rapidement, se vident et leurs parois rigides forment les cernes du bois qui s’accumulent au cœur de l’arbre. Fabriquer du bois n’est cependant pas l’apanage des arbres ; des herbes comme les lavandes et les sauges accumulent du bois dans leur tige.</p>
<p>Quid des « faux arbres » ? Palmiers et bananiers ressemblent fort à des arbres ; en tout cas, ils en ont le port majestueux, mais ce sont des herbes géantes. Ils n’ont pas de tronc, mais une tige remplie de moelle ou de longues fibres (le stipe), et leurs palmes remplacent les branches.</p>
<p>Une certitude, être un arbre donne un avantage considérable sur les plantes herbacées cantonnées au ras du sol : dominer et être plus proche du soleil pour en capter la lumière.</p>
<h2>L’héritage de Darwin</h2>
<p>Depuis Aristote, les arbres, comme les autres plantes, sont perçus comme des organismes vivants, mais passifs, juste capables de croître, de respirer et de se nourrir. Le philosophe grec leur a attribué une « âme végétative », inférieure à l’« âme sensitive » des animaux et bien loin de l’« âme intellective » de l’homme.</p>
<p>Cette vision anthropocentrique du monde a été relayée au cours des siècles par les philosophes et les théologiens occidentaux. Il aura fallu attendre les travaux initiés par le naturaliste paléontologue anglais Charles Darwin (1809-1882) et son fils Francis (1848-1925) pour que cette vision du monde végétal évolue sensiblement.</p>
<p>Les savants anglais ont alors démontré que les plantes possédaient des capacités sensorielles leur permettant de percevoir le monde qui les entoure et d’interagir avec cet environnement. Elles réagissent aux perturbations extérieures afin de s’y adapter et de pallier ainsi leur immobilité forcée.</p>
<p>Au cours de l’année 1880, les Darwin publient <em>The Power of Movement in Plants</em> (<em>La Capacité de mouvement des plantes</em>). Leurs expériences montrent par exemple que le coléoptile (cet organe formant une gaine protectrice autour des pousses émergentes de graminées) est capable de se diriger vers une source de lumière.</p>
<p>Cette capacité à s’orienter en fonction de la source de la lumière, appelée phototropisme, n’est que l’un des nombreux mécanismes inventés par les plantes pour sentir et communiquer avec l’environnement, mais aussi avec les autres êtres vivants.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/254327/original/file-20190117-32831-16esjga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/254327/original/file-20190117-32831-16esjga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=290&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/254327/original/file-20190117-32831-16esjga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=290&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/254327/original/file-20190117-32831-16esjga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=290&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/254327/original/file-20190117-32831-16esjga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=365&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/254327/original/file-20190117-32831-16esjga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=365&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/254327/original/file-20190117-32831-16esjga.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=365&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jeunes pousses tendues vers la source lumineuse.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/young-sprout-turns-towards-light-31179769">Shutterstock</a></span>
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<p>Des recherches ultérieures ont confirmé que les plantes perçoivent leur environnement et s’y adaptent par leurs mouvements : elles redressent leur tige inclinée par le vent, s’éloignent de leurs voisines, se dirigent vers la lumière.</p>
<p>Comme les animaux, elles possèdent donc plusieurs sens (vision, odorat, toucher), qui ont la particularité d’être répartis sur toute la surface de leur corps, et non pas localisés dans des organes spécialisés comme chez les animaux. Au niveau moléculaire, les récepteurs et les cascades de signaux déclenchés par la perception de ces stimuli extérieurs sont fondamentalement identiques chez les animaux, les plantes et les mycètes.</p>
<p>Les plantes sont également capables d’émettre des signaux de stress ou de satiété, et de tisser des liens avec les champignons et bactéries symbiotiques du sol. Elles sont donc douées de sensibilité, c’est-à-dire capables de ressentir les modifications du milieu et d’y réagir. En biologie, cette propriété se définit
comme étant la capacité pour un « récepteur » (en fait un organisme, une cellule ou une molécule) à recevoir des stimulations d’origine physique ou biologique, et à y répondre en mobilisant l’énergie de leur métabolisme.</p>
<h2>Les plantes, êtres sensibles</h2>
<p>Au cours des dernières années, notre vision des plantes a considérablement évolué et de nombreuses recherches sont désormais consacrées à la sensibilité des plantes. Comment sont-elles capables de percevoir les multiples signaux extérieurs qui les bombardent ? Comment ces signaux sont-ils captés et interprétés (« transduits », dit-on) par les voies de signalisation moléculaire ? Comment cellules, tissus et plantes répondent-ils à ces signaux environnementaux ? Comment s’y adaptent-ils ?</p>
<p>Les plantes sont donc des êtres sensibles : elles communiquent, elles échangent des signaux chimiques. Pour autant, sont-elles douées d’intelligence ? Si l’on considère l’intelligence telle qu’elle est définie dans le Larousse, comme une « aptitude à s’adapter à une situation, à choisir des moyens d’action en fonction des circonstances », alors les plantes sont douées d’intelligence, comme tous les organismes vivants, bactéries ou vers de terre, qui eux aussi sont sensibles
et s’adaptent. Cette intelligence est toutefois bien éloignée de l’intelligence cognitive humaine. Pourtant, des auteurs n’hésitent plus à parler de « l’intelligence des plantes ». Le livre de l’ingénieur forestier allemand Peter Wohlleben, <em>La Vie secrète des arbres</em>, a d’ailleurs fait l’objet d’une vive polémique lors de sa sortie en Allemagne et en France.</p>
<p>Avec un discours excessivement anthropomorphique, ce forestier, amoureux des forêts, y développe l’idée que les arbres communiquent entre eux par le biais de signaux chimiques et à travers leurs racines et les réseaux de filaments mycéliens des champignons symbiotiques qui les connectent. Ces réseaux souterrains serviraient de lien solidaire pour nourrir les arbres voisins malades ou les « arbres enfants », poussant dans l’ombre de leurs parents. Les racines auraient même la capacité de transmettre des messages d’alerte en cas de danger, par exemple lors d’une attaque de chenilles.</p>
<p>Face à une agression, « les informations sont transmises (à la communauté) chimiquement, mais aussi, ce qui est plus surprenant, électriquement, à la vitesse d’un centimètre par seconde ». Ainsi alertés, les arbres pourraient organiser leur protection contre les parasites, les insectes ravageurs, ou même le gibier, en déclenchant la libération de composés volatiles d’alerte par les feuilles et leurs champignons mycorhiziens. Le lecteur est ainsi encouragé à revoir ses convictions.</p>
<p>Les arbres, ainsi que les autres plantes, seraient doués de sentiments humains : amour maternel, amitié, solidarité. Leur âme ne serait pas seulement « végétative » et désormais « sensitive », mais même « intellective ». Comme dans <em>Avatar</em>, le film de science-fiction de James Cameron, les plantes pourraient bien former un immense ensemble de réseaux intelligents irriguant notre biosphère.</p>
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<p>Le succès du livre de Peter Wohlleben s’explique en partie par la capacité de l’auteur à partager sa passion pour les arbres, avec un vrai sens de la pédagogie. Je crois qu’il entre en résonance avec les préoccupations environnementales qui animent aujourd’hui le public. Ce livre soulève de multiples questions pertinentes sur la biologie des arbres et le fonctionnement des forêts, mais les résultats scientifiques sont parfois mal compris et, au final, la vision de la forêt et de la communauté des organismes qu’elle héberge relève plus du conte philosophique que de la réalité. Néanmoins, je considère que c’est une bonne nouvelle qu’un livre décrivant la forêt et les arbres se vende aussi bien qu’un lauréat du prix Goncourt.</p>
<p>Quoi qu’il en soit, les plantes ont un comportement bien plus sophistiqué qu’on ne l’a imaginé pendant des siècles. Elles sont capables, d’une part, de percevoir leurs voisines et, d’autre part, de se percevoir elles-mêmes dans l’espace et d’adapter leurs mouvements en conséquence. Elles peuvent donc sentir et communiquer.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/110042/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Francis Martin est l’auteur du livre « Sous la forêt. Pour survivre, il faut des alliés ». </span></em></p>
Notre vision des plantes a considérablement évolué ces dernières années et de nombreuses recherches se consacrent désormais à l’étude de leur sensibilité.
Francis Martin, Biologiste, mycologue, directeur scientifique du Labex « Arbre », Inrae
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.