tag:theconversation.com,2011:/ca/topics/obsolescence-32257/articlesobsolescence – The Conversation2022-12-21T18:19:42Ztag:theconversation.com,2011:article/1966202022-12-21T18:19:42Z2022-12-21T18:19:42ZCadeaux de Noël : la fabrication de nos appareils numériques a une énorme empreinte carbone<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/502191/original/file-20221220-26-ecence.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C992%2C667&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Si vous tenez absolument à offrir des produits électroniques à vos proches,
cherchez des informations environnementales et sociales sur les produits que vous souhaitez acheter.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>La période des fêtes arrive à grands pas et vous cherchez à offrir des appareils électroniques à vos proches ? Téléphones intelligents, consoles vidéos, tablettes, liseuses, montres connectées, ordinateurs, batteries externes ; le moins qu’on puisse dire, c’est que les options sont nombreuses.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/en-construction-mieux-vaut-preconiser-le-bois-pour-reduire-lempreinte-carbone-des-batiments-180752">En construction, mieux vaut préconiser le bois pour réduire l’empreinte carbone des bâtiments</a>
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<p>Mais, en tant que consommateurs de ces produits, sommes-nous vraiment conscients de l’énorme coût carbone associé à tout le cycle de vie de notre cadeau, de la fabrication, à l’utilisation et à la fin de vie de ces appareils électroniques ? Dans un <a href="https://doi.org/10.1016/j.spc.2022.09.025">article publié récemment</a>, mes collègues et moi avons montré que l’empreinte carbone associée à l’utilisation des services numériques (regarder des films et de séries en diffusion en continu, écouter de la musique, envoyer des courriels, faire des rencontres en visioconférence) est dominée par la fabrication des appareils électroniques.</p>
<p>En tant que chercheurs travaillant sur les impacts environnementaux des systèmes économiques, nous pensons qu’il est important d’alerter les utilisateurs de services numériques sur les enjeux associés à la production de leurs appareils électroniques. Nous fournissons également quelques trucs et astuces à celles et ceux qui souhaitent offrir un produit électronique comme cadeau.</p>
<h2>Une production effrénée de produits électroniques et de déchets</h2>
<p>Le trafic de données numériques est passé de <a href="https://twiki.cern.ch/twiki/pub/HEPIX/TechwatchNetwork/HtwNetworkDocuments/white-paper-c11-741490.pdf">100 Go par jour en 1992 à 46 000 Go par seconde en 2017, et pourrait atteindre 150 000 Go par seconde avant la fin de 2022</a>. La numérisation de notre société s’est également accompagnée d’une utilisation intensive d’appareils électroniques.</p>
<p>En 2019, les quatre milliards d’utilisateurs de services numériques dans le monde possédaient <a href="https://www.greenit.fr/empreinte-environnementale-du-numerique-mondial/">34 milliards d’appareils numériques</a>. Le nombre d’appareils électroniques connectés à l’internet devrait atteindre <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0959652621031577">200 milliards d’unités d’ici 2030</a>.</p>
<p>La production effrénée d’appareils électroniques produite chaque année génère aussi une quantité importante de déchets électroniques à traiter en fin de vie. On estime que le monde a généré <a href="https://ewastemonitor.info/gem-2020/">53 millions de tonnes de déchets électroniques en 2019, dont seulement 17 % ont été recyclés</a>. En moyenne, un Canadien génère <a href="https://globalewaste.org/map/">20 kg de déchets électroniques par an</a>.</p>
<h2>L’empreinte carbone des appareils électroniques</h2>
<p><a href="https://doi.org/10.1016/j.spc.2022.09.025">Dans un article publié récemment</a>, nous avons créé plusieurs profils d’utilisation de services numériques (intensif, modéré et consciencieux) afin de comparer l’empreinte carbone des utilisateurs en fonction d’un certain nombre de paramètres. On parle notamment du nombre d’appareils électroniques achetés, le modèle et le temps que les consommateurs décident de les garder.</p>
<p>Uniquement à cause de la fabrication des appareils électroniques, l’empreinte carbone varie de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2352550922002652">90 kg à 327 kg d’éq. CO₂ par an</a>.</p>
<p>Pour mettre ces chiffres en perspective, il suffit de les relativiser par rapport au budget carbone disponible pour chaque habitant de la terre (<a href="https://www.unep.org/emissions-gap-report-2020">2,1 t éq. CO₂ par an</a>) afin de respecter les accords climatiques. À titre comparatif, les émissions par personne des Québécoises et Québécois représentent en moyenne <a href="https://unfccc.int/documents/194925">près de 10 t éq. CO₂ par an</a>. On estime ainsi que le poids annuel de la fabrication des appareils électroniques dans le budget carbone des utilisateurs varie entre 4 % (utilisateur consciencieux) à 16 % (utilisateur intensif).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502181/original/file-20221220-6047-ko0oa2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Empreinte carbone de la fabrication des appareils électroniques en fonction des profils des utilisateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Luciano Rodrigues Viana), Fourni par l’auteur</span></span>
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<p>Le budget carbone des utilisateurs peut être encore plus compromis lorsqu’on y ajoute la consommation d’électricité des appareils électroniques. Un utilisateur intensif en Alberta consommerait ainsi 25 % de son budget carbone (électricité très carbonée). <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2352550922002652">Ces chiffres s’élèvent à 17 % pour le même profil d’utilisation au Québec (électricité bas carbone)</a>.</p>
<p>N’oublions pas qu’il faut également ajouter à ce budget carbone ce que nous mangeons, les transports que nous utilisons, nos vacances, nos voyages d’affaires, nos vêtements, le chauffage de notre maison, et j’en passe. Bref, vous avez compris que chaque choix de consommation est important dans l’équation de notre budget carbone, budget que nous souhaitons respectueux des objectifs climatiques mondiaux.</p>
<p>À la lumière de ces résultats, acheter moins de produits électroniques et surtout prolonger leur durée de vie sont les deux actions les plus efficaces pour réduire l’empreinte carbone des utilisateurs des services numériques.</p>
<p>Bien que cette solution semble triviale, l’obsolescence technologique rapide et les pressions sociales incitent les utilisateurs à acheter régulièrement de nouveaux appareils électroniques au lieu de les conserver plus longtemps.</p>
<p>Aux États-Unis, par exemple, les téléphones intelligents sont remplacés, en moyenne, <a href="https://www.statista.com/statistics/619788/average-smartphone-life/">après 2,75 ans d’utilisation</a>. À l’échelle mondiale, <a href="https://librairie.ademe.fr/cadic/7327/guide-longue-vie-smartphone.pdf">1,43 milliard de téléphones intelligents</a> ont été vendus en 2021. Ces chiffres renforcent la nécessité d’une utilisation plus raisonnée des produits numériques.</p>
<h2>D’où provient cette empreinte carbone aussi élevée ?</h2>
<p>L’impact carbonique élevé des produits électroniques provient notamment de <a href="https://librairie.ademe.fr/consommer-autrement/1190-modelisation-et-evaluation-du-poids-carbone-de-produits-de-consommation-et-biens-d-equipement.html">la production de cartes et de composants électroniques de puissance et de contrôle, ainsi que de la production d’écrans pour les produits concernés</a>.</p>
<p>L’extraction et la transformation de minéraux indispensables à la fabrication des produits électroniques (or, argent, cuivre, cobalt, lithium, terres rares et autres) nécessitent une grande quantité d’énergie.</p>
<p>En outre, la production de composants et l’assemblage de produits finis sont en grande partie réalisés en Chine (<a href="https://arxiv.org/abs/2102.02622">61 % de la production du secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC) pour 2015</a>), où la production d’électricité est très carbonée.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=266&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=266&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=266&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=334&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=334&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502182/original/file-20221220-20-zxuzeo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=334&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Empreinte carbone de la fabrication de certaines marques et modèles de téléphones intelligents. Le transport, l’utilisation et les étapes de fin de vie ne sont pas inclus dans l’évaluation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Luciano Rodrigues Viana), Fourni par l’auteur</span></span>
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<h2>Au-delà de la culpabilisation des utilisateurs des TIC</h2>
<p>Si l’action individuelle peut réduire notre empreinte écologique liée à la fabrication des appareils électroniques, elle est largement insuffisante pour l’émergence d’une industrie numérique compatible avec les limites planétaires. Les États et les entreprises ont donc un rôle fondamental à jouer.</p>
<p>Les gouvernements doivent, entre autres, créer des lois pour lutter contre le gaspillage de ressources matérielles et énergétiques. Par exemple, <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/indice-reparabilite">exiger que les fabricants des produits électroniques affichent le niveau de réparabilité de leurs produits</a> et même interdire la commercialisation des produits non réparables et non recyclables.</p>
<p>Les entreprises doivent d’adopter des modèles économiques cohérents avec les enjeux environnementaux et sociaux de notre époque.</p>
<p>Aujourd’hui, le modèle économique utilisé par la plupart des fabricants des appareils électroniques est largement basé sur <a href="https://www.qqf.fr/infographie/49/obsolescence-programmee">l’obsolescence programmée (technique, esthétique et logicielle)</a>. En d’autres mots, c’est une stratégie qui vise à créer, chez les consommateurs, un besoin constant l’amenant à racheter de nouveaux biens.</p>
<p>Ces pratiques sont vraisemblablement en contradiction avec les efforts actuels pour développer une industrie numérique cohérente avec une trajectoire de neutralité carbone.</p>
<h2>Offrir des produits numériques</h2>
<p>Si vous tenez absolument à offrir des produits électroniques à vos proches, n’oubliez pas de considérer au moins trois aspects dans votre décision.</p>
<p>En premier lieu, assurez-vous que votre cadeau sera réellement utilisé. Il est dommage de mobiliser autant de matières premières et d’énergie pour fabriquer des appareils qui seront très peu, voire jamais utilisé. <a href="https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/5942-evaluation-de-l-impact-environnemental-de-la-digitalisation-des-services-culturels.html">L’empreinte carbone d’une liseuse</a>, par exemple, est amortie entre 50 et 100 livres lus. Ainsi, pour une personne qui lit, disons cinq livres par an, il faut garder la liseuse de 10 à 20 ans pour que chaque livre électronique supplémentaire ait moins d’impact carbone que le format papier.</p>
<p>Deuxièmement, achetez de préférence des produits reconditionnés. Par exemple, en moyenne, un téléphone intelligent reconditionné est <a href="https://librairie.ademe.fr/cadic/7327/guide-longue-vie-smartphone.pd">jusqu’à 8 fois moins impactant pour l’environnement que le neuf</a> (82 kg de matières économisées et 87 % de gaz à effet de serre en moins). C’est bon pour la planète, mais aussi pour le porte-monnaie !</p>
<p>Enfin, cherchez des informations environnementales et sociales sur les produits que vous souhaitez acheter. Il faut choisir ceux qui sont <a href="https://tcocertified.com/fr/criteria-overview/">plus facilement réparables</a>, <a href="https://www.ecoconso.be/fr/content/label-ange-bleu-blauer-engel-pour-le-materiel-informatique">efficaces d’un point de vue énergétique</a>, émettent moins de carbone et fabriqués dans le <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/nouveau-monde/nouveau-monde-fairphone-2-le-smartphone-anti-geek_2383230.html">respect des droits de l’humain</a>.</p>
<p>La prochaine fois que quelqu’un vous offrira un produit électronique, vous saurez désormais qu’il a un impact très important sur la planète. Assurez-vous au moins de lui donner la plus longue vie possible !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196620/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Luciano Rodrigues Viana a reçu des financements du Conseil de Recherches en Sciences Naturelles et en Génie du Canada (CRSNG). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jean-François Boucher a reçu des financements du Conseil de Recherches en Sciences Naturelles et en Génie du Canada (CRSNG).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mohamed Cheriet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’empreinte carbone associée à l’utilisation des services numériques est dominée par la fabrication des appareils électroniques. À l’approche de Noël, une prise de conscience s’impose.Luciano Rodrigues Viana, Doctorant en sciences de l'environnement, Département des sciences fondamentales, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Jean-François Boucher, Professeur, Eco-consulting, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Mohamed Cheriet, Full Professor, System Engineering Department & General Director, CIRODD: Interdisciplinary Research Centre on the Opérationnalisation of Sustainability Development, École de technologie supérieure (ÉTS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1697652021-10-20T19:40:33Z2021-10-20T19:40:33ZVos appareils électroniques sont-ils obsolètes de plus en plus rapidement ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/427214/original/file-20211019-15-1mp7047.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=24%2C9%2C2020%2C1523&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un écran cassé peut souvent se remplacer, mais ce n’est pas le cas de tous les composants de nos téléphones, tablettes et ordinateurs.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/zooboing/4668010058/in/photostream/">Patrick Hoesly, Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>En 2019, l’ADEME <a href="https://librairie.ademe.fr/cadic/1866/guide-pratique-impacts-smartphone.pdf">soulignait</a> que 88 % des Français changent de téléphone alors que le précédent est encore en état de marche et que seuls 15 % des téléphones sont collectés pour être recyclés.</p>
<p>La fabrication de dispositifs électroniques et leur remplacement rapide demandent beaucoup de ressources, notamment <a href="https://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-terres-rares-ademe/">terres rares</a> et ressources pétrolières. En effet, à l’heure même où l’<a href="https://www.lemonde.fr/blog/huet/2021/08/09/le-rapport-du-giec-en-18-graphiques/">on cherche à diminuer drastiquement son utilisation</a>, le pétrole reste un <a href="https://www.planete-energies.com/fr/medias/decryptages/la-petrochimie-une-industrie-incontournable">matériau de base</a> pour de nombreux produits de notre quotidien (plastiques, tissus synthétiques, films d’emballage notamment).</p>
<p>Ces produits représentent également une source de pollution importante : <a href="https://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-terres-rares-ademe/">80 % des déchets électroniques</a> ne peuvent pas être recyclés et sont soit incinérés, soit enfouis.</p>
<p>Même si elle ne résout pas tous les problèmes liés à la surconsommation, la lutte contre l’obsolescence programmée permet de limiter l’utilisation extensive des ressources et la pollution, tout en permettant aux consommateurs de réaliser de substantielles économies.</p>
<h2>Qu’est-ce que l’obsolescence programmée ?</h2>
<p>L’obsolescence programmée est définie en France par l’<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032225325/">article L441-2 du code de la consommation</a> : « L’obsolescence programmée se définit par l’ensemble des techniques par lesquelles le metteur sur le marché d’un produit vise à en réduire délibérément la durée de vie pour en augmenter le taux de remplacement ».</p>
<p>Cette obsolescence programmée peut revêtir de multiples facettes. L’<strong>obsolescence technique</strong> fait suite à une faiblesse matérielle délibérée qui rend le produit inutilisable. Elle peut se manifester sous la forme de la panne d’un composant essentiel, de l’utilisation de matériaux peu robustes ou encore en introduisant un dispositif limitant la durée de vie du produit. Par exemple, certaines imprimantes indiquent que les cartouches d’impression sont vides <a href="https://www.lesnumeriques.com/imprimante/obsolescence-programmee-imprimantes-epson-ne-convainc-pas-n72957.html">alors qu’il reste encore de l’encre</a>.</p>
<p>L’<strong>obsolescence logicielle</strong> impacte les biens électroniques, principalement les smartphones, les tablettes et les ordinateurs. Certains appareils ne permettent plus l’installation des systèmes et logiciels les plus récents. Officiellement, ce blocage permet d’éviter l’installation d’un logiciel que l’appareil ne pourrait pas utiliser pleinement en raison de ses caractéristiques techniques.</p>
<p>A contrario, l’utilisateur se voit parfois imposer l’installation de la dernière version du système d’exploitation, celle-ci ralentissant considérablement le fonctionnement de l’appareil. L’entreprise Apple a été condamnée en France à 25 millions d’euros d’amende <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/apple-condamne-a-une-amende-de-25-millions-d-euros-par-l-autorite-de-la-concurrence_2117598.html">pour ce motif</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-lutte-pour-une-agriculture-libre-bricoler-et-partager-pour-semanciper-147051">La lutte pour une agriculture libre : bricoler et partager pour s’émanciper</a>
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<p>Enfin, l’<strong>obsolescence programmée indirecte</strong> rend un produit inutilisable en raison de l’indisponibilité d’un produit ou d’un composant associé. Nous retrouvons dans cette catégorie l’impossibilité de trouver un chargeur de remplacement pour un produit électronique, l’incapacité de réparer un produit en raison de l’inexistence des pièces détachées nécessaires à sa réparation ou encore l’excessivité du prix de la réparation. C’est la raison pour laquelle l’Europe <a href="https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/l-europe-veut-de-vrais-chargeurs-universels-20210923">souhaite imposer l’utilisation de chargeurs universels pour les smartphones</a>.</p>
<p>Deux autres catégories d’obsolescence viennent s’ajouter à celles-ci : l’<strong>obsolescence esthétique</strong>, qui ne repose pas sur une usure anticipée ou une impossibilité d’utiliser le produit, mais sur le recours à des techniques marketing pour créer un besoin de changement chez l’utilisateur. Le produit possédé apparaît alors comme dépassé, soit en raison de son esthétique, soit des fonctionnalités qu’il propose. Nous pouvons également citer ici l’<strong>obsolescence écologique</strong>, qui a vu le jour <a href="https://www.moustique.be/actu/2017/09/26/les-ecolos-planifient-aussi-obsolescence-168505">ces dernières années</a> : certaines entreprises incitent les consommateurs à changer un produit en état de fonctionnement par un nouveau produit qui serait plus économe en énergie.</p>
<h2>D’où vient ce concept ?</h2>
<p>Officiellement, l’obsolescence programmée est apparue suite à la crise économique de 1929 : Bernard London, un courtier new-yorkais, <a href="https://www.cairn.info/revue-du-mauss-2014-2-page-50.htm">propose</a>, alors de déterminer une durée de vie pour les produits afin d’en faciliter le renouvellement. Il ne s’agit pas précisément d’obsolescence programmée, mais plutôt d’« obsolescence planifiée ». Dans cette vision, chaque produit doit avoir une durée de vie déterminée lors de sa fabrication, et les <a href="https://www.cairn.info/revue-du-mauss-2014-2-page-50.htm">consommateurs ont l’obligation de ne plus utiliser ces produits passée cette limite</a>, même si les produits peuvent encore techniquement être utilisés. Bien que cette proposition n’ait pas été mise en œuvre, elle a contribué à l’acceptation de l’obsolescence programmée, démontrant ses atouts économiques et sociaux – les enjeux environnementaux et ceux liés à la rareté de certaines ressources n’étaient alors pas d’actualité.</p>
<p>Le premier exemple d’obsolescence programmée date cependant d’avant la crise de 1929. En 1924, les principaux fabricants d’ampoules mondiaux se sont réunis secrètement, créant le premier cartel mondial. Les ampoules fabriquées jusqu’alors avaient une durée de vie importante, la durée moyenne de fonctionnement étant de 2500 heures (une ampoule <a href="https://www.nouvelobs.com/sciences/20160607.OBS2022/la-belle-histoire-de-l-ampoule-qui-brille-depuis-115-ans.html">fonctionne depuis 1901</a> dans la caserne de pompiers de Livermore en Californie). Cette longévité limitant les revenus de ces entreprises, la décision de <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/industry-story-au-diable-la-vie-eternelle.N543299">plafonner la durée de fonctionnement à 1000 heures</a> fut prise. Chaque entreprise du cartel se devait de respecter cet engagement, et des contrôles étaient réalisés dans les sites de fabrication pour vérifier sa bonne mise en œuvre.</p>
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<p>Depuis cette époque, l’obsolescence programmée est <a href="https://journals.openedition.org/tc/12557">omniprésente</a> dans le monde économique, permettant de redynamiser des marchés saturés ou en voie de saturation.</p>
<h2>Comment lutter contre l’obsolescence programmée ?</h2>
<p>Plusieurs initiatives permettent de lutter contre l’obsolescence programmée.</p>
<p>Après la création d’un « <em>Repair Café</em> » à Amsterdam en 2009, des communautés d’utilisateurs se sont développées à travers l’Europe pour proposer des ateliers de réparation de produits défectueux ou des <a href="https://www.linfodurable.fr/technomedias/ou-trouver-des-tutoriels-en-ligne-pour-reparer-vos-objets-vous-memes-17317">tutoriels</a>. D’autres communautés permettent d’offrir une deuxième vie à des objets en leur trouvant un nouveau propriétaire, que ce soit en les vendant, par don ou par troc.</p>
<p>Les États se mobilisent aussi pour lutter contre ce phénomène. Ainsi, en France, depuis le 1<sup>er</sup> janvier 2021, les fabricants de certains produits doivent afficher un indice de réparabilité. Cet indice permet à l’acheteur de connaître les possibilités de réparation d’un produit lors de son achat.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/dans-la-fabrique-de-lindice-de-reparabilite-en-vigueur-depuis-janvier-2021-155536">Dans la fabrique de « l’indice de réparabilité » en vigueur depuis janvier 2021</a>
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<p>L’obsolescence logicielle représente un défi majeur. Une <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/numerique-et-environnement-remise-au-parlement-du-rapport-sur-lobsolescence-logicielle-prevu">étude</a> initiée par le Ministère de la Transition Écologique suggère d’imposer aux fabricants d’assurer les mises à jour pendant au moins 5 ans après la fabrication. En attendant que de telles initiatives aboutissent, les auteurs de cette étude recommandent de ne faire que les mises à jour indispensable à la sécurité pour les équipements électroniques anciens, car les mises à jour peuvent ralentir l’équipement concerné.</p>
<p>La législation française considère l’obsolescence programmée comme un délit <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006069565/LEGISCTA000032222837/#LEGISCTA000032225329">Article 441-2 du Code de la consommation</a>, mais la preuve de ce délit est presque impossible à établir. Une <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4054_proposition-loi">proposition de loi a été initiée le 7 avril 2021</a>. Celle-ci propose d’étendre la durée minimale de garantie légale sur les biens matériels de 2 à 10 ans et de garantir la disponibilité des pièces détachées sur cette durée.</p>
<p>Si celle-ci est validée, elle représentera une avancée considérable pour lutter contre le phénomène d’obsolescence programmée.</p>
<p>Une prise de conscience des utilisateurs est également nécessaire. En effet, au-delà de la problématique d’obsolescence avec une panne empêchant totalement le fonctionnement de l’appareil, d’après une étude de l’ADEME, 88 % des téléphones portables remplacés chaque année <a href="https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/1886-tiroirs-pleins-de-telephones-remplaces-consommateurs-et-objets-a-obsolescence-percue.html">fonctionnent encore</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169765/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Delphine Billouard-Fuentes ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>D’où viennent les pannes de nos appareils électroniques ? Sont-ils réparables ? Retour sur les différents types d’obsolescence et les outils législatifs pour contenir les abus.Delphine Billouard-Fuentes, Professeur associé, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1315322020-02-19T19:44:01Z2020-02-19T19:44:01ZDu Sénat aux lobbies, retour sur le vote de la loi antigaspillage<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/316174/original/file-20200219-11005-afbjpf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Selon l’Ademe, en France, moins de la moitié des appareils ménagers en panne sont réparés. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Suite au <a href="https://www.vie-publique.fr/loi/268681-loi-lutte-contre-le-gaspillage-et-economie-circulaire">vote final de la loi</a> « anti-gaspillage pour une économie circulaire » par le parlement, le 30 janvier 2020, plusieurs mesures phares vont prochainement entrer en vigueur.</p>
<p>Si l’attention médiatique à l’égard de ce texte s’est focalisée sur la <a href="https://theconversation.com/comprendre-la-polemique-sur-la-consigne-des-bouteilles-plastiques-126651">consigne</a> ou le plastique, un autre volet – la lutte contre l’obsolescence programmée – était également au cœur des débats. Plusieurs mesures ont ainsi pour objectif d’allonger la durée de vie des produits pour en finir avec « cette arnaque pour le consommateur comme pour la planète », pour reprendre les termes de la secrétaire d’État Brune Poirson. La création d’un indice de réparabilité pour 2021, figure parmi les initiatives les plus marquantes.</p>
<p>D’autres mesures sont à noter : les éco-organismes devront mettre en place un fonds de la réparation et un fonds du réemploi, pour financer au-delà du recyclage ces piliers de l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/economie-circulaire-26694">économie circulaire</a> ; les consommateurs devraient être mieux informés de la durabilité des produits pour faire des choix éclairés ; l’irréparabilité intentionnelle devient un délit au même titre que l’obsolescence programmée ; les fabricants vont devoir respecter de nouvelles obligations sur la disponibilité des pièces détachées…</p>
<p>Or nombre de ces dispositions n’étaient pas prévues dans le projet de loi initial. Comment expliquer ce résultat final ? Nous proposons de dévoiler ici le jeu entre les différents acteurs (élus et lobbies) qui a conduit à l’évolution du cadrage réglementaire concernant la durabilité des objets.</p>
<h2>Des sénateurs pionniers contre l’obsolescence</h2>
<p>Suite aux nombreux échanges organisés par le gouvernement autour de la « feuille de route économie circulaire », un projet de loi a été proposé au banc des sénateurs en septembre 2019 ; cette première copie a ensuite été revue et amendée par les députés, avant l’accord définitif de janvier 2020.</p>
<p>Contrairement à leur réputation conservatrice, les sénateurs ont été à l’avant-garde de l’économie circulaire, votant de nombreuses dispositions en première lecture pour favoriser notamment la réparation et la durabilité des produits.</p>
<p>Ils ont, par exemple, intégré dans le projet de loi un nouvel indice de durabilité ; exigé la transparence des critères permettant de déterminer l’indice de réparabilité proposé par le gouvernement ; obligé la disponibilité des pièces détachées dans le secteur médical pendant 10 ans ou encore la mise en place d’un compteur d’usage sur les produits (à l’instar d’un compteur kilométrique sur les automobiles). Les sénateurs ont également voté deux fonds ambitieux – dédiés à la réparation et au réemploi.</p>
<p>Certains reculs par rapport au projet de loi initial du gouvernement ont toutefois été constatés : date d’entrée en vigueur de l’indice de réparabilité repoussé d’un an, tout comme le délai maximal de livraison des pièces détachées, passé de 20 à 30 jours.</p>
<p>Beaucoup de ces mesures ont été votées contre l’avis du gouvernement, sous l’impulsion de sénateurs écologistes, socialistes, communistes ou républicains, ayant sans doute cherché une caisse de résonance politique pour faire de l’écologie un sujet phare en pointant les lacunes du gouvernement en ce domaine.</p>
<p>Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a ainsi <a href="https://www.senat.fr/presse/cp20190918.html">dénoncé un projet de loi</a> « pas à la hauteur de la nécessaire “accélération écologique” annoncée par le premier ministre ». Dans ce même communiqué de presse, la rapporteur (LR) souligne que le Sénat a « substantiellement enrichi le texte [pour] promouvoir le réemploi et la réparation par la création d’un fonds d’aide à la réparation permettant de prendre en charge une partie des coûts, souvent dissuasifs » ou encore « d’interdire la publicité incitant à jeter des produits encore en état de marche ».</p>
<p>Les sénateurs avaient donc mis la barre assez haut avant le passage du projet de loi à l’Assemblée nationale.</p>
<h2>Des mesures en demi-teinte</h2>
<p>Les députés et la majorité gouvernementale n’ont pas voulu se montrer moins déterminés que le Sénat en matière d’écologie. Les rapporteurs ont dit chercher à « consolider » le texte afin d’en assurer la sécurité juridique, c’est-à-dire éviter de voter des textes inapplicables ou attaquables au niveau européen.</p>
<p>Dans les faits, l’ambition de la plupart des mesures a été revue à la baisse, tout en restant plus importante que le projet initial de l’exécutif. Ainsi, l’indice de réparabilité a été rétabli pour 2021, et étendu dans son format à un indice de durabilité d’ici 2024. Le gouvernement et les députés ont supprimé le compteur d’usage obligatoire, le réduisant à une démarche volontaire dans le cadre de l’indice de durabilité (les produits ayant un compteur recevraient une meilleure note). La loi a ramené la disponibilité obligatoire des pièces dans le secteur médical à 5 ans, mais l’a étendu à d’autres catégories de produits, comme les ordinateurs et les <em>smartphones</em>, pièces qui devront finalement être fournies dans un délai maximum de 15 jours.</p>
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<figcaption><span class="caption">Brune Poirson et l’obsolesce programmée. (Arte, 2019).</span></figcaption>
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<p>En septembre 2019, les sénateurs avaient aussi fait preuve de volontarisme en créant une « garantie logicielle », rassurant le consommateur quant au bon fonctionnement de son téléphone ou de sa tablette avec des mises à jour pendant 10 ans. Seulement, les députés sont revenus en arrière : le consommateur aura simplement le droit de refuser toute mise à jour (sans dissociation de confort ou sécurité).</p>
<p>Dans les deux chambres, le sujet de l’extension de la garantie légale de conformité ou de la publicité sont restés tabous. Malgré de nombreux amendements déposés par des parlementaires sur ces deux thèmes, invoquant respectivement la protection des consommateurs face aux risques de pannes prématurées et le rôle de l’obsolescence culturelle, rien de significatif n’a été adopté.</p>
<p>Au-delà des consignes de vote pouvant émaner des ministères, qui influence les parlementaires dans le dépôt d’amendements et leurs arguments ?</p>
<h2>Des lobbies bien organisés</h2>
<p>En coulisses du vote des lois, les groupes d’intérêts s’activent pour freiner de nouvelles dispositions ou aller plus loin. Il est rare, en effet, que les propositions d’amendements d’un projet de loi émergent de la seule initiative des parlementaires. Ces derniers consultent, plus ou moins officiellement lors d’auditions ou de rendez-vous, des ONG, associations, think tank, fabricants, distributeurs, fédérations professionnelles, syndicats…</p>
<p>Depuis peu, certains parlementaires s’engagent dans une démarche de <em>sourcing</em>, afin de renseigner l’origine de l’amendement porté lorsque celui-ci a été proposé par un représentant d’intérêts, garantissant davantage de transparence, sans pour autant remettre en cause le principe selon lequel le mandat impératif est nul et que le droit de vote des membres du parlement est personnel (<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexteArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006527492&cidTexte=JORFTEXT000000571356&dateTexte=19581005">article 27 de la Constitution)</a>.</p>
<p>Avec seulement <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/ce-que-declarent-les-deputes-sur-les-lobbies-qui-les-influencent_fr_5e187a8ac5b6da971d146d4a?utm_hp_ref=fr-politique">4,4 % des amendements adoptés sourcés (ou 10 % des amendements recevables)</a> dans le cadre de la loi antigaspillage pour une économie circulaire, cette pratique est encore trop récente et peu généralisée, pour permettre d’en tirer des résultats significatifs sur l’origine et la proportion des représentants d’intérêts présents.</p>
<p>Cependant, nous constatons que les acteurs de l’économie sociale, solidaire et de l’environnement ont été très actifs, aux côtés des fédérations professionnelles. Les associations WWF, Zero Waste France, Surfrider, Halte à l’obsolescence programmée et Tara Océan sont le plus souvent citées dans les amendements adoptés.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/316188/original/file-20200219-11000-2854gr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/316188/original/file-20200219-11000-2854gr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/316188/original/file-20200219-11000-2854gr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1061&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/316188/original/file-20200219-11000-2854gr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1061&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/316188/original/file-20200219-11000-2854gr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1061&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/316188/original/file-20200219-11000-2854gr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1333&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/316188/original/file-20200219-11000-2854gr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1333&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/316188/original/file-20200219-11000-2854gr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1333&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Quel « sourcing » pour la loi sur l’économie circulaire ?</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.cominst.com/app/uploads/2019/12/Visuel-sourcing-De%CC%81cembre-2019.png">Cominst</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Toutefois, les parlementaires assument, plus ou moins aisément, leurs sources d’influence. Tous les groupes politiques ne le renseignent d’ailleurs <a href="https://www.cominst.com/app/uploads/2019/12/Visuel-sourcing-De%CC%81cembre-2019.png">pas dans les mêmes proportions</a>. Les députés de la République en marche, la France insoumise, les Socialistes, le MoDem, Libertés et territoires sont plus enclin à la transparence que Les Républicains ou l’UDI.</p>
<p>De même, les industriels ou groupements d’entreprises ont certainement moins intérêt à être visibles auprès du grand public, contrairement aux associations qui peuvent ainsi démontrer leur efficacité auprès des citoyens et militants.</p>
<p>Les associations ont joué un rôle clef dans le résultat du débat parlementaire en rehaussant l’ambition de la loi. Dans un climat politique tendu au sujet du climat, illustré par de nombreuses manifestations, <a href="https://www.lemonde.fr/climat/article/2018/12/07/la-mobilisation-citoyenne-pour-le-climat-prend-racine_5394337_1652612.html">notamment des jeunes</a>, ou encore les résultats du <a href="https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-33248-synthese-debats.pdf">Grand débat</a> ou de la <a href="https://www.conventioncitoyennepourleclimat.fr">Convention citoyenne</a> pour le climat, les jeux d’acteurs ont eu raison d’un texte substantiellement renforcé entre le projet de loi initial du gouvernement et la loi finalement votée.</p>
<p>Bien que restant très mesuré, le texte prend désormais davantage en compte l’allongement la durée de vie des produits, essentiellement via l’incitation des citoyens à une consommation durable et des entreprises à davantage de transparence, voire – dans une moindre mesure – d’obligations, en faveur de la réparation, pour une logique de construction d’une économie plus « circulaire ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/131532/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laetitia Vasseur travaille également pour l’association HOP (Halte à l’obsolescence programmée), qu’elle a co-fondée. Elle a reçu des financements publics pour cette association. </span></em></p>Dans les coulisses de l’élaboration de la loi antigaspillage, adoptée par le parlement français fin janvier 2020.Laetitia Vasseur, Doctorante économie circulaire en sciences de gestion, ESCP Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1278362019-12-12T17:23:42Z2019-12-12T17:23:42ZLutter contre l’obsolescence programmée, pas qu’une affaire de bobos<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/303742/original/file-20191126-112526-edn5z6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C523%2C5548%2C3147&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les activistes contre l’obsolescence programmée sont sociologiquement plus variés qu’on ne peut le croire.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/success?u=http%3A%2F%2Fdownload.shutterstock.com%2Fgatekeeper%2FW3siZSI6MTU3NDgwNTA5OSwiYyI6Il9waG90b19zZXNzaW9uX2lkIiwiZGMiOiJpZGxfMTI3NTQ5Mzg4NSIsImsiOiJwaG90by8xMjc1NDkzODg1L2h1Z2UuanBnIiwibSI6MSwiZCI6InNodXR0ZXJzd">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Voté par le Sénat à la quasi-unanimité, le <a href="http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/dossiers/lutte_gaspillage_economie_circulaire">projet de loi anti-gaspillage pour une économie circulaire</a> a été examiné le 9 décembre 2019 par l’Assemblée nationale. Parmi les mesures phares, l’adoption d’un indice de réparabilité, qui indique si un produit est réparable, difficilement réparable ou non réparable. Il permettrait, en aiguillant le choix du consommateur, de lutter contre l’obsolescence programmée.</p>
<p>Le projet de loi est présenté par ses promoteurs comme une mesure en faveur de la protection de l’environnement. « Le tout jetable, le gaspillage, l’incinération, la mise en décharge ne peuvent plus être la solution dans un monde où il faudrait 5 planètes si l’ensemble des êtres humains vivaient comme des Européens », écrit Brune Poirson, Secrétaire d’État auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire, <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/economie-circulaire-senat-adopte-projet-loi-anti-gaspillage">sur le site du Ministère</a>.</p>
<p>La loi, ses avancées et ses insuffisances ont été commentées par de nombreuses associations écologistes, comme <a href="https://www.zerowastefrance.org/loi-anti-gaspillage-au-senat-des-reculs-sur-le-plastique-des-avancees-concretes-pour-la-seconde-main/">Zero Waste</a> ou <a href="https://www.wwf.fr/vous-informer/actualites/loi-anti-gaspillage-un-premier-pas-sur-la-consigne-mais-encore-beaucoup-a-faire-pour-mettre-fin-au">WWF</a>. Sur la scène médiatique, la durée de vie des produits paraît essentiellement formulée comme une problématique environnementale. Est-ce à dire que la question ne préoccupe que des militants écologistes, <a href="https://theconversation.com/bienvenue-dans-lere-de-la-consommation-spirituelle-108970">souvent associés à des profils sociaux urbains et surdiplômés</a> ?</p>
<h2>Au-delà du profil bien connu du militant vert</h2>
<p>Dans le cadre d’une thèse de doctorat en sociologie à Sciences Po, nous menons des enquêtes pour comprendre les profils des consommateurs et citoyens qui s’intéressent à la question.</p>
<p>L’une d’entre elles, menée en ligne auprès de 2505 volontaires, porte sur les sympathisants d’une association particulièrement active sur cette thématique : Halte à l’obsolescence programmée (HOP). Créée en 2015, HOP vise à fédérer les citoyens, les entreprises et les décideurs pour encourager le développement <a href="http://www.halteobsolescence.org/">« de produits durables et réparables »</a>. Elle réunit une base de plus de 20 000 abonnés à sa newsletter.</p>
<p>Si l’on devait faire le portrait-robot du militant de l’obsolescence programmée, il se rapprocherait des écologistes d’Europe Écologie les Verts, décrits par le sociologue <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2013/06/14/des-verts-a-europe-ecologie-quoi-de-neuf_3430150_3232.html">Daniel Boy</a>.</p>
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<figcaption><span class="caption">L’obsolescence programmée en une minute (AFP).</span></figcaption>
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<p>Nous avons comparé certaines de leurs caractéristiques à celles de la moyenne des Français – en nous appuyant sur des <a href="https://www.elipss.fr/fr/#leprojet">statistiques nationales</a> et <a href="http://www.europeansocialsurvey.org/">européennes</a>. La majorité des répondants sont en effet plus engagés, plus à gauche et plus sensibles à l’écologie que la moyenne. Quatre fois plus nombreux que la moyenne des Français à avoir milité dans un parti politique au cours des 12 derniers mois, ils sont trois fois plus à avoir signé une pétition ou boycotté un produit.</p>
<p>En ce qui concerne la sensibilité environnementale, 80 % de nos répondants se déclarent très ou extrêmement préoccupés par le changement climatique, contre 34 % seulement des Français.</p>
<p>À grands traits, on pourrait résumer ce public à une population de cadres urbains diplômés. Près de la moitié d’entre eux habite dans une grande ville ou à proximité, contre moins d’un tiers des Français. 55 % des interrogés sont diplômés du second ou du troisième cycle du supérieur, contre seulement 17 % des Français. Les catégories « cadres » et « professions intermédiaires » représentent d’ailleurs à elles seules 78 % des répondants d’Halte à l’obsolescence programmée – alors qu’elles ne concernent que 54 % des Français.</p>
<h2>Pas uniquement des citoyens très engagés</h2>
<p>Si ce profil domine, il ne rend pourtant pas justice à la diversité des personnes qui s’intéressent à la durée de vie des objets. Il est intéressant de l’analyser plus finement, au-delà des grands chiffres majoritaires.</p>
<p>Du côté des opinions politiques, soulignons que 23 % se considèrent du centre ou de droite, voire d’extrême droite. Si les électeurs de Benoît Hamon ou Jean‑Luc Mélenchon sont surreprésentés parmi les répondants, cela n’exclut pas un grand nombre d’électeurs d’Emmanuel Macron (22 % contre <a href="https://www.interieur.gouv.fr/Archives/Archives-elections/Election-presidentielle-2017/Election-presidentielle-2017-resultats-globaux-du-premier-tour">23 % de Français</a> ayant voté pour lui au premier tour), ni des électeurs de partis de droite (13 % si l’on regroupe Marine Le Pen, François Fillon et les partis divers droite).</p>
<p>En termes d’engagement citoyen, la moitié des répondants ne sont impliqués dans aucune autre association que HOP. Ceux qui militent également dans une association environnementale, politique ou sociale ne représentent qu’un tiers d’entre eux.</p>
<p>Les personnes qui se soucient de la durée de vie des objets partagent néanmoins un consensus sur l’idée qu’il faudrait consommer moins. Mais elles sont aussi équipées en matière d’objets électroniques ou électroménagers que l’ensemble des Français.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/303782/original/file-20191126-112499-b0zs0v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/303782/original/file-20191126-112499-b0zs0v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/303782/original/file-20191126-112499-b0zs0v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=239&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/303782/original/file-20191126-112499-b0zs0v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=239&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/303782/original/file-20191126-112499-b0zs0v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=239&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/303782/original/file-20191126-112499-b0zs0v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=301&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/303782/original/file-20191126-112499-b0zs0v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=301&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/303782/original/file-20191126-112499-b0zs0v.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=301&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Types d’équipements possédés. Lecture : 96 % des répondants HOP résidant sur le territoire français possédant un four, contre 94 % des Français. Population : 1945 enquêtés du questionnaire HOP ayant indiqué qu’ils résidaient dans un département français (0 % de non-réponses). 2337 parmi les 2362 enquêtés d’ELIPSS (1 % de non-réponses), appelés « Français » ici.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Halte à l’obsolescence programmée, enquête style de vie et environnement ELIPSS 2017</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une variété de profils sociaux</h2>
<p>Globalement, les répondants sont représentatifs de la diversité sociologique et géographique française.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/303777/original/file-20191126-112539-tycap0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/303777/original/file-20191126-112539-tycap0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/303777/original/file-20191126-112539-tycap0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/303777/original/file-20191126-112539-tycap0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/303777/original/file-20191126-112539-tycap0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/303777/original/file-20191126-112539-tycap0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/303777/original/file-20191126-112539-tycap0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/303777/original/file-20191126-112539-tycap0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Répartition des répondants HOP par rapport aux Français. Lecture : 12 % des répondants HOP résident en Auvergne-Rhône-Alpes, comme 12 % des Français. Population : 1945 répondants parmi les 2505 enquêtés HOP (22 % de non réponses). Estimation sur 66 992 699 Français.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Halte à l’obsolescence programmée, données juin 2019/Insee, estimation de la population au 1ᵉʳ janvier 2019, données de fin 2018</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Toutes les catégories socio-professionnelles sont représentées (employés, retraités, chômeurs, étudiants et personnes au foyer). Les tranches de revenu vont de moins de 950 € (13 % contre 15 % des Français) à plus de 2500 € par <a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1802">unité de consommation</a> (26 % contre 27 % des Français).</p>
<p>Les secteurs d’activité sont eux aussi variés, bien que certains soient surreprésentés, comme l’enseignement ou la recherche (15 %), le secteur médical (10 %), l’informatique (8 %), le commerce et la distribution (7 %) ou encore le service à la personne (7 %). Notre population d’enquête compte des instituteurs, des buralistes, des techniciens informatiques, des cheminots, mais aussi des journalistes, des conseillers bancaires, ou encore des secrétaires de direction.</p>
<p>Notons aussi que les genres sont équilibrés, avec légèrement plus d’hommes (54 % des répondants), tandis que les adhérents d’Europe-Écologie-les-Verts comptent seulement un <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2013/06/14/des-verts-a-europe-ecologie-quoi-de-neuf_3430150_3232.html">tiers de femmes</a>. Les tranches d’âge sont bien distribuées. Les moins de 35 ans (21 %) sont à peu près aussi nombreux que les plus de 65 ans (16 %), les 36-45 ans, les 46-55 ans et les 56-65 ans (plus ou moins 20 %).</p>
<h2>La durée de vie des objets, un enjeu pluriel</h2>
<p>Comment alors expliquer que se retrouvent, dans une même association, un agriculteur breton sexagénaire, électeur de François Fillon et peu préoccupé par la question du climat, et une jeune architecte d’intérieur mélenchoniste, résidant dans le Nord de la France ?</p>
<p>Cette capacité à regrouper des profils et des intérêts aussi variés est liée au fait que la cause de la durée de vie des objets rassemble autour de plusieurs enjeux. Les répondants s’accordent à dire que l’obsolescence programmée a beaucoup, voire énormément, de conséquences négatives sur l’environnement, mais aussi sur le consommateur. Le volet environnemental de la cause est souvent mis en avant : plus des deux tiers des répondants se disent plus sensibles à cet enjeu. Mais un quart des répondants priorise plutôt la défense du consommateur, priorité qui s’accroît quand le niveau de diplôme est plus faible.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/303775/original/file-20191126-180279-cx1sp2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/303775/original/file-20191126-180279-cx1sp2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/303775/original/file-20191126-180279-cx1sp2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=176&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/303775/original/file-20191126-180279-cx1sp2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=176&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/303775/original/file-20191126-180279-cx1sp2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=176&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/303775/original/file-20191126-180279-cx1sp2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=222&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/303775/original/file-20191126-180279-cx1sp2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=222&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/303775/original/file-20191126-180279-cx1sp2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=222&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Lecture : parmi les deux enjeux de l’obsolescence programmée proposés, 55 % des répondants titulaires d’un CAP/BEP sont plus sensibles à la défense du consommateur, contre 75 % des Bac +3 et plus. Population : 2 505 enquêtés. Précision : nous avions proposé les deux premières modalités uniquement, et une modalité « Autre » qui a été recodée ensuite en « Les deux » et « Aucun », et « Autres » (qui désigne quelques autres domaines plus marginaux).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Halte à l’obsolescence programmée, données juin 2019</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La pluralité des thèmes dont relève la question de l’obsolescence programmée et, au-delà, celle de la durée de vie des objets, est visible dans la façon dont les individus en parlent. Les termes utilisés pour résumer leur opinion sur le sujet varient.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/303774/original/file-20191126-112522-18z9fj4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/303774/original/file-20191126-112522-18z9fj4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/303774/original/file-20191126-112522-18z9fj4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=519&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/303774/original/file-20191126-112522-18z9fj4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=519&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/303774/original/file-20191126-112522-18z9fj4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=519&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/303774/original/file-20191126-112522-18z9fj4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=652&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/303774/original/file-20191126-112522-18z9fj4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=652&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/303774/original/file-20191126-112522-18z9fj4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=652&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Nuage de mots à partir de la réponse libre à la question : « En trois mots, que vous évoque l’obsolescence programmée ? » Lecture : la taille du mot est proportionnelle à son nombre d’occurrences parmi les réponses. Le mot « gaspillage » a été employé 387 fois, et le mot « court-termisme » a été employé 5 fois. Population : 2299 répondants sur 2 505 enquêtés (8 % de non-réponses).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Halte à l’obsolescence programmée, données juin 2019</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>L’analyse des trois termes les plus cités fait part de cette polysémie. En premier, le « gaspillage » (mentionné 387 fois), terme hautement normatif, évoque le non-sens causé par le raccourcissement de la durée de vie des objets. En deuxième, la « pollution » (330 fois) pointe du doigt les conséquences environnementales déjà citées. En troisième, l’« arnaque » (321 fois) fait davantage référence au duo producteur-consommateur, à travers une accusation indignée du système industriel, plaidant pour une meilleure protection des acheteurs. Ces termes embrassent donc des aspirations à gagner en autonomie, en tant que consommateurs et citoyens, vis-à-vis des produits.</p>
<p>À l’heure où il s’agit d’encourager l’évolution vers des modes de vie plus sobres et durables, la thématique de la durée de vie des objets, par sa capacité à atteindre une diversité d’acteurs, semble constituer un levier intéressant.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/127836/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julie Madon ne possède pas de parts et ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article. Elle est financée par un contrat doctoral de Sciences Po pour réaliser sa thèse, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son poste universitaire.</span></em></p>Cet enjeu, qui touche à la fois l’environnement et la protection du consommateur, parvient à mobiliser un large panel de citoyens.Julie Madon, Doctorante au Centre de Sociologie des Organisations, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/907882018-02-01T05:39:02Z2018-02-01T05:39:02ZLa consommation durable, un levier pour l’Europe<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/204013/original/file-20180130-107713-12phjkn.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les déchets électroniques, dont le volume augmente fortement depuis dix ans, sont parmi les plus difficiles à recycler.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/green-ram-card-collection-825262/">Fancycrave/Pexels</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article est republié dans le cadre de la Fête de la Science 2018 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<p><em>Thierry Libaert est intervenu au séminaire <a href="https://www.collegedesbernardins.fr/passe-et-avenir-de-la-civilisation-europeenne">« Passé et avenir de la civilisation européenne »</a> organisé par le Collège des Bernardins.</em></p>
<hr>
<p>L’Europe ne fait plus rêver. La totale indifférence dans laquelle se sont achevées les cérémonies de commémoration du 60<sup>e</sup> anniversaire du Traité de Rome, signé en 1957, confirme que le grand rêve des pères fondateurs est derrière nous. Du pantouflage chez Goldman Sachs de l’ancien président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, aux errements publics sur le glyphosate, la confiance des citoyens s’est érodée. Comment la rétablir ? Peut-être en luttant contre les pratiques abusives, obsolescence programmée en tête.</p>
<h2>Les pistes du retour à la confiance</h2>
<p>Pour que l’Europe inspire à nouveau confiance, trois voies complémentaires s’offrent à elle. Ses institutions doivent en premier lieu modifier leurs pratiques, pour prendre davantage en considération la voix de la société civile. L’Europe doit également s’inventer un nouveau récit, porté par une politique de communication globale et cohérente qui ne doit plus seulement être l’agrégation des communications de chacune de ses institutions. Enfin, les institutions européennes doivent se positionner fortement sur les nouveaux enjeux qui préoccupent la grande majorité des citoyens européens.</p>
<p>Au nombre de ces enjeux figure l’obsolescence programmée. De nombreux citoyens européens ont vécu, au moins une fois dans leur existence, la désagréable expérience de voir un produit neuf tomber en panne <a href="https://www.euractiv.fr/section/developpement-durable/news/des-chercheurs-s-interrogent-sur-l-obsolescence-programmee/">peu après son achat</a>. De retour au magasin, le consommateur s’entend alors suggérer qu’il ferait mieux d’en racheter un autre : pièces de rechange indisponibles, trop chères, délais de réparation interminables… Voire, pour certains appareils électroniques (ordinateurs, tablettes, smartphones), produits purement et simplement irréparables.</p>
<h2>Les subtilités de l’obsolescence programmée</h2>
<p>Bien que cette situation soit une réalité, l’obsolescence programmée a trop longtemps été présentée comme une manœuvre délibérée des industriels. Ceux-ci saboteraient eux-mêmes le fonctionnement de leurs produits pour accélérer leurs taux de renouvellement. Ces pratiques ont certes pu exister, notamment dans le secteur des imprimantes ou de l’électroménager, mais elles sont désormais rarissimes. </p>
<p>En effet, aujourd’hui aucune entreprise ne peut assumer le risque réputationnel lié à la divulgation d’un mécanisme délibéré de fin de vie de ses produits. En réalité, le problème de l’obsolescence programmée concerne davantage le vieillissement accéléré : mises à jour logicielles qui retardent la vitesse d’exécution des ordinateurs, incompatibilités techniques (obligation d’achat d’un nouveau chargeur à chaque acquisition d'un nouveau modèle de tablette), et, plus fréquemment encore, freins voire impossibilité de réparabilité des produits.</p>
<h2>Épuisement des ressources, pollution, chômage et endettement</h2>
<p>Les conséquences de cette obsolescence programmée sont multiples. Environnementales tout d’abord : c’est sous cet angle que le problème a commencé à émerger au début des années 60, avec la publication du livre de Vance Packard, <a href="https://www.jstor.org/stable/pdf/3320020.pdf?refreqid=excelsior%3Aab672fb51f12d52f011e4a0c31d21719"><em>L’art du gaspillage</em></a>. Non seulement l’obsolescence programmée participe-t-elle à la raréfaction des matières premières (60 métaux différents sont nécessaires pour fabriquer un smartphone, dont des métaux rares), mais surtout elle implique l’accroissement des déchets. C’est principalement le cas dans les filières électriques et électroniques, qui sont les moins facilement recyclables. Les déchets d’équipements électriques et électroniques sont l’un des flux de déchets dont la croissance est la plus rapide dans l’Union Européenne (3 à 5 % par an). Chaque année, <a href="http://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/waste/key-waste-streams/weee">10 millions de tonnes de ces déchets (appareils électroménagers, ordinateurs, imprimantes, appareils photo numériques…) sont jetés</a>. Une tendance qui va se poursuivre dans les années à venir, puisque les douze millions de tonnes devraient être dépassés en 2020.</p>
<p><br>
<a href="http://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/waste/key-waste-streams/weee"></a></p><figure><a href="http://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/waste/key-waste-streams/weee"><img src="https://i.imgur.com/K1C9aGq.gif"></a></figure><br><p></p>
<p>L’impact de l’obsolescence programmée ne se limite pas à l’environnement. Ses conséquences sont également sociales, car avec la fin de la réparabilité, c’est toute une filière d’emplois de proximité qui disparaît. <a href="http://www.rreuse.org/wp-content/uploads/Routes-to-Repair-RREUSE-final-report.pdf">Un rapport du Parlement européen</a> a ainsi montré en 2017 que 2 000 emplois avaient été perdus en sept ans aux Pays-Bas. En Allemagne, en une seule année, 13 % des magasins de réparation radio et TV ont fermé. Enfin, en France, en l’espace de deux ans ce secteur a perdu 8 % de ses effectifs. On comprend mieux ces chiffres si l’on sait que seuls 44 % des appareils électriques et électroniques qui tombent en panne sont effectivement réparés…</p>
<p>Outre les pertes d’emploi, cette obsolescence programmée a un autre impact sociétal majeur. L’observation des pratiques de consommation indique en effet que les produits les moins chers sont, en toute logique, prioritairement achetés par les catégories professionnelles les plus défavorisées. Or, ces produits d’entrée de gamme sont souvent aussi les plus fragiles. En se retrouvant obligés de racheter fréquemment des produits même peu onéreux, les ménages les plus modestes sont entraînés dans une spirale négative qui peut les mener à un endettement massif.</p>
<h2>Une carte à jouer pour l’Europe</h2>
<p>Les problématiques liées à l’obsolescence programmée dépassent les enjeux socio-économiques, pour toucher également à la santé publique et à l’éthique professionnelle (déchets envoyés dans les pays en développement, <a href="http://geopolis.francetvinfo.fr/l-afrique-reste-desarmee-face-aux-dechets-electroniques-qui-s-accumulent-150743">par exemple</a>). Cette situation pourrait toutefois constituer un avantage pour les entreprises qui fabriqueraient des produits durables. Celles-ci pourraient espérer tirer parti de la désaffection des citoyens européens devant les produits « jetables ».</p>
<p>Pour y parvenir, les solutions ne manquent pas. La première consisterait à mettre en place un dispositif d’affichage de la durée de vie des produits. Ce dispositif présenterait l’avantage d’être peu onéreux, et surtout de redonner le pouvoir au consommateur. <a href="http://www.eesc.europa.eu/fr/news-media/press-releases/label-durable-56-de-vente-en-plus-pour-les-produits-longue-duree-de-vie-le-cese-publie-une-nouvelle-etude-sur">Testée en 2015 sur plus de 3 000 consommateurs européens</a> répartis dans quatre grandes zones géographiques, cette solution a fait ses preuves. Les consommateurs qui repèrent l’information sur la durée de vie des produits sont prêts à acheter plus cher des produits plus durables. La boucle est donc vertueuse puisqu’elle profite aussi bien au consommateur qu’à l’entreprise.</p>
<p>Extension du système de garantie, réorientation des dépenses publiques… Des solutions complémentaires existent, sur lesquelles pourraient s’appuyer les futures politiques européennes. Un groupe de travail rassemblant des représentants d’entreprises, des consommateurs, des environnementalistes et des syndicats a permis d’en identifier une vingtaine, listées dans notre dernier ouvrage, <a href="http://www.lespetitsmatins.fr/collections/deprogrammer-lobsolescence/"><em>Déprogrammer l’obsolescence</em></a>.</p>
<h2>Quasi-unanimité contre l’obsolescence programmée</h2>
<p>Aujourd’hui, toutes les composantes de la société civile et l’ensemble des formations politiques, à l’exception des mouvements populistes, s’accordent à considérer que l’obsolescence programmée est un sujet majeur que la Commission européenne doit désormais prendre en compte. Pour preuve, l’avis que nous avions proposé en octobre 2013 au Comité économique et social européen avait été voté à la quasi-unanimité. Il en a été de même en juillet 2017 lors du <a href="http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P8-TA-2017-0287+0+DOC+XML+V0//FR">vote d’une résolution du Parlement européen</a> sur le sujet.</p>
<p><a href="http://www.lemonde.fr/entreprises/article/2017/12/29/apple-s-excuse-et-reduit-le-cout-de-remplacement-de-ses-batteries_5235580_1656994.html">La récente reconnaissance par Apple</a> de ses pratiques de vieillissement anticipé, la recevabilité d’une <a href="https://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/obsolescence-programmee-enquete-ouverte-sur-le-fabricant-d-imprimantes-epson_1972203.html">plainte contre le groupe Epson</a>, tout ceci prouve, s’il en était encore besoin, la réalité des pratiques non conformes. Celles-ci sont en conflit avec l’idéal d’une Europe initiant une transition économique plus juste et plus responsable. La lutte contre ces dérives, qui concernent chaque consommateur, pourrait faire réémerger le sentiment d’une Europe proche des préoccupations de chacun, une Europe de proximité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/90788/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thierry Libaert est membre de Comité Economique et Social Européen de Fondation pour la Nature et l'Homme, de La fabrique Ecologique, de Comité d'Ethique Publicitaire.. </span></em></p>Et si la lutte contre l’obsolescence programmée permettait à l’Europe de regagner la confiance de ses citoyens ?Thierry Libaert, Conseiller au Comité Économique et Social Européen, Collège des BernardinsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/851652017-10-08T19:01:02Z2017-10-08T19:01:02ZÊtes-vous Terriens ou Martiens ? Plaidoyer pour une économie permacirculaire<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/188972/original/file-20171005-15464-1evml6u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/closeup-seedlings-eggshell-405672208">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Terriens ou Martiens ? La question peut paraître oiseuse. Elle semble pourtant avoir déjà été tranchée dans l’esprit des propagandistes de la fuite en avant technologique et des décideurs qu’ils hypnotisent.</p>
<p>Et nous ne cessons d’y répondre nous-mêmes par nos modes de vie, par leur effet global cumulé. En dépassant les capacités de charge de la planète (que l’on mesure avec l’<a href="https://le-cartographe.net/dossiers-carto-91/monde/176-lempreinte-ecologique">« empreinte écologique »</a>) ou en franchissant (pour considérer une autre batterie d’indicateurs globaux) les <a href="http://www.nature.com/nature/journal/v461/n7263/full/461472a.html">« limites planétaires »</a>, nous agissons quasiment tous comme si nous disposions d’une autre planète – comme si Mars s’apprêtait à nous accueillir ! Ce « nous » masque certes des inégalités dans la responsabilité, mais il s’agit ici d’aborder un autre aspect du problème.</p>
<p>Le niveau global où se situent les indicateurs pertinents pour évaluer l’impact de nos activités sur la planète est, pour nous autres humains, d’ordre purement scientifique. Il renvoie à une dimension de la réalité à laquelle nos sens ne nous donnent aucun accès et il n’est actuellement pris en charge par aucune instance politique.</p>
<p>Le Conseil de sécurité des Nations unies veille à la paix mondiale mais pas au non-franchissement des limites planétaires, même si les questions environnementales peuvent désormais y avoir droit de cité. L’Accord de Paris de 2015 a représenté à cet égard un réel progrès.</p>
<p>Dans un ouvrage qui vient de paraître (<em><a href="https://www.puf.com/content/Ecologie_integrale">Écologie intégrale : pour une société permacirculaire</a></em>, Éditions Puf), nous proposons de faire entrer cet horizon global dans l’arène démocratique. Nous proposons de transformer en objet de décision politique (en prenant l’échelle d’une nation particulière) la question du non-franchissement des limites planétaires. Et nous prétendons que la réponse à cette question conditionne la faisabilité d’une économie authentiquement circulaire. La seule qui nous permette de continuer à vivre sur Terre.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"902954081207152641"}"></div></p>
<h2>Des indicateurs dans le rouge</h2>
<p>Quel que soit l’indicateur choisi, nous avons déjà franchi les limites de la Terre. Nous consommons désormais à l’échelle mondiale 1,7 planète, c’est-à-dire <a href="https://open.library.ubc.ca/cIRcle/collections/ubctheses/831/items/1.0088048">plus de ressources</a> que la Terre n’est capable de nous en procurer sans dégradations. En 2017, le jour du dépassement des capacités terrestres a eu lieu dès le 2 août. Depuis, nous vivons à crédit.</p>
<p>De manière générale, les flux de matières mondiaux <a href="http://unep.org/documents/irp/16-00169_LW_GlobalMaterialFlowsUNEReport_FINAL_160701.pdf">croissent plus rapidement</a> que le PIB mondial, et ce depuis le début des années 2000. Dans l’article qu’il a rédigé pour l’ouvrage <a href="https://www.puf.com/content/Dictionnaire_de_la_pens%C3%A9e_%C3%A9cologique"><em>Dictionnaire de la pensée écologique</em></a> (2015), l’ingénieur François Grosse rappelle ainsi :</p>
<blockquote>
<p>« La consommation mondiale d’acier pendant l’année 2011 – environ 1,5 milliard de tonnes – est supérieure à la production cumulée de fer de toute l’espèce humaine jusqu’à 1900, depuis les origines préhistoriques de la sidérurgie. Un paramètre déterminant de ce bouleversement est l’"invention" de la croissance économique : pendant les millénaires précédents, le PIB mondial a augmenté à un rythme inférieur à 0,1 % par an […], soit une augmentation cumulée de moins (voire beaucoup moins) de 10 % par siècle. À l’échelle de l’évolution des sociétés, la transformation de l’économie humaine depuis un ou deux siècles constitue donc un choc, auquel rien n’a préparé notre espèce. »</p>
</blockquote>
<p>Ce choc est perpétué par notre système économique, essentiellement pour deux raisons : les pays riches maintiennent coûte que coûte leur niveau de consommations matérielles et les classes moyennes des pays émergents accèdent aux modes de vie occidentaux.</p>
<p>Si l’on se tourne du côté de l’autre indicateur global, <a href="http://science.sciencemag.org/content/347/6223/1259855">celui des limites planétaires</a>, la situation n’est guère plus rassurante. Sur les neuf limites dont le franchissement ferait basculer le système-Terre dans un état inédit par rapport à celui que nous avons connu depuis la fin du précédent âge glaciaire, nous en avons déjà franchi quatre : dans le domaine du climat, de la biodiversité, de l’usage des sols et concernant les flux de phosphore et d’azote associés à nos activités agricoles.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"791544181093203968"}"></div></p>
<h2>Le piège environnemental</h2>
<p>Rien de bien visible ne se passe pourtant, objectera-t-on. Tel a longtemps été le cas, en effet. Mais plus maintenant. Il n’y a désormais guère de lieu sur Terre où, d’une manière ou d’une autre, on ne perçoive le changement climatique : qu’il s’agisse de la fonte rapide de nombreux glaciers ainsi que de celle du Larsen C dans l’Antarctique Ouest, de la hausse des températures en Arctique (20 °C au-dessus des moyennes saisonnières fin 2016 et début 2017), de l’élévation du niveau des mers dans l’océan Indien ou de vagues de chaleurs, d’inondations, de cyclones ou de typhons, en Asie comme en Amérique du Nord.</p>
<p>Nous touchons ici au cœur du piège environnemental : nous pouvons dégrader la planète longtemps sans conséquences visibles ; quand elles le deviennent, il est trop tard pour se prémunir des dommages associés au niveau de dégradation atteint. Nous en sommes là pour le climat au moins. Et même <a href="https://www.nature.com/nclimate/journal/v7/n9/full/nclimate3352.html">si nous parvenons</a>, quasiment par miracle, à ne pas trop excéder une augmentation de la température moyenne à la fin du siècle de 2 °C, ce n’est <a href="http://www.atmos-chem-phys.net/16/3761/2016/">pas une promenade climatique</a> qui nous attend !</p>
<p>Jusqu’où irons-nous sur la voie qui demeure encore celle de toutes les nations, poursuivant la croissance de leur PIB, laquelle se traduit immanquablement en consommation croissante de ressources ? Jusqu’à l’effondrement ? Nous ne nous aventurerons pas à répondre. Rappelons seulement que le fameux <a href="http://www.donellameadows.org/wp-content/userfiles/Limits-to-Growth-digital-scan-version.pdf">Rapport Meadows de 1972</a> sur les limites à la croissance prévoyait que, dans l’hypothèse alarmante où l’on ne ferait rien pour changer les choses, les courbes retraçant nos activités économiques et la démographie mondiale entre 2020 et 2040 s’inverseraient rapidement, sous la forme d’une profonde dégradation économique et sociale.</p>
<p>Bornons-nous à constater que la mollesse de nos réactions, le primat que nous accordons en tous points ou presque à notre modèle économique nous conduisent nécessairement, dans une <a href="http://www.worldbank.org/en/news/feature/2012/05/09/growth-to-inclusive-green-growth-economics-sustainable-development">course à l'uniformisation des pratiques</a> qui n’a jamais été officiellement approuvée par quelque instance démocratique ou scientifique que ce soit, à une fuite en avant technologique.</p>
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<figcaption><span class="caption">135 ans de réchauffement climatique en 30 secondes, une vidéo réalisée par la NASA (Climatecentraldotorg, 2015).</span></figcaption>
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<h2>Mars, l’impossible option</h2>
<p>Cette fuite en avant constitue de fait une fuite en avant spatiale. Continuer sur notre lancée suppose que nous allions, dans un avenir relativement proche, chercher des matériaux sur d’autres planètes et, au final, que nous changions de planète !</p>
<p>Tel est d’ailleurs bel et bien l’imaginaire qui sous-tend les activités d’une société comme <em>Space X</em> fondée par l’<a href="http://www.courrierinternational.com/article/technologie-et-elon-musk-traversera-le-monde-dos-de-dragons">entrepreneur Elon Musk</a>. La planète candidate la plus proche n’est autre que Mars. Or, il n’y a pas d’atmosphère sur Mars qui permette de respirer ou de se protéger des rayonnements cosmiques délétères. Sa surface est, semble-t-il, passablement chlorée.</p>
<p>Quant à <a href="http://nautil.us/issue/43/heroes/make-mars-great-again">« terraformer » Mars</a>, un temps presque infini serait nécessaire. Sans compter qu’il faudrait y transporter des milliards d’habitants… avec quelle énergie et quels matériaux ? Pour l’heure, Musk n’est à même de proposer à ses admirateurs qu’un aller simple. Soulignons encore que selon les calculs du physicien Gabriel Chardin, une horde humanoïde passant d’une planète analogue à la nôtre à la suivante – en y maintenant un taux de croissance annuel de 2 % – <a href="https://lejournal.cnrs.fr/billets/le-paradoxe-de-fermi-et-les-extraterrestres-invisibles">détruirait en 5 000 à 6 000 ans</a> l’univers dans un rayon de dix milliards d’années-lumière.</p>
<p>Il serait grand temps de sortir de ce rêve cauchemardesque et de se rendre à l’évidence : nous n’avons qu’une seule planète et guère d’autre issue que de composer avec ses limites.</p>
<p>Se rendre à cette évidence, c’est se donner pour objectif, à une échéance de grosso modo deux à trois décennies (comme le suggère notamment, parmi bien d’autres, la <a href="http://www.bfe.admin.ch/energiestrategie2050/06445/index.html?lang=fr">stratégie énergétique 2050</a> de la Confédération helvétique), le retour à une empreinte écologique d’une seule planète tout en cherchant à inverser les tendances en matière de dépassement des limites planétaires.</p>
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<figcaption><span class="caption">Elon Musk présentant son projet de vie sur Mars le 28 septembre dernier (SpaceX, 2017).</span></figcaption>
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<h2>Recycler ne suffira pas</h2>
<p>Le retour à une seule planète, c’est précisément l’objectif qui a été proposé le 25 septembre 2016 au peuple suisse, lors d’une <a href="https://www.admin.ch/gov/fr/accueil/documentation/votations/20160925/initiative-economie-verte.html">initiative populaire</a> intitulée « Pour une économie durable et fondée sur une gestion efficiente des ressources (économie verte) ». Si le « non » l’a largement emporté, le « oui » s’est imposé dans des villes comme Zurich, Genève ou Lausanne. Cette traduction politique des limites planétaires est la condition nécessaire d’une <a href="https://www.puf.com/content/Ecologie_integrale">économie circulaire qui répondrait réellement</a> aux enjeux qui sont désormais les nôtres.</p>
<p>C’est le taux de croissance de la consommation des ressources qui, rappelons-le, conditionne la circularité d’une économie. On ne recycle en effet différentes matières qu’après des temps de résidence dans l’économie qui sont variables, mais qui peuvent atteindre plusieurs décennies.</p>
<p>Avec un taux de croissance annuel supérieur à 1 %, la part recyclée finit par ne représenter <a href="https://www.futuribles.com/fr/revue/365/le-decouplage-croissance-matieres-premieres-de-lec/">qu'une portion assez faible</a> de la matière consommée au moment de la réintroduction de la matière recyclée dans le cycle des activités économiques.</p>
<p>Recycler <a href="https://sapiens.revues.org/906">ne suffit donc pas</a> : c’est à une véritable restauration de la planète qu’il convient de s’atteler, avec le retour à une empreinte d’une seule planète. D’où l’idée d’une économie régénérative, restaurant de fond en comble les sols, réduisant fortement les activités extractives, substituant massivement aux matières premières classiques <a href="http://www.lemonde.fr/tribunes/article/2017/07/09/economie-circulaire-imposer-des-matieres-recyclees-dans-les-produits-neufs_5158140_5027560.html">des matières recyclées ou biosourcées</a>, inversant les courbes de dégradation, redonnant un sens au travail, etc.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"861131757189574656"}"></div></p>
<h2>Pour une société permacirculaire</h2>
<p>C’est cette économie que nous qualifions de « permacirculaire ». Nous entendons par là une économie qui veille non seulement aux synergies locales entre usines et entreprises et aux arrangements « micro » de recyclage et de fonctionnalité, mais qui, contrairement à l’économie circulaire standard, se soucie également d’une réduction <em>globale</em> des flux de matière et des rythmes de croissance et d’un changement de fond dans la culture, allant vers davantage de sobriété vécue et des technologies plus simples.</p>
<p>La vision actuelle de l’« innovation » et de l’« écologisation » de l’industrie inscrit toute la réflexion au sein d’un seul paradigme : celui de la « croissance verte », réputée magique en ce qu’elle ne requiert pas de changement dans notre culture et dans nos modes de vie. Cette monomanie bloque les voies d’expérimentation autres – dans l’économie sociale et solidaire ou à travers des choix de vie plus radicaux de « suffisance ».</p>
<p>Une des thèses majeures que nous défendons est que la permacircularité peut être atteinte avec une <em>pluralité</em> de trajectoires économiques, allant des approches permacoles, enracinées et expérimentales (par exemple la <a href="http://www.schweibenalp.ch/">communauté de Schweibenalp</a> en Suisse) jusqu’à des productions très capitalistiques de services ou d’objets, utiles aux autres secteurs (par exemple le <a href="http://autorecyclers.ca/2017/high-tech-auto-recycling-leaders-green-economy/">recyclage des pièces automobiles</a>), en passant par une <a href="http://planeteviable.org/economie-sociale/">économie sociale, environnementale et solidaire</a> et des activités bancaires <a href="https://www.bas.ch/fr/a-propos-de-la-bas/la-bas-aujourdhui/actualites/news/2017/06/21/genuegend-ist-besser-eine-studie-ueber-suffizienz/">davantage orientées vers la « suffisance »</a>.</p>
<p>L’unique contrainte, mais elle est absolue, est que <em>chacune</em> de ces approches fasse ses preuves à l’intérieur d’un <em>même</em> cadre uniforme : celui du retour à une seule planète.</p>
<p>La « croissance verte », à elle seule, n’a aucune chance de nous permettre de réaliser cet objectif. Une société permacirculaire offrirait ainsi un cadre éminemment plus pluraliste et plus démocratique, mais aussi plus cohérent, que celui proposé actuellement par ceux qui ne jurent que par une seule et unique voie d’avenir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/85165/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dominique Bourg est membre de la Fondation pour la Nature et l'Homme </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christian Arnsperger est conseiller scientifique de la Banque Alternative Suisse. </span></em></p>L'émergence d'une économie authentiquement circulaire réclame la prise en compte des limites planétaires. La croissance verte n'est qu'un mirage.Dominique Bourg, Philosophe, professeur à la Faculté des géosciences et de l’environnement, Université de LausanneChristian Arnsperger, Professeur en durabilité et anthropologie économique, Faculté des géosciences et de l’environnement, Université de LausanneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/735972017-03-09T07:57:35Z2017-03-09T07:57:35ZConsommation collaborative : le covoiturage courte-distance et le réemploi d’objets sont les plus écolos<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/158564/original/image-20170227-26306-1k2uuw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Vendre, acheter, revendre, réutiliser. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/cherylfoong/8249901310/in/photolist-dz1UeL-6KvefD-ekwSh3-bBTdD4-dzWt4s-6qkDWA-ekwzYo-7YAeax-9v1xMz-7HY44q-bLrXRg-o3GTX-4vVLp1-6Th6x-dARrAQ-dPceVw-k5wydz-pZxDZy-RtYSNN-k5wdLi-95uEy9-k5wxNg-7YoqtM-k5weh8-85FFft-peSDPZ-4r9pwY-k5vVWP-k5yHhd-k5wAmx-k5wyVX-7zNA22-eh5c3w-k5yt6C-k5w6sx-k5wyFZ-k5wR4t-71GYBo-EwBz1m-HmKomQ-k5wjRz-56KKCG-k5w8Dr-98PBua-6P13aQ-9wKtS7-k5wG82-pQ1wbF-k5yoK3-k5vQ2c">Cheryl Foong/flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>La consommation collaborative – qui désigne les pratiques augmentant
l’usage d’un bien ou d’un service, par le partage, l’échange, le troc, la vente ou la location de celui-ci, avec et entre particuliers – s’est <a href="http://www.economie.gouv.fr/vous-orienter/entreprise/numerique/chiffres-cles-leconomie-collaborative">rapidement développée</a> ces dernières années. Elle suscite de nombreux espoirs, tant économiques et sociaux (gisement de croissance, sens donné aux échanges et lien social) qu’environnementaux. Cela étant, elle pose de nouveaux défis à l’autorité publique et aux entreprises, notamment sur les questions juridiques et fiscales, comme en témoigne un <a href="http://www.gouvernement.fr/partage/6421-rapport-de-pascal-terrasse-sur-le-developpement-de-l-economie-collaborative">récent rapport</a> sur le sujet.</p>
<p>Ces nouvelles formes de consommation posent également des questions inédites quant à leur impact environnemental. Un <a href="http://www.assemblee-nationale.fr/14/evenements/mardi-avenir/2015-02/Iddri-economie-du-partage.pdf">travail pionnier</a>, publié en 2014, formalise ces interrogations et propose des pistes de réflexion sur la contribution de l’économie du partage à la transition énergétique.</p>
<p>C’est à la suite de ces réflexions et des derniers <a href="http://www.ademe.fr/alleger-lempreinte-environnementale-consommation-francais-2030-synthese">travaux prospectifs</a> de l’Ademe sur l’allègement de l’empreinte environnementale de la consommation des ménages français, qu’une nouvelle étude dont les résultats sont rendus publics ce jour, analyse les impacts environnementaux des pratiques collaboratives.</p>
<p>Ces dernières peuvent-elles permettre, comparativement aux pratiques de consommation dites conventionnelles, de réduire certains impacts environnementaux ?</p>
<h2>De nouveaux usages largement partagés</h2>
<p>La consommation collaborative a connu une forte expansion, à l’image du covoiturage longue distance, presque inexistant il y a encore quelques années. La communauté d’utilisateurs se compte aujourd’hui en millions : 24 % des personnes âgées de 18 ans et plus utilisent le covoiturage longue distance de temps en temps. Néanmoins, l’importance de la consommation collaborative est à relativiser.</p>
<p>La part du covoiturage dans les déplacements de longue distance se serait par exemple élevée à <a href="http://www.ademe.fr/developpement-covoiturage-regulier-courte-moyenne-distance">3 % en France en 2014</a>. Et, selon le Credoc, le montant issu de la vente d’objets entre particuliers s’établissait en France à 300 millions d’euros (M€) en 2013, contre 100 milliards d’euros (Md€) pour les professionnels du secteur. Les achats alimentaires réalisés au sein d’une communauté d’acheteurs particuliers s’élevaient, eux, à 70 M€ en 2014, contre plus de 200 Md€ pour l’ensemble des achats de biens alimentaires des ménages. Enfin, la part de la location entre particuliers représentait, en 2014, 0,7 % du marché de la location courte durée.</p>
<p>Contrairement à certaines idées reçues, la consommation collaborative ne s’adresse pas uniquement aux étudiants, jeunes actifs et aux urbains. Trois profils se dégagent toutefois.</p>
<p>Ainsi, les étudiants apparaissent plus disposés que la moyenne à effectuer des achats de biens entre particuliers. Ils sont <a href="http://www.entreprises.gouv.fr/etudes-et-statistiques/enjeux-et-perspectives-la-consommation-collaborative">42 %, contre 15 %</a> pour les retraités à le faire au moins une fois par trimestre. Ils sont également plus nombreux à déclarer proposer ou solliciter des services entre particuliers (83 %, contre 55 % pour les retraités). De même, les familles, à l’inverse des célibataires, sont très actives en matière de pratiques collaboratives. Elles sont, par exemple, plus de 60 % à déclarer effectuer des achats ou des ventes de biens entre particuliers, contre 43 % pour les célibataires. Enfin, les personnes indiquant avoir un engagement bénévole régulier, soit <a href="https://www.francebenevolat.org/sites/default/files/uploads/media/CP-Etude-IFOP-FB-CM2013-juin13.pdf">18 % des Français</a> en 2013, sont actives dans une multitude de pratiques liées à cette consommation.</p>
<p>Dans tous les cas, même s’il ne constitue pas la seule motivation, le motif économique explique pour une large part le passage à l’acte : <a href="http://www.ademe.fr/usages-partages-location-reemploi-troc-don-comme-alternatives-a-possession-exclusive-cartographie-type-biens-freins-sociotypes">67 % des Français interrogés</a> sur leurs motivations citent le fait de gagner de l’argent ou faire des économies, bien avant la protection de l’environnement.</p>
<h2>Un bilan environnemental qui varie fortement</h2>
<p>La première phase de notre étude a permis de confirmer à la fois l’ampleur et l’hétérogénéité du phénomène de consommation collaborative, ainsi que son dynamisme. En outre, les analyses de cycle de vie quantitatives sur une douzaine de pratiques de consommation collaborative sélectionnées ont révélé que « le bilan environnemental » varie fortement d’une pratique à l’autre, et selon l’impact environnemental étudié.</p>
<p>Néanmoins pour certaines d’entre elles, les réductions d’impact ont été difficiles à identifier, et dans certains cas, se sont même révélées négatives : il a été constaté une augmentation de l’impact dû à ces pratiques. Mais pour ces cas, la faible disponibilité des données n’a pas permis de conclure définitivement.</p>
<h2>La mobilité partagée</h2>
<p>Parmi l’ensemble des pratiques de consommation collaborative, la mobilité partagée, et plus particulièrement la mobilité partagée sur courte distance, offre un potentiel de réduction d’impacts particulièrement intéressant.</p>
<p>Ainsi, le covoiturage de courte distance – en particulier celui effectué pour se déplacer du domicile au lieu de travail – peut permettre de diviser par 2 les impacts environnementaux. Ce type de déplacement, souvent très difficile à éviter, se substitue en effet à plus de 80 % à des déplacements effectués en voiture peu remplies (en moyenne 1,07 passager par trajet). L’augmentation du taux de remplissage permise par le <a href="http://www.ademe.fr/etude-nationale-covoiturage-courte-distance">covoiturage de courte distance</a> entraîne donc une réduction importante des impacts.</p>
<p>En ce qui concerne la mobilité de longue distance, avec 1,92 passager par trajet en moyenne, le taux de remplissage actuel des voitures, bien que <a href="http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/publications/p/179/873/mobilite-francais-panorama-issu-lenquete-nationale.html">faible dans l’absolu</a>, reste relativement élevé comparé aux trajets de courte distance. Aussi, les réductions d’impacts, au niveau d’une unité de service rendu (effectuer un kilomètre de trajet longue distance), sont évaluées à environ un tiers comparé au mix de transport de longue distance moyen observé aujourd’hui, et à environ 10 % si l’on prend en compte le fait que nombre de covoitureurs eussent voyagé en train sinon et que certains n’auraient pas voyagé en l’absence de cette offre.</p>
<h2>Le réemploi d’objets</h2>
<p>Le réemploi d’objets offre une autre piste digne d’intérêt. Il existe ainsi un gisement important de réduction d’impacts environnementaux sur les produits pour lesquels la phase de production et/ou de fin de vie porte une part significative de ces impacts. C’est le cas du mobilier, des produits audiovisuels de loisir et informatiques. À l’inverse, pour des produits qui génèrent la majeure partie de leurs impacts environnementaux lors de leur utilisation, comme l’électroménager, les gains offerts par le réemploi sont moindres. Ce gisement sera d’autant plus élevé, que l’écart entre la durée de vie théorique du bien (durée de vie jusqu’à son usure physique) et sa durée de vie effective (durée réelle d’usage du bien) est important.</p>
<p>La durée de seconde vie des produits est ainsi déterminante pour le niveau du gain environnemental : une tablette informatique dont la durée d’utilisation passe de 2 à 4 ans permet d’améliorer de près de 50 % son bilan environnemental. Pour une durée prolongée de 4 à 6 ans, le gain est de 25 % environ.</p>
<p>On peut enfin noter que pour les pratiques de location entre particuliers, les impacts de la logistique de transmission du bien sont déterminants. Dans le cas de la location ou du prêt de tondeuse entre trois particuliers par exemple, la logistique nécessaire pour le transport induit des impacts négatifs qui peuvent dégrader significativement le bilan environnemental de la pratique collaborative par rapport à la pratique conventionnelle (utiliser un bien équivalent acheté) : +60 % d’impact sur l’indicateur CO<sub>2</sub> notamment.</p>
<h2>Un bilan nuancé</h2>
<p>Compte tenu de la disponibilité des données, il demeure difficile d’évaluer précisément les impacts des différentes pratiques de la consommation collaborative, et le niveau de confiance dans les résultats est variable. Le gain environnemental dépend dans tous les cas fortement de la pratique conventionnelle à laquelle la pratique collaborative est substituée, de la logistique de partage et de la durée de vie des produits réemployés. En tous cas, consommer de manière collaborative ne signifie pas automatiquement « consommer responsable ». En tant que consommateur, on doit intégrer la consommation collaborative à une réflexion permanente sur le « mieux consommer ».</p>
<p>Par ailleurs, l’étude montre que la place de la consommation collaborative dans la consommation en général et, en conséquence, son potentiel de réduction des impacts environnementaux sont à relativiser. Ainsi, l’apport des technologies et les évolutions de la société française restent déterminants pour diminuer les impacts environnementaux de la consommation des Français en 2030.</p>
<p>Certaines pratiques bien identifiées offrent néanmoins un potentiel de réduction d’impacts environnementaux intéressant. Le partage de mobilité d’un côté, et le réemploi d’objets de l’autre, figurent parmi l’ensemble des pratiques collaboratives, celles qui ouvrent les perspectives les plus intéressantes sur le plan environnemental. Ainsi, la consommation collaborative élargit le champ des possibles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/73597/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Vincent ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Contrairement à une idée assez répandue, la consommation collaborative n’est pas toujours vertueuse sur le plan environnemental. C’est ce que révèle une étude de l’Ademe publiée aujourd’hui.Isabelle Vincent, Chef du service « Économie et prospective », Ademe (Agence de la transition écologique)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/648452016-11-02T23:01:06Z2016-11-02T23:01:06ZLe Fairphone ou les balbutiements de la téléphonie éthique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/143816/original/image-20161030-15816-gx9787.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des enfants montrant leur récolte de cuivre, un matériau essentiel à la fabrication des téléphones portables, en République démocratique du Congo. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/fairphone/5503465235/in/photostream/">Fairphone/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span></figcaption></figure><p>Depuis une dizaine d’années, le marché mondial du <em>smartphone</em> connaît une croissance <a href="http://www.zdnet.fr/actualites/chiffres-cles-les-ventes-de-mobiles-et-de-smartphones-39789928.htm">quantitative</a> forte, globale et régulière. Le volume total d’unités vendues devrait passer de 300 millions en 2010 à quelque 2 000 millions en 2020. Pour 2016, on table sur 1 500 millions d’unités écoulées.</p>
<p>Dans le même temps, le bilan énergétique et éthique du secteur et de l’<a href="https://theconversation.com/leconomie-numerique-est-une-industrie-lourde-1-donner-ces-donnees-50674">économie numérique au sens large</a> demeure largement négatif et préoccupant.</p>
<p>La fabrication des téléphones, qui se fait désormais essentiellement en Asie, nécessite des substances à la fois toxiques et non biodégradables (arsenic, béryllium, mercure, plomb, tantale) dont l’extraction a des impacts humains et environnementaux souvent catastrophiques. De plus, ces appareils ne sont pas souvent conçus pour être réparables, ils seront donc rarement réparés !</p>
<p>Pire, <a href="http://www.arehn.asso.fr/dossiers/telephone_portable/telephone_portable.html">après une durée de vie très courte</a>, ils ne sont quasiment pas recyclés. On les retrouve soit dans nos tiroirs, soit en direction de l’Asie, Chine ou Inde en tête, pour un démantèlement dans des conditions discutables, soit en direction de l’Afrique et de ses décharges électroniques sauvages comme celle <a href="https://oooohlaa.wordpress.com/2012/05/05/agbogbloshie-plus-grande-decharge-electronique-dafrique/">du Ghana à Accra-Agbogbloshie</a>.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le débat «Où vont nos déchets électroniques ?» (Public Sénat, 2011).</span></figcaption>
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<h2>Un marché dominé par Samsung et Apple…</h2>
<p>Sur le front des terminaux, les deux entreprises continuent à <a href="http://www.zdnet.fr/actualites/chiffres-cles-les-ventes-de-mobiles-et-de-smartphones-39789928.htm">dominer l’offre mondiale</a> et ce malgré les récents déboires industriels de Samsung et l’infléchissement des ventes de Apple sur les marchés matures. En 2016, Samsung représente ainsi 22 % du marché mondial, Apple 12 %, Huawei 10 %, Lenovo (en incluant les marques <a href="http://www.nextinpact.com/news/98001-lenovo-abandonne-marque-motorola-pour-moto.htm">Moto et Vibe, ex-Motorola</a>) 5 %, LG 4 % et Xiaomi 1 %.</p>
<p>Les autres constructeurs sont marginaux en terme de volume : c’est le cas de Microsoft et de son Windows phone (ex-Nokia) dont l’avenir semble compromis, de HTC après la dégringolade des ventes de 35 % en 2015 et de BlackBerry qui se recentre sur le logiciel et les services plutôt que sur ses terminaux dont les ventes ont fortement chuté.</p>
<p>Concernant les <a href="http://www.tomsguide.fr/article/guide-smartphone-acheter,2-1219-3.html">systèmes d’exploitation</a>, Android (Google) fait la course en tête avec 80 % de parts du marché suivi par l’iOS (Apple), qui arrive loin derrière avec 15 %, mais devant Windows Phone 10 et BlackBerry 10.</p>
<h2>… mais avec de multiples niches</h2>
<p>Dans ce marché très agressif, il est toutefois possible de surnager – voire de se faire une place au soleil – grâce à des stratégies et des produits de niche.</p>
<p>C’est le cas des <a href="http://www.lexpress.fr/diaporama/diapo-photo/tendances/produit-high-tech/smartphone-ultra-resistant-notre-selection_1732922.html">smartphones résistants</a> des constructeurs Caterpillar, Crosscal, Kyocera, MTT ou encore Jeep. C’est aussi vrai de certains smartphones ludiques, explicitement conçus pour les enfants via les marques Wiko, Samsung ou Lumia par exemple. C’est enfin le cas de smartphones compatibles avec des appareils auditifs, dotés d’une notice bien lisible et d’une touche « urgence », plutôt destinés aux <a href="https://www.quechoisir.org/guide-d-achat-telephones-mobiles-pour-seniors-n2371/">seniors</a>. Sur ce segment, on retrouve des acteurs classiques (Samsung, Apple, LG), mais aussi des constructeurs spécialisés comme Amplicomms, Doro ou encore Emporia.</p>
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<figcaption><span class="caption">Exemple de téléphone portable conçu pour les personnes âgées (La Quotidienne, 2013).</span></figcaption>
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<p>Dans cette offre diversifiée, on regrettera toutefois que les téléphones « éthiques » (réparables, recyclables, respectueux, sobres…) représentent une niche où les constructeurs n’osent s’aventurer. Pourquoi <a href="http://www.rts.ch/info/sciences-tech/6129384-les-marques-de-telephones-portables-classees-selon-leur-ethique.html">tant de légèreté ?</a></p>
<h2>L’éthique et la durabilité à la peine</h2>
<p>À la l’heure de la transition énergétique, la modularité, et donc la réparabilité, semble être une solution intéressante. Mais Google vient de renoncer récemment à son projet de <a href="http://www.01net.com/astuces/projet-ara-google-met-son-smartphone-modulaire-au-placard-1032803.html">téléphone modulaire</a>, Ara, pour d’obscures raisons liées aux reconfigurations au sein de l’entreprise à la suite de sa prise de contrôle par Alphabet.</p>
<p>Mais dans ce segment, l’entreprise néerlandaise <a href="https://www.fairphone.com/fr/">Fairphone</a> continue, tel un irrésistible village gaulois, de creuser le sillon de l’éthique et de la durabilité. Elle s’accroche sur le marché, encore symbolique quantitativement, en proposant après son Fairphone 1 – un semi-échec – le Fairphone 2 – un semi-succès.</p>
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<figcaption><span class="caption">Fairphone, le premier smartphone éthique (Arte, 2016).</span></figcaption>
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<p>Fin 2013, le <a href="http://www.lesnumeriques.com/telephone-portable/fairphone-fairphone-p16466/test.html">Fairphone 1</a> créait une belle surprise et récoltait un joli succès d’estime sur le marché polluant et énergivore des téléphones. L’entreprise proposait pour 310 euros, hors frais de port, un appareil qui n’utilisait pas de métaux rares en provenance de pays en guerre, était assemblé dans des usines respectant les protections sociales minimales, était pensé pour être réparable et donc recyclable et dont la batterie et la connectique étaient standards.</p>
<p>Ce modèle ne remporta pas un franc succès commercial, avec seulement 60 000 exemplaires vendus. Un semi-échec probablement imputable à un manque de puissance et à un design trop classique.</p>
<p>Fin 2015, le <a href="http://www.lesnumeriques.com/telephone-portable/fairphone-fairphone-2-p26923/test.html">Fairphone 2</a> arrive sur le marché pour 525 euros. Il est présenté comme équitable et évolutif. La firme cible 100 000 à 150 000 exemplaires en 2016, ce qui reste marginal comparé aux énormes volumes des leaders du secteur.</p>
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<figcaption><span class="caption">«Les secrets inavouables de nos téléphones portables» (Cash Investigation, 2015).</span></figcaption>
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<h2>Être « fair », ça veut dire quoi ?</h2>
<p>La firme néerlandaise se positionne comme respectueuse des personnels, de la durabilité et de la sobriété. Ces trois dimensions sont largement absentes des stratégies des leaders du marché et – doit-on le regretter ? – tout aussi éloignées <a href="http://www.jeuxvideo.com/forums/42-51-42077122-1-0-1-0-decouverte-du-fairphone.htm">des préoccupations</a> des jeunes et moins jeunes acheteurs qui survalorisent le prix, le design et la performance. La prise en compte de l’<a href="http://images.cigref.fr/Publication/2014-CIGREF-Ethique-et-Numerique-une-ethique-a-reinventer-Rapport-mission-F-FISCHER.pdf">éthique dans le numérique</a> reste à balbutiante.</p>
<p>Sur son site Internet, l’entreprise s’engage donc à s’approvisionner en métaux et minéraux dans des mines convenablement exploitées. Concrètement, l’entreprise ne peut le garantir que pour l’étain, le tantale, le tungstène et l’or, mais il s’agit là d’une <a href="https://www.fairphone.com/en/2016/06/20/fairphone-2-good-vibrations-with-conflict-free-tungsten-2/">avancée symbolique</a> pour le secteur de la téléphonie.</p>
<p>Le groupe réinvestit entre outre quelque 67 euros par téléphone vendu dans des programmes sociaux et environnementaux destinés à améliorer les étapes de sa production. La firme travaille enfin au respect du bien-être des ouvriers de son sous-traitant assembleur chinois Hi-P. En fin de vie, les Fairphone hors service sont <a href="https://www.fairphone.com/fr/2015/03/26/latest-news-on-ghana-e-waste-collection-program/">recyclés sous contrôle</a> au Ghana.</p>
<p>Pour les circuits imprimés du Fairphone 2, l’or utilisé a été certifié Fairtrade, grâce à un partenariat avec Max Havelaar. C’est une première dans l’industrie électronique, qui est pourtant le troisième marché pour l’or !</p>
<p>Comme il est indiqué sur la notice et le site support, le terminal est en grande partie <a href="https://shop.fairphone.com/en/accessories/">modulaire</a> donc démontable et réparable. « Déclipsable », la coque donne accès à la batterie – qui coûte 20 euros – et au bloc-écran – qui coûte 85 euros – ainsi qu’à trois autres modules dévissables. Un premier bloc intègre le haut-parleur, le vibreur, le port USB et le micro. Un second bloc, la prise casque, l’écouteur, la LED et la caméra frontale. Un dernier est consacré au module photographique.</p>
<p>Cette modularité permet d’éventuelles réparations ou remplacements pour allonger la durée de vie l’appareil. Sa collecte et son recyclage en circuit contrôlé sont prévus… si l’utilisateur à la bonne idée de le rapporter.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le design modulaire du Fairphone 2 (Fairphone, 2015).</span></figcaption>
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<p>L’entreprise propose assez peu d’applications préinstallées, laissant l’utilisateur libre de ne pas le surcharger et donc de ne pas surconsommer d’énergie. On y trouve quand même <a href="https://fr.ifixit.com/">iFixit</a>, l’application de référence pour la réparation high-tech ainsi que Peace of mind qui permet de protéger les données.</p>
<h2>Quelle place pour des terminaux plus durables ?</h2>
<p>Outre le combat symbolique, mais utile, mené par Fairphone, il existe <a href="http://www.lesnumeriques.com/legrandforum/avis/Mobilite-Telephonie-GPS/telephone/smartphone-durable-excellentes-sujet_5951_1.htm">assez peu</a> de projets similaires. Une petite entreprise finlandaise – Circular Devices – cherche à commercialiser un PuzzlePhone composé de trois modules. Notons aussi les projets de ZTE avec son téléphone Eco-Mobius et Xiaomi avec son Magic Phone.</p>
<p>Et l’on pourra enfin tout simplement regretter les disparitions des constructeurs américains (Motorola) et européens (Nokia, Erikson, Sagem, Thomson) et noter l’apparition de <a href="http://www.latribune.fr/technos-medias/20121229trib000739801/le-premier-smartphone-africain-fait-son-apparition-au-congo.html">matériel africain</a> (Elikia). Insistons enfin sur la concentration de la production en Asie (Chine, Corée, Japon, Taiwan) ce qui augmente les coûts et impacts liés aux transports des matériels, de <a href="https://theconversation.com/rien-ne-sert-de-produire-responsable-il-faut-acheter-durable-51414">leurs matières premières et de leurs composants</a>.</p>
<p>Sur le marché de la téléphonie et de ses « milliers de millions » d’appareils vendus, comme sur les autres, l’impulsion décisive viendra certainement des consom’acteurs qui par leurs achats – ou non – orienteront peu à peu les offreurs vers une prise en compte de la durabilité, l’éthique, la sobriété ou la frugalité, aujourd’hui largement ignorées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/64845/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Bidan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le succès d’estime du téléphone Fairphone peine à masquer la difficile percée des matériels éthiques et durables sur le gigantesque marché de la téléphonie mobile mondiale.Marc Bidan, Professeur des universités, management des systèmes d’information, Université de NantesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/670062016-10-13T18:27:32Z2016-10-13T18:27:32ZEn Europe, les initiatives se multiplient pour en finir avec le tout jetable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/141637/original/image-20161013-31319-107dss8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Réparer plutôt que remplacer.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.shutterstock.com/pic-329931380/stock-photo-man-repairing-broken-smartphone-in-workshop.html?src=utJgq-9-6Ak0LXXn59ab6A-1-0">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Serait-on en train d’assister à la fin de l’ère du tout jetable ? Ces cinquante dernières années nous ont donné des grilles-pain irréparables à la moindre petite panne, des T-shirts qui rétrécissent et se délavent en un clin d’œil, des aspirateurs qu’il faut changer après quelques années d’utilisation seulement.</p>
<p>Une « obsolescence programmée » dont les smartphones sont les témoins privilégiés : qui n’a jamais constaté le <a href="http://www.theweek.co.uk/59708/does-apple-slow-old-iphones-when-a-new-model-comes-out">fonctionnement altéré</a> de son ancien appareil après l’installation d’une mise à jour « essentielle » ? Cette réalité concerne en fait tout un tas de produits, des vêtements aux lunettes, pour lesquels on propose sans arrêt de nouvelles collections visant à encourager la consommation.</p>
<h2>Des actions récentes</h2>
<p>On peut cependant se réjouir d’une décision récente du gouvernement suédois qui a décidé de faire <a href="https://www.thelocal.se/20160917/sweden-wants-to-make-repairing-things-cheaper">passer la TVA de 25 % à 12 %</a> sur les réparations. Il s’agit du dernier signe d’une remise en cause en Europe de la culture consumériste (« extraire, fabriquer, consommer, jeter ») qui se trouve au cœur de nos économies industrialisées.</p>
<p>En France, l’obsolescence programmée est depuis 2015 passible de <a href="http://www.lefigaro.fr/conso/2015/07/25/05007-20150725ARTFIG00002-l-obsolescence-programmee-est-desormais-un-delit-passible-de-prison.php">deux ans d’emprisonnement</a> et d’une amende qui peut aller jusqu’à 300 000 euros. Et l’Espagne est récemment devenue le premier pays a instaurer un objectif visant à accroître la réutilisation des produits. Pendant ce temps, l’<a href="http://www.umweltbundesamt.de/en">Agence</a> fédérale de l’environnement a commandé une étude sur la durée de vie des produits électriques dans le but de développer des stratégies anti-obsolescence.</p>
<h2>L’Europe passe à l’action</h2>
<p>Il faut replacer ces décisions dans le cadre d’initiatives européennes pour soutenir le développement durable, notamment sur les fronts des déchets et de l’économie circulaire, qui promeut l’utilisation des objets et leur recyclage aussi longtemps que possible.</p>
<p>La <a href="http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=URISERV%3Aev0010">directive relative aux déchets</a> adoptée en 2013 attend ainsi de chaque membre de l’Union qu’il mette au point un programme de prévention en ce domaine. Les autorités britanniques ont d’ailleurs été les premières à s’engager dans cette voie. Dan Rogerson, l’ex-ministre alors en charge de ces questions, a été jusqu’à <a href="https://www.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/265022/pb14091-waste-prevention-20131211.pdf">déclarer</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Les objets devraient être conçus pour avoir des durées de vie longues, incluant la possibilité de la réparation et de la réutilisation. »</p>
</blockquote>
<p>Un <a href="http://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:8a8ef5e8-99a0-11e5-b3b7-01aa75ed71a1.0003.02/DOC_1&format=PDF">plan d’action</a> de l’Union européenne a été ajouté à ce texte en 2015, afin que la Commission s’engage à examiner l’ampleur du phénomène de l’obsolescence programmée et agisse en conséquence.</p>
<p>La <a href="http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32009L0125&from=EN">directive EcoDesign</a> de 2009 qui visait dans un premier temps à mettre en œuvre l’efficacité énergétique, s’applique désormais aux cycles de vie des produits. Ce texte exige déjà que les aspirateurs qui seront mis en vente dans l’Union à partir de septembre 2017 soient équipés de moteurs conçus pour durer au moins 500 heures. D’autres produits devraient être prochainement soumis aux mêmes impératifs.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les principes de l’économie circulaire (Fondation Ellen MacArthur, 2013).</span></figcaption>
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<h2>Des habitudes de consommation bien ancrées</h2>
<p>Le coup de pouce suédois à l’allégement de la fiscalité sur les réparations représente toutefois un succès modeste pour les militants écologistes, compte tenu de la forte pression qui pèse sur les États de l’Union pour pratiquer les mêmes taux de TVA. Et, malheureusement, cela n’aura certainement qu’un effet modéré sur la demande de réparation.</p>
<p>Une <a href="http://www.jstor.org/stable/40647716?seq=1#page_scan_tab_contents">étude</a> suggère en effet que la réduction de taxes ne serait en mesure de faire une grosse différence sur le prix au point d’amener les consommateurs à opter pour cette option : les habitudes de consommation sont très profondément ancrées et, dans la durée, remplacer l’appareil défectueux demeure souvent la solution la moins coûteuse.</p>
<p>Mais cette initiative est un signal positif : les gouvernements européens commencent à réagir favorablement aux actions menées à Bruxelles par des <a href="http://www.eeb.org/index.cfm?LinkServID=1E2E1B48-5056-B741-DB594FD34CE970E9">ONG de défense de l’environnement</a>. D’autres évolutions peuvent être attendues, en particulier de la <a href="http://www.rreuse.org/wp-content/uploads/Routes-to-Repair-RREUSE-final-report.pdf">délivrance de manuels</a> d’entretien comportant des informations techniques pour aider les réparateurs indépendants et les usagers à faire durer les produits.</p>
<h2>Réparer, une pièce du puzzle</h2>
<p>L’initiative de l’UE dans le domaine de l’économie circulaire est très significative. Ceci étant dit, une économie authentiquement durable ne pourra se contenter seulement d’accroître le recyclage, du fait que les procédés nécessaires à la collecte, au démontage et à la réutilisation des produits usagés sont énergivores – et consomment la plupart du temps des énergies fossiles.</p>
<p>De plus, les métaux, plastiques et textiles recyclés présentent souvent certaines limitations qui menacent la qualité de la production. Dans bien des cas, il faudra ajouter des matériaux neufs… Le produit composé à 100 % de matériaux recyclés n’existe pas encore.</p>
<p>Le véritable changement nécessitera d’allonger la durée de vie des produits de sorte que <a href="https://www.theguardian.com/business/2016/jan/18/weve-hit-peak-home-furnishings-says-ikea-boss-consumerism">moins de nouveaux objets</a> soient fabriqués. Réparer et réutiliser font partie de ce processus, mais il semble tout aussi essentiel que les objets soient conçus dès le départ pour <a href="https://www.routledge.com/Longer-Lasting-Products-Alternatives-To-The-Throwaway-Society/Cooper/p/book/9780566088087">durer plus longtemps</a>.</p>
<p>Un tel programme réclame de profonds changements au niveau culturel et systémique : les entreprises devront apprendre à survivre en vendant moins et en misant sur des produits durables que les consommateurs choisiront d’acheter et de conserver.</p>
<p>Après tout, aucun bénéfice ne peut être tiré d’un appareil qui serait fabriqué pour durer et dont on se <a href="http://www.wrap.org.uk/content/study-re-use-potential-household-bulky-waste">débarrasserait prématurément</a>…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/67006/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tim Cooper a reçu des financements du EPSRC (réf. EP/N022645/1). </span></em></p>La décision de la Suède en faveur de la réparation est le signal le plus récent d’une lutte contre l’obsolescence programmée qui s’organise au sein de l’Union européenne.Tim Cooper, Professor, Head of Sustainable Consumption Research Group, Nottingham Trent UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.