tag:theconversation.com,2011:/fr/topics/robotisation-35791/articlesrobotisation – The Conversation2021-03-15T17:16:44Ztag:theconversation.com,2011:article/1559362021-03-15T17:16:44Z2021-03-15T17:16:44ZVoici comment la révolution robotique modifiera les emplois et les entreprises au Canada<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/388370/original/file-20210308-23-m353j3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4985%2C3218&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’avenir du travail automatisé ne signera pas forcément la fin des emplois pour les humains.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>En 2017, je suis rentré au Canada après un séjour en Suède, où j’ai passé un an à travailler sur <a href="https://magazine.cim.org/en/technology/fully-loaded">l’automatisation dans les mines</a>. Peu après mon retour, le <em>New York Times</em> a publié un article intitulé <a href="https://www.nytimes.com/2017/12/27/business/the-robots-are-coming-and-sweden-is-fine.html">« The Robots Are Coming, and Sweden Is Fine »</a>, sur la manière dont la Suède a intégré l’automatisation tout en limitant les coûts humains.</p>
<p>Si les Suédois semblent optimistes quant à leur avenir en compagnie des robots, d’autres sont plus pessimistes. Une étude abondamment citée estime que <a href="https://www.oxfordmartin.ox.ac.uk/downloads/academic/future-of-employment.pdf">47 % des emplois risquent d’être remplacés par des robots et l’intelligence artificielle aux États-Unis</a>.</p>
<p>Que cela nous plaise ou non, l’ère du robot est déjà commencée. Reste à savoir si l’économie canadienne va fleurir ou s’effondrer dans un monde où les robots prennent en charge les tâches que nous ne voulons pas faire nous-mêmes. La réponse pourrait vous surprendre.</p>
<h2>Les robots sont partout</h2>
<p>Les <a href="https://robots.ieee.org/">robots</a> modernes sont le moyen par lequel l’intelligence artificielle (IA) interagit physiquement avec nous et le monde qui nous entoure. Si certains <a href="https://robots.ieee.org/robots/?t=sort">ressemblent à des humains</a>, ce n’est pas le cas pour la plupart d’entre eux qui sont plutôt conçus pour effectuer de manière autonome des tâches complexes.</p>
<p>Les robots ont connu une croissance rapide au cours des dernières décennies. Si, au départ, il s’agissait surtout d’appareils créés pour des applications industrielles précises, ils ont désormais envahi le domaine des articles ménagers. On peut acheter un robot pour <a href="https://www.protegez-vous.ca/electromenagers/aspirateurs-robots/comparez-tous-les-aspirateurs-robots?sortBy=prod.oada.3363aspirateursrobots.name.asc&page=1&configure%5BhitsPerPage%5D=18">passer l’aspirateur</a>, <a href="https://www.muramur.ca/creer/trucs-astuces/robot-tondeuse-1.2622759">tondre la pelouse</a> et <a href="https://spectrum.ieee.org/automaton/robotics/drones/ring-indoor-security-drone">assurer la surveillance de la maison</a>. Les enfants jouent avec des <a href="https://robots.ieee.org/learn/">robots éducatifs</a> à l’école, où ils apprennent à programmer et à construire des robots, ce qui peut les mener à des <a href="https://robotiquefirstquebec.org/frc/">concours internationaux de robotique</a>.</p>
<p>Des robots font également leur apparition dans les hôpitaux. Ils nous aident dans la <a href="https://robotics.utoronto.ca/covid-19-white-paper/">lutte contre la Covid-19</a> et accomplissent d’autres <a href="https://spectrum.ieee.org/automaton/robotics/medical-robots/medical-robots-future-outbreak-response">tâches relatives aux soins de santé</a> de manière plus sûre et efficace qu’on ne le ferait.</p>
<p>Les médias regorgent d’histoires sur les dernières avancées techniques, ainsi que de rumeurs et de spéculations sur les innovations secrètes des grandes entreprises internationales, comme <a href="https://waymo.com/">Waymo</a>, <a href="https://www.tesla.com/fr_CA/autopilot?redirect=no">Tesla</a>, <a href="https://www.macrumors.com/roundup/apple-car/">Apple</a>, <a href="https://group.volvocars.com/company/innovation/autonomous-drive">Volvo</a> et <a href="https://www.getcruise.com/technology">GM</a>.</p>
<p>La NASA, quant à elle, vient de faire atterrir sur Mars le <a href="https://www.nasa.gov/perseverance">rover Perseverance</a>, avec un hélicoptère autonome appelé <a href="https://mars.nasa.gov/technology/helicopter/">Ingenuity</a> fixé à son ventre.</p>
<p>Oh, et il y a aussi les <a href="https://www.youtube.com/watch?v=fn3KWM1kuAw">robots danseurs</a>, bien entendu.</p>
<h2>Les robots dans les coulisses</h2>
<p>Je travaille dans la robotique et la technologie des véhicules autonomes <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007%2F978-3-319-32552-1_59">pour les mines</a> depuis la fin des années 1990. Cette industrie vit de profonds changements, avec des machines entièrement autonomes qui remplacent progressivement les travailleurs dans des conditions obscures, sales et dangereuses.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/385348/original/file-20210219-17-1jic3xc.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/385348/original/file-20210219-17-1jic3xc.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/385348/original/file-20210219-17-1jic3xc.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/385348/original/file-20210219-17-1jic3xc.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/385348/original/file-20210219-17-1jic3xc.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/385348/original/file-20210219-17-1jic3xc.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/385348/original/file-20210219-17-1jic3xc.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/385348/original/file-20210219-17-1jic3xc.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Un chargeur-transporteur souterrain entièrement autonome développé pour le fabricant suédois d’équipements miniers Epiroc AB en partenariat avec l’entreprise canadienne de robotique MacDonald, Dettwiler et Associés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Joshua Marshall</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>Cette révolution robotique se produit également dans les coulisses d’autres industries. Les robots remplissent les <a href="https://amazonrobotics.com/#/">commandes d’Amazon</a>, fabriquent des <a href="https://www.mckinsey.com/business-functions/operations/our-insights/automation-robotics-and-the-factory-of-the-future">objets dans des usines</a>, <a href="https://www.reussir.fr/machinisme/kubota-investit-dans-les-robots-volants-cueilleurs-de-fruits">plantent et cueillent</a> dans les champs et les vergers, aident sur les <a href="https://www.bostondynamics.com/spot/resources/pomerleau">chantiers de construction</a>, et ainsi de suite.</p>
<p>Les robots <a href="https://fanuc.co.jp/en/profile/production/factory1.html">construisent même d’autres robots</a>. Alors, risquons-nous de manquer d’emplois pour les humains ?</p>
<h2>Des robots au Canada</h2>
<p>Nombreux sont ceux qui brossent un <a href="https://www.basicbooks.com/titles/martin-ford/rise-of-the-robots/9780465097531/">tableau sombre de l’avenir</a>, où les robots et l’IA font disparaître tous les « bons emplois ». Bien que je reconnaisse l’importance d’être conscients <a href="https://theconversation.com/the-future-of-work-will-hit-vulnerable-people-the-hardest-131963">d’éventuelles inégalités et d’effets indésirables</a> que pourraient engendrer les nouvelles technologies, je soutiens que les Canadiens ont la capacité de les éviter.</p>
<p>Mais pour cela, <a href="https://ingenuitylabs.queensu.ca/">mes collègues</a> et moi considérons que notre pays a besoin d’élaborer une « stratégie en matière de robotique ».</p>
<p>En 2017, le Canada a lancé la première stratégie nationale en intelligence artificielle au monde. Appelé <a href="https://cifar.ca/fr/ia/">« Stratégie pancanadienne en matière d’IA »</a> et doté d’un budget de 125 millions de dollars, ce programme vise à renforcer le leadership du Canada dans le domaine de l’IA en finançant des instituts, des universités et des hôpitaux pour atteindre des objectifs précis.</p>
<p>Dans sa liste de 2020 des emplois de l’avenir, le Forum économique mondial a classé les ingénieurs en robotique en <a href="http://www3.weforum.org/docs/WEF_Future_of_Jobs_2020.pdf">10eposition</a>, non loin des spécialistes de l’IA et de l’apprentissage machine. Au Canada, je vois un énorme potentiel pour notre industrie robotique, grâce à des entreprises telles que <a href="https://clearpathrobotics.com/">Clearpath Robotics</a>, <a href="https://ottomotors.com/">OTTO Motors</a>, <a href="https://www.kinovarobotics.com/fr">Kinova,</a><a href="https://robotiq.com/fr/">Robotiq</a>et <a href="https://titanmedicalinc.com/">Titan Medical</a>, leaders mondiaux dans la conception et la fabrication de robots destinés à des usages qui s’étendent de la manutention à la chirurgie.</p>
<p>Le Canada pourrait également considérer l’utilisation accrue de robots dans des secteurs importants sur le plan économique, notamment l’exploitation minière, l’agriculture, la production industrielle et le transport.</p>
<p>Pourtant, le Canada est peut-être le <a href="https://www.businesswire.com/news/home/20200608005203/en/ %22How-Nations-Invest-Robotics-Research %22- %E2 %80 %93-report">seul pays du G7 à ne pas disposer d’une stratégie en matière de robotique</a>.</p>
<h2>La révélation robotique</h2>
<p>L’espoir existe. Selon un <a href="https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/201102/dq201102d-fra.htm">rapport de Statistique Canada daté de novembre 2020</a>, les entreprises canadiennes qui emploient des robots ont également embauché davantage de travailleurs humains, contrairement à ce qu’on est porté à croire instinctivement. En fait, elles en ont embauché 15 % de plus !</p>
<p>Cela ne signifie pas pour autant que nous pouvons simplement nous détendre et ne rien faire. L’activité économique accrue que les robots procurent aux entreprises s’accompagne <a href="https://www150.statcan.gc.ca/n1/daily-quotidien/210127/dq210127b-fra.htm">d’une évolution où « les travailleurs passent ainsi généralement moins de temps à effectuer des tâches manuelles routinières au profit de tâches cognitives non routinières.</a> ».</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/385346/original/file-20210219-13-hcqsmp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/385346/original/file-20210219-13-hcqsmp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/385346/original/file-20210219-13-hcqsmp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/385346/original/file-20210219-13-hcqsmp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/385346/original/file-20210219-13-hcqsmp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=480&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/385346/original/file-20210219-13-hcqsmp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/385346/original/file-20210219-13-hcqsmp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/385346/original/file-20210219-13-hcqsmp.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=603&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Des chercheurs en robotique mobile de l’Institut de recherche Ingenuity Labs de l’Université Queen’s.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Heshan Fernando</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>L’éducation ainsi que la recherche et le développement — avec les <a href="https://engineering.queensu.ca/programs/undergraduate/mre/index.html">nouveaux programmes qui formeront la prochaine génération de spécialistes des robots</a> et les <a href="https://ncrn-rcrc.mcgill.ca/">pôles de recherche collaborative</a> — ont un rôle essentiel à jouer. On doit les combiner à une stratégie nationale en matière de robotique et à un système socio-économique qui soutient une main-d’œuvre en transition pour assurer la réussite, le bien-être et le bonheur des Canadiens, aux côtés de leurs amis robots.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/155936/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Joshua A. Marshall reçoit des fonds du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada (CRSNG) dans le cadre de la subvention à la découverte RGPIN-2015-04025. Il reçoit également des fonds du Réseau canadien de robotique (RCRN) du CRSNG et de ses partenaires industriels, dont Clearpath Robotics, dans le cadre de la subvention NETGP 508451-17, du programme de R et D coopérative du CRSNG, General Dynamics Land Systems (Canada), et de R & D pour la défense Canada (RDDC) dans le cadre de la subvention DNDPJ 533392-18, du Conseil national de recherches du Canada (CNRC) dans le cadre de la convention de subvention SC-AI4L-118-1, ainsi que du programme CREATE du CRSNG pour l'établissement de la confiance dans les véhicules autonomes connectés dans le cadre de la subvention 542999-2020.</span></em></p>L’utilisation de robots et de machines autonomes augmente dans tous les secteurs industriels, forçant les gouvernements à mettre en place une stratégie pour la main-d’œuvre.Joshua A. Marshall, Associate Professor of Mechatronics and Robotics Engineering, Queen's University, OntarioLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1535812021-02-14T17:08:11Z2021-02-14T17:08:11ZQuels principes juridiques pour les systèmes d’armes létales autonomes ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/383352/original/file-20210209-19-149i6vv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C0%2C1183%2C673&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/121186423@N04/50744495887/in/photolist-2kj7NHv-BP39hB-EZ5vvA-8XgBHy-Ur3foH-sQcbEn-Cm4Y6C-BP34o8-cBz2WN-6dx5jk-4ggAqq-acQsYj-qYGQAp-bPbLci-EzgjQJ-ETcr1k-E51kaP-F2opLF-5LpzsN-acQtdS-81nC9q-sAD9w-5ds2eg-SLjLx3-9f5wkd-EHyc8-6Mqm6Z-4SHsu-EHyaT-Axz8d1-4wCQ8-7Md2Kg-24x5xkU-5anMwx-byEEu7-81nCb3-5wUMRB-23zPqYa-Vx52HM-4zRaKm-bxTegR-23Kj9Ck-9bQuaF-2gYyPZk-6H5wwY-Qiohaj-abMtfa-7bxtC-85uGQC-9vwN7s">Flickr/Clodius-22</a></span></figcaption></figure><p>L’intelligence artificielle (IA) est intrinsèquement à double usage (civil et militaire), de même que les systèmes informatiques. Une réglementation efficace en la matière devrait faire en sorte que l’IA utilisée par le secteur de la défense soit responsable, équitable, traçable, fiable et gouvernable. Or, malgré l’évidence des risques liés aux SALA (systèmes d’armes létales autonomes), celles-ci ne font à ce jour l’objet d’aucune réglementation internationale ad hoc.</p>
<p>Dans quelle mesure les règles du droit international (tant public que privé) et du droit de l’Union européenne sont-elles adaptées à l’essor de ces technologies ? Le <a href="https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/A-9-2021-0001_FR.html">rapport</a> que le Parlement européen a adopté le mercredi 20 janvier cherche à répondre à cette interrogation.</p>
<h2>Autorité de l’État : souveraineté numérique, résilience stratégique et militaire</h2>
<p>Le rapport observe en filigrane que les États membres doivent agir avec efficacité pour réduire leur dépendance à l’égard des données étrangères et veiller à ce que :</p>
<blockquote>
<p>« la détention, par de puissants groupes privés, des technologies les plus élaborées en matière d’IA n’aboutisse pas à contester l’autorité de la puissance publique et encore moins à lui substituer des entités privées, en particulier lorsque le propriétaire de ces groupes privés est un pays tiers. »</p>
</blockquote>
<p>Or l’écosystème mondial de l’IA est, précisément, dominé par les géants du numérique américains (GAFAM) et chinois (BATX : Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi). Ces entreprises s’engagent <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/intelligence-artificielle-peut-on-se-passer-des-gafam-1138142">avec d’énormes moyens</a> dans la bataille de l’IA, telles des nations souveraines. Elles développent pour cela des <a href="https://www.forbes.fr/technologie/gafam-et-industrie-4-0-la-discrete-strategie-de-conquete/">technologies</a> qu’utilisent volontiers les grandes puissances, engagées dans une « course à l’armement numérique ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1356905808236335105"}"></div></p>
<p>Si la résilience stratégique implique de ne jamais être pris au dépourvu, notamment en temps de crise, l’IA n’est pas une « simple » révolution technologique source de « destruction créatrice », selon <a href="https://www.economie.gouv.fr/facileco/joseph-schumpeter">l’expression de Schumpeter</a>. Appliquée au domaine militaire, elle représente un outil stratégique dans un contexte où les acteurs, s’ils n’en sont pas au stade de la confrontation, ne s’engagent pas encore suffisamment sur le terrain de la coopération.</p>
<p>Concernant les SALA, les principes généraux du droit international humanitaire créent un véritable hiatus souligné par le rapport puisque seuls les êtres humains sont dotés de capacités de jugement. Le Sénat français <a href="https://www.senat.fr/rap/r19-642/r19-6427.html">remarque</a> justement que :</p>
<blockquote>
<p>« les SALA permettraient en effet d’éliminer les barrières psychologiques à l’utilisation de la force létale, ce qui n’est pas le cas pour les drones qui restent pilotés par un être humain (d’où le syndrome post-traumatique parfois observé chez des pilotes de drones). »</p>
</blockquote>
<p>Les principaux États-nations militaires développent des SALA à un rythme rapide car ils ont un intérêt propre à créer les capacités offensives les plus efficaces, indépendamment du cadre juridique. Les États-Unis développent le <a href="https://www.mer-ocean.com/sea-hunter-premier-navire-autonome-pour-chasser-les-sous-marins-ennemis/"><em>Sea Hunter</em></a>, navire autonome transocéanique de 60 mètres, dédié à la lutte anti-sous-marine et capable de naviguer dans les eaux internationales en s’adaptant sans intervention humaine aux règles de navigation en vigueur. La Russie, elle, mise avant tout sur la robotisation. Elle a développé un petit char capable de suivre un soldat et de tirer vers la même cible.</p>
<p>Demain, un État ne pourrait-il pas répondre par une guerre conventionnelle à une cyberattaque ? Il est donc plus que nécessaire d’examiner l’incidence que peut avoir l’IA, en tant que facteur stratégique, sur la politique de sécurité et de défense commune de l’Union européenne.</p>
<h2>Les risques éthiques des systèmes d’armes létales autonomes</h2>
<p>Les principes juridiques de précaution, de distinction, d’intégrité territoriale, de non-intervention et de recours à la force issus du droit de la guerre restent pertinents face à une technologie innovante car le principe de nouveauté ne peut être invoqué en soutien à une quelconque dérogation quant au respect des <a href="https://www.icj-cij.org/fr/affaire/95">normes actuelles</a> du droit international humanitaire.</p>
<p>Or, le droit relatif à l’emploi de la force, tel que consacré par la Charte des Nations unies (abstention du recours à la menace ou à l’emploi de la force dans les relations internationales), et le droit applicable dans les conflits armés reposent notamment sur deux principes cardinaux auxquels les SALA restent soumis :</p>
<ul>
<li><p>La distinction entre combattants et non-combattants (les États ne doivent jamais prendre pour cible des civils, ni en conséquence utiliser des armes qui sont dans l’incapacité de distinguer entre cibles civiles et cibles militaires) ;</p></li>
<li><p>La <a href="https://www.icrc.org/fr/doc/resources/documents/misc/5fzgrl.htm">clause de Martens</a>, selon laquelle les personnes civiles et les combattants restent sous la sauvegarde et sous l’empire des principes du droit des gens, tels qu’ils résultent des usages établis, des principes de l’humanité et des exigences de la conscience publique.</p></li>
</ul>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/383339/original/file-20210209-21-ota5uv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/383339/original/file-20210209-21-ota5uv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/383339/original/file-20210209-21-ota5uv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/383339/original/file-20210209-21-ota5uv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/383339/original/file-20210209-21-ota5uv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/383339/original/file-20210209-21-ota5uv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/383339/original/file-20210209-21-ota5uv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les technologies doivent être utilisées au bénéfice de l’humanité.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/personne-tenant-un-outil-a-main-noir-et-argent-6153343/">Cottonbro/Pexels</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le Parlement européen souhaite donc que les SALA ne soient utilisés que dans des cas précis et selon des procédures d’autorisation fixées à l’avance de façon détaillée dans des textes dont l’État concerné (qu’il soit membre ou non de l’OTAN) assure l’accessibilité au public, ou au moins à son Parlement national.</p>
<p>En 2018, le secrétaire général de l’ONU et le Parlement européen avaient appelé à <a href="https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-8-2018-0341_FR.html">l’interdiction</a> de la mise au point, de la production et de l’utilisation de SALA « avant qu’il ne soit trop tard ».</p>
<p>Pour que les technologies soient centrées sur l’humain, elles doivent être utilisées au bénéfice de l’humanité et du bien commun, et avoir pour but de contribuer au bien-être et à l’intérêt général de leurs citoyens.</p>
<p>De plus, une personne doit avoir la possibilité de corriger, d’interrompre ou de désactiver une technologie fondée sur l’IA en cas de comportement imprévu, d’intervention accidentelle, de cyberattaques et d’ingérence de tiers. Cela implique que toute décision prise par un être humain qui s’appuierait exclusivement sur des données et des recommandations générées par des machines est à proscrire.</p>
<p>Ce principe est à intégrer dès la conception des systèmes d’IA et devrait également s’intégrer via des lignes directrices sur la supervision et la surveillance humaines. C’est ce qui explique la <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-monde-est-a-nous/le-parlement-europeen-legifere-pour-la-premiere-fois-sur-l-intelligence-artificielle_4132967.html">position</a> du Parlement européen :</p>
<blockquote>
<p>« Les systèmes totalement soustraits à un contrôle humain (<em>human off the loop</em>) et à une surveillance humaine doivent être interdits sans aucune exception et en toutes circonstances. »</p>
</blockquote>
<h2>Réglementer pour anticiper les évolutions technologiques</h2>
<p>Le Parlement européen constate que les <a href="https://www.justice-ia.com/files/sites/181/2019/10/EthicsguidelinesfortrustworthyAI-FRpdf.pdf">lignes directrices sur l’éthique</a> du groupe d’experts de haut niveau ne sont pas suffisantes pour garantir que les entreprises agissent loyalement et assurent la protection effective des individus, et que le <a href="https://ec.europa.eu/info/sites/info/files/commission-white-paper-artificial-intelligence-feb2020_fr.pdf">Livre blanc de la Commission européenne sur l’IA</a> ne tient pas compte des aspects militaires de l’utilisation de l’intelligence artificielle.</p>
<p>Suite à <a href="https://undocs.org/fr/A/RES/73/266">l’adoption</a> par l’Assemblée générale de l’ONU de sa résolution « Favoriser le comportement responsable des États dans le cyberespace dans le contexte de la sécurité internationale », deux groupes ont été formés pour guider les pourparlers :</p>
<ul>
<li><p>Le Groupe d’experts gouvernementaux chargés d’examiner les moyens de favoriser le <a href="https://www.un.org/disarmament/fr/informatique-et-telematique/">comportement responsable</a> des États dans le cyberespace dans le contexte de la sécurité internationale (GEG), M. Guilherme de Aguiar Patriota (Brésil),</p></li>
<li><p>Le Groupe de travail à composition non limitée sur les <a href="https://www.un.org/disarmament/open-ended-working-group/">progrès de l’informatique et des télécommunications</a> dans le contexte de la sécurité internationale.</p></li>
</ul>
<p>Le premier rassemble des experts gouvernementaux des Nations unies des hautes parties contractantes (États) à la [Convention sur certaines armes classiques</p>
<p>(CCAC)](https://www.un.org/disarmament/fr/le-desarmement-a-geneve/convention-sur-certaines-armes-classiques/), et le second tous les États membres de l’ONU qui peuvent auditionner des représentants de l’industrie, des ONG et des membres académiques.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1233295771912540160"}"></div></p>
<p>L’UE, dans son ensemble, n’a accepté que récemment de discuter des implications de l’évolution de l’IA et de la numérisation dans le secteur de la défense. Aujourd’hui, le Parlement européen estime que l’Union doit aider les États membres à harmoniser leur stratégie en matière d’IA militaire. Le Parlement appelle également à faire progresser les travaux d’élaboration d’un nouveau cadre normatif mondial vers un instrument juridiquement contraignant axé sur les définitions, les concepts et les caractéristiques des technologies émergentes relevant des SALA. Ces principes sont bien connus des opérateurs d’IA du secteur civil :</p>
<ul>
<li><p>Loyauté, transparence, équité, gouvernabilité précaution ;</p></li>
<li><p>Responsabilité et imputabilité ;</p></li>
<li><p>Obligation de rendre des comptes, explicabilité et traçabilité.</p></li>
</ul>
<p>L’explicabilité vise ici à déterminer si, et dans quelle mesure, l’État, en tant que sujet de droit international et autorité souveraine, peut agir avec l’aide de systèmes d’IA dotés d’une certaine autonomie sans enfreindre les obligations découlant du droit international. Elle permet de vérifier par quel procédé les technologies d’IA à haut risque parviennent à des décisions, notamment en ce qui concerne les fonctions critiques telles que la sélection et l’engagement d’un objectif et le degré d’interaction nécessaire entre l’humain et la machine, y compris la notion de contrôle et de jugement humains. Cela nécessitera une formation appropriée des personnels civil et militaire (professions réglementées, activités liées à l’exercice de l’autorité de l’État, comme l’administration de la justice) afin de leur permettre de déceler avec précision les discriminations et les partis pris dans les ensembles de données et de les éviter.</p>
<p>Sur la responsabilité, le Parlement recommande que l’identité de la personne responsable de la décision de l’IA puisse être établie et retient la responsabilité des États membres, des parties à un conflit et des individus quant aux actions et effets prévisibles, accidentels ou indésirables des systèmes fondés sur l’IA.</p>
<p>Un contrôle <em>ex ante</em>, miroir de l’étude d’impact, permettrait dès la conception et à tout moment, lors des phases de développement, d’essai, de déploiement et d’utilisation de systèmes fondés sur l’IA, d’identifier les risques potentiels, notamment celui de victimes collatérales parmi la population civile, de pertes accidentelles de vies humaines et de dommages aux infrastructures.</p>
<p>Un contrôle <em>ex post</em> soutenu par des systèmes de certification et de surveillance rigoureux, ainsi que par des mécanismes clairs d’audit et des tests de résistance spécifiques visera à faciliter et à assurer le respect de cette conformité. Ces audits devraient être effectués périodiquement par une autorité indépendante qui superviserait les applications d’IA à haut risque utilisées par les pouvoirs publics ou les autorités militaires.</p>
<h2>Réglementation ou prolifération des SALA ?</h2>
<p>L’examen du droit international conventionnel ne contient pas d’interdiction de recourir aux SALA. Si l’on examine le droit international coutumier, on constate que les membres de la communauté internationale sont profondément divisés sur le point de savoir si le non-recours aux SALA constitue l’expression d’une <em>opinio juris</em> (conscience d’être lié par une obligation juridique, conviction que l’on doit adopter, un comportement donné).</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/ryjRGWoZPhQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Robots tueurs : faut-il les interdire ?</span></figcaption>
</figure>
<p>L’apparition, en tant que <em>lex lata</em> (loi qui existe), d’une règle coutumière prohibant spécifiquement l’emploi des SALA se heure aux tensions qui subsistent entre 28 États qui sont en faveur d’un instrument juridiquement contraignant interdisant les armes totalement autonomes (Autriche, Brésil, Chili). En 2018, lors de la <a href="https://www.un.org/disarmament/fr/le-desarmement-a-geneve/convention-sur-certaines-armes-classiques/">réunion</a> annuelle des États parties à la Convention sur certaines armes classiques, une minorité d’États a utilisé les règles résultant du consensus pour bloquer toute progression sur ce terrain. La Corée du Sud, Israël, les États-Unis et la Russie se sont déclarés contre la négociation d’un nouveau traité, alors que la <a href="https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/politique-etrangere-de-la-france/securite-desarmement-et-non-proliferation/desarmement-et-non-proliferation/systemes-d-armes-letales-autonomes-quelle-est-l-action-de-la-france/">France</a> envisage davantage un code de conduite qu’un traité d’interdiction.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1308849154194579456"}"></div></p>
<p>L’Assemblée générale de l’ONU a <a href="https://undocs.org/fr/A/RES/73/266">adopté</a> en décembre 2018 une résolution intitulée « Favoriser le comportement responsable des États dans le cyberespace dans le contexte de la sécurité internationale ». En novembre 2020, elle a adopté <a href="https://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/C.1/75/L.4&referer=/&Lang=F">quinze projets</a> de résolutions, dont deux concurrents, portant sur la sécurisation du cyberespace : l’un américain, appuyé par les pays de l’UE notamment, l’autre russe, qui prévoit la <a href="https://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/C.1/75/L.8/rev.1&referer=/&Lang=F">création</a> d’un autre groupe de travail pour remplacer ceux existant dès 2021. Au nom de l’Union européenne, la représentante de l’Allemagne a expliqué qu’elle <a href="https://www.un.org/press/fr/2020/agdsi3659.doc.htm">s’opposerait</a> au projet de résolution russe qui va à l’encontre de la résolution A/73/27 puisque les travaux sont en <a href="https://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/C.1/75/L.60&Lang=F">cours</a> et non finalisés.</p>
<p>Le prochain cycle de négociations aura lieu en mars prochain.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153581/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Devillier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La réalité a dépassé la science-fiction. Les robots « tueurs » sont dans les rangs de notre armée et de celles d’autres États. Il semble urgent de réglementer l’utilisation de ces engins autonomes.Nathalie Devillier, Professeur de droit, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1274572019-11-26T19:34:54Z2019-11-26T19:34:54ZLa stratégie russe de développement de l’intelligence artificielle<p>Le 1<sup>er</sup> septembre 2017, le président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine énonça lors du discours de rentrée universitaire <a href="https://www.larevuedudigital.com/vladimir-poutine-le-leader-en-intelligence-artificielle-dominera-le-monde/">ces propos sentencieux</a> :</p>
<blockquote>
<p>« L’intelligence artificielle est l’avenir, non seulement pour la Russie, mais pour toute l’humanité. Cela présente des opportunités colossales, mais aussi des menaces difficiles à prévoir aujourd’hui. Quiconque deviendra le leader dans ce domaine deviendra le dirigeant du monde. »</p>
</blockquote>
<p>L’<em>oukaze</em> (loi) fixant le cadre, les objectifs et les moyens du développement de l’intelligence artificielle en Russie a été promulgué près de deux ans plus tard, le 10 octobre 2019. Ce <a href="https://cset.georgetown.edu/wp-content/uploads/Decree-of-the-President-of-the-Russian-Federation-on-the-Development-of-Artificial-Intelligence-in-the-Russian-Federation-.pdf">décret présidentiel</a> s’inscrit dans une volonté politique plus large : garantir la souveraineté technologique de la Fédération de Russie. Une ambition qu’est encore venue illustrer la <a href="http://en.kremlin.ru/events/president/news/62003">participation remarquée de Vladimir Poutine</a> à la conférence sur l’intelligence artificielle tenue le 9 novembre 2019 à Moscou.</p>
<h2>Contextualisation historique de la stratégie informationnelle et cyber russe depuis les années 2000</h2>
<p>La <a href="https://www.itu.int/en/ITU-D/Cybersecurity/Documents/National_Strategies_Repository/Russia_2000.pdf">doctrine de la Fédération de Russie en matière de cyberespace</a> – ou plus exactement de « stratégie informationnelle » – date du 9 septembre 2000. Elle a été <a href="https://rg.ru/2016/12/06/doktrina-infobezobasnost-site-dok.html">révisée à la marge le 5 décembre 2016</a>, restant immuable sur ses aspects principaux : la défense des intérêts nationaux (sur le plan technique mais aussi civilisationnel, moral et spirituel) ; la nécessité d’un secteur informationnel propice à l’émergence de champions nationaux et internationaux ; l’appui d’outils et de services informationnels au développement économique ; l’émergence d’une société informationnelle sûre et fiable.</p>
<p>Ce corpus doctrinal, relativement neutre technologiquement, d’où sa pérennité, fut complété au fil des années par plusieurs textes officiels à l’orientation ostensiblement plus technique, qui fournissent des définitions, des rapports de situation, des objectifs, le cadre législatif et la liste des acteurs financiers impliqués.</p>
<p>Citons par exemple la <a href="http://government.ru/en/docs/8024/">Stratégie de développement de l’industrie des technologies de l’information</a> de la Fédération de Russie pour 2014-2020 et perspectives à l’horizon 2025 ou, plus récemment, la <a href="http://en.kremlin.ru/acts/news/54477">Stratégie pour le développement de la société informationnelle 2017-2030</a>. Certains textes complémentaires peuvent être très ciblés, comme la <a href="https://www.wipo.int/edocs/lexdocs/laws/en/ru/ru126en.pdf">loi fédérale sur l’information, les technologies de l’information et de la protection de l’information n°149-FZ</a> du 27 juillet 2006, laquelle sera modifiée à plusieurs reprises, notamment via la <a href="https://www.lexology.com/library/detail.aspx?g=1b82dd62-4be5-4236-b295-7aab0cf0f90c">loi fédérale n°242-FZ</a> du 21 juillet 2014 (concernant la protection des données des citoyens russes hébergées sur des serveurs situés sur le territoire national), la <a href="https://www.loc.gov/law/foreign-news/article/russia-new-legislation-restricts-anonymity-of-internet-users/">loi fédérale n°276-FZ</a> du 29 juillet 2017 (réglementant l’utilisation et le développement des outils d’anonymisation) et la <a href="https://merlin.obs.coe.int/iris/2019/6/article22.en.html">loi fédérale n°90-FZ</a> du 1<sup>er</sup> mai 2019 (qui porte sur la résilience du réseau Internet en cas de blocage ou de dysfonctionnement majeur du DNS).</p>
<p>Il ne faudrait cependant pas omettre les déclarations du président Poutine, qui donnent le la quant aux futures orientations stratégiques du pays. Ce fut l’objet de son fameux <a href="https://www.frstrategie.org/publications/notes/discours-1er-mars-vladimir-poutine-quels-messages-2018">discours</a> du 1<sup>er</sup> mars 2018, en pleine campagne de réélection, face aux représentants des deux Chambres ainsi qu’aux membres du gouvernement Medvedev. Dans un contexte de grande tension avec ses homologues occidentaux, il confirme la détermination de la Russie à assurer sa sécurité militaire par le développement de diverses armes… mais, aussi, de l’intelligence artificielle, évoquée à deux reprises, signe de son importance. D’où son aboutissement logique avec l’oukaze n°490 du 10 octobre 2019.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/302700/original/file-20191120-542-1h60wc8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/302700/original/file-20191120-542-1h60wc8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/302700/original/file-20191120-542-1h60wc8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=505&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/302700/original/file-20191120-542-1h60wc8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=505&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/302700/original/file-20191120-542-1h60wc8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=505&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/302700/original/file-20191120-542-1h60wc8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/302700/original/file-20191120-542-1h60wc8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/302700/original/file-20191120-542-1h60wc8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=634&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>L’oukaze du 10 octobre 2019</h2>
<p>Ce décret présidentiel de plus de vingt-trois pages est exclusivement focalisé sur l’intelligence artificielle et sur son écosystème, d’où ce titre sans ambiguïté : « Stratégie nationale du développement de l’intelligence artificielle pour la période s’étendant jusqu’à 2030 ».</p>
<p>Si le texte fixe comme horizon l’année 2030, il prévoit un rapport de situation et la finalisation des premiers objectifs pour l’année 2024, notamment dans le registre de la recherche (au travers du dépôt de brevets ou de publications scientifiques mais aussi de solutions pratiques pleinement fonctionnelles). L’article premier relatif aux dispositions générales annonce que la liste des documents cités n’exclut en rien les programmes nationaux où l’intelligence artificielle viendrait à s’appliquer, à tous les échelons du pays.</p>
<p>La définition russe de l’intelligence artificielle donnée à l’article 5 est la suivante :</p>
<blockquote>
<p>« Ensemble de solutions technologiques permettant de simuler des fonctions cognitives humaines (incluant l’auto-apprentissage et la recherche de solutions sans l’appoint d’algorithmes prédéterminés) et d’obtenir des résultats lors de tâches spécifiques comparables aux résultats de l’activité intellectuelle humaine. »</p>
</blockquote>
<p>Si le document prend soin de rappeler le contexte global de course à l’intelligence artificielle (chiffres à l’appui) et de souligner les ressources techniques et humaines de la Fédération de Russie, il rappelle également qu’une absence de coordination et d’implication des différents acteurs nationaux serait préjudiciable pour la place mondiale de la Russie dans ce secteur stratégique. Il est énoncé distinctement que la recherche scientifique spécifique à ce secteur doit être appuyée, que la qualité et l’accessibilité des données doivent être prioritaires, que les produits et services russes doivent bénéficier d’un accès facilité au marché mondial, que l’obtention de matériel informatique puissant est nécessaire et que l’émergence de cadres qualifiés dans ce domaine et d’un éveil de la population active aux possibilités offerte par l’intelligence artificielle doivent être stimulés.</p>
<p>Assez surprenant toutefois est l’objectif de création d’un système complexe de régulation des relations sociales issues du développement et de l’utilisation de l’intelligence artificielle. Il ne s’agit pas de contrôler les relations sociales déjà existantes par l’appoint de l’intelligence artificielle mais de réguler celles qui sont créées algorithmiquement : c’est là une projection peu commune. Autre point qu’il convient de souligner : le soutien au développement d’architectures matérielles basées sur <a href="https://www.zdnet.fr/actualites/qu-est-ce-que-l-ingenierie-neuromorphique-et-pourquoi-elle-declenche-une-revolution-39880479.htm">l’intelligence neuromorphique</a>.</p>
<p>Fait singulier, le télétravail est évoqué comme l’un des moyens d’attirer des spécialistes du secteur en améliorant leur environnement de recherche et de production. Par ailleurs, le recrutement de spécialistes étrangers est recommandé : pour les attirer, de hauts salaires sont préconisés, concomitamment à un cadre de travail agréable. Plus généralement, le texte octroie une place majeure à l’aspect humain, en insistant sur la qualité de la formation en recherche tant fondamentale qu’appliquée – et cela, sur le long terme.</p>
<p>Sont également encouragées la participation des spécialistes russes aux forums mondiaux et la mise à disposition, au profit de leurs collègues extérieurs, de bibliothèques ouvertes. Il est mentionné que des compétitions pourraient stimuler l’émulation et le progrès (on peut songer à cet égard aux <a href="https://ioinformatics.org/">Olympiades de l’informatique</a> et à l’<a href="https://icpc.baylor.edu">International Collegiate Programming Contest (ICPC)</a> où les universités de l’ex-Union soviétique excellent depuis les années 2000).</p>
<p>Enfin, le texte recommande la mise en place de méthodes unifiées et régulièrement mises à jour permettant de développer des bases de données massives de qualité sur les serveurs publics afin d’alimenter les plates-formes d’apprentissage automatique.</p>
<p>Pour résumer, l’oukaze fixe deux dates butoir : 2024 et 2030. La première date est un point d’étape critique vers la seconde qui doit être l’aboutissement des objectifs fixés. La Russie, ayant appris des rigidités et de l’hypocrisie du Gosplan, a décidé de procéder par une approche cadrée mais non rigide, se ménageant une capacité d’évolution au gré des découvertes et aboutissements. D’où l’avertissement inséré explicitement dans le document sur le potentiel ralentissement que provoqueraient des barrières administratives trop rigoureuses – message comminatoire destiné tant au législateur trop bavard qu’aux fonctionnaires trop zélés qui entraveraient la bonne marche d’une intelligence artificielle à la russe.</p>
<h2>Les enjeux militaires liés au développement de l’IA</h2>
<p>Même si le volet militaire n’apparaît pas directement dans l’oukaze du 10 octobre 2019, il faut garder à l’esprit qu’il est bien présent en arrière-plan de chaque direction ou préconisation fixée par ce texte.</p>
<p>La doctrine militaire russe a pleinement intégré l’apport de l’intelligence artificielle dans le contexte global de robotisation du champ de bataille pour le combat terrestre, aérien, naval, sous-marin, cyber puis spatial. En 2018, le chef d’état-major des forces russes <a href="https://forcesoperations.com/la-guerre-du-futur-vue-par-les-russes/">indiquait</a> que la Russie s’engageait vers la robotisation de 33 % de ses matériels et de ses systèmes d’armes. Depuis, plusieurs hauts responsables ont déclaré qu’il fallait impérativement retirer le soldat russe de la zone d’immédiate conflictualité pour le remplacer par des plates-formes armées robotisées télé-opérées et semi-autonomes. La <a href="https://fr.rbth.com/tech/80667-russie-drones-combat-devoiles">« dronification » des matériels militaires terrestres russes</a> est en bonne marche.</p>
<p>De nombreuses plates-formes ont été développées, testées et améliorées, <a href="http://www.spacewar.com/reports/Russia_tested_over_200_new_weapons_in_Syria_MP_999.html">y compris sur le théâtre de guerre syrien</a>. De grands programmes industriels ont été lancés comme celui du char de combat <a href="https://fr.rbth.com/defense/2017/05/16/le-char-russe-t-14-armata-equipe-des-technologies-furtives_763914">T14 Armata</a> qui évolue rapidement vers une plate-forme télé-opérée sans équipage (sans doute la première au monde de ce genre). Ou encore le projet d’aéronef de cinquième génération Su-57 qui, en sa prochaine mouture, est censé embarquer un système intégré algorithmique de complète délégation de vol. On ne compte plus le nombre de plates-formes robotisées de taille intermédiaire créées depuis 2015 et utilisées pour les campagnes de déminage, de détection d’explosifs, d’actions en zone ayant subi une pollution NRBC (nucléaire, radiologique, biologique et chimique), d’acquisition de renseignements, de surveillance automatique de zones sensibles, de logistique, de ravitaillement ou d’appui feu. Les forces terrestres russes seront dotées de plates-formes modulables, robustes, rapidement configurables et adaptables à des missions et à des contextes spécifiques comme le combat en milieu sous-terrain (grottes et tunnels), toujours très coûteux en vies humaines.</p>
<p>Fin 2009, les premiers robots de combat terrestre (UGV) russes dotés de capacités de duplication d’actions de combat ont fait leur apparition, à l’image du <a href="https://www.c4isrnet.com/unmanned/2019/03/04/russias-new-robot-is-a-combat-platform-with-drone-scouts/">robot Marker</a>, capable de suivre automatiquement un combattant humain superviseur et de reproduire fidèlement ses tirs lorsque celui-ci ouvre le feu sur une cible. Le développement d’UGV armés « dupliquants » transforme en profondeur les mécanismes du combat terrestre et constitue un important multiplicateur de puissance sur le théâtre des opérations.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/HfYuDHphx1M?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Présentation du robot Marker, publiée par la Fondation russe pour les projets de recherche avancés, février 2019.</span></figcaption>
</figure>
<p>Concrètement, le robot doit intervenir partout où il peut économiser le sang russe. La doctrine d’économie du sang est aussi liée à l’économie financière engendrée par le remplacement d’équipages humains par des systèmes automatisés produits en grande série. Ce choix stratégique de dronification des systèmes est d’ailleurs totalement partagé par les concurrents <a href="https://www.forbes.com/sites/sebastienroblin/2019/09/30/dont-just-call-them-drones-a-laypersons-guide-to-military-unmanned-systems-on-air-land-and-sea/#b068fd72b005">chinois et américain</a>.</p>
<p>Quel que soit le milieu de confrontation (terre, air, mer, cyber), nous assistons ainsi à une course à l’autonomisation des systèmes d’armes impliquant les trois acteurs principaux – Russie, Chine, États-Unis. Cette course à l’armement semi-autonome s’appuie nécessairement sur les progrès technologiques et scientifiques réalisés en apprentissage automatique, en robotique, en optimisation ou en contrôle optimal. Les besoins en expertise dans ces champs de recherche motivent pleinement les mesures d’incitation au recrutement d’experts internationaux en IA et le développement de laboratoires et de structures de formation de haut niveau en IA.</p>
<p>Comme elle a su le faire pour la conquête spatiale au milieu du XX<sup>e</sup> siècle, la Russie s’est mise en ordre de marche pour la conquête de l’intelligence artificielle. Méthodiquement, sereinement, efficacement, elle installe ce puissant vecteur de puissance dans l’ensemble de ses structures militaro-industrielles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/127457/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le décret président adopté le 9 octobre 2019 fixe les objectifs de la Russie en matière d'intelligence artificielle. Un programme d'une grande ambition, notamment dans le domaine militaire.Thierry Berthier, Maitre de conférences en mathématiques, cybersécurité et cyberdéfense, chaire de cyberdéfense Saint-Cyr, Université de LimogesYannick Harrel, Consultant, expert en cyberstratégie et géonomie, chercheur, Université de Petrosani, Université PetrosaniLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1261422019-11-07T08:12:26Z2019-11-07T08:12:26ZEt si le robot était l’avenir de l’homme ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/299480/original/file-20191030-17878-7yov4n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=14%2C83%2C3244%2C2360&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La mise en place d'un nouveau robot dans l'entreprise CFT industrie a permis trois embauches.</span> <span class="attribution"><span class="source">CFT Industrie (DR).</span></span></figcaption></figure><p><em><strong>La robotisation fait peur, tant elle est synonyme de suppression d’emplois dans l’inconscient collectif. Pourtant, les cas où la robotisation maintient, voire accroît l’emploi se multiplient. Parmi ceux-ci, le cas d’une TPE industrielle d’une dizaine de personnes frappe les esprits.</strong></em></p>
<h2>Une entrepreneure venue d’ailleurs</h2>
<p>En 2011, Élisabeth Klein devient directrice de CFT industrie, PME de huit personnes spécialisée dans le cintrage et l’assemblage de fils, tubes et tôles. Cette nomination très improbable est le point de départ d’une transformation d’autant plus spectaculaire qu’elle semble se dérouler le plus naturellement du monde.</p>
<p>Bien qu’elle soit sur un marché de niche ignoré par les grands groupes industriels, l’entreprise a alors de plus en plus de mal à être rentable. Lorsqu’elle est mise en cessation de paiement par son PDG, les regards se tournent vers Élisabeth Klein, ancienne comptable qui venait de démissionner du comité de direction pour divergence de vues. Pour trouver une solution de pérennisation de la société, l’administrateur contacte celle qui connaît le mieux les réalités de l’entreprise, ses collaborateurs, ses clients et qui croit à son avenir. Il lui propose de reprendre la société pour 1 euro symbolique, mais elle lui dit que l’entreprise vaut plus et approche un (petit) groupe industriel, SFAM, qui conclut très vite l’achat avec l’appui de l’administrateur judiciaire.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/299482/original/file-20191030-17878-13lek2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/299482/original/file-20191030-17878-13lek2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=817&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/299482/original/file-20191030-17878-13lek2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=817&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/299482/original/file-20191030-17878-13lek2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=817&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/299482/original/file-20191030-17878-13lek2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1027&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/299482/original/file-20191030-17878-13lek2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1027&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/299482/original/file-20191030-17878-13lek2l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1027&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Élisabeth Klein/CFT Industrie (DR).</span>
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<p>La voici directrice de CFT industrie, alors que rien ne l’y prédestinait : magistrate de formation, elle avait accepté de remplacer la comptable partie en congé maternité, puis était restée en relation avec l’entreprise pour superviser les comptes. Aujourd’hui encore, elle mène en parallèle une activité de juge des enfants car elle tient à son rôle de magistrate.</p>
<h2>Préparer l’achat d’un robot</h2>
<p>Elle réduit les dettes et contracte deux gros marchés de fournitures de paniers métalliques, pour des motoculteurs et pour des appareils médicaux. Toutefois, si l’entreprise garde la technique de soudage à la main, les marchés ne seront pas rentables, et il faut acquérir un robot de soudure. Or, un tel appareil coûte très cher, plus de 160 000 euros, et risque d’inquiéter le personnel. N’étant ni ingénieure ni manager, elle souhaite se faire aider et se tourne vers le Centre technique des industries mécaniques (CETIM), qui propose un audit, une subvention de 10 % de l’investissement et un accompagnement. L’intervenant lui fait aussi comprendre qu’il faut transformer le management et développer les talents.</p>
<p>Pour elle, les choses sont claires : il faut que ce soient les soudeurs qui établissent un cahier des charges et acquièrent le robot. Ils font effectivement les démarches avec l’aide de l’intervenant du CETIM, et leur implication facilite grandement l’intégration du robot.</p>
<p>Elle s’attache aussi à développer la curiosité (un maître mot pour elle) de tout le personnel. Des visites d’autres entreprises sont organisées chaque mois sur le temps de travail. Elles ne sont pas obligatoires, mais tous jouent le jeu. Certains vont même voir des entreprises le soir ou pendant leurs congés, et s’informent sur l’existence de tel robot ou de tel dispositif.</p>
<p>Autre exemple de ce nouvel état d’esprit : pendant un séminaire annuel du groupe SFAM, un travail par équipes de quatre est organisé sur 12 thèmes. Les résultats sont présentés dans une petite place de marché : chaque équipe présente son thème, puis rend visite aux onze autres stands.</p>
<p>Pour accompagner cette montée en compétence, l’entreprise investit massivement dans la formation, et valorise la polyvalence. Le personnel se prend au jeu de la modernisation et de la numérisation.</p>
<p>L’introduction du robot entraîne un grand progrès de productivité sans licenciement, mais au contraire trois embauches.</p>
<h2>Vers un management très participatif</h2>
<p>L’intervenant fait évoluer le management de l’entreprise vers un mode participatif, en montrant aux uns et aux autres comment faire.</p>
<blockquote>
<p>« J’ai appris à dire “Je ne sais pas” à un collaborateur. Il y a 15 ans, j’aurais répondu : “je vais réfléchir et je reviens vers toi”, puis j’aurais cherché une solution. Aujourd’hui, je lui dis : “c’est toi le spécialiste, qu’est-ce que tu ferais ?” C’est d’ailleurs une chance que je ne sois ni ingénieure ni financière, car cela me donne l’occasion de faire appel aux autres. »</p>
</blockquote>
<p>Elle se renomme codirectrice de CFT Industrie, pour signifier un mode d’organisation plus collectif et non pyramidal. La délégation aux opérateurs selon le principe « c’est celui qui fait qui sait » facilite la mise en place de nouveaux processus : <em>lean management</em>, gestion de production et maintenance assistée par ordinateur, etc.</p>
<p>Les salaires sont transparents, les commerciaux étant même mieux payés que la codirectrice, et la prime d’intéressement aux résultats est la même pour tous.</p>
<h2>Le bonheur au travail</h2>
<p>Le bien-être du personnel est une priorité. Les conditions de travail et la sécurité font l’objet d’une grande attention. L’entreprise est d’ailleurs lauréate en 2017 des trophées de la prévention des risques professionnels organisés par la Caisse d’assurance retraite et de santé au travail de la région Centre – Val de Loire.</p>
<p>Un lieu de repos est aménagé dans l’enceinte de l’entreprise avec trois chambres, une salle de bain et une petite cuisine, ce qui permet aux salariés de faire une pause quand ils en ressentent le besoin, voire même de dormir sur place le soir, car certains habitent relativement loin. Ce local facilite aussi l’accueil de stagiaires.</p>
<h2>Valoriser le personnel vis-à-vis de l’extérieur</h2>
<p>Élisabeth Klein est convaincue que, pour impliquer les salariés dans l’entreprise, il faut leur offrir la possibilité de se valoriser vis-à-vis de l’extérieur. Plusieurs initiatives vont dans ce sens.</p>
<p>L’entreprise invite ses clients et ses prospects, lors d’une journée de <em>fablab</em>, à venir dans l’usine rencontrer le personnel, utiliser le matériel et réaliser gratuitement leur pièce.</p>
<p>Elle participe à l’opération de l’académie de Versailles AdopteUneClasse.com. Pendant un an, elle parraine une classe d’un lycée technique de Rambouillet, avec des interventions dans le lycée et des visites de l’entreprise, ou en apportant une aide aux élèves pour la préparation du BTS.</p>
<p>À l’occasion d’un arbre de Noël, les familles ont été invitées à suivre la fabrication d’une corbeille de fruits en fils métalliques. Chacune passait de poste en poste avec son fil, qui était cintré, puis soudé, etc. La visite se terminait par l’opération de peinture. Les salariés ont été fiers de montrer à leur famille ce qu’ils savaient faire.</p>
<p>De nombreux échanges sont organisés entre les trois entreprises sœurs du groupe SFAM. Elles se préparent pour 2025 avec des thèmes comme 100 % compétents et épanouis ensemble, ou 100 % robotisés et connectés. Une lettre électronique diffuse en interne des reportages sur les réalisations des uns et des autres et sur des visites d’entreprises.</p>
<h2>Plaisir et efficacité</h2>
<p>Tout cela peut paraître simple, mais les projets qu’anime Élisabeth Klein vont au rebours d’habitudes selon lesquelles l’industrie doit être menée « à la dure » et de façon hiérarchique. Comme elle en témoigne :</p>
<blockquote>
<p>« On m’avait appris que pour faire bien fonctionner une entreprise, il fallait être le plus factuel possible et se méfier des émotions. Je pense que c’est une erreur. Il y a toujours de l’affectif dans une entreprise, même s’il ne faut pas que cela prenne une place démesurée ».</p>
</blockquote>
<p>Les entreprenant·e·s n’ont pas les yeux rivés sur le seul chiffre du profit, et savent miser sur la relation et la confiance. C’est cela qui pourrait en faire les leaders de l’industrie de demain.</p>
<hr>
<p><em>Pour en savoir plus sur CFT industrie : <a href="https://www.ecole.org/fr/seance/1319-l-integration-d-un-robot-declenche-la-transformation-technologique-et-organisationnelle-d-une-tpe">« L’intégration d’un robot déclenche la transformation technologique et organisationnelle d’une TPE »</a>. Voir aussi la publication <a href="https://www.la-fabrique.fr/fr/publication/organisation-et-competences-dans-lusine-du-futur/">« Organisation et compétences dans l’usine du futur vers un design du travail »</a>.</em></p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/_uWL-_d-Mxo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/126142/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<h4 class="border">Disclosure</h4><p class="fine-print"><em><span>Michel Berry est fondateur et animateur du Jardin des entreprenants</span></em></p>La robotisation est synonyme de suppression d’emploi dans l’inconscient collectif. Pourtant, elle peut avoir l’effet inverse et être facteur de vivre ensemble, comme le montre le cas de CFT industrie.Michel Berry, Fondateur de l'école de Paris du Management, Mines ParisLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1253562019-10-16T14:48:14Z2019-10-16T14:48:14ZLe marché du travail change. Voici comment les politiciens peuvent aider les employés à rester dans le coup<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/297258/original/file-20191015-98640-rsem9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le chef libéral Justin Trudeau assiste à une démonstration d'un moteur de voiture électrique alors qu'il fait un arrêt de campagne chez un concessionnaire de véhicules électriques à Trois-Rivières, au Québec, le 13 septembre. Au fur et à mesure que l'industrie automobile évoluera vers la voiture électrique, de nouvelles compétences seront nécessaires pour les travailleurs. </span> <span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Sean Kilpatrick</span></span></figcaption></figure><p>Si <a href="https://www.cbc.ca/news/business/jobs-economy-election-1.5298115">l'économie</a> est un enjeu clé de cette élection, une question centrale à laquelle les partis doivent s'attaquer de toute urgence est celle de l'employabilité à long terme des travailleurs. </p>
<p>Au-delà de promesses électorales plus médiatisées comme <a href="https://www.ledevoir.com/politique/canada/564630/le-npd-devoile-ses-chiffres-et-ses-deficits">la proposition du NPD de hausser le salaire minimum à 15 dollars de l'heure</a> et le plan du Parti vert <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1251849/parti-vert-proteger-travailleur-combustible-fossile-energie-may-emploi">visant à former des travailleurs du secteur des combustibles fossiles dans celui des énergies renouvelables</a>, il faut qu'Ottawa devienne proactif afin de s'assurer que tous auront les compétences nécessaires.</p>
<p>Les menaces qui pèsent sur les secteurs traditionnels et les emplois abondent. Des perturbations majeures sont prévues <a href="https://www.cbc.ca/news/politics/green-party-robot-tax-platform-1.5302236">en raison de l'automatisation</a> et <a href="https://www.weforum.org/about/jobs-and-the-fourth-industrial-revolution">de l'intelligence artificielle. De nombreux emplois sont menacés et d'autres remodelés radicalement</a>. Ce processus fait partie de la <a href="https://www.weforum.org/about/the-fourth-industrial-revolution-by-klaus-schwab">quatrième révolution industrielle</a>. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lia-pour-le-meilleur-sans-le-pire-107552">L’IA pour le meilleur, sans le pire</a>
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<p>Dans ma recherche <a href="https://www.goodreads.com/book/show/46365554-an-overview-of-training-and-development?from_search=true">sur la formation en milieu de travail</a> et pour la rédaction d'un livre sur les répercussions de la quatrième révolution industrielle sur les carrières, j'ai identifié trois manières qui pourraient améliorer l'employabilité à long terme des travailleurs actuels. </p>
<h2>Aider les gens à maintenir les compétences nécessaires</h2>
<p>Il faut passer de l'urgence à la prévention dans nos politiques sur l'emploi et devenir plus proactif afin d'aider les personnes à se maintenir au travail ou à développer les compétences dont elles ont besoin pour rester aptes au travail. </p>
<p>Lorsqu'un employeur important cesse ses activités (comme GM qui ferme son usine d'Oshawa), les gouvernements provincial et fédéral disent souvent qu'ils vont <a href="https://globalnews.ca/news/4762851/general-motors-oshawa-jobs/">aider les travailleurs à se recycler pour trouver un nouvel emploi</a>.</p>
<p>Mais le cas de GM reflète un problème plus grave : au fur et à mesure que <a href="https://www.detroitnews.com/story/business/autos/2019/09/05/shift-electric-vehicles-radically-change-auto-factories/2208961001/">l'industrie automobile passera des voitures à essences aux voitures électriques</a>, de nouvelles compétences seront nécessaires. </p>
<p>Une approche fondée sur la prévention permettrait de voir venir de tels changements. Elle viserait à aider les employeurs et les travailleurs à se préparer à la transition pendant que ces derniers ont encore un emploi - de sorte que les employeurs pourraient les considérer pour des emplois fondamentalement différents. </p>
<p>Un rapport sur la façon dont les ministères fédéraux doivent se préparer a révélé que les exigences des employeurs en matière de compétences <a href="https://www.ctvnews.ca/politics/behind-the-scenes-work-on-skills-policy-detailed-in-election-tinged-documents-1.4526130">vont changer de plus en plus fréquemment au cours des prochaines années</a>. </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/296523/original/file-20191010-188829-1urla1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/296523/original/file-20191010-188829-1urla1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/296523/original/file-20191010-188829-1urla1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/296523/original/file-20191010-188829-1urla1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/296523/original/file-20191010-188829-1urla1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/296523/original/file-20191010-188829-1urla1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/296523/original/file-20191010-188829-1urla1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le ministre fédéral des Finances, Bill Morneau, s'adresse au Club économique du Canada au sujet du budget fédéral à Calgary, en Alberta, en mars 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Jeff McIntosh</span></span>
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</figure>
<p>Le <a href="https://www.budget.gc.ca/2019/docs/themes/good-jobs-de-bons-emplois-fr.html">projet d'Allocation canadienne pour la formation</a>
présenté <a href="https://www.journaldemontreal.com/2019/03/19/budget-federal-17-milliard--pour-former-les-travailleurs">dans le budget libéral de 2019 </a> suggère un changement d'orientation. Il accorde aux travailleurs un crédit d'impôt pour la moitié des coûts de formation et l'assurance-emploi pour le temps nécessaire à la formation. </p>
<p>Mais avec un crédit d'impôt à vie de 5 000 dollars et des cours de formation technique de plus de 2 600 dollars, le crédit d'impôt est insuffisant pour couvrir les coûts réels de certains secteurs d'activité, en particulier ceux axés sur la technologie. </p>
<p>S'attendre à ce que les travailleurs ayant une famille interrompent leur carrière et vivent de l'assurance-emploi n'est peut-être pas une option réaliste pour certains. </p>
<h2>Élargir les avantages de la formation</h2>
<p>La politique fédérale devrait encourager les employeurs à offrir plus de formation à un plus grand nombre d'employés, et pas seulement aux cadres intermédiaires et supérieurs. </p>
<p>Une manière d'éviter que des compétences deviennent obsolètes est la formation offerte par l'employeur. Toutefois, les données indiquent que <a href="https://www.conferenceboard.ca/e-library/abstract.aspx?did=9398&AspxAutoDetectCookieSupport=1">les investissements des employeurs canadiens dans la formation ne suivent pas la cadence</a>, selon le Conference Board du Canada. </p>
<p>Les dépenses sont passées d'une moyenne de 688 dollars par employé en 2010 à 889 dollars en 2017, mais une fois ajustées pour tenir compte de l'inflation, l'augmentation n'est que de 109 dollars par employé. Pire, après ajustement pour tenir compte des différences de devises, ce montant représente un peu plus de la moitié (52,5 pour cent) <a href="https://www.td.org/research-reports/2017-state-of-the-industry">de ce que les États-Unis dépensent par employé (1 694 dollars canadiens)</a>.</p>
<p>La même étude du Conference Board indique également que l'augmentation des dépenses n'a profité qu'aux cadres supérieurs et intermédiaires, qui ont reçu plus d'heures de formation en 2017 qu'en 2010. En revanche, les superviseurs, les professionnels, les gens de métier et les travailleurs non techniques - emplois moyennement et hautement qualifiés - ont tous vu leurs heures de formation diminuer. </p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/296434/original/file-20191010-188819-1smxjh3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/296434/original/file-20191010-188819-1smxjh3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=496&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/296434/original/file-20191010-188819-1smxjh3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=496&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/296434/original/file-20191010-188819-1smxjh3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=496&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/296434/original/file-20191010-188819-1smxjh3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=623&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/296434/original/file-20191010-188819-1smxjh3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=623&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/296434/original/file-20191010-188819-1smxjh3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=623&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Andrew Cash, candidat fédéral néo-démocrate dans la circonscription de Davenport, à Toronto, et titulaire entre 2011 et 2015, a cofondé le Urban Worker Project pour faire pression en faveur de changements législatifs afin d'offrir une meilleure protection aux travailleurs contractuels ou sous-traités.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://creativecommons.org/licenses/by/2.0/legalcode">(Joe Cressy/Flickr)</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cela ne concerne même pas la formation des travailleurs pigistes ou contractuels, qui <a href="https://www.ourcommons.ca/Content/Committee/421/HUMA/Reports/RP10553151/humarp19/humarp19-e.pdf">ne sont pas techniquement des employés</a>, mais qui ont quand même besoin de maintenir leurs compétences à jour afin de fournir leurs services. </p>
<p>Bien que certains <a href="https://www.thestar.com/business/2014/01/21/skills_shortage_top_concern_employers_say.html">employeurs s'inquiètent d'une pénurie d’employés ayant les compétences requises</a>, il ne semble pas qu'ils fassent leur part.</p>
<p>Une politique sur le marché du travail devrait porter sur le nombre d'heures de formation offerte par les employeurs, ainsi que sur la façon dont ces derniers, ainsi que les associations professionnelles ou les gouvernements, la reconnaissent et l'offrent de manière équitable. </p>
<p>Une telle politique devrait également faire la distinction entre la formation sur la conformité que l'employeur doit fournir obligatoirement et celle qui améliore les capacités des travailleurs. Idéalement, le gouvernement devrait également offrir des incitatifs aux organisations afin qu'elles offrent une formation destinée aux clients et fournisseurs. </p>
<p>L'actuelle Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'œuvre du Québec - anciennement appelée <a href="http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/ShowDoc/cs/D-7.1">Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'œuvre</a> - a été adoptée pour répondre au faible taux de participation des employés à la formation. La loi exige maintenant que les employeurs dont la masse salariale est supérieure à 2 millions de dollars investissent au moins 1 pour cent de la masse salariale totale dans la formation. Des études suggèrent que, bien qu'imparfaite, <a href="http://en.copian.ca/library/research/ccl/quebec/quebec.pdf" title=" ">la loi a augmenté le nombre de personnes participant à la formation</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/296553/original/file-20191010-188802-1ia9tid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/296553/original/file-20191010-188802-1ia9tid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=395&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/296553/original/file-20191010-188802-1ia9tid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=395&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/296553/original/file-20191010-188802-1ia9tid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=395&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/296553/original/file-20191010-188802-1ia9tid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=496&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/296553/original/file-20191010-188802-1ia9tid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=496&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/296553/original/file-20191010-188802-1ia9tid.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=496&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le ministre fédéral de l'Infrastructure et des Collectivités, François-Philippe Champagne, en compagnie de la ministre de la Justice du Québec, Sonia Lebel, et du ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale de la province, Jean Boulet, lors d'une annonce de formation professionnelle à Montréal en juin 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Paul Chiasson</span></span>
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</figure>
<h2>Offrir des incitatifs à la formation</h2>
<p>Le gouvernement fédéral devrait également offrir des incitatifs aux travailleurs afin qu'ils participent à de la formation, par exemple sous forme de crédits d'impôt. </p>
<p>Les employeurs ont certainement la responsabilité de s'assurer que leurs travailleurs possèdent les compétences nécessaires. Toutefois, 64,5 pour cent des 802 travailleurs canadiens choisis au hasard qui ont participé à l'Étude sur l'apprentissage informel du Conference Board en 2018 ont déclaré que <a href="https://www.conferenceboard.ca/e-Library/abstract.aspx?did=9861">la responsabilité de l'apprentissage continu est partagée entre travailleurs et employeurs</a>. Les travailleurs représentaient un échantillon représentatif des industries canadiennes. </p>
<p>Mais les travailleurs semblent avoir un engagement limité à l'égard de la formation continue. Dans la même étude du Conference Board, 17,7 pour cent des travailleurs ont investi moins de 100 dollars par année dans leur formation continue et 23,8 pour cent ont dépensé entre 101 dollars et 250 dollars annuellement. De plus, 41,5 pour cent des travailleurs consacrent moins d'une heure par semaine à de nouveaux apprentissages. Ce n'est pas entièrement de leur faute. Certains employeurs découragent activement la formation en milieu de travail.</p>
<p>La politique devrait prévoir des incitations à participer à la fois à des formations formelles et à de l'auto-apprentissage, ainsi qu'offrir des mesures de soutien. </p>
<p>La politique fédérale devrait également tenir compte de l'éventail croissant d'options de formation offertes aux travailleurs, comme les <a href="https://www.forbes.com/sites/petergreene/2019/02/16/education-micro-credentials-101-why-do-we-need-badges/#3004a7102419">programmes courts</a>, les écoles de codage, <a href="http://mooc.org/">les cours en ligne ouverts (MOOC)</a>, les programmes de certificat et les certifications volontaires. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-apprendre-a-coder-109206">Pourquoi apprendre à coder ?</a>
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<p>Le gouvernement pourrait aider à dissiper la confusion et exiger une définition précise des programmes. C'est important parce que l'obtention des titres de compétences peut offrir une voie d'accès à des emplois plus rentables et plus rapidement que de nombreux programmes traditionnels. Mais pour ce faire, il faut que tous sachent ce que signifie tel ou tel titre de compétences.</p>
<p>Bien que les politiques publiques ne puissent empêcher l'impact de l'automatisation et de l'intelligence artificielle, elles pourraient du moins définir comment les changements vont affecter les employeurs et les employés de la même façon.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125356/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Saul Carliner reçoit des fonds de Entente Canada Québec Conseil canadien sur l'apprentissage - Adhésion au CRSH : Association for Talent Development ; de l'Institute for Performance and Learning ; de l'Academy of Human Resource Development ; du Canadian Network for Innovation in Education ; de la Society for Technical Communication. Il a agi à titre de conseiller pour les deux études du Conference Board mentionnées dans l'article, il travaille comme directeur de recherche pour Lakewood Media (en vertu d'un contrat de recherche avec son université) ; ancien président de Ometz, une agence des services sociaux basée à Montréal qui fournit des services de placement.</span></em></p>L'auteur a identifié trois façons par lesquelles les décideurs canadiens pourraient améliorer l'employabilité à long terme des travailleurs et atténuer les effets de l'automatisation et de l'IA.Saul Carliner, Professor of Education, Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1142692019-04-04T18:07:31Z2019-04-04T18:07:31ZL'intelligence artificielle dans nos vies, au travail: s'adapter ou périr?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/267628/original/file-20190404-123419-10vlvqy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Face à l'intelligence artificielle, les humains deviendront-ils comme ces dinosaures, qui n'ont su s'adapter aux nouvelles réalités terriennes ?</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>À l’ère de la quatrième révolution industrielle, entreprises et travailleurs courent le même risque d’extinction. Pour y faire face, ils doivent faire preuve d’initiative et savoir s’adapter.</p>
<p>À la suite de <a href="https://theconversation.com/vaincre-le-cyberharcelement-en-cinq-etapes-93446">mes recherches</a> sur le passage de l’état de témoin passif à celui d’agent de changement, j’avance qu'une formation permettant de développer nos connaissances et notre savoir-faire est nécessaire à l’adaptation à l’âge de l’intelligence artificielle (IA). </p>
<p>Mais elle ne suffira pas. Un milieu empathique et empreint de soutien ainsi qu’un apprentissage de soi sont également cruciaux.</p>
<h2>La révolution de l’IA est là</h2>
<p><a href="https://www.youtube.com/watch?v=2WiPx6thH2E">La révolution de l’IA</a> est amorcée. <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ceFFLOBoews">La technologie évolue à une vitesse remarquable</a>. La question n’est plus de savoir si l’on s’en sert ou non, mais plutôt comment mieux collaborer avec elle.</p>
<p>Les technologies ambiantes, telles que <a href="https://www.apple.com/fr/siri/">Siri</a>, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Hnzy9Wh1TWk">Alexa</a> ou <a href="https://www.microsoft.com/fr-ca/windows/cortana">Cortana</a>, s’intègrent sans heurt dans nos interactions. Et ce n’est qu’un début.</p>
<p>L’IA émotionnelle apprend aux robots à éprouver de l’empathie. Les articles sur <a href="https://ai.google/stories/">Google AI </a> révèlent la manière dont l’IA aide les gens à résoudre divers problèmes. <a href="https://www.lebigdata.fr/ia-2019">Les experts s’empressent de prédire</a> comment nous vivrons avec l’IA dans un avenir rapproché, <a href="https://theconversation.com/comment-lia-va-transformer-le-systeme-de-sante-109496">comment il interagira dans le domaine de la santé.</a> </p>
<p>On observe à Montréal une convergence de l’expertise en matière d’IA. Ainsi, le Centre hospitalier de l’Université de Montréal a fondé <a href="https://eiaschum.ca/en/">l’École de l’intelligence artificielle en santé</a>. Quant à <a href="https://mila.quebec/">Mila, l’Institut québécois d’intelligence artificielle</a> mené par <a href="https://ici.radio-canada.ca/tele/tout-le-monde-en-parle/site/segments/entrevue/111975/yoshua-bengio-recherche-intelligence-artificielle-prix-turing-informatique?fbclid=IwAR2VnM0XuFVtTdR6VuwgbXvHNf5J5e55t4qMv0kTacmAcKlYOCMvRuQT6tY">Yoshua Bengio </a>– plus grand spécialiste mondial de l’apprentissage machine et lauréat du prix Turing –, il accélérera le développement de l’IA au Québec.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/267625/original/file-20190404-123434-plth7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/267625/original/file-20190404-123434-plth7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/267625/original/file-20190404-123434-plth7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/267625/original/file-20190404-123434-plth7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=387&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/267625/original/file-20190404-123434-plth7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/267625/original/file-20190404-123434-plth7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/267625/original/file-20190404-123434-plth7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=487&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le professeur de sciences informatiques, Yoshua Bengio, lauréat du prestigieux prix du prix Turing, chez lui à Montréal.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Graham Hughes</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En France, le gouvernement veut faire du pays « <a href="https://www.frenchweb.fr/insiders-bruno-le-maire-veut-faire-de-la-france-le-champion-europeen-des-centres-de-donnees/348062">la première terre d’accueil des centres de données en Europe</a> », et les intervenants de l’<a href="https://www.aifrancesummit.fr">AI France Summit</a> discutent des « potentialités de l’écosystème France en matière d’intelligence artificielle ». L’<a href="https://www.actuia.com/agenda/">Agenda de l’intelligence artificielle</a> prévoit par ailleurs nombre d’événements.</p>
<h2>Une tâche qui dépasse l’humain</h2>
<p>Les technologies de rupture progressent, la démographie évolue, le pouvoir des consommateurs et l’économie à la demande augmentent, les marchés de talents mondiaux sont en plein essor. L’avenir du travail s’en trouve façonné <a href="https://www.elementai.com/fr/produits">dans tous les domaines</a>, notamment l’<a href="https://nouvelles.umontreal.ca/article/2018/11/29/intelligence-artificielle-un-potentiel-immense-pour-l-education/">éducation</a>, la <a href="https://www.directioninformatique.com/un-programme-en-cybersecurite-et-ia-pour-polytechnique-montreal/66595">cybersécurité</a>, <a href="https://theconversation.com/airbus-boeing-google-textron-toyota-vw-la-guerre-des-drones-autonomes-de-transport-de-passagers-113127">le transport</a>, <a href="https://theconversation.com/comment-lia-va-transformer-le-systeme-de-sante-109496">les soins de santé</a>, la <a href="https://www.ledevoir.com/culture/musique/549681/l-intelligence-artificielle-nouvelle-vedette-de-la-musique">musique</a> et l’<a href="https://www.lesaffaires.com/techno/produits-electroniques/microsoft-veut-developper-l-intelligence-artificielle-en-agriculture/607588">agriculture</a>.</p>
<p>Les travailleurs « humains+ » sont ceux qui œuvrent aux côtés des machines pour parvenir à une <a href="https://www.hbrfrance.fr/magazine/2019/03/24753-lintelligence-collaborative-quand-lhomme-et-la-machine-unissent-leurs-forces/">intelligence collaborative</a>. Ils consolident leurs connaissances, leurs compétences et leurs expériences individuelles au moyen d’un ensemble de capacités technologiques pour améliorer leur rendement.</p>
<h2>Enseigner l’adaptabilité</h2>
<p>Le 12 février 2019, à l’occasion du <a href="https://ciomontrealsummit.com/speakers">CIO Montreal Summit</a>, j’ai abordé la manière de composer avec les technologies de rupture et la diversité, facteurs qui transforment le milieu de travail. Après la table ronde, une participante m’a posé une question clé : comment enseigner l’adaptabilité, soit la capacité de s’accommoder à de nouvelles conditions et de s’épanouir dans de nouveaux environnements, aux dinosaures humains?</p>
<p>« S’adapter ou périr » demeure un mantra du monde des affaires. L'adaptabilité des employés constitue pour eux la clé d’un avenir où nombre des tâches ne peuvent encore être imaginées.</p>
<p>Les employés de la prochaine génération devront être formés comme des humains+ avant d’entrer sur le marché du travail, et <a href="http://www3.weforum.org/docs/WEF_FOW_Reskilling_Revolution.pdf">la main-d’œuvre actuelle devra se soumettre à une mise à niveau et à un renouvellement continus de ses compétences</a>.</p>
<p>Or, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=5pPpRvqv8yE">on a peu fait pour repenser la formation et le perfectionnement nécessaires au milieu de travail de l’avenir</a>. Certes, comme la créativité, <a href="https://www.weforum.org/agenda/2019/01/the-hard-and-soft-skills-to-futureproof-your-career-according-to-linkedin/">une autre compétence générale recherchée</a>, l’adaptabilité se révèle plus complexe qu’il n’y paraît.</p>
<p><a href="https://trainingindustry.com/magazine/issue/training-versus-performance-it-isnt-always-a-training-issue/">Elle va au-delà des connaissances et du savoir-faire</a>. Elle exige un changement d’attitude qui ne se produit qu’en révisant nos construits, en tenant compte de nouvelles perspectives et en comprenant que les technologies s’ajoutent à nos propres capacités plutôt que de les remplacer.</p>
<h2>Humain contre machine</h2>
<p>Beaucoup associent l’IA aux récits de science-fiction, comme la série de films <em>Terminator</em>, où <a href="https://www.futura-sciences.com/tech/dossiers/robotique-trois-lois-robotique-1836/page/2/">le principal objectif de la technologie est de contrôler, voire d’exterminer la race humaine</a>.</p>
<p>D’autres sont influencés par les mises en garde répétées d’<a href="https://fr.sputniknews.com/presse/201903051040254660-intelligence-artificielle-risques-avertissement/">experts du monde entier</a> contre l’IA et la domination technologique. Ainsi, le fondateur de Tesla, <a href="https://fr.express.live/oubliez-le-changement-climatique-lintelligence-artificielle-est-la-plus-grande-menace-existentielle-exp-217615/">Elon Musk, a déclaré à plusieurs reprises que l’IA est plus dangereuse que les armes nucléaires</a> et peut devenir un dictateur immortel. Quant à James Barrat, il s’emploie à mettre en lumière <a href="https://www.youtube.com/watch?v=gsvm-LzXNSo&list=WL&index=235&t=1125s">la course à l’intelligence </a> qui se dessine selon lui non pas entre géants de la technologie, mais entre humains et machines.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/intelligence-artificielle-vers-une-destruction-creatrice-demplois-97637">La technologie a éliminé des emplois dans le passé et en éliminera d’autres dans un avenir rapproché</a>. Les emplois de demain exigeront de la main-d’œuvre actuelle qu’elle s’engage à pratiquer un apprentissage continu.</p>
<p>Par ailleurs, <a href="http://www.ethique.gouv.qc.ca/fr/projets-en-cours/intelligence-artificielle.html">les problèmes éthiques de l’IA</a> n’ont pas encore été résolus, et l’<a href="https://theconversation.com/lia-pour-le-meilleur-sans-le-pire-107552">établissement d’un code en la matière s’avère complexe</a>.</p>
<p>Depuis la présentation de la <a href="https://www.declarationmontreal-iaresponsable.com">Déclaration de Montréal</a> pour un développement responsable de l’intelligence artificielle, en novembre 2017, jusqu'à son adoption, en décembre 2018, 1 130 citoyens et 28 organismes signataires se sont engagés à favoriser le développement et la mise en œuvre socialement responsables d’une IA qui sert la société et lui profite.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/247130/original/file-20181125-149308-1tpcszz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/247130/original/file-20181125-149308-1tpcszz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/247130/original/file-20181125-149308-1tpcszz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/247130/original/file-20181125-149308-1tpcszz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=414&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/247130/original/file-20181125-149308-1tpcszz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/247130/original/file-20181125-149308-1tpcszz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/247130/original/file-20181125-149308-1tpcszz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=521&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Présentation de la Déclaration de Montréal pour un développement responsable de l'intelligence artificielle, à l'Université de Montréal, le 3 novembre 2017.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://c1.staticflickr.com/5/4554/38315310631_09f828d6d4_b.jpg">Flickr</a>, <a class="license" href="http://artlibre.org/licence/lal/en">FAL</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une évolution empathique</h2>
<p>Les dinosaures humains peuvent-ils s’adapter? Je dirais qu’ils le peuvent, mais qu’ils auront besoin du soutien empathique de tout un village.</p>
<p>Les entreprises qui veulent voir leur main-d’œuvre prête pour l’avenir du travail doivent adopter une approche proactive et aider leurs employés à trouver leur place dans le milieu de travail de demain. Surtout, elles doivent comprendre d’où vient la résistance au changement afin d’y remédier.</p>
<p>Simultanément, les entreprises doivent mettre à profit les capacités de leur main-d’œuvre qui ne sont pas propres à un contexte particulier et en faire usage de manière efficace. Avant tout, elles doivent trouver des moyens de préserver les emplois de leurs travailleurs. La peur d’être remplacés peut en effet rendre les dinosaures humains encore moins disposés à changer.</p>
<p>La dynamique d’équipe devrait fonctionner de manière empathique pour faciliter les collaborations entre humains ainsi qu’entre humains et machines, et appuyer chacun dans son processus d’adaptation.</p>
<p>À l’échelle individuelle, nous devons développer notre capacité mentale et émotionnelle ainsi que nos connaissances et compétences pour embrasser notre identité et notre attitude d’humain+. Enfin, nous devons vouloir nous adapter, ce qui exige de changer la manière dont nous voyons le monde. Une fois que nous avons défini et analysé l’essence de notre résistance au changement, nous pouvons élaborer des stratégies qui nous permettront de faire face aux incertitudes et d’expérimenter activement de nouvelles possibilités.</p>
<p>Grâce à cette expérimentation, nous pourrons repenser notre collaboration avec les technologies de rupture et modifier notre conception du milieu de travail de demain.</p>
<p>Le premier <a href="https://americas.worldsummit.ai">World Summit AI Americas</a>, qui a lieu à Montréal le 10 et 11 avril 2019, rassemblera des sommités de l’intelligence artificielle. Outre les fascinantes discussions prévues sur le concept d’AI4Good, les solutions appliquées pour les entreprises, les ateliers pratiques et l’élaboration de plans de mise en œuvre de l’IA au cours de l’année à venir, j’encourage vivement les influenceurs qui seront présents à discuter de l’adaptation de la main-d’œuvre ainsi que de stratégies concrètes pour l’appuyer et la faciliter.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/114269/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nadia Naffi est affiliée avec Milieux Institute for Arts, Culture and Technology and the Centre for Immigration Policy Evaluation (CIPE) de l'Université Concordia, et avec le Educational Informatics Lab (EILAB) de l'Institut universitaire de technologie de l'Ontario.</span></em></p>Les humains devront adapter leur vie et leur travail à l'arrivée disruptive des machines intelligentes. En fait-on assez en formation et perfectionnement ?Nadia Naffi, Assistant Professor in the Department of Education (Educational Technology), Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1068272019-01-15T16:46:27Z2019-01-15T16:46:27ZLe devenir robot de l'humain<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/266440/original/file-20190328-139368-46dh1y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un robot pensif. Qui imite qui à la fin?</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>L’intelligence derrière l’«intelligence» artificielle (IA) est suspecte. Certes, nous doutons de moins en moins de ses remarquables capacités techniques. En revanche, nous doutons de plus en plus de… son intelligence. </p>
<p>Par exemple, nous hésitons à parler d'intelligence authentique – au sens fort du terme – quand bien même l'IA de Google nous épate en prenant rendez-vous chez le coiffeur sans nous. Cela nous rend bien sûr service, mais est-ce réellement de l'intelligence?</p>
<p>Je ne m'aventurerai pas à définir l'intelligence. C'est là un terrain glissant. Cependant, je vous suggère la lecture d'un article élegant sur le sujet, publié par <a href="https://theconversation.com/intelligence-artificielle-et-pensee-humaine-96508">Margarida Romero</a>. </p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/JvbHu_bVa_g?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">L'IA de Google prend des rendez-vous à votre place.</span></figcaption>
</figure>
<p>Or, le manque de consensus actuel, chez les technophobes comme chez les technophiles - sans oublier ceux entre les deux - nous révèle une chose: l’intelligence, qu’elle soit artificielle ou naturelle, nous invite à la réflexion critique. </p>
<h2>De la machine qui imite</h2>
<p>Qui imite qui ? À priori, on serait tenté de répondre que l’IA imite l'esprit humain, sa démarche, son langage et son raisonnement. </p>
<p>En effet, l'IA faible comme l'IA forte (voir <a href="https://theconversation.com/lemotion-talon-dachille-de-lintelligence-artificielle-95105">Jacques Baudron</a> pour la distinction) reposent sur des algorithmes permettant à la machine d'agir rationnellement. Qu'elle échoue ou qu'elle parvienne à égaler l'intelligence naturelle - voire qu'elle la dépasse - l'IA a comme point de repère établi l'humain. </p>
<p>C’est ce que le philosophe <a href="http://jef-safi.net/spip/spip.php?article896">Pascal Chabot</a> désigne comme une «mimesis opératoire». Chabot ne décortique pas le concept davantage, mais on trouve chez le philosophe <a href="http://sens-public.org/article1267.html?lang=fr#fn10">Adriano Fabris</a> une démonstration plus détaillée et précise de l'imitation:</p>
<p><em>«Le concept d’«imitation» (mimesis) est une catégorie dynamique et relationnelle. Il relie deux ou plusieurs éléments qui ont un rapport spécifique entre eux. Il s’agit d’un rapport au sein duquel on reconnaît une primauté à un élément particulier, dans la mesure où celui-ci est pris en tant que modèle […]. En d’autres termes, la «copie» est considérée comme telle dans la mesure où elle ressemble et cherche de plus en plus à ressembler, à quelque chose ou à quelqu’un pris comme «modèle». En ceci consiste donc la dynamique de l’imitation.»</em></p>
<p>Essentiellement, c’est l’élément imitant (l’IA dans notre cas) qui mime le comportement de l’élément imité (l’humain) selon une méthode programmée.
Toutefois, cela va plus loin. </p>
<h2>De l’humain qui imite</h2>
<p>L’humain aussi peut être amené à imiter l’IA. Supposons qu’il souhaite interagir avec une machine, il doit adapter sa prononciation en vue de se faire comprendre du premier coup par son assistant vocal Siri, Alexa ou Google Home. Les exemples sont aussi nombreux que les diverses interactions entre l'IA et l'humain (voir sur ce sujet les expérimentations réalisées en <a href="https://cdn.theconversation.com/static_files/files/359/Psychologie_cognitive_et_intelligence_artificielle.pdf?1542571352">psychologie cognitive</a>).</p>
<p>Je propose l'adoption d'un nouveau concept pour exprimer cette réalité de l'humain moderne: le <em>technomimétisme</em>. </p>
<p>J’entends par technomimétisme le processus de modification et d’ingénierie par lequel l’humain s’inspire des formes, matières, propriétés, processus et fonctions de la technique plus généralement, et de la technologie (et de l’IA) plus spécifiquement. Il vise l’implantation – consciente et inconsciente – de la logique des machines dans la sphère d’activité du naturel. </p>
<p>Le technomimétisme rompt avec le biomimétisme car il convoite la prévisibilité alors que les systèmes naturels tendent vers l’imprévisibilité. Il est animé par le principe suivant : être l’artiste de sa vie plutôt que de la subir comme un spectateur. Sur ce sujet, les travaux de l'historienne des sciences <a href="https://cdn.theconversation.com/static_files/files/360/A_Cultural_Perspective_on_Biomimetics.pdf?1542574143">Bernadette Bensaude-Vincent</a> posent une juste distinction entre biomimétisme et technomimétisme. </p>
<p>L’humain, dans cette conjecture technomimétique, se dirige vers la standardisation et l’homogénéisation de son comportement. Il devra être de plus en plus prévisible – et plus robotisé – afin que l'IA puisse traiter l'information reçue rapidement. Au passage, il est pertinent de réfléchir à la question de la prédictibilité (ou non) d’une IA forte. Personne, pas même les programmeurs et les ingénieurs, ne sont en mesure d'analyser par quel raisonnement l’IA forte arrive à choisir « x » plutôt que « y », ou l'inverse. C'est là une question primordiale. </p>
<p>La mise en place d'une lecture technomimétique fait apparaître un « devenir robot chez l’humain ». Pourtant, la chose est assez peu étudiée. La contre-intuitivité d'un tel constat y est certainement pour quelque chose. L’ouvrage <em>What Computers Still Can’t Do : A Critique of Artificial Reason</em> de <a href="https://www.nytimes.com/2017/05/02/us/hubert-dreyfus-dead-philosopher-of-artificial-intelligence.html">Hubert L. Dreyfus</a> apporte des arguments précis et lucides à ce sujet.</p>
<h2>Nouvelles perspectives de réflexion</h2>
<p>Considérer les rapports entre l'humain et l'IA de l'angle du technomimétisme contraste avec la plupart des études sur le sujet. </p>
<p>Leur postulat de départ: la machine reproduit ce que la personne fait. La relation inverse est par conséquent inconsciemment négligée. Toutefois, le philosophe <a href="https://cdn.theconversation.com/static_files/files/361/Cognitive_Psychology.pdf?1542576422">Charles Taylor</a> s'est posé la question et s’y est aventuré dans son livre <em>Human Agency and Language</em>.</p>
<p>Il semble qu’une approche dynamique, c’est-à-dire qui est consciente de l’influence mutuelle exercée entre l’humain et la machine, permettra d’étudier la question éthique du développement de l’IA plus pertinemment: le développement technologique (et donc de l’IA aujourd'hui) doit devenir un moyen – de l’épanouissement humain – et non une fin en soi. Les travaux de <a href="http://sens-public.org/article1060.html?lang=fr">Martin Heidegger</a>, <a href="https://cdn.theconversation.com/static_files/files/362/Illich_et_la_technologie.PDF?1542577500">Ivan Illich</a> et surtout <a href="https://vimeo.com/156520798">Gilbert Simondon</a> sur la technologie comme outil de l'humain- et non l'inverse - sont ici essentiels. </p>
<iframe src="https://www.franceculture.fr/player/export-reecouter?content=bd3cab91-6a7e-4ca3-9277-bfdbdebd1793" width="100%" frameborder="0" scrolling="no" height="137"></iframe>
<h2>Une rencontre curieuse</h2>
<p>Revenons à notre question initiale: qui imite qui ? Il semble que l’imitation se fait dans les deux sens, mais à différents degrés: l’IA imite l’humain automatiquement, tandis que l’humain imite l’IA (presqu’)automatiquement. </p>
<p>Certes, ce dernier peut encore préserver son indépendance face à la machine, mais pour combien de temps? Il s'agit là d'une question assez préoccupante.</p>
<p>Dans l’optique de pouvoir utiliser efficacement l'intelligence artificielle, l’humain aligne – au début consciemment et ensuite plus inconsciemment – son comportement (et aussi sa pensée) sur le modèle plus standard de l’IA. C’est un humain qui se robotise par anticipation. </p>
<p>Dans cette conjoncture, je constate une dynamique à l'œuvre relativement curieuse: alors que la recherche scientifique sur l’intelligence artificielle pousse (avec grand succès) vers un rapprochement avec l’intelligence naturelle, c’est davantage l’humain qui se rapproche (par technomimétisme) en s’alignant sur les principes de communication et les pratiques de l'IA.</p>
<h2>L'humain augmenté (et diminué)</h2>
<p>Ce nivellement par le bas (technomimétique) de l’humain n’est pas sans effet. D’une manière générale, en se robotisant, il finit forcément par se déshumaniser. D’une manière précise, il profite du développement de l’IA sur le plan de l’utilité, de l’efficacité, et du rendement, tout en perdant jusqu’à un certain degré des éléments qui le composent dans ce qui fait de lui un être à proprement parler imparfait, et donc pas un robot. </p>
<p>Il y aurait un prix à payer pour tout cela.</p>
<p>Prenons l'exemple de l’oubli. C'est un de ces éléments qui nous caractérisent depuis toujours, que cela nous plaise ou non. Néanmoins, à l’heure de l’IA et du numérique, on oublie jusqu'à l'existence de cette lacune. On pourrait dire que l’humain oublie l’oubli. Aujourd’hui, tout est sauvegardé dans des bases de données et la mémoire devient du coup matérielle, à savoir qu’il devient (presque) impossible d’oublier. </p>
<p>Or, il est assez inquiétant de constater que de tels changements ne sont pas plus discutés. Saluons ici le travail de <a href="https://www.collegedesbernardins.fr/intervenants/doueihi-milad">Doueihi</a> qui explore des mutations aussi subtiles dans ses travaux. À ma modeste connaissance, l'horizon de l'humain augmenté fait couler beaucoup plus d'encre que celui de l'humain diminué, et pourtant… </p>
<p>Ainsi, il me semble que l’humain qui imite un peu trop (et de trop près) l’IA s’engage peut-être dans une voie sans issue, celle d'une humanité à la fois augmentée et diminuée, tout dépendant du point de vue. </p>
<p>Et c’est sur cette observation que s’achève notre brève réflexion critique sur l’éthique, le développement de l’IA, et le technomimétisme de l’homme. </p>
<p>Je propose qu’on s’empare davantage de la question car elle nous concerne tous. À vrai dire, le développement de l'IA n'est pas seulement l'affaire des «experts» et des investisseurs. </p>
<p>À nous tous d'en juger.</p>
<p><em>Merci à <a href="https://umontreal.academia.edu/CharlesBlattberg">Charles Blattberg</a>, <a href="http://umontreal.academia.edu/GuadalupeGonz%C3%A1lezDi%C3%A9guez">Guadalupe Gonzalez Dieguez</a> et <a href="https://umontreal.academia.edu/FranciscoALoiola">Francisco Antonio Loiola</a> pour leurs précieux commentaires sur les ébauches de cette réflexion philosophique.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/106827/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mario Ionuț Maroșan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Afin de l'utiliser efficacement, l’humain aligne – consciemment puis inconsciemment – son comportement et sa pensée sur le modèle plus standard de l’IA. C’est un humain qui se robotise par anticipation.Mario Ionuț Maroșan, Membre de l’équipe de recherche et d'analyse de la Déclaration de Montréal pour un développement responsable de l’intelligence artificielle, auxiliaire d'enseignement et de recherche en philosophie politique et auxiliaire à l'Institut d'études religieuses, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1067232018-11-13T23:06:07Z2018-11-13T23:06:07ZDébat : Les robots détruisent l’emploi dans les services ? Bonne nouvelle !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/244784/original/file-20181109-116820-1r8x2ry.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=40%2C13%2C949%2C438&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Accueillis par des robots, les clients des hôtels n'auront plus à subir d'éventuels réceptionnistes désagréables...</span> <span class="attribution"><span class="source">MONOPOLY919 / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Ils s’appellent Pepper, Milo, Aimo, Budd ou Paro. Ils ont pénétré les espaces marchands et non marchands. Voici nos nouveaux serviteurs : les robots. Destinés à faciliter notre vie, nous distraire, tenir compagnie aux personnes âgées, aider les enfants autistes, accueillir et servir les clients. Après l’automatisation, les services opteraient-ils pour la « robolution » ? C’est enfin ce que nous espérons ! En effet, si certains y voient l’apogée de la déshumanisation de la relation marchande nous, nous y voyons la fin d’échanges forcés, douloureux et parfois à la limite du supportable.</p>
<p>Oui, trop souvent l’interaction humaine est associée à des représentations positives comme la compassion, l’empathie, l’écoute, la générosité voire la dévotion. Mais être humain ce n’est pas uniquement cela. Blaise Pascal l’a écrit : « être humain c’est aussi être sujet à l’ennui, l’angoisse ou l’inquiétude, tant cette nature est incapable de reposer dans une nature qu’il qualifie d’assurée ».</p>
<h2>L’humain peut nuire dans les services</h2>
<p>Venons-en aux faits : oui, il y a des nuisances à être servi par les humains. Oui des clients font de l’intolérance au service « humain ». Vous en doutez ? N’avons-nous jamais été affectés d’être le spectateur passif d’un personnel sous pression que nous percevons insuffisamment payé pour la dureté de sa tâche ? Peinés et compatissants vis-à-vis de personnel que nous percevons (satanée perception) sans grand avenir professionnel en nous demandant avec tristesse « ce qu’il fera de sa vie », « s’il a un avenir » ? Ressenti cet inconfort au moment de l’addition d’être le maître de l’obole suprême, le pourboire ? « Vais-je le donner ? Il ou elle m’a l’air dans le besoin, fatigué, etc. ». Bref, ce sentiment d’être pris en otage par excès d’empathie, d’hypersensibilité et de compassion.</p>
<p>Oui, assurément, l’humain peut nuire dans les services plus qu’il ne gâte et en cela la promesse des robots nous ravit. Enfin l’absence de réciprocité humaine à l’origine de bien des conflits. Enfin de la constance, qualité hautement improbable dans les situations de services. Enfin délivrés de la charge wagnérienne du personnel pour garder le leadership de la relation. Enfin délivrés de devoir engloutir et digérer les émotions les plus dérangeantes que nous renvoie un humain, puisque les clients verront dans le robot ce qu’ils souhaitent y voir, ce dernier n’exprimant pas de sentiments.</p>
<h2>Questions d’apparence</h2>
<p>Car si certains employés ne sont pas spontanément animés (ne démontrent pas une volonté de servir) ou insuffisamment contenus (ne montrent pas ce qu’ils ressentent), le robot lui est programmé pour l’être quelles que soient les circonstances. Si, comme le dit Blaise Pascal, la fragilité de l’homme est physique et morale, le robot lui est endurant (ne renvoie pas ce sentiment d’être maltraité) et dépourvu de conscience (il ne pense pas). C’est ce qui le rend inhumain et qui nous réjouit.</p>
<p>Des questions comme l’apparence ne sont encore pas résolues. De petite taille, il amusera, renvoyant à un imaginaire enfantin (le personnel atteint de nanisme ne nous renvoie pas cette émotion). Ressemblant à l’Homme, il renvoie, comme l’écrit le roboticien japonais Masahiro Mori, à « la vallée de l’angoisse d’étrangeté ». Grands, ils s’apparentent aux robots malfaisants des films de science-fiction. Doit-il être féminin ? Masculin ? « Asexué » ? Les premiers modèles et les concepteurs s’orientent vers une apparence humaine. Mais est-ce vraiment la bonne voie ?</p>
<p>À défaut d’apporter des réponses qui ne seront pas transposables à tous les services, l’arrivée des robots doit permettre l’émergence de nouveaux paradigmes du service. Et sans doute en premier lieu, celui de considérer l’humain et tout ce qu’il représente comme néfastes (et pas seulement inutiles) à la qualité de certains services. Quoi qu’il en soit, laissons enfin le client au contact des robots être en prise avec son imaginaire : lui laisser le choix des émotions ressenties face à un interlocuteur… enfin inhumain.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/106723/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Annie Lapert-Munos ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Ne vous êtes-vous jamais agacé, en tant que client, de ces dysfonctionnements humains qui nuisent à la qualité de service ? Réjouissez-vous, les robots arrivent…Annie Lapert-Munos, Docteur en sciences de gestion, HDR, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1055992018-10-25T22:11:33Z2018-10-25T22:11:33ZLa « start-up nation » : un symptôme, mais de quoi ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/242159/original/file-20181024-71014-wy34lw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C14%2C985%2C579&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Sous pression, les jeunes entrepreneurs auraient tendance à oublier de prendre en compte les effets de leurs ambitions sur leur entourage. </span> <span class="attribution"><span class="source">Just dance / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Devenir une « start-up nation » est aujourd’hui un objectif de politique publique dans la quasi-totalité des pays du monde, du Maroc au Bangladesh en passant par le Mexique ou le Pérou. Tous tentent d’imiter les nations pionnières en ce domaine, à savoir les États-Unis, la Chine, la Corée du Sud, Israël et le Canada. Quant à la France, après un démarrage laborieux au début des années 2000, elle a récemment réactivé cet objectif. </p>
<p>Le 10 octobre 2018, le président de la République en personne a pris la parole devant un parterre d’entrepreneurs du numérique réunis dans les locaux de la Station F, qui se présente comme le <a href="https://stationf.co/fr/">plus grand incubateur au monde</a>. Emmanuel Macron y a annoncé une ambitieuse feuille de route pour la French Tech visant à aider et à promouvoir les entrepreneurs en France.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/1UpWKAWKJm0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Discours du président de la République à la Station F, le 10 octobre 2018.</span></figcaption>
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<p>Partout, la pression institutionnelle pour transformer les jeunes gens en entrepreneurs vire à l’obsession. Mais de quoi est-elle le symptôme ? Ne peut-on y voir l’expression d’une panique des politiques face aux manques de perspectives à offrir à la jeunesse ?</p>
<h2>Prestataires de prestataires de prestataires…</h2>
<p>Tentons ici d’interpréter cette injonction nouvelle et étrange : « Devenez des entrepreneurs ! » Elle semble suggérer que les institutions établies n’ouvrent que deux voies aux jeunes générations : l’indigence plus ou moins assistée (par exemple par un revenu universel), ou le coup de poker. L’encouragement à créer des start-ups peut ainsi être vu comme le pendant médiatique de la très discrète stratégie des grandes organisations étatiques et capitalistes qui continuent de se débarrasser en douceur de la question sociale.</p>
<p>De plus en plus, ces dernières sous-traitent, externalisent, automatisent, robotisent, digitalisent, réduisant la part des coûts salariaux dans le total des frais. Elles recherchent des « talents », c’est-à-dire la petite minorité de salariés à forte valeur ajoutée. Dans le même temps, elles évitent systématiquement d’employer les travailleurs jugés interchangeables, qu’elles renvoient à la dure logique du marché en les transformant progressivement en prestataires ; en prestataires de prestataires ; en prestataires de prestataires de prestataires ; etc.</p>
<h2>Nouvelle vague d’utopies</h2>
<p>Que vont devenir les diplômés sortis des universités ? Qu’ils soient étudiants en sport, en art, en journalisme, en communication, en Humanités, en marketing, ou encore en ressources humaines, ils rêvent tous de se réaliser et même de se faire plaisir dans leur futur métier, tout en conservant cinq semaines de vacances annuelles et des RTT.</p>
<p>Les années 1970 avaient transformé la jeunesse universitaire en militants révolutionnaires qui préparaient la prochaine révolution en lisant Trotsky, Lénine ou Mao. Ce rêve perdure encore un peu aujourd’hui, avec ses variantes dans le militantisme écologique, altermondialiste ou féministe. Mais il se mêle désormais à une nouvelle vague d’utopies qui amalgame digitalisation, réalité virtuelle, poker, entrepreneuriat, création de start-up, argent facile, fortunes rapides et culte de la performance.</p>
<p>Le problème, c’est que la société n’accueille pas les nouvelles générations dans un monde du travail préparé à leur arrivée. Elle les renvoie à eux-mêmes en les baptisant « entrepreneurs ». Ce mot magique, chargé de liberté et d’espérance, reporte en réalité sur eux, et sur eux seuls, la responsabilité des déconvenues qui peuvent les attendre. L’échec sera alors la <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/psychologie/psychologie-generale/fatigue-detre-soi_9782738108593.php">marque de leur insuffisance</a>, et la réussite de quelques-uns sera la preuve qu’ils auraient pu y arriver, comme l'a justement souligné le sociologue Alain Ehrenberg dans son livre « La fatigue d’être soi ».</p>
<h2>Réussites éclatantes mais problématiques</h2>
<p><a href="https://theconversation.com/la-bataille-dazincourt-1415-la-mode-des-start-up-1998-2017-et-lhistoire-des-passions-francaises-85491">Dans un article</a> publié dans ces colonnes, j’avais posé l’inquiétante question du taux d’échec des créateurs de start-up. J’avais également souligné notre manque de connaissance des dégâts collatéraux sur leur vie comme sur celle de leur famille et, plus généralement, le coût social et financier de ces échecs cumulés.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-bataille-dazincourt-1415-la-mode-des-start-up-1998-2017-et-lhistoire-des-passions-francaises-85491">La bataille d’Azincourt (1415), la mode des start‑up (1998‑2017)… et l’histoire des passions françaises</a>
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<p>Il convient d’ajouter que même certaines des réussites les plus éclatantes sont problématiques. L’ambition démesurée d’une hypercroissance construite à partir de rien (ou presque) ne saurait en effet être sans conséquence morale sur « les entrepreneurs et les entrepris », pour reprendre la belle formule de <a href="https://classiques-garnier.com/entrepreneurs-entreprise-histoire-d-une-idee.html">la philosophe Héléne Verin</a>.</p>
<p>À ce sujet, je vous invite à lire l’article de <a href="https://www.linkedin.com/pulse/pour-en-finir-avec-le-machiav%C3%A9lisme-start-up-diana-filippova/">Diana Filippova</a>, ancienne responsable de l’écosystème start-up de Microsoft France, dans lequel elle s’indigne de la conduite machiavélique de certains des fondateurs de start-up qu’elle fréquente.</p>
<p>Elle signale notamment que les jeunes entrepreneurs, obsédés par l’objectif de croissance et pressés par l’obligation de résultats, deviennent rapidement durs en affaires. Ils en viendraient même à oublier de prendre en compte les effets de leurs ambitions sur celles et ceux qui sont mêlés à leur aventure. Partis avec les meilleures intentions, ils enchaîneraient ensuite dépôts de bilan et numéros de SIRET tout en développant une forme de cynisme.</p>
<h2>Opportunisme irresponsable</h2>
<p>Des startups comme <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/03/22/ce-qu-il-faut-savoir-sur-cambridge-analytica-la-societe-au-c-ur-du-scandale-facebook_5274804_4408996.html">Cambridge Analytica</a> ou <a href="https://theconversation.com/theranos-les-inavouables-secrets-dune-start-up-frauduleuse-103860">Theranos</a> sont à l’origine d’une forme extrême d’opportunisme irresponsable. Et Mark Zuckerberg, tout à la réussite de sa belle start-up, ne s’est-il vraiment rendu compte de ce qu’il faisait qu’une fois face à une <a href="http://www.businessinsider.fr/en-direct-audition-mark-zuckerberg-au-parlement-europeen/">commission d’enquête</a> ? Les utilisateurs de Facebook ont-ils enfin compris que la plate-forme aux rencontres enchanteresses était aussi la sale boîte qui vend en secret leurs données personnelles ?</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/theranos-les-inavouables-secrets-dune-start-up-frauduleuse-103860">Theranos, les inavouables secrets d’une start-up frauduleuse</a>
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<p>L’histoire du capitalisme sur longue période nous enseigne que l’accumulation très rapide de grandes richesses passe presque toujours par des <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index-Portrait_de_l_homme_d_affaires_en_predateur-9782707150745.html">activités de prédation</a>. Pour reprendre la terminologie d’Aristote, il s’agit de <em>Chrèmatistikos</em> (l’art d’acquérir des richesses), et non pas d’<em>Oikonomia</em> (l’art d’administrer sa maison).</p>
<p>Les start-ups sont poussées à accumuler la plus grande richesse possible en un minimum de temps par les fonds d’investissement qui les financent. Or, c’est précisément dans le cadre de telles ambitions démesurées que la prédation devient le facteur explicatif le plus probable de la réussite.</p>
<h2>Forte obligation de réussite</h2>
<p>Les start-ups à succès, GAFA et licornes se développent parfois en écrasant tout sur leur passage. Mais que penser des entrepreneurs mal placés sur le marché et qui ne s’en sortent pas ? C’est sur cette population fragilisée que la dimension délétère de la propagande en faveur de la création d’entreprise risque d’être la plus dommageable. En effet, comme l’avait déjà vu le sociologue américain Robert K. Merton dans son livre <em>Social Theory and Social Structure</em> (1968) :</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/242155/original/file-20181024-71011-1l8j9gy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/242155/original/file-20181024-71011-1l8j9gy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=841&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/242155/original/file-20181024-71011-1l8j9gy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=841&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/242155/original/file-20181024-71011-1l8j9gy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=841&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/242155/original/file-20181024-71011-1l8j9gy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1057&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/242155/original/file-20181024-71011-1l8j9gy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1057&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/242155/original/file-20181024-71011-1l8j9gy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1057&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Robert K. Merton.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikipedia</span></span>
</figcaption>
</figure>
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<p>« Lorsqu’une culture comporte une forte obligation de réussite économique alors qu’il existe peu de moyens pour les personnes ordinaires de parvenir à cette fin, on observe une tendance à rechercher des voies de réussites nouvelles : comportements innovants pour les hommes d’affaires, déviance et crime pour ceux qui n’ont pas accès aux moyens d’enrichissement légitime. »</p>
</blockquote>
<p>Si les plus vigoureux survivent, c’est souvent en jouant des tours pendables à leurs petits camarades dans une cour de récréation où l’on suppose que tout est permis, et que la fin justifie les moyens.</p>
<p>Alors, innovation ou déviance criminelle ? Hypercroissance ou catastrophes à venir ? Nouvelles technologies libératrices ou technologies asservissantes ? Entrepreneuriat social ou arnaque bien pensée et bien pensante ? En l’état, l’entrepreneuriat, c’est la fortune pour quelques-uns et de grosses déceptions pour beaucoup d’autres, le tout dans un climat moral qu’on pourrait qualifier de « verglacé », sans craindre la métaphore.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/105599/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Michel Villette ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’engouement autour de la création d’entreprise n’est pas sans conséquence négative, surtout pour ceux, nombreux, qui échouent. Pourtant, le discours « tous entrepreneurs » reste prédominant.Michel Villette, Professeur de Sociologie, Chercheur au Centre Maurice Halbwachs ENS/EHESS/CNRS , professeur de sociologie, AgroParisTech – Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/960802018-07-08T21:25:47Z2018-07-08T21:25:47ZLes robots sont-ils les chirurgiens de demain ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/222248/original/file-20180607-137306-17w9fpm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=15%2C15%2C5291%2C3516&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Opération chirurgicale réalisée sur un patient avec le système robotisé Da Vinci. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/istanbul-turkey-january-11-2016-da-425458075?src=jz4KQJvYVe2lhP4fR9EOfA-1-13">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p><em>Alain-Charles Masquelet et Philippe Hubinois sont intervenus au <a href="https://www.collegedesbernardins.fr/recherche/que-vaut-le-corps-humain-medecine-et-valeurs-du-corps">séminaire de recherche « Que vaut le corps humain ? Médecine et valeur du corps »</a> du Collège des Bernardins.</em></p>
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<p><strong>Le chirurgien exerce aujourd’hui un métier hyper technologique, au point qu’il peut se retrouver à commander le bras articulé d’un robot effectuant les gestes à sa place. S’agit-il d’un progrès ?</strong></p>
<p><strong>Philippe Hubinois :</strong> Le robot n’effectue pas les gestes du chirurgien à sa place. C’est le chirurgien qui dirige les bras du robot. Deux doigts de chacune de ses deux mains manipulent des <em>sticks</em>, c’est-à-dire des manettes, qui commandent directement les mouvements des bras du robot porteurs des instruments chirurgicaux. Il s’agit donc, en réalité, d’un dispositif « démultiplicateur » des gestes du chirurgien, qui supprime tout tremblement, si infime soit-il, permet de réaliser des sutures dans des positions très inconfortables, voire impossibles pour les mains humaines. Le robot possède sept <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Degr%C3%A9_de_libert%C3%A9_(m%C3%A9canique)">degrés de liberté</a>, quand le poignet humain n’en possède que trois. Le dispositif permet de zoomer et dézoomer, donc d’agrandir considérablement les détails opératoires, pour une meilleure précision du geste.</p>
<p>Il s’agit d’un progrès qu’il faut cependant nuancer, car le toucher direct des organes par le doigts du chirurgien devient impossible. Il est remplacé par un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dispositif_haptique">dispositif haptique</a>, c’est-à-dire un ressenti artificiel avec retour de force, infiniment moins sensible.</p>
<p><strong>Alain-Charles Masquelet :</strong> Il faut commencer, me semble-t-il, par dissiper un possible malentendu. Ce que nous appelons robot chirurgical n’a rien à voir avec l’idée fantasmée d’une machine humanoïde qui réaliserait des actes opératoires à la place du chirurgien. L’expression correcte est d’ailleurs « chirurgie assistée par robot ». Robot vient du mot tchèque <em>robota</em> qui signifie travail pénible, ou labeur. Il traduit bien le souci de l’humain de confier des tâches difficiles ou rebutantes à une machine.</p>
<p>On peut considérer plusieurs sortes de robots selon leur degré d’automatisation ou d’autonomie. Au stade le moins élevé, on trouve le robot qu’il faut activer en permanence par un geste humain. Il ne possède aucune autonomie et n’offre aucun caractère automatique. C’est dans cette catégorie que s’inscrit le « robot chirurgical » le plus utilisé, le Da Vinci. Ce type de robot est une forme amplifiée de la main du chirurgien. Il potentialise son geste. Je ne vois pas de différence de nature, mais seulement une différence de degré, entre la couturière qui tient l’aiguille entre le pouce et l’index, le chirurgien qui fait usage d’un porte aiguille – qui est déjà une amplification de sa main – et le robot Da Vinci, entièrement dirigé par la main humaine.</p>
<p>Dans certaines spécialités médicales, on a affaire à des robots qui réalisent automatiquement un geste selon un programme préétabli. Un exemple, parmi les interventions sur le cerveau, est la descente « robotisée » de l’électrode de stimulation cérébrale profonde, pour le traitement de la maladie de Parkinson.</p>
<p>Dans la catégorie supérieure de robots, on trouve le robot autonome, gouverné par des algorithmes qui permettent de faire face à des situations avec des imprévus, comme la voiture circulant sans conducteur. Nous n’en sommes pas à ce stade en chirurgie.</p>
<p>Le robot chirurgical apporte indiscutablement une série d’améliorations, comme la vision en trois dimensions qu’on n’a pas avec un endoscope et surtout la précision du geste, grâce à la miniaturisation des instruments et la suppression de tout tremblement.</p>
<p>A priori, le robot n’offre pas un avantage décisif par rapport à un chirurgien expérimenté, sauf dans certaines situations particulières dont nous reparlerons.</p>
<p><strong>Les robots peuvent-ils réaliser des prouesses que les chirurgiens ne peuvent pas faire ?</strong></p>
<p><strong>Alain-Charles Masquelet :</strong> Dans un certain sens oui, notamment dans les régions de notre anatomie dont l’accès est difficile. Les bras robotiques sont plus minces que l’avant-bras du chirurgien et l’instrument terminal, beaucoup moins encombrant que la main. Un bon exemple est celui des tumeurs de la paroi postérieure de l’oropharynx, la partie du pharynx située en arrière de la bouche. On ne peut pas les aborder en chirurgie traditionnelle sans réaliser préalablement une section de la lèvre inférieure et une <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ost%C3%A9otomie">ostéotomie</a> de la mâchoire inférieure, des interventions qui ne sont pas légères. Le robot à bras articulés, type Da Vinci, permet de retirer la tumeur sans rien toucher, en passant simplement par la bouche dans laquelle les quatre bras peuvent pénétrer.</p>
<p><strong>Philippe Hubinois :</strong> La possibilité de coupler la robotisation avec l’usage de la « réalité virtuelle augmentée » permet, en effet, de réaliser des prouesses. On peut ainsi projeter en cours d’opération l’anatomie interne de l’organe plein d’un patient comme le foie ou le pancréas. Son anatomie a été reconstituée avant l’intervention à partir des examens complémentaires effectués par le patient. Cette technique permet de préserver au mieux les vaisseaux et les nerfs. On peut en particulier enlever une tumeur en épargnant un maximum de tissu sain autour, ce qui est capital pour l’état futur du patient. La marge de progression est encore très importante dans ce domaine.</p>
<p><strong>Les fabricants affirment que l’utilisation de systèmes robotisés pour les opérations entraîne moins de complications chez les patients et des durées d’hospitalisation moins longues. Cela est-il confirmé par les études scientifiques ?</strong></p>
<p><strong>Alain-Charles Masquelet :</strong> À ma connaissance il n’y a pas d’étude rigoureuse ayant tranché en faveur du robot. Un article paru en 2014 dans la revue <em>The Lancet</em> soulignait que le bénéfice du robot était indiscutable pour le chirurgien en termes de précision et de confort. Par contre, le bénéfice pour le patient restait à démontrer en raison de l’absence d’essais comparatifs entre chirurgie traditionnelle et chirurgie assistée par robot.</p>
<p>Les spécialistes, notamment les urologues, s’accordent à dire qu’il n’y a pas de différence, en termes de résultats, entre la chirurgie assistée par robot et la chirurgie réalisée par un opérateur expérimenté.</p>
<p>L’un des aspects regrettables de l’évolution actuelle des techniques chirurgicales est l’extension abusive des cas dans lesquels la chirurgie assistée par robot est proposée. Ce phénomène résulte d’un marketing agressif des fabricants. Plus globalement, il pose le problème de la formation des futurs chirurgiens. En effet, une formation spécifique à la chirurgie assistée par robot est nécessaire. De plus, la maîtrise du dispositif exige une pratique régulière. On voit ainsi poindre une menace pour l’acquisition des gestes traditionnels qui restent, malgré tout, le quotidien du chirurgien.</p>
<p>La tentation de basculer dans le tout robot existe, mais il ne faut pas méconnaître les inconvénients du robot : le coût initial du dispositif (2 millions d’euros), le coût de sa maintenance (200 000 euros par an), le coût du consommable (2 000 euros par intervention), l’entrainement des équipes, la durée de mise en place… sans compter le risque de panne technique !</p>
<p><strong>Philippe Hubinois :</strong> Il est impossible aujourd’hui d’affirmer, au vu des études bibliographiques, qu’il y aurait une supériorité indéniable du chirurgien équipé d’un robot sur celui qui ne l’est pas. Moins de complications avec les systèmes robotisés et des durées d’hospitalisation plus courtes, les deux assertions sont liées. Moins il y a de complications, plus la durée moyenne d’hospitalisation pour un type donné d’intervention est courte. En réalité, les résultats espérés avec la robotisation dépendent de deux choses : d’abord de la qualité intrinsèque du chirurgien, qui dirige les bras du robot (talent naturel, qualité de la formation), ensuite de l’aboutissement technologique du système robotisé, les progrès dans ce domaine étant constants.</p>
<p><strong>Et demain, peut-on imaginer que des robots opèrent seuls les patients ?</strong></p>
<p>Alain-Charles Masquelet : Vous voulez dire des robots parfaitement autonomes ? C’est sans doute là que se situe la vraie rupture technologique, car un tel robot résulterait du couplage entre la machine et l’intelligence artificielle. C’est concevable pour des situations opératoires standardisées. Mais alors, pourquoi dans ces conditions utiliser un robot dont la seule mise en place exige, déjà, du temps et de l’énergie ?</p>
<p>Par ailleurs nombreuses sont les situations où il est difficile d’imaginer qu’un robot puisse opérer seul un patient. C’est le cas en traumatologie, où les situations sont toujours singulières. De toute façon, l’intelligence artificielle a ses limites, quoi qu’on en dise, même avec l’arsenal sophistiqué relevant du <em>machine learning</em>. Quid en effet de l’initiative d’un robot face à une variation anatomique propre au patient ? Le chirurgien expérimenté, lui, pourra en tirer profit pour simplifier l’opération et être plus efficace. C’est dans cet énoncé, me semble-t-il, que réside la distinction entre le faire et l’agir. Le travail d’un robot autonome ne sera jamais que de l’ordre du faire dans la mesure où il exécute un programme, quand bien même celui-ci offre une latitude importante pour résoudre des problèmes imprévus. En revanche, la tâche du chirurgien est de l’ordre de l’agir. L’agir implique de prendre en permanence des initiatives, c’est-à-dire de construire l’opération au fur et à mesure que celle-ci se déroule. Je ne parviens pas à concevoir qu’un robot puisse agir au sens qui vient d’être exposé. En tout état de cause, il faut maintenir l’humain dans la boucle de l’hypertechnologisation, ne serait-ce que pour qu’il puisse, le cas échéant, désactiver le dispositif.</p>
<p><strong>Philippe Hubinois :</strong> Rien ne permet d’écarter l’idée d’un robot opérant seul, dans un avenir très lointain. On peut d’ailleurs faire remarquer qu’il existe déjà des systèmes expérimentaux de suture de l’intestin sur l’animal, indépendant de l’action humaine.</p>
<p>Pour des procédures parfaitement « réglées », un système robotisé fonctionnant seul pourrait en théorie aboutir à réaliser la tâche chirurgicale demandée. Mais la chirurgie s’applique à des êtres vivants, tous différents : elle n’est de ce fait jamais parfaitement prévisible. De plus elle est réalisée chez un patient endormi, plongé dans un « coma artificiel » qui n’est pas sans conséquence et dont la durée doit être calculée au plus juste. S’agissant d’une relation de soins, les liens interhumains restent capitaux. Il paraît en l’état impossible d’imaginer qu’un être humain ne soit pas présent quand un robot opérerait seul, ne serait-ce que pour pouvoir « reprendre la main » si une difficulté se présente.</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em><a href="https://www.collegedesbernardins.fr/">Le Collège des Bernardins</a> est un lieu de formation et de recherche interdisciplinaire. Acteurs de la société civile et religieuse entrent en dialogue autour des grands défis contemporains, qui touchent l’homme et son avenir.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/96080/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Au bloc opératoire, les interventions mobilisent de plus en plus de technologie. Des robots permettent de réaliser des gestes inaccessibles à l'homme. Cependant leur supériorité reste à démontrer.Estelle Saget, Cheffe de rubrique Santé + Médecine, The Conversation FranceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/961562018-05-06T20:11:19Z2018-05-06T20:11:19ZElon Musk est-il un super-héros ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/217801/original/file-20180504-166900-w83yi9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=411%2C0%2C1101%2C634&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans le film _Iron Man 2_, Elon Musk (dans son propre rôle, en blanc), rencontre l'une de ses sources d'inspiration : Tony Stark (R. Downey Jr.), célèbre super héros de l'Univers Marvel.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.disneypixar.fr/films/261-iron-man-2">Disney Pixar</a></span></figcaption></figure><p>Le 2 mai 2018, après l’annonce des <a href="http://files.shareholder.com/downloads/ABEA-4CW8X0/6239658125x0x979026/44C49236-1FC2-4FD9-80B1-495ED74E4194/TSLA_Update_Letter_2018-1Q.pdf">résultats du premier trimestre 2018</a> l’action a chuté de 6 % montrant les limites des « super pouvoirs » d’Elon Musk. La réalité est-elle en train de le rattraper ?</p>
<h2>Elon Musk, humain après tout</h2>
<p>Avec ses promesses d’un monde meilleur, moins pollué grâce à ses véhicules électriques, Elon Musk a su galvaniser les foules et les investisseurs. Voiture sans pilote, <a href="https://usbeketrica.com/article/tourisme-spatial-elon-musk-promet-la-lune">tourisme spatial</a>, <a href="https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/aeronautique-defense/lanceurs-reutilisables-spacex-continue-son-show-592474.html">lanceurs de satellites réutilisables</a>… Ses idées futuristes vendent du rêve. </p>
<p>Comble de la communication, il a même envoyé un <a href="https://theconversation.com/tesla-un-magicien-dans-lespace-92224">roadster dans l’espace</a>. Pourtant, ledit rêve a parfois du mal à se concrétiser, comme le rappellent régulièrement les difficultés de Tesla à atteindre ses objectifs. Mais après chaque annonce décevante, Elon Musk rassure sur les perspectives et sur les nouveaux chiffres à atteindre. Cette capacité de conviction lui a permis de propulser Tesla vers les sommets de la capitalisation boursière : le 17 février 2018, la société franchissait la barre des 56,7 milliards de dollars.</p>
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<figcaption><span class="caption">Un roadster Tesla rouge dérive désormais dans l’espace…</span></figcaption>
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<p>Pour certains, <a href="http://bfmbusiness.bfmtv.com/entreprise/elon-musk-et-iron-man-qui-inspire-qui-880759.html">Elon Musk a tout de Tony Stark</a>, le génial et technophile milliardaire de l’éditeur américain de bandes dessinées Marvel. Revêtu d’une armure de combat de sa conception, Stark devient <em>Iron Man</em>, super-héros quasi-invulnérable. </p>
<p>Comme lui, Elon Musk est riche, passionné de haute technologie, audacieux… et condescendant. En effet, ses derniers commentaires <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/automobile/0301637712905-elon-musk-sagace-contre-les-analystes-et-fait-plonger-tesla-en-bourse-2173652.php">méprisants à l’égard des analystes financiers</a> commencent à agacer. Si jusqu’ici sa stratégie a très bien fonctionné, il semblerait qu’aujourd’hui, il ne soit plus en mesure de cacher la réalité. Selon nous, quatre raisons pourraient expliquer la baisse de l’action Tesla.</p>
<h2>Une situation de trésorerie inquiétante</h2>
<p>Lorsqu’on analyse le tableau de flux de trésorerie de Tesla fourni avec les <a href="http://files.shareholder.com/downloads/ABEA-4CW8X0/2355143750x0x979026/44C49236-1FC2-4FD9-80B1-495ED74E4194/TSLA_Update_Letter_2018-1Q.pdf">résultats du 1ᵉʳ trimestre 2018</a> (chiffres non audités), il ne faut pas seulement regarder la position nette à la fin de la période comptable analysée : 3,2 milliards de dollars à fin mars 2018 contre 3,9 milliards à fin décembre 2017, ce qui traduit tout de même une diminution de 745 millions de dollars. Il faut surtout se pencher sur les liquidités générées par les activités opérationnelles (<a href="https://www.investopedia.com/terms/c/cash-flow-from-operating-activities.asp"><em>cash flow from operating activities</em></a> en anglais) qui ressortent fortement négatives à 398 millions de dollars à fin mars 2018.</p>
<p>En d’autres termes, sur chaque voiture produite et vendue, ainsi que sur l’activité stockage d’énergie, Tesla perd de l’argent. À titre comparatif, sur le dernier trimestre 2017, la trésorerie d’exploitation était positive à 510 millions de dollars. Ceci signifie que Tesla a brûlé 908 millions de dollars juste en trésorerie d’exploitation ! Si la société réussit à conserver une position nette positive en fin de période, c’est seulement grâce aux emprunts et émission de capital réalisés précédemment, et à une diminution des investissements.</p>
<h2>Tesla n’arrive pas à générer des profits</h2>
<p>Avec un niveau de marge globale de 19 % à fin décembre 2017, Tesla a généré une perte de 1,96 milliard de dollars. À fin mars 2018, la marge brute sur l’activité automobile (80,2 % des ventes à fin mars 2018) ressort à 19,7 % soit quasiment le même niveau et Tesla affiche une perte de 710 millions de dollars (contre une perte de 330 millions de dollars à fin mars 2017). Plus préoccupant, dans le communiqué de presse annonçant les résultats du premier trimestre 2018, Elon Musk et Deepak Ahuja précisent que la marge sur le Model 3 est toujours <a href="http://files.shareholder.com/downloads/ABEA-4CW8X0/2355143750x0x979026/44C49236-1FC2-4FD9-80B1-495ED74E4194/TSLA_Update_Letter_2018-1Q.pdf">« légèrement négative »</a>. Ils maintiennent leur objectif de marge brute à 25 % dès que la production sera stabilisée à 5 000 unités par semaine.</p>
<p>Mais même si Elon Musk indique que les 5 000 véhicules par semaine seront atteints dans deux mois, le défi n’est pas encore relevé. Le dirigeant a lui-même reconnu <a href="https://theconversation.com/teslas-problem-overestimating-automation-underestimating-humans-95388">« nous avons fait une erreur en introduisant trop de robotisation trop vite »</a> et d’ajouter :</p>
<blockquote>
<p>« À moyen terme, nous pensons atteindre une marge brute légèrement plus basse [que les 25 %] du fait de coûts de main-d’œuvre plus élevés dans certaines étapes de production où nous avons dû faire marche arrière en terme d’automatisation, ainsi que des coûts matières renchéris suite aux nouveaux droits de douane et enfin d’une augmentation du prix de certaines matières premières et d’un dollar plus faible. »</p>
</blockquote>
<p>Malgré l’utilisation à plusieurs reprises du qualificatif « légèrement », ces éléments cumulés sont peu rassurants sur la capacité de Tesla à afficher une marge brute positive à court terme. Pour l’instant la marge brute sur le Model 3 est toujours négative. En avril, déjà, Elon Musk reconnaissait avoir voulu automatiser trop vite Tesla :</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"984882630947753984"}"></div></p>
<blockquote>
<p>« Oui, l’automatisation excessive de Tesla fut une erreur. Pour être précis, mon erreur. Les êtres humains sont sous-estimés. »</p>
</blockquote>
<h2>Tesla va devoir lever des fonds malgré une réduction des investissements</h2>
<p>Tesla avait indiqué dans son rapport annuel 2017 que les investissements en 2018 seraient du même ordre que ceux de 2017, soit plus de 4,4 milliards de dollars. Lors de l’annonce des résultats du 1<sup>er</sup> trimestre 2018, les projections d’investissement (<a href="https://www.investopedia.com/terms/c/capitalexpenditure.asp">Capital Expenditure ou Capex</a> en anglais) ont été revues à la baisse à moins de 3 milliards de dollars. Elon Musk martèle qu’il n’aura pas besoin de financement supplémentaire. Pourtant, sa trésorerie d’exploitation fortement négative, ses investissements (même réduits) ainsi que les échéances auquel le groupe devra faire face (plus de 4 milliards de dollars entre avril 2018 et 2019), sans oublier un endettement de plus de 10 milliards de dollars, montrent clairement que Tesla aura besoin d’argent frais prochainement.</p>
<p>Aujourd’hui Tesla est dans une situation critique. Son endettement financier net s’élève à 213 % à fin mars 2018 (237 % à fin décembre 2017) et son endettement total sur fonds propres atteint les 512,7 % à fin mars 2018 (576 % à fin décembre 2017). Tous les analystes financiers relancent Elon Musk sur cette question légitime de besoin de financement que ce dernier réfute. </p>
<p>Cette fois, néanmoins, son traitement par le mépris et son dédain affiché des experts semble avoir entamé la confiance des marchés. Au-delà du surendettement de Tesla, cette attitude pourrait être une des raisons de la chute du cours du 3 mai. Même si à la clôture, l’action reprenait des couleurs et cotait 284,45 dollars, valorisant encore Tesla à près de 49 milliards de dollars, le cours est en dessous de la barre symbolique des 300 dollars. Et cette première baisse pourrait bien être un prélude à une chute beaucoup plus brutale…</p>
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<figcaption><span class="caption">L’attitude d’Elon Musk lors de la séance de question du dernier « earnings call » de Tesla, le 2 mai, a surpris et irrité (en anglais).</span></figcaption>
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<h2>Une accumulation de départs au plus haut niveau et des signaux forts</h2>
<p>La trésorière et vice-présidente finance de Tesla, Susan Repo, <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2018-03-13/tesla-treasurer-and-vp-of-finance-is-said-to-leave-the-company">est partie de la société en mars 2018</a>, juste après le chef comptable, Éric Branderiz, qui a fait ses cartons le 7 mars. Certes, les mouvements de cadres dirigeants existent dans tous les groupes. Mais peut-on vraiment croire à une coïncidence ? D’autant qu’en février 2018, le responsable des ventes mondiales avait lui aussi quitté le navire, et qu’un an plus tôt, le directeur financier Jason Wheeler démissionnait. Une démission qui avait été annoncée à la veille de la communication sur les résultats trimestriels…</p>
<p>Récent retraité, Deepak Ahuja, qui fut directeur financier de Tesla pendant plus de sept ans, d’août 2008 à novembre 2015, avait alors été rappelé à la rescousse. Rappelons-le, en 2008, c’est lui qui <a href="https://www.mensxp.com/work-life/success-stories/41210-deepak-ahuja-cfo-tesla-the-man-who-saved-elon-musk-s-company-from-bankruptcy.html">avait sauvé Tesla de la faillite</a>. Faut-il voir un signe à ce retour ? Et pourquoi tous ces départs ? Environnement chargé d’adrénaline et de stress ? Conditions de travail difficiles ? Elon Musk précise qu’il dort régulièrement dans l’usine de production de Fremont, Californie et a annoncé que l’usine tournerait 24 heures sur 24 jusqu’à fin juin. Il aurait envoyé un e-mail interne annonçant qu’il allait embaucher 400 personnes supplémentaires par semaine sur les usines de Fremont et de Gigafactory 1. Une nouvelle décision qui risque de renchérir encore les coûts, alors que les marges sont insuffisantes et même négatives sur le Model 3…</p>
<p>À l’heure actuelle, le PDG de Tesla n’a toujours pas réussi à gérer les problèmes de production du Model 3. Sa société est loin d’être rentable, son surendettement ne se réduit pas, et le problème épineux de son financement demeure. Malgré les efforts de communication, le vernis du super-héros invulnérable commence à s’effriter. Les investisseurs ne sont plus dupes, mais ils ont énormément à perdre. Les résultats de production du Model 3, fin juin 2018, constitueront un sérieux test pour les supposés super-pouvoirs d’Elon Musk. Et causeront peut-être la chute de l’homme qui s’était pris pour Iron Man…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/96156/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Chaboud ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Elon Musk ne cache pas son admiration pour Tony Stark, personnage fictif dont l’alter-ego n’est autre que l’invincible Iron Man. Mais les résultats de Tesla le rappellent à la dure réalité…Isabelle Chaboud, Professeur associé d’analyse financière, d’audit et de risk management, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/926362018-03-05T08:10:56Z2018-03-05T08:10:56ZOrthodontiste numérique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/208760/original/file-20180303-65544-kxrgpr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Mâchoire numérisée.</span> <span class="attribution"><span class="source">Dent3D/Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><em>Thierry Viéville et Pascal Guitton, du Blog Binaire, ont proposé a l’orthodontiste Dr Masrour Makaremi d’évoquer les progrès effectués dans les domaines de l’intelligence artificielle et des sciences informatiques sur la pratique médicale au cours des décennies à venir. Cet article est publié en collaboration avec le <a href="http://binaire.blog.lemonde.fr/">Blog Binaire</a></em>.</p>
<hr>
<p>À l’avenir, intelligence artificielle et pratique médicale auront partie liée. Ce constat fait l’objet d’un ample consensus, comme en témoigne par exemple l’investissement de milliards de dollars que les géants du numérique déploient au sein de leurs filiales santé. La précision d’un diagnostic radiologique effectué par un logiciel reposant sur l’apprentissage profond (ou « deep learning », voir par exemple l’<a href="https://interstices.info/jcms/p_83372/l-apprentissage-profond-une-idee-a-creuser">article d’Interstices</a> sur ce sujet) se révèle quantitativement supérieure à celle des meilleurs experts en radiologie ; ce qui n’est pas sans rappeler la victoire emportée par le programme AlphaGo sur Lee Sedol, le champion du monde de go.</p>
<h2>Notre médecine subordonnée aux algorithmes ?</h2>
<p>Cela conduit des personnes comme le docteur Laurent Alexandre à promulguer un courant de pensée qui s’apparente au <a href="https://books.google.fr/books/about/Against_Technology.html">néo-luddisme</a> prévalant de nos jours parmi le corps médical. <a href="http://www.editions-jclattes.fr/la-guerre-des-intelligences-9782709660846">Selon ce spécialiste</a> des révolutions technologiques et de leurs enjeux, l’enrichissement incessant des compétences des robots comporte le risque majeur « qu’en 2030 le médecin soit subordonné à l’algorithme, comme l’infirmière l’est aujourd’hui au médecin ». Tout en ayant le mérite d’amener la réflexion sur les enjeux de l’interface homme-machine (IHM) dans les pratiques médicales, les prédictions afférentes aux stratégies d’automatisation que les multinationales du numérique veulent appliquer au domaine de la santé sont génératrices de défiance et d’angoisse chez de nombreux praticiens.</p>
<p>La spécialité médicale que j’exerce, l’orthopédie dento-faciale (orthodontie), est dans l’œil du cyclone : elle serait vouée à mourir à petit feu, aucun praticien n’arrivant « à la cheville » d’un système basé, entre autres, sur l’intelligence artificielle (IA). J’ai donc voulu relever mon regard vers mon futur bourreau et j’ai fait une chose assez rare : après 10 années d’activité professionnelle, je suis retourné sur les bancs de l’université par le biais d’un Master 2 de neurosciences computationnelles.</p>
<h2>Plus-value du clinicien</h2>
<p>Après cette année d’étude, je n’ai jamais été aussi optimiste quant à la plus-value du clinicien. Aux antipodes du <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/le-mythe-de-la-singularite-jean-gabriel-ganascia/9782021309997">mythe de la singularité technologique</a>, je suis persuadé que la bonne symbiose entre la médecine et l’IA est en quête d’une <a href="https://scholar.harvard.edu/lkatz/publications/computing-inequality-have-computers-changed-labor-market">complémentarité</a> mobilisant une stratégie d’augmentation (par le numérique) de l’activité médicale, résolument distincte d’une stratégie d’automatisation, pour reprendre les termes de <a href="https://www.hbrfrance.fr/magazine/2016/05/10780-au-dela-de-lautomatisation/">Davenport et Kirby</a>. Cette dernière « part des tâches de base qui constituent un poste donné, et vient les soustraire à travers le déploiement d’ordinateurs qui reprennent une à une ces tâches effectuées par des humains dès que celles-ci peuvent être codifiées ». Cependant, tout en assurant « des économies en termes de coûts », ce mouvement vers l’automatisation « circonscrit notre pensée dans un cadre délimité par les paramètres du travail tel qu’il est accompli aujourd’hui ». En revanche, l’augmentation « signifie que l’on part de ce que les humains font aujourd’hui pour arriver à comprendre la manière dont ce travail pourrait être approfondi, et non diminué, par une utilisation plus poussée des machines ».</p>
<p>Pour illustrer les implications possibles de chacune de ces deux stratégies dans le domaine de l’orthopédie dento-faciale, considérons l’<a href="https://www.researchgate.net/publication/303290434_Abord_du_patient_lors_du_protocole_ortho-chirurgical">exemple suivant</a>. Une empreinte 3D des maxillaires effectuée au moyen d’un scanner intra-oral est traitée par un algorithme qui, à partir de ce modèle géométrique, va positionner les arcades dentaires dans une position idéale en fonction de l’anatomie dentaire du patient. À partir de ce résultat numérique est ensuite conçu, à l’aide d’un procédé de conception et fabrication par ordinateur, un dispositif orthodontique (par exemple une bague ou une gouttière) parfaitement adapté au patient. Sa mise en place technique ne demande qu’une compétence clinique limitée. Dans ce schéma thérapeutique, la valeur ajoutée de l’orthodontiste, aussi bien technique qu’intellectuelle, se réduit, de prime abord, à un rôle minime.</p>
<h2>Où l’on voit que ce n’est pas si simple</h2>
<p>Pour que tout se déroule parfaitement suivant un procédé calibré au millimètre près, il faut faire abstraction du fait que les déplacements relatifs aux alvéoles dentaires ont lieu au sein de la face, donc au carrefour de nombreuses fonctions relatives à la bouche et au visage (respiration, mastication, déglutition, phonation, posture linguale…). Ceci a, en autres, une incidence esthétique majeure dans cet environnement biologique de tissu mou et dur réagissant aux contraintes biomécaniques de façon variable d’un individu à l’autre. À ces paradigmes viennent souvent se rajouter les paramètres de croissance faciale complexes et variables qu’il faut prendre en compte.</p>
<p>Tout bien considéré, au contraire de ce que l’orthodontiste peut parfois être amené à croire de lui-même, sa valeur et celle de ses dix années d’études ne résident pas seulement dans sa capacité à mettre en œuvre une procédure technique parfaitement codifiée et maîtrisée, mais aussi dans son aptitude à effectuer un codage des valeurs des différents paramètres faciaux sur une échelle commune (établir une « monnaie commune » des différents paramètres).</p>
<p>Par exemple, dans deux situations cliniques où le positionnement tridimensionnel des arcades est très similaire, les empreintes 3D seront identiques ; qui plus est, si nous ne faisons que suivre l’algorithme, les outils thérapeutiques individualisés seront également très proches. Or, si l’on se transpose dans le contexte biologique au sein de la face, les situations cliniques pourront s’éloigner l’une de l’autre. À travers son diagnostic, le praticien va placer sur la même échelle de valeur, le potentiel de croissance osseuse de la mandibule, une perception esthétique du profil et son devenir ainsi que l’efficience d’une fonction linguale et respiratoire de sorte qu’il décidera de façon quasiment intuitive (sens clinique), en intégrant ces paramètres cliniques dans une même matrice d’analyse. Selon qu’il prône une forte stimulation de la croissance mandibulaire ou des extractions de prémolaires, la planification et l’outil thérapeutiques seront diamétralement différents.</p>
<p>En l’espèce, l’inefficacité de la machine n’est pas due au fait qu’il lui manque encore les données des différents paramètres faciaux qui sont nécessaires à son algorithme et qui, s’ils lui étaient un jour transmis, lui permettraient de « prendre la bonne décision ». Il s’agit plutôt de son incapacité structurelle à forger une « monnaie commune » entre paramètres étrangers les uns aux autres, par exemple, entre une fonction linguale et une esthétique faciale.</p>
<p>En creusant dans différentes spécialités médicales, on arrive à des conclusions similaires. Une incarnation semble nécessaire à ce type de cognition. Les algorithmes vont pouvoir décrypter et analyser des données : voilà en quoi ils sont supérieurs à notre cerveau. Mais lorsqu’il s’agira de les placer dans le contexte global de l’individu de sorte à créer une « monnaie commune » entre différents paramètres, ils seront dans une impasse : il ne leur est pas possible de créer des connaissances pour modéliser le sens clinique. C’est là que réside la plus-value de nos cerveaux – et pour longtemps encore.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/208305/original/file-20180228-36706-1ugoexn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/208305/original/file-20180228-36706-1ugoexn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/208305/original/file-20180228-36706-1ugoexn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/208305/original/file-20180228-36706-1ugoexn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/208305/original/file-20180228-36706-1ugoexn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/208305/original/file-20180228-36706-1ugoexn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/208305/original/file-20180228-36706-1ugoexn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Du patient à la machine.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fourni par l’auteur</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Allier expertise algorithmique et humaine</h2>
<p>Différentes pistes peuvent être envisagées dans le cadre de la stratégie d’augmentation dont il a été question, le défi majeur pour le praticien étant d’accepter de sortir de sa zone de confort pour former un tandem avec l’intelligence artificielle et pour le programmeur de concevoir un modèle au service de la cognition humaine et non son supplétif. S’agissant de l’orthopédie dento-faciale, je proposerais les hypothèses suivantes :</p>
<ul>
<li><p>Mieux connecter le praticien à l’environnement numérique. Rechercher des interfaces plus immersives entre la modélisation 3D issue des algorithmes et le praticien, en prenant en compte le fait qu’au-delà d’un degré de complexité de représentation 3D, le cerveau a du mal à maintenir son attention (d’où l’intérêt pour la réalité virtuelle ou augmentée) ; garder aussi à l’esprit que, vu que notre cerveau fonctionne mieux sur un mode non verbal, nous aurons du mal à expliciter nos intuitions cliniques afin de les transmettre aux dispositifs logiciels</p></li>
<li><p>Faire du praticien une interface efficace. Chercher à former des praticiens capables d’offrir une interface efficace entre le patient et les dispositifs logiciels plus que des techniciens performants qui se placeront en concurrence avec lesdits dispositifs. Cet objectif suppose de considérer la formation en internat non pas comme une simple suite de procédés techniques, mais aussi comme un milieu censé nourrir la connaissance et la sensibilité du praticien à parts égales, de sorte que celui-ci soit à même d’évaluer de façon transversale les paramètres dont dépend la réussite de sa thérapeutique.</p></li>
<li><p>Renforcer les réseaux entre praticiens. Utiliser les capacités du « deep learning », notamment dans la reconnaissance des formes, pour identifier des cas cliniques susceptibles de connecter, grâce à cette reconnaissance, deux praticiens confrontés à des cas cliniques similaires en deux endroits distincts du globe. Offrir aussi à chaque praticien la possibilité de mener des recherches thématiques ou des analyses critiques dans sa propre base de données.</p></li>
</ul>
<p>Valoriser une stratégie d’augmentation dans les rapports entre l’humain et l’intelligence artificielle, pour la médecine de l’avenir, c’est se souvenir des paroles du prix Nobel de littérature <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Isaac_Bashevis_Singer">Isaac Bashevis Singer</a> : « plus la technologie progresse, plus les gens s’intéressent aux possibilités du seul esprit humain ». Face à la révolution technologique à l’œuvre, il importe de faire résonner les mots de l’historien <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Robert_%C3%80_.Rosenstone">Robert Rosenstone</a> : « La révolution, c’est une tentative pour faire aboutir des rêves ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/92636/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Masrour Makaremi dirige un cabinet d'orthopédie dento-faciale à Bergerac.</span></em></p>La médecine inféodée aux algorithmes, ce n’est pas inévitable. Le robot et le clinicien peuvent travailler de concert, par exemple en orthodontie.Masrour Makaremi, Chercheur et chargé d'enseignement au collège de santé (département d'orthopédie dentofaciale), Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/842982017-10-01T20:36:05Z2017-10-01T20:36:05ZEthique du robot et de la robotisation<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/187366/original/file-20170925-17462-1lq00l0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Robots jouets</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Metal_House_Battery_Operated_New_2010_Robots_You_are_Three_Times_a_Robot~~.jpg">D J Shin/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2017 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<hr>
<p>Les robots envahissent de plus en plus notre quotidien – des robots de jeux destinés aux enfants aux robots de déminage de l’armée, en passant par les tondeuses automatiques. Ce mouvement n’en est qu’à ses débuts, et il faut s’attendre à une généralisation des robots dans un futur proche. Quelles questions éthiques pose cette robotisation croissante ?</p>
<p>Il me semble en voir deux principales : qu’a-t-on le droit de faire faire à un robot, d’une part, et les robots sont-ils susceptibles de devenir eux-mêmes des sujets éthiques, d’autre part ?</p>
<h2>Qu’a-t-on le droit de faire faire à un robot ?</h2>
<p>Faire tondre sa pelouse ou passer l’aspirateur à un robot ne semble pas poser de questions éthiques particulières. Mais la robotisation, déjà ancienne, des chaînes d’usine pose déjà une question sociale aiguë en obligeant à repenser ce que peut être l’emploi des humains dans un monde où l’<a href="http://www.usinenouvelle.com/article/mon-pote-ce-robot-des-salaries-racontent-l-impact-du-robot-sur-leur-environnement.N560533">industrie est automatisée</a>. <a href="http://www.coe.gouv.fr/Detail-Nouveaute.html%3Fid_article=1347.html">Ce n’est pourtant qu’un début</a>. Or la généralisation des robots va poser des questions éthiques de plus en plus graves, et il est urgent de réfléchir à ce que nous sommes prêts à leur déléguer. Plusieurs pistes semblent poser des problèmes sérieux. Examinons-en deux, l’univers du service à la personne et les robots tueurs.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/187367/original/file-20170925-17397-4v8w73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/187367/original/file-20170925-17397-4v8w73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=850&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/187367/original/file-20170925-17397-4v8w73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=850&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/187367/original/file-20170925-17397-4v8w73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=850&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/187367/original/file-20170925-17397-4v8w73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1068&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/187367/original/file-20170925-17397-4v8w73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1068&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/187367/original/file-20170925-17397-4v8w73.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1068&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le robot chinois Sanbot, notamment utilisé en milieu hospitalier.</span>
<span class="attribution"><span class="source">QIHAN Technology</span></span>
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<p><strong>Des robots aides-soignants.</strong> De plus en plus de robots sont pensés pour améliorer notre quotidien par leur présence. Quand il s’agit de robots joueurs, comme <a href="http://www.lci.fr/high-tech/cozmo-le-petit-robot-craquant-arrive-en-france-2054341.html">Cozmo</a>, destinés à amuser les enfants, cela ne pose pas plus de questions qu’un simple jeu vidéo (mais pas moins, il est vrai). Mais quand il s’agit de remplacer les aides-soignantes dans un hôpital ou les auxiliaires de vie dans une maison de retraite, ces questions deviennent plus ardues. Le Japon par exemple, développe des <a href="http://www.silvereco.fr/japon-des-robots-infirmiers-pour-assister-les-aidants-et-les-professionnels-des-soins-a-domicile/3152162">programmes de ce genre.</a></p>
<p>Avec le vieillissement de la population, il serait certes dommage de se priver de l’appoint apporté par les robots pour de multiples tâches y compris –pourquoi pas ? – pour jouer au Scrabble. Mais remplacer toutes les aides humaines par des robots revient à priver la personne d’un droit à des relations <em>vraiment</em> humaines. Programmé pour plaire et satisfaire, le robot n’aura jamais la complexité des relations d’un être humain – complexité qui en fait tout le sel.</p>
<p>Certains robots comme <a href="http://www.rtl.fr/actu/environnement/pepper-le-robot-qui-ressent-les-emotions-cartonne-au-japon-7778919189">Pepper</a> au Japon sont déjà capables de vous écouter et de réagir à vos émotions, mais ils sont – par principe – incapables de partager leurs propres soucis existentiels, parce qu’ils n’en ont pas. L’écoute est à sens unique. À moins qu’on programme des robots à simuler des problèmes personnels, ce qui reviendrait à faire vivre la personne aidée dans l’illusion. N’être entouré que de robots ne risque-t-il pas, en définitive, d’engendrer des psychoses, tant l’interaction humaine est indispensable au psychisme ? Le psychanalyste Serge Tisseron a étudié les risques liés à cette <a href="http://www.philomag.com/les-livres/notre-selection/le-jour-ou-mon-robot-maimera-vers-lempathie-artificielle-11958">empathie artificielle.</a></p>
<p>Enfin, d’un point de vue social, la robotisation des auxiliaires de vie dédouane les humains à bon compte du problème de l’aide à apporter aux personnes âgées. C’est, au fond, une élégante manière de se débarrasser de la question. Cette difficulté éthique atteint son sommet quand on envisage d’employer des robots comme <a href="https://theconversation.com/ne-condamnez-pas-les-sex-machines-derniers-avatars-de-la-robotique-48119">assistants sexuels</a>. L’idée même semble psychotique, tant elle revient à prendre un fantasme pour la réalité et un objet artificiel pour un être vivant.</p>
<p><strong>Robots tueurs.</strong> L’autre univers inquiétant est celui des robots tueurs. Actuellement, les armées occidentales, en particulier l’US Army, utilisent déjà des drones armés comme le <a href="http://robots.blog.lemonde.fr/2017/03/16/retraite-du-drone-predator-lheure-du-bilan/">Predator</a>. Mais ces drones ne sont pas autonomes. La décision de tirer ou non est prise <a href="https://theconversation.com/drones-armes-drones-de-combat-et-robots-tueurs-58365">par un être humain qui téléguide l’engin</a>. Mais il est, aujourd’hui, techniquement possible de passer à l’étape suivante et de réaliser <a href="https://theconversation.com/robots-tueurs-et-kamikazes-notre-humanite-en-question-83005">des robots qui décident seuls de tirer ou non</a>, comme notre robot aspirateur décide seul de la manière de contourner un obstacle. Des spécialistes de l’intelligence artificielle ont déjà <a href="http://tempsreel.nouvelobs.com/tech/20170821.OBS3592/robots-tueurs-elon-musk-et-115-autres-experts-avertissent-l-onu-du-danger.html">tiré la sonnette d’alarme</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/187369/original/file-20170925-17414-1sq1mek.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/187369/original/file-20170925-17414-1sq1mek.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/187369/original/file-20170925-17414-1sq1mek.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/187369/original/file-20170925-17414-1sq1mek.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/187369/original/file-20170925-17414-1sq1mek.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/187369/original/file-20170925-17414-1sq1mek.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/187369/original/file-20170925-17414-1sq1mek.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Manifestation contre les robots tueurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sharron Ward for the Campaign to Stop Killer Robots/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
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<p>De tels engins seraient éthiquement insupportables pour deux raisons : <em>primo</em>, décider de tirer est une décision moralement forte, mobilisant de nombreux facteurs et qui relève finalement plus de l’instinct que du calcul. L’abandonner à la froideur rigide d’un logiciel, c’est se vouer à des erreurs meurtrières. <em>Secundo</em>, face à ces erreurs, personne ne serait responsable. Il n’y aurait pas de soldat humain à convoquer devant une commission ou un tribunal. De nouveau, mais à une échelle bien plus grave, l’humanité se délesterait de sa responsabilité.</p>
<h2>Les robots sont-ils susceptibles de devenir des sujets éthiques ?</h2>
<p>Certains veulent déjà doter les robots d’une <a href="https://www.village-justice.com/articles/Quelle-personnalite-juridique-pour-les-robots,24075.html">personnalité juridique</a> pour lever les problèmes de responsabilité. Mais peut-on imaginer un robot à l’intelligence si perfectionnée qu’elle en devienne capable de décisions éthiques au sens fort et, par conséquent, acquiert des droits et des devoirs envers ses compagnons humains ? Si de tels robots étaient possibles, pour le coup, les objections que nous avons émises au point précédent tomberaient, il n’y aurait plus aucune raison de leur refuser les décisions qui, aujourd’hui, relèvent de l’homme.</p>
<p><a href="http://www.atlantico.fr/decryptage/pourra-t-on-inculquer-sens-moral-aux-robots-edouard-kleinpeter-laurent-alexandre-2101792.html">Laurent Alexandre</a>, l’auteur transhumaniste, est persuadé que cette situation va se concrétiser prochainement. <a href="https://blogs.mediapart.fr/jean-paul-baquiast/blog/300714/nick-bostrom-superintelligence-paths-dangers-strategies-oup-oxford-3-juillet-2014">Nick Bostrom</a> invite à s’interroger dès maintenant sur les conséquences des intelligences artificielles morales. <a href="https://questionsdecommunication.revues.org/10988">Paul Dumouchel et Luis Damiano</a> émettent, toutefois, une objection : nul ne réalisera de robot moral parce que ces robots, par définition, seraient capables d’être immoraux et nul n’a envie de voir ce que donnerait un robot vicieux. Il est possible de répondre deux choses à cette objection : <em>primo</em>, rien ne garantit qu’un fou n’essayera pas quand même ; <em>secundo</em>, cela ne tranche pas le débat de principe : un robot peut-il développer un sens éthique ?</p>
<p>Derrière cette question se joue notre conception de la conscience. Si nous acceptons l’idée selon laquelle la conscience humaine ne serait qu’un processus mathématique, il sera un jour ou l’autre possible de la coder informatiquement et les robots nous battront dans tous les domaines, y compris la morale. Mais là est bien la question.</p>
<p>La philosophie débat de cette question depuis longtemps. Par exemple, tout le courant nommé <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ph%C3%A9nom%C3%A9nologie_%28philosophie%29">phénoménologie</a>, né avec le philosophe autrichien Husserl, nie que la conscience soit un simple logiciel. La conscience est esprit, elle ne se laisse pas réduire à sa part calculatoire, aussi vaste et impressionnante soit cette dernière. En particulier, la morale relève bien plus de l’esprit de finesse cher à Pascal que de l’esprit de calcul.</p>
<p>Faire croire le contraire et chercher des robots éthiques ne peut qu’aboutir à des déceptions ou à des drames. Le robot est un outil très perfectionné et très utile. Pas moins, mais pas plus.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/84298/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Matthieu Villemot est membre de l'église catholique. </span></em></p>La généralisation des robots pose des questions éthiques de plus en plus graves. Il est urgent de réfléchir à ce que nous sommes prêts à leur déléguer.Matthieu Villemot, professeur de philosophie à la Faculté Notre-Dame , Collège des BernardinsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/838552017-09-14T20:34:56Z2017-09-14T20:34:56ZRobolution : comment les robots changent nos entreprises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/185721/original/file-20170912-3778-19y2c13.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C637%2C418&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Robots industriels.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://visualhunt.com/f2/photo/15957174136/bf3171afe4/">Kitmondo/Visualhunt.com </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Relayant des formes de mise en garde largement diffusée au cinéma (<em>2001, l’odyssée de l’espace</em>, <em>Terminator</em>, <em>Matrix</em>…), de très nombreux ouvrages récents pointent les dangers de l’essor des technologies numériques et de l’entrée des robots dans nos environnements et en particulier dans les entreprises. De nombreux spécialistes s’en inquiètent, fondant leur pessimisme sur des analyses philosophiques (les dangers liés à un possible asservissement de l’<a href="http://bit.ly/2wVaGst">homme à la machine</a>) ou plus économiques (fin de la « destruction créatrice » à la Schumpeter qui voyait de nouveaux secteurs et emplois prendre le relais de ceux rendus obsolètes <a href="http://bit.ly/2y29Rf3">par le progrès technique</a>).</p>
<h2>La grande mutation technologique en cours</h2>
<p>Certains font pourtant preuve d’un optimisme à toute épreuve, rappelant que les conséquences de la robotisation ne seront pas déterminées par les technologies elles-mêmes mais plutôt par les choix qui nous reviennent en termes d’utilisation de ces technologies (voir, notamment, Andrew McAfee et Erik Brynjolfsson, <a href="http://bit.ly/2h0Iy0y"><em>Machine, Platform, Crowd : Harnessing Our Digital Future</em></a>). Les chiffres avancés aux termes d’études très documentées se révèlent également dissonants.</p>
<p><a href="http://bit.ly/1mj2qSJ">Carl Benedikt Frey et Michael Osborne</a>, deux chercheurs de la Oxford Martin School concluaient en 2013 que 47 % des emplois américains étaient menacés par l’automatisation. Plus récemment, une étude de l’OCDE avançait le <a href="http://bit.ly/2nARw2U">chiffre de 9 %</a>, relativisant, tout en la confirmant (ce n’est quand même pas rien) la menace.</p>
<p>Quoi qu’il en soit, le phénomène, en s’accélérant, va rapidement devenir un élément structurant de l’économie dans les années qui viennent, certains experts n’hésitant plus à qualifier les conséquences de ce que Andrew McAfee et Erik Brynjolfsson appellent « le deuxième âge de la machine » de « quatrième révolution industrielle » ou de « robolution ».</p>
<h2>Une robotisation encore peu effective dans nos entreprises</h2>
<p>Malgré son haut niveau de productivité horaire et la persistance de freins fiscaux et réglementaires à l’embauche, l’industrie française se caractérise plutôt, si on la compare à celle des grands pays développés, par un faible recours aux robots. Selon une récente étude de l’IFR (la <a href="https://ifr.org/">Fédération internationale de robotique</a>), on pouvait dénombrer 127 robots pour 10 000 salariés dans le secteur manufacturier en France en 2015, ce qui plaçait le <a href="https://ifr.org/free-downloads/">pays au 14ᵉ rang mondial</a>, très loin derrière les leaders européens (Suède, Danemark, Allemagne), eux-mêmes loin des chiffres observables dans les pays développés asiatiques (Corée du Sud, Singapour, Japon).</p>
<p>Loin d’être en reste, la Chine devrait voir ses entreprises s’équiper massivement dans les années qui viennent. Entre 2018 et 2020, le taux de croissance des ventes de robots industriels devrait croître de 15 à 20 % par an selon l’IFR. Dans le secteur de la Chimie-Plasturgie, le taux de robotisation apparaît deux fois moins élevé en France qu’en Allemagne. Chiffre étonnant à l’heure où le recours aux robots est parfois présenté comme la dernière planche de salut pour ce qu’il reste de notre industrie, confrontée que se trouve cette dernière à un coût du travail élevé.</p>
<h2>Un inéluctable rattrapage à venir</h2>
<p>À l’analyse, deux grandes raisons émergent pour expliquer cette moindre appétence de nos entreprises pour les robots. La première découle du morcellement du tissu productif. Les robots, qui génèrent des coûts fixes élevés, se trouvent plutôt dans les grandes entreprises ou les ETI, peu présentes en France (où les entreprises demeurent, en moyenne, petites).</p>
<p>La seconde provient des choix stratégiques de nos grandes entreprises, privilégiant externalisation et délocalisation à la robotisation (le fait de chercher des ressources productives bon marché en dehors des frontières permet de conserver des combinaisons productives anciennes plus intensives en travail). Pourtant, même les « pays ateliers » d’Asie investissement massivement dans la robotisation de leurs usines au point de faire sensiblement évoluer leurs combinaisons productives (ceci entretient la large prédominance de l’Asie en termes de répartition du nombre de robots dans le Monde).</p>
<p>Les changements récents, au sein de nombreuses entreprises françaises, renforcent l’idée selon laquelle un réel changement de cap est en cours. Surfant sur les effets favorables des relocalisations en termes d’image, mais aussi sur le développement de nouvelles compétences, désormais plus disponibles, pour travailler avec les robots, de nombreuses entreprises réorientent aujourd’hui leur stratégie.</p>
<p>Paradoxalement, le recours massif aux robots pourrait avoir pour effet de rendre possible un retour d’une partie de l’industrie et de l’emploi industriel en France, comme le justifierait la situation spécifique de notre pays (grand potentiel de robotisation et de relocalisation compte tenu de la relative faiblesse actuelle de ces deux phénomènes par rapport à ce qui est observable dans des pays comparables). Les chiffres provenant des États-Unis permettent, d’ores et déjà, de relativiser les craintes : au cours des 7 dernières années, 260 600 emplois y ont été créés dans l’industrie automobile, alors même que le <a href="http://bit.ly/2pZV68m">recours aux robots s’y intensifiait</a>.</p>
<h2>Le rôle essentiel de la formation</h2>
<p>Comme l’expliquait en mars dernier Christophe Sirugue, alors Secrétaire d’État chargé de l’Industrie, du Numérique et de l’Innovation, « sans formation au numérique, on risque de donner prise à une peur des robots » (<a href="https://www.lesechos.fr/19/03/2017/lesechos.fr/0211892283004_sirugue-souhaite-une---formation-au-numerique---pour-eviter-la---peur-des-robots--.htm"><em>Les Echos</em>, 20 mars 2017</a>). Au-delà de la gestion d’une légitime peur, la formation est seule capable de permettre un développement de compétences techniques permettant à de nouveaux métiers de réellement émerger. <em>Chief digital officers</em>, développeurs, <em>community managers</em>, analystes cybersécurité, pilotes à distance des usines, <em>data scientists</em> (fraîchement métier élu le plus sexy du XXI<sup>e</sup> siècle par la <em>Harvard Business Review</em>)… apparaissent comme autant de métiers porteurs de nouvelles opportunités professionnelles… et requérant des compétences faisant encore largement défaut sur le marché du travail.</p>
<p>Au-delà des compétences techniques, un besoin de compétences spécifiquement humaines émerge également : compétences émotionnelles, relationnelles… toutes ces compétences que ne maîtrisent pas, pour l’instant, les robots et dont le développement (qui suppose lui aussi de réels efforts de formation) deviendra sans doute la condition essentielle des nombreuses créations d’emplois à venir. À ce propos, la riche conférence du 1<sup>er</sup> décembre 2016 s’intitulant <a href="http://bit.ly/2km0u2C">« Au secours, les relations humaines reviennent »</a> amène plusieurs conclusions : la peur de voir les robots remplir toutes les fonctions, bien que légitime, s’avère infondée ; les relations humaines, parfois oubliées, demeurent centrale pour le succès des entreprises et organisations ; de telles relations humaines créatrices de valeur ne s’improvisent ni ne se décrètent : les vrais efforts d’investissement dans les années à venir concernent bien le « capital humain ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/83855/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hugues Poissonnier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’accélération de l’entrée des robots dans les entreprises et le développement de leurs capacités bouleversent en profondeur les stratégies, les structures et les compétences humaines requises.Hugues Poissonnier, Professeur d'économie et de management, Directeur de la Recherche de l’IRIMA, Membre de la Chaire Mindfulness, Bien-Etre au travail et Paix Economique, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/789382017-06-07T20:48:05Z2017-06-07T20:48:05ZLa robotisation mène-t-elle à la fin du travail ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/172417/original/file-20170606-18888-z7jxjj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Robot humanoïde.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://visualhunt.com/f/photo/4038313726/6cdc410cb7/">br1dotcom/Visual Hunt</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié publié en partenariat avec les « 5 articles… en 5 minutes ! » de <a href="http://bit.ly/2qISife">Paris School of Economics</a>. Le titre original de l’article académique est « Robots : vers la fin du travail ? » <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01513006/">PSE Working Papers</a>.</em></p>
<hr>
<p>D’après une étude menée par <a href="http://www.nber.org/papers/w23285">Daron Acemoglu (MIT) et Pascual Restrepo (Boston University)</a>, lorsque l’on introduit un robot à un certain « poste » dans une industrie, il conduit à la destruction de 6,2 postes dans la zone géographique qui l’entoure. Mais que nous enseigne la science économique à ce sujet ? Les robots mènent-ils inévitablement à la disparition du travail ?</p>
<h2>Les effets contrastés du progrès technique sur l’emploi et les inégalités</h2>
<p>Dans les grandes lignes, la science économique nous apprend que le progrès technique profite à certaines catégories de travailleurs et nuit à d’autres. On considère le plus souvent que le progrès technique peut nuire aux travailleurs peu qualifiés, en remplaçant par exemple les poinçonneurs du métro par des tourniquets, des caissières par des scanneurs ou encore des concierges par des digicodes. Il ne faut alors pas minimiser son rôle dans l’augmentation des inégalités entre travailleurs.</p>
<p>Cependant, une innovation peut profiter aux travailleurs peu qualifiés et nuire à certaines catégories de travailleurs qualifiés : ce fut le cas par exemple pour la chaîne d’assemblage inventée par Henry Ford, qui rendit obsolète tout un savoir-faire artisanal dans le domaine de l’automobile, tout en contribuant en même temps à la hausse des salaires ouvriers.</p>
<p>Depuis le milieu des années 1970, l’économie mondiale connaît une nouvelle vague d’innovations – automation, NTIC… – ayant des effets asymétriques selon les catégories de travailleurs considérés. En général, ces innovations sont considérées comme responsables de la hausse des inégalités salariales de la plupart des pays occidentaux au cours des quatre dernières décennies.</p>
<p>Pourtant, il est admis qu’à long terme, le progrès technique est le facteur principal de la hausse extraordinaire des salaires réels et du niveau de vie des consommateurs observée depuis la révolution industrielle. Mais, les récents progrès de la robotique pourraient bien remettre en question cet optimisme et donner raison aux cassandres qui prophétisent la fin du travail.</p>
<h2>Six scénarios, avec ou sans « mécanismes de transferts »</h2>
<p>Dans un <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01513006/">article récent</a>, je considère six scénarios pour éclairer cette question. Dans trois d’entre eux, une classe humaine quasi-oisive se maintient grâce à des transferts prélevés sur la production effectuée par des robots.</p>
<p>Ces transferts peuvent s’effectuer à travers l’État-Providence, le clientélisme d’une oligarchie possédant les robots, ou le maintien néo-fordiste d’emplois tertiaires dont la fonction essentielle serait le versement d’un salaire qui permettrait le maintien du pouvoir d’achat.</p>
<p>En l’absence de mécanismes redistributifs, j’envisage trois autres scénarios. Selon le scénario des rentiers, des dynasties de travailleurs épargnent suffisamment pour que leurs descendants vivent exclusivement de leurs revenus financiers – générés indirectement par les robots ; et cette classe est suffisamment nombreuse pour s’opposer politiquement à la mise en place de mécanismes redistributifs en faveur des travailleurs.</p>
<p>Selon le scénario malthusien, le salaire tombe au niveau du salaire de subsistance et la population humaine diminue, ne laissant subsister qu’une classe de rentiers vivant de la possession des robots. Selon le scénario virtuel, le salaire de subsistance lui-même baisse considérablement sous l’effet des nouvelles technologies : la population se maintient en dépit des baisses de salaire.</p>
<h2>La menace des robots autoformés</h2>
<p>Ces scénarios me permettent d’avancer que l’émergence de robots flexibles et capables d’apprendre pourrait représenter une réelle menace pour les emplois, car elle permettrait la production massive de substituts peu coûteux à toutes les formes de travail humain.</p>
<p>Dans ces conditions, redéployer les ressources humaines libérées par l’autonomisation vers de nouvelles activités ne sera plus possible, puisque ces nouvelles tâches pourront également être effectuées par des robots.</p>
<p>Ainsi, la robotisation achèverait la transition vers une société ou l’expression « gagner sa vie » n’aura plus de sens. La consommation des humains sera financée par les revenus des robots qu’ils possèdent, des transferts redistributifs, et son caractère gratuit car largement virtualisée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/78938/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gilles Saint-Paul a reçu des financements de Paris Sciences Lettres, OSE, CEPREMAP</span></em></p>Six scénarios pour analyser l’impact de la robotisation sur le travail et l’emploi.Gilles Saint-Paul, Économiste, Chaire associée, Paris School of Economics – École d'économie de ParisLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/760572017-04-20T18:16:41Z2017-04-20T18:16:41ZL’intelligence artificielle, bientôt candidate à l’Élysée ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/165041/original/image-20170412-25870-1hmlw65.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Démonstration des capacités de Watson dans le jeu « Jeopardy ! » en 2011</span> <span class="attribution"><span class="source">Rosemaryetoufee / Wikimedia commons</span></span></figcaption></figure><p>En février 2011, à l’issue de trois manches, un dénommé Watson battait à plate couture deux champions du jeu « Jeopardy ! » et remportait le gain de 1 million de dollars. Or <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Watson_(intelligence_artificielle)">Watson</a> n’est autre qu’un programme d’intelligence artificielle (IA) développé par IBM. Et l’événement, abondamment commenté, démontrait donc que l’IA n’était plus confinée à des jeux comme les échecs, mais pouvait répondre à des questions de culture générale formulées en langage naturel.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/165043/original/image-20170412-25888-f9yzuk.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/165043/original/image-20170412-25888-f9yzuk.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/165043/original/image-20170412-25888-f9yzuk.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/165043/original/image-20170412-25888-f9yzuk.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/165043/original/image-20170412-25888-f9yzuk.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/165043/original/image-20170412-25888-f9yzuk.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/165043/original/image-20170412-25888-f9yzuk.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’une des premières versions de Watson, conçu par IMB, dans les bureaux de Yorktown Heights, à New York, en 2011.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Clockready/Wikimedia</span></span>
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</figure>
<p>Plus récemment, lors des débats télévisés entre les principaux prétendants au poste suprême de président de la République, la mise en scène évoquait sans ambiguïté les jeux populaires en France comme « Question pour un champion », « Des chiffres et des lettres » ou encore « Jeopardy ! » aux États-Unis. On y voyait des candidats qui s’affrontaient debout derrière des pupitres, avec des temps de réponse chronométrés, et des résultats s’affichant en temps réel. Tout était là, jusqu’aux codes et aux couleurs du genre. D’où cette question, volontairement provocatrice…</p>
<h2>Que donnerait le débat d’une IA face à des politiques ?</h2>
<p>Avant de répondre, résumons la situation de part et d’autre. Depuis la victoire de Watson, les avancées spectaculaires de l’IA, notamment dans le domaine de l’apprentissage profond ou <a href="https://www.amazon.fr/Comprendre-Deep-Learning-introduction-neurones/dp/B01MSFLMFD/"><em>deep learning</em></a>, ont suscité de très nombreux questionnements. Les <a href="http://www.courrierinternational.com/article/2010/06/17/paroles-de-technoprophete">technoprophètes</a> du <a href="http://example.com/https://fr.wikipedia.org/wiki/Transhumanisme">transhumanisme</a> prédisent l’avènement dans un futur proche d’une super-intelligence qui prendrait en main la destinée de la planète après une envolée exponentielle de ses capacités. Pour certains, cette « singularité technologique » serait une véritable bénédiction. Pour d’autres, elle mettrait inévitablement fin à l’espèce humaine.</p>
<p>Sans aller jusqu’à ces points de vue extrêmes, il est certain que dans les années à venir, l’IA impactera profondément de nombreux secteurs d’activité, et les métiers qui leur sont associés. Mais dans le même temps, on ne peut qu’observer avec amertume la méfiance et le discrédit croissant des citoyens envers les institutions et les acteurs de la sphère politique. Les symptômes sont nombreux : désengagement dans les représentations traditionnelles que sont les partis politiques et les syndicats, absentéisme record aux élections, vote contestataire pour les extrêmes, personnalités politiques régulièrement décriées pour leur manque d’efficacité ou leurs agissements dans certaines affaires, etc. Il ne sert à rien de se voiler la face : les bases institutionnelles de nos démocraties représentatives branlent de toutes parts.</p>
<p>Vu la défiance des Français envers leur classe politique et l’accélération des progrès en IA, la réponse à notre question ne fait donc aucun doute : une IA aurait une chance non négligeable de battre les candidats humains. D’ailleurs, dans un sondage mené en février 2017 par Opentext auprès de 2000 Français, près d’un tiers d’entre eux pensait qu’une technologie intelligente prendrait de meilleures décisions que le gouvernement. Il n’y aurait donc pas que certaines catégories de métiers, comme les chauffeurs de taxi ou les radiologues, touchés par l’essor de la robotisation et de l’IA : les ministres et même le président de la République pourraient perdre leur travail !</p>
<h2>La campagne « Watson 2016 », un sujet plus sérieux qu’il n’y paraît</h2>
<p>En 2016, déjà, lors de l’élection présidentielle américaine, l’un des candidats annoncés n’était autre que Watson. Sur son site de campagne, on pouvait lire : « Nous pensons que les capacités uniques de Watson pour analyser l’information, et prendre des décisions éclairées et transparentes, en font un candidat idéal pour le poste à responsabilités que représente celui de président. » S’en suivait un argumentaire étayé, qui vantait les mérites des capacités d’analyse de l’IA, avec la prise en compte de tous les aspects d’un problème, l’évaluation des qualités et des défauts de chaque décision et leur impact potentiel sur l’économie, l’environnement, l’éducation, la santé, la diplomatie et les libertés publiques.</p>
<p>Dans les faits, il ne s’agissait pas d’une véritable candidature portée par IBM, mais d’une initiative personnelle de l’artiste et designer <a href="http://aaronsiegel.net/">Aaron Siegel</a>. Son objectif ? « J’espère que cela poussera les gens à discuter du potentiel de l’intelligence artificielle dans la politique. », déclarait-il dans un entretien alors accordé à la <a href="http://www.lemonde.fr/pixels/article/2016/02/17/une-intelligence-artificielle-en-campagne-pour-la-maison-blanche_4866921_4408996.html">presse</a>. On peut sourire à cette idée, mais le sujet est en fait plus sérieux qu’il n’y paraît. Car le monde actuel est devenu si complexe qu’il est difficile d’analyser globalement une situation et les impacts d’une décision.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/165073/original/image-20170412-25888-9j7ekx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/165073/original/image-20170412-25888-9j7ekx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/165073/original/image-20170412-25888-9j7ekx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/165073/original/image-20170412-25888-9j7ekx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/165073/original/image-20170412-25888-9j7ekx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/165073/original/image-20170412-25888-9j7ekx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/165073/original/image-20170412-25888-9j7ekx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Représentation de la complexité économique en France en 2015.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Image retouchée issue de The Observatory of Economic Complexity</span></span>
</figcaption>
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<p>On peut se représenter cette complexité comme un grand réseau dynamique multidimensionnel. Avec plusieurs enjeux majeurs : l’épuisement progressif des ressources planétaires, le réchauffement climatique, les conflits armés, l’omniprésence du terrorisme, la surpopulation, l’économique mondialisée, la lutte contre la pauvreté… pour ne citer que les plus évidents. Le plus souvent, les décisions qui sont prises n’ont pour objectif que de résoudre un problème « local ». Mais les « effets de bord » sur d’autres noeuds du réseau peuvent être importants : à titre d’exemple, une décision prise pour assurer le seul équilibre financier du système de retraite a des conséquences multiples, directes et indirectes dans toute la société.</p>
<h2>L’IA : un outil pour moderniser les instances de gouvernance</h2>
<p>Avec les avancées récentes de l’IA, on prend conscience de la complémentarité entre l’intelligence humaine et celle des machines. Pour simplifier, la première, généralement, prend ses décisions de façon émotionnelle et avec empathie, en tenant compte du contexte, avant de rationaliser ses choix. La seconde, quant à elle, analyse méthodiquement les données mises à sa disposition, avant de prendre une décision logique. La question n’est donc pas tant de remplacer les politiques par des IA, mais de moderniser les instances de gouvernance. Entre autres, en les dotant d’outils d’analyse et de prise de décision à la hauteur des enjeux.</p>
<p>Pour rester dans la course de l’IA déjà engagée au niveau mondial, la France a récemment annoncé sa stratégie. Mais en dépit de recommandations pour faire de l’État un pionnier dans l’<a href="http://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/2017/Rapport_synthese_France_IA_.pdf">adoption de l’IA</a>, les actions envisagées restent timides et, surtout, la sphère politique y est totalement absente.</p>
<p>Dans une telle perspective, outre un investissement important de recherche et développement, plusieurs problématiques restent à aborder. Dont celle de l’objectivité des analyses face à des biais possibles, ou encore la transparence des décisions. La complexité des situations et le côté « boîte noire » de certaines technologies, comme les réseaux de neurones profonds, compliquent en effet l’explication d’une décision dont la justification résiderait dans un réseau complexe de causes et de conséquences. Cela ne rend pas la tâche aisée face à certains discours qui nient la complexité du monde, en proposant des discours simplistes pour susciter l’adhésion de l’opinion publique.</p>
<p>Ajoutons pour conclure que la science-fiction a depuis longtemps imaginé des sociétés gouvernées par des IA. Ainsi, la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Culture">Culture</a> inventée par l’écrivain écossais <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Iain_Banks">Iain M. Banks</a> est une parfaite utopie où l’humanité, entièrement gérée par des IA, est devenue une civilisation multiforme, décentralisée, pacifiste, tolérante, éthique. Les culturiens y jouissent d’une durée de vie étendue, et passent la majorité de leur temps en loisirs. Mais tout n’y est pas si simple. Car l’utopie n’est jamais très loin de la dystopie et du cauchemar.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76057/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Claude Heudin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans un monde complexe, où il est difficile d’analyser globalement une situation et les impacts d’une décision, l’intelligence artificielle pourrait être un nouvel outil au service des politiques…Jean-Claude Heudin, Directeur IIM & Chercheur Intelligence Artificielle, Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/753312017-04-05T22:38:32Z2017-04-05T22:38:32ZLa 5G : une bombe économique à venir… et à préparer<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/163693/original/image-20170403-21960-v9leh7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C970%2C361&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La 5G, un progrès spectaculaire.</span> </figcaption></figure><p>Numérisation, digitalisation, robotisation : autant de phénomènes en cours qui, à défaut de toucher toutes les entreprises, pour le moment, sont décrits comme porteurs de bouleversements majeurs sur le travail. Certains prospectivistes envisagent ce qu’ils qualifient de « fin du travail », légitimant des propositions telles que le « revenu universel », popularisé par le candidat socialiste à l’élection présidentielle.</p>
<p>La réalité est sans doute plutôt celle d’une évolution, plus ou moins forte, du travail (selon l’OCDE, seuls 9 % des emplois actuels seraient menacés à terme <a href="http://bit.ly/2nARw2U">par la robotisation</a>, chiffre à comparer aux nouveaux emplois créés). En ce qui concerne les créations d’emplois, les chiffres associés au <a href="http://cnet.co/2nOWjyN">déploiement de la 5G à partir de 2020</a> sont plus qu’enthousiasmants (nous n’évoquerons pas ici les aspects sanitaires, pourtant essentiels, sans doute trop souvent minimisés et qui nécessiteraient bien plus qu’une tribune).</p>
<p>Une récente étude du cabinet anglais <a href="http://bit.ly/2mvjOM8">IHS Markit</a> envisage la création de 22 millions d’emplois au niveau mondial d’ici 2035, en lien direct avec le développement de la 5G.</p>
<h2>Vers la vraie révolution numérique ?</h2>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/163698/original/image-20170403-21938-za7il9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163698/original/image-20170403-21938-za7il9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163698/original/image-20170403-21938-za7il9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163698/original/image-20170403-21938-za7il9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163698/original/image-20170403-21938-za7il9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163698/original/image-20170403-21938-za7il9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163698/original/image-20170403-21938-za7il9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163698/original/image-20170403-21938-za7il9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les caractéristiques de la 5G.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://vonguru.fr/2015/10/05/orange-autorise-a-tester-5g-a-belfort/">vonguru.fr</a></span>
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<p>Annoncée régulièrement, sans que de réels bouleversements ne lui soient associés, la véritable révolution numérique est peut-être sur le point d’émerger avec la 5G. Ses effets sur l’industrie s’annoncent colossaux.</p>
<p>Prévue pour fin 2020, après un premier test dès les prochains Jeux olympiques de <a href="http://bit.ly/2nOPVYc">2018 à Pyeongchang</a>, la 5G doit proposer une performance globale des réseaux 1 000 fois supérieure à leur performance actuelle.</p>
<p>Au-delà du débit et de la rapidité d’accès aux données, la technologie devrait favoriser le développement de services encore au stade des balbutiements aujourd’hui : domotique, réalité virtuelle, conduite à distance, objets connectés… : une véritable relance, voire la réunion de conditions d’émergence, pour plusieurs industries d’avenir. On comprend mieux dès lors les chiffres avancés au moment d’évaluer les impacts sur l’économie mondiale.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/163695/original/image-20170403-21960-1b4tf3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163695/original/image-20170403-21960-1b4tf3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163695/original/image-20170403-21960-1b4tf3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=334&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163695/original/image-20170403-21960-1b4tf3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=334&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163695/original/image-20170403-21960-1b4tf3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=334&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163695/original/image-20170403-21960-1b4tf3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=420&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163695/original/image-20170403-21960-1b4tf3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=420&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163695/original/image-20170403-21960-1b4tf3m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=420&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les opérateurs français se préparent à la 5G (ici Bouygues).</span>
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<p>Pas de moins de 12 000 milliards d’euros de retombées économiques au niveau mondial doivent accompagner la création des 22 millions d’emplois évoqués plus haut, toujours selon le cabinet IHS Markit, chiffres faisant l’objet par ailleurs d’un large consensus.</p>
<h2>Des effets réels à relativiser</h2>
<p>Comme pour toute (r)évolution technologique, les impacts associés à la 5G ne seront bien sûr pas les mêmes pour tous les secteurs d’activités, ni pour toutes les entreprises au sein d’un même secteur (certains parviennent toujours à mieux tirer leur épingle du jeu).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/163696/original/image-20170403-21963-vpp8bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163696/original/image-20170403-21963-vpp8bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163696/original/image-20170403-21963-vpp8bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=293&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163696/original/image-20170403-21963-vpp8bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=293&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163696/original/image-20170403-21963-vpp8bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=293&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163696/original/image-20170403-21963-vpp8bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=368&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163696/original/image-20170403-21963-vpp8bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=368&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163696/original/image-20170403-21963-vpp8bl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=368&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Comment Nokia voit le déploiement de la 5G et ses effets.</span>
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</figure>
<p>Au-delà des opérateurs télécoms, le premier secteur qui bénéficiera des retombées de la 5G, et de loin, sera l’industrie manufacturière (3 364 milliards de dollars de retombées économiques). La vente, les services publics ou la construction en bénéficieront également massivement.</p>
<p>En ce qui concerne les pays, des inégalités se dessinent déjà compte tenu des investissements réalisés ou prévus, même si ces chiffres peuvent toujours évoluer. Derrière la Chine, les États-Unis, et plusieurs autres pays (Japon, Corée du Sud, Finlande, Suède, Allemagne…), la France ne se prépare que modestement et souffre d’un réel déficit d’investissements publics, notamment par rapport à un pays voisin comme l’Italie. L’étude table sur 85 milliards de revenus et 400 000 nouveaux emplois d’ici à 2035 pour notre pays (contre 3 500 milliards de revenus pour la Chine et 719 pour les États-Unis).</p>
<p>Toujours difficile à évaluer, l’impact des investissements publics n’est, de plus, pas toujours celui qui était escompté. Certains investissements semblent pourtant moins aléatoires que d’autres. À en croire les chiffres évoqués plus haut, il semble difficile, voire dangereux, de ne pas réagir dès aujourd’hui.</p>
<p>Ce qui est vrai pour les pouvoirs publics (dont dépend une partie essentielle des investissements) l’est également pour les entreprises. Une telle suggestion ne serait bien sûr pertinente qu’une fois les aspects sanitaires (liés notamment aux effets des ondes émises, en lien avec la multiplication des antennes relais) évalués avec précision, si toutefois les conclusions vont bien dans le sens d’impacts réduits. Ici réside une première étape à la fois essentielle et urgente.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/75331/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hugues Poissonnier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le déploiement de la 5G peut générer d’importants effets économiques. Ces effets s’avéreront toutefois dépendants des investissements consentis par les acteurs économiques.Hugues Poissonnier, Professeur d'économie et de management, Directeur de la Recherche de l’IRIMA, Membre de la Chaire Mindfulness, Bien-Etre au travail et Paix Economique, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/721592017-02-14T21:25:40Z2017-02-14T21:25:40ZPour une « bonne » consommation<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/156383/original/image-20170210-23331-n62zpn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Proposer aux consommateurs des expériences et des apprentissages, pas seulement des produits. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/download/confirm/574301698?src=seXYZkCL5sQTou6-AwsFRw-3-27&size=huge_jpg">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p><em>Consommer autrement, mieux, moins ? Le 26 janvier dernier, <a href="http://www.lobsoco.com/">L’Obsoco</a> organisait à l’ESCP Europe une journée de réflexion sur le thème <a href="http://www.lobsoco.com/le-cercle-colloque-du-26-janvier-2017/">« Dé-penser la consommation »</a>. Partenaire de ce colloque, The Conversation publie les différentes interventions des chercheurs participants. Des podcasts du colloque, réalisés par <a href="https://www.moustic.fr/">Moustic The Audio Agency</a>, sont à découvrir à la fin de chaque article.</em></p>
<hr>
<p>Au cours de la dernière décennie, économistes et psychologues ont été de plus en plus nombreux à se pencher sur les ressorts du bonheur ou, à tout le moins, du <a href="https://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=RFE_123_0035">« bien-être subjectif »</a>. Ils convergent en général autour de l’idée que, passé un certain seuil, l’accroissement de la richesse à l’échelle d’un pays a, au pire, un effet nul, au mieux, un effet limité sur le sentiment de bien-être de la population.</p>
<p>À cette limite endogène des promesses de la société de consommation s’ajoute avec de plus en plus d’évidence l’impasse écologique à laquelle mène la logique du « toujours plus ».</p>
<p>Faut-il pour autant rejeter en bloc la consommation et promouvoir la frugalité ?</p>
<h2>Deux façons d’envisager le bonheur</h2>
<p>Outre qu’elle reviendrait à négliger le rôle de la consommation dans le circuit économique, la radicalité d’une telle posture pêche par son manque de nuance.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/156385/original/image-20170210-23361-1j9zsrc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/156385/original/image-20170210-23361-1j9zsrc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/156385/original/image-20170210-23361-1j9zsrc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=592&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/156385/original/image-20170210-23361-1j9zsrc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=592&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/156385/original/image-20170210-23361-1j9zsrc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=592&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/156385/original/image-20170210-23361-1j9zsrc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=744&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/156385/original/image-20170210-23361-1j9zsrc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=744&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/156385/original/image-20170210-23361-1j9zsrc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=744&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le Comptoir local, un acteur des circuits courts en Île-de-France.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.instagram.com/p/6jx6ZNBbFB/?taken-by=lecomptoirlocal">Comptoir local</a></span>
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</figure>
<p>Toutes les consommations ne se valent pas, tant sur le plan de la contribution au bien-être individuel que sur celui de l’impact environnemental et sociétal. Sur ce dernier point, l’<a href="http://www.developpement-durable.gouv.fr/leco-conception-des-produits">écoconception</a>, l’agriculture bio ou « raisonnée », les circuits courts, l’économie circulaire, l’<a href="http://www.novethic.fr/lexique/detail/economie-de-fonctionnalite.html">économie de la fonctionnalité</a>… sont autant de pistes qui montrent la voie d’une « bonne » consommation.</p>
<p>Sur la capacité de la consommation à contribuer au bien-être individuel, les travaux précurseurs de l’économiste <a href="http://www.persee.fr/doc/reco_0035-2764_1980_num_31_2_408530_t1_0378_0000_001">Tibor Scitovsky</a> invitent à penser que, si certaines consommations échouent à produire un surcroît de bien-être subjectif durable, d’autres ont la faculté de contribuer à l’épanouissement des personnes.</p>
<p>Les travaux de recherche récents, reprenant les termes d’un débat qui opposait déjà les philosophes antiques, insistent sur la distinction qu’il convient d’opérer entre deux approches du bonheur. Le bonheur « hédonique » réside dans la maximisation des plaisirs et la minimisation des peines. C’est celui-ci qui, dans son rapport à la consommation, semble être voué à la saturation dès lors qu’un certain niveau de vie a déjà été atteint et qui condamne à une fuite en avant dans le « toujours plus » pour tenter d’entretenir la flamme.</p>
<p>Le bonheur « eudémonique », lui, passerait par la découverte et le développement par chacun de son « daimon », c’est-à-dire de sa nature profonde, de ses dispositions, de ses talents, de ses goûts. Autrement dit, un bonheur qui passe par la réalisation personnelle, le développement de soi, le sens donné à la vie. Cette approche humaniste du bonheur – qui n’exclut pas le plaisir hédonique – ouvre des perspectives intéressantes pour dessiner les contours d’une « bonne » consommation.</p>
<h2>Le souci de l’expérience</h2>
<p>Les marques et les enseignes qui œuvrent sur les marchés de la consommation ressentent de plus en plus clairement les limites d’un modèle, issu du capitalisme industriel, qui repose avant tout sur l’« avoir ». Leur engagement dans <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2006-3-page-99.htm">des approches « expérientielles »</a> témoigne d’une certaine prise conscience de l’intérêt de déplacer le centre de gravité de la relation marchande de l’« avoir » à l’« être ».</p>
<p>Autrement dit, ne pas se contenter de « faire la vente », mais se soucier de faire vivre au client une « expérience », c’est-à-dire un moment valorisé, parfois mémorable, contribuant à transformer la personne. Ce souci de l’expérience ne doit pas se limiter – comme c’est malheureusement trop souvent le cas – à l’expérience d’achat, dans le but de stimuler le désir d’acheter.</p>
<p>Il doit s’étendre à l’expérience de consommation, c’est-à-dire aux moments où le client s’efforce de jouir des effets utiles potentiellement contenus dans son achat. Il reste encore énormément à faire dans cette direction, notamment en centrant la relation commerciale sur la coproduction avec le client de solutions à des problèmes ciblés. Cette perspective est d’autant plus attrayante que, en mettant l’accent sur la finalité de la consommation plus que sur les moyens matériels permettant de l’atteindre, on entrevoit des <em>business models</em> (tels que l’économie de la fonctionnalité) dans lesquels la rentabilité dépend des économies en ressources naturelles.</p>
<h2>Exprimer ses facultés</h2>
<p>Le psychanalyste Erich Fromm, dès 1976 dans <a href="http://next.liberation.fr/livres/2000/10/19/etre-ou-avoir-une-question-de-fromm_341180"><em>Avoir ou être</em></a>, mettait en avant que le « mode être » se caractérise par le fait d’être en activité, d’employer « les pouvoirs humains », d’exprimer ses facultés. Autrement dit, « être » passe par « faire ».</p>
<p>Le bien-être eudémonique découlerait ainsi de l’engagement dans des activités qui mobilisent les compétences et les talents de la personne qui en tire alors à la fois la satisfaction de l’exploitation de ses potentialités et le développement de ses compétences par l’usage.</p>
<p>Le psychologue <a href="https://www.cgu.edu/people/mihaly-csikszentmihalyi/">Mihaly Csikszentmihalyi</a> est à l’origine d’un vaste ensemble d’études qui se sont attachées à définir les caractéristiques des activités susceptibles de produire un <a href="http://www.psychomedia.qc.ca/psychologie-positive/2013-05-14/definition-experience-optimale-flux">état de « <em>flow</em> »</a>, c’est-à-dire un état mental marqué par une absorption de l’individu dans l’activité, générateur d’un sentiment de plénitude, et dont il ressort grandi. L’expérience du <em>flow</em> et des bénéfices sur la structuration du soi peut se vivre dans l’exercice de l’activité professionnelle.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/fXIeFJCqsPs?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Mihaly Csikszentmihalyi: Flow, the secret to happiness » (TED, 2008).</span></figcaption>
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<p>De fait, eu égard à l’importance de la part de la vie qui est consacrée au travail et au rôle des identités professionnelles dans la construction et l’image de soi, ce qui se « fait » au travail est essentiel. Mais, plus proche des problématiques de consommation, l’état de <em>flow</em> et, plus généralement le bien-être eudémonique seraient souvent le produit des activités de loisirs.</p>
<p>Comment ne pas être frappé par l’engouement croissant des populations des pays riches pour les activités qui impliquent de « faire » : à l’essor déjà ancien des pratiques sportives et artistiques s’est plus récemment ajouté l’engouement pour le bricolage, le jardinage, la cuisine, la couture, les loisirs créatifs, la création d’objets… Comme si les individus, désorientés face à un monde déboussolé, cherchaient dans le « faire » une forme de consolidation de leur identité, un sentiment d’autonomie, une réponse à leur quête de sens et, bien souvent, des opportunités de lien social authentique fondé sur des centres d’intérêt partagés.</p>
<p>Avec l’<a href="http://www.lobsoco.com/lobservatoire-du-faire/">Observatoire du faire</a> lancé par l’<a href="http://www.lobsoco.com/">ObSoCo</a> en 2016, nous avons voulu en savoir plus, à la fois sur le degré et les formes d’engagement des Français dans le « faire » et sur ses effets sur le bien-être. 24 activités de loisirs actifs ont ainsi été passées au crible. Elles partagent de conduire les pratiquants à produire un résultat : un artefact physique (bricolage, jardinage, fabrication/restauration d’objets…), une performance (sports, théâtre, danse…), une « œuvre » (création musicale sur ordinateur, arts graphiques, écriture…)…</p>
<h2>Des activités qui contribuent au bien-être</h2>
<p>Trois résultats principaux émergent des données recueillies.</p>
<p>Premièrement, les Français sont massivement investis dans le « faire ». Pas moins de 93 % des quelque 5000 personnes interrogées ont pratiqué au moins occasionnellement l’une des 24 activités étudiées au cours des 12 derniers mois. Parmi elles, 85 % (soit 79 % de la population totale) se déclarent « passionnées » par l’une au moins des activités pratiquées.</p>
<p>Deuxièmement, le degré d’engagement des individus dans le « faire » (appréhendé par le nombre d’activités pratiquées et la fréquence de la pratique, le niveau d’effort ressenti durant la pratique, le niveau autoévalué des compétences mobilisées…) est positivement corrélé à la fois au degré de satisfaction exprimée par les individus à l’égard de leur existence, à une mesure du niveau général de bien-être eudémonique, ainsi qu’au niveau de bien-être psychologique.</p>
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<p>Troisièmement, les activités de loisirs actifs sont inégales dans leur capacité à contribuer au bien-être. Les plus performantes sur ce point sont celles qui répondent à des motivations intrinsèques (pratiquée davantage pour elle-même davantage que pour le résultat qui en est attendu), qui impliquent la créativité du pratiquant et qui lui permettent d’enrichir sa vie sociale. Mais plus encore, c’est le niveau d’investissement consenti par la personne dans l’activité qui détermine le niveau des gratifications qui en est issu.</p>
<h2>Des gratifications et des efforts</h2>
<p>Ces résultats soulèvent un paradoxe : pourquoi le « faire », en dépit de ses effets bénéfiques, n’apparaît-il pas de manière générale comme une priorité dans la manière dont les individus allouent leur temps ? Pas seulement le partage entre temps de travail et de temps de loisirs, mais aussi entre les différentes activités de loisir.</p>
<p>Par exemple, pourquoi consacrons-nous en moyenne <a href="http://www.mediametrie.fr/television/actualites/nouvel-article-audience-le-mag-pourquoi-regarde-t-on-plus-ou-moins-la-television.php?id=208">3h40 par jour</a> à regarder la télévision (soit plus de 40 % du temps non contraint), alors qu’il a été montré qu’il s’agit d’une activité <a href="http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2016/10/26/31003-20161026ARTFIG00242-michel-desmurget-la-television-nous-coute-presque-trois-ans-d-esperance-de-vie.php">conduisant souvent à l’apathie</a> et qui est négativement corrélée au sentiment subjectif de bien-être ?</p>
<p>Une partie de l’explication réside sans doute dans le fait que les gratifications issues du « faire » réclament un investissement préalable dans des compétences de base, dont l’apprentissage, parfois ingrat, réclame un effort. La valeur consumériste du plaisir facile et immédiat s’oppose à l’engagement de l’effort susceptible de déboucher le cercle vertueux qui lie les gratifications retirées de l’activité à un surcroît d’investissement. Il est effectivement plus facile, surtout après une dure journée de travail, de s’affaler devant sa télévision que d’apprendre à jouer du violon…</p>
<p>Il y a donc un enjeu de politique publique associé à la promotion du « faire ». L’Observatoire du faire confirme que c’est souvent durant l’enfance que se font les premiers pas vers des activités qui peuvent donner du sens à une vie entière. Il convient donc de réfléchir aux moyens de multiplier les occasions de contact, à tous les âges de la vie, avec des activités susceptibles de révéler à chacun ses goûts et ses dispositions.</p>
<h2>Se préparer à l’avenir</h2>
<p>Et si la puissance de séduction de marketing s’exerçait au profit de la promotion du « faire » ?</p>
<p>Selon nos estimations, le marché du « faire » (matériel, fourniture, services…) s’élève à environ 95 milliards d’euros, soit deux fois plus que le marché de l’habillement et de la chaussure. Certaines grandes entreprises se sont déjà (re-)positionnées dans cette direction, dans le bricolage et la décoration, le jardinage, la cuisine ou les loisirs créatifs, notamment.</p>
<p>Elles se soucient alors de promouvoir des produits simples à utiliser ; elles ont compris l’importance d’accompagner leurs clients dans l’apprentissage des compétences de base, par la production de didacticiels, la diffusion de vidéos, l’organisation des cours. Les plus hardies accompagnent leurs clients dans la pratique en leur donnant accès aux infrastructures et équipements nécessaires (voir les Décathlon Villages ou le TechShop de Leroy Merlin) ou prennent part à l’animation de communautés de pratiquants. Les médias commencent aussi à percevoir les attentes latentes en la matière qui, de <em>Top Chef</em>, à <em>The Voice</em> en passant les <em>Prodiges</em> ou _ <a href="https://theconversation.com/lamateur-a-ses-pinceaux-71204">À vos pinceaux</a> _ valorisent la pratique amateur.</p>
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<p>Orienter le modèle de consommation de l’« avoir » vers le « faire » serait de nature remettre la consommation au service des bien-être. C’est sans doute aussi une manière de nous préparer à ce que l’avenir, peut-être, nous prépare.</p>
<p>L’Observatoire du faire montre sur les personnes les plus engagées dans le « faire » sont aussi les moins sensibles aux valeurs matérialistes ; si « faire » est associé à des consommations marchandes qui pourraient devenir des relais de la croissance économique, ses adeptes sont naturellement plus disposés à un mode de vie plus frugal que la crise écologique risque de nous imposer.</p>
<p>De même, si les prévisions de destructions d’emplois massives liées au déploiement de la <a href="https://theconversation.com/le-robot-tue-t-il-lemploi-49007">robotisation</a> et de l’intelligence artificielle devaient s’avérer, la <a href="https://theconversation.com/conversation-avec-bernard-stiegler-faire-de-plaine-commune-en-seine-saint-denis-le-premier-territoire-contributif-de-france-65931">place du travail</a> dans la structuration des sociétés occidentales devra être révisée. Quel usage sera fait alors du temps disponible si le « mode avoir » continue de dominer le « mode être » ? Les adeptes du « faire », eux, sauront quoi faire du temps libéré.</p>
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Dé-penser la consommation : « Pour une bonne consommation » par Philippe Moati.
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<p class="fine-print"><em><span>Philippe Moati est directeur scientifique de l’Observatoire société et sonsommation (l’Obsoco) qui a réalisé, avec le soutien de la MAIF, l’« Observtoire du faire » dont il est question dans cet article. </span></em></p>Toutes les façons de consommer ne se valent pas et de nouvelles formes s’organisant autour du « faire » émergent, offrant de nouvelles perspectives où consommation et frugalité ne s’opposent pas.Philippe Moati, Professeur en sciences économiques, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.