tag:theconversation.com,2011:/ca/topics/economies-denergie-31311/articleséconomies d’énergie – The Conversation2023-11-08T20:45:07Ztag:theconversation.com,2011:article/2163692023-11-08T20:45:07Z2023-11-08T20:45:07ZPrix de l’énergie en hausse, rénovation qui stagne : comment expliquer ce paradoxe ?<p>Avec une hausse des prix de l’électricité de 26 % et du gaz de 50,6 % entre janvier 2018 et décembre 2022 en France, nous aurions pu nous attendre à une progression significative de la rénovation dans le résidentiel.</p>
<p>En France, ce dernier compte pourtant <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/le-parc-de-logements-par-classe-de-performance-energetique-au-1er-janvier-2022-0">encore 36 % de chaudières au gaz et 26 % au fioul</a>. Seuls 5 % des résidences principales sont classées en étiquette A ou B en 2022, et le <a href="https://theconversation.com/le-diagnostic-de-performance-energetique-dpe-utile-mais-pas-miraculeux-pour-inciter-a-la-renovation-du-parc-locatif-prive-215906">nombre de logements mal isolés demeure considérable</a> (39 % des logements en étiquettes E, F et G).</p>
<p>Au cours de l’hiver 2021-2022, « 22 % des Français ont déclaré avoir <a href="https://theconversation.com/confinements-et-hausse-des-factures-denergie-le-risque-de-lautorestriction-151488">souffert</a> du froid pendant au moins 24h et 11,9 % des Français les plus modestes ont dépensé plus de 8 % de leurs revenus <a href="https://onpe.org/chiffres_cles/les_chiffres_cles_de_la_precarite_energetique_edition_mars_2023">pour payer les factures énergétiques de leur logement en 2021</a> ».</p>
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<p>Le secteur résidentiel reste ainsi un gisement important d’économie d’énergie, en particulier en matière de <a href="https://theconversation.com/renovation-energetique-en-france-des-obstacles-a-tous-les-etages-147978">rénovations</a> en efficacité énergétique. Et pourtant, les ménages semblent faire abstraction d’opportunités d’investissement apparemment rentables : c’est ce que l’on appelle <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/0928765594900019;https://journals.openedition.org/rei/5985;https://www.cairn.info/revue-economique-2018-2-page-335.htm">« le paradoxe énergétique »</a>.</p>
<p>Comment l’expliquer, alors que le prix de l’énergie devrait au contraire, à première vue, donner un coup de pouce à la rénovation ?</p>
<h2>Prix de l’énergie, un incitateur ?</h2>
<p>En réalité, la demande d’énergie est peu sensible au prix à court terme : pour une hausse de 100 % des prix de l’énergie en moyenne, les ménages les plus pauvres réduisent leur consommation de chauffage <a href="https://theconversation.com/chauffage-les-plus-aises-sont-aussi-ceux-qui-realisent-le-moins-deconomies-denergie-190582">entre 6 % et 11 % en fonction de leur revenu</a>.</p>
<p>Il est en effet plus facile de réduire sa consommation tant qu’une marge de manœuvre est possible et qu’il existe des solutions substituables sur le marché : pour le chauffage, par exemple, l’électricité peut se substituer au gaz dans de nombreux cas. A contrario, il n’existe pas de substitut à l’électricité pour l’éclairage ou les appareils électroménagers.</p>
<p>La réaction en revanche s’observera avec plus de force à long terme : la chute de la demande est alors bien plus importante que l’augmentation du prix. C’est le concept d’élasticité-prix de la demande : à la suite d’un choc sur les prix, les ménages n’ont pas le temps, ni d’ajuster instantanément leur comportement ni de changer leurs équipements. En revanche, ces chocs de prix influenceront leur processus de décision et de consommation à long terme. Ainsi, quand bien même on n’observe pas d’effet à court terme de la hausse des prix de l’énergie, les effets pourraient se faire sentir dans un horizon plus lointain.</p>
<h2>Un paradoxe analysé par les économistes</h2>
<p>La question du prix de l’énergie, si elle est cruciale, n’est pas le seul argument à peser dans la décision, pour les ménages, de changer ou non leurs équipements.</p>
<p>Rappelons également que pour bénéficier de la plupart des aides de l’État, les ménages doivent faire appel à un professionnel du bâtiment agréé. Dans certaines régions, la tension sur l’offre est importante et il s’avère parfois difficile de trouver un professionnel compétent rapidement disponible…</p>
<p>Pour tenter d’expliquer néanmoins ce paradoxe de la diffusion très progressive d’équipements énergétiques apparemment rentables, de nombreux économistes ont analysé la nature et l’occurrence des barrières à l’investissement. Ces dernières sont nombreuses.</p>
<h2>De multiples freins à l’adoption</h2>
<p>Parmi elles, le statut d’occupation joue un rôle : rappelons qu’en France le pourcentage de locataires <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/cache/digpub/housing/bloc-1a.html">s’établit à 35,3 % en 2021</a>. Citons également les <a href="https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique-2007-4-page-49.htm?ref=doi">difficultés d’accès au crédit</a>, ou bien l’hétérogénéité de revenus, de préférence et de sensibilité environnementale qui existent entre les individus.</p>
<p>Les dépenses d’investissement dans des nouvelles technologies sont en outre affectées par la combinaison entre différentes sortes d’incertitudes (incertitude sur les gains énergétiques, sur les prix de l’énergie, sur les politiques publiques ou encore sur les prix des futurs produits et des coûts d’installation) et de leur irréversibilité (car les coûts sont irrécouvrables). Ce qui pousse les ménages à retarder autant que possible les investissements, en attendant d’obtenir de nouvelles informations.</p>
<p>D’autres freins à l’adoption interviennent, tels que les coûts associés à la recherche d’information sur les technologies ou encore ceux engendrés par la gêne occasionnée durant les travaux. Tous ces éléments, non pris en compte dans la plupart des analyses coûts-bénéfices, rendent des investissements profitables à première vue, moins rentables que ce qu’ils semblent être en réalité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216369/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dorothée Charlier est membre de SOLAR ACADEMY, FAERE et FAEE.
</span></em></p>Malgré des prix qui bondissent, la rénovation énergétique reste lente en France. D’abord car les effets de la hausse ne sont pas immédiats, mais aussi car d’autres freins interviennent.Dorothée Charlier, Maîtresse de conférences en économie de l’énergie et de l’environnement, IAE Savoie Mont BlancLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2014122023-03-16T11:24:52Z2023-03-16T11:24:52ZLa sobriété énergétique, tellement plus qu’une collection d’écogestes !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/515719/original/file-20230316-14-oh3wlb.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C0%2C2263%2C1175&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Préparation du repas à l’aide d’un four solaire. </span> <span class="attribution"><span class="source">Violeta Ramirez</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Si la notion de « sobriété énergétique » était encore récemment réservée aux prospectivistes, aux bureaux d’étude et conseil, et aux chercheurs et partisans de la décroissance, ce terme est aujourd’hui utilisé partout. Y compris dans les directives managériales des institutions les plus engagées sur le terrain de la croissance économique, qui demandent à présent aux employés de réduire la consommation énergétique liée à leurs déplacements, à leur confort thermique, etc.</p>
<p>La vitesse à laquelle la notion s’est vulgarisée et banalisée ne laisse de surprendre ceux qui travaillent depuis des années sur la question.</p>
<p>Si la diffusion du terme et des recommandations à la frugalité et l’anti-gaspillage sont antérieurs, le grand « décollage » de la sobriété énergétique a eu lieu très récemment, en 2022, suite au déclenchement de la guerre en Ukraine. Pour montrer la solidarité avec ce pays et, en même temps, pouvoir passer l’hiver, les dirigeants européens ont fait un appel à la réduction de la consommation d’énergie, permettant de pallier la réduction des importations énergétiques.</p>
<h2>Régulation de la consommation d’énergie et innovation technique</h2>
<p>En France, le gouvernement d’Élisabeth Borne a <a href="https://www.vie-publique.fr/discours/286643-elisabeth-borne-06102022-plan-de-sobriete-energetique">annoncé en octobre 2022 son plan de sobriété énergétique</a>, demandant aux Français de réduire leur consommation d’énergie pour éviter au gouvernement d’imposer des mesures de rationnement et des coupures électriques.</p>
<p>Dans les communiqués officiels – reproduits ensuite par les collectivités, les entreprises et les institutions –, la sobriété énergétique fait désormais référence à un ensemble de technologies de fabrication et de gestes du quotidien tels que la réduction de la consommation électrique individuelle et publique, la limitation du chauffage et de l’autosolisme, la rénovation thermique des bâtiments, l’équipement en technologies plus efficaces (thermostats intelligents, ampoules LED)… </p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/xelzTI8j0TE?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Sobriété énergétique : annonce des premières mesures par le gouvernement. (France 24/Youtube, octobre 2022)</span></figcaption>
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<p>On rassemble ainsi dans cette définition de la sobriété énergétique des solutions relevant tantôt du changement de comportement des consommateurs, tantôt de l’innovation technique des industriels permettant de maintenir le même niveau de confort avec une moindre consommation d’énergie.</p>
<h2>Écarter les dimensions transformatrices</h2>
<p>Si la diffusion de la notion au-delà du cercle d’experts est une bonne chose, son acception institutionnalisée pose de nombreuses questions.</p>
<p>Premièrement, la confusion, volontairement entretenue par le gouvernement entre « sobriété » et « efficacité » énergétiques, lui permet de faire cohabiter de manière fallacieuse, dans un seul et même discours, des orientations opposées : la sobriété et la croissance.</p>
<p>Deuxièmement, l’utilisation de cette notion à fort potentiel contestataire, pour faire référence à une somme de gestes – présentés comme provisoires et relevant en partie de l’innovation technique –, permet d’éviter la remise en question de la trajectoire de la société contemporaine et ses conséquences dévastatrices pour l’habitabilité de la planète.</p>
<p>On le comprend, l’enjeu majeur de cette institutionnalisation réside dans la dépossession des catégories pouvant nommer et aider à construire des alternatives sociales.</p>
<h2>Sobriété énergétique : de quoi parle-t-on exactement ?</h2>
<p>En tant que modération ou autolimitation des besoins et des désirs, la sobriété est une vertu reconnue dans les civilisations anciennes – Aristote fait ainsi l’éloge de la modération en tant que pratique de la juste mesure –, ayant intégré de nombreuses philosophies, religions et systèmes de croyances.</p>
<p>Dès le XVIII<sup>e</sup> siècle, l’avènement du capitalisme industriel s’accompagne de multiples formes de dissidence à l’égard de la société productiviste, qui contestent l’objectif de croissance et réclament une modération de la production et de la consommation.</p>
<p>Rappelons que cet objectif de croissance trouve notamment son origine dans le fait que les grandes machines industrielles n’étaient rentables que si de grandes quantités de biens étaient produites, conduisant au primat de l’offre sur la demande.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/redecouvrir-la-pensee-de-jacques-ellul-pionnier-de-la-decroissance-80624">Redécouvrir la pensée de Jacques Ellul, pionnier de la décroissance</a>
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<p>Des mouvements sociaux, toujours marginalisés, se sont opposés au règne de la machine (à l’image des briseurs de machines), à l’augmentation de la productivité et à la séparation du travailleur et du consommateur.</p>
<p>D’autres ont opté pour prendre leurs distances par rapport à l’économie industrielle et expérimenter un mode de vie à contre-courant où les besoins reconnus se limitent au « nécessaire de vie », selon l’expression du philosophe Henry David Thoreau.</p>
<h2>Pauvreté volontaire, simplicité, frugalité, décroissance</h2>
<p>Les multiples discours sociaux revendiquant une modération de la production et de la consommation qui se sont succédé depuis le XVIII<sup>e</sup> siècle n’ont pas toujours utilisé le terme de sobriété.</p>
<p>Parfois, d’autres termes traduisant le principe d’autolimitation volontaire et de suffisance ont été utilisés : « pauvreté volontaire », « simplicité volontaire », « frugalité » ou « décroissance ».</p>
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<img alt="Une personne se prépare à planter" src="https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514226/original/file-20230308-26-kgwf7u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Faire pousser ses futurs aliments.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Violeta Ramirez</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<img alt="Un enfant tient une matière compostée dans ses mains" src="https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514228/original/file-20230308-20-na46z7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Composter ses déchets.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Violeta Ramirez</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Ces discours ont contesté l’objectif de croissance (produire et consommer toujours plus) avec des arguments écologiques, politiques, moraux et mathématiques. Ils ont non seulement critiqué cette orientation productiviste de la société moderne, mais ont également proposé des alternatives sociotechniques : produire localement avec des technologies simples et des énergies renouvelables, respecter les cycles de recyclage de la matière, etc.</p>
<h2>Un changement durable chez les individus</h2>
<p>Au XXI<sup>e</sup> siècle, juste avant son institutionnalisation, la notion de sobriété énergétique était utilisée pour désigner des stratégies et choix de réduction de la consommation matérielle et énergétique en vue de l’adaptation des modes de vie aux limites planétaires. </p>
<p>Elle nommait ainsi un processus réflexif, réalisé individuellement et/ou collectivement, consistant à interroger les besoins et à réévaluer les consommations selon un critère énergétique et environnemental, et pas seulement économique.</p>
<p>À la différence de son acception institutionnalisée, qui appelle à des comportements provisoires résultant d’un contexte conjoncturel, le processus d’apprentissage et d’adoption des valeurs et pratiques qu’implique l’engagement dans la sobriété énergétique transforme durablement l’individu, peu enclin par la suite à retomber dans une « ébriété » énergétique.</p>
<h2>Quoi au bout de la spirale de descente énergétique ?</h2>
<p>Les démarches de sobriété énergétique peuvent être portées collectivement, mais elles relèvent, d’abord, d’un engagement et d’un questionnement individuel. Par quels moyens et avec quels résultats les personnes parviennent-elles à l’objectif de réduire leur consommation énergétique ?</p>
<p>L’étude ethnographique d’initiatives de sobriété volontaire montre que le souci de réduire son impact environnemental donne lieu à un processus de transformation qui commence par le questionnement, la limitation et la redéfinition de ses besoins ; il peut aller jusqu’à la remise en question et la [transformation des formes de travail].</p>
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<img alt="Une femme découpe une planche de bois" src="https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514229/original/file-20230308-795-ze5ziu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">S’affranchir du « travail professionnel » pour prendre le temps de bricoler, par exemple, permet de gagner en autonomie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Violeta Ramirez</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Pour une bonne partie des personnes engagées dans la sobriété énergétique, l’objectif vise à réduire les coûts environnementaux liés aux modes de vie ; cette réduction a des effets sur la manière de satisfaire les besoins concernant le logement (construire et bricoler son habitat), l’alimentation (produire sa nourriture ou la glaner), l’équipement (fabriquer, récupérer et réparer des objets, vêtements et outils), l’énergie et les ressources (produire son énergie et collecter son eau, traiter et transformer ses déchets).</p>
<p>« Faire soi-même » apparaît comme la meilleure façon de contrôler les conditions et les conséquences de son mode de vie. Certaines personnes décident ainsi de réduire leur temps de travail professionnel et augmenter le temps de travail « pour soi », afin de produire elles-mêmes ce dont elles ont besoin.</p>
<p>Consommer autrement amène ainsi à travailler autrement et vice-versa, dans une spirale par laquelle le sujet gagne en autonomie : il acquiert des connaissances qui lui permettent de se passer du marché de biens, de services et du travail.</p>
<p>On le comprend, ces différents enjeux associés à la définition de la sobriété énergétique défendue ici (en récupérant et en élaborant des connaissances pour s’émanciper du marché capitaliste et de sa culture consumériste), diffèrent significativement de ceux associés à la notion désormais institutionnalisée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201412/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Violeta Ramirez ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le processus d’apprentissage et d’adoption des valeurs et pratiques qu’implique l’engagement dans la sobriété énergétique transforme durablement les individus.Violeta Ramirez, Anthropologue, chercheur postdoctoral sur la transition et la sobriété énergétiques, Université Savoie Mont BlancLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1989532023-02-10T14:39:58Z2023-02-10T14:39:58ZVoici comment cuire vos pâtes correctement tout en économisant<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/507426/original/file-20230131-4114-mv0hcy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=15%2C0%2C5077%2C3397&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Lorsque nous faisons cuire des pâtes sèches, deux processus se déroulent généralement en parallèle. Tout d’abord, l’eau pénètre dans les pâtes, les réhydratant et les ramollissant en dix minutes dans l’eau bouillante. Ensuite, les pâtes se réchauffent, ce qui provoque l’expansion des protéines et les rend comestibles.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Les Italiens défendent leur cuisine de manière notoire – et légitime – comme en témoignent les fréquents débats sur les garnitures appropriées pour la pizza ou le choix des pâtes à utiliser avec un <em>ragù bolognese</em>. </p>
<p>Il n’est donc pas surprenant que, lorsqu’un physicien italien, lauréat d’un prix Nobel, <a href="https://www.ft.com/content/a29356f4-096f-4f84-960f-426adc2224a9">a émis des conseils</a> sur la façon de cuire les pâtes à la perfection, ce qui a semblé remettre en question toutes les méthodes utilisées par les cuisiniers du pays depuis des siècles, il a suscité une <a href="https://www.independent.co.uk/life-style/food-and-drink/italy-pasta-cooking-gas-scientist-b2160736.html">vive polémique</a>.</p>
<p>Le professeur Giorgio Parisi – qui a reçu le <a href="https://www.nobelprize.org/prizes/physics/2021/parisi/facts/">Nobel de physique 2021</a> pour « sa découverte de l’interaction entre désordre et fluctuations dans les systèmes physiques, de l’échelle atomique à l’échelle planétaire » – a suggéré que le fait d’éteindre le feu <a href="https://www.forbes.com/sites/danieladelorenzo/2022/09/15/can-italians-keep-up-their-pasta-intake-when-energy-costs-are-rocketing/amp/">à mi-cuisson des pâtes</a>, puis de couvrir la casserole et d’attendre que la chaleur résiduelle de l’eau termine le travail, peut aider à réduire le coût de la cuisson des pâtes.</p>
<p>À cela, le chef étoilé au guide Michelin <a href="https://medium.com/counterarts/the-debate-on-spaghetti-to-save-gas-95742e35d992">Antonello Colonna a répondu</a> que cette méthode rendait les pâtes caoutchouteuses et qu’elle ne pourrait jamais être servie dans un restaurant gastronomique comme le sien. La controverse s’est rapidement propagée dans les médias, avec la contribution de plusieurs sommités de l’alimentation et de la science.</p>
<p>Mais pour ceux d’entre nous qui, à la maison, tentent d’économiser en cuisinant des pâtes, la méthode de Parisi est-elle vraiment rentable ? Et le goût est-il vraiment si mauvais ? Inspirés par l’idée d’économiser de l’argent, les étudiants Mia et Ross de l’Université de Nottingham Trent se sont mis à la cuisine pour faire cuire des pâtes de différentes manières, contribuant ainsi à débroussailler la question.</p>
<h2>Que se passe-t-il lorsque vous faites cuire des pâtes ?</h2>
<p>Tout d’abord, il faut se demander ce qui se passe réellement lorsque nous faisons cuire des pâtes. Dans le cas des pâtes sèches, deux processus se déroulent généralement en parallèle. Tout d’abord, l’eau pénètre dans les pâtes, les réhydratant et les ramollissant en dix minutes dans l’eau bouillante. Ensuite, les pâtes se réchauffent, ce qui provoque l’expansion des protéines et les rend comestibles.</p>
<p>La méthode de cuisson classique consiste à plonger 100 g de pâtes dans 1 litre d’eau bouillante pendant dix à douze minutes, en fonction de leur épaisseur. La répartition de la consommation d’énergie est représentée dans le graphique suivant, qui peut être converti en coût total au moyen des informations sur le prix de l’énergie et l’efficacité de la cuisinière.</p>
<p>Aux prix d’aujourd’hui, le coût de la cuisson des pâtes sèches sur une plaque vitrocéramique s’élève à 0,21 $ par portion, à 0,17 $ sur une plaque à induction et à 0,11 $ sur une table de cuisson au gaz. Ainsi, étant donné notre passion pour les pâtes (par exemple, chaque habitant du Royaume-Uni en mangeant en moyenne une <a href="https://www.statista.com/statistics/284475/weekly-household-consumption-of-pasta-in-the-united-kingdom-uk/#:%7E:text=In%202019%2F2020%2C%20an%20average,per%20week%20in%20UK%20holds.">portion par semaine</a>), nous dépensons environ 7 625 000 $ par semaine pour cuisiner des pâtes.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/508109/original/file-20230203-8929-5qr1dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Graphique circulaire montrant la répartition de l’énergie utilisée pour cuire une casserole de pâtes" src="https://images.theconversation.com/files/508109/original/file-20230203-8929-5qr1dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/508109/original/file-20230203-8929-5qr1dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=255&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/508109/original/file-20230203-8929-5qr1dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=255&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/508109/original/file-20230203-8929-5qr1dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=255&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/508109/original/file-20230203-8929-5qr1dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/508109/original/file-20230203-8929-5qr1dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/508109/original/file-20230203-8929-5qr1dq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Graphique circulaire montrant la répartition de l’énergie utilisée pour cuire une casserole de pâtes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(David Fairhurst, Mia London et Ross Broadhurst/Université de Nottingham Trent)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Le graphique montre clairement qu’environ 60 % de l’énergie est utilisée pour maintenir l’eau en ébullition. Ainsi, tout ce qui peut être fait pour réduire le temps de cuisson aurait un effet considérable sur le coût global. La méthode de Parisi, qui consiste à éteindre la plaque de cuisson à mi-chemin et à laisser les pâtes cuire dans la chaleur résiduelle, permet de réduire de moitié le coût de la cuisson, soit une économie d’environ 0,05 $. Cette méthode sera encore plus efficace sur les plaques vitrocéramiques ; contrairement à celles à gaz et à induction, elles mettent plus de temps à refroidir.</p>
<p>Cependant, en séparant les processus de réhydratation et de chauffage, il est possible de diminuer davantage le coût. Les pâtes sèches peuvent être entièrement réhydratées en les faisant <a href="https://www.exploratorium.edu/food/soaking-pasta">préalablement tremper dans de l’eau froide</a> pendant deux heures. Ce processus ne nécessite aucune énergie et permet d’économiser 0,05 $ supplémentaire. </p>
<p>Il faut ensuite plonger les pâtes dans l’eau bouillante pour les réchauffer ; et là aussi, il y a d’autres économies à faire. Les <a href="https://www.seriouseats.com/how-to-cook-pasta-salt-water-boiling-tips-the-food-lab">chefs</a>, les <a href="https://www.thespruceeats.com/cook-pasta-with-less-water-995917">blogueurs</a> et les <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/jsfa.9299">scientifiques</a> rapportent que la qualité des pâtes cuites n’est pas affectée par la réduction considérable de la quantité d’eau. Nous avons constaté qu’en employant la moitié de l’eau, nous obtenions des pâtes parfaites, mais qu’en réduisant notre utilisation à un tiers, nous n’étions pas satisfaits. L’amidon est libéré pendant la cuisson ; s’il n’y a pas assez d’eau, il se concentre, laissant des amas de pâtes cuites de manière inégale. Cependant, le fait de remuer régulièrement la casserole améliore quelque peu le résultat.</p>
<p>Le graphique montre que le deuxième besoin énergétique le plus important est celui nécessaire pour porter l’eau à ébullition. Encore une fois, d’autres économies peuvent être réalisées ici.</p>
<p>Il s’avère que les granules de protéines des pâtes <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/jsfa.11138">se dissolvent au-dessus de 80 °C</a> ; il n’est donc pas nécessaire de porter la casserole à une « ébullition à gros bouillons » à 100 °C, comme cela est souvent conseillé. Un léger mijotage suffit à cuire complètement les pâtes, ce qui permet une économie supplémentaire d’environ 0,01 $.</p>
<p>Nous avons également étudié la possibilité d’utiliser un micro-ondes pour chauffer les pâtes préalablement trempées. Ces appareils sont très efficaces pour chauffer l’eau, mais dans le cadre de nos expériences, ils ont produit les pâtes les plus mauvaises de toutes. À ne pas essayer à la maison !</p>
<h2>Comment s’y prendre… et économiser de l’argent</h2>
<p>La palme pour la <a href="https://www.exploratorium.edu/food/recipes/low-energy-spaghetti">méthode la plus efficace</a> de cuisson des pâtes sèches revient au <a href="https://www.exploratorium.edu/food/soaking-pasta">trempage préalable dans de l’eau froide</a> avant la cuisson dans une casserole d’eau ou de sauce frémissante pendant une à deux minutes. Laisser le couvercle sur la casserole est une autre chose simple que vous pouvez faire. L’ajout de sel, bien que ne faisant qu’une différence minime quant au point d’ébullition, améliore considérablement le goût.</p>
<p>Nous ne sommes pas tous des chefs étoilés ou des physiciens lauréats du prix Nobel, mais nous pouvons tous <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/jsfa.9299">faire une différence</a> dans notre façon de cuisiner pour réduire nos factures d’électricité tout en produisant des aliments savoureux. À vous maintenant d’expérimenter ces méthodes jusqu’à ce que vous trouviez une combinaison qui rende votre cuisine plus économique tout en économisant vos sous !</p>
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<p><em>L’auteur tient à remercier ses étudiants Mia London et Ross Broadhurst pour leur aide dans la compilation de cette recherche.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198953/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David Fairhurst ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Bien que de nombreux Italiens ne partagent pas cet avis, il existe des moyens de cuisiner des pâtes tout en économisant de l’énergie.David Fairhurst, Associate professor, Nottingham Trent UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1984282023-01-26T11:44:54Z2023-01-26T11:44:54ZSobriété : Et si on s’inspirait de ceux et celles qui la pratiquent au quotidien ?<p>« Je baisse, j’éteins, je décale » : c’est à partir de ce slogan que le gouvernement entend sensibiliser la population à la sobriété énergétique et promouvoir les éco-gestes. L’explosion des coûts de l’énergie – en partie imputable au conflit russo-ukrainien – apparaît depuis quelques mois comme l’opportunité de réduire ou optimiser nos consommations individuelles et collectives. </p>
<p>Un ensemble de « trucs et astuces » ont été mis en avant <a href="https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/maison/economies-denergie/20-solutions-reduire-consommation-delectricite">par les médias et les agences de l’État</a> pour réduire significativement notre consommation d’énergie, repenser les approvisionnements alimentaires ou bien encore optimiser nos déplacements. </p>
<p>Si personne ne semble opposer de résistance au contenu de ces incitations, leur réception n’est toutefois pas uniforme : quand les mieux dotés ont tendance à y voir un message de bon sens, voire les <a href="https://www.puf.com/content/La_conversion_%C3%A9cologique_des_Fran%C3%A7ais">prémices d’un tournant écologique attendu de longue date</a>, les plus précaires – on parle principalement ici des personnes qui se situent hors emploi – ont eux tendance à se sentir peu concernés par des appels à une sobriété qu’ils ne connaissent déjà que trop bien.</p>
<p>Une étude que nous avons menée en 2020-2021 dans le cadre du <a href="https://msh-dijon.u-bourgogne.fr/actualites/livinglabterritorial/">Living lab territorial</a> pour la transition sociale et écologique de la Maison des sciences de l’homme de Dijon révèle que les plus précaires possèdent déjà une véritable expertise de l’optimisation énergétique. </p>
<p>Cette étude a consisté en 20 entretiens semi-directifs ayant pour but de sonder les pratiques de débrouillardise développées au quotidien pour parvenir à boucler son budget mensuel. Ces entretiens taisaient volontairement la variable écologique afin de la laisser émerger le cas échéant. Ils ont été complétés par trois entretiens collectifs en lien avec des associations permettant de produire et confronter différents discours de justification de ces pratiques.</p>
<h2>Sept besoins fondamentaux à satisfaire</h2>
<p>C’est en effet en situation de sobriété contrainte que les individus bricolent les pratiques de débrouillardises à la fois les plus efficaces et les plus adaptées à leur quotidien. Ils déploient et affinent ainsi, au fur et à mesure du temps, de véritables compétences de gestion dédiées à la survie. </p>
<p>Pour parvenir à « boucler les fins de mois », les plus précaires n’ont en effet d’autres choix que d’opérer à des optimisations et arbitrages articulés autour de sept besoins principaux relevant d’une égale importance : se loger et aménager son logement, pour s’y sentir véritablement chez soi ; se nourrir d’une manière jugée convenable ; se déplacer de façon à ne pas se sentir assignée à un territoire restreint ; se vêtir de manière confortable et valorisante ; s’alimenter en énergie et en eau de manière suffisante, mais supportable ; développer des liens de solidarité pour s’entraider dans la difficulté ; prendre soin de soi et des autres, afin de conserver une estime de soi suffisante. </p>
<p>C’est une forme de débrouillardise populaire écologique qui se développe en situation de contrainte économique, prise dans une ambiguïté entre sobriétés subie et quête d’estime sociale d’une expertise citoyenne.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/506316/original/file-20230125-22-z5n9du.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/506316/original/file-20230125-22-z5n9du.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/506316/original/file-20230125-22-z5n9du.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=594&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/506316/original/file-20230125-22-z5n9du.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=594&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/506316/original/file-20230125-22-z5n9du.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=594&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/506316/original/file-20230125-22-z5n9du.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=746&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/506316/original/file-20230125-22-z5n9du.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=746&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/506316/original/file-20230125-22-z5n9du.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=746&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Cartographie des pratiques de la débrouillardise pour répondre aux 7 besoins fondamentaux du quotidien.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fourni par les auteurs</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>À n’en pas douter, la motivation première de l’investissement dans cette débrouillardise est économique et s’inscrit dans les conséquences des inégalités environnementales liées à l’accès aux ressources et aux services de première nécessité. </p>
<p>Les dépenses sont ainsi prises dans une sorte de matrice mentale qui suppose, avant toute chose, de pourvoir à ses besoins tout en se conformant aux contraintes budgétaires. Le registre de pratiques autour des économies d’énergie et de l’eau est représentatif de cette sobriété sous contrainte impliquant une charge mentale dont beaucoup préféreraient se défaire.</p>
<h2>Des îlots de débrouillardise</h2>
<p>Parce qu’elle suppose de vivre en sobriété et de s’appuyer sur des solutions durables dès que possible, la précarité incline à développer des pratiques par ailleurs qualifiées d’écologiques. </p>
<p>Le logement est bien souvent à taille restreinte et décoré à partir d’objets récupérés ou achetés en seconde main. La cuisine accueille généralement un congélateur permettant d’accueillir les denrées achetées en quantité lors des promotions. La « chasse aux bonnes affaires » permet en outre d’accéder occasionnellement à des produits de plaisir (fromage à raclette, pâte à tartiner…) pour faire plaisir aux enfants ou se donner le sentiment de consommer « comme tout le monde », comme l’évoque le sociologue <a href="https://journals.openedition.org/lectures/41256">Denis Colombi</a>. </p>
<p>Les quantités d’énergies consommées sont réduites au strict minimum. Là non plus, les plus précaires n’ont pas attendu les incitations aux baisses de consommation pour préférer enfiler un pull à des dispositifs de chauffage souvent vétustes et énergivores. </p>
<p>Par ailleurs, les vêtements de la penderie sont largement issus de trocs ou acquis en seconde main, et les pratiques de soin du corps, qui reposent largement sur la fabrication « maison » des cosmétiques (par ailleurs proche du mouvement « zéro déchets ») et des compétences développées par la pratique (coiffure, esthétisme…) relèvent d’un travail du quotidien. </p>
<p>À l’extérieur, les pratiques de mobilité reposent largement sur la mutualisation des moyens de transport ou le recours à des mobilités certes avantageuses économiquement, mais coûteuses en temps ou en compétences (transports en commun, mobilités dites « douces », mais qui se révèlent parfois dures lorsqu’il s’agit de transporter des affaires et/ou se déplacer sur une longue distance). </p>
<p>En outre, ces pratiques se développent, se peaufinent, se partagent et s’alimentent au travers d’un ensemble de sociabilités développées au sein d’îlots de débrouillardise : brocantes, ressourceries et associations de quartier représentent autant de lieux qui confèrent une précieuse sociabilité et permettent d’enrichir ses compétences.</p>
<h2>Une écologie à « nous »</h2>
<p>Toutes ces pratiques de sobriété appellent ainsi à une redéfinition par la pratique de ce dont peut relever la sobriété. En leur sein se loge, en effet, une <a href="https://www.cairn.info/revue-societes-contemporaines-2021-4-page-37.htm">conception populaire de l’écologie qui s’oppose aux discours dominants sur les enjeux environnementaux</a>. </p>
<p>Ainsi, les plus pauvres confrontent volontiers une écologie « à nous » – jugée réaliste, car fondée sur l’expérience pratique du quotidien, et qui se confronte à la faiblesse des ressources économiques ainsi qu’aux restrictions d’accès qu’impliquent la ruralité ou les périphéries urbaines – à une écologie « à eux », celle des élites politiques et médiatiques, vécue comme moralisante, voire punitive, et considérée comme déconnectée des réalités de vie des populations, notamment parce qu’elle se base largement sur un mode de vie davantage urbain et plus aisé. </p>
<hr>
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<p><em>Pour suivre au plus près les questions environnementales, retrouvez chaque jeudi notre newsletter thématique « Ici la Terre ». Au programme, un mini-dossier, une sélection de nos articles les plus récents, des extraits d’ouvrages et des contenus en provenance de notre réseau international. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-environnement-150/">Abonnez-vous dès aujourd’hui</a>.</em></p>
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<p>Cette conception alternative de l’écologie se fonde sur quelques logiques culturelles – primat donné à la famille, importance de l’honneur personnel notamment – que l’on retrouve par ailleurs dans les travaux portant sur les milieux populaires ; on peut citer ceux de <a href="http://www.leseditionsdeminuit.fr/livre-La_Culture_du_pauvre-2122-1-1-0-1.html">Richard Hoggart</a> ou encore ceux d’<a href="https://www.cairn.info/le-monde-prive-des-ouvriers--9782130608769.htm">Olivier Schwartz</a>. </p>
<p>Elle traduit ainsi un attachement aux liens sociaux de proximité, en premier lieu desquels on retrouve la famille. La sphère domestique correspond à un refuge, et les liens qu’elle contient sont à prioriser. Ainsi, les pratiques de frugalité pour soi relèvent ici d’un sacrifice pour ses enfants. La jeune génération représente un double espoir : celui de l’ascension sociale individuelle autant que de la salvation écologique collective. </p>
<h2>Des pratiques valorisantes</h2>
<p>Cette conception de l’écologie participe également à sauver son honneur et son estime personnelle, en ce qu’elle permet de revaloriser des pratiques développées en situation de pauvreté à l’aune des nouvelles préoccupations écologiques moralement valorisées. </p>
<p>Plus encore, elle permet d’affirmer un mode de vie qui serait « réellement écologique », non seulement sobre, mais qui demande un investissement en temps, en compétences et en travail quotidien, face à des pratiques qui ne remettent pas en cause la société de consommation (mobilité électrique, consommation de produits bios) et empreintes de « distinction verte » voire de <em>greenwashing</em>. </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/387185/original/file-20210302-21-1dditw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=258%2C77%2C5492%2C3492&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/387185/original/file-20210302-21-1dditw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/387185/original/file-20210302-21-1dditw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/387185/original/file-20210302-21-1dditw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/387185/original/file-20210302-21-1dditw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/387185/original/file-20210302-21-1dditw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/387185/original/file-20210302-21-1dditw0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Réparer pour retarder au maximum les achats.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/technician-repairing-smartphones-motherboard-lab-showing-1662975682">Shutterstock</a></span>
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<p>Cette écologie fondée sur la revendication du goût de l’effort permet alors de contrer l’étiquette d’inactif que peuvent subir les personnes sans emploi.</p>
<p>Sans ériger les plus pauvres en héros de la transition écologique, car une part de la débrouillardise est bien subie, il est possible de trouver dans l’expérience de la précarité des savoirs et des compétences à partir desquels redéfinir des objectifs qui soient à la hauteur des enjeux de réduction des consommations. </p>
<p>En d’autres termes, et alors que les mesures politiques d’incitation à la baisse des consommations énergétiques se multiplient, l’attention portée aux modes de vie des plus pauvres rappelle qu’une expertise ordinaire de la sobriété n’a pas attendu la crise pour se développer et se partager. En outre, les appels à la sobriété doivent prendre en considération les injustices environnementales que subissent les plus pauvres, ces derniers ne pouvant guère aller plus loin en la matière.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198428/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gaëtan Mangin est membre du Living lab territorial pour la transition écologique (LTTE) hébergé par la MSH de Dijon depuis 2020. Il y était salarié en tant qu'ingénieur d'étude au moment où cette recherche fut menée.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Alex Roy est membre du Living lab territorial pour la transition écologique (LTTE) de la MSH de Dijon. </span></em></p>En situation de sobriété subie, les populations précaires deviennent expertes d’une économie de la débrouille dont les vertus écologiques sont nombreuses. Gaëtan Mangin, ATER en sociologie, Université d'ArtoisAlex Roy, Chercheur associé en sociologie urbaine, ENTPELicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1913972022-10-18T16:53:27Z2022-10-18T16:53:27ZExtinction des feux : pour une véritable planification écologique de l’éclairage nocturne<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/487414/original/file-20220929-14-pvdn5g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C613%2C4601%2C2835&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les aveuglantes lumières d’un parking de supermarché désert. </span> <span class="attribution"><span class="source">Romain Sordello</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Depuis quelques semaines, l’éclairage nocturne fait l’objet de nombreux débats politiques et médiatiques. Avec l’augmentation actuelle du prix de l’énergie, la sobriété (re)devient un enjeu de souveraineté nationale. En particulier, l’éclairage des monuments, purement esthétique, est de plus en plus jugé superflu.</p>
<p>De même, les vitrines, enseignes et publicités allumées toute la nuit choquent de plus en plus de citoyens à qui l’on demande en parallèle de faire des sacrifices. En réponse, <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/les-enseignes-de-la-grande-distribution-saccordent-sur-un-plan-de-sobriete-energetique-1777147">plusieurs grands groupes</a> ont par exemple annoncé dernièrement s’engager à éteindre les enseignes.</p>
<p>Les débats cherchent alors à identifier les éclairages les plus énergivores, dont l’extinction engendrerait le plus d’économie énergétique et financière. C’est ainsi que l’on apprend que <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/energie/sobriete-energetique-est-ce-vraiment-utile-d-eteindre-la-lumiere_5276851.html">l’extinction des publicités n’apporterait pas une économie substantielle</a>, de même que celle des terrains de sport <a href="https://www.lexpress.fr/actualites/1/actualite/renoncer-aux-matches-de-nuit-le-sport-face-au-defi-de-la-sobriete-energetique_2178994.html">pour les matchs nocturnes</a>.</p>
<p>Malheureusement, la biodiversité – à l’instar de la santé humaine – est rarement évoquée dans ces calculs. Pourtant, nous partageons l’espace-temps nocturne avec le reste du vivant et en prendre conscience ferait inévitablement pencher la balance en faveur d’une réduction des éclairages. On se souvient par exemple de <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2016/07/11/pourquoi-le-stade-de-france-etait-il-envahi-de-papillons-lors-de-la-finale-de-l-euro_5993445_3244.html">l’arrivée massive de papillons de nuit au Stade de France lors d’un match nocturne de juillet 2016</a>, très probablement attirés et piégés par cet éclairage artificiel pendant leur migration entre l’Afrique du Nord et le sud de l’Europe.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487418/original/file-20220929-14-h27bv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487418/original/file-20220929-14-h27bv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487418/original/file-20220929-14-h27bv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487418/original/file-20220929-14-h27bv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487418/original/file-20220929-14-h27bv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487418/original/file-20220929-14-h27bv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487418/original/file-20220929-14-h27bv0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le quartier de la Défense et ses innombrables bureaux allumés la nuit.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Sordello</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>L’éclairage nocturne, déjà encadré depuis 10 ans en France</h2>
<p>Rappelons tout d’abord qu’une règlementation existe en France sur l’éclairage nocturne depuis déjà une <a href="https://www.demarches.interieur.gouv.fr/professionnels/publicites-enseignes-batiments-professionnels-quel-eclairage-nocturne">dizaine d’années</a>.</p>
<p>Ainsi, les vitrines, les monuments et les bureaux doivent être éteints entre 1h et 7h du matin (ou 1h après la fermeture et jusqu’à 1h avant l’ouverture) <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000027003910/">depuis juillet 2013</a>. Il en va de même des publicités, enseignes et pré-enseignes lumineuses dont l’extinction est obligatoire entre 1h et 6h du matin <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000025240851/">depuis juillet 2012</a>. Ce 5 octobre 2022, un <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000046368520">nouveau décret (n° 2022-1294)</a> a été publié supprimant la dérogation qui existait jusqu’ici pour les unités urbaines de plus de 800 000 habitants où la règle était alors fixée par un règlement local de publicité. Cela concerne donc 7 unités urbaines (Paris, Lyon, Marseille, Lille, Toulouse, Bordeaux, Nice). Les gares et aéroports restent exemptés, de même que les publicités à éclairage fixe dans le mobilier urbain pendant la durée du service.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487413/original/file-20220929-16-qd2hg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487413/original/file-20220929-16-qd2hg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487413/original/file-20220929-16-qd2hg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487413/original/file-20220929-16-qd2hg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487413/original/file-20220929-16-qd2hg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487413/original/file-20220929-16-qd2hg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487413/original/file-20220929-16-qd2hg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La façade illuminée de l’Hôtel de Ville de Caen.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Sordello</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Cette règlementation, consolidée encore par un <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000037864346/">arrêté ministériel de 2018</a>, fait de la France l’un des pays – si ce n’est <em>le</em> pays – le plus en avance concernant l’encadrement de l’éclairage nocturne.</p>
<p>Malheureusement, le manque d’application – et de contrôles – ne rend pas ces bonnes intentions avant-gardistes aussi concrètes qu’on pourrait l’espérer. En effet, même s’il n’existe pas de suivi national exhaustif, certaines associations ont montré que <a href="https://fne.asso.fr/communique-presse/le-jour-sans-fin-pres-de-1600-eclairages-illegaux-recenses">l’application de cette règlementation fait largement défaut</a>. Tout un chacun peut facilement le constater autour de chez soi en observant des commerces ou des bureaux fermés allumés en pleine nuit.</p>
<p>Une étude en sciences comportementales, qui vient d’être publiée par la <a href="https://www.modernisation.gouv.fr/publications/reduire-la-pollution-lumineuse-leclairage-des-sciences-comportementales">Direction interministérielle de la transformation publique, en lien avec l’Office français de la biodiversité (OFB)</a>, montre que 10 ans après son adoption, cette réglementation reste encore très peu connue des commerçants et que, le cas échéant, de nombreuses barrières – notamment liées à des arguments de sécurité et d’attractivité économique – expliquent cette réticence à éteindre.</p>
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<p>À l’heure où chacun est appelé à « être plus sobre », une première réponse à la crise actuelle de l’énergie serait donc déjà d’appliquer et de faire appliquer les textes existants. C’est d’ailleurs ce que demandent précisément 91 % des Français selon un <a href="https://www.opinion-way.com/fr/component/edocman/opinionway-pour-anpcen-les-franc-ais-et-la-pollution-lumineuse-septembre2022/viewdocument/2968.html">sondage OpinionWay pour l’ANPCEN paru en septembre</a>.</p>
<h2>Un sujet qui ne se limite pas à des enjeux énergétiques</h2>
<p>L’existence de cette réglementation tire ses fondements du Grenelle de l’environnement qui a inscrit dans le Code de l’environnement l’objectif de « prévenir ou limiter les dangers ou trouble excessif aux personnes et à l’environnement causés par les émissions de lumière artificielle » (art L583-1). Cette régulation de l’éclairage nocturne ne vise donc pas que les économies d’énergie, qui apparaissent même en seconde position dans le texte, mais aussi et avant tout la santé publique et la préservation de la biodiversité.</p>
<p>En effet, cette lumière artificielle a des impacts considérables sur les animaux, les plantes et les écosystèmes. La recherche a produit une littérature abondante depuis plusieurs décennies à ce sujet. Des milliers d’articles scientifiques révèlent des effets néfastes sur <a href="https://doi.org/10.3390/su14031107">toutes les espèces ou presque</a> et à différents maillons de la biodiversité (gènes, individus, écosystèmes, paysages, etc.).</p>
<p>À titre d’exemples, en 2022, des chercheurs ont mis en évidence ou confirmé que l’éclairage nocturne <a href="https://doi.org/10.1038/s41598-022-05059-4">altérait le sommeil des oiseaux diurnes</a>, <a href="https://doi.org/10.1111/gcb.16126">favorisait les plantes invasives</a>, <a href="https://doi.org/10.1111/gcb.13792">pénalisait la migration des oiseaux</a> ou encore <a href="https://doi.org/10.1016/j.envpol.2021.118350">perturbait la pollinisation jusqu’à plusieurs kilomètres des points lumineux</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487416/original/file-20220929-17-trueq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487416/original/file-20220929-17-trueq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487416/original/file-20220929-17-trueq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487416/original/file-20220929-17-trueq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487416/original/file-20220929-17-trueq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487416/original/file-20220929-17-trueq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487416/original/file-20220929-17-trueq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dans une rue parisienne, désynchronisation d’un arbre dont une partie du houppier est éclairé.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Sordello</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Sobriété de l’énergie, mais surtout sobriété de l’éclairage !</h2>
<p>En France, il est très fréquent d’observer plus de 10 lux (grandeur mesurant la quantité de lumière par mètre carré) et même plusieurs dizaines de lux en pied de mâts d’éclairages urbains ou interurbains. Or, certaines espèces sont sensibles à des niveaux bien inférieurs.</p>
<p>Par exemple, un cours d’eau recevant 5 lux deviendra <a href="https://doi.org/10.1016/j.envpol.2021.116585">quasi non empruntable par des anguilles</a>. La <a href="https://doi.org/10.3390/insects12080734">bioluminescence des femelles</a> de vers luisants est compromise dès 0,1 lux. Chez les crapauds, les <a href="https://doi.org/10.1093/beheco/arab044">déplacements sont perturbés dès 0,04 lux</a>. La <a href="https://doi.org/10.3390/su11226400">production de mélatonine</a> chez les reptiles et les rongeurs est même stoppée entre 0,01 et 0,03 lux !</p>
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<span class="caption">Un pont éclairé peut représenter une barrière infranchissable pour des animaux aériens comme aquatiques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Sordello</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Dès lors, on comprend que seule l’extinction permettra d’éviter de tels impacts et que l’enjeu pour la biodiversité est donc d’éclairer le moins possible en quantité et en durée. Or, cette sobriété de l’éclairage n’est pas forcément atteinte si l’on vise uniquement une sobriété énergétique.</p>
<p>Par exemple, une étude sur les vers luisants montre qu’un <a href="https://doi.org/10.1007/s00265-021-03093-2">éclairage de 15 min aura beaucoup moins d’impact qu’un éclairage de 45 min</a> alors qu’avec une vision purement centrée sur la consommation d’énergie cette nuance serait jugée insignifiante.</p>
<p>Les sujets « biodiversité » et « énergie » se chevauchent, mais ne se recouvrent donc pas entièrement… et, même, de moins en moins. En effet, avec le déploiement mondial des technologies LED en éclairage extérieur, des composants électroniques à faible consommation, il est désormais possible d’éclairer toujours plus en consommant toujours moins. Sur le terrain, on observe alors une augmentation du nombre de points lumineux, publics comme privés, sous couvert d’économie d’énergie. C’est ce que l’on appelle « l’effet rebond ».</p>
<p>Émettre de la lumière artificielle la nuit génère une pollution lumineuse qui est un problème en soi pour la biodiversité, indépendamment de la consommation d’énergie que cela représente. Certes la production d’électricité a des impacts sur les espèces et les écosystèmes (destruction et fragmentation des habitats engendrées par la construction de centrales, barrages, éoliennes ou panneaux solaires), mais le premier problème que pose l’éclairage nocturne pour la biodiversité est l’exposition à une lumière qui est normalement quasi absente de l’environnement nocturne naturel en dehors de celle émanant du ciel étoilé et de la lune.</p>
<p>Dans l’hypothèse où nous réussirions à éclairer la nuit gratuitement et sans aucune émission de carbone le problème resterait pour autant entier.</p>
<h2>Éteindre au cœur de la nuit, une mesure suffisante ?</h2>
<p>Depuis longtemps, plusieurs milliers de communes en France coupent leur éclairage public en cœur de nuit, pour différentes raisons, souvent par simple bon sens, à des endroits ou à des horaires où les besoins sont quasi nuls. Aujourd’hui, cette pratique s’étend massivement, et même de grandes villes s’en saisissent <a href="https://actu.fr/normandie/rouen_76540/rouen-dans-11-quartiers-il-n-y-aura-plus-d-eclairage-public-a-partir-d-une-heure-du-matin_43869532.html">comme Rouen (110 000 habitants) depuis 2019</a>.</p>
<p>Comme nous l’avons vu précédemment, ces mesures d’extinction ont un intérêt pour réduire la pollution lumineuse et ses dégâts sur la biodiversité. Elles ont un effet direct et immédiat sur les risques d’éblouissements des animaux, sur le niveau d’obscurité et sur la visibilité des étoiles dont la faune nocturne se sert pour se repérer.</p>
<p>D’autres bénéfices, notamment sur la chronobiologie des espèces, faune comme flore, sont également prévisibles. Le cycle annuel des végétaux est régulé majoritairement par la variation de la durée de la nuit. Avec l’éclairage artificiel, les arbres en ville sont déphasés : la <a href="https://theconversation.com/light-pollution-is-disrupting-the-seasonal-rhythms-of-plants-and-trees-lengthening-pollen-season-in-us-cities-184730">chute de leurs feuilles est retardée</a> et leurs bourgeons s’ouvrent plus tôt. Il en est de même des animaux, pour qui la <a href="https://doi.org/10.1016/j.envpol.2022.120045">lumière est également un synchronisateur</a>. L’exposition à la lumière artificielle, notamment en cas de lumière intrusive, <a href="https://www.inserm.fr/dossier/chronobiologie/">perturbe notre propre sommeil, et pourrait conduire à des troubles de la santé</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487415/original/file-20220929-14-u2nzfd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487415/original/file-20220929-14-u2nzfd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487415/original/file-20220929-14-u2nzfd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487415/original/file-20220929-14-u2nzfd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487415/original/file-20220929-14-u2nzfd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487415/original/file-20220929-14-u2nzfd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487415/original/file-20220929-14-u2nzfd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Lumière intrusive dans des logements.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Sordello</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Dans le même temps, ces mesures d’extinctions – si elles se limitent au cœur de nuit – ne seront <a href="https://doi.org/10.1016/j.envpol.2022.119552">pas suffisantes pour enrayer tous les impacts</a>. Les rares évaluations qui existent dans la littérature scientifique, de l’ordre de 3 ou 4 études, portent toutes sur des chauves-souris et montrent que <a href="https://doi.org/10.1111/gcb.13036">l’efficacité dépend beaucoup de l’horaire d’extinction</a>.</p>
<p>En effet les chauves-souris, comme de nombreux autres animaux dits « nocturnes » – chouettes, insectes, rongeurs, cervidés – sont actifs surtout en début et en fin de nuit. Ces « chronotones », moments charnières du cycle jour/nuit, sont donc aussi des moments sensibles où des mesures de réduction sont nécessaires, par un éclairage sobre et restreint aux stricts besoins. La technologie peut ici permettre d’ajuster l’éclairage aux extrémités de la nuit en fonction de nos usages. Certaines communes <a href="https://www.marneetgondoire.fr/documents/Documents/Environnement/ateliers_biodiversite/202007_Extinction_de_l_eclairage_public_Retour_d_experience_PNRGF.pdf">coupent totalement leur éclairage public en période estivale</a> quand les nuits sont très courtes.</p>
<h2>Des mesures d’urgence aux changements transformateurs</h2>
<p>Actuellement, les décisions d’éteindre se multiplient. De jour en jour, de nouvelles municipalités annoncent des engagements. Les éclairages de mise en valeur des bâtiments publics sont souvent les premiers fléchés, comme à <a href="https://www.leparisien.fr/economie/sobriete-energetique-lille-va-couper-leclairage-des-batiments-publics-02-09-2022-ML7VOHVDWNCWXAQLIT7RAXVTBI.php">Lille</a>, <a href="https://rue89bordeaux.com/2022/09/bordeaux-vise-41-dautonomie-energetique-en-2026-un-pas-de-geant-pour-la-ville/">Bordeaux</a> ou <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2022/09/13/crise-energetique-l-eclairage-des-monuments-municipaux-a-paris-cessera-a-22-heures_6141431_3244.html">Paris</a>.</p>
<p>Là encore, ces actions apparaîtront peut-être comme symboliques sur le plan énergétique, mais tout photon évité dans l’environnement est un gain pour la biodiversité et un pas supplémentaire vers l’obscurité naturelle. De plus, les éclairages de mises en valeur sont le plus souvent en contre-plongée, émettant énormément de lumière vers le ciel et contribuant donc fortement à la pollution lumineuse sous forme de halo, néfaste à la biodiversité.</p>
<p>Le sport est désormais lui aussi mis à contribution avec une <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/dp-plan-sobriete.pdf">réduction du temps d’éclairage de 50 % pour les compétitions en journée et de 30 % en soirée inscrite dans le plan de sobriété énergétique du gouvernement dévoilé le 6 octobre</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487417/original/file-20220929-20-msjdln.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487417/original/file-20220929-20-msjdln.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487417/original/file-20220929-20-msjdln.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487417/original/file-20220929-20-msjdln.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487417/original/file-20220929-20-msjdln.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487417/original/file-20220929-20-msjdln.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487417/original/file-20220929-20-msjdln.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Éclairage en contre-plongée, encastré dans le sol, pour la mise en valeur d’un bâtiment.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Sordello</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Toutes ces mesures vont dans le bon sens. Néanmoins, on peut regretter qu’elles soient prises à la hâte et essentiellement pour des raisons énergétiques et financières, alors que le problème de la pollution lumineuse, bien plus transversal, est connu depuis très longtemps. Le risque est que ces extinctions « subies » soient alors mal vécues par une certaine partie de la population, ce qui desservirait la cause à long terme.</p>
<p>Une <a href="https://bit.ly/3FrPOIR">enquête de 2021 menée par l’Institut Paris Région et totalisant 2 778 répondants</a> montre que 95 % des personnes interrogées sont favorables à une extinction partielle durant la nuit (92 % d’après le sondage OpinionWay-ANPCEN de septembre 2022). Dans le même temps, ces extinctions peuvent encore parfois susciter des craintes chez certaines personnes, par rapport à des arguments sécuritaires notamment. Pourtant, dans les faits, de nombreux retours d’expériences montrent l’inverse. En Haute-Garonne par exemple, 98 % des communes n’ont rencontré aucun problème d’insécurité depuis la mise en place de l’extinction en cœur de nuit d’après une <a href="https://www.sdehg.fr/wp-content/uploads/Publications_sdehg/Rapport-de-sondage-extinction-eclairage-public.pdf">enquête du Syndicat d’énergie</a>. Autre exemple, en Angleterre, les <a href="https://doi.org/10.1007/s10940-022-09539-8">vols de voitures se concentrent sur les rues qui ne font pas l’objet d’extinction</a>. Il est donc important de prendre le temps d’exposer ce genre d’éléments à la population pour une meilleure acceptabilité des mesures.</p>
<p>Au final, l’enjeu est que ces mesures d’extinction ou de réduction des éclairages soient le catalyseur d’un véritable « changement transformateur » <a href="https://ipbes.net/es/node/35236">tel que le préconise l’IPBES</a>. Autrement dit, qu’elles s’inscrivent dans la durée, en modifiant réellement notre rapport à l’éclairage nocturne, et qu’elles ne représentent pas une simple privation le temps que l’énergie redevienne abordable.</p>
<h2>Repenser en profondeur l’éclairage nocturne</h2>
<p>Cette période au carrefour de diverses crises – érosion de la biodiversité, sortie de pandémie, tensions géopolitiques – est une vraie opportunité pour réinterroger en profondeur nos réels besoins, et cela doit concerner aussi l’éclairage nocturne.</p>
<p>La réponse ne pourra pas être une simple fuite en avant vers toujours plus de technologie. Si celle-ci résout certains problèmes, elle en crée d’autres. En plus de l’effet rebond, la conversion massive des éclairages à Sodium, de couleur jaune/orange, en sources LED, dont le spectre est majoritairement blanc et riche en bleu, change la composition de la pollution lumineuse. Ceci <a href="https://doi.org/10.1126/sciadv.abl6891">accentue la diffusion de la lumière</a> et génère <a href="https://doi.org/10.1111/1365-2664.14146">divers impacts</a>, notamment le risque de désynchronisation, <a href="https://www.anses.fr/fr/content/led-et-lumi%C3%A8re-bleue">y compris chez l’humain</a>.</p>
<p>Dans un tel contexte, une véritable planification écologique en matière d’éclairage nocturne s’impose pour reconquérir l’obscurité. C’est ce que propose la <a href="https://doi.org/10.1016/j.landurbplan.2021.104332">Trame noire</a>, qui vise à identifier, préserver et restaurer un <a href="https://www.trameverteetbleue.fr/sites/default/files/references_bibliographiques/guide_trame_noire_ofb_ums_cpa39_mai.pdf">réseau écologique de milieux naturels suffisamment sombres</a>, permettant d’assurer le fonctionnement écologique nocturne d’un territoire avec une vue globale et transversale. Le lien entre santé humaine et protection de la biodiversité doit aussi être un levier.</p>
<p>D’autant que réduire la pollution lumineuse est facile : il suffit d’éteindre pour que la lumière disparaisse… Mais pour cela, tout le monde doit jouer le jeu, dans un esprit de « solidarité écologique » : des <a href="https://doi.org/10.1016/j.biocon.2018.04.018">espaces protégés</a> peuvent en effet être impactés à distance. Aussi, tous les propriétaires d’éclairages, publics comme privés, doivent se sentir impliqués, <a href="https://sfecologie.org/regard/r98-sept-2021-romain-sordello-pollution-lumineuse/">y compris les particuliers</a>, dont les éclairages se multiplient et qui ignorent bien souvent la règlementation qui les concerne aussi.</p>
<p>Vivre la nuit nous parait une évidence mais pour une espèce biologiquement diurne cela ne va pas de soi : il s’agit même d’un luxe que l’on s’offre au détriment d’un équilibre sensible et vieux de plusieurs milliards d’années. En prendre conscience est indispensable pour renouer avec une vie plus harmonieuse et donner du sens à cette fin de l’abondance.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/191397/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Sordello ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Alors que chacun est appelé à la sobriété dans un contexte de crise énergétique, il faut aussi rappeler que l’éclairage nocturne et ses excès constituent une grave menace pour la biodiversité.Romain Sordello, Ingénieur expert biodiversité, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1905822022-09-19T18:44:13Z2022-09-19T18:44:13ZChauffage, les plus aisés sont aussi ceux qui réalisent le moins d’économies d’énergie<p>Canicule, feux de forêt, guerre en Ukraine… Après un été 2022 marqué par une actualité énergétique intense, il est temps de s’interroger sur la conduite à tenir pour faire face au changement climatique. À ce sujet, le <a href="https://wir2022.wid.world/www-site/uploads/2021/12/Summary_WorldInequalityReport2022_French.pdf">Laboratoire sur les inégalités mondiales</a> souligne que :</p>
<blockquote>
<p>« 10 % des plus fortunés sont responsables de 48 % de toutes les émissions de gaz à effet de serre mondiales, tandis que les 50 % les plus pauvres ne sont responsables que de 12 % au total. »</p>
</blockquote>
<p>Face à ce constat et à l’hiver qui se rapproche, on peut donc s’interroger sur les comportements de consommation des ménages les plus aisés, alors qu'une polémique a déjà éclaté ces dernières semaines au sujet de <a href="https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2022/08/24/jets-prives-les-stars-rattrapees-au-vol_6138895_4500055.html">l’utilisation des jets privés</a>.</p>
<h2>Entre 8 % et 10 % en plus</h2>
<p>Si on se base sur une abondante littérature en économie, on a tendance à trouver une relation positive entre le niveau de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/revenus-27531">revenu</a> et la consommation d’énergie. Cette relation positive peut être associée à plusieurs phénomènes, qui va d’une augmentation de la température de confort en hiver à l’achat de nouveaux équipements consommateurs d’électricité.</p>
<p>Par exemple, des études ont montré qu’une préférence déclarée pour le confort thermique pouvait se traduire par une hausse de la consommation d’énergie entre <a href="https://ideas.repec.org/a/eee/enepol/v125y2019icp277-285.html">8 %</a> et <a href="https://www.researchgate.net/publication/323657256_Energy_Consumption_in_the_French_Residential_Sector_How_Much_do_Individual_Preferences_Matter">10 %</a> selon les différentes estimations. Le niveau de revenu pourrait ainsi être perçu comme un indicateur pour évaluer un <a href="https://ideas.repec.org/a/eee/enepol/v107y2017icp82-95.html">niveau spécifique de confort</a> et de taux d’équipement.</p>
<p>[<em>Plus de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>De plus, les ménages les plus aisés, qui vivent souvent dans des maisons individuelles récentes et qui peuvent ajuster leur température de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/chauffage-31312">chauffage</a>, ont tendance à consommer plus que ce que leur diagnostic de performance énergétique indique, comme nous l’avons relevé dans un <a href="https://ideas.repec.org/a/eee/enepol/v156y2021ics0301421521003505.html">article</a> de recherche publié en 2021.</p>
<p>En approfondissant cette relation entre niveau de revenu et poids de la consommation énergétique (en se basant sur des données françaises récentes récoltées dans le cadre du <a href="https://www.irege.univ-smb.fr/pepsi-3/">projet de recherche PEPSI</a>), nous obtenons que ceux qui déclarent préférer le confort thermique plutôt que de réaliser des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/chauffage-31312">économies d’énergie</a> gagnent 7 965 euros de plus par an que la moyenne des ménages. </p>
<h2>Taux d’équipement en hausse</h2>
<p>Si on regarde plus en détail, le lien entre la température moyenne de chauffage en hiver dans les pièces à vivre et le niveau de revenu (Figure 1), on constate que les ménages qui se chauffent en dessous de 19 °C gagnent relativement moins que les ménages qui peuvent maintenir une température adéquate.</p>
<p>Il en va de même pour ceux qui se chauffent à plus de 25 °C, mais ces derniers sont parfois dans l’incapacité de pouvoir ajuster leur température (en général, les ménages qui ne sont pas en mesure de pouvoir régler leur température de chauffage vivent dans des logements plus anciens et gagnent 4016 euros de moins par an).</p>
<p>En outre, parmi les ménages qui se chauffent à moins de 19 °C en hiver, ils sont plus des trois quarts à déclarer se restreindre.</p>
<p><iframe id="HJo9p" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/HJo9p/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Par ailleurs, si on considère que les ménages vivant dans les logements dotés de la meilleure étiquette énergétique (et qui ont donc moins besoin d’énergie pour se chauffer), notés A, ont un revenu moyen supérieur de 13 000 euros par rapport à ceux qui vivent dans des logements notés G, on remarque également que les ménages les plus aisés dépensent nettement plus en facture d’électricité et de chauffage, ce qui semble réaffirmer une préférence avérée pour le confort thermique et l’utilisation d’appareils électroménagers (Figure 2).</p>
<p><iframe id="RMN65" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/RMN65/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Après « le deuxième été le plus chaud observé en France depuis au moins 1900 avec un écart de +2,3 °C par rapport à la moyenne 1991-2020 » en 2022 selon Météo France, on peut donc s’interroger sur l’évolution des dépenses d’électricité des ménages français dans les années à venir.</p>
<p>En effet, d’une façon générale, le <a href="https://presse.ademe.fr/2021/06/la-climatisation-vers-une-utilisation-raisonnee-pour-limiter-limpact-sur-lenvironnement.html">taux d’équipement des ménages en système de rafraichissement augmente</a> depuis 2020. Ce sont particulièrement les ménages propriétaires (75 % des détenteurs de système de refroidissement en 2020), souvent chef d’entreprise, indépendant ou cadre et résidants en maison individuelle qui entretiennent cette hausse (60 %).</p>
<p>Cette tendance risque désormais de s’accentuer si l’on veut pouvoir assurer le confort thermique et le bien-être de chacun. Il va donc être plus que nécessaire de trouver des solutions pérennes pour assurer le confort thermique d’hiver et d’été en veillant à ne pas creuser les inégalités.</p>
<p>Si les innovations technologiques permettront probablement de limiter le poids des consommations sur le climat, une solution consiste également à poursuivre les efforts dans l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments tout en veillant à informer les ménages les plus aisés du poids de leur consommation sur le climat.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190582/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dorothée Charlier est membre de l'IREGE (IAE - USMB) et de la Solar Academy. </span></em></p>Selon un projet de recherche, ceux qui déclarent préférer le confort thermique plutôt que de réaliser des économies d’énergie gagnent 7 965 euros de plus par an que la moyenne des ménages.Dorothée Charlier, Maîtresse de conférences en économie de l’énergie et de l’environnement, IAE Savoie Mont BlancLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1900162022-09-18T16:02:32Z2022-09-18T16:02:32ZSobriété pour l’Ukraine, sobriété pour le climat : quelles sont nos marges de manœuvre ?<p>La crise énergétique, singulièrement accentuée par la guerre en Ukraine, pousse les <a href="https://www.tf1info.fr/environnement-ecologie/sobriete-energetique-en-europe-chez-nos-voisins-d-allemagne-espagne-italie-aussi-on-commence-a-agir-2230291.html">États membres de l’UE</a>, <a href="https://www.ouest-france.fr/economie/energie/direct-crise-de-l-energie-mesures-d-urgence-bouclier-tarifaire-des-annonces-prevues-ce-mercredi-46e2db70-33e5-11ed-9c1b-e0562d5df803">dont la France</a> à prendre des engagements forts pour conserver les bases du fonctionnement de leurs économies, tout en réduisant les importations énergétiques en provenance de Russie. </p>
<p>À l’horizon du prochain hiver, il leur faut donc baisser drastiquement la consommation d’énergie, <a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2022/07/26/member-states-commit-to-reducing-gas-demand-by-15-next-winter/#:%7E:text=Les%20%C3%89tats%20membres%20sont%20convenus,aux%20mesures%20de%20leur%20choix.">jusqu’à -15% au niveau de l’UE pour le gaz naturel</a>, et en France entre <a href="https://www.publicsenat.fr/article/societe/pour-eviter-les-coupures-d-electricite-rte-mise-sur-ecowatt-pour-inciter-a-reduire">5 % et 15 % la consommation d’électricité</a> en fonction de la rigueur de l’hiver.</p>
<p>Mais la sécheresse extrême de l’été rappelle aussi l’urgence climatique et la nécessité de diminuer les consommations d’énergies fossiles de manière vigoureuse et surtout durable. Sur ces deux horizons, le court terme de la guerre en Ukraine et le long terme de la lutte contre le changement climatique, il faut à la fois <a href="https://theconversation.com/energie-climat-la-transition-est-elle-vraiment-en-panne-en-france-154963">réduire et décarboner notre consommation énergétique</a>.</p>
<p>Dans l’immédiat, les <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/energie/direct-crise-de-l-energie-elisabeth-borne-doit-annoncer-des-mesures-de-protection-pour-les-francais_5360464.html">dirigeants font appel à la sobriété</a> « en solidarité » avec l’Ukraine (et pour passer l’hiver), et demain pour sauver le climat. Mais parle-t-on des mêmes actions ? Et comment inscrire la sobriété dans le temps de façon à ce qu’elle soit durable ?</p>
<p>Pour répondre à ces problématiques, nous illustrons notre analyse sur les principaux usages énergétiques d’un ménage français <a href="https://www.odyssee-mure.eu/">à partir des données de la base Odyssee/Mure</a>, qui permet une description fine des consommations d’énergie. Ces usages représentent déjà plus de 40 % de la consommation finale. Pour être exhaustif, l’exercice devrait être étendu au secteur tertiaire (public et privé), au transport de marchandises et à l’industrie.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/KNoF_tpcCzY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le 14 septembre 2022, la première ministre Élisabeth Borne a tenu une conférence de presse sur la situation énergétique. (Gouvernement).</span></figcaption>
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<h2>Sobriété énergétique : de quoi parle-t-on ?</h2>
<p>La sobriété énergétique, dont il est tant question aujourd’hui, n’est pas un concept nouveau. Au XIII<sup>e</sup> siècle, <a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-du-vendredi-12-ao%C3%BBt-2022-4420180">Saint Thomas d’Aquin</a> la référait déjà à notre capacité d’autolimitation.</p>
<p>Si l’on remplace dans la citation du philosophe et théologien le vin par l’énergie, sa définition indiquait que « l’usage de [l’énergie] est affaire de modération. La sobriété n’est pas une abstinence, c’est la mesure de [cet usage] ». Plus tard, à l’époque des chocs pétroliers, on parle de « chasse au gaspi ».</p>
<p>Pourtant, la référence à la sobriété (« sufficiency » en anglais) n’est décrite comme un pilier incontournable des politiques climatiques que dans le dernier rapport du GIEC, en 2022. Et elle n’apparaît que <a href="https://theconversation.com/climat-le-quinquennat-de-la-bifurcation-ecologique-184517">très récemment dans le discours officiel français</a>.</p>
<h2>Un enjeu individuel et collectif</h2>
<p>La sobriété peut s’entendre au niveau des comportements et des choix individuels, mais aussi au niveau de la société dans son ensemble. On parle alors de <a href="https://www.iddri.org/fr/publications-et-evenements/billet-de-blog/poser-les-bases-dune-politique-de-sobriete-collective">sobriété collective</a> et celle-ci se joue à travers les politiques d’aménagement, les infrastructures, les systèmes techniques, mais également les normes de comportement et l’imaginaire social.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les individus peuvent-ils sauver le climat grâce à la sobriété ? (<em>Le Monde</em>, août 2022).</span></figcaption>
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<p>Dans la mesure où les choix individuels sont en partie contraints, il s’agit de considérer la sobriété individuelle comme <a href="https://www.lemonde.fr/series-d-ete/article/2022/08/17/sophie-dubuisson-quellier-sociologue-l-injonction-aux-petits-gestes-pour-le-climat-peut-etre-contre-productive_6138257_3451060.html">« encastrée » dans des structures collectives</a>, matérielles ou immatérielles.</p>
<p>À cette articulation entre l’individuel et le collectif, il faut aussi associer le caractère réversible ou non de l’effort de sobriété : acheter un véhicule consommant 5 l/100km plutôt que 10 l/100km est une décision qui engage, au moins pour le temps de détention du véhicule ; en revanche, adopter la conduite économe au moment d’une hausse des prix de l’essence ne garantit pas le maintien de cette conduite sur le long terme…</p>
<p>Le logement et le transport routier de passagers (voitures et véhicules utilitaires légers) représentent chacun environ 21 % de la consommation finale en 2019, mais aussi des dépenses énergétiques similaires et chiffrées par ménage à <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-energie-2021/">1 600€/an chacune en 2019</a>. Les ménages disposent de marges de manœuvre pour limiter leur consommation. En appliquant à court terme les <a href="https://www.tf1info.fr/conso/video-energie-objectif-10-d-economie-a-la-maison-2231498.html">10 % d’économies d’énergie escomptés par le gouvernement pour ces gestes</a>, cela représenterait a minima, c’est-à-dire au prix de 2019, un gain annuel de l’ordre de 320€ pour le logement et le transport.</p>
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<h2>Les trois leviers de la sobriété</h2>
<p>Pour les deux secteurs, on peut distinguer trois leviers principaux :</p>
<p>À un 1<sup>er</sup> niveau, on trouve la quantité de service énergétique demandée : dans le logement, il s’agit d’assurer le confort de vie pour un nombre de m<sup>2</sup> correspondant à la taille du logement ; dans les transports, il s’agit du kilométrage parcouru en automobile chaque année par le ménage. On pourra alors parler de sobriété « dimensionnelle ».</p>
<p>Au 2<sup>e</sup> niveau, on identifie la consommation spécifique de l’équipement, respectivement la consommation annuelle par m<sup>2</sup> de logement, telle que mesurée par le DPE (diagnostic de performance énergétique), et pour les transports la consommation normalisée de carburant du véhicule (en l/100km). Ces indicateurs font référence à l’efficacité énergétique.</p>
<p>Enfin, le 3<sup>e</sup> niveau renvoie strictement au comportement du consommateur et à l’intensité d’usage de l’équipement ; dans le logement, la consommation dépendra bien sûr de la consigne de température, à 19 ou à 22 °C ; tout comme dans les transports de la vitesse de déplacement, 130 ou 110 km/h sur autoroute, 90 ou 80km/h sur route.</p>
<p>Les courbes d’isoconsommation mettent en évidence des arbitrages possibles entre les deux premiers leviers : un petit logement très mal isolé peut consommer autant qu’un grand logement BBC ; inversement pour les transports, on peut consommer peu en roulant beaucoup, si l’équipement automobile est très performant.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/482958/original/file-20220906-26-ggkhqq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/482958/original/file-20220906-26-ggkhqq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/482958/original/file-20220906-26-ggkhqq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=231&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/482958/original/file-20220906-26-ggkhqq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=231&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/482958/original/file-20220906-26-ggkhqq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=231&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/482958/original/file-20220906-26-ggkhqq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=291&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/482958/original/file-20220906-26-ggkhqq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=291&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/482958/original/file-20220906-26-ggkhqq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=291&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le graphique illustre la manière dont il est possible de passer de -50 % à +50 % de la moyenne. Sur la courbe rouge – ébriété énergétique – on consomme alors trois fois plus que sur la courbe verte de sobriété. Usages concernés pour le logement : chauffage, eau chaude, climatisation, éclairage et VMC ; pour le transport routier de passagers ; voitures et véhicules utilitaires légers.</span>
<span class="attribution"><span class="source">P. Criqui, C. Sebi, données base Odyssee/Mure, 2019</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<h2>Les objectifs français et européen</h2>
<p>La « feuille de route » pour la neutralité carbone en France est explicitée dans la <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/strategie-nationale-bas-carbone-snbc">Stratégie nationale bas carbone</a> (SNBC), dont la dernière version de 2020 est en cours d’actualisation.</p>
<p>Cette feuille de route s’inscrit dans la perspective de la neutralité carbone et est donc a priori compatible avec le paquet « Fit for 55 » de l’Union européenne. Elle pointe la nécessité de diminuer les consommations finales d’au moins 20 % en 2030 (par rapport à 2015), tant pour le secteur du bâtiment (résidentiel et tertiaire) que pour celui des transports (routier et autres), il s’agit bien ici des consommations et non des émissions de gaz à effet de serre.</p>
<p>Cet objectif est par ailleurs cohérent avec la réduction d’au minimum 40 % de la consommation totale en 2050 intégrée dans la SNBC.</p>
<h2>Sobriété de comportement</h2>
<p>À l’horizon des prochains mois, les premiers gestes renvoient à une « sobriété de comportement ». Ils consisteraient à <a href="https://expertises.ademe.fr/professionnels/entreprises/performance-energetique-energies-renouvelables/lenergie-commerces/dossier/chauffage-magasin/tout-quil-faut-savoir-chauffage">réduire de 1 à 2 °C la température de chauffage</a> et à chauffer uniquement les pièces occupées. Si cette mesure était appliquée de manière générale, elle permettrait de réduire de près de 10 % la consommation de chauffage des logements.</p>
<p>Pour le transport automobile, la généralisation <a href="https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/bureau/deplacements/lecoconduite-solution-consommer-moins-carburant-limiter-emissions-co2">d’une réduction de la vitesse de 10 à 20 km/h</a> et de <a href="https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/bureau/deplacements/lecoconduite-solution-consommer-moins-carburant-limiter-emissions-co2">l’écoconduite</a> permettraient de gagner environ 15 % de la consommation de carburants.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/482966/original/file-20220906-20-w4ml3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/482966/original/file-20220906-20-w4ml3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/482966/original/file-20220906-20-w4ml3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=727&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/482966/original/file-20220906-20-w4ml3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=727&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/482966/original/file-20220906-20-w4ml3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=727&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/482966/original/file-20220906-20-w4ml3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=914&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/482966/original/file-20220906-20-w4ml3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=914&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/482966/original/file-20220906-20-w4ml3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=914&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Gestes de sobriété par levier d’action pour le logement et le transport.</span>
<span class="attribution"><span class="source">P. Criqui, C. Sebi</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<h2>Sobriété par l’investissement</h2>
<p>Mais pour atteindre les objectifs intermédiaires de 2030, il faudra passer à la « sobriété par l’investissement », un investissement dans des équipements et des infrastructures permettant de limiter les besoins. Pour les logements il faudra accélérer encore les <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/sites/default/files/2022-03/rapport_onre_mars2022.pdf">actions de rénovation globale</a> : celle-ci consiste à rénover au minimum trois postes (par exemple, l’isolation toiture, le remplacement des ouvertures et le chauffage) – pour un quart du parc (soit 7,3 millions) : l’économie additionnelle serait de 15 %.</p>
<p>Pour le transport, en plus de la généralisation de la conduite douce, il conviendrait de convertir 10 % du parc de véhicule à l’électrique (contre 1 % aujourd’hui), ce qui ajouterait 6 % d’économie d’énergie (le rendement d’un véhicule électrique est de <a href="https://www.fiches-auto.fr/articles-auto/voiture-electrique/s-2399-rendement-reel-des-voitures-electriques.php">90 % contre moins de 40 % pour un véhicule thermique</a>).</p>
<h2>Combiner petits gestes et gros investissements</h2>
<p>Pour réduire de 40 à 50 % la consommation d’énergie finale en 2050, la sobriété collective sera essentielle. Elle nécessitera à la fois des actes réglementaires forts – limitant par exemple les vitesses de circulation par décret ou bannissant les véhicules thermiques – et des efforts massifs d’investissements dans de nouvelles infrastructures. Cela pour <a href="https://expertises.ademe.fr/air-mobilites/mobilite-transports/passer-a-laction/dossier/alternatives-a-voiture-individuelle/report-modal">amplifier le transfert modal</a> dans le transport (convertir un trajet en voiture en bus/train permet une <a href="https://centre.ademe.fr/sites/default/files/dp-semaine-mobilite.pdf">économie d’énergie de 40 %</a>) et pour garantir le niveau de consommation BBC à tous les logements.</p>
<p>Une sobriété énergétique forte et durable doit donc impérativement combiner la mobilisation générale des comportements écoresponsables et un investissement massif. Cela suppose aussi, à court et plus long terme, la mise en œuvre de politiques cohérentes en matière de prix de l’énergie et de normes légales de comportement et de performance.</p>
<p>Celles-ci devront cibler en priorité les institutions publiques et les organisations privées (à l’instar des <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/espagne/sobriete-energetique-l-espagne-va-limiter-les-thermostats-dans-les-commerces-les-lieux-culturels-et-les-transports_5288524.html">mesures d’urgence proposées en Allemagne</a> ou en <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/espagne/sobriete-energetique-l-espagne-va-limiter-les-thermostats-dans-les-commerces-les-lieux-culturels-et-les-transports_5288524.html">Espagne</a>). Une condition pour que les ménages ne soient pas les seuls à porter l’effort de sobriété et qu’ils soient ainsi embarqués de manière durable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190016/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La mise en œuvre de la sobriété énergétique, indispensable à divers égards, implique de combiner changements de comportements individuels et investissement dans des infrastructures adaptées.Patrick Criqui, Directeur de recherche émérite au CNRS, Université Grenoble Alpes (UGA)Carine Sebi, Professeure associée et coordinatrice de la chaire « Energy for Society », Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1826992022-05-10T21:49:46Z2022-05-10T21:49:46ZPlanification écologique : la nécessaire concertation démocratique pour une mise en œuvre juste et efficace<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/462216/original/file-20220510-16-a7cnul.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C147%2C2048%2C1818&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Si la rénovation énergétique a pu améliorer le confort de vie des usagers, elle n'a pas toujours conduit à la diminution attendue de la consommation d'énergie.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/65389393@N00/38534865270">Ghislain Sillaume/flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Durant sa campagne, Emmanuel Macron a affirmé vouloir mettre la <a href="https://www.lemediatv.fr/emissions/2022/macron-comprend-il-la-planification-ecologique-RgWgM4L2QryYaaAHs1ExKw">planification écologique au centre du prochain quinquennat</a>, sous l’égide directe du Premier ministre. En attendant sa nomination, l’institut France Stratégie vient de dévoiler son <a href="https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-2022-rapport-soutenabilites-7mai-17h-final-synthese.pdf">rapport sur les enjeux de cette planification écologique</a>, préconisant entre autres un renouveau de l’exercice démocratique.</p>
<p>Dans ce contexte, en quoi consiste la planification écologique ? Quels en sont les contours et prérequis nécessaires pour aboutir à des résultats qui fédèrent le plus grand nombre de citoyens ? Comment éviter les échecs cuisants comme ceux de la rénovation énergétique ?</p>
<h2>L’importance de la concertation</h2>
<p>La planification écologique est l’aptitude d’un pays de se doter d’un cadre institutionnel et réglementaire adapté à ses objectifs écologiques. L’une de ses fonctions est notamment de permettre de <a href="https://france.attac.org/nos-publications/les-possibles/numero-23-printemps-2020/dossier-la-planification-pour-la-transition-sociale-et-ecologique/article/la-planification-ecologique-une-approche-institutionnaliste-7330">financer les investissements privés et publics nécessaires pour la transition</a>.</p>
<p>Si on peut se réjouir de voir la question écologique se placer au centre de l’échiquier politique et être annoncée comme principe phare pour les cinq prochaines années, on doit néanmoins se méfier de mesures imposées par le gouvernement ne répondant aux besoins réels ou « perçus » des citoyens.</p>
<p>En effet, faute de cohérence et de concertation préalable, l’État français a déjà été amené à renoncer à la fiscalité écologique avec la crise des « bonnets rouges » en 2013 et des « gilets jaunes » en 2019. Ces mesures furent perçues comme injustes, car touchant les travailleurs les plus pauvres, notamment lors du mouvement des « gilets jaunes » avec la hausse du prix du carburant.</p>
<p>Ainsi que le préconise le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Rapport_Brundtland">rapport Brundtland</a> rédigé par les Nations unies en 1987, la participation et l’information ainsi que la justice et la solidarité sont les principes de base pour que la transformation écologique soit acceptée par les citoyens.</p>
<p>Face aux <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0170840614563742">« grands défis » de notre siècle</a>, il n’existe pas une solution possible, mais de nombreuses options. Les problèmes environnementaux sont complexes, incertains et ont des conséquences multiples.</p>
<p>Face à ces défis, la méthode préconisée est le <a href="https://archive.org/details/howwethink02dewegoog/page/n16/mode/2up">pragmatisme à la « Dewey »</a>, c’est-à-dire une concertation décentralisée pour trouver un compromis acceptable et surtout, accepté par les acteurs publics et privés ainsi que par l’ensemble des citoyens.</p>
<p>La concertation est toutefois difficile et longue à mettre en œuvre. En effet, elle ne se programme pas, mais se co-construit avec un ensemble de parties prenantes.</p>
<h2>L’exemple de la rénovation énergétique</h2>
<p>Prenons un exemple simple : la <a href="https://theconversation.com/renovation-energetique-en-france-des-obstacles-a-tous-les-etages-147978">rénovation énergétique</a>, c’est-à-dire l’ensemble des travaux visant à diminuer la consommation énergétique du bâtiment et de ces usagers en utilisant des énergies décarbonées.</p>
<p>Annoncée en France comme la prochaine mesure phare du quinquennat pour la planification écologique, elle illustre la complexité des défis à surmonter pour aboutir à une réelle réduction des gaz à effet de serre.</p>
<p>La rénovation énergétique est complexe et implique de nombreux acteurs publics et privés (dont la plupart n’ont pas l’habitude de collaborer avec des acteurs intermédiaires), ainsi que de nombreuses sources de financement. Elle repose sur de multiples options technologiques possibles, et nécessite des compromis entre coût économique, pratiques énergétiques et réduction des gaz à effet de serre.</p>
<p>Face à ces difficultés, l’habitude est donc de mettre en place ces programmes sans les usagers et sans observation préalable de leurs pratiques de consommation.</p>
<p>Ceci conduit généralement à des résultats variables… voire mauvais. Notamment, on observe de nombreux effets rebonds après les opérations de réhabilitation, et les retours sur investissement sont loin de ceux escomptés.</p>
<p>Et pour cause : les modèles de prédiction sur lesquels ils sont basés reprennent souvent un profil d’usager dit « moyen », et sont incapables d’intégrer la complexité des usages locaux dans leur modèle de prévision.</p>
<p>Pourtant, les travaux de mon laboratoire sur la <a href="https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01424234">réhabilitation des logements sociaux en région PACA</a> et sur la <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-03402212/file/Lazaric%20Toumi%20Ecological%20Economics%20.pdf">consommation énergétique</a> montrent qu’il est possible, par la concertation, d’enseigner la réduction de la consommation énergétique et ainsi de modifier durablement les comportements.</p>
<p>Lorsque l’on fait le bilan de la réhabilitation des logements sociaux en région PACA, on voit une nette différence entre les opérations ayant bénéficié d’une concertation en amont (programme d’éducation populaire, travail avec les associations environnementales sur les questions énergétiques, dialogues avec la maîtrise d’ouvrage sur les options techniques telles que l’isolation et le thermostat) et les autres opérations « classiques ».</p>
<p>Quand la concertation avec les usagers fut mise en œuvre, les réductions de consommation énergétique furent importantes, avec une diminution effective de la consommation sur le long terme en évitant les potentiels effets rebond (c’est-à-dire une augmentation de la consommation d’énergie par usager allant à l’encontre des prévisions initiales).</p>
<p>Si le confort thermique est un réel bien-être pour les usagers, le but premier de la rénovation énergétique reste la réduction des gaz à effets de serre. Pour parvenir à ce résultat, il est nécessaire de concilier bien-être, éducation populaire et réduction de la facture énergétique, sous peine de voir ces programmes coûteux ne pas déployer leur potentiel et générer frustration et incompréhension potentielle.</p>
<p>La concertation (avec les différents intervenants : ménages, associations, maîtres d’œuvre…) doit alors être au cœur du processus. Mieux, elle doit être apprise et comprise en étant impulsée comme principe et méthode par l’État pour servir de modèle à l’ensemble des acteurs.</p>
<h2>Quelles bonnes pratiques pour la planification écologique ?</h2>
<p>Les leçons à tirer pour la planification écologique sont multiples. Tout d’abord, la concertation est un processus complexe, long et hasardeux, mais qui doit être mise en place dès le départ.</p>
<p>La planification permet de fixer un cadre et des objectifs. Il est important, par la suite, que ces derniers soient décentralisés et mis en œuvre par les acteurs territoriaux, avec de réelles ressources et moyens pour les accompagner dans cette démarche.</p>
<p>Cette démarche de concertation collective via des associations d’éducation populaire ou des outils comportementaux (récompenses, coups de pouce – nudges – ou conseils – boosts –) est non seulement durable, mais a de nombreux impacts sur le long terme. Elle permet de ne pas réduire la question de la planification écologique à de simples dispositifs techniques, certes indispensables, mais largement insuffisants.</p>
<p>Pour conclure, on peut dire que la clé de voûte de la planification écologique repose sur plusieurs préconisations à intégrer dans l’agenda politique pour les prochaines années :</p>
<ul>
<li><p>La co-construction des scénarios de transition écologique avec les usagers comme condition préalable</p></li>
<li><p>La mise en place de programme d’éducation populaire et d’expérimentations de divers outils d’apprentissage vers la transition écologique (réduction des déchets, réduction de la consommation énergétique, nouvelles formes de mobilité…)</p></li>
<li><p>La volonté d’innover, tant du point de vue technologique que social, pour aboutir à des résultats ambitieux perçus comme utiles et justes</p></li>
<li><p>La volonté d’évaluer les résultats obtenus et de les diffuser à toutes les parties prenantes, pour apprendre des succès, mais aussi des échecs et tirer les leçons des méthodes locales</p></li>
<li><p>La capacité de dédier du temps et des ressources à la co-construction pour fédérer l’ensemble de parties prenantes, quitte à retarder à court terme les programmes en place</p></li>
<li><p>La décentralisation des moyens et des ressources pour que les acteurs territoriaux s’approprient la question de la mise en œuvre de la planification environnementale en fonction des spécificités et contraintes locales</p></li>
<li><p>La capacité de mesurer les bénéfices en matière de bien-être, d’inégalités et de réduction de gaz à effet de serre pour chaque programme engagé</p></li>
</ul>
<p>En conclusion, pour que la planification écologique puisse être perçue comme juste et utile, il faut changer la donne des pratiques en cours, ne pas chercher l’efficacité à tout prix, mais voir la portée des programmes sur le long terme et se donner le temps de la concertation collective.</p>
<p>C’est à ce prix que la programmation environnementale pourra offrir toutes les opportunités pour les citoyens, et fédérera le plus grand nombre autour de l’objectif fondamental : la réduction de notre empreinte carbone et l’héritage du bien commun aux générations à venir.</p>
<p>La tâche est ambitieuse, mais c’est à ce prix que la transition écologique et sa mise en œuvre pourront embarquer le plus grand monde de citoyens, et toucher leur cible initiale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182699/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Lazaric ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La planification écologique est annoncée comme au cœur du prochain quinquennat. Pour fédérer les citoyens et atteindre ses objectifs, le gouvernement a tout intérêt à se tourner vers la concertation.Nathalie Lazaric, Directrice de recherche en innovation et apprentissage, Université Côte d’AzurLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1814562022-05-01T16:46:22Z2022-05-01T16:46:22ZPourquoi crier au scandale à chaque fois qu’une personnalité utilise un jet privé ?<p>Au lendemain du premier tour de l’élection présidentielle du 10 avril 2022, le <a href="https://vert.eco/articles/jean-castex-fait-un-aller-retour-en-jet-prive-pour-voter-devant-les-cameras">média <em>Vert</em></a> épinglait le choix du Premier ministre Jean Castex d’avoir utilisé un jet privé pour aller voter à Prades, dans les Pyrénées-Orientales. </p>
<p>Des accusations similaires se sont multipliées tout cet été 2022, visant patrons et stars sur les réseaux sociaux. </p>
<p>Ces polémiques surgissent dans un contexte où les appels à baisser la consommation d’énergie des ménages se multiplient, alors que l’Union européenne doit se libérer de sa dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie et que la publication du dernier volet du rapport du GIEC le 4 avril 2022 alerte une nouvelle fois sur l’urgence d’agir drastiquement pour freiner le dérèglement climatique.</p>
<p>Outre l’impact financier pour le contribuable du recours abusif aux jets privés de la part de responsables politiques, quels effets de tels comportements de la part des personnalités publiques peuvent-ils avoir sur les consommateurs en matière de choix énergétiques ?</p>
<p><a href="https://doi.org/10.3917/ror.152.0029">Dans une étude publiée à l’été 2020</a> dans la <em>Revue de L’organisation responsable</em>, j’ai tenté d’explorer les principales raisons qui expliquent pourquoi les individus ne diminuent pas leur consommation d’énergie domestique, malgré les invitations pressantes à le faire.</p>
<p>Dans ces travaux, j’ai établi une typologie des consommateurs en fonction de leur rapport aux économies d’énergie. Si du côté des « résistants », les motivations sont diverses, les discours et attitudes contradictoires des dirigeants apparaissent comme un facteur saillant.</p>
<h2>Ces 1001 raisons d’être réfractaire au changement</h2>
<p>Il y a d’abord ceux qui jugent que les économies d’énergie ne sont qu’un effet de mode qui passera, qu’ils en ont assez d’en entendre parler et de faire des efforts. D’autres s’assument explicitement climatosceptiques : ils ne croient tout simplement pas à la problématique environnementale, ni par conséquent à la nécessité de réduire leur consommation énergétique résidentielle.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=366&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/459060/original/file-20220421-34130-z0vdiu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La théorie des <em>nudge</em> suggère que l’on peut influencer les choix des individus par des incitations non financières et non contraignantes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sourav Raina</span></span>
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</figure>
<p>D’autres invoquent la préservation de leur liberté individuelle : ils refusent que l’action publique s’immisce dans leur vie quotidienne et les empêchent de consommer ce qu’ils veulent, quand ils veulent et comme ils veulent.</p>
<p>Une autre frange encore présente une réticence générale au changement, qui va au-delà des « habitudes » et <a href="https://psycnet.apa.org/record/2003-99635-011">peut présenter 4 dimensions</a> : la recherche de routine, la réaction émotionnelle, la focalisation sur le court terme et la rigidité cognitive.</p>
<h2>Un sentiment d’injustice</h2>
<p>Mais il existe un autre segment chez ces « résistants » à l’économie d’énergie : celui des révoltés par l’injustice perçue à l’égard des vrais pollueurs, par l’incohérence de l’action publique et son manque de transparence.</p>
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<p>Eux estiment que les pouvoirs publics s’acharnent sur les ménages tout en se montrant laxistes vis-à-vis des grands groupes pollueurs. Notre recherche qualitative, à travers des entretiens et une netnographie, révèle que ces répondants vont, parce qu’ils jugent l’action de l’État contradictoire, jusqu’à refuser d’adopter un comportement économe en énergie.</p>
<p>Pour eux, l’État incite d’un côté la population à adopter des comportements économes, tout en ne l’informant pas par ailleurs du caractère énergivore des innovations technologiques et des nouveaux appareils.</p>
<h2>La schizophrénie des pouvoirs publics</h2>
<p>L’action publique peut en effet <a href="http://www.afsp.msh-paris.fr/congres2007/ateliers/textes/at1pautard.pdf">apparaître schizophrène</a> sur ce sujet, prise entre les enjeux de la croissance économique et de la dynamique des marchés et ceux d’une régulation des comportements des consommateurs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/272487/original/file-20190503-103071-lfg7xf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La barre de gauche représente la moyenne pour le mode, celle du milieu en hachuré seulement pour les déplacements à courte distance, et à droite les déplacements longue distance qui sont plus directement comparables à l’aérien en termes de motifs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/la-mobilite-des-francais-panorama-issu-de-lenquete-nationale-transports-et-deplacements-2008">Aurélien Bigo/Données Ademe et ENTD</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Pour les répondants révoltés, la résistance à la déconsommation apparaît donc comme une manière d’exprimer leur point de vue et de révéler leur opposition à ce double discours.</p>
<p>« Non pas du tout je ne vais pas faire le con alors que les autres dépensent de l’argent aux frais de la princesse. », « Qu’ils commencent par le haut », exprime une personne interrogée. « Pourquoi les gens au-dessus ne se serrent pas la ceinture. ».</p>
<p>« Le soir, sur les routes nationales, il y a des complexes commerciaux… qui laissent toutes les lumières allumées sur des parkings déserts. La consommation d’énergie de Las Vegas, Les politiciens qui voyagent en Jet Privé… », souligne un autre contributeur anonymisé sur le forum sur-la-toile.com.</p>
<p><em>« Calculer l’empreinte écologique : évaluer la trace laissée sur le passage sur cette Terre (en termes d’épuisement des ressources et pollution) et surtout, pour ceux qui le peuvent (c’est-à-dire les sociétés), le profit tiré de ces prélèvements (gratos), et pointez du doigt les coupables, les vrais. » (Anonymisé, forum : sur-la-toile.com)</em></p>
<p>S’ils veulent convaincre ce groupe de résistants d’agir en faveur de la maîtrise de l’énergie, les acteurs publics devront affiner leur communication et tâcher de corriger l’injustice perçue.</p>
<p>En la matière, les personnalités politiques gagneraient à prouver leur cohérence et à faire en sorte que le message qu’ils diffusent soit reflété dans leurs comportements.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181456/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dhouha El Amri ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’incohérence et le double discours des pouvoirs publics pèsent lourd dans la réticence des citoyens à réduire leur consommation d’énergie.Dhouha El Amri, Maître de conférences en sciences de gestion, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1703462021-11-24T23:20:12Z2021-11-24T23:20:12ZDébat : Métavers, taxis volants et autres armes de destruction massive de la planète<p>5G, 8K, taxis volants et métavers fascinent tout autant qu’ils posent question, mais assez rarement, voire jamais, sous l’angle écologique.</p>
<p>Dans un récent article du quotidien <em>Le Monde</em> – paru le 18 octobre 2021 et intitulé <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/10/18/facebook-va-recruter-10-000-personnes-en-europe-pour-creer-le-metavers_6098755_3234.html">« Facebook va recruter 10 000 personnes en Europe pour créer le métavers »</a> –, sont ainsi évoqués l’emploi, la localisation du lieu de production de l’innovation, des « cas d’usage » de cette application et les expériences qu’elle permettra ; les risques soulignés concernent seulement l’addiction ou les droits de l’individu dans le métavers.</p>
<p>On retrouve <a href="https://www.lemonde.fr/la-foire-du-drone/article/2019/05/17/y-a-t-il-un-pilote-dans-le-taxi-volant_5463533_5037916.html">cette même trame narrative</a> au sujet des taxis volants : les promesses d’un côté et le rapport des individus entre eux, lorsqu’ils seront aux commandes de l’engin.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/0IKKIPZr_C0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">À Toulouse, Airbus présente son taxi volant prévu pour 2023. (AFP, 2021).</span></figcaption>
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<p>Le lien n’est toutefois jamais établi entre ces initiatives et leurs potentiels impacts sur la biosphère. Pour trouver un tel lien, il faut aller dans les pages « Planète » ou « Livres » du <em>Monde</em> : ici, le consommateur est <a href="https://www.lemonde.fr/emploi/article/2021/09/16/l-enfer-numerique-la-face-cachee-de-nos-e-mails_6094839_1698637.html">mis en cause pour ses usages excessifs</a> de vidéo ou d’emails.</p>
<p>Cette manière de « compartimenter » les débats et les enjeux ne date pas d’hier et feuilleter de vieux numéros du <em>Monde</em> conduira aux mêmes observations.</p>
<h2>Technologies <em>hype</em> vs écologie punitive</h2>
<p>La réglementation procède de façon identique. D’un côté, des lois et directives qui <a href="https://www.arcep.fr/la-regulation/telecom-et-numerique/les-textes-legislatifs.html">organisent l’expansion du numérique</a> et de ses applications ; de l’autre, celles qui s’intéressent aux implications écologiques de ces technologies, gérées par d’autres agences – comme l’Ademe (Agence de la transition écologique) en France.</p>
<p>Une première conséquence de cette partition est de faire apparaître l’écologie comme « punitive ». D’un côté, les <a href="https://www.gartner.com/en/research/methodologies/gartner-hype-cycle">innovations techniques et leur « hype »</a>, leur lot de promesses de nouvelles expériences, de joie, de bonheur, de réalisations fantastiques. De l’autre, la question écologique, qui parle déchets, efficacité énergétique, destruction de la planète et autres questions « déprimantes » et « ennuyeuses ».</p>
<p>Cela vaut aussi pour la recherche : les chercheurs avec de bonnes nouvelles » technologiques sont placés en tête de gondole, les autres restent en fond de cale. Ainsi la médiatrice de <em>France Info</em> expliqua-t-elle que le transfert du footballeur Messi <a href="https://mediateur.radiofrance.com/rendez-vous/couverture-editoriale-sur-larrivee-de-lionel-messi-au-psg/">« valait » plus de temps d’antenne</a> que le rapport du GIEC, le premier sujet relevant du feuilleton, alors que le rapport du GIEC constitue un événement ponctuel.</p>
<h2>Sobriété oblitérée</h2>
<p>Autre conséquence : la réglementation écologique reste globalement cantonnée au domaine de <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/action-france-lefficacite-energetique">« l’efficacité écologique »</a> ; ce terme technique désigne la quantité de matière et d’énergie nécessaire pour fabriquer un bien ou rendre un service.</p>
<p>Cette efficacité masque d’autres approches, essentielles dans la transition écologique : celles relatives à la sobriété. Celle-ci pose la question de savoir si nous avons vraiment besoin de ce bien ou ce service. Que ce soit pour la 8K ou de la 5G, l’association Shift Project remet ainsi en cause son intérêt, <a href="https://theshiftproject.org/article/lean-ict-pour-une-sobriete-numerique-intermediaire/">au regard de ses effets prévisibles sur la planète</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1418546682543984641"}"></div></p>
<p>Troisième conséquence de cette partition entre expansion numérique et impact environnemental, l’écologie a toujours un temps de retard. On y assiste dans les faits : en dépit des réglementations, l’impact écologique du secteur numérique ne cesse de grandir. Les applications sont développées à coup de millions, voire de milliards. Ensuite seulement se pose la question environnementale. Il est alors déjà trop tard !</p>
<h2>Des dépendances massives… et prévisibles</h2>
<p>Pourtant, dans bon nombre de cas, les effets de ces projets sont prévisibles – on peut dire bien en amont quelles sont les idées désastreuses, ou du moins fortement problématiques.</p>
<p>Mener cette réflexion en amont permettrait d’éviter des <a href="https://www.persee.fr/doc/rfeco_0769-0479_1994_num_9_1_950">situations de <em>lock-in</em> technologique</a>, telles que la dépendance massive des modes de vie à l’automobile ou au smartphone. Des situations dont il est difficile de sortir, parce qu’elles impliquent de coordonner un changement d’infrastructures et d’habitudes, à l’image de l’implantation du vélo en ville, « contre » la voiture.</p>
<p>Ces conséquences facilement anticipables, on les retrouve avec la 5G, la 8K, les taxis volants et le métavers.</p>
<p>Conçue pour favoriser une forte hausse du trafic de données, la 5G a par exemple un énorme coût énergétique, même si des gains tout aussi énormes en termes d’efficacité sont réalisés dans ce domaine depuis les années 1950. Comme le souligne le Shift Project <a href="https://theshiftproject.org/article/lean-ict-pour-une-sobriete-numerique-intermediaire/">dans son rapport</a>, ces gains d’efficacité sont cependant stables à l’échelle du système technique ; ils ne pourront donc pas compenser la multiplication des données…</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1234616967933448192"}"></div></p>
<p>Le raisonnement vaut pour la 8K et les métavers, que l’on pourrait décrire sur un plan conceptuel comme une variante améliorée de <a href="https://secondlife.com/">Second Life</a>, univers numérique persistant mis en service en 2003. À l’époque, le spécialiste de la technologie Nicholas Carr avait fait remarquer qu’un avatar sur ce réseau <a href="http://www.roughtype.com/?p=611">consommait plus d’énergie</a> qu’un Brésilien moyen.</p>
<p>Des œuvres de fiction comme <em>Virtual Revolution</em> (2016) esquissent un monde dans lequel les métavers absorberaient l’essentiel de nos interactions sociales, de même que les réseaux sociaux sont aujourd’hui un véhicule majeur des conversations quotidiennes.</p>
<p>La quantité d’information qu’il sera nécessaire de produire et de traiter est facile à anticiper, par comparaison avec ce qui existe déjà. L’entreprise informatique <a href="https://www.cisco.com/c/dam/m/en_us/solutions/service-provider/vni-forecast-highlights/pdf/Global_2020_Forecast_Highlights.pdf">Cisco prévient</a> : ces univers pourraient facilement devenir la première source de trafic sur Internet.</p>
<p>Quant aux taxis volants, ils cherchent à retrouver dans les airs la place « perdue » au sol ; bref, à encombrer l’un des derniers espaces encore disponibles, tout en sachant que monter et descendre consomme généralement plus d’énergie que de se déplacer à l’horizontale, du fait de la gravité.</p>
<h2>Notre relation à la nature</h2>
<p>On le voit, les liens entre innovation technologique et situation écologique ne sont pas compliqués à établir ; il n’y a pas ici de difficulté conceptuelle. Et l’écologie n’est pas condamnée à être en retard.</p>
<p>Marx nous expliquait déjà que la <a href="https://d-nb.info/94187897x/04">question du rapport des êtres humains à la nature, c’est la technique</a>, les choix techniques, et non l’admiration béate d’espaces supposément vierges que l’on contemplerait lors de balades le week-end…</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-nature-une-idee-qui-evolue-au-fil-des-civilisations-158045">La « nature », une idée qui évolue au fil des civilisations</a>
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<p>Les écologistes l’affirment haut et fort, depuis longtemps : certains choix techniques posent un problème de compatibilité avec les conditions d’une vie bonne sur Terre. Mais ces problèmes sont formulés dans l’espace public de manière compartimentée, ce qui empêche toute problématisation sérieuse.</p>
<h2>Pourquoi ça coince ?</h2>
<p>L’écologisme n’est pas condamné à demeurer dans le « punitif ». Vélos, circuits courts, énergies renouvelables, isolation, autoconstruction… les initiatives écologiques sont nombreuses et peuvent peser, dès lors que les différentes voies possibles sont convenablement informées, dans le débat public.</p>
<p>Qu’est-ce qui pose problème alors ? Pourquoi la <em>hype</em> bénéficie-t-elle autant à des projets dont on peut facilement montrer qu’ils poseront d’énormes problèmes dès qu’ils atteindront une certaine échelle ? Les explications sont multiples.</p>
<p>Les projets de « la tech » sont les mieux financés, bénéficiant d’une grande force de frappe en matière de puissance de persuasion. Marketing, enquêtes… le <em>storytelling</em> est savamment dosé et étroitement ciblé pour toucher les publics les plus réceptifs, avant d’être progressivement étendu vers de nouvelles franges de la population, jusqu’à saturation.</p>
<p>Ces histoires partielles s’inscrivent aussi dans l’histoire plus large des sociétés développées et leur course aux technologies les plus capitalistiques, <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1232830/f1n351.pdf">comme Marx le montra dès 1867</a>, soulignant les effets de la reproduction élargie du capital. Les socialismes ont d’ailleurs placé beaucoup d’espoir dans cette « expansion des forces productives ».</p>
<p>Rompre avec cette histoire linéaire, puisque poursuivant toujours le même but, c’est comme « régresser » et l’on préfère en quelque sorte maintenir cette narration que la vie sur Terre. Une narration où science et science-fiction se mêlent, à l’image d’Elon Musk évoquant une installation prochaine sur Mars. Le biais cognitif, <a href="https://www.puf.com/content/La_d%C3%A9mocratie_des_cr%C3%A9dules">appelé « effet Othello »</a>, joue ici à plein.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1099919194693554177"}"></div></p>
<p>Une autre explication concerne la capitalisation elle-même, qui constitue une <a href="http://www.editions-recherches.com/fiche.php?id=84">mesure de la puissance</a> des organisations. Plus la capitalisation est importante, plus les réseaux contrôlés par l’organisation s’avèrent étendus – et plus la puissance de persuasion est élevée. Elon Musk, encore lui, ambitionne de contrôler l’ensemble de la flotte de véhicules particuliers, avec ses robotaxis et ses voitures autonomes. Et ce qui est vrai des entreprises l’est aussi des États, comme le souligne François Fourquet dans l’ouvrage <a href="http://www.editions-recherches.com/fiche.php?id=84"><em>Les Comptes de la puissance</em></a>.</p>
<p>Si les <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k48039030">conceptions dominantes du socialisme</a> au XXe siècle ont toujours été fascinées par ce pouvoir collectif que le capitalisme faisait naître, et qu’elles cherchaient à mettre au service du plus grand nombre, l’écologisme soutient pour sa part <a href="http://www.editionsamsterdam.fr/nature-et-politique/">l’initiative décentralisée et les boucles de petite taille</a>.</p>
<p>Ce courant rompt ainsi fréquemment avec la « politique de puissance », expliquant notamment son opposition forte aux conservatismes. Est-ce « réaliste », dans un monde où les États cherchent à se dominer les uns les autres ? Mais, à l’opposé, la course à la grandeur peut-elle durer indéfiniment si elle mine les conditions de vie sur Terre ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170346/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabrice Flipo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour quelles raisons les effets délétères des nouvelles technologies sur l’environnement ne sont-elles pas prises en compte bien en amont ?Fabrice Flipo, Professeur en philosophie sociale et politique, épistémologie et histoire des sciences et techniques, Institut Mines-Télécom Business School Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1646392021-09-13T17:53:55Z2021-09-13T17:53:55ZÉlectroménager : comment encourager le consommateur à l’efficacité énergétique<p>Premier poste de dépense d’énergie, le logement représente 52 % du budget énergétique moyen par foyer, selon des <a href="https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/infographie-economiser-eau-energie.pdf">données de l’Ademe</a> rendues publiques en décembre 2020. L’usage quotidien de l’électroménager, notamment, engendre des consommations significatives, en particulier lorsque les équipements sont peu performants ou inadaptés aux besoins réels des ménages.</p>
<p>Les consommateurs en sont pourtant rarement conscients et peinent à hiérarchiser les sources de surconsommation. Ils n’ignorent généralement pas qu’un réfrigérateur exige plus d’électricité à l’année qu’un lave-linge, mais ils ne perçoivent pas ce qui caractérise l’ensemble de leur utilisation domestique, tous appareils confondus.</p>
<p>Ceci conduit à des surconsommations et à des pertes évitables, surtout lorsque l’on sait, à travers <a href="https://www.ecologic-france.com/professionnels/collectivites-locales-et-bailleurs/les-appareils-electriques-dans-les-foyers-francais-etude.html">l’étude menée par Ipsos</a> pour la filière DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques), qu’un foyer accumule en moyenne une centaine d’appareils électriques et électroniques.</p>
<p>La valeur énergétique consommée ne se reflète alors qu’à travers la facture d’énergie du foyer qui représenterait <a href="https://selectra.info/energie/guides/conso/appareils-electriques">jusqu’à 10 % du budget global des ménages</a> (ce dernier pouvant inclure les dépenses alimentaires, de transport, de loisir, etc.).</p>
<p>Améliorer l’efficacité énergétique chez soi et mieux choisir ses équipements en fonction de ses besoins permet non seulement de réduire sa facture énergétique, mais aussi de restreindre son impact écologique tout en encourageant les fabricants d’appareils à s’engager dans la transition.</p>
<p>Encore faut-il sauter le pas…</p>
<h2>Quand le changement est porté par les consommateurs</h2>
<p>La tendance à la hausse de l’équipement des consommateurs en électroménager est notamment due à la multiplication d’appareils à durée de vie limitée voués au remplacement. Or celle-ci peut difficilement être vue comme durable compte tenu des urgences climatiques et écologiques actuelles.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1205399889221496832"}"></div></p>
<p>Dans cette optique, l’implication des ménages dans la transition écologique peut représenter l’une des clés du changement. En effet, ils peuvent d’abord agir en augmentant la durée de vie de leurs appareils <a href="https://www.gifam.fr/wp-content/uploads/2019/04/Guide-ecogestes.pdf">avec des écogestes</a> souvent simples, mais également avec leur pouvoir d’achat en optant pour les <a href="https://www.guidetopten.fr/">modèles d’électroménager</a> qui permettent de réduire significativement la consommation énergétique. Les marges de progrès sont encore élevées, notamment en France.</p>
<h2>Les Français freinés par le prix</h2>
<p>Diverses études, synthétisées dans le cadre du projet <a href="https://gbrisepierre.fr/wp-content/uploads/2020/07/%C3%89tat-de-lart-Bibliographie-MECAPERF-diffusable.pdf">Mecaperf</a> montrent que les Français achètent encore peu d’appareils de la meilleure classe énergétique malgré leur bonne volonté affichée. La demande reste faible et dépasse à peine les 10 % en France, contre plus de 20 % dans des pays voisins comme l’Allemagne, l’Italie ou l’Autriche.</p>
<p>La principale raison de cet écart serait le prix, jugé trop haut en comparaison à ces modèles moins performants et moins écologiques… Or, ce prix plus élevé peut en réalité souvent être amorti sur la durée de vie du produit, grâce aux économies sur la facture énergétique si les appareils sont bien dimensionnés et optimisés, et leurs usagers bien informés.</p>
<h2>Le manque d’information, un obstacle à l’achat</h2>
<p>L’une des clés de voûte de l’efficacité énergétique dans les foyers est l’information transmise aux consommateurs. Il a été montré que les personnes qui ont le moins de connaissances en la matière sont les moins disposées à aller vers les appareils performants. Augmenter le niveau de savoir des usagers peut les aider à faire des choix plus informés et judicieux.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1366918844095336448"}"></div></p>
<p>La <a href="https://ec.europa.eu/info/energy-climate-change-environment/standards-tools-and-labels/products-labelling-rules-and-requirements/energy-label-and-ecodesign/about_fr">mise en place de l’étiquette énergétique</a> par l’Union européenne depuis plus de 25 ans a été, dans ce sens, un vrai soutien aux consommateurs pour les guider dans leurs choix. Elle leur permet de comparer les capacités des modèles en affichant des informations utiles et facilement identifiables sur une échelle de A (meilleur) à G (moins bon).</p>
<p>Toutefois, le manque d’actualisation des échelles de performance a, au fil des années, questionné la lisibilité des classifications (avec des étiquettes pour certains produits où tous les modèles sur le marché obtenaient des classes A+, A++ ou A+++).</p>
<h2>Nouvelle étiquette, aide ou source de confusions ?</h2>
<p>Pour pallier cela et remettre à niveau les informations aux consommateurs, une <a href="https://fr.label2020.eu/la-nouvelle-etiquette-energie/objectif-et-interets/">nouvelle étiquette énergétique</a> est entrée en vigueur en mars 2021 avec comme principales évolutions : le retour à une échelle de performance énergétique plus stricte de A à G, l’absence de modèles dans la classe A (et parfois B) au moment du lancement et l’apparition d’un QR code permettant aux consommateurs d’accéder à des informations complémentaires.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1336343593196400644"}"></div></p>
<p>Les consommateurs peuvent donc s’appuyer sur ces nouvelles informations qui doivent obligatoirement apparaître sur les étiquettes des réfrigérateurs, congélateurs, lave-linge, machines lavantes-séchantes, lave-vaisselle, caves à vin et écrans.</p>
<p>Ces récentes modifications peuvent toutefois créer une confusion temporaire chez les consommateurs habitués aux anciennes classifications et qui ne connaissent pas nécessairement bien les autres critères techniques à prendre en considération pour s’assurer d’un achat réellement performant.</p>
<p><a href="https://www.ecoconso.be/fr/content/une-nouvelle-etiquette-energie-pour-les-electromenagers">Pour l’association ecoconso</a>, les consommateurs devront s’accoutumer à ce qu’un appareil très performant soit classé au départ B, C ou même D sur les nouvelles étiquettes.</p>
<h2>Une partie de la solution dans la distribution</h2>
<p><a href="https://gbrisepierre.fr/wp-content/uploads/2020/07/%C3%89tat-de-lart-Bibliographie-MECAPERF-diffusable.pdf">Selon la synthèse effectuée dans le cadre du projet Mecaperf</a>, 55 % des consommateurs achètent leurs appareils ménagers dans la grande distribution, ce qui place les distributeurs en première ligne.</p>
<p>Il leur incombe de jouer un rôle d’accompagnateur vers la transition énergétique au sein des foyers, en aidant par exemple à lever la confusion des acheteurs pour qu’ils s’approprient l’étiquette énergétique et en les orientant vers les appareils les plus performants.</p>
<p>Ils peuvent se reposer sur les différents points de contact entre consommateurs et distributeurs (affichage, vendeur, chatbot, etc.), mais pour bien informer les premiers, il est nécessaire qu’ils soient eux-mêmes impliqués et organisés dans des stratégies responsables en faveur de la transition énergétique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/164639/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cette recherche bénéficie d’un financement Ademe dans le cadre du projet « Mécanique de la décision d’équipement des consommateurs en électroménager performant » (Mecaperf).</span></em></p>L’électroménager occupe une place importante dans la consommation énergétique du logement. Plusieurs obstacles restent à lever pour encourager les Français à choisir des appareils plus performants.Nil Özçaglar-Toulouse, Professeure des universités, LUMEN (ULR 4999), Université de LilleIlana Bouhafs, Chercheuse, Université de LilleMarie Beck, Maître de conférences - LUMEN (ULR 4999), Université de LilleYasmine Allouat, Doctorante en sciences de gestion - Marketing, LUMEN (ULR 4999), Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1476672020-10-20T19:57:44Z2020-10-20T19:57:44ZLes bâtiments de demain seront… vivants !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/362111/original/file-20201007-20-pyth32.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=22%2C7%2C4916%2C3490&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Vue imaginaire de l’intérieur d’un « bâtiment vivant ».</span> <span class="attribution"><span class="source">Assia Stefanova/Hub for Biotechnology in the Built Environment</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Et si nos logements étaient des êtres vivants ? Je ne parle pas ici de maisons intelligentes dans lesquelles la voix désincarnée d’Alexa décide où installer les nouvelles lampes du salon.</p>
<p>Je veux dire vraiment vivants – qui grandissent, vivent, respirent et même se reproduisent. L’idée peut sembler farfelue, mais face à la crise climatique, nous avons besoin de repenser radicalement notre façon d’habiter et de concevoir notre environnement.</p>
<p>La biologie réalise aujourd’hui des prouesses en matière d’ingénierie. Et, dans le domaine de la construction, la prochaine étape pourrait être de créer des bâtiments qui font partie intégrante de la nature. Avec mes confrères et consœurs des universités de Newcastle et de Northumbria (Grande-Bretagne), nous avons lancé un <a href="http://www.bbe.ac.uk/">nouveau centre de recherches</a> dédié à ces possibilités.</p>
<p>Voici cinq manières dont nous pensons que les bâtiments du futur pourraient évoluer pour devenir des choses vivantes et respirantes !</p>
<h2>Des bâtiments qui poussent</h2>
<p>Du calcaire coquillier au bois des arbres morts, nous utilisons déjà nombre de matériaux naturels pour construire ; cette palette pourrait être radicalement étendue. Le magazine <em>Scientific American</em> a récemment présenté le mycélium, qui désigne l’appareil végétatif des champignons, comme un <a href="https://blogs.scientificamerican.com/observations/the-mycelium-revolution-is-upon-us/">matériau du futur</a>.</p>
<p>Et c’est vrai, le mycélium a besoin d’à peine plus que des copeaux de bois ou du marc de café pour pousser, et ce en très peu de temps, créant ainsi des matériaux aux excellentes performances structurelles.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/nuvd7bxpjIg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>À New York, <a href="https://www.archdaily.com/521266/hy-fi-the-organic-mushroom-brick-tower-opens-at-moma-s-ps1-courtyard">l’installation Hi-fi</a> présentait une tour de 13 mètres de haut, construite à l’aide de briques de mycélium. Le prochain défi consisterait à concevoir une structure dans laquelle ce mycélium demeurerait en partie vivant, restant capable de pousser et d’évoluer.</p>
<p>Le projet de <a href="https://www.nasa.gov/directorates/spacetech/niac/2018_Phase_I_Phase_II/Myco-architecture_off_planet/">myco-architecture</a>, mené par Lynn Rothschild à la NASA, a exploré cette possibilité en imaginant, dans la perspective de voyages sur d’autres planètes, des habitats qui se reproduiraient d’eux-mêmes.</p>
<h2>Des bâtiments qui guérissent</h2>
<p>Les fissures dans le béton d’un bâtiment marquent généralement le début de la fin. L’eau s’infiltre, finissant par rouiller les renforts métalliques qui maintiennent la structure.</p>
<p>Mais des chercheurs ont commencé à expérimenter un béton qui peut s’autoguérir. Une méthode prometteuse – actuellement développée par un groupe dirigé par <a href="https://www.tudelft.nl/en/2015/tu-delft/tu-delft-self-healing-bio-concrete-nominated-for-european-inventor-award/">Henk Jonkers à l’Université de technologie de Delft</a> (Pays-Bas) – entend incorporer des spores bactériennes (soit des graines de bactéries) dans le mélange avec lequel se fabrique le béton.</p>
<p>Dès que l’eau commence à s’infiltrer dans les fissures microscopiques, la bactérie se réactive. Le matériau devient alors littéralement vivant, déclenchant un processus chimique qui fait croître de nouveaux cristaux de calcite « guérissant » le béton. L’utilisation de cette technique peut prolonger la vie d’un bâtiment de plusieurs décennies, voire davantage.</p>
<h2>Des bâtiments qui respirent</h2>
<p>De nombreuses constructions – et tout particulièrement les <a href="https://theconversation.com/glass-skyscrapers-a-great-environmental-folly-that-could-have-been-avoided-116461">gratte-ciels vitrés</a> présents dans les grandes villes du monde – sont lourdement équipés pour assurer un bon fonctionnement.</p>
<p>Des systèmes de climatisation mécaniques, semblables à des poumons, font circuler l’air pour réchauffer et rafraîchir les pièces. Bien sûr, on peut toujours penser à ouvrir une fenêtre pour faciliter une ventilation naturelle mais ne serait-ce pas mieux si les murs pouvaient respirer ?</p>
<p>À l’Institut de technologie du Massachusetts (États-Unis), l’équipe d’Hironshi Ishii a développé des <a href="https://tangible.media.mit.edu/project/biologic/">matériaux dont la forme peut varier</a> en présence de l’eau. Ces matériaux consistent en autant de couches de spores bactériennes (similaires à celles utilisées dans le béton autocicatrisant évoqué précédemment) et de latex. Lorsque le matériau sèche, il se contracte et change de forme. Ces scientifiques ont montré de possibles applications dans notre quotidien, comme ces vêtements capables de « réagir » à la transpiration.</p>
<p>Mon équipe a commencé à explorer la possibilité <a href="http://www.synbio.construction/2019/07/05/active-origami-project-presented-at-caltech/">d’étendre cette méthode</a> à la construction, pour créer au sein des bâtiments des membranes capables de « transpirer » à mesure que l’humidité intérieure augmente. En utilisant des membranes en latex, recouvertes de spores bactériennes, le matériau s’assouplira et ouvrira ses pores – comme les glandes qui sécrètent la sueur –, permettant à l’air de circuler à travers les parois.</p>
<h2>Des bâtiments avec un système immunitaire</h2>
<p>Nous sommes entourés de milliards de microorganismes, présents partout sur les surfaces de nos maisons, de nos corps et dans l’air. Alors que nous dépensons chaque année des fortunes en nettoyants antibactériens pour tuer ces écosystèmes complexes, nous savons désormais que les personnes <a href="https://www.bbc.co.uk/news/science-environment-17952320">vivant à la campagne souffrent moins d’allergies</a> que les urbains. Et il semble qu’être exposé à de « bonnes » bactéries aiderait les enfants à construire leur système immunitaire.</p>
<p><a href="https://www.ucl.ac.uk/bartlett/architecture/news/2017/aug/bartlett-researchers-are-awarded-funding-tackle-anti-microbial-resistance">Dans le cadre d’un projet pilote très intéressant</a>, des chercheurs de la University College de Londres ont commencé à étudier comment concevoir des surfaces pour nos cuisines (par exemple) qui soient bioréceptives – c’est-à-dire qui favorisent la croissance de bactéries connues pour offrir une résistance aux insectes causant des maladies. Sans doute pourrons-nous bientôt manger nos yaourts probiotiques… dans des cuisines probiotiques !</p>
<h2>Des bâtiments avec un estomac</h2>
<p>La plupart des bâtiments nécessitent une énorme quantité de matériaux et d’énergie, tout en rejetant des déchets qui doivent ensuite être enlevés et traités à l’échelle industrielle.</p>
<p>De nouvelles recherches suggèrent cependant que ces déchets pourraient devenir une source d’énergie pour la construction. Une équipe de chercheurs du <a href="https://livingarchitecture-h2020.eu/">projet européen Living Architecture</a> travaille à la mise au point d’un nouveau type de pile à combustible microbienne, utilisant les déchets domestiques pour générer de petites quantités d’énergie ; ces travaux interviennent dans le cadre d’un projet plus vaste, explorant la puissance de traitement des microbes dans les bâtiments.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=504&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=504&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=504&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/284977/original/file-20190719-116543-iyhc9n.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Piles à combustible microbiennes développées dans le cadre du projet européen Living Architecture.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Photographe du consortium Living Architecture</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Ces piles à combustible seraient intégrées aux briques qui, en plus d’en être l’estomac, feraient partie intégrante de la structure du bâtiment. Elles absorberaient les eaux usées et les bactéries, elles convertiraient, au fur et à mesure de la décomposition des déchets, l’énergie chimique en énergie électrique. Dans un tel scénario, les toilettes pourraient aussi recharger votre téléphone portable.</p>
<p>Aussi excitante que soit la promesse de bâtiments « vivants », des inconvénients existent ici ; à commencer par l’inévitable disparition de ces constructions. Mais c’est déjà le cas des logements actuels, dont la démolition s’avère coûteuse et polluante.</p>
<p>Imaginons plutôt une ville où les immeubles pourraient mourir tranquillement pour s’en retourner à la terre, fournissant une précieuse nourriture pour les suivants, capables de grandir, évoluer, s’adapter. N’est-ce pas plus excitant qu’une maison intelligente dont le réfrigérateur range automatiquement vos brocolis ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147667/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Martyn Dade-Robertson a reçu des financements du EPSRC (EP/R003629/1) pour le Thinking Soils Project. The Hub, for Biotechnology in the Built Environment a reçu des financements de Research England dans le cadre du programme Expanding Excellence in England (E3).</span></em></p>Des blocs de construction en champignons au béton auto-cicatrisant, l’architecture utilise la biotechnologie pour donner vie aux bâtiments.Martyn Dade-Robertson, Professor of Emerging Technology, Co-director of the Hub for Biotechnology in the Built Environment, Newcastle UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1388422020-05-29T17:13:54Z2020-05-29T17:13:54ZPenser l’après : Les limites physiques de la planète<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/338316/original/file-20200528-51445-7my5wn.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C150%2C1488%2C840&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La physique fixe des bornes à notre vie sur Terre.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/argonne/32229215831/in/photostream/">Sean M. Couch, MSU</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Les chercheuses et les chercheurs qui contribuent chaque jour à alimenter notre média en partageant leurs connaissances et leurs analyses éclairées jouent un rôle de premier plan pendant cette période si particulière. En leur compagnie, commençons à penser la vie post-crise, à nous outiller pour interroger les causes et les effets de la pandémie, et préparons-nous à inventer, ensemble, le monde d’après.</em></p>
<hr>
<p>Le confinement mis en place pour lutter contre la pandémie de Covid-19 a radicalement modifié nos vies en stoppant de nombreuses activités. Une des conséquences de cette crise sanitaire est la <a href="https://theconversation.com/covid-et-baisse-des-emissions-de-co-une-nouvelle-etude-fait-le-point-secteur-par-secteur-138971">diminution de nos émissions</a> de CO<sub>2</sub> la <a href="https://www.lemonde.fr/blog/huet/2020/05/11/covid-19-combien-de-co2-evite/">plus importante</a> depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale : <a href="https://arxiv.org/abs/2004.13614">7 % sur les quatre premiers mois de 2020</a>. Respecter l’objectif de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Accord_de_Paris_sur_le_climat">Accord de Paris</a> pour limiter le réchauffement à 1,5 °C nécessite une baisse des émissions équivalente à celle imposée par le Covid-19, mais <em>en continu</em> <a href="https://www.unenvironment.org/resources/emissions-gap-report-2019">durant les prochaines décennies</a>.</p>
<p>La pandémie a aussi révélé la fragilité de notre société. Quelles seraient les conséquences humaines d’une telle pandémie combinée avec un phénomène naturel extrême – <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/05/21/le-cyclone-amphan-devaste-l-inde-et-le-bangladesh_6040335_3244.html">ouragan</a>, <a href="https://www.franceculture.fr/environnement/2019-annee-sous-les-feux">incendie géant</a>, canicule – dont la probabilité et l’amplitude <a href="http://documents.irevues.inist.fr/handle/2042/56362">augmentent</a> à cause du réchauffement climatique ?</p>
<p>Il est grand temps de prendre des mesures face aux risques futurs – qui se cumuleront – et d’augmenter l’intensité des efforts consentis pour être en état d’y faire face. Deux oublis sont à l’origine de nos imprudences : l’oubli de principes de base de la physique et l’oubli des limites physiques de notre planète.</p>
<h2>La physique ne se laisse pas oublier</h2>
<p>L’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_(physique)">énergie</a> est une notion fondamentale de la physique, qui quantifie la capacité à transformer la matière. Déplacer un objet, le construire ou le détruire, le chauffer, et toute autre transformation, nécessitent de l’énergie, et d’autant plus d’énergie que la transformation est importante.</p>
<p>Depuis sa maîtrise du feu, l’humanité a domestiqué de nombreuses <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ressources_et_consommation_%C3%A9nerg%C3%A9tiques_mondiales">formes d’énergie</a>, classées en deux groupes : <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/energie/energie-de-stock-ou-energie-de-flux-1973.php">énergies <em>de flux</em> et énergies <em>de stock</em></a>. Voici une analogie. En cas de soif, vous pouvez vous abreuver à une source – il est impossible de choisir son débit, mais elle coule en permanence. Avec une bouteille d’eau, l’eau peut être bue d’un coup ou progressivement, mais la quantité totale consommée est fixée par le stock initial – la taille de la bouteille.</p>
<p>Les énergies de flux sont le vent, le solaire, l’hydraulique au fil de l’eau, les courants marins et la géothermie. Elles ont une puissance limitée et nous devons l’accepter. Impossible de faire souffler le vent plus fort, ou de tirer du Soleil plus de lumière que la Terre n’en reçoit.</p>
<p>Les énergies de stocks sont les énergies fossiles – pétrole, gaz, charbon – et l’énergie nucléaire. Avec celles-ci, la contrainte est la quantité totale qui est disponible moyennant un effort considéré comme acceptable. En pratique, le débit d’énergie (la puissance) résultant de l’exploitation d’une énergie de stock est si grand que le rythme des transformations s’accroît considérablement tant que le stock n’atteint pas une valeur critique. À cause de la difficulté à estimer « ce qu’il reste dans le puits » (l’état du stock), il est fréquent d’être leurré par le mirage d’une source illimitée, alors qu’en réalité un stock utilisé finit par s’épuiser.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338320/original/file-20200528-51509-ffvoww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Différents types d’énergie, différentes contraintes.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-illustration/black-background-form-3d-illustration-rendering-797190190">Angelatriks/Shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>Les matériaux extraits de la croûte terrestre utiles à nos sociétés, comme les métaux, forment aussi un stock. Or des <a href="https://www.pnas.org/content/112/20/6295">métaux importants</a> sont dispersés dans la roche avec des teneurs parfois aussi faibles que quelques grammes par tonne. <a href="https://ecoinfo.cnrs.fr/2014/09/03/2-lenergie-des-metaux/">Concentrer la matière</a> est une étape clé qui utilise d’énormes <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959652609003199">quantités d’énergie, souvent à haute puissance</a>. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959378017313031">90 milliards de tonnes de matériaux</a> sont extraits chaque année et l’état des stocks devient <a href="https://www.zeit.de/wissen/2015-06/ressourcen-rohstoffe.pdf">critique</a>. De plus, cette matière concentrée artificiellement n’est pas toujours bien recyclée : sur une soixantaine de métaux <a href="http://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8702">34 ont un taux de recyclage inférieur à 1 %</a>, dont beaucoup sont demandés par les nouvelles technologies.</p>
<h2>Les trois limites de la planète : matière, énergie, environnement</h2>
<p>Matière, énergie et environnement forment un triptyque interconnecté et indissociable. Par exemple, transformer la matière grâce à l’énergie modifie l’environnement : directement par l’extraction et la production, indirectement par les déchets qui en résultent inéluctablement. Agir sur une seule des crises qui touchent ce triptyque aboutit souvent à aggraver les deux autres.</p>
<p>Il est désormais acquis que le <a href="https://ipbes.net/news/Media-Release-Global-Assessment-Fr">déclin rapide de la biodiversité</a> et le changement climatique menacent <a href="https://advances.sciencemag.org/content/6/19/eaaw1838">l’habitabilité de notre planète</a> et la survie à long terme de l’espèce humaine, requérant des <a href="https://theconversation.com/rapport-de-lipbes-sur-la-biodiversite-lheure-nest-plus-aux-demi-mesures-116473">actions urgentes</a>. <a href="http://vaclavsmil.com/2012/12/21/harvesting-the-biosphere-what-we-have-taken-from-nature/">L’empreinte de l’humanité sur la biosphère</a> prend de <a href="https://science.sciencemag.org/content/347/6223/1259855.abstract">multiples formes</a> et a considérablement augmenté depuis qu’aux énergies de flux utilisées traditionnellement se sont ajoutées les énergies de stock.</p>
<p>Nous entrons dans une période où nous disposerons sans doute de moins en moins d’énergie à cause de la <a href="https://www.lemonde.fr/blog/petrole/2019/02/04/pic-petrolier-probable-dici-a-2025-selon-lagence-internationale-de-lenergie/">raréfaction des stocks d’énergies fossiles</a>. Surtout, il est indispensable que nous en réduisions sensiblement notre consommation pour limiter le réchauffement climatique qui posera <a href="https://www.refletsdelaphysique.fr/articles/refdp/abs/2015/01/refdp201543p46/refdp201543p46.html">certainement des problèmes avant l’épuisement des stocks</a>. Développer le nucléaire pour compenser cette réduction <a href="https://www.refletsdelaphysique.fr/dossiers/255-l-electricite-nucleaire-questions-ouvertes-et-points-de-vue">n’est pas la solution idéale</a>, en particulier à cause des déchets.</p>
<p>Disposer de moins d’énergie, volontairement ou non, c’est effectuer des déplacements moins nombreux et moins rapides, produire moins d’objets manufacturés, réduire l’usage du numérique, altérer les services publics, bref avoir moins de capacités à affronter les catastrophes naturelles ou les effets de la société de consommation. Si l’on pense à la pandémie actuelle, cela veut dire moins de masques, et plus de difficulté à les laver.</p>
<p>On pourrait certes espérer que la solution passe par l’amélioration de l’efficacité de nos machines, les perfectionnant pour qu’elles rendent le même service en consommant moins d’énergie et de matière. Mais tant qu’on reste attaché aux énergies fossiles et aux hautes puissances, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_rebond_(%C3%A9conomie)">l’effet rebond</a> menace : un gain d’efficacité visant à réduire la consommation d’une machine en énergie ou en matière est souvent annulé par une augmentation de son usage et donc de sa consommation globale.</p>
<p>Certains rêvent d’aller chercher des <a href="https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/exploration-spacex-elon-musk-promet-million-personnes-mars-2050-79254/">régions habitables</a> ou des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Exploitation_mini%C3%A8re_des_ast%C3%A9ro%C3%AFdes">minerais</a> hors de notre planète. Une telle tentative détournerait à son profit des ressources d’énergie et de matière considérables, sans avoir démontré au préalable qu’elle rapporterait effectivement plus d’énergie qu’elle n’en consomme. On peut aussi craindre une exportation des problèmes environnementaux.</p>
<h2>De quels leviers disposons-nous ?</h2>
<p>Pour l’instant, notre société ne lance des projets et ne prend des décisions que sous l’angle du profit monétaire. Pourquoi ne pas faire preuve désormais de prévoyance, en calculant les coûts d’abord selon le triptyque matière-énergie-environnement et de ses limites ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=379&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338321/original/file-20200528-51483-81nc2i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=476&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Quels leviers pour faire avec moins ?</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-vector/vector-ink-swirling-water-isolated-cloud-204927085">Duvanova/Shutterstock</a></span>
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<p>Concernant la matière : le cycle entier de la production – extraction, fabrication, distribution, usage, fin de vie, retour à la fabrication ou à l’usage – doit être pensé pour diminuer la dégradation spontanée. En l’occurrence une triple dégradation : l’énergie se transforme en des formes de moins en moins utilisables, et se dilue <em>in fine</em> en chaleur ; les matières se mélangent et se diluent ; l’environnement est de moins en moins adapté à la vie. Le recyclage, tel qu’il est pratiqué, est <a href="https://theconversation.com/pourquoi-ne-recycle-t-on-que-22-des-plastiques-49626">limité</a> et n’est <a href="https://www.linkedin.com/pulse/la-d%C3%A9sillusion-dune-start-up-de-l%C3%A9conomie-circulaire-charles-dauzet/">pas la solution</a>. La robustesse, la modularité et la facilité de réparation permettraient de passer de l’obsolescence à la durabilité, et de l’irresponsabilité à la responsabilité vis-à-vis des objets que nous utilisons.</p>
<p>Constatant que les énergies de stocks ne sont pas durables, il serait judicieux de se tourner vers la seule source qui l’est : le Soleil, qui devrait encore briller pendant <a href="https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/astronomie-soleil-notre-etoile-va-t-elle-mourir-9545/">5 milliards d’années</a>. Le flux solaire reçu par la Terre est directement ou indirectement à l’origine de nos énergies solaires, hydroélectrique, éolienne et alimentaire. Il a une puissance considérable : <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Irradiation_solaire">174 000 térawatts, à peu près dix mille fois</a> supérieure à la consommation de l’humanité entière. En effet, à titre de comparaison, notons que les ressources fossiles que nous avons brûlées en à peine deux siècles proviennent de l’accumulation de l’énergie solaire captée par la photosynthèse durant cent mille fois plus longtemps.</p>
<p>La puissance reçue du Soleil est distribuée sur toute la surface de la planète. La capter entièrement et la concentrer pour alimenter la société de consommation, par exemple sous forme de panneaux photovoltaïques ou de biocarburants, se heurte à des obstacles en <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Biocarburant#Possibilit%C3%A9_de_remplacement_des_%C3%A9nergies_fossiles">pratique</a>, tant en termes d’utilisation de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89nergie_solaire_photovolta%C3%AFque#Risques_environnementaux">matière première</a> que d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Biocarburant#Utilisation_de_terre_arable">utilisation des sols</a> et d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Biocarburant#Bilan_environnemental">environnement</a>.</p>
<p>Il serait donc judicieux de se restreindre à utiliser des technologies de basse puissance. C’est-à-dire limitées par ce qui arrive sur une surface donnée locale au cours de l’année : le flux solaire, le vent, la pluie et les fleuves, la géothermie, le bois et la végétation qui poussent. Du fait qu’on intègre ces limites, il ne peut y avoir d’effet rebond.</p>
<p>De telles technologies seraient-elles réalisables en pratique ? L’exemple de la vie depuis plusieurs milliards d’années montre qu’il est non seulement faisable, mais aussi durable, de n’utiliser que le flux d’énergie venant du Soleil, et surtout la matière disponible inlassablement recyclée à partir de sources diluées.</p>
<p>Qu’est-ce à dire ? Il y a des éléments dont nos cellules ne peuvent se passer, mais qu’elles emploient en toute petite quantité, le fer par exemple. Qu’ils proviennent de l’eau de mer ou d’une roche, ils y étaient très dilués. Jamais, dans toute la chaîne écologique, il n’y a l’équivalent d’un haut-fourneau qui les utilise sous forme pure avec un coût énergétique élevé. Ils restent plus ou moins dilués dans les cellules, à l’état de trace, et passant ainsi d’un organisme à l’autre. La biochimie fine des cellules limite la dégradation de l’énergie et la déperdition de matière.</p>
<p>Cependant, les leviers d’actions sont loin de se limiter à des choix technologiques. La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Scientisme">foi inconsidérée en la science</a> ou la technique a montré ses limites. Est-il raisonnable d’espérer que la technologie, à elle seule, résoudra les problèmes qu’elle pose ? Qui oserait encore proclamer aujourd’hui que <a href="https://www.albin-michel.fr/ouvrages/homo-deus-9782226393876">« nous sommes parvenus à dominer la famine, les épidémies et la guerre »</a> ? Un premier levier d’action consisterait à forger les outils mentaux qui nous permettront de réagir à une situation encore jamais vue.</p>
<p>De la pandémie, nous pouvons tirer une leçon d’<a href="https://theconversation.com/face-au-mur-de-la-croissance-exponentielle-135331">anticipation</a>, <a href="https://editions-metailie.com/livre/histoire-dun-escargot-qui-decouvrit-limportance-de-la-lenteur/">sans confondre urgence et précipitation</a>. La prudence, vertu recommandable, consiste à imaginer les conséquences de nos actes, et aussi à admettre que certaines nous échappent. La pandémie rappelle crûment qu’il y a deux durées distinctes : celle de la prise de décision – brève – et celle au bout de laquelle les conséquences des décisions deviennent perceptibles – potentiellement longue. Les physiciens savent bien qu’une telle situation est difficilement pilotable et potentiellement <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9troaction#Boucle,_cha%C3%AEne_et_oscillation">instable</a>.</p>
<p>La pandémie a aussi changé notre perception de la mobilité incessante, réputée indispensable auparavant et désormais source de diffusion du danger. Le confinement nous a donné un exemple collectif d’autolimitation, d’une ampleur inédite dans l’histoire récente de l’humanité. La <a href="https://theconversation.com/pourquoi-leconomie-circulaire-ne-doit-pas-remplacer-la-sobriete-119021">sobriété</a>, vertu tout aussi recommandable que la prudence, dépend de nos capacités à nous limiter nous-mêmes.</p>
<p>À l’échelle de l’individu, viser plus de sobriété nécessite de rétablir le lien entre nos actions et la perception de leurs conséquences. Par exemple, dans les pays industrialisés, nous consommons l’eau du robinet sans prêter aucune attention à la somme colossale d’efforts individuels, collectifs, industriels, technologiques et scientifiques que requiert son arrivée apparemment miraculeuse. Expliquer, enseigner, persuader peut amener à changer nos comportements. Ici aussi, le confinement a contribué au <a href="https://theconversation.com/trier-reemployer-reparer-entretenir-confines-quatre-conseils-pour-une-consommation-plus-sobre-136915">changement d’attitude</a>.</p>
<p>À l’échelle collective, il existe des tentatives de répartir les contraintes concernant la pollution, comme le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Budget_carbone">budget carbone</a>. La subvention ou la taxe, le quota ou le rationnement, la norme ou la loi, bref tous les mécanismes collectifs de limitation peuvent être des leviers d’action s’ils sont justifiés et compris. L’enjeu, dans toute sa complexité, est bien sûr que ces contraintes soient équitables pour être acceptées : là encore, la pandémie a été un <a href="https://theconversation.com/dans-les-cites-le-sentiment-dinjustice-sintensifie-avec-le-confinement-137135">révélateur</a>.</p>
<h2>Leçons collectives à tirer</h2>
<p>Les termes de « croissance verte » ou de « développement durable » sont des <a href="https://reporterre.net/Les-mensonges-de-la-croissance">oxymores</a> : sans croissance de la consommation d’énergie <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01151590">pas de croissance</a> du flux formel d’échanges monétaires, aussi appelé PIB. Parce qu’il semble <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/13563467.2019.1598964">impossible</a>, ou extrêmement difficile, de consommer moins d’énergie tout en maintenant la croissance économique telle qu’elle est définie actuellement, il est irresponsable de miser sur la perpétuation de cette dernière.</p>
<p>La <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9croissance">décroissance</a> n’est pas l’opposé de la croissance économique : elle se place sur un plan plus large, positif, aussi qualitatif que quantitatif. Considérant que la société de consommation apporte plus de nuisances que de bienfaits, elle invite à repenser l’économie, la culture et la politique afin de limiter tant la consommation d’énergie que l’empreinte écologique tout en réduisant les inégalités. Ce n’est donc pas une simple diminution quantitative : c’est un changement de structure. Si la société de consommation était comparée à une voiture, la croissance économique et énergétique serait son carburant. Passer à la décroissance ne consisterait pas à priver la voiture de carburant, mais plutôt à la remplacer par un vélo.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338323/original/file-20200528-51477-sl7z16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La pandémie a montré que nous pouvons nous autolimiter, individuellement et collectivement, en nous réorganisant.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-illustration/smooth-curles-colorful-strings-on-white-1303569259">Evgeniy Zebolov/Shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>Longtemps confinée aux <a href="http://www.decroissance.org/">cercles militants</a>, la notion de décroissance est depuis un an reprise par les milieux <a href="https://www.pnas.org/content/113/22/6105">académiques</a> puis <a href="https://www.usinenouvelle.com/blogs/julien-fosse/la-croissance-verte-ideal-ou-illusion.N853460">économiques</a>. Elle suscite des remises en cause inattendues, <a href="https://www.linkedin.com/pulse/la-d%C3%A9sillusion-dune-start-up-de-l%C3%A9conomie-circulaire-charles-dauzet/">d’un startupper</a> comme de l’<a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/mon-probleme-avec-la-croissance-1158702">éditorialiste des Échos</a>. La réflexion gagne une frange de <a href="https://www.lemonde.fr/campus/article/2019/11/03/ces-jeunes-ingenieurs-qui-choisissent-la-decroissance_6017843_4401467.html">jeunes ingénieurs</a>. Quand un sondage indique que <a href="http://www.odoxa.fr/sondage/barometre-economique-doctobre-francais-plus-ecolos-jamais/">54 % des Français préfèrent la décroissance à une croissance « verte »</a>, le journal <em>La Décroissance</em> titre ironiquement : <a href="http://www.ladecroissance.net/?chemin=journal&numero=165">« On a gagné ? ! »</a>.</p>
<p>La pandémie fait basculer le statut du débat croissance/décroissance, devenu un sujet <a href="https://lbbe.univ-lyon1.fr/Francois-Graner-Matiere-et-Systemes-Complexes-CNRS-Univ-de-Paris-Diderot.html">scientifique</a>. Il peut désormais être abordé dans les <a href="https://www.franceinter.fr/societe/agricultrice-entrepreneur-autrice-on-a-demande-aux-moins-de-35-ans-ce-qu-ils-veulent-pour-le-monde-d-apres">médias grand public</a>. Des <a href="https://labos1point5.org/nos-objectifs/">scientifiques</a> s’engagent – au nom des limites physiques de la planète – et œuvrent pour réorienter les politiques publiques de façon à s’affranchir du <a href="https://theshiftproject.org/article/crise-climat-plan-transformation-economie-chantier-urgence-crowdfunding/">pari incertain et périlleux de la croissance</a>.</p>
<h2>À quoi sommes-nous prêts pour survivre ?</h2>
<p>La pandémie frappe de manière très <a href="https://theconversation.com/logement-comment-la-crise-sanitaire-amplifie-les-inegalites-135762">inégalitaire</a>, et une crise économique frappe beaucoup plus violemment à mesure que l’on est moins riche. De la même façon, la crise écologique et énergétique qui s’annonce risque de frapper plus fortement les pays et les personnes les plus pauvres. Pour nous autolimiter dans un cadre de collaboration plutôt qu’en compétition, une réforme profonde de notre système politico-économique est nécessaire.</p>
<p>L’un des rares <a href="https://www.thomassankara.net/sankarisme-et-environnement-communication-de-meng-nere-fidele-kientega/">chefs d’État ayant commencé à implémenter une politique écologique</a> a été assassiné après quelques années. On peut imaginer qu’un changement profond vers une <a href="https://editions-libertaires.org/?p=885">écologie politique assumée</a> aurait à surmonter de fortes résistances. Pourtant, la pandémie met aussi en lumière que, même dans des sociétés basées sur la concurrence, les <a href="https://theconversation.com/dossier-la-solidarite-en-temps-de-crise-138670">solidarités</a> prennent parfois le dessus.</p>
<p>Elle apporte aussi la preuve que les États peuvent prendre, au nom de la survie, la décision d’arrêter la machine économique et industrielle. Bien sûr, la brutalité de cet arrêt a eu des conséquences très graves : en premier lieu, la faim, de l’<a href="https://www.la-croix.com/Monde/Asie-et-Oceanie/En-Inde-peur-faim-prevaut-celle-coronavirus-2020-04-05-1201087921">Inde</a> à la <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/coronavirus-la-pandemie-aggrave-la-crise-alimentaire_3934589.html">Colombie</a> en passant par les États-Unis où l’on peut voir des <a href="https://www.youtube.com/watch?v=iWT9aOE0OGo">Mercedes dans une queue</a> pour recevoir de l’aide alimentaire gratuite. Dans le futur, mieux vaudrait étaler ces changements dans le temps, les anticiper et les piloter, plutôt que les subir.</p>
<p>Face à cette pandémie qui ne contient qu’un seul risque, certes très grave, une large frange de l’humanité a donné un coup de frein d’une ampleur encore jamais vue. Face à la crise globale énergétique, matérielle et environnementale, face aux risques bien plus nombreux, tout aussi certains, et au moins aussi <a href="https://advances.sciencemag.org/content/6/19/eaaw1838">mortels</a>, mais à une échéance plus étalée, consentirons-nous les efforts indispensables ?</p>
<hr>
<p><em>Cet article a bénéficié de discussions avec Emmanuelle Rio, Jean‑Manuel Traimond et Aurélien Ficot. Nous remercions aussi les nombreux relecteurs</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/138842/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La pandémie confirme les limites de la croissance, incite à repenser nos relations aux technologies en tenant compte du triptyque énergie-matière-environnement, et ouvre le débat de la décroissance.Roland Lehoucq, Chercheur en astrophysique, Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)François Graner, Directeur de recherche CNRS, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1389712020-05-19T16:05:55Z2020-05-19T16:05:55ZCovid et baisse des émissions de CO₂ : une nouvelle étude fait le point secteur par secteur<p>Avec la pandémie, de nouveaux modes de vie – on pense notamment à la diminution drastique de l’usage des voitures – sont apparus. La distanciation sociale imposée par le Covid-19 change notre façon de vivre et de travailler.</p>
<p>Le nombre de personnes à vélo ou marchant a ainsi connu une envolée inédite. Bogota, Berlin et Vancouver ont <a href="https://www.wri.org/blog/2020/04/coronavirus-biking-critical-in-cities">élargi leurs voies cyclables</a>. <a href="http://www.leparisien.fr/paris-75/deconfinement-a-paris-anne-hidalgo-veut-faciliter-les-deplacements-a-velo-et-a-pied-04-05-2020-8310735.php">À Paris</a>, un vaste réseau de voies pour les vélos est également en cours d’élaboration.</p>
<p>Mais, une fois passée la crise, le système reviendra-t-il à la « normale » ? Et le devrait-il ?</p>
<p>C’est l’une des nombreuses questions qui émergent à l’heure où l’effet de la pandémie sur les émissions de carbone commence à se préciser.</p>
<h2>Au-delà de la pandémie</h2>
<p>Dans un article de recherche – <a href="https://www.nature.com/articles/s41558-020-0797-x">publié ce mardi 19 mai 2020</a> dans la revue scientifique <em>Nature Climate Change</em> –, nous montrons comment le Covid-19 a affecté les émissions de CO<sub>2</sub> dans six secteurs économiques (énergie, transport routier, industries, services publics et commerces, residentiel et aviation) à l’échelle mondiale.</p>
<p>Nous avons ainsi découvert que les niveaux d’activité restreints ont entraîné une baisse maximale de 17 % des émissions mondiales quotidiennes début avril, par rapport à 2019.</p>
<p>Ces données sont précieuses à un moment où nous considérons qu’un changement structurel profond est nécessaire pour orienter l’économie mondiale vers la neutralité carbone.</p>
<p>Prenons le cas de nos rues devenues soudain si calmes avec le confinement. La chute du trafic routier est l’un des principaux moteurs de la baisse des émissions mondiales durant la pandémie. Par conséquent, si nous encourageons le vélo et le télétravail au-delà de la pandémie actuelle, nos objectifs climatiques pourraient devenir plus facilement réalisables.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/336075/original/file-20200519-152344-ynlr5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/336075/original/file-20200519-152344-ynlr5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/336075/original/file-20200519-152344-ynlr5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=348&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/336075/original/file-20200519-152344-ynlr5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=348&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/336075/original/file-20200519-152344-ynlr5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=348&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/336075/original/file-20200519-152344-ynlr5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/336075/original/file-20200519-152344-ynlr5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/336075/original/file-20200519-152344-ynlr5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=438&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Émissions fossiles quotidiennes mondiales de CO₂, en millions de tonnes. Les lignes en pointillés représentent différents scénarios futurs d’émissions fonction de l’évolution de la pandémie et des niveaux de confinement.</span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<h2>Des données précises et variées</h2>
<p>Chaque fin d’année, nous publions le <a href="https://www.globalcarbonproject.org/index.htm">« Global Carbon Budget »</a>, un rapport annuel de référence sur les tendances mondiales et régionales du cycle du carbone. Les circonstances inédites que nous traversons nous ont incités à effectuer une analyse préliminaire.</p>
<p>Cette analyse a consisté à estimer comment la pandémie a pu influencer les émissions quotidiennes de CO<sub>2</sub> dans 69 pays – couvrant 97 % des émissions mondiales –, pour six secteurs économiques.</p>
<p>Il a fallu collecter, de façon très détaillée et variée, de nouvelles données à partir de diverses sources pendant la période de confinement. Nous avons, par exemple, examiné l’activité de transport routier et aérien à l’aide des données de trafic fournies par <a href="https://www.tomtom.com/en_gb/traffic-index/">TomTom</a>, de mobilité grâce à <a href="https://www.apple.com/covid19/mobility">Apple Maps</a> ainsi que des données relatives aux <a href="https://www.oag.com/coronavirus-airline-schedules-data">décollages d’avions</a> dans les aéroports. Nous avons aussi eu recours à des données quotidiennes portant sur les changements de consommation d’électricité ou l’activité industrielle.</p>
<p>Nous avons ensuite construit un « indice de confinement » – de 0 (pas de confinement) à 3 (confinement le plus strict) – dans chaque pays afin d’extrapoler les données disponibles au niveau mondial.</p>
<h2>Le pic pandémique</h2>
<p>Début avril 2020, au plus fort de la crise, le recul de l’activité mondiale a entraîné une baisse de 17 % des émissions quotidiennes mondiales – soit 17 millions de tonnes par jour – par rapport à la moyenne quotidienne de 2019.</p>
<p>Au cours de cette période, les émissions quotidiennes totales auront été similaires à celles observées en 2006. Le fait que le monde émette autant, dans des conditions de confinement strict, qu’il y a 14 ans, dans des conditions normales, souligne la croissance rapide de nos émissions de CO<sub>2</sub> ces dernières années.</p>
<p>Avec une part de 43 % dans la réduction globale, le trafic routier aura le plus contribué à la baisse des émissions. Parmi les autres contributeurs de poids, on trouve le secteur de la production d’énergie et celui de l’industrie (avec notamment la fabrication de produits et matériaux tels que le ciment et l’acier).</p>
<p>L’ensemble de ces trois secteurs est à l’origine de 86 % de la baisse des émissions journalières durant le confinement.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/336081/original/file-20200519-152338-dnmwvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/336081/original/file-20200519-152338-dnmwvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/336081/original/file-20200519-152338-dnmwvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/336081/original/file-20200519-152338-dnmwvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/336081/original/file-20200519-152338-dnmwvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/336081/original/file-20200519-152338-dnmwvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/336081/original/file-20200519-152338-dnmwvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/336081/original/file-20200519-152338-dnmwvd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Ampleur de la baisse des émissions de CO₂ au niveau mondial et par secteur d’activité pendant le confinement.</span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Si le secteur de l’aviation a subi une chute quotidienne de son activité de l’ordre de 60 % au niveau mondial – la plus importante baisse de tous les secteurs que nous avons analysés –, sa contribution à la baisse globale des émissions a été relativement faible (10 %), ce secteur ne représentant que 3 % des émissions mondiales.</p>
<p>Comme la majorité des gens sont restés à la maison, nous avons logiquement constaté une légère augmentation (de l’ordre de 5 %) des émissions mondiales du secteur résidentiel.</p>
<p>En France, le confinement a entraîné une baisse des émissions quotidiennes de pointe estimée à 34 %, soit deux fois plus importante que la baisse mondiale de 17 %. Cette baisse provient principalement du secteur du transport routier.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/336080/original/file-20200519-152292-cv7od7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/336080/original/file-20200519-152292-cv7od7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/336080/original/file-20200519-152292-cv7od7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=422&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/336080/original/file-20200519-152292-cv7od7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=422&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/336080/original/file-20200519-152292-cv7od7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=422&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/336080/original/file-20200519-152292-cv7od7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=530&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/336080/original/file-20200519-152292-cv7od7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=530&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/336080/original/file-20200519-152292-cv7od7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=530&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Ampleur de la baisse des émissions de CO₂ pour la France et par secteur d’activité pendant le confinement.</span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<h2>Les perspectives pour 2020</h2>
<p>Nous avons aussi évalué la façon dont la pandémie pourrait affecter les émissions de CO<sub>2</sub> pour le reste de 2020 – sachant que cela dépendra de l’intensité et de la durée des restrictions dans les mois à venir.</p>
<p>Si le confinement mondial généralisé se termine vers la mi-juin, nous estimons que les émissions globales de carbone en 2020 chuteront d’environ 4 % par rapport à 2019. Si certaines restrictions restent néanmoins en place pour le reste de l’année, la réduction serait d’environ 7 %. La gamme complète des baisses d’émissions est de 2 % à 13 %, si l’on considère les différents scénarios de pandémie et les incertitudes relatives aux données.</p>
<p>Plaçons ces chiffres dans le contexte du changement climatique. Selon l’Accord de Paris sur le climat et le <a href="https://www.unenvironment.org/resources/emissions-gap-report-2019">« Gap Report »</a> des Nations unies, les émissions mondiales doivent chuter de 3 et 7 % par an d’ici à 2030 pour limiter respectivement le changement climatique en dessous de 2 °C et de 1,5 °C. Avec la baisse des émissions prévue cette année suite au confinement, nous pourrions de fait atteindre cet objectif en 2020.</p>
<h2>À la croisée des chemins</h2>
<p>Stabiliser le système climatique nécessitera des modifications de nos systèmes énergétiques et économiques d’une ampleur extraordinaire – comparable à la perturbation provoquée par Covid-19. Mais comment faire pour que la baisse des émissions en 2020 impulse ces changements nécessaires et durables ?</p>
<p>L’expérience des crises économiques mondiales précédentes indique que, sauf actions concertées, les émissions finiront par <a href="https://www.nature.com/articles/nclimate1332">rebondir</a> et revenir à peu près aux niveaux d’avant crise.</p>
<p>Mais ce n’est pas une fatalité : le choc du confinement nous offre une occasion de changer les structures qui sous-tendent nos systèmes énergétiques et économiques. Un tel choc pourrait nous engager sur la voie de la décarbonisation de l’économie mondiale.</p>
<p>Évoquons à nouveau toutes ces personnes qui se sont mises récemment à la marche et/ou au vélo. Les gouvernements ne devraient-ils pas se saisir de l’occasion pour encourager et soutenir ces moyens de transport à faibles émissions et les rendre permanents ? Et si nous accélérions aussi le déploiement des voitures, vélos et trottinettes électriques pour élargir les options de mobilité tout en réduisant la pollution des milieux urbains ?</p>
<p>On peut aujourd’hui se féliciter que de nombreux responsables politiques souhaitent prendre une telle direction. La région Ile-de-France s’est par exemple engagée à investir <a href="http://www.leparisien.fr/info-paris-ile-de-france-oise/transports/deconfinement-l-lle-de-france-investit-300-millions-d-euros-pour-la-realisation-du-rer-velo-21-04-2020-8303484.php">300 millions d’euros</a> dans un réseau de « RER vélo » de 650 km reliant Paris à sa périphérie.</p>
<p>La crise a ouvert la voie à de multiples autres changements, permettant d’évaluer quels déplacements étaient essentiels et comment la communication à distance pouvait offrir une alternative efficace.</p>
<p>Si la réduction forcée de la consommation de produits et d’énergie pendant le confinement n’offre pas d’incitation directe pour réduire les émissions de gaz à effet de serre à long terme, des modes de production et consommation à <a href="https://www.nature.com/articles/s41560-018-0172-6">plus faible demande énergétique</a> peuvent être atteints, conduisant à un développement plus respectueux de l’environnement tout en préservant le bien-être individuel et l’activité économique.</p>
<p>Nous pouvons revenir rapidement à la « normale », avec des émissions de gaz à effet de serre qui continueront de suivre leur trajectoire. Mais si nous optons pour le changement, 2020 pourrait bien être le coup de pouce inattendu qui renverse à jamais la tendance mondiale des émissions.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/138971/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pep Canadell a reçu des financements du Australian National Environmental Science Program.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Corinne Le Quéré a reçu des financements de la Royal Society (No. RP/R1/191063) et de la Commission européenne (Horizon 2020) pour les projets VERIFY (No. 776810), CHE (No. 776186) et 4C (No. 821003). Elle préside le Haut Conseil pour le climat et est membre du UK Committee on Climate Change.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Glen Peters a reçu des financements de la Commission européenne (Horizon 2020) pour les projets PARIS REINFORCE (grant agreement No. 820846), 4C (No. 821003) et VERIFY (No. 776810).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Matthew William Jones a reçu des financements de la Commission européenne (Horizon 2020) for les projets VERIFY (No. 776810) and CHE (No. 776186).
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pierre Friedlingstein a reçu des financements de la Commission européenne (Horizon 2020) for le projet 4C (No. 821003).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Rob Jackson a reçu des financements de la Gordon and Betty Moore Foundation.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Felix Creutzig et Yuli Shan ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>De tout récents travaux du Global Carbon Project montrent dans le détail les effets de la pandémie et du confinement sur l’économie mondiale.Pep Canadell, Chief research scientist, CSIRO Oceans and Atmosphere; and Executive Director, Global Carbon Project, CSIROCorinne Le Quéré, Royal Society Research Professor, University of East AngliaFelix Creutzig, Chair Sustainability Economics of Human Settlements, Mercator Institute on Global Commons and Climate ChangeGlen Peters, Research Director, Center for International Climate and Environment Research - OsloMatthew William Jones, Senior Research Associate, University of East AngliaPierre Friedlingstein, Chair, Mathematical Modelling of Climate, University of ExeterRob Jackson, Chair, Department of Earth System Science, and Chair of the Global Carbon Project, globalcarbonproject.org, Stanford UniversityYuli Shan, Research Fellow, University of GroningenLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1371892020-05-13T18:56:48Z2020-05-13T18:56:48ZTunisie : l’entrepreneuriat dans le tourisme saharien n’est pas encore un relais de croissance durable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/330413/original/file-20200424-163098-pu47k6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C9%2C3264%2C2433&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La région du sud tunisien est particulièrement aride, ce qui limite la construction d'infrastructures consommatrices d'eau.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Chebika,Tozeur.jpg">Mouna Mallek </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La position compétitive de la Tunisie, fondée sur le tourisme balnéaire, est de plus en plus vulnérable à la concurrence ainsi qu’aux facteurs politique et sécuritaire du pays. Tous les indicateurs (recettes, durée de séjour, couverture de la balance commerciale…) ont reculé depuis le début des années 2000, avant de <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/2011/09/28/97002-20110928FILWWW00557-forte-baisse-du-tourisme-en-tunisie.php">chuter brutalement en 2011</a> après la révolution, poussant le pays à s’interroger sur son offre touristique.</p>
<p>C’est maintenant un facteur sanitaire qui vient ébranler l’industrie du tourisme dans sa globalité. La propagation éclair du Covid-19 a mené les États à successivement fermer leurs frontières et à confiner leur population.</p>
<p>Malgré le processus de déconfinement progressif qui s’organise peu à peu, une grande incertitude continue de planer sur le secteur du tourisme international. L’Organisation mondiale du tourisme (OMT) anticipe ainsi une <a href="https://www.lechotouristique.com/article/pandemie-lomt-prevoit-une-chute-de-20-a-30-du-tourisme-international-en-2020">baisse</a> de 300 à 500 milliards de dollars des recettes touristiques en 2020.</p>
<p>Les pays dont l’économie dépend en grande partie du tourisme sont donc les plus exposés. C’est le cas de la Tunisie pour lequel le secteur du tourisme représentait <a href="https://www.leconomistemaghrebin.com/2019/06/18/tourisme-en-tunisie-kpmg-pib/">environ 14 %</a> du produit intérieur brut (PIB) en 2019.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1240042234541674496"}"></div></p>
<p>Avant la crise sanitaire, la <a href="https://www.middleeasteye.net/reportages/tunisie-pourquoi-le-tourisme-ne-fait-plus-recette-999652242">situation</a> critique du secteur avait déjà de quoi inquiéter. Malgré tous les efforts déployés par les pouvoirs publics, le tourisme balnéaire continuait de souffrir de plusieurs insuffisances et contraintes, dont la plus importante est l’image de marque de la Tunisie.</p>
<p>En effet, le pays a jusqu’à présent développé une stratégie marketing axée essentiellement sur un tourisme balnéaire de masse. Certes, cette stratégie a permis de créer une forte notoriété sur les principaux marchés émetteurs mais il en a résulté une image de destination mono-produit (bas de gamme), peu représentative de la diversité de l’offre touristique tunisienne.</p>
<h2>Se différencier grâce au tourisme saharien</h2>
<p>À ces contraintes structurelles s’ajoutent des contraintes d’ordre conjoncturel, dont la crise du Covid-19 constitue l’exemple le plus récent. À partir de 2010, la « révolution du jasmin » a installé une atmosphère de crainte sécuritaire, ce qui s’est traduit par la perte d’une partie conséquente des parts de marché au profit de ses concurrents directs.</p>
<p>Pour faire face à ces contraintes, la Tunisie essaie de développer depuis quelques années un tourisme qui répondrait davantage aux nouvelles exigences et attentes des clients : un tourisme <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/tunisie-rene-trabelsi-desormais-on-met-en-avant-un-tourisme-durable-et-alternatif-22-06-2019-2320437_3826.php">durable et plus responsable</a>.</p>
<p>En ce sens, les autorités tunisiennes ont encouragé les entrepreneurs à s’orienter vers le <a href="https://africanmanager.com/le-sud-nouvelle-plaque-tournante-de-linvestissement-touristique/">tourisme saharien</a>, dans le sud désertique du pays. À ce sujet, nous nous sommes demandé si l’entrepreneuriat pouvait être bénéfique pour les populations locales et participer à un réel processus de développement durable.</p>
<p>Pour répondre à cette question, nous avons mené une étude (à paraître) dans la région de Tozeur, considérée comme un secteur prometteur.</p>
<p>Or, nous avons constaté que les actions en faveur du développement touristique dans cette région avaient actuellement un impact majoritairement négatif sur les plans économique, environnemental et social.</p>
<p>La raison principale réside dans la fragilité de l’écosystème de cette région, composée de zones désertiques et d’oasis, et dans la trop grande dépendance actuelle du tourisme saharien au tourisme balnéaire.</p>
<p>Notre analyse montre d’abord que, bien que le tourisme saharien soit une activité importante, les durées des séjours restent relativement courtes (1,3 jour en moyenne). Il s’agit là d’un véritable handicap pour le processus de développement du tourisme saharien qui impacte directement la nature des emplois en ce créant que des emplois saisonniers et précaires.</p>
<p>L’accessibilité de la région fait également partie de l’équation. Bien qu’il existe un aéroport international à Tozeur, le nombre de vols, concentrés sur la fin de semaine, reste assez limité. La rentabilité du voyage sur le plan économique et surtout écologique n’est donc pas assurée pour les touristes.</p>
<p>De même, la population locale souffre économiquement de cette faible activité aéroportuaire. C’est le cas des habitants de la ville désertique de <a href="https://www.businessnews.com.tn/une-bouffee-dair-frais-pour-la-ville-de-nefta,519,75772,3">Nefta</a> par exemple, dont les revenus dépendent essentiellement du tourisme saharien. Le développement et la promotion d’une offre de mobilité alternative compétitive pourraient notamment permettre de contourner le problème.</p>
<p>Quel que soit le moyen de transport alternatif, bus ou train, le temps de trajet reste en effet très long. Par exemple, pour se rendre de Tunis à Tozeur, il faut compter entre 7 et 9 heures de route (en temps normal, il y a 2 trains et 3 bus par jour). Pour les autres grandes villes comme Sfax et Sousse (2 trains et 3</p>
<p>bus par jour), il faut compter entre 5 et 7 heures pour se rendre à Tozeur. Les tarifs oscillent en outre entre 7 et 10 euros, contre 300 à 500 euros pour l’avion qui assure les liaisons en une heure environ.</p>
<h2>Le haut de gamme n’est pas toujours durable</h2>
<p>La création d’une zone touristique haut de gamme (avec un terrain de golf) à Tozeur, à la fin des années 2000, montre que le tourisme saharien représente un nouveau produit indépendant du produit touristique balnéaire. Cette offre autonome peut attirer une clientèle passionnée par la nature, l’aventure et le dépaysement. Or, cette offre dépend aujourd’hui encore avant tout d’un produit déjà existant, à savoir, le tourisme balnéaire, car la majorité des séjours s’effectuent au cours de circuits dans le sud de la Tunisie.</p>
<p>La réalisation d’un parcours de golf à Tozeur pourrait présenter un intérêt considérable pour la zone puisqu’il peut être à l’origine de plusieurs retombées directes et indirectes sur le tourisme saharien. Ce projet peut avoir des impacts positifs sur l’activité hôtelière et ses activités annexes, puisqu’il peut drainer une clientèle de haut de gamme ayant l’habitude de dépenser plus que la moyenne des touristes qui viennent habituellement en Tunisie. Autrement dit, Tozeur n’est pas encore une destination de vacances à part entière.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/330416/original/file-20200424-163058-rfrz4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/330416/original/file-20200424-163058-rfrz4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/330416/original/file-20200424-163058-rfrz4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/330416/original/file-20200424-163058-rfrz4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/330416/original/file-20200424-163058-rfrz4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/330416/original/file-20200424-163058-rfrz4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/330416/original/file-20200424-163058-rfrz4g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Golf de Tozeur dans le sud tunisien.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Terrain_de_golf_de_Tozeur.jpg">Andrea Pacelli</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Sur un plan environnemental, cette région est l’une des régions les plus chaudes et les plus arides du territoire. La présence d’un terrain de golf ne fait qu’aggraver la situation. La faiblesse de la pluviométrie se conjugue en effet aux importants besoins en eaux. Théoriquement, le terrain de golf a besoin de 7 000 mètres cubes d’eau par jour, selon l’agence foncière touristique. Mais les disponibilités réelles et possibles selon les autorités sont de 2 500 mètres cubes par jour en été et 1 800 mètres cubes par jour en hiver.</p>
<p>Ces contraintes climatiques constituent donc un frein majeur pour consolider l’offre autour du golf. De tels investissements resteraient en outre peu cohérents avec une politique de développement d’un tourisme plus durable.</p>
<p>Le sud tunisien reste néanmoins une région propice pour entreprendre et innover au niveau de l’offre touristique. Des investissements pertinents permettraient de réorienter les flux de touristes aujourd’hui attirés par les stations balnéaires en faveur d’un tourisme saharien valorisant les richesses naturelles et patrimoniales.</p>
<p>Malheureusement, les résultats issus de notre étude ne sont en aucun cas conformes à l’objectif de la mise en place d’un écosystème visant à encourager l’entrepreneuriat durable et l’écotourisme. Aujourd’hui, le seul projet qui se présente comme durable est <a href="https://www.ideomagazine.com/diar-abou-habibi-une-maison-dhotes-unique-en-tunisie/">l’écolodge Diar Abou Habibi</a>, situé en plein cœur d’une palmeraie dans l’oasis de Tozeur.</p>
<p>Faire du Sahara tunisien un relais de croissance durable pour le secteur touristique reste une belle ambition. Cependant, elle nécessite une mobilisation plus prononcée de la population locale et des acteurs institutionnels. De plus, la mise en place d’un processus d’évaluation socio-économique et environnementale des projets permettra à l’avenir de mieux les intégrer dans une politique de transition écologique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/137189/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le développement d’une offre durable et responsable dans les régions désertiques reste à l’état d’intention dans un pays dépendant du tourisme balnéaire de masse.Nizar Ghamgui, Professeur associé en Entrepreneuriat et Stratégie, PSB Paris School of BusinessAmel Souissi, Professeure, Haute école spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1373012020-05-03T17:44:28Z2020-05-03T17:44:28ZLes bonnes pratiques pour des visioconférences moins énergivores sur smartphone<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/331358/original/file-20200429-51474-j7771.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=360%2C828%2C4748%2C2700&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/KzUsqBRU0T4">Allie / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Avec le confinement, les séances de visio et d’audioconférences, notamment sur smartphones, se multiplient. À titre d’exemple, l’application Zoom, malgré les controverses sur ses <a href="https://www.nextinpact.com/news/108854-zoom-retour-sur-accumulation-failles.htm">failles de sécurité et de confidentialité</a>, a vu ses utilisateurs multipliés par 20 en trois mois. En réponse, l’application de visioconférence professionnelle de <a href="https://www.20minutes.fr/high-tech/2769827-20200429-visioconference-concurrencer-zoom-google-meet-devient-gratuit-tout-monde">Google (Meet) devient gratuite</a> pour tenter de séduire le milliard d’utilisateurs de Gmail.</p>
<p><a href="https://selectra.info/energie/actualites/politique/coronavirus-transition-energetique">En cette période inédite</a>, nos comportements numériques ont changé. Ils ont des effets immédiats sur la surchauffe des réseaux numériques et la surcharge des serveurs informatiques des applications. Cela impacte donc aussi la qualité et la stabilité des réunions virtuelles.</p>
<p>Dès lors, si l’offre d’applications est <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2020/03/17/les-meilleurs-logiciels-de-visioconference-gratuits-pour-communiquer-depuis-la-maison_6033387_4408996.html">actuellement pléthorique</a>, tous les systèmes ne se valent pas au niveau de leur consommation énergétique.</p>
<h2>L’explosion des réunions virtuelles</h2>
<p>Les déplacements fortement limités par le confinement et la montée en puissance des solutions techniques proposées encouragent mécaniquement l’usage des <a href="https://www.informatiquenews.fr/nouvelles-versions-de-zoom-et-google-meet-la-visio-est-en-fete-69554">salles virtuelles</a>, rencontres électroniques, collaboration en ligne, partages d’écran et autres pratiques de conférences vidéo et audio.</p>
<p>Celles-ci ont vu leur sollicitation et leur utilisation fortement croître depuis le confinement imposé à la moitié de l’humanité. L’usage de l’application WhatsApp a, par exemple, <a href="https://www.rtl.fr/actu/conso/confinement-3-reflexes-a-avoir-pour-ne-pas-surcharger-le-reseau-internet-7800282503">quintuplé</a>.</p>
<p>Depuis le début du confinement, le télétravail a été multiplié par 7 (le trafic voix et le trafic visio ont doublé également) <a href="https://www.france24.com/fr/20200320-coronavirus-les-r%C3%A9seaux-peuvent-tenir-assure-le-pdg-d-orange">selon une déclaration de Stéphane Richard, le PDG d’Orange</a>, fin mars 2020. Ces données visaient à rassurer les utilisateurs sur la robustesse des réseaux, câbles et interconnexions en France en cas de forte sollicitation.</p>
<h2>De Whereby à Zoom… 9 outils testés</h2>
<p>L’usage des solutions de téléconférence est de plus en plus simple et intuitif. Il s’agit en général de se connecter – de <a href="https://www.numerama.com/tech/613003-pourquoi-il-vaut-mieux-passer-votre-smartphone-sur-le-wi-fi-a-domicile.html">préférence via un réseau wifi</a> ou 4G/5G – à une plate-forme ou une application pour rejoindre une réunion cible. Vous y assistez en tant qu’animateur, invité ou participant ; vous pouvez intervenir en activant le micro, la caméra, le partage d’écran (consistant à projeter l’image de son écran pour en partager le contenu – comme des présentations – avec les autres) et de clavier grâce à des fonctionnalités de plus en plus inventives.</p>
<p>La pratique n’est toutefois pas anodine et pose de nombreuses questions. En matière de <a href="https://cyberguerre.numerama.com/4282-visioconference-la-securite-de-zoom-nest-pas-a-la-hauteur-de-son-succes.html">sécurité</a> et de stockage des données échangées ; de confidentialité et de contrôle des accès ; <a href="https://www.cnil.fr/fr/garantir-la-securite-des-donnees">d’analyse d’impact relative à la protection des données (AIPD) (tache trop souvent baclée)</a> ; de facilité d’usage et également de consommation énergétique.</p>
<p>C’est ce dernier aspect qui nous intéresse ici.</p>
<p>Des <a href="https://greenspector.com/fr/quelle-application-mobile-de-visioconference-pour-reduire-votre-impact/">tests récents</a>, pilotés par l’entreprise nantaise Greenspector, ont permis d’y voir plus clair en procédant à divers calculs sur les caractéristiques techniques et énergétiques des applications parmi les plus mobilisées en ce moment.</p>
<p>Nous avons comparé la consommation de différents outils : <a href="https://whereby.com/">Whereby</a>, <a href="https://www.webex.com/">Webex (by CISCO)</a>, Skype, <a href="https://zoom.us/fr-fr/meetings.html">Zoom</a>, <a href="https://meet.jit.si/">JITSI</a>, <a href="https://www.microsoft.com/fr-ca/microsoft-365/microsoft-teams/group-chat-software">Teams</a>, Tixeo, Infomaniak Meet et GoToMeeting, quand elles sont utilisées sur smartphone.</p>
<p>Les tests soulignent que si certains systèmes sont plus gourmands que d’autres en énergie, nos comportements jouent également beaucoup sur la dépense.</p>
<h2>La mesure de la consommation</h2>
<p>Le travail de mesure de consommation énergétique a été effectué grâce à l’outil <a href="https://greenspector.com/fr/explorer-manuellement-une-application-avec-le-free-runner-test/">Greenspector Test Runner</a> sur les applications déployées sur un smartphone S7 (Android 8).</p>
<p>Ces évaluations ont été réalisées à partir de trois <a href="https://greenspector.com/fr/quelle-application-mobile-de-visioconference-pour-reduire-votre-impact/">types de scénarios</a> donnant lieu à des tests manuels de 1 minute.</p>
<p>Le premier scénario est celui d’une conférence audio entre deux personnes ; le second, celui d’un échange audio et vidéo entre deux personnes également ; le dernier, celui d’une conférence audio avec la fonction partage d’écran activée (tableau blanc, annotation, etc.) et la caméra désactivée.</p>
<p>Les moyennes sont issues de trois mesures homogènes avec des consommations relevées au travers d’un réseau wifi. Notons qu’elles peuvent être tout à fait éloignées des consommations relevées sur un ordinateur portable relié à un réseau filaire qui serait <a href="https://le-routeur-wifi.com/wifi-vs-ethernet/">beaucoup moins énergivore</a>.</p>
<h2>Limiter l’usage de la vidéo</h2>
<p>En matière de <em>consommation d’énergie (mAh)</em>, le test a montré que pour l’ensemble de ces applications, elle est en moyenne 2,25 fois plus importante quand on ajoute la vidéo à l’audio. Elle bondit de 14 % lorsqu’on couple le partage d’écran à l’audio. Il convient donc dans l’idéal de se contenter de la voix, sans caméra ni partage d’écran.</p>
<p>GoToMeeting apparaît être la moins énergivore, suivie par Zoom (+10 %) et Webex (+12 %).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/330986/original/file-20200428-110779-1imcmyv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/330986/original/file-20200428-110779-1imcmyv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/330986/original/file-20200428-110779-1imcmyv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/330986/original/file-20200428-110779-1imcmyv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/330986/original/file-20200428-110779-1imcmyv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/330986/original/file-20200428-110779-1imcmyv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/330986/original/file-20200428-110779-1imcmyv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Consommation d’énergie des applications de visioconférence.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Greenspector, Leboucq et Bidan</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En ce qui concerne les <em>données échangées</em>, le test a mis en lumière que la consommation de ces applications est en moyenne 12 fois plus importante quand on active la caméra. De même, elle bondit de 51 % lorsque l’on ajoute le partage d’écran à l’audio.</p>
<p>Il semble nécessaire, là encore, d’éviter le partage de la vidéo et de limiter nos partages d’écran pour réduire les échanges de données sur les réseaux. Le test a également montré que le mode optimisé JITSI – permettant d’activer une faible bande passante – ne semble pas produire une réelle réduction de cet « impact » (33,4 Mo/minute).</p>
<p>Dans l’ensemble, GoToMeeting et Webex apparaissent comme les deux applications les plus économes en données.</p>
<p>Quant à la <em>projection des données mesurées en impact carbone (gEqCO<sub>2</sub>)</em>, ce comparatif a mis en lumière qu’une visioconférence sur smartphone est 3 fois plus lourde pour l’environnement lorsqu’on choisit d’ajouter la vidéo à l’audio. Avec un seul partage d’écran, cet impact ne croît que de 20 %.</p>
<p>Skype et Teams apparaissent en la matière comme de bons élèves. L’impact carbone est plus faible pour Skype grâce à son empreinte en données, mais Teams consomme moins d’énergie. À l’inverse, JITSI et Infomaniak Meet se font remarquer avec des résultats médiocres.</p>
<p>À titre plus anecdotique, l’usage de certaines applications peut être optimisé sur smartphone. Ainsi, la version TIXEO-optimisée (qui vient d’être primée par la CNIL pour son <a href="https://www.silicon.fr/teletravail-cnil-tixeo-authentification-forte-337477.html">authentification forte</a>) peut réduire significativement sa dépense énergétique en mode audio et vidéo.</p>
<p>A contrario, Zoom (très utilisée actuellement dans le cadre <a href="https://www.refinery29.com/fr-fr/2020/03/9605739/zoom-teletravail-reunions-en-ligne-classes-coronavirus">du télétravail</a>) sollicite lourdement le smartphone avec une notification de surconsommation de batterie apparue à plusieurs reprises lors des mesures in vivo. Fait regrettable, car, contrairement à l’ordinateur ou à la tablette, il est compliqué de paramétrer une qualité vidéo réduite sur smartphone.</p>
<h2>Quelles solutions et attitudes post-confinement ?</h2>
<p>Le confinement a montré combien les utilisateurs pouvaient être inventifs, exigeants, et prescripteurs d’applications. Les entreprises vont devoir s’adapter et intégrer <a href="https://management-datascience.org/articles/12835/">ces systèmes</a> que leurs employés-utilisateurs se sont appropriés, chez eux, au fur et à mesure de l’interpénétration des sphères personnelles et professionnelles.</p>
<p>Des réseaux de communications majeurs dans la sphère personnelle et professionnelle – comme Facetime, WhatsApp ou Messenger – n’ont pas encore été testés dans le cadre de cette recherche. De même, des applications très originales comme <a href="https://discordapp.com/">Discord</a> quittent les communautés de joueurs pour séduire le grand public <a href="https://islean-consulting.fr/fr/digital-transformation/discord-loutil-du-gamer-propulse-en-plateforme-pour-les-classes/">et les enseignants</a>. Elles seront prochainement testées tant leur adoption est aujourd’hui massive et leur appropriation rapide.</p>
<p>À ce stade toutefois, les attitudes les <a href="https://greenspector.com/fr/quelle-application-mobile-de-visioconference-pour-reduire-votre-impact/">moins énergivores</a> consistent à couper la caméra – une fois les présentations de courtoisies effectuées en début de réunion – pour privilégier l’audio et le partage d’écran et ses riches fonctionnalités <a href="https://www.blog-nouvelles-technologies.fr/176356/comment-partager-votre-ecran-sur-zoom-sur-desktop-et-mobile/">(fenêtre spécifique, outils d’annotation, tableau blanc, segmentation de l’écran)</a> comme sur Zoom, Teams ou même <a href="https://www.presse-citron.net/des-lundi-google-meet-sera-gratuit-pour-tous/">Google Meet</a>.</p>
<p>Pour choisir la meilleure solution, il est également possible de se fonder sur les outils de visioconférence validés et présentés dans la liste du Socle interministériel des logiciels libres <a href="https://www.mim-libre.fr/wp-content/uploads/2019/05/sill-2019-pub.pdf">(SILL)</a>. Il s’agirait ainsi de privilégier des <a href="https://meet.jit.si/">solutions dont le code est accessible</a>.</p>
<p>Le choix de l’application et les comportements de consommation vont en effet de pair dans le combat contre l’empreinte environnementale de nos écosystèmes numériques. Les mesures de sortie de confinement annoncées marquent notamment la volonté de poursuivre le <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/deconfinement-ecoles-transports-masques-ce-qu-il-faut-retenir-des-annonces-d-edouard-philippe-pour-le-11-mai_3938721.html">recours massif au télétravail</a> et donc aux téléconférences. Il faudra, dès lors, continuer à adapter à la fois nos solutions et nos attitudes !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/137301/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Bidan est membre de la section sciences de gestion et du management du conseil national des universités </span></em></p>Choisir la bonne application et l’utiliser sobrement réduit considérablement la consommation énergétique de nos réunions virtuelles.Marc Bidan, Professeur des Universités - Management des systèmes d’information - Polytech Nantes, Auteurs historiques The Conversation FranceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1351732020-03-31T18:19:28Z2020-03-31T18:19:28ZVers une baisse historique de la consommation d’énergie pour 2020<p>Depuis mi-mars, la crise sanitaire du coronavirus oblige les entreprises à fonctionner au ralenti et les Français à rester travailler chez eux, entraînant une baisse significative de notre consommation énergétique finale.</p>
<p>À partir des premières estimations macroéconomiques disponibles et des enseignements que l’on tire d’autres périodes de crise, nous évaluons que l’impact d’un mois de confinement sur la consommation finale d’énergie en 2020 en France aurait un effet équivalent à celui observé au cours de la dernière crise financière de 2008.</p>
<p>Deux mois de confinement engendreraient une baisse record et d’une ampleur équivalente à celle de 1975, au cours du premier choc pétrolier.</p>
<p>Nous résumons ici les principaux scénarios sur l’évolution de la consommation énergétique de 2020, résultats élaborés en nous appuyant sur les données d’<a href="https://www.enerdata.fr/">Enerdata</a>, bureau d’études spécialisé dans le domaine de l’énergie.</p>
<h2>Économie au ralenti = des secteurs qui consomment moins d’énergie</h2>
<p>Selon les dernières prévisions de l’Insee, l’activité économique s’établit pendant cette période de confinement à environ <a href="https://www.marianne.net/economie/coronavirus-un-mois-de-confinement-c-est-3-points-de-pib-en-moins-selon-l-insee">65 % de la normale</a> en France ; cela va se traduire par une baisse record de la consommation d’énergie dans les secteurs de l’industrie, du tertiaire ou encore du transport.</p>
<p>À partir de ces chiffres, nous estimons une baisse de consommation énergétique de 35 % dans les secteurs tertiaires et industrie et une chute de <a href="https://www.lemonde.fr/sante/article/2020/03/25/coronavirus-trafic-sncf-et-ratp-fortement-reduit-pour-limiter-les-deplacements-non-essentiels_6034389_1651302.html">80 % du trafic de passager</a>. Au vu du maintien de la chaîne logistique pour les marchandises, nous supposons que la consommation n’évoluera pas pour le <a href="https://www.banquedesterritoires.fr/coronavirus-trafic-reduit-pour-les-transports-de-voyageurs-chaine-logistique-mobilisee-pour-les">transport de marchandises</a>, ni pour l’agriculture.</p>
<p>Le secteur résidentiel connaîtra, lui, une hausse significative de sa consommation énergétique (<a href="https://www.agence-france-electricite.fr/consommation-electrique/moyenne-par-jour/">que nous estimons à environ 15 %)</a>, étant donné qu’une grande partie de la population est appelée à rester chez elle et donc à davantage se chauffer, éclairer, utiliser des appareils électriques, etc.</p>
<p>Ainsi, l’évolution de toutes ces activités engendrerait une baisse de la demande d’électricité (tous secteurs confondus) de 15 % au mois de mars en France, une réduction équivalente à celle <a href="https://media.rte-france.com/covid19_quels_impacts_sur_la_consommation_electricite/">annoncée par le gestionnaire RTE</a> la semaine passée.</p>
<p>Estimons maintenant l’impact du coronavirus sur la consommation finale d’énergie au pas de temps annuel, c’est-à-dire pour l’année 2020.</p>
<h2>Quatre scénarios selon la durée du confinement et la vitesse de reprise de l’économie</h2>
<p>Depuis le début de la crise sanitaire, il est difficile de savoir si le confinement va durer quatre semaines ou plus. Et il est encore plus difficile d’évaluer l’impact sur la croissance économique.</p>
<p>Au tout début de la crise, le projet de loi de finances rectificative fixait l’hypothèse d’un <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041734221&categorieLien=id">recul du PIB de 1 % pour 2020</a>, en faisant l’hypothèse d’une reprise économique rapide.</p>
<p>Quelques jours plus tard, cette estimation était révisée et « sera certainement beaucoup plus élevée », selon le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, qui « ne croit pas au coup de baguette magique » au moment de la sortie de crise. </p>
<p>Les chiffres varient également beaucoup d’une source à une autre. Moody’s vient de réviser sa prévision de croissance pour la France à <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/moodys-revise-sa-prevision-de-croissance-pour-la-france-a-1-4-en-2020-1365770">-1,4 % en 2020</a>, la banque américaine <a href="https://www.liberation.fr/france/2020/03/26/comment-la-france-tente-d-amortir-la-chute_1783235">Goldman Sachs</a> évoque une chute pouvant aller jusqu’à 9 % du PIB en 2020 dans la zone euro…</p>
<p>Ce qui est certain, c’est que la chute d’activité dépendra de la durée du confinement.</p>
<p>Nous établissons donc quatre scénarios qui varieront en fonction de la durée du confinement – entre 1 mois et 2 mois ; et en fonction de la vitesse de reprise de l’économie. Cette dernière pourrait être rapide – avec un retour à la normale après confinement correspondant à <a href="https://www.marianne.net/economie/coronavirus-un-mois-de-confinement-c-est-3-points-de-pib-en-moins-selon-l-insee">3 points de perte de PIB</a> comme l’a récemment indiqué l’Insee (sachant que les prévisions d’avant crise prévoyaient +1 % de croissance pour 2020) ou plus lente, comme l’indiquait le ministre français de l’Économie.</p>
<p>Concernant cette dernière hypothèse, nous établissons que l’impact macroéconomique d’une reprise lente de l’économie comprendrait à la fois le choc de court terme, auquel s’ajouterait un rythme de croissance ralenti pour le reste de l’année 2020, tel qu’observé pendant la dernière crise financière de 2008-2009.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/324132/original/file-20200330-159520-1e25tfh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/324132/original/file-20200330-159520-1e25tfh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/324132/original/file-20200330-159520-1e25tfh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=220&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/324132/original/file-20200330-159520-1e25tfh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=220&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/324132/original/file-20200330-159520-1e25tfh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=220&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/324132/original/file-20200330-159520-1e25tfh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=277&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/324132/original/file-20200330-159520-1e25tfh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=277&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/324132/original/file-20200330-159520-1e25tfh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=277&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Carine Sebi/Morgane Crenes</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Comme en 2008 ou comme en 1975 ?</h2>
<p>En fonction de nos quatre scénarios et des statistiques fournies par <a href="https://www.enerdata.fr/">Enerdata</a>, évaluons maintenant l’impact de la crise sanitaire sur les consommations énergétiques en France pour l’année 2020.</p>
<p>Dans le scénario 1 – le confinement se limiterait à un mois et la reprise économique serait rapide et immédiate – la consommation totale d’énergie baisserait de 2,3 % par rapport à ce que nous observerions sans la crise sanitaire en 2020. Si l’économie repartait plus lentement après un mois de confinement – scénario 3 –, alors l’impact serait plus marqué et la chute de consommation énergétique serait équivalente à celle observée en 2008-2009, soit – 5,3 %.</p>
<p>Si le confinement durait deux mois, alors les effets seraient démultipliés et, dans le pire des scénarios – le scénario 4 –, la consommation d’énergie finale en France reculerait de 7,6 %, soit le niveau de baisse de consommation énergétique observé en 1975 au cours du premier choc pétrolier.</p>
<p>Selon les dernières annonces du gouvernement le <a href="https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/coronavirus-le-confinement-prolonge-jusquau-15-avril-1189702">confinement devrait durer 6 semaines</a> avec une reprise lente de l’économie, ce qui impliquerait, toujours selon nos estimations, une baisse de 6,5 % de la consommation énergétique finale en 2020 par rapport à ce que nous observerions sans la crise sanitaire.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/324131/original/file-20200330-173620-7i8mr3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/324131/original/file-20200330-173620-7i8mr3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/324131/original/file-20200330-173620-7i8mr3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/324131/original/file-20200330-173620-7i8mr3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/324131/original/file-20200330-173620-7i8mr3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/324131/original/file-20200330-173620-7i8mr3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=381&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/324131/original/file-20200330-173620-7i8mr3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=381&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/324131/original/file-20200330-173620-7i8mr3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=381&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Impact sur la consommation finale d’énergie par rapport à un scénario sans crise sanitaire en 2020, et évolution de la consommation finale corrigée du climat en France pendant la crise financière de 2008 et pétrolière de 1975.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Carine Sebi et Morgan Crenes à partir d’Enerdata</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>L’épidémie fera également chuter les émissions de CO₂</h2>
<p>Si l’on suppose que le contenu carbone de l’énergie consommée reste identique à celui de 2019, alors les émissions de CO<sub>2</sub> liées à l’énergie en France chuteront également, entre -5,7 % (selon le scénario 3) et jusqu’à -8,3 % (selon le scénario 4) par rapport à un scénario sans crise sanitaire.</p>
<p>Toutes ces estimations sont bien évidemment à prendre avec une grande précaution et représentent un premier ordre de grandeur de l’impact du coronavirus sur les consommations énergétiques en France.</p>
<p>Beaucoup s’accordent à dire qu’une fois la crise passée, nous observerons en 2021 un effet rebond avec une consommation qui devrait repartir bien à la hausse, annulant dans ce cas la tendance de 2020. Rendez-vous donc en 2021 pour faire un réel bilan.</p>
<hr>
<p><em><a href="https://www.enerdata.fr/societe/equipe-direction.html">Morgan Crenes</a>, responsable de l’équipe Data & Research d’<a href="https://www.enerdata.fr/">Enerdata</a>, bureau d’études spécialisé dans le domaine de l’énergie, a participé à la rédaction de cet article</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/135173/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Carine Sebi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’impact d’un mois de confinement sur la consommation finale d’énergie en France pourrait avoir un effet équivalent à celui observé lors de la dernière crise financière de 2008.Carine Sebi, Assistant professor and Coordinator of the "Energy for Society" Chair, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1281422020-01-20T20:41:53Z2020-01-20T20:41:53ZPour être énergétiquement performant, l’habitat doit tenir compte du facteur humain<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/309967/original/file-20200114-151848-zxelnl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=277%2C184%2C5086%2C3547&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le facteur humain joue un rôle important dans les performances effectives de l'habitat énergétiquement performant.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/house-energy-efficiency-concept-775055299">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Le secteur du bâtiment résidentiel est le second secteur consommateur d’énergie finale en France (derrière celui du transport), avec environ <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/chiffres-cles-de-lenergie-edition-2018">50 % d’énergie carbonée</a>. Pour l’accompagner dans sa mutation, l’État français a mis en place une réglementation, la RT 2012, qui fixe un seuil maximal de consommation d’énergie pour les bâtiments neufs, et des crédits d’impôt pour la rénovation énergétique des particuliers.</p>
<p>En parallèle de ces mesures, on assiste à l’émergence d’habitats énergétiquement performants : habitats passifs (supposés avoir une consommation d’énergie extrêmement faible, voire nulle) et autres bâtiments à énergie positive (qui produisent plus d’énergie qu’ils n’en consomment).</p>
<p>Les technologies numériques font également leur apparition dans nos habitats, pour nous assister dans la maîtrise de notre consommation d’énergie (affichage de la consommation en direct, relevés détaillés en ligne, applications, etc.).</p>
<p>Si cette réponse technique semble être cohérente, il est légitime, avec l’arrivée prochaine de la <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/re2020-nouvelle-etape-vers-future-reglementation-environnementale-des-batiments-neufs-plus">nouvelle norme RE 2020</a> qui remplacera la RT 2012, de se poser la question de l’efficacité de cette réponse : la technique garantit-elle la performance énergétique du bâtiment résidentiel ?</p>
<h2>Des performances décevantes</h2>
<p>Les résultats <a href="https://www.larevuedelenergie.com/quel-est-limpact-des-travaux-de-renovation-energetique-des-logements-sur-la-consommation-denergie/">d’une étude parue fin 2019</a> ont montré que la baisse de consommation d’énergie liée à la rénovation énergétique des logements est nettement inférieure aux prédictions.</p>
<p>Selon les auteurs, les habitants rénovent leur habitat dans une optique de confort thermique plus que dans un objectif de baisse de la consommation d’énergie. Dans la même veine, des <a href="http://www.batiment-energie.org/doc/01-ENERTECH.pdf">expérimentations</a> portant sur des bâtiments énergétiquement performants ont révélé que la baisse de consommation d’énergie prévue n’était pas observée.</p>
<p>Des sociologues de l’université Toulouse II <a href="https://www.unil.ch/files/live/sites/ouvdd/files/shared/URBIA/urbia_15/Decoupe_3.pdf">se sont penchés sur la question</a>. D’après eux, les habitants n’utilisent pas les bâtiments et leurs équipements comme leurs concepteurs l’avaient prévu, ce qui ne leur permet pas de diminuer leur consommation d’énergie autant qu’espéré.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1196523088726446080"}"></div></p>
<p>Dans certains cas, ils auraient même des comportements contre-performants, qui augmenteraient leur consommation. Ces résultats sont tout à fait cohérents avec ceux <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1364032117309061">d’une étude parue en 2017</a>, selon laquelle la dépense d’énergie des bâtiments peut être 3 fois plus importantes qu’attendu.</p>
<p>Les facteurs en jeu sont variés : l’environnement (fait-il froid ou chaud ?), le bâtiment (est-il bien isolé ?), les équipements (sont-ils économes ?) et les occupants. Les auteurs indiquent que le comportement de ces derniers est essentiel mais qu’il est le moins pris en compte dans la conception des bâtiments.</p>
<p>Les comportements jouent ainsi un rôle non négligeable dans la consommation d’énergie des bâtiments. Et les seuls aspects techniques paraissent insuffisants pour atteindre les objectifs de réduction d’énergie.</p>
<h2>Des usages parfois non anticipés</h2>
<p>Pour expliquer cet état de fait, intéressons-nous aux usages des résidents, dont l’essentiel des activités domestiques sont source de consommation d’énergie, comme, par exemple, de faire un gâteau.</p>
<p>Pour tenter de limiter les dépenses énergétiques générées par sa cuisson, ils peuvent mettre en place des actions de maîtrise de l’énergie : cuire le gâteau après un gratin pour économiser le temps de chauffe, acquérir un four plus économe. Mais ils peuvent aussi avoir des activités de gestion de l’énergie, en enlevant par exemple les feuilles mortes tombées sur des panneaux solaires.</p>
<p>La difficulté à atteindre les objectifs de réduction d’énergie dans l’habitat est probablement liée à l’inadéquation des systèmes techniques (ici, la maison ou l’application de suivi de la consommation d’énergie) aux utilisateurs et à leurs usages.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1196970975935565825"}"></div></p>
<p>En conception, on parle de « modèle de conception » pour qualifier la représentation que se fait le concepteur de l’utilisation probable de son objet par l’utilisateur : c’est une représentation hypothétique. On parle de « modèle d’utilisation » pour qualifier la représentation qu’a l’utilisateur lorsqu’il se sert de l’objet ; il s’agit ici d’une représentation réelle.</p>
<p>Lorsqu’il existe une différence trop importante entre le modèle de conception et le modèle d’utilisation, l’utilisation de l’objet est rendue moins efficace, plus difficile et peut être à l’origine d’usages non anticipés. <strong>Par exemple, aérer sa maison tous les matins dans un bâtiment passif</strong>. Ces usages non anticipés par le concepteur du bâtiment peuvent être à l’origine d’une surconsommation d’énergie. Il est donc primordial de bien comprendre l’activité des habitants pour imaginer des habitats et des équipements adaptés.</p>
<h2>Prendre en compte les biais cognitifs</h2>
<p>Reste que bien connaître l’activité des habitants n’est pas suffisant. Il faut aussi tenir compte du fonctionnement de leur cerveau, doté d’une rationalité limitée. Nos sens, notre mémoire et notre capacité à traiter des informations sont restreints.</p>
<p>Lorsque nous prenons des décisions, nous sommes donc soumis à ce que l’on appelle des « biais cognitifs » – des automatismes qui nous permettent de traiter rapidement une multitude d’informations, mais qui sont aussi à l’origine d’erreurs de raisonnement. Alors que nous pensons agir de façon rationnelle et en accord avec nos valeurs, nous avons parfois des comportements qui vont à leur encontre. Ces biais n’épargnent pas nos comportements en faveur de l’environnement.</p>
<p>En 2011, Robert Gifford <a href="https://www.researchgate.net/publication/254734365_The_Dragons_of_Inaction_Psychological_Barriers_That_Limit_Climate_Change_Mitigation_and_Adaptation">publiait un article</a> décrivant les 29 biais cognitifs auxquels nous sommes soumis et qui nous empêchent d’agir pour limiter et nous adapter au changement climatique. Une <a href="https://www.nature.com/articles/s41893-019-0263-9?proof=true">étude parue en 2019</a> dans la revue <em>Nature Sustainability</em>, montre que lorsqu’un individu s’engage dans un comportement pro-environnemental (acheter un four économe en énergie), cela a une influence négative sur un autre comportement positif (surveiller sa consommation d’énergie).</p>
<p>Ce mécanisme peut être induit par un effet de compensation morale (aussi appelé « effet rebond ») : lorsqu’une action moralement positive est utilisée pour légitimer une action moralement moins positive.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1070451812719837184"}"></div></p>
<p>Prenons un exemple : un individu achète une chaudière électrique nouvelle génération pour remplacer son ancien appareil fonctionnant au fioul. Elle lui permet de ne plus consommer de fioul et s’avère plus économe en énergie. On s’attend donc à une baisse de consommation pour le chauffage. Avec son ancienne chaudière à fioul, cet usager essayait de réduire l’utilisation de son chauffage, afin de moins polluer. Désormais, il s’en soucie beaucoup moins, sa chaudière étant électrique et plus économe. Il a donc augmenté la température de son domicile, pour passer de 19° à 21 °C, et chauffe désormais son hall d’entrée.</p>
<p>Ici, le remplacement d’une chaudière à fioul par une chaudière électrique économe en énergie est à l’origine de comportements énergétiquement moins sobres, qui peuvent limiter la baisse de consommation, voire entraîner une augmentation de la consommation d’énergie pour le chauffage.</p>
<p>Dans la mesure où les biais cognitifs peuvent nettement influencer notre consommation d’énergie à la maison, il est nécessaire de les prendre en compte dans la conception de l’habitat.</p>
<h2>Favoriser la collaboration</h2>
<p>Si la technique est indispensable pour améliorer l’efficacité énergétique et la maîtrise de l’énergie, elle reste insuffisante.</p>
<p>Une réflexion sur nos comportements doit être intégrée pour penser des bâtiments n’engendrant pas d’usages aux effets limitatifs, voire contre-productifs concernant la baisse de la consommation d’énergie. L’objectif n’est pas de persuader les utilisateurs d’avoir tel ou tel comportement, mais bien de concevoir des habitats et des équipements compatibles avec les résidents, pour rendre possible la réalisation des performances énergétiques escomptées, et permettre des attitudes réellement sobres.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"806748495562436608"}"></div></p>
<p>Pour cela, le bâtiment et ses équipements doivent s’intégrer à l’activité des habitants, à leurs objectifs et leur permettre de s’émanciper de leurs biais cognitifs. À cet effet, des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1364032114007990">chercheurs autrichiens</a> proposent ainsi une liste de recommandations visant à neutraliser ces biais relativement à la consommation d’énergie dans l’habitat. Par exemple, pour tirer profit du « biais de statu quo », qui entraîne une résistance au changement, les auteurs proposent de définir par défaut les appareils sur leur mode d’utilisation le plus sobre énergétiquement. L’utilisateur doit donc fournir un effort pour utiliser un mode d’utilisation plus consommateur.</p>
<p>Il ne suffit donc pas de considérer l’habitat comme un système technique plus ou moins énergétiquement efficace, mais comme un système qui ne peut être énergétiquement efficace qu’avec ses habitants.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/128142/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Antoine Martin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’habitat énergétiquement performant nécessite de tenir compte des habitants pour être vraiment efficace.Antoine Martin, Doctorant en ergonomie, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1241212019-12-09T19:42:56Z2019-12-09T19:42:56ZLes pièges de « l’éco-efficience »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/302930/original/file-20191121-474-1l6jnhd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=147%2C287%2C4927%2C3158&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Changer les ampoules de ses lampes pour des LED, un exemple d’éco-efficience.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/success?u=http%3A%2F%2Fdownload.shutterstock.com%2Fgatekeeper%2FW3siZSI6MTU3NDM3MjU2MSwiYyI6Il9waG90b19zZXNzaW9uX2lkIiwiZGMiOiJpZGxfMTExNjU3NDE4NCIsImsiOiJwaG90by8xMTE2NTc0MTg0L2h1Z2UuanBnIiwibSI6MSwiZCI6InNodXR0ZXJzdG9jay1tZWRpYSJ9LCJtcmNUWnZtUTM0d3JrZ2ZiY1lsYmhzL21RY2MiXQ%2Fshutterstock_1116574184.jpg&pi=33421636&m=1116574184&src=f6ac3cc3-e22c-4c3e-b3e1-39a9496c715f-1-51">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>« L’enfer est pavé de bonnes intentions »… l’adage vaut aussi lorsqu’il s’agit de préserver les ressources naturelles. En matière d’économies d’énergie, par exemple, les efforts des entreprises pour réduire les ressources consommées en vue de la production n’ont pas toujours l’impact environnemental espéré.</p>
<p>« L’éco-efficience » désigne, pour une entreprise, le fait d’utiliser moins de ressources naturelles dans le processus de production pour obtenir une même quantité de produits. Coca-Cola et Nestlé tentent par exemple d’utiliser <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/coca-cola-tant-deau-pour-une-bouteille-1125657">moins d’eau</a>, et Siemens <a href="https://www.industrie-techno.com/article/la-production-d-acier-reclamera-moins-d-energie.12050">moins d’électricité</a>. Cet effort environnemental est conséquent, sachant que Coca-Cola a besoin de 70 litres d’eau pour produire 1 litre de boisson et produit une <a href="https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/agroalimentaire-biens-de-consommation-luxe/plastique-hsbc-suggere-a-coca-cola-de-revenir-aux-bouteilles-reutilisables-792947.html">pollution plastique considérable</a>.</p>
<p>Les entreprises s’intéressent de plus en plus à cette démarche, pour différentes raisons. Ces économies d’énergie présentent l’avantage de diminuer leurs coûts pour un même niveau de production. Mettre en avant un produit « plus vert » envoie par ailleurs un signal positif au consommateur et l’incite à l’achat. Mais penchons-nous d’un peu plus près sur les mécanismes d’une telle démarche.</p>
<h2>Effets rebonds</h2>
<p>On a tendance à croire que l’éco-efficience aligne les objectifs économiques de l’entreprise avec les objectifs environnementaux, à savoir réduire l’utilisation des ressources naturelles. Mais ce n’est pas si simple : il faut distinguer les ressources naturelles utilisées par unité produite – que mettent souvent en valeur les entreprises engagées dans une démarche d’éco-efficience – et les ressources naturelles consommées au total, qui sont liées à la demande globale. C’est ce dernier point qui détermine l’impact environnemental.</p>
<p>Prenons l’exemple d’une voiture qui consommerait moins d’essence au kilomètre. Un même trajet nous revient moins cher qu’avec un véhicule traditionnel. Par ce que l’on appelle « effet rebond », cela risque d’inciter les gens à rouler davantage, et donc à consommer plus d’essence.</p>
<p>Même conséquence pour les ampoules LED, qui coûtent moins chères à l’utilisation que les ampoules incandescentes. On veille moins à éteindre ces lumières à basse consommation <a href="https://www.wsj.com/articles/americans-are-no-longer-gluttons-for-electricitythank-the-led-bulb-11570791602">que celles à ampoules incandescentes</a>, ce qui <a href="https://ssir.org/articles/entry/there_is_no_such_thing_as_a_green_product">augmente paradoxalement la facture d’énergie</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"832231187917766656"}"></div></p>
<h2>Inefficace sur les marchés de masse</h2>
<p>L’éco-efficience, en permettant de produire moins cher, entraîne donc un « effet coût » : le coût de production baisse, le prix de vente diminue lui aussi et, par conséquent, la demande et la production augmentent. On consomme davantage, ce qui va à l’encontre des objectifs environnementaux.</p>
<p>Cet argument semble valable sur les marchés de masse. Lorsque l’utilisation totale des ressources augmente à la suite d’une politique d’éco-efficience, on dit qu’il y a un « sur-rebond », avec un impact finalement négatif sur l’environnement.</p>
<h2>Du côté des produits de luxe</h2>
<p>Mais il existe aussi ce que l’on appelle un « rebond négatif », lorsque la préservation en ressources est plus importante que prévu. C’est le cas pour les biens de luxe ou les marchés de niche, lorsque les entreprises se positionnent sur des produits haut de gamme plus respectueux de l’environnement, labellisés « verts ».</p>
<p>Le consommateur est alors prêt à payer plus cher pour des produits plus verts – une voiture électrique ou hybride, des batteries recyclables. Aujourd’hui la voiture hybride coûte plus cher à produire, le procédé étant nouveau et nécessitant d’être amorti ; mais le prix est aussi plus élevé parce que les consommateurs y consentent.</p>
<p>Si les entreprises en profitent et augmentent leurs prix, cela entraîne une baisse des quantités demandées et donc des ressources totales consommées. Au final, l’intérêt environnemental est plus important que prévu. Paradoxalement, c’est lorsque les entreprises vont augmenter leurs prix pour des produits plus éco-efficients que l’impact sur l’environnement sera le plus favorable.</p>
<p>Pour être réellement bénéfiques à l’environnement, les politiques d’éco-efficience ne doivent donc pas trop favoriser la demande et s’inscrire dans une démarche de sobriété. Pour que l’éco-efficience soit pertinente, le prix doit augmenter ou du moins ne pas « trop » baisser pour contenir la demande.</p>
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<p><em>Stanko Dimitrov (professeur associé à l’Université de Waterloo, Canada) et Frank Figge (professeur à Kedge Business School) ont participé à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124121/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Régis Chenavaz ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’éco-efficience, souvent présentée comme un des moyens de faire des économies d’énergie, s’avère souvent moins efficace qu’on ne le croie.Régis Chenavaz, Enseignant-chercheur en économie et marketing, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1256262019-11-28T19:27:31Z2019-11-28T19:27:31ZL’accès à mes données de consommation me permet-il de faire des économies d’énergie ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/302516/original/file-20191119-111630-51erd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=169%2C76%2C2449%2C1414&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Le déploiement des <a href="https://www.senat.fr/rap/r17-306/r17-3061.pdf">« compteurs nouvelle génération »</a> (<a href="http://www.theses.fr/2018PESC0003">Linky</a> pour l’électricité, <a href="https://www.grdf.fr/documents/10184/1291504/MDE+Compteurs+Communicants/">Gazpar</a> pour le gaz) apparus en France ces dernières années posent la question de l’utilisation des données ainsi collectées. Ces informations sont-elles vraiment mises au service de la <a href="https://www.gouvernement.fr/action/la-transition-energetique-pour-la-croissance-verte">transition énergétique</a> ?</p>
<p>L’information rendue plus accessible par ces compteurs de nouvelle génération est en effet souvent envisagée comme une opportunité de <a href="https://www.cairn.info/la-consommation-engagee--9782724622157.htm">responsabiliser le consommateur d’énergie</a>. Elle contribuerait à en faire un <a href="http://www.smartgrids-cre.fr/index.php?p=consommacteur-definition">« consom’acteur »</a>, auxiliaire d’un réseau vertueux structurant, le <a href="http://www.smartgrids-cre.fr/index.php?p=comprendre-les-smart-grids">« réseau intelligent »</a>.</p>
<p>L’information sur nos données de consommation d’énergie nous amène-t-elle à mieux et moins consommer ? Que peut-on vraiment espérer de cette mise à disposition du point de vue des politiques publiques ?</p>
<p>La question peut paraître triviale tant l’intérêt semble aller de soi. En effet, une meilleure connaissance de ce que nous consommons devrait naturellement nous amener à une attention plus soutenue, à des décisions plus rationnelles. Bref, l’information devrait contribuer à faire de nous des consommateurs avertis, plus sobres en énergie.</p>
<h2>Une difficile évaluation</h2>
<p>Les <a href="https://www.smartgrid.gov/files/ami_initiatives_aceee.pdf">enquêtes internationales</a> qui se sont penchées sur la question peinent dans les faits à quantifier l’impact de l’information sur les pratiques domestiques consommatrices d’énergie : certaines études, minoritaires, déduisent un impact nul voire négatif, avec une légère hausse de la consommation imputable aux dispositifs testés ; et, d’autres, les plus nombreuses, annoncent jusqu’à 40 % d’économie. Aujourd’hui les industriels affichent plus modestement environ <a href="https://www.sowee.fr/station-connectee">25 % d’économie</a>.</p>
<p>Les récents démonstrateurs français qui disposent d’un suivi scientifique tablent pour leur part sur un <a href="https://www.ecoco2.com/wp-content/uploads/2017/12/livre-blanc-web.pdf">gain compris entre 1 et 10 %</a>.</p>
<p>L’évaluation quantitative des dispositifs reste donc problématique <a href="https://www.ademe.fr/systemes-electriques-intelligents-premiers-resultats-demonstrateurs">tant les paramètres à prendre en compte sont nombreux</a> : fiabilité du matériel, fonctionnalités de l’interface, prise en compte des variations météorologiques saisonnières, représentativité de la population étudiée, occupation des lieux mesurés…
Une autre question apparaît : les économies d’énergie doivent-elles constituer l’unique critère de mesure de l’efficacité ? N’y aurait-il pas d’autres bénéfices à en attendre ? Les recherches en psychologie sociale, sociologie et sciences de l’ingénieur que nous menons depuis plusieurs années nous ont permis de dégager certaines tendances étayées par des données quantitatives et qualitatives : analyse des consommations réelles, enquêtes psychologiques et sociologiques auprès des ménages participants aux expérimentations.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/efficacite-energetique-est-il-vraiment-possible-de-faire-mieux-avec-moins-113796">Efficacité énergétique : est-il vraiment possible de faire mieux avec moins ?</a>
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<h2>Viser des changements durables</h2>
<p>Selon nos analyses, le bénéfice des informations se situerait moins dans les économies liées au court terme – même si elles peuvent être bien réelles – que dans la constitution d’une culture de l’énergie acquise par apprentissage sur le temps long.</p>
<p>Autrement dit, on peut espérer beaucoup plus de bénéfices – même s’ils restent difficiles à quantifier – d’une montée individuelle et collective en compétences que de la mise en œuvre d’actions immédiates. Les <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/21711976.2017.1359371">résultats de nos recherches</a> autour de dispositifs et de modalités très diverses de mise à disposition de l’information (<a href="http://www.bourges.univ-orleans.fr/afficheco/">afficheurs dans les logements</a>, support Web, <a href="http://www.programme-movida.fr/les-projets-de-recherche/item/8-chemin">support papier</a>, information temps réel, historique…) sont à ce propos sans équivoque.</p>
<p>La mise à disposition de données constitue un levier favorable aux changements profonds et durables dans nos manières de consommer l’énergie mais il faut pour cela remplir un certain nombre de conditions. Les risques induits sont en effet tout aussi nombreux que les bénéfices que l’on peut en attendre car ces données et les façons de les présenter ne sont pas neutres.</p>
<p>Incompréhension, décision contre-productive, surconsommation, effet rebond, sentiment de perte de maîtrise de son environnement peuvent être observés. Et lorsque l’injonction au changement est comprise comme une injonction morale difficile à atteindre, les informations peuvent induire un sentiment de honte et de disqualification sociale.</p>
<h2>Élaborer une « culture de l’énergie »</h2>
<p>La mise à disposition des données de consommation occupe une place très particulière dans l’ensemble des informations délivrées aux consommateurs d’énergie. L’hypothèse généralement retenue étant qu’elles suffiront à provoquer une prise de conscience et une rationalisation des comportements énergétiques.</p>
<p>Or, ces données techniques « objectives » se heurtent toutefois à des représentations sociales qui structurent nos <a href="https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/visions-energie-climat-2030-2050-partie-1-2014-8102.pdf">modes de vie</a> et donnent sens ou au contraire font obstacle à ces informations. Proposer une information ne garantit donc pas son appropriation, encore moins la qualité de son interprétation et la pertinence des actions mises en œuvre.</p>
<p>On le comprend, il ne suffit pas de rendre les données de consommation simples, attractives, ludiques pour qu’elles soient accessibles et appropriées par le plus grand nombre. Afin qu’elles contribuent effectivement à la transition énergétique, il faut réfléchir bien au-delà du « design » de l’information. Nos travaux dégagent trois grandes pistes de réflexion à ce propos.</p>
<p>Une première piste consiste à travailler les conditions de l’apprentissage et de la montée progressive en compétences. Les données doivent, en effet, au-delà d’informer, pouvoir favoriser une posture réflexive permettant de s’approprier les données, de les analyser et de les traduire éventuellement au travers d’actions. Cela implique de travailler la mise en forme des données, de définir et hiérarchiser les données pertinentes, d’en ordonner la présentation, de les contextualiser et de réfléchir aux modalités de leur communication.</p>
<p>La deuxième piste questionne le langage utilisé pour partager les données avec les consommateurs d’énergie. Ici, la langue de l’ingénieur s’est « naturellement » imposée, or sous des dehors rationnels et universels, elle utilise un ensemble de conventions d’écriture, de termes techniques, de signes, de symboles et de concepts très inégalement partagés au sein de la population.</p>
<p>Le nécessaire effort de traduction se conclut souvent par un appauvrissement de l’information (utilisation d’emojis ou de couleurs, conversion dans des unités de valeur réputées plus accessibles, etc.). Il faudrait plutôt construire une « langue » permettant de conserver la richesse de l’information tout en étant compréhensible par le plus grand nombre. Il s’agit là d’un des chantiers les plus ardus.</p>
<p>Enfin, la troisième piste qui nous semble devoir être approfondie concerne les conditions à réunir pour atteindre un niveau de confiance suffisant. Même lorsque la source est considérée comme sérieuse et fiable, les données sont systématiquement mises à l’épreuve pour en vérifier l’authenticité et l’exactitude.</p>
<p>Instaurer cette confiance passe souvent par un contrôle de données très faciles à effectuer par les ménages (heure du lever, de la préparation des repas, mise en route du chauffe-eau…). Si ces informations n’ont pas d’impact direct sur les économies d’énergie, elles rassurent sur la personnalisation des données et crédibilisent l’ensemble des informations. Ces opérations de vérification et les moyens de les accompagner méritent d’être explorés.</p>
<p>Il est difficile de conclure sur l’impact réel et mesurable de l’information. Ce que la littérature scientifique et les recherches que nous menons montrent avec certitude c’est que si les données de consommation énergétiques sont globalement favorables aux économies d’énergie, elles ne se suffisent pas à elles-mêmes.</p>
<p>Si l’on veut que les consommateurs d’énergie deviennent plus compétents, plus à même de gérer rationnellement l’énergie, le travail de mise en forme des données ne suffira pas. Il faut engager une réflexion sur les modalités d’apprentissage, à très grande échelle, de cette culture de l’énergie. Les données de consommation peuvent y jouer un rôle essentiel à cette condition.</p>
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<p><em><a href="https://www.researchgate.net/profile/Johanna_Le_Conte">Johanna Le Conte</a> (Eco CO<sub>2</sub>) et Raphaël Salvazet sont co-auteurs de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125626/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lolita Rubens a reçu des financements de l’Ademe et du ministère de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christèle Assegond ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Proposer une information ne garantit pas son appropriation, encore moins la qualité de son interprétation et la pertinence des actions mises en œuvre.Lolita Rubens, Maitresse de conférences en psychologie sociale, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Christèle Assegond, Sociologue, Université de ToursLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1268502019-11-18T19:55:27Z2019-11-18T19:55:27ZLa rénovation thermique réduit-elle vraiment votre facture d’énergie ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/301250/original/file-20191112-178520-1rh1sug.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=126%2C58%2C5178%2C3421&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Selon une étude des auteurs, 1 000 euros de travaux en rénovation énergétique entraînent une diminution de 8,3€ par an de la facture énergétique.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/man-installing-thermal-insulation-layer-under-233789185">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>La rénovation énergétique est l’un des piliers de l’action publique en faveur de la transition énergétique. Dernière illustration en date, le plan gouvernemental de rénovation énergétique des bâtiments, qui prévoit la rénovation de <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Plan%20de%20r%C3%A9novation%20%C3%A9nerg%C3%A9tique_0.pdf">500 000 logements</a> par an pendant cinq ans. Ou le discours de politique générale de juin 2019 du premier ministre qui annonçait une réforme des aides à la rénovation. Cette priorité se manifeste par une multiplication d’instruments : éco-prêt à taux zéro, crédit d’impôt pour la transition énergétique, certificats d’économies d’énergie, diagnostic de performance énergétique, et les acronymes correspondants : éco-PTZ, CITE, CEE, DPE… Mais la rénovation énergétique des logements réduit-elle vraiment la consommation d’énergie comme elle le prétend ?</p>
<h2>Un investissement moyen rentabilisé en… 120 ans</h2>
<p>Nous venons de publier une <a href="https://www.larevuedelenergie.com/quel-est-limpact-des-travaux-de-renovation-energetique-des-logements-sur-la-consommation-denergie">étude économétrique</a> reposant sur l’observation des travaux réellement effectués par des ménages et leurs factures énergétiques avant et après travaux. Les données proviennent de l’<a href="https://ademe.typepad.fr/files/tns-sofres---me-bilan-2012---synth%C3%A8se-4-pages-3008.pdf">enquête Maîtrise de l’Énergie</a> réalisée par TNS-SOFRES pour l’Ademe. De 2000 à 2013, l’institut de sondage interrogeait chaque année un panel représentatif de 7 à 9 000 ménages sur leur dépense énergétique et sur leurs éventuels investissements dans la rénovation. Chaque ménage était sondé plusieurs années consécutives, permettant ainsi d’observer l’évolution de leurs factures après rénovation. L’enquête fut malheureusement stoppée et les enquêtes plus récentes ne fournissent plus les mêmes éléments.</p>
<p>Le modèle économétrique, que nous ne décrirons pas ici, consiste pour l’essentiel à comparer la variation de la consommation d’énergie d’un ménage réalisant des travaux avec celle des ménages n’effectuant pas de travaux ou des travaux d’un montant différent. Pour identifier un effet « toutes choses égales par ailleurs », nous effectuons cette comparaison pour une même année et entre des ménages vivant dans la même région (et donc soumis aux mêmes conditions météorologiques, macroéconomiques et réglementaires), ayant un revenu similaire et une taille de foyer identique, contrôlant ainsi l’effet de facteurs susceptibles d’affecter la consommation énergétique.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1113222583149895681"}"></div></p>
<p>Notre estimation aboutit au résultat suivant : 1 000 euros de travaux ne diminuerait en moyenne la facture énergétique que de 8,4 € par an. Pour un investissement moyen de l’enquête, cela correspond à une diminution de 2,7 % de la facture. La rénovation énergétique est alors loin d’être rentable si l’on s’en tient aux seules économies d’énergie puisque le temps de retour correspondant, c’est-à-dire le nombre d’années nécessaires pour récupérer le coût de l’investissement initial, est de 120 ans.</p>
<p>Ce résultat apparaît en décalage avec le consensus actuel des experts. Notre estimation est par exemple beaucoup plus faible que celles incluses dans les fiches des opérations standardisées utilisées pour <a href="https://calculateur-cee.ademe.fr">calculer les économies d’énergie</a> générant les Certificats d’Économie d’Énergie (CEE).</p>
<p>À titre d’illustration, la fiche CEE décrivant la pose d’une fenêtre ou d’une porte-fenêtre avec vitrage isolant – une opération notoirement moins efficace que d’autres – prédit un impact deux fois plus élevé que notre estimation de l’impact de l’investissement moyen.</p>
<h2>Une question de confort plus que d’économies</h2>
<p>Notre travail est une analyse a posteriori sur des données décrivant des comportements réels. Au contraire, le consensus d’experts a été construit en France à partir de modèles de simulation fondés sur des hypothèses de comportements. De ce point de vue, notre approche est plus proche d’une <a href="https://academic.oup.com/qje/article/133/3/1597/4828342">étude américaine</a> réalisée en 2018 qui identifie elle aussi des impacts très faibles – des économies d’énergie environ 2,5 fois inférieures à celles prédites par le modèle utilisé par les autorités publiques américaines pour piloter de nombreux programmes de soutien à la rénovation énergétique.</p>
<p>Comment alors expliquer la modestie de ces impacts ? Une première explication tient au fait que la première motivation exprimée par les ménages réalisant des travaux de rénovation énergétique n’est pas l’économie d’énergie, mais le confort. Or améliorer son confort équivaut en pratique à augmenter la température intérieure du logement. Après rénovation, rien ne dit que cette augmentation ne vienne annuler l’impact énergétique des travaux. Plus de confort, moins de déperdition d’énergie mais au total plus de consommation d’énergie. C’est « l’effet rebond ».</p>
<p>Par ailleurs, la qualité n’est pas toujours au rendez-vous dans un marché de la rénovation où prévaut une asymétrie d’information entre des ménages peu au fait des subtilités techniques de l’opération, et des professionnels qui savent que la qualité de leur prestation ne sera observée par les clients qu’une fois les travaux terminés et la facture réglée.</p>
<h2>Cibler les fournisseurs et non les consommateurs</h2>
<p>Ce résultat conduit évidemment à s’interroger sur la pertinence des subventions à l’efficacité énergétique dans le secteur résidentiel si elles sont uniquement motivées par la réduction de la consommation d’énergie. En tout état de cause, la rénovation énergétique ne constitue pas un gisement d’opérations peu coûteuses de réduction de la consommation d’énergie, et par conséquent des émissions de gaz à effet de serre.</p>
<p>L’estimation d’un temps de retour de 120 ans concerne un investissement moyen. Or il est notoire que l’impact énergétique varie beaucoup en fonction du type de travaux réalisés. Notre étude invite donc à cibler le soutien public sur les travaux les plus efficaces (en particulier, l’isolation des combles, des murs, des planchers).</p>
<p>Enfin et surtout, ce résultat invite à déplacer la focale de l’action publique des consommateurs d’énergie vers les fournisseurs de solutions de rénovation énergétique avec un double objectif : réduire les prix et améliorer la qualité de la rénovation. D’autant que la multiplication des aides allouées à leurs clients n’a pu que dégrader leur performance sur ces deux dimensions. Des dispositifs comme l’opération en cours « isolation des combles à 1 euro » rendent ainsi presque accessoires le prix et la qualité des travaux réalisés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/126850/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Matthieu Glachant ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une étude montre que la facture énergétique des ménages est bien moins sensible à la rénovation que prévu, ce qui interroge l’action publique en la matière.Matthieu Glachant, Professeur d’économie, Mines Paris - PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1266162019-11-11T20:49:38Z2019-11-11T20:49:38Z700 millions de pneus chinois, Obama, Michelin et moi<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/300618/original/file-20191107-10910-sskd8h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=23%2C62%2C937%2C526&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Près d’un pneu sur trois dans le monde est fabriqué en Chine.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Zhao jiankang / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Les pneus chinois ont envahi les États-Unis et l’Europe. Une concurrence déloyale qui a abouti à des sanctions commerciales de Washington et de Bruxelles. Le président Barack Obama a tiré le premier. <a href="https://www.lequotidien.lu/economie/face-aux-pneus-chinois-michelin-se-degonfle-en-europe/">Michelin est touché</a>. Et moi, je ne sais plus quoi acheter pour changer mes gommes usées. Des boudins du Vietnam premier prix ou des pneumatiques longue durée « Made in EU » ? Roulons ensemble pour comprendre le dumping chinois et l’effet des surtaxes à l’importation. Bon à savoir en ces temps de guerre commerciale ; la chaussée est glissante.</p>
<h2>Des pneus chinois par centaines de millions</h2>
<p>La Chine est le premier producteur mondial de pneus. Près d’un sur trois sort de ses usines. Aucune entreprise pourtant parmi les cinq plus grands manufacturiers du pneumatique. Le premier est d’origine japonaise, ce que ne laisse pas deviner son nom, Bridgestone ; le second, un français de Clermont-Ferrand qui éditait aussi un guide des meilleurs restaurants, Michelin bien sûr ; le troisième, un américain qui porte le nom de l’inventeur de la vulcanisation (ce qui rend le caoutchouc moins plastique, mais plus élastique), Goodyear ; le quatrième vient d’Hanovre et a conçu le premier pneu pour bicyclette, Continental ; le cinquième, un autre japonais qui porte un prénom comme tel, Sumitomo. En 2017, il fallait arriver à la sixième place pour trouver un fabricant chinois : Pirelli. Eh oui ! La firme milanaise plus que centenaire a été <a href="https://fr.reuters.com/article/businessNews/idFRKBN0MJ0G220150323">rachetée en 2015 par ChemChina</a>, un conglomérat d’État alors à la tête du principal producteur domestique de pneus radiaux et tout-terrain.</p>
<p>La place de la Chine dans le pneumatique est bien sûr liée à la montée en puissance spectaculaire de son industrie automobile. Pas de vente de voiture neuve avec des roues sans pneus ! Ce marché de la première monte est crucial. Les clients ont en effet tendance à reprendre les mêmes pneumatiques lorsqu’ils devront être changés. Dans les pays vieux routiers de l’automobile la première monte représente entre un quart et un tiers des ventes ; le remplacement le reste.</p>
<p>Mais comme la flotte chinoise de véhicules est récente (5 ans d’âge en moyenne contre près du double en France), le marché du remplacement garde ses plus belles promesses pour demain.</p>
<h2>Petits et grands pneumaticiens chinois</h2>
<p>Si vous passez par Dawang, au sud de Pékin, vous y trouverez des <a href="https://www.globaltimes.cn/content/1119026.shtml">centaines de manufacturiers du pneu</a>. Ils ont fait la prospérité de la ville. Ils y contribuent moins aujourd’hui car le pneumatique chinois est en crise. De nombreux petits faiseurs ont fait faillite et fermé leur porte. Pour la première fois depuis 20 ans la production automobile chinoise a décru en 2018, une année seulement après la <a href="https://www.lesechos.fr/2017/03/flambee-des-prix-sur-le-marche-des-pneumatiques-151708">flambée du prix du caoutchouc</a> naturel. À ces deux années noires s’est ajoutée une plus grande vigilance des autorités de contrôle de l’environnement ; elles ont fait le ménage parmi les entreprises ne respectant pas les normes. Le tout, suite à une longue série de restrictions commerciales contre l’importation de pneus chinois (voir plus bas).</p>
<p>Face à ces adversités, les petits et moyens manufacturiers ont les reins moins solides que les quelques grandes entreprises du secteur : pas de diversification sur des produits moins exposés, pas d’implantation à l’étranger, pas de capacité d’investissement pour se moderniser, pas d’influence sur le gouvernement central. À l’instar de leurs consœurs américaines <a href="https://www.jstor.org/stable/2138664">qui n’ont pas survécu aux années 1920</a>, la plupart vont disparaître face à la surcapacité de production. La consolidation du pneu chinois est donc en <a href="https://www.tirereview.com/china-rise-tire-companies-making-waves-around-globe/">route</a>. Dans une poignée d’années, quelques firmes seulement domineront le marché domestique. Mais, contrairement aux grandes entreprises américaines qui, à l’exception de Goodyear, <a href="https://www.nber.org/chapters/c8649">ont perdu pied sur le marché mondial</a>, il est peu probable qu’elles sortent du jeu planétaire.</p>
<h2>Barack Obama a tiré le premier</h2>
<p>Ce n’est pas Donald Trump mais son prédécesseur à la Maison Blanche qui a commencé à surtaxer les pneus venus de Chine. Une <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/protectionnisme-trump-ne-fait-pas-dans-la-nouveaute-131221">taxe <em>ad valorem</em> de plus de 35 %</a> a été introduite aux frontières pour trois ans. Prise en 2009, cette décision s’appuie sur une clause spéciale liée à l’<a href="https://www.cambridge.org/core/journals/world-trade-review/article/ustyres-upholding-a-wto-accession-contract-imposing-pain-for-little-gain/EE43CFD76D1FB29C084581D447E8DE43">entrée de la République populaire dans l’Organisation mondiale du commerce</a> (OMC). Elle vise à sauvegarder les entreprises dès lors que leur marché domestique est bouleversé par les importations du nouveau membre. Or celles des pneumatiques chinois a triplé entre 2004 et 2008, passant de 6,7 % à 29 % de la production étatsunienne. Sur la même période, le secteur a perdu plusieurs milliers d’emplois.</p>
<p>Oui, mais est-ce bien à cause des pneus chinois ? Rien, n’est moins clair. Il suffit de lire <em>International Debates</em> qui a <a href="https://congressionaldigest.com/issue/chinese-tire-tariffs/american-coalition-for-free-trade-in-tires/">ouvert ses colonnes</a> aux partisans et adversaires de cette protection des frontières. Pour le syndicat américain des métallos (qui coiffe aussi les ouvriers du caoutchouc) il est temps d’agir face aux pneus à prix bradés venus de Chine. D’autres usines vont sinon fermer. Point de vue partagé par les élus démocrates et républicains des États où elles sont menacées.</p>
<p>En revanche, il s’agit d’une mesure infondée pour l’Association des industriels chinois du pneu ainsi que pour les entreprises américaines qui les importent et les distribuent. À leurs yeux, les usines ont fermé parce que les entreprises ont décidé de leur propre chef d’abandonner la production de pneus bas de gamme du fait de leur manque de rentabilité sur le sol américain. Les Michelin, Goodyear et autres Bridgestone qui dominent la fabrication aux États-Unis ont des usines en Chine et bien ailleurs dans le monde. L’invasion pneumatique chinoise serait la conséquence de leur décision stratégique. Les opposants de la décision d’Obama observent d’ailleurs que ces pneumaticiens n’ont ni demandé, ni appuyé la mesure de taxation aux frontières.</p>
<p>Conclusion : faute d’études indépendantes, il est difficile de trancher cette controverse sur l’origine des emplois perdus.</p>
<h2>Quels sont les effets de la surtaxe ?</h2>
<p>En revanche, avec un peu d’années de recul, des données et des travaux académiques, les conséquences de surtaxe sont plus nettes. Sans surprise, les importations de pneus chinois ont drastiquement diminué en quantité (moins 67 % sur les 12 mois qui ont suivi son introduction). Quant aux emplois trois ans après la mesure, ils n’ont augmenté que d’un millier seulement, une croissance qui est <a href="https://www.piie.com/system/files/documents/pb12-9.pdf">loin de permettre</a> de revenir au niveau d’emploi des années antérieures à la mesure. De plus, ces nouveaux emplois auraient peut-être été créés sans elle, poussés par exemple par la reprise économique de l’après-crise financière. Ou, inversement, sans la décision de Barack Obama, le nombre d’emplois aurait décliné et ces pertes évitées sont alors à porter à son crédit.</p>
<p>Il convient donc de comparer les effets de la mesure à ce qui se serait passé si… elle n’avait pas eu lieu. C’est le fameux scénario contrefactuel cher aux économistes : comparer ce qui s’est passé dans le pneu à partir de 2009 à quelque chose qui n’est pas observable puisque non advenu. Vous voyez la difficulté. Pour la contourner, on peut penser par exemple à chercher des différences avec des industries qui n’ont pas connu de restrictions aux importations ou avec d’autres secteurs de transformation du caoutchouc. Pas sûr cependant que ces industries aient été soumises aux mêmes tendances que celle du pneumatique. Quand le choix du groupe de contrôle comparable n’est pas évident, il est possible de recourir à des méthodes économétriques sophistiquées. C’est ce que fait un <a href="https://ideas.repec.org/a/eee/eecrev/v85y2016icp22-38.html">trio de chercheurs</a>. Le résultat qu’ils avancent est sans appel :</p>
<blockquote>
<p>« L’emploi total et le salaire moyen des entreprises du pneu aux États-Unis n’ont pas été affectés par la mesure de sauvegarde. »</p>
</blockquote>
<p>L’hypothèse explicative est simple : les importations en moins des États-Unis venant de Chine auraient été compensées par des importations en plus d’autres pays. Avec la mesure, la Chine exporte moins de pneus, mais la Thaïlande, l’Indonésie ou encore la Corée du sud voient les leurs gonfler. Le vide chinois est comblé par une réallocation des capacités et une modification des circuits. Par exemple, les pneus d’une usine chinoise qui devaient aller aux États-Unis sont exportés dans les pays qui recevaient des pneus d’une usine indonésienne et ces derniers sont alors exportés aux États-Unis.</p>
<p>Conclusion : pas évident d’obtenir des effets significatifs lorsque les restrictions d’importations concernent un seul pays et que le bien considéré est produit par des multinationales implantées un peu partout.</p>
<h2>Dumping et subventions</h2>
<p>L’administration américaine a imposé de <a href="https://www.govinfo.gov/content/pkg/FR-2015-08-10/pdf/2015-19615.pdf">nouveaux droits de douane</a> aux pneus chinois en 2015. Il ne s’agit plus cette fois d’une mesure de sauvegarde, mais d’une action en bonne et due forme pour concurrence déloyale selon les règles de l’OMC. Il ne suffit plus de montrer que l’industrie a été bouleversée par une augmentation foudroyante des importations ; il faut apporter la preuve que le prix du bien importé est anormalement bas (mesure antidumping) ou que l’entreprise a bénéficié d’aides publiques (mesure antisubventions). Dans les deux cas, il est en plus nécessaire de démontrer que la concurrence déloyale qui s’est exercée a été dommageable à l’industrie domestique. Bref, le standard de preuve est élevé et les chiffres âprement discutés pour établir le prix normal, le niveau des subventions reçues et l’ampleur du préjudice.</p>
<p>L’administration américaine a estimé que la marge de dumping des fabricants de pneus en Chine s’élevait entre 15 et 30 % selon les sociétés et que les subventions représentaient l’équivalent de 21 à 100 % du prix facturé. Elle a donc taxé aux frontières les pneus chinois de chaque entreprise à hauteur de ces montants. Après s’être redressées quand la mesure de sauvegarde triennale de 2009 a expiré, les importations de pneumatiques chinois aux États-Unis <a href="https://www.tirebusiness.com/wholesale/impact-import-duties-chinese-truck-tires-flux">ont de nouveau dégringolé</a>.</p>
<p>Heureusement pour Donald Trump, les mesures qui viennent d’être décrites ont seulement porté sur les pneus équipant les véhicules de tourisme et les utilitaires légers. Restaient les pneumatiques chinois pour camions et autobus à chasser pour cause de dumping et subventions. Ils le seront à <a href="https://www.govinfo.gov/content/pkg/FR-2017-01-27/pdf/2017-01862.pdf">mi-mandat</a>. Ceci dit, les gros pneus chinois surtaxés représentent un marché affecté minuscule en comparaison des centaines de milliards de dollars d’importations de la République populaire taxées par le président américain dans sa bataille commerciale contre <a href="https://abcnews.go.com/Politics/10-times-trump-attacked-china-trade-relations-us/story?id=46572567">« le plus grand voleur dans l’histoire du monde »</a>. Mais il s’agit là d’une vision très personnelle de la concurrence déloyale. Elle ne s’embarrasse ni des règles et obligations de démonstration qu’impose l’OMC, ni des principes internationaux en matière de défense commerciale licite.</p>
<p>Conclusion : ne pas confondre défense commerciale et protectionnisme.</p>
<h2>Et l’Europe ?</h2>
<p>De son côté, l’Union européenne est à la traîne. Pas de mesures contre les pneus pour véhicules légers, seulement <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32018R0683">contre les pneus pour poids lourds et autobus</a> ; de plus, elle a diligenté son enquête postérieurement à celle de l’Administration américaine. Les droits de douane tenant compte du dumping et des subventions chinoises sont entrés en vigueur il y a tout juste un an. Il faut dire que l’Union européenne n’est pas très encline à se défendre. Fin 2018, un peu plus d’une centaine de mesures antidumping et antisubventions étaient en vigueur contre <a href="https://www.igf.finances.gouv.fr/files/live/sites/igf/files/contributed/IGF%20internet/2.RapportsPublics/2019/2018-M-105-03-UE.pdf">près d’un demi-millier pour les États-Unis</a>.</p>
<p>Selon leur tissu industriel, les États membres sont plus ou moins affectés par les importations chinoises. La crainte de représailles est également différemment ressentie selon l’importance de leurs exportations. L’Allemagne et la France n’ont pas, par exemple, les mêmes intérêts en cas de mesure commerciale contre la Chine. Les États membres sont donc plus ou moins allants pour se défendre en cas de concurrence déloyale. Le consensus est difficile.</p>
<p>L’Union européenne n’a pas non plus été très soucieuse de défense commerciale en autorisant en 2015 la vente de Pirelli à Chemchina. À travers cette entreprise d’État, la Chine acquiert des technologies et des savoir-faire dans la conception et fabrication de pneumatiques haut de gamme ainsi qu’une marque reconnue (pour les non-initiés aux sports mécaniques, Pirelli équipe les pneus des bolides de Formule 1). L’achat de l’entreprise milanaise a d’ailleurs été largement aidé par l’État de la République populaire, notamment par un prêt préférentiel et une <a href="https://www.igf.finances.gouv.fr/files/live/sites/igf/files/contributed/IGF%20internet/2.RapportsPublics/2019/2018-M-105-03-UE.pdf">prise de participation du Fonds de la Route de la soie</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/300620/original/file-20191107-10952-1dk79jm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/300620/original/file-20191107-10952-1dk79jm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=347&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/300620/original/file-20191107-10952-1dk79jm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=347&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/300620/original/file-20191107-10952-1dk79jm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=347&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/300620/original/file-20191107-10952-1dk79jm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=437&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/300620/original/file-20191107-10952-1dk79jm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=437&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/300620/original/file-20191107-10952-1dk79jm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=437&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Pour la Chine, le rachat de Pirelli signifie l’acquisition d’un savoir-faire dans la conception et fabrication de pneumatiques haut de gamme.</span>
<span class="attribution"><span class="source">S_Z/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>N’éreintons pas cependant l’Europe. L’Union, contrairement aux États-Unis, a été avisée d’inclure les pneus rechapés dans son investigation et sa décision. Le changement de la bande de roulement des pneus de camion est en effet un moyen de leur donner une nouvelle vie pour 300 000 km supplémentaires d’autoroute. Des kilomètres qui permettent d’économiser du caoutchouc et d’autres matières premières. Cette possibilité ne vaut toutefois que pour des pneus neufs plus chers à l’achat car de carcasse plus durable. Ce n’est pas le cas des pneus chinois bas de gamme, mais dont le prix subventionné les rendait encore moins cher que le simple coût du rechapage ; une opération par ailleurs réalisée par des <a href="https://www.challenges.fr/automobile/actu-auto/les-pneus-chinois-menacent-la-filiere-francaise-du-caoutchouc_416002">milliers d’employés en Europe</a> !</p>
<p>Conclusion : l’action antidumping de l’Europe est économiquement et écologiquement vertueuse.</p>
<h2>Des mesures moyennement efficaces</h2>
<p>Il convient toutefois de ne pas s’emballer à propos de l’efficacité de cette mesure de l’Union ; idem pour celles prises par les États-Unis en 2015 et 2019. Au cours des cinq dernières années passées, plusieurs grands pneumaticiens chinois ont construit des usines à l’étranger, en particulier en Thaïlande et au Vietnam. De plus, à l’instar de Pirelli, le numéro deux du pneu coréen – à la tête d’usines chez lui, mais aussi aux États-Unis et au Vietnam – est passé sous contrôle chinois. Par ces investissements étrangers, les entreprises chinoises disposent dorénavant de marges de manœuvre face aux restrictions à l’importation.</p>
<p>À l’inverse, il ne faudrait pas penser non plus que ces mesures n’ont aucune efficacité. Ce serait le cas si les pneus fabriqués en Chine étaient remplacés un pour un par des pneus produits ailleurs et exportés au même prix. Or les possibilités de réallocation des capacités et de modification des circuits des multinationales du pneu, y compris chinoises, ne sont ni instantanées ni complètement faisables à moyen terme. De plus, à long terme les grands fabricants chinois n’ont pas intérêt à perdre de l’argent en bradant leurs produits à l’export.</p>
<p>De façon générale, le bilan économique des mesures de défense commerciale relève du cas par cas. Des possibilités de manœuvre des multinationales, mais également des effets sur les importateurs et distributeurs qui perdent du chiffre d’affaires, des consommateurs lésés par une augmentation des prix, sans compter les effets de mesures de rétorsion et leur propre cortège d’effets. À la suite de la première mesure américaine contre les pneus chinois, l’industrie avicole américaine a perdu un <a href="https://www.piie.com/publications/pb/pb12-9.pdf">milliard de dollars de recettes d’exportation</a>, la Chine ayant décidé de surtaxer les morceaux découpés de poulet « made in USA ».</p>
<p>Conclusion : difficile de globaliser les effets</p>
<h2>Michelin touché</h2>
<p>Le cas Michelin est un bon exemple de l’effet en demi-teinte des mesures de défense commerciale. Malgré la mesure antidumping européenne, la firme globale auvergnate a décidé de <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/10/10/l-usine-michelin-de-la-roche-sur-yon-fermera-d-ici-a-la-fin-de-2020-plus-de-600-salaries-concernes_6014943_3234.html">fermer fin 2020 son site de production</a> de pneus pour poids lourds de La Roche-sur-Yon. Il souffre d’une taille insuffisante. Elle ne lui assure plus d’être compétitif face à une concurrence même à la loyale, c’est-à-dire basée sur la productivité du capital, du travail ou des intrants. Un esprit caustique remarquera aussi que Michelin est elle-même sanctionnée par la mesure européenne car elle surtaxe aussi ses pneumatiques pour poids lourds et autobus fabriqués en Chine. Ces exportations de Michelin vers l’Europe sont toutefois très marginales.</p>
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<figcaption><span class="caption">Michelin : l’annonce de la fermeture du site de La Roche-sur-Yon (France 3 Pays de la Loire, 10 octobre 2019)</span></figcaption>
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<p>Par ailleurs, une mesure européenne antidumping sur les pneus bas de gamme pour véhicules légers n’aurait pas non plus empêché la fermeture de son usine allemande à Bamberg, un site vieux de près d’un demi-siècle spécialisé dans la production de pneus de moyenne gamme. Il souffre avant tout d’une demande décroissante : il produit des 16 pouces et non les larges pneus chaussant les véhicules de grand gabarit, SUV et autres Crossovers qui plaisent tant aujourd’hui même s’ils polluent plus, rendent la vie si difficile aux cyclistes et sont beaucoup plus dangereux pour les piétons.</p>
<h2>Et moi et moi et moi…</h2>
<p>Propriétaire d’une Peugeot 3008, attentif à mon empreinte carbone et roulant à vélo par des rues et routes étroites, je suis une preuve vivante de cette contradiction. De tels comportements qui frisent l’irrationalité ne cessent d’intriguer les économistes, en particulier les spécialistes de l’environnement. Pourquoi n’investissons-nous pas dans des équipements rentables grâce à la réduction de la facture d’énergie qu’ils nous apportent ?</p>
<p>Sur le papier, il n’y a en effet pas photo : le consommateur gagne à acheter des pneus chers plutôt que bon marché, c’est-à-dire des pneus haut de gamme plutôt que bas de gamme, ou encore des pneus des grandes marques historiques plutôt que des pneus anonymes venus d’Asie.</p>
<p>D’abord, ils permettent de parcourir un plus grand nombre de kilomètres sans les changer. Cette économie dans la durée est à souligner car un contre-exemple de la si courante obsolescence programmée. Les grands pneumaticiens cherchent à offrir des pneus qui durent le plus longtemps possible.</p>
<p>Ensuite, il suffit de rouler une quinzaine de milliers de kilomètres par an pour que le supplément de prix soit plus que compensé par la moindre consommation de carburant. Peut-être ne le savez-vous pas, mais environ un plein sur quatre de votre voiture sert uniquement à faire rouler les pneumatiques. La faute à la résistance au roulement. Le pneu s’écrase sous le poids du véhicule et cette déformation d’environ une largeur de main s’oppose à la traction. Diminuer la résistance au roulement permet donc de réduire la consommation de carburant, mais il faut y parvenir sans que le pneu perde de son adhérence – c’est mieux pour démarrer et conserver sa vitesse et éviter d’aller dans le décor sur chaussée mouillée… Bref, sans avoir à mentionner d’autres critères de performance des pneus, comme le confort de la conduite ou le bruit, le pneumatique est un produit hypertechnique. Ce qui explique pourquoi Michelin, inventeur hier du pneu radial et concepteur aujourd’hui de <a href="https://www.lamontagne.fr/clermont-ferrand-63000/actualites/michelin-presente-vision-son-pneu-du-futur-a-montreal_12441736/">nombreux prototypes</a> (pneus sans air, biodégradable, connecté…) fait partie des 50 premiers déposants de brevets au monde. Cherté et qualité des pneumatiques sont donc étroitement corrélées.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/300860/original/file-20191108-194650-1r5wooa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/300860/original/file-20191108-194650-1r5wooa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/300860/original/file-20191108-194650-1r5wooa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/300860/original/file-20191108-194650-1r5wooa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/300860/original/file-20191108-194650-1r5wooa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/300860/original/file-20191108-194650-1r5wooa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/300860/original/file-20191108-194650-1r5wooa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/300860/original/file-20191108-194650-1r5wooa.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le pneu increvable de Michelin.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://newatlas.com/michelin-gm-uptis-airless-tire/60004/">Michelin</a></span>
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<p>Malgré ce double gain, les pneus bas de gamme qui finalement reviennent plus cher se vendent bien. Les raisons avancées par les économistes qui s’intéressent à l’efficacité énergétique sont <a href="https://www.nber.org/papers/w15031.pdf">multiples</a>. Citons-en quelques-unes. Le consommateur peut être atteint d’une sorte de myopie qui écrase les gains futurs. Par exemple exprimer une nette préférence pour le présent et une aversion au risque et à l’incertitude (le prix des carburants fluctue et il n’est pas connu à l’avance sur la durée de l’amortissement de l’équipement). Un tien vaut mieux que deux tu l’auras. Le consommateur peut aussi reconnaître qu’il en sait moins que le vendeur et que le vendeur le sachant va lui faire miroiter des performances auxquelles il ne croira pas. Méfiance, méfiance…</p>
<p>Enfin, le consommateur peut prendre des décisions selon des mécanismes bien éloignés de la rationalité et des calculs qu’elles exigent. Il privilégiera alors des solutions simples et routinières comme acheter la même chose qu’avant. Comme le dit le refrain de la chanson de Jacques Dutronc qui a inspiré le titre de cette chronique « J’y pense et puis j’oublie, c’est la vie, c’est la vie ».</p>
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<figcaption><span class="caption">Jacques Dutronc, « Et moi, et moi, et moi » (Archive INA, 1966).</span></figcaption>
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<p><em>François Lévêque vient de publier <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/sciences-humaines/management-entreprise/habits-neufs-de-la-concurrence_9782738139177.php">« Les habits neufs de la concurrence. Ces entreprises qui innovent et raflent tout »</a> aux éditions Odile Jacob.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/126616/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Quelles sont les conséquences des sanctions commerciales visant à limiter la conquête chinoise du marché mondial du pneumatique ?François Lévêque, Professeur d’économie, Mines Paris - PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1040302018-10-12T09:14:20Z2018-10-12T09:14:20ZUne maison « intelligente » pour faire des économies d’électricité<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/240323/original/file-20181011-154555-ff2drf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock </span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2018 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>En France, le bâtiment, qu’il soit tertiaire ou résidentiel, reste de loin le plus gros consommateur d’énergie devant les transports, l’industrie et l’agriculture.</p>
<p>Selon les derniers chiffres du ministère de la Transition écologique et solidaire, cela représente <a href="http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/publications/p/2764/969/chiffres-cles-lenergie-edition-2018.html">près de 45 %</a> de la consommation finale d’énergie. Paradoxalement, le bâtiment est l’un des secteurs les moins émetteurs de gaz à effet de serre (20 %). L’industrie (29 %) et les transports (28 %) sont de bien plus mauvais élèves.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=446&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=446&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=446&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=561&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=561&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/240306/original/file-20181011-154561-hh2jpz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=561&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Répartition de la consommation finale d’énergie en France par secteurs d’activités.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/fileadmin/documents/Produits_editoriaux/Publications/Datalab/2018/datalab-43-chiffres-cles-de-l-energie-edition-_2018-septembre2018.pdf">Ministère de la Transition écologique et solidaire</a></span>
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<p>Dans un contexte de transition énergétique – qui vise notamment à préparer « l’après-pétrole » – et pour faire face aux enjeux d’approvisionnement en énergie, à l’épuisement des ressources, à l’augmentation des prix et aux impératifs de la protection de l’environnement, il est primordial que chacun d’entre nous parvienne à mieux gérer sa consommation d’électricité.</p>
<p>Quels sont les moyens pour y parvenir ? On peut commencer chez soi !</p>
<h2>Les systèmes de gestion de l’électricité</h2>
<p>Les <a href="http://eduscol.education.fr/sti/ressources_techniques/revue-3ei-sommaire-du-ndeg-89">systèmes de gestion de l’énergie électrique</a> offrent aujourd’hui la possibilité de maîtriser de manière dite « intelligente » aussi bien la consommation d’un bâtiment que le coût de cette consommation.</p>
<p>Ces systèmes ont pour but d’économiser l’électricité et d’optimiser le confort des usagers en adaptant le fonctionnement des équipements. Par exemple, lorsque le bâtiment est inoccupé, le système peut arrêter le chauffage de manière automatique ou le ralentir durant la nuit. Ces actions « intelligentes » peuvent intervenir en toute transparence pour les usagers afin de donner de la priorité de fonctionnement à certains équipements.</p>
<p>Cette hiérarchisation du fonctionnement des appareils permet de diminuer la puissance appelée par l’installation électrique et ainsi soulager le réseau de distribution lors des pointes de consommation.</p>
<h2>Un exemple concret de gestion « intelligente »</h2>
<p>Dans le cadre du <a href="https://certem.univ-tours.fr/activites-scientifiques/axes-de-recherche-et-projets/ecco-581684.kjsp?RH=GREMAN">projet « ECCO »</a> financé par la région Centre Val-de-Loire, le groupe de recherche en matériaux, microélectronique, acoustique et nanotechnologies de l’Université de Tours (<a href="https://greman.univ-tours.fr/">GREMAN</a>) travaille sur l’optimisation du coût de la consommation d’électricité dans l’habitat individuel.</p>
<p>Ce dispositif est réalisé à l’aide d’un système de stockage (des batteries), un convertisseur d’énergie, des capteurs (de température, de présence, etc.), un <a href="https://www.mdpi.com/1996-1073/10/11/1701">système de prédiction et de gestion de l’électricité</a> (un algorithme informatique est mis en œuvre) ainsi que des prises « intelligentes » pour piloter tous les équipements présents dans la maison.</p>
<p>Deux objectifs sont ici visés : « effacer » la consommation électrique ou la reporter via un système de stockage.</p>
<p>Durant les périodes « creuses », l’utilisateur fait fonctionner ces équipements électriques directement sur le réseau de distribution. Durant les périodes de pointe de consommation, le système de stockage « soulage » le réseau de distribution.</p>
<p>Ce système permet ainsi de garantir, à tout instant, un équilibre entre la production d’électricité et sa consommation. Le dialogue entre le système de stockage et le réseau de distribution est réalisé dans ce cas par l’intermédiaire d’un <a href="http://www.icrepq.com/icrepq18/257-18-bissey.pdf">convertisseur statique d’énergie</a>. Ce dernier est bidirectionnel, car l’électricité doit pouvoir transiter dans les deux sens : du système de stockage vers le réseau de distribution et du réseau de distribution vers le système de stockage.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=295&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=371&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=371&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/240309/original/file-20181011-154539-1j8ktbi.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=371&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Système de prédiction et de gestion de la consommation d’électricité proposé par le groupe de recherche en matériaux, microélectronique, acoustique et nanotechnologies (GREMAN) de l’université de Tours.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sebastien Jacques/Université Tours</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Des prises « intelligentes »</h2>
<p>Dans ce système mis au point par les chercheurs du GREMAN, le pilotage des appareils électriques d’un logement peut être réalisé à l’aide d’un petit appareil, appelé « prise intelligente » (ou <em>smart plug</em>), que l’on branche directement sur les prises électriques « classiques ». Son utilisation ne nécessite aucune modification de l’installation électrique de la maison.</p>
<p>L’ordre de commande de cette prise « intelligente » provient du système de prédiction et de gestion de l’électricité. Le <em>smart plug</em> doit donc pouvoir être commandé à distance de deux façons.</p>
<p>Dans un premier cas, l’utilisateur donne lui-même l’ordre de pilotage à partir d’une application installée sur son <em>smartphone</em> ou sa tablette numérique. Il pourra par exemple créer une ambiance sonore, baisser les volets roulants de sa chambre ou encore simuler une présence en allumant et en éteignant une lumière à des intervalles de temps réguliers.</p>
<p>Dans un second cas, l’usager n’intervient pas dans la gestion du coût de la consommation d’électricité. Lors des périodes de pointe par exemple (notamment entre 19h et 22h), le réfrigérateur pourra s’éteindre quelques minutes, sans que son utilisateur s’en aperçoive, pour diminuer la puissance appelée à ce moment-là par l’installation électrique.</p>
<h2>Les défis scientifiques</h2>
<p>La mise en œuvre des systèmes « intelligents » de gestion de l’électricité ne repose pas uniquement sur les prises « intelligentes ». Trois défis scientifiques doivent être aujourd’hui relevés.</p>
<p>Il y a d’abord la maîtrise du stockage de l’électricité à des coûts d’installation raisonnables pour l’usager ; celle du système de prédiction et de gestion de l’électricité ; enfin, la mise au point d’un convertisseur bidirectionnel à hautes performances énergétiques.</p>
<p>L’équipe du GREMAN tente d’apporter des solutions pour répondre à ces défis. Et la maquette d’une maison « intelligente » <a href="https://www.univ-tours.fr/site-de-l-universite/fete-de-la-science-2018-633931.kjsp">sera présentée par les chercheurs</a> au public lors de cette 27e édition de la Fête de la science.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/240320/original/file-20181011-154577-nrje7i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Démonstrateur d’une maison connectée « intelligente ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sebastien Jacques/Université Tours</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/104030/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sébastien Jacques a reçu des financements de la région Centre Val-de-Loire (projet de recherche d’intérêt régional n°2015-00099656). </span></em></p>Des chercheurs travaillent sur des systèmes de gestion de la consommation d’électricité pour l’habitat.Sébastien Jacques, Enseignant-chercheur en génie électrique, Université de ToursLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/862682017-10-29T23:17:35Z2017-10-29T23:17:35ZMails, navigation Internet, stockage des données : comment réduire son impact énergétique au bureau<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/192101/original/file-20171026-13340-178anur.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les multiprises à interrupteur, précieuses alliées de la sobriété énergétique. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Lire et écrire des emails, imprimer un rapport, utiliser son smartphone, organiser une visioconférence avec son ordinateur portable… Le quotidien de millions de travailleurs ne se vit plus aujourd’hui sans outils informatiques et numériques.</p>
<p>Si ces équipements ont contribué à « dématérialiser » les façons de travailler, cette dématérialisation n’est cependant <a href="https://theconversation.com/leconomie-numerique-est-une-industrie-lourde-1-donner-ces-donnees-50674">pas sans coût énergétique</a>.</p>
<p>On estime ainsi que <a href="https://www.arobase.org/actu/chiffres-e-mail.htm">215 milliards de mails</a> (hors spam) ont été échangés chaque jour le monde en 2016… et quelque 180 millions de recherches effectuées sur Google. Pour permettre toutes ces opérations, il faut des serveurs, des routeurs, des <em>data centers</em>, des terminaux…</p>
<p>Mais il est possible, et en fait assez simple, d’adopter les bons réflexes pour être plus économe en énergie et en ressources sur son lieu de travail, comme le souligne un <a href="http://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/guide-pratique-face-cachee-numerique.pdf">récent guide conçu par l’Ademe</a>.</p>
<h2>Bien utiliser son équipement</h2>
<p>Au bureau, les technologies numériques constituent le premier poste de consommation électrique. Or on estime que le quart des consommations électriques des équipements informatiques pourrait être évité en suivant ces quelques conseils.</p>
<p>On peut d’abord penser à régler son ordinateur – et son smartphone quand c’est possible – en mode « économies d’énergie » : diminution de la luminosité de l’écran, mise en veille automatique après 10 minutes d’inactivité, écran de veille noir… Attention toutefois à certains économiseurs d’écran faisant appel à des graphismes « 3D ». Ils sollicitent énormément la carte graphique et peuvent consommer autant, sinon plus, que le mode actif.</p>
<p>On pourra également désactiver les fonctions GPS, Wifi, Bluetooth des téléphones et des tablettes quand on ne s’en sert pas, ou encore adopter le mode « avion ».</p>
<p>Il faut enfin veiller à ne pas laisser les appareils allumés en permanence. Une solution possible consiste à brancher ses équipements (ordinateur et imprimante) sur une multiprise à interrupteur pour couper l’alimentation une fois la journée finie… car même éteints, les équipements continuent de consommer de l’électricité. Cette consommation dite « passive » est due au fait que l’interrupteur de ces équipements est placé après le transformateur ; branché, ce dernier continue d’utiliser de l’énergie (le courant résiduel circulant toujours).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"742047594445197313"}"></div></p>
<h2>Gérer ses mails et sa messagerie</h2>
<p>L’impact de l’envoi d’un mail dépend du poids des pièces jointes, du temps de stockage sur un serveur mais aussi du nombre de destinataires. Multiplier par 10 le nombre des destinataires d’un mail multipliera ainsi son impact par 4.</p>
<p>On peut donc essayer de cibler les destinataires et de limiter les envois en nombre, d’autant que ce type d’envoi peut être considéré comme indésirable ou même traité comme un spam par certaines messageries.</p>
<p>Une autre astuce pour rendre sa communication moins énergivore consistera à envoyer des messages légers ; cela se fait en optimisant notamment la taille des pièces jointes : on optera donc pour des fichiers compressés, des images et des PDF basse définition…</p>
<p>Si la pièce jointe est très lourde, on préférera utiliser une clé USB ou un lien hypertexte pour remplacer le document ; l’usage des sites de transfert de fichiers lourds (comme les FTP) n’étant pas vraiment la solution la plus écologique.</p>
<p>Un autre détail auquel porter attention : les logos placés dans les signatures des mails. On leur préférera plutôt une image en basse définition contenant le texte et le logo de la signature.</p>
<p>Une gestion efficace de la boîte mail passe également par un nettoyage régulier, tout particulièrement s’il s’agit d’un webmail. On supprimera de même rapidement les spams qui s’empilent à vue d’œil.</p>
<h2>Surfer léger sur le Net</h2>
<p>L’impact d’une requête web dépend du temps de recherche et du nombre de pages consultées.</p>
<p>On divise ainsi par 4 les émissions de gaz à effet de serre de son surf sur le Net en allant directement à l’adresse du site. Dans cette optique, la création de favoris dans le navigateur pour les sites les plus régulièrement consultés s’impose.</p>
<p>Toujours pour limiter la sollicitation des serveurs, on utilisera des mots-clés précis dans le moteur de recherche. Sachant que les requêtes peuvent être affinées en excluant certains mots, en en couplant d’autres ou encore en utilisant la fonction « recherche avancée » du navigateur.</p>
<p>À propos des navigateurs, on sait que certains consomment plus d’énergie que d’autres : l’<a href="http://presse.ademe.fr/2014/07/etude-web-energy-archive-la-consommation-energetique-des-sites-web-cote-utilisateur.html">étude <em>Web Energy Archive</em></a> pour l’Ademe a ainsi désigné Chrome comme l’un des plus gourmands (27 Wh pour 1 000 pages vues), devant Internet Explorer et Firefox.</p>
<p>Dans le surf, le matériel compte aussi : une recherche d’une minute sur Internet consomme 100 watts sur un ordinateur fixe, 20 watts sur un ordinateur portable, quelques watts sur une tablette, et encore moins sur un téléphone. Une connexion par fil (câble Ethernet) au réseau consomme moins qu’une liaison wifi.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"493450750132224000"}"></div></p>
<h2>Garder juste ce qu’il faut</h2>
<p>On assiste depuis quelques années au développement du stockage des données en externe ; c’est ce que permet notamment le <em>cloud</em> qui désigne l’ensemble des réseaux, serveurs et unités de stockage auquel les usagers se connectent via une liaison Internet sécurisée. Le cloud permet le stockage de données (hébergement de photos, de vidéos, de musique, sauvegarde en ligne des données), mais aussi l’usage d’applications, de services, de logiciels (streaming vidéo, suites bureautiques connectées) sans les posséder.</p>
<p>Si ces solutions peuvent donner l’impression d’accéder à un espace de stockage infini et éternel, ce sont ici de grandes quantités de données qui s’accumulent et réclament de plus en plus d’énergie pour leur gestion et leur conservation.</p>
<p>Il est donc essentiel de trier, d’organiser… et de jeter ses données. On le fera aussi bien pour les e-mails, les favoris, et toutes les données stockées localement que pour les données stockées en externe (en supprimant les vidéos et les photos jamais regardées, la musique jamais écoutée…). On classera ce que l’on souhaite conserver pour y accéder rapidement, en préférant le stockage local, moins énergivore au cloud : transporter une donnée sur Internet consomme <a href="https://www.greenit.fr/2015/06/04/comment-reduire-l-empreinte-environnementale-du-web/">deux fois plus d’énergie</a> que la stocker pendant un an.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/5YawCCUxa_E?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Qu’est-ce que le cloud ? (Pixees Scienceparticipative, 2017).</span></figcaption>
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<h2>Imprimer avec modération</h2>
<p>Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le développement du numérique ne s’est pas accompagné d’une diminution de la consommation de papier. Réduire les impressions, c’est faire des économies de consommables, de matières premières, d’énergie.</p>
<p>On imprimera donc seulement ce qui est utile et nécessaire, en paramétrant l’imprimante (noir et blanc, brouillon, recto-verso, deux pages par feuille). Le papier imprimé sur une seule face pourra toujours servir de brouillon. On évitera également d’imprimer des documents gourmands en encre (aplats de couleur).</p>
<p>Certains labels et écolabels peuvent guider les choix pour une consommation plus durable : l’<a href="http://www.ademe.fr/expertises/consommer-autrement/passer-a-laction/reconnaitre-produit-plus-respectueux-lenvironnement/dossier/incontournables-lecolabel-europeen-logos-publics/lecolabel-europeen-ecolabel-connu-reconnu-france">Écolabel européen</a> (pour le papier) ; l’Écolabel nordique ou l’Ange bleu (pour le papier et les cartouches d’encre).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/192110/original/file-20171026-13355-bmylwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/192110/original/file-20171026-13355-bmylwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/192110/original/file-20171026-13355-bmylwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=321&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/192110/original/file-20171026-13355-bmylwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=321&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/192110/original/file-20171026-13355-bmylwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=321&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/192110/original/file-20171026-13355-bmylwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/192110/original/file-20171026-13355-bmylwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/192110/original/file-20171026-13355-bmylwn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=404&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La police de caractère Ryman Eco pour limiter la consommation d’encre.</span>
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<p>Rappelons enfin que les économies peuvent commencer dès la conception des documents : en les rendant faciles et agréables à lire à l’écran (le destinataire aura moins envie de l’imprimer) et en optant pour des polices de caractère qui consomment <a href="https://www.greenit.fr/2010/06/18/changez-de-police-de-caractere-pour-economiser-30-d-encre/">peu d’encre</a> (comme Garamond, Century Gothic, Ryman Eco ou Ecofont).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/86268/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Alain Anglade ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Au bureau, les économies d’énergie passent désormais par des formes de sobriété numérique.Alain Anglade, Ingénieur en efficacité énergétique des technologies de l’information et de la communication (TIC), Ademe (Agence de la transition écologique)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/798832017-06-22T19:42:52Z2017-06-22T19:42:52ZPodcast : des ressources naturelles jusqu’à quand ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/175041/original/file-20170621-9586-1tfodlm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">De gauche à droite : Philippe Grandcolas, Pascal Garret, Emmanuel Hache et Didier Pourquery en studio. </span> </figcaption></figure><p>Où en sommes-nous des ressources naturelles de la planète ? Faut-il s’inquiéter de leur épuisement ? Existe-t-il des solutions pour les gérer durablement ?</p>
<p>Trois parties dans cette émission :</p>
<ol>
<li><p>« Où en sommes-nous des <strong>ressources énergétiques</strong> ? » avec Emmanuel Hache (IFPEN)</p></li>
<li><p>« Comment transformer <strong>les déchets et les rebuts</strong> en ressources » avec Pascal Garret</p></li>
<li><p>« Ressources et <strong>biodiversité</strong> » avec Philippe Grandcolas (CNRS/MNHN)</p></li>
</ol>
<hr>
<p><em><strong>Animation</strong> : Yves Bongarçon (Moustic the Audio Agency) et Didier Pourquery (The Conversation)<br>
<strong>Réalisation</strong> : Joseph Carabalona (Moustic the Audio Agency)</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/79883/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuel Hache est directeur de recherche et professeur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sociologue de formation, Pascal Garret travaille comme photographe indépendant, avec le groupe de recherche « Sociétés urbaines et déchets ».</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Philippe Grandcolas ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’inquiétude monte face à la raréfaction voire la disparition des ressources naturelles de la planète… Paroles d’experts pour éclairer ce sujet essentiel.Emmanuel Hache, Économiste et prospectiviste, IFP Énergies nouvelles, Auteurs historiques The Conversation FrancePascal Garret, Photographe indépendant en sciences sociales, collabore à Sociétés Urbaines et Déchets, Université de ToursPhilippe Grandcolas, Directeur de recherche CNRS, systématicien, UMR ISYEB, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.