tag:theconversation.com,2011:/fr/topics/especes-disparues-23944/articlesespèces disparues – The Conversation2024-01-17T09:12:40Ztag:theconversation.com,2011:article/2212652024-01-17T09:12:40Z2024-01-17T09:12:40ZUne nouvelle recherche fait le point sur l’extinction des espèces animales… et leur redécouverte<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/569591/original/file-20240116-22672-a3vxe4.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C5%2C1914%2C1261&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le caméléon de Voeltzkow a été redécouvert à Madagascar en 2018.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.inaturalist.org/observations/2583347">Martin Mandák/iNaturalist </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Nous sommes actuellement confrontés à une extinction de masse des espèces. En marge de ce phénomène, certaines espèces sont dites « perdues », ce sont celles qui n’ont pas été observées dans la nature depuis plus de dix ans, malgré les recherches effectuées pour les retrouver. Les espèces perdues de tétrapodes (animaux vertébrés à quatre membres, dont les amphibiens, les oiseaux, les mammifères et les reptiles) sont un phénomène mondial : on en dénombre plus de 800.</p>
<p><a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/gcb.17107">Notre étude</a>, publiée aujourd’hui dans la revue scientifique <em>Global Change Biology</em>, tente de déterminer pourquoi certaines espèces de tétrapodes sont redécouvertes et d’autres non. Elle révèle également que le nombre d’espèces de tétrapodes perdues augmente de décennie en décennie. Cela signifie que, malgré de nombreuses recherches, nous les perdons à un rythme plus rapide que nous ne les redécouvrons. En particulier, les taux de redécouverte des espèces perdues d’amphibiens, d’oiseaux et de mammifères ont ralenti ces dernières années, tandis que les taux de perte des espèces de reptiles ont augmenté.</p>
<p>En général, les espèces disparaissent parce que leurs populations ont été réduites à une taille très faible en raison de menaces humaines telles que la chasse ou la pollution. Par conséquent, de nombreuses espèces disparues sont menacées d’extinction (en fait, certaines sont probablement déjà éteintes). Cependant, il est difficile de protéger les espèces perdues de l’extinction parce que nous ne savons pas où elles se trouvent.</p>
<h2>Les redécouvertes conduisent à des actions de conservation</h2>
<p>En 2018, des chercheurs colombiens ont réussi à retrouver le <a href="https://www.iucnredlist.org/species/22735460/181746724">chardonneret d’Antioquia</a> (<em>Atlapetes blancae</em>), une espèce d’oiseau non répertoriée depuis 1971. Cette redécouverte a conduit à la <a href="https://www.rainforesttrust.org/urgent-projects/last-stand-for-the-antioquia-brush-finch/">création d’une réserve</a> pour protéger la population restante, qui est minuscule et menacée par la perte d’habitat causée par l’expansion de l’agriculture et le changement climatique.</p>
<p><a href="https://www.smithsonianmag.com/smart-news/scientists-find-the-extinct-victorian-earless-dragon-not-seen-since-1969-180982440/">Le reptile <em>Tympanocryptis pinguicolla</em></a> a été redécouvert en Australie l’année dernière. Il n’avait pas été enregistré depuis 54 ans et était présumé éteint, en raison de la perte de son habitat de prairie et de la prédation par des espèces exotiques envahissantes, y compris les chats sauvages. Sa redécouverte a donné lieu à un <a href="https://minister.dcceew.gov.au/plibersek/media-releases/joint-media-release-reptile-thought-be-extinct-rediscovered-victoria">financement gouvernemental</a> pour tester de nouvelles techniques d’étude afin de trouver d’autres populations de l’espèce, ainsi qu’à un programme d’élevage et à la préparation d’un plan de rétablissement de l’espèce.</p>
<p>Les redécouvertes sont donc importantes : elles apportent la preuve de l’existence d’espèces très menacées, ce qui incite à financer des mesures de conservation. Les résultats de notre étude peuvent aider à hiérarchiser les recherches d’espèces disparues. Dans l’image ci-dessous, nous avons cartographié leur distribution mondiale, en identifiant les régions où il y a beaucoup d’espèces perdues et peu d’espèces redécouvertes.</p>
<h2>Quels sont les facteurs qui influencent les redécouvertes ?</h2>
<p>Malheureusement, de nombreuses recherches pour retrouver des espèces perdues restent infructueuses. En 1993, des recherches menées pendant sept ans au Ghana et en Côte d’Ivoire n’ont pas permis de retrouver un primate disparu, le <a href="https://www.science.org/content/article/where-have-you-gone-miss-waldrons-red-colobus">colobe rouge de Miss Waldron</a> (<em>Piliocolobus waldronae</em>). L’équipe de recherche a conclu que ce singe, non répertorié depuis 1978, pourrait bien avoir disparu. Elle serait due à la chasse et à la destruction de son habitat forestier. D’autres recherches en 2005, 2006 et 2019 ont également été infructueuses, bien que des <a href="https://iucn.org/resources/publication/red-colobus-piliocolobus-conservation-action-plan-2021-2026">cris susceptibles d’être ceux de cette espèce aient été entendus en 2008</a>.</p>
<p>En 2010, les recherches du crapaud à bec de Mésopotamie (<em>Rhinella rostrata</em>), non répertorié en Colombie depuis 1914, ont été infructueuses (<a href="https://news.mongabay.com/2010/11/pictures-mr-burns-frog-discovered-in-colombia-along-with-2-other-new-species/">mais ont conduit à la découverte de trois nouvelles espèces d’amphibiens</a>). La recherche de la <a href="https://www.rewild.org/lost-species/sinu-parakeet">perruche de Sinú</a> (<em>Pyrrhura subandina</em>), non répertoriée en Colombie depuis 1949, a également été infructueuse l’année dernière. Néanmoins, l’équipe du projet a identifié la présence de <a href="https://www.birdguides.com/articles/conservation/exciting-rediscoveries-boost-hopes-of-finding-sinu-parakeet/">dix autres espèces de perroquets dans la zone d’étude et de grandes étendues d’habitat approprié</a>, ce qui laisse espérer que la perruche de Sinú continue d’exister.</p>
<p>Pourquoi certaines espèces sont-elles redécouvertes alors que d’autres restent perdues ? Existe-t-il des facteurs spécifiques qui influencent la redécouverte ? Notre étude visait à répondre à ces questions, afin d’améliorer notre capacité à distinguer les types d’espèces perdues que nous pouvons redécouvrir de celles que nous ne pouvons pas redécouvrir, parce qu’elles sont éteintes.</p>
<p>Notre équipe était composée de membres de l’organisation <a href="https://www.rewild.org/lost-species">Re :wild</a>, qui dirige les efforts de recherche des espèces perdues depuis 2017, ainsi que d’experts en espèces de la <a href="https://www.iucn.org/our-union/commissions/species-survival-commission">Commission de la sauvegarde des espèces de l’Union internationale pour la conservation de la nature</a> (UICN).</p>
<p>Nous avons compilé une <a href="https://doi.org/10.5061/dryad.c866t1gdf">base de données de 856 espèces de tétrapodes perdues et de 424 espèces redécouvertes</a> (amphibiens, oiseaux, mammifères et reptiles). Nous avons ensuite proposé trois grandes hypothèses sur les facteurs susceptibles d’influencer la redécouverte : les caractéristiques des espèces de tétrapodes et de l’environnement ainsi que les activités humaines influencent la redécouverte.</p>
<p>Par exemple, la masse corporelle (une caractéristique de l’espèce) peut avoir une influence positive sur la redécouverte, car les espèces perdues de grande taille devraient être plus faciles à trouver. Les espèces perdues qui occupent des forêts denses (une caractéristique de l’environnement) peuvent ne pas être redécouvertes car il est difficile de les chercher. Les espèces perdues affectées par des menaces associées aux activités humaines (par exemple, les espèces exotiques envahissantes, qui sont répandues dans de nouveaux endroits par le commerce mondial) peuvent ne pas être redécouvertes, car elles sont peut-être éteintes.</p>
<p>Sur la base de ces hypothèses, nous avons collecté des données sur une série de variables associées à chaque espèce perdue et redécouverte, que nous avons ensuite analysées pour déterminer leur influence sur la redécouverte.</p>
<h2>Difficile à trouver + négligé = redécouvert</h2>
<p>D’un autre côté, nos résultats suggèrent que même si de nombreuses espèces disparues sont difficiles à trouver, avec un peu d’effort et l’utilisation de nouvelles techniques, elles sont susceptibles d’être redécouvertes. Ces espèces comprennent celles qui sont très petites (y compris de nombreuses espèces de reptiles disparues), celles qui vivent sous terre, celles qui sont nocturnes et celles qui vivent dans des zones difficiles à étudier.</p>
<p>D’ailleurs, depuis la fin de notre étude, la <a href="https://www.theguardian.com/environment/2023/nov/30/back-from-the-brink-de-wintons-golden-mole-feared-extinct-rediscovered-after-86-years-aoe">Taupe dorée de Winton</a> (<em>Cryptochloris wintoni</em>) a été redécouverte en Afrique du Sud. Cette espèce n’avait pas été observée dans la nature depuis 1937. Elle vit sous terre la plupart du temps, c’est pourquoi des recherches ont été menées à l’aide de techniques telles que l’ADN environnemental et l’imagerie thermique.</p>
<p>Nos résultats suggèrent également que certaines espèces sont négligées par les spécialistes de la conservation, en particulier celles qui ne sont pas considérées comme charismatiques, telles que les reptiles, les petites espèces et les rongeurs. Les recherches de ces espèces peuvent également être couronnées de succès. Le caméléon de Voeltzkow (<em>Furcifer voeltzkowi</em>), une petite espèce de reptile, a été <a href="https://www.livescience.com/lost-chameleon-rediscovered-after-century.html">redécouvert à Madagascar en 2018</a>.</p>
<h2>Perdues ou éteintes ?</h2>
<p>Malheureusement, nos résultats suggèrent également que certaines espèces perdues ont peu de chances d’être retrouvées, quels que soient les efforts déployés, parce qu’elles sont éteintes. Par exemple, les espèces de mammifères encore perdues sont en moyenne trois fois plus grandes que les espèces de mammifères redécouvertes. Certaines de ces espèces de grande taille, charismatiques et bien visibles auraient déjà dû être redécouvertes.</p>
<p>En outre, un tiers des espèces de mammifères encore perdues sont endémiques des îles, où les espèces de tétrapodes sont <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2351989421003978">particulièrement vulnérables à l’extinction</a>. Le mélomys de Bramble Cay (<em>Melomys rubicola</em>), qui était autrefois considéré comme une espèce perdue, a récemment été <a href="https://www.dcceew.gov.au/environment/biodiversity/threatened/nominations/comment/bramble-cay-melomys-2018">déclaré éteint</a> par le gouvernement australien. Il occupait une petite île qui a fait l’objet d’une étude approfondie. S’il existait encore, il aurait déjà dû être redécouvert.</p>
<p>Les espèces d’oiseaux perdues ont, en moyenne, disparu depuis plus longtemps que celles qui ont été redécouvertes (28 % ont disparu depuis plus de 100 ans), et beaucoup ont été recherchées à plusieurs reprises – peut-être que certaines de ces espèces auraient également dû être redécouvertes à ce jour.</p>
<p>Néanmoins, des redécouvertes inattendues d’espèces disparues depuis longtemps comme le <a href="https://www.edgeofexistence.org/species/cebu-flowerpecker/">pic de Cebu</a> (<em>Dicaeum quadricolor</em>) se produisent, nous ne devrions donc pas perdre espoir et nous devrions certainement continuer à chercher. Cependant, certaines recherches sont menées pour retrouver des espèces perdues depuis longtemps et considérées comme éteintes, comme le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0048969723014948">thylacine</a> (<em>Thylacinus cynocephalus</em>). Les ressources limitées disponibles pour la conservation de la biodiversité seraient peut-être mieux utilisées pour rechercher des espèces perdues susceptibles d’exister encore.</p>
<hr>
<p><em>Tim Lindken, ancien étudiant en master sous la responsabilité de l’auteur, a contribué à la rédaction de cet article.</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221265/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Evans a reçu des financements de The Alexander von Humboldt Foundation.</span></em></p>Il existe des centaines d’espèces disparues à travers le monde et leur nombre augmente de décennie en décennie. Pourquoi certaines espèces sont redécouvertes, alors que d’autres ne le sont pas ?Thomas Evans, Research scientist, Freie Universität Berlin, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1817452022-04-28T21:22:00Z2022-04-28T21:22:00ZMammouths et CRISPR-Cas9 : quelle éthique pour la résurrection d’espèces disparues ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/459116/original/file-20220421-13-s0o04l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C0%2C2552%2C1700&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Mammouth laineux reconstitué en 1979, en exposition Royal BC Museum de Victoria (Canada).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Woolly_mammoth.jpg?uselang=fr">Flying Puffin/Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Pourrait-on vraiment revoir un jour les mammouths laineux disparus il y maintenant 3700 ans ? La question pourrait paraître saugrenue mais les progrès des techniques de génie génétique permettent dorénavant d’envisager sérieusement de faire revivre des <a href="https://www.cell.com/current-biology/fulltext/S0960-9822(22)00249-4">espèces disparues</a> ou proches des <a href="https://colossal.com/">dites espèces disparues</a> (<a href="https://www.academia.edu/download/53147475/De-ex_guidelines_Digital_31.7.16_Final.pdf">appelées « proxies »</a>).</p>
<p>Les buts avoués de ces tentatives sont multiples, qu’il s’agisse de valider le concept de désextinction ou d’apporter une solution écologique à la problématique de la libération du permafrost due au changement climatique.</p>
<h2>La technologie CRISP-Cas9</h2>
<p>Cette avancée technologique est notamment due à la technologie d’édition du génome CRISPR-Cas9, découverte en 2012 par <a href="https://www.science.org/doi/abs/10.1126/science.1258096">Emmanuelle Charpentier et Jennifer Doudna</a>. Cette technique dite des <a href="https://www.medecinesciences.org/en/articles/medsci/pdf/2015/12/medsci20153111p1014.pdf">« ciseaux moléculaires »</a> permet de modifier l’ADN à un endroit précis du génome, dans n’importe quelle cellule. Elle reproduit un processus de défense existant naturellement dans certaines bactéries. La technique comporte une séquence d’ARN dite guide, dont le rôle est de cibler une séquence d’ADN spécifique, associée à une enzyme (ici Cas9), dont le rôle est de couper l’ADN au niveau de ladite séquence. Les systèmes naturels de réparation de la cellule vont ensuite automatiquement « recoller » les extrémités des deux morceaux d’ADN créés par la rupture.</p>
<p>En fonction du <a href="https://theconversation.com/crispr-comment-ca-marche-158581">résultat souhaité</a> (réparation, inactivation de gène), on intègre ou non dans le processus une sorte de « modèle » de réparation. Sans modèle, le système de réparation agit à chacune des nouvelles extrémités du brin d’ADN, générant des « anomalies » dans la séquence ciblée, ce qui répare ou inactive le gène. Inversement, en présence d’une séquence d’ADN synthétique servant de modèle et – bien sûr – sans anomalies, le processus de réparation l’intègre au niveau de la coupure, cicatrisant littéralement ou corrigeant le brin.</p>
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<figcaption><span class="caption">CRISPR-Cas9 : une méthode révolutionnaire. Inserm/YouTube.</span></figcaption>
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<p>Si la technologie CRISPR-Cas9 a <a href="https://theconversation.com/crispr-cas9-comment-modifier-les-genomes-va-changer-la-societe-66320">longtemps et surtout intéressé la médecine ou l’agriculture</a>, elle aurait donc désormais une nouvelle utilité : la désextinction.</p>
<h2>Le dilemme de la désextinction : faire revenir des espèces disparues ou créer des espèces ressemblantes ?</h2>
<p>La « désextinction » désigne le processus de « résurrection » d’espèces éteintes par des méthodes génétiques, ici l’usage de CRISPR-Cas9. Contrairement à <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0093691X08007784?via%3Dihu">d’autres expériences plus anciennes</a>, la désextinction ne nécessite pas de cellule vivante ou congelée de l’espèce disparue : il suffit d’avoir des restes organiques – échantillons de poils, de sang, d’os – qui contiennent des fragments d’ADN. Ces échantillons d’ADN permettent ensuite aux généticiens de séquencer le génome de l’organisme disparu. Et c’est là que le bât blesse.</p>
<p><a href="https://academic.oup.com/gbe/article/12/3/48/5727767">L’ADN se dégradant</a> après la mort de l’organisme, il n’est pas possible d’avoir les génomes complets des candidats à la résurrection : il manque toujours une partie de la séquence génétique, un « trou » de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0960982222002494">l’ordre de 5 %</a>. Combler ce trou nécessite plus d’échantillons, de meilleure qualité… et <a href="https://www.science.org/doi/10.1126/science.abj6987">beaucoup de temps</a>. De quoi rendre une vraie désextinction pour l’instant impossible !</p>
<p>Heureusement, il existe une parade. Si les généticiens disposent d’assez d’informations sur le génome de l’espèce ciblée, CRISPR-Cas9 leur permet de modifier l’ADN de son parent vivant le plus proche, afin de créer un génome artificiel qui se rapprochera du code génétique de l’espèce disparue. Ce génome est ensuite inséré dans un ovule fécondé, puis incubé par une femelle de l’espèce vivante la plus proche. L’individu qui en résulte n’est <strong>pas</strong> génétiquement identique à son cousin éteint, mais les caractéristiques clés qui rendaient ce dernier unique sont réintroduites.</p>
<p>Ainsi, les scientifiques qui travaillent à la désextinction du mammouth laineux partent de l’ADN d’un éléphant d’Asie, puis utilisent CRISPR pour réintroduire les <a href="https://www.nature.com/articles/s41587-021-01096-y">caractéristiques qui rendaient le mammouth unique</a>, notamment les éléments de métabolisme qui lui permettaient de survivre dans la toundra subarctique (graisse, pelage…)</p>
<h2>Désextinction et éthique : quels droits et quels comportements pour l’espèce recréée ?</h2>
<p>Cette pratique soulève d’une part la question de la désignation de ces espèces (qu’est-ce qu’une espèce éteinte ? L’espèce éteinte recréée est-elle une ancienne espèce « libre de droits » ou une nouvelle espèce synthétique ? Est-ce un animal avec les droits qui en découlent ou non ?) et d’autre part la question du devenir psychique de l’animal ainsi crée.</p>
<p>Bien que le sujet soit toujours discuté, il y a une sorte de consensus qui tend à dire que l’extinction est la <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/risa.12927">mort de tous les membres d’une espèce de plantes, d’animaux ou d’autres organismes</a>. Une fois qu’une espèce est éteinte, elle sort du périmètre de protection actuel (<a href="https://www.epo.org/news-events/news/2020/20200514a_fr.html">non-brevetabilité</a>) pour passer sous le régime <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00414-020-02272-6">du traitement des dépouilles</a> (protégées, mais appropriables). La question éthique du statut des êtres créés à partir de ces dépouilles appropriables est encore peu considérée, mais elle doit être résolue avant que ces derniers ne surviennent dans nos écosystèmes.</p>
<p>On trouve aujourd’hui des <a href="https://trace.journal.fi/article/view/59487">pistes</a> tendant à faire reconnaître ces nouvelles-anciennes espèces comme des animaux sauvages, donc protégés comme tel. Il n’y a cependant pas de consensus, ce qui peut laisser libre cours à toutes les initiatives commerciales, comme le statut « for profit » de <a href="https://venturebeat.com/2022/03/09/how-colossal-is-using-genetic-engineering-to-bring-back-the-woolly-mammoth/">l’expérience Colossal</a> (visant à recréer un mammouth laineux) le démontre.</p>
<p>Pourtant, le <a href="https://theconversation.com/xenobots-biobots-doit-on-avoir-peur-des-robots-vivants-175601">vivant</a> n’est pas un jouet dont on s’amuse. Les animaux – actuels ou recréés – ne sont pas (plus) des objets et on peut sincèrement se demander si faire ainsi revenir, dans un univers totalement artificiel, un ou plusieurs spécimens dont on ignore tout des comportements n’est pas à l’orée de la maltraitance.</p>
<p>En effet, l’extinction n’est pas seulement la perte de traits physiques, mais aussi de comportements : grégarité, rituels d’accouplement, techniques d’alimentation et de communication sont irrécupérables. Comment ces espèces <a href="https://www.pnas.org/doi/abs/10.1073/pnas.0501844102">apprendront-elles à se comporter comme leurs semblables</a> si elles n’ont pas de modèle dont s’inspirer ? Et au-delà de l’espèce, quelle sera la conséquence sur l’écosystème (et sa communauté équilibrée d’espèces) dans lequel une telle créature serait réintroduite ?</p>
<h2>Pourquoi dé-éteindre : posture déontologique, réinvention de l’évolution ou utilitarisme écologique ?</h2>
<p>Pourquoi l’humanité, espèce à part entière, souhaite-t-elle alors dé-éteindre ? S’agit-il d’une posture de culpabilité tendant à prendre en considération des espèces que nous avons éliminées en leur rendant <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959378014001812">« justice écologique »</a> au travers d’une recréation ?</p>
<p>Si l’on va plus loin, cela reviendrait aussi à instaurer une hiérarchie des espèces où l’humain – bien sûr tout au sommet de celle-ci – s’arrogerait le droit de décider de celles qui auraient le droit de revenir, car étant nos victimes. Mais qu’en serait-il des autres ? L’humanité, bien qu’elle soit effectivement responsable des extinctions actuelles, n’est ni à l’origine ni en cause lorsque l’on évoque toutes les <a href="https://doi.org/10.1016/j.futures.2009.07.012">extinctions massives qui ont déjà eu lieu</a>. Pourquoi alors, notre espèce souhaite-t-elle tout d’un coup faire renaître le passé et éventuellement s’amender ?</p>
<p>S’agit-il de l’expression de notre profond égoïsme ? De <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0022103111001260">nombreuses études démontrent</a> qu’il y a peu de place chez l’homme pour le désintéressement. L’observation des extinctions montre le danger qui nous guette. La désextinction serait alors le produit d’un bipède pensant n’ayant pas envie de subir le même sort que ses prédécesseurs, et prêt à toutes les ruptures éthiques pour faire mentir le cycle immuable de l’évolution. Une démarche en <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/BF00141682">adéquation avec une espèce</a> qui, pour son seul bénéfice, n’hésite pas à mettre en pratique des <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/10878570510700119/full/html">innovations transformationnelles</a> sans se poser la question des impacts à terme de ces déploiements, ni sur ses cohabitants ni sur ses congénères.</p>
<p>Il est ainsi prégnant de constater que si <a href="https://www.atlantis-press.com/article/25894066.pdf">l’éthique sert souvent de garde-fou à la créativité humaine sans la brider</a>, elle est sur ce sujet cantonnée à des approches par disciplines (autrement dit en silos, par exemple en n’abordant que la problématique de l’éthique de la reproduction), mais peu considérée dans son ensemble. L’exigence de prudence n’apparaît ainsi pas dans les narratifs et il n’y a pas de cartographie générale de ce qu’impliquerait (en bien comme en mal) ce type de réintroduction. Au contraire, les projets invoquent toujours une « raison supérieure ». Pour le <a href="https://genomebiology.biomedcentral.com/articles/10.1186/s13059-015-0800-4">mammouth 2.0</a>, c’est la lutte contre la fonte du permafrost qui est mise en exergue.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/459120/original/file-20220421-23-6xa4c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Tableau montrant une horde de mammouths dans la neige" src="https://images.theconversation.com/files/459120/original/file-20220421-23-6xa4c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/459120/original/file-20220421-23-6xa4c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=202&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/459120/original/file-20220421-23-6xa4c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=202&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/459120/original/file-20220421-23-6xa4c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=202&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/459120/original/file-20220421-23-6xa4c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=254&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/459120/original/file-20220421-23-6xa4c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=254&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/459120/original/file-20220421-23-6xa4c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=254&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Plusieurs initiatives visent à dé-éteindre le mammouth laineux. Charles R. Knight, <em>Wooly mammoths near the Somme River</em>, AMNH mural.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/File:Wooly_Mammoths.jpg">Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette dernière narration part d’un postulat : l’humanité est incapable de lutter et ne luttera pas contre le changement climatique. Elle doit donc inventer des « mandataires » pour le faire à sa place là où le risque est le plus sérieux, par exemple au niveau de la libération de gaz et bactéries liée à la fonte du permafrost. Le mammouth issu d’une manipulation CRISPR est un de ces substituts.</p>
<p>Son espèce d’origine a disparu non pas en raison d’une surexploitation humaine, mais parce que son habitat a drastiquement changé du fait – déjà – du réchauffement climatique. Cette situation a fait disparaître de la steppe arctique les <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-021-04016-x">astéracées dont il avait fait sa nourriture habituelle</a>, au bénéfice des poacées qu’il goûtait moins (le mammouth, poète, aimait les fleurs). La disparition de l’herbivore nomade a fait qu’il n’y avait plus de déambulations suffisantes pour tasser le terrain, ce qui a accéléré la transformation de l’habitat en univers hostile pour ce dernier. Ces déambulations permettaient aussi de conserver la compacité des terres, <a href="https://doi.org/10.1016/j.quascirev.2012.10.005">élément fondamental pour que celles-ci continuent à emprisonner le permafrost</a>. Partant de ce constat, l’éminent géophysicien spécialiste de la sphère arctique Seguei Zimov a entrepris de récréer un <a href="https://pleistocenepark.ru/">écosystème apte à accueillir de nouveaux grands herbivores</a> pour qu’ils viennent tasser les sols.</p>
<p>Voilà la désextinction justifiée, et le bien-être animal assuré, puisque l’humain a recréé un environnement mammouth-compatible avant de le faire revenir. Mais est-ce vraiment un mammouth ou plutôt un éléphant résistant au froid ? Cet environnement lui sera-t-il vraiment adapté ?</p>
<p>On sait de plus que les <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/gcb.12973">émissions de méthanes par les herbivores participent au changement climatique</a>. Faire revenir des émetteurs de grande taille pour un bénéfice incertain ne sera-t-il pas pire que le mal ?</p>
<h2>L’usage de CRISPR : désextinction ou conservation ?</h2>
<p>L’usage de la technologie CRISPR-Cas9 comme outil de désextinction soulève de nombreuses interrogations. Certes, réintroduire une espèce reconstituée serait avantageux pour la conservation, en permettant de restaurer une certaine diversité génétique ou des interactions écologiques. Elle pourrait également favoriser la conservation des espèces menacées : l’introduction de « traits disparus » dans des espèces qui luttent pour s’adapter à un environnement en mutation rapide pourrait les aider à survivre (et éviter leur propre extinction).</p>
<p>Il convient pourtant de ne pas être naïf. Devant ces nouvelles facilités écartant (ou reportant) des dangers immédiats bien réels d’extinction, que feront les dirigeants politiques, dont on voit le faible empressement à déployer les actions nécessaires pour faire face aux impératifs du changement climatique ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181745/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Caroline Gans Combe a reçu des financements de l'Union Européenne dans le cadre de deux projets de recherche : Deform & ProRes.</span></em></p>La technologie CRISPR-Cas9 pourrait permettre de faire revivre des animaux disparus. Une optique qui soulève plusieurs questions éthiques, tant en termes de droits que de bien-être animal.Caroline Gans Combe, Associate professor Data, econometrics, ethics, OMNES EducationLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1768662022-02-21T21:05:36Z2022-02-21T21:05:36ZComment évaluer l’impact du recul de la biodiversité sur le système financier français<p>La biodiversité constitue le tissu vivant de notre planète, aujourd’hui victime de dégradations sans précédent causées par le déploiement continu de diverses activités.</p>
<p>Pour les sociétés humaines, les risques engendrés par une telle dégradation pourraient être au moins aussi élevés que ceux provoqués par le changement climatique, <a href="https://theconversation.com/changement-climatique-et-crise-de-la-biodiversite-la-dangereuse-alliance-83825">ces risques étant d’autre part intimement liés</a>.</p>
<p>Bien que la sensibilisation à ces enjeux s’accélère rapidement auprès des décideurs politiques, ce n’est <a href="https://publications.banque-france.fr/perte-de-biodiversite-et-stabilite-financiere-une-nouvelle-frontiere-pour-les-banques-centrales-et">que récemment que la communauté financière a commencé à s’intéresser aux conséquences économiques et financières de cette perte de biodiversité</a>.</p>
<p>Pour le système financier, la détérioration des écosystèmes ainsi que les transformations politiques, économiques et sociales pour protéger la nature peuvent être source de risques – « physiques » dans le premier cas, « de transition », dans le second.</p>
<p><a href="https://publications.banque-france.fr/sites/default/files/medias/documents/wp826_0.pdf">Dans une publication d’août 2021</a>, qui s’inspire notamment de méthodologies utilisées par la <a href="https://www.pbl.nl/en/publications/indebted-to-nature">Banque centrale des Pays-Bas</a>, nous avons fourni une première évaluation visant à mieux identifier les risques financiers potentiels liés à la perte de biodiversité pour la France.</p>
<p>Que nous enseigne cette analyse du cas français et quelles voies de recherches futures dessine-t-elle ?</p>
<h2>Des risques liés à la dégradation des écosystèmes</h2>
<p>Nous avons d’abord évalué les dépendances des institutions financières françaises (principalement fonds d’investissement, compagnies d’assurance et banques) aux services dits « écosystémiques » – ces services que nous rendent les écosystèmes fonctionnels (ou en bon état), comme la pollinisation ou la régulation des maladies. Les titres financiers considérés (dettes et obligations) sont « dépendants » des services écosystémiques via les activités des entreprises financées.</p>
<p>Nous obtenons ainsi une première estimation de l’exposition potentielle à une aggravation de la perte physique de biodiversité : en cas de détérioration de la qualité d’un service écosystémique donné (ce que nous appelons « choc physique »), une entreprise qui en est fortement dépendante est a priori plus susceptible d’être perturbée dans ses activités.</p>
<p>Nos résultats, présentés dans le graphique ci-dessous, indiquent que 42 % de la valeur du portefeuille de titres des institutions financières françaises a été émise par des entreprises qui sont fortement ou très fortement dépendantes d’au moins un service écosystémique. Par ailleurs, 9 % a été émis par des entreprises présentant une très forte dépendance à l’égard d’au moins un service écosystémique, et 21 % par des entreprises présentant une dépendance combinée au moins « moyenne » à l’égard de cinq services écosystémiques ou plus.</p>
<p>Ces dépendances sont les plus élevées pour les services écosystémiques d’approvisionnement en eau (de surface et souterraine) et pour certains services dits « de régulation » tels que le contrôle de l’érosion, la protection contre les inondations et les tempêtes, et la régulation du climat.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/447024/original/file-20220217-6550-o73nvu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/447024/original/file-20220217-6550-o73nvu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/447024/original/file-20220217-6550-o73nvu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/447024/original/file-20220217-6550-o73nvu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/447024/original/file-20220217-6550-o73nvu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/447024/original/file-20220217-6550-o73nvu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/447024/original/file-20220217-6550-o73nvu.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">42 % de la valeur du portefeuille de titres des institutions financières françaises a été émise par des entreprises ayant une dépendance « au moins forte » à au moins un service écosystémique (barre centrale).</span>
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<p>Notons que ces dépendances ne sont que « directes », dans le sens où elles ne concernent que les dépendances aux services écosystémiques de l’activité de production de l’entreprise en propre, et non celles de ses fournisseurs. Si l’on inclut les dépendances des fournisseurs, toutes les entreprises du portefeuille deviennent au moins faiblement dépendantes de tous les services écosystémiques.</p>
<h2>Des risques liés à la transition écologique</h2>
<p>Nous avons ensuite calculé une « empreinte biodiversité » du portefeuille de titres, c’est-à-dire l’impact sur la biodiversité exercé par les institutions financières françaises à travers les entreprises dont elles détiennent les titres. Il s’agit d’estimer ainsi leur exposition à des chocs de transition.</p>
<p>En effet, plus l’impact sur la biodiversité des entreprises du portefeuille est négatif, plus le risque d’être soumis à une réglementation ou à un changement de préférences des consommateurs (ce que nous appelons « choc de transition ») est a priori élevé.</p>
<p>Pour évaluer cette empreinte biodiversité des entreprises puis du portefeuille, nous avons utilisé le Global Biodiversity Score (GBS) développé par CDC Biodiversité. Cet outil permet de convertir le chiffre d’affaires d’une entreprise par région et secteur de production en pressions sur la biodiversité (par exemple, relativement au changement climatique ou à l’utilisation des terres), puis en impact exprimé en une seule métrique : le MSA.km<sup>2</sup>.</p>
<p>Un impact de 1 MSA.km<sup>2</sup> peut être interprété comme un effet sur la biodiversité comparable à la transformation de 1 km<sup>2</sup> d’écosystème « intact » (comprendre non dégradé par les activités humaines) en une surface totalement artificielle (comme un parking).</p>
<p>L’empreinte statique obtenue pour le portefeuille (c’est-à-dire combinant les impacts cumulés par les activités financées au fil du temps) via les activités financées est de 130 000 MSA.km<sup>2</sup>, ce qui peut être comparé à l’effet sur la biodiversité terrestre de l’artificialisation de 130 000 km<sup>2</sup> (soit 24 % de la surface de la France métropolitaine) d’un écosystème initialement « intact ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/447023/original/file-20220217-23-1dap8wk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/447023/original/file-20220217-23-1dap8wk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/447023/original/file-20220217-23-1dap8wk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/447023/original/file-20220217-23-1dap8wk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/447023/original/file-20220217-23-1dap8wk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=519&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/447023/original/file-20220217-23-1dap8wk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=519&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/447023/original/file-20220217-23-1dap8wk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=519&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’empreinte biodiversité du portefeuille de titres des institutions financières françaises est due à plusieurs pressions exercées sur la biodiversité par les entreprises financées (et surtout par les activités de leurs fournisseurs), en particulier le changement d’usage des sols.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Svartzman et coll. (2021)</span></span>
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</figure>
<p>Cette empreinte est causée par diverses pressions, notamment l’utilisation des terres. Elle intègre les impacts sur la biodiversité issus des différents niveaux de la chaîne de valeur des entreprises du portefeuille : nos résultats indiquent qu’ils proviennent principalement des fournisseurs directs, puis du reste de la chaîne de valeur en amont, plutôt que des opérations directes des entreprises du portefeuille.</p>
<h2>Les pays en développement en première ligne</h2>
<p>Au-delà d’une simple analyse des dépendances aux services écosystémiques et de l’empreinte biodiversité des institutions financières, il s’agirait de travailler à l’élaboration de véritables scénarios de « chocs » afin de mieux estimer les risques financiers liés à la perte de biodiversité.</p>
<p>Ces scénarios pourraient consister à décrire d’une part de possibles évolutions de la qualité des services rendus par la nature (choc physique), et d’autre part envisager les futures politiques publiques visant à protéger la biodiversité (choc de transition). Il s’agirait ensuite d’estimer l’exposition et la vulnérabilité des entreprises et des institutions financières à ces évolutions, comme cela est déjà fait dans le cas du changement climatique.</p>
<p>Les systèmes économiques et financiers des pays en développement pourraient par ailleurs demander une attention particulière. Une <a href="https://openknowledge.worldbank.org/handle/10986/35882">étude récente de la Banque mondiale (Johnson, 2021)</a> montre que les économies en développement et émergentes devront faire face à l’essentiel des impacts directs liés à la perte de biodiversité, avec des pertes pouvant atteindre 10 % du PIB en 2030 si certains services écosystémiques s’effondrent.</p>
<p>Les risques seraient particulièrement élevés pour l’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud, qui dépendent des cultures pollinisées avec une capacité limitée à passer à d’autres options de production et de consommation ou à s’adapter à la dégradation de l’approvisionnement en eau.</p>
<p>Les questions de financement de la transition liée à la biodiversité et de prise en compte de la biodiversité dans les trajectoires de développement devraient par ailleurs être au cœur de l’accord discuté dans le cadre de la 15<sup>e</sup> Conférence des parties (COP) sur la biodiversité, qui aura lieu à Kunming en 2022.</p>
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<p><em>Julien Gauthey, Thomas Allen, Joshua Berger et Antoine Vallier sont co-auteurs de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/176866/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les opinions exprimées reflètent les idées personnelles des auteurs et n’expriment pas nécessairement la position de la Banque de France. Mathilde Salin a reçu des financements de la Banque de France et de l’ANRT. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Antoine Godin, Julien Calas, Paul Hadji-Lazaro, Romain Svartzman et Étienne Espagne ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Des travaux récents et inédits se sont intéressés aux conséquences économiques et financières de la perte de biodiversité.Mathilde Salin, Doctorante en économie, Université Paris-SaclayAntoine Godin, Économiste-modélisateur, Agence française de développement (AFD)Étienne Espagne, Économiste, Agence française de développement (AFD)Julien Calas, Chargé de recherche biodiversité, Agence française de développement (AFD)Paul Hadji-Lazaro, Doctorant en économie écologique, Université Sorbonne Paris NordRomain Svartzman, Economiste à la Banque de France, Chercheur associé à l’Institute for Innovation and Public Purpose, UCLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1494932020-11-05T19:59:40Z2020-11-05T19:59:40ZPourquoi ne connaît-on que 20 % du vivant ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/367551/original/file-20201104-15-1qr407a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C18%2C1020%2C683&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans une galerie d’un muséum d’histoire naturelle. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/76283035@N00/2540634421">Dom Dada/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Les chiffres donnent le vertige : 2 millions d’espèces vivantes décrites par la science mais 8 millions (au moins) toujours inconnues ; soit, au total, plus de 10 millions d’espèces à la surface du globe. Ces 20 % « identifiés » de la biodiversité permettent-ils vraiment de connaître notre planète et son fonctionnement ? Dans les grandes lignes peut-être, mais au regard des enjeux considérables du quotidien – pathogènes, exotiques envahissantes, ennemis des cultures, etc. –, et du futur des écosystèmes en questionnement, est-ce suffisant ?</p>
<p>Et encore, ce constat ne concerne ici que des espèces actuelles ; or ce sont mille à dix mille fois plus qui ont existé au cours des temps géologiques et ne sont aujourd’hui connues qu’à travers un nombre très limité de fossiles ! Nous en avons pourtant aussi <a href="https://theconversation.com/les-charmes-discrets-des-insectes-fossiles-56029">besoin pour comprendre l’immense biodiversité</a> qu’abrite la Terre.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-charmes-discrets-des-insectes-fossiles-56029">Les charmes discrets des insectes fossiles</a>
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<p>C’est le travail des sciences de la taxonomie et de la systématique que de nommer, décrire ces espèces et d’organiser les systèmes de classification. En effet, donner des noms aux organismes permet tout simplement de partager l’information à leur sujet de manière rigoureuse en les identifiant et en les positionnant les unes par rapport aux autres.</p>
<p>Qu’il s’agisse de lutter contre une espèce <a href="https://theconversation.com/la-taxonomie-cette-discipline-essentielle-a-la-comprehension-des-pathogenes-139685">pathogène</a>, d’en protéger une autre contribuant au fonctionnement des écosystèmes ou encore de sélectionner une plante pour son jardin, nous avons besoin de nommer les espèces. Consommer un champignon toxique constitue ainsi une erreur taxonomique potentiellement fatale…</p>
<h2>Nommer, décrire et classer le vivant</h2>
<p>Depuis la fondation de ces sciences – systématique et taxonomie –, notamment par le naturaliste suédois <a href="https://www.biodiversitylibrary.org/item/10277">Karl Von Linné</a> en 1758, de très nombreux scientifiques et naturalistes ont parcouru le monde et répertorié les espèces vivantes. À cette époque, il suffisait de quelques échantillons préservés dans un musée, d’une publication accompagnée d’une description et d’un nom et le tour était joué !</p>
<p>Depuis, les progrès ont été colossaux : dès le XIX<sup>e</sup> siècle, les règles de la science ouverte ont prévalu en taxonomie, permettant que toutes ces connaissances soient accessibles, compatibles et réutilisables, selon le principe <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fair_data">FAIR</a> et grâce au développement des Muséums et de leurs collections accessibles ; soulignons aussi l’instauration des règles de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nomenclature_zoologique">nomenclature</a> (sur « comment donner des noms ») qui préservent la cohérence du système des noms et des classifications.</p>
<p>Depuis quelques décennies, les descriptions des organismes intègrent des dimensions moléculaires, avec notamment un <a href="https://www.encyclopedie-environnement.org/vivant/metabarcoding-codes-barres-adn-caracteriser-biodiversite/">barcoding</a> génétique et tous les outils du numérique aidant aux descriptions et aux identifications (<a href="https://www.xper3.fr/?language=fr">systèmes experts</a>, images 3D anatomiques, vidéos, et <a href="https://sonotheque.mnhn.fr/">enregistrements sonores</a>, etc.).</p>
<p>Les classifications reflètent aussi l’état des connaissances sur l’évolution du vivant, car elles intègrent autant que possible les relations de parenté entre les espèces – les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Phylog%C3%A9nie">phylogénies</a> – avec des arbres basés sur l’analyse de l’ADN.</p>
<p>Les classifications gagnent ainsi non seulement en sens mais aussi en stabilité à mesure que les recherches progressent. Cela permet à chacun de comprendre que les espèces appartiennent à des groupes d’organismes issus de l’évolution ; ainsi, l’espèce humaine – <em>Homo sapiens</em> – est un animal vertébré, mais plus précisément un mammifère et un primate. L’appartenance à ces catégories, basée sur des attributs particuliers (les vertèbres des vertébrés, par exemple), permet de situer les espèces et les groupes les uns par rapport aux autres.</p>
<h2>Quelles espèces découvre-t-on encore ?</h2>
<p>Mais pourquoi connaît-on si peu du monde vivant qui nous entoure malgré cet effort d’inventaire initié au XVIII<sup>e</sup> siècle ?</p>
<p>Chaque jour, en effet, de nouvelles espèces sont décrites par les scientifiques. On a par exemple récemment découvert que la taupe présente dans le Sud-Ouest de la France et de l’Europe constituait une espèce nouvelle <a href="https://theconversation.com/en-direct-des-especes-silence-elle-creuse-une-nouvelle-espece-de-taupe-decouverte-en-france-92080">(<em>Talpa aquitania</em>)</a>, bien différente de la taupe d’Europe avec laquelle on l’avait jusqu’alors confondue.</p>
<p>Citons encore le <a href="https://theconversation.com/en-direct-des-especes-le-gobemouche-gris-une-histoire-corse-86369">gobemouche gris de Corse</a>, une autre espèce à part, malgré ses migrations communes en Afrique du Nord avec l’espèce du continent.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"930915873757548544"}"></div></p>
<p>On voit que les espèces inconnues ne sont pas forcément de petits organismes oubliés au fin fond des forêts tropicales ou des <a href="https://theconversation.com/biodiversite-la-mer-a-encore-de-nombreux-secrets-a-nous-livrer-145787">océans</a>. Cela dit, le travail de terrain des scientifiques au cours des <a href="https://oceans.taraexpeditions.org/m/science/les-resultats/eukaryotic-plankton-diversity-in-the-sunlit-ocean/">grandes campagnes</a> d’exploration en révèle des nombres considérables. De quelques centaines à quelques dizaines de milliers.</p>
<p>Des insectes nouveaux pour la science sont aussi découverts chaque année sur notre territoire métropolitain, sans même le recours à l’outil génétique… simplement parce que personne ne les avait vus avant ou n’avait les compétences pour les identifier.</p>
<h2>Pourquoi reste-t-il tant à découvrir ?</h2>
<p>Le monde vivant est <a href="https://fr.calameo.com/read/006296239477bf161ccd3">hyperdivers</a> : il y a 500 espèces d’arbres dans un km<sup>2</sup> de forêt tropicale, des milliers d’espèces d’insectes dans quelques km<sup>2</sup> en Europe et 1 000 espèces de bactéries dans un cm<sup>3</sup> de sol ! Cette diversité est répartie de manière complexe et inégale à la surface du globe, avec de nombreuses espèces limitées géographiquement, dites <a href="https://www.lemonde.fr/biodiversite/visuel/2016/11/24/en-nouvelle-caledonie-a-la-recherche-d-especes-uniques-au-monde_5037052_1652692.html">« endémiques »</a>.</p>
<p>Il faut donc parcourir chaque région, parfois peu accessible ou présumée connue à tort, pour faire avancer la connaissance. C’est quelquefois une vallée, une montagne ou un fleuve qui amènera à la découverte d’un <a href="https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/botanique-amborella-nous-met-piste-premieres-plantes-fleurs-51189/">organisme particulièrement informatif</a>, qui va modifier nos connaissances de manière importante. On sait aujourd’hui où se trouvent les carences, en matière de <a href="https://theconversation.com/biodiversite-quand-loiseau-fait-de-lombre-a-linsecte-95629">groupes</a> ou d’espaces méconnus, en cartographiant nos données, en cumulant nos informations dans des portails de science ouverte, comme le <a href="https://www.gbif.org/fr/">GBIF</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/HvS6sRVZbHo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Présentation de la plate-forme GBIF. (GBIF/Youtube, 2017).</span></figcaption>
</figure>
<p>Il faut aussi rappeler que la science a fait une très longue pause : au début XX<sup>e</sup> siècle, l’enjeu était davantage de comprendre les lois de l’hérédité ou du fonctionnement des écosystèmes que de rallonger ce qui semblait être pour certains la déjà suffisamment longue liste « à la Prévert » des organismes existants.</p>
<p>Aujourd’hui, la communauté des biologistes comprend infiniment plus de personnes travaillant sur des organismes dits « modèles » – étudiés au laboratoire dans les tréfonds de leur génome ou de leurs cellules, comme <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Drosophile"><em>Drosophila</em></a> ou <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Arabidopsis_thaliana"><em>Arabidopsis</em></a> – que de <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rstb.2003.1440">taxonomistes</a> ou d’évolutionnistes découvrant ou comparant des organismes peu connus. Les deux sont pourtant également indispensables et complémentaires.</p>
<p>Depuis quelques décennies, fort heureusement, un regain d’intérêt se manifeste pour la diversité du vivant, comme en témoigne l’émergence du mot « biodiversité ». Il est aujourd’hui devenu évident que nous dépendons tous de cette infinie richesse, qu’il s’agisse d’<a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00912633/document">espèces rares</a> aux rôles primordiaux dans les écosystèmes ou d’espèces pathogènes ou <a href="https://theconversation.com/des-vers-geants-predateurs-envahissent-les-jardins-francais-dans-lindifference-96241">envahissantes</a>.</p>
<p>La plate-forme internationale IPBES – cet équivalent du GIEC pour la biodiversité –, en a rendu compte très clairement dans ses <a href="https://theconversation.com/rapport-de-lipbes-sur-la-biodiversite-lheure-nest-plus-aux-demi-mesures-116473">évaluations</a>. Et la pandémie de Covid-19, née des transformations radicales d’écosystèmes forestiers et des <a href="https://theconversation.com/covid-19-ou-la-pandemie-dune-biodiversite-maltraitee-134712">maltraitances humaines</a> sur des chauves-souris rhinolophes et pangolins et leurs virus méconnus, nous le rappelle avec force.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1244520813606338562"}"></div></p>
<h2>Quelques milliers de spécialistes dans le monde</h2>
<p>Des outils extraordinaires, nés des progrès de la biologie moléculaire, viennent aujourd’hui en aide à la taxonomie. Qu’il s’agisse du <a href="https://ibol.org/">barcode</a> génétique – une petite séquence d’ADN identifiant chaque organisme – ou de la <a href="https://lejournal.cnrs.fr/articles/la-revolution-metagenomique">métagénomique</a> – qui prend tout l’ADN dans un milieu donné et le trie en barcodes d’organismes différents –, la communauté scientifique dispose désormais d’outils formidables pour le futur de l’étude de la biodiversité.</p>
<p>Mais ceux-ci réclament aussi qu’une taxonomie classique perdure et soit développée en parallèle : sans les noms d’espèces et les connaissances indispensables qui leur sont associées, des millions d’identifiants numériques et de séquences d’ADN ne pourront être utilisés. Ces deux aspects – noms/classifications et barcodes/métabarcodes – sont indissociables. Mais entre temps, la communauté des scientifiques taxonomistes a fondu comme neige au soleil, se réduisant à quelques milliers de spécialistes dans le monde.</p>
<p>L’expertise du taxonomiste – lui permettant de connaître les détails du vivant dans tel ou tel groupe d’organismes, de comprendre leur fonctionnement et leur évolution – nécessite de longues années d’apprentissage et d’expérience pour mettre à disposition de tous les descriptions et classifications des espèces découvertes pendant les travaux scientifiques. Une démarche encore perçue comme <a href="https://retractionwatch.com/2020/07/06/indexer-obviously-made-a-mistake-in-sanctioning-taxonomy-journal-says-editor/">peu valorisante</a> et qui peine à intéresser les jeunes chercheurs.</p>
<p>Il reste heureusement quelques <a href="https://twitter.com/ISYEBsp/status/1222107706418515969?s=20">villages gaulois de la taxonomie</a> dans de grands musées – comme le <a href="https://www.mnhn.fr/">Muséum national d’histoire naturelle de Paris</a>, la <a href="https://www.si.edu/">Smithsonian Institution</a> aux États-Unis ou le <a href="https://www.nhm.ac.uk/">Natural History Museum</a> en Grande-Bretagne – et un réel intérêt politique dans des pays fortement biodivers comme le <a href="https://www.scielo.br/scielo.php ?script=sci_arttext&pid=S0031-10492006001300001&lang=en">Brésil</a> ou la Chine. Et l’on peut se réjouir que ces efforts soient à nouveau visibles au <a href="https://inpn.mnhn.fr/docs/communication/livretInpn/LIVRET_INPN_2019.pdf">plan national</a> ou <a href="http://www.bionet-intl.org/case_studies/">international</a>, et se conjuguent avec la transition environnementale. Il est essentiel que celle-ci prenne en compte cette base incontournable de la connaissance du vivant.</p>
<hr>
<p><em>Retrouvez Philippe Grandcolas dans le podcast du Muséum national d’histoire naturelle <a href="https://www.mnhn.fr/fr/explorez/podcasts/pour-que-nature-vive">« Pour que nature vive »</a>, avec l’épisode <a href="https://www.mnhn.fr/fr/explorez/podcasts/que-nature-vive/cuisiner-nature">« Mieux connaître la nature pour mieux la préserver »</a>.</em></p>
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</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/149493/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Garrouste a reçu des financements du CNRS, LABEX BCDiv, IPEV, MINEAE et National Geographic.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Philippe Grandcolas et Tony Robillard ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Le monde vivant est hyperdivers et cette diversité est répartie de manière complexe et inégale à la surface du globe.Philippe Grandcolas, Directeur de recherche CNRS, systématicien, directeur de l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (ISYEB), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Romain Garrouste, Chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (ISYEB), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Tony Robillard, Maître de conférences à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (ISYEB), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1240492019-09-27T02:18:46Z2019-09-27T02:18:46ZEnquête chez le seul mammifère herbivore devenu aquatique : une sirène préhistorique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/294390/original/file-20190926-51429-1iv31dh.PNG?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C0%2C837%2C618&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Reconstitution de Sobrarbesiren dans son paléoenvironnement.</span> <span class="attribution"><span class="source">Rosa Alonso. D’après Diaz-Berenguer et al. 2019</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>La conquête du milieu terrestre a été un évènement majeur de l’histoire évolutive des tétrapodes (vertébrés à pattes). Grâce à l’acquisition de l’œuf amniotique (à coquille), les amniotes – regroupant les reptiles non-aviens, oiseaux et mammifères – se sont complètement libérés du milieu aquatique. Cependant, certains d’entre eux sont secondairement retournés à ce milieu.</p>
<p>C’est le cas de nombreux reptiles marins, tels que les mosasaures, plésiosaures (aujourd’hui éteints), serpents et tortues marins, mais aussi de mammifères, tels que les pinnipèdes (otaries, phoques), cétacés (baleines, dauphins), et siréniens.</p>
<p>Ce dernier groupe inclut aujourd’hui le lamantin et le dugong qui peuplent des eaux tropicales peu profondes – côte et eau douce, essentiellement dans l’hémisphère sud. Les trois espèces de lamantin vivent le long des côtes atlantiques et dans des fleuves d’Amérique latine et d’Afrique de l’ouest ; le dugong vit dans les océans Indien et Pacifique (sud-ouest).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/294376/original/file-20190926-51463-1hka658.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/294376/original/file-20190926-51463-1hka658.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/294376/original/file-20190926-51463-1hka658.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/294376/original/file-20190926-51463-1hka658.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=197&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/294376/original/file-20190926-51463-1hka658.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/294376/original/file-20190926-51463-1hka658.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/294376/original/file-20190926-51463-1hka658.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=247&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cartes de répartition géographique des trois espèces de lamantin (vert : lamantin des Caraïbes ; rouge : lamantin d’Amazonie ; orange : lamantin d’Afrique) et du dugong (bleu).</span>
<span class="attribution"><span class="source">source</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Une seule espèce connue de sirénien a peuplé des eaux froides. Il s’agit de la Rhytine de Steller, qui vivait dans le nord de l’océan Pacifique, mais qui s’est malheureusement éteinte au XVIII<sup>e</sup> siècle, peu après sa découverte, du fait de la prédation humaine.</p>
<h2>De drôles de sirènes</h2>
<p>Les siréniens modernes sont exclusivement aquatiques. Ils présentent un corps fusiforme, avec des membres antérieurs transformés en palettes natatoires (membres aplatis dont la forme se rapproche de celle d’une nageoire) tandis que les membres postérieurs ont régressé, et leur queue, qui est une nageoire horizontale, assure la propulsion. Arrondie chez les lamantins, elle est bilobée (composée de deux lobes) chez le dugong. Ce sont des animaux herbivores qui broutent des plantes aquatiques. Leur taille varie entre 2,8 et 4 mètres.</p>
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<span class="caption">Photographie de dugong.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/geoffspiby/3496456401/in/set-72157617637762678">Geoff Spiby/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>De la terre à la mer</h2>
<p>Les siréniens sont de proches parents des éléphants et des damans. Leur radiation évolutive (diversification à partir de leur ancêtre commun) débute au début de l’ère tertiaire en Afrique. Trois familles de siréniens sont connues à l’Éocène (34-56 millions d’années), parmi lesquelles des formes quadrupèdes (prorastomidés et protosirénidés) dont certaines semblent avoir été capables de se mouvoir sur terre, et des formes exclusivement aquatiques aux membres postérieurs vestigiaux (dugongidés) (membres atrophiés dont la fonction a été perdue).</p>
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<span class="caption">Reconstitution du squelette de <em>Pezosiren</em> (longueur : env. 2,1 mètres) ; d’après Domning, 2001.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Domning</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<span class="caption">Squelette de <em>Dugong dugon</em>.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Source</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>La transition entre le milieu terrestre et le milieu aquatique au cours de leur histoire évolutive a imposé des modifications morphologiques et physiologiques importantes et la découverte de spécimens fossiles permet de retracer les étapes de ce processus évolutif.</p>
<h2>Un nouveau quadrupède européen</h2>
<p>Récemment un <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-018-23355-w">nouveau genre de sirénien a été découvert en Espagne</a> : <em>Sobrarbesiren</em>. Il correspond au plus vieux sirénien d’Europe de l’Ouest et serait le proche cousin des dugongidés. C’est le premier sirénien quadrupède d’Eurasie dont quasiment l’intégralité du squelette soit connue (des restes d’au moins six individus ont été retrouvés).</p>
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<figcaption>
<span class="caption">Reconstitution de <em>Sobrarbesiren</em>,En gris, les os connus.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Diaz-Berenguer et al. 2018</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p><em>Sobrarbesiren</em> est considéré comme représentant potentiellement un stade intermédiaire entre les formes quadrupèdes amphibies (prorastomidés) et aquatiques (protosirénidés). Il reste cependant toujours très difficile d’estimer les capacités locomotrices d’organismes disparus. Ceci requiert notamment le recours à l’anatomie comparée.</p>
<h2>Des indices à déchiffrer</h2>
<p><a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10914-019-09482-9?wt_mc=Internal.Event.1.SEM.ArticleAuthorOnlineFirst&utm_source=ArticleAuthorOnlineFirst&utm_medium=email&utm_content=AA_en_06082018&ArticleAuthorOnlineFirst_20190907">Une étude récente</a> a réalisé une analyse comparée de l’anatomie du bassin et du membre postérieur chez différents siréniens afin de préciser le mode de locomotion possible de <em>Sobrarbesiren</em>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/294383/original/file-20190926-51421-8yj5fn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/294383/original/file-20190926-51421-8yj5fn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/294383/original/file-20190926-51421-8yj5fn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/294383/original/file-20190926-51421-8yj5fn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/294383/original/file-20190926-51421-8yj5fn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/294383/original/file-20190926-51421-8yj5fn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/294383/original/file-20190926-51421-8yj5fn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dégagement de côtes et de l’os coxal (bassin) de <em>Sobrarbesiren</em>.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ester Diaz-Berenguer.</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Au cours de la transition entre le milieu terrestre et le milieu aquatique, le membre se réduit et perd son articulation avec la colonne vertébrale via la ceinture pelvienne (bassin). En effet il n’est plus nécessaire de porter le poids du corps à l’aide des membres dans ce milieu à faible gravité. Le registre fossile documente les différentes étapes de cette réduction du membre postérieur et du bassin, depuis des morphologies proches de celles d’organismes terrestres, jusqu’à une réduction extrême.</p>
<p>Un des principaux indices permettant d’estimer si l’animal était aquatique ou amphibie est la morphologie du bassin. L’absence de sacrum fonctionnel (vertèbres sacrales fusionnées qui, unies aux os coxaux, forment le bassin) montre l’impossibilité d’une locomotion quadrupède sur terre et suggère un mode de vie exclusivement aquatique. La présence d’un sacrum suggère le contraire mais ce n’est pas parce que l’animal semble avoir été capable de se mouvoir sur terre que c’était réellement le cas ! La forme de nombreux os (notamment les os des membres) doit être observée en suivant la même démarche comparative. De plus, une morphologie intermédiaire reste parfois très ambiguë et d’autres indices sont alors à rechercher.</p>
<p>C’est notamment le cas des études de microanatomie osseuse. En effet, si la morphologie est supposée rendre compte de ce que l’animal était susceptible de faire, la structure interne des os renseigne sur ce que l’animal a réellement fait. Elle est en effet très plastique et s’adapte aux contraintes subies par les organismes. Chez les organismes aquatiques, une spécialisation osseuse est particulièrement répandue chez les nageurs peu actifs ayant recours à un contrôle hydrostatique (passif) de leur flottabilité : l’augmentation de la masse des os. Elle permet de contrecarrer la poussée d’Archimède pour pouvoir plonger et rester à une faible profondeur avec le minimum d’effort. Les siréniens montrent cette spécialisation, notamment au niveau de leurs côtes, très massives et compactes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/294385/original/file-20190926-51425-vmvp72.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/294385/original/file-20190926-51425-vmvp72.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=270&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/294385/original/file-20190926-51425-vmvp72.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=270&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/294385/original/file-20190926-51425-vmvp72.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=270&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/294385/original/file-20190926-51425-vmvp72.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=339&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/294385/original/file-20190926-51425-vmvp72.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=339&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/294385/original/file-20190926-51425-vmvp72.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=339&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Coupe d’humérus de sanglier (gauche) et de dugong (droite) illustrant la très forte augmentation de compacité observable chez le dugong. Noir : tissu osseux ; blanc : cavités. Échelles : 5 mm.</span>
<span class="attribution"><span class="source">S</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Amphibien ou aquatique ?</h2>
<p>La structure interne du fémur et de l’os coxal (bassin) de <em>Sobrarbesiren</em> a été analysée. Les os ont été scannés aux rayons X (<a href="http://mateis.insa-lyon.fr/fr/content/micro-tomographie-aux-rayons-x">microtomographie</a>) afin de pouvoir visualiser la distribution du tissu osseux dans l’os. La très forte compacité observée n’est pas compatible avec une locomotion terrestre car des os très compacts sont très susceptibles de se fracturer sur terre.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/294386/original/file-20190926-51421-1uc7013.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/294386/original/file-20190926-51421-1uc7013.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=325&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/294386/original/file-20190926-51421-1uc7013.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=325&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/294386/original/file-20190926-51421-1uc7013.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=325&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/294386/original/file-20190926-51421-1uc7013.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/294386/original/file-20190926-51421-1uc7013.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/294386/original/file-20190926-51421-1uc7013.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=408&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Coupes transverses du fémur (gauche) et de l’os coxal (droite) de <em>Sobrarbesiren</em> montrant une structure extrêmement compacte (les cavités sont en noir et en blanc). Echelle : 1 cm.</span>
<span class="attribution"><span class="source">S</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Ainsi cette étude couplant données anatomiques et microanatomiques a permis de suggérer que, malgré une morphologie potentiellement compatible avec une locomotion partiellement terrestre, <em>Sobrarbesiren</em> devait vraisemblablement être plutôt exclusivement aquatique. La position intermédiaire de <em>Sobrarbesiren</em> par rapport au degré d’adaptation au milieu aquatique est confirmée.</p>
<p>Comme précédemment observé au sein de la lignée des cétacés, il semble bien que les adaptations liées au retour à un mode de vie aquatique se produisent d’abord au niveau microanatomique puis au niveau anatomique chez les siréniens.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124049/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Alexandra Houssaye a reçu des financements de l'ERC (European Research Council), du CNRS et du MNHN</span></em></p>On a longtemps pensé que la vie avait évolué de l’eau à la terre, mais certains animaux auraient fait le chemin inverse. Rencontrez cette drôle de sirène.Alexandra Houssaye, Chercheuse Paleobiologie/Morphologie fonctionnelle, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1168642019-07-03T20:31:56Z2019-07-03T20:31:56ZLa « sixième extinction » aura-t-elle lieu ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/275216/original/file-20190517-69209-1xtlwu6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le mandrill (Afrique de l'ouest) est une espèce jugée vulnérable, victime de la chasse et de la déforestation.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/mandrill-mandrillus-sphinx-sitting-on-tree-726328891">Ondrej Prosicky/Shutterstock</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Nous serions entrés dans la <a href="http://www.la-librairie-vuibert.com/livre/9782311100617-la-6e-extinction-comment-lhomme-detruit-la-vie">« sixième extinction »</a>. L’expression est volontairement forte, et doit marquer les esprits, en faisant référence à la dévastatrice extinction permienne – la 3<sup>e</sup>, survenue il y a 252 millions d’années (Ma) –, entraînant la disparition de 95 % des espèces marines et peut-être de 70 % des espèces terrestres. En évoquant aussi la crise du Crétacé-Tertiaire – la 5<sup>e</sup>, dite « K-Pg », il y a 65 Ma –, et la disparition des dinosaures non-aviens.</p>
<p>Mais faire référence aux extinctions massives passées est-il juste ? Cet article interroge la rigueur scientifique du concept de sixième extinction, à manier avec précaution.</p>
<p>L’histoire du vivant s’écrit surtout depuis le Cambrien, commencé il y a 542 Ma, et l’essor d’une vie animale laissant des traces fossiles. Depuis, on observe globalement une augmentation du niveau de biodiversité. Aussi, si des apparitions et des extinctions de taxons biologiques (c’est-à-dire espèces, genres ou familles) se produisent régulièrement, le bilan sur une période donnée est, en général, positif. À quelques exceptions près.</p>
<p>En 1982, les paléontologues David M. Raup et J. John Sepkoski identifient à partir des données fossiles disponibles quatre à cinq « extinctions massives », moments au cours desquels un nombre exceptionnel de disparitions complètes de taxons entraînent une chute du niveau de biodiversité. Elles se situent à la fin de l’Ordovicien (- 445 Ma), lors des derniers étages géologiques du Dévonien (-360 à -380 Ma), du <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/08912963.2015.1103237">Permien</a> (- 252 Ma), du Trias (-201 Ma) et du Crétacé (-65 Ma). Ce sont les cinq « premières » extinctions massives.</p>
<h2>Les enseignements du passé</h2>
<p>Cependant, les auteurs n’ont analysé que des données de fossiles marins, alors plus nombreuses. Or, si la vie est encore majoritairement marine à l’Ordovicien, ce n’est plus le cas ensuite. Et le registre fossile des organismes terrestres témoigne parfois d’une autre histoire.</p>
<p>Les mammifères, par exemple, apparu au Mésozoïque (-252 à -65 Ma), ont traversé la plus fameuse des extinctions, la crise K-Pg, celle des dinosaures. Leur dynamique face à la crise est encore <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/full/10.1098/rstb.2015.0140">débattue</a>. Mais si l’extinction K-Pg a pu favoriser, ultérieurement, une diversification morphologique et écologique des mammifères, notamment placentaires, les grands groupes actuellement reconnus seraient apparus avant et auraient tous survécu (heureusement pour nous).</p>
<p>Sur une période plus longue, le <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/gto.12250">registre fossile</a> des végétaux terrestres est aussi surprenant. Vraisemblablement apparus au Silurien (-443 à -416 Ma), leur dynamique de diversification ne semble avoir été ralentie ni au Dévonien, ni au Crétacé, et seulement localement au Trias : la diversité des végétaux a été peu impactée par les extinctions massives survenues à ces périodes.</p>
<p>Au final, seule une extinction (à la fin du Permien) sur les cinq initialement identifiées aurait été à la fois massive, entraînant de nombreuses disparitions de taxons, et globale, touchant tous les types d’organismes, à une échelle planétaire. Ce qui classerait le phénomène actuel à la deuxième place, lui donnant un caractère encore plus exceptionnel… s’il correspondait véritablement, en comparaison, à une extinction massive.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275179/original/file-20190517-69204-1n9etbj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275179/original/file-20190517-69204-1n9etbj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=657&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275179/original/file-20190517-69204-1n9etbj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=657&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275179/original/file-20190517-69204-1n9etbj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=657&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275179/original/file-20190517-69204-1n9etbj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=826&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275179/original/file-20190517-69204-1n9etbj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=826&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275179/original/file-20190517-69204-1n9etbj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=826&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les cinq extinctions massives passées et classiquement reconnues sont représentées par les lignes verticales rouges. Cependant, la plupart ne seraient pas globales, dans la mesure où leur impact sur la dynamique de la diversité végétale est moindre, sinon nulle. Seule la crise massive de la fin du Permien aurait concerné aussi le monde terrestre. Réciproquement, à partir de données paléobotaniques, on enregistre d’autres crises, par exemple à la fin du Carbonifère, non détectées à partir des données marines (lignes vertes).</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Employer le conditionnel plutôt que le futur</h2>
<p>Dans leur <a href="https://editions.flammarion.com/Catalogue/hors-collection/essais/la-sixieme-extinction">livre phare</a> de 1995, le paléontologue Richard Leakey et le journaliste scientifique Roger Lewin annonçaient que jusqu’à 100 000 espèces <em>disparaîtront</em> chaque année d’ici la fin du XXI<sup>e</sup> siècle. Parler au conditionnel aurait été plus juste. Car il ne s’agissait pas d’une prédiction mais d’une anticipation quant à l’évolution future de la tendance actuelle.</p>
<p>Suivant une approche rétrospective, le chercheur en écologie et zoologie Gerardo Ceballos et ses collègues <a href="http://advances.sciencemag.org/content/1/5/e1400253">annonçaient de leur côté, en 2015</a>, que le taux d’extinction des vertébrés estimé à partir des extinctions enregistrées depuis 1900 <em>aurait</em> été 22 à 53 fois supérieures au taux « normal », estimé pour des époques plus anciennes à partir de données fossiles.</p>
<p>Ici aussi, la prudence est requise. Si une tendance à la hausse des taux d’extinction estimés semble confirmée, il reste délicat d’opposer directement des estimations obtenues sur <a href="https://www.nature.com/articles/nature09678">des intervalles de temps si différents</a> (de l’ordre du million d’années pour des données fossiles, de l’ordre du siècle pour des données actuelles).</p>
<p>Au total, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui suit l’<a href="https://www.iucnredlist.org/resources/summary-statistics#Summary%20Tables">état de la biodiversité</a>, enregistre pour 2019, 1 757 extinctions ou probables extinctions depuis 1500. Que l’on considère le nombre total d’espèces existant à la surface de la planète (au moins 2 millions), ou le nombre d’espèces suivies par l’UICN (98 510), on est encore loin des 75 % d’extinction caractérisant une extinction massive.</p>
<p>Assurément, la sixième extinction n’a pas encore eu lieu. Aura-t-elle lieu ?</p>
<p>En toute rigueur, il est difficile pour un scientifique de s’exprimer fermement sur l’avenir. Les prospectives scientifiques impliquent des hypothèses que seul le temps pourra ou non confirmer. En ce sens, extrapoler à partir de la crise de biodiversité actuelle pour conclure définitivement sur une extinction massive à venir manque de fondement scientifique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275296/original/file-20190519-69174-19h49vi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275296/original/file-20190519-69174-19h49vi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275296/original/file-20190519-69174-19h49vi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275296/original/file-20190519-69174-19h49vi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275296/original/file-20190519-69174-19h49vi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275296/original/file-20190519-69174-19h49vi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275296/original/file-20190519-69174-19h49vi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">40 % des espèces d’insectes pourraient avoir disparu de la planète d’ici quelques décennies : une hypothèse qui reste à confirmer… sans pour autant nier la gravité de la tendance actuelle.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/collection-beetle-grasshoppers-wasps-insects-general-1058244">Nathan B. Dappen/Shutterstock</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Discuter le concept de 6<sup>e</sup> extinction, est-ce du déni ?</h2>
<p>Non. En 2019, l’UICN liste 27 157 espèces menacées d’extinction. Soit près du tiers des espèces suivies ! C’est énorme. Mais il ne s’agit pas (encore) d’extinctions. En 2017, l’entomologiste <a href="https://journals.plos.org/plosone/article/authors?id=10.1371/journal.pone.0185809">Caspar Hallmann et ses confrères</a> évoquaient un déclin de plus de 75 % de la biomasse d’insectes en 27 ans sur des sites protégés en Allemagne. Le chiffre saisit car il évoque les extinctions massives ! Mais cela a pu survenir sans aucune extinction.</p>
<p>Les deux situations indiquent plus clairement le déclin démographique d’un grand nombre d’espèces. Celles-ci sont de plus en plus rares, sur une aire géographique de plus en plus réduite. Et ces déclins ont, sans intervention, l’extinction pour aboutissement.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1124184537364422656"}"></div></p>
<p>C’est pourquoi en 2019, les biologistes <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0006320718313636?via%3Dihub#f0020">Francisco Sánchez-Bayo et Kris A.G. Wyckhuys</a> suggèrent que 40 % des espèces d’insectes pourraient avoir disparu de la planète d’ici quelques décennies. Mais l’hypothèse d’extinction spécule sur l’issue de la situation actuelle plutôt qu’elle n’en rend compte, car à ce jour les espèces concernées ne sont (pour la plupart) pas éteintes.</p>
<p>Il y aurait, dans cette distinction, une maigre consolation : peut-être arriverons-nous à prévenir les extinctions. Mais c’est là que le débat, en apparence sémantique, prend son sens, car prévenir l’extinction des espèces ne suffirait pas nécessairement.</p>
<p>Dans un écosystème, les espèces ne sont pas que des entités indépendantes et contingentes. Elles interagissent les unes avec les autres ; et avec leur environnement physico-chimique.</p>
<p>Elles remplissent une « fonction » : la production primaire, l’herbivorie, la prédation, la dégradation de la matière organique morte, la symbiose, le parasitisme, etc. Ces fonctions, combinées, participent au fonctionnement de l’écosystème entier. Si elles disparaissent, l’écosystème peut être perturbé et se dégrader. Par exemple, au-delà du service écosytémique qu’ils rendent à l’homme, la fonction des insectes pollinisateurs participe au maintien des végétaux pollinisés, à la base des chaînes alimentaires. Or ces fonctions peuvent disparaître sans extinction de l’espèce, lorsque les espèces ne sont plus suffisamment abondantes pour les assurer. Et c’est précisément ce qui se passe.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/275297/original/file-20190519-69209-cvuuh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/275297/original/file-20190519-69209-cvuuh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/275297/original/file-20190519-69209-cvuuh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/275297/original/file-20190519-69209-cvuuh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/275297/original/file-20190519-69209-cvuuh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/275297/original/file-20190519-69209-cvuuh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/275297/original/file-20190519-69209-cvuuh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Chaque espèce interagit avec d’autres, créant des chaînes sensibles aux variations de la biodiversité. Ici, un Colibri scintillant (Brésil) prélevant du nectar.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/glitteringthroated-emerald-amazilia-fimbriata-trochilidae-family-1275275056">Waldemar Manfred Seehagen/Shutterstock</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au final, le concept de sixième extinction paraît avoir plusieurs limites : il fait référence à des évènements passés, encore mal compris, notamment quant à leur ampleur ; il anticipe, dans une sorte de fatalisme, sur l’issue de la situation actuelle ; il focalise sur un phénomène (l’extinction) au risque d’en négliger un autre (le déclin démographique de nombreuses espèces, et ses conséquences sur le fonctionnement des écosystèmes).</p>
<p>Enfin, sur un autre registre, plus psychologique, il brandit la menace d’une catastrophe imminente, mais qui ne survient pas, au risque de biaiser la perception du déclin, bien réel, des espèces et de leurs fonctions. En comparaison, le concept de crise de biodiversité, plus proche de l’expérience de chacun – les hirondelles sont toujours là mais moins nombreuses qu’avant –, paraît plus pertinent.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été écrit avec la précieuse collaboration de Borja Cascales-Minana, paléobotaniste, chargé de recherche CNRS au laboratoire Evo-Eco-Paleo (UMR Université de Lille-CNRS 8198).</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/116864/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Maxime Pauwels a reçu des financements de Université de Lille, Centre National de la Recherche Scientifique, Agence Nationale de la Recherche, Région Hauts de France. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jessie Cuvelier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>6ᵉ extinction, une expression sans appel. Entre hypothèse et spéculation sur l’avenir, les auteurs optent pour la justesse scientifique. Sans minimiser pour autant la perte de biodiversité en cours.Maxime Pauwels, Enseignant-chercheur en écologie et évolution, Université de LilleJessie Cuvelier, Ingénieur d'études CNRS - chargée de collections, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/878972018-01-14T20:44:48Z2018-01-14T20:44:48ZEspèces en voie d’extinction : le compte n’y est pas<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/201398/original/file-20180109-36040-3vnd5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un Mautodontha de Tahiti. Les invertébrés sont les grands absents des évaluations de la crise d’extinction qui affecte la biodiversité. </span> <span class="attribution"><span class="source">Benoît Fontaine/MNHN</span></span></figcaption></figure><p>Ces trente dernières années, des scientifiques de plus en plus nombreux tentent d’alerter sur la période d’extinction de masse du vivant que nous traversons.</p>
<p>Principalement causé par les activités humaines, ce phénomène a été qualifié de « sixième crise d’extinction », en référence aux <a href="https://theconversation.com/a-propos-des-grandes-crises-dextinction-81531">cinq grandes crises</a> qui ont émaillé l’histoire de la vie sur Terre. La cinquième, la plus célèbre, avait conduit à l’extinction des dinosaures, bien avant l’apparition de l’homme.</p>
<p>Officiellement pourtant, seules 859 espèces sont aujourd’hui recensées comme éteintes si l’on s’en réfère à la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature <a href="https://www.iucn.org/fr">(UICN)</a>. Ce qui représente moins de 0,05 % des deux millions d’espèces répertoriées. Ce chiffre pourrait jeter un doute sur la réalité de la crise : si la situation est si grave, où sont les espèces éteintes ?</p>
<p>Il s’explique pourtant. Tout d’abord par la difficulté qu’il y a à prouver qu’une espèce a disparu : si on ne la trouve plus, c’est peut-être parce qu’on a mal cherché, au mauvais endroit, à la mauvaise période ou avec des moyens inappropriés.</p>
<p>Ensuite, les espèces dont l’état de conservation est bien connu – à savoir les vertébrés et quelques autres petits groupes tels que papillons de jour, les coraux bâtisseurs de récifs ou les libellules – ne constituent qu’une infime partie de la biodiversité globale ; ainsi, ce sont moins de 5 % des espèces connues qui ont été évaluées dans le cadre de la <a href="http://www.iucnredlist.org/">liste rouge de l’UICN</a>.</p>
<h2>Des millions d’espèces non évaluées</h2>
<p>Autre fait marquant : la plus grande partie de la biodiversité – composée d’invertébrés tels que les insectes, mollusques, arachnides ou nématodes – est pratiquement absente des évaluations de la crise d’extinction.</p>
<p>Faute de données quantifiées sur les tailles des populations, les aires de répartition ou la démographie de ces espèces, il est impossible d’utiliser les méthodes classiques, telles que celle utilisée par l’UICN pour les comptabiliser.</p>
<p>Dans ce contexte, puisque les informations manquent pour la grande majorité des espèces (sans parler des cinq à dix millions d’espèces encore inconnues !), comment mesurer avec exactitude l’ampleur de la crise ?</p>
<p>Plusieurs approches, basées sur de grands jeux de données, sont disponibles.</p>
<p>Il est ainsi possible de <a href="https://www.nature.com/articles/nature09678">comparer les taux d’extinction</a> actuels et passés pour les groupes évalués par l’UICN, de <a href="https://www.nature.com/articles/nature02121">projeter les futures modifications d’habitats</a> provoquées par le réchauffement climatique ou d’<a href="https://www.nature.com/news/biodiversity-the-ravages-of-guns-nets-and-bulldozers-1.20381">évaluer l’impact de l’agriculture</a> et de la surexploitation.</p>
<p>Une autre façon de mesurer la crise consiste à mesurer non pas les extinctions, mais les réductions de population et d’aires de répartition, préludes à l’extinction. C’est l’approche qui a été utilisée dans une <a href="http://www.pnas.org/content/114/30/E6089.full">étude</a> publiée en juillet 2017 qui a reçu un fort écho médiatique.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"884841134182236162"}"></div></p>
<p>En utilisant les données de la liste rouge sur les contractions d’aires de répartition et les extinctions de populations pour 27 600 espèces de vertébrés, les auteurs de cette étude ont montré que près de la moitié des espèces de l’échantillon ont perdu des populations ou ont vu leur aire de répartition diminuer au cours du siècle dernier. La plupart des 177 espèces de mammifères d’un sous-échantillon pour lequel des données détaillées sont disponibles dans la littérature scientifique ont perdu plus de 40 % de leur aire de répartition depuis 1900 et la moitié en ont perdu plus de 80 % !</p>
<p>Si cette étude est remarquable, elle s’appuie cependant, comme la plupart des travaux sur le sujet, sur les seules espèces pour lesquelles les données démographiques ou géographiques existent (grands vertébrés en tête).</p>
<h2>Une nouvelle approche pour les espèces mal connues</h2>
<p>Est-ce à dire qu’il est impossible de mesurer la crise à travers le prisme des petites espèces peu étudiées et mal connues ? Certainement pas. Nous avons proposé une <a href="http://www.pnas.org/content/112/25/7761">nouvelle approche</a>, qui permet de prendre en compte toutes les espèces, et notamment les invertébrés.</p>
<p>Souvent, les seules données existantes sur ces espèces sont contenues dans la description originale (article scientifique qui relate la découverte de l’espèce, donne sa description et lui attribue un nom), et très peu de choses sont connues de leur biologie ou de leur aire de répartition, sans même parler de leur démographie !</p>
<p>Mais il existe pourtant des sources de données très fiables : les spécimens conservés dans les collections des muséums, accompagnés d’étiquettes mentionnant le lieu et la date de la collecte.</p>
<p>L’idée est donc la suivante : la quantité de spécimens en collection doit, dans une certaine mesure, refléter l’état des populations de l’espèce dans la nature. Cela n’est certes pas vrai pour des espèces rares et remarquables ou ayant une valeur marchande, comme <a href="https://www.conchology.be">certains cônes</a> par exemple : celles-ci seront paradoxalement surreprésentées dans les collections, car davantage recherchées.</p>
<p>Mais pour les espèces banales, peu connues et sans valeur, nous pouvons faire l’hypothèse que leur rythme d’apparition dans les collections traduit directement leur abondance dans la nature. Une espèce collectée rarement mais jusqu’à une date récente est probablement vivante. Une espèce ayant été collectée à un rythme soutenu mais seulement jusqu’à une date ancienne est probablement éteinte.</p>
<p>De manière générale, le rapport entre le rythme de collecte et le temps écoulé depuis la dernière collecte nous permet d’estimer la probabilité que l’espèce soit toujours présente.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"948170439314018304"}"></div></p>
<h2>Des maths et des experts</h2>
<p>Pour un échantillon aléatoire de 200 espèces de mollusques terrestres (escargots et limaces) du monde entier, nous avons ainsi recherché et rassemblé toutes les dates de collecte provenant de la littérature scientifique, de données fournies par des experts et des spécimens des collections de plusieurs grands muséums d’histoire naturelle.</p>
<p>Le premier enseignement de cette compilation de données illustre bien le manque de connaissances sur les invertébrés : 30 % des espèces de l’échantillon ne sont connues que par leur description originale, et 33 % n’ont été observées que dans une seule localité ! Nous avons analysé ces données par <a href="http://www.pnas.org/content/112/25/7761">deux approches complémentaires</a>.</p>
<p>Premièrement, nous avons construit un modèle mathématique probabiliste qui repose sur l’hypothèse que les espèces se sont éteintes à un taux très faible jusqu’au début du XX<sup>e</sup> siècle, où leur probabilité d’extinction par année a littéralement explosé. Pour chacune des 200 espèces, à l’aide de la dernière date à laquelle elle a été observée, l’effort de collecte estimé pour cette espèce et la probabilité estimée de la trouver lorsqu’elle est vivante, nous avons comparé la probabilité qu’elle soit éteinte avec celle qu’elle soit encore vie pour proposer un « statut de conservation statistique » : « probablement éteinte », « probablement vivante » ou « sans avis ».</p>
<p>Parallèlement, nous avons sollicité 30 malacologues, experts reconnus d’une famille de mollusques ou d’une région biogéographique, et leur avons soumis les espèces de l’échantillon, en leur demandant s’ils pouvaient évaluer leur statut de conservation (« non menacé », « menacé », « éteint » ou « impossible à évaluer »), et quand ils avaient collecté des spécimens de ces espèces sur le terrain.</p>
<h2>Une extinction sans précédent</h2>
<p>Suivant la méthodologie de l’UICN, 85 % des espèces de notre échantillon n’auraient pas pu être évaluées, faute de données suffisantes. En revanche, seules 41 % sont impossibles à évaluer avec l’approche « à dire d’expert » ; dans ce cadre, 45,5 % ont été classées comme non menacées, 3,5 % comme menacées et 10 % comme éteintes.</p>
<p>Cette approche peut être critiquée, puisqu’elle se fonde sur des critères difficiles à quantifier, voire des ressentis. Pourtant, ses résultats sont remarquablement adéquats avec ceux obtenus par le modèle statistique ; ce dernier évalue lui aussi 10 % des espèces de l’échantillon comme éteintes, ce qui, rapporté à l’ensemble des espèces terrestres connues, représente environ 130 000 extinctions en 250 ans !</p>
<p>Deux méthodes indépendantes, l’une basée sur les connaissances des spécialistes, l’autre sur un modèle mathématique, convergent pour confirmer que sur un échantillon aléatoire d’espèces, la proportion d’espèces éteintes par rapport à la biodiversité connue est beaucoup plus importante que les 0,05 % recensés officiellement. La crise d’extinction actuelle est sans précédent dans l’histoire de la vie sur Terre.</p>
<h2>Étendre l’évaluation</h2>
<p>D’autres groupes d’espèces mériteraient également une évaluation de leur statut de conservation. Par exemple, certains insectes emblématiques, comme les abeilles sauvages, sont relativement bien étudiés. Pourtant, la liste rouge de ce groupe de pollinisateurs révèle que <a href="http://ec.europa.eu/environment/nature/conservation/species/redlist/downloads/European_bees.pdf">57 % des 1965 espèces européennes</a> n’ont pu être évaluées faute de données adéquates.</p>
<p>Le cas des syrphes et autres diptères, dont l’efficacité de pollinisation est pourtant largement reconnue, est remarquable puisqu’aucune évaluation à l’échelle française ou européenne n’a été effectuée à ce jour.</p>
<p>En tenant compte des spécificités d’échantillonnage propres aux différents groupes, il sera intéressant d’adapter l’approche développée pour les mollusques terrestres à d’autres groupes bien représentés dans les collections. Cela permettra d’évaluer l’impact de la crise d’extinction sur les différents compartiments de la biodiversité et d’orienter les efforts de conservation vers les régions et les espèces les plus touchés.</p>
<p>Car même pour des taxons peu connus, il est possible de mesurer l’impact de la crise, en mettant à profit la modélisation mathématique, le savoir des spécialistes et l’extraordinaire richesse des collections des muséums.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/87897/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Si la période d’extinction de masse du vivant que nous connaissons est bien documentée pour les vertébrés, de nombreuses espèces invertébrées échappent aux évaluations.Benoît Fontaine, Ingénieur en biologie de la conservation, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Amaury Lambert, Professeur, probabilités, biologie évolutive, Sorbonne UniversitéColin Fontaine, Docteur en écologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Guillaume Achaz, Docteur en biologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/838252017-10-24T20:55:35Z2017-10-24T20:55:35ZChangement climatique et crise de la biodiversité : la dangereuse alliance<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/185495/original/file-20170911-1317-12cbc07.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Arbres desséchés dans le désert namibien. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/arbre-d%C3%A9sert-namibie-dead-vlei-64311/">Katja/pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Le changement global que connaît notre planète est trop souvent associé aux seuls changements climatiques. Or il concerne aussi la biodiversité, avec ce processus appelé « crise de la <a href="https://theconversation.com/extinctions-de-masse-comment-la-vie-rebondit-48271">6ᵉ extinction</a> ».</p>
<p><a href="https://theconversation.com/a-propos-des-grandes-crises-dextinction-81531">Ces crises de la biodiversité</a> désignent une période au cours de laquelle une grande partie des espèces vivantes est frappée d’extinction, à l’image de celle du <a href="http://geologie.mnhn.fr/biodiversite-crises/page5.htm#KT">Crétacé-Tertiaire</a>, il y a 65 millions d’années, qui vit disparaître les dinosaures.</p>
<p>Ces dernières décennies, de <a href="http://www.pnas.org/content/112/25/7761">nombreuses espèces</a> ont donc disparu ou ont été terriblement affectées au point d’être menacées de disparition. C’est ce que l’<a href="http://www.pnas.org/content/114/30/E6089.abstract">analyse des populations de 25 000 espèces de vertébrés</a> a récemment établi.</p>
<p>Selon une autre étude, on apprend que l’Europe a perdu <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/ele.12387/full">421 millions individus d’oiseaux</a> ces trente dernières années ; de nombreuses espèces communes, comme les alouettes ou les mésanges, sont en fort déclin. Et ces derniers jours, la revue scientifique <em>Plos One</em> a fait beaucoup parler en publiant les résultats de travaux quantifiant pour la première fois le dramatique <a href="http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0185809">déclin des insectes volants</a> sur le Vieux Continent.</p>
<p>Pour beaucoup, cette crise de la biodiversité demeure un évènement de moindre importance, dont les conséquences pour les humains resteraient purement éthiques ou patrimoniales. On trouve triste de voir décliner les populations d’éléphants, de baleines, d’oiseaux ou de grenouilles, mais ce n’est pas aussi grave que certains drames humains, comme les famines ou les exodes causés par le changement climatique. C’est ici une lourde erreur car perte de biodiversité et changement climatique <a href="http://www.millenniumassessment.org/documents/document.354.aspx.pdf">sont intimement liés</a> et ont <em>ensemble</em> des conséquences dramatiques pour l’humanité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">En Europe, les populations de mésanges connaissent un fort déclin.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/missbutterfly/12947874633/in/photolist-kJaf2P-dV9aaz-SqyWGS-7hyVS2-UJEsCm-evJ3JQ-5MC33W-kCwuQH-GLjoEp-Rzboou-bn7hqy-bn7hSw-RBTfrT-ncMq7d-ncMtVU-3nn1gC-4vPQv5-4gVMzH-nsenWb-4gZR41-jEQae7-4fhxZ8-5t1rGH-pMvFtv-Rx3RaS">Julie Missbutterflies/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une crise bien caractérisée et sans précédent</h2>
<p>La 6<sup>e</sup> extinction de masse affecte pratiquement tous les milieux et toute la biodiversité. Elle s’explique par une <a href="http://www.millenniumassessment.org/documents/document.354.aspx.pdf">multitude de facteurs</a>, tous liés aux activités humaines : changement climatique, dévastation des milieux naturels due à l’agriculture industrielle, déforestation, exploitation minière, urbanisation effrénée, pollutions innombrables des pesticides aux plastiques, en passant par les apports azotés excessifs et la pollution lumineuse. Il apparaît bien difficile d’agir de manière efficace en se limitant à une seule de ces causes.</p>
<p>Cette crise est d’autre part incroyablement rapide. Son appellation, en référence aux extinctions de masse passées, peut être trompeuse de ce point de vue : elle va en effet mille fois plus vite que les précédentes et nous affectera directement à l’échelle de notre vie d’adulte.</p>
<p>Ce sont <a href="http://doi.org/10.1038/461472a">tous les seuils</a> de stabilité des cycles terrestres qui sont aujourd’hui affectés ; une situation pouvant conduire à des <a href="http://doi.org/10.1038/nature09678">changements de biodiversité très forts et très rapides</a>.</p>
<h2>Des réseaux d’interactions essentiels</h2>
<p>La biodiversité ne se résume pas à des listes d’espèces peuplant des milieux spécifiques. Chaque espèce dépend de beaucoup d’autres du fait de leurs interactions, au travers de relations de consommation, de prédation, de parasitisme, de mutualisme, ou de <a href="http://www.encyclopedie-environnement.org/vivant/systemes-symbiotiques-parasites/">commensalisme</a>.</p>
<p>Introduisez, comme ce fut le <a href="https://www.csiro.au/en/Research/BF/Areas/Invasive-species-and-diseases/Biological-control/Exotic-dung-beetle-to-tackle-Aussie-flies">cas en Australie</a> il y a quelques décennies, des bovins en oubliant d’introduire les insectes coléoptères bousiers <a href="http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/coprophage/19144?q=coprophage#19033">coprophages</a> associés et ce sont les prairies qui dépérissent d’être littéralement recouvertes de bouses.</p>
<p>Laissez-vous envahir par un <a href="http://draaf.paca.agriculture.gouv.fr/Le-Charancon-Rouge-du-Palmier-en">charançon exotique</a> et <a href="http://www.lefigaro.fr/sciences/2017/07/11/01008-20170711ARTFIG00271-la-mort-annoncee-des-palmiers-de-la-cote-d-azur.php">10 000 palmiers meurent</a> sur la Côte d’Azur en moins de 10 ans. Supprimez un tiers des abeilles sauvages en France et la <a href="http://doi.org/10.1038/nature11148">pollinisation de 80 % des plantes</a>, y compris celles de nombre de nos cultures, sera gravement affectée.</p>
<p>C’est une évidence absolue que la perte d’espèces en proportions considérables (selon les groupes d’organismes, de <a href="http://doi.org//10.1038/nature09678">10 à 40 % dans les 50 prochaines années</a>) aura des effets écologiques très forts et des conséquences immédiates sur notre vie quotidienne.</p>
<p>Les réseaux d’interactions entre espèces au sein des écosystèmes sont incroyablement complexes et <a href="http://doi.org/10.1126/science.1188321">leur modélisation</a> reste un problème scientifique de longue haleine. Le nombre d’espèces intervenant au sein de ces réseaux naturels est considérable : la faune française compte par exemple pas moins de <a href="https://inpn.mnhn.fr/accueil/index">90 000 espèces d’insectes</a> dont les rôles écologiques sont souvent <a href="https://theconversation.com/crise-de-la-biodiversite-noublions-pas-les-invertebres-81517">primordiaux</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"913675100079214592"}"></div></p>
<h2>Toutes les espèces comptent</h2>
<p>Une autre idée reçue nuit à l’appréhension des effets de cette crise de la biodiversité : les écosystèmes ne sont pas uniquement régis par quelques espèces abondantes et communes dont il serait plus facile de préserver l’existence. Les espèces rares – et précisément plus fragiles du fait de leur rareté – assument souvent des rôles écologiques majeurs malgré leur faible importance numérique. Leur disparition ne passera ainsi pas inaperçue au plan fonctionnel.</p>
<p>Un <a href="http://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.1001569">bilan</a> publié en 2013 – prenant en compte différents types d’écosystèmes et plusieurs milliers d’espèces – a montré que des fonctions originales et importantes sont ainsi fréquemment tenues par des espèces rares.</p>
<p>Il est souvent difficile de faire comprendre ce type de résultats peu compatibles avec notre vision dominante de l’ingénierie agronomique, dans laquelle l’homme pense pouvoir gérer durablement des systèmes simplifiés, notamment agricoles ou forestiers, avec un interventionnisme permanent.</p>
<p><a href="http://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.1001569">L’étude</a> cite ainsi l’exemple d’une petite plante (saxifrage) des milieux alpins européens, assez rare et très discrète. Cette dernière permet aux pollinisateurs de se maintenir sur des affleurements rocheux inhospitaliers. En maintenant ces pollinisateurs naturels et leurs espèces associées, on évite une cascade d’interventions coûteuses, polluantes et peu pérennes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Saxifrage en Vanoise.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Saxifrage_en_Vanoise_2017.jpg">Wikipedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Une <a href="https://www.nature.com/nature/journal/v486/n7401/full/nature11148.html">synthèse</a> récente a examiné environ 2 000 études scientifiques à propos des relations entre biodiversité et sociétés humaines. Elle a permis de montrer que les pertes de biodiversité aboutissent toujours à des diminutions importantes de services écosystémiques, comme la décomposition, les cycles de la matière, l’assainissement des eaux, la régulation climatique ou la pollinisation.</p>
<h2>Perte de biodiversité et dégradation du climat</h2>
<p>On souligne souvent cet enchaînement fatal des causalités : émissions/perturbations humaines conduisant au changement climatique provoquant une perte de biodiversité, cette dernière causant elle-même des dommages aux sociétés humaines.</p>
<p>Mais cela fait abstraction d’une boucle de rétroaction extrêmement importante et trop peu mentionnée : celles de la <a href="http://www.fondationbiodiversite.fr/images/decisionspubliques/IPBES/6_nov_2014_GIEC-IPBES/Compte_rendu_IPBES_GIEC_6nov_V2.pdf">biodiversité sur le climat</a>.</p>
<p>Or, envisager la planète comme un système purement physique et minéral dans lequel la biodiversité est hébergée – n’assurant pas elle-même de rétroaction fonctionnelle ou régulatrice sur celui-ci – est une représentation complètement erronée de la réalité.</p>
<p>La couverture végétale et le sol assument, par exemple, un rôle crucial de régulation climatique directe, outre le stockage et le recyclage du carbone. La déforestation entraîne ainsi la disparition locale définitive des nuages et des pluies. La composante biologique des océans (notamment le plancton) absorbe également une quantité de carbone considérable : on rappellera ainsi que plus d’un quart du CO<sub>2</sub> émis par les activités humaines est absorbé par les océans.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"917470020678103045"}"></div></p>
<p>Les synthèses citées ici ont montré que les pertes de biodiversité conduisaient à de fortes baisses de performances dans les écosystèmes, <a href="https://www.nature.com/nature/journal/v486/n7401/full/nature11148.html">jusqu’à hauteur de 10 à 15 % de leur productivité</a>.</p>
<p>Une couverture végétale terrestre ou des peuplements planctoniques marins, tous appauvris ou profondément déséquilibrés, n’assureront pas en effet leurs fonctions régulatrices avec la même efficacité. Sans compter que d’énormes surfaces de cette couverture végétale – comme les forêts tropicales – continuent à être <a href="https://theconversation.com/forest-loss-has-halved-in-the-past-30-years-latest-global-update-shows-46932">rapidement dévastées</a>.</p>
<p>La crise de la 6<sup>e</sup> extinction n’est pas qu’une préoccupation pour les défenseurs des droits des animaux ; elle nous concerne tous. Au-delà des aspects éthiques évidents d’une telle catastrophe, les conséquences dans notre vie quotidienne seront importantes et sans aucun doute profondément négatives.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/83825/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La disparition rapide et massive de nombreuses espèces terrestres doit alerter autant que les effets du changement climatique… d’autant plus que ces deux processus sont intimement liés.Philippe Grandcolas, Directeur de recherche CNRS, systématicien, UMR ISYEB, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Roseli Pellens, Ingénieure de recherche en macroécologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/815172017-10-23T19:08:13Z2017-10-23T19:08:13ZCrise de la biodiversité : n’oublions pas les invertébrés !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/191365/original/file-20171023-1695-xsrt9u.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un orthoptère dans des champignons corticoles (qui vivent sur les écorces d’arbre) en Guyane. </span> <span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Il semble aujourd’hui établi que nous vivons la 6<sup>e</sup> extinction de masse de la biodiversité ; cette expression désigne une période au cours de laquelle on observe une baisse très importante des populations d’animaux, de plantes, etc.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/a-propos-des-grandes-crises-dextinction-81531">Causée par les activités humaines</a>, elle est d’une ampleur sans précédent ; c’est qu’indiquent les données de nombreuses études globales (dont une <a href="http://advances.sciencemag.org/content/1/5/e1400253">étude récente</a> sur les vertébrés) et locales ; il faut aussi prendre en compte les nouvelles données concernant l’amplitude de la biodiversité, que nous n’avons fait qu’effleurer ces 200 dernières années, depuis que le naturaliste suédois Linné a inventé la <a href="https://www.herodote.net/Carl_von_Linne_1707_1778_-synthese-212.php">taxonomie</a>, toujours utilisée aujourd’hui.</p>
<p>Car c’est bien cette biodiversité foisonnante (on parle de « megadiversité ») encore largement inconnue qui est en train de disparaître sous nos yeux.</p>
<p>La situation s’avère particulièrement critique dans les <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1744-7429.2006.00141.x/full">régions intertropicales</a> qui concentrent aujourd’hui développement rapide – avec des croissances de PIB quelquefois <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Croissance_%C3%A9conomique#Cons.C3.A9quences">supérieures à 5 %</a> – et croissance démographique ; une évolution qui entraîne déforestations, pollutions, prélèvements de faune et flore ainsi que des dégradations des habitats naturels liés à une urbanisation sans précédent.</p>
<p>Or ces régions sont de véritables <a href="http://www.cnrs.fr/cw/dossiers/dosbiodiv/index.php?pid=decouv_chapA&zoom_id=zoom_a1_4">« points chauds »</a> de biodiversité, tout particulièrement les forêts humides qu’elles abritent. Ici, l’absence de conditions limitantes (la chaleur et l’humidité y sont optimales) permet un développement idéal des écosystèmes forestiers, aquatiques, littoraux et de toutes les interfaces entre les écosystèmes.</p>
<p>Dans ce contexte, des organismes aussi insignifiants (en apparence !) que les mollusques, les mille-pattes, les araignées, les insectes et tant d’autres « invertébrés » disparaissent avant même d’avoir été inventoriés. Ils sont pourtant absolument essentiels à la biodiversité. Nous allons voir pourquoi.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Libellule <em>Brechmorhoga sp.</em> dans un marécage guyanais. Les libellules sont des prédateurs importants d’insectes des milieux humides, où elles participent au fonctionnement de l’écosystème.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<h2>Incontournables insectes et arthropodes</h2>
<p>Les insectes, les arthropodes (crustacés, araignées, milles pattes, etc.) et tous les autres invertébrés (mollusques, vers, etc.) sont <a href="https://theconversation.com/les-insectes-vont-ils-sauver-le-monde-62836">essentiels aux écosystèmes</a> de notre planète ; ils constituent en effet la nourriture de la plupart des vertébrés sur lesquels <a href="http://www.nature.com/articles/s41598-017-09084-6">se concentrent</a> les efforts de recherche et de conservation.</p>
<p>On pourrait expliquer cette préférence par un effet d’anthropocentrisme, les vertébrés (oiseaux, cétacés, primates, etc.) paraissant plus proches de l’homme, ou dans tous les cas plus emblématiques.</p>
<p>Maillon crucial des chaînes alimentaires, insectes et arthropodes sont des ingénieurs écologiques aux fonctions essentielles – comme la pollinisation et la fertilisation des sols –, des microéboueurs de déchets organiques de toute nature, des auxiliaires indispensables (mais quelquefois ignorés) de nos agroécosystèmes, des micro-experts sentinelles de nos écosystèmes et de vilaines affaires criminelles (sciences forensiques), les futurs modèles de nos solutions bioinspirées les plus innovantes, des modèles en biologie générale et comparée qui nous échappent encore, des acteurs de nos patrimoines culturels… et peut-être le futur de l’alimentation humaine !</p>
<p>Il est désormais possible d’évaluer l’importance des insectes et autres arthropodes en matière de potentiel d’évolution ; et ceci est important pour faire les bons choix de conservation. Aujourd’hui, toute une partie de la recherche se consacre ainsi à <a href="http://www.springer.com/us/book/9783319224602">cette phylogénie de la conservation</a> pour trouver les <a href="https://www.sfecologie.org/regard/r73-juin-2017-ph-grandcolas-systematique/">critères</a> de plus en plus objectifs afin d’orienter les décideurs en réponse à cette 6<sup>e</sup> extinction de masse.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La luge des cimes est un outil dédié à l’étude des canopées tropicales. Créée par l’équipe du Radeau des cimes, cette plateforme accueillant deux ou trois scientifiques peut se déplacer au-dessus de la canopée, choisir des arbres d’intérêt pour en étudier la faune et la flore. Un ballon à air chaud et son pilote en permette le déplacement. Ici dans la forêt guyanaise.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Fossiles et paléo-écosystèmes</h2>
<p>Dans ce contexte de quantification de la biodiversité et de l’extinction – que ce soit en nombre d’unités taxonomiques ou par rapport au rythme de cette extinction –, il apparaît que les données concernant des insectes fossiles, désormais adossées à des bases de données relativement fournies, permettent d’avoir du recul face aux cinq extinctions de masse précédentes.</p>
<p>Ces dernières se situent dans <a href="http://geologie.mnhn.fr/biodiversite-crises/page4.htm">des temps profonds</a> : de la crise Permien-Trias, il a plus de 250 millions d’années, à celle du Crétacé-Tertiaire, il y a 65 millions d’années.</p>
<p>Les insectes ont en effet toujours montré des taux d’extinction des rangs taxonomiques supérieurs (familles, etc.) beaucoup moins importants que chez les vertébrés. Ceci peut être expliqué par la relative importance de la biodiversité des insectes, déjà avérée <a href="http://www.nature.com/nature/journal/v503/n7475/full/nature12629.html">depuis la fin du Carbonifère</a>, il y a plus de 300 millions d’années.</p>
<p>Ce fut le cas lors de la crise de la fin du Crétacé, qui a vu l’extinction des dinosaures mais a <a href="https://www.bio-conferences.org/articles/bioconf/abs/2015/01/bioconf-origins2015_00006/bioconf-origins2015_00006.html">« laissé passer »</a> tous les groupes modernes d’insectes vivant à cette période. Ces organismes ont donc participé à la reconstitution des écosystèmes après ces crises majeures. Ils en ont peut-être même été des acteurs majeurs.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Chenille du papillon <em>Charaxes jasius</em>, un papillon méditerranéen vivant sur un seul végétal, l’arbousier. Ces deux espèces sont liées par cette relation entre plantes et hôtes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<h2>Le rythme de l’extinction</h2>
<p>Ce phénomène nous invite à prendre en compte la valeur évolutive de la perte de biodiversité, c’est-à-dire la perte de possibilités adaptatives des écosystèmes et des lignées face aux changements qui s’opèrent sous nos yeux.</p>
<p>En plus de l’importance écologique (effets « immédiats »), il faut considérer l’échelle évolutive (sur plusieurs dizaines de générations au minimum) qui entre en compte dans la persistance et l’évolution des systèmes écologiques.</p>
<p>Ce maintien de la biodiversité maximale, outre la valeur de chaque espèce, représente une garantie pour l’avenir : qui sait, par exemple, si l’une ou plusieurs de ces espèces infimes ne cachent pas un trésor pour l’humanité (une molécule d’intérêt majeur, une particularité biologique transposable par bio-inspiration, un parasite fondamental pour lutter contre une bio-invasion…).</p>
<p>Notre inquiétude concerne donc le rythme de ces extinctions qui semble, dans ce nouvel épisode, cette 6<sup>e</sup> extinction de masse, sans précédent. Les écosystèmes pourront-ils faire fonctionner leur capacité de résilience ou de compensation ? Ceux-ci existent-ils vraiment à cette échelle ? Nous dirigeons-nous vers un effondrement provoqué par cette rapidité ?</p>
<p>Comment les écosystèmes et les territoires vont-ils s’adapter à ces changements profonds ? Devra-t-on un jour envisager de recréer certaines espèces (un pollinisateur d’une espèce végétale d’intérêt agronomique majeur, un parasite d’une espèce terriblement invasive ou impactante pour la santé, etc.) en ayant recours à la biologie de synthèse ?</p>
<h2>De ce côté-ci de la biodiversité</h2>
<p>On a commencé par entendre dire « Il n’y plus de saisons », puis ce fut « Où sont passés les oiseaux ? » et maintenant « Mais au fait, où sont les insectes ? ».</p>
<p>C’est une sensation étrange de pouvoir ressentir à l’échelle d’une mémoire humaine ce type de phénomène. D’abord de manière empirique, puis de manière scientifique en utilisant des bases de données de différents pays européens, comme celles des collections des Muséums d’histoire naturelle, basées sur les spécimens ou des travaux de recherche tout récents.</p>
<p>Ou encore, avec le recours des sciences citoyennes, à la fois moyen de pallier aux difficultés de financement de la recherche et formidable moyen de sensibilisation qui s’est imposé comme un <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/ece3.2526/full">outil incontournable</a> au fil des années.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les Eucères (caractérisées par des antennes très longues) sont des abeilles solitaires d’Europe qui participent à la pollinisation des orchidées.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Car les insectes et autres arthropodes ne périclitent pas que dans les zones intertropicales. Nos régions aussi sont concernées, comme le montre une <a href="http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0185809">toute récente étude</a> parue dans la revue <em>PloS One</em> (moins 75 % d’insectes volants en Allemagne ces trente dernières années) ; une situation parfois masquée par les introductions et autres incursions d’espèces dites « invasives », <a href="https://theconversation.com/la-punaise-diabolique-cette-creature-urbaine-66752">certaines discrètes</a>, d’autre moins comme le <a href="https://theconversation.com/le-frelon-asiatique-est-entre-dans-paris-62746">frelon asiatique</a>… Ou encore le très désagréable moustique-tigre qui, comme pas mal d’autres, ne sert pas la cause invertébrée !</p>
<p>Il faut encore convaincre pour bien faire comprendre le rôle essentiel de ces petits organismes – en apparence anodins, discrets ou invisibles – à ceux qui les ignorent, s’en désintéressent ou s’en méfient ainsi qu’à ceux en charge de prendre les décisions.</p>
<p>Que vaut alors la cause de cette majorité silencieuse, qui disparaît tristement sous les tropiques ?</p>
<p>On sent toutefois une prise en compte grandissante de cette situation, peut-être « grâce » au déclin des abeilles et à l’impact des études en écologie fonctionnelle… On voit ainsi fleurir des « hôtels à abeilles » dans les jardins, des « passerelles à faune » enjamber les autoroutes, une <a href="http://www.trameverteetbleue.fr/">« trame verte et bleue »</a> se dessiner ; et l’on connaît bien désormais le rôle des vers de terre (Annelides) dans les sols.</p>
<p>Comme c’est le cas pour les récifs coralliens, la France à la responsabilité de millions d’hectares de forêts tropicales, méditerranéennes, tempérées, atlantiques et des espèces qui y vivent. Il est urgent de les protéger, de poursuivre les inventaires et la recherche sur le rôle de la biodiversité dans tous les écosystèmes, et d’aider à la protection des milieux tropicaux où cette biodiversité cachée disparaît chaque jour un peu.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/81517/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Garrouste ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Mollusques, milles‑pattes, araignées, insectes… les invertébrés connaissent ces dernières années, tout autant que les vertébrés, un inquiétant recul de leurs populations.Romain Garrouste, Chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205 MNHN-CNRS-UPMC-EPHE), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/762862017-04-24T21:16:45Z2017-04-24T21:16:45ZCe que « Life » nous dit sur demain<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/166490/original/file-20170424-12468-n24b7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'équipage découvre la toute première preuve d’une vie extraterrestre sur Mars.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.allocine.fr/film/fichefilm-244761/photos/detail/?cmediafile=21394577">Allociné</a></span></figcaption></figure><p>Le film <em>Life : origine inconnue</em> de Daniel Espinosa pose la question de la procédure à adopter le jour où l’humanité entrera en contact avec une forme de vie inconnue, extraterrestre… Dans cette éventualité, quel meilleur laboratoire de confinement peut-on alors imaginer que la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Station_spatiale_internationale">station spatiale internationale, qui orbite à 400 kilomètres au-dessus de nos têtes</a> ?</p>
<p>Le décor est posé. L’action, on s’en doute, tournera autour d’un huis clos meurtrier à cause d’un invité d’origine inconnue. Un scénario qui rappelle au spectateur que <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alien_(film)">« dans l’espace, personne ne vous entend crier »</a> !</p>
<p>Cependant, quelques questions demeurent… tout d’abord au sujet de cette forme de vie qui est « réactivée » avec un peu de chaleur, une goutte d’eau et le bon cocktail gazeux. Si cela paraît « trop fastoche », il n’est cependant pas nécessaire d’aller chercher un échantillon martien pour rencontrer une forme de vie avec une résistance similaire à celle de Calvin – <em>attention : spoiler !</em> Calvin est le nom donné par les terriens à la forme de vie martienne. En effet, il existe, sur Terre, ce genre de forme de vie « extrêmophile » : <a href="http://www.maxisciences.com/tartigrade/le-tardigrade-cet-animal-quasi-indestructible-revele-la-cle-de-ses-super-pouvoirs_art38760.html">on les nomme tardigrades ou oursons d’eau</a>.</p>
<h2>Des organismes aux propriétés exceptionnelles</h2>
<p>Ces drôles de petites bestioles sont capables de survivre à des températures approchant du zéro absolu (-273 °C) ou à d’autres, proches de 150 °C, bien au-delà du point d’ébullition de l’eau. Elles résistent aussi à de très forts niveaux de radiation, mortels pour toute autre sur forme de vie, des pressions extrêmement fortes – tels qu’on les trouverait au fond d’un hypothétique océan profond de 60 km (600 mégapascals) – ou, à l’inverse, extrêmement faible comme le vide spatial. Mais, surtout, le tardigrade est capable d’hiberner sur de très longues périodes, sachant évacuer jusqu’à 99 % de l’eau présente dans ses cellules, la remplaçant par un antigel de sa fabrication, le tréhalose. Des chercheurs ont ainsi réveillé des tardigrades, découverts dans les couches profondes des glaces arctiques, qui étaient gelés depuis des millénaires, dans un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tardigrada">état que l’on nomme cryptobiose</a>. En quelques minutes, parfois quelques heures, les oursons d’eau se sont remis à vivre.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/166492/original/file-20170424-12658-1hedfqr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/166492/original/file-20170424-12658-1hedfqr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/166492/original/file-20170424-12658-1hedfqr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/166492/original/file-20170424-12658-1hedfqr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/166492/original/file-20170424-12658-1hedfqr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/166492/original/file-20170424-12658-1hedfqr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/166492/original/file-20170424-12658-1hedfqr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/166492/original/file-20170424-12658-1hedfqr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Un tardigrade.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:SEM_image_of_Milnesium_tardigradum_in_active_state_-_journal.pone.0045682.g001-2.png">Schokraie E., Warnken U., Hotz-Wagenblatt A., Grohme M.A., Hengherr S., et coll. (2012) Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Mais, avec le tardigrade, pas de danger pour l’humanité ! Les plus grands d’entre eux ne mesurent que 1,5 millimètres et, bien que l’on trouve des tardigrades dans tous les écosystèmes de la planète, l’humain aura toujours l’avantage de la vitesse : le nom savant des oursons d’eau signifie « marcheur lent »…</p>
<p>Donc Calvin, voyageur interplanétaire et invité indésirable de l’ISS, n’est finalement pas si improbable : les tardigrades semblent capables de survivre à un voyage similaire à celui que Calvin fit depuis la planète rouge… Mais contrairement aux tardigrades, ce dernier se révèle hautement véloce et étonnamment dangereux pour les humains. Un des membres d’équipage dit de Calvin : « Je le hais. Il n’y a pas de méchanceté en lui, mais pour survivre, il doit nous tuer. » La loi du plus fort, du darwinisme de comptoir… qui mettront à rude épreuve les barrières de confinement mises en place à bord de l’ISS, pour le plus grand plaisir du spectateur.</p>
<p>Observer une forme de vie inconnue dans un laboratoire lointain, hors de l’atmosphère terrestre, semble être une idée brillante. Mais dès aujourd’hui et sur Terre, l’humanité pourrait bien se trouver confrontée à des formes de vie inconnues, et cela sans confinement possible.</p>
<h2>Agents pathogènes réactivés</h2>
<p>Depuis de nombreuses années, à cause des dérèglements climatiques, les chercheurs constatent un dégel de la toundra, du permafrost et autres pergélisols, ces terres qui, au-delà des cercles polaires, restent gelées toute au long de l’année. Avec ce dégel, conséquence du réchauffement climatique, ce sont des agents pathogènes qui, enfermés dans ces sols depuis des siècles, voire des millénaires, se trouvent réactivés…</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/166491/original/file-20170424-23807-11qxd4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/166491/original/file-20170424-23807-11qxd4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=815&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/166491/original/file-20170424-23807-11qxd4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=815&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/166491/original/file-20170424-23807-11qxd4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=815&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/166491/original/file-20170424-23807-11qxd4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1024&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/166491/original/file-20170424-23807-11qxd4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1024&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/166491/original/file-20170424-23807-11qxd4p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1024&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Ne craignez pas la mort, mais la vie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.allocine.fr/film/fichefilm-244761/photos/detail/?cmediafile=21394577">Allociné</a></span>
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<p>Ainsi, récemment, à Yamal, une région située au nord-est de Moscou, au-delà du cercle polaire, un <a href="http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1546351-une-epidemie-d-anthrax-decime-des-rennes-en-siberie-le-permafrost-recele-bien-pire.html">enfant est mort de l’anthrax</a> et des dizaines d’autres ont été contaminés par le même bacille de la maladie du charbon apporté par leurs troupeaux qui paissent dans la toundra. L’agent pathogène venait vraisemblablement de la carcasse d’un renne mort de cette maladie et conservé dans la glace depuis le début du XX<sup>e</sup> siècle.</p>
<p>Toujours dans cette région, les épidémiologistes s’attendent même au retour de souches de la variole datant de la fin du XIX<sup>e</sup> siècle. Bien que Yamal soit une péninsule isolée, pour les scientifiques, ces résurgences sont autant de signaux d’alarme dont il faut tenir compte.</p>
<p>Et le dégel ne cesse de croître. Ce sont désormais des terres et autres milieux toujours plus anciens qui sortent de leur hibernation. Bientôt, ce seront des dépouilles de mammouths qui, libérées de leurs gangues de glaces, de leurs capsules temporelles, pourraient bien, à leur tour, libérer dans l’environnement des agents pathogènes vieux de près de 30 000 ans, virus ou bacilles auxquels nos systèmes immunitaires n’ont plus été confrontés depuis trop longtemps.</p>
<p>Dans le cas de ces carcasses de mammouths qui dégèlent avec des voyageurs inconnus et peut-être indésirables, on parle de macrovirus. <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/sante/russie-dans-le-permafrost-virus-et-bacteries-attendent-le-degel_31120">Certains sont déjà étudiés par des équipes de chercheurs russes et françaises.</a> Et, là… pas question de confinement : de la Russie jusqu’au Canada, les terres qui pourraient dégeler au cours des prochaines décennies se comptent en surfaces de dizaines de millions de kilomètres carrés. Au risque épidémiologique, il faut ajouter le risque environnemental, bien que ce dernier ne soit pas au centre de ce propos, avec le danger de voir se produire, dans l’atmosphère, des dégazages massifs de méthane lui aussi stocké dans les terres qui devraient rester gelées…</p>
<p>La seule bonne nouvelle dans la perspective de ce dégel à grande échelle est que plus la forme de vie est de structure complexe, comme les macrovirus trouvés dans les carcasses de mammouth, plus il y a de chance que le gel et le temps aient endommagé cette forme de vie, réduisant le risque épidémiologique pour les formes de vie contemporaines… quoique, avec son étonnante résistance à l’hibernation, le tardigrade – potentiel voyageur interplanétaire – vienne contredire cette apaisante affirmation !</p>
<p>Alors, <em>Life</em> est-il encore un film de science-fiction, un film d’extraterrestres ou bien est-ce la métaphore d’un avenir – épidémiologique – que l’humanité se prépare quand elle refuse de voir et d’entendre les signes d’un danger, les prémices d’une variante des conséquences des dérèglements climatiques qu’elle provoque, prémices collectés et publiés par les chercheurs ? Les capsules, qu’elles soient temporelles ou spatiales, de glace ou d’acier, sont-elles toutes à ouvrir, au risque de faire passer la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Pandore">boîte de Pandore</a> du mythe à la réalité ?</p>
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<hr>
<p><em>Vidéo coproduite par le Huffington Post et Futur Hebdo.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76286/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olivier Parent ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>« Dis-moi quel film tu regardes, je te dirai quel avenir tu te prépares », pourrait tout aussi bien dire le prospectiviste…Olivier Parent, Auditeur de l’IHEST, Institut des hautes études pour la science et la technologie (IHEST)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/733302017-02-21T08:09:40Z2017-02-21T08:09:40ZL’Anthropocène et l’échelle des temps géologiques<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/157549/original/image-20170220-15892-1hq2w21.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C592%2C2196%2C1317&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Globe au paléozoïque. Museum of the Rockies, Bozeman, Montana.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/timevanson/9321607571">Tim Evanson/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La géologie est une discipline dans laquelle le temps joue un rôle fondamental. Il en est une colonne vertébrale. Comme, de plus, il couvre une durée de plus de 4 milliards d’années, il est nécessaire de le découper en tranches. Ces tranches sont plus ou moins épaisses (ères, périodes, époques…) et toutes servent à établir des corrélations entre des terrains parfois éloignés.</p>
<p>Depuis que la vie s’est répandue en abondance sur Terre, il y a 550 millions d’années, les ères, les systèmes et les étages sont distingués sur la base de leur contenu en fossiles, et généralement séparés par une grande crise du monde vivant.</p>
<p>Ainsi l’<a href="http://geologie.mnhn.fr/paleozoique.htm">ère paléozoïque</a> est séparée de l’<a href="http://geologie.mnhn.fr/mesozoique.html">ère mésozoïque</a> par la plus grande crise que le monde vivant ait connu (96 % des espèces sont alors éradiquées) et certains organismes emblématiques disparaissent à jamais telles les trilobites, ou certains groupes du microfossiles comme les Fusulines…</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/157544/original/image-20170220-15931-19lhzus.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/157544/original/image-20170220-15931-19lhzus.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/157544/original/image-20170220-15931-19lhzus.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/157544/original/image-20170220-15931-19lhzus.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/157544/original/image-20170220-15931-19lhzus.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/157544/original/image-20170220-15931-19lhzus.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/157544/original/image-20170220-15931-19lhzus.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Trilobites <em>Selenopeltis buchii</em>, fossiles provenant du Maroc.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Trilobite_Selenopeltis_buchii.jpg">Kevin Walsh/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>L’ère mésozoïque est aussi séparée de l’<a href="http://www.universalis.fr/encyclopedie/cenozoique/">ère cénozoïque</a> par une autre grande crise biologique majeure qui voit la disparition de dinosaures non-aviens, des ammonites… Toutes ces crises du monde vivant sont associées à de profonds bouleversements de l’environnement (variation du niveau des mers de 100 à 200 m, changement du contenu de l’atmosphère en CO<sub>2</sub> et SO<sub>2</sub>, refroidissement ou réchauffement…). Les subdivisions plus fines de l’échelle des temps (étages) sont basées sur des principes identiques, mais généralement de moindre importance.</p>
<h2>Subdivisions</h2>
<p>L’établissement des différentes subdivisions et leur définition répondent donc à des méthodes et normes très précises. Elles sont gérées par des commissions de l’<a href="http://iugs.org/index.php?page=what-is-iugs">IUGS (International Union of Geological Sciences)</a>, dont l’un des objectifs est d’établir des standards afin que la communauté mondiale utilise des mots qui ont la même acception partout.</p>
<p>Les subdivisions de l’échelle des temps géologiques font partie de ces standards. La proposition de chaque nouvelle subdivision est instruite par un groupe de travail, qui la soumet à une sous-commission, puis à une commission et enfin au comité exécutif avant d’être ratifiée et finalement introduite dans l’échelle des temps.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/157548/original/image-20170220-15908-nlkulk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/157548/original/image-20170220-15908-nlkulk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/157548/original/image-20170220-15908-nlkulk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/157548/original/image-20170220-15908-nlkulk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/157548/original/image-20170220-15908-nlkulk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/157548/original/image-20170220-15908-nlkulk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/157548/original/image-20170220-15908-nlkulk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Procédure suivie pour modifier un nom ou un âge ou pour introduire/supprimer une subdivision, à parti d’un groupe de travail.
Pour la question de l’Anthropocène, le chemin devrait être : du Groupe de travail (existant), soumission à la sous-commission du Quaternaire (non effectuée), commission de stratigraphie, etc.</span>
<span class="attribution"><span class="source">IUGS</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>La procédure est longue, et suivie avec la même rigueur que celle utilisée par les États pour modifier une Loi.</p>
<p>Prenons l’exemple du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Quaternaire">Quaternaire</a>. Cette subdivision de l’échelle des temps, proposée en 1829 par Jules Desnoyers, a mis quelques décennies à s’imposer (le géologue britannique Lyell par exemple ne l’a jamais accepté). En 1982, après une décennie de discussion entre spécialistes, la sous-commission du Quaternaire décide de poser officiellement le problème de sa limite inférieure lors d’un congrès à Moscou. En 1995, l’américain William Berggren propose l’abandon du terme. Cela a été effectué en 2004 : il ne figure plus sur l’échelle internationale des temps géologiques du Congrès géologique international à Florence.</p>
<p>Quatre ans plus tard, le sujet est néanmoins repris et le mot Quaternaire est ré-introduit dans l’échelle internationale des temps, mais en tant que système cette fois, non plus en tant qu’ère. Il figure de nouveau sur l’échelle lors du congrès géologique suivant, à Oslo, en 2008. Néanmoins son cas n’est pas encore fixé car alors la limite inférieure reste sujette de débats, et sa limite n’est pas fixée, soit à 2,588 millions d’années, soit à 1,806 millions d’années, selon que l’étage <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9lasien">Gélasien</a> en fasse partie ou non. La décision finale sera prise en 2009 (Gibbard et Head, 2009). Entre 1982 et 2009, 27 ans auront été nécessaires pour que la communauté se mette d’accord sur ce standard international.</p>
<p>Un dossier respectant des critères précis peut donc être présenté à la commission <em>ad hoc</em>. Parmi les critères, certains sont géologiques (continuité sédimentaire, taux de sédimentation, etc.), d’autres sont bio-stratigraphiques (forte modification de la faune pendant une durée importante pour des fossiles abondants et diversifiés…), d’autres encore sont physico-chimiques (isotopiques, magnétiques…). Mais surtout, il faut des critères à la fois globaux et synchrones. Le synchronisme est capital car le repère sert, d’abord, à dater. Nous étudierons cette question dans un deuxième article, à paraître demain.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/73330/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>DE WEVER Patrick est
- membre de la Société Géologique de France,
- Chairman de la International Commission Geohertage de l'International Union of Geological Sciences,
- membre de l'International Commission of Protected Areas de l'UICN,
- Membre du Groupe français de l'UICN pour le Patrimoine mondial etc.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Stan Finney est secrétaire général de l'International Union of Geological Sciences</span></em></p>L’Anthropocène, ou « ère de l’humain » est un concept avancé par certains scientifiques, et devenu très populaire. Pour l’évaluer, passage en revue de la notion d’échelle des temps géologiques.De Wever Patrick, Professeur, géologie, micropaléontologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Stan Finney, Professeur à Long Beach, Université de Californie et président de la Commission Internationale de Stratigraphique, California State University, Long BeachLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/728862017-02-13T21:09:43Z2017-02-13T21:09:43ZAvec « Planet Earth », le documentaire animalier fait sa mue<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/156662/original/image-20170213-18120-epud05.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le cameraman Jonathan Jones en pleine action. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.bbc.co.uk/programmes/p04jjg8r/p04jjfj3">BBC/Planet Earth II</a></span></figcaption></figure><p>Grâce à sa manière inégalée de révéler aux spectateurs des paysages sublimes et des créatures incroyables, la série documentaire <a href="https://www.youtube.com/watch?v=c8aFcHFu8QM"><em>Planet Earth II</em></a> a connu ces derniers mois des records d’audience en Grande-Bretagne. À la caisse des supermarchés ou dans le bus, les discussions allaient bon train sur les chorégraphies des flamants roses ou ces serpents lancés à la poursuite d’un jeune iguane. C’est toute une génération qui découvre avec ces films les merveilles du monde naturel.</p>
<p>La série <a href="http://www.bbc.co.uk/programmes/b006mywy"><em>Planet Earth</em></a> a vu le jour il y a une décennie, soit à la même période que la sortie du film d’Al Gore, <a href="http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=111289.html"><em>Une Vérité qui dérange</em></a>, dont l’objectif était d’éveiller les consciences au problème du réchauffement climatique. Mais en captivant son public avec des histoires sur les espèces en danger et des lieux secrets, David Attenborough a fait avancer la cause environnementale d’une manière tout à fait singulière.</p>
<p>Si le format des 6 nouveaux films de la série diffusés cet hiver outre-Manche reste identique à celui des 11 premiers épisodes de 2006, on perçoit cependant de subtiles différences témoignant d’une évolution dans notre façon de voir le monde sauvage. Et l’on prend conscience dans ce <em>Planet Earth II</em> de tout ce que nous pourrions voir disparaître et de tout ce qui a déjà disparu.</p>
<p>Ceci est particulièrement sensible dans le dernier épisode de la nouvelle série pour lequel les réalisateurs ont posé leurs caméras en ville. Cette description de la vie animale en zones urbaines ne cesse de nous rappeler à quel point les activités humaines impactent le monde sauvage. En suivant ces animaux dans nos rues, ce nouveau récit souligne l’importance de la préservation de la biodiversité sur Terre.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/156665/original/image-20170213-18117-1t21fh2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/156665/original/image-20170213-18117-1t21fh2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/156665/original/image-20170213-18117-1t21fh2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/156665/original/image-20170213-18117-1t21fh2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/156665/original/image-20170213-18117-1t21fh2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/156665/original/image-20170213-18117-1t21fh2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/156665/original/image-20170213-18117-1t21fh2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En Inde, des singes dans la jungle urbaine.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.bbc.co.uk/programmes/p04k83bb/p04k7z70">BBC/Planet Earth II</a></span>
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<h2>Après « Le Jour d’après »</h2>
<p>Il y a dix ans, l’éveil environnemental rencontrait un écho sans précédent. Les documentaires sérieux, comme <em>Une Vérité qui dérange</em>, suivaient de près la sortie de films catastrophe comme <a href="http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=45361.html"><em>Le Jour d’après</em></a>. La demande de contenus sur ces questions de la part des médias était alors à son maximum.</p>
<p>Dix ans plus tard, la même attente semble se manifester à nouveau. Mais la forme a changé, <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1468-2885.2008.00328.x/full">nombre d’études</a> en psychologie et en communication ayant montré que les récits et fictions avaient un effet puissant sur le public, parfois plus puissant que des formes documentaires.</p>
<p>Si <em>Planet Earth</em> est un modèle dans le genre du documentaire animalier, il possède également des caractéristiques relevant de la fiction. Ses paysages nous emmènent loin de la réalité, et c’est ce qui plaît tant à des millions de téléspectateurs. La musique originale de Hans Zimmer, qui a composé pour les longs-métrages <em>Gladiator</em> et <em>The Dark Knight Rises</em> et a été récompensé d’un Oscar, n’y est pas pour rien. Les animaux apparaissent ici comme des superhéros. Et chaque scène comporte des éléments communs aux espèces sauvages et aux humains : l’amour, la vie de famille, l’instinct parental, la lutte pour la survie et la domination.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Rv9hn4IGofM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Mais plutôt que de porter un message anxiogène aux accents apocalyptiques très répandu parmi les documentaires environnementaux, <em>Planet Earth</em> opte pour un récit positif qui, <a href="http://scx.sagepub.com/content/30/3/355.short">selon certains travaux</a>, pourrait conduire les individus à passer à l’action. Si vous vous retrouvez agrippé à votre canapé devant le sort réservé à un iguane ou le destin malheureux d’une antilope, c’est que l’identification avec les personnages de <em>Planet Earth</em> a fonctionné. Et c’est cette identification qui pourra modifier votre vision de l’environnement et des problèmes qui y sont liés.</p>
<h2>Les hommes, ces animaux</h2>
<p>En nous offrant le spectacle d’animaux tentant de s’adapter à un environnement en pleine évolution, <em>Planet Earth</em> nous offre également l’opportunité de réfléchir à la manière dont nous autres, humains, allons devoir aussi nous adapter.</p>
<p>Prenant intelligemment ses distances avec des films comme celui de Leonardo di Caprio, <a href="http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=249802.html"><em>Avant le déluge</em></a>, <em>Planet Earth</em> a fait le choix de ne pas mentionner le terme « changement climatique » ou d’y faire clairement référence, laissant ainsi le spectateur tirer ses propres conclusions à partir du film. Ceci est tout à fait frappant quand la série nous montre des terres détruites par les feux ou des changements météo qui ne manquent pas de nous interroger sur la responsabilité humaine.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/156664/original/image-20170213-18104-17h4kxf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/156664/original/image-20170213-18104-17h4kxf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/156664/original/image-20170213-18104-17h4kxf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/156664/original/image-20170213-18104-17h4kxf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/156664/original/image-20170213-18104-17h4kxf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/156664/original/image-20170213-18104-17h4kxf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/156664/original/image-20170213-18104-17h4kxf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un paresseux nain du Panama se jette à l’eau après avoir entendu le cri d’une femelle.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.bbc.co.uk/programmes/p04dgbn4/p04dgby5">BBC/Planet Earth II</a></span>
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<p>Cette démarche s’incarne tout particulièrement dans le dernier épisode, sur les villes – avec toutes les conséquences qu’une telle situation a sur les espèces animales. Et si les singes se délectent de la vie citadine sur les marchés de Bombay et que les hyènes ont développé des relations tout à fait particulières avec leurs voisins à deux pattes, les petites tortues sont elles très perturbées par la lumière artificielle qui les gêne dans leur avancée vers la mer.</p>
<p>À l’heure où la lutte contre les conséquences des changements climatiques paraît encore hésitante, <em>Planet Earth II</em> nous montre la situation de notre planète telle qu’elle est aujourd’hui, en évitant les discours catastrophistes et l’esthétique apocalyptique. Un choix qui explique certainement le succès de cette série et en fait un des documentaires environnementaux parmi les plus originaux et les plus forts.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/72886/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michela Cortese a précédemment reçu des financements du gouvernement gallois pour des travaux sur la communication visuelle dans le domaine des énergies renouvelables. </span></em></p>La série documentaire qui a conquis des millions de spectateurs en Grande-Bretagne sera diffusée ce mardi soir sur France 2 sous la forme d’un film, « Planète animale ».Michela Cortese, Associate Lecturer, Bangor UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/659982016-10-03T20:00:12Z2016-10-03T20:00:12ZPourquoi les zèbres n’ont pas été domestiqués<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/139647/original/image-20160928-27037-fvhuhc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C16%2C668%2C429&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un cheval à rayures ? Pas vraiment...</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.shutterstock.com/pic-281622710/stock-photo-zebra.html?src=tWar6vP5ZHAoJNCfWRt9gA-1-0">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Les zèbres ressemblent à des chevaux à bien des égards (ou plutôt à des poneys, vu leur taille). Pourtant, les chevaux ont été domestiqués, tandis que les zèbres sont restés sauvages, car il existe des différences fondamentales entre ces deux animaux. Alors, comment les zèbres sont-ils parvenus à éviter le destin de bêtes de somme ou de bêtes de course ? Et qui s’en sort le mieux aujourd’hui, du cheval ou du zèbre ?</p>
<p>Évidemment, les humains ont tenté de monter et de faire galoper les zèbres, à la fois par attrait de la nouveauté et en raison de leurs apparentes similitudes avec les chevaux. Le film de 2005, <a href="http://www.film4.com/reviews/2005/racing-stripes"><em>Racing Stripes</em> (Courses de rayures)</a> raconte ainsi l’histoire d’un jeune zèbre qui veut participer à des courses de chevaux – sauf que les réalisateurs ont dû tourner certaines scènes avec un cheval pour doubler le zèbre (à l’image, c’est la queue qui trahit le cheval).</p>
<h2>Un ancêtre commun</h2>
<p>La crinière et la queue du zèbre ressemblent davantage à celles des ânes, ce qui reflète l’évolution <a href="http://chem.tufts.edu/science/evolution/HorseEvolution.htm">du gène <em>Equus</em></a>. Même si les chevaux, les ânes et les zèbres ont un ancêtre commun, l’<a href="https://www.britannica.com/animal/dawn-horse">Hyracotherium</a>, qui vivait en Europe et en Amérique du Nord il y a 55 millions d’années, les divergences dans leurs gènes montrent que le zèbre et l’âne sont plus proches entre eux que l’âne ou le zèbre ne le sont du cheval.</p>
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<p>Les équidés nord-américains (les équidés désignant la famille des chevaux) <a href="http://www.horsetalk.co.nz/2012/11/29/why-did-horses-die-out-in-north-america/#axzz4KE50zAfX">ont disparu</a> il y a 8 à 10 000 ans de cela. En Europe comme en Asie, l’homme du paléolithique a parcouru les plaines pour chasser sans relâche les troupeaux de chevaux sauvages. Le changement climatique, le boisement et la chasse ont progressivement repoussé les animaux vers les zones semi-désertiques d’Asie centrale.</p>
<p>L’ancêtre sauvage du cheval domestique (<em>Equus ferus</em>) a été apprivoisé pour la première fois à l’ouest de la <a href="http://www.cam.ac.uk/research/news/mystery-of-the-domestication-of-the-horse-solved">steppe eurasienne</a>, zone où l’on a retrouvé les premières traces archéologiques de <a href="http://www.cam.ac.uk/research/news/mystery-of-the-domestication-of-the-horse-solved">sa domestication</a>. Des études récentes montrent également que les chevaux sauvages venaient grossir les rangs des troupeaux de chevaux domestiqués, tandis qu’ils s’éparpillaient dans <a href="http://phys.org/news/2016-05-history-eurasian-wild-horses.html">toute l’Eurasie</a>.</p>
<h2>Chevaux à tout faire</h2>
<p>Les chevaux ont d’abord été domestiqués pour leur viande, mais leur immense potentiel pour le transport, la communication et la guerre en ont rapidement fait des alliés importants du <a href="http://www.equineheritageinstitute.org/shaping-civilizations-the-role-of-the-horse-in-human-societies/">développement de la civilisation</a>. En Mongolie, le <a href="http://www.amnh.org/explore/science-bulletins/bio/documentaries/the-last-wild-horse-the-return-of-takhi-to-mongolia/article-the-horse-in-mongolian-culture">pays du cheval</a>, c’est sur son fier destrier que le légendaire guerrier <a href="http://afe.easia.columbia.edu/mongols/conquests/khans_horses.pdf">Gengis Khan</a> a conquis des terres qui s’étendaient de la Hongrie à la Corée et de la Sibérie au Tibet, au XIII<sup>e</sup> siècle.</p>
<p>Alors, si le cheval a joué un rôle si important dans notre civilisation, pourquoi n’est-ce pas le cas du zèbre ? Les premiers humains sont apparus <a href="http://news.nationalgeographic.com/news/2007/07/070718-african-origin.html">sur le continent africain</a>, il paraît donc étonnant qu’ils n’aient pas cherché à exploiter le potentiel du zèbre, qui vivait dans les parages.</p>
<p>Contrairement aux équidés eurasiens, cependant, la population de zèbres africains était relativement protégée et particulièrement adaptée à son environnement. Tous les équidés sont des herbivores, et en tant que proies, ils ont tous développé une réaction puissante en cas de danger : <a href="http://www.cfsph.iastate.edu/Emergency-Response/Just-in-Time/08-Animal-Behavior-Restraint-Equine-HANDOUT.pdf">ils fuient, ou ils se battent</a>. Afin de survivre dans un environnement peuplé de grands prédateurs tels que le lion, le guépard et la hyène, le zèbre est devenu un animal très vif et très réactif capable de s’enfuir quand il est confronté au danger et qui sait aussi se défendre vigoureusement s’il est capturé.</p>
<h2>Des ruades et des morsures</h2>
<p>La <a href="http://www.bbc.co.uk/newsround/14407260">ruade d’un zèbre</a> peut casser la mâchoire d’un lion. Le zèbre peut aussi infliger des <a href="http://www.nbcwashington.com/news/local/Zebra-Bites-Zookeeper-at-National-Zoo-232342411.html">morsures terribles</a> et possède un <a href="http://mentalfloss.com/article/80999/14-zany-facts-about-zebras">réflexe d’esquive</a> qui empêche quiconque de l’attraper au lasso : autant de puissantes réactions d’évitement qui ont peut-être été favorisées par la familiarité des zèbres avec les chasseurs-cueilleurs.</p>
<p>En somme, le zèbre n’est pas très porté sur l’espèce humaine, et il ne répond pas aux critères requis pour la domestication d’une espèce animale. Selon l’explorateur et savant Francis Galton (un parent de Charles Darwin), ces <a href="http://www.galton.org/essays/1860-1869/galton-1865-domestication-animals.pdf">critères incluent</a> que l’animal ait un certain goût du confort, qu’il soit facile de s’en occuper, qu’il soit utile à l’homme et qu’il en apprécie la compagnie.</p>
<p>Pour Galton, le zèbre est l’exemple type de l’espèce impossible à domestiquer. Il indique que les Boers, en Afrique du Sud, ont essayé plusieurs fois de harnacher des zèbres. Même s’ils y sont parvenus quelquefois, la nature sauvage et têtue de l’animal déjouait la plupart de leurs tentatives.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/137567/original/image-20160913-4980-1502nie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/137567/original/image-20160913-4980-1502nie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/137567/original/image-20160913-4980-1502nie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/137567/original/image-20160913-4980-1502nie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/137567/original/image-20160913-4980-1502nie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/137567/original/image-20160913-4980-1502nie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/137567/original/image-20160913-4980-1502nie.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une mise en garde à prendre au sérieux.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.shutterstock.com/pic-21179662/stock-photo-a-zebra-stallion-shows-his-teeth.html?src=0tyMMW2BsOgISoCak7Dslw-3-29">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Libres mais menacés</h2>
<p>Bien qu’il semble possible de domestiquer un <a href="http://www.dailymail.co.uk/news/article-2763629/Your-eyes-not-deceiving-This-girl-really-riding-think-Prepare-amazed-magic-THE-ZEBRA-WHISPERER.html">zèbre isolé</a>, cette espèce n’est pas une bonne candidate à la domestication. Outre la nature intraitable du zèbre et son puissant instinct de survie, le fait qu’il soit un « aliment pour lion » l’a peut-être rendu moins attrayant aux yeux des premiers humains.</p>
<p>La domestication et l’élevage sélectif ont certainement <a href="http://www.academia.edu/1785218/From_wild_horses_to_domestic_horses_a_European_perspective">transformé</a> les caractéristiques physiques et comportementales du cheval, qui à l’origine était sans doute plus petit, plus sauvage et plus proche du zèbre que le cheval d’aujourd’hui.</p>
<p>Et même si les chevaux travaillent dur, vivent dans des environnements plus urbanisés que les zèbres et font ce que leur propriétaire leur demande, ils vivent en sécurité et jouissent d’un certain confort. En réalité, la domestication les a sauvés de l’extinction. En tant que stratégie de survie, la domestication a même très bien marché pour la population de chevaux, qui atteint désormais 60 millions d’individus.</p>
<p>De leur côté, les zèbres sont aujourd’hui moins de 800 000, les humains étant la plus grande menace pour leur survie. La liberté leur a coûté cher.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/65998/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Carol Hall ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ils ressemblent étrangement à des chevaux à rayures, alors pourquoi les zèbres ne se sont-ils pas laissé domestiquer ?Carol Hall, Reader in Equitation Science, Nottingham Trent UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/611882016-07-06T04:35:05Z2016-07-06T04:35:05ZDe mystérieuses créatures en forme de champignons peuplent les fonds marins<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/129381/original/image-20160705-814-1e2gg53.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dendrogramma.</span> <span class="attribution"><span class="source">Hugh McIntosh/Museum Victoria</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span></figcaption></figure><p>Les scientifiques annoncent rarement qu’ils ont découvert une espèce animale totalement inconnue, qui n’appartient à aucun des principaux groupes : crustacés, insectes, vers, méduses, éponges, vertébrés (auxquels nous appartenons), etc.</p>
<p>La présence d’étranges <a href="http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0102976">organismes en forme de champignon</a> dans les fonds marins du sud-est australien, à un un kilomètre sous la surface de la mer, a donc <a href="http://www.esf.edu/top10/2015/04.htm">fait sensation</a> en 2014.</p>
<p>Ces animaux, baptisés <em>Dendrogramma</em>, étaient particulièrement bizarres. Avec leur queue et leur chapeau gélatineux, ils évoquaient un champignon. La queue abritait un canal dont les ramifications rayonnaient sur le chapeau et dont la base présentait une ouverture semblable à celle d’une bouche. Ils ne présentaient ni appendices ni cellules spécialisées qui révèle leur relation de parenté avec d’autres animaux.</p>
<p>Encore plus intrigant, ces créatures offraient une certaine ressemblance avec des <a href="http://www.ucmp.berkeley.edu/vendian/ediacaran.php">fossiles vieux de 560 millions d’années</a> découverts à Terre-Neuve, en Russie et en Namibie, ainsi que dans la chaîne des Flinders Ranges, au sud de l’Australie.</p>
<p>Les premiers organismes pluricellulaires datent de cette période, bien avant que les animaux et les plantes adoptent les formes et les fonctions qu’on leur connaît aujourd’hui. Il serait stupéfiant que ces étranges créatures aient survécu en Australie pendant des centaines de millions d’années !</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/124433/original/image-20160530-900-5trfzs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/124433/original/image-20160530-900-5trfzs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/124433/original/image-20160530-900-5trfzs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/124433/original/image-20160530-900-5trfzs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/124433/original/image-20160530-900-5trfzs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=423&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/124433/original/image-20160530-900-5trfzs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/124433/original/image-20160530-900-5trfzs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/124433/original/image-20160530-900-5trfzs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=532&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Des fossiles âgés de 560 millions d’années ressemblant aux Dendrogramma.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>En l’absence de données génétiques, il manquait à cette histoire un élément de preuve essentiel.</p>
<p>L’ADN, capable de mettre à jour des relations insoupçonnées entre des organismes ou des plantes, est en effet devenu aussi indispensable à la biologie moderne qu’à la médecine et aux enquêtes policières.</p>
<p>Les yeux, par exemple, ont subi de multiples évolutions et n’indiquent pas obligatoirement une ascendance commune. Mais les échantillons de <em>Dendrogramma</em>, collectés en 1986, ont été conservés dans du formol, qui dégrade l’ADN. Il a donc fallu commencer par trouver de nouveaux exemplaires.</p>
<h2>Une découverte en eaux profondes</h2>
<p>Les choses en sont restées là jusqu’en novembre 2015, date à laquelle Hugh Macintosh, du Museum Victoria, a décelé la silhouette familière du champignon, à 2 800 mètres de fond, dans la Great Australian Bight.</p>
<p>Embarqué sur le <a href="http://mnf.csiro.au/Vessel.aspx"><em>RV Investigator</em></a>, le nouveau navire de recherche australien, il participait à un <a href="http://www.csiro.au/en/Research/EF/Areas/Oil-gas-and-fuels/Offshore-oil-and-gas/GAB-Deepwater">programme scientifique mené par le CSIRO</a> pour étudier le milieu marin au sud de l’Australie.</p>
<p>Hugh nous a aussitôt envoyé un e-mail : « Devinez ce que j’ai trouvé ! »</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/124418/original/image-20160530-859-1jnkh6e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/124418/original/image-20160530-859-1jnkh6e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/124418/original/image-20160530-859-1jnkh6e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/124418/original/image-20160530-859-1jnkh6e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/124418/original/image-20160530-859-1jnkh6e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/124418/original/image-20160530-859-1jnkh6e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/124418/original/image-20160530-859-1jnkh6e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/124418/original/image-20160530-859-1jnkh6e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le nouveau navire de recherche australien, le RV Investigator.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Tim O’Hara/Museum, Victoria</span></span>
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</figure>
<p>La science étant bien souvent affaire de patience, nous avons dû attendre la fin du voyage du RV Investigator, l’arrivée des échantillons, le passage par divers laboratoires pour prélever et séquencer l’ADN, puis la publication de ses travaux.</p>
<p>Nous ne nous sommes pas tourné les pouces pour autant. Notre spécialiste de l’évolution, Andrew Hugall, a téléchargé les génomes de dizaines d’animaux et mis en place un système capable de cataloguer les séquences ADN, depuis le protozoaire monocellulaire jusqu’à la baleine.</p>
<p>Puis ce fut de nouveau l’attente. Les vacances de Noël n’ont rien arrangé. Chacun de nous a même parié sur la place qu’allait occuper le <em>Dendrogramma</em> dans l’arbre phylogénétique. (J’ai perdu.)</p>
<p>Enfin, un mardi après-midi de janvier, à 16h30, les résultats ADN sont tombés. L’ordinateur d’Andrew les a moulinés et, quatre heures plus tard, nous avions une réponse. Le <em>Dendrogramma</em> était une sorte de siphonophore.</p>
<h2>Le quoi ?</h2>
<p>Un siphono-quoi ? Telle a été notre réaction, à peu de choses près. Car, même pour des biologistes marins, les siphonophores sont des créatures aussi étranges que rares.</p>
<p>Ce sont des cnidaires de la famille des méduses, des coraux et des anémones. Dotés de polypes, comme les coraux, ils ont les mêmes tentacules urticants que les méduses et peuvent se déplacer.</p>
<p>Certains polypes fonctionnent comme des unités de propulsion, d’autres servent à la nutrition ou à la reproduction. Ils possèdent parfois des appendices défensifs aplatis, les bractées.</p>
<p>Ils peuvent aussi avoir une forme de champignon ! <a href="http://dx.doi.org/10.1016/j.cub.2016.04.051">Il a été démontré</a> que les échantillons de <em>Dendrogramma</em> ne sont pas des animaux entiers, mais des bractées de siphonophores, c’est-à-dire des morceaux d’une créature plus importante.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/124424/original/image-20160530-879-xwubor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/124424/original/image-20160530-879-xwubor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/124424/original/image-20160530-879-xwubor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/124424/original/image-20160530-879-xwubor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/124424/original/image-20160530-879-xwubor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/124424/original/image-20160530-879-xwubor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/124424/original/image-20160530-879-xwubor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/124424/original/image-20160530-879-xwubor.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Un siphonophore benthique, agrippé à l’aide de ses tentacules au rebord d’un canyon sous-marin dans le Golfe du Mexique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Okeanos Explorer/NOAA</span></span>
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</figure>
<h2>D’un mystère à l’autre</h2>
<p><a href="http://www.deepseanews.com/2014/09/the-tale-of-a-new-phylum-that-really-wasnt/">Certains critiques</a> ont reproché aux auteurs d’avoir publié leurs travaux sans les données ADN.</p>
<p>Je ne partage pas entièrement ce point de vue : j’estime qu’il est indispensable d’émettre des idées et des hypothèses, qui pourront être confrontées aux avancées de la science. Nous ne nous serions même pas mis en quête des <em>Dendrogramma</em> si nous n’avions pas été alertés.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/124426/original/image-20160530-869-1qeqds3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/124426/original/image-20160530-869-1qeqds3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/124426/original/image-20160530-869-1qeqds3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=849&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/124426/original/image-20160530-869-1qeqds3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=849&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/124426/original/image-20160530-869-1qeqds3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=849&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/124426/original/image-20160530-869-1qeqds3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1066&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/124426/original/image-20160530-869-1qeqds3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1066&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/124426/original/image-20160530-869-1qeqds3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1066&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les preuves génétiques indiquent que les champignons Dendrogramma ne sont pas des animaux entiers, mais les morceaux d’un siphonophore. L’apparence de l’animal entier reste un mystère.</span>
<span class="attribution"><span class="source">David Paul and Rebecca McCauley/Museum Victoria</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Certes, nous avons été déçus d’apprendre que le <em>Dendrogramma</em> n’était pas une espèce inédite. Mais nos recherches sont importantes. Une évolution indépendante sur plusieurs centaines de millions d’années aurait pu générer toutes sortes de nouveautés biochimiques, depuis les antibiotiques jusqu’aux médicaments contre le cancer.</p>
<p>Seule une part du mystère a été résolue. Nous savons à quoi ressemblent ses bractées, mais pas l’animal dans son ensemble.</p>
<p>Il existe une multitude de formes et de tailles de siphonophores.</p>
<p>Les grands fonds sont particulièrement vastes. Il a fallu des dizaines d’années pour obtenir des <a href="https://www.youtube.com/watch?v=3nZur1hfT78">vidéos du calmar géant</a>. Peut-être s’en écoulera-t-il autant avant que l’on puisse admirer le <em>Dendrogramma</em> dans toute sa splendeur.</p>
<p><em>Traduit de l’anglais par Catherine Biros pour <a href="http://www.fastforword.fr">Fast for Word</a></em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/61188/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tim O'Hara a reçu des financements de Marine Biodiversity Hub, à travers le National Environmental Research Program (NERP), et géré par the Australian Government’s Department of the Environment.</span></em></p>D’étranges organismes au chapeau gélatineux ont été découverts dans des fonds marins au large de l’Australie. Les scientifiques ont mené l’enquête. Surprise, surprise !Tim O'Hara, Senior Curator of Marine Invertebrates, Museums Victoria Research InstituteLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/597572016-06-10T04:49:47Z2016-06-10T04:49:47ZSept destinations pour découvrir l’Afrique grandeur nature<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/123596/original/image-20160523-11004-13f87u3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le parc national du Simien en Éthiopie.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Si je vous dis « Afrique », vous me répondrez certainement « aventure, danger », peut-être même « romantisme ». Rien de plus logique après tout, le continent possède nombre d’endroits à l’époustouflante beauté. La diversité des sites à explorer, des dunes du Sahara aux vastes forêts du Congo, fait de l’Afrique l’une des destinations les plus riches en culture et en paysages. Pour les amoureux de la nature, voici sept destinations particulièrement « vertes ».</p>
<h2>1. Le Mont Nimba</h2>
<p>Le <a href="http://whc.unesco.org/en/list/155">Mont Nimba</a> se situe entre la <a href="https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/gv.html">Guinée</a>, le <a href="https://www.cia.gov/library/publications/resources/the-world-factbook/geos/li.html">Liberia</a> et la <a href="https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/iv.html">Côte d’Ivoire</a> ; les reliefs de sa <a href="http://www.eoearth.org/view/article/154709/">réserve naturelle</a> sont couverts de forêts denses. La faune et flore, extrêmement variées, comptent certaines espèces menacées comme
le <a href="http://www.arkive.org/african-viviparous-toad/nectophrynoides-poyntoni/">crapaud Nimbaphrynoide</a> ou ces chimpanzés très habiles qui se servent des pierres comme autant d’<a href="http://www.onekind.org/education/animal_sentience/tool_use/tool_use_in_chimpanzees">outils</a>.</p>
<p>C’est certainement ici que l’on trouve les plus belles plantes du continent africain. Dans la zone du <a href="http://global.britannica.com/place/Gulf-of-Guinea">golfe de Guinée</a>, le site tient du refuge écologique exceptionnel. Y accéder se mérite : les contrôles y sont très stricts et les visites ne sont possibles qu’en groupes organisés et autorisés.</p>
<h2>2. La rivière Sangha</h2>
<p>La <a href="http://whc.unesco.org/en/list/1380">Sangha</a> coule au nord-ouest du <a href="http://www.worldwildlife.org/places/congo-basin">bassin du Congo</a> où le <a href="http://www.lonelyplanet.com/cameroon">Cameroun</a>, la <a href="http://www.lonelyplanet.com/search?q=Central+African+Republic">République Centrafricaine</a> et le <a href="http://www.lonelyplanet.com/search?q=congo">Congo</a> se rejoignent.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/105801/original/image-20151214-9511-1vl00k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/105801/original/image-20151214-9511-1vl00k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/105801/original/image-20151214-9511-1vl00k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=328&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/105801/original/image-20151214-9511-1vl00k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=328&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/105801/original/image-20151214-9511-1vl00k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=328&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/105801/original/image-20151214-9511-1vl00k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=412&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/105801/original/image-20151214-9511-1vl00k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=412&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/105801/original/image-20151214-9511-1vl00k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=412&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La rivière Sangha, à la frontière entre Cameroun, Centrafrique et République démocratique du Congo.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Une grande partie du ce site, niché dans un écosystème tropical et humide, est vierge de toute activité humaine : on y trouve des crocodiles du Nil et des poissons-tigre géants. La Sangha accueille aussi des éléphants, des
<a href="http://animals.nationalgeographic.com/animals/mammals/lowland-gorilla/">gorilles</a> et des chimpanzés.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/105802/original/image-20151214-9515-1yo59kc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/105802/original/image-20151214-9515-1yo59kc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/105802/original/image-20151214-9515-1yo59kc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/105802/original/image-20151214-9515-1yo59kc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/105802/original/image-20151214-9515-1yo59kc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/105802/original/image-20151214-9515-1yo59kc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/105802/original/image-20151214-9515-1yo59kc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/105802/original/image-20151214-9515-1yo59kc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Un gorille de la Sangha.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>3. Cap-Vert</h2>
<p>Le <a href="http://mynatour.org/destination/ecotourism-cape-verde">Cap-Vert</a> (ou République du Cabo Verde) compose un archipel situé au large de l’Afrique de l’Ouest, bien connu pour ses plages idylliques et souvent désertes. Mais pas seulement. Ses paysages où alternent volcans, forêts épaisses et des plaines arides sont à couper le souffle. Une diversité idéale pour les amateurs de sensations fortes ou, tout simplement, les amoureux de la nature. Sans oublier ses célèbres tortues de mer.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/105794/original/image-20151214-9494-1eo9u29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/105794/original/image-20151214-9494-1eo9u29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/105794/original/image-20151214-9494-1eo9u29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/105794/original/image-20151214-9494-1eo9u29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/105794/original/image-20151214-9494-1eo9u29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/105794/original/image-20151214-9494-1eo9u29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/105794/original/image-20151214-9494-1eo9u29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/105794/original/image-20151214-9494-1eo9u29.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Sur l’île de Boa Vista… le paradis est définitivement vert et bleu.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Reuters</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Sur l’île de <a href="http://www.capeverde.com/islands/boa-vista.html">Boa Vista</a>, l’endroit le plus vert du Cap-Vert , l’écotourisme s’est enraciné : ici, les visiteurs sont encouragés à utiliser eau et électricité avec parcimonie et à oublier télévision et air conditionné…</p>
<h2>4. La Gambie</h2>
<p>Plus petit pays du continent, la <a href="https://www.cia.gov/library/publications/the-world-factbook/geos/ga.html">Gambie</a>, voisine du Sénégal, possède une étroite façade sur la côte atlantique. Le pays est connu pour son écosystème varié, dont la rivière <a href="http://www.accessgambia.com/information/gambia-river-info.html">Gambie</a> constitue le principal foyer. La vie sauvage du <a href="http://www.thegambiawildlife.com/protected-areas/kiang-west-national-park/index.html">parc Kiang West National</a> et de la <a href="http://www.thegambiawildlife.com/protected-areas/bao-bolong-wetlands--reserve/index.html">Réserve Bao Bolong</a> abrite singes, hippopotames et oiseaux rares.</p>
<p>Le pays est à l’origine du plus ancien projet de réimplantation de singes du continent. Lancé en 1979, il accueille aujourd’hui plus d’une centaine d’animaux. Si les chimpanzés sauvages ont disparu du pays au début du XX<sup>e</sup> siècle, quatre groupes de spécimens cohabitent actuellement sur les <a href="http://www.lonelyplanet.com/the-gambia/upper-gambia-river/river-gambia-national-park">îles Baboon</a>, site principal du projet de conservation. La Gambie est également un acteur majeur en matière d’écotourisme, comme en témoigne la lodge <a href="http://www.accessgambia.com/information/makasutu-cultural-forest.html">Makasutu</a>, internationalement reconnue.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/105807/original/image-20151214-9523-1ehdakf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/105807/original/image-20151214-9523-1ehdakf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/105807/original/image-20151214-9523-1ehdakf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/105807/original/image-20151214-9523-1ehdakf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/105807/original/image-20151214-9523-1ehdakf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/105807/original/image-20151214-9523-1ehdakf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/105807/original/image-20151214-9523-1ehdakf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/105807/original/image-20151214-9523-1ehdakf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Dans la réserve Makasutu, en Gambie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<h2>5. La réserve géante du Niger</h2>
<p>Figurant parmi les pays les plus pauvres du monde, le <a href="http://www.bbc.com/news/world-africa-13943662">Niger</a> héberge, et c’est moins connu, l’une des plus grandes surfaces protégées d’Afrique, dont les réserves naturelles de l’<a href="http://whc.unesco.org/en/list/573">Aïr et du Ténéré</a>. Cette zone, véritable sanctuaire, ne représente que le sixième de la surface préservée. C’est ici que l’on peut admirer les roches volcaniques de l’<a href="http://www.lonelyplanet.com/niger/northern-niger/air-mountains-and-tenere-desert">Aïr</a> dans le désert saharien du <a href="https://fr.Wikim%C3%A9dia.org/wiki/T%C3%A9n%C3%A9r%C3%A9">Ténéré</a>. La variété des paysages, des plantes et d’animaux semble ici infinie.</p>
<p>Dernier bastion de vie sauvage de la région du <a href="https://www.oecd.org/fr/csao/publications/un-atlas-du-sahara-sahel-9789264222335-fr.htm">Sahara-Sahel</a>, la situation isolée de la réserve naturelle de l’Aïr et du Ténéré contribue à la survie de nombreuses espèces. Le paysage, merveilleusement désertique, se compose de dunes, de déserts de graviers, de vallées parsemées de falaises, de canyons et de plateaux…</p>
<h2>6. Les forêts tropicales de la Salonga</h2>
<p>Le <a href="http://whc.unesco.org/en/list/280">parc national de la Salonga</a> constitue la plus grande réserve tropicale d’Afrique. Situé au cœur du bassin central de la rivière Congo, le site n’est accessible que par voie d’eau. Dans cette forêt, hommes et animaux cohabitent.</p>
<p>Le parc joue un rôle essentiel dans la régulation du climat et la captation du C02. On y trouve de nombreuses espèces menacées comme le <a href="http://www.animalfactguide.com/animal-facts/bonobo/">chimpanzé pigmé</a>, l’<a href="http://www.nature.org/newsfeatures/specialfeatures/animals/mammals/african-bush-elephant.xml">éléphant du bush</a> ou le <a href="http://www.birdlife.org/datazone/speciesfactsheet.php?id=284">paon du Congo</a>.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/105809/original/image-20151214-9534-vollqw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/105809/original/image-20151214-9534-vollqw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/105809/original/image-20151214-9534-vollqw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/105809/original/image-20151214-9534-vollqw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/105809/original/image-20151214-9534-vollqw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/105809/original/image-20151214-9534-vollqw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/105809/original/image-20151214-9534-vollqw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/105809/original/image-20151214-9534-vollqw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le paon du Congo fait la roue dans le parc national de la Salonga.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<h2>7. Parc national du Simien en Éthiopie</h2>
<p>Le <a href="http://whc.unesco.org/en/list/9">Parc national du Simien</a>, dans le nord de l’<a href="http://www.lonelyplanet.com/ethiopia">Éthiopie</a>, est tout simplement spectaculaire. Des millions d’années d’érosion ont créé ici des montagnes, des vallées et des précipices qui peuvent atteindre les 1 500 mètres de hauteur.</p>
<p>C’est un refuge pour nombre d’espèces menacées, comme le célèbre
<a href="http://www.arkive.org/walia-ibex/capra-walie/">bouquetin d’Abyssinie</a>, espèce endémique, le <a href="http://animals.nationalgeographic.com/animals/mammals/gelada/">gélada</a> ou encore le <a href="http://www.arkive.org/ethiopian-wolf/canis-simensis/">loup d’Éthiopie</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/105810/original/image-20151214-9540-enhpa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/105810/original/image-20151214-9540-enhpa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/105810/original/image-20151214-9540-enhpa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/105810/original/image-20151214-9540-enhpa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/105810/original/image-20151214-9540-enhpa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/105810/original/image-20151214-9540-enhpa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/105810/original/image-20151214-9540-enhpa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/105810/original/image-20151214-9540-enhpa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le loup d’Éthiopie, menacé, évolue dans le parc national du Simien.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le parc prend place dans le paysage des <a href="http://www.simienmountains.org/">Monts Simien</a>, où se dresse le <a href="http://www.mountain-forecast.com/peaks/Ras-Dashen">Ras Dashan</a>, point culminant du pays avec ses 4 550 mètres d’altitude. Les exceptionnels plateaux en forme de vague des monts Simiens n’ont rien à envier aux grands canyons du Colorado.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/59757/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Martinette Kruger travaille comme chercheuse au Tourism Research Entity, TREES (Tourism Research in Economic Environs and Society) de la North-West University. Elle a reçu des financements du National Research Foundation (NRF).
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Armand travaille au Tourism Research Entity, TREES (Tourism, Research in Economic Environs and Society) de la North-West University. Il a reçu des fonds du National Research Foundation (NRF).</span></em></p>Guinée, Cameroun, Cap-Vert, Gambie, Niger, RDC, Éthiopie… Une promenade sauvage sur le continent africain en sept étapes.Martinette Kruger, Professor of Tourism, North-West UniversityArmand Viljoen, PhD Candidate in Tourism Management, North-West UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/600722016-05-27T04:45:19Z2016-05-27T04:45:19Z#Webdothon : plongée dans la biodiversité francilienne en cinq webdocs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/124141/original/image-20160526-22080-12k0yxt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">« Touche pas à ma prairie », l’heureux gagnant du Webdothon 2015. </span> </figcaption></figure><p>En décembre dernier, l’université de recherche Paris Sciences et Lettres <a href="https://www.univ-psl.fr/fr">(PSL)</a> lançait une expérience innovante, mêlant journalisme, enquête et gestion de projet. Son principe : réunir sur une courte durée cinq équipes transdisciplinaires composées d’étudiants de PSL – de l’IPJ Dauphine, de l’Isige Mines-Paritech et de l’EHESS – pour que chaque groupe réalise un webdocumentaire sur le thème de la <a href="https://theconversation.com/extinctions-de-masse-comment-la-vie-rebondit-48271">« sixième extinction »</a> en Île-de-France.</p>
<p>Ont ainsi été conçus, dans les conditions réelles d’une production éditoriale, cinq petits objets multimédia (POM) à l’aide de <a href="https://racontr.com/fr/">RacontR</a>, un outil de création pour élaborer des « webdocs » : <em>La bioversité au coin de ma rue</em>, <em>Pas de quartier pour les pesticides</em>, <em>Les moineaux, mignons et menacés</em>, <em>Les écrevisses attaquent</em>, <em>Touche pas à ma prairie !</em>.</p>
<p>Évalués en deux temps par un jury auquel la rédaction de The Conversation a participé, deux projets – <em>Touche pas à ma prairie</em> et <em>Les moineaux, mignons et menacés</em> – ont été distingués et récompensés ce mercredi 25 mai.</p>
<h2>Danger dans les prés</h2>
<p>Aux manettes du webdoc gagnant, on retrouve Yasmina Cardoze, Laure Couteau, Romain Gras, Émilie Guimart, Robin Gremmel, Olivier Liffran et Alban Méry de Montigny. Félicité pour sa rigueur scientifique, <em>Touche pas à ma prairie</em>, part de ce constat simple et méconnu : 44 % des espèces menacées d’Île-de-France vivent dans les prairies, des écosystèmes fragilisés par l’avancée des arbres et des terres cultivées. Voici le résultat de leur enquête conduite tambours battants dans les herbes franciliennes :</p>
<iframe src="https://r7d0e27627.racontr.com" width="100%" height="425" frameborder="0" onmousewheel="" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<p><br></p>
<h2>Des moineaux et des hommes</h2>
<p>Le second webdoc distingué par le jury du Webdothon 2015 va à travers villes et à travers champs sur deux petites pattes… Pauline Blanchard, Anaïs Cherif, Céline Eson, Gaëtan Hallier, Coralie Neyrand, Alexis Patri ont en effet suivi à la trace les moineaux qui se font de plus en plus rares en Île-de-France. Découvrez leur réalisation qui donne avec beaucoup d’humour de vraies solutions pour faire revenir les jolis piafs :</p>
<iframe src="https://rcb9727675.racontr.com" width="100%" height="425" frameborder="0" onmousewheel="" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<p><br></p>
<p>Pour découvrir les autres webdocs qui ont pris part à la compétition, rendez-vous sur <a href="http://www.webdothon.com/">www.webdothon.com</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/60072/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Retour sur une initiative originale lancée fin 2015 qui associe des étudiants de différents cursus universitaires autour de la création de webdocumentaires.Jennifer Gallé, Cheffe de rubrique Environnement + Énergie, The Conversation FranceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/530762016-01-13T05:36:14Z2016-01-13T05:36:14ZOn a retrouvé les tortues géantes disparues des Galapagos<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/107957/original/image-20160112-6977-jmqx4u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’une des vénérables habitantes des pentes du mont Wolf sur l'île Isabela. </span> <span class="attribution"><span class="source">Luciano Beheregaray</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Au large des côtes équatoriennes, les îles Galapagos sont mondialement connues pour avoir inspiré à Darwin sa <a href="https://theconversation.com/explainer-theory-of-evolution-2276">théorie de l’évolution</a>. Elles abritent une flore et une faune d’une richesse exceptionnelle, à l’image de ces tortues géantes, considérées comme les plus grands animaux terrestres à sang froid. </p>
<p>Les tortues géantes ont longtemps prospéré dans cet archipel de l’océan Pacifique. Il en existait une quinzaine d’espèces évoluant au gré de <a href="http://www.pnas.org/content/101/17/6514.full">la formation volcanique</a> des îles. À la suite de l’arrivée des premiers hommes, quatre espèces disparurent. </p>
<p>Nous sommes rentrés il y a quelques semaines d’une expédition aux Galapagos dont l’objectif était de retrouver deux de ces espèces disparues. Cela peut paraître un peu fou, mais nous sommes arrivés à nos fins. Voici comment. </p>
<figure>
<iframe src="https://www.google.com/maps/d/u/0/embed?mid=zXUWIAKxCpHk.kJdpTkVYSjfk" width="100%" height="480"></iframe>
<figcaption>The Galápagos Islands, showing locations mentioned in this story.</figcaption>
</figure>
<h2>Menace sur les tortues</h2>
<p>L’archipel a été colonisé à la fin du XIX<sup>e</sup> siècle avec nombre de conséquences néfastes pour les tortues : braconnage des baleiniers et pirates, introduction de nuisibles privant les tortues de nourriture, mangeant leurs œufs ou leurs petits. Ces dernières ont ainsi disparu de certaines îles et vu leur population se réduire dramatiquement dans d’autres zones insulaires. </p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/107482/original/image-20160107-14966-93jac6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/107482/original/image-20160107-14966-93jac6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/107482/original/image-20160107-14966-93jac6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/107482/original/image-20160107-14966-93jac6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/107482/original/image-20160107-14966-93jac6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/107482/original/image-20160107-14966-93jac6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/107482/original/image-20160107-14966-93jac6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/107482/original/image-20160107-14966-93jac6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Lonesome George, immortalisé à 100 ans, peu avant son trépas.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/putneymark/1351695967/in/photolist-34rN7T-5bSaiw-9tj9ht-9tj94z-ddSFnF-5ZkkAG-5ZEWRd-6uBcng-2VoC8b-fSktL5-7qthop-5ZAK66-2VjeSp-frYxAd-oRuePR-6bwgpi-amMf7L-5ZEXzy-4z5wrn-4z9Kkf-4z9NVY-4z5AY2-4z9Q9d-4z9SCb-4z9LEf-4z5BRP-4z5uFp-4z5Bhr-4z5wVp-4z9LTQ-5ZEXjG-7pBkcK-djLaSB-nqnCJ-94aMU7-5Y6B6q-9tn6A7-au9qVd-au6Ljz-5Y2kq8-amQy7m-cm7hp3-cYsUQW-4z5uUX-4z5yTe-4z9TEf-4z9PtS-4z5vv8-4z9R97-4z9Pzq">Flickr/putneymark</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Darwin consacra, lors de sa visite de 1835 sur l’archipel, des pages à la reproduction d’une espèce de tortue, la <a href="http://www.iucnredlist.org/details/9023/0"><em>Chelonoidis elephantopus</em></a>, que l’on ne trouvait alors que sur l’île Floreana et qui disparut vers 1850. </p>
<p>Une autre espèce, qui se rencontrait seulement sur l’île Pinta, la <a href="http://www.iucnredlist.org/sotdfiles/chelonoidis-(nigra)-abingdonii.pdf"><em>Chelonoidis abingdoni</em></a>, s’éteignit pour sa part en 2012, lorsque son dernier représentant, un mâle retenu en captivité et répondant au surnom de <a href="http://www.bbc.com/news/world-18574279">Lonesome George</a> mourut. Il était devenu une véritable star et fut un temps considéré comme l’une des créatures vivantes <a href="http://www.guinnessworldrecords.com/world-records/most-endangered-animal/">les plus rares</a> au monde. </p>
<h2>Sur la trace des espèces disparues</h2>
<p>Il y a dix ans, <a href="http://mscg.yale.edu/">notre programme de recherche</a> en génétique fit une découverte des plus étonnantes. Certaines tortues du mont Wolf, un volcan de l’île Isabela, ne correspondaient pas à celles (<em>Chelonoidis becki</em>) que l’on trouve habituellement dans cette zone. Au lieu de cela, leur ADN correspondait à celui des espèces disparues de <a href="http://www.pnas.org/content/early/2008/09/19/0805340105.abstract">Floreana</a> et <a href="http://www.nature.com/news/2007/070430/full/news070430-1.html">Pinta</a> </p>
<p>Cette trouvaille donna lieu, en 2008, à une expédition sur le mont Wolf, où nous avons procédé au marquage et à l’échantillonnage de 1 600 tortues. Les analyses révélèrent un nombre très importants de tortues à l’ADN hybride : 17 possédaient des traces de l’ADN de la tortue de l’île Pinta, <em>Chelonoidis abingdoni</em> ; 89 autres présentaient des traces de l’ADN de la tortue de l’île Floreana, <em>Chelonoidis elephantopus</em>. </p>
<p>Comment cela était-il possible ? </p>
<p>Il semblait fort probable que des gens aient déplacé ces tortues d’une île à l’autre. De vieux carnets de bord de l’industrie baleinière rapportaient que pour alléger leurs navires, baleiniers et pirates se délestaient, dans la baie de Banks à proximité du mont Wolf, de tortues qu’ils avaient capturées. </p>
<p>Ces animaux, récupérés sur les îles moins montagneuses de Floreana et de Pinta, furent durant des siècles les proies des baleiniers et pirates qui avaient l’habitude de faire une halte dans l’archipel pour renouveler <a href="https://www.newscientist.com/article/mg19426071-300-galapagos-tortoises-untangling-the-evolutionary-threads/">leurs provisions de nourriture</a> en prévision de leurs longues traversées. </p>
<p>Nombre de ces tortues rejetées en mer atteignirent le rivage, se mélangeant aux espèces endémiques de l’île Isabela. Elles donnèrent ainsi naissance à une lignée hybride qui conservait les caractéristiques distinctives des espèces de Floreana et de Pinta. </p>
<figure class="align-center zoomable">
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<span class="caption">Le mont Wolf, point culminant des Galapagos.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Luciano Beheregaray</span></span>
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<h2>Une expédition difficile</h2>
<p>Notre dernière expédition avait pour objectif d’identifier les animaux dont les ancêtres venaient de Floreana ou de Pinta. C’était un objectif ambitieux et compliqué sur le plan logistique. </p>
<p>Notre équipe – composée de gardes du parc national des Galapagos, de scientifiques et de vétérinaires originaires de 10 pays différents – fut répartie en 9 groupes de 3 à 4 personnes. Chaque groupe devait inspecter de vastes champs de lave instables et inhospitaliers ainsi qu’une végétation épineuse sur les pentes du mont Wolf. Sans oublier les rencontres impromptues avec les guêpes, l’étouffante chaleur équatoriale, et une période de pluie non-stop six jours durant. </p>
<p>Lorsque nous trouvions l’une des tortues recherchées, nous contactions notre vaisseau ravitailleur par radio et dégagions la végétation des pentes du volcan pour faire de la place au filet de cargaison transporté par hélicoptère. La précieuse tortue était alors installée dans le filet, puis transportée à bord de notre navire ancré dans la baie de Banks.</p>
<p>Notre équipe découvrit ainsi plus de 1 300 tortues, dont près de 200 possédaient des ancêtres à la fois de Floreana et de Pinta. Nous en avons transportées 32 par les airs jusqu’à notre navire pour rejoindre ensuite la zone d’élevage en captivité du parc national de Galapagos. </p>
<figure class="align-right ">
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<span class="caption">Une tortue géante dont les ancêtres appartenaient aux deux espèces disparues prend son envol pour rejoindre le vaisseau ravitailleur.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Elizabeth Hunter</span></span>
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<p>Parmi ces 32 sujets, 4 femelles présentaient des gènes de Floreana ; un mâle et une femelle possédant ceux de Pinta furent marqués et étudiés. </p>
<h2>Réintroduire les espèces</h2>
<p>L’ADN des ces tortues va être analysé et servira à établir la meilleure stratégie de reproduction : nous souhaitons réintroduire autant que possible les gènes présents à l’origine sur Floreana et Pinta. La progéniture née en captivité et descendant des deux espèces disparues devrait rejoindre ses îles d’origine d’ici 5 à 10 ans. </p>
<p>La réintroduction de ces tortues dans leurs îles d’origine ainsi que la restauration de leur habitat sont en effet essentielles pour la <a href="http://www.galapagos.org/conservation/conservation/project-areas/ecosystem-restoration/tortoise-restoration/">préservation des écosystèmes insulaires</a>. Ces grands herbivores à l’exceptionnelle longévité se comportent en effet comme des <a href="http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0110742">ingénieurs</a> au service des écosystèmes, modifiant leur habitat au profit d’autres espèces. </p>
<p>Mais la faible diversité génétique ne risque-t-elle pas d’entraver la survie des populations réintroduites ? </p>
<p>Il s’agit là d’une préoccupation logique pour tous les programmes de réintroduction s’appuyant sur un petit nombre de reproducteurs en captivité. Les tortues géantes des Galapagos peuvent toutefois survivre à des accidents démographiques majeurs et garantir ainsi le succès des programmes de réintroduction. </p>
<p>Prenons l’exemple de la population de tortues du volcan Alcedo (île Isabela), connue comme la plus importante des Galapagos : elle descend d’une unique femelle qui aurait survécu à une très importante <a href="http://www.nature.com/news/2003/031003/full/news03029-11.html">éruption volcanique</a> durant la période préhistorique. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/106595/original/image-20151218-8081-13q58io.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/106595/original/image-20151218-8081-13q58io.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/106595/original/image-20151218-8081-13q58io.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/106595/original/image-20151218-8081-13q58io.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=385&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/106595/original/image-20151218-8081-13q58io.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/106595/original/image-20151218-8081-13q58io.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/106595/original/image-20151218-8081-13q58io.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=484&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les tortues géantes de notre expédition au mont Wolf sont déplacées dans la zone de reproduction en captivité du parc national des Galapagos, sur l’île de Santa Cruz.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Joe Flanagan</span></span>
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<p>La réintroduction de plus de 1 500 petits nés en captivité et appartenant à une espèce qu’on trouvait jadis sur l’île Espanola est un autre succès. Toute la population rapatriée dans cette zone provient d’une quinzaine de reproducteurs captifs et <a href="http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0110742">se porte aujourd’hui très bien</a>. </p>
<p>Faire revivre des espèces éteintes, comme celles de Floreana et de Pinta, était quelque chose d’impensable il n’y a pas si longtemps. C’est désormais possible. Et l’intérêt d’une telle initiative s’est encore accru du fait qu’il reste de très nombreuses tortues possédant des gènes de Floreana et de Pinta sur les pentes du mont Wolf. Les ajouter aux programmes d’élevage devrait stimuler la diversité génétique et s’avère donc très prometteur pour les futures expéditions. </p>
<p>Nul doute que ce sera épique, mais absolument gratifiant pour les scientifiques concernés par la préservation des tortues géantes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/53076/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Luciano Beheregaray receives funding from the Australian Research Council.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Adalgisa 'Gisella' Caccone receives funding from the Galápagos Conservancy and National Geographic Society for this research.</span></em></p>Lorsque Lonesome George, une tortue géante des Galapagos, mourut à 100 ans, beaucoup pensèrent que son espèce venait de disparaître à jamais avec lui… mais il n’en était rien.Luciano Beheregaray, Professor in Biodiversity Genetics and ARC Future Fellow, Flinders UniversityAdalgisa 'Gisella' Caccone, Senior Research Scientist and Lecturer, Department of Ecology & Evolutionary Biology, Yale UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.