tag:theconversation.com,2011:/fr/topics/sciences-cognitives-49251/articlessciences cognitives – The Conversation2023-03-09T18:43:08Ztag:theconversation.com,2011:article/2014132023-03-09T18:43:08Z2023-03-09T18:43:08ZPourquoi les mondes imaginaires sont-ils de plus en plus populaires ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/514256/original/file-20230308-18-7b1gg1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=15%2C13%2C1262%2C705&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Notre appétence pour les mondes imaginaires est corrélée à notre quête de nouveauté. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=132663.html">Allociné</a></span></figcaption></figure><p>Depuis quelques décennies, nous sommes témoins d’un engouement mondial pour les mondes imaginaires. Des mondes fictifs tels que ceux que l’on retrouve dans les romans, les films, les mangas, les séries télévisées et les jeux vidéo ne cessent de gagner en popularité et en complexité. Des univers aussi riches et élaborés que ceux de <em>Star Wars</em>, <em>One Piece</em>, <em>Zelda</em>, <em>Game of Thrones</em>, <em>Elden Ring</em>, <a href="https://theconversation.com/le-quidditch-ce-sport-reel-venu-dharry-potter-64534"><em>Harry Potter</em></a> ou encore le <em>Seigneur des Anneaux</em> attirent chacun des millions de fans à travers le monde. Pourquoi tant de succès, et pourquoi aujourd’hui, et non pas plus tôt ?</p>
<p><a href="https://www.routledge.com/Building-Imaginary-Worlds-The-Theory-and-History-of-Subcreation/Wolf/p/book/9780415631204">Les mondes imaginaires existent certes depuis très longtemps</a> : l’<em>Odyssée</em>, écrite il y a presque 3000 ans, se situe souvent dans des îles qui n’existent pas, mais inspirées d’îles existantes, comme l’île des Cyclopes (ainsi nommée en hommage au texte d’Homère), au large de la Sicile. Homère n’a fait qu’y imaginer des cyclopes. En comparaison, J.-K. Rowling a inventé des territoires magiques dissimulés au sein du monde réel, avec de nombreuses descriptions précises de lieux imaginaires. Et Georges Lucas, avec <a href="https://theconversation.com/lascension-des-hero-nes-dans-star-wars-une-victoire-feministe-130222"><em>Star Wars</em></a>, a inventé des centaines de planètes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’exploration selon le jeu vidéo Zelda.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Des écrivains tels que Jules Verne et <a href="https://theconversation.com/pourquoi-edgar-allan-poe-est-lecrivain-prefere-des-incompris-198552">Edgar Allan Poe</a> ont aussi créé des univers fictifs, dès le XIX<sup>e</sup> siècle. Cependant, leurs écrits développent une intrigue qui a la primeur sur le monde créé. L’univers imaginaire est plutôt un prétexte à des aventures, pas une invention en soi. Tolkien, au début du XX<sup>e</sup> siècle, a inventé un monde avec une géographie, une végétation, des espèces, un langage et des civilisations. <a href="https://www.fabula.org/actualites/68668/a-besson-constellations-des-mondes-fictionnels-dans-l-imaginaire-contemporain.html">Ce monde imaginaire, complet, autonome, et cohérent</a>, a du sens indépendamment de l’histoire de la quête de Frodon par exemple.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-langues-elfiques-de-tolkien-plus-populaires-que-lesperanto-71388">Les langues elfiques de Tolkien, plus populaires que l’espéranto</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>C’est depuis Tolkien, et surtout ces dernières décennies, que ces mondes imaginaires sont devenus aussi complexes et riches et se sont répandus. Pourquoi sont-ils devenus si populaires ? Nous posons l’hypothèse selon laquelle la curiosité joue un rôle central dans ce phénomène culturel d’ampleur.</p>
<h2>La curiosité pour des environnements nouveaux</h2>
<p>Dans une de ses lettres, J.R.R. Tolkien écrivait lui-même qu’une partie de l’attrait du <em>Seigneur des Anneaux</em> « repose sur le sentiment intrinsèque de récompense que nous éprouvons en regardant au loin une île non visitée ou les tours d’une ville lointaine ». Une intuition partagée par Shigeru Miyamoto, le créateur de <em>Zelda</em>, l’un des jeux vidéo les plus vendus au monde, dans lequel on peut incarner Link et explorer librement Hyrule, un monde d’inspiration médiévale. Miyamoto disait qu’il voulait créer « un univers de jeu qui transmette le même sentiment que celui que l’on ressent lorsqu’on explore une nouvelle ville pour la première fois ».</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/alice-a-lasile-60457">Alice à l’asile</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>L’intuition de ces deux créateurs de mondes imaginaires a été indirectement confirmée par des études récentes en sciences cognitives. Le cerveau de <a href="https://www.researchgate.net/publication/245765584_Conserved_role_of_dopamine_in_the_modulation_of_behavior">toute espèce mobile</a> est en effet doté <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/9658025/">d’un système dopaminergique, qui est associé à la motivation et à la récompense</a>. Des recherches en neurosciences montrent que ce système est aussi activé <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16880131/">lorsque nous découvrons de nouveaux objets</a> ou <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29218570/">lorsque nous décidons</a> d’explorer un nouvel environnement. Il nous incite à chercher des informations nouvelles qui seront mobilisées dans le futur. Tous les animaux sont curieux de nouveaux environnements, même si le degré de curiosité diffère d’une espèce à l’autre.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le jeu inspiré de la saga Harry Potter nous plonge dans des mondes imaginaires.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>C’est un des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21702807/">systèmes cognitifs les plus anciens</a> dans l’histoire évolutionnaire de la cognition animale, car il était nécessaire à la navigation dans l’espace. Cela explique pourquoi, quand des éthologues leur présentent un objet nouveau et un objet familier, des espèces aussi différentes que les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10071-017-1103-9">dauphins</a> ou les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10329-019-00731-2">macaques</a> observent plus longtemps les objets nouveaux – une mesure commune de la curiosité.</p>
<h2>Un avantage dans l’évolution</h2>
<p><a href="https://psycnet.apa.org/record/1992-98504-016">Cette curiosité pour des environnements nouveaux est un comportement adaptatif</a>. Au cours de l’histoire de notre espèce, la curiosité humaine a évolué en réponse aux exigences de survie et de reproduction. Les humains qui ont développé une curiosité accrue ont été mieux équipés pour explorer leur environnement et découvrir de nouvelles ressources. Cette capacité a permis à ces individus de survivre plus longtemps et donc de se reproduire davantage, menant à la lente propagation des gènes associés à cette curiosité accrue dans la population.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le héros face à l’inconnu, une mise en scène visuelle qui attise notre curiosité dans Avatar.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>La curiosité se nourrit de promesses d’informations nouvelles. C’est pour cela que les environnements nouveaux sont si fascinants pour nos cerveaux : la vision d’un monde imaginaire est un indice qui nous informe qu’une grande quantité d’informations reste à découvrir. Il faut noter que cette curiosité pour les environnements nouveaux est activée même si l’environnement nouveau est fictionnel, car le mécanisme qui nous pousse à découvrir de nouveaux environnements n’a pas évolué dans un contexte où la fiction existait. Nous savons bien sûr faire la différence entre la réalité et la fiction, mais <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2022.786770/full">nos préférences héritées de l’évolution ne prennent pas en compte cette frontière : elles s’intéressent à toutes sortes d’informations</a>.</p>
<p>La promesse de découvertes nous attire dans les affiches promotionnelles des fictions dans lesquelles un personnage fait face à un large panorama d’un monde imaginaire, prêt à l’explorer. Nous aimons cette idée qu’il reste du chemin à parcourir. Des psychologues ont par exemple montré que des <a href="https://www.researchgate.net/publication/249624135_Environmental_PreferenceA_Comparison_of_Four_Domains_of_Predictors">photographies de paysage sont en moyenne plus appréciées quand elles indiquent visuellement la présence d’opportunités de découverte</a> – avec, par exemple, l’image d’une forêt au loin et un chemin sinueux qui disparaît dans les arbres.</p>
<h2>La variation de la curiosité</h2>
<p>Si la curiosité a été sélectionnée au cours de l’évolution, le degré de curiosité n’est ni fixe, ni toujours le même. On voit très bien qu’autour de nous, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0092656617301149">certaines personnes sont plus exploratrices que d’autres</a>. Un des facteurs qui expliquent ces différences est la génétique : la curiosité <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.2190/h8h6-qykr-keu8-gaq0?journalCode=icaa">fait partie intégrante de notre personnalité</a>, qui est en <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352250X15002171">partie déterminée par notre patrimoine génétique hérité de nos parents</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=768&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=768&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=768&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=965&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=965&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=965&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Caspar David Friedrich, Le Voyageur contemplant une mer de nuages, 1818. Un avant-goût romantique du boom des fictions pleines de mondes imaginaires des 20ᵉ et XXIᵉ siècle ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cependant, un autre facteur important détermine le niveau de curiosité des individus. Il est important de noter que la curiosité a des conséquences qui peuvent être néfastes pour un organisme – par exemple, si l’exploration ne paye pas, le temps passé à explorer est perdu. Or, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352250X15002055">ces conséquences ne sont pas aussi négatives pour l’organisme selon s’il se trouve dans un environnement pauvre en ressources ou dans un environnement riche en ressources</a>.</p>
<p>L’évolution a donc façonné le système de la curiosité pour être flexible en fonction de l’environnement dans lequel se trouve un organisme, pour gérer ses « coûts » et ses « bénéfices ». Les scientifiques en écologie comportementale appellent cette flexibilité la <a href="https://www.edge.org/response-detail/27196">plasticité phénotypique</a>.</p>
<p>Dans des environnements prospères et donc prévisibles, les individus ont accès à davantage de ressources et sont donc moins susceptibles de faire l’expérience d’une pénurie ou d’un danger immédiat. Par conséquent, ils peuvent <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1090513821000271">se permettre d’être plus explorateurs et curieux, en prenant des risques</a> pour rechercher de nouvelles opportunités et expériences qui peuvent être bénéfiques à long terme.</p>
<p>En revanche, dans des environnements plus pauvres et plus imprévisibles, les risques associés à l’exploration sont plus élevés, car un échec peut entraîner des dommages importants. Dans de tels environnements, les individus devraient être <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1090513821000143">plus motivés à se concentrer sur l’exploitation de leur environnement pour satisfaire leurs besoins immédiats</a>, plutôt que de prendre des risques pour explorer de nouvelles opportunités.</p>
<p>Des études ont confirmé que chez des espèces aussi différentes que les <a href="https://www.researchgate.net/publication/27270675_The_Significance_of_Ecological_Factors_for_Exploration_and_Neophobia_in_Parrots">perroquets</a> et les <a href="https://www.researchgate.net/profile/Sofia-Forss-2/publication/279631853_Contrasting_Responses_to_Novelty_by_Wild_and_Captive_Orangutans/links/5a532cd30f7e9bbc10568f28/Contrasting-Responses-to-Novelty-by-Wild-and-Captive-Orangutans.pdf">orangs-outangs</a>, les individus qui ont été nourris ou ont un accès direct à de la nourriture sont plus curieux que les autres, toutes choses égales par ailleurs.</p>
<p>Chez les humains, des études montrent que les habitants de sociétés dotées d’un produit intérieur brut par habitant plus élevé (qui bénéficient donc de meilleures conditions de vie, en matière d’alimentation, d’accès au soin, et d’accès à l’éducation) sont en <a href="https://www.sociostudies.org/journal/articles/2189446/">moyenne plus ouverts à de nouvelles expériences</a>. D’autres études montrent que les individus vivant dans des familles qui bénéficient de meilleures conditions de vie <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28238826/">sont plus curieux</a>, <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/08902070221078479?journalCode=erpa">ont moins de chance de voir leur niveau de curiosité décroître</a> en grandissant, et que cela peut expliquer les <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/abs/10.1098/rstb.2021.0345">différences de capacités d’apprentissage qu’on observe entre des pays qui n’ont pas le même niveau de développement économique</a>.</p>
<h2>L’attrait pour les mondes imaginaires</h2>
<p>Nous avons ainsi formulé <a href="https://www.edgardubourg.fr/_files/ugd/9c54f0_80037d57932f446ba20010547087a5fc.pdf">l’hypothèse selon laquelle le succès culturel récent des mondes imaginaires s’explique par l’amélioration des conditions de vie</a> au cours des dernières décennies. Cette amélioration des conditions de vie <a href="https://www.cambridge.org/core/services/aop-cambridge-core/content/view/6CBACB4C2DFB11F5A13D3B4A5E9E2EB4/S0140525X1800211Xa.pdf/psychological-origins-of-the-industrial-revolution.pdf">aurait mené à des changements de mentalité majeurs</a>. Notamment, comme l’environnement des individus devient plus prévisible et plus sûr, les coûts liés à la curiosité pour des environnements nouveaux diminuent. Cette évolution des mentalités pourrait donc expliquer l’accroissement de la popularité et de la richesse des mondes imaginaires. Bien sûr, explorer des mondes imaginaires ne comporte aucun risque en soi, mais, encore une fois, la frontière entre la réalité et la fiction importe peu en la matière. Seule compte la sensibilité de nos préférences : il faut être curieux des environnements nouveaux dans la vie réelle pour trouver attrayants les mondes imaginaires dans les fictions.</p>
<p>Nous avons d’abord montré, dans une <a href="https://psyarxiv.com/d9uqs">étude à paraître</a>, que le niveau de curiosité des individus est en effet corrélé à leur préférence pour les mondes imaginaires : les personnes plus exploratrices aiment davantage les mondes imaginaires, les personnes moins exploratrices les aiment moins. Nous avons ensuite regardé l’évolution des mondes imaginaires dans les romans et les films : environ 10 % des films produits et 10 % des romans parus développent un monde imaginaire au début du XX<sup>e</sup> siècle, contre environ 20 % d’entre eux aujourd’hui. Cela correspond à une augmentation de 100 % en un siècle, dans les deux médias. Cette augmentation suit l’augmentation permanente du niveau de richesses des pays industrialisés tout au long du XX<sup>e</sup> siècle. Bien que cette association ne prouve pas l’existence d’un lien causal, elle tend à confirmer notre hypothèse selon laquelle la popularité croissante de ces mondes imaginaires s’explique en partie par la croissance économique et l’amélioration des conditions de vie, qui augmenterait naturellement la motivation de lecteurs et lectrices, et des téléspectateurs et téléspectatrices, à explorer ces nouveaux mondes.</p>
<p>Nos recherches s’inscrivent dans un projet plus global qui vise à une meilleure compréhension de notre attrait pour les fictions, grâce à notre compréhension de la psychologie humaine. Par exemple, en comprenant d’où vient la peur et comment cette émotion fonctionne, on peut <a href="https://academic.oup.com/book/4159">mieux comprendre notre attrait pour les films d’horreur et les attractions effrayantes</a>.</p>
<p>Inversement, ces recherches peuvent aussi mener à une meilleure compréhension de la psychologie, grâce aux fictions. Par exemple, <a href="https://www.nature.com/articles/s41562-022-01292-z">tracer l’histoire de la représentation de l’amour dans les textes littéraires permet de mieux comprendre l’histoire du sentiment amoureux et les facteurs de ses fluctuations</a>, dont les <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/1745691614561683">bases psychologiques et biologiques sont désormais bien connues</a>.</p>
<hr>
<p><em>Cet article est issu d’un <a href="https://cognition.ens.fr/fr/news/semaine-du-cerveau-2023-lens-16860">cycle de conférences proposées par l’ENS-PSL dans le cadre de la 25ᵉ édition de la Semaine du cerveau</a>, du 13 au 17 mars 2023. À cette occasion, des chercheuses et chercheurs proposent des interventions sur le thème « pensée et émotions : du réel à l’imaginaire ». Retrouvez Edgar Dubourg le 14/03 à 18h30 pour la conférence : « Comment expliquer notre fascination pour les mondes imaginaires ? »</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201413/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Edgar Dubourg a reçu des financements de l'École Normale Supérieure-PSL.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Nicolas Baumard a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche, du CNRS et de l'université PSL. </span></em></p>La curiosité joue un rôle central dans notre engouement pour des univers fictifs riches et innovants.Edgar Dubourg, Doctorant en études cognitives, École normale supérieure (ENS) – PSLNicolas Baumard, Chercheur en études cognitives, École normale supérieure (ENS) – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1595832021-05-24T18:48:08Z2021-05-24T18:48:08ZLecture, postures, émotions : comment le corps nous aide à comprendre un texte<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/400364/original/file-20210512-16-57gb75.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C8%2C1908%2C1267&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Notre engagement « cognitif » varie au fil de la lecture.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/photos/boy-book-reading-literature-read-5731001/">Sabrina Eickhoff/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>À la lecture de ces premières lignes, votre attention est pleinement focalisée sur le contenu du texte. Votre curiosité pour le sujet de l’article – ou simplement le fait de découvrir une nouvelle information – fait que vous êtes engagés « cognitivement » dans le traitement du texte.</p>
<p>Puis, au cours de la lecture, cet engagement va peu à peu s’atténuer : votre lecture va s’accélérer, vos fixations oculaires vont être de plus en plus courtes, et peut-être irez-vous jusqu’à ignorer certains mots, pourtant indispensables à la bonne compréhension du texte. À ce moment-là, la probabilité de rappeler des informations précises du texte est fortement restreinte.</p>
<p>Alors, seuls une information importante, du contenu suscitant une émotion, ou encore une incongruité dans le discours par exemple pourront réactiver votre engagement cognitif et vous ramener à une pleine compréhension et mémorisation du texte.</p>
<h2>Comprendre un texte</h2>
<p>Les quelques étapes présentées ci-dessus résument de manière schématique la fluctuation de l’engagement cognitif en lecture. De même que nous avons du mal à rester concentrés longtemps durant un cours magistral ou lorsque nous regardons un film, notre degré d’attention varie au fil d’une lecture. Et nous allons le voir, la posture du lecteur en est un marqueur inattendu.</p>
<p>Mais en quoi notre corps peut-il bien être impliqué dans cette activité hautement intellectuelle qu’est la lecture ? Quel rôle les émotions contenues dans un texte jouent-elles et dans quelle mesure notre corps y est-il sensible ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1360139567622422534"}"></div></p>
<p>La lecture est une entreprise complexe de <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03050436/">construction de sens</a> qui mobilise nombre d’habiletés, par exemple la conversion graphème/phonème (de l’écrit au son) et nécessite de faire constamment des liens entre ce qui vient d’être lu et les connaissances stockées dans la mémoire à long terme afin de construire une représentation mentale du texte qui soit la plus cohérente possible.</p>
<p>L’objectif de lecture que nous avons en tête établit des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1207/s15326950dp3702_5">normes de cohérence</a>. Ainsi, celles-ci sont plus élevées lorsque nous lisons à des fins d’étude que lorsque nous lisons pour le plaisir ou nous divertir. Et nous sommes plus susceptibles d’investir des <a href="https://link.springer.com/article/10.3758/BF03206376">efforts cognitifs supplémentaires</a> si le but de notre lecture est d’apprendre quelque chose de nouveau.</p>
<p>La tâche de lecture a donc une influence sur notre engagement cognitif : elle joue un rôle crucial dans la façon dont nous allouons nos ressources cognitives pour encoder les informations textuelles dans notre mémoire. Les informations qui étaient au centre de l’attention – donc très actives dans la mémoire de travail pendant la lecture – sont plus susceptibles d’être incorporées à la représentation mémorielle du texte.</p>
<p>Voilà en quoi l’engagement cognitif en lecture est primordial, notamment en situation d’apprentissage. Plus on est engagés cognitivement lors de lecture, plus la compréhension et la rétention en mémoire sont opérantes.</p>
<h2>Engagement cognitif</h2>
<p>L’engagement cognitif peut être défini comme un processus dans lequel les ressources cognitives du lecteur se concentrent sur la tâche de lecture et se reflètent <a href="https://science.sciencemag.org/content/328/5977/453.abstract">dans le comportement du lecteur</a>. Les ressources cognitives sont par exemple la motivation, l’attention, la mémoire et même les émotions.</p>
<p>L’engagement cognitif a été principalement étudié en psychologie de l’éducation pour étudier la motivation et l’engagement des élèves en utilisant des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00461520.2014.1002924">échelles subjectives d’auto-évaluation</a>. Dans ce cas, les lecteurs évaluent eux-mêmes dans quelle mesure ils étaient engagés dans leur tâche de lecture.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/mecanismes-de-lattention-les-comprendre-pour-mieux-apprendre-143661">Mécanismes de l’attention : les comprendre pour mieux apprendre</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Cette méthode subjective d’évaluation possède deux inconvénients : le premier est que les lecteurs évaluent leur engagement a posteriori, après la tâche de lecture, et le second est que l’on demande au lecteur de conscientiser un engagement ou un désengagement qui n’est pas nécessairement conscient pendant la lecture.</p>
<p>Des méthodes qualitatives objectives ont donc été utilisées pour tenter de qualifier l’engagement cognitif lors des <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/074193258500600609">tâches d’apprentissage</a> et de <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00461520.2015.1004068">lecture</a>. Elles s’appuient sur les mouvements oculaires, qui révèlent que, plus une information est fixée longuement, <a href="https://psycnet.apa.org/doiLanding?doi=10.1037%2F0033-2909.124.3.372">plus elle est traitée profondément</a>.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/400334/original/file-20210512-15-1jyx3fz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/400334/original/file-20210512-15-1jyx3fz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=604&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/400334/original/file-20210512-15-1jyx3fz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=604&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/400334/original/file-20210512-15-1jyx3fz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=604&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/400334/original/file-20210512-15-1jyx3fz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=759&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/400334/original/file-20210512-15-1jyx3fz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=759&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/400334/original/file-20210512-15-1jyx3fz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=759&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Illustration du montage expérimental permettant de mesurer la posture pendant la lecture. En jaune, les marqueurs réfléchissants de motion capture, tablette tactile pour la lecture, lunettes eye-tracking pour l’enregistrement des mouvements oculaires.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Ugo Ballenghein</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Des études récentes ont examiné d’autres moyens de mesurer l’engagement cognitif pendant la lecture, notamment en couplant la technique oculométrique – consistant à mesurer les mouvements oculaires – et la technique de capture des mouvements posturaux (motion capture).</p>
<p>L’oculométrie permet d’une part un accès direct à l’information textuelle traitée par le lecteur, et d’autre part la motion capture offre la possibilité d’étudier comment les gens se tiennent en lisant, avec une précision millimétrique.</p>
<p><a href="https://psycnet.apa.org/record/2018-04018-001">Les résultats</a> ont montré que lorsque les lecteurs parcouraient des passages particulièrement importants et en lien avec une tâche qui leur avait été donnée au préalable, leurs mouvements posturaux étaient ralentis, presque figés, afin d’intégrer efficacement les informations présentes dans le texte. Ainsi, il a été montré que la stabilité posturale peut refléter le niveau d’engagement cognitif des lecteurs.</p>
<h2>Influence des émotions</h2>
<p>Les contenus émotionnels sont omniprésents dans notre quotidien, à la télévision, sur les réseaux sociaux, dans la presse et dans les livres. Et les émotions jouent un rôle dans les <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/1754073909103595">décisions que nous prenons</a>, et aussi, nous allons le voir, dans le <a href="https://www.tandfonline.com/doi/10.1080/02699931.2019.1574718">fait d’être engagé</a> dans la lecture d’un texte.</p>
<p>Les études scientifiques semblent parvenir à un consensus pour considérer les affects selon une structure <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0028393214000062">bidimensionnelle</a> :</p>
<ul>
<li><p>la valence émotionnelle, qui permet de décrire dans quelle mesure le sentiment perçu est agréable ou désagréable, selon une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/0005791694900639">échelle bipolaire</a> allant du négatif au positif ;</p></li>
<li><p>l’excitation ou l’intensité de la sensation. Il a été démontré que les stimuli émotionnels influencent la motivation, ils sont donc susceptibles de <a href="https://psycnet.apa.org/record/1997-08878-000">capter l’attention</a> plus rapidement que les stimuli neutres.</p></li>
</ul>
<p>Des chercheurs ont examiné l’effet de la valence sur l’attention portée aux mots lus et ont trouvé un <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/02699931.2014.938023">avantage</a> pour les mots émotionnels par rapport aux mots neutres, quelle que soit la polarité de valence (agréable ou désagréable).</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/ItVqo26_b0Q?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Journée d’étude sur les tablettes tactiles et l’éducation, 2019 – intervention d’Ugo Ballenghein.</span></figcaption>
</figure>
<p><a href="https://www.tandfonline.com/doi/10.1080/02699931.2019.1574718">Une étude récente</a> a exploré l’effet de la valence émotionnelle sur l’engagement cognitif lors d’une tâche de lecture sur tablette tactile. Les résultats ont montré que les lecteurs faisaient significativement moins de mouvements lorsqu’ils lisaient des textes émotionnels (positifs et négatifs) comparés à des textes neutres. Les émotions agiraient donc comme des promoteurs attentionnels lors de la lecture.</p>
<p>L’étude de la cognition humaine tend à être décrite comme étant <a href="https://mitpress.mit.edu/books/embodied-mind">« incarnée »</a>, cela veut dire que les processus mentaux entretiennent un lien indéfectible avec le corps qu’ils habitent. Comme nous l’avons vu, les mouvements du corps, au même titre que les mouvements oculaires, peuvent rendre compte de processus cognitifs à l’œuvre dans des tâches de lecture.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lire-sur-papier-lire-sur-ecran-en-quoi-est-ce-different-112493">Lire sur papier, lire sur écran : en quoi est-ce différent ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>L’idée d’une lecture « incarnée » indique que le lecteur serait alors engagé, immergé dans le texte et que ses réponses sensori-motrices seraient le reflet de cette coopération fructueuse permettant l’engagement intellectuel et physique dans le texte.</p>
<p>Avec l’utilisation grandissante des tablettes tactiles, la distanciation physique précédemment requise par l’écran déporté de l’ordinateur est ici abolie au profit d’un écran portable « faisant corps » avec le lecteur. On se dirige donc vers des modes de lecture nouveaux, notamment en classe. Les études en cours tenteront de sonder cette influence de la posture lors des apprentissages, notamment de la lecture et de l’écriture.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/159583/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ugo Ballenghein ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En quoi notre corps est-il impliqué dans cette activité si intellectuelle qu’est la lecture ? Quel rôle les émotions jouent-elles ? Ces questions ouvrent des pistes pour l’apprentissage de la lecture.Ugo Ballenghein, Maître de conférences en psychologie cognitive, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1489412020-11-15T17:04:17Z2020-11-15T17:04:17ZRénovation énergétique : pourquoi l’incitation économique ne suffira pas<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/368557/original/file-20201110-21-1pi5bkv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=101%2C81%2C1162%2C775&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans le plan de relance annoncé par le gouvernement pour la rentrée 2020, une enveloppe de 2 milliards sera allouée aux travaux d’isolation dans les logements privés.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/man-installing-thermal-roof-insulation-layer-753960253">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Sur les quelques <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/la-renovation-energetique-des-batiments-change-d-echelle-avec-les-6-7-milliards-du-plan-de-relance.N999859">7 milliards d’euros</a> prévus pour la rénovation énergétique dans le plan de relance annoncé par le gouvernement pour cette rentrée 2020, une enveloppe de 2 milliards sera allouée aux travaux d’isolation dans les logements privés, via le <a href="https://www.maprimerenov.gouv.fr/prweb/PRAuth/BPNVwCpLW8TKW49zoQZpAw%5B%5B*/!STANDARD">dispositif MaPrimeRénov</a>. Accordée depuis 1 an aux ménages les plus modestes, cette aide aux travaux d’isolation ne sera plus soumise à un plafond de revenus à compter du 1<sup>er</sup> janvier 2021.</p>
<p>Cet investissement massif de l’État dans l’aide financière au particulier, en accord avec la représentation populaire d’un être humain principalement motivé par le gain financier (le légendaire <em>homo economicus</em> !), laisse supposer que l’incitation économique serait suffisante ou constituerait un élément clé pour motiver les comportements. Mais comment expliquer alors que certains ménages, à niveau de revenu équivalent, vont se lancer dans la rénovation énergétique et d’autres pas ? Et parmi ceux qui se décident, le font-ils pour les mêmes raisons ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"690081516458610689"}"></div></p>
<p>De manière générale, face à l’urgence environnementale, les politiques publiques s’appuient sur l’instauration d’un cadre législatif, la mise en place de tarifications incitatives ou la diffusion d’informations à travers de larges campagnes de communications.</p>
<p><a href="https://homerus.hypotheses.org/148">Ces trois leviers « traditionnels »</a> ont des effets indéniables à court ou moyen terme pour créer un contexte propice au changement. Mais les sciences comportementales et plus particulièrement la psychologie nous enseignent aussi qu’au-delà du contexte, ces leviers d’influence sont la plupart du temps insuffisants pour générer le changement en tant que tel et pour garantir qu’il soit pérenne.</p>
<p>Cet accompagnement des changements de comportement néglige trop souvent un élément essentiel : la prise en considération du profil psychologique de la cible.</p>
<h2>Des déterminants psychologiques</h2>
<p>Les facteurs psychologiques qui guident les comportements respectueux de l’environnement sont divers et variés et ont déjà fait l’objet de plusieurs classifications dans le domaine. La taxonomie que nous proposons distingue quatre catégories de déterminants : cognitifs, motivationnels, émotionnels et sociaux. Les deux premières catégories constituent sans doute les catégories de déterminants les plus intuitives.</p>
<p>Les déterminants cognitifs comprennent les représentations, convictions et croyances liées à l’environnement et à l’impact de nos comportements sur cet environnement. Par exemple, le fait que les conséquences du changement climatique soient perçues comme psychologiquement distantes dans l’espace comme dans le temps peut <a href="http://www.columbia.edu/%7Erim2114/publications/McDonald-Chai-Newell-2015.pdf">constituer un obstacle</a> à la mise en place de comportements pro-environnementaux.</p>
<p>Les déterminants motivationnels, bien souvent réduits à l’intensité de la motivation à faire (est-ce que je me sens prêt.e à entreprendre des travaux ?), englobent également la nature de cette motivation – est-ce que je produis ce comportement car je dois le faire (motivation extrinsèque à l’individu) ou bien parce que je le veux (motivation intrinsèque à l’individu) ? Cette évolution de la motivation se fait par étapes et chacune d’entre elles est décisive pour <a href="https://www.researchgate.net/publication/307912262_Specific_Barriers_and_Drivers_in_Different_Stages_of_Decision-Making_about_Energy_Efficiency_Upgrades_in_Private_Homes">assurer la pérennité d’un changement de comportement</a> en général et écocitoyen en particulier comme la rénovation énergétique.</p>
<p>La troisième catégorie est relative à nos émotions, celles que nous vivons au moment où nous produisons le comportement – cela me réjouit de rénover mon logement – mais aussi et surtout celles que nous anticipons : dans quel état serai-je après avoir réalisé – ou pas – un geste écocitoyen : soulagé·e, déçu.e, culpabilisé·e ? Cette anticipation émotionnelle constitue également un élément décisif dans la production et la pérennisation d’un comportement.</p>
<p>Enfin, les déterminants sociaux englobent les aspects normatifs, moraux et identitaires. Ils sont globalement liés à l’influence de l’entourage et font partie des éléments les plus sous-estimés et ayant pourtant un poids considérable dans le passage à l’action écocitoyenne. Par exemple, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0360544215008865">avoir des informations sur la consommation énergétique de mes voisins</a> par rapport à la mienne aura plus d’influence qu’un retour sur ce que cela me coûte !</p>
<h2>Concevoir des campagnes mieux ciblées</h2>
<p>Parallèlement aux conditions de vie domestiques et économiques qui restent un élément central <a href="https://ideas.repec.org/a/eee/appene/v212y2018icp1333-1344.html">dans la décision d’engager ou pas des travaux de rénovation</a>, les motifs qui guident l’engagement dans des travaux d’isolation de son logement sont finalement psychologiques et sociaux avant d’être écologiques. Cette observation qui peut paraître étonnante est connue depuis bien longtemps des psychologues sociaux.</p>
<p>Si l’on garde cette idée à l’esprit, on arrive à deux constats : d’abord l’intérêt limité de développer des campagnes de sensibilisation qui se limitent à la seule présentation des bénéfices et des risques de nos comportements pour l’environnement. Une analyse rapide de ce qui est mis en avant dans ces campagnes nous montre d’ailleurs une focalisation sur les dommages et les pertes associées à des émotions négatives. C’est ce que nous appelons en psychologie un « cadrage en perte » dans la présentation de l’information qui revient ici à quasi systématiquement mettre l’accent sur le dérèglement climatique et les catastrophes naturelles qui seraient dus à l’activité humaine plutôt que sur tous les bénéfices de cette activité si elle venait à se modifier. Or, l’efficacité de ce type de cadrage pour engendrer des comportements vertueux est plus que discutée !</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1130987081143148544"}"></div></p>
<p>Second constat : pour optimiser les campagnes de prévention en faveur de comportements écocitoyens, il suffirait d’identifier systématiquement en amont les déterminants du comportement visé pour une population définie et dans un contexte défini. Sans aller jusqu’à produire une campagne spécifique à chaque individu, cela permettrait de construire des campagnes adaptées à des profils généraux. Les concepteurs de campagne doivent au moins savoir s’ils s’adressent à des personnes motivées à rénover qui ne sont pas encore passées à l’action, à des personnes qui ne sont pas encore sensibilisées ou enfin à des personnes carrément réfractaires à la question. La stratégie de communication employée ne pourra pas être similaire dans chacun des cas, les enjeux psychologiques n’étant sans doute pas les mêmes.</p>
<p>La bonne nouvelle est qu’il s’agit précisément du travail des psychologues sociaux et des chercheur.se.s expert·e·s de l’accompagnement du changement. Ils et elles mettent à disposition des pouvoirs publics toutes leurs compétences conceptuelles et méthodologiques dans l’identification des déterminants et dans le montage de dispositifs (optimisés !) de promotion de comportements écocitoyens.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/148941/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Comment la psychologie sociale peut compléter avantageusement les stratégies « traditionnelles » pour encourager les comportements vertueux en matière d’environnement.Cécile Sénémeaud, Professeure de psychologie sociale, directrice du Laboratoire de Psychologie Caen Normandie (LPCN, EA 7452), Université de Caen NormandieJessica Mange, Maîtresse de Conférences en Psychologie Sociale - Responsable du Master 2 parcours « Psychologie sociale de l’intervention : audit & conduite du changement », Université de Caen NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1443392020-08-14T13:49:34Z2020-08-14T13:49:34ZTrois façons de mieux étudier, selon la science<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/352580/original/file-20200812-24-1vglwni.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La clé de la conservation à long terme des informations est de pratiquer la récupération de ces informations. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>En cette année de pandémie, le retour à l’école, du primaire au post-doctorat, en passant par le collégial, ne se fera pas comme d’habitude.</p>
<p>Qu’à cela ne tienne, les étudiants devront faire ce que tous les étudiants ont fait avant eux : réussir leurs cours. Pour cela, il est bon de se rappeler que certaines façons d’apprendre et de retenir l’information sont plus efficaces que d’autres.</p>
<p>Par exemple, les étudiants s’appuient toujours sur de vieilles techniques, comme <a href="https://doi.org/10.1177/1529100612453266">relire leurs manuels ou notes de cours en mettant en évidence les informations qu’ils jugent importantes</a>. Réviser intensivement la veille d’un examen. Mais ce ne sont pas les méthodes les plus efficaces. <a href="https://doi.org/10.1037/0033-2909.132.3.354">Plus d’un siècle de recherche</a> nous a démontré que le fait d’étudier ou de se pratiquer lors de sessions plus courtes étalées sur une plus longue période de temps (méthode parfois appelée « <a href="https://fr.qwe.wiki/wiki/Distributed_Practice">pratique distribuée</a> » ou « répétition espacée ») améliore l’apprentissage et la mémoire à long terme. Ces approches permettent ultimement de gagner du temps.</p>
<p>Mes recherches pédagogiques au sein du département de kinésiologie de la Western University s’intéressent à la façon dont les gens apprennent et aux simples changements que les enseignants et les étudiants peuvent apporter pour améliorer leurs résultats. Voici quelles stratégies cognitives peuvent optimiser l’apprentissage, tant sur le plan scolaire que dans la vie quotidienne.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/352015/original/file-20200810-24-zprfp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/352015/original/file-20200810-24-zprfp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/352015/original/file-20200810-24-zprfp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/352015/original/file-20200810-24-zprfp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/352015/original/file-20200810-24-zprfp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/352015/original/file-20200810-24-zprfp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/352015/original/file-20200810-24-zprfp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Mettre en évidence les infos importantes est une bonne chose, mais n’en faites pas votre principale stratégie de rétention de l’information.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Améliorer l’apprentissage</h2>
<p>Des chercheurs de l’Université d’État du Kent ont découvert que les <a href="https://doi.org/10.1007/s10648-013-9240-4">étudiants qui étudient par ce qu’ils ont appelé le « réapprentissage successif » obtiennent des résultats aux tests 12 % plus élevés que leurs camarades de classe qui utilisent des méthodes conventionnelles</a>. Ils ont également retenu beaucoup plus d’informations lorsqu’ils ont été testés à nouveau des jours et des semaines après leurs examens finaux.</p>
<p>En outre, une vaste étude en ligne sur les pratiques d’étude a révélé <a href="https://doi.org/10.1038/s41539-020-0061-1">que l’apprentissage espacé semble avoir les plus grands avantages pour les étudiants ayant des notes plus faibles aux examens finaux</a> et peut même atténuer les effets de l’accomplissement de moins d’activités d’apprentissage tout au long d’un cours.</p>
<p>Voyons comment et pourquoi cela fonctionne.</p>
<h2>La récupération des informations est la clé</h2>
<p>Seule une partie des informations que vous apprenez fait partie de vos connaissances permanentes, ou à long terme. Lorsque vous apprenez quelque chose de nouveau, votre mémoire de travail conserve ces informations dans un état actif, les gardant <a href="https://doi.org/10.1038/nrn1201">à votre disposition pour les utiliser et les combiner avec d’autres choses que vous connaissez déjà (mémoire à long terme) ou que vous vivez dans le moment (mémoire à court terme)</a>.</p>
<p>C’est ce qui se passe, par exemple, lorsque vous essayez de vous souvenir d’un numéro de téléphone. Tout en vous concentrant sur le numéro, vous pouvez faire appel à des informations pertinentes sur la personne que vous prévoyez d’appeler ou à des astuces de mémorisation que vous avez utilisées pour les numéros de téléphone dans le passé.</p>
<p>Cependant, lorsque l’information contenue dans votre mémoire de travail cesse d’être utilisée, sa présence s’estompe. La transition entre les informations nouvellement apprises et les informations mémorisées depuis longtemps <a href="https://doi.org/10.1016/j.neulet.2009.11.028">dépends de la façon dont l’information a été utilisée ou répétée</a>.</p>
<p>S’entraîner à la <a href="http://doi.org/10.1126/science.1152408">récupération des informations est la clé de leur conservation à long terme</a>. L’espacement de ces séances vous donne la possibilité d’oublier juste assez pour rendre votre rappel efficace, <a href="https://doi.org/10.1016/j.cogpsych.2010.05.004">vous permettant de vous souvenir de ce que vous avez appris</a> — ce qui améliore la mémoire et ralentit l’oubli.</p>
<p>Heureusement, presque tout, des travaux scolaires aux nouvelles langues, peut être appris de cette façon.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/352014/original/file-20200810-16-jdcz8r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/352014/original/file-20200810-16-jdcz8r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/352014/original/file-20200810-16-jdcz8r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/352014/original/file-20200810-16-jdcz8r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/352014/original/file-20200810-16-jdcz8r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/352014/original/file-20200810-16-jdcz8r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/352014/original/file-20200810-16-jdcz8r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les séances d’études intensives fonctionnent pour le rappel du lendemain, mais vous oublierez vite la plupart de ce que vous avez appris.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Attention au bourrage de crâne</h2>
<p>Le réapprentissage successif peut sembler difficile <a href="https://eric.ed.gov/?id=EJ1021069">comparé aux stratégies typiques (mais inefficaces) comme le surlignage et la relecture</a>.</p>
<p>Si vous avez été un étudiant qui s’est bourré le crâne la veille d’un examen, vous savez peut-être que <a href="https://psycnet.apa.org/doi/10.1037/0022-0663.97.1.70">cela peut fonctionner pour réussir le test</a>. Mais les étudiants ne se rendent pas compte à quel point et à quelle vitesse ils oublient le contenu appris de manière aussi intensive.</p>
<p>Cela signifie que les apprenants peuvent identifier à tort le bourrage de crâne comme étant une stratégie facile et efficace et éviter des stratégies plus difficiles, mais plus efficaces comme le réapprentissage successif qui favorise en fait la rétention à long terme.</p>
<p>Alors, comment « réapprendre de manière succèssive » ?</p>
<h2>Décomposer les choses en trois étapes</h2>
<p><strong>Se fixer un objectif :</strong> Déterminez ce que vous allez étudier — par exemple les sujets clés d’un cours ou d’un manuel de conduite — et quand vous le ferez, en créant et en suivant un calendrier. Visez des sessions d’étude plus courtes et espacées dans le temps. Par exemple, cinq <a href="https://psycnet.apa.org/doi/10.1037/0021-9010.84.5.795">sessions d’une heure valent mieux qu’une session de cinq heures</a>.</p>
<p><strong>Pratiquer :</strong> Créez des occasions de rappeler ce que vous avez appris afin de faciliter le stockage à long terme des informations. Les applications de cartes flash en ligne sont très utiles (il y a des options gratuites <a href="https://apps.ankiweb.net/">telles que Anki</a> et <a href="https://nkoapps.com/">Flashcards by NKO</a>), mais vous n’avez besoin ultimement que d’un papier et d’un stylo.</p>
<p>Si vous êtes étudiant, essayez de laisser des espaces dans vos notes de cours pour vous permettre d’écrire des idées et des concepts après la classe.</p>
<p>Si vous enseignez, intégrez des tests informels dans vos cours. Au-delà de la modélisation de la technique, <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.1221764110">cela aide également les étudiants à maintenir leur attention, à prendre de meilleures notes et à réduire l’anxiété liée aux tests</a>.</p>
<p><strong>Consolider vos succès :</strong> Vérifiez votre travail et suivez vos progrès dans le temps. Si vous parvenez à vous souvenir de quelque chose la plupart du temps, vous pouvez réduire la fréquence de révision de ce contenu et le remplacer par du nouveau contenu au fur et à mesure de vos progrès. Le rappel délibéré d’une information est l’ingrédient essentiel d’un réapprentissage successif. Assurez-vous donc de l’ancrer dans votre mémoire en notant et en vous engageant à répondre avant de vérifier vos notes ou votre manuel.</p>
<p>N’oubliez pas que sans une pratique de rappel délibéré, peu d’informations se retrouvent dans votre mémoire à long terme, ce qui empêche un apprentissage efficace à long terme.</p>
<p>Alors, posez votre surligneur et essayez quelque chose de nouveau. Le simple fait de penser régulièrement à un sujet et de se rappeler de détails qui y sont reliés vous offre une véritable chance de succès.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/144339/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Danielle Brewer-Deluce ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Posez votre surligneur. Les recherches sur le cerveau et la mémoire montrent qu’il est plus efficace d’apprendre en laissant du temps entre les séances d’étude et en se testant fréquemment.Danielle Brewer-Deluce, Assistant Professor, School of Kinesiology, Western UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1389532020-05-25T18:12:53Z2020-05-25T18:12:53ZLa complexité, une bonne excuse pour ne pas agir ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/336008/original/file-20200519-152320-1dmp1j2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=43%2C21%2C7202%2C4454&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans le face-à-face avec une situation complexe, il s’agit de refuser l’esquive au profit de la compréhension.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/businessman-choosing-between-entrances-middle-maze-1196682568">ra2 studio / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>La critique est classique : à trop complexifier, on se trouve bien incapable de décider donc d’agir. Une synthèse éloquente de cette idée pourrait se trouver dans <a href="https://books.google.fr/books?id=JChFDQAAQBAJ&pg=PT397&lpg=PT397&dq=Ce+qui+est+simple+est+toujours+faux.+Ce+qui+ne+l%27est+pas+est+inutilisable">ce propos</a> de l’écrivain et philosophe Paul Valéry :</p>
<blockquote>
<p>« Ce qui est simple est toujours faux. Ce qui ne l’est pas est inutilisable. »</p>
</blockquote>
<p>Il y aurait donc un dilemme entre action et vérité ; la simplicité se situant du côté de l’action, la complexité du côté de la vérité.</p>
<p>De cette dichotomie simple, les gens d’action auront vite fait de déclasser tout intérêt pour une pensée complexe. À quoi sert donc ce penseur qui cherche à rendre compte de la complexité de tous les objets soumis à sa raison ? Tout ce qu’il produit, en matière de connaissance, ne débouche sur rien qui soit « actionnable » ou « opérationnel » !</p>
<p>Dès lors, ne faudrait-il pas abandonner cette idée de « penser de manière complexe » ? Ne faudrait-il pas jeter l’opprobre sur ces empêcheurs d’agir, ces tourneurs en rond, ces bavards aux jambes croisés, ces flibustiers de la pensée ? Peut-être. Mais pas avant de leur avoir laissé la possibilité de s’expliquer.</p>
<h2>Avant tout, comprendre les problèmes</h2>
<p>Le premier enjeu est bien là : comprendre. Il s’agit, <a href="https://books.openedition.org/cdf/3555?lang=fr#bodyftn13">selon l’expression</a> du philosophe Jacques Bouveresse, de subordonner « le désir de juger au devoir de comprendre ». Aussi, ce souci de compréhension va de pair avec un souci de vérité ou, formulé négativement, un refus de l’erreur et de l’illusion.</p>
<p>En ce sens, dans ce face-à-face avec la complexité, il s’agit de refuser l’esquive au profit de la compréhension ; il s’agit de refuser l’illusion simplificatrice et rassurante au profit d’une pensée complexe plus déstabilisante.</p>
<p>Cela nécessite donc au moins deux prérequis. Le premier est d’accorder une certaine valeur aux connaissances descriptives qui permettent de comprendre. Le second est d’inscrire ces connaissances dans un horizon bien défini : celui de la quête de la vérité ou, exprimé négativement, de la lutte contre l’erreur et l’illusion (<a href="https://agone.org/revueagone/agone38et39/enligne/16/index.html">selon la formule</a> du philosophe Friedrich Nietzsche : « Caractère négatif de la « vérité » – en tant que suppression d’une erreur ; d’une illusion »).</p>
<p>Dès lors, par cet exercice de complexification, il est possible de dépasser une pensée superficielle au profit d’une compréhension approfondie des problèmes. Plus encore, cela permet de <a href="https://www.cairn.info/eduquer-pour-un-monde-problematique--9782130589792-page-107.htm">mieux construire les problèmes</a>, de les débarrasser des opinions fausses, des préjugés, des illusions.</p>
<p>Ainsi, le penseur de la complexité s’inscrit pleinement dans cette affirmation de Gaston Bachelard au sujet de <a href="http://classiques.uqac.ca/classiques/bachelard_gaston/formation_esprit_scientifique/formation_esprit_scientifique.html">« l’esprit scientifique »</a> :</p>
<blockquote>
<p>« L’opinion pense mal ; elle ne pense pas : elle traduit des besoins en connaissances ! En désignant les objets par leur utilité, elle s’interdit de les connaître. On ne peut rien fonder sur l’opinion : il faut d’abord la détruire. Elle est le premier obstacle à surmonter. […] L’esprit scientifique nous interdit d’avoir une opinion sur des questions que nous ne comprenons pas, sur des questions que nous ne savons pas formuler clairement. Avant tout, il faut savoir poser des problèmes ».</p>
</blockquote>
<h2>La pensée complexe offre un triple éclairage</h2>
<p>Considérons que l’action comporte trois étapes : la formation du jugement, l’arrêt de la décision puis sa mise en œuvre. À quel moment la pensée complexe intervient-elle ?</p>
<p>Tout d’abord, nous l’avons vu précédemment, lors de la première étape en permettant de bien poser les problèmes. Ensuite, une fois les problèmes bien posés, la pensée complexe permet aussi de mieux cerner l’étendue du domaine des possibles en matière de résolution. En effet, bien que la pensée complexe n’offre pas une seule solution « clé en main », elle offre une méthode pour construire avec rigueur un ensemble de scénarios, de voies de résolution possibles.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/r2I-gGj72kE?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">TEDX « Comment passer de la pensée (complexe) à l’action ? »</span></figcaption>
</figure>
<p>Cependant, une fois les scénarios possibles identifiés, la décision ne peut être tranchée par une connaissance descriptive. C’est vers un <a href="https://www.cairn.info/revue-les-sciences-de-l-education-pour-l-ere-nouvelle-2012-1-page-17.htm">autre type de connaissances</a> qu’il faut se tourner : celles dites « évaluatives ». Il s’agira alors de formuler un jugement, d’évaluer les scénarios.</p>
<p>Or, un tel jugement nécessitera un double engagement : éthique et politique. Éthique pour définir « ce qui compte », ce qui a de la valeur. Dès lors, il sera possible, au regard de ces normes, de classer les scénarios, d’en exclure certains et d’en privilégier d’autres. Et c’est par ce classement que s’opère l’engagement politique qui offrira plus de pouvoir, plus de voix, plus d’importance à certains points de vue, certaines dimensions (économique, politique, etc.) plutôt que d’autres.</p>
<p>À cet égard, bien que la pensée complexe ne fournisse pas la solution à un problème, elle éclaire la nature de l’action autour de la notion de « pari ». Cette notion de « pari » éclaire le pont qui permet de passer de la pensée à l’action. Aussi, nous voilà éclairer sur sa nature : éthique et politique. Ce genre d’idées suscite parfois l’hostilité de ceux qui aiment faire de la connaissance descriptive, rationnelle, un argument pour appuyer leur choix (appréciant les formules du type « there is no alternative »).</p>
<p>La connaissance complexe remet en cause cette façon de faire passer des choix éthiques et politiques pour des vérités scientifiques. Elle démontre l’étendue des scénarios possibles et dévoile la nature éthique et politique qui ont conduit à retenir un scénario plutôt qu’un autre.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1262657949635350528"}"></div></p>
<p>Enfin, une fois la décision arrêtée, vient sa mise en œuvre. Affirmer que toute décision est un pari permet également de souligner la dimension incertaine propre à l’action.</p>
<p>Comme l’énonçait Edgar Morin, penseur de la complexité, à travers sa théorie de l’<a href="https://www.youtube.com/watch?v=MkojAMG9UTw">« écologie de l’action »</a>, « dès qu’un individu entreprend une action, quelle qu’elle soit, celle-ci commence à échapper à ses intentions. Cette action entre dans un univers d’interactions et c’est finalement l’environnement qui s’en saisit dans un sens qui peut devenir contraire à l’intention initiale ».</p>
<p>Dès lors, l’intelligence de l’action suppose une intelligence stratégique apte à saisir les opportunités, identifier les signaux faibles ou encore à relier des indices à la manière d’un Sherlock Holmes. De plus, tonique et soucieuse de comprendre ce qui se passe, la pensée poursuit son effort de complexification afin de lutter contre les erreurs et les illusions durant l’action.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/IQ0L4sEreaU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Laurent Bibard, philosophe : Maîtriser la complexité par la simplicité (Xerfi canal, 2019).</span></figcaption>
</figure>
<p>En définitive, la pensée complexe offre un triple éclairage à l’action : elle l’éclaire sur ses possibilités (en luttant contre l’erreur et l’illusion), sa nature (un pari éthique et politique) ainsi que sur ses modalités (la stratégie et la pensée durant l’action).</p>
<h2>Une fausse bonne excuse</h2>
<p>Ceci étant dit, la pensée complexe aura toujours ses ennemis : les sots, les « solutionnistes » et les paniqués (pour n’en citer que quelques-uns).</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/336011/original/file-20200519-152344-1irfw39.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/336011/original/file-20200519-152344-1irfw39.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=849&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/336011/original/file-20200519-152344-1irfw39.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=849&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/336011/original/file-20200519-152344-1irfw39.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=849&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/336011/original/file-20200519-152344-1irfw39.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1067&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/336011/original/file-20200519-152344-1irfw39.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1067&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/336011/original/file-20200519-152344-1irfw39.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1067&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le philosophe français Edgar Morin, penseur de la complexité.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/people/61838152@N06">Fronteiras do Pensamento</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>« La paresse de l’esprit », selon la formule d’Edgar Morin, est mise à mal par cette pensée vivante, qui implique un effort important pour comprendre au mieux les problèmes qui lui sont adressés.</p>
<p>Aussitôt que la complexité se présente, le paresseux s’en va à la recherche de quelques certitudes simples et simplificatrices pour ne surtout pas trop penser. Plus encore, et c’est en cela que <a href="https://www.en-attendant-nadeau.fr/2018/08/14/sottise-betise-retour-mulligan/">ce paresseux est un sot</a>, il méprise les valeurs cognitives que sont la connaissance, la vérité, l’honnêteté et la modestie intellectuelle.</p>
<p>Par ailleurs, les solutionnistes, qui préfèrent les solutions rapides à la compréhension lente des problèmes, se trouvent bien déçus par le programme que nous proposons.</p>
<p>Comme l’énonçait l’écrivain Robert Musil : « Quand on veut être actif, on n’a plus le droit d’être affamé ni de rêvasser : il faut manger des biftecks, et se remuer ». Mais ne soyons pas dupes, ces gens ne s’épuisent pas à cause de l’effort mais de leurs gesticulations liées à leur incapacité à se tenir assis suffisamment longtemps dans ce face-à-face avec un réel insignifiant et parfois absurde.</p>
<p>Et puis, les paniqués. À la différence du peureux, le paniqué n’a pas le <a href="https://www.cairn.info/revue-etudes-2014-1-page-57.htm">courage</a> nécessaire pour parier et dépasser sa peur ; il s’enferme dans la peur et n’en sort pas. On le reconnaît assez bien dans ces mots Musil :</p>
<blockquote>
<p>« Quand on peut faire tout ce qu’on veut, on a bientôt fait de ne plus savoir quoi désirer […]. Il faut que l’homme se sente d’abord limité dans ses possibilités, ses sentiments et ses projets par toutes sortes de préjugés, de traditions, d’entraves et de bornes, comme un fou par la camisole de force, pour que ce qu’il réalise puisse avoir valeur, durée et maturité… »</p>
</blockquote>
<p>Il reste alors les courageux prêts à jouer leur peau, à assumer la portée éthique et politique de leur décision. Ils aiment la connaissance, se soucient de la vérité, luttent contre l’erreur et l’illusion.</p>
<p>L’incertitude, le doute et l’incomplétude de leur savoir ne les empêchent pas d’agir car ils savent que le pari est nécessaire. Toutefois, ils ne se reposent jamais, conscients de leur fragilité. Ils se savent sujets à la bêtise comme à l’intelligence alors ils consentent à beaucoup d’efforts pour bien penser avant d’agir et à encore plus d’effort pour bien penser pendant l’action.</p>
<p>Modestes, fragiles, certes ; mais vivants, toniques et amoureux de la vie donc de la connaissance et de la vérité à son sujet. Ils répéteront alors comme le philosophe <a href="https://www.dailymotion.com/video/x6vtvq3">Raymond Aron</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Je crois que tout est toujours en question, tout est toujours à sauver, que rien n’est définitivement acquis, et qu’il n’y aura jamais de repos sur la Terre pour les Hommes de bonne volonté. »</p>
</blockquote><img src="https://counter.theconversation.com/content/138953/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ousama Bouiss travaille au sein du cabinet Hector Advisory et est membre du groupe "Reliance en complexité".</span></em></p>L’action comporte trois étapes : la formation du jugement, l’arrêt de la décision puis sa mise en œuvre. Cela suppose d’apprendre à bien poser les problèmes.Ousama Bouiss, Doctorant en stratégie et théorie des organisations, Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1338412020-03-23T18:43:24Z2020-03-23T18:43:24ZVirus, mèmes et bonnes pratiques : la compétition des propagations<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/322379/original/file-20200323-112661-1kgjff0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C0%2C2041%2C1367&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Yayoi Kusama
« All the Eternal Love I Have for the Pumpkins », 2016
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.facebook.com/arsgratiartismutatismutandis.25/photos/basw.AboDMbBTm3-STc5S86CIuzPQyoOeujjC_qc33G3Zk2m-sS-8keRiEDLhZkojXjCGH_c2qIkFvqX97FYX0Kzj9_6CTYYTaOw4DENypK435LcTfrUp1t0qR5wAtriaVs7KnppEZ0zAxYJnpU9w2EaQ6rOG.10155305394179574.10155219337119574.10218701974492499.910579325755789.10155219337114574.10155219337124574/910579325755789/?type=1&theater">Smithsonian's Hirshhorn Museum and Sculpture / Page Facebook</a></span></figcaption></figure><p>Lorsqu’une crise virale advient, ce ne sont pas seulement les virus qui se propagent avec leurs propres mécanismes, c’est aussi chaque société qui fait émerger tout son potentiel viral, selon un fonctionnement social tout à fait ordinaire que Tarde avait pensé sous le terme d’imitation à la fin du XIX<sup>e</sup> siècle. Car les messages d’alerte ou de soutien sur les réseaux sociaux, les bonnes pratiques, les peurs, les fake news, tout se diffuse selon un modèle de viralité, qui devrait être appelé plutôt un principe de réplication, car, comme les virus, ce qui se transmet se transforme et ne se reproduit pas toujours à l’identique.</p>
<p>Toutes ces formes de propagation adviennent à rythme élevé, à haute fréquence, et sont en compétition les unes avec les autres. Ainsi, les mécanismes de propagation spécifiques au virus doivent être contrecarrés par la capacité de propagation des recommandations sanitaires. Soit à partir d’un modèle disciplinaire à la chinoise, soit (et même dans le cas de la Chine) par la vertu de l’imitation, processus social de base, tellement négligé malgré les travaux de <a href="http://classiques.uqac.ca/classiques/tarde_gabriel/lois_imitation/lois_imitation.html">Tarde</a>.</p>
<p>Tous ces processus se diffusent de proche en proche, selon une logique de voisinage qui peut changer selon l’environnement et les circonstances de contact, parfois uniques et très brèves, pour les messages qu’on peut appeler des <a href="https://www.penguin.co.uk/books/253900/from-bacteria-to-bach-and-back/9780141978048.html">mèmes</a> comme pour les virus, d’où la difficulté à les modéliser et à les prédire.</p>
<p>Première forme de compétition à prendre au sérieux comme question sociale, la compétition entre le virus, force opportuniste s’il en est, et les messages gouvernementaux qui invitent à observer les bonnes pratiques en période d’épidémie. Ces messages n’arrivent pas sur un terrain vierge. Notre attention est déjà totalement accaparée par d’autres influences, notamment par des habitudes qui diffèrent en fonction des individus. Les habitudes d’hygiène installées par des répétitions et des imitations multiples deviennent des alliées contre la propagation du virus. Le geste devenu un automatisme permet d’économiser notre énergie cognitive. Pour beaucoup d’entre nous cependant, penser sans cesse à ce que l’on touche, à comment se comporter avec telle personne sans laisser les habitudes « non hygiéniques » reprendre le dessus exige un effort, transforme la vie ordinaire en épreuve constante de résolution de problèmes. On dit alors que la situation perd de son « naturel » (qui n’est évidemment devenu naturel que par éducation et par imitation de longue durée).</p>
<p>La compétition avec le virus est plutôt en défaveur des humains, car les habitudes qui résistent le plus sont celles qui consistent à continuer à sortir, à se serrer la main ou à se retrouver entre amis ou collègues, toutes choses qui sont essentielles à la vie sociale en temps normal, qui ne reposent pas sur une distanciation systématique. Là encore, compétition des propagations et des imitations, car voir un groupe assis le long du canal est un signal fort en faveur des habitudes de proximité sociale.</p>
<h2>Bonnes pratiques et contrôle social</h2>
<p>Certains peuvent alors considérer que la propagation des bonnes pratiques serait nettement plus efficace si elles étaient assorties de sanctions, de surveillance collective, de contrôle social renforcé, comme on le voit en Chine. On oublie de dire que c’est ce qui a entraîné aussi le retard de la Chine dans la prise au sérieux du lanceur d’alerte, car la conformité consiste, dans ce cas, à étouffer les divergences, alors que l’alerte devait être diffusée rapidement.</p>
<p>Et l’enjeu de l’incorporation des habitudes aussi ordinaires est bien plus complexe qu’une simple affaire de sanction, légale ou normative. Une expérience personnelle permet de voir comment cette compétition pour la propagation des bonnes pratiques peut se transformer en guerre de tous contre tous.</p>
<p>Lors de mon tout récent voyage en train (le 13 mars, avant le confinement !), un homme monte à un arrêt et fait entrer sa vieille mère qu’il doit tenir par le bras pour l’installer à sa place. Après qu’il soit redescendu, il se trouve que, présent sur la plate-forme, je ressens le courant d’air et qu’il me fait éternuer, dans mon mouchoir en papier que je jette aussitôt dans la poubelle voisine. L’homme m’interpelle vivement en me disant : « Si vous êtes malade, il faudrait vous mettre un masque ». Je lui signale que c’est un éternuement très ponctuel et que j’ai pris toutes mes précautions. L’incident s’arrête là mais il est très étonnant de sentir une agressivité très forte, d’autant plus qu’il se sentait sans doute mal à l’aise de faire circuler sa mère fragilisée à ce moment précis de la crise virale. J’aurais pu en effet lui rétorquer qu’il était encore plus irresponsable que moi sur ce plan. Mais on voit alors que la logique de contrôle social se transformerait en conflit, en dénonciations publiques (ce qui se passe dans certains appels au SAMU), et sans aucun doute en affrontements. Il convient d’avoir cela en tête malgré le calme apparent de la situation.</p>
<p>Dès lors que les victimes vont devenir plus nombreuses, que la peur se sera elle aussi propagée à une grande partie de la population, toutes les réactions sont possibles. Je dis bien réaction, en l’opposant à réflexion, car tous ceux qui plaident pour des postures « rationnelles » oublient trop vite comment la peur parvient à court-circuiter tous les processus de délibération, de prise de décision.</p>
<h2>Attitude mimétique et peur de la pénurie</h2>
<p>De la même façon, la compétition entre propagations s’étend désormais aux questions d’approvisionnement. On peut dire dans ce cas qu’il y a un effet d’anticipation, de réflexion qui pousse à parier sur un risque de pénurie, ce qui conduit à procéder à des achats de précaution. Tous comportements que d’autres dénonceront aussitôt comme « irrationnels » puisque les messages des professionnels de la distribution sont rassurants sur ce point. Oui, mais lorsque le voisinage des clients du supermarché permet de voir à l’œuvre les premiers caddies archi remplis « par précaution », c’est l’attitude mimétique qui prend le dessus. Autant faire comme les autres sans en partager nécessairement les motivations mais en tous cas, en adoptant un principe de précaution ordinaire (« au cas où »).</p>
<p>Cette propagation d’une anticipation de pénurie provoque la pénurie, c’est bien connu et les messages institutionnels rassurants classiques perdent la compétition face à l’imitation généralisée. Il faudrait en effet diffuser immédiatement des images montrant des norias de camions de livraison remplissant aussitôt les rayons au fur et à mesure qu’ils se vident pour avoir une chance de contrecarrer les effets de l’imitation. Car dans ces situations, c’est <a href="https://www.boullier.bzh/articles-ouvrages/boullier-d-2014-mediologie-des-regimes-dattention/">« l’attention alerte »</a> qui est mobilisée, celle qui s’appuie sur le choc des images (dont l’interprétation peut alors être totalement travestie) pour en faire des signaux puissants, et leur conception devient essentielle.</p>
<h2>Moments de contagion</h2>
<p>Ces moments de panique ne sont pas seulement des comportements de populations peu informées car ils sont en fait analogues en tous points aux comportements financiers des possédants. La panique boursière se limite pour l’instant aux firmes et aux institutionnels qui font, eux, profession et jeu de la spéculation sur ces micropaniques à la microseconde près dans leur activité ordinaire. Ce jeu sur les anticipations, sur les attentes est au cœur même de la <a href="http://ses.ens-lyon.fr/articles/andre-orlean-la-finance-de-marche-et-ses-crises-77458">mécanique spéculative de la finance</a>, qui n’est qu’un processus de propagation, très bien instrumenté et manipulé par ceux qui pensent avoir l’information avant les autres.</p>
<p>Cette propagation d’anticipations a déjà été expérimentée avec les crises précédentes et elle s’était étendue aux banques (Lehman Brothers par exemple), <a href="https://croquant.atheles.org/dynamiquessocioeconomiques/lacriseducapitalismeamericain/index.html">à leur robustesse</a>. Si la défiance atteint la protection des placements des particuliers, toutes choses pourtant garanties par la loi jusqu’à un certain plafond, la panique bancaire lui succédera comme ce fut le cas dans de nombreux pays dans la dernière décennie (Chypre, Grèce, Argentine) et aucun message rationnel ne l’arrêtera. Il faudra alors brider la distribution des liquidités ce qui ne fera que confirmer qu’il existe bien un problème. Comme on le voit, il est trop aisé de disqualifier ces phénomènes de propagation, d’imitation ou de réplication en les qualifiant de comportements de foule, de grégaires, d’irrationnels. Le virus devrait nous apprendre que nous sommes faits des mêmes processus que lui, à savoir de <em>moments</em> de contagion.</p>
<p>Fort heureusement, ces mécanismes de voisinage sont eux aussi en conflit d’influence avec nos capacités de raisonnement et de décision et aussi avec nos héritages, toute notre éducation qui peut suffire à empêcher une guerre civile pour des histoires de masques indisponibles. Mais l’issue du conflit n’est pas toujours garantie. Les entités qui circulent, ces messages, ces signaux sont tout aussi puissants parfois que les virus et peuvent amplifier ou contrecarrer le phénomène sanitaire. Les <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/rumeurs-jean-noel-kapferer/9782757816431">rumeurs</a>) de l’ancien monde médiatique ont muté en une prolifération de signaux à haute fréquence pour un écosystème de notre attention toujours plus sous tension. <a href="https://mitpress.mit.edu/books/distracted-mind">Adam Gazzaley et Gary Rosen</a> rappellent à partir de leurs expériences de laboratoire que si notre esprit est devenu distrait, c’est qu’il est sans cesse sollicité par un processus de stimulation « bottom-up » fondé sur la nouveauté et la saillance, qui détournent l’attention de son cours habituel.</p>
<h2>Pour une nouvelle communication virale</h2>
<p>Dès lors, il convient de préparer un matériel de communication virale à la hauteur du défi, en misant là aussi sur des images-chocs qui ne vaccinent pas, certes, et qui ont le défaut d’exploiter encore les mêmes processus de réactivité, d’alerte qui inhibent la réflexion. Mais à l’heure des réseaux sociaux, il serait naïf de croire que la compétition des propagations peut s’appuyer seulement sur les discours institutionnels, sur les émissions de télé pédagogiques, toutes choses nécessaires mais souvent les seuls formats qu’on retrouve sur ces chaînes d’information continue qui ne produisent que des discours répétitifs soi-disant légitimes mais désormais soumis à la vive concurrence des experts ordinaires que chacun prétend être.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/m_7Zp27Liw0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Coronavirus : le flashmob sonore des Italiens confinés (<em>Le Parisien</em>).</span></figcaption>
</figure>
<p>Il est au contraire très prophylactique de montrer la vidéo des Italiens chantant entre eux <a href="https://www.youtube.com/watch?v=m_7Zp27Liw0">depuis leurs balcons</a>. Car la crainte de l’isolement se trouve alors combattue par une image forte, par un choc émotionnel qui rappelle la force du soutien du voisinage contre la suspicion qui pourrait se généraliser.</p>
<p>Aucune « pédagogie » ici mais une pratique rendue visible qui illustre avec force que d’autres valeurs collectives peuvent combattre la peur et notamment la peur de l’isolement. Les plates-formes numériques et les réseaux sociaux, qui sont formatés pour accélérer abusivement nos réactions pour des objectifs de placement publicitaire, peuvent jouer sur ce plan un rôle intéressant en valorisant les contenus de solutions collectives, qui montrent comment on combat la propagation de la peur. À condition que les citoyens s’en saisissent avec créativité et que les institutions valorisent tout cela. La compétition virale pour l’attention ne fait que commencer.</p>
<p>On peut espérer qu’enfin ces processus soient pris au sérieux comme objets d’étude car ils sont constitutifs de notre vie sociale : nous sommes aussi (pas seulement) agis par des processus de propagation d’entités qui nous traversent, les virus, les messages et les objets qui nous transforment sans que nous puissions les contrôler. Si au moins, le virus nous désintoxiquait de cette foi moderne délirante dans notre capacité de contrôle du monde, les victimes auraient permis un pas salutaire vers une nouvelle forme de sagesse.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/133841/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dominique Boullier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Messages d’alerte ou de soutien sur les réseaux sociaux, bonnes pratiques, peurs, fake news, tout se diffuse selon un même modèle de viralité.Dominique Boullier, Professeur des universités en sociologie. Chercheur au Centre d'Etudes Européennes et de Politique Comparée, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1295072020-01-09T20:44:11Z2020-01-09T20:44:11ZHyperconnexion en classe : la bataille n’est pas perdue<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/309059/original/file-20200108-107204-1pncajd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=20%2C30%2C5291%2C3742&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les capacités des smartphones, et leur pouvoir de distraction, ont augmenté de manière exponentielle ces dernières années.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-vector/high-speed-communications-world-wide-web-1332081053">Shutterstock/Andrey Suslov</a></span></figcaption></figure><p>À une époque où le digital infiltre le quotidien et les salles de classe, les chercheurs s’interrogent, voire même s’inquiètent, de cette place grandissante dans le monde de l’enseignement. D’ailleurs, quel enseignant n’a pas déjà surpris des étudiants en train de faire sur leur ordinateur des activités n’ayant aucun lien avec le cours ?</p>
<p>Au-delà de l’intérêt ou du désintérêt pour une matière, ces attitudes posent aussi la question des menaces sur les capacités de concentration des jeunes. Retour sur ces inquiétudes et sur quelques-unes des pistes qui se dessinent pour contrer ce phénomène.</p>
<h2>Menaces sur l’attention</h2>
<p>Au-delà des alertes sur l’impact négatif des écrans sur le développement des enfants, soulevés notamment par l’ouvrage de <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/10/28/que-peut-on-dire-du-lien-entre-capacites-cognitives-et-exposition-aux-ecrans_6017217_4355770.html">Michel Desmurget</a>, <em>La Fabrique du crétin digital</em>, des chercheurs se sont penchés plus spécifiquement sur l’irruption du numérique dans les écoles et universités.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/PoHTnbo7Oro?wmode=transparent&start=88" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Interview de Michel Desmurget sur France Inter, octobre 2019.</span></figcaption>
</figure>
<p>Doctorante à l’université Clermont-Auvergne, <a href="https://www.lemonde.fr/campus/article/2019/11/25/les-etudiants-sont-demandeurs-d-une-interdiction-des-ecrans-pour-eviter-les-tentations_6020400_4401467.html">Juliette Robert</a> s’est par exemple intéressée à la déconcentration engendrée par ordinateurs et téléphones pendant les cours. Plutôt que les documents pédagogiques qui accompagnent les séances, les étudiants auraient tendance à favoriser des activités de divertissement, notamment sur les réseaux sociaux.</p>
<p>Quasiment tous les enseignants sont confrontés au <a href="https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-tech/20130824.RUE8369/halte-au-phubbing-vous-pouvez-lacher-votre-telephone.html">phubbing</a>, ce syndrome de consultation quasi addictif de son smartphone y compris lors d’interactions sociales.</p>
<p>Le débat sur l’utilisation des ordinateurs en salle de cours n’est pas nouveau mais il a pris une ampleur considérable avec la génération dite « digital native ». Ce constat est partagé également dans l’ouvrage de Bruno Patino, la <a href="https://www.grasset.fr/livres/la-civilisation-du-poisson-rouge-9782246819295">civilisation du poisson rouge</a>, qui indique que les chercheurs de Google ont montré que la durée d’attention de la génération des millennials n’excède pas 9 secondes, soit une seconde de plus que le poisson rouge.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lire-sur-papier-lire-sur-ecran-en-quoi-est-ce-different-112493">Lire sur papier, lire sur écran : en quoi est-ce différent ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Les écrans ont ainsi détourné l’attention des étudiants de l’enseignant et ont grandement fragilisé le rôle de ce dernier dans l’apprentissage, ce dernier devant même parfois se justifier des connaissances diffusées face au moteur de recherche Google…</p>
<p>Bien entendu, les conséquences de l’utilisation des smartphones sont liées d’abord à son usage comme le souligne <a href="https://theconversation.com/a-lecole-le-portable-cest-le-couteau-suisse-du-xxi-siecle-96363">François Taddéi</a>. Ceci dit, plusieurs <a href="https://cpb-us-w2.wpmucdn.com/sites.udel.edu/dist/6/132/files/2010/11/Psychological-Science-2014-Mueller-0956797614524581-1u0h0yu.pdf">recherches</a> en sciences de l’éducation convergent vers le fait que des étudiants qui prennent des notes manuscrites ont de meilleurs résultats scolaires que ceux qui en prennent avec leur ordinateur.</p>
<h2>Repenser les cours</h2>
<p>Devant ce constat et cette problématique d’attention partagée unanimement au sein des établissements, des alternatives et quelques expérimentations ouvrent des pistes qui tendent à se généraliser dans plusieurs institutions. D’abord, on peut retravailler le rythme et l’interactivité des cursus.</p>
<p>C’est ce que nous avons fait au sein du pôle Léonard de Vinci en misant sur la classe inversée – ce dispositif qui consiste à demander un travail préparatoire plus important hors de la salle de classe pour favoriser des modalités de contrôle des connaissances et des échanges plus interactifs en cours.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/classes-inversees-retour-sur-un-phenomene-precurseur-1-66062">Classes inversées, retour sur un phénomène précurseur (1)</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>L’expérimentation peut même être poussée jusqu’à ce que ce soit le matériau créé par les étudiants qui constituent le support de cours avec des outils comme des wikis, voire même à ce que les étudiants choisissent les connaissances les plus appropriées pour co-construire le cours avec l’enseignant pour illustrer le concept de <a href="https://theconversation.com/classe-renversee-pourquoi-laisser-les-cles-de-la-classe-aux-etudiants-110446">classe renversée</a>.</p>
<p>Les enseignants dans les modules de marketing de première année ont également retravaillé le format de leurs cours en modifiant le rythme et en variant les supports (utilisation de vidéos, quiz en ligne, sondage pendant le cours pour avoir l’opinion des étudiants, etc.) tout en y associant des principes de gamification.</p>
<h2>Responsabiliser les étudiants</h2>
<p>Enfin, dans d’autres établissements, certains enseignants ont même été jusqu’à proscrire l’utilisation des ordinateurs et smartphones dans la salle de classe. Cela nécessite une explication au départ avec les étudiants du contrat moral et un certain talent pour capter leur attention durant toute la durée de la séance, mais certains étudiants reconnaissent volontiers les bénéfices d’apprendre sans avoir les <a href="https://www.lemonde.fr/campus/article/2019/11/25/les-etudiants-sont-demandeurs-d-une-interdiction-des-ecrans-pour-eviter-les-tentations_6020400_4401467.html">yeux rivés sur des écrans</a>.</p>
<p>Ce travail de pédagogie est important aussi pour développer une réelle prise de conscience du pouvoir des écrans sur l’apprentissage auprès des étudiants. Au sein du pôle Léonard de Vinci, les étudiants de première année ont ainsi pu suivre des <a href="https://youtu.be/xdpiWDW5Zi0">formations conçues par des chercheurs en neurosciences</a> pour les sensibiliser aux dangers des écrans et sur la manière d’utiliser les ordinateurs et smartphones dans l’apprentissage des connaissances avec des techniques simples mais efficaces.</p>
<p>Cette thématique sera également traitée lors d’un hackathon pour les étudiants de quatrième année : « hyperconnexion et transparence numérique : quelles solutions alternatives pour 2030 ? »</p>
<p>Au-delà de la sensibilisation des étudiants aux problèmes de surcharge mentale et d’économie de l’attention, l’idée est de les rendre acteurs eux-mêmes de solutions créatives et originales pour faire face à cette problématique de l’attention qui se retrouve aussi de plus en plus dans le monde de l’entreprise.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/129507/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sébastien Tran travaille au sein du Pôle Léonard de Vinci en tant que directeur général adjoint</span></em></p>Pour maintenir l’attention des étudiants à l’heure où fleurissent les écrans, les établissements repensent leurs enseignements.Sébastien Tran, Directeur de l'École de Management Léonard de Vinci (EMLV), Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1244022019-10-10T21:40:09Z2019-10-10T21:40:09ZDe quelles façons l’intelligence artificielle se sert-elle des neurosciences ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/295842/original/file-20191007-121056-1ndjrzc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=853%2C332%2C5137%2C2928&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Cerveau et synapse</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/IHfOpAzzjHM">robina weermeijer/unsplash</a></span></figcaption></figure><p>L’Intelligence artificielle (IA) s’est construite sur une opposition entre connaissances et données. Les neurosciences ont fourni des éléments confortant cette vision mais ont aussi révélé que des propriétés importantes de notre cognition reposent sur des interdépendances fortes entre ces deux concepts. Cependant l’IA reste bloquée sur ses conceptions initiales et ne pourra plus participer à cette dynamique vertueuse tant qu’elle n’aura pas intégré cette vision différenciée.</p>
<h2>IA symbolique et numérique</h2>
<p>La quête pour l’IA s’est toujours faite sur la base d’une polarité entre deux approches exclusives, symbolique ou numérique. Cette polarité fut déclarée dès ses origines. Certains de ses pères fondateurs comme J. von Neumann ou N. Wiener, ont proposé de modéliser le cerveau et le calcul des neurones pour tenter d’égaler une intelligence. D’autres, comme H. Newell ou J. McCarthy, ont souligné que, tout comme notre esprit, les ordinateurs manipulent des symboles et peuvent donc construire des représentations du monde et les manipulations caractéristiques de l’intelligence.</p>
<p>Cette dualité est illustrée par l’expression des frères Dreyfus, « Making a mind versus modelling the brain », dans un <a href="http://www.ccs.fau.edu/%7Ebressler/EDU/CompNeuro/Resources/Mind_Modelling_Brain.pdf">article</a> datant de 1991. Ils y expliquent que, par leur construction même, ces deux paradigmes de l’intelligence sont faits pour s’opposer : Le paradigme symbolique met l’accent sur la résolution de problèmes et utilise la logique en suivant une approche réductionniste et le paradigme numérique se focalise sur l’apprentissage et utilise les statistiques selon une approche holistique.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/295849/original/file-20191007-121060-e4zl4i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/295849/original/file-20191007-121060-e4zl4i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/295849/original/file-20191007-121060-e4zl4i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/295849/original/file-20191007-121060-e4zl4i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/295849/original/file-20191007-121060-e4zl4i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=481&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/295849/original/file-20191007-121060-e4zl4i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=481&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/295849/original/file-20191007-121060-e4zl4i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=481&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Liaisons.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Medium</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>On connaît la suite de l’histoire avec, tour à tour, chaque approche écrasant l’autre à l’occasion du succès éclatant d’une technique particulière, suivi de désillusions entraînant ce que les spécialistes ont appelé l’« hiver » de l’IA. Aujourd’hui, l’IA a fait des progrès indéniables, mais nous subissons toujours cette dualité, même si le vocabulaire a un peu évolué et que l’on parle maintenant d’IA basée sur les connaissances (pour le web sémantique) ou sur les données (et les <em>data sciences</em>). Nous sommes actuellement sans conteste dans une période numérique où tout le monde n’a que le <em>Deep Learning</em> à la bouche, même si des voix commencent à s’élever pour prédire une chute proche si l’on n’est pas capable d’interpréter ces techniques numériques dans le sens de la transparence et des explications, deux notions du monde des connaissances.</p>
<p>Sommes-nous encore partis pour un cycle, à toujours nous demander laquelle de ces deux approches finira par démontrer qu’elle était la bonne, ou saurons-nous trancher le nœud gordien ? C’est dans cette dernière perspective que je propose de revenir aux fondamentaux. Puisque les deux approches s’accordent au moins sur le fait qu’elles cherchent à reproduire nos fonctions cognitives supérieures, ne devrait-on pas commencer par se demander si notre cognition est symbolique ou numérique ?</p>
<h2>Mémoires implicite et explicite</h2>
<p>A cette question, les sciences cognitives répondent d’abord que notre mémoire à long terme est soit explicite soit implicite. D’une part nous pouvons nous souvenir de notre repas d’hier soir (mémoire épisodique) ou avoir la connaissance que le ciel est bleu (mémoire sémantique) ; d’autre part nous avons appris notre langue maternelle et nous pouvons apprendre à faire du vélo (mémoire procédurale). Nous savons que (et nous en sommes conscients, nous savons l’expliquer) ou nous savons faire (et nous pouvons en faire la démonstration, sans être capable de ramener cette connaissance au niveau conscient). On retrouve ici les principes décrits respectivement en IA par la manipulation explicite de connaissances ou implicite de données.</p>
<p>Les neurosciences ont identifié des circuits cérébraux correspondants, avec en particulier les boucles entre les ganglions de la base et le cortex plutôt impliquées dans la mémoire implicite, et l’hippocampe et ses relations avec l’ensemble du lobe temporal médial, essentiel pour la mémoire explicite. Les deux modes d’apprentissage sont à l’œuvre dans deux phénomènes : la consolidation et la formation des habitudes.</p>
<h2>Les mécanismes de la consolidation</h2>
<p>Ces mémoires complémentaires sont construites avec un apprentissage lent et procédural dans le cortex et la formation rapide d’associations arbitraires dans l’hippocampe. Prenons un exemple : allant toujours faire mes achats dans le même supermarché, je vais former, après de nombreuses visites, une représentation de son parking, mais à chaque visite, je dois aussi me souvenir de l’endroit précis où j’ai laissé ma voiture. Les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Neurosciences_computationnelles">modèles computationnels</a> permettent de mieux comprendre ce qui est à l’œuvre ici. Les modèles d’apprentissage procédural implicite, généralement en couches, montrent que des régularités sont extraites statistiquement, à partir de nombreux exemples dont les représentations doivent se recouvrir pour pouvoir généraliser. Mais si l’on souhaite apprendre ensuite des données avec d’autres régularités, on va observer l’oubli catastrophique des premières relations apprises.</p>
<p>Inversement, dans un modèle d’apprentissage explicite de cas particuliers, on va privilégier le codage de ce qui est spécifique plutôt que de ce qui est régulier dans l’information (pour retrouver ma voiture, je ne dois pas généraliser sur plusieurs exemples mais me souvenir du cas précis). Cet apprentissage sera plus rapide, puisqu’on ne cherchera pas à se confronter à d’autres exemples mais à apprendre par cœur un cas particulier. Mais l’expérimentation avec ce type de modèles montre des risques d’interférence si on apprend trop d’exemples proches, ainsi qu’un coût élevé pour le stockage des informations (ce qui n’est pas le cas pour l’apprentissage implicite). Il est donc impératif de limiter le nombre d’exemples stockés dans l’hippocampe.</p>
<p>Des transferts de l’hippocampe vers le cortex (que l’on appelle consolidation, se produisant principalement lors des phases de sommeil) traitent les deux problèmes évoqués plus haut. D’une part, lorsque des cas particuliers proches sont stockés dans l’hippocampe, leurs points communs sont extraits et transférés dans le cortex. D’autre part, l’hippocampe, en renvoyant vers le cortex des cas particuliers, lui permet de s’entraîner de façon progressive, en alternant cas anciens et nouveaux et lui évite l’oubli catastrophique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/295848/original/file-20191007-52202-8ezkon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/295848/original/file-20191007-52202-8ezkon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=473&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/295848/original/file-20191007-52202-8ezkon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=473&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/295848/original/file-20191007-52202-8ezkon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=473&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/295848/original/file-20191007-52202-8ezkon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=594&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/295848/original/file-20191007-52202-8ezkon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=594&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/295848/original/file-20191007-52202-8ezkon.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=594&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La région colorée en violet foncé est le cortex cérébral.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cortex_c%C3%A9r%C3%A9bral#/media/Fichier:Brainmaps-macaque-hippocampus.jpg">brainmaps.org</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Les mécanismes de la formation des habitudes</h2>
<p>La prise de décision peut se faire selon deux modes, réflexif et réflectif. Là aussi, les apprentissages implicite et explicite sont à l’œuvre. Pour prendre une décision, une représentation explicite du monde permettra de façon prospective d’anticiper les conséquences que pourraient avoir nos actions et de choisir la plus intéressante. Avec sa capacité à former rapidement des associations arbitraires, l’hippocampe semble massivement impliqué dans la construction de ces cartes cognitives explicites.</p>
<p>Ensuite, après avoir longuement utilisé cette approche dirigée par les buts, on peut se rendre compte, par une analyse rétrospective portant sur de nombreux cas, que dans telle situation la même action est toujours sélectionnée, et se former une association situation-action dans le cortex par apprentissage lent, sans se représenter explicitement le but qui motive ce choix. On appelle cela la formation des habitudes.</p>
<h2>Mais que fait l’IA ?</h2>
<p>La dualité implicite/explicite a conforté l’IA dans ses aspects numériques/symboliques ou basés sur les données et sur les connaissances. L’IA n’a cependant pas intégré un ensemble de résultats qui montrent que, au-delà d’une simple dualité, les mémoires implicites et explicites interagissent subtilement pour former notre cognition.</p>
<p>Concernant la consolidation, l’hippocampe est en fait alimenté presque exclusivement par des représentations provenant du cortex, donc correspondant à l’état courant de la mémoire implicite, ce qui indique que ces deux mémoires sont interdépendantes et co-construites. Comment ces échanges se réalisent entre le cortex et l’hippocampe et comment ils évoluent mutuellement restent des mécanismes très peu décrits et très peu connus en neurosciences.</p>
<p>Concernant la formation des habitudes, cette automatisation de notre comportement n’est pas à sens unique et nous savons figer un comportement puis le réviser par une remise en cause explicite quand il n’est plus efficace puis le reprendre si besoin. Là aussi, ces mécanismes sont très peu compris en neurosciences.</p>
<p>La modélisation a été une source d’inspiration pour aider les neurosciences à formaliser et à décrire les mécanismes de traitement de l’information à l’œuvre dans notre cerveau. Pourtant, concernant ces modalités d’associations flexibles entre nos mémoires implicites et explicites, l’IA ne joue pas son rôle d’aiguillon pour aider les neurosciences à avancer sur ces questions, car elle reste bloquée sur cette dualité rigide et stérile entre données et connaissances, alors que les relations entre connaissances et données devraient être au cœur des préoccupations d’une IA soucieuse de résoudre ses points de blocage. Il est donc temps d’exposer au grand jour ce hiatus et de demander à l’IA de jouer son rôle d’inspiration.</p>
<hr>
<p><em>Cet article est publié dans le cadre de l’évènement « Le procès de l’IA », un <a href="http://tousensciences.fr/bdxmacropole-proces/">projet Arts & Science de l’Université de Bordeaux</a>, en partenariat avec Primesautier Théâtre.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124402/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Frédéric Alexandre ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’intelligence artificielle cherche à reproduire les fonctions cognitives supérieures mais ne prend toujours pas en compte les interactions subtiles du traitement de l’information dans notre cerveau.Frédéric Alexandre, Pilote de l'équipe MNEMOSYNE à l'Institut des Maladies Neurodegeneratives, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1125802019-03-03T20:04:01Z2019-03-03T20:04:01ZRéguler ses émotions dans son travail : le cas des policiers de la BAC<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/261069/original/file-20190226-150694-ciok4b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=7%2C7%2C983%2C654&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans la police, les états relatifs au stress professionnel sont vécus au sein même de la vie personnelle.</span> <span class="attribution"><span class="source">NeydtStock / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p><em>Hélène Monier est l’auteure de la thèse intitulée <a href="http://www.theses.fr/2017LYSE3027">« Les régulations individuelles et collectives des émotions dans des métiers sujets à incidents émotionnels : quels enjeux pour la GRH ? »</a>. Elle a reçu le Prix AGRH-FNEGE pour ses travaux.</em></p>
<hr>
<p>La thèse intitulée <a href="http://www.theses.fr/2017LYSE3027">« Les régulations individuelles et collectives des émotions dans des métiers sujets à incidents émotionnels : quels enjeux pour la GRH ? »</a> propose d’examiner les thématiques actuelles de santé-sécurité au travail (SST) et de qualité de service concernant différents métiers en primo-contact avec un public, en y portant un regard nouveau : il s’agit de considérer ces thématiques sous l’angle émotionnel au travail. La composante émotionnelle, en effet, y joue un rôle certain, que la gestion des ressources humaines (GRH) découvre à peine depuis les années 2000.</p>
<p>Dans les métiers de contact avec un public, identifier, exprimer, comprendre, et réguler les émotions constitue une compétence particulièrement utile à l’accomplissement de la tâche. L’émotion du professionnel en contact direct avec l’usager ou le client doit être contrôlée, réprimée, simulée ou réfrénée. Face à son interlocuteur, l’enjeu humain pour le professionnel sera d’être capable, non seulement d’en « lire » le visage et la communication non verbale, pour y apporter une réponse adéquate, mais encore d’adapter lui-même son état émotionnel à la situation, en conformité avec les règles émotionnelles exigées par l’organisation.</p>
<figure>
<iframe src="https://player.vimeo.com/video/288012815" width="500" height="281" frameborder="0" webkitallowfullscreen="" mozallowfullscreen="" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Régulations individuelles et collectives des émotions dans des métiers sujets à incidents émotionnels », vidéo FNEGE Médias (2018).</span></figcaption>
</figure>
<p>La thèse soulève la question suivante : « Quelles sont les composantes du processus émotionnel au travail et leurs répercussions sur la santé du professionnel ainsi que sur l’accomplissement de sa tâche » ?</p>
<p>Nous abordons la composante émotionnelle au travail selon la <a href="https://psycnet.apa.org/record/2001-06810-000">perspective cognitive</a>, et, afin d’étudier la composition des émotions, optons pour l’approche par catégories, selon le modèle multidimensionnel de <a href="https://www.jstor.org/stable/27857503?seq=1#page_scan_tab_contents">R. Plutchik</a>.</p>
<p>D’une part, concernant les régulations individuelles des émotions, trois concepts sont examinés dans cette recherche : les <a href="http://ei.yale.edu/publication/emotional-intelligence-4/">« compétences émotionnelles »</a>, le <a href="https://www.cairn.info/revue-travailler-2003-1-page-19.htm?try_download=1">« travail émotionnel »</a>, et la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/9457784">« régulation émotionnelle »</a>. D’autre part, concernant les régulations collectives des émotions, cette recherche mobilise la théorie de la régulation sociale de <a href="https://www.persee.fr/doc/rfsoc_0035-2969_1988_num_29_1_2475">J.-D. Reynaud</a>, et en interroge l’éventuelle composante émotionnelle.</p>
<h2>Gérer la peur et l’incertitude</h2>
<p>Nous avons mené une recherche comparative de quatre cas : les policiers de Brigade Anti-Criminalité (BAC), les infirmiers urgentistes, les enseignants en Réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP+) et les téléconseillers d’un centre d’appels. Pour des raisons de pertinence, de pragmatisme et d’actualité, le métier de policier représente le secteur d’activité archétypal de référence. Nous avons triangulé trois méthodes qualitatives de recueil : des immersions dans chaque terrain, 108 entretiens, et des éléments de documentation, dans le but de comparer les perspectives et d’analyser les échantillons en profondeur.</p>
<p>Les résultats issus des analyses trouvent à se classer en trois catégories : les objets, les outils, et les effets émotionnels du travail. Afin de les exposer succinctement, nous avons ici extrait des verbatim, concernant le cas des policiers, et reflétant tout d’abord :</p>
<ul>
<li>les objets émotionnels de travail, inhérents à l’activité réelle des professionnels (émotions-objets, risques physiques et psychologiques…). Citons le cas de la peur :</li>
</ul>
<blockquote>
<p>« Les courses-poursuites, je trouve que c’est quand même quelque chose de très dangereux, on est à des vitesses des fois folles. C’est un domaine qui me provoque beaucoup d’émotions, ça me charge. Là, je serai presque dans la crainte, quand je vois que ça passe tout juste ».</p>
</blockquote>
<p>Ou bien ici la colère :</p>
<blockquote>
<p>« Les mecs sont partis, ont réussi. On repart ; et je suis bloqué par un véhicule de police, j’ai pris du retard, et plus tard ils ont largué la bagnole ; mais là, j’avais une COLÈRE ! Mais, magistrale ! J’ai tapé sur le tableau de bord, de colère ! »</p>
</blockquote>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/261071/original/file-20190226-150721-qn7kq9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/261071/original/file-20190226-150721-qn7kq9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/261071/original/file-20190226-150721-qn7kq9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/261071/original/file-20190226-150721-qn7kq9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/261071/original/file-20190226-150721-qn7kq9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/261071/original/file-20190226-150721-qn7kq9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/261071/original/file-20190226-150721-qn7kq9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les courses-poursuites provoquent beaucoup d’émotions chez les policiers.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sibuet Benjamin/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<ul>
<li>Pour travailler et transformer ces objets de travail, les professionnels recourent à des outils émotionnels de travail (émotions-outils, compétences émotionnelles, travail émotionnel, stratégies de régulation, etc.). Relevons, pour les policiers, l’importance de la préparation et de la vigilance collective, avant et pendant une intervention de perquisition au domicile de personnes recherchées, potentiellement armées :</li>
</ul>
<blockquote>
<p>« Quand on va chercher des mecs à domicile le matin, on essaye de s’organiser un peu : ‟on prend le bélier, on prend pas, on casse la porte, on casse pas, on prend les casques balistiques ?“ on est vraiment là-dedans, la préparation, l’anticipation, la vigilance. »</p>
</blockquote>
<ul>
<li>Ces objets et outils produisent des effets émotionnels du travail, pour les individus et les collectifs (émotions-effets, retraits, départs, fatigue, fierté, satisfaction, etc.). Relevons l’ambivalence des états de vigilance, qui, au sein de la privée, peuvent être vécus comme une déformation professionnelle empêchant de cloisonner les deux sphères de vie :</li>
</ul>
<blockquote>
<p>« Je suis vigilant. Tout le temps. Même chez moi quand je ferme mon portail, je le fais comme ça (mimes) parce que je sais que s’il y a un mec qui rentre il ne va pas rentrer par là. C’est une déformation professionnelle. C’est même des fois handicapant. »</p>
</blockquote>
<p>Ou bien ici, des états relatifs à la peur, au stress professionnel, vécu au sein même de la vie personnelle :</p>
<blockquote>
<p>« Charlie Hebdo, ce qu’il s’est passé, là, c’était dur de déconnecter parce qu’on nous demandait de rentrer avec notre arme de service, il y avait une tension permanente. »</p>
</blockquote>
<h2>Risques sur la santé</h2>
<p>Ces résultats nous conduisent à penser l’ouverture de l’organisation aux phénomènes émotionnels, et le rôle de la gestion des ressources humaines et du management quant à cette composante. Nous proposons un <a href="https://www.erudit.org/fr/revues/ri/2017-v72-n4-ri03400/1043173ar/resume/">modèle de structuration du processus émotionnel</a> au travail.</p>
<p>Commençons par les objets émotionnels de travail : ils correspondent à toute émotion issue de la situation de travail, du contexte de travail. Dans la littérature, ils retentissent sur la santé et la qualité de service. La peur au travail par exemple, constituera un risque sur la santé et le manque de clarté organisationnelle, comme les injonctions paradoxales peuvent mettre à mal la qualité de service. Cette recherche montre que la nature des objets de travail, comme l’incertitude pour les policiers, va influencer celle des outils de travail, comme la vigilance, par exemple. Enfin, ces objets produisent des effets, comme l’intention de quitter.</p>
<p>Les outils émotionnels de travail constituent les moyens, liés aux émotions, mis en œuvre par l’individu et/ou le collectif de travail, afin d’agir sur les objets émotionnels de travail. La littérature le confirme : ces outils impactent la santé des professionnels ; par exemple, la prise de substances est nocive pour la santé, alors que les stratégies de régulations collectives se révèlent constituer un rempart salutaire. Ces outils conditionnent aussi la qualité de service ou d’intervention : c’est le cas des émotions-outils de travail, comme la joie, l’empathie, la vigilance, et le travail émotionnel au sens de <a href="https://www.cairn.info/revue-travailler-2003-1-page-19.htm?try_download=1">A. Hochschild</a>. Ces outils agissent sur les objets du travail : par exemple, les formations à la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3072688/">réévaluation cognitive</a>, permettent aux professionnels de faire baisser l’intensité de la peur ou de la colère. Ces outils produisent en eux-mêmes des effets émotionnels de travail : c’est le cas par exemple du travail émotionnel qui provoque de la fatigue, ou bien de l’état de vigilance constant.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/261073/original/file-20190226-150715-1xx5cl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/261073/original/file-20190226-150715-1xx5cl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/261073/original/file-20190226-150715-1xx5cl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/261073/original/file-20190226-150715-1xx5cl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/261073/original/file-20190226-150715-1xx5cl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/261073/original/file-20190226-150715-1xx5cl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/261073/original/file-20190226-150715-1xx5cl6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le travail émotionnel augmente le niveau de fatigue.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Guillaume Louyot Onickz Artworks/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les effets émotionnels du travail englobent toute conséquence, liée à l’émotion au travail, sur l’individu et/ou sur le collectif de travail. Ces effets affectent la santé des professionnels, de manière délétère par exemple lorsque le stress professionnel, ressenti jusque dans la vie privée, est chronique, ou bien de manière vertueuse, lorsque les situations de travail apportent fierté et satisfaction. Ils conditionnent aussi la qualité de service, de manière nuisible par exemple lorsqu’il y a un conflit travail-famille, et de manière constructive lorsque l’organisation aménage des sas de décompression et des « coulisses » <a href="http://www.leseditionsdeminuit.com/livre-La_Pr%C3%A9sentation_de_soi._La_Mise_en_sc%C3%A8ne_de_la_vie_quotidienne_I-2089-1-1-0-1.html">au sens goffmanien</a>. Ces effets influencent à leur tour les futurs outils de travail, car si l’organisation les néglige, comment les professionnels vont-ils mobiliser ensuite ces outils pour recréer la disponibilité émotionnelle nécessaire dans l’interaction ?</p>
<p>Dans cette perspective, le Limsse (Labo’ d’innovation management pour la santé-sécurité au travail), intégré au centre de recherche de l’<a href="http://www.ensp.interieur.gouv.fr/Recherche/Projets">ENSP</a>, est en cours de création en réponse à des impératifs stratégiques du ministère de l’Intérieur à propos notamment du management de la qualité de vie au travail (QVT).</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/112580/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hélène Monier est enseignant-chercheur en gestion des ressources humaines à Burgundy School of Business, chercheuse associée Centre de Recherche de l'ENSP (Ecole Nationale Supérieure de la Police), et vice-présidente des Pôles du management - Le Pôle Lyon Rhône.</span></em></p>Lorsqu’un professionnel exerce un métier en contact direct avec un public, ses émotions doivent être tour à tour contrôlées, réprimées, simulées ou réfrénées.Hélène Monier, Enseignant-chercheur, Burgundy School of Business Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1017852018-11-28T20:40:41Z2018-11-28T20:40:41ZPourquoi l’intelligence artificielle risque de continuer à tuer<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/247569/original/file-20181127-76764-2ba7vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/intelligence-artificielle-cerveau-3683774/">Geralt/Pixabay</a></span></figcaption></figure><p>Des neurones artificiels pour des machines profondément intelligentes. C’est la nouvelle révolution de l’IA offerte, depuis 2012, par <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Geoffrey_Hinton">Geoffrey Hinton</a> et son équipe. Cet expert en sciences cognitives de l’université de Toronto, et chercheur chez <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Google_Brain">Google Brain</a> a annoncé cette année-là des résultats exceptionnels d’un réseau de neurones artificiels à couches profondes (<em>Deep Neural Network</em>, DNN) dans une tâche de classification d’images.</p>
<p>Suite à ces performances impressionnantes dans ce domaine prometteur et passionnant qu’est l’intelligence artificielle (IA), des investissements massifs ont été réalisés par les universités mais aussi par les plus grands groupes internationaux pour développer ce nouveau potentiel. Néanmoins, malgré l’efficacité impressionnante des DNN dans de nombreux domaines d’applications (reconnaissance visuelle ou vocale, traduction, imagerie médicale, etc.) des questions se posent sur les limites du <a href="https://theconversation.com/deep-learning-des-reseaux-de-neurones-pour-traiter-linformation-76055">deep learning</a> dans d’autres domaines tels que le pilotage de véhicules autonomes par exemple.</p>
<p>Pour comprendre les limites de l’IA actuelle, il faut comprendre d’où viennent les DNN et surtout de quelles zones du cerveau humain ils en constituent l’analogue formel, ce qui est souvent très mal connu dans l’ingénierie industrielle mais aussi dans certains centres de recherche. Depuis cette nouvelle révolution, ils utilisent le Deep learning comme une « baguette magique » sans en connaître ni l’origine, ni les limites. Sur ce point, le titre du rapport Villani – « Donner un sens à l’intelligence artificielle » – est révélateur de ce malaise profond.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/ILsA4nyG7I0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Explication des DDN.</span></figcaption>
</figure>
<h2>D’où vient le <em>deep learning</em> ?</h2>
<p>L’origine des réseaux de neurones artificiels remonte aux années 1940 et aux découvertes fondatrices en neurosciences et en psychologie de McCulloch et Pitts (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Neurone_formel">premier modèle mathématique d’un neurone</a>) et de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Donald_Hebb">Donald Hebb</a> (formalisation des règles d’apprentissage synaptique). L’objectif de ces chercheurs était de comprendre comment les neurones, briques élémentaires du cerveau, pouvaient générer la psyché.</p>
<p>Ce travail séminal a conduit à la conception en 1958 du premier réseau de neurones artificiels par le psychologue américain Frank Rosenblatt : le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Perceptron">Perceptron</a>. Ces premières recherches ont évidemment été suivies d’évolutions importantes, par exemple sur la base des travaux en neurosciences de <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Hodgkin%E2%80%93Huxley_model">Hodgkin et Huxley</a> qui spécifient la dynamique temporelle de l’intégration neuronale ou les travaux en informatique et en mathématiques de <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Bernard_Widrow">Bernard Widrow</a> et <a href="https://en.m.wikipedia.org/wiki/Marcian_Hoff">Ted Hoff</a> qui proposèrent l’utilisation d’algorithmes de descente de gradient plus efficaces pour la modification des connexions synaptiques des réseaux de neurones.</p>
<p>Ces optimisations mathématiques ont ensuite été approfondies dans les années 1980 par les recherches en sciences cognitives de David Rumelhart, Geoffrey Hinton, et James McClelland, parmi les membres du <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Connectionism">Parallel Distributed Processing Research Group</a> qui ont permis l’optimisation de la modification des connexions synaptiques dans des couches profondes de neurones et l’avènement du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Perceptron_multicouche">perceptron multi-couches</a> (ou multi-layer perceptron, MLP). Les DNN, développés par des auteurs tels que Geoffrey Hinton, Yann LeCun ou Yoshua Bengio, sont les descendants directs du MLP.</p>
<h2>Existe-t-il un lien entre Deep Learning et cerveau ?</h2>
<p>Malgré l’origine interdisciplinaire et inspirée du fonctionnement du cerveau des DNN, on peut se demander dans quelle mesure ces algorithmes simulent encore quelque chose du cerveau humain. Les DNN ont été conçus pour réaliser des tâches de reconnaissance et classification d’images par exemple. À cette fin, les DNN utilisent différentes couches de <a href="https://towardsdatascience.com/types-of-convolutions-in-deep-learning-717013397f4d"><em>convolution</em></a> et de <a href="https://www.actuia.com/contribution/thibault-neveu/les-reseaux-de-neurones-convolutifs/"><em>pooling</em></a> avant la reconnaissance de l’image.</p>
<p>Concernant les couches de convolutions, les travaux de Hubel et Wiesel dans les années 1960 ou de Jones et Palmer dans les années 1980 montrent la possibilité de simuler par cette méthode la probabilité de réponse de neurones du cortex visuel primaire. De nombreuses recherches en sciences cognitives, <a href="https://www.deboecksuperieur.com/auteur/martial-mermillod">dont nos propres travaux</a>, utilisent ainsi ce processus pour simuler la réponse de ces neurones de façon neuro-inspirée.</p>
<p>Concernant le processus de <em>pooling</em>, différents travaux réalisés depuis 30 ans en neurosciences et en psychologie cognitive montrent comment le cerveau réalise ce processus d’abstraction au niveau de la voie occipito-temporale. Ainsi, les travaux de Rufin Vogels ou de Keiji Tanaka montrent comment cette voie permet l’identification ou la classification visuelle indépendamment des propriétés de surface de l’image comme la texture, la couleur, la distance ou la position des objets dans l’image. Ces aires cérébrales sont donc sensibles aux mêmes informations que les couches perceptives apprises par un DNN lors du processus de <em>pooling</em>.</p>
<p>Plus surprenant encore, les recherches de <a href="https://www2.le.ac.uk/centres/csn/people-1/Rodrigo">Rodrigo Quian Quiroga</a> et de ses collaborateurs ont montré l’existence de neurones spécifiques à des concepts ou à des identités (par exemple des neurones « Jennifer Aniston », ou « Tour de Pise »). Ils s’activent lors d’un accès direct au concept tel que le nom écrit « Jennifer Aniston ». Encore plus passionnant au regard de l’avenir de l’IA, les travaux de Quiroga montrent que cette activité neuronale est corrélée avec la perception <em>consciente</em> d’un stimulus de l’environnement.</p>
<p>En résumé, bien que simplifiés et mathématiquement optimisés par rapport à un cerveau biologique, les DNN reproduisent les processus de convolution/abstraction de cette zone très spécifique du cortex. Des travaux de neurosciences cognitives récents montrent ainsi, par implants d’électrodes cérébrales ou par IRM fonctionnel, la similitude de fonctionnement entre DNN et cette voie occipito-temporale.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/247571/original/file-20181127-76740-yma8t1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/247571/original/file-20181127-76740-yma8t1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=276&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/247571/original/file-20181127-76740-yma8t1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=276&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/247571/original/file-20181127-76740-yma8t1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=276&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/247571/original/file-20181127-76740-yma8t1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=347&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/247571/original/file-20181127-76740-yma8t1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=347&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/247571/original/file-20181127-76740-yma8t1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=347&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Exemple de recherches montrant l’équivalence de fonctionnement entre Deep Neural Networks et voie occipito-temporale du cortex visuel.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Kuzovkin, Vicente, Petton, Lachaux, Baciu, Kahane et Aru, 2018.</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une IA plus fiable parce qu’inspirée du cerveau ?</h2>
<p>Les recherches fondamentales interdisciplinaires sur les DNN ont permis d’aboutir à des applications impressionnantes dans de nombreux domaines : reconnaissance et classification visuelle, reconnaissance vocale, traduction, jeux de go, composition musicale, etc. Malheureusement, par méconnaissance des travaux en sciences cognitives qui en sont à l’origine, les DNN restent actuellement trop souvent utilisés comme une « baguette magique » permettant de résoudre tous et n’importe quels problèmes.</p>
<p>Dans l’exemple des voitures autonomes, l’utilisation aveugle de DNN couplés directement à des systèmes de contrôle des actions du véhicule serait très risquée : ce serait équivalent à demander à un chauffeur de taxi qui a perdu plus de 80 % de son cerveau suite à un accident (et ne conservant que cette voie occipito-temporale) de conduire une voiture. Il n’est tout simplement pas possible de demander à ces systèmes plus que ce pour quoi ils ont été conçus à l’origine au risque de produire des accidents dramatiques.</p>
<p>Les aires cérébrales humaines impliquées dans l’anticipation (figure ci-dessous), l’orientation spatiale ou les fonctions sensori-motrices impliquées dans la conduite dans un environnement complexe sont très différentes des processus neuronaux à l’œuvre au niveau de la voie occipito-temporale. Ces processus neuronaux impliqués dans la compréhension et la planification de l’action sont réalisés par le cortex occipito-pariétal sur la base de processus neuronaux très différents de la voie occipito-temporale ! Ce sont des neurones très différents et sensibles par exemple à la distance, la position ou la vitesse. Autant de paramètres qui déterminent la manière dont nous pouvons agir sur l’environnement.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/247574/original/file-20181127-76761-x74d9e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/247574/original/file-20181127-76761-x74d9e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/247574/original/file-20181127-76761-x74d9e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/247574/original/file-20181127-76761-x74d9e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=378&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/247574/original/file-20181127-76761-x74d9e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/247574/original/file-20181127-76761-x74d9e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/247574/original/file-20181127-76761-x74d9e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=475&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Il est possible d’améliorer les capacités d’anticipation d’un système neuromorphique en simulant les boucles récurrentes d’aires associatives vers les aires perceptives à l’œuvre dans le cerveau humain.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Mermillod, Bourrier, David, Kauffmann, Chauvin, Guyader, Dutheil et Peyrin, 2018.</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’utilisation aveugle de DNN (ou d’autres systèmes artificiels) sans retour, ni comparaison à la neuro-inspiration pour des fonctions cognitives différentes n’est pas seulement limité en performance, c’est tout simplement dangereux. Nous ne prétendons pas que la neuro-inspiration est la seule voie efficace pour une IA plus sûre. Néanmoins, au regard du passé tumultueux de l’IA, et en particulier au regard de l’efficacité maintenant démontrée de systèmes neuro-inspirés comme les DNN comparativement aux méthodes d’ingénierie antérieures utilisées (pour la reconnaissance visuelle par exemple), il nous semble primordial de comprendre comment le cerveau réalise d’autres fonctions cognitives (contrôle moteur, intégration multi-sensorielle, etc.) afin de les comparer aux techniques d’ingénierie actuelles réalisant ces fonctions dans l’optique de produire des IA plus sûres et plus efficaces.</p>
<p>Si la recherche en IA se faisait en plus étroite collaboration avec les sciences cognitives, cela permettrait :</p>
<ul>
<li><p>de comprendre et de simuler les zones du cerveau qui ne sont pas encore appréhendées par le Deep Learning.</p></li>
<li><p>de proposer des IA plus fiables et plus performantes en comparaison avec les performances humaines.</p></li>
</ul>
<p>Ce défi passe par un travail interdisciplinaire qui nécessite bien sûr des mathématiques et de l’informatique mais aussi des neurosciences, de la psychologie cognitive, sans oublier des recherches en électronique et en physique pour développer les nouveaux processeurs neuronaux en cours de déploiement. Il s’agit de dépasser enfin les limites des machines de Turing-Von Neumann qui a dominé l’industrie électronique et l’informatique depuis la seconde guerre mondiale.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/101785/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Martial Mermillod a reçu des financements de l'Institut Universitaire de France, du CNRS et du Cross-Disciplinary Project NeuroCoG (IDEX Univ. Grenoble Alpes, programme "Investissements d’avenir" ANR-15-IDEX-02). </span></em></p>Attention à l’utilisation aveugle de l’intelligence artificielle : utilisée comme une « baguette magique », par exemple dans une voiture autonome, elle présente des risques.Martial Mermillod, Chercheur Laboratoire de Psychologie et NeuroCognition, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1047452018-10-16T20:01:38Z2018-10-16T20:01:38ZCette sensation de « ce qui est vrai »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/240132/original/file-20181010-72100-1dsb5u9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C244%2C998%2C726&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption"></span> <span class="attribution"><span class="source">Mervyn Chan/Unsplash</span></span></figcaption></figure><p><em>Cette chronique est dans la droite ligne et se nourrit des recherches et rencontres publiées sur mon site <a href="https://www.cahiersdelimaginaire.com/votrelaboratoirecreatif-sylviegendreau/">Les cahiers de l’imaginaire</a>.</em></p>
<hr>
<p>S’agit-il de logique pure ? Bien sûr que non, il serait ridicule de dire cela. Mais s’il est juste de considérer un raisonnement comme étant la somme de <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/caim.12128">deux</a> éléments : l’intuition et la pensée analytique, quelle est la part de chacun ?</p>
<p>Des <a href="https://artsweb.uwaterloo.ca/%7Egpennyco/Thompson,%20Prowse%20Turner%20&%20Pennycook%20%282011%29.pdf">chercheurs</a> canadiens proposent l’hypothèse suivante : lorsqu’un raisonnement s’opère et qu’une solution, une idée, une pensée nous vient à l’esprit, il est à chaque fois accompagné d’un processus de métacognition, une « sensation de ce qui est vrai ». Cette métacognition nous indique alors si oui ou non nous devons suivre notre intuition initiale sur une analyse.</p>
<p>Dans chacune de leurs expériences, les chercheurs ont noté une correspondance étroite entre la « sensation de ce qui vrai » et deux paramètres de la pensée analytique :</p>
<ul>
<li><p>Une « sensation de ce qui vrai » de faible intensité associée à un temps de réflexion long et à une probabilité accrue de changer d’avis.</p></li>
<li><p>Une « sensation de ce qui vrai » de forte intensité correspond, à l’inverse, à un temps de réaction rapide. La décision est prise et il est peu probable que nous changions d’avis.</p></li>
</ul>
<p>Pour que nous puissions obtenir de meilleurs résultats, l’intuition et la pensée analytique doivent procéder conjointement.</p>
<p>Dans le domaine de la production artistique, la pensée analytique puise son savoir dans la virtuosité de l’artiste. Cette habileté se construit au fil de la pratique. L’artiste qui pratique intensément son art, accumule une connaissance pratique de ce qui est réalisable ou ne l’est pas, de ce qui aura un impact émotionnel.</p>
<p>Mais, au-delà de cette « sensation de ce qui est vrai », comment définir ce qu’est l’intuition ? Pourquoi faudrait-il s’en préoccuper ?</p>
<p>Innover est un impératif. Les problèmes que devra surmonter l’humanité au cours des années à venir la forceront à trouver de nouvelles solutions. Pour innover, il faut être créatifs. Et pour être créatifs, il faut faire preuve d’intuition.</p>
<p>Il existe, selon des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/21650349.2017.1313132">chercheurs</a> japonais qui ont mené une étude sur le rôle de l’intuition et de la capacité de synthèse sur la créativité et l’innovation, deux types de créativité :</p>
<ul>
<li><p>La créativité qui cherche à générer des idées qui se démarquent des concepts traditionnels.</p></li>
<li><p>La créativité qui aboutit à de nouveaux produits à partir d’une combinaison des connaissances et des technologies existantes.</p></li>
</ul>
<h2>Quelle part d’intuition dans ce processus ?</h2>
<p>L’intuition, toujours selon les chercheurs japonais, est ce qui initie une prise de décision suite à la reconnaissance de motifs et de correspondances lors d’une expérience sensorielle. Cette intuition expérientielle ou associative peut être décrite comme la prise de conscience qu’une chose est reliée à une autre, cette prise de conscience est basée sur la sensibilité propre à l’observateur.</p>
<h2>Le processus de design</h2>
<p>Le processus de design comprend à la fois l’analyse et la synthèse :</p>
<p>Analyser, consiste à comprendre la nature d’un objet en le décomposant. Synthétiser, pour innover, consiste à combiner des éléments existants en un tout qui n’existe pas encore.</p>
<p>Le cycle de création du design intégrateur comprend les étapes suivantes :</p>
<ul>
<li><p>Identification de connexions entre différentes données et technologies.</p></li>
<li><p>Formulation d’hypothèses découlant des connexions établies.</p></li>
<li><p>Les applications possibles (les produits) deviennent apparentes, ou se révèlent d’elles-mêmes en examinant les connexions établies.</p></li>
</ul>
<p>Les chercheurs ont tenté de mettre à profit l’approche du design intégrateur en la proposant à un groupe d’étudiants en design.</p>
<p>Les résultats sont intéressants et constituent des exemples d’innovations originales :</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/240133/original/file-20181010-72103-umnoyn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/240133/original/file-20181010-72103-umnoyn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=486&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/240133/original/file-20181010-72103-umnoyn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=486&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/240133/original/file-20181010-72103-umnoyn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=486&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/240133/original/file-20181010-72103-umnoyn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=611&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/240133/original/file-20181010-72103-umnoyn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=611&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/240133/original/file-20181010-72103-umnoyn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=611&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Creativity in Innovation Design.</span>
</figcaption>
</figure>
<ul>
<li><p>Une caméra-fourmis : une petite caméra pouvant s’introduire dans un espace difficile d’accès pour les humains et se déployer en essaim pour prendre des photos. Théâtre d’opérations : lieux de sinistres.</p></li>
<li><p>Une montre-guetteuse : une montre qui transmet des données (heure, lieu, dangers) par conduction osseuse, telle une abeille qui communique sa position par bourdonnement. Théâtre d’opérations : lieux publics ou à l’intérieur d’une automobile, par exemple.</p></li>
<li><p>Une lampe-singe : une lampe qui peut être installée de différentes façons, à l’instar d’un singe qui peut s’agripper à l’aide de ses pattes ou de sa queue. Théâtre d’opérations : à l’intérieur d’un bâtiment.</p></li>
<li><p>Un filet à poissons : un petit sous-marin qui fonctionne comme une baleine. Le sous-marin produit des bulles d’air et des sons. Il opère en coordination avec d’autres sous-marins de même type pour confondre des poissons et les diriger vers un filet. Théâtre d’opérations : milieu sous-marin.</p></li>
</ul>
<p>Cette semaine, je vous propose d’animer un atelier avec les membres de votre famille, vos amis ou vos collègues. Donnez-vous la mission de créer quelque chose de nouveau en suivant les conseils de cet article. C’est l’<a href="https://www.cahiersdelimaginaire.com/cahier-d-exercices/de-sylvie-gendreau-exercice-no-96">exercice</a> de la semaine !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/104745/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Les problèmes que devra surmonter l’humanité au cours des années à venir la forceront à trouver de nouvelles solutions plus rapidement. Le design intégrateur est un accélérateur. Tentez l’expérience.Sylvie Gendreau, Chargé de cours en créativité et innovation, Polytechnique MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1034002018-10-04T16:59:37Z2018-10-04T16:59:37ZLes secrets de la mémoire épisodique : voyage au cœur de vous-même<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/238098/original/file-20180926-48644-1ncz9r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C20%2C1914%2C1247&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La mémoire épisodique nous aide à nous adapter et à nous définir.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/en/photo-photographer-old-photos-256887/">jarmoluk/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la Science 2018 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a></em></p>
<hr>
<p>La mémoire humaine est une fonction cognitive de haut niveau grâce à laquelle l’homme emmagasine, conserve puis réactualise ultérieurement les informations qu’il a rencontrées au cours de sa vie. Il n’existe pas un <a href="http://theses.univ-lyon2.fr/documents/getpart.php?id=lyon2.2008.labeye_e&part=149730">mais plusieurs systèmes de mémoire</a>.</p>
<p>Parmi ces différents systèmes, la mémoire épisodique fait référence aux souvenirs autobiographiques. Grâce à un voyage mental dans le temps, cette forme de mémoire permet de se souvenir d’évènements passés personnellement vécus que l’on peut resituer dans le temps et l’espace (se souvenir du film vu au cinéma la veille) mais aussi d’actions à faire dans le futur (se rendre à un rendez-vous médical le lendemain).</p>
<p>La mémoire épisodique est fondamentale à la fois en termes d’adaptation à l’environnement et de sentiment d’identité.</p>
<h2>Fouiller dans ses souvenirs</h2>
<p>Cependant, bien que présents en mémoire épisodique, les souvenirs ne sont pas toujours spontanément accessibles. En effet, lorsqu’un individu doit rechercher une information contenue en mémoire épisodique, il engage ainsi des stratégies de recherche qui ne se révèlent pas toujours efficaces.</p>
<p>Par exemple, si j’essaye de me souvenir de ce que j’ai mangé hier midi, une stratégie qui pourrait s’avérer inefficace serait de se limiter à rechercher en mémoire le contenu du repas en lui-même. Une stratégie plus efficace pourrait être de chercher à se souvenir avec qui j’ai partagé ce repas, où nous étions, etc., pour augmenter les chances de retrouver le souvenir que je cherche.</p>
<p>Pour évaluer le fonctionnement de la mémoire épisodique, les recherches menées en laboratoire consistent à demander à un participant volontaire de mémoriser des informations par exemple une liste de mots (20, 30, 40 ou plus selon l’expérience) présentés un par un (cartable, mouchoir, taureau…).</p>
<p>Dans un second temps, on lui demande de restituer ces mots. Plusieurs modes de récupération en mémoire peuvent alors être proposés. La tâche de « rappel libre » consiste à rechercher en mémoire les informations apprises sans aucune aide, ce qui nécessite donc d’initier spontanément des stratégies de récupération.</p>
<p>Il s’agit du mode de récupération le plus difficile et dans ce contexte, le participant échoue souvent à retrouver les mots appris. Cependant, les mots qui n’ont pas été rappelés ne sont pas pour autant oubliés et sont parfois accessibles si on fournit une aide sous la forme d’un indice de récupération. La tâche de « rappel indicé » consiste à proposer des catégories sémantiques (« un animal ? » pour le mot taureau) ou des trigrammes (TAU – – ?) qui facilitent la tâche puisque ces indices orientent la recherche en mémoire.</p>
<p>Une troisième façon d’accéder aux souvenirs en mémoire épisodique consiste plus simplement à représenter l’information préalablement encodée parmi de nouvelles informations (cartable, écolier, taureau, guirlande…), situation de reconnaissance où il est possible de s’appuyer sur un sentiment de familiarité pour identifier l’information apprise. En effet, le fait de revoir une seconde fois l’information apprise peut déclencher un sentiment de « déjà vu » qui facilite l’accès au souvenir sans nécessairement avoir besoin de se souvenir d’éléments contextuels.</p>
<p>Ainsi, plus la recherche en mémoire est guidée par la tâche, meilleure est la récupération des informations.</p>
<p>Toutefois, la récupération des informations n’est possible que lorsque la phase d’enregistrement des informations a été réalisée de façon efficace. Un encodage efficace des informations repose sur un traitement « profond » qui consiste par exemple à associer l’information à apprendre à nos connaissances préalables (ce qui implique d’analyser le sens de l’information à apprendre) ou à mémoriser le contexte de présentation de cette information (forme, couleur…).</p>
<p>Par exemple, pour retenir le mot pomme, je vais penser au fait que c’est un fruit, qu’elle peut être jaune, verte ou rouge, qu’elle pousse sur un arbre, qu’on peut l’utiliser pour faire une tarte, etc.</p>
<p>Plus l’encodage est élaboré, plus nous disposons d’informations contextuelles, et plus nous disposerons d’indices pour récupérer cette information ultérieurement.</p>
<h2>Le rôle des émotions</h2>
<p>Les émotions facilitent également la mémorisation d’un événement car elles jouent un rôle important dans l’adaptation de l’individu à son environnement. Les émotions sont des réactions de l’organisme qui lui permettent de fournir des réponses rapides face à des situations représentant un enjeu critique pour la survie ou plus simplement le bien-être de l’individu.</p>
<p>Il est donc crucial pour l’individu de mémoriser les expériences ayant provoqué des émotions pour favoriser l’efficacité de son adaptation ultérieure. Nous sommes donc plus attentifs, plus sensibles aux évènements ayant un caractère émotionnel. Certains évènements peuvent même entraîner un souvenir indélébile. Ainsi, il est fort probable que vous vous souveniez exactement où et avec qui vous étiez au moment où ont été diffusées les images du 11 septembre.</p>
<p>Expérimentalement, on peut tester cet effet de l’émotion sur la mémoire en utilisant des mots connotés de façon positive (« vacances »), négative (« maladie ») et neutres et les résultats montrent que nous retenons mieux les mots à connotation émotionnelle (+ ou -) que les mots à connotation neutre.</p>
<p>Dans le cerveau, un noyau situé en avant de l’hippocampe joue un rôle essentiel dans cet effet des émotions sur la mémoire. Il s’agit de l’amygdale qui permet d’associer une émotion à un événement particulier.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/238096/original/file-20180926-48634-10yeny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/238096/original/file-20180926-48634-10yeny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/238096/original/file-20180926-48634-10yeny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=440&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/238096/original/file-20180926-48634-10yeny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=440&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/238096/original/file-20180926-48634-10yeny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=440&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/238096/original/file-20180926-48634-10yeny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=553&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/238096/original/file-20180926-48634-10yeny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=553&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/238096/original/file-20180926-48634-10yeny.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=553&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Amygdale, hippocampe et fornix sur une coupe anatomique, d’après Digital Anatomist Project (University of Washington), dessin à la tablette graphique et Artweaver.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Fichier:Amygdala_hippocampus.jpg">Pancrat/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’amygdale agit conjointement avec l’<a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/memoire-episodique-et-cerveau/1-memoire-episodique-et-hippocampe/">hippocampe</a> (qui est le siège de la mémoire) pour moduler le stockage des souvenirs. Les études en neuroimagerie ont par exemple montré une augmentation de l’activité au niveau de l’amygdale lorsque l’individu visualise une scène émotionnelle. On a également pu observer que les personnes dont l’amygdale a été endommagée présentent une mémoire correcte mais insensible à l’effet renforçateur des émotions.</p>
<h2>Les faux souvenirs</h2>
<p>Les souvenirs contenus en mémoire épisodique ne sont pourtant pas un reflet fidèle de la réalité des événements que nous avons vécus. Notre mémoire est subjective et nos souvenirs dépendent de notre interprétation de la réalité, de nos connaissances et de nos expériences.</p>
<p>Ainsi, on parle de faux souvenirs pour qualifier les souvenirs que nous croyons avoir d’évènements qui n’ont jamais eu lieu ou d’informations que nous n’avons jamais entendues ou vues. Le paradigme du DRM (<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28190038">Deese-Roediger-McDermott</a>, 1995) est utilisé en laboratoire pour illustrer ce phénomène d’intrusions (ou illusions de mémoire).</p>
<p>Lorsque nous apprenons une liste de mots (bibliothèque, chapitre, écrivain…) où les mots évoquent tous un autre mot qui ne fait pas partie de la liste d’apprentissage (LIVRE), nous avons tendance à rappeler ce mot critique que nous n’avons pourtant pas appris. L’explication réside notamment dans le fait que chaque mot appris est fortement associé au mot critique (le mot bibliothèque me fait penser à livre, le mot chapitre me fait penser à livre…), si bien que l’activation de ce réseau sémantique rend saillant le mot critique et nous amène à penser qu’il faisait partie de la liste d’apprentissage.</p>
<h2>Les effets du vieillissement</h2>
<p>Parmi les déficits cognitifs liés au vieillissement, celui de la mémoire épisodique est certainement le <a href="http://psycnet.apa.org/record/1992-98157-002">plus connu et le plus documenté</a>.</p>
<p>En effet, avec l’avancée en âge, les souvenirs épisodiques diminuent et sont de moins bonne qualité. Les recherches en psychologie cognitive ont permis de formuler trois hypothèses majeures pour expliquer le moins bon fonctionnement de la mémoire épisodique avec l’âge.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/238088/original/file-20180926-48647-1pufm95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/238088/original/file-20180926-48647-1pufm95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=232&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/238088/original/file-20180926-48647-1pufm95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=232&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/238088/original/file-20180926-48647-1pufm95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=232&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/238088/original/file-20180926-48647-1pufm95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=292&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/238088/original/file-20180926-48647-1pufm95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=292&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/238088/original/file-20180926-48647-1pufm95.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=292&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Nous ne sommes pas tous égaux face au vieillissement du cerveau et aux pertes de mémoire.</span>
</figcaption>
</figure>
<p><a href="https://pdfs.semanticscholar.org/b759/d8c368a64f370821eb6ca09610aac1778096.pdf">L’hypothèse du ralentissement cognitif émise en 1996</a> suggère que les difficultés de mémoire que rencontrent les personnes âgées pourraient s’expliquer par le fait qu’elles seraient moins rapides au moment où elles doivent traiter des informations, ce qui diminue l’efficience de leur mémoire.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/238085/original/file-20180926-48644-1wrdmfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/238085/original/file-20180926-48644-1wrdmfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/238085/original/file-20180926-48644-1wrdmfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1290&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/238085/original/file-20180926-48644-1wrdmfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1290&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/238085/original/file-20180926-48644-1wrdmfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1290&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/238085/original/file-20180926-48644-1wrdmfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1622&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/238085/original/file-20180926-48644-1wrdmfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1622&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/238085/original/file-20180926-48644-1wrdmfx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1622&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Comparaison des cartes architectoniques des cortex préfrontaux humain (en haut) et simien (Macaque, en bas).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cortex_pr%C3%A9frontal#/media/File:Architectonic_map_of_the_human_and_macaque_monkey_prefrontal_cortex.png">Petrides M., Pandya D.N. (2009), PLoS Biology/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Une autre hypothèse propose que le vieillissement s’accompagne d’un <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-1-4684-4178-9_11">déficit en ressources attentionnelles</a>. Disposant de moins de ressources sur lesquelles s’appuyer, les personnes âgées ont plus de difficultés à accéder aux souvenirs. L’hypothèse du <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/8831298">dysfonctionnement exécutif</a> soutient quant à elle que la moindre efficience du fonctionnement mnésique s’explique en partie par le déclin des capacités exécutives qui sont des fonctions cognitives de haut niveau nous permettant de nous adapter à des situations nouvelles et de planifier nos actions.</p>
<p>Cette dernière hypothèse s’appuie sur l’observation d’une dégradation précoce du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cortex_pr%C3%A9frontal">cortex préfrontal</a> avec l’âge.</p>
<p>Bien que le fonctionnement de la mémoire épisodique soit associé au fonctionnement des lobes temporaux internes et de l’hippocampe, il est aujourd’hui admis que le cortex préfrontal est aussi fortement impliqué dans l’efficience mnésique.</p>
<p>Cette région cérébrale est le siège des fonctions exécutives. Il s’agit de processus cognitifs essentiels au fonctionnement optimal de la mémoire puisqu’ils permettent de mettre en place des stratégies d’encodage et de récupération.</p>
<h2>Les expériences de vie et la mémoire</h2>
<p>Cependant le vieillissement est un processus hétérogène et nous ne sommes pas tous égaux face au déclin de la mémoire épisodique. Les expériences de vie accumulées permettent de se constituer une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/19467352">« réserve cérébrale et cognitive »</a> qui pourrait ralentir les effets du vieillissement.</p>
<p>Ainsi, avoir suivi des études supérieures, avoir une profession stimulante, multiplier les activités culturelles et les activités physiques tout au long de la vie permet d’augmenter le nombre de neurones et de connexions neuronales (réserve cérébrale) et d’accumuler des compétences cognitives et des connaissances sur le fonctionnement de la mémoire qui faciliterait les apprentissages ultérieurs (réserve cognitive). Cette réserve est essentielle puisqu’elle contribue à développer notre cerveau et à retarder l’impact du vieillissement sur le fonctionnement de la mémoire épisodique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/103400/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Faux souvenirs ? Enfance ? Projets ? Sans la mémoire épisodique, nous ne serions pas nous-mêmes.Badiaa Bouazzaoui, Ingénieur de Recherche «Production et analyse de données en Sciences Humaines et Sociales», Université de ToursSandrine Vanneste, Maître de conférence en psychologie, Université de ToursLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1028722018-09-18T23:17:28Z2018-09-18T23:17:28ZDébat : 80 km/h, tous morts d’ennui ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/235811/original/file-20180911-144476-1983irc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=38%2C38%2C8445%2C6041&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Rouler lentement pourrait être dangereux... Rhode Island George P. Wetmore, 1906.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/8/84/SenatorWetmoreInAutomobile_retouched.jpg">Library of Congress-Harris & Ewing, Inc/Wikimedia</a></span></figcaption></figure><p>Récemment, comme des <a href="https://www.boursier.com/actualites/economie/limitation-a-80-km-h-le-nombre-d-automobilistes-flashes-a-double-39342.html">centaines de milliers d’automobilistes français</a>, je me suis faite flasher sur une route secondaire. Amputée d’un point et de quelques dizaines d’euros, j’ai pris une résolution : respecter strictement les limitations de vitesse. Après tout, avec un limiteur et un régulateur de vitesse, la tâche ne devrait pas être si difficile, ai-je pensé. Sans compter que mon attitude raisonnable me permettrait de gagner 13 mètres <a href="http://www.securite-routiere.gouv.fr/connaitre-les-regles/reglementation-et-sanctions/baisse-de-la-vitesse-maximale-autorisee-de-90-a-80-km-h">en cas de freinage</a> !</p>
<p>Cependant, dès le premier trajet je constate que 80 km/h c’est lent, très lent. Si lent que j’ai largement le temps d’observer mes congénères… je suis alors frappée d’une réalité aussi terrifiante que criante : au moins trois conducteurs sur quatre qui croisaient ma route étaient plus attentifs à leur téléphone qu’à leur conduite. Une fois la phase de critique presque « réflexe » passée à juger ces « mauvais conducteurs inconscients », j’ai commencé à analyser la situation avec un tout autre regard, avec celui d’une <a href="https://rd.springer.com/chapter/10.1007/978-3-319-96068-5_22">spécialiste de la charge mentale</a>.</p>
<h2>La charge mentale, quèsaco ?</h2>
<p>Face au nombre incalculable d’informations à traiter dans notre environnement, notre cerveau fait le tri : il sélectionne les informations pertinentes et inhibe celles qui sont inutiles. C’est ainsi que certaines activités complexes comme la résolution d’un problème mathématique, l’écriture d’un roman ou encore la lecture d’un article scientifique dans une langue étrangère mobilisent beaucoup notre attention. D’autres en revanche, comme parler, marcher, respirer, sont tellement ancrées dans notre quotidien que l’on n’y pense même plus. Elles sont automatisées.</p>
<p>Les psychologues <a href="http://www.armand-colin.com/la-charge-cognitive-9782200347246?qt-meme_theme_meme_auteur=0">Lucile Chanquoy, André Tricot et John Sweller</a> appellent ainsi « charge cognitive » le niveau de ressources mobilisées pour la réalisation d’une tâche.</p>
<p>À la gestion purement mécanique des ressources attentionnelles s’ajoute une dimension psychique. En effet en fonction du niveau de stress de l’individu, de sa motivation, et son état émotionnel, il ressentira plus ou moins la contrainte imposée par les informations à traiter.</p>
<p>Enfin la pression exercée par la montre joue également un rôle non négligeable dans la perception des sollicitations mentales.</p>
<p>Pour résumé, la « charge mentale » comporte trois aspects : la dimension cognitive, donc le nombre d’information à traiter, la dimension psychique donc la façon dont on perçoit ces informations, et la <a href="http://www.dtic.mil/docs/citations/ADA212879">pression temporelle</a></p>
<p>Ces dernières années, les scientifiques et non scientifiques se sont beaucoup penchés sur les effets de la charge mentale sur la performance et la santé des individus.</p>
<h2>La charge mentale chez les femmes, les cadres… et les pilotes !</h2>
<p>La charge mentale des femmes a récemment été un sujet particulièrement traité notamment par les chroniques pointant du doigt <a href="https://emmaclit.com/2017/05/09/repartition-des-taches-hommes-femmes/">l’épuisement de ces superwomen</a> « épuisées de devoir penser à tout ».</p>
<p>Quant à la charge mentale des managers elle a fait l’objet de nombreuses publications scientifiques et actions de <a href="http://www.officiel-prevention.com/protections-collectives-organisation-ergonomie/psychologie-du-travail/detail_dossier_CHSCT.php?rub=38&ssrub=163&dossid=463">prévention</a>. Ce que l’on sait moins en revanche, c’est que les études de la charge mentale hors laboratoire ont en réalité débuté dans le monde des transports.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/236628/original/file-20180917-158240-140cp38.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/236628/original/file-20180917-158240-140cp38.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/236628/original/file-20180917-158240-140cp38.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/236628/original/file-20180917-158240-140cp38.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=326&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/236628/original/file-20180917-158240-140cp38.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=409&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/236628/original/file-20180917-158240-140cp38.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=409&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/236628/original/file-20180917-158240-140cp38.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=409&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Charge mentale et performance.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Lisa Jeanson</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>C’est le psychologue néerlandais Kalsbeek qui, dès 1969, était l’un des premiers à vouloir mesurer la charge mentale des pilotes durant les vols. Il s’agissait alors d’optimiser le poste de conduite et la communication avec les contrôleurs aériens afin de <a href="http://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/155534340700100102">réduire le risque d’accidents</a>. Aux prémices des recherches sur la charge mentale, on cherchait donc à réduire les contraintes imposées aux opérateurs en leur fournissant des systèmes d’aide au pilotage et à la prise de décision, le plus connu étant le pilote automatique. Aujourd’hui, il s’agit davantage d’aider les pilotes et contrôleurs à maintenir un certain niveau de vigilance afin qu’ils puissent réagir en cas de problème et ce n’est pas une mince affaire !</p>
<p>Mais alors, me diriez-vous, quel est le rapport avec le passage au 80km/h ?</p>
<h2>Le cerveau s’ennuie…</h2>
<p>En réalité, le poste de conduite automobile a subi les mêmes mutations que le poste de pilotage, avec quelques années de retard. Aujourd’hui, dans n’importe quel véhicule de moins de cinq ans, on retrouve un régulateurs, un limiteur de vitesse, des aides au stationnement et autres systèmes sensés rendre la conduite plus « facile », « confortable » et moins <a href="https://www.cd-sport.com/cd-conseils/historique-systemes-daide-a-conduite/">« fatigante »</a>. Ces « aides à la conduite » transforment nos tableaux de bord, certes, mais pas seulement !</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/V6eDNVRb3PU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">L’anti-ennui au volant…</span></figcaption>
</figure>
<p>Elles participent également à réduire de façon drastique la charge mentale des conducteurs. Des recherches mettent d’ailleurs en garde les conducteurs contre l’ennui au volant, expliquant que <a href="https://www.cerveauetpsycho.fr/sd/psychologie/cerveau-et-psycho-36-578.php">« les conducteurs passent 30 % de leur temps au volant centrés sur autre chose que la conduite de la voiture »</a>.</p>
<p>Ajoutez à cela une baisse de la vitesse forcée sur des routes monotones qui contraint à l’utilisation du régulateur de vitesse et le conducteur a presque l’impression de faire de la figuration derrière son volant. Seulement voilà : dans la conduite comme dans la vie, on le sait aujourd’hui, l’idéal n’est pas un niveau de charge mentale minimum mais un niveau de charge mentale <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25442818"><em>optimum</em></a>.</p>
<h2>… et commet des fautes</h2>
<p>En d’autres termes, à charge mentale trop basse, le cerveau s’ennuie et ses performances baissent immanquablement. Dans une étude <a href="https://trid.trb.org/view/783477">réalisée en 2006 de l’Institut de Recherche sur les transports Virginia Tech à Blacksburg</a>, durant laquelle 1000 voitures ont été équipées de capteurs, des chercheurs ont trouvé que 78 % des accidents et 65 % des quasi-collisions avaient lieu à cause d’un manque d’attention des conducteurs… </p>
<p>Or que fait-on aujourd’hui lorsqu’on s’ennuie, dans la file d’une caisse de supermarché, lorsqu’on arrive en avance à un rendez-vous, ou encore dans la salle d’attente de notre médecin ? Et bien on sort tout naturellement notre meilleur allié contre l’embêtement cérébral : le téléphone portable.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/235815/original/file-20180911-144479-1p2gvof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/235815/original/file-20180911-144479-1p2gvof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/235815/original/file-20180911-144479-1p2gvof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/235815/original/file-20180911-144479-1p2gvof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/235815/original/file-20180911-144479-1p2gvof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/235815/original/file-20180911-144479-1p2gvof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/235815/original/file-20180911-144479-1p2gvof.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le téléphone au volant : remède contre l’ennui mais accident assuré !</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.maxpixel.net/Sms-Phone-Interior-Mobile-Vehicle-Car-Hand-2825946">MaxPixel</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Que l’on se comprenne, loin de moi l’idée de faire une apologie de l’utilisation du téléphone en conduisant, ni même de trouver des excuses aux « irresponsables », je me contente simplement d’analyser les possibles effets du passage au 80 km/h sur la charge mentale des conducteurs.</p>
<p>D’ailleurs, risques d’accident et d’amendes obligent, certains choisiront d’autres occupations pour leur esprit telles que la divagation, la musique, la rédaction mentale d’un plan détaillé pour un article sur la charge mentale au volant, etc.</p>
<p>Quoi qu’il en soit, le fait est que nous ne supportons pas l’ennui ! Preuves en sont les innombrables activités que nous mettons en place pour combler à tout prix les « vides » éventuels que nous expérimentons au quotidien : la télévision, les réseaux sociaux, les mini jeux addictifs, et, pour les plus classiques, les livres… </p>
<p>Or au volant, ces distractions et les défauts d’inattention peuvent avoir des conséquences <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1389041701000481">dramatiques</a> puisqu’ils risquent de multiplier par 2 ou 4 notre temps de <a href="https://www.automobile-club.org/actualites/securite-routiere/distraction-et-inattention-au-volant">réaction</a> !</p>
<p>Bien entendu, les conducteurs français n’ont pas attendu le passage au 80km/h pour pianoter sur leurs téléphones portables au volant mais rouler étant une activité <a href="https://www.cerveauetpsycho.fr/sd/psychologie/cerveau-et-psycho-36-578.php">« surapprise »</a>, réduire sa vitesse habituelle de 10km/h demande une période d’adaptation. Quelles que soient les stratégies choisies (utilisation du limiteur ou régulateur de vitesse, « passer le temps », etc.), cette adaptation aura forcément un impact sur l’attention mobilisée et sur l’ennui ressenti au volant.</p>
<p>Je me demande donc… Ces 13 mètres gagnés avec un passage de 90 à 80km/h en valent-ils vraiment le coup ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/102872/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lisa Jeanson étudie la charge mentale chez PSA et au laboratoire PErSEUs </span></em></p>80 km/h c’est lent, très lent. Si lent qu’on pourrait mourir d’inattention.Lisa Jeanson, Doctorante en ergonomie cognitive, groupe PSA/laboratoire PErSEUs, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1028922018-09-13T03:30:58Z2018-09-13T03:30:58ZBoire du thé pour être plus créatif !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/235494/original/file-20180909-90568-1dbq4m3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Photo by Suhyeon Choi on Unsplash</span> </figcaption></figure><p><em>Cette chronique est dans la droite ligne et se nourrit des recherches et rencontres publiées sur mon site <a href="https://www.cahiersdelimaginaire.com/votrelaboratoirecreatif-sylviegendreau/">Les cahiers de l’imaginaire</a>.</em></p>
<p>Boire du thé aurait un impact sur la créativité. C’est ce qu’une étude chinoise récente démontre. Mais, me direz-vous, les Chinois, grands amateurs de thé, ont-ils l’objectivité requise pour mener une enquête impartiale ?</p>
<p>Quelle méthodologie ces chercheurs ont-ils utilisée ? Je vous réponds plus tard, mais tout d’abord de quelle créativité s’agit-il ? Il importe de préciser que l’étude porte exclusivement sur la créativité divergente, celle qui permet d’identifier un grand nombre de solutions possibles à un problème donné.</p>
<p>Les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0950329317303051">chercheurs</a> ont réalisé deux expériences :</p>
<ul>
<li><p>La première, menée auprès de 50 participants (dix minutes après que les participants aient bu soit de l’eau ou du thé), démontre que ceux qui avaient bu du thé exécutaient plus facilement des tâches où ils devaient faire preuve de créativité spatiale.</p></li>
<li><p>La deuxième expérience à laquelle se sont prêtés 40 participants portait sur la cognition sémantique. Encore là, ceux qui avaient bu du thé ont obtenu un score plus élevé.</p></li>
</ul>
<p>Les bienfaits du thé sur la santé physique et mentale sont déjà établis. Le thé aurait une influence positive sur la cognition.</p>
<h2>Qu’est-ce que la cognition ?</h2>
<p>La cognition est un processus mental complexe qui consiste à acquérir de nouvelles connaissances par le biais des expériences que nous menons, consciemment ou non, en interagissant constamment avec notre environnement. Tous nos sens, nos pensées, les données que nous accumulons au fil de nos expériences sont mis à contribution.</p>
<p>La cognition inclut une panoplie d’activités mentales : la perception, l’attention, la mémoire, les émotions, le langage, la prise de décision, le raisonnement.</p>
<p>Il a été démontré que l’attention, en particulier, pouvait être améliorée en buvant du thé.</p>
<p>Or l’attention joue un rôle déterminant dans plusieurs activités mentales clés. Les individus créatifs, par exemple, sont en mesure d’ajuster leur degré d’attention selon le niveau d’ambiguïté des tâches qu’ils s’apprêtent à accomplir. La consommation de thé améliore à la fois la vitesse et la précision de l’attention accordée aux tâches en cours d’exécution tout en réduisant la possibilité d’être distrait par des données non pertinentes.</p>
<p>Deux ingrédients en sont en cause : la caféine et la théanine. Elles ont pour effet d’améliorer l’attention.</p>
<h2>Qu’est-ce que la créativité ?</h2>
<p>La créativité est la capacité de générer des idées originales et utiles afin de solutionner un problème.</p>
<p>La créativité est constituée de deux composantes essentielles : la pensée convergente et la pensée divergente.</p>
<p>La pensée convergente consiste à trouver une solution unique à un problème donné. La pensées divergente tente au contraire de générer de multiples solutions. La pensée divergente occupe une place centrale dans les activités créatives.</p>
<p>Les deux types de pensée, convergente et divergente, font appel à des processus mentaux différents.</p>
<p>Alors que la pensée convergente fait appel à un contrôle mental plus serré qui a pour objectif de trouver une solution correspondant à une série de critères clairement définis, la pensée divergente cherche à relâcher ce contrôle, optant plutôt pour une exploration libre de plusieurs solutions possibles à partir de critères flous.</p>
<p>Comment les chercheurs chinois ont-ils mesuré l’impact de la consommation de thé sur la créativité divergente ? </p>
<p>Dans un premier temps, ils ont eu recours à des blocs de construction. Le fait de manipuler des blocs de construction permet de mesurer le degré de raisonnement spatial des participants. Ensuite, ils ont mesuré l’aisance des participants pour créer de nouveaux concepts. Ils ont demandé aux participants d’imaginer différents intitulés pour le nom d’un restaurant de nouilles ramen sur le point d’ouvrir ses portes.</p>
<p>Dans les deux expériences, les participants utilisent directement la pensée divergente sans qu’ils aient besoin d’avoir recours à d’autres compétences.</p>
<p>Pendant l’expérience, du thé et de l’eau furent servis sans que les participants n’aient conscience que l’objectif visé était de mesurer l’impact de la consommation de thé sur leur créativité.</p>
<p>L’expérience des blocs de construction a été présentée aux participants de la manière suivante. Une entreprise aimerait disposer d’exemples attractifs afin de commercialiser un nouveau type de blocs. Chaque participant disposait d’un maximum de dix minutes pour réaliser un assemblage.</p>
<p>Ensuite, dix évaluateurs externes, ignorant l’objectif de l’expérience et les conditions de réalisation des assemblages, jugèrent les résultats sur photos.</p>
<p>Quatre critères furent pris en compte :</p>
<ul>
<li><p>Le caractère innovateur.</p></li>
<li><p>L’aspect esthétique.</p></li>
<li><p>L’assemblage forme-t-il un tout cohérent ?</p></li>
<li><p>À quel point l’assemblage se démarque-t-il, s’impose-t-il par rapport aux autres ?</p></li>
</ul>
<p>L’expérience de créativité conceptuelle, d’une durée de vingt minutes, s’est déroulée après avoir présenté à vingt participants le cas suivant. Un entrepreneur, sur le point d’ouvrir un restaurant de nouilles ramen, est à la recherche d’un nom à la fois original et attractif.</p>
<p>De nouveau, dix évaluateurs externes ont mesuré les caractères innovant et ludique des réponses fournies.</p>
<p>Les deux expériences démontrent que la consommation de thé a eu un effet significatif sur la créativité divergente. Pour bien marquer la valeur de leurs résultats, les chercheurs s’empressent de préciser que la méthodologie retenue (explorations spatiale et sémantique) vise à exclure les variables externes risquant de solliciter chez les participants des compétences qui ne seraient pas directement reliées à la créativité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/235495/original/file-20180909-90553-1j9zh4x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/235495/original/file-20180909-90553-1j9zh4x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/235495/original/file-20180909-90553-1j9zh4x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/235495/original/file-20180909-90553-1j9zh4x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/235495/original/file-20180909-90553-1j9zh4x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/235495/original/file-20180909-90553-1j9zh4x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/235495/original/file-20180909-90553-1j9zh4x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">static squarespace.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Finalement, ils ont pris la peine de contrôler avec précision la température à laquelle le thé noir est servi, 42 degrés. En effet, des <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24530552">études</a> démontreraient que servir un thé chaud ou un thé froid n’aurait pas les mêmes effets.</p>
<p>Préparez-vous un thé à la bonne température, et dites-moi si vous avez été plus créatif pendant l’<a href="https://www.cahiersdelimaginaire.com/cahier-d-exercices/de-sylvie-gendreau-exercice-92">exercice</a> de cette semaine, <strong>créer l’effet WOW</strong>.</p>
<p>Et si jamais vous souhaitez impressionner votre entourage par une touche de poésie… inspirez-vous de ce maître de thé créatif, dans la vidéo ci-dessous.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/wEqLOjmHtw4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/102892/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Des études démontreraient que servir un thé chaud ou un thé froid n’aurait pas les mêmes effets sur la créativité.Sylvie Gendreau, Chargé de cours en créativité et innovation, Polytechnique MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/968262018-06-26T20:11:15Z2018-06-26T20:11:15Z« Parcours connectés » : accompagner la formation des enseignants dans la transformation numérique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/224669/original/file-20180625-19404-11vcuz5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C139%2C2105%2C1337&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Testing effect…</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/dierkschaefer/2961565820/in/photolist-5vGNkE-4YKKw4-7XtJNd-h8UhV-o3EVhm-64zrPn-9UwYi-815VWu-a3vLfi-off1YR-2vfT-bPewqD-bpydp-cdeNh-5MjkCE-5MfXVM-bPbME2-4HwWMS-7APj3z-nXLBAv-bJa77V-ihD6Dc-763uLi-nXKK6K-5Nrged-e4CcRp-2GD3A-qdqqts-o3KF16-7Zfsv7-62srhZ-quC2pw-acg5vF-p9hCJ4-8Kik7-gayZDq-qwVhCH-6J7EYR-7Zftmo-5MfXWP-8B7oY2-2v1uWb-ihD64e-5pms8T-jypVk8-yEqgm-a3vLfM-6MaCW8-bCVYWK-6EoSxo">Dierk Schaefer/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Le projet « Parcours connectés » dans lequel ma thèse s’inscrit est parmi les <a href="https://ecolenumerique.education.gouv.fr/2016/09/23/1244/">22 lauréats</a> de l’appel à projets e-FRAN (espaces de formation, de recherche et d’animation numérique). E-FRAN vise à soutenir des projets de transformation de l’École et la création de « territoires éducatifs d’innovation numérique » en prenant appui sur la recherche. Cet appel à projets a été lancé dans le cadre du <a href="https://www.caissedesdepots.fr/investissements-davenir">Programme d’Investissement d’Avenir</a> par la mission sur le numérique éducatif confiée au recteur Jean‑Marc Monteil. L’objectif est notamment de créer une communauté scientifique de niveau international en matière de numérique éducatif et de favoriser le transfert des résultats de la recherche vers l’école en stimulant les interactions entre les laboratoires et le terrain.</p>
<p>Les projets sélectionnés sont liés à de la recherche appliquée. Ils réunissent des acteurs variés de l’éducation et de la recherche dans le domaine : des laboratoires et les instituts auxquels ils sont rattachés (CNRS, INRIA), des entreprises (dont un certain nombre de start-up), des établissements scolaires (du primaire au lycée), des établissements d’enseignement supérieur, des ESPE, et enfin plusieurs associations.</p>
<p>Nous sommes environ une cinquantaine de doctorant·e·s à avoir bénéficié d’une bourse de thèse dans le cadre d’e-FRAN et dans des disciplines variées allant de l’informatique à l’ergonomie en passant par la psychologie sociale, les neurosciences, la psychologie cognitive, en bien entendu les sciences de l’éducation.</p>
<h2>Un projet impliquant laboratoires, associations, start-up… et doctorants</h2>
<p>Un tel projet implique un ensemble de partenaires très variés. C’est l’association <a href="https://syn-lab.fr/lassociation/">Synlab</a>, porteur de <a href="https://bit.ly/2lAi3y2">Parcours connectés</a> qui pilote et coordonne les actions menées par les différents parties prenantes.</p>
<p>En dehors du comité « recherche » impliquant 4 laboratoires, l’ESPE de Créteil est également impliquée, ainsi que la start-up <a href="https://www.didask.com">Didask</a> avec qui je travaille en étroite collaboration.</p>
<p>Le projet Parcours connectés emploie en tout trois doctorant·e·s rattachés à un laboratoire du consortium (Niluphar Ahmadi, en thèse de psychologie cognitive au Laboratoire de Psychologie : Cognition, Comportement, Communication de l’université de Rennes 2 et Benoît Choffin, en thèse d’informatique au Laboratoire de Recherche Informatique à Paris-Saclay).</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/HdElKrPeRNo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<h2>Mieux comprendre et accompagner la formation des futurs professeurs</h2>
<p>Deux grands axes guident le développement et le suivi de Parcours connectés :</p>
<ul>
<li><p>Un premier axe qui se concentre sur des expérimentations à l’ESPE de l’académie de Créteil à la fois sur la partie formation initiale des étudiants qui se préparent au métier de professeurs des écoles, mais aussi sur l’accompagnement des néo-titulaires qui ont tout juste obtenu leur diplôme. Plusieurs cohortes sont suivies sur les 4 années du projet.</p></li>
<li><p>Un second axe se concentre sur des expérimentations de recherche à la fois fondamentale et appliquée. D’une part, il vise à mieux comprendre les mécanismes sous jacents de l’apprentissage ; mais aussi à réaliser l’évaluation et l’amélioration de la plate-forme numérique d’enseignement créée par la start-up Didask, partenaire du projet.</p></li>
</ul>
<p>Mon projet de thèse est directement lié à ce 2<sup>e</sup> axe, Didask est en fait mon terrain d’expérimentation !</p>
<h2>Des premiers résultats sur l’optimisation des apprentissages</h2>
<p>Je m’intéresse à l’optimisation des apprentissages par le prisme de la psychologie cognitive. Ces vingt dernières années, de <a href="https://bit.ly/2MTHS8B">nombreux travaux de recherche</a> ont été réalisés, répliqués et démontrés dans divers contextes d’apprentissage sur les stratégies qui permettent de <a href="http://www.hup.harvard.edu/catalog.php?isbn=9780674729018">maîtriser et mémoriser</a> durablement de nouvelles connaissances.</p>
<p>Pourtant, ces résultats robustes sont peu diffusés et exploités pour créer des <a href="https://theconversation.com/et-si-les-reformes-de-leducation-sappuyaient-sur-les-donnees-de-la-science-79713">outils et environnements d’apprentissage fondés sur des preuves</a> ; alors que <a href="http://www.indiana.edu/%7Epcl/rgoldsto/courses/dunloskyimprovinglearning.pdf">certaines méthodes d’apprentissage peu efficaces persistent</a>. L’hétérogénéité dans les classes est toujours bien présente, et à l’heure où l’on valorise la personnalisation des parcours d’apprentissage et la formation tout au long de la vie, peu de dispositifs permettent vraiment de répondre à ses problématiques et besoins (du moins en France…).</p>
<p>L’intuition de Didask a été de se dire que le numérique est un environnement très intéressant pour permettre à toute personne d’apprendre et acquérir de nouvelles compétences, se former à tout âge, et à son rythme. De plus, les fondateurs de Didask ont compris que les résultats de la recherche en psychologie pouvaient tout à fait être intégrés dans l’essence même d’une plate-forme d’enseignement/pour la formation.</p>
<p>Un résultat particulièrement significatif a attiré l’attention de Son Thierry Ly, président et co-fondateur de Didask : l’<a href="http://video.lefigaro.fr/figaro/video/big-bang-eco-2018-l-intervention-de-son-thierry-ly/5775785248001/">effet de récupération en mémoire</a> (<em>testing effect</em> en anglais). <a href="https://www.didask.com/blog/articles/testing-effect-apprendre-durablement">Cet effet</a> se définit comme le bénéfice sur la mémorisation de nouvelles informations lorsque celles ci sont entraînées et testées par un exercice de recherche en mémoire par rapport à une méthode plus passive de relecture répétée.</p>
<h2>Autour du « testing effect »</h2>
<p>L’architecture de la <a href="https://www.didask.com/">plate-forme Didask</a> a été pensée et développée autour de l’apprentissage par la récupération en mémoire, en mettant au cœur des formations l’utilisation de quiz et exercices variés pour engager activement les apprenants et consolider la mémorisation à long terme de nouvelles informations. Lors de la création des contenus de formation, des ressources pédagogiques sont implémentées en appui des quiz, et peuvent prendre différentes formes : vidéos, articles, illustrations, textes, powerpoint… Les utilisateurs apprennent via les quiz, et peuvent accéder à la partie théorique du cours quand ils le souhaitent.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/_wqG7g1kZUo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Testing effect (test-enhanced learning) in learning theory.</span></figcaption>
</figure>
<p>Lorsque j’ai commencé ma thèse, une question restait encore ouverte dans la littérature sur le <a href="https://bit.ly/2Kh2Z2V">testing effect</a>, et intriguait également beaucoup Didask : à quel moment est-il plus opportun et bénéfique de faire les quiz d’entrainement ? Après après eu recours à la ressource pédagogique, autrement après avoir lu le cours ? ou avant même d’y accèder, sans avoir lu le cours ? Nous avons donc réalisé avec mon équipe de recherche et Didask une expérimentation sur de nombreux apprenants (285) pour répondre à cette question de l’emplacement optimal des quiz par rapport à la lecture des contenus d’apprentissage.</p>
<p>Nous avons trouvé que l’entrainement par des quiz après la lecture des contenus permettaient une meilleure mémorisation qu’un entrainement avec des quiz avant de lire les contenus du cours. Ces deux méthodes d’apprentissage menaient à des performances supérieures par rapport une méthode d’apprentissage sans quiz, avec une simple relecture des contenus (l’article associé à cette expérience a été soumis dans une revue internationale).</p>
<h2>Suivi et impacts du projet e-FRAN</h2>
<p><a href="https://bit.ly/2K77aT8">Synlab</a> assure le suivi des différentes sous-projets de Parcours connectés, notamment en réunissant le consortium régulièrement dans l’année. Cela nous permet de faire un point de l’avancement de chacun, de tisser des collaborations inter-laboratoires, et de présenter la suite des événements. Du côté de mon laboratoire, une nouvelle expérimentation est en cours, de nouveaux résultats sont donc attendus pour la rentrée !</p>
<p>Plusieurs livrables sont inclus dans le projet et transmis directement à la Caisse Des Dépôts qui se matérialisent par des rapports intermédiaires faisant office de bilan ; et la mise en ligne d’une formation à destination des enseignants sur des compétences transversales (coopération, climat de classe, attention et concentration, créativité, pédagogies actives) sur Didask.</p>
<p>Enfin, le <a href="https://bit.ly/2K3TjNc">premier colloque e-FRAN</a> a été organisé en janvier 2018 afin de réunir tous les projets lauréats, ce qui a permis une première rencontre de tous les acteurs impliqués aussi bien du côté éducation nationale que côté recherche. Les doctorant·e·s ont pu présenter leurs travaux, ce qui a permis d’apprécier la diversité des projets financés et implantés partout en France. Dans cette logique de créer un écosystème autour du numérique éducatif tout en créant un vivier de futur·e·s chercheur·e·s.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/96826/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Mon équipe de recherche a reçu des financements de Caisse Des Dépôts - Programme d'Investissement d'Avenir. </span></em></p>Un système qui vise à accompagner au mieux les enseignants en début de carrière.Alice Latimier, Doctorante, Laboratoire de sciences cognitives et psycholinguistique, École normale supérieure (ENS) – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/986822018-06-21T18:57:14Z2018-06-21T18:57:14ZJ'avais l'habitude de…<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/224111/original/file-20180620-137746-13ghrx4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Photo by Daniele Levis Pelusi on Unsplash</span> </figcaption></figure><p><em>Cette chronique est dans la droite ligne et se nourrit des recherches et rencontres publiées sur mon site <a href="http://www.cahiersdelimaginaire.com/votrelaboratoirecreatif-sylviegendreau/">Les cahiers de l’imaginaire</a></em>.</p>
<p>J’ai fait une découverte intéressante qui sera très utile pour nous aider à nous débarrasser de nos mauvaises habitudes. Surtout, lisez bien jusqu’à la fin, je croise plusieurs études différentes sur le sujet. Vous verrez à quel point les neurosciences nous apprennent des choses fascinantes.</p>
<h2>La plasticité de nos comportements est fondamentale pour nous adapter, mais qu’est-ce qui gouverne cette plasticité dans notre cerveau ?</h2>
<p>Des <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29359362">études</a> japonaises récentes mettent en évidence le rôle spécifique joué par les <a href="https://bit.ly/2Kehurs">neurotransmetteurs cholinergiques</a> situés dans le stratum, une structure nerveuse subcorticale.</p>
<p>Pour l’instant les chercheurs n’ont mené des expériences que sur des rats. Ils ont créé une habitude de substitution et mesuré le taux d’activation des neurotransmetteurs cholinergiques. Les chercheurs ont constaté que les niveaux mesurés sont significativement plus élevés que le taux habituel relevé chez les animaux de contrôle.</p>
<p>Ainsi, l’activation des neurotransmetteurs cholinergiques joue un rôle dans l’ancrage d’une nouvelle habitude. Lorsqu’une vieille habitude est remplacée par une nouvelle, cela facilite la plasticité comportementale.</p>
<p>Les résultats de cette étude confirment ce que plusieurs d’entre nous savent déjà : il est plus efficace de remplacer une habitude par une autre, plutôt que de tenter de la supprimer. Lire mon article sur le sujet : <a href="https://theconversation.com/une-tactique-simple-pour-chasser-une-mauvaise-habitude-95040">« Une tactique simple pour chasser une mauvaise habitude »</a>.</p>
<h2>Pour casser une habitude et la remplacer par une autre, il faut que nous puissions faire preuve de plasticité comportementale</h2>
<p><strong>Ce qu’il faut éviter :</strong></p>
<ul>
<li><p>Se complaire dans nos anciennes habitudes et se contenter de réagir comme nous en avions l’habitude.</p></li>
<li><p>Refuser d’explorer de nouvelles pistes, de nouvelles manières de faire.</p></li>
</ul>
<p><strong>Ce qu’il faut encourager :</strong></p>
<ul>
<li><p>Réduire notre dépendance par rapport aux stratégies comportementales habituelles.</p></li>
<li><p>Favoriser l’exploration de nouveaux comportements.</p></li>
</ul>
<h2>Les neurotransmetteurs cholinergiques ont pour effet d’inhiber les neurones encodant nos vieilles habitudes</h2>
<p>L’impact des neurotransmetteurs cholinergiques concerne spécifiquement la substitution d’une habitude (existante) par une autre et leur action n’aurait pas d’impact sur le circuit de la gratification ou de la motivation. En d’autres mots, il s’agirait d’un mécanisme de reprogrammation « automatique » des habitudes sans que la recherche d’une gratification ou que la motivation n’ait de rôle à jouer.</p>
<h2>Deux conclusions s’imposent :</h2>
<ol>
<li><p>Il est préférable de casser une mauvaise habitude en la remplaçant par une autre, une bonne habitude de préférence.</p></li>
<li><p>Le processus de substitution pourrait être facilité par l’activation de neurotransmetteurs sans que nous ayons à faire des efforts particuliers de motivation ou sans qu’on nous fasse miroiter une récompense.</p></li>
</ol>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/224110/original/file-20180620-137738-qk0rlf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/224110/original/file-20180620-137738-qk0rlf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/224110/original/file-20180620-137738-qk0rlf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/224110/original/file-20180620-137738-qk0rlf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/224110/original/file-20180620-137738-qk0rlf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/224110/original/file-20180620-137738-qk0rlf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/224110/original/file-20180620-137738-qk0rlf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Photo : Justyn Warner, Unsplash.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Changer d’attitude n’entraîne pas automatiquement un changement de comportement</h2>
<p>De manière générale, notre intention, notre désir de changer, ne se traduisent qu’en de petites modifications de notre comportement. Puisqu’il en est ainsi, il se peut que les processus mentaux à la base de l’attitude et du comportement soient différents de ce que nous pensions.</p>
<p>Des <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/01973533.2014.996225">chercheurs</a> se sont penchés sur cette question embarrassante. Mais tout d’abord, <strong>que nous enseigne la croyance populaire</strong> ?</p>
<p>La croyance populaire nous enseigne qu’un individu modifiera son comportement s’il est persuadé de son bien-fondé. Dès lors, tout est une question de motivation et de volonté.</p>
<p>S’il est plus ou moins motivé, ou si sa capacité à changer est faible, il sera peu enclin à entreprendre les changements de comportement qu’il envisage.</p>
<p>À l’inverse, un individu très motivé et apte au changement sera porté à élaborer un plan d’action précis et efficace pour amorcer les changements de comportement nécessaires.</p>
<p>Mais qu’en serait-il si l’on envisageait le problème sous un autre angle ? Si nous supposions d’entrée de jeu que les attitudes et les comportements font appel à des mécanismes psychologiques différents.</p>
<p>Des modèles récents suggèrent que nous développons une habitude grâce à un apprentissage instrumental – un apprentissage qui tient compte de la conséquence d’un comportement avant qu’il ne se produise – un apprentissage sur lequel les messages de persuasion ont généralement peu de prise.</p>
<p><strong>Ainsi, l’idée qui veut qu’un message de persuasion puisse changer l’attitude d’un individu ne signifie pas que ce message puisse modifier un comportement</strong>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/224154/original/file-20180621-137728-1tzywkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/224154/original/file-20180621-137728-1tzywkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/224154/original/file-20180621-137728-1tzywkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/224154/original/file-20180621-137728-1tzywkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/224154/original/file-20180621-137728-1tzywkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/224154/original/file-20180621-137728-1tzywkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/224154/original/file-20180621-137728-1tzywkn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=478&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Yuriy Trubitsyn, Unsplash.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>En ce qui concerne nos habitudes, l’intention de changer ne se traduit pas en un nouveau comportement. <strong>La cause véritable d’une modification d’un comportement ne dépendrait pas d’une attitude jugée faible, mais de la force avec laquelle nous faisons l’apprentissage d’un comportement.</strong></p>
<p>Une centaine de participants se sont prêtés à trois expériences en laboratoire. Dans chaque cas :</p>
<p>Les participants ont été divisés en deux groupes. Le premier groupe – le groupe neutralisé – a été soumis à une procédure visant à réduire leur niveau de motivation afin de les rendre plus susceptibles d’être influencés par des messages de persuasion. Le deuxième – le groupe de contrôle – n’a pas été soumis à cette procédure.</p>
<p>Les deux groupes ont ensuite écouté des messages de persuasion et leurs attitudes ont été notées.</p>
<p>Finalement, les deux groupes se sont prêtés à des tâches à choix multiples et leur comportement a alors été mesuré.</p>
<p>L’intérêt principal de ces expériences consiste à mesurer le comportement réel des participants, et pas simplement leurs intentions de changer.</p>
<p>Le « groupe neutralisé » qui a participé à la première expérience s’est montré plus ouvert au végétalisme que le groupe de contrôle. Toutefois, cette attitude d’ouverture ne s’est pas traduite par un changement de comportement. Les deux autres expériences sont venues confirmer la première.</p>
<p>Cette étude démontre que ce sont les habitudes qui expliquent le fait que la persuasion n’a pas le même effet qu’il s’agisse de l’attitude ou du comportement. Si nous voulons véritablement changer, ce sont nos habitudes que nous devons modifier ainsi que les processus cognitifs qui peuvent nous aider à y parvenir comme la planification, l’organisation, l’élaboration de stratégies, et l’analyse fréquente des progrès accomplis.</p>
<h2>Laissons donc les attitudes de côté, et concentrons-nous sur les habitudes</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/224155/original/file-20180621-137738-1k7uc16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/224155/original/file-20180621-137738-1k7uc16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/224155/original/file-20180621-137738-1k7uc16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/224155/original/file-20180621-137738-1k7uc16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/224155/original/file-20180621-137738-1k7uc16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/224155/original/file-20180621-137738-1k7uc16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/224155/original/file-20180621-137738-1k7uc16.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Que se passe-t-il lorsque nous sommes en train de développer ou de changer une habitude ?</p>
<p>Lorsque nous faisons l’apprentissage d’un nouveau comportement, deux processus sont engagés simultanément :</p>
<ol>
<li><p>Une association est faite entre la réponse à un stimulus et le résultat obtenu. Cet encodage est nécessaire afin de produire à nouveau cette réponse lorsque nous voulons obtenir le même résultat.</p></li>
<li><p>En même temps, et indépendamment du résultat obtenu, une connexion est établie entre le stimulus et la réponse. Cette connexion est à la base du développement d’une habitude.</p></li>
</ol>
<p>Le premier processus est consciemment orienté en fonction du but poursuivi lorsque nous désirons développer une habitude. Le deuxième se met en place de manière plus ou moins automatique, selon la répétition, l’habitude se mettant ainsi en place progressivement.</p>
<p>Des <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28970144">recherches</a> en neurosciences ont été menées pour tenter d’y voir plus clair. Des tests d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle ont été réalisés sur une cinquantaine de participants afin de déterminer les zones du cerveau concernées.</p>
<p>Deux régions du cerveau sont concernées : le lobule pariétal inférieur et le cortex préfrontal ventromédian.</p>
<p>Durant la période d’apprentissage, on peut prédire la solidité avec laquelle une habitude sera encodée selon l’activation des régions concernées.</p>
<p>Les habitudes les plus solides sont associées à une diminution de l’activité cérébrale dans le lobule pariétal et le cortex préfrontal. À l’inverse, les habitudes les plus faibles se caractérisent lorsque les deux régions concernées demeurent activées durant la période d’apprentissage.</p>
<p>Entre d’autres mots, lorsque le cerveau cesse de se préoccuper, ou se préoccupe dans une moindre mesure des résultats obtenus lors de l’apprentissage (types de résultats, mesures, efficacité de l’approche en fonctions du but recherché, etc.), l’habitude en question est sans doute suffisamment encodée pour qu’elle produise d’elle-même les effets souhaités sans que les fonctions cognitives n’aient sans cesse à vérifier et à mesurer les résultats désirés.</p>
<p>Les résultats de ces études concordent. Il ne suffit pas de vouloir changer d’attitude pour que nos comportements suivent. Tout dépend de l’efficacité avec laquelle nous développons de nouvelles habitudes. Et, dans l’apprentissage de ces habitudes, notre plan d’action (but poursuivi, actions à mener, mesure des résultats) tout autant que la mécanique répétitive avec laquelle nous encodons la nouvelle habitude a un rôle important à jouer. Ce sont les bases du système que les participants mettent en place pendant le cours en ligne, <a href="https://www.dessinezvotrefutur.com/">Dessinez votre futur</a>.</p>
<p>Comprendre pourquoi nous faisons les choses et ce qui se passe dans notre cerveau au moment où nous les faisons, peut nous aider à mieux organiser nos activités quotidiennes. Il suffit parfois de petits changements pour améliorer notre qualité de vie et notre satisfaction à la fin d’une journée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/98682/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
l’idée qui veut qu’un message de persuasion puisse changer l’attitude d’un individu ne signifie pas que ce message puisse modifier un comportement.Sylvie Gendreau, Chargé de cours en créativité et innovation, Polytechnique MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/981412018-06-14T19:44:39Z2018-06-14T19:44:39ZL’apprentissage de la lecture… vu du cerveau<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/222747/original/file-20180612-112611-trth2d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=36%2C18%2C5934%2C3962&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Que se passe-t-il dans le cortex quand on apprend à lire ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://visualhunt.com/f2/photo/16244901278/ca93fe5840/">cheriejoyful on Visual Hunt</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Alors que les débats semblent reprendre de plus belle sur l’éternel sujet de l’apprentissage de la lecture en CP, quelle méthode est la plus adaptée pour apprendre à lire ? L’organisation du cortex nous donne la réponse.</p>
<h2>Le cortex</h2>
<p>La brique de la base du fonctionnement cortical est la colonne corticale, qui rassemble 100 000 neurones. Les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9ocortex">16 milliards de neurones du cortex</a> sont donc regroupés au sein de 160 000 colonnes, réparties parmi 360 cartes corticales. Le nombre moyen de colonnes par carte est donc autour de 450. Ces 360 cartes forment une arborescence hiérarchisée : il y a des cartes de bas niveau qui reçoivent les informations en provenance des organes des sens (œil, peau, oreilles, etc.) et qui alimentent des cartes de plus haut niveau, lesquelles alimentent des cartes de niveaux supérieurs, et ainsi de suite.</p>
<p>Pour certaines fonctions cognitives complexes (comme la compréhension de texte), le nombre d’étages dans la hiérarchie est supérieur à dix. Pour ce qui est de reconnaître un mot d’après sa suite de lettres (orthographe), six étages suffisent. Les étages des niveaux supérieurs permettront de reconnaître la grammaire de la phrase, etc.</p>
<h2>Les cartes corticales</h2>
<p>Les cartes corticales sont des mémoires associatives : <a href="https://bit.ly/129Mf7C">elles mémorisent des associations</a>. Chacune des colonnes d’une carte est connectée à de nombreuses autres colonnes appartenant éventuellement à plusieurs (autres) cartes. Ce sont les connexions d’entrée. De temps à autre, des informations circulent sur ces connexions.</p>
<p>Le fonctionnement des neurones est ainsi fait que la configuration d’activité des connexions entrantes est mémorisée et devient spécifique d’une des colonnes corticales de la carte. À partir de cet instant, lorsque cette configuration d’information sera présente en entrée de la carte, c’est cette colonne qui sera activée (et elle seulement). Il suffit dès lors pour savoir ce qui se passe dans les étages inférieurs de regarder uniquement quelles colonnes sont actives à un étage donné de la hiérarchie de cartes.</p>
<h2>Auto-organisation des cartes</h2>
<p>L’association mémorisée est donc celle de plusieurs entrées actives et une colonne. Cette association nécessite que les événements aient lieu dans un intervalle de temps court (quelques ms). Cependant, au fur et à mesure que l’on « monte » dans la hiérarchie, les associations mémorisées lient éventuellement des événements plus éloignés dans le temps (ms, s, etc.).</p>
<p>Ceci est possible car l’activation d’une colonne corticale ne mobilise à chaque instant que quelques-uns de ses cent mille neurones. Les sorties d’une colonne sont donc actives aussi longtemps que nécessaire.</p>
<h2>Les étapes de la lecture</h2>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/222680/original/file-20180611-191965-mfh7xj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/222680/original/file-20180611-191965-mfh7xj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/222680/original/file-20180611-191965-mfh7xj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=528&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/222680/original/file-20180611-191965-mfh7xj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=528&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/222680/original/file-20180611-191965-mfh7xj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=528&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/222680/original/file-20180611-191965-mfh7xj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=663&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/222680/original/file-20180611-191965-mfh7xj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=663&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/222680/original/file-20180611-191965-mfh7xj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=663&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Fig. 1. Les 6 cartes corticales impliquées dans la reconnaissance d’un mot.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Vis-à-vis de la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ptABRBcdI0c">reconnaissance des mots à partir des lettres</a>, nous savons depuis les travaux de Hubel et Wiesel (<a href="https://bit.ly/2LKcO9Q">Nobel de Médecine, 1981</a>) que la première carte (1) reconnaît des barres de contraste orientées. Par exemple, si l’œil regarde un « A », trois colonnes sont actives. L’une qui code pour une barre à 60°, la seconde pour une barre à 120° et la dernière pour une horizontale. La carte de l’étage suivant (2) mémorise les événements qui lient les barres de contraste entre elles : elle reconnaît donc des angles aigus, des angles droits, des intersections… La carte suivante (3) reconnaît des associations d’angles, c’est-à-dire des formes de lettres (en tenant compte de la police utilisée, mais indépendamment de la position sur la rétine). La carte suivante (4) associe les lettres indépendamment de la police (A, <em>A</em>, <strong>A</strong> sont la même lettre). La carte suivante (5) associe des paires de lettres, que l’on nomme des « bigrammes ». Les bigrammes du mot « TABLE » sont : TA, TB, TL, TE, AB, AL, AE, BL, BE, LE. La carte suivante (6) est la carte des mots. Chacune de ses colonnes est associée à un ensemble de bigrammes, identifiant ainsi un mot.</p>
<h2>Mots voisins</h2>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/222681/original/file-20180611-191940-rpk2af.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/222681/original/file-20180611-191940-rpk2af.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/222681/original/file-20180611-191940-rpk2af.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=230&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/222681/original/file-20180611-191940-rpk2af.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=230&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/222681/original/file-20180611-191940-rpk2af.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=230&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/222681/original/file-20180611-191940-rpk2af.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=289&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/222681/original/file-20180611-191940-rpk2af.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=289&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/222681/original/file-20180611-191940-rpk2af.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=289&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Fig. 2. Exemples de mots voisins sur la carte des mots.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les propriétés d’organisation neuronale et corticale font que les colonnes voisines les unes des autres (sur une carte) représentent des associations proches. Pour la carte des mots, des colonnes voisines codent des mots voisins – sauf que le voisinage est fonction du codage bigrammique (et non pas de l’ordre des lettres).</p>
<p>De ce fait, « étude » est voisin de « dentés », ce qui semble contre-intuitif. Tout ceci est cependant confirmé par de <a href="https://bit.ly/2sQqUzA">nombreux travaux de psychologie expérimentale</a>.</p>
<h2>Apprentissage de la lecture</h2>
<p>Apprendre à lire revient donc à organiser les six cartes impliquées. L’apprentissage doit se faire dans l’ordre. Impossible de reconnaître des angles si l’on est incapable de reconnaître convenablement des barres de contraste. Il faut d’abord être formé aux barres de contraste, puis aux angles, puis à des lettres, puis à toutes les lettres dans leurs différentes polices, puis aux associations de deux lettres, puis aux mots.</p>
<p>Les méthodes globales (ou mixtes) font l’impasse sur l’apprentissage des syllabes – passant directement des lettres (carte n°4) aux mots (carte n°6). Nous comprenons maintenant pourquoi plusieurs générations d’élèves ne sont pas de bons lecteurs. Prônée par le <a href="https://bit.ly/2y4hrd1">ministre de l’Éducation nationale</a> et les neurosciences, le retour à la méthode syllabique est une bonne chose car elle permet la bonne organisation de la carte des bigrammes (carte n°5). Il n’en faut pas plus, ni moins, pour être en passe de devenir un bon lecteur.</p>
<hr>
<p><em><strong>Travaux de référence de l’auteur sur ce sujet</strong> :<br>
T. Bluche, C. Kermorvant, C. Touzet & H. Glotin, <a href="https://bit.ly/2sQCw5P">« Cortical-Inspired Open-Bigram Representation for Handwritten Word Recognition »</a>, 14th IAPR International Conference on Document Analysis and Recognition (ICDAR2017), Kyoto, Japan, November 9-15, 2017.<br>
C. Touzet, C. Kermorvant, & H. Glotin, <a href="https://bit.ly/2JC1PPb">« A Biologically Plausible SOM Representation of the Orthographic Form of 50,000 French Words »</a>, dans Villmann, Th., Schleif, F.-M., Kaden, M., Lange, M. (Eds.), « Advances in Self-Organizing Maps and Learning Vector Quantization », Springer AISC 295, pp. 303-312, 2014.<br>
S. Dufau, Lété, B., Touzet, C., Glotin, H., Ziegler J.C., and Grainger, J.A., <a href="https://bit.ly/2sPUPrM">« Developmental Perspective on Visual Word Recognition : New Evidence and a Self-Organizing Model »</a>, « European Journal of Cognitive Psychology », 22 : 5, 669 – 694, 2010.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/98141/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Claude Touzet a reçu des financements du CNRS (ACI : Modélisation computationnelle de l’apprentissage des mots écrits) et de l'ANR (ANR "Blanche" : Apprentissage neuro-computationnel de la lecture et ANR Contint : Indexation par intégration cognitive de manuscrit : des Pixels au Sens). </span></em></p>Quelle méthode est la plus adaptée pour apprendre à lire ? L’organisation du cortex nous donne la réponse.Claude Touzet, Maître de Conférences en Sciences Cognitives, UMR CNRS 7260, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/960742018-05-28T20:45:14Z2018-05-28T20:45:14ZLa maladie d’Alzheimer ne va pas exploser, voici pourquoi<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/219566/original/file-20180518-42238-1i2cx58.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=44%2C22%2C4963%2C3083&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le concept de « réserve cognitive » permet de décrire la capacité de notre cerveau à résister au phénomène du vieillissement. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/senior-citizens-working-on-cognitive-mind-547269766?src=Rv6e8mpe0ZCD66kcL6L2jg-1-5">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p><em>Notre auteur, professeur de gériatrie, dénonce dans son livre co-écrit avec le journaliste Éric Favereau, <a href="http://www.michalon.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=500635">« Alzheimer le grand leurre »</a> (Michalon), une médicalisation croissante de ce phénomène naturel qu’est le vieillissement. Selon lui, Alzheimer est une construction sociale bien plus qu’une réalité médicale. Et d’ailleurs, la grande épidémie annoncée ne se produira pas, affirme-t-il dans l’extrait que nous publions ci-dessous.</em></p>
<hr>
<p>Une bonne nouvelle arrive, à contre-courant de toutes les prévisions : le nombre de cas supposés de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/alzheimer-31417">maladie d’Alzheimer</a> diminue. Cette donnée peut surprendre, mais c’est ainsi.</p>
<p>Depuis 20 ans, on nous avait habitués à des prévisions catastrophiques ; on nous parlait d’épidémie mondiale de maladie d’Alzheimer ; on mettait en exergue le vieillissement inexorable de la population planétaire, en déduisant que les démences en tous genres ne pouvaient qu’exploser. Tout cela baignait dans un modèle médical expliquant scientifiquement, courbes à l’appui, ces évolutions dramatiques.</p>
<p>Ce n’est donc pas le cas. La maladie d’Alzheimer et les autres démences sont sur le déclin.</p>
<p>Ces deux dernières années, plusieurs études ont été publiées dans les plus grandes revues scientifiques, et toutes pointent la même tendance dans différents pays du monde : au cours des dernières décennies, il y a une diminution du nombre de nouveaux cas, ce qu’on nomme l’<a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1060">incidence</a>.</p>
<p>Ces données sont issues, en particulier, de la fameuse cohorte américaine de Framingham, <a href="https://www.nejm.org/doi/full/10.1056/nejmoa1504327">dévoilées dans le <em>New England Journal of Medicine</em> en 2016</a>. À chaque décennie depuis les années 1980, les auteurs constatent une baisse moyenne de 20 % de l’incidence des démences. Ces constats ont été confirmés par les <a href="https://www.lemonde.fr/medecine/article/2016/02/16/le-risque-d-alzheimer-revu-a-la-baisse_4865921_1650718.html">premiers résultats d’une autre étude</a> menée aux États-Unis sur 20 000 personnes âgées de plus de 50 ans : entre 2000 et 2010, la prévalence de la démence chez les plus de 65 ans est passée de 11,7 à 9,2 %.</p>
<h2>Une étude menée depuis 1948 dans une petite ville américaine</h2>
<p>L’étude de Framingham fait en tout cas référence. Elle a été réalisée depuis 1948 dans cette petite ville du Massachusetts aux États-Unis, dont la population était somme toute très représentative ; en plus, la proximité de l’université de Harvard – l’une des institutions initiatrices du projet – permettait un travail efficace.</p>
<p>Commencée avec 5 209 personnes, l’étude en est désormais à sa troisième génération de participants. Cette enquête s’est d’abord penchée sur les principaux facteurs de risque des accidents cardio-vasculaires, montrant ainsi les méfaits de l’excès de cholestérol, de l’hypertension artérielle, du diabète, ou encore du tabagisme.</p>
<p>Depuis 40 ans, les participants font aussi l’objet d’examens de leurs fonctions cognitives. Les résultats publiés ont été obtenus à partir du suivi des volontaires de la première génération et de leurs descendants. Les chercheurs ont ainsi scruté l’apparition d’une maladie d’Alzheimer ou d’une autre forme de démence chez les plus de 60 ans, et cela pendant quatre périodes successives de cinq ans, allant de la fin des années 1970 à la fin des années 2010.</p>
<h2>Une baisse de la proportion de personnes touchées</h2>
<p>Le risque a été évalué à 3,6 % (taux d’individus) lors de la première période ; 2,8 % dans la deuxième ; 2,2 % durant la troisième ; et 2 % lors de la quatrième période. Soit une réduction moyenne de 20 % d’une décennie à l’autre.</p>
<p>Indéniablement, cela baisse. Qu’en déduire ? Est-ce que ce phénomène s’explique par la diminution des facteurs de risques vasculaires, ces pathologies pouvant provoquer des accidents cérébraux et donc, par ricochet, des démences ? Les auteurs répondent par la négative. D’autant que cette baisse est particulière : elle est statistiquement significative chez les personnes avec un niveau d’études au moins équivalent au bac.</p>
<p>Une autre cohorte, celle dite de Rotterdam, a montré une baisse, également de 20 %, des démences entre 1990 et 2000. Sur le plan statistique, ce n’était pas encore significatif mais une tendance comparable a été décrite au Danemark, puis au Royaume-Uni.</p>
<h2>Pas d’épidémie monstrueuse d’Alzheimer</h2>
<p>Bref, c’est un solide faisceau d’études qui l’indiquent. La fameuse chronique annoncée d’une épidémie monstrueuse de gens atteints d’Alzheimer se dégonfle, en tout cas en prévalence à un âge donné.</p>
<p>Et surtout, dans l’étude de Framingham, si l’évolution favorable du nombre de démences touche toutes les catégories d’âges, elle est spectaculaire chez les hommes, et particulièrement marquée dans les populations éduquées. L’élévation du niveau d’éducation pouvant, de ce fait, expliquer en partie le recul de l’âge moyen de début de la démence : 80 ans dans la première période, 85 dans la dernière.</p>
<p>Certains notent aussi que la baisse de l’incidence des maladies cardio-vasculaires, et donc des accidents vasculaires, cérébraux, qui contribuent aux démences, pourrait avoir des effets paradoxaux. « Dans chaque tranche d’âge, et en particulier dans les plus élevées, le recul des décès pour cause cardio-vasculaire exposerait davantage d’individus à une dégénérescence neuronale », a fait ainsi remarquer <a href="https://www.letemps.ch/sciences/nouveaux-cas-dalzheimer-recul">dans le quotidien suisse <em>Le Temps</em></a> le professeur Joël Ménard, professeur émérite de santé publique, qui a présidé en France le conseil scientifique de la Fondation Plan Alzheimer (2008-2012).</p>
<p>Lors de leur présentation des résultats de Framingham, les auteurs ont répondu que selon leurs calculs, « la baisse de la prévalence des démences compenserait dorénavant l’augmentation de l’espérance de vie, qui faisait mécaniquement augmenter le nombre de cas. Si bien qu’on devrait stabiliser le nombre global de cas. »</p>
<h2>L’effet bénéfique du niveau intellectuel</h2>
<p>De fait, cette évolution à la baisse renforce la piste selon laquelle Alzheimer n’est rien d’autre qu’une médicalisation du phénomène naturel de vieillissement cérébral. Bien plus que les autres, Alzheimer semble être une construction sociale qui s’est faite à un moment donné avec, derrière, la réalité clinique du vieillissement.</p>
<p>On devient vieux tard, et on le devient de plus en plus tard. Et dans cette évolution, la culture joue un rôle essentiel. Ce recul de la vieillesse résulte, bien sûr, des progrès médicaux classiques (les vieux sont mieux soignés), du mode de vie (cela va de soi), mais une éducation plus forte de toute la population mondiale favorise cette baisse.</p>
<p>Le niveau intellectuel repousse ainsi les frontières, comme si notre intelligence nous donnait des armes face à un processus dégénératif inscrit dans notre espèce.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/219565/original/file-20180518-42210-sxu7ao.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/219565/original/file-20180518-42210-sxu7ao.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/219565/original/file-20180518-42210-sxu7ao.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/219565/original/file-20180518-42210-sxu7ao.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/219565/original/file-20180518-42210-sxu7ao.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/219565/original/file-20180518-42210-sxu7ao.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/219565/original/file-20180518-42210-sxu7ao.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le niveau d’éducation s’est élevé au sein de toute la population mondiale.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/retired-man-reading-newspaper-his-retirement-548020600?src=amhRlkUBlwgbRJUX2r15Xw-1-43">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cela devrait nous rendre modeste sur l’importance ou la pertinence des politiques de santé. Si l’on remonte 30 années en arrière, nul n’aurait rêvé d’une telle action sur l’épidémiologie d’une maladie. L’ampleur est presque aussi importante que celle de la découverte des vaccins ou du traitement de la tuberculose !</p>
<h2>À niveau égal de lésions dans le cerveau, on peut être normal… ou dément</h2>
<p>À côté de cette découverte du poids de l’éducation et du niveau socio-éducatif, ce qui a peut-être le plus bouleversé nos connaissances scientifiques dans le domaine de l’Alzheimer, c’est la découverte de l’absence de parallélisme absolu entre les lésions anatomiques et les conséquences sur le fonctionnement cérébral. Alors que dans toutes les maladies existe le schéma classique qui associe symptômes et lésions, rien de cela dans l’Alzheimer.</p>
<p>Des études menées chez des religieux américains observent même qu’à niveau égal de lésions dans le cerveau, on peut être soit normal, soit dément. Étrange découverte, d’autant que ce qui semble expliquer cette différence est là encore le niveau social et éducatif.</p>
<p>Pour expliquer tous ces éléments, on a inventé le concept de <a href="http://www.chu-rouen.fr/page/reserve-cognitive">réserve cognitive</a>. Indiscutablement, ce concept est extrêmement séduisant même si aujourd’hui, et malgré tous les progrès en neurosciences ou en imagerie fonctionnelle cérébrale, personne n’a réussi à lui donner une base scientifique rigoureuse.</p>
<p>Pour autant, il est accepté par tout le monde, tant il explique cette épidémiologie si exceptionnelle et tant il ouvre des perspectives positives, aussi bien en prévention primaire qu’en accompagnement d’un déclin cognitif avéré. Les individus les plus stimulés intellectuellement arrivent ainsi à compenser plus longtemps une éventuelle altération de leurs fonctions cognitives sans manifester trop de symptômes.</p>
<p>En d’autres termes, comme tout organe, notre cerveau se dégrade mais deux processus contradictoires semblent en jeu : d’un côté, un vieillissement qui va vers une dégradation de nos capacités ; et de l’autre, des processus qui nous permettent de compenser, de mieux résister, et cela se fait par le biais de ce que l’on appelle la réserve cognitive.</p>
<h2>La réserve cognitive, ou la capacité de riposte de notre cerveau</h2>
<p>Que cache cette notion ? Des chercheurs comme des cliniciens estiment qu’il y a un domaine neuronal dont la fonction est de lutter contre la dégradation progressive de notre cerveau, en tout cas d’y trouver des réponses. Et cette capacité de riposte se renforcerait à tout âge de la vie.</p>
<p>Sans que cela constitue une preuve absolue, un certain nombre d’études observationnelles accréditent ce concept de réserve cognitive. On montre ainsi qu’exercer un métier à forte valeur de stress protégerait du déclin intellectuel, tout comme prendre une retraite tardive. Avoir une activité sociale riche et interactive avec le monde extérieur lors de la retraite serait aussi protecteur, y compris après 80 ans. Pratiquer une activité physique donnerait aussi des armes pour résister.</p>
<p>Ce concept de réserve cognitive expliquerait également la relation complexe entre prise de médicaments sédatifs comme les benzodiazépines et émergence du déclin cognitif ; ainsi <a href="http://www.neuromedia.ca/les-benzodiazepines-augmentent-elles-le-risque-de-maladie-dalzheimer/">selon les auteurs d’une étude franco-canadienne</a> (Inserm et Université de Montréal) publiée en 2017, « les résultats renforcent l’idée d’un lien direct possible entre prise de benzodiazépines et la maladie d’Alzheimer ». Comme si ces médicaments paralysaient ou détruisaient un édifice patiemment construit.</p>
<p>Voilà qui éclaire également les très complexes relations entre pathologies psychiatriques et déclin cognitif. Toutes les maladies mentales exposent à un sur-risque de déclin cognitif, comme si elles empêchaient la construction ou l’utilisation de cette réserve.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/217578/original/file-20180503-153914-19fpffz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/217578/original/file-20180503-153914-19fpffz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=927&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/217578/original/file-20180503-153914-19fpffz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=927&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/217578/original/file-20180503-153914-19fpffz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=927&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/217578/original/file-20180503-153914-19fpffz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1165&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/217578/original/file-20180503-153914-19fpffz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1165&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/217578/original/file-20180503-153914-19fpffz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1165&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Couverture du livre paru le 19 avril chez Michalon.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Que dire de plus ? Cette résistance est un processus qui pourrait se bâtir tout au long de la vie. Elle est en même temps fragile car attaquée, déstabilisée par toutes les maladies que l’on peut contracter dans notre vie. Des chercheurs travaillent sur des liens entre le déclin cognitif et les maladies cardio-vasculaires, partant de l’hypothèse – qui n’est pas absurde – que si la personne est hypertendue, sa probabilité de subir un déclin cognitif avec l’âge serait plus élevée car elle aurait grignoté sa réserve cognitive.</p>
<p>Cette notion de réserve cognitive est, en tout cas, nouvelle. Et change les perspectives. Bon nombre de chercheurs y travaillent, essayant de mieux la définir, de la mesurer aussi, voire de la quantifier, ou de mettre en évidence quelques liens. Pour le moment, ce sont juste quelques pistes.</p>
<p>C’est un concept productif, établissant des passerelles entre le parcours de vie de la personne et le déclin cognitif qu’elle pourrait subir. La réserve cognitive ne serait pas seulement une faculté de s’adapter : elle devrait aussi s’entretenir, se développer. Ce qui ouvre des perspectives, en <a href="https://theconversation.com/comment-bien-vieillir-et-se-premunir-contre-alzheimer-88997">prévention</a> comme pour la prise en charge.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/96074/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olivier Saint-jean ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Plusieurs études solides montrent que les différentes formes de démences chez les personnes âgées sont sur le déclin. La hausse du niveau d’éducation pourrait en être l’explication.Olivier Saint-jean, Professeur de gériatrie, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/942662018-04-03T20:43:04Z2018-04-03T20:43:04ZPsychologie et neurosciences cognitives au service des apprentissages au collège<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/213024/original/file-20180403-189807-vetr1s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour ne plus être perdu face au travail personnel au collège. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/9o8YdYGTT64">Redd Angelo/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article décrit l’un des projets primés en <a href="http://www.education.gouv.fr/cid56374/journee-de-l-innovation.html">2017 lors des journées de l’innovation</a> (Prix des pratiques favorisant l’évaluation pour les apprentissages), en avant-première de la Journée nationale de l’Innovation 2018</em>.</p>
<hr>
<p>Dans le cadre de la loi sur la refondation de l’École et de la mise en place de la réforme du collège, nous avons décidé <a href="https://www.ouest-france.fr/normandie/lessay-50430/au-college-de-lessay-les-neurosciences-pour-aider-memoriser-4447823">au collège de Lessay (académie de Caen)</a> d’appuyer le travail d’accompagnement personnalisé (AP) sur la psychologie et les sciences cognitives. Cette action s’inscrit dans une <a href="https://pod.ac-caen.fr/video/0635-cardie-caen-psychologie-et-neurosciences-cognitives-au-service-des-apprentissages-clg-g-desdevises-du-dezert-lessay-50/">refonte globale du fonctionnement de l’établissement</a>.</p>
<p>Les créneaux d’AP permettent de traiter des questions de l’attention, de la mémorisation, des modalités d’élaboration des stratégies de résolution, des aspects méthodologiques et <a href="https://bit.ly/1HATswC">métacognitifs</a> des apprentissages en lien avec le fonctionnement cérébral. Elles peuvent également contribuer à comprendre et connaître les processus en jeu sur le plan cérébral dans ces différentes tâches, tenter d’en identifier les éléments qui pourraient les perturber et de construire des solutions adaptées.</p>
<p>L’AP est ainsi le lieu pour amener les élèves à prendre conscience du fonctionnement de leur cerveau, organe des apprentissages, de la manière dont il apprend, comprend, se trompe, se remodèle et développe ses capacités. L’AP est également le lieu de réalisation d’une partie du travail personnel, adossé ainsi au travail disciplinaire, tout en réexploitant les découvertes des sciences cognitives.</p>
<h2>Le travail personnel : constat à l’origine de l’action</h2>
<p>Une part importante des élèves n’effectue pas le travail personnel demandé par les enseignants. Les raisons en sont multiples :</p>
<ul>
<li><p>manque d’appétence pour la chose scolaire,</p></li>
<li><p>forte concurrence des « sirènes » numériques et télévisuelles,</p></li>
<li><p>faible accompagnement scolaire d’une partie des parents,</p></li>
<li><p>manque d’autonomie pour faire et surtout, manque de méthodes pour apprendre et réaliser les travaux demandés.</p></li>
</ul>
<p>Ce déficit de travail personnel des élèves a des effets notables sur leurs apprentissages, leurs résultats, leur orientation et sur le déroulement des cours et le climat de classe.</p>
<p>Par ailleurs, au fil de l’histoire de l’École, la réalisation du travail personnel des élèves a connu un glissement progressif de l’intérieur des murs de celle-ci vers l’extérieur, laissant alors l’élève le plus souvent livré à lui-même pour l’accomplir. Pour autant, la nature du travail demandé n’a pas nécessairement été réinterrogée pour tenir compte de ce que l’élève est – ou n’est pas – en mesure de faire sans un accompagnement expert non seulement dans telle ou telle discipline, mais plus encore dans le fait d’apprendre.</p>
<h2>Des objectifs pour les élèves et les enseignants</h2>
<p>Du point de vue des élèves, l’action vise à une meilleure compréhension de leurs modes de fonctionnement pour apprendre et des raisons pour lesquelles ils échouent parfois, une réduction des modes de fonctionnement fatalistes (« je suis nul », « j’ai jamais su faire », « j’ai pas de mémoire », etc.). Elle vise aussi à ce que le travail scolaire soit mieux réalisé, associé à une meilleure compréhension des cours, une amélioration de l’estime de soi et de l’appétence scolaire.</p>
<p>Du point de vue des enseignants, nous escomptons une meilleure compréhension des modes de fonctionnement des élèves pour apprendre et des raisons pour lesquelles ils échouent parfois, la mise en place de stratégies de remédiation adaptées, une modification du regard porté sur les difficultés des élèves et un développement de la posture d’expertise en apprentissages, ainsi qu’une réflexion sur la nature des travaux demandés aux élèves et sur les connaissances méthodologiques et métacognitives à leur fournir pour les mettre en situation de réaliser efficacement ces travaux.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/212798/original/file-20180402-189824-1toh6eg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/212798/original/file-20180402-189824-1toh6eg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/212798/original/file-20180402-189824-1toh6eg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/212798/original/file-20180402-189824-1toh6eg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/212798/original/file-20180402-189824-1toh6eg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=305&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/212798/original/file-20180402-189824-1toh6eg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/212798/original/file-20180402-189824-1toh6eg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/212798/original/file-20180402-189824-1toh6eg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=383&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La première année (2016-2017), tous les élèves du collège ont été concernés, soit 300 élèves répartis dans trois classes sur chacun des quatre niveaux de la 6<sup>e</sup> à la 3<sup>e</sup>, dont 13 élèves inscrits en ULIS. À partir de 2017-2018, seuls les élèves de 6<sup>e</sup> sont concernés mais leur formation aux contenus des neurosciences cognitives s’étalera sur deux années.</p>
<h2>Une mise en œuvre à plusieurs dimensions</h2>
<p>Dans le cadre de la réforme du collège, l’établissement a fait le choix de modifier la structure horaire du collège afin de faire travailler les élèves le mieux et le plus possible.</p>
<p>Au lieu de faire 26 cours de 55 minutes (déplacements des élèves inclus), nous avons choisi de faire 32 cours de 45 minutes (déplacements des élèves non inclus). Cette organisation a permis de mettre en place un créneau d’accompagnement personnalisé quatre jours par semaine (un créneau par jour) favorisant ainsi la réalisation du travail personnel avec l’encadrement des professeurs et des assistants d’éducation et a réduit le nombre d’heures de permanence où l’élève est seul en autonomie. Concrètement :</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/212799/original/file-20180402-189801-1b96hzv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/212799/original/file-20180402-189801-1b96hzv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/212799/original/file-20180402-189801-1b96hzv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/212799/original/file-20180402-189801-1b96hzv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/212799/original/file-20180402-189801-1b96hzv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/212799/original/file-20180402-189801-1b96hzv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/212799/original/file-20180402-189801-1b96hzv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/212799/original/file-20180402-189801-1b96hzv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Les liens avec la recherche</h2>
<p>L’action s’effectue en <a href="http://eduscol.education.fr/experitheque/fiches/fiche12585.pdf">partenariat avec trois chercheurs</a> universitaires membres du Laboratoire de Psychologie Caen Normandie : <a href="https://bit.ly/2H34f9g">Céline Lanoë</a> <a href="https://bit.ly/2H34f9g">Céline Lanoë</a> (Maitre de Conférences en Psychologie du Développement à l’ESPE de l’Académie de Caen de l’Université Caen Normandie), <a href="https://bit.ly/2EaV1o9">Amélie Lubin</a> (Maitre de Conférences en Psychologie du Développement à l’Université Paris Descartes) et <a href="http://www.unicaen.fr/recherche/mrsh/pagePerso/519169">Sandrine Rossi</a> (Maitre de Conférences en Psychologie Cognitive, Habilitée à Diriger des Recherches, à l’Université Caen Normandie).</p>
<p>Leurs travaux portent sur les processus permettant le contrôle cognitif des pensées et des comportements, notamment à l’œuvre dans les apprentissages scolaires. Ils font le lien entre le monde de la recherche et celui de l’éducation en soulignant l’importance de faire prendre conscience à tous les élèves, et à tous les âges, des outils cognitifs dont ils disposent pour mieux apprendre (<a href="https://www.researchgate.net/publication/304892962_Decouvrir_son_cerveau_pour_mieux_apprendre">Lanoë, Lubin & Rossi, 2016</a> ; <a href="https://bit.ly/2EcnVEw">Lanoë, Rossi, Froment & Lubin, 2015</a>).</p>
<p>Ces chercheurs ont notamment piloté pendant plusieurs années des animations pédagogiques dans le 1<sup>er</sup> degré, au cours desquelles ont collaboré des chercheurs, des professeurs des écoles, des conseillers pédagogiques et des inspecteurs de l’Éducation nationale, afin de travailler à l’adaptation d’une méthodologie de laboratoire vers la classe (<a href="https://bit.ly/2pXzOdo">Lubin, Lanoë, Pineau et Rossi, 2012</a> ; Rossi, Lubin, Lanoë et Pineau, 2012). Un ouvrage a été publié sur ce sujet aux Éditions Canopé <a href="https://www.reseau-canope.fr/notice/decouvrir-le-cerveau-a-lecole.html">« Découvrir le cerveau à l’école : les sciences cognitives au service des apprentissages »</a> (Rossi, Lubin et Lanoë, 2017) qui propose aux enseignants du 1<sup>er</sup> degré des séquences pédagogiques sensibilisant les élèves à l’existence de leur cerveau et à son rôle dans les apprentissages scolaires.</p>
<p>Sollicités par le chef d’établissement du collège de Lessay, ces chercheurs ont réalisé une formation intitulée « Psychologie et Neurosciences Cognitives au service des apprentissages » vers l’ensemble de l’équipe (trois jours en juin 2016). Depuis, les chercheurs accompagnent scientifiquement l’équipe pédagogique sur le contenu des séances d’AP « découverte de soi » (relecture hebdomadaire du contenu, diffusion de supports vidéo, supports imagés, etc.).</p>
<p>Le soutien des trois chercheurs universitaires est un point d’appui incontournable du projet, tant par le biais de la formation prodiguée aux personnels que dans le suivi des actions et outils de travail mis en place. Ce suivi permet notamment de veiller à ne s’appuyer que sur des données scientifiquement validées. En effet, Internet et les articles de vulgarisation scientifique véhiculent bon nombre de croyances erronées (neuromythes) ou d’approximations.</p>
<p>Enfin, l’apprendre à apprendre reste un slogan tant qu’il n’est pas validé par une expérimentation structurée. Dans cet objectif, l’équipe scientifique à laquelle s’est ajouté <a href="http://www.theses.fr/s185235">Pauline Allix</a> (doctorante) réalise à partir de cette année et pour une durée de 3 ans une évaluation comparée de la cohorte d’élèves de 6<sup>e</sup>.</p>
<p>Des évaluations sont réalisées auprès des élèves et des parents en pré-test et en post-test. Celles-ci portent sur leurs compétences en lecture et en mathématiques, leurs conceptions de l’intelligence et du fonctionnement du cerveau, leurs croyances dans les <a href="https://bit.ly/2H6IkxG">neuromythes</a> et leur perception d’eux-mêmes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/94266/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Le collège Georges Desdevises du Dézert a reçu des financements de la Fondation de France dans le cadre de ce projet. </span></em></p>Un projet du collège de Lessay (académie de Caen) qui utilise les résultats de la recherche pour appuyer l’accompagnement personnalisé des élèves.Vincent Pesnel, Proviseur, lycée Sivard de Beaulieu, Carentan, Ministère de l'Éducation nationaleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/928142018-03-05T20:48:00Z2018-03-05T20:48:00ZLa recherche au secours de l’école ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/208813/original/file-20180304-65525-ycqbxe.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=95%2C110%2C2955%2C1772&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">De quelle recherche a-t-on besoin ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://visualhunt.com/photo/111614/">VisualHunt</a></span></figcaption></figure><p>Dans les sociétés d’aujourd’hui, il n’est d’activité qu’on ne cherche à améliorer en s’appuyant sur les acquis de la recherche. Cela vaut pour les activités à forte charge humaine, comme la médecine, même si, particulièrement dans ce cas, les apports de la recherche ne sont pas forcément mis en œuvre, parce que des considérations autres que techniques interviennent ; par exemple, si on sait parfaitement comment aider à mourir les personnes en fin de vie, ceci apparaît comme méritant un débat.</p>
<h2>Quelle(s) science(s) pour l’éducation ?</h2>
<p>Concernant l’éducation, l’apport potentiel des recherches est couramment mis en balance avec les spécificités et les tensions qui caractérisent ce champ. Sans doute, les questions scolaires sont abordées avec une passion ou une charge affective fortes, par tous les anciens élèves que nous sommes, de même qu’elles revêtent une dimension idéologique claire. D’autant plus qu’il n’y a pas de raison qu’elles soient particulièrement consensuelles, dès lors que l’école est aujourd’hui au cœur de stratégies forcément conflictuelles d’insertion et de reproduction sociale…</p>
<p>Pourtant, l’idée de tirer parti des sciences pour améliorer l’enseignement est une vieille idée : dès les années 1960, la pédagogie expérimentale s’est efforcée d’élaborer ce qu’on appelait à l’époque une <a href="http://bit.ly/2FoN43G">« science de l’enseignement »</a>. Science qui non seulement n’a jamais été unifiée mais n’a jamais vraiment convaincue, tant elle suscitait de critiques.</p>
<p>On en retrouve un écho aujourd’hui dans les critiques faites aux prétentions éducatives des neurosciences. L’enseignement ne se réduit jamais à un processus « stimulus-produit », le contexte joue (les interactions en classe, les contenus proposés), mais aussi et surtout la motivation des « apprenants ».</p>
<p>Tout ceci rend extrêmement délicat de dégager des explications mono-causales débouchant sur des recommandations univoques. D’autant plus qu’à des considérations d’efficacité se surajoutent des considérations proprement éducatives. Même si cela peut s’avérer efficace, faut-il, par exemple, récompenser financièrement les élèves pour leurs apprentissages ?</p>
<p>Et puis, en général, les questions d’éducation sont abordées par les dirigeants politiques davantage sur la base d’une vision globale, politique, où la charge charismatique importe plus que l’étayage scientifique.</p>
<h2>Réformer grâce aux « acquis de la recherche » ?</h2>
<p>C’est à cet égard que le ministre de l’Éducation Jean‑Michel Blanquer entend se démarquer. Il affirme vouloir fonder ses réformes sur les acquis de la recherche, par exemple quand il décide de dédoubler les classes de CP en zone prioritaire, en s’inspirant directement des travaux des économistes Piketty et Valdenaire montrant qu’une réduction très marquée de la taille de la classe, dans les milieux les plus défavorisés, peut atténuer les inégalités sociales.</p>
<p>Certes, on déplorera qu’il semble juger sans importance de remettre du même coup en cause, avant toute évaluation sérieuse, l’expérience « plus de maîtres que de classe », engagée elle aussi sur la base de recherches.</p>
<p>Mais ce ne sont peut-être pas là les recherches dans lesquelles il a le plus confiance… Aujourd’hui, il existe une multitude d’approches scientifiques des questions scolaires, et de toutes aussi nombreuses contingences politiques ou personnelles font qu’on se tournera plutôt vers telle ou telle.</p>
<h2>Les neurosciences à la rescousse</h2>
<p>Alors que la ministre précédente mettait en avant les travaux sociologiques et économiques établissant les bienfaits d’une certaine mixité sociale, le ministre actuel affirme haut et fort sa confiance dans les neurosciences. Certes, ces approches ne prétendent pas répondre aux mêmes questions. Comment des élèves par ailleurs comparables travaillent ou vivent plus ou moins bien selon la composition sociale du public de l’établissement, dans un cas ; de l’autre, comment les jeunes cerveaux abordent les premiers apprentissages ?</p>
<p>Dans sa confiance envers les neurosciences, qui s’est traduite par la nomination d’un neuroscientifique à la tête du conseil scientifique de l’Éducation nationale installé en janvier 2018, Jean‑Michel Blanquer n’innove en rien. Dès 2006, Gilles de Robien alors ministre <a href="http://bit.ly/2I5djKY">exprimait son enthousiasme</a> par rapport à « la science, la vraie, la science expérimentale », poursuivant « cette science toute jeune, c’est la science du cerveau ».</p>
<p>On croit entendre mot pour mot Jean‑Michel Blanquer, quand il s’efforce de présenter sa politique comme découlant tout simplement de la science qui lui semble la moins contestable. Et séduisante, car les neurosciences restent un continent relativement noir, mystérieux, prometteur mais encore très neuf, et c’est sans doute pour cette raison que l’enthousiasme du début du XXI<sup>e</sup> siècle (exprimé également par les <a href="http://bit.ly/2thocWA">instances européennes</a>) ne s’est guère traduit jusqu’alors dans les politiques éducatives.</p>
<h2>La tentation d’instrumentaliser la science</h2>
<p>S’il sait être enthousiaste, le milieu scientifique est par nature et en général, prudent, bien plus que le milieu politique qui lui, doit trancher et prendre, pour exister, un flot incessant de « mesures »… Et pour trancher dans les débats que suscitent toute décision politique, la tentation est grande d’instrumentaliser la science, comme s’il était possible d’en tirer toujours des conclusions univoques, populaires si possibles (tel que le B.A-BA pour apprendre à lire).</p>
<p>Mais si les techniques d’imagerie cérébrale permettent de voir les régions du cerveau activées lors de telle ou telle tâche, il reste à interpréter ce constat d’une « activité »cérébrale » (notamment, est-on face à une cause des apprentissages, ou bien à une conséquence ?).</p>
<p>Plus largement, tout neuroscientifique sérieux sait pertinemment que ses expériences sont des expériences, pas forcément transposables, et que les mécanismes de l’apprentissage, plurifactoriels, ne se réduisent pas à un circuit neuronal particulier.</p>
<p>Il sait pertinemment que le meilleur cerveau du monde n’apprend pas tout seul mais en interaction avec d’autres, que la méthode pédagogique qui respecte le mieux du monde le fonctionnement cérébral ne peut rien contre un enfant qui ne veut pas apprendre, ou encore que les principes redécouverts mais somme toute assez élémentaires selon lequel il convient de stimuler l’attention ou la curiosité des élèves risquent de rester sans effet sur les apprentissages avec des d’enseignants peu motivés, des journées de classe à rallonges ou des enfants mal nourris !</p>
<h2>Prendre en compte l’intrication des facteurs</h2>
<p>Contre toute tentation de déterminisme « neuro » magique, il faut rappeler aussi (et entre autres) que la psychologie sociale démontre, sur la base d’expériences, qu’il suffit souvent de modifier les pratiques en classe ou les énoncés des exercices pour que les apprentissages des élèves en soient significativement affectés.</p>
<p>Ou encore, rappeler que les sociologues montrent que des élèves au départ comparables progressent inégalement selon la composition de leur classe (son niveau moyen ou son hétérogénéité notamment). Ou encore que telle méthode pédagogique peut s’avérer efficace ou non selon les caractéristiques des publics auxquels elle est appliquée.</p>
<p>Bref, une masse de travaux convainquent sans ambiguïté que des élèves exposés à la même méthode – fût-elle conforme à ce qu’on sait sur le cerveau – vont voir leurs apprentissages fortement modulés selon le contexte pédagogique et social où ils évoluent.</p>
<p>Globalement, un des messages les mieux partagés au sein de la recherche en éducation (des neuroscientifiques aux sociologues de l’éducation, en passant par les psychologues de tous horizons) est l’intrication, dans tout apprentissage, de multiples facteurs : la santé (nutrition, sommeil, exercice physique…), les interactions sociales, les émotions, la confiance en soi, et bien sûr la mobilisation des enseignants et l’organisation même de l’enseignement…</p>
<h2>Un besoin de pluridisciplinarité</h2>
<p>Même si on peut comprendre que les neurosciences séduisent par leur simplicité (apparente), il n’y a aucune raison ni de les frapper d’anathème ni de leur donner un monopole : c’est avant tout d’une pluridisciplinarité dont on a besoin. Mais se pose alors le problème, scientifique, réel et difficile, de l’articulation de recherches qui se situent à différents niveaux.</p>
<p>Peu de chercheurs, que toute la logique des champs scientifiques pousse à se spécialiser, osent s’aventurer sur ce terrain, d’autant plus que, dans le champ académique, se soucier des implications concrètes de ses travaux n’est pas plus valorisé que la pluridisciplinarité. Encore faudrait-il que les diverses spécialités ne s’ignorent pas, ne se caricaturent pas…</p>
<p>Par ailleurs et surtout, le fait de connaître certains des facteurs et des mécanismes qui favorisent les apprentissages, et l’effet objectif de telle ou telle méthode ou modalité d’organisation des systèmes éducatifs n’est pas suffisant pour dicter une politique éducative efficace et juste.</p>
<p>Car au-delà de l’efficacité d’un élément, il existe toute une gamme de solutions alternatives (qui, concernant les questions éducatives, ne se situent pas toutes uniquement dans le milieu scolaire), et, surtout peut-être, un horizon de valeurs que le politique ne peut ignorer. Et qui vont exiger de lui des arbitrages.</p>
<p>Ainsi, les recherches sociologiques qui s’appuient <a href="http://bit.ly/2FoHTRc">sur des comparaisons internationales</a>, si elles démontrent la portée égalisatrice d’une école unifiée, sans filières précoces, révèlent en même temps que si l’on déplace le projecteur quelques années plus loin, en considérant la facilité, pour les jeunes, à s’insérer sur le marché du travail, les systèmes à filières font mieux.</p>
<h2>Fixer d’abord des objectifs politiques</h2>
<p>Ce n’est évidemment pas aux chercheurs mais bien aux politiques de dire s’il est plus important, pour un pays, de voir ses jeunes s’insérer aisément dans la vie active, que de manifester, à 15 ans, des compétences égalisées.</p>
<p>Une chose est sûre : ni les comparaisons internationales ni les recherches quelles qu’elles soient ne dictent les pistes à suivre. Piloter scientifiquement l’école n’est pas pour demain, même si c’était le rêve du ministre… Sa tâche est plus complexe : il lui revient d’expliciter les objectifs éducatifs que la nation entend privilégier et d’en organiser les modalités d’application dans un environnement où les contraintes de toute nature ne manquent pas.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/92814/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
L’idée de tirer parti des sciences pour améliorer l’enseignement est une vieille idée. Mais piloter scientifiquement l’école n’est pas pour demain et ne peut se substituer aux choix politiques.Marie Duru-Bellat, Professeure des universités émérite en sociologie, Observatoire sociologique du changement, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/923932018-02-27T22:17:06Z2018-02-27T22:17:06ZLes sciences cognitives, reines des sciences ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/207699/original/file-20180223-108107-1h4zcn.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=31%2C5%2C1137%2C765&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans la boite noire.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.youtube.com/watch?v=txzDqz4lAlU">TimeShift /YouTube</a></span></figcaption></figure><p>La nomination du neuroscientifique Stanislas Dehaene à la tête du Conseil scientifique de l’Éducation nationale en novembre dernier, puis l’annonce le 10 janvier de la <a href="http://www.education.gouv.fr/cid124957/installation-du-conseil-scientifique-de-l-education-nationale.html">composition dudit conseil</a> avec nombre de chercheur∙es inscrivant leurs travaux dans le champ des sciences cognitives, ont provoqué quelques remous.</p>
<p>Sous l’impulsion du ministre Jean‑Michel Blanquer, les sciences cognitives occupent en effet une place centrale et inédite dans le dispositif de réforme de l’Éducation nationale, au risque de paraître exclure d’autres disciplines. Des chercheur∙es et des syndicats enseignants ont à juste titre rappelé que l’école avait « besoin de toute la recherche » comme de l’expérience du terrain, et que <a href="http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/12/20/enseigner-est-une-science_4338294_3232.html">quoi qu’en dise Stanislas Dehaene</a>, <em>enseigner n’est pas une science</em> mais bien plus une pratique qui, à l’instar de la médecine, peut s’appuyer sur les sciences sans pouvoir s’y réduire.</p>
<p>Placées sous le feu des projecteurs, les sciences cognitives sont parfois implicitement et naïvement présentées comme permettant une approche scientifique et dégagée d’enjeux idéologiques de l’éducation ou d’autres pratiques, ce qui ne constitue ni plus ni moins qu’une <a href="http://www.lemonde.fr/idees/article/2018/02/07/yves-charles-zarka-la-neurologie-cognitive-releve-d-un-scientisme-non-denue-de-dangers_5252765_3232.html">variante de scientisme</a>. Car rien ne garantit <em>a priori</em> la neutralité des sciences cognitives, que l’on considère les différents usages que l’on peut en faire, leurs effets potentiels, ou les présupposés qui sous-tendent leurs méthodes et principes explicatifs.</p>
<p>L’instrumentalisation des sciences cognitives interroge, que cela soit à propos de l’éducation ici ou à propos de la sociologie ailleurs, d’autant plus qu’il s’agit d’un <a href="http://www.liberation.fr/debats/2018/01/31/il-n-y-a-pas-eu-de-big-bang-cognitif_1626409">champ de recherche aux résultats relativement restreints</a>.</p>
<p>Qui plus est, alors qu’elles mobilisent de nombreuses disciplines les sciences cognitives sont souvent méconnues et réduites aux neurosciences, principalement du fait de leur développement récent fulgurant lié à l’essor des technologies d’imagerie cérébrale. Quand par ailleurs certain∙es de leurs supporters ne se privent pas de prises de position autocentrées et réductionnistes, parfois outrancières, cela achève de rendre circonspect.</p>
<h2>Les sciences cognitives, une histoire courte</h2>
<p>Dans la continuité de <a href="https://www.cairn.info/revue-cites-2014-4-p-71.htm">conceptions classiques</a> issues de la philosophie ou de la psychologie, les sciences cognitives visent à offrir une approche interdisciplinaire de l’esprit humain, de la connaissance et de sa dynamique : apprentissage et mémoire, acquisition tacite de savoirs, acquisition de savoir-faire, interaction homme-machine… Après un demi-siècle d’existence, elles constituent un domaine encore jeune si on les compare à la physique ou à la biologie. Mais on peut considérer qu’elles ont dépassé le stade de l’enfance, et de l’innocence qui est réputée l’accompagner.</p>
<p>Issues de la convergence de recherches dans des disciplines aussi variées que la psychologie, la neurobiologie, la linguistique, l’éthologie, la philosophie, l’informatique, la robotique et l’intelligence artificielle, sans pour autant que ces dernières s’y réduisent, les sciences cognitives ont en effet connu un essor considérable grâce au développement des sciences et technologies du numérique.</p>
<p>Loin des premiers pas théoriques, elles ont contribué à des innovations technologiques qui ont envahi la vie quotidienne, des smartphones aux tablettes en passant par les réseaux sociaux, les prothèses robotisées, les logiciels éducatifs ou les équipements médicaux <em>hi-tech</em>.</p>
<p>En poursuivant la métaphore des âges, on pourrait dire que <strong>les sciences cognitives sont vaillamment parvenues à l’adolescence</strong> – l’adolescence avec ses qualités, mais aussi ses limites.</p>
<p><strong>L’adolescence avec ses qualités</strong> : c’est l’enthousiasme parfois immodéré qui pousse à aller de l’avant, plus loin dans la compréhension de l’humain, dans la modélisation et la simulation de l’intelligence, dans la mise en œuvre de technologies cognitives. C’est cette vision que l’avenir nous appartient, qu’on a énormément de choses à comprendre et à réaliser, et qu’il faut dépasser la génération d’avant. Et il est vrai que le domaine est prometteur, qu’il accumule les découvertes et les applications, apportant parfois des éléments d’explication d’hypothèses avancées dans d’autres domaines comme la psychanalyse ou la pédagogie.</p>
<p><strong>L’adolescence avec ses limites</strong> : c’est le narcissisme propre à cet âge, qui de l’enthousiasme fait glisser à l’optimisme béat devant ses propres progrès, et à l’illusion que l’avenir ne dépend que de soi et plus des autres. Le narcissisme des sciences cognitives est évidemment encouragé par le contexte social, quand elles promeuvent une approche centrée sur l’individu autonome doté de compétences, approche qui entre en résonance parfaite avec la conception sociale dominante de l’humain. Ce narcissisme s’exprime de manière récurrente par certains de ses acteurs à coup de tribunes technophiles, et dans certains cas extrêmes conduit à l’<a href="https://theconversation.com/debat-intelligence-artificielle-robots-transhumanisme-du-bonheur-ou-la-planete-des-singes-86161">illusion transhumaniste</a> d’un avenir radieux tout entier modelé par les sciences cognitives et leurs alliées, génétique et nanotechnologies.</p>
<p>Les sciences cognitives paraissent ainsi à la croisée des chemins. Elles seront manifestement une composante de l’avenir, mais on ne sait pas à quoi ressemblera leur âge adulte. Aujourd’hui déjà, à côté de la production d’instruments réputés utiles voire agréables, on les voit mobilisées dans la vidéosurveillance généralisée ou dans l’industrie militaire, et à la source de pollutions massives (via l’<a href="http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2012/07/19/en-chine-les-terres-rares-tuent-des-villages_1735857_3216.html">exploitation des terres rares</a> notamment).</p>
<p>Le maintien prolongé des sciences cognitives dans l’adolescence semble pouvoir conduire à un monde qui, loin d’être radieux, serait invivable. À l’inverse, on peut imaginer que leur passage à l’âge adulte se fera par la prise en compte d’une dimension de l’humain pour l’instant absente ou totalement marginale : la dimension sociale.</p>
<h2>Du naturalisme à l’humanisme</h2>
<p>Car ce qui fait que nous sommes des <em>personnes</em> et non seulement des individus plus ou moins autonomes et dotés de compétences à renforcer, c’est que nous n’appartenons pas seulement à un environnement physique, biologique et informationnel, mais que nous appartenons à un <em>monde</em>, à une société, donc à une ou plusieurs cultures et à une histoire.</p>
<p>Pour exprimer cette dualité dans les termes de <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/la-vie-didier-fassin/9782021374711">Didier Fassin</a>, notre vie n’est pas seulement <em>biologique</em> et physique, elle est aussi <em>biographique</em>, sociale et politique. Sans ce monde, sans cette société, ces cultures et cette histoire, <em>nous n’existerions pas</em> : nous n’existerions pas en tant que personnes avec nos multiples rôles sociaux, avec nos normes et nos institutions, avec nos croyances et nos savoirs, nos désirs et nos peurs, nous ne serions pas nous-mêmes.</p>
<p>Par le noyau initial des disciplines qu’elles ont incorporées, les sciences cognitives se sont focalisées sur certains aspects des humains qui les font appréhender au mieux comme des « agents intelligents » plus ou moins sophistiqués dans une sphère interactionnelle limitée, mais qui ne permettent pas de les comprendre comme des personnes.</p>
<p>Si les sciences cognitives passent un jour à l’âge adulte, ce sera en dépassant le narcissisme de l’adolescence et par une prise de conscience critique de cette limite. On peut gager que cela passera par l’ouverture d’un dialogue avec les sciences sociales et historiques, avec des disciplines comme l’ethnologie, la psychanalyse, la critique littéraire, l’histoire de l’art.</p>
<p>Il n’est pas question ici de défendre la perspective d’un dialogue journalistique ni celle d’un vernis culturel à apposer sur de l’ingénierie cognitive. Il ne s’agit pas non plus de promouvoir une subordination des sciences humaines et sociales aux sciences cognitives, comme par une annexion de voisinage, qui viendrait épaissir le mille-feuille d’une conception déjà multifactorielle de l’individu.</p>
<p>Il s’agit plutôt de construire un <a href="https://www.cairn.info/revue-cites-2014-4-p-17.htm"><em>dialogue sérieux</em></a> dont les formes et modalités sont à inventer, une confrontation d’idées et d’approches irréductibles les unes aux autres, mais toutes autant indispensables à la compréhension de ce que nous sommes comme personnes. Ajouter ce programme à l’agenda peut constituer un bel avenir pour les sciences cognitives – certes pas l’avenir radieux des prophètes, mais un avenir fructueux, auquel chaque domaine pourra contribuer avec son histoire, ses connaissances et ses pratiques.</p>
<p>À l’ambition démesurée d’une position dominante et au discours décomplexé de certains de ses apôtres, il paraît ainsi raisonnable d’opposer la vision modeste d’un champ de recherche jeune et en expansion, mais circonscrit et non exclusif, et surtout conscient de ses limites.</p>
<p>On ne peut évidemment pas ignorer l’apport des sciences cognitives en général, et des neurosciences en particulier, à la connaissance de l’humain. Que certaines connaissances issues de ces domaines trouvent des applications dans l’éducation tombe également sous le sens.</p>
<p>À cet égard, la participation de chercheur∙es en sciences cognitives à l’élaboration des politiques d’éducation n’est pas illégitime, à condition toutefois que leur positionnement soit clarifié. En effet, par leur individualisme méthodologique assumé, les sciences cognitives demeurent essentiellement incomplètes et ne peuvent offrir qu’une vue partielle de leur objet. Ériger leur perspective en point de vue dominant sur l’humain et ses pratiques éloignerait de la scientificité de leurs méthodes et de la neutralité à laquelle elles pourraient aspirer.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/92393/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Manuel Rebuschi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Réflexion sur la place des sciences cognitives – disciplines encore adolescentes – dans l’éducation.Manuel Rebuschi, Maître de conférences en philosophie, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/905932018-02-13T20:22:15Z2018-02-13T20:22:15ZPensée magique, quête de sens et méthode scientifique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/206160/original/file-20180213-44651-cjuu19.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Zoologischer Garten, 1912.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:August_Macke_053.jpg">August Macke/Wikimedia</a></span></figcaption></figure><p>La pensée magique est une étape normale du <a href="http://www.sceptiques.qc.ca/forum/archives/41455.html">développement de l’enfant</a> (entre 2 et 6 ans) où il croit découvrir que ce qu’il pense peut agir directement sur le monde. Cela peut être traumatisant s’il croit être la cause d’événements négatifs comme une maladie ou un accident. Le traumatisme va persister aussi longtemps que sa croyance dans ses capacités. Il faudra qu’il découvre – ou qu’on lui explique – la différence entre le normal et le paranormal pour qu’il dépasse le stade de la pensée magique.</p>
<p>Pourquoi tous les enfants passent-ils par ce stade préopératoire ? Nous sommes une espèce intelligente parce que notre cerveau est en permanence à la recherche de liens entre des éléments jusqu’alors considérés comme indépendants. Cette <a href="https://theconversation.com/intelligences-87484">quête de sens</a> implique de détecter les coïncidences, qui seront ensuite validées (ou non) comme étant des liens avérés. Les premiers liens découverts sont les plus évidents, puis au fur et à mesure de notre apprentissage de la vie, nous découvrons des relations plus complexes. Parmi les premiers éléments glanés nous trouvons : « je lâche un objet alors il tombe », « j’ouvre la porte et les objets sont encore là » (ils n’ont pas bougé), « le feu passe au rouge et les voitures s’arrêtent ».</p>
<p>Admettons qu’un jour, un enfant pense « celui-là je ne l’aime pas » et que juste après on lui dise que cette personne vient de se casser la jambe. Son cerveau étant construit pour détecter les coïncidences, la détection aura lieu et cet enfant croit maintenant que lorsqu’il pense du mal d’une personne, celle-ci va se casser la jambe. Généralisant à partir de ce fait, il croit que ce qu’il pense change le monde… Évidemment, cela ne dure pas. Le monde ne se pliant pas à sa volonté, de nombreuses non-coïncidences vont l’obliger à admettre qu’il est en fait impuissant. Cela peut être très rassurant, mais aussi déprimant (comment expliquer et/ou changer le monde alors ?).</p>
<h2>Les adultes et la pensée magique</h2>
<p>Dans les lignes qui précèdent, nous avons laissé un enfant démoralisé par son incapacité à changer le monde par la pensée, mais de nombreux adultes croient fermement qu’ils le peuvent. Ce que nous appelons la foi (des croyants) est bien la définition d’une pensée magique. Selon eux, leurs intentions, prières et autres pensées ont une action sur le monde puisqu’elles touchent leur Créateur. Tous les adultes adeptes de la pensée magique n’adhèrent pas forcément à une religion. Les <a href="http://www.sciences-cognitives.org/TnC2/TnC2_19/">barreurs de feu</a>, par exemple, sont persuadés de limiter au maximum les effets d’une brûlure avec une simple pensée ou prière. Ils existent depuis toujours, en France (plus de 6 000) et dans le monde entier. Pourquoi une telle omniprésence ? Une explication possible est qu’ils disposent d’un vrai pouvoir… Mais qu’en dit la science ?</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/206161/original/file-20180213-44627-j8xlq3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/206161/original/file-20180213-44627-j8xlq3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=634&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/206161/original/file-20180213-44627-j8xlq3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=634&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/206161/original/file-20180213-44627-j8xlq3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=634&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/206161/original/file-20180213-44627-j8xlq3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=797&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/206161/original/file-20180213-44627-j8xlq3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=797&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/206161/original/file-20180213-44627-j8xlq3.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=797&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Illustration d’une sensation douloureuse par Descartes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">René Descartes, Traité de l’homme/Wikipédia</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par définition, la science et ses serviteurs les chercheurs s’intéressent à tous les faits inexpliqués. Les phénomènes non expliqués dans le domaine de la pensée magique sont regroupés sous le nom de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Paranormal">« phénomènes para-normaux »</a> (ou PSI). Des milliers d’études ont pointé l’existence de faits qui entrent dans cette catégorie. L’une des études parmi les plus récentes et les plus connues <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26834996">a été publiée</a> dans le <em>Journal of Personality and Social Psychology</em> en 2011, et <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26834996">confirmée</a> en 2015. De quoi s’agissait-il ? <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Daryl_Bem">Daryl Bem</a>, professeur émérite à Cornell University a refait neuf expériences classiques de psychologie expérimentale – en inversant la causalité – et a obtenu des résultats probants. Par exemple, les sujets doivent deviner si une image va apparaître à droite ou à gauche de l’écran. Ils indiquent leur choix, puis un tirage aléatoire a lieu qui détermine où va apparaître la photo. Normalement, c’est du hasard (50 %), mais pour une catégorie de sujets – déterminée à l’avance – les probabilités de réussite sont de 56 % ! Mais, puisque les phénomènes PSI sont avérés, comment les expliquer ?</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/206163/original/file-20180213-44647-1ht3erq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/206163/original/file-20180213-44647-1ht3erq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/206163/original/file-20180213-44647-1ht3erq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/206163/original/file-20180213-44647-1ht3erq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=559&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/206163/original/file-20180213-44647-1ht3erq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=703&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/206163/original/file-20180213-44647-1ht3erq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=703&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/206163/original/file-20180213-44647-1ht3erq.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=703&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Pensée magique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sydney Harris, _What’s So Funny About Science ?_ (1977).</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Il faut étudier le paranormal !</h2>
<p>Une publication scientifique est ainsi faite qu’elle doit permettre à d’autres chercheurs de refaire la même expérience afin de retrouver le même résultat. C’est cette reproductibilité des faits qui fait office de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9thode_scientifique">« preuve scientifique »</a>. Qu’en est-il de faits qui ne seraient pas reproductibles par n’importe quelle équipe ? S’il fallait « croire » pour obtenir un certain résultat et qu’à défaut de croire on en obtienne un autre ? De tels faits existent, notamment ceux rapportés par D. Bem. Dans ce cas, la science d’aujourd’hui, avec sa méthodologie, n’a rien à dire : ce n’est pas de son ressort.</p>
<p>Plutôt que de nier toute efficacité à la pensée magique, il faudrait en faire un sujet d’étude autorisé et financé. Quelques chercheurs se sont lancés et proposent des théories, pas très bien vues de la science « mainstream », qui prennent en compte l’expérimentateur (celui-ci n’est plus en dehors de l’expérience) : la théorie de la double causalité, qui entend faire le lien entre science et spiritualité, les ondes scalaires, ou encore les ondes d’échelle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/90593/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Claude Touzet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Comment étudier scientifiquement la pensée magique ? Plaidoyer pour la recherche en paranormal.Claude Touzet, Maître de Conférences en Sciences Cognitives, UMR CNRS 7260, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/913992018-02-12T21:23:31Z2018-02-12T21:23:31ZOsons aussi les sciences cognitives dans l’enseignement supérieur<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/205563/original/file-20180208-180805-1dq4sg8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Connaissances et savoirs.</span> </figcaption></figure><p>Une bonne nouvelle en ce début d’année : la place centrale que tient l’enseignement dans le débat public avec un ministre de l’éducation nationale qui lance une réforme du baccalauréat et s’adjoint un <a href="http://lemde.fr/2ALDbX8">Comité scientifique présidé par Stanislas Dehaene</a>, professeur de psychologie cognitive expérimentale au Collège de France. Côté enseignement supérieur, Frédérique Vidal, indiquait lors de son <a href="http://bit.ly/2E9brhS">audition au Sénat en juillet 2017</a>, vouloir développer la recherche sur l’éducation, en particulier grâce aux sciences cognitives. Mais sans toutefois préciser si des liens seraient établis avec les disciplines académiques autres que celles de l’éducation.</p>
<h2>Des disciplines essentielles aujourd’hui</h2>
<p>Les <a href="http://bit.ly/2sjofka">sciences cognitives</a> étudient les processus mentaux et les mécanismes neurophysiologiques qui nous permettent de construire nos connaissances : la perception, la mémoire, l’attention, l’imagerie, le raisonnement, la communication. Les sciences cognitives étudient également l’engagement dans l’action : la planification et l’exécution de l’action. La connaissance s’appuie donc sur des mécanismes qui permettent une expérience consciente.</p>
<p>Neurosciences, neuropsychologie, psychologie comparée, psychologie cognitive, psychologie du développement, linguistique, logique, intelligence artificielle, philosophie, psychologie sociale et anthropologie… une longue liste de sciences qu’il est impossible pour un individu de maîtriser mais dont le développement et la diffusion notamment <a href="http://sciences-cognitives.fr/">dans l’éducation devient primordiale</a>.</p>
<p>Des voix divergentes s’expriment sur l’éventualité d’une <a href="http://bit.ly/2zF8eqF">future domination de l’homme par la machine</a>. Sans verser dans les travers de la futurologie et de la tentation de positions très tranchées, on peut affirmer que le <a href="http://bit.ly/2EdGmxy">rôle des machines va s’intensifier</a>. On pourrait alors se dire : pas besoin d’approfondir notre connaissance des sciences de la connaissance et donc du cerveau. Après tout, on a fonctionné (peut-être pas si mal) avec une connaissance (très) limitée jusqu’à présent et les machines réaliseront une partie de nos tâches parmi les plus pénibles.</p>
<p>Mais ce sont justement <a href="http://bit.ly/2n4ocWx">ces changements d’environnement et nouvelles interactions</a> qui rendent essentiel le besoin d’approfondir notre connaissance des sciences de la connaissance. À l’heure où d’aucuns annoncent notamment, sous l’impulsion de l’intelligence artificielle, la fin du savoir et de l’enseignement tels que nous les connaissons, les enjeux des sciences cognitives pour l’éducation et plus particulièrement pour l’enseignement supérieur deviennent primordiaux.</p>
<p>Au passage, on peut s’étonner d’une sémantique française spécifique : éducation avant le bac et enseignement supérieur après. Comme si les finalités divergeaient. Les Anglo-saxons font plus simple : <em>education</em> et <em>higher education</em>.</p>
<h2>Pour la formation supérieure, aussi</h2>
<p>Les ouvrages sur l’intelligence artificielle, le transhumanisme se multiplient et plusieurs sont devenus des best-sellers comme <a href="http://bit.ly/2y7HFYt">La Guerre des intelligences</a> de Laurent Alexandre. Le succès mondial, plutôt inattendu au départ, d’<a href="http://bit.ly/2pgpN8C">Une brève histoire de l’humanité</a> de Yuval Noah Harari montre une appétence forte pour mieux comprendre qui nous sommes en tant qu’Homo Sapiens et comment nous pourrions évoluer avec un dessein orchestré par la recherche scientifique.</p>
<p>Malgré cet intérêt, les sciences cognitives ont jusqu’à présent peu infusé les pratiques d’enseignement pour les formations supérieures françaises qu’il s’agisse des Universités ou des Grandes Écoles. L’académisme continue à être largement privilégié. Pas de connotation négative dans cette expression mais les pratiques pédagogiques restent souvent (mono)-centrées sur les disciplines et les connaissances attachées même si l’hybridation, et la reconnaissance d’un besoin de transversalité, prend de l’ampleur.</p>
<p>Est-ce un défaut de connaissance et de formation des enseignants-chercheurs ? Probablement. L’importance de la formation des enseignants-chercheurs à l’innovation pédagogique est largement partagée par les Universités et les Grandes Écoles, et les initiatives de formation plus importantes que la perception commune. Pour autant, la connaissance et la diffusion des dernières avancées dans le champ des sciences cognitives restent limitées.</p>
<p>Les étudiants ont une bonne compréhension du corps humain et une pratique régulière d’exercice physique. À l’instar de leurs professeurs, le cerveau, son fonctionnement et la manière dont la connaissance se forme restent souvent des inconnus pour eux. Si on faisait un test, combien d’enseignants-chercheurs seraient capables de citer les <a href="http://bit.ly/2GYlacp">8 (et demi) formes d’intelligence de Gardner</a> (N.B. intrapersonnelle, interpersonnelle, kinesthésique, linguistique, logico-mathématique, musicale, spatiale, naturaliste, existentielle).</p>
<p>Cette typologie est critiquée mais il faut lui reconnaître le mérite de mettre en évidence la pluralité de l’intelligence et d’avoir stimulé de nouveaux travaux sur les formes d’intelligence comme la <a href="http://bit.ly/2nT6R05">théorie triarchique de l’intelligence</a> (analytique, créative ou synthétique, pratique) de Robert Stenberg.</p>
<p>N’avons-nous pas tendance à calquer notre propre modèle cognitif sur nos apprenants ? Oui très certainement pour la majorité d’entre nous. Il est naturel de rester dans sa zone de confort cognitive mais un groupe d’étudiants représentera une variété de profils cognitifs. Le renouvellement des pratiques pédagogiques dans l’enseignement supérieur a fait lever le verrou d’une position dominante du professeur et d’une monotonie du mode d’apprentissage.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/205484/original/file-20180208-180841-12dk2lk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/205484/original/file-20180208-180841-12dk2lk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/205484/original/file-20180208-180841-12dk2lk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/205484/original/file-20180208-180841-12dk2lk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/205484/original/file-20180208-180841-12dk2lk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/205484/original/file-20180208-180841-12dk2lk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/205484/original/file-20180208-180841-12dk2lk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/205484/original/file-20180208-180841-12dk2lk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Hackathon. Utiliser toutes ses formes d’intelligences.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/ourQHRTE2IM">Alex Kotliarskyi/Unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Maîtriser la production de connaissances</h2>
<p>L’étape suivante, dans un monde où d’autres formes d’intelligence que l’intelligence humaine se développent, est de bien comprendre mutuellement (étudiants et enseignants) comment nous apprenons et créons de la connaissance (dont des connaissances créatives).</p>
<p>Il n’y a que des avantages à comprendre, par exemple, pourquoi il est contre-productif de maintenir des durées de cours ou des postures corporelles incompatibles avec la capacité d’attention du cerveau et comment la fatigue, le manque de sommeil (que nous avons culturellement en France tendance à valoriser) ou autres font barrière à la cognition. Et à l’inverse comment l’apprentissage progresse s’il se situe dans un contexte propice.</p>
<p>Face aux machines, quelle est la force de l’homme ? Si la réponse principale est sa capacité à créer, nous ne pouvons plus faire l’économie d’une formation à l’apprentissage pour tous (enseignants et étudiants) comme base solide pour ensuite aller vers les enseignements académiques.</p>
<h2>Les sciences cognitives enrichissent les autres sciences</h2>
<p>Les sciences cognitives sont également source d’enrichissement des disciplines académiques. Prenons l’exemple de sciences de gestion et économiques. <a href="http://bit.ly/2EbJfyG">Hervé Laroche et Jean‑Pierre Nioche</a> ont dès 1994 interrogé l’apport des sciences cognitives à la stratégie d’entreprise en indiquant que « l’une des clés du processus stratégique, peut-être la seule, réside dans la pensée des dirigeants, dans ses mécanismes ».</p>
<p>De son côté, l’<a href="http://bit.ly/2sgwAoL">économie cognitive</a>, nouvelle venue de la dernière décennie, étudie les croyances et les raisonnements des acteurs économiques dans un environnement d’interaction dynamique.</p>
<p>Oser les sciences cognitives dans l’enseignement supérieur, c’est simplement prendre le risque d’un apprentissage plus épanoui et plus porteur de créativité et de meilleure compréhension des phénomènes que nous observons, analysons et enseignons.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/91399/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Claude-Gaudillat ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les sciences cognitives ont jusqu’à présent peu infusé les pratiques d’enseignement pour les formations supérieures. Or elles ouvrent sur un apprentissage plus épanoui et plus porteur de créativité.Valérie Claude-Gaudillat, Professeur de stratégie, Directrice d'Audencia Innovation, AudenciaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/895952018-02-02T05:36:51Z2018-02-02T05:36:51ZComment les sciences cognitives peuvent contribuer à améliorer l’enseignement<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/204466/original/file-20180201-123829-1dbl730.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Cognition.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/pnnl/6310387725/">PNNL/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>L’enseignement en France est aujourd’hui mis à mal par deux tendances fortes et présentes depuis plusieurs années. D’une part, le niveau scolaire des écoliers français est actuellement en pleine diminution selon <a href="http://bit.ly/2g80sbC">plusieurs classements internationaux</a> tandis que, dans le même temps, la transformation digitale continue de modifier l’organisation traditionnelle du travail et pose de réelles questions sur les futurs besoins en compétence. Faut-il réinventer notre modèle éducatif ?</p>
<h2>Un Conseil Scientifique observé de près</h2>
<p>En guise de réponse, <a href="http://lemde.fr/2ALDbX8">Jean‑Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale</a>, a opté pour la création du Conseil Scientifique de l’Éducation nationale dont la l’<a href="http://bit.ly/2D3j3WG">installation a eu lieu le 10 janvier 2018</a>. Cette nouvelle instance consultative a pour mission de repenser la pédagogie à l’école en s’appuyant pour cela sur des preuves scientifiques solides. Stanislas Dehaene, professeur de psychologie cognitive expérimentale au Collège de France, en est le président et il a tenu sa première grande conférence internationale le 1<sup>er</sup> février sur le thème de l’<a href="http://bit.ly/2Fybnbu">expérimentation dans le domaine éducatif</a>.</p>
<p>L’annonce de la création de ce Conseil a <a href="http://bit.ly/2nuhFCo">soulevé de nombreux questionnements</a> de la part de chercheurs, enseignants et syndicats autour d’un risque de focalisation trop importante sur les neurosciences dans ce projet. L’une des peurs était que les nouvelles propositions recourent à une approche mécaniste, basée uniquement sur le fonctionnement du cerveau, qui nierait d’autres aspects de la situation en classe et passerait à côté de la réalité du terrain.</p>
<p>Pour répondre à ces inquiétudes, Stanislas Dehaene a réaffirmé le recours à une approche pluridisciplinaire, expliquant par exemple qu’ils n’allaient pas <a href="http://bit.ly/2CSVEmt">« faire des IRM à tous les écoliers »</a> (ndlr : une technique d’imagerie cérébrale). De plus, la <a href="http://bit.ly/2CVvOBL">liste définitive des 21 membres du conseil</a> aura permis de calmer un temps ces craintes. En effet, même si plusieurs experts sont directement issus des sciences cognitives, d’autres disciplines sont représentées comme la sociologie, l’informatique, les sciences de l’éducation, les mathématiques et l’économie.</p>
<h2>Des chantiers sociétaux à lancer</h2>
<p>Les enjeux sociétaux auxquels doit répondre ce conseil sont de taille : infléchir au plus vite la diminution du niveau scolaire de nos écoliers et les préparer au mieux à s’adapter à la complexité du monde et à un futur de plus en plus flexible et technologique. Les <a href="http://bit.ly/2E85LrE">sciences cognitives</a>, qui se destinent à décrypter les mécanismes de la pensée humaine, permettent justement aujourd’hui de mieux comprendre la situation pédagogique et d’augmenter l’efficience de notre système de formation. C’est pourquoi ce conseil devra poser plusieurs grands chantiers autour des méthodes de partage et d’évaluation des connaissances.</p>
<p>D’ores et déjà, de nombreux paramètres en classe ont fait l’objet d’études en sciences cognitives, offrant un bon niveau de maturité scientifique pour assurer un transfert efficace des connaissances. Il est à noter que les exemples qui vont suivre sont issus des réflexions de l’auteur et non du conseil scientifique. Un premier chantier pourrait s’appuyer sur la mise en application de notre compréhension du <a href="http://bit.ly/2rXfJad">fonctionnement individuel des élèves</a> et notamment de la triade <em>attention, intention, émotions</em>.</p>
<p>Dans ce domaine, de nombreux modèles et travaux nous expliquent comment l’<a href="http://bit.ly/2Ex1GuO">attention</a> peut être captée ou dirigée, quelles multiples opérations mentales sont nécessaires pour adopter un comportement flexible et adapté, mais également quelle influence ont les émotions sur nos comportements. La réunion de ces vastes domaines de connaissances augmente la compréhension de la situation pédagogique du point de vue de l’élève et permet de mieux repenser les temps de formation.</p>
<p>Un second chantier pourrait s’appuyer sur la compréhension empirique de la <a href="http://bit.ly/2E86xVA">situation d’apprentissage</a> et notamment l’existence de plusieurs « lois cognitives » à même de guider différentes méthodes pédagogiques. Qu’il s’agisse de la profondeur de traitement de l’information, de la répétition de l’information ou bien encore l’<a href="http://bit.ly/2DTqn3n">apprentissage distribué</a>, plusieurs techniques peuvent être utilisées et combinées afin d’augmenter la rétention des informations.</p>
<h2>Apprendre à apprendre</h2>
<p>Seulement, l’école ne doit pas servir uniquement qu’à transférer une quantité d’informations d’un individu à l’autre. Elle doit également aider les apprenants à prendre du recul, à la fois sur les informations présentées afin de développer un esprit critique mais également sur leur propre mode de fonctionnement.</p>
<p>Cette réflexion constitue pour Stanislas Dehaene un chantier potentiel, ciblé sur l’objectif d’« apprendre à apprendre aux élèves, pour qu’ils développent leur autonomie et <a href="http://lemde.fr/2ALDbX8">leur confiance en eux</a> ». Ce domaine, aussi appelé la <a href="http://bit.ly/1HATswC">métacognition</a>, était jusqu’alors rarement évoqué à côté des apprentissages fondamentaux que sont la lecture, l’écriture et le comptage.</p>
<p>Pourtant, cette capacité à s’adapter et à constamment apprendre de nouvelles connaissances et compétences a de nombreuses fois été citée comme centrale dans l’<a href="https://www.weforum.org/agenda/2016/01/the-10-skills-you-need-to-thrive-in-the-fourth-industrial-revolution/">adaptation au futur marché du travail et à l’évolution de notre société</a>. La mise en application d’actions dans ce domaine sera donc à suivre de très prés.</p>
<h2>Expérimentations, tests et transmissions</h2>
<p>Comment le conseil souhaite-t-il passer des mots aux actes ? Dès le début, celui-ci a affiché sa volonté très forte de <a href="http://bit.ly/2FAYe1w">mettre en place des expérimentations</a> afin de développer des nouveaux outils d’évaluation physiques et numériques des performances de écoliers, ceux disponibles actuellement n’étant pas toujours satisfaisant sur le plan des délais et des mesures. Il s’agira par exemple d’aider les professeurs des écoles à évaluer par des tests éprouvés, tout au long du CP, le niveau de chaque élève.</p>
<p>Dans un second volet, il s’agira également de passer rapidement à la mise en place de test des nouveaux protocoles pédagogiques afin de mesurer leur efficacité sur le terrain. En revanche, les moyens associés à ces expérimentations devront être conséquents afin de mettre en place des études directement en classe, au moyen notamment de réseaux d’écoles à même de les accueillir et de chercheurs et jeunes chercheurs capables de porter ces projets.</p>
<p>Dans un troisième volet, il faudra impérativement sensibiliser et former les professeurs des écoles à la pratique pédagogique nourries des recherches en sciences cognitives. Cela risque d’être malheureusement complexe sans repenser les temps de formation des enseignants et futurs enseignants. Pourtant, nombreux sont ceux qui aimeraient bénéficier de ces connaissances, qui se révèlent être un réel appui au quotidien.</p>
<h2>Trois défis à relever</h2>
<p>Ainsi, ce projet répond à des ambitions très fortes en lien avec la réussite des générations futures en se basant sur le constat actuel plutôt inquiétant de la <a href="http://bit.ly/2ARBprG">baisse du niveau scolaire en France</a>. Seulement, les moyens investis devront être à la hauteur des défis et écarter plusieurs dangers en lien avec le fonctionnement des réformes d’état, les ressources ou encore nos choix de société.</p>
<p>Premièrement, Il faut à tout prix éviter un mode de fonctionnement vertical qui n’inclurait pas les enseignants. Ainsi, les professeurs des écoles devront être impliqués de façon précoce aux différents groupes de travail qui sélectionneront et piloteront les projets. En plus d’enrichir les débats grâce à leur vision irremplaçable du terrain, cette association permettra d’augmenter la légitimité des propositions de cette instance et les chances qu’elles puissent ultimement nourrir les pratiques pédagogiques actuelles.</p>
<p>Il ne faudra pas nous plus négliger la montée en compétence du personnel enseignant, et bannir l’idée d’un système qui ne ferait qu’ajouter des préconisations sur la formation des profs sans dégager les moyens financiers et temporels nécessaires.</p>
<p>Enfin, il a déjà été souligné combien il est essentiel que le modèle éducatif soit relié à l’évolution du travail et de la société, notamment au regard de la transformation digitale. Néanmoins, il convient de réfléchir ensemble à un modèle pédagogique lucide et à même de faire grandir nos écoliers tant sur le plan des compétences que de la connaissance de soi, des autres, et de la culture.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/89595/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cyril Couffe ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Analyse des chantiers que le nouveau Conseil Scientifique de l’Éducation nationale va devoir lancer. Et des défis qu’il va devoir relever.Cyril Couffe, Directeur de la chaire "Talents de la transformation digitale", Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/903962018-02-01T05:38:43Z2018-02-01T05:38:43ZEnseigner n’est pas une science, c’est une culture d’action éducative<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/203855/original/file-20180129-89582-19cdn1x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Enseigner à Paris à la fin du XIVᵉ siècle (Grandes Chroniques de France).</span> </figcaption></figure><p>La mise en place récente d’un « Conseil scientifique de l’éducation » a remis dans l’actualité du débat public français la question du rapport entre politique et science en matière d’éducation, et, plus étonnamment, reprend une question <a href="https://fr.wikisource.org/wiki/Durkheim_-_%C3%89ducation_et_sociologie/Texte_entier">déjà posée dans le contexte scientiste du XIXᵉ siècle</a> : enseigner est-il une science à disposition des personnels d’enseignement ?</p>
<p>Enseigner est considéré par Freud, au même titre que soigner et gouverner, comme un <a href="http://journals.openedition.org/leportique/271">des trois métiers « impossibles »</a> : pas plus que les médecins, les enseignants ne considèrent leur métier comme une science applicable. Lorsqu’il s’agit de susciter des changements chez autrui, patient, apprenant, c’est l’activité du sujet qui assure sa propre transformation, et non l’activité de l’intervenant, qui au mieux organise des conditions favorables à cette transformation.</p>
<p>Ceci est vrai de toutes les interventions professionnelles. Comme les valeurs, les savoirs ne s’appliquent pas ; au mieux peuvent-ils avoir une incidence sur la transformation des représentations et des affects qui accompagnent et dynamisent les actions.</p>
<p>Affirmer que l’enseignement est une science joue une fonction sociale, renvoyant à la logique de l’acte de gouverner : éviter de prendre en compte les rapports que les sujets humains entretiennent entre eux dans les situations éducatives et dans les situations sociales, ce qui est de nature à légitimer ces formes de violence qui sont fondées sur l’affirmation de « vérités ».</p>
<p>Dans cet esprit le présent texte a trois objectifs :</p>
<ul>
<li><p>Analyser ce qui est en jeu dans une situation éducative : nous faisons l’hypothèse qu’elle est un couplage entre l’activité d’un sujet apprenant et l’activité d’un sujet intervenant</p></li>
<li><p>Identifier l’enseignement comme une culture d’organisation de ce couplage</p></li>
<li><p>Situer l’enseignement comme une culture d’action éducative parmi d’autres</p></li>
</ul>
<h2>L’action éducative est une organisation d’activités ordonnée autourᵉd’uneᵉtransformation valorisée d’habitudes d’activité</h2>
<ul>
<li><p>Au-delà de la diversité de ses formes, l’<a href="https://www.puf.com/content/Vocabulaire_danalyse_des_activit%C3%A9s">éducation est une organisation d’activités ordonnée autour d’une intention, déclarée ou en acte</a> : contribuer à la transformation d’un sujet. Elle est fondée sur une hypothèse : les activités organisées sont susceptibles de produire le résultat escompté. Les acteurs éducatifs se représentent ou mettent en mots les transformations recherchées ; ils n’ont qu’une vue partielle des transformations effectives, qui dépassent singulièrement les résultats de l’évaluation. Comme tous les professionnels engagés dans des interventions sur l’activité d’autrui, les éducateurs connaissent plus ce qu’ils ont l’intention de faire que ce qu’ils font.</p></li>
<li><p>L’éducation intervient sur des processus déjà en cours. Des constructions de sujets s’effectuent en permanence à partir, dans et par leurs activités ; l’éducation n’a pour ambition que de les influencer.</p></li>
<li><p>Le travail spécifique des personnels éducatifs, même lorsqu’ils ne font qu’énoncer des savoirs, est de « proposer/imposer » des espaces pour l’activité des apprenants. Ces espaces sont-ils investis par l’activité des apprenants, et dans quelles conditions ? C’est la question. Il n’y a pas d’éducation sans engagement du sujet apprenant dans la transformation de sa propre activité.</p></li>
<li><p>Les apprentissages auxquels sont ordonnées les actions éducatives sont des transformations valorisées d’habitudes d’activité. Très souvent dans l’approche de l’univers scolaire les apprentissages sont réduits à des apprentissages mentaux ou discursifs. Or, avoir appris, c’est simplement faire les choses autrement et trouver que c’est mieux ainsi, qu’il s’agisse d’activité mentale, d’activité communicationnelle ou d’activité physique, et le plus souvent des trois à la fois. Ces transformations sont valorisées socialement pour être considérées comme des apprentissages. L’approche des apprentissages est une activité d’évaluation, pas une activité scientifique.</p></li>
</ul>
<h2>L’enseignement est une culture d’organisation des actions éducatives, centrée sur l’activité de l’enseignant</h2>
<ul>
<li><p>Les figures les plus nombreuses des actions éducatives apparaissent dans les systèmes d’enseignement. Ces systèmes tendent d’ailleurs à désigner comme « enseignants » leurs personnels stratégiques, quelles que soient leurs activités. Ceci est vrai de la maternelle à l’enseignement supérieur, en incluant l’enseignement professionnel’.</p></li>
<li><p>Même s’il convient de ne pas confondre système d’enseignement et culture de l’enseignement, ces actions éducatives ont comme référence principale les « cultures de l’enseignement ». Celles-ci ont comme caractéristique de concevoir l’espace éducatif comme un espace de mise à disposition de savoirs, hypothèse étant faite de leur appropriation sous forme de connaissances par les enseignés.</p></li>
<li><p>Dans ces cultures, les apprentissages sont verbalisés essentiellement en termes de termes de savoirs/connaissances. Les savoirs seraient « transmis » par les enseignants qui les « détiennent », lesquels sont rémunérés au niveau socialement reconnu de ces savoirs. Ils seraient « appropriables » par les élèves/étudiants. Dans la rhétorique de ces cultures, tout tourne autour des savoirs, de leur détention, de leur transmission, de leur appropriation, de la transposition de savoirs de référence en savoirs enseignés, du « rapport au savoir » des uns et des autres.</p></li>
<li><p>L’espace et le temps éducatif s’inscrivent dans une logique de communication : immédiate ou différée, dans un lieu spécialisé ou en situation d’activité « réelle », en présence ou à distance selon les cas (présentiel, tutorat, ressources éducatives, Internet). L’appropriation supposée des savoirs transmis par les publics-cible relève pour l’essentiel d’une activité ordonnée autour de ces savoirs. L’hypothèse de l’appropriation est souvent non vérifiée.</p></li>
<li><p>Cette logique de communication tend à privilégier l’activité de l’enseignant et sa programmation pédagogique. La culture professionnelle proposée à l’enseignant tend à faire de l’élève l’objet de l’activité de l’enseignant, et non à le voir comme un sujet en interactivité avec lui.</p></li>
<li><p>Ajouter à cette organisation de l’action éducative une connaissance par les enseignants des processus mentaux des élèves et leurs « bases neurales » ne change rien à l’affaire : il s’agit alors seulement de l’activité interprétative du fonctionnement mental et cognitif de leurs élèves. On reste dans la même culture professionnelle qui ignore la spécificité de l’interactivité en jeu.</p></li>
</ul>
<h2>Il existe d’autres cultures d’action éducative, situant différemment le rapport entre activité de l’apprenant/activité de l’intervenant. Elles ne sont pas davantage des sciences</h2>
<ul>
<li>D’autres actions éducatives, valorisées plus récemment, situent l’activité de l’intervenant éducatif comme une organisation de situations d’apprentissage, et l’activité de l’apprenant comme une transformation de sa propre activité en vue d’un transfert dans d’autres espaces. On tend à parler alors de cultures de la formation (formation des adultes, formation professionnelle, espaces « pédagogiques » au sein du système éducatif).</li>
</ul>
<p>Les cultures de la formation tendent à privilégier les notions de capacités ou d’attitudes, désignées par exemple en termes de « savoir », « savoir faire » et « savoir-être », et elles organisent l’espace éducatif comme un espace de production de nouvelles capacités ou attitudes en vue de leur transfert dans d’autres espaces que celui de la formation. Elles se présentent comme centrées sur les sujets apprenants. Privilège est alors donnée à la notion d’activité, et de référentiel d’activité. Cette rhétorique ne nourrit pas davantage une science de la formation, mais une ingénierie de la formation.</p>
<ul>
<li>D’autres actions éducatives encore situent l’activité de l’apprenant comme non distincte de son activité « en situation réelle », et l’activité de l’intervenant comme la mise en place d’un dispositif ayant pour ambition de transformer à la fois l’action et l’acteur.</li>
</ul>
<p>Depuis une trentaine d’années on a vu ainsi être valorisées des « formations intégrées à l’activité » : formation intégrée au travail, formation-production, formation-action, insertion par l’économique, organisation apprenante, analyse des pratiques, écriture sur les pratiques notamment. La notion de compétence y est utilisée pour désigner non seulement la référence, mais l’objet même de l’action éducative.</p>
<p>Ces actions éducatives peuvent être considérées comme l’ouverture d’espaces conçus et organisés autour d’une double intention de production de biens et/ou de services, et de développement des compétences investies dans cette production. L’hypothèse centrale est que l’on peut changer à la fois et dans le même temps l’action et l’acteur. Ceux qui prennent la place des formateurs sont des professionnels accompagnateurs : parrains,tuteurs,coachs… ; et ceux qui prennent la place des apprenants sont désignés comme des opérateurs ou des praticiens.</p>
<p>Ces nouvelles interventions éducatives font apparaître de nouveaux réseaux sémantiques : les notions de développement de compétence et de professionnalisation y jouent un rôle majeur. L’activité d’apprentissage n’est pas distinguée de l’activité de production d’utilités. S’il peut exister une intelligibilité des activités, il ne peut avoir de définition scientifique des compétences, mais seulement une définition sociale, les énoncés sur les compétences étant eux aussi des évaluations.</p>
<h2>Cultures de l’enseignement, cultures de la formation etᵉcultures du développement des compétences</h2>
<p>Enseignement, formation et développement de compétences peuvent se comparer entre eux en tant que cultures d’action éducative :</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/203830/original/file-20180129-89593-138ub56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/203830/original/file-20180129-89593-138ub56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/203830/original/file-20180129-89593-138ub56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/203830/original/file-20180129-89593-138ub56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/203830/original/file-20180129-89593-138ub56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/203830/original/file-20180129-89593-138ub56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/203830/original/file-20180129-89593-138ub56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/203830/original/file-20180129-89593-138ub56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Cultures d’action éducative et cultures d’action plus larges</h2>
<p>Pour comprendre la force sociale des cultures d’action éducative, il est utile de les mettre en relation avec des cultures d’action beaucoup plus large :</p>
<p><strong>Le vocabulaire de l’enseignement</strong> renvoie à la zone sémantique des valeurs, des règles, des normes, de la culture et plus généralement des énoncés faisant l’objet d’une valorisation sociale sanctionnée par une activité de transmission-communication. Il s’inscrit dans un paradigme global distinguant et hiérarchisant langage, pensée, action. Il fait écho à des modes d’organisation du travail et de l’activité fondés sur une distinction sociale entre activités de conduite et d’exécution, sur la spécialisation des tâches et sur leur organisation en niveau. Il est encore en cohérence avec des modes de gestion des êtres sociaux distinguant temps de l’école et temps du travail.</p>
<p><strong>Le vocabulaire de la formation</strong> renvoie à une zone sémantique de désignation de qualités, habiletés, aptitudes, obtenues par construction/abstraction des rapports que les sujets entretiennent avec leurs activités, et en dissociation avec leur engagement effectif dans ces mêmes activités. Il s’inscrit dans un paradigme plus général de pensée et d’action que l’on peut caractériser comme articulant et distinguant théorie du sujet/théorie de l’activité. Il fait écho à des modes d’organisation du travail et de l’activité fondés à la fois sur une valorisation de l’action et de sa gestion, sur la distinction de champs d’activités présentant une autonomie relative et sur leur articulation : notion de métier et de qualification. Il est en cohérence avec des modèles de production et de gestion des êtres sociaux articulant explicitement moments de construction et moments de mobilisation des sujets humains : modèle de la formation tout au long de la vie, modèle de l’alternance… etc.</p>
<p><strong>Le vocabulaire du développement des compétences</strong> renvoie à une zone sémantique de désignation des sujets humains en rapport avec leur engagement dans l’action : notions de professionnalisme, d’expertise, de sujet agissant, etc. Il s’inscrit dans un paradigme de pensée et d’action intégrant théorie du sujet/théorie de l’activité : le paradigme constructiviste. Il est en cohérence avec des modes d’organisation « pilotés par l’aval » : économie de services, flexibilité des activités productives. Il est en cohérence avec des modèles de production et de gestion des êtres sociaux tendant à intégrer explicitement construction et mobilisation des êtres sociaux : éloge de la compétence comme outil intégré pour la formation, l’orientation, la gestion des ressources humaines et de la production, injonction de subjectivité, appel à la créativité, éloge des talents, « gestion des personnes ».</p>
<h2>« Pour transmettre, il faut inspirer »</h2>
<p>Que veut-on dire quand on dit qu’enseigner, c’est une science ? Le langage scientifique se nourrit d’univocité, et non de la polysémie du discours social.</p>
<p>Utilisé au singulier, le terme science est une qualification de résultats de recherche auxquels on veut donner un statut de vérité épistémique et d’autorité sociale.</p>
<p>Au pluriel, il désigne des modes sociaux d’organisation de la production et de la transmission de savoirs dans les institutions académiques.</p>
<p>Une action est, elle, une organisation singulière d’activités ordonnée autour d’une transformation du monde. Une culture d’action, un mode évolutif, partagé par plusieurs sujets, d’organisation des constructions de sens à partir, sur et <a href="http://bit.ly/2DYhdpI">pour les activités dans lesquelles ils sont engagés</a></p>
<p>Veut-on dire que les activités, interactivités et interactions des acteurs éducatifs doivent faire l’objet d’activités de recherche ? Dans ce cas il faut le dire ainsi. À l’évidence, de telles recherches contribuent déjà à l’optimisation des actions éducatives et au développement des compétences de leurs acteurs. Et il convient de les développer davantage.</p>
<p>Mais c’est pour l’essentiel une « science sociale » qui a pour objet le travail qu’une société produit sur elle-même ; c’est une activité scientifique qui part du matériau des actes et des sens que les acteurs donnent à leurs actes, et qui développe un quadruple mouvement de subjectivation, d’objectivation, d’analyse et d’interprétation.</p>
<p>Ce travail se nourrit aussi de positions épistémologiques qui ne se limitent pas à des causalités linéaires, mais qui intègrent la prise en compte de corrélations de transformations ou de transformations conjointes sujets/activités/environnements, ce qui inclut les phénomènes de plasticité, y compris neuronale.</p>
<p><a href="http://bit.ly/2rMoaFn">William James</a>, très critique sur la confusion entre psychologie et éducation estimait que la première qualité des enseignants est le « tact » c’est-à-dire à une activité de gestion par les enseignants de leurs interactions avec les apprenants.</p>
<p>La première compétence des enseignants n’est-elle pas de proposer des activités qui permettent la construction par les apprenants des sens les plus complets (personnels, sociaux, épistémiques, etc.) susceptibles d’influer sur l’engagement de leur activité.</p>
<p>Soucieux à la fois de transmettre son art et « ce qu’il est », notre contemporain le <a href="http://bit.ly/2ddzvWS">chef cuisinier Thierry Marx</a> n’exprime-t-il pas autre chose quand il dit que « Pour transmettre, il faut inspirer » (France Culture, 23 janvier 2018) ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/90396/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Marie Barbier est responsable de la chaire Unesco-Cnam . <a href="http://chaire-unesco.cnam.fr/#2">http://chaire-unesco.cnam.fr/#2</a></span></em></p>Alors que le ministre de l’Éducation a mis en place un Conseil Scientifique de l’Éducation nationale, réflexion sur ce qu’est « enseigner ».Jean-Marie Barbier, Professeur des universités en sciences de l'éducation/formation des adultes, DHC Louvain, Chaire Unesco Cnam/Centre de recherche sur la Formation, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.