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On estime que l'hépatite C a causé la mort de 400 000 personnes en 2016. Shutterstock

Comment la découverte de l’hépatite C par un chercheur albertain a conduit au prix Nobel et sauvé des vies

Cette année, le prix Nobel de physiologie ou médecine a été décerné aux virologues Harvey J. Alter et Charles M. Rice et au biochimiste Michael Houghton pour la découverte du virus de l’hépatite C. Cette reconnaissance représente une fois de plus un bel exemple de l’importance de faire de la recherche fondamentale afin de faire face aux ravages des maladies virales, responsables de millions de morts partout dans le monde.

Nobel de médecine : le prix décerné aux trois découvreurs du virus de l’hépatite C.

L’infection par l’hépatite C a entraîné environ 400 000 décès en 2016 selon l’OMS. Semblable au virus SARS-CoV-2 qui cause la Covid-19, l’hépatite C est un virus à ARN. Cependant, l’hépatite C pénètre dans l’organisme par la circulation sanguine, où elle attaque ensuite le foie pour entraîner une cirrhose et un cancer du foie.

Aucun vaccin efficace contre le virus de l’hépatite C n’est encore disponible jusqu’à ce jour, mais les découvertes scientifiques fondamentales des lauréats du prix Nobel ont contribué au développement de médicaments antiviraux qui guérissent aujourd’hui plus de 95 % des personnes infectées. Cependant, il y encore fort à faire afin d’améliorer l’accessibilité à ces traitements, surtout dans les pays plus démunis.

De gauche à droite, Harvey J. Alter, Charles M. Rice et Michael Houghton
Cette combinaison de photos montre, de gauche à droite, Harvey J. Alter, Michael Houghton et Charles M. Rice qui ont remporté conjointement le prix Nobel de médecine le 5 octobre 2020 pour leur découverte du virus de l’hépatite C. La principale cause de maladie du foie qui touche des millions de personnes dans le monde. « zoomable = « vrai. Rhoda Baer/National Institutes of Health, Richard Siemens/Université de l’Alberta, AP Photo/John Minchillo

Le Chimpanzé n° 910

En 1989, Houghton — accompagné du biochimiste Qui-Lim Choo, de la généticienne Amy Weiner et des virologues George Kuo, Lacy Overby et Daniel Bradley — ont rapporté l’étonnante découverte d’un nouveau virus qu’ils ont nommé hépatite C. À cette époque, rien n’était connu sur ce virus.

Alors, comment ces chercheurs ont-ils pu déchiffrer les caractéristiques expérimentales permettant d’identifier ce nouveau virus ? Pour ce faire, l’équipe a infecté des chimpanzés avec du sérum d’un patient diagnostiqué avec une hépatite de cause inconnue. L’animal expérimental clé était un chimpanzé nommé n° 910 ; L’ADN et l’ARN ont été extraits de son plasma.

En utilisant les techniques de biologie moléculaire de l’époque, l’ADN complémentaire aux acides nucléiques extraits du plasma du chimpanzé a été fabriqué dans le tube à essai, puis inséré dans un virus bactérien connu sous le nom de bactériophage lambda. Ces virus bactériens sont utilisés pour infecter les bactéries E. coli afin de fabriquer des protéines en grande quantité.

Illustration d’un bactériophage
Les chercheurs ont utilisé des bactériophages pour reprogrammer les bactéries E. coli afin de produire des protéines spécifiques. » zoomable = « vrai. Shutterstock

Nouvelle découverte d’un virus

À la grande stupéfaction de Houghton et de son équipe, le sérum d’un patient atteint d’hépatite contenait des anticorps qui reconnaissaient les protéines produites de cette manière. Ces anticorps avaient détecté un virus mortel jusqu’alors inconnu. Une expérimentation plus poussée avec des contrôles rigoureux a établi sans équivoque que cela représentait un nouveau virus à ARN. Un test sanguin a été développé permettant de détecter les patients infectés par ce nouveau virus qu’ils avaient découvert.

En 1975, Harvey Alter a découvert une forme d’hépatite mortelle chez certains patients qui avaient reçu des transfusions sanguines. Plus tard, Charles Rice a prouvé que le virus que Houghton et ses collègues avaient découvert était bien la cause de cette forme d’hépatite.

Biotech Nobels

Le prix Nobel récompense le travail qu’Harvey Alter a mené au sein de la société de biotechnologie Chiron Corporation. Ce n’est pas le premier prix Nobel attribué à une découverte biotechnologique — la méthode de réaction en chaîne par polymérase, ou PCR, utilisée aujourd’hui pour tester le virus SARS-CoV-2 résulte également d’une découverte biotechnologique. Cette découverte a été faite par Kary Mullis, qui a reçu le prix Nobel de chimie 1993 pour son travail effectué chez Cetus Corporation, l’une des premières sociétés de biotechnologie.

Ces découvertes innovatrices illustrées par ces deux prix Nobel annoncent une nouvelle direction dans la recherche grâce aux talents et aux ressources déployés par la biotechnologie via le capital-risque.


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Houghton et son équipe ont mis au point un vaccin contre l’hépatite C qui fait actuellement l’objet d’essais précliniques. Il est également en première ligne dans la lutte contre la pandémie de Covid-19. Ses recherches actuelles — financées par les Instituts de recherche en santé du Canada — visent à développer un vaccin contre la protéine clé de ces virus qui infectent des millions d’humains.

Houghton a été recruté au Canada en 2010 en partie dans le cadre du programme de Chaire d’excellence en recherche du Canada. Les 10 ans de Houghton à Edmonton en tant que Directeur du Li Ka Shing Applied Virology Institute ont déjà conduit au développement de médicaments pour l’hépatite C, ainsi que d’autres médicaments qui pourraient conduire à traiter la Covid-19.

Michael Houghton a été nommé titulaire de la Chaire d’excellence en recherche du Canada en virologie en 2010.

Jusqu’à tout récemment, les chefs de file de la recherche en santé au Canada pouvaient être financés dans le cadre du programme de subventions Fondation des IRSC. Malheureusement, ce programme qui est maintenant terminé, met en péril l’espoir de maintenir l’excellence à son plus haut niveau afin de retenir nos meilleurs talents dans la recherche axée sur la découverte.

Espérons que la reconnaissance de Houghton en Alberta renforcera les efforts visant à soutenir nos pionniers partout au Canada, alors que nous traversons cette crise de la Covid-19.

John Bergeron remercie Kathleen Dickson en tant que co-auteure et Nathalie Lamarche-Vane (Université McGill) pour les idées, corrections et modifications.

This article was originally published in English

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