tag:theconversation.com,2011:/fr/topics/ethologie-24270/articleséthologie – The Conversation2024-01-26T14:56:06Ztag:theconversation.com,2011:article/2214842024-01-26T14:56:06Z2024-01-26T14:56:06ZL’IA apprend à analyser les communications des poulets pour nous aider à comprendre leurs gloussements<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/570212/original/file-20240116-21-fbzgp8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C17%2C6000%2C3970&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les poulets sont des communicateurs hors pair.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Vous êtes-vous déjà demandé de quoi parlent les poulets ? Les poulets sont des communicateurs doués ; leurs gloussements, leurs cris et leurs roucoulements ne sont pas des sons aléatoires, mais un système linguistique complexe. Ces cris sont leur façon d’interagir avec le monde et d’exprimer leur joie, leur peur et de se transmettre des repères sociaux.</p>
<p>Comme pour les humains, le « langage » des poulets varie en fonction de l’âge, de l’environnement et, étonnamment, de la <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pone.0010639">domestication</a>, ce qui nous permet de mieux comprendre leurs <a href="https://doi.org/10.3390/ani11020434">structures sociales</a> et leurs comportements. La compréhension de ces vocalisations peut transformer notre approche de l’aviculture, en améliorant le bien-être et la qualité de vie des poulets.</p>
<p>Nos recherches à l’université Dalhousie appliquent l’intelligence artificielle (IA) pour décoder le langage des poulets. Ce projet devrait révolutionner notre connaissance de ces créatures à plumes et de leurs méthodes de communication, en nous offrant une fenêtre sur leur monde qui nous était jusqu’à présent fermée.</p>
<h2>Traducteur de poulet</h2>
<p>L’utilisation de l’IA et de l’apprentissage automatique dans ce domaine revient à disposer d’un traducteur universel pour le langage des poulets. L’IA peut analyser de grandes quantités de données audio. Comme le montrent nos recherches, qui doivent encore faire l’objet d’une évaluation par les pairs, nos algorithmes apprennent à reconnaître les schémas et les nuances dans les <a href="https://doi.org/10.1101/2023.12.26.573338">vocalisations des poulets</a>. La tâche n’est pas simple : les poulets émettent toute une gamme de sons dont la hauteur, la tonalité et le contexte varient.</p>
<p>Mais grâce à des techniques avancées d’analyse des données, nous commençons à déchiffrer leur code. Cette percée dans le domaine de la communication animale n’est pas seulement une réussite scientifique ; c’est aussi un pas vers un traitement plus humain et plus empathique des animaux d’élevage.</p>
<p>L’un des aspects les plus intéressants de cette étude est la compréhension du contenu émotionnel de ces sons. Grâce au traitement du langage naturel (TLN), une technologie souvent utilisée pour déchiffrer les langues humaines, nous apprenons à interpréter l’<a href="https://doi.org/10.3390/s21020553">état émotionnel des poulets</a>. Sont-ils stressés ? Sont-ils contents ? En comprenant leur <a href="https://doi.org/10.3390/ani12060759">état émotionnel</a>, nous pouvons prendre des décisions plus éclairées concernant leurs soins et leur environnement.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/569656/original/file-20240116-23-oqw734.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="une personne en combinaison blanche tenant un iPad et entourée de poulets" src="https://images.theconversation.com/files/569656/original/file-20240116-23-oqw734.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/569656/original/file-20240116-23-oqw734.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/569656/original/file-20240116-23-oqw734.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/569656/original/file-20240116-23-oqw734.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/569656/original/file-20240116-23-oqw734.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/569656/original/file-20240116-23-oqw734.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/569656/original/file-20240116-23-oqw734.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Comprendre les expressions des poulets aura un impact sur la façon dont ils sont élevés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Communication non verbale chez les poulets</h2>
<p>Outre les vocalisations, nos recherches portent également sur les indices non verbaux permettant d’évaluer les émotions des poulets. Nous avons ainsi étudié le clignement des yeux et la température du visage. La manière dont ces éléments peuvent constituer des <a href="https://doi.org/10.1101/2022.01.31.478468">indicateurs fiables</a> de l’état émotionnel des poulets est analysée dans une publication préliminaire (pas encore évaluée par les pairs).</p>
<p>En utilisant des méthodes non invasives telles que la vidéo et l’imagerie thermique, nous avons observé des changements de température autour des yeux et de la tête, ainsi que des variations dans le comportement de clignement des yeux, qui semblent être des réponses au stress. Ces résultats préliminaires ouvrent de nouvelles voies pour comprendre comment les poulets expriment leurs sentiments, tant sur le plan comportemental que physiologique, ce qui nous fournit des outils supplémentaires pour évaluer leur bien-être.</p>
<h2>Des volailles plus heureuses</h2>
<p>Ce projet dépasse le cadre de la curiosité intellectuelle ; ses <a href="https://doi.org/10.1101/2022.07.31.502171">retombées sont réelles</a>. Dans le secteur agricole, la compréhension des vocalisations des poulets est un moyen d’améliorer les pratiques d’élevage. Les agriculteurs peuvent utiliser ces connaissances pour créer de meilleures conditions de vie, ce qui se traduit par des poulets plus sains et plus heureux. Cela peut en retour avoir un effet sur la qualité des produits, la santé des animaux et l’efficacité globale de l’exploitation.</p>
<p>Les résultats de cette recherche peuvent également être appliqués à d’autres domaines de l’<a href="https://doi.org/10.1016/j.measurement.2022.110819">élevage</a>, ce qui pourrait déboucher sur des avancées dans la manière dont nous interagissons avec une variété d’animaux de ferme et dans les soins qui leur sont prodigués.</p>
<p>Mais nos travaux ne se limitent pas aux pratiques agricoles. Ils pourraient influencer les politiques en matière de bien-être animal et de traitement éthique. L’évolution de notre connaissance de ces animaux nous incite à <a href="https://doi.org/10.3390/agriengineering5010032">plaider pour leur bien-être</a>. Cette étude modifie la façon dont nous envisageons notre relation avec les bêtes, en privilégiant l’empathie et la compassion.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/569662/original/file-20240116-15-c9v7e6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="un homme introduit sa main dans un poulailler rempli de poulets" src="https://images.theconversation.com/files/569662/original/file-20240116-15-c9v7e6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/569662/original/file-20240116-15-c9v7e6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/569662/original/file-20240116-15-c9v7e6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/569662/original/file-20240116-15-c9v7e6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/569662/original/file-20240116-15-c9v7e6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/569662/original/file-20240116-15-c9v7e6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/569662/original/file-20240116-15-c9v7e6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La compréhension de la communication et du comportement des animaux peut avoir une influence sur les politiques en matière de bien-être animal.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Unsplash/Zoe Schaeffer)</span></span>
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<h2>IA éthique</h2>
<p>L’utilisation éthique de l’IA dans ce contexte crée un précédent pour les futures applications technologiques dans le domaine de la science animale. Nous démontrons que la technologie peut et doit être employée pour <a href="https://doi.org/10.1007/s44230-023-00050-2">favoriser le bien-être de tous les êtres vivants</a>. C’est une responsabilité que nous prenons au sérieux ; nous veillons à ce que nos avancées en matière d’IA soient conformes aux principes éthiques et au bien-être des sujets de notre étude.</p>
<p>Les retombées de nos recherches s’étendent également à l’éducation et aux efforts de conservation. En comprenant les méthodes de communication des poulets, nous acquérons des connaissances sur le langage aviaire en général, offrant ainsi une perspective unique sur la complexité des systèmes de communication animale. Ces enseignements peuvent s’avérer essentiels pour les défenseurs de l’environnement qui œuvrent à la protection des espèces d’oiseaux et de leurs habitats.</p>
<p>En poursuivant nos avancées dans ce domaine, nous ouvrons les portes d’une nouvelle ère dans l’<a href="https://doi.org/10.3389/fvets.2021.740253">interaction entre l’animal et l’homme</a>. Notre quête pour <a href="https://doi.org/10.20944/preprints202309.1714.v1">décoder le langage des poulets</a> est plus qu’une simple recherche universitaire : c’est un pas vers un monde plus empathique et plus responsable.</p>
<p>En tirant parti de l’IA, nous ne nous contentons pas de percer les secrets de la communication aviaire, mais nous établissons également de nouvelles normes en matière de bien-être animal et d’utilisation éthique des technologies. La période dans laquelle nous vivons est passionnante ; nous sommes à l’aube d’une conception nouvelle de la relation entre l’homme et le monde animal, et tout commence par le poulet.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/221484/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Suresh Neethirajan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’intelligence artificielle peut traiter un grand nombre de vocalisations de poulets et identifier des schémas dans les communications entre volatiles.Suresh Neethirajan, University Research Chair in Digital Livestock Farming, Dalhousie UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2201312023-12-21T14:28:23Z2023-12-21T14:28:23ZLa faim justifie les moyens – quand l’ours polaire s’attaque à l’oie des neiges<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/566997/original/file-20231220-19-d2je5g.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C1%2C989%2C745&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les adaptations que les ours devront déployer pour faire face aux défis imposés par les changements climatiques sont multiples et imprévisibles.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>C’est durant l’hiver que les ours polaires (<em>Ursus maritimus</em>) constituent leurs <a href="https://doi.org/10.1086/physzool.69.2.30164186">réserves de graisses</a>. La chasse intensive de phoques – une ressource <a href="https://doi.org/10.1139/z75-117">riche en gras</a> – leur permet d’emmagasiner assez d’énergie pour traverser l’été.</p>
<p>Avec le réchauffement du climat, les opportunités de chasse sur la banquise <a href="https://doi.org/10.1111/1365-2656.12685">diminuent</a>. Et les experts estiment qu’il n’y a pas assez de nourriture sur la terre ferme pour compenser la <a href="https://doi.org/10.1890/140202">diminution des réserves énergétiques chez les ours</a>.</p>
<p>Face à ces changements, certains individus profitent des colonies <a href="https://doi.org/10.1098/rspb.2013.3128">d’oiseaux nicheurs et de leurs œufs</a>, l’une des rares ressources faciles à obtenir sur la terre ferme, pour combler en partie leurs déficits énergétiques. Les adaptations que les ours devront déployer pour faire face aux défis imposés par les changements climatiques sont multiples et imprévisibles.</p>
<p>Étudiant-chercheur en écologie, je profitais d’un court séjour au nord de l’île de Baffin, au Nunavut, pour travailler sur la petite faune de l’île Bylot. Le temps d’un après-midi, un ours polaire en a décidé autrement. Nous vous livrons ici ses prouesses, qui ont mené à l’observation d’un comportement inédit.</p>
<h2>L’observation inusitée – l’ours polaire en eau douce</h2>
<p>Nous sommes le 8 août 2021. À 80 km de la communauté inuite de Mittimatalik, le camp de recherche de l’île Bylot fourmille d’activité.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1139/as-2023-0029">Établi depuis 30 ans</a>, il est situé en plein cœur de l’aire d’élevage de la plus grande colonie connue d’oie des neiges (<em>Anser caerulescens caerulescens</em>). Aujourd’hui, les scientifiques de différents horizons parcourent le fond de la vallée Quarliktuvik – généralement plat – pour étudier le sol, l’eau, les plantes et la faune.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/566995/original/file-20231220-25-jybcic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Bylot Island main research station TimMoser x" src="https://images.theconversation.com/files/566995/original/file-20231220-25-jybcic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/566995/original/file-20231220-25-jybcic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/566995/original/file-20231220-25-jybcic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/566995/original/file-20231220-25-jybcic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/566995/original/file-20231220-25-jybcic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=310&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/566995/original/file-20231220-25-jybcic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=310&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/566995/original/file-20231220-25-jybcic.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=310&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le camp de recherche de l’île Bylot.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Tim Moser)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>En sortant d’un ravin, l’un des rares reliefs des environs, je balaie la vallée de mes jumelles. Deux paires de jambes retiennent mon attention au loin. Les brumes de chaleur brouillent l’image, mais ce que je considérais être des collègues marchant côte à côte prend soudainement la forme floue – mais caractéristique – d’un ours polaire. Bien que tous aient l’équipement nécessaire – vaporisateurs chasse-ours, cartouches anti-ours et parfois même un fusil – je retourne <em>presto</em> au camp après avoir alerté le groupe par radio.</p>
<p>Plusieurs collègues se sont regroupés sur une petite colline pour garder à l’œil le nouveau venu. En effet, le temps que je parcoure le kilomètre me séparant du camp, <em>nanuk</em> en avait fait trois dans sa direction et s’affairait autour d’un étang occupé par des oies. À cette période de l’année, <a href="https://doi.org/10.1111/jav.00982">celles-ci sont en mues</a> – donc incapables de voler – et s’attroupent près des étangs pour échapper au <a href="https://doi.org/10.14430/arctic604">renard arctique (<em>Vulpes lagopus</em>)</a>, qui dédaigne de se jeter à l’eau. Avec un ours dans les parages, les activités sur le terrain cessent et nous profitons de cet après-midi radieux pour observer le roi de la banquise.</p>
<p>Fidèles à leur habitude, les oies se sont réfugiées dans l’étang le plus proche à la vue du danger. Elles pataugent suffisamment rapidement pour maintenir l’ours, qui nage à la surface, à une bonne distance.</p>
<p>Celui-ci utilise alors une technique inédite : il plonge sous l’eau, disparaît aux yeux des oies qui cessent de fuir, et sort sous l’une d’elle.</p>
<p>Ma collègue Mathilde Poirier consigne ce comportement dans son carnet :</p>
<blockquote>
<p>13h45 – 14h00 : l’ours nage dans le lac […], effectue 4 plongées pour essayer d’attraper une oie. Réussi à sa 4<sup>e</sup> tentative (attrape l’oie par en dessous, lors d’une plongée).</p>
</blockquote>
<p>Au cours de l’après-midi, l’ours utilise cette technique deux autres fois, avec un échec et une réussite.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/566996/original/file-20231220-19-utj9iv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="schéma" src="https://images.theconversation.com/files/566996/original/file-20231220-19-utj9iv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/566996/original/file-20231220-19-utj9iv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/566996/original/file-20231220-19-utj9iv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/566996/original/file-20231220-19-utj9iv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/566996/original/file-20231220-19-utj9iv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/566996/original/file-20231220-19-utj9iv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/566996/original/file-20231220-19-utj9iv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Nous avons observé une technique de chasse inédite chez un ours polaire : il plonge sous l’eau, disparaît aux yeux des oies qui cessent de fuir, puis sort sous l’une d’elle.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Madeleine-Zoé Corbeil-Robitaille)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Quels bénéfices les ours peuvent-ils tirer de ce comportement ?</h2>
<p>Deux mois plus tard, de retour l’Université Laval, cette observation nous fascine toujours. Nulle part dans la littérature scientifique ne fait-on mention d’un tel comportement. Au mieux, on y rapporte des <a href="https://doi.org/10.33265/polar.v41.8176">attaques sur des guillemots dans l’océan</a>, près des côtes, un environnement fort différent des étangs calmes et peu profond où nous avons observé les attaques.</p>
<p>Étant au fait des <a href="https://doi.org/10.1890/140202">défis énergétiques</a> auxquels font face les ours durant l’été, notre groupe de recherche a voulu répondre à la question suivante : est-ce que cette technique de chasse permettrait à l’ours polaire de bénéficier de la consommation d’oie des neiges ?</p>
<p>L’information consignée sur le terrain, soit le temps nagé par l’ours et son succès de chasse, nous permettait justement d’y répondre. En combinant nos observations avec des <a href="https://doi.org/10.1007/s00300-017-2209-x">estimations du coût énergétique</a> de la nage chez l’ours et <a href="https://doi.org/10.1093/conphys/cow045">l’énergie contenue dans une oie des neiges</a>, nous avons pu modéliser l’efficacité énergétique de la technique.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1139/AS-2023-0036">Ces calculs révèlent</a> que cette technique de chasse pourrait permettre aux ours d’acquérir plus d’énergie qu’ils n’en dépensent, particulièrement pour les ours de petite taille, et s’ils arrivent rapidement à attraper l’oie.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/566994/original/file-20231220-25-lint0u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="ours polaire" src="https://images.theconversation.com/files/566994/original/file-20231220-25-lint0u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/566994/original/file-20231220-25-lint0u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/566994/original/file-20231220-25-lint0u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/566994/original/file-20231220-25-lint0u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/566994/original/file-20231220-25-lint0u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/566994/original/file-20231220-25-lint0u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/566994/original/file-20231220-25-lint0u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">L’ours en question s’affairait autour d’un étang occupé par des oies.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Yannick Seyer)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Un apport énergétique qui est loin d’être suffisant</h2>
<p>Cet apport énergétique aurait toutefois une portée très limitée.</p>
<p>Tout d’abord, une oie fournit relativement peu d’énergie – environ 200 fois moins qu’un <a href="https://doi.org/10.1139/z75-117">phoque annelé de 45 kilogrammes</a>.</p>
<p>De plus, elles sont rarement disponibles comme proies : elles perdent la capacité de voler seulement 3 ou 4 semaines chaque été et leurs colonies sont situés à <a href="http://dx.doi.org/10.1002/jwmg.879">quelques endroits</a> seulement dans l’arctique.</p>
<p>La chasse d’oies pourrait donc bénéficier ponctuellement à certains ours, mais ne permettra pas, à l’échelle de la population, d’alléger les déficits énergétiques causés par la fonte de la banquise.</p>
<p>Bien que notre observation souligne l’éventail comportemental que peuvent déployer les ours pour exploiter les ressources terrestres, ce type d’interaction entre l’oie des neiges et l’ours polaire ne devrait pas avoir d’impact sur les populations des deux espèces.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220131/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David Bolduc a reçu des financements du PFSN et de l'Association canadienne pour le trappage sans cruauté. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Matthieu Weiss-Blais a reçu des financements de CRSNG, FRQNT, PFSN. </span></em></p>Des chercheurs ont fait une observation fascinante : un ours polaire a employé une technique de chasse en plongée, encore jamais rapportée, pour capturer de grandes oies des neiges en mue.David Bolduc, Étudiant au doctorat en écologie animale, Université LavalMatthieu Weiss-Blais, Étudiant la maîtrise en biologie, Université LavalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2163802023-10-26T08:42:09Z2023-10-26T08:42:09Z« Le propre de l’Homme » existe-t-il vraiment en éthologie ?<p>« Le propre de l’Homme ». Voilà une expression qui inspire moult réflexions et débats. À chaque époque et chaque culture d’apporter ses éléments de réponse, plus ou moins influencés par les courants religieux et philosophiques qui y prévalent. Il y a 2 400 ans, le philosophe grec Aristote avançait que l’homme était le seul animal à disposer d’une <a href="https://filosofiadoinicio.com/fr/lame-selon-aristote/">« âme intellective »</a>, lui permettant de penser et de comprendre, alors que les autres espèces se limiteraient à appréhender leur environnement et à se déplacer <a href="https://www.cairn.info/revue-le-philosophoire-2003-3-page-65.htm">pour satisfaire leurs besoins</a>.</p>
<p>Puis l’Homme a été considéré comme l’aboutissement d’un travail divin, conçu à l’image de son créateur, et donc exclu du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/ethologie-24270">règne animal</a>. La théorie de l’évolution de Charles Darwin a <a href="http://darwin-online.org.uk/converted/pdf/1861_OriginNY_F382.pdf">lourdement impacté les réflexions</a> : l’intelligence animale (et les comportements qu’elle rend possibles) ne peut être organisée de manière linéaire. Car à l’instar de l’évolution biologique des espèces, <a href="https://theconversation.com/est-il-pertinent-de-hierarchiser-les-especes-animales-90577">celle de l’intelligence est « buissonnante »</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<h2>Rire n’est plus le propre de l’Homme</h2>
<p><em>Homo sapiens</em> n’est donc pas l’aboutissement d’un long processus évolutif ni la plus haute branche de l’arbre. Juste une espèce parmi d’autres. Les travaux des éthologues, dont un échantillon peut être retrouvé dans <a href="https://www.delachauxetniestle.com/livre/un-tanguy-chez-les-hyenes">mon premier ouvrage, <em>Un Tanguy chez les hyènes</em></a>, appuient tous les jours cette affirmation, à l’aide de recherches menées sur les primates, mais aussi sur les poissons, reptiles, insectes ou encore amphibiens. Depuis l’avènement de leur discipline, au milieu du XX<sup>e</sup> siècle, ces scientifiques brisent, les unes après les autres, les barrières que nous avons couramment dressées entre l’Homme et les autres espèces animales.</p>
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<p>À l’instar d’<a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/avec-philosophie/la-physique-aristotelicienne-les-animaux-le-monde-et-nous-1547019">Aristote</a> ou de <a href="https://www.editionspoints.com/ouvrage/gargantua-francois-rabelais/9782020300322">François Rabelais</a>, nombreux sont ceux qui considéraient le rire comme un comportement propre à notre espèce. Aujourd’hui cependant, on sait que les <a href="https://www.mnhn.fr/fr/le-rire-est-il-vraiment-le-propre-de-l-homme">primates rient de bon cœur</a>, mais peuvent également rire en réponse à l’hilarité d’un congénère, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21355640/">pour se montrer à leur avantage auprès de celui-ci</a>.</p>
<h2>La transmission des savoirs et l’apprentissage</h2>
<p>Destiné à la formation des enseignants, l’ouvrage <a href="https://www.lamartine.fr/livre/9782804176266-l-enseignement-explicite-la-gestion-des-apprentissages-clermont-gauthier/">« L’enseignement explicite – La gestion des apprentissages »</a> (De Boeck, 2013) souligne pour sa part que : « Deux aptitudes semblent propres à l’humain et le distinguent de ses cousins primates. La première est la propension à transmettre et la seconde, la capacité à apprendre à partir de ces enseignements ». </p>
<p>Pourtant, les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16840701/">suricates inculquent aux plus jeunes les rudiments de la chasse</a> : sous les regards attentifs, l’enseignant attrape un scorpion puis le relâche, afin de laisser aux novices l’occasion de s’exercer à la capture, tout en corrigeant leurs mouvements si nécessaire. Une fois cette compétence acquise, les plus expérimentés apprennent à extraire le dard de l’arachnide sans se faire pincer, avant de le placer en bouche.</p>
<p>Les êtres humains seraient les seuls à prendre part à <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16262930/">« des activités collaboratives impliquant des objectifs partagés et des intentions communes »</a>. Cette affirmation de neuroscientifiques allemands est au moins infirmée par des observations sur des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/mms.12906">orques</a> et des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26192594">chimpanzés</a>, démontrant la coordination dont font preuve ces animaux lors de leurs parties de chasse (aux baleines et aux colobes, respectivement). Un rôle est attribué à chaque individu (bloqueur, chasseur, embusqué, meneur…), qui doit ensuite coordonner ses actions avec celles du groupe et anticiper continuellement les mouvements tant des proies que des partenaires de chasse. Des techniques nécessitant des années d’observation et de pratique.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-animaux-peuvent-ils-avoir-une-culture-167860">Les animaux peuvent-ils avoir une culture ?</a>
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<h2>La fausse piste du langage</h2>
<p>René Descartes au XVII<sup>e</sup> siècle, affirmait que seul l’Homme <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b86069594.r=.langEN">utilise un langage pour communiquer ses pensées</a>. Une idée non partagée par Charles Darwin qui, deux siècles plus tard, <a href="https://www.loc.gov/item/06017473/">soulignait que</a>:</p>
<blockquote>
<p>« l’Homme n’est pas le seul animal qui puisse exprimer ce qui se passe dans son esprit, et comprendre plus ou moins ce qui est dit par un autre. » </p>
</blockquote>
<p>La question du langage comme spécificité humaine est récurrente. Au milieu du XX<sup>e</sup> siècle, le prix Nobel Karl von Frische nous éclairait sur les systèmes complexes de communication des abeilles, qui utilisent leurs cinq sens pour se transmettre de l’information lors de leurs danses de recrutement de butineuses.</p>
<p>Mais selon Hélène Bouchet, Camille Coye et Alban Lemasson, le langage humain serait rendu unique par ses propriétés de <a href="https://www.tetralogiques.fr/IMG/pdf/tetralogiques_21_numero_complet.pdf">générativité, de récursivité, sa fonction symbolique et ses capacités de déplacement</a>. Si, sur base des connaissances actuelles, il n’est pas aisé de les contredire, on doit admettre que les recherches progressent rapidement et mettent en lumière certaines de ces caractéristiques linguistiques chez les primates non-humains. On sait aujourd’hui que les chimpanzés disposent de plusieurs dizaines de cris différents, <a href="https://www.nature.com/articles/s42003-022-03350-8">qu’ils combinent de manière prévisible en suivant des règles de contigüité précises</a>, sortes de règles grammaticales, afin de générer des centaines de séquences différentes.</p>
<h2>Repenser notre singularité humaine</h2>
<p>Ces quelques exemples ont valeur d’illustration. Nous aurions pu aborder le système de <a href="https://www.researchgate.net/publication/233822970_Food_Sharing_in_Vampire_Bats">« sécurité sociale »</a> mis en place par les vampires d’Azara, du <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1439-0310.1988.tb00707.x">« vote démocratique »</a> des cygnes chanteurs, des <a href="https://www.nature.com/articles/s41559-020-01314-x">principes d’agriculture</a> appliqués par les fourmis champignonnistes, des <a href="https://www.nature.com/articles/srep02106">expressions artistiques</a> des poissons-globes, de <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2610150/">l’homoparentalité</a> des albatros de Laysan, du <a href="https://academic.oup.com/jmammal/article/97/5/1428/2219069">deuil</a> des orques, des <a href="https://www.nature.com/articles/ncomms2781">gestes intentionnels</a> des mérous, des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31847765/">conflits récurrents</a> entre communautés voisines de suricates, des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/17790854/">stratégies de séduction</a> des insectes Hylobittacus, des <a href="https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1890/13-0927.1">soins parentaux</a> prodigués par les grenouilles des fraises ou encore des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0960982221017322">gestes d’empathie</a> des chimpanzés.</p>
<p>Autant de comportements que l’on attribue à tort à l’espèce humaine, et autant de résultats scientifiques qui nous poussent à repenser notre singularité. L’ensemble de ces comportements, et bien d’autres, ont été rassemblés et décrits dans mon second livre, <a href="https://www.delachauxetniestle.com/livre/la-cigale-et-le-zombie">« La Cigale et le Zombie : ces comportements que l’on pensait propres à l’Homme »</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216380/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François Verheggen ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Qu’est-ce qui rend notre espèce humaine unique au sein du royaume du vivant ? Des travaux scientifiques récents montrent que la frontière entre l’humain et le non-humain est bien plus fine qu’on le penseFrançois Verheggen, Professeur d'éthologie, Université de LiègeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2137662023-09-21T10:18:45Z2023-09-21T10:18:45ZComment écouter la nature ? Quand le vivant nous parle<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/549288/original/file-20230920-25-jymd2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C26%2C2500%2C1624&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les êtres humains peuvent repérer à l'oreille les variations du vivant, qu'il s'agisse du vent ou de la tombée de la nuit, comme le montre un nouveau programme de recherche.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/WtwSsqwYlA0">Khamkeo Vilaysing/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Sommes-nous sensibles à la différence entre une forêt tempérée et une prairie ? Percevons-nous finement les variations sonores associées aux changements saisonniers ou encore la différence entre l’aube et le milieu de la journée ? À quel point sommes-nous sensibles à la présence d’êtres vivants dans ces environnements, à leur variété ?</p>
<p>Toutes ces questions sont aujourd’hui abordées dans un <a href="https://anr.fr/Projet-ANR-20-CE28-0011">programme de recherche alliant sciences cognitives et écologie</a>.</p>
<p>Bien que l’étude des « paysages sonores » ait débuté il y a de cela près d’un demi-siècle avec les travaux de <a href="https://www.abebooks.fr/9780394409665/Tuning-World-Schafer-R-Murray-0394409663/plp">R. Murray Schafer</a> en 1977 et <a href="https://www.sfu.ca/%7Etruax/handbook2.html">Barry Truax</a> en 1978, nos connaissances restent encore fragmentaires quant à la manière dont l’être humain, avec ses oreilles et son système auditif, perçoit les scènes acoustiques complexes produites par des environnements dits <a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/interception/interception-du-dimanche-05-fevrier-2023-5845593">« naturels »</a>, à savoir des environnements marginalement affectés par l’activité humaine.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Pour suivre au plus près les questions environnementales, retrouvez chaque jeudi notre newsletter thématique « Ici la Terre ». <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-environnement-150/">Abonnez-vous dès aujourd’hui</a>.</em></p>
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<h2>L’écologie des paysages sonores</h2>
<p>L’écologie des paysages sonores ou écoacoustique, un champ scientifique inspiré par les travaux pionniers de <a href="https://www.researchgate.net/publication/260037729_Bioacoustics_Habitat_Ambience_Ecological_Balance">Bernie Krause</a> (1987), est aujourd’hui en <a href="https://academic.oup.com/bioscience/article/61/3/203/238162">plein essor</a>. Cette discipline <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s12304-015-9248-x">utilisant les paysages sonores</a> à différentes échelles spatiales et temporelles afin d’explorer la complexité écologique bénéficie de l’apparition d’enregistreurs passifs autonomes à bas coût (voir figure 1).</p>
<p>Ces derniers permettent aux écologues et éthologues d’enregistrer des bases de données acoustiques massives et de qualité sans interférer avec l’environnement.</p>
<p>L’écoacoustique bénéficie également du développement récent de techniques de traitement de signal élaborées, dont l’efficacité est démultipliée par les méthodes modernes d’apprentissage machine.</p>
<p>La mise en place de collaborations entre écoacousticiens et spécialistes de l’audition humaine ouvre ainsi la possibilité de mieux comprendre comment nous – humains – percevons auditivement les environnements naturels, leur composition, les processus écologiques à l’œuvre ainsi que leurs variations, qu’elles soient d’origine naturelle ou induites par l’activité humaine.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/uTbA-mxo858?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Conférence TED, Bernie Krause : « The voice of the natural world ».</span></figcaption>
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<h2>Quatre habitats distincts en Californie</h2>
<p>Les premiers résultats de ce programme de recherche interdisciplinaire viennent d’être récemment <a href="https://pubs.aip.org/asa/jasa/article-abstract/147/5/3260/993983/Characterizing-amplitude-and-frequency-modulation?redirectedFrom=fulltext">publiés</a> dans diverses revues notamment <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fevo.2022.894232/full"><em>Frontiers</em></a> ou le <a href="https://pubs.aip.org/asa/jasa/article/153/5/2706/2888160/Auditory-discrimination-of-natural-soundscapes"><em>Journal of Acoustical Society of America</em></a>.</p>
<p>Ce programme débute par une <a href="https://pubs.aip.org/asa/jasa/article-abstract/147/5/3260/993983/Characterizing-amplitude-and-frequency-modulation?redirectedFrom=fulltext">étude « pilote »</a> visant à caractériser l’information acoustique véhiculée par des paysages sonores enregistrés dans une réserve de biosphère de Californie (voir figure 2).</p>
<p>Il s’agit ici de quatre habitats distincts d’un même biome terrestre tempéré, c’est-à-dire une région vaste et homogène du point de vue climatique.</p>
<p>Les données sonores, collectées et analysées par <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10980-011-9639-6">Bernie Krause et ses collègues</a> correspondent à des enregistrements de haute qualité réalisés à quatre saisons (printemps, été, automne, hiver), quatre périodes de la journée (aube, milieu de la journée, soirée, nuit) au sein de quatre sites : une forêt, une clairière, un maquis et une prairie.</p>
<p>Ces nombreux échantillons sonores sont ensuite transmis à un modèle informatique de système auditif humain simulant les grandes étapes de traitement de l’information sonore dans l’oreille interne, le tronc cérébral et le cortex auditif d’un être humain. La figure 3 présente la sortie moyenne de ce modèle auditif.</p>
<p>Ces représentations montrent comment la puissance de modulation des sons se distribue en fonction de la fréquence audio (en ordonnée) et la cadence temporelle (en abscisse) du signal, ce pour chaque condition expérimentale. La figure 3 montre la sortie du modèle auditif pour chaque habitat, moyennée à travers les périodes de la journée et saisons.</p>
<p>Ces images illustrent donc l’information acoustique spectrale et temporelle disponible pour un être humain. Malgré la forte variabilité acoustique des paysages sonores, ces représentations diffèrent fortement entre habitats, et suggèrent que nous devrions être tout à fait capables de discriminer ces paysages sonores et leurs variations. Pour tester plus avant cette hypothèse, nous avons transmis les sorties de ce modèle auditif à des algorithmes de classification (des programmes d’apprentissage machine). Les résultats des simulations sont très clairs : les performances de classification (quel est l’habitat, le moment de journée, la saison ?) sont largement supérieures à la performance due au hasard.</p>
<h2>Entendre l’habitat, la saison et le moment de la journée</h2>
<p>Ces premiers résultats fournissent des prédictions que l’on peut ensuite tester chez l’humain. Une deuxième étude, <a href="https://pubs.aip.org/asa/jasa/article/153/5/2706/2888160/Auditory-discrimination-of-natural-soundscapes">comportementale cette fois</a>, reprend cette même base d’échantillons sonores et l’organise afin de mesurer les capacités de discrimination auditive de ces sons en fonction de l’habitat, de la saison et de la période de la journée chez des personnes entendantes adultes.</p>
<p>Le nombre de mois d’exposition à des paysages sonores naturels de ces participants – tous urbains au moment des expériences – a été parallèlement estimé grâce à un questionnaire. Ces expériences de discrimination sont réalisées à l’aide d’un protocole de discrimination « en choix forcé » visant à limiter l’influence de biais non sensoriels, par exemple une préférence personnelle pour un habitat.</p>
<p>Lors de chaque essai de la procédure expérimentale, trois sons distincts (dont un provient, par exemple, d’une clairière et les deux autres d’une forêt) sont présentés aux oreilles des participants dans un ordre aléatoire et ces derniers doivent déterminer lequel de ces sons est différent des deux autres.</p>
<p>Les résultats comportementaux présentés en figure 4 sont conformes aux prédictions du modèle : nous sommes capables de discriminer l’habitat, la saison et la période de la journée bien au-dessus du hasard. Qui plus est, ces capacités ne varient que très peu entre personnes testées, et – plus surprenant – ces capacités ne sont pas corrélées à la durée d’exposition préalable à des paysages sonores naturels. Les performances humaines sont toutefois inférieures à celles du modèle, suggérant une forme de sous-optimalité chez l’humain qu’il conviendra d’étudier.</p>
<h2>Écouter le vivant, l’eau, le vent ou la pluie</h2>
<p>Ces premiers résultats illustrent des capacités auditives élémentaires sous-tendant l’écoute des environnements naturels.</p>
<p>D’autres travaux similaires portant sur la nature des informations acoustiques utilisées par l’être humain pour détecter la présence d’êtres vivants et déterminer leur variété (la richesse en espèces) sont en cours grâce aux programmes de recherche de F. Apoux, E. Grinfeder, N. Miller-Viacava et R. McWalter au sein de notre groupe.</p>
<p>Ces études sont motivées par les résultats antérieurs d’autres équipes suggérant que les sources sonores biologiques se distinguent acoustiquement des sources géophysiques <a href="https://pubs.aip.org/asa/jasa/article-abstract/114/6/3394/544398/Modulation-spectra-of-natural-sounds-and?redirectedFrom=fulltext">comme l’eau, le vent ou la pluie</a>, et que notre système auditif réaliserait un <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-019-43126-5">traitement prioritaire</a> des sons <a href="https://pubs.aip.org/asa/jasa/article/127/3/EL105/605919/Why-are-natural-sounds-detected-faster-than-pips">d’origine biologique</a>.</p>
<h2>Des effets psychologiques, sensoriels et émotionnels</h2>
<p>Des <a href="https://unhabitat.org/world-cities-report-2022-envisaging-the-future-of-cities">millions de personnes vivent en zone rurale</a> et de nombreux citadins investissent du temps et des ressources pour s’exposer régulièrement à ces paysages naturels au sein d’espaces verts ou de parcs nationaux. Pour toutes ces personnes, l’accès à ces espaces <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11252-016-0581-x">biodiverses</a> <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2021.570563/full">pourrait contribuer à leur bien-être et à la qualité de vie</a> comme le montrent de <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2013097118">nombreux travaux</a>.</p>
<p>Par ailleurs, les paysages sonores naturels se transforment progressivement et profondément sous <a href="https://www.cell.com/trends/ecology-evolution/fulltext/S0169-5347(19)30226-5 ?_returnURL=https %3A %2F %2Flinkinghub.elsevier.com %2Fretrieve %2Fpii %2FS0169534719302265 %3Fshowall %3Dtrue">l’effet des activités humaines</a>.</p>
<p>Tout laisse à penser que nous sommes sensibles à ces transformations et que cela ne sera pas sans effets psychologiques, sensoriels et émotionnels. Pris ensemble, ces données incitent à mieux comprendre les mécanismes auditifs engagés dans ces interactions fondamentales entre notre organisme et les processus écologiques à l’œuvre au sein des environnements naturels.</p>
<hr>
<p><em>Le programme de recherche <a href="https://anr.fr/Projet-ANR-20-CE28-0011">Perception audiitive des paysages sonores naturels: Entendre la bioversité – HEARBIODIV</a> financé par l'Agence nationale de la recherche (ANR) est porté par l’École normale supérieure (Christian Lorenzi), le Muséum national d’histoire naturelle (Jérome Sueur), Bernie Krause (Wild Sanctuary) et Régis Férrière (IRL CNRS iGlobes).</em></p>
<p><em>L’Agence nationale de la recherche (ANR) finance en France la recherche sur projets. Elle a pour mission de soutenir et de promouvoir le développement de recherches fondamentales et finalisées dans toutes les disciplines, et de renforcer le dialogue entre science et société. Pour en savoir plus, consultez le site de l’<a href="https://anr.fr/">ANR</a>.</em></p>
<p><em>Cet article est par ailleurs rédigé dans le cadre de la 1<sup>ere</sup> Biennale sur la nature et le vivant, coorganisé par L’ENS-PSL, le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) et l’École des Arts Décoratifs. Retrouvez <a href="https://www.ens.psl.eu/actualites/nous-le-vivant">ici</a> le programme de cet événement qui a lieu le 23 septembre.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213766/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian Lorenzi a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche (ANR): ANR-20-CE28-0011 Hearing Biodiversity. </span></em></p>Premiers résultats d’un nouveau programme de recherche en sciences cognitives dédié à l’étude de nos capacités de perception des paysages sonores naturels.Christian Lorenzi, Professeur en psychologie expérimentale, École normale supérieure (ENS) – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2057172023-07-25T14:49:00Z2023-07-25T14:49:00ZPour les mésangeais du Canada, la rivalité dans la fratrie peut s’avérer mortelle<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/526302/original/file-20230515-36897-i2fvqh.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C2%2C1894%2C1100&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les jeunes mésangeais du Canada se battent pour empêcher leurs frères et sœurs d’entrer sur le territoire des parents.</span> <span class="attribution"><span class="source">(M. Fuirst)</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Dans le règne animal, les conflits entre frères et sœurs – principalement sous la forme d’une compétition pour la nourriture amenée par les parents – sont assez fréquents chez les oiseaux. La mort peut parfois en résulter, mais le fratricide se produit presque toujours lorsque les jeunes sont encore au nid. </p>
<p>Les rivalités entre frères et sœurs suggèrent un <a href="https://doi.org/10.1006/anbe.1998.0842">compromis entre la concurrence pour les ressources et les avantages associés aux liens de sang</a>. Chez de nombreuses espèces, malgré ces affrontements, les juvéniles ont le choix de rester sur le territoire familial ou de partir à la recherche d’un nouveau foyer. </p>
<p>Mais les membres d’une même fratrie de mésangeais du Canada se battront pour le territoire après avoir quitté le nid. S’ils perdent, ils doivent partir.</p>
<p>Mes collègues et moi-même avons comparé les <a href="https://doi.org/10.1098/rspb.2022.1863">avantages liés à la survie et à la reproduction du juvénile dominant, tout en tenant compte des risques associés à l’expulsion des frères et sœurs</a>. Cette étude sur les conflits au sein de la fratrie chez les animaux sauvages est la première à mesurer les conséquences de l’éviction des frères et sœurs. Le prix à payer pour l’expulsion des proches parents réside dans le fait que les individus qui pourraient contribuer à la diffusion des gènes familiaux sont condamnés à l’exil, où ils ont une forte probabilité de périr.</p>
<h2>Comportement du mésangeai du Canada</h2>
<p>En utilisant 6 années de données de pistage radioélectrique et nos 50 années de données sur les mésangeais du Canada, marqués individuellement dans le <a href="https://www.algonquinpark.on.ca/index.php">parc provincial Algonquin</a> dans le centre de l’Ontario, nous avons cherché à savoir si l’avantage de chasser ses frères et sœurs l’emportait sur les répercussions négatives.</p>
<p>Pour ce faire, nous avons examiné la survie et le succès reproductif à vie de tous les juvéniles dominants et expulsés connus. Les mésangeais du Canada pouvant vivre jusqu’à 17 ans, il a fallu plus de cinq décennies pour recueillir des données sur la durée de vie d’un nombre suffisant d’individus de cette population. </p>
<p><a href="https://www.allaboutbirds.org/guide/Canada_Jay/overview">Les mésangeais du Canada sont des résidents permanents des forêts boréales d’Amérique du Nord</a> ; ils dépendent des aliments stockés pour survivre pendant l’hiver. Il s’agit de l’une des deux seules espèces connues (<a href="https://birdsoftheworld.org/bow/species/sibjay1/cur/introduction">l’autre étant le mésangeai imitateur, étroitement apparenté</a>) chez lesquelles les conflits dans la fratrie entraînent l’expulsion d’un ou de plusieurs frères et sœurs du territoire d’origine après que les juvéniles ont quitté le nid.</p>
<p>Environ six semaines après le départ de la progéniture, mais alors qu’elle se trouve encore sur le territoire d’origine et est toujours nourrie par les parents, une bataille intense s’engage. Le résultat final est l’éjection des frères et sœurs plus faibles (les expulsés) du territoire familial par le juvénile dominant. Les expulsés doivent dénicher une nouvelle maison avant l’arrivée de l’hiver.</p>
<p>Nous avons constaté que s’il y a un prix à payer par les juvéniles dominants pour avoir expulsé leurs frères et sœurs, les avantages d’une survie plus élevée la première année et d’un succès reproductif à long terme l’emportent sur les inconvénients liés à l’expulsion.</p>
<h2>Le gagnant remporte tout</h2>
<p>La décision de chasser les expulsées hors de leur territoire d’origine constitue un compromis de taille pour les mésangeais du Canada. Nos recherches ont montré qu’en demeurant la seule progéniture dans le nid, un juvénile dominant présente une plus grande probabilité de survie au cours de sa première année et une reproduction plus réussie à l’âge adulte.</p>
<p>Ceci est probablement dû au fait que le juvénile dominant n’a pas besoin de trouver un nouveau lieu de vie, qu’il est en mesure de vivre en groupe dès sa première année et qu’il connaît déjà l’habitat où il peut stocker de la nourriture pour l’hiver.</p>
<p>Alors que le juvénile dominant profite de ces avantages, les expulsés sont condamnés à une première année de vie risquée, au cours de laquelle leurs chances de survie sont moindres.</p>
<p>Il n’est pas forcément bénéfique de <a href="https://doi.org/10.1006/anbe.1998.0842">tuer ou expulser un frère ou une sœur</a>, même si l’on en a la capacité. Ces derniers partagent des gènes, de sorte que leur porter préjudice a un effet négatif sur le succès génétique de la lignée d’un individu. Toutefois, dans le monde animal, ces comportements reposent sur des inconvénients et des avantages. </p>
<p>Si, en monopolisant les ressources du nid, un frère ou une sœur est en mesure d’obtenir un bienfait à vie qui l’emporte sur l’inconvénient que représenterait le partage des ressources, ce trait sera alors considéré comme adaptatif et se propagera probablement dans la population au fil du temps.</p>
<p>Dans le cas des mésangeais du Canada, les frères et sœurs expulsés ne meurent pas tous. Nos recherches ont montré que, bien que les expulsés aient un taux de survie plus faible au cours de leur premier été, la plupart de ceux qui restent sont adoptés par des adultes sans lien de parenté avec eux. Nous avons observé des juvéniles avec des parents sans progéniture. Une plus petite proportion a pu trouver un partenaire pour se reproduire dès la première année ou est demeurée seule. </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/523670/original/file-20230501-926-xeiogk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="un jeune oiseau gris et blanc hors du nid portant une bande orange vif à la patte regarde l’appareil photo" src="https://images.theconversation.com/files/523670/original/file-20230501-926-xeiogk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/523670/original/file-20230501-926-xeiogk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/523670/original/file-20230501-926-xeiogk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/523670/original/file-20230501-926-xeiogk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/523670/original/file-20230501-926-xeiogk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/523670/original/file-20230501-926-xeiogk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/523670/original/file-20230501-926-xeiogk.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Un jeune mésangeai du Canada hors du nid portant une bande de couleur dans une tourbière à épinettes dans le parc provincial Algonquin en Ontario.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(M. Fuirst)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Comportement et survie de la fratrie</h2>
<p>Dans le parc provincial Algonquin, le <a href="https://doi.org/10.1111/gcb.15445">nombre de territoires des mésangeais du Canada a diminué de plus de 75 % au cours des quatre dernières décennies</a>. Cette tendance est due au réchauffement des températures et à l’augmentation de la fréquence des épisodes de gel et de dégel qui altèrent la nourriture hautement périssable que les mésangeais stockent pour l’hiver. </p>
<p>Notre étude est importante pour le domaine de l’écologie comportementale. Elle apporte un éclairage nouveau sur les moteurs évolutifs des conflits entre frères et sœurs. La population de mésangeais du Canada du parc Algonquin étant en fort déclin, il est essentiel de comprendre leurs comportements pour cerner les obstacles auxquels les individus doivent faire face pour survivre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205717/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Matthew Fuirst a reçu un financement de la Weston Family Foundation Fellowship for Northern Conservation.</span></em></p>Les mésangeais du Canada qui sont capables d’expulser leurs frères et sœurs du nid et du territoire ont de meilleures chances de survie.Matthew Fuirst, Instructor, Integrative Biology, University of GuelphLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2060762023-06-06T19:54:07Z2023-06-06T19:54:07ZGuerre et paix chez les insectes floricoles<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/528874/original/file-20230529-29-7mgo4m.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C5%2C1954%2C1216&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une abeille sauvage attaque une abeille sur une fleur.</span> <span class="attribution"><span class="source">Thomas Renaud</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Une abeille, sur une fleur, attaquée par une autre abeille, sauvage celle-ci. Vous pourriez avoir vu cette scène de nombreuses fois, mais peu de gens la remarquent vraiment. Cette photo illustre que certaines espèces d’insectes floricoles sont enclines à menacer, à harceler ou à attaquer des individus d’autres espèces moins agressives. Mais les raisons pour cette agressivité ne sont pas encore très claires.</p>
<p>Avec <a href="https://www.quae.com/produit/1491/9782759228027/pollinisation">près de 90 % des plantes à fleurs pollinisées par les insectes</a>, les insectes floricoles sont un pilier de <a href="https://www.mdpi.com/2076-3298/6/2/22">notre sécurité alimentaire et de nos économies</a>. À l’heure où les populations d’insectes s’effondrent, avec un <a href="https://environment.ec.europa.eu/topics/nature-and-biodiversity/pollinators_en">tiers des espèces européennes d’abeilles, papillons et syrphes en déclin</a>, <a href="https://www.nature.com/articles/s41559-021-01534-9">principalement à cause de la destruction de leurs habitats et de l’utilisation massive de produits phytosanitaires</a>, observer des insectes pendant la pollinisation se révèle être à la fois banal et extrêmement précieux.</p>
<p>Notamment parce que la cohabitation entre plusieurs individus n’est pas aussi paisible que l’on pourrait supposer : il n’est pas rare d’observer des <a href="https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/bes2.2050">comportements agressifs, voire violents, entre deux individus d’une même espèce, ou d’espèces différentes</a>.</p>
<p><a href="https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/ecy.3958">Jusqu’à récemment</a>, une description générale des comportements agressifs des insectes sur les fleurs en conditions réelles n’était pas documentée : si les notions d’interaction agressive et de compétition sont bien ancrées, les études se sont jusque-là concentrées principalement sur des compétitions au sein d’une même espèce ou d’interactions entre espèces dans des cadres très restreints, <a href="https://books.google.be/books?hl=en&lr=&id=aQlCAQAAQBAJ">comme des conflits entre colonies entières d’espèces différentes de fourmis, par exemple</a>.</p>
<h2>Les comportements agressifs et la hiérarchie de dominance</h2>
<p>Les interactions interindividuelles d’agression entre insectes floricoles peuvent être classées en 5 catégories par ordre de violence : « l’interaction neutre » lorsque deux individus se rencontrent sans qu’il ne se passe rien ; le « vol stationnaire » d’un individu derrière un autre ; « l’intimidation » lorsqu’un individu vole ou tournoie très près d’un second individu ; « l’agression » lorsqu’un individu frappe ou percute un autre individu (comme sur la photo) ; et le « combat » lorsqu’un individu en attrape un autre en le faisant tomber de sa fleur.</p>
<p>Ces différentes interactions ne sont pas utilisées de la même façon et avec la même fréquence par tous les espèces ou groupes d’espèces. Ainsi, les gros syrphes (taille supérieure à 15 millimètres), les abeilles de couleur grises du genre <em>Anthophora</em> et d’autres abeilles sauvages sont plus susceptibles de montrer des comportements agressifs que les abeilles domestiques et nombre d’espèces de bourdons (genre <em>Bombus</em>).</p>
<p>De l’autre côté, certaines espèces et groupes d’espèces sont des cibles privilégiées. C’est le cas par exemple des abeilles domestiques, qui sont principalement ciblées par les gros syrphes ou les bourdons rayés de jaune. Les bourdons, eux, se voient attaqués par les plus gros syrphes et les abeilles grises du genre Anthophora.</p>
<p>Une hiérarchie de dominance peut alors être établie sur la base des comportements subis et initiés, et de leur niveau de violence. Trois principaux groupes peuvent être isolés : le groupe des dominants, avec les gros syrphes et les abeilles grises du genre <em>Anthophora</em>, ayant une plus grande propension à initier des comportements agressifs ; le groupe des dominés, avec les abeilles domestiques, les bourdons et les papillons, plus enclins à subir les comportements agressifs ; et un groupe intermédiaire avec des espèces ou des groupes d’espèces initiant autant d’interactions agressives qu’elles les subissent, dont les coléoptères, les petits syrphes, les mouches du sous-ordre des Brachycera, les abeilles charpentières, les guêpes polistes, et la plupart des abeilles sauvages.</p>
<p>Cependant, il n’a pas été possible d’expliquer pour le moment la propension à initier des comportements agressifs par les caractéristiques des espèces comme la taille des insectes, la sociabilité ou la spécialisation sur les ressources. Des études bénéficiant d’une identification plus fine de chaque espèce, souvent difficile en conditions naturelles, seront nécessaires pour pouvoir mieux comprendre la hiérarchie de dominance entre espèces. </p>
<h2>De l’observation à la théorisation</h2>
<p>La fréquence et la nature des comportements agressifs <a href="https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/ecy.3958">changent avec des facteurs environnementaux tels que l’ensoleillement ou le vent</a>, ce qui suggère que leur apparition est liée au stress et à l’excitation du moment. </p>
<p>Ceci étant, la grande majorité des interactions entre individus de la même espèce ou d’espèces différentes sont de nature « neutre », c’est-à-dire sans agression. En même temps, la <a href="https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/ecy.3958">majorité d’interactions agressives n’aboutit pas avec l’agresseur prenant possession de la fleur</a>. Le fait d’être stressé ou excité par le soleil et le vent n’explique pas complètement pourquoi les insectes se livrent à un comportement coûteux et risqué, sans bénéfice évident. Quelle est la raison qui motivent les insectes floricoles à attaquer, et en ciblant seulement certaines autres espèces ?</p>
<p>Les théories existantes sur l’agression interespèces indiquent que <a href="https://nyaspubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/nyas.12082">l’agression est instable et doit amener à un partage de l’espace et le temps entre différentes espèces</a>. Ces théories ne donnent pas de piste pour imaginer le bénéfice que cette hiérarchie d’agression pourrait avoir pour les insectes floricoles, car les théories prédisent qu’une telle hiérarchie ne doit pas exister. Les hiérarchies d’agressivité peuvent exister au sein d’une population d’une même espèce. Mais selon la théorie actuelle, plutôt de se battre continuellement entre dominantes et subordonnées pour protéger leurs fleurs, un ensemble d’espèces différentes doivent évoluer des préférences florales, des territoires de fourrage, ou des horaires différenciées. Le cas des insectes floricoles agressives nous présente un petit mystère évolutif qu’il faudra étudier… une autre raison pour motiver leur conservation !</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été co-écrit avec Thomas Renaud, étudiant en M2 BEE Génie Écologique à l’Université de Poitiers, et co-auteur de l’étude parue dans la rubrique « The Scientific Naturalist » dans la revue scientifique Ecology, volume 104, issue 3, en 2023.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206076/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Meredith Root-Bernstein a reçu des financements de Direction Générale Deleguée à la Recherche, à l’Expertise, à la Valorisation et à l’Enseignement-Formations du Muséum National d'Histoire Naturelle, pour le stage de Thomas Renaud. </span></em></p>Les fleurs sont un véritable champ de bataille, où des insectes se livrent une guerre féroce. Qui sont les victimes ?Meredith Root-Bernstein, CR CNRS en ethnobiologie, ecologie, éthologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2059112023-05-19T13:22:53Z2023-05-19T13:22:53ZLes abeilles peuvent apprendre, mémoriser, penser et prendre des décisions<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/527111/original/file-20230518-21019-3s1ww.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C988%2C646&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les abeilles sont des animaux intelligents qui ressentent probablement la douleur, se souviennent des motifs et des odeurs et reconnaissent même les visages humains.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Au moment où les arbres et les fleurs s’épanouissent au printemps, les abeilles sortent de leurs nids et cachettes hivernales. Pour de nombreuses espèces, c’est le <a href="https://theconversation.com/spring-signals-female-bees-to-lay-the-next-generation-of-pollinators-134852">moment de s’accoupler</a>. Et certaines construisent de nouveaux nids solitaires ou des colonies. </p>
<p>Les abeilles et les autres pollinisateurs sont essentiels à la société. Ils fournissent environ un tiers de la <a href="https://theconversation.com/a-bee-economist-explains-honey-bees-vital-role-in-growing-tasty-almonds-101421">nourriture que nous consommons</a>, un service dont la valeur mondiale est estimée à <a href="https://doi.org/10.1038/nature20588">577 milliards de dollars américains par année</a>.</p>
<p>Mais les abeilles sont également intéressantes à bien d’autres égards. Dans mon nouveau livre, <a href="https://islandpress.org/books/what-bee-knows"><em>What a Bee Knows : Exploring the Thoughts, Memories, and Personalities of Bees</em></a>, rédigé à la lumière de mes <a href="https://scholar.google.com/citations?user=tqms8REAAAAJ&hl=en">50 années de recherche sur les abeilles</a>, j’explore la façon dont ces créatures perçoivent le monde et leurs étonnantes capacités de navigation, d’apprentissage, de communication et de mémorisation. Voici ce que j’ai appris.</p>
<h2>Au-delà des ruches et du miel</h2>
<p>À l’image des abeilles mellifères, l’idée que toutes les abeilles sont sociales et vivent dans des ruches ou des colonies avec une reine est largement répandue. Or, seulement 10 % des abeilles sont sociales. Et la plupart des types d’abeilles ne produisent pas de miel.</p>
<p>La majorité des abeilles mènent une vie solitaire, creusant des nids dans le sol ou trouvant des terriers de coléoptères abandonnés dans le bois mort pour y élire domicile. Certaines abeilles sont des cleptoparasites, c’est-à-dire qu’elles se faufilent dans des <a href="https://www.sciencefriday.com/articles/death-and-thievery-in-the-colony/">nids inoccupés pour y pondre leurs œufs</a>. On observe ce même comportement chez certains oiseaux, notamment chez les vachers qui pondent leurs œufs dans les nids d’autres oiseaux et <a href="https://madisonaudubon.org/blog/2018/8/9/into-the-nest-cowbirds-everybodys-favorite-villain">laissent les parents nourriciers, qui ne se doutent de rien, élever leurs petits</a>.</p>
<p>Quelques espèces d’abeilles tropicales, connues sous le nom d’abeilles vautours (ou abeilles charognardes), survivent en <a href="https://doi.org/10.1128/mBio.02317-21">mangeant des carcasses</a>. Leurs intestins contiennent des bactéries acidophiles qui leur permettent de digérer la viande en décomposition. </p>
<p><div data-react-class="InstagramEmbed" data-react-props="{"url":"https://www.instagram.com/p/CGWgbHdgmBB/ ?utm_source=ig_web_copy_link\u0026igshid=MzRlODBiNWFlZA==","accessToken":"127105130696839|b4b75090c9688d81dfd245afe6052f20"}"></div></p>
<h2>Des cerveaux bien remplis</h2>
<p>Les abeilles perçoivent le monde très différemment des humains. Mais de manière tout aussi complexe. Les abeilles sont des animaux intelligents qui <a href="https://doi.org/10.1016/j.anbehav.2016.05.005">ressentent probablement la douleur</a>, se souviennent des motifs et des odeurs et <a href="https://doi.org/10.1242/jeb.01929">reconnaissent même les visages humains</a>. Elles <a href="https://doi.org/10.1006/nlme.1996.0069">peuvent résoudre des labyrinthes</a> et utiliser des outils simples. </p>
<p>Les recherches montrent que les abeilles <a href="https://doi.org/10.1016/j.cub.2020.12.027">ont conscience de leur existence</a> et pourraient même avoir une <a href="https://doi.org/10.1016/j.cub.2017.08.008">forme primitive de conscience</a>. Pendant les six à dix heures que les abeilles <a href="https://doi.org/10.7717/peerj.9583">passent à dormir quotidiennement</a>, les souvenirs sont <a href="https://doi.org/10.1016/j.neubiorev.2014.09.020">consolidés</a> dans leur étonnant cerveau, un organe de la taille d’une graine de pavot qui contient un million de cellules nerveuses. Il semblerait que les <a href="https://doi.org/10.1016/j.cub.2015.09.001">abeilles puissent même rêver</a>. Et j’aime beaucoup cette idée. </p>
<h2>Un monde sensoriel étranger</h2>
<p>L’expérience sensorielle des abeilles est très différente de la nôtre. Par exemple, les humains voient le monde à travers les couleurs primaires <a href="http://hyperphysics.phy-astr.gsu.edu/hbase/vision/colcon.html">rouge, vert et bleu</a>. Pour les abeilles, les couleurs primaires sont le <a href="https://doi.org/10.1007/978-3-642-71496-2_15">vert, le bleu et l’ultraviolet</a>.</p>
<p>La vision des abeilles est <a href="https://doi.org/10.1146/annurev.ento.010908.164537">60 fois moins précise que celle des humains</a> : une abeille qui vole ne peut voir les détails d’une fleur qu’à une distance d’environ 10 pouces. Cependant, les abeilles peuvent voir des <a href="https://theconversation.com/les-tournesols-ont-des-motifs-imperceptibles-qui-attirent-les-pollinisateurs-177602">motifs floraux cachés dans l’ultraviolet</a> qui sont invisibles pour nous, et ces motifs les conduisent au nectar des fleurs.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le naturaliste David Attenborough utilise la lumière ultraviolette pour montrer comment les fleurs peuvent apparaître différemment aux abeilles et aux humains.</span></figcaption>
</figure>
<p>Les abeilles peuvent également repérer les fleurs en détectant les changements de couleur à distance. Lorsque les humains regardent un film projeté à 24 images par seconde, les images individuelles semblent se confondre avec le mouvement. Ce phénomène, appelé <a href="https://www.cchst.ca/oshanswers/ergonomics/lighting/lighting_flicker.html">seuil de fusion du papillotement</a>, indique la capacité de notre système visuel à résoudre les images en mouvement. Les abeilles ont une fréquence de fusion des scintillements beaucoup plus élevée – il faudrait passer le film 10 fois plus vite pour qu’il leur paraisse flou – et peuvent donc survoler une prairie fleurie et <a href="https://doi.org/10.1007/BF00610583">voir des points lumineux de couleur</a> qui ne se distingueraient pas pour les humains.</p>
<p>De loin, les abeilles détectent les fleurs par leur odeur. L’odorat de l’abeille est <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pone.0009110">100 fois plus sensible</a> que le nôtre. Des scientifiques ont utilisé des abeilles pour renifler des produits chimiques <a href="https://entomologytoday.org/2013/11/25/can-trained-bees-detect-cancer-in-patients/">associés au cancer</a> et <a href="https://www.cbsnews.com/boston/news/boston-researchers-train-bees-to-detect-diabetes/">au diabète</a> dans l’haleine de patients ainsi que pour détecter la présence <a href="https://www.technologyreview.com/2006/12/07/227361/using-bees-to-detect-bombs/">d’explosifs</a>. </p>
<p>Le sens du toucher des abeilles est également très développé : elles peuvent sentir de minuscules crêtes semblables à des empreintes digitales <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.82.14.4750">sur les pétales de certaines fleurs</a>. Les abeilles sont <a href="https://doi.org/10.1080/0005772X.1995.11099233">presque sourdes</a> à la plupart des sons aériens, sauf si elles sont très proches de la source. Mais elles sont sensibles aux vibrations. </p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1348645052134944771"}"></div></p>
<h2>Résoudre des problèmes</h2>
<p>Les abeilles <a href="https://doi.org/10.1080/0005772X.1995.11099233">peuvent naviguer dans des labyrinthes</a> aussi bien que les souris, et des études montrent qu’elles sont conscientes des dimensions de leur corps. Par exemple, lorsque de gros bourdons ont été entraînés à voler puis à passer par une fente dans une planche pour atteindre la nourriture de l’autre côté, les abeilles ont <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.2016872117">tourné leur corps de côté et dissimulé leurs pattes</a>. </p>
<p>Des expériences menées par le chercheur canadien Peter Kevan et Lars Chittka en Angleterre ont démontré que les abeilles ont une capacité d’apprentissage remarquable. Des bourdons ont été entraînés à tirer une ficelle – en d’autres termes, à utiliser un outil – reliée à un disque en plastique contenant des cavités cachées remplies d’eau sucrée. Ils pouvaient voir les puits de sucre mais ne pouvaient pas obtenir la récompense <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pbio.1002564">à moins de tirer sur la ficelle</a>.</p>
<p>D’autres abeilles ouvrières ont été placées dans une cage grillagée où elles pouvaient voir ce que faisaient un autre groupe d’abeilles entraînées à tirer cette ficelle. Une fois les nouvelles élèves libérées, elles ont également tiré sur la ficelle pour obtenir les friandises. Cette étude a démontré ce que les scientifiques appellent <a href="https://www.britannica.com/science/social-learning">l’apprentissage social</a> – agir de manière à imiter le comportement des autres.</p>
<h2>La pollinisation par les vibrations</h2>
<p>Même la pollinisation, l’un des comportements les plus connus des abeilles, peut être beaucoup plus compliquée qu’il n’y paraît. </p>
<p>Le processus de base est similaire pour tous les types d’abeilles : les femelles transportent sur leur corps des grains de pollen, les cellules sexuelles des plantes, d’une fleur à l’autre, afin de collecter du pollen et du nectar pour se nourrir et nourrir leurs larves en développement. Lorsque le pollen frotte sur le <a href="https://www.amnh.org/learn-teach/curriculum-collections/biodiversity-counts/plant-identification/plant-morphology/parts-of-a-flower">stigmate d’une fleur</a>, il y a pollinisation. </p>
<p>Mon domaine de recherche préféré sur les abeilles examine une méthode appelée <a href="https://doi.org/10.1016/j.pbi.2013.05.002">pollinisation par vibration</a>. Les abeilles l’utilisent sur environ 10 % des 350 000 espèces de plantes à fleurs du monde qui possèdent des <a href="https://www.amnh.org/learn-teach/curriculum-collections/biodiversity-counts/plant-identification/plant-morphology/parts-of-a-flower">anthères</a> spéciales, structures qui produisent du pollen. </p>
<p>Par exemple, les cinq anthères d’une fleur de tomate sont pincées ensemble, comme les doigts fermés d’une main. Le pollen est libéré par un ou deux petits pores situés à l’extrémité de chaque anthère. </p>
<p>Lorsqu’une femelle bourdon se pose sur une fleur de tomate, elle mord une anthère et contracte ses muscles de vol de <a href="https://doi.org/10.1093/jxb/erab428">100 à 400 fois par seconde</a>. Ces puissantes vibrations éjectent le pollen des pores de l’anthère sous la forme d’un nuage qui happe l’abeille. Et tout ça, en quelques dixièmes de seconde. </p>
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<figcaption><span class="caption">Des bourdons font une démonstration de pollinisation par vibration sur une fleur de violette de Perse.</span></figcaption>
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<p>L’abeille, alors suspendue par une patte, racle le pollen dans des « paniers » – des structures situées sur ses pattes arrière. Elle répète ensuite la vibration sur les anthères restantes avant de passer à d’autres fleurs.</p>
<p>Les abeilles utilisent également la pollinisation par vibration sur les fleurs de bleuets, de canneberges, d’aubergines et de kiwis. Mes collègues et moi-même menons des expériences pour déterminer la biomécanique entourant la <a href="https://doi.org/10.1098/rsif.2022.0040">façon dont les vibrations des abeilles éjectent le pollen des anthères</a>. </p>
<h2>Planter pour les abeilles</h2>
<p>De nombreuses espèces d’abeilles sont en <a href="https://theconversation.com/il-faut-sauver-les-abeilles-on-ne-peut-pas-se-permettre-de-perdre-nos-pollinisateurs-naturels-117280">déclin dans le monde entier</a>, en raison de facteurs de stress tels que les <a href="http://dx.doi.org/10.1126/science.1255957">parasites, les pesticides et la perte d’habitat</a>.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="Cubes de bois remplis de brindilles et de briques" src="https://images.theconversation.com/files/526311/original/file-20230515-18664-v796la.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/526311/original/file-20230515-18664-v796la.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/526311/original/file-20230515-18664-v796la.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/526311/original/file-20230515-18664-v796la.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/526311/original/file-20230515-18664-v796la.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/526311/original/file-20230515-18664-v796la.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/526311/original/file-20230515-18664-v796la.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un « hôtel à insectes » pour abeilles solitaires et autres insectes nicheurs, fabriqué à partir de tiges, de briques et de blocs de bois.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/news-photo/insect-hotel-for-solitary-bees-and-artificial-nesting-place-news-photo/601067110">Arterra/Universal Images Group vis Getty Images</a></span>
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<p>Que vous ayez une jardinière en appartement ou plusieurs hectares de terrain, vous pouvez poser quelques <a href="https://theconversation.com/to-help-insects-make-them-welcome-in-your-garden-heres-how-153609">gestes simples pour aider les abeilles</a>. </p>
<p>Tout d’abord, plantez des fleurs sauvages indigènes afin que les fleurs soient disponibles à chaque saison. Deuxièmement, essayez d’éviter d’utiliser des insecticides ou des herbicides. Troisièmement, aménagez un terrain dégagé où les abeilles fouisseuses peuvent faire leur nid. </p>
<p>Avec un peu de chance, vous aurez bientôt de nouvelles voisines bourdonnantes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/205911/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stephen Buchmann ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les scientifiques découvrent des phénomènes étonnants sur la perception sensorielle et les capacités cognitives des abeilles.Stephen Buchmann, Adjunct Professor of Entomology and of Ecology and Evolutionary Biology, University of ArizonaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1988572023-03-03T14:30:45Z2023-03-03T14:30:45ZPourquoi les chats et les chiens ont-ils des quarts d’heure de folie ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/507216/original/file-20230130-11405-jfvv4y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=37%2C9%2C6187%2C4150&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Si les quarts d’heure de folie font partie de la routine de jeu de votre animal, cela signifie qu’il est heureux et qu’il s’amuse.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Est-ce que votre chat ou votre chien a soudainement un regain d’énergie et réalise des exploits athlétiques qui rendraient jaloux un médaillé olympique ? Bienvenue dans le monde des quarts d’heure de folie.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/mais-que-petrissent-donc-les-chats-198856">Mais que pétrissent donc les chats ?</a>
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<p>Les quarts d’heure de folie sont des périodes intenses d’activités hautement énergétiques, où l’animal peut se mettre à courir, à tourner, à sauter ou à se rouler par terre. Le tout à toute vitesse.</p>
<p>On a proposé comme nom scientifique à ce phénomène « période d’activité frénétique aléatoire » (FRAP, pour « frenetic random activity periods »). Chez les lapins, on parle de <a href="https://www.ingentaconnect.com/content/aalas/jaalas/2020/00000059/00000004/art00003">binkies</a>. Mais de nombreux propriétaires de chats et de chiens les appellent zoomies, en anglais, ou quarts d’heure de folie.</p>
<p>Alors pourquoi nos animaux ont-ils des quarts d’heure de folie ? Faut-il s’en inquiéter ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1605829086240276482"}"></div></p>
<h2>D’où viennent les quarts d’heure de folie ?</h2>
<p>Repensez aux moments où votre chat ou votre chien s’offre son quart d’heure de folie.</p>
<p>Cela peut arriver après le bain, dans le parc à chiens, au milieu de la nuit et, bien sûr, souvent, on a aucune idée de la cause.</p>
<p>Le déclencheur peut être l’excitation ou une soudaine hausse de la stimulation.</p>
<p>Chez les chats, un déclencheur fréquent est le passage par le bac à litière. C’est ce qu’on appelle la « caca-phorie », une sensation d’euphorie après la défécation. Ce phénomène peut être dû au fait que le passage des selles stimule le <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5859128/">nerf vague</a>, ce qui entraîne des sentiments positifs et une baisse du rythme cardiaque et de la pression artérielle.</p>
<p>Le quart d’heure de folie peut être considéré comme un moment de jeu, car les deux comportements partagent de nombreuses caractéristiques. Ces moments seraient donc intrinsèquement agréables, ou, en d’autres termes, une vraie fête.</p>
<p>Si les quarts d’heure de folie font partie de la routine de jeu de votre animal, cela signifie qu’il est heureux et qu’il s’amuse.</p>
<p>Bien que nous ne sachions pas encore si ce phénomène est plus fréquent à certains moments de la journée, ou s’il se produit plus souvent chez certaines races que chez d’autres, nous considérons qu’il est généralement une indication d’un niveau élevé d’excitation et, probablement, d’une bonne humeur.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/504366/original/file-20230113-26-li24wl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un chat court à toute vitesse autour d’une maison" src="https://images.theconversation.com/files/504366/original/file-20230113-26-li24wl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/504366/original/file-20230113-26-li24wl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/504366/original/file-20230113-26-li24wl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/504366/original/file-20230113-26-li24wl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/504366/original/file-20230113-26-li24wl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=481&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/504366/original/file-20230113-26-li24wl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=481&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/504366/original/file-20230113-26-li24wl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=481&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Votre chat court-il parfois dans la maison à toute vitesse, apparemment sans raison ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les humains sont aussi des animaux et certaines personnes ont également ce qui pourrait s’apparenter à des quarts de folie.</p>
<p>Vous est-il arrivé d’éprouver soudain une excitation intense et d’avoir une énergie débordante ? Peut-être avez-vous ressenti le besoin de sauter, de vous trémousser ou de danser, avant que cette sensation ne s’estompe et que vous ne redeveniez comme avant.</p>
<p>Cela peut être causé par une multitude de choses – une situation emballante ou nouvelle, un pic d’énergie après une longue période de repos ou un changement de votre chimie interne. Vous avez peut-être vécu une poussée d’<a href="https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/hormone-adrenaline-2938/">adrénaline</a> causée par l’excitation, la surstimulation ou le stress.</p>
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<p><a href="https://giphy.com/gifs/parkour-DoCIC5Pxp57qg">via Giphy</a></p>
<h2>Les quarts d’heure de folie sont-ils toujours un signe de bonheur ?</h2>
<p>Il ne faut pas oublier que les animaux sont des individus et que, tout comme nous, la raison pour laquelle ils se comportent comme ils le font est complexe et multiple.</p>
<p>Lorsque vous évaluez le comportement de votre animal, il est essentiel de tenir compte du contexte.</p>
<p>Il est beaucoup question en ligne des quarts d’heure de folie, mais il y a un manque de recherche scientifique sur leurs causes et leur fréquence, et il n’existe même pas de définition officielle du phénomène.</p>
<p>Demandez-vous : suis-je convié aux quarts d’heure de folie ?</p>
<p>Chez les chiens et les chats, les quarts d’heure de folie peuvent inclure une invitation à se joindre à eux – chez les chiens, il s’agit le plus souvent d’une position de révérence, où le chien semble s’incliner devant un autre dans le but d’indiquer qu’il a envie de jouer, suivie d’une pause que l’on observe souvent dans le <a href="https://doi.org/10.1007/s10071-008-0175-y">jeu dyadique</a> (jeu entre deux individus ou plus).</p>
<p>Chez les chats, l’invitation peut consister à interagir physiquement avec vous ou à se rouler sur le sol à plusieurs reprises. Si c’est le cas, votre animal est probablement excité et souhaite jouer avec vous.</p>
<h2>Que faire quand mon animal devient fou ?</h2>
<p>À moins qu’il n’y ait un élément de danger immédiat (par exemple, si cela se produit sur ou près d’une route), il n’y a aucune raison d’empêcher votre chat ou votre chien de s’éclater.</p>
<p>Les chats et les chiens sont des as de l’évitement des obstacles, même à grande vitesse. Si vous avez la chance de recevoir une invitation pour participer à la frénésie, n’hésitez pas à vous joindre au jeu.</p>
<p>Le fait de partager des activités telles que le jeu avec votre chien ou votre chat peut comporter de nombreux <a href="https://doi.org/10.1016/j.applanim.2006.03.009">bienfaits</a> pour la relation humain-animal. C’est aussi très amusant pour vous !</p>
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<p><a href="https://giphy.com/gifs/post-zoomies-bathtime-ClFhnciqiinwk">via Giphy</a></p>
<h2>Quand doit-on s’inquiéter ?</h2>
<p>Les quarts d’heure de folie font partie intégrante de la vie d’un chien ou d’un chat et sont tout à fait normaux (et amusants).</p>
<p>Parfois, cependant, cela peut être un symptôme de <a href="https://books.google.com.au/books/about/Manual_of_Clinical_Behavioral_Medicine_f.html?id=ANzWPAAACAAJ&redir_esc=y">stress ou d’un problème de santé</a>.</p>
<p>Comme toujours, c’est le contexte qui compte. Vous devez consulter votre vétérinaire si votre chien ou votre chat manifeste le comportement en question pendant de longues périodes (en particulier, s’il tourne en rond ou si le comportement survient en période de confinement). Il peut s’agir de signes d’un <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-022-07443-6">trouble du comportement répétitif</a>.</p>
<p>Si vous avez du mal à dévier ou à faire cesser ce comportement, ou s’il entraîne des blessures, parlez-en à un vétérinaire.</p>
<p>Même si vous n’avez pas envie de participer à la frénésie, prenez le temps de vous arrêter et de regarder votre chien ou votre chat s’amuser.</p>
<p>Il nous arrive tous d’avoir besoin d’un moment de folie…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198857/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Susan Hazel est affiliée au Dog & Cat Management Board of South Australia et à la RSPCA South Australia.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Ana Goncalves Costa est affiliée à l'Institut Delta.
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julia Henning ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les quarts d’heure de folie sont des périodes intenses d’activités hautement énergétiques, où l’animal peut se mettre à courir, à tourner, à sauter ou à se rouler par terre. Le tout à toute vitesse.Susan Hazel, Associate Professor, School of Animal and Veterinary Science, University of AdelaideAna Goncalves Costa, PhD student, University of AdelaideJulia Henning, PhD Candidate, University of AdelaideLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1988562023-02-03T15:00:11Z2023-02-03T15:00:11ZMais que pétrissent donc les chats ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/507213/original/file-20230130-9071-jvpwxu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=34%2C6%2C4566%2C2579&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Lorsque votre chat est sur vos genoux et qu’il fait du pain, c’est une façon de dire « nous sommes liés » ou « tu fais partie de mon groupe social ». Ou, pour une vision plus humaine, « tu es mon pote ».</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Le « pétrissage », c’est ce que fait un chat quand il malaxe un objet avec ses pattes avant, qui s’ouvrent et se ferment, l’une après l’autre.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comment-caresser-un-chat-selon-la-science-120936">Comment caresser un chat, selon la science</a>
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<p>Ce mouvement, qui doit son nom à sa ressemblance avec l’action de pétrir de la pâte, est répété de manière rythmée. Vous avez peut-être déjà vu votre félin faire ce geste et vous êtes demandé d’où peut bien lui venir ce comportement.</p>
<p>Alors, pourquoi les chats font-ils du pétrissage ? Cette action peut-elle nous apprendre quelque chose sur ce qu’ils ressentent et que faire quand ils « font du pain » sur nous ?</p>
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<figcaption><span class="caption">Video : Andrea Harvey.</span></figcaption>
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<h2>Les origines évolutives du pétrissage</h2>
<p>Les chats commencent à faire ce geste lorsqu’ils sont de tout petits chatons qui boivent le lait de leur mère. Le pétrissage est associé à la tétée et contribue à stimuler la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1558787815001549">production de lait</a> de la mère par la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0093691X05001858">libération d’ocytocine</a>, et a probablement évolué pour cette raison.</p>
<p>Le pétrissage présente également un autre avantage évolutif. Il peut être utilisé comme une forme de communication tactile et phéromonale entre le chaton et la mère.</p>
<p>Les chats possèdent des glandes odoriférantes dans leurs coussinets, et lorsqu’ils malaxent, ces glandes libèrent des phéromones (messages chimiques qui servent à communiquer).</p>
<p>En pétrissant leur mère, ils libèrent des <a href="https://doi.org/10.1016/S0195-5616(02)00128-6">phéromones</a> associées à l’attachement, à l’identification, à l’état de santé ou à bien d’autres informations.</p>
<p>L’une d’entre elles, appelée « phéromone apaisante du chat », est libérée par les glandes sébacées situées autour des glandes mammaires.</p>
<p>En plus d’être importante pour l’attachement de la mère avec ses petits, la phéromone apaisante du chat a aussi le pouvoir de traiter l’<a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/1098612X18774437">agressivité</a> chez les chats adultes.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/492879/original/file-20221101-26-w2sie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C18%2C6200%2C4573&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un chaton pétrit les couvertures d’un lit" src="https://images.theconversation.com/files/492879/original/file-20221101-26-w2sie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C18%2C6200%2C4573&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/492879/original/file-20221101-26-w2sie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/492879/original/file-20221101-26-w2sie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/492879/original/file-20221101-26-w2sie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=445&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/492879/original/file-20221101-26-w2sie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=559&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/492879/original/file-20221101-26-w2sie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=559&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/492879/original/file-20221101-26-w2sie5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=559&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le pétrissage peut constituer une forme de communication tactile et phéromonale entre le chaton et sa mère.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Si le pétrissage est un comportement de chaton, pourquoi mon chat adulte le fait-il encore ?</h2>
<p>Si le pétrissage a évolué pour stimuler la production de lait et transmettre des messages chimiques et tactiles entre le chaton et sa mère, c’est également un comportement courant des chats adultes, en raison d’un phénomène appelé <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/B9780123945860000019">néoténie</a>.</p>
<p>On parle de néoténie lorsqu’un animal conserve ses traits physiques ou comportementaux juvéniles à l’âge adulte. Il est probable que ces caractéristiques permettent aux chats de socialiser avec les humains et les autres félins ou animaux de la maison.</p>
<p>Le pétrissage, notamment, peut se poursuivre à l’âge adulte, car il peut servir à communiquer des messages.</p>
<p>Lorsque votre chat est sur vos genoux et qu’il fait du pain, c’est une façon de dire « nous sommes liés » ou « tu fais partie de mon groupe social ». Ou, pour une vision plus humaine, « tu es mon pote ».</p>
<p>Si on récompense son animal par de l’attention lorsqu’il fait du pétrissage, on renforce son comportement.</p>
<p>Certains chats aiment faire du pétrissage sur des couvertures douces ou en laine tout en les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1558787815001215?via%3Dihub">tétant</a>, comme s’il s’agissait d’une tétine. Cela peut être relaxant ou apaisant pour le chat en raison de cette association.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/492890/original/file-20221101-12-43vmyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="un chat pétrit sur le lit" src="https://images.theconversation.com/files/492890/original/file-20221101-12-43vmyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/492890/original/file-20221101-12-43vmyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/492890/original/file-20221101-12-43vmyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/492890/original/file-20221101-12-43vmyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/492890/original/file-20221101-12-43vmyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/492890/original/file-20221101-12-43vmyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/492890/original/file-20221101-12-43vmyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">On renforce son geste si on récompense son chat par de l’attention lorsqu’il fait du pétrissage.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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<h2>Que nous apprend le pétrissage sur les sentiments de notre chat ?</h2>
<p>Dans la plupart des cas, le pétrissage signifie qu’un chat se sent bien.</p>
<p>Cependant, s’il fait du pétrissage (surtout en tétant) très souvent, pendant une longue période, de façon compulsive ou si cela commence à blesser ses coussinets, ses pattes ou sa bouche, cela peut être un signe que l’animal est stressé ou qu’il souffre, et il vaut mieux alors consulter un vétérinaire.</p>
<p>Le fait de pétrir et de téter de manière compulsive est un problème qu’on observe fréquemment <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1558787815001215?via%3Dihub">chez les chats siamois et birmans</a>.</p>
<p>Ce ne sont pas tous les chats qui aiment faire du pain. Tout comme les gens, les chats sont des individus et chacun montre à sa façon qu’il est bien ou que vous faites partie des siens. </p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/492885/original/file-20221101-26-cntbsa.gif?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C1%2C89%2C67&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="un chat pétrit un chien" src="https://images.theconversation.com/files/492885/original/file-20221101-26-cntbsa.gif?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C1%2C89%2C67&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/492885/original/file-20221101-26-cntbsa.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/492885/original/file-20221101-26-cntbsa.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/492885/original/file-20221101-26-cntbsa.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/492885/original/file-20221101-26-cntbsa.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/492885/original/file-20221101-26-cntbsa.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/492885/original/file-20221101-26-cntbsa.gif?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le pétrissage indique probablement que votre chat se sent bien.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Giphy.</span></span>
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<h2>Au secours ! Mon chat me fait mal !</h2>
<p>Le pétrissage est un comportement normal qui peut aider votre chat à se sentir lié à vous. Si ses griffes sont un peu trop présentes à votre goût, étendez une couverture épaisse sur vos jambes. Évitez de le gronder ou de le chasser de sur vos genoux.</p>
<p>Pour l’encourager lorsqu’il vous pétrit en y mettant le moins de griffes possible, offrez-lui alors plus d’attention en le flattant ou en lui donnant une gâterie.</p>
<p>Vous pouvez même ajouter un signal pour demander qu’il rétracte ses griffes. Quelque chose de court comme « griffes ! » Associez le mot et une récompense alimentaire au comportement désiré.</p>
<p>Et si votre cœur est pétri d’amour, c’est parfait comme chat !</p>
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<p><a href="https://giphy.com/gifs/gatos-uYh2E1meNXAFa"></a></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198856/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Susan Hazel est affiliée au Dog & Cat Management Board of SA, à RSPCA SA et à Animal Therapies Ltd.
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julia Henning ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le pétrissage est un comportement typique du chaton. Mais il peut se poursuivre à l’âge adulte, car il peut servir à communiquer des messages.Susan Hazel, Associate Professor, School of Animal and Veterinary Science, University of AdelaideJulia Henning, PhD Candidate, University of AdelaideLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1939162022-11-09T15:03:45Z2022-11-09T15:03:45ZAprès les humains, les abeilles sont les seuls animaux capables de faire la différence entre les nombres pairs et impairs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/493364/original/file-20221103-24-opavd5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C29%2C3876%2C2555&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En apprenant à d’autres espèces animales à distinguer les nombres pairs et impairs et à effectuer d’autres opérations mathématiques abstraites, nous pouvons en apprendre davantage sur la façon dont les mathématiques et la pensée abstraite sont apparues chez les humains.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>« Deux, quatre, six, huit… »</p>
<p>Enfants, nous apprenons que les chiffres peuvent être pairs ou impairs. Et il existe de nombreuses façons de les classer.</p>
<p>Nous pouvons mémoriser la règle selon laquelle les chiffres se terminant par 1, 3, 5, 7 ou 9 sont impairs, tandis que ceux se terminant par 0, 2, 4, 6 ou 8 sont pairs. Nous pouvons aussi diviser un nombre par 2 : si le résultat est un nombre entier, cela signifie qu’il est pair, sinon il est forcément impair.</p>
<p>De même, dans le monde réel, nous pouvons utiliser l’appariement lorsque nous travaillons avec des objets. Si un élément reste non apparié, nous avons donc un nombre impair d’objets.</p>
<p>Jusqu’à présent, la catégorisation paire et impaire, également appelée classification par parité, n’avait jamais été prouvée chez les animaux non humains. Dans une nouvelle étude <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fevo.2022.805385/full">publiée récemment</a> dans la revue <em>Frontiers in Ecology and Evolution</em>, nous démontrons que les abeilles domestiques peuvent apprendre à le faire.</p>
<h2>Pourquoi la classification par parité est-elle particulière ?</h2>
<p>Les tâches de parité (telles que la catégorisation des impairs et des pairs) sont considérées comme des <a href="https://psycnet.apa.org/record/1993-44067-001?doi=1">concepts numériques abstraits et de haut niveau chez les humains</a>.</p>
<p>Il est intéressant de noter que l’être humain fait preuve de biais de précision, de vitesse, de langage et de relations spatiales lorsqu’il classe les nombres en catégories paire ou impaire. Par exemple, nous <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0010027799000487">avons tendance à répondre plus rapidement</a> aux nombres pairs avec des actions effectuées par notre main droite, et aux nombres impairs avec des actions effectuées par notre main gauche.</p>
<p>Nous sommes également plus rapides, et plus précis, lorsque nous classons les nombres pairs par rapport aux nombres impairs. Et les recherches ont montré que les enfants associent généralement le mot <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0022096599925183">« pair » à « droite » et « impair » à « gauche »</a>.</p>
<p>Ces études suggèrent que ces biais peuvent être appris ou innés dans le cas des nombres pairs et impairs, et qu’ils peuvent être le résultat de l’évolution, de la transmission culturelle ou d’une combinaison des deux.</p>
<p>L’importance de la parité, au-delà de son utilisation en mathématiques, n’est pas claire. Les origines des biais restent donc floues. Nous pourrions en apprendre davantage sur notre propre relation avec la parité en comprenant pourquoi et comment d’autres animaux peuvent reconnaître (ou apprendre à reconnaître) les nombres pairs et impairs.</p>
<h2>Entraîner les abeilles à apprendre la parité et l’imparité</h2>
<p>Des études ont révélé que les abeilles peuvent apprendre à <a href="https://theconversation.com/bees-join-an-elite-group-of-species-that-understands-the-concept-of-zero-as-a-number-97316">classer des quantités</a>, à effectuer des additions et des soustractions simples, à <a href="https://theconversation.com/we-taught-bees-a-simple-number-language-and-they-got-it-117816">associer des symboles à des quantités</a> et à <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2589004220303072">associer des concepts de taille et de nombre</a>.</p>
<p>Pour enseigner aux abeilles une tâche de parité, nous avons séparé les individus en deux groupes. L’un d’eux a été entraîné à associer les nombres pairs à de l’eau sucrée et les nombres impairs à un liquide amer (de la quinine). Pour l’autre groupe, les nombres impairs étaient associés à de l’eau sucrée et les nombres pairs à de la quinine.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Image montrant un schéma d’une abeille à qui l’on montre un tableau de quantités paires et impaires sur un panneau circulaire dans trois essais différents" src="https://images.theconversation.com/files/457822/original/file-20220413-12-dpkge8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/457822/original/file-20220413-12-dpkge8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/457822/original/file-20220413-12-dpkge8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/457822/original/file-20220413-12-dpkge8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=352&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/457822/original/file-20220413-12-dpkge8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/457822/original/file-20220413-12-dpkge8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/457822/original/file-20220413-12-dpkge8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=442&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Voici un exemple d’une abeille entraînée à associer des stimuli « pairs » à une récompense sur 40 choix d’entraînement.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Scarlett Howard), Fourni par l’auteure</span></span>
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</figure>
<p>Nous avons entraîné des abeilles individuelles en utilisant des comparaisons de nombres pairs et impairs (avec des cartes présentant 1 à 10 formes imprimées) jusqu’à ce qu’elles choisissent la bonne réponse avec une précision de 80 %.</p>
<p>Étonnamment, les deux groupes ont appris à des rythmes différents. Les abeilles dressées pour associer les nombres impairs à l’eau sucrée ont appris plus vite. Leur biais d’apprentissage en faveur des nombres impairs était à l’opposé de celui des humains, qui catégorisent plus rapidement les nombres pairs.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="Abeilles se tenant sur l’arête d’une plate-forme en plexiglas gris et buvant un liquide clair (eau sucrée)" src="https://images.theconversation.com/files/457280/original/file-20220411-19-z8jc37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/457280/original/file-20220411-19-z8jc37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=834&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/457280/original/file-20220411-19-z8jc37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=834&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/457280/original/file-20220411-19-z8jc37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=834&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/457280/original/file-20220411-19-z8jc37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1048&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/457280/original/file-20220411-19-z8jc37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1048&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/457280/original/file-20220411-19-z8jc37.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1048&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les abeilles se posaient sur une plate-forme pour boire de l’eau sucrée pendant l’expérience.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Scarlett Howard), Fourni par l’auteure</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous avons ensuite testé chaque abeille avec d’autres chiffres qui n’avaient pas été montrés pendant l’entraînement. Fait impressionnant, elles ont classé les nouveaux chiffres de 11 ou 12 éléments comme impairs ou pairs avec une précision d’environ 70 %.</p>
<p>Nos résultats ont montré que les abeilles, avec leurs cerveaux miniatures, étaient capables de comprendre les concepts d’imparité et de parité. Ainsi, un cerveau humain complexe et imposant <a href="https://www.nature.com/scitable/blog/brain-metrics/are_there_really_as_many/#:%7E:text=Approximately%2086%20billion%20neurons%20in,between%20200%20and%20400%20billion.">composé de 86 milliards de neurones</a>, et un cerveau d’insecte miniature <a href="https://rsv.org.au/one-two-bee/#:%7E:text=Les%20cerveaux%20des%20abeaux%20sont,des%20capacit%C3%A9s%20de%20traitement%20neural%20en%20comparaison.">comptant environ 960 000 neurones</a> peuvent tous deux classer les nombres par parité.</p>
<p>La tâche de parité était-elle donc moins complexe que nous le pensions ? Pour trouver la réponse, nous nous sommes tournés vers la technologie biomimétique.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/0dMRzGQKKLU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Nous avons entraîné les abeilles à choisir des nombres pairs. Dans cette vidéo, nous voyons l’abeille inspecter chaque carte sur l’écran, avant de faire le bon choix sur celle présentant un nombre pair de 12 formes.</span></figcaption>
</figure>
<h2>Création d’un réseau de neurones artificiels simple</h2>
<p>Les réseaux neuronaux artificiels ont été l’un des premiers algorithmes d’apprentissage mis au point pour l’apprentissage automatique. Inspirés des neurones biologiques, ils sont évolutifs et peuvent s’attaquer à des tâches complexes de reconnaissance et de classification en utilisant la <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/BF02478259">logique des propositions</a>.</p>
<p>Nous avons construit un réseau neuronal artificiel simple à cinq neurones seulement pour effectuer un test de parité. Entre 0 et 40 impulsions ont été transmises au réseau, qui les a classées comme impaires ou paires. Malgré sa simplicité, le réseau neuronal a correctement classé les nombres d’impulsions comme impairs ou pairs avec une précision de 100 %.</p>
<p>Cela nous a montré que, <em>en principe</em>, la classification par parité ne nécessite pas un cerveau imposant et complexe comme celui d’un humain. Il ne faut cependant pas en déduire que les abeilles et le réseau neuronal simple ont utilisé le même mécanisme pour résoudre la tâche.</p>
<h2>Simple ou complexe ?</h2>
<p>Nous ignorons encore comment les abeilles ont pu effectuer la tâche de parité. Les explications peuvent porter sur des processus simples ou complexes. Par exemple, les abeilles peuvent avoir :</p>
<ol>
<li><p>apparié des éléments pour obtenir un élément non apparié</p></li>
<li><p>effectué des calculs de division – bien que la division n’ait pas été démontrée auparavant chez les abeilles</p></li>
<li><p>compté chaque élément, puis appliqué la règle de classification pair/impair à la quantité totale.</p></li>
</ol>
<p>En apprenant à d’autres espèces animales à distinguer les nombres pairs et impairs et à effectuer d’autres opérations mathématiques abstraites, nous pouvons en apprendre davantage sur la façon dont les mathématiques et la pensée abstraite sont apparues chez les humains.</p>
<p>La découverte des mathématiques est-elle une conséquence inévitable de l’intelligence ? Ou les mathématiques sont-elles en quelque sorte liées au cerveau humain ? Les différences entre les humains et les autres animaux sont-elles moins importantes que nous le pensions jusque-là ? Peut-être pouvons-nous en tirer une compréhension intellectuelle ; il suffit d’être à l’écoute.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/193916/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Scarlett Howard a reçu une bourse du programme de formation à la recherche (RTP) du gouvernement australien, de l'université RMIT, de la Fondation Fyssen, du prix français L'Oréal-UNESCO pour les femmes et la science pour les jeunes talents, et de l'université Deakin. Elle est affiliée à Pint of Science Australia en tant que responsable média bénévole.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Adrian Dyer a reçu des financements du Conseil australien de la recherche. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Andrew Greentree a reçu des financements du Conseil australien de la recherche, du Defence Science and Technology Group, du SmartSat CRC, de l'Office de la recherche scientifique de l'US Air Force, de l'Office asiatique de la recherche et du développement aérospatiaux, de l'Office de la recherche navale des États-Unis et de la Foundation for Australia-Japan Studies.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jair Garcia ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Avec leur cerveau miniature de 960 000 neurones (contre 86 milliards chez l’homme), les abeilles ont réussi à comprendre les concepts d’impairs et de pairs.Scarlett Howard, Lecturer, Monash UniversityAdrian Dyer, Associate Professor, Monash UniversityAndrew Greentree, Professor of Quantum Physics and Australian Research Council Future Fellow, RMIT UniversityJair Garcia, Researcher and analyst, Monash UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1801922022-04-10T20:12:53Z2022-04-10T20:12:53ZDes souris, des vaches, des odeurs et des hommes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/455062/original/file-20220329-2839-1istwvw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=18%2C0%2C2048%2C1361&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les vaches recherchent plus les odeurs d'humains non-stressés que stressés.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/27702659@N00/6258240517/">Oli/flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Les animaux, dotés d’organes sensoriels différents des nôtres, ne perçoivent pas le monde de la même façon que nous. Si notre sensorialité est à dominante audiovisuelle, l’olfaction prévaut autant que la vision et l’audition chez la plupart des autres mammifères. Afin de vivre au mieux avec les animaux qui nous entourent, que ce soit nos animaux de compagnie ou ceux d’élevage, il est nécessaire de comprendre les bases sensorielles de la relation homme-animal.
Pour cela se pose la question de la contagion des émotions de l’homme vers l’animal, mais également de l’animal vers l’homme, afin de respecter voire d’améliorer leur bien-être, mais également le nôtre.</p>
<p>La question du bien-être des animaux a pris une importance croissante et se trouve au cœur des <a href="https://www.cabdirect.org/cabdirect/abstract/20203102977">préoccupations sur l’avenir de l’élevage</a>. En 2018, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) propose une <a href="https://www.anses.fr/fr/content/avis-de-lanses-relatif-au-%C2%AB%C2%A0bien-%C3%AAtre-animal-contexte-d%C3%A9finition-et-%C3%A9valuation-%C2%BB">définition du bien-être animal</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Le bien-être d’un animal est l’état mental et physique positif lié à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux, ainsi que de ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l’animal. »</p>
</blockquote>
<p>L’ANSES souligne également que « les actions humaines positives envers l’animal (la bientraitance) sont un préalable indispensable au bien-être des animaux ». La relation homme-animal est donc une <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fvets.2020.590867/full">composante clé du bien-être animal</a>, mais aussi de celui de l’éleveur. En effet, une relation basée sur des rapports calmes et avec des animaux non stressés permet la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/0168159194901317">diminution des risques d’accident</a>. L’éleveur est de ce fait moins stressé au quotidien, et un cercle vertueux s’établit. L’évaluation de cette relation passe nécessairement par la prise en compte de la perception sensorielle que l’animal a de l’humain.</p>
<h2>L’olfaction, un sens d’importance chez les mammifères</h2>
<p>De façon surprenante, l’influence des indices olfactifs humains sur les animaux d’élevage a été jusqu’ici peu considérée, bien que l’olfaction soit une modalité sensorielle dominante chez les mammifères. De ce fait, le rôle de l’olfaction est potentiellement massif, et ce dès les premiers temps du développement. Elle soutient et facilite la mise en place des premières interactions sociales et des relations d’attachement sélectif. Chez les ovins, par exemple, les agneaux nouveau-nés <a href="https://doi.org/10.1163/156853995X00603">recherchent les odeurs acquises <em>in-utero</em></a> par rapport à des odeurs nouvelles.</p>
<p>Les animaux d’élevage et de laboratoire sont également capables de percevoir les émotions d’autres congénères via des signaux olfactifs, induisant des <a href="https://hal.inrae.fr/hal-02623245/document">modifications comportementales et physiologiques</a>. Par exemple, les vaches vont mettre plus de temps à manger dans un seau ou à explorer un nouvel objet si elles sont mises en présence d’odeurs d’urine de congénères stressés.</p>
<p>Enfin, dans une relation de proie-prédateur, les animaux sont capables d’identifier olfactivement des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0149763405000588">animaux d’espèce différente</a>. Par exemple, les rongeurs (les proies) qui sont mis en présence de fèces de chats ou de renards (leurs prédateurs) vont montrer des comportements de peur, comme le « freezing » (le fait d’être pétrifié et de ne plus bouger) ou un évitement de ces fèces, mais également sécréter des hormones de stress comme le cortisol.</p>
<p>Ces études montrent l’importance de la communication olfactive entre les espèces animales (que ce soit au sein de la même espèce ou entre espèces animales), mais généralement pas avec l’homme. Cependant, l’importance de l’olfaction dans les interactions entre l’homme et l’animal commence elle aussi à émerger.</p>
<h2>La communication olfactive entre humains et animaux domestiques</h2>
<p>Des animaux de compagnie ou de loisirs tels que le chien ou le cheval peuvent discriminer des odeurs corporelles humaines « émotionnelles », c’est-à-dire échantillonnées chez des émetteurs exposés à un état émotionnel donné (peur ou joie). En présence d’odeurs humaines de peur, des <a href="https://europepmc.org/article/med/28988316">Labradors et des Golden retrievers</a> ont montré des comportements de peur : ils avaient une fréquence cardiaque plus rapide et restaient plus près de leur maître. À l’inverse, en présence d’odeurs humaines de joie, leur fréquence cardiaque était plus lente et ils montraient des comportements joyeux envers des personnes inconnues en les approchant et en interagissant avec elles. Les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S016815912030160X">chevaux</a>, de leur côté, sont plus vigilants (ils lèvent leur tête plus souvent et plus longtemps) en présence d’odeurs humaines de peur qu’en présence d’odeurs de joie.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="2 chiots labrador blancs assis dans l'herbe" src="https://images.theconversation.com/files/455063/original/file-20220329-3198-dumwzc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/455063/original/file-20220329-3198-dumwzc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/455063/original/file-20220329-3198-dumwzc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/455063/original/file-20220329-3198-dumwzc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=426&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/455063/original/file-20220329-3198-dumwzc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/455063/original/file-20220329-3198-dumwzc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/455063/original/file-20220329-3198-dumwzc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=535&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les chiens réagissent aux pleurs d'un bébé humain en augmentant leur propre niveau de stress : on parle de contagion émotionnelle.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/crazycups/3942368675/">Crazybananas/flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De façon intéressante, ces études ont montré que la perception de ces odeurs émotionnelles activait chez les animaux receveurs une réponse congruente avec l’état émotionnel de l’émetteur humain, selon une forme de contagion émotionnelle <a href="https://doi.org/10.1177/1745691616676599">similaire à celle observée entre humains</a>. Par exemple, lorsque nous entendons des pleurs d’enfant, notre sécrétion de cortisol (hormone du stress) augmente : c’est un signe d’empathie, et l’émotion de tristesse ou de peur est transmise de l’enfant vers l’adulte qui l’entend. Mais elle est <a href="https://www.researchgate.net/profile/Min-Hooi-Yong-2/publication/269181701_Emotional_contagion_Dogs_and_humans_show_a_similar_physiological_response_to_human_infant_crying/links/5e8ffd69a6fdcca789063930/Emotional-contagion-Dogs-and-humans-show-a-similar-physiological-response-to-human-infant-crying.pdf">également transmise au chien</a>, qui va lui aussi augmenter son niveau de cortisol.</p>
<h2>Qu’en est-il des animaux d’élevage ou de laboratoire ?</h2>
<p>Ces différents résultats suggèrent ainsi que l’olfaction pourrait influencer l’établissement et la qualité de la relation homme-animal, et ainsi impacter le bien-être des deux partis. La question de mes travaux de recherche est donc la suivante : « La relation homme-animal étant un facteur clé du bien-être animal et humain, les animaux d’élevage et de laboratoire sont-ils capables de percevoir les émotions humaines via des signaux olfactifs ? »</p>
<p>Une de mes premières études a eu pour objectif de tester si une odeur d’humain stressé modifie le comportement d’animaux d’élevage (comme la vache) et de laboratoire (comme la souris). Deux odeurs de sueur ont été collectées sur 25 étudiants d’école d’ingénieur (14 femmes, 11 hommes, âgés de 19 à 23 ans) : une odeur de « stress » après un partiel et une odeur de « non-stress » après des cours. Deux expérimentations de discrimination de ces odeurs ont été conduites : l’une sur 20 souris mâles en conditions contrôlées et l’autre sur 10 vaches en ferme.</p>
<p>Les souris ont déféqué plus en présence de l’odeur de stress et les vaches ont passé plus de temps à sentir l’odeur de non-stress. L’augmentation de la défécation peut être considérée comme un marqueur de stress chez l’animal, mais aussi chez l’homme (par exemple, nous pouvons avoir envie d’uriner plus fréquemment avant une évaluation ou un entretien). À l’inverse, le fait d’interagir plus longtemps avec un objet (le sentir, le toucher ou le manipuler) peut être considéré comme un marqueur d’intérêt et non de stress chez l’animal.</p>
<p>Ainsi, les souris et les vaches semblent percevoir et réagir différemment <a href="https://europepmc.org/article/med/33839953">aux odeurs d’émotions humaines</a>. Les souris semblent montrer plutôt une réponse de peur à l’odeur de stress humain. Les vaches, quant à elles, semblent montrer une préférence pour l’odeur de non-stress, mais sans chercher à éviter ou fuir l’odeur de stress. Ces résultats préliminaires peuvent indiquer des niveaux différents d’attachement entre les animaux et leur éleveur, mais aussi des pratiques d’élevage et de manipulations différentes.</p>
<p>Les études doivent se poursuivre chez ces animaux afin de déterminer les odeurs émotionnelles humaines apaisantes afin d’améliorer la relation homme-animal et leur bien-être. On pourrait imaginer d’utiliser des odeurs humaines de joie pour apaiser les animaux lors d’évènements stressants avec des humains qu’ils ne connaissent pas, par exemple lors des transports ou au moment de l’abattage. Une sélection génétique d’animaux pourrait également être envisagée, en sélectionnant les animaux les moins réactifs à l’odeur de stress humain.</p>
<p>Nos prochains travaux s’attacheront à tester différentes odeurs émotionnelles humaines (comme la joie et le stress) chez les ovins. Les moutons sont en effet des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0168159112001220">animaux d’élevage accessibles, généralement curieux et expressifs</a>. La conduite d’une troupe ovine implique également de nombreuses manipulations au contact de l’homme (mise bas, identification, pesée, tonte, parage d’onglons), ce qui expose les animaux aux indices olfactifs humains, qu’ils peuvent probablement aussi détecter à distance. Le modèle ovin est donc particulièrement intéressant pour pousser plus loin nos études.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/180192/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Alexandra Destrez a reçu des financements de l'ANR France Relance, de l'Institut Agro Dijon et de l'UMR CSGA pour ses travaux de recherches. </span></em></p>La relation homme-animal passe aussi par l'odorat. Sentir des odeurs venant d'humains stressés ou non-stressés induit des changements comportementaux chez les vaches et les souris.Alexandra Destrez, Maître de conférences en éthologie développementale et psychologie cognitive, Institut Agro DijonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1743492022-01-11T20:55:52Z2022-01-11T20:55:52ZImages de science : Dans les Alpes, les loups chassent le mouflon<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/439320/original/file-20220104-13-10r7aa1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C8256%2C5499&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Crane de mouflons dans la neige, au croisement de deux pistes de loups.</span> <span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Les vallées de montagne sont des lieux souvent isolés, où vie sauvage et pastorale cohabitent. Certaines vallées font l’objet d’aménagements importants pour les sports d’hiver, dont nous connaissons les <a href="https://theconversation.com/pas-de-ski-alpin-cette-annee-cest-loccasion-de-sinteresser-a-la-biodiversite-montagnarde-152842">conséquences sur la vie sauvage et la biodiversité</a>.</p>
<p>Depuis 2 ans, une certaine tranquillité s’est instaurée dans les vallées, exploitées ou non, et la vie sauvage a pu s’y réinstaller, notamment en hiver. Preuve en est cette scène de chasse observée en décembre, dans la <a href="https://www.naves-savoie.com/">vallée de Naves</a> (entre tarentaise et beaufortain) une vallée isolée mais fréquentée en été et en hiver, vers 2200 m d’altitude et non loin d’une bergerie. Deux meutes de loups sont réputées fréquenter cette vallée, et des <a href="https://www.lasavoie.fr/31240/article/2021-10-06/attaques-de-loups-dans-le-beaufortain-la-situation-n-est-plus-tenable-les">attaques sur des troupeaux</a> ont déjà eu lieu. Des tirs de défense ont déjà eu lieu en 2018 et un loup y a été tué.</p>
<p>Lors d’une visite de cette vallée tranquille bien enneigée (neige de cinq jours), j’observais un croisement entre deux pistes animales, avec un monticule de neige. J’identifiais deux pistes de loups. J’eus alors la surprise de trouver, bien enfouie dans un tunnel de neige, une grande tête de mouflon avec des cornes spectaculaires de plus de 65 cm d’envergure. Un véritable trophée, avec un peu de chair et de poils ainsi que le début de la colonne vertébrale, que l’animal avait déplacé et enfoui à mi-pente, entre une bergerie et une piste de ski de fond. C’est un comportement courant du loup de déplacer des éléments de carcasses et de chasser en hiver où ses besoins caloriques sont élevés.</p>
<p>Le <a href="https://atlasmam.fauneauvergnerhonealpes.org/accueil/especes/ongules/mouflon/">mouflon</a>, une espèce de « mouton » sauvage (genre <em>Ovis</em>), n’est pas originaire des Alpes. Il a été petit à petit introduit au milieu du XX<sup>e</sup> siècle, sans aucune étude préalable, et pour des raisons cynégétiques plus qu’écologiques. Cette introduction a eu lieu à partir des populations préservées des montagnes corses (aujourd’hui hélas bien plus réduites), elles-mêmes originaires d’échappés de troupeaux, qui depuis le Néolithique ont accompagné les populations humaines.</p>
<p>Le <a href="https://www.loupfrance.fr/le-loup/">loup</a> par contre s’y est réinvité tout seul dès 1992, avec son <a href="https://www.lifewolfalps.eu/fr/le-loup-dans-les-alpes/le-loup-dans-les-alpes-francaises/">retour dans le Mercantour</a> depuis l’Italie, après plus de 60 ans d’absence sur le territoire français.</p>
<p>Et les mouflons, prédatés par les premières meutes du Mercantour des années 1990, ont bien participé à ce succès en devenant une ressource supplémentaire disponible pour ce prédateur. Ils ont dès lors dû adapter leur comportement (fini l’absence de prédateur autre que les renards et les aigles !) afin d’échapper à ce prédateur efficace et malin. Pas toujours avec succès, comme le prouve ce crâne…</p>
<p>Une question irrésolue est de savoir si les deux pistes observées à Naves (empreintes de même taille et déformées par le vent) sont celles de deux individus, ou bien d’un seul revenu sur ses pas, par exemple pour enfouir, revoir ou partager sa prise avec la meute (en général quatre ou cinq individus issus d’un couple reproducteur). Interactions entre individus autour du « trophée » ou simple comportement individuel ? La science des traces (ou ichnologie) ne peut certes pas répondre à tout, mais elle aide cependant à la connaissance de la nature actuelle et <a href="https://theconversation.com/images-de-science-en-provence-ils-ont-marche-sur-terre-avant-les-dinosaures-161692">passée</a>. Ici, elle éclaire par exemple des interactions entre proies et prédateurs, alors que tous deux étendent progressivement leur aire de répartition.</p>
<p>Dans cette vallée tranquille, loin des bruits et autres dérangements de l’industrie des sports d’hiver mécaniques mais avec seulement des activités peu perturbantes, et si le surpâturage est évité en été, un parfait équilibre entre nature et activités humaines peut se mettre en place et perdurer. Bien entendu, cette cohabitation nécessite un accompagnement adéquat pour les acteurs de la montagne, autant pédagogique d’économique.</p>
<p>Ainsi, les incursions du loup (un <a href="https://www.nature.com/articles/s41559-018-0472-z">superprédateur</a> au rôle majeur dans la structuration des écosystèmes) peuvent s’y maintenir, comme preuve d’une certaine naturalité. Et ainsi permettre ce type d’observations assez uniques (qu’il est possible de <a href="https://www.loupfrance.fr/suivi-du-loup/declarer-un-indice/">déclarer</a> pour permettre leur suivi), comme un contrepoint aux vallées voisines perturbées par la reprise des activités après la longue pause pandémique, et dans lesquelles la faune sauvage doit se réadapter à un certain niveau de perturbation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174349/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Garrouste a reçu des financements de MNHN, CNRS, Sorbonne Université, LABEX BCDiv, SU-ITE, IPEV, National Geographic</span></em></p>Après deux ans de pandémie ayant paralysé les stations de sports d’hiver, la nature a repris ses droits dans les vallées. Et les loups y chassent le mouflon en hiver.Romain Garrouste, Chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (ISYEB), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1729882021-12-05T17:20:41Z2021-12-05T17:20:41ZMolly l’orang-outan, une artiste pas comme les autres<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/435327/original/file-20211202-19762-hf3x2l.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=60%2C20%2C6720%2C4426&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un orang-outan et son dessin. </span> <span class="attribution"><span class="source">Marie Pelé</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Jusqu’à sa mort en 2011, Molly vivait près de Tokyo, au Japon. Aux alentours de ses 50 ans, Molly a commencé à se passionner pour le dessin, réalisant près de 1 300 créations les cinq dernières années de sa vie. </p>
<p>L’histoire de Molly n’est pas commune puisque Molly était un orang-outan.</p>
<p>Dessiner est un comportement courant chez l’être humain. <a href="https://www.cairn.info/revue-enfance-2005-1-page-34.htm">Vers l’âge de 18 mois</a>, les jeunes enfants commencent à faire leurs premières marques, leurs premiers tracés et développent avec l’âge un intérêt plus ou moins grand pour cette activité. Mais dessiner est un comportement que l’on retrouve aussi chez <a href="https://psycnet.apa.org/doiLanding?doi=10.1037%2Fcom0000251">d’autres primates</a> comme les chimpanzés, les gorilles, les macaques ou encore les capucins. Seulement voilà, ce n’est pas un comportement hautement présent dans le répertoire naturel de ces animaux, même s’il en existe un certain nombre d’observations anecdotiques.</p>
<p>C’est donc bien dans les parcs zoologiques et les instituts de recherche que les soigneurs n’hésitent pas à donner feutres et tubes de peinture à leurs animaux pour les occuper. C’est le cas des soigneurs du Zoo de Tama, près de Tokyo au Japon, qui organisent pour leurs orangs-outans des ateliers de dessin. Des toiles blanches et 16 crayons gras de couleurs différentes sont mis à la disposition de tous les membres du groupe. Ceux-ci sont libres d’utiliser ce matériel comme bon leur semble et ne sont en rien contraints à dessiner.</p>
<p>Ainsi, Molly prenait plaisir à dessiner tandis que d’autres n’y voyaient aucun intérêt. C’est le cas de Julie, une autre femelle orang-outan, qui en 5 ans n’a réalisé que 16 dessins. Cependant, même si Molly a produit un grand nombre de dessins, aucun d’eux n’apparaît représenter quoi que ce soit (tout du moins à un être humain). Les dessins de Molly et de ses congénères ne sont pas figuratifs et nous semblent à première vue n’être que de simples « gribouillages », pareils à ceux réalisés par de très jeunes enfants. Heureusement, la collection importante de dessins produits par les orangs-outans au Zoo de Tama nous a permis d’en faire l’étude minutieuse.</p>
<h2>Montre-moi comment tu dessines, je te dirai qui tu es</h2>
<p>Afin d’avoir un examen le plus objectif possible des dessins réalisés par les orangs-outans du zoo de Tama, nous avons mis en place un protocole très précis de collecte de données. Sur chaque dessin, nous avons appliqué une grille de 10 carreaux par 10 carreaux permettant une lecture plus minutieuse de chaque élément. Pour chaque carreau, nous avons en effet relevé une douzaine de données qualitatives et quantitatives telles que le recouvrement de la feuille, les couleurs utilisées, la présence de certaines formes comme les <em>fan patterns</em> (traits en aller-retour), mais aussi des cercles, des boucles ou encore des triangles. Un véritable travail de fourmis puisqu’au total <a href="https://www.mdpi.com/2076-2615/11/11/3202">790 dessins ont été analysés à l’œil nu</a> par trois observatrices différentes.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/435278/original/file-20211202-13-1e9pmwh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/435278/original/file-20211202-13-1e9pmwh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/435278/original/file-20211202-13-1e9pmwh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/435278/original/file-20211202-13-1e9pmwh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/435278/original/file-20211202-13-1e9pmwh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=300&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/435278/original/file-20211202-13-1e9pmwh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/435278/original/file-20211202-13-1e9pmwh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/435278/original/file-20211202-13-1e9pmwh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=377&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Pour chacune des cinq femelles orangs-outans, exemple de deux dessins.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pelé et coll., 2021</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>En général, les cinq femelles orangs-outans dessinent sur la moitié de la feuille, en partant de son centre. Elles utilisent trois couleurs différentes en moyenne et dessinent deux <em>fan patterns</em> par feuille. Les cercles, boucles et triangles sont beaucoup plus rares et ne se retrouvent que sur certains dessins.</p>
<p>Molly se distingue de ses congénères à plusieurs égards. Elle recouvre plus la toile, utilise plus de couleurs, fait plus de boucles. Kiki, au contraire fait moins de traits, mais ils sont plus marqués, amenant un contraste plus élevé à ses dessins. On note également des préférences de couleurs : le vert chez Molly et Kiki, le rouge pour Julie, Yuki et Gypsy.</p>
<p>Outre des motivations à dessiner différentes chez nos cinq femelles orangs-outans, nos premiers résultats montrent donc qu’elles ne dessinent pas non plus de la même façon. Ces différences pourraient également être liées à la personnalité des femelles ainsi qu’à leurs capacités cognitives. Des études plus approfondies, par le biais notamment de <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-021-83043-0">nouvelles technologies</a>, pourraient nous permettre de creuser la question. Par exemple, l’utilisation de tablettes tactiles couplées à des modules d’eye-tracking (permettant le suivi du regard de l’utilisateur) pourrait nous éclairer sur le degré d’anticipation et donc d’intention de l’individu qui dessine.</p>
<p>Le nombre important de dessins réalisés par Molly nous a permis de regarder l’évolution de son comportement de dessin avec le temps. En vieillissant, Molly s’est mise à utiliser moins de couleurs, à moins recouvrir la toile et à moins centrer ses dessins qu’auparavant. Ces changements sont certainement liés à des limitations physiques croissantes, par exemple, elle était devenue aveugle de l’œil gauche. Pourtant, elle créa des dessins toujours plus complexes que les autres femelles, notamment en termes de traits. Mais les dessins de Molly semblent également varier avec les personnes qui l’entourent tels que <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2019.02050/full">ses soigneurs</a>. Dans notre étude, nous avons également pu mettre en évidence l’influence des saisons sur la couleur des dessins de Molly. Ainsi, elle préférait utiliser le vert en été et en hiver et le rose au printemps et en automne.</p>
<p>La complexité de ses dessins, ses variations de couleurs saisonnières et d’autres indices comme le fait de commencer au centre de la toile indiquent bien que Molly ne dessine pas au hasard. Bien au contraire, ils nous laissent à penser que nos proches cousins possèderaient certaines prémices nécessaires à la représentation.</p>
<h2>Molly fait-elle exception parmi les singes dessinateurs ?</h2>
<p>Les années 1960 virent ce qui a été plus tard appelé l’âge d’or du dessin simiesque. À cette époque, plusieurs psychologues s’intéressent aux œuvres réalisées le plus souvent par des chimpanzés. L’un des plus connus, Desmond Morris, publiera <a href="https://openlibrary.org/works/OL443161W/Biologie_de_l%E2%80%99art"><em>Biologie de l’art</em></a> dans lequel il retrace la création artistique des primates et regroupe tous les dessins et peintures de singes de l’époque. Il travaillera aussi à faire connaître les œuvres de son chimpanzé mâle Congo à la télévision et lors d’expositions dans les plus grandes galeries du monde. Congo montra en effet un intérêt particulier pour la peinture, réalisant plusieurs centaines de tableaux jusqu’à son adolescence. Cependant, des profils comme ceux de Molly et Congo restent rares.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/435280/original/file-20211202-13-16cs95a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/435280/original/file-20211202-13-16cs95a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/435280/original/file-20211202-13-16cs95a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/435280/original/file-20211202-13-16cs95a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/435280/original/file-20211202-13-16cs95a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/435280/original/file-20211202-13-16cs95a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/435280/original/file-20211202-13-16cs95a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/435280/original/file-20211202-13-16cs95a.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">En octobre 2021, Nénette s’installe pour une nouvelle session de peinture.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marie Pelé</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Molly n’est plus là, mais une autre femelle orang-outan, elle aussi très âgée, peint et dessine dès qu’on lui en donne l’occasion. Il s’agit de <a href="https://www.cairn.info/revue-de-la-bibliotheque-nationale-de-france-2020-2-page-67.html">Nénette</a>, l’orang-outan star de la Ménagerie du Jardin des Plantes du Muséum national d’histoire naturelle de Paris. Forte de caractère, Nénette peut rester concentrée plusieurs dizaines de minutes sur un même dessin ; fait assez rare tant les orangs-outans sont des animaux curieux et facétieux. Avec l’équipe qui prend soin de Nénette, nous venons de mettre en place un nouveau protocole de recherche pour mieux appréhender et mieux comprendre le dessin chez cette femelle orang-outan. Les dessins de Nénette ont-ils des points communs avec ceux de Molly ? Si oui, lesquels ? Affaire à suivre…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172988/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marie Pelé a reçu des financements de la Mission pour les Initiatives Transverses et Interdisciplinaires (MITI) du CNRS ainsi qu'un financement IDEX de l'université de Strasbourg. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Cédric Sueur est membre de l’Institut Universitaire de France, membre du conseil scientifique de Reworld Media et de la fondation LFDA. Il a reçu des financements de la Mission pour les Initiatives Transverses et Interdisciplinaires (MITI) du CNRS ainsi qu'un financement IDEX de l'université de Strasbourg.</span></em></p>Molly était une femelle orang-outan, créatrice de plus de 1 300 dessins. Que nous apprennent-ils sur la manière qu’ont ces singes de percevoir et de représenter le monde ?Marie Pelé, Chargée de recherche en éthologie, Institut catholique de Lille (ICL)Cédric Sueur, Maître de conférences en éthologie, primatologie et éthique animale, CNRS, Université de StrasbourgLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1574422021-09-12T16:35:53Z2021-09-12T16:35:53ZLa beauté des comportements collectifs, ou comment le tout devient plus grand que la somme des parties<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/390383/original/file-20210318-15-1bl9az.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C15%2C5142%2C3402&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une nuée d’oiseaux s’envole, et tous semblent savoir où vont les autres.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/b7MZ6iGIoSI">James Wainscoat , Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Dans le cinéma fantasy ou de science-fiction, des batailles titanesques mettent en scène simultanément des milliers de personnages, comme lorsque les cavaliers du Rohan font face aux armées des Orcs dans les films du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Seigneur_des_anneaux_(s%C3%A9rie_de_films)">Seigneur des anneaux</a>. Ces images spectaculaires sont rendues possibles à l’aide de techniques de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Simulation_de_foule">simulation de foule</a> : chaque personnage animé possède un comportement individuel très simple, mais du fait du grand nombre de personnages et de leurs interactions, il est possible de faire naître un vrai comportement collectif. Mais comment orchestrer un si grand nombre d’« individus » de façon cohérente à partir des règles les plus simples possible ?</p>
<p>Cette question fait l’objet d’une réflexion ancienne, non pas chez les réalisateurs de films, mais chez les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89thologie">éthologues</a>. Que dire lorsque s’élèvent par milliers les oiseaux d’une nuée de migrateurs ! Marquants le bleu du ciel d’un corps noir, souple, cohérent, la nuée agit d’un seul bloc alors qu’elle se compose bel et bien d’individus tout à fait distincts. La question vient d’elle-même : comment décrire un tel phénomène ? Comment une association d’individus peut-elle engendrer un tout, si cohérent qu’on pourrait le croire animé d’une volonté propre ?</p>
<p>Nous allons voir que les comportements de groupe, même complexes, ne nécessitent pas forcément une forme évoluée d’intelligence ou de perception. Un petit nombre de règles simples suffit parfois pour faire émerger des comportements collectifs à grande échelle.</p>
<h2>Les comportements collectifs chez les animaux… et les bactéries</h2>
<p>En éthologie, ce genre de phénomène de groupe n’est pas limité aux nuées d’oiseaux : banc de poissons, essaims d’abeilles, on les retrouve chez de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Agr%C3%A9gation_(comportement)">nombreuses espèces</a>. Ces agrégations en grand nombre sont depuis longtemps étudiées et servent différentes fonctions bénéfiques à l’espèce.</p>
<p>Par exemple, l’agrégation <a href="https://science.sciencemag.org/content/284/5411/99">est bénéfique</a>, car elle permet la protection du groupe, un plus grand choix de partenaires et une diffusion de l’information plus efficace. Dans le cas des poissons, un article paru en 2018 suggère de plus que le banc peut aider à <a href="https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.120.198101">diminuer l’énergie requise</a> au déplacement dans l’eau, en suivant les courants induits par le groupe !</p>
<p>Plus étonnant encore, on retrouve des comportements collectifs complexes dans des organismes simples qu’on ne qualifie ordinairement pas d’« intelligents ». Certaines <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0378437197005116">colonies de bactéries</a> peuvent former d’étranges structures qui témoignent d’un comportement collectif.</p>
<p>Cet exemple est particulièrement intéressant, car il suggère que des comportements collectifs ne nécessitent même pas une forme d’intelligence ou de perception. Les comportements collectifs peuvent être « émergents », c’est-à-dire être le fruit d’interactions à la fois simples et locales.</p>
<h2>Les comportements collectifs d’objets physiques inanimés</h2>
<p>Les clefs d’une compréhension plus fine de ces comportements collectifs sont peut-être à chercher ailleurs qu’en éthologie. Aussi, la question des comportements collectifs émergents s’exporte désormais à d’autres domaines des sciences, comme la physique ou l’informatique.</p>
<p>D’une part, la physique de la <a href="https://www.ec2m.espci.fr/accueil/la-recherche/matiere-active/">matière active</a> poursuit les travaux des biologistes, en construisant de nouveaux systèmes émergents, pilotés par des règles plus élémentaires. Il n’est définitivement plus question ici d’êtres vivants ni d’intelligence, mais d’éléments simples, qui interagissent mécaniquement, et parviennent tout de même à produire des effets collectifs de grande ampleur.</p>
<figure>
<iframe src="https://player.vimeo.com/video/529363902" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Du fait de leurs collisions, les « grains marcheurs » s’alignent deux à deux et un mouvement collectif apparaît spontanément. Ces petits grains sont des disques rigides de quelques millimètres, asymétriques. Ils sont construits avec une patte fine et rigide à l’avant, et un support souple et épais à l’arrière. Crédit : Olivier DAUCHOT.</span></figcaption>
</figure>
<p>Un exemple de comportement émergent en physique est celui des « grains marcheurs ». Quelques milliers de ces grains sont placés sur un plateau vibrant, et voilà que chacune se retrouve propulsée vers l’avant. Ici, faire varier l’amplitude de vibration du plateau revient à faire varier la puissance que possède chaque particule pour avancer, mais augmente aussi le caractère erratique du mouvement individuel des particules. Pour des valeurs intermédiaires de l’amplitude de vibration, un mouvement collectif et coordonné émerge. Pourtant dépourvu d’appareil sensoriel ou cognitif, tout se passe comme si ces petits grains avaient choisi d’aller de concert dans un même sens.</p>
<p>Comment décrire mathématiquement les mouvements collectifs de ce type de particules ? Les modèles les plus simples de mouvement collectif, comme celui de <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Vicsek_model">Vicsek</a>, se résument parfois à deux équations simples et un nombre très réduit de paramètres. En faisant varier ces paramètres, on peut faire apparaître des « transitions de phase », où le système se met spontanément à exhiber des comportements collectifs à grande échelle, comme si les particules se mettaient soudainement d’accord sur la marche à suivre.</p>
<p>Par ailleurs, bien que la compréhension fine des comportements émergents reste un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89mergence#Exemples">sujet actif de recherche</a>, il existe déjà des modèles et des applications tangibles, en robotique et en informatique.</p>
<h2>Essaims de robots et animations de foules : les comportements collectifs en robotique et informatique</h2>
<p>Des systèmes informatiques analogues à ceux des biologistes ont commencé à apparaître il y a une trentaine d’années, avec entre autres le modèle des <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Boids">boids</a>. Ce modèle, proposé en 1986, permet de simuler très simplement des nuées et des essaims, au travers de petits triangles, libres de se mouvoir dans l’espace, appelés <em>boids</em>. Le comportement de ces derniers est régi par un mélange correctement dosé de 3 grandes règles : se rapprocher des groupes, s’aligner avec ses voisins, et fuir les zones trop densément peuplées.</p>
<p>Par sa simplicité, ce modèle inspire même des techniques de simulation de foules, qui finissent utilisées dans la production de films et ultimement <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Simulation_de_foule">au cinéma</a>, par exemple dans <a href="https://youtu.be/w-Oy4TYDnoQ">« Le seigneur des anneaux »</a>, sorti en 2001.</p>
<p>Aujourd’hui, avec la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Circuit_int%C3%A9gr%C3%A9#%C3%89chelle_d%E2%80%99int%C3%A9gration">miniaturisation des composants électroniques</a>, la baisse des prix et l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_de_Moore">augmentation des vitesses de calcul</a>, des essaims de robots réels voient le jour. Les chercheurs en robotique s’exercent à manipuler simultanément <a href="https://www.science.org/doi/full/10.1126/science.1254295">plusieurs centaines de robots</a>, et leur coordination est un défi d’envergure, à la fois technique et théorique.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/419752/original/file-20210907-21-1jc9keo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/419752/original/file-20210907-21-1jc9keo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/419752/original/file-20210907-21-1jc9keo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/419752/original/file-20210907-21-1jc9keo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/419752/original/file-20210907-21-1jc9keo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/419752/original/file-20210907-21-1jc9keo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/419752/original/file-20210907-21-1jc9keo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/419752/original/file-20210907-21-1jc9keo.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Kilobot est un essaim de mille robots développé à l’Université de Harvard, aux États-Unis.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Kilobot_robot_swarm.JPG">asuscreative, Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Les avantages d’un essaim de robots par rapport à un robot unique sont <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/robotica/article/swarm-robotics-reviewed/C31F3EC5FC09AC2ED9DF91083C0FD886/share/3c86ca2c5c5df5f5a234a78651ed34e47b142283">multiples</a> : une couverture spatiale plus importante, un coût réduit, une plus grande tolérance à la panne. Le lien avec la question de l’émergence est direct : quel est le plus simple ensemble de règles qui permet de régir l’essaim tout entier pour atteindre un objectif fixé ?</p>
<p>Ici, chaque robot ne peut obtenir qu’une information partielle de l’environnement dans lequel il évolue, grâce à ses capteurs et ceux de ses pairs. La simplicité des règles qui régissent son comportement n’est pas seulement un questionnement théorique, il y a également une forte dimension pratique : la réduction du coût du matériel nécessaire pour construire les robots.</p>
<p>Des résultats bluffants sont déjà d’actualité, en 2019 une équipe du Massachsetts Institute of Technology <a href="https://www.nature.com/articles/s41586-019-1022-9">a développé</a> une flotte de robots bio-inspirés – individuellement, ils ne peuvent que se contracter ou se dilater, mais ils parviennent en groupe à former un organisme cohérent capable de se déplacer et de franchir des obstacles, <a href="https://youtu.be/aXrljS7wBic">comme on le voit sur cette vidéo (en anglais)</a>.</p>
<p>Le parallèle avec la biologie se poursuit en 2021, alors qu’une équipe de Harvard <a href="https://robotics.sciencemag.org/content/6/50/eabd8668">développe</a> des robots-poissons, <a href="https://youtu.be/qVsu49f-Vf0">ici aussi en vidéo</a>, dont le comportement rappelle celui des boids.</p>
<p>Combiner intelligence individuelle et intelligence collective émergente est un pas majeur vers des systèmes multi-robots adaptatifs. Les systèmes robotiques et intelligences artificielles de demain se situent-elles à la croisée des sciences, entre biologie, physique et informatique ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/157442/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jérémy Fersula a reçu des financements du Sorbonne Center for Artificial Intelligence (SCAI).</span></em></p>Foules, robots, animaux… Des comportements complexes peuvent émerger de règles très simples. Pour les comprendre et les reproduire, par exemple au cinéma, de nombreuses disciplines contribuent.Jérémy Fersula, Doctorant en Robotique, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1455892020-09-07T18:35:02Z2020-09-07T18:35:02ZPourquoi les guêpes sont insupportables à la fin de l’été<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/356746/original/file-20200907-20-1vp979z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=67%2C60%2C828%2C532&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le sucre attire les guêpes!</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/wasp-on-fresh-orange-413788">Sascha Burkard/Shutterstock.com</a></span></figcaption></figure><p>Les saucisses cuisent et la bière est fraîche – enfin prêts pour le parfait barbecue de fin d’été. Dîner en plein air, verre en terrasse, glaces – nous saisissons les derniers instants de la belle saison, des moments précieux avec les proches avant un hiver incertain de reconfinements locaux ou réunions Zoom.</p>
<p>Puis, une visiteuse imprévue arrive. Vêtue d’une robe voyante, la taille fine, l’indésirable déborde de confiance. Elle est arrogante, s’octroie le droit de boire à tous les verres et on peut s’effrayer de trouver un dard aiguisé dans son derrière rayé.</p>
<p>La fin de l’été est la saison des guêpes – ces insectes attisent les rancœurs et les cris dans les jardins et aux terrasses de café. C’est le cas chaque année, mais c’est particulièrement insupportable alors que nous comptons les quelques jours qu’il nous reste pour profiter du beau temps en respectant les consignes de distanciation sociale.</p>
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<img alt="Vue aérienne d’un pique-nique dans un parc." src="https://images.theconversation.com/files/355045/original/file-20200827-24-1808w3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/355045/original/file-20200827-24-1808w3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/355045/original/file-20200827-24-1808w3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/355045/original/file-20200827-24-1808w3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/355045/original/file-20200827-24-1808w3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/355045/original/file-20200827-24-1808w3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/355045/original/file-20200827-24-1808w3k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le terrain de jeu des guêpes en congé forcé.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/happy-family-children-having-picnic-park-1202893330">JaySi/Shutterstock</a></span>
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<p>Il est difficile de trouver des côtés positifs à un monde en proie à une pandémie. Mais ces derniers mois ont remis au goût du jour un mot bien utile pour expliquer le comportement antisocial des guêpes à la fin de l’été : les congés forcés. Et pour quelqu’un qui passe son temps <a href="http://www.sumnerlab.co.uk/">à faire des recherches sur les guêpes</a>, trouver une expression pour excuser leur mauvais comportement est assez excitant. Si vous êtes l’une des <a href="https://www.gov.uk/government/collections/hmrc-coronavirus-covid-19-statistics">nombreuses</a> personnes au chômage partiel en ce moment, vous êtes particulièrement bien placé pour comprendre les guêpes de fin d’été.</p>
<h2>Guêpes ouvrières</h2>
<p>Les guêpes ont tendance à ne perturber notre vie en plein air qu’à la fin de l’été, contrairement aux apparences. Tout le reste de l’été, elles sont aussi très occupées, mais nous ne sommes pas assez intéressants pour qu’elles daignent nous regarder. Il est très probable que la guêpe que vous avez écrasée à votre barbecue le week-end dernier a passé l’été à enlever les chenilles de votre potager ou les pucerons de vos tomates.</p>
<p>Cette guêpe faisait partie de l’équipe de dame nature chargée de la lutte contre les parasites : sans les guêpes, nous devrions utiliser beaucoup plus de pesticides pour garder nos laitues entières et les tomates exemptes de pucerons. Les guêpes nous rendent service – ce sont des ennemies naturelles d’autres insectes, encore plus nuisibles.</p>
<p>Pour cette guêpe travailleuse, au milieu de l’été, nos boissons sucrées n’avaient aucun intérêt, car elle voulait des protéines. C’est une chasseuse, une travailleuse. Au milieu de l’été, son but est de fournir des protéines à ses petits frères et sœurs, les larves du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Couvain">« couvain »</a>. Elle est l’un des rouages stériles d’un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Superorganisme">superorganisme</a>, poussée par l’évolution à transmettre ses gènes en élevant les larves. Habituellement, elle chasse d’autres insectes pour leurs protéines, comme des chenilles de jardin ou des mouches. Elle apporte des proies à la colonie où il y a des milliers de larves, des petits frères et sœurs à nourrir.</p>
<p>Elle peut mâcher un peu la proie, voire, peut-être, en ingérer un peu, avant de la donner directement à une larve, mais la majeure partie de la protéine va aux petits. En échange de son travail, la larve lui donnera une sécrétion sucrée riche en glucides. On pense actuellement que c’est là le principal mode de nutrition des guêpes ouvrières adultes. Chaque colonie produit plusieurs milliers de guêpes ouvrières et elles sont très occupées pendant une grande partie de l’été à nourrir leur couvain ; elles seraient comme « accros » aux sécrétions sucrées de leur fratrie larvaire.</p>
<h2>Congé forcé</h2>
<p>Au cours de l’été, la colonie se transforme en une citadelle pouvant compter jusqu’à 10 000 travailleurs ; parallèlement à cette croissance du nombre de travailleurs, les larves commencent à se transformer en insectes. Lorsqu’une larve est complètement nourrie, à l’âge de deux semaines environ, elle est prête à se métamorphoser en une belle guêpe adulte. Elle ferme elle-même l’alvéole dans laquelle elle loge pour poursuivre son <a href="https://www.apiculture.net/blog/cycle-vie-abeilles-n38">développement pupal</a> et elle n’a plus besoin des soins de ses aînées.</p>
<p>Tous les couvains ne se métamorphosent pas en une seule fois ; il reste encore de nombreuses larves à nourrir. Mais la proportion entre le nombre d’ouvrières et celui de larves change, et à mesure que l’été avance vers l’automne, il y a de plus en plus d’ouvrières sous-employées et – ce qui est important – elles ne reçoivent plus la dose de sucre administrée par leurs frères et sœurs. Les ouvrières sont, en effet, mises à pied. Et comme les humains mis à pied, leur comportement change.</p>
<p>Maintenant, elles cherchent du sucre loin de la colonie – lors de nos pique-niques par exemple. En l’absence de ces festins sucrés faciles, elles rendent visite aux fleurs et les pollinisent, tout comme les abeilles. En fait, les guêpes peuvent être <a href="https://academic.oup.com/aobpla/article/9/3/plx020/3855705">aussi efficaces</a> à la pollinisation que certaines abeilles. En termes d’évolution, votre pique-nique est une distraction relativement nouvelle.</p>
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<img alt="Une guêpe s’assoit sur des fleurs blanches." src="https://images.theconversation.com/files/355146/original/file-20200827-24-ze89j5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/355146/original/file-20200827-24-ze89j5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/355146/original/file-20200827-24-ze89j5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/355146/original/file-20200827-24-ze89j5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/355146/original/file-20200827-24-ze89j5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/355146/original/file-20200827-24-ze89j5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/355146/original/file-20200827-24-ze89j5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un guêpe pollinise.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/common-aerial-yellowjacket-collecting-nectar-tiny-1626669769">Paul Reeves Photography/Shutterstock</a></span>
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<p>De tels changements de comportement surviennent en réponse aux besoins de leur société ; les ouvrières perçoivent les exigences changeantes et modifient la façon dont les gènes sont exprimés dans leur cerveau. On trouve dans le cerveau des guêpes <a href="https://www.pnas.org/content/112/45/13970">quelques indices</a> sur l’évolution des comportements d’aide et sur les mécanismes moléculaires qui les sous-tendent.</p>
<h2>Dans le cerveau des guêpes</h2>
<p>Mon équipe <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2214574518300385">fait des recherches</a> sur les mécanismes moléculaires qui sous-tendent le comportement de ces guêpes afin de comprendre comment et pourquoi leurs traits sociaux évoluent. Les guêpes ouvrières que vous voyez à votre pique-nique font partie d’un des produits biologiques de l’évolution les plus complexes que l’on trouve dans le monde naturel : une colonie dite « superorganisme ».</p>
<p>Tout comme une ruche d’abeilles, chaque colonie est dirigée par une seule reine mère qui pond tous les œufs ; ses jeunes en début de saison sont les ouvrières stériles qui aident à élever plus de couvains et éventuellement les mâles et femelles fertiles – les reines de l’année suivante. La reine, les ouvrières et les individus fertiles ont tous un aspect et un comportement très différents, à tel point que vous risquez de les confondre avec des espèces différentes. Ils dépendent les uns des autres en tant que différentes composantes de cette grande « machine », ce superorganisme. Ce qui est extraordinaire, c’est qu’elles sont toutes produites à partir des mêmes éléments constitutifs – elles ont un génome commun. Mais leurs gènes s’expriment différemment.</p>
<p>Comprendre comment les génomes évoluent pour produire les composantes si différentes, mais si bien articulées d’un superorganisme reste l’une des grandes questions en suspens de la biologie de l’évolution. Cette guêpe à votre pique-nique est un produit hautement perfectionné de l’évolution qui joue un rôle important dans une société qui dépasse la nôtre en termes de complexité et de coordination.</p>
<p>Personne n’aime que son pique-nique soit infesté de guêpes, mais avec une certaine compréhension de la biologie qui sous-tend leur comportement, chacun peut s’adapter pour les respecter. La pandémie a forcé des changements dans notre propre comportement et nous nous sommes adaptés. S’il y a un point positif dans les défis auxquels nous sommes confrontés actuellement, c’est peut-être que nous pouvons faire preuve d’un peu plus d’empathie envers ces insectes incompris, mais importants.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/145589/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Seirian Sumner a reçu des financements du Natural Environment Research Council au Royaume-Uni. </span></em></p>Une notion qui résonne trop bien avec l’actualité de ces derniers mois explique le comportement des guêpes à la fin de l’été : les congés forcés.Seirian Sumner, Professor of Behavioural Ecology, UCLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1183572019-06-05T20:47:22Z2019-06-05T20:47:22ZDécouvrez les singes titis et leur système de communication unique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/278181/original/file-20190605-40754-jldkm.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C3988%2C2994&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un singe titi dans son arbre. </span> <span class="attribution"><span class="source">Geoffrey Mesbahi</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>L’étude de la communication animale peut nous renseigner sur l’évolution du langage humain mais aussi nous donner une idée de la diversité des systèmes de communication qui existent sur Terre. <a href="https://advances.sciencemag.org/content/5/5/eaav3991">Nous avons mené une étude</a> sur le singe titi qui suggère que leur système de communication suit des règles très précises et est différent de tout ce qui a été décrit jusqu’à présent.</p>
<p>Dans leur vie quotidienne, les humains ont la capacité de communiquer sur des objets, des personnes, des évènements extérieurs : c’est ce qu’on appelle la référence. Il a longtemps été considéré que cette capacité était propre à l’homme et que les animaux, eux, ne communiquaient qu’à propos de leurs émotions et ressentis. Mais en étudiant de plus près comment les animaux communiquent, on se rend compte depuis quelques décennies que de nombreuses espèces, comme les chimpanzés, les suricates, les chiens et même les mésanges, sont capables de référence. Ainsi, en comparant les systèmes référentiels des animaux à celui de l’humain, on peut étudier l’évolution de cette capacité sur plusieurs millions d’années.</p>
<p>Le singe titi à front noir (<em>Callicebus nigrifrons</em>) est un petit singe d’Amérique du Sud qui vit en famille de 4 à 6 individus. Il possède deux types de cris d’alarme, le cri A et le cri B, et il les émet en séquence les uns à la suite des autres lorsqu’il se sent menacé.</p>
<p>Le singe titi et l’humain ont divergé l’un de l’autre il y a 43 millions d’années : ainsi, si l’on trouve des caractéristiques physiques ou comportementales similaires chez les titis et les humains, alors notre dernier ancêtre commun d’il y a 43 millions d’années possédait déjà sûrement ces caractéristiques.</p>
<p>Dans notre étude, nous avons voulu comparer les capacités de référence des titis à celles des humains, en étudiant comment les singes titis communiquent lorsqu’ils font face à un prédateur.</p>
<p>Pour cela, nous avons conduit une série d’expériences sur six familles de singes titis sauvages dans la forêt atlantique brésilienne. Pour chaque expérience, nous avons placé un prédateur empaillé (un rapace, un petit léopard local ou une martre) soit au sol, soit dans la canopée, et nous avons enregistré les cris que les titis émettaient lorsqu’ils voyaient le prédateur.</p>
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<figcaption><span class="caption">Réaction d’un jeune mâle à la présence d’un petit léopard empaillé (oncille) dans un arbre. Crédit : Geoffrey Mesbahi.</span></figcaption>
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<p>Nous avons ensuite joué ces cris à d’autres singes titis et avons filmé leurs réactions, afin de voir quelles informations les singes titis pouvaient extraire de ces séquences d’alarme.</p>
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<figcaption><span class="caption">Réaction d’un jeune mâle à des cris qui indiquent la présence d’un petit léopard (oncille) dans un arbre. Crédit : Mélissa Berthet.</span></figcaption>
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<h2>Des règles de communication précises</h2>
<p><a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/abs/10.1098/rsbl.2013.0535">Une précédente étude</a> suggérait que les titis pouvaient indiquer quel est le prédateur (est-ce un prédateur terrestre ou aérien ?) et où il se trouve (est-il au sol ou dans la canopée ?) avec ces séquences d’alarme. Les résultats de notre étude confirment ceci, et montrent que les singes qui entendent ces séquences comprennent toutes ces informations : ils peuvent savoir quel est le prédateur et où il se trouve juste en écoutant les séquences.</p>
<p>Cependant, les règles que les titis utilisent pour transmettre ces informations n’ont été décrites chez aucune autre espèce animale. La clé résiderait dans la proportion de combinaisons de deux cris B dans la séquence. Par exemple, un titi émet la séquence <em>BBBABBB</em> en voyant un prédateur : cette séquence est composée de 6 combinaisons de cris (BB, BB, BA, AB, BB, BB) parmi lesquels 4 combinaisons de deux cris B (BB) : la proportion de combinaisons de cris B est élevée (4/6), il est donc très probable que le prédateur qui est dans les environs soit un animal terrestre qui se trouve au sol.</p>
<p>Au contraire, si un singe émet une séquence où la proportion de combinaisons de cris B est faible (par exemple une séquence <em>AAAAABB</em>, où la proportion de BB est de 1/6), alors il y a de fortes chances que le prédateur soit un animal aérien dans la canopée. De plus, les singes qui entendent ces séquences sans voir de prédateur réagissent de façon tout à fait adaptée : si la séquence contient beaucoup de combinaisons BB, alors les individus regardent vers le haut-parleur, comme s’ils cherchaient un prédateur terrestre dans les environs de l’individu qui crie. Au contraire, si la proportion de combinaisons BB est faible, alors les titis regardent en l’air, comme s’ils cherchaient un prédateur aérien au-dessus d’eux.</p>
<p>Notre étude montre donc que les singes titis transmettent des messages complexes sur les contextes de prédation en combinant deux cris en séquences avec des règles particulières. Mais ce qui est encore plus intéressant, c’est que ce système suggère que les singes titis ont un système de perception du monde qui les entoure bien différent de celui des humains.</p>
<h2>Un système de communication probabiliste</h2>
<p>L’humain a un système de perception et de communication catégorique : la plupart des éléments de notre environnement sont gradués mais l’humain les classe en permanence. Par exemple, les couleurs d’un arc-en-ciel forment un gradient continu, mais notre œil perçoit six ou sept bandes, que nous nommons « rouge », « orange », « jaune », « vert », « bleu », « violet » – et « indigo » pour les artistes parmi nous.</p>
<p>De la même façon, l’humain aurait tendance à classer les évènements de prédations auxquels sont soumis les titis en quatre catégories : « il y a un prédateur aérien dans la canopée », « il y a un prédateur aérien au sol », « il y a un prédateur terrestre dans la canopée » et « il y a un prédateur terrestre au sol ». Cependant, selon nos résultats, les titis ne feraient pas quatre catégories distinctes : ils transmettent les informations sur le type et le prédateur le long d’un continuum qui semble aller de « prédateur terrestre au sol » à « prédateur aérien dans la canopée », en utilisant la proportion de combinaisons de cris. Les titis transmettraient donc une information graduée à laquelle les receveurs répondraient aussi de façon graduée, en regardant plus ou moins vers le ciel ou l’émetteur du cri. C’est un système de communication probabiliste, c’est-à-dire un système basé sur des proportions de combinaisons de cris qui transmet des informations graduées.</p>
<p>En étudiant les autres espèces, l’humain a toujours cherché à expliquer les systèmes de communication en des termes catégoriques, car c’est son système de communication par défaut. Nos résultats suggèrent qu’il est trop anthropomorphique de chercher à étudier la communication catégorique des animaux : peut-être que ce mécanisme probabiliste est plus répandu que l’on ne l’imagine, ce qui expliquerait pourquoi nous avons du mal à comprendre les systèmes de communication d’autres espèces lorsque nous les étudions avec notre conception catégorique. La prochaine étape est donc de chercher si ce système probabiliste existe chez d’autres espèces : si c’est le cas, alors nous pourrions supposer que ce système probabiliste constitue l’ancêtre de la communication catégorique de l’humain.</p>
<p>En conclusion, notre étude montre que lorsqu’on étudie d’autres espèces, il est important de s’ouvrir à de nouvelles formes de communication inconnues à l’homme, afin de mieux comprendre ce qui rend le langage unique et comment il a évolué.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/118357/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mélissa Berthet a reçu des financements de l'European Research Council, de l'Université de Neuchâtel, du Fond National Suisse, de l'Ecole Normale Supérieure et de la Fondation Fyssen.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Geoffrey Mesbahi a reçu des financements de European Research Council, du Fond National Suisse et de l'Université de Neuchâtel. Ses travaux sont actuellement financés par l'Agence de l'Eau Rhin-Meuse, le Fonds Européen de Développement Régional, le Commissariat au Massif des Vosges et la Région Grand-Est.</span></em></p>Une étude fascinante nous montre un tout autre système de communication que le notre pour se prévenir des dangers.Mélissa Berthet, Docteur en biologie spécialisée en comportement animal, École normale supérieure (ENS) – PSLGeoffrey Mesbahi, Doctorant, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/835442017-09-27T22:47:16Z2017-09-27T22:47:16ZTrois jours dans la peau d’un chasseur-cueilleur vont-ils améliorer mon microbiote ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/184750/original/file-20170905-13718-graywa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les Hadza, qui vivent en Tanzanie, ont l'une des flores intestinales les plus riches à travers la planète. </span> <span class="attribution"><span class="source">Jeff Leach</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p><em>L’auteur de cet article, Tim Spector, interviendra à Paris, le 19 octobre 2017, lors du colloque organisé par l’Académie de médecine sur le thème « Microbiote et maladies chroniques ». Il présentera notamment les projets financés de manière participative <a href="http://britishgut.org/">British Gut</a> et <a href="http://americangut.org/">American Gut</a>, encourageant les Britanniques et les Américains à faire tester leur microbiote.</em></p>
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<p>De plus en plus d’indices suggèrent que, plus votre flore intestinale est riche et diverse, moins vous avez de chance de tomber malade. Le régime alimentaire est la clé pour maintenir cette diversité. Cela fut démontré de manière frappante lorsque mon fils Tom, étudiant britannique, imita pour les besoins de la science le réalisateur du documentaire <a href="http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=56838.html"><em>Super Size Me</em></a> en suivant un régime purement McDonald’s. Au bout de seulement quatre jours, le nombre de ses microbes bénéfiques <a href="https://theconversation.com/your-gut-bacteria-dont-like-junk-food-even-if-you-do-41564">avait significativement baissé</a>.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/your-gut-bacteria-dont-like-junk-food-even-if-you-do-41564">Des résultats similaires</a> ont été obtenus dans des études plus larges, à la fois chez l’homme et chez l’animal.</p>
<p>Votre microbiote intestinal est constitué d’une vaste communauté de milliards de milliards de bactéries <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3983973/">ayant une influence majeure</a> sur votre métabolisme ainsi que sur votre système immunitaire et votre humeur. Ces bactéries et champignons colonisent chaque recoin de votre tube digestif. Leur diversité, reflétant le nombre et la richesse en espèces différentes, est le meilleur indicateur de votre santé intestinale globale. La majeure partie des 1 à 2 kilos de cet « organe microbien » est situé dans votre colon (la partie la plus importante de votre gros intestin).</p>
<p>Nous observons les plus gros changements microbiens chez les personnes suivant un régime alimentaire peu sain, avec un microbiote instable et d’une faible diversité. Ce que nous ne savions pas, c’était si un microbiote sain et stable peut être amélioré en seulement quelques jours. L’opportunité de tester cette hypothèse d’une manière peu habituelle s’est présentée quand mon collègue <a href="http://humanfoodproject.com/about/founder-jeff-leach/">Jeff Leach</a> m’invita à une expédition de terrain en Tanzanie, où il vivait et travaillait chez les Hadza, un des derniers groupes de chasseurs-cueilleurs du continent africain.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/176263/original/file-20170629-16069-1985iz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/176263/original/file-20170629-16069-1985iz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/176263/original/file-20170629-16069-1985iz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/176263/original/file-20170629-16069-1985iz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/176263/original/file-20170629-16069-1985iz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/176263/original/file-20170629-16069-1985iz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/176263/original/file-20170629-16069-1985iz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Chasseurs de la tribu Hadza.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jeff Leach</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Mon microbiote est plutôt sain actuellement et, parmi les premières centaines d’échantillons que nous avions testés dans le cadre d’un précédent projet, celui de l'entreprise de test du microbiote <a href="http://mapmygut.com">MapMyGut</a>, j’avais la plus grande diversité au niveau intestinal. Une grande diversité est associée à un faible risque d’obésité et d’autres nombreuses maladies. Les Hadza ont une des diversités les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24736369">plus riches de la planète</a>.</p>
<p>La méthodologie de recherche fut conçue par Jeff qui me suggéra de me nourrir exclusivement comme un chasseur-cueilleur pendant trois jours, lors de mon séjour dans son camp. Je devais évaluer mes microbes intestinaux avant, pendant et après mon séjour en Tanzanie. Je n’avais pas le droit de me laver ou d’utiliser des lingettes désinfectantes. De plus, on attendait de moi que je chasse et cueille le plus possible avec les Hadza. Cela impliquait de se trouver au contact du caca des bébés Hazda et des babouins traînant aux alentours.</p>
<p>Pour nous aider à faire des enregistrements lors du séjour, j’étais accompagné de Dan Saladino, l’intrépide présentateur et producteur de l’<a href="http://www.bbc.co.uk/programmes/b006qnx3">émission de cuisine de la radio britannique BBC 4</a>, qui préparait une émission spéciale sur les « microbes Hadza ».</p>
<p>Après un vol long et épuisant jusqu’à l’aéroport Mont Kilimandjaro en Tanzanie, nous restâmes une nuit à Arusha, une ville au nord du pays. Avant de partir, le matin suivant, je produisis mon échantillon de caca de référence.</p>
<p>Suite à un voyage de huit heures dans un Land Rover sur des chemins cahoteux, nous arrivâmes. Depuis le sommet d’un grand rocher, Jeff nous fit signe de nous rapprocher pour observer, sur le lac Eyasi, le plus beau lever de soleil au monde. Là, au milieu des roches du célèbre site de fossiles des gorges d’Olduvai, avec en ligne de mire les plaines du Serengeti, Jeff nous expliqua que nous ne serions jamais plus proches du berceau du genre <em>Homo</em>.</p>
<h2>Un régime vieux de millions d’années !</h2>
<p>Les Hadza recherchent les mêmes animaux et les mêmes plantes que les humains ont chassés et ramassés pendant des millions d’années. Il est à noter que le tango dansé entre l’humain et les microbes depuis une éternité a probablement dessiné notre système immunitaire actuel et nous a construit tel que nous sommes aujourd’hui. Être sur la terre des Hadza avait donc un sens primordial pour moi.</p>
<p>À la différence des Hadza qui dorment auprès du feu ou dans des huttes en herbe, on m’avait donné une tente et dit de bien la fermer à cause des scorpions et des serpents. Je devais être attentif à l’endroit où je marchais si j’avais une envie nocturne pressante. Après une nuit riche en émotions mais peu reposante, une grosse pile de cosses de baobabs cueillies pour mon petit déjeuner m’attendait.</p>
<p>Le fruit du baobab est la pierre angulaire du régime Hadza, rempli de vitamines, de graisse dans ses graines, et bien sûr, d’une dose significative de fibres. Nous étions entourés de baobabs, s’étendant à perte de vue. Leur fruit a une coque similaire à la noix de coco mais la leur se brise facilement pour révéler une chair blanchâtre autour d’un gros noyau riche en graisse. La haute teneur en vitamine C donnait un goût de citron plutôt inattendu.</p>
<p>Les Hadza ont mixé les parties charnues avec de l’eau puis ont mélangé vigoureusement pendant deux à trois minutes avec un bâton jusqu’à obtenir une mélasse épaisse et laiteuse. Celle-ci fut ensuite filtrée tant bien que mal pour couler dans une tasse pour mon petit déjeuner. Ce fut, à ma grande surprise, plaisant et rafraîchissant. Comme je n’étais pas sûr de ce que j’allais manger d’autre en ce premier jour, j’en pris deux tasses et me sentis tout à coup totalement repu.</p>
<p>Mon encas suivant fut composé de baies sauvages provenant des nombreux arbres entourant le camp – les plus communes étant les baies de Kongorobi. Celles-ci, rafraîchissantes et légèrement sucrées, contiennent vingt fois plus de fibres et de polyphénols que les baies cultivées. Elles me garantissaient un puissant carburant pour mon microbiote intestinal. On me proposa ensuite un déjeuner à base de tubercules à haute concentration en fibres, déterrées et jetées dans le feu par les femmes de la tribu. Ce fut plus difficile à manger – un peu comme si j’avais mastiqué du céleri dur et terreux. Je n’ai pas demandé une seconde portion mais n’ai pas non plus eu faim, sans doute grâce à mon petit déjeuner riche en fibres. Personne ne sembla s’intéresser à un éventuel dîner.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/176261/original/file-20170629-16083-1601lfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/176261/original/file-20170629-16083-1601lfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/176261/original/file-20170629-16083-1601lfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/176261/original/file-20170629-16083-1601lfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/176261/original/file-20170629-16083-1601lfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/176261/original/file-20170629-16083-1601lfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/176261/original/file-20170629-16083-1601lfh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des femmes Hadza font légèrement griller des tubercules riches en amidon et en fibres.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jeff Leach</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Quelques heures plus tard on nous demanda de nous joindre à une partie de chasse pour débusquer des porcs-épics – une gourmandise rare. Même Jeff, durant ses quatre ans passés à travailler sur le terrain, n’en avait jamais goûté.</p>
<p>Deux porcs-épics de 20kg chacun furent traqués de nuit jusqu’au fond des galeries qu’ils avaient creusées pour s’approcher d’une termitière. Après plusieurs heures passées nous-mêmes à creuser – en évitant soigneusement leurs épines, aussi coupantes que des lames de rasoir – les deux animaux furent ramenés à la surface. Un feu fut allumé. Les épines, la peau et les organes importants furent disséqués d’une manière experte, puis le cœur, le foie et les poumons cuisinés et mangés aussitôt.</p>
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<span class="caption">Un chasseur Hadza retourne au camp avec un porc-épic dépecé jeté sur son épaule.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jeff Leach</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Le reste des grasses carcasses fut ramené au camp pour un repas commun. Cela avait un goût de cochon de lait. Nous avons eu un menu similaire les deux jours suivants, avec un plat principal composé de damans – un étrange animal à fourrure et à sabots, ressemblant à un cochon d’Inde, pesant environ 4kg – un cousin de l’éléphant, aussi étonnant que cela paraisse.</p>
<p>Notre dessert, récolté en haut d’un baobab, fut le meilleur miel que j’aurais pu imaginer – avec, en bonus, un rayon de miel plein de protéines et de graisses provenant des larves d’abeilles. La combinaison du gras et du sucre rendit notre dessert le plus dense en énergie que l’on puisse trouver dans la nature. Il a sans doute pu rivaliser avec la découverte du feu quant à son importance au titre de l’évolution.</p>
<p>Sur les terres Hadza, rien n’est gâché ou tué sans raison. Cela dit, les membres de la tribu mangent une incroyable variété de plantes et d’animaux (environ 600, la plupart étant des oiseaux) par rapport à nous, en Occident. Ce qui m’étonna le plus, était le peu de temps qu’ils passaient à chercher de la nourriture. Quelques heures par jour leur suffisaient – aussi simple que d’aller au supermarché. Quelle que soit la direction où vous alliez, il y avait de la nourriture au-dessus, sur, et en dessous du sol.</p>
<h2>Une énorme augmentation de la diversité microbienne</h2>
<p>Vingt-quatre heures plus tard, Dan et moi étions de retour à Londres, lui avec ses précieuses cassettes audio et moi avec mes échantillons de caca chéris. Après en avoir produit quelques un de plus, je les envoyai au laboratoire pour analyse.</p>
<p>Les résultats montrèrent des différences claires entre l’échantillon de départ et celui produit après trois jours de mon régime de glaneur. La bonne nouvelle était que ma diversité microbienne intestinale avait augmenté d’un incroyable 20 %, avec des microbes africains totalement nouveaux, par exemple ceux de l’espèce phylum <em>Synergistetes</em>.</p>
<p>La mauvaise nouvelle fut, qu’au bout de quelques jours, mon microbiote revint vers ce qu’il était avant mon voyage. Mais nous avions appris quelque chose d’important. Votre régime et votre santé intestinale peuvent être bons, mais ils ne le seront jamais autant que ceux de nos ancêtres. Chacun devrait faire l’effort d’améliorer sa santé intestinale <a href="https://theconversation.com/east-african-hunter-gatherer-research-suggests-the-human-microbiome-is-an-ecological-disaster-zone-73668">grâce à un régime et un style de vie plus sauvage</a>. Être plus aventurier dans notre cuisine quotidienne, se reconnecter à la nature et la vie microbienne qui lui est associée, pourrait bien être la seule chose dont nous ayons besoin !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/83544/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tim Spector est le co-fondateur de Map My Gut Ltd, une entreprise de test du microbiote et a également reçu des financements de MRC, NIHR, CDRF, ARUK, il est l'auteur de "The Diet Myth: the science behind what we eat" Orion 2016</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jeff Leach est le fondateur du Human Food Project et le cofondateur de Map My Gut et l'auteur de Rewild</span></em></p>Le chercheur britannique Tim Spector, professeur en épidémiologie génétique du microbiote, raconte comment son expérience parmi les Hadza, en Tanzanie, a changé sa flore intestinale.Tim Spector, Professor of Genetic Epidemiology, King's College LondonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/808192017-08-29T19:50:23Z2017-08-29T19:50:23ZSanté mentale : quand les animaux soignent<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/180040/original/file-20170727-29132-1j00g8z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La personne diminuée par la maladie retrouve dans l'animal (ici un chien) une utilité sociale qu'elle pensait avoir perdue.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Langley_therapy_dog.jpg">U.S. Air Force/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Des animaux en renfort, à l’hôpital psychiatrique ? Cela existe depuis 2010 à l’hôpital Philippe Pinel d’Amiens, où 259 patients <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/sante/cerveau-et-psy/cynotherapie-a-l-hopital-des-chiens-soignent-des-malades-sur-prescription_114622">ont déjà bénéficié du soutien d’un chien</a>. Le but est de les aider à s’ouvrir sur l’extérieur, et donc à guérir plus rapidement. L’établissement picard est le seul en France, pour le moment, à utiliser ce qui se nomme la cynothérapie. Mais l’idée de mettre des animaux au contact de malades psychiatriques à des fins thérapeutiques s’avère prometteuse.</p>
<p>En réalité ancienne, cette pratique remonte, précisément, à 1792, lorsque des protestants quakers anglais décidèrent de placer des patients en compagnie de lapins ou de poules, dont ils devaient s’occuper. Le but était d’induire chez eux un plus grand contrôle émotionnel. Après cette première expérimentation, les animaux font progressivement leur entrée dans les hôpitaux psychiatriques. Certains établissements commencent à adopter des chiens pour favoriser la socialisation entre les résidents.</p>
<p>Aujourd’hui, en plus des chiens, on utilise des <a href="http://www.psychologies.com/Planete/Les-animaux-et-nous/Articles-et-Dossiers/Le-chat-un-therapeute-au-poil">chats</a>, des <a href="https://fr.sputniknews.com/societe/201604281024612397-lapine-maux-ame-guerisseur/">lapins</a>, des canaris, des chevaux, des <a href="http://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/var/six-fours-les-plages/lama-therapie-six-fours-traiter-troubles-du-comportement-grace-mediation-animale-1220495.html">lamas</a> ou même des <a href="https://blog.surf-prevention.com/2012/03/02/delphinotherapie-la-therapie-assistee-par-les-dauphins/">dauphins</a>, dans le cadre de ce qu’on appelle la <a href="http://www.bnf.fr/documents/biblio_zootherapie.pdf">zoothérapie ou la médiation animale</a>. Ces animaux sont mobilisés dans les troubles mentaux, mais aussi chez les personnes ayant subi un accident vasculaire cérébral (AVC) ou les personnes autistes.</p>
<h2>Chats, hamsters, perruches…</h2>
<p>C’est aux États-Unis que les premières études scientifiques sont conduites. Dans les années 1960, le pédopsychiatre <a href="http://www.nytimes.com/1984/04/03/obituaries/dr-boris-m-levinson-dead-aided-disturbed-youngsters.html">Boris M. Levinson</a> obtient des résultats bénéfiques en utilisant le chien comme « co-thérapeute » de l’enfant présentant des troubles psychiatriques. Il fait figure de pionnier et inspire d’autres expérimentations.</p>
<p><a href="http://www.nytimes.com/1998/03/02/us/dr-samuel-corson-88-dies-father-of-pet-assisted-therapy.html">Samuel et Elizabeth Corson</a>, eux aussi psychiatres, testent les thérapies assistées par l’animal en individuel (un animal pour un patient). Sur un groupe de 50 patients, seuls trois restent indifférents, tandis que tous les autres améliorent leur capacité à communiquer avec d’autres personnes. D’autres formules seront testées avec succès : un chat par service dans un hôpital, des oiseaux dans les salles de groupes de parole, des séances hebdomadaires de soin prodigués par les patients à des hamsters ou même à des perruches…</p>
<p>Il faut cependant attendre les années 1980 pour que les travaux sur l’interaction homme-animal se systématisent. Des chercheurs américains observent l’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/6563527">effet positif des chiens sur le niveau de stress des personnes</a>, qu’elles soient malades ou bien-portantes, à partir d’indicateurs tels que la tension artérielle ou le pouls. Une diminution de la pression sanguine est observée lorsque la personne « papouille » l’animal, et d’autant plus quand elle a un lien préexistant avec lui.</p>
<h2>L’habileté sociale améliorée</h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/180042/original/file-20170727-8525-1rtmd9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/180042/original/file-20170727-8525-1rtmd9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/180042/original/file-20170727-8525-1rtmd9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/180042/original/file-20170727-8525-1rtmd9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=413&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/180042/original/file-20170727-8525-1rtmd9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=519&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/180042/original/file-20170727-8525-1rtmd9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=519&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/180042/original/file-20170727-8525-1rtmd9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=519&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les chevaux permettent une thérapie en milieu ouvert.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/anoldent/846549885">anoldent/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p><a href="http://pepite-depot.univ-lille2.fr/nuxeo/site/esupversions/6715e403-c6db-4f7b-a85d-c6ea259b9398">L’équinothérapie</a> (<em>therapeutic riding</em> ou <em>hippotherapy</em> en anglais), elle, est différente des exemples cités précédemment, en ce que la fréquentation des chevaux permet une thérapeutique ludique, hors des institutions de soins. On peut la diviser en deux pratiques distinctes : l’équitation en elle-même, qui permet de travailler la tonicité musculaire et la posture, et le soin de l’animal, qui concerne davantage l’émotionnel et le relationnel. Les types de patient pouvant bénéficier du contact des chevaux sont nombreux. On peut citer, parmi d’autres, les personnes atteintes d’une <a href="https://informations.handicap.fr/art-handicap-moteur-70-3136.php">infirmité motrice cérébrale</a>, de la maladie de Parkinson, de la trisomie 21, les victimes d’un AVC ou les personnes <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Prise_en_charge_de_l%27autisme_par_l%27%C3%A9quith%C3%A9rapie">autistes</a>.</p>
<p>Chez les enfants autistes <a href="http://www.mira.ca/fr/nos-services/7/chien-d-assistance-pour-enfant-presentant-un-tsa_142.html">mis au contact de chiens</a>, les résultats sont positifs voire spectaculaires sur les trois grandes catégories de symptômes : troubles de la communication, difficultés dans les interactions sociales, comportements restrictifs ou répétitifs. Le lien exclusif avec l’animal crée les conditions d’un soin sans les mots, qui paradoxalement peut amener l’enfant à acquérir ou à renforcer ses compétences verbales.</p>
<p>Les patients atteints de dépression ou de troubles psychiatriques, les personnes âgées touchées par la maladie d’Alzheimer ou par une perte d’autonomie voient également leurs habiletés sociales améliorées avec la présence d’un canari auprès d’eux.</p>
<p>Mais que se passe-t-il, en réalité, entre une personne autiste et un chien ? Ou entre une personne âgée et un petit canari ? Si nous avons du mal à comprendre l’efficacité de ce lien, c’est parce que nous sommes habitués à une conception biologique de la maladie. Une grille de lecture relationnelle, en revanche, nous permet d’aller plus loin dans la compréhension de l’effet thérapeutique de l’animal.</p>
<h2>La composante relationnelle de la maladie</h2>
<p>La maladie, et donc le soin, ont en effet une composante relationnelle. Être malade, ce n’est pas seulement être atteint d’un dysfonctionnement biologique : c’est se voir attribuer un rôle différent dans la vie sociale. Face aux individus moins « capables » ou moins « productifs », les comportements des autres changent. Le malade chronique ou incurable pourra susciter un surcroît d’attention, ou au contraire de la crainte. Les relations s’en trouvent asymétriques et une forme d’isolement se fait souvent sentir.</p>
<p>Les animaux permettent à l’être humain ainsi frappé d’altérité de développer une communication non verbale. L’animal est une présence, un être vivant auquel on peut parler, même confusément, ou ne pas parler du tout. Son effet bénéfique tient dans le stimulus psycho-affectif et l’échange coordonné qu’il permet (par exemple, une caresse à un chat déclenche un ronronnement). L’<a href="http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/%C3%A9thologie/49750">éthologie</a> a bien fait ressortir le fait que les animaux, et spécifiquement les chiens, ressentent des émotions, dont certaines peuvent être associées à une forme de compassion. La relation avec l’animal crée les conditions d’un soin sans les mots.</p>
<p>La maladie est affaire de positionnement relatif entre les individus. La personne se sent malade parce qu’elle consulte un médecin ou parce qu’on lui prodigue des soins. Si elle se trouve en position de prendre soin à son tour, son rôle change. Entrer en relation avec un être qu’elle considère avoir besoin de secours ou d’attention est un facteur d’amélioration de son état. Dans les expérimentations menées par les Colson, les chiens cabossés, chétifs ou timides attiraient une attention particulière. La personne diminuée par la maladie trouvait dans l’animal à secourir une possibilité de se décentrer et une utilité sociale renouvelée.</p>
<h2>Une minorité de patients hermétiques aux animaux</h2>
<p>Toutefois, si les thérapies assistées par l’animal montrent des résultats significatifs avec une grande variété d’espèces et de pathologies, leur efficacité n’est pas universelle. Les études montrent une minorité de patients pour laquelle l’animal n’est d’aucun secours. Certains malades psychiatriques y restent totalement hermétiques. Des personnes autistes ont une peur insurmontable des chiens ou ne supportent pas leur odeur, du fait d’une hypersensibilité olfactive. D’autres souffrant de polypathologies peuvent être allergiques à certains animaux, ou avoir un système immunitaire trop fragile pour y être exposés.</p>
<p><a href="http://www.rehab.research.va.gov/jour/06/43/3/macauley.html">Une étude</a> menée sur des personnes <a href="http://www.vulgaris-medical.com/encyclopedie-medicale/aphasie">aphasiques</a> – c’est-à-dire présentant des troubles du langage – après un AVC, a montré qu’il n’y avait pas de différence biologique entre une réhabilitation classique et une réhabilitation avec le chien : elles sont toutes les deux efficaces. En revanche, la satisfaction des patients ayant recouvré la parole grâce à un chien était bien meilleure. Ils trouvaient le protocole moins stressant, plus amusant et appréciaient la composante relationnelle.</p>
<p>Dans un autre registre, des critiques de la part de <a href="http://www.animalsandsociety.org/wp-content/uploads/2016/04/zamir.pdf">certains militants défendant les droits des animaux</a> se sont faites entendre. Pour ces « libérationnistes », les animaux employés dans ces thérapies font l’objet d’exploitation. Les arguments mis en avant sont la « limitation du bien-être et de la liberté » de l’animal, ainsi que son « instrumentalisation ». Les thérapies assistées par les animaux seraient, de ce point de vue, moralement condamnables.</p>
<h2>L’animal, un autre semblable</h2>
<p>L’animal occupe, quoi qu’il en soit, une place singulière dans notre imaginaire collectif : le jeune Mowgli élevé par des loups dans <em>Le Livre de la jungle</em>, le Petit prince apprivoisant un renard qui deviendra pour lui « unique au monde », Gulliver conversant avec les intelligents et civilisés <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Houyhnhnm">« Houyhnhnms »</a>, nom donné aux chevaux d’après le son qu’ils font avec leurs naseaux.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/180048/original/file-20170727-8486-1fct5nq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/180048/original/file-20170727-8486-1fct5nq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/180048/original/file-20170727-8486-1fct5nq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/180048/original/file-20170727-8486-1fct5nq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/180048/original/file-20170727-8486-1fct5nq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/180048/original/file-20170727-8486-1fct5nq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/180048/original/file-20170727-8486-1fct5nq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dans <em>Le Livre de la jungle</em> de Rudyard Kipling (ici son adaptation en film d’animation par les studios Disney), le jeune Mowgli est élevé par des loups avant de rencontrer de nombreux animaux, dont l’ours Baloo.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/91689877@N03/35436547796/in/photolist-VZpz51-CkE4v-VWMg8D-UMivQ2-VRqiLg-VNb9p7-VGmy8t-Wton2U-RXPyrQ-VuUiqg-V7bhZm-ULBd4y-VrLJRS-V7bbEC-URaEED-UsSA28-UpMSUA-VrJQd7-VGnkMz-VuTjqe-UpNt85-UsT3eP-VuUFjg-VCQyrJ-VCND6s-VuUvTx-VrMk5w-VMS95A-VGobGt-URXAyy-UsTiGc-VCQpBj-V7abNW-VuThSp-R68DDq-VZpw6A-W5Quc5-UsSBK8-V79WLh-VuTmJc-VrLmp7-Vy7hjA-VrKHXu-VNbaqq-VrJFC1-UpNyCJ-UsT77Z-UsTyXx-VsLW67-UsU7Ek">Patrick Rich/Flickr</a></span>
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<p>Ainsi, l’animal n’apparaît pas comme cet autre radical qui appartiendrait au domaine séparé de la nature, mais bien comme un semblable avec qui nous partageons des réactions et des émotions. Les <a href="https://fr.wikisource.org/wiki/Fables_d%E2%80%99%C3%89sope">fables d’Ésope</a> ou de <a href="http://www.lesfables.fr/">La Fontaine</a>, comme de nombreux contes pour enfants, mettent en scène des animaux pour mieux parler des hommes… S’ils n’ont pas les mots pour communiquer, les animaux savent établir des liens avec l’homme. La médecine contemporaine ne saurait faire l’économie de cette sagesse ancestrale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/80819/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Elisa Chelle ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des études ont montré que la zoothérapie pouvait avoir des effets spectaculaires sur les patients, en les aidant à s’ouvrir sur l’extérieur. Et ce dans le cas de plusieurs troubles psychiatriques.Elisa Chelle, Chercheuse, Université de LyonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/766332017-05-17T20:20:24Z2017-05-17T20:20:24ZDans le ventre de sa mère, le fœtus associe sons et émotions<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/166664/original/file-20170425-27254-10rck15.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La grossesse, expérience sensorielle pour la mère et l'enfant.</span> <span class="attribution"><span class="source">http://www.flickr.com/photos/newlifehotels/3508874204/</span></span></figcaption></figure><p>Chez l’homme comme chez bien des espèces animales – que ce soit parmi les oiseaux, les crocodiles ou les mammifères – le fœtus est capable de percevoir des stimuli externes, et en particulier des sons, au moins à la fin de son développement. Les sons perçus peuvent être naturels (comme la voix de la mère), ou artificiels (musique). Et le fœtus fait la différence entre ceux qui lui sont ou non familiers. Cette expérience sensorielle prénatale est naturellement mémorisée. Tant et si bien que dès la naissance, le petit de l’homme reconnaît la voix de sa mère, et il peut même montrer une préférence pour des musiques qu’elle a écoutées à la fin de sa grossesse.</p>
<p>Il y a donc transmission « transnatale », c’est-à-dire du stade fœtal au stade postnatal. Et c’est vrai pour différentes modalités sensorielles. Un exemple ? De tout jeunes rats dont les mères ont été placées en apesanteur pendant la gestation présenteront des perturbations de l’équilibre. De fait, le comportement et la physiologie de leur mère sont une source majeure d’<a href="https://www.cairn.info/revue-spirale-2011-3-page-35.htm">expériences sensorielles</a> pour le fœtus : si elle ressent des émotions pendant qu’elle réalise une tâche, on observe alors chez lui des changements de rythme cardiaque.</p>
<h2>Jusqu’à quel point peut-il mémoriser les associations ?</h2>
<p>Capable d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Apprentissage">apprentissage</a> par association – en mémorisant le lien entre un stimulus et son ressenti – le fœtus est donc sensible aux émotions ressenties par sa mère. Mais jusqu’à présent, aucune étude ne permettait de rapprocher ces deux processus. Jusqu’à quel point le fœtus peut-il associer des stimuli perçus en même temps que les émotions ressenties par sa mère, puis mémoriser cette association ? C’est précisément la question que nous nous sommes posée au sein des laboratoires <a href="http://www.phase.inra.fr/">Physiologie, Environnement et Génétique pour l’Animal et les Systèmes d’Élevage</a>) et <a href="https://ethos.univ-rennes1.fr/">Ethologie animale et Humaine</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167510/original/file-20170502-17254-6n6e1x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167510/original/file-20170502-17254-6n6e1x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167510/original/file-20170502-17254-6n6e1x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167510/original/file-20170502-17254-6n6e1x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167510/original/file-20170502-17254-6n6e1x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167510/original/file-20170502-17254-6n6e1x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167510/original/file-20170502-17254-6n6e1x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le cochon est un bon modèle animal pour l’expérimentation relatée dans cet article.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/de-porcs-porc-domestique-t%C3%A9ter-536539/">Gellinger/Pixabay</a></span>
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<p><a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27857224">Pour y répondre</a>, nous avons choisi un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Mod%C3%A8le_animal">modèle animal</a> : le cochon. Avec l’idée de tester si des sons diffusés à la mère pendant la gestation, tout en lui faisant vivre des expériences plus ou moins positives sur le plan émotionnel, pouvaient ensuite avoir un impact sur les réactions des petits à l’écoute de ces mêmes sons. Ayant une audition très développée et des capacités cognitives reconnues, tout en faisant l’objet d’élevages et en se laissant facilement manipuler, le cochon constituait le modèle idéal. Nous avons donc fait la lecture de textes diffusés par haut-parleurs, tout en y associant des expériences émotionnelles positives ou négatives chez des truies gestantes. Puis nous avons observé la réaction des porcelets à ces mêmes textes, juste après leur naissance et dans les semaines suivantes.</p>
<p>Au total, pendant le dernier mois de gestation, 38 truies ont ainsi été soumises quotidiennement à 10 minutes de caresses ou autres sources d’émotions positives le matin, puis à 10 minutes de gestes brusques ou autres sources d’émotions négatives l’après-midi. Trois groupes ont été constitués. Dans deux groupes « test », composés de 10 truies chacun, ces traitements étaient associés avec une voix humaine particulière (voix A pour le traitement positif et voix B pour le traitement négatif pour le groupe 1, voix B pour le positif et voix A pour le négatif pour le groupe 2). Enfin dans un groupe « témoin », comprenant lui aussi 10 truies, ces mêmes traitements étaient appliqués sans que des voix soient diffusées. Les truies n’entendaient aucune autre voix, les soigneurs ayant pour consigne de ne jamais leur parler.</p>
<h2>Après la naissance, trois constats</h2>
<p>Après leur naissance, les porcelets ont été soumis à des tests de séparation sociale de cinq minutes, étant alors placés seuls dans une pièce. Une telle situation les amène en général à pousser des « cris de détresse » qui indiquent leur niveau de stress. Or nous avons pu faire trois constats.</p>
<p>Premièrement, qu’ils aient deux jours ou trois semaines, les porcelets ayant entendu des voix humaines avant leur naissance étaient moins stressés que les porcelets témoins, quand ces mêmes voix leur étaient diffusées pendant le test : ces voix étaient donc perçues comme « familières », après avoir été mémorisées <em>in utero</em>.</p>
<p>Deuxièmement, quand une voix nouvelle lisant le même texte était diffusée, elle avait également un effet apaisant, preuve que les porcelets avaient généralisé l’effet d’une voix à toute voix humaine.</p>
<p>Troisièmement, enfin, les porcelets étaient plus stressés par une voix associée par leur mère à une émotion négative que liée à une émotion positive. Ils avaient donc bien mémorisé l’association entre la voix et le ressenti de leur mère, et ce souvenir avait un impact majeur sur leurs réactions.</p>
<p><em>In fine</em>, ces résultats sont la première démonstration d’un apprentissage in utero par association entre un stimulus sensoriel et l’état émotionnel de la mère. Et ils devraient avoir des retombées majeures. D’abord, parce qu’ils mettent en lumière le potentiel impact de la voix des soigneurs sur les mères gestantes d’espèces domestiques ou captives. Ensuite, parce qu’ils peuvent être élargis à l’humain. On pourrait s’en inspirer pour apaiser les nouveau-nés en situation difficile – par exemple en cas de naissance prématurée – en leur faisant écouter certaines musiques. Et l’on devrait sans doute reconsidérer les préconisations habituelles autour de la grossesse.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76633/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Capable de percevoir les sons mais aussi le ressenti de sa mère, le fœtus les associe et les garde en mémoire. Un apprentissage qui aura, à la naissance, un impact sur ses réactions.Alban Lemasson, Professeur à l'université de Rennes 1, directeur du laboratoire d'éthologie animale et humaine (EthoS), Université de Rennes 1 - Université de RennesMartine Hausberger, Directrice de recherche au CNRS. Dirige l'équipe de recherche PEGASE au sein du laboratoire d'éthologie animale et humaine (EthoS), Université de Rennes 1 - Université de RennesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/591292016-05-11T04:35:49Z2016-05-11T04:35:49ZLes pieuvres sont super-intelligentes… mais ont-elles une conscience ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/121933/original/image-20160510-20713-1t1xnjn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La pieuvre, invertébrée malicieuse.</span> <span class="attribution"><span class="source">Vladimir Wrangel/Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Inky, la pieuvre sauvage, <a href="http://www.theguardian.com/world/2016/apr/13/the-great-escape-inky-the-octopus-legs-it-to-freedom-from-new-zealand-aquarium">s’est échappée</a> de l’Aquarium national de Nouvelle-Zélande. Apparemment, elle s’est faufilée à travers une petite ouverture de son réservoir et des empreintes de ventouses montrent qu’elle s’est frayée un chemin vers un tuyau d’évacuation des eaux se déversant dans l’océan.</p>
<p>Bien joué, Inky ! Ton courage nous donne l’occasion de réfléchir au degré d’intelligence des céphalopodes. En fait, ils sont <a href="http://www.csmonitor.com/Science/2016/0413/What-Inky-the-octopus-s-escape-tells-us-about-animal-cognition">très intelligents</a>. Jennifer Mather, experte dans ce domaine, a passé des années à les étudier. <a href="http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1053810006001504">Selon elle</a>, ils ne démontrent pas seulement leur aptitude à décrypter de nombreuses caractéristiques de leur environnement, mais ils passent d’une phase d’exploration vers quelque chose qui ressemble à un jeu, si on leur donne l’occasion.</p>
<p>Par exemple, Jennifer Mather raconte comment deux pieuvres ont utilisé plusieurs fois leurs jets d’eau pou faire sauter un objet vers un conduit situé à l’opposé de leur réservoir. Ce qu’elle décrit comme « l’équivalent aquatique d’un jeu de ballon ». Qui plus est, comme l’explique Jennifer Mather, les céphalopodes résolvent les problèmes avec inventivité. Ainsi, quand elles s’attaquent à des coquillages, les pieuvres utilisent souvent toute une gamme de tactiques pour détacher la viande de la coquille, avec un va-et-vient de techniques : ouvrir le coquillage en le tirant, en écailler le bord, ou en percer la paroi. Une vraie démarche d’essais et erreurs !</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/k9l1JWUftFs?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Les céphalopodes, certes, ne sont pas les seuls à faire preuve d’intelligence. C’est le cas aussi d’autres espèces non-humaines. Dans leur genre particulier, beaucoup de machines le sont aussi et certaines surpassent les hommes les plus intelligents dans nos <a href="https://theconversation.com/faut-il-avoir-peur-dalphago-56376">jeux les plus compliqués</a>. Vous devinez probablement la question suivante. Cela signifie-t-il que nombre de non-humains – les pieuvres, les corbeaux, les singes, les machines – sont dotés d’une conscience ? Et si oui, comment y répondons-nous ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/121935/original/image-20160510-20734-1aw64rs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/121935/original/image-20160510-20734-1aw64rs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/121935/original/image-20160510-20734-1aw64rs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/121935/original/image-20160510-20734-1aw64rs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/121935/original/image-20160510-20734-1aw64rs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/121935/original/image-20160510-20734-1aw64rs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/121935/original/image-20160510-20734-1aw64rs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’humain Lee Sedol contre la machine intelligente AlphaGo.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bepo Live/YouTube</span></span>
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<p>Ce genre de questions provoque beaucoup d’intérêt. Rien que le mois dernier, un des primatologues les plus influents, Franz de Waal, a publié une étude consacrée à l’<a href="http://www.nytimes.com/2016/04/10/opinion/sunday/what-i-learned-from-tickling-apes.html">anthropomorphisme et à la conscience des chimpanzés</a> ; des philosophes et des scientifiques ont débattu de la <a href="http://www.kurzweilai.net/the-problem-of-ai-consciousness">conscience des intelligences artificielles</a> et de la possibilité pour les machines de devenir conscientes d’elles-mêmes sans que nous nous en rendions compte ; enfin, le neuroscientifique Michael Graziano a soutenu que les théories actuelles de la conscience sont « pires qu’erronées » tout en prédisant que nous aurons construit une machine consciente dans les <a href="http://www.theatlantic.com/science/archive/2016/03/phlegm-theories-of-consciousness/472812/">50 ans à venir</a>.</p>
<p>Cependant, il est difficile de savoir quel type de vie mentale possèdent les animaux non-humains et si elle ressemble quelque peu à la nôtre. Si c’est le cas, avons-nous tort de les manger ? Ou bien, prenons en considération les robots : ils pourraient très bien développer une activité mentale qui leur soit propre. Nous ne sommes guère préparés à reconnaître si – ou quand – cela va intervenir, même si nous pourrions être amenés, éventuellement, à avoir des <a href="https://aeon.co/opinions/we-have-greater-moral-obligations-to-robots-than-to-humans">obligations morales envers ces machines</a>.</p>
<p>Ce que j’ai lu de mieux ces temps-ci sur la conscience et chez les non-humains, c’est une nouvelle, <a href="http://escapepod.org/2016/03/29/ep526-the-hunter-captain/">« The Hunter Captain »</a>, du philosophe et écrivain David John Baker. Il s’agit d’êtres d’une race étrangère qui, pour la première fois, rencontrent un humain. Selon leurs neurosciences à eux, cet humain est dépourvu de la structure neurale spécifique qui engendre la conscience. Comme tous les autres animaux qu’ils ont rencontrés, y compris les animaux parlants qu’ils tuent de façon violente avant de les manger, l’homme n’est qu’intelligent, mais privé de conscience. En tant que tel, il n’a pas de statut moral, il est destiné à être pourchassé, ou asservi. Comme on peut l’imaginer, l’être humain s’y oppose. S’ensuit une discussion entre l’alien et l’homme sur la philosophie de l’esprit.</p>
<p>La nouvelle de David John Baker met en scène les deux points clefs de décisions auxquelles nous sommes confrontés quand nous nous soucions de la conscience chez les non-humains.</p>
<p>Le premier pose la question de savoir si la conscience serait la base indispensable pour gagner un statut moral : à savoir ce que vous avez en vous qui crée une obligation de vous traiter d’une façon particulière (interdiction de vous faire du mal, respect de vos droits). Même si la conscience constitue le point essentiel, il n’est pas évident de savoir où tracer la ligne de démarcation : d’aucuns disent que la valeur morale exigeun <a href="https://jmp.oxfordjournals.org/content/early/2009/02/04/jmp.jhn038.full">type de conscience</a> associée à la sensation de douleur et de plaisir (la conscience des phénomènes) ; d’autres pointent celle qui est <a href="http://journals.cambridge.org/action/displayAbstract?fromPage=online&aid=312522&fileId=S0265052505052027">associée à la connaissance de soi-même</a>.</p>
<p>Le second point concerne la nature de la conscience et on se demande s’il suffit d’un certain type d’intelligence, ou d’un certain niveau d’intelligence. Auquel cas, quel degré d’intelligence faut-il manifester, et comment le mesurer ? Même si la seule intelligence n’est pas suffisante pour garantir la conscience, il pourrait être psychologiquement impossible pour nous, les humains, d’affronter un être hautement intelligent sans ressentir l’envie irrépressible de le savoir conscient. Devons-nous faire confiance à ce besoin ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/121938/original/image-20160510-20721-gf1n9a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/121938/original/image-20160510-20721-gf1n9a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/121938/original/image-20160510-20721-gf1n9a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/121938/original/image-20160510-20721-gf1n9a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/121938/original/image-20160510-20721-gf1n9a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/121938/original/image-20160510-20721-gf1n9a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/121938/original/image-20160510-20721-gf1n9a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’intelligence, c’est s’adapter à son environnement.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/_bluevanilla/9266841092">chostett/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
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</figure>
<p>Regardons, à nouveau, du côté des pieuvres. En se basant sur des signes comportementaux, on peut dire qu’elles sont intelligentes. Mais rien n’est moins évident que de savoir à quel point elles le sont, et même si cette question est pertinente. L’intelligence des pieuvres se forme, en partie, en fonction de leurs besoins – leur type de pensée et de besoins dépend de l’histoire de leur évolution de leur environnement et de leur conformation. En fonction de ces facteurs, on peut estimer que les pieuvres sont hautement intelligentes. La conscience pourrait être intimement liée aux particularités de l’intelligence proprement humaine. Mais compte tenu du peu que nous savons de la conscience, il semble imprudent, à l’heure actuelle, de souscrire à cette explication.</p>
<p>D’autres points méritent que l’on s’interroge. Les pieuvres <a href="http://blogs.scientificamerican.com/octopus-chronicles/do-octopuses-feel-pain/">ressentent-elles la douleur</a> ? Apparemment oui, même si les sceptiques peuvent vous expliquer qu’elles ne font jamais que réagir à des stimuli comme si elles avaient mal. Mais ont-elles conscience d’éprouver cette douleur ? On ne sait pas.</p>
<p>Il n’existe que très peu de consensus sur ces questions difficiles. Mon but a été de s’y confronter. Car nous avons tous, c’est évident, à décider ce qu’il faut en penser. Nous interagissons déjà avec des animaux certainement dotés de conscience et, à des degrés divers, d’intelligence. En outre, pour beaucoup d’entre nous, dans un futur proche ou lointain, c’est à des machines probablement conscientes à des degrés divers d’intelligence que nous aurons à faire.
Contrairement à Inky, la pieuvre sauvage, les questions sur la conscience chez les non-humains ne vont pas s’effacer comme cela.</p>
<p><em>En collaboration avec le blog <a href="http://blog.practicalethics.ox.ac.uk/">Practical Ethics</a> de l’université d’Oxford</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/59129/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joshua Shepherd a reçu des financements du Wellcome Trust.</span></em></p>On dit les pieuvres intelligentes, au point de jouer savamment des tentacules pour s'échapper de l'aquarium. Cela veut-il dire qu'elles sont dotées de conscience, tout comme nous les humains ?Joshua Shepherd, Wellcome Trust Research Fellow in Philosophy, University of OxfordLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/563042016-03-16T05:45:52Z2016-03-16T05:45:52ZComment être heureux et avoir beaucoup d’enfants quand on est un poisson<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/115104/original/image-20160315-9272-5hduz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Communauté en aquarium</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.publicdomainpictures.net/view-image.php?image=3511&picture=live-fish-aquarium&large=1">Shari Weinsheimer</a></span></figcaption></figure><p>Pourquoi les vieux couples se ressemblent-ils tant ? Cette question est vivement débattue en psychologie humaine. Le fait que les partenaires se ressemblent et adoptent des comportements similaires jouerait un <a href="http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0191886910003612">rôle non négligeable</a> dans la satisfaction maritale des conjoints et la cohésion de leur couple.</p>
<p>Le fait que les partenaires se ressemblent peut être le simple résultat d’un choix préalable à la mise en couple (“qui se ressemble s’assemble”). Mais il est aussi possible que cette ressemblance résulte d’une convergence comportementale entre les partenaires une fois le couple formé (“qui s’assemble finit par se ressembler”).</p>
<p>Pour notre espèce, il est très difficile de démêler le processus de choix initial des partenaires, de la convergence après le début de la relation. Pour arriver à faire la part des choses, il faudrait pouvoir contrôler la formation des couples indépendamment des préférences individuelles. Évidemment, c’est éthiquement et moralement inacceptable, la question reste donc en suspens chez l’humain.</p>
<h2>Et chez les autres animaux monogames ?</h2>
<p>Chez les autres espèces monogames, la question avait jusqu’à maintenant été négligée, les biologistes supposant plus ou moins implicitement que la similarité entre les partenaires résulterait d’un choix initial, et non d’une forme d’ajustement à la formation du couple.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/115105/original/image-20160315-9276-n748ya.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/115105/original/image-20160315-9276-n748ya.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/115105/original/image-20160315-9276-n748ya.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/115105/original/image-20160315-9276-n748ya.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=418&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/115105/original/image-20160315-9276-n748ya.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/115105/original/image-20160315-9276-n748ya.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/115105/original/image-20160315-9276-n748ya.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=525&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Huskies. Les chiens ont des personnalités diverses.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/chiens-de-tra%C3%AEneau-husky-oeil-bleu-273409/">Violetta/Pixabay</a></span>
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</figure>
<p>Au sein d’une même espèce, les individus n’ont <a href="http://psycnet.apa.org/journals/bul/127/1/45/">pas tous le même profil comportemental</a>. Peut-être avez-vous remarqué que certains chiens sont plutôt téméraires, agressifs face à une menace et plus explorateurs dans l’environnement (on les appelle les individus proactifs) alors que d’autres sont timides, peu agressifs et peu enclin à la nouveauté (les individus réactifs).</p>
<p>Il ne s’agit pas d’anthropomorphisme, simple projection de sentiments humains sur nos animaux domestiques. Car il est relativement facile de quantifier objectivement, au moyen de tests standardisés, ces différences de profil comportemental. On les retrouve chez presque toutes les espèces animales chez qui elles ont été recherchées.</p>
<p>Il serait faux de croire qu’un profil serait systématiquement plus avantageux qu’un autre. Par exemple, dans un contexte de soins parentaux, les individus proactifs passent beaucoup de temps à défendre leur nid contre les prédateurs alors que les individus réactifs investissent surtout dans les soins directs aux œufs ou aux jeunes.</p>
<p>À l’échelle du couple, la combinaison des profils comportementaux des deux parents devraient affecter leur capacité à se reproduire efficacement. En effet, les parents doivent <a href="http://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.1002248">coordonner leurs actions</a> quand ils se partagent les soins aux jeunes. Les couples dont les partenaires ont un profil comportemental similaire sont alors souvent avantagés.</p>
<p>Par exemple, <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1365-2656.2005.00962.x/full">chez les mésanges charbonnières ou les diamants mandarins</a>, les partenaires qui se ressemblent arrivent à élever plus de jeunes que les couples dont les partenaires sont différents. Des parents similaires arrivent à se synchroniser leurs trajets auprès de la couvée ce qui réduit l’activité autour du nid et évite donc d’attirer l’attention des prédateurs sur celui-ci. Ainsi, plus que le profil comportemental de chacun des parents, c’est bien leur ressemblance qui aurait un rôle crucial sur leur succès de reproduction du couple.</p>
<h2>Qui se ressemble se défend mieux</h2>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/115106/original/image-20160315-9276-kqv88s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/115106/original/image-20160315-9276-kqv88s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/115106/original/image-20160315-9276-kqv88s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/115106/original/image-20160315-9276-kqv88s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/115106/original/image-20160315-9276-kqv88s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/115106/original/image-20160315-9276-kqv88s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/115106/original/image-20160315-9276-kqv88s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Attention aux ours quand on est en balade.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:MUTCD_W11-16.svg">Wikimedia</a></span>
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</figure>
<p>Risquons une analogie : supposons que lors d’une randonnée en famille avec vos jeunes enfants, vous croisiez un ours un peu agressif qui vous perçoit comme un danger et menace de vous attaquer. Soit vous et votre conjoint décidez d’unir vos forces pour lui faire peur et le mettre en fuir, soit vous adoptez un comportement plus prudent et battez en retraite en essayant de ne pas laisser de petits derrière. Dans les deux cas, il n’est pas certain que vous vous en sortiez sans mal, mais les chances de succès de ces deux tactiques sont en tout cas plus élevées que si l’un de vous fuit alors que l’autre attaque l’ours tout seul.</p>
<p>Choisir dès le départ un partenaire similaire à soi semblerait donc une bonne stratégie pour s’assurer un bon succès reproducteur. Mais, à moins d’être particulièrement chanceux, il faudra aux individus beaucoup de temps pour dénicher ce partenaire idéal, et peut-être n’y arriveront-ils pas ! Le risque est alors grand pour les individus de rester célibataire et de laisser passer une occasion de se reproduire… Il serait alors peut-être plus judicieux d’accepter un des premiers partenaires disponibles qui se présente, puis de tenter de tirer parti de la situation en s’ajustant à lui ou en attendant qu’il le fasse La question est alors de savoir si des partenaires mal assortis peuvent s’accorder l’un à l’autre après la formation du couple ?</p>
<h2>Poissons en couples</h2>
<p>Les oiseaux ont la réputation de former des couples stables et d’être fidèles à leur partenaire. La monogamie se retrouve aussi dans d’autres groupes tels que certains poissons dont le <a href="http://biogeosciences.u-bourgogne.fr/fr/theses-hdr/31-fr/theses-hdr/theses-en-cours/830-these-de-chloe-laubu">cichlidé zébré Amatitlania siquia</a>, un petit poisson tropical d’eau douce. Chez cette espèce, le mâle et la femelle forment une paire stable, occupent un nid qu’ils creusent dans le sédiment et veillent ensemble sur leur progéniture.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/115107/original/image-20160315-9276-zgcmf3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/115107/original/image-20160315-9276-zgcmf3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/115107/original/image-20160315-9276-zgcmf3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/115107/original/image-20160315-9276-zgcmf3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/115107/original/image-20160315-9276-zgcmf3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=444&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/115107/original/image-20160315-9276-zgcmf3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=444&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/115107/original/image-20160315-9276-zgcmf3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=444&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Cichlidés zébrés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikipédia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les soins prodigués aux jeunes sont variés et s’étalent sur plusieurs semaines depuis la ponte jusqu’à l’indépendance des alevins. La défense du nid contre les prédateurs est une des tâches essentielles car, dans les rivières d’Amérique centrale où ils vivent, les jeunes sont en permanence exposés à la prédation par des poissons plus gros. Il est donc crucial que les parents arrivent à se coordonner efficacement pour que leurs jeunes survivent.</p>
<p><a href="http://advances.sciencemag.org/content/2/3/e1501013.article-info">Dans notre étude</a>, nous avons formé des couples composés de partenaires aux profils comportementaux très contrastés ou, au contraire, très similaires. L’activité de défense du nid face à un intrus sur leur territoire était évaluée pour chaque individu avant et après la formation du couple.</p>
<p>Cette étude nous a tout d’abord permis d’observer que, tout comme chez les oiseaux, ce qui compte, c’est bien la ressemblance entre partenaires : les couples formés de deux partenaires proactifs ou deux partenaires réactifs avaient un succès reproducteur comparable, et, en moyenne, supérieur à celui des couples formés d’individus dissemblables (un proactif apparié avec un réactif).</p>
<p>En revanche, une observation plus fine des résultats a révélé quelques surprises : le comportement de certains couples initialement mal assortis avait convergé ! Les partenaires étaient parvenus à s’accorder l’un à l’autre. En outre, plus ils étaient devenus similaires, meilleur était leur succès reproducteur. Non seulement ils avaient plus de jeunes que les couples qui avaient peu convergé, mais ils avaient un nombre de jeunes équivalent à celui des couples initialement similaires. Par ailleurs, la convergence était principalement le résultat de l’ajustement du partenaire réactif vers son partenaire proactif.</p>
<p>Notre travail a mis en avant la possibilité d’un ajustement des partenaires après la mise en couple pour expliquer la similarité au sein des couples de cichlidés zébrés observée dans la nature. Gardons-nous bien à ce stade de généraliser ces conclusions à l’espèce humaine, mais reconnaissons que si les partenaires poissons sont capables de s’ajuster l’un à l’autre, il est envisageable que les conjoints humains le soient aussi.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/56304/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Qui se ressemble, s’assemble, et vivra heureux, dit la sagesse populaire. Et qui s’assemble finit par se ressembler, observe-t-on chez les poissons. Et chez les humains ?Chloé Laubu, Doctorante, équipe écologie évolutive, Université de Bourgogne – UBFCFrançois-Xavier Dechaume-Moncharmont, Maître de conférences (HDR) en écologie évolutive, Université de Bourgogne – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/551112016-03-03T05:42:02Z2016-03-03T05:42:02ZLes poissons ont-ils des états d’âme ? Peut-être bien…<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/113366/original/image-20160301-8054-1wyzhwz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=387%2C0%2C3231%2C1784&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Que pense-t-il ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/aquarium-poisson-nager-l-eau-722447/">Kelin/Pixabay</a></span></figcaption></figure><p>La question fait <a href="http://plato.stanford.edu/entries/consciousness-animal/">débat depuis des siècles</a> : hormis le genre humain, d’autres êtres vivants, les autres animaux, peuvent-ils penser et ressentir des émotions ? La plupart d’entre nous sont d’accord : les hommes ont un degré de conscience, qu’on peut définir, en gros, comme la capacité <a href="http://booksandjournals.brillonline.com/content/journals/10.1163/156916208x311665">d’expérimenter des pensées et d’éprouver des sentiments</a>. Mais savoir quelles autres créatures possèdent un degré de conscience, cela reste une question ouverte et controversée.</p>
<p>Nous pouvons aussi nous demander s’il existe différents niveaux de conscience et si les expériences d’autres organismes vivants sont similaires aux nôtres. On peut imaginer que les dauphins et les cervidés ont la capacité de ressentir des émotions, mais qu’en est-il d’un poisson, d’un insecte, d’une plante ? Ce qui nous amène à une autre interrogation clé pour les scientifiques : comment découvrir si les animaux où les plantes ressentent quelque chose ?</p>
<p>Mes collègues et moi-même avons fait une <a href="http://rspb.royalsocietypublishing.org/content/282/1819/20152266">expérience récente</a> qui éclaire quelque peu la question. Nous avons découvert que les poissons sont davantage susceptibles d’éprouver des émotions que nous ne le pensions.
Les scientifiques ont utilisé de nombreux critères différents – pour ou contre – afin d’affirmer que les animaux ont ou pas une forme d’émotion et de conscience.</p>
<p>Les uns <a href="http://www.vetsuisse.ch/wp-content/uploads/2015/06/Fish_pain-perception-fish-contra.pdf">soutiennent</a> que les poissons, par exemple, ne possèdent pas cette capacité, car leurs cerveaux, relativement petits et rudimentaires, n’ont pas le cortex cérébral indispensable pour traiter, comme chez les mammifères, des informations sophistiquées. Ceux-là font valoir que les poissons montrent peu de capacité pour apprendre et mémoriser. Et qu’ils ont un éventail de comportements tout à fait élémentaire. Selon cette analyse, les réactions manifestées par les poissons dans un environnement hostile relèveraient d’un niveau un peu supérieur à de simples réflexes, mais se limiteraient à un niveau très basique avec peu ou pas de contenu émotionnel.</p>
<h2>Capacités d’apprentissage</h2>
<p>D’autres scientifiques sont vraiment convaincus que les poissons sont dotés d’émotions, de conscience, et cela pour nombre de raisons. Par exemple, le cerveau du poisson, petit, est organisé différemment de celui des mammifères. Mais il possède des structures qui proviennent d’une même origine, du point de vue de l’évolution, que certaines de celles du cerveau des mammifères. Ces dernières jouent un rôle majeur dans la naissance des émotions (l’amygdale) et dans celle de l’apprentissage (l’hippocampe). Si ces zones du cerveau sont endommagées, on observe des effets comportementaux analogues chez les poissons et les mammifères, ce qui laisse à penser qu’elles <a href="http://www.jneurosci.org/content/24/9/2335">remplissent la même fonction</a>.</p>
<p>De plus, un important travail de recherche le démontre clairement : les poissons ont des capacités impressionnantes d’apprentissage qu’ils utilisent au service de toute une gamme de comportements sophistiqués. Nombre d’espèces de poissons arrivent à des prouesses de navigation en se remémorant des <a href="http://rspb.royalsocietypublishing.org/content/271/1553/2131">itinéraires enregistrés dans leur cerveau</a>. D’autres peuvent déterminer comment ils peuvent gagner une bataille contre d’autres poissons en observant et en se <a href="http://www.nature.com/nature/journal/v446/n7131/full/nature05646.html">souvenant des conflits précédents</a> face à leurs rivaux potentiels. Et certains sont mêmes capables de fabriquer et d’utiliser des outils comme une enclume pour ouvrir des <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1467-2979.2011.00451.x/abstract">coquilles de mollusques</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/111647/original/image-20160216-19260-1hc6ebv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/111647/original/image-20160216-19260-1hc6ebv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/111647/original/image-20160216-19260-1hc6ebv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/111647/original/image-20160216-19260-1hc6ebv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/111647/original/image-20160216-19260-1hc6ebv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/111647/original/image-20160216-19260-1hc6ebv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/111647/original/image-20160216-19260-1hc6ebv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Certains poissons sont capables de se remémorer des trajets compliqués.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>Les poissons, nous le savons également, peuvent percevoir et réagir à des stimuli aussi nocifs que certains produits chimiques, comme l’acide acétique, lequel provoque aussi des <a href="bit.ly/1XvbhF0">douleurs chez les mammifères</a>. Tout cela inclut des réponses comportementales qui vont bien au-delà de simples réflexes, par exemple des <a href="http://link.springer.com/article/10.1007%2Fs10806-011-9355-x">modifications de l’état mental</a>.</p>
<h2>Fièvre « émotionnelle »</h2>
<p>Une des façons caractéristiques d’identifier l’état de conscience, dont on pensait les poissons démunis, c’est la capacité de <a href="http://www.ingentaconnect.com/content/els/00319384/1995/00000058/00000003/art00091">ressentir une hyperthermie due au stress</a>, une « fièvre émotionnelle ». C’est une réaction physique semblable à une fièvre infectieuse, mais, dans le cas présent, c’est la création d’une situation de stress qui jouera le rôle de détonateur. Il suffit de savoir que, grosso modo, le corps devient plus chaud quand il doit répondre au stress.</p>
<p>Jusqu’à une date récente, on pensait que seuls les animaux vertébrés, les amniotes (mammifères, oiseaux et reptiles) ressentaient cette fièvre émotionnelle et, du même coup, démontraient qu’ils avaient une capacité de conscience. Cette façon de voir se fondait sur de précédents travaux selon lesquels les <a href="https://www.researchgate.net/publication/222626927_No_emotional_fever_in_toads">crapauds</a> et les <a href="https://www.researchgate.net/publication/13760621_Fever_in_Goldfish_Is_Induced_by_Pyrogens_But_Not_by_Handling">poissons rouges</a> n’n’éprouvaient pas cette fièvre.</p>
<h2>Le test du poisson-zèbre</h2>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/113370/original/image-20160301-8079-1v6z1tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/113370/original/image-20160301-8079-1v6z1tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/113370/original/image-20160301-8079-1v6z1tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/113370/original/image-20160301-8079-1v6z1tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/113370/original/image-20160301-8079-1v6z1tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/113370/original/image-20160301-8079-1v6z1tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/113370/original/image-20160301-8079-1v6z1tt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Poissons-zèbre.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/ajc1/3335797116">ajcann/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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</figure>
<p>Mais en étudiant les poissons-zèbres mis en situation de stress – à savoir en les confinant dans un petit filet au centre d’un réservoir servant à l’expérience –, mes collègues et moi-même <a href="http://rspb.royalsocietypublishing.org/content/282/1819/20152266">avons pu prouver</a> le contraire. Comme les poissons sont des ectothermes ou animaux à sang froid, ils ont besoin de se mouvoir dans un environnement où la température coïncide avec leur état physiologique interne. Après une situation de stress, vous pourriez donc vous attendre à ce qu’ils cherchent une eau plus chaude.</p>
<p>Au bout de quinze minutes passées dans le filet, les poissons prisonniers ont été relâchés pour qu’ils puissent nager librement dans les autres parties du réservoir, dont chacune était chauffée à une température différente. Les poissons stressés ont passé beaucoup plus de temps dans les eaux chaudes que les congénères qui n’avaient pas subi de stress. Cela semble indiquer que leur température corporelle a grimpé entre 2 et 4 degrés Celsius et que la cause en était la « fièvre émotionnelle ».</p>
<p>Le fait que certains poissons puissent ressentir cette fameuse fièvre ne prouve pas que les poissons en général soient des êtres dotés de conscience. Mais cela signifie une chose : ceux qui croient que les poissons sont dénués de sensations ne peuvent plus tirer argument d’un manque supposé de fièvre émotionnelle.</p>
<p>Tout cela vient enrichir l’image qui commence à se former : les poissons sont des animaux complexes qui pourraient bien être sensibles et conscients, du moins dans une certaine mesure. Et plus important encore, cela pourrait avoir un effet sur la compréhension que nous pouvons avoir de l’évolution des émotions et de la conscience chez les animaux vertébrés. Sans parler de nos arguments en faveur de la protection des poissons.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/55111/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sonia Rey Planellas ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Aussi stupide qu’un poisson rouge ! Une idée reçue remise aujourd’hui en cause par des scientifiques qui ont découvert nombre de capacités aux poissons. Jusqu’aux émotions et à la conscience ?Sonia Rey Planellas, Senior research fellow, University of StirlingLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/531742016-01-26T21:00:34Z2016-01-26T21:00:34ZComment la sociabilité des éléphants les aide à survivre au braconnage<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/109191/original/image-20160126-19633-1875zek.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><span class="source">Shifra Goldenberg</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Au même titre que les êtres humains, des animaux aussi extrêmement socialisés que les éléphants dépendent de leurs liens avec les autres pour gouverner leur vie de tous les jours. La vie collective les aide dans les décisions difficiles qu’ils ont à prendre régulièrement : quoi manger, où aller quand l’eau se tarit, comment être un parent.</p>
<p>Et, comme chez les gens, certains liens sociaux sont plus importants que d’autres. La vieillesse chez les éléphantes matriarches, chefs de file des groupes familiaux, a été associée à des réponses plus efficaces face aux <a href="http://dx.doi.org/10.1098/rspb.2011.0168">sons émis par des prédateurs</a>, à une <a href="http://dx.doi.org/10.1126/science.1057895">meilleure reconnaissance</a> des appels lancés par des éléphants d’autres groupes et à une <a href="http://dx.doi.org/10.1098/rsbl.2008.0370">plus grande survie</a> d’éléphanteaux pendant des phases de sécheresse. Ce savoir-faire perfectionné et les bénéfices dont profitent les plus jeunes membres de la troupe peuvent se révéler cruciaux pour des animaux qui parcourent des <a href="http://dx.doi.org/10.1016/j.biocon.2012.07.019">paysages étendus</a> à travers les écosystèmes africains. </p>
<p>Hélas, les éléphants les plus âgés ont aussi été les cibles préférées des braconniers à cause de la taille de leurs défenses et la perte de ces éléphants, critique pour une communauté, peut entraîner des implications de longue durée pour les éléphants restants. Quand le braconnage de l’ivoire a atteint des <a href="http://dx.doi.org/10.1073/pnas.1403984111">niveaux insoutenables</a> lors de la dernière décennie, mes collègues et moi décidâmes de rechercher comment la mort de ces matriarches, pierre angulaire de leur collectivité, affecte les éléphants survivants de leur groupe. À quel point leurs structures sociales résistent-elles lorsque des membres importants ont été tués ?</p>
<h2>Seize années d'observations</h2>
<p>Pour le savoir, nous avons analysé les observations effectuées sur des éléphants en liberté dans les réserves nationales de Samburu et de Buffalo Springs dans le nord du Kenya, entre 1998 et 2014. Cette période de temps incluait des épisodes de faible braconnage mais aussi de braconnage intense, s’aggravant en 2009. Cette phase d’accélération a été exacerbée par une <a href="http://dx.doi.org/10.1371/journal.pone.0053726">sécheresse sévère</a> qui a tué beaucoup de vieux et de très jeunes éléphants. </p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/106383/original/image-20151216-30098-1t8oje7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/106383/original/image-20151216-30098-1t8oje7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/106383/original/image-20151216-30098-1t8oje7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/106383/original/image-20151216-30098-1t8oje7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/106383/original/image-20151216-30098-1t8oje7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/106383/original/image-20151216-30098-1t8oje7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/106383/original/image-20151216-30098-1t8oje7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/106383/original/image-20151216-30098-1t8oje7.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les éléphants sont reconnaissables via certaines marques uniques, comme les lignes de l'oreille ou des défenses cassées.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shifra Goldenberg</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span>
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</figure>
<p>Chaque étude portait sur une liste d’animaux que nous avons repérés en groupe, en travaillant sur des bandes de terrain à travers les réserves animalières. Pendant les dix-huit ans sur lesquels l'ONG <a href="http://savetheelephants.org/">« Save the Elephants »</a> a maintenu ce projet sur le terrain, nous avons dressé un guide d’identification pour chacun des éléphants en utilisant des traits physiques particuliers : une oreille déchirée en forme de diamant, une défense cassée, une cicatrice, un penchant systématique de l'animal pour le contact de la bâche du camion contre sa trompe. Dans ces réserves, les éléphants sont exposés depuis des décennies aux véhicules de recherche ou de tourisme, ce qui permet de les approcher et de les observer sans les déranger.</p>
<p>Généralement, nous faisons route le long de la rivière Ewaso Ngiro, une source d’eau pérenne habituelle pour les éléphants et d’autres animaux sauvages au sein de cet écosystème de savane semi-aride. Dans notre aire d’observation, les éléphants suivent un schéma de déplacement prévisible, ils se dirigent vers la rivière dès que le soleil se fait intense et la quitte quand la température baisse. Les zones d'observation de la rivière sont une bonne occasion de tomber sur des éléphants en milieu de journée. Les familles, les groupes de mâles, les mâles isolés, s’y retrouvent pour boire, manger et se reposer.</p>
<p>Les groupes d’éléphants varient en nombre impressionnant entre les saisons. Ils vont de familles de dix ou moins, pendant la saison sèche, à des rassemblements de près de trois cents en saison humide. De grands rassemblements peuvent être particulièrement éclairants : réunions de vieux amis après de longues séparations, avec leurs petits qui se mélangent. En notant quels éléphants se retrouvent en groupes et à quelle fréquence, on peut en déduire les forces de leurs relations.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/106375/original/image-20151216-30088-j5oal5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/106375/original/image-20151216-30088-j5oal5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/106375/original/image-20151216-30088-j5oal5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/106375/original/image-20151216-30088-j5oal5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/106375/original/image-20151216-30088-j5oal5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/106375/original/image-20151216-30088-j5oal5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/106375/original/image-20151216-30088-j5oal5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/106375/original/image-20151216-30088-j5oal5.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les éléphanteaux prennent ensemble des bains de boue pendant la saison humide.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shifra Goldenberg</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span>
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<h2>Ce que nous savons de la société des éléphants</h2>
<p>Chez les éléphants femelles, les rapports sociaux engendrent des réseaux à l’intérieur des réseaux. Prenez comme analogie mon propre réseau professionnel. Les membres du laboratoire où j’exerce comprennent les scientifiques avec qui je suis le plus en interaction. Ce groupe de recherche constitue l’un de ceux qui composent notre département universitaire. Des programmes interdisciplinaires à l’intérieur de l’université tissent des liens entre des multiples départements. Et, plus largement, mon réseau professionnel peut compter des chercheurs dont je suis éloignée, connectés à moi par le biais de collègues universitaires (par exemple, via mes contacts LinkedIn). </p>
<p>Cette façon de se grouper comme dans un nid définit clairement les niveaux qui caractérisent mon univers professionnel, chaque niveau répondant à une fonction. Les interactions sociales d’espèces très peu nombreuses donnent lieu à l’émergence de cette complexité et c’est le cas pour les rapports sociaux chez les éléphants.</p>
<p>Avant même que le braconnage se soit intensifié dans la population que nous étudions, des chercheurs ont identifié parmi les éléphants, des <a href="http://dx.doi.org/10.1016/j.anbehav.2004.08.018">regroupements bien distincts</a>. Des groupements de type familial (notre laboratoire) se sont nichés au sein de groupes de liaison (notre département) qui à leur tour se regroupent en clans (comme notre université).</p>
<p>Les femelles et leurs petits passent presque tout leur temps à se déplacer, se reposer, s’alimenter au sein du noyau familial. Les réunions des groupes de liaison surviennent moins fréquemment et celles des clans encore moins. Ces deux groupes se réunissent le plus souvent pendant la saison humide, quand les ressources abondent et quand les éléphants sont en pleine santé. Ces larges regroupements, lorsque la vie est bonne, favorisent les échanges d’informations et les accouplements. </p>
<p>Ce sont les vieilles matriarches qui guident leur famille, décidant quand, où et avec qui se grouper. Leurs choix déterminent ces niveaux de contacts sociaux. Que se passe-t-il donc lorsqu’elles sont tuées ?</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/106414/original/image-20151217-32606-1tb94ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/106414/original/image-20151217-32606-1tb94ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/106414/original/image-20151217-32606-1tb94ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/106414/original/image-20151217-32606-1tb94ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/106414/original/image-20151217-32606-1tb94ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/106414/original/image-20151217-32606-1tb94ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/106414/original/image-20151217-32606-1tb94ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/106414/original/image-20151217-32606-1tb94ru.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Deux jeunes femelles de différentes familles interagissent, pendant qu'une vieille parente se tient à proximité.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shifra Goldenberg</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span>
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</figure>
<h2>Les populations ont évolué mais les groupes ont tenu bon</h2>
<p>Pendant les <a href="http://dx.doi.org/10.1016/j.cub.2015.11.005">16 années de notre étude</a>, la population de Samburu a significativement rajeunie. Seuls 30 % des éléphants actuels étaient présents au début de notre recherche. Et pourtant, malgré ces changements, les groupes familiaux et les groupes de liaison restaient aussi faciles à repérer après le braconnage qu’avant cette période de perturbation.</p>
<p>Plus surprenant encore, c’est la façon dont les jeunes femelles ont recréé ces niveaux sociaux. Nous avons comparé les relevés des relations de mères entre elles avant le braconnage avec les rapports entre leurs filles après cet événement. Il s’avère que les filles ont maintenu largement les mêmes relations d’une famille à l’autre même si leur mère était morte.</p>
<p>Dans quelques groupes disjoints, les femelles ont puisé dans leurs groupes de liaison ou dans leur clan ancien pour reconstruire de nouveaux groupes. Parfois, il en a résulté des groupes familiaux avec des membres extérieurs à la famille.</p>
<p>Compte tenu de <a href="http://dx.doi.org/10.1098/rspb.2009.0941">travaux précédents</a> dans le domaine de la génétique parmi la population, nous savons que les éléphants édifient parfois une famille quand ils n’en ont pas. Nous avons à nouveau observé ce processus pendant les quelques années précédentes où le braconnage s’est intensifié : les femelles ont puisé dans les réseaux élargis de leurs mères. Par exemple, le groupe de liaison Planets, jadis dominant, qui comptait plusieurs matriarches de plus de cinquante ans, comprend à l’heure actuelle deux jeunes mères, Europa et Haumea et quelques éléphanteaux (Europa, à vingt-trois ans, est la plus âgée). Leur nouveau groupe de liaison inclue The Flowers, des éléphants qui étaient uniquement affiliés à un clan, dans les années précédant le braconnage.</p>
<p>Ce travail nous montre que les groupes de liaison et les groupes claniques chez les éléphants peuvent servir de puissants contrepoids face à un effondrement social en donnant aux femelles survivantes un cadre pour construire leur propre réseau. Le legs des mères éléphantes vit à travers les choix sociaux de leurs filles.</p>
<h2>Résilience mais pas sécurité</h2>
<p>Peut-être n’est-il pas si étonnant que les éléphants aient les moyens de faire face aux changements dramatiques de leur environnement social. Les liens sociaux sont vitaux pour leur survie. Et même avant que le braconnage n’atteigne des niveaux insoutenables, les éléphants ont une histoire faite de perturbations dues à la chasse et à la sécheresse. Mais cette résilience est tout à fait impressionnante.</p>
<p>Cependant, il n’y a pas que des bonnes nouvelles. Notre recherche n’a pas pu inclure ces femelles que nous n’avons pas pu étudier, certaines ayant pu mourir du fait du braconnage dans leurs familles. De plus, il peut y avoir des répercussions en aval comme une mortalité plus élevée d’éléphanteaux due à la perte de grands-mères et de mères dont nous n’avons pas connaissance.</p>
<p>Mais la plus grande partie de la structure sociale de la population est restée relativement intacte. Ce qui montre sa résilience sociale globale. Combiné à des informations récentes selon lesquelles le <a href="https://www.washingtonpost.com/news/worldviews/wp/2015/12/08/lifeline-for-elephants-ivory-price-halves-in-china-after-xi-pledges-ban/">prix de l’ivoire en Chine a baissé</a> pour la première fois depuis des années, notre travail laisse espérer que les sociétés d’éléphants peuvent se rétablir si nous leur laissons de l’espace pour le faire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/53174/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Shifra Goldenberg a reçu des financements de la National Science Foundation. Elle est membre de l'ONG Save the Elephants.</span></em></p>Pourchassés par les braconneurs pour leur ivoire, les éléphants africains montrent une résilience étonnante. Les liens sociaux survivent à la mort des matriarches qui dirigent les groupes.Shifra Goldenberg, PhD Candidate in Ecology in the Department of Fish, Wildlife and Conservation Biology, Colorado State UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.