tag:theconversation.com,2011:/fr/topics/invertebres-45199/articlesinvertébrés – The Conversation2021-05-04T17:35:45Ztag:theconversation.com,2011:article/1574522021-05-04T17:35:45Z2021-05-04T17:35:45ZComme votre intestin, la forêt a besoin de son microbiote<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/397112/original/file-20210426-19-1xrp6f5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C2533%2C1705&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un brin de mousse grossi 400&nbsp;fois, vu en microscopie électronique à balayage après un séchage qui permet de préserver l’intégrité architecturale de la mousse et de son microbiote.</span> <span class="attribution"><span class="source">V. Baton et K. Comte</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Et oui, les mousses aussi ont un microbiote, mais à défaut d’être interne, comme celui de nos intestins, il est à la surface de la mousse. Celle-ci est colonisée notamment par des bactéries, des champignons, des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Protista">protistes</a> et des invertébrés.</p>
<p>Ce brin de mousse terrestre par exemple, de l’espèce <em>Thuidium tamariscinum</em>, a été prélevé dans la forêt de Fontainebleau en avril 2017. Autour de sa tige centrale, on voit des feuilles couvertes de petites protubérances arrondies, les « mamilles ». Sur la tige, de fines ramifications apparaissent : ce sont des structures photosynthétiques secondaires, les « paraphylles », dont le rôle et l’origine sont sujets à controverse depuis plusieurs décennies. Et ce qui brille ici par sa relative absence, c’est le microbiote de la mousse, que l’on appelle la « bryosphère ». Ces différentes composantes biologiques sont dépendantes des conditions environnementales et météorologiques, et en particulier de la pollution alentour.</p>
<h2>Les mousses terrestres pour évaluer la pollution localement</h2>
<p>Les mousses sont d’excellents <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bioindicateur">bio-indicateurs</a> de la qualité de l’air. En effet, contrairement aux végétaux « supérieurs », elles ne possèdent pas de racines et doivent donc se procurer les éléments dont elles ont besoin en les absorbant dans l’atmosphère. Elles sont donc particulièrement exposées à la pollution atmosphérique en métaux lourds et en azote, et en utilisant des facteurs de conversion appropriés, les concentrations analysées dans les mousses peuvent être comparées aux teneurs en éléments traces dans les zones contaminées.</p>
<p>Cette capacité de « bioaccumulation », c’est-à-dire d’accumuler des substances polluantes organiques ou inorganiques à partir du milieu ambiant, est utilisée dans plusieurs programmes nationaux et européens de surveillance et dans le cadre de la convention de Genève sur la <a href="https://www.actu-environnement.com/ae/dictionnaire_environnement/definition/convention_sur_la_pollution_atmospherique_transfrontiere_a_longue_distance.php4">pollution atmosphérique transfrontière à longue distance</a>.</p>
<p>L’objectif majeur du dispositif français <a href="http://bramm.mnhn.fr/category/bramm/">BRAMM</a>, pour « Biosurveillance des retombées atmosphériques métalliques par les mousses », est de surveiller l’évolution de 26 éléments chimiques polluants. Sur 445 sites français, tous les 5 ans depuis 1996, le contenu en éléments traces de cinq types de mousses Bryopsidées, dont <em>T. tamariscinum</em>, est analysé par <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Spectrom%C3%A9trie_de_masse">spectrométrie de masse</a>. Cette approche globale de surveillance biologique est complémentaire à celle utilisant des capteurs physico-chimiques. Elle permet de dresser une cartographie à l’échelle nationale identifiant les zones qui, bien qu’elles soient souvent éloignées des sources de contamination, sont exposées aux polluants présentant un risque sanitaire pour les populations.</p>
<p>Cette surveillance montre que la concentration en polluants mesurée dans les mousses et dans l’atmosphère varie avec les saisons, de façon parfois importante, et aussi imprévisible. Plusieurs causes ont été proposées, par exemple l’âge et la morphologie de la mousse ou les conditions météorologiques et microclimatiques.</p>
<h2>Notre brin de mousse, la météo et la pollution de l’air</h2>
<p>Avril 2017 était un printemps sec, et la présence de ces paraphylles corrobore l’<a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00378941.1967.10838522">hypothèse</a> selon laquelle ces structures se développeraient pour accroître la capacité de photosynthèse en période sèche. Le développement des paraphylles forme de plus un feutrage épais à la surface de la tige, ce qui permettrait aussi – secondairement – de retenir un maximum d’eau pour la survie de la mousse. Les paraphylles seraient un des mécanismes de protection pour survivre aux conditions arides.</p>
<p>Bien que cette hypothèse soit actuellement controversée, nous avons effectivement pu observer de très fortes variations des paraphylles entre un hiver pluvieux et doux et un printemps sec et doux sur la même espèce de mousse issue du même site d’étude.</p>
<p>Nous ajoutons une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10021-010-9336-3">hypothèse</a> d’étude qui reste à vérifier. Nous pensons que la « bryosphère » – le microbiote de la mousse – pourrait être responsable des variations saisonnières en absorbant et bioaccumulant une partie des contaminants atmosphériques. Par exemple, plusieurs études montrent que le groupe très présent des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cyanobacteria">cyanobactéries</a> est capable de transformer l’azote atmosphérique en azote organique et de former une véritable symbiose avec la mousse. D’autres sont capables de bioaccumuler certains métaux lourds, tels que le plomb et le cuivre.</p>
<p>Les paraphylles que nous voyons sur cette photo ont donc un double intérêt. D’une part, elles pourraient influer sur un processus biologique, en réduisant drastiquement l’habitat disponible pour le développement de la bryosphère : on ne voit que très peu de microorganismes sur la tige et les feuilles. D’autre part, elles pourraient affecter un mécanisme physique, en perturbant le ruissellement des dépôts humides métalliques le long de la tige et par conséquent diminuer la capacité d’absorption extracellulaire de la mousse.</p>
<p>Ces prochaines années, un des enjeux sera de distinguer les variations inhérentes aux processus physiologiques de la mousse et de son microbiote et celles liées aux facteurs dits « abiotiques », c’est-à-dire la quantité des polluants et la météo. Ainsi, on pourra renforcer la fiabilité des résultats et mieux évaluer la valeur réelle des mousses comme bio-indicateurs de la qualité de l’air aux niveaux national et européen.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été co-écrit par Géraldine Toutirais, ingénieure d’étude au MNHN. L’image est issue du travail de master 2 de Valentin Baton de 2017.</em></p>
<p><em>Le dispositif français BRAMM (Biosurveillance des retombées atmosphériques métalliques par les mousses) est sous l’égide du Muséum national d’histoire naturelle et la direction scientifique de Sébastien Leblond depuis 2005</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/157452/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Katia Comte ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ce brin de mousse ressemble à une forêt microscopique qui abrite tout un écosystème.Katia Comte, Maitre de conférences HDR, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1462282020-10-21T20:01:01Z2020-10-21T20:01:01ZComment observe-t-on la biodiversité en milieu agricole ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/358093/original/file-20200915-18-1qfr64f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C5%2C1198%2C736&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">De gauche à droite, et de haut en bas&nbsp;: mégère (Lasiommata megera), flambé (Iphiclides podalirius), piéride du navet (Pieris napi), et cuivré commun (Lycaena phlaeas).
</span> <span class="attribution"><span class="source">Laurent Palussière / D.R.</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science 2020 (du 2 au 12 octobre 2020 en métropole et du 6 au 16 novembre en Corse, en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition a pour thème : « Planète Nature ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>En France métropolitaine, la surface utilisée pour la production agricole représente environ la <a href="https://agriculture.gouv.fr/agriculture-et-foret/quelle-part-du-territoire-francais-est-occupee-par-lagriculture">moitié de la surface du territoire</a>. Les terres agricoles sont donc des milieux à ne pas négliger dans la prise en compte de la préservation de la biodiversité, d’autant qu’une part importante des espèces des climats tempérés est étroitement liée au milieu agricole.</p>
<p>L’<a href="http://observatoire-agricole-biodiversite.fr/">Observatoire agricole de la biodiversité</a> (OAB) est un programme de science participative développé en 2009 par le Museum national d’histoire naturelle (MNHN), sous l’impulsion du ministère de l’Agriculture, dans le cadre de la Stratégie nationale pour la biodiversité (SNB). Il permet l’observation de la biodiversité au sein de parcelles agricoles à l’aide de quatre protocoles ciblant les vers de terre, les abeilles solitaires, les invertébrés du sol et les papillons.</p>
<h2>Rôles divers</h2>
<p>Les vers de terre ont une réelle influence sur la qualité et la fertilité des sols. On les classe en trois groupes : les épigés, qui vivent en surface et se nourrissent de matière organique ; les anéciques, qui creusent des galeries entre la surface du sol et les zones profondes et qui enfouissent la matière organique de surface ; enfin, les endogés, qui vivent en profondeur et se nourrissent de matière organique dégradée. Leur présence et leur diversité permettent de maintenir voire d’améliorer la qualité et la fertilité des sols.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/358085/original/file-20200915-22-mskbjn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/358085/original/file-20200915-22-mskbjn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/358085/original/file-20200915-22-mskbjn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=472&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/358085/original/file-20200915-22-mskbjn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=472&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/358085/original/file-20200915-22-mskbjn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=472&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/358085/original/file-20200915-22-mskbjn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=593&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/358085/original/file-20200915-22-mskbjn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=593&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/358085/original/file-20200915-22-mskbjn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=593&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Osmie cornue (<em>osmia cornuta</em>), l’une des quelque 800 espèces d’abeilles solitaires présentes en France métropolitaine.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marion Lecardonnel/DR</span></span>
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</figure>
<p>Les abeilles solitaires représentent en France environ 800 espèces différentes, alors que l’abeille domestique de nos ruches n’est qu’une espèce : <em>Apis mellifera</em>. Les abeilles solitaires jouent donc un rôle important dans la pollinisation, notamment lorsque les températures sont encore basses, au début du printemps.</p>
<p>Les papillons participent également à la pollinisation. Certains se plaisent dans des milieux variés, même les plus anthropisés, mais d’autres sont spécifiques de milieux très précis. Leur cycle de vie est parfois lié à une plante en particulier, appelée plante hôte.</p>
<p>Enfin, les invertébrés du sol regroupent un grand nombre d’animaux ayant des rôles très divers : araignées, scarabées, vers de terre, limaces, escargots, cloportes, mille-pattes, fourmis et bien d’autres !</p>
<p>Avec ces protocoles, il n’est pas toujours possible d’identifier la faune jusqu’à l’espèce. L’analyse se fait donc en partie par rapport aux fonctions des animaux, classés en 4 catégories :</p>
<ul>
<li><p>les <strong>décomposeurs</strong> (vers de terre, cloportes, fourmis, etc.) qui décomposent la matière organique et participent à la fertilité des sols ;</p></li>
<li><p>les <strong>pollinisateurs</strong> (papillons, coléoptères, etc.) qui participent à la reproduction des végétaux en transportant du pollen ;</p></li>
<li><p>les <strong>prédateurs</strong> (carabes, araignées, staphylins, perce-oreilles, etc.) qui se nourrissent d’autres espèces et participent à la régulation des ravageurs ; on peut citer l’exemple bien connu de la coccinelle qui mange des pucerons, ou celui moins connu de certains carabes qui mangent des limaces ;</p></li>
<li><p>les <strong>ravageurs</strong> (limaces, charançons, taupins, etc.) qui se nourrissent de végétaux (feuilles ou racines) et peuvent détruire des cultures, provoquant des pertes de récoltes.</p></li>
</ul>
<p>En Indre-et-Loire, ce sont une quinzaine d’agriculteurs volontaires qui participent aux suivis de l’OAB chaque année. Ils sont accompagnés par la <a href="https://sepant.fr/">Sepant</a>, l’association animatrice du réseau départemental, et épaulés par un groupe de bénévoles actifs et intéressés par ces thématiques.</p>
<p>Depuis 2019, l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (<a href="http://www.inrae.fr">INRAE</a>) met également en place les protocoles de l’OAB sur deux parcelles du site de Nouzilly (37380) : une prairie conduite sans intrants chimiques et une parcelle de blé conduite en conventionnel.</p>
<h2>Nichoirs, planches et moutarde</h2>
<p>Pour le suivi des populations de vers de terre dans le cadre de l’OAB, un mélange d’eau et de moutarde est déposé sur trois zones de 1m<sup>2</sup> pour faire remonter les vers de terre. Ils sont ensuite récupérés, puis triés par groupe et comptés avant d’être relâchés. Ce protocole a été mis en place sur la prairie et a permis d’identifier 26 épigés, 10 anéciques et 10 endogés. Ce nombre était inférieur à la moyenne nationale de 2018 (62 vers de terre par parcelle en moyenne, selon le <a href="http://oab.mnhn.fr/sites/observatoire-agricole-biodiversite.fr/files/upload/attached/bilan_oab_2018.pdf">bilan OAB 2018</a>)</p>
<p>Pour le suivi des abeilles solitaires dans le cadre de l’OAB, deux nichoirs sont installés sur la bordure des parcelles. Les abeilles viennent occuper les loges qui composent ces nichoirs, ce qui permet de les compter et d’estimer leur diversité grâce aux <a href="http://observatoire-agricole-biodiversite.fr/la-biodiversite-en-milieu-agricole/les-abeilles-sauvages/les-differents-opercules-observes">matériaux utilisés pour fermer les loges</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/358091/original/file-20200915-18-10s791r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/358091/original/file-20200915-18-10s791r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/358091/original/file-20200915-18-10s791r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/358091/original/file-20200915-18-10s791r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/358091/original/file-20200915-18-10s791r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=404&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/358091/original/file-20200915-18-10s791r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/358091/original/file-20200915-18-10s791r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/358091/original/file-20200915-18-10s791r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=508&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Nichoir à abeilles disposé sur la bordure d’une parcelle d’INRAE.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ghylène Goudet/DR</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous avons réalisé ces relevés sur deux parcelles d’INRAE entre mai et octobre, et nous avons observé 12 à 15 loges colonisées par des abeilles sur la prairie et 14 à 28 loges colonisées sur la culture.</p>
<p>Au niveau national, <a href="http://oab.mnhn.fr/sites/observatoire-agricole-biodiversite.fr/files/upload/attached/bilan_oab_2018.pdf">9 loges en moyenne</a> étaient colonisées par parcelle en 2018. Nous avons noté la présence d’osmies maçonnes (loges fermées par de la terre ou de la boue), d’<em>Osmia caerulescens</em> (loges fermées par des feuilles mâchées) et de mégachiles (loges fermées par des morceaux de feuilles).</p>
<figure class="align-center zoomable">
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<span class="caption">Nombre de loges fermées dans les nichoirs sur les deux parcelles d’INRAE au cours de l’année 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ghylène Goudet/DR</span></span>
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</figure>
<p>Pour le suivi des papillons dans le cadre de l’OAB, ils sont observés en vol lors de passages dans la parcelle. On estime ainsi leur quantité et la diversité des groupes. Nous avons compté et identifié les papillons sur les deux parcelles d’INRAE en juin, juillet et août 2019 et nous avons observé entre 5 et 12 individus par mois, la <a href="http://oab.mnhn.fr/sites/observatoire-agricole-biodiversite.fr/files/upload/attached/bilan_oab_2018.pdf">moyenne nationale</a> étant à 14 individus en 2018.</p>
<p>Nous avons observé une diversité relativement importante avec des papillons de la famille des papilionidés (flambé et machaon), des piéridés (piéride blanche, citron, souci), des lycénidés (lycènes bleus, lycènes orangés) et des nymphalidés (mégère, myrtil, amaryllis, procris, tabac d’Espagne, tircis).</p>
<p>Pour le suivi des invertébrés terrestres dans le cadre de l’OAB, trois planches sont posées à même le sol, deux en bordure et une au centre de la parcelle. Les invertébrés du sol se réfugient sous la planche, qui offre un refuge et de l’humidité, ce qui permet de les compter et de les identifier. Nous avons placé 3 planches sur chacune des deux parcelles d’INRAE.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/358095/original/file-20200915-20-164g7lr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/358095/original/file-20200915-20-164g7lr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/358095/original/file-20200915-20-164g7lr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/358095/original/file-20200915-20-164g7lr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/358095/original/file-20200915-20-164g7lr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/358095/original/file-20200915-20-164g7lr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/358095/original/file-20200915-20-164g7lr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/358095/original/file-20200915-20-164g7lr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Planche de suivi des invertébrés du sol disposée dans la bordure d’une parcelle d’INRAE.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ghylène Goudet/DR</span></span>
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</figure>
<p>D’avril à novembre, nous avons observé en moyenne 31 individus par mois sur la prairie et 29 sur la culture, la <a href="http://oab.mnhn.fr/sites/observatoire-agricole-biodiversite.fr/files/upload/attached/bilan_oab_2018.pdf">moyenne nationale</a> étant à 30 individus en 2018. Nous avons observé des prédateurs, des décomposeurs et des ravageurs, avec une diversité importante puisque nous avons relevé de 8 à 18 groupes différents.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/358098/original/file-20200915-24-12a5bza.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/358098/original/file-20200915-24-12a5bza.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/358098/original/file-20200915-24-12a5bza.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=196&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/358098/original/file-20200915-24-12a5bza.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=196&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/358098/original/file-20200915-24-12a5bza.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=196&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/358098/original/file-20200915-24-12a5bza.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=246&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/358098/original/file-20200915-24-12a5bza.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=246&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/358098/original/file-20200915-24-12a5bza.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=246&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Nombre d’invertébrés observés sous les planches disposées sur les deux parcelles d’INRAE au cours de l’année 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ghylène Goudet/DR</span></span>
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</figure>
<p>Dans les deux parcelles, l’abondance et la diversité des invertébrés étaient plus importantes sur les bordures des parcelles par rapport au centre de la parcelle. Les bordures semblent donc être un réservoir important de biodiversité, qu’il faut prendre en compte dans les pratiques agricoles pour préserver la faune.</p>
<hr>
<p><em>Marion Bernard, chargée de mission agronomie, eau et environnement à la Sepant, a co-rédigé cet article</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146228/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ghylène Goudet a reçu des financements de INRAE. </span></em></p>Vers de terre, abeilles, papillons, invertébrés… L’Observatoire agricole de la biodiversité a mis au point des techniques spécifiques pour chaque espèce.Ghylène Goudet, Ingénieur de recherche, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1296582020-01-12T22:53:13Z2020-01-12T22:53:13ZImpact écologique des feux : et les insectes ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/309296/original/file-20200109-80159-aisdhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C40%2C1899%2C1195&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des punaises « gendarmes ». </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/bugs-bug-de-feu-col%C3%A9opt%C3%A8re-insectes-4690325/">smeyli77/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié en collaboration avec les chercheurs de l’ISYEB (Institut de Systématique, Évolution, MNHN/CNRS/EPHE/Sorbonne Université/Université des Antilles). Ils proposent chaque mois une chronique scientifique de la biodiversité : « En direct des espèces ». Objectif : comprendre l’intérêt de décrire de nouvelles espèces et de cataloguer le vivant.</em></p>
<hr>
<p>La destruction massive de millions d’hectares de forêts en Australie nous rappelle qu’au cours de la saison estivale, le même changement climatique engendre sous nos latitudes les mêmes problèmes, notamment en région méditerranéenne.</p>
<p>L’augmentation des températures et les sécheresses, qui surviennent non seulement en été, mais aussi au printemps et à l’automne, s’accompagnent d’événements extrêmes. Tornades, précipitations tropicales, moussons inhabituelles et catastrophiques engendrent des drames humains et des dégâts matériels considérables. L’eau, le feu, et parfois le vent, s’associent par intermittence pour nous rappeler que la nature domine toujours, quel que soit notre niveau d’aménagement ou de technologie.</p>
<p>On dit les écosystèmes méditerranéens adaptés au feux, y compris les forêts tropicales, subtropicales et tempérées d’Australie, qui comptent un grand nombre d’espèces végétales pyrophiles (littéralement « qui aiment le feu »). Certaines en ont même besoin pour se reproduire. Mais lorsqu’une telle surface est concernée par la combustion, la situation <a href="https://theconversation.com/incendies-en-australie-leurope-nest-pas-a-labri-de-catastrophes-similaires-129468">ne répond plus à un cycle normal</a>.</p>
<p>On a beaucoup entendu le nombre global d’animaux tués, estimé à un milliard. Mais qu’en est-il des insectes et autres invertébrés, qui sont à la <a href="https://theconversation.com/que-signifie-vraiment-le-declin-des-insectes-pour-la-biodiversite-122676">base du fonctionnement des écosystèmes</a> ?</p>
<h2>Des impacts directs et indirects</h2>
<p>On sait désormais l’importance des insectes dans le fonctionnement des écosystèmes, et combien ils <a href="https://theconversation.com/biodiversite-quand-loiseau-fait-de-lombre-a-linsecte-95629">sont négligés</a> dans les études et les objectifs de conservation.</p>
<p>Malgré l’importance du feu pour certaines espèces, on est surpris du peu de travaux sur les conséquences des incendies sur les insectes. Comme le reste de la faune et la flore, les insectes sont brûlés par les flammes, atteints par les chaleurs extrêmes et par les fumées. Le seul avantage que certains possèdent réside dans leur pouvoir de résister au feu jusqu’à une certaine intensité.</p>
<p>Après un incendie rapide, par exemple, les insectes sous les grosses pierres, les fourmilières et les termitières souterraines, ou dans les troncs partiellement brûlés, sont en partie protégés.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1212808274891948032"}"></div></p>
<p>Bien sûr, les insectes aquatiques peuvent aussi s’abriter, mais seulement en apparence. Les écosystèmes vivant dans l’eau sont dépendants des écosystèmes terrestres qui les entourent, et subiront des effets indirects, qui vont <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00442-011-2130-x">décupler l’impact des feux</a> : disparition de la nourriture et compétition pour les organismes survivants, diminution de niches et disparition d’habitats.</p>
<p>Regardons le cas d’une larve de libellule qui aurait échappé au cataclysme et pourrait se transformer en adulte. Que pourrait-il alors manger ? c’est le cas de la majorité des survivants, il vont subir les effets indirects. Tous ces effets indirects, auxquels il faut ajouter le fractionnement des habitats et les conséquences génétiques sont à prendre en compte dans les évaluations d’impacts.</p>
<h2>Les insectes influent-il sur les incendies ?</h2>
<p>C’est une question curieuse au premier abord, mais tout à fait sérieuse pour certaines régions, notamment tempérées, comme dans les forets boréales (Europe et Amérique du Nord).</p>
<p>Que ce soit des défoliateurs (qui s’attaquent aux feuilles et bourgeons), comme le bombyx disparate, des insectes des écorces, comme les terribles scolytes (qui provoquent des réductions de matière inflammable par la chute de feuilles et d’aiguilles pour les conifères), ou qui augmentent la quantité de matière morte (bois des arbres morts), les insectes pourraient avoir un impact <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1748-9326/11/4/045008/meta">sur le régime de feux</a> en diminuant la sévérité des incendies puisqu’il y moins de « carburants » à brûler ; alors que l’on pourrait croire que l’augmentation du bois mort augmente plutôt cette sévérité.</p>
<p>Et les feux peuvent augmenter l’action de certains insectes xylophages (tous ceux qui se nourrissent de bois). Il y a probablement une relation complexe entre changement climatique, impact des insectes forestiers xylophages et sévérité des incendies qui <a href="https://academic.oup.com/forestscience/article/60/3/489/4583745">nécessitent des observations plus poussées</a>.</p>
<h2>Des pullulations post-incendies</h2>
<p>L’été 2003, dans la commune de Sainte-Maxime, dans le Var, une étrange pullulation de punaises brunâtres avait <a href="http://www.delachauxetniestle.com/ouvrage/hemipteres-de-france/9782603020722">défrayé la chronique</a>. Des habitants s’en étaient plaints alors que des milliers de petites larves se répandaient dans les piscines et les habitations, en provenance d’une forêt et d’un golf à proximité.</p>
<p>J’ai eu la chance d’observer <a href="https://theconversation.com/a-lautomne-les-punaises-arrivent-en-ville-et-aux-champs-122736">ce phénomène assez impressionnant</a>, proche de ceux qui arrivent actuellement près de champs de colza et autres grandes cultures et surtout d’intervenir auprès de la mairie pour éviter des traitements inutiles. Les punaises inoffensives se sont métamorphosées peu après en adultes et ont quitté les lieux en quelques jours, pour vivre leur vie de punaises ailleurs et cesser d’inquiéter les riverains.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1189638457318150149"}"></div></p>
<p>Il s’agissait de la punaise <em>Aphanus rolandrii</em>, se nourrissant de graines dont la production avait été favorisée par la pousse de végétaux, elle-même favorisée par les incendies. Les arbres ayant été détruits, une strate herbacée s’était développée, avec des espèces pyrophiles conduisant à une production de graines hors norme.</p>
<p>Depuis, j’observe régulièrement cette <a href="https://inpn.mnhn.fr/espece/cd_nom/238122">espèce pyrophile</a> après les incendies. L’adulte est tout noir avec une simple tache faune orangée, une couleur sombre propre à de nombreux insectes spécialisés dans les périodes post-incendies, qui leur permet de mieux échapper aux prédateurs.</p>
<h2>Les insectes, plus résistants ?</h2>
<p>Cela n’assure toutefois pas que l’ensemble des insectes soit tellement plus coriace face aux flammes. Les insectes subissent le double impact des incendies comme les autres organismes animaux, direct et indirect avec une incidence écologique énorme.</p>
<p>Les organismes endogés (qui vivent dans le sol, les grottes), ainsi que certaines espèces qui vivent dans les tiges et les troncs, peuvent pourtant échapper à la destruction immédiate par le feu en étant protégés de l’effet direct des flammes et de la chaleur. D’où peut être le maintient de la plupart des lignées malgré les aléas climatiques du passé et les grandes crises d’extinctions des écosystèmes de notre planète que les <a href="https://theconversation.com/les-charmes-discrets-des-insectes-fossiles-56029">insectes ont traversées</a>.</p>
<p>Les grands incendies (on parle de méga-incendies au-delà de 10 000 hectares calcinés d’un seul tenant) constituent donc de terribles catastrophes écologiques (au sens premier du terme : des changements rapides de l’état d’un système écologique). La science et par conséquent les médias en négligent l’impact direct et indirect sur une fraction importante de la biodiversité : les insectes et tous les invertébrés. Et en Australie comme ailleurs il y a des espèces endémiques en danger qui vont devenir encore plus sensibles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/129658/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Garrouste a reçu des financements du CNRS, de SU et de l’ANR.</span></em></p>Grands oubliés des feux, les insectes entretiennent pourtant avec les incendies une relation complexe.Romain Garrouste, Chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205 MNHN-CNRS-Sorbonne Univ.-EPHE-Univ. Antilles), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1226762019-10-30T19:03:01Z2019-10-30T19:03:01ZQue signifie vraiment le déclin des insectes pour la biodiversité ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/298150/original/file-20191022-55679-uxezmb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=108%2C47%2C1401%2C939&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le mélibée est l’une des espèces de papillon les plus menacées en France.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9lib%C3%A9e_(papillon)">Kars Veling — C. Van Swaay et al. (2012)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Plusieurs publications ont récemment alerté sur la diminution inquiétante des populations d’insectes. L’analyse d’un échantillonnage de <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pone.0185809">près de 30 ans en Allemagne</a> ou encore la <a href="https://doi.org/10.1016/j.biocon.2019.01.020">compilation de la littérature internationale</a> révèlent un risque d’extinction pour de nombreuses espèces.</p>
<p>Il n’est bien sûr pas surprenant que la destruction d’habitats naturels, la détérioration des écosystèmes et l’uniformisation des milieux de vie mettent en danger les organismes qui y vivent. Mais il était temps de le quantifier et de se préoccuper du sort des invertébrés. La disparition de grands mammifères ou d’oiseaux est généralement bien plus médiatisée, ces espèces apparaissant comme un patrimoine naturel qu’il s’agit de préserver.</p>
<p>Aussi l’annonce de la <a href="https://www.nytimes.com/2018/11/27/magazine/insect-apocalypse.html">disparition d’espèces peu emblématiques</a> offre-t-elle l’opportunité de réfléchir à la signification de la biodiversité entomologique.</p>
<p>Les insectes sont à cet égard très édifiants : cette classe d’invertébrés représenterait en effet à elle seule <a href="http://www.insectes.org/opie/nombre-insectes-monde.html">plus de 64 % des espèces vivantes</a>. Présents dans presque tous les milieux (y compris nos villes), de tailles et de mœurs très différentes, les insectes ont dans nos cultures des statuts très contrastés.</p>
<p>On y trouve des espèces dites « utiles », car auxiliaires de notre agriculture, ou de sérieux compétiteurs qualifiés de « nuisibles » – comme les punaises et les moustiques qui mettent en danger la santé humaine. Notre rapport aux insectes est bien souvent affectif : la beauté des papillons nous émeut mais les mouches ou les cafards nous apparaissent repoussants. D’autres espèces, dites « envahissantes », menacent quant à elles la biodiversité indigène.</p>
<p>Mais pourquoi y a-t-il autant d’espèces d’insectes ? Et en quoi la disparition de certaines d’entre elles serait-elle un problème ? Pourquoi s’embarrasser de plus de <a href="http://sante.lefigaro.fr/article/existe-t-il-des-peaux-a-moustiques-/">3 500 espèces de moustiques</a> ? Les insectes risquent-ils vraiment de disparaître ?</p>
<h2>La spécialisation au cœur de la biodiversité des insectes</h2>
<p>Nombreux sont les insectes qui mangent des plantes ; et, en se diversifiant au cours du temps, les végétaux terrestres ont constitué pour ces herbivores une immense variété de micro-habitats et de ressources à exploiter. Racines, rhizomes, tiges ou troncs, feuilles, jeunes fruits, graines représentent des sources de nutriments extrêmement diverses.</p>
<p>Pour l’insecte, chaque partie de la plante constitue un micro-habitat, caractérisé par sa température, son degré d’humidité, l’intensité de l’éclairement, etc. Les espèces se succèdent pour exploiter chaque plante au fil des saisons en fonction de sa valeur nutritive. En Europe, près de 300 espèces différentes d’insectes phytophages peuvent ainsi être associées à l’exploitation du chêne – comme le balanin qui perfore les glands ou la tordeuse verte dont les chenilles broutent les feuilles.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1096263125752524801"}"></div></p>
<p>Au cours de leur longue histoire évolutive, les insectes ont dû constamment s’adapter pour exploiter plus efficacement ces plantes, en consommant également les tissus « difficiles », riches en cellulose, en silice ou en tanins, tout en contournant les défenses chimiques de la plante. Dans cette longue sélection réciproque, des combinaisons efficaces de gènes ont été sélectionnées. Pour éviter de diluer les « bons » gènes à chaque génération, mieux vaut se reproduire entre soi : c’est ce qu’on appelle « l’isolement reproducteur » qui préserve les combinaisons de gènes les plus efficaces.</p>
<p>La spécialisation est donc l’une des clés pour comprendre le sens de la biodiversité entomologique. Ce nombre d’herbivores spécialistes ne doit cependant pas faire oublier que des insectes généralistes comme la punaise verte ou les criquets ont également bien « réussi ». Une espèce plus polyvalente pourra en effet faire face aux changements de son milieu, mieux se défendre contre les pathogènes et se répandre partout sur la planète.</p>
<h2>Le nombre d’espèces n’est pas le plus important</h2>
<p>Les écologues inventorient les espèces dans la nature et construisent des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Indicateur_de_biodiversit%C3%A9">indices ou indicateurs</a> de biodiversité ; ces derniers permettent de mesurer le nombre d’espèces différentes ou prennent en compte les abondances relatives de chaque espèce. Cela permet d’évaluer la richesse spécifique d’un milieu et son évolution, qu’elle soit naturelle ou influencée par les activités humaines.</p>
<p>La qualité d’un écosystème ne se mesure toutefois pas au degré de diversité d’espèces animales et végétales qu’il abrite : en Europe, par exemple, une forêt comporte moins d’espèces qu’une prairie, mais l’écosystème de la première n’en est pas moins fonctionnel que celui de la seconde. Par ailleurs, des processus spontanés modifient les écosystèmes sur des durées, parfois longues pour notre échelle humaine. L’évolution « naturelle » des milieux ne s’accompagne pas nécessairement d’un gain en nombre d’espèces. Ceci nous éloigne du concept d’équilibre naturel – généralement considéré comme une valeur désirable – au sein duquel chaque espèce d’insecte trouverait une place stable grâce à un jeu nul d’interactions, au profit d’une <a href="https://laviedesidees.fr/Le-futur-de-la-biodiversite.html">vision plus dynamique et fonctionnelle</a> de la biodiversité.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"874778704110645253"}"></div></p>
<p>En réalité, chaque organisme vivant « choisit » les espèces avec lesquelles il interagit. Les végétaux en produisant des substances toxiques contribuent par exemple à réduire les populations d’insectes. On évoque souvent la pollinisation comme un exemple d’interactions positives entre les plantes à fleurs et les insectes. Mais, là encore, les plantes à fleurs savent se montrer sélectives et tous n’ont pas accès à leur précieux nectar : la longueur et le diamètre de la corolle sélectionnent les insectes en fonction de la taille de leur « langue », les plantes se trouvant ainsi assurées de ne pas gaspiller leur nectar pour des pollinisateurs peu fidèles ou porteurs d’un pollen incompatible.</p>
<p>Les orchidées ont ainsi perfectionné le système en produisant des signaux odorants et visuels qui n’attirent que certaines espèces d’insectes ; ces signaux sont si puissants que l’insecte visite les fleurs même en l’absence de récompense ! L’orchidée fait ainsi l’économie de la récompense et est assurée de recevoir du pollen compatible.</p>
<h2>Une biodiversité en permanente transformation</h2>
<p>Les interactions entre espèces dans un même milieu naturel ont été souvent pensées en termes de compétition (pour les ressources) ou de prédation (une espèce en exploitant une autre). Mais, comme nous l’avons vu pour la pollinisation, les interactions « positives » sont extrêmement nombreuses, bien qu’il existe des tricheurs.</p>
<p>Elles impliquent une forte interdépendance au sein des écosystèmes. À l’échelle de notre durée de vie, nous observons les mêmes insectes d’une année sur l’autre à la même période. Mais les relations entre plantes et insectes sont en fait en constante évolution. Une plante fabrique une substance chimique pour se protéger des insectes phytophages, qui à leur tour doivent s’adapter.</p>
<p>Admettre que la biodiversité entomologique ne soit pas un équilibre stable à l’intérieur des écosystèmes ne signifie pas que tout soit possible. Lorsque les milieux ou l’environnement changent, la flore et la faune se modifient également. Si une espèce périclite, par exemple après l’émergence d’un pathogène, une espèce opportuniste pourra prendre sa place ; mais ces réajustements prennent du temps.</p>
<p>Les conséquences de l’altération des milieux peuvent être très difficiles à percevoir à court terme. Par exemple, les variations des populations de micro-insectes détritivores en réponse à la pollution du sol passent tout d’abord inaperçues. Mais elles ont des conséquences sur la décomposition et le recyclage de la matière organique. Si le changement dans l’environnement est trop rapide ou trop important, la biodiversité ne peut plus jouer son rôle de réservoir d’espèces de substitution ou d’innovations biologiques.</p>
<h2>L’action (trop) rapide des hommes</h2>
<p>On sait aujourd’hui que l’action humaine sur les écosystèmes naturels est très rapide. Très tôt dans l’histoire du vivant, elle a joué un rôle important en détruisant beaucoup d’habitats mais aussi en fabriquant de nouveaux milieux de vie. En colonisant à peu près toute la planète, elle se comporte à la manière de ces espèces invasives qui supplantent les espèces indigènes. Il est ainsi très difficile de trouver un milieu « naturel » qui n’aurait pas été modifié par les êtres humains et puisse servir « de référence ».</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/298143/original/file-20191022-55645-kpk1n2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/298143/original/file-20191022-55645-kpk1n2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/298143/original/file-20191022-55645-kpk1n2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/298143/original/file-20191022-55645-kpk1n2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=397&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/298143/original/file-20191022-55645-kpk1n2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/298143/original/file-20191022-55645-kpk1n2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/298143/original/file-20191022-55645-kpk1n2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=499&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Bourse aux insectes.</span>
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<p>La puissance des moyens mis en œuvre et la rapidité de ces changements ne laissent pas le temps au réservoir d’innovation que constitue la biodiversité de rétablir le fonctionnement des écosystèmes. Dans son ouvrage publié en 2006 <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/un-elephant-dans-un-jeu-de-quilles-l-homme-dans-la-biodiversite-robert-barbault/9782020820752"><em>Un éléphant dans un jeu de quille</em></a>, l’écologue Roger Barbault a très bien décrit les rapports de l’humanité avec la biodiversité : nous avons poussé très loin l’exploitation de quelques plantes cultivées, un peu à la manière des insectes spécialistes. Mais, comme la <a href="https://theconversation.com/ce-que-notre-rapport-aux-insectes-dit-de-notre-rapport-a-la-nature-115929">pyrale du buis</a> dont les populations finissent par s’effondrer localement par épuisement de sa plante-hôte, nous sommes aujourd’hui confrontés aux limites de ce fonctionnement.</p>
<p>Avec plus d’un million d’espèces connues, la biodiversité entomologique nous apparaissait inépuisable. Elle ne l’est pas mais je ne crois pas pour autant que les insectes disparaîtront. Le risque est plutôt de voir se développer quelques espèces parmi les plus généralistes et adaptables dans des milieux desquels nous aurons éliminés tous leurs compétiteurs ou ennemis naturels. La <a href="https://www.letemps.ch/societe/fourmis-dargentine-supercolonie-6000-km-long-envahit-leurope">fourmi d’Argentine</a>, capable de former des super-colonies, semble ainsi très bien adaptée aux milieux anthropisés. Compétiteur redoutable, elle en élimine les quelques espèces d’arthropodes qui pourraient s’opposer à son expansion et devient alors un compétiteur pour l’espèce humaine.</p>
<h2>Milieux naturels, milieux humains</h2>
<p>Notre relation au vivant s’est construite sur une opposition entre le « naturel » et le « civilisé ». Dans ce cadre de pensée, maîtriser la nature grâce à la technologie est le plus souvent évalué positivement. Ce faisant, nous oublions que les lois physiques s’appliquent à notre technologie et que l’économie ne peut dicter ses propres lois indépendamment des ressources disponibles.</p>
<p>Nous reconnaissons de mieux en mieux l’importance des insectes et les écoservices qu’ils nous rendent – pollinisation des plantes cultivées, élimination des phytophages, recyclage de la matière organique. Plutôt que d’opposer des milieux « naturels » aux milieux « humains », il nous faut admettre que nos civilisations s’intègrent dans des milieux de vie préexistants. Et des milieux urbains bien aménagés peuvent tout à fait constituer des mosaïques de micro-habitats pour les insectes et favoriser la conservation d’une diversité d’arthropodes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1123728993411371010"}"></div></p>
<p>Le débat suscité autour de la disparition des insectes est une bonne chose. L’urgence est grande, mais il ne faut pas qu’un discours catastrophiste obscurcisse le débat. Entre expansion du moustique tigre, des tiques, des processionnaires, des punaises diaboliques… et disparition des papillons et des abeilles, les informations que nous recevons sont complexes.</p>
<p>Face à un choix de société et aux inévitables conflits d’usage, c’est au politique d’agir et de réguler. Admettre que l’homme évolue dans un milieu vivant en constante évolution, qu’il doit en tirer son alimentation et parfois s’en protéger et que ce milieu n’est pas inépuisable passe par l’éducation. La biodiversité, y compris celle des insectes, ne doit pas être vue comme un patrimoine figé. Elle est le fruit de millions d’années au cours desquelles des solutions à des problèmes complexes ont été élaborées par l’évolution biologique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/122676/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Renou a reçu des financements de l’Agence nationale pour la recherche (projet Odorscape). </span></em></p>Entre discours catastrophiste et optimisme excessif, comprendre les interactions entre les insectes et leurs milieux permet d’appréhender plus justement les enjeux qui entourent leur déclin.Michel Renou, Directeur de recherche en biologie des insectes, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1184222019-06-24T21:00:22Z2019-06-24T21:00:22ZDépasser sa peur des espèces invasives grâce à la science citoyenne<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/280429/original/file-20190620-149818-4u5edl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=284%2C296%2C7551%2C5005&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">De nombreux sites permettent aujourd’hui de s’informer, voire d’apporter des données, sur des espèces animales introduites et envahissantes en France.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié en collaboration avec les chercheurs de l’ISYEB (Institut de Systématique, Évolution, Biodiversité, Muséum national d’Histoire naturelle, Sorbonne Universités). Ils proposent chaque mois une chronique scientifique de la biodiversité : « En direct des espèces ». Objectif : comprendre l’intérêt de décrire de nouvelles espèces et de cataloguer le vivant.</em></p>
<hr>
<p>Dans le contexte du réchauffement climatique et de multiples autres causes humaines (déplacements globalisés en tête), des espèces changent d’aire de répartition avec l’aide de l’homme. La perte globale de biodiversité constatée sur Terre facilite ce processus, rendant les écosystèmes encore plus vulnérables et sensibles aux espèces envahissantes.</p>
<p>Le tout récent rapport de l’IPBES, <a href="https://www.ipbes.net/news/Media-Release-Global-Assessment-Fr">rendu public début mai</a>, a rappelé le lien entre ces introductions et la perte de diversité du vivant ; celles-ci contribuent en effet à un emballement, avec des écosystèmes <a href="https://www.nature.com/articles/ncomms14163">toujours plus anthropisés</a> ou toujours affectés en <a href="https://www.nature.com/articles/nature11869">cas de restauration</a>.</p>
<p>Comment lutter contre ce phénomène ? Va-t-il s’amplifier ? Pour apporter des éléments de réponse, revenons sur ces mouvements d’espèces en France à l’aide d’exemples précis et bien documentés.</p>
<h2>Une punaise doublement diabolique</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/280430/original/file-20190620-149818-1ogtld1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/280430/original/file-20190620-149818-1ogtld1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/280430/original/file-20190620-149818-1ogtld1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/280430/original/file-20190620-149818-1ogtld1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/280430/original/file-20190620-149818-1ogtld1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/280430/original/file-20190620-149818-1ogtld1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/280430/original/file-20190620-149818-1ogtld1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/280430/original/file-20190620-149818-1ogtld1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Inoffensive pour l’humain, la punaise diabolique ravage les cultures.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><a href="https://theconversation.com/la-punaise-diabolique-cette-creature-urbaine-66752">La punaise diabolique</a>, d’origine asiatique, est la dernière à avoir <a href="https://theconversation.com/rentree-2018-tres-invasive-pour-la-punaise-diabolique-104599">défrayé la chronique</a>. À la fois dérangeante dans les maisons en automne et ravageur important des cultures et des espèces ornementales, elle continue son invasion en France et dans le monde. Elle masque aussi l’invasion d’une autre espèce, moins dérangeante et sans incidence sur nos cultures mais assez imposante : la <a href="https://theconversation.com/encore-une-punaise-diabolique-quand-the-conversation-fait-de-la-science-participative-71197">punaise américaine des conifères</a>.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/280433/original/file-20190620-149806-1nct5dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/280433/original/file-20190620-149806-1nct5dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/280433/original/file-20190620-149806-1nct5dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/280433/original/file-20190620-149806-1nct5dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/280433/original/file-20190620-149806-1nct5dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/280433/original/file-20190620-149806-1nct5dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/280433/original/file-20190620-149806-1nct5dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/280433/original/file-20190620-149806-1nct5dt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Elles s’agrègent pour entrer parfois par centaines dans les maisons.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’invasion de ces deux espèces aurait été difficile à éviter. Ces espèces arboricoles (arbres et arbustes) ne sont en effet pas faciles à détecter, sauf par ce fameux comportement d’agrégation qui dérange tant lorsqu’elles entrent par centaines ou milliers dans nos maisons ; ce fut le cas il y peu <a href="https://www.varmatin.com/vie-locale/envahi-de-punaises-il-ne-sait-plus-quoi-faire-270079">dans le Var</a>.</p>
<p>L’intérêt envers cette punaise est en général saisonnier, déclinant en hiver, ce qui repousse les tentatives de résolution du problème. Le phénomène va toutefois s’amplifier, notamment sous l’influence des changements climatiques, et l’été sans fin de 2018 a certainement compté dans l’ampleur du phénomène.</p>
<p>Le problème ne manquera pas ensuite de se porter dans les champs et sur différentes cultures, comme ce fut le cas <a href="https://www.epa.gov/safepestcontrol/brown-marmorated-stink-bug">aux États-Unis</a> ; difficile alors d’éviter une recrudescence des traitements chimiques.</p>
<p>Cette tendance se manifeste déjà en France malgré les réticences grandissantes de l’opinion publique à l’égard des produits phytosanitaires. La punaise diabolique va-t-elle « servir » pour reculer sans fin l’interdiction et la réglementation sévère de l’usage des pesticides ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"785785766022492162"}"></div></p>
<h2>Les plathelminthes de nos jardins</h2>
<p>Les plathelminthes terrestres, auparavant totalement inconnus du grand public, ont fait la une <a href="https://theconversation.com/des-vers-geants-predateurs-envahissent-les-jardins-francais-dans-lindifference-96241">des médias</a>, à tel point que la découverte de ces « vers géants » (certainement arrivés d’Asie par le transport de plantes) a été considérée comme l’un des <a href="http://www.cite-sciences.fr/fr/ressources/conferences-en-ligne/saison-2018-2019/lannee-2018-en-sciences/">cinq événements scientifiques de l’année 2018</a>.</p>
<p>Mais il n’y a pas que les <em>Bipalium kewense</em> – certes très impressionnants avec leurs 30 centimètres de corps jaune et visqueux. <a href="https://peerj.com/articles/297/">Une dizaine d’autres espèces existent</a>, dont une qui a tout pour attirer l’attention puisqu’elle a été classée <a href="https://theconversation.com/en-direct-des-especes-avez-vous-vu-obama-dans-votre-jardin-74030">dans le genre <em>Obama</em></a>.</p>
<p>Ces plathelminthes sont partout, dans plus de 75 départements de France métropolitaine, et parfois très nombreux, des centaines dans un seul jardin. On les voit moins facilement que les insectes volants, mais ceux qui visitent leur potager la nuit et voient partout des animaux bizarres, mous, et recouverts de mucus n’aiment pas cela du tout ; d’autant plus que lorsqu’ils sont chez vous, rien ne les fait partir.</p>
<p>Si les plathelminthes terrestres peuvent inspirer de la répulsion, ils ne sont pas directement dangereux pour l’homme (évitez tout de même de les toucher). C’est leur effet sur les autres animaux du sol, <a href="https://peerj.com/articles/4672/">dont les vers de terre</a>, qui suscite l’inquiétude.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1003627319578320896"}"></div></p>
<h2>Le frelon asiatique tueur d’abeilles</h2>
<p>Le frelon asiatique <em>Vespa velutina</em> est la hantise des apiculteurs même s’il n’est qu’un, et non le plus important, des facteurs de mortalité de l’abeille domestique en Europe.</p>
<p>Comme tous les frelons et autres guêpes sociales, il inquiète aussi le grand public, à cause de ses piqûres qui ne sont pourtant pas plus venimeuses que celle de l’abeille domestique.</p>
<p>Toutes ces espèces sociales, qui attaquent lorsqu’on s’approche à moins de 5 mètres de leur nid, ne sont véritablement dangereuses qu’en cas de piqûres multiples (plusieurs centaines) ou chez les personnes allergiques, pour qui une seule piqûre peut être fatale en l’absence d’un rapide traitement.</p>
<p>Comme la plupart de ses nids sont installés à plus de 10 mètres de haut dans les arbres ou sous les toits, les risques d’attaque du frelon asiatique sont donc limités, même si les médias s’empressent de signaler tous les cas de piqûres, fatales ou multiples, dues à cette espèce. Ils renforcent ainsi l’inquiétude du grand public alors que l’abeille domestique et les guêpes communes sont bien plus souvent en cause dans ce genre d’accident.</p>
<p>Depuis son premier signalement dans l’Hexagone en 2004, le frelon asiatique s’est répandu dans la <a href="https://theconversation.com/le-frelon-asiatique-est-entre-dans-paris-62746">totalité du territoire français</a> et a gagné la plupart des pays voisins. Comme tout autre frelon, ses colonies sont annuelles et meurent en hiver, sauf les futures reines qui se cachent pour hiverner. Ainsi abritées, elles peuvent être accidentellement transportées sur de grandes distances via le commerce international.</p>
<p>C’est ainsi que la reine (probablement unique) qui est à l’origine de l’invasion en France est arrivée de Chine, mais aussi que des pays européens comme le Portugal, l’Allemagne, l’Angleterre ou les Baléares ont été atteints alors que l’Espagne, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas ont été colonisés avec la <a href="http://frelonasiatique.mnhn.fr/">progression naturelle du front d’invasion</a> depuis la France.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"756518628024016896"}"></div></p>
<h2>Indispensables taxonomie et histoire naturelle</h2>
<p>Il y a probablement une relation entre la crainte des espèces invasives – surtout quand ce sont des insectes ou des <a href="https://theconversation.com/crise-de-la-biodiversite-noublions-pas-les-invertebres-81517">invertébrés</a> – et une grande méconnaissance de la nature qui conduit à des réactions de peur <a href="https://theconversation.com/les-francais-naimeraient-ils-ni-les-insectes-ni-la-nature-96746">souvent injustifiées</a>.</p>
<p>L’expérience montre, pour le frelon asiatique par exemple, que les actions de communication (conférences, réunions d’information, articles de vulgarisation, <a href="http://frelonasiatique.mnhn.fr/">sites Internet</a>) sont utiles pour aider le public à relativiser le danger comme à mettre en œuvre des méthodes de prévention respectueuses de l’environnement.</p>
<p>Il est nécessaire, dans le contexte actuel de perte de biodiversité, de continuer à renseigner les invasions et les détecter précocement, que ce soit par les sciences participatives ou l’implication des pouvoirs publics.</p>
<p>Les programmes universitaires, les filières professionnelles (agronomie, santé) et générales (sciences naturelles au lycée, biologie des organismes) doivent se renforcer pour les sciences naturelles, qui sont au cœur des préoccupations du XXI<sup>e</sup> siècle, comme le démontre le récent rapport IPBES.</p>
<h2>Les sciences participatives en première ligne</h2>
<p>Des sites dédiés permettent aujourd’hui de s’informer, voire d’apporter des données, sur des espèces animales introduites et envahissantes en France.</p>
<p>C’est le cas du site <a href="http://eee.mnhn.fr/">EEE-FIF</a>, dédié à un large public : il fournit une expertise scientifique et une large documentation sur les espèces exotiques envahissantes en France métropolitaine comme en outremer.</p>
<p>D’autres sites permettent à tout un chacun de contribuer d’une façon plus générale au suivi et à l’acquisition de connaissances sur la biodiversité en France.</p>
<p>L’observatoire participatif des espèces et de la nature (<a href="https://www.open-sciences-participatives.org/home/">OPEN</a>) est le portail du collectif national des sciences participatives – biodiversité (<a href="http://www.naturefrance.fr/sciences-participatives/le-collectif-national-sciences-participatives-biodiversite">CNSPB</a>). <a href="https://www.open-sciences-participatives.org/ecosysteme-sciences-participatives/?theme%5B%5D=117&mot_cle=#container-content">Ce collectif</a>, qui s’appuie sur un réseau d’acteurs professionnels, œuvre à faire connaître et reconnaître les sciences participatives liées à la biodiversité en France.</p>
<p>Depuis mai 2018, il est également possible de participer à l’inventaire des espèces en transmettant ses observations aux experts via l’application <a href="https://inpn.mnhn.fr/informations/inpn-especes">INPN Espèces</a> qui permet de découvrir toutes les espèces de la faune et de la flore françaises (métropole et outre-mer) à travers leurs caractéristiques, leur répartition ou encore leur statut de conservation.</p>
<p>Grâce à une entrée facilitée par l’image et à une géolocalisation depuis son mobile, mieux connaître la nature autour de soi mais aussi faire remonter ses observations devient un jeu d’enfant.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1131147772680384512"}"></div></p>
<p>On l’aura compris, l’information et la documentation des situations sont pleines de sens concernant les espèces invasives. La science citoyenne est ici doublement utile, en renseignant des informations sur la biodiversité, qu’elle soit ordinaire ou extraordinaire, et en participant à l’information utile pour contribuer à une gestion intégrée d’espèces potentiellement problématiques… Et nous aider à renouer plus généralement avec la nature qui nous entoure.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/118422/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Garrouste a reçu des financements du MNHN, du CNRS, de Sorbonne Universités ITE, de National Geographic de l’ANR.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Claire Villemant a reçu des financements du ministère de l'Agriculture, du MNHN, du CNRS et de Sorbonne Universités. Elle est membre du CA de l’OPIE (Office pour l’information entomologique). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jean-Lou Justine a reçu des financements du MNHN et du CNRS.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Quentin Rome a reçu des financements du ministère de l’Agriculture et du ministère de l’Environnement. </span></em></p>La crainte que nous inspirent les espèces invasives n’est pas étrangère à notre méconnaissance de la nature.Romain Garrouste, Chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205 MNHN-CNRS-UPMC-EPHE-Univ. Antilles), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Claire Villemant, Maître de conférences en entomologie, UMR7205 ISYEB, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Jean-Lou Justine, Professeur de parasitologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Quentin Rome, Chargé d’études scientifiques en entomologie - UMS 2006 PatriNat - AFB, CNRS, MNHN, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1108552019-02-06T22:54:39Z2019-02-06T22:54:39Z« En direct des espèces » : des coquillages qui ont du mordant<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/257251/original/file-20190205-86228-e4757a.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C73%2C1022%2C622&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un Tonnoidea (_Tonna perdix_) engloutissant un concombre de mer.</span> <span class="attribution"><span class="source">Wikipedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié en collaboration avec les chercheurs de l’ISYEB (Institut de Systématique, Évolution, Biodiversité, Muséum national d’Histoire naturelle, Sorbonne Universités). Ils proposent une chronique scientifique de la biodiversité : « En direct des espèces ». Objectif : comprendre l’intérêt de décrire de nouvelles espèces et de cataloguer le vivant</em>.</p>
<hr>
<p>Prédateur ! Ce seul mot évoque le guépard poursuivant la gazelle ou le rapace fondant sur sa proie, mais vous n’imaginez peut-être pas que des milliers de ces chasseurs se meuvent à la vitesse… d’un escargot. Nous parlons ici de l’ordre des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Neogastropoda">Neogastropoda</a>, l’un des groupes de prédateurs les plus diversifiés et les plus fascinants du monde vivant. Imaginez qu’avec potentiellement 50 000 espèces (dont seulement 15 000 ont été décrites à ce jour), il y aurait sur Terre cinq fois plus de ces néogastéropodes que d’oiseaux et dix fois plus que de mammifères. Des eaux tropicales à celles des pôles, ils sont présents à toutes les profondeurs. Les plus petits spécimens font à peine quelques millimètres tandis que la trompette australienne (<em>Syrinx aruanus</em>) frôle le mètre.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/257306/original/file-20190205-86202-1xt377c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/257306/original/file-20190205-86202-1xt377c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=218&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/257306/original/file-20190205-86202-1xt377c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=218&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/257306/original/file-20190205-86202-1xt377c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=218&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/257306/original/file-20190205-86202-1xt377c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=274&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/257306/original/file-20190205-86202-1xt377c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=274&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/257306/original/file-20190205-86202-1xt377c.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=274&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Variété morphologique des néogastéropodes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">MNHN.</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Pour chasser, certains néogastéropodes adoptent des comportements parfois étranges. D’autres ont développé des particularités anatomiques, et produisent des molécules spécifiques. Si l’aigle utilise ses serres pour tuer ses proies, l’arme de choix de nos gastéropodes est leur <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Radula">radula</a>. Il s’agit d’un ruban musculeux se trouvant dans la cavité buccale, recouverte de plusieurs centaines de dents <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Chitine">chitineuses</a>. Les formes de ces dents varient en fonction du régime alimentaire et des stratégies des différents organismes. Voici quelques exemples de leurs incomparables stratégies de chasse.</p>
<h2>Percer à l’acide</h2>
<p>Les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Murex_(genre)">Murex</a> (<em>Muricidae</em>) dont le représentant le plus connu est très certainement le peigne de venus (<em>Murex pecten</em>), s’attaquent à d’autres mollusques, dont ils percent la coquille à l’aide de leur radula. Pour dissoudre ce matériau résistant, le Murex produit des acides et des enzymes grâce à une glande présente dans leur pied (« accessory boring organ »). La radula n’a alors plus qu’à gratter la coquille fragilisée. Mais la patience reste la première qualité du chasseur : on a vu un Murex forer ainsi pendant une semaine avant d’accéder au corps mou de sa proie !</p>
<p>Les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tonnoidea">Tonnoidea</a> ont une méthode très semblable à celle des Murex pour se nourrir mais ne raffolent pas des mollusques. Leurs péchés mignons, ce sont les annélides (vers) et les échinodermes (oursins, étoiles de mer et concombre de mer). Un peu d’acide sulfurique très concentré produit par les glandes salivaires leur permet de manger leurs proies sans s’y casser la radula…</p>
<h2>Vampiriser et asphyxier</h2>
<p>Cependant, il n’est pas toujours nécessaire de tuer la proie. Certains gastéropodes (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Colubrariidae">Colubrariidae</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Marginellidae">Marginellidae</a> et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cancellariidae">Cancellariidae</a>) se comportent comme de vrais vampires des mers. Ils attendent qu’un poisson s’endorme pour ramper vers les parties sans écailles de son corps, telles que les yeux, la base des nageoires ou l’anus. Ils y pratiquent une petite entaille à l’aide de leur radula, et pompent le sang tranquillement. Les glandes salivaires produisent alors des anticoagulants qui empêchent la pompe de se boucher.</p>
<p>Et parfois, la radula n’entre même pas en jeu : les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Olividae">Olividae</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Harpidae">Harpidae</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Fasciolariidae">Fasciolariidae</a> et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Volutidae">Volutidae</a> se contentent simplement d’asphyxier leurs proies (essentiellement des mollusques et des crustacés) en les enfermant dans une poche formée par leur pied. Certaines espèces vont jusqu’à libérer dans cette poche quelques molécules anesthésiantes, histoire que la proie se tienne tranquille pendant son agonie…</p>
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<figcaption><span class="caption">Un Fasciolariidae capturant un autre mollusque.</span></figcaption>
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<h2>Paralyser à l’aide de toxines</h2>
<p>Mais le groupe de néogastéropodes le plus connu est certainement celui des <a href="http://cap.chru-lille.fr/CAPBD/BAIES/detail/ca5-00aout1.htm">cônes</a> (Conidae), généralement bien classés dans le <em>top 10</em> des espèces les plus venimeuses au monde. Les dents marginales de leur radula se sont détachées et ont pris la forme de seringues avec lesquels le cône pique sa proie (vers, mollusques et poissons). Il lui injecte un venin composé principalement de neurotoxines, puis la ramène ensuite dans son proboscis (une extension de la bouche en forme de tube).</p>
<p>D’autres espèces préfèrent paralyser la proie à distance en diffusant leurs toxines (du doux nom de toxines « nirvana ») dans l’eau. Reste alors à enfermer la bête dans sa bouche, à la manière d’un filet de pêche, puis à lui assener le coup de grâce en injectant d’autres toxines via la radula. On a même vu un cône se laisser glisser, grâce à son mucus et sa coquille légère, depuis un surplomb rocheux directement sur sa proie pour mieux la surprendre.</p>
<p>Il existe même une espèce qui chasse en groupe : puisque leur venin est moins puissant que chez d’autres spécimens, et qu’une injection ne suffit pas à paralyser une proie, ils se mettent à plusieurs pour achever leur victime. On pourrait également parler de ces cônes dont le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Proboscis">proboscis</a> ressemble à un ver ou aux tentacules d’une anémone, pour mieux attirer les poissons, ou encore de ces proches cousins des cônes, les térèbres (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Terebridae">Terebridae</a>), dont certaines espèces sont capables d’élargir leur pied pour surfer sur une vague et prendre de vitesse (un comble pour un mollusque !) un ver annélide.</p>
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<h2>Des molécules pour soigner</h2>
<p>Les biologistes qui étudient ces coquillages sont de plus en plus nombreux. Les molécules produites par ces organismes (neurotoxines, insulines, sérotonines, anticoagulants, etc.) pourraient avoir des applications thérapeutiques multiples pour l’homme : traitement de la douleur, de maladies cardio-vasculaires, de cancers, d’Alzheimer, de Parkinson, etc. La liste s’allonge régulièrement. Pour le moment, une seule de ces molécules a passé avec succès toutes les étapes qui conduit de la découverte à l’utilisation en médecine : le <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Ziconotide">Prialt</a>, issu du cône magicien (<em>Conus magus</em>), est aujourd’hui utilisé pour traiter les douleurs chroniques. Cependant, les chercheurs étudient les molécules sécrétées par les cônes depuis maintenant plusieurs décennies, mais n’ont fait que gratter la surface de ce qui semble être un réservoir infini de médicaments (pensez donc : une seule espèce de cône produit 200 toxines différentes !). Mais l’<a href="https://theconversation.com/les-science-omiques-du-nouveau-pour-la-biologie-moleculaire-et-pour-la-planete-107579">ère des « omics »</a> (génomique, transcriptomique, protéomique, etc.) ouvre des perspectives qui révolutionneront certainement notre futur, et devraient nous permettre <a href="https://www.researchgate.net/publication/307583009_Systematics_and_Evolution_of_the_Conoidea">d’en apprendre plus</a> sur la biologie, l’écologie et l’évolution de ces <a href="https://academic.oup.com/mbe/article-abstract/35/10/2355/5056056?redirectedFrom=fulltext">fascinants animaux</a>.</p>
<p>Notez qu’une seule espèce de néogastéropodes, le cône géographe, est mortelle pour l’homme. Jusqu’ici, elle n’a fait officiellement que 36 morts. C’est bien peu par rapport aux 100 000 morts par an dues aux <a href="https://theconversation.com/les-morsures-de-serpents-plaie-africaine-mieux-reconnue-par-loms-48443">morsures de serpents</a>… Alors, pas de panique, vous ne risquez rien (ou presque) ! La prochaine fois que vous observerez un beau coquillage sur la plage, dites-vous plutôt que ces redoutables prédateurs produisent des molécules qui guériront peut-être les maladies de vos enfants !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/110855/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Puillandre a reçu des financements de l'ANR</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Malcolm Sanders a reçu des financements du Labex BCDiv. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Paul Zaharias ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Prédateurs sous-marins, les néogastéropodes usent de stratégies redoutablement efficaces pour s’attaquer à leurs proies. Découvrez ces micro-dents de la mer.Nicolas Puillandre, Maitre de conférence , Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Malcolm Sanders, Post-doctorant, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Paul Zaharias, Doctorant, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/939372018-03-26T22:32:39Z2018-03-26T22:32:39ZQuand les parasites des animaux nous infectent<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/211987/original/file-20180326-159060-xvqsqt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C229%2C4782%2C2391&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Attention aux yeux des bovins</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/search/?license=4%2C5%2C9%2C10&advanced=1&text=parasite">Freestocks/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Une <a href="https://www.cnn.com/videos/health/2018/02/13/abby-beckley-eye-worms-orig-vstop-bdk.cnn">vidéo</a> postée par une Américaine : Abby Beckley, a connu un énorme succès sur Internet. On la voit extraire de petits vers de son œil ! Des chercheurs du centre américain de contrôle et de prévention des maladies ont publié un <a href="http://www.ajtmh.org/content/journals/10.4269/ajtmh.17-0870">rapport</a> décrivant l’infection de cette femme comme le premier cas humain de parasitage du ver de l’œil du bétail <em>Thelazia gulosa</em>.</p>
<p>À la vue de cette vidéo, vous avez très certainement eu la chair de poule. Au-delà de ce cas spectaculaire, on peut se demander comment un parasite de vache s’est retrouvé dans un œil humain et plus généralement : comment les parasites animaux peuvent-ils infecter les humains ?</p>
<p>Pour répondre à cette question, il est nécessaire de mieux comprendre les parasites et leur écologie. En tant que vétérinaire et écologiste des maladies, mes recherches portent sur les facteurs écologiques qui influencent l’émergence des <a href="http://agriculture.gouv.fr/les-zoonoses-ces-maladies-transmissibles-entre-lhomme-et-lanimal">zoonoses</a> : des maladies qui se transmettent des animaux aux humains. Le cas des vers oculaires du bétail est certainement intrigant.</p>
<h2>Parasitisme : les bases</h2>
<p>Au sens le plus élémentaire, un parasite est un organisme qui vit à l’extérieur (« ectoparasite » – tiques, puces, moustiques) ou à l’intérieur (« endoparasite » – vers, vers intestinaux, parasites sanguins) d’un autre organisme et utilise cet organisme (« hôte ») pour survivre.</p>
<p>Concentrons-nous sur les endoparasites. Leur cycle de vie peut être très complexe et impliquer plusieurs hôtes. Le définitif est celui où le parasite se reproduit, tandis que l’intermédiaire abrite les stades de vie immatures et non reproductifs.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/211979/original/file-20180326-159075-hvcl8p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/211979/original/file-20180326-159075-hvcl8p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/211979/original/file-20180326-159075-hvcl8p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/211979/original/file-20180326-159075-hvcl8p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/211979/original/file-20180326-159075-hvcl8p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/211979/original/file-20180326-159075-hvcl8p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/211979/original/file-20180326-159075-hvcl8p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Nematode.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://en.wikipedia.org/wiki/Thelazia">Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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</figure>
<p>Il existe un autre type d’hôte, appelé hôte accidentel, que le parasite peut infecter mais qui ne fait pas partie de son cycle de vie normal. Par exemple, les humains sont des hôtes accidentels pour les vers des yeux du bétail.</p>
<h2>De l’animal à l’homme</h2>
<p>La <a href="https://www.cdc.gov/parasites/index.html">transmission des parasites</a> d’un hôte à un autre peut se produire par plusieurs voies, selon l’endroit où le parasite réside dans l’hôte et comment il est excrété, par exemple par les excréments, le sang ou d’autres sécrétions corporelles. Le contact direct, la consommation d’eau ou d’aliments contaminés, ou un vecteur comme une tique ou un moustique sont autant de moyens d’infection.</p>
<p>Auparavant, on pensait que des changements évolutifs étaient nécessaires pour qu’un parasite puisse changer d’hôte. Bien que ce soit vrai dans la plupart des cas, ce n’est pas indispensable. Des recherches ont montré que les mécanismes que les parasites utilisent pour envahir, survivre et se reproduire avec succès au sein d’un hôte peuvent être applicables à une large gamme d’êtres vivants.</p>
<p>Ce processus, appelé <a href="http://rstb.royalsocietypublishing.org/content/370/1665/20130553">adaptation écologique</a>, signifie que le changement peut se produire plus rapidement sans avoir besoin de développer de nouveaux mécanismes.</p>
<p>Les humains ont accéléré ces processus en contribuant à des changements écologiques majeurs, et par conséquent, au cours du siècle dernier, nous avons vu l’émergence rapide de <a href="https://www.nature.com/articles/nature06536">maladies zoonotiques</a>.</p>
<h2>Le rythme alarmant des changements écologiques</h2>
<p>En écologie des maladies, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0020751905002109?via%3Dihub">nous réfléchissons de manière globale</a>, en examinant les interactions de l’agent pathogène avec ses hôtes mais aussi les conditions environnementales dans lesquelles la maladie se produit.</p>
<p>Les changements écologiques globaux induits par l’homme ont modifié l’équilibre de nombreux systèmes pathologiques – entraînant le déplacement de nouvelles maladies ou de pathologies anciennes vers d’autres zones ou de nouveaux hôtes.</p>
<p>Le changement climatique rend certains endroits <a href="http://rstb.royalsocietypublishing.org/content/370/1665/20130553">plus adaptés</a> à des espèces, en particulier dans les zones tempérées et à des altitudes plus élevées. Au fur et à mesure que l’aire de répartition d’une espèce s’élargit, la gamme de ses parasites peut également s’étendre, offrant un nouveau potentiel de transmission aux espèces indigènes de la région.</p>
<p>La mondialisation et l’augmentation des voyages internationaux <a href="http://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(12)61151-9/fulltext">facilitent les déplacements</a> rapides des humains et des animaux dans le monde entier. De nouvelles espèces peuvent s’établir dans une zone et contribuer à la transmission d’agents pathogènes, de plus les espèces indigènes dans ces zones n’ont aucune immunité préalable.</p>
<p>Prenons l’exemple de l’<a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1773035X1630199X">angiostrongylose humaine</a> causée par un ver nématode, hôte du rat : <em>Angliostrongylus cantonensis</em>. Plusieurs pays auparavant indemnes de cette maladie ont connu des flambées de cas dues à l’introduction de l’hôte intermédiaire, l’escargot géant africain, dans des conteneurs destinés à l’export.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/211242/original/file-20180320-80637-1o1w8mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/211242/original/file-20180320-80637-1o1w8mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=319&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/211242/original/file-20180320-80637-1o1w8mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=319&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/211242/original/file-20180320-80637-1o1w8mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=319&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/211242/original/file-20180320-80637-1o1w8mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=401&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/211242/original/file-20180320-80637-1o1w8mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=401&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/211242/original/file-20180320-80637-1o1w8mp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=401&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Escargots géants d’Afrique à Miami en 2011.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/J Pat Carter)</span></span>
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<p>L’urbanisation et la privation d’habitat de la faune ont contribué à accroître le contact entre les humains et les animaux, offrant <a href="http://www.cell.com/trends/ecology-evolution/fulltext/S0169-5347(16)30184-7">plus de possibilités de transmission</a> d’agents infectieux, comme les parasites.</p>
<p>La Malaisie a, par exemple, connu une <a href="https://parasitesandvectors.biomedcentral.com/articles/10.1186/1756-3305-1-26">augmentation significative des cas de paludisme</a>. Le pathogène identifié est <em>Plasmodium knowlesi</em>, présent naturellement chez les macaques et transmissible à l’homme via les moustiques. La déforestation et le développement économique rapide de cette région ont rapproché les humains de ces primates.</p>
<p>D’autres <a href="http://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(12)61678-X/fulltext">évolutions du paysage</a> peuvent modifier de façon spectaculaire la faune d’un écosystème. La dégradation des pâturages au Tibet a coïncidé avec une augmentation spectaculaire des cas d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89chinococcose">échinococcose alvéolaire</a>. Les petits mammifères qui agissent comme hôtes intermédiaires du parasite ont prospéré dans cet environnement, facilitant ainsi le cycle de transmission.</p>
<p>Ces processus <a href="http://www.mdpi.com/1660-4601/6/2/678">n’accélèrent pas seulement la transmission de maladies des animaux vers les humains</a>. Il existe des preuves de l’introduction de parasites dans les populations d’animaux sauvages en raison de l’activité humaine.</p>
<p>Cela peut être particulièrement préjudiciable pour les espèces vulnérables, déjà menacées par les changements écologiques en cours. Les flambées de toxoplasmose chez les loutres de mer en Californie et les marsupiaux en Australie seraient dues à la contamination de l’eau par des excréments des chats domestiques.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/211243/original/file-20180320-80624-1k92o50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/211243/original/file-20180320-80624-1k92o50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/211243/original/file-20180320-80624-1k92o50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/211243/original/file-20180320-80624-1k92o50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/211243/original/file-20180320-80624-1k92o50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/211243/original/file-20180320-80624-1k92o50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/211243/original/file-20180320-80624-1k92o50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une loutre de mer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Audrey McAvoy)</span></span>
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<h2>Collaborer pour lutter</h2>
<p>Nous savons que l’émergence d’infections parasitaires zoonotiques est une question complexe. Non seulement cela concerne la santé humaine, mais aussi <a href="http://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(12)61678-X/fulltext">animale et environnementale</a>. Cela signifie que des efforts de collaboration entre les disciplines sont nécessaires pour comprendre, contrôler et prévenir ces maladies, et nous devons nous unir pour nous attaquer aux changements écologiques qui pourraient avoir d’importantes répercussions sur la santé humaine et animale à l’avenir.</p>
<p>À l’heure actuelle, il est difficile de savoir si le ver de l’œil du bétail <em>Thelazia gulosa</em> deviendra un problème pour les humains. L’histoire regorge d’exemples d’étranges transmissions de pathogènes qui ne se voient plus ou ne réapparaissent que rarement.</p>
<p>Mais il est important qu’Abby Beckley raconte son histoire, car cela nous permet de rester vigilants face aux risques potentiels.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/93937/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Katie Clow a reçu des financements de the Natural Sciences and Engineering Research Council of Canada (NSERC) et de the Canadian Institutes of Health Research (CIHR). Elle a travaillé pour l'entreprise Zoetis. Elle est affiliée à vétérinaires sans frontières Canada.</span></em></p>Des maladies touchant les animaux peuvent se transmettre aux humains. C’est le cas de pathologies portées par des parasites. Plus nous perturbons l’environnement plus des cas peuvent se produire.Katie M. Clow, Postdoctoral Fellow, University of GuelphLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/920822018-03-06T20:58:24Z2018-03-06T20:58:24ZComprendre l’évolution des vers parasites grâce à leurs spermatozoïdes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/209114/original/file-20180306-146655-1vu42ia.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C3%2C2313%2C1471&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Coupes transversales de spermatozoïdes du monogène _Chimaericola leptogaster_ vus au microscope électronique.</span> <span class="attribution"><span class="source">Jean-Lou Justine</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié en collaboration avec les chercheurs de l’ISYEB (Institut de Systématique, Évolution, Biodiversité, Muséum national d’Histoire naturelle, Sorbonne Universités). Ils proposent chaque mois une chronique scientifique de la biodiversité : « En direct des espèces ». Objectif : comprendre l’intérêt de décrire de nouvelles espèces et de cataloguer le vivant</em>.</p>
<hr>
<p>Connaissez-vous la « spermatologie comparée » ? C’est une science consacrée à la description des spermatozoïdes. Un premier congrès international lui a été consacré en 1970. En <a href="http://europepmc.org/abstract/med/1107820">1976</a>, plus de 1000 espèces animales avaient leur spermatozoïde décrit en microscopie électronique ; et aujourd’hui, c’est probablement dix fois plus.</p>
<p>Pour comprendre l’évolution, les scientifiques commencent par observer les êtres vivants, et par définir des caractères. Par exemple, le nombre de pattes, la présence de plumes. Il s’agit ensuite de démêler ces caractères et comprendre lesquels permettent de retracer les lignées évolutives.</p>
<p>Au cours de l’histoire de la biologie, des instruments de plus en plus puissants ont été utilisés pour décrire et classifier ces caractères. Dès l’Antiquité, l’œil nu, puis des loupes, des microscopes, et enfin des microscopes électroniques. Depuis une trentaine d’années, les outils de la biologie moléculaire donnent accès aux quatre bases (A, T, G, C) de l’ADN, qui sont, elles aussi, des caractères.</p>
<p>Pour certains animaux, il a été très difficile de comprendre l’évolution à partir des observations. Cela a été en particulier le cas des vers parasites appartenant à l’embranchement des Plathelminthes (ou vers plats). Ces animaux sont mous et n’ont pas de fossiles. Leur forme plate et l’apparente simplicité de leur anatomie ne donnaient pas beaucoup d’indices pour comprendre leur évolution – autrement dit… Ils manquaient de caractères !</p>
<h2>Diversité des spermatozoïdes</h2>
<p>Dans les années 1970, la révolution de la microscopie électronique a permis de redécouvrir le monde incroyablement variable de la forme des cellules et de leurs organites. La biologie cellulaire est alors redevenue descriptive. Et parmi ces cellules, l’une est apparue extrêmement variable : le spermatozoïde. Le spermatozoïde joue le rôle, très spécialisé, de transporter l’information génétique du mâle et l’amener à la cellule femelle, l’ovule. L’ovule, lui, est une cellule sphérique sans grande originalité chez la plupart des animaux. Mais les spermatozoïdes ! Quelle incroyable variété de formes et de dimensions !</p>
<p>Revenons-en à nos vers parasites membres des Plathelminthes. Et bien, s’ils ont un corps mou et peu intéressant, quelle diversité dans leurs spermatozoïdes ! Il faut dire qu’un parasite, confortablement installé chez son hôte qui lui fournit gîte et couvert, n’a qu’une chose à faire : se reproduire. Pondre des millions d’œufs, fabriquer des millions d’ovules, et encore plus de millions de spermatozoïdes, pour créer une nouvelle génération de parasites. Pour découvrir les caractères qui leur manquaient pour comprendre l’évolution de ces vers, les chercheurs ont étudié leurs spermatozoïdes.</p>
<p>Qu’est-ce qui différencie un spermatozoïde humain d’avec celui d’un ver plat ? Les axonèmes, entre autres caractéristiques. Ces structures sont les moteurs des cils et des flagelles des cellules eucaryotes. Nous, humains, possédons des cils dans de nombreuses cellules, comme dans les bronches, et des flagelles dans nos spermatozoïdes. Chez 99 % des cellules eucaryotes, ces axonèmes ont la même organisation, avec 9 doublets de microtubules en cercle et deux microtubules centraux ; cette structure, quasiment universelle, est appelée <em>9+2</em>. Le composant de ces microtubules est une protéine, la tubuline.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/208008/original/file-20180227-36674-uxp66j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/208008/original/file-20180227-36674-uxp66j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/208008/original/file-20180227-36674-uxp66j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/208008/original/file-20180227-36674-uxp66j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/208008/original/file-20180227-36674-uxp66j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=432&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/208008/original/file-20180227-36674-uxp66j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=432&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/208008/original/file-20180227-36674-uxp66j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=432&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Axonèmes 9+2 et 9 + « 1 »</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jean‑Lou Justine</span></span>
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<p>Mais, chez les Plathelminthes, les axonèmes des spermatozoïdes n’ont pas cette structure universelle <em>9+2</em>. Dans leur centre, ils n’ont pas des microtubules mais un moyeu spiralé ; ces axonèmes sont donc appelés <em>9 + « 1 »</em>. Notez bien les guillemets, parce que le « 1 » au milieu, ce n’est pas la moitié du 2 des axonèmes <em>9+2</em> : c’est quelque chose de complètement différent. Une structure différente au centre de l’axonème : voilà un caractère !</p>
<p>Et justement, cela devient utile pour comprendre l’évolution : cet axonème bizarre <em>9 + « 1 »</em> est partagé par tous les Plathelminthes parasites et aussi quelques groupes de Plathelminthes non parasites, qui appartiennent à ce qu’on appelait les Turbellariés. Grâce à ce caractère, dès 1985, <a href="https://doi.org/10.1007/978-94-009-4810-5_1">Ehlers</a> a pu retracer l’évolution des Plathelminthes et en réunir certains dans un groupe qu’il a appelé les Trepaxonemata (de <em>trepa</em> qui signifie en spirale : ceux qui ont une spirale dans leur axonème). D’autre travaux plus détaillés ont permis de trouver d’autres caractères dans les spermatozoïdes des Plathelminthes : par exemple, le nombre d’axonèmes. La plupart des spermatozoïdes de Plathelminthes ont deux axonèmes (une bizarrerie dans la nature), mais <a href="https://www.parasite-journal.org/articles/parasite/abs/1982/04/parasite1982574p419/parasite1982574p419.html">certains n’en ont qu’un</a>.</p>
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<span class="caption">Schémas de coupes transversales de spermatozoïdes de Trématodes (Digenea) et de Monogènes (Polyopisthocotylea et Monopisthocotylea).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jean‑Lou Justine</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans les années 1990, la spermatologie comparée des Plathelminthes a fourni aux chercheurs des quantités de caractères, qui leur manquaient auparavant. Ainsi, on peut définir les Cestodes, qui incluent les vers solitaires ou ténias, <a href="https://www.jstor.org/stable/3284502">sur la base d’un caractère simple de leur spermatozoïde</a>. Dans le groupe des Trématodes, qui incluent la douve du foie et les schistosomes, les spermatozoïdes sont maintenant connus dans plus de cent espèces et fournissent aussi des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0065308X17300453">caractères utiles</a> pour la compréhension des relations entre certaines familles.</p>
<p>Pour le groupe des Monogènes, qui sont des parasites de poissons, les spermatozoïdes ont permis de qualifier, par leurs caractères, les deux grands groupes qui composent les Monogènes. Ces groupes répondent aux noms un peu longs de Monopisthocotylea et Polyopisthocotylea, qui deviennent presque clairs quand on comprend que cela signifie « une seule ventouse à l’arrière » (<em>mono – opistho – cotylea</em>) ou « plusieurs ventouses à l’arrière » (<em>poly – opistho – cotylea</em>). Appelons-les « Polyop » et « Monop » pour simplifier.</p>
<h2>Distinguer Polyop de Monop</h2>
<p>Et bien, on peut reconnaître un Polyop d’un Monop <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/002075199190151V">grâce à son spermatozoïde</a> ! Celui des Polyop a deux axonèmes et des microtubules sur les côtés, alors que les différentes familles de Monop ont différentes sortes de spermatozoïdes, qui ne sont jamais comme ceux des Polyop. Reste un problème : rien dans les spermatozoïdes ne permet de reconnaître un Monogène – autrement dit, les Polyop et les Monop forment bien un groupe, chacun de leur côté (chaque groupe descend d’un ancêtre commun), mais rien ne les rassemble (il n’y a pas un ancêtre commun à tous les Monogènes). Ou, en termes scientifiques, les caractères des spermatozoïdes prouvent que Polyop et Monop sont monophylétiques, mais les Monogènes, eux, en principe formés de l’addition Monop + Polyop, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0020751998000605">ne le sont pas</a>.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/207870/original/file-20180226-120776-wpa99e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/207870/original/file-20180226-120776-wpa99e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=887&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/207870/original/file-20180226-120776-wpa99e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=887&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/207870/original/file-20180226-120776-wpa99e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=887&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/207870/original/file-20180226-120776-wpa99e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1115&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/207870/original/file-20180226-120776-wpa99e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1115&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/207870/original/file-20180226-120776-wpa99e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1115&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le Monogène <em>Chimaericola leptogaster</em>. Sur la figure la tête est en haut, les ventouses sont en bas, donc à l’arrière.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jean‑Lou Justine</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Quand nous avons obtenu les premiers résultats de biologie moléculaire, les arbres évolutifs calculés à partir de ces nouveaux caractères (les bases A, T, G, C) ont vite donné les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S016668519700176X">mêmes</a> <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0020751999001976">résultats</a>, avec Monop et Polyop monophylétiques, mais n’ont jamais donné de preuves de la monophylie des Monogènes.</p>
<p>Voilà que nous venons de publier des <a href="https://www.parasite-journal.org/articles/parasite/full_html/2018/01/parasite170144/parasite170144.html">nouveaux résultats</a> sur les spermatozoïdes des Polyop. Pourquoi ne pas avoir fait cela plus tôt ? Parce que ce n’est pas si facile. Les Monogènes sont des parasites de poissons cartilagineux et osseux. Les Monogènes les plus primitifs sont parasites des poissons cartilagineux (Chondrichthyens), les chimères et les requins. Et on ne récolte pas facilement une chimère, qui vit au fond des océans, en bon état, avec ses parasites bien frais.</p>
<figure class="align-center ">
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<figcaption>
<span class="caption">La chimère <em>Chimaera monstrosa</em>.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikipedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Nouveaux résultats</h2>
<p>Nous avons obtenu des résultats sur les spermatozoïdes de trois Polyop rares : deux de la famille des Hexabothriidae (le nom signifie qu’ils ont six – <em>hexa</em> – ventouses – <em>bothrium</em>). Et surtout, un de la famille des Chimaericolidae (facile à retenir si on se souvient que c’est un parasite de chimère, en latin <em>Chimaera</em>), dont le nom est <em>Chimaericola leptogaster</em> ; nous avons collecté ce parasite d’une chimère pêchée au large de la Norvège. Personne n’avait observé la structure des spermatozoïdes de ces deux familles. Surprise, alors que ces deux familles sont indubitablement des Polyop (ils ont plusieurs ventouses à l’arrière, c’est bien visible), leurs spermatozoïdes ne présentent pas la structure des spermatozoïdes de Polyop. Voilà une certitude de 20 ans qui disparaît, et qui montre qu’il n’y a pas que la biologie moléculaire qui peut encore amener des résultats nouveaux. Finalement, les caractères des spermatozoïdes qui unissaient, semblait-il, les Polyop, sont restreints à une branche terminale des Polyop (les Mazocraeidea), qui sont des parasites de poissons osseux (Ostéichthyens).</p>
<figure class="align-right ">
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<figcaption>
<span class="caption">Schéma de coupe transversale du spermatozoïde de <em>Chimaericola leptogaster</em>, dans la région du noyau (la masse grise au centre).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jean‑Lou Justine</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Et justement, que disent les résultats récents de la biologie moléculaire ? La dernière tendance est de séquencer l’ensemble du génome des mitochondries et de comparer, pas seulement les séquences des bases ATGC, mais plutôt l’ordre des gènes et divers détails dans ce génome mitochondrial, le mitogénome, qui est circulaire. En clair, les caractères ne sont plus les bases elles-mêmes mais les arrangements des groupes de bases. <a href="https://parasitesandvectors.biomedcentral.com/articles/10.1186/1756-3305-7-377">Que disent</a> les mitogénomes des Monogènes ? Que les Polyop se ressemblent en eux, que les Monop se ressemblent entre eux… mais que les Polyop ne ressemblent pas aux Monop.</p>
<p>Tiens, tiens… Nous revoilà aux résultats de la spermatologie comparée d’il y a 20 ans. Et les mitogénomes des Chimaericolidae et des Hexabothriidae, me direz-vous ? Aucune donnée disponible ! Les mitogénomes des Polyop connus sont tous des Mazocraeidea, les parasites de poissons osseux cités plus haut. Notre connaissance des mitogénomes des Monogènes est au point où en était la connaissance des spermatozoïdes il y a 20 ans. Rendez-vous dans quelques années.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/92082/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Lou Justine a reçu des financements du Muséum National d'Histoire Naturelle. Il est Rédacteur-en-chef de la revue "Parasite" (<a href="http://www.parasite-journal.org">http://www.parasite-journal.org</a>), dans laquelle ont été publiés certains des articles mentionnés dans ce texte.</span></em></p>En biologie, l’étude de ces cellules très particulières que sont les spermatozoïdes permet d’en savoir plus sur des espèces comme les vers parasites.Jean-Lou Justine, Professeur de parasitologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/878972018-01-14T20:44:48Z2018-01-14T20:44:48ZEspèces en voie d’extinction : le compte n’y est pas<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/201398/original/file-20180109-36040-3vnd5m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un Mautodontha de Tahiti. Les invertébrés sont les grands absents des évaluations de la crise d’extinction qui affecte la biodiversité. </span> <span class="attribution"><span class="source">Benoît Fontaine/MNHN</span></span></figcaption></figure><p>Ces trente dernières années, des scientifiques de plus en plus nombreux tentent d’alerter sur la période d’extinction de masse du vivant que nous traversons.</p>
<p>Principalement causé par les activités humaines, ce phénomène a été qualifié de « sixième crise d’extinction », en référence aux <a href="https://theconversation.com/a-propos-des-grandes-crises-dextinction-81531">cinq grandes crises</a> qui ont émaillé l’histoire de la vie sur Terre. La cinquième, la plus célèbre, avait conduit à l’extinction des dinosaures, bien avant l’apparition de l’homme.</p>
<p>Officiellement pourtant, seules 859 espèces sont aujourd’hui recensées comme éteintes si l’on s’en réfère à la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature <a href="https://www.iucn.org/fr">(UICN)</a>. Ce qui représente moins de 0,05 % des deux millions d’espèces répertoriées. Ce chiffre pourrait jeter un doute sur la réalité de la crise : si la situation est si grave, où sont les espèces éteintes ?</p>
<p>Il s’explique pourtant. Tout d’abord par la difficulté qu’il y a à prouver qu’une espèce a disparu : si on ne la trouve plus, c’est peut-être parce qu’on a mal cherché, au mauvais endroit, à la mauvaise période ou avec des moyens inappropriés.</p>
<p>Ensuite, les espèces dont l’état de conservation est bien connu – à savoir les vertébrés et quelques autres petits groupes tels que papillons de jour, les coraux bâtisseurs de récifs ou les libellules – ne constituent qu’une infime partie de la biodiversité globale ; ainsi, ce sont moins de 5 % des espèces connues qui ont été évaluées dans le cadre de la <a href="http://www.iucnredlist.org/">liste rouge de l’UICN</a>.</p>
<h2>Des millions d’espèces non évaluées</h2>
<p>Autre fait marquant : la plus grande partie de la biodiversité – composée d’invertébrés tels que les insectes, mollusques, arachnides ou nématodes – est pratiquement absente des évaluations de la crise d’extinction.</p>
<p>Faute de données quantifiées sur les tailles des populations, les aires de répartition ou la démographie de ces espèces, il est impossible d’utiliser les méthodes classiques, telles que celle utilisée par l’UICN pour les comptabiliser.</p>
<p>Dans ce contexte, puisque les informations manquent pour la grande majorité des espèces (sans parler des cinq à dix millions d’espèces encore inconnues !), comment mesurer avec exactitude l’ampleur de la crise ?</p>
<p>Plusieurs approches, basées sur de grands jeux de données, sont disponibles.</p>
<p>Il est ainsi possible de <a href="https://www.nature.com/articles/nature09678">comparer les taux d’extinction</a> actuels et passés pour les groupes évalués par l’UICN, de <a href="https://www.nature.com/articles/nature02121">projeter les futures modifications d’habitats</a> provoquées par le réchauffement climatique ou d’<a href="https://www.nature.com/news/biodiversity-the-ravages-of-guns-nets-and-bulldozers-1.20381">évaluer l’impact de l’agriculture</a> et de la surexploitation.</p>
<p>Une autre façon de mesurer la crise consiste à mesurer non pas les extinctions, mais les réductions de population et d’aires de répartition, préludes à l’extinction. C’est l’approche qui a été utilisée dans une <a href="http://www.pnas.org/content/114/30/E6089.full">étude</a> publiée en juillet 2017 qui a reçu un fort écho médiatique.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"884841134182236162"}"></div></p>
<p>En utilisant les données de la liste rouge sur les contractions d’aires de répartition et les extinctions de populations pour 27 600 espèces de vertébrés, les auteurs de cette étude ont montré que près de la moitié des espèces de l’échantillon ont perdu des populations ou ont vu leur aire de répartition diminuer au cours du siècle dernier. La plupart des 177 espèces de mammifères d’un sous-échantillon pour lequel des données détaillées sont disponibles dans la littérature scientifique ont perdu plus de 40 % de leur aire de répartition depuis 1900 et la moitié en ont perdu plus de 80 % !</p>
<p>Si cette étude est remarquable, elle s’appuie cependant, comme la plupart des travaux sur le sujet, sur les seules espèces pour lesquelles les données démographiques ou géographiques existent (grands vertébrés en tête).</p>
<h2>Une nouvelle approche pour les espèces mal connues</h2>
<p>Est-ce à dire qu’il est impossible de mesurer la crise à travers le prisme des petites espèces peu étudiées et mal connues ? Certainement pas. Nous avons proposé une <a href="http://www.pnas.org/content/112/25/7761">nouvelle approche</a>, qui permet de prendre en compte toutes les espèces, et notamment les invertébrés.</p>
<p>Souvent, les seules données existantes sur ces espèces sont contenues dans la description originale (article scientifique qui relate la découverte de l’espèce, donne sa description et lui attribue un nom), et très peu de choses sont connues de leur biologie ou de leur aire de répartition, sans même parler de leur démographie !</p>
<p>Mais il existe pourtant des sources de données très fiables : les spécimens conservés dans les collections des muséums, accompagnés d’étiquettes mentionnant le lieu et la date de la collecte.</p>
<p>L’idée est donc la suivante : la quantité de spécimens en collection doit, dans une certaine mesure, refléter l’état des populations de l’espèce dans la nature. Cela n’est certes pas vrai pour des espèces rares et remarquables ou ayant une valeur marchande, comme <a href="https://www.conchology.be">certains cônes</a> par exemple : celles-ci seront paradoxalement surreprésentées dans les collections, car davantage recherchées.</p>
<p>Mais pour les espèces banales, peu connues et sans valeur, nous pouvons faire l’hypothèse que leur rythme d’apparition dans les collections traduit directement leur abondance dans la nature. Une espèce collectée rarement mais jusqu’à une date récente est probablement vivante. Une espèce ayant été collectée à un rythme soutenu mais seulement jusqu’à une date ancienne est probablement éteinte.</p>
<p>De manière générale, le rapport entre le rythme de collecte et le temps écoulé depuis la dernière collecte nous permet d’estimer la probabilité que l’espèce soit toujours présente.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"948170439314018304"}"></div></p>
<h2>Des maths et des experts</h2>
<p>Pour un échantillon aléatoire de 200 espèces de mollusques terrestres (escargots et limaces) du monde entier, nous avons ainsi recherché et rassemblé toutes les dates de collecte provenant de la littérature scientifique, de données fournies par des experts et des spécimens des collections de plusieurs grands muséums d’histoire naturelle.</p>
<p>Le premier enseignement de cette compilation de données illustre bien le manque de connaissances sur les invertébrés : 30 % des espèces de l’échantillon ne sont connues que par leur description originale, et 33 % n’ont été observées que dans une seule localité ! Nous avons analysé ces données par <a href="http://www.pnas.org/content/112/25/7761">deux approches complémentaires</a>.</p>
<p>Premièrement, nous avons construit un modèle mathématique probabiliste qui repose sur l’hypothèse que les espèces se sont éteintes à un taux très faible jusqu’au début du XX<sup>e</sup> siècle, où leur probabilité d’extinction par année a littéralement explosé. Pour chacune des 200 espèces, à l’aide de la dernière date à laquelle elle a été observée, l’effort de collecte estimé pour cette espèce et la probabilité estimée de la trouver lorsqu’elle est vivante, nous avons comparé la probabilité qu’elle soit éteinte avec celle qu’elle soit encore vie pour proposer un « statut de conservation statistique » : « probablement éteinte », « probablement vivante » ou « sans avis ».</p>
<p>Parallèlement, nous avons sollicité 30 malacologues, experts reconnus d’une famille de mollusques ou d’une région biogéographique, et leur avons soumis les espèces de l’échantillon, en leur demandant s’ils pouvaient évaluer leur statut de conservation (« non menacé », « menacé », « éteint » ou « impossible à évaluer »), et quand ils avaient collecté des spécimens de ces espèces sur le terrain.</p>
<h2>Une extinction sans précédent</h2>
<p>Suivant la méthodologie de l’UICN, 85 % des espèces de notre échantillon n’auraient pas pu être évaluées, faute de données suffisantes. En revanche, seules 41 % sont impossibles à évaluer avec l’approche « à dire d’expert » ; dans ce cadre, 45,5 % ont été classées comme non menacées, 3,5 % comme menacées et 10 % comme éteintes.</p>
<p>Cette approche peut être critiquée, puisqu’elle se fonde sur des critères difficiles à quantifier, voire des ressentis. Pourtant, ses résultats sont remarquablement adéquats avec ceux obtenus par le modèle statistique ; ce dernier évalue lui aussi 10 % des espèces de l’échantillon comme éteintes, ce qui, rapporté à l’ensemble des espèces terrestres connues, représente environ 130 000 extinctions en 250 ans !</p>
<p>Deux méthodes indépendantes, l’une basée sur les connaissances des spécialistes, l’autre sur un modèle mathématique, convergent pour confirmer que sur un échantillon aléatoire d’espèces, la proportion d’espèces éteintes par rapport à la biodiversité connue est beaucoup plus importante que les 0,05 % recensés officiellement. La crise d’extinction actuelle est sans précédent dans l’histoire de la vie sur Terre.</p>
<h2>Étendre l’évaluation</h2>
<p>D’autres groupes d’espèces mériteraient également une évaluation de leur statut de conservation. Par exemple, certains insectes emblématiques, comme les abeilles sauvages, sont relativement bien étudiés. Pourtant, la liste rouge de ce groupe de pollinisateurs révèle que <a href="http://ec.europa.eu/environment/nature/conservation/species/redlist/downloads/European_bees.pdf">57 % des 1965 espèces européennes</a> n’ont pu être évaluées faute de données adéquates.</p>
<p>Le cas des syrphes et autres diptères, dont l’efficacité de pollinisation est pourtant largement reconnue, est remarquable puisqu’aucune évaluation à l’échelle française ou européenne n’a été effectuée à ce jour.</p>
<p>En tenant compte des spécificités d’échantillonnage propres aux différents groupes, il sera intéressant d’adapter l’approche développée pour les mollusques terrestres à d’autres groupes bien représentés dans les collections. Cela permettra d’évaluer l’impact de la crise d’extinction sur les différents compartiments de la biodiversité et d’orienter les efforts de conservation vers les régions et les espèces les plus touchés.</p>
<p>Car même pour des taxons peu connus, il est possible de mesurer l’impact de la crise, en mettant à profit la modélisation mathématique, le savoir des spécialistes et l’extraordinaire richesse des collections des muséums.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/87897/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Si la période d’extinction de masse du vivant que nous connaissons est bien documentée pour les vertébrés, de nombreuses espèces invertébrées échappent aux évaluations.Benoît Fontaine, Ingénieur en biologie de la conservation, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Amaury Lambert, Professeur, probabilités, biologie évolutive, Sorbonne UniversitéColin Fontaine, Docteur en écologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Guillaume Achaz, Docteur en biologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/838252017-10-24T20:55:35Z2017-10-24T20:55:35ZChangement climatique et crise de la biodiversité : la dangereuse alliance<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/185495/original/file-20170911-1317-12cbc07.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Arbres desséchés dans le désert namibien. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/arbre-d%C3%A9sert-namibie-dead-vlei-64311/">Katja/pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Le changement global que connaît notre planète est trop souvent associé aux seuls changements climatiques. Or il concerne aussi la biodiversité, avec ce processus appelé « crise de la <a href="https://theconversation.com/extinctions-de-masse-comment-la-vie-rebondit-48271">6ᵉ extinction</a> ».</p>
<p><a href="https://theconversation.com/a-propos-des-grandes-crises-dextinction-81531">Ces crises de la biodiversité</a> désignent une période au cours de laquelle une grande partie des espèces vivantes est frappée d’extinction, à l’image de celle du <a href="http://geologie.mnhn.fr/biodiversite-crises/page5.htm#KT">Crétacé-Tertiaire</a>, il y a 65 millions d’années, qui vit disparaître les dinosaures.</p>
<p>Ces dernières décennies, de <a href="http://www.pnas.org/content/112/25/7761">nombreuses espèces</a> ont donc disparu ou ont été terriblement affectées au point d’être menacées de disparition. C’est ce que l’<a href="http://www.pnas.org/content/114/30/E6089.abstract">analyse des populations de 25 000 espèces de vertébrés</a> a récemment établi.</p>
<p>Selon une autre étude, on apprend que l’Europe a perdu <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/ele.12387/full">421 millions individus d’oiseaux</a> ces trente dernières années ; de nombreuses espèces communes, comme les alouettes ou les mésanges, sont en fort déclin. Et ces derniers jours, la revue scientifique <em>Plos One</em> a fait beaucoup parler en publiant les résultats de travaux quantifiant pour la première fois le dramatique <a href="http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0185809">déclin des insectes volants</a> sur le Vieux Continent.</p>
<p>Pour beaucoup, cette crise de la biodiversité demeure un évènement de moindre importance, dont les conséquences pour les humains resteraient purement éthiques ou patrimoniales. On trouve triste de voir décliner les populations d’éléphants, de baleines, d’oiseaux ou de grenouilles, mais ce n’est pas aussi grave que certains drames humains, comme les famines ou les exodes causés par le changement climatique. C’est ici une lourde erreur car perte de biodiversité et changement climatique <a href="http://www.millenniumassessment.org/documents/document.354.aspx.pdf">sont intimement liés</a> et ont <em>ensemble</em> des conséquences dramatiques pour l’humanité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/189516/original/file-20171010-17676-1hkec5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En Europe, les populations de mésanges connaissent un fort déclin.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/missbutterfly/12947874633/in/photolist-kJaf2P-dV9aaz-SqyWGS-7hyVS2-UJEsCm-evJ3JQ-5MC33W-kCwuQH-GLjoEp-Rzboou-bn7hqy-bn7hSw-RBTfrT-ncMq7d-ncMtVU-3nn1gC-4vPQv5-4gVMzH-nsenWb-4gZR41-jEQae7-4fhxZ8-5t1rGH-pMvFtv-Rx3RaS">Julie Missbutterflies/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une crise bien caractérisée et sans précédent</h2>
<p>La 6<sup>e</sup> extinction de masse affecte pratiquement tous les milieux et toute la biodiversité. Elle s’explique par une <a href="http://www.millenniumassessment.org/documents/document.354.aspx.pdf">multitude de facteurs</a>, tous liés aux activités humaines : changement climatique, dévastation des milieux naturels due à l’agriculture industrielle, déforestation, exploitation minière, urbanisation effrénée, pollutions innombrables des pesticides aux plastiques, en passant par les apports azotés excessifs et la pollution lumineuse. Il apparaît bien difficile d’agir de manière efficace en se limitant à une seule de ces causes.</p>
<p>Cette crise est d’autre part incroyablement rapide. Son appellation, en référence aux extinctions de masse passées, peut être trompeuse de ce point de vue : elle va en effet mille fois plus vite que les précédentes et nous affectera directement à l’échelle de notre vie d’adulte.</p>
<p>Ce sont <a href="http://doi.org/10.1038/461472a">tous les seuils</a> de stabilité des cycles terrestres qui sont aujourd’hui affectés ; une situation pouvant conduire à des <a href="http://doi.org/10.1038/nature09678">changements de biodiversité très forts et très rapides</a>.</p>
<h2>Des réseaux d’interactions essentiels</h2>
<p>La biodiversité ne se résume pas à des listes d’espèces peuplant des milieux spécifiques. Chaque espèce dépend de beaucoup d’autres du fait de leurs interactions, au travers de relations de consommation, de prédation, de parasitisme, de mutualisme, ou de <a href="http://www.encyclopedie-environnement.org/vivant/systemes-symbiotiques-parasites/">commensalisme</a>.</p>
<p>Introduisez, comme ce fut le <a href="https://www.csiro.au/en/Research/BF/Areas/Invasive-species-and-diseases/Biological-control/Exotic-dung-beetle-to-tackle-Aussie-flies">cas en Australie</a> il y a quelques décennies, des bovins en oubliant d’introduire les insectes coléoptères bousiers <a href="http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/coprophage/19144?q=coprophage#19033">coprophages</a> associés et ce sont les prairies qui dépérissent d’être littéralement recouvertes de bouses.</p>
<p>Laissez-vous envahir par un <a href="http://draaf.paca.agriculture.gouv.fr/Le-Charancon-Rouge-du-Palmier-en">charançon exotique</a> et <a href="http://www.lefigaro.fr/sciences/2017/07/11/01008-20170711ARTFIG00271-la-mort-annoncee-des-palmiers-de-la-cote-d-azur.php">10 000 palmiers meurent</a> sur la Côte d’Azur en moins de 10 ans. Supprimez un tiers des abeilles sauvages en France et la <a href="http://doi.org/10.1038/nature11148">pollinisation de 80 % des plantes</a>, y compris celles de nombre de nos cultures, sera gravement affectée.</p>
<p>C’est une évidence absolue que la perte d’espèces en proportions considérables (selon les groupes d’organismes, de <a href="http://doi.org//10.1038/nature09678">10 à 40 % dans les 50 prochaines années</a>) aura des effets écologiques très forts et des conséquences immédiates sur notre vie quotidienne.</p>
<p>Les réseaux d’interactions entre espèces au sein des écosystèmes sont incroyablement complexes et <a href="http://doi.org/10.1126/science.1188321">leur modélisation</a> reste un problème scientifique de longue haleine. Le nombre d’espèces intervenant au sein de ces réseaux naturels est considérable : la faune française compte par exemple pas moins de <a href="https://inpn.mnhn.fr/accueil/index">90 000 espèces d’insectes</a> dont les rôles écologiques sont souvent <a href="https://theconversation.com/crise-de-la-biodiversite-noublions-pas-les-invertebres-81517">primordiaux</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"913675100079214592"}"></div></p>
<h2>Toutes les espèces comptent</h2>
<p>Une autre idée reçue nuit à l’appréhension des effets de cette crise de la biodiversité : les écosystèmes ne sont pas uniquement régis par quelques espèces abondantes et communes dont il serait plus facile de préserver l’existence. Les espèces rares – et précisément plus fragiles du fait de leur rareté – assument souvent des rôles écologiques majeurs malgré leur faible importance numérique. Leur disparition ne passera ainsi pas inaperçue au plan fonctionnel.</p>
<p>Un <a href="http://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.1001569">bilan</a> publié en 2013 – prenant en compte différents types d’écosystèmes et plusieurs milliers d’espèces – a montré que des fonctions originales et importantes sont ainsi fréquemment tenues par des espèces rares.</p>
<p>Il est souvent difficile de faire comprendre ce type de résultats peu compatibles avec notre vision dominante de l’ingénierie agronomique, dans laquelle l’homme pense pouvoir gérer durablement des systèmes simplifiés, notamment agricoles ou forestiers, avec un interventionnisme permanent.</p>
<p><a href="http://journals.plos.org/plosbiology/article?id=10.1371/journal.pbio.1001569">L’étude</a> cite ainsi l’exemple d’une petite plante (saxifrage) des milieux alpins européens, assez rare et très discrète. Cette dernière permet aux pollinisateurs de se maintenir sur des affleurements rocheux inhospitaliers. En maintenant ces pollinisateurs naturels et leurs espèces associées, on évite une cascade d’interventions coûteuses, polluantes et peu pérennes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/185666/original/file-20170912-19514-1d4j1dx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Saxifrage en Vanoise.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Saxifrage_en_Vanoise_2017.jpg">Wikipedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Une <a href="https://www.nature.com/nature/journal/v486/n7401/full/nature11148.html">synthèse</a> récente a examiné environ 2 000 études scientifiques à propos des relations entre biodiversité et sociétés humaines. Elle a permis de montrer que les pertes de biodiversité aboutissent toujours à des diminutions importantes de services écosystémiques, comme la décomposition, les cycles de la matière, l’assainissement des eaux, la régulation climatique ou la pollinisation.</p>
<h2>Perte de biodiversité et dégradation du climat</h2>
<p>On souligne souvent cet enchaînement fatal des causalités : émissions/perturbations humaines conduisant au changement climatique provoquant une perte de biodiversité, cette dernière causant elle-même des dommages aux sociétés humaines.</p>
<p>Mais cela fait abstraction d’une boucle de rétroaction extrêmement importante et trop peu mentionnée : celles de la <a href="http://www.fondationbiodiversite.fr/images/decisionspubliques/IPBES/6_nov_2014_GIEC-IPBES/Compte_rendu_IPBES_GIEC_6nov_V2.pdf">biodiversité sur le climat</a>.</p>
<p>Or, envisager la planète comme un système purement physique et minéral dans lequel la biodiversité est hébergée – n’assurant pas elle-même de rétroaction fonctionnelle ou régulatrice sur celui-ci – est une représentation complètement erronée de la réalité.</p>
<p>La couverture végétale et le sol assument, par exemple, un rôle crucial de régulation climatique directe, outre le stockage et le recyclage du carbone. La déforestation entraîne ainsi la disparition locale définitive des nuages et des pluies. La composante biologique des océans (notamment le plancton) absorbe également une quantité de carbone considérable : on rappellera ainsi que plus d’un quart du CO<sub>2</sub> émis par les activités humaines est absorbé par les océans.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"917470020678103045"}"></div></p>
<p>Les synthèses citées ici ont montré que les pertes de biodiversité conduisaient à de fortes baisses de performances dans les écosystèmes, <a href="https://www.nature.com/nature/journal/v486/n7401/full/nature11148.html">jusqu’à hauteur de 10 à 15 % de leur productivité</a>.</p>
<p>Une couverture végétale terrestre ou des peuplements planctoniques marins, tous appauvris ou profondément déséquilibrés, n’assureront pas en effet leurs fonctions régulatrices avec la même efficacité. Sans compter que d’énormes surfaces de cette couverture végétale – comme les forêts tropicales – continuent à être <a href="https://theconversation.com/forest-loss-has-halved-in-the-past-30-years-latest-global-update-shows-46932">rapidement dévastées</a>.</p>
<p>La crise de la 6<sup>e</sup> extinction n’est pas qu’une préoccupation pour les défenseurs des droits des animaux ; elle nous concerne tous. Au-delà des aspects éthiques évidents d’une telle catastrophe, les conséquences dans notre vie quotidienne seront importantes et sans aucun doute profondément négatives.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/83825/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La disparition rapide et massive de nombreuses espèces terrestres doit alerter autant que les effets du changement climatique… d’autant plus que ces deux processus sont intimement liés.Philippe Grandcolas, Directeur de recherche CNRS, systématicien, UMR ISYEB, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Roseli Pellens, Ingénieure de recherche en macroécologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/815172017-10-23T19:08:13Z2017-10-23T19:08:13ZCrise de la biodiversité : n’oublions pas les invertébrés !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/191365/original/file-20171023-1695-xsrt9u.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un orthoptère dans des champignons corticoles (qui vivent sur les écorces d’arbre) en Guyane. </span> <span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Il semble aujourd’hui établi que nous vivons la 6<sup>e</sup> extinction de masse de la biodiversité ; cette expression désigne une période au cours de laquelle on observe une baisse très importante des populations d’animaux, de plantes, etc.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/a-propos-des-grandes-crises-dextinction-81531">Causée par les activités humaines</a>, elle est d’une ampleur sans précédent ; c’est qu’indiquent les données de nombreuses études globales (dont une <a href="http://advances.sciencemag.org/content/1/5/e1400253">étude récente</a> sur les vertébrés) et locales ; il faut aussi prendre en compte les nouvelles données concernant l’amplitude de la biodiversité, que nous n’avons fait qu’effleurer ces 200 dernières années, depuis que le naturaliste suédois Linné a inventé la <a href="https://www.herodote.net/Carl_von_Linne_1707_1778_-synthese-212.php">taxonomie</a>, toujours utilisée aujourd’hui.</p>
<p>Car c’est bien cette biodiversité foisonnante (on parle de « megadiversité ») encore largement inconnue qui est en train de disparaître sous nos yeux.</p>
<p>La situation s’avère particulièrement critique dans les <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1744-7429.2006.00141.x/full">régions intertropicales</a> qui concentrent aujourd’hui développement rapide – avec des croissances de PIB quelquefois <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Croissance_%C3%A9conomique#Cons.C3.A9quences">supérieures à 5 %</a> – et croissance démographique ; une évolution qui entraîne déforestations, pollutions, prélèvements de faune et flore ainsi que des dégradations des habitats naturels liés à une urbanisation sans précédent.</p>
<p>Or ces régions sont de véritables <a href="http://www.cnrs.fr/cw/dossiers/dosbiodiv/index.php?pid=decouv_chapA&zoom_id=zoom_a1_4">« points chauds »</a> de biodiversité, tout particulièrement les forêts humides qu’elles abritent. Ici, l’absence de conditions limitantes (la chaleur et l’humidité y sont optimales) permet un développement idéal des écosystèmes forestiers, aquatiques, littoraux et de toutes les interfaces entre les écosystèmes.</p>
<p>Dans ce contexte, des organismes aussi insignifiants (en apparence !) que les mollusques, les mille-pattes, les araignées, les insectes et tant d’autres « invertébrés » disparaissent avant même d’avoir été inventoriés. Ils sont pourtant absolument essentiels à la biodiversité. Nous allons voir pourquoi.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/191363/original/file-20171023-1746-zaxsd4.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Libellule <em>Brechmorhoga sp.</em> dans un marécage guyanais. Les libellules sont des prédateurs importants d’insectes des milieux humides, où elles participent au fonctionnement de l’écosystème.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<h2>Incontournables insectes et arthropodes</h2>
<p>Les insectes, les arthropodes (crustacés, araignées, milles pattes, etc.) et tous les autres invertébrés (mollusques, vers, etc.) sont <a href="https://theconversation.com/les-insectes-vont-ils-sauver-le-monde-62836">essentiels aux écosystèmes</a> de notre planète ; ils constituent en effet la nourriture de la plupart des vertébrés sur lesquels <a href="http://www.nature.com/articles/s41598-017-09084-6">se concentrent</a> les efforts de recherche et de conservation.</p>
<p>On pourrait expliquer cette préférence par un effet d’anthropocentrisme, les vertébrés (oiseaux, cétacés, primates, etc.) paraissant plus proches de l’homme, ou dans tous les cas plus emblématiques.</p>
<p>Maillon crucial des chaînes alimentaires, insectes et arthropodes sont des ingénieurs écologiques aux fonctions essentielles – comme la pollinisation et la fertilisation des sols –, des microéboueurs de déchets organiques de toute nature, des auxiliaires indispensables (mais quelquefois ignorés) de nos agroécosystèmes, des micro-experts sentinelles de nos écosystèmes et de vilaines affaires criminelles (sciences forensiques), les futurs modèles de nos solutions bioinspirées les plus innovantes, des modèles en biologie générale et comparée qui nous échappent encore, des acteurs de nos patrimoines culturels… et peut-être le futur de l’alimentation humaine !</p>
<p>Il est désormais possible d’évaluer l’importance des insectes et autres arthropodes en matière de potentiel d’évolution ; et ceci est important pour faire les bons choix de conservation. Aujourd’hui, toute une partie de la recherche se consacre ainsi à <a href="http://www.springer.com/us/book/9783319224602">cette phylogénie de la conservation</a> pour trouver les <a href="https://www.sfecologie.org/regard/r73-juin-2017-ph-grandcolas-systematique/">critères</a> de plus en plus objectifs afin d’orienter les décideurs en réponse à cette 6<sup>e</sup> extinction de masse.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/191364/original/file-20171023-1689-dvvwjh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La luge des cimes est un outil dédié à l’étude des canopées tropicales. Créée par l’équipe du Radeau des cimes, cette plateforme accueillant deux ou trois scientifiques peut se déplacer au-dessus de la canopée, choisir des arbres d’intérêt pour en étudier la faune et la flore. Un ballon à air chaud et son pilote en permette le déplacement. Ici dans la forêt guyanaise.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Fossiles et paléo-écosystèmes</h2>
<p>Dans ce contexte de quantification de la biodiversité et de l’extinction – que ce soit en nombre d’unités taxonomiques ou par rapport au rythme de cette extinction –, il apparaît que les données concernant des insectes fossiles, désormais adossées à des bases de données relativement fournies, permettent d’avoir du recul face aux cinq extinctions de masse précédentes.</p>
<p>Ces dernières se situent dans <a href="http://geologie.mnhn.fr/biodiversite-crises/page4.htm">des temps profonds</a> : de la crise Permien-Trias, il a plus de 250 millions d’années, à celle du Crétacé-Tertiaire, il y a 65 millions d’années.</p>
<p>Les insectes ont en effet toujours montré des taux d’extinction des rangs taxonomiques supérieurs (familles, etc.) beaucoup moins importants que chez les vertébrés. Ceci peut être expliqué par la relative importance de la biodiversité des insectes, déjà avérée <a href="http://www.nature.com/nature/journal/v503/n7475/full/nature12629.html">depuis la fin du Carbonifère</a>, il y a plus de 300 millions d’années.</p>
<p>Ce fut le cas lors de la crise de la fin du Crétacé, qui a vu l’extinction des dinosaures mais a <a href="https://www.bio-conferences.org/articles/bioconf/abs/2015/01/bioconf-origins2015_00006/bioconf-origins2015_00006.html">« laissé passer »</a> tous les groupes modernes d’insectes vivant à cette période. Ces organismes ont donc participé à la reconstitution des écosystèmes après ces crises majeures. Ils en ont peut-être même été des acteurs majeurs.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/191362/original/file-20171023-1722-7pxzkc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=489&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Chenille du papillon <em>Charaxes jasius</em>, un papillon méditerranéen vivant sur un seul végétal, l’arbousier. Ces deux espèces sont liées par cette relation entre plantes et hôtes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Le rythme de l’extinction</h2>
<p>Ce phénomène nous invite à prendre en compte la valeur évolutive de la perte de biodiversité, c’est-à-dire la perte de possibilités adaptatives des écosystèmes et des lignées face aux changements qui s’opèrent sous nos yeux.</p>
<p>En plus de l’importance écologique (effets « immédiats »), il faut considérer l’échelle évolutive (sur plusieurs dizaines de générations au minimum) qui entre en compte dans la persistance et l’évolution des systèmes écologiques.</p>
<p>Ce maintien de la biodiversité maximale, outre la valeur de chaque espèce, représente une garantie pour l’avenir : qui sait, par exemple, si l’une ou plusieurs de ces espèces infimes ne cachent pas un trésor pour l’humanité (une molécule d’intérêt majeur, une particularité biologique transposable par bio-inspiration, un parasite fondamental pour lutter contre une bio-invasion…).</p>
<p>Notre inquiétude concerne donc le rythme de ces extinctions qui semble, dans ce nouvel épisode, cette 6<sup>e</sup> extinction de masse, sans précédent. Les écosystèmes pourront-ils faire fonctionner leur capacité de résilience ou de compensation ? Ceux-ci existent-ils vraiment à cette échelle ? Nous dirigeons-nous vers un effondrement provoqué par cette rapidité ?</p>
<p>Comment les écosystèmes et les territoires vont-ils s’adapter à ces changements profonds ? Devra-t-on un jour envisager de recréer certaines espèces (un pollinisateur d’une espèce végétale d’intérêt agronomique majeur, un parasite d’une espèce terriblement invasive ou impactante pour la santé, etc.) en ayant recours à la biologie de synthèse ?</p>
<h2>De ce côté-ci de la biodiversité</h2>
<p>On a commencé par entendre dire « Il n’y plus de saisons », puis ce fut « Où sont passés les oiseaux ? » et maintenant « Mais au fait, où sont les insectes ? ».</p>
<p>C’est une sensation étrange de pouvoir ressentir à l’échelle d’une mémoire humaine ce type de phénomène. D’abord de manière empirique, puis de manière scientifique en utilisant des bases de données de différents pays européens, comme celles des collections des Muséums d’histoire naturelle, basées sur les spécimens ou des travaux de recherche tout récents.</p>
<p>Ou encore, avec le recours des sciences citoyennes, à la fois moyen de pallier aux difficultés de financement de la recherche et formidable moyen de sensibilisation qui s’est imposé comme un <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/ece3.2526/full">outil incontournable</a> au fil des années.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/191361/original/file-20171023-1698-gz5prc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les Eucères (caractérisées par des antennes très longues) sont des abeilles solitaires d’Europe qui participent à la pollinisation des orchidées.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Car les insectes et autres arthropodes ne périclitent pas que dans les zones intertropicales. Nos régions aussi sont concernées, comme le montre une <a href="http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0185809">toute récente étude</a> parue dans la revue <em>PloS One</em> (moins 75 % d’insectes volants en Allemagne ces trente dernières années) ; une situation parfois masquée par les introductions et autres incursions d’espèces dites « invasives », <a href="https://theconversation.com/la-punaise-diabolique-cette-creature-urbaine-66752">certaines discrètes</a>, d’autre moins comme le <a href="https://theconversation.com/le-frelon-asiatique-est-entre-dans-paris-62746">frelon asiatique</a>… Ou encore le très désagréable moustique-tigre qui, comme pas mal d’autres, ne sert pas la cause invertébrée !</p>
<p>Il faut encore convaincre pour bien faire comprendre le rôle essentiel de ces petits organismes – en apparence anodins, discrets ou invisibles – à ceux qui les ignorent, s’en désintéressent ou s’en méfient ainsi qu’à ceux en charge de prendre les décisions.</p>
<p>Que vaut alors la cause de cette majorité silencieuse, qui disparaît tristement sous les tropiques ?</p>
<p>On sent toutefois une prise en compte grandissante de cette situation, peut-être « grâce » au déclin des abeilles et à l’impact des études en écologie fonctionnelle… On voit ainsi fleurir des « hôtels à abeilles » dans les jardins, des « passerelles à faune » enjamber les autoroutes, une <a href="http://www.trameverteetbleue.fr/">« trame verte et bleue »</a> se dessiner ; et l’on connaît bien désormais le rôle des vers de terre (Annelides) dans les sols.</p>
<p>Comme c’est le cas pour les récifs coralliens, la France à la responsabilité de millions d’hectares de forêts tropicales, méditerranéennes, tempérées, atlantiques et des espèces qui y vivent. Il est urgent de les protéger, de poursuivre les inventaires et la recherche sur le rôle de la biodiversité dans tous les écosystèmes, et d’aider à la protection des milieux tropicaux où cette biodiversité cachée disparaît chaque jour un peu.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/81517/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Garrouste ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Mollusques, milles‑pattes, araignées, insectes… les invertébrés connaissent ces dernières années, tout autant que les vertébrés, un inquiétant recul de leurs populations.Romain Garrouste, Chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205 MNHN-CNRS-UPMC-EPHE), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/815312017-10-22T21:08:13Z2017-10-22T21:08:13ZÀ propos des grandes crises d’extinction<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/189772/original/file-20171011-16660-trtc2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C68%2C1024%2C725&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une soixantaine de crises d’extinction ont été documentées. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/lizadaly/4542270068/in/photolist-7VojDb-cnWP8U-7gXokN-TUNEQ3-pmVKKM-9Dggzr-pmVKXa-nGUwUy-4tURrx-WgEc5n-d8uQsW-4xkaao-2p8Yhx-36fEa-4xkaty-jdzSh5-8pzJGo-d59qjL-a2vbgP-dWa6PE-dcqZ1a-4AqhmW-XsYFaR-eJXgC1-eDx2gV-8ugfsT-dYxhkw-7BwH9q-9t2bNJ-bwFR5h-fp648E-dXMAFv-7Vi8op-foQKy6-Wcredr-fp62LY-fp62vJ-7UZscQ-ewKWyV-p5HXDT-foQMtZ-fp63xq-dXTgv1-nUn65b-a8zjJ7-srANrh-73BSYZ-foQKKv-gAfpEP-7rBEVS">Liza/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Les données de la géologie et de la paléontologie nous renseignent sur l’existence d’une soixantaine de crises d’extinction des espèces depuis 600 millions d’années environ.</p>
<p>Nous ne savons pas grand-chose sur ce qu’il s’est passé avant cette période, les espèces d’alors étant très peu fossilisables (en l’absence de squelettes externes et internes) et les traces éventuellement laissées ayant disparu. <a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/geochimie/">La géochimie</a> nous apporte cependant de précieux renseignements, grâce au monde des bactéries et des <a href="http://planktonchronicles.org/fr/episode/protiste1-cellules-dans-la-mer/">protistes</a>.</p>
<p>Depuis cette époque, les fossiles retrouvés sont bien documentés et nous permettent une construction plus élaborée de « l’arbre du vivant ». La Terre est datée à 4,6 milliards d’années et l’apparition de la vie sur Terre à <a href="http://www.nature.com/nature/journal/v537/n7621/full/nature19355.html">plus de 3,5 milliards d’années</a>. Celle-ci est apparue au sein de l’<a href="http://www.college-de-france.fr/site/gilles-boeuf/course-2014-01-07-11h00.htm">océan ancestral</a>, soit en milieu côtier chaud et peu profond, soit à plus grande profondeur autour des sources hydrothermales, selon diverses théories.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/189775/original/file-20171011-16660-1rxsu1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/189775/original/file-20171011-16660-1rxsu1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/189775/original/file-20171011-16660-1rxsu1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/189775/original/file-20171011-16660-1rxsu1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/189775/original/file-20171011-16660-1rxsu1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/189775/original/file-20171011-16660-1rxsu1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/189775/original/file-20171011-16660-1rxsu1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des traces de vers, découvertes au Brésil et datant d’environ 550 millions d’années, ont été récemment mises en évidence par des chercheurs de l’Université de Manchester.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.manchester.ac.uk/discover/news/half-a-billion-year-old-fossils-shed-new-light-on-animal-evolution/">Université de Manchester</a></span>
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</figure>
<h2>Cinq crises majeures</h2>
<p>Parmi ces 60 crises, cinq ont été particulièrement bien mises en évidence de par leur ampleur ; et elles ont fait l’objet d’un travail de redéfinition dans un <a href="http://www.nature.com/nature/journal/v471/n7336/full/nature09678.html?foxtrotcallback=true">article publié</a> par la revue scientifique <em>Nature</em> en 2011 : ces crises majeures concernent ainsi l’extinction d’au moins les trois quarts des espèces vivantes, marines et continentales, sur un temps « court ».</p>
<p>Immédiatement, la question surgit : qu’est-ce qu’un temps « court » ? En géologie, il s’agit d’un temps de l’ordre du demi-million d’années. Par comparaison à la situation que nous connaissons aujourd’hui, les échelles de temps se bousculent !</p>
<p>Entre le temps géopolitique de l’humanité et le temps de la Terre, les distances sont vertigineuses. Voilà pourquoi « l’ère anthropocène » ne peut entrer dans l’échelle géologique. C’est en 2000 que l’on a vu apparaître cette notion, proposée par le néerlandais Paul Crutzen (Nobel de chimie en 1995) : à savoir une « ère » durant laquelle le plus puissant facteur de changements serait l’espèce humaine. Crutzen la faisait démarrer à la révolution industrielle, au moment de l’invention de la machine à vapeur. Si l’idée peut paraître séduisante, il semble toutefois plus prudent de la garder comme image.</p>
<p>Les crises d’extinction de la biodiversité ont toujours été multifactorielles et on a fait appel à diverses raisons, pouvant d’ailleurs bien souvent jouer en commun : impact de météorite géante, explosion « proche » de super nova, réchauffement brutal, effondrement des contenus de l’eau et de l’air en oxygène, volcanisme intense et gigantesques émissions de gaz à effets de serre, tremblements de terre et tsunamis violents, rencontres de continents, froid glacial prolongé, obscurcissement de la lumière solaire…</p>
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<h2>La crise actuelle</h2>
<p>Il faut bien prendre en compte ces différentes caractéristiques des grandes crises d’extinction lorsque l’on parle de la « crise actuelle de la biodiversité ». <a href="http://www.wwf.fr/vous_informer/rapport_planete_vivante_2016/">Le rapport détaillé du WWF</a> d’octobre 2016 donnait bien le ton : son indice « planète vivante » indique une « réduction » de 58 % globalement, pour l’ensemble des écosystèmes (marins et continentaux), sur une très courte période de… 42 ans !</p>
<p><a href="http://www.wwf.fr/vous_informer/rapport_planete_vivante_2016/rapport_planete_vivante_2014/indice_planete_vivante/">Cet indice</a> est calculé sur l’effondrement du nombre des individus des populations de vertébrés (plus de 14 000 populations suivies pour 3 700 espèces). Certains écosystèmes sont particulièrement touchés, à l’image des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Eau_douce">milieux dulçaquicoles</a> (-81 % !) ou les grandes plaines d’Argentine.</p>
<p>Il faut souligner que nous parlons de diminutions du nombre des individus, pas d’extinctions. Elles pourraient, bien sûr, survenir à terme, mais cela prend un certain temps. À l’échelle d’une vie humaine, les extinctions sont rares et liées à des espèces endémiques très peu distribuées, sur des îles par exemple.</p>
<p>Les causes de ce phénomène d’érosion rapide de la biodiversité sont bien identifiées : destruction massive des écosystèmes, pollution généralisée – même à des endroits où l’humain n’est pas, à l’image des pôles) –, dissémination anarchique des espèces (la <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/un-elephant-dans-un-jeu-de-quilles-l-homme-dans-la-biodiversite-robert-barbault/9782020820752">« roulette écologique »</a>), surexploitation des espèces (pêche et forêts) et, enfin, ce changement climatique actuel beaucoup trop rapide qui <a href="http://books.openedition.org/cdf/3607">n’arrange pas les choses</a>.</p>
<p>La perte, les dégradations et les morcellements des habitats représentent la raison essentielle. Bien entendu, ces pertes de biodiversité sont très préoccupantes pour les services rendus par les écosystèmes et de nombreux travaux récents insistent sur la structuration des écosystèmes pour mieux résister aux différentes agressions actuelles, déclenchées par les activités humaines.</p>
<p>C’est bien le cercle vicieux dans lequel nous sommes engagés : les écosystèmes sont tous dégradés et donc moins capables de résister. À cause de la pression humaine, en accélération constante, le capital naturel diminue plus vite qu’il ne peut se régénérer. Les activités humaines et l’exploitation des ressources se sont tellement développées – en lien notamment avec la pression démographie – que les conditions écologiques ayant favorisé notre développement et notre croissance commencent aujourd’hui <a href="http://www.wwf.fr/vous_informer/rapport_planete_vivante_2016/">à se dégrader</a>.</p>
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<p>Les travaux du groupe de chercheurs conduits par le <a href="http://science.sciencemag.org/content/347/6223/1259855">climatologue suédois Johan Rockström</a> ont défini des limites planétaires à nos impacts et nous annoncent que sur neuf altérations d’origine humaine qui touchent le système Terre, quatre ont déjà dépassé des seuils « supportables » ; ces derniers concernent les intrants azotés et phosphorés dans la biosphère, le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité.</p>
<p>Et dans un <a href="http://www.pnas.org/cgi/doi/10.1073/pnas.1704949114">article</a> publié en mai 2017, qui a fait couler beaucoup d’encre, nos collègues mexicains et américains rebondissent avec une longue étude très documentée sur l’accélération de la dégradation de la biodiversité. Ils parlent même d’« anéantissement biologique », de « défaunation » aux conséquences catastrophiques, en s’appuyant sur les données de l’Union internationale pour la conservation de la nature <a href="https://www.iucn.org/fr">(IUCN)</a> relatives à 27 600 espèces de vertébrés terrestres : 32 % d’entre elles ont décliné en population et répartition.</p>
<p>Ils se sont tout particulièrement intéressés à 177 espèces de mammifères terrestres, démontrant que 30 % d’entre elles ont perdu 30 % au moins de leur territoire ; plus de 40 % ont perdu au moins 80 % de leur répartition géographique depuis 1900 ! Ils en concluent que la sixième crise d’extinction est en cours et que la réalité dépasse encore les prévisions les plus pessimistes.</p>
<p>Il faut également faire mention d’une toute <a href="http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0185809">récente étude</a>, parue le 18 octobre 2017 dans la revue <em>PLoS One</em>, à propos du déclin des insectes volants ces trente dernières années en Europe.</p>
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<h2>Réduire notre impact</h2>
<p>Comment peut-on comparer la situation actuelle aux crises du passé ? La vraie question pouvant être formulée ainsi : combien de temps faut-il pour revenir à un état plus ou moins proche de l’initial, celui d’avant la crise ?</p>
<p>Les facteurs déclenchants des crises antérieures ont été analysés ; ils ne sont pas en cause dans ce qui se passe aujourd’hui. Ce sont bien les activités humaines qui sont responsables de la situation présente. Après des centaines de millions d’années durant lesquelles les grands facteurs de l’environnement – la température, l’oxygène disponible, la salinité de l’océan, la composition de l’air… – ont été les moteurs de l’évolution du vivant et de ses capacités adaptatives, c’est bien l’humain et ses bouillonnantes activités qui sont devenus la force essentielle !</p>
<p>En estimant les vitesses d’évolution, en tentant de prédire les trajectoires possibles et en planifiant les mécanismes, nous pourrions sans doute fortement réduire notre impact sur les espèces et les écosystèmes et ainsi sérieusement améliorer les coûts économiques et sociaux de nos activités sur la nature.</p>
<p>Aussi, doit-on changer : on parle beaucoup de « résilience », c’est-à-dire la capacité pour un écosystème agressé de retrouver une situation de « maintien de ses qualités » plus ou moins proche du stade d’avant l’agression. Mais n’oublions pas que pour qu’un écosystème puisse être résilient, encore faut-il qu’il n’ait pas disparu !</p>
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<p>Il doit tout d’abord résister à l’agression puis, avant de risquer de totalement disparaître, pourra-t-il peut-être entrer en résilience, ce qui prend un certain temps. Notons aussi que la situation de « basculement des écosystèmes » (qui désigne le basculement vers un état totalement différent de manière irréversible), fréquente au-delà d’un certain seuil de perturbation, demeure difficile à prévoir.</p>
<p>L’état de structuration de nos écosystèmes actuels, marins et continentaux, est-il suffisamment organisé pour résister ? Jusqu’où pouvons-nous accepter les <a href="https://www.nature.com/nature/journal/v486/n7401/full/nature11148.html">dégradations des espèces</a> et des écosystèmes ? De plus, on démontre maintenant qu’une biodiversité abondante et fonctionnelle est génératrice de <a href="https://www.nature.com/articles/ncomms15810">plus de biodiversité</a>. Ceci est très important à prendre en compte.</p>
<p>Il est grand temps de réagir et de considérer comme aussi importante que le changement climatique accéléré la perte de la biodiversité. Nous ne consommons que du biologique et ne coopérons qu’avec du biologique ! Aussi doit-on admettre une fois pour toutes notre indissociable relation à la vie sur la planète et à la biodiversité : chaque fois que nous l’agressons, nous nous auto-agressons (et notre économie trinque).</p>
<p>Pour une espèce qui a choisi de s’appeler <em>sapiens</em>, cela paraît bien stupide ! Méritons durant ce siècle ce terme dont nous nous sommes affublés, nous qui n’avons toujours pas dépassé le stade de l’<em>Homo faber</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/81531/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gilles Bœuf ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Grâce à l’étude des fossiles, l’homme a connaissance d’une soixantaine de crises de la biodiversité. Parmi elles, cinq épisodes particulièrement marqués se distinguent.Gilles Bœuf, Biologiste, océanographe, professeur, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.