tag:theconversation.com,2011:/ca/topics/senegal-27632/articlesSénégal – The Conversation2024-03-25T19:19:42Ztag:theconversation.com,2011:article/2265532024-03-25T19:19:42Z2024-03-25T19:19:42ZSénégal : la réputation de Macky Sall est ternie, mais l'ancien président a beaucoup fait, tant au Sénégal qu'à l'étranger<p><a href="https://www.britannica.com/biography/Macky-Sall">L'héritage</a>de Macky Sall en tant que président du Sénégal depuis 2012 s'est complexifié davantage au cours de sa dernière année au pouvoir. Les multiples transgressions qui ont marqué cette période semblent avoir gravement entaché sa réputation.</p>
<p>Pendant quelques mois, il a donné l'impression à ses adversaires et à ses détracteurs qu'il nourrissait des <a href="https://www.voaafrique.com/a/soulagement-au-s%C3%A9n%C3%A9gal-apr%C3%A8s-l-annonce-de-macky-sall-de-ne-pas-briguer-un-3e-mandat/7166215.html">ambitions de troisième mandat</a>. Ce qui fréquent en politique présentement en l'Afrique de l'Ouest. </p>
<p>Le report des élections de trois semaines, <a href="https://information.tv5monde.com/afrique/senegal-le-president-macky-sall-annonce-le-report-de-lelection-presidentielle-2707783">décidé</a> le 3 février 2024, a suscité une forte clameur populaire. Ses députés à l'Assemblée nationale ont ensuite <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20240205-s%C3%A9n%C3%A9gal-l-assembl%C3%A9e-nationale-vote-le-report-de-la-pr%C3%A9sidentielle-des-d%C3%A9put%C3%A9s-%C3%A9vacu%C3%A9s-manu-militari">voté à l'unanimité </a> pour reporter l'élection et prolonger le mandat de M. Sall jusqu'en décembre. </p>
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<a href="https://theconversation.com/macky-sall-throws-senegals-democratic-credentials-into-doubt-222923">Macky Sall throws Senegal's democratic credentials into doubt</a>
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<p>Le 6 mars, le Conseil constitutionnel du pays <a href="https://www.france24.com/fr/afrique/20240215-au-s%C3%A9n%C3%A9gal-le-conseil-constitutionnel-invalide-le-report-de-la-pr%C3%A9sidentielle">a statué</a> que le report était inconstitutionnel et que les élections devraient se tenir avant le 2 avril, date d'expiration du mandat présidentiel de M. Sall. </p>
<p>En conséquence, M. Sall a fixé les élections sénégalaises au <a href="https://www.ouest-france.fr/monde/senegal/senegal-lexecutif-fixe-la-date-de-lelection-presidentielle-au-24-mars-af08a3b7-9f69-4e3c-82d8-10eee1e906a6">24 mars</a>. Avec cette décision, le danger d'une dérive autoritaire au Sénégal semble avoir été écarté. </p>
<p>Le moment est donc venu de procéder à une évaluation plus réfléchie de ses huit années de mandat.</p>
<p>J'ai été un <a href="https://theconversation.com/profiles/douglas-yates-1462326">observateur</a> de la politique sénégalaise depuis la fin des années 1990, en m'occupant de la construction de la démocratie pour le Bureau régional pour l'Afrique de l'Agence américaine d'information (US Information Agency), en enseignant la politique africaine à des étudiants de troisième cycle à Paris et en commentant dans les médias l'évolution de la politique sénégalaise. </p>
<p>D'après ce que j'ai observé, je dirais que les mandats présidentiels de Sall ont connu certains succès économiques, nationaux et internationaux qui méritent d'être rappelés aujourd'hui, en cette période de doute.</p>
<p>À mon avis, l'héritage de <a href="https://www.presidence.sn/en/presidency/biography">Macky Sall</a> a été préservé. Du moins, en apparence.</p>
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<a href="https://theconversation.com/2024-senegal-election-crisis-points-to-deeper-issues-with-macky-sall-and-his-preferred-successor-223035">2024 Senegal election crisis points to deeper issues with Macky Sall and his preferred successor</a>
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<h2>Ce qu'il laisse derrière lui</h2>
<p>Son héritage en tant que Président s'est traduit par de grands projets d'infrastructure, notamment des aéroports, un meilleur système ferroviaire et des parcs industriels. </p>
<p>Les aéroports sénégalais étaient dans un état déplorable lorsqu'il est entré en fonction. Le pays comptait 20 aéroports, mais seuls neuf d'entre eux avaient des pistes asphaltées. En mauvais état, ces aéroports n'attiraient pas les grands voyageurs d'affaires internationaux qui auraient pu créer des entreprises et embaucher la main-d'œuvre qualifiée du pays ou collaborer avec ses entrepreneurs novateurs.</p>
<p><a href="https://www.aeroport-dakar.com/">L'aéroport international Blaise Diagne</a>, qui porte le nom du premier Africain noir élu au Parlement français en 1914, a ouvert ses portes en décembre 2017. Le projet, lancé en 2007 par son prédécesseur, Abdoulaye Wade, a été achevé par M. Sall. </p>
<p>Situé à proximité de la capitale, Dakar, facile d'accès grâce à une autoroute moderne, cet aéroport a amélioré la mobilité des passagers et le transport de marchandises. La compagnie aérienne nationale, <a href="https://flyairsenegal.com/en/home/">Air Sénégal</a>, est basée dans cet aéroport. Elle dessert plus de 20 destinations dans 18 pays. </p>
<p>M. Sall a également construit le premier <a href="https://www.railway-technology.com/projects/dakar-regional-express-train/">Train Express Régional</a> du pays, une liaison ferroviaire qui relie Dakar à un nouveau parc industriel majeur (également construit sous le mandat de M. Sall) et bientôt à l'aéroport international Blaise Diagne. </p>
<p>M. Sall a également renforcé les platesformes aéroportuaires régionales du pays. Il a dirigé la <a href="https://www.transcon.sn/en/project-intro/project-objectives">reconstruction</a> de cinq aéroports régionaux au Sénégal. </p>
<p>Le parc industriel de Diamniadio, situé à 30 km à l'est de Dakar, financé par des prêts de l'Eximbank China, a été achevé en 2023. Le parc est un projet industriel phare de la stratégie d'industrialisation de M. Sall pour le Sénégal. </p>
<p>Le nouveau parc est situé au cœur d'un réseau de zones économiques spéciales comprenant Diass, Bargny, Sendou et Ndayane. Des entreprises de divers secteurs, tels que l'industrie pharmaceutique, les appareils électroniques et le textile, ouvrent de nouveaux bureaux dans le parc, qui devrait fabriquer des produits de haute qualité répondant aux besoins locaux. </p>
<p>Les aéroports, les trains et les parcs industriels devraient, selon les partisans de M. Sall, contribuer réellement à la transformation du Sénégal, qui est passé du statut d'exportateur d'arachides postcolonial à celui de centre manufacturier de substitution aux importations.</p>
<p>À mon avis, ce que Sall laisse derrière lui est substantiel, surtout si on le compare au très controversé <a href="https://www.bfmtv.com/sciences/monument-controverse-pour-les-50-ans-d-independance-du-senegal_AN-201004030005.html">Monument de la Renaissance Africaine</a> de son prédécesseur Abdoulaye Wade. Cette statue de bronze de 171 pieds de haut, située au sommet d'une colline surplombant Dakar et construite par une entreprise nord-coréenne, a peu ou pas du tout contribué à l'économie du pays.</p>
<p>M. Sall a également contribué à la réputation du Sénégal à l'étranger, en se positionnant comme un acteur respecté et influent sur la scène internationale. En tant que président de l'organe économique régional de la Cedeao en <a href="https://www.presidence.sn/en/newsroom/senegals-place-in-ecowas_1122">2015-2016</a>, il a fait de l'amélioration de l'intégration économique le point central de son mandat. </p>
<p>Il s'est également efforcé d'établir des relations plus étroites avec d'autres organisations internationales, notamment le G7, le G20 et l'Union africaine. Alors qu'il était président de l'UA de 2022 à 2023, il a <a href="https://www.forbesafrica.com/opinion/op-ed/2023/07/30/african-union-must-be-in-the-g20/">fait du lobbying</a> pour que l'Union africaine soit incluse dans le G20, se plaignant que l'Afrique du Sud soit le seul membre du continent à faire partie d'un forum économique international d'importance. </p>
<p>Dans son <a href="https://www.aa.com.tr/fr/monde/a-l-ag-de-lonu-macky-sall-%C3%A9voque-l-afrique-des-solutions-/2690266">discours</a> à l'Assemblée générale des Nations unies, il a défendu la cause du continent. Il n'y a aucune excuse, a-t-il dit, pour ne pas assurer une représentation cohérente de l'Afrique dans les principaux organes décisionnels du monde. </p>
<p>Il a souligné l'importance d'un financement accru de la part des pays développés pour les initiatives d'adaptation au climat dans les pays en développement, en particulier en Afrique.</p>
<p>La gestion par M. Sall de la <a href="https://www.who.int/health-topics/coronavirus#tab=tab_1">crise COVID</a>, qui a atteint le Sénégal en mars 2020, a été son premier grand test de leadership. Malgré ses ressources limitées, le Sénégal a <a href="https://www.devex.com/news/how-senegal-has-set-the-standard-on-covid-19-98266">surpassé</a> de nombreux pays plus riches dans sa réponse à la pandémie de COVID, grâce au leadership de M. Sall.</p>
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<a href="https://theconversation.com/senegals-internet-shutdowns-are-another-sign-of-a-democracy-in-peril-207443">Senegal's internet shutdowns are another sign of a democracy in peril</a>
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<h2>Contribution à la tradition démocratique du Sénégal</h2>
<p>Son héritage important sera sa participation à la tradition démocratique du Sénégal. </p>
<p>Tout d'abord, il s'est attaqué aux ambitions dynastiques d'Abdoulaye Wade en désignant son fils Karim Wade comme héritier présomptif. Ensuite, il a <a href="https://www.lemonde.fr/en/le-monde-africa/article/2024/02/23/senegalese-president-macky-sall-promises-to-step-down-but-does-not-set-election-date_6551927_124.html">respecté</a> la limite de deux mandats présidentiels. Cela signifie qu'il passera bientôt le pouvoir à un successeur, maintenant ainsi une tradition unique et <a href="https://2012-2017.usaid.gov/senegal/newsroom/fact-sheets/senegal-democracy-and-governance-fact-sheet">ininterrompue</a> de transition du pouvoir dans l'une des démocraties les plus stables d'Afrique de l'Ouest. </p>
<p>Tout n'a pas été rose pour autant. Ces dernières années, la tentation du pouvoir a semblé submerger M. Sall. Il a commencé à donner des <a href="https://www.africaintelligence.com/west-africa/2023/03/02/paris-and-washington-fret-over-macky-sall-s-third-term-ambitions,109919519-eve">signes troublants</a> de son désir de rester au pouvoir au-delà de son mandat constitutionnel.</p>
<p>Puis, après avoir tâté le terrain et constaté que l'opinion publique était fortement opposée à ce qu'il viole les limites qu'il avait lui-même imposées lorsqu'il était dans l'opposition à son prédécesseur, il a <a href="https://www.bbc.com/news/world-africa-66093983">choisi</a> de ne pas se présenter à l'élection. Il a plutôt soutenu la candidature de son <a href="https://www.rfi.fr/en/africa/20231222-senegalese-pm-amadou-ba-named-as-ruling-party-s-presidential-candidate">Premier ministre de l'époque, Amadou Ba</a>. </p>
<p>Mais cette décision a été suivie d'une série d'arrestations de ses opposants les plus virulents dont <a href="https://www.bbc.com/news/world-africa-68562465">Ousmane Sonko</a> très populaire sur les médais sociaux. </p>
<p>Plus de <a href="https://www.google.com/search%20?%20q=How+many+dead+in+Senegal+protests&rlz=1C1ONGR_frFR949FR949&oq=How+many+dead+in+Senegal+protests&gs_lcrp=EgZjaHJvbWUyBggAEEUYOTIHCAEQIRigATIHCAIQIRigAdIBCDQzNDJqMGo3qAIAsAIA&sourceid=chrome&ie=UTF-%208">350 manifestants</a> ont été arrêtés lors des manifestations de mars 2021 et de juin 2023. Au moins 23 personnes sont mortes. </p>
<p>Puis il y a eu son décret présidentiel de dernière minute <a href="https://www.aljazeera.com/news/2024/2/3/senegaltwo%20s-macky-sall-postpones-presidential-election">reportant</a> l'élection qui était prévue pour le 25 février. </p>
<p>Ce décret a été suivi de <a href="https://www.lemonde.fr/en/le-monde-africa/article/2024/02/10/senegal-student-killed-in-protest-against-election-postponement_6510579_124.html">manifestations pour la démocratie</a> et d'une violente répression policière des manifestations dans les centres urbains, qui a entraîné la mort de civils. </p>
<p>Après les protestations, M. Sall a fait une autre volte-face extraordinaire. Il a <a href="https://www.aa.com.tr/en/africa/senegals-president-pledges-to-comply-with-constitutional-councils-ruling-hold-presidential-poll-soon/3139996#">annoncé</a> qu'il respecterait la décision du Conseil constitutionnel, qui lui refusait le droit de prolonger son mandat présidentiel et exigeait que des élections soient organisées avant le 2 avril. </p>
<p>Ce faisant, il a préservé le système d'équilibre des pouvoirs au Sénégal. En outre, sa décision de <a href="https://www.france24.com/en/africa/20240315-senegal-s-top-opposition-leaders-sonko-faye-released-from-prison-says-lawyer">libérer</a> Sonko et ses autres opposants de prison et de les amnistier a préservé l'espace public pour une opposition démocratique et des libertés civiles.</p>
<p>L'héritage de Sall en tant que voix de l'Afrique pourrait lui offrir une promotion latérale de la présidence du Sénégal au siège d'une organisation internationale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/226553/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Douglas Yates does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Avec le déroulement de l'élection du 24 mars, il semble que le président sénégalais Macky Sall ait préservé son héritage.Douglas Yates, Professor of Political Science , American Graduate School in Paris (AGS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2261242024-03-22T09:28:15Z2024-03-22T09:28:15ZSénégal : la crise électorale de 2024 met en évidence des problèmes plus profonds impliquant Macky Sall et son dauphin<p>La tentative infructueuse du président sénégalais <a href="https://www.europe1.fr/international/portrait-senegal-macky-sall-un-president-de-temps-troubles-4229196">Macky Sall</a> de <a href="https://information.tv5monde.com/afrique/senegal-le-president-macky-sall-annonce-le-report-de-lelection-presidentielle-2707783">reporter</a> l'élection présidentielle a exacerbé inutilement des tensions déjà présentes dans le processus électoral. Cette décision met en évidence des problèmes de gouvernance plus profonds dans le pays.</p>
<p>Le décret de <a href="https://www.jeuneafrique.com/1533059/politique/presidentielle-au-senegal-macky-sall-acte-le-report-de-lelection/">Sall</a>, ultérieurement <a href="https://www.aa.com.tr/fr/afrique/s%C3%A9n%C3%A9gal-le-conseil-constitutionnel-annule-le-report-de-la-pr%C3%A9sidentielle-/3139053">annulé</a> par le Conseil constitutionnel, était le dernier en date d'une série d'interventions abusives du gouvernement dépassant les prérogatives du pouvoir exécutif. Il s'agit notamment de la <a href="https://fr.africanews.com/2018/07/03/senegal-presidentielle-rejet-de-la-candidature-de-karim-wade//">disqualification</a> de candidats clés de l'opposition, de la manipulation des procédures judiciaires et de la détention arbitraire d'opposants.</p>
<p>Les 12 années de mandat de Sall ont été marquées par des contradictions. Son administration a stimulé les investissements dans les transports et les infrastructures urbaines. Il a notamment travaillé sur l'extension du <a href="https://documents1.worldbank.org/curated/en/319731593403262722/text/Senegal-Transport-and-Urban-Mobility-Project.txt">réseau autoroutier</a>, le nouvel aéroport international de Diass, le développement de routes principales et l'achèvement de projets de transport public.</p>
<p>Mais ces investissements ne se sont pas traduits par une amélioration de la vie des Sénégalais. Des milliers de jeunes continuent de s'aventurer dans des <a href="https://www.jeuneafrique.com/1072143/politique/tribune-whatshappeninginsenegal-quand-le-drame-des-migrants-passe-au-second-plan/">voyages périlleux</a> vers l'Europe, ayant perdu tout espoir de réaliser leur potentiel dans leur propre pays. </p>
<p>C'est dans ce contexte qu'il a décidé de reporter les élections, dans une ultime tentative de mettre en place une stratégie gagnante pour son camp. Son successeur désigné, <a href="https://information.tv5monde.com/afrique/senegal-qui-est-amadou-ba-premier-ministre-et-dauphin-designe-de-macky-sall-2667253">Amadou Ba</a>, reste une figure contestée au sein du parti au pouvoir, <a href="https://www.senegel.org/en/movements/political-parties/poldetails/2">l'Alliance pour la République</a>.</p>
<p><a href="https://www.researchgate.net/profile/Amy-Niang">Je m'intéresse à l'histoire de la formation de l'État en Afrique de l'Ouest</a>. Comme je l'ai <a href="https://rowman.com/ISBN/9781786606525/The-Postcolonial-African-State-in-Transition-Stateness-and-Modes-of-Sovereignty">soutenu</a> dans mes travaux, les États se maintiennent en produisant et en marginalisant des catégories “alterisées” en leur sein. Cela fait référence à une situation où les gouvernements affirment leur souveraineté non pas contre des forces extérieures, mais contre des groupes culturels internes et des logiques de gouvernance existantes. Le style de gouvernance de Sall correspond sensiblement à ce schéma. </p>
<h2>Crise au sein de son parti</h2>
<p>Sall <a href="https://fr.africanews.com/2024/02/10/senegal-macky-sall-se-justifie-sur-le-report-de-la-presidentielle//">a déclaré</a> qu'il reportait les élections en raison d'un prétendu conflit entre l'Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel. Le parlement avait approuvé la création d'une commission d'enquête sur le processus de validation des candidatures présidentielles par le Conseil constitutionnel.</p>
<p>En fait, Sall s'est accroché à <a href="https://www.bbc.com/afrique/articles/c1vywrx3xx9o">une accusation</a> de corruption portée par Karim Wade contre deux juges du Conseil constitutionnel suite à l'exclusion de Karim de l'élection en raison de sa double nationalité.</p>
<p>Mais la raison la plus plausible est une crise au sein du camp au pouvoir. L'Alliance pour la République est un parti divisé qui se présente aux élections en ordre dispersé. Le successeur choisi par M. Sall, <a href="https://www.bbc.com/afrique/articles/cxwr34j394wo">Ba</a>, ne suscite guère d'enthousiasme parmi les électeurs. Il incarne le statu quo. Candidat aisé, Ba a la tâche ardue de convaincre un électorat appauvri qu'il est à la hauteur. </p>
<p>M. Sall a outrepassé ses pouvoirs constitutionnels. La <a href="https://adsdatabase.ohchr.org/IssueLibrary/SENEGAL_Constitution.pdf">constitution sénégalaise</a> limite la durée du mandat présidentiel, qui ne peut être modifiée. De surcroît, selon le <a href="https://dge.sn/sites/default/files/2019-01/CODE%20ELECTORAL%202018_0.pdf">code électoral</a>, le décret fixant la date de l'élection présidentielle doit être publié au plus tard 80 jours avant la date prévue du scrutin. M. Sall a reporté le scrutin seulement 12 heures avant le début de la campagne et <a href="https://www.africanews.com/2024/02/14/senegal-authorities-restrict-internet-access-and-ban-march//">22 jours avant le scrutin</a>.</p>
<p>La tentative de report de l'élection par M. Sall, qui vient renforcer un climat de méfiance à l'égard de l'intégrité du processus électoral, a plongé le Sénégal dans une grave crise constitutionnelle. Son décret a mis en exergue deux questions importantes :</p>
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<li><p>l'engagement du gouvernement en faveur d'une passation de pouvoir ordonnée</p></li>
<li><p>l'intégrité du processus démocratique.</p></li>
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<h2>L'érosion d'une tradition démocratique</h2>
<p>Depuis 2021, une série de manifestations et d'émeutes ont opposé Ousmane Sonko, une figure clé de l'opposition faisant l'objet d'accusations de viol, et ses partisans à un gouvernement accusé d'avoir manipulé le système judiciaire pour entraver un candidat sérieux. En conséquence, l'économie a été gravement perturbée, avec une perte de production économique journalière estimée à <a href="https://www.reuters.com/world/africa/restaurants-water-towers-unrest-dents-senegals-economy-2023-06-09/">33 millions de dollars</a>. </p>
<p>En outre, M. Sall a mobilisé les forces de sécurité et de défense pour instaurer un climat de peur. Il a eu recours à des mesures musclées contre les figures de l'opposition et les voix dissidentes au sein de la société civile, par le biais de détentions arbitraires et de poursuites judiciaires. Son gouvernement a systématiquement <a href="https://www.hrw.org/news/2023/06/05/senegal-violent-crackdown-opposition-dissent">restreint</a> la liberté de réunion, interdit les manifestations, réprimé les médias indépendants et utilisé les ressources publiques pour renforcer le parti au pouvoir.</p>
<p>Pour toutes ces raisons, le Sénégal a connu un affaiblissement des institutions chargées de garantir l'État de droit, de favoriser la participation politique et d'assurer la reddition des comptes des pouvoirs publics.</p>
<p>M. Sall a été élu en <a href="https://www.lejdd.fr/International/Macky-Sall-a-ete-elu-a-la-presidence-du-Senegal-497449-3222704">2012</a> après une période tumultueuse sous le gouvernement flamboyant du <a href="https://www.britannica.com/biography/Abdoulaye-Wade">président Abdoulaye Wade</a>. M. Sall a fait toute sa carrière politique sous la tutelle de M. Wade. Cependant, leurs relations se sont détériorées lorsqu'il est devenu évident que M. Sall nourrissait l'ambition de défier le fils de M. Wade, <a href="https://www.africa-confidential.com/profile/id/254/page/4">Karim</a>, qui était destiné à succéder à son père. </p>
<p>M. Sall s'est engagé à assurer une gouvernance vertueuse et sobre. Mais l'euphorie du public s'est vite dissipée lorsque des scandales impliquant des ministres et des <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/06/25/senegal-soupconne-de-corruption-le-frere-du-president-macky-sall-demissionne_5481292_3212.html">membres de sa famille proche</a> ont mis à nu la corruption au sein de l'administration.</p>
<p>En 2023, dans un contexte de grande agitation sur la validité d'un troisième mandat, Sall <a href="https://www.bbc.com/news/world-africa-66093983">a cédé</a> à la pression populaire, après <a href="https://www.voanews.com/a/senegalese-opposition-rally-against-president-sall-s-possible-third-term-ambition-/7091705.html">de violentes manifestations</a>. Celles-ci ont débouché sur la crise politique la plus grave depuis les années 1960, faisant plus de 60 morts et conduisant à l’<a href="https://www.hrw.org/news/2024/01/22/senegal-pre-election-crackdown">arrestation</a> de plus d'un millier de personnes.</p>
<h2>Où va le Sénégal ?</h2>
<p>Conformément à la <a href="https://www.theeastafrican.co.ke/tea/rest-of-africa/senegal-presidentsets-presidential-election-for-march-24-4547872">décision du Conseil constitutionnel</a>, M. Sall a finalement accepté d'organiser l'élection avant son départ.</p>
<p>À l'approche du scrutin du 24 mars, l'absence des principaux candidats et les incertitudes concernant les procédures électorales ajoutent à la volatilité de la situation. </p>
<p>En outre, la rupture de la confiance est telle que l'opinion publique sénégalaise doute encore de l'engagement de M. Sall à remplir ses obligations et à faciliter une passation de pouvoir ordonnée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/226124/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Amy Niang does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Les tentatives de report l'élection au Sénégal montrent des problèmes de gouvernance sous l'administration de Macky Sall et les faiblesses de son successeur désigné, Amadou Ba.Amy Niang, Head of Research Programme, Council for the Development of Social Science Research in AfricaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2253912024-03-08T15:11:17Z2024-03-08T15:11:17ZLa côte de l'Afrique de l'Ouest était un paradis pour la piraterie et la pêche illégale : comment la technologie change la donne<p><a href="https://nemrod-ecds.com/?p=4193">Le golfe de Guinée</a> - une région côtière qui s'étend du Sénégal à l'Angola - est doté de vastes réserves d'hydrocarbures, de minéraux et de ressources halieutiques. Il s'agit également d'une voie importante pour le commerce international, ce qui le rend essentiel au développement des pays de la région.</p>
<p>Cependant, pendant longtemps, les pays du golfe de Guinée n'ont pas surveillé correctement ce qui se passait dans leurs eaux. Cela a permis aux <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/12/12/le-golfe-de-guinee-mer-de-tous-les-dangers-et-royaume-de-la-piraterie-mondiale_6105768_3212.html">menaces pour la sécurité en mer</a> de se développer. Parmi ces menaces, figurent la pêche illégale, non déclarée et non réglementée, le trafic de drogue, la piraterie et les vols à main armée, ainsi que le déversement de déchets toxiques.</p>
<p>Par exemple, en 2020, le <a href="https://www.icc-ccs.org/icc_test/index.php/1305-latest-gulf-of-guinea-piracy-attack-alarming-warns-imb#:%7E:text=IMB%20data%20shows%20that%20the,in%202019%20from%2017%20incidents.">Bureau maritime international</a> a signalé que la région avait connu le plus grand nombre d'enlèvements d'équipages jamais enregistré : 130 membres d'équipage enlevés lors de 22 incidents. En 2019, 121 membres d'équipage ont été enlevés lors de 17 incidents.</p>
<p>Des mesures régionales sont prises pour contrer ces menaces. En 2013, les chefs d'État ont signé le <a href="https://www.gouv.bj/article/2504/securite-maritime-dans-golfe-guinee-cmmc-celebre-anniversaire-code-conduite-yaounde/#:%7E:text=Le%20Code%20de%20conduite%20de%20Yaound%C3%A9%20est%20un%20processus%20dont,en%20mer%2C%20notamment%20la%20piraterie">code de conduite de Yaoundé</a> - une déclaration visant à travailler ensemble et à faire face aux menaces. Cela a également entraîné la mise en place d'un grand centre, connu sous le nom d’<a href="https://icc-gog.org/?page_id=1575">Architecture de Yaoundé</a> (composé de différentes divisions), qui coordonne et partage les informations sur ce qui se passe en mer. </p>
<p>Depuis la signature du code de conduite de Yaoundé en 2013, des progrès ont été réalisés. Comme nous l'avons constaté dans <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308597X23005092?ref=pdf_download&fr=RR-2&rr=848184a42c0160f6">une nouvelle étude</a>, les outils technologiques ont joué un rôle essentiel dans la lutte contre les menaces à la sécurité en mer dans les pays d'Afrique de l'Ouest et d'Afrique centrale. </p>
<p>Par exemple, le Nigeria a été désigné comme un foyer de la piraterie mais, en 2022, il a été <a href="https://www.vanguardngr.com/2022/05/nigeria-exits-nations-of-high-piracy-risks-robbery-in-international-waters-imu/#:%7E:text=For%20fighting%20Sea%20Piracy%20headlong%20through%20the%20Nigerian,has%20exited%20Nigeria%20from%20the%2020B%20Piracy%20List.">retiré de la liste</a> grâce, en grande partie, à l'utilisation de la <a href="https://guardian.ng/business-services/maritime/nigeria-delisted-from-sea-piracy-list-says-navy/">technologie</a>.</p>
<p>Les outils technologiques ont permis aux pays de gérer et de surveiller plus efficacement l'environnement marin. Ils favorisent également le partage d'informations entre les organismes chargés de l'application des lois. Cela a conduit à des opérations d'interception réussies et a permis de poursuivre des pirates dans la région.</p>
<h2>Les outils technologiques</h2>
<p>Les navires de <a href="https://www.imo.org/en/OurWork/Safety/Pages/AIS.aspx">cargaison</a> et de <a href="https://www.fao.org/3/w9633e/w9633e.pdf">pêche</a> sont tenus, en vertu du droit international, d'être équipés de systèmes qui transmettent des données indiquant où ils se trouvent. </p>
<p>Depuis la signature du code de conduite de Yaoundé, nous avons <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308597X23005092">découvert</a> que de nouvelles technologies utilisent désormais ces données de localisation pour aider les pays du golfe de Guinée à surveiller leurs eaux. </p>
<p>Des outils et des systèmes - tels que Radar, le système d'information régional de l'architecture de Yaoundé (<a href="https://www.gogin.eu/plateforme-yaris/">Yaris</a>), <a href="https://info.seavision.volpe.dot.gov/">Sea-Vision</a>, <a href="https://www.skylight.global/">Skylight</a> et <a href="https://globalfishingwatch.org/">Global Fishing Watch</a> - intègrent des informations provenant de divers systèmes de surveillance et de contrôle de la localisation, ainsi que des données satellitaires, afin d'identifier les comportements suspects. Cela a permis d'améliorer considérablement les efforts déployés pour lutter contre les menaces à la sécurité. </p>
<p>Les pays du Golfe de Guinée ont désormais une meilleure connaissance de l'activité des navires dans leurs eaux et sont en mesure de réagir en connaissance de cause dans les situations d'urgence, telles que la piraterie, les vols à main armée et les vols de pétrole. </p>
<p>Par exemple, en 2022, le <a href="https://shipsandports.com.ng/mt-heroic-idun-captain-issued-false-piracy-alert-says-gambo/">pétrolier Heroic Idun</a> a échappé à une arrestation au Nigeria pour comportement suspect, puis s'est rendu en Guinée équatoriale. Utilisant le système de l'architecture de Yaoundé, la Guinée équatoriale a retenu le navire à la demande du Nigeria et il a ensuite été <a href="https://www.reuters.com/world/africa/detained-oiltanker-equatorial-guinea-return-nigeria-officials-2022-11-11/">condamné à une amende</a>. </p>
<p>Sans le code de conduite de Yaoundé et les nouvelles technologies qu'il a introduites, le partage d'informations, la collecte de preuves et la coopération entre les pays n'auraient pas été possibles.</p>
<h2>Les avancées technologiques du Nigeria</h2>
<p>Le Nigeria est un exemple typique d'un pays où les investissements dans les infrastructures technologiques ont aidé à faire face aux menaces à la sécurité et au développement. </p>
<p>Au cours des trois dernières années, le Nigeria a déployé une série d'outils technologiques. Par exemple, la marine a déployé le <a href="https://www.defenceweb.co.za/sea/sea-sea/regional-maritime-awareness-capability-rmac-programme-rolling-out-across-africa/">Regional Maritime Awareness Capability facility</a>, qui reçoit, enregistre et distribue des données, ainsi que le système de surveillance de masse <a href="https://www.defenceweb.co.za/sea/sea-sea/nigeria-commissions-falcon-eye-maritime-domain-awareness-system/#:%7E:text=Nigeria%20has%20commissioned%20the%20Israeli-designed%20Falcon%20Eye%20maritime,July%20at%20the%20Nigerian%20Naval%20Headquarters%20in%20Abuja">Falcon Eye</a>.</p>
<p>L'Agence nigériane d'administration et de sécurité maritimes a également progressé grâce à son <a href="https://nimasa.gov.ng/president-buhari-launches-deep-blue-project-in-lagos/#:%7E:text=Le%20Projet%2C%20qui%20a%20%C3%A9t%C3%A9%20initi%C3%A9%20par%20le%20f%C3%A9d%C3%A9ral,les%20eaux%20nig%C3%A9rianes%20jusqu'au%20Golfe%20de%20Guin%C3%A9e.">projet Deep Blue</a>. Il s'agit notamment d'un centre de renseignements et de collecte de données qui travaille avec des navires de mission spéciale (comme des véhicules aériens sans pilote) pour prendre des mesures contre les menaces. </p>
<p>Depuis, le Nigeria a enregistré une <a href="https://www.icc-ccs.org/index.php/1342-new-imb-report-reveals-concerning-rise-in-maritime-piracy-incidents-in-2023#:%7E:text=Malgr%C3%A9%20la%20continuit%C3%A9%20de%20la%20restriction%20,deux%20%C3%A9quipes%20bless%C3%A9es%20en%2023">réduction</a> des actes de piraterie et des vols à main armée en mer. Autrefois désigné comme un point chaud de la piraterie, le pays a été <a href="https://nimasa.gov.ng/piracy-nigeria-removed-from-ibf-unsafe-waters-list/">retiré de la liste des points chauds</a> en 2022. </p>
<h2>Un optimisme prudent</h2>
<p>Il est évident que la technologie a un rôle important à jouer dans l'amélioration de la sûreté et de la sécurité en mer. Mais elle n'est pas sans poser des problèmes, comme nous l'avons identifié dans notre étude.</p>
<p>Tout d'abord, une dépendance excessive à l'égard des outils technologiques externes a entraîné un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308597X23005092?ref=pdf_download&fr=RR-2&rr=848184a42c0160f6#sec0035">manque d'appropriation</a> de la technologie. Cela affecte la durabilité des projets. Par exemple, lorsque le financement de l'UE pour YARIS expirera, les coûts d'exploitation seront transférés de l'UE aux États de l'architecture de Yaoundé. Mais les États régionaux n'ont toujours pas de plans clairs sur la manière de soutenir YARIS.</p>
<p>Deuxièmement, l'utilisation de la technologie nécessite des personnes disposant d'une expertise spécifique. Or, de nombreux pays n'ont pas les moyens de les embaucher ou ne produisent pas de ressources humaines dotées de cette expertise. Même lorsque le personnel a reçu une formation, il peut ne pas avoir accès aux outils (qui ne sont pas disponibles au niveau national) pour appliquer ce qu'il a appris. </p>
<p>Troisièmement, les systèmes de surveillance existants tels que le Système d'identification automatique (AIS) et le Système de surveillance des navires (VMS) peuvent être désactivés, une vulnérabilité que les criminels continuent d'exploiter. Les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC9286260/pdf/pone.0269490.pdf">systèmes radar</a> peuvent combler ces lacunes, mais la couverture RADAR est insuffisante le long des côtes. Dans le même ordre d'idées, la rareté des <a href="https://www.sciencedirect.com/topics/earth-and-planetary-sciences/data-center">centres de données</a> nationaux pour l'identification et le suivi des navires à longue distance (en raison d'un manque d'investissement) rend difficile l'utilisation de la technologie existante.</p>
<p>Cinquièmement, il existe des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308597X23005092?ref=pdf_download&fr=RR-2&rr=848184a42c0160f6#sec0025">défis</a> liés aux difficultés de communication, à l'absence de connexions internet à bord de certains navires ou à la faible vitesse de l'internet. </p>
<p>Enfin, les opérateurs privés comme l'industrie du transport maritime n'utilisent pas les services fournis par l'Architecture de Yaoundé. Cela semble lié à des considérations politiques et au manque de confiance dans les solutions régionales. </p>
<p>Les opérateurs de navires signalent plutôt les incidents à des agences extérieures à la région, telles que <a href="https://www.mica-center.org/en/agreements-supporting-the-action-of-the-mica-center/">Maritime Domain Awareness for Trade - Gulf of Guinea</a> (basée en France) ou le <a href="https://www.icc-ccs.org/icc/imb">Bureau maritime international</a> en Malaisie. Ces agences diffusent souvent des informations sans les confirmer auprès de l'architecture régionale, ce qui empêche les agences régionales de travailler efficacement.</p>
<p>Il est dans l'intérêt des pays de l'Atlantique de coopérer et de se coordonner pour relever les défis de la sécurité maritime. </p>
<p>La technologie peut jouer un rôle clé à cet égard. Mais il est essentiel que les pays améliorent leur savoir-faire technologique et veillent à ce que les partenaires extérieurs et les entreprises utilisent les services technologiques disponibles. Ce sera un grand pas vers un environnement maritime sûr et collaboratif.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225391/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ifesinachi Okafor-Yarwood reçoit des fonds du Scottish Funding Council et du PEW Charitable Trust.</span></em></p>Les technologies sont essentielles pour contrer les menaces à la sécurité en mer dans plusieurs pays d'Afrique de l'Ouest et du CentreIfesinachi Okafor-Yarwood, Lecturer, University of St AndrewsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2242752024-02-26T12:23:15Z2024-02-26T12:23:15ZApprentissage bilingue : leçons de l'Afrique de l'Ouest sur ce qui marche le mieux<p>Les enfants vivant dans des communautés multilingues apprennent souvent à l'école une langue qui ne correspond pas à celle qu'ils parlent à la maison. Ce décalage les empêche de participer aux discussions en classe et d'apprendre à lire. Il en découle des résultats d'apprentissage médiocres, des redoublements et des abandons scolaires.</p>
<p>Les programmes d'éducation bilingue qui incluent les langues maternelles sont de plus en plus populaires pour améliorer les résultats scolaires. L'éducation bilingue est associée à de meilleures <a href="https://doi.org/10.1017/S1366728908003386">compétences linguistiques et d'alphabétisation</a>, à une réduction des redoublements et des taux d'abandon scolaire dans le <a href="https://hdl.handle.net/10986/10331">monde entier</a>. L'intégration des langues maternelles dans l'éducation valorise également les identités culturelles des enfants, améliorant la confiance, <a href="https://doi.org/10.1080/09500789808666737">l'estime de soi</a> et <a href="https://doi.org/10.1007/s11159-012-9308-2">l'apprentissage</a>. </p>
<p>Mais le simple fait de dispenser un enseignement bilingue ne garantit pas de meilleurs résultats scolaire. C'est la conclusion d'un récent <a href="https://doi.org/10.1080/13670050.2023.2290482">article</a> que nous avons publié et dans lequel nous avons examiné les programmes bilingues dans six pays francophones d'Afrique de l'Ouest : Niger, Sénégal, Mali, Burkina Faso, Côte d'Ivoire et Cameroun. </p>
<p>Nous avons trouvé des résultats mitigés, entre les pays et les programmes et au sein de ceux-ci.</p>
<p>Nous avons identifié deux séries de facteurs qui limitent ou contribuent à la qualité de l'enseignement bilingue. Il s'agit de :</p>
<ul>
<li><p>des facteurs de mise en œuvre, tels que la formation des enseignants et les ressources disponibles dans les salles de classe;</p></li>
<li><p>des facteurs socioculturels, tels que la perception des langues maternelles dans l'éducation.</p></li>
</ul>
<p>Nos résultats soulignent la nécessité de prendre en compte le contexte local lors de l'application des programmes d'éducation bilingue. </p>
<h2>L'éducation bilingue en Afrique de l'Ouest francophone</h2>
<p>Notre équipe a mené des recherches en Côte d'Ivoire de 2016 à 2018. Nous avons mesuré les compétences linguistiques et de lecture des enfants dans leur langue maternelle et en français, et comparé les résultats entre les enfants scolarisés dans des écoles francophones ou bilingues du Projet École Intégrée. </p>
<p>Les enfants des écoles francophones ont obtenu de meilleurs résultats que leurs camarades des écoles bilingues dans les <a href="https://doi.org/10.1037/edu0000723">évaluations de la langue et de la lecture</a>. Les enseignants ont révélé qu'ils disposaient de meilleures ressources pédagogiques et qu'ils se sentaient mieux préparés dans les écoles francophones. </p>
<p>Nous avons voulu savoir si les programmes d'éducation bilingue dans d'autres pays francophones de la région avaient connu des expériences similaires. En 2022, nous avons recherché dans les bases de données universitaires la littérature en anglais et en français qui traitait de la mise en œuvre des programmes et mesurait les résultats de l'apprentissage et de la scolarisation dans le cadre des programmes d'éducation bilingue. Nous avons examiné neuf programmes provenant de six pays : Niger, Sénégal, Mali, Burkina Faso, Côte d'Ivoire et Cameroun. </p>
<p>Ces pays sont d'anciennes colonies ou territoires français. Le français est la langue officielle ou de travail et souvent la langue d'enseignement à l'école. Toutefois, ces pays sont très multilingues. Environ <a href="https://www.axl.cefan.ulaval.ca/afrique/niger.htm">23</a> langues vivantes sont parlées au Niger, <a href="https://www.axl.cefan.ulaval.ca/afrique/senegal.htm#:%7E:text=Groupes%20minoritaires%3A%20environ%2040%20langues,0%2C4%20%25">39</a>%2C%20etc.) au Sénégal, <a href="https://information.tv5monde.com/afrique/mali-dans-un-pays-aux-70-langues-pourquoi-nen-navoir-quune-seule-officielle-1424862">68</a> au Mali, <a href="https://www.statista.com/statistics/1280625/number-of-living-languages-in-africa-by-country/">71</a> au Burkina Faso, <a href="https://www.statista.com/statistics/1280625/number-of-living-languages-in-africa-by-country/">78</a> en Côte d'Ivoire et <a href="https://www.statista.com/statistics/1280625/number-of-living-languages-in-africa-by-country/">277</a> au Cameroun. </p>
<p>Notre étude a montré que les enfants peuvent tirer profit de l'apprentissage de deux langues. Cela est vrai qu'il s'agisse de deux langues officielles, comme dans les écoles camerounaises <a href="https://doi.org/10.1007/s10993-019-09510-7">Dual Curriculum Bilingual Education (Programme d'éducation bilingue)</a> (français et anglais), ou d'une langue maternelle et du français, comme dans les <a href="https://doi.org/10.1086/447544">écoles communautaires</a> du Mali. Les enfants peuvent également en bénéficier, qu'ils soient progressivement initiés à une langue tout au long de l'école primaire ou que les deux langues soient introduites en même temps.</p>
<p>Mais le manque de ressources et l'absence de prise en compte des conditions locales ont affecté les résultats. Les programmes qui ont abouti à des résultats positifs en matière de scolarisation et d'apprentissage ont identifié et ciblé des défis communs liés à l'école et à la communauté.</p>
<h2>Formation des enseignants et ressources</h2>
<p>Un défi commun lié à l'école était que les enseignants ne disposaient pas de matériel pédagogique dans toutes les langues d'enseignement.</p>
<p>Le programme <a href="https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000161121">Pédagogie Convergente</a> au Mali, par exemple, a permis aux enseignants de disposer de matériel en français et dans leur langue maternelle. Les enfants ont obtenu de meilleurs résultats en français et en mathématiques. </p>
<p>Mais certains enseignants du même programme ne disposaient pas toujours de <a href="https://books.google.ca/books/about/Patterns_of_French_literacy_development.html?id=MoNnAAAAMAAJ&hl=en&redir_esc=y">matériel</a> pédagogique dans leur langue maternelle. Et certains enfants avaient des difficultés à lire et à écrire. </p>
<p>Un autre problème commun est que les enseignants ne se sentent pas préparés à enseigner dans toutes les langues, car la formation des enseignants se fait souvent dans une langue officielle, comme le français. Le <a href="https://www.adeanet.org/clearinghouse/sites/default/files/docs/interieur_11_burkina_fre.pdf">Programme d'éducation bilingue</a> au Burkina Faso, par exemple, s'est efforcé de former les enseignants dans leur langue maternelle afin qu'ils se sentent à l'aise pour suivre le programme bilingue. </p>
<p>Les enfants des écoles bilingues du Burkina Faso ont obtenu des <a href="https://doi.org/10.1080/13670050802149275">taux de réussite</a> supérieurs à la moyenne à l'examen du certificat d'études primaires, <a href="https://www.memoireonline.com/06/22/12997/m_Le-rapport-des-enseignants-aux-langues-nationales-en-tant-que-mdiums-et-matires-den.html">ont moins redoublé</a> et sont restés plus longtemps à l'école que les enfants des écoles françaises traditionnelles. </p>
<p>Ces deux exemples contrastent avec les écoles bilingues de Côte d'Ivoire, où les enseignants manquaient de matériel et de formation dans leur langue maternelle. En conséquence, les enfants ont démontré de moins bonnes compétences en langue et en lecture que leurs camarades dans les écoles uniquement françaises.</p>
<h2>Facteurs socioculturels</h2>
<p>Nous avons identifié des défis communs liés à la communauté, notamment en ce qui concerne l'adhésion de la communauté et la perception de l'enseignement dans la langue maternelle. </p>
<p>Par exemple, les familles ayant un statut socio-économique élevé craignaient que <a href="https://doi.org/10.1080/13670050208667760">les écoles expérimentales du Niger</a> n'entravent la maîtrise du français par les enfants et ne compromettent leur entrée dans l'enseignement secondaire. </p>
<p>Des programmes tels que le <a href="https://ared-edu.org/wp-content/uploads/2021/07/DC-Senegal-Workshop-Findings_04.2019-FINAL-ENG.pdf">Projet d'appui à l'éducation de qualité en langues maternelles pour l'école primaire</a> au <a href="https://doi.org/10.1080/13670050.2020.1765968">Sénégal</a> se sont efforcés de combattre les perceptions négatives en éduquant les familles sur les avantages de l'éducation bilingue. Les enfants du programme sénégalais ont obtenu de meilleurs résultats que leurs camarades des écoles françaises traditionnelles dans toutes les matières scolaires.</p>
<p>Les mêmes programmes ont parfois donné des résultats différents en fonction de la communauté. Par exemple, bien que les enfants scolarisés dans des écoles bilingues au Burkina Faso aient obtenu de bons résultats, les <a href="https://doi.org/10.1007/s11159-021-09885-y">parents</a> ont estimé que les programmes français étaient mieux adaptés pour la poursuite des études dans le secondaire. </p>
<h2>Quelles conséquences pour l'enseignement bilingue ?</h2>
<p>Notre étude a mis en évidence que les efforts visant à fournir aux enseignants les ressources dont ils ont besoin et à favoriser le soutien de la communauté ont été systématiquement associés à des résultats positifs en matière de scolarisation et d'apprentissage. </p>
<p>Toutefois, l'efficacité de ces initiatives peut varier selon les communautés, en raison de contraintes de ressources différentes et de différences socioculturelles. Les études qui ont révélé des résultats moins satisfaisants ont également identifié la présence de défis communs. Par conséquent, l'éducation bilingue peut favoriser des résultats d'apprentissage positifs si des efforts sont déployés pour surmonter les défis communs en fonction des besoins des communautés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/224275/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>The authors do not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and have disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Même si ‘éducation bilingue peut améliorer les résultats d'apprentissage, il est important de tenir compte du contexte local.Kaja Jasinska, Assistant Professor, Applied Psychology and Human Development, University of TorontoMary-Claire Ball, PhD student, Developmental Psychology and Education, University of TorontoLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2221662024-02-20T08:27:48Z2024-02-20T08:27:48ZSénégal : Dakar se dote d'un nouveau système de transport de masse mais les défis de la mobilité demeurent<p>Un nouveau système de transport dénommé Bus rapid transit (BRT) ou encore Bus à haut niveau de service (BHNS) de Dakar a été inauguré le 14 janvier 2024 par le président Macky Sall. Il traduit, selon le <a href="https://www.cetud.sn/">Conseil exécutif des transports urbains de Dakar (CETUD)</a>, la vision du chef de l’État de promouvoir la mobilité collective, en prenant en compte les enjeux transversaux liés aux transitions numérique et énergétique. Il apparaît dans les médias comme une “<a href="https://africa24tv.com/mise-en-service-du-bus-rapid-transit-brt-pour-desengorger-dakar/">révolution des transports de masse</a>” dont la mise en service serait un “tournant dans le domaine du transport en masse”. Il devrait, selon Macky Sall, “<a href="https://www.rts.sn/actualite/detail/general/le-brt-est-une-avancee-majeure-pour-resoudre-les-problemes-actuels-de-transport-a-dakar-et-anticiper-les-defis-futurs-macky-sall">résoudre les problèmes actuels de transport à Dakar et anticiper les défis futurs</a>”. </p>
<p>En tant que enseignant-chercheur, j'ai accumulé 30 ans d'expérience dans l'enseignement et la recherche axés sur les villes africaines. Ces dernières années, mon intérêt s'est porté sur les transports et les mobilités à Dakar, y compris des études sur les systèmes BRT et la modernisation de la mobilité urbaine.</p>
<h2>Histoire du transport de masse</h2>
<p>Avant d’évoquer les défis, il faut tout de même préciser deux choses. La première est qu’au-delà de l’utilisation des nouvelles technologies, l’idée de transport de masse n’est pas nouvelle. Elle remonte aux années 1980 avec déjà la mise en service du <a href="https://www.seneplus.com/article/quand-le-%E2%80%9Cpetit-train%E2%80%9D-fait-le-bonheur-des-banlieusards">Petit train de banlieue en 1987</a>. Elle est par la suite <a href="https://www.researchgate.net/profile/Papa-Sakho-2/publication/317951764_Le_systeme_des_transports_urbains_a_Dakar_triomphe_de_la_negociation_de_l'Etat_au_quotidien/links/5952905d458515a207f7e403/Le-systeme-des-transports-urbains-a-Dakar-triomphe-de-la-negociation-de-lEtat-au-quotidien.pdf">consolidée en 1994 par le projet</a> d’en faire une dorsale adossée à l’axe ferroviaire avec une expérience de courte durée d’intermodalité avec la Société de transports urbains du Cap-Vert (SOTRAC) (1971-1998). </p>
<p>La deuxième porte sur l’histoire de BRT qui, <a href="https://www.itdp.org/2004/01/01/pre-feasibility-study-for-bus-rapid-transit-in-dakar-senegal/">en réalité, remonte à 2002 </a>. Le projet consistait à disposer d’une seule ligne de grande capacité menant au centre-ville de Dakar et un réseau limité d’axes de rabattement <a href="https://www.itdp.org/2004/01/01/pre-feasibility-study-for-bus-rapid-transit-in-dakar-senegal/">connectant les populations de la banlieue de Pikine et Guédiawaye</a>. Les deux schémas sont donc quasi identiques.</p>
<h2>Défis majeurs de la mobilité urbaine</h2>
<p>Quant aux défis majeurs de la mobilité urbaine à Dakar, trois défis paraissent cruciaux à court et long terme. A court et moyen terme, il s’agit d’une part, de la gestion des flux de déplacements et, d’autre part, de la gouvernance du système des transports urbains et, à plus long terme, de la planification des besoins de mobilité compte tenu de l’organisation de l’occupation de l’espace.</p>
<p>Le premier défi concerne la facilité d'accès au centre-ville pour les habitants des banlieues. Ce défi a trait à l’accès des populations des banlieues au centre-ville. Il s'agit de résoudre deux problèmes d'espace pour rendre les déplacements plus fluides. D'abord, le centre-ville est situé loin, à l'extrême sud-ouest de la ville qui concentre la plupart des activités économiques et de services du pays. Ensuite, l’étranglement de la presqu’île constitue un goulot aux déplacements vers le centre des populations des banlieues qui s’étendent en éventail de plus en plus vers l'est. </p>
<p>Le deuxième, celui de la gouvernance, est une offre préexistante de transport composée par des moyens de transport en commun privés dominés par ceux dits “informels”. Malgré de nombreuses tentatives de l’Etat de mettre en place un système formel, cette offre subsiste grâce à sa résilience et capacité d’adaptation. </p>
<p>Aujourd’hui encore, <a href="https://www.researchgate.net/profile/Papa-Sakho-2/publication/317951764_Le_systeme_des_transports_urbains_a_Dakar_triomphe_de_la_negociation_de_l'Etat_au_quotidien/links/5952905d458515a207f7e403/Le-systeme-des-transports-urbains-a-Dakar-triomphe-de-la-negociation-de-lEtat-au-quotidien.pdf">le programme de renouvellement admis en 1992 entamé depuis 2005</a> peine à être bouclé avec un gap de quelque 1800 “cars rapides” et Ndiaga Ndiaye à envoyer à la casse. Ce sont des minibus qui assurent les trajets dans des zones urbaines et périurbaines à Dakar, offrant un moyen de transport populaire et abordable pour de nombreux Sénégalais. </p>
<p>Le troisième est celui de la planification tenant compte à long terme de la géographie de l’agglomération. En effet, <a href="https://www.facebook.com/cetudsn/posts/brt-et-main-d%C5%93uvre-locale-le-cetud-remet-en-cause-le-rapport-itf-labogehu-gli-ht/3935381159852464/">les prévisions de croissance démographique évoquées pour l’ensemble de la région de Dakar</a> seront concentrées dans ces banlieues orientales ayant les plus besoin des services du centre-ville. En conséquence, leurs besoins d’accéder aux services du centre-ville seront de plus en plus croissants. Ainsi quelle que soit la qualité des infrastructures, le risque est grand d’être en deçà de la demande de mobilité polarisée par le centre. </p>
<h2>Que de faire ?</h2>
<p>Faut-il supprimer des cars qui assurent une bonne partie du transport de masse à Dakar - soit au moins 4 individus par équipage, et déguerpir ceux qui exercent des métiers connexes tout le long du parcours du BRT? Cela suppose de réfléchir sur les voies et moyens d’intégrer tous ces acteurs du système préexistant ou tout au moins sur le sort qui leur sera réservé.</p>
<p>L'organisation du réseau de transport (y compris le BRT et le Train Express Régional) doit tenir compte des contraintes liées à la géographie du site de la presqu'île. Cela suggère la nécessité de modifier la direction à sens unique des déplacements qui, actuellement va principalement de la banlieue vers le centre-ville excentré. Pour cela, il serait utile d'étendre l'aménagement urbain à une échelle plus vaste qui couvre l'aire métropolitaine de Dakar, Thiès et Mbour. </p>
<p>Casser les mouvements de navettes, c’est aussi privilégier les déplacements de proximité en démultipliant les services et activités de proximité pour créer de nouvelles centralités. Une telle approche irait dans le sens de promouvoir la mobilité douce, particulièrement adaptée aux distances relativement courtes. </p>
<p>En gros, la modernisation du système transport urbain dakarois a constamment rencontré des difficultés depuis les indépendances à apporter une réponse globale aux problèmes de mobilité dans l’agglomération urbaine de Dakar. Les réformes ont été au cours de leur mise en œuvre marquées par une incertitude face à la résilience des systèmes préexistants dits informels et à leurs capacités d’adaptation et de contestation. </p>
<p>Ce rapide survol interpelle les politiques sur deux questions. Comment articuler de manière cohérente la modernisation des infrastructures à la gestion des systèmes préexistants de transport? L’amélioration de l’accès à la ville au plus grand nombre peut-elle se réaliser par la seule modernisation des infrastructures de transport sans une réorganisation de l’espace urbain?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222166/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pape Sakho receives funding from MOVIDA.</span></em></p>Depuis les indépendances, la modernisation du système de transport urbain à Dakar a eu du mal à apporter une réponse globale aux problèmes de mobilité dans l’agglomération urbaine de Dakar.Pape Sakho, Maître de conférences CAMES, Université Cheikh Anta Diop de DakarLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2231332024-02-17T13:13:08Z2024-02-17T13:13:08ZLa crise politique perdure au Sénégal : ce qui doit changer<p><em>Le 3 février, moins de trois semaines avant le scrutin, le président sénégalais Macky Sall a pris un décret <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20240203-s%C3%A9n%C3%A9gal-l-%C3%A9lection-pr%C3%A9sidentielle-du-25-f%C3%A9vrier-report%C3%A9e-sine-die">reportant indéfiniment l'élection</a>, en attendant une enquête sur des allégations de corruption de juges du Conseil constitutionnel. Le 5 février, le Parlement <a href="https://www.france24.com/fr/afrique/20240205-s%C3%A9n%C3%A9gal-le-report-de-la-pr%C3%A9sidentielle-au-15-d%C3%A9cembre-approuv%C3%A9-%C3%A0-l-assembl%C3%A9e-nationale">a décidé</a>, de son côté, de reporter le vote de près de 10 mois, le fixant au 15 décembre.</em></p>
<p><em>Cependant, le Conseil constitutionnel <a href="https://www.bbc.com/afrique/articles/crgk12vd22no">a déclaré</a> le jeudi 15 février que la loi adoptée par le Parlement était contraire à la Constitution et a ordonné l'annulation du décret de M. Sall reportant l'élection.</em></p>
<p><em>La décision inattendue et sans précédent de Sall depuis l'introduction des élections multipartites dans le pays a eu l'effet d'un choc. Dans un discours à la nation, il a justifié le report par un différend entre l'Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel, l'arbitre du jeu électoral. Cette situation a plongé le Sénégal dans une crise politique dont l'issue est désormais incertaine. Elle soulève également des questions juridiques.</em></p>
<p><em>Abdoul Aziz Mbodji est enseignant-chercheur sur<a href="https://base.afrique-gouvernance.net/docs/gouvernance_et_constitutionnalisation_des_ressources_naturelles.pdf"> l'organisation et le fonctionnement de l'Etat et le droit constitutionnel</a>, à l'université Alioune Diop de Bambey, au Sénégal. Il analyse la décision de Macky Sall, la décision du Conseil constitutionnel et les réformes pour éviter de futures crises similaires.</em></p>
<h2>Y a-t-il une base légale au report de la présidentielle?</h2>
<p>La réponse est claire : il n'existe aucune base légale pour un tel report de la présidentielle.</p>
<p>Tout d’abord, le décret qui a stoppé le processus est arbitraire, ne s'appuie sur aucun texte et viole d'ailleurs la Constitution en son 31 article qui dispose : </p>
<blockquote>
<p>Le scrutin pour l’élection du président de la République a lieu quarante-cinq jours francs au plus et trente jours francs au moins avant la date de l’expiration du mandat du président de la République en fonction.</p>
</blockquote>
<p>Il viole aussi l'article LO 137 du code électoral qui dispose que “les électeurs sont convoqués par décret publié au journal officiel au moins 80 jours avant le jour du scrutin”. Le décret défie la décision du juge constitutionnel portant proclamation de la liste des candidats à l'élection présidentielle. Cette décision est contraignante pour tous, en vertu de l'article 92 de la Constitution qui dispose : </p>
<blockquote>
<p>Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d’aucune voie de recours. Elles s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles.</p>
</blockquote>
<p>Ensuite, la loi constitutionnelle est intervenue dans un domaine protégé, dans une matière qui ne peut pas faire l’objet de révision conformément à l’article 103 alinéa 7 de la Constitution qui dit clairement que la durée et le nombre de mandats consécutifs du président de la République ne peuvent faire l’objet de révision. Encore, elle agit dans le sens contraire de la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à <a href="https://conseilconstitutionnel.sn/2018/08/29/decision-n-1-c-2016-du-12-fevrier-2016-affaire-n-1-c-2016/">l’avis du 12 février 2016</a> sur le référendum de mars 2016. </p>
<p>Le juge déclare dans le considérant 31 que “considérant, en effet, que ni la sécurité juridique, ni la stabilité des institutions ne seraient garanties si, à l’occasion de changements de majorité, à la faveur du jeu politique ou au gré des circonstances notamment, la durée des mandats politiques en cours, régulièrement fixée au moment où ceux-ci ont été conférés pouvait, quel que soit au demeurant l’objectif recherché, être réduite ou prolongée.</p>
<h2>Comment tenir l'élection à bonne date, après l'annulation du report par le Conseil constitutionnel?</h2>
<p>Le Conseil constitutionnel a été saisi de deux types de requête :</p>
<ol>
<li><p>des requêtes contre le décret portant abrogation du décret portant convocation du corps électoral;</p></li>
<li><p>des recours contre la loi portant report de l’élection du 25 février au 15 décembre 2024.</p></li>
</ol>
<p>Dans <a href="https://www.bbc.com/afrique/articles/crgk12vd22no">sa décision du 15 février</a>, les juges du Conseil constitutionnel ont décidé de que la loi repoussant de 10 mois l'élection prévue le 25 février et permettant le maintien du Président Sall à son poste au-delà du terme de son mandat était contraire à la constitution.</p>
<p>En annulant également le décret présidentiel qui modifiait de facto le calendrier électoral, le Conseil constitutionnel ne propose pas de nouvelle date pour le scrutin. Reconnaissant le retard accumulé dans le processus, il constate simplement "l’impossibilité d’organiser l’élection présidentielle à la date initialement prévue” du 25 février et “invite les autorités compétentes à la tenir dans les meilleurs délais. </p>
<h2>Dans ces conditions, comment tenir l'élection à bonne date?</h2>
<p>C’est simple! Deux hypothèses peuvent être décidées par le juge.
Le processus devra se poursuivre comme prévu. Dans ces circonstances, l'administration devra continuer à organiser les élections dans le temps restant, ce qui entraînera malheureusement une campagne électorale courte.</p>
<p>Le Conseil constitutionnel peut, en vertu d'une interprétation de l'article 34 de la Constitution, fixer une nouvelle date pour permettre à l'administration de rattraper les retards et de remédier aux manquements. </p>
<h2>Quelles réformes à envisager, compte tenu de la crise actuelle pour ne plus tomber dans le scénario actuel ?</h2>
<p>Il est quasi difficile de reformer contre l’abus de pouvoir et le coup de force. Mais je crois qu'il serait important de doter le Conseil constitutionnel des moyens pour sauvegarder l’intégrité du processus électoral. </p>
<p>Il est crucial d'élargir le champ de compétence du Conseil constitutionnel en précisant sa compétence face aux lois de révision ainsi qu'à toutes les matières relatives aux élections nationales. De même, une réforme du mode de nomination des membres du Conseil constitutionnel est nécessaire pour briser le monopole présidentiel sur les nominations.</p>
<p>L'extension du droit de saisine aux partis politiques, aux citoyens et aux organisations de la société civile est également importante.</p>
<p>Enfin, cette pratique devrait être constitutionnalisée et perpétuée. La présence au moins d’un théoricien en droit public parmi les membres du Conseil constitutionnel est aussi souhaitable</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223133/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Abdoul Aziz Mbodj est affilié à un parti d'oppostion au Sénégal. </span></em></p>Le Conseil constitutionnel n'a pas fixé une nouvelle date pour l'élection présidentielle, laissant planer le doute sur la manière de procéder.Abdoul Aziz Mbodj, Enseignant-chercheur en droit public, Université Alioune Diop de BambeyLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2230442024-02-07T16:43:44Z2024-02-07T16:43:44ZMacky Sall remet en cause les fondements démocratiques du Sénégal<p>Le président <a href="https://www.britannica.com/biography/Macky-Sall">sénégalais Macky Sall </a> <a href="https://www.ouest-france.fr/monde/senegal/au-senegal-le-president-reporte-lelection-presidentielle-et-plonge-le-pays-dans-lincertitude-066e7ec6-c36f-11ee-8bc3-7b463e0b059b">a annoncé</a> début février le report sine die de l'élection présidentielle, initialement prévue pour le 25 février. Cette annonce a suscité des craintes quant à d'éventuelles manifestations populaires, une répression violente. Des inquiétudes subsistent aussi sur la mutation du président précédemment démocratique en leader autoritaire, voire sur un éventuel nouveau coup d'État en Afrique de l'Ouest. </p>
<p>La région a connu une série de coups d'État depuis 2020 : le Mali en août de la <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2020/10/ROBERT/62316">même année</a>, suivi d'un <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/05/31/au-mali-la-semaine-ou-le-colonel-goita-s-est-couronne-president_6082131_3212.html">deuxième</a> en 2021. <a href="https://www.france24.com/fr/afrique/20210906-coup-d-%C3%A9tat-en-guin%C3%A9e-la-pr%C3%A9visible-chute-du-pr%C3%A9sident-alpha-cond%C3%A9">La Guinée</a> a également connu un coup d'État cette année-là et le <a href="https://africacenter.org/fr/spotlight/comprendre-le-dernier-coup-detat-au-burkina-faso/">Burkina Faso</a> un an plus tard. En juillet 2023, les militaires ont pris le contrôle du <a href="https://theconversation.com/niger-un-coup-detat-pas-comme-les-autres-211242">Niger</a>.</p>
<p>Le Sénégal n'a jamais subi de coup d'État et a été considéré comme la <a href="https://2012-2017.usaid.gov/senegal/newsroom/fact-sheets/senegal-democracy-and-governance-fact-sheet#:%7E:text=Senegal%20has%20a%20reputation%20de,place%20suivant%20des%20%C3%A9lections%20d%C3%A9mocratiques%20cr%C3%A9dibles.">démocratie la plus stable de la région</a>. </p>
<p>Depuis <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/312">l'indépendance en 1960</a>, il a connu trois transitions pacifiques du pouvoir. D'abord en 1980, de <a href="https://www.academie-francaise.fr/les-immortels/leopold-sedar-senghor">Léopold Sédar Senghor</a> à <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/560">Abdou Diouf</a> ; puis, en 2000, de Diouf à <a href="https://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Abdoulaye_Wade/149378">Abdoulaye Wade</a> ; et enfin, en 2012, de <a href="https://www.britannica.com/biography/Abdoulaye-Wade">Wade à Sall</a>.</p>
<p>Dans la terminologie de la science politique, une démocratie n'est considérée comme consolidée qu'après une “<a href="https://www.britannica.com/topic/two-turnover-test">double alternance</a>”. C'est le cas lorsqu'un parti d'opposition qui a accédé au pouvoir à l'issue d'élections démocratiques (la première alternance) cède lui-même le pouvoir à son opposition après avoir perdu des élections démocratiques (la deuxième alternance).</p>
<p>Je suis <a href="https://www.ags.edu/international-relations/agsird-faculty/douglas-a-yates">politologue et chercheur</a> et je m'intéresse à la politique africaine et à la construction de la démocratie. En me basant sur mon expérience, je pense que le Sénégal est un cas exceptionnel en Afrique de l'Ouest. </p>
<p>Le pays a bénéficié d'une “triple alternance” au pouvoir par le biais d'élections démocratiques. Cependant, avant ces trois transitions démocratiques pacifiques, le pays a traversé des crises avec des présidents en exercice tentant de prolonger leur mandat au-delà des limites constitutionnelles. </p>
<p>Les fondements démocratiques du Sénégal semblent avoir été cimentées par le fait qu'aucun des présidents n'a réussi à prolonger son mandat de manière inconstitutionnelle.</p>
<p>Ce bilan devrait être pris en compte pour évaluer l'avenir d'un nouveau président.</p>
<h2>Une démocratie modèle en Afrique de l'Ouest</h2>
<p>Au cours des quatre dernières décennies, le Sénégal s'est fait connaître pour ses médias <a href="https://www.afrobarometer.org/publication/senegals-internet-shutdowns-are-another-sign-of-a-democracy-in-peril/">relativement indépendants</a> et sa liberté d'expression. Tous les présidents sénégalais ont tous fini par quitter le pouvoir. Cela a contribué à faire des élections la seule possibilité d'accéder au pouvoir. </p>
<p>Le Sénégal est classé “<a href="https://freedomhouse.org/country/senegal/freedom-world/2023">partiellement libre</a>” par Freedom House dans son rapport <a href="https://freedomhouse.org/sites/default/files/2023-03/FIW_World_2023_DigtalPDF.pdf">Freedom in the World 2023</a>. Le think tank utilise un ensemble de critères tels que les droits politiques et les libertés civiles pour classer les pays en trois catégories : libres, partiellement libres et non libres. Le Sénégal obtient de bons scores dans certains domaines, comme la liberté académique et le droit des individus à pratiquer et à exprimer leur foi ou leur non-croyance en public. En revanche, il pèche dans d'autres domaines, comme les restrictions sur la liberté de réunion des citoyens et la dispersion violente de certaines manifestations. </p>
<p>Malgré la tenue d'élections régulières, chaque dirigeant a bien amorcé son mandat avant avant de tenter par la suite de rester au pouvoir plus longtemps que prévu.</p>
<p><a href="https://www.academie-francaise.fr/les-immortels/leopold-sedar-senghor">Léopold Sédar Senghor</a> est devenu le premier président du Sénégal après l'indépendance en 1960. Il est arrivé au pouvoir grâce à sa réputation d'intellectuel du mouvement de la “négritude”, d'opposant démocratique au colonialisme français et de combattant de la liberté. </p>
<p>Mais, en 1963, 1968, 1973 et 1978, il a organisé des <a href="https://www.britannica.com/topic/plebiscite">plébiscites présidentiels</a> pour se maintenir au pouvoir. </p>
<p>Puis, en décembre 1980, après 22 ans de pouvoir, il <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/560">décide</a> de se retirer et de passer le relais à son successeur désigné, Abdou Diouf. </p>
<p><a href="https://www.presidence.sn/en/presidency/abdou-diouf">Abdou Diouf</a> a eu la même tentation. Il s'est accroché à la présidence jusqu'à ce que des décennies d'opposition pacifique, démocratique et fondée sur des principes, menée par Abdoulaye Wade, le contraignent à accepter sa défaite lors des l'élection de 2000.</p>
<p>Après de longues années de lutte pour le pouvoir,<a href="https://www.presidence.sn/en/presidency/abdoulaye-wade">Wade</a> a été emprisonné et contraint de s'exiler à Paris. Il a ensuite pris la tête d'un mouvement populaire qui a renversé le Parti socialiste, longtemps resté au pouvoir, ainsi que M. Diouf. </p>
<p>Il a promis de mettre fin à la corruption inhérente au régime de parti unique. Mais vers la fin de son second mandat, en 2009, il a lui aussi commencé à imiter ses prédécesseurs. Wade a passé ses dernières années au pouvoir à <a href="https://www.france24.com/fr/20120131-s%C3%A9n%C3%A9gal-portrait-abdoulaye-wade-presidentiell-karim-pds-opposition">essayer</a> de remporter un troisième mandat. Lorsque cela n'a pas abouti, il a désigné son fils <a href="https://www.africa-confidential.com/profile/id/254/page/4">Karim Wade</a> comme son successeur à la tête de son parti. Mais Karim Wade a été <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/03/23/senegal-karim-wade-condamne-a-six-ans-de-prison_4599445_3212.html">condamné pour enrichissement illicite</a> et les voeux de son père n'ont pas été exaucés.</p>
<p><a href="https://www.presidence.sn/en/presidency/biography">Macky Sall</a> de <a href="https://www.senegel.org/en/movements/political-parties/poldetails/2">l'Alliance pour la République</a> est arrivé au pouvoir en 2012 en tant qu'homme politique intègre et anti-corruption. Mais lui aussi est tombé dans ces travers. </p>
<p>Après sa réélection en 2019, il a nommé un Premier ministre technocrate peu charismatique, <a href="https://www.enqueteplus.com/content/tourn%C3%A9es-%C3%A9conomiques-du-premier-ministre-amadou-ba-en-qu%C3%AAte-de-l%C3%A9gitimit%C3%A9-populaire">Amadou Ba</a>, comme numéro deux. Son ancienne Première ministre <a href="https://www.unwomen.org/fr/news/stories/2013/9/senegal-appoints-female-pm">Aminata Touré dite Mimi</a> (elle a été candidate à la présidence) est ainsi devenue son adversaire. Cela lui a également permis de s'assurer qu'il n'aurait pas à faire face à un Premier ministre devenant plus populaire que lui.</p>
<p>M. Sall souhaitait manifestement briguer un troisième mandat. Pourtant, il <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/07/04/au-senegal-macky-sall-renonce-a-un-troisieme-mandat-une-decision-face-a-l-histoire_6180405_3212.html#:%7E:text=S%C3%A9n%C3%A9gal-,Au%20S%C3%A9n%C3%A9gal%2C%20Macky%20Sall%20renonce%20%C3%A0%20un%20troisi%C3%A8me%20mandat%2C%20une,se%20repr%C3%A9senterait%20pas%20en%202024.">a renoncé</a> à cette option en 2023 et a soutenu Amadou Ba comme candidat à sa succession.</p>
<p>Le dernier candidat de l'opposition en lice en 2023, après l'exclusion de Karim Wade, était <a href="https://www.bbc.com/afrique/articles/ck5yky1d48xo">Ousmane Sonko</a>. Personnalité des réseaux sociaux, il est parfois surnommé le “Trump du Sénégal” en raison de ses déclarations choquantes, qui lui ont valu l'affection des jeunes Sénégalais.</p>
<p><a href="https://www.bbc.com/news/world-africa-66086570">Par exemple</a>, il a déclaré que “ceux qui ont gouverné le Sénégal depuis le début méritent d'être fusillés”. </p>
<p>Il convient également de noter un aspect plus sérieux concernant Sonko, qui, en tant qu'ancien inspecteur des impôts, a mené des enquêtes sur la corruption au sein du gouvernement de Sall. Il a écrit un <a href="https://www.fauves-editions.fr/catalogue/couv/aplat/9791030200607.pdf">livre</a> sur la corruption dans les secteurs pétrolier et gazier au Sénégal, mettant en cause le gouvernement de Sall.</p>
<p>En 2023, des accusations d'agression sexuelle ont été portées contre lui et <a href="https://foreignpolicy.com/2023/06/01/senegal-ousmane-sonko-trial-conviction-protests-macky-sall-election/#:%7E:text=On%20Thursday%2C%20Sonko%20was%20convicted,allowed%20to%20appeal%20the%20decision.">il a été poursuivi en justice</a>. Cela l'a empêché de se présenter aux élections de 2024. Sonko <a href="https://www.africanews.com/2024/01/30/ousmane-sonko-chooses-bassirou-diomaye-faye-as-replacement-in-senegals-presidential-race//">a soutenu</a> Bassirou Diomaye Faye pour le remplacer.</p>
<p>Ses partisans ont toujours soutenu que les accusations avaient été <a href="https://www.reuters.com/world/africa/police-fire-tear-gas-supporters-senegal-opposition-leader-sonko-2023-02-16/">montées de toutes pièces</a> en raison de son opposition au gouvernement Sall.</p>
<p>Sonko a été acquitté de l'accusation de viol mais <a href="https://www.france24.com/fr/vid%C3%A9o/20230601-ousmane-sonko-condamn%C3%A9-deux-ans-de-prison-ferme-pour-corruption-de-la-jeunesse">condamné</a> pour “corruption de la jeunesse”. Les jeunes <a href="https://theconversation.com/senegal-behind-the-protests-is-a-fight-for-democratic-freedoms-208612">sont descendus dans la rue pour protester</a>, qualifiant Sall de tyran. Ce dernier a eu recours à l'appareil répressif de l'État pour étouffer les protestations.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
Read more:
<a href="https://theconversation.com/senegal-behind-the-protests-is-a-fight-for-democratic-freedoms-208612">Senegal: behind the protests is a fight for democratic freedoms</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Puis, le 4 février, alors que la campagne électorale était sur le point de commencer, M. Sall a <a href="https://information.tv5monde.com/afrique/senegal-le-president-macky-sall-annonce-le-report-de-lelection-presidentielle-2707783">annoncé</a>, dans une démarche sans précédent, qu'il reportait l'élection pour une durée indéterminée, invoquant un différend au sujet de la liste des candidats.</p>
<p>Des <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/02/05/au-senegal-premieres-manifestations-et-repressions-apres-le-report-de-l-election-presidentielle_6214833_3212.html">affrontements ont éclaté</a> entre les manifestants et la police à Dakar.</p>
<p>Les tensions ont continué à monter. Alors que les dirigeants et les partisans de l'opposition organisaient des manifestations, le gouvernement a imposé des <a href="https://fr.africanews.com/2024/02/05/senegal-internet-coupe-les-deputes-discutent-du-report-des-elections//">restrictions</a> sur l'accès à Internet.</p>
<p>Le 5 février, les parlementaires ont été invités à voter une loi reportant l'élection au 15 décembre 204. Un débat long et houleux s'en est suivi. Plusieurs députés de l'opposition ont été expulsés de force de l'hémicycle, tandis que la police a utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants rassemblés à l'extérieur du bâtiment du parlement.</p>
<p>Finalement, la décision de reporter le scrutin au mois de décembre a été adoptée en l'absence des députés de l'opposition. Un certain nombre d'entre eux <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20240205-s%C3%A9n%C3%A9gal-l-assembl%C3%A9e-nationale-vote-le-report-de-la-pr%C3%A9sidentielle-des-d%C3%A9put%C3%A9s-%C3%A9vacu%C3%A9s-manu-militari">ont été arrêtés</a>.</p>
<h2>Quelles suites ?</h2>
<p>Selon moi, le Sénégal est une démocratie consolidée. Il a connu trois alternances démocratiques pacifiques du pouvoir d'un parti au pouvoir à l'opposition. </p>
<p>La situation actuelle n'est certainement pas favorable. Mais l'expérience passée suggère qu'un nouveau président pourrait encore prendre ses fonctions, qu'il soit issu du parti au pouvoir ou de l'opposition.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223044/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Douglas Yates does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Le Sénégal est considéré comme la démocratie la plus stable d'Afrique de l'Ouest, car il n'a jamais connu de coup d'État. Mais tous ses anciens présidents ont tenté de prolonger leur mandat.Douglas Yates, Professor of Political Science , American Graduate School in Paris (AGS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2206912024-01-21T07:07:13Z2024-01-21T07:07:13ZAu Sénégal, les petits exploitants d'or utilisent encore du mercure toxique : comment réduire les dégâts ?<p>“Ne pas pêcher dans ces eaux.” “Contient des niveaux élevés de mercure”. Ces mises en garde sont placardées devant des milliers de lacs et de rivières dans le monde, ainsi que sur de nombreux produits halieutiques. </p>
<p>Mais la consommation de poissons contaminés n'est pas la seule source d'exposition au mercure. L'inhalation de vapeurs de mercure, libérées lors de l'extraction d'un autre oligo-élément, l'or, est encore plus dangereuse. Les mineurs qui inhalent des vapeurs de mercure peuvent subir les mêmes <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0013935116302754?via%3Dihub">effets toxiques</a> que les personnes qui consomment des aliments contaminés par le mercure : tremblements des membres, vision trouble, perte de fonctionnalité des membres, voire la mort. Dans le monde, <a href="https://chemistry-europe.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/chem.201704840">entre 10 et 19 millions de personnes</a> travaillent dans les mines d'or artisanales et à petite échelle.</p>
<p>J'ai <a href="https://gersonlab.weebly.com/people.html">étudié</a> l'impact du mercure sur l'environnement au niveau mondial au cours des huit dernières années. Mes <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2666791623000234?utm_campaign=STMJ_AUTH_SERV_PUBLISHED&utm_medium=email&utm_acid=278782186&SIS_ID=&dgcid=STMJ_AUTH_SERV_PUBLISHED&CMX_ID=&utm_in=DM431241&utm_source=AC_">récentes recherches</a> ont permis de trouver un moyen efficace de réduire les émissions de mercure provenant de l'exploitation artisanale et à petite échelle de l'or au Sénégal grâce à l'éducation et à la distribution d'équipements.</p>
<p>Nous avons organisé des séances d'information sur les dangers du mercure et sur l'utilisation d'équipements permettant de réduire les émissions de mercure et l'exposition à cette substance. Les séances ont été tenues par des membres respectés de la communauté, dans les langues locales, à l'aide de graphiques simples. Les communautés ont également reçu des équipements : des cornues (dispositifs de capture du mercure) fabriquées par des artisans locaux à l'aide de matériaux disponibles localement. Ils ont mis ces articles en vente dans les magasins locaux. </p>
<h2>Utilisation du mercure dans l'exploitation artisanale et à petite échelle de l'or</h2>
<p>L'extraction artisanale et à petite échelle de l'or <a href="https://www.nrdc.org/sites/default/files/investing-artisanal-gold-summary.pdf">produit environ 20 %</a> de tout l'or vendu sur le marché mondial. Le processus est loin d'être respectueux de l'environnement. De vastes zones de <a href="https://www.scientificamerican.com/article/gold-mining-is-poisoning-amazon-forests-with-mercury/">forêts</a> sont déboisées pour faire place à l'équipement minier. La terre ou les sédiments sont extraits des puits ou des rivières. Le mercure est ensuite mélangé aux sédiments. </p>
<p>Le mercure est utilisé dans l'extraction de l'or parce qu'il est bon marché, facile à obtenir et efficace pour séparer l'or. Il forme une un revêtement autour de l'or, créant un amalgame mercure-or. Cet amalgame est ensuite brûlé, laissant derrière lui de l'or qui peut être vendu pour de gros bénéfices. Au cours de ce processus, d'énormes quantités de mercure sont <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-022-27997-3.epdf?sharing_token=SS0Zinmr3e4M1-5aak8Bn9RgN0jAjWel9jnR3ZoTv0ONl2tI5_r4OiC9PdUUQEvMoaD1-h16KJeqDvTzKEwqGXAvIDzbqW8cy_8HXy476nR8mcArSl4R0Ner2eUgks4pc7tNG75xFgkKVFQi42HTyITvkyHNHuLo5ayV_WRtsj4%3D">libérées</a> dans l'atmosphère.</p>
<p>L'extraction artisanale et à petite échelle de l'or est la plus grande source de <a href="https://www.unep.org/explore-topics/chemicals-waste/what-we-do/mercury/global-mercury-assessment">pollution par le mercure au niveau mondial</a>, émettant plus de mercure que la combustion du charbon. Elle est présente <a href="https://www.unep.org/resources/publication/global-mercury-assessment-technical-background-report?_ga=2.52038313.1887903477.1676509867-1079977290.1676509867">dans plus de 70 pays</a>, dont la plupart en Afrique subsaharienne, en Asie du Sud-Est et en Amérique du Sud. La Convention de Minamata sur le mercure du Programme des Nations unies pour l'environnement <a href="https://minamataconvention.org/en">est entrée en vigueur en 2017</a> afin de réduire la production, le commerce et l'utilisation du mercure au niveau mondial. L'article 7 traite spécifiquement du mercure dans l'extraction artisanale et à petite échelle de l'or.</p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/artisanal-gold-mining-in-south-africa-is-out-of-control-mistakes-that-got-it-here-188038">Artisanal gold mining in South Africa is out of control. Mistakes that got it here</a>
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<h2>Stratégies de réduction des émissions de mercure provenant de l'extraction de l'or</h2>
<p>Malgré la Convention, la réduction de l'utilisation du mercure et des émissions provenant de l'extraction artisanale et à petite échelle de l'or n'a guère été couronnée de succès. De nombreux chercheurs et organisations ont tenté de former les utilisateurs aux dangers du mercure ou ont introduit des technologies sans mercure. Ces interventions permettent parfois de réduire l'utilisation du mercure dans un premier temps, mais ces nouvelles pratiques ne perdurent pas toujours.</p>
<p>Les interventions de santé publique nous enseignent que la connaissance ne conduit pas toujours à un changement de comportement. Par exemple, nous savons qu'il est dangereux de fumer, mais de nombreuses personnes continuent à le faire. Et les technologies sans mercure sont <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2666791623000234#bib49">souvent coûteuses</a>, produites avec des matériaux qui ne peuvent pas être obtenus localement, et très techniques.</p>
<h2>Intervention au Sénégal</h2>
<p>Dans une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2666791623000234?utm_campaign=STMJ_AUTH_SERV_PUBLISHED&utm_medium=email&utm_acid=278782186&SIS_ID=&dgcid=STMJ_AUTH_SERV_PUBLISHED&CMX_ID=&utm_in=DM431241&utm_source=AC_">étude récente</a>, j'ai travaillé avec des collaborateurs au Sénégal pour réduire les émissions de mercure provenant de l'extraction artisanale et à petite échelle de l'or. Ensemble, nous avons associé une campagne éducative à la distribution d'équipements sur une période de six mois. Des enquêtes menées avant et après l'intervention ont montré que celle-ci avait permis d'améliorer les connaissances sur les dangers du mercure et d'accroître l'utilisation des technologies améliorées.</p>
<p>Des membres dignes de confiance de la communauté ont mené des séances d'éducation dans les langues locales. Les supports visuels ont été créés en tenant compte des commentaires des collaborateurs sénégalais locaux afin de garantir leur adéquation culturelle. La population locale a été formée pour présenter les informations aux mineurs et aux membres de la communauté et pour répondre aux questions. Ces membres de la communauté ont été rémunérés pour participer à cette formation.</p>
<p>Les formateurs ont ensuite organisé des sessions formelles pour discuter de ces sujets. D'autres séances éducatives informelles ont eu lieu autour d'un thé dans les communautés, dans les langues locales. Elles ont mis l'accent sur les dangers du mercure et prodigué des conseils sur l'utilisation de cornues et d'équipements de protection individuelle pour réduire les émissions de mercure et l'exposition à cette substance. Les chefs de village, les imams, les élus, les mineurs, les vendeurs, les groupes de femmes et les jeunes ont tous été ciblés par les séances d'information. L'information a également été diffusée par la radio locale, <a href="https://aiccra.cgiar.org/publications/assessing-reach-climate-and-agricultural-related-content-community-radio-stations">une technique efficace</a> pour atteindre un public plus large au Sénégal. </p>
<p>Des équipements ont été distribués dans les magasins locaux, afin de les rendre disponibles à l'achat. L'objectif était d'accroître l'accès aux équipements susceptibles de réduire l'exposition au mercure, tout en demandant aux gens de payer pour cela, réduisant ainsi la dépendance à l'égard d'organisations extérieures pour la continuité du programme.</p>
<p>La distribution d'équipements s'est concentrée sur les cornues, des dispositifs qui agissent comme un couvercle sur une marmite. Dans les méthodes traditionnelles à flamme nue, l'amalgame mercure-or libère du mercure directement dans l'air. Dans une cornue, le mercure libéré se condense sur le couvercle de la cornue et passe dans un tube jusqu'à un seau d'eau, où il peut être recueilli. Cela réduit les émissions de mercure dans l'air et le mercure peut être réutilisé.</p>
<p>Les cornues ont été fabriquées par des forgerons locaux à l'aide d'équipements disponibles sur place. La conception a tenu compte des besoins des mineurs et de leurs commentaires. La première série d'équipements a été fournie gratuitement aux magasins, qui ont acheté du matériel de réapprovisionnement avec les bénéfices de la vente de la première série. Les cornues ont été vendues au prix de 15 000 CFA (environ 24,70 USD).</p>
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<a href="https://theconversation.com/ghanas-artisanal-miners-are-a-law-unto-themselves-involving-communities-can-help-fix-the-problem-192256">Ghana's artisanal miners are a law unto themselves: involving communities can help fix the problem</a>
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<h2>Les conséquences de cette intervention</h2>
<p>L'exploitation artisanale de l'or est un <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/08941920.2016.1273417">moyen de subsistance important</a> pour de nombreuses personnes au Sénégal et dans le monde. Étant donné les dangers de la toxicité du mercure, il est nécessaire de réduire l'exposition élevée des mineurs et de leurs communautés. Notre étude fournit un mécanisme pour y parvenir.</p>
<p>Elle a suscité des réactions positives, ce qui laisse penser que des interventions similaires pourraient être efficaces dans d'autres pays où l'on pratique l'extraction artisanale et à petite échelle de l'or.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220691/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jacqueline Gerson reçoit des fonds de World Connect et de l'Université de Duke.</span></em></p>Compte tenu des dangers de la toxicité du mercure et de la forte exposition des mineurs et de leurs communautés, des solutions sont nécessaires pour réduire une telle exposition.Jacqueline Gerson, Assistant professor, Michigan State UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2210652024-01-12T19:26:37Z2024-01-12T19:26:37ZCAN 2023 : tout ce qu'il faut savoir sur une année record pour la plus grande compétition de football d'Afrique<p>La plus grande fête du football en Afrique, la <a href="https://www.cafonline.com/caf-africa-cup-of-nations/">Coupe d'Afrique des Nations 2023 (CAN)</a> masculine, est organisée par la Côte d'Ivoire en Afrique de l'Ouest et se terminera par la finale le 11 février 2024.</p>
<p>Plus que jamais, l'attention mondiale sera rivée sur les événements de la 34e édition de la Coupe en raison de la participation de certains athlètes qui font partie des plus éminents dans le domaine du football. Ajoutez à cela le fait que le tournoi se déroule pendant l'hiver européen et qu'il n'est donc pas confronté à la concurrence d'autres tournois internationaux majeurs, à l'exception de la Coupe d'Asie de l'AFC. </p>
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<a href="https://theconversation.com/africa-cup-of-nations-showcases-the-continents-finest-footballers-and-chinas-economic-clout-220313">Africa Cup of Nations showcases the continent's finest footballers – and China's economic clout</a>
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<p>Le tournoi a ses <a href="https://english.aawsat.com/sports/4766406-asian-cup-afcon-scheduling-%E2%80%98not-good%E2%80%99-players-says-arsenal%E2%80%99s-tomiyasu%C2%A0">détracteurs</a>, en particulier en Europe, où plusieurs clubs perdront des joueurs clés au profit d'équipes africaines. Malgré cela, rares sont ceux qui doutent que La CAN entre dans une nouvelle ère.</p>
<p>En tant que <a href="https://scholar.google.com/scholar?hl=en&as_sdt=0%2C5&q=Chuka+Onwumechili&btnG=">chercheur</a> en communication sportive axée sur le football africain, je pense que ce sera une année record pour la CAN. Les vedettes mises à part, le tournoi continue de se développer en termes d'audience mondiale, d'amélioration des infrastructures, d'attention médiatique et d'augmentation des récompenses.</p>
<h2>Une dotation record</h2>
<p>La <a href="https://www.cafonline.com">Confédération africaine de football</a> (Caf) a annoncé une <a href="https://www.sportingnews.com/us/soccer/news/afcon-2023-prize-money-total-winners-africa-cup-nations-2024/3cef2e95886cf6b323253685">augmentation de 40 %</a> des récompenses pour les vainqueurs de la CAN. Le pays champion remportera 7 millions de dollars US, le vice-champion 4 millions, le troisième 2,5 millions et le quatrième 1,3 million. Bien qu'encore loin de l'Europe, ces récompenses <a href="https://en.as.com/en/2021/07/10/soccer/1625920368_059485.html">sont plus importantes</a> que celles ofertes par la Copa America (le championnat de football sud-américain) en 2021.</p>
<h2>Les stars</h2>
<p>Les joueurs africains vedettes sont des noms connus en Europe, grâce à des postes de haut niveau dans des clubs de premier plan. De grands noms comme <a href="https://www.transfermarkt.co.za/victor-osimhen/profil/spieler/401923">Victor Osimhen</a> (Nigeria), <a href="https://www.transfermarkt.co.za/achraf-hakimi/profil/spieler/398073">Achraf Hakimi</a> (Maroc) et <a href="https://www.transfermarkt.co.za/mohamed-salah/profil/spieler/148455">Mohamed Salah</a> (Égypte) représenteront tous leur pays lors du tournoi. Ils ont recueilli les trois plus grands <a href="https://www.espn.com/soccer/story/_/id/39091926/nigeria-striker-osimhen-african-footballer-year">votes</a> pour le titre de Joueur africain de l'année 2023. En outre, d'autres finalistes des Caf Awards - Fiston Mayele (Congo), Peter Shalulile (Namibie) et Percy Tau (Afrique du Sud) - participeront également au tournoi. A cette liste s'ajoute le sensationnel gardien de but marocain <a href="https://www.transfermarkt.co.za/bono/profil/spieler/207834">Yassine Bounou</a>.</p>
<h2>Les téléspectateurs du monde entier</h2>
<p>Le tournoi sera un événement mondial. La Caf a <a href="https://www.cafonline.com/caf-africa-cup-of-nations/news/caf-concludes-extensive-global-tv-broadcast-agreements-ahead-of-the-kick-off-of-the-totalenergies-africa-cup-of-nations-cote-d-ivoire-2023/">annoncé</a> une nouvelle série d'accords sur les droits de diffusion. Il s'agit notamment d'accords avec la BBC et Sky au Royaume-Uni, Band TV au Brésil, beIN et Canal+, entre autres. Ces accords signifient que le tournoi sera suivi en direct dans 180 pays à travers le monde. La Caf a également annoncé plus de 6 000 demandes d'accréditation de médias. C'est plus du double des demandes reçues lors de la précédente édition de la CAN.</p>
<h2>Des infrastructures de classe mondiale</h2>
<p>La Côte d'Ivoire a mis tout en œuvre pour que la CAN de cette année soit un événement de classe mondiale. On estime que le pays hôte a dépensé <a href="https://www.bbc.com/sport/africa/67719900">1 milliard de dollars</a> pour rénover les routes, les stades, les hôpitaux et d'autres infrastructures en préparation du tournoi. Outre la rénovation des stades existants, le pays a construit trois nouveaux sites. Il y a deux nouveaux stades d'une capacité de 20 000 places. Le <a href="https://www.afrik-foot.com/en-ng/afcon-2023-laurent-pokou-stadium-san-pedro">Stade Laurent Pokou</a> est situé à San-Pédro dans l'extrême sud-ouest du pays et le <a href="https://www.cafonline.com/caf-africa-cup-of-nations/stade-amadou-gon-coulibaly/">Stade Amadou Gon Coulibaly</a> à Korhogo dans le nord. </p>
<p>La plus grande nouvelle infrastructure, le <a href="https://www.modernghana.com/sports/1284721/2023-afcon-six-world-class-stadiums-ready-for.html">Stade Alassane Ouattara</a>, est située juste à l'extérieur de la capitale économique, Abidjan, et a été construite avec 260 millions de dollars pour accueillir 60 000 spectateurs sous un même toit. </p>
<p>Certains de ces sites, comme celui de Korhogo, sont accompagnés d'hôtels, de villas et de routes nouvellement construits. En tant que pays hôte, la Côte d'Ivoire bénéficiera également d'une base de supporters qui pourrait renforcer le moral de son équipe et ses chances de victoire.</p>
<h2>Les favoris</h2>
<p>Une saine rivalité entre les nations - en particulier entre l'Afrique de l'Ouest et l'Afrique du Nord - va intensifier les enjeux de la CAN de cette année. Vingt-quatre équipes participent à la phase de groupes et 16 d'entre elles se qualifieront pour la <a href="https://www.bbc.com/sport/africa/67615678">phase à élimination directe</a>. Cela signifie que trois équipes se qualifieront à partir de quatre poules sur sur les six. </p>
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Read more:
<a href="https://theconversation.com/womens-afcon-2022-nigeria-sweats-as-morocco-and-cote-divoire-usher-in-new-era-177844">Women's Afcon 2022: Nigeria sweats as Morocco and Cote d'Ivoire usher in new era</a>
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<p>Bien que le Maroc soit devenu la première équipe africaine à atteindre la demi-finale d'une Coupe du monde de football masculin, il pourrait avoir du mal à remporter la CAN. Le Maroc a <a href="https://tribune.com.pk/story/2452923/morocco-seek-end-to-48-year-african-trophy-drought">remporté un seul</a> titre de la CAN, en 1976 en Éthiopie, et a atteint la finale en 2004 à Tunis. Mais le pays nord-africain fait partie des favoris en Côte d'Ivoire. Le pays hôte et le champion en titre, le Sénégal, se joindront à aux Marocains. Le Nigeria et l'Algérie sont également des candidats sérieux, tandis que le Mali fait figure d'outsider.</p>
<p>Compte tenu de tous ces développements, il ne fait aucun doute que le tournoi établira des records d'audience et d'affluence des stades, ouvrant ainsi une nouvelle perspective pour le tournoi le plus prestigieux d'Afrique. </p>
<p>La CAN a débuté ce 13 janvier 2024.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221065/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Chuka Onwumechili does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>L'augmentation des récompenses, plusieurs nouveaux contrats de diffusion et les plus grands noms du football africain définiront l'édition 2024 de la CAN.Chuka Onwumechili, Professor of Communications, Howard UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2199152023-12-18T04:24:45Z2023-12-18T04:24:45ZSénégal : la langue arabe progresse, malgré la domination du français<p>Depuis 2012, la journée mondiale de la langue arabe, est célébrée le &_ décembre de chaque année, conférant ainsi à cette langue sémitique une stature de langue de communication internationale. La date du 18 décembre a été retenue pour commémorer le jour où l'arabe est devenue <a href="https://www.unesco.org/fr/world-arabic-language-day">langue officielle et de travail de l'ONU</a> en 1973.</p>
<p>Cette journée offre l'opportunité de reconnaître la richesse culturelle et linguistique portée par l'arabe. Au Sénegal, la célébration de cette journée revêt une signification particulière. Le français, héritage du passé colonial, a été imposé comme <a href="https://theconversation.com/recul-du-francais-au-senegal-de-lhegemonie-officielle-a-la-decheance-194392">langue officielle dominante dans l'administration</a>, reléguant au fil du temps l'arabe au statut de langue exclusivement associée au domaine religieux. </p>
<p>Cette orientation a conduit à ignorer sa contribution historique à l'édification des connaissances écrites au Sénégal.</p>
<p>Ce papier tente d’analyser les perspectives et les défis actuels de la langue arabe au Sénégal. Il ne sera pas question de dresser les francophones contre arabophones, mais, d’œuvrer au remembrement de notre héritage culturel, en mettant en valeur tous ces aspects occultés ou peut-être méconnus de la trajectoire intellectuelle du Sénégal qui est loin d’être unilingue, mais essentiellement plurilingue.</p>
<h2>Enjeux et défis d’une valorisation</h2>
<p>Au Sénégal, l'empreinte du passé colonial a considérablement redessiné le paysage linguistique attribuant au français le rôle prééminent de langue officielle dans l'administration et au sein de l'élite. Ce processus historique a fini par reléguer l’arabe au rang de langue associée à la pratique religieuse, dépourvue de toute considération intellectuelle. Alors qu’au Sénégal, et pendant longtemps, l’enseignement de l’arabe a été<a href="https://www.karthala.com/accueil/339-histoire-politique-du-senegal-9782865371181.htmla"> la première étape</a> dans la fabrication des savoirs écrits. </p>
<p>Ce qui se manifeste à travers ce qui est convenu d’appeler la littérature sénégalaise d’expression arabe et ajami (Ajami désigne les populations non arabes de la communauté musulmane et par extention la littérature produite dans les langues africaines avec les caractères arabes). </p>
<p>S’agissant de l’introduction de l’arabe dans l’école laïque sénégalaise, l’on peut dire que bien que <a href="https://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers15-07/010065046.pdf">présent à l’élémentaire depuis 1963</a>, son enseignement a connu une longue période d’incertitude, dans la mesure où il n’existait aucun texte règlementaire fixant son programme et ses horaires.</p>
<p>Cependant, l’an 2002 marque une <a href="https://journals.openedition.org/cres/2428?lang=en">date charnière</a> dans l’histoire de l’enseignement de l'arabe dans le système éducatif au Sénégal. A partir de cette année, le temps alloué à cette offre éducative passe d’une heure à quatre heures par semaine, selon nos entretiens réalisé auprès de la division de l'enseignement arabe. Cette dynamique positive a été accompagnée d’une politique de recrutement d’enseignants en langue arabe au même titre que leurs collègues des autres disciplines. Le nombre d’enseignants en arabe qui était de 8 en 1962 passera à 13.358 en 2020 à l’élémentaire (classique et franco-arabe), selon Ousmane Ba, chef de la division de l'enseignement arabe. </p>
<p>Pour le moyen-secondaire, leur nombre actuel est de 2307 professeurs. En ce qui concerne l’encadrement, les inspecteurs en langue arabe étaient de 19 en 2000, contre 108 en 2022.</p>
<p>Ces différentes réformes intervenues dans le secteur de l’éducation ont mis fin à une précarité professionnelle, doublée d’une injustice sociale de l’enseignant en langue arabe, dépourvu de toute protection sociale, juridique et statuaire. </p>
<h2>Quel avenir ?</h2>
<p>Aujourd’hui, l’arabe est non seulement la langue officielle de 22 États, dont des puissances économiques et diplomatiques. Elle est également enseignée dans les plus grandes universités du monde, tout comme elle est utilisée par les plus grands médias du monde. </p>
<p>L’arabe fait aussi partie des langues de travail de l’Organisation des nations unies (ONU). Cet état de fait est loin d’être anodin, conformément au principe d’égale authenticité des versions traduites qui ont la même valeur juridique.</p>
<p>En service à l’ambassade du Sénégal en Russie, où presque tous les pays arabes sont représentés, Ndiaga Bèye souligne comment la langue arabe lui sert beaucoup dans le cadre de ses activités professionnelles, en tant que Premier conseiller, pour nouer des contacts à l’occasion de réceptions diplomatiques. Selon lui, la langue arabe contribue à la diversification de ses sources d’information en lui permettant également d’avoir une bonne grille de lecture. </p>
<p>De nos jours, les critiques ne manquent pas sur le modèle éducatif hérité de la colonisation. On reproche très souvent à cette école d’être élitiste et rigide, agnostique et peu respectueuse des coutumes africaines. La réinvention de cette école tant réclamée ne se fera pas sans une institutionnalisation de l’offre éducative dite arabo-islamique. </p>
<p>A ce propos, nous proposons une harmonisation maîtrisée des deux offres éducatives ou la mixité, en lieu et place d’une séparation. Cette séparation serait synonyme de ghettoïsation de l’enseignement arabe au sein de la République sénégalaise. De ce point de vue, l’espace scolaire devrait constituer le lieu le plus adéquat pour donner de la valeur et de la légitimité scientifique et sociale à une langue et aux personnes qui la pratiquent. </p>
<p>Laisser l’enseignement de la langue arabe aux seules initiatives privées reviendrait à en faire davantage une langue subversive et de la fermeture, une langue passéiste et de la peur, une langue suspecte et de la honte. </p>
<p>Au Sénégal, la langue arabe dispose d’un passé glorieux, d'un présent rassurant et d'un avenir prometteur. Pour s’en convaincre, il suffit juste de rappeler qu’elle ne cesse de progresser se diffuser à la faveur des initiatives des pouvoirs publics en sa faveur (création d’écoles publiques arabes, Baccalauréat arabe, accès des diplômés en arabe au concours d'entrée à l'École nationale d'administration, recrutement de professeurs et d’inspecteurs…). </p>
<p>Cependant, sa principale contrainte est le contexte politique et social dans lequel son enseignement a toujours évolué. Ce contexte a favorisé une sorte de confrontation avec la culture occidentale dont la domination s'est traduite par l’adoption du français comme langue officielle. Toutefois, l’enseignement de l'arabe a pu résister face à cette concurrence à la faveur de son ancrage social et territorial ainsi que la détermination salutaire des intellectuels arabophones qui, curieusement ne sont pas très souvent considérés comme tels par une certaine élite au Sénégal. </p>
<p>Aussi, devant l’idée d’une marginalisation supposée ou réelle de l’élite arabophone dans l’espace public sénégalais, les arabisants doivent également travailler à la maîtrise des autres langues de communication comme le français, la langue officielle, et accessoirement l’anglais, pour donner plus de valeur à leur compétence.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219915/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Serigne Mbaye Dramé does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Laisser l’enseignement de la langue arabe aux seules initiatives privées reviendrait à en faire davantage une langue subversive et de la fermeture, une langue passéiste.Serigne Mbaye Dramé, Doctorant en études arabes et islamiques, Université Cheikh Anta Diop de DakarLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2189452023-12-14T19:10:51Z2023-12-14T19:10:51Z40 ans de lutte contre le VIH en Afrique : de la tragédie à l’espérance<p>La commémoration des <a href="https://www.pasteur.fr/fr/journal-recherche/actualites/40-ans-decouverte-du-vih-virus-responsable-du-sida-est-identifie-20-mai-1983">40 ans de la découverte du virus d’immunodéficience humaine</a> (VIH) invite à jeter un regard rétrospectif sur quatre décennies de lutte contre ce fléau dans l’Afrique au sud du Sahara. Cette région <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/societe-africaine/lafrique-region-du-monde-la-plus-touchee-par-le-vih-virus-responsable-du-sida_3738733.html">a payé le plus lourd tribut</a> à la pandémie.</p>
<p>Au début des années 2000, les trois quarts des adultes mourant du sida et 80 % des enfants vivant avec le VIH étaient des Africains. La création en 2001-2002 du <a href="https://www.theglobalfund.org/fr/about-the-global-fund/history-of-the-global-fund/">Fonds mondial</a>, à l’initiative du secrétaire général de l’ONU, le Ghanéen Kofi Annan, va contribuer à l’accès universel au traitement et à désamorcer la bombe du sida. Lors du lancement officiel du Fonds mondial à New York en 2001, moins de 1 % des patients africains ont accès aux traitements. À cette époque où des chercheurs militants parlent de <a href="https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(02)11722-3/fulltext">« crime contre l’humanité »</a> pour dénoncer l’apathie de la communauté internationale face à la pandémie, la naissance du Fonds inaugure une <a href="https://www.cairn.info/revue-vacarme-2009-4-page-84.htm">réponse d’envergure au niveau mondial</a>.</p>
<p>Aujourd’hui, l’Afrique subsaharienne abrite 65 % du nombre total de personnes vivant avec le VIH dans le monde, soit 25,6 millions d’individus sur 39 millions. Le continent a également connu des progrès non négligeables en matière d’accès au traitement : les trois quarts des personnes vivant avec le VIH en Afrique subsaharienne <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2022/07/07/sida-en-afrique-le-temps-de-l-espoir_6133771_3212.html">suivent désormais un traitement antirétroviral</a>.</p>
<p>Au cœur des drames causés par la maladie dite du syndrome d’immunodéficience acquise (sida), l’Afrique subsaharienne a aussi contribué à faire avancer la connaissance et à générer des mobilisations collectives inédites, associatives et politiques, certains de ses médecins et chercheurs ayant mené leurs combats jusqu’au sommet des programmes internationaux. La lutte contre le sida en Afrique représente un combat global, transnational, auquel ont significativement contribué quelques personnalités parfois insuffisamment connues.</p>
<h2>Premières années : le tout-prévention</h2>
<p>Le virus d’immunodéficience humaine est officiellement découvert en 1983 par une équipe de l’Institut Pasteur (pour cela, Françoise Barré-Senoussi et Luc Montagnier seront récompensés par le prix Nobel de médecine 25 ans plus tard, <a href="https://www.librairie-ledivan.com/ebook/9782705906375-sida-les-secrets-d-une-polemique-bernard-seytre/">après moult controverses)</a>. Initialement diagnostiqué en France et aux États-Unis dans les milieux gays, le VIH va se propager et devenir une pandémie.</p>
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<p>L’Afrique subsaharienne va vite devenir la région du monde la plus touchée par cette maladie. La mise à disposition du <a href="https://www.futura-sciences.com/sante/dossiers/medecine-sida-vaincre-vih-1696/page/8/">test diagnostique Elisa</a> intervient en 1985 et la majorité des pays peut déclarer officiellement les premiers cas de sida. Pour autant, quelques cas sont détectés avant la généralisation du test Elisa grâce à des réseaux d’instituts de recherche, notamment la présence d’antennes américaines du Center for Disease Control (CDC) dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest, au Sénégal et en Côte d’Ivoire par exemple. Les premiers cas sont également diagnostiqués au sein de la communauté homosexuelle en Afrique du Sud. Des ONG vont aussi permettre de diagnostiquer des cas de sida, <a href="https://books.google.fr/books/about/Politiques_publiques_du_sida_en_Afrique.html?id=DyUgAQAAIAAJ&redir_esc=y">comme la Croix-Rouge dans l’ex-Zaïre</a>.</p>
<p>Des médecins travaillant sur les maladies infectieuses dans les hôpitaux des grandes villes africaines seront les précurseurs de la lutte contre le sida dans leurs pays, en mettant en place des comités de suivi ou des ersatz de veille épidémiologique, avec ou sans l’aide de partenaires internationaux, suivant les concours de circonstances. Ils deviendront des fers de lance officiels de la riposte au sida dans leurs pays lorsque l’OMS mettra en place le premier programme mondial de lutte contre le sida, le <a href="https://data.unaids.org/pub/report/2008/jc1579_first_10_years_en.pdf">Global Programme on AIDS</a> (GPA), en 1986.</p>
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<p>Sous la direction d’un professeur de santé publique de l’Université de Harvard, Jonathan Mann, le GPA va inciter à la mise en place des Programmes nationaux de lutte contre le sida (PNLS) en Afrique. Le Sénégal en Afrique de l’Ouest et l’Ouganda en Afrique australe seront parmi les premiers pays à mettre en place ces PNLS, dès 1986. Ils vont également illustrer, de manière différente, le rôle du leadership politique et le <a href="https://www.taylorfrancis.com/chapters/edit/10.4324/9781351147880-3/patterns-mobilization-political-culture-fight-aids-fred-eboko-babacar-mbengue?context=ubx&refId=21a1a383-0d35-40a1-8d58-673a41eef0c0">lien entre les sommets des États et les associations</a>.</p>
<p>En l’absence de traitements efficaces et du fait des moyens modiques affectés à la riposte dans cette première décennie des années sida, les PNLS vont être tournés vers le « toute prévention ». La thématique des « populations à risque » va orienter le ciblage des campagnes de prévention : les « prostituées », rebaptisées plus tard « les professionnelles du sexe » ; les transporteurs par car, réputés comme étant vulnérables au « risque sida » du fait de leur surexposition aux relations sexuelles non protégées ; et plus largement « les jeunes ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"673930952100487172"}"></div></p>
<p>Après une petite période de relativisation ou de déni politique de la maladie, les slogans vont passer à la vitesse supérieure dès la fin des années 1980. Ils mettent alors en avant la lutte contre « le vagabondage sexuel » et s’accompagnent de discours catastrophistes. Les campagnes de prévention affichent des images de malades du sida en phase terminale accompagnées du message abrupt : « Le sida tue. » Ces pratiques vont se heurter à la réalité cognitive des représentations des plus jeunes : personne ne s’infecte avec des malades squelettiques en phase terminale.</p>
<p>Les précurseurs africains évoqués plus haut vont avoir un rôle pionnier et des carrières connectées aux réseaux internationaux, entre hasard et nécessité. L’histoire du jeune docteur Pierre M’Pelé est aussi emblématique qu’elle est peu connue au-delà des spécialistes.</p>
<h2>Pierre M’Pelé du Congo-Brazzaville, au cœur du combat initial</h2>
<p>Après des études de médecine à la faculté des sciences de la santé de Brazzaville, en République du Congo, Pierre M’Pelé poursuit sa formation à Paris, dans un service de maladies infectieuses et de médecine tropicale. Au sein de l’Hôpital de la Salpêtrière à Paris, il intègre le département de médecine tropicale et de santé publique au moment même où apparaissent les premiers cas de sida en France.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/564520/original/file-20231208-19-w2cwvp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/564520/original/file-20231208-19-w2cwvp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/564520/original/file-20231208-19-w2cwvp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=901&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/564520/original/file-20231208-19-w2cwvp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=901&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/564520/original/file-20231208-19-w2cwvp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=901&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/564520/original/file-20231208-19-w2cwvp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1132&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/564520/original/file-20231208-19-w2cwvp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1132&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/564520/original/file-20231208-19-w2cwvp.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1132&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Pierre M’Pelé a raconté son parcours dans un ouvrage paru en 2019.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.editions-maia.com/livre/itineraire-dun-medecin-africain/">Éditions Maïa</a></span>
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<p>Sous la direction du professeur Marc Gentilini, il sera confronté à cette « nouvelle » maladie qui ne faisait partie ni de son projet de formation ni des activités de ce service. Il va donc vite découvrir l’expérience de la prise en charge du VIH/sida en même temps que ses pairs médecins, notamment les docteurs Willy Rozenbaum et Jean-Claude Chermann et leur patron Marc Gentilini.</p>
<p>C’est à partir d’un prélèvement effectué par Willy Rozenbaum sur le ganglion d’un patient que Françoise Barré-Senoussi va isoler ce qui sera désigné comme étant le VIH. Pierre M’Pelé est présent dans l’équipe, avec laquelle il travaille au quotidien. Dans un <a href="https://www.editions-maia.com/livre/itineraire-dun-medecin-africain/">ouvrage publié en 2019</a>, il revient sur l’histoire de la découverte du VIH :</p>
<blockquote>
<p>« C’est Willy qui orienta les biologistes de l’Institut Pasteur à la recherche étiologique d’origine virale de la maladie chez BRU, les trois premières lettres de ce jeune malade français, fébrile, épuisé mais sympathique, admis dans le service depuis quelques semaines et dont le ganglion adressé à l’équipe du Pr Luc Montagnier permettra la découverte en 1983 du rétrovirus “LAV-BRU” responsable du sida. Bru mourut en 1988 […]. »</p>
</blockquote>
<p>Au-delà du cycle de la découverte du VIH, le docteur M’Pelé effectuera une autre découverte dont sa paternité est connue et peu reconnue en tant que telle.</p>
<p>Il commence à distinguer des symptômes spécifiques aux patients originaires d’Afrique, précisément du Zaïre (actuelle République démocratique du Congo) et du Congo-Brazzaville. Par rapport aux autres patients, il révèle une prédominance de la coïnfection avec la tuberculose et une faible prédominance chez les patients africains d’une pathologie pulmonaire fréquente chez les autres patients, le <em>Pneumocystis carinii</em>.</p>
<p>La revue de référence <em>Lancet</em> ne publiera pas son article alors que ces spécificités vont être reconnues par ailleurs autour de ce qui sera appelé « le sida africain », dont la présentation a été effectuée en 1985 lors d’une conférence organisée à Bangui (en République centrafricaine), sous la houlette de Françoise Barré-Senoussi. M’Pelé explique que le <em>Lancet</em> n’a pas publié son article, « peut-être parce que venant d’un Africain inconnu, premier sur la liste des auteurs sur ce constat qui différencie le sida des Américains, des Européens de celui des Africains et c’est dommage et injuste ».</p>
<p>Fort de cette expérience, M’Pelé rentre à Brazzaville en juin 1986 et devient le « Monsieur sida du Congo » comme d’autres pionniers africains, <a href="https://www.routledge.com/Public-Policy-Lessons-from-the-AIDS-Response-in-Africa/Eboko/p/book/9780367616250">riches de leurs collaborations internationales dans leurs pays respectifs</a>.</p>
<h2>Abdourahmane Sow, un précurseur de Dakar à Genève</h2>
<p>Dans la majorité des pays africains, les premiers cas de sida sont diagnostiqués à partir de 1985, date de la mise à disposition par l’OMS des tests Elisa. Dans certains pays, comme le Sénégal, des relations entretenues avec les partenaires internationaux, dont le Center for Disease Control, vont permettre de reconnaître plus tôt la présence du VIH. C’est dans cette logique qu’à l’issue d’une recherche clinique menée par une équipe sénégalaise du Pr. Souleymane M’Boup de l’hôpital Le Dantec à Dakar, une équipe française et une équipe américaine révèlent dès 1984 l’existence en Afrique de l’Ouest d’un second sous-type du VIH, le VIH2, diffèrent du sous-type 1 (le VIH1, le plus répandu dans le monde) et présent au Sénégal, au Cap-Vet et en Guinée-Bissau. Le VIH2 se révèle moins pathogène et moins virulent que le VIH1.</p>
<p>Abdourahmane Sow est un médecin formé à la faculté de médecine de Dakar puis à Paris, où il est lauréat du concours d’agrégation en maladies infectieuses et tropicales. Il fait partie des jeunes médecins qui diagnostiquent les premiers cas de sida au Sénégal, au CHU de Dakar. Il prend la tête de la lutte contre le sida en tant que chef du service des maladies infectieuses de Dakar en 1986. Il est appelé à Genève en 1989, suite à la création du Global Programme on AIDS en 1986. Ce programme est dirigé par un professeur de santé publique issu de l’école de santé publique de Harvard, le professeur Jonathan Mann, qui s’entoure d’une petite équipe d’une dizaine de spécialistes venus du monde entier.</p>
<p>Le Pr. Sow s’inscrit dans cette dynamique internationale où il est question de répondre à un péril mondial avec des moyens thérapeutiques d’une grande modicité jusqu’au milieu des années 1990. Au sein de cette équipe, il va s’impliquer dans la mise en place des PNLS en Afrique, notamment au Togo, au Bénin et au Gabon. Il restera au GPA jusqu’à la fin de cette structure, qui sera remplacée par l’organisation inter-agences des Nations unies sur le sida (ONUSIDA) en 1996.</p>
<p>Au Sénégal, dont les bases de la riposte au sida ont été fixées par le Pr. Sow, la relève sera assurée par le docteur Ibra Ndoye, qui restera à la tête du PNLS sénégalais de 1986 à son départ à la retraite en 2014. Un record de longévité en Afrique dans la lutte contre le sida, et un mandat marqué par la mise en place dès 2002 du <a href="http://mediatheque.lecrips.net/docs/PDF_GED/S43720.pdf">premier programme d’accès aux ARV en Afrique francophone</a>.</p>
<h2>Une distribution inégale du VIH en Afrique</h2>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/564521/original/file-20231208-19-8vc3y3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/564521/original/file-20231208-19-8vc3y3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/564521/original/file-20231208-19-8vc3y3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=630&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/564521/original/file-20231208-19-8vc3y3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=630&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/564521/original/file-20231208-19-8vc3y3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=630&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/564521/original/file-20231208-19-8vc3y3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=792&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/564521/original/file-20231208-19-8vc3y3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=792&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/564521/original/file-20231208-19-8vc3y3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=792&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Prévalence du VIH en Afrique, 2021. Cliquer pour zoomer.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Origine_du_virus_de_l%27immunod%C3%A9ficience_humaine#/media/Fichier:HIV_Prevalence_Africa_2021.png">Polaert/Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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</figure>
<p>À la fin des années 1980, <a href="https://www.karthala.com/accueil/1705-lepidemie-du-sida-en-afrique-subsaharienne-regards-historiens-9782845867833.html">explique Philippe Denis</a>, « l’épidémie était solidement installée dans les territoires “pionniers” (Côte d’Ivoire, République centrafricaine, Rwanda, Burundi, Ouganda, Tanzanie, Zambie, Zimbabwe)_ ». Il poursuit : « La décennie 1990 vit l’embrasement de l’Afrique australe. Alors que le nombre de cas nouveaux semblait plafonner dans plusieurs sites d’Afrique centrale, orientale et occidentale, il explosait au sud où des taux inégalés étaient atteints. »</p>
<p>En 2003, la géographe française <a href="https://www.cairn.info/revue-herodote-2003-4-page-117.htm">Jeanne-Marie Amat-Roze</a> montre de manière magistrale cette distribution et cette progression inégales de la maladie sur le continent africain. L’Afrique australe va constituer l’épicentre de la maladie. L’Afrique du Sud compte à ce jour près de 9 millions de personnes vivant avec le VIH, mais également un des <a href="https://doi.org/10.3917/polaf.156.0021">taux d’accès aux médicaments parmi les plus élevés en Afrique</a>.</p>
<h2>Du sida sans médicaments à l’accélération de l’accès aux antirétroviraux en Afrique</h2>
<p>L’annonce officielle de l’efficacité des molécules antirétrovirales (ARV), les trithérapies, intervient lors de la Conférence mondiale sur le sida à Vancouver en 1996, peu après la promulgation, en janvier 1995, de <a href="https://www.wto.org/french/tratop_f/trips_f/trips_f.htm">l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce</a> (ADPIC) qui protège ces médicaments sur 20 ans. L’ADPIC est la première résolution adoptée par l’Organisation mondiale du Commerce, créée en 1994. La bonne nouvelle de l’efficacité des ARV rend amers les militants pour l’accès aux médicaments et aux soins en Afrique. Le slogan employé ces militants lors de la Conférence mondiale de Genève en 1998 est clair : « Les médicaments sont au Nord, les malades sont au Sud. » C’est la thématique du <a href="https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000145646">« droit contre la morale »</a>.</p>
<p>Après bien des atermoiements et de <a href="https://journals.openedition.org/apad/195">vraies-fausses concessions des laboratoires pharmaceutiques</a> sur l’élargissement de l’accès aux médicaments pour les patients du Sud, dont la Côte d’Ivoire et l’Ouganda vont être les “pilotes” en Afrique dans les années 1990, le combat va se poursuivre au niveau international. L’ambassadeur américain à l’ONU, Richard Holbrooke, <a href="https://doi.org/10.3917/ris.046.0129">inscrit la question du sida en Afrique à l’agenda du Conseil de Sécurité en janvier 2000</a>. L’oligopole de 39 laboratoires pharmaceutiques qui avaient déposé des plaintes contre le Brésil et l’Afrique du Sud pour non-respect des brevets est contraint de retirer ses plaintes en avril 2001 sous la pression des ONG internationales, dont MSF et Act’Up, qui rebaptisent les laboratoires en question « Marchands de mort ».</p>
<p>Sous la houlette du secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, le <a href="http://journals.openedition.org/faceaface/1214">Fonds mondial de lutte contre le sida, le paludisme et la tuberculose</a> est fondé en 2001 et les premières subventions sont accordées avec les contributions des pays du G8 en 2002 à Gênes en Italie. Les copies des médicaments antirétroviraux fabriqués avant 2005 peuvent être distribuées via des financements du Fonds mondial et le passage à l’échelle <a href="https://journals.openedition.org/amades/1335">peut devenir réalité sur le continent africain</a>. Entre 2002 et 2012, la prévalence et la mortalité liées au VIH chutent de manière significative en Afrique. Et le Fonds mondial peut se targuer d’avoir sauvé plusieurs dizaines de millions de vies depuis sa création. Le programme américain, lancé en 2003 sous la houlette du président George W. Bush (<a href="https://www.state.gov/pepfar/">President Emergency Plan fo AIDS relief – PEPFAR</a>), suit la cadence. Les présidents Lula et Chirac lancent en 2006 un fonds complémentaire, <a href="https://unitaid.org/">l’Unitaid</a>.</p>
<p>Les années 2000-2010 vont représenter une remarquable inversion de paradigme qui rend effective la prise en charge des patients africains vivant avec le VIH.</p>
<p>Dans ce registre, le président du Botswana, Festus Mogae, va incarner un <a href="https://michelfortin.leslibraires.ca/livres/prendre-soin-de-sa-population-fanny-chabrol-9782735117390.html">modèle achevé d’engagement pour l’accès universel aux ARV</a>. Il lance en 2000 le premier programme d’accès gratuit aux ARV en Afrique avec 80 % des financements domestiques. C’est <a href="https://www.routledge.com/Public-Policy-Lessons-from-the-AIDS-Response-in-Africa/Eboko/p/book/9780367616250">« l’État militant »</a>.</p>
<p>Reste la question des maladies non transmissibles qui posent la question de « la santé globale ». Celle-ci vise à promouvoir, au niveau international, l’inscription sur les agendas internationaux des <a href="https://www.ucpress.edu/book/9780520271999/reimagining-global-health">principaux chocs épidémiologiques et des questions majeures de santé</a>. Autrement dit, il s’agit de rompre avec la « biopolitique » définie par Michel Foucault comme <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/-il-faut-defendre-la-societe-michel-foucault/9782020231695">« le droit de faire vivre et de laisser mourir »</a> pour privilégier ce que Didier Fassin nomme <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/la-vie-didier-fassin/9782021374711">« les politiques de la vie »</a>. C’est encore un autre chantier.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/218945/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fred Eboko ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le VIH a été découvert il y a 40 ans. Retour sur quatre décennies d’efforts de la communauté internationale et des chercheurs du continent en Afrique, continent particulièrement affecté.Fred Eboko, Directeur de Recherche. Sociologie politique. Politiques de santé en Afrique. Représentant de l'IRD en Côte d'Ivoire, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2147692023-10-23T18:05:47Z2023-10-23T18:05:47ZL’Afrique et le désenchantement démocratique<p><a href="https://theconversation.com/niger-le-putsch-de-trop-211846">La série de coups d’État militaires</a> intervenus dans la bande sahélienne au cours de ces dernières années a souvent été analysée, en France, du point de vue du <a href="https://theconversation.com/au-sahel-la-france-poussee-dehors-176067">rejet par les populations locales</a> (ou, en tout cas, par une partie d’entre elles) de la présence militaire, diplomatique et économique française.</p>
<p>Toutefois, ces putschs s’inscrivent également dans un processus que l’on observe plus largement dans les pays d’Afrique anciennement colonisés : le rejet de plus en plus assumé de la démocratie « à l’européenne », perçue comme une idéologie contraire aux traditions et aux volontés des peuples africains, et comme un instrument employé par les puissances occidentales sans cohérence et selon leur bon vouloir.</p>
<h2>Un rapport ambigu à la démocratie</h2>
<p>Les pouvoirs coloniaux européens n’ont pas instauré la démocratie dans les territoires africains conquis au cours du XIX<sup>e</sup> siècle, tant s’en faut. En fait, les administrations coloniales ont mis en place des pouvoirs despotiques qui prenaient assez bien le relais des <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/1967/05/DECRAENE/27814">empires et des royaumes qui avaient existé en Afrique jusqu’alors</a> et qui avaient été vaincus par les armées conquérantes (tels ceux dirigés, sur le territoire de l’actuel Mali, par <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/umar-omar-saidou-tall/">El Hadj Omar</a> (1796-1864) ou <a href="https://www.liberation.fr/debats/2017/01/04/samori-de-l-histoire-au-mythe_1816858/">Samori</a> (1830-1900), entre autres exemples).</p>
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<p>Les paysans africains (largement majoritaires dans les populations du continent à l’époque) n’ont donc pas vraiment été dépaysés par la violence coloniale et tout ce qui l’accompagnait : perception d’impôts, recrutements forcés, cultures obligatoires (culture forcée du coton à l’Office du Niger, de l’arachide au Sénégal et au Mali), etc. Dans la conscience paysanne, l’anthropologue peut observer la <a href="https://editions-croquant.org/actualite-politique-et-sociale/835-l-invention-du-sahel.html">permanence de la notion de « force »</a>, qui a toujours été au cœur des relations entre États, et entre les États et leurs sujets.</p>
<p>Il n’en reste pas moins qu’au niveau villageois, un autre principe prévalait : celui selon lequel le chef de village devait prendre sa décision sur la base d’un consensus après avoir consulté l’ensemble des villageois.</p>
<p>Cette ambiguïté ou dualité du pouvoir, qui reposait à la fois sur une force d’émanation guerrière et sur le principe apparemment égalitaire de la « palabre », se retrouve aujourd’hui après qu’elle a été oblitérée par la mise en œuvre, dans la dernière période de la colonisation française, des <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-droit-constitutionnel-2004-4-page-741.htm">élections</a>. Il faut en effet attendre la fin de la Seconde Guerre mondiale pour que la France mette en place des <a href="https://recherche-anom.culture.gouv.fr/ark:/61561/dy768auyx0f">processus électoraux</a> et que surgisse ainsi un principe démocratique.</p>
<p>Ce processus s’est poursuivi après les indépendances, sauf dans les pays qui se sont engagés dans la voie du socialisme comme la Guinée et le Mali. Interrompu dans certains pays par des coups d’État militaires, le processus démocratique a repris de plus belle après la <a href="https://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMEve/1279">fameuse déclaration de François Mitterrand à La Baule, en 1990</a>, sur la nécessité de la démocratisation du continent.</p>
<p>L’Afrique francophone s’est ainsi retrouvée à partir des années 1990 avec des pays modèles en matière de démocratie comme le <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/05/democratie-en-afrique-l-exception-senegalaise_6180690_3232.html">Sénégal</a> et le <a href="https://www.sciencespo.fr/ceri/fr/content/dossiersduceri/mon-pays-sa-un-certain-retour-sur-la-democratie-exemplaire-du-mali-et-sa-deraison-islamique">Mali</a>. Puis est venu le temps du désenchantement avec la <a href="https://www.iris-france.org/151715-cote-divoire-une-guerre-de-trente-ans-qui-tire-a-sa-fin/">guerre civile en Côte d’Ivoire</a> (2002-2007) et la volonté de certains chefs d’État d’effectuer des mandats supplémentaires en modifiant les Constitutions de leurs pays respectifs (Côte d’Ivoire, Sénégal), sans compter les pays où des despotes se sont maintenus au pouvoir pendant des décennies (Guinée équatoriale, Cameroun, Congo-Brazzaville…).</p>
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<h2>La démocratie, une notion étrangère au continent ?</h2>
<p>Mais c’est <a href="https://theconversation.com/sahel-des-populations-civiles-a-lepreuve-dune-insurrection-djihadiste-201981">l’essor du djihadisme dans les pays du Sahel</a> qui a véritablement sonné le glas du mirage démocratique. La démocratie, avec ses élections, a été vue par bon nombre d’acteurs locaux, notamment militaires, comme un instrument d’affaiblissement des armées nationales, alors même qu’elles se trouvaient aux prises avec des éléments qualifiés de terroristes.</p>
<p>Au Mali notamment, et bien qu’<a href="https://theconversation.com/mali-le-president-ibrahim-boubacar-keita-pris-a-son-propre-jeu-146275">Ibrahim Boubacar Keita</a> ait été élu démocratiquement en 2013, a été pointée la déliquescence du régime avec son cortège de corruption, de népotisme et de prévarication. En deçà, la gestion du président Alpha Omar Konaré (1992-2002) qui jusque là avait été considérée comme sans tache, a récemment été mise en cause par le premier ministre actuel <a href="https://www.jeuneafrique.com/1446942/politique/au-mali-choguel-maiga-de-retour-sur-la-pointe-des-pieds/">Choguel Maiga</a> (arrivé au pouvoir à la suite du <a href="https://theconversation.com/mali-un-coup-detat-dans-le-coup-detat-161594">putsch de 2021</a>) en raison de son supposé abandon de l’armée au cours de ses mandats successifs, laissant ainsi libre cours à la poussée djihadiste. À l’inverse, est réhabilitée la figure du général Moussa Traoré, auteur en 1968 d’un coup d’État militaire qui avait mis fin au régime socialiste de Modibo Keita.</p>
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<a href="https://theconversation.com/mali-moussa-traore-parcours-dun-dictateur-dechu-et-rehabilite-146661">Mali : Moussa Traoré, parcours d’un dictateur déchu et réhabilité</a>
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<p>Bref, le principe démocratique d’inspiration occidentale est censé, d’après certains responsables africains eux-mêmes, ne pas convenir à l’Afrique ; on retrouve là l’idée de Jacques Chirac qui estimait que le <a href="https://cafebabel.com/fr/article/lafrique-a-t-elle-jamais-ete-mure-pour-la-dictature-5ae0049ff723b35a145daf13/">continent africain n’était pas mûr</a> pour l’application de ce système politique.</p>
<p>La démocratie, avec son système électoral donnant des gagnants et des perdants, est en effet considérée comme étant l’objet de toutes les manipulations et de toutes les compromissions. Il existe une véritable nostalgie, au sein de larges secteurs des populations africaines, pour un pouvoir fort, un pouvoir guerrier qu’incarnent bien les militaires qui se sont emparés du pouvoir au Mali, en Guinée, au Burkina Faso et au Niger. Mais au-delà, il existe un goût prononcé pour des institutions proprement africaines, que celles-ci soient d’ordre coercitif ou consensuel.</p>
<h2>La remise en valeur de modèles précoloniaux</h2>
<p>Cette nostalgie prend plusieurs formes, celle de formations politiques et de certaines associations anciennes – que celles-ci aient disparu, qu’elles existent encore ou qu’elles se soient profondément transformées.</p>
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<a href="https://theconversation.com/democratie-ruecratie-theocratie-la-spirale-africaine-178961">Démocratie, « ruecratie », théocratie : la spirale africaine ?</a>
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<p>L’empire médiéval du Mali, ainsi que la <a href="https://editions.flammarion.com/branchements/9782082125475">Charte de Kurugan Fuga</a>, édictée par son fondateur Sunjata, continuent ainsi de servir de référence à certaines fractions de l’élite politique et intellectuelle malienne. Les pactes politiques entre clans qui ont été instaurés à cette période sont censés pouvoir servir de modèle alternatif aux Constitutions importées d’Occident.</p>
<p>De même, les sociétés de chasseurs mandingues et dogons, avec <a href="https://www.persee.fr/doc/jafr_0037-9166_1964_num_34_2_1383">leur organisation égalitaire</a>, fournissent un modèle de comportement concurrençant de façon convaincante les Constitutions occidentales, qui reposent sur le principe de l’égalité des citoyens. Enfin, la palabre villageoise, ou plutôt une version idéalisée de cette institution, paraît être à même de ramener la concorde et d’échapper aux procédures électorales sources de divisions.</p>
<p>Dans une perspective <a href="https://www.editions-mf.com/produit/107/9782378040505/l-ange-noir-de-l-histoire">afro-futuriste</a>, certaines formations politiques existant depuis une époque reculée mais toujours présentes actuellement comme le <a href="https://www.persee.fr/doc/ahess_0395-2649_1985_num_40_6_283244_t1_1447_0000_002">royaume bamoun du Cameroun</a> sont présentées par des intellectuels africains comme pouvant fournir un contrepoint alternatif à un État camerounais défaillant (voir le passage « Foumban is Wakanda », pp. 47-49 dans le <a href="https://www.editionsmimesis.fr/catalogue/critique-de-la-raison-animiste/">récent ouvrage de l’auteur de ces lignes</a>).</p>
<p>Bref, l’Afrique disposerait de ressources politiques autochtones lui permettant de se passer de l’importation de modèles prétendument universels mais ne s’appliquant en réalité qu’à l’Occident.</p>
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<p><a href="https://www.lecturesanthropologiques.fr/1086">Le principe universaliste de la démocratie occidentale</a>, outre qu’il serait défendu de façon hypocrite par l’Europe et les États-Unis, qui s’accommodent parfaitement de nombreux régimes formellement démocratiques mais en réalité répressifs, est également vu par certains secteurs des opinions africaines comme le moyen d’imposer des valeurs contraires à leurs propres valeurs culturelles. Il en va ainsi des droits de l’homme qui sont brandis par les Occidentaux pour fustiger l’excision, les mariages forcés ou encore la condamnation de l’homosexualité.</p>
<p>En cela, certains pays africains trouvent un répondant dans la Russie de Poutine, qui lui aussi dénonce des valeurs occidentales « ne correspondant pas à la culture russe ».</p>
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<a href="https://theconversation.com/russie-lhomophobie-detat-element-central-de-la-guerre-des-valeurs-contre-loccident-212396">Russie : l’homophobie d’État, élément central de la « guerre des valeurs » contre l’Occident</a>
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<p>Partout en Afrique, au Maghreb (Tunisie), dans certains pays européens (Hongrie, Slovaquie) et même aux États-Unis (Trump), la démocratie est battue en brèche au profit du culte du chef. Dans le cadre de ce modèle, plus aucun corps intermédiaire n’est censé subsister entre le leader et ses citoyens devenus des sujets. La démocratie devient une curiosité ou un vestige occidental, d’autant plus que certains de ses thuriféraires peuvent apparaître comme étant eux-mêmes nostalgiques d’un Ancien Régime où s’épanouissait la royauté (c’est ainsi <a href="https://theconversation.com/de-louis-xvi-a-emmanuel-macron-lheritage-monarchique-de-la-v-republique-90324">qu’est parfois présenté Emmanuel Macron</a>).</p>
<p>Dans de larges parties du monde, la démocratie n’a plus le vent en poupe et l’Occident a bien du mal à imposer au nom de ce principe des changements de régime dans des pays qui, il n’y a pas si longtemps, se trouvaient encore sous sa dépendance. Le renversement des dictateurs Saddam Hussein en Irak et Mouammar Kadhafi en Libye, et c’est un euphémisme, ne s’est pas avéré convaincant, de sorte que la politique de George W. Bush contre les États « voyous » est désormais abandonnée et que les États-Unis par exemple, à la différence de la France, se sont parfaitement accommodés, dans un premier temps, de l’arrivée au pouvoir au Niger d’une junte militaire, même s’ils ont <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/10/10/niger-washington-qualifie-la-prise-de-pouvoir-des-militaires-de-coup-d-etat-et-coupe-son-aide_6193601_3212.html">fait machine arrière par la suite</a>, tout en maintenant leurs troupes dans le pays.</p>
<h2>L’Histoire continue</h2>
<p>Bref, contrairement à <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/l-histoire-de-la-fin-de-l-histoire-5290629">ce que prévoyait Francis Fukuyama</a>, l’Histoire ne s’est pas arrêtée après la chute du mur de Berlin et de l’Union soviétique. On assiste au contraire, dans l’esprit de la conférence de Bandung (1955), à une <a href="https://theconversation.com/avec-le-conflit-russie-ukraine-le-renouveau-des-non-alignes-184295">reprise d’initiative des pays du Sud</a>, avec par exemple l’émergence des BRICS auxquels sont venus s’adjoindre plusieurs pays, notamment africains (Égypte et Éthiopie), sans que la question de leur nature démocratique soit posée (pas plus d’ailleurs qu’elle n’est posée pour les membres fondateurs de ce groupe que sont la Chine et la Russie). Le débat international ne porte donc plus sur le régime politique de chaque pays membre mais sur la volonté contre-hégémonique de défier la suprématie de l’Occident, incarnée essentiellement par les États-Unis et l’Europe.</p>
<p>Il va sans dire que le <a href="https://www.france24.com/fr/%C3%A9co-tech/20230823-une-monnaie-commune-des-brics-peut-elle-faire-trembler-le-dollar">projet des BRICS d’instaurer une nouvelle monnaie</a> aura sans doute des répercussions dans les anciennes colonies françaises d’Afrique qui continuent de voir leur souveraineté limitée par l’existence du franc CFA. C’est sans doute dans ce domaine que sera mené le prochain combat politique et économique entre les pays africains francophones et la France, laissant ainsi de côté la question de savoir si ces pays sont de nature démocratique ou dictatoriale.</p>
<p>La vision d’une humanité se dirigeant dans son ensemble vers un avenir démocratique radieux n’a donc plus cours. Le combat démocratique universel a cédé la place à des rapports de force entre pays et entre nations, ce qui redonne une certaine actualité aux analyses des années 1960-1970 qui <a href="https://www.jstor.org/stable/23589873">mettaient en avant les rapports centre-périphérie</a> au sein du système économique mondial.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214769/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Loup Amselle ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans de nombreux pays africains, le concept même de démocratie est aujourd’hui profondément déconsidéré.Jean-Loup Amselle, Anthropologue et ethnologue, directeur d'études émérite à l'EHESS, chercheur à l'Institut des mondes africains, École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2118812023-10-11T13:50:20Z2023-10-11T13:50:20ZRaréfaction des sardinelles rondes en Afrique du Nord-Ouest : comment éviter l'effondrement<p>La pêche artisanale est un secteur refuge ou de reconversion pour de nombreux agriculteurs et éleveurs victimes du changement climatique dans le Sahel. Mais au cours des quatre dernières décennies, la tendance à la surexploitation a causé la diminution de 20 à 50 % des quantités de poissons présents dans les eaux sénégalaises, et par conséquent la qualité de vie des pêcheurs. Cette diminution a surtout concerné les poissons de fonds dits <a href="https://doi.org/10.1051/alr/2017046">“démersaux”</a>, alors que l'abondance des petits poissons pélagiques (comme les sardinelles) fluctuait principalement sous <a href="https://doi.org/10.1111/fog.12218">l’effet des conditions climatiques</a>. Mais depuis 2021, les captures de sardinelles rondes dans la sous-région <a href="https://doi.org/10.1016/j.fishres.2023.106873">ont chuté</a> en-deça du dixième de ce qu'elles étaient à leur apogée, en 2011. Ce qui pourrait indiquer un effondrement prochain de cette pêcherie (en science halieutique l'effondrement sera acté si cette situation s'étale sur <a href="https://doi.org/10.1111/j.1467-2979.2005.00181.x">4 années consécutives</a>).</p>
<p>La sardinelle ronde est historiquement une des principales espèces capturées et transformées artisanalement en Afrique du Nord et de l'Ouest. Elle contribue à la fois en quantité et en qualité à <a href="https://www.isblue.fr/la-recherche/projets-de-recherche/projet-emblematique-omega/">l’alimentation</a> des populations <a href="https://www.nature.com/articles/s43016-022-00643-3">sahéliennes</a>. Elle est source d'omega 3, une molécule nécessaire au maintien des fonctions vitales et en particulier pour le développement du <a href="https://www.lanutrition.fr/bien-dans-sa-sante/les-complements-alimentaires/les-principaux-complements-alimentaires/les-complements-correcteurs-de-l-alimentation/les-omega-3/le-dha-lallie-sante-de-votre-cerveau">cerveau</a>. </p>
<p>Les qualités de la sardinelle ronde en font également une espèce de choix pour la fabrication des farines de poissons dont <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0308597X22002378?via%3Dihub">la demande</a> ne cesse de grimper sur le marché mondial. Mais depuis quelques années, les consommateurs sénégalais et mauritaniens ont constaté la raréfaction des sardinelles rondes, souvent absentes des étalages. </p>
<p>Au Sénégal, les quantités annuelles débarquées fluctuaient de 100 000 à 250 000 tonnes <a href="https://doi.org/10.1111/fog.12218">dans les années 2010</a>, mais stagnent autour de 10 000 tonnes depuis 2020. Nous cherchons ici à interpréter ces changements à la lumière de nos <a href="https://doi.org/10.1016/j.pocean.2018.03.011">récentes recherches</a> sur les migrations de cette espèce dans la sous région.</p>
<h2>Disparition progressive des sardinelles rondes</h2>
<p>A l’ouverture du <a href="https://www.imrop.mr/symposium-international-sur-les-petits-pelagiques-dans-la-zone-nord-ouest-africaine-exploitation-diversification-des-usages-et-effets-des-changements-climatiques/#:%7E:text=L%E2%80%99IMROP%20organisera%20%C3%A0%20Nouakchott%2C%20du%2024%20au%2026,de%20gestion%2C%20leurs%20gouvernances%20et%20leurs%20retomb%C3%A9es%20socio%C3%A9conomiques.">symposium international sur les petits pélagiques dans la zone nord-ouest africaine</a> tenu à Nouakchott en mai 2022, un industriel fustigeait les “extrémistes écolo” qui proposeraient des quotas de pêche trop bas. </p>
<p>Lors de ce même symposium, nous avons appris pourtant <a href="https://www.fao.org/documents/card/en/c/CB0490FR">la chute vertigineuse des captures de sardinelles rondes</a> à l’échelle de la sous-région, passant de 425 561 tonnes en 2018 à 49 550 tonnes en 2021.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1016/j.pocean.2018.03.011">Les récents développements</a> de la recherche océanographique ont permis d’étudier la migration des sardinelles sous l’angle de la modélisation biophysique, c’est-à-dire de modéliser leurs déplacements directement à partir de la dynamique des courants, du plancton et des poissons eux-mêmes, indépendamment des données de pêche. Les résultats suggèrent l'existence d’une grande diversité de routes migratoires mais seule une faible proportion de poissons effectue la migration complète historiquement décrite et classiquement admise.</p>
<p>La vision proposée par le modèle, corroborée par les données obtenues auprès des artisans pêcheurs sénégalais, est celle d’une grande proportion de sardinelles rondes basées en Mauritanie qui déborderait au gré des courants et des saisons vers le nord ou vers le sud. Aussi, le modèle suggère une extension au large des sardinelles variable selon les saisons, mais une densité toujours plus forte dans la zone côtière. </p>
<p>En résumé, cette étude a montré que le cœur de la population des sardinelles rondes, la zone la plus dense, centre de gravité des migrations saisonnières qui alimente les pays voisins, se situerait dans la frange côtière des eaux mauritaniennes. Ce qui explique les <a href="https://doi.org/10.1016/j.fishres.2016.10.009">captures exceptionnelles</a> qui y sont réalisées depuis l’avènement des usines de farine de poissons en Mauritanie.</p>
<h2>Développement des usines de farine de poisson</h2>
<p>Depuis 2012, l'industrie de farine de poisson dans la sous-région a connu un développement rapide, surtout en Mauritanie (environ 40 usines sur 650 km de côte) relativement au Sénégal et en Gambie (environ 10 usines sur 550 km de côte). En Mauritanie, ce développement a eu <a href="https://doi.org/10.1016/j.fishres.2016.10.009">un effet particulièrement notoire</a> sur la distribution et l’intensité de l’effort de pêche. Avant, la Mauritanie passait des accords avec des bateaux-usines étrangers, les autorisant à exploiter ses eaux hauturières, c'est à dire au-delà de 7 miles nautiques (environ 14 km) des côtes. Lorsque la densité de poissons chutait, les bateaux étrangers se redéployaient vers d’autres régions du monde.</p>
<p>Pour des raisons de valorisation et de domestication des ressources halieutiques et de développement économique local, les politiques nationales entre 2013 et 2016 <a href="https://doi.org/10.1016/j.fishres.2016.10.009">ont encouragé</a> l’installation des usines à terre. </p>
<p>Malheureusement, ce changement de paradigme a amplifié le problème de surexploitation des sardinelles rondes. En effet, les usines sont devenues de nouveaux acheteurs capables chacune d’engloutir quotidiennement des quantités considérables de poissons. Pour les alimenter en poissons frais, des accords ont été passés successivement avec le Sénégal puis la Turquie sous l’appellation “affrètement coque nue”. </p>
<p>Dans les deux cas, ces flottes sont autorisées à pêcher dans la zone côtière, où les sardinelles rondes et autres espèces se concentrent, comme expliqué plus haut.</p>
<p>Le mécanisme de régulation de l'effort de pêche qui pouvait se mettre en œuvre avec la pêche hauturière étrangère en cas de baisse des captures devient difficile pour le cas des bateaux côtiers travaillant dans le cadre d'un affrètement. En effet, ceux-ci opèrent pour le compte d'usines de farine localisées le long des côtes et qui demandent un ravitaillement permanent, ce qui est possible en Mauritanie en puisant dans la riche zone côtière.</p>
<h2>Surexploitation de la sardinelle</h2>
<p>Pour mieux comprendre ce qui se joue dans cette sous-région, imaginons une métaphore simple. Pensez à une grande baignoire remplie d'eau, dans laquelle se trouvent deux tuyaux, l’un qui arrive près du fond et l’autre à mi-hauteur. L'eau de la baignoire représente l’ensemble des sardinelles rondes de la sous-région. La pêche qui s’exerce dans la zone côtière mauritanienne équivaut à pomper l’eau de la baignoire par le tuyau qui arrive près du fond. </p>
<p>En revanche, la pêche qui s’exerce dans les autres zones, donc au large de la Mauritanie ou bien dans les zones adjacentes nord et sud, reviendrait à pomper l’eau par le tuyau à mi-hauteur. Si l’on pompe à la fois dans les deux tuyaux, le tuyau à mi-hauteur sera asséché avant celui du fond. Et donc avant que les captures ne diminuent dans la zone côtière mauritanienne, elles tomberont très bas dans les autres zones. </p>
<p>Cela est dû au fait que dans le modèle, les sardinelles se déplacent sans cesse, mais se trouvent en moyenne plus souvent dans la zone côtière de la Mauritanie. Cette métaphore illustre un phénomène appelé <a href="https://blog.nature.org/2016/05/11/hyperstability-the-achilles-heel-of-data-poor-fisheries/">“hyperstabilité des captures”</a>, souvent observé dans les pêcheries à travers le monde. </p>
<p>Ainsi, il apparaît évident que l’établissement des usines de farines de poissons a créé une situation qui menace la population de sardinelles rondes en créant une demande sans limite alimentée par une exploitation intense dans la zone côtière mauritanienne. </p>
<p>La prise en compte des résultats scientifiques dans les mesures de gestion est un processus très long. Dès 2014, les scientifiques <a href="https://www.fao.org/3/i5284b/i5284b.pdf">avaient tiré la sonnette d’alarme</a> sur le risque de surexploitation des espèces migratrices induit par ces nouvelles pratiques. </p>
<p>Depuis 2014, différents travaux <a href="https://doi.org/10.1016/j.marpol.2022.105294">halieutiques</a>, <a href="https://doi.org/10.1016/j.marpol.2016.11.008">bioéconomiques</a> et <a href="https://doi.org/10.3917/med.193.0113">socio-économiques</a> publiés par des scientifiques mauritaniens et sénégalais ont également tiré la sonnette d’alarme. Mais les mesures prises, avec une faible coordination des gouvernements des pays concernés, se sont révélées inadaptées ou insuffisantes pour empêcher l’effondrement annoncé par les scientifiques de la population de sardinelle ronde.</p>
<h2>Que faire ?</h2>
<p>Une régulation concertée et informée de la pêche au niveau des Etats est plus que jamais nécessaire. Si les sardinelles rondes se retrouvent le plus souvent en Mauritanie, elles <a href="https://doi.org/10.1016/j.pocean.2018.03.011">traversent les frontières maritimes</a>, du Maroc à la Guinée.</p>
<p>Les récentes constatations sur la diminution de la sardinelle ronde au Sénégal nous poussent à croire que cette espèce devrait figurer à minima dans l’annexe 2 de la convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (<a href="https://www.cms.int/sites/default/files/instrument/CMS_text_fre.PDF">CMS</a>), c'est-à-dire la liste des espèces devant faire l’objet d’accords entre les pays traversés. </p>
<p>Face à cette responsabilité partagée, il faut une gestion collective reposant par exemple sur un système de suivi de l’effort de pêche harmonisé au niveau sous-régional. Autrement dit, il faut renforcer la mission de coopération de la commission sous-régionale des pêches (CSRP), organisation intergouvernementale qui pourrait par exemple appuyer à l'attribution d'écocertification - processus par lequel un organisme évalue et atteste qu'un produit, un service et une entreprise respecte des normes environnementales spécifiques - aux pêcheries qui, par leur réglementation, favorisent la gestion commune, et donc leur durabilité. Bien sûr, un accord explicite des dits gouvernements est nécessaire, bien que déjà acquis sur le principe par les signataires de la CMS.</p>
<p>Enfin, il faut respecter les habitats essentiels des sardinelles rondes comme leurs zones de reproduction et de nurseries. Le <a href="https://www.cairn.info/revue-confluences-mediterranee-2011-3-page-133.htm">Banc du Sahara</a>, le <a href="https://mava-foundation.org/fr/article/banc-darguin-au-croisement-de-la-conservation-du-developpement-et-de-la-finance/">Banc d'Arguin</a> et la <a href="https://journals.openedition.org/etudescaribeennes/1172?&id=1172&lang=en">Petite Côte</a> sont par exemple trois sites clefs identifiés. Il convient de mieux les étudier pour comprendre leurs vulnérabilités. La zone côtière mauritanienne devrait faire l’objet d’une attention particulière en raison de son rôle important pour les capacités de renouvellement de cette espèce migratoire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/211881/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>The authors do not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and have disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Le développement des usines de poisson a augmenté la pression sur la sardinelle ronde à travers la multiplication des bateaux senneurs, qui opèrent dans la zone côtière, pour leur ravitaillement.Timothée Brochier -, Océanologue, Institut de recherche pour le développement (IRD)Cheikh Baye Braham, Chercheur en océnographie, Institut Mauritanien de Recherche Océanographique et des PêchesModou Thiaw, Maître de Recherche en écologie halieutique, Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA)Patrice Brehmer, Chercheur, Socio-ecosystèmes marins, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2123922023-08-31T10:38:32Z2023-08-31T10:38:32ZSénégal : le chikungunya sévit dans le pays, voici comment l'éviter<p>Au cours du mois d'août 2023, une épidémie de chikungunya a été identifiée au Sénégal, touchant <a href="https://www.pressafrik.com/Chikungunya-apres-Kedougou-la-maladie-s-est-propagee-jusqu-a-Dakar_a260987.html">la région de Kédougou</a>, dans le sud du pays. Les trois départements de cette région ont signalé <a href="https://crisis24.garda.com/alerts/2023/08/senegal-elevated-chikungunya-activity-reported-in-the-kedougou-region-through-august-update-1">112 cas confirmés</a> de cette maladie virale. Bien que le chikungunya soit relativement rare au Sénégal, les autorités sanitaires cherchent à apaiser les inquiétudes en soulignant qu'aucun cas grave n'a été signalé jusqu'à présent.</p>
<p>Le virus du chikungunya est originaire d'Afrique mais il s'est répandu dans le monde au fil des ans. Au <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7241529/">cours des 20 dernières années</a>, de plus en plus d'infections par le chikungunya ont été signalées dans les pays africains, mais le tableau général de sa circulation reste sous-estimé, la maladie étant sous-diagnostiquée et insuffisamment déclarée.</p>
<p>Le virus du chikungunya a été identifié pour la première<a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/chikungunya#:%7E:text=R%C3%A9partition%20g%C3%A9ographique%20et%20flamb%C3%A9es%20%C3%A9pid%C3%A9miques,d'Asie%20(1)."> fois en Tanzanie en 1952</a>. Le chikungunya est une maladie infectieuse provoquée par un virus transmis aux humains par des moustiques du genre <em>Aedes</em> (moustique tigre). Le nom de la maladie signifie “celui qui marche courbé”, parce que l’infection entraîne non seulement une forte fièvre, mais aussi des douleurs articulaires et musculaires. Ce nom est dérivé d’un mot de la <a href="https://fr-academic.com/dic.nsf/frwiki/917008">langue kimakonde</a> – parlée dans le sud-est de la Tanzanie et au nord-est du Mozambique – et qui signifie “se déformer”.</p>
<p>D’après l’OMS, depuis 2004, des flambées urbaines de chikungunya ont été <a href="https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/chikungunya#:%7E:text=R%C3%A9partition%20g%C3%A9ographique%20et%20flamb%C3%A9es%20%C3%A9pid%C3%A9miques,d'Asie%20(1).">signalées dans plus de 110 pays d’Asie</a>, d’Afrique, d’Europe et des Amériques. Ces flambées sont devenues plus fréquentes et plus étendues là où des populations d’<em><a href="https://www.ird.fr/projet-tis-aedes-oi-application-de-la-technique-de-linsecte-sterile-dans-locean-indien#:%7E:text=L'Aedes%20aegypti%20est%20une,et%20de%20la%20fi%C3%A8vre%20jaune.">Aedes aegypti</a></em> ou d’<em><a href="https://www.pasteur.fr/fr/journal-recherche/actualites/qui-est-moustique-tigre-ou-aedes-albopictus">Aedes albopictus</a></em> sont bien établies. Dans ces régions, une transmission locale par les moustiques est désormais connue. </p>
<p>Mes <a href="https://www.documentation.ird.fr/listes/parauteur/SOKHNA/CHEIKH+SADIBOU/tout">recherches</a> portent, principalement, sur <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed?term=Sokhna+">l'épidémiologie des agents pathogènes</a> à transmission vectorielles responsables des maladies fébriles en Afrique de l'Ouest. Dans cet article, j'explique les symptômes, le traitement, le diagnostic et la prévention de cette infection.</p>
<h2>Symptômes, traitement et vaccins</h2>
<p>Chez les cas qui présentent <a href="https://applications.emro.who.int/docs/Fact_Sheet_WHD_2014_FR_15259.pdf?ua=1">des symptômes</a>, la maladie se manifeste après une incubation de 4 à 8 jours en moyenne, suite à la piqûre d’un moustique tigre infecté. Une fièvre élevée (supérieure à 38,5°C) apparaît brutalement, accompagnée de maux de tête, de courbatures ou de douleurs articulaires, qui peuvent être intenses, touchant principalement les poignets, chevilles et phalanges et qui sont souvent très handicapantes. </p>
<p>Ces symptômes durent généralement quelques jours, mais peuvent persister pendant des semaines ou des mois. L’évolution peut être rapidement favorable, si le malade répond bien au traitement symptomatique. Après la guérison, les patients ont de fortes chances d’avoir acquis une immunité contre de futures infections.</p>
<p>La prise en charge clinique vise essentiellement à soulager la fièvre et les douleurs articulaires au moyen d’antipyrétiques, d’analgésiques adaptés, d’un bon apport en liquides et d’un repos du patient. Il n'existe pas de médicament antiviral spécifique contre l'infection par le chikungunya. </p>
<p>Plusieurs <a href="https://francais.medscape.com/voirarticle/3610245">vaccins sont en cours de développement</a>, mais ils ne sont pas encore homologués. C’est pourquoi l’OMS encourage les pays à une meilleure prise en charge des malades et une mise en œuvre de stratégies de communication sociale visant à réduire la présence des moustiques vecteurs.</p>
<h2>Diagnostic</h2>
<p>Le virus du chikungunya peut être détecté directement dans des échantillons sanguins prélevés chez le patient au cours de la première semaine de la maladie par <a href="https://www.hpci.ch/prevention/fiches-techniques/contenu/technique-de-pr%C3%A9l%C3%A8vement-par-pcr-nasopharyng%C3%A9">PCR</a> (technique d'amplification de l'ADN ou <a href="https://www.francepaternite.com/entre-arn-et-adn-differences-et-similarites/#:%7E:text=L'ADN%20stocke%20l'information%20g%C3%A9n%C3%A9tique%20%C3%A0%20long%20terme.&text=L'ARN%20quant%20%C3%A0%20lui,informations%20g%C3%A9n%C3%A9tiques%20dans%20certains%20organismes.">ARN </a>du porteur de la maladie). D’autres tests peuvent détecter la réponse immunitaire d’une personne à l’infection par le virus du chikungunya. </p>
<p>Ces tests sont généralement utilisés pour rechercher la présence d’anticorps dirigés contre le virus, qui sont généralement détectables dès la première semaine après l’apparition de la maladie et peuvent encore être détectés pendant environ deux mois.</p>
<p>C’est pourquoi l’OMS encourage les pays à acquérir et à maintenir les capacités nécessaires à la détection et à la confirmation des cas.</p>
<h2>Prévention et lutte</h2>
<p>Lors d’une piqûre, le moustique tigre prélève le virus sur une personne infectée, et à l’occasion d’une autre piqûre, il le transmet à une personne saine. C’est pourquoi, le meilleur moyen de lutter contre la transmission du chikungunya est de se protéger individuellement contre les piqûres de moustique (vêtements longs, répulsifs cutanés, moustiquaires), et de détruire les gîtes larvaires les plus accessibles.</p>
<p>Il faut pour cela mobiliser les communautés qui jouent un rôle essentiel dans la réduction des sites de reproduction des moustiques en vidant et en nettoyant régulièrement les récipients contenant de l'eau, en éliminant les déchets et en soutenant les programmes locaux de lutte contre les moustiques. </p>
<p>Lors de flambées épidémiques, des insecticides peuvent être pulvérisés pour tuer les moustiques adultes. Les moustiquaires de fenêtre et de porte peuvent empêcher aussi les moustiques de pénétrer dans les habitations. Les moustiquaires imprégnées d’insecticide doivent être utilisées (jour et nuit) contre les moustiques qui piquent, en particulier les jeunes enfants et les personnes malades ou âgées. </p>
<p>Toutes ces mesures peuvent également être prises à titre d’urgence par les autorités sanitaires pour lutter contre les moustiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212392/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cheikh Sokhna does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Le meilleur moyen de lutter contre la transmission du chikungunya est de se protéger individuellement contre les piqûres de moustique et de ralentir leur reproduction.Cheikh Sokhna, Directeur de recherche à l'IRD, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2111572023-08-11T13:54:07Z2023-08-11T13:54:07ZAvec le prix des denrées qui augmentent, le Sénégal pourrait connaître de nouvelles turbulences<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/541798/original/file-20230808-21-49wab3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=50%2C0%2C5615%2C3732&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un manifestant lance une pierre sur la police lors d'une manifestation à Dakar, au Sénégal, le 3 juin 2023. Ces affrontements contre le régime en place pourrait être un prélude à d'autres, cette fois contre la hausse du prix des denrées. </span> <span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Leo Correa)</span></span></figcaption></figure><p>La cherté du coût de la vie a souvent conduit de nombreux peuples dans la rue. Il se peut fort bien que la hausse du prix des denrées de base ait des impacts politiques au sein de plusieurs États, notamment au Sénégal. </p>
<p>Avec la suspension récente des exportations de certains types de riz en provenance d’Inde, rien n’exclut de nouvelles émeutes de la faim dans ce pays d’Afrique de l’Ouest, qui vient d’être secoué par des <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/le-senegal-s-embrase-la-communaute-internationale-se-mobilise-03-06-2023-2522824_3826.php">mobilisations d’une rare violence</a> en soutien à l’opposant Ousmane Sonko, condamné à la prison par le régime en place.</p>
<p>Doctorante en science politique à l’Université d’Ottawa, mes recherches portent sur l’analyse des mouvements sociaux face à l’accaparement des terres, à l’accès des femmes aux ressources productives et à l’étude des politiques agricoles au Sénégal.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/541805/original/file-20230808-11343-hkw1lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541805/original/file-20230808-11343-hkw1lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541805/original/file-20230808-11343-hkw1lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541805/original/file-20230808-11343-hkw1lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541805/original/file-20230808-11343-hkw1lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541805/original/file-20230808-11343-hkw1lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541805/original/file-20230808-11343-hkw1lf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des affrontements ont lieu entre des manifestants et des policiers antiémeute dans un quartier de Dakar, au Sénégal, le 3 juin 2023.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Leo Correa)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>D’inquiétantes restrictions pour l’Afrique</h2>
<p>Le gouvernement indien a en effet annoncé le 20 juillet 2023 la <a href="https://www.lexpress.fr/monde/asie/linde-interdit-lexportation-de-riz-blanc-non-basmati-quelles-consequences-64UFXCYO6FBDBCG7TOHK4QBTSI/">suspension de ses exportations de riz blanc non-basmati</a>. Cette décision s’ajoute à celle de la <a href="https://www.jeuneafrique.com/1380258/economie-entreprises/senegal-cote-divoire-benin-linde-complique-lapprovisionnement-en-riz/">restriction des exportations de brisures de riz et l’ajout d’une taxe de 20 % pour tout achat de paddy rice</a>. </p>
<p>Ces actions menées par le gouvernement indien ont pour objectif de limiter la hausse du coût du riz sur son territoire et faire face à sa baisse de production due à des conditions climatiques difficiles. Le conflit entre la Russie et l’Ukraine, la pandémie de la Covid-19 et le changement climatique ont contribué à une <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/04/11/l-inflation-reste-a-des-niveaux-eleves-sur-fond-de-ralentissement-de-la-croissance-mondiale_6169074_3234.html">inflation record des économies mondiales</a> ainsi qu’une hausse du coût des céréales sur les marchés mondiaux. </p>
<p>L’Ukraine et l’Inde sont les principaux exportateurs de blé et de riz à destination des pays africains. <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2022/07/22/l-ukraine-et-la-russie-signent-un-accord-avec-l-onu-et-la-turquie-pour-relancer-les-exportations-de-cereales_6135808_3210.html">L’accord sur les exportations de céréales ukrainiennes</a> signé en juillet 2022 a permis l’approvisionnement de <a href="https://fondation-farm.org/ble-guerre-ukraine-afrique/">800 000 tonnes de blé vers l’Afrique du Nord, contre 5 à 6 millions de tonnes avant la crise et un million à destination des pays de la Corne de l’Afrique</a> via le Programme alimentaire mondial, dont le principal fournisseur est l’Ukraine. </p>
<p>La récente décision de la Russie de <a href="https://www.lepoint.fr/monde/cereales-ukrainiennes-quelles-consequences-apres-le-retrait-russe-17-07-2023-2528624_24.php">ne pas reconduire l’accord sur les exportations de céréales</a> ravive de nombreuses craintes au sein des gouvernances des États africains dont la sécurité alimentaire est déjà menacée. La <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/societe-africaine/insecurite-alimentaire-un-africain-sur-cinq-a-eu-faim-en-2021_5250298.html">malnutrition a touché en Afrique 278 millions de personnes en 2021</a>.</p>
<h2>« On a faim, le riz est cher »</h2>
<p>Cette situation rappelle les <a href="https://www.lemonde.fr/international/article/2008/04/17/cinq-questions-sur-la-crise-alimentaire-mondiale_1034481_3210.html">conditions qui ont conduit aux émeutes de la faim de 2008</a> en <a href="https://doi.org/10.3917/rtm.196.0927">Afrique, en Asie et en Amérique latine</a>, dus en partie à une hausse du prix des denrées vivrières et des matières premières sur les marchés mondiaux. </p>
<p>Au Sénégal, on pouvait entendre les slogans suivants, « <a href="https://www.lefigaro.fr/international/2008/04/17/01003-20080417ARTFIG00006-crise-alimentairela-disette-menace-au-senegal.php">On a faim</a> ! », « <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/hausse-du-prix-du-riz-une-preoccupation-mondiale_1626923.html">Le riz est cher, va-t’en</a> ! » à destination du président Abdoulaye Wade. </p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/541813/original/file-20230808-25-vo5w0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541813/original/file-20230808-25-vo5w0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541813/original/file-20230808-25-vo5w0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541813/original/file-20230808-25-vo5w0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541813/original/file-20230808-25-vo5w0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541813/original/file-20230808-25-vo5w0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541813/original/file-20230808-25-vo5w0e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le président sénégalais Abdoulaye Wade accueille son homologue français Nicolas Sarkozy, à son arrivée à Dakar, le 26 juillet 2007, un peu avant les émeutes de la faim.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Pascal Rossignol, pool)</span></span>
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</figure>
<p>La chercheuse au Centre de recherche sur les systèmes climatiques de l’université de Columbia, et spécialiste de <a href="https://theconversation.com/we-simulated-how-a-modern-dust-bowl-would-impact-global-food-supplies-and-the-result-is-devastating-133662">la manière dont les changements environnementaux affectent la sécurité alimentaire</a>, <a href="https://www.alisonheslin.com/">Alison Heslin</a>, affirme qu’il existe une <a href="https://doi.org/10.1177/0022343319898227">corrélation entre l’accès à l’alimentation, l’urbanisation, la pauvreté, le type de régime politique et l’apparition d’émeutes</a>. </p>
<p>Pour Heslin, les émeutes de la faim ont une profonde nature politique. En effet, lors de ces émeutes, les demandes des participants dépassent les revendications liées à l’accès aux denrées. <a href="https://doi.org/10.1177/0022343319898227">Cet accessibilité devient une force mobilisatrice de revendications</a> sociales, économiques et politiques. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/541804/original/file-20230808-30403-37xtfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541804/original/file-20230808-30403-37xtfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541804/original/file-20230808-30403-37xtfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541804/original/file-20230808-30403-37xtfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541804/original/file-20230808-30403-37xtfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541804/original/file-20230808-30403-37xtfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541804/original/file-20230808-30403-37xtfa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Des policiers tirent des gaz lacrymogènes lors d’une manifestation à Dakar, le 2 juin 2023. Les affrontements entre la police et les partisans du chef de l’opposition sénégalaise, Ousmane Sonko, ont fait neuf morts.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Leo Correa)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces éléments sont observables au sein des émeutes qui ont secoué le Sénégal en 2008, allant de protestations contre la vie chère à des revendications <a href="https://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/noteafrique11antil.pdf">exigeant le départ du président Abdoulaye Wade</a>. </p>
<h2>Les difficultés de production de riz local</h2>
<p>Le riz constitue l’un des aliments de base de la cuisine sénégalaise. La production nationale ne couvre que <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/video/2023/01/31/senegal-a-quand-l-autosuffisance-en-riz_6159968_3212.html">40 % de la consommation locale</a>. L’État sénégalais dépend grandement des importations de riz indien, qui représentait en <a href="https://www.ansd.sn/sites/default/files/2023-01/NACE_2021_VERSION_FINALE-30122022-rev.pdf">2021 70,7 % des achats de riz</a>. </p>
<p>La filière rizicole sénégalaise rencontre de nombreux défis. La vallée du fleuve Sénégal, dont les rizicultures sont irriguées, fournit la majorité de la production nationale. <a href="https://www.agrimaroc.org/index.php/Actes_IAVH2/article/view/1080/1537">La Casamance produit également du riz, par culture pluviale</a>, mais le rendement est faible. Le changement climatique a un impact important : les <a href="https://www.ifad.org/documents/38714170/43334911/S%C3%A9n%C3%A9gal_IFAD+Futur+de+l%27agri.pdf/6ec32c0d-92c5-1038-0ba9-5bbdc0d8f83e?t=1625228825636#:%7E:text=Mais%20l%E2%80%99agriculture%20s%C3%A9n%C3%A9galaise%20reste,limit%C3%A9es%20des%20exploitants%20agricoles%20%C3%A0">pluies irrégulières, la salinisation et l’acidification des sols</a> limitent l’augmentation des rendements du riz local. </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/541801/original/file-20230808-24-8949pn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541801/original/file-20230808-24-8949pn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=498&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541801/original/file-20230808-24-8949pn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=498&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541801/original/file-20230808-24-8949pn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=498&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541801/original/file-20230808-24-8949pn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=626&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541801/original/file-20230808-24-8949pn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=626&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541801/original/file-20230808-24-8949pn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=626&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des enfants transportent des sacs de riz, dans un village du Sénégal, en avril 2023. La filière rizicole sénégalaise rencontre de nombreux défis, exacerbés par le changement climatique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<p>À la suite des émeutes de la faim de 2008, d’importants investissements ont été entrepris par le gouvernement sénégalais dans la filière rizicole à travers notamment le programme de la <a href="https://www.jeuneafrique.com/192231/archives-thematique/agriculture-les-fruits-de-la-goana/">Grande Offensive agricole pour la Nourriture et l’Abondance</a>,(GOANA). Les résultats de ce programme n’ont pas été à la hauteur des attentes des agriculteurs qui dénonçaient une <a href="http://senemag.free.fr/spip.php?article658">production de riz de contre-saison de mauvaise qualité</a> dû à l’empressement du gouvernement d’augmenter les rendements. </p>
<p>D’autres programmes se sont ajoutés au GOANA, dont le <a href="https://www.ipar.sn/IMG/pdf/2009_Prog_Nat_Autosufisance_Riz.pdf">Programme national d’Autosuffisance en Riz</a> (PNAR), mais on en est encore loin. </p>
<p>Cette production locale rencontre également des limites liées à sa commercialisation. Les ménages sénégalais ont une <a href="https://www.liberation.fr/planete/2019/04/17/riz-le-senegal-veille-au-grain_1722023/">nette préférence pour la brisure de riz importée d’Asie</a> par rapport au riz local qui se caractérise par de gros grains. Cette préférence alimentaire des foyers sénégalais est liée à la colonisation. Durant cette période, la <a href="https://www.alimenterre.org/le-senegal-peut-nourrir-le-senegal">France distribuait au Sénégal des brisures de riz provenant des rizières d’Indochine</a>. Il faut également noter que le prix de cette brisure de riz est également bien moins élevé que celui du riz local.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/541799/original/file-20230808-19-8e9054.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541799/original/file-20230808-19-8e9054.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541799/original/file-20230808-19-8e9054.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541799/original/file-20230808-19-8e9054.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541799/original/file-20230808-19-8e9054.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541799/original/file-20230808-19-8e9054.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541799/original/file-20230808-19-8e9054.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le président français Emmanuel Macron accueille le président sénégalais Macky Sall, le 23 juin 2023, au palais de l’Élysée à Paris, lors d’un sommet pour aider les pays en développement à mieux lutter contre le changement climatique et la pauvreté.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Christophe Ena)</span></span>
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<h2>Déjà une profonde instabilité politique</h2>
<p>Le Sénégal fait ainsi face ces derniers mois à une profonde instabilité politique. De <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/le-senegal-s-embrase-la-communaute-internationale-se-mobilise-03-06-2023-2522824_3826.php">violentes mobilisations et des émeutes ont éclaté dans les différentes villes du pays</a> en soutien à l’opposant Ousmane Sonko, à la suite de ses récentes condamnations.</p>
<p>Cet opposant <a href="https://www.france24.com/fr/vid%C3%A9o/20220804-s%C3%A9n%C3%A9gal-qui-est-cette-jeunesse-derri%C3%A8re-le-leader-de-l-opposition-ousmane-sonko">cristallise pour ses partisans</a> une <a href="https://www.seneplus.com/opinions/pastef-le-pragmatisme-politique-en-marche-pour-roume">politique de rupture</a> avec la gouvernance de Macky Sall par sa dimension <a href="https://www.seneplus.com/opinions/pastef-le-pragmatisme-politique-en-marche-pour-roume">souverainiste</a>. Il soutient entre autres une <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/02/13/presidentielle-au-senegal-ousmane-sonko-un-candidat-antisysteme-pas-si-rebelle-que-ca_5423134_3212.html">sortie du franc CFA, la réduction du train de vie de l’État</a> et la mise en place d’un <a href="https://senego.com/programme-du-candidat-ousmane-sonko-voici-ce-quil-souhaite-faire-pour-le-senegal_852436.html">fonds patriotique</a> pour financer les petites et moyennes entreprises et les industries nationales.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/541806/original/file-20230808-15-pf92pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/541806/original/file-20230808-15-pf92pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/541806/original/file-20230808-15-pf92pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/541806/original/file-20230808-15-pf92pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/541806/original/file-20230808-15-pf92pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/541806/original/file-20230808-15-pf92pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/541806/original/file-20230808-15-pf92pd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des amis et des parents arrivent au cimetière local pour l’enterrement d’Elhaji Cisse, à Dakar, au Sénégal, le 5 juin 2023. Selon la famille, l’étudiant de 26 ans a été abattu par les forces de sécurité alors qu’il se trouvait près d’une manifestation.</span>
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<p>La répression policière et l’annonce de la non-reconduction de mandat du président Macky Sall ont permis une accalmie sociale relative, mais le récent <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/08/01/au-senegal-le-gouvernement-annonce-la-dissolution-du-parti-d-ousmane-sonko_6184036_3212.html">emprisonnement de Sonko et la dissolution de son parti</a> fait craindre l’éclosion de nouvelles violences au Sénégal. <a href="https://www.enqueteplus.com/content/chert%C3%A9-de-la-vie-moncap-pastef-fait-l%E2%80%99%C3%A9tat-des-lieux">Selon son parti</a>, l’augmentation des prix est liée à l’incapacité du gouvernement à privilégier les emplois et les entreprises nationales et à mener une lutte contre la corruption et la déperdition des ressources. </p>
<p>L’inflation à la hausse et les restrictions d’importation du riz indien pourraient ainsi devenir un facteur amplificateur des mobilisations en soutien à Ousmane Sonko.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/211157/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Diana Alima Cissé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Déjà secoué en juin par de violentes émeutes contre le régime en place, le Sénégal pourrait connaître de nouvelles turbulences à la suite de la hausse du prix des denrées, notamment le riz.Diana Alima Cissé, Doctorante à l'École d'études politiques, L’Université d’Ottawa/University of OttawaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2099232023-07-26T14:59:35Z2023-07-26T14:59:35ZLa qualité de l'air diminue à Dakar : que faire pour l'améliorer?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/539218/original/file-20230725-28-xh4xpa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’accroissement du parc automobile a un impact négatif sur la qualité de l’air à Dakar.</span> <span class="attribution"><span class="source">Photo : SEYLLOU/AFP via Getty Images</span></span></figcaption></figure><p>En Afrique, la pollution de l'air a causé <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34627472/">1,1 million de décès en 2019</a>, dont près de 400 000 attribuables à la pollution de l'air ambiant, selon <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34627472">une étude</a> publiée en 2021 par la revue Lancet Planet Health. À l’instar de beaucoup d’autres métropoles en croissance, les problèmes liés à la dégradation de la qualité de l’air à Dakar sont de plus en plus perceptibles. La vétusté du parc automobile, les rejets industriels, les combustibles à usage domestique, l’incinération des déchets au milieu des lieux d’habitation et l’intensité du trafic routier sont <a href="https://www.researchgate.net/publication/358620867_Pollution_atmospherique_dans_la_ville_de_Dakar_Senegal">les principaux facteurs de pollution atmosphérique dans la capitale sénégalaise</a>. </p>
<p>À cette pollution atmosphérique d’origine anthropique s’ajoute une pollution naturelle engendrée par les couches de poussière provenant du désert du Sahara. En effet, le désert du Sahara est considéré comme <a href="https://www.corse.ars.sante.fr/sites/default/files/2017-02/Etude_InVS_CIRE_vents_de_sable.pdf">la plus grande source de poussières au monde</a>. Il contribue à la moitié des émissions globales de poussières minérales dans l’atmosphère. Ces poussières sont émises dans l’atmosphère lors de tempêtes qui sont des vents forts peuvent soulever de grandes quantités de sable et de poussières. Elles sont ensuite transportées sur de longues distances par les vents jusqu’aux régions côtières d’Afrique de l’Ouest. </p>
<p>Ce texte se fonde sur mes <a href="https://lameteorologie.fr/issues/2022/116/meteo_2022_116_48">recherches</a>. Il met l'accent sur la problématique de la pollution de l'air à Dakar en identifiant les principales sources de pollution, en évaluant l'efficacité du dispositif de surveillance de la qualité de l'air et en explorant des solutions potentielles pour atténuer ce problème.</p>
<h2>Les sources majeures de pollution de l’air à Dakar</h2>
<p><strong>Le secteur du transport routier</strong></p>
<p>La croissance démographique rapide et l’urbanisation incontrôlée à Dakar ont exercé une pression considérable sur les besoins de mobilité, notamment sur la demande en transport. De 1976 à 2013, la population dakaroise est passée de 892 127 habitants à 3 137 196 habitants, soit une augmentation d'un facteur 3,5. Ce chiffre atteint aujourd'hui plus de 4 millions d’habitants. Dakar <a href="https://www.ansd.sn/sites/default/files/2023-04/SES-Dakar-2019.pdf">concentre</a> plus de la moitié du parc automobile national. Ce parc, qui augmente rapidement, est surtout dominé par les véhicules intégrant les moteurs diesel. Étant donné la nature polluante des véhicules automobiles, l’accroissement du parc a forcément un impact négatif sur la qualité de l’air. Il entraîne une consommation accrue des produits pétroliers et donc des émissions de polluants.</p>
<p>De plus, le manque de rigueur dans le contrôle technique des véhicules automobiles, les congestions fréquentes de la circulation dans la capitale sénégalaise sont des facteurs aggravant les émissions de polluants. Les rejets d’oxydes d’azote issus du secteur des transports au Sénégal dans la période 2010-2015 représentaient ainsi environ <a href="https://lameteorologie.fr/issues/2022/116/meteo_2022_116_48">32 % des émissions anthropiques</a>. </p>
<p><strong>Le secteur industriel</strong></p>
<p>Dakar <a href="https://aquadocs.org/bitstream/handle/1834/6974/BaiedeHann_ndao.pdf?sequence=1&isAllowed=y">regroupe</a> 80 % du tissu industriel sénégalais, lequel se concentre majoritairement autour de la <a href="https://www.afd.fr/fr/carte-des-projets/depolluer-baie-hann">baie de Hann</a>. Ces industries génèrent des déchets liquides et solides, des rejets atmosphériques et des nuisances sonores ou olfactives. Ne disposant pour la plupart d’aucun système de filtrage des polluants atmosphériques, elles les rejettent, après leurs activités, directement dans l’atmosphère. </p>
<p>Le secteur de l’énergie est ainsi responsable de <a href="https://lameteorologie.fr/issues/2022/116/meteo_2022_116_48">63 % des émissions de dioxyde de soufre</a> et de 7 % des émissions d’oxyde d’azote.</p>
<p><strong>L'incinération à l’air libre des déchets solides</strong></p>
<p>La gestion des déchets municipaux pose un véritable problème à l’environnement en Afrique subsaharienne où le taux de <a href="https://openknowledge.worldbank.org/handle/10986/17388">collecte des déchets solides</a> dans les villes n’excède pas 46 %. Le système de collecte des ordures reste défaillant. Ce qui pousse les populations à adopter des alternatives telles que l’utilisation des charrettes à traction animale ou le rejet des déchets dans des zones non habitées. Cela entraîne une prolifération des décharges sauvages. Ces dernières, qui se multiplient dans la capitale sénégalaise, ont d’énormes conséquences sur l’environnement, notamment sur la qualité de l’air. L'incinération à l’air libre des déchets solides par les ménages, mais aussi dans les décharges, est une pratique très fréquente et contribue clairement à la détérioration de la qualité de l’air. </p>
<h2>L'impact des vents secs</h2>
<p>L’harmattan est un vent de secteur nord-est, chaud et sec, qui souffle en provenance du Sahara. Au cours de son passage, il transporte d’importantes quantités de poussières du Sahara et des régions désertiques du Sahel. Des <a href="https://journals.ametsoc.org/view/journals/apme/25/7/1520-0450_1986_025_0903_amfsdt_2_0_co_2.xml">études</a> <a href="https://journals.ametsoc.org/view/journals/apme/25/7/1520-0450_1986_025_0903_amfsdt_2_0_co_2.xml">ont montré</a> que 60 % des flux de poussières du nord de l’Afrique se dirigent vers le Golfe de Guinée. En saison sèche, entre novembre et mars, la plupart des villes situées en zone sahélienne sont ainsi confrontées aux vents secs du Nord-Est, chargés de poussières minérales d’origine désertique. </p>
<p>Durant cette période, plusieurs villes de la région connaissent des niveaux de concentration en particules de poussières très élevés. A Dakar les niveaux de concentration en particules dépassent largement les seuils fixés par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).</p>
<p>Les poussières en provenance du désert du Sahara viennent s’ajouter à la pollution atmosphérique d’origine anthropique que nous venons d'évoquer. Ces poussières désertiques peuvent avoir un impact sur l’environnement (réduction de l’intensité du rayonnement solaire, de la visibilité), sur les activités quotidiennes (suspension des vols) et sur la santé humaine. Par exemple, l'inhalation de particules de poussière peut aggraver les problèmes respiratoires existants, tels que l'asthme et les allergies.</p>
<h2>Efficacité du dispositif de surveillance</h2>
<p>La surveillance et la gestion de la qualité de l’air permettent de disposer de bons indicateurs en termes de risque sanitaire. Dakar fait partie des rares villes d’Afrique subsaharienne à bénéficier d’un réseau de surveillance de la qualité de l’air. Le réseau est constitué de 6 stations fixes (5 réparties dans la ville de Dakar et une autre à Guédiawaye, en banlieue). </p>
<p>En 2009, le gouvernement sénégalais a mis en place le Centre de gestion de la qualité de l’air (CGQA) pour évaluer la qualité de l’air à Dakar. La création du CGQA a été possible grâce à un financement du Fonds nordique de développement (NILU). </p>
<p>Les instruments de surveillance de la qualité de l’air sont très coûteux, ils nécessitent un personnel qualifié et une maintenance régulière. Par ailleurs, ces équipements sont installés le plus souvent loin des sources ponctuelles de pollution qui peuvent changer au fil du temps. Les concentrations des polluants atmosphériques peuvent en effet présenter une forte variabilité spatio-temporelle, difficile à mesurer par les stations de référence. </p>
<h2>Les solutions possibles</h2>
<p>La lutte contre les effets néfastes de la pollution constitue un véritable enjeu et une série de défis complexes pour les gouvernants. Nous allons énumérer quelques mesures possibles visant à atténuer les effets néfastes de la pollution de l’air comme :</p>
<ul>
<li><p>le renouvellement du parc automobile avec des véhicules moins polluants; </p></li>
<li><p>la promotion des transports en collectifs tels que le TER (Train Express Régional) et le BRT (Bus Rapid Transit); </p></li>
<li><p>la mise en place d'un système d’alertes précoces qui permettra aux populations de prendre rapidement des mesures de protection appropriées. </p></li>
</ul>
<p>Entre autres mesures individuelles, chaque personne à son niveau peut participer à la réduction des effets néfastes de la pollution de l'air en respectant les recommandations suivantes en périodes de pic de pollution : </p>
<ul>
<li><p>se protéger en utilisant des masques faciaux appropriés; </p></li>
<li><p>limiter les déplacements et éviter une exposition longue à l’air ambiant; </p></li>
<li><p>réduire et reporter les activités physiques intenses en plein air;</p></li>
<li><p>consulter un médecin en cas de gêne inhabituelle.</p></li>
</ul>
<p>Les politiques de lutte contre la pollution de l’air nécessitent des actions ambitieuses dans tous les secteurs d’activité, ainsi que des financements colossaux qui impactent le budget de l'Etat. </p>
<p>Nos résultats de <a href="https://lameteorologie.fr/issues/2022/116/meteo_2022_116_48">recherche</a> ont montré que la qualité de l’air dans la ville de Dakar est mauvaise et se détériore surtout pendant la saison sèche où les pics de pollution sont assez fréquents. Les particules en suspension sont les polluants les plus importants observés à Dakar et leurs concentrations dépassent les seuils annuels fixés par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Des efforts sont entrepris par le gouvernement pour contrôler et endiguer le phénomène mais sont encore insuffisants.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209923/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Baïdy SOW does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>La surveillance et la gestion de la qualité de l’air permettent de disposer de bons indicateurs en termes de risque sanitaire. Dakar bénéficie d’un réseau de surveillance de la qualité de l’air.Baïdy SOW, Doctorant en physique, Université Alioune Diop de BambeyLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2081232023-06-29T19:12:05Z2023-06-29T19:12:05ZSénégal : une crise politique majeure qui aurait pu être évitée<p>Comment expliquer les récents accès de violence politique au <a href="https://theconversation.com/fr/topics/senegal-27632">Sénégal</a>, pays tant vanté par le passé pour sa supposée « exception démocratique » ?</p>
<p>Ces dernières années, les crises politiques se répètent et se ressemblent : une dizaine de morts en <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/550569/senegal-violences-manifestations-morts">janvier-février 2012</a> après l’annonce de la candidature du président sortant Abdoulaye Wade à un troisième mandat ; 14 morts en <a href="https://www.amnesty.org/fr/latest/campaigns/2022/03/senegal-noublie-pas-mars-2021/">mars 2021</a> suite à l’arrestation de l’opposant Ousmane Sonko ; 4 morts en <a href="https://www.jeuneafrique.com/1362410/politique/senegal-pourquoi-le-deces-dun-manifestant-proche-de-lopposition-pose-question/">juillet 2022</a> lors des manifestations contre l’invalidation des candidats des listes d’opposition aux législatives ; enfin, 23 morts <a href="https://information.tv5monde.com/afrique/senegal-23-morts-selon-amnesty-international-qui-reclame-une-enquete-2646005#">début juin 2023</a> après la condamnation du même Ousmane Sonko pour « corruption de la jeunesse ».</p>
<p>Cette dernière crise a particulièrement marqué les esprits. Pourtant, ses ingrédients étaient bien connus depuis longtemps…</p>
<h2>Usure du pouvoir et tentation autoritaire</h2>
<p>En 2012, Abdoulaye Wade s’était porté candidat à sa propre succession alors qu’il avait déjà effectué deux mandats présidentiels, ce qui avait entraîné une sérieuse crise politico-constitutionnelle. Il avait alors été vaincu au second tour par son ancien premier ministre Macky Sall. La victoire de ce dernier, pour un mandat de sept ans, avait engendré de grands espoirs : le nouveau chef de l’État, voulait-on croire, allait mettre en œuvre une transformation institutionnelle qui éviterait qu’une telle situation ne se répète.</p>
<p>L’optimisme démocratique n’a pas duré : à chaque étape, le président Sall a semblé privilégier le rapport de force.</p>
<p>Plutôt qu’appliquer les propositions des <a href="https://www.jeuneafrique.com/203156/politique/assises-nationales-et-apr-s/">Assises nationales de 2009</a> pour une réforme en profondeur des institutions, qu’il a signées, il mène à la hâte une <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2016/03/18/senegal-que-disent-les-15-points-soumis-a-referendum_4886000_3212.html">révision constitutionnelle en 2016</a>. Celle-ci réduit la durée du mandat présidentiel à cinq ans, mais ne prend pas à bras-le-corps le problème principal identifié depuis longtemps, à savoir l’hyperprésidentialisme du système politique sénégalais, produit de son histoire depuis le <a href="https://www.seneplus.com/opinions/regard-sur-les-evenements-de-decembre-1962">coup de force de Senghor en 1962</a>.</p>
<p>En 2019, l’instauration d’un <a href="https://www.jeuneafrique.com/1331019/politique/legislatives-au-senegal-la-guerre-des-parrainages-est-declaree/">système de parrainages</a> pour les candidatures à l’élection présidentielle – qui en soi n’a rien d’anti-démocratique, mais qui a été mis en place sans concertation et compte parmi les plus stricts d’Afrique ou d’Europe – entrave sérieusement le pluralisme des élections.</p>
<p>Surtout, l’élimination judiciaire préalable des deux opposants les plus importants, le fils de l’ancien président Karim Wade et le maire de Dakar Khalifa Sall, <a href="https://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine-2018-3-page-187.htm?ref=doi">emprisonnés puis libérés mais devenus inéligibles</a>, confirme la volonté du pouvoir de n’organiser que des élections sans danger.</p>
<p>C’est dans ce contexte que Sall est réélu en 2019 pour un second mandat, de cinq ans cette fois. La <a href="https://theconversation.com/enjeux-et-usages-du-poste-de-premier-ministre-au-senegal-117575">suppression surprise du poste de premier ministre</a> au lendemain de l’élection, pour éviter toute concurrence politique possible et renforcer toujours plus les pouvoirs présidentiels, avant la réinstauration de la fonction en 2022, pose la question de la crédibilité des institutions. Dans les classements internationaux sur l’état de droit et la liberté de la presse, le <a href="https://rsf.org/fr/pays-s%C3%A9n%C3%A9gal">Sénégal dégringole régulièrement</a>.</p>
<p>Dans le même temps, les signes du déclin électoral de la coalition au pouvoir Benno Bokk Yakaar se multiplient durant le second mandat, alors même qu’elle ne cesse de coopter des opposants, tant du camp libéral de l’ex-président Abdoulaye Wade que des rangs socialistes. En janvier 2022, l’opposition remporte la majorité des grandes villes aux <a href="https://www.lepoint.fr/afrique/elections-locales-du-senegal-maintenant-que-le-vin-est-tire-04-02-2022-2463355_3826.php">municipales</a>. Six mois plus tard, lors des <a href="https://www.france24.com/fr/afrique/20220812-l%C3%A9gislatives-au-s%C3%A9n%C3%A9gal-le-camp-pr%C3%A9sidentiel-garde-la-majorit%C3%A9-absolue-gr%C3%A2ce-%C3%A0-une-alliance">législatives</a>, le pouvoir évite de peu une cohabitation avec la coalition d’opposition Yewwi Askan Wi, qui regroupe notamment les soutiens d’Ousmane Sonko, de Khalifa Sall et de Karim Wade.</p>
<h2>Tout pouvoir n’a-t-il pas l’opposition qu’il mérite ?</h2>
<p>Plus que l’usure inexorable, et finalement très classique, du pouvoir, c’est la persécution au long cours de l’opposition qui a conduit la direction actuelle du pays dans l’impasse. Cette stratégie jusqu’au-boutiste s’est peut-être retournée aujourd’hui contre ses initiateurs.</p>
<p>En 2019 déjà, le pouvoir n’avait pas lésiné sur les moyens, au point de faire appel à une <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2023/02/15/revelations-sur-team-jorge-des-mercenaires-de-la-desinformation-operant-dans-le-monde-entier_6161842_4408996.html">officine israélienne produisant des fake news</a>. Diverses <a href="https://www.bbc.com/afrique/region-53043804">rumeurs infondées</a> circulent alors sur les réseaux sociaux afin de décrédibiliser Ousmane Sonko.</p>
<p>Ce dernier, qui n’était alors qu’un opposant parmi d’autres, détonnait déjà dans le champ politique par la modernité de ses campagnes et de ses levées de fonds en ligne, et par la capacité de son parti, les Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), à mobiliser une bonne partie de la jeunesse urbaine et estudiantine, mais aussi au-delà, dans les classes populaires et la diaspora.</p>
<p>Inspecteur des impôts, radié de la fonction publique par un décret de Macky Sall en 2016 suite à ses sorties médiatiques sur des scandales financiers présumés, puis élu député en 2017, Sonko, né en 1974, se distingue par un discours intransigeant axé sur la lutte contre la corruption, le souverainisme et un nationalisme mâtiné de conservatisme religieux. Il obtient un score encourageant de 15 % à la présidentielle de 2019.</p>
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<p>En janvier 2021, le pouvoir menace une première fois de <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20210104-s%C3%A9n%C3%A9gal-le-pastef-d-ousmane-sonko-menac%C3%A9-de-dissolution">dissoudre le Pastef</a> au prétexte d’une levée de fonds en ligne ayant permis au parti de récolter environ 200 000 euros. Le mois suivant, une <a href="https://www.jeuneafrique.com/1117077/politique/senegal-ce-que-contient-la-plainte-pour-viols-et-menaces-de-mort-contre-ousmane-sonko/">plainte est déposée</a> contre Ousmane Sonko pour viols répétés et menaces de mort par une employée de salon de massage, Adji Sarr. C’est le coup d’envoi de « l’affaire Ousmane Sonko », qui tient en otage le Sénégal depuis lors.</p>
<p>Sonko radicalise alors son discours et lance l’épreuve de force avec la justice. Son arrestation en mars 2021 dans le cadre de cette enquête provoque la première <a href="https://theconversation.com/la-place-essentielle-des-reseaux-socionumeriques-dans-la-contestation-au-senegal-157467">grande série d’émeutes</a>, dont la répression fera 14 morts.</p>
<p>Face à la réaction de ses partisans, le pouvoir est contraint de le libérer. Sonko ne peut plus quitter le territoire national et ses moindres faits et gestes sont scrutés… ce qui ne l’empêche pas de <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20220124-s%C3%A9n%C3%A9gal-l-opposant-ousmane-sonko-remporte-la-mairie-de-ziguinchor-une-%C3%A9tape-importante">se faire élire maire de Ziguinchor</a> (la grande ville de Casamance) en mai 2022 et d’organiser de grands meetings pour démontrer sa popularité et s’en servir comme bouclier.</p>
<p>Après les scrutins de 2022, une autre plainte, pour diffamation cette fois, est déposée par un ministre, ancien chef de cabinet de Macky Sall. Elle aboutira en avril 2023 à une condamnation pour six mois de prison avec sursis, une amende considérable et le risque de l’inéligibilité pour Ousmane Sonko.</p>
<p>Mais c’est le procès Adji Sarr contre Ousmane Sonko qui attise la tension maximale. Le verdict de juin 2023, qui requalifie les faits en « corruption de la jeunesse », délit exhumé du code pénal mais presque jamais utilisé, met le feu aux poudres en condamnant Ousmane Sonko à deux ans de prison ferme. S’il reste pour l’instant en liberté, <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20230628-s%C3%A9n%C3%A9gal-ousmane-sonko-s-exprime-pour-la-premi%C3%A8re-fois-depuis-sa-condamnation">son arrestation semble imminente</a>.</p>
<p>Alors qu’il sonne pour l’opinion comme un acquittement puisque les accusations de viols et menaces ne sont pas retenues, et qu’il semble crédibiliser les suspicions d’instrumentalisation de la justice et/ou de la plaignante, le verdict rend encore plus incertaine la possibilité pour Sonko de concourir à la prochaine présidentielle, prévue pour début 2024.</p>
<h2>La mécanique infernale de la polarisation</h2>
<p>La <a href="https://afriquexxi.info/Au-Senegal-chronique-d-une-insurrection-annoncee">polarisation suscitée par cette affaire</a> divise jusqu’au sein des familles. Elle synthétise de façon vertigineuse toute une série de clivages au Sénégal (rapports entre les générations, conceptions de la citoyenneté, rapports de genre, rapport au religieux, à la justice et aux forces de l’ordre, rapports de classe et inégalités sociales, etc.).</p>
<p>Chaque camp se rejette la responsabilité de la crise. Le pouvoir dénonce la mégalomanie d’un politicien qui entendrait se soustraire à la justice de son pays, et instrumentaliserait ses partisans pour se construire une immunité « populaire » à la Trump et défier les institutions. Pour leur part, Ousmane Sonko et ses partisans crient au complot, au harcèlement judiciaire et policier, et à la volonté de liquidation politique.</p>
<p>Souligner la responsabilité première et écrasante du pouvoir dans ce processus de polarisation n’exonère certes pas les outrances d’Ousmane Sonko, qui ont pu faire douter jusque dans ses rangs. Pour un prétendant à la magistrature suprême, les <a href="https://www.france24.com/fr/%C3%A9missions/journal-de-l-afrique/20230530-ousmane-sonko-appelle-les-s%C3%A9n%C3%A9galais-%C3%A0-se-lever-comme-un-seul-homme-contre-le-pouvoir">appels à la confrontation directe et violente</a> passent mal auprès d’une part importante de l’opinion.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/tensions-politiques-au-senegal-sachemine-t-on-vers-une-impasse-201224">Tensions politiques au Sénégal : s'achemine-t-on vers une impasse?</a>
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<p>Les <a href="https://afriquexxi.info/Senegal-Le-corps-des-femmes-cet-objet-politique">organisations féministes</a>, ainsi que divers médias ou intellectuels rappellent <a href="https://www.seneplus.com/opinions/sonko-criton-plutot-que-socrate">ses discours misogynes</a> et soulignent le hiatus entre l’image de rigueur morale qui était le fonds de commerce du leader du Pastef et la fréquentation nocturne d’un salon de massage et/ou de prostitution.</p>
<p>Mais le verdict aura aussi sans doute contribué à cimenter sa base, qui n’attend plus grand-chose des institutions. Les <a href="https://information.tv5monde.com/afrique/tensions-au-senegal-500-arrestations-les-deux-camps-se-renvoient-la-responsabilite-des">arrestations massives</a> opérées parmi les membres du Pastef, y compris des élus (députés ou maires), combinées à des arrestations de nombreux <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/03/08/au-senegal-les-journalistes-inquiets-apres-une-nouvelle-arrestation-dans-le-cadre-de-l-affaire-ousmane-sonko_6164695_3212.html">journalistes</a>, lient temporairement le destin du parti à la société civile, signe que la tentative visant à isoler le Pastef a largement échoué. Échec supplémentaire pour le pouvoir : les autres partis d’opposition ont plutôt apporté leur soutien à Ousmane Sonko.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/au-senegal-les-manoeuvres-politiciennes-autour-du-dialogue-politique-122929">Au Sénégal, les manœuvres politiciennes autour du dialogue politique</a>
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<p>Le recours documenté à des « nervis » – ces hommes de main prêts à tout –, en particulier dans le camp du pouvoir, là encore aussi vieux que l’existence des campagnes électorales, <a href="https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2023/06/senegal-amnesty-international-demande-une-enquete-independante-sur-la-repression-meurtriere-lors-des-manifestations/">inquiète les organisations internationales et de défense des droits de l’homme</a>, d’autant qu’il se généralise même hors des périodes électorales. Les attaques de maisons d’hommes politiques, du pouvoir comme de l’opposition, sont là aussi tout sauf nouvelles, mais à l’ère des réseaux sociaux leur retentissement est majeur.</p>
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<p>Le Sénégal semble ainsi redécouvrir la part d’ombre de sa vie politique. Entre la tentation de la milicianisation chez certains soutiens du pouvoir en place, et celle de l’insurrection chez certains éléments du Pastef, l’impasse semblait totale début juin et <a href="https://www.youtube.com/watch?v=T0NT8ydFe4c">l’affrontement de grande ampleur inévitable</a>. Mais l’intensité des réactions dans les médias, la classe politique et la population signale un profond refus de la banalisation de la violence. L’examen de conscience général qu’a produit la crise pourrait redonner toute sa légitimité à un espace central, convaincu que ces deux polarités extrêmes mènent à l’impasse démocratique.</p>
<p>Certains faucons proches du pouvoir souhaitent <a href="https://www.seneweb.com/news/Contribution/reponse-a-l-rsquo-insurrection-terrorist_n_411594.html">« éradiquer » le Pastef</a>, ce qui serait le moyen le plus sûr de conduire à davantage de radicalisation et à des lendemains encore plus incertains pour le Sénégal.</p>
<p>Ce parti joue un rôle important pour l’intégration politique des élites intermédiaires et d’une certaine jeunesse urbaine désenchantée. Le pouvoir aurait tout intérêt à l’inclure dans le jeu électoral, quitte à bousculer un peu l’entre-soi de la classe politique sénégalaise. Le « risque » serait bien moindre que son exclusion des rouages de la démocratie représentative. D’autant que pour Ousmane Sonko, l’épreuve électorale est peut-être plus redoutable que l’épreuve judiciaire qui lui est imposée actuellement : il lui faudra faire face à des contradicteurs, défendre la crédibilité économique et budgétaire d’un programme, aligner des potentielles équipes gouvernementales et des compétences, rassurer des potentiels alliés pour une coalition…</p>
<h2>Les solutions sont connues</h2>
<p>Certes, le Sénégal peut s’enorgueillir de deux alternances politiques réussies en 2000 et 2012. Mais ce que la <a href="https://theconversation.com/presidentielle-au-senegal-les-faux-semblants-dune-democratie-modele-112776">légende dorée de l’exception démocratique sénégalaise</a> ne signale pas, ce sont les conséquences de la présence des présidents sortants dans ces deux scrutins. Seule l’existence du second tour a permis leur défaite, par un « vote utile » ou « dégagiste ». Le président élu tend alors à prendre son élection pour un vaste soutien populaire à sa personne et le réveil de l’impopularité n’en est que plus brutal.</p>
<p>La cristallisation d’un débat sur le troisième mandat, qui dans un pays normalement démocratique ne devrait même pas exister, souligne bien <a href="https://www.seneweb.com/news/Contribution/cette-verite-que-l-rsquo-on-ne-saurait-c_n_411628.html">l’absence de consolidation institutionnelle de la démocratie</a>. Le franchissement d’un véritable seuil qualitatif pour la démocratie au Sénégal serait donc qu’un président sortant ne se représente pas après ses deux mandats permis par la Constitution. Si Macky Sall entend marquer l’histoire politique de son pays, c’est en annonçant son départ qu’il pourra le faire.</p>
<p>La construction d’institutions politiques démocratiques fortes – et fortes parce que démocratiques – est essentielle pour la légitimité du pouvoir et la stabilité à long terme. <a href="https://obamawhitehouse.archives.gov/the-press-office/remarks-president-ghanaian-parliament">Barack Obama ne disait pas autre chose</a> en rappelant, en 2009, lors de sa visite au Ghana, cette vérité simple mais efficace : « L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts. Elle a besoin d’institutions fortes. »</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/208123/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Etienne Smith ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La condamnation de l’opposant Ousmane Sonko dans une affaire montée de toutes pièces selon ses partisans a mis le feu aux poudres au Sénégal.Etienne Smith, Maître de conférences, Sciences Po BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2071732023-06-26T17:21:21Z2023-06-26T17:21:21ZAïd-el-Kébir : comment choisir son mouton au Sénégal ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/531218/original/file-20230610-26322-e051lp.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C1%2C1078%2C753&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Vue d’un point de vente de moutons à Saint-Louis, Sénégal.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Mouhamadou Moustapha Sow</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Cette semaine, un cinquième de la population mondiale célébrera potentiellement la fête religieuse de l’Aïd-el-Kébir. Dans un pays comme le <a href="https://theconversation.com/tensions-politiques-au-senegal-sachemine-t-on-vers-une-impasse-201224">Sénégal</a>, on estime que près de 810 000 béliers sont sacrifiés durant cette journée. Aussi appelée Tabaski en <a href="https://theconversation.com/fr/topics/afrique-de-louest-107305">Afrique de l’Ouest</a>, cette fête musulmane est un événement majeur dans le calendrier de nombreux pays de la région. Elle marque la cérémonie de commémoration du sacrifice d’un bélier par Abraham en lieu et place de son fils. Au-delà de la dimension religieuse, la Tabaski représente d’importants enjeux économiques, sociaux et symboliques.</p>
<p>Quels sont ces enjeux ? Quels critères déterminent la valeur marchande et symbolique du mouton acheté ? Pour répondre à ces questions, nous avons réalisé une enquête dans la région de Saint-Louis, au Sénégal, en 2021.</p>
<h2>La flambée des prix au Sénégal</h2>
<p>Le prix des moutons au Sénégal connaît depuis une dizaine d’années une augmentation continue. On estime que, en l’espace de dix ans, le prix moyen d’un mouton est passé de 80 000 à 140 000 francs CFA (120 à 215 euros). Entre 2020 et 2021, l’étude réalisée dans la région de Saint-Louis a mis en évidence une augmentation de 6 % du prix moyen sur les marchés. Plusieurs éléments d’explication permettent de comprendre une telle augmentation.</p>
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<p>Premièrement, la hausse des prix peut s’expliquer par des facteurs liés à la production. D’une part, les coûts d’engraissement des moutons ont crû en raison de l’augmentation du prix des aliments industriels et de la raréfaction du fourrage. D’autre part, la multiplication des maladies ovines et la difficulté d’accéder à des traitements vétérinaires adaptés ont gonflé la facture.</p>
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<p>Deuxièmement, la hausse des prix s’explique par l’engouement croissant autour de la Tabaski. La dimension symbolique de l’achat des moutons occupe une place centrale dans de nombreuses familles sénégalaises. L’achat du mouton constitue à la fois un symbole du prestige social de la famille, un devoir social et un rite religieux.</p>
<p>Des codes sociaux précis encadrent le prix réel (et supposé) de l’animal. Pour les éleveurs, cet événement constitue l’une des seules chances d’obtenir un retour sur investissement. En effet, dans les jours et semaines précédant la Tabaski, le prix des moutons est en moyenne nettement supérieur au reste de l’année. Ainsi, pour les éleveurs, cette période est le moment idéal pour la vente du cheptel.</p>
<p>Troisièmement, la flambée des prix peut également s’expliquer par une hausse de la demande. L’augmentation du pouvoir d’achat d’une partie de la population entraîne un accroissement des prix sur l’ensemble du marché.</p>
<h2>Un an de salaire pour s’acheter un mouton</h2>
<p>Le <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/08/12/le-ladoum-mouton-star-de-la-tabaski-au-senegal_5498696_3212.html">Ladoum</a>, catégorie de mouton généralement élevée dans les grandes villes comme Dakar, Mbour, Thiès, Touba et Saint-Louis illustre parfaitement cette flambée des prix. Cette race ovine s’arrache à prix d’or dans les marchés durant la Tabaski. En 2018, un mâle géniteur nommé Galactic a été acheté par la bergerie Galoya pour un peu plus de 52 millions de francs CFA, soit plus de 80 000 euros. Ce prix, même s’il est exceptionnel, illustre bien la valeur et la dimension symbolique de l’achat du mouton. Ces dernières années, les prix pratiqués pour les Ladoums oscillent entre 450 000 et 1 200 000 francs CFA (entre 675 et 1 800 euros).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1160873263205093376"}"></div></p>
<p>Ces prix apparaissent d’autant plus importants au regard du salaire annuel moyen au Sénégal (nous ne disposons pas de données récentes concernant les salaires, mais le <a href="https://donnees.banquemondiale.org/indicator/NY.GDP.PCAP.KN?locations=SN">produit intérieur brut par habitant est de 840 736 francs CFA</a> par an en 2021, soit 1 280 euros). Pour la majorité des Sénégalais, l’achat du mouton pour la Tabaski constitue un sacrifice financier important. Beaucoup ont recours à l’argent de la diaspora pour se le permettre. De nombreuses familles s’endettent pour assurer l’ensemble des obligations sociales liées à cette fête. Cette situation plonge beaucoup de familles dans des dynamiques d’appauvrissement.</p>
<h2>Un symbole de réussite sociale</h2>
<p>La Tabaski est ainsi un baromètre qui permet de mesurer les difficultés économiques de la population sénégalaise.</p>
<p>Lors de l’achat des béliers, les femmes et enfants accompagnent les maris sur le marché afin de choisir l’animal. Les vendeurs proposent aux femmes les béliers avec la valeur marchande la plus importante.</p>
<p>Les acheteurs doivent alors arbitrer entre le prix du mouton et le prestige familial lié à l’achat d’un « beau » bélier. La dimension symbolique de l’animal s’illustre également par le fait que les familles conservent les plus beaux béliers devant leur maison. Ces derniers témoignent du prestige social de la famille et de la réussite économique de ses membres.</p>
<h2>Quel mouton acheter ?</h2>
<p>La valeur d’un bélier se caractérise par des critères précis comme la taille, le poids, la couleur, la posture, la dimension et l’orientation des cornes et des oreilles. Quelles caractéristiques sont privilégiées ?</p>
<p>Selon les 400 consommateurs interrogés lors de notre enquête, les béliers de couleur blanche sont les plus prisés (cette couleur permettrait de protéger le propriétaire du mauvais sort). Leur sacrifice témoigne d’un plus grand prestige social.</p>
<p>Les critères liés à la taille des cornes, de la queue et de l’animal sont également pris en compte. La taille des oreilles est particulièrement importante car elle peut être un critère de non-conformité religieuse du bélier. L’âge du bélier est un élément à prendre en considération : il doit avoir au minimum 12 mois. Le choix de l’animal en fonction de ce paramètre est influencé par les femmes – celles-ci prennent en compte le temps de cuisson de la viande. Les béliers âgés demandent plus de temps de cuisson, ce qui peut être contraignant pour l’organisation de la fête.</p>
<p>Pour résumer, le mouton idéal est d’une taille importante, de couleur blanche et d’âge moyen. Les grands béliers blancs se négocient à des prix nettement plus élevés, tandis que les béliers d’un âge avancé perdent de leur valeur.</p>
<p>La valeur de l’animal est ainsi quasi exclusivement fixée selon l’apparence du bélier. Des critères comme la qualité de la viande, l’utilisation d’antibiotiques ou encore la santé de l’animal ne sont que faiblement considérés. Lorsqu’on choisit un mouton pour la Tabaski, les critères symboliques priment.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207173/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le mouton acheté pour la fête religieuse de la Tabaski témoigne du prestige social d’une famille. Quels critères déterminent la valeur marchande et symbolique de l’animal ? Enquête au Sénégal.Léo Delpy, Socio-économiste au sein de l’Unité mixte de recherche « Animal, santé, territoires, risques et écosystèmes » (UMR ASTRE), CiradMouhamadou Moustapha Sow, PhD Student, Université Gaston BergerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2012242023-03-16T14:10:04Z2023-03-16T14:10:04ZTensions politiques au Sénégal : s'achemine-t-on vers une impasse?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/515608/original/file-20230315-14-bk4vnr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le chef de l'opposition sénégalaise, Ousmane Sonko (non visible), se rend au tribunal de Dakar, au Sénégal, le 3 mars 2021, sous l'œil d'un groupe de gendarmes.</span> <span class="attribution"><span class="source">Photo Seyllou. AFP via Getty Image.</span></span></figcaption></figure><p>“Gatsa-Gatsa” (“oeil pour œil”, en langue wolof). C'est l'expression qu'Ousmane Sonko, leader de l'opposition sénégalaise et fondateur du parti Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité, <a href="https://pastef.org/">Pastef</a>, a prononcée lors d'un méga meeting à Keur Massar (banlieue de Dakar) <a href="https://www.sudquotidien.sn/ousmane-sonko-en-meeting-a-keur-massar-jai-deja-fait-mon-testament-et-je-suis-pret-a-faire-face-a-macky-sur-tous-les-fronts/">le 22 janvier 2023</a>. </p>
<p>Depuis lors, l'expression est devenue un hashtag sur les médias sociaux et les forums en ligne ainsi qu'un cri de ralliement pour une bonne partie de la jeunesse sénégalaise qui, compte tenu des <a href="https://foreignpolicy.com/2022/07/29/senegal-sall-democratic-backsliding-african-democracy/">récents reculs démocratiques</a> du pays, a jugé inévitable une confrontation avec le régime de Macky Sall. Si le leitmotiv “Gatsa-Gatsa” fait écho aux appels incessants de Sonko à la résistance contre le régime Sall depuis février 2021 (date à laquelle il a été accusé de viol et de menaces de mort par la masseuse Adji Sarr), il s'agit également d'une réaction contre la récente décision judiciaire d'envoyer l'affaire <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/01/18/au-senegal-ousmane-sonko-renvoye-devant-un-tribunal-criminel-pour-viols-presumes_6158382_3212.html">en procès</a>. </p>
<h2>Équité judiciaire et confrontation</h2>
<p>Il a fallu deux ans à la justice sénégalaise pour organiser une audience préliminaire et une confrontation entre Sonko et son accusatrice, Adji Sarr. Samba Sall, le premier juge qui avait hérité de l'affaire,<a href="https://emedia.sn/DECES-DU-DOYEN-DES-JUGES-SAMBA-SALL.html">est décédé en avril 2021</a>, ce qui a entraîné la <a href="https://www.emedia.sn/OUMAR-MAHAM-DIALLO-NOUVEAU-DOYEN-DES-JUGES-OUSMANE-DIAGNE-A-LA-TETE-DU-PARQUET.html">nomination d'Oumar Maham Diallo</a> qui, huit mois auparavant, avait <a href="https://www.pressafrik.com/Ousmane-Sonko-attaque-le-juge-Maham-Diallo-Il-n-est-pas-juge-ni-magistrat-mais-plutot-un_a252288.html">partagé un post Facebook incriminant Ousmane Sonko</a>. Cette nomination a soulevé de nombreuses questions quant à l'impartialité du juge Diallo et a conforté les partisans de Sonko dans leur demande au juge de se récuser. </p>
<p>L'audience préliminaire et la confrontation entre le leader de Pastef et son accusatrice ont révélé des éléments intéressants qui, selon de nombreux observateurs, remettent sérieusement en cause le récit de la plaignante. </p>
<p>Tout d'abord, Baye Mbaye Niasse (le guide spirituel “autoproclamé” d'Adji Sarr) et les avocats de Sonko ont présenté au juge <a href="https://kewoulo.info/affaire-sweet-beaute-la-version-de-adji-sarr-sur-les-audios-de-mc-niass/">six conversations audio</a> entre Adji Sarr et Niasse. Dans l'une d'elles, Sarr dit que les accusations sont <a href="http://www.walf-groupe.com/adji-sarr-et-les-audios-de-mc-niasse-clap-de-fin-pour-sweet-beauty/?noamp=mobile">un complot contre Ousmane Sonko</a>. Sommée par le juge de s'expliquer, Adji Sarr a confirmé <a href="https://www.leral.net/Audios-produits-par-Mc-Niass-Adji-Sarr-confirme-l-authenticite-des-enregistrements-meme-si-elle-avance-que_a341440.html">l'authenticité des enregistrements</a> mais a déclaré que leur contenu était un stratagème pour tromper Niasse et tester sa loyauté puisqu'il prétendait vouloir la sortir de cette situation. Que sa justification soit convaincante ou non, les enregistrements ont jeté de sérieux doutes sur les accusations devant le tribunal de l'opinion publique. </p>
<p>Le deuxième élément qui transparaît lors de l'audience préliminaire est le rôle prétendument douteux du procureur général de l'époque, Serigne Bassirou Guèye, pendant la phase d'enquête. Sonko et ses avocats ont affirmé détenir des preuves que l'ancien procureur a “falsifié” le rapport d'enquête initial de la police en <a href="https://www.seneweb.com/news/Justice/sonko-annonce-une-plainte-contre-bassiro_n_392291.html">supprimant des preuves disculpatoires</a>. Ils ont également affirmé détenir un rapport interne de la gendarmerie ayant fait l'objet d'une fuite et qui prouve que le procureur s'est permis des libertés avec l'enquête.</p>
<p>Le troisième élément qui est apparu est l'existence du rapport de la gendarmerie, commandité par le général Jean-Baptiste Tine, à la suite du licenciement précipité du capitaine Oumar Touré, l'ancien officier de la gendarmerie qui a mené l'enquête préliminaire sur les accusations portées contre Sonko. Quelques semaines avant son licenciement, le capitaine Touré <a href="https://www.youtube.com/watch?v=jiTQmyWjgXQ">avait publié</a> une vidéo et un message sur les médias sociaux dans lesquels il déclarait être suivi par des individus non identifiés et craindre pour sa vie. </p>
<p>La démission de Touré et les messages sur les médias sociaux ont provoqué une onde de choc dans tout le pays, entraînant une <a href="https://www.sudquotidien.sn/affaire-sweet-beaute-sonko-mouille-serigne-bassirou-gueye-et-annonce-une-plainte-devant-la-cour-supreme-et-ligaj/">enquête interne</a> de la gendarmerie. </p>
<p>Le rapport a fuité et s'est retrouvé entre les mains d'un journaliste d'investigation, Pape Alé Niang, qui <a href="https://www.youtube.com/watch?v=6UBaCkvY4aE">a publiquement divulgué son contenu</a> avant d'être arrêté et emprisonné par le régime. <a href="https://www.nytimes.com/2023/01/07/world/africa/senegal-journalist-hunger-strike.html">Niang a été récemment libéré</a> après une intense pression nationale et internationale de la part d'organisations de la société civile, de défense des droits de l'homme et de journalistes.</p>
<p>En plus de ces éléments importants, le Dr Alphousseyni Gaye, le gynécologue qui a examiné l'accusatrice la nuit du crime présumé, a été entendu par le juge et a <a href="https://kewoulo.info/urgent-docteur-alfousseyni-gaye-lauteur-fameux-rapport-adji-sarr-attendu-demain-tribunal/">réaffirmé</a> que son examen médical n'a apporté aucune preuve de viol.</p>
<p>Malgré tous ces éléments et l'incapacité des avocats de l'accusatrice à présenter des preuves tangibles du crime, le juge Diallo a inculpé Sonko et renvoyé l'affaire en procès. Sonko et ses avocats, qui s'attendaient à un non-lieu, ont vainement fait appel de la décision du juge. Alors qu'aucune date n'a encore été fixée pour le procès, la rhétorique des deux parties (opposition et régime) a pris un ton plus incendiaire et belliqueux.</p>
<h2>L'affrontement a commencé</h2>
<p>Lors de son méga meeting à Keur Massar, Sonko <a href="https://www.sudquotidien.sn/ousmane-sonko-en-meeting-a-keur-massar-jai-deja-fait-mon-testament-et-je-suis-pret-a-faire-face-a-macky-sur-tous-les-fronts/">a déclaré</a> solennellement :“J'ai déjà écrit mon testament et maintenant, je suis prêt à affronter Macky Sall sur tous les fronts”. </p>
<p>Si cette déclaration a été accueillie avec enthousiasme par une foule extatique de partisans et de jeunes gens qui le considèrent comme un rédempteur et celui sur qui ils fondent leur espoir, elle a sans aucun doute résonné comme une menace et un défi pour les partisans du régime. Depuis lors, les deux camps continuent de se livrer une guerre par procuration via la presse, les médias sociaux ainsi que des visites et des tournées improvisées qui sont devenues l'arme d'attraction massive de Sonko.</p>
<p>Le 10 février 2023, Sonko et ses partisans ont bravé une interdiction de manifester à Mbacké (à deux heures et demie à l'est de Dakar) qui s'est transformée en une violente confrontation avec la police. La manifestation a entraîné d'importants dégâts matériels, des dizaines d'arrestations et de blessures. </p>
<p>La chaîne de télévision privée Wal-Fadjri, qui <a href="https://www.impact.sn/Gaze-et-bloque-le-convoi-d-Ousmane-Sonko-prend-une-route-sablonneuse-pour-rallier-Mbacke_a36837.html">a retransmis</a> en direct les affrontements, en a également subi les conséquences lorsque le <a href="http://www.cnra.sn/do/">CNRA</a> a coupé et suspendu son signal <a href="https://www.rfi.fr/fr/afrique/20230212-s%C3%A9n%C3%A9gal-la-cha%C3%AEne-walf-tv-suspendue-pour-sept-jours">pendant une semaine</a>. Malheureusement, <a href="https://theconversation.com/le-senegal-renoue-t-il-avec-la-censure-mediatique-200477">ce type de censure</a> est récurrent sous le régime Sall et prouve une volonté politique d'étouffer la liberté de la presse et la liberté d'opinion. Une semaine après la confrontation de Mbacké, Sonko a de nouveau été convoqué au tribunal, cette fois pour <a href="https://www.jeuneafrique.com/1420564/politique/laffaire-mame-mbaye-niang-contre-ousmane-sonko-du-vent/">un procès en diffamation </a>intenté contre lui par l'ancien ministre du Tourisme, Mame Mbaye Niang. </p>
<h2>Brutalité policère</h2>
<p>Mais ce qui ressort de cette journée reste <a href="https://www.youtube.com/watch?v=wMANGz8B4uE">la brutalité</a> avec laquelle une unité spéciale de la police a brisé la vitre de la voiture de Sonko, l'a trainé dehors et l'a forcé à monter dans un véhicule de police blindé. La vidéo s'est rapidement répandue dans les médias nationaux et internationaux ainsi que dans les réseaux sociaux. </p>
<p>Si ces images ont énormément terni la démocratie sénégalaise, elles ont exposé la nature de plus en plus répressive du régime et fait gagner davantage de soutien populaire et de sympathie pour Ousmane Sonko. Bien que la police n'ait pas arrêté Sonko, ses actions injustifiées continuent de mettre en danger et de menacer l'intégrité physique de l'opposant que le gouvernement doit protéger.</p>
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<figcaption><span class="caption">La voiture de Ousmane Sonko cassée par une unité spéciale de la police.</span></figcaption>
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<h2>Agitation contre une troisième candidature</h2>
<p>A moins d'un an de l'élection présidentielle de 2024, Macky Sall <a href="https://www.sudquotidien.sn/macky-sall-maintient-toujours-son-ni-oui-ni-non-sur-sa-candidature-a-la-presidentielle-de-2024/">n'a pas encore clarifié </a>son intention de quitter le pouvoir étant donné que constitutionnellement il ne peut plus déposer une candidature à la présidentielle. </p>
<p>Par conséquent, il existe une crainte réelle qu'il puisse forcer le passage à l'élection et plonger le pays dans une tension politique similaire à celle de 2011, lorsque le président de l'époque, <a href="https://www.presidence.sn/presidence/abdoulaye-wade">Abdoulaye Wade</a>, avait décidé de briguer “inconstitutionnellement” un troisième mandat. </p>
<p>En outre, il existe une appréhension palpable chez beaucoup de Sénégalais que Sonko pourrait perdre son procès sur les affaires de viol et de diffamation, scellant ainsi son destin de candidat à la présidence en 2024. En ce sens, la nouvelle stratégie de Pastef consiste à faire une démonstration de force par le biais de grands rassemblements et de démarchages à travers le pays pour consolider son soutien populaire et mettre une énorme pression sur le régime Sall. Cette approche répond à un double objectif. </p>
<p>Premièrement, elle vise à annihiler toute tentative de manipulation de la justice pour un verdict de culpabilité dans l'affaire de viol qui disqualifierait systématiquement Sonko de la course à la présidentielle de 2014. Le soulèvement populaire de 2021 a clairement montré que toute tentative d'instrumentaliser le système judiciaire à des fins politiques entraînera des confrontations violentes aux résultats désastreux. Ce que les Sénégalais attendent, c'est un procès équitable et transparent pour toutes les parties impliquées. </p>
<p>Deuxièmement, l'agitation politique envoie des signaux d'avertissement au Président Sall : toute tentative de briguer un troisième mandat se heurtera à une résistance populaire farouche.</p>
<p>Cependant, <a href="https://seneweb.com/news/Video/ousmane-sonko-et-sa-famille-empeches-de-_n_404361.html">le blocus du domicile de Sonko par la police</a> a considérablement limité sa liberté de mouvement. En outre, le refus systématique des demandes d'autorisation de rassemblement de son parti (par les administrations locales) entrave de plus en plus sa tactique de mobilisation de masse. Cette situation nie ainsi un droit constitutionnel fondamental (celui de manifester et de se rassembler) et crée des affrontements violents entre les forces de sécurité et les partisans de Sonko qui veulent à tout prix exercer leurs droits constitutionnels. </p>
<h2>Campagnes de dénonciation</h2>
<p>Récemment, le Pastef a inclus dans sa stratégie des campagnes internationales de dénonciation du régime et de correction de la rhétorique de diabolisation à son égard. </p>
<p>La coalition au pouvoir (Benno Bokk Yakkaar) a intensifié sa campagne visant à présenter Sonko comme un “salafiste”, un “terroriste” et un leader politique “anti-français/occidental” qui veut mettre en péril les intérêts occidentaux au Sénégal, une image contre laquelle Sonko et ses partisans ont riposté par une campagne de relations publiques soutenue. </p>
<p>Le 28 février 2023, Sonko a ainsi publié “<a href="https://www.ndarinfo.com/Ousmane-Sonko-s-adresse-a-la-Communaute-internationale_a35415.html">un message à la communauté internationale</a>”, un long discours traduit en arabe, en anglais et en français dans lequel il détaille le recul démocratique du Sénégal, notamment la multiplication des prisonniers politiques (y <a href="https://www.youtube.com/watch?v=m6r7ZNXYGac&t=1104s">compris des mineurs selon le journaliste d'investigation Pape Alé Niang</a>) et les récentes attaques contre son intégrité physique, entre autres formes de répression gouvernementale. Alors que Sonko continue de bénéficier d'un soutien populaire plus important, son discours à l'égard du régime s'est radicalisé et son appel à la résistance se transforme progressivement en un appel à la “riposte”. </p>
<p>D'un autre côté, le régime Sall semble également résolu à faire respecter la loi et l'ordre par tous les moyens nécessaires. Face à ce bras de fer et à une rhétorique cavalière de part et d'autre, des segments de la société civile et des leaders religieux multiplient les appels à la paix, au dialogue et à la médiation pour éviter une impasse sociopolitique sans précédent avant la présidentielle de 2024.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201224/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bamba Ndiaye does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Les velléités du pouvoir d'invalider la candidature de l'opposant Ousmane Sonko ont créé un climat crispé laissant présager une confrontation inévitable.Bamba Ndiaye, Assistant Professor, Emory UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1976402023-02-09T23:41:56Z2023-02-09T23:41:56ZSilence, déclassement et dépendance : la vie des personnes âgées vivant avec le VIH au Sénégal<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/506615/original/file-20230126-35203-3amwxg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1288%2C598&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Réunion de personnes âgées organisée par le Conseil national des Aînés du Sénégal, sur le rôle des aidants dans la prise en charge des maladies chroniques à Dakar, 2023.
</span> <span class="attribution"><span class="source">S. Sagne, CNAS</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>En Afrique, grâce à l’efficacité des traitements antirétroviraux (ARV) qui ont été généralisés à partir des années 2000, de plus en plus de personnes vieillissent avec le VIH. On estime que le nombre de personnes vivant avec le VIH âgées de plus 50 ans devrait tripler d’ici 10 ans, et atteindre <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28831864/">6 à 10 millions en Afrique sub-saharienne</a>. Elles subissent les effets physiologiques universels du vieillissement, cumulés avec ceux des traitements médicamenteux et de l’infection virale sur le long terme. Vieillir avec le VIH en Afrique devient une expérience – somatique et sociale, individuelle et collective – de plus en plus fréquente.</p>
<p>Le Sénégal fut le <a href="https://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers20-10/010064279.pdf">premier pays d’Afrique francophone</a> à avoir rendu disponibles les antirétroviraux (ARV), dès 1998. En 2022, les personnes âgées de plus de 50 ans vivant avec le VIH (PAVVIH) représentent plus du tiers des 31 637 personnes traitées. Certaines le sont depuis plus de 20 ans.</p>
<p>Comment ces personnes et leurs proches vivent-ils le vieillissement avec le VIH ? Comment la société gère-t-elle leur santé ? Une étude anthropologique <a href="https://crcf.sn/grand-age-et-vih-au-cameroun-et-au-senegal-anthropologie-du-vieillissement-et-de-la-maladie/">« Grand âge et VIH »</a> est actuellement en cours à Dakar et à Yaoundé (Cameroun) auprès de personnes âgées de plus de 70 ans, vivant avec de VIH, de leurs proches et des soignants pour analyser le vécu et les perceptions du vieillissement avec le VIH. Les premiers résultats de l’étude à Dakar sont ici présentés.</p>
<h2>Vivre avec le VIH dans la longue durée</h2>
<p>« On vit avec ça, cela ne nous pose plus de problème, on s’est habitué, on oublie presque que l’on est malade », déclare Aminata, âgée de 70 ans, qui reçoit un traitement antirétroviral depuis 21 ans (tous les prénoms sont fictifs).</p>
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<p>Dans les années 2000, la prise des traitements contre le VIH était très contraignante. Le nombre des comprimés était élevé – jusqu’à 20 comprimés par jour – et certains traitements avaient des effets secondaires éprouvants. Vingt ans après, ces traitements, rendus gratuits, ont été simplifiés et se résument souvent à la prise quotidienne d’un seul comprimé. Généralement dépistées alors qu’elles étaient dans un état grave, ces personnes ont retrouvé santé et vie « normale » ; certaines se qualifient de « survivantes ». Elles font preuve d’une très bonne adhésion aux soins et au traitement ARV.</p>
<p>Mais avec l’âge, elles sont confrontées à diverses pathologies liées au vieillissement qui surviennent plus précocement que chez les personnes non infectées par le VIH. Les plus fréquentes sont l’hypertension artérielle, le diabète et leurs complications (maladies cardiaques, oculaires, AVC, etc.) Ces maladies complexifient leur suivi médical et les contraignent à fréquenter diverses structures de santé, en plus de leur visite semestrielle pour le VIH. Certaines PAVVIH témoignent de difficultés à suivre les traitements pour ces autres maladies qu’elles jugent moins prioritaires, d’autant que les médicaments sont souvent coûteux.</p>
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<h2>Secret, silence, partage</h2>
<p>Au moment du diagnostic, les personnes se sont parfois confiées à quelques proches : le conjoint, la personne qui les accompagnait aux consultations ou qui finançait les soins. Par la suite, rares sont celles qui l’ont révélé à d’autres personnes.</p>
<p>D’une manière générale, les personnes considèrent que « le VIH est une maladie qu’il ne faut pas divulguer », car « cette maladie n’est pas jolie ». La crainte d’un jugement moral sur les circonstances de la contamination demeure le principal motif du maintien du secret. En 2022, le VIH demeure une maladie stigmatisante.</p>
<p>Les femmes âgées vivant avec le VIH sont souvent veuves parce que leur conjoint est décédé du VIH et en raison de la différence d’âge liée au contexte de polygamie. Elles subissent une pression au remariage de la part de la famille et de la société, mais peu d’entre elles acceptent de se remarier, de crainte que leur nouveau conjoint divulgue leur maladie.</p>
<p>Les enfants des PAVVIH sont également peu informés, même si ce sont des adultes. « Je vis comme si je n’avais pas cette maladie, je la garde pour moi, même à mes enfants, je n’ai rien dit » témoigne Ibrahima, âgé de 72 ans ; d’autres s’accommodent d’une forme de non-dit : « Je n’ai jamais discuté de la maladie avec mes enfants ; ils savent parce qu’en 2000 c’est ma fille aînée qui m’accompagnait à l’hôpital, mais je n’ai jamais fait face à eux pour en parler », explique Ousseynou, 84 ans, traité par ARV depuis 22 ans. Ces réticences sont majorées chez les personnes dépistées à un âge avancé, en raison du tabou portant sur la sexualité des personnes âgées.</p>
<p>Mais la survenue d’incapacités fonctionnelles (cécité, difficultés à se déplacer, etc.) nécessitant une aide pour les activités quotidiennes (prise des médicaments ou trajets pour les consultations) oblige à revoir ces choix. Au mieux, l’annonce à l’un des enfants clarifie un non-dit ou suscite une sollicitude ; mais parfois, cela ravive des conflits anciens et des accusations de dissimulation.</p>
<h2>Déclassement économique et précarité</h2>
<p>Avec l’avancée en âge, l’arrêt de toutes activités professionnelles se traduit pour la majorité des personnes âgées par une diminution majeure de leurs ressources économiques. Au Sénégal, seules 24 % des personnes de plus de 60 ans ont une pension de retraite, au montant souvent modeste, le <a href="https://www.cairn.info/revue-sante-publique-2016-1-page-91.htm?ref=doi">minimum étant de 53 € par mois</a>. À travers les dispositifs de réversion, les veuves reçoivent des pensions encore plus faibles, notamment dans les cas de partage lié à la polygamie.</p>
<p>Les personnes qui avaient une activité professionnelle dans le secteur informel, et qui n’ont plus de revenu, constatent avec inquiétude l’érosion de leur capital économique. Certaines se retrouvent contraintes à des déménagements successifs qui les repoussent progressivement vers la périphérie urbaine pour trouver des loyers moins onéreux.</p>
<p>Les PAVVIH tentent de travailler tant que leur condition physique le leur permet, afin de repousser le moment où elles n’auront plus d’autonomie économique. Cette perte d’autonomie se traduit pour toutes par un déclassement économique et par l’exacerbation de situations de précarité et de dépendance qui ont un impact direct sur leur santé physique et psychologique.</p>
<p>Dans le même temps, leurs dépenses de santé augmentent. En effet, au Sénégal, si les médicaments ARV et certains examens biologiques sont gratuits depuis 2003, une partie des coûts des soins liés au VIH et ceux des autres maladies sont supportés par les patients. Or la moitié des PAVVIH présentent au moins une comorbidité qui nécessite un traitement régulier. <a href="https://theconversation.com/au-senegal-quelle-couverture-de-sante-des-personnes-agees-souffrant-de-diabete-et-dhypertension-174180">Une étude réalisée en 2021 à Dakar</a> évalue entre 34 et 40 € le reste à charge d’une consultation pour des patients âgés présentant une hypertension artérielle ou un diabète, ce à quoi s’ajoutent les coûts du transport pour se rendre dans les structures de soins. Alors que le dispositif de protection sociale prévu pour les plus de 60 ans – le <a href="https://www.agencecmu.sn/plan-sesame-0">Plan Sésame</a> – fonctionne mal, ces dépenses de santé constituent souvent un véritable casse-tête pour les PAVVIH et leur famille.</p>
<h2>Dépendance</h2>
<p>Le manque de ressources place les personnes âgées, et notamment les PAVVIH, en situation de dépendance économique à l’égard de leurs proches. Les aides dont elles peuvent bénéficier sont fonction de la nature et de la qualité des liens, une forme d’héritage des relations familiales sur l’ensemble de leur vie.</p>
<p>Les personnes le plus souvent sollicitées sont les enfants, les frères et sœurs utérins, puis les descendants indirects (neveux et nièces) ; moins souvent, des relations amicales anciennes ou des parents aisés plus éloignés ; plus rarement encore, le voisinage. Les PAVVIH déploient parfois toute une stratégie pour éviter la honte de devoir quémander (la <a href="https://www.cairn.info/revue-autrepart-2015-1-page-181.htm">sutura</a>) et ne pas solliciter trop souvent les proches au risque de les « fatiguer ».</p>
<p>« Je vis avec l’aide des gens et la grâce divine », reconnaît Habib, 84 ans, traité depuis 20 ans qui précise que ce sont ses voisins qui financent le déplacement pour se rendre à l’hôpital (2 €). Le code d’honneur est souvent évoqué : « Mon fils gère la vie dans la maison : s’il me donne, je vais prendre, mais ma dignité ne me permet pas de lui demander. »</p>
<p>Au Sénégal, la cohabitation intergénérationnelle est fréquente, la taille moyenne des ménages étant de dix personnes. Cette situation peut favoriser une entraide au bénéfice des personnes âgées. Mais les difficultés d’accès à l’emploi conduisent souvent à ce que ce soient les personnes âgées disposant d’une pension de retraite qui entretiennent la maisonnée. Il leur faut alors choisir entre les dépenses familiales et celles concernant leurs dépenses médicales, souvent au détriment de leur santé.</p>
<h2>Une entrée « digne » dans les rôles sociaux du grand âge avec le VIH</h2>
<p>Les PAVVIH ne vivent heureusement pas toutes dans des situations dramatiques. Notre étude a permis d’identifier les conditions favorisant une entrée « digne », pour les personnes vivant avec le VIH, dans les rôles sociaux du grand âge.</p>
<p>Fatou, 74 ans, veuve, est traitée par ARV depuis 2006 ; elle habite avec ses deux fils, ses belles-filles et cinq petits-enfants scolarisés. Seul son fils aîné est informé de sa maladie. Elle dit vivre une vieillesse heureuse. Ses enfants la prennent en charge et elle s’occupe de ses petits-enfants : « Je ne fais rien comme activité à part garder mes petits-enfants qui me tiennent compagnie, je suis la « yaay » (mère de famille) ».</p>
<p>Dans le contexte actuel de dépendance économique de la plupart des PAVVIH, ces rôles sociaux sont rendus possibles lorsque leurs enfants sont socialement insérés, à travers un emploi et des revenus stables. Ils peuvent alors se répartir la prise en charge financière de leurs parents ; en retour, ceux-ci peuvent s’investir dans leur rôle au sein de la famille ou de la communauté.</p>
<p>À défaut du soutien familial, il est de la responsabilité collective d’assurer une vie digne aux PAVVIH. Des associations de personnes vivant avec le VIH commencent à se mobiliser en faveur de leurs ainés. Plus largement, des collectifs comme le <a href="http://archives.aps.sn/article/144413?lightbox%5Bwidth%5D=75p&lightbox%5Bheight%5D=90p">Conseil national des Ainés du Sénégal</a> militent pour un meilleur fonctionnement du Plan Sésame et la création d’un minimum vieillesse pour les personnes démunies. Au Sénégal, les personnes de plus de 60 ans ne représentent que 6 % de la population. Dans un pays où le <a href="https://www.cairn.info/revue-gerontologie-et-societe-2019-1-page-85.htm">grand âge est valorisé</a>, s’occuper des aînés devrait être l’une des valeurs cardinales d’une société solidaire, tout comme cela devrait l’être dans le reste du monde.</p>
<hr>
<p><em>Le projet <a href="https://crcf.sn/grand-age-et-vih-au-cameroun-et-au-senegal-anthropologie-du-vieillissement-et-de-la-maladie/">« Grand âge et VIH au Cameroun et au Sénégal, anthropologie du vieillissement et de la maladie »</a> est financé par Sidaction-Ensemble Contre le Sida. Les investigateurs principaux sont au Cameroun : Laura Ciaffi, Marie-José Essi, Antoine Socpa ; au Sénégal : Gabrièle Laborde-Balen, Khoudia Sow, Bernard Taverne ; au Sénégal, les enquêtes ont été réalisées par Seynabou Diop, Catherine Fall et Marcel Ndiana Ndiaye</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197640/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gabriele Laborde-Balen a reçu des financements de Sidaction-Ensemble Contre le Sida, Expertise France, ANRS I Maladies Infectieuses Emergentes</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Bernard Taverne a reçu des financements de Sidaction-Ensemble Contre le Sida, Expertise France, ANRS I Maladies Infectieuses Emergentes</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Khoudia Sow a reçu des financements de Sidaction-Ensemble Contre le Sida, Expertise France, ANRS I Maladies Infectieuses Emergentes.</span></em></p>Au Sénégal, le VIH reste largement tabou, ce qui a un impact direct sur les personnes qui en sont porteuses, et particulièrement sur les seniors.Gabriele Laborde-Balen, Anthropologue, Centre Régional de Recherche et de Formation à la prise en charge Clinique de Fann (CRCF, Dakar), Institut de recherche pour le développement (IRD)Bernard Taverne, Anthropologue, médecin, Institut de recherche pour le développement (IRD)Khoudia Sow, Chercheuse en anthropologie de la santé (CRCF)/TransVIHMI, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1984562023-02-06T18:09:18Z2023-02-06T18:09:18ZRecul du tourisme de masse : la transformation d’une station balnéaire emblématique du Sénégal<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/507376/original/file-20230131-7778-wacbvj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C0%2C5551%2C3700&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Transats vides sur la plage de Saly, au Sénégal.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/saly-senegal-africa-april-2-2022-2149144773">Pierre Laborde/shutterstock.com</a></span></figcaption></figure><p>Saly : dans l’imaginaire de nombreux touristes et retraités européens, et notamment français, le nom même de cet <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2022/05/20/a-saly-au-senegal-on-ne-comprend-pas-comment-des-gens-peuvent-voter-extreme-droite-ici_6127017_3212.html">ancien petit village côtier sénégalais, situé sur la Petite-Côte</a>, à quelque 90 km au sud de Dakar, évoque le modèle typique de la station balnéaire.</p>
<p>Cette vision est désormais quelque peu dépassée. À Saly, la vie économique et sociale a longtemps reposé sur le dynamisme des complexes hôteliers et autres clubs de vacances célèbres gérés par les grands tour-opérateurs. Ce modèle qui s’essoufflait déjà a été profondément affecté par la pandémie de Covid-19. Certains hôtels historiques sont laissés à l’abandon, le principal restaurant est fermé et le centre commercial originel vivote.</p>
<p>Pour autant, loin de dépérir, la ville se transforme, attirant davantage la clientèle sénégalaise, tandis que les formes de la présence des Européens se transforment progressivement.</p>
<h2>Le recul du tourisme de masse</h2>
<p>La crise sanitaire mondiale de 2019 a incité les touristes de l’UE à opter pour des <a href="https://www.geo.fr/voyage/slow-tourisme-une-tendance-accentuee-par-le-Covid-19-205737">destinations moins éloignées</a> que par le passé. Et cette tendance à un tourisme « de proximité » semble perdurer.</p>
<p>Les pratiques touristiques ont évolué vers de nouvelles formes, comme les <a href="https://ieeexplore.ieee.org/abstract/document/9437685"><em>Digital nomads</em></a> (ces personnes qui choisissent de travailler à distance, souvent depuis un lieu de villégiature), qui correspondent moins aux standards du tourisme de masse. Les nouveaux voyageurs fréquentent moins les clubs et leurs besoins s’éloignent dorénavant de plus en plus du modèle <a href="https://www.researchgate.net/publication/324099628_Towards_a_Sustainable_Sun_Sea_and_Sand_Tourism_The_Value_of_Ocean_View_and_Proximity_to_the_Coast">« Sea, sun and sand »</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un quartier de Saly au Sénégal privé de ses touristes" src="https://images.theconversation.com/files/506796/original/file-20230127-14-slqcmk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/506796/original/file-20230127-14-slqcmk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/506796/original/file-20230127-14-slqcmk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/506796/original/file-20230127-14-slqcmk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/506796/original/file-20230127-14-slqcmk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/506796/original/file-20230127-14-slqcmk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/506796/original/file-20230127-14-slqcmk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Place déserte à Saly au Sénégal.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sébastien Fleuret/UMR ESO-Angers</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>La pandémie a également généré une <a href="https://africanmanager.com/senegal-loffre-locale-pour-relancer-le-tourisme/">croissance du tourisme intérieur</a>. Le Sénégal ayant été l’un des premiers pays à <a href="https://www.bbc.com/afrique/region-51959820">fermer ses frontières</a> au moment de l’épidémie, les touristes sénégalais se sont réapproprié les espaces balnéaires côtiers désertés par les Européens. Certains hôteliers de prestations haut de gamme relatent qu’au moment des confinements, ils ont développé une offre promotionnelle essentiellement adressée à une clientèle dakaroise afin d’assurer un minimum d’activité dans leurs établissements.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une plage au Sénégal avec des infrastructures délabrées" src="https://images.theconversation.com/files/506797/original/file-20230127-25-oogoks.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/506797/original/file-20230127-25-oogoks.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/506797/original/file-20230127-25-oogoks.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/506797/original/file-20230127-25-oogoks.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=420&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/506797/original/file-20230127-25-oogoks.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/506797/original/file-20230127-25-oogoks.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/506797/original/file-20230127-25-oogoks.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’aménagement des plages souffre du manque d’entretien.</span>
<span class="attribution"><span class="source">David Lessault/UMR ESO Angers</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>La tendance a confirmé l’attrait, en nette augmentation depuis deux décennies, que suscitent les espaces côtiers chez les Dakarois. Chaque fin de semaine, l’accès à la seule plage de Saly qui soit dotée d’un parking, est pris d’assaut par des centaines de familles venant de Dakar et possédant une résidence secondaire ou séjournant en location dans des auberges alentour. Les habitants en profitent pour installer des gargotes éphémères où sont vendus poissons grillés, fruits et autres jus. Le temps d’un week-end, les Sénégalais semblent reprendre leurs droits, alors que durant la semaine cette plage est plutôt fréquentée par les touristes et résidents européens, voire leur est exclusivement réservée.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Des voitures sont garées aux abords d’une plage au Sénégal" src="https://images.theconversation.com/files/506800/original/file-20230127-18-z4aiqd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/506800/original/file-20230127-18-z4aiqd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/506800/original/file-20230127-18-z4aiqd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/506800/original/file-20230127-18-z4aiqd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/506800/original/file-20230127-18-z4aiqd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/506800/original/file-20230127-18-z4aiqd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/506800/original/file-20230127-18-z4aiqd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1006&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La plage de Saly attire un tourisme interne sénégalais.</span>
<span class="attribution"><span class="source">David Lessault/UMR ESO-Angers</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<h2>Nouvelles formes de présence européenne</h2>
<p>Si le modèle de la station balnéaire dédiée au tourisme international semble avoir fait son temps, d’autres présences européennes se sont imposées localement. Dans un premier temps, Saly n’a pas échappé, à l’instar de nombreuses destinations des pays du Sud, à l’arrivée de Français retraités venus passer « l’hiver au chaud ». Pour les retraités célibataires, ces séjours longs sont parfois associés à la recherche d’un projet de vie en couple au Sénégal, de préférence avec un ou une partenaire plus jeune. Ces démarches sont assez fréquentes et pleinement assumées malgré le regard peu approbatif des populations locales, qui <a href="https://www.xibar.net/Enquete-Mariages-mixtes-au-senegal-Amours-Drames-Melodrames_a1882.html">y voient parfois une pratique immorale compte tenu des grandes différences d’âge et de ressources</a>.</p>
<p>Toujours est-il que le phénomène s’est développé depuis le début des années 2000 et se localise principalement dans une dizaine de résidences collectives fermées qui essaiment au sud de l’ancienne station balnéaire. L’autonomie de ces nouveaux résidents, par rapport à ceux des hôtels et clubs, a donné naissance à une nouvelle économie locale orientée vers l’accès à l’alimentation (multiplication des supermarchés, de grandes enseignes), vers des services résidentiels (femmes de ménage, gardiennage, piscinistes, etc.) et vers la restauration (bars, restaurants). Cette seconde forme de l’expansion de Saly semble aujourd’hui diluée à son tour par le développement de nouvelles extensions résidentielles vers le nord et vers le sud de la commune.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Plan d'urbanisation de la ville de Saly" src="https://images.theconversation.com/files/508609/original/file-20230207-29-7gxm4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/508609/original/file-20230207-29-7gxm4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=595&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/508609/original/file-20230207-29-7gxm4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=595&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/508609/original/file-20230207-29-7gxm4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=595&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/508609/original/file-20230207-29-7gxm4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=748&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/508609/original/file-20230207-29-7gxm4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=748&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/508609/original/file-20230207-29-7gxm4s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=748&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La station balnéaire s'inscrit dans un plan d'urbanisation ambitieux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sébastien Fleuret/UMR ESO-Angers</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Au début des années 2020, de nouvelles implantations transforment le paysage local. Aux côtés des complexes hôteliers et des résidences collectives fermées pour retraités apparaissent de nouveaux espaces résidentiels construits de manière plus anarchique sur le modèle de la villa individuelle ou du groupement de villas. Ce mode d’expansion est dopé par l’arrivée plus récente d’entrepreneurs européens.</p>
<p>Armelle et Hervé (les prénoms ont été changés) se sont installés en location dans une villa meublée de bord de mer au moment du Covid pour fuir le confinement en France. Leur séjour les a décidés à venir s’installer définitivement à Saly. Ils ont laissé en gestion en France leur réseau de boutiques de prêt-à-porter pour venir développer de nouvelles entreprises au Sénégal. Après un premier achat immobilier sur la côte au nord de la station, ils envisagent aujourd’hui de déménager vers les extensions récentes d’un quartier au nom évocateur « La Piste des milliardaires », où les constructions se multiplient autour du golf, vers l’intérieur, en rognant sur les espaces de culture des villages environnants.</p>
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<p>De nombreux jeunes entrepreneurs ont rapidement cerné les besoins de consommation de cette nouvelle population huppée de Saly. Jean vient d’ouvrir un fast food sur l’artère principale de la ville. Ses hamburgers sont vendus aux prix que l’on retrouve en Europe avec des produits « bio » garantis « fraîcheur ». Il a bien ciblé sa clientèle. Le secteur dans lequel il exerce concentre essentiellement des résidents européens, principalement belges et français, et des résidents secondaires de l’élite dakaroise et <a href="https://www.lorientlejour.com/article/996932/libanais-du-senegal-une-etude-tente-de-dissiper-les-prejuges.html">libanaise</a>. On retrouve également dans sa clientèle des Sénégalais anciennement émigrés de retour d’Europe. Ces derniers se sont approprié les pratiques touristiques des pays d’immigration et sont de plus en plus nombreux à investir dans l’immobilier sur la Petite Côte.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Chantier en cours pour la construction d’une villa au Sénégal" src="https://images.theconversation.com/files/506810/original/file-20230127-23-qnhoxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/506810/original/file-20230127-23-qnhoxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/506810/original/file-20230127-23-qnhoxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/506810/original/file-20230127-23-qnhoxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/506810/original/file-20230127-23-qnhoxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/506810/original/file-20230127-23-qnhoxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/506810/original/file-20230127-23-qnhoxw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les chantiers de construction se multiplient à Saly.</span>
<span class="attribution"><span class="source">David Lessault/UMR ESO Angers</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Avec le développement du modèle de la villa individuelle, qui rompt avec le modèle hôtelier classique, de nouvelles activités émergent dans différents domaines. On observe, par exemple, la multiplication des centres commerciaux. Sidy, qui a vécu 35 ans en France, a ainsi lancé son enseigne de grande distribution pour concurrencer les groupes internationaux qui ouvrent des magasins à travers tout le Sénégal et encore davantage à Saly. Jean a, lui, mis en place une offre de livraison de burgers à domicile pour diversifier la clientèle de son fast food. Ce modèle commercial occidental assez peu développé dans la région rencontre un franc succès. D’autres activités émergent sous l’effet des présences européennes. C’est le cas du <a href="https://www.au-senegal.com/le-padel-nouveau-sport-a-la-mode-au-senegal,16342.html"><em>padel</em></a>, ce jeu de raquette importé d’Espagne, qui réunit en vase clos des adeptes exclusivement d’origine européenne.</p>
<h2>L’évolution des paysages</h2>
<p>Ces tendances récentes ont un impact notable sur les paysages. Elles se traduisent par la multiplication des chantiers de construction, participent à l’expansion rapide de la zone des villas tout en opérant la jonction au nord avec le front d’urbanisation dakarois. Cet axe (zone verte sur la carte) est principalement animé par les investissements provenant d’Européens et de la diaspora sénégalaise.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Chemin menant à une villa blanche au bord de la mer au Sénégal" src="https://images.theconversation.com/files/506814/original/file-20230127-25-h5ylwc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/506814/original/file-20230127-25-h5ylwc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/506814/original/file-20230127-25-h5ylwc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/506814/original/file-20230127-25-h5ylwc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/506814/original/file-20230127-25-h5ylwc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/506814/original/file-20230127-25-h5ylwc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/506814/original/file-20230127-25-h5ylwc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La piste des milliardaires, chemin bordé de villas luxueuses.</span>
<span class="attribution"><span class="source">David Lessault/UMR ESO Angers</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>De nouvelles constructions sont en plein développement sur le littoral en direction de Ngaparou. Sur cet axe, l’urbanisation est continue jusqu’à Somone. C’est aussi dans le domaine des terres agricoles périphériques, en direction de l’intérieur (vers l’autoroute), que de grandes villas et résidences privées fleurissent. C’est ici que se trouve la « piste des milliardaires » évoquée plus haut.</p>
<p>Plus au sud et vers l’intérieur, l’expansion, également très rapide, est plutôt alimentée par les migrants originaires du Sénégal ou de la sous-région (Gambie, Guinée, Niger, Mali, Mauritanie). Ces derniers sont attirés par les perspectives d’emplois générés par ce développement local soudain et cherchent à s’installer à proximité de leur lieu de travail. Ils participent ainsi à l’urbanisation du quartier « Saly Carrefour » qui rejoint désormais la ville voisine de M’Bour (zone violette sur la carte).</p>
<p>Chaque matin, la route qui relie M’Bour à Saly est prise d’assaut par des taxis informels (nommés les « clandos ») qui acheminent les travailleurs domestiques vers les zones résidentielles. Ibrahim, embauché par des propriétaires français pour surveiller un groupement de 23 villas, doit prendre trois moyens de transport différents pour venir travailler. Cela représente plus d’une heure de transport et un quart de son maigre salaire (70 000 francs CFA par mois soir un peu plus de 100 euros) prélevé chaque mois pour rejoindre son lieu de travail, six jours sur sept.</p>
<p>D’une certaine manière, l’expansion rapide observée dans le secteur résidentiel aisé vers le nord de la commune et dans celui des extensions populaires vers l’est et vers le sud éloigne encore davantage les populations locales et européennes les unes des autres. Elle renforce ainsi la ségrégation et complique l’accès à l’emploi des travailleurs locaux qui ne disposent pas des ressources pour se loger sur place.</p>
<p>La dynamique d’expansion de Saly initialement <a href="https://www.sapco.sn/">stimulée par l’État</a> dès les années 1970 à travers la promotion du tourisme balnéaire international, puis par la mise en place des grands projets d’infrastructures (nouvel aéroport, autoroute à péage) est aujourd’hui relayée par le foisonnement de nouveaux acteurs privés. Plusieurs modèles de présence européenne co-existent désormais : celui des complexes hôteliers en déclin, des résidences fermées pour seniors, des villas individuelles des entrepreneurs et de la diaspora sénégalaise. En marge, de nouveaux quartiers populaires se développent vers le sud et l’intérieur en lieu et place des anciens villages. De part et d’autre de l’ancien cœur de station, ces deux formes d’extension au contenu social très contrasté participent à la fabrique originale d’une ville satellite de Dakar devenue cosmopolite.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198456/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David Lessault a reçu des financements de l'Académie des Sciences. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pape Sakho est membre de l'UGI et de l'association internationale des géographes francophones. Il a reçu des financements du CNRS</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sébastien Fleuret ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ancien village de pêcheurs devenu station balnéaire dans les années 1970, Saly, au Sénégal, cherche des solutions au recul du tourisme international.Sébastien Fleuret, Directeur de recherche au CNRS, géographe de la santé, Université d'AngersDavid Lessault, Chargé de recherche au CNRS, spécialiste des migrations et mobilités internationales, Université d'AngersPape Sakho, Maître de conférences CAMES, Université Cheikh Anta Diop de DakarLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1926742022-11-11T13:43:04Z2022-11-11T13:43:04ZJolof rice : après la labellisation, les défis qui attendent le Sénégal<p>Le Jolof rice ou riz au poisson - appelé également ceebu jën, selon l'orthographe wolof - a été inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco à la demande du Sénégal. Au-delà du débat entre nations ouest-africaines sur la paternité de ce mets, les défis qui attendent le Sénégal pour tirer profit de cette reconnaissance sont nombreux.</p>
<p>L’origine de ce plat est liée, d’abord, à <a href="http://excerpts.numilog.com/books/9782402562706.pdf">un point d’histoire</a>. Précisément, la colonisation a substitué aux cultures vivrières la brisure de riz, importée à partir de l’Indochine. Ensuite, interviendra ce que nous avons appelé dans notre livre <a href="https://senegal.harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=72081">Le ceebu jën, un patrimoine bien sénégalais</a> le coup de génie des autochtones, notamment des Saint-louisiens. Sous ce rapport, la principale curiosité était la suivante : comment réussir, à partir de ce qu’on n’a pas produit, à créer du tout à fait nouveau. Et en l’occurrence, pour le ceebu jën, ce n’est pas uniquement le riz qui est exporté. Excepté le poisson, pratiquement toutes ses composantes essentielles témoignent, par leur provenance, d’une économie extravertie.</p>
<h2>La légende Penda Mbaye</h2>
<p>Le riz sera l’objet d’un traitement original, au terme duquel sera inventé un mets méconnu aussi bien de ceux-là qui ont la culture du riz que des producteurs des légumes. Au nom de riz au poisson est régulièrement accolé le nom d’une femme, <a href="https://royalsenegal.com/recette-1/">Penda Mbaye</a>. Si nul ne conteste cette filiation entre ce plat et cette dame, il reste que de sérieuses informations sur l'identité de cette femme, sur le lieu et l'époque où elle a vécu et sur les conditions de la création de ce mets font cruellement défaut. C'est pourquoi nous avons affirmé dans notre <a href="https://senegal.harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=72081">livre</a> qu’elle a bien vite quitté l’histoire pour se tailler une place de choix dans la légende. </p>
<p>Le colon trouvera la stratégie idoine pour « accrocher » ses sujets. L’acte un fut de mettre sous dépendance du riz tous ces déconnectés des activités agricoles, venus tenter de faire fortune dans les marchés à<a href="https://www.universalis.fr/recherche/l/1/q/SAINT-LOUIS,%20S%C3%A9n%C3%A9gal"> Saint-Louis</a>, une des portes d’entrée des Occidentaux et, pendant une bonne période, capitale de l’Afrique Occidentale Française. </p>
<p>Suivront, ensuite, les paysans, premières victimes de l’économie désarticulée par la disparition programmée des cultures vivrières. Si on ajoute à ces franges, les enseignants, les différents agents de l’administration et les militaires, on comprend mieux le processus pernicieux de <a href="https://www.alimenterre.org/le-senegal-peut-nourrir-le-senegal#:%7E:text=Le%20riz%20repr%C3%A9sente%20%C3%A0%20lui,un%20h%C3%A9ritage%20du%20pass%C3%A9%20colonial.">promotion du riz</a>. </p>
<p>Débordant les centres urbains, le riz sera consommé sur, pratiquement, l’essentiel de la colonie du Sénégal. Et, à la faveur du brassage, les « étrangers », en épousant des Saint-Louisiennes, ramènent à leur terroir d’origine leur « douce moitié » qui ne rate pas l’occasion de faire goûter à leur nouvelle famille les délices du riz au poisson. Conjuguant expertise et coquetterie, elle « s’amusera » à servir le riz au poisson dans ses différentes déclinaisons : riz rouge, riz blanc sauce goorjigèen – ce mets à cheval sur le riz rouge et le riz blanc est appelé riz homme-femme.</p>
<h2>Enjeux gastrodiplomatiques</h2>
<p>Du succès de la stratégie de promotion du riz par les forces coloniales a résulté l’ancrage d’une <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3339459x.texteImage">économie foncièrement extravertie</a>. Des indépendances à nos jours, des efforts ont été fournis pour produire du riz en Casamance et dans la région de Saint-Louis. Dans le même mouvement, l’exploitation des zones maraîchères des <a href="https://www.divecosys.org/terrains/senegal/les-niayes">Niayes </a>et du <a href="https://www.memoireonline.com/12/13/8322/Une-zone-marachere-en-crise-au-nord-du-Senegal--le-Gandiolais-et-le-Toube-dans-la-communaute.html">Gandiol</a> a contribué à répondre au besoin des populations en matière de légumes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/491286/original/file-20221024-356-8ibvsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/491286/original/file-20221024-356-8ibvsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/491286/original/file-20221024-356-8ibvsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/491286/original/file-20221024-356-8ibvsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/491286/original/file-20221024-356-8ibvsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/491286/original/file-20221024-356-8ibvsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/491286/original/file-20221024-356-8ibvsr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une femme en train de servir du ceebu jen. Photo Cellou AFP via Getty Images.</span>
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<p>Il a été noté une revendication fort divergente de la paternité du ceebu jën. Cependant, cette controverse n’a jamais débouché sur ces « guerres » qui provoquent souvent des soubresauts de violence dont a parlé <a href="https://www.universalis.fr/recherche/l/1/q/BOCUSE%20PAUL">Paul Bocuse</a>, surnommé « le pape » de la gastronomie française. Pour illustration, il souligne que lors de la <a href="https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2013/03/20/debut-de-la-visite-de-barack-obama-en-israel_1850958_3222.html">venue de Barack Obama</a>, en 2013, en Israël, les Palestiniens avaient estimé qu'en servant au président americain du <a href="https://cuisine.journaldesfemmes.fr/recette/309902-houmou">houmous</a>, leurs voisins avaient commis un <a href="https://www.cairn.info/revue-geoeconomie-2016-1.htm">« vol de leur héritage culturel»</a>. L’auteur indique que, outre le houmous, <a href="https://www.lapresse.ca/actualites/insolite/201005/09/01-4278705-un-enorme-falafel-cause-des-querelles-entre-le-liban-et-israel.php">le falafel</a>, autre mets fort prisé de cette région, est aussi objet de la même « guerre » entre le Liban et Israël.</p>
<p>Nigérians et Ghanéens ont revendiqué la <a href="https://www.bbc.com/travel/article/20210607-jollof-wars-who-does-west-africas-iconic-rice-dish-best#:%7E:text=These%20two%20passionate%20nations%20seem,is%20best%20for%20absorbing%20flavour.">paternité du Jolof rice</a>. Mais, dans notre livre, nous indiquons que la « sénégalité » de ce plat est d’autant plus établie que la référence au <a href="https://artsandculture.google.com/entity/m0241pk?hl=fr">« Jolof »</a>, ancien royaume, constitutif du Sénégal, n’est pas une simple clause de style.</p>
<p>Comme il arrive dans l'histoire, quand un art atteint une certaine notoriété, sa paternité devient objet de <a href="https://manuelnumeriquemax.belin.education/francais-seconde/topics/francais2-presse-c1-342-a_dossier-culturel-controverses-esthetiques-du-roman-xix-roman-sup-e-sup-siecle-a-nos-jours">controverses</a>. Il s'y ajoute que les transformations et les différentes déclinaisons subies par le mets peuvent contribuer à brouiller les repères historiques. En l'occurrence, lorsque que le ceebu jën renvoie exclusivement au riz au poisson, le jolof rice s'accommode, de manière indifférenciée aussi bien de la viande, du poulet que du poisson. Sans doute, il s'agit d'un enrichissement indéniable, mais dans le patrimoine originel, il existe des codes qui permettent de distinguer les différents types de plats. Nous pensons d'ailleurs qu'aujourd'hui la question de la paternité soulève de moins en moins de passion.</p>
<h2>Les défis à relever</h2>
<p>Depuis décembre 2021, l’Unesco a intégré le ceebu jën sur la liste du <a href="https://ich.unesco.org/fr/RL/le-ceebu-jn-art-culinaire-du-sngal-01748">patrimoine immatériel l’humanité</a>. Cette labellisation par l’Unesco de la version sénégalaise du riz au poisson a, d’abord, le mérite de valoriser ce que les Sénégalais ont à un double niveau. Ce classement de cet art culinaire dans le trésor de l’humanité est une reconnaissance d’un savoir-faire, partie intégrale du patrimoine immatériel. Et c’est toujours bon pour le mental des Africains. Il s’agit aussi d’un encouragement à fournir un effort plus soutenu pour faire du consommer local une réalité, voire un réflexe. </p>
<p>Cette labellisation a sans doute aussi des <a href="https://www.lobs.sn/Patrimoine-immateriel-les-enjeux-diplomatiques-et-touristiques-de-l-inscription-du-ceebu-jen-a-l-unesco">incidences</a> tout à fait positives pour l’économie, le tourisme, l’agriculture, la pêche, la restauration, etc. Il n’est pas non plus superflu d’y intégrer les enjeux dans le cadre de la gastrodiplomatie. Toutefois, mettre à profit tous ces avantages exige que le Sénégal veille davantage sur ses <a href="https://www.ouestaf.com/senegal-le-poisson-se-fait-rare-dans-les-quais-de-peche/">ressources halieutiques </a>et, surtout, règle, pour de bon, la récurrente question de l’<a href="http://ipar.sn/L-OBJECTIF-DE-L-AUTOSUFFISANCE-EN-RIZ-PLOMBE.html?lang=fr">autosuffisance en riz</a> pour mettre un terme à cette perversion scandaleuse consistant à se nourrir de ce que l’on ne produit pas.</p>
<p>Le Sénégal, dont la réputation repose davantage sur son rayonnement culturel et sa diplomatie, a tout intérêt à s’inscrire dans cette mouvance. Ainsi, il lui reviendra de revaloriser, en plus du riz au poisson, tout son patrimoine gastronomique, afin d’en faire un atout supplémentaire au profit du rôle qu’il entend jouer dans le concert des nations. </p>
<p>Dans cet esprit, l’<a href="http://www.ita.sn/">Institut de technologie alimentaire</a> retrouverait une nouvelle jeunesse. A cet établissement public, créé en 1963, avait été assignée la mission de recherche-développement en alimentation et nutrition. </p>
<p>Dans cet esprit de valoriser le riche patrimoine sénégalais, l’institut pourrait se fixer comme objectif de promouvoir tout ce remarquable consommable sénégalais à base de mil ou de fruits locaux. Et pour relever ce défi, le Sénégal serait bien inspiré de mettre à profit toute l’expertise avérée des institutions de recherche, des universités, de la Société nationale d'aménagement et d'exploitation des terres du Delta et de la Vallée du fleuve (<a href="https://www.dri.gouv.sn/%C3%A9tiquettes/soci%C3%A9t%C3%A9-nationale-d%E2%80%99am%C3%A9nagement-et-dexploitation-des-terres-du-delta-de-fleuve-s%C3%A9n%C3%A9gal-et">Saed</a>), d’<a href="https://www.africarice.org/">Africa Rice</a> et des différents acteurs de son économie. </p>
<p><em>Cet article a été écrit avec la contribution de Alpha Amadou Sy, co-auteur du livre Ceebu jën, un patrimoine bien sénégalais.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/192674/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fatima Fall Niang does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p>Le Jolof rice est originaire du Sénégal. Cette paternité a été prouvée par l'histoire et confirmée par l'Unesco. Le Sénégal doit relever plusieurs défis pour profiter de cette labellisation.Fatima Fall Niang, Directrice du Centre de recherche et documentation du Senegal (CRDS), Université Gaston BergerLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1900922022-09-14T18:08:45Z2022-09-14T18:08:45ZAu Sénégal, mobilisation pour protéger le plus grand gisement forestier du pays<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/484659/original/file-20220914-9486-bt5hhv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans la partie Sud-Est du Sénégal (ici à Medina Yoro Foulah), les forêts sont menacées par des feux de brousse et la coupe abusive. Les acteurs de la DyTAES se mobilisent pour enrayer la déforestation.</span> <span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin / Cirad</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Du 7 février au 12 mars 2022, la Dynamique pour une transition agroécologique au Sénégal (DyTAES) – réseau qui fédère l’ensemble des acteurs de l’agroécologie du pays – <a href="https://theconversation.com/fr/topics/la-caravane-de-lagroecologie-126986">a entrepris une grande caravane</a> pour rencontrer les agriculteurs et agricultrices du pays.</p>
<p>Après un périple de 25 jours ponctué de multiples étapes, les caravaniers ont atteint les départements de Kolda, Velingara et Tambacounda, situés dans le sud-est du Sénégal, une zone forestière de première importance soumise à de multiples pressions.</p>
<h2>Face à face avec des coupeurs de bois clandestins</h2>
<p>Cette forêt, Oumar Dème la connaît depuis son enfance. Il l’a vue se dégrader d’année en année, sous l’agression des feux de brousse et des machettes. En 2014, lorsqu’il est devenu maire de sa commune, Ndoga Babacar (département de Tambacounda), il a décidé de consacrer son mandat à lutter contre le fléau de la déforestation illégale.</p>
<p>Un pari particulièrement risqué dans cette zone frontalière du Sénégal, en proie à la pauvreté, à la corruption et à la circulation des trafiquants de tous genres. Avec l’appui des habitants, le nouveau maire a construit un réseau de surveillance communautaire qui lui permet de savoir ce qui se passe dans chaque parcelle forestière de sa commune.</p>
<p>Un jour d’août 2019, ses informateurs lui ont révélé la présence d’un camp illégal de coupeurs de bois dans une zone reculée, à seulement quelques kilomètres de la frontière gambienne. Il prend alors une décision frappante : se rendre lui-même sur site accompagné de la presse et d’une poignée de militants afin de surprendre les exploitants clandestins !</p>
<p>Arrivé sur place, le groupe découvre une cinquantaine de jeunes hommes et femmes épuisés, le regard hagard, certains semblant en très mauvaise santé. En face des caméras, le maire sermonne le chef de camp et lui rappelle les règles d’utilisation de la forêt en vigueur dans sa commune.</p>
<p>Trois années plus tard, en 2022, alors que la nouvelle caravane de la DyTAES sillonne le pays, le constat est amer : à Ndoga Babacar comme dans tout le sud-est du Sénégal, la situation des forêts s’est dégradée.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/482997/original/file-20220906-4758-cd3fh8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/482997/original/file-20220906-4758-cd3fh8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/482997/original/file-20220906-4758-cd3fh8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/482997/original/file-20220906-4758-cd3fh8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/482997/original/file-20220906-4758-cd3fh8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/482997/original/file-20220906-4758-cd3fh8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/482997/original/file-20220906-4758-cd3fh8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les ouvriers d’un camp illégal de coupe de bois et de charbonnage, dans une zone isolée du Sénégal oriental à la frontière sénégalo-gambienne. Ces jeunes hommes originaires de Guinée forestière vivent avec leur famille dans des conditions précaires, sans accès à l’eau ni aux soins.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/CIRAD</span></span>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/482998/original/file-20220906-24-361j37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/482998/original/file-20220906-24-361j37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/482998/original/file-20220906-24-361j37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/482998/original/file-20220906-24-361j37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/482998/original/file-20220906-24-361j37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=506&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/482998/original/file-20220906-24-361j37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=506&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/482998/original/file-20220906-24-361j37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=506&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Camp illégal de coupe de bois (charbonnière, ouvrier et fagots) dans la forêt aménagée de la commune de Ndoga Babacar (département de Tambacounda) ; en août 2019, Oumar Dème (en bleu), maire de la commune, a organisé une conférence de presse dans ce camp.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/CIRAD</span></span>
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<h2>Une région forestière menacée par les activités humaines</h2>
<p>La région Sud-Est du Sénégal est pourtant gâtée par la nature. Contrastant drastiquement avec le reste du pays, cette zone subtropicale bénéficie de précipitations abondantes, en moyenne 730 mm/an.</p>
<p>Ce climat clément permet de maintenir le plus grand gisement forestier du pays. La région est connue pour ses forêts classées, dont le parc national du Niokolo-Koba, inscrit sur la liste des sites du patrimoine mondial de l’Unesco, abritant une faune et flore très riches. Cependant, à travers la fenêtre des voitures, les caravaniers observent le long des routes des tapis de cendres noires et une savanisation galopante. Triste conséquence du charbonnage, des feux de brousse anthropiques, de l’exploitation forestière et de la mise en culture de nouvelles terres.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484661/original/file-20220914-8366-ygjnt5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484661/original/file-20220914-8366-ygjnt5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484661/original/file-20220914-8366-ygjnt5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484661/original/file-20220914-8366-ygjnt5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484661/original/file-20220914-8366-ygjnt5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484661/original/file-20220914-8366-ygjnt5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484661/original/file-20220914-8366-ygjnt5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Producteur maraîcher dans une zone de front pionnier de Medina Yoro Foulah (département de Kolda).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/Cirad</span></span>
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<p>Malgré une volonté politique de protéger les forêts, ces dernières disparaissent à un rythme effréné. Entre 1990 et 2015, les <a href="https://inondations-dakar.org/dataset/rapport-sur-l-etat-de-l-environnement-au-senegal-2015/resource/4c161442-52bd-4770-9b5d-f063452929ab">forêts sont passées de 9,3 à 8,2 millions d’hectares au Sénégal</a>, enregistrant une perte moyenne annuelle de 40 000 ha.</p>
<p>Mactar Diop, préfet du département de Kolda, est conscient du désastre environnemental qui se joue : « la coupe du bois, les défrichements irréguliers pour la production agricole et les feux de brousse anthropiques causent la disparition de beaucoup d’espèces animales et végétales ». Le commerce illicite de bois entre le Sénégal et la Gambie contribue à la disparition progressive d’espèces forestières comme le vène (<em>Pterocarpus erinaceus</em>) et le kapokier (<em>Ceiba pentandra</em>).</p>
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<span class="caption">Parcelle forestière après un feu de brousse dans le département de Kolda.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/CIRAD</span></span>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/484590/original/file-20220914-16-v5bblw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/484590/original/file-20220914-16-v5bblw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/484590/original/file-20220914-16-v5bblw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/484590/original/file-20220914-16-v5bblw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/484590/original/file-20220914-16-v5bblw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/484590/original/file-20220914-16-v5bblw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/484590/original/file-20220914-16-v5bblw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/484590/original/file-20220914-16-v5bblw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=504&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Chaque année, les populations du département de Kolda mettent le feu aux forêts et aux jachères. Le brûlage permet de défricher rapidement les sous-bois et de stimuler la croissance de la biomasse herbacée pour nourrir le bétail. Cette pratique, lorsqu’elle n’est pas bien maîtrisée, peut également tuer les arbres et dégrader les sols.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/Cirad</span></span>
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<h2>Une agroécologie protectrice des forêts</h2>
<p>Lors de son passage dans le sud-est du Sénégal, la caravane DyTAES a mis en lumière plusieurs initiatives de lutte contre les feux de brousse anthropiques et la coupe abusive des arbres.</p>
<p>À Kolda, deux communes contiguës (Niaming/Médina Yoro Foulah) se sont coordonnées depuis 2020 pour mettre en défens une parcelle forestière de 20 hectares. Bien que de petite échelle, cette initiative a montré qu’avec un engagement fort des collectivités territoriales, il était possible de mettre un coup d’arrêt rapide à la déforestation.</p>
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<p>Dans le département de Vélingara, plusieurs comités de gestion des catastrophes naturelles ont été créés avec l’appui de l’ONG World vision. Ces comités organisent un réseau de surveillance et d’alerte contre l’élagage illégal des arbres. Ils implantent également des haies « pares-feux » en privilégiant l’anacardier, une essence qui produit les délicieuses noix de cajou et qui constitue une excellente barrière naturelle contre la propagation des incendies.</p>
<p>À Tambacounda, l’ONG Enda Pronat fait la promotion à grande échelle de la régénération naturelle assistée, une pratique qui consiste à protéger les jeunes arbres qui apparaissent spontanément (plutôt que de planter de nouveaux arbres).</p>
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<span class="caption">Le secrétaire du comité environnemental de veille de la forêt de Niaming/Médina Yoro Foulah, dans le Sud-Est du Sénégal.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/Cirad</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/483003/original/file-20220906-18-e9yk9u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/483003/original/file-20220906-18-e9yk9u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=203&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/483003/original/file-20220906-18-e9yk9u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=203&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/483003/original/file-20220906-18-e9yk9u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=203&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/483003/original/file-20220906-18-e9yk9u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=255&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/483003/original/file-20220906-18-e9yk9u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=255&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/483003/original/file-20220906-18-e9yk9u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=255&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Visite par les caravaniers de la forêt mise en défens de Niaming/Médina Yoro Foulah ; L’anacardier, en plus de produire des noix, permet de construire des haies vives pare-feux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/CIRAD ; Malick Djitté/FONGS</span></span>
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<h2>Semer les graines du changement</h2>
<p>Lutter contre la déforestation passe également par une sécurisation et une diversification des moyens d’existence des populations. Dans le sud-est du Sénégal, ces dernières dépendent principalement de l’élevage, de la production de coton, de la riziculture et des cultures d’autosubsistance (niébé, fonio, mil, maïs, etc.).</p>
<p>Malheureusement, ces spéculations subissent de plein fouet les effets négatifs de la révolution verte. En particulier, le coton est en proie à une utilisation importante et abusive de pesticides parfois non homologués ; une situation rendue possible par le manque d’encadrement des producteurs et la porosité de la frontière sénégalo-gambienne.</p>
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<span class="caption">Culture conventionnelle de coton à Koussanar (département de Tambacounda) ; moissonneuses-batteuses utilisées en riziculture intensive à Anambe (département de Velingara) ; Élevage intensif de volailles à Medina Yoro Foulah (département de Kolda).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/CIRAD</span></span>
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<p>Lors des étapes sud-est de la caravane, les participants ont rencontré plusieurs initiatives agroécologiques visant à réduire la dépendance des paysans et paysannes vis-à-vis des intrants extérieurs (pesticides, engrais et semences).</p>
<p>Dans le département de Vélingara, par exemple, la ferme agroécologique Biolopin à Djimini intègre intelligemment l’arboriculture, le maraîchage bio, l’élevage et la production de plantes médicinales. La ferme produit, améliore et diffuse des « semences paysannes » en collaboration avec l’Association sénégalaise des producteurs de semences paysannes (ASPSP).</p>
<p>Rustiques, résistantes et peu coûteuses, ces semences paysannes offrent une alternative précieuse aux semences distribuées par les compagnies agrosemencières, particulièrement gourmandes en intrants chimiques et dont la productivité diminue à chaque cycle cultural.</p>
<p>Lamine Biaye, fondateur de Biolopin, rappelle qu’« en agroécologie, il ne faut pas dépendre des semences extérieures […] ; il faut au contraire les produire soi-même pour être autonome. Il y a un grand vent de transition agroécologique à travers le monde, mais il n’y a pas de transition agroécologique sans semences paysannes ».</p>
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<figcaption>
<span class="caption">Visite d’un « grenier traditionnel amélioré » avec l’appui de Am Be Koun – Solidarité ; Semences et farine de mil ; Lamine Biaye, fondateur de Biolopin, présente sa collection de « semences paysannes ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Raphael Belmin/CIRAD ; Malick Djitté/FONGS</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans le département de Tambacounda, les producteurs sont également sur la voie de l’autonomisation semencière. Des banques céréalières villageoises ont été créées par l’ONG CARITAS dans 20 villages, bénéficiant à 1020 producteurs et productrices sur une superficie totale de 213 hectares.</p>
<p>À Koussanar, l’ONG ActionAid et la Fédération Yakar Niani Wouli ont mis en place une production écologique de semences bénéficiant à 40 femmes issues de 6 villages. À Saré Nopi, l’organisation Am Be Koun-Solidarité (ABK-S) a modernisé le grenier traditionnel « kourou-kourou » afin d’améliorer les conditions de conservation et de préservation des semences.</p>
<p>Après leur périple de 34 jours à travers le Sénégal, les acteurs de la caravane DyTAES vont se consacrer à la capitalisation des résultats obtenus sur le terrain et à l’ouverture d’un nouveau cycle de dialogue avec le gouvernement sénégalais. Une manière de porter la voix des ruraux du pays et d’alimenter le « plan Sénégal Émergent Vert » en cours d’élaboration.</p>
<hr>
<p><em>Laure Diallo est co-autrice de cet article. Retrouvez tous les articles sur la grande caravane de l’agroécologie au Sénégal en <a href="https://theconversation.com/fr/topics/la-caravane-de-lagroecologie-126986">cliquant ici</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190092/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les étapes de la caravane évoquées dans cet article ont été organisées par les membres de la DyTAES avec l’appui financier du projet Fair Sahel (Union Européenne), de MISEROR, de Action Aid, de l’Agence Française de Développement, du Cadre National de Concertation des Ruraux (CNCR) et de Bel Fondation d’Entreprise.
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Raphaël Belmin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour la dernière étape de la grande caravane de l’agroécologie 2022, cap sur la plus grande zone forestière du pays.Marie-Liesse Vermeire, Chercheuse en écologie du sol, CiradRaphaël Belmin, Chercheur en agronomie, photographe, accueilli à l’Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA, Dakar), CiradLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1827302022-05-16T19:46:54Z2022-05-16T19:46:54ZViolences obstétricales en Afrique de l’Ouest : la pandémie de Covid-19 a-t-elle changé la face des hôpitaux ?<p>Le Sénégal est actuellement sous le choc depuis le décès d’une mère et son bébé à naître de 9 mois dans la salle d’attente d’un hôpital régional. La famille de la défunte dénonce une négligence de l’équipe de garde et plusieurs sages-femmes sont en garde à vue en attente de jugement définitif.</p>
<p>Face à cela, les syndicats de la santé sont en grève – <a href="https://www.courrierinternational.com/article/sante-apres-la-mort-d-astou-sokhna-le-senegal-choque-par-le-martyr-des-femmes-enceintes">journées sans accouchement</a> – pour défendre leur corporation. Une suspension des services de santé qui nourrit un sentiment d’injustice sociale des patientes, qui organisent de leur côté des <a href="https://mobile.twitter.com/seneweb">marches de soutien à la famille éplorée</a>.</p>
<p>Le décès de cette jeune femme n’est que la partie émergée des défis de santé que constituent les <a href="https://www.cairn.info/revue-sante-publique-2021-5-page-629.htm">violences obstétricales</a>, en Afrique et dans le monde entier. Cet événement terrible est un exemple révélateur d’un environnement sociosanitaire souvent dysfonctionnel, caractérisé par l’impossible admission de patientes aux urgences par manque de garant, où des femmes en travail ou leurs fœtus peuvent mourir dans les ambulances par manque de lit de réanimation après avoir fait le tour des hôpitaux référencés.</p>
<p>En dépit de <a href="https://www.cairn.info/revue-sante-publique-2021-5-page-695.htm">projets d’humanisation de l’accouchement</a> et des <a href="https://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine-2012-3-page-100.htm">politiques de gratuité</a> en faveur du couple mère/enfant en vigueur dans la plupart des formations sanitaires publiques des pays ouest-africains, ce drame fait ainsi ré-émerger les tensions suscitées par le <a href="https://ideas4development.org/violences-obstetricales-afrique-ouest/">sort réservé à de très nombreuses femmes dans les maternités en Afrique de l’Ouest</a>, et repose les questions structurelles sur les <a href="https://theconversation.com/afrique-francophone-a-quoi-servent-tous-ces-hopitaux-106459">hôpitaux</a> dans ces pays.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1514104425270464514"}"></div></p>
<h2>Développer les capacités d’accueil hospitalier</h2>
<p>En 2020, l’organisation de la riposte contre la pandémie de Covid-19 a été un moment fort pour le diagnostic des systèmes sanitaires du monde entier.</p>
<p><a href="https://www.ceped.org/fr/publications-ressources/working-papers-du-ceped/article/la-riposte-nationale-contre-la">En Afrique</a>, plusieurs initiatives ont été entreprises par les États pour y <a href="https://doi.org/10.3917/spub.216.0785">faire face et renforcer les systèmes sanitaires locaux</a> : augmentation de la capacité d’accueil (construction d’hôpitaux, de salle d’hospitalisation), relèvement du plateau technique (lits de réanimation), recrutement de spécialistes et déploiement dans les zones enclavées.</p>
<p>Aujourd’hui, malgré ces efforts consentis en période d’urgence, les difficultés d’accès aux soins persistent en Afrique de l’Ouest, surtout concernant la santé maternelle. Les femmes enceintes issues de familles démunies décèdent encore par défaut de prise en charge adéquate (encore plus au Sahel <a href="https://doi.org/10.1186/s13031-020-00334-5">dans les zones de conflit</a>).</p>
<p>Les familles aisées affiliées aux assurances privées ou aux mutuelles de santé, ou celles capables de payer, se tournent vers les <a href="https://www.documentation.ird.fr/hor/fdi:010074622">cliniques privées locales</a>. Pendant ce temps, l’accouchement à domicile ou assisté par une accoucheuse traditionnelle reste une <a href="https://corpus.ulaval.ca/jspui/bitstream/20.500.11794/37992/1/34919.pdf">pratique largement partagée par les familles les plus démunies</a>, mais aussi par certaines femmes ayant eu une <a href="https://doi.org/10.1111/j.1600-0412.2011.01163.x">expérience traumatique antérieure d’accouchement à l’hôpital</a>.</p>
<p>Ainsi, les inégalités d’accès aux soins entre les classes sociales demeurent, en Afrique comme ailleurs. Faut-il croire que l’engouement du « renouveau » qu’avait suscité la pandémie de Covid-19 n’a finalement pas permis une réforme en profondeur, ni la généralisation de la <a href="https://theconversation.com/les-defis-de-la-couverture-sanitaire-universelle-en-afrique-un-ouvrage-de-synthese-en-francais-169422">couverture sanitaire universelle</a> promulguée par les Nations unies en 2015 ?</p>
<p>Il nous semble que le déterminisme structurel des réformes néolibérales reprend le dessus sur les mesures conjoncturelles de la riposte face au Covid-19, largement financées par l’extérieur.</p>
<h2>Un modèle hospitalier néolibéral ?</h2>
<p>Depuis les programmes d’ajustements structurels des années 1980-1990, le fonctionnement des formations sanitaires en Afrique repose surtout sur un modèle néolibéral.</p>
<p>Si la plupart des ressources humaines sont payées par l’État, chaque structure de santé (hôpital, centre, poste) gère son propre budget de fonctionnement, provenant en grande partie des prestations payantes (pour la partie officielle) des patients (tickets de consultation, frais examens médicaux, vente de médicaments). Le fonctionnement financier de l’hôpital public repose donc sur une logique de marché – offre des professionnels de santé et demande des usagers (malades) – et une bonne santé financière permet d’assurer la pérennité du service et des soins.</p>
<p>En plus des deux parties prenantes (prestataires et clients), s’ajoute le rôle régulateur de l’État, tantôt salvateur, tantôt déstabilisateur.</p>
<p>La politique interventionniste de l’État providence accorde sur le papier aux usagers des prestations gratuites, comme pour les <a href="https://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine-2012-3-page-11.htm">enfants</a> de moins de 5 ans ou les césariennes. Ces initiatives à vocation sociale reposant sur une équité territoriale par la couverture santé universelle permettent aux familles, dont les plus démunies, d’accéder aux soins à moindre coût et augmentent ainsi le <a href="http://www.equitesante.org/wp-content/uploads/2015/12/Numero-1-Nov2015.pdf">pouvoir d’agir des usagers et des usagères</a>. Le Burkina Faso est un bel exemple de volonté politique et de réussite à cet égard.</p>
<p>Mais l’État doit rembourser <em>a posteriori</em> aux formations sanitaires les prestations des populations enregistrées dans le registre des politiques de gratuité. C’est souvent là que le bât blesse.</p>
<p>En effet, les retards de remboursement de l’État mettent les structures de santé sous pression financière pour acheter des intrants et payer les salaires du personnel contractuel. Ces retards contribuent à une rupture <a href="https://doi.org/10.1016/j.rbms.2019.12.001">éthique des soignants</a> qui enveniment les relations soignants-soignés et conduisent à des pratiques médicales inappropriées.</p>
<p>Conjuguée à la faible formation en psycho-sociologie des relations aux soins, la pression financière pousse certains prestataires à <a href="https://www.cairn.info/revue-agone-2016-1-page-89.htm">trier les malades</a>, non pas suivant l’urgence médicale mais suivant la capacité de paiement : <a href="https://pfongue.org/IMG/pdf/tdr_etude_anthropologique_aacid.pdf">« On prend les patients qui payent cash ! Les patients ayant besoin de prestations gratuites ou sans lettre de garantie de la mutuelle de santé vont devoir attendre »</a>, nous a dit une sage-femme lors d’une analyse des barrières à l’adhésion des populations dans les mutuelles de santé au Sénégal.</p>
<p>Les femmes avec un capital économique (et social) faible sont alors plus exposées aux violences obstétricales que les autres.</p>
<h2>Violences exercées et injonctions contradictoires</h2>
<p>Les <a href="https://www.documentation.ird.fr/hor/fdi:010031060">violences en institutions de soins ne sont ni nouvelles</a> ni <a href="https://editions.flammarion.com/les-brutes-en-blanc/9782081390331">l’apanage des professionnels de santé ouest-africains</a>.</p>
<p>Les négligences et pratiques inappropriées des soignants sont quotidiennes ; elles se manifestent dans des hôpitaux sous pression assaillis par des <a href="https://www.cairn.info/revue-sante-publique-2004-1-page-37.htm">injonctions étatiques qui brouillent leur fonctionnement</a>. En Afrique, des centaines de <a href="https://www.chathamhouse.org/2017/12/hospital-detentions-non-payment-fees">femmes sont retenues dans les hôpitaux après avoir accouché par défaut de paiement des prestations</a>.</p>
<p>L’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait pourtant demandé aux pays de <a href="https://www.who.int/publications/m/item/public-health-and-social-measures-for-covid-19-preparedness-and-response-in-low-capacity-and-humanitarian-settings">supprimer le paiement direct des soins durant la pandémie</a>. Même si certains économistes de l’OMS ne sont pas d’accord avec cette solution, la commission pour la santé de la revue <a href="https://doi.org/10.1016/S2214-109X(22)00005-5">The Lancet</a> vient de rappeler l’importance que les soins de santé primaires soient gratuits au point de service, étant entendu que l’État doit en garantir le financement.</p>
<p>Néanmoins, rares sont les <a href="https://scienceetbiencommun.pressbooks.pub/cus/front-matter/introduction/">pays africains à garantir ce droit à la santé et respecter leurs engagements au financement de la santé</a>.</p>
<h2>Quelles perspectives ?</h2>
<p>L’hôpital public des pays ouest-africains est plus que jamais sous tension, d’autant que la pandémie de Covid-19 a remis l’hospitalo-centrisme au goût du jour (au Sénégal, les hôpitaux absorbent deux tiers des dépenses de santé).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Porte ouverte sur l’intérieur d’une salle d’accouchement dans un état de propreté limite" src="https://images.theconversation.com/files/462032/original/file-20220509-16-alkylb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/462032/original/file-20220509-16-alkylb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=803&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/462032/original/file-20220509-16-alkylb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=803&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/462032/original/file-20220509-16-alkylb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=803&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/462032/original/file-20220509-16-alkylb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1009&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/462032/original/file-20220509-16-alkylb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1009&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/462032/original/file-20220509-16-alkylb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1009&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les maternités demandent encore de gros investissements au Sénégal pour offrir de bonnes conditions d’accouchement aux femmes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Abdoulaye Moussa Diallo</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Au-delà de la baisse constante de la mortalité maternelle depuis 1987, pour améliorer ce climat socioprofessionnel, l’État doit absolument consentir à augmenter son investissement dans le secteur sanitaire. Au Sénégal, par exemple, seulement 5 % du budget national est alloué à la santé. Ce montant est dérisoire au regard des nombreux défis auxquels l’organisation sanitaire est confrontée.</p>
<p>Le plan d’investissement annoncé en 2020 de 1 400 milliards de francs CFA, dont 62 % pour les infrastructures, jusqu’en 2024 ne sera certainement pas suffisant. De surcroît, moins de <a href="https://www.dhsprogram.com/pubs/pdf/FR368/FR368.T.pdf">5 % de la population</a> est couverte par une mutuelle de santé communautaire, instrument phare du programme de couverture sanitaire universelle (CSU).</p>
<p>L’<a href="https://ceim.uqam.ca/db/IMG/pdf/note_politique_se_ne_gal.pdf">utilisation des profits dérivés des ressources extractives pour financer la santé</a> parait une solution durable et réalisable. Elle pourrait favoriser l’avènement de la CSU, notamment (mais pas seulement) par des <a href="https://theconversation.com/senegal-un-modele-dassurance-sante-resilient-en-temps-de-covid-19-143116">unités départementales d’assurance maladie</a>, à grande échelle et professionnelles, résilientes, solvables et dynamiques, capables de parer aux éventuelles actions hégémoniques et contreproductives pour le bon fonctionnement du système. Et de participer ainsi à l’avènement d’un « meilleur hôpital ».</p>
<p>Le soutien à la structure de la demande, à la réalisation d’un contre-pouvoir où les malades sont au cœur du système de santé devient une urgence pour débattre et trouver une solution, ensemble, avec les représentants de l’offre de soins. La judiciarisation de la santé ne sera pas une solution.</p>
<p>Pour cela, il va falloir que les acteurs se réconcilient avec le système sanitaire, en plaidant en faveur de l’effectivité d’une gouvernance sanitaire locale harmonieuse <a href="https://www.theses.fr/2021LILUA013">incluant les acteurs de santé communautaire</a>.</p>
<p>Cela peut passer par la création d’entités locales qui instaureront des relations de confiance basées sur des échanges constructifs et inclusifs afin d’en arriver à une <a href="https://www.academia.edu/9483200/La_promotion_de_la_sant%C3%A9_une_probl%C3%A9matique_au_coeur_de_nos_pr%C3%A9occupations_%C3%A9ditoriales">« santé » non seulement « par » et « pour » les communautés, mais aussi « selon elle »</a> où le <a href="https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/206971/9789290613176_eng.pdf">patient sera au cœur des prises de décisions</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182730/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Clémence Schantz a reçu des financements d'organismes de recherche publics (ANR, Institut Convergences et Migrations, Cité du Genre, Institut du Genre, etc)</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Valéry Ridde a reçu des financements d'organismes de recherche publics (ANR, IRSC, AFD, ONG etc.). Il est actuellement affecté à l'ISED/UCAD au Sénégal.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Abdoulaye Moussa Diallo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La prise en charge des femmes enceintes à l’hôpital reste un défi au Sénégal, notamment pour des raisons pécuniaires. Comment remédier aux violences obstétricales qui peuvent en découler ?Abdoulaye Moussa Diallo, Sociologue, Université de LilleClémence Schantz, Sociologue, Institut de recherche pour le développement (IRD)Valery Ridde, Directeur de recherche, Institut de recherche pour le développement (IRD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1819122022-05-10T21:47:42Z2022-05-10T21:47:42ZLe niébé, une alternative pour la souveraineté alimentaire des pays d’Afrique subsaharienne ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/462214/original/file-20220510-22-a45d3j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C11%2C3695%2C2428&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un producteur dans un champ de niébé au Sénégal.</span> <span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Appartenant à la famille des Fabaceae, le niébé <em>Vigna unguiculata (L.) Walp</em> est une légumineuse à graines originaire d’Afrique, aujourd’hui cultivée dans presque toutes les <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-018-34555-9">régions tropicales et subtropicales</a>. Le niébé représente la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S037842900300039X?via%3Dihub">plus importante culture</a> de légumineuse à graines d’Afrique subsaharienne, en particulier dans les zones de savane aride à semi-arides. Les principaux pays producteurs sont le Nigéria et le Niger qui représentent à eux deux près de la moitié de la production mondiale.</p>
<p>Cette denrée de base, exploitée et valorisée de manière efficiente, pourrait constituer un véritable rempart contre la malnutrition et la dépendance vis-à-vis de certains produits comme le riz, les protéines animales et le blé, dont on mesure aujourd’hui, à la lumière du conflit Russo-Ukrainien, les vulnérabilités pour les populations subsahariennes. Le niébé offre aussi un large éventail de possibilités gastronomiques, pour la plupart méconnues. Par exemple, plus de 50 plats peuvent être réalisés avec ce dernier, incluant entrées, plats de résistance, desserts, et <a href="https://www.enqueteplus.com/content/diversification-des-fili%C3%A8res-les-merveilles-du-ni%C3%A9b%C3%A9">même le pain</a> !</p>
<h2>Origine et distribution géographique du niébé</h2>
<p>Après la domestication de ses formes sauvages par les premiers cultivateurs d’Afrique, dès le Néolithique, le niébé fut rapidement introduit en Inde. Les dates de l’introduction du niébé en Europe divergent et font toujours l’objet de débats entre scientifiques, mais tout le monde s’accorde sur le fait que le niébé y était déjà consommé <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Vigna_unguiculata">quelques siècles avant notre ère</a>. Alors appelé dolique à œil noir, habine des Landes ou haricot Mongette de Provence, il était cultivé dans le sud de la France avant son remplacement progressif par le haricot commun (<em>Phaseolus vulgaris</em> L.), plus productif et mieux adapté aux climats tempérés.</p>
<h2>Importance nutritionnelle, patrimoniale et socio-économique du niébé</h2>
<p>Le niébé occupe une bonne place dans les politiques de diversification agricole en Afrique de l’Ouest et du Centre. À ce titre, les états de la région tentent d’accompagner le regain d’intérêt pour cette plante locale longtemps délaissée malgré ses nombreuses vertus et en particulier ses qualités nutritionnelles. Avec un contenu en protéines supérieur à 20 %, la graine mûre représente une source importante d’acides aminés. Elle contient une grande quantité d’amidon (50 à 67 %) et présente de fortes teneurs en fibres alimentaires et en vitamines de type B (acide pantothénique ou acide folique). La graine est également riche en microéléments essentiels, tels que le fer, le calcium et le zinc et possède une faible de teneur en matière grasse, ce qui en fait une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/jsfa.7644">ressource très intéressante</a> d’un point de vue nutritionnel.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/462262/original/file-20220510-26-y5ht2m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/462262/original/file-20220510-26-y5ht2m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=593&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/462262/original/file-20220510-26-y5ht2m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=593&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/462262/original/file-20220510-26-y5ht2m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=593&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/462262/original/file-20220510-26-y5ht2m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=745&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/462262/original/file-20220510-26-y5ht2m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=745&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/462262/original/file-20220510-26-y5ht2m.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=745&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Graines de niébé.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Seule la présence de quelques facteurs antinutritionnels, qui peuvent réduire la digestibilité ou bien la biodisponibilité de certains minéraux essentiels (Magnésium, Calcium, Fer, Zinc), <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/10904935/">constituent des freins</a> pour l’acceptabilité et la promotion de cette légumineuse à graine. L’utilisation des différentes techniques de préparation et des efforts dans la sélection variétale visant à réduire ces composés antinutritionnels pourraient permettre de limiter les effets indésirables et d’améliorer encore les vertus du niébé.</p>
<p>En Afrique subsaharienne, le niébé est un aliment de base très prisé pour ses feuilles, ses gousses vertes et ses graines sèches pour l’alimentation humaine, ou pour ses fanes riches en protéines, qui constituent un fourrage de qualité pour le bétail. En plus de leur haute teneur en protéines, comparable aux graines mûres, les fanes présentent des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/jsfa.7644">taux d’acides aminés essentiels</a> encore plus élevés. Ces dernières sont une ressource très prisée durant la saison sèche car les paysans qui récoltent et stockent le fourrage de niébé pour la vente en pleine saison sèche augmentent leurs revenus de 25 %.</p>
<p>Dans la moitié nord du Sénégal, la récolte des cultures vivrières traditionnelles, comme le mil, le sorgho, l’arachide, et les variétés tardives de niébé sous forme de gousses sèches ont généralement lieu entre octobre et décembre. La possibilité de récolter les variétés de niébé à cycle court, c’est-à-dire à récolte précoce, est très importante car elle procure de la nourriture à un moment de l’année où les greniers sont presque vides (période de soudure).</p>
<p>La vente des gousses est aussi une opportunité pour les producteurs, et notamment les femmes qui sont très souvent impliquées dans la culture, la récolte et la vente de niébé, d’obtenir des revenus à une période critique où les prix des autres denrées sont au plus haut.</p>
<p>Depuis plusieurs années, cette spéculation est passée d’une culture vivrière à une culture de rente, au même titre que l’arachide. Le circuit de transformation du niébé est très prometteur : non seulement le prix est plus rémunérateur, mais il y a aussi beaucoup plus de possibilités de valorisation. Les transformatrices sénégalaises disent que tout ce qui peut être réalisé avec le mil, le maïs et le riz, peut l’être avec le niébé.</p>
<h2>Modes de cultures et services écosystémiques</h2>
<p>En Afrique de l’Ouest, notamment au Sénégal et au Burkina Faso, le niébé joue un rôle majeur dans la rotation ou l’association avec des cultures de céréales (maïs, mil et sorgho), en particulier en zones caractérisées par une faible pluviométrie et des sols peu fertiles. Au Sénégal, le niébé est surtout cultivé dans les régions de Diourbel, Louga et Thiès. Avec à peine 300-500 mm d’eau par an et une pluie erratique qui se répartit sur les trois mois d’hivernage (juillet-septembre), cette zone est sujette aux sécheresses.</p>
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<span class="caption">Champ de niébé au Sénégal.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’utilisation par les producteurs de plusieurs variétés améliorées par la recherche agricole, qui bouclent leurs cycles en 2 mois, permet de limiter l’impact des sécheresses et d’obtenir des gousses fraîches en pleine période de soudure.</p>
<p>Outre ces variétés à cycle court, d’autres variétés très appréciées des producteurs à port érigé ou rampant sont également disponibles. Grâce à l’utilisation de semences de qualité, les rendements en graines peuvent atteindre 800 kg, voire 1,3 tonne par hectare avec les nouvelles variétés.</p>
<p>En dépit d’une teneur en protéines importante, les besoins en azote minéral pour la culture du niébé sont peu élevés. Ce paradoxe peut s’expliquer par une particularité commune à une grande partie des légumineuses qui sont capables de fixer le diazote atmosphérique présent en abondance dans l’air grâce à une interaction symbiotique avec des bactéries du sol, appelées rhizobiums. Cette symbiose fixatrice d’azote procure aux légumineuses un avantage net dans des sols pauvres et représente un levier d’amélioration de la productivité des cultures associées complémentaires telles que le mil, le sorgho ou le maïs, et participe à la durabilité des agroécosystèmes.</p>
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<p>Afin d’améliorer la production tout en respectant l’environnement, divers types de biofertilisants sont utilisables comme les engrais organiques ou le compost (résidus d’origine végétale et/animale décomposés, stabilisés et enrichis) qui sont couramment utilisés mais insuffisants pour couvrir de grandes surfaces de cultures. L’inoculation de microorganismes promoteurs de croissance des plantes, comme les bactéries fixatrices d’azote (rhizobiums) ou les champignons endomycorhiziens, représentent également un levier potentiel d’amélioration de la production du niébé et <em>a minima</em> de stabilisation des rendements en graines. Leur utilisation par inoculation, une technique simple d’apport en masse des microorganismes sélectionnés au moment du semis, est en cours de structuration au Sénégal avec le développement d’unités de production de champignons mycorhiziens en milieu paysan.</p>
<h2>Opportunités, attentes des communautés d’acteurs et mesures d’accompagnement nécessaires</h2>
<p>Pour l’heure, au Sénégal, les principaux freins au développement de cette culture sont l’accès à des semences de qualité, la pauvreté des sols, les ravageurs, les processus de transformation et l’organisation de la filière.</p>
<p>Pour lever ces freins, il est donc nécessaire de soutenir les sélectionneurs qui développent des variétés de niébé plus résistantes à la sécheresse et aux principaux ravageurs de culture. La sélection de variétés résistantes permettant une lutte préventive contre les ravageurs est d’autant plus importante que les traitements curatifs par des produits phytosanitaires qui accroissent les problèmes sanitaires (risques d’intoxication), économiques (coûts de ces produits) et environnementaux (appauvrissement des sols, pollution des nappes). Les pratiques culturales, comme l’association niébé-céréale, peuvent également atténuer l’impact de certaines maladies. Pour renforcer ou diversifier le circuit de transformation, le financement de projets intersectoriels permettant d’intégrer et de valoriser le savoir-faire local est primordial, par exemple le développement de solutions et de sites dédiés à la bonne conservation des grains, la transformation et leur commercialisation. </p>
<p>Si un cadre national interprofessionnel de la filière niébé a récemment été mis en place, cette interprofession doit cependant être renforcée et représentative de tous les acteurs. En parallèle, il est fondamental de structurer la recherche autour de vastes programmes multidisciplinaires et de soutenir le transfert à grande échelle des résultats qui en sont issus. Seule une action en ce sens des décideurs politiques et des bailleurs permettra le développement de cette filière niébé à haut potentiel pour les pays d’Afrique subsaharienne, mais aussi pour les pays du sud de l’Europe qui font face à des sécheresses de plus en plus fréquentes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181912/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le niébé est une légumineuse à haute valeur nutritionnelle qui pourrait servir de rempart à la malnutrition.Jean-Christophe Avarre, Chercheur en écologie virale, Institut de recherche pour le développement (IRD)Antoine Le Quéré, Chercheur en écologie microbienne, Institut de recherche pour le développement (IRD)Mouhamadou Moussa Diangar, Selectionneur / Généticien niébé, Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA)Moustapha Guèye, Agronome, Institut sénégalais de recherches agricoles (ISRA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.