tag:theconversation.com,2011:/ca/topics/ma-s-36047/articlesmaïs – The Conversation2024-03-05T16:00:36Ztag:theconversation.com,2011:article/2227732024-03-05T16:00:36Z2024-03-05T16:00:36ZLes mycotoxines dans les céréales et autres aliments : une menace pour la santé, un défi pour la sécurité alimentaire<p>C’est quoi les mycotoxines, en bref ? Les <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/mycotoxins">mycotoxines</a> sont des molécules naturelles toxiques susceptibles de contaminer les aliments. Elles sont sécrétées par des champignons ubiquitaires microscopiques tels que <em>Penicillium</em>, <em>Aspergillus</em> ou <em>Fusarium</em>, entre autres. Communément appelées moisissures, elles prospèrent dans des environnements chauds et humides, rendant les pays au climat tropical particulièrement vulnérables.</p>
<p>Les mycotoxines posent des risques sérieux pour la santé humaine et animale, ainsi que des <a href="https://publications.iarc.fr/_publications/media/download/1378/cf18c35802429a1f50a2d434340e848cb6d26f28.pdf">pertes économiques considérables</a> (du fait des récoltes détruites mais aussi de problèmes de santé animale et humaine).</p>
<p>La <a href="https://theconversation.com/fr/topics/toxicite-66344">toxicité</a> des mycotoxines va de <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/mycotoxins">symptômes aigus à des maladies chroniques graves</a>. Certaines mycotoxines comme les aflatoxines, les ochratoxines et les fumonisines, sont particulièrement problématiques car fréquemment présentes dans l’alimentation et <a href="https://doi.org/10.1016/j.toxicon.2020.04.101">toxiques même à faible dose</a>.</p>
<p>Difficilement détectables à l’œil nu, l’identification et la quantification des mycotoxines dans les produits alimentaires s’effectuent essentiellement en laboratoire.</p>
<h2>Dans les céréales, fruits à coque, épices, aliments pour animaux</h2>
<p>Les microorganismes qui produisent les mycotoxines ont la particularité de pouvoir se développer sur différentes cultures, à deux moments clés : dans les champs, lorsque les conditions climatiques sont favorables à leur croissance (chaleur et humidité importantes) ; et après récolte, pendant le stockage des denrées alimentaires.</p>
<p>Ces contaminants toxiques peuvent se retrouver dans <a href="https://www.anses.fr/fr/content/les-mycotoxines">divers aliments de base</a>, tels que les céréales, les fruits à coque, les épices, etc. mais également dans les aliments pour animaux ou dérivés des animaux (lait, viande).</p>
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<p>La présence de mycotoxines dans l’alimentation est un problème de santé publique majeur qui nécessite une attention urgente. Malgré leur impact significatif sur la santé mondiale, les mycotoxines restent méconnues du grand public et des autorités, en particulier dans les pays les moins avancés. Il est donc crucial de sensibiliser davantage les populations à cette menace invisible dans notre chaîne alimentaire pour limiter l’exposition humaine et animale.</p>
<h2>Une situation maîtrisée en France et en Europe</h2>
<p>En Europe et en Amérique du Nord, des réglementations strictes limitent la présence de mycotoxines dans les aliments. Cependant, de nombreux autres pays, notamment en Afrique, n’ont pas de limites réglementaires pour les mycotoxines, ce qui expose les populations vulnérables à des <a href="https://doi.org/10.3390/toxins15090583">risques sanitaires et économiques</a>.</p>
<p>En France, un système de traçabilité efficace et des seuils réglementaires stricts assurent la sécurité des consommateurs. Les produits contaminés sont rapidement <a href="https://rappel.conso.gouv.fr/categorie/0/1/mycotoxines">retirés du marché</a>.</p>
<h2>Des épidémies silencieuses en Afrique</h2>
<p>Parmi les problèmes majeurs qui entravent la sécurité alimentaire en Afrique, la contamination des aliments par les mycotoxines est considérée comme l’un des principaux dangers. Les épidémies de mycotoxicoses récentes, telles que l’ergotisme ou l’aflatoxicose, ont des <a href="https://doi.org/10.3390/toxins14070442">taux de mortalité élevés</a>. En Afrique, les cultures de base, notamment le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/ma-s-36047">maïs</a>, les arachides, le sorgho et le mil, sont souvent fortement contaminées par une ou plusieurs mycotoxines.</p>
<p>L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que <a href="https://www.who.int/docs/default-source/resources/the-need-for-integrated-approaches-to-address-food-safety-risk---the-case-of-mycotoxins-in-africa-en.pdf">plus de 500 millions de personnes dans le monde, principalement en Afrique subsaharienne, sont exposées à des niveaux dangereux de mycotoxines</a>. Les conditions climatiques, les pratiques agricoles et les systèmes de stockage des aliments contribuent à ce problème. Les fortes pluies, les températures élevées et l’humidité favorisent la croissance des champignons producteurs de mycotoxines.</p>
<p>Les exemples qui suivent, non exhaustifs et qui relatent des épidémies survenues au XXI<sup>e</sup> siècle, illustrent l’ampleur et la persistance de l’enjeu lié aux métabolites fongiques (c’est-à-dire issus des champignons) dans les cultures et les produits alimentaires africains.</p>
<p>Ainsi, la <a href="https://doi.org/10.1081/TXR-120024094">mort de 12 personnes dans le district de Meru North au Kenya en 2001</a> a été attribuée à la consommation de grains de maïs contaminés par l’aflatoxine.</p>
<p>Pour cette même raison, plus tard, en 2004, le Kenya a connu l’un des <a href="https://doi.org/10.1128/AEM.02370-06">épisodes les plus graves d’intoxications humaines jamais enregistrés dans l’histoire des mycotoxines</a>. Cette épidémie aiguë a provoqué 125 décès sur 317 cas signalés au 20 juillet 2004, soit un taux de mortalité de 39 %.</p>
<p>Malheureusement, l’épidémie d’aflatoxicose s’est poursuivie au cours des années suivantes (2005-2008 et 2010), en particulier chez les agriculteurs de subsistance d’Afrique de l’Est. Il s’agit d’agriculteurs dont la production est essentiellement destinée à les nourrir eux-mêmes ainsi que leur famille, sans qu’ils puissent dégager de surplus commercialisable.</p>
<p>Une étude approfondie menée dans l’est du Kenya a révélé que <a href="https://doi.org/10.1289/ehp.1003044">plus de 470 cas d’empoisonnement étaient survenus entre 2004 et 2010</a> à la suite de l’ingestion d’aliments contaminés par l’aflatoxine, avec un taux de mortalité de 40 %.</p>
<p>Plus récemment, une <a href="https://doi.org/10.3920/WMJ2018.2344">épidémie d’aflatoxicose a été signalée entre mai et novembre 2016 en Tanzanie centrale</a>, entraînant un taux de mortalité de 30 %.</p>
<p>Bien que ces cas aient été largement documentés, la possibilité que ces chiffres soient sous-estimés est élevée. En effet, l’inadéquation ainsi que le manque d’organisation du système de suivi coordonné et de la surveillance médicale conduisent souvent à de nombreux cas non signalés.</p>
<p>Il convient de noter que la grande majorité des foyers de mycotoxicoses documentés en Afrique ne concerne que celles dues aux aflatoxines, malgré le large éventail d’autres mycotoxines qui contaminent les denrées alimentaires. Ces intoxications aiguës ne sont donc que la partie émergée de l’iceberg.</p>
<h2>Des causes climatiques, agricoles et individuelles</h2>
<p>La lutte contre les mycotoxines pose de nombreuses difficultés en raison de la multiplicité des facteurs à prendre en compte. Ces contaminations résultent de l’interaction de causes climatiques, agricoles et individuelles, dans un contexte où les données scientifiques et les moyens de détection restent insuffisants.</p>
<p>Pour prévenir les contaminations, plusieurs méthodes existent : en champs, entre autres, recourir à des rotations de cultures et utiliser des variétés résistantes ; pour le stockage, éviter les lieux chauds et humides, bien aérer les moissons ou récoltes, etc.</p>
<p>Mais le changement climatique pourrait aggraver le problème des mycotoxines en Afrique, en créant des conditions encore plus favorables aux moisissures, <em>via</em> une alternance de sécheresses et de fortes précipitations.</p>
<p>Il s’agit de gérer un aléa sanitaire dont les effets sur le long terme sont mal cernés. Une approche pluridisciplinaire, systémique et concertée est nécessaire pour une maîtrise durable de ce problème. Les épidémies passées soulignent la nécessité de renforcer la surveillance et le contrôle de la contamination par les mycotoxines, de développer des techniques de culture et de stockage adaptées, d’intensifier les programmes de détection et de sensibiliser la population aux risques de consommation de produits contaminés.</p>
<h2>L’urgence : produire des données sur les mycotoxines en Afrique</h2>
<p>Les mycotoxines sont un problème mondial, particulièrement grave dans les pays moins avancés, notamment en Afrique, où la surveillance et le rappel des produits contaminés sont insuffisants. Les seuils réglementaires sont souvent inexistants ou plus élevés, et la traçabilité des aliments est déficiente, contribuant aux épidémies régulières. Le manque de données sur la contamination, la toxicité et l’exposition aux mycotoxines entrave l’établissement de réglementations protectrices.</p>
<p>La production de ces données est essentielle pour identifier les mycotoxines les plus dangereuses. Mais elle dépend de la disponibilité de fonds de recherche, d’installations technologiques et d’une main-d’œuvre qualifiée, souvent inadéquats ou inexistants dans les pays les moins avancés.</p>
<h2>À terme, réduire de l’impact sanitaire et socio-économique sur les populations vulnérables</h2>
<p>Ainsi, nos travaux de recherche se concentrent sur la compréhension des facteurs favorisant la croissance de moisissures produisant des mycotoxines, mais aussi l’identification de mycotoxines locales, l’évaluation de la contamination des cultures, ainsi que l’estimation de l’exposition et des risques sanitaires des populations.</p>
<p>Ces travaux visent à produire des données fiables au niveau local, en étroite collaboration avec les chercheurs africains. L’objectif est de co-concevoir avec les parties prenantes africaines des solutions adaptées, telles que des méthodes de détection et de prévention durables. Il s’agit également de renforcer les capacités analytiques nationales et de coopérer avec la recherche internationale selon une logique de co-développement.</p>
<p>Ces efforts de recherche viendront fournir une base factuelle solide aux pays africains pour élaborer des réglementations nationales efficaces. L’objectif final est de réduire de manière durable l’impact sanitaire et socio-économique des mycotoxines sur les populations vulnérables du continent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222773/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mohamed Haddad a reçu des financements de l'IRD et de l'Université Toulouse 3 Paul Sabatier</span></em></p>En Europe, des réglementations strictes limitent la présence de mycotoxines dans les aliments. Mais en Afrique, des épidémies et des décès sont liés à la consommation de céréales contaminées.Mohamed Haddad, Chercheur, chimiste des produits naturels, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1994432023-02-09T23:42:51Z2023-02-09T23:42:51ZPourquoi la Chine, plus que la guerre en Ukraine, menace la sécurité alimentaire mondiale<p>En ce début 2023, la flambée des prix agricoles, qui a marqué l’année qui vient de s’écouler, semble derrière nous. Les prix des produits les plus affectés, comme les céréales et les oléagineux, ont en effet retrouvé leur niveau de fin 2021. Les prix de l’énergie et des fertilisants sont eux redescendus de leur pic de 2022 sans toutefois revenir à leur niveau de 2021.</p>
<p>Ce retour des prix à des niveaux plus bas ne doit cependant pas faire oublier que les prix étaient déjà très élevés en 2021, ce qui montre bien que l’invasion de l’Ukraine par la Russie n’était pas la cause première de cette crise, mais un facteur aggravant d’une situation tendue qui lui préexistait.</p>
<p>Le prix des céréales était, en effet, 44 % plus haut en décembre 2021 qu’un an plus tôt ; l’augmentation était encore plus spectaculaire pour le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/ble-50466">blé</a>, dont le prix avait augmenté de près de 80 % entre ces deux dates. Or en 2021, ces niveaux inquiétaient déjà les organisations internationales travaillant sur la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/securite-alimentaire-51357">sécurité alimentaire</a>, car ils mettaient en péril les approvisionnements en nourriture dans de nombreux pays pauvres dont les finances sortaient très affaiblies de la crise sanitaire.</p>
<p>Le maintien de prix à des niveaux aussi élevés pendant maintenant plus de deux ans menace fortement les progrès réalisés en matière de sécurité alimentaire depuis deux décennies.</p>
<p><iframe id="F8U56" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/F8U56/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Bien entendu, les causes de ces évolutions sont multiples, mais l’une d’entre elles, pourtant majeure, est rarement évoquée : la politique menée en <a href="https://theconversation.com/fr/topics/chine-20235">Chine</a> pour assurer sa sécurité alimentaire. Celle-ci s’est matérialisée par la constitution de stocks de céréales et par la mise en place de restrictions aux exportations de fertilisants, mesures qui ont contribué à la hausse des prix mondiaux et aux difficultés pour sortir de cette crise.</p>
<h2>La Chine dépendante depuis 2003</h2>
<p>Avec 18 % de la population mondiale pour seulement 8,6 % des terres arables en 2020, la Chine fait face à un défi quasi structurel de sécurité alimentaire. D’autant que ses terres arables ont diminué de 6 % de 2009 à 2019 (ministère des Ressources naturelles) sous la pression de l’urbanisation et offrent une productivité moyenne relativement modeste.</p>
<p>Cette situation délicate est aggravée par la pollution des eaux et des sols, particulièrement saillante par le passé du fait d’une administration peu regardante. Jusqu’au début des années 2000, la consommation alimentaire chinoise était assurée principalement par des approvisionnements locaux, le commerce avec le reste du monde étant extrêmement limité.</p>
<p><iframe id="18mzC" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/18mzC/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>L’enrichissement de la Chine s’est traduit par une transformation de son régime alimentaire : plus de calories et de protéines consommées et plus de produits d’origine animale ; d’après FAOSTAT, en Chine, la part des protéines d’origine animale dans le total des protéines consommées est passée de <a href="https://www.fao.org/statistics/fr/">32 % en 2001 à 39 % en 2018</a>.</p>
<p>Ce supplément de demande n’ayant pas pu être satisfait par la production intérieure, les importations de produits alimentaires chinois ont commencé à augmenter en 2002, le déséquilibre entre consommation et production s’accélérant même depuis 2013 jusqu’à conduire la Chine à devenir le premier importateur mondial de produits agricoles et alimentaires en 2012.</p>
<p>À ces transformations structurelles s’est ajouté l’épisode d’épizootie de peste porcine africaine qui a détruit la moitié du cheptel porcin chinois en 2018. La reconstitution de ce cheptel à partir de 2020-2021 a conduit la Chine à importer beaucoup plus de maïs : plus de 29 millions de tonnes, contre jamais plus de 8 millions par an auparavant. Un tel accroissement de demande, qui correspondait à 2,5 % de la production mondiale, a significativement contribué à l’augmentation des prix mondiaux en 2021.</p>
<h2>Politique nationale, conséquences mondiales</h2>
<p>La sécurité alimentaire est en Chine un souci de longue date, comme en témoignent les niveaux de stocks très élevés à la fin des années 1990. Les réserves agricoles publiques sont constituées à la fois des réserves stratégiques nationales, des stocks des différents échelons administratifs (répondant pour partie à des minimas fixés par le gouvernement, dont six mois de consommation pour les provinces consommatrices nettes et trois pour les autres) et des réserves temporaires issues des programmes de soutien des prix.</p>
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<p>Avec la montée en puissance des importations de produits alimentaires à partir de 2003, l’enjeu de sécurité alimentaire est réapparu dans les préoccupations des autorités chinoises en 2006. Au-delà d’une présence nouvelle dans les discours de politique générale, un premier Plan-Cadre spécifique a été publié en 2008, fixant un objectif d’autosuffisance sur le blé et le riz à l’horizon 2030, ainsi que la sanctuarisation d’une certaine surface de terres arables au niveau national et aux différents échelons administratifs.</p>
<p>En parallèle, les autorités ont progressivement déployé, à partir de 2006, un programme de soutien aux prix, particulièrement généreux pour les producteurs, au point de donner lieu à un différend porté à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et perdu par la Chine. Ce programme aurait été un élément important de la hausse des réserves chinoises temporaires jusqu’à 2010. Enfin, depuis 2014, les obligations et la responsabilité des autorités locales en matière de réserves minimales ont été renforcées pour plusieurs produits agricoles de base.</p>
<p>Résultat, au cours de la période 2010-2017 la Chine a procédé à une fantastique accumulation de stocks de grains, de sorte qu’aujourd’hui les stocks de l’ensemble des céréales et oléagineux sont estimés à près de 500 millions de tonnes, pour une consommation annuelle de 780 millions de tonnes (graphique 2). Même si ces stocks ont été pour beaucoup accumulés à partir de productions domestiques, ils ont nécessité d’augmenter les importations : les stocks actuels correspondent à près d’un tiers des importations chinoises depuis 2000.</p>
<p>La politique de stockage chinoise illustre bien les effets secondaires d’une politique nationale sur la sécurité alimentaire mondiale. Du fait de la taille du pays, le stockage chinois de céréales et d’huiles végétales a des répercussions significatives sur les équilibres globaux. Concernant le blé, les stocks chinois représenteraient aujourd’hui environ 20 % de la consommation mondiale (graphique 3), soit 54 % des stocks mondiaux. La situation serait encore pire pour le maïs (69 %) et le riz (64 %).</p>
<p><iframe id="S28Py" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/S28Py/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En plus de la taille de ces stocks, leur détention par la Chine représente un enjeu particulier pour la sécurité alimentaire mondiale. En effet, en règle générale, les stocks de céréales sont considérés comme cruciaux car ils permettent d’absorber les chocs temporaires d’offre et de demande : ils contribuent à stabiliser les prix, limitant aussi bien leur baisse, lorsque les récoltes sont bonnes, que leur hausse, lorsqu’elles sont mauvaises.</p>
<h2>Une crise différente</h2>
<p>La théorie économique nous enseigne que les pics de prix sur les marchés agricoles devraient survenir lorsque les stocks sont au plus bas et qu’il n’y a plus que très peu de marges de manœuvre pour faire face à une mauvaise récolte. Historiquement, cela a bien été le cas : les flambées des prix des années 1970 et 2000 correspondent par exemple à des stocks mondiaux historiquement bas.</p>
<p>La crise actuelle est différente car elle intervient à un moment où les stocks sont historiquement hauts. Mais c’est l’importance des stocks chinois qui expliquent l’abondance mondiale car, dans les principaux pays exportateurs, ces stocks sont au plus bas après le minimum de 2007-2008, autre année de flambée des prix.</p>
<p>Or, les stocks chinois ne jouent pas aujourd’hui un rôle régulateur pour la sécurité alimentaire mondiale car ils ne réagissent pas aux signaux de prix et aux autres tensions sur les marchés. Les stocks ont normalement vocation à absorber les chocs temporaires ou à permettre de bénéficier des hausses de prix.</p>
<p>Mais dans le cas chinois, cela est différent. Lorsque la demande pour l’alimentation animale augmente en Chine à partir de 2020-2021, c’est avant tout les importations qui y répondent, pas les stocks, pourtant abondants. Lorsque les prix flambent en 2022 et que les grands pays exportateurs vident leurs stocks, les stocks chinois ne bougent pas, malgré les opportunités de profits.</p>
<p>Les stocks chinois réagissent donc à des objectifs de politique intérieure : assurer un volant de réserves alimentaires au seul bénéfice de la population chinoise. Le fait que la Chine ait accumulé d’importants stocks, loin de contribuer à une meilleure sécurité alimentaire pour tous, a au contraire diminué les quantités disponibles sur les marchés, les laissant beaucoup plus sensibles aux chocs.</p>
<h2>Pékin effondre le marché des fertilisants</h2>
<p>Une production mondiale abondante aurait été en 2022 un élément-clé pour sortir de la flambée des prix agricoles. Or, sur cette dimension aussi, une politique chinoise pèse : celle qui concerne les restrictions aux exportations de fertilisants. La Chine a mis en place le 28 août 2021, donc bien avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, une interdiction, jusqu’au 31 décembre 2022, d’exporter du <em>phosphate rock</em>, ainsi que des licences d’exportation de fertilisants. Avant cela, la Chine réalisait 11 % des exportations mondiales d’engrais azoté (1er exportateur mondial), 1,2 % de celles de potasse et 11 % de celles de phosphate.</p>
<p>Les restrictions à l’exportation sont peu régulées par l’OMC, qui <em>grosso modo</em> a pour seule exigence de réclamer aux pays qui les mettent en place d’informer les pays qui pourraient être affectés par ces instruments commerciaux et d’appliquer ces restrictions sans discrimination à tous les membres.</p>
<p>Dans un contexte d’augmentation des prix de l’énergie (énergie nécessaire à la production de fertilisants azotés) et des fertilisants, la Chine a mis en place ces restrictions à l’exportation pour que sa production de fertilisants soit majoritairement vendue aux fermiers chinois. Avec ces restrictions, l’offre de fertilisants sur le marché mondial s’est effondrée et leurs prix se sont envolés en août 2021 à partir d’un niveau déjà relativement élevé, dû à la hausse des prix de l’énergie à partir du premier semestre 2021. Ces restrictions à l’exportation se sont traduites par une baisse des exportations chinoises de fertilisants de 7 millions de tonnes entre 2021 et 2022 pour l’ensemble des fertilisants, soit une réduction de 23 %.</p>
<p>Les pénuries mondiales de fertilisants en 2021 et 2022 ont limité la production agricole mondiale. Si les hausses des prix de l’énergie sont un des principaux facteurs de ces tensions, les restrictions aux exportations chinoises ont aussi joué un rôle non négligeable et souvent omis. Les prix mondiaux des fertilisants ont baissé significativement depuis le premier trimestre 2022, tout en restant très élevés par rapport à janvier 2020 (graphique 1).</p>
<h2>Le risque d’un « multi-bilatéralisme »</h2>
<p>Cette situation est d’autant plus inquiétante que les prix des fertilisants ont augmenté beaucoup plus que ceux des produits agricoles, ce qui devrait amener les agriculteurs à en utiliser moins et donc peser encore sur la production agricole mondiale.</p>
<p>Ces dernières décennies, la Chine est devenue un acteur majeur sur les marchés agricoles internationaux, comme sur de nombreux autres marchés. Avec un poids plus important dans le commerce agricole et alimentaire mondial, on aurait pu espérer une conduite de sa politique commerciale coordonnée avec celles de ses partenaires.</p>
<p>Au contraire, ce poids plus important s’est accompagné de politiques internes de très grande ampleur conduites sans coordination avec ses partenaires et dans une relative opacité, affectant ainsi un système alimentaire fragile. Même si la Chine n’est pas seule responsable de la crise actuelle, ses politiques y ont contribué, alors même que la vente des stocks chinois pourrait mettre fin aux tensions.</p>
<p>L’importance de ces réserves chinoises rend d’ailleurs d’autant plus nécessaire l’engagement multilatéral de la Chine sur les enjeux de sécurisation des approvisionnements alimentaires des pays les plus vulnérables. Or, en dépit des initiatives de la France, de l’UE et du G7 en ce sens en 2022, au plus fort des tensions sur les marchés agricoles mondiaux, Pékin n’a fait état d’aucune volonté d’aller au-delà des mécanismes multilatéraux existants.</p>
<p>Dans le même temps, le sujet de la sécurité alimentaire a été bien plus fréquemment traité dans les échanges bilatéraux et plurilatéraux des dirigeants de la République populaire en 2022, pouvant laisser craindre une préférence de Pékin pour une forme de « multi-bilatéralisme », plus à même de permettre une exploitation géostratégique de sa puissance de marché.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199443/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La politique menée par Pékin pour répondre à sa demande intérieure en matière de blé, de riz ou de maïs contribue fortement à la hausse des prix sur les marchés internationaux.Antoine Bouët, Directeur, CEPIIChristophe Gouel, Conseiller scientifique au CEPII, directeur de recherche, InraeFrançois Chimits, Économiste, programme scientifique « politiques commerciales », CEPIILicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1018462018-10-07T19:20:39Z2018-10-07T19:20:39ZLa vie en développement : se construire sans ou sur une erreur<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/235863/original/file-20180911-144461-1f32b7v.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C3%2C1187%2C849&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’erreur, source de diversité.
</span> <span class="attribution"><span class="source"> C.Spriet /UGSF</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2018 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>Les cellules d’un organisme se développent selon un programme précis dicté par son ADN et influencé par l’environnement. Le processus de duplication de l’ADN ou une modification de l’environnement des cellules peuvent être à l’origine d’erreurs altérant le comportement normal de la cellule. Certaines de ces erreurs peuvent être corrigées (réparation de l’ADN), devenir fatales (apoptose) ou provoquer des anomalies de développement (malformation des organes). Certaines de ces erreurs peuvent conférer des avantages aux cellules et organismes qui les portent, et être recherchées, voire sélectionnées.</p>
<p>Comment se produisent les erreurs ? Parmi les agents créant des erreurs au niveau de l’ADN, on recense les agents mutagènes chimiques, les rayonnements ultraviolets et les rayonnements ionisants. Ces agents modifient les bases de l’ADN, ou brisent la structure physique de l’hélice d’ADN ou provoquent des erreurs lors de la réplication de l’ADN. Si la lésion de l’ADN n’est pas corrigée, l’information génétique peut être altérée de façon permanente, créant une mutation. Ces agents sont dits génotoxiques.</p>
<h2>Se construire sans erreur</h2>
<p>Les brins d’ADN peuvent donc être cassés ou modifiés. La plupart de ces lésions moléculaires sont détectées et corrigées quelques secondes après leur création, avant qu’elles ne causent des anomalies définitives. Les systèmes de détection des erreurs, sensibles aux mauvais appariements des bases ou aux altérations de la structure physique de l’ADN, évitent ainsi aux cellules de transmettre des informations erronées, dont les répercussions peuvent avoir des effets au niveau de la cellule ou de l’organisme. Des agents génotoxiques sont impliqués dans des processus de cancérisation où l’accumulation de mutations conduit à la transgression des règles de la vie cellulaire avec pour conséquence une prolifération anarchique, l’évitement de la mort cellulaire.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/235867/original/file-20180911-144461-tp1nka.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/235867/original/file-20180911-144461-tp1nka.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=986&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/235867/original/file-20180911-144461-tp1nka.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=986&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/235867/original/file-20180911-144461-tp1nka.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=986&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/235867/original/file-20180911-144461-tp1nka.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1240&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/235867/original/file-20180911-144461-tp1nka.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1240&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/235867/original/file-20180911-144461-tp1nka.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1240&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Têtard de Xenopus laevis âgés de 6 jours.</span>
<span class="attribution"><span class="source">S. Slaby, C. Spriet/UGSF</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par ailleurs, si ces mutations se produisent lors de la vie embryonnaire, elles peuvent avoir des effets sur le développement. La chorégraphie qui préside à l’édification d’un organisme à partir d’une unique cellule œuf demande une régulation fine. Toute dérégulation peut compromettre sévèrement le développement de l’individu ou altérer des fonctions cellulaires capitales.</p>
<p>Ainsi chez l’homme, la consommation d’alcool, de drogue, la prise de médicaments et les infections virales (rubéole) au cours de la grossesse ont des effets visibles sur le développement embryonnaire et la vie de l’individu.</p>
<p>La thalidomide est un agent pharmacologique qui constitue un cas d’école : prescrit aux femmes enceintes pour lutter contre les nausées et les troubles nerveux, ce médicament est à l’origine de graves malformations congénitales. La thalidomide fait désormais partie de ce que l’on appelle les agents tératogènes, c’est-à-dire qui peuvent provoquer des effets néfastes sur le fœtus lorsque celui-ci y est exposé pendant la grossesse. Le type de malformation ou de défaut de développement embryonnaire sera conditionné par la durée, le moment de l’exposition et la nature des agents dits tératogènes.</p>
<p>Certains modèles animaux, comme les amphibiens, peuvent aider à comprendre les facteurs environnementaux qui conduisent aux anomalies de développement.</p>
<h2>Se construire sur une erreur</h2>
<p>Certaines de ces erreurs liées à la multiplication de l’ADN sont à l’origine de l’apparition de nouveaux caractères ou de nouvelles propriétés indispensables à l’évolution des organismes. Dans la nature, ces nouvelles propriétés vont, par exemple, permettre à l’individu de mieux s’adapter à son environnement. L’homme tire parti de ces erreurs notamment en sélectionnant des espèces adaptées à différentes situations.</p>
<p>La domestication du maïs en est un bon exemple. Elle commence il y a 9 000 ans au Mexique lorsque l’homme sélectionne des plants mutés de téosinte, l’ancêtre du maïs tel que nous le connaissons aujourd’hui. De façon étonnante, les différences morphologiques majeures entre la téosinte et le maïs sont dues à un très petit nombre de gènes dont les mutations ont permis au maïs de prendre un rôle central dans l’alimentation d’Amérique centrale depuis plus de 5 000 ans. Depuis, l’homme n’a cessé d’optimiser le maïs dans le but d’améliorer son rendement de production ou d’adapter ses caractéristiques aux différentes applications industrielles. Ainsi, plusieurs dizaines de nouvelles variétés sont actuellement développées chaque année en France.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/235866/original/file-20180911-144464-ygx73v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/235866/original/file-20180911-144464-ygx73v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/235866/original/file-20180911-144464-ygx73v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/235866/original/file-20180911-144464-ygx73v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/235866/original/file-20180911-144464-ygx73v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/235866/original/file-20180911-144464-ygx73v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/235866/original/file-20180911-144464-ygx73v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Grain de maïs à éclater.</span>
<span class="attribution"><span class="source">C. Spriet/UGSF</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’utilisation du maïs se décline aujourd’hui dans trois grands domaines d’applications. La grande majorité de la production est dévolue à l’alimentation animale. Viennent ensuite l’alimentation humaine, mais également les industries non-alimentaires où le maïs pourra être décliné du biocarburant au bioplastique.</p>
<p>Cette grande variété d’applications nécessite des maïs présentant des caractéristiques très différentes, notamment en ce qui concerne la composition et la morphologie du grain. Le grain de maïs est composé de différentes parties :</p>
<ul>
<li><p>l’embryon, situé à la base du grain ;</p></li>
<li><p>l’albumen principalement composé de grains d’amidons et d’eau ;</p></li>
<li><p>l’enveloppe extérieure ou péricarpe.</p></li>
</ul>
<p>Même si les variétés actuelles de maïs produisent des grains de couleur jaune, il existe en réalité une multitude de couleurs possibles allant du violet au jaune, en passant par le rouge ou le rose. Ces variations de couleurs sont dépendantes de l’accumulation de pigments (carotènes et anthocyanes) dans les différentes couches cellulaires des grains.</p>
<p>Les différences entre les variétés de maïs sont liées à la présence de modification de l’ADN de la plante. Certaines variétés ont ainsi été sélectionnées pour un usage spécifique, c’est le cas, par exemple du maïs à éclater ou <em>Zea mays var. everta</em> qui possède une enveloppe externe très épaisse indispensable à la fabrication du popcorn.</p>
<p>Lorsqu’on chauffe de tels grains à une température optimale de 180°C, l’eau présente dans l’albumen va entrer en ébullition et se concentrer au cœur du grain. L’enveloppe extérieure de cette variété de maïs est alors suffisamment épaisse pour permettre une montée en pressions de l’eau qui va cuire le grain d’amidon, le rendre visqueux et permettre son agglutination. La vapeur d’eau occupant un plus grand volume que sous forme liquide, elle va enfin rompre brutalement l’enveloppe et l’amidon prendra alors la forme caractéristique du popcorn. Le popcorn peut alors être savouré, mais également être utilisé pour le conditionnement biodégradable d’objet fragile, le popcorn présentant des propriétés élastiques équivalentes à celles du polystyrène expansé.</p>
<p>Ainsi, l’erreur fait partie de la vie de toutes les cellules. Si elle n’est pas réparée, elle peut être source de diversité, d’apparition de malformations ou de nouveaux caractères. Si les erreurs lors du développement peuvent être associées à des événements dramatiques, elles peuvent également être moteurs de l’évolution. Elles peuvent par ailleurs être sélectionnées par l’homme pour l’amélioration variétale.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été écrit par trois chercheurs de l’Unité de Glycobiologie structurale et fonctionnelle de Lille (le docteur Corentin Spriet, le professeur Jean‑François Bodart et le docteur Fabrice Wattebled) dans le contexte du village des sciences de Lille ou ces thèmes seront développés au travers de différents stands d <a href="http://www.cue-lillenorddefrance.fr/?q=culture-patrimoine/culture-scientifique/culture-fete-de-la-science">u 11 au 14 octobre 2018</a>. N’hésitez pas à nous rendre visite pour en savoir plus !</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/101846/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Corentin Spriet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si les erreurs lors du développement peuvent être associées à des événements dramatiques, elles sont également moteurs de l’évolution.Corentin Spriet, PhD en Instrumentation et Analyse Avancée, HDR en Biologie et Santé., Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/818652017-08-22T20:47:18Z2017-08-22T20:47:18ZDomestication des plantes sauvages : que savaient vraiment les premiers agriculteurs ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/180752/original/file-20170802-24116-1usvf3p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C248%2C1238%2C749&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Moisson des céréales en Égypte.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Egyptian_harvest.jpg">The Oxford Encyclopedia of Ancient Egypt/Wikimedia Commons</a></span></figcaption></figure><p>Les débuts de l’agriculture, qui marquent une <a href="https://theconversation.com/andrea-leadsom-is-wrong-about-the-history-of-farming-and-heres-why-it-matters-70923">véritable révolution</a> dans l’histoire de l’humanité, fascinent les scientifiques depuis des siècles. L’événement, vieux de quelque 10 000 ans, est pourtant difficile à étudier et un certain nombre d’énigmes restent à résoudre. Comment les chasseurs-cueilleurs ont-ils commencé à pratiquer l’agriculture ? Comment s’y sont-ils pris pour domestiquer les plantes ? Comment expliquer les différences qui existent entre plantes cultivées et plantes sauvages ?</p>
<p>Si l’on compare en effet les cultures domestiquées avec leurs apparentées sauvages, la différence est souvent impressionnante. L’exemple du maïs est à ce titre tout à fait significatif, comme en témoigne l’image ci-dessous.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/169337/original/file-20170515-6984-clo9tj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">À gauche, le téosinte, que l’on trouve essentiellement au Mexique. À droite, sa version domestiquée, le maïs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nsf_beta/3745571067">Nicolle Rager Fuller, National Science Foundation</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le processus de domestication qui explique ces transformations entre plantes sauvages et cultivées remonte pour l’essentiel aux premiers temps de l’agriculture, c’est-à-dire à l’âge de pierre. C’est à cette période que l’on a commencé à semer, cultiver et récolter à l’aide de faucilles en pierre.</p>
<p>Les populations de l’époque avaient-elles conscience que cette domestication entraînerait de tels effets sur les plantes ? Recherchaient-elles ces résultats ? La question reste entière…</p>
<p>Est-ce que quelqu’un a vraiment pu, 8000 av. J.-C., penser que des plants de téosinte pourraient donner un jour des <a href="http://learn.genetics.utah.edu/content/selection/corn/">épis de maïs</a> ou que le <a href="http://www.sciencemag.org/news/2015/11/study-argues-rice-was-domesticated-least-three-times">riz sauvage</a> pourrait donner à terme du riz basmati ou à long grain ? Beaucoup d’archéologues pensent que non, mais il semble difficile d’exclure définitivement cette piste.</p>
<h2>Le rôle des premiers agriculteurs</h2>
<p>Les premiers fermiers ont-ils domestiqué les plantes et cherché à les faire évoluer ? Ou les caractéristiques de ces plantes ont-elles tout simplement évolué à mesure que les agriculteurs les travaillaient et les récoltaient ?</p>
<p>L’article publié par notre équipe dans la revue <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/evl3.6/epdf"><em>Evolution Letters</em></a> se penche sur ces questions. Nous avons ainsi cherché à connaître et à comparer les tailles des grains des plantes sauvages avec ceux des plantes domestiquées. À noter que ces dernières – comme le blé, le riz ou le maïs – ont perdu la capacité de disperser naturellement leurs grains.</p>
<p>Au niveau de la taille, la différence s’avère importante : les grains de maïs sont 15 fois plus gros que ceux du téosinte, ceux du soja sept fois plus gros que ceux de son « cousin » sauvage. En ce qui concerne l’orge, la différence n’est que de 60 %, mais l’<a href="http://onlinelibrary.wiley.com/wol1/doi/10.1111/1365-2435.12760/abstract">écart de rendement</a> entre les deux variétés est énorme.</p>
<p>Bien sûr, il est possible que les fermiers qui cultivaient les versions primitives de ces cultures aient cherché à obtenir des grains de plus grande taille pour assurer un meilleur rendement. Pour y voir plus clair, nous avons décidé de comparer l’évolution de ces plantes à celle des légumes cultivés.</p>
<h2>Des grains plus gros avec la domestication</h2>
<p>En effet, dans le cas où les premiers fermiers auraient pratiqué la culture des légumes basée sur la sélection, les effets auraient été visibles sur les feuilles, les tiges ou les racines qui se consomment, mais pas directement sur la taille des grains. Il est ainsi probable que les changements intervenus au niveau de la taille des grains pour ces légumes n’aient pas de caractère intentionnel.</p>
<p>La sélection naturelle est une autre façon d’expliquer cet accroissement de la taille des grains, les plants les plus imposants ayant mieux survécu que les petits.</p>
<p>Ce phénomène peut aussi s’envisager comme une conséquence de transformations génétiques : les fermiers auraient pu produire des cultures de taille importante volontairement, en conservant et en replantant les grains issus des plantes les plus grandes, ou involontairement, en accordant plus d’attention, sans même le remarquer, aux plantes de grande taille, au détriment des plus petites. Mais il existe de nombreuses plantes qui, bien que grandes au moment de leur maturité, poussent à partir de petits grains.</p>
<p>Nous avons rassemblé des données renseignant la taille des grains de nombreuses cultures modernes, ainsi que d’espèces sauvages encore vivantes aujourd’hui qui leur sont apparentées. Nous avons trouvé, pour sept espèces de légumes, des preuves solides accréditant l’idée que la domestication a engendré une croissance générale des grains. C’est particulièrement frappant pour des cultures comme celle de la pomme de terre, du manioc ou de la patate douce, pour lesquelles les fermiers n’ont même pas besoin de semer. Dans ces cas, l’augmentation de la taille des grains s’est certainement produite sans que les hommes l’aient recherché.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/169341/original/file-20170515-6987-jsipst.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le système racinaire d’un plant de patate douce. Les pommes de terre poussent généralement à partir de leurs semblables ou de boutures. Pourtant, les graines ont malgré tout grossi depuis la domestication du légume.</span>
<span class="attribution"><span class="source">saint1533/Pixabay</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Sélection naturelle et génétique</h2>
<p>Si, rien qu’en cultivant des légumes, les premiers fermiers ont fait grossir leurs grains, cela peut nous apprendre quelque chose sur les céréales. En effet, les effets liés à la domestication des légumes sont tout à fait comparables à celle qui intervient pour les céréales ou les légumineuses (lentilles ou haricots, par exemple). Il est donc tout à fait probable que la croissance des grains observée sur ces cultures se soit produite, au moins en partie, pendant la phase de domestication, sans qu’elle soit le fruit de la volonté des fermiers de l’âge de pierre. Ceux-ci n’avaient pas prévu de cultiver des céréales de plus grande taille : c’est la sélection naturelle ou la génétique qui ont fait leur travail.</p>
<p>Les travaux menés dans le cadre de notre étude contribuent à mieux comprendre l’évolution des cultures. Et la sélection « involontaire » décrite dans cet article constitue un phénomène probablement plus important que nous le pensions.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/81865/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Colin Osborne a reçu des financements du UK Natural Environment Research Council (NERC) et du European Research Council (ERC).</span></em></p>Les plantes que nous cultivons sont très différentes des espèces sauvages qui leur sont apparentées. Est-ce le fruit de la sélection naturelle ou d’une volonté délibérée des hommes ?Colin Osborne, Professor of Plant Biology, University of SheffieldLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/732472017-02-19T20:18:38Z2017-02-19T20:18:38ZAfrique : pourquoi la lutte contre la chenille légionnaire est si difficile<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/157422/original/image-20170219-10209-igmbyh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La chenille légionnaire d’automne a été repérée pour la première fois en Afrique début 2016. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/confirm/447052915?size=huge_jpg">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>L’aire de répartition de la chenille légionnaire d’automne (<em>Spodoptera frugiperda</em>) se situe en Amérique. Mais cette larve de papillon se propage actuellement à grande vitesse dans la partie sud de l’Afrique. Son apparition sur le continent a été détectée pour la première fois en janvier 2016 <a href="http://dx.doi.org/10.1371%2Fjournal.pone.0165632">au Nigeria</a>. En une année, elle s’est répandue pour <a href="http://ewn.co.za/2017/02/03/sa-confirms-presence-of-fall-armyworm">atteindre, en janvier dernier, l’Afrique du Sud</a>.</p>
<p>La présence de la chenille légionnaire d’automne ajoute aux dégâts déjà causés par sa cousine africaine, <a href="http://theconversation.com/armyworms-are-wreaking-havoc-in-southern-africa-why-its-a-big-deal-72822"><em>Spodoptera exempta</em></a>.</p>
<p>Cette situation a des répercussions considérables pour les populations touchées. Car ce papillon est un terrible ravageur du maïs et d’autres plantes cultivées, comme le sorgho. Il s’agit d’une menace sérieuse pour l’agriculture et par conséquent la sécurité alimentaire en Afrique ; c’est de même un problème pour le commerce international avec la mise en place de quarantaines. La situation est tout particulièrement préoccupante pour les cultures sud-africaines qui viennent tout juste de se remettre d’une <a href="http://www.unocha.org/el-nino-southern-africa">terrible sécheresse</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/fjq6wL9p1AI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Afrique australe : les chenilles détruisent dangereusement les cultures (France 24, 2017).</span></figcaption>
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<p>En Afrique subsaharienne, 208 millions de personnes <a href="https://www.afdb.org/fileadmin/uploads/afdb/Documents/Events/DakAgri2015/Cereal_Crops-_Rice__Maize__Millet__Sorghum__Wheat.pdf">dépendent du maïs</a> pour assurer leur alimentation. Ces cultures sont également essentielles aux petits agriculteurs de la région qui en tirent la majorité de leurs revenus.</p>
<p>Comprendre comment les chenilles légionnaires se reproduisent, se déplacent et se nourrissent est indispensable pour faire face à la menace qu’elles représentent. Ces insectes possèdent en effet des qualités qui les rendent particulièrement difficiles à contrôler : ils volent très bien, se reproduisent en masse et leurs larves peuvent se nourrir d’une grande variété de plantes. En outre, ils développent très rapidement des résistances aux pesticides.</p>
<h2>Des espèces venues d’ailleurs</h2>
<p>De telles invasions biologiques menacent la biodiversité, l’équilibre des écosystèmes naturels et agricoles et, à terme, la sécurité alimentaire. L’Afrique subsaharienne est considérée comme particulièrement vulnérable face à ces espèces invasives, en raison de sa grande dépendance à l’<a href="http://www.pnas.org/content/113/27/7575">égard de l’agriculture</a>.</p>
<p>En général, l’expansion de l’aire géographique de telles espèces est empêchée par des barrières naturelles, océans ou montagnes. Mais avec le développement des échanges commerciaux et des déplacements au niveau mondial, on a observé une multiplication ces dernières décennies de ces invasions biologiques. On peut citer, le grand capucin du maïs, <em>Prostephanus truncatus</em>, lui aussi originaire des Amériques, introduit par accident en <a href="http://www.cabi.org/isc/datasheet/44524">Tanzanie dans les années 1970</a>. Ce coléoptère s’est rapidement propagé via des lots de maïs et de manioc séché infestés. Cette espèce <a href="http://www.cabi.org/isc/datasheet/44524">s’est depuis propagée</a> à de nombreux pays d’Afrique.</p>
<p>Les avis divergent à propos de la chenille légionnaire d’automne en Afrique. Une piste possible avance que l’espèce est arrivée via des denrées alimentaires en <a href="http://theconversation.com/armyworms-are-wreaking-havoc-in-southern-africa-why-its-a-big-deal-72822">provenance d’Amérique</a>. Ceci est tout à fait envisageable : les insectes peuvent facilement traverser les frontières via des matières végétales infestées. Et ces espèces ont été à <a href="http://ec.europa.eu/food/plant/plant_health_biosecurity/europhyt/interceptions_en">maintes reprises</a> interceptées dans des envois destinés à l’Europe.</p>
<p>Il est également possible que cette chenille ait traversé l’Atlantique <a href="http://theconversation.com/armyworms-are-wreaking-havoc-in-southern-africa-why-its-a-big-deal-72822">grâce aux vents</a>, les insectes adultes pouvant être portés par les vents sur de très grandes distances. L’exemple le plus connu de ce phénomène concerne le papillon monarque, <em>Danaus plexippus</em>, qui a de cette façon traversé l’Atlantique des Amériques aux <a href="http://www.ukbutterflies.co.uk/species.php?species=plexippus">îles britanniques</a>.</p>
<p>Quelle que soit la façon dont la chenille légionnaire d’automne a atteint l’Afrique, sa progression rapide à travers le continent témoigne de sa grande capacité de dispersion. Le vol endurant des papillons adultes leur permet de passer facilement les frontières. Aux États-Unis, on sait depuis longtemps que ces espèces s’appuient sur les courants-jets pour la <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/international-journal-of-tropical-insect-science/article/div-classtitlemigration-and-the-life-history-strategy-of-the-fall-armyworm-span-classitalicspodoptera-frugiperdaspan-in-the-western-hemispherea-hreffn01-ref-typefnadiv/EB7A3F758E7F1436A2FECDE39278CB61">dispersion des adultes</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=369&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=369&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=369&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/156738/original/image-20170214-26007-gkij2j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=463&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Au stade adulte, la chenille légionnaire d’automne peut passer les frontières grâce à son vol.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/wildreturn/14935803778/in/photolist-d3SNDY-6QqoXh-oDMjaL-gpfrtU-d3Uao7-d79a3h-oKPU7f-gpfpE3-6RGevB-gpfSJq-go4894-d8cJF5-6Vgc4Q-4SbUPG-fBJVZ2-bjeW4X-gpfGi4-go3K4K-fBJWmZ-go3LYr-go3AtY-jVVicb-kTMHYr-AvMn4p-jVSM8P-B9KERi-AvMsjz-yH2GUF-kTPkJ1-jVT77P-jVUMTG-jVSRpz-y3EsBr-go3Vmj-gpfHcD-aidc9j-bjeY2a-bjeXbR-vXH3Hz-w8WXXh-xeeuGH-d4uCF3-8SX6Kb-fmApcZ-ofsohw-wHoGwS-wHoG23-umzPC6-65nRGS-65ixHi">Andy Reago & Chrissy McClarren/Flickr</a></span>
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<h2>La biologie de la chenille légionnaire</h2>
<p>Son nom scientifique, <em>Spodoptera frugiperda</em>, fait référence aux ailes à motifs gris des papillons adultes et aux ravages qu’elles occasionnent sur les fruits. Son nom courant renvoie au fait que les chenilles se déplacent en masse à l’automne.</p>
<p>Plusieurs caractéristiques de cet insecte en font une espèce particulièrement difficile à contrôler : en plus de leur impressionnante endurance de vol, les femelles adultes sont extrêmement fertiles, avec plus de 1 000 œufs pondus durant leur vie.</p>
<p>Ces chenilles peuvent coloniser plus de 100 plantes appartenant à <a href="http://dx.doi.org/10.1371%2Fjournal.pone.0165632">27 espèces différentes</a>. Si elles sont polyphages – c’est-à-dire capables de se nourrir d’une grande variété de plantes –, leurs hôtes préférés demeurent le maïs, le sorgho, le millet, le riz et la cane à sucre.</p>
<p>Une autre raison de la difficulté à les appréhender réside dans leur capacité à <a href="http://dx.doi.org/10.1371%2Fjournal.pone.0165632">résister aux pesticides</a>. On a ainsi essayé d’éradiquer cette chenille à l’aide de maïs BT, mais ces plantations sont toujours très controversées dans de <a href="http://dx.doi.org/10.1371%2Fjournal.pone.0165632">nombreux pays africains</a>.</p>
<p>On a imputé à la chenille légionnaire d’automne des dégâts ayant occasionné des pertes annuelles de 600 millions de dollars <a href="http://dx.doi.org/10.1371%2Fjournal.pone.0165632">pour le seul Brésil</a>. Ces chenilles représentent également une menace pour d’autres cultures essentielles : le niébé, la pomme de terre et le soja.</p>
<p>À l’heure qu’il est, nous ne disposons pas d’informations suffisantes au sujet de son impact sur l’ensemble des cultures africaines. Mais l’inquiétude grandit.</p>
<h2>Agir vite</h2>
<p>Compte tenu de la forte menace économique, gouvernements et organisations internationales ont mis en place des plans d’urgence pour lutter contre cette invasion.</p>
<p>Ces mesures comprennent notamment une surveillance s’appuyant sur des pièges à la phéromone pour évaluer la progression de l’invasion, des campagnes itinérantes pour informer le public et l’<a href="http://reliefweb.int/report/south-africa/pest-alert-detection-spodoptera-frugiperda-fall-army-worm-first-time-south-0">homologation d’urgence</a> de pesticides.</p>
<p>L’éradication de la chenille légionnaire d’automne va prendre du temps. À l’heure qu’il est, le contrôle de ce ravageur doit d’abord passer par une coopération internationale avec les pays d’Afrique touchés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/73247/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Kerstin Kruger ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’Afrique australe est touchée par une invasion de ravageurs qui détruit ses cultures. Mobiles, très fécondes et résistantes aux pesticides, ces chenilles sont difficilement contrôlables.Kerstin Kruger, Associate Professor in Zoology & Entomology, University of PretoriaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.