tag:theconversation.com,2011:/fr/topics/cellules-souches-23930/articlescellules souches – The Conversation2024-01-09T17:55:50Ztag:theconversation.com,2011:article/2201842024-01-09T17:55:50Z2024-01-09T17:55:50ZBanques de sang de cordon ombilical, la France en pointe<p>Le sang de cordon, également appelé sang de cordon ombilical ou sang placentaire, est le sang qui reste dans le cordon ombilical et le placenta après la naissance du bébé, et après que le cordon a été clampé et coupé. </p>
<p>Riche en <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cellules-souches-23930">cellules souches</a> précurseures des cellules sanguines, il est précieux. En effet, ces cellules (aussi appelées « cellules souches hématopoïétiques »), possèdent une capacité particulièrement intéressante : elles sont capables de reconstituer tous les types de cellules sanguines, comme les globules rouges, les globules blancs et les plaquettes. </p>
<p>De ce fait, le sang de cordon peut être utilisé pour traiter des personnes atteintes de pathologies graves, notamment les <a href="https://www.frm.org/recherches-cancers/leucemies/focus-leucemies">leucémies</a>. Mais sa conservation, qui, selon les pays, peut se faire dans des banques publiques ou privées, pose diverses questions concernant l’accès à ce soin pour tous, et soulève des interrogations <a href="https://theconversation.com/fr/topics/bioethique-48728">bioéthiques</a>.</p>
<h2>Du prélévement à la greffe de sang de cordon</h2>
<p>Avant tout, précisons que le <a href="https://www.agence-biomedecine.fr/Don-prelevement-et-greffe-de-sang,63">prélèvement de sang de cordon ne présente aucun risque pour la mère ou le nouveau-né</a>.</p>
<p>La première greffe réussie de sang de cordon a eu lieu en 1988 par <a href="https://www.senat.fr/rap/r08-079/r08-0791.pdf#page=15">l’équipe française de l’hôpital Saint-Louis à Paris</a>. Le patient était un petit Américain de 5 ans atteint d’<a href="https://www.orpha.net/consor/cgi-bin/OC_Exp.php?Expert=84&lng=FR">anémie de Fanconi</a>.</p>
<p>Depuis lors, on estime que <a href="https://www.researchgate.net/publication/345388796_Worldwide_survey_on_key_indicators_for_public_cord_blood_banking_technologies_By_the_World_Marrow_Donor_Association_Cord_Blood_Working_Group">plus de 50 000 greffes de sang de cordon ont été réalisées dans le monde, avec un taux de réussite élevé</a>.</p>
<p>Concrètement, cinq étapes sont nécessaires depuis le prélèvement jusqu’à la greffe effective, comme le détaille l’Agence de la biomédecine :</p>
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<img alt="Le schéma montre avec des dessins légendés les 5 étapes nécessaires au don de sang de cordon, depuis le prélèvement jusqu’au don effectif." src="https://images.theconversation.com/files/566647/original/file-20231219-25-q90dyb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/566647/original/file-20231219-25-q90dyb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=503&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/566647/original/file-20231219-25-q90dyb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=503&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/566647/original/file-20231219-25-q90dyb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=503&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/566647/original/file-20231219-25-q90dyb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=632&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/566647/original/file-20231219-25-q90dyb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=632&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/566647/original/file-20231219-25-q90dyb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=632&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dondesangdecordon.fr/comment.php">Schéma extrait du site Internet dondesangdecordon.fr de l’Agence française de biomédecine</a></span>
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<p>En France, les banques qui collectent et conservent le sang de cordon sont publiques, les coûts de collecte et de conservation étant totalement pris en charge par l’État. Mais cette conservation répond à certaines règles.</p>
<h2>En France, des banques de sang de cordon publiques pour tous</h2>
<p>En France, le sang de cordon est conservé pour le bénéfice d’autrui. <a href="https://www.agence-biomedecine.fr/Don-prelevement-et-greffe-de-sang,63">Il est interdit d’en faire usage pour soi-même ou pour son propre enfant</a>.</p>
<p>La loi française prévoit que le don de sang de cordon peut être fait, de manière exceptionnelle, à l’enfant ou à ses frères et sœurs, mais seulement en cas de nécessité thérapeutique avérée et dûment justifiée lors du prélèvement.</p>
<p>En 2016, le tribunal de grande instance de Grasse (Alpes-Maritime) a néanmoins pour la première fois autorisé la conservation de sang de cordon ombilical à des fins privées et par anticipation. Des parents ont en effet pu conserver <a href="https://www.senat.fr/leg/exposes-des-motifs/ppl18-703-expose.html">le sang du cordon ombilical de leur enfant</a> « au regard de nécessités thérapeutiques justifiées », en l’occurrence de lourds antécédents familiaux (notamment des cancers du pancréas et du foie).</p>
<p>La requête du couple était fondée sur la crainte d’un risque « futur » pour l’enfant si ce dernier venait à développer une maladie grave. En conséquence, le <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2016/12/17/congeler-du-sang-de-cordon-ombilical-un-pari-incertain_5050516_3224.html">sang de cordon a été collecté pour être stocké dans une banque privée britannique</a>.</p>
<p>Il faut souligner que la loi française interdit habituellement de transporter, ou d’envoyer par colis, du sang de cordon ombilical à une société privée basée à l’étranger (articles <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006418888">511-8</a> à <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000034079662">511-8-2</a> du Code pénal).</p>
<p>Les critiques ont fait valoir que cette décision pourrait favoriser à l’avenir l’installation de banques de sang de cordon privées sur le territoire français.
Cependant, jusqu’à présent, en France, seules les banques de sang de cordon publiques, approuvées par les autorités sanitaires nationales et placées sous la supervision du Réseau Français de Sang Placentaire, sont autorisées à fonctionner. </p>
<p>Il faut par ailleurs insister sur le fait qu’à ce jour, <a href="https://www.agence-biomedecine.fr/Reseau-Francais-de-Sang-Placentaire">aucune étude n’a démontré l’efficacité thérapeutique des greffes effectuées sur soi à partir de son propre sang de cordon (qui aurait été conservé à cet effet)</a>. </p>
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<img alt="Schéma d’une carte de France sur laquelle figurent les banques et maternités du Réseau Français de Sang Placentaire (RFSP) en 2022" src="https://images.theconversation.com/files/566653/original/file-20231219-21-xjzrws.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/566653/original/file-20231219-21-xjzrws.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=733&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/566653/original/file-20231219-21-xjzrws.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=733&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/566653/original/file-20231219-21-xjzrws.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=733&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/566653/original/file-20231219-21-xjzrws.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=922&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/566653/original/file-20231219-21-xjzrws.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=922&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/566653/original/file-20231219-21-xjzrws.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=922&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dondesangdecordon.fr/comment.php">Agence de la biomédecine, Réseau français de sang placentaire (RFSP), 2022</a></span>
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<p>La situation française n’est cependant pas la norme : dans d’autres pays, le sang de cordon est conservé au sein de banques de sang de cordon privées à but lucratif qui posent question.</p>
<h2>La conservation du sang de cordon, un marché en expansion</h2>
<p>La taille du marché mondial des services de mise en banque du sang de cordon est estimée à 33,8 milliards de dollars en 2023 et devrait atteindre <a href="https://www.coherentmarketinsights.com/market-insight/cord-blood-banking-services-market-3913">51,3 milliards de dollars d’ici 2030</a>.</p>
<p>Il est principalement dominé par les banques de sang de cordon privées. On estime que les banques de sang de cordon publiques détiennent environ 800 000 unités de sang de cordon dans le monde, tandis que les <a href="https://www.nature.com/articles/s41409-019-0546-9">banques privées en conservent plus de 4 millions</a>.</p>
<p>En <a href="https://www.researchgate.net/publication/373820800_Cord_Blood_Banks_Types_and_Accreditations_-_A_Review">Europe également</a>, ce sont les banques de sang de cordon privées qui dominent le marché. Dans plusieurs pays européens comme en Hongrie, en Bulgarie, en Lituanie, au Luxembourg, en Roumanie, en Estonie et au Danemark, seules des banques de sang de cordon privées sont disponibles. Il en va de même dans d’autres pays du monde, tels que la Norvège ou la Nouvelle-Zélande.</p>
<h2>Des problèmes à plusieurs niveaux</h2>
<p>Dans ces banques de sang de cordon privées, les unités de sang de cordon sont réservées pour l’usage exclusif des familles qui peuvent s’offrir ce soin, accentuant ainsi les disparités dans l’égalité d’accès au soin entre les riches et les pauvres.</p>
<p>Aux <a href="https://thocc.org/health-community/health-resources/health-library/detail?id=zx1634&lang=en-us">États-Unis, par exemple</a>, ce modèle de <em>Private banking</em> se traduit généralement par la facturation de frais initiaux de 1 000 à 2 000 dollars pour le prélèvement et le stockage, suivis de frais annuels de plus de 100 dollars pour l’entreposage.</p>
<p>En outre, les stratégies de marketing des banques de santé privées, qui présentent le sang de cordon comme une « assurance biologique » contre de futures maladies mortelles, induisent les familles en erreur. Comme évoqué, la probabilité que ce sang de cordon puisse être techniquement utilisable à l’avenir pour son enfant est très faible, selon les scientifiques.</p>
<p>De plus, ces banques privées peuvent faire faillite et transférer les unités de sang de cordon stockées à l’étranger après leur fermeture, sans en avertir les familles. C’est <a href="https://www.swissinfo.ch/fre/multimedia/cryoconservation_des-cellules-souches-dispers%C3%A9es-par-une-entreprise-suisse/45286800">ce qui s’est produit dans le passé avec Cryo-Save Europe</a>.</p>
<h2>En Europe, des systèmes hybrides qui ne sont pas exempts de critiques</h2>
<p>Au Royaume-Uni, où les banques de sang de cordon privées et publiques se côtoient, il existe également des banques de sang de cordon hybrides combinant systèmes publics et privés, parfois dans des proportions différentes. Par exemple, la Precision Cellular Storage, anciennement connue sous le nom de <em>Virgin Health Bank</em>, stocke 80 % de chaque unité de sang de cordon pour un usage public et les 20 % restants pour un usage privé. Ces 20 % réservés à l’usage personnel contribuent néanmoins à réduire l’accès aux soins de santé pour tous.</p>
<p>En Suisse, des banques de sang de cordon hybrides coexistent également, sous forme de banques de sang de cordon privées et publiques au niveau national. Toutefois, dans le modèle hybride suisse, l’État peut demander à une banque hybride de disposer d’unités de sang de cordon pour en faire bénéficier un patient lambda qui s’avérerait compatible avec ledit sang de cordon.</p>
<p>Cette demande est soumise à la volonté des parents, qui peuvent accepter ou refuser de donner accès au sang de cordon de leur enfant. S’ils donnent leur accord, ils sont alors remboursés des frais de conservation engagés.</p>
<p>En Espagne (où se trouvent également des banques de sang de cordon publiques et privées), le modèle des banques de sang de cordon hybrides, bien que différent du modèle suisse, n’est pas non plus exempt de critiques. Pour garantir l’accès aux cellules souches du sang de cordon, l’État espagnol a en effet le droit de réquisitionner des unités de sang de cordon conservées par les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00404-023-07003-x">banques hybrides</a> (toujours en échange du remboursement des frais de banque). </p>
<p>Ce modèle peut être perçu comme un risque du point de vue des familles, qui peuvent être réticentes à l’idée de s’inscrire sur les registres, de peur que le sang de cordon de leur enfant stocké dans ces banques hybrides ne soit réquisitionné.</p>
<h2>Le modèle français semble le plus approprié</h2>
<p>Les banques de sang de cordon soulèvent aussi plusieurs questions juridiques et éthiques concernant la propriété, le consentement, l’information et la protection des données.</p>
<p>Pour y répondre, en France, la collecte comme la conservation du sang de cordon dans les banques publiques sont réglementées par le Code de la santé publique (CSP) qui se fondent sur les principes bioéthiques de dignité, de liberté et de solidarité.</p>
<p>Le principe de dignité implique la non-commercialisation du corps humain (<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006419293">articles 16-1 et 16-5 du Code civil</a>). Par conséquent, le prélèvement et la mise en banque du sang de cordon ne sont autorisés qu’à des fins thérapeutiques et de recherche <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000046126007">(art. L1241-1 du CSP)</a> et n’ont pas vocation à faire partie du marché commercial.</p>
<p>Appliqué au domaine médical, le principe de liberté exige le consentement libre et éclairé de la personne concernée avant toute intervention médicale ou traitement, sauf disposition légale contraire <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000046126007">(art. L1111-4 du CSP)</a> et <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000031927576">(art. L 1111-5 du CSP)</a>.</p>
<p>Ce consentement peut être retiré à tout moment (<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041721056">art. L1111-4 du CSP</a>). Ainsi la mise en banque du sang de cordon n’est autorisée que si la femme a donné son consentement écrit et éclairé avant le prélèvement, au cours de sa grossesse. Elle peut révoquer son consentement à tout moment avant le prélèvement du sang de cordon (<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006686197/2002-01-18">art. L1241-1 du CSP</a>).</p>
<p>Enfin, en vertu du principe de solidarité, les banques de sang de cordon sont autorisées à condition que le don du sang de cordon soit gratuit, anonyme (<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000046126007">art. L1241-1 du CSP</a>) et destiné à un usage collectif.</p>
<p>En conclusion, pour des raisons éthiques comme pour garantir l’égalité d’accès aux soins, le modèle français, dans lequel seules les banques de sang de cordon publiques sont autorisées, semble être le plus approprié, contrairement à d’autres modèles à l’œuvre ailleurs en Europe et dans le monde.</p>
<p>Le modèle français maximise l’accès du public aux greffes de sang de cordon. Il vise à sauver plus de vies en essayant de faire correspondre les cellules souches du sang de cordon disponibles avec le plus grand nombre de personnes bénéficiaires, là où les banques de sang de cordon privées ne servent qu’un petit groupe d’utilisateurs.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220184/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Allane Madanamoothoo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En France, ce sont des banques publiques qui conservent le sang de cordon qui s’avère précieux pour traiter des maladies graves. Mais ailleurs, ce secteur est dominé par des sociétés privées.Allane Madanamoothoo, Professeur associé en droit, EDC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2139362023-10-11T10:50:23Z2023-10-11T10:50:23ZReconstruire les jonctions os-tendon-muscle en laboratoire : un défi sportif !<p>C’est notamment grâce à nos 500 tendons que nous sommes capables de bouger, car ils font le lien entre nos os et nos muscles. Mais comme le célèbre talon d’Achille, ils sont aussi un de nos points faibles : ils peuvent se rompre, et leur cicatrisation est alors très compliquée – tout comme les ligaments, qui font quant à eux le lien entre deux os.</p>
<p>Un gros enjeu pour certains sportifs – environ <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3761855/">40 % des joueurs de tennis sont touchés par des inflammations du tendon du coude</a>, et cela peut doubler chez les joueurs de plus de 40 ans. Une rupture de tendon peut aussi être synonyme de fin de carrière, comme ce fut le cas de Yoann Huget, qui a dû arrêter sa carrière de rugbyman en 2021 après une rupture du tendon d’Achille.</p>
<p>Et cela ne se limite pas aux athlètes ! En effet, les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/B9780128015902000053">personnes âgées sont aussi atteintes par des ruptures du tendon car avec l’âge ces derniers deviennent plus fragiles et ne se régénèrent plus aussi vite qu’ils se dégradent</a>. Environ <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3761855/">30 % des consultations pour des troubles musculo-squelettiques sont liées à des tendinopathies</a>. Ainsi, avec le vieillissement global de la population, comprendre comment réparer les tendons devient un enjeu majeur de santé publique.</p>
<h2>Faire pousser des tissus artificiels pour remplacer les tendons rompus</h2>
<p>Grâce aux progrès en ingénierie tissulaire et à l’utilisation de biomatériaux, on développe de nouvelles approches pour tenter de réparer les ruptures des tendons. L’idée est de <a href="https://doi.org/10.1098/rsif.2006.0124">cultiver des cellules dans des conditions particulières sur une « matrice » artificielle</a> (appelée <em>scaffold</em> en anglais), qui leur sert de support, un peu comme un échafaudage pour construire une maison. L’objectif est que cet ensemble développe les caractéristiques biologiques et mécaniques d’un tissu humain « naturel ».</p>
<p>Cependant, recréer un tendon neuf ne suffit pas, encore faut-il pouvoir l’implanter efficacement. En effet, comme le tendon se régénère très mal, suturer un substitut sur un tissu dégradé ou rompu n’est pas une solution viable : du fait d’une faible vascularisation locale, il reçoit moins de signaux favorisant la cicatrisation et la réparation… et risque de rompre à la première sollicitation mécanique.</p>
<p>C’est pourquoi, dans le laboratoire <a href="https://bmbi.utc.fr/">CNRS Biomécanique et Bioingénierie BMBI</a> à l’Université de Technologie de Compiègne, nous proposons d’élargir le champ de vision en <a href="https://doi.org/10.3390/ma11071116">associant les deux « voisins » du tendon : l’os et le muscle</a>.</p>
<p>En effet, l’os a une capacité d’autorégénération qui s’appuie sur des mécanismes de renouvellement cellulaire, ce qui explique que les fractures osseuses se réparent naturellement. <a href="https://www.insb.cnrs.fr/fr/cnrsinfo/regeneration-musculaire-le-couplage-entre-myogenese-et-angiogenese-est-stimule-par-les">Pour les muscles, la régénération passe par les cellules souches myogéniques</a>.</p>
<p>L’idée est donc de fabriquer en laboratoire un tendon avec, à une extrémité, une composante osseuse, et à l’autre, une composante musculaire. Ceci devrait permettre in fine de greffer le continuum os-tendon-muscle artificiel à l’os et au muscle du patient – une greffe qui devrait mieux tenir que les greffes de tendons artificiels sur tendons endommagés.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/551402/original/file-20231002-19-o3uqig.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Schéma de la stratégie de recherche" src="https://images.theconversation.com/files/551402/original/file-20231002-19-o3uqig.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551402/original/file-20231002-19-o3uqig.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=286&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551402/original/file-20231002-19-o3uqig.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=286&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551402/original/file-20231002-19-o3uqig.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=286&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551402/original/file-20231002-19-o3uqig.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551402/original/file-20231002-19-o3uqig.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551402/original/file-20231002-19-o3uqig.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Stratégie os-tendon-muscle pour la réparation des tendons.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Nicolas Rivoallan</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Comment orienter le devenir des cellules souches</h2>
<p>Les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cellules-souches-23930">cellules souches</a> sont initialement pluripotentes, c’est-à-dire qu’elles peuvent encore devenir différents types de cellules. Cette différenciation se fait naturellement in vivo jusqu’à atteindre un type de cellule spécialisée et fonctionnelle dans chaque tissu.</p>
<p>Mais <a href="https://doi.org/10.3390/ijms23010260">il est également possible de guider in vitro la différenciation vers des cellules osseuses (ostéoblastes), tendineuses (ténocytes) ou musculaires (myotubes)</a>, en jouant sur leur environnement, par exemple des facteurs chimiques, des stimulations physiques ou le matériau servant de support.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/551399/original/file-20231002-19-9uqely.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="schéma de différenciation des cellules souches" src="https://images.theconversation.com/files/551399/original/file-20231002-19-9uqely.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551399/original/file-20231002-19-9uqely.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=293&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551399/original/file-20231002-19-9uqely.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=293&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551399/original/file-20231002-19-9uqely.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=293&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551399/original/file-20231002-19-9uqely.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551399/original/file-20231002-19-9uqely.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551399/original/file-20231002-19-9uqely.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=369&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La différenciation des cellules souches aboutit à la formation de différents tissus.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Nicolas Rivoallan</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>C’est une combinaison de ces deux dernières approches que nous avons choisie : en travaillant sur les propriétés du « scaffold » (composition, architecture, propriétés mécaniques…) et en exerçant un étirement cyclique, nous avons démontré que l’<a href="https://doi.org/10.3390/ijms23010260">on peut amorcer la différenciation des cellules souches vers les différents phénotypes d’intérêt (os, tendon ou muscle)</a>.</p>
<p>Le scaffold est fabriqué à partir d’un polymère biocompatible (le polycaprolactone) mis sous forme de nanofils. On obtient ainsi des supports de quelques dizaines de microns d’épaisseur, plus ou moins poreux, et dont la topographie dépend du collecteur qui réceptionne les fibres extrudées.</p>
<p>Par exemple, sur des fibres disposées aléatoirement, les cellules souches ont tendance à évoluer vers un phénotype tendineux (tendon) si on leur impose des cycles d’étirement.</p>
<p>Sur des fibres structurées en forme de nids d’abeille, les cellules deviennent plus aisément de l’os. Enfin, sur des fibres bien alignées, elles fusionnent en myotubes longs et bien droits, comme on en trouve dans le tissu musculaire.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/551429/original/file-20231002-19-svwh5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="microscopies des 3 structures de scaffold" src="https://images.theconversation.com/files/551429/original/file-20231002-19-svwh5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/551429/original/file-20231002-19-svwh5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=183&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/551429/original/file-20231002-19-svwh5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=183&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/551429/original/file-20231002-19-svwh5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=183&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/551429/original/file-20231002-19-svwh5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=229&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/551429/original/file-20231002-19-svwh5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=229&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/551429/original/file-20231002-19-svwh5t.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=229&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le support de culture des cellules souches, ou scaffold, est fabriqué à partir d’un polymère biocompatible et nanostructuré. Pour des fibres alignées, les cellules ont tendance à se différencier en un tissu musculaire, pour un scaffold aléatoire en tendon, et pour un support en nid d’abeille, en os.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Nicolas Rivoallan</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Nous sommes parvenus à fabriquer d’un seul tenant ce matériau composé de ces différentes structures – nids d’abeille, aléatoire et alignée – pour ensuite cultiver des cellules souches qui deviennent de cellules osseuses, tendineuses ou musculaires suivant leur localisation.</p>
<p>À ce stade, ce sont plutôt des approches innovantes en microfabrication qui sont mobilisées, comme le « gap-spinning », une variante de la technique utilisée pour fabriquer les nanofils, ou encore la fabrication de collecteurs spécifiques par impression 3D ou photolithographie.</p>
<p>Dans un premier temps, on n’envisage pas d’aboutir à une solution implantable chez les patients, mais de proposer un modèle d’étude in vitro des jonctions os-tendon et tendon-muscle, afin de mieux comprendre la formation et la dégradation de ces jonctions, notamment en termes de vieillissement et de réponse aux chocs. Ainsi, nous pourrons évaluer différentes stratégies thérapeutiques pour traiter les pathologies des personnes âgées et des sportifs, sans recourir à l’expérimentation animale.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science (qui a lieu du 6 au 16 octobre 2023 en métropole et du 10 au 27 novembre 2023 en outre-mer et à l’international), et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition porte sur la thématique « sport et science ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213936/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Rivoallan a reçu des financements du MESRI (demi-allocation), bourse "Exposé-Schorlaship" et "DAAD". </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Cécile Legallais a reçu des financements de l'ANR (projet TENORS ANR-21-CE18-0035), du Labex MS2T et de l'Equipex FIGURES.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Timothée Baudequin a reçu des financements de l'ANR, de l'institut INSIS du CNRS et de la Direction à la Recherche de l'Université de Technologie de Compiègne. </span></em></p>Les ruptures de tendon touchent les sportifs et les personnes âgées. Une nouvelle stratégie pour tenter de les réparer de façon pérenne est en développement.Nicolas Rivoallan, Doctorant en Biomécanique et Bio-ingénierie, Université de Technologie de Compiègne (UTC)Cécile Legallais, Directrice de Recherche CNRS en Biomécanique et Bioingénierie, Université de Technologie de Compiègne (UTC)Timothée Baudequin, Maître de Conférences en Génie Biologique, Université de Technologie de Compiègne (UTC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1991382023-02-05T16:53:53Z2023-02-05T16:53:53ZCancer : les thérapies de différenciation, ou comment faire revenir les cellules cancéreuses dans le droit chemin<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/508192/original/file-20230205-15-3bqf1z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=383%2C398%2C1171%2C1073&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Cette image de microscopie montre des cellules cancéreuses du pancréas en croissance (noyau en bleu, membranes en rouge). </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/nihgov/26645788710/">Min Yu/Eli et Edythe Broad Center for Regenerative Medicine and Stem Cell Research, USC / NIH / Flickr</a></span></figcaption></figure><p>Les scientifiques ont baptisé de telles cellules, « cellules souches cancéreuses ». Ils <a href="https://doi.org/10.1186/s13578-017-0188-9">pensent qu’elles ont une part de resposabilité</a> non seulement dan l’initiation des cancers, mais aussi dans leur progression, le développement de métastases, les récidives et la résistance aux traitements.</p>
<h2>Qu’est-ce que la thérapie de différenciation ?</h2>
<p>Un nombre croissant de preuves semble indiquer que les cellules souches cancéreuses sont capables de ce différencier en de multiples types cellulaires, y compris des cellules non cancéreuses. Forts de ce constat, les chercheurs ont eu l’idée d’essayer de mettre au point un nouveau type de traitement, appelé <a href="https://doi.org/10.1177/1010428317729933">thérapies de différenciation</a>. </p>
<p>Le concept a été forgé suite aux observations qui ont révélé que les hormones et les cytokines, deux types de protéines qui jouent un rôle clé dans la communication entre les cellules, pouvaient <a href="https://doi.org/10.1038/nrc.2017.103">stimuler la maturation des cellules souches et ce faisant, leur faire perdre leur capacité de régénération</a>. Réussir à forcer les cellules souches cancéreuses à se différencier en des cellules plus « matures » pourrait donc stopper leur prolifération incontrôlable, et en faire des cellules normales. </p>
<p>La thérapie de différenciation a déjà fait ses preuves dans le traitement de la <a href="https://doi.org/10.1182/blood-2009-01-198911">leucémie aiguë promyélocytaire</a>, un <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/docs/survie-des-personnes-atteintes-de-cancer-en-france-metropolitaine-1989-2018-leucemie-aigue-myeloide-promyelocytaire">cancer des cellules sanguines agressif</a>. Dans le cas de cette maladie, l’<a href="https://www.academie-medecine.fr/le-dictionnaire/index.php?q=acide%20r%C3%A9tino%C3%AFque">acide rétinoïque</a> et l’arsenic sont utilisés pour bloquer une protéine qui empêche les cellules myéloïdes, un type de cellules sanguines dérivées de cellules de la moelle osseuse, de poursuivre leur maturation. En leur permettant de poursuivre leur développement normal, ce traitement leur fait perdre leurs caractéristiques cancéreuses.</p>
<p>Autre intérêt des thérapies de différenciation : puisqu’elles ne se focalisent pas sur la destruction des cellules cancéreuses et ne nécessitent pas de soumettre les cellules saines à proximité à des produits chimiques toxiques, elles peuvent s’avérer <a href="https://doi.org/10.1182%2Fblood-2009-01-198911">moins délétères que les traitements traditionnels</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/503362/original/file-20230105-22-8a0umi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Image en microscopie de leucémie aiguë promyélocytaire " src="https://images.theconversation.com/files/503362/original/file-20230105-22-8a0umi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/503362/original/file-20230105-22-8a0umi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/503362/original/file-20230105-22-8a0umi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/503362/original/file-20230105-22-8a0umi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/503362/original/file-20230105-22-8a0umi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/503362/original/file-20230105-22-8a0umi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/503362/original/file-20230105-22-8a0umi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La leucémie aiguë promyélocytaire peut être traitée par thérapie de différenciation.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/photo/acute-promyelocytic-leukemia-cells-royalty-free-image/1417347912">jarun011/iStock via Getty Images Plus</a></span>
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</figure>
<h2>Utiliser les cellules souches pour traiter le cancer</h2>
<p>Il existe plusieurs autres pistes potentielles mettant à contribution les cellules souches pour lutter contre le cancer. Les cellules souches cancéreuses peuvent par exemple être <a href="https://doi.org/10.1038/s41392-020-0110-5">directement ciblées</a> dans l’optique de stopper leur croissance, ou bien être transformées en <a href="https://doi.org/10.1515/iss-2016-0005">« chevaux de Troie »</a> capables de s’attaquer aux autres cellules tumorales.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1155/2016/1740936">Les cellules souches cancéreuses quiescentes</a>, qui ne se divisent pas, mais demeurent vivantes, sont elles aussi de potentielles cibles thérapeutiques. Ces cellules jouent un rôle important dans l’émergence de résistance aux traitements dans une grande variété de sortes de cancers, car elles ont une capacité de régénération et de survie encore plus importante que celle des autres cellules souches cancéreuses.
Leur quiescence peut persister durant des décennies, ce qui signifie qu’elles peuvent être à l’origine de récidives de la maladie. Elles sont malheureusement difficiles à distinguer des cellules souches cancéreuses « classiques », ce qui complique leur étude. </p>
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<p>Autre piste suivie par les chercheurs : modifier génétiquement des cellules souches afin qu’elles expriment une protéine capable de le lier spécifiquement à une cible spécifique, présente dans des cellules cancéreuses. Cette approche permet d’augmenter l’efficacité des traitements, en relâchant les médicaments directement dans la tumeur. Les <a href="https://doi.org/10.3389%2Ffbioe.2020.00043">cellules souches mésenchymateuses</a> provenant de la moelle osseuse sont par exemple capables de migrer naturellement vers les tumeurs, et de s’y arrimer. Elles pourraient donc être utilisées pour délivrer des molécules thérapeutiques directement au contact des cellules cancéreuses.</p>
<p>Les cellules souches peuvent aussi être utilisées pour produire des <a href="https://doi.org/10.1002/wdev.399">organoïdes modèles</a>, qui sont des sortes de versions miniatures des organes, afin de tester de potentiels médicaments anticancéreux et d’étudier les mécanismes qui mènent à la maladie</p>
<h2>Les défis des thérapies à base de cellules souches</h2>
<p>Bien que les nombreux avantages des cellules souches suscitent de nombreux intérêts chez les scientifiques qui développent des thérapies destinées à traiter le cancer, <a href="https://doi.org/10.18632%2Foncotarget.20798">plusieurs défis restent encore à relever</a>. On sait par exemple que bon nombre des thérapies à base de cellule souche actuelles sont incapables d’éliminer à elle seule les tumeurs : elles doivent être pour cela conjuguées à d’autres médicaments. </p>
<p>Il existe également des préoccupations concernant la capacité éventuelle des cellules souches à promouvoir la croissance tumorale.</p>
<p>En dépit de ces obstacles, selon nous, les technologies à base de cellules souches ont le potentiel d’ouvrir de nouvelles perspectives dans le domaine des thérapies anticancéreuses. La conjugaison du génie génétique et des cellules souches semble en mesure de surmonter les principaux inconvénients posés par les chimiothérapies actuelles, notamment la question de leur toxicité pour les cellules saines. Si nous poursuivons les recherches, il se pourrait que les thérapies ciblant les cellules souches cancéreuses finissent un jour par faire partie des traitements standards d’un grand nombre de type de cancers.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199138/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>De nombreuses tumeurs contiennent des cellules souches cancéreuses qui les aident à se développer et à échapper aux traitements. Une nouvelle piste tente de rendre ces cellules à nouveau normales.Huanhuan Joyce Chen, Assistant Professor of Molecular Engineering, University of Chicago Pritzker School of Molecular EngineeringAbhimanyu Thakur, Postdoctoral Scholar in Molecular Engineering, University of Chicago Pritzker School of Molecular EngineeringLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1884182022-08-10T17:30:49Z2022-08-10T17:30:49ZPremier « embryon synthétique » au monde : une prouesse riche en promesses… et en questions<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/478279/original/file-20220809-25-upv6kq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C0%2C963%2C474&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Embryon synthétique de souris, du jour 1 (en haut à gauche) au jour 8 (en bas à droite). Tubes neural, cardiaque, digestif… commencent à se former comme dans un embryon «naturel».</span> <span class="attribution"><span class="source">Weizmann Institute of Science</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Dans ce qui est <a href="https://www.theguardian.com/science/2022/aug/03/scientists-create-worlds-first-synthetic-embryos">considéré comme une première mondiale</a>, des biologistes ont développé des modèles d’embryons de souris en laboratoire sans avoir besoin d’ovules fécondés, d’embryons ou même… de souris – en utilisant uniquement des <a href="https://theconversation.com/les-cellules-souches-induites-le-patient-dans-une-boite-de-culture-148123">cellules souches</a> (qui peuvent se transformer en n’importe quel autre type de cellule) mises en suspension dans un incubateur spécial.</p>
<p>Cette réussite inédite, <a href="https://www.cell.com/cell/fulltext/S0092-8674(22)00981-3">publiée dans la revue Cell</a> par une équipe dirigée par des chercheurs de l’Institut Weizmann des sciences (Israël), offre un modèle très sophistiqué de ce qui se passe au début du développement de l’embryon chez la souris – juste après l’implantation de l’ovule fécondé par un spermatozoïde à la paroi de l’utérus.</p>
<p>Il s’agit d’une étape cruciale : au sein de l’espèce humaine, de nombreuses grossesses s’interrompent à ce stade, sans que l’on sache vraiment pourquoi. Le fait de disposer de modèles va permettre de mieux comprendre ce qui peut mal se passer et, éventuellement, de découvrir dans ce second temps ce que nous pourrions faire pour y remédier.</p>
<h2>Un simili embryon</h2>
<p>Les chercheurs sont donc partis de cellules de souris qu’ils ont retransformées en cellules souches – capables de redonner dans un second temps les autres types cellulaires : de peau, nerveuses, etc. Ils les ont ensuite placées dans des bioréacteurs rotatifs avec solution nutritive pour leur permettre de se multiplier. (<em>Si l’énorme majorité de ces cellules n’a rien donné, <a href="https://wis-wander.weizmann.ac.il/life-sciences/without-egg-sperm-or-womb-synthetic-mouse-embryo-models-created-solely-stem-cells">0,5 % d’entre elles se sont assemblées en petites sphères qui se sont développées, similaires à 95 % à de « vrais » embryons</a>, ndlr</em>)</p>
<p>Ce qui est particulièrement intéressant dans ces « embryoïdes » modèles, c’est leur structure très complexe. Déjà, les cellules souches ont pu s’y différentier et adopter une disposition rappelant ce qui s’observe dans l’embryon à un stade précoce – notamment pour les précurseurs du cœur, du sang, du cerveau et d’autres organes. De plus, une partie des cellules souches, spécifiquement traitées dans ce but, a pu s’orienter vers la formation de cellules de « soutien » comme celles que l’on trouve dans le placenta ou le sac vitellin, nécessaires pour établir et maintenir une grossesse.</p>
<p><em>In vivo</em>, les premiers stades de la grossesse sont difficiles à étudier chez la plupart des animaux : les embryons sont microscopiques – il s’agit encore de minuscules amas de cellules – difficiles à localiser et à observer dans l’utérus. Pourtant, nous savons qu’à ce stade du développement les choses peuvent mal tourner : par exemple, des facteurs environnementaux peuvent influencer et entraver le développement, ou les cellules ne reçoivent pas les bons signaux pour former complètement la moelle épinière, comme dans le cas du <a href="https://www.betterhealth.vic.gov.au/health/conditionsandtreatments/spina-bifida">spina bifida</a>, etc.</p>
<p>En utilisant des modèles comme celui-ci, nous pouvons commencer à nous demander pourquoi et observer en direct ce qui se passe (les embryoïdes étant dans des fioles transparentes).</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/dXlEDAGCN7w?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Quoique simplifié, ce modèle d’embryon de souris de huit jours a un cœur qui bat, un sac vitellin, un placenta et une circulation sanguine émergente. L’Institut Weizmann des sciences.</span></figcaption>
</figure>
<p>Cependant, même si ces modèles constituent un outil de recherche puissant, il est important de comprendre qu’ils ne sont <strong>pas</strong> des embryons – d’où le terme d’embryoïde employé par certains chercheurs.</p>
<p>Ils reproduisent bien certains aspects du développement, mais ni l’architecture cellulaire ni le potentiel de développement des « vrais » embryons dérivés de la fécondation d’ovules par des spermatozoïdes ne peut être observé pour l’heure.</p>
<p>L’équipe à l’origine de ces travaux souligne qu’elle n’a pas été en mesure de développer ces modèles au-delà de huit jours, alors qu’une gestation normale chez la souris dure 20 jours.</p>
<h2>Demain des « embryons synthétiques » humains ?</h2>
<p>Le domaine de la modélisation de l’embryon progresse rapidement, et de nouvelles avancées apparaissent chaque année.</p>
<p>En 2021, <a href="https://thenode.biologists.com/the-making-of-human-blastoids/outreach/">plusieurs équipes</a> ont réussi à faire en sorte que des cellules souches pluripotentes humaines s’autoagrègent dans une boîte de Pétri, imitant le « blastocyste » – soit un des premiers stades du développement embryonnaire, à moins de 100 cellules, juste avant le <a href="https://www.mayoclinic.org/healthy-lifestyle/pregnancy-week-by-week/multimedia/fertilization-and-implantation/img-20008656">processus complexe de l’implantation</a>.</p>
<p>Les chercheurs qui utilisent ces modèles d’embryons humains, souvent appelés <a href="https://theconversation.com/researchers-have-grown-human-embryos-from-skin-cells-what-does-that-mean-and-is-it-ethical-157228">blastoïdes</a>, ont même pu commencer à explorer l’implantation dans une boite de Pétri, mais ce processus est beaucoup plus difficile chez la femme que chez la souris.</p>
<p>La production de modèles d’embryons humains d’une complexité équivalente à celle obtenue avec un modèle de souris reste une proposition lointaine, mais qui doit être envisagée.</p>
<p>Il est important que nous soyons conscients de ce que pourrait vraiment nous dire un tel modèle ; un embryon dit synthétique, cultivé en boîte de Pétri, aura ses limites quant à ce qu’il peut nous apprendre sur le développement humain.</p>
<p><em>[Plus de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>.]</em></p>
<h2>Des enjeux éthiques forts</h2>
<p>Aucune modélisation d’embryon ne peut se faire sans une source de cellules souches. Lorsqu’on se penche sur les potentielles utilisations futures de cette technologie, il est primordial de se demander d’où viennent ces cellules : S’agit-il de cellules souches embryonnaires humaines (dérivées d’un blastocyste) ou de cellules souches pluripotentes induites (comme ici) ?</p>
<p>Un autre point à considérer pour ce type particulier de recherche est celui du consentement. Nous devrions réfléchir davantage à la manière dont ce domaine de recherche sera régi, quand il devrait être utilisé et par qui.</p>
<p>Cependant, il est important de reconnaître qu’il existe déjà des lois et des <a href="https://www.isscr.org/policy/guidelines-for-stem-cell-research-and-clinical-translation/key-topics/embryo-models">directives internationales sur la recherche sur les cellules souches</a> qui fournissent un cadre pour réglementer ce domaine de recherche.</p>
<p>En Australie, la recherche impliquant des modèles d’embryons de cellules souches humaines nécessiterait une autorisation, similaire à celle requise pour l’utilisation d’embryons humains naturels en vertu de la loi en vigueur depuis 2002. Cependant, <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-021-01423-y">contrairement à d’autres juridictions</a>, la loi australienne dicte également la durée pendant laquelle les chercheurs peuvent faire croître des modèles d’embryons humains, une restriction que certains chercheurs <a href="https://www.abc.net.au/radionational/programs/sciencefriction/change-to-14-day-rule-for-embryo-research/13382872">souhaiteraient voir modifiée</a>. (<em>En France, les <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000043884384/">lois de bioéthiques</a> encadrent la recherche autour des embryons, ndlr</em>)</p>
<p>Indépendamment des changements concernant la manière et le moment où la recherche sur les embryons humains est menée, il est nécessaire que la communauté discute davantage de ce sujet avant qu’une décision ne soit prise.</p>
<p>Il existe une distinction entre certaines technologies telles que le clonage humain à des fins de reproduction, qui sont interdites, et d’autres destinées à faire progresser notre compréhension du développement embryonnaire humain et de ses troubles, qui sont autorisées. Ces travaux sont parfois le seul moyen d’obtenir des informations. (<em>Les chercheurs pointent également que « cette méthode ouvre de nouvelles perspectives pour l’étude de <a href="https://wis-wander.weizmann.ac.il/life-sciences/without-egg-sperm-or-womb-synthetic-mouse-embryo-models-created-solely-stem-cells">l’auto-organisation des cellules souches en organes et pourrait, à l’avenir, contribuer à la production de tissus transplantables</a> », ndlr</em>).</p>
<p>La science progresse rapidement. Bien qu’elle concerne principalement les souris à ce stade, le moment est venu de discuter de ce que cela signifie pour l’être humain et d’examiner où et comment nous devrons tracer la ligne dans le sable…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/188418/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Megan Munsie a reçu des financements de l'Australian Research Council, du Medical Research Future Fund et de la Novo Nordisk Foundation. Elle est vice-présidente de l'Australasian Society for Stem Cell Research, directrice non exécutive de la National Stem Cell Foundation of Australia et membre des comités consultatifs d'éthique et de politique de plusieurs organisations nationales et internationales, dont l'International Society for Stem Cell Research.</span></em></p>Créer un embryon artificiel qui soit capable de rejouer, sous nos yeux, les premiers jours de la vie : la prouesse, menée ici chez la souris, était attendue. Qu’y a-t-il derrière cette réussite ?Megan Munsie, Professor - Emerging Technologies (Stem Cells) at The University of Melbourne and Group Leader - Stem Cell Ethics & Policy at the Murdoch Children's Research Institute, The University of MelbourneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1849802022-07-04T13:45:46Z2022-07-04T13:45:46ZGreffe de pancréas : un pas de plus vers la guérison du diabète de type 1<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/471220/original/file-20220627-26-thwv4w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C1%2C998%2C664&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Plusieurs articles scientifiques font maintenant état des résultats positifs et des conséquences à long terme d’une transplantation pancréatique pour guérir le diabète.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Il y a 100 ans, le diabète de type 1 était synonyme de mort certaine. Malgré l’amélioration des soins de santé, <a href="https://jamanetwork.com/journals/jama/fullarticle/2088852">l’espérance de vie des personnes qui en sont atteintes est raccourcie d’une douzaine d’année</a>.</p>
<p>La découverte de l’insuline pour <a href="https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/decouverte-de-linsuline">contrôler la maladie, en 1921</a>, a changé la vie de millions de personnes. Mais une mauvaise administration de ce médicament peut encore causer des ravages, comme le démontre le <a href="https://www.ledevoir.com/opinion/libre-opinion/726978/libre-opinion-appel-a-l-empathie-pour-ceux-qui-comme-karim-ouellet-sont-atteints-du-diabete-de-type-1">drame vécu par le chanteur Karim Ouellet, décédé en novembre dernier</a>.</p>
<p>Les chercheurs se tournent désormais vers la greffe de pancréas pour guérir le diabète. Et les résultats sont très prometteurs.</p>
<p>En tant que doctorante en biologie moléculaire et diabétique de type 1, j’ai un intérêt insatiable envers le <a href="https://www.facebook.com/la.scientifique.diabetique/">partage de connaissances scientifiques liées au diabète</a>.</p>
<h2>Des îles productrices d’insuline</h2>
<p>À quoi est dû le <a href="https://www.diabete.qc.ca/fr/comprendre-le-diabete/tout-sur-le-diabete/types-de-diabete/le-diabete-de-type-1/">diabète de type 1</a> ? En quelques mots, il se développe lorsque le <a href="https://www.familiprix.com/fr/psst/3-maladies-du-systeme-immunitaire">système immunitaire s’attaque à des amas de cellules</a>, nommés îlots. <a href="https://doi.org/10.1038/srep14634">Le pancréas compte près de trois millions d’îlots</a> producteurs d’insuline. Cette hormone est produite lorsque la quantité de sucre dans le sang s’élève, ce qui se produit après avoir mangé des bonbons, par exemple. Afin de stabiliser la quantité de sucre qui circule dans le sang, l’insuline va transférer ce sucre aux organes pour leur fournir de l’énergie ! Sans insuline, les organes très demandant en énergie, comme le cerveau, ne peuvent pas être nourris et donc ne peuvent pas fonctionner correctement.</p>
<p>Au contraire, dans le cas du <a href="https://www.diabete.qc.ca/fr/comprendre-le-diabete/tout-sur-le-diabete/types-de-diabete/le-diabete-de-type-2/">diabète de type 2</a>, le pancréas s’épuise à force de produire trop souvent de l’insuline, qui devient défectueuse. Le sucre peut alors s’accumuler en grande quantité dans le sang, peu importe le type de diabète. À long terme, cela peut provoquer des dommages aux organes (reins, foie, os, yeux), aux vaisseaux sanguins et aux nerfs, ce qui entraîne de graves problèmes de santé.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/471247/original/file-20220627-18-yqw2g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/471247/original/file-20220627-18-yqw2g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/471247/original/file-20220627-18-yqw2g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/471247/original/file-20220627-18-yqw2g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/471247/original/file-20220627-18-yqw2g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/471247/original/file-20220627-18-yqw2g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/471247/original/file-20220627-18-yqw2g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/471247/original/file-20220627-18-yqw2g9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">À gauche, un pancréas en santé qui produit beaucoup d’insuline. À droite, un pancréas détruit chez une personne atteinte de diabète de type 1 qui ne produit presque plus d’insuline. Chez une personne atteinte de diabète de type 2, le pancréas s’épuise et produit de l’insuline défectueuse.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Maria Galipeau), Fourni par l’auteure</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Bien que l’insuline soit couramment utilisée afin de contrôler le diabète, elle a des <a href="https://caf.novonordisk.ca/content/dam/Canada/AFFILIATE/caf-novonordisk-ca/OurProducts/documents/novorapid-product-monograph.pdf">effets secondaires indésirables</a> à ne pas négliger dont la prise de poids, une diminution de l’espérance de vie et le coma diabétique.</p>
<p>Il arrive même qu’une personne atteinte de diabète ait des taux de sucre très bas ou très élevés potentiellement mortels, comme en a été victime Karim Ouellet. L’injection d’insuline est ainsi limitée comme traitement à long terme pour contrôler le diabète. La greffe de pancréas offre l’espoir d’une vie sans multiples injections d’insuline quotidiennes.</p>
<p>L’approche consiste à isoler un pancréas sain chez une personne récemment décédée, ou une partie du pancréas d’une personne vivante, et le greffer dans le foie d’une personne atteinte de diabète.</p>
<h2>Des greffes qui ne datent pas d’hier</h2>
<p>Le 17 décembre 1966, les chirurgiens américains Dr Lillehei et Dr Kelly ont réalisé la <a href="https://doi.org/10.1016/j.cireng.2017.02.002">toute première greffe de pancréas chez l’humain</a>. À l’époque, les patients devaient recommencer à s’injecter de l’insuline dès six jours après la greffe. Quelques problèmes de santé survenaient également à la suite de la chirurgie, allant de l’inflammation du pancréas jusqu’à la mort des patients.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/470949/original/file-20220626-26-k6j5wz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/470949/original/file-20220626-26-k6j5wz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/470949/original/file-20220626-26-k6j5wz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=257&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/470949/original/file-20220626-26-k6j5wz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=257&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/470949/original/file-20220626-26-k6j5wz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=257&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/470949/original/file-20220626-26-k6j5wz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=323&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/470949/original/file-20220626-26-k6j5wz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=323&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/470949/original/file-20220626-26-k6j5wz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=323&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">À gauche, Dr William Kelly avec le premier receveur d’une greffe. À droite, Dr Richard Lillehei.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Image tirée de la revue « CIRUGÍA ESPAÑOLA »</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>C’est dans l’objectif de perfectionner et de simplifier les méthodes de greffe de pancréas que le <a href="https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT00014911">protocole d’Edmonton</a> a vu le jour, en mars 1999. <a href="https://www.ualberta.ca/medicine/about/people/details.html">Le docteur James Shapiro</a>, professeur de chirurgie et d’oncologie à l’Université d’Alberta, dirige l’équipe qui a mis au point cette procédure révolutionnaire pour traiter les personnes atteintes de diabète de type 1. Les <a href="https://www.thelancet.com/journals/landia/article/PIIS2213-8587(22)00114-0/fulltext?dgcid=raven_jbs_etoc_feature_landia">résultats de leur plus grande étude</a> jamais réalisée sur la greffe de pancréas est parue en mai 2022.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/470951/original/file-20220626-18-hdoqjt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/470951/original/file-20220626-18-hdoqjt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/470951/original/file-20220626-18-hdoqjt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/470951/original/file-20220626-18-hdoqjt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/470951/original/file-20220626-18-hdoqjt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=403&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/470951/original/file-20220626-18-hdoqjt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/470951/original/file-20220626-18-hdoqjt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/470951/original/file-20220626-18-hdoqjt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=507&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La greffe de pancréas consiste à isoler les îlots du donneur sain et de les greffer dans le foie du patient atteint de diabète de type 1.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Maria Galipeau), Fourni par l’auteure</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette étude d’envergure, réalisée à l’hôpital de l’Université d’Alberta, décrit les résultats à long terme (1999-2019) chez 255 patients atteints de diabète de type 1 âgés de plus de 18 ans. Les chercheurs ont innové en ajoutant deux <a href="https://www.familiprix.com/fr/articles/medicaments-immunosuppresseurs">médicaments immunosuppresseurs</a> pendant les deux semaines suivant la greffe. Les immunosuppresseurs empêchent la destruction de l’organe greffé en bloquant le système immunitaire du receveur de greffe. Pour certaines personnes, de trois à cinq greffes de pancréas additionnelles sont nécessaires afin d’assurer la survie du nouvel organe chez les patients.</p>
<h2>Une lueur d’espoir pour les patients</h2>
<p>Malgré que les pancréas greffés semblent bien se porter un an après la première greffe, la survie du nouveau pancréas diminue après cinq ans et baisse considérablement après 20 ans. Certains patients ont dû reprendre de très faibles doses d’insuline après la greffe. Mais bonne nouvelle : après deux greffes de pancréas, quatre patients sur cinq peuvent complètement arrêter les injections d’insuline après un an.</p>
<p>Bien que ces résultats soient très prometteurs, les patients doivent prendre des immunosuppresseurs durant toute leur vie à la suite de la greffe, ce qui peut entraîner des cas de cancers de la peau, des infections et des <a href="https://doi.org/10.2165/00128072-200103010-00004">retards de croissance chez l’enfant</a>. Voilà pourquoi la <a href="http://dx.doi.org/10.1136/adc.88.7.591">greffe de pancréas n’a pas été réalisée à ce jour chez les enfants et les adolescents diabétiques</a>.</p>
<p>Or, les nouveaux immunosuppresseurs utilisés dans le protocole d’Edmonton sont sans stéroïdes, ce qui minimise l’impact sur la croissance et le développement des enfants. Chez l’adulte, ces nouveaux <a href="https://doi.org/10.1097/01.tp.0000287117.98785.54">immunosuppresseurs</a> diminuent les risques de maladies cardiovasculaires, de rejet et d’infections après la greffe de pancréas.</p>
<p>Bien que cette thérapie ne soit pas parfaite, elle permet d’améliorer la qualité de vie des patients. À l’heure actuelle, de nombreuses facettes de la greffe de pancréas font l’objet d’études dans l’optique de favoriser son succès : l’élargissement du bassin de donneurs de pancréas, l’optimisation du site de la greffe et le développement de thérapies à base de <a href="https://www.hema-quebec.qc.ca/cellules-souches/savoir-plus/cellules-souches.fr.html">cellules souches</a>. Ces dernières, lorsqu’elles sont dérivées du propre sang d’un patient, permettraient d’éliminer l’usage d’immunosuppresseurs durant toute la vie.</p>
<p>Grâce aux progrès rapportés par l’équipe du protocole d’Edmonton, les patients atteints de diabète de type 1 peuvent garder espoir qu’une thérapie plus durable verra le jour dans un futur rapproché.</p>
<hr>
<p><em>Un grand merci à Étienne Aumont, qui a révisé cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/184980/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Maria Galipeau a reçu des financements de FRQS. </span></em></p>Une nouvelle étude présente les résultats à long terme d’une greffe de pancréas pour traiter les personnes atteintes de diabète de type 1. La guérison du diabète est peut-être à portée de la main.Maria Galipeau, Doctorante en biologie moléculaire, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1762102022-02-14T18:12:33Z2022-02-14T18:12:33ZAuto-régénération : ce dont notre corps est capable<p>Lorsque nous entendons le mot « régénération », nous imaginons d’emblée la repousse spontanée d’organes ou de membres perdus comme on le voit dans les films de science-fiction et autres comics dédiés aux super-héros tel Wolverine dont le pouvoir auto-guérisseur est la marque de fabrique…</p>
<p>Dans la vie réelle, la situation semble moins idéale et nous partons généralement du principe que le corps humain ne se régénère pas. Un bras amputé ne repousse pas, une lésion de la moelle épinière peut entraîner une paralysie à vie et une dent arrachée est perdue à jamais. Notre corps se couvre de cicatrices, un patient peut être condamné à se déplacer en fauteuil roulant ou à attendre une greffe d’organe pour avoir une chance de survivre.</p>
<p>On a donc l’impression d’être coincé dans un corps incapable de s’auto-réparer en cas de blessure grave. Pourquoi en est-il ainsi ? Et la médecine du futur pourra-t-elle un jour aider à régénérer ces parties perdues ?</p>
<h2>Un corps en fait en constant renouvellement</h2>
<p>Pourtant, à l’opposé de ces idées reçues démoralisantes, notre corps cumule les prouesses biologiques ! Loin des regards, la plupart de nos organes se renouvellent constamment en éliminant les cellules anciennes ou mortes et en les remplaçant par de nouvelles afin de rester dans un état optimal.</p>
<p>Notre peau, par exemple, perd des millions de cellules par jour qui sont en permanence remplacées. Grâce à ce rythme soutenu, vous retrouvez, tous les mois environ, une nouvelle couche de cellules cutanées. C’est pourquoi griffure, estafilade et coupure guérissent spontanément – ne vous coupez pas trop profondément, quand même.</p>
<p>Les organes internes subissent également ce genre de « rajeunissement ». Les cellules qui tapissent l’intérieur de votre estomac se régénèrent en continu pour résister à leur environnement acide. Vous changez du coup la paroi de votre estomac toutes les semaines. Le tissu osseux est, lui, entièrement remplacé tous les 10 ans et, en cas de fracture, de <a href="https://orthoinfo.aaos.org/en/staying-healthy/bone-health-basics/">nouvelles cellules osseuses recollent obligeamment les deux parties</a>.</p>
<p>Après avoir livré une bataille épuisante contre des micro-organismes envahisseurs, notre système immunitaire régénère aussi les cellules perdues pour retrouver sa composition originale.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/444609/original/file-20220205-21-o00a56.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444609/original/file-20220205-21-o00a56.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=687&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444609/original/file-20220205-21-o00a56.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=687&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444609/original/file-20220205-21-o00a56.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=687&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444609/original/file-20220205-21-o00a56.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=863&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444609/original/file-20220205-21-o00a56.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=863&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444609/original/file-20220205-21-o00a56.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=863&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les papilles gustatives de la langue (rose) détectent les goûts et saveurs et les transforment en signaux électriques envoyés au cerveau par les fibres nerveuses (jaune). En cas de blessure, les bourgeons gustatifs peuvent se régénérer en 10 jours et fonctionner à nouveau.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Dany Gaillard et Linda Barlow/Université du Colorado</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Mais l’organe humain le plus impressionnant en termes de régénération est le foie. Son rôle de détoxification du sang l’y oblige… En cas de dommage grave ou d’amputation partielle, il est capable de repousser et fonctionner à nouveau comme si de rien n’était. Et l’on peut multiplier les exemples… Avez-vous déjà pensé à votre langue, dont les papilles gustatives sont régulièrement victimes de brûlures causées par la précipitation ? Dix jours seulement leur suffisent pour se reconstituer et vous permettent de goûter (littéralement) à nouveau au plaisir de la cuisine.</p>
<h2>Quelques limites toutefois…</h2>
<p>Mais si le corps est capable de remplacer autant de tissus, pourquoi alors vieillissons-nous ? Tout d’abord, parce que lorsque nous prenons de l’âge, les <a href="https://elifesciences.org/articles/62852">cellules accumulent des dommages – dans leur matériel génétique notamment</a>. Ces « nouvelles cellules » qui naissent tard dans notre vie, si l’on peut dire, ne bénéficient pas d’un bel ADN tout neuf de nouveau-né : elles disposent, comme leurs consœurs, de l’ADN endommagé de leurs cellules mères.</p>
<p>Et une fois un certain seuil d’altérations accumulées atteint, une cellule ne peut plus fonctionner. Ce phénomène est comme une horloge inéluctable qui nous amène chaque jour un peu plus vers notre date d’expiration.</p>
<p>Deuxièmement, certains tissus ou organes ne se régénèrent jamais (entièrement). C’est, malheureusement, le cas du cerveau. Les cellules nerveuses, par exemple, qui font fonctionner notre corps et notre esprit, ne repoussent jamais en cas de blessure. Tout comme leur propriétaire, elles reposent en paix après des décennies de travail.</p>
<p>Enfin, lorsque la blessure d’une partie du corps est trop importante, sa réparation complète devient impossible. Par conséquent, même si le corps humain peut régénérer certaines de ses parties, il ne peut pas remplacer toutes ses pièces cassées comme on le ferait pour une voiture.</p>
<h2>Éponges et salamandre, les championnes de la régénération au naturel</h2>
<p>D’où viennent ces limites ? L’évolution ne pourrait-elle pas sélectionner de telles caractéristiques pour favoriser la survie ? Force est de reconnaître que certains animaux font des miracles…</p>
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<img alt="L’hydre (2cm au plus grand) présente un corps tubulaire au sommet duquel s’étirent des tentacules (disposées autour de la bouche-anus de l’animal)" src="https://images.theconversation.com/files/444605/original/file-20220205-19-tn3ugc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444605/original/file-20220205-19-tn3ugc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444605/original/file-20220205-19-tn3ugc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444605/original/file-20220205-19-tn3ugc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444605/original/file-20220205-19-tn3ugc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444605/original/file-20220205-19-tn3ugc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444605/original/file-20220205-19-tn3ugc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Ce petit animal marin, <em>Hydra vulgaris</em>, a été (bien) nommé d’après l’hydre de Lerne de la mythologique grecque, et dont les têtes repoussaient au fur et à mesure qu’Hercule les tranchait.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Proyecto Agua</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Par exemple, le cnidaire <em>Hydra</em> peut se reconstituer un <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/8432387/">corps entier à partir de quelques centaines de cellules</a>, ou former deux répliques lorsqu’elle est coupée en deux ! Les vers plats se font repousser une nouvelle tête à partir de leur queue, et les étoiles de mer de nouveaux bras comme nous des cheveux.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/wU5-O8Ln3PQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Voici comment l’hydre se régénère.</span></figcaption>
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<p>Un peu moins éloigné de nous dans l’arbre du vivant, le poisson-zèbre, modèle animal populaire dans les laboratoires, n’est pas en reste puisqu’il peut <a href="https://presse.inserm.fr/en/understanding-zebrafish-fin-regeneration-opens-up-avenues-in-regenerative-medicine/44238/">faire repousser ses nageoires caudales, des parties de son cerveau, son cœur et de nombreux autres organes</a>.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/444611/original/file-20220205-23-wjx3on.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444611/original/file-20220205-23-wjx3on.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444611/original/file-20220205-23-wjx3on.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444611/original/file-20220205-23-wjx3on.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444611/original/file-20220205-23-wjx3on.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444611/original/file-20220205-23-wjx3on.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444611/original/file-20220205-23-wjx3on.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cette salamandre a perdu sa queue récemment, et est en train de la régénérer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Greg Schechter/Flickr</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Les salamandres, enfin, sont tout aussi douées. Si vous avez déjà essayé d’en attraper une par la queue, vous vous êtes sans doute retrouvé avec seulement cet appendice caudal frétillant dans les doigts. Elle s’en sera débarrassée sans regret et en arborera un nouveau en l’espace de quelques semaines seulement !</p>
<p>Pas de miracle toutefois. Plus on monte dans l’échelle de l’évolution, plus les capacités de régénération se réduisent. Coupez un poisson-zèbre en deux et il ne se passera rien de bon pour lui. Les souris ne réparent pas plus une lésion cérébrale grave ou un membre perdu que les êtres humains.</p>
<h2>Retour vers la cellule souche…</h2>
<p>Pourquoi les animaux « plus simples » (quoiqu’en se référant à ce trait, on pourrait dire plus complexes !) se régénèrent-ils si bien – et pas nous ?</p>
<p>Une grande partie de l’histoire tient à un groupe de cellules bien particulier : la cellule souche. Immature, elle peut se transformer en n’importe quel type de cellule, de foie, de peau, de cerveau ou de rein, lorsqu’elle reçoit le signal adéquat et les bonnes instructions.</p>
<p>Et il existe plusieurs sortes de cellules souches chez les animaux. Certaines peuvent former tous les types de cellules du corps de leur propriétaire : ce sont des <a href="https://www.inserm.fr/dossier/cellules-souches-pluripotentes-induites-ips/">cellules « pluripotentes »</a>, comme chez <em>Hydra</em>. Celles que les scientifiques trouvent chez les vertébrés adultes ne peuvent plus donner naissance qu’à quelques types cellulaires : elles sont dites « multipotentes ».</p>
<p>Chez les salamandres, en cas de blessure, des cellules souches se rassemblent dans le bourgeon de la plaie et commencent à <a href="https://doi.org/10.1038/news.2009.614">reconstruire à l’identique le membre perdu</a>. Pour ce faire, elles utilisent le « plan » du membre, codé par les gènes. Ce n’est pas surprenant, car l’ADN niché dans chacune (ou presque) de nos cellules a déjà eu ce rôle de plan général, lors de l’embryogenèse !</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/byLDgtSMI0w?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Modélisation du processus de régénération du membre chez la salamandre.</span></figcaption>
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<p>Ainsi, pour reconstruire un nouveau membre à partir de zéro, il convient de réactiver précisément les bons gènes, un peu comme un architecte se plongerait dans les plans originaux d’une maison pour reconstruire un mur endommagé. Étant donné que nous partageons la majeure partie de notre ADN avec des organismes capables de se régénérer, <a href="https://wi.mit.edu/news/science-self-repair-regeneration-research-whitehead-institute">l’identification de ces gènes « régénérateurs »</a> et la recherche de moyens de neutraliser les freins moléculaires afin de réussir à les activer à volonté constituent un objectif majeur de la recherche sur la régénération.</p>
<p>Il convient également de conserver les instructions visant à prévenir toute croissance excessive et la formation de tumeurs… Les cellules souches sont capables de générer juste ce qu’il faut de cellules pour faire une copie de taille parfaite de la partie du corps perdue. Des signaux extérieurs aux cellules servent probablement à <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30603379/">leur indiquer quand s’arrêter</a>. Ils restent pour l’heure difficiles à identifier.</p>
<h2>Quand l’évolution dit stop</h2>
<p>Voici une première explication possible à notre capacité limitée : les mécanismes à gérer sont devenus si complexes au cours de l’évolution, qu’il est devenu trop difficile d’harmoniser la myriade de gènes et de signaux. Et les risques de provoquer la formation de tumeurs trop grands. Si bien que la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/labs/pmc/articles/PMC7383998/">sélection naturelle les a progressivement réduits au silence</a>, une fois qu’un animal a atteint le stade adulte.</p>
<p>Il y aurait simplement trop de consignes à suivre pour exécuter encore sans risque le programme « comment se régénérer ».</p>
<p>Une autre raison plausible est que nous avons moins de cellules souches pluripotentes (actives) que ces autres animaux plus simples. Bien que nous en ayons. Les scientifiques essaient maintenant de comprendre ce qui se passe dans ces cellules souches lorsqu’une <a href="https://www.dailymail.co.uk/sciencetech/article-9660023/Humans-untapped-ability-regenerate-body-parts-just-like-salamanders-scientists-claim.html">partie du corps est amputée chez l’Homme, par rapport aux poissons ou aux grenouilles</a> qui font mieux que nous.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1489360548408045575"}"></div></p>
<p>Si les chercheurs parviennent à décrypter les mécanismes chez ces animaux, ils pourraient peut-être inhiber la cicatrisation et ressusciter ce système d’autoguérison en sommeil chez nous à l’aide <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/sciadv.abj2164">d’un simple cocktail de médicaments</a> ? Ou d’outils d’édition génétique, capables de modifier à volonté l’activité de certains gènes, conçus comme des « interrupteurs de régénération » ?</p>
<h2>Médecine régénérative : où en sommes-nous ?</h2>
<p>Le développement de nos connaissances médicales nous donne toujours plus d’outils pour aider notre corps à se guérir.</p>
<p>Les chirurgiens peuvent transplanter à peu près de tout, peau, main, cornée ou cœur – voire <a href="https://theconversation.com/greffe-dun-coeur-de-porc-chez-un-patient-ce-que-pourraient-changer-les-xenotransplantations-175234">cœur de porc génétiquement modifié pour être « humanisé » !</a>.</p>
<p>Il est même désormais possible <a href="https://www.illinoisscience.org/2019/10/3d-printing-artificial-organs-medical-technology-biotech/">d’imprimer en 3D des organes relativement simples comme la vessie</a>, ce qui constitue un cas de régénération artificielle en dehors du corps.</p>
<p>Une autre technologie révolutionnaire concerne les bras et les jambes bioniques qui peuvent être commandés par la pensée de la personne.</p>
<p>Mais on parlait plus de réparation sinon de remplacement que de remise en route de nos capacités ancestrales d’auto-régénération.</p>
<p>Une autre technique encore en phase expérimentale, mais qui s’appuie cette fois davantage sur notre capacité de régénération, est la transplantation de cellules souches.</p>
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<img alt="Cellules souches neurales humaines mises en culture" src="https://images.theconversation.com/files/444613/original/file-20220205-21-njledm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/444613/original/file-20220205-21-njledm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/444613/original/file-20220205-21-njledm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/444613/original/file-20220205-21-njledm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=449&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/444613/original/file-20220205-21-njledm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/444613/original/file-20220205-21-njledm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/444613/original/file-20220205-21-njledm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=564&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En laboratoire, on peut déjà faire pousser des cellules souches capables de générer de nouvelles cellules nerveuses et de la glie (cellules de soutien). L’espoir est de réussir un jour leur transplantation au niveau d’une blessure pour faciliter la régénération des tissus.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Yirui Sun</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>L’idée est simple : cultiver des cellules souches provenant d’autres parties du corps ou multipliées en laboratoire, les reprogrammer génétiquement si nécessaire, les transplanter dans le tissu blessé et administrer un cocktail de médicaments qui leur permettra de produire les types de cellules spécialisés nécessaires pour restaurer la zone endommagée. Bref, de régénérer le site en y amenant une armada de cellules souches pour qu’elles y fassent leur office. Les expériences sur les animaux sont prometteuses (et la technique fonctionne bien chez l’humain pour les greffes de moelle osseuse), mais le succès reste mitigé pour notre espèce.</p>
<p>Enfin, les scientifiques tentent de libérer le potentiel de réparation de nos cellules souches – par divers traitements ou demain par génie génétique. Cela serait particulièrement pertinent pour le cerveau, sujet à des maladies neurodégénératives pour lesquelles les options chirurgicales ou thérapeutiques sont limitées. Cependant, la <a href="https://jamanetwork.com/journals/jamaneurology/fullarticle/2048380">population de cellules souches cérébrales est petite… et surtout inactive</a>. Nous n’avons pas encore trouvé la bonne recette pour réveiller cette pourtant prometteuse équipe interne de microchirurgiens.</p>
<p>Pour l’instant, nous devons donc nous contenter des outils que la nature nous a donnés… Et reconnaître humblement que, en matière de régénération, nous ne pouvons pas (encore) rivaliser avec la plupart de nos minuscules confrères réputés « primitifs » !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/176210/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pieter Vancamp ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Contrairement aux idées reçues, notre corps est capable de se régénérer - en partie. Quelles sont ses limites… et quelles leçons tirer des animaux qui font mieux que nous pour la médecine de demain ?Pieter Vancamp, Post-doctorant, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1540162021-03-08T19:39:07Z2021-03-08T19:39:07ZImages de science : Jusqu’à quel âge le cerveau fabrique-t-il des neurones ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/380677/original/file-20210126-21-14q17hp.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C34%2C1200%2C734&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des neurones au niveau du bulbe olfactif sur une coupe de cerveau de jeune souris (grossissement 200 fois).</span> <span class="attribution"><span class="source">Nathalie Core-Polo</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p><em>Le format « Images de science » vous propose de décrypter une photographie particulièrement signifiante d’un point de vue scientifique, de la décrire et d’en comprendre les enjeux.</em></p>
<hr>
<p>L’image montre des neurones dans la région du bulbe olfactif sur une coupe de cerveau de jeune souris. Les différentes couleurs permettent de mieux comprendre le développement des neurones dans le cerveau de la souris après sa naissance. La présence concomitante de la fluorescence verte et de la fluorescence rouge ou orange dans une cellule permet de déterminer si le neurone nouvellement fabriqué (en vert) est un neurone à dopamine (rouge) ou à calrétinine (orange). Le bleu indique simplement le noyau de toutes les cellules présentes à l’image.</p>
<h2>Le cerveau produit-il des neurones tout au long de la vie et pourquoi ?</h2>
<p>Jusqu’au milieu du XX<sup>e</sup> siècle, un des dogmes majeurs des neurosciences considérait que les neurones étaient fabriqués uniquement avant la naissance, pendant le développement du système nerveux. Dès lors, le cerveau adulte ne pouvait qu’en perdre en vieillissant. Or, dès les années 90, ce dogme a été renversé par des études qui ont prouvé l’existence de <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/fondamental/biologie-cellulaire/une-cellule-souche-qu-est-ce-que-c-est_13003">cellules souches</a> dans le <a href="https://www.nature.com/articles/nrn2571">cerveau de plusieurs organismes</a> tels que les oiseaux, les poissons et les mammifères. Les cellules souches sont des cellules « mères » capables de donner naissance à tous les types cellulaires d’un organisme. Elles peuvent perdurer à l’âge adulte dans différents tissus ou organes avant d’éventuellement se différencier, c’est-à-dire de former des cellules spécifiques de l’organe considéré – dans ce cas, du cerveau.</p>
<p>Il est maintenant bien établi que certains types de neurones <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/full_html/2006/07/medsci2006226-7p607/medsci2006226-7p607.html">continuent d’être produits</a> à partir de ces cellules souches tout au long de la vie. Chez les mammifères, deux régions particulières sont concernées par l’apport continuel de nouveaux neurones : l’hippocampe, siège du contrôle de la mémoire et de l’apprentissage, et le bulbe olfactif, indispensable au décodage des informations sensorielles olfactives en provenance du milieu extérieur.</p>
<p>Ce renouvellement cellulaire permettrait une adaptation (ou « plasticité ») des circuits neuronaux à de nouvelles informations. Qui plus est, les cellules souches constitueraient également un réservoir cellulaire capable d’être réactivé en contexte pathologique lors de lésions cérébrales pour rediriger précisément la production de cellules neurales (neurones et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cellule_gliale">glie</a>) vers la région endommagée.</p>
<p>Derrière le terme générique de neurone se cache en fait une variété importante de types cellulaires, ayant des morphologies et des fonctions différentes. Une des énigmes de la neurogenèse est donc de comprendre comment des cellules souches d’apparence similaire peuvent générer une telle diversité de neurones. Les gènes ont un rôle important à jouer dans ce processus et il est donc essentiel de déterminer quels sont ceux qui sont requis pour fabriquer tel type neuronal plutôt de tel autre. Ces connaissances sont notamment cruciales pour développer des approches thérapeutiques qui consisteraient à détourner les cellules souches de leur fonction normale pour les forcer à produire de nouveaux neurones en remplacement de ceux altérés par la pathologie, dans le cas d’une maladie neurodégénérative par exemple.</p>
<h2>Comment identifier la fonction d’un gène dans la formation de neurones ?</h2>
<p>En modifiant l’activité de ce gène dans les cellules souches, soit en l’abolissant, soit en l’augmentant, et en observant l’effet de la modification sur le devenir des cellules souches : quel type de neurones sont-elles alors capables de produire ?</p>
<p>Chez la souris, il est possible d’introduire un gène, ou une molécule inactivant ce gène, directement et précisément dans certaines cellules souches du cerveau chez l’animal vivant, celles qui produisent les neurones du bulbe olfactif. Et pour pouvoir repérer les cellules ainsi modifiées, un gène codant pour une protéine fluorescente est introduit simultanément dans les mêmes cellules, dans le cas de cette image la « GFP » (verte). Il suffit alors de suivre les devenirs des cellules vertes dans le bulbe olfactif, et d’identifier le type des nouveaux neurones générés.</p>
<p>Pour cette étude-ci, le tissu a été traité par deux anticorps fluorescents (rouge et orange) afin de révéler la présence de protéines spécifiques dans les cellules, chaque anticorps interagissant avec une protéine particulière. Les cellules rouges et orange correspondent respectivement à deux sous-types de neurones présents dans le bulbe olfactif : les <a href="http://acces.ens-lyon.fr/biotic/neuro/drogues/html/glossaire.htm">neurones à dopamine</a> (neuromédiateur) et les neurones à calrétinine (protéine se liant au calcium). Les cellules vertes correspondent à de nouveaux neurones produits à partir de cellules souches modifiées au premier jour après la naissance, dans lesquelles la protéine fluorescente GFP a été introduite par manipulation génétique. Un neurone vert et orange indique que ce nouveau neurone est un neurone à calrétinine, et un neurone vert et rouge est un neurone à dopamine.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/154016/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dans le cadre de ses travaux de recherche, Nathalie Coré-Polo bénéficie de financements de l'Agence Nationale de la Recherche (ANR) et de la Fondation pour la Recherche Médicale (FRM).</span></em></p>Quand et comment les neurones se forment-ils au long de la vie ?Nathalie Coré-Polo, Chargée de Recherche CNRS, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1481232020-11-08T18:13:01Z2020-11-08T18:13:01ZLes cellules souches induites : le patient dans une boîte de culture<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/363995/original/file-20201016-17-1329r2z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">National cancer institute (visualisation par immunofluorescence des microtubules de cellules dans un cancer du sein) </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/W2OVh2w2Kpo">NCI/Unsplash</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science 2020 (du 2 au 12 octobre 2020 en métropole et du 6 au 16 novembre en Corse, en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Planète Nature ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>Imaginez la scène. Vous sentant fébrile, perclus de fatigue, et toussant à n’en plus finir, vous vous rendez chez le médecin. Or après avoir examiné vos oreilles, votre gorge, palpé vos viscères, écouté vos battements de cœur… il vous propose une biopsie de peau. Cela ne vous surprend pas, et vous lui tendez le bras. Après tout, c’est un prélèvement de routine qui permettra de générer des cellules caractéristiques de vos différents organes, pour déterminer d’où vient le problème et vous traiter de manière individuelle, en minimisant le risque d’effets indésirables.</p>
<p>Naturellement, il s’agit de science-fiction. Nous sommes en 2020, et de telles méthodes diagnostiques ne sont pas encore appliquées. Mais au vu des récentes avancées de la recherche biomédicale, un tel scénario n’a peut-être rien de si extravagant…</p>
<p>Avec des cellules isolées à partir de la peau, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21243013/">du sang</a>, ou des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21636641/">urine</a> s, les scientifiques peuvent en effet obtenir tous les types cellulaires de notre corps en les faisant se multiplier sur les milieux de culture ad-hoc. Or il leur est ainsi permis d’étudier les mécanismes impliqués dans une maladie, mais aussi de repérer parmi plusieurs médicaments ceux qui sont les plus efficaces pour une pathologie précise, liée à tel organe et tel types de cellules, tout en évaluant les potentiels effets toxiques – et donc indésirables – sur les autres types cellulaires de l’organisme. Un fabuleux développement biotechnologique que l’on doit aux travaux pionniers de l’équipe de Shinya Yamanaka, travaux qui ont depuis été couronnés d’un prix Nobel de médecine.</p>
<h2>Des cellules ramenées à un état embryonnaire</h2>
<p>En 2006, alors que la recherche sur les <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/cellules-souches-embryonnaires-humaines">cellules souches embryonnaires</a> se heurtait déjà à des problèmes éthiques, ce médecin japonais émet l’hypothèse selon laquelle il est possible de transformer une cellule adulte spécialisée en une autre dont le destin n’est pas figé, en réactivant l’expression de certains gènes. Il décide donc de mener l’expérience, avec son étudiant Kazutoshi Takahashi, en utilisant des gènes surexprimés dans les <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/cellules-souches-embryonnaires-humaines">cellules souches des embryons</a>. Ces gènes sont alors introduits, via des virus, dans des cellules du tissu conjonctif – ou fibroblastes – prélevées dans l’épiderme de rongeurs. Et c’est un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0092867406009767?via%3Dihub">succès</a>) : les deux chercheurs parviennent bien à déprogrammer les cellules adultes pour les faire retrouver le même état indifférencié et pluripotent que chez l’embryon, c’est-à-dire la capacité à se transformer ultérieurement en divers types cellulaires.</p>
<p>Ainsi est né le concept de <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/cellules-souches-pluripotentes-induites-ips">« cellules souches pluripotentes induites »</a> (en anglais <em>induced pluripotent stem cells</em>, ou iPSC). Et dans l’année suivant sa première étude, l’équipe de Shinya Yamanaka a réitéré son expérience sur des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/18035408/">cellules humaines</a>. Enfin, il a ensuite été démontré que plusieurs types de cellules humaines, isolées tant à partir de la peau que du sang – peuvent être dans un premier temps déprogrammées, pour être reprogrammées et fournir aux chercheurs des cellules difficiles à prélever sur un patient : par exemple, des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19213953/">cellules du cœur</a>, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19736565/">du foie</a>, ou encore <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/18669821/">du cerveau</a>. Avec, à la clé, différentes applications biomédicales…</p>
<p>A partir de cellules saines pluripotentes, on peut ainsi envisager de remplacer des cellules défectueuses chez un malade, autrement dit s’orienter vers une <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/therapie-cellulaire">thérapie cellulaire</a>. C’est la stratégie pour laquelle a opté récemment une grosse équipe japonaise, dont faisait partie Shinya Yamanaka, pour tenter d’interrompre la progression d’une cécité induite par la <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/degenerescence-maculaire-liee-age-dmla">dégénérescence maculaire liée à l’âge</a> (DMLA), chez une femme de 77 ans.</p>
<p>En l’occurrence, des fibroblastes de peau ont été transformés en cellules pluripotentes, puis reprogrammés en cellules de la rétine (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89pith%C3%A9lium_pigmentaire_r%C3%A9tinien">épithelium pigmentaire</a>), lesquelles ont été transplantées dans l’œil atteint. <a href="https://www.nejm.org/doi/10.1056/NEJMoa1608368?url_ver=Z39.88-2003&rfr_id=ori:rid:crossref.org&rfr_dat=cr_pub%20%200www.ncbi.nlm.nih.gov">Résultat</a> : au bout d’un an, la capacité visuelle de la patiente a augmenté, sans qu’aucun effet indésirable du traitement ne soit constaté. C’est peut-être ce qui a motivé le lancement d’un <a href="https://clinicaltrials.gov/ct2/show/NCT04339764?term=NCT04339764&draw=2&rank=1">essai clinique de thérapie cellulaire de la DMLA</a> en septembre dernier, même s’il s’agit cette fois de partir de cellules du sang, plutôt que de la peau. Mais pour le Japonais Shinya Yamanaka, c’est ailleurs que se situe l’une des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0092867416311400?via%3Dihub">retombées les plus prometteuses</a> des iPSC…</p>
<h2>Modéliser des pathologies, cribler des traitements</h2>
<p>D’après le prix Nobel, l’atout majeur des iPSC, c’est de faire progresser la modélisation des pathologies et d’autoriser le criblage de molécules à fort potentiel thérapeutique. Quelles que soient les pathologies, on peut en effet observer les mêmes altérations dans les tissus prélevés chez un patient décédé et dans des cellules dérivées d’iPSC. On note par exemple : des baisses ou élévations du <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22451909/">niveau d’expression de certaines protéines</a>, un métabolisme cellulaire <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21307850/">trop ou peu actif</a>, ou encore des agrégats de protéines (comme dans les maladies d’Alzheimer ou de Parkinson, etc).</p>
<p>De telles altérations ont d’ores et déjà été identifiées à l’aide d’iPSC pour des <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7221979/">maladies neuro-dégénératives</a>, <a href="https://www.mdpi.com/1422-0067/21/17/6388">cardiovasculaires</a>, <a href="https://stemcellsjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/stem.3154">hépatiques</a> ou dans le <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/jdi.13091">diabète</a>. Leur mise au jour est essentielle s’agissant de mieux comprendre les mécanismes impliqués. Et de ce point de vue, le recours aux iPSC est d’autant plus justifié que l’on a affaire à des cellules comme celles du cœur ou du cerveau, difficilement accessibles chez le patient.</p>
<p>Autres intérêts majeurs des iPSC : elles permettent de disposer d’un modèle personnalisé, spécifique du patient, tout en pouvant servir de support pour tester de potentiels traitements. Jusqu’alors, la plupart des molécules étaient en effet testées sur des lignées cellulaires puis sur des modèles animaux – les tests de toxicité étant souvent réalisés chez le rongeur. Or les iPSC donnent la possibilité d’évaluer l’impact d’un médicament sur d’autres cellules que celles visées pour traiter la maladie – notamment les cellules du foie, du cœur ou encore les cellules nerveuses. C’est ainsi, par exemple, que l’on a pu mettre au jour les mécanismes impliqués dans la toxicité d’un <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fcvm.2020.00050/full">traitement anti-cancéreux, la doxorubicine, sur les cellules cardiaques</a>. Ce qui a permis d’orienter les stratégies thérapeutiques pour réduire le risque d’insuffisance cardiaque.</p>
<h2>Une technique déjà très convoitée…</h2>
<p>On le voit. La recherche dans le champ des iPSC humaines avance. Mais il reste beaucoup à étudier et valider pour rendre possible son transfert vers des approches cliniques et thérapeutiques à grande échelle. Or force est de constater que la technique suscite déjà la convoitise de cliniques privées et de sociétés de biotechnologies, qui la présentent comme un remède miracle. Et malheureusement, il a été rapporté aux États-Unis les cas de trois <a href="https://www.nejm.org/doi/10.1056/NEJMoa1609583?url_ver=Z39.88-2003&rfr_id=ori:rid:crossref.org&rfr_dat=cr_pub%20%200www.ncbi.nlm.nih.gov">personnes devenues aveugles</a> après avoir usé des services d’une de ces cliniques, où leur furent injectées des « cellules souches » dérivées de tissu adipeux pour traiter une DMLA.</p>
<p>À ce sujet, notons que le tissu adipeux étant plus facile à obtenir, les iPSC que l’on en tire sont moins onéreuses à cultiver. Mais si l’on opte pour la sécurité, les protocoles sont toujours long, et donc coûteux : il faut compter six mois entre l’obtention des cellules du patient et la différenciation au type cellulaire d’intérêt, et six mois supplémentaires pour étudier sur ces cellules les mécanismes pathologiques et les effets des médicaments. Et comparées aux iPSC issues des fibroblastes et des cellules sanguines, sur lesquelles on a désormais plus de dix années de recul, les iPSC provenant du tissu adipeux ne sont pas encore bien caractérisées et semblent faire l’objet de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19594392/">remaniements au niveau de leurs chromosomes</a>.</p>
<p>Pour terminer, ajoutons que des cellules pluripotentes sont potentiellement susceptibles de former des tumeurs. Leur caractéristiques génétiques complètes doivent donc impérativement être établies avant qu’elles ne soient introduites chez une patient : il est essentiel de s’assurer qu’il n’y a pas de mutations ou d’altérations de l’ADN pouvant induire une prolifération incontrôlable de ces cellules dans l’organisme. En d’autres termes, comme l’ont souligné <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352304217300247?via%3Dihub">Fei Lia, Jim HubTong et Chuan Hec</a> voilà trois ans, « sans connaissances détaillées et précises sur la manière dont ces cellules souches peuvent être correctement différenciées vers les types cellulaires souhaités, la voie à suivre pour la recherche d’un remède à base de cellules souches nécessitera plus qu’une foi aveugle. »</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/148123/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Laumonnier a reçu des financements de l'Inserm, ANR, Commission Européenne (FP7), Fondation de France, la Région Centre Val de Loire</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Débora Lanznaster ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Avec des cellules isolées tirées de la peau, du sang, ou des urines, les scientifiques peuvent en théorie obtenir tous les types cellulaires. Où en est la recherche dans ce domaine ?Frédéric Laumonnier, Chargé de recherche de l'Inserm, Université de ToursDébora Lanznaster, Chercheur contractuel, Université de ToursLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1275572019-12-09T19:43:29Z2019-12-09T19:43:29ZEmbryons et cellules souches : le travail de funambule du législateur<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/305459/original/file-20191205-39009-1oweckn.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Cellules souches embryonnaires en culture (visibles au centre) - (NIH code: WA09)</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Humanstemcell.JPG">Ryddragyn/ English Wikipedia</a></span></figcaption></figure><p>Parangon de démocratie participative, les États généraux de la <a href="https://etatsgenerauxdelabioethique.fr">bioéthique</a> initiés en 2018 sous la supervision du <a href="https://www.ccne-ethique.fr">Comité consultatif national d’éthique</a> ont permis de rappeler que la bioéthique est l’affaire de tous. Cette consultation citoyenne d’ampleur a été réalisée sur des thématiques telles que l’<a href="https://www.has-sante.fr/jcms/c_2834548/fr/fin-de-vie-en-parler-la-preparer-et-l-accompagner">accompagnement de la fin de vie</a>, la recherche sur l’embryon humain et les <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/cellules-souches-embryonnaires-humaines">cellules souches embryonnaires</a>, l’<a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/assistance-medicale-procreation-amp">assistance médicale à la procréation</a> ou PMA.</p>
<p>De fait, c’est ce dernier sujet qui a monopolisé l’attention des médias, mais aussi et surtout la majeure partie du temps de parole des parlementaires durant les débats en première lecture à l’Assemblée nationale. Pourtant, le projet de loi actuellement porté par le gouvernement n’est pas seulement relatif à « la PMA pour toutes », mais correspond plus largement à un projet de révision des lois dites « bioéthiques ».</p>
<h2>Une révision législative médiatisée</h2>
<p>Depuis l’adoption des deux <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000549618&categorieLien=id">lois du 29 juillet 1994</a>, des révisions régulières des lois « bioéthiques » sont opérées pour tenter d’adapter le cadre juridique à l’évolution fulgurante du progrès scientifique.</p>
<p>À l’issue des États généraux de la bioéthique, il a finalement été décidé d’exclure du projet de loi la question de la fin de vie, celle-ci ayant toujours jusqu’ici fait l’objet de textes spécifiques. Ainsi, outre l’ouverture de l’accès à l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes non mariées, la recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires constitue l’un des sujets phares de cette nouvelle révision et mérite que l’on y porte davantage d’attention.</p>
<h2>Des recherches facilitées</h2>
<p>Le <a href="http://www.assemblee-nationale.fr/15/ta/ta0343.asp">projet de loi</a> adopté par l’Assemblée nationale le 15 octobre 2019 opère une importante distinction entre le régime applicable aux recherches menées sur l’embryon, et à celles portant sur les cellules souches embryonnaires. En effet, ces dernières ne seront plus soumises qu’à un régime déclaratif, alors qu’il était jusqu’ici nécessaire de procéder en amont à une demande d’autorisation pour mener ces pratiques.</p>
<p>Cette modification a été motivée par les nombreuses avancées médicales qui sont attendues de l’utilisation des cellules souches embryonnaires. Pour mieux comprendre, il convient de rappeler que ces cellules disposent d’un potentiel qui les rend particulièrement intéressantes : elles sont en effet capable de se <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Diff%C3%A9renciation_cellulaire">différencier</a>, c’est-à-dire, de se spécialiser, en n’importe quel autre type de cellules. Et devant la commission sénatoriale, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean%E2%80%91Fran%C3%A7ois_Delfraissy">Pr. Jean‑François Delfraissy</a>, spécialiste d’immunologie et président du Comité consultatif national d’éthique en 2016, a par exemple envisagé un recours généralisé à ces cellules souches pour réparer des cartilages de genou, de hanche, ou encore d’épaule.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305666/original/file-20191206-90588-118gqrc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305666/original/file-20191206-90588-118gqrc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305666/original/file-20191206-90588-118gqrc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305666/original/file-20191206-90588-118gqrc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=441&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305666/original/file-20191206-90588-118gqrc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=554&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305666/original/file-20191206-90588-118gqrc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=554&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305666/original/file-20191206-90588-118gqrc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=554&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cartilage.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Cartilage.jpg">Fanny Castets</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Précisons-le. Il ne faut pas confondre les cellules souches embryonnaires, qui sont dérivées d’un embryon surnuméraire ensuite détruit, avec les <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/cellules-pluripotentes-induites-ips">cellules pluripotentes induites</a> (dites cellules « IPS »). Découvertes par le médecin japonais <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Shinya_Yamanaka">Shinya Yamanaka</a> et lui ayant valu le Prix Nobel de physiologie ou médecine avec le biologiste britannique <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/John_Gurdon">John Gurdon</a>, ces IPS sont obtenues à partir de cellules adultes, et elles ne disposent pas des mêmes qualités que leurs homologues embryonnaires. Certains scientifiques ont d’ailleurs souligné qu’en dépit leur intérêt scientifique, elles ne sauraient se substituer complètement aux cellules souches embryonnaires dans un cadre thérapeutique.</p>
<p>Une inquiétude demeure, concernant le potentiel de différenciation de ces deux types de cellules : pluripotentes, elles sont susceptibles de se différencier en gamètes. Craignant la loi de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dennis_Gabor">Gabor</a>, selon laquelle « tout ce qui est techniquement faisable sera fait tôt ou tard », il semble que la seule ligne rouge permettant d’éviter la création d’embryons à partir de telles cellules provienne de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Convention_d%27Oviedo">Convention d’Oviedo</a>. Signée en 1997 dans la ville espagnole éponyme, elle interdit, par son article 18, la création d’embryons à des fins de recherche.</p>
<h2>Maintien du cadre légal sur l’embryon implantable</h2>
<p>Le projet de loi actuellement examiné par le Sénat a également apporté des éléments nouveaux à l’encadrement des recherches sur l’embryon humain. Cette activité, d’abord couverte d’une interdiction absolue, puis rendue possible par le biais de dérogations, a été légalisée en 2013. Il convient, pour cela, d’obtenir en amont une autorisation délivrée par l’<a href="https://www.agence-biomedecine.fr">Agence de la biomédecine</a>. Plusieurs situations doivent cependant être distinguées, les recherches ne pouvant pas être menées sur n’importe quel type d’embryon.</p>
<p>Tout d’abord, seuls les embryons cultivés <em>in vitro</em> peuvent être utilisés. Ensuite, il doit s’agir d’embryons surnuméraires, ne faisant donc plus l’objet d’un projet parental. Qui plus est, ces embryons devront in fine être détruits. Dans ce cadre, et à des fins de recherche, certaines observations peuvent être menées. Et ce, dans le but d’améliorer la technique.</p>
<p>Le taux de réussite de l’assistance médicale à la procréation reste peu satisfaisant. Et pour le faire progresser, il est nécessaire de mieux connaître les premières étapes de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Embryogen%C3%A8se">embryogenèse</a>. L’interdit principal porte donc sur les interventions ayant pour objet de modifier le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9nome">génome</a> de l’embryon destiné à être implanté. Mais cette prohibition, qui trouve notamment son origine dans l’<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006419299&cidTexte=LEGITEXT000006070721&dateTexte=20040807">article 16-4</a> du code civil, devrait être rappelée avec un article L.2141-3-1 inséré dans le <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006072665&idArticle=LEGIARTI000006687421&dateTexte=&categorieLien=cid">Code de la santé publique</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/305466/original/file-20191205-39005-15tqu1x.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/305466/original/file-20191205-39005-15tqu1x.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/305466/original/file-20191205-39005-15tqu1x.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/305466/original/file-20191205-39005-15tqu1x.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/305466/original/file-20191205-39005-15tqu1x.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/305466/original/file-20191205-39005-15tqu1x.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/305466/original/file-20191205-39005-15tqu1x.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Fécondation in vitro par injection intracytoplasmique de spermatozoïde dans un ovocyte.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Icsi.JPG">RWJMS IVF Laboratory</a></span>
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<p>Plus largement, il s’agit en fait de se prémunir contre d’éventuelles atteintes à l’intégrité de l’espèce humaine. En introduisant des modifications dans le génome d’un embryon, le risque est grand qu’elles ne se répercutent sur sa descendance. Et in fine, elles pourraient ainsi induire un changement de grande ampleur dans le génome de l’espèce humaine, considéré comme le patrimoine commun de l’humanité.</p>
<p>Lors des débats parlementaires sur cette question, les récentes expérimentations menées par le scientifique chinois <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/He_Jiankui">He Jiankui</a>, qui a prétendu avoir créé les premiers bébés humains génétiquement modifiés, étaient dans tous les esprits. Mais grâce à la réaction quasi-consensuelle s’étant dessinée sur le plan international suite à cette annonce déconcertante, le maintien de cette prohibition dans le dispositif légal français n’a pas posé de difficultés.</p>
<h2>Les rêves de démiurge du scientifique</h2>
<p>Reste le problème des embryons ne faisant plus l’objet d’un projet parental. Pour eux, les possibilités expérimentales sont différentes. Ces embryons, qui seront détruits au plus tard après quatorze jours de culture, pourront subir des modifications du génome. Un vrai changement. Jusqu’alors, l’<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000024325606&cidTexte=LEGITEXT000006072665&dateTexte=20110709">article L.2151-2</a> alinéa 2 du Code de la santé publique interdisait en effet de créer des embryons chimériques, ou transgéniques. Mais selon le <a href="https://www.conseil-etat.fr">Conseil d’État</a>, le terme <a href="https://fr.wiktionary.org/wiki/transg%C3%A9nique"><em>transgénique</em></a> posait des difficultés. Car seule l’insertion de nouveaux gènes était prohibée, l’inactivation de certains gènes étant possible.</p>
<p>En supprimant cette interdiction, le projet de loi lève donc un interdit important. Pour autant, rappelons que cette possibilité demeure cantonnée aux recherches sur l’embryon ne faisant plus l’objet d’un projet parental, et voués à la destruction. Quant aux embryons <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Chim%C3%A8re_(g%C3%A9n%C3%A9tique)">chimériques</a>, on peut là encore constater une évolution d’ampleur. Avec ce projet de loi, l’adjonction de cellules d’origine humaine dans un embryon animal est dorénavant possible. L’interdit portant sur les chimères est en effet levé pour moitié : seule demeure la prohibition portant sur l’insertion de cellules animales au sein d’un embryon humain.</p>
<p>Finalement, s’agissant des recherches sur l’embryon et les cellules souches, ce projet de loi peut être vu comme une révision offrant de nouvelles possibilités aux scientifiques, avec l’espoir d’avancées thérapeutiques majeures. Face aux craintes d’un glissement incontrôlé vers une véritable réification de l’embryon humain, il faut se satisfaire de la ratification française de la Convention d’Oviedo. Elle constitue l’ultime rempart à une telle instrumentalisation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/127557/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Elise Roumeau ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires est un sujet phare du projet de loi adopté par les députés en octobre 2019 et faisant suite aux états généraux de la bioéthique.Elise Roumeau, Doctorante contractuelle, chargée de TD, Université Clermont Auvergne (UCA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1239412019-10-03T17:44:13Z2019-10-03T17:44:13ZParalysie cérébrale : les cellules souches, un remède plausible pour réparer le cerveau ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/295452/original/file-20191003-52796-w47na5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=19%2C29%2C6495%2C4336&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’utilisation des cellules souches en thérapie est complexe à mettre en œuvre, mais porteuse d’espoir.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science (du 5 au 13 octobre 2019 en métropole et du 9 au 17 novembre en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition aura pour thème : « À demain, raconter la science, imaginer l’avenir ». Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>Médecins et chercheurs explorent depuis plusieurs années les vertus thérapeutiques potentielles des cellules souches, qui ont la capacité de pouvoir se transformer en différentes sortes de cellules présentes dans le corps humain. L’idée initiale était d’utiliser ces cellules très particulières pour remplacer les cellules d’un patient, soient parce qu’elles avaient été détruites, soit parce que leur fonctionnement était imparfait.</p>
<p>Cette approche génère de nombreux espoirs pour soigner différentes maladies pour lesquelles il n’existe pas de thérapie efficace. On pourrait en particulier imaginer utiliser les cellules souches pour traiter un cerveau fonctionnellement défaillant, comme dans le cas de la <a href="https://youtu.be/MN_hgEOpWh0">paralysie cérébrale</a>, première cause de handicap moteur de l’enfant.</p>
<p>Mais si cette idée séduisante est toujours d’actualité, ses modalités de mise en œuvre ont quelque peu évolué. Au fil des études, les chercheurs se sont en effet rendus compte que l’utilisation thérapeutique des cellules souches se heurte à plusieurs difficultés. Explications.</p>
<h2>Que sont les cellules souches ?</h2>
<p>On distingue diverses catégories de cellules souches, en fonction de leur origine et de leur capacité à donner naissance, en présence des stimuli chimiques adéquats, à une variété plus ou moins grande de types de cellules : neurones, cellules cardiaques, cellules rénales, etc. Par exemple, les cellules souches embryonnaires sont capables de donner naissance à toutes les sortes de cellules qui composent un organisme.</p>
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<p>Les cellules souches les plus étudiées actuellement sont les cellules souches mésenchymateuses (MSC étant l’abréviation classique en anglais) qu’on peut retrouver par exemple dans le cordon ombilical, le liquide amniotique, la moelle osseuse ou encore le tissu adipeux. Elles peuvent donner naissance à de nombreuses catégories de cellules, y compris des cellules présentes dans le cerveau.</p>
<h2>Comment fonctionnent-elles ?</h2>
<p>Un grand nombre de cellules souches sont capables de se transformer en cellules du cerveau. Cependant, les études expérimentales ont clairement montré que la majorité des cellules souches, une fois dans le cerveau, ne vont survivre que durant une très courte période (quelques jours en général). Seule une infime proportion de ces cellules va devenir des neurones qui vont s’intégrer dans des réseaux fonctionnels. Dans ce contexte, le remplacement de neurones cérébraux détruits ou non fonctionnels par administration de cellules souches n’est plus un objectif réaliste.</p>
<p>Cela ne signifie toutefois pas que l’administration de cellules souches soit inutile. En effet, des travaux menés dans chez des animaux modèles pour la paralysie cérébrale ont montré que les cellules souches peuvent apporter un bénéfice certain. Capables de migrer jusqu’au site de la lésion dans le cerveau, grâce à la reconnaissance de molécules libérées par les cellules cérébrales en souffrance, les cellules souches produisent des facteurs qui vont favoriser la survie, la multiplication, la croissance et la plasticité des cellules cérébrales.</p>
<p>Elles sont aussi capables de limiter l’inflammation cérébrale, qui est un facteur délétère pour la <a href="https://www.cairn.info/revue-spirale-2012-3-page-17.htm">plasticité cérébrale</a>, c’est-à-dire la capacité du cerveau à modifier sa structure en fonction des apprentissages et des expériences, par la fabrication de nouvelles connexions entre les neurones. De plus, des études récentes</p>
<h2>Quels sont les risques et les limitations des cellules souches ?</h2>
<p>Les cellules souches étant capables de se multiplier de façon importante, le principal risque lié à leur utilisation est le développement de tumeurs. Ce risque théorique est fortement limité par la courte durée de survie des cellules souches transplantées. Néanmoins, deux cas de développement de tumeurs chez des patients adultes qui avaient été traités par transplantation de cellules souches (pour des indications sans relation avec la paralysie cérébrale) ont été récemment documentés. L’un de ces cas, en particulier, est survenu <a href="http://www.cmaj.ca/content/191/27/E761">plusieurs années après la thérapie</a>.</p>
<p>L’autre problème lié à l’utilisation des cellules souches est lié à leur origine. Dans la plupart des cas, les cellules souches transplantées proviennent d’un donneur. Il existe de ce fait un risque important de rejet immunologique des cellules transplantées, ce qui peut encore réduire davantage leur survie chez le receveur.</p>
<p>Comme pour les greffes d’organes ou de moelle osseuse, une compatibilité optimisée des <a href="https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/genetique-cmh-118/">antigènes du complexe majeur d’histocompatibilité</a> (molécules présentes à la surface des cellules qui, lorsqu’elles sont très différentes entre donneur et receveur, induisent le rejet de cellules ou organes transplantés) entre donneur et receveur est à privilégier pour limiter ce type d’écueil.</p>
<h2>Où en sommes-nous aujourd’hui ?</h2>
<p>L’utilisation des cellules souches représente un <a href="https://stemcellsjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.5966/sctm.2015-0372">véritable espoir pour le traitement de différentes maladies neurologiques</a> (en aigu ou à distance de l’épisode initial), et en particulier pour soigner la paralysie cérébrale.</p>
<p>À ce jour de nombreuses études expérimentales ont été réalisées et sont en cours. Si elles ont permis de montrer le potentiel très important des cellules souches dans des modèles animaux de paralysie cérébrale, elles ont également révélé la complexité d’identifier les meilleures conditions de mise en place d’une telle thérapie : type de cellules souches à utiliser, moment idéal pour la transplantation, dose à administrer, éventuelle répétition des administrations, meilleure voie d’administration (intranasale, intraveineuse, intracérébrale…)</p>
<p>Plusieurs essais thérapeutiques avec administration de cellules souches <a href="https://stemcellsjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.5966/sctm.2015-0372">sont également menés actuellement</a>. Ils concernent soit des patients à risque de développer une paralysie cérébrale, parce qu’ils sont subis une lésion cérébrale au moment de la naissance par exemple, soit des patients avec paralysie cérébrale avérée.</p>
<p>Il faut toutefois souligner que les protocoles utilisés varient énormément d’un essai à l’autre (type de patient inclus, de cellule souche utilisé, dose(s) administrée(s), la voie d’administration…). C’est un problème, car cette hétérogénéité rend les comparaisons impossibles.</p>
<p>Ces essais thérapeutiques chez l’être humain, menés sans véritable coordination entre les centres et sur la base de données expérimentales parcellaires, ont cependant le mérite de montrer la faisabilité et très probablement l’innocuité de ce type de thérapie.</p>
<p>Ils ont aussi poussé certaines firmes privées à investir dans la production de cellules souches « aux normes », qui pourront obtenir prochainement les agréments nécessaires pour une éventuelle utilisation en clinique.</p>
<h2>Mieux organiser coordonner la recherche</h2>
<p>Afin d’éviter des échecs à répétition qui pourraient mettre en péril le développement de ce type de thérapie, il semble indispensable d’adopter des approches bien construites. Elles doivent permettre d’identifier rapidement la stratégie optimale pour les patients atteints de paralysie cérébrale. Il est également important d’identifier des sous-groupes de patients avec paralysie cérébrale en fonction de l’origine du déficit, afin d’optimiser pour chaque sous-groupe la thérapie.</p>
<p>Une telle approche nécessite une collaboration internationale entre équipes cliniques et de recherche. La première étape consistera à compléter les données chez l’animal, pour disposer du maximum d’informations afin de guider les études cliniques chez l’être humain. Là aussi, une standardisation des protocoles est indispensable pour pouvoir comparer les différentes approches et déterminer la meilleure stratégie.</p>
<p>Il faut aussi souligner la nécessité d’offrir une solution « encadrée et professionnelle » aux familles, qui sont souvent en grande souffrance. À la recherche d’une thérapie pour leurs enfants, elles sont parfois tentées, de façon bien compréhensible, de s’en remettre à des institutions peu scrupuleuses. Moyennant des tarifs prohibitifs, celles-ci leur proposent des thérapies soi-disant à base de cellules souches sans garantie de savoir-faire, de qualité des cellules administrées, de suivi des patients, ni de partage avec la communauté internationale des résultats obtenus.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/123941/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre Gressens conseille Chiesi</span></em></p>Pourra-t-on un jour réparer cerveau et système nerveux abîmés grâce aux cellules souches ? Cette approche est certes compliquée à mettre en œuvre, mais elle n’en demeure pas moins envisageable.Pierre Gressens, Neuropédiatre, Directeur de Recherche Inserm et Directeur d’Unité Inserm, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/905892018-02-28T21:09:55Z2018-02-28T21:09:55ZCordon ombilical et pontage cardiaque<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/208126/original/file-20180227-36686-zd5pj5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C5%2C3818%2C2137&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le cordon ombilical, lien primordial entre la mère et son enfant pourrait servir bien longtemps après la naissance...</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/3SDP4zc_z9w">Arteida Mjeshtri/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>L’arrivée d’un nouveau-né est un moment de bonheur et personne ne fait attention au placenta et ses annexes comme le cordon ombilical : lien le plus fondamental entre la mère et l’enfant.</p>
<p>Bien que les cordons ombilicaux ne soient pas encore valorisés dans la plupart des maternités dans le monde, ses potentialités dans la <a href="https://www.reseau-chu.org/article/labos-high-tech-pour-la-medecine-regeneratrice-la-medecine-du-futur/">médecine régénérative</a> sont des plus reconnues.</p>
<p><a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do?idArticle=LEGIARTI000006686056&idSectionTA=LEGISCTA000006171017&cidTexte=LEGITEXT000006072665">La loi française</a> autorise le don des tissus périnataux pour autrui, à finalité thérapeutique ou scientifique, avec le consentement de la mère. Le cordon ombilical sur lequel nous travaillons contient ainsi des tissus d’origine humaine qui se révèlent être des trésors pour la médecine régénérative.</p>
<p>Un cordon ombilical présente une veine et deux artères parallèles qui sont entourées d’une fine membrane et d’une matrice gélatineuse appelée <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gel%C3%A9e_de_Wharton">gelée de Wharton</a>. Celle-ci est connue pour sa richesse en <a href="https://www.eurostemcell.org/fr/les-cellules-souches-mesenchymateuses-les-autres-cellules-souches-de-moelle-osseuse">cellules souches mésenchymateuses</a>, un type de cellules très utilisé dans le domaine de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ing%C3%A9nierie_tissulaire">ingénierie tissulaire</a> de par ses capacités de renouvellement et de différenciation vers des cellules spécifiques.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/208129/original/file-20180227-36683-16bkayc.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/208129/original/file-20180227-36683-16bkayc.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=273&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/208129/original/file-20180227-36683-16bkayc.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=273&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/208129/original/file-20180227-36683-16bkayc.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=273&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/208129/original/file-20180227-36683-16bkayc.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=343&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/208129/original/file-20180227-36683-16bkayc.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=343&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/208129/original/file-20180227-36683-16bkayc.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=343&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Coupe schématique d’un cordon ombilical.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://vetopsy.fr/reproduction/gestation/images/cordon-ombilical.gif">vetopsy.fr</a></span>
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<p>Initialement, les cellules souches mésenchymateuses étaient prélevées de la moelle osseuse. Le cordon ombilical offre la possibilité d’un prélèvement facile de cellules souches mésenchymateuses en grande quantité. De plus, le cordon ombilical est considéré comme appartenant au tissu périnatal, les cellules souches qu’il contient sont aussi plus jeunes que les cellules issues de la moelle osseuse.</p>
<p>Ces cellules en font donc des acteurs de choix pour être utilisées en ingénierie tissulaire puisqu’elles ont la capacité de « devenir » des cellules propres à un organe et d’en avoir les fonctions spécifiques.</p>
<h2>Aux origines de l’ingénierie tissulaire vasculaire</h2>
<p>Il y a plus d’un siècle, le <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/alexis-carrel/">Dr Alexis Carrel</a> comprenait, chez des patients souffrant de maladie cardiaque, l’association entre l’<a href="https://www.swissheart.ch/fr/maladies-cardiaques-avc/maladies/angine-de-poitrine.html">angine de poitrine</a> et la <a href="http://www.precisdanesthesiecardiaque.ch/Chapitre%205/stencoron.html">sténose coronarienne</a>.</p>
<p>Carrel a reçu le prix Nobel de physiologie et de médecine en 1912. Dès lors, les traitements chirurgicaux pour les maladies cardiovasculaires, en particulier les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pontage_aorto-coronarien">pontages aorto-coronariens</a>, ont beaucoup progressé.</p>
<p>Chaque année en France, plus que 25 000 patients bénéficient d’un pontage coronarien. Cependant, la potentialité de greffons vasculaires naturels est limitée. Bien que les artères ou les veines isolées d’un malade soient la source vasculaire préférentielle pour ce traitement, leur indisponibilité pour une telle application est souvent constatée en clinique, en particulier pour des patients atteints de diabète ou de maladies vasculaires périphériques.</p>
<p>Le praticien doit donc se tourner vers des vaisseaux exogènes, qui ne répondent pas à toutes les attentes. Aussi, l’ingénierie vasculaire apparaît comme une alternative intéressante, car elle pourrait permettre la production en grand nombre de vaisseaux prêts à être implantés tout en respectant ses qualités et fonctionnalités.</p>
<p>Le principe de l’ingénierie tissulaire repose sur trois acteurs interdépendants : des cellules, une matrice (naturelle ou synthétique) pouvant les héberger, et un environnement favorable à leur développement : à la fois chimique (facteur de croissance, teneur en oxygène…) et physique (pression, cisaillement…).</p>
<h2>Cellules souches et ingénierie vasculaire</h2>
<p>L’objectif de l’ingénierie vasculaire est de construire un greffon vasculaire constitué de cellules vasculaires et d’une matrice extracellulaire (sorte de structure organisée) sous forme de tube dans laquelle les cellules peuvent se loger, s’organiser et interagir aux sollicitations du flux sanguin.</p>
<p>L’ingénierie commence par l’isolement des cellules, puis une amplification <em>in vitro</em> pour en avoir une quantité suffisante avant de les déposer sur une matrice.</p>
<p>En les combinant avec des biomatériaux de forme tubulaire, il est alors possible de former un greffon vasculaire cellularisé mais cela demande un temps de maturation des cellules de plusieurs semaines (avec un risque majeur de perdre leurs fonctionnalités).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/208230/original/file-20180228-36683-1faosl2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/208230/original/file-20180228-36683-1faosl2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/208230/original/file-20180228-36683-1faosl2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/208230/original/file-20180228-36683-1faosl2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/208230/original/file-20180228-36683-1faosl2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=519&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/208230/original/file-20180228-36683-1faosl2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=519&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/208230/original/file-20180228-36683-1faosl2.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=519&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dessin de presse.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteur</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Quand bien même, l’idéal serait alors de prélever des cellules du patient, ce qui donnerait un greffon cellularisé prêt à lui être implanté sans risque majeur de rejet. Cependant, les résultats rapportés dans la littérature sont assez décevants, en particulier du fait que les cellules utilisées sont déjà « matures » et qu’elles perdent progressivement leurs fonctionnalités au cours de leurs divisions successives, nécessaires pour augmenter leur nombre.</p>
<p>Pour contourner cet écueil, nous pouvons utiliser des cellules souches mésenchymateuses qui sont reconnues comme faiblement immunogènes (qui théoriquement n’entraînent pas de rejet après implantation) et susceptibles de devenir des cellules spécifiques du vaisseau.</p>
<p>Ces cellules constituent donc un axe majeur dans l’élaboration d’un nouveau biomatériau cellularisé. Reste à définir le support sur et dans lequel ces cellules vont se loger. L’idéal est de trouver un support naturel et, dans la mesure du possible, d’origine humaine, pour fabriquer un biomatériau qui peut fournir un environnement favorable au développement des cellules souches.</p>
<h2>Le bon terreau pour la culture des cellules souches</h2>
<p>Nous avons développé au sein de notre groupe du <a href="http://www.imopa.cnrs.fr/">laboratoire IMoPA</a> un substitut vasculaire cellularisé et totalement d’origine humaine, qui contient à la fois des cellules souches et une matrice d’origine vasculaire. Toutes deux provenant du cordon ombilical.</p>
<p>L’utilisation du cordon ombilical est d’autant plus aisée que ce tissu d’origine humaine n’est pas actuellement valorisé. Pourtant, la gelée de Wharton qui le constitue, est à la fois une niche de cellules souches et un environnement naturel pour ces cellules. Par conséquent, il nous est paru intéressant de fabriquer un biomatériau à base de la gelée de Wharton dans lequel les cellules souches isolées <em>se sentent chez elles</em> pour le coloniser.</p>
<p>Cette surface est utilisée pour cultiver les cellules souches, un peu comme un terreau est déposé sur un sol aride pour cultiver des légumes. La surface recouverte de la gelée de Wharton montre un effet favorable à l’adhésion et à la prolifération des cellules souches. De plus, cette surface favorise la différenciation des cellules souches en un type de cellules vasculaire (appelées cellules endothéliales) localisées sur la surface interne du vaisseau, qui empêchent en autre la formation de caillots sanguins.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/208259/original/file-20180228-36680-kmou0i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/208259/original/file-20180228-36680-kmou0i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/208259/original/file-20180228-36680-kmou0i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/208259/original/file-20180228-36680-kmou0i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/208259/original/file-20180228-36680-kmou0i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/208259/original/file-20180228-36680-kmou0i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/208259/original/file-20180228-36680-kmou0i.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Culture de cellules dans une boîte de Petri. Le liquide rouge amène tous les éléments chimiques nécessaires à leur croissance.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Cell_Culture_in_a_tiny_Petri_dish.jpg">Kaibara87/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Dans notre corps, les <a href="http://imedecin.com/Histologie/les-cellules-endotheliales.html">cellules endothéliales</a> sont soumises à un flux sanguin constant, dont les forces de cisaillement nécessitent une adhésion forte des cellules à leur surface pour ne pas être arrachées. Nous avons d’ailleurs montré dans un modèle <em>in vitro</em> utilisant un réacteur capable de mimer les conditions de flux sanguin de notre corps, que les cellules cultivées sur une surface préparée à partir de la gelée de Wharton adhérent davantage en comparaison de conditions standards.</p>
<p>Forts de ces observations, nous avons recouvert d’une solution de la gelée de Wharton la surface interne d’une matrice obtenue par décellularisation d’une artère ombilicale. Les cellules souches mésenchymateuses sont alors ensemencées sur cette surface. Pour valider la fonctionnalité vasomotrice de cette artère ainsi construite, nous l’avons implantée au niveau de la carotide de lapin et vérifié la dynamique du flux sanguin dans le greffon.</p>
<p>Après trois semaines d’implantation, nous avons constaté que les artères traitées par la gelée de Wharton étaient toutes perméables et présentaient un débit sanguin comparable au témoin, alors que l’absence de cellules conduisait à une thrombose précoce. Ceci met en évidence que la gelée de Wharton est une excellente matrice naturelle d’origine humaine, facile à extraire et à moindre coût, qui permet à la fois une adhésion forte des cellules, leur prolifération et leur différenciation, ce qui en fait un candidat prometteur pour l’ingénierie tissulaire.</p>
<p>Les résultats très prometteurs nous amènent à valider les performances de ce greffon par un pontage coronarien chez le cochon. <em>In fine</em>, cette étude vise à alimenter une banque de prothèses vasculaires de grade clinique disponibles pour réaliser des pontages par voie mini-invasive assistée d’un robot qui a l’avantage de suppléer une déficience en artères autologues et de réduire l’impact traumatisant d’une telle intervention.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/90589/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Quel peut bien être le lien entre un pontage cardiaque et un cordon ombilical ? Des cellules prélevées sur ce dernier pourraient aider à réaliser ces opérations !Pan Dan, Médecin chercheur, Université de LorrainePatrick Menu, Professeur de physiologie et physiopathologie à la faculté de pharmacie de Nancy, Université de LorraineVéronique Decot, Maitre de conferences et praticien hospitalier au CHRU de Nancy, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/869592017-11-09T21:06:18Z2017-11-09T21:06:18ZL’humain réparé, rêve d’immortalité ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/193917/original/file-20171109-27106-14q7m31.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un homme à réparer : réalisable dans le futur ? </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/falconchile2/14229452617/sizes/l/">Falcon C/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/193551/original/file-20171107-1008-yco58q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/193551/original/file-20171107-1008-yco58q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=308&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/193551/original/file-20171107-1008-yco58q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=308&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/193551/original/file-20171107-1008-yco58q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=308&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/193551/original/file-20171107-1008-yco58q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=386&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/193551/original/file-20171107-1008-yco58q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=386&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/193551/original/file-20171107-1008-yco58q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=386&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>L’auteur de cet article sera présent au <a href="http://leforum.cnrs.fr/">Forum du CNRS 2017</a> dont The Conversation France est partenaire. Il interviendra le dimanche 26 novembre de 16h30 à 18h à la Cité internationale universitaire de Paris.</em></p>
<hr>
<p>Entre l’espoir d’immortalité et la fatalité de la mortalité, l’humain a de tout temps cherché à contrer le vieillissement et la défectuosité de parties fonctionnelles de son corps.</p>
<p>Ainsi, le mythe de Prométhée montre que les Grecs anciens connaissaient déjà la potentialité de certaines parties du corps à se réparer tout seul. Ce Dieu, attaché sur un rocher pour avoir donné le feu aux hommes, voyait chaque jour son foie dévoré en partie par un aigle. Lequel foie se régénérait le jour suivant pour que la litanie de la punition s’accomplisse. Si les anciens avaient choisi le foie plutôt que d’autres organes pour illustrer le mythe, c’est parce qu’ils savaient le foie capable de se régénérer en grande partie.</p>
<p>Plus récemment, la symbolique des sorcières a souvent été associée à la salamandre, capable de régénérer ses membres. L’humain et les vertébrés supérieurs n’ont pas la même capacité que la salamandre, le poisson-zèbre ou l’axolotl et encore moins celle de régénération totale des végétaux. Mais les études récentes démontrent que cette capacité pourrait exister, ou à minima, être localement stimulée.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/193918/original/file-20171109-27120-1yx493x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/193918/original/file-20171109-27120-1yx493x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/193918/original/file-20171109-27120-1yx493x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/193918/original/file-20171109-27120-1yx493x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/193918/original/file-20171109-27120-1yx493x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/193918/original/file-20171109-27120-1yx493x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/193918/original/file-20171109-27120-1yx493x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’axolotl est un amphibien capable de régénérer ses membres.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/scazon/3242874784/in/photolist-5WyzGd-5WyzB5-Ao7k-anXdQw-a6y2m8-a6y3oH-a6y2RF-7ZxmYE-7rMWHz-aE4bnU-dPQfpk-6HSPhL-7ZMHyj-9akpaL-9ahdq2-G59fJ8-7XW67M-9NiUux-d3wtHw-aBzfDf-a7S9xn-5BgHHc-9ahfS2-6MS26W-dr7unV-9rUoP6-ffxCs1-7PMR7L-mBPkec-mzXpw4-rQgdZs-4CeV7X-pQCQNu-6VjJhJ-5Gas6o-9W2aoN-aE4bes-mzXpoP-9rXmnu-oYgdi7-mzYFN1-dag1rX-xtspKj-xtspzu-wiJvWQ-xegUXB-xvLX9x-xuXJru-xtsknb-oFNtps">Scazon/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Les cellules souches : la clé de la régénération ?</h2>
<p>La capacité de régénération est principalement portée par des cellules du corps qui vont se reprogrammer pour remplacer le tissu ou l’organe lésé. Certaines de ces cellules dites <a href="https://www.inserm.fr/thematiques/immunologie-inflammation-infectiologie-et-microbiologie/dossiers-d-information/cellules-souches-et-therapie-cellulaire">« souches »</a> sont générées par la moelle osseuse et peuvent circuler dans le corps. D’autres cellules souches sont générées par les tissus eux-mêmes, comme ces cellules souches des bulbes cutanés dont la mission est de permettre la croissance des cheveux et des poils tout au long de la vie.</p>
<p>Quelle que soit leur origine, ces cellules ont la potentialité de se transformer pour réparer et faire croître toute sorte de tissus. Cette potentialité de devenir différente, qu’on appelle la différenciation cellulaire, suscite de nombreux espoirs, notamment depuis qu’on les a aussi identifiées dans le système nerveux central (le cerveau) et périphérique (la moelle osseuse et les nerfs).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/193919/original/file-20171109-27126-1uljtwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/193919/original/file-20171109-27126-1uljtwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/193919/original/file-20171109-27126-1uljtwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/193919/original/file-20171109-27126-1uljtwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/193919/original/file-20171109-27126-1uljtwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/193919/original/file-20171109-27126-1uljtwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/193919/original/file-20171109-27126-1uljtwa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cellules souches embryonnaires de souris en culture.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cellule_souche#/media/File:Mouse_embryonic_stem_cells.jpg">Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Si le phénomène de régénération est peu évident chez l’humain, il existe un mécanisme que tout le monde connaît. Il s’agit de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cicatrisation">cicatrisation</a>. Tout est dans le mot, c’est une réparation qui laisse une cicatrice. La régénération n’est donc que partielle et ne permet pas une reproduction à l’identique. Il n’est qu’à voir la peau régénérée des grands brûlés dont l’aspect cartonné n’est qu’une pâle reproduction de la belle élasticité du tissu cutané d’origine. Il faut donc comprendre le pourquoi de cette insuffisance, même s’il est bien compris que la cicatrisation est essentielle, voire vitale.</p>
<h2>Les acteurs de la réparation des corps</h2>
<p>Les acteurs œuvrant à la régénération du corps sont au croisement de nombreux mécanismes intrinsèques du vivant, ce qui inclut en première ligne les biologistes et le corps médical, évidemment, mais aussi les physiciens et les mathématiciens ingénieurs ou théoriciens, les chimistes, les ingénieurs, les psychologues et de nombreux acteurs des sciences humaines et sociales.</p>
<p>Ces acteurs de la régénération humaine peuvent orienter leurs travaux vers la régénération d’une fonction, en cherchant à remplacer cette fonction déficiente, par exemple le genou, la peau ou le cœur, ou en incitant le corps à participer lui-même à cette régénération, par exemple en conduisant la repousse de canaux nerveux lésés. L’option actuelle est certainement un mélange des deux approches, par une ingénierie corporelle inclusive et incitative. Ainsi les prothèses de nouvelle génération remplacent et respectent la fonction à recréer, en reproduisant l’organe lésé de façon personnalisée, et en même temps, elles se doivent d’être biocompatibles, en s’intégrant dans le corps sans générer de mécanismes de défense ou de rejet.</p>
<p>Le Graal de cette recherche est de considérer l’élément inséré comme le point de départ de la régénération en incitant et orientant les propres mécanismes de réparation et de régénération du corps. Il s’agit alors de créer une niche pour que les mécanismes de cette régénération soient dûment incités à s’orienter vers une dynamique complète de reconstitution, et non seulement de cicatrisation.</p>
<p>En d’autres termes, les chercheurs, ingénieurs et médecins considèrent le site de réparation/régénération comme un écosystème cohérent. Il doit être connecté ou doit pouvoir se connecter lui-même même, c’est-à-dire être vascularisé et innervé. Il doit retenir les cellules souches circulantes et informer les cellules souches résidantes en leur donnant les informations nécessaires pour les orienter vers une croissance différenciée. Il devra fournir un environnement mécanique précis, tant les cellules sont sensibles aux propriétés mécaniques des tissus environnants ; ceci est illustré par la cicatrisation de la peau qui s’effectue dans l’environnement plastique formé par des mailles rigidifiées de collagène qui n’a plus rien à voir avec l’élasticité de la peau de jouvenceaux servant de référence au discours du cosmétique.</p>
<h2>Après l’imprimante 3D, voici l’impression 4D !</h2>
<p>Ces considérations théoriques sont celles de l’ingénierie tissulaire moderne qui s’inscrit dans une approche globale où la chimie des matériaux, la pharmacologie cellulaire, l’embryologie et la biomécanique, entre autres, se combinent pour proposer aux tissus lésés des niches cellulaires et tissulaires, à la fois prothèse fonctionnelle et matrice de régénération. Dans ce contexte, le facteur temps est un élément essentiel.</p>
<p>Il est bien connu du chirurgien qui suit les évolutions/involutions en direct sur le corps des personnes soignées. Il devient un élément complexe à prendre en compte pour les chercheurs. Le temps ajoute une quatrième dimension à la modélisation de prothèses et orthèses, qu’elles soient synthétisées classiquement avec un matériau unique ou par l’addition orchestrée de plusieurs matériaux séquentiellement ajoutés sous le contrôle d’un logiciel lors de l’impression tridimensionnelle. Cette <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bio-impression">« impression 4D »</a> (l’impression 3D et le facteur temps) est certainement une clé pour optimiser la personnalisation des prothèses et orthèses et favoriser l’hybridation avec le corps. Ses potentialités sont à la base de l’ingénierie de ces niches propices à la régénération de tissus, voire à terme, d’organes.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/193920/original/file-20171109-27161-7p07dk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/193920/original/file-20171109-27161-7p07dk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/193920/original/file-20171109-27161-7p07dk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/193920/original/file-20171109-27161-7p07dk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/193920/original/file-20171109-27161-7p07dk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/193920/original/file-20171109-27161-7p07dk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/193920/original/file-20171109-27161-7p07dk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Imprimante 4D développée par la société russe 3D Bioprinting Solutions, capable d’imprimer des organes vivants.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bio-impression#/media/File:Printer_3D_Bioprinting_Solutions.jpg">Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
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<p>L’introduction systématique du temps introduit un dernier concept qui caracole au front de nos connaissances. Il s’agit du destin des tissus régénérés. On voit que le destin des tissus cicatrisés n’est souvent pas optimal, au regard de leur fonction initiale, même si le corps a dûment fait son travail d’urgence. La croissance des tissus doit être rapide sous peine que d’autres mécanismes se mettent en place (inflammation, infection). La croissance des tissus doit être objectivée : un nerf doit redonner un nerf. La croissance doit être limitée : des cellules doivent mourir ou arrêter de croître au front de la plaie, souvent en invoquant ce mécanisme de mort programmé que l’on appelle l’apoptose. La croissance doit être évolutive : les informations initiales transmises aux cellules doivent soit évoluer soit être interprétées différemment par les cellules. C’est là où les mécanismes épigénétiques vont intervenir. Il s’agit de faire en sorte que le bout de tissu ou d’organe en construction évolue vers un ensemble complet et fonctionnel.</p>
<p>Si l’information initiale de la niche fournie est traduite par les gènes en un programme initial de croissance et de différenciation cellulaire, l’évolution de l’environnement va réguler cette action au fil du temps. Cette épigénétique, autour de la génétique, fait appel à des mécanismes qui sont loin d’être compris et qui font l’objet d’excitantes recherches. Un moteur important de la régulation épigénétique est l’environnement mécanique des tissus. La mollesse d’un foie n’a rien à voir avec l’élasticité des vaisseaux sanguins et de la peau ni avec la dureté d’un ligament ou d’un os. Ce facteur biomécanique est devenu essentiel dans la modélisation des prothèses, orthèses voire des niches environnementales favorables à la régénération.</p>
<p>En résumé, la régénération partielle du corps est l’objet de nombreuses études se traduisant déjà cliniquement. Il y a cependant beaucoup à faire tant les espoirs sont importants, comme celui de régénérer les nerfs chez le tétraplégique. Mais ce qui était inenvisageable il y a quelques décennies devient un objectif réaliste. Le futur seulement dira si cela est réalisable. Le foie pourrait perdre sa singularité régénératrice inscrite dans le mythe de Prométhée. Quant à la régénération de l’Humain dans son entièreté, même la salamandre n’en est pas capable. Pour le moment.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/86959/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pascal Sommer ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La régénération partielle du corps est l’objet de nombreuses études se traduisant déjà cliniquement. Il y a cependant beaucoup à faire tant les espoirs sont importants.Pascal Sommer, Biologiste à l’Institut des sciences du mouvement (CNRS/Aix-Marseille université), Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/762822017-07-09T20:01:50Z2017-07-09T20:01:50ZLe cancer peut-il être dû à la « malchance » ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/165919/original/file-20170419-2398-1dntcoc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une jeune femme en traitement pour un cancer du sein, chez elle. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/young-woman-overcoming-cancer-home-235948381">Fototip/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>« Docteur, quelle est la cause de mon <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cancer-20834">cancer</a> ? » Cette question plonge le plus souvent le médecin dans un abîme de perplexité. On connaît certains facteurs de risque à l’échelle d’une population, mais pour un individu en particulier, on ne peut guère émettre que des hypothèses. Les scientifiques, toutefois, comprennent de mieux en mieux les mécanismes déclenchant les tumeurs. Même si certaines de leurs explications provoquent des remous…</p>
<p>Ainsi, deux chercheurs américains <a href="http://www.lemonde.fr/pathologies/article/2017/03/23/le-debat-sur-le-role-du-hasard-dans-le-cancer-relance_5099833_1655270.html">ont suscité la polémique</a> avec leurs travaux sur le rôle du « hasard » dans le cancer, dont leur <a href="http://science.sciencemag.org/content/355/6331/1330">dernier article paru dans la revue de référence <em>Science</em> en mars</a>. Ils affirment en effet que la maladie n’est pas tant liée à des risques héréditaires (la transmission d’un gène de prédisposition) et environnementaux (comme le tabagisme ou l’exposition à l’amiante) qu’à des mutations aléatoires (des erreurs de copie de l’ADN) survenant spontanément dans nos cellules lorsque celles-ci se divisent pour se renouveler, tout au long de notre vie. Autrement dit, au hasard.</p>
<p>Dans un <a href="http://science.sciencemag.org/content/347/6217/78">précédent article publié en 2015 dans la même revue</a>, Christian Tomasetti et Bert Vogelstein, chercheurs à l’université Johns Hopkins de Baltimore (États-Unis), s’interrogeaient déjà sur la fréquence des cas de cancer selon leur localisation dans les différents tissus du corps humain. Par exemple, le risque de développer un cancer du poumon au cours de la vie est de 6,9 % contre 1,08 % pour la thyroïde, et moins encore pour le cerveau et d’autres localisations.</p>
<h2>Le côlon, davantage touché que l’intestin grêle</h2>
<p>Ces différences sont généralement attribuées à l’exposition accrue de certains tissus aux facteurs de risque comme le tabac, l’alcool ou les ultraviolets. Mais cela n’explique pas pourquoi, le long du système digestif par exemple, le côlon est bien plus souvent touché que les autres organes. Par ailleurs, les parois de l’intestin grêle (entre l’estomac et le côlon) sont plus exposées aux substances mutagènes externes que les cellules du cerveau. Et pourtant, les tumeurs cérébrales sont trois fois plus fréquentes.</p>
<p>Ce paradoxe s’observe aussi pour des cancers d’origine génétique où une même mutation conduisant à des tumeurs colorectales et de l’intestin grêle voit cette seconde localisation bien plus rare que la première. Par contre, chez les souris porteuses de cette mutation, c’est l’inverse : les tumeurs de l’intestin grêle sont plus fréquentes que celles du côlon.</p>
<p>Les deux chercheurs font alors l’hypothèse que les mutations endogènes spontanées lors de la division des cellules souches (encore indifférenciées) d’un tissu sont en cause. En effet, chez l’homme, les cellules souches du gros intestin se renouvellent plus fréquemment que celles du grêle ; alors que chez la souris, c’est le contraire. Or plus les cellules se dupliquent, plus le risque d’erreurs dans la copie de l’ADN augmente. Cela pourrait expliquer les différences de déclenchement de cancers entre des organes pourtant exposés à des facteurs héréditaires ou environnementaux identiques.</p>
<h2>Plus un tissu se renouvelle, plus le risque de cancer est élevé</h2>
<p>En vérifiant ce lien supposé entre le nombre connu de divisions des cellules souches d’un tissu donné et le risque de cancer à cet endroit, une corrélation importante est apparue. Plus les cellules souches d’un tissu se multiplient au cours de la vie, plus le risque de cancer de ce tissu est élevé. Ce premier résultat, obtenu à partir de données sur la population américaine, a été renforcé par la seconde étude publiée au mois de mars, qui retrouve une corrélation moyenne du même ordre dans 69 pays.</p>
<p>Les chercheurs se sont ensuite appliqués à isoler les effets de ces mutations endogènes spontanées de ceux des autres facteurs de cancer, héréditaires et environnementaux. Ils ont ainsi montré que la majorité des cancers étaient liés à la « malchance », autrement dit à ces mutations aléatoires spontanées. Celles-ci jouent même un rôle non négligeable dans des cancers dont les causes environnementales sont fortement établies par ailleurs, comme celui du fumeur.</p>
<p>Ces résultats peuvent laisser penser qu’il n’est pas aussi utile qu’on le dit d’inciter les citoyens à adopter des comportements vertueux, par exemple l’arrêt de la cigarette ou la consommation de fruits et légumes. Pour cette raison, ils ont suscité une vive polémique, et les données présentées par les chercheurs ont donc été réanalysées par une autre équipe. Cette fois, le rôle attribuable au hasard <a href="https://theconversation.com/pourquoi-la-plupart-des-cancers-ne-sont-pas-la-faute-a-pas-de-chance-52883">est apparu moins important</a>.</p>
<h2>Les effets du stress oxydant sur l’ADN</h2>
<p>Par ailleurs, la littérature scientifique en microbiologie, liée directement ou non au cancer, abonde d’articles sur les mutations et les dommages endogènes causés à l’ADN. Dans un <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/10688856">article de 2000</a>, le chercheur américain Lawrence Marnett conclut même de son analyse des effets mutagènes du stress oxydant (cette agression de nos cellules par des molécules très réactives liées à l’oxygène, les « radicaux libres ») que ceux-ci l’emportent sur les dommages engendrés par les substances cancérigènes. Et le stress oxydant n’est pas la seule cause d’atteintes endogènes de l’ADN, comme on l’apprend dans une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/15123782">synthèse de Roel De Bont et Nicolas Van Larebeke</a> sur le sujet, datée de 2004.</p>
<p>Dans un <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28187286">article publié en début d’année</a>, Anthony Tubbs et Andre Nussenzweig rappellent que l’ADN de chaque cellule humaine enregistre 70 000 lésions par jour. On ne vivrait pas longtemps s’il n’existait pas des mécanismes prévus pour corriger ces erreurs et si elles devaient toutes mener à des tumeurs… C’est là qu’il est important de se rappeler que pour qu’une tumeur apparaisse, de <a href="https://theconversation.com/comment-une-cellule-devient-cancereuse-et-ce-quon-peut-faire-pour-leviter-69997">multiples processus de contrôle doivent avoir échoué</a>.</p>
<p>D’abord, l’ADN défectueux de la cellule ne doit pas avoir été réparé, comme cela est normalement prévu. Ensuite, le défaut doit en priorité toucher les gènes responsables de la duplication cellulaire ou ceux qui la contrôlent, autorisant ainsi une multiplication anarchique de la cellule. Il faut encore que cette cellule défectueuse échappe à son auto-destruction naturellement programmée (apoptose) puis à la vigilance du système immunitaire, chargé de débarrasser l’organisme des intrus et autres éléments non fonctionnels.</p>
<p>L’exposition de la cellule aux mutagènes, qu’ils soient internes ou externes, n’est donc qu’une étape dans une vaste chaîne de dérégulations indispensables pour qu’il y ait tumeur.</p>
<h2>Le rôle du stress</h2>
<p>À ce stade de la réflexion autour de la part de « malchance » dans la survenue d’un cancer, il est utile de se pencher sur le rôle particulier joué par le stress subi par les individus, <a href="http://www.deboecksuperieur.com/ouvrage/9782804185213-stress-et-cancer">sujet de mon ouvrage <em>Stress et cancer, quand notre attachement nous joue des tours</em></a> (De Boeck). Chacune des étapes de la cancérisation d’une cellule listées précédemment est en effet sensible au stress et à ses hormones. Ainsi le stress physiologique chronique qui, dans le mode de vie moderne, est majoritairement induit par un stress d’ordre psychologique, peut être considéré comme une cause directe de cancer même si, il faut le noter, <a href="http://www.lexpress.fr/actualite/societe/sante/les-emotions-une-arme-anticancer_1578398.html">des voix discordantes continuent à s’élever sur cette question</a>.</p>
<p>Le stress psychologique chronique engendre en effet une accélération de la multiplication des cellules, liée au raccourcissement des télomères, ces « embouts » qui protègent nos chromosomes de l’usure. Ce phénomène a été révélé par les travaux d’Elisabeth Blackburn, prix Nobel de médecine <a href="http://www.editions-tredaniel.com/leffet-telomere-p-7232.html">pour sa découverte de la télomérase</a>. Or plus ces cellules différenciées se multiplient, plus le risque de mutations aléatoires de leur ADN s’accroît. Par ailleurs, plus les cellules différenciées vieillissent et meurent, plus les cellules souches se divisent pour en produire de nouvelles, augmentant encore le risque de cancérisation.</p>
<p>Mais ce n’est pas tout. Le stress physiologique affecte aussi, par des mécanismes neuroendocriniens, le métabolisme oxydatif, la réparation de l’ADN, l’expression d’oncogènes et la production de facteurs de croissance. Il entraîne une dérégulation générale liée à l’inflammation chronique et une altération du fonctionnement immunitaire qui perd en efficacité, comme le montrent les études figurant en références dans mon livre, précédemment cité.</p>
<p>Pour revenir à la polémique suscitée par les deux chercheurs américains autour de la « malchance », celle-ci ouvre une nouvelle piste de réflexion. Christian Tomasetti et Bert Vogelstein soulignent que, selon l’organisme britannique Cancer Research UK, 42 % des cas de cancer peuvent être évités par des actions sur l’environnement et sur le style de vie des individus. En France, l’Institut national du cancer rapporte une proportion comparable de cas évitables (40 %) dans son rapport publié le 15 juin, <a href="http://www.e-cancer.fr/ressources/cancers_en_france/#page=93">« Les cancers en France 2016 »</a>. C’est à la fois beaucoup… et peu. Est-ce à dire qu’il faudrait se résigner à la fatalité dans 60 % des cas ?</p>
<p>À la place, les deux chercheurs suggèrent des moyens d’action contre la « malchance ». Ils préconisent, entre autres, le recours aux antioxydants pour améliorer la prévention des cancers. On peut aussi penser, à la lumière des processus délétères déclenchés par le stress, que protéger son équilibre psychique peut y participer efficacement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76282/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Yvane Wiart ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des erreurs d'ADN se produisent spontanément dans nos cellules. Alors que l'homme d'affaire Bernard Tapie attribue son cancer au stress, le point sur ce qu'on sait des causes de cette maladie.Yvane Wiart, Chargée de cours, docteure en psychologie, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/528832016-01-13T05:36:22Z2016-01-13T05:36:22ZPourquoi la plupart des cancers ne sont pas la faute à « pas de chance »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/107902/original/image-20160112-6972-1hpmesk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.shutterstock.com/pic-181507967/stock-photo-cancer-cell-lymphocytes-d-rendered-cancer-cell-clusters-of-cells-cancer-cell-and-lymphocytes.html?src=pd-same_artist-180113165-hEy_UNQjH0sJGj9bfV8HWw-3">UGREEN 3S/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Selon une étude, publiée dans la revue <a href="http://www.sciencemag.org/content/347/6217/78"><em>Science</em></a> au début de l’année 2015, la plupart des cancers ne sont pas évitables : c’est juste la faute à « pas de chance ». Cependant, quelques mois plus tard, une autre étude, dans le journal <a href="http://www.nature.com/nature/journal/vaop/ncurrent/full/nature16166.html"><em>Nature</em></a>, est parvenue à des conclusions tout à fait opposées : des facteurs externes comme le tabac, l’exposition au soleil et la maladie due au papillomavirus humain jouent une part beaucoup plus importante dans la survenue ou non d’un cancer. Alors, quelle est la cause de cette maladie : la malchance ou bien des styles de vie à éviter et des facteurs dus à l’environnement ?</p>
<h2>Pourquoi la malchance ?</h2>
<p>L’étude sur le manque de chance, conduite par Tomasetti et Vogelstein, de l’université Johns Hopkins, se fonde sur deux faits. Premièrement, il n’est pas vrai que le cancer peut frapper à parts égales tous les organes et tissus du corps. Des cancers, comme celui du colon, sont relativement courants, tandis que d’autres, comme celui des os, sont beaucoup plus rares, pour des raisons que cette étude s’applique à découvrir.</p>
<p>Deuxièmement, plusieurs types de tissus renferment des quantités différentes de cellules qui se divisent, appelées cellules souches. Elles ont pour fonction de remplacer les cellules vieillissantes ou endommagées. La fréquence de ces divisions varie selon l’endroit du corps où elles se trouvent et selon le nombre de fois où elles ont besoin d’être remplacées.</p>
<p>Selon l’une des <a href="https://med.stanford.edu/ludwigcenter/overview/theory.html">écoles de pensée</a>, le cancer survient quand les cellules souches échappent à tout contrôle.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/107899/original/image-20160112-6992-1k3abjo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/107899/original/image-20160112-6992-1k3abjo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/107899/original/image-20160112-6992-1k3abjo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/107899/original/image-20160112-6992-1k3abjo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/107899/original/image-20160112-6992-1k3abjo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/107899/original/image-20160112-6992-1k3abjo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/107899/original/image-20160112-6992-1k3abjo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=491&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cellules cancéreuses.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Cancer_cells_(1).jpg">Dr. Cecil Fox/Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Chaque fois qu’une cellule se divise en deux, il faut qu’elle fabrique une copie exacte de tout son ADN. Ce processus de copie est généralement précis, mais des erreurs peuvent survenir et entraîner, au hasard, des mutations spontanées. Quand des mutations se produisent dans les gènes contrôlant la division cellulaire, cela entrave leur mission qui est de supprimer les tumeurs. Le résultat c’est le cancer.</p>
<p>À en croire Tomasetti et Vogelstein, chaque fois qu’une cellule se divise, l’erreur due au hasard dans sa copie de l’ADN peut causer une mutation aboutissant au cancer. Si les cellules individuelles se divisent plus fréquemment, ou s’il y a davantage de cellules, dans l’ensemble, chez qui ce processus se déclenche, alors le risque augmente de voir apparaître ces mutations.</p>
<p>Les deux chercheurs ont examiné le comportement de cellules souches provenant de différents tissus et, en particulier, leur nombre ainsi que la fréquence avec laquelle elles se divisent tout au long d’une vie humaine. En se basant sur la variation de ces nombres dans divers tissus, ils en ont déduit que le risque de développer une forme particulière de cancer était étroitement lié au nombre de fois où les cellules souches se sont divisées dans ce tissu. Cela reflète le « risque intrinsèque » lié au copiage fréquent de l’ADN.</p>
<h2>Pourquoi l’environnement ?</h2>
<p>Dans une étude plus récente, des chercheurs de la Stony Brook University (SBU) à New York ont procédé à un autre examen des données utilisées par Tomasetti et Vogelstein. Ils ont remarqué que même si l’on prend en compte le nombre total de divisions de cellules souches, certains cancers continuent d’être davantage susceptibles de survenir que d’autres. Les cancers les plus courants, en ont-ils déduit, doivent avoir une cause externe supplémentaire, comme l’environnement, le style de vie ou la composante génétique.</p>
<p>À partir de là, quand ils ont à nouveau analysé les données, ils ont découvert que dans de nombreux cancers, y compris les plus courants comme les cancers du poumon et du foie, moins de 10 % des risques étaient liés à des erreurs de copiage.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/107900/original/image-20160112-6961-1plnpyi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/107900/original/image-20160112-6961-1plnpyi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/107900/original/image-20160112-6961-1plnpyi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/107900/original/image-20160112-6961-1plnpyi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/107900/original/image-20160112-6961-1plnpyi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/107900/original/image-20160112-6961-1plnpyi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/107900/original/image-20160112-6961-1plnpyi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Facteur de risque.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/coin-fumeurs-fumer-cigarette-679840/">Pixabay</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Que croire ?</h2>
<p>Les deux études ont des points communs, mais se différencient clairement dans leurs estimations du nombre de risques intrinsèques et extrinsèques qui contribuent au cancer.</p>
<p>En particulier, l’équipe SBU a renforcé notamment son point de vue avec un élément de preuve qui ne se trouvait pas dans les travaux de Tomasetti et Vogelstein. Tout d’abord, les chercheurs ont mis en lumière un grand nombre de données pointant la contribution importante de <a href="http://www.cancerresearchuk.org/health-professional/cancer-statistics/risk/preventable-cancers">l’environnement et du choix de style de vie</a> comme facteurs à risque du cancer. Par exemple, il est bien connu que le cancer du côlon se manifeste relativement peu au Japon, mais que les immigrants japonais aux États-Unis et leurs descendants présentent un <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/10877333">risque de tumeur du côlon</a> encore plus élevé que les Américains d’origine européenne.</p>
<p>L’équipe SBU a aussi examiné les différents types de mutations entraînées par toute une gamme de cancers. On observe certaines mutations plus fréquemment dans les tumeurs de personnes âgées. Cela correspond au cas du « pas de chance » où les facteurs clefs déclenchant l’apparition du cancer sont les erreurs qui s’accumulent chaque fois qu’une cellule se divise.</p>
<p>Cependant, des cancers portent aussi en eux de nombreux types de mutations qui peuvent survenir suite à une exposition à des facteurs cancérigènes, par exemple les mutations provoquées par le soleil aboutissant à un cancer de la peau. Combien de fois ces changements responsables des cancers surviennent-ils ? Cela dépend beaucoup moins de l’âge de la personne que de l'intensité de son exposition à des facteurs cancérigènes.</p>
<p>Finalement, les chercheurs de la SBU ont aussi montré que le taux d’erreurs connu dans le copiage de l’ADN n’est pas suffisamment élevé pour être le seul facteur déterminant de risque de développer les cancers étudiés par les deux équipes.</p>
<p>Même si nous connaissons les causes de certains types de cancer – par exemple dans le cancer du poumon, le fait de fumer –, d’autres cas, nombreux, s’avèrent plus compliqués et ne relèvent pas d’une seule et même origine.</p>
<p>Nous sommes tout juste en train de démêler l’effet des nombreux facteurs impliqués. Tandis que la chance joue un rôle pour déterminer qui aura le cancer et qui ne l’aura pas, il est tout à fait évident que le mode de vie, l’environnement ainsi que nos propres gènes peuvent changer la donne de façon considérable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/52883/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sarah Allinson a reçu, dans le passé, des financements du North West Cancer Research et est membre de son comité scientifique.</span></em></p>La chance commande-t-elle vos risques de cancer ? Une étude de chercheurs américains pose l’hypothèse. D’autres spécialistes ne sont pas d’accord. Les facteurs liés à l’environnement sont majeurs.Sarah Allinson, Senior Lecturer, Lancaster UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/514272015-12-09T05:48:26Z2015-12-09T05:48:26ZRésistance aux antibiotiques : l’apocalypse est-elle au bout du chemin ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/104703/original/image-20151207-20451-13mkhs1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C19%2C666%2C407&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.shutterstock.com/dl2_lim.mhtml?id=205420948&size=medium_jpg&src=KLrJIrAPK_gMn-DpMVjlbA-1-0">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Des <a href="http://www.thelancet.com/journals/laninf/article/PIIS1473-3099(15)00424-7/abstract">chercheurs chinois</a> ont découvert récemment que des bactéries <em>E. coli</em> résistaient à un antibiotique dénommé colistine, qualifié souvent d’antibiotique du dernier recours. Cette découverte a conduit les experts à une mise en garde : une <a href="http://www.bbc.co.uk/news/health-34857015">ère post-antibiotiques</a> pourrait advenir. Ce qui inquiète précisément les professionnels de santé c’est le fait que le bout circulaire d’ADN qui rend les micro-organismes résistants à la colistine risque de se transmettre à d’autres souches de bactéries néfastes.</p>
<p>Ce cercle fait d’ADN, connu sous le nom de MCR-1, a été découvert sur une structure circulaire d’ADN que l’on appelle un plasmide. Les plasmides sont porteurs d’ « options supplémentaires » pour les bactéries : en l’occurence, des gènes qui ne sont pas essentiels à la survie mais qui peuvent être bénéfiques pour l’organisme considéré. Dans ce cas précis, survivre en présence de colistine. Quelques plasmides peuvent être répliqués et transmis à d’autres bactéries, leur apportant les options supplémentaires.</p>
<p>Les chercheurs chinois estiment que la bactérie <em>E. coli</em> résistante, découverte à l’origine dans les porcs et les produits carnés, a développé la capacité à résister à la colistine en raison de l’utilisation intensive de cet antibiotique dans la nourriture des animaux.</p>
<h2>Les résistances évoluent</h2>
<p>La <a href="http://www.webmd.com/drugs/2/drug-8761/colistin-colistimethate-sodium-injection/details">colistine</a> rend la membrane de la cellule bactérienne plus facile à traverser pour les médicaments. C’est pourquoi elle est couramment utilisée pour traiter les infections résistantes aux antibiotiques. Elle peut tuer les bactéries pathogènes à elle seule, mais elle est utilisée le plus souvent en conjonction avec d’autres antibiotiques.</p>
<p>Quand les bactéries comme <em>E. coli</em> sont continuellement exposées à la colistine, celles qui n’ont pas de défense meurent. D’autres survivent, car elles ont, face aux antibiotiques, développé une résistance grâce à la mutation naturelle de l’ADN pendant la division cellulaire. Et ce sont elles qui vont transmettre ces changements bénéfiques à la génération suivante. Si bien que vous vous trouvez finalement avec toute une population de microbes résistants à l’antibiotique.</p>
<p>Les bactéries résistent à la colistine de plusieurs façons. La colistine n’est plus en mesure de coller à la bactérie ; ou bien la membrane de la cellule devient plus résistante ; ou encore l’antibiotique peut être éjecté de la cellule par les bactéries.</p>
<h2>Les unes renforcées, les autres affaiblies</h2>
<p>Développant notre propre recherche à l’université Trent de Nottingham, nous avons exposé les bactéries au même antibiotique, et nous avons vu que certaines résistaient et d’autres non.</p>
<p>Nous avons étudié, comme beaucoup d’autres groupes, <a href="http://jac.oxfordjournals.org/content/70/8/2209.long">le processus</a> selon lequel la bactérie devient résistante à la colistine et nous avons créé des souches résistantes par le biais de semaines d’exposition <a href="http://www.icaaconline.com/php/icaac2013abstracts/data/papers/2013/C1/2013_C1-505.htm">à cet antibiotique et à d’autres anti-bactériens</a>.</p>
<p>Comme certains désinfectants fonctionnent de la même façon avec la colistine, nous avons voulu savoir si l’exposition aux désinfectants, à la maison ou à l’hôpital, entraînait une résistance à la colistine. Dans les bactéries mutantes que nous avons engendrées, certaines ont réussi, plus qu’auparavant, à envahir les cellules humaines, mais d’autres ont perdu tout pouvoir de pénétration. Aussi aimerais-je bien savoir quels autres changements ont été observés dans les bactéries étudiées par les chercheurs chinois.</p>
<p>Je me souviens, avec regret, que les premières bactéries résistantes à la colistine que j’ai étudiées possédaient une membrane de cellule plus solide : mais à cause de cette rigidité, elles avaient tendance à mourir quand je les entreposais au froid. Leur rigidité, tellement utile dans la lutte contre la colistine, signifiait qu’elles se détruisaient à des températures très basses. Ainsi, la bactérie résistante à la colistine découverte par les chercheurs chinois a pu être affectée par d’autres facteurs – plus néfastes aux bactéries que bénéfiques.</p>
<h2>Vitesse d’acquisition</h2>
<p>Cependant, la vitesse à laquelle les bactéries ont acquis la résistance constitue l’aspect le plus alarmant de cette dernière découverte. Une seule interaction entre des bactéries résistantes et non résistantes peut dès lors donner deux organismes résistants, le plasmide étant copié et passant d’une bactérie à l’autre.</p>
<p>Jusqu’à présent, les bactéries ayant développé de la résistance à la colistine auraient nécessité une longue période d’exposition à l’antibiotique avant qu’une souche résistante ne se développe. La résistance portée par le plasmide est beaucoup plus rapide. Il ne s’agit pas là du lent glissement de changements accumulés, mais du transfert, en un seul coup, de tout l’ensemble de gènes requis pour cette opération.</p>
<p>Ce transfert de plasmide d’un gène résistant a été observé depuis quelque temps avec d’autres antibiotiques – y compris ceux associés à la colistine –, mais, jusqu’à maintenant, cela n’avait pas marché avec la colistine seule.</p>
<h2>Bactéries sans frontières</h2>
<p>Les plasmides « coûtent cher » aux bactéries qui les portent parce qu’ils requièrent beaucoup d’énergie. Ainsi, il faut qu’il y ait une force motrice qui mette à mort les bactéries non porteuses de plasmide pour que cette capacité se transmette de génération à génération.</p>
<p>Une nouvelle recherche parue dans la revue <em>The Lancet</em> suggère que l’utilisation de la colistine chez les animaux de ferme, là où les bactéries ont été isolées, en est la cause probable. Car, parmi les bactéries exposées de façon ininterrompue à la colistine, seules ont survécu celles qui portaient le plasmide. En outre, ce n’est pas la première fois que l’utilisation d’antibiotiques sur des animaux de ferme a produit des bactéries capables de causer des infections résistantes aux antibiotiques chez les humains.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/102527/original/image-20151119-18413-qselve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/102527/original/image-20151119-18413-qselve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/102527/original/image-20151119-18413-qselve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/102527/original/image-20151119-18413-qselve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/102527/original/image-20151119-18413-qselve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/102527/original/image-20151119-18413-qselve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/102527/original/image-20151119-18413-qselve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La résistance aux antibiotiques se joue des frontières.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.shutterstock.com/cat.mhtml?autocomplete_id=&language=en&lang=en&search_source=&safesearch=1&version=llv1&searchterm=passport%20control&media_type=photos&media_type2=photos&searchtermx=&photographer_name=&people_gender=&people_age=&people_ethnicity=&people_number=&color=&page=1&inline=161334506">Shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>L’usage de la colistine pour traiter les animaux de ferme est rarement pratiqué en Europe. Toutefois, les voyages aériens et le mépris affiché des bactéries pour les frontières nationales signifient une chose : c’est seulement une question de temps avant que l’on ne voie débarquer ici l’une de ces souches.
Je serais curieux de savoir à quel degré ce plasmide est conservé au sein de la population bactérienne dans des zones où l’on ne rencontre pas généralement de colistine. Ou bien est-ce que les gènes migrent au sein du chromosome de la bactérie, devenant ainsi une partie normale du micro-organisme et non pas un supplément optionnel.</p>
<p>Tout ceci pour rappeler que, quand il s’agit de résistance aux antibiotiques, il n’est pas seulement question de prescription locale, mais d’une utilisation au niveau mondial. Les infections résistantes aux antibiotiques constituent un problème mondial et la réponse doit être donnée à la même échelle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/51427/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michael Loughlin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La découverte de bactéries Escherichia coli résistantes à la colistine, antibiotique de dernier recours, fait craindre de devoir se passer un jour de ces médicaments. Il faut une réponse mondiale.Michael Loughlin, Senior lecturer, Nottingham Trent UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/514262015-12-02T05:32:59Z2015-12-02T05:32:59ZLe mythe du « chaînon manquant » ne fait pas avancer la science<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/103544/original/image-20151129-11640-k3i1xq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.shutterstock.com/pic.mhtml?id=158823788&src=lb-29877982">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Au printemps dernier, on a appris qu’on venait de découvrir un <a href="http://www.nytimes.com/2015/05/07/science/under-the-sea-a-missing-link-in-the-evolution-of-complex-cells.html?_r=0">chaînon manquant</a> entre les micro-organismes et les humains et qu’on l’avait appelé <a href="http://phenomena.nationalgeographic.com/2015/05/06/new-loki-microbe-is-closest-relative-to-all-complex-life/">Lokiarchaeota</a>. En fait, ce microbe repéré sur le fond marin à côté d’une source hydrothermale baptisée château Loki, partage des caractéristiques avec, à la fois, les bactéries et nous-mêmes. Et du coup, il constituerait un chaînon manquant entre les deux groupes. Les microbiologistes se sont montrés bien silencieux face à la fiction ainsi racontée. En effet, même si ce microbe est fascinant, et mérite donc d’être mis en pleine lumière, il ne constitue pas plus un chaînon manquant que l’ornithorynque en est un entre les canards et les hommes.</p>
<p>L’image du chaînon manquant, fondée sur l’idée que l’évolution est un processus méthodique avec des connexions logiques et continues à découvrir et à répertorier, voilà qui fait une bien belle histoire. Mais elle est fausse. Et cela influence de façon fâcheuse la compréhension que nous avons de phénomènes menaçants et immédiats comme l’évolution rapide de la grippe.</p>
<h2>La grande chaîne du vivant</h2>
<p>La notion de chaînons manquants dans l’évolution remonte à la théologie médiévale de la <a href="https://en.Wikipedia.org/wiki/Great_chain_of_being">grande chaîne du vivant</a>, une théorie qui a survécu à Darwin et <a href="http://doi.org/10.1186/1936-6434-6-18">persiste jusqu’à nos jours</a>. Elle est irrésistible – et pas seulement parce que vous savez qui finira tout en haut du pinacle présumé de l’évolution.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/93439/original/image-20150831-25766-3dudhw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/93439/original/image-20150831-25766-3dudhw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/93439/original/image-20150831-25766-3dudhw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/93439/original/image-20150831-25766-3dudhw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=424&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/93439/original/image-20150831-25766-3dudhw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/93439/original/image-20150831-25766-3dudhw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/93439/original/image-20150831-25766-3dudhw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=533&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Deux visions des relations entre les animaux connus des théologiens du Moyen-Age.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Author</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>A la gauche du schéma, il y a l’image habituelle de la vie sur Terre : une chaîne de créatures s’alignant sans à-coups du poisson à l’homme en passant par les grenouilles et les lézards. L’idée étant que pas à pas, la vie « avance » en gagnant de plus en plus de complexité : la théorie de la grande chaîne du vivant est tellement enracinée qu’elle est même utilisée par des <a href="http://images.dailytech.com/nimage/23843_large_South_Park_Evolution_Wide.png">artistes comiques</a> et des <a href="http://www.wallpaperup.com/239428/homersapien-wallpaper-2560x1600.html">dessinateurs humoristiques</a> pour se moquer de <a href="https://yalealumnimagazine.com/uploads/images/5400054/1414763822/zallinger_fish-phone.jpg">l’esprit de l’époque</a>.</p>
<h2>Imagerie scientifique</h2>
<p>Mais qu’il y a-t-il sur le schéma de droite ? L’un et l’autre sont justes et montrent exactement les mêmes informations à propos des relations entre espèces : les humains sont plus étroitement apparentés aux singes que ces deux espèces ne sont apparentées aux lézards et que tout ce petit monde n’est apparenté aux grenouilles, etc. Mais nous savons bien que les hommes ne constituent pas un chaînon entre les poissons et les grenouilles. Chaque noeud d’un arbre généalogique peut être tourné sans que cela ne modifie les rapports exacts entre les membres présents. La rotation sur la gauche est la plus habituelle car nous aimons bien nous situer au sommet !</p>
<p>On ne peut dévoiler plus efficacement la puissance de ce genre d’imagerie scientifique qu’en positionnant Lokiarchaeota comme chaînon manquant dans une telle chaîne d’évolution imaginaire.</p>
<p>L’un des grands succès de notre compréhension de la vie, c’est de savoir que la cellule eucaryote, celle qui est nôtre, provient d’une fusion ancienne, par <a href="http://www.huffingtonpost.com/james-a-shapiro/cell-mergers-evolution-life_b_1807742.html">symbiogenèse</a>, de formes de vie très disparates. C’est ce que l’on appelle une chimère à moins que l’on préfère l’appeler une créature de Frankenstein. Le microbe Lokiarchaeota est un salmigondis d’éléments disparates ressemblant aux <a href="http://www.ucmp.berkeley.edu/alllife/threedomains.html">trois domaines du vivant</a> dont nous partageons une partie. C’est un Frankenstein comme nous ne l’avons encore jamais vu, mais un Frankenstein tout de même, et pas l’anneau d’une chaîne.</p>
<p>On assiste de plus en plus à des découvertes époustouflantes, toutes rendues possibles par notre utilisation de nouvelles technologies moléculaires pour explorer la biodiversité de la Terre. Par exemple, le <a href="http://www.pbs.org/newshour/updates/tiny-ocean-organism-brought-earth-life/">laboratoire</a> de Penny Chisholm au Massachusetts Institute of Technology a découvert des virus qui avaient emprunté des éléments d’information photosynthétique au plancton marin – une <a href="http://www.the-scientist.com/?articles.view/articleNo/23469/title/Virus-may-aid-photosynthesis/">trouvaille remarquable</a> mais pas parce que c’est un chaînon manquant entre les virus et les plantes.</p>
<p>L’image d’une chaîne continue, degré après degré et anneau après anneau, est déterminante dans la façon dont nous percevons l’évolution et cela affecte notre vie quotidienne. Prenons l’exemple de la grippe, qui requiert une vaccination par an car elle évolue sans cesse pour échapper à notre système immunitaire : ce qui nous a protégé l’année dernière ne servira plus cette année. Si l’on ignore l’émergence rare – heureusement pour nous – de monstruosité comme la <a href="https://virus.stanford.edu/uda/">grippe espagnole</a> après la Première Guerre mondiale, le virus de la grippe évolue sans arrêt. Il est généralement modélisé comme se produisant par <a href="http://www.dictionnaire-sante.com/definition-derive-antigenique">dérive antigénique</a>, un phénomène continu et sans à-coups qui l’emporte au hasard à travers l’espace de l’évolution, pour trouver de nouveaux endroits où se mettre à l’abri du système immunitaire.</p>
<h2>Un récit différent de l’évolution</h2>
<p>Mais nous ne pouvons pas nous contenter de récits anciens simplement parce que nous les trouvons confortables et familiers. Pour l’épidémiologue et théoricien <a href="http://www.zoo.ox.ac.uk/people/view/gupta_s.htm">Sunetra Gupta</a>, de nombreuses maladies infectieuses – dont le virus de la grippe – évoluent via le réassemblage d’<a href="https://youtu.be/M-zYg8Crmvc">éléments anciens</a> provenant de sources disparates, et non au cours d’une errance perpétuelle vers de nouveaux endroits. Plutôt qu’un horloger aveugle tripotant le modèle de l’année dernière – c’est la célèbre image de l’évolution de <a href="http://www.theguardian.com/science/2010/apr/30/richard-dawkins-blind-watchmaker">Richard Dawkins</a> –, il s’agit plutôt de la vision d’un savant fou qui assemble chaque année, dans son laboratoire, de nouvelles créatures frankensteiniennes.</p>
<p>À coup sûr, le nouveau vaccin qui vous est inoculé chaque année ne ressemble pas à un anneau d’une chaîne continue. Il s’agit plus d’un mélange de <em>A/Nouvelle-Calédonie/20/99</em> et de <em>B/Shandong/7/97</em>, élaboré à partir de souches précédentes. A Oxford, Gupta et son équipe opposent l’habituelle et confortable idée de dérive antigénique à celle d’une <a href="http://rstb.royalsocietypublishing.org/content/royptb/368/1614/20120200.full.pdf">« épargne antigénique »</a> concept inspiré du monde de l’économie, évoquant l’image de quelqu’un qui, dans un magazine d’occasion, farfouille pour retrouver les modèles anciens de vêtements afin d’en confectionner de nouveau. Déterminer le juste point de vue sur l’évolution du virus de la grippe fait actuellement l’objet d’études scientifiques actives et <a href="http://www.biomedcentral.com/1741-7007/10/38">controversées</a>.</p>
<p>Le fait est que les métaphores ont un pouvoir considérable en matière scientifique. Mais ce n’est pas la réalité qui nous les impose. L’importance d’images fortes pour permettre au grand public de comprendre la science ne doit pas être surévaluée. Il est arrivé que la presse mondiale nous régale d’un <a href="https://youtu.be/RkUjfKVk1QI"><em>Late Night Double Feature Picture Show</em></a> où des scientifiques <a href="http://www.nytimes.com/1998/08/21/world/in-the-norwegian-permafrost-a-new-hunt-for-the-deadly-1918-flu-virus.html">déterrent les cadavres</a> dans le permafrost arctique afin de réactiver en laboratoire le virus mortel de la grippe de 1918. Cette remarquable étude de la grippe aurait été accueillie moins en fanfare si elle ne se rattachait pas à des mythes populaires. Merci Mary Shelley !</p>
<p>Nous devons choisir nos métaphores avec soin, de peur d’être induits en erreur. Ainsi, la Grande chaîne du vivant, tendue à travers l’espace de l’évolution par des horlogers aveugles, avec des chaînons manquants en attente de découverte, ne nous aide pas à comprendre les maladies infectieuses.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/51426/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sean Nee ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La biologie est friande de métaphores et d’images fortes pour décrire l’évolution du vivant. Mais que valent ces représentations ? Celle, fameuse, du chaînon manquant est hautement critiquable.Sean Nee, Research Professor of Ecosystem Science and Management, Penn StateLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.