tag:theconversation.com,2011:/ca/topics/mines-24902/articlesmines – The Conversation2024-03-05T16:00:55Ztag:theconversation.com,2011:article/2226562024-03-05T16:00:55Z2024-03-05T16:00:55ZExploitation minière en Afrique : enjeux fiscaux, sociaux et environnementaux<p>« La course est lancée » pour dominer la technologie des énergies propres, a déclaré Ursula von der Leyen, en mars 2023, lorsqu’elle a annoncé la mise en place du <a href="https://www.consilium.europa.eu/fr/infographics/critical-raw-materials/">Règlement européen sur les matières premières critiques</a>, qui vise à réduire la dépendance actuelle de l’UE en matière d’approvisionnement en minerais critiques. Ce texte a été présenté en réponse à la <a href="https://www.ofce.sciences-po.fr/blog/linflation-reduction-act-americain-une-loi-mal-nommee/">loi sur la réduction de l’inflation des États-Unis</a>, qui comprend notamment un engagement à accroître l’approvisionnement national en ces minerais essentiels.</p>
<p>Dans ce contexte de compétition entre grandes puissances, on peut craindre que certains impacts socio-économiques et environnementaux négatifs propres à l’industrie minière soient volontairement ignorés, dans un objectif de sécurisation rapide des ressources. Or, négliger ces questions pourrait compromettre les efforts déployés pour atténuer le changement climatique et protéger la biodiversité, et répéterait les erreurs du passé, avec une exploitation systématique des pays en développement réduits à la production de matières premières de base, comme l’a souligné le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres dans son <a href="https://news.un.org/en/story/2023/12/1144267">adresse aux dirigeants mondiaux</a> lors de la COP28.</p>
<h2>Un moment charnière</h2>
<p>La transition énergétique, qui vise à réduire, voire à remplacer un système utilisant les énergies fossiles par un nouveau mode de consommation centré sur les énergies renouvelables, implique un besoin accru de ressources minières, aussi appelées minerais critiques. La demande de ces minerais – lithium, cobalt, graphite, nickel et cuivre – <a href="https://www.iea.org/news/iea-critical-minerals-and-clean-energy-summit-delivers-six-key-actions-for-secure-sustainable-and-responsible-supply-chains">va exploser dans les années à venir</a>.</p>
<p>Le continent africain abrite de vastes ressources naturelles, <a href="https://theconversation.com/les-nouveaux-enjeux-de-lexpansion-miniere-en-afrique-220605">notamment minières</a>. Cependant, le nombre de pays pouvant prétendre produire une quantité significative de minerais critiques pour la transition énergétique est, au regard de l’état des réserves connues, <a href="https://theconversation.com/les-minerais-critiques-des-ambitions-pour-lafrique-220735">très restreint</a>. Contrairement au boom minier des minerais précieux qui se situait principalement en Afrique de l’Ouest, ce nouveau boom trouve son centre de gravité en Afrique centrale et australe : République démocratique du Congo (RDC) et Zambie pour le cuivre et le cobalt, Afrique du Sud et Zimbabwe pour le platine et le manganèse, ou encore Madagascar et Mozambique pour le graphite, le titane et les <a href="https://www.vie-publique.fr/parole-dexpert/289457-terres-rares-quels-enjeux-pour-la-france-et-leurope">terres rares</a>.</p>
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<p>C’est donc l’occasion pour ces pays de réexaminer les régimes fiscaux afin de favoriser une mobilisation plus efficace des recettes qui seront nécessaires pour assurer leur propre transition énergétique.</p>
<p>Contrairement au secteur pétrolier, où les pays et compagnies ont adopté principalement des accords de partage de la production (ou des revenus), dans le secteur minier c’est le régime de concession qui est prédominant. Dès lors, les États doivent développer la fiscalité pour récupérer une partie des revenus générés par l’exploitation minière. Le débat sur la politique fiscale optimale qui permettrait aux gouvernements africains de capter une « juste » part de la rente ressurgit donc suite à l’augmentation des cours de certains des minerais clés pour la transition énergétique.</p>
<p>Il est crucial de ne pas reproduire le cycle des années 2000. À cette époque, la vague de privatisations des années 1990 combinée à la hausse des prix des métaux en 2000 s’est traduite par une vague d’investissements, mais les administrations des États africains n’étaient pas préparées pour négocier avec les multinationales minières, et leurs codes miniers pas suffisamment bien conçus pour les aider à tirer un revenu décent de l’exploitation. En outre, ces pays ont offert des incitations fiscales de façon trop systématique dans le cadre des premières conventions minières négociées, qui n’ont que rarement permis aux gouvernements de percevoir les recettes attendues. Exemple révélateur de cette asymétrie : <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2011/02/COLOMA/20108">« les contrats chinois »</a> conclus entre Pékin et Kinshasa entre 2007 et 2008 pour plusieurs milliards de dollars.</p>
<h2>Depuis 2010, un processus de rééquilibrage des intérêts</h2>
<p>Les pays producteurs de minerais, critiques ou pas, ont entrepris depuis 2010 des processus d’élaboration de <a href="https://www.ictd.ac/fr/publication/la-fiscalite-miniere-en-afrique-quelle-evolution-recente-en-2018/">nouveaux codes miniers</a> afin de rééquilibrer les intérêts de l’ensemble des parties concernées.</p>
<p>Les redevances minières sont en hausse (elles sont généralement versées aux collectivités locales plutôt qu’à l’État central). Par ailleurs, les taux sont de plus en plus variables ou progressifs en fonction du cours des matières premières. En moyenne, les taux de l’impôt sur les sociétés pour le secteur minier restent généralement inférieurs aux taux du régime général, mais on observe une moindre pratique des exonérations dans le cadre des conventions minières (il est préférable d’avoir un <a href="https://ferdi.fr/publications/analyse-comparee-des-cadres-legislatifs-et-conventionnels-de-la-fiscalite-aurifere-en-afrique-de-l-ouest">taux moindre mais effectivement appliqué)</a>.</p>
<p>La gratuité des participations pour les États est plus fréquente, ce qui permet à ces États de recevoir des dividendes, mais aussi des informations sur l’exploitation de la mine qui peuvent être utiles pour déterminer la rentabilité réelle du projet et donc la taxation appropriée.</p>
<p>On constate enfin une résurgence de l’impôt sur la rente, qui permet de compenser les pertes liées aux sous-estimations (intentionnelles ou non) du potentiel des prix des minerais par les compagnies.</p>
<p>Dans l’ensemble, les <a href="https://ferdi.fr/publications/analyse-la-fiscalite-miniere-augmente-en-afrique">impôts ont augmenté</a> ; cependant, toute augmentation du taux d’imposition ne garantit pas que les recettes seront effectivement perçues.</p>
<h2>Etat des lieux au cours de la dernière décennie</h2>
<p>Les recettes du secteur minier en Afrique demeurent pourtant inférieures à leur potentiel. Le <a href="https://jaga.afrique-gouvernance.net/_docs/app_ar2013_fr_summary_hi_res_final.pdf">rapport du Africa Progress Panel (2013)</a> avait déjà attiré l’attention de la communauté internationale sur ce paradoxe coûteux pour la mobilisation des ressources intérieures en Afrique. <a href="https://www.ictd.ac/fr/publication/quavons-nous-appris-au-sujet-de-la-taxation-des-activites-minieres-en-afrique/">Lundstøl & Moore, en 2016</a>, soulignent que le chiffre d’affaires du secteur a été multiplié par 4,6 pendant le dernier boom 2000-2010 tandis que les recettes fiscales, elles, n’ont été augmentées que d’un facteur de 1,15.</p>
<p>Force est de constater que sur la période 2010-2020 les choses ne se sont guère améliorées. En effet, on observe que les recettes fiscales sont toujours significativement plus faibles que les rentes minières issues de l’extraction : elles sont de deux à cinq fois moins importantes sur 2010-2019.</p>
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<h2>Les défis de la fiscalité minière</h2>
<p>Ainsi, réviser les codes miniers ne suffit pas et peut même se révéler contreproductif car les fréquents changements de niveaux de taxation peuvent représenter une difficulté pour les investisseurs et les faire fuir.</p>
<p>Car si la baisse des recettes minières s’explique en partie par la baisse des cours des minerais jusqu’à 2019, elle résulte également des défis récurrents de la fiscalité minière :</p>
<ul>
<li><p>la faible capacité des administrations fiscales et minières dans les pays ;</p></li>
<li><p>la course au moins-disant fiscal que se livrent toujours les économies du continent ;</p></li>
<li><p>la non-imposition du secteur artisanal, qui joue un rôle important dans minerais de la transition ;</p></li>
<li><p>les clauses de stabilisation dans les conventions passées figeant les dispositions fiscales sur des périodes de 10 à 30 ans et rendant inopérantes les nouvelles dispositions fiscales.</p></li>
</ul>
<h2>Le problème de l’évasion fiscale</h2>
<p>L’optimisation fiscale agressive des entreprises multinationales, qui leur permet de réduire les profits déclarés dans les pays à taux d’imposition élevés pour les transférer dans des pays à taux d’imposition privilégiés, reste le défi principal.</p>
<p>Plusieurs études ont montré la relation qui existe entre les taux d’imposition et le niveau de profits des entreprises minières. En particulier, <a href="https://www.imf.org/en/Publications/WP/Issues/2021/01/15/Is-There-Money-on-the-Table-Evidence-on-the-Magnitude-of-Profit-Shifting-in-the-Extractive-49983">Beer and Devlin (2021)</a> montrent qu’une augmentation du taux d’impôt sur les bénéfices de 1 % entraîne une réduction de l’assiette de ce même impôt de 3,5 %. En 2021, le <a href="https://www.letemps.ch/economie/compagnies-minieres-ne-paient-assez-dimpots-afrique">FMI indiquait</a> que 15 pays d’Afrique perdaient entre 450 et 730 millions de dollars par an en recettes fiscales sur le revenu des sociétés, en raison du transfert de bénéfices par les entreprises multinationales.</p>
<p>Parmi les techniques d’érosion de la base d’imposition et de transfert de bénéfices, la plus fréquemment utilisée dans le secteur minier est l’abus des règles sur les prix de transfert. Les entreprises vendant le minerai à leur filiale à l’étranger pour le transformer peuvent effectuer cette opération à un prix inférieur au cours réel afin de diminuer le profit, et donc le prélèvement, dans le pays d’origine. Il existe aussi d’autres techniques aux résultats similaires comme la surévaluation des coûts d’investissement, le surendettement auprès de sociétés affiliées, le chalandage fiscal (<a href="https://doi.org/10.35188/UNU-WIDER/2023/433-5">Kinda and Tagem,2023</a>) et les transferts indirects de titres miniers (<a href="https://www.elibrary.imf.org/view/journals/087/2021/022/087.2021.issue-022-en.xml">Albertin et coll., 2021</a>).</p>
<h2>Mise en place de standards sur les prix de transfert et de prix plancher</h2>
<p>Des avancées ont été réalisées par la communauté internationale, notamment à travers les actions de lutte contre l’érosion de la base d’imposition via le <a href="https://www.igfmining.org/resource/determining-price-minerals/">transfert de bénéfices (BEPS-OCDE) et les standards sur les prix de transfert</a>.</p>
<p>Par exemple, pour déterminer le prix de vente du cuivre entre parties liées, la Zambie a adopté ce que l’on appelle la « sixième méthode », qui utilise des prix cotés publics, ajustés en fonction des conditions précises de la vente, pour calculer le produit de la vente aux fins de l’impôt sur les bénéfices. L’autorité fiscale zambienne (ZRA) <a href="https://oecd-development-matters.org/2020/11/12/victoire-historique-devant-la-cour-supreme-en-zambie--des-milliards-de-dollars-us-en-recettes-fiscales-supplementaires-et-un-message-par-dela-les-frontieres/">a remporté une bataille judiciaire</a> contre une filiale de Glencore, Mopani Mining Copper plc, qui pratiquait abusivement la manipulation des prix de transfert sur le cuivre pour éviter l’imposition.</p>
<h2>Renégociation des contrats miniers</h2>
<p>En mai 2023, les autorités congolaises ont lancé la <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20230526-quel-avenir-pour-le-contrat-du-si%C3%A8cle-entre-la-rdc-et-la-chine">renégociation du fameux contrat du siècle</a> (dit Mines contre infrastructures) signé en 2007, qui prévoyait plus de 6 milliards de dollars d’investissements chinois en échange d’accès aux mines de cobalt et de cuivre.</p>
<p>Or, quinze ans après, les résultats attendus n’ont pas été au rendez-vous. <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20240130-la-rdc-obtient-5-8-millliards-suppl%C3%A9mentaires-dans-le-contrat-du-si%C3%A8cle-avec-les-entreprises-chinoises">Ces négociations ont abouti en février 2024</a> et les autorités congolaises ont obtenu 5,8 milliards USD de surplus dans les négociations avec le groupement d’entreprises chinoises signataires de l’accord, cependant ce groupement voit les quelque 100 millions USD d’exonération maintenus.</p>
<h2>L’exemple de la Copperbelt – révélateur des tensions entre le développement économique…</h2>
<p>La <a href="https://www.britannica.com/place/Copperbelt-region-Africa">Copperbelt</a> désigne une zone géologique riche en gisements de cobalt et de cuivre, située à cheval entre le sud de la République démocratique du Congo (RDC) et le nord de la Zambie. Grâce à l’extraction qui y est conduite, la RDC est de loin le premier producteur de cobalt, avec près de 70 % de la production mondiale. Le pays est aussi (re)devenu un très important producteur de cuivre.</p>
<p>En dépit de son importance pour la production mondiale de minerais critiques, cette zone comporte de grandes fragilités. Le secteur ne crée pas suffisamment de valeur économique pour réduire durablement la pauvreté. Depuis les années 2000, on assiste dans la région à une forte croissante démographique en raison de la forte attractivité économique des mines et donc de la main-d’œuvre disponible, que l’économie de la zone peine à intégrer.</p>
<p>En effet, bien que les mines de la région nécessitent annuellement plus de <a href="https://rue.bmz.de/resource/blob/75700/f832381629ad21dc7f2d16f2a06b227a/lion-in-the-copperbelt-data.pdf">2 milliards de dollars</a> de biens et services pour leur fonctionnement : électricité, carburant, pièces de rechange ou produits chimiques. Mais le partage de la valeur économique avec les populations locales reste limité.</p>
<p>Plusieurs raisons peuvent l’expliquer. On citera en particulier le manque d’intégration des fournisseurs locaux au sein de cet écosystème minier, en particulier pour les produits et services à forte valeur ajoutée. On pourra aussi noter les difficultés économiques et technologiques rencontrées par ces pays qui rendent compliquée la production locale de produits à plus forte valeur ajoutée par exemple, des batteries. Enfin, la zone est notoirement enclavée et éloignée de certains des principaux poumons économiques des deux pays, ce qui constitue un frein supplémentaire au développement industriel.</p>
<h2>… et la protection de l’environnement</h2>
<p>La Copperbelt est intégralement localisée au sein de l’écorégion du Miombo zambézien central, un environnement hébergeant une importante biodiversité florale et animale. Les pressions exercées par l’extraction du cuivre et du cobalt peuvent être classées en deux catégories d’impacts :</p>
<ul>
<li><p>Les impacts directs renvoient à la surface nécessaire à l’extraction des minerais et aux infrastructures associées, impliquant l’inévitable défrichement de la zone ainsi que la production de déchets miniers ;</p></li>
<li><p>L’impact indirect, généré par l’attractivité des villes minières, qui implique le développement d’activités économiques de subsistance comme l’agriculture ou la production de charbon de bois, qui ont un impact direct sur l’état des forêts.</p></li>
</ul>
<p>Le grand nombre de mines industrielles et artisanales dans cette région rend inévitables les dommages environnementaux directs comme la déforestation des sites d’extraction, et la production de déchets miniers ou indirects via le développement de l’agriculture pour répondre aux besoins d’une population croissante et au développement des mines artisanales (la zone hébergerait aussi plus de <a href="https://www.bgr.bund.de/EN/Themen/Min_rohstoffe/Downloads/studie_BGR_kupfer_kobalt_kongo_2019_en.pdf?__blob=publicationFile&v=3">100 000 mineurs artisanaux</a>).</p>
<p>Bien que cette zone comporte de nombreuses aires protégées, la combinaison des dynamiques démographiques et minières semble compromettre les efforts de conservation de l’environnement mis en place par les gouvernements. <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/19475705.2021.2017021">De récents travaux</a> suggèrent que les aires protégées à proximité des sites miniers sont largement dégradées par les activités humaines.</p>
<h2>Initiatives internationales</h2>
<p>Les pays ont tout intérêt à retirer des bénéfices et à se mêler de l’exploitation minière pour prendre soin et protéger des zones comme celle de la Copperbelt.</p>
<p>Il existe de nombreuses initiatives internationales pour les accompagner : <a href="https://www.icmm.com/fr/societe-et-economie/gouvernance-et-transparence/l-initiative-relative-a-la-transparence-des-industries-extractives">l’Initiative sur la transparence des industries extractives</a> et <a href="https://www.igfmining.org/">l’Intergovernmental Forum on Mining, Minerals, Metals and Sustainable Development</a> (IGF) pour les aspects gouvernance et fiscalité, l’<a href="https://responsiblemining.net/">Initiative for Responsible Mining Assurance</a> (IRMA) et la <a href="https://www.oecd.org/fr/gouvernementdentreprise/mne/mining.htm">Due Diligence Guidance for Responsible Supply Chains of Minerals from Conflict-Affected and High-Risk Areas</a> de l’OCDE pour les aspects environnementaux et sociaux.</p>
<p>Ainsi c’est forte des conseils et de l’assistance technique du Forum sur l’administration fiscale africaine (ATAF), de l’OCDE et du Groupe de la banque mondiale que l’administration fiscale de la Zambie a <a href="https://oecd-development-matters.org/2020/11/12/victoire-historique-devant-la-cour-supreme-en-zambie--des-milliards-de-dollars-us-en-recettes-fiscales-supplementaires-et-un-message-par-dela-les-frontieres/">bâti son argumentaire</a> de manière à faire valoir que Mopani Mining Copper plc avait vendu son cuivre à Glencore International AG à bas prix, minorant de cette façon son bénéfice imposable et, donc, l’impôt dont elle était redevable.</p>
<p>De même, en mai 2022, le gouvernement guinéen a travaillé avec l’IGF et l’OCDE pour <a href="https://www.igfmining.org/impactstory/guinea-bauxite-reference-price/">établir un prix minimum de la bauxite</a> que les sociétés minières devraient appliquer dans leurs ventes aux sociétés affiliées dans des conditions économiques normales. Ce « prix de référence » est entré en vigueur en septembre 2022.</p>
<p>Afin d’éviter les « injustices et l’extractivisme » du passé de l’exploitation des ressources naturelles, les dirigeants africains appellent à un meilleur contrôle de l’extraction des minéraux et des métaux nécessaires à la transition vers une énergie propre. <a href="https://www.theguardian.com/environment/2024/feb/28/african-leaders-call-for-equity-over-minerals-used-for-clean-energy">Une résolution</a> en faveur d’un changement structurel favorisant un partage équitable des bénéfices de l’extraction, soutenu par un groupe de pays principalement africains, dont le Sénégal, le Burkina Faso, le Cameroun et le Tchad, a été présentée mercredi 28 février 2024 à l’assemblée environnementale des Nations unies à Nairobi et appelle à l’utilisation durable des minerais de transition.</p>
<hr>
<p><em>Pour une analyse plus détaillée de ces questions, lire le chapitre qui y est consacré dans <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/l_economie_africaine_2024-9782348081903">« L’économie africaine 2024 »</a>, qui vient de paraître aux éditions La Découverte</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222656/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hugo Lapeyronie a reçu des financements de l'Association Nationale de la Recherche et de la Technologie (ANRT). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Harouna Kinda et Julien Gourdon ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>En Afrique, le secteur minier est en plein boom, en bonne partie du fait de son rôle central dans la transition énergétique. Mais la hausse de l’extraction s’accompagne de nombreux défis.Julien Gourdon, Economiste, Agence française de développement (AFD)Harouna Kinda, Attaché temporaire d’enseignement et de recherche, Université Clermont Auvergne (UCA)Hugo Lapeyronie, Doctorant en économie du développement, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2235052024-02-26T15:53:39Z2024-02-26T15:53:39ZNorthvolt : les citoyens peuvent-ils encore s’opposer à un projet fait au nom de la transition énergétique ?<p>Le 8 février, lors d’un point de presse, le premier ministre François Legault invitait la population québécoise <a href="https://www.journaldequebec.com/2024/02/08/les-quebecois-doivent-changer-dattitude-a-legard-des-grands-projets-dit-legault">à « changer d’attitude » par rapport aux grands projets</a> liés à la transition vers une économie axée sur des technologies à faible émission de GES. </p>
<p>Bien que cette exhortation fasse référence à la <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2015219/northvolt-usine-projet-seance-information">mobilisation citoyenne contre le projet d’usine de batteries Northvolt</a>, elle reflète une tendance plus large du gouvernement caquiste voulant que le territoire québécois soit mis au service du développement d’une <a href="https://www.quebec.ca/gouvernement/ministere/economie/publications/developpement-filiere-batterie/a-propos#:%7E:text=Le%20Qu%C3%A9bec%20a%20tout%20ce,approvisionnement%20de%20la%20fili%C3%A8re%20batterie.">« filière batterie »</a>. </p>
<p>Le premier ministre a-t-il raison de rappeler ainsi à l’ordre la société québécoise ? Est-il moralement et politiquement problématique de s’opposer aux projets qui visent à contribuer à la transition énergétique mondiale ?</p>
<p>Dans une récente étude, « Par-delà l’obligation d’exploiter le territoire. Autodétermination des communautés locales et transition énergétique au Québec », à paraître sous peu dans la Revue canadienne de science politique, nous avons étudié et comparé les arguments en faveur et contre des projets d’exploitation du territoire québécois aux fins de la transition énergétique. Notre objectif était d’évaluer dans quelle mesure une opposition citoyenne pouvait être considérée comme légitime dans ce contexte.</p>
<h2>Le Québec, riche en ressources nécessaires à la transition énergétique mondiale</h2>
<p>Si la filière batterie occupe une aussi grande place dans le <a href="https://coalitionavenirquebec.org/fr/blog/2023/09/05/developpement-de-la-filiere-batterie-quebecoise/">plan de développement économique de la Coalition Avenir Québec</a>, c’est notamment parce que le Québec dispose de toutes les ressources pour jouer un rôle de premier plan dans la transition énergétique mondiale. Non seulement est-il possible d’y développer tout l’écosystème économique nécessaire à la production de véhicules électriques, mais son sous-sol minier regorge des <a href="https://www.canada.ca/fr/campagne/mineraux-critiques-au-canada/les-mineraux-critiques-une-occasion-pour-le-canada.html">minéraux critiques</a> pour cette transition, telle que le nickel, le cobalt, le cuivre, le lithium, le graphite et le zinc.</p>
<p>Le <a href="https://www.ledevoir.com/opinion/editoriaux/799142/filiere-batteries-nationalisme-vert-legault">« nationalisme vert »</a> du gouvernement Legault s’inscrit en outre dans une logique de réappropriation collective du territoire dont les bénéfices seraient redirigés vers des programmes sociaux, en faisant une forme de <a href="https://iris-recherche.qc.ca/blogue/environnement-ressources-et-energie/quest-ce-que-lextractivisme/#:%7E:text=Le%20n%C3%A9o%2Dextractivisme%20est%20fonctionnel,enclaves%20d%E2%80%99exploitation%2Fexportation.">« néoextractivisme »</a> à teneur environnementale. Le « néoextractivisme », tout comme l’extractivisme classique, est un modèle de développement économique fondé sur l’extraction de ressources sur un territoire, mais avec la particularité d’inscrire cette exploitation dans un discours politique aux prétentions progressistes.</p>
<h2>La frilosité québécoise à l’égard de la filière batterie</h2>
<p>Bien avant l’arrivée de Northvolt, la question de l’adhésion de la population québécoise se posait déjà en lien avec la <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1906119/claims-mines-laurentides-lanaudiere-graphite-lithium">prolifération des titres miniers au Québec</a>. </p>
<p>Plusieurs groupes décrient depuis plusieurs années l’importante perte d’habitats (et <a href="https://snapquebec.org/quand-le-regime-minier-devient-un-champ-de-mines/">ses effets sur la biodiversité</a>) occasionnée par ce néoextractivisme québécois. On s’inquiète aussi du fait que les <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2023-04-20/demandes-d-exclusion-d-activites-minieres/les-villes-se-heurtent-a-quebec.php">communautés locales n’aient pas leur mot à dire</a> dans l’approbation des projets. </p>
<p>Le Québec a récemment connu une <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/environnement/2023-10-06/sud-du-quebec/la-hausse-de-claims-miniers-preoccupe-les-citoyens.php">prolifération des titres miniers</a> détenus sur son territoire, hausse qui a suscité une vague de résistance. Et certains projets miniers – comme le projet de <a href="https://lomiko.com/fr/projets/projet-la-loutre/#:%7E:text=Le%20plan%20minier%20pr%C3%A9voit%2021,aux%20exigences%20locales%20du%20site.">mine de graphite La Loutre</a> – ont du même coup provoqué d’<a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2001689/manifestation-projet-minier-la-loutre-outaouais">importantes mobilisations citoyennes</a>.</p>
<p>Manifestement, que ce soit pour des projets comme Northvolt ou des projets miniers, les développements en lien avec la filière batterie font systématiquement face à de la résistance de la part des communautés locales.</p>
<h2>Le Québec aurait un devoir moral de contribuer à la transition</h2>
<p>À une époque où l’électrification de l’économie est vue <a href="https://www.economist.com/leaders/2023/04/05/the-case-for-an-environmentalism-that-builds">comme une panacée</a>, toute opposition citoyenne aux projets en lien avec la transition énergétique risque d’être dépeinte comme un phénomène de <a href="https://www.iedm.org/sites/default/files/pub_files/note0308_fr.pdf">« pas dans ma cour »</a>. Cette accusation morale attribue aux mouvements d’opposition des motivations égocentriques s’opposant au bien commun. </p>
<p>C’est à cet argumentaire que recourt François Legault : l’opposition aux mines ou aux usines de batteries priverait l’humanité des ressources nécessaires à la transition énergétique. Or, <a href="https://www.lapresse.ca/affaires/portfolio/2024-02-12/energies-renouvelables/le-quebec-ne-peut-pas-se-reposer-sur-ses-lauriers.php?sharing=true">cet argument n’est pas sans fondement</a> : de telles oppositions risquent d’encourager l’<a href="https://multinationales.org/fr/enquetes/cac40-et-climat-au-dela-des-effets-d-annonces/comment-l-europe-et-ses-entreprises-delocalisent-leurs-emissions-de-gaz-a-effet">externalisation de ces industries</a>, exposant davantage des communautés déjà vulnérables aux effets de la crise environnementale.</p>
<p>Selon cette vision, l’exploitation du territoire québécois serait une chose doublement noble, répondant autant aux besoins québécois en matière de financement des services publics qu’aux impératifs planétaires de la lutte contre les changements climatiques. </p>
<p>Doit-on pour autant conclure que les communautés locales n’ont pas la légitimité de s’opposer aux projets liés à la transition énergétique ? </p>
<h2>Les collectivités locales doivent jouir d’une certaine autonomie territoriale</h2>
<p>Les <a href="https://plato.stanford.edu/entries/territorial-rights/">droits sur le territoire</a> sont centraux à l’autonomie des communautés. Les devoirs qu’entretiennent les collectivités locales à l’égard de la crise climatique n’invalident pas complètement leurs revendications légitimes en lien avec les lieux qu’elles habitent. De tels pouvoirs permettent de promouvoir certains besoins et certaines valeurs sociales et de penser leur rapport au territoire d’une manière qui les reflète.</p>
<p>Ces droits ne sont certainement pas absolus, en particulier face à la crise environnementale actuelle. L’imposition de certains projets au nom de la justice sociale et environnementale est parfois tout à fait légitime. Il n’empêche que le fardeau de la justification revient à ceux voulant priver les communautés locales de leur droit de s’opposer aux projets qui dénaturent leur milieu de vie. </p>
<h2>L’« attitude » de la population québécoise en lien avec la filière batterie demeure légitime</h2>
<p>Le paradigme de la transition énergétique présuppose que, par le développement de technologies dites « vertes », l’humanité puisse sortir de la crise climatique sans remettre en question le principe de développement économique. </p>
<p>Mais cette hypothèse est loin de faire consensus. </p>
<p>Parmi les <a href="https://www.ledevoir.com/lire/806617/coup-essai-mensonge-transition-energetique">nombreuses raisons</a> mettant en doute ce postulat, il y a notamment le fait que l’accroissement de la demande finit toujours par rattraper les gains en (éco)efficience (l’ <a href="https://www.pourleco.com/le-dico-de-l-eco/leffet-rebond-paradoxe-de-jevons">« effet rebond »</a>). À ceci s’ajoute la <a href="https://www.systext.org/node/1785">quantité astronomique de déchets</a> générée par l’exploitation des minéraux critiques, venant plomber l’empreinte environnementale de la ruée vers les technologies « vertes ».</p>
<p>Mais surtout, le modèle de la transition énergétique ne remet aucunement en question certaines causes profondes de la crise environnementale. Pensons seulement ici à l’importance de l’automobile dans nos habitudes de vie et nos aménagements urbains. La supériorité du modèle de la transition énergétique – par rapport à d’autres solutions passant par une refonte plus substantielle du modèle de développement économique et territorial québécois – reste donc à démontrer.</p>
<p>La filière batterie se présente certes comme une solution aux inégalités environnementales et à la crise climatique. Mais pour justifier une limite au droit d’une communauté de dire non à un mégaprojet venant perturber son milieu de vie, il faut faire la démonstration que cette stratégie est pleinement crédible, ce à quoi les tenants de la transition énergétique ne sont pas encore parvenus.</p>
<p>La société québécoise peut ainsi conserver en toute légitimité son « attitude » réfractaire – n’en déplaise au premier ministre. L’horizon moral et politique dans lequel s’inscrit la filière batterie devra tôt ou tard faire l’objet d’une véritable délibération publique au Québec.</p>
<p>Le gouvernement Legault a manqué à cette obligation en modifiant les critères d’assujettissement pour éviter un BAPE dans le dossier Northvolt. Il est aussi impératif que la Loi sur les mines soit révisée, comme <a href="https://www.ledroit.com/actualites/politique/2023/05/07/claims-miniers-maite-blanchette-vezina-envisage-de-modifier-la-loi-sur-les-mines-3B2ZLBZ6TFAKZHRHNB65VCCCLU/">semblait l’envisager la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina</a>, en mai 2023.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223505/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérôme Gosselin-Tapp a reçu des financements des organismes subventionnaires et centres de recherche suivants : le CRSH, le CRSNG, le FRQSC, le CSBQ et le Fonds François-et-Rachel-Routhier.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Frédérique Jean a reçu des financements des organismes subventionnaires suivants : le CRSH et le FRQSC. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Léonard Bédard a reçu des financements des organismes subventionnaires et centres de recherche suivants : le CRSH, le FRQSC, le Groupe de recherche interuniversitaire sur normativité (GRIN) et l'Institut d'éthique appliquée de l'Université Laval (IDÉA).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sacha-Emmanuel Mossu a reçu des financements du Fonds François-et-Rachel-Routhier, de Mitacs, du Groupe interuniversitaire sur la normativité (GRIN) et de l'Institut d'éthique appliquée de l'Université Laval (IDÉA). </span></em></p>Les communautés locales n’ont guère leur mot à dire dans le développement de projets comme les usines de batteries pour voitures électriques, qui visent à favoriser la transition énergétique mondiale.Jérôme Gosselin-Tapp, Professeur adjoint, Université LavalFrédérique Jean, Candidate à la maîtrise en philosophie, Université LavalLéonard Bédard, Candidat à la maîtrise en philosophie, Université LavalSacha-Emmanuel Mossu, Doctorant en philosophie, Université LavalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2207352024-02-04T15:37:06Z2024-02-04T15:37:06ZLes minerais critiques, des ambitions pour l’Afrique<p>Avec l’accélération de la transition énergétique et numérique, les besoins mondiaux en <a href="https://theconversation.com/pourquoi-parle-t-on-de-criticite-des-materiaux-105258">minerais critiques</a> connaissent une croissance exponentielle ces dernières années, avec de 2017 à 2022 une hausse de 200 % de la demande de lithium, un bond de 70 % pour le cobalt et de 40 % pour le nickel. La demande de minéraux essentiels critiques devrait être <a href="https://www.iea.org/reports/critical-minerals-market-review-2023">multipliée par 3,5 d’ici à 2030</a>.</p>
<p>L’Afrique, qui dispose de larges ressources et gisements en la matière, espère en profiter pour soutenir une trajectoire d’industrialisation fondée sur une transformation locale accrue de ses minerais et renforcer son rôle dans les <a href="https://au.int/sites/default/files/documents/30995-doc-africaminingvisionfrench.pd">chaînes de valeur internationales</a>.</p>
<p>Ces ambitions doivent cependant être analysées au prisme des réalités géologiques, des politiques et de l’environnement de chaque pays et du contexte international. C’est en particulier la montée du « protectionnisme vert » au sein des grandes puissances économiques et la multiplication des offres de partenariats aux pays du continent <a href="https://www.afd.fr/fr/ressources/les-minerais-de-la-transition-energetique-et-numerique-une-opportunite-pour-lafrique">qu’il faudra juger au fil du temps</a>.</p>
<h2>Position dominante de l’Afrique</h2>
<p>Les <a href="https://theconversation.com/loi-europeenne-sur-les-metaux-critiques-moins-de-dependance-mais-des-questions-en-suspens-218631">« minerais critiques »</a> englobent une série de ressources essentielles à la construction des infrastructures de la <a href="https://theconversation.com/les-pressions-sur-leau-face-ignoree-de-la-transition-energetique-154969">transition énergétique et numérique</a> (panneaux solaires, éoliennes véhicules électriques, écrans tactiles, stockages de données, connexion des systèmes entre eux).</p>
<p><a href="https://theconversation.com/loi-europeenne-sur-les-metaux-critiques-moins-de-dependance-mais-des-questions-en-suspens-218631">Différentes listes</a> de ces minerais ont été établies par les pays consommateurs de minerais, chacune étant basée sur des hypothèses concernant la demande à venir, les utilisations futures et leur disponibilité. Elles reflètent ainsi le caractère stratégique du minerai pour le pays.</p>
<p>L’Afrique dispose d’une position dominante sur quatre minerais considérés comme critiques par plusieurs listes : le cobalt, le manganèse, le chrome et le platine. Elle est également très présente sur cinq autres – le bauxite, le graphite, le cuivre, le nickel et le zinc.</p>
<h2>Opportunité pour le continent ?</h2>
<p>Cette place centrale du continent africain incite les gouvernements à proposer aux investisseurs de transformer les minerais sur place, afin de créer davantage de valeur ajoutée et susciter des retombées économiques locales et régionales.</p>
<p>Ils entendent utiliser les avantages de la nouvelle dynamique en matière de liberté d’échange et d’intégrité régionale (mise en place de la Zone de libre échange continentale africaine Zlecaf) en développant des chaînes de valeur régionales compétitives. Cette politique nouvelle est au centre de l’agenda du <a href="https://au.int/en/amdc">Centre pour le développement des ressources minérales en Afrique</a> parrainé par l’Union Africaine.</p>
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<p>Avec le temps et l’appui de bonnes politiques incitatives, la plupart de ces projets pourraient devenir réels et pérennes. Pour certains pays moins dotés, des objectifs plus modestes pourront sans doute inclure d’abord le développement de réseaux de fournisseurs de produits et de services aux sociétés minières, des camionnettes et des fabricants de pièces de rechange jusqu’aux services de restauration, géomètres et services de ressources humaines, soutenus par des exigences de contenu local afin d’abaisser les barrières à l’entrée pour les entreprises locales.</p>
<p>Ces services n’ont pas le statut ou le potentiel économique du raffinage mais contribueront à renforcer les chaînes d’approvisionnement locales amont et à ajouter une valeur utile à l’exploitation des minerais en Afrique.</p>
<h2>Transformation des minerais</h2>
<p>Afin de tirer le meilleur parti de leurs ressources minières, les pays africains pourraient ainsi développer une industrie de transformation locale des minerais.</p>
<p>Sur l’ensemble de la chaîne de valeur du secteur, l’extraction minière rapporte en effet peu par rapport aux étapes en aval de production de biens issus des minerais. Cela contribuerait en outre à une industrialisation du continent attendue de longue date.</p>
<p>L’exemple du cuivre illustre bien les défis à relever : en <a href="https://documents.banquemondiale.org/fr/publication/documents-reports/documentdetail/305141468189249424/zambia-economic-brief-making-mining-work-for-zambia">Zambie</a> et en RDC, la production minière a augmenté dans les années 2010 alors que la part des exportations de produits semi-finis a diminué.</p>
<h2>Production de batteries ?</h2>
<p>L’ambition de certains pays africains s’étend jusqu’à la <a href="https://www.state.gov/translations/french/les-etats-unis-publient-un-protocole-daccord-signe-avec-la-republique-democratique-du-congo-et-la-zambie-pour-renforcer-la-chaine-de-valeur-des-batteries-de-vehicules-electriques/">production de batteries</a> à destination des véhicules électriques, ce qui dépendra aussi de l’existence d’un marché pour les véhicules alimentés par des batteries à proximité.</p>
<p>Du fait du manque d’accessibilité financière et d’infrastructures de recharge à l’échelle du réseau, le marché africain de l’électrique à quatre roues risque de rester longtemps limité. La chaîne de valeur des batteries fabriquées à partir de nickel, lithium et manganèse pourrait s’arrêter à la production de matériaux précurseurs de batteries.</p>
<p>Avec un potentiel plus important sur le marché africain des véhicules électriques à 2 ou 3 roues – qui utilisent des batteries au lithium, au fer et au phosphate et sont aussi précieuses pour le stockage stationnaire de l’énergie – les industries fondées sur la chimie des batteries ont plus de chances d’être viables.</p>
<p>Cela requerra des investissements dans les usines de fabrication de cellules : ils seraient facilités par un soutien aux fabricants nationaux de véhicules électriques à 2 et 3 roues, par davantage de découvertes de lithium et par une coordination régionale sur le raffinage du lithium.</p>
<h2>Contrôler les exportations ?</h2>
<p>La stratégie adoptée par certains pays africains est d’essayer de forcer la main aux compagnies minières : contraindre les exportations de matières premières non transformées en imposant des <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/trade/raw-materials-critical-for-the-green-transition_c6bb598b-en;jsessionid=t10e5NtYkZgGGN68CYsRV6fi9TsVUl-Iwykelcg_.ip-10-240-5-29">restrictions</a>, dans le but que cela favorise les industries locales en aval.</p>
<p>On en compte presque 2500 restrictions aux exportations sur le continent en 2021 (contre 1000 en 2009) lorsque l’on croise les différents types de mesures (interdiction, quotas d’exportation, licences ou taxes sur les exportations) et les 70 minerais et métaux.</p>
<p>Ces restrictions à l’exportation en Afrique comme outils de stimulation de la transformation locale des minéraux <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/trade/export-controls-and-competitiveness-in-african-mining-and-minerals-processing-industries_1fddd828-en">ne semblent pourtant pas efficaces</a>. Il n’y a pas eu d’amélioration de l’avantage comparatif révélé des produits transformés et ces décisions ont même pu saper la performance globale des industries dans certains cas.</p>
<h2>Favoriser les zones économiques spéciales</h2>
<p>Un problème majeur de la transformation locale est celui du financement. Pour les États, le défi sera de réussir à attirer des investisseurs prêts à dépenser les fonds nécessaires pour construire et installer des usines.</p>
<p>Les recettes directes seraient toutefois maximisées si plusieurs pays s’associaient pour développer ensemble des complexes de transformation et des filières de référence. C’est dans ce contexte qu’émergent des projets de zones économiques spéciales (ZES) autour de la transformation des minerais.</p>
<p>Dans la dernière décennie, des dizaines de nouvelles ZES ont ainsi surgi pour répondre aux besoins de l’industrie minière : la « Platinum Valley » cherche à révolutionner la production africaine de piles à hydrogène.</p>
<p>La <a href="https://www.uneca.org/fr">Commission économique des Nations unies pour l’Afrique</a> (CEA) et la banque d’affaires <a href="https://www.afreximbank.com/fr/">Afreximbank</a> se sont récemment associées à travers un accord-cadre pour l’établissement d’une ZES pour la production de batteries et de véhicules électriques en RDC et en Zambie.</p>
<h2>Accroître la taille du marché local</h2>
<p>Un autre défi à l’émergence d’une industrie de transformation est l’absence d’un marché local suffisant pouvant justifier la création d’unités de transformation locale et permettre le développement des chaînes de valeurs régionales.</p>
<p>Aucun pays africain ne possédant à lui seul tous les minéraux nécessaires à la production de batteries, les États devront donc mettre en commun leurs approvisionnements en minéraux pour atteindre les échelles requises.</p>
<p>De nombreuses barrières au commerce sur le continent demeurent : plus le produit est haut dans la chaîne de valeurs des produits miniers, plus les tarifs entre les pays du continent sont élevés. Cela crée un obstacle majeur au développement de la chaîne de valeur. Les standards sont en moyenne de 2 à 4 sur chaque produit, or en moyenne, les coûts commerciaux liés à ces mesures non tarifaires <a href="https://openknowledge.worldbank.org/entities/publication/09f9bbdd-3bf0-5196-879b-b1a9f328b825">diminuent de 4,9 points de pourcentage le commerce des produits miniers</a> (contre 2,6 % en moyenne pour les biens). L’agenda de la Zlecaf, qui entend réduire ces barrières tarifaires et non-tarifaires, peut proposer un cadre intéressant pour ces transformations.</p>
<h2>Défis majeurs des infrastructures</h2>
<p>Outre l’émergence d’un marché local, aller au-delà d’un simple traitement des minerais et créer des chaînes de valeur intégrées à l’échelle de l’Afrique est très complexe au regard des défis énergétiques et des systèmes de transport actuels.</p>
<p>Cela implique des besoins énergétiques importants pour les usines de transformation, alors que l’accès à l’électricité demeure un problème pour de nombreux pays africains. Si l’extraction industrielle peut consommer assez peu d’énergie, la transformation en produits raffinés est le plus souvent très <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301679X17302359">énergivore</a>. Les grandes raffineries de minerais du monde sont souvent là où l’énergie est disponible et <a href="https://www.piie.com/publications/policy-briefs/building-downstream-capacity-critical-minerals-africa-challenges-and">peu coûteuse</a>.</p>
<p>L’autre obstacle est l’insuffisance des transports terrestres. Les réseaux de transport en Afrique demandent à être réhabilités ou développés pour supporter les trafics courants et absorber ces flux minéraliers massifs.</p>
<p>En résumé, le continent africain dispose de perspectives de création de valeur mais devra pour les concrétiser renforcer sa position sur le marché des matières premières minérales, exploiter ses avantages comparatifs et améliorer ses infrastructures, systèmes énergétiques et conditions générales d’investissements. Des <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/ip_23_5303">alliances</a> sont donc à bâtir au niveau africain et international. Cependant l’analyse des potentiels de transformation ne doit pas se borner aux seuls minerais de la transition. Il est en effet crucial pour le continent de développer ses capacités de transformation sur les minerais qu’il produit d’ores et déjà en grandes quantités, platines et or et également pour les matériaux de construction : le fer et l’acier. D’autant que les besoins en minerais stratégiques sont tellement importants que cela pourrait conduire les industries de la transition énergétique à utiliser d’autres composants et à se passer de lithium pour les batteries par exemple.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220735/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hugo Lapeyronie a reçu des financements de l'Association nationale de la recherche et de la technologie. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julien Gourdon, Philippe Bosse et Émilie Normand ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Le continent espère profiter des besoins croissants en minerais critiques pour renforcer son rôle dans les chaînes de valeur internationales, au-delà de la seule extraction.Julien Gourdon, Economiste, Agence française de développement (AFD)Émilie Normand, Économiste, IFP Énergies nouvelles Hugo Lapeyronie, Doctorant en économie du développement, Université Paris 1 Panthéon-SorbonnePhilippe Bosse, Ingénieur géologue au département Afrique de l’AFD, Agence française de développement (AFD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2206052024-01-31T15:55:37Z2024-01-31T15:55:37ZLes nouveaux enjeux de l’expansion minière en Afrique<p>La production minière a commencé à augmenter de <a href="https://reporterre.net/Une-ruee-miniere-mondiale">façon significative au cours des années 2000</a> dans le monde entier et en Afrique, principalement du fait de la poursuite de la libéralisation du secteur minier, notamment sur le continent africain, des cours élevés de l’or, et du développement, en de nombreux points de la planète, de nouvelles mines, essentiellement par des investisseurs anglo-saxons (Canada, Australie, etc.).</p>
<p>Cet essor s’est encore accéléré à partir de la seconde moitié des années 2010, du fait de la hausse des investissements internationaux (notamment en provenance de Chine, des Émirats, d’Inde, de Russie, des États-Unis, du Canada, du Japon ou encore du Maroc), bien sûr dans l’or mais aussi dans d’autres métaux (cuivre, cobalt, diamant, manganèse, bauxite, fer, titane, étain) puis, à partir de 2020, dans de nouveaux métaux (graphite, platine, terres rares, lithium…).</p>
<p><a href="https://afd.keepeek.com/publicMedia?t=pm0GgoI5rG&o=155257">L’Afrique joue une part importante dans ce boom minier mondial</a>, même si les investissements y restent encore modestes (moins de 14 % des IDE mondiaux dans le secteur entre 2018 et 2022 étaient à destination du continent).</p>
<h2>Quels sont les minerais concernés et dans quelles régions se trouvent-ils ?</h2>
<p>Le secteur minier du continent africain produit essentiellement quinze minerais. Les métaux précieux comptent pour 45 % des exportations de métaux du continent, loin devant les métaux ferreux (23 % des exportations), les métaux non ferreux (19 %) et les minerais industriels (12 %).</p>
<p>Les métaux dits de la transition énergétique – surlignés en rouge dans le graphique ci-dessous – sont ceux utilisés dans la fabrication de véhicules électrifiés (cobalt, cuivre, lithium, graphites), dans les piles à combustible (métaux du groupe platine) et dans les technologies de l’éolien et du solaire photovoltaïque (cuivre, lithium, cobalt, nickel). Ils représentent près de 29 % des exportations.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/568037/original/file-20240105-27-b3s6bc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/568037/original/file-20240105-27-b3s6bc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/568037/original/file-20240105-27-b3s6bc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=312&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/568037/original/file-20240105-27-b3s6bc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=312&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/568037/original/file-20240105-27-b3s6bc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=312&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/568037/original/file-20240105-27-b3s6bc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=392&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/568037/original/file-20240105-27-b3s6bc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=392&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/568037/original/file-20240105-27-b3s6bc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=392&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Cliquer pour zoomer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UN Comtrade</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p><strong>– Métaux précieux : or et métaux du groupe du platine (MGP)</strong></p>
<p>Le dynamisme actuel du secteur minier africain est en grande partie porté par la production d’or. L’Afrique du Sud possède les premières réserves du continent et les troisièmes réserves mondiales.</p>
<p>Toutefois, l’Afrique de l’Ouest est en passe de devenir une place forte, notamment grâce au Ghana, au Burkina Faso et au Mali, qui possèdent des réserves non négligeables, encore peu exploitées. Les métaux du groupe du platine (MGP) nécessaires à la fabrication de piles à combustible sont produits principalement en Afrique du Sud, premier producteur de palladium et de platine au monde. Toutefois, la production minière d’or d’Afrique du Sud a beaucoup baissé en raison de la forte profondeur de plusieurs sites d’extraction importants anciens arrivés à leurs limites d’exploitabilité.</p>
<p><strong>– Métaux ferreux : cobalt, manganèse, coltan, chrome, nickel et fer</strong></p>
<p>L’Afrique est incontestablement le leader mondial du cobalt. Le continent possède plus de 50 % des réserves mondiales de ce métal non ferreux, dont 48 % se situent en République démocratique du Congo.</p>
<p>En 2022, le continent africain concentrait plus de 58 % des réserves de manganèse connues et est, dans son ensemble, le leader mondial de la production de manganèse. L’Afrique est aussi le plus gros producteur de coltan (72 % de la production mondiale) et de chrome.</p>
<p>Le continent est en revanche un modeste producteur de nickel et de fer avec respectivement 4 % et 3 % de la production mondiale, principalement en Afrique du Sud. Bien que de nombreux autres pays africains possèdent des réserves de taille substantielle, elles sont dans l’ensemble encore peu exploitées. C’est en particulier le cas de l’Afrique de l’Ouest, qui dispose de plusieurs gisements de taille mondiale.</p>
<p><strong>– Métaux non ferreux : bauxite, cuivre, zinc et lithium</strong></p>
<p>Le continent africain est un acteur majeur de la production de bauxite, essentiellement grâce à la richesse du sous-sol guinéen. Avec 23,8 % des réserves mondiales en 2022, le pays dispose des premières réserves mondiales.</p>
<p>D’importantes quantités de cuivre encore sous-exploitées sont aussi hébergées dans le sol africain. Les principales réserves exploitées du continent sont partagées entre la RDC et la Zambie dans la zone dite de la <a href="https://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers16-09/010047833.pdf">« Copperbelt »</a>, les deux pays possédant respectivement les 7<sup>e</sup> et 11<sup>e</sup> réserves mondiales.</p>
<p>L’Afrique est cependant un petit producteur de zinc à l’échelle mondiale avec seulement 4 % de la production. L’Afrique du Sud en est depuis peu le premier producteur (30 % de la production du continent).</p>
<p>De nombreux projets d’extraction de lithium et terres rares sont en cours : au Burundi, en Tanzanie, en Angola, à Madagascar et en Afrique du Sud pour les terres rares ; en RDC, au Mali et au Zimbabwe pour le lithium. Le continent n’est toutefois pas un acteur leader sur ces minerais.</p>
<p><strong>– Minerais industriels : diamants, phosphate et graphite</strong></p>
<p>L’Afrique est particulièrement bien fournie en diamants, détenant en 2022 environ 43 % des réserves mondiales, réparties pour l’essentiel entre l’Afrique du Sud, la Namibie, le Botswana, la RDC et l’Angola.</p>
<p>Le continent dispose aussi d’immenses réserves de phosphate (environ 80 % des réserves mondiales), même si dans les faits, les réserves et la production africaines sont très largement dominées par le Maroc. Le pays, qui possède à lui seul environ 70 % des réserves mondiales, n’est pourtant que le second producteur mondial derrière la Chine.</p>
<p>Concernant le graphite, enfin, l’Afrique représente 20 % de la production mondiale et détient 20 % des réserves. Le Mozambique en est le 1<sup>er</sup> producteur africain devant Madagascar et la Tanzanie.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/572776/original/file-20240201-19-cinark.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/572776/original/file-20240201-19-cinark.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/572776/original/file-20240201-19-cinark.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/572776/original/file-20240201-19-cinark.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/572776/original/file-20240201-19-cinark.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/572776/original/file-20240201-19-cinark.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/572776/original/file-20240201-19-cinark.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/572776/original/file-20240201-19-cinark.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Part de l’Afrique dans la production et les exportations mondiales. Cliquer pour zoomer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">USG & UN Comtrade</span></span>
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<h2>Que représente le secteur minier pour ces économies ?</h2>
<p>Il est remarquable que la part des exportations des produits miniers dans le PIB n’a que faiblement ralenti lors de la chute des cours des produits miniers en 2015, puis a fortement augmenté depuis 2016. Plus encore, la part des exportations minières dans les exportations totales n’a pas ralenti : la moyenne sur le continent était de 25 % sur 2013-2021 contre 14 % sur 2005-2012.</p>
<p>Cette part des exportations minières dans les exportations totales est très significative dans de nombreux pays du continent avec des valeurs ressortant au-delà de 50 % pour la Zambie, la RDC, la Mauritanie, la Guinée, le Mali et le Burkina Faso. Le rebond a été particulièrement fort au Burkina Faso, au Ghana ou au Mali sur l’or, mais également en Sierra Leone et en Guinée. Une grande partie des exportations minières depuis dix ans sont constituées des produits or et diamant (représentant 12 % des exportations totales d’Afrique), des métaux (7,5 %) et des minerais (6 %).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/572799/original/file-20240201-15-7yvq2t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/572799/original/file-20240201-15-7yvq2t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/572799/original/file-20240201-15-7yvq2t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=579&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/572799/original/file-20240201-15-7yvq2t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=579&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/572799/original/file-20240201-15-7yvq2t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=579&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/572799/original/file-20240201-15-7yvq2t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=727&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/572799/original/file-20240201-15-7yvq2t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=727&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/572799/original/file-20240201-15-7yvq2t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=727&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution et part des exportations de ressources minières dans les exportations totales 2005-2012, 2013-2021. Cliquer pour zoomer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">WITS, Banque mondiale</span></span>
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<span class="caption">Évolution et part des exportations de ressources minières dans les exportations totales 2005-2012, 2013-2021. Cliquer pour zoomer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">WITS, Banque mondiale</span></span>
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<p>Cependant la contribution au PIB reste faible que l’on prenne comme indicateur la part des exportations de produits miniers dans le PIB – produit intérieur brut (A), la part de la rente minière dans le PIB (B) ou la part des ressources minières dans la richesse totale (C), 10 % en moyenne alors que pour les pays pétrolier cette ressource pétrolière représentait généralement 30 % du PIB.</p>
<h2>Quelles dynamiques dans l’exploitation de ces richesses ?</h2>
<p>On observe une double dynamique dans l’attribution des budgets d’exploration des ressources minières en Afrique. Les pays miniers historiques, quoique drainant des montants d’exploration supérieurs, sont en perte de vitesse relative vis-à-vis de nouveaux pays émergents dans la production minière.</p>
<iframe title="Part de la rente minière dans le PIB national" aria-label="Carte" id="datawrapper-chart-JwlYK" src="https://datawrapper.dwcdn.net/JwlYK/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width: 0; min-width: 100%!important; border: none;" height="776" data-external="1" width="100%"></iframe>
<p>Une part très élevée de pays miniers historiques concentrent depuis longtemps l’essentiel de la production africaine de quelques métaux-clés. On pense en premier lieu à l’Afrique du Sud ainsi qu’à la RDC, au Ghana, au Burkina Faso et à la Zambie qui sont les premières destinations des budgets d’exploration en Afrique et comptent le plus grand nombre de mines ouvertes sur leurs territoires entre les années 2000 et 2021.</p>
<p>Le budget d’exploration à destination de ces pays semble cependant stagner voire décliner depuis 2012, malgré un léger regain en 2018, révélant une relative faiblesse de l’attractivité du secteur minier africain. Cet essoufflement relatif s’explique essentiellement par la chute des cours des métaux, mais il est significatif de constater que les dépenses d’exploration de ces pays ne parviennent pas à repartir alors même que le secteur minier mondial repart à la hausse. Les raisons principales nonobstant des ressources importantes de grande qualité sont l’insuffisance ou la précarité de certaines infrastructures (énergie, rail, port), les problèmes de sécurité et une perception négative des risques politiques et économiques (prix de l’énérgie).</p>
<iframe title="Évolution du budget d'exploration de cinq pays africains" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-wsM30" src="https://datawrapper.dwcdn.net/wsM30/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width: 0; min-width: 100%!important; border: none;" height="400" data-external="1" width="100%"></iframe>
<p>De façon générale, on observe un intérêt renouvelé des pays africains pour leur secteur minier. C’est le cas au <a href="https://www.jeuneafrique.com/1429158/economie-entreprises/avec-son-hub-minier-le-senegal-veut-se-rendre-incontournable/">Sénégal</a>, en <a href="https://www.afrique-sur7.ci/485322-secteur-minier-cote-divoire-economie">Côte d’Ivoire</a> et au <a href="https://www.jeuneafrique.com/1477461/economie-entreprises/avec-un-nouveau-code-minier-le-mali-se-reapproprie-son-or/">Mali</a>. Plusieurs pays traditionnellement peu miniers tentent de se positionner sur le marché grâce au développement de leur cartographie minière et à la mise en œuvre de politiques attractives pour les explorateurs et les investisseurs. Ainsi, le Cameroun, la République du Congo, l’Ouganda, le Tchad, le Togo, Djibouti ou encore la République centrafricaine développent plusieurs projets miniers alors même qu’ils ne comptent actuellement aucune mine industrielle majeure.</p>
<h2>L’émergence de nouveaux acteurs</h2>
<p>La libéralisation du secteur portée par les <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/raq/2010-v40-n3-raq0118/1009370ar.pdf">réformes promues par la Banque mondiale dans les années 1980</a> voit l’installation durable des acteurs canadiens, australiens et, dans une moindre mesure, suisses et américains dans le secteur minier africain.</p>
<p>À ce jour, si l’on observe la part de chaque entreprise dans la production minière africaine totale, on constate que les compagnies occidentales sont très largement en tête et représentent 80 % des investissements miniers en Afrique. Les entreprises Anglo American (Royaume-Uni, ex sud-africaine), Glencore (Suisse) et First Quantum Minerals (Canada) sont ainsi les champions de la production minière africaine et représentent à elles quatre près du quart de la production en 2018. Ces acteurs occidentaux continuent d’être très dynamiques via le financement de projets d’exploration et des activités d’expansion des mines existantes.</p>
<iframe src="https://afd.keepeek.com/pm0GgoI5rG" style="border: 0;width:100%;height:100%" frameborder="0" allowfullscreen="" width="100%" height="400"></iframe>
<p>Le <a href="https://www.cairn.info/revue-mondes-en-developpement-2020-1-page-99.htm?ref=doi">boom minier de 2009-2013</a> voit également l’apparition des nouveaux acteurs dits « émergents ». Parmi ces pays, la Chine est celui qui connaît la progression la plus fulgurante en Afrique. Dans la lignée de <a href="https://www.cifor.org/knowledge/publication/4321/">sa politique du « Going Out »</a> et pour répondre à sa demande croissante en minerais, la Chine s’implante solidement dans le secteur minier africain à partir des années 2010. En 2018, les entreprises chinoises représentaient ainsi 41 % de la production de cobalt africaine et 28 % de celle de cuivre.</p>
<p>La Russie, autre géant du secteur minier, a également profité de l’ouverture du secteur minier <a href="https://lejournaldelafrique.com/lexploitation-russe-des-diamants-africains-une-affaire-couteuse-et-urgente/">pour s’implanter en Afrique</a>, principalement dans le diamant et le platine en Afrique australe et dans l’or en Afrique de l’Ouest. Elle a particulièrement renforcé son influence sur le continent après <a href="https://theconversation.com/la-russie-les-sanctions-et-la-securite-europeenne-70424">l’imposition des premières sanctions internationales</a> suite à l’annexion russe de la Crimée en 2014 et continue d’entretenir d’étroites relations avec des pays comme le Mali, le Zimbabwe, l’Afrique du Sud ou la Centrafrique.</p>
<p>Moins étudiée que la Chine, l’influence indienne est pourtant bien réelle dans le secteur minier africain, principalement en Afrique australe. L’Inde cherche avant tout à sécuriser son approvisionnement en charbon dont elle est une grosse consommatrice (70 % de son mix énergétique). Elle se positionne également sur le fer africain pour nourrir son industrie de la sidérurgie mais également sur le zinc, le plomb, le cuivre et les pierres précieuses au travers du géant minier indien Vedanta.</p>
<p>Les pays du Golfe (Émirats arabes unis, Arabie saoudite, Qatar) quant à eux, partenaires commerciaux historiques dans le commerce d’or avec l’Afrique, s’implantent peu à peu dans le secteur du diamant et des métaux industriels comme le cobalt et l’aluminium.</p>
<p>L’Afrique du Sud a toujours fait figure d’exception à l’échelle du continent. Longtemps référence de la production minière africaine, elle compte un grand nombre de compagnies actives en Afrique du Sud même, en Afrique australe et sur le reste du continent, et de taille comparable aux plus grands investisseurs sur le sol africain. L’Afrique du Sud a développé ses propres compagnies minières d’envergure mondiale, notamment AngloGold Ashanti, Anglo American Platinum, Impala Platinum et Gold Fields qui figurent parmi les cinquante plus grandes entreprises minières.</p>
<p>Le Maroc a également développé une stratégie panafricaine au travers d’acteurs publics comme le <a href="https://www.jeuneafrique.com/1476249/economie-entreprises/freine-au-soudan-managem-creuse-sa-dette-pour-soutenir-son-expansion-ouest-africaine/">groupe Managem</a> ou l’<a href="https://www.jeuneafrique.com/1435671/economie-entreprises/le-geant-marocain-ocp-engrange-100-millions-de-dollars-pour-verdir-ses-activites/">Office Chérifien des Phosphates</a> (OCP). L’OCP a un monopole sur l’extraction, la transformation et la vente de phosphates au Maroc et est la plus grande société de phosphate mondiale (31 % du marché). Le groupe a mis sur pied une stratégie d’expansion à travers 12 pays africains. Managem est quant à elle le leader du secteur minier métallique marocain et exploite 15 mines à travers huit pays africains, notamment en Guinée, au Gabon, en RDC et au Soudan.</p>
<iframe title="Part des compagnies dans la production minière africaine en 2018" aria-label="Diagramme circulaire" id="datawrapper-chart-6tunn" src="https://datawrapper.dwcdn.net/6tunn/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width: 0; min-width: 100%!important; border: none;" height="433" data-external="1" width="100%"></iframe>
<p>Les pays africains ont donc engagé des politiques ambitieuses afin de bénéficier du <a href="https://www.afd.fr/fr/ressources/les-minerais-de-la-transition-energetique-et-numerique-une-opportunite-pour-lafrique">boom minier sur les matériaux critiques</a> de la transition énergétique mais également sur d’autres minerais de valeur tel que l’or. Mais ces pays doivent maintenant développer de nouvelles politiques pour inciter à la transformation de ces minerais sur le continent et accroître les revenus fiscaux tout en ménageant les impacts environnementaux et sociaux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220605/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hugo Lapeyronie a reçu des financements de l'Association nationale de la recherche et de la technologie. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julien Gourdon, Philippe Bosse et Émilie Normand ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Alors que le secteur minier est en plein essor en Afrique, les pays du continent tentent de développer leurs programmes d’exploration pour prendre part à la dynamique.Julien Gourdon, Economiste, Agence française de développement (AFD)Émilie Normand, Économiste, IFP Énergies nouvelles Hugo Lapeyronie, Doctorant en économie du développement, Université Paris 1 Panthéon-SorbonnePhilippe Bosse, Ingénieur géologue au département Afrique de l’AFD, Agence française de développement (AFD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2124982023-08-31T18:03:04Z2023-08-31T18:03:04ZDécouverte d’un potentiel gisement d’hydrogène colossal en Lorraine<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/545329/original/file-20230829-21-ffu4tg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=32%2C40%2C5374%2C2569&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Site de Folschviller où ont débuté les travaux de forage à l'origine de la découverte du gisement d'hydrogène</span> <span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>En recherche scientifique comme ailleurs, il arrive que l’on découvre quelque chose que l’on ne cherchait pas, voire même que l’on découvre quelque chose d’intérêt supérieur à ce que l’on cherchait. C’est la sérendipité. C’est ce qui nous est arrivé en sondant le sous-sol lorrain depuis la commune de Folschviller et en y dénichant un gisement potentiel d’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/hydrogene-25933">hydrogène</a> blanc. Sous ce territoire encore durablement affecté par la désindustrialisation pourrait ainsi sommeiller rien moins que le plus gros réservoir mondial connu à ce jour, de ce gaz, qui suscite de plus en plus d’intérêt dans le cadre de la transition énergétique.</p>
<h2>Statuer sur nos ressources en méthane et découvrir de l’hydrogène</h2>
<p>En tant que membres du <a href="http://georessources.univ-lorraine.fr/">Laboratoire GeoRessources</a> de l’Université de Lorraine et du CNRS, le but premier de notre exploration était d’évaluer l’état du méthane dans le sous-sol lorrain afin d’en estimer la ressource et de voir si une production locale de ce gaz était envisageable. Pour poursuivre cet objectif, nous avons dû développer des technologies innovantes pour ausculter <em>in situ</em> et en continu les formations géologiques du Carbonifère (période géologique allant d’il y a 359 à 299 millions d’années). </p>
<p>Cela a notamment été possible grâce à l’invention de la sonde SysMoG en collaboration avec la société Solexperts, un outil qui nous a ainsi permis d’analyser les gaz dissous dans l’eau dans les formations géologiques jusqu’à 1200 m de profondeur, une première mondiale, respectueuse de l’environnement. En effet, le travail de miniaturisation de la sonde SysMoG nous permet une telle auscultation du sous-sol à partir de puits d’un diamètre intérieur de 6 cm !</p>
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<img alt="Sonde de mesure SysMoG prête à commencer le forage dans un puits de quelques 6 cm de diamètre" src="https://images.theconversation.com/files/545321/original/file-20230829-25-ccw31m.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/545321/original/file-20230829-25-ccw31m.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=455&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/545321/original/file-20230829-25-ccw31m.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=455&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/545321/original/file-20230829-25-ccw31m.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=455&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/545321/original/file-20230829-25-ccw31m.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=572&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/545321/original/file-20230829-25-ccw31m.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=572&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/545321/original/file-20230829-25-ccw31m.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=572&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Sonde de mesure SysMoG prête à commencer le forage dans un puits de quelques 6 cm de diamètre.</span>
<span class="attribution"><span class="source">GéoRessources</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>En poursuivant ainsi le monitoring chimique des strates géologiques et des gaz accompagnateurs du méthane, nous avons été surpris de constater que l’hydrogène était présent en forte proportion et que sa concentration augmentait avec la profondeur pour atteindre 20 % à 1 250m de profondeur. De telles proportions nous permettent désormais de considérer qu’à 3000 m de profondeur, la teneur en hydrogène pourrait dépasser 90 %, d’après nos modélisations. Ainsi et sur la base des données gazières à -1 100m (14 % d’hydrogène), ce gisement lorrain pourrait contenir jusqu’à 46 millions de tonnes d’hydrogène blanc, c’est-à-dire plus de la moitié de la production annuelle mondiale actuelle d’hydrogène gris.</p>
<h2>Les différentes couleurs de l’hydrogène</h2>
<p>Blanc ? Gris ? Derrière ces « couleurs » de l’hydrogène se cache en fait sa provenance en lien avec son mode de production. Pour rappel, l’hydrogène est un gaz qui, la plupart du temps, est combiné à d’autres éléments, dans l’eau, dans les énergies fossiles…</p>
<p>L’hydrogène gris correspond ainsi à l’hydrogène produit en usine par transformation de gaz naturel. Il s’agit actuellement de la <a href="https://theconversation.com/lhydrogene-sera-vraiment-revolutionnaire-si-il-est-produit-a-partir-des-renouvelables-145804">première provenance d’hydrogène utilisée comme source d’énergie</a>, qui est critiquée pour la quantité de CO<sub>2</sub> émise durant le procédé. L’hydrogène noir est quant à lui produit à partir de charbon, l’hydrogène vert est lui le résultat d’électrolyse de l’eau avec de l’électricité produite à partir d’énergie renouvelable. Pour toutes ces formes d’hydrogène, on parle donc d’énergie secondaire. L’hydrogène blanc, qui nous intéresse ici, correspond à l’hydrogène déjà présent en l’état dans la nature. Il s’agit alors d’une source d’énergie primaire.</p>
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<img alt="Dispositif autour de la sonde permettant le monitoring gazier du sous sol jusqu’à plus de 1000 m" src="https://images.theconversation.com/files/545326/original/file-20230829-24-zjmvip.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/545326/original/file-20230829-24-zjmvip.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=434&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/545326/original/file-20230829-24-zjmvip.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=434&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/545326/original/file-20230829-24-zjmvip.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=434&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/545326/original/file-20230829-24-zjmvip.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=545&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/545326/original/file-20230829-24-zjmvip.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=545&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/545326/original/file-20230829-24-zjmvip.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=545&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dispositif autour de la sonde permettant le monitoring gazier du sous sol jusqu’à plus de 1000 m.</span>
<span class="attribution"><span class="source">GeoRessources</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Sa disponibilité à l’état brut le rend des plus intéressant à l’heure où l’hydrogène pourrait <a href="https://theconversation.com/developpement-de-la-filiere-hydrogene-quels-usages-privilegier-quels-defis-surmonter-161246">remplacer les énergies fossiles</a> dans les secteurs des transports ou dans les fabrications très énergivores du verre, de l’acier et du ciment, mais où des voix s’élèvent aussi <a href="https://theconversation.com/lhydrogene-sera-vraiment-revolutionnaire-si-il-est-produit-a-partir-des-renouvelables-145804">pour questionner l’empreinte carbone</a> de ses modes de production.</p>
<h2>La piste d’un hydrogène issu de phénomènes d’oxydation et de réduction</h2>
<p>Directement disponible, ce gisement potentiel d’hydrogène blanc a donc l’immense avantage de ne pas nécessiter d’énergie supplémentaire pour être produit à partir d’autres gaz ou molécules. Il suscite également notre enthousiasme car l’hypothèse que nous favorisons aujourd’hui pour expliquer sa présence dans le sous-sol lorrain laisse présager une ressource presque infinie de ce gaz.</p>
<p>Pour rappel, l’hydrogène est très fréquemment présent dans le milieu naturel et son origine peut être multifactorielle (activité bactérienne, artefact technologique, origines géologiques impliquant les phases minérales ou organiques). Concernant la Lorraine, nous privilégions pour l’instant l’idée que l’hydrogène est ici le résultat de la présence, à la fois de molécules d’eau et de minéraux composés de carbonates de fer. </p>
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<p>Deux composés qui, lorsqu’ils entrent en contact, génèrent des réactions d’oxydation du minéral et de réduction de l’eau, qui aboutissent à la production d’hydrogène (H2) et d’oxydes de fer. Si cette hypothèse se confirme, cela impliquerait que cette production d’hydrogène, en plus d’être colossale et naturelle, pourrait donc être presque « renouvelable » car ces processus chimiques d’oxydation et de réduction demeurent rapides (de l’ordre de quelques semaines ou mois) et car la réserve de carbonate de fer dans le sous-sol lorrain est quasi infinie.</p>
<h2>La prochaine étape : un forage à 3 000 mètres</h2>
<p>Avant d’imaginer l’exploitation d’un tel gisement, la route peut paraître encore longue mais le chemin à suivre est lui déjà bien tracé. Il nous faut d’abord prouver que la présence d’hydrogène est homogène dans ce bassin de 490 km<sup>2</sup>. Pour cela, la prochaine étape consistera à déployer la sonde SysMoG dans des forages voisins de celui de Folschviller où nous avons découvert la présence d’hydrogène. Ensuite, il nous faut démontrer que la concentration en hydrogène continue de croître pour des profondeurs supérieures à 1200 m. </p>
<p>Malheureusement, aucun puits en région lorraine ne permet de déployer l’outil à de telles profondeurs. </p>
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<img alt="Image du centre industriel avec les anciens bâtiments de l’industrie minière" src="https://images.theconversation.com/files/545475/original/file-20230830-19-41ggsz.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/545475/original/file-20230830-19-41ggsz.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/545475/original/file-20230830-19-41ggsz.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/545475/original/file-20230830-19-41ggsz.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/545475/original/file-20230830-19-41ggsz.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/545475/original/file-20230830-19-41ggsz.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/545475/original/file-20230830-19-41ggsz.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">À Folschviller, la dernière mine de charbon a fermé en 1979. La ville a depuis perdu un cinquième de sa population. Aujourd’hui, la perspective d’une exploitation du gisement d’hydrogène est bien accueillie par les pouvoirs locaux.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Puits_I_(Folschviller)#/media/Fichier:2015-05_-_Puits_Folschviller_-_17.JPG">A.BourgeoisP/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Nous proposons donc de réaliser un forage profond (3000 m) pour démontrer que la concentration d’hydrogène continue de croître en profondeur. Si tel est le cas, nous validerons alors la présence d’un gisement exceptionnel d’hydrogène naturel de taille inédite et nous pourrons mener une première estimation réaliste de la ressource. Plusieurs partenaires industriels et institutionnels, français et étrangers, sont intéressés pour financer ce projet. Il nous reste à convaincre l’État français de son intérêt, afin d’obtenir les autorisations nécessaires. L’ensemble de ces étapes serait conduit au travers d’un programme de recherche REGALOR II, que nous espérons démarrer au premier trimestre 2024 pour une durée de 3 à 4 ans maximum. Ce n’est donc pas un futur si éloigné au vu des enjeux économiques qui se dessinent.</p>
<h2>Imaginer de nouvelles exploitations de gisements de gaz naturels</h2>
<p>L’idée de pouvoir, un jour, exploiter un tel gisement implique également de repenser nos représentations de gisements de gaz naturels exploités à ce jour. Les pressions de gaz sont ici près de dix fois plus faibles que pour un gisement conventionnel mais l’extension latérale du gisement est bien plus grande. Ce nouveau type de gisement doit donc être source d’innovations. On peut par exemple envisager de n’extraire que les gaz d’intérêt par une séparation en fond de puits afin d’éviter de construire une unité de séparation en surface. Cette manière de procéder nous assurerait également de ne pas empiéter sur les terres agricoles.</p>
<p>Une meilleure compréhension de la genèse de ce gisement permettrait également de décrire les formations rocheuses favorables à l’émergence d’hydrogène en termes de composition minéralogique, de chimie des eaux, de température subie et de profondeur d’enfouissement, et donc de produire de nouveaux guides de prospection afin de sonder les sous-sols d’autres régions. Plusieurs pays, frontaliers ou non, se montrent déjà intéressés. Nos amis des Hauts-de-France sont évidemment dans les starting-blocks.</p>
<h2>Un hydrogène encore objet de peurs excessives</h2>
<p>Pour le grand public, l’hydrogène peut cependant parfois faire peur, du fait, notamment dans les esprits plus âgés, d’images du Zeppelin LZ 129 Hindenburg. Gonflé à l’hydrogène, ce dirigeable, en explosant en plein vol en 1937 a durablement entaché l’image de ce gaz. Comme tous les gaz fossiles, certes, l’hydrogène est inflammable et explosif. Il peut former des mélanges explosifs dès que sa concentration dépasse 4 % dans l’air. Cependant, il n’y a pas de risque d’explosion dans le milieu souterrain, notamment dans les roches carbonifères de Lorraine, car il n’y a pas d’oxygène. Un des défis d’une potentielle exploitation future consiste donc à éviter tout contact de l’hydrogène avec l’oxygène de l’air dans les unités de séparation et de distribution. </p>
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<img alt="Image du Zeppelin LZ 129" src="https://images.theconversation.com/files/545327/original/file-20230829-19-qazct7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/545327/original/file-20230829-19-qazct7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=470&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/545327/original/file-20230829-19-qazct7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=470&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/545327/original/file-20230829-19-qazct7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=470&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/545327/original/file-20230829-19-qazct7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=591&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/545327/original/file-20230829-19-qazct7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=591&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/545327/original/file-20230829-19-qazct7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=591&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Pour le grand public, l’hydrogène peut cependant parfois faire peur, du fait, notamment dans les esprits plus âgés, d’images du Zeppelin LZ 129 Hindenburg. Gonflé à l’hydrogène, ce dirigeable, en explosant en plein vol en 1937 a durablement entaché l’image de ce gaz.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/LZ_129_Hindenburg#/media/File:Hindenburg_at_lakehurst.jpg">Wikimedia</a></span>
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<p>Par ailleurs, l’hydrogène est un gaz léger, qui s’échappe par le moindre orifice ou simplement en diffusant au travers des matériaux. C’est ce qui explique les difficultés pour le stocker de façon pérenne. Mais la manipulation de l’hydrogène est courante, tant dans l’industrie que pour le transport et ces risques sont maîtrisés depuis longtemps.</p>
<p>En Lorraine, après nos premières découvertes à Folschviller, nous avons ressenti de l’enthousiasme auprès des élus des communes environnantes et un véritable soutien à poursuivre l’exploration. Le passé minier de cette région qui continue d’être affectée par les crises industrielles récentes (du charbon, de l’acier) reste pour nous un atout considérable pour toute possible exploitation d’hydrogène dans le futur, car la population connaît bien le sous-sol de la région et dispose de compétences techniques fortes. Cet enthousiasme est aussi partagé par une autre région de France : les Hauts-de-France au passé minier fort similaire. Il s’étend aussi à nos voisins transfrontaliers : le Grand-Duché du Luxembourg, la Sarre et la Wallonie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212498/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>L'Université de Lorraine, université de rattachement de Jacques Pironon, a reçu des financements de la région Grand-Est et du FEDER pour la réalisation du projet de recherche REGALOR. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>L'Université de Lorraine, université de rattachement de Philippe de DONATO, a reçu des financements de la région Grand-Est et du FEDER pour la réalisation du projet de recherche REGALOR. </span></em></p>Dans la Lorraine désindustrialisée, deux géologues racontent leur découverte fortuite d'un gisement d'hydrogène potentiellement colossal qui suscite de grands espoirs.Jacques Pironon, Directeur de recherche au CNRS, Université de LorrainePhilippe de Donato, Directeur de recherche au CNRS, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1925732022-11-21T19:26:25Z2022-11-21T19:26:25ZRecycler 100 % des métaux, un objectif atteignable ?<p>Popularisé par l’engouement autour de l’économie circulaire, le recyclage a le vent en poupe. Charriant la promesse d’un modèle fonctionnant en vase clos et marquant son indépendance par rapport à des ressources minières au bilan écologique souvent dénoncé, le recyclage multiplie les avantages théoriques sur le papier.</p>
<p>Cet apport de métaux recyclés dits secondaires se substitue en effet à une partie des besoins auparavant assurés par les mines (métaux dits primaires), et permet donc d’éviter les déchets et contaminations associés à la mine tout en diminuant notre dépendance à l’importation de métaux depuis des pays potentiellement sensibles géopolitiquement.</p>
<p>D’un point de vue énergétique, une tonne d’acier, d’aluminium ou de cuivre recyclée est en outre moins énergivore que son équivalent primaire – avec des économies d’énergie <a href="https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8607">allant de 60 à 90 %</a>. Les volumes de métaux recyclés réintroduits dans la boucle, enfin, sont autant de matières qui n’iront pas finir dans les décharges avec le lot de pollutions et de coûts qu’elles auraient pu générer.</p>
<p>Pourtant, et sans même viser la circularité parfaite, l’essor du « tout » recyclage pour l’ensemble des métaux est loin d’être aussi simple et relève davantage d’une route semée d’embûches.</p>
<h2>Comment on mesure le recyclage</h2>
<p>Commençons par préciser ce que l’on entend derrière ce vaste concept de recyclage. Quatre différentes façons de l’évaluer permettent de l’appréhender : le taux de collecte, le taux d’efficacité du recyclage, le taux de recyclage en fin de vie des éléments et le taux d’incorporation de <a href="https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8702">matière recyclée dans les produits</a>.</p>
<p>Le taux de collecte représente les quantités de métaux effectivement collectées chaque année sur le flux total qui parvient en fin de vie tandis que le taux d’efficacité du recyclage mesure la quantité recyclée sur la quantité qui est collectée. Le produit de ces deux derniers taux équivaut au taux de recyclage en fin de vie des éléments. Le taux d’incorporation, quant à lui, correspond à la part de matière recyclée dans le cycle de production.</p>
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<p>Chacun de ces indicateurs a son utilité. Pour minimiser la quantité de déchets à gérer dans les décharges, le taux de recyclage des éléments en fin de vie est plus pertinent, alors que pour réduire les ressources extraites à partir des mines (et l’énergie consommée associée), agir sur le taux d’incorporation de matière recyclée dans les produits aura plus d’incidence.</p>
<p>Si l’on exclut la possibilité d’une baisse de la production de produits (ou d’un découplage absolu), se rapprocher d’un taux d’incorporation de recyclé de 100 % nécessite un taux de recyclage des éléments en fin de vie de 100 %.</p>
<h2>Des produits complexes</h2>
<p>Jusqu’ici, les faits semblent contredire ce but. Une grande partie des métaux <a href="https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8702">ne sont pas ou peu recyclés</a>, c’est le cas de la plupart des métaux mineurs (parfois dits métaux rares, comme le lithium, le gallium ou l’indium). Et les métaux bien recyclés (acier, métaux de base et précieux) ont de leur côté atteint un plateau et ne progressent plus.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=728&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=728&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=728&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=915&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=915&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=915&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution des différents taux de recyclage selon les métaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Données de Krausmann et coll. 2017</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Il semblerait donc que le scénario du tout recyclé se heurte à la réalité de produits qui sont souvent : complexes (nombre de composants et d’éléments), variés et dont les concentrations en métaux – jouant à la fois sur les coûts et les recettes des recycleurs – ne sont pas toujours favorables à ces derniers par rapport à la mine classique.</p>
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<span class="caption">Rapport entre les concentrations dans les mines et dans les circuits imprimés d’ordinateurs (PCB) pour plusieurs métaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fizaine 2020</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>La diversité des produits et des composants complexifie le montage de lignes de recyclage adaptées et leur massification, d’autant plus que les courtes durées de vie technologique de certains produits peuvent rendre complètement caduc le modèle de recyclage auparavant pertinent.</p>
<p>Ainsi, le remplacement très rapide des lampes fluo compactes par leur équivalent en LED en quelques années a mis un terme aux expérimentations de recyclage des terres rares issues des premières, les flux traitables de déchets étant amenés à se tarir vite.</p>
<h2>Des conditions économiques parfois défavorables</h2>
<p>Pour continuer, le prix des métaux mais surtout sa volatilité associée n’est pas non plus toujours un terrain très favorable à la mise en place de chaînes de recyclage car celle-ci accentue l’incertitude sur le niveau des recettes. Quand bien même les prix des métaux atteindraient des niveaux élevés, différentes études passées ont démontré la faible réaction de l’offre secondaire des métaux <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0921344917300605?via%3Dihub">au prix de ces derniers</a>.</p>
<p>Du côté des coûts, l’extraction à partir de la « mine urbaine » n’est pas forcément un eldorado économique notamment lorsque l’on s’intéresse à la concentration des métaux mineurs. Pour ces derniers, les concentrations de la mine urbaine sont bien souvent très en deçà de celle de la mine classique. Associés à des prix moyens, ils ne représentent qu’une fraction mineure des recettes extractibles, il n’est donc pas surprenant que les métaux mineurs ne soient pas ciblés par les recycleurs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=461&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=580&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=580&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/491900/original/file-20221026-27-el39uc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=580&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Proportion des différents métaux dans la valeur totale contenue dans les circuits imprimés d’ordinateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fizaine 2020</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-center zoomable">
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<figcaption>
<span class="caption">Relation entre prix, dilution, valeur et métaux recyclés dans les circuits imprimés d’ordinateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fizaine 2020</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ensuite <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/09593330.2016.1237552">d’autres études</a>) ont montré que la réduction en amont des quantités de métaux notamment précieux dans les produits électroniques (en particulier par la miniaturisation) a rendu beaucoup moins attractif le modèle du recyclage. Il y aurait alors, un arbitrage entre d’une part des produits complexes avec des concentrations faibles de métaux (donc économes en métaux) mais peu recyclables, et des produits plus simples mais plus gourmands en métaux et donc mieux recyclables. Le premier R de l’économie circulaire (c’est-à-dire diminuer) aurait ainsi tendance à chasser son dernier R (recycler).</p>
<p>Des effets similaires ont été observés pour les panneaux photovoltaïques dont les épaisseurs en baisse (et concentration) auraient des effets défavorables au recyclage des métaux contenus.</p>
<h2>Des contraintes multiples</h2>
<p>Enfin, il existe aussi d’autres obstacles, trop longs à développer ici, d’ordre technologiques, culturels et juridiques qui contraignent <a href="http://www.editionstechnip.com/fr/catalogue-detail/2166/les-metaux-rares-opportunite-ou-menace.html">l’atteinte du tout recyclé</a>.</p>
<p>Une mauvaise réaction face à ces constats consisterait à disqualifier l’intérêt du recyclage. Au contraire, le recyclage devra faire partie intégrante d’un modèle économique plus durable à la fois du point de vue des ressources et de l’environnement.</p>
<p>Comme le rappellent sans cesse les spécialistes des sciences de l’environnement, le recyclage n’est toutefois qu’une petite partie de la solution et sa maximisation est complexe, difficile et parfois incompatible avec d’autres leviers de l’économie circulaire. La recherche a donc encore du travail pour mieux comprendre comment dénouer ces contraintes et proposer de nouveaux modèles plus soutenables.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/192573/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Florian Fizaine ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La « mine urbaine » semble à première vue un eldorado afin de récupérer et réutiliser les métaux. Mais les obstacles à sa mise en œuvre demeurent nombreux.Florian Fizaine, Maître de conférences en sciences économiques, Université Savoie Mont BlancLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1900802022-10-10T19:00:55Z2022-10-10T19:00:55ZBatteries électriques : une meilleure traçabilité pour un lithium plus durable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/484039/original/file-20220912-6429-j1xjtu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=9%2C10%2C1192%2C786&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des tas de sels contenant du lithium, dans le salar d'Uyuni en Bolivie.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/tomab/4147784984/in/photolist-7jwtYd-S98sqr-T9d6F1-T9d6sf-To1b28-TjpQFb-S98uBv-S98sbt-S98shk-mStdaa-mSscCT-mSse7H-8S4TfB-mSydxz-mSrWoH-mSy5gK-mSs7F6-mSs13B-mSxavM-mSsAL6-mSzEYj-mSt2in-mSu3aj-mSxHTa-mReVUh-mSvurq-nbRvRV-nt4nTe-mRdCBH-mSrSYD-mR7FgJ-mR9fKA-mR7mic-mRdx7p-mR5Rbi-mRd2yM-mReZeJ-mR5Vur-mRdsjZ-cpGbH9-mRfsX9-mR6D4Z-mRbtS3-mR85cy-mRduxB-mR8S5q-mRdFZ6-mR8xJg-mRaavB-mR68JM">TomaB/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span></figcaption></figure><p>On aime bien savoir d’où viennent les produits que l’on consomme, preuve en est l’AOC de tel fromage ou vin, l’étiquetage de la provenance des fruits et légumes, l’affichage des conditions équitables de production de telle tablette de chocolat ou du café. Mais alors que l’impact environnemental et social associé à nos appareils électroniques entre de plus en plus dans les consciences (pénurie d’eau, bilan carbone, conditions de travail, respect des peuples indigènes, etc.), on ne peut pas encore savoir d’où vient le lithium, un des éléments les plus problématiques dans les batteries actuellement, et donc s’assurer de son origine.</p>
<p>Nous proposons une approche géochimique qui établit une « empreinte digitale » du lithium afin de tracer le lithium de nos batteries et, potentiellement, d’offrir des garanties pour une extraction socialement et environnementalement durable.</p>
<h2>Le lithium, nouvel « or blanc »</h2>
<p>Le lithium a un rôle clé dans les batteries rechargeables des appareils électroniques portables (tablettes et téléphones), des moyens de transport électriques (véhicules hybrides et électriques, scooters et vélos électriques) et pour les technologies stationnaires de stockage d’énergie, indispensables pour le développement des énergies renouvelables intermittentes.</p>
<p>En d’autres termes, les « sels de lithium » sont actuellement une des clés de voûte à la transition énergétique décarbonée.</p>
<p>Les tonnages de lithium nécessaires à la fabrication des batteries au lithium devraient dépasser <a href="https://www.mineralinfo.fr/fr/ecomine/marche-du-lithium-2020-enjeux-paradoxes">100 kilotonnes en 2025</a>, notamment car l’électrification des transports, encouragée ou imposée par différent pays de l’Union européenne, va considérablement augmenter le besoin en lithium dans les prochaines années.</p>
<p>Avec la demande croissante en lithium, les impacts environnementaux et sociaux liés à l’exploitation minière vont augmenter, ainsi que les attentes des consommateurs en termes de garanties sur l’origine du lithium et des efforts déployés pour réduire son impact environnemental et social.</p>
<h2>D’où vient le lithium ?</h2>
<p>À l’heure actuelle, seuls <a href="https://www.mineralinfo.fr/fr/ecomine/marche-du-lithium-2020-enjeux-paradoxes">deux types de gisements</a> sont à l’origine de l’essentiel de la production mondiale en lithium. Il s’agit de gisements de lithium sous la forme de roches dures, par exemple les pegmatites à spodumène (Australie, Canada, Chine) et des saumures des salars sud-américains du « triangle du lithium » (Bolivie, Argentine, Chili) et de Chine.</p>
<p>En Argentine, les communautés indigènes signalent déjà que l’exploitation du lithium sur leurs terres menace <a href="https://www.amnesty.org/fr/latest/press-release/2019/03/amnesty-challenges-industry-leaders-to-clean-up-their-batteries/">leur survie et l’exercice de leurs droits ancestraux</a>.</p>
<p>Au Zimbabwe, où l’exploitation du lithium est actuellement faible, des <a href="https://www.business-humanrights.org/fr/derni%C3%A8res-actualit%C3%A9s/investigating-illicit-financial-flows-in-zimbabwes-lithium-mining-sector/">flux financiers illicites</a> ont déjà été identifiés par certaines ONGs dans le secteur de l’extraction du lithium.</p>
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<p>Ces deux sources de lithium présentent aussi des impacts environnementaux différents. Ainsi, l’exploitation des saumures de lithium consomme de grandes quantités d’eau par évaporation et provoque un <a href="https://www.nature.com/articles/s43247-020-00080-9">risque de pénurie d’eau douce</a> pour les populations et les écosystèmes locaux dans des zones déjà très arides. De son côté, l’impact environnemental de l’exploitation du lithium à partir des roches dures est dominé par un traitement à l’acide sulfurique et par un procédé qui passe par la fracturation mécanique et le traitement thermique du minerai donc plus énergivore que celui de la filière salar. Ainsi, pour la filière roches dures l’impact est plus élevé en termes de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32250776/">réchauffement climatique (émission de CO₂) et d’acidification</a> que pour la filière salar.</p>
<p>À titre d’exemple, les sels de lithium issus des spodumènes australiens qui sont ensuite extraits et purifiés en Chine possèdent un <a href="https://www.jadecove.com/research/liohco2impact">bilan carbone trois fois plus élevé</a> que ceux produits à partir des salars du Chili et d’Argentine.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484040/original/file-20220912-20-4pji63.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un échantillon de spodumène de 12,5 centimètres à Itagassu, Espirito Santo, Brésil.</span>
<span class="attribution"><span class="source">BRGM, Urbain de Cayeux</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une chaîne d’approvisionnement complexe</h2>
<p>La chaîne d’approvisionnement pour la fabrication des batteries est complexe et divisée en de nombreuses étapes, généralement réalisées dans des lieux et des pays différents : l’exploitation minière, la métallurgie d’extraction et de purification, la synthèse des matières actives de la cathode, la fabrication des éléments de la batterie et l’assemblage des packs de batteries.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=119&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=119&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=119&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=150&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=150&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484888/original/file-20220915-22-dii1np.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=150&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La chaîne d’approvisionnement pour la fabrication des batteries.</span>
<span class="attribution"><span class="source">BRGM, Desaulty</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De plus, un fabricant de batteries peut avoir plusieurs sources d’approvisionnement et différents lots de production d’un même modèle de voiture électrique peuvent par exemple contenir des lithiums d’origines très diverses.</p>
<p>En raison de la complexité de cette chaîne d’approvisionnement, il est difficile pour les utilisateurs finaux de s’assurer que le lithium est issu d’une filière d’approvisionnement responsable et durable.</p>
<h2>Les « empreintes digitales » du lithium</h2>
<p>Pour aider à contrôler et à certifier l’origine et le commerce de la production de lithium, nous proposons une méthode analytique, basée sur l’analyse isotopique du lithium.</p>
<p>En effet, le lithium possède deux isotopes stables (les isotopes sont des variantes du même élément, qui se distinguent par leur masse, pour le lithium il s’agit de <sup>6</sup>Li et <sup>7</sup>Li), que l’on retrouve tous les deux dans les échantillons de lithium, mais leur proportion varie en fonction du minerai, et en particulier des conditions physico-chimiques de formation.</p>
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<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/relocaliser-lextraction-des-ressources-minerales-en-europe-les-defis-du-lithium-138581">Relocaliser l’extraction des ressources minérales : en Europe, les défis du lithium</a>
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</em>
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<p>Cette signature isotopique représente une « empreinte digitale » du lithium. Par exemple, le lithium provenant de saumure contient proportionnellement plus de <sup>7</sup>Li (le nom d’un des deux isotopes) que celui des gisements de type roches dures.</p>
<h2>Traçabilité géochimique du lithium ?</h2>
<p>Cette « empreinte digitale » est en fait, dans la plupart des cas, conservée jusqu’au lithium des batteries qui se trouvent dans nos voitures et nos téléphones. En d’autres termes, en analysant nos batteries, nous pouvons savoir d’où provient le lithium qui la compose grâce à une analyse isotopique.</p>
<p>En effet, nous avons montré dans une étude récente publiée dans <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-022-31850-y"><em>Nature Communications</em></a> que si certains procédés d’extraction et de purification avaient tendance à augmenter le contenu relatif du <sup>7</sup>Li par rapport à la signature isotopique naturelle, les autres étapes de fabrication des batteries ne modifient pas la signature isotopique. Il est ainsi possible de déterminer si le lithium provient d’un gisement de type saumure ou roche dure.</p>
<p>Pour une détermination plus fine de la provenance, le développement d’une base de données regroupant notamment les valeurs des rapports isotopiques des sels de lithium disponibles sur le marché sera nécessaire. La plus grande limite de cette approche sera les chevauchements des signatures pour des produits provenant de différents sites ou producteurs de sel.</p>
<h2>Vers la certification d’une filière d’approvisionnement en lithium responsable et durable</h2>
<p>Dans le contexte de volonté politique de réindustrialiser la production de batteries en Europe, et de défense de filière de production des batteries durables et responsables, avoir les moyens de certifier le lithium est important.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=214&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=214&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=214&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=269&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=269&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484041/original/file-20220912-26-mvs4db.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=269&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La chaîne de certification proposée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">BRGM, Desaulty</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le principe de cette méthode analytique est le même que celui développé pour la <a href="https://www.brgm.fr/fr/actualite/video/tao-tracabilite-analytique-or-guyane">traçabilité de l’or</a>, et du <a href="https://www.bgr.bund.de/EN/Themen/Min_rohstoffe/Rohstoff_forsch/LF_Herkunftrsnachweis_COLTAN_Newsletter01-2010.html">coltan</a>, qui permet de vérifier si le produit correspond à son origine déclarée en comparant l’échantillon en question à des échantillons de référence d’origine connue stockés dans une base de données.</p>
<p>L’aspect crucial pour le lithium sera le développement de la base de données de référence contenant les signatures isotopiques complètes et actualisées des différents produits disponibles sur le marché. Cette base de données devra être incrémentée au fur et à mesure de l’exploitation de nouveaux gisements ou du développement de nouveaux procédés d’extraction et de purification. Pour ce faire, il sera nécessaire de collaborer avec les miniers et producteurs de sels de lithium pour évaluer la signature de leurs produits. Cette collaboration entre la recherche publique et les différents acteurs de la filière est une condition sine qua non pour le développement d’une filière d’approvisionnement en lithium responsable et durable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190080/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une nouvelle méthode pour tracer le lithium de nos batteries électriques et encourager une gestion plus durable des ressources minérales.Anne-Marie Desaulty, Chercheur en géochimie isotopique, BRGM, BRGMCatherine Guerrot, PhD Géochimie isotopique et géochronologie, BRGMDaniel Monfort Climent, Ingénieur géologue, ressources minérales et économie circulaire, BRGMGaetan Lefebvre, Chercheur, BRGMSébastien Perret, Technicien en analyses isotopiques, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1894052022-08-26T16:25:23Z2022-08-26T16:25:23ZLes zones grises de l’exploitation des ressources sur la Lune, et les pistes pour en sortir<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/481279/original/file-20220826-22-2q6nxr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C352%2C3881%2C2887&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Revendiquer un territoire dans l'espace est illégal selon les lois internationales.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/d/dd/Buzz_salutes_the_U.S._Flag.jpg">NASA/Neil Armstrong</a></span></figcaption></figure><p>Cela fait 50 ans que l’homme n’est pas allé sur la Lune, et même les robots y vont peu. Mais le satellite naturel de la Terre est sur le point d’être envahi.</p>
<p>Au moins six pays et une multitude d’entreprises privées ont annoncé publiquement plus de <a href="https://www.nsr.com/nsr-developing-moon-market-propelled-by-250-missions-and-105-billion-in-revenue-through-decade/">250 missions vers la Lune</a>, qui auront lieu au cours de la prochaine décennie. Nombre de ces missions prévoient des bases lunaires permanentes et ambitionnent d’évaluer et de commencer à utiliser les ressources naturelles de la Lune. À court terme, les ressources seraient utilisées pour les missions lunaires, mais à long terme, la Lune et ses ressources seront essentielles aux missions vers les autres trésors du système solaire.</p>
<p>Ces nobles ambitions se heurtent à une question juridique imminente. Sur Terre, la possession et la propriété des ressources naturelles sont fondées sur la souveraineté territoriale. À l’inverse, l’article II du <a href="https://www.unoosa.org/pdf/gares/ARES_21_2222E.pdf">Traité sur l’espace extra-atmosphérique</a> – l’accord vieux de 60 ans qui guide l’activité humaine dans l’espace – interdit aux nations de revendiquer un territoire dans l’espace. Cette limitation inclut la Lune, les planètes et les astéroïdes. Comment peut-on alors gérer les ressources spatiales ?</p>
<p>Je suis avocate, et je me concentre sur l’<a href="https://scholar.google.com/citations?user=TUy5ls8AAAAJ&hl=en&oi=ao">utilisation pacifique et durable de l’espace</a> pour le bénéfice de toute l’humanité. Je pense que les années 2020 seront reconnues comme la décennie au cours de laquelle l’homme est devenu une véritable « espèce spatiale », qui utilise les ressources de l’espace pour survivre et prospérer dans l’espace et sur Terre. Pour construire cet avenir, la communauté internationale travaille, dans différentes instances, à développer un cadre de gestion des ressources spatiales, en commençant par celles de notre plus proche voisine : la Lune.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/480133/original/file-20220819-24-e8abwt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Deux images côte à côte des pôles nord et sud de la Lune avec des taches bleues représentant l’eau" src="https://images.theconversation.com/files/480133/original/file-20220819-24-e8abwt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/480133/original/file-20220819-24-e8abwt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/480133/original/file-20220819-24-e8abwt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/480133/original/file-20220819-24-e8abwt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/480133/original/file-20220819-24-e8abwt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/480133/original/file-20220819-24-e8abwt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/480133/original/file-20220819-24-e8abwt.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’eau est l’une des ressources les plus précieuses sur la Lune et se trouve principalement dans les cratères du pôle sud (gauche) et du pôle nord (droite). Les zones de glace de surface sont en bleu.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.jpl.nasa.gov/news/ice-confirmed-at-the-moons-poles">NASA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Missions lunaires pour ressources lunaires</h2>
<p>Le <a href="https://www.nasa.gov/specials/artemis/">Programme Artemis</a> mené par les États-Unis est une coalition de partenaires commerciaux et internationaux dont le premier but est de ramener des humains sur la Lune d’ici 2024, avec l’objectif à plus long terme d’établir une base lunaire permanente. La Russie et la Chine ont également annoncé un projet de <a href="http://french.china.org.cn/china/txt/2022-01/29/content_78019360.htm">station de recherche lunaire internationale (ILRS)</a> et ont invité à la <a href="https://theconversation.com/space-blocs-the-future-of-international-cooperation-in-space-is-splitting-along-lines-of-power-on-earth-180221">collaboration internationale</a>. De multiples missions privées sont également en cours de développement par des entreprises comme <a href="https://ispace-inc.com/">iSpace</a>, <a href="https://www.astrobotic.com/">Astrobotic</a> et une <a href="https://www.scientificamerican.com/article/a-new-private-moon-race-kicks-off-soon/">poignée d’autres</a>.</p>
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<p>Ces missions visent à déterminer quelles ressources sont réellement disponibles sur la Lune, où elles se trouvent et s’il sera <a href="https://theconversation.com/de-lespace-aux-oceans-les-nouvelles-frontieres-minieres-158734">difficile de les extraire</a>. Actuellement, la plus précieuse de ces ressources est l’eau. L’eau se trouve principalement sous forme de <a href="https://www.space.com/15094-moon-water-ice-space-fuel.html">glace dans les cratères ombragés des régions polaires</a>. Elle est nécessaire pour boire et cultiver des aliments. Divisée en hydrogène et en oxygène, elle pourrait également être utilisée comme <a href="https://www.space.com/15094-moon-water-ice-space-fuel.html">combustible pour les fusées</a> qui retournent sur Terre ou voyageraient au-delà de la Lune.</p>
<p>Parmi les autres ressources précieuses de la Lune figurent des métaux rares comme le néodyme – utilisé dans les aimants – et l’<a href="https://theconversation.com/objectif-lune-le-temps-de-la-reconquete-150153">hélium 3</a>, qui peut être utilisé pour <a href="https://doi.org/10.1126/science.add5489">produire de l’énergie</a>.</p>
<p>Les recherches actuelles suggèrent que seules quelques petites zones de la Lune contiennent <a href="https://phys.org/news/2020-11-moon-resources-tension-scientists.html">à la fois de l’eau et des éléments de terres rares</a>. Cette concentration de ressources pourrait poser un problème, car de nombreuses missions prévues se dirigeront probablement vers les mêmes zones de la Lune pour prospecter.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/480135/original/file-20220819-26-g5k28o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Une empreinte de botte dans la surface poussiéreuse de la Lune" src="https://images.theconversation.com/files/480135/original/file-20220819-26-g5k28o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/480135/original/file-20220819-26-g5k28o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=604&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/480135/original/file-20220819-26-g5k28o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=604&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/480135/original/file-20220819-26-g5k28o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=604&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/480135/original/file-20220819-26-g5k28o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=758&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/480135/original/file-20220819-26-g5k28o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=758&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/480135/original/file-20220819-26-g5k28o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=758&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Une couche de fine poussière et d’éclats de roche tranchants recouvre la surface de la Lune, comme le montre cette photo prise par Buzz Aldrin en 1969.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://images.nasa.gov/search-results?q=AS11-40-5877">NASA/Buzz Aldrin</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Tout commence avec une poussière lunaire… exaspérante</h2>
<p>Le dernier humain sur la Lune, l’astronaute d’Apollo 17 Eugene Cernan, a qualifié la poussière lunaire de <a href="https://an.rsl.wustl.edu/apollo/data/A17/resources/a17-techdebrief.pdf">« l’une des limitations les plus exaspérantes de la surface lunaire »</a>. En effet, la Lune est recouverte d’une couche de poussière fine et de petits fragments de roche pointus, appelés régolithe. Comme il n’y a pratiquement pas d’atmosphère sur la Lune, le régolithe est <a href="https://sciences.ucf.edu/class/landing-team/the-science-of-plume-effects/">facilement soufflé par le vent généré par les engins spatiaux</a> qui atterrissent ou roulent à la surface.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourra-t-on-faire-pousser-des-plantes-sur-la-lune-des-indices-avec-les-echantillons-ramenes-par-apollo-185083">Pourra-t-on faire pousser des plantes sur la Lune ? Des indices avec les échantillons ramenés par Apollo</a>
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<p>Une partie de la mission Apollo 12 de 1969 consistait à ramener sur Terre des morceaux de Surveyor 3, un vaisseau spatial américain qui s’était posé sur la Lune en 1967 pour étudier sa surface. Le module lunaire Apollo 12 s’est posé à quelque 150 mètres de Surveyor 3, mais après inspection, les ingénieurs ont constaté que des particules soufflées par les gaz d’échappement d’Apollo 12 avaient perforé la surface de Surveyor 3, <a href="https://www.lpi.usra.edu/lunar/strategies/Cour-PalaisEtAl_NASA-SP-284E_Surveyor_3_Particulate_Impacts.pdf">enfonçant littéralement du régolithe dans l’équipement</a>.</p>
<p>Dans ces conditions, on imagine facilement un atterrisseur ou un rover (un véhicule de surface) d’un pays puisse passer trop près de l’engin spatial d’un autre pays et provoque des dommages importants.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/480134/original/file-20220819-3033-za6ht2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Une personne en combinaison spatiale se tenant à côté d’un engin de sondage sur la surface de la Lune avec un atterrisseur en arrière-plan" src="https://images.theconversation.com/files/480134/original/file-20220819-3033-za6ht2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/480134/original/file-20220819-3033-za6ht2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=525&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/480134/original/file-20220819-3033-za6ht2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=525&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/480134/original/file-20220819-3033-za6ht2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=525&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/480134/original/file-20220819-3033-za6ht2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=660&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/480134/original/file-20220819-3033-za6ht2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=660&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/480134/original/file-20220819-3033-za6ht2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=660&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La poussière de l’atterrissage d’Apollo 12, vue en arrière-plan sur cette image, a perforé le métal sur le Surveyor 3, à l’avant, à plus de quelques 150 mètres de distance.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://grin.hq.nasa.gov/ABSTRACTS/GPN-2000-001316.html">Alan L. Bean/NASA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h3>Un besoin de règles</h3>
<p>Quand les efforts pour retourner sur la Lune ont commencé à s’intensifier dans les années 2000, la NASA était très préoccupée par le potentiel destructeur de la poussière lunaire. À tel point qu’en 2011, elle a émis une série de recommandations à l’intention de toutes les entités spatiales. L’objectif était de protéger Apollo et d’autres objets américains sur la surface lunaire qui ont une valeur historique et scientifique. Les recommandations mettent en œuvre des <a href="https://www.nasa.gov/pdf/617743main_NASA-USG_LUNAR_HISTORIC_SITES_RevA-508.pdf">« zones d’exclusion »</a>, définies par la NASA comme des « zones limites dans lesquelles les engins spatiaux en visite ne doivent pas pénétrer ». Ces suggestions ne peuvent pas être mises en œuvre à l’égard d’une entité ou une nation – à moins qu’elle ne soit liée directement à la NASA par contrat.</p>
<p>Le concept même de ces zones viole le sens littéral et l’intention de <a href="https://www.unoosa.org/oosa/en/ourwork/spacelaw/treaties/outerspacetreaty.html">l’article II</a> du Traité sur l’espace extra-atmosphérique : cet article stipule qu’aucune zone de l’espace n’est sujette à une « appropriation nationale » par « des moyens d’utilisation ou d’occupation ». La création d’une zone d’exclusion autour d’un site d’atterrissage ou d’une exploitation minière pourrait certainement être considérée comme une occupation.</p>
<p>Mais le Traité sur l’espace extra-atmosphérique offre potentiellement une solution.</p>
<h2>Actions internationales</h2>
<p>En effet, son <a href="https://www.unoosa.org/oosa/en/ourwork/spacelaw/treaties/outerspacetreaty.html">article IX</a> exige que toutes les activités dans l’espace soient menées « en tenant dûment compte des intérêts correspondants d’autrui ». Suivant cette philosophie, de nombreuses nations travaillent actuellement à l’utilisation collaborative des ressources spatiales.</p>
<p>À ce jour, 21 nations ont accepté les <a href="https://www.nasa.gov/specials/artemis-accords/img/Artemis-Accords-signed-13Oct2020.pdf">Accords d’Artémis</a>, qui utilisent cette disposition du Traité, relative à la prise en compte des intérêts d’autrui, pour encourager le développement de zones de « notification et de coordination », également appelées « zones de sécurité ». S’il n’est pas négligeable d’avoir 21 signataires, les accords n’incluent pas pour l’instant les grandes nations spatiales que sont la Chine, la Russie et l’Inde.</p>
<p>En juin 2022, le comité des Nations unies sur les <a href="https://www.unoosa.org/oosa/en/ourwork/copuos/index.html">utilisations pacifiques de l’espace extra-atmosphérique</a> a créé le <a href="https://www.unoosa.org/oosa/en/ourwork/copuos/lsc/space-resources/index.html">Groupe de travail sur les aspects juridiques des activités liées aux ressources spatiales</a>. Le mandat de ce groupe est d’élaborer des recommandations de principes concernant « l’exploration, l’exploitation et l’utilisation des ressources spatiales ». Bien que le groupe n’ait pas encore abordé les questions de fond, au moins un pays non-signataire des accords d’Artémis, le <a href="https://theconversation.com/de-lespace-aux-oceans-les-nouvelles-frontieres-minieres-158734">Luxembourg</a>, a déjà exprimé son intérêt pour la promotion des zones de sécurité.</p>
<p>Ce groupe de travail semble un bon moyen pour obtenir un soutien international unanime à l’idée des zones de sécurité telles que celles décrites dans les accords d’Artémis. <a href="https://www.forallmoonkind.org/">For All Moon-kind</a>, une organisation à but non lucratif que j’ai fondée et qui est composée d’experts de l’espace et de vétérans de la NASA, a pour mission de soutenir la création de zones de protection autour des <a href="https://theconversation.com/apollo-landers-neil-armstrongs-bootprint-and-other-human-artifacts-on-moon-officially-protected-by-new-us-law-152661">sites d’importance historique dans l’espace</a>, comme première version des zones de sécurité. Bien qu’initialement motivées par cette exaspérante poussière lunaire, les zones de sécurité pourraient constituer un point de départ pour le développement d’un système fonctionnel de gestion des ressources et du territoire dans l’espace. Une telle action permettrait de protéger les sites historiques importants. Elle pourrait également avoir l’avantage de présenter la gestion des ressources comme un outil de conservation, plutôt que d’exploitation.–</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/189405/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michelle L.D. Hanlon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’ère de l’exploitation des ressources lunaires approche rapidement. Comment le faire durablement – et légalement ?Michelle L.D. Hanlon, Professor of Air and Space Law, University of MississippiLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1836762022-05-29T15:32:05Z2022-05-29T15:32:05ZEn Chine, l’exploitation des terres rares s’accompagne d’une pollution massive<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/465282/original/file-20220525-11-auaf6i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C11%2C7348%2C4891&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Exploitation minière dans la région du Xinjiang, en Chine.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/keketuohai-unesco-global-geoparkxinjiang-rare-metals-2034930392">twabian/shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Il n’est pas une semaine sans que la presse, qu’elle soit nationale ou internationale, ne relate un fait relatif aux risques de pénurie en métaux stratégiques, utiles dans la transition énergétique. Le mois dernier, un <a href="https://www.eurometaux.eu/media/20ad5yza/2022-policymaker-summary-report-final.pdf">rapport</a> faisant part du besoin croissant en terres rares d’ici 2050 a largement été relayé.</p>
<p>En effet, les <a href="https://theconversation.com/rares-chers-essentiels-quelle-actualite-pour-les-metaux-en-periode-de-pandemie-156996">terres rares</a> sont utilisées dans toutes les nouvelles technologies.</p>
<p>Cependant, le grand public ne sait pas toujours d’où elles viennent ni quel est l’impact environnemental de leur production.</p>
<h2>Que sont les terres rares ?</h2>
<p>Les <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03587840/file/TUDURI_resume_RST_Lyon2020.pdf">terres rares</a> ont des propriétés magnétiques, électroniques, optiques et catalytiques exceptionnelles, particulièrement utiles pour les technologies qui accompagnent la transition énergétique.</p>
<p>Aujourd’hui, leur consommation est principalement soutenue par le secteur des aimants permanents, composés pour partie de terres rares (notamment du néodyme et du praséodyme et en moindre mesure du dysprosium et du terbium pour les applications de haute performance).</p>
<p>Les secteurs d’usages de ces aimants sont multiples : ils permettent en effet la miniaturisation (électronique, robotique) et l’allègement des équipements (générateurs d’éoliennes off-shore, moteurs des véhicules électriques…).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Gros plan sur des panneaux solaires, avec une éolienne à l’arrière-plan" src="https://images.theconversation.com/files/465253/original/file-20220525-18-2jp1ts.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/465253/original/file-20220525-18-2jp1ts.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/465253/original/file-20220525-18-2jp1ts.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/465253/original/file-20220525-18-2jp1ts.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/465253/original/file-20220525-18-2jp1ts.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/465253/original/file-20220525-18-2jp1ts.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/465253/original/file-20220525-18-2jp1ts.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les éoliennes et les panneaux photovoltaïques sont de gros consommateurs de terres rares.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/iKjAj_oq-IE">Nazrin Babashova/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette demande croît de 10 % par an. En 2021, la production mondiale est ainsi estimée à 280 000 tonnes de terres rares.</p>
<p>Selon les estimations, la Chine y participerait à hauteur de 60 % (source <a href="https://pubs.usgs.gov/periodicals/mcs2022/mcs2022.pdf">USGS</a>), mais ne se préoccupe que très peu des pollutions engendrées par leur exploitation.</p>
<h2>Le drainage minier acide, potentiel désastre environnemental</h2>
<p>La Chine exploite notamment des gisements d’argile dans le sud du pays. Les terres rares y sont principalement exploitées selon une technique appelée <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lixiviation_en_tas">« lixiviation en tas »</a>.</p>
<p>Malheureusement, cette technologie produit une <a href="https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2021.150241">grande pollution</a>, due au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Drainage_minier_acide">drainage minier acide</a>.</p>
<p>Ce phénomène spontané est généré par l’oxydation des sulfures (par exemple, la pyrite) contenus dans les roches ou résidus. En effet, lors des travaux miniers (excavations et pompages), l’équilibre chimique de ces affleurements et dépôts profonds est perturbé par une oxydation au contact de l’atmosphère.</p>
<p>Les produits résultant de ce drainage minier acide peuvent ensuite migrer dans les environnements souterrains, ce qui entraîne une grave contamination par les terres rares des <a href="https://doi.org/10.1016/j.gexplo.2012.11.018">sols</a>, des <a href="https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2004.05.012">eaux</a> et des <a href="https://doi.org/10.3390/su10061758">cultures</a>.</p>
<p>S’y rajoutent des problèmes sanitaires, incluant la contamination des eaux de surface et souterraines par des métaux (comme les terres rares), l’exposition à de fortes concentrations de dioxyde de soufre, aux particules…</p>
<p>L’augmentation des concentrations en terres rares dans l’environnement proche des exploitations minières a ainsi suscité des inquiétudes dans le monde entier, par exemple, en <a href="https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2021.150241">Chine</a>, au Vietnam, en Australie, en Inde ou en <a href="https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2004.05.012">Espagne</a>.</p>
<p>_</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Enorme mine ouverte à flanc de colline et plongeant profondément dans le sol" src="https://images.theconversation.com/files/465256/original/file-20220525-14-ju3fz0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/465256/original/file-20220525-14-ju3fz0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/465256/original/file-20220525-14-ju3fz0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/465256/original/file-20220525-14-ju3fz0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/465256/original/file-20220525-14-ju3fz0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/465256/original/file-20220525-14-ju3fz0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/465256/original/file-20220525-14-ju3fz0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La mine de cuivre de Rio Tinto (Espagne) a été fermée en 2001.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/mdRmslWQgxQ">Jordi Vich Navarro/Unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour limiter les impacts environnementaux résultant du drainage minier acide, des <a href="https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2004.09.002">technologies d’atténuation naturelle passive</a> comme l’activité microbienne (par exemple nitrification/dénitrification), ou des technologies actives (comme la coagulation/floculation) pourraient être utilisées.</p>
<p>Cependant, ces deux grands types de technologies présentent des <a href="https://doi.org/10.1016/j.gexplo.2021.106742">inconvénients</a>, tels que des problèmes de biocolmatage et d’entartrage résultant des précipitations minérales pour la première, et des traitements coûteux et longs pour la seconde.</p>
<p>Nos <a href="https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2021.150241">travaux récents</a> menés dans le sud de la Chine autour d’une mine dans la province de Jiangxi ont montré que ce drainage minier acide pouvait être pris en compte dans un processus de traitement des eaux de drainage par simple neutralisation du pH (séparation de plusieurs kilogrammes de terres rares par jour). Ce simple traitement permet de produire des terres rares tout en réduisant la pollution engendrée… mais n’est pas rentable économiquement.</p>
<h2>Les terres rares, une ressource stratégique</h2>
<p>La production et l’exploitation des terres rares (depuis la mine jusqu’aux aimants permanents) sont un avantage compétitif majeur de la Chine, qui souligne l’importante vulnérabilité de l’approvisionnement pour l’industrie européenne.</p>
<p>Afin d’atténuer ce déséquilibre industriel, l’Union européenne encourage les États membres à développer et à diversifier leurs sources d’approvisionnement, qu’elles soient primaires (minières) ou secondaires (réutilisation, recyclage et réduction des déchets).</p>
<p>Cependant, l’Union européenne (et plus largement de nombreux pays) est contrainte par des législations environnementales qui imposent de nombreux aménagements, comme en France avec la gestion du <a href="https://www.normandie.developpement-durable.gouv.fr/gestion-des-deblais-de-chantiers-de-grandes-a4424.html">drainage minier acide</a>.</p>
<p>Tant qu’il n’y aura pas de prise en compte à l’échelle mondiale de ces risques de pollution, les industries vont continuer de produire ailleurs (comme en Chine), là où les contraintes environnementales sont moins strictes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/183676/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olivier Pourret ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les terres rares sont très utilisées dans les nouvelles technologies. Mais leur exploitation cause de graves problèmes environnementaux qui doivent être adressés de manière internationale.Olivier Pourret, Enseignant-chercheur en géochimie et responsable intégrité scientifique et science ouverte, UniLaSalleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1771012022-03-21T20:04:29Z2022-03-21T20:04:29ZComment mieux recycler le phosphore présent dans les sols ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/448167/original/file-20220223-12782-1064tg5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C169%2C1037%2C700&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Communauté de plantes (lentille, féverole de printemps, pois fourrager, avoine de printemps, moutarde blanche et phacélie) cultivées pour recycler le phosphore des sols. </span> <span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Comme tous les organismes vivants, les plantes ne peuvent pas se passer de phosphore, qui constitue un élément majeur pour leur nutrition et la productivité des agroécosystèmes. Mais par la nature de ses formes chimiques, le phosphore est peu disponible dans les sols pour les plantes. La fertilisation des cultures en phosphore a ainsi représenté un élément essentiel au développement de l’agriculture ; de nos jours, cette fertilisation est toujours requise pour maintenir la production alimentaire.</p>
<p>La fertilisation phosphatée constitue toutefois une source de contamination – en métaux toxiques, <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10653-009-9273-2">avec notamment le cadmium et l’uranium</a> – des sols cultivés ; cela principalement en raison des impuretés présentes dans certaines roches phosphatées utilisées pour la fabrication de ces engrais. On en consomme en France chaque année, qui représentent <a href="https://ree.developpement-durable.gouv.fr/themes/pressions-exercees-par-les-modes-de-production-et-de-consommation/usages-de-matieres-potentiellement-polluantes/fertilisants/article/les-livraisons-d-engrais-en-france">environ 410 000 tonnes (et 2,6 millions de tonnes pour l’Union européenne)</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1014127931201908736"}"></div></p>
<p>Or le cadmium s’accumule dans la chaîne alimentaire. Et l’on sait que l’exposition au cadmium chez les humains (non-fumeurs) provient principalement de la <a href="https://efsa.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.2903/j.efsa.2009.980">contamination des sols par les engrais phosphatés</a>.</p>
<p>Classé cancérogène pour l’être humain par l’Organisation mondiale de la santé, plusieurs pays de l’Union européenne ont adopté une réglementation fixant une limite inférieure ou égale allant de <a href="https://www.europarl.europa.eu/news/en/press-room/20181119IPR19407/fertilisers-cadmium-parliament-and-council-negotiators-reach-provisional-deal">60 à 20 mg de cadmium par kg</a> d’engrais phosphaté.</p>
<h2>Recycler le phosphore accumulé dans les sols</h2>
<p>Les ressources minières de roches phosphatées présentant de faibles teneurs en cadmium constituent des ressources finies et épuisées en Europe ; elles sont également devenues rares à l’échelle mondiale (un gisement est présent en Russie). Face à cette rareté, de nouveaux systèmes <a href="https://agronomie.asso.fr/fileadmin/user_upload/revue_aes/aes_vol6_n1_juin2016/pdf/aes_vol6_n1_09_faucon_et_al.pdf">d’économie circulaire et de nouvelles pratiques</a> sont à mettre en place pour sécuriser la production agricole.</p>
<p>Un des défis actuels concerne le recyclage du phosphore au sein de nos territoires, en valorisant notamment les excréments animaux et humains, mais aussi l’accroissement de la disponibilité du phosphore accumulé dans les sols cultivés suite à une longue histoire de fertilisation. Il s’agit de réduire les apports en phosphore minéral d’origine fossile et les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0065211315001121">pertes par les eaux de ruissellement</a>.</p>
<p>Le premier objectif le plus durable – avant d’effectuer de nouveaux apports de phosphore renouvelable impliquant du transport et des émissions de gaz à effet de serre – consiste donc à recycler le phosphore accumulé dans les sols en améliorant sa disponibilité, c’est-à-dire sous une forme chimique assimilable par la plante.</p>
<p>Il existe divers moyens d’y arriver, grâce à certaines pratiques agroécologiques notamment.</p>
<h2>Valoriser le génie des plantes et des micro-organismes du sol</h2>
<p>Les pratiques qui s’appuient sur les principes de l’agroécologie (qui propose <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1360138517300195">d’examiner le fonctionnement des agrosystèmes et d’intégrer des processus écologiques</a>) peuvent offrir une opportunité de limiter les pertes en phosphore et d’en améliorer la disponibilité dans les sols cultivés pour rendre son utilisation plus efficace.</p>
<p>Avant de mobiliser ce phosphore non disponible dans les sols, une des priorités consiste à en limiter les pertes par le ruissellement dans un objectif à la fois d’économie et de réduction de pollution des eaux de surface (ce qu’on appelle le phénomène d’eutrophisation).</p>
<p>Lors des saisons pluvieuses, les plantes, et plus globalement les cultures couvrant entièrement le sol, limitent l’énergie des gouttes d’eau et la formation d’un ruissellement intense. Celles avec une forte densité de racines fines par volume de sol favorisent la perméabilité et l’infiltration de l’eau, provoquant ainsi la réduction du ruissellement et du transfert de phosphore dans les eaux de surface.</p>
<p>Les plantes présentant une densité de tiges et de feuilles verticales constituent aussi une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/ldr.3812">barrière végétale réduisant le ruissellement</a> et donc les pertes du phosphore associées. Les cultures présentant toutes ces caractéristiques sont donc préconisées pour réduire les pertes par ruissellement.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/453315/original/file-20220321-14810-ts4bmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/453315/original/file-20220321-14810-ts4bmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/453315/original/file-20220321-14810-ts4bmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/453315/original/file-20220321-14810-ts4bmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/453315/original/file-20220321-14810-ts4bmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/453315/original/file-20220321-14810-ts4bmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/453315/original/file-20220321-14810-ts4bmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/453315/original/file-20220321-14810-ts4bmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Lupin blanc.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Lupinus_albus#/media/Fichier:Lupinus_albus_000_223_259_O.jpg">Jean-Claude Echardour/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Plusieurs espèces et variétés, adaptées aux faibles teneurs disponibles en phosphore ou moyennement exigeantes (comme le lupin blanc), augmentent la longueur de leurs racines, la densité de poils absorbants et s’associent avec des champignons symbiotiques (les mycorhizes) afin de répondre à l’hétérogénéité spatiale du phosphore dans le sol, améliorant l’exploration de ce dernier et son absorption.</p>
<h2>Miser sur la complémentarité</h2>
<p>Les microorganismes du sol, et plus particulièrement du sol adhérant aux racines, sont capables d’améliorer la disponibilité du phosphore.</p>
<p>Ils existent ainsi des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2452219822000064">bactéries qui minéralisent le phosphore organique</a> (peu disponible) grâce à l’activité de leurs enzymes (appelées phosphatases ou phytases) ou qui solubilisent des formes non disponibles.</p>
<p>Des champignons peuvent participer à cette mobilisation en exsudant de petites molécules organiques prenant la place du phosphore fixé (bloqué) sur les constituants du sol. Ces phénomènes microbiologiques sont donc à exploiter pour recycler le phosphore stocké dans les sols. Lorsque le sol ne présente pas ces fonctions microbiologiques, ces micro-organismes peuvent être appliqués au niveau des graines semées afin de rechercher ce service d’amélioration de la disponibilité du phosphore.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/conversation-avec-le-biologiste-edward-farmer-ce-que-parvient-a-faire-une-plante-est-absolument-fabuleux-103464">Conversation avec le biologiste Edward Farmer : « Ce que parvient à faire une plante est absolument fabuleux »</a>
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<p>Certaines espèces et variétés cultivées – comme la féverole, la vesce velue, la lentille – présentent des caractéristiques particulières au niveau de leurs racines pour augmenter la disponibilité du phosphore et son prélèvement. Ces caractéristiques ont été mises en évidence au cours de la dernière décennie et constituent aujourd’hui une base de connaissances pour composer des cultures favorisant cette disponibilité et donc son recyclage au sein de l’agroécosystème.</p>
<p>Cependant, la « super plante » <a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/1365-2435.13823">qui mobiliserait du phosphore dans le sol n’existe pas</a> : les végétaux ne peuvent mobiliser tout à la fois les caractéristiques morphologiques, symbiotiques et chimiques nécessaires à cette fin. Ce sont, par exemple, les plantes avec des racines plus épaisses (comme la féverole et la lentille ou des graminées) et présentant une plus faible longueur qui s’associent avec les champignons mycorhiziens engagés dans l’exploration du sol. Les plantes avec une longueur de racines élevées et fines (comme la phacélie, le trèfle d’Alexandrie, l’avoine rude) seront moins associées avec ces champignons et libéreront donc moins d’exsudats favorisant la disponibilité du phosphore.</p>
<p>Penser la complémentarité à l’échelle d’une communauté végétale cultivée semble donc s’imposer.</p>
<h2>Associer les cultures</h2>
<p><a href="https://nph.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/nph.12778">Plusieurs études</a> ont mis en évidence le rôle des cultures composées de plusieurs espèces ou variétés dans l’amélioration rapide de la disponibilité du phosphore au sein des agroécosystèmes ; diversité des variétés, association de deux cultures récoltées, cultures en relais et cultures compagnes (implantées pour fournir certains services).</p>
<p>L’intégration de cultures intermédiaires, implantées entre deux cultures pour couvrir le sol et éviter les pertes en azote et la pollution de l’eau, <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11104-020-04584-3">composées d’espèces efficaces pour acquérir le phosphore</a> constitue une des pratiques pouvant augmenter la disponibilité du phosphore. Ces cultures absorbent une quantité de phosphore ensuite libérée lors de la minéralisation de leurs résidus, bénéficiant à la culture suivante et permettant la réduction d’apport de fertilisant phosphaté.</p>
<p>Il s’agira désormais de combiner l’utilisation des ressources en phosphore renouvelables présentes à l’échelle du territoire et le développement de cultures et variétés répondant aux exigences des filières agricoles et à l’amélioration de la disponibilité du phosphore dans les sols.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/177101/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Trinsoutrot Gattin a reçu des financements dans le cadre de projets de la Région Normandie et de projets européens. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Nicolas Honvault a reçu des financements de l'ANRT dans le cadre d'une convention de doctorat CIFRE avec le groupe coopératif agricole et agroalimentaire Vivescia. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>David Houben et Michel-Pierre Faucon ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Certaines plantes et micro-organismes peuvent aider à accroître la disponibilité du phosphore, essentiel à la productivité végétale, dans les sols cultivés.Michel-Pierre Faucon, Enseignant-chercheur en écologie végétale et agroécologie - Directeur à la recherche UniLaSalle Beauvais, UniLaSalleDavid Houben, Enseignant-chercheur, science du sol, UniLaSalleIsabelle Trinsoutrot Gattin, Directrice Unité de recherche Agroécologie, UniLaSalleNicolas Honvault, Post doctorant, agroécologie, UniLaSalleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1759012022-03-01T20:12:51Z2022-03-01T20:12:51ZIndustrie nucléaire : le grand jeu géopolitique<p>L’invasion de l’Ukraine par la Russie et la <a href="https://www.leparisien.fr/international/guerre-en-ukraine-5-minutes-pour-comprendre-ce-qui-se-joue-a-tchernobyl-25-02-2022-DXDFMYBS2ZCXFN5BGGGN54UH5Q.php">prise rapide de Tchernobyl</a> ont mis un coup de projecteur sur le secteur nucléaire ukrainien.</p>
<p>Stratégiques pour Kiev, les 15 réacteurs en fonction fournissent encore la moitié de la production électrique ukrainienne. Tandis que le pays exploite ses ressources en uranium, il n’a pas les capacités industrielles pour les transformer en combustibles nécessaires pour alimenter ses centrales de technologie soviétique.</p>
<p>Suite à la révolution de 2014, le gouvernement ukrainien a <a href="https://www.kernd.de/kernd-wAssets/docs/fachzeitschrift-atw/2015/atw2015_03_kirst_vver_fuel.pdf">cherché à rompre sa dépendance</a> à l’importation de combustible de Russie. Cette stratégie est partiellement couronnée de succès : en 2021, <a href="https://www.neimagazine.com/news/newswestinghouse-increases-fuel-supplies-to-ukraine-8160077">6 des 15 réacteurs étaient fournis par des combustibles produits par l’Américain Westinghouse</a> dans son usine suédoise de Västerås.</p>
<p>Avant l’Ukraine, suite aux manifestations de janvier 2022 au Kazakhstan, la presse s’était fait l’écho de <a href="https://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/crise-au-kazakhstan-menace-sur-l-uranium-et-le-nucleaire-mondial_2165654.html">craintes concernant la sécurité d’approvisionnement</a> en combustible de l’industrie nucléaire ; le Kazakhstan concentre <a href="http://www.world-nuclear.org/information-library/nuclear-fuel-cycle/mining-of-uranium/world-uranium-mining-production.aspx">41 % de la production mondiale d’uranium</a>.</p>
<p>À l’inverse du pétrole ou du gaz, et en dehors des <a href="https://bit.ly/3HaNwhL">questions de prolifération</a>, le nucléaire est fréquemment présenté comme <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2211467X20300444">épargné par les risques géopolitiques</a>.</p>
<p>La faible part de l’uranium dans le coût de l’électricité, de <a href="https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/EzPublish/20140527_rapport_cout_production_electricite_nucleaire.pdf">l’ordre de 5 % à 7 %</a>, limiterait sa sensibilité aux aléas politiques. La répartition des réserves, identifiées dans <a href="https://www.oecd-nea.org/jcms/pl_52718/uranium-2020-resources-production-and-demand">52 pays</a>, préserverait de tout risque de dépendance. De plus, la densité énergétique de l’uranium permettrait de constituer des stocks de combustibles.</p>
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<figcaption><span class="caption">Vidéo expliquant le cycle du combustible nucléaire. (IAEA/Youtube, 2022).</span></figcaption>
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<h2>Le rôle clé de la Russie et de la Chine</h2>
<p>Les reconfigurations de la filière révèlent les limites de cette analyse, comme le souligne le <a href="https://www.iris-france.org/wp-content/uploads/2020/12/OSFME-Rapport-5-VF-avec-biographie.pdf">rapport « Les stratégies nucléaires civiles de la Chine, des États-Unis et de la Russie »</a> de l’Observatoire de la sécurité des flux et des matières énergétiques paru en septembre 2020.</p>
<p>La croissance des publications par les <em>think tanks</em> français (<a href="https://www.iris-france.org/wp-content/uploads/2020/12/OSFME-Rapport-5-VF-avec-biographie.pdf">IRIS</a>, <a href="https://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/merlin_petits_reacteurs_2019.pdf">IFRI</a>, <a href="https://www.frstrategie.org/sites/default/files/documents/publications/recherches-et-documents/2020/202014-2.pdf">FRS</a>) et anglophones (<a href="https://www.csis.org/analysis/changing-geopolitics-nuclear-energy-look-united-states-russia-and-china">CSIS</a>, <a href="https://www.iiss.org/blogs/analysis/2018/12/geopolitics-nuclear-energy">IISS</a>, <a href="https://carnegieendowment.org/2018/05/14/future-of-nuclear-power-in-china-pub-76311">Carnegie</a>) témoigne également de cette prise de conscience. Et tous s’attardent sur le rôle structurant de la Chine et de la Russie.</p>
<p>L’industrie nucléaire russe a été <a href="https://www.academia.edu/download/30296429/foir3049.pdf">réorganisée en 2007</a> par Vladimir Poutine dans une unique société, Rosatom. L’objectif était double : atteindre 45 % d’électricité nucléaire dans le mix national en 2050, mais surtout, créer un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2211467X17300305">géant tourné vers l’export</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/plus-de-trois-decennies-apres-tchernobyl-la-russie-joue-cranement-la-carte-nucleaire-159574">Plus de trois décennies après Tchernobyl, la Russie joue crânement la carte nucléaire</a>
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<p>Côté chinois, la filière s’est <a href="https://academic.oup.com/jwelb/article/13/1/23/5818940?login=true">structurée autour de trois groupes</a> – la China National Nuclear Corporation, la China General Nuclear Power Corporation et la State Power Investment Corporation. Cette organisation a nourri des <a href="https://www.cambridge.org/core/books/abs/policy-regulation-and-innovation-in-chinas-electricity-and-telecom-industries/capability-upgrading-and-catchup-in-civil-nuclear-power-the-case-of-china/3ADDC51E436AA6C386AB2AB9497ED818">rivalités à l’international</a>, en dépit des tentatives d’apaisement du gouvernement : fondation d’une coentreprise pour déployer un réacteur commun, division du monde en zone d’intervention.</p>
<p>Russes et Chinois ont rempli le vide laissé par le retrait des anciennes puissances industrielles, États-Unis en tête. Dans ce pays, <a href="https://www.aspeninstitute.org/wp-content/uploads/2017/02/2016-Nuclear-Energy-Forum-1-30-17.pdf">l’effondrement du marché intérieur</a> et le renforcement des réglementations sur la non-prolifération ont marqué le tissu industriel. Deux entreprises, Westinghouse et General Electrics-Hitachi, disposent de réacteurs à la vente.</p>
<h2>Le Kazakhstan, cœur de l’industrie uranifère</h2>
<p>Les réserves mondiales d’uranium restent importantes, <a href="https://www.oecd-nea.org/jcms/pl_52718/uranium-2020-resources-production-and-demand">estimées à 8 millions de tonnes</a>, soit 135 années de la consommation annuelle (sur la base de 2020). Toutefois, le recul des prix depuis 2011, tombant sous les 90 $/kg avant la crise du Covid, a recentré l’attention sur quelques pays disposant de ces ressources à faible coût.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1220987251485806592"}"></div></p>
<p>Cette dynamique a fait du Kazakhstan, qui détient 31 % des réserves mondiales exploitables à moins de 80 $, le cœur de l’industrie uranifère.</p>
<p>Le secteur états-unien est la première victime de ces prix. Depuis 2014, la <a href="https://sgp.fas.org/crs/nuke/R45753.pdf">production d’uranium y a été divisée par 24</a>, rendant le pays dépendant à 94 % des importations. Poussée par le lobbying des États uranifères républicains (Wyoming, Texas et Nebraska), l’administration Trump a publié en avril 2020 un <a href="https://www.energy.gov/sites/default/files/2020/04/f74/Restoring%20America%27s%20Competitive%20Nuclear%20Advantage_1.pdf">plan pour contrer l’influence chinoise et russe</a> en quatre points : création de réserves à partir des mines américaines, prolongement des quotas sur l’achat d’uranium russe à 20 % des importations, interdiction d’importation d’uranium transformé de Chine et de Russie, suppression des réglementations limitant l’ouverture de mines. La victoire des Démocrates en 2021 et les divergences sur le nucléaire au sein du parti ont stoppé son application.</p>
<h2>L’Afrique au centre des convoitises</h2>
<p>Les <a href="https://www.files.ethz.ch/isn/185558/diisreport2014-19.pdf">réserves russes</a> sont importantes (8 % des gisements mondiaux), mais seuls 6 % sont exploitables à moins de 80 dollars. De fait, la production (2846 t en 2021) ne permet ni de couvrir les besoins intérieurs (5000 t), ni de répondre aux ambitions d’exportations (20 000 t).</p>
<p>La <a href="https://www.ndc.nato.int/research/research.php?icode=584">stratégie d’expansion russe</a> repose donc sur le développement d’exploitations à l’étranger, via Uranium One, filiale de Rosatom. Si le Kazakhstan reste l’unique source, <a href="https://uranium1.com/upload/iblock/365/36550a33c6649bed14a59494a6de94a6.pdf">Uranium One</a> a fait de l’Afrique, et particulièrement de la Tanzanie, une zone de développement prioritaire.</p>
<p>Cette orientation pourrait créer des tensions avec la Chine, dont la <a href="https://www.files.ethz.ch/isn/178281/RP2014-03_Uranium-China_Patton-Schell_cve_1703_web.pdf">consommation d’uranium</a> représente 15 % du total mondial. L’approvisionnement chinois suit la <a href="https://www.belfercenter.org/sites/default/files/legacy/files/chinasaccesstoruraniumresources.pdf">stratégie des « trois tiers »</a> visant à augmenter la production nationale, acquérir des ressources à l’étranger et acheter sur le marché. Mais la faiblesse de ses ressources ne lui permet que de couvrir 20 % des besoins.</p>
<p>La filière conduit une stratégie de rachat de mines à l’étranger <a href="https://www.sipri.org/publications/2013/sipri-policy-papers/africa-and-global-market-natural-uranium-proliferation-risk-non-proliferation-opportunity">prioritairement en Afrique</a>. Si la Chine s’est d’abord dirigée vers le Niger, les <a href="https://ctc.usma.edu/china-uranium-comparative-possibilities-agency-statecraft-niger-namibia/">efforts</a> se sont depuis portés sur la Namibie où l’industrie uranifère est entièrement contrôlée par les industriels chinois depuis 2019.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"903921375206887424"}"></div></p>
<h2>Comment Rosatom est devenu incontournable</h2>
<p>Pour rappel, les centrales ne s’alimentent pas d’uranium, mais de combustibles dont la production change selon la technologie des réacteurs. Ceux à eau légère, qui constituent <a href="https://pris.iaea.org/PRIS/WorldStatistics/OperationalReactorsByCountry.aspx">85 % du parc mondial</a>, nécessitent trois étapes de fabrication : la conversion de l’uranium, l’enrichissement et la fabrication des assemblages. Cinq pays (France, Chine, Canada, Russie et États-Unis) contrôlent la conversion. Le risque de dépendance y est limité par les <a href="https://world-nuclear.org/information-library/nuclear-fuel-cycle/conversion-enrichment-and-fabrication/conversion-and-deconversion.aspx">surcapacités structurelles</a>, seuls 55 % des moyens étant mobilisés.</p>
<p>Il en va de même pour l’<a href="http://www.world-nuclear.org/information-library/nuclear-fuel-cycle/conversion-enrichment-and-fabrication/uranium-enrichment.aspx">enrichissement</a>, réalisé dans 13 pays, et dont le taux d’utilisation n’était que de 86 % en 2020.</p>
<p>Rosatom est devenu le principal acteur de la production de combustible, dominant la conversion (35 % des parts du marché) ainsi que l’enrichissement (36 %). C’est toutefois <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2211467X17300305">dans l’exportation de combustibles assemblés</a> que son influence est la plus sensible. Un réacteur sur six dans le monde consomme des assemblages russes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"909175890596302850"}"></div></p>
<p>Cette position résulte de l’existence d’un marché captif auprès des <a href="https://mitpress.universitypressscholarship.com/view/10.7551/mitpress/9780262515788.001.0001/upso-9780262515788-chapter-6">exploitants de réacteurs de technologie soviétiques et russes</a>, appelés VVER. En 2019, 100 % de l’électricité nucléaire produite en Hongrie, en Slovaquie, en République tchèque, en Bulgarie et en Arménie était générée avec du combustible russe.</p>
<p>Ce contrôle constitue-t-il un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2211467X16300372">risque géopolitique</a> ?</p>
<p>L’Américain Westinghouse a développé des assemblages pour réacteurs VVER dès les années 1990 et a agrandi son usine de fabrication suédoise pour répondre aux <a href="https://digital.lib.washington.edu/researchworks/handle/1773/33531">demandes des exploitants ukrainiens</a>.</p>
<p>Mais ces solutions de diversification se heurtent à des obstacles techniques. Westinghouse a connu plusieurs défaillances décourageant les nouveaux importateurs. L’adaptation des combustibles aux caractéristiques de chaque réacteur limite les possibilités de changement rapide de fournisseur. Il en va de même pour les processus d’obtention de licence d’exploitation. La faible concurrence sur ce marché constitue un enjeu majeur, particulièrement au regard des exportations à venir.</p>
<h2>Les enjeux stratégiques de l’exportation des réacteurs</h2>
<p><a href="https://www.sipri.org/publications/2019/eu-non-proliferation-and-disarmament-papers/russias-nuclear-energy-exports-status-prospects-and-implications">Rosatom est le premier exportateur mondial de centrales</a> et contrôle 30 % du marché. Cette réussite relève d’une <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/15387216.2017.1396905">diplomatie nucléaire proactive</a> épaulée par un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301421518308231">réseau commercial implanté dans 60 pays</a>.</p>
<p>Mais sa principale force réside dans la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301421518304245">capacité à proposer des solutions de financement</a>. Le modèle dit <a href="https://digital.lib.washington.edu/researchworks/handle/1773/42155">« Build, Own, Operate »</a> (BOO), appliqué à Akkuyu (Turquie), en est le paroxysme. Ici, Rosatom construit la centrale, en devient le propriétaire et l’exploite en se remboursant par la vente d’électricité.</p>
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<figcaption><span class="caption">Centrale d’Akkuyu en Turquie : Poutine et Erdogan affichent leur « amitié ». (Euronews/Youtube, 2021).</span></figcaption>
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<p>La Chine reste loin derrière. Face au <a href="https://www.mdpi.com/2071-1050/10/6/2086">retard pris sur les objectifs d’extension</a> du parc national, l’export est devenu un impératif pour les industriels chinois. À ce jour, la Chine n’a vendu que quatre tranches en dehors de ses frontières, au Pakistan, et les contrats espérés dans les pays de la Belt and Road Initiatives <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301421516305031">sont loin d’être concrétisés</a>.</p>
<p>Les <a href="https://accf.org/wp-content/uploads/2017/03/ACCF_China_paper_03.pdf">tensions avec l’administration Trump</a> ont ralenti les projets européens, à l’image de la Roumanie, où le gouvernement a retiré sous pression américaine la participation chinoise au projet de Cernavoda à l’été 2019.</p>
<p>Les prochaines années verront ainsi se tenir des débats grandissants sur l’avenir du nucléaire, à mesure que les réacteurs existants vieilliront. Comme tout système énergétique, le nucléaire n’est pas épargné d’enjeux géopolitiques. Parallèlement aux questions économiques et environnementales, ces éléments devront informer les décisions.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/175901/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les recherches ayant mené à cet article ont été financées par l’Observatoire de la sécurité des flux et des matières énergétiques de l’Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS). </span></em></p>Le nucléaire civil est fréquemment présenté comme épargné par les risques géopolitiques. Mais l’actualité et les reconfigurations de la filière révèlent les limites de cette analyse.Teva Meyer, Maître de conférences en géopolitique et géographie, Université de Haute-Alsace (UHA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1764272022-02-14T18:13:19Z2022-02-14T18:13:19ZAu Québec, le travail dans les mines est-il une option d’avenir pour les femmes ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/446297/original/file-20220214-126317-19lnjx5.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C2%2C1382%2C954&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Deux femmes « mineurs » chez iamgold. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.youtube.com/watch?v=x6pjym7NKjI">Capture d'écran / Youtube</a></span></figcaption></figure><p>Le film québécois <em>Souterrain</em> a été projeté en avant-première pour tous les mineurs ayant participé au tournage, le 29 septembre 2020 dans la mine à ciel ouvert Sygma à Val d’Or. Il a été présenté au Festival du film de Whistler (Colombie britannique) le 20 décembre suivant, où il a reçu le prix de la meilleure réalisation. Mais en raison de la pandémie ce film, très attendu au Canada, n’est sorti sur les écrans que le 26 janvier dernier.</p>
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<p>La réalisatrice, dont le <a href="https://www.filmsquebec.com/films/chien-de-garde-sophie-dupuis">premier film <em>Chien de Garde</em></a> a été doublement primé au Festival International du film de Saint-Jean-de-Luz en 2018 – prix de la meilleure mise en scène et prix de la meilleure interprétation pour les deux vedettes du film –, est petite-fille et fille de mineur. Sophie Dupuis est née à Val d’Or, ville industrielle de l’ouest du Québec dans la région de l’Abitibi-Temiscamingue, région minière, située sur les rives de l'étang Demontigny. A côté de l’or, des minerais tels que le cuivre, le zinc, l’argent et le plomb y sont également exploités. La ruée vers l’or de ce Klondike québécois s’opère surtout dans les années 1920-1950, en direction de la faille de Cadillac, autour des mines de Lamaque à Val d’Or, exploitées entre 1934 et 1989, et du « village de compagnie » Bourlamaque. Dans ces années, une cinquantaine de mines sont ouvertes dans la région, dont quelques quarante sont des mines d’or. En Abitibi-Temiscamingue de nombreuses mines d’or sont toujours exploitées par des compagnies telles que Mine Canadian Malartic, LaRonde, Westwood, employant <a href="https://propair.ca/fr/blogue/propair/l-abitibi-temiscamingue-une-terre-de-mines-de-richesses-a-decouvrir-/23/68384">toutes entre 500 et 1000 employés, ainsi que de plus petites à l’image de Goldex</a>.</p>
<p>Avec <em>Souterrain</em>, Sophie Dupuis rend hommage aux mineurs dont elle a partagé le quotidien. Son film se déroule en partie au fond d’une mine d’or moderne, mécanisée, dans laquelle travaillent, à quelques 450 mètres de profondeur, des <a href="https://www.lesaffaires.com/dossier/exploration-miniere-plongee-sous-terre/a-3-km-de-profondeur-dans-la-mine-d-or-laronde/582249">équipes réunissant des hommes et quelques femmes</a>. Confrontés quotidiennement au danger que présente, aujourd’hui encore, le travail dans les galeries, ces mineurs canadiens entendent la détonation d’une explosion, là où certains des travailleurs ont été affectés ce jour-là. Solidaires de leurs camarades un groupe de sauveteurs, composé de jeunes mineurs et de mineurs plus expérimentés, tous très bien équipés, est immédiatement formée pour aller à la recherche de potentielles victimes, sous la conduite d’une femme faisant preuve d’une grande autorité.</p>
<h2>Les femmes de plus en plus nombreuses</h2>
<p>En effet de plus en plus de femmes travaillent, désormais, dans le secteur minier au Québec. Elles représentent environ 17 % de la main-d’œuvre, plus particulièrement dans des postes de gestion, mais étonnamment elles sont 4 % dans les différents métiers liés à la production. En 2016, le Conseil d’Intervention pour l’Accès des Femmes au Travail (CIAFT) a publié à Montréal une étude sur les <a href="https://ciaft.qc.ca/wp-content/uploads/2017/01/ciaft_femmesmetierssecteurminierqc_pdf.pdf"><em>Femmes de métiers dans le secteur minier : un portrait, les principaux défis et pistes d’action pour l’industrie québécoise</em></a>. Face au manque de main-d’œuvre masculine, les compagnies minières ont commencé à faire circuler l’idée selon laquelle « travailler dans les mines est aussi pour les femmes ».</p>
<p>Jessica Salois-Rivard, est arpenteuse principale – c’est-à-dire chef d’équipe – <a href="https://inmq.gouv.qc.ca/publication/84/portraits-metiers-professions-mines">à la compagnie Westwood, près de Rouyn-Noranda</a>. Elle y est employée depuis six ans. Le matin, elle descend au fond pour coordonner le travail des arpenteurs. C’est elle qui décide de la répartition de l’équipe dans les galeries, qui organise le temps de travail, les déplacements, qui veille à la sécurité et à la santé de ses camarades. L’après-midi elle remonte à la surface, où elle est notamment en charge de la commande du matériel et d’autres tâches administratives et de gestion.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/6il8NtiLp0A?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Dans les mines du Québec les métiers du fond ont beaucoup évolué, selon Jessica l’arpenteuse. Il y a désormais beaucoup plus de « métiers de tête » : des ingénieurs, des électriciens, des mécaniciens et des soudeurs… C’est ainsi que des femmes bien formées peuvent être amenées à manœuvrer du matériel lourd. Ceci a amené les compagnies à faire des recherches dans le domaine de l’ergonomie, voire à repenser les normes en matière de sécurité et de santé au travail, mais également à être plus conciliantes dans l’aménagement des horaires afin de permettre aux mères de famille d’avoir à la fois une vie de famille et des perspectives de carrière professionnelle dans les mines.</p>
<h2>Un danger toujours présent</h2>
<p>Au regard de l’histoire du travail dans les mines, ces femmes font-elles avancer la cause féministe en affirmant ainsi leur capacité à exercer des métiers depuis longtemps dévolus aux hommes ? Au contraire, leur retour dans les galeries souterraines marque-t-il un recul de la protection des travailleurs exerçant leur métier dans des conditions dangereuses ? Telles sont deux des questions que pose, très utilement, ce film. </p>
<p>Il faut se souvenir que, même si les conditions de travail dans les mines ont beaucoup évolué depuis l’époque où les lois interdisant le travail des femmes et des enfants au fond ont été votées dans les grands pays industrialisés le danger, comme l’illustre bien <em>Souterrain</em>, est toujours présent et les catastrophes toujours menaçantes. Dans <em>Germinal</em>, Emile Zola met en scène de toutes jeunes femmes, comme Catherine Maheu et ses camarades à la tâche dans les galeries souterraines du Voreux. En effet, celles que l’on appelle <a href="https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/hercheur/39647">« les hercheuses »</a> roulent de lourdes berlines pleines de minerai jusqu’au plan incliné, destiné à faciliter l’évacuation du charbon.</p>
<p>Ce type de travail harassant effectué par des femmes à des centaines de mètres sous terre, dans des conditions de promiscuité et d’insécurité va être, dans les dernières décennies du XIX<sup>e</sup> siècle, de plus en plus considéré comme une forme d’exploitation inacceptable. La saint-simonienne Pauline Viardot se fait l’écho de cette indignation dans <em>La Revue indépendante</em>, dirigée par George Sand et Louis Viardot, dès juillet 1842. Les témoignages recueillis semblent montrer que la vie que mènent les femmes dans les mines est « contraire aux lois de la pudeur, cette seconde nature de la femme » et qu’elles sont parfois contraintes de travailler jusqu’aux premières douleurs de l’enfantement.</p>
<p>En France, le travail des femmes au fond a été <a href="https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/Loi_du_19_mai_1874.pdf">légalement et définitivement interdit grâce au vote de la loi du 19 mai 1874</a>. Néanmoins, certaines compagnies ont, jusque dans les années 1880, au mépris de la loi, continué à les faire descendre dans les entrailles de la terre. En Belgique, il faudra attendre près d’une décennie de plus – loi du 13 décembre 1889 – <a href="http://www.carhop.be/revuescarhop/wp-content/uploads/2017/03/Introduction-au-dossier-1.pdf">pour voir les femmes interdites de labeur au fond</a>. Faut-il aujourd’hui revenir sur cette législation, protectrice des femmes, au nom de l’égalité entre les sexes ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/176427/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En affirmant leur capacité à exercer des métiers depuis longtemps dévolus aux hommes, les femmes « mineurs » nous donnent à réfléchir.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1730292021-12-22T20:23:48Z2021-12-22T20:23:48ZL’exploitation minière menace les populations autochtones isolées de la région amazonienne du Brésil<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/435098/original/file-20211201-13-1vx3wd0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1356%2C665&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Membres d’une tribu isolée au Brésil.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Gleison Miranda/FUNAI/Survival</span></span></figcaption></figure><p>Les terres indigènes de l’Amazonie brésilienne abritent non seulement le plus grand nombre de peuples indigènes isolés au monde, mais aussi l’une des plus grandes réserves minérales mondiales encore inexploitée. C’est pourquoi elles se trouvent au centre des intérêts de développement du pays depuis des décennies.</p>
<p>Le président actuel du Brésil, Jair Bolsonaro, a l’intention d’autoriser l’exploitation de ces ressources minérales par le biais d’un projet de loi (<a href="https://www.camara.leg.br/proposicoesWeb/fichadetramitacao?idProposicao=2236765">PL191/2020</a>) qui <a href="https://doi.org/10.1525/elementa.427">met en danger les forêts et les sociétés uniques qu’elles protègent</a>.</p>
<p>Bien que l’exploitation minière ne soit pas encore autorisée sur les terres autochtones, les <a href="https://doi.org/10.1017/S0376892917000376">sociétés minières demandent des permis depuis des années</a>. Il existe actuellement plus de <a href="https://doi.org/10.1016/j.gloenvcha.2021.102398">3 600 projets de mines sur les terres indigènes</a> où vivent des groupes isolés, pour une superficie d’exploitation totale de plus de 10 millions d’hectares – une superficie comparable à celle de l’Islande. En outre, l’Agence nationale des mines du Brésil s’efforce d’attirer davantage d’investisseurs, et l’intérêt de ceux-ci devrait augmenter avec l’approbation de la loi PL191/2020.</p>
<p>Malheureusement, les zones riches en minéraux se trouvent précisément dans les régions les plus reculées, où les populations autochtones sont restées isolées. Ainsi, il y a <a href="https://doi.org/10.1016/j.gloenvcha.2021.102398">plus de projets miniers sur les terres indigènes avec des groupes isolés</a> que sur celles sans groupes isolés.</p>
<h2>Des groupes isolés à haut risque</h2>
<p>Si le projet de loi PL191/2020 est adopté, les opérations minières toucheront <a href="https://doi.org/10.1016/j.gloenvcha.2021.102398">25 terres indigènes abritant 43 groupes isolés</a>, avons-nous révélé dans une étude récemment publiée. La situation est particulièrement préoccupante pour 21 groupes, dont les terres sont visées par la majorité des projets.</p>
<p>Dans certains cas, l’exploitation minière laisserait peu de place à la sauvegarde des droits des autochtones. Par exemple, dans les terres indigènes Xikrin do Rio Catete et Baú, les projets miniers occuperaient environ 80 % du territoire. Or, le projet de loi ne prévoit aucune limite, ce qui pourrait amener à atteindre ce taux d’occupation sans problème pour les groupes miniers.</p>
<p>La situation est critique en terre indigène Yanomami, un vaste territoire à la frontière avec le Venezuela sur lequel vivent sept groupes isolés. Les concessions minières y couvrent 3,3 millions d’hectares, une superficie équivalente à celle de la Catalogne. Son impact s’ajouterait à <a href="https://news.mongabay.com/2020/11/the-amazons-yanomami-utterly-abandoned-by-brazilian-authorities-report/">l’invasion massive de chercheurs d’or illégaux</a> à laquelle est confronté le territoire, qui a déjà causé des centaines de morts indigènes <a href="https://doi.org/10.1126/science.abc0073">suite à la propagation du Covid-19</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/435300/original/file-20211202-23-11v5105.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/435300/original/file-20211202-23-11v5105.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/435300/original/file-20211202-23-11v5105.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1000&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/435300/original/file-20211202-23-11v5105.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1000&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/435300/original/file-20211202-23-11v5105.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1000&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/435300/original/file-20211202-23-11v5105.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1257&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/435300/original/file-20211202-23-11v5105.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1257&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/435300/original/file-20211202-23-11v5105.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1257&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Carte des terres indigènes en Amazonie brésilienne. Les couleurs indiquent le nombre de groupes autochtones isolés (en haut, en bleu) et le nombre de demandes d’exploitation minière (en bas, en rouge) enregistrées dans chacun d’eux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Modifié de Villén-Pérez et coll. (2021)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<h2>Les effets de l’exploitation minière sur les peuples autochtones</h2>
<p>L’exploitation minière affecte les populations autochtones isolées de plusieurs façons :</p>
<ul>
<li><p>La déforestation qu’elle entraîne réduit le territoire utilisable par ces groupes et augmente les risques de contacts indésirables. Il est parfois avancé que l’exploitation minière a un effet très localisé et donc non pertinent. Cependant, le développement généré autour d’un projet minier entraîne un impact environnemental important. En fait, 9 % de la déforestation en Amazonie est directement ou indirectement <a href="https://doi.org/10.1038/s41467-017-00557-w">due à l’exploitation minière</a>.</p></li>
<li><p>La pollution des rivières qu’elle cause est l’un des plus grands problèmes environnementaux et sanitaires de l’Amazonie. En raison de l’exploitation intensive de l’or, ses habitants sont parmi les plus exposés au mercure dans le monde. Il en va probablement de même pour les populations autochtones isolées, qui doivent elles aussi être touchées par les graves problèmes de santé causés par le mercure.</p></li>
<li><p>L’arrivée massive de travailleurs a des répercussions multiples. La croissance démographique peut épuiser les ressources alimentaires des forêts et des rivières de la région, compromettant ainsi les moyens de subsistance des communautés isolées. En outre, les non-autochtones apportent avec eux des maladies contre lesquelles les peuples isolés ne sont pas immunisés. Un bref contact peut <a href="https://doi.org/10.1038/srep14032">décimer leurs populations</a>, comme cela s’est produit à plusieurs reprises dans le passé. Et même en l’absence de contact, les populations isolées peuvent être affectées par une incidence accrue des maladies transmises par les moustiques, comme le paludisme.</p></li>
</ul>
<h2>Les connaître pour les protéger</h2>
<p>Il existe 120 groupes indigènes isolés <a href="https://acervo.socioambiental.org/acervo/publicacoes-isa/cercos-e-resistencias-povos-indigenas-isolados-na-amazonia-brasileira">enregistrés dans l’Amazonie brésilienne</a>. La Fondation nationale des Indiens (FUNAI) est l’agence gouvernementale chargée de les étudier et de les protéger. Elle est bien consciente de l’existence de certains groupes isolés, qui ont été localisés depuis le sol ou depuis les airs, même si, pour la plupart d’entre eux, cependant, il n’y a que quelques indications de leur existence.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/435302/original/file-20211202-15-13v1uei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/435302/original/file-20211202-15-13v1uei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/435302/original/file-20211202-15-13v1uei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1008&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/435302/original/file-20211202-15-13v1uei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1008&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/435302/original/file-20211202-15-13v1uei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1008&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/435302/original/file-20211202-15-13v1uei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1267&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/435302/original/file-20211202-15-13v1uei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1267&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/435302/original/file-20211202-15-13v1uei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1267&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Groupes indigènes isolés sur des terres indigènes en Amazonie brésilienne. Les cercles indiquent le nombre de demandes d’exploitation minière enregistrées sur chaque terre indigène.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Modifié de Villén-Pérez et al. (2021)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Le travail de la FUNAI est essentiel pour la protection de ces sociétés isolées. Sur toutes les terres indigènes, celles où se trouvent des groupes isolés connus <a href="https://doi.org/10.1016/j.gloenvcha.2021.102398">enregistrent moins d’intérêts miniers</a> que celles qui n’en ont pas. Les grandes entreprises minières préfèrent opérer là où il n’y a pas de groupes extérieurs connus susceptibles de compromettre leur réputation.</p>
<p>En outre, des groupes isolés connus pourraient entraver l’obtention des licences nécessaires. Le texte actuel du PL191/2020 ;autoriserait les opérations minières sur les terres indigènes où se trouvent des groupes isolés, mais pas sur les territoires exclusivement fréquentés par ces derniers. Par conséquent, les groupes isolés moins bien étudiés représentent un risque moindre pour l’obtention d’une licence, car les limites de leurs territoires sont totalement inconnues.</p>
<p>Aujourd’hui, de nouveaux groupes isolés sont encore enregistrés à un rythme plus élevé que celui des études. Mais la situation s’est aggravée depuis l’arrivée au pouvoir de l’administration Bolsonaro en 2019 : la <a href="https://www.socioambiental.org/sites/blog.socioambiental.org/files/arquivos/povos_isolados_cdh_onu_relatorio_2020.pdf">FUNAI est en cours de démantèlement</a> et fait face à des réductions de personnel et de budget paralysant son activité.</p>
<p>Or, il est urgent d’étudier tous les groupes isolés afin de les protéger. Le fait de bien les connaître dissuadera les entreprises d’investir sur leurs terres et fournira des informations sur leur localisation qui se révéleront essentielles si le projet de loi PL191/2020 est adopté. Pour y parvenir, le gouvernement brésilien doit remettre la FUNAI dans les conditions opérationnelles et financières nécessaires.</p>
<h2>Comment éviter leur disparition</h2>
<p>De nombreux peuples indigènes isolés de l’Amazonie brésilienne sont conscients de l’existence d’autres sociétés. Certains ont même subi des violences et des épidémies liées au contact dans le passé. Forts de cette expérience, ils ont choisi d’exercer leur droit à l’isolement comme stratégie de survie.</p>
<p>Le Brésil possède l’une des politiques les plus anciennes et les plus solides en matière de protection des droits des populations autochtones isolées. Cependant, les caractéristiques de l’Amazonie rendent sa mise en œuvre parfois difficile. Ces difficultés de gouvernance ont été exacerbées par la situation politique actuelle, qui rend impossible de garantir une coexistence sûre entre les opérations minières et les populations isolées.</p>
<p>Des <a href="https://doi.org/10.1016/j.gloenvcha.2021.102398">travaux scientifiques</a> indiquent que le gouvernement brésilien devrait investir dans l’étude de la localisation et de la vulnérabilité des groupes indigènes isolés connus en Amazonie brésilienne. Dans le même temps, il doit éviter toute augmentation de la pression de développement qui mettrait en danger les populations autochtones isolées vivant sur son territoire. Faute de quoi, des peuples, des sociétés et des cultures uniques pourraient s’éteindre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/173029/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sara Villén Pérez reçoit des financements de la Communauté de Madrid (Ayuda Atracción Talento Investigador 2017-T2/AMB-6035), de la Communauté de Madrid en collaboration avec l'Université d'Alcalá (projet CM/JIN/2019-003), de l'Université d'Alcalá (projet CGB2018/BIO-032), et du ministère de la Transition écologique et du Défi démographique à travers la Fondation Biodiversité (projet 2020/00085/001).</span></em></p>Au Brésil, un projet de loi proposé par Jair Bolsonaro risque d’étendre les zones d’exploitation minière dans des régions isolées d’Amazonie et de mettre en péril 43 groupes indigènes.Sara Villén Pérez, Investigadora postdoctoral en Ecología (Programa Talento de la Comunidad de Madrid), Universidad de AlcaláLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1719842021-12-13T18:20:30Z2021-12-13T18:20:30ZLes mineurs marocains, derniers damnés des Houillères<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/436995/original/file-20211210-91139-18h59ef.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C4%2C2971%2C2989&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">« Arrivée de main-d'œuvre marocaine à l'aéroport de Lesquin, 9 janvier 1976 »
</span> <span class="attribution"><span class="source"> Centre Historique Minier (prêt ANMT)</span></span></figcaption></figure><p><em>Le ventre des hommes</em>, roman de Samira El Ayachi <a href="https://www.babelio.com/livres/Ayachi-Le-ventre-deshommes/1339150">qui vient de paraître aux éditions de L’Aube</a>, entraîne le lecteur dans les dernières années de l’exploitation du charbon dans le Bassin du Nord-Pas-de-Calais. Le sort des ouvriers marocains, recrutés sur place dans leur pays par un envoyé spécial des Houillères pour sortir les <a href="https://www.cairn.info/revue-plein-droit-2009-2-page-35.htm">dernières tonnes de houille du bassin</a> est, avec la figure du père de la narratrice – un homme « aux yeux tirés », « aux yeux pliés par l’inquiétude » – au cœur de ce récit.</p>
<p>De nombreuses questions liées à la place dévolue aux travailleurs immigrés au sein de la société française y sont abordées. À quel travail sont-ils astreints ? À quel type de contrat ont-ils droit ? Quels logements leur sont attribués ? Comment peuvent-ils lutter contre les conditions qui sont leur sont faites ? Pourtant en filigrane tout au long du livre, comme une note d’espoir, il y a la présence de l’école de la République. Celle qui donne aux enfants de ces travailleurs, qui savent s’en saisir, les clefs d’un autre monde !</p>
<h2>Les mineurs marocains</h2>
<p>Dans les années 1960, puis 70 – lors du premier choc pétrolier, – les Houillères du Nord Pas-de-Calais font appel, chaque année, à plusieurs milliers de travailleurs marocains pour contribuer à l’extraction du charbon. Autre personnage très présent dans le roman, Félix Mora, un <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2020/06/25/le-tampon-vert-tu-partais-en-france-le-rouge-tu-retournais-au-bled-sur-la-piste-de-felix-mora-l-homme-qui-a-embauche-des-milliers-de-travailleurs-marocains-pour-les-mines-francaises_6044081_3212.html">ancien officier de l’armée française qui parle l’arabe et qui est au cœur d’un processus de recrutement commencé dès 1949</a>. Pour le compte des Houillères, il se rend à de très nombreuses reprises dans le sud du Maroc où il sélectionne, dans la vallée du Drâa, d’où est originaire le père d’Hannah l’héroïne du roman de Samira El Ayachi, dans le Tafilalet, ou encore dans la région de Ouarzazate, des milliers de paysans pauvres. Entre 1949 et 1977, <a href="https://www.septentrion.com/fr/livre/?GCOI=27574100455490">78 000 Marocains seront recrutés pour travailler dans les mines</a>. Mora ne s’est-il pas vanté à la télévision d’avoir « regardé dans le blanc des yeux un million de candidats au moins » ?</p>
<p>Par petites touches, puis dans un long historique, <em>Le Ventre des hommes</em> rappelle les conditions dans lesquelles ces Marocains âgés de plus de 21 ans, pesant au minimum 55 kilos, sans infirmité et ayant une très bonne acuité visuelle, sont arrivés dans le bassin houiller. Ils ne sont pas tous venus en avion, comme voudrait le faire accroire la « com’ » des Houillères, mais en camion ou en car jusqu’à Casablanca, puis par bateau jusqu’à Marseille ou Bordeaux, enfin en train à leurs frais jusqu’à Douai. Logés dans des « baraques » de quelques mètres carrés ou dans des camps pour célibataires, car ils doivent arriver seuls, <a href="https://www.septentrion.com/fr/livre/?GCOI=27574100455490">ils vivent isolés des autres mineurs</a>.</p>
<p>Ils ne savent donc pas qu’ils ne bénéficient <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00277/le-regime-minier.html">d’aucun des avantages du Statut du mineur, décrété en juin 1946</a>. Ils n’ont, en effet, ni contrat de travail ni logement, « à vie ». Ils sont loin de se douter que les mines sont sur le point de fermer et qu’ensuite il leur sera proposé des incitations matérielles pour retourner dans leur pays. Ils ont pourtant travaillé des années au fond, à moins 1300 mètres de profondeur, ne ménageant pas leur peine. Réputés courageux, <a href="https://www.persee.fr/doc/homig_1142-852x_1995_num_1192_1_2550">ils sont affectés aux tâches les plus pénibles et les plus dangereuses</a>, au bowettage – percement des galeries – et à l’abattage du minerai, là où les risques de développer une maladie respiratoire sont les plus importants. La silicose rôde ! À la fin du roman en document annexe l’auteur a cru bon, à juste titre, d’inclure les quatre pages de « Conseils à la maîtrise », rédigés par la Direction du Personnel des Houillères du Bassin du Nord et du Pas-de-Calais (HBNPC) à propos du « comportement [à avoir] envers les ouvriers nord-africains ».</p>
<p>Ils insistent, en conclusion, sur le caractère contradictoire des Nord Africains, qui ont d’une part « un complexe d’infériorité » parce qu’ils ne parlent pas le français et ne sont pas au fait des techniques du travail souterrain et, d’autre part, font preuve « d’une grande fierté [au sujet] de leur race et de leur origine. En agissant sur ce dernier sentiment, vous pouvez obtenir beaucoup de ces ouvriers » !</p>
<p>En 1980 et 1987, les <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00279/revendications-d-anciens-mineurs-marocains-pour-faire-valoir-leurs-droits.html">mineurs marocains se mettent en grève</a>. La CGT fait circuler des tracts en arabe et encourage ces travailleurs à la rejoindre. Chez Hannah, de mystérieuses réunions se tiennent « avec des Français bien habillés », de l’argent provenant de collectes circule. Des Marocains « s’organisent entre eux contre les Houillères » et veulent récupérer les droits qu’ils n’ont pas eus, quitte à aller « jusqu’à La Haye ». Mais d’autres, sans espoir, décident d’aller chercher du travail en Belgique et, certains, de rentrer au Maroc, comme le propose leur employeur. Le retour au pays s’organise, ironie du sort, sous la houlette de celui qui avait été « chercher du muscle » pour les mines du Nord-Pas-de-Calais, des années auparavant : Félix Mora. Pour la plupart, ce sera le désenchantement !</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/WgLESF4ZnjM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>En février 2013, après trois décennies de combat, la justice donnera raison à dix mineurs marocains – appartenant à <a href="https://www.atmf.org/?p=2734">l’Association des Mineurs marocains du Nord-Pas-de-Calais (AMMN)</a> – qui se disaient victimes de discrimination. 40 000 euros seront versés à chacun d’entre eux. Cette victoire n’est que symbolique, au regard des 78 000 autres qui n’ont jamais rien obtenu !</p>
<h2><em>Germinal</em> et l’école de la République</h2>
<p>En France ces hommes, « réduits à leurs bras », sont discriminés dans leur travail, comme dans leur vie quotidienne. Nombre d’entre eux se sentent déclassés. Certains n’étaient-ils pas, à l’image du père d’Hannah, chef de village avant de partir. Ajoutée à cela, leur difficulté à s’exprimer dans une langue autre qu’un mélange de « françarabe et de picard » ! Avec leurs familles, ils ne s’intègrent donc qu’à la marge.</p>
<p>Mais il y a, pour les enfants de ces mineurs marocains, l’enfance dans le bassin minier. Car si leurs femmes vivent entre elles, n’apprenant que quelques bribes de français, leurs petits côtoient d’autres jeunes, dont les pères sont aussi venus de pays étrangers pour travailler dans les mines. Dans le roman, comme dans la vraie vie, le coron joue un rôle social et familial important, tant il constitue un îlot isolé du reste du monde, mais dans le même temps un lieu dans lequel règne une grande promiscuité. Autour d’eux, les enfants voient les terrils, qui leur sont familiers, tout comme les chevalements qui dominent le paysage. Ils savent intuitivement qu’ils marchent sur la veine dans laquelle leurs pères abattent le charbon.</p>
<p>Dans le bassin il y a des écoles, qui ne sont plus depuis longtemps celles mises en place par le patronat, dirigées par des membres de congrégations religieuses. L’école de la République est ouverte à tous les enfants qui y découvrent, parfois avec délectation, les livres, la littérature. Il y a cette institutrice, qui apprend à Hannah les mots de la langue française et lui offre son premier ouvrage. Plus tard, pousser les portes de la Bibliothèque municipale aura pour elle quelque chose de magique, d’autant que la bibliothécaire lui laisse prendre plus de livres que règlementairement autorisé.</p>
<p>Dans le coron, l’école et la place s’appellent Emile Zola ! Hannah fait très vite une overdose de <em>Germinal</em> : le matin, le midi, le soir, en livre, comme en film. Longtemps, pour elle, c’est juste un roman de « gueux en galère », qui la renvoie à « son habit de malheureuse » ! « Et puis, un soir, quelque chose se passe. [Elle] ouvre Zola. [Elle] li[t] Zola. <em>Germinal</em> dans les bras. Et [elle] pleure ». Elle sera « la première fille de la cité des mines » à partir loin, pour poursuivre ses études, ce qui lui vaudra d’être interviewée sur « la réussite scolaire des enfants du bassin minier » !</p>
<p>Longtemps, ces mineurs marocains parleront du retour au pays, où ils rêvent de se construire une maison, à Zagora par exemple. Certains le feront, mais elle restera souvent vide et inachevée. Puis, avec la deuxième génération qui n’a connu que la France, le Maroc ce sera juste pour les vacances !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171984/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>De nombreuses questions liées à la place dévolue aux travailleurs immigrés au sein de la société française sont abordées dans « le ventre des hommes », de Samira El Ayachi.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1642732021-09-27T14:42:17Z2021-09-27T14:42:17ZDans les mines du Congo, des femmes enceintes et des enfants vivent dangereusement<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/423365/original/file-20210927-21-1if13uz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=10%2C5%2C988%2C658&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des femmes et des enfants, dans le village de Lukonga, em République démocratique du Congo. Déplacés par les conflits armés, vulnérables, ils se retrouvent à travailler dans des mines de fortune, dans des conditions très précaires.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>À l’abri des regards, en République démocratique du Congo, des femmes, parfois enceintes, et des enfants, travaillent dans des mines « informelles », dans des conditions dangereuses, inhalant des produits toxiques, pour des salaires de misère.</p>
<p>Pourtant, au moment de son indépendance en 1960, les secteurs minier et agricole faisaient de la République démocratique du Congo (RDC) <a href="http://congomines.org/reports/1162-les-ressources-naturelles-en-republique-democratique-du-congo-un-potentiel-de-developpement">« le deuxième pays industrialisé d’Afrique »</a>.</p>
<p>Soixante et un an plus tard, ses ressources naturelles sont exploitées en grande partie artisanalement et anarchiquement, et <a href="https://www.radiookapi.net/2015/10/15/actualite/economie/rdc-8-habitants-sur-10-vivent-sous-le-seuil-de-pauvrete-absolue">au moins 80 % de la population vit dans la pauvreté absolue</a>. Ces <a href="https://www.investindrc.cd/fr/Ressources-naturelles-et-profil-geographique">richesses</a> mettent en évidence des défis structurels majeurs et exacerbent les conflits et les inégalités sociales.</p>
<p>Je suis chercheur affilié au Centre for Human Rights and Legal Pluralism de l’Université McGill. Mes travaux portent sur le lien entre les ressources naturelles et l’activisme des groupes armés en RDC. Dans une <a href="https://theconversation.com/une-centaine-de-groupes-armes-seme-le-chaos-au-congo-130100">précédente publication dans <em>La Conversation Canada</em></a>, j’ai expliqué les motivations et les sources de financement de la centaine des groupes armés qui sèment le chaos à l’est de la RDC. Cette fois, je veux mettre en lumière la situation des femmes et des enfants qui participent à l’extraction de l’or, qui est un de moyens que ces groupes armés utilisent pour financer leurs activités.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/423342/original/file-20210927-25-12cwqwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/423342/original/file-20210927-25-12cwqwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/423342/original/file-20210927-25-12cwqwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/423342/original/file-20210927-25-12cwqwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/423342/original/file-20210927-25-12cwqwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/423342/original/file-20210927-25-12cwqwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/423342/original/file-20210927-25-12cwqwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des soldats des Forces de défense congolaises inspectent les lieux d’une attaque près de la ville d’Oicha, à 30 km de Beni, en République démocratique du Congo, en juillet 2021. Des centaines de groupes armés sèment le chaos en RDC et utilisent l’exploitation de mines d’or pour se financer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Al-hadji Kudra Maliro)</span></span>
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<h2>Une législation innovante</h2>
<p>En 2018, la RDC a profondément modifié son code et son règlement miniers pour, entre autres, bonifier l’encadrement des exploitants artisanaux, améliorer les droits de la personne et assurer les meilleures conditions de travail dans les sites miniers.</p>
<p>Alignée sur les normes internationales pour assurer la traçabilité et la certification des minerais, la <a href="http://congomines.org/reports/1845-journal-officiel_-reglement-minier-revise-par-le-decret-n-18-024-du-08-juin-2018-textes-coordonnes">nouvelle législation minière</a> interdit le travail des femmes enceintes et des enfants dans les mines.</p>
<p>L’obligation des exploitants miniers de restaurer le milieu après extraction, la diminution de la période de stabilisation fiscale de dix à cinq ans et l’annulation des anciennes conventions minières sont également prévues, si bien que toutes les entreprises minières sont désormais soumises au code minier.</p>
<h2>40 kg sur les dos des femmes enceintes</h2>
<p>Mais dans la réalité, sur le terrain, les conditions de travail dans les sites miniers demeurent préoccupantes. La présence de nombreuses femmes, parfois enceintes, ainsi que d’enfants à la recherche des minerais est remarquable dans les sites miniers du Sud-Kivu, notamment. Cette main-d’œuvre est appréciée par les exploitants miniers parce qu’elle est peu coûteuse. Mais ces femmes et ces enfants mettent leur vie et leur santé en péril.</p>
<p>Les femmes préparent la nourriture pour les creuseurs, transportent les bagages, puisent l’eau, pilent les pierres (quartz), lavent le sable. De nombreuses, parmi elles, s’adonnent à la prostitution.</p>
<p>Elles reçoivent un dollar américain pour un sac de 40 kg transporté sur leur dos, sur une distance de près de quatre kilomètres. La même somme est payée pour une bassine d’environ 10 Kilos de quartz pilés. Les gérantes des restaurants ou des bistros — y compris celles qui sont commises au lavage des minerais — sont en grande partie autonomes, <a href="https://www.freetheslaves.net/wp-content/uploads/2015/03/KivuReport-web626-FRENCH.pdf">mais non exemptes d’abus sexuels</a>.</p>
<p>Leurs fonds ne suffisent pas à démarrer une activité commerciale et à prospérer. Dans les carrés de Kamituga/Mwenga, notamment dans les sites Calvaire et Nero chanda, l’eau utilisée pour le lavage du sable est réputée polluée de mercure. Ce dernier permet d’extraire rapidement l’or de l’amalgame après le chauffage. Certaines femmes travaillent à perte, car une vaste somme de déchets lavés ne contient pas d’or.</p>
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<span class="caption">Des femmes en plein travail dans le site minier Calvaire à Kamituga, dans le territoire de Mwenga, dans la province du Sud-Kivu, en RDC.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Emmanuel Habasheka</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Contaminées au mercure</h2>
<p><a href="https://www.thelancet.com/pdfs/journals/lanplh/PIIS2542-5196(20)30057-7.pdf">Les travaux dirigés par Donna Mergler</a>, au Canada, en avril 2020, permettent d’affirmer que l’empoisonnement au mercure tue silencieusement les femmes et l’ensemble de la communauté.</p>
<p>Le sol, les rivières y compris les poissons pêchés localement (à Kamituga et dans d’autres zones minières au Sud-Kivu) sont intoxiqués. Plusieurs femmes et filles souffrent de douleurs lombaires et d’infections vaginales chroniques. Elles avortent ou mettent au monde des enfants avec des malformations. D’autres ne sont pas alitées, mais elles souffrent des symptômes liés à ce produit, <a href="https://ici.radio-canada.ca/espaces-autochtones/1699337/mercure-mort-prematuree-grassy-narrows-ontario-ottawa-turtle-mergler-etude">notamment des problèmes neurologiques, de motricité ou encore d’apprentissage</a>.</p>
<p>Les femmes et les filles qui pilent les quartz sont soumises au contrôle systématique à la fin de leur journée de travail, des pratiques qui incluent le toucher vaginal et annal. Elles ont également des problèmes pulmonaires et oculaires associés à l’absence de matériel de protection contre les impacts, et la poussière. Appelées « creuseuses sans bêche », les travailleuses du sexe reçoivent des miettes d’or — poussière d’une valeur de 5 à 10 dollars USD — en échange de leurs services.</p>
<p>Le gain gagné est en grande partie dépensé pour la survie, ou pour l’alcool, la drogue et le maquillage. Elles sont à risque d’avortements, de grossesses non désirées et d’infections sexuellement transmissibles, dont le VIH/sida.</p>
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<img alt="XXX" src="https://images.theconversation.com/files/410682/original/file-20210710-25-1r15jwd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/410682/original/file-20210710-25-1r15jwd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1068&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/410682/original/file-20210710-25-1r15jwd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1068&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/410682/original/file-20210710-25-1r15jwd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1068&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/410682/original/file-20210710-25-1r15jwd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1342&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/410682/original/file-20210710-25-1r15jwd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1342&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/410682/original/file-20210710-25-1r15jwd.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1342&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des femmes surnommées Hulux (4x4) transportent des quartz dans le site minier Calvaire à Kamituga, dans le territoire de Mwenga, au Sud-Kivu, en RDC.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Emmanuel Habasheka</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Des esclaves ignorées</h2>
<p>Les communautés et particulièrement les femmes et les filles sont pour la plupart inconscientes des risques qu’elles encourent, mais surtout, <a href="https://blogs.worldbank.org/fr/voices/dans-le-secteur-minier-les-femmes-unissent-leurs-efforts-pour-ameliorer-leur-situation">elles n’ont pas d’autres choix pour survivre</a>.</p>
<p>Ce sont des personnes vulnérables, des déplacées qui ont abandonné leur milieu de vie en raison de l’insécurité. D’autres ont été expulsées de leurs zones par des instances gouvernementales à la demande des exploitants industriels. Il y a également les filles qui tombent enceintes précocement, les femmes rejetées après avoir été violées par des inconnus, les anciens enfants soldats et les orphelins.</p>
<p><a href="https://reliefweb.int/report/democratic-republic-congo/rapport-mi-parcours-du-groupe-d-experts-sur-la-r-publique-d-2">Selon le récent rapport des experts des Nations-Unies sur le Congo</a>, les groupes armés y compris leurs dépendants et certains militaires du gouvernement exploitent illicitement des ressources naturelles, notamment l’or et le coltan, dans les zones des conflits. La ruée vers ces richesses est actuellement l’une des raisons de <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20191025-rdc-raisons-violences-minembwe-kivu">la « guerre par rébellions interposées entre le Rwanda et le Burundi »</a> dans les moyens et hauts plateaux d’Uvira, Mwenga et Fizi au Sud-Kivu.</p>
<h2>Des indicateurs catastrophiques</h2>
<p>En RDC, <a href="https://www.cd.undp.org/content/rdc/fr/home/sustainable-development-goals/goal-5-gender-equality.html">41 % des femmes sont analphabètes et occupent des emplois non rémunérés</a>. Plus de <a href="https://zoom-eco.net/developpement/rdc-le-taux-danalphabetisme-seleve-a-291-gouvernement-et-unesco-mobilises-contre-ce-fleau/">7 millions d’enfants et d’adolescents n’étudient pas</a> et il y a près de 50 ans <a href="https://www.cncd.be/IMG/pdf/cwbci_afrique2.pdf">que le taux brut de scolarisation pour le secondaire stagne autour de 20 %</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/423341/original/file-20210927-15-18kiwos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/423341/original/file-20210927-15-18kiwos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/423341/original/file-20210927-15-18kiwos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/423341/original/file-20210927-15-18kiwos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/423341/original/file-20210927-15-18kiwos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/423341/original/file-20210927-15-18kiwos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/423341/original/file-20210927-15-18kiwos.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des gens ayant fuit Goma à la suite d’une irruption volcanique attendent la distribution d’aliments, en mai 2021, à Sake. La pauvreté extrême et le manque d’éducation font de la RDC un des pays avec l’indice humain de développement le plus faible de la planète.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Moses Sawasawa)</span></span>
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</figure>
<p>Plusieurs adolescents et adolescentes ont des charges énormes, même si la loi interdit à toute personne âgée de moins de 18 ans de travailler. Plusieurs sont déjà parents. <a href="https://www.radiookapi.net/emissions-2/2008/07/11/kinshasa-celebration-de-la-journee-mondiale-de-la-population">Seulement 9 % des Congolais recourent à la contraception</a> pour éviter ou limiter les naissances, l’accès aux contraceptifs est compliqué pour les célibataires et <a href="https://globalpressjournal.com/africa/democratic-republic-of-congo/drc-married-women-receive-preferential-access-birth-control/fr/">l’autorisation du mari est requise pour les femmes mariées</a>.</p>
<h2>Un État défaillant</h2>
<p>Le besoin de se nourrir et de supporter leurs dépendants pousse donc les plus vulnérables à rejoindre les sites miniers ou les groupes armés actifs dans la zone. Aucune loi ne détermine à quelle période de la grossesse la femme ne peut travailler dans un site minier. Elle est notamment muette sur la possibilité d’exiger le test de grossesse pour recruter une femme dans un site minier.</p>
<p>Certaines femmes enceintes camouflent leur état. D’autres recourent à des compromis (corruption, avances sexuelles, retenue de la rémunération, corvée) et parviennent à travailler jusqu’à l’accouchement, sans carte de creuseur. Les visites des sites miniers prévues par la loi sont quasi absentes.</p>
<p>Les quelques inspecteurs formés par l’Organisation mondiale de migration sont insuffisants et n’ont pas des ressources nécessaires pour couvrir tous les chantiers miniers.</p>
<p>Il est évident que l’exploitation artisanale des ressources naturelles de la RDC a des incidences négatives sur la sécurité et les droits fondamentaux de la personne, particulièrement des femmes et des enfants. Les coutumes, les lois, la défaillance du secteur éducatif et de l’autorité de l’État congolais en sont les principales causes. Les groupes armés et la crise sanitaire due à la Covid-19 exacerbent la situation.</p>
<p>Les réformes législatives en vigueur ne sont pas réellement mises en application. Elles ne permettent pas aux personnes vulnérables de s’affranchir de la servilité dans les sites miniers.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/164273/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valentin MIGABO ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des centaines de groupes armés sèment le chaos en RDC et se financent par l’exploitation des mines. Ils utilisent des femmes et des enfants comme main-d’œuvre bon marché, au péril de leur santé.Valentin MIGABO, Searcher, McGill UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1671982021-09-05T16:55:10Z2021-09-05T16:55:10Z« Germinal », le destin d’un roman culte<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/419037/original/file-20210902-27-1jqk14y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=100%2C9%2C1497%2C1053&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'oeuvre de Zola reste un chef-d'oeuvre inégalé, qui continue à inspiré le cinéma et la littérature. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=18702290.html">Allociné</a></span></figcaption></figure><p>Au moment où le roman de Zola, <em>Germinal</em>, est présenté au public français pour la première fois sous la forme d’une <a href="https://www.allocine.fr/series/ficheserie_gen_cserie=25257.html">minisérie télévisée en six épisodes</a> (coproduction franco-italienne bientôt sur France 2), il faut se souvenir qu’avant même d’être publié en version livre chez Charpentier en 1885, c’est en format feuilleton qu’il paraît entre le 26 novembre 1884 et le 25 février 1885 dans le quotidien <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b90129825.item"><em>Gil Blas</em></a>). C’est là que les lecteurs se sont familiarisés avec les aventures de Catherine et de Lantier.</p>
<h2>Les Houilleurs de Polignies</h2>
<p>« Siècle du journal », le XIX<sup>e</sup> siècle voit fleurir au rez-de-chaussée des premières pages des quotidiens, ainsi que dans les pages intérieures des hebdomadaires et des revues, des feuilletons qui font rage parmi les amateurs, de plus en plus nombreux, de littérature populaire. Le premier d’entre eux – <em>La Comtesse de Salisbury</em> d’Alexandre Dumas – commence à paraître en 1836 <a href="https://gallica.bnf.fr/html/und/presse-et-revues/la-comtesse-de-salibury?mode=desktop">dans le quotidien <em>La Presse</em> d’Émile de Girardin</a>).</p>
<p>C’est grâce à ce type de lecture que les Français découvrent progressivement le monde de la mine, d’autant qu’ils ne peuvent plus guère ignorer l’importance économique de l’industrie minière qui, dans les années 1870, emploie quelque 110 000 personnes. Peut-être certains ont-ils lu le tout premier « roman de la mine », <a href="https://www.laporterie.com/produit/houilleurs-de-polignies-les-par-elie-berthet/"><em>Les Houilleurs de Polignies</em> d’Élie Berthet</a>)- auteur d’une centaine de romans et premier à avoir osé situer son récit dans une mine –, paru dans la « Bibliothèque variée » chez Hachette en 1866.</p>
<p>Zola, depuis 1862, est employé par cette grande maison d’édition où il est rattaché au service de la publicité nouvellement créé. Dans ce cadre, il est chargé de rédiger, pour le <em>Bulletin du libraire et de l’amateur de livres</em>, les notices des livres à paraître. En janvier 1866, la note qu’il écrit sur <em>Les Houilleurs de Poliginies est élogieuse</em> :</p>
<blockquote>
<p>« Monsieur Elie Berthet sait admirablement dramatiser ses récits […], il nous fait descendre dans une mine de houille et il traite […] avec beaucoup de talent ces scènes de désespoir et d’angoisse qui se passent dans les entrailles du sol […] le livre est plein de très curieux détails sur la vie et les mœurs des houilleurs. C’est un monde particulier et étrange dont le romancier a tiré parti en conteur pittoresque et intéressant […]. La partie dramatique est habilement mêlée aux détails techniques et rien n’est plus attachant que les amours d’Amélie et de Léonard, se déroulant au milieu des péripéties des houilleurs conduits pas un coquin qui finit par expier ses crimes ».</p>
</blockquote>
<h2>Aux origines de <em>Germinal</em></h2>
<p>Près de vingt plus tard, le père des Rougon-Macquart se rend à Denain (Nord) du 23 février au 2 mars 1884, à la fosse Renard de la Compagnie des Mines d’Anzin, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fosse_Renard#/media/Fichier:Denain_-_Fosse_Renard_(C).jpg">où une grève s’est déclarée</a>). Là, en compagnie du député socialiste de Valenciennes Alfred Giard qui le fait passer pour son secrétaire, il descend au fond. Comme on peut le découvrir dans ses <em>Carnets d’enquête</em>, <a href="https://www.persee.fr/doc/colan_0336-1500_1987_num_72_1_982_t1_0118_0000_4">publiés dans la collection Terre humaine chez Plon</a>, Émile Zola « a revêtu la chemise, la culotte, ou cule, la veste, le jupon, il a coiffé le béguin bleu et le chapeau de cuir dur, ou barrette, il est allé chercher la lampe individuelle et il est entré dans la « berline » de descente », devenant ainsi l’espace d’un jour, un mineur parmi les mineurs, risquant sa vie à leurs côtés !</p>
<p>Fort de cette expérience et de ses abondantes lectures, notamment techniques et médicales, il s’est sans aucun doute souvenu du roman de Berthet qui contenait déjà tous les topoï, tous les stéréotypes, de ce qui deviendra un quasi-genre littéraire : le « roman de la mine ».</p>
<p>Comme dans <em>Germinal</em>, et comme dans quasiment tous les autres récits de ce type, on y retrouve : une foule de travailleurs exploités, une catastrophe souterraine, un sauvetage difficile, une ducasse (fête régionale), un mouvement social. Mais aussi un groupe de personnages, souvent assez manichéens, comprenant un jeune ingénieur, un ouvrier frondeur, un patron en difficulté, une jeune fille - ouvrière ou fille du patron de la mine, selon que le feuilleton soit rose, ou noir comme <em>Germinal</em> qui se place d’emblée sur le terrain de la lutte entre le Capital et le Travail.</p>
<p>Zola est loin d’être un précurseur puisqu’entre 1866 et 1885 pas moins de dix romans et nouvelles, portant en partie ou en totalité sur la mine et les mineurs, ont été publiés. Mais, aucun d’entre eux ne provoquera une bombe éditoriale, un séisme littéraire, comparable à celui causé par le plus célèbre volet des Rougon-Macquart.</p>
<h2>Germinal, le roman des mineurs du XXᵉ siècle</h2>
<p>En moins de deux décennies la corporation des mineurs s’est approprié <em>Germinal</em>, faisant sien le roman naturaliste. En témoigne la présence d’une délégation de « gueules noires », venus de Denain vêtus de leurs habits de travail avec leur fanfare aux obsèques de l’écrivain. <a href="https://www.google.fr/search?q=mineurs+denain+obs%8Fques+Zola+paris&newwindow=1&sxsrf=AOaemvLzquXcviGmUWdG16PYH5Aa">Ils accompagneront le convoi jusqu’au cimetière de Montmartre</a>. Comme le note un journaliste de <em>L’Aurore</em> dans l’édition du 6 octobre 1902 : « Ils portent une boîte en bois blanc, dans laquelle se trouve une couronne, qu’ils viennent déposer sur la tombe de celui qui chanta leurs misères » et de la foule rassemblée au cimetière, monte des cris : « Germinal, Germinal » !</p>
<p>A l’autre bout du siècle, en 1992-1993, lors du tournage du long métrage de Claude Berri, un certain nombre d’anciens mineurs – le dernier puits dans la région ayant fermé à Oignies (Pas-de-Calais) le <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00211/la-derniere-remontee-des-mineurs-a-la-fosse-9-9-bis-d-oignies.html">21 décembre 1990</a> – sont invités par le metteur en scène à jouer leur propre rôle. Nombre d’entre eux semblent avoir été particulièrement motivés par les scènes de protestation collective, de manifestations et de grève ! Un petit groupe de participants a même composé un texte en vers offert à l’acteur Renaud, <a href="https://www.alamyimages.fr/photo-image-germinal-germinal-etienne-lantier-renaud-m-catherine-maheu-judith-henry-legende-locale-sony-1994-52698379.html">admiré dans le rôle de Lantier</a>.</p>
<p>Notons également la création, au cours du tournage, d’une « Association des amis de Germinal et anciens mineurs », ainsi que l’augmentation du nombre d’exemplaires du roman vendus dans les librairies du nord de la France.</p>
<p>Mais l’engouement pour <em>Germinal</em> ne se limite pas aux anciens membres du « Peuple de la nuit ». Nombreuses sont les personnalités politiques de tous bords à se rendre sur le lieu du tournage. Le culte de <em>Germinal</em> atteindra même les sommets de l’État. François Mitterrand, réputé être fin connaisseur de littérature, se voit même présenter par Claude Berri le scénario de son film ! La minisérie réalisée par David Hourrègue et Julien Lilti, qui se sont autorisé quelques libertés avec le récit originel – ajoutant quelques personnages – relance à son tour l’intérêt du grand public pour cette œuvre. Mais <em>Germinal</em>, chef-d’œuvre inégalé, a-t-il toujours la même place dans l’univers mental de nombreux Français ?</p>
<h2>De la mine à l’écriture</h2>
<p>Pour les hommes du charbon, ce roman, signé par l’un des plus grands écrivains français, entré au Panthéon dès 1908, a donné à leur corporation la dignité à laquelle ils aspiraient. Certains d’entre eux – environ 70 mineurs francophones – qui se réclament de <em>Germninal</em>, ont été conduits sur le chemin de l’écriture, quasiment toujours autobiographique. Mais pour la plupart, comme pour l’écrivain-mineur belge Constant Malva (1903-1969) : « Zola a tout dit, il s’est servi magistralement de tous les éléments que la mine peut fournir pour un roman » !</p>
<p>Ce « roman-culte du fond » a, selon Henri Mitterand grand connaisseur de l’œuvre de Zola, su cristalliser « toutes les virtualités tragiques, épiques et symboliques » du monde de la mine. Si Zola n’a pas su anticiper une catastrophe aussi terrible que celle qui s’est produite à Courrières (Pas-de-Calais) le 10 mars 1906, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Catastrophe_de_Courri%C3%A8res#/media/Fichier:Courri%C3%A8res_1906_LeJ.jpg">au cours de laquelle 1099 mineurs trouvent la mort</a>, il a senti toute la violence contenue dans les bassins miniers, à son époque.</p>
<p>Sa description de la sauvage émasculation de Maigrat l’épicier qui refuse de faire crédit aux familles de mineurs affamées et révoltés paraît impensable. Pourtant dans la réalité, en 1886 à Decazeville, les houilleurs de cette cité minière défenestrent, dans une scène d’une barbarie inouïe, <a href="https://www.google.fr/search?q=watrin+defenestration&newwindow=1&sxsrf=AOaemvKIUJ8wZQAqvcbplmsqtZn5G_okWg:1630508341442&source=lnms&tbm=isch&sa=X&ved=2ahUKEwjsp_rzhN7yAhVG1hoKHa2dCToQ_AUoAnoECAEQBA&biw=1440&bih=738#imgrc=ZjCX7Xbj5PxiwM">l’ingénieur Watrin</a>, donnant ainsi naissance à l’expression <a href="https://www.cairn.info/revue-entreprises-et-histoire-2009-2-page-149.htm">« watrinade »</a>.</p>
<p>Ce roman naturaliste, qui donné des lettres de noblesse aux « gueules noires », occupe une place à part dans la littérature française. Ses héros de chair et d’os se sont entièrement reconnus dans le portrait de leur vie, s’appropriant l’œuvre avant la mort de son auteur pour s’en réclamer, ensuite, plus d’un siècle durant.</p>
<p>Connu et reconnu dans le monde entier, <em>Germinal</em> a inspiré bien des écrivains, comme <a href="https://www.amazon.fr/Sub-Sole-Baldomero-Lillo/dp/8492491086?asin=1502743779&revisionId=&format=4&depth=1">Baldomero Lillo (1867-1923)</a>, pour ne citer que lui, qui se voulait le Zola chilien, mais également des cinéastes comme <a href="https://www.cinematheque.fr/film/47172.html">Capellani en 1903</a> et Yves Allégret en 1963, qui <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00009/tournage-de-germinal-par-yves-allegret.html">dans son film, intitulé également <em>Germinal</em>,</a> fit jouer Claude Brasseur et Jean Sorel.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/167198/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour les hommes du charbon ce roman, écrit par l’un des plus grands écrivains français, entré au Panthéon dès 1908, a donné à leur corporation la dignité à laquelle ils aspiraient.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1586692021-04-22T12:46:26Z2021-04-22T12:46:26ZL’exploitation minière dans l’espace n’est pas de la science-fiction, et le Canada pourrait y occuper une place de choix<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/396411/original/file-20210421-17-pf8cef.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=25%2C0%2C2880%2C1784&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Falaises dans de la glace ancienne sur Mars.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.nasa.gov/sites/default/files/thumbnails/image/pia24147.jpg">(NASA)</a></span></figcaption></figure><p>En cette époque de <a href="https://www.un.org/fr/un75/climate-crisis-race-we-can-win">crise climatique</a>, l’exploitation minière spatiale est de plus en plus d’actualité. La nécessité d’avoir une <a href="https://www.canada.ca/fr/services/environnement/meteo/changementsclimatiques/plan-climatique/carboneutralite-2050.html">économie carboneutre</a> requiert une augmentation de l’offre de ressources naturelles non renouvelables, telles que les métaux dont on se sert pour <a href="https://www.mining.com/accelerating-cross-border-north-american-integration-of-battery-ev-and-critical-mineral-supply-chains/">fabriquer des batteries</a>.</p>
<p>Cela constitue la toile de fond d’une nouvelle course à l’espace mettant en scène des nations et le secteur privé.</p>
<p>Le Canada est un pays qui mène des <a href="https://financialpost.com/technology/canadas-space-industry-set-for-relaunch-decades-after-its-last-big-achievement">activités spatiales</a>, un chef de file dans <a href="https://www.rncan.gc.ca/nos-ressources-naturelles/mines-materiaux/faits-mineraux-metaux/les-mineraux-et-leconomie/20604">l’exploitation minière</a> et un acteur important de <a href="https://www.carbonbrief.org/the-carbon-brief-profile-canada">l’économie mondiale du carbone</a>. Il se trouve bien placé pour <a href="https://financialpost.com/technology/canadas-space-industry-set-for-relaunch-decades-after-its-last-big-achievement">participer activement</a> au domaine émergent des ressources spatiales.</p>
<p>Cependant, les questions qui se posent dans ce domaine dépassent le cadre du Canada, puisqu’elles concernent l’avenir de l’humanité, sur Terre et dans l’espace.</p>
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<img alt="Une fusée décolle de sa base" src="https://images.theconversation.com/files/392379/original/file-20210329-21-1muls3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/392379/original/file-20210329-21-1muls3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/392379/original/file-20210329-21-1muls3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/392379/original/file-20210329-21-1muls3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/392379/original/file-20210329-21-1muls3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/392379/original/file-20210329-21-1muls3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/392379/original/file-20210329-21-1muls3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une fusée Atlas V de United Launch Alliance décolle de la base de lancement de Cap Canaveral en juillet, en Floride. La mission a envoyé un rover sur Mars pour y chercher des signes de vie et explorer la géologie de la planète.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/John Raoux)</span></span>
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<h2>Forte demande de métaux pour batteries</h2>
<p>Sur Terre, les mesures de lutte contre le réchauffement climatique comprennent le passage à une <a href="http://www.scientifique-en-chef.gouv.qc.ca/impacts/ddr-etre-carboneutre-decembre-2019/">économie carboneutre</a> grâce au développement de parcs de véhicules électriques et à des investissements dans des infrastructures de production d’énergie renouvelable à grande échelle. Pour y parvenir, il faut de grandes quantités de <a href="https://www.mining.com/nickel-cobalt-price-10-charts-show-chinas-grip-on-battery-supply-chain-to-last-decades/">métaux pour batteries</a> (lithium, cobalt, nickel), de <a href="https://www.mining.com/ontario-to-develop-first-critical-minerals-strategy/">minéraux essentiels</a> (cuivre) et de <a href="https://www.mining.com/china-continues-dominance-of-rare-earths-markets-to-2030-says-roskill/">terres rares</a>, à tel point que des analystes des marchés ont mis en garde contre un éventuel <a href="https://www.allnews.ch/content/points-de-vue/mati%C3%A8res-premi%C3%A8res-le-d%C3%A9but-d%E2%80%99un-super-cycle">super-cycle des métaux</a>. Dans un super-cycle, la demande dépasse largement l’offre, ce qui cause une flambée des prix.</p>
<p>C’est pourquoi l’industrie minière cherche activement de <a href="https://www.mining.com/web/rare-metal-mining-goes-to-new-heights-and-depths/">nouvelles possibilités d’exploitation minière</a>. On parle notamment <a href="https://www.mining.com/circular-economics-reprocessing-waste-and-mining/">d’économie circulaire</a> (recyclage et gestion améliorée des déchets miniers), <a href="https://www.mining.com/web/deep-sea-mining-could-destroy-undiscovered-species-says-ocean-panel/">d’exploitation minière en eaux profondes</a> ainsi que dans l’espace. Cette dernière offre des possibilités de grandes retombées, tout en engendrant d’importants défis.</p>
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<img alt="Surface de la planète Mars" src="https://images.theconversation.com/files/392381/original/file-20210329-23-vljp49.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/392381/original/file-20210329-23-vljp49.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/392381/original/file-20210329-23-vljp49.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/392381/original/file-20210329-23-vljp49.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/392381/original/file-20210329-23-vljp49.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/392381/original/file-20210329-23-vljp49.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/392381/original/file-20210329-23-vljp49.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Photo de la surface de Mars prise lors de la mission du rover Persévérance.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(NASA)</span></span>
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<p>Un défi de taille est l’absence d’un cadre réglementaire cohérent pour régir l’exploitation minière dans l’espace. Si le <a href="https://www.unoosa.org/pdf/publications/STSPACE11F.pdf">traité sur l’espace de 1967</a> a été signé par toutes les puissances spatiales et est largement considéré comme le document constitutionnel du droit de l’espace extra-atmosphérique, il présente des lacunes en ce qui a trait à son interprétation.</p>
<p>Le texte stipule qu’aucune nation ne peut s’approprier un corps céleste (comme la Lune), mais il ne parle pas de la possibilité d’en posséder les ressources dérivées.</p>
<p>Les <a href="https://www.mining.com/how-earth-bound-mining-lawyers-think-about-space-mining/">avocats sur Terre qui se penchent sur des projets d’exploitation minière dans l’espace</a> sont appelés à en examiner quatre aspects : la sécurité d’occupation, le régime fiscal, la bancabilité des projets et leur faisabilité. Décortiquons-les.</p>
<h2>1. Sécurité d’occupation</h2>
<p>Dans le domaine minier, la <a href="https://open.uct.ac.za/handle/11427/20801">sécurité d’occupation</a> signifie avoir des droits sûrs et stables tout au long du cycle d’exploitation. Le traité sur l’espace extra-atmosphérique de 1967 n’est pas clair sur la question de la propriété des ressources extraites, et les interprétations varient.</p>
<p>Jusqu’à présent, le <a href="https://theconversation.com/how-luxembourg-is-positioning-itself-to-be-the-centre-of-space-business-120436">Luxembourg</a> et les <a href="https://www.mining.com/obama-boosts-asteroid-mining-signs-law-granting-rights-to-own-space-riches/">États-Unis</a> ont adopté une législation qui permet de revendiquer des ressources extraites, apportant ainsi la sécurité d’occupation <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/espace/le-luxembourg-legifere-sur-l-exploitation-miniere-des-ressources-spatiales_114764">aux sociétés minières spatiales basées dans ces juridictions</a>.</p>
<h2>2. Régime fiscal</h2>
<p>Cette question fait référence au paiement de taxes, de redevances ou autres. C’est ici que le <a href="https://www.unoosa.org/pdf/gares/ARES_34_68E.pdf">traité sur la Lune</a> de 1979 entre en jeu. Seules deux puissances spatiales l’ont signé : l’Inde et l’Australie.</p>
<p>Le rôle que le traité sur la Lune devrait jouer dans le droit de l’espace ne fait pas l’unanimité. <a href="https://theconversation.com/who-owns-space-us-asteroid-mining-act-is-dangerous-and-potentially-illegal-51073">Certains affirment qu’il ne concerne</a> pas les pays non-signataires ; d’autres <a href="https://theconversation.com/who-owns-space-33222">suggèrent l’existence de parallèles</a> avec la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (UNCLOS). Les deux textes font référence au « patrimoine commun de l’humanité ».</p>
<p>UNCLOS a créé un organisme international de réglementation, <a href="https://www.isa.org.jm/">l’Autorité internationale des fonds marins</a>, chargée d’accorder des licences d’exploitation minière en eaux profondes sur la base du paiement de redevances. Ces redevances doivent ensuite être réparties équitablement entre toutes les nations de la planète. Certains plaident pour <a href="https://theconversation.com/all-of-humanity-should-share-in-the-space-mining-boom-57740">qu’un système similaire</a> s’applique à l’espace extra-atmosphérique.</p>
<h2>3. Bancabilité du projet</h2>
<p>Le troisième point, la bancabilité du projet, concerne sa capacité à attirer du financement.</p>
<p>Cela sera déterminé en bonne partie par les deux points précédents : la sécurité d’occupation et le régime fiscal applicable, démontrant une fois de plus la nécessité de s’entendre sur un <a href="https://theconversation.com/ive-always-wondered-could-someone-take-ownership-of-a-planet-or-a-moon-101464">cadre juridique clair</a> avant de se lancer dans l’action.</p>
<h2>4. Faisabilité du projet</h2>
<p>Ce dernier point comporte plusieurs facettes. La faisabilité technique fait actuellement l’objet <a href="https://www.mining.com/luxembourg-to-create-space-resources-centre/">d’une grande attention</a>, car de nombreux travaux de <a href="https://www.mining.com/canadian-space-mining-developer-inks-deal-us-based-moon-express/">recherche et développement</a> sont consacrés à la robotique avancée et aux systèmes automatisés qui seraient nécessaires aux opérations d’exploitation minière dans l’espace.</p>
<p>Les progrès réalisés à ce jour comprennent la <a href="https://www.mining.com/water-from-near-earth-asteroids-could-fuel-space-mining/">découverte de cristaux d’eau sur la Lune</a> et sur <a href="https://theconversation.com/ice-mined-on-mars-could-provide-water-for-humans-exploring-space-83728">Mars</a>, ainsi que la capacité d’utiliser la technologie <a href="https://theconversation.com/want-to-build-a-moon-base-easy-just-print-it-59070">d’impression 3D</a> dans l’espace à des fins de fabrication. Ces percées rendent plus envisageable l’exploitation minière dans l’espace.</p>
<p>Les deux personnes les plus riches du monde étant désormais engagées dans la course à l’espace – <a href="https://www.cnbc.com/2021/01/14/jeff-bezos-blue-origin-aims-to-fly-people-on-new-shepard-by-april.html">Jeff Bezos avec Blue Origin</a>et <a href="https://www.nationalgeographic.fr/espace/elon-musk-dans-7-ans-spacex-pourra-envoyer-des-hommes-sur-mars">Elon Musk avec SpaceX</a> –, nous pouvons nous attendre à une grande accélération technologique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Jeff Bezos se tient devant une toile de fond étoilée" src="https://images.theconversation.com/files/392384/original/file-20210329-23-wou37g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/392384/original/file-20210329-23-wou37g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/392384/original/file-20210329-23-wou37g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/392384/original/file-20210329-23-wou37g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/392384/original/file-20210329-23-wou37g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/392384/original/file-20210329-23-wou37g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/392384/original/file-20210329-23-wou37g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Jeff Bezos dans le cadre du dévoilement de l’atterrisseur lunaire Blue Moon de Blue Origin en mai 2019, à Washington.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Patrick Semansky)</span></span>
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</figure>
<p>La<a href="https://theconversation.com/space-mining-is-closer-than-you-think-and-the-prospects-are-great-45707">faisabilité économique</a>suppose que l’exploitation minière de l’espace soit rentable. La pénurie imminente de ressources naturelles non renouvelables associée aux progrès technologiques et à la <a href="https://www.mining.com/infographic-the-facts-and-figures-that-make-space-mining-real/">richesse minérale époustouflante</a> que recèle un <a href="https://theconversation.com/mining-asteroids-could-unlock-untold-wealth-heres-how-to-get-started-95675">seul astéroïde</a> pourrait bien rendre la chose possible.</p>
<h2>Utilisation pacifique de l’espace</h2>
<p>Un autre aspect justifie la nécessité de conclure des <a href="https://theconversation.com/to-the-moon-and-beyond-4-whats-the-point-of-going-back-to-the-moon-120791">accords internationaux</a> et de coopérer dans le domaine de l’espace : l’utilisation pacifique de l’espace, conformément au traité sur l’espace.</p>
<p>En octobre 2020, huit pays ont signé les <a href="https://theconversation.com/could-corporations-control-territory-in-space-under-new-us-rules-it-might-be-possible-138939">accords Artemis</a>, une entente<a href="https://www.mining.com/web/nasa-seeks-to-set-law-for-space-mining/">pilotée par la NASA</a>. Parmi les pays signataires, on trouve les États-Unis, le Canada, l’Australie et le Luxembourg. <a href="https://www.mining.com/experts-warn-of-brewing-space-mining-war-among-us-china-and-russia/">La Russie et la Chine</a>, qui ont depuis choisi de collaborer entre elles sur des projets spatiaux, figurent parmi les absents notables.</p>
<p>Les questions juridiques relatives à la propriété des ressources spatiales doivent être <a href="https://theconversation.com/lunar-gold-rush-could-create-conflict-on-the-ground-if-we-dont-act-now-new-research-151645">traitées de toute urgence</a> afin d’éviter des guerres spatiales pour les ressources naturelles entre des superpuissances comme les États-Unis, la Russie et la Chine. Cela inclut le <a href="https://theconversation.com/lunar-gold-rush-could-create-conflict-on-the-ground-if-we-dont-act-now-new-research-151645">statut juridique des accords d’Artémis</a>. Idéalement, l’on devrait régler la question avant de se lancer dans l’exploitation minière de l’espace.</p>
<p>Enfin, l’exploitation minière de l’espace soulève certaines questions éthiques, comme celle de savoir si l’on devrait considérer la Lune comme une <a href="https://theconversation.com/can-the-moon-be-a-person-as-lunar-mining-looms-a-change-of-perspective-could-protect-earths-ancient-companion-144848">personne morale</a>, si cette activité va entraîner une nouvelle forme de <a href="https://theconversation.com/elon-musk-releases-details-of-plan-to-colonise-mars-heres-what-a-planetary-expert-thinks-79733">colonisation</a> et comment elle pourrait <a href="https://theconversation.com/lunar-gold-rush-is-about-to-start-and-we-could-exhaust-the-solar-system-in-fewer-than-500-years-117450">mieux servir le bien commun de l’humanité</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/158669/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Elizabeth Steyn ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’exploitation minière de l’espace est peut-être plus proche que vous ne le pensez. Mais il est urgent de régler les questions juridiques relatives à la propriété des ressources spatiales.Elizabeth Steyn, Cassels Brock Fellow and Assistant Professor of Mining and Finance Law (Western Law); Faculty Member of the Institute for Earth and Space Exploration (Western Space), Western UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1569962021-04-07T18:47:08Z2021-04-07T18:47:08ZRares, chers, essentiels : quelle actualité pour les métaux en période de pandémie ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/392246/original/file-20210329-21-13s21yn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=14%2C5%2C1183%2C668&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une mine à ciel ouvert dans le parc minier national de Huangshi, dans la province de Hubei en Chine.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/panoramic-view-open-pit-iron-mine-1880125651">chuyuss, Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Depuis fin 2019, la pandémie liée au virus SARS-CoV-2 remet en cause plusieurs fondamentaux sur nos stratégies et méthodes d’approvisionnement. Certains produits anodins et non stratégiques, tels que les masques ou encore les lits de réanimations, se sont transformés en produits à forts enjeux qui ont créé des tensions importantes dans les chaînes d’approvisionnement. Cette situation montre d’une part qu’un produit, sans enjeux à un moment donné, peut rapidement devenir essentiel et donc très critique, et d’autre part, que de nombreux pays se sont rendu compte des conséquences de leur forte dépendance envers certains pays, notamment la Chine.</p>
<p>Au-delà de la situation sanitaire actuelle et des produits médicaux, des questions se posent plus généralement pour tous les produits critiques, c’est-à-dire nécessaires et essentiels à un pays, dans un contexte de dépendance économique. Avec la transition écologique et la croissance exponentielle des objets connectés, les pays développés ont davantage besoin de métaux rares qu’auparavant pour alimenter les <a href="https://theconversation.com/internet-des-objets-une-dependance-aux-metaux-rares-source-de-grande-vulnerabilite-119194">industries électroniques</a>, proposant des produits tels que des smartphones, ordinateurs ou encore des voitures électriques.</p>
<p>Or, la plupart des pays développés n’ont pas accès à ces métaux rares et doivent donc les approvisionner auprès d’autres pays, <a href="https://www.europe1.fr/emissions/L-edito-eco2/la-chine-durcit-le-ton-sur-les-terres-rares-strategiques-pour-les-armees-du-monde-entier-4025775">notamment la Chine</a> qui aujourd’hui est l’acteur majeur. Ces approvisionnements soulèvent des problèmes <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2020/07/BORTOLINI/61981">géopolitiques</a>, éthiques et environnementaux. Le contexte pandémique que nous connaissons actuellement a eu des conséquences importantes sur ces approvisionnements et a poussé les différents pays à concevoir et mettre en œuvre des stratégies différentes pour les sécuriser autant que possible.</p>
<h2>Quels sont ces métaux ?</h2>
<p>Les <a href="http://www.mineralinfo.fr/page/minerais-metaux-0">métaux rares</a> représentent une quarantaine d’éléments du tableau périodique. Ils sont produits à faibles tonnages et sont nécessaires à un grand nombre d’industries. Leur rareté n’est pas nécessairement due à leur faible teneur dans la croûte terrestre, mais davantage à leur complexité d’extraction. En effet, il faut <a href="http://minesqc.com/fiches-dinformations/quentend-on-par-ressources-minerales-et-reserves-minerales-y-a-t-il-une-difference/">distinguer</a> les réserves, réellement exploitables, et les ressources, c’est-à-dire l’ensemble des gisements contenant les minéraux recherchés dans la croûte terrestre. Les métaux rares sont généralement présents à l’intérieur des minerais classiques. Ils proviennent, pour certains d’entre eux, des mines de zinc, de cuivre ou encore de nickel. On retrouve parmi ces métaux, l’indium, le gallium, le cobalt.</p>
<p>Parmi ces métaux rares, on distingue les fameuses terres rares. Certaines d’entre elles sont très recherchées pour leurs propriétés magnétiques et sont principalement produites et extraites en Chine, pouvant générer des conflits d’ordre géopolitique. Contrairement à ce que leur nom suggère, les terres rares ne sont pas si rares, mais leurs teneurs dans les gisements sont souvent très faibles et elles sont donc difficiles à exploiter.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/391664/original/file-20210325-17-19rgobk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/391664/original/file-20210325-17-19rgobk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/391664/original/file-20210325-17-19rgobk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/391664/original/file-20210325-17-19rgobk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/391664/original/file-20210325-17-19rgobk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/391664/original/file-20210325-17-19rgobk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/391664/original/file-20210325-17-19rgobk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des terres rares. Dans le sens des aiguilles d’une montre, en partant du haut : praséodyme, cérium, lanthane, néodyme, samarium et gadolinium.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Rareearthoxides.jpg">Peggy Greb, USDA/Wikipedia</a></span>
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</figure>
<p><a href="http://www.mineralinfo.fr/page/matieres-premieres-critiques">Les métaux critiques</a> sont ainsi nommés par référence à la situation qui serait la nôtre s’ils venaient à manquer. Ils peuvent être propres à chaque entreprise, État ou région. Parmi ces métaux critiques, on distingue les métaux stratégiques qui sont critiques pour des secteurs à enjeux vitaux. Les industries de la défense et l’énergie utilisent ainsi des métaux qui sont stratégiques, car essentiels à leur activité, par exemple l’uranium, en particulier en France, qui est un métal stratégique pour l’industrie du nucléaire.</p>
<p><a href="https://ec.europa.eu/trade/policy/in-focus/conflict-minerals-regulation/regulation-explained/index_fr.htm">Les minerais de conflit</a> sont des métaux dont une partie – minoritaire – est issue de territoires sous tension. On parle des 3TG (pour Tantale, Tungstène, Tin et l’or) auxquels s’ajoute souvent le cobalt. Ils sont qualifiés « de conflits », car leur exploitation peut participer au financement de groupes armés, ou reposer sur le travail d’enfants ou <a href="https://www.franceinter.fr/monde/l-ue-mettra-t-elle-un-frein-a-l-exploitation-des-ouvriers-qui-extraient-les-minerais-pour-nos-smartphones">travail forcé</a> dans des mines artisanales illégales.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/392202/original/file-20210329-19-1m24y3t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/392202/original/file-20210329-19-1m24y3t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/392202/original/file-20210329-19-1m24y3t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/392202/original/file-20210329-19-1m24y3t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/392202/original/file-20210329-19-1m24y3t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/392202/original/file-20210329-19-1m24y3t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/392202/original/file-20210329-19-1m24y3t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/392202/original/file-20210329-19-1m24y3t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Où sont les terres rares dans le tableau périodique des éléments ?</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/7/7d/Tableau_periodique_terres_rares.svg/1280px-Tableau_periodique_terres_rares.svg.png">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Chacun de ces métaux ou minerais est au cœur d’enjeux actuels forts pour chaque grande région, économie ou pays, comme l’illustrent les questions de terres rares en Chine, de métaux de conflit en Europe et de métaux rares et stratégiques aux USA.</p>
<h2>Pas de tension pour la Chine</h2>
<p>La Chine, premier producteur, extracteur et importateur de terres rares au monde a vu sa <a href="https://www.latribune.fr/opinions/blogs/commodities-influence/avant-l-election-americaine-la-chine-decouple-des-metaux-en-profiteront-860246.html">production légèrement baisser au début de la pandémie</a>, du fait des suspensions d’activités industrielles sur les sites de production, du manque de main-d’œuvre dû à la quarantaine et des problématiques logistiques. Avant cette situation, la Chine utilisait ses unités de transformation de terres rares à moins de 40 % de leur capacité, certaines d’entre elles ayant été fermées les années précédentes suite à des renforcements de contrôle environnemental. Les prix n’ont <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/le-coronavirus-affecte-peu-la-production-chinoise-de-terres-rares.N933309">pas subi de forte augmentation</a> et la demande est toujours présente.</p>
<h2>Tentative d’émancipation des États-Unis</h2>
<p>Les États-Unis avaient déjà décidé de s’émanciper de la Chine pour la <a href="https://www.lesechos.fr/finance-marches/marches-financiers/washington-accelere-ses-investissements-dans-les-metaux-rares-1198605">production de leurs métaux stratégiques</a>. La crise de la Covid-19 a accéléré cette stratégie concernant l’ouverture de mines et la création de sites de transformation. Sous l’administration Trump, cette recherche d’indépendance vis-à-vis de la Chine était une priorité. Depuis l’arrivée de Joe Biden, la Chine menace encore davantage de <a href="https://www.lesechos.fr/monde/enjeux-internationaux/terres-rares-pekin-tente-par-un-nouveau-bras-de-fer-avec-washington-1290788">réduire ses exportations</a> vers les États-Unis, pour cibler et affaiblir <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/02/17/la-bataille-des-terres-rares-passe-par-la-relance-de-la-production-hors-de-chine_6070272_3234.html">l’industrie militaire américaine</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/392203/original/file-20210329-25-bupvdf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/392203/original/file-20210329-25-bupvdf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/392203/original/file-20210329-25-bupvdf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/392203/original/file-20210329-25-bupvdf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/392203/original/file-20210329-25-bupvdf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/392203/original/file-20210329-25-bupvdf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/392203/original/file-20210329-25-bupvdf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le site de Round Top Mountain, au Texas, États-Unis.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/ff/Round_Top_Mountain_Texas.png">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p>En réponse, de forts investissements sont faits, notamment sur certains sites comme celui de <a href="https://www.lefigaro.fr/economie/au-texas-une-montagne-pour-briser-le-monopole-chinois-sur-les-terres-rares-20200716">Round Top Mountain au Texas</a>, qui abriterait 16 des 17 éléments composants les terres rares et 11 des 35 métaux critiques tels que l’uranium et le lithium. Cette montagne, connue comme étant le plus grand gisement de terres rares des États-Unis, pourrait permettre à ce dernier de s’approvisionner en métaux stratégiques pendant <a href="https://lvsl.fr/comment-son-quasi-monopole-sur-les-metaux-rares-permet-a-la-chine-de-redessiner-la-geopolitique-internationale/">130 ans</a>.</p>
<p>Toutefois, la mise en exploitation d’un tel gisement nécessite près d’une vingtaine d’années. La stratégie des Américains concernant ces métaux ne concerne pas uniquement l’extraction, ils misent également beaucoup sur la <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/le-plan-des-etats-unis-pour-se-passer-des-terres-rares-de-la-chine-1340833">recherche et le développement</a> pour notamment trouver des méthodes de recyclages ou de substitutions pour les métaux stratégiques.</p>
<h2>La traçabilité des métaux pour l’Europe</h2>
<p>En Europe, l’ensemble des États mise sur la <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/rwanda/l-union-europeenne-impose-le-tracage-des-metaux-rares-pour-lutter-contre-le-trafic-des-minerais-du-conflit_4259099.html">traçabilité des minerais de conflits</a>. Depuis le premier janvier 2021, l’Union européenne impose une totale traçabilité de ces métaux, tout comme les États-Unis qui l’avaient mise en place dès 2010 à travers le <a href="http://www.mineralinfo.fr/ecomine/lunion-europeenne-compte-encadrer-commerce-minerais-conflits">Dodd-Frank Act</a>.</p>
<p>Au cœur de cette stratégie, la République Démocratique du Congo (RDC) avec la province du nord Kivu, région frontalière du Rwanda et de l’Ouganda. En effet, la RDC est connue, depuis des décennies, pour le trafic de métaux impliquant des problématiques de conflit armé. À l’époque, l’or et les diamants étaient déjà sous les feux des projecteurs, mais dorénavant avec l’explosion des nouvelles technologies, ce sont les métaux tels que le tantale ou le tungstène qui sont ciblés. La <a href="https://ec.europa.eu/trade/policy/in-focus/conflict-minerals-regulation/regulation-explained/index_fr.htm">nouvelle loi européenne</a> « prévoit l’obligation pour les entreprises européennes intervenant dans la chaîne d’approvisionnement de veiller à ce que leurs importations de ces minerais et métaux proviennent exclusivement de sources responsables et ne soient pas issues de conflits ».</p>
<p>Si le virus SARS-CoV-2 a été un catalyseur des tensions internationales sur certains métaux critiques et/ou rares, les stratégies des grandes puissances différaient déjà avant la crise. L’explosion des nouvelles technologies va continuer d’engendrer des besoins accrus et met en lumière les enjeux de régionalisation des chaînes d’approvisionnement.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été coécrit par Pablo Maniglier</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/156996/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marty Justine a reçu des financements.
Ce travail a bénéficié d'une aide de l'Etat gérée par l'Agence Nationale de la Recherche au titre du programme Investissements d'Avenir portant la référence ANR-15-IDEX-02</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Blandine Ageron a reçu des financements de ANR. </span></em></p>Difficile de s’y retrouver entre les métaux rares qui le sont vraiment, les terres rares qui ne le sont pas toujours, et les métaux qui ont des rôles stratégiques et géopolitiques. On fait le point.Justine Marty, Doctorante en Supply Chain Management, Université Grenoble Alpes (UGA)Blandine Ageron, Professeur des Universités, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1552712021-03-01T14:38:34Z2021-03-01T14:38:34ZLe rôle stratégique et essentiel des métaux rares pour la santé<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/390472/original/file-20210318-21-3qvy6s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C7%2C2619%2C1688&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En plus des métaux stratégiques, qui sont au coeur de conflits, il existe des métaux essentiels à la santé. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>La pandémie de Covid-19 a mis en évidence que la plupart des pays ne disposaient pas d’une souveraineté sanitaire suffisante pour faire face à une telle crise. Des pénuries de masques, de respirateurs, de médicaments et maintenant de vaccins se sont fait sentir dans de nombreux pays, même les plus avancés. Ces problèmes montrent que nos sociétés sont dépendantes de certains pays pour des produits essentiels.</p>
<p>Qu’en est-il pour les métaux ?</p>
<p>Notre <a href="http://www.industrie-minerale-territoires.fr/index.en.htm">équipe de recherche</a> Franco-canadienne travaille depuis quelques années sur les interactions entre les sciences de la Terre et les sciences sociales, notamment autour du concept de géologie sociale et sur la dynamique des territoires riches en ressources.</p>
<h2>Des métaux stratégiques</h2>
<p>La notion de minerai critique et stratégique remonte aux guerres du 1IX<sup>e</sup> siècle. A la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont constitué des stocks de métaux. Toutefois, la surabondance de métaux de la fin du XX<sup>e</sup> siècle et la mondialisation ont conduit les états occidentaux à abandonner leur politique pro active dans ce domaine. La prise de conscience d’une dépendance aux ressources minérales importées ne revint qu’à la fin des années 1990, avec l’émergence des économies asiatiques et de nouveaux monopoles.</p>
<p>La liste des métaux critiques et stratégiques varie selon les pays, allant d’une douzaine pour la Défense nationale française aux <a href="https://www.usgs.gov/news/interior-releases-2018-s-final-list-35-minerals-deemed-critical-us-national-security-and">35 métaux</a> répertoriés dans le décret de l’ex-président américain Donald Trump, en 2018.</p>
<p>Pourquoi ces listes de métaux ? Elles reflètent les grands enjeux du passé, ceux des guerres du XX<sup>e</sup> siècle et des conflits craints pour le futur. Plus généralement, elles marquent les crises technologiques et sociales qui ont frappé nos sociétés depuis 50 ans et qui ont mené à ce que le sociologue allemand Ulrich Beck a appelé la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ulrich_Beck">société du risque</a>.</p>
<p>Ainsi, chaque crise a laissé dans son sillage de nouvelles solutions technologiques, une sécurisation des chaînes d’approvisionnement et une conscience accrue de la dépendance, à chaque fois différente, envers divers métaux. Voici quelques exemples.</p>
<h2>Du pétrole à l’or</h2>
<p>En 1973, la crise du pétrole a souligné la fragilité de la plupart des pays développés en matière d’énergie. Certains pays se sont tournés vers le nucléaire, d’autres vers l’hydro-électricité. Des mines d’uranium sont alors mises en production un peu partout, de la Saskatchewan au Niger ; le prix du minerai flambe en 1978 et le pic de production est atteint en 1980.</p>
<p>La crise terroriste de 2001 a accéléré à son tour le développement des technologies de l’information dans les industries de la défense et la consommation de métaux de haute technologie a augmenté en conséquence. Le prix du tantale connaît un pic en 2000 et sa production mondiale est maximale en 2004. Cette demande encourage la production artisanale dans l’est du Congo, au cœur d’un conflit depuis 20 ans.</p>
<p>La crise du nucléaire à la suite des accidents de Tchernobyl (1986) et de Fukushima (2011) a encouragé le passage aux énergies renouvelables à forte intensité de métaux, notamment pour l’éolien. Le prix des terres rares a explosé pour atteindre un sommet en 2010, et la production a doublé depuis en 10 ans.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/386208/original/file-20210224-13-khyykl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/386208/original/file-20210224-13-khyykl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/386208/original/file-20210224-13-khyykl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/386208/original/file-20210224-13-khyykl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/386208/original/file-20210224-13-khyykl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/386208/original/file-20210224-13-khyykl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/386208/original/file-20210224-13-khyykl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Minerai de terres rares (andradite NB), projet Kwyjibo (Côte Nord, Québec).</span>
<span class="attribution"><span class="source">fournie par les auteurs</span></span>
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<p>Enfin, en 2008, la crise financière a fragilisé les marchés mondiaux et entraîné une reprise des achats d’or, notamment par les banques centrales russes et chinoises, ce qui a permis de soutenir le cours du précieux métal.</p>
<p>On comprend ainsi que chaque crise s’accompagne de nouveaux besoins en minéraux et d’une sécurisation de ces nouvelles filières métalliques.</p>
<h2>Métaux et enjeux sanitaires</h2>
<p>Les métaux sont utilisés pour la santé humaine depuis des millénaires. La médecine <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ayurveda">ayurvédique</a>, une médecine traditionnelle utilisée depuis 3000 ans en Inde, recourt au plomb, au mercure, et à l’arsenic pour soigner divers maux. Toxiques en trop grande quantité, ces métaux peuvent cependant devenir indispensables dans certains médicaments et équipements médicaux et orthopédiques.</p>
<p>Aujourd’hui, la pharmacopée mobilise plus d’une douzaine de métaux ou de métalloïdes agissant sur diverses pathologies : fer contre l’anémie, bismuth, cobalt et nickel contre les problèmes gastriques, lithium contre la dépression, antimoine contre la leishmaniose, platine ou métaux radioactifs contre le cancer, arsenic contre le psoriasis. L’or peut même traiter la polyarthrite rhumatoïde…</p>
<p>Les métaux sont aussi largement utilisés dans les prothèses : ainsi, une bouche traitée par un prothésiste dentaire pourrait contenir jusqu’à 32 métaux différents ! L’imagerie médicale recourt également à de nombreux métaux, des rayons X à la médecine nucléaire ; la résonance magnétique nucléaire (RMN) repose sur des aimants riches en terres rares, tandis que 20 % du gadolinium mondial sert pour des solutions qui augmentent le contraste des images de la RMN.</p>
<h2>Métaux et crise de la Covid-19</h2>
<p>Et la Covid-19 ? On retrouve des métaux tant dans la prévention que dans le traitement de cette nouvelle maladie.</p>
<p>Le cuivre a été le grand favori pour créer des <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/pourquoi-le-cuivre-est-le-pire-ennemi-du-coronavirus-en-plein-air_fr_5e96c5c0c5b6ac7eb262b677">surfaces anti-Covid</a>, pouvant réduire les éclosions nosocomiales dans les hôpitaux et faisant disparaître virus et bactéries en moins de deux heures. Le zinc quant à lui peut renforcer les défenses immunitaires et a déjà été utilisé contre des virus.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/386210/original/file-20210224-23-1v7ib6t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/386210/original/file-20210224-23-1v7ib6t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/386210/original/file-20210224-23-1v7ib6t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/386210/original/file-20210224-23-1v7ib6t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/386210/original/file-20210224-23-1v7ib6t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/386210/original/file-20210224-23-1v7ib6t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/386210/original/file-20210224-23-1v7ib6t.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Exploration de métaux rares, projet North Rae (Ungava, Québec).</span>
<span class="attribution"><span class="source">fournie par les auteurs</span></span>
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<p>L’argent prévient les infections et est présent partout dans les hôpitaux. Son utilisation en hygiène et en santé représente plus de 6 % de la production minière. Certains respirateurs contiennent du chrysocale, un alliage de cuivre, zinc et d’étain qui a d’ailleurs fait défaut en Europe au printemps 2020.</p>
<p>Ainsi, en plus des métaux stratégiques au cœur de conflits, il existe des métaux essentiels à la santé. La pandémie de 2020 a provoqué des pénuries en produits d’hygiène et pharmaceutiques ; des équipements médicaux de pointe, bourrés de composants électroniques et donc de métaux à haute valeur ajoutée, ont parfois fait défaut.</p>
<p>La plupart des pays occidentaux dépendent de métaux importés. Il serait donc temps d’établir avec plus de discernement ce qui est réellement indispensable, quels sont ces métaux essentiels dans le secteur de la santé, et comment en garantir l’approvisionnement pour les prochaines crises sanitaires.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/155271/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Jébrak reçoit des financements de recherche pour des organismes publics (CRSNG, FRQNT) et privés (compagnies minières); il est membre de l'Ordre des Géologues du Québec.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Yann Gunzburger reçoit des financements de la part d'organismes publics et, sous forme de mécénat, de la part d'entreprises privées, notamment dans le cadre d'une chaire de recherche et de formation s'intéressant aux relations entre projets miniers et territoires. Il est adhérent de la Société de l'Industrie Minérale.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jack-Pierre Piguet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le fer combat l’anémie. Le bismuth soulage les problèmes gastriques. Le lithium agit contre la dépression et l’or peut traiter la polyarthrite rhumatoïde… les métaux sont précieux pour la santé.Michel Jébrak, professeur émérite en ressources minérales, Université du Québec à Montréal (UQAM)Jack-Pierre Piguet, Professeur, Laboratoire GeoRessources, Université de LorraineYann Gunzburger, Professeur des universités, laboratoire GeoRessources, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1549692021-02-16T19:26:05Z2021-02-16T19:26:05ZLes pressions sur l’eau, face ignorée de la transition énergétique<p>La question des matériaux utilisés pour produire les technologies bas-carbone (batteries, éoliennes, panneaux solaires, véhicules électrifiés, etc.) est fondamentale, et largement commentée. Celle de la consommation en eau nécessaire à l’extraction des minerais et la fabrication de ces technologies est beaucoup moins abordée, alors qu’elle est pourtant essentielle.</p>
<p>On parle en effet des pressions sur l’eau dans le cadre des usages agricoles, de l’élevage et plus <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10021-011-9517-8">particulièrement de la production de viande</a>, mais peu quand il s’agit du déploiement des technologies bas carbone. Dans un monde de plus en plus contraint par la ressource hydrique, cet enjeu va pourtant devenir incontournable, et l’est d’ailleurs déjà dans certaines régions.</p>
<p>Aux effets connus du réchauffement climatique <a href="https://www.nature.com/articles/s41558-019-0456-2">sur le cycle de l’eau</a> s’ajoutent les <a href="https://www.fao.org/aquastat/en/overview/methodology/water-use">pressions anthropiques croissantes</a> exercées sur les ressources en eau : entre 1900 et 2010, les prélèvements au niveau mondial ont été multipliés par plus de 7 alors que la population n’a été multipliée sur la même période « que » par 4,4. Certaines zones se retrouvent ainsi en état de fort stress hydrique, augurant des conflits d’usages croissants entre l’agriculture, l’industrie et la population, voire des tensions au niveau international.</p>
<h2>L’eau et les métaux de la transition</h2>
<p>Les technologies de la transition énergétique sont complexes et consomment certains matériaux en grande quantité. <a href="https://theconversation.com/les-materiaux-de-la-transition-energetique-le-lithium-105429">Le lithium</a>, le <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/cobalt-transition-energetique-quels-risques-dapprovisionnements">cobalt</a> ou encore le nickel sont ainsi devenus les métaux vedettes des batteries lithium-ion utilisées dans les véhicules électriques. <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/cuivre-transition-energetique-metal-essentiel-structurel-et-geopolitique">Le cuivre</a>, déjà omniprésent dans notre quotidien, pourrait voir sa demande exploser en relation avec les nouvelles mobilités mais également avec le solaire photovoltaïque (PV).</p>
<p>De manière globale, la dynamique de transition énergétique mondiale ne pourra se réaliser qu’à travers <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/transition-energetique-bas-carbone-quelles-evolutions-geopolitique-lenergie">l’intensification des extractions minières à travers le monde</a> et donc engendrer une augmentation de la consommation d’eau.</p>
<p>À l’échelle d’un pays, le secteur minier se trouve souvent <a href="http://pdf.wri.org/working_papers/mine_the_gap.pdf">bien loin derrière l’agriculture</a> ou même d’autres secteurs industriels (au <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301420718301193">Pérou</a>, par exemple, il pèse pour environ 1 % de la consommation en eau du pays contre presque 89 % pour l’agriculture). Il n’en demeure pas moins un important consommateur, notamment lors des phases d’extraction et de traitement des minerais et génère de nombreuses externalités sur l’eau (déversements de substances, drainages acides, etc.).</p>
<p>En outre, pour bon nombre de métaux étudiés, la production minière ou les activités de transformation sont effectuées dans des pays où la pression sur la ressource en eau est déjà forte et pour lesquels la situation hydrique n’est pas, dans l’état actuel des choses, amenée à s’améliorer dans les décennies à venir.</p>
<p>Très gourmande en eau, l’industrie des terres rares illustre bien cette problématique. <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/article/les-terres-rares-transition-energetique-quelles-menaces-les-vitamines-lere-moderne">Nos résultats</a> révèlent en effet une pression accrue sur les ressources en eau dans au moins deux pays déjà soumis à des épisodes de fort stress hydrique : la Chine et l’Australie. Dans un scénario climatique contraint, la consommation en eau de l’industrie australienne des terres rares en 2050 représenterait plus de deux tiers (69,2 %) du prélèvement en eau de l’ensemble des secteurs industriels en 2015 ou encore 11,2 % de l’eau prélevée au total en 2015 dans le pays.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=339&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/383244/original/file-20210209-15-11dxs6y.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=426&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Classement des pays dans la production minière mondiale de certains métaux pour l’année 2020 et niveau de stress hydrique attendu en 2040.</span>
<span class="attribution"><span class="source">World Resource Institute, 2015 ; USGS, 2021</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Or les terres rares ne sont pas les seuls éléments concernés par la politique minière volontariste de l’Australie : celle-ci figure dans le top 5 des producteurs mondiaux pour le lithium, le nickel, le cuivre le cobalt ou encore l’aluminium. On ne peut alors qu’imaginer <a href="https://ofb.gouv.fr/documentation/eau-et-milieux-aquatiques-les-chiffres-cles-edition-2020">l’empreinte eau du secteur minier</a> dans un pays où les épisodes de sécheresse s’intensifient.</p>
<p>Bien que moins alarmant, le constat est similaire pour la Chine : la plus grande réserve de terre rares au monde – Bayan Obo en Mongolie intérieure – est située dans une zone de stress hydrique qualifié de « extrêmement élevé ».</p>
<h2>Des conflits sur l’eau de plus en plus fréquents</h2>
<p>Dans de nombreux autres pays miniers, les conflits autour de la ressource en eau représentent déjà une menace.</p>
<p>Au Chili par exemple, les activités d’extraction (cuivre et lithium) se concentrent dans le nord du pays, zone parmi les plus arides au monde. Ces dernières années, on constate un renforcement de la mobilisation des populations indigènes et des groupes environnementaux, appuyés récemment par le régulateur environnemental chilien, qui dénoncent l’épuisement de l’aquifère situé dans la zone du désert d’Atacama et les dommages causés aux écosystèmes. Les batailles juridiques se multiplient et ralentissent des projets miniers, comme celui de « Rajo Inca », un projet à 1,2 milliard de dollars mené par Codelco.</p>
<p>Malgré ses ressources en eau, le Pérou <a href="https://www.2030wrg.org/peru/background/">est soumis à un fort stress hydrique</a> en raison de leur inégale répartition, des pollutions diverses et de la fonte des glaciers de la région andine. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301420718301193">La rareté de l’eau et les investissements miniers</a> élevés seraient les deux facteurs qui augmentent la prédisposition aux conflits dans la région. L’empreinte environnementale du secteur minier apparaît ainsi « la goutte de trop » : la <a href="http://cooperaccion.org.pe/wp-content/uploads/2016/10/GOBERNANZAAGUA.pdf">pollution de 16 des 21 fleuves les plus contaminées</a> serait due aux activités minières ou industrielles présentes ou passées selon l’Autorité nationale de l’eau (ANA).</p>
<h2>La désalinisation, fausse bonne idée ?</h2>
<p>La multiplication des conflits et la raréfaction de cette ressource mettent en péril les activités minières et demandent aux entreprises du secteur d’anticiper, de s’adapter et d’innover.</p>
<p>En réponse au défi de l’eau, ces dernières cherchent notamment à réduire leur consommation en améliorant l’efficacité de leurs procédés d’exploitation ou de transformation. Le développement d’un procédé innovant d’extraction directe du lithium adapté aux eaux des salars d’Argentine par <a href="https://www.ifpenergiesnouvelles.fr/innovation-et-industrie/nos-expertises/climat-et-environnement/metaux-critiques-et-terres-rares/nos-solutions">IFP Energies Nouvelles et Eramet</a> illustre par exemple ce type de défis. L’entreprise chilienne SQM, spécialisée dans le lithium souhaite ainsi grâce à ses innovations réduire sa consommation en eau de 30 % d’ici 2030.</p>
<p><a href="https://www.cochilco.cl/Listado%20Temtico/2020%2010%2030%20Consumo%20de%20agua%20en%20la%20mineria%20del%20cobre%20al%202019_version%20final.pdf">Dans l’industrie du cuivre</a>, l’amélioration des processus de recyclage de l’eau a permis de faire passer la part d’eau recyclée dans la consommation totale du secteur de 72,7 à 76,4 % entre 2018 et 2019.</p>
<p>Une autre option connaît un franc succès dans la région ces dernières années : le recours à la désalinisation. Cochilco (la Commission chilienne du cuivre) estime ainsi que l’utilisation d’eau de mer <a href="https://www.cochilco.cl/Listado%20Temtico/2020%2010%2030%20Consumo%20de%20agua%20en%20la%20mineria%20del%20cobre%20al%202019_version%20final.pdf">devrait plus que tripler</a> à l’horizon 2029.</p>
<p>La <a href="https://www.mckinsey.com/industries/metals-and-mining/our-insights/desalination-is-not-the-only-answer-to-chiles-water-problems">viabilité d’une telle stratégie</a> interroge toutefois dans la mesure où les installations de pompage, de traitement de l’eau de mer et d’acheminement de l’eau sur des milliers de kilomètres à travers les Andes supposent des investissements ainsi qu’une consommation en matériaux et en énergie conséquente. En bref, un procédé énergivore et à forte intensité matière.</p>
<p>L’exploitation des aquifères grâce aux procédés de forage est une autre des possibilités exploitées pour faire face au manque d’eau. Début 2020, au plus fort de la sécheresse australienne, Glencore optait ainsi pour cette dernière solution <a href="https://www.wsj.com/articles/australia-is-dry-as-a-bone-and-miners-need-water-to-stay-afloat-11579170604">afin d’alimenter en eau</a> sa mine CSA de cuivre située en <a href="https://www.wsj.com/articles/australia-is-dry-as-a-bone-and-miners-need-water-to-stay-afloat-11579170604">Nouvelle-Galles du Sud</a>. Là aussi, ces forages effectués pour exploiter des eaux souterraines déjà menacées interrogent.</p>
<h2>L’empreinte eau, un indicateur mal connu</h2>
<p>Dans ce contexte, l’enjeu de la consommation en eau devrait faire l’objet d’une sensibilisation plus importante auprès des citoyens pour aller dans le sens d’une plus grande sobriété. Il est notamment incarné par la notion d’empreinte eau, qui pour une population donnée correspond à la quantité d’eau utilisée sur le territoire pour répondre à l’ensemble de ses besoins. Elle incorpore ainsi, en plus de l’eau du robinet consommée, celle nécessaire à la production des biens et des services produits sur le territoire national mais également importés.</p>
<p>L’empreinte eau des citoyens des pays de l’OCDE est, en moyenne, plus élevée que celle des pays hors-OCDE. Celle d’un Français est par exemple supérieure à 200m3/habitant/an alors qu’elle est de 167m3/habitant/an au niveau mondial.</p>
<p>Plus encore, il s’avère que l’empreinte eau française est environ trois fois supérieure au volume d’eau consommé à l’échelle domestique. À l’instar de l’empreinte carbone, une large portion du bilan en eau d’un français vient du fait que la consommation d’eau pour produire les biens et services importés en France est supérieure à celle des biens et services exportés de France.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=346&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=435&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=435&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/384017/original/file-20210212-15-mxboyi.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=435&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Comparaison international des volumes d’eau consommée par personne et de l’empreinte eau, moyenne 1995–2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">D’après les données de base de données EXIOBASE3.7 ; MTES, 2020</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette non-prise en compte de l’empreinte eau accentue le décalage entre la perception de l’usager sur sa consommation et la réalité des impacts de son mode de vie sur la ressource en eau. Cette perception est d’autant plus aggravée qu’il existe une forte tolérance vis-à-vis des <a href="https://www.novethic.fr/actualite/environnement/eau/isr-rse/en-france-20-du-reseau-d-eau-fuit-et-c-est-un-probleme-ecologique-148759.html">fuites d’eau potable des canalisations</a> (environ 20 % de l’eau serait perdue) par les citoyens et les opérateurs, évitant à ces derniers d’investir massivement dans la maintenance des infrastructures.</p>
<p>Comme pour la sobriété énergétique ou en matériaux, une modification des comportements d’achats est nécessaire et elle passera par une meilleure information du consommateur avec, par exemple, un étiquetage obligatoire du contenu en eau des produits.</p>
<h2>Recycler les minerais</h2>
<p>L’empreinte environnementale relative à l’eau des minerais recyclés est bien inférieure à celle des minerais directement extraits du sous-sol. La consommation en eau peut être divisée par 5 dans le cas des terres rares, par 10 dans le cas du cuivre ou même par 20 dans le cas du cobalt. Lorsque l’on sait que <a href="https://globalewaste.org/">seulement 42,5 % du total des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE)</a> ont été recyclés au sein de l’Union européenne à 28 en 2019, la promotion de la collecte et du recyclage apparaît être un levier intéressant à mobiliser.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=229&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=229&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=229&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=288&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=288&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/383247/original/file-20210209-19-l65zu3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=288&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Quantité d’eau utilisée pour l’extraction de minerai ou la réutilisation de déchets de l’industrie minière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sverdrup and Koca, 2016</span></span>
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<p>La mise en place par les pouvoirs publics de politiques publiques allant dans le sens d’une économie circulaire pourrait par ailleurs être porteuse de bénéfices allant au-delà de la réduction de la pression sur les ressources.</p>
<p>Selon l’Institut de l’économie circulaire, elle permettrait la <a href="https://institut-economie-circulaire.fr/wp-content/uploads/2018/01/2015_iec_etude_emploi.pdf">création ou le renforcement de filières créatrices d’emplois</a>, argument d’autant plus pertinent dans le contexte de la crise économique générée par la pandémie de la Covid-19. Elle permettrait également de renforcer la souveraineté de l’État français et plus largement des pays de l’Union européenne dans leur approvisionnement en métaux critiques.</p>
<p>Enfin, appuyer la recherche et l’innovation autour des procédés industriels de pointe est également un levier pour améliorer la gestion de l’eau dans le secteur tout en consolidant le rayonnement des entreprises françaises à l’international.</p>
<h2>L’or bleu : bien commun ou bien privé ?</h2>
<p>L’industrie minière, mais également les populations vont aussi devoir faire face à l’augmentation de l’incertitude autour des conditions d’accès à l’or bleu. On voit en effet deux phénomènes antagonistes se développer.</p>
<p>D’une part, on observe un mouvement de marchandisation de la ressource en eau dont la dernière manifestation hautement symbolique est <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/les-contrats-futurs-sur-leau-sechangent-pour-la-premiere-fois-a-la-bourse-de-chicago-1388069">l’introduction d’un contrat à terme sur l’eau</a> sur le Chicago Mercantile Exchange fin 2020.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1202085416909836294"}"></div></p>
<p>D’autre part, certaines populations ou collectivités revendiquent l’eau en tant que <a href="https://news.un.org/fr/story/2010/07/190352-lassemblee-generale-declare-que-lacces-leau-potable-est-un-droit-fondamental">droit humain fondamental</a> et entendent s’opposer à l’accaparement de celle-ci par le secteur privé.</p>
<p>Parmi les pays évoqués ici, le Chili est un exemple évocateur. Plébiscité par le peuple chilien, le <a href="https://dialogochino.net/en/climate-energy/38578-chile-opens-the-door-for-an-ecological-constitution/">projet de nouvelle constitution</a> pourrait redonner à l’eau, privatisée depuis 1981, le statut de bien commun, ce qui engendrera des incertitudes pour le secteur minier.</p>
<p>Ce mouvement de réappropriation de l’eau en tant que bien public est également observable dans certains pays occidentaux. C’est par exemple ce qu’il s’est passé à Paris avec la remunicipalisation du service public de l’eau en 2009 et, depuis 2010, la régie Eau de Paris en assure toute la distribution.</p>
<p>Bien qu’elle soit un modeste usager d’eau à côté du secteur agricole, l’industrie minière devra, comme tous les autres secteurs, composer dans un monde où le spectre de la <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/water-action-decade/">crise de l’eau redoutée par les Nations-Unies</a> risque de devenir bien réel et où chaque goutte d’eau consommée comptera.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/154969/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuel Hache a reçu des financements de l'Agence nationale de la recherche (ANR) pour le projet Generate (Géopolitique des énergies renouvelables et analyse prospective de la transition énergétique) entre 2018 et 2020. Il est chercheur associé au laboratoire Economix de l’Université Paris Nanterre et directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Charlène Barnet et Gondia Sokhna Seck ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Les technologies bas-carbone nécessaires à la transition énergétique ne sont pas seulement gourmandes en métaux, mais également en eau.Emmanuel Hache, Économiste et prospectiviste, IFP Énergies nouvelles, Auteurs historiques The Conversation FranceCharlène Barnet, Économiste, IFP Énergies nouvelles Gondia Sokhna Seck, Spécialiste en modélisation et analyse des systèmes énergétiques, IFP Énergies nouvelles Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1536792021-01-24T17:23:40Z2021-01-24T17:23:40ZExploitation minière : les terrils, dangers oubliés et patrimoine retrouvé<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/379965/original/file-20210121-17-nfmy53.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C0%2C2192%2C1424&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Capture d'écran, Netflix.</span> </figcaption></figure><p>Tous ceux qui suivent la série <em>The Crown</em> ont pu assister, dans le deuxième épisode de la saison trois, au dramatique effondrement d’un terril qui eut lieu dans la petite ville minière d’Aberfan dans le sud du pays de Galles, le 20 octobre 1966. Rares, pourtant, ont été les accidents de ce type dans l’histoire de l’exploitation minière dans le monde.</p>
<p>Traditionnellement, les grands ennemis des hommes de la mine – et de leurs familles – sont réputés être au nombre de trois. L’air vicié de « grisou » ou « terrou », un gaz difficile à détecter qui asphyxie, qui prend feu et explose dans les galeries, comme lors de la catastrophe de Courrières <a href="https://www.herodote.net/10_mars_1906-evenement-19060310.php">qui fit 1099 victimes le 10 mars 1906</a>. L’eau qui provoque des inondations comme le met en scène Hector Malot dans <em>Sans famille</em> (1878), lorsqu’une rivière en crue envahit une mine dans les Cévennes. La terre, enfin, qui est à l’origine de nombreux éboulements au fond. Petits ou grands, ils sont responsables de la plupart des accidents au quotidien. Mais les terrils, amoncellements de déchets remontés des profondeurs, ne figurent pas au nombre des dangers redoutés des mineurs, tant leurs effondrements sont exceptionnels dans l’histoire de l’exploitation minière.</p>
<h2>Amoncellement de déchets</h2>
<p>Dans les premiers temps de l’exploitation souterraine, les déchets sont laissés au fond. Vers le milieu du XIX<sup>e</sup> siècle, ils sont progressivement amenés à la surface et entassés à l’extérieur du puits, à l’aide de petits wagonnets mus manuellement. La mécanisation progressive des mines voit naître les premiers terrils. Avec le temps, ils deviennent de plus en plus grands et de plus en nombreux, au point de faire désormais partie intégrante du paysage minier, partout dans le monde.</p>
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<figcaption><span class="caption">Terrils, du noir au vert.</span></figcaption>
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<p>Les terrils sont connus pour être des sources de chaleur qui se consument de l’intérieur pendant des années – jusqu’à 30 voire 50 ans –, comme à la Ricamarie dans la Loire. À Alès (Gard), à l’automne 2004, quarante ans après la fermeture du dernier puits de ce bassin, deux terrils, un très ancien et un autre plus récent, constitué entre 1945 et 1975, <a href="https://www.liberation.fr/terre/2004/11/06/ales-brule-d-un-feu-interieur_498503">sont entrés en combustion à plus de 900°</a>. Il en a été de même <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00880725/document">à Tcheliabinsk dans le sud de l’Oural</a> et au Portugal <a href="https://www.geocaching.com/geocache/GC67F4D_gn16-terril-en-combustion?guid=68d8e48f-ad7f-4102-a36a-586184f6a3ef">dans le Douro</a>.</p>
<p>Les terrils peuvent aussi, parfois, s’effondrer. Dans les années 1930, à Donetsk en Ukraine, des bâtiments de trois étages <a href="https://www.geosoc.fr/publication/geochronique/sommaires-et-resumes/576-geochronique-127-septembre-2013-regards-sur-mines-de-nouvelle-caledonie-sables-bleutes-du-var-transition-energetique-combustion-des-terrils/file.html">ont été ensevelis à la suite de l’éboulement d’un « terikon »</a>. Aujourd’hui encore, ce bassin minier en compte quelque 600. Elles constituent les seules montagnes de la région.</p>
<h2>A Aberfan, un accident sans précédent</h2>
<p>Trois décennies plus tard, la catastrophe d’Aberfan va endeuiller à jamais cette petite communauté minière. C’est un terril de 40 mètres de haut – seuls, semble-t-il, des monticules ne dépassant pas les six mètres étaient officiellement autorisés – érigé sur une petite colline sous laquelle coule une source, qui s’effondre. 230 000 m<sup>3</sup> de déchets miniers se déversent, dans un bruit apocalyptique et avec une violence inouïe sur l’école du village, ôtant la vie à <a href="https://www.politics.ox.ac.uk/news/iain-mclean-on-the-anniversary-of-the-disasters-natural-and-political-at-aberfan.html">109 écoliers et 5 de leurs enseignants, ainsi qu’à huit autres adultes, soit au total 144 victimes</a>. La menace que représentait ce terril était pourtant connue. Il était trop élevé et en surplomb des maisons, mais le dénoncer risquait d’accélérer la fermeture de cette mine, considérée comme de moins en moins rentable.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/1lzJLww3DvM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Moins de 10 ans plus tard, le 26 août 1975, en pleine nuit à Calonne-Ricouart (Pas-de-Calais), nouveau drame. Cette fois, le terril prend feu et explose. Bilan : six morts, 47 maisons détruites et trois hectares de terrain <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00151/explosion-d-un-terril-a-calonne-ricouart.htm">sont recouverts de cendres</a>. À Herstal (Belgique), dans le quartier de la Préalle, à la mine de la Petite Bacnure, le 1<sup>er</sup> avril 1999 un terril s’affaisse, sans faire de victime, sur sept habitations. Pendant plusieurs années, il a continué à barrer la route et laissé derrière lui un spectacle de désolation.</p>
<p>À long terme, au-delà de l’éventualité qu’un terril se consume lentement avant d’exploser, il y a toutes les substances nocives pour l’environnement que certains d’entre eux contiennent et laissent échapper. En octobre 1992 un ancien et très important terril, composé de 600 000 m<sup>3</sup> de résidus différents – oxydes de fer, aluminium, silicium, sodium, titane, calcium – laissés derrière lui par Aluminium Péchiney, s’est effondré. Constitué au cours de la première moitié du XX<sup>e</sup> siècle, il est coincé entre la voie ferrée Marseille-Aubagne et L’Huveaune, <a href="https://social.shorthand.com/lamarsweb/j2yJySguMc/crassiers-dalumine-lheritage-pas-si-invisible">principale rivière se jetant dans la mer au niveau de la cité phocéenne</a>, il continue à déverser dans les eaux souterraines des concentrés de radionucléides, des éléments instables donc potentiellement dangereux. Son impact chimique et radiologique sur l’environnement est loin d’être inoffensif. Sur le terrain d’une ancienne compagnie pétrolière, un terril de plus de quatre mètres de haut s’est effondré en octobre 1996. La coulée menaçait une ferme implantée plus bas, dont le bâtiment se fissurait. Enfin, du méthane qui s’échappait <a href="https://www.aria.developpement-durable.gouv.fr/accident/12085/">faisait craindre une explosion</a> !</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1350036106331435010"}"></div></p>
<p>Pourtant, malgré leur dangerosité, les terrils font partie des lieux de mémoire de la mine. À Denain (Nord) le terril Renard, qui tire son nom de la fosse éponyme, est de ceux-là. Le puits creusé en 1836 a été fermé en 1948, <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00241/une-maison-de-mineur-a-denain.html">après plus d’un siècle d’exploitation</a>. C’est sous la conduite du jeune ingénieur Louis Mercier qu’Émile Zola, préparant <em>Germinal</em>, <a href="https://www.cairn.info/revue-travailler-2002-1-page-37.htm">descend à 675 m de profondeur dans cette fosse le 25 février 1884</a>. C’est également là que travailla pendant plus de 45 ans, le père du truculent personnage de mineur <a href="http://www.cafougnette.com">connu sous le nom de Cafougnette</a>, Jules Mousseron (1868-1943) le <a href="https://fresques.ina.fr/memoires-de-mines/fiche-media/Mineur00241/une-maison-de-mineur-a-denain.html">célèbre mineur, poète et chansonnier</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=924&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=924&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=924&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1161&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1161&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/380000/original/file-20210121-17-72xgwf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1161&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jules Mousseron en 1912.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jules_Mousseron#/media/Fichier:Jules_Mousseron_1912.jpg">Wikimedia</a></span>
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<p>Le <a href="https://www.bassinminier-patrimoinemondial.org/actualites/classement-de-chaine-terrils-titre-de-loi-paysage/">28 décembre 2016</a>, 78 terrils formant une chaîne, situés dans ce qui était le bassin du Nord et du Pas-de-Calais, ont été jugés dignes d’appartenir au patrimoine national au titre de la loi du 2 mai 1930 « ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels… »</p>
<p>Certains d’entre eux ont été rendus à la nature, voire à l’expérimentation agronomique, d’autres sont désormais dédiés aux loisirs. Le terril de Pinchonvalles à Avion (Pas-de-Calais), est le plus long d’Europe. Entièrement boisé, il fait la joie des naturalistes et des amateurs de champignons. Son biotope est d’une grande richesse. Espèces animales et végétales rares y cohabitent, comme ces pommiers de variétés anciennes, issues des pépins laissés au fond par les <a href="https://www.ville-avion.fr/node/261">mineurs d’antan à l’heure du « briquet »</a>, surnom donné au casse-croûte dans le bassin du Nord-Pas-de-Calais.</p>
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<figcaption><span class="caption">Loin des montagnes, le ski toute l’année sur un terril.</span></figcaption>
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<p>Pour les fous de glisse, un terril de 129 mètres de haut a été aménagé en piste de ski, à Noeux-les-Mines dans le Pas-de-Calais.Le <a href="https://www.tourisme-bethune-bruay.fr/a-voir-a-faire/culture-patrimoine/loisinord-1070412">complexe Loisinord</a> attire également les foules avec son grand stade nautique. Enfin, les terrils jumeaux (n°s 11 et 19) de Loos-en-Gohelle, les plus hauts d’Europe avec leurs 186 mètres, ont été aménagés pour les promeneurs. Non loin de là se trouve le Louvre-Lens, musée et lieu d’exposition.</p>
<p>À Aberfan, le <em>Memorial Cemetery and Garden</em> a été construit sur le site de la Pantglas School. Lieu de mémoire émouvant, avec ses arches de pierre blanche représentant <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Aberfan#/media/File:Mynwent_Aberfan.jpg">chacune une des petites victimes</a>, il a été inauguré par la reine en mars 1973, avec dépôt d’une couronne de fleurs. Voulait-elle, ce faisant, faire taire les critiques que lui avait valu le retard avec lequel elle s’était rendue sur place sept ans plus tôt et dont la série <em>The Crown</em> se fait l’écho ? Elle s’y rendra à plusieurs reprises, par la suite, en 1997, puis en 2016 à l’occasion du 50<sup>e</sup> anniversaire du drame d’Aberfan.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153679/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En se consumant de l’intérieur, les terrils (ces accumulations de déchets liés à l’exploitation minière) ont provoqué de nombreux accidents au cours de l’histoire.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1519512021-01-04T19:17:00Z2021-01-04T19:17:00ZVers la fin du « King coal » : quel avenir pour le charbon et l’extraction minière ?<p>À l’heure des énergies renouvelables, le charbon a-t-il un avenir ? Est-il en mesure de se transformer en <a href="https://www.connaissancedesenergies.org/le-charbon-propre-est-un-nouveau-type-de-charbon-150910">énergie propre</a>, comme le promettent certains ? Les exploitations minières laisseront-elles un jour derrière elles des terres vierges de pollution et des régions en mesure de se redynamiser ?</p>
<p>Le charbon constitue une source d’énergie présentant un certain nombre d’avantages : ses réserves mondiales sont importantes et pourraient, selon les estimations, être exploitées pendant encore un siècle et demi. Il se transporte aisément, n’est pas toujours coûteux, mais s’avère très polluant. Responsable de près de la moitié des émissions de CO<sub>2</sub> dans le monde, il rejette des gaz soufrés, des oxydes d’azote ainsi que des particules fines.</p>
<p>Actuellement, <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/36-de-l-electricite-mondiale-reste-produite-au-charbon.N977641">36 % de l’électricité mondiale</a> est produite dans des centrales à charbon, dont le nombre augmente notamment dans des pays qui s’accordent… sur la nécessité de protéger le climat !</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"940260060474863618"}"></div></p>
<h2>De grands pays encore fortement dépendants</h2>
<p>Depuis quelques années, en Chine, de nombreuses centrales électriques ont <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/centrales-a-charbon-un-recul-inedit-sauf-en-chine-1228151">été construites</a>. Or, l’empire du Milieu est déjà le plus important émetteur de gaz à effet de serre dans le monde. Dans ce pays où 60 % des besoins en énergie primaire sont assurés par le charbon, un marché national du CO<sub>2</sub> a été mis en place fin 2017.</p>
<p>En Inde, la production et la consommation de charbon augmentent également et le secteur emploie quelque 350 000 personnes. 60 % de l’électricité indienne provient de la houille, mais comme en Chine, le gouvernement dit vouloir encourager les énergies renouvelables… En Asie du Sud-Est, en Indonésie et au Bangladesh, de nouvelles centrales électriques au charbon ont été prévues pour être construites respectivement à Kalselteng 2 dans l’île de Kalimantan et à Matarbari, district de Cox Bazar, dans le Sud-Est du pays.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"732526129869815809"}"></div></p>
<p>En Afrique, une centrale électrique au charbon a été mise en route fin 2018 <a href="https://www.medias24.com/MAROC/ECONOMIE/ENTREPRISES/188569-La-centrale-thermique-de-Safi-entre-en-service.html">à Safi</a>, au Maroc, alors que le gouvernement chérifien annonce être capable en 2030 de produire un plus de la moitié de son électricité grâce aux énergies renouvelables. L’Afrique du Sud ne fait pas exception avec Medupi 2, dans la province de Limpopo. Sa nouvelle centrale électrique est alimentée par le charbon de la <a href="https://www.globalafricanetwork.com/company-news/efficient-mining-at-lephalale/">mine à ciel ouvert de Grootegeluk</a> située non loin, 3200 personnes y travaillent.</p>
<p>Grand pollueur, les États-Unis ont vu en 2019 leur consommation de charbon plonger au plus bas depuis 1975, grâce notamment à la fermeture d’une cinquantaine de centrales électriques. <a href="https://www.lesechos.fr/monde/etats-unis/etats-unis-la-consommation-de-charbon-chute-a-son-plus-bas-depuis-1975-1161139">Selon un rapport indépendant</a>, rédigé par le groupe Rhodium, les émissions de CO<sub>2</sub> auraient diminué d’environ 2 % au cours de la même période. Pourtant, en Virginie, dans de petites communautés charbonnières depuis longtemps en déclin – à l’image de Logan et de Dixie, bourgades blotties au cœur des Appalaches –, les habitants appauvris ont placé tous leurs espoirs en Donald Trump, grand défenseur du « King coal ».</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-coup-de-grisou-de-ladministration-trump-72397">Le coup de grisou de l’administration Trump</a>
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<p>En Australie, où ce minerai est exploité depuis la fin du XVIII<sup>e</sup> siècle sur la côte au nord de Sydney, la grande époque du charbon tire à sa fin. Pays exportateur, l’Australie voit ses plus gros clients, le Japon et la Chine, mettre un frein à leurs commandes.</p>
<p>Comme dans d’autres pays, des mouvements de protestation ont éclaté <a href="https://observers.france24.com/fr/20150729-australie-queensland-abbot-point-bassin-galilee-adani-charbon-grande-barriere-corail">contre des projets d’ouverture</a> de mines jugées trop polluantes. Les banques semblent, quant à elles, hésiter à financer ce type de projet. Si Glencore, une société suisse présente en Australie, <a href="https://www.glencore.com.au/en/who-we-are/energy-products/Pages/coal.aspx">n’abandonne pas le charbon</a>, elle se tourne néanmoins progressivement vers d’autres minerais, tels que le cobalt, le cuivre et le nickel, censés favoriser la transition vers les énergies renouvelables.</p>
<h2>La place marginale de l’Europe</h2>
<p>À l’échelle mondiale, le poids du charbon européen est marginal. À terme, sa production est sans doute destinée à disparaître. Alors qu’en Allemagne près de 40 % de l’électricité provient toujours de la combustion de la houille et de la lignite, les autorités disent <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/06/03/en-allemagne-une-sortie-du-charbon-toute-en-contradictions_6041601_3234.html">vouloir « sortir » du charbon</a>. Or, en 2019, la construction d’une nouvelle centrale électrique à Datteln, dans le land de Rhénanie, a été mise en route…</p>
<p>En Pologne, où le charbon est à l’origine d’environ <a href="https://www.ft.com/content/d44cca2d-1bf1-4fbd-81fc-bdf0da79eb4f">75 % de l’électricité</a>, les dirigeants déclarent vouloir en avoir fini avec ce minerai, dont le coût de production est relativement élevé… mais pas avant 2050 ! En Serbie, c’est grâce à des prêts chinois qu’une unité thermique a récemment été construite, à Kostolac sur le Danube.</p>
<p>Au Royaume-Uni, à Whitehaven, dans le comté de West Cumbria, où une <a href="https://theconversation.com/une-plongee-dans-les-mines-de-charbon-sous-marines-95986">mine de charbon sous-marine</a> a été exploitée jusqu’en 1986, la communauté de communes a accordé le 2 octobre dernier, un permis de construire à la West Cumbria Mining (WCM). Cette compagnie prévoit d’extraire 3 millions de tonnes de houille par an, destinées à la production d’acier. Mais les <a href="https://www.liberation.fr/amphtml/terre/2020/12/27/en-angleterre-un-projet-minier-devient-un-enjeu-de-justice-climatique_1809633">écologistes sont vent debout</a> et le gouvernement n’a pas encore donné son accord pour le lancement du chantier.</p>
<p>En France, quatre centrales électriques sont encore en activité. Celle de Cordemais (Loire-Atlantique) continuera, à bas régime, jusqu’en 2024, voire 2026. Au Havre (Seine-Maritime) et à Saint-Avold (Moselle), la fin est programmée respectivement pour avril 2021 et 2022. Enfin, à Gardanne (Bouches-du-Rhône), la fermeture devrait avoir lieu prochainement, le président Emmanuel Macron s’étant engagé à mettre un terme à leur activité avant la fin de son mandat. En France, 1,5 % à 2 % de l’électricité est produite avec du charbon et « seulement » 1400 emplois sont concernés par cette mesure.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1090672892545851392"}"></div></p>
<h2>L’épineuse question de « l’après »</h2>
<p>Une fois les centrales électriques fermées et les bassins miniers abandonnés, est-il possible de donner une nouvelle vie à ces lieux et de proposer des alternatives aux employés du secteur ?</p>
<p>La tâche est très difficile, comme nous le rappelle l’exemple du bassin du Nord-Pas-de-Calais en France et celui des anciennes régions minières d’Angleterre.</p>
<p>Même des expériences qui se voulaient novatrices n’ont pas été convaincantes, à l’image de celle lancée par l’ONG « Mined mines » dans les Appalaches, région minière nord-américaine en déshérence. Destinée à réorienter les ex-mineurs dans les métiers du codage informatique pour les aider à trouver un emploi lucratif tout en demeurant dans leur région d’origine, elle a beaucoup déçu.</p>
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<h2>Pas que le charbon</h2>
<p>Sur le front des dégâts écologiques causés par l’exploitation minière, rappelons qu’ils ne concernent pas uniquement le charbon.</p>
<p>À Cuidanovita, ville minière située dans les montagnes roumaines du Banat, où l’uranium a été exploité à partir des années 1960 par une société roumano-soviétique, l’extraction est au point mort. Les anciens ouvriers mineurs et leurs familles vivent au milieu de fortes radiations émanant de terrils radioactifs. Ils se servent d’une eau provenant d’une nappe phréatique dont le <a href="https://www.uradmonitor.com/ciudanovita/">taux de pollution</a> est extrêmement élevé.</p>
<p>En France, à Salsigne (Aude), située à une vingtaine kilomètres de Carcassonne, l’extraction de l’or s’est arrêtée en 2004. La vallée de l’Orbiel, dite « Vallée de l’arsenic », site de l’ancienne plus grande mine d’or de France, est désormais le lieu le <a href="https://www.fne.asso.fr/actualites/salsigne-la-vall%C3%A9e-de-l%E2%80%99arsenic-un-scandale-d%E2%80%99%C3%A9tat">plus pollué de l’Hexagone</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"966315070966976512"}"></div></p>
<h2>Polluer moins</h2>
<p>Comment, dans l’avenir, poursuivre l’activité minière dans de meilleures conditions ? Le charbon peut-il véritablement devenir « propre » grâce au système prôné par certains <a href="https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/capture-et-stockage-du-co2-ccs-une-situation-etrange">défenseurs du « carbon capture and storage »</a> (CCS) ? Cet ensemble de techniques a pour objectif d’améliorer le rendement, de diminuer les émissions de CO<sub>2</sub> et de traiter les fumées, mais pour le moment son coût reste prohibitif.</p>
<p>Une fois le charbon abandonné, il y aura toujours des exploitations minières dangereuses et polluantes : d’uranium, de cuivre, d’étain de cuivre, de zinc, d’or… que rejettent souvent les populations locales.</p>
<p>En Roumanie, en <a href="http://www.stopmines23.fr/solidarite-opposants-aux-mines-dor-en-grece-appel-a-dons/">Grèce</a> et en Macédoine du Nord, des villes entières se sont opposées à des projets miniers. <a href="https://www.courrierdesbalkans.fr/Macedoine-Gevgelija-referendum-non-mine-montagne-Kozuf">Lors d’un référendum organisé en 2017</a>, les habitants de Gevgelija (Macédoine du Nord) ont voté contre l’ouverture d’une mine d’or et de cuivre à ciel ouvert de trois kilomètres de diamètre et de 700 mètres de profondeur sur le territoire de leur commune, par crainte des conséquences écologiques. Son exploitation aurait entraîné, comme à Salsigne, une <a href="https://www.courrierdesbalkans.fr/Macedoine-initiative-locale-projets-miniers-societes-etrangeres">pollution de longue durée à l’arsenic et au cyanure</a>, matières utilisées dans ce type de mine.</p>
<p>En Albanie, à Bulqizë, dans le nord du pays à 40 kilomètres de Tirana, des manifestations ont eu lieu <a href="https://www.labourstartcampaigns.net/show_campaign.cgi?c=4274">dans une mine de chrome</a> – substance hautement toxique – en 2011 et en 2019. Après le renvoi de leurs délégués syndicaux, les mineurs se sont mis en grève, y compris de la faim, pour de meilleurs salaires – les habitants de cette ville sont parmi les plus pauvres du pays – et de meilleures conditions de travail, les mineurs intervenant à 1400 mètres de profondeur. Des arrestations ont eu lieu et les informations sur ces conflits sont rares.</p>
<p>Le charbon a sans aucun doute un avenir, en particulier dans les pays qui ne peuvent se passer de son apport énergétique. La France n’a-t-elle pas, au mois de septembre dernier, <a href="https://www.lci.fr/planete/pourquoi-la-france-a-t-elle-rallume-ses-centrales-a-charbon-cette-semaine-2164968.html">relancé certaines de ses centrales thermiques</a> ? Ce recours à la houille n’empêche pas les dirigeants des pays concernés de multiplier les déclarations encourageantes au sujet du passage aux énergies renouvelables. Mais dans quel délai pourront-elles résoudre les problèmes posés par le réchauffement climatique et la pollution environnementale ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151951/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si nombre de pays déclarent vouloir s’émanciper de cette énergie fossile polluante, le charbon reste encore bien présent et pose de multiples défis environnementaux et économiques.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1506982020-11-26T20:02:07Z2020-11-26T20:02:07Z« Les gueules noires », ou le long parcours d’un livre méconnu<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/371565/original/file-20201126-15-1xfjfwr.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=14%2C2%2C1968%2C1159&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Illustration de la couverture originale des « Gueules noires », par Steinlen, en 1907. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53188780p/f1.item">BnF</a></span></figcaption></figure><p>Les jeunes éditions A Propos, spécialisées dans la publication de livres consacrés à l’art, à l’histoire de l’art et au patrimoine dans lesquels les illustrations et la photographie occupent une place importante, viennent de <a href="https://editions-a-propos.com/shop/editions-a-propos/tresors/les-gueules-noires/">faire paraître une très belle réédition de l’ouvrage d’Émile Morel, <em>Les Gueules noires</em></a>, paru en 1907, un an après la terrible catastrophe de Courrières (10 mars 1906), chez Edward Sansot à Paris. Abondamment et puissamment illustré par l’artiste suisse Théophile Steinlen, il méritait tout à fait d’être de nouveau mis à la disposition des lecteurs, d’autant que sur le marché du livre d’occasion la version originale de l’œuvre de Morel se vend, à l’heure actuelle, entre 60 et 160 euros selon son état de conservation (<a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53188780p/f1.item.zoom">gallica.bnf.fr/ark :/12148/btv1b53188780p/f1.item.zoom</a>).</p>
<p>Avec l’avant-propos du journaliste Dominique Simonnot, auteur de <em>Plus noir dans la nuit : la grande grève des mineurs de 1948</em> (Calmann-Lévy, 2014), qui rappelle très justement « qu’aujourd’hui, dans le monde entier, des exploiteurs font vivre et revivre les mêmes scènes à d’autres exploités », la note sur Emile Morel, le rappel de ce que fut la catastrophe de Courrières et de ce qu’a été la participation de Steinlen à ce recueil de nouvelles, parfois nommées « contes » à l’époque de leur première parution, <em>Les Gueules noires</em>, dans son édition contemporaine, offre une plongée dans le monde de la mine à l’orée du XX<sup>e</sup> siècle. Le cahier d’illustrations et de photos, placé à la toute fin du livre, rappelle très justement la jeunesse de beaucoup de ces gueules noires, la présence de filles sur le carreau de la mine, sans parler des drames qui ont rythmé l’exploitation du charbon.</p>
<h2>Tranches de vie</h2>
<p>L’ouvrage vaut autant pour les sept textes dramatiques de Morel, que pour les nombreuses illustrations de Steinlen. Les tranches de la vie des mineurs que sont « La paye », « Multitude solitude », « Train-tramway », « Dimanche », « La Jaune », « Le Baptême » ou encore « La Veuve », ainsi réunies, brossent un tableau quasi complet – ne manque que celui de la vie domestique qui n’est qu’effleurée – du monde de la houille. Dans cet univers, des silhouettes vont et viennent en un long troupeau, en une « colonne houleuse ». Dans la nuit, un « exode d’ombres » jaillit de partout pour aller au travail puis, quand celui-ci est terminé, le puits recrache les hommes qui remontent du fond. Où vont-ils, selon Morel ? À l’estaminet, fuir dans l’alcool, le genièvre et la bière, qu’accompagne leur fidèle pipe, un quotidien difficile. De peur que « La paye » n’y passe, les femmes sont aux aguets lors de sa distribution, ce qui n’empêche pas l’un d’entre eux de boire l’argent destiné au cercueil de son jeune fils, mort au fond !</p>
<p>Le danger et la mort rôdent en permanence dans les bassins, comme en témoigne « La veuve », une nouvelle dans laquelle l’auteur reprend le thème de la catastrophe minière avec, sans aucun doute, en mémoire celle de Courrières avec ses 1099 morts – qui laissa tant de veuves et d’orphelins, mais aussi d’« estropiés » que Morel décrit mendiant les jours de paye – amenant exceptionnellement sur place journalistes et ministres ! L’arrivée d’un médecin en blouse blanche à la mine, dans « La jaune », venu dépister les mineurs atteints d’un ankylostome, un mal très douloureux causé par un ver intestinal, et éventuellement de tuberculose, introduit le lecteur au cœur du dilemme qui se pose à ce praticien, dénoncer les méfaits de la mine sur la santé de ceux qui y travaillent, ou accepter la promesse d’une promotion en échange de son silence concernant les maladies professionnelles.</p>
<p>La direction de la houillère, le patronat, « les messieurs gantés », les ingénieurs, sont présents dans « Le baptème », tout comme l’église, le curé « gros et gras » qui renseigne les dirigeants sur l’état d’esprit qui règne parmi les travailleurs. Morel souligne que « les gros capitaux sont très pieux ». Ils mettent les grands moyens pour baptiser, du nom de « Sainte Eudoxie », leur nouvelle fosse. Le dimanche, jour de repos, jour silencieux dans le bassin, les cloches de l’église – souvent construite par la compagnie – sonnent. Les mineurs s’adonnent, alors, à leurs loisirs favoris, comme l’élevage des pigeons voyageurs, les courses de chiens, mais <a href="https://fr.artquid.com/artwork/599770/alexandre-steinlen-combat-de-coqs.html">surtout les violents et cruels combats de coqs que Morel dépeint avec un réalisme dans « Dimanche »</a>. Ce jour-là, les femmes de mineurs cuisinent et une odeur d’oignon se répand dans les corons.</p>
<p>Morel n’oublie pas de camper ses « contes » dans un environnement qui dépasse celui du bassin houiller. Car, à cette époque, nombreux sont les mineurs qui appartiennent encore au monde rural. Ces mineurs-paysans rentrent après le travail, par le « Train-Tramway », le « train des gueules noires », vers un lopin de terre qu’ils continuent à cultiver en famille. La campagne n’est, donc, jamais très loin !</p>
<p>Emile Morel dresse un tableau très sombre, le plus souvent désespérant, de ce secteur de l’industrie. Il n’accorde aucune dignité aux hommes et aux femmes qui y travaillent. Il les dépeint comme des bêtes de somme, comme des brutes avinées… Même la jeune trieuse amoureuse de « Multitude solitude » est laide, jalouse et accrochée à un travailleur qui abuse d’elle, ce qui était loin d’être un phénomène rare.</p>
<h2>Le parcours d’un livre</h2>
<p>Les traces laissées par cet écrivain sont peu nombreuses. Homme de lettres discret, membre de la Société des gens de lettres, il est, pense-t-on, l’auteur de deux romans : <em>Charme des yeux</em>, dont aucun exemplaire ne semble actuellement disponible, et de <em>Névrose</em> publié par E. Sansot et cie en 1904 dans la Bibliothèque internationale d’édition. Cet ouvrage n’est pas répertorié dans le Catalogue Collectif de France (CCF), mais peut encore être trouvé chez certains libraires. Pourquoi Morel s’est-il, vers 1906-1907, intéressé aux « gueules noires » ? Sans doute parce que né à Arras, ville située non loin d’un bassin minier, ce monde de la mine ne lui est pas totalement étranger, mais aussi parce que vient de se produire la plus dramatique catastrophe minière de tous les temps ! Le sujet est donc sensible et peut attirer les lecteurs.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/371570/original/file-20201126-15-886drk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/371570/original/file-20201126-15-886drk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/371570/original/file-20201126-15-886drk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=870&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/371570/original/file-20201126-15-886drk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=870&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/371570/original/file-20201126-15-886drk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=870&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/371570/original/file-20201126-15-886drk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1093&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/371570/original/file-20201126-15-886drk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1093&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/371570/original/file-20201126-15-886drk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1093&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le livre a été réédité récemment aux éditions A propos.</span>
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<p>À qui s’adresse-t-il pour essayer de faire publier ses petits « contes » ? Naturellement à l’éditeur Edward Sansot, avec lequel il a déjà travaillé pour <em>Névrose</em>, un roman richement illustré par le Franco-italien Manuel Orazi (1860-1934) illustrateur, peintre, affichiste, décorateur, <a href="https://www.paperblog.fr/3695858/nevrose-1904-illustrations-de-m-orazi/">au style Art Nouveau et à l’œuvre prolifique</a>. Quant à Edward Sansot, qui utilise parfois le pseudonyme Sansot-Orland, il est né dans le Gers en 1864. Les contemporains de celui qui fut tout à la fois poète, directeur de revues et éditeur de quelque 500 titres, entre 1903 et 1926 – date de sa mort à Nice – décrivent un drôle de bonhomme au fort accent bordelais et « au bonnet à calotte de concierge ». La carrière d’éditeur de Sansot mériterait sans doute d’être étudiée avec plus de précision : <a href="https://www.abebooks.com/servlet/BookDetailsPL?bi=794563041&searchurl=an%3Drenee%2Bvivien%26sortby%3D1&cm_sp=snippet-_-srp1-_-image11#&gid=1&pid=1">il publia tout de même Maurice Barrès, Jean Lorrain, Henry Bordeaux, et la poétesse Renée Vivien</a>)… Nous <a href="https://leautaud.com/les-editions-du-journal/">savons grâce au <em>Journal littéraire</em> de Paul Léautaud</a> que toute la jeune littérature se réunissait chez Morel, à Melun notamment, sous les auspices de Sansot. C’est un « lanceur de jeunes » <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Andr%C3%A9_Billy">selon André Billy</a>, membre de l’Académie Goncourt, à qui Sansot demanda 400 francs pour publier son premier ouvrage[2]. Sansot est donc, en tout cas pour certains, un éditeur à compte d’auteur qui n’est pas trop gourmand et aime donner sa chance aux débutants. <a href="https://esprit.presse.fr/article/dedet-christian/gabriel-boillat-la-librairie-bernard-grasset-et-les-lettres-francaises-1907-1914-17068">« En 1905, les jeunes auteurs en mal d’édition n’avaient que la ressource de s’adresser à Edward Sansot, rue de l’Éperon, et de se mettre d’accord avec lui sur le montant destiné à l’assurer contre tout risque de mévente »</a>.</p>
<p>Morel, auteur peu connu de 34 ans, va donc de nouveau voir le lanceur de jeunes qu’est Sansot, chez lequel il a déjà publié un ouvrage très bien illustré, pour son recueil sur les houilleurs. Sans doute ce dernier lui propose-t-il de faire écrire la préface par l’auteur maison et critique d’art qu’est Paul Adam (1862-1920), connu entre autres pour <em>Être</em> (1888) mais qui a, en 1892, <a href="https://fr.theanarchistlibrary.org/library/paul-adam-eloge-de-ravachol">écrit l’éloge funèbre de Ravachol</a> et contribué à des revues anarchistes. Sans doute aussi est-ce une certaine sensibilité à la « Question sociale » qui conduit Adam à accepter de rédiger l’introduction à un ouvrage considéré dans la <em>Revue des lectures</em> en 1908 comme « hideux, odieux, haineux ». Ceci n’empêche pas ce dernier de qualifier Morel de « Gorki français » et d’affirmer que « la fatalité des lois économiques écrasant les foules industrielles est subie par les travailleurs non sans une abnégation », surtout quand après des grèves et des émeutes… les ouvriers se remettent « à l’œuvre » afin de produire de l’aisance pour les classes aisées. Il évoque in fine, dans sa préface, le caractère fatal du salariat.</p>
<p>Doté d’une préface, il ne reste plus qu’à illustrer le recueil. Après Orazi, Morel aura droit, chez Sansot, à des lithographies hors texte et à des vignettes hyperréalistes en noir et blanc de l’anarchiste suisse Théophile Steinlen (1859-1923), qui s’est rendu avec l’auteur dans le bassin minier, comme le décrit Philippe Kaenel dans « Steinlen, un témoin empathique », à la fin de l’ouvrage publié chez A propos.</p>
<p>Tel est le parcours d’un livre qui a bénéficié du concours de tous ceux qui pouvaient essayer de contribuer à son succès. L’auteur qui a choisi le sujet en fonction de l’actualité, l’éditeur qui a pris le risque de le publier, qui a choisi un illustrateur reconnu et adapté, ainsi qu’un préfacier d’un certain renom. Seuls les lecteurs semblent avoir manqué le rendez-vous. Trouvera-t-il son public, aujourd’hui ? En tout cas, il le mérite !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/150698/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Cooper-Richet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Émile Morel, auteur complètement oublié, publie en 1907 un texte consacré aux mineurs, au titre évocateur, « Les Gueules noires ». Un récit sombre, réédité récemment.Diana Cooper-Richet, Chercheur au Centre d’histoire culturelle des sociétés contemporaines, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) – Université Paris-Saclay Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1434692020-10-27T22:21:53Z2020-10-27T22:21:53ZQuand les plantes piègent les polluants d’origine minière<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/365851/original/file-20201027-13-f8fikh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C14%2C895%2C562&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">_Agrostis castellana_ est utilisée sur d’anciens sites miniers pour ses capacités dépolluantes. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Fichier:Agrostis_castellana.jpg">Colin Meurk/Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Imaginez un terrain à l’abandon, envahi par les mauvaises herbes… quoi de plus banal ? Mais c’est justement cette « banalité » qui est recherchée – et parfois difficile à obtenir – sur les sites d’anciennes mines. Car pour maîtriser les risques liés aux pollutions d’anciennes exploitations, micro-organismes et plantes sont mis à contribution. Ce « travail d’équipe » porte un nom : la phytostabilisation.</p>
<p>Le procédé a d’autant plus intérêt qu’il s’agit d’une technique écologique peu onéreuse, et que la France compte plus de 2000 dépôts de mines métalliques à traiter.</p>
<p>Pour comprendre la pollution des sites miniers, il faut remonter à leur « genèse », l’activité minière. Afin d’accéder aux métaux intéressants, les mineurs doivent extraire de grandes quantités de roche. Puis, lorsque le filon concentré est atteint, il est nécessaire de broyer le minerai pour n’en retenir que la partie la plus concentrée en métal. Le résidu est généralement rejeté et déposé à proximité du site d’extraction.</p>
<p>En quoi ces résidus représentent-ils une source potentielle de pollution ? C’est qu’ils contiennent des éléments métalliques et d’autres substances toxiques, comme l’arsenic par exemple. Le hic étant que ces résidus, plages ou tas de sable, peuvent disséminer leurs poussières toxiques. Souvent, les minéraux économiquement intéressants correspondent aux sulfures métalliques, riches en soufre et en fer. Exposés à l’atmosphère et aux intempéries, ils sont dissous par des bactéries qui tirent leur énergie de leur oxydation.</p>
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<figcaption>
<span class="caption">Vue de la mine de cuivre à ciel ouvert de Küre (Turquie, 2012).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Francis Cottard/BRGM</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Cela peut produire des <a href="https://oreme.org/observation/pollumine/carnoules/">eaux acides polluées</a>, généralement riches en fer et autres métaux. Or, les scientifiques ont découvert que des micro-organismes et des plantes pouvaient contribuer à piéger ces polluants.</p>
<p>Différents mécanismes contribuent à réduire la mobilité de ces polluants : les plantes peuvent retenir les particules de résidu dans leurs racines, modifier ou empêcher la circulation d’eau à travers le résidu, et les métaux sont piégés autour des racines par des processus pouvant associer plantes et micro-organismes.</p>
<h2>Une ancienne mine d’argent du Massif central</h2>
<p>Dans le cadre du projet scientifique <a href="https://www.isto-orleans.fr/2016/07/28/phytoselect/">Phytoselect</a> – soutenu par la région Centre Val de Loire et coordonné par l’Institut des sciences de la Terre d’Orléans avec la <a href="http://www.cestdanslaire.fr/fr/page/des-plantes-au-secours-de-la-depollution-des-sols">participation du BRGM</a> – ce procédé de phytostabilisation a fait l’objet d’une évaluation approfondie.</p>
<p>Un résidu sableux et acide, riche en plomb et arsenic, a été prélevé sur le site de l’ancienne mine d’argent de Pontgibaud, dans le Puy-de-Dôme. Des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0883292719302410">expériences de laboratoire</a> à petite échelle ont tout d’abord permis de choisir les meilleurs ingrédients qui seront mélangés à ce sol toxique et pauvre en nutriments pour permettre aux plantes de pousser et neutraliser les effets de la pollution.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/353614/original/file-20200819-42823-1yg4xh0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/353614/original/file-20200819-42823-1yg4xh0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/353614/original/file-20200819-42823-1yg4xh0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/353614/original/file-20200819-42823-1yg4xh0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/353614/original/file-20200819-42823-1yg4xh0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=330&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/353614/original/file-20200819-42823-1yg4xh0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/353614/original/file-20200819-42823-1yg4xh0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/353614/original/file-20200819-42823-1yg4xh0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=415&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Sur le site de l’ancienne mine d’argent de Pontgibaud (Puy-de-Dôme).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Projet Phytoselect/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/349595/original/file-20200727-23-luucgp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/349595/original/file-20200727-23-luucgp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/349595/original/file-20200727-23-luucgp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/349595/original/file-20200727-23-luucgp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/349595/original/file-20200727-23-luucgp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/349595/original/file-20200727-23-luucgp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=516&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/349595/original/file-20200727-23-luucgp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=516&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/349595/original/file-20200727-23-luucgp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=516&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Tests de différents amendements en microcosmes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Cindy Gassaud/projet Phytoselect/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Puis, plutôt que de passer directement des résultats de laboratoire « en pot » au test sur site, une phase intermédiaire a été réalisée dans un <a href="https://plateformes-pivots.eu/prime/">mésocosme métrique</a>, soit une reproduction maîtrisée d’un petit morceau, à peu près d’un m<sup>3</sup>, du site réel.</p>
<p>Ce dernier permet ainsi d’étudier, dans les conditions contrôlées du laboratoire, le comportement des polluants sur un profil de dépôt de résidu, de sa surface à la nappe souterraine. Le mésocosme est équipé de l’éclairage nécessaire pour la croissance des plantes et d’un système d’arrosage contrôlé, ainsi que de systèmes de mesure et de prélèvement d’eau à chaque profondeur.</p>
<figure class="align-right zoomable">
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<figcaption>
<span class="caption">Représentation schématique du mésocosme.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Hugues Thouin/projet Phytoselect/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’expérimentation en mésocosme fournit de la sorte une image complète de ce qui se passe à l’intérieur du massif de résidus miniers lorsque les plantes se développent à sa surface.</p>
<p>Un an après l’amendement de surface et le semis des plants d’<a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/15226514.2014.1003786">Agrostis</a>, une herbacée dont les graines ont été collectées sur le site d’étude, les racines se sont bien développées et ont efficacement piégé les particules polluantes. Le flux d’eau percolant à travers les résidus a été diminué par rapport à l’état initial, probablement grâce à l’amélioration de la capacité du système à retenir de l’eau interstitielle, mais également en raison de la quantité d’eau absorbée et <a href="https://www.actu-environnement.com/ae/dictionnaire_environnement/definition/evapotranspiration.php4">« transpirée »</a> par les plantes.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/349601/original/file-20200727-21-1p8j4kr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/349601/original/file-20200727-21-1p8j4kr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/349601/original/file-20200727-21-1p8j4kr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/349601/original/file-20200727-21-1p8j4kr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/349601/original/file-20200727-21-1p8j4kr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/349601/original/file-20200727-21-1p8j4kr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/349601/original/file-20200727-21-1p8j4kr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/349601/original/file-20200727-21-1p8j4kr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Profil du résidu phytostabilisé, un an après l’amendement et le semis.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Hugues Thouin/projet Phytoselect/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/349602/original/file-20200727-23-1mnh7td.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/349602/original/file-20200727-23-1mnh7td.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/349602/original/file-20200727-23-1mnh7td.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/349602/original/file-20200727-23-1mnh7td.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/349602/original/file-20200727-23-1mnh7td.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/349602/original/file-20200727-23-1mnh7td.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/349602/original/file-20200727-23-1mnh7td.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/349602/original/file-20200727-23-1mnh7td.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Particules de résidu minier associées aux racines d’Agrostis.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Hugues Thouin/projet Phytoselect/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les données abondantes de cette expérience n’ont pas encore été entièrement exploitées, mais des variations importantes de paramètres le long du profil de résidu sont déjà observées : l’acidité, la diversité microbienne, les concentrations en métaux et autres substances dissoutes évoluent de la surface vers la profondeur.</p>
<h2>Les mécanismes microbiens du piégeage</h2>
<p>Quels rôles jouent les micro-organismes au cours du processus de phytostabilisation ?</p>
<p>Si certains contribuent à la dissémination des polluants par oxydation des sulfures présents dans les déchets, d’autres représentent des alliés précieux. Par exemple, des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/01490450600724282">bactéries oxydent l’arsenic</a>, le manganèse ou le fer, ce qui permet de piéger l’arsenic à la surface de particules, formées au cours des réactions d’oxydation. Au niveau des racines, des bactéries et champignons ont une action bénéfique sur la croissance des plantes.</p>
<figure class="align-right zoomable">
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<figcaption>
<span class="caption">Sulfures d’arsenic et d’antimoine recouvrant un biofilm.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Extrait de la thèse d’Elia Laroche/BRGM</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Plus profondément dans le massif de résidu, d’autres bactéries, appartenant au groupe des <a href="https://link.springer.com/content/pdf/10.1007/s00792-010-0309-4.pdf">sulfato-réductrices</a> pourraient se développer en absence d’oxygène. Ces micro-organismes, lorsqu’on leur fournit une source d’énergie organique, font <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0304389416308822">précipiter sous forme de sulfures</a> divers métaux ainsi que l’arsenic ou l’antimoine.</p>
<p>Ainsi, des mécanismes microbiens, lorsqu’ils sont judicieusement maîtrisés, permettent de piéger sous forme de phases solides les polluants initialement dissous. Pour cette raison, l’évolution des populations de micro-organismes au cours de la mise en place du procédé de phytostabilisation, à différentes profondeurs, est très attentivement examinée.</p>
<p>En conclusion, les plantes et les micro-organismes peuvent contribuer à piéger les polluants d’origine minière, tels que les métaux et les métalloïdes. L’ingénierie inspirée par la nature peut contribuer de façon non négligeable à la réduction des risques autour des anciennes mines, à travers des procédés nécessairement adaptés aux conditions particulières de chaque site (minéralogie, topologie, hydrologie, biodiversité).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143469/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabienne Battaglia-Brunet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La dispersion de résidus chargés en métaux sur d’anciens sites miniers est source de pollution. Des chercheurs mettent au point une méthode pour les piéger à l’aide de plantes et de micro-organismes.Fabienne Battaglia-Brunet, Chercheuse en microbiologie, BRGMLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1461802020-10-08T13:35:17Z2020-10-08T13:35:17ZLe Mali mérite mieux que ce que le Canada et son aide internationale lui offrent<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/360353/original/file-20200928-18-dcbogx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le Mali connaît un nouveau gouvernement de transition après le coup d'État du 18 août. L'aide que lui apporte le Canada est réservé aux enjeux de sécurité et à un illusoire développement économique.</span> <span class="attribution"><span class="source">(AP Photo)</span></span></figcaption></figure><p>On s’intéresse rarement au Mali, pays du Sahel africain, hormis lorsqu’il s’y passe des événements spectaculaires, comme lors du dernier coup d’État, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Coup_d%27%C3%89tat_de_2020_au_Mali">survenu le 18 août</a>, des attentats sanglants, comme <a href="https://www.lesoleil.com/actualite/monde/mali-lonu-denonce-un-ignoble-attentat-a-gao-ou-les-canadiens-sont-deployes-81fe3312c072659192b3f3903645bfef">ceux de Gao, où des Canadiens sont déployés, en 2018</a> ou dans la capitale, Bamako (le <a href="https://www.journaldemontreal.com/2017/06/18/mali-attaque-en-cours-contre-un-campement-touristique-a-bamako-frequente-par-des-occidentaux">dernier, revendiqué par Al-Qaida, perpétré en 2017</a>). Ou encore, sur une note moins dramatique, lorsqu’un de nos responsables politiques y est en visite.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/360354/original/file-20200928-18-1jf28ea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/360354/original/file-20200928-18-1jf28ea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/360354/original/file-20200928-18-1jf28ea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/360354/original/file-20200928-18-1jf28ea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/360354/original/file-20200928-18-1jf28ea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/360354/original/file-20200928-18-1jf28ea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/360354/original/file-20200928-18-1jf28ea.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La transition du pouvoir après le coup d’État du 18 août : l’ancien ministre de la Défense Bah N’Daw, à droite, et le colonel Assimi Goita, chef de la junte qui a fomenté le coup d’État, lors d’une cérémonie dans la capitale, Bamako, le 25 septembre.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo</span></span>
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<p>Bref, le regard porté est souvent filtré par nos intérêts plutôt que sur les aspirations du peuple malien.</p>
<p>De façon générale, les coups d’État sont présentés comme une « malédiction » du continent africain. En l’absence d’une analyse plus fine de l’imbrication complexe d’enjeux internes et externes à l’origine de ces événements, c’est le vieux réflexe de supériorité occidental qui prend le dessus : ces pays sont « jeunes » et ont besoin de notre appui pour leur montrer la voie.</p>
<p>Ces supposées « explications » ne servent en fait que de masque pour permettre la poursuite du « business as usual » dont l’appropriation des ressources de pays présentés comme pauvres, alors qu’ils sont pourtant riches en ressources naturelles convoitées par les grandes puissances économiques.</p>
<p>Le coup d’État au Mali du 18 août était le deuxième en huit ans, après celui de 2012, et le quatrième depuis l’indépendance. <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/national/2020-08-29/le-canada-reevalue-ses-liens-avec-le-mali-apres-le-coup-d-etat.php">Le ministre des Affaires étrangères, François-Philippe Champagne, l’a condamné</a> et a déclaré que le gouvernement réévalue ses relations avec le Mali, tout en précisant que le Canada n’allait pas y retirer ses soldats et son aide.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/360356/original/file-20200928-16-1gugbu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/360356/original/file-20200928-16-1gugbu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/360356/original/file-20200928-16-1gugbu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/360356/original/file-20200928-16-1gugbu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/360356/original/file-20200928-16-1gugbu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/360356/original/file-20200928-16-1gugbu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/360356/original/file-20200928-16-1gugbu2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des gens célèbrent dans les rues de Bamako au lendemain du coup d’État, le 19 août. Les coups d’État sont présentés comme une « malédiction » du continent africain. C’est le vieux réflexe de supériorité occidental qui prend le dessus : ces pays sont « jeunes » et ont besoin de notre appui pour leur montrer la voie. (AP Photo).</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo</span></span>
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<p>Professeure émérite à la Faculté de science politique et de droit de l’Université du Québec à Montréal, je dirige en ce moment une équipe de recherche avec des partenaires au Mali et au Sénégal sur le thème de l’accès à la santé, les ressources minières et le rôle des politiques publiques en Afrique.</p>
<h2>L’aide militaire américaine</h2>
<p>Ce qu’il y a de nouveau dans ce dernier coup d’État ce sont les liens qui commencent à être mis en évidence entre, d’une part, la formation donnée à des militaires africains par les États-Unis (par le passé avec une participation canadienne) et, d’autre part, l’implication fréquente de ces militaires dans des coups d’État sur le continent.</p>
<p><a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0022343317713557">Une étude dans le <em>Journal of Peace Research</em> en 2017</a> révèle que, sur une période de 40 ans, deux tiers des coups d’État réussis ont été menés par des officiers ayant reçu une formation militaire américaine. Notons que la plus grande partie de la coopération internationale au Mali est allouée au secteur sécuritaire et non pas au développement social, à la lutte contre la pauvreté et aux droits de la personne.</p>
<p>Les analyses restent largement silencieuses sur cette présence militaire massive et sur les autres facteurs de risque de déstabilisation. De fait, l’enjeu principal pour la coopération au Mali est la sécurisation du pays en vue de permettre avant tout l’exploitation des ressources naturelles — dont l’or –, <a href="https://www.ieim.uqam.ca/spip.php?page=article-cooperation&id_article=10160">et ce malgré le discours d’aide au développement que nous aimons nous répéter</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/360355/original/file-20200928-18-17javg6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/360355/original/file-20200928-18-17javg6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/360355/original/file-20200928-18-17javg6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/360355/original/file-20200928-18-17javg6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/360355/original/file-20200928-18-17javg6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/360355/original/file-20200928-18-17javg6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/360355/original/file-20200928-18-17javg6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des Maliens manifestent en faveur du nouveau gouvernement de transition, le 21 août, à Bamako. Plusieurs pancartes affichent leur hostilité à la France, qui déploient de nombreux soldats au Mali dans le cadre de l’opération Barkhane. Les Américains — et par le passé les Canadiens — assurent aussi la formation de militaires.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo</span></span>
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<h2>Le facteur or</h2>
<p><a href="https://www.jeuneafrique.com/mag/749972/economie/industries-extractives-au-mali-une-filiere-en-or/">Le rythme d’extraction de l’or est en augmentation rapide au Mali</a>. La production industrielle d’or a battu un nouveau record en 2019 en atteignant 65,1 tonnes, en progression de 7 % par rapport à 2018. L’or fournit les trois-quarts des recettes d’exportation du pays, mais faute d’activités de valorisation et de transformation en aval, sa contribution au PIB n’est que d’environ 6 à 7 %.</p>
<p>Les sociétés minières canadiennes sont bien implantées au Mali et leur présence est en croissance. Selon Ressources naturelles Canada, les <a href="https://www.rncan.gc.ca/cartes-outils-publications/publications/publications-sur-les-mineraux-le/actifs-miniers-canadiens/actifs-miniers-canadiens-annexe-1/15407">actifs des compagnies minières canadiennes seraient passés de 1,680 million de dollars en 2017 à 1,843 million en 2018</a>. La présence du Canada s’est renforcée avec <a href="https://www.international.gc.ca/trade-commerce/trade-agreements-accords-commerciaux/agr-acc/mali/fipa-apie/index.aspx?lang=fra&_ga=2.164354047.1719881756.1597672646-1486702162.1583786280">l’accord bilatéral sur la promotion et la protection des investissements</a> de 2016 qui favorise et garantit les investissements canadiens au Mali.</p>
<p>Les solutions aux enjeux complexes auxquels est confronté le Mali (islamisme radical, pauvreté, inégalités, etc.) ne résident pas simplement dans une meilleure formation des militaires, à qui on propose pourtant de donner des cours sur la démocratie et la gouvernance.</p>
<p><a href="https://afrimag.net/les-mines-medaille-dor-de-leconomie-du-mali/#Le_quart_du_budget_du_Mali">Malgré 13 mines actives</a>, le modèle actuel d’extraction ne suscite que très peu d’achats de biens en contenu local, peu d’emplois locaux, et peu d’effets d’entrainement sur l’économie.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/360358/original/file-20200928-22-1vud01z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/360358/original/file-20200928-22-1vud01z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/360358/original/file-20200928-22-1vud01z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/360358/original/file-20200928-22-1vud01z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/360358/original/file-20200928-22-1vud01z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/360358/original/file-20200928-22-1vud01z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/360358/original/file-20200928-22-1vud01z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des mineurs en train de traiter des pierres dans une mine d’or, le 22 janvier, à Kidal. Une ruée vers l’or est en cours dans le nord du Mali, dans une zone où opèrent des militants liés à Al-Qaïda.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AP Photo/Baba Ahmed</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le Canada doit clarifier ses propres objectifs et atteindre une cohérence beaucoup plus grande entre ses interventions en matière d’investissement, de commerce, de sécurisation et de développement s’il veut améliorer sa coopération au Mali. Ce n’est pas le modèle actuel de mise en valeur des ressources campé dans une vision étroite de la sécurité et les manifestations de « croissance économique » à court terme qui en résultent qui réduiront les inégalités et apporteront plus de stabilité au Mali.</p>
<h2>Vers une coopération informée par des perspectives maliennes</h2>
<p>En cette période où émerge une nouvelle vague de conscience sur le racisme et la discrimination avec « Idle No More » et « Black Lives Matter », il est grand temps de reconnaître que les stratégies du Canada au Mali devraient être revues de fond en comble.</p>
<p>Le Canada sera jugé très sévèrement par la jeune génération actuelle et celles à venir si nous perpétuons et finançons des stratégies au Mali et en Afrique qui ne seraient jamais acceptables chez nous. Elles sont clairement la manifestation d’un sentiment de supériorité raciale que nous avons encore du mal à nommer.</p>
<p>Des alternatives existent. Valorisons les perspectives de chercheurs, intervenants et décideurs du Mali dans le but de susciter une redéfinition en profondeur de nos approches en matière de coopération. Valorisons aussi la <a href="https://www.giersa.ulaval.ca/.Articlesurlesecteurminierhttps://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/02255189.2019.1650333">recherche qui se fait au Canada depuis des décennies sur ce pays et la sous-région</a> en partenariat avec des acteurs locaux. Des voix importantes de la société civile malienne lancent un appel à surmonter la <a href="https://lessor.site/pr-doulaye-konate-il-faut-des-initiatives-endogenes-pour-juguler-cette-crise.html">déconnexion entre les milieux dans lesquels sont produits les savoirs et les cercles où les décisions se prennent</a>.</p>
<p>Pourrions-nous nous en inspirer ? De telles synergies pourraient être réalisées, par exemple, en mettant en place des consortiums de réflexion qui seraient accessibles aux décideurs et aux chercheurs canadiens et maliens. Ces espaces devraient avoir pour principal objectif de briser les approches en silos : les intérêts économiques du Canada, les risques sécuritaires, les inégalités sociales, le renforcement de la démocratie ou le développement économique et social sont traités comme des questions séparées.</p>
<p>Mais avant toute chose, c’est aux acteurs locaux que revient la responsabilité de redéfinir les priorités de développement et non, comme c’est encore le cas aujourd’hui, aux intervenants étrangers.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146180/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bonnie Campbell receives funding from
Conseil de recherches en sciences humaines CRSH</span></em></p>Alors que le Mali vient de connaître un autre coup d’État, l’aide internationale, dont du Canada, est réservée surtout aux enjeux de sécurité, en grande partie afin d’assurer l’exploitation minière.Bonnie Campbell, Professeure émérite en économie politique. Département de science politique de l' Université du Quéebc à Montréal., Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.