tag:theconversation.com,2011:/ca/topics/leadership-24112/articlesleadership – The Conversation2024-03-18T15:33:22Ztag:theconversation.com,2011:article/2251382024-03-18T15:33:22Z2024-03-18T15:33:22ZCorruption bancaire : le rôle clé de la conception du « leadership » selon les pays<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/579921/original/file-20240305-30-jcla9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C60%2C1905%2C1299&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les cas de corruption concernent aussi bien les grandes banques que les plus petites.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.publicdomainpictures.net/fr/free-download.php?image=rejet-des-pots-de-vin-et-de-la-corruptio&id=493834">Publicdomainpictures.net/Mohamed Mahmoud Hassan</a></span></figcaption></figure><p>Ces dernières années, les cas de corruption ont régulièrement alimenté la chronique et de grandes banques internationales ont été <a href="https://www.globalwitness.org/en/campaigns/corruption-and-money-laundering/banks-and-dirty-money">condamnées à des amendes pour de telles affaires</a>. Bien que ces cas concernent principalement des banques de pays développés, le problème reste néanmoins tout aussi grave dans les pays en développement, à l’image des exemples récents de la <a href="https://www.benarnews.org/english/news/bengali/bank-embezzlement-case-charges-06122023142707.html">Basic Bank au Bangladesh</a> en 2023 ou de la <a href="https://www.voanews.com/a/former-bank-of-china-chairman-indicted-for-bribery-in-anticorruption-drive/7493948.html">Bank of China</a> début 2024.</p>
<p>Or, la corruption peut nuire à la fonction première d’<a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0304393206001437">allocation efficace des crédits</a>, ce qui a des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1540-6261.2005.00727.x">conséquences négatives sur la croissance des entreprises</a>. En outre, les comportements contraires à l’éthique peuvent avoir des effets négatifs sur la satisfaction des clients, la <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10551-023-05546-2">valeur et la réputation de la banque</a>, ainsi que sur la <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3292740">qualité des prêts et les bénéfices de l’enseigne</a>.</p>
<h2>Le rôle de la culture nationale</h2>
<p>Mais quels sont les facteurs qui expliquent la corruption, outre l’appât du gain au sens strict ? Dans une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10551-023-05546-2">étude</a> récente que nous avons publiée dans le <em>Journal of Business Ethics</em>, nous nous sommes concentrés sur l’effet de la culture nationale. En effet, comme nous pouvons le constater sur la carte ci-dessous, des pays au niveau de développement équivalent peuvent afficher de grandes différences quant à l’ampleur de la corruption sur leur territoire.</p>
<p><iframe id="1hSbp" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/1hSbp/4/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Pour mener l’analyse, nous avons collecté des données à partir de deux sources principales. Tout d’abord, nous nous appuyons sur l’<a href="https://www.enterprisesurveys.org/en/enterprisesurveys">enquête</a> de la Banque mondiale sur les entreprises dans laquelle figure une question sur la corruption des agents bancaires. Ensuite, nous avons mobilisé les données issues d’autres travaux de recherche (<a href="https://globeproject.com/">ici</a> et <a href="https://us.sagepub.com/en-us/nam/culture-leadership-and-organizations/book226013">ici</a>) pour établir la mesure dans laquelle les différents pays approuvent différents styles de leadership. Ainsi, ces styles de leadership traduisent des préférences sociétales profondément enracinées.</p>
<p>Il existe six dimensions du leadership global approuvé par la culture : (i) charismatique/basé sur la valeur, (ii) axé sur l’équipe, (iii) participatif, (iv) axé sur l’humain, (v) autonome et (vi) autoprotecteur. Dans notre étude, chaque pays s’est vu attribuer un score différent sur chacune des dimensions du leadership en fonction de ses préférences pour ce style de leadership.</p>
<p>Par exemple, les États-Unis affichent sur ces différentes dimensions des scores de 6,12 (charismatique/basé sur la valeur), 5,80 (orienté vers l’équipe), 5,93 (participatif), 5,21 (orienté vers l’humain), 3,75 (autonome), 3,15 (autoprotecteur). En revanche, dans le cas de la Malaisie, les scores sont respectivement de 5,89, 5,80, 5,12, 5,24, 4,03 et 3,49.</p>
<p>Pour les besoins de notre analyse, nous avons utilisé les scores des 6 dimensions globales pour définir <a href="https://ideas.repec.org/a/spr/soinre/v127y2016i1d10.1007_s11205-015-0959-9.html">trois grands prototypes de leadership</a> : égoïste, prosocial et non autonome.</p>
<p>Nous avons constaté que, si les prototypes de leadership prosocial et non autonome n’avaient pas d’importance, un leadership « égoïste » avait un effet statistiquement significatif. Ainsi, un leadership égoïste entraînerait une augmentation de 5,4 points de pourcentage de la probabilité qu’une entreprise considère la corruption bancaire comme un obstacle majeur et une diminution de 13,3 points de pourcentage de la probabilité qu’une entreprise considère la corruption bancaire comme n’étant pas un obstacle à la croissance de l’entreprise.</p>
<p>Par exemple, les États-Unis présentent une culture de leadership moins « égoïste » que la Malaisie (avec un écart-type de 1 sur cette dimension). Ainsi, si le score des États-Unis était remplacé par celui de la Malaisie, la probabilité que les entreprises américaines déclarent la corruption bancaire comme un obstacle majeur augmenterait de 5,4 points de pourcentage et la probabilité qu’elles déclarent la corruption bancaire comme un obstacle nul diminuerait de 13,3 points de pourcentage.</p>
<h2>Un besoin de puissants superviseurs</h2>
<p>Autrement dit, un style de leadership égocentrique augmente la probabilité de corruption bancaire. Ainsi, pour limiter le phénomène, les dirigeants des banques peuvent essayer d’adopter des styles de leadership compatibles avec un style participatif et non égocentrique. De tels styles leur permettraient d’accorder aux subordonnés plus d’autonomie et de responsabilité dans la prise de décision, d’être ouverts à leurs opinions et suggestions, et de faire preuve de respect et de sollicitude dans leurs relations avec eux.</p>
<p>Au niveau national, nous comprenons bien entendu qu’il est difficile pour les décideurs politiques de modifier (du moins à court terme) des caractéristiques sociétales profondément enracinées, telles que les idéaux de leadership partagés par la culture. Cependant, il semble que l’existence de puissants superviseurs bancaires et d’un registre public/bureau privé puisse au moins atténuer les effets négatifs du style de leadership égocentrique. Le régulateur pourrait donc prendre des mesures dans ce sens.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225138/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une étude montre que l’ampleur du problème de la corruption dans un pays ne dépend pas uniquement du niveau de richesse.Chrysovalantis Gaganis, Professor of Finance, University of CreteFotios Pasiouras, Professor of Banking and Finance, Montpellier Business SchoolMenelaos Tasiou, Associate Professor in Finance, University of SurreyLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2202252023-12-20T19:57:59Z2023-12-20T19:57:59ZGérald Darmanin, symbole des illusions perdues du macronisme ?<p>Le projet de loi sur l’immigration était annoncé comme un moment décisif pour les différents acteurs de la vie politique française et en particulier pour Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur. Il constitue sans doute un tournant important pour l’homme politique et illustre a plusieurs égards les difficultés auxquelles font face Emmanuel Macron, le macronisme et le système politique français dans son ensemble.</p>
<p>Les derniers événements ont été particulièrement difficiles pour le ministre même si celui qui a remis <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/gerald-darmanin/info-franceinfo-vote-de-rejet-de-la-loi-immigration-gerald-darmanin-a-propose-sa-demission-refusee-par-le-president-lors-d-un-entretien-lundi-soir-a-l-elysee_6237198.html">sa lettre de démission, refusée par l’Élysée</a> (suite au vote de la motion de rejet de la loi sur l’immigration) <a href="https://www.lefigaro.fr/politique/en-direct-loi-immigration-nous-sommes-plus-pres-d-un-accord-que-d-un-desaccord-affirme-darmanin-20231218">se félicite</a> aujourd’hui de la séquence politique qui a vu l’adoption de cette même loi.</p>
<p>L’homme politique est-il pour autant renforcé de cet épisode et que nous dit-il de l’état du macronisme ?</p>
<h2>Une image d’homme de droite</h2>
<p>Si Gérald Darmanin a pu publiquement <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/gerald-darmanin/presidentielle-2027-gerald-darmanin-estime-qu-edouard-philippe-est-le-mieux-place-mais-s-interroge-sur-son-envie_6109053.html">interroger sa volonté</a> de se positionner dans la course pour le poste de président de la République, il fait très clairement parti des personnes qui pourraient prétendre à la succession d’Emmanuel Macron.</p>
<p>Darmanin s’est construit une image d’homme de droite attaché au respect de l’ordre et son rôle de ministre de l’Intérieur a donné corps à ce positionnement. Mais plusieurs ratés (<a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/02/16/gerald-darmanin-doit-tirer-les-lecons-du-chaos-au-stade-de-france_6162045_3232.html">incidents du Stade de France</a>, <a href="https://www.lexpress.fr/societe/terrorisme-islamiste-darmanin-plaide-pour-une-injonction-de-soins-FJ5FEWIDYZCEVKUAN3CSTXHOG4/">attaques terroristes</a>…) et polémiques (<a href="https://www.lepoint.fr/societe/gerald-darmanin-maintient-ses-propos-sur-karim-benzema-25-10-2023-2540792_23.php#11">affaire Karim Benzema</a>, <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/gerald-darmanin/accusations-de-viol-a-l-encontre-de-gerald-darmanin-le-non-lieu-en-faveur-du-ministre-de-l-interieur-est-confirme-en-appel_5620133.html">accusation de viol</a>…) ont écorné sa réputation d’efficacité et de rigueur. Le rejet de « son » projet de loi sur l’immigration porte un coup certain à ses ambitions personnelles qui s’appuyaient en grande partie sur sa légitimité en matière de sécurité.</p>
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<p>Difficile pourtant de prévoir ce qu’il adviendra des ambitions présidentielles de Darmanin tant la période qui s’ouvre est inédite sous la V<sup>e</sup> République. <a href="https://www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-assemblee/histoire/la-ve-republique/les-grandes-etapes-de-la-ve-republique">Pour la première fois</a>, un président encore jeune quittera la présidence sans avoir été battu… alors que la possibilité qu’<a href="https://fr.news.yahoo.com/emmanuel-macron-pourrait-il-se-representer-en-2032-151353458.html?guccounter=1&guce_referrer=aHR0cHM6Ly93d3cuZ29vZ2xlLmNvbS8&guce_referrer_sig=AQAAAEKnCJD-4Puu94CtwDzyqMxOwQpDP1vGFHerRERgF4B1jyXWISobCd63hHgltqw3Oh95r1Db3-hkKua6TWiKp0H1yAoVvvxfn1Yr3jSxxiXfgw8aSkHR0_DL6ujHfEb48njeoWtcR5S6knPk_DbXa0vZG6669MwJO4f0YDYY0TT3">il puisse se représenter de manière non consécutive</a> n’est pas écartée.</p>
<p>Jamais, une telle situation n’était arrivée et la succession d’Emmanuel Macron risque donc de réserver des stratégies et des montages politiques nouveaux.</p>
<p>Pour la première fois, la <a href="https://www.lejdd.fr/politique/presidentielle-2027-marine-le-pen-caracole-en-tete-edouard-philippe-favori-du-camp-macroniste-dapres-un-sondage-139319">favorite des sondages</a> et de l’élection présidentielle pourrait être Marine Le Pen, la candidate du parti représentant l’extrême droite française. Dans ce contexte, le positionnement d’homme de droite de Darmanin et sa connaissance des dossiers régaliens, légitimés par son passage place Beauvau, seront sans doute recherchés par ceux qui décideront de se lancer dans la bataille face à Marine Le Pen.</p>
<h2>Pas de vrai virage politique, sauf vers la droite</h2>
<p>Lors de sa première élection présidentielle, Emmanuel Macron s’était fait élire en promettant de <a href="https://theconversation.com/la-gauche-et-la-droite-font-elles-encore-sens-en-france-178181">dépasser le clivage droite/gauche</a>.</p>
<p>Les sujets mis en avant, à l’image de l’immigration, et les mesures prises, comme dans le cadre de la réforme des retraites, semblent entériner l’idée que le parti présidentiel penche désormais fortement <a href="https://theconversation.com/emmanuel-macron-lheritier-cache-de-nicolas-sarkozy-178669">à droite</a>.</p>
<p>Le départ d’anciens alliés issus de la gauche, à l’instar tout récemment de <a href="https://www.ouest-france.fr/politique/daniel-cohn-bendit/europeennes-daniel-cohn-bendit-rompt-avec-macron-et-appelle-les-ecologistes-a-rejoindre-glucksmann-1f927344-9804-11ee-b5ab-4c9dbbc4ce19">Daniel Cohn Bendit</a>, parait d’ailleurs confirmer ce virage.</p>
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<figcaption><span class="caption">Immigration : le projet de loi adopté par l’Assemblée nationale le 19 décembre 2023, HuffPost.</span></figcaption>
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<p>Lors de la seconde élection, il avait déclaré que le résultat morcelé du premier tour l’obligeait à faire de la politique autrement et qu’il avait <a href="https://www.youtube.com/watch?v=SMHd9uYD5H8">compris le message</a>. L’épisode des échanges et négociations entre Darmanin et Les Républicains (LR) lors de la loi sur l’immigration donne pourtant l’image de manœuvres politiciennes peu en accord avec l’idée de nouvelles pratiques politiques et de la recherche d’un consensus autour d’un projet commun. Alors que certains en appellent à une <a href="https://books.openedition.org/putc/157?lang=fr">VIᵉ république</a>, la façon dont les jeux de pouvoir s’organisent sous et autour d’Emmanuel Macron rappelle en tous points celles des époques précédentes.</p>
<p>La loi sur l’immigration symbolise à plusieurs égards la « politique à l’ancienne » que l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron devait faire disparaître. En ce sens, elle illustre l’échec de la tentative de faire de la politique autrement. La <a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/un-parlement-en-toc-l-amertume-d-une-deputee-macroniste-decidee-a-ne-pas-se-representer-a-l-assemblee-5879426">décision de certains élus macronistes</a> de ne pas rempiler suite au premier quinquennat, avaient déjà en partie mis en exergue ce phénomène. Force est constater que l’utilisation répétée du 49.3 semble témoigner des <a href="https://www.lopinion.fr/politique/les-deputes-macronistes-doivent-encore-apprendre-a-perdre">difficultés du camp présidentiel</a> à <a href="https://theconversation.com/macron-incarnation-de-la-theorie-des-paradoxes-et-de-ses-limites-195300">co-construire, à négocier, à convaincre</a>.</p>
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<a href="https://theconversation.com/changer-de-constitution-pour-changer-de-regime-180160">Changer de constitution pour changer de régime ?</a>
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<h2>Un décalage profond avec les électeurs</h2>
<p>L’incapacité de parvenir à mettre en place de nouvelles pratiques politiques illustre un phénomène plus profond pour la V<sup>e</sup> République et le système démocratique : celui du décalage entre la façon dont les décideurs politiques comprennent les messages des urnes et des élections et la réalité des aspirations des électeurs et de la population. L’affaire de la loi sur l’immigration vient rappeler que le macronisme n’est pas parvenu à combler ce décalage… qui s’est sans doute amplifié au cours des dernières années suite à des scandales comme <a href="https://www.lefigaro.fr/actualite-france/dossier/affaire-benalla-macron-garde-du-corps-video-manifestant">l’affaire Benalla</a> ou la crise des <a href="https://www.sciencespo.fr/cevipof/fr/content/qui-sont-les-gilets-jaunes-et-leurs-soutiens.html">« gilets jaunes »</a>.</p>
<p>Mais l’épisode de la loi sur l’immigration est aussi un tournant politique car la motion de rejet de la loi sur l’immigration a donné lieu à un vote uni de <a href="https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/loi-immigration-et-integration-ce-quil-faut-savoir-1902727">LR, du Rassemblement national (RN) et de la gauche</a>. Cette alliance, bien que de circonstance, montre à quel point le Rassemblement national est devenu un <a href="https://theconversation.com/lextreme-droite-premier-courant-politique-francais-182977">parti comme les autres</a> au sein de la vie politique française.</p>
<h2>Un parfum de fatalité ?</h2>
<p>Le Front Républicain contre l’extrême droite s’est transformé en un <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/12/13/l-arc-republicain-un-concept-destine-a-exclure-certains-du-champ-de-la-legitimite-politique_6205527_3232.html">Arc Républicain</a> visant tous les extrêmes. Et les partis « traditionnels » s’allient désormais de plus en plus avec le RN au hasard des circonstances. La <a href="https://www.lopinion.fr/politique/la-strategie-de-la-cravate-du-rn-fonctionne-t-elle">stratégie de Marine Le Pen</a> visant à cultiver une image sérieuse et modérée à l’Assemblée Nationale semble donc porter ses fruits, d’autant plus qu’elle positionne son groupe parlementaire en complète opposition avec la <a href="https://www.leparisien.fr/politique/la-on-va-dans-le-mur-au-sein-de-lfi-la-strategie-de-la-bordelisation-fait-debat-16-12-2023-SOHC2BQIXBDGXHV45XZP6OGKZE.php">stratégie volontiers provocatrice</a> et belliqueuse de LFI et de certaines personnalités de gauche.</p>
<p>Comme ses prédécesseurs, Emmanuel Macron, qui avait affirmé qu’il parviendrait à faire baisser l’extrême droite en France, ne parvient pas à empêcher l’expansion du RN. Les figures comme Gérald Darmanin semblaient pourtant <a href="https://www.lavoixdunord.fr/1182443/article/2022-05-20/gerald-darmanin-l-atout-droite-pop-de-macron-rempile-l-interieur">destinées à élargir le spectre du parti présidentiel</a> et devaient faire barrage au parti d’extrême droite en se positionnant sur ses thématiques et ses idées. Les déboires du ministre de l’Intérieur illustrent au contraire les limites des stratégies de lutte contre l’extrême droite visant à s’appuyer sur des personnalités censées reprendre et représenter leurs idées pour attirer les électeurs.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-rn-trou-noir-du-paysage-politique-francais-219757">Le RN, « trou noir » du paysage politique français</a>
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<p>Mais l’expansion du RN est à mettre en perspective avec les succès des partis d’extrême droite dans plusieurs pays d’Europe comme en <a href="https://fr.euronews.com/2023/10/22/giorgia-meloni-un-an-a-la-tete-de-litalie">Italie</a> ou au <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/11/24/extreme-droite-aux-pays-bas-l-original-triomphe-toujours-de-la-copie_6202071_3232.html">Pays Bas</a> ou par exemple en <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2023/11/20/en-argentine-le-choc-et-les-interrogations-apres-l-election-triomphale-de-javier-milei-a-la-presidence_6201228_3210.html">Argentine</a>. L’exemple français n’est pas exceptionnel et ces succès donnent un parfum de fatalité à l’incapacité d’Emmanuel Macron et du camp présidentiel à contrer l’expansion du parti présidé par Jordan Bardella.</p>
<p>La période de turbulences économiques, sociales, géopolitiques et environnementales actuelle est aussi un terrain particulièrement fertile pour la montée des extrêmes et des populismes. Dans le cas de la France, cette montée ne pourra être un tant soit peu contenue que si des personnes comme Gérald Darmanin et Emmanuel Macron parviennent à éviter des séquences comme celle de la loi sur l’immigration tant elles mettent en lumière les illusions perdues de leur aventure politique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220225/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olivier Guyottot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Comment Gérald Darmanin incarne l’échec d’une « nouvelle façon » de faire de la politique.Olivier Guyottot, Enseignant-chercheur en stratégie et en sciences politiques, INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2182212023-11-22T16:18:24Z2023-11-22T16:18:24ZLe style de leadership de JFK inspire toujours, 60 ans après sa mort<p>John F. Kennedy demeure une figure publique exemplaire, une source d’inspiration, et son style de leadership constitue une référence depuis des décennies.</p>
<p>L’ancien président américain (1961-1963) a projeté une image idéalisée du <a href="https://independentaustralia.net/politics/politics-display/john-f-kennedy-a-leader-for-our-time,13059">leadership</a>, qui, dans sa meilleure version, démontre que le système politique peut relever les plus grands défis de la société. Il a exercé une présidence optimiste et ambitieuse et, bien que sa fin ait été tragique, il a remporté des succès considérables dans des domaines aussi divers que la <a href="https://millercenter.org/president/kennedy/domestic-affairs">réduction de la pauvreté</a>, <a href="https://www.jfklibrary.org/learn/about-jfk/jfk-in-history/nuclear-test-ban-treaty#:%7E:text=Kennedy%20signed%20the%20ratified%20treaty,the%20nation%20conducting%20the%20test">l’interdiction des essais d’armes nucléaires</a> et les programmes spatiaux Mercury et <a href="https://history.nasa.gov/moondec.html">Apollo</a>.</p>
<p>Porté au pouvoir en novembre 1960, à l’âge de 43 ans, JFK demeure à ce jour le <a href="https://obamawhitehouse.archives.gov/1600/presidents/johnfkennedy">plus jeune président américain</a> élu. Son âge aurait pu être vu comme un handicap, en particulier en matière de politique étrangère, mais il a approfondi ses connaissances grâce aux nombreux voyages à l’étranger qu’il a effectués pendant son mandat au Congrès et son service militaire. En outre, il a choisi des personnes <a href="https://www.jfklibrary.org/learn/about-jfk/life-of-john-f-kennedy/fast-facts-john-f-kennedy/officials-of-the-kennedy-administration">hautement qualifiées et instruites</a> pour son cabinet.</p>
<h2>Un leadership éclairé</h2>
<p>Pour le 60<sup>e</sup> anniversaire de la mort de Kennedy, il est bon de rappeler que sa présidence a posé les <a href="https://www.jstor.org/stable/23631185">jalons</a> d’un style de leadership ambitieux, éclairé et progressiste. Jack, Robert et Edward Kennedy ont contribué, chacun à sa manière, aux causes politiques démocrates, telles que l’élargissement des droits civiques et la réforme des soins de santé.</p>
<p>Le style de leadership de JFK a eu une influence considérable et servi de <a href="https://theconversation.com/when-image-trumps-ideology-how-jfk-created-the-template-for-the-modern-presidency-78073">modèle</a> politique et culturel à des présidents aussi différents que Ronald Reagan, Bill Clinton et Barack Obama. </p>
<p>Bien que plus à droite que Kennedy, Reagan (un ancien acteur) partageait sans doute avec ce dernier un sens du <a href="https://archive.nytimes.com/www.nytimes.com/books/first/f/fitzgerald-blue.html">théâtre politique</a>. Clinton s’est efforcé de se forger une image <a href="http://www.espn.com/espn/photos/gallery/_/id/7964385/image/3/version/mobile/bill-clinton-presidents-playing-football">jeune, vigoureuse</a> et idéalisée <a href="https://www.jstor.org/stable/41940033">inspirée de JFK</a>, même si plusieurs de ses tentatives pour faire adopter des lois dans le but d’atteindre d’importants objectifs démocrates (comme la réforme des soins de santé) ont fini par échouer. Clinton, comme JFK, aimait réunir de grands groupes <a href="https://eu.recordnet.com/story/news/1995/01/01/clinton-parties-with-thinkers-s/50877460007/">d’intellectuels et de leaders de leur domaine</a> pour discuter de politique et de divers enjeux. <a href="https://books.google.co.uk/books?id=q6G96iX0xW8C">Selon Ted Sorensen</a>, ancien rédacteur de discours de JFK, Obama croyait, comme Kennedy, à la diplomatie et aux négociations, même avec ses adversaires.</p>
<p>Le style ouvert et captivant de Kennedy a fait en sorte que le gouvernement et le service public paraissaient intéressants et <a href="https://news.gallup.com/poll/165902/americans-rate-jfk-top-modern-president.aspx">pertinents</a>. Même si les méthodes utilisées pour établir les classements des présidents <a href="https://www.york.ac.uk/business-society/research/management/policy/archive/trump_presidential_performance_evaluation/">ont souvent été contestées</a>, JFK a toujours figuré parmi les <a href="https://scri.siena.edu/2022/06/22/american-presidents-greatest-and-worst/">dix premiers</a>, bien qu’il n’ait été au pouvoir qu’un peu plus de 1 000 jours. La famille Kennedy a prospéré grâce à l’ambition et au pouvoir, mais son désir de <a href="https://www.theatlantic.com/magazine/archive/2013/08/the-legacy-of-john-f-kennedy/309499/">servir le public</a> semblait sincère, tout comme celui d’apprendre et de progresser.</p>
<h2>Les séminaires de Hickory Hill</h2>
<p>JFK a gouverné à partir du centre, en nommant des personnes aux antécédents politiques variés dans son cabinet. <a href="https://www.historyextra.com/period/20th-century/jfk-style-over-substance/">Il a réussi</a> à faire adopter de nombreuses lois pendant son mandat et a contribué à l’adoption de la législation historique sur les droits civiques par son successeur, Lyndon Johnson.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/QXqlziZV63k?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Discours de JF Kennedy sur l’exploration spatiale.</span></figcaption>
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<p>Dans le cadre de nos <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/17427150211042153">recherches</a> archivistiques, nous nous sommes intéressés à l’évolution de ce que l’on a appelé les « séminaires de Hickory Hill », une série de discussions et de rencontres sociales qui se déroulaient généralement au domicile de Robert et Ethel Kennedy à McLean, en Virginie. </p>
<p>Ces événements permettaient d’explorer les problèmes sociaux et leurs solutions, et constituaient en quelque sorte des précurseurs des groupes de développement du leadership. Les échanges portaient sur des sujets aussi variés que les grandes œuvres littéraires et la pauvreté des enfants. <a href="https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/aujourd-hui-l-histoire/segments/entrevue/438908/rachel-carson-printemps-silencieux-ddt-environnement">Rachel Carson</a> et le philosophe <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Jules_Ayer">A.J. Ayer</a> ont figuré parmi les orateurs invités. Le cercle intime de l’administration Kennedy collaborait avec des personnes de l’extérieur, ce qui contraste avec les <a href="https://doi.org/10.1177/1742715016680666">styles de leadership</a> partisans, secrets et souvent cloisonnés si courants aujourd’hui.</p>
<p>La présidence et le leadership de JFK ont été marqués par quelques succès notables. Le président a utilisé le gouvernement fédéral pour faire respecter la déségrégation raciale dans plusieurs <a href="https://www.nps.gov/articles/000/the-kennedys-and-civil-rights.htm">affaires</a> très médiatisées. Son administration a également préparé le terrain pour la législation sur les droits civiques mentionnée plus haut, qui a été adoptée après sa mort. Parmi les aspects moins positifs, le pouvoir de Kennedy était délibérément cultivé et contrôlé à la manière d’une marque par son entourage proche. Son père s’est vanté d’avoir vendu l’image de son fils comme des <a href="https://www.theguardian.com/film/2017/jan/07/jackie-natalie-portman-behind-the-creation-of-jfk-camelot-movies">savonnettes</a>.</p>
<h2>Éviter la pensée de groupe</h2>
<p>JFK a également commis des erreurs. Il a accepté le débarquement de la <a href="https://doi.org/10.2307/2149944">baie des Cochons</a>, à Cuba, après que des experts militaires ont prédit à tort qu’il serait facile de renverser le régime de Fidel Castro. Le président a appris, à la dure, qu’il fallait parfois se méfier des conseils militaires. Après l’incident de la baie des Cochons, JFK a introduit de nouvelles méthodes de travail pour <a href="https://hbr.org/2013/11/how-john-f-kennedy-changed-decision-making">éviter la « pensée de groupe</a> ». Son succès dans la crise des missiles de Cuba découle en partie de cette leçon.</p>
<p>Kennedy a également intensifié la terrible intervention américaine <a href="https://millercenter.org/the-presidency/educational-resources/kennedy-commitment">au Viêt Nam</a>. Il a souscrit à la <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1179/072924701791201576">« théorie des dominos »</a> sur la prétendue nécessité pour les États-Unis d’affronter le communisme en Asie, quel qu’en soit le prix. Son administration a entraîné l’Amérique dans une guerre perdue d’avance en soutenant le régime instable du Sud Viêt Nam et en participant à un <a href="https://nsarchive2.gwu.edu/NSAEBB/NSAEBB101/index.htm">coup d’État</a> sanglant contre l’un de ses dirigeants.</p>
<p>Des rédacteurs de discours et des historiens tels que Ted Sorensen et Arthur Schlesinger Jr ont déployé des efforts considérables pour préserver et promouvoir l’image de la famille Kennedy en présentant son leadership comme progressiste, voire héroïque (Schlesinger était chargé de la gestion quotidienne des séminaires de Hickory Hill et a joué un rôle clé dans l’élaboration des <a href="https://www.jstor.org/stable/2657937">classements</a> de leadership présidentiel). Ces efforts ont assurément influencé la portée et la longévité de la popularité des Kennedy.</p>
<p>D’autres liens existent entre JFK et l’étude du leadership. James MacGregor Burns, théoricien du leadership, a écrit un <a href="https://books.google.co.uk/books?id=cm2LCwAAQBAJ">livre de campagne</a> sur JFK, et <a href="https://books.google.co.uk/books?id=lhrPS_s7EawC">l’œuvre de Burns</a> a servi à promouvoir l’idée d’un <a href="https://doi.org/10.1080/135943299398410">« leadership transformationnel »</a>, selon laquelle les formes de leadership les plus efficaces et les plus éthiques sont celles qui mettent l’accent sur la vision, le changement et l’inspiration, plutôt que celles qui se limitent à tenir boutique.</p>
<p>On se souvient généralement de JFK comme d’un bon président, mais l’image idéalisée de Camelot est <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0018726702055002181">assurément exagérée</a>.</p>
<h2>L’anti-Trump</h2>
<p>Lors de ce qui s’est avéré son dernier voyage, JFK devait <a href="https://www.politico.com/news/magazine/2022/06/10/jfk-foresaw-donald-trumps-america-00038627">prononcer un discours à Dallas</a> dans lequel il mettait en garde contre « des voix qui prêchent des doctrines totalement étrangères à la réalité » – et qui, craignait-il, risquaient « d’entraver la sécurité de ce pays ». Ce leadership agressif et populiste qu’il décriait, incarné de nos jours par Donald Trump, est en plein essor.</p>
<p>Plutôt que de collaborer avec leurs rivaux politiques, ces personnes préfèrent les rejeter et les attaquer. Robert Kennedy Jr, par exemple, se présente à l’élection présidentielle en suivant le <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/1350508419870901">modèle Trump</a> de dénigrement et de populisme, se positionnant comme quelqu’un de l’extérieur qui « va assainir le système », plutôt que comme un rejeton de l’une des familles les plus influentes d’Amérique.</p>
<p>L’héritage de JFK conserve néanmoins le potentiel de promouvoir une approche sérieuse et éthique du leadership. Il valorise des visions d’idéalisme et de service public, et non d’égoïsme et de dénigrement. Toutefois, <a href="https://www.theguardian.com/film/2016/sep/13/jackie-review-natalie-portman-kennedy-jfk#:%7E:texilsils%20t=Portman%20is%20altogether%20astonishing%20in,had%20on%20those%20around%20her.">cette présentation</a> omet souvent de tenir compte des défauts et des échecs de John F. Kennedy.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218221/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le style de leadership de JFK a eu une influence considérable et a servi de modèle tant à Ronald Reagan, qu'à Bill Clinton ou à Barack Obama.Leo McCann, Professor of Management, University of YorkSimon Mollan, Reader in Management, University of YorkLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2145212023-10-19T20:37:30Z2023-10-19T20:37:30ZLa France insoumise et Renaissance : crise ou métamorphose de partis singuliers ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/551189/original/file-20230929-27-e9cvb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=136%2C56%2C2338%2C2195&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le futur demeure incertain, avec des défis toujours présents pour ces deux formations, notamment en matière de leadership.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/scratched-posters-streets-paris-april-21-625766570">Laurentlesax</a></span></figcaption></figure><p>La crise sans précédent qui divise la gauche et la LFI, en raison des prises de position de Jean-Luc Mélenchon et de certains cadres de son mouvement au sujet des <a href="https://twitter.com/jlmelenchon/status/1712180530228117832?s=61&t=wSy5WVrwX54m1O2-Sbk-sw">attaques du Hamas sur Israël</a> du 7 octobre 2023 entache sérieusement l’avenir de <a href="https://www.lesechos.fr/politique-societe/politique/la-nupes-se-rapproche-un-peu-plus-dun-divorce-1987041">l’alliance de gauche</a>.</p>
<p>Le PCF voit l’union comme une « impasse », plaidant pour une <a href="https://www.nouvelobs.com/politique/20231015.OBS79547/le-pcf-qualifie-la-nupes-d-impasse-et-appelle-a-un-nouveau-type-d-union-pour-la-gauche.html">nouvelle forme d’union à gauche</a>, tandis que le Conseil national du PS a décidé d’un <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/10/17/jean-luc-melenchon-accuse-olivier-faure-de-rompre-la-nupes-apres-les-critiques-du-premier-secretaire-du-ps_6194956_823449.html">moratoire</a> sur sa participation à la Nupes, appelant à un « fonctionnement plus démocratique » de l’alliance pour aboutir à <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/10/17/jean-luc-melenchon-accuse-olivier-faure-de-rompre-la-nupes-apres-les-critiques-du-premier-secretaire-du-ps_6194956_823449.html">« une candidature commune à l’élection présidentielle de 2027 »</a></p>
<p>Ces événements viennent ajouter à une situation déjà fragile, à la suite des élections de 2022, et dans lequel l’horizon politique pour LFI/Nupes mais aussi pour le parti présidentiel, LREM (devenue Renaissance) entre dans une période d’incertitude.</p>
<p>Tandis qu’Emmanuel Macron ne peut briguer un troisième mandat présidentiel consécutif, Jean-Luc Mélenchon qui ne détient plus de mandat électif, semble vouloir se mettre en <a href="https://www.youtube.com/watch?v=tI4kWSn5Awk">« retrait »</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-les-discours-de-defaite-sont-ils-souvent-de-bons-discours-181438">Pourquoi les discours de défaite sont-ils (souvent) de bons discours</a>
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<p>Pour LFI, la crise actuelle trouve son origine dans un déficit d’horizontalité et à l’influence continue de Jean-Luc Mélenchon. Du côté de Renaissance, l’incertitude provient d’un verrouillage institutionnel. Ces situations soulèvent des questions sur la succession de ces deux leaders. En effet, ni les statuts de Renaissance, ni ceux de LFI n’établissent de procédures démocratiques explicites pour désigner leurs successeurs.</p>
<p>Ces formations partisanes vont donc être amenées à régler des enjeux de leadership. Bien qu’ils aient partagé des <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/ps/2022-v41-n2-ps06818/1088649ar/">structures organisationnelles similaires</a> par le passé (parti-mouvement, à adhésion gratuite, peu démocratique et centré sur une plate-forme numérique), LFI et Renaissance empruntent désormais des voies divergentes en matière de gouvernance et de stratégie interne.</p>
<h2>Entre transition et tensions : Les nouveaux défis de la France insoumise</h2>
<p>Quelques mois après la campagne présidentielle, une <a href="https://lafranceinsoumise.fr/assemblee-representative-10-decembre-2022/">« Assemblée représentative »</a> est mise en place le 10 décembre 2022, composée d’un tiers de cadres et de deux tiers de militants tirés au sort. Elle a pour but de formaliser l’organisation par la création de deux organes ; la « coordination des espaces » et le « conseil politique ». Les principales figures du mouvement proches de Jean-Luc Mélenchon, telles que Sophia Chikirou, Manuel Bompard, Mathilde Panot, entre autres, occupent la <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/la-france-insoumise/la-france-insoumise-la-nouvelle-direction-autour-de-manuel-bompard-attise-les-critiques-au-sein-du-mouvement_5536845.html">première instance</a>, tandis que des <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/12/09/a-lfi-une-assemblee-representative-qui-seme-la-colere-au-sien-du-parti_6153732_823448.html">figures dissidentes</a> comme Clémentine Autain et François Ruffin sont reléguées au conseil politique, une instance spécialement créée pour l’occasion <a href="https://www.lepoint.fr/politique/lfi-tient-son-premier-conseil-politique-sans-ruffin-autain-corbiere-ni-garrido-16-01-2023-2504952_20.php">représentant la pluralité du mouvement</a>. Pour les évincés de la coordination du parti, cela s’apparenterait davantage à un <a href="https://www.liberation.fr/politique/elections/lfi-choisit-une-direction-ultra-resserree-et-suscite-la-colere-20221210_6MZ3XJOVVBC2XJ5FGOZEDYD7TU/">« conseil Théodule »</a>, un comité sans grande utilité.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/france-insoumise-un-cesar-a-la-tete-dun-mouvement-anarchique-169482">France insoumise : un César à la tête d’un mouvement anarchique ?</a>
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<p>L’Assemblée représentative valide la stratégie de l’ancrage local par la création de « boucles départementales » et l’acquisition de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=g7ayvI4t3jQ">« QG insoumis »</a>. Les 21 membres de la coordination des espaces plébiscitent <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/12/10/manuel-bompard-prend-les-renes-de-la-france-insoumise-sous-les-critiques-de-figures-du-parti_6153880_823448.html">Manuel Bompard</a> à la coordination nationale. Toutefois, la désignation de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Interroi">interrex</a> – leader temporaire du mouvement avant la nomination d’un successeur à Jean-Luc Mélenchon – n’a pas été sans remous. Plusieurs cadres influents tels qu’Alexis Corbière, Clémentine Autain, François Ruffin et Éric Coquerel ont regretté l’absence de consultation dans ce processus et souligné l’opacité de ce plébiscite.</p>
<p>La centralisation des décisions a été un point de friction, suscitant des <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-brief-politique/la-france-insoumise-se-dechire-apres-une-reorganisation-qui-exclut-les-figures-montantes-du-parti_5507295.html">critiques internes</a>, avec des termes tels que : « purge », « verrouillage » ou encore « autodésignation ».</p>
<p>Ainsi, malgré ces évolutions structurelles, LFI conserve son identité de <a href="https://le1hebdo.fr/journal/numeros/174/melenchon-dit-tout/politique_franaise-personnalit.html">parti-mouvement gazeux</a>. L’organisation n’a pas fondamentalement changé et Jean-Luc Mélenchon garde un magistère sur la structure qu’il continue à diriger (Manuel Bompard est un proche).</p>
<h2>Renaissance : du parti-mouvement au parti traditionnel ?</h2>
<p>En mars 2022, Emmanuel Macron plaide pour la formation d’un <a href="https://www.rtl.fr/actu/politique/presidentielle-2022-un-nouveau-parti-pour-emmanuel-macron-7900144281">nouveau parti</a> englobant tous les partis de la majorité présidentielle (excepté le MoDem et Horizons qui gardent leur indépendance). Ce <a href="https://www.lepoint.fr/politique/la-republique-en-marche-devient-officiellement-renaissance-17-09-2022-2490355_20.php#11">« nouveau » parti</a> établit rapidement de nouveaux statuts votés par les adhérents de LREM et Stéphane Séjourné en prend la tête. Ces statuts marquent le passage à une organisation partisane « traditionnelle » typique de la V<sup>e</sup> République avec une structure hiérarchisée claire, qui vise un <a href="https://metropolitiques.eu/Municipales-2020-La-Republique-en-marche-au-defi-de-l-ancrage-politique-local.html">ancrage local</a> (il est actuellement faible).</p>
<p>Du temps de LREM, le bureau exécutif désignait les référents, entraînant de nombreuses critiques en interne sur son manque de démocratie. Désormais à Renaissance, les membres des bureaux départementaux sont élus par les adhérents du département pour trois ans. En cela, sa structuration rappelle les fédérations socialistes. Chaque assemblée départementale est organisée en association loi de 1901, avec un budget dépendant du nombre d’adhérents, des cotisations des élus locaux et des contributions des sympathisants, à l’opposé de ce qui se faisait à LREM, où le budget était alloué par appel à projets.</p>
<p>Renaissance offre une plus grande autonomie financière et de liberté d’action dans les activités militantes locales (impressions de propagande politique, etc.). De plus, contrairement à LREM où le bureau exécutif désignait les candidats locaux, ce sont désormais les bureaux départementaux qui les choisissent pour les villes de moins de 60 000 habitants. L’attrait de ces instances locales n’a pas échappé à une dizaine de ministres, désireux d’étendre leur influence. Ces figures politiques ont saisi l’opportunité des élections internes de Renaissance pour se positionner à la tête de certains bureaux départementaux et ainsi se constituer des fiefs. On y retrouve, par exemple, Gérald Darmanin dans le Nord, Patricia Mirallès dans l’Hérault, et Aurore Bergé dans les Yvelines.</p>
<p>Cependant, malgré ces évolutions structurelles, le défi reste de taille pour Renaissance. Il se heurte à la difficulté de la conversion des <a href="https://www.lefigaro.fr/elections/regionales/on-n-a-pas-des-militants-on-a-des-cliqueurs-francois-patriat-etrille-lrem-parti-trop-virtuel-20210622">« cliqueurs LREM »</a> (soutiens sur Internet) en adhérents Renaissance.</p>
<p>Suite à 12 entretiens que nous avons menés avec des présidents de bureaux départementaux, il ressort qu’en moyenne, seulement 10 % des cliqueurs LREM deviennent adhérents Renaissance. Pour augmenter ce pourcentage, certains présidents de bureaux départementaux ont adopté des approches « proactives » telles que le <em>phoning</em>, l’envoi de courriels et même des rencontres informelles autour de « goûters ». Cependant, ils rencontrent divers obstacles, tels que des bases de données LREM obsolètes ou la présence de cliqueurs issus de partis d’opposition. Le passage à la cotisation offre plus de droits, mais aussi plus de responsabilités, nécessitant ainsi un apprentissage de la démocratie partisane. Malgré ces efforts, la conversion reste timide, avec seulement <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/la-republique-en-marche/info-franceinfo-renaissance-le-parti-presidentiel-revendique-un-pic-d-adhesions-avec-pres-de-400-nouveaux-adherents-hebdomadaires_5753147.html">30 000 adhérents officiels à ce jour</a>.</p>
<h2>L’heure de la restructuration</h2>
<p>Une transformation s’opère au sein des partis politiques phares, La France Insoumise (LFI) et La République en Marche (devenue Renaissance). LFI cherche à équilibrer démocratisation interne et centralisation, en adoptant une structure davantage ancrée localement, mais rencontre des tensions internes, notamment exacerbées par la crise au Proche-Orient et les déclarations de Jean-Luc Mélenchon. Ces dernières ont eu pour effet de <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/la-france-insoumise/comment-la-guerre-entre-israel-et-le-hamas-exacerbe-les-divisions-au-sein-de-la-france-insoumise_6127539.html">polariser les élites partisanes</a>, démontrant, s’il en était encore besoin, que « l’ancien leader » est toujours aux commandes du mouvement.</p>
<p>De son côté, Renaissance se métamorphose d’un parti-mouvement à une formation plus traditionnelle, mettant en avant des structures départementales et cherchant à renforcer sa base d’adhérents.</p>
<p>Dans les deux cas, rien n’est tranché sur la question de la désignation du futur candidat aux élections présidentielles de 2027. Les organisations évoluent, mais le futur demeure incertain, avec des défis toujours présents pour ces deux formations, notamment en matière de leadership.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214521/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ludovic Grave ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ni Renaissance ni La France insoumise ne disposent à ce jour de procédures démocratiques traditionnelles pour désigner leurs leaders et faire face aux crises qui les divisent.Ludovic Grave, Doctorant en science politique, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2143282023-10-08T17:15:09Z2023-10-08T17:15:09Z« PSPP », l’étoile montante de la politique québecoise<p>Lundi 2 octobre, au Québec, une élection législative partielle, dans la circonscription de Jean-Talon, a vu une <a href="https://www.ledevoir.com/politique/quebec/799195/election-partielle-jean-talon-resultats">nette victoire du Parti québécois</a> (PQ), favorable à l’indépendance. Ce scrutin a constitué un test pour l’étoile montante du paysage politique québécois, <a href="https://www.noovo.info/nouvelle/cest-un-vote-qui-est-un-avertissement-tres-serieux-a-la-caq-dit-pspp.html">Paul Saint-Pierre Plamondon, dit « PSPP »</a>, chef du PQ depuis 2020 et député à l’Assemblée nationale du Québec depuis 2022. Dans le présent article, j’applique la matrice de la réussite, un de <a href="https://www.pressesdesmines.com/produit/le-nouvel-heroisme/">mes objets de recherche depuis une dizaine d’années</a>, au cas PSPP.</p>
<p>PSPP ne dispose encore que d’un poids modeste, puisque son parti – qui est présent uniquement sur la scène politique québécoise, l’indépendance du Québec étant défendue au niveau fédéral par une autre formation, le Bloc québécois – avait jusqu’ici trois députés à l’Assemblée nationale du Québec, qui en compte 125. Avec l’élection de Pascal Paradis dans la circonscription de Jean-Talon, il en aligne désormais quatre. Bien loin de la majorité. Cependant, d’après les critères de la <em>matrice de la réussite</em>, son potentiel est remarquable. PSPP sature déjà tous les critères qui forgent l’image du « héros-leader » dans nos sociétés contemporaines, sujet sur lequel j’ai publié des articles de recherche au <a href="https://journals.openedition.org/communication/4854">Québec</a> et aux <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10551-016-3063-4">États-Unis</a>, ainsi qu’un livre en <a href="https://www.pressesdesmines.com/produit/le-nouvel-heroisme/">France</a>.</p>
<p>J’examine successivement ces sept critères de la <em>matrice de la réussite</em>. Je les aborde, pour les six premiers, par paires de critères en tension entre eux : être (1) dans le cadre et (2) faire voler le cadre en éclats ; (3) dans la coopération et (4) dans la compétition ; (5) un grand acteur habile à jouer sur les signes extérieurs et (6) fortement branché sur son intériorité, son authenticité. Le septième critère, qualifions-le de « méta », au-delà des six autres, est (7) de montrer une aisance au milieu des paradoxes et de savoir leur donner du sens.</p>
<h2>1. Être dans le cadre, solide sur ses objectifs</h2>
<p>PSPP défend une <em>mission</em>. C’est le service minimum du leadership : avoir un projet clair, partageable avec les autres. Rien de très original, mais encore faut-il y parvenir, ce qui n’est pas toujours évident quand le paysage est complexe, ce qui est le cas ici. Pour PSPP, l’objectif est le renouveau du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_du_mouvement_ind%C3%A9pendantiste_qu%C3%A9b%C3%A9cois">mouvement indépendantiste au Québec</a> et son aboutissement à un État québécois indépendant.</p>
<p>Il l’énonce vers le milieu des années 2010, justifiant son action par l’idée qu’« à moyen terme, la question de l’indépendance du Québec reviendrait en force ». La proposition est de « faire de l’indépendance la locomotive du parti ».</p>
<p>La mission est de <a href="https://www.journaldequebec.com/2020/08/23/rebatir-le-camp-du-oui--la-survie-du-quebec-passe-par-lindependance"><em>Rebâtir le camp du oui</em></a>, titre de son livre paru en 2020 : un « oui » à l’indépendance clairement assumé. L’enjeu est « l’accession à l’indépendance », plus encore que la « prise de pouvoir » qui, dit-il en 2020, n’est qu’un « enjeu complémentaire ».</p>
<p>La franchise de l’énoncé programmatique fait partie de la stratégie : « parler sans détour de la cause qui nous anime » est le registre privilégié. Il recommande à son camp d’« être transparent quant à ce qu’on pense véritablement ».</p>
<h2>2. Faire voler les cadres en éclats, oser nager à contre-courant</h2>
<p>PSPP se distingue par une aptitude forte à la <em>divergence</em>. C’est une autre clé du leadership cherchant à s’affirmer : se faire remarquer en innovant par rapport à la norme.</p>
<p>Plusieurs aspects de sa personnalité et de ses initiatives alimentent ce récit de manière éclatante. Il y a le coup le plus visible, qui restera en mémoire : <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1923814/paul-st-pierre-plamondon-pq-refus-serment-roi-demande">il refuse de prêter allégeance au roi d’Angleterre</a> au moment de son accession au Parlement en 2022. Il restera le premier député de l’histoire québécoise, et canadienne, à ne pas prêter serment au roi.</p>
<p>La règle est pourtant sans ambiguïté : selon la constitution, si vous ne prêtez pas serment, vous n’avez pas le droit de siéger. Avec les deux autres députés du PQ, il doit, physiquement, rebrousser chemin devant la porte d’entrée du Parlement, gardée par une huissière. La provocation est magistrale. À noter que, en décembre 2022, suite à cet épisode, l’Assemblée nationale a <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1940108/assemblee-nationale-abolition-serment-roi-deputes-pq">aboli l’obligation pour les députés québécois de prêter serment au roi</a>.</p>
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<h2>3. Privilégier la coopération, construire avec les autres</h2>
<p>PSPP se signale par une recherche constante d’<em>entente</em>. Pas de polémique inutile, pas de stratégie de la controverse, pas de scandale : l’inverse d’un Trump.</p>
<p>Même lors de l’épisode de la non-prestation de serment au Parlement, politesse et mesure guident les députés concernés. C’est d’autant plus remarquable qu’ils pourraient facilement faire de cet événement et, plus généralement, de leur action pour l’indépendance du Québec, un cheval de bataille qu’ils évoqueraient à hauts cris.</p>
<p>Or, sans arrogance et sans esclandre, PSPP maintient le cap de la coopération, à l’œuvre par exemple lorsqu’il salue les autres partis que le sien, ouvrant sans doute la voie à de futures coalitions : « Bravo aux autres chefs de s’être tenus debout pour leurs convictions. » Il répète à l’envi qu’il fait primer le commun sur les différences, bien que, par ailleurs, on l’a vu avec le critère (2) précédent, il est engagé dans une stratégie de la différenciation : il faut bien voir – je ne le rappellerai jamais assez – que c’est en jonglant avec des critères en tension entre eux, dans un <em>équilibre précaire</em>, que le profil de réussite se parachève.</p>
<h2>4. Ne pas avoir peur du rapport de forces</h2>
<p>Pour autant, PSPP ne rechigne pas à la <em>compétition</em>. Les sujets de discorde sont mis sur la table sans ambages, notamment la difficile <a href="https://www.lapresse.ca/debats/opinions/2021-04-17/cohabitation-cote-a-cote-ou-anglicisation-coast-to-coast.php">cohabitation entre le français et l’anglais</a>, avec, à l’horizon, ni plus ni moins qu’une question de « survie linguistique et culturelle » pour le Québec francophone.</p>
<p>Placer le débat sur le terrain de la survie veut dire, très explicitement, que la compétition est <em>à mort</em>. La coopération, oui – cf. le critère (3) ci-dessus – mais sans aucun angélisme. PSPP et le PQ ne se censurent pas pour qualifier le problème, avançant des arguments juridiques, culturels, éthiques, organisationnels, donc complexes et intriqués. Le point décisif est que, pour eux, le pronostic vital est engagé, ce dont ils auront à convaincre, dans le futur, de nouveaux électeurs et électrices pour progresser.</p>
<p>Remarquons que le registre de la lutte à mort, de la lutte tragique, est présent. Par exemple, PSPP défend l’idée que, entre le niveau fédéral canadien et le niveau provincial québécois, « il y a un gouvernement de trop », ou qu’« une véritable gouvernance environnementaliste implique de pouvoir se détacher des choix polluants du Canada. Cela implique donc que le Québec devienne un pays ». Sur cette base, il n’est pas étonnant que les campagnes se déroulent avec « énormément de pression ».</p>
<h2>5. Être un grand acteur, habile à jouer sur les signes extérieurs</h2>
<p>PSPP, comme tout leader politique aujourd’hui dans nos sociétés démocratiques, doit assumer, en public, une dimension de <em>rôle</em>. Il est à l’aise dans les médias, et passe très bien à la télévision et à la radio. Il a d’ailleurs lui-même animé une émission de radio et tenu des chroniques à la télévision pendant des années.</p>
<p>Le leader du PQ sait, et théorise en professionnel, que « la politique est une question d’images autant que d’idées, et celui ou celle qui incarne un mouvement politique joue pour beaucoup »… et « joue beaucoup », pourrait-on ajouter en se référant à <a href="https://www.cairn.info/la-sociologie--9782912601858-page-79.htm">Erving Goffman</a>, le grand sociologue de la mise en scène de soi qui a montré que la moindre de nos interactions en société a une dimension théâtrale.</p>
<p>Autour de PSPP, tout un imaginaire est en train de se bâtir à partir de narrations (<em>storytelling</em>) et de symboles qui frappent. Avec ses deux autres collègues élus du PQ au Parlement, ils étaient <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/politique/2022-10-21/assermentation-du-pq/les-trois-mousquetaires-sentent-qu-ils-ont-des-bases-solides.php">« les trois mousquetaires »</a>. Ils seront désormais, le destin le voulait, « les quatre mousquetaires », ce qui colle bien à leur image de rebelles, fortes têtes, et en même temps courageux pour servir des causes qui les dépassent.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1665010529440505857"}"></div></p>
<h2>6. Être une personne complète, avec son corps, ses sentiments et ses émotions</h2>
<p>PSPP est au contact de son <em>intériorité</em>. Ce point est essentiel à articuler avec le point (5). Aujourd’hui, pas de grand acteur sans implication forte de l’intériorité. Pas de signe extérieur efficace qui ne soit rendu crédible par une dose d’énergie intérieure. En même temps qu’il se montre très pointu pour maîtriser les signes extérieurs, l’acteur moderne est branché sur sa sensibilité, ses émotions, ses mouvements intérieurs. Le jeu doit être vivant, juste, authentique, personnel. Le public doit y croire : c’est la leçon d’un siècle d’école russo-américaine du jeu d’acteur, via <a href="https://www.librairie-gallimard.com/livre/9782070707058-le-travail-a-l-actors-studio-strasberg-l/">l’Actors Studio</a>, Stanislavski et Strasberg en référents de la Méthode – contre, soit dit en passant, l’école française (Diderot et le <a href="https://editions.flammarion.com/paradoxe-sur-le-comedien/9782080711311">paradoxe sur le comédien</a>).</p>
<p>La pure extériorité, non seulement ne suffit pas, mais se retourne contre l’émetteur aussitôt que le public sent le conventionnel, la recette mécanique, la désincarnation, le faux. Les registres varient : mettre ses tripes à l’air, se noyer dans l’introspection, annoncer une confidence, une valeur intime, ne pas tricher avec ce qu’on est, avoir des imperfections qui échappent, distiller la vérité de sa propre vie…</p>
<p>Pour PSPP, un registre qui lui échappe fréquemment est d’être ému aux larmes, comme, par exemple, un <a href="https://www.noovo.info/video/paul-st-pierre-plamondon-est-emu-devant-ses-militants.html">jour d’élection où il attend, devant les caméras, les résultats</a>. Il a sa fille dans ses bras, la berce. Il commence à parler devant un petit groupe, et, d’un seul coup, il s’interrompt, il a un début de sanglot, il enfouit son visage contre l’épaule de sa fille, les larmes emplissent ses yeux. Dans le public, le signe est interprété bizarrement par deux personnes qui partent d’un rire sonore. PSPP confie, de manière presque inaudible, comme pour s’excuser, ou donner la clé de son hoquet : « Je suis émotif, mais… », pause, puis il se reprend et continue son discours.</p>
<h2>7. « Paul Saint-Pierre Paradoxal ». Montrer une aisance au milieu des injonctions en tension et savoir leur donner du sens</h2>
<p>PSPP sait naviguer parmi les <em>paradoxes</em>. Ce septième critère de réussite est « méta », car il englobe les critères précédents. Il condamne au funambulisme, dans un équilibre précaire entre plusieurs sources de contradictions. Un journaliste ne s’y trompe pas qui décerne à PSPP le surnom de <a href="https://www.journaldequebec.com/2020/10/15/paul-st-pierre-paradoxal">« Paul Saint-Pierre Paradoxal »</a>.</p>
<p>Comme pour tout paradoxe, soit la contradiction vous brise et le dilemme vous épuise ; soit vous en sortez par le haut, vous vous adressez à un spectre plus large de la réalité et en tirez votre énergie. Plusieurs paradoxes sont particulièrement actifs dans le cas de PSPP. Je n’évoquerai ici que celui qui tourne autour de la dialectique ordre/désordre, sur l’axe <em>mission/divergence</em> de la <em>matrice de la réussite</em>. Le désordre est difficile à évacuer d’un projet de sécession qui s’assume. L’aventure de l’indépendance peut attirer pour les opportunités qu’elle crée, mais elle peut aussi faire peur. L’ordre, PSPP le revendique fortement. Dans son livre, il détaille le budget de sa première année au pouvoir et sa feuille de route des 100 premiers jours, afin de répondre à « la stratégie de la peur économique » souvent opposée au projet souverainiste par ses adversaires.</p>
<p>Avec cette capacité à marcher en <em>équilibre</em> sur un chemin de crête, PSPP semble disposer des capacités nécessaires pour rassembler. S’il peut faire progresser le « camp du oui » en incluant des sensibilités divergentes, mises en dialogue, rien ne permet encore, évidemment, de prédire la victoire ultime : l’histoire du « Québec libre » reste à écrire. Mais l’élection de Pascal Paradis à Jean-Talon est peut-être le signe qu’une dynamique s’est enclenchée…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214328/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olivier Fournout ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le leader du Parti québecois coche toutes les cases de la « matrice de la réussite », un concept développé pour évaluer les chances de succès des personnalités politiques.Olivier Fournout, Maître de conférence HDR, département Sciences économiques et sociales, chercheur à l’Institut Interdisciplinaire de l’Innovation (CNRS), Télécom Paris – Institut Mines-TélécomLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2142912023-09-28T19:13:50Z2023-09-28T19:13:50ZSe réorganiser dans un contexte extrême : les leçons des forces spéciales américaines<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/550002/original/file-20230925-27-g4bkc2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=42%2C27%2C979%2C637&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Intervenant aux côtés de l’armée conventionnelle, environ 3500 hommes des forces spéciales opéraient en Irak en 2004.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://picryl.com/media/us-army-usa-special-forces-armed-with-colt-556-mm-m16a2-assault-rifles-scan-7da4d8">Picryl</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>En 2004, l’Irak est une poudrière. Un an après l’invasion américaine qui renversa le régime de Saddam Hussein, la guerre est gagnée sur le terrain mais la paix se révèle amère. La rébellion des populations, l’influence d’Al-Qaida ou encore les réseaux mafieux entraînent chaque jour un peu plus le pays vers le chaos. Dès le début de cette période d’instabilité croissante, et aux côtés des forces conventionnelles, les forces spéciales américaines – environ 3,500 hommes regroupés au sein de la Task Force 714 (TF714) – vont se trouver à la pointe de la lutte contre ces réseaux.</p>
<p>Face à une issue du conflit plus qu’incertaine, le général Stanley McChrystal, à la tête de la TF714, va dans un premier temps solliciter davantage les hommes et les machines pour passer d’une dizaine à une vingtaine de raids par mois. Toujours à la pointe du dispositif, ces raids atteignent les têtes pensantes et les lieutenants des réseaux terroristes avec l’objectif de dégrader les structures hiérarchiques de l’ennemi et le désorganiser. C’est une véritable performance organisationnelle. Et pourtant, rien n’y fait : la violence augmente, la vitesse de récupération des insurgés surprend, les infiltrations de fedayin s’intensifient et les autorités locales sont débordées.</p>
<p>Devant ce constat, qui mettra deux ans à se cristalliser dans les esprits des dirigeants, McChrystal va poser une vision qui découle de la conviction longuement murie selon laquelle <a href="https://www.amazon.com/Share-Task-General-Stanley-McChrystal/dp/1591844754/ref=sr_1_4?crid=23PRC3ZI09DFS&keywords=stanley+mcchrystal&qid=1695132444&s=books&sprefix=stanley+mcchrystal%2Cstripbooks-intl-ship%2C251&sr=1-4">il faut soi-même fonctionner en réseau pour battre un réseau</a>. C’est en effet la première fois dans l’histoire qu’une insurrection capitalise sur le numérique. Pour s’organiser, les insurgés et les terroristes internationaux laissent de côté la structure hiérarchique traditionnelle pour lui préférer le réseau. Dans ce réseau, les liens sont souples et changeants, la prise de décision et l’action sont décentralisées, les sources de financement sont multiples et la communication s’effectue à la vitesse de la bande passante.</p>
<h2>De 20 à 300 raids par mois</h2>
<p>Pour espérer prendre de vitesse l’adversaire, les forces spéciales doivent donc radicalement changer leur façon de s’organiser. Or, l’armée américaine doit son existence juridique à une loi du Congrès : ses missions, son organigramme, son recrutement, et son financement dépendent tous du droit américain. Changer la structure de TF714 n’est donc pas une option pour le Général McChrystal. Quand bien même le Congrès accepterait de revisiter l’organisation de l’armée, le temps nécessaire se compterait en années pour qu’une hypothétique loi passe. Impensable.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Les forces d’opérations spéciales irakiennes effectuent un exercice de sauvetage d’otages à Bagdad, en Irak" src="https://images.theconversation.com/files/550004/original/file-20230925-21-gt7fhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/550004/original/file-20230925-21-gt7fhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/550004/original/file-20230925-21-gt7fhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/550004/original/file-20230925-21-gt7fhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/550004/original/file-20230925-21-gt7fhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=511&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/550004/original/file-20230925-21-gt7fhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=511&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/550004/original/file-20230925-21-gt7fhf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=511&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les forces d’opérations spéciales irakiennes effectuent un exercice de sauvetage d’otages à Bagdad, en Irak.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Isof-1.jpg">Halasadi/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour accompagner ses forces dans leur mutation, pour que ses unités soient plus rapides, plus agiles et autonomes, fassent circuler librement l’information, <a href="https://www.amazon.com/Transforming-US-Intelligence-Irregular-War/dp/1626167656/ref=sr_1_4?qid=1695132316&refinements=p_27%3ARichard+Shultz&s=books&sr=1-4&text=Richard+Shultz">récoltent et partagent le renseignement</a>, le général n’a qu’un levier de changement : la culture. Autrement dit, c’est en faisant <a href="https://www.amazon.com/Team-Teams-Rules-Engagement-Complex/dp/1591847486/ref=sr_1_1?crid=1RB0A3HDY7858&keywords=teams+of+teams&qid=1695131985&s=books&sprefix=teams+of+team%2Cstripbooks-intl-ship%2C176&sr=1-1">évoluer les relations au sein de la communauté</a> (culture) plutôt qu’en changeant l’organigramme (structure) qu’il sera possible d’imiter les comportements d’un réseau, et peut-être de battre Al-Qaida et les insurgés à leur propre jeu en Irak.</p>
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<p>Or, la matrice de l’armée américaine, y compris celle des forces spéciales, est celle du modèle bureaucratique fondé schématiquement sur la hiérarchie, la division du travail, le réductionnisme, la spécialisation, le respect formel de règles écrites, la distinction décision-exécution, le caractère unidirectionnel de l’information qui remonte et celui de la décision qui descend, le tout au service de l’efficience par l’optimisation des moyens.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-renaissance-de-larmee-americaine-apres-la-guerre-du-vietnam-un-cas-decole-pour-toutes-les-organisations-212069">La renaissance de l’armée américaine après la guerre du Vietnam, un cas d’école pour toutes les organisations ?</a>
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<p>Pour fonctionner en réseau, McChrystal va alors pratiquer une autonomisation (empowerment) maximale des unités à l’intérieur de fenêtres de tir étroites de 24 heures. Tous les jours à la même heure, des centaines puis des milliers d’acteurs vont se connecter pour partager le renseignement et revisiter les priorités. Fort de cette information, les unités vont agir en autonomie et mener toutes les actions que la situation sur le terrain exige, selon elles, sans autorisation de la chaîne hiérarchique. En se connectant à d’autres unités voire à d’autres entités à l’intérieur du gouvernement américain (DIA, CIA, FBI…), ces unités vont à la fois alimenter le flux d’information en temps réel et en même temps bénéficier de l’information issue d’autres points de contact, le tout pour agir dans l’instant.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/550007/original/file-20230925-17-4me52s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Les forces d’opérations spéciales de l’US Air Force et un pilote secouru après une mission de sauvetage réussie" src="https://images.theconversation.com/files/550007/original/file-20230925-17-4me52s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/550007/original/file-20230925-17-4me52s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/550007/original/file-20230925-17-4me52s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/550007/original/file-20230925-17-4me52s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/550007/original/file-20230925-17-4me52s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/550007/original/file-20230925-17-4me52s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/550007/original/file-20230925-17-4me52s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les forces d’opérations spéciales et un pilote secouru après une mission de sauvetage réussie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://picryl.com/media/us-air-force-usaf-special-operation-forces-sof-personnel-and-a-rescued-us-military-5ce9bf">Picryl</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour éviter que les cellules autonomes ne transforment l’organisation en anarchie, le temps de décision autonome est court et l’espace de décision est très clair (zones de « no go » etc.). Ce fonctionnement va libérer les énergies et les actions. De 10-20 raids par mois, TF714 va en exécuter près de 300 par mois à partir de 2006, et ce pendant plusieurs années, sans moyens supplémentaires. Étonnamment, non seulement le nombre d’actions entreprises va croître, mais leur qualité également. En témoignent l’exploitation et la dissémination accélérées du renseignement entre les nodules du réseau américain, en temps réel, ce qui enrichit « l’intelligence » distribuée entre les unités et donc leur vitesse et pertinence dans l’action.</p>
<h2>Capacités apprenantes</h2>
<p>Le pilotage de cette transformation illustre les <a href="https://onesearch.wesleyan.edu/discovery/fulldisplay/alma9932145040903768/01CTW_WU:CTWWU">capacités apprenantes de la TF714</a> pourtant sous contraintes extrêmes : </p>
<ul>
<li><p>un leadership qui commence par changer lui-même, en profondeur, puis qui porte avec passion une vision renouvelée en adoptant les comportements qui en découlent (accent sur la qualité de la relation, sur l’importance de la confiance, de l’humilité) ; </p></li>
<li><p>(faire) admettre l’insuffisance d’actions pourtant exécutées à la perfection ; </p></li>
<li><p>tester de nouvelles approches et effectuer une réinitialisation du modèle d’efficacité dans le nouvel environnement en conservant et diffusant les méthodes qui donnent des résultats ; </p></li>
<li><p>ne pas sanctionner les expérimentations qui échouent ou déçoivent, les diffuser pour éviter de les répéter ; </p></li>
<li><p>accepter de constamment faire évoluer ses certitudes et ses schémas mentaux face au réel (« ground truth ») ; </p></li>
<li><p>identifier les forces dans l’organisation et s’en inspirer ; </p></li>
<li><p>repérer les élastiques identitaires qui réactivent les réflexes comportementaux et sont des freins à l’adoption de la nouvelle vision ; </p></li>
<li><p>ou encore, passer du paradigme dans lequel l’information est le pouvoir à celui dans lequel le <a href="https://www.youtube.com/watch?v=9jRkACywckE">partage est le pouvoir</a>.</p></li>
</ul>
<p>Cette transformation organisationnelle, intégralement accomplie sous le feu, <em>in</em> <em>situ</em>, de manière expérimentale et sans toucher à une ligne ou une case de l’organigramme, constitue un cas d’école : il montre en effet que pour se transformer et s’adapter à l’environnement il ne s’agit pas d’écarter les changements structurels de sa boite à outils, mais qu’il s’agit d’y inclure également la culture managériale et le leadership comme puissants adjuvants au service d’une démarche stratégique renouvelée.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/managers-et-si-vous-vous-inspiriez-des-methodes-de-larmee-205888">Managers, et si vous vous inspiriez des méthodes de l’armée ?</a>
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</p>
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<img src="https://counter.theconversation.com/content/214291/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Misslin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans l’Irak déstabilisé par la chute de Saddam Hussein en 2003, les unités d’élite américaines ont transformé leur culture – sans toucher à l’organigramme – pour tenter de répondre au chaos.Thomas Misslin, Doctorant, Sciences de Gestion, Dauphine-PSL - Chef de projet, Executive Education, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2129252023-09-14T17:02:34Z2023-09-14T17:02:34ZFemmes et minorités à la haute direction : ça bloque dans l’antichambre<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/548144/original/file-20230913-33750-imqte4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=40%2C0%2C4470%2C2971&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le pourcentage de femmes à la tête des entreprises en Amérique du Nord scille toujours autour de 5%.
</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Depuis quelques années, de nombreuses recherches sont publiées sur la représentation des femmes à la tête des entreprises et le constat demeure désolant. </p>
<p>Que ce soit au Canada ou aux États-Unis, le pourcentage oscille toujours autour de 5 % dans les grandes organisations. </p>
<p>Peut-on espérer une augmentation de ce pourcentage au cours des prochaines années ? Est-ce que le vivier de talents féminins dans l’antichambre d’une nomination à la présidence-direction générale est suffisant pour espérer une augmentation substantielle, ou faut-il d’autres stratégies pour changer la donne ?</p>
<p>Respectivement doyenne de l’École de gestion John Molson, et experte depuis plusieurs décennies de la place des femmes dans les hautes sphères du milieu des affaires, nous nous intéressons aux raisons du surplace actuel.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-entreprises-doivent-viser-des-objectifs-plus-ambitieux-pour-lavancement-des-femmes-161172">Les entreprises doivent viser des objectifs plus ambitieux pour l’avancement des femmes</a>
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<h2>Un vivier homéopathique et anémique</h2>
<p>Une <a href="https://www.semanticscholar.org/paper/Diversity-in-the-C-Suite%3A-The-Dismal-State-of-Among-Larcker-Tayan/192970d4859158281b752be4b76bdf7e8dc0a2c6">étude récente</a> publiée par les professeurs David F. Larcker and Brian Tayan, de l’Université Stanford, nous procure des renseignements intéressants à ce sujet. Elle visait à identifier, parmi les 100 plus importantes entreprises américaines, les possibilités que des femmes et des membres de communautés culturelles puissent être nommés à des fonctions de PDG. Ils ont évalué celles et ceux d’entre eux qui occupent des fonctions relevant directement d’un PDG. Les conclusions de cette analyse sont préoccupantes :</p>
<ul>
<li><p>seulement 25 % de femmes occupent de telles fonctions ;</p></li>
<li><p>peu de femmes se retrouvent dans les fonctions les plus porteuses de nominations, soit celles ayant trait aux opérations (15 %), aux services financiers (14 %) et aux services juridiques (35 %) ;</p></li>
<li><p>quant aux fonctions offrant peu de possibilités de promotion comme premier dirigeant, selon les critères utilisés pour sélectionner d’éventuels PDG, celles-ci sont occupées davantage par des femmes (cheffe des ressources humaines, de la gestion des risques, des communications, etc.).</p></li>
</ul>
<p>Cette présence plus forte des femmes dans ces fonctions d’appui est l’illustration <a href="https://hbr.org/2007/09/women-and-the-labyrinth-of-leadership">du labyrinthe du leadership</a>, soit ces détours complexes et sans issu auxquelles les femmes sont confrontées dans leur carrière en raison des stéréotypes, des biais et des obligations familiales qu’elles continuent à assumer seules, malgré un meilleur partage de ces fonctions avec leurs partenaires masculins.</p>
<p>Pourquoi, après tant de décennies d’efforts pour accroître la représentation féminine dans les instances décisionnelles, si peu de femmes parviennent à prendre leur place ? Nous proposons comme explication ces trois discriminants indirects.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/trop-peu-de-femmes-atteignent-les-plus-hauts-echelons-il-est-temps-dagir-177408">Trop peu de femmes atteignent les plus hauts échelons. Il est temps d’agir</a>
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<h2>Le manque d’expérience, un critère discriminatoire</h2>
<p><a href="https://www.spencerstuart.com/research-and-insight/predicting-ceo-success-when-potential-outperforms-experience">Dans un récent article</a> publié par le cabinet-conseil Spencer Stuart, on faisait le constat que la demande pour des PDG expérimentés avait presque quadruplé depuis de début du siècle, passant de 4 % en 1997 à 16 % en 2019. Selon des dirigeants consultés par ce cabinet, les responsables de processus de sélection posent l’hypothèse que l’expérience préalable de PDG est un prédicteur de l’impact que pourra avoir un candidat sur la valeur pour les actionnaires.</p>
<p><a href="https://www.spencerstuart.com/-/media/2019/hbr-ceo-lifecycle/hbr_ceo_lifecycle_spencerstuart.pdf">Les conclusions d’une autre étude</a> réalisée par ce même cabinet sur le cycle de vie des PDG et de leur performance apportent un éclairage qui fragilise cette hypothèse quant au lien entre expérience préalable et valeur actionnariale. </p>
<p>Après avoir analysé la performance de 855 PDG du S&P sur une période de vingt ans, le cabinet a pu constater que les PDG occupant cette fonction pour la première fois produisaient un taux de rendement pour les actionnaires (TSR) plus élevé que les PDG expérimentés. Ces PDG non expérimentés auraient de plus comme avantage de demeurer en poste plus longtemps et avoir une performance moins volatile. </p>
<p><a href="https://www.researchgate.net/publication/272806955_La_remuneration_des_dirigeants_mythes_et_recommandations">Selon les résultats d’une autre étude</a> réalisée il y a quelques années par les professeurs Michel Magnan, de l’Université Concordia, et Sylvie St-Onge, de HEC Montréal, moins de 10 % des différences dans la performance boursière des grandes banques canadiennes peuvent être expliquées par des facteurs propres à chacune d’elles. Parmi eux, les décisions et les initiatives du PDG en place, mais aussi les employés, la clientèle, la localisation des places d’affaires ou le « mixte » d’affaires.</p>
<p>Ce critère d’expérience préalable de PDG et l’importance qu’on y accorde constituent un facteur de discrimination indirecte qui prive les femmes, les représentants des communautés culturelles et les jeunes talents d’accéder à ces fonctions. Outre d’être discriminatoire, ce critère perpétue de plus le statu quo et limite l’accès à de telles fonctions à un groupe restreint d’individus.</p>
<h2>Embaucher des gens qui nous ressemblent</h2>
<p>L’adéquation culturelle, ou « culture fit », vise à sélectionner des talents qui sont en adéquation avec la culture de l’entreprise, c’est-à-dire ses valeurs, sa vision, sa raison d’être, ses objectifs et autres éléments qui la caractérisent. </p>
<p>Si un tel processus de recrutement a pour avantage de recruter des talents qui sauront s’intégrer et performer rapidement, il cependant comme désavantage de favoriser le statu quo et la règle de la majorité, ainsi que de s’entourer de personnes qui nous ressemblent, soit par le sexe, l’âge, les origines culturelles et autres différences <a href="https://insight.kellogg.northwestern.edu/article/cultural-fit-discrimination">pouvant être considérées comme dérangeantes</a>. </p>
<p>Dans <a href="https://www.talentinnovation.org/_private/assets/IDMG-ExecSummFINAL-CTI.pdf">cette étude</a> du Center for Talent Innovation, on montre bien que l’innovation prospère dans un environnement où les dirigeants acceptent la différence, s’ouvrent aux changements et aux perturbations et encouragent la libre expression.</p>
<h2>La valeur financière sous-estimée de la diversité</h2>
<p>Un groupe de chercheurs de la Bryant University et de l’Université Concordia, <a href="https://journals.aom.org/doi/abs/10.5465/AMPROC.2023.134bp">ont réalisé une étude empirique sur les performances financières</a> de PDG à la tête d’entreprises américaines cotées en bourse. Ils ont totalisé plus de 11 600 observations annuelles, sur une période de 15 ans (1998-2013). </p>
<p>Il en ressort que les femmes de couleur et les femmes blanches ont réalisé des performances financières supérieures à celles enregistrées par les hommes de couleur, qui eux ont mieux fait que les hommes blancs. Selon les auteurs, ces résultats s’expliquent par le fait que dès leur très jeune âge, les personnes issues des minorités se font dire par leur entourage qu’elles doivent développer leur résilience, et que si elles veulent réussir, elles doivent être plus intelligentes et faire mieux que n’importe qui d’autre. </p>
<h2>Un leadership plus humain</h2>
<p>Dans un monde où la volatilité, l’incertitude, la complexité et l’ambiguïté prévalent, ce sont les qualités de leadership appropriées à un pareil contexte qui doivent guider dans un processus de sélection. Ces qualités — agilité, adaptabilité, empathie, humilité — se trouvent tout autant chez les femmes que les hommes. C’est ce qu’on appelle les compétences douces ou « soft skills ». </p>
<p><a href="https://hbr.org/2022/07/the-c-suite-skills-that-matter-most">Selon une étude publiée en août 2022</a>, la quête de ces qualités prend de plus en plus de place dans les descriptions de fonctions pour les postes de haute de direction depuis la dernière décennie. Seul le recours prioritaire à celles-ci pour identifier les meilleures candidatures assurera des règles de jeu équitables tout autant pour les femmes que les hommes. </p>
<p>Il est bénéfique pour les entreprises de prendre conscience de l’importance de la diversité des talents et de styles de leadership. En promouvant les meilleures personnes aux postes de pouvoir, elles deviennent plus performantes et humaines.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212925/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Après des décennies d’efforts pour accroître la représentation féminine dans les instances décisionnelles des entreprises, peu de femmes parviennent à prendre leur place.Louise Champoux-Paillé, Cadre en exercice, John Molson School of Business, Concordia UniversityAnne-Marie Croteau, Dean, John Molson School of Business, Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2103172023-07-27T19:37:00Z2023-07-27T19:37:00ZUn bon leader est-il nécessairement empathique ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/538984/original/file-20230724-21-f5ild5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=84%2C18%2C823%2C556&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans un contexte d’augmentation des risques psychosociaux, ignorer les émotions au travail n’aide pas…
</span> <span class="attribution"><span class="source">Melissa Hogan/Wikimedia commons</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>De nombreux dirigeants se posent secrètement la question suivante : « est-il efficace, rentable et utile pour moi de faire preuve d’empathie en tant que leader ? » La réponse est simple : oui, c’est efficace. Et c’est bon pour tout le monde.</p>
<p>L’empathie, qui consiste à essayer de se mettre à la place de l’autre personne, s’applique à de nombreuses situations professionnelles ; elle signifie que nous écoutons et que nous nous soucions des autres, ce qui favorise un bon environnement de travail et limite les risques psychosociaux au travail.</p>
<p>Pourtant, des préjugés et des erreurs de pensée semblent s’interposer et empêcher les dirigeants de faire preuve d’empathie. Par exemple :</p>
<ul>
<li><p>Si je fais preuve d’un peu d’empathie, je vais devenir le « bureau des pleurs » de mes employés.</p></li>
<li><p>Si je fais preuve d’empathie, j’estime devoir être récompensé. L’autre personne me doit quelque chose et, si elle ne me le rend pas, c’est la preuve que je perds mon temps.</p></li>
<li><p>Les leaders qui font preuve d’empathie sont faibles : je ferais donc mieux de paraître dur.</p></li>
</ul>
<p>Or, un dirigeant peut être <a href="https://www.linkedin.com/pulse/leadership-power-empathy-dr-julia-milner-1e/?trackingId=vnAMRrOcTcCe0cd4wjOGGA%3D%3D">fort et empathique</a>. Nous ne sommes pas faibles parce que nous nous soucions des autres. Cependant, inclure l’empathie et les émotions signifie que nous créons une nouvelle façon de voir le leadership.</p>
<h2>Le défi du télétravail</h2>
<p>Mes <a href="https://au.linkedin.com/in/drjuliamilner">recherches</a> ont montré que, souvent, l’état d’esprit d’un leader l’empêche de faire preuve d’empathie. Les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/dirigeants-62811">dirigeants</a> estiment notamment que l’empathie reste l’une des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/competences-80203">compétences</a> les plus difficiles à démontrer, d’autant plus avec l’essor du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/teletravail-34157">télétravail</a> qui réduit les échanges en présentiel.</p>
<p>Or, les personnes qui reçoivent les messages du dirigeant ne ressentent pas l’empathie de cette manière. Certaines personnes préfèrent d’ailleurs les interactions écrites car elles leur donnent le temps de réfléchir et de ne pas réagir immédiatement. Pour autant, elles n’ont pas l’impression qu’il y a automatiquement un manque d’empathie.</p>
<p>Pour les leaders, cela signifie ce qui suit :</p>
<ul>
<li><p>Les dirigeants doivent vérifier si leur propre état d’esprit les gêne ou si un biais cognitif les empêche de faire preuve d’empathie.</p></li>
<li><p>Il faut clarifier la manière de traduire l’empathie dans le monde virtuel. N’oubliez pas : l’important n’est pas <em>ce que</em> vous dites, mais <em>comment</em> vous le dites. Nous avons notamment observé que, pour les appels vidéo, les participants pensent souvent qu’un écran signifie que je peux oublier mes propres expressions faciales. A contrario, certains dirigeants sont tellement concentrés sur la façon dont ils se présentent qu’ils fixent la fenêtre de leur propre écran et perdent l’attention qu’ils portent à l’écoute.</p></li>
</ul>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Il s’agit donc de trouver un juste milieu et de s’habituer à faire preuve d’empathie virtuellement. Les dirigeants ne doivent pas non plus oublier leur voix, en particulier lors des appels vidéo, car la voix devient très importante lorsque les participants font plusieurs choses à la fois, qu’ils écoutent sans nécessairement vous regarder tout le temps. Autrement dit, les manifestations de l’agitation ou du stress dans la voix, ou encore le fait de laisser peu de place aux questions vont envoyer des signaux d’un manque d’empathie.</p>
<h2>Renforcez le « muscle » de l’empathie</h2>
<p>Pour contourner ces obstacles, voici quelques conseils sur la manière de <a href="https://www.linkedin.com/posts/drjuliamilner_empathy-leadership-empathyatwork-activity-7045703432480972802-GE2-/?originalSubdomain=pf">commencer à montrer de l’empathie</a> :</p>
<ul>
<li>1) Dans chaque interaction, pensez systématiquement à écouter, à poser des questions et à donner des signaux qui montrent que vous avez bien saisi les messages – sans tomber dans une communication artificielle. Vous renforcerez ainsi votre « muscle » de l’empathie par l’entraînement et l’expérience.</li>
</ul>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/DrVt0UbfBu0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Empathy at work | How to do it in 4 practical steps (Julien Milner, en anglais).</span></figcaption>
</figure>
<ul>
<li><p>(2) Enregistrez une vidéo et vérifiez vos e-mails lors des interactions quotidiennes. Même s’il est initialement étrange de se voir en vidéo ou d’analyser le « comment » de notre communication, ces séances de débriefings peuvent aider à identifier certaines erreurs.</p></li>
<li><p>(3) Essayez de trouver quelqu’un qui est reconnu pour ses qualités d’empathie. Observez et posez des questions pour vous améliorer.</p></li>
</ul>
<p>Ignorer les émotions au travail n’aide pas à favoriser un environnement… L’empathie doit donc être affinée et pratiquée. Autrement dit, il est grand temps de faire de l’empathie une compétence essentielle du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/leadership-24112">leadership</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210317/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julia Milner ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Savoir se mettre à la place de l’autre apparaît comme une compétence de plus en plus essentielle. Or, plusieurs biais empêchent les dirigeants de la mettre en place.Julia Milner, Professeure de leadership, EDHEC Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2087702023-07-05T17:32:20Z2023-07-05T17:32:20ZBien-être au travail : et si les SCOP avaient tout compris ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/534787/original/file-20230629-19-puskmt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=127%2C26%2C1270%2C909&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le taux de pérennité à 5&nbsp;ans des SCOP a augmenté de 3&nbsp;points par rapport à 2021&nbsp;: il atteint 76&nbsp;% contre 61&nbsp;% pour l’ensemble des entreprises françaises. (Ici, l'ancienne usine Fralib de Gémenos (13), produisant des thés et infusions, qui s'est transformée en SCOP en 2014).
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/alternative-libertaire/38176825802">Flickr/Levan Ramishvili</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La <a href="https://theconversation.com/fr/topics/reforme-des-retraites-82342">réforme des retraites</a> de 2023, qui entérine le report de l’âge légal de départ à 64 ans, soulève la question de la soutenabilité du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/travail-20134">travail</a>. Selon la Dares, la direction statistique du ministère du Travail, 37 % des salariés ne se sentaient pas capables, en 2019, de tenir dans leur travail jusqu’à la retraite. L’exposition aux risques professionnels – physiques ou <a href="https://theconversation.com/fr/topics/risques-psychosociaux-35370">psychosociaux</a> – explique notamment ce chiffre élevé.</p>
<p>Les <a href="https://www.banquedesterritoires.fr/en-2023-les-embauches-se-stabilisent-et-les-difficultes-de-recrutement-augmentent">difficultés de recrutement</a> et les différentes formes de démission (<a href="https://theconversation.com/le-mystere-de-la-grande-demission-comment-expliquer-les-difficultes-actuelles-de-recrutement-en-france-173454">visible</a> ou <a href="https://theconversation.com/quiet-quitting-au-dela-du-buzz-ce-que-revelent-les-demissions-silencieuses-192267">silencieuse</a>) que connaissent de nombreuses entreprises s’expliquent en partie par les <a href="https://dares.travail-emploi.gouv.fr/publication/quelles-sont-les-conditions-de-travail-qui-contribuent-le-plus-aux-difficultes-de-recrutement">conditions de travail</a> perçues dans le secteur ou dans le poste proposé, et, plus globalement, par le déphasage entre les attentes des uns et les offres des autres. Deux années de crise Covid ont profondément <a href="https://corporate.apec.fr/home/nos-etudes/toutes-nos-etudes/bilan-2022-des-difficultes-de-recrutement-de-cadres.html">changé la donne</a>. Ce n’est donc pas pour rien si les spécialistes considèrent aujourd’hui la Qualité de Vie et des Conditions de Travail (QVCT) comme un <a href="https://www.preventica.com/presse/2023/preventica-paris-2023-le-bilan.pdf">facteur central d’attractivité</a>, de fidélisation et de performance de l’entreprise.</p>
<p>Face à cette situation, les auteurs de <a href="https://dares.travail-emploi.gouv.fr/sites/default/files/cce92165fbf37551d78048a7f7ed8220/Dares-Analyses_Facteurs%20qui%20influencent%20la%20capacite%20%C3%A0%20faire%20le%20meme%20travail%20jusqu%27a%20la%20retraite.pdf">l’étude</a> de la Dares concluent :</p>
<blockquote>
<p>« Une organisation du travail qui favorise l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/autonomie-52709">autonomie</a>, la participation des salariés et limite l’intensité du travail tend à rendre celui-ci plus soutenable ».</p>
</blockquote>
<p>L’exposition aux risques, physiques ou psychosociaux, va de pair avec un sentiment accru d’insoutenabilité. L’autonomie et le soutien social (de la part des supérieurs, des collègues, ou des représentants du personnel) favorisent au contraire la soutenabilité, comme la participation à la prise de décisions atténue les impacts des changements organisationnels.</p>
<p>Ce type d’organisation se retrouve justement dans les sociétés coopératives et participatives (SCOP). Il s’agit de sociétés anonymes (SA) ou de société à responsabilité limitée (SARL) devenues « entreprises de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/economie-sociale-et-solidaire-22578">l’économie sociale et solidaire</a> » (ESS) par choix et par agrément. Les principes (but poursuivi autre que le profit, double projet humain et économique) et les règles de l’ESS (gouvernance, partage des bénéfices) sont ainsi inscrits dans leurs statuts. </p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/534986/original/file-20230630-17-zuvny9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/534986/original/file-20230630-17-zuvny9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/534986/original/file-20230630-17-zuvny9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=247&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/534986/original/file-20230630-17-zuvny9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=247&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/534986/original/file-20230630-17-zuvny9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=247&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/534986/original/file-20230630-17-zuvny9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=310&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/534986/original/file-20230630-17-zuvny9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=310&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/534986/original/file-20230630-17-zuvny9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=310&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Finalités et règles de gouvernance et de partage propres aux SCOP.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans ces structures, les salariés sont les associés majoritaires : ils détiennent au moins 51 % du capital social et 65 % des droits de vote. Le pouvoir y est exercé démocratiquement et les profits, les risques ou encore les compétences sont partagés. Les SCOP se distinguent ainsi des entreprises classiques par les finalités et les principes qui les guident, le statut d’associé ouvert à leurs salariés, et leur fonctionnement décisionnel, organisationnel et rétributif. La qualité de vie et le bien-être au travail sont au cœur du projet, et ne sont pas des enjeux secondaires ou optionnels.</p>
<p>Au terme de deux <a href="https://www.les-scop-bfc.coop/system/files/Synthe%25CC%2580se%2520Fact%25202021_0.pdf">enquêtes</a> menées auprès de 205 dirigeants et 554 collaborateurs (dans une recherche en partenariat avec la confédération générale des SCOP, la <a href="https://www.les-scop.coop/">CGSCOP</a>), nous avons effectivement pu constater une implication et un engagement au travail élevés, ainsi qu’un sentiment généralisé de bien-être.</p>
<h2>Pouvoir effectif</h2>
<p>Les dirigeants comme les coopérateurs expriment en moyenne des niveaux de bien-être élevés. Le tableau ci-dessous récapitule les auto-évaluations de nos répondants (note sur 10) :</p>
<p><iframe id="GArhN" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/GArhN/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Ce bien-être est favorisé par les pratiques coopératives (organisation du travail, de la décision, rétribution) qui jouent sur l’implication, l’engagement et le sentiment de sécurité des collaborateurs. Il impacte aussi la performance économique de l’entreprise.</p>
<p>Les salariés apprécient notamment leur pouvoir décisionnel. Le sentiment d’« empowerment », c’est-à-dire d’émancipation, de « prise de pouvoir », est en effet particulièrement élevé (8,32/10). D’après la chercheuse américaine Gretchen M. Spreitzer, c’est ce qu’éprouvent des salariés quand ils exercent un <a href="https://journals.aom.org/doi/abs/10.5465/256865">pouvoir effectif sur leur environnement professionnel</a>, à travers un sentiment de compétence, d’impact sur ce qui se passe dans leur entreprise, d’autonomie dans les décisions qui concernent leur travail, et de sens qu’ils trouvent à leur travail.</p>
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<p>Ainsi, même si les coopérateurs ne se saisissent pas tous de la même façon de leur droit à la parole et qu’en pratique la participation est variable, ces sociétés se caractérisent par une participation assez élevée des membres à la prise de décisions stratégiques et opérationnelles.</p>
<p>Pour les coopérateurs, il découle de ce pouvoir décisionnel le sentiment d’une réelle implication vis-à-vis de leur organisation. Le tableau ci-dessous montre les auto-évaluations des salariés concernant différents niveaux d’implication :</p>
<p><iframe id="anz5b" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/anz5b/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>On note enfin que les salariés-associés ont un niveau d’implication affective, d’implication normative, d’<em>empowerment</em> (à travers les sentiments de compétence, d’autonomie, et d’impact), et un sentiment de sécurité de l’emploi plus élevés que les salariés non-associés.</p>
<h2>Contrat psychologique</h2>
<p>Nos répondants estiment, globalement, que le contrat dit <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=SsLBAwAAQBAJ">psychologique</a> avec leur société est particulier et spécifique à ce type de structure. En effet, le contrat entre un salarié et une entreprise n’est pas seulement juridique : il est aussi moral. Ce que je peux donner (mes contributions) comme ce que je peux recevoir (les rétributions) va au-delà du contrat de travail. Par exemple, je donne ma loyauté en échange d’une qualité de vie au travail. C’est un « deal » que les salariés-associés estiment équilibré.</p>
<p>Notre étude dévoile l’importance des valeurs coopératives (soutien, partage, participation démocratique, droit à la parole, etc.) dans le contrat psychologique au sein des SCOP. Ces aspects « immatériels » du contrat permettent de compenser des aspects plus matériels (rémunération, formation, développement de carrière, etc.) pour lesquels les SCOP ne surpassent pas les entreprises traditionnelles.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/535246/original/file-20230703-257505-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/535246/original/file-20230703-257505-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=412&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/535246/original/file-20230703-257505-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=412&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/535246/original/file-20230703-257505-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=412&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/535246/original/file-20230703-257505-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=518&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/535246/original/file-20230703-257505-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=518&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/535246/original/file-20230703-257505-6gxcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=518&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’équilibre du contrat psychologique dans les SCOP.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>En effet, les coopérateurs estiment que leur contrat « immatériel » a d’autant plus de valeur qu’il serait très difficile à retrouver ailleurs, dans les organisations classiques. De plus, cette composante immatérielle du contrat permet de prédire des variables clés telles que le bien-être des coopérateurs, ainsi que le sens élevé qu’ils accordent à leur travail.</p>
<h2>La nécessité d’un leadership « transformationnel »</h2>
<p>Cependant, pour tous, dirigeants comme coopérateurs, le niveau de bien-être dépend du style de leadership. Même si les collaborateurs sont associés et si le terme « gérant » ou « référent » est souvent préféré à « dirigeant » ou « manager », la présence d’un leader pour faire vivre le modèle coopératif reste nécessaire.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/535492/original/file-20230704-26-ampcml.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/535492/original/file-20230704-26-ampcml.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/535492/original/file-20230704-26-ampcml.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/535492/original/file-20230704-26-ampcml.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/535492/original/file-20230704-26-ampcml.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/535492/original/file-20230704-26-ampcml.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/535492/original/file-20230704-26-ampcml.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/535492/original/file-20230704-26-ampcml.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les différences entre leadership « transformationnel » et « transactionnel ».</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les enquêtes menées révèlent l’importance du style de leadership adopté au sein de ces sociétés. Le style dit « transformationnel » (qui encourage l’autonomie, la reconnaissance et la valorisation de chaque membre) est en parfaite adéquation avec les valeurs et le fonctionnement des SCOP. Un tel dirigeant a donc une influence très positive sur le bien-être au travail de tous les membres, y compris le sien. En revanche, si son style est plutôt « transactionnel », ses comportements professionnels apparaissent comme peu adaptés au fonctionnement coopératif et incompatibles avec les aspirations des coopérateurs : ce style ne favorise d’ailleurs ni son propre bien-être, ni celui des autres.</p>
<p>Ces résultats mettent en évidence une spirale vertueuse, caractérisée non par des dispositifs très innovants, comme nous pouvions l’imaginer, mais par des grappes de pratiques organisationnelles et managériales humainement valorisantes et économiquement efficaces, guidées par des valeurs et finalités fortement ancrées dans les statuts, et non négociables. Si elle n’est pas exempte de faiblesses ni exonérée des contraintes que connaît toute entreprise, une des réussites de la SCOP, dans le contexte actuel, est de parvenir à associer le collectif (le « vivre ensemble » et la solidarité) et l’individuel (autonomie, responsabilité, développement), l’humain et l’économique. Oui, c’est possible !</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/535247/original/file-20230703-241559-6883q1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/535247/original/file-20230703-241559-6883q1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/535247/original/file-20230703-241559-6883q1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=224&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/535247/original/file-20230703-241559-6883q1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=224&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/535247/original/file-20230703-241559-6883q1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=224&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/535247/original/file-20230703-241559-6883q1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=282&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/535247/original/file-20230703-241559-6883q1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=282&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/535247/original/file-20230703-241559-6883q1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=282&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La spirale vertueuse, organisée en cercles concentriques, des SCOP.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Selon le réseau des SCOP, on dénombrait, fin 2022, 2606 de ces structures, présentes dans tous les secteurs d’activité, qui pèsent 58137 emplois et 8,4 milliards de chiffre d’affaires. Ces entreprises coopératives ont en outre enregistré une <a href="https://www.les-scop.coop/chiffres-cles-2022">croissance de 11 % par rapport à 2021</a>. Le taux de pérennité à 5 ans a augmenté de 3 points par rapport à 2021 : il atteint 76 % contre 61 % pour l’ensemble des entreprises françaises. La solidité des SCOP reste donc un sérieux atout de l’économie française pour les politiques de l’emploi mais aussi celles visant à favoriser le bien-être au travail.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/208770/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>En associant davantage les salariés aux décisions, le modèle coopératif répond notamment au besoin de valeurs, de sens, de reconnaissance ou encore d’autonomie dans le travail.Claude Fabre, Maître de Conférences en Sciences de Gestion (spécialité ressources humaines), Université de MontpellierFlorence Loose, Maitre de Conférences en Psychologie Sociale, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2075372023-07-03T09:57:57Z2023-07-03T09:57:57ZÊtes-vous victime de « micro-management » ? Sept conseils pour en sortir<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/531320/original/file-20230612-260197-esj5ai.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=21%2C3%2C1164%2C817&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le micro-management peut être motivé par de bonnes intentions mais entraîne souvent des résultats contreproductifs…
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.wallpaperflare.com/illustration-of-woman-in-business-situation-with-ongoing-conflict-wallpaper-aayyc/download/1920x1080">Wallpaperflare.com</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Êtes-vous victime de « micro-management » de la part de votre responsable ? Pour répondre à cette question, imaginez la scène fictive suivante : Marc se rend chez Kelly, sa responsable, pour lui faire part de quelques préoccupations concernant l’équipe et un nouveau projet qui vient d’être lancé. Lorsqu’il frappe à la porte, il entend un bref « entre ». Dans le bureau, Kelly semble occupée, tapant frénétiquement sur son clavier. « Je suis avec vous dans une minute », lui dit-elle, tout en consultant son téléphone et en cochant des éléments sur une liste en papier.</p>
<p>Marc sent qu’il n’aura pas beaucoup de temps, alors il est bref.</p>
<blockquote>
<p>Marc : « Bonjour Kelly, comment ça va ? »</p>
<p>Kelly : « Bonjour Marc, ça va, j’espère que toi aussi. Je n’ai que cinq minutes, car je dois finir un rapport. De quoi veux-tu parler ? »</p>
</blockquote>
<p>[Ses yeux parcourant une grosse pile de papiers devant elle]</p>
<blockquote>
<p>Marc : « Eh bien, je suis préoccupé par la façon dont l’équipe travaille sur le nouveau projet. J’ai l’impression que nous nous ne savons pas exactement où nous allons et que nous nous dirigeons dans la mauvaise voie, je… »</p>
</blockquote>
<p>[L’ordinateur de Kelly émet un son de notification, et elle regarde à nouveau son téléphone.]</p>
<blockquote>
<p>Kelly : « Marc, je te suggère de créer une liste de tâches à faire et en priorisant les tâches les plus urgentes et importantes, de classer les tâches par client, etc. »</p>
</blockquote>
<p>[Et ses suggestions se poursuivent pendant les quatre minutes restantes].</p>
<p>Cette scène présente les trois principaux indicateurs qui caractérisent les situations de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0090261622000055">micro-management</a> que nous avons étudiées dans le cadre de nos travaux sur le <a href="https://www.youtube.com/watch?v=z5hwEDhKn20">leadership</a> :</p>
<ul>
<li><p>Les réunions ne laissent que peu de place au dialogue. En se montrant rapidement directive, le comportement de communication de Kelly n’a pas donné à Marc l’occasion de partager ses réflexions.</p></li>
<li><p>Les émotions ne sont pas prises en compte et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0090261623000013">il n’y a pas empathie</a>. Marc voulait que Kelly l’écoute et reconnaisse son point de vue, ce qui ne fut pas le cas.</p></li>
<li><p>Les instructions détaillées et pas à pas apparaissent comme la seule solution pour résoudre un problème. Kelly a manqué une occasion de tirer parti du pouvoir d’autonomisation des autres et de les soutenir dans la recherche de leurs propres solutions. Marc travaille pourtant beaucoup plus étroitement sur le projet et a probablement plus d’idées sur la façon de le faire avancer.</p></li>
</ul>
<p>Si vous vous reconnaissez dans le personnage de Marc, alors sans doute devinez-vous déjà les conséquences du micro-management : bien que Kelly ait de bonnes intentions – résoudre rapidement un problème qui lui est présenté – le résultat des échanges est, au bilan, contreproductif. En effet, il est plus motivant de créer ses propres solutions plutôt que d’être « micro-managé ». Autrement dit, le micro-management enlève une composante de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/motivation-60842">motivation</a>.</p>
<hr>
<p>
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<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/dou-vient-la-motivation-pourquoi-certaines-personnes-en-ont-elles-plus-que-dautres-193767">D’où vient la motivation ? Pourquoi certaines personnes en ont-elles plus que d’autres ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<h2>Derrière les meilleures intentions…</h2>
<p>Autonomiser les autres ne signifie pas pour autant ne pas fournir de réponse si une personne a besoin d’instructions claires. Le micro-management ne signifie pas non plus que les managers le pratiquent à mauvais escient ou qu’ils ne soutiennent pas la résolution des problèmes. Mais il s’agit d’abord de se demander si l’environnement permet la formulation et la prise en compte d’idées et de propositions diverses.</p>
<hr>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Chaque lundi, que vous soyez dirigeants en quête de stratégies ou salariés qui s'interrogent sur les choix de leur hiérarchie, recevez dans votre boîte mail les clés de la recherche pour la vie professionnelle et les conseils de nos experts dans notre newsletter thématique « Entreprise(s) ».</em></p>
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<p>Or, nous relevons de nos analyses de milliers d’interactions vidéo sur le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/leadership-24112">leadership</a> que les dirigeants peinent à autonomiser leurs équipes. Ainsi, nous avons constaté qu’ils pratiquaient souvent, à leur insu, « un micro-management motivationnel », comme nous l’avons appelé dans un TedXTalks.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/sW_PN3BDa0A?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">The surprising truth in how to be a great leader (Julia Milner | TEDxLiège (2019)).</span></figcaption>
</figure>
<p>Cela signifie que des instructions directes sont données avec un enthousiasme qui transparaît aussi bien dans la voix que dans le langage corporel. Souvent, les leaders ont les meilleures intentions, mais ils manquent de temps et estiment que leurs fonctions les obligent à tout résoudre.</p>
<h2>Que faire ?</h2>
<p>Pour sortir de ces situations, il ne suffit pas de dire à votre responsable que vous ne voulez pas être micro-managé. Voici quelques conseils pour aller plus loin :</p>
<ul>
<li><p>Les leaders manquent souvent de temps. En conséquence, soyez précis et clair sur ce que vous attendez d’eux. Exprimez le fait que vous souhaitez discuter d’un sujet avec eux, que vous aimeriez avoir un point de vue sur une idée que vous avez. Faites en sorte que votre leader vous écoute : « serait-il possible que vous m’écoutiez pendant deux minutes, car cela m’aiderait vraiment à parler de ce sujet x ».</p></li>
<li><p>Demandez-leur de vous poser des questions pour vous assurer de leur écoute : « quelle est la principale question qui vous vient à l’esprit après mon bref exposé ? »</p></li>
<li><p>Concentrez-vous sur les solutions plutôt que de présenter uniquement le problème. Au lieu de signaler un problème, présentez plusieurs idées et suggestions sur la façon de le résoudre : « j’ai réfléchi aux trois solutions suivantes pour notre projet actuel ».</p></li>
<li><p>Demandez des retours (<a href="https://www.youtube.com/watch?v=vg2Ckq79XRM"><em>feedback</em></a>) régulièrement. Pas seulement lors de votre évaluation de performance, afin de pouvoir changer les choses en continu : « j’aimerais connaître votre point de vue et vos commentaires sur x. »</p></li>
<li><p>Soyez transparent sur vos valeurs, renseignez-vous sur vos <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Xg1WccmVKGA">points forts</a> et communiquez-les pour amplifier vos forces sur les projets. Formulez-le clairement : « ce qui me motive, c’est si je peux utiliser xy, faire xy, travailler avec xy ».</p></li>
<li><p>Soyez reconnaissant, montrez votre <a href="https://www.youtube.com/watch?v=2qPkW1SWMg0">appréciation</a> envers l’équipe et son travail. Ne vous contentez pas de vous plaindre ou de parler des problèmes, mais reconnaissez également les choses que votre responsable fait correctement. </p></li>
<li><p>Les <a href="https://theconversation.com/bonnes-feuilles-lemotion-le-virus-le-plus-contagieux-sur-terre-117866">émotions sont contagieuses</a>, efforcez-vous donc de propager celles que vous souhaitez voir davantage dans votre environnement de travail.</p></li>
</ul>
<p>Avec ces conseils, vous pouvez mettre fin à des situations micro-management. Vous pourrez également aider votre responsable à changer de méthodes de management pour favoriser l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/autonomie-52709">autonomie</a> des équipes, donc leur motivation et leurs performances. À vous de jouer !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207537/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julia Milner ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si vous n’êtes pas sûr de savoir comment répondre à cette question, il est probable que vous soyez dans cette situation sans le savoir.Julia Milner, Professeure de leadership, EDHEC Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2058882023-05-29T10:56:30Z2023-05-29T10:56:30ZManagers, et si vous vous inspiriez des méthodes de l’armée ?<p>Les raisons d’être d’une <a href="https://theconversation.com/topics/armee-21672">armée</a> et celles d’une <a href="https://theconversation.com/topics/entreprise-s-137378">entreprise</a> n’ont, a priori, rien de commun. La première vise à protéger et à dissuader le déclenchement de conflits armés ; la seconde cherche à atteindre ses objectifs de profit en distribuant biens ou services sur son marché.</p>
<p>Que pourraient donc bien enseigner les <a href="https://theconversation.com/topics/militaire-55111">militaires</a> à ces acteurs du monde civil ? En quoi l’expérience d’un chef de section ou d’un escadron pourrait enrichir les réflexions et les actions d’un manager de département ou d’une responsable d’atelier ? Qu’est-ce qu’un chef de corps pourrait transmettre à la responsable d’une <em>business unit</em> ?</p>
<p>Malgré ce qui oppose ces deux mondes, les armées sont devenues, en quelques années, des <a href="https://www.xerficanal.com/strategie-management/emission/Thierry-Picq-Tessa-Melkonian-Gerer-les-risques-extremes-les-lecons-des-forces-speciales-pour-l-entreprise_2127.html">sources d’apprentissage</a> importantes pour les managers d’entreprise, aux États-Unis d’abord, et aujourd’hui en France.</p>
<p>Nos travaux de recherche montrent, en effet, que l’armée a une longueur d’avance dans la manière de conceptualiser l’environnement, dans la préparation des collectifs à y faire face et dans le fait de reconnaître le leadership comme facteur décisif.</p>
<h2>Champ de bataille et gestion de l’humain</h2>
<p>Les armées conceptualisent le champ de bataille comme un environnement mouvant et <a href="https://theconversation.com/topics/incertitude-23726">imprévisible</a> dans lequel surviennent des situations aussi complexes qu’ambiguës. Le théoricien militaire prussien Carl von Clausewitz, l’exprimait ainsi en son temps : </p>
<blockquote>
<p>« L’incertitude est l’essence même de la guerre. »</p>
</blockquote>
<p>Être performant en collectif relève alors du <a href="https://www.youtube.com/watch?v=mZ-IBRGfJyY">défi permanent</a>. Un acronyme a été forgé au sein de <a href="https://usawc.libanswers.com/faq/84869">l’armée américaine</a> pour décrire le nouvel ordre mondial post-guerre froide, plus instable, moins prévisible, plus complexe : VUCA pour <em>volatility, uncertainty, complexity and ambiguity</em> (volatilité, incertitude, complexité, ambiguïté). Ce terme est maintenant largement répandu en entreprise pour <a href="https://cmr.berkeley.edu/browse/issues/61_1/">décrire l’environnement concurrentiel</a>, bouleversé hier par la mondialisation, aujourd’hui par la digitalisation ou la pandémie et demain par l’intelligence artificielle.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/mZ-IBRGfJyY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Le champ de bataille, celui de l’armée comme celui de l’entrepreneur, se caractérise ainsi de manière identique. Le monde militaire ayant conceptualisé cette instabilité permanente, il en a tiré très tôt de nombreuses leçons.</p>
<p>Une autre raison qui fait de l’expérience des armées une source opérationnelle de compétitivité et de performance pour les entreprises est leur rapport à l’humain. Si les entreprises ont un discours centré sur le capital humain, les armées joignent plus souvent, et depuis plus longtemps, le geste à la parole, en particulier en matière de développement du leadership. L’engagement et la résilience, l’entraînement et les compétences, le moral des troupes et l’esprit de corps sont perçus comme des facteurs essentiels à la réussite collective.</p>
<h2>L’armée, un savoir-faire pour motiver</h2>
<p>Dans un environnement incertain, comme pour un navire en pleine tempête, tout le monde est attendu sur le pont pour contribuer à la réussite collective. L’engagement de chacun, considéré comme une condition de survie, se manifeste par la prise d’initiative, une participation active à l’action, de l’entraide spontanée, et de la prise de risque.</p>
<p>Le monde militaire, en particulier les forces spéciales et autres unités d’élite, s’appuie sur les <a href="https://www.bkconnection.com/static/Intrinsic_Motivation_at_Work_2nd_EXCERPT.pdf">quatre leviers de la motivation intrinsèque</a> pour susciter l’engagement des personnels. Par motivation intrinsèque, on désigne les sources de motivations propres à l’individu, lorsque l’action elle-même est sa propre récompense. On la distingue de la motivation extrinsèque comme une prime sur objectif, par exemple, ou les félicitations de son manager, qui trouve sa source à l’extérieur de l’individu.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>D’abord, l’armée a <strong>une raison d’être claire</strong>, convaincante : la défense nationale. Cette raison d’être est régulièrement rappelée au travers de multiples cérémonies. Il peut s’agir de visites d’autorités, de la commémoration de l’Armistice du 11 novembre 1918 ou de la Victoire du 8 mai 1945, de la célébration de la Fête nationale et du défilé le 14 juillet, ou d’autres événements spécifiques à tel ou tel régiment (Camerone le 30 avril célébré tous les ans au sein de chaque unité de la légion étrangère par exemple).</p>
<p>L’engagement passe aussi par <strong>un développement permanent de capacités</strong> au travers d’entraînements réguliers qui donnent aux personnels le sentiment réel d’apprendre, de davantage maîtriser techniques et méthodes et de progresser dans leur métier. Compte aussi le renforcement de l’<strong>esprit de corps</strong> au travers de rituels réguliers qui, loin de gommer les individualités, forgent des liens et structurent le collectif par-delà les différences (la marche au pas, les chants, les pots de départ ou d’arrivée, les dégagements, les compétitions internes…).</p>
<p>Enfin, dernier levier, est développée l’<strong>autonomie dans l’action</strong> au service de l’effet final recherché. La motivation intérieure, et la performance collective qui en découle, seront d’autant plus fortes que le ciment du collectif sera fondé sur <a href="https://www-xerficanal-com.em-lyon.idm.oclc.org/strategie-management/emission/Tessa-Melkonian-Un-leader-doit-etre-exemplaire-_3748033.html">l’exemplarité</a> des chefs ; et ceci est vrai aussi bien dans l’armée qu’en entreprise.</p>
<p>De là proviennent quelques pistes de réflexion pour le manager et son équipe : quelle est la vision de l’entreprise ? De l’entité ? De l’équipe ? Est-elle partagée ? Quelles sont les marges de manœuvre des équipes dans la réalisation de la vision ? Quelles sont les opportunités individuelles et collectives de se développer, de s’améliorer ? Quels sont les rituels ? Les rendez-vous incontournables dans le mois ou dans l’année ?</p>
<h2>L’armée, une culture du débriefing</h2>
<p>En environnement VUCA, l’action s’effectue dans une incertitude diffuse qui rend difficile l’interprétation du réel, l’identification des bons leviers et la compréhension des liens entre les décisions et leurs effets. L’interdépendance des éléments de l’environnement, la vitesse d’évolution des situations, et le flou qui nimbe les données accessibles, toujours parcellaires, donne l’impression de « naviguer à vue ». Cette expression sied depuis longtemps au monde militaire et de plus en plus à l’entreprise. Voir plus loin est ainsi une composante de plus en plus importante du leadership. Pour accompagner la réflexion et l’action, des <a href="https://hbr.org/2007/11/a-leaders-framework-for-decision-making">modèles de décision</a> ont été développés au cœur desquels se trouve l’expérimentation ou l’exploration, c’est-à-dire l’apprentissage par l’expérience.</p>
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<p>Sur la base de travaux en psychologie sociale et comportementale, l’armée américaine a mis au point une méthode, le débriefing (<em>After-Action Review</em>), qui permet à un collectif au sortir « d’un coup de feu » de se mettre en réflexivité, d’analyser la situation, l’effet final recherché et le dénouement. Il s’agit de disséquer l’expérience, puis d’en tirer des hypothèses d’action pour le futur : que doit-on conserver, renforcer ou stopper ?</p>
<p>Son emploi régulier, en entraînement comme en opération, et ce à tous les niveaux d’un régiment, permet aux acteurs sur le terrain de tirer les leçons de l’expérience de manière très rapide, et de se projeter dans un avenir parfois très proche avec une nouvelle grille de compréhension à mettre à l’épreuve des faits. Comme le dit l’ancien chef d’état-major de l’armée américaine, le général Gordon Sullivan :</p>
<blockquote>
<p>« Toute équipe qui a une mission claire peut débriefer pour améliorer sa performance. »</p>
</blockquote>
<p>Ce mode d’apprentissage on-line, forme d’antidote à l’effet <em>fog of war</em>, au brouillard qui plane sur le théâtre d’opérations, est l’apanage des unités de l’armée de terre américaine aujourd’hui. Il s’est répandu en France depuis les années 1990, avec adaptations, au sein des <a href="https://www.youtube.com/watch?v=tzlzQY_OE8w">forces spéciales</a>, du RAID, du GIGN ou des sapeurs-pompiers.</p>
<p>Le manager et son équipe sont ainsi invités à se questionner. Comment se déroule le débriefing ? Existe-t-il un protocole adapté au contexte des missions de l’équipe et du secteur d’activité ? Qui est concerné par le processus de débriefing ? Qui le facilite ? Dans quel esprit et avec quels objectifs le débriefing est-il mené ? Le débriefing est-il systématique ou seulement pratiqué après un échec ?</p>
<p>Le tout cependant n’intervient pas sans un leadership par la confiance pour orchestrer le collectif. Le chef d’état-major prussien, Helmut von Moltke, encourageait les officiers à « ne donner que les ordres qui sont strictement nécessaires » pour permettre aux subordonnés d’exprimer pleinement leur créativité et leur intelligence, avec des marges de manœuvre, au service d’une vision claire et intégrée par tous. Au fondement du principe de subsidiarité qui rend possible cette autonomie dans l’action se trouve la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Mf-xYu8uoNk">confiance réciproque</a> entre les subordonnés et les chefs : « pas de leadership sans confiance, pas d’entreprise sans confiance » affirme le général Vincent Desportes, ancien directeur de l’École de Guerre et dirigeant d’entreprise.</p>
<hr>
<p><em>Philippe Horras, officier et commando Marine durant 22 ans, aujourd’hui <a href="https://www.pearl-crisis.com/">conseiller en gestion de crise</a>, a participé à la rédaction de cet article</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205888/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Misslin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Champs de bataille et marchés, l’incertitude plane sur ces deux environnements en constante évolution. L’armée l’a sans doute intégré depuis plus longtemps que les entreprises.Thomas Misslin, Doctorant, Sciences de Gestion, Dauphine-PSL - Chef de projet, Executive Education, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2046432023-05-15T10:18:34Z2023-05-15T10:18:34ZPour devenir un leader, faut-il être drôle ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/523239/original/file-20230427-27-6dqen7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=83%2C0%2C1455%2C989&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’ancien président des États-Unis, Barack Obama a forgé une partie de sa popularité sur des épisodes humoristiques, comme son Mic Drop en 2016.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Maison blanche</span></span></figcaption></figure><p>Si le rire est le propre de l’homme, le sens de l’<a href="https://theconversation.com/topics/humour-24698">humour</a> n’est pas aussi bien partagé chez nombre de dirigeants. Dans ses manifestations publiques ou symboliques, il ne fait pas bon ménage avec le <a href="https://theconversation.com/topics/pouvoir-64767">pouvoir</a>. L’humour a longtemps été condamné par le christianisme, dans la mesure où les Évangiles ne relatent pas d’épisodes dans lesquels Jésus rit. Tel est du moins l’argument du moine ultra rigoriste <a href="https://www.youtube.com/watch?v=tZcKVmljc_Q">Jorge de Burgos</a> dans le roman d’Umberto Eco, <em>Le Nom de la Rose</em>.</p>
<p>Dans les théories classiques du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/leadership-24112"><em>leadership</em></a>, de plus en plus contestées aujourd’hui, l’humour ne fait pas partie des prétendues qualités nécessaires au leadership, telles que la ténacité, l’exemplarité ou la capacité à influencer et motiver. L’humour semblerait s’opposer à l’autorité que doivent incarner les leaders. Pour diriger, il faudrait être sérieux, tant de nombreuses décisions ont des conséquences graves.</p>
<p>En politique, il semble que plus les régimes sont autoritaires, plus l’humour est banni. Des dictateurs comme Mussolini, Pinochet, Staline, Hitler ou Pol Pot n’étaient pas des plaisantins (et c’est bien sûr une litote que de le dire). Dans l’actualité, certains dirigeants puissants présentent des visages sévères et n’utilisent presque jamais l’humour dans leur style de leadership. Les présidents autoritaires Recep Tayyip Erdogan, Viktor Orbán, Vladimir <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2021/10/06/en-russie-l-humour-politique-ne-fait-pas-rire-le-pouvoir-de-vladimir-poutine_6097273_3210.html">Poutine</a>, Xi Jinping ou Ali Khamenei, le mollah iranien, manient peu les calembours ou les jeux de mots.</p>
<p>Dans les démocraties ou au sommet des grandes entreprises, les « petites blagues » sont plutôt mal vues et peuvent décrédibiliser les compétences du leader et ternir son image. Le <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/francois-hollande/video-petites-blagues-autoderision-francois-hollande-le-president-des-bons-mots_2189235.html">président François Hollande</a> semble notamment en avoir fait les frais durant son quinquennat.</p>
<h2>Humour ou ironie ?</h2>
<p>Par leadership, on entend l’aptitude à influencer les autres pour atteindre un objectif et réaliser le changement, sachant que les suiveurs sont plus ou moins libres de suivre le leader. Nous qualifierons d’« éthique », le leader qui ne fait pas de mal aux autres et à son environnement.</p>
<p>L’humour est une forme de communication qui cherche intentionnellement à provoquer le rire ou le sourire. D’un côté, il y a un message supposé humoristique. De l’autre côté, il y a la réponse de ceux qui reçoivent ce stimulus. L’humour peut aussi être considéré comme une disposition d’esprit qui implique souvent la mise en cause de soi-même et l’autodérision. Voilà peut-être pourquoi les leaders autoritaires ou les petits chefs qui ne deviendront jamais grands le détestent : l’humour met en cause l’humoriste lui-même.</p>
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<p>L’ironie, elle, est davantage une manière de railler, de se moquer de quelqu’un ou quelque chose. Dans les discours actuels, elle est utilisée par certains pour fustiger des catégories ciblées. L’intention est moqueuse, malicieuse, parfois cruelle. L’étymologie du mot nous renvoie à la « dissimulation ». <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/04/20/reforme-des-retraites-emmanuel-macron-joue-l-ironie-au-risque-d-alimenter-la-colere_6170378_823448.html">L’ironie</a> donne l’impression de plaisanter, mais il ne s’agit que d’une plaisanterie superficielle : derrière le sourire se masquent le reproche et la morsure.</p>
<p>Dans la bouche d’un leader autoritaire ou négatif, l’ironie devient une arme pour annihiler la motivation et le plaisir au travail. Le sarcasme du leader politique ou économique va souvent de pair avec le narcissisme ou l’arrogance. Le président américain <a href="https://www.washingtonpost.com/podcasts/post-reports/the-irony-of-trumps-casual-attitude-toward-coronavirus/">Donald Trump</a> en avait ainsi fait usage à de nombreuses reprises.</p>
<p>L’ironie, c’est rire des autres ou contre les autres et c’est une des armes des leaders toxiques. L’humour, c’est rire avec les autres ; et comme l’ont démontré de nombreuses recherches académiques sur le sujet, il peut devenir un atout du leader démocratique, positif et éthique, qui ne nie pas ses responsabilités et qui sait faire preuve d’empathie.</p>
<h2>Un levier de changement</h2>
<p>D’après <a href="https://www.cairn.info/revue-humanisme-et-entreprise-2008-3-page-21.htm">Céline Bottega</a>, enseignante à Marseille, l’humour est susceptible de renforcer collectivement les comportements. Il serait d’abord un bon outil de <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/le-management-par-lhumour-une-valeur-en-hausse-1032458">management</a> et leadership. Il favorise les <a href="https://www.letemps.ch/economie/carrieres/lhumour-un-ferment-relations-travail-un-outil-prevention-conflits">relations sociales</a>, rend les situations professionnelles moins négatives et réduit le stress par exemple. Il génère des bienfaits psychologiques : bien-être et plaisir au travail, permet d’éviter la colère et la frustration, deux émotions destructrices des relations sociales. Il redonne, enfin, de l’énergie.</p>
<p>L’humour s’avère également un <a href="https://www.lepoint.fr/culture/humour-fary-le-rire-est-le-premier-moyen-pour-communiquer-19-02-2019-2294444_3.php">bon moyen de communiquer</a>. Il permet de remettre en question les préjugés et de relativiser les opinions. Il met en évidence les contradictions et les croyances erronées. C’est un bon outil de persuasion. Les relations interpersonnelles, dans des négociations âpres par exemple, sont modifiées car l’humour instaure un climat relationnel agréable. Il engendre des émotions positives : la joie, la surprise, la gaieté. </p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Chaque lundi, que vous soyez dirigeants en quête de stratégies ou salariés qui s’interrogent sur les choix de leur hiérarchie, recevez dans votre boîte mail les clés de la recherche pour la vie professionnelle et les conseils de nos experts dans notre newsletter thématique « Entreprise(s) ».</em></p>
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<p>L’humour est enfin un <a href="http://www.journaldunet.com/management/0503/050376humour.shtml">bon levier de changement</a>. Un processus de transformation sera peut-être mieux accepté et mieux vécu si le leader sait communiquer sur ce processus avec humour, avant, pendant et après sa mise en œuvre.</p>
<p>L’utilisation de l’humour par les dirigeants suppose néanmoins que les leaders maîtrisent les lois de la communication.</p>
<p>Dans la communication des politiciens, il apaise les tensions, attire l’attention du public et favorise la mémorisation des messages. Le <a href="https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/s679654_001/humour-politique-de-de-gaulle-a-hollande">général de Gaulle</a> par exemple, savait manier les mots et répondre en 1967 à un journaliste prenant de ses nouvelles :</p>
<blockquote>
<p>« Je ne vais pas mal, mais, rassurez-vous, un jour je ne manquerai pas de mourir ».</p>
</blockquote>
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<p>Le premier ministre britannique Winston Churchill tout comme le président américain Barack <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/usa/barack-obama-un-president-qui-a-de-l-humour_1429943.html">Obama</a> savaient manier avec talent les bons mots dans leurs interventions. L’humour rappelle aux leaders de ne pas se prendre trop au sérieux, même s’ils traitent de choses sérieuses. Il représente un atout pour affronter et résoudre les problèmes pénibles.</p>
<p>Oui, le leader authentique doit savoir pratiquer l’humour. Il ne doit pas hésiter à se moquer de lui-même, de ses défauts et de ses faiblesses. Car l’humour est un signe pertinent de la <a href="https://www.futura-sciences.com/sante/actualites/medecine-avoir-sens-humour-signe-bonne-sante-mentale-64725/">santé mentale</a> et un avantage inestimable dans la vie professionnelle et la vie en général.</p>
<h2>De bonne humeur, toujours !</h2>
<p>Attention cependant, si l’humour constitue un puissant levier pour influencer les comportements, il doit rester éthique, pour que l’outil de leadership ne se transforme pas en support de manipulation. On peut plus difficilement rire d’une guerre ou d’un bateau de migrants. L’humour doit se pratiquer à bon escient, au bon moment et dans la bonne situation. Sinon, il peut dégrader les relations humaines et abîmer la crédibilité du leader. Un P.-D.G serait mal vu s’il galéjait au moment où il annonce un plan de licenciement, de même qu’un ministre annonçant le report de l’âge de départ à la retraite.</p>
<p>À défaut d’humour, le leader a alors un <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/le-manager-a-un-devoir-de-bonne-humeur-affirme-la-coach-corinne-samama.N203777">devoir de bonne humeur</a>. Nul besoin pour le leader d’être un humoriste. Comment peut-il cultiver cette bonne humeur ? Il lui suffit d’apprécier et d’encourager l’humour des autres. On pourrait donc donner le conseil suivant aux dirigeants actuels : restez toujours de bonne humeur, à défaut d’avoir de l’humour vous-mêmes. Si vous en avez, pratiquez-le à bon escient pour dédramatiser les situations, renforcer les comportements positifs et <a href="https://www.lexpress.fr/economie/emploi/au-travail-l-humour-engendre-la-joie-et-le-plaisir-d-etre-ensemble_1293272.html">favoriser les relations sociales</a>.</p>
<p>Si vous en manquez, entourez-vous de collaborateurs qui en ont ou qui sont de bonne humeur. Encouragez le <a href="https://www.capital.fr/votre-carriere/lhumour-est-un-pouvoir-sous-employe-en-entreprise-regrette-la-chercheuse-vanessa-marcie-1454706">rire</a> et la bonne humeur et riez aux blagues des autres. Bannissez, en revanche le cynisme, l’ironie et la moquerie. Lancez de nouveaux projets sur le mode ludique. Faites <a href="https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/20140516trib000830429/le-management-par-le-jeu-un-nouveau-moyen-de-motiver-les-salaries-.html">jouer ensemble</a>, lors des séminaires, les collaborateurs.</p>
<p>Un monde sans humour serait inhumain. Un exercice du pouvoir sans humour le serait tout autant.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204643/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Villemus ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si vous peinez à faire usage de l’humour, appliquez-vous à rester de bonne humeur et à vous entourer de collaborateurs capables de traits d’esprit autres que l’ironie.Philippe Villemus, Professeur chercheur en marketing et leadership, Montpellier Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1977272023-01-22T16:25:31Z2023-01-22T16:25:31ZPour les managers, la méditation pleine conscience fait bien plus que réduire le stress<p>Contrairement aux idées reçues, la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/meditation-34997">méditation</a> pleine conscience (MPC) pour les dirigeants et managers ne les conduit ni à se relaxer, ni à se centrer égoïstement sur eux. Elle ouvre au contraire leur attention à leurs collaborateurs, leur fait prendre conscience des enjeux climatiques et prendre des décisions pour contribuer au bien commun.</p>
<p>Ce sont les premiers résultats d’une étude menée sur le développement d’un état d’esprit durable chez 11 leaders ayant participé à un <a href="https://www.em-strasbourg.com/fr/professionnel/formations/du-leadership-mediation-neuroscience">programme de formation expérientielle</a> fondée sur la MPC développé au sein d’un diplôme universitaire ; et qui ont été présentés au mois de janvier dernier, dans le cadre des journées organisées à Rennes sur <a href="https://www.strategie-aims.com/groups/15">le thème</a> des « Sens, non-sens et contresens de l’enseignement du management : comment former des managers davantage incarnés et plus soucieux de l’éthique ». </p>
<p>La pratique de méditation pleine conscience est pourtant surtout reconnue pour ses effets sur la réduction du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/stress-20136">stress</a> avec notamment le protocole MBSR (<em>mindfulness-based stress reduction</em>) développé par le professeur émérite américain de médecine Jon Kabat-Zinn qui s’est inspiré, en les sécularisant, des <a href="https://www-tandfonline-com.scd-rproxy.u-strasbg.fr/doi/full/10.1080/14639947.2011.564844">principes bouddhistes de la méditation</a>. Depuis quelques années, la méditation pleine conscience est également mobilisée dans les programmes de développement du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/leadership-24112">leadership</a>, cette capacité à influencer et entraîner les autres dans l’action.</p>
<p>Cette pratique s’appuie sur un ensemble d’exercices et de techniques permettant de centrer l’attention sur l’expérience du moment présent, dans une attitude de non-jugement avec une attention portée sur le « monde intérieur et extérieur », selon les termes de Jon Kabat-Zinn.</p>
<h2>« Une joie qui crée de l’envie »</h2>
<p>Dans le contexte de la formation expérientielle qui a fait l’objet de notre étude, fondée sur une observation participante et des entretiens, l’enjeu de la méditation pleine conscience était de favoriser chez les participants le développement d’un état d’esprit de durabilité (EED), ou « sustainability mindset », afin qu’ils s’engagent dans des pratiques socialement responsables.</p>
<p>Les entretiens ont été menés dans les six mois qui ont suivi la fin de leur formation afin de prendre en compte les évolutions des participants dans leur rôle de dirigeants au sein de leurs organisations respectives et de pouvoir ainsi observer les conséquences d’une posture plus socialement responsable de leur part (c’est-à-dire des changements en termes de comportement, de prise de conscience, d’engagement, d’interaction avec les parties prenantes, etc.).</p>
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<p>Les résultats révèlent trois niveaux à travers lesquels la méditation pleine conscience peut favoriser le développement d’un état d’esprit de durabilité chez les leaders : un niveau individuel, qui inclut leurs émotions et leurs ressentis corporels ; un niveau interpersonnel et organisationnel, qui englobe une réflexion sur leur propre rôle de leader et leurs relations avec les autres ; et un niveau sociétal, qui se traduit notamment par un leadership soucieux de contribuer au bien de l’ensemble.</p>
<h2>« Changement de paradigme »</h2>
<p>Le premier niveau concerne le regard que le participant porte sur lui-même avec des transformations relatives à l’émergence d’émotions et de ressentis nouveaux dans le quotidien</p>
<p>Dans les entretiens, plusieurs répondants soulignent l’importance des émotions, comme ce directeur administratif et financier d’un groupe de laboratoires d’analyses médicales, qui évoque un retour de la joie dans sa vie, et qui soutient l’énergie qu’il déploie dans ses projets personnels et professionnels. Comme l’explique la personne interviewée :</p>
<blockquote>
<p>« Je suis de nouveau arrivé à insuffler de la joie dans mon quotidien, ce qui me donne une pêche pour faire bouger les choses. Et ça, c’est une joie qui crée de l’envie ».</p>
</blockquote>
<p>Ces prises de conscience initiées d’abord à un niveau personnel ont eu des effets dans une pratique managériale qui insiste sur l’importance de prendre soin de soi et des autres, ce qui correspond au deuxième niveau. Un participant en témoigne :</p>
<blockquote>
<p>« [J’ai pu] découvrir que c’était important de prendre soin de soi et que c’était le préalable pour être capable de prendre soin des autres. »</p>
</blockquote>
<p>Une autre participante, médecin responsable d’un service de réanimation au sein d’un CHU, abonde dans le même sens :</p>
<blockquote>
<p>« [La formation a favorisé] un changement de paradigme de réflexion sur comment on fait ou comment on avance sur les projets ; cela m’a conduit à travailler de manière différente, à être moins la locomotive et le moteur. »</p>
</blockquote>
<p>Enfin, le troisième niveau fait référence aux décisions et/ou actions de changement dans l’organisation qui ont pu être déclenchées en fonction des expériences personnelles vécues par le leader, tel qu’illustré par un directeur administratif et financier qui a pris part à l’étude :</p>
<blockquote>
<p>« On a monté une formation […] pour que les gens apprennent à prendre soin d’eux-mêmes et découvrent un certain nombre d’outils, de méthodes, d’approches et s’ouvrir un petit peu les yeux, sortir de ses routines habituelles, se rendre compte déjà de ces routines et de voir qu’il y a des moyens d’en échapper. »</p>
</blockquote>
<p>Cette prise de conscience des enjeux sociétaux ressort nettement dans les témoignages, à l’image de celui d’une leader dans la commercialisation de dispositifs médicaux :</p>
<blockquote>
<p>« Mes transformations ont vraiment été de l’ordre de prise de conscience environnementale, chez moi, très forte. C’était un sujet que je connaissais, mais je dirais ‘comme tout le monde’, et qui a pris une place et une mesure tout à fait nouvelles dans le cadre de la formation. »</p>
</blockquote>
<p>Ces premiers résultats invitent à poursuivre la réflexion sur l’importance de prendre en compte non seulement la dimension intellectuelle mais également celle corporelle des ressentis et des émotions dans les processus d’apprentissage. Les dispositifs de formation expérientielle qui associent des activités collectives à des expériences individuelles, incluant la réflexion et la contemplation, restent rares.</p>
<p>Ils semblent en effet ouvrir une voie d’enseignement et de recherche prometteuse pour aller plus loin dans la formation de l’action éthique des leaders à l’aide de dispositifs de formation expérientielle qui favorisent des remises en question de leur manière d’agir voire d’être.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197727/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les participants à une étude expérientielle affirment que cette pratique les a notamment conduits à se tourner vers autrui et à prendre conscience d’enjeux sociétaux.Jocelyne Yalenios, Enseignant-chercheur en Management/RH, Université de StrasbourgAline Pereira Pündrich, Enseignante-chercheure en management, Université de StrasbourgBabak Mehmanpazir, Maître de conférences en sciences de gestion, Université de StrasbourgLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1969732023-01-05T19:24:04Z2023-01-05T19:24:04ZPourquoi a-t-on besoin de « Lehmann Sisters » : plus de femmes aux postes décisionnels<p>L’égalité des sexes a été posée comme l’une des valeurs fondatrices de l’Union européenne. Et pourtant, en 2022, les femmes restent sous-représentées aux postes de décision en Europe. Selon l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE), elles ne représentent que 32,3 % des présidents, membres des conseils d’administration et représentants des salariés, et 21,5 % des PDG, cadres et non cadres des plus grandes entreprises cotées en Europe. La situation paraît sensiblement la même en ce qui concerne les gouvernements, les institutions financières et les académies nationales des sciences.</p>
<p>Au-delà de l’importance d’une représentation égale, nos recherches au sein de l’<a href="https://www.axa-research.org/en/project/paola-profeta">AXA Lab on Gender Equality</a> montrent qu’un leadership équilibré entre les sexes présente de nombreux avantages. Veiller à ce que les femmes soient représentées de manière égale parmi les candidats potentiels à un poste de direction, c’est s’assurer de disposer d’un plus grand nombre de candidats, et accroître ses chances de sélectionner la bonne personne.</p>
<p>Cela a été prouvé empiriquement par la recherche. L’introduction de quotas de genre dans les conseils d’administration en Italie a, par exemple, non seulement augmenté la proportion de femmes dans les conseils d’administration, mais a également amélioré les qualifications de tous les membres du conseil, hommes et femmes. Les hommes moins qualifiés qui siégeaient auparavant au conseil d’administration n’ont, de fait, pas été reconduits dans leurs fonctions. Ce résultat devient possible lorsque des femmes qualifiées et compétentes, prêtes à devenir des leaders, se trouvent en nombre abondant, comme c’est le cas aujourd’hui dans de nombreux pays européens.</p>
<h2>Imaginer les sœurs Lehman</h2>
<p>Un deuxième argument concerne l’agenda des institutions et organisations. Les ordres du jour des directions où les sexes sont équitablement représentés incluent généralement des points négligés là où les hommes se trouvent excessivement majoritaires. Des points qui peuvent pourtant s’avérer importants pour leurs organisations, par exemple, les objectifs de durabilité.</p>
<p>Il a été démontré que la présence de femmes aux postes de décisions politiques est associée à davantage de financements en direction des services de garde d’enfants, eux-mêmes favorisant l’emploi des mères de famille. Les services de garde d’enfants, constituent d’ailleurs une politique clairement efficace en la matière. Importants pour le développement des enfants, ils aident en particulier les femmes à concilier vie professionnelle et vie familiale. Il y a là un cercle vertueux, cela engendrant un renforcement de la place des femmes à la tête des organisations, menant des politiques positives sur le marché du travail.</p>
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<p>Le style de leadership n’est pas non plus sans importance. La recherche a établi que, par rapport aux hommes, les femmes dirigeantes ont tendance à être plus réticentes au risque et moins animées d’un esprit de compétition, plus démocratiques et innovantes, et qu’elles se projettent à plus long terme.</p>
<p>Ces éléments ne sont pas des détails : Christine Lagarde, ancienne directrice du Fond monétaire international et actuelle présidente de la Banque centrale européenne, a souvent fait remarquer que si Lehman Brothers avait été « Lehman Sisters », la crise financière de 2007-2008 n’aurait peut-être jamais eu lieu. Une surreprésentation des hommes dans les organes de décision peut entraîner un comportement agressif et surcompétitif. Et compte tenu des dégâts mondiaux laissés par la crise financière, un leadership de « frères et sœurs » est devenu une référence pour les organisations.</p>
<p>Un exemple plus récent est la pandémie de Covid-19. Une étude réalisée en 2021 sur 194 pays a révélé qu’au cours du premier trimestre de la crise, les pays dirigés par des femmes ont connu de meilleurs résultats. Elles ont eu tendance à imposer des mesures de blocage beaucoup plus tôt que leurs homologues masculins. Pareille observation rejoint le fait que les femmes sont plus réticentes au risque que les hommes, même lorsqu’elles se trouvent au pouvoir. Les données suggèrent également que les citoyennes étaient plus susceptibles de percevoir le Covid-19 comme un problème de santé grave, d’approuver les mesures de restriction des politiques publiques et de s’y conformer.</p>
<h2>Faire évoluer les stéréotypes culturels</h2>
<p>Les stéréotypes enracinés dans les mentalités constituent un obstacle majeur à l’équilibre entre les sexes aux postes de direction. Il est généralement admis que cela est une question de culture, et la culture évolue lentement. Les politiques et les mesures peuvent donc accélérer la réduction des inégalités, mais il faudra du temps pour constater de réels changements.</p>
<p>Il est difficile de mesurer les phénomènes culturels touchant au genre et d’évaluer les progrès réalisés. Les chercheurs utilisent pour cela les données de l’Enquête mondiale sur les valeurs. Elles montrent que les stéréotypes explicites ont diminué au fil du temps, même si les différences d’un pays européen à l’autre restent importantes. L’affirmation « Les hommes sont de meilleurs chefs d’entreprise que les femmes » est, par exemple, approuvée par 15,8 % des citoyens italiens, mais seulement par 4,6 % des Suédois.</p>
<p>Partout, les stéréotypes implicites sont plus forts que les stéréotypes explicites. Des travaux récents montrent qu’ils sont bien établis sur le lieu de travail. Les répondants au test d’association implicite sur le sexe et la carrière ont tendance, par exemple, à associer les femmes avec la famille et les hommes avec la carrière. Les managers qui prennent des décisions en matière d’embauche et de promotion partagent ces stéréotypes. La manière de les contrer et de les atténuer s’avère une tâche plus compliquée, mais pourtant importante pour réduire les écarts entre les sexes sur le lieu de travail.</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=158&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=158&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=158&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=198&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=198&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/310261/original/file-20200115-134768-1tax26b.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=198&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Créé en 2007 pour aider à accélérer et à partager les recherches scientifiques sur des enjeux sociaux majeurs, le Fonds d’Axa pour la recherche soutient près de 700 projets dans le monde mené par des chercheurs issus de 38 pays. Pour en savoir plus, visiter le site ou bien suivre sur Twitter <a href="https://twitter.com/AXAResearchFund">@AXAResearchFund</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196973/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Paola Profeta ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les femmes restent sous-représentées dans les postes décisionnels, même si la recherche montre que l’égalité entre sexes va de pair avec une montée en compétence et en efficacité.Paola Profeta, Director of Axa Research Lab on Gender Equality, AXA Fonds pour la RechercheLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1929102022-11-18T11:47:34Z2022-11-18T11:47:34ZLes footballeurs, ces « leaders involontaires » (mais leaders quand même)<p>À moins d’une semaine du coup d’envoi de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/exemplarite-62932">Coupe du monde</a> 2022, le mardi 15 novembre, Hugo Lloris, capitaine de l’équipe de France, a assuré que « <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/Hugo-lloris-capitaine-de-l-equipe-de-france-quelque-chose-sera-fait-pour-defendre-les-droits-humains-au-qatar/1364865">quelque chose sera fait</a> » concernant les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/droits-de-lhomme-20351">droits humains</a> au <a href="https://theconversation.com/fr/topics/qatar-39492">Qatar</a>, pays-organisateur. « On ne peut pas rester insensibles à ces sujets-là. Ce sera fait dans quelques jours, ou heures, on verra », a poursuivi le gardien de but, sans détailler.</p>
<p>À la question « en attend-on trop des joueurs ? », Hugo Lloris a ensuite répondu par l’affirmative : « le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/football-20898">football</a> a une place assez importante dans la société et on en demande de plus en plus aux joueurs. Mais je crois que ce qu’on nous demande avant tout, c’est d’être performant sur le terrain ».</p>
<p>Cette déclaration, qui intervient après <a href="https://theconversation.com/le-boycott-de-la-coupe-du-monde-aura-ses-limites-mais-le-qatar-ne-sen-sortira-pas-indemne-194587">plusieurs semaines d’appels au boycott</a> de la compétition, signifie-t-elle que, à l’instar des Bleus, on peut être « leader » sans le vouloir ? Et si la réponse est positive, s’ensuit celle de l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/exemplarite-62932">exemplarité</a> et de la responsabilité de ces « leaders involontaires ».</p>
<p>Lorsque l’entraîneur du Paris Saint-Germain Christophe Galtier fait rire (jaune), début septembre, en proposant sarcastiquement, au nom de l’écologie, le char à voile comme alternative à l’avion privé pour aller disputer un match à Nantes, mais aussi lorsqu’<a href="https://www.eurosport.fr/football/coupe-du-monde/2022/eric-cantona-va-boycotter-la-coupe-du-monde-2022-au-qatar_sto9144232/story.shtml">Éric Cantona</a> annonce qu’il ne regardera pas la Coupe du onde au Qatar pour se dissocier d’un événement environnementalement et éthiquement désastreux, ils s’attirent une audience prête à les suivre – ou à les conspuer.</p>
<p>La parole s’avère d’ailleurs à peine nécessaire : l’éclat de rire de Killian Mbappé en écho à son entraîneur sur les chars à voile valait mille mots. Il pouvait signifier que les stars du foot n’ont pas à se sentir concernées par les débats qui préoccupent le grand public. Il pouvait aussi signifier à ses fans que l’écologie n’a pas d’importance.</p>
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<p>La recherche définit le leadership à partir de l’influence que peut avoir une personne sur les autres. C’est ce que l’on retrouve dans les <a href="https://books.google.fr/books?id=dMMEnn-OJQMC"><em>handbooks</em></a> de référence de la discipline comme celui de Bernard et Ruth Bass. Et c’est en ce sens que les prises de position des stars en font des leaders.</p>
<p>Cependant, les études sur le leadership involontaire restent encore <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1048984321000849">sous-développées</a> dans la littérature scientifique. Les chercheurs préfèrent le plus souvent observer l’influence de managers, c’est-à-dire de personnes dotées d’un pouvoir hiérarchique a priori, dans le cadre d’organisations. Leur leadership est alors un instrument au service des objectifs de l’organisation.</p>
<h2>La contagion du ballon rond</h2>
<p>L’une des façons de comprendre le leadership involontaire suppose de ne plus se concentrer sur le leader (le manager par exemple) mais sur la relation entre le leader et les personnes dont il suscite l’adhésion. Exprimer ses propres vues, lorsqu’elles font écho à un ressenti ou à une attente implicite de la part d’une audience, constitue clairement un acte de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/leadership-24112">leadership</a>.</p>
<p>La relation de principe est à sens unique. Elle repose par exemple sur le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1048984321000849">charisme</a>, une forme de pouvoir identifiée dès le début du XX<sup>e</sup> siècle par le sociologue allemand Max Weber qui se fonde sur une attribution prêtée par les suiveurs au leader : celui-ci serait capable de faire ce qui reste impossible au commun des mortels.</p>
<p>Dans le cadre du business ou de la politique, cela passe par l’affirmation d’une certitude dans l’accomplissement d’une vision. On parle alors de « leadership <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1048984399000168">transformationnel</a> ». Mais rien ne garantit que l’audience y croit. Pour les sportifs, la chose est en revanche facilitée par deux éléments.</p>
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<p>D’une part, les études montrent que les attributions sont contagieuses : la reconnaissance d’un seul talent exceptionnel suffit à attribuer au leader une distinction charismatique. Marquer des buts, faire des passes millimétrées et des tacles tout en finesse sont autant d’éléments qui, pour les fans, font du footballeur une personne hors du commun. Il sera, en conséquence, perçu comme doué de clairvoyance et donc suivi.</p>
<p>Le second élément est ce que l’on appelle « l’amiabilité », le capital de sympathie dont jouissent les stars. Il induit dans ce qu’elles disent (ou ce dont elles s’esclaffent) un certain degré de véracité et donc une invitation à s’inscrire dans les foulées du leader. Le leadership n’a donc pas à être délibéré, intentionnel. Par leur talent balle au pied, par leur image sur la pelouse, les footballeurs stars sont des leaders sans le vouloir.</p>
<h2>Un leadership éthique ?</h2>
<p>Quant à savoir quels devraient être les messages de ces leaders par inadvertance, les débats académiques restent grand ouverts. Depuis le début des années 2000 et le crash d’organisations dirigées par de grands charismatiques la recherche a largement intégré une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/ijmr.12082">dimension éthique comme clé de l’influence</a>. La meilleure inspiration pourrait être le leadership responsable, proposé par toute une école de <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10551-011-1114-4">chercheurs suisses</a>.</p>
<p>Ce courant théorise une influence positive du leader sur la base de sa considération pour de multiples parties prenantes. Les leaders responsables parviennent à équilibrer, voire à mettre en synergie les demandes nombreuses et souvent contradictoires qui s’exercent sur leurs organisations. Leur influence se développe ainsi auprès de plusieurs audiences, déterminant des « effets de réseau » qui se renforcent mutuellement.</p>
<p>À condition d’être capables d’intégrer un discours de leader responsable, singulièrement sur les questions du réchauffement climatique et du respect des droits humains, les stars du foot pourraient se construire une influence dépassant largement le cadre qui les a rendus célèbres. C’est à peu près la voie que personnifie Éric Cantona, footballeur retraité, avec sa dénonciation de la coupe du monde au Qatar.</p>
<h2>Face aux contradictions</h2>
<p>Ceux qui évoluent toujours sur les terrains, pour leur part, se trouvent pris dans des contraintes rendant difficile cette forme de leadership. Il n’est pas certain que les exigences de l’entraînement et des matchs laissent l’ouverture d’esprit nécessaire aux joueurs du Paris-Saint-Germain pour se pencher sur les grands défis de la planète, malgré les dénégations de <a href="https://sports.orange.fr/football/ligue-1/psg/article/psg-galtier-prend-la-defense-de-son-equipe-a-propos-de-l-ecologie-CNT000001SIJmf.html">Christophe Galtier</a>.</p>
<p>Il leur est surtout compliqué de dénoncer des parties prenantes, comme les milliardaires du Golfe ou d’ailleurs, qui peuvent être leur employeur et qui leur donnent les moyens de leur distinction via un mode de vie hors du commun. Les conceptions classiques interdisent au leader de se contredire. Seules des théories alternatives comme le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1048984308000040">servant leadership</a> intègrent l’admission d’une vulnérabilité.</p>
<p>En outre, les tournants responsable et <a href="https://theconversation.com/fr/topics/ethique-20383">éthique</a> de la recherche en leadership sont actuellement pris à contre-pied. La promesse d’un leadership positif « universel » est battue en brèche. De plus en plus, le leadership se concentre autour de communautés polarisées, voire opposées. Les leaders personnifient un rêve. Mais que ce rêve ne soit partagé que par une communauté de fans acquis à une cause – gagner la Ligue des champions ou la Coupe du monde, intégrer la jet-set des buteurs et des rappeurs – ne diminue pas la puissance de l’influence exercée par ceux qui l’expriment.</p>
<p>Il existe cependant une limite à l’influence que peuvent exercer les stars du foot. Le leadership en tant que phénomène relationnel suppose de la constance. Pour que l’influence de Christophe Galtier ou Killian Mbappé ait un réel impact, ils devront répéter le message. Peu de chances, vu les polémiques suscitées, qu’on les y reprenne.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/192910/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vincent Giolito ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les sportifs, considérés comme doués de capacités hors normes, sont généralement pour cette raison également perçus comme dotés d’une grande clairvoyance hors des stades.Vincent Giolito, Professeur, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1737872022-04-26T15:24:19Z2022-04-26T15:24:19ZLeadership d’entreprise : pourquoi le ton employé par la direction a des répercussions morales<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/441574/original/file-20220119-8665-163lrao.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C6564%2C5114&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des défenseurs de la langue française protestent contre l'incapacité de Michael Rousseau, directeur général d'Air Canada, à parler français devant le siège de la compagnie aérienne lors d'une manifestation à Montréal. </span> <span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Ryan Remiorz </span></span></figcaption></figure><p>En novembre, Air Canada a fait les manchettes <a href="https://www.lapresse.ca/affaires/entreprises/2021-11-03/unilinguisme-du-pdg-d-air-canada/michael-rousseau-vivement-critique.php">lorsque son PDG s’est adressé à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain</a> et a admis qu’il ne parlait pas français.</p>
<p>Michael Rousseau vit depuis plus de dix ans à Montréal, où se trouve le siège social d’Air Canada. Il a depuis <a href="https://www.ledevoir.com/politique/quebec/645051/michael-rousseau-indigne-de-ses-fonctions">présenté ses excuses et s’est engagé à apprendre le français</a>. </p>
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<img alt="Un homme aux cheveux gris sourit" src="https://images.theconversation.com/files/435686/original/file-20211204-27-1qkad9d.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/435686/original/file-20211204-27-1qkad9d.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/435686/original/file-20211204-27-1qkad9d.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/435686/original/file-20211204-27-1qkad9d.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/435686/original/file-20211204-27-1qkad9d.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/435686/original/file-20211204-27-1qkad9d.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/435686/original/file-20211204-27-1qkad9d.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Air Canada.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Air Canada</span></span>
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<p>Plus récemment, le PDG de SNC-Lavalin a <a href="https://www.cbc.ca/news/canada/montreal/snc-lavalin-ceo-postpone-speech-french-quebec-1.6246286">reporté une allocution</a> qu’il devait donner à Montréal, s’engageant d’abord à rafraîchir ses notions de français.</p>
<p>Et on apprenait à la mi-avril que le CN, la plus grande compagnie de chemin de fer du pays, <a href="https://www.lapresse.ca/affaires/entreprises/2022-04-25/langues-officielles/le-cn-sur-la-sellette.php">ne comptait plus aucun francophone sur son conseil d’administration</a> et ce, même si son siège social est à Montréal et qu’elle est assujettie à la Loi sur les langues officielles. Sa nouvelle PDG depuis le 28 février, Tracy Robinson, est unilingue anglophone.</p>
<p>L’attention médiatique qu’ont attirée le CN, Air Canada et SNC-Lavalin illustre l’importance du comportement des PDG. En effet, ce qu’ils disent et la façon dont ils le disent sont essentiels — cela donne le ton dans la direction de l’entreprise et peut avoir de vastes retombées.</p>
<h2>Ton de la direction : sens et impact</h2>
<p>L’expression « ton de la direction » désigne, de façon générale, les sujets abordés par les chefs d’entreprise, la façon dont ils parlent, ce qu’ils font et la manière dont ils le font. Le ton de la direction est interne lorsque les dirigeants s’adressent aux employés et agissent à l’intérieur de l’entreprise. Le ton est externe lorsque les dirigeants s’adressent à un public élargi, comme M. Rousseau lors de son discours à Montréal, et que leurs actions ont lieu hors de l’entreprise.</p>
<p>Le ton de la direction peut être donné de différentes façons, c’est-à-dire en personne ou à distance (dans les journaux, les communiqués de presse, les rapports, les médias sociaux ou les vidéos).</p>
<p>Le ton de la direction indique le <a href="https://rdcu.be/cBSGZ">raisonnement moral</a> des chefs d’entreprise, révélant ce qui selon eux est bon ou pas, et ce qui est important ou non. Quand un chef d’entreprise donne un discours dans une région francophone, mais qu’il ne parle qu’anglais, cela illustre ce qu’il pense de l’importance de la langue — et de la langue qu’il croit être la plus importante.</p>
<p>Le raisonnement moral que révèle le ton de la direction a des conséquences. Les chefs d’entreprise ont autorité en raison de la place qu’ils occupent au sommet de la hiérarchie organisationnelle. Ce qu’ils disent et font <a href="https://doi.org/10.1007/s10551-013-2035-1">redescend la hiérarchie</a> jusqu’à l’ensemble des employés, légitimisant au passage des comportements particuliers. En parlant anglais dans un milieu francophone, un chef d’entreprise montre qu’il est acceptable de ne pas parler français.</p>
<h2>Ton de la direction : le mauvais et le bon</h2>
<p>Le ton de la direction a un poids moral. Il peut promouvoir une certaine culture au sein de l’organisation, encourageant les employés à se comporter de façon plus ou moins <a href="https://doi.org/10.1080/1359432X.2020.1804876">éthique</a>.</p>
<p>Le ton de la direction peut contribuer à une culture permissive de harcèlement. Par exemple, le PDG d’Uber, Travis Kalanick, <a href="https://www.theguardian.com/technology/2017/jun/20/uber-ceo-travis-kalanick-resigns">a démissionné en 2017</a> après qu’une enquête interne ait mis en lumière le très grand nombre de cas de harcèlement sexuel survenus sous sa direction.</p>
<p>La culture d’entreprise peut ainsi créer un climat qui favorise le harcèlement, y compris le <a href="https://doi.org/10.1177/000312240406900105">harcèlement sexuel</a>, si les dirigeants <a href="https://doi.org/10.1108/PR-07-2016-0169">se montrent passifs</a>, évitent de prendre des décisions et n’interviennent pas lorsqu’ils font face à un comportement inapproprié, à moins que de graves problèmes ne surviennent. Un ton de <a href="https://doi.org/10.1108/GM-11-2019-0198">« laissez-faire »</a> montre qu’un comportement inapproprié est toléré et légitime et qu’il ne sera ni puni, ni corrigé. Les <a href="https://doi.org/10.1016/j.avb.2009.01.002">agresseurs sont encouragés</a>, les victimes réduites au silence. Les témoins savent ce qui se passe, mais ne font rien.</p>
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<img alt="Une femme assise à son ordinateur, la tête dans ses mains" src="https://images.theconversation.com/files/435687/original/file-20211204-27-adau1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/435687/original/file-20211204-27-adau1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/435687/original/file-20211204-27-adau1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/435687/original/file-20211204-27-adau1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/435687/original/file-20211204-27-adau1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/435687/original/file-20211204-27-adau1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/435687/original/file-20211204-27-adau1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Si des comportements comme le harcèlement au travail ne sont pas résolus, ils se multiplient au sein de l’organisation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Piqsels)</span></span>
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<p>Ce problème est exacerbé en cas de <a href="https://doi.org/10.1108/GM-11-2019-0198">leadership hostile</a>, caractérisé par un comportement agressif qui crée un climat de peur <a href="https://doi.org/10.1108/EDI-09-2018-0162">et de silence</a>. Les comportements problématiques favorisés par le ton de la direction peuvent prendre diverses formes et comprennent les <a href="https://doi.org/10.1016/j.jacceco.2012.07.005">délits d’initié</a>, la <a href="https://rdcu.be/cBSKz">communication d’informations inexactes</a> et la <a href="https://doi.org/10.1016/j.jbankfin.2019.06.002">gestion du résultat</a>.</p>
<p>En revanche, le ton de la direction peut favoriser une culture saine lorsque les chefs d’entreprise sont des modèles de conduite sur le plan moral.</p>
<p>Ainsi, les <a href="https://spectrum.library.concordia.ca/id/eprint/989073/">dirigeantes</a> d’entreprises canadiennes que j’ai interviewées mettent souvent l’accent sur l’importance d’un leadership axé sur l’attention et l’empathie.</p>
<p>L’une d’entre elles parle de ce que les gens valorisent, soulignant qu’ils « ne vont pas suivre des actes illégaux ou autres gestes semblables. La paix fondée sur la confiance et l’intégrité se transforme alors en réussites ». Elle explique que la confiance requiert « une pensée intégrative », qui « vient de l’écoute et de l’ouverture ».</p>
<h2>Ton de la direction : prêcher par l’exemple</h2>
<p>Idéalement, les chefs d’entreprise doivent se montrer attentifs envers leurs communautés, se comporter de façon responsable et poser comme des modèles de bonne conduite. Ils connaissent le poids moral de leurs paroles et de leurs actes.</p>
<p>Pour y parvenir, il faut s’y prendre tôt. Les leaders sont le produit de leur culture sociétale. L’éducation joue un rôle essentiel si on veut avoir conscience de nos paroles et actes, de la façon dont ils résonnent chez les autres et de leur impact sur eux.</p>
<p>Proches des bureaux de direction, les conseils d’administration ont la responsabilité de surveiller les chefs d’entreprise ; ils <a href="https://doi.org/10.1177/0008125617712257">doivent agir de façon proactive</a> avant qu’une crise n’éclate.</p>
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<img alt="Une femme parle à des employés à une table de conférence" src="https://images.theconversation.com/files/436448/original/file-20211208-23-1rglos9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/436448/original/file-20211208-23-1rglos9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/436448/original/file-20211208-23-1rglos9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/436448/original/file-20211208-23-1rglos9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/436448/original/file-20211208-23-1rglos9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/436448/original/file-20211208-23-1rglos9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/436448/original/file-20211208-23-1rglos9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les dirigeantes d’entreprise affirment que l’attention et l’empathie sont des éléments essentiels au leadership éthique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>Pour ce faire, ils doivent définir les limites d’un comportement approprié ou inapproprié en s’interrogeant sur les attentes, les priorités ainsi que la façon dont doit agir et parler un chef d’entreprise. Ils doivent déterminer ce qui se passe si les limites fixées ne sont pas respectées.</p>
<p>Les membres d’un conseil d’administration doivent utiliser cette information lors du processus de recrutement afin d’identifier les leaders qui répondent aux attentes de l’entreprise et, par la suite, de les encadrer et de les évaluer de façon exhaustive et régulière.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173787/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Claudine Mangen a reçu des financements du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada.. </span></em></p>Ce que les PDG disent et la manière dont ils le disent sont essentiels. Leurs paroles peuvent donner le ton au sommet de l’entreprise et avoir des répercussions considérables.Claudine Mangen, RBC Professor in Responsible Organizations and Associate Professor, Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1810802022-04-11T21:07:34Z2022-04-11T21:07:34ZAnne Hidalgo et Valérie Pécresse, victimes aussi d’une falaise de verre ?<p>Pour la première fois de l’histoire, il n’y a jamais eu autant de femmes candidates à l’élection présidentielle et les partis historiques, le Parti socialiste (PS) et Les Républicains (LR) ont placé deux femmes à leurs têtes, pour concourir à l’élection présidentielle.</p>
<p>Valérie Pécresse (LR), battue dans les urnes ce dimanche 10 avril avec un score de 4,79 % <a href="https://www.marianne.net/politique/droite/valerie-pecresse-sous-la-barre-des-5-la-droite-pulverisee">ne cache plus</a> sa fatigue et son épuisement. Elle témoigne que « rien » ne lui a été épargné durant cette campagne. Quant à Anne Hidalgo (PS), elle a peiné à fédérer autour de son programme avec une dégringolade dans les estimations de vote jusqu’à un score historiquement bas le soir du premier tour : à 1,74 %, la candidate socialiste est placée <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/04/11/resultats-de-la-presidentielle-2022-avant-le-second-tour-deux-strategies-se-dessinent-chez-macron-et-le-pen_6121567_823448.html">juste au-dessus</a> de Philippe Poutou et Nathalie Artaud.</p>
<p>Valérie Pécresse et Anne Hidalgo seraient-elles victimes du phénomène de la « falaise de verre » ? L’analyse du parcours de ces femmes en politique pourrait être observée au regard de ce que les scientifiques en leadership ont théorisé depuis de nombreuses années.</p>
<p>Ainsi deux chercheurs de l’Université d’Exeter, Michelle Ryan et Alexander Haslam en 2005, ont <a href="https://psycnet.apa.org/record/2005-06147-001">montré</a> à partir d’un échantillon de 100 entreprises cotées à la Bourse de Londres (FTSE) que lors des situations de crise au sein d’une entreprise, les femmes étaient nommées à leur tête. Et non pas l’inverse : ce ne sont pas les femmes qui conduisent à la crise mais bien elles que l’on place quand c’est déjà trop tard.</p>
<h2>Un échec quasi inévitable</h2>
<p>La falaise de verre, terme emprunté à la métaphore du <a href="https://journals.openedition.org/sdt/16326">plafond de verre</a> constitue, aussi une autre forme de discrimination, insidieuse et subtile, plaçant les femmes dirigeantes dans une situation de leadership précaire. Ainsi leur échec en tant que leader est quasiment inévitable, puisque le contexte économique est en crise, ce qui les conduit inexorablement à être stigmatisée en cas d’échec.</p>
<p>Il semble que les candidates du PS et des LR aient été placées au bord du précipice, dans une course électorale difficile à gagner. D’ailleurs, les <a href="https://www.unige.ch/fapse/psychosociale/collaborateurs/kulich">travaux de Clara Kulich</a> suggèrent que placer les femmes à la tête d’une entreprise en crise est observé comme un symbole de changement, voire même de bouc émissaire pour expliquer un échec, dans certains cas.</p>
<p>Depuis l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, les partis traditionnels ont traversé une <a href="https://theconversation.com/disruption-ou-irruption-la-republique-dans-limpasse-presidentielle-174980">crise politique majeure</a>. Positionner deux femmes qui ont pourtant gagné des élections régionales pour Valérie Pécresse et la mairie de Paris pour Anne Hidalgo, les a conduits malgré tout à l’échec.</p>
<p>La falaise de verre s’est illustrée tout au long de leur campagne présidentielle. <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/02/01/presidentielle-2022-le-parti-socialiste-au-bord-de-la-crise-de-nerfs_6111818_823448.html">Au PS</a>, Anne Hidalgo a obtenu le soutien timide d’Olivier Faure. Le premier secrétaire <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/politique/anne-hidalgo-les-traitres-et-les-planques-recit-d-une-semaine-sous-tension-au-ps_2167479.html">reproche</a> cependant à sa candidate de ne pas en faire assez. Anne Hidalgo, l’accuse de son côté de ne pas assez la <a href="https://www.francetvinfo.fr/elections/presidentielle/primaire-populaire-gauche/presidentielle-le-ps-reaffirme-son-soutien-a-anne-hidalgo-apres-la-victoire-de-christiane-taubira-a-la-primaire-populaire_4935877.html">défendre</a>.</p>
<p>Le maire de Dijon et socialiste François Rebsamen évoquait d’ailleurs que le Parti socialiste <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/19h20-politique/presidentielle-2022-anne-hidalgo-est-plombee-par-le-parti-socialiste-affirme-francois-rebsamen-qui-soutient-emmanuel-macron_4974957.html">« tire la candidate vers le bas »</a> au vu de la crise qu’il traverse : difficile dans ce contexte pour Anne Hidalgo de faire des miracles et de redresser une situation déjà critique depuis le <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/ps/le-ps-va-t-il-survivre-au-quinquennat-de-francois-hollande_829003.html">quinquennat de François Hollande</a>.</p>
<p>Quant à Valérie Pécresse, elle s’est vue reprochée tout au long de la campagne son manque d’<a href="https://www.lexpress.fr/actualite/politique/ni-un-monstre-froid-ni-une-macron-valerie-pecresse-en-quete-d-authenticite_2166863.html">authenticité</a>. Bien que très consciencieuse, connaissant son programme sur le bout des doigts, elle a été victime du « syndrome de la bonne élève », ses détracteurs critiquant son manque d’incarnation de la fonction présidentielle, ce qui a contribué à la discréditer.</p>
<p>La campagne présidentielle n’a pas permis aux femmes de se détacher à côté des autres candidats. Bien au contraire, cette campagne a mis en exergue les biais invisibles (comme la falaise de verre) rencontrés par les femmes dirigeantes.</p>
<p>D’ailleurs Michelle Ryan et Alexander Haslam soulignent qu’en cas d’échec, la dissonance entre les attentes stéréotypées de leadership (fermeté, puissance) et les stéréotypes féminins (douceur, bienveillance) est alors renforcées. L’échec conduit alors à discréditer les femmes aux positions de leadership.</p>
<h2>Des attentes et injonctions contradictoires</h2>
<p>Exercer du leadership lorsque l’on est une femme constitue une difficulté particulière parce que les attentes sociales apposées aux femmes (de douceur et de sympathie) sont en contradiction flagrante avec les attentes de leadership (de pouvoir et de domination). Par conséquent, un <a href="https://psycnet.apa.org/record/2018-19642-001">article publié</a> dans la revue <em>The Leadership Quarterly</em> en 2018, suggère que les femmes qui parviennent à asseoir leur leadership et à le voir reconnu par les suiveurs savent gérer avec dextérité, des injonctions paradoxales contradictoires. Être à la fois ferme et compétente, tout en faisant preuve de douceur et de sympathie. Le problème est que ces qualités sont souvent vues comme opposées et difficiles à mettre en place, en même temps.</p>
<p>Il semblerait ainsi que seule Marine Le Pen soit parvenue à gérer ces tensions contradictoires. Elle a réussi à lisser son discours, pour paraître <a href="https://www.lepoint.fr/politique/marine-le-pen-les-francais-estiment-que-son-image-s-est-adoucie-17-01-2022-2460773_20.php">« adoucie »</a>, « davantage sympathique et chaleureuse » dans les yeux des Français (33 %, +4 points par rapport à mai 2021), considérée comme une attente stéréotypée féminine ; tout en étant perçue comme « capable de prendre des décisions » (52 %) (<em>Le Point</em>, 17/01/2022), attente stéréotypée de leadership.</p>
<p>Le parcours des femmes en politique permet d’illustrer le long et difficile cheminement des <a href="https://www.telerama.fr/radio/podcast-popol-entre-engagement-et-bonne-humeur-la-politique-au-feminin-7009021.php">femmes pour accéder au pouvoir</a>, des entreprises ou des administrations publiques. Alice Eagly, l’une des premières chercheuses américaines à travailler sur le leadership des femmes évoque la métaphore du <a href="https://www.apa.org/news/podcasts/speaking-of-psychology/women-leaders">« labyrinthe »</a> pour illustrer le cheminement difficile et complexe traversé par les femmes pour parvenir aux positions stratégiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181080/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sarah Saint-Michel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le résultat des deux candidates des partis historiques montre aussi que le cheminement des femmes en politique demeure difficile, excepté peut-être pour Marine Le Pen.Sarah Saint-Michel, Maître de conférences, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1808892022-04-08T16:12:35Z2022-04-08T16:12:35ZQuelle stratégie pour le 3ᵉ tour ?<p>Avant même de connaître le résultat du 1<sup>er</sup> tour de l’élection présidentielle du 10 avril et le nom des deux finalistes, La France Insoumise (LFI) proposait début mars à Europe Ecologie Les Verts (EELV) de réfléchir à un <a href="https://www.francetvinfo.fr/elections/legislatives/legislatives-2022-la-france-insoumise-renouvelle-sa-proposition-d-accord-a-europe-ecologie-les-verts_5053594.html">accord pour les élections législatives</a>.</p>
<p>Jordan Bardella <a href="https://www.lefigaro.fr/elections/presidentielles/jordan-bardella-prepare-la-paix-des-braves-avec-les-electeurs-d-eric-zemmour-20220323">vantait les qualités d’Eric Zemmour et la proximité entre leurs deux mouvements</a> lors d’un débat organisé par Valeurs Actuelles… alors que Marine Le Pen <a href="https://www.lemonde.fr/election-presidentielle-2022/article/2022/03/29/marine-le-pen-tend-la-main-a-marion-marechal-et-renvoie-dos-a-dos-eric-zemmour-et-jean-luc-melenchon_6119706_6059010.html">« tendait la main »</a> à sa nièce Marion Maréchal quelques semaines après le <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/la-france-insoumise/elections-europeennes-deconvenue-pour-la-france-insoumise-qui-obtient-seulement-6-7-des-voix-au-coude-a-coude-avec-le-ps_3451939.html">ralliement de cette dernière au candidat de Reconquête !</a> !</p>
<p>Si coopération entre compétiteurs, connue sous le nom de <a href="https://public.summaries.com/files/8-page-summary/co-opetition.pdf">coopétition</a>, et alliances stratégiques ne sont pas <a href="https://theconversation.com/presidentielle-2022-et-si-la-gauche-etait-au-second-tour-175850">spécifiques aux cercles politiques</a> et sont souvent des moyens de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=2NOO3rnYDcY">coopérer tout en se faisant concurrence</a>, la logique actuelle de la V<sup>e</sup> République impose à la grande majorité des formations politiques françaises ce type de stratégies.</p>
<h2>Les élections législatives, 3ᵉ tour de l’élection présidentielle</h2>
<p>Le passage du septennat au quinquennat présidentiel introduit par la <a href="https://www.vie-publique.fr/fiches/19599-le-quinquennat">loi constitutionnelle du 2 octobre 2000</a> a permis de faire coïncider la durée du mandat présidentiel avec celle du mandat des députés et les élections législatives suivent aujourd’hui de quelques semaines l’élection du président de la République au suffrage universel direct.</p>
<p>Certains considèrent que les élections législatives constituent de ce fait le <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/marine-le-pen/legislatives-trois-questions-qui-planent-sur-le-troisieme-tour-de-la-presidentielle_2161136.html">« 3ᵉ tour »</a> de l’élection présidentielle dans la mesure où elles pourraient permettre d’élire une autre majorité que celle soutenant le président fraîchement élu et le forcer à <a href="https://www.vie-publique.fr/dossier/37993-la-cohabitation-dans-la-vie-politique-francaise">cohabiter</a>.</p>
<p><a href="https://www.assemblee-nationale.fr/depute/election_depute.asp">Le scrutin uninominal majoritaire à deux tours</a> utilisé dans le cadre des élections législatives françaises est aussi un élément qui pousse à nouer des alliances dans la mesure où il laisse peu de chance aux petits partis de faire élire seuls leurs candidats ou à des familles politiques divisées de peser efficacement sur les débats du Palais Bourbon.</p>
<p>Pour les petites formations politiques, ces stratégies sont le moyen d’obtenir un nombre suffisant de députés pour constituer un « groupe » à l’Assemblée Nationale – <a href="https://www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-assemblee/role-et-pouvoirs-de-l-assemblee-nationale/les-organes-de-l-assemblee-nationale/les-groupes-politiques">il faut 15 députés pour faire un groupe depuis 2009</a> – et de servir de force d’appoint à un plus gros parti.</p>
<p>Pour ces derniers, les stratégies d’alliance peuvent permettre de s’assurer une majorité quand celle-ci n’est pas garantie ou de peser face à une nouvelle majorité… et éventuellement de se positionner dans l’optique de l’élection présidentielle suivante.</p>
<h2>Une situation très différente de 2017</h2>
<p>En 2017, beaucoup d’alliances avaient été scellées en amont de l’élection présidentielle (<a href="https://www.lexpress.fr/actualite/politique/elections/emmanuel-macron-et-francois-bayrou-bientot-l-alliance-pour-la-presidentielle_1881916.html">La République en Marche – LREM – et le Mouvement Démocrate – MoDem-</a>, <a href="https://www.publicsenat.fr/article/politique/presidentielle-l-ecologiste-jadot-abandonne-au-profit-de-hamon-55861">Parti socialiste et EELV</a>, <a href="https://theconversation.com/les-communistes-et-lelection-presidentielle-une-histoire-tumultueuse-170398">LFI et Parti Communiste</a> notamment). La situation de 2022 est de ce point de vue assez différente puisqu’écologistes et communistes présentent par exemple chacun un candidat propre (Yannick Jadot et Fabien Roussel).</p>
<p>Les perspectives d’alliances de 2022 sont aussi impactées par l’anticipation d’une réélection de l’actuel président de la République que <a href="https://www.bfmtv.com/politique/elections/presidentielle/tous-les-sondages-de-l-election-presidentielle-2022_GN-202110220314.html">l’écrasante majorité</a> des sondages annonce gagnant depuis plusieurs mois.</p>
<p>Ce scénario annoncé force les autres partis politiques ou certaines personnalités à se projeter sur l’après-présidentielle, par exemple <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/l-edito-politique/presidentielle-2022-derriere-le-ralliement-de-marion-marechal-a-eric-zemmour-l-hypothetique-union-de-la-droite-et-de-lextreme-droite_4973136.html">Marion Maréchal</a> ou <a href="http://www.slate.fr/story/221478/edouard-philippe-temps-long-vie-politique-centralite-horizons-droite-republicains">Édouard Philippe</a> sur les élections présidentielles de 2027 et l’après-Macron.</p>
<h2>Une majorité présidentielle déjà unie</h2>
<p>Pour la majorité présidentielle, les perspectives de réélection et les nombreux soutiens issus de droite (Jean‑Pierre Raffarin, <a href="https://www.francebleu.fr/infos/politique/renaud-muselier-christian-estrosi-et-anthony-borre-presents-au-meeting-d-emmanuel-macron-a-paris-1648914910">Renaud Muselier, Christian Estrosi</a>…) comme de gauche (Manuel Valls, <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/bourgogne-franche-comte/cote-d-or/dijon/presidentielle-francois-rebsamen-et-d-autres-figures-issues-du-ps-creent-un-parti-en-soutien-a-macron-2517468.html">François Rebsamen</a>…) semblent constituer un socle solide pour Emmanuel Macron. Au-delà du ralliement de certains petits groupes parlementaires issus du PS et de LR, de nouvelles alliances stratégiques structurantes, à l’image de celle entre LREM et le MoDem en 2017, paraissent peu probables au moment d’aborder les élections législatives.</p>
<p>Si le <a href="https://www.francetvinfo.fr/elections/regionales/resultats-des-elections-regionales-pourquoi-lrem-n-arrive-toujours-pas-a-s-implanter-localement_4680391.html">manque d’implantation locale</a> demeure une faiblesse du parti présidentiel, la logique d’une dynamique post-élection présidentielle, qui a prévalu jusqu’ici pour tous les présidents sous la V<sup>e</sup> République et avait permis à Emmanuel Macron de remporter assez largement les législatives de 2017 avec <a href="https://www.interieur.gouv.fr/Elections/Les-resultats/Legislatives/elecresult__legislatives-2017/(path)/legislatives-2017/FE.html">350 députés sur 577 sièges</a>, devrait théoriquement prévaloir.</p>
<p>Mais si Emmanuel Macron est finalement réélu le 24 avril prochain, la question sera sans doute de savoir si les conséquences d’événements aussi extrêmes et inattendus que la crise du Covid et la guerre en Ukraine viendront mettre en doute la victoire attendue de la majorité présidentielle aux élections législatives.</p>
<h2>Équation compliquée pour Les Républicains et le Parti socialiste</h2>
<p>La situation est toute autre pour les deux anciens partis dominants de la V<sup>e</sup> République. Avec 29 députés obtenus en 2017 et désormais une réelle chance de ne pas dépasser les 5 % au 1<sup>er</sup> tour de l’élection présidentielle (et de ne pas voir ses <a href="https://www.publicsenat.fr/article/politique/presidentielle-2022-quelles-sont-les-regles-de-financement-de-la-campagne-191106">dépenses de campagne remboursées</a>), le Parti socialiste semble stratégiquement dans l’impossibilité de faire l’économie d’une alliance pour espérer exister lors des législatives.</p>
<p>Des accords avec EELV et/ou le Parti Communiste feraient alors notamment écho au <a href="https://www.jean-jaures.org/publication/le-programme-commun-de-la-gauche-1972-1977-cetait-le-temps-des-programmes/?post_id=16789&export_pdf=1">Programme Commun</a> de 1972 et à la <a href="http://www.slate.fr/story/178563/gauche-plurielle-unite-presidentielle-2022-ps-lfi-eelv-pc">Gauche Plurielle</a> de 1997. La première avait rassemblé le Parti Communiste, le Parti socialiste et le Mouvement des Radicaux de Gauche autour d’un programme commun de gouvernement. La seconde avait réuni la quasi-totalité des partis de gauche dans le cadre du gouvernement de cohabitation de Lionel Jospin sous la présidence de Jacques Chirac.</p>
<p>En 2017, Les Républicains avaient mieux résisté et obtenu 113 députés. La désignation réussie de Valérie Pécresse comme candidate LR à l’élection présidentielle <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/journal-de-18h/journal-de-18h00-par-laura-dulieu-du-samedi-04-decembre-2021">semblait alors pouvoir relancer le parti de droite</a>.</p>
<p>Pourtant, le résultat est aujourd'hui catastrophique après ce premier tout de scrutin. Et les possibilités d’alliance semblent très faibles pour un parti coincé entre LREM, le Rassemblement national et le projet d’Union des Droites de Reconquête ! (qui tente d’<a href="https://www.bfmtv.com/politique/legislatives-marion-marechal-veut-une-coalition-allant-de-reconquete-au-courant-lr-de-ciotti_AN-202204070501.html">attirer à lui le courant d’Eric Ciotti</a>) sans risquer la désagrégation.</p>
<p>La facilité des deux partis à obtenir les <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2022/02/01/election-presidentielle-2022-visualisez-les-parrainages-obtenus-par-les-candidats_6111902_4355770.html">500 parrainages d’élus</a>, nécessaires pour valider leur candidature à l’élection présidentielle est venue rappeler la force de leur présence locale malgré les <a href="https://www.liberation.fr/politique/elections/a-droite-une-implantation-locale-qui-prend-leau-20220311_CW4TPMBAKFAQXPW5APYXX7O6KM/">difficultés pour rester unis</a>.</p>
<p>Leur nombre de députés aura vraisemblablement un impact direct sur leur survie politique et financière. Leur capacité à endosser le costume du « petit » parti, après avoir longtemps été la <a href="https://www.cairn.info/revue-commentaire-2002-3-page-601.htm">force dominante des coalitions passées</a>, est un défi de taille et sera sans doute un élément clef pour mettre en place avec succès une telle stratégie.</p>
<h2>Guerre des chef(fe)s à l’extrême droite…</h2>
<p>Le cas d’une élection présidentielle réunissant deux formations d’extrême droite sous la V<sup>e</sup> République n’est pas inédit et rappelle les élections présidentielles de 2002. À cette occasion, Jean‑Marie Le Pen et Bruno Mégret étaient tous les deux candidats suite à leur <a href="https://theconversation.com/dou-vient-lobsession-identitaire-de-la-politique-francaise-175540">rupture de 1999</a>. Mais l’analogie s’arrête ici puisque Bruno Mégret n’avait obtenu que 2,34 % des suffrages et que Jean‑Marie Le Pen avait, à la <a href="https://academic.oup.com/poq/article-abstract/68/4/602/1884181 ?login=false">surprise générale</a>, accédé au second tour.</p>
<p>En réalité, la situation actuelle renvoie plutôt au duel Chirac/Balladur de 1995. Si Chiraquiens et Balladuriens s’étaient finalement retrouvés derrière Jacques Chirac pour le second tour de l’élection présidentielle, l’affrontement sans merci entre les deux camps avait durablement nourri les <a href="https://www.dailymotion.com/video/x62pqk1">inimitiés et les tensions</a> au sein de la droite conservatrice.</p>
<p>Alors que Marine Le Pen s'est qualifiée pour le second tour, elle devra donc rassembler son camp, mais s’entendre avec les ex-membres du Rassemblement national comme <a href="https://www.franceinter.fr/politique/poids-lourd-du-rassemblement-national-gilbert-collard-rejoint-eric-zemmour">Gilbert Collard</a> ou avec Eric Zemmour ne sera pas facile.</p>
<p>Cette alliance paraît pourtant inéluctable entre deux partis, le Rassemblement national et Reconquête ! qui pèsent à ce jour près de 30 % des intentions de votes et dont l’électorat semble naviguer d’un camp à l’autre en vase communicant.</p>
<p>Mais l’enjeu de cette stratégie d’alliance va bien au-delà des élections législatives. Quelle <a href="https://www.cairn.info/revue-savoir-agir-2015-2-page-13.htm">stratégie</a> pour conquérir un jour le pouvoir ? Quel avenir pour le parti fondé par Jean‑Marie Le Pen et pour le mouvement Reconquête ! ? Qui, en cas de réélection d’Emmanuel Macron, prendra la tête de ce courant politique et se positionnera pour le représenter lors de l’élection présidentielle de 2027, alors que les prétendants ne manquent pas (Marine Le Pen, Eric Zemmour, Marion Maréchal, Jordan Bardella notamment) ? Toutes ces questions pèseront forcément sur les négociations et sur les décisions à venir.</p>
<h2>Rapports de forces à gauche</h2>
<p>La volonté de LFI de convaincre EELV de travailler sur un accord pour les législatives avant même l’issue du 1<sup>er</sup> tour n’est sans doute pas exempte de « calculs » politiques. Cette annonce pourrait favoriser un <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/03/28/presidentielle-2022-le-pen-melenchon-macron-la-bataille-du-vote-utile-qui-pourrait-influencer-le-premier-tour_6119412_823448.html">vote utile</a> pour le candidat de gauche le mieux placé selon les sondages (en l’occurrence celui de LFI) et pousser Yannick Jadot à cesser de critiquer la <a href="https://www.ouest-france.fr/elections/presidentielle/presidentielle-2022-jadot-denonce-une-capitulation-de-melenchon-face-a-poutine-513dc256-9df9-11ec-816b-ed6ee69963f0">complaisance de Jean‑Luc Mélenchon à l’encontre de Vladimir Poutine</a>.</p>
<p>Face à la dynamique de Marine Le Pen, LFI sort battue, mais renforcée, de ce 1<sup>er</sup> tour. Mais ce demi-succès, sur lequel LFI n’avait pas réussi à <a href="https://www.francetvinfo.fr/politique/la-france-insoumise/elections-europeennes-deconvenue-pour-la-france-insoumise-qui-obtient-seulement-6-7-des-voix-au-coude-a-coude-avec-le-ps_3451939.html">capitaliser à l’époque</a>, ne devrait pas renverser un rapport de force qui a tourné en faveur de EELV lors des <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/06/22/l-assurance-de-yannick-jadot-apres-les-elections-europeennes-irrite-la-gauche_5480058_823448.html">élections européenne de 2019</a> et des <a href="https://www.francetvinfo.fr/elections/municipales/resultats-des-municipales-2020-lyon-bordeaux-strasbourg-une-vague-ecologiste-deferle-sur-les-grandes-villes_4019095.html">municipales de 2020</a>.</p>
<p>Dans la perspective d’une alliance stratégique entre les deux partis, cette question est centrale tant la volonté hégémonique de LFI à gauche est source de <a href="https://theconversation.com/communistes-versus-insoumis-les-racines-du-conflit-84646">tensions</a>.</p>
<p>Les oppositions de fond, qui existent sur de nombreuses questions entre les forces de gauche (sur l’Europe et la place de la France dans le monde, le nucléaire, la question de la laïcité, le rapport au communautarisme…), et les questions de personnes demeurent aussi des sources de divergences qu’il faudra dépasser.</p>
<p>La personnalité et les outrances de Jean‑Luc Mélenchon, qui <a href="https://www.lefigaro.fr/politique/les-insoumis-essaient-d-imaginer-le-jour-d-apres-jean-luc-melenchon-20211209">devrait a priori passer la main et ne pas se représenter en 2027</a> compte tenu de son âge, ont jusqu’à présent constitué l’un des principaux freins à un rapprochement stratégique.</p>
<p>Finalement, s’il est évident que de nombreuses tractations pour former des alliances, à droite comme à gauche, vont continuer à avoir lieu d’ici les élections législatives, la principale interrogation concerne sans doute la capacité des formations à dépasser les antagonismes qui les avaient empêchées de s’allier lors de l’élection présidentielle.</p>
<p>Bouleverser les rapports de force que va dessiner l’élection présidentielle du 10 et du 24 avril et faire des législatives le 3<sup>e</sup> tour de la présidentielle seront pourtant vraisemblablement à ce prix.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/180889/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olivier Guyottot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans le contexte actuel de la Vᵉ République la coopétition risque de s’imposer à la grande majorité des formations politiques françaises.Olivier Guyottot, Enseignant-chercheur en stratégie et en sciences politiques, INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1801492022-03-29T19:31:05Z2022-03-29T19:31:05ZVolodymyr Zelensky, un style de leadership au service de son peuple<p>Qu’est-ce qui donne à l’Ukraine le courage extraordinaire d’arrêter un agresseur plusieurs fois plus grand et plus puissant ? Si la détermination du pays a forcément de nombreux facteurs, il en est un, développé par la recherche en management, qui mérite une attention approfondie. Il s’agit du leadership de ses dirigeants, c’est-à-dire, dans la définition académique, l’influence qu’ils exercent informellement, indépendamment de leur pouvoir effectif, sur les personnes placées sous leur responsabilité, dans la <a href="https://www.econbiz.de/Record/the-bass-handbook-of-leadership-theory-research-and-managerial-applications-bass-bernard/10003690372">perspective de susciter une action collective</a>.</p>
<p>Le leadership du président Volodymyr Zelensky se distingue particulièrement à cet égard, car il échappe aux caractéristiques que les chercheurs identifient traditionnellement comme clés de l’influence. Son style se situe à l’opposé des dimensions classiques du leadership dit transformationnel incarnées par des figures comme Elon Musk ou Jeff Bezos. Combinant vision et charisme, la théorie du leadership transformationnel tend à faire de ces leaders des héros peut-être enviables, mais essentiellement détachés du commun des mortels. Comme l’avait noté la philosophe Sandra Laugier dans <em>Le Monde</em>, Volodymir Zelensky <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/03/23/sandra-laugier-zelensky-meme-dans-son-nouveau-role-de-chef-de-guerre-se-pose-en-president-citoyen_6118694_3232.html">ridiculise également le leadership autoritaire</a> et narcissique.</p>
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<figcaption><span class="caption">Qui est le « servant leader » ? (EM Lyon, 2021).</span></figcaption>
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<p>Comprendre le leadership de Volodymyr Zelensky suppose de recourir à une autre grille d’analyse, celle du « servant leadership » que nous mobilisons dans nos <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10551-020-04509-1">recherches</a>. Bien au-delà de la coïncidence avec le titre de la série <em>Serviteur du peuple</em> dont il était le héros télévisé et qui l’a popularisé avant qu’il ne se lance en politique, la relation que le président ukrainien entretient avec ses interlocuteurs depuis le déclenchement de la guerre, le 24 février 2022, fait de lui une incarnation convaincante du servant leadership.</p>
<h2>Primus inter pares</h2>
<p>Développée à partir des années 1970 sur l’inspiration d’un dirigeant d’entreprise, Robert Greenleaf, la <a href="https://www.scirp.org/(S(351jmbntvnsjt1aadkposzje))/reference/ReferencesPapers.aspx ?ReferenceID=1030846">théorie du servant leadership</a> s’appuie sur un postulat majeur, complété par plusieurs dimensions dont la pertinence et l’efficacité ont été montrées par quantité d’études depuis une dizaine d’années.</p>
<p>Le postulat principal, développé par Nathan Eva et ses collègues dans une revue exhaustive de 50 ans de recherches sur le sujet, est qu’un servant leader construit son influence faisant passer les <a href="https://psycnet.apa.org/record/2019-08783-004">intérêts de ses subordonnés en premier</a>, devant ceux de la collectivité, de l’organisation, laissant ses propres intérêts personnels en troisième position. Comme l’a déjà noté le chercheur canadien Ajnesh Prasad dans ces colonnes, <a href="https://theconversation.com/zelensky-superstar-le-president-ukrainien-brille-dabord-et-avant-tout-par-ses-gestes-courageux-178393">il a suffi d’une phrase</a> à Volodymyr Zelensky pour illustrer ce principe cardinal lorsqu’il a décliné l’offre américaine de l’exfiltrer avec sa famille lors de l’invasion russe, réclamant au contraire pour ses concitoyens des moyens pour se battre avec la formule « j’ai besoin de munitions, pas d’un taxi ! »</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1497479868841398275"}"></div></p>
<p>Mais la correspondance entre le style du président Zelensky et la théorie du servant leadership dépasse les principes généraux. L’une des caractéristiques de ces leaders est <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0149206310380462">l’humilité</a>, qualité mise en relief par Dirk van Dierendonck à l’école de management de Rotterdam. À la distance d’avec leurs interlocuteurs, les servant leaders préfèrent la proximité.</p>
<p>L’influence du servant leader ne doit rien à la domination ni à l’admiration vis-à-vis des personnalités hors du commun : il ou elle est seulement <em>primus inter pares</em>, premier parmi des pairs. Lorsqu’il s’adresse aux assemblées et sénats à l’étranger, Volodymyr Zelensky rappelle, en s’habillant en treillis militaire sans marque de grade, que ses pairs sont ses concitoyens sous les bombes et face aux chars, et non les parlementaires qui l’écoutent en costume et tailleur dans des hémicycles lambrissés. Le contenu et le ton de ses discours, s’ils évoquent l’ethos du chef ainsi que l’a signalé l’enseignant-chercheur Alexandre Eyries, font surtout apparaître Volodymyr Zelensky comme le porte-parole de son peuple, <a href="https://theconversation.com/pourquoi-volodymyr-zelensky-est-en-train-de-gagner-la-guerre-de-la-communication-179011">son héraut plutôt qu’un héros</a>.</p>
<h2>« Liberté commune ! »</h2>
<p>La correspondance reste valable lorsqu’on examine le comportement du président ukrainien à la lumière des dimensions identifiées par Robert Liden, de l’Université de l’Illinois à Chicago, qui, avec ses collègues, a conçu le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1048984308000040">questionnaire de mesure du servant leadership</a> sans doute le plus utilisé en recherche, que ce soit en entreprise ou dans le secteur public. Parmi les 7 dimensions du servant leadership, au moins trois semblent trouver une illustration directe avec Volodymyr Zelensky :</p>
<ul>
<li><strong>Les principes éthiques</strong>. Les servant leaders sont reconnus pour l’importance qu’ils attachent à distinguer ce qui est « bien » et de ce qui ne l’est pas, et à privilégier décisions et attitudes qui tombent dans la première catégorie. Les paroles de Volodymyr Zelensky témoignent de cette préoccupation constante. Il en appelle aux valeurs : « la vérité… l’unité… la liberté. » Il établit les priorités d’après une conception morale universelle.</li>
</ul>
<p>« Toutes les entreprises doivent se rappeler une fois pour toutes que les valeurs valent plus que des bénéfices », a-t-il énoncé par exemple devant les députés et sénateurs français le 23 mars. En appeler à l’éthique renvoie à Montesquieu, qui affirmait que le principe de la démocratie est la vertu, par opposition à celui du despotisme : la peur.</p>
<ul>
<li><p><strong>Le sens de la communauté</strong>. C’est la dimension la plus originale de la théorie du servant leadership, qui souligne que l’influence des dirigeants tient à la façon dont ils placent l’action collective au bénéfice de la communauté plus large à laquelle le collectif appartient. Ici réside peut-être l’aspect le plus remarquable de la façon dont le président Zelensky exerce son influence sur la communauté internationale, justement. Pour amener les pays occidentaux à s’impliquer davantage, il expose comment les valeurs propres à ses interlocuteurs sont en jeu dans ce conflit, par exemple dans le cadre initial des négociations sur le Donbass, qui représentait « l’ensemble du monde ». Il en appelle à « notre liberté commune ! »</p></li>
<li><p><strong>L’assistance émotionnelle</strong>. La théorie du servant leadership se singularise également par la reconnaissance des émotions, tout au moins celles des personnes sous la responsabilité des dirigeants. Le servant leader vient au secours de ceux qui souffrent (une dimension qui résonne avec le leadership spirituel dans la plupart des religions). Cet aspect transparaît dans les paroles du président ukrainien, plus spécifiquement dans les mots qui reconnaissent les souffrances. Des mots concrets, lorsqu’il dénonce par exemple le bombardement d’un hôpital pour enfants dans la ville martyre de Marioupol. Des mots à l’opposé du vocabulaire technocratique et autoritaire.</p></li>
</ul>
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<figcaption><span class="caption">Hôpital bombardé en Ukraine : le président Zelensky dénonce un « crime de guerre » (France 24, 10 mars 2022).</span></figcaption>
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<p>Volodymyr Zelensky s’inscrit enfin dans une autre dimension du servant leadership, la confiance, la délégation et l’autonomie (il semble laisser un champ appréciable à d’autres personnalités, comme le maire de Kyiv Vitali Klitschko). Cependant, les données manquent pour établir une correspondance plus exhaustive. La théorie note en particulier que de tels leaders ont de hautes capacités à conceptualiser ; et que, plus qu’ils veillent à « faire grandir » leurs subordonnés pour les inviter à devenir à leur tour des servant leaders.</p>
<p>L’analyse demanderait également à être relativisée dans deux directions. D’une part, des critiques voudront questionner le degré d’authenticité du président ukrainien : le style de Volodymyr Zelensky, comédien de stand-up expert à faire réagir des audiences, ne pourrait-il pas relever seulement de techniques de communication, illustrées dans certaines études sur le <a href="https://www.researchgate.net/publication/258221554_When_Does_Charisma_Matter_for_Top-Level_Leaders_Effect_of_Attributional_Ambiguity">leadership charismatique</a> ? D’autre part, les circonstances terribles de la guerre en Ukraine évoquent la théorie du leadership situationnel, qui indique que des qualités de leader ne sont pas forcément intrinsèques à une personne, mais émergent de la rencontre d’une personnalité avec son environnement.</p>
<p>Il n’en reste pas moins que le président Zelensky impressionne par son impact. Ces dernières semaines, il a entraîné ses concitoyens à arrêter l’offensive russe et, en parallèle, conduit l’Occident à l’unité à son secours. Pour tout responsable d’un collectif, son exemple invite à considérer comment mieux intégrer le servant leadership, en temps de guerre comme en temps de paix.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/180149/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vincent Giolito ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’exercice du pouvoir du président ukrainien depuis le début de l’invasion russe partage des caractéristiques communes avec les principes du « servant leadership » mis en évidence par la recherche.Vincent Giolito, Professeur, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1767042022-03-10T20:26:42Z2022-03-10T20:26:42ZQu’est-ce qu’un « leader » ?<p>Dans moins d’un mois, les Français vont élire leur dirigeant pour les cinq ans à venir. Ce dirigeant sera-t-il un leader (un « meneur ») ?</p>
<p>« Leadership » est un mot abstrait qui désigne une relation entre individus. Le terme renvoie à un facteur crucial dans l’interaction entre les leaders et les suiveurs qui le distingue d’autres relations de domination telles que le management. Ce facteur se rapporte à la nature de l’obéissance. Par exemple, le management implique l’obéissance et <a href="https://citeseerx.ist.psu.edu/viewdoc/download?doi=10.1.1.993.7465&rep=rep1&type=pdf">cette obéissance est volontaire ou involontaire</a>. Lorsqu’une relation de leadership existe, les « suiveurs » ne sont pas des subordonnés obligés d’obéir mais des personnes qui choisissent de suivre.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/etre-un-leader-pendant-lapocalypse-lecons-de-the-walking-dead-134618">Être un leader pendant l’apocalypse : leçons de « The Walking Dead »</a>
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<h2>Pouvoir et autorité</h2>
<p>Pouvoir et autorité coïncident souvent. Par exemple, le pouvoir et l’autorité d’un cadre dirigeant sont normalement observables simultanément. Cette coïncidence fréquente incite à penser que les deux termes sont indissociables et peuvent s’utiliser indifféremment mais ce n’est pas le cas : la coercition n’est pas la coopération et obéir ne signifie pas forcément être d’accord.</p>
<p>Le mot « autorité » peut s’interpréter de plusieurs manières. Dans un sens, le terme désigne une forme de pouvoir, parfois appelé « pouvoir formel » ou <a href="https://www.lisez.com/livre-de-poche/economie-et-societe/9782266132442">« pouvoir légitime »</a> (par exemple, comme dans l’expression « le policier est une figure d’autorité »). Le deuxième sens du mot « autorité », parfois désigné « pouvoir informel » ou <a href="https://www.lisez.com/livre-de-poche/economie-et-societe/9782266132442">« pouvoir personnel »</a>, renvoie à une idée de concession volontaire et d’évaluation (voire de remise en question) régulière du lien de subordination. Par exemple, Didier Raoult, que beaucoup considéraient comme une référence sur les maladies infectieuses, a perdu beaucoup de son autorité à la suite de ses interventions douteuses sur le Covid.</p>
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<iframe src="https://player.vimeo.com/video/662001892" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le langage du leadership, Jean-Étienne Joullié.</span></figcaption>
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<p>Distinguer autorité et pouvoir, c’est reconnaître que l’obéissance obtenue par la contrainte n’est pas de la même nature que l’obéissance obtenue par la coopération.</p>
<p>Pour le sociologue allemand <a href="https://link.springer.com/book/10.1007/978-1-349-01046-2">Carl Friedrich</a>, l’autorité existe lorsque celui qui parle est capable d’élaborer un raisonnement qui justifie ce qu’il dit et qui est accepté en tant que tel par ceux qui écoutent. L’autorité est comprise ici comme une augmentation de la parole, comme l’ajout de la sagesse à la volonté et de la raison à la préférence. En revanche, en l’absence de débat, lorsqu’aucun raisonnement n’est présenté, l’autorité du détenteur du pouvoir se désagrège et la confiance disparaît. La coopération tourne alors à la coercition.</p>
<h2>L’autorité vient d’en bas</h2>
<p>Si, comme le soutient Friedrich, l’autorité est ce qui rend les communications acceptables, la désignation d’une communication comme faisant autorité appartient aux individus auxquels elle s’adresse et non à ceux qui la prononcent. L’autorité vient donc d’en bas parce qu’elle est concédée par ceux à qui elle s’applique. C’est un mandat à commander, une autorisation accordée par d’autres qu’un désaccord persistant dissout.</p>
<p>Le pouvoir ne présuppose pas l’autorité. Il est moralement neutre mais ses usages sont jugés en accord (ou pas) avec l’autorité (au sens d’autorisation). Par exemple, un homme armé a le pouvoir de braquer une banque, mais n’en a pas l’autorité (n’y est pas autorisé).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/soumission-a-lautorite-lobeissance-nest-pas-ce-que-stanley-milgram-croyait-164341">Soumission à l’autorité : l’obéissance n’est pas ce que Stanley Milgram croyait</a>
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<p>En résumé, l’autorité est une source de pouvoir, mais l’inverse n’est pas vrai. Appliquée au leadership, cette analyse implique que le pouvoir d’un leader est conditionné à, et limité par, la concession d’autorité accordée par ses suiveurs. Le leadership ne découle donc pas des caractéristiques personnelles des individus. Ce n’est pas non plus une manifestation du pouvoir, mais c’est une relation fondée sur l’autorité comme source de pouvoir.</p>
<h2>Les cinq fonctions du langage</h2>
<p>Grâce aux travaux du psychologue et linguiste allemand <a href="https://benjamins.com/catalog/z.164">Karl Bühler</a>, du philosophe austro-britannique <a href="https://www.routledge.com/Conjectures-and-Refutations-The-Growth-of-Scientific-Knowledge/Popper/p/book/9780415285940#:%7E:text=Conjectures%20and%20Refutations%20is%20one,to%20politics%20and%20to%20history.">Karl Popper</a> et du psychologue social australien <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/3676129/">Robert Spillane</a>, il est possible de décomposer le langage en cinq grandes fonctions formant une hiérarchie suivant un principe d’implication (c’est-à-dire qu’une fonction d’un niveau donné implique toutes les fonctions des niveaux inférieurs).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/446749/original/file-20220216-27-16tlg1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/446749/original/file-20220216-27-16tlg1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/446749/original/file-20220216-27-16tlg1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=164&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/446749/original/file-20220216-27-16tlg1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=164&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/446749/original/file-20220216-27-16tlg1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=164&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/446749/original/file-20220216-27-16tlg1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=206&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/446749/original/file-20220216-27-16tlg1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=206&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/446749/original/file-20220216-27-16tlg1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=206&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les cinq fonctions et les valeurs du langage.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<p>On distingue le langage expressif, qui exprime un sentiment ou état intérieur au locuteur ; le langage descriptif, par lequel une perception du monde extérieur est communiquée ; et le langage argumentatif, qui véhicule les raisons et les arguments soutenant les points de vue. Vient ensuite le langage conseil, par lequel des recommandations sont exposées et finalement le langage promesse, lorsque les orateurs s’engagent à faire (ou pas) quelque chose.</p>
<p>Chaque fonction du langage peut s’activer selon deux valeurs opposées. Ainsi, les expressions sont soit sincères ou insincères, les descriptions vraies ou fausses, les arguments valides ou invalides, les recommandations justifiées ou non et les promesses responsables ou irresponsables.</p>
<p>Le langage argumentatif est le langage de l’autonomie et de la liberté intellectuelle. Les arguments critiques valides clarifient les problèmes, révèlent les erreurs, exposent les préjugés et démasquent les mensonges.</p>
<p>Les penseurs critiques confrontent les autocrates, les pseudo-experts et tous ceux qui cherchent à faire paraître les problèmes plus complexes qu’ils ne le sont vraiment.</p>
<p>Au contraire, l’absence ou la faiblesse du raisonnement conduit à la confusion, la dépendance et finalement ouvre la porte au contrôle psychologique. C’est pour ces raisons que Winston Smith, dans le livre de George Orwell, <a href="https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Du-monde-entier/1984">1984</a>, est torturé jusqu’à ce qu’il accepte que 2 + 2 = 5. Désormais incapable de penser par lui-même, il doit s’en remettre à « Big Brother » même pour des questions élémentaires.</p>
<h2>Langage noble et langage ignoble</h2>
<p>Pour le philosophe américain <a href="https://www.msubillings.edu/commfaculty/gross/COMT%20330/weaver.PDF">Richard Weaver</a>, le langage noble est un langage qui soutient l’esprit critique. Les orateurs nobles clarifient les problèmes et des situations ambiguës et remplacent préjugés et partis pris par des faits établis et des opinions étayées. Ils cherchent à responsabiliser leurs auditeurs en les informant des circonstances qui les entourent et en déployant des raisonnements convaincants.</p>
<p>Contrairement au langage noble, un langage ignoble érode la liberté. En effet, les locuteurs ignobles mentent, déforment, trompent, tronquent les faits ou exagèrent les problèmes pour susciter des sentiments de désespoir chez ceux qui les écoutent, dans le but de les contrôler ou du moins de prendre sur eux un ascendant psychologique.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/leadership-en-temps-de-crise-mieux-vaut-servir-les-autres-quetre-charismatique-155973">Leadership : en temps de crise, mieux vaut servir les autres qu’être charismatique</a>
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<p>Certains, tel un récent <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2021/01/07/violences-du-capitole-les-derniers-saccages-de-donald-trump_6065451_3210.html">président étatsunien</a>, sont prêts à occuper le devant de la scène en déformant les faits, en proposant des raisonnements douteux et en s’appuyant sur des tours de passe-passe rhétoriques acceptés comme preuves de savoir supérieur par des auditeurs crédules.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/451020/original/file-20220309-15-uqbi46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/451020/original/file-20220309-15-uqbi46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/451020/original/file-20220309-15-uqbi46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/451020/original/file-20220309-15-uqbi46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/451020/original/file-20220309-15-uqbi46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/451020/original/file-20220309-15-uqbi46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/451020/original/file-20220309-15-uqbi46.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Donald Trump marche et Vladimir Poutine lors du sommet du G20 à Osaka, le 28 juin 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Brendan Smialowski/AFP</span></span>
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<p>Un orateur noble ne prétend pas être détenteur d’un savoir extraordinaire (une <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2021/12/10/ralph-bollmann-pour-merkel-il-n-y-a-rien-au-dessus-du-poste-de-chancelier_6105532_3210.html">ancienne chancelière allemande</a> vient à l’esprit ici). Il limite ses recommandations à ce qui peut être fait en principe par tous ceux qui disposeraient des mêmes connaissances que lui. Ses explications visent à convaincre via des propositions raisonnables.</p>
<p>La distinction entre langage noble et ignoble est essentielle. En effet, lorsque le langage est utilisé pour contrôler les individus et les priver de leur choix d’obéir, les notions d’autorité et le pouvoir fusionnent dans la notion d’autoritarisme. Autrement dit, la différence entre l’autorité et le pouvoir doit être maintenue.</p>
<h2>Le leadership</h2>
<p>Ceux qui recherchent le pouvoir ont donc le choix. À un extrême, ils s’expriment avec sincérité, décrivent de manière précise et complète, argumentent et débattent, recherchent la coopération, et finalement proposent des recommandations ouvertes à la critique. Ceux qui parlent ainsi acceptent la responsabilité du pouvoir de leur autorité lorsqu’ils l’obtiennent. Ils rappellent à ceux qui choisissent de les suivre la responsabilité qui découle de leur décision de suivre. Comme expliqué plus en détail dans une publication récente dont les grandes lignes de cet article sont extraites, ces individus sont des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1048984320301181">leaders</a>.</p>
<p>À l’extrême opposé, il existe les individus qui emploient un langage d’expressions insincères, de descriptions fausses ou biaisées, de mensonges, d’arguments invalides ou qui mobilisent d’autres techniques de manipulation pour avancer des promesses irresponsables. Le premier ministre britannique actuel, <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/01/17/boris-johnson-ou-la-culture-du-mensonge_6109800_3232.html">Boris Johnson</a>, est un exemple frappant de ce genre de personnage. Confronté aux conséquences de ses communications, il cherche à évader ses responsabilités en niant ses déclarations précédentes, en invoquant des raisonnements fallacieux ou en attribuant l’origine des événements qu’il a déclenchés à d’autres personnes. Il profite du pouvoir de sa position, mais il n’a pas d’autorité.</p>
<p>Comme l’autorité est source de pouvoir, les dirigeants autoritaires aspirant au leadership essayent de paraître nobles. Cependant, ces individus ne possèdent pas d’autorité, bien qu’ils le prétendent. En d’autres termes, le « leader autoritaire » (oxymore) n’est pas un leader, mais celui qui, sans autorité, abuse d’un pouvoir institutionnalisé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/176704/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Etienne Joullié ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans moins d’un mois, les Français vont élire leur dirigeant pour les cinq ans à venir. Ce dirigeant sera-t-il un véritable leader utilisant un langage noble ?Jean-Etienne Joullié, Professeur de management à l'EMLV, Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1757972022-02-15T15:56:02Z2022-02-15T15:56:02ZLeadership : dans la tête de visionnaires inspirants<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/446361/original/file-20220214-21-977nw3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=10%2C1%2C977%2C664&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les leaders visionnaires se distinguent par leur sensibilité aiguë, leur anticonformisme et leur faculté de raisonnement supérieure.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>La capacité de prévoir avec réalisme ce qui va se produire dans un avenir plus ou moins rapproché confère à un individu ou une organisation un avantage stratégique enviable, surtout dans un environnement concurrentiel.</p>
<p>Ceux que l’on appelle les « leaders visionnaires » appartiennent en général à une élite intellectuelle assez rare. Grâce à leur sensibilité aiguë, à leur anticonformisme et à leur faculté de raisonnement supérieure, ils arrivent à percevoir des « signaux faibles » ou des « problèmes émergents » dans des événements isolés, surprenants ou bizarres qui n’ont, pour le commun des mortels, aucune signification apparente.</p>
<p>Dans une biographie qu’il consacre au génie inventif de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nikola_Tesla">Nikola Tesla</a>, le journaliste John J. O’Neil offre un exemple concret du pouvoir unique des visionnaires. Il y raconte que l’ingénieur serbe a eu l’idée de développer un moteur à courant alternatif en récitant les vers d’un poème de Goethe, <a href="https://web.archive.org/web/20130213112510/http://www.rastko.org.rs/istorija/tesla/oniell-tesla.html">sous le regard interloqué d’un ami qui l’accompagnait pour une promenade</a>.</p>
<p>Cette capacité des leaders visionnaires d’identifier les scénarios d’un futur possible afin d’adapter les décisions et les stratégies qui auront des conséquences à court ou à long terme <a href="https://link.springer.com/book/10.1007/978-3-319-63023-6">se nomme anticipation</a>. C’est à partir de cette forme de prescience que se développent les innovations les plus révolutionnaires. Celles-ci percolent ensuite vers les autres couches de la société, où les « influenceurs » (journalistes, chroniqueurs, blogueurs, etc.), les « décideurs » (politiciens, chefs d’entreprise, etc.) et le « grand public » finissent par les adopter et leur donner une réalité.</p>
<p>En tant que chercheur universitaire spécialisé en éthique, je me suis intéressé à la question de l’anticipation chez les leaders visionnaires parce qu’elle nous en révèle davantage sur une compétence éthique essentielle depuis Aristote : la prudence. La prudence est une forme de sagesse pratique qui permet de prévoir ce qui vient et d’agir adéquatement sur le présent, en <a href="https://www.la-croix.com/Debats/Covid-19-lurgence-prudence-2020-09-23-1201115565">recourant à des connaissances issues de l’expérience</a>.</p>
<p>Afin de découvrir les secrets fascinants des leaders visionnaires, j’ai choisi d’en interroger quinze (onze hommes et quatre femmes) œuvrant, au Québec, dans les domaines les plus divers comme les arts, les sciences et technologies, les affaires, le sport ou les milieux communautaires. Ce qu’ils m’ont dévoilé lors des entrevues se rapportait à trois thèmes distincts : </p>
<ul>
<li><p>le raisonnement et l’analyse de tendances ; </p></li>
<li><p>la matérialisation des idées ; </p></li>
<li><p>les qualités morales et personnelles.</p></li>
</ul>
<p>Les résultats complets de mon étude ont été publiés en janvier 2022 dans la revue américaine <a href="https://scholar.valpo.edu/jvbl/vol15/iss1/9/"><em>Journal of Values-Based Leadership</em></a>.</p>
<h2>Les ressorts cognitifs de l’anticipation</h2>
<p>Sur le plan cognitif, les visionnaires sont très sensibles aux problèmes et aux besoins qui ne trouvent pas de réponses satisfaisantes dans le monde qui les entoure.</p>
<p>Cette situation de « manque » génère une émotion, une insatisfaction qui les incite à trouver des solutions novatrices à partir d’une analyse de l’« existant ». L’émotion produite par l’insatisfaction semble activer un mécanisme interne d’« appariement intuitif » qui interprète les configurations du monde extérieur à travers des images, des modèles et des schémas inscrits dans la mémoire subconsciente. Ils peuvent ainsi détecter les déficits fonctionnels et la sous-efficience de certaines solutions afin de les corriger.</p>
<p>Les leaders interrogés ont aussi mentionné que l’intuition et la créativité, qui nourrissent l’anticipation, bénéficient grandement de certains rituels qui favorisent un état d’esprit propice à la création. Par exemple, certains ont affirmé faire de la méditation, alors que pour d’autres c’était le sport ou la lecture. Ces bénéfices sont d’ailleurs largement démontrés dans la littérature sur la créativité, même si <a href="https://www.psychologies.com/Moi/Se-connaitre/Comportement/Articles-et-Dossiers/Les-pouvoirs-de-la-reverie">peu d’écrits se sont intéressés à l’anticipation comme telle</a>. Cet apport semble s’expliquer notamment par les <a href="https://www.huffpost.com/archive/qc/entry/quand-notre-cerveau-devient-creatif_b_6341316/amp">humeurs positives ou négatives engendrées par ces rituels</a>.</p>
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<img alt="Portrait de Nikola Tesla" src="https://images.theconversation.com/files/444591/original/file-20220204-27-1p1ahr0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C4%2C982%2C658&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444591/original/file-20220204-27-1p1ahr0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444591/original/file-20220204-27-1p1ahr0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444591/original/file-20220204-27-1p1ahr0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444591/original/file-20220204-27-1p1ahr0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444591/original/file-20220204-27-1p1ahr0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444591/original/file-20220204-27-1p1ahr0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Nikola Tesla, leader visionnaire au génie inventif, eut l’idée de développer un moteur à courant alternatif en récitant un poème.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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</figure>
<p>En outre, plusieurs leaders visionnaires ont fait valoir l’importance de développer un savoir interdisciplinaire, de même qu’une approche systémique des problèmes. L’approche systémique étudie un phénomène <a href="https://lact.fr/nos-videos-articles/blogs/436-l-approche-systemique-joeel-de-rosnay">à partir de ses interactions avec un contexte et un environnement plus larges</a>. Elle invite donc à une forme de synthèse dans laquelle plusieurs ensembles de données sont comparés afin de cheminer vers une solution.</p>
<h2>Passer de l’idée à sa matérialisation</h2>
<p>Une bonne idée ne sert pas à grand-chose si elle n’est pas faisable. Pour cette raison, la question de l’implantation et des étapes de réalisation d’une idée ou d’un concept ont été abordées par les leaders. À ce sujet, plusieurs ont affirmé faire appel à des scénarios, à des modélisations ou à des prototypes qui sont testés avant la mise en œuvre. Cette démarche s’apparente aux étapes de la « conception créative » (ou design thinking) à travers lesquelles il faut évaluer la viabilité d’un concept à partir de la représentation matérielle de celui-ci.</p>
<p>Bien que l’émotion et l’intuition agissent en amont du processus d’anticipation et y contribuent de manière substantielle, il reste que selon plusieurs leaders, il importe de soumettre les idées créatives à l’épreuve de la critique. Souvent, ce processus est mené en équipe et vise le consensus. Cette idée n’est d’ailleurs pas étonnante, car <a href="https://www.youtube.com/watch?v=xPqbrV02cZ8">l’incidence positive du groupe sur la prise de décision est largement démontrée en psychologie sociale depuis plusieurs décennies</a>.</p>
<p>La réalisation des idées se heurte bien souvent à des contraintes matérielles, temporelles ou sociales que n’ignorent pas les leaders visionnaires. Cependant, comme le montrent des recherches récentes sur la créativité, celles-ci peuvent stimuler la résolution créative de problèmes. En fait, l’aptitude à entrevoir les obstacles, de même que les moyens de les surmonter, constitue une <a href="https://www.youtube.com/watch?v=4_-3DRa4i8k">disposition essentielle de l’anticipation et une marque distinctive du talent des visionnaires</a>.</p>
<h2>Les leaders visionnaires ont-ils une éthique particulière ?</h2>
<p>Dans la dernière partie de mon enquête, j’ai demandé aux leaders visionnaires quelles valeurs morales guidaient leur travail et quelles qualités personnelles ils admiraient chez d’autres leaders.</p>
<p>Les valeurs morales qu’ils ont jugées les plus importantes étaient, dans l’ordre : l’intégrité, l’ouverture, l’empathie, la persévérance, le respect de l’environnement et l’égalitarisme.</p>
<p>Les principales qualités personnelles mentionnées étaient, toujours dans l’ordre : rassembleur, convaincant, curieux, créatif, passionné, confiant, cultivé, intuitif, humoristique, flexible et pragmatique.</p>
<p>Au-delà des valeurs et des qualités énoncées, les leaders ont surtout insisté sur la motivation qui les anime de vouloir faire une différence et de participer à la création d’un monde meilleur à partir des valeurs qu’ils chérissent. Il semble que leur désintéressement leur permette d’ignorer l’immédiat des gains à court terme pour embrasser l’horizon temporel plus vaste que requièrent la prudence et l’anticipation.</p>
<p>Si leurs témoignages n’ont sans doute pas permis d’épuiser le vaste sujet de l’anticipation et du leadership visionnaire, ils ont néanmoins permis d’accéder à quelques secrets du génie humain et de son excellence morale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/175797/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yanick Farmer ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Incursion dans la tête de personnes remarquables, considérées par leurs pairs comme des visionnaires ayant fait avancer la société dans différents domaines (arts, sciences et technologies, affaires).Yanick Farmer, professeur titulaire en éthique de la communication, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1692242021-11-11T15:29:04Z2021-11-11T15:29:04ZUn leadership féminin émerge. Va-t-il réussir à s’imposer ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/431320/original/file-20211110-27-1ls3n56.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C12%2C8141%2C5106&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La mairesse de Montréal, Valerie Plante, réagit au lendemain de sa réélection, le 8 novembre. Les femmes sont désormais à la tête de 5 des 10 plus grandes villes du Québec. Il faut que cet élan trace la voie à une meilleure représentation féminine aux postes de direction dans le milieu des entreprises.</span> <span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Paul Chiasson </span></span></figcaption></figure><p>Lors des élections municipales tenues le 7 novembre, l’émergence des femmes à des postes de haut niveau a été remarquable. En effet, cinq des dix plus grandes villes québécoises ont élu une mairesse, soit Montréal, Longueuil, Gatineau, Sherbrooke et Saguenay.</p>
<p>Ce changement notable survient alors qu’on observe aussi, dans le milieu des affaires, qu’une nouvelle forme de leadership, plus féminin, a émergé durant la crise de la Covid-19.</p>
<p>C’est ce que révèle une <a href="https://wiw-report.s3.amazonaws.com/Women_in_the_Workplace_2021.pd">étude récente de McKinsey&Company et LeanIn.Org</a>, réalisée auprès de 423 entreprises américaines et canadiennes. Elle brosse un portrait du leadership exercé par les femmes et les hommes au cours de la dernière année de la pandémie.</p>
<p>Selon ses conclusions, les femmes ont su exprimer un leadership plus fort que celui des hommes au moment où le mieux-être des employés prenait plus de place au sein des organisations, et ce, sous plusieurs dimensions : poser des actions pour accompagner les membres de leurs équipes, aider leurs collègues à gérer leur charge de travail dans un contexte de travail à domicile ou encore, accorder une importance particulière à la santé mentale et au bien-être de leurs collègues.</p>
<p>De plus, cette étude révèle que les femmes consacrent presque deux fois plus de temps que leurs collègues masculins à appuyer d’autres femmes ou des employés appartenant à des groupes minoritaires par des efforts de mentorat ou de parrainage (sponsoring). De telles actions contribuent sans aucun doute à créer un meilleur climat de travail, à maintenir ou accroître le taux de rétention des employés, voire à augmenter le taux d’attractivité de nouveaux talents dans un contexte de pénurie généralisée de main-d’œuvre.</p>
<p>Toutefois, comme le souligne l’étude, de telles activités d’accompagnement sont peu valorisées par certaines organisations. Elles ne font pas partie des critères utilisés pour évaluer la performance ou accorder des promotions, et elles ne sont généralement pas rémunérées à leur juste valeur, lorsqu’elles le sont.</p>
<p>Alors, ce style de leadership empreint de valeur d’inclusion et d’empathie, qui s’exprime davantage chez les femmes que chez les hommes, va-t-il s’imposer ou disparaître à mesure que la vie d’avant reprend ses droits ?</p>
<p>Économiste, MBA et certifiée en gouvernance, je suis engagée depuis 40 ans à promouvoir une participation accrue des femmes au sein des hautes instances de nos organisations. Depuis plusieurs années, j’observe, j’étudie et je vis la diversité au sein des entreprises canadiennes. Le <a href="https://portail-assurance.ca/article/un-centre-dentrepreneuriat-et-de-gestion-au-feminin-portera-le-nom-de-barry-lorenzetti/">Centre Lorenzetti</a>, que je co-dirige avec la professeure <a href="https://www.concordia.ca/jmsb/faculty/ingrid-chadwick.html">Ingrid Chadwick</a>, vise à promouvoir le développement de l’entrepreneuriat et du leadership chez les femmes.</p>
<h2>Un leadership en péril</h2>
<p>Comme des collègues et moi-même l’avons déjà exprimé <a href="https://theconversation.com/le-mythe-du-leadership-feminin-149113">dans un article publié dans <em>La Conversation</em></a>, une plus grande mixité au sein des pouvoirs de décision ne conduit pas nécessairement à une confrontation constructive des visions de différents types de leadership. Ainsi, « le leadership fondé sur le commandement et le contrôle, qui fut le propre du siècle dernier et caractérisé par l’homogénéité du pouvoir masculin, se complète par l’ajout d’autres qualités, comme l’empathie, la compassion, la communication et la collaboration, qui témoignent de l’émergence de nouveaux leaders féminins ».</p>
<p><a href="https://www.theglobeandmail.com/business/article-hybrid-work-risks-becoming-the-next-career-killer-for-women/">Les propos de Linda Seymour</a>, présidente et chef de la direction de la Banque HSBC Canada, semblent indiquer que ce style de leadership, où on trouve davantage d’équilibre entre les femmes et les hommes en situation de pouvoir, serait peut-être en péril. Bien que la formule du travail hybride s’impose de plus en plus au sein de nos organisations, le retour au travail des femmes gestionnaires, qui ont réduit leurs heures pour assurer la nécessaire conciliation travail-famille, s’effectuera à un rythme plutôt lent. Les jeunes enfants n’ont pas encore reçu les vaccins nécessaires pour assurer un retour normal à la garderie ou à l’école. On pourrait ainsi assister à un retour en arrière où les hommes occupaient la grande majorité des fonctions de direction. Ce scénario appelle à la vigilance.</p>
<p>L’importance d’avoir des femmes à des postes de direction s’est fragilisée, et cela est plus qu’inquiétant. Selon le <a href="https://lautorite.qc.ca/fileadmin/lautorite/reglementation/valeurs-mobilieres/0-avis-acvm-staff/2021/2021mars10-58-312-avis-acvm-fr.pdf">plus récent rapport des autorités canadiennes des valeurs mobilières</a> sur les divulgations en matière de représentation des femmes aux postes de haute direction, 35 % des entreprises ne comptaient, avant l’impact de la pandémie, aucune femme au sein de leur haute direction, et seulement 5 % des postes à la présidence et direction générale étaient occupées par des femmes. Une compilation récente des données relatives aux 60 plus grandes entreprises canadiennes composant l’indice S&P/TSX 60 révélait que seulement 7,6 % des postes les mieux rémunérés étaient occupés par des femmes. Selon mon expérience, la situation actuelle demande des actions particulières et fermes.</p>
<h2>Des cibles pour les postes de haute direction</h2>
<p>L’étude des autorités en valeurs mobilières canadiennes indique que les grandes entreprises qui se sont dotées d’une cible pour accroître la représentation féminine au sein de leurs conseils d’administration comptaient en moyenne 26 % de femmes à leur conseil, contre 17 % en moyenne chez les autres entreprises. L’efficacité de l’orientation réglementaire est également confirmée <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3910116">par une étude récente intitulée « The Impact of a Principles-Based Approach to Director Gender Diversity Policy »</a>.</p>
<p>Toutefois, la pratique qui consiste à fixer des cibles au sein des entreprises canadiennes n’est pas chose courante en regard des postes de haute direction. Seulement 4 % des entreprises avaient choisi cette voie. L’une des raisons évoquées est qu’une telle stratégie soit inappropriée compte tenu du nombre très restreint de personnes composant la haute direction des organisations.</p>
<p>Sachant que le nombre de femmes présentes dans des postes de direction de tous les niveaux pourrait diminuer à la suite de la pandémie, je crois que les autorités réglementaires devraient encourager fortement les entreprises assujetties à cette réglementation à se doter de telles cibles pour les principales catégories de postes de gestionnaires. Elles doivent y accorder une attention particulière dans leur reddition de compte.</p>
<p>De plus, une idée intéressante serait de considérer de facto toutes les personnes éligibles à une promotion en se rappelant que certaines femmes ont de la réticence à se mettre de l’avant ou à considérer <a href="https://gap.hks.harvard.edu/leaning-or-not-leaning-out-optout-choice-framing-attenuates-gender-differences-decision-compete">qu’elles possèdent</a> les compétences et les expériences requises pour postuler à un poste plus élevé.</p>
<h2>Favoriser le retour en force des femmes</h2>
<p>Ainsi, il nous faut accepter que la productivité au travail devra dorénavant être considérée autrement, et qu’elle intègre la notion de mieux-être. L’évaluation de la performance ne doit plus uniquement être basée sur des critères liés à la présence au bureau.</p>
<p>Au fil des décennies, une meilleure représentation des femmes dans les entreprises nous <a href="https://www.imf.org/fr/News/Articles/2018/11/28/blog-economic-gains-from-gender-inclusion-even-greater-than-you-thought">a permis d’accomplir de grands progrès en tant que société</a>. La pandémie est venue freiner cet élan. Il importe de récupérer nos acquis compromis présentement et de venir en aide aux femmes qui démontrent un engagement et une passion pour leur travail, ou tout simplement qui souhaitent réintégrer à leur juste valeur le marché de l’emploi. Il faut pour cela des politiques actives des gouvernements et des entreprises qui visent à favoriser leur retour en force.</p>
<p>Bref, il faut que cet élan que l’on a vu aux dernières élections municipales trace la voie à une meilleure représentation féminine aux postes de direction dans le milieu des entreprises du secteur privé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169224/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Louise Champoux-Paillé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Un nouveau leadership féminin émerge, tant en politique que dans le milieu des affaires. Mais il n’est pas toujours valorisé par les organisations et sa pérennité est menacée.Louise Champoux-Paillé, Cadre en exercice John Molson School of Business Concordia, Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1689912021-10-05T19:15:33Z2021-10-05T19:15:33ZLes organisations « libérées », qui responsabilisent les équipes, sont plus résistantes aux crises<p>En ces temps de troubles où une crise sanitaire met à mal l’économie mondiale, les interrogations sur les modèles d’entreprises capables d’y survivre sont plus que jamais d’actualité. Le travail de recherche que nous avons réalisé pour l’ouvrage <a href="https://www.dunod.com/sites/default/files/atoms/files/Feuilletage_1430.pdf"><em>Management libéré</em></a> (Éditions Dunod) met en exergue des invariants, des incontournables pour tout processus de « libération » s’inscrivant dans une performance durable.</p>
<p>Certaines étapes clés, méthodes ou outils semblent alors incontournables pour mener des processus de libération qui résistent aux crises. Grands groupes comme petites et moyennes entreprises (PME), les entreprises étudiées confirment d’ailleurs que les périodes de crise sont propices au changement, à <a href="https://theconversation.com/linnovation-manageriale-un-accelerateur-de-performance-125647">l’innovation managériale</a>, à la libération organisationnelle, à condition que l’on ne soit pas passif et dans l’action. Cette proactivité face à l’incertitude est source d’<a href="https://theconversation.com/construire-des-societes-antifragiles-pour-survivre-a-limprevisibilite-des-crises-139907">antifragilité</a>, cette surprenante capacité à performer plus en temps de crise qu’en temps normal.</p>
<h2>Le rôle fondamental du management</h2>
<p>Le conférencier Isaac Getz invite à considérer la libération plus comme une « philosophie » qu’un modèle. Pourtant, si comme le soutient le spécialiste des réseaux sociaux, Clay Shirky, « lorsque vous adoptez un outil, vous <a href="https://www.ted.com/talks/clay_shirky_how_the_internet_will_one_day_transform_government?language=fr">adoptez aussi la philosophie du management</a> qui lui est implicite », alors il va de soi de considérer que l’adoption d’une philosophie entraîne l’adoption d’outils qui lui sont implicites. Or, ces outils concrets sont jusqu’ici assez peu révélés.</p>
<p>Alors que, dans la vision radicale de l’influent consultant Tom Peters, la libération devait conduire à la <a href="https://theconversation.com/entreprise-liberee-les-nouveaux-roles-des-managers-128713">suppression des lignes hiérarchiques</a>, c’est paradoxalement sur les managers que repose le déploiement d’une culture managériale libérée propre à responsabiliser et rendre autonomes les travailleurs.</p>
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<iframe src="https://embed.ted.com/talks/lang/fr/clay_shirky_how_the_internet_will_one_day_transform_government" width="100%" height="480" style="position:absolute;left:0;top:0;width:100%;height:100%" frameborder="0" scrolling="no" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>C’est donc bien la « philosophie » du management qu’il faut repenser : accepter de perdre le contrôle pour des bénéfices souvent non quantifiables, libérer la parole et la créativité des collaborateurs au risque qu’elle remette en question ses décisions, voire son propre rôle… Un positionnement quelque peu insécurisant a priori.</p>
<p>En effet, les leaders libérateurs ne sont pas toujours exclusivement les dirigeants des organisations libérées. Chez le spécialiste de l’aérospatiale Thales, Christian Bardot, alors responsable de l’activité avionique hélicoptères, a conduit un processus de libération au sein de sa business unit. L’avenir dira si celui-ci se déploiera dans le groupe par essaimage. Au sein de la société de conseil en ingénierie Extia (distinguée dans le <a href="https://www.extia-group.com/fr-en">palmarès</a> Great Place to Work), la directrice des ressources humaines a mis en place une boucle vertueuse d’amélioration continue, fondée sur une vision partagée par tous, et sur la satisfaction et le bien-être des salariés en tant qu’indicateurs de performance privilégiés.</p>
<p>Ainsi, le processus de libération ne saurait fonctionner sans un leader inspirant et exemplaire, pas forcément dirigeant, qui incarne les principes de management libéré mis en place dans l’entreprise.</p>
<h2>Trois principes</h2>
<p>On peut définir trois grands principes managériaux qui doivent accompagner la « libération » de l’entreprise sans pour autant viser de “one best way” : définition des raisons d’être, droit à l’erreur et gestion des tensions.</p>
<p>Avant toute chose, il s’agit de définir la raison d’être de l’entreprise et la contribution de chaque service/département à sa réussite. En effet, derrière la philosophie de l’entreprise libérée, on retrouve toujours une organisation humaine, une « communauté de coopération » qui œuvre vers du « mieux » individuel et collectif. Décliner cette approche en missions pour chaque individu permet ainsi de donner du sens aux actions et de générer l’engagement.</p>
<p>Ensuite, mettre le bien-être des salariés au centre de la réflexion, voire les considérer comme des clients (comme le fait l’agence de conseil <a href="https://www.herault-tribune.com/articles/primum-non-nocere-lagence-biterroise-opte-pour-le-statut-de-societe-a-mission/">Primum Non Nocere</a>), favorise la confiance et l’autonomisation. Ceci implique une grande bienveillance managériale ainsi qu’un droit à l’erreur favorable à la prise d’initiative. L’objet est ainsi de transformer de possibles tensions interpersonnelles cachées en tensions organisationnelles identifiées pour les débloquer.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1232390817299542017"}"></div></p>
<p>Dans tous les cas, le processus ne peut être durablement porté que par un leader visionnaire sous peine de s’effondrer dès son départ de l’entreprise. En effet, rares sont les entreprises libérées qui <a href="https://www.hbrfrance.fr/chroniques-experts/2019/06/26308-entreprises-liberees-survivre-au-changement-de-leadership/">survivent au départ de leur dirigeant libérateur</a>.</p>
<p>Chez ESII, PME spécialisée dans la gestion d’accueil et de files d’attente, le déploiement d’une libération jugée rapidement trop rigide a conduit vers un processus de libération piloté en partie au sein d’instances collectives transversales, parfois statutaires, souveraines dans leur prise de décision collective. D’ailleurs, pour survivre aux départs en retraite en cours des deux fondateurs libérateurs, la PME est devenue une entreprise à mission, dont l’objet central est la libération, tout en organisant le transfert de propriété vers le collectif.</p>
<h2>Gouvernance collective</h2>
<p>L’étude de divers cas nous enseigne que la libération s’organise autour d’un <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/09/26/entreprise-sans-chef-l-avenir-d-une-utopie_6096097_3234.html">principe de gouvernance collective</a> qui peut prendre différentes formes : comité de pilotage dans la PME ESII, équipe en trinômes chez Aepsilon, groupe d’aide à la décision et réunions de gouvernance partagée chez Primum Non Nocere, ou encore gouvernance cellulaire chez la chaîne de restauration La Panière. Ces instances peuvent ainsi prendre tout type de décision, des plus opérationnelles aux plus stratégiques.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/423865/original/file-20210929-28-of12x2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/423865/original/file-20210929-28-of12x2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/423865/original/file-20210929-28-of12x2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/423865/original/file-20210929-28-of12x2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/423865/original/file-20210929-28-of12x2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=824&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/423865/original/file-20210929-28-of12x2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1035&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/423865/original/file-20210929-28-of12x2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1035&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/423865/original/file-20210929-28-of12x2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1035&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Management libéré. 7 entreprises dévoilent leurs méthodes : agilité, performance durable et antifragilité (Éditions Dunod).</span>
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<p>Une crise peut devenir le déclencheur d’un processus de libération, comme chez Thales, car la remise en question qu’elle implique se mue parfois en une opportunité de transformation et simplification. Elle peut également faire émerger des dysfonctionnements latents qu’il devient urgent de résoudre. Dans ce cas, quand bien même cela ne se passe pas à l’échelle de l’entreprise dans sa globalité, mais à l’échelle d’un service, un état d’esprit entrepreneurial reste propice à la libération.</p>
<p>L’on peut citer encore l’exemple de ESII, qui malgré la crise sanitaire, a maintenu sa croissance et rempli son carnet de commandes. Elle a fait pivoter son offre pour développer des solutions Covid-19 sur mesure avec des grands comptes comme La Poste ou Carrefour, et globalement l’entreprise s’est renforcée. ESII est donc sans nul doute une <a href="https://theconversation.com/construire-des-societes-antifragiles-pour-survivre-a-limprevisibilite-des-crises-139907">entreprise antifragile</a>, comme Vogo ou CIAM, c’est-à-dire une entreprise qui se développe plus vite au contact des crises qu’en leur absence. Et c’est aussi, résolument, un bel exemple de management libéré.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/168991/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Ce modèle d’entreprise implique une gouvernance collective qui favorise la remise en question et donc le décèlement de nouvelles opportunités.Julien Granata, Professeur à Montpellier Business School associé à la Chaire MIND - Enseignant-chercheur à MRM, Montpellier Business SchoolAnnabelle Jaouen, Associate professor, Montpellier Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1613782021-05-25T18:18:21Z2021-05-25T18:18:21ZVoici les cinq dirigeants qui ont le plus mal géré la Covid-19 dans leur pays<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/402701/original/file-20210525-23-1kqggqg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C5%2C3401%2C2274&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le président biélorusse Alexandre Loukachenko, sans masque, visite un hôpital pour les patients atteints de la Covid-19, à Minsk, le 27 novembre 2020. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/belarus-president-lukashenko-visits-hospital-for-covid-19-news-photo/1229813959?adppopup=true">Andrei Stasevich\TASS via Getty Images</a></span></figcaption></figure><p>La Covid-19 est extrêmement difficile à contrôler, et les dirigeants politiques ne représentent qu’une partie de l’équation lorsqu’il s’agit de gérer cette pandémie.</p>
<p>Mais certains dirigeants mondiaux, actuels ou sortants, ont fait peu d’efforts pour combattre les flambées de coronavirus dans leur pays, que ce soit en minimisant la gravité de la pandémie, en faisant fi de la science ou en ignorant les gestes sanitaires essentiels comme la distanciation sociale et le port du masque. Tous les hommes figurant sur cette liste ont commis au moins une de ces erreurs, et certains les ont toutes commises — avec des conséquences funestes.</p>
<h2>Narendra Modi, de l’Inde</h2>
<p><strong>Sumit Ganguly, Université de l’Indiana</strong></p>
<p>L’Inde est le nouvel épicentre de la pandémie mondiale, enregistrant au mois de mai quelque <a href="https://www.washingtonpost.com/world/2021/05/01/india-coronavirus/">400 000 nouveaux cas par jour</a>. Cette statistique, aussi terrible soit-elle, ne rend pas compte de l’horreur qui se déroule dans le pays. Les patients atteints du virus de la Covid-19 meurent dans les hôpitaux parce que les médecins <a href="https://www.businesstoday.in/current/economy-politics/24-patients-die-at-hospital-in-karnataka-due-to-oxygen-shortage/story/438125.html">n’ont pas d’oxygène</a> ni de <a href="https://www.france24.com/en/live-news/20210422-india-s-covid-19-shortages-spur-black-market-for-drugs-oxygen">médicaments comme le remdesivir</a> à leur offrir. Les malades sont refoulés dans les cliniques, <a href="https://www.cbsnews.com/news/india-covid-hospitals-turn-patients-away/">faute de lits disponibles</a>.</p>
<p>De nombreux Indiens <a href="https://www.npr.org/2021/05/11/995446333/this-government-has-failed-us-anger-rises-in-india-over-pm-modis-covid-response">accusent un homme d’être responsable</a> de la tragédie du pays : le Premier ministre <a href="https://www.washingtonpost.com/outlook/modis-pandemic-choice-protect-his-image-or-protect-india-he-chose-himself/2021/04/28/44cc0d22-a79e-11eb-bca5-048b2759a489_story.html">Narendra Modi</a>. En janvier 2021, Modi a déclaré lors d’un <a href="https://www.livemint.com/news/india/pm-modi-to-address-the-world-economic-forum-s-davos-summit-at-5-30-pm-today-11611803181228.html">forum mondial</a> que l’Inde avait « sauvé l’humanité… en contenant efficacement le coronavirus ». En mars, son ministre de la santé a proclamé que la <a href="https://www.nytimes.com/2021/05/01/world/asia/india-covid19-modi.html">pandémie tirait à sa fin</a>. Dans les faits, la Covid-19 gagnait en intensité en Inde et dans le monde entier — mais son gouvernement n’a rien fait pour parer à <a href="https://www.nytimes.com/2021/04/09/world/asia/india-covid-vaccine-variant.html">d’éventuelles résurgences des cas</a>, comme l’émergence d’un variant plus mortel et plus contagieux.</p>
<p>Alors même que d’importantes <a href="https://www.bbc.com/news/world-asia-india-56037565">zones du pays</a> n’avaient pas totalement supprimé le virus, Modi et d’autres membres de son parti ont organisé des meetings de campagne en plein air avant les élections d’avril. <a href="https://theprint.in/opinion/politricks/poll-rallies-to-kumbh-mela-modi-shahs-conscience-must-take-a-look-at-latest-covid-surge/639526/">Peu de participants portaient des masques</a>. Modi a également autorisé la tenue, de janvier à mars, <a href="https://www.washingtonpost.com/world/2021/05/08/india-coronavirus-kumbh-mela/">d’un festival religieux qui attire des millions de personnes</a>. Les responsables de la santé publique pensent aujourd’hui que le festival a pu être un événement super-propagateur et qu’il s’agit d’une <a href="https://thewire.in/health/watch-karan-thapar-ashish-jha-kumbh-mela-shahi-snan-covid-19">« énorme erreur »</a>.</p>
<p>Alors que Modi vantait ses succès l’année dernière, l’Inde — le <a href="https://www.cnbc.com/2021/05/05/why-covid-vaccine-producer-india-faces-major-shortage-of-doses.html">plus grand fabricant de vaccins</a> au monde — a envoyé plus de 10 millions de doses de <a href="https://www.wsj.com/articles/india-starts-covid-19-vaccine-drive-to-neighboring-countries-11611234933">vaccins à des pays voisins</a>. Pourtant, seulement 1,9 % des 1,3 milliard d’habitants de l’Inde avaient été entièrement vaccinés contre la Covid-19 au début du mois de mai.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/399548/original/file-20210508-23-15af3jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=15%2C15%2C3480%2C2479&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Modi et Bolsonaro se serrent la main" src="https://images.theconversation.com/files/399548/original/file-20210508-23-15af3jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=15%2C15%2C3480%2C2479&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/399548/original/file-20210508-23-15af3jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/399548/original/file-20210508-23-15af3jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/399548/original/file-20210508-23-15af3jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=428&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/399548/original/file-20210508-23-15af3jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/399548/original/file-20210508-23-15af3jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/399548/original/file-20210508-23-15af3jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=538&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le président brésilien Jair Bolsonaro et le premier ministre indien Narendra Modi sont tous deux accusés d’avoir mal géré les épidémies de Covid-19 dans leur pays.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/brazils-president-jair-bolsonaro-and-indias-prime-minister-news-photo/1182256687?adppopup=true">Pavel Golovin/AFP</a></span>
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</figure>
<h2>Jair Bolsonaro du Brésil</h2>
<p><strong>Elize Massard da Fonseca, Fundação Getulio Vargas et Scott L. Greer, Université du Michigan</strong></p>
<p>Le président brésilien Jair Bolsonaro ne s’est pas contenté de ne pas réagir à la Covid-19 — qu’il qualifie de <a href="https://edition.cnn.com/2020/05/23/americas/brazil-coronavirus-hospitals-intl/index.html">« petite grippe »</a> — il a activement aggravé la crise au Brésil.</p>
<p>Bolsonaro <a href="https://edition.cnn.com/2020/05/23/americas/brazil-coronavirus-hospitals-intl/index.html">a usé de ses pouvoirs constitutionnels pour s’immiscer</a> dans les affaires administratives du ministère de la Santé, telles que les protocoles cliniques, la divulgation des données et l’achat de vaccins. <a href="https://www.nexojornal.com.br/expresso/2020/08/04/Quais-os-vetos-de-Bolsonaro-a-medidas-de-combate-%C3%A0-pandemia">Il a opposé son veto</a> à des textes de loi qui auraient, par exemple, rendu obligatoire le port du masque dans les sites religieux et indemnisé les professionnels de la santé ayant subi un préjudice permanent du fait de la pandémie. Il a également sapé les efforts du gouvernement de l’État pour promouvoir la distanciation sociale et a <a href="https://www.reuters.com/article/us-health-coronavirus-brazil-idUSKBN22N308">signé un décret pour permettre à de nombreux commerces de rester ouverts</a> en tant ‘qu’essentiels’, notamment les spas et les salles de sport. Bolsonaro a également fait la promotion agressive de <a href="https://www.nytimes.com/2020/06/13/world/americas/virus-brazil-bolsonaro-chloroquine.html">médicaments non éprouvés</a>, notamment l’hydroxychloroquine, pour traiter les patients atteints de la Covid-19.</p>
<p>Bolsonaro a utilisé son poste de président pour influencer le débat autour de la crise du coronavirus, créant un <a href="https://politica.estadao.com.br/noticias/geral,bolsonaro-volta-a-chamar-crise-do-coronavirus-de-histeria,70003236546">faux dilemme entre la catastrophe économique et la distanciation sociale</a> et en <a href="https://oglobo.globo.com/sociedade/coronavirus/bolsonaro-sugere-cloroquina-ate-quinto-dia-apos-surgimento-de-sintomas-do-coronavirus-apesar-de-nao-haver-estudos-conclusivos-24360182">déformant la science</a>. Il a rendu les gouvernements des États brésiliens, la Chine et l’Organisation mondiale de la santé responsables de la crise de la Covid-19 et n’a jamais assumé la responsabilité de la gestion de l’épidémie dans son propre pays.</p>
<p>En décembre, Bolsonaro a déclaré qu’il ne recevrait pas le vaccin en raison de ses effets secondaires. « <a href="https://doi.org/10.1016/s0140-6736(21)00181-1">Si vous vous transformez en crocodile, c’est votre problème »</a>, a-t-il déclaré.</p>
<p>La mauvaise gestion de la pandémie par Bolsonaro a créé des conflits au sein de son gouvernement. Le Brésil a vu défiler quatre ministres de la Santé en moins d’un an. Les flambées épidémiques incontrôlées au Brésil ont donné naissance à plusieurs nouveaux variants du coronavirus, dont le <a href="https://www.thelancet.com/article/S0140-6736(21)00183-5/fulltext">variant P.1, qui semble plus contagieux</a>. Le taux de transmission de la Covid-19 au Brésil <a href="https://mrc-ide.github.io/global-lmic-reports/BRA/">commence enfin à baisser</a>, mais la situation reste préoccupante.</p>
<h2>Alexandre Loukachenko de la Biélorussie</h2>
<p><strong>Elizabeth J. King et Scott L. Greer, Université du Michigan</strong></p>
<p>De nombreux pays dans le monde ont affronté la Covid-19 avec des politiques tragiquement défaillantes. Cependant, selon nous, les pires dirigeants face à cette pandémie sont ceux qui ont choisi le déni total plutôt que l’action inefficace.</p>
<p>Alexandre Loukachenko, dirigeant autoritaire de longue date de la Biélorussie, n’a jamais <a href="https://novayagazeta.ru/articles/2020/03/23/84461-krest-moschevik-vodka-i-traktor">reconnu la menace</a> de la Covid-19. Au début de la pandémie, alors que d’autres pays imposaient des mesures de confinement, Loukachenko n’a mis en œuvre aucune mesure sanitaire pour empêcher la propagation du virus.</p>
<p>Au lieu de cela, il a affirmé que le virus pouvait être évité en <a href="http://novayagazeta.ee/articles/30392/">buvant de la vodka</a>, en allant au sauna et en travaillant dans les champs. Ce négationnisme a pratiquement laissé le fardeau des mesures préventives et l’aide à la pandémie <a href="https://www.bmj.com/content/370/bmj.m3543">aux individus et aux campagnes</a> de financement participatif.</p>
<p>Au cours de l’été 2020, Loukachenko a déclaré <a href="https://www.bbc.com/russian/news-53570933">qu’il avait reçu un diagnostic de Covid-19</a> mais qu’il était asymptomatique, ce qui lui a permis de continuer à prétexter que le virus n’était pas une menace sérieuse. Le fait d’avoir prétendument déjoué la maladie et d’avoir visité des hôpitaux dédiés à la Covid-19 sans masque a également renforcé l’image d’homme fort qu’il souhaitait donner.</p>
<p>La Biélorussie vient de commencer sa campagne de vaccination, mais M. Loukachenko affirme qu’il ne se fera pas vacciner. Actuellement, <a href="https://ourworldindata.org/covid-vaccinations">moins de 3 % des Biélorusses</a> sont vaccinés contre la Covid-19.</p>
<h2>Donald Trump des États-Unis</h2>
<p><strong>Dorothy Chin, Université de Californie, Los Angeles</strong></p>
<p>Trump n’est plus en fonction, mais sa mauvaise gestion de la pandémie continuera d’avoir des conséquences dévastatrices à long terme sur les États-Unis — en particulier sur la <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32562416/">santé et le bien-être des minorités</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/399549/original/file-20210508-17-1y2wmij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Trump face à une foule" src="https://images.theconversation.com/files/399549/original/file-20210508-17-1y2wmij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/399549/original/file-20210508-17-1y2wmij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/399549/original/file-20210508-17-1y2wmij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/399549/original/file-20210508-17-1y2wmij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/399549/original/file-20210508-17-1y2wmij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/399549/original/file-20210508-17-1y2wmij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/399549/original/file-20210508-17-1y2wmij.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Trump lors d’un rassemblement de campagne le 17 octobre 2020 à Muskegon, Michigan, après s’être remis du Covid-19.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/president-donald-trump-arrives-for-a-campaign-rally-on-news-photo/1281136162?adppopup=true">Rey Del Rio/Getty Images</a></span>
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</figure>
<p>Le <a href="https://www.nytimes.com/2020/07/24/us/politics/coronavirus-trump-denial.html">déni précoce de la pandémie</a> par Trump, la <a href="https://www.nytimes.com/2020/05/21/us/politics/trump-fact-check-hydroxychloroquine-coronavirus-.html">désinformation continue sur le port du masque</a> et les traitements, ainsi que <a href="https://abcnews.go.com/Politics/trumps-stunning-reversal-total-authority-claim-governors-analysis/story ?id=70160951">son leadership incohérent</a> ont nui au pays dans son ensemble — mais le résultat a été bien pire pour certains groupes que pour d’autres. Les communautés de couleur ont souffert <a href="https://www.cdc.gov/coronavirus/2019-ncov/covid-data/investigations-discovery/hospitalization-death-by-race-ethnicity.html">d’un nombre disproportionné de contaminations et de décès.</a> Bien que les Afro-Américains et les Latinos ne représentent que 31 % de la population américaine, par exemple, ils comptent <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32562416/">pour plus de 55 % des cas de Covid-19.</a> Les membres des communautés amérindiennes <a href="https://www.cdc.gov/coronavirus/2019-ncov/covid-data/investigations-discovery/hospitalization-death-by-race-ethnicity.html">ont été hospitalisés 3,5 fois plus et ont souffert d’un taux de mortalité 2,4 fois supérieur</a> à celui des Blancs.</p>
<p><a href="https://www.forbes.com/sites/mikepatton/2020/06/28/pre-and-post-coronavirus-unemployment-rates-by-state-industry-age-group-and-race/ ?sh=485d6d39555%3Csup%3Ee%3C/sup">Les taux de chômage sont également disproportionnés</a>. Au plus fort de la pandémie aux États-Unis, ils ont grimpé à 17,6 % pour les Latino-Américains, 16,8 % pour les Afro-Américains et 15 % pour les Américains d’origine asiatique, contre 12,4 % pour les Américains blancs.</p>
<p><a href="https://carsey.unh.edu/publication/inequities-job-loss-recovery-amid-Covid-pandemic">Ces écarts considérables</a> ont amplifié les inégalités existantes telles que la <a href="https://blogs.imf.org/2020/05/11/how-pandemics-leave-the-poor-even-farther-behind/">pauvreté</a>, la <a href="https://www.brookings.edu/blog/up-front/2020/06/01/housing-hardships-reach-unprecedented-heights-during-the-covid-19-pandemic/">précarité du logement</a> et la <a href="https://www.mckinsey.com/industries/public-and-social-sector/our-insights/covid-19-and-learning-loss-disparities-grow-and-students-need-help">qualité de l’enseignement</a> — et continueront probablement à le faire <a href="https://www.mckinsey.com/industries/public-and-social-sector/our-insights/covid-19-and-student-learning-in-the-united-states-the-hurt-could-last-a-lifetime">pendant encore un certain temps</a>. Par exemple, alors que l’économie américaine dans son ensemble montre des signes de reprise, les <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2021-05-03/powell-says-economy-making-real-progress-but-disparities-weigh ?srnd=premium&sref=x0fnd0v3">groupes minoritaires n’ont pas fait de progrès</a> équivalents.</p>
<p>Enfin, le blâme de Trump à l’égard de la Chine pour la Covid-19 — qui comprenait des épithètes raciales telles que le fait de qualifier le virus de <a href="https://www.huffpost.com/entry/trump-kellyanne-conway-coronavirus_n_5eeebc5dc5b6aac5f3a46b45">« kung flu »</a> — a immédiatement précédé une multiplication par près de deux des attaques contre les <a href="https://stopaapihate.org/national-report-through-march-2021/">Américains d’origine asiatique et les insulaires du Pacifique</a> au cours de l’année écoulée. Cette tendance inquiétante ne montre <a href="https://abcnews.go.com/US/wireStory/asian-american-women-stabbed-san-francisco-attack-77497315">aucun signe d’atténuation.</a></p>
<p>L’administration Trump a encouragé dès le début le développement du vaccin par les États-Unis, une réalisation dont peu de dirigeants mondiaux peuvent se prévaloir. Mais la désinformation et la rhétorique anti-scientifique qu’il a diffusées continuent de <a href="https://www.cbsnews.com/news/covid-vaccine-hesitancy-opinion-poll/ ?ftag=MSF0951a18">compromettre le chemin vers la sortie de la pandémie aux États-Unis.</a> Les derniers sondages indiquent que <a href="https://www.pbs.org/newshour/health/as-more-americans-get-vaccinated-41-of-republicans-still-refuse-covid-19-shots">24 % de tous les Américains et 41 % des républicains</a> disent qu’ils ne se feront pas vacciner.</p>
<h2>Andrés Manuel López Obrador du Mexique</h2>
<p><strong>Salvador Vázquez del Mercado, Centro de Investigación y Docencia Económicas (Centre de recherche et de documentation économique)</strong></p>
<p>Avec 9,2 % de patients atteints de la Covid-19 qui succombent à la maladie, le <a href="https://globalhealthsciences.ucsf.edu/news/mexicos-response-covid-19-case-study">Mexique</a> détient le <a href="https://ourworldindata.org/explorers/coronavirus-data-explorer ?zoomToSelection=true& %3Btime=2020-03-01..latest& %3BpickerSort=asc& %3BpickerMetric=location& %3BMetric=Case+fatality+rate& %3BInterval=7-day+rolling+average& %3BRelative+to+Population=true& %3BAlign+outbreaks=false& %3Bcountry=USA%7EITA%7EIND%7EMEX%7EARG%7EBRA+ %22 %22">taux de mortalité le plus élevé au monde</a>. Des <a href="http://www.healthdata.org/news-release/covid-19-has-caused-69-million-deaths-globally-more-double-what-official-reports-show">estimations récentes</a> montrent que la pandémie y a fait près de 617 000 morts, soit autant que les États-Unis et l’Inde, deux pays dont la population est pourtant beaucoup plus importante.</p>
<p>Une combinaison de facteurs a contribué aux flambées épidémiques galopantes et prolongées de Covid-19 au Mexique. L’un d’eux est le manque de leadership national.</p>
<p>Tout au long de la pandémie, le président mexicain Andrés Manuel López Obrador a cherché à minimiser la gravité de la situation au Mexique. Au tout début, il a <a href="https://www.animalpolitico.com/2020/03/no-dejen-de-salir-amlo-coronavirus-covid19/">résisté aux appels à décréter un confinement national</a> t a continué à organiser des <a href="https://www.eluniversal.com.mx/nacion/politica/critican-amlo-por-besar-nina-pese-recomendaciones-por-coronavirus">rassemblements</a> dans tout le pays avant de finir, le 23 mars 2020, par fermer le Mexique pendant deux mois. Il a <a href="https://www.jornada.com.mx/notas/2020/12/02/politica/reitera-amlo-que-descarta-cubrebocas-lo-mejor-es-la-sana-distancia/">fréquemment refusé</a> de porter un masque.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/401105/original/file-20210517-13-1x9palm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Le président mexicain s’exprime sur une scène avec une petite foule de représentants du gouvernement assis à proximité" src="https://images.theconversation.com/files/401105/original/file-20210517-13-1x9palm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/401105/original/file-20210517-13-1x9palm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/401105/original/file-20210517-13-1x9palm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/401105/original/file-20210517-13-1x9palm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/401105/original/file-20210517-13-1x9palm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/401105/original/file-20210517-13-1x9palm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/401105/original/file-20210517-13-1x9palm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">López Obrador, sans masque, annonce un verrouillage national le 23 mars 2020, après avoir encouragé pendant des semaines les Mexicains à poursuivre leurs activités habituelles.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/andrés-manuel-lópez-obrador-mexicos-president-speaks-during-news-photo/1214294932?adppopup=true">Adrián Monroy/Medios y Media/Getty Images</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ayant hérité d’une multitude de services de santé sous-financés lors de son arrivée au pouvoir en 2018, Lopez Obrador n’a que très peu augmenté les dépenses liées à la santé pendant la pandémie. Selon les experts, les <a href="https://www.excelsior.com.mx/nacional/mas-gasto-a-salud-pero-recorta-rubros-presupuesto-subio-apenas-36/1349412">budgets des hôpitaux sont insuffisants</a> par rapport à l’énormité de la tâche qui leur incombe.</p>
<p>Avant même que la pandémie n’éclate, la politique d’austérité budgétaire extrême de Lopez Obrador — en place depuis 2018 — avait rendu la lutte contre la crise sanitaire beaucoup plus difficile en <a href="https://www.ft.com/content/2bb141e2-4d0a-435f-9720-3f67b8077c28">limitant considérablement l’aide financière</a> liée à la Covid-19 disponible pour les citoyens et les entreprises. Cela a, dans la foulée, aggravé la grave crise économique causée par la pandémie, alimentant la nécessité de maintenir l’économie ouverte toute l’année dernière, en bonne partie pendant la féroce deuxième vague hivernale, dont le Mexique commence à peine à se relever.</p>
<p>Avec, comme résultat, une autre fermeture devenue inévitable : celle de décembre 2020.</p>
<p>Aujourd’hui, le <a href="https://www.elfinanciero.com.mx/nacional/aumenta-el-uso-de-cubrebocas-en-el-pais-y-la-mayoria-reprueba-que-amlo-no-los-utilice/">port du masque a gagné en popularité</a> et le Mexique <a href="https://elpais.com/mexico/2021-02-23/asi-avanza-la-vacunacion-contra-coronavirus-en-mexico.html.">a entièrement vacciné 10 % de sa population</a>, contre <a href="https://ourworldindata.org/explorers/coronavirus-data-explorer ?zoomToSelection=true&Metric=People+vaccinated&Interval=7-day+rolling+average&Relative+to+Population=true&Align+outbreaks=false&country=USA %7EMEX %7EGTM">1 % au Guatemala voisin</a>. La situation s’améliore, mais le chemin de la guérison sera long pour le Mexique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161378/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sumit Ganguly reçoit un financement du Département d'Etat américain.
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Dorothy Chin reçoit un financement de l'Institut du cœur, du sang et des poumons du NIH.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Elize Massard da Fonseca reçoit un financement de la Fondation de recherche de Sao Paulo et du Conseil national de la recherche du Brésil (CNPq).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Salvador Vázquez del Mercado reçoit un financement du Conseil national de la science et de la technologie (CONACYT).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Scott L. Greer a reçu des fonds du Centre de recherche et de développement du génie de l'armée américaine, de la US National Science Foundation et de l'Observatoire européen des systèmes et des politiques de santé.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Elizabeth J King ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La pandémie n’est pas terminée, mais ces dirigeants sont déjà entrés dans l’histoire pour avoir échoué à combattre efficacement la Covid-19. Certains d’entre eux n’ont même pas vraiment essayé.Sumit Ganguly, Distinguished Professor of Political Science and the Tagore Chair in Indian Cultures and Civilizations, Indiana UniversityDorothy Chin, Associate Research Psychologist, University of California, Los AngelesElizabeth J King, Associate Professor in Health Behavior and Health Education in the School of Public Health, University of MichiganElize Massard da Fonseca, Assistant Professor, Brazilian School of Public Administration, Fundação Getulio VargasSalvador Vázquez del Mercado, Conacyt Research Professor, National Laboratory of Public Policy, Centro de Investigación y Docencia EconómicasScott L. Greer, Professor, Global Health Management and Policy and Political Science, University of MichiganLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1585352021-04-11T16:45:38Z2021-04-11T16:45:38ZLes politiques de bien-être des salariés se diffusent dans les entreprises par effet mimétique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/393760/original/file-20210407-13-1rydbj7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5472%2C3645&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les entreprises ont tendance à imiter les pratiques de leurs pairs en matière de ressources humaines.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/office-meditation-reducing-work-stress-relief-1104907439">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>De plus en plus d’entreprises accordent une attention particulière à l’investissement dans le capital humain et considèrent le bien-être des employés comme l’un des canaux importants pour réaliser un retour sur cet investissement.</p>
<p>Comment expliquer cette tendance ? Il est établi dans la littérature financière et économique que les agents suivent souvent leurs pairs en observant les autres choix, obtenus par l’interaction sociale, plutôt que d’utiliser leurs propres informations et sans même chercher à connaître les coûts et les avantages des choix alternatifs.</p>
<p>Ainsi, nous avons cherché dans notre étude (article à venir dans <em><a href="https://www.researchgate.net/publication/350705893_The_Role_of_Peers_Effect_in_Corporate_Employee_Welfare_Policies">British Journal of Management</a></em>) à vérifier empiriquement une première hypothèse de recherche, à savoir les politiques de bien-être des salariés des entreprises sont positivement associées aux politiques de ressources humaines des organisations homologues.</p>
<h2>Le rôle des managers</h2>
<p>En effet, les préoccupations des managers en matière de réputation sur le marché du travail les obligent à adopter des politiques de ressources humaines similaires à celles de leurs concurrents, que ces politiques maximisent ou non la richesse des actionnaires ou celle de l’entreprise et de ses parties prenantes.</p>
<p>Par ailleurs, les managers peuvent manquer d’expertise, de connaissances ou de compétences spécifiques. Ils peuvent également être (ou avoir l’impression d’être) moins informés que leurs pairs du secteur, ce qui les conduit à suivre les pratiques des autres entreprises.</p>
<p>Cet argument est développé dans la littérature dans le cadre des modèles de réputation et d’apprentissage qui soutiennent que le mécanisme fondamental derrière le mimétisme n’est pas un suivi irrationnel mais il est dû à des informations, à une distorsion des incitations, ou des capacités cognitives limitées du gestionnaire.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/393762/original/file-20210407-17-7o7fbq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/393762/original/file-20210407-17-7o7fbq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/393762/original/file-20210407-17-7o7fbq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/393762/original/file-20210407-17-7o7fbq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/393762/original/file-20210407-17-7o7fbq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/393762/original/file-20210407-17-7o7fbq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/393762/original/file-20210407-17-7o7fbq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les préoccupations des managers les poussent à adopter des politiques de ressources humaines similaires à celles de leurs concurrents.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/handsome-manager-working-laptop-office-598517315">Shutterstock</a></span>
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<p>Ce cadre théorique nous permet de développer une deuxième hypothèse de recherche à tester, à savoir il existe une relation leader-suiveur dans les politiques de bien-être des salariés selon laquelle les entreprises suiveuses imitent les politiques des leaders.</p>
<h2>L’influence des pairs</h2>
<p>La littérature financière a montré l’importance de l’interaction sociale et des effets des pairs dans la définition des politiques financières d’une entreprise. Par exemple, la politique d’investissement d’une entreprise dépend largement des stratégies d’investissement et de gestion des flux de trésorerie de ses pairs.</p>
<p>De même, il existe des études empiriques suggérant que les décisions de financement des pairs locaux d’une entreprise influencent considérablement ses propres décisions en matière de structure du capital.</p>
<p>Dans notre étude, nous examinons l’effet des stratégies de bien-être des salariés des entreprises homologues sur les politiques de ressources humaines d’une entreprise. La principale motivation de notre étude est le fait que, dans le monde concurrentiel d’aujourd’hui, les salariés qualifiés sont la clé de l’innovation et de l’amélioration de la qualité.</p>
<p>Ainsi, pour conserver leur main-d’œuvre qualifiée, les entreprises doivent investir dans leur capital humain, au moins, si leurs pairs et concurrents du secteur le font ; sinon, ils craignent de perdre cet atout.</p>
<p>Nous mesurons le bien-être des employés grâce à la base de données Kinder, Lydenberg, Domini Research & Analytics (KLD) (rachetée par <a href="https://www.msci.com/our-solutions/esg-investing/esg-ratings">MSCI ESG Research</a> en 2009), qui mesure les pratiques RSE des entreprises en fonction de sept dimensions (communauté, diversité, relations avec les employés, environnement, produit, droits de l’homme, et gouvernance d’entreprise).</p>
<p>Pour notre variable d’intérêt à savoir le bien-être des salariés, nous avons considéré le score des forces (relations syndicales, politiques d’implication des employés, force des prestations de retraite, programmes de participation aux bénéfices, normes de santé et de sécurité, et d’autres forces) et des faiblesses (relations syndicales, réduction des effectifs, normes de santé et de sécurité, préoccupations concernant les prestations de retraite, et d’autres faiblesses) pour chaque entreprise et chaque année.</p>
<h2>Un comportement mimétique créateur de valeur</h2>
<p>Nous avons constitué un large panel de données américaines avec 11 451 observations année-entreprise sur deux décennies (1996–2017). En utilisant des techniques économétriques avancées, nous avons testé un modèle empirique expliquant le score de l’entreprise en politique de bien-être de ses salariés en fonction du score de ses pairs et un panel de variables de contrôle.</p>
<p>Nos résultats montrent que les politiques des entreprises comparables jouent un rôle important dans la définition de la politique de ressources humaines de l’entreprise. En particulier, les entreprises suiveuses imitent le comportement des leaders. Les entreprises leaders ne suivent cependant pas les autres. Les analyses montrent en outre que ce comportement mimétique est créateur de valeur.</p>
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<span class="caption">Les entreprises suiveuses imitent le comportement des leaders.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/red-person-spreads-his-influence-other-1728601711">Shutterstock</a></span>
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<p>En résumé, notre étude montre que les entreprises imitent les pratiques de leurs pairs en matière de ressources humaines. Nos résultats restent robustes avec différentes alternatives de techniques d’estimation et de variables de mesure. Dans le contexte actuel de la crise sanitaire, la responsabilité des entreprises leaders est par conséquent importante pour accélérer les bonnes pratiques en matière de bien-être des salariés au niveau de leur secteur d’activité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/158535/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une étude menée aux États-Unis montre que les pratiques des pairs, et plus particulièrement des leaders sectoriels, jouent un rôle important dans la définition des politiques de ressources humaines.Souad Lajili Jarjir, Enseignant-chercheur en finance, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Sabri Boubaker, Professor of Finance, EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.