tag:theconversation.com,2011:/global/topics/dechets-electroniques-26466/articlesdéchets électroniques – The Conversation2024-03-24T17:53:09Ztag:theconversation.com,2011:article/2255872024-03-24T17:53:09Z2024-03-24T17:53:09ZDroit à la réparation : l’Europe s’attaque aux millions d’appareils électroniques qui dorment dans nos tiroirs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/581265/original/file-20240312-24-gnxqw9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption"></span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/top-view-old-computers-digital-tablets-2109892556">Veja/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>C’est un tiroir que l’on est beaucoup à avoir, souvent dissimulé dans un coin de notre bureau ou de notre chambre, archive involontaire à notre époque de surconsommation. Car ce tiroir sert de « nécropole » à une variété d’appareils électroniques et d’accessoires devenus obsolètes ou cassés. Il s’agit notamment de téléphones portables qui ont été remplacés par des modèles plus récents, de chargeurs qui ne correspondent plus à nos appareils actuels, d’écouteurs qui ne fonctionnent plus depuis longtemps, ou même de câbles divers dont l’utilité est depuis longtemps oubliée.</p>
<p>Les chiffres sont là, implacables, révélant l’ampleur de l’accumulation des déchets électroniques et leur impact dévastateur sur l’environnement. En moyenne, les Français accumulent chez eux environ 20 % d’appareils électriques qu’ils n’utilisent plus. Cela représente environ 178 millions d’appareils sur les 846 millions que les Français possèdent au total. En plus de cela, 21 millions d’appareils sont cassés. Derrière ce chiffre se trouve une véritable mine d’or de matières premières inutilisées dans nos foyers. D’autant plus que, selon une récente étude menée par l’ADEME, notre penchant pour la technologie ne va pas en diminuant, avec une moyenne de cent équipements électriques et électroniques par foyer, allant de l’essentiel au superflu.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-mines-urbaines-ou-les-ressources-minieres-insoupconnees-de-nos-dechets-electroniques-214398">Les « mines urbaines », ou les ressources minières insoupçonnées de nos déchets électroniques</a>
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<h2>Derrière cette accumulation d’objets électroniques non utilisés</h2>
<p>Alors pourquoi ne vidons-nous pas ce tiroir ?</p>
<p>La réponse est multiple. D’abord, il y a une forme d’attachement émotionnel profond à ces appareils qui ont partagé des moments de notre vie. Ensuite, certains se disent qu’ils s’en resserviront peut-être un jour, sans savoir vraiment comment. Et puis il y a ceux qui, devant l’incertitude sur la manière de les recycler de manière appropriée, décident finalement de ne pas s’en séparer. Enfin, il y a ceux aussi qui renoncent à le faire réparer, tant le parcours peut être semé d’embûches.</p>
<p>En effet, si l’intention de désencombrer est louable, la réalité du recyclage et de la réparation se heurte à des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959652621002225">obstacles économiques non négligeables</a>. Des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959652621002225">chercheurs du Ratio Institute</a> en Suède ont ainsi recensé plusieurs barrières telles que le coût comparativement plus faible des nouveaux produits, la réduction de la durée de vie des produits, la complexité croissante de la conception des produits, et l’augmentation du coût de la main-d’œuvre dans les pays industrialisés.</p>
<p>La recherche d’un service de réparation compétent représente un défi supplémentaire. Dans un marché dominé par la vente de produits neufs, les services de réparation spécialisés et de confiance sont parfois difficiles à localiser. Les consommateurs doivent souvent se lancer dans un véritable parcours du combattant pour trouver un <a href="https://www.ecosystem.eco/reparer/">réparateur qualifié</a>, disposé à s’attaquer à leur modèle spécifique d’appareil.</p>
<p>Dans la même veine, l’économiste néerlandais <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0921800917317573">Julian Kirchherr</a> et ses co-auteurs expliquent que la perception de la qualité moindre des matériaux recyclés et leurs coûts plus élevés font que les consommateurs ont naturellement davantage tendance à se tourner vers du neuf. </p>
<p>Enfin, la disponibilité des pièces détachées est un autre point de friction majeur. Car les fabricants ne fournissent pas toujours les pièces nécessaires au-delà d’une certaine période après la production de l’appareil. Même lorsque les pièces sont disponibles, leur coût, ajouté à celui de la main-d’œuvre, peut rendre la réparation économiquement irréaliste.</p>
<h2>Réparer : le consommateur au centre de l’équation ?</h2>
<p>En France, bien que les consommateurs aient une image positive de la réparation, qu’ils associent principalement à un acte écologique, cette pratique reste minoritaire. En effet, selon une étude de 2019 intitulée <a href="https://harris-interactive.fr/wp-content/uploads/sites/6/2020/06/rapport-francais-reparation-perception-pratique-2020.pdf">Les Français et la réparation : Perceptions et pratiques</a> réalisée par Harris Interactive pour le compte de l’ADEME, 54 % des Français interrogés choisissaient de remplacer un produit tombé en panne plutôt que de le réparer. Le coût de la réparation est le principal frein à la réparation, cité par 68 % d’entre eux.</p>
<p>Mais réparer ou non un objet, n’est pas non plus qu’une affaire de prix, de confiance en la qualité du produit réparé et de disponibilité. Comme le rappelle la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0959652620356900">sociologue Nazli Terzioglu</a>, la réparation est également affaire d’émotions et de valeurs, et diverge de fait en fonction de notre savoir-faire technique, du temps et de l’effort requis, des coûts financiers, des préoccupations environnementales, du plaisir perçu dans l’acte de réparation, et de la valeur symbolique ou fonctionnelle attribuée aux objets.</p>
<p>Par exemple, l’attachement émotionnel à un objet peut servir de puissante motivation à sa réparation, alors que le manque de confiance dans l’objet réparé en termes de sécurité peut représenter une barrière.</p>
<h2>Rien ne se perd, tout se répare : reprendre le contrôle des objets du quotidien</h2>
<p>Au-delà de ces considérations personnelles, enfin, la réparation est également devenue une affaire de législateurs. Dans sa quête pour une Europe plus verte, la Commission a récemment introduit de nouvelles règles communes visant à promouvoir la réparation des biens. Intitulée <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/ip_24_608"><em>Right to Repair</em></a>, cette nouvelle directive renforce le droit à la réparation sur une multitude d’appareils tels que le lave-linge, le lave-vaisselle, le réfrigérateur, l’aspirateur et le téléphone portable. En mettant l’accent sur la durabilité et l’accessibilité de la réparation, l’Europe espère non seulement réduire les déchets électroniques mais également lutter contre l’<a href="https://theconversation.com/vos-appareils-electroniques-sont-ils-obsoletes-de-plus-en-plus-rapidement-169765">obsolescence programmée</a>. La réussite de cette initiative pourrait marquer un tournant décisif dans notre rapport aux biens de consommation, si le texte, en cours de finalisation, reste fidèle à sa première ambition.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/581262/original/file-20240312-18-y2kmno.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/581262/original/file-20240312-18-y2kmno.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/581262/original/file-20240312-18-y2kmno.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/581262/original/file-20240312-18-y2kmno.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/581262/original/file-20240312-18-y2kmno.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/581262/original/file-20240312-18-y2kmno.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/581262/original/file-20240312-18-y2kmno.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/581262/original/file-20240312-18-y2kmno.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>En plus de cette condition, il est également possible de s’interroger sur un potentiel bras de fer entre les fabricants de pièces détachées et les réparateurs indépendants. Si les fabricants de pièces détachées ne parviennent pas à proposer des prix raisonnables pour ces pièces, cela pourrait finalement entraîner une augmentation des coûts de réparation. En conséquence, cela pourrait donc dissuader les consommateurs de faire réparer leurs produits, ce qui va à l’encontre de l’objectif principal du <em>Right to Repair</em> qui est de faciliter l’accès à la réparation et de prolonger la durée de vie des produits. </p>
<p>Par ailleurs, les réparateurs indépendants doivent également prendre en compte les coûts de stockage des produits, de la main-d’œuvre, du transport, ainsi que des équipements et de leur maintenance. Par conséquent, il est probable que la réparation d’objets de faible valeur devienne économiquement peu viable.</p>
<p>Pourtant, on voit naître dans le secteur de la réparation un certain nombre d’initiatives inspirantes. Startups, associations, et plates-formes dédiées offrent des solutions pratiques et accessibles pour ceux désireux de réparer plutôt que de remplacer. Par exemple, porté par Grenoble-Alpes Métropole, le nouveau site métropolitain <a href="https://www.grenoblealpesmetropole.fr/actualite/189/45-pole-r-le-lieu-totem-du-reemploi-a-ouvert-ses-portes.htm">Pôle R</a> d’une superficie de 8 000 m<sup>2</sup> dédié à l’économie circulaire, abrite la <a href="https://www.grenoblealpesmetropole.fr/actualite/174/45-la-nouvelle-donnerie-depose-minute-simple-rapide-et-pratique.htm">Donnerie</a>, un service qui permet aux habitants de déposer des objets en bon état ou facilement réparables dont ils n’ont plus besoin.</p>
<p>La réparation à distance par visioconférence fait également de plus en plus d’adeptes. Après un pré-diagnostic par téléphone, la start-up <a href="https://start.lesechos.fr/innovations-startups/tech-futur/pivr-la-startup-pour-reparer-a-distance-son-electromenager-1174815#:%7E:text=Lanc%C3%A9e%20il%20y%20a%20seulement,avec%20l'aide%20de%20professionnels.&text=Les%20rouages%20des%20machines%20%C3%A0,plus%20de%20secrets%20pour%20elles.">Pivr</a> met en relation ses clients avec des réparateurs professionnels. Si une pièce détachée est nécessaire, une seconde visioconférence est programmée à la réception de la pièce détachée pour diriger le consommateur sur le changement de la pièce. La start-up <a href="https://www.lesechos.fr/start-up/deals/spareka-mise-sur-le-filon-de-lautoreparation-1912260">Spareka</a> propose, quant à elle, un chatbot, des tutoriels vidéo pour faciliter les diagnostics et l’autoréparation ainsi qu’un accès à 8 millions de pièces détachées pour réparer ses appareils.</p>
<p>D’autres initiatives visaient à créer du lien tout en donnant une seconde vie à un objet. C’est par exemple l’objectif du mouvement <a href="https://www.repaircafe.org/fr/">Repair Café</a>, un concept instauré en 2009 aux Pays-Bas par la journaliste et militante écologiste Martine Postma et largement déployé depuis. </p>
<p>D’après une étude récente publiée dans le <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/jiec.13451">Journal of Industrial Ecology</a> analysant les pratiques de réparation de 922 personnes ayant déjà fréquenté des Repair Cafés, l’acte de réparation est motivé par plusieurs raisons. Leur décision est influencée non seulement par leur évaluation personnelle de ce que signifie réparer – par exemple, la satisfaction de prolonger la vie d’un produit ou la fierté de contribuer à la réduction des déchets – mais aussi par la dimension sociale liée à l’acte de réparation. Ces aspects sociaux comprennent l’interaction avec d’autres personnes partageant les mêmes idées, l’apprentissage auprès d’experts en réparation et le sentiment d’appartenance à une communauté qui valorise des actions pro-environnementales. Par ailleurs, les interrogés expliquent également qu’ils se rendent dans des Repair Cafés pour des raisons de facilité et de commodité de la réparation de produits (accès aux outils, aux pièces détachées et aux connaissances requises).</p>
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<figcaption><span class="caption">Vidéo du Parlement Européen faisant la promotion de la réparation des objets, en mettant notamment à l’honneur un Repair Café d’Amsterdam.</span></figcaption>
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<h2>Réparer ou racheter : un bilan contrasté en France</h2>
<p>En France, cette directive Right to Repair vient s’ajouter au <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/bonus-reparation">Bonus réparation</a> proposé par le Gouvernement pour allonger la durée de vie des équipements. Les consommateurs peuvent bénéficier d’une réduction sur leur facture de réparation (en moyenne 17 % du coût total pour une aide allant de 15 à 60 €), à condition de se rendre chez <a href="https://annuaire-qualirepar.ecosystem.eco/">l’un des 4 700 réparateurs agréés QualiRépar</a>.</p>
<p>Un an après son lancement, le bilan reste mitigé : le bonus n’a été mobilisé que pour 0,2 % des pannes et 1,7 % des réparations hors garantie en 2023. C’est ce que révèle <a href="https://www.halteobsolescence.org/wp-content/uploads/2024/01/Rapport-HOP-Bonus-reparation.pdf">l’étude menée par l’association Halte à l’obsolescence programmée (HOP)</a>, qui met en évidence d’autres manquements tels que le faible nombre de réparateurs (74 % des réparateurs non labellisés considèrent le coût de labellisation trop élevé, et 52 % d’entre eux trouvent le délai de remboursement trop long), la complexité des procédures, une communication trop discrète, et des montants de prise en charge insuffisants.</p>
<p>Le succès de la directive européenne <em>Right to Repair</em> dépendra dès lors de sa mise en œuvre effective et de l’engagement des parties prenantes à tous les niveaux. Les fabricants devront s’adapter à ces nouvelles exigences qui seront définies par le futur <a href="https://eeb.org/ecodesign-eu-one-step-closer-to-making-sustainable-products-the-norm/">règlement sur l’éco-conception</a> (Ecodesign for Sustainable Products Regulation – ESPR) en cours de négociation, tandis que les consommateurs devront être sensibilisés à l’importance de la réparation et du recyclage. Un modèle économique viable de la réparation est également crucial pour rendre celle-ci attractive auprès des acteurs du secteurs comme des consommateurs.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/225587/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le Parlement Européen tâche de se doter d'une politiques ambitieuses en matière de réparation des objets. Mais pour que celle-ci se généralise, il faut encore que cette action soit économiquement viable.Sebastien Bourdin, Professeur de Géographie économique, Titulaire de la Chaire d'excellence européenne "Economie Circulaire et Territoires", EM NormandieNicolas Jacquet, Assistant de Recherche ∙ Chaire d'excellence européenne « Économie circulaire et Territoires », EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2157732023-10-19T10:16:28Z2023-10-19T10:16:28ZLes panneaux solaires, fer de lance de la transition ou casse-tête pour le recyclage ? Le vrai du faux<p>Le panneau solaire, moins vertueux que le bidon d’essence pour l’environnement et la santé humaine ? Les panneaux photovoltaïques, souvent considérés comme une solution propre et durable pour la production d’énergie, sont entourés de <a href="https://npr.org/2023/02/18/1154867064/solar-power-misinformation-activists-rural-america">légendes urbaines</a>, selon lesquelles ils généreraient de larges quantités de déchets toxiques difficiles à recycler. Ces fausses informations ont la fâcheuse tendance à semer la confusion chez le public, en créant des doutes sur la <a href="https://theconversation.com/energies-renouvelables-leolien-le-solaire-et-le-bois-sont-les-plus-competitifs-70226">viabilité des énergies renouvelables</a>.</p>
<p>Pour autant, les panneaux solaires ne sont pas entièrement exempts d’impacts environnementaux. Alors, sont-ils vraiment supérieurs à ceux des sources d’énergie fossile ? Pour le savoir, plusieurs chercheurs américains se sont penchés, dans un commentaire publié par la revue <a href="https://www.nature.com/articles/s41567-023-02230-0"><em>Nature Physics</em></a> sur quelques uns des mythes tenaces qui entourent les panneaux solaires. Par exemple, le coût environnemental de leur production, le déluge supposé de déchets électroniques ou encore la toxicité des matériaux pour la santé humaine et environnementale.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<h2>Les vrais chiffres des déchets du photovoltaïque</h2>
<p>Combien de déchets la filière du photovoltaïque génère-t-elle ? En 2016, l’IRENA, l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (<em>International Renewable Energy Agency</em>), publiait un <a href="https://www.irena.org/publications/2016/Jun/End-of-life-management-Solar-Photovoltaic-Panels">rapport très commenté</a>, qui attirait l’attention sur le problème que peuvent poser les déchets photovoltaïques. Le rapport estime que le monde pourrait accumuler de 54 (scénario bas) à 160 millions de tonnes (scénario haut) de déchets provenant de panneaux solaires d’ici 2050.</p>
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<p>Est-ce beaucoup ? Pour le savoir, on peut comparer à quelques autres chiffres de l’industrie des déchets. A titre de comparaison, plus de <a href="https://www.oecd.org/environment/plastics/">12 000 millions de tonnes de déchets plastiques</a> auront été produits d'ici 2050, pour <a href="https://www.itu.int/en/ITU-D/Environment/Documents/Toolbox/GEM_2020_def.pdf">plus de 1800 millions de tonnes de déchets électroniques</a>. L’industrie fossile, elle, aura produit d'ici 2050 <a href="https://info.ornl.gov/sites/publications/files/Pub60563.pdf">plus de 45 000 millions de tonnes de cendres de charbon et 249 millions de tonnes de boues huileuses</a> – sans même parler des émissions de gaz à effet de serre. Comprendre : même dans l’hypothèse la plus pessimiste, les déchets issus de panneaux solaires ne représentent qu'une fraction du poids de ceux issus de l’industrie fossile.</p>
<p><iframe id="jC1BX" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/jC1BX/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<h2>Des panneaux solaires plus efficaces… et plus verts</h2>
<p>La fabrication des panneaux solaires consomme des ressources, telles que le silicium, l’argent, l’aluminium, ou encore tellure de cadmium. Elle nécessite aussi de l’énergie, en particulier si les matériaux sont fabriqués à l’étranger et doivent être expédiés sur de longues distances. Certains fabricants de panneaux solaires <a href="https://www.leparisien.fr/economie/le-leader-du-photovoltaique-delocalise-en-pologne-07-02-2011-1303715.php">délocalisent leur production</a> à l’étranger. Or, certains pays producteurs appliquent des normes environnementales moins strictes. L’empreinte carbone de l’aluminium, du lithium ou du silicium produit en Europe est ainsi largement inférieure à la moyenne mondiale, selon une <a href="https://eurometaux.eu/media/jmxf2qm0/metals-for-clean-energy.pdf">étude menée en 2022 par KU Leuven</a>.</p>
<p>Des avancées technologiques significatives ont été réalisées pour augmenter l’efficacité des panneaux solaires au cours des dernières années. Celles-ci permettent de produire plus d’énergie avec moins de matériaux, ce qui réduit le coût par watt installé et le poids des panneaux solaires. Elles permettent aussi de limiter la dépendance à certains matériaux critiques, comme le silicium, le cuivre ou l’argent.</p>
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<li><p>Les panneaux solaires traditionnels, basés sur des cellules solaires en silicium monocristallin ou polycristallin, exigeaient une quantité substantielle de silicium pur. Cependant, de nouvelles technologies ont émergé, comme les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S136403211631070X">cellules solaires à couche mince</a> (amorphes, en couches minces de cuivre, d’indium, de gallium et de sélénium – CIGS), qui nécessitent beaucoup moins de matériaux rares.</p></li>
<li><p>Des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S014098831500167X">procédés de fabrication plus efficaces</a> ont permis de réduire le besoin d’intrants tels que le cuivre, l’argent, le silicium, etc. En parallèle, la miniaturisation des composants électriques et électroniques des panneaux solaires contribue aussi à réduire la quantité de cuivre et d’autres métaux utilisés dans les câblages et les connexions.</p></li>
<li><p>De nouvelles technologies telles que les cellules solaires à <a href="https://theconversation.com/perovskite-new-type-of-solar-technology-paves-the-way-for-abundant-cheap-and-printable-cells-202579">pérovskite</a> promettent <a href="https://pubs.acs.org/doi/abs/10.1021/acs.chemrev.0c00107">d’augmenter considérablement les rendements</a>.</p></li>
<li><p>De nouveaux matériaux, comme des polymères conducteurs utilisés pour capter la lumière solaire dans les <a href="https://theconversation.com/us/topics/organic-solar-cells-13994">cellules solaires organiques</a>, limitent le besoin en métaux rares.</p></li>
<li><p>Les avancées en matière de conception de panneaux, de revêtements anti-reflets et de structures de cellules ont <a href="https://core.ac.uk/download/pdf/236010391.pdf">contribué à cette amélioration</a>.</p></li>
<li><p>Enfin, les suiveurs photovoltaïques, ou « trackers solaires » ont également permis d’améliorer l’efficacité des appareils. Il s’agit de dispositifs mécaniques qui ajustent constamment l’angle et la direction des panneaux solaires pour suivre la trajectoire du soleil tout au long de la journée. De quoi capturer la lumière solaire de manière optimale tout au long de la journée, et générer jusqu'à <a href="https://pubs.acs.org/doi/full/10.1021/acsenergylett.2c00442">55 % plus d’électricité qu’un panneau solaire fixe</a>.</p></li>
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<figcaption><span class="caption">Exemple d’installation munie d’un tracker solaire.</span></figcaption>
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<h2>L’enjeu du recyclage</h2>
<p>Le recyclage en fin de vie joue bien entendu un rôle important pour limiter l’empreinte environnementale des panneaux solaires. Car les métaux qu’ils contiennent peuvent être récupérés grâce au recyclage, réduisant ainsi la nécessité d’extraire de nouvelles ressources. Les panneaux solaires photovoltaïques d’aujourd’hui sont conçus pour avoir une durée de vie moyenne d’environ 25 à 30 ans, cependant l’industrie se dirige à terme vers une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0038092X12002642">espérance de vie allant jusqu’à 50 ans</a>. Allonger cette durée de vie permet ainsi de limiter la quantité de déchets produits chaque année.</p>
<p>En ce qui concerne la France seule, les besoins en recyclage sont estimés à <a href="https://www.pv-magazine.fr/2022/02/14/acteur-de-la-semaine-rosi-solar-lance-lindustrialisation-de-sa-technologie-de-recyclage">150 000 tonnes d’ici 2030 par Soren</a>, l’éco-organisme chargé du <a href="https://theconversation.com/comment-recycle-t-on-les-panneaux-solaires-174715">recyclage des panneaux solaires en France</a>. Contrairement à une idée reçue, on peut recycler un panneau à près de 99 %. On ne pousse cependant pas toujours le recyclage au maximum, parce que cela reviendrait trop cher. De ce fait, le « point mort » économique – ou seuil de rentabilité – se situe aujourd’hui aux environs de 95 % de matériaux recyclés.</p>
<h2>La toxicité en question</h2>
<p>Parmi les arguments invoqués contre le solaire, on retrouve l’idée selon laquelle certains matériaux utilisés dans les modules photovoltaïques s’accumuleraient dans l’environnement puis causeraient des dommages à la santé humaine. Le cadmium, en particulier, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2214785320354699">utilisé pour certaines technologies solaires</a>, est considéré comme un <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/VSR2015SA0140Ra-1.pdf">cancérogène certain pour l’homme par le Centre international de recherche sur le cancer</a> (CIRC). Les cancers associés sont ceux des voies respiratoires, notamment du poumon. Le cadmium est également suspecté d’être cancérogène pour le cancer de la prostate et le cancer du rein.</p>
<p>Cela dit, la toxicité des matériaux est une chose, le risque d’exposition en est une autre. Quels sont les risques d’exposition pour ces produits, par rapport aux appareils électroniques du quotidien ? Selon un article publié dans la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1364032114007734"><em>Renewable and Sustainable Energy Review</em></a>, les risques concrets pour la santé humaine suite à la pollution des panneaux solaires dans l’environnement – par exemple suite à des fuites en cas de pluie – restent négligeables. Selon une <a href="https://ieeexplore.ieee.org/abstract/document/1305373">autre étude</a>, il existe un risque pour la santé humaine lorsque l’arsenic et le béryllium sont aéroportés. Toutefois, les méthodes de production modernes <a href="https://ieeexplore.ieee.org/abstract/document/1305373">ont éliminé ce risque</a>.</p>
<p>Par ailleurs, la grande majorité des modules photovoltaïques sont fabriqués à base de silicium cristallin, qui ne pose aucun risque sanitaire pour l’utilisateur final. Par ailleurs, les risques liés au process de fabrication ont été <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1876610213000830">largement réduits au cours des dernières années</a>. Ce type de technologie est de loin le plus fréquent, avec <a href="https://www.pv-magazine.fr/2023/08/31/les-grandes-orientations-de-linnovation-pour-les-technologies-photovoltaiques/">95 % de part de marché mondial en 2022</a>.</p>
<h2>Et s’il fallait rejouer le match solaire vs. fossile</h2>
<p>Revenons-en à notre comparaison entre les déchets du photovolaïque et ceux de l’industrie fossile. Sur le plan de la toxicité, les cendres de charbon sont bien plus problématiques. Elles sont considérées comme hautement toxiques et carcinogènes pour l’homme, car elles contiennent une variété de métaux lourds, tels que le plomb, le cadmium, l’arsenic, le chrome, le nickel, et d’autres. Ces métaux lourds sont toxiques pour les cellules humaines, <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30228133/">dont ils perturbent le fonctionnement</a>.</p>
<p>Lorsqu’elles sont libérées dans l’atmosphère, elles se transforment aussi en <a href="https://theconversation.com/pollution-de-lair-toutes-les-particules-fines-nont-pas-les-memes-effets-sur-la-sante-161261">particules fines</a> qui peuvent être inhalées profondément dans les poumons. Ces particules fines sont associées à des problèmes respiratoires graves et sont également liées à un risque accru de cancer du poumon.</p>
<p>Tout au long de leur cycle de vie, les modules photovoltaïques polluent donc beaucoup moins que le pétrole ou le charbon. Leur adoption à large échelle pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et lutter contre le changement climatique <a href="https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg3/figures/summary-for-policymakers/figure-spm-7/">s’impose sur le plan économique</a>, comme sur le plan de la santé humaine.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/215773/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Serge Besanger est co-fondateur et ex-président du CERES, puis PVCycleFrance devenu Soren.</span></em></p>Les panneaux solaires sont indispensables à la transition énergétique. Et pourtant, selon certains, leur recyclage relâcherait des polluants nocifs dans l’environnement… Qu’en est-il vraiment ?Serge Besanger, Professeur à l’ESCE International Business School, INSEEC U Research Center, ESCE International Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2143982023-09-28T06:34:58Z2023-09-28T06:34:58ZLes « mines urbaines », ou les ressources minières insoupçonnées de nos déchets électroniques<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/550658/original/file-20230927-21-ul4bm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Tas de téléphones et de smartphones usagés</span> <span class="attribution"><span class="source">Hellebardius</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Et si, plutôt que de développer de nouvelles infrastructures minières, on valorisait les gisements de métaux contenus dans les objets électroniques que nous n’utilisons plus (ordinateurs, smartphones, etc.) ? Il existe de très bonnes raisons de s’intéresser au potentiel de ces <a href="https://theconversation.com/recycler-100-des-metaux-un-objectif-atteignable-192573">« mines urbaines »</a>, ou mines secondaires, par opposition aux mines « primaires » où l’on exploite directement les ressources du sol.</p>
<p>Celles-ci permettraient même de faire d’une pierre trois coups, en réduisant la quantité de <a href="https://theconversation.com/le-volume-de-dechets-electroniques-explose-et-leur-taux-de-recyclage-reste-ridicule-143701">déchets électroniques</a>, en réduisant l’empreinte énergétique et les dégradations environnementales causées par l’industrie minière, et en préservant des ressources critiques stratégiques pour le continent européen. Mais aujourd’hui, ce potentiel reste encore largement sous-exploité.</p>
<hr>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/505718/original/file-20230122-28471-kntkja.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<h2>Un enjeu stratégique pour l’Union européenne</h2>
<p>Valoriser les déchets électroniques est intéressant car cela permet de réduire, mécaniquement, leur quantité. Ils constituent aujourd’hui l’un des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0959652619325077">flux de déchets à la croissance la plus rapide</a>, dégradent les écosystèmes et représentent un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0048969720332654">enjeu majeur de santé publique</a>.</p>
<p>L’exploitation de ces ressources secondaires permet aussi de diminuer la pression sur les ressources primaires du fait de l’exploitation minière – et donc de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0959652619325077">réduire son impact environnemental élevé</a>. En effet, le recyclage de certains métaux est moins énergivore que leur extraction minière. C’est le cas de l’aluminium : sa production par recyclage nécessite <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11837-021-04802-y">dix à quinze fois moins d’énergie</a> que sa production primaire.</p>
<p>D’autant plus que plusieurs des métaux valorisés font partie de ressources critiques au niveau de l’Union européenne. Elles sont essentielles à l’industrie, en particulier dans un contexte de transition énergétique, et présentent un fort risque de tensions d’approvisionnement. À ce titre, l’Union européenne publie et met à jour régulièrement depuis 2011 la liste des métaux critiques qui devraient constituer des priorités de valorisation pour les mines urbaines.</p>
<p>La <a href="https://single-market-economy.ec.europa.eu/sectors/raw-materials/areas-specific-interest/critical-raw-materials_en">cinquième liste, publiée en 2023</a>, identifiait 34 métaux critiques, dont les terres rares, le lithium, le cuivre ou le nickel. Malheureusement, on ne peut que constater le fossé entre les recommandations de l’Union européenne et les pratiques de valorisation des mines urbaines.</p>
<h2>Un cycle de vie truffé d’obstacles au recyclage</h2>
<p>En cause, des obstacles techniques, organisationnels, réglementaires et économiques à chaque étape du cycle de vie d’un objet, qui limitent son potentiel de valorisation. Dès la conception des objets, on peut identifier certaines pratiques qui limitent la recyclabilité des métaux, comme le recours aux alliages, ou encore l’hybridation des matières, notamment utilisée pour l’emballage de liquides alimentaires. La plupart des briques de ce type sont ainsi constituées de carton et de PolyAl, un mélange de polyéthylène (un type de plastique) et d’aluminium.</p>
<p>Or, pendant longtemps, on a récupéré et recyclé le carton des briques alimentaires, mais pas le PolyAl, produisant ainsi une situation de recyclage incomplet. Dans ce cas précis, les entreprises Tetra Pak et Recon Polymers ont fini par mettre au point un procédé de séparation, et ouvrir une <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/un-nouveau-debouche-pour-le-polyal.N1217752">usine de recyclage spécifique pour le PolyAl en 2021</a>. Mais un grand nombre d’autres produits continuent à être difficiles à recycler, précisément parce que cet aspect n’a pas été pris en compte au moment de leur conception.</p>
<p>Les <a href="https://www.cairn-sciences.info/quel-futur-pour-les-metaux--9782759809011-page-287.htm">usages dispersifs</a>, qui consistent à utiliser de petites quantités de métaux dans des produits pour en modifier les propriétés, sont une autre pratique qui pose problème pour le recyclage : des nanoparticules d’argent sont par exemple intégrées dans les chaussettes pour empêcher les mauvaises odeurs. Ou encore, quelques grammes de dysprosium, une terre rare, sont parfois utilisés pour booster les capacités magnétiques des aimants. Autant d’usages des métaux qui confisquent à jamais leur circularité.</p>
<h2>Hibernation électronique dans les greniers</h2>
<p>Une fois l’objet conçu et utilisé, le deuxième frein vient du consommateur, qui a tendance à stocker ses objets électroniques, qu’ils fonctionnent ou non, plutôt qu’à les déposer dans une filière spécifique pour qu’ils soient recyclés. Le phénomène est tel qu’on parle d’<a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0956053X16307607?via%3Dihub">hibernation électronique</a>. En 2009 déjà, une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0301479709001637">étude pionnière</a> estimait qu’en moyenne, les foyers américains abritaient 6,5 objets électroniques en hibernation dans leur grenier, et ce chiffre n’a fait qu’augmenter de façon exponentielle au fil des années.</p>
<p>En 2021, une <a href="https://www.gstatic.com/gumdrop/sustainability/electronics-hibernation.pdf">étude menée par Google</a> identifiait sept obstacles principaux au recyclage des appareils électroniques par les consommateurs : le manque de sensibilisation aux options de recyclage existantes, les attentes d’une compensation financière ou sociale, la nostalgie, la volonté d’avoir un terminal de rechange en réserve, la volonté de récupérer des données sur le terminal, ou encore de supprimer des données, et enfin le manque de praticité des filières de réemploi ou de recyclage.</p>
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<img alt="Principaux obstacles au recyclage des déchets électroniques pour les consommateurs" src="https://images.theconversation.com/files/550692/original/file-20230927-19-dqt564.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/550692/original/file-20230927-19-dqt564.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=509&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/550692/original/file-20230927-19-dqt564.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=509&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/550692/original/file-20230927-19-dqt564.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=509&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/550692/original/file-20230927-19-dqt564.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=640&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/550692/original/file-20230927-19-dqt564.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=640&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/550692/original/file-20230927-19-dqt564.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=640&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Principaux obstacles au recyclage des déchets électroniques pour les consommateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Google</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Une étude plus récente <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0921800922003962">menée en Suisse</a> nuance cependant ces résultats : 40 % des répondants affirmaient être prêts à se séparer de leur vieux téléphone portable pour une compensation inférieure à cinq dollars. Il serait toutefois intéressant de mener la même enquête dans des pays moins riches que la Suisse…</p>
<p>Le troisième point de blocage, enfin, concerne les systèmes de collecte et les infrastructures de recyclage. En France, pour la plupart des filières de déchets spécifiques (déchets électroniques, emballages, pneus, etc.), tout est centralisé par des éco-organismes, des organismes privés qui peuvent avoir une responsabilité organisationnelle – ils organisent concrètement les opérations de recyclage – ou financière, auquel cas ils s’occupent uniquement de la gestion financière de la filière. Ces éco-organismes sont régulièrement au cœur de controverses : des analyses indiquent que la <a href="https://www.cairn.info/revue-mouvements-2016-3-page-82.htm">valorisation matière des flux de déchets gérés par les éco-organismes est souvent sous-optimale</a>, notamment à cause de leurs objectifs de rentabilité.</p>
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<img alt="Les principaux freins à l’exploitation des mines urbaines" src="https://images.theconversation.com/files/550697/original/file-20230927-17-m51mz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/550697/original/file-20230927-17-m51mz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/550697/original/file-20230927-17-m51mz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/550697/original/file-20230927-17-m51mz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/550697/original/file-20230927-17-m51mz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/550697/original/file-20230927-17-m51mz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/550697/original/file-20230927-17-m51mz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les principaux freins à l’exploitation des mines urbaines.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<h2>Impliquer ingénieurs, designers, politiques et consommateurs</h2>
<p>Pour accompagner les entreprises dans une démarche d’écoconception, il existe pourtant plusieurs initiatives, dont la <a href="https://upcyclea.com/en/cradle-to-cradle/">démarche Cradle to Cradle</a>, « du berceau au berceau », qui invite à considérer l’ensemble du cycle de vie des objets conçus, afin notamment de permettre leur recyclabilité.</p>
<p>Cependant, si on adopte une focale plus large, on ne peut ramener l’engagement des industriels en faveur du recyclage à une rationalité économique étroitement conçue. Cet engagement dépend de facteurs organisationnels, sociaux, voire anthropologiques qui, s’ils ne sont pas antinomiques avec la rationalité économique, <a href="https://www.cairn.info/revue-flux-2017-2-page-51.htm">appellent à penser le problème du non-recyclage de façon plus large</a>.</p>
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<p>Il existe des leviers pour développer l’exploitation des mines urbaines avec, à la clé, des avantages économiques, environnementaux et géopolitiques.</p>
<ul>
<li><p>Du côté des ingénieurs et des concepteurs de produits, cela passe par un design plus responsable, en prenant en compte l’entièreté du cycle de vie des produits au moment même de leur conception.</p></li>
<li><p>Du côté des consommateurs, cela implique une plus grande sensibilisation à la pratique du tri des flux de déchets spécifiques, notamment électroniques.</p></li>
<li><p>Les entreprises, pour leur part, doivent raisonner sur un temps plus long et pas seulement en fonction de la rentabilité à court terme, dans un contexte de volatilité du cours des métaux.</p></li>
<li><p>Les États, enfin, gagneraient à mettre en place des réglementations adaptées à la complexité du secteur, n’excluant pas des objectifs ambitieux de taux de recyclage spécifiques par type de métal, ainsi qu’une forme de planification territoriale pour mieux coordonner les flux.</p></li>
</ul>
<h2>La difficulté à tendre vers l’économie circulaire</h2>
<p>Rappelons enfin que même dans le cas idéal d’une exploitation optimale du gisement que constituent les mines urbaines, avec des taux de recyclage élevés pour tous les métaux, nous serions toujours loin d’une situation d’économie circulaire. En effet, chaque année, la demande en métaux continue d’augmenter de manière très significative.</p>
<p>La recyclabilité et le recyclage effectif des métaux sont donc des conditions nécessaires, mais non suffisantes à la mise en place d’une économie véritablement circulaire. En effet, seule une décroissance des flux de matière et d’énergie dans l’industrie permettrait aux mines urbaines de se substituer en partie, et non de s’ajouter, à l’exploitation des gisements primaires.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214398/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Le contenu de cet article est issu en grande partie d'un travail de recherche post-doctorale effectué en 2013-2014 à l'ENS Lyon, et co-financé par le partenaire industriel Solvay.
Fanny Verrax est membre du parti politique Génération Ecologie. Elle ne reçoit aucun financement de ce parti.
</span></em></p>Et si, plutôt que de développer l’extraction minière, on valorisait davantage les métaux qu’abritent les objets électroniques que nous n’utilisons plus (ordinateurs, smartphones, etc.) ?Fanny Verrax, Professeur associé en transition écologique et entreprenariat social, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2001052023-02-21T17:46:05Z2023-02-21T17:46:05ZRéparabilité des produits : durabilité versus fiabilité, quels enjeux de communication ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/510540/original/file-20230216-22-u9lbjw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1200%2C716&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">À peine un appareil électronique en panne sur deux est aujourd’hui réparé en France.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/30478819@N08/43576848495">Marco Verch/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Chaque Français produit environ <a href="https://librairie.ademe.fr/cadic/5576/flux_de_dechets_en_un_coup_doeil_010694.pdf">5 tonnes de déchets par an</a>, notamment des produits tombés en panne que l’on jette afin de les remplacer. En 2020, <a href="https://longuevieauxobjets.gouv.fr/entreprise/appliquer-lindice-de-reparabilite-sur-vos-produits-et-tendre-vers-un-indice-de">seuls 40 % des appareils électriques et électroniques en panne étaient réparés</a>. Sèche-cheveux, smartphone, lave-vaisselle, machine à laver… La plupart de nos objets du quotidien sont concernés.</p>
<p>C’est en premier lieu pour des raisons environnementales que la réparabilité des produits devient un enjeu majeur. Un indice de réparabilité est d’ailleurs devenu <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/indice-reparabilite">obligatoire en France depuis 2021</a> pour certaines catégories de produits, afin d’informer le consommateur sur le caractère réparable ou non d’un produit au moment de son achat et ainsi allonger sa durée de vie.</p>
<p>Cependant, les marques ont-elles réellement intérêt à communiquer sur la réparabilité de leurs produits ? Les réactions des consommateurs restent incertaines et pourraient même être contradictoires. C’est ce que nous essayons de mieux cerner dans un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0148296322009225">article</a> récemment publié dans le Journal of Business Research.</p>
<h2>Fiable ou pas fiable, telle est la question</h2>
<p>Cette contradiction s’explique par les deux dimensions de la perception de qualité du produit : sa durabilité, c’est-à-dire la période de temps pendant laquelle le produit va remplir ses fonctions de manière performante, et sa fiabilité, c’est-à-dire sa probabilité de panne.</p>
<p>D’un côté, la réparabilité d’un produit peut être perçue de manière positive par le consommateur pour des raisons environnementales et économiques, car elle fait la promesse d’une plus grande durabilité.</p>
<p>D’un autre côté, la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/communication-21313">communication</a> sur la réparabilité peut porter préjudice au produit si elle accentue son risque de défaillance dans l’esprit du consommateur et lui fait évoquer sa nécessité de réparation. En raison de ce deuxième effet possible, les communications au sujet de la réparabilité du produit peuvent engendrer des effets moins positifs, voire négatifs.</p>
<p>Cela pourrait décourager les marques de communiquer sur la réparabilité. D’autant plus que proposer un produit réparable a un coût non négligeable, que ce soit pour la marque qui doit prendre en compte sa réparation dès sa conception, ou pour le consommateur qui devra payer les pièces de rechange et la main-d’œuvre pour le réparer.</p>
<h2>Une dimension responsable</h2>
<p>Pour mieux comprendre, nous avons, dans un premier temps, mené trois expérimentations sur 1 269 personnes en France, suivies d’une méta-analyse. Cette première phase quantitative montre que les marques qui communiquent au sujet de la réparabilité de leurs produits sont perçues plus positivement par les consommateurs. Cela s’explique, d’une part, par leur perception que le produit aura une durabilité accrue et, d’autre part, par leur perception que la marque se comporte de manière socialement responsable.</p>
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<p>Ces effets positifs sont surtout observables pour les marques que les consommateurs perçoivent comme moins fiables, que cela soit dû au produit en lui-même ou à une expérience antérieure que ces derniers ont eue avec ce type de produits. Point non négligeable, l’effet de la communication sur la réparabilité ne s’est jamais avéré négatif, comme certaines marques pouvaient le craindre.</p>
<p>Cette phase quantitative montre ainsi, empiriquement, que les marques peuvent communiquer sereinement sur la réparabilité de leurs produits, et, ce faisant, signaler que leurs produits sont durables et qu’elles mettent en place des mesures socialement responsables.</p>
<h2>Des motivations stratégiques ou altruistes ?</h2>
<p>Pour mieux comprendre les perceptions du consommateur et identifier d’autres facteurs pouvant influencer l’efficacité de la communication sur la réparabilité, nous avons ensuite mené une analyse qualitative des commentaires postés sur les réseaux sociaux.</p>
<p>Si la deuxième partie de l’étude confirme que la communication sur la réparabilité est globalement perçue positivement, elle met également en évidence l’importance de considérer d’autres éléments, tels que le scepticisme des consommateurs sur les vraies motivations des marques quand il s’agit de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/responsabilite-societale-des-entreprises-rse-21111">responsabilité sociétale des entreprises (RSE)</a>. Leurs arguments peuvent en effet soit être interprétés comme altruistes et authentiques, soit au contraire comme stratégiques, teintés d’ultra-consommation, d’obsolescence programmée et de profit, comme ces deux commentaires postés sur les réseaux sociaux en attestent :</p>
<blockquote>
<p>« Attendre des industriels qui nous vendent de l’obsolescence programmée de fabriquer du réparable, il n’y a que moi qui m’interroge ? »</p>
<p>« Quelles raisons aurait un constructeur d’adopter ça ? La bienveillance ? La philanthropie ? Si ça marchait comme ça, ça se saurait… Je ne veux pas être défaitiste mais s’il n’y a pas de projet de loi, rien n’obligera les constructeurs à faire ça. Sans compter l’aspect économique. Ils seraient capables de multiplier les prix par deux ou trois ? »</p>
</blockquote>
<p>Selon que le consommateur attribue le premier ou second type de motivations, l’effet de la communication sur la réparabilité aura alors un effet plus ou moins positif.</p>
<p>Au bilan, cette étude montre clairement que la communication sur la réparabilité des produits reste bénéfique pour les marques, et que l’argument de la durabilité l’emporte sur les craintes quant à la fiabilité. Les entreprises ont donc intérêt à sauter le pas, tout en veillant à la crédibilité de leur communication matière de RSE. Espérons que ces recherches pourront les aider à franchir ce cap, espérons aussi que les consommateurs feront le choix de faire réparer leurs produits plutôt que de les jeter.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/200105/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les marques ont-elles intérêt réellement à proposer des produits aisément réparables et communiquer à ce sujet ? Le consommateur risque en effet de l’interpréter comme un manque de fiabilité.Joëlle Vanhamme, Professeur de marketing, EDHEC Business SchoolPauline Munten, Researcher and Teaching Assistant in Marketing, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1947012023-01-04T19:57:45Z2023-01-04T19:57:45ZIndice de réparabilité : deux ans après sa mise en place, un premier bilan critique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/496454/original/file-20221121-22-ffo75k.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=30%2C23%2C1362%2C889&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/PZLgTUAhxMM">K I L I A N / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Un <a href="https://www.europarl.europa.eu/news/fr/press-room/20210204IPR97114/des-regles-renforcees-en-matiere-de-consommation-et-de-recyclage">plan d’action pour l’économie circulaire</a> a été voté par le Parlement européen en février 2021 dans le but d’atteindre une économie neutre en carbone, durable, non toxique et entièrement circulaire d’ici à 2050. Une des priorités de ce plan – qui s’inscrit dans une stratégie initiée par de nombreuses directives et décrets du Parlement européen, notamment la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/%3Furi%3DCELEX:32012L0019&ust=1669107300000000&usg=AOvVaw22ifSKs4_FB8TF9JsfeUSd&hl=fr&source=gmail">directive 2012/19/UE</a> – est de réduire les déchets d’équipements électroniques et électriques.</p>
<p>D’après le rapport <a href="https://www.itu.int/en/ITU-D/Environment/Pages/Spotlight/Global-Ewaste-Monitor-2020.aspx">« The Global E-waste Monitor 2020 »</a>, la quantité de déchets liée aux équipements électriques et électroniques (EEE) a bondi de 44,4 Mt en 2014 à 53,6 Mt en 2019 (soit 7,3 kg par habitant) et devrait atteindre 74,7 Mt d’ici à 2030. Soit une hausse de 21 % en 5 ans et de presque 70 % en 15 ans. Parmi les causes avancées de cette augmentation, la consommation grandissante d’EEE, leur court temps de vie et le manque de solutions pour les réparer.</p>
<h2>L’indice de réparabilité, c’est quoi et pourquoi ?</h2>
<p>L’initiative française d’indice de réparabilité <a href="https://theconversation.com/dans-la-fabrique-de-lindice-de-reparabilite-en-vigueur-depuis-janvier-2021-155536">déployé le 1ᵉʳ janvier 2021</a> entend répondre à ces défis en sensibilisant les consommateurs à la réparation et en incitant les fabricants à l’écoconception.</p>
<p>Affiché sur les produits, l’indice prend la forme d’une note sur 10 et d’un pictogramme coloré dépendant du score obtenu – rouge pour les équipements ayant une note inférieure ou égale à 1,9 ; orange, jaune, vert clair et vert foncé, jusque 3,9, 5,9, 7,9 et 10, respectivement.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/496452/original/file-20221121-17-6fieh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/496452/original/file-20221121-17-6fieh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/496452/original/file-20221121-17-6fieh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=145&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/496452/original/file-20221121-17-6fieh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=145&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/496452/original/file-20221121-17-6fieh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=145&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/496452/original/file-20221121-17-6fieh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=183&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/496452/original/file-20221121-17-6fieh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=183&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/496452/original/file-20221121-17-6fieh8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=183&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Illustration de l’indice de réparabilité.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Afin de calculer cet indice, cinq critères sont utilisés : la disponibilité de la documentation technique ; la démontabilité et accès, outils, fixations ; la disponibilité des pièces détachées ; le prix des pièces détachées ; et des critères spécifiques à la catégorie du produit.</p>
<h2>Le score de 700 équipements analysé</h2>
<p><a href="https://dial.uclouvain.be/memoire/ucl/object/thesis:35363">En mai 2022</a>, nous avons analysé les scores de plus de 700 équipements électroniques dans trois catégories de produits : les téléviseurs, les smartphones et les ordinateurs portables, qui sont les appareils électroniques avec le potentiel de réparabilité le plus important comparé, par exemple, aux lave-linge qui atteignent un bien meilleur taux de réparation – <a href="https://www.halteobsolescence.org/rapport-denquete-sur-lobsolescence-des-lave-linge-2/">bien qu’améliorable également</a>. Les données (prix de vente, marque, modèle, indice de réparabilité, score de chaque critère et sous-critère) ont été récoltées à partir du <a href="https://www.darty.com/">site Internet de la société Darty</a>.</p>
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<p>Cette analyse nous a permis de constater que, malgré l’obligation depuis le 1<sup>er</sup> janvier 2021 de rendre disponible le score lors de la vente de l’équipement, certaines marques n’ont pas encore fourni celui de leurs produits, et que certains arborent un score unique pour toute la gamme de produits. La grille de calcul de score est ainsi remplie de façon globale sans inclure les spécificités de chaque bien, ce qui pose question compte tenu de la faible standardisation des pièces détachées.</p>
<p>La majorité des scores obtenus par les marques pour leurs différents produits sont en outre supérieurs à 5, ce qui montre un manque d’efficacité dans l’utilisation de l’échelle complète et de sanction en cas de mauvais score sur un ou plusieurs critères. L’utilisation d’une moyenne arithmétique pour calculer l’indice final conduit en effet à ce que de bons scores sur certains critères compensent les mauvais scores sur d’autres.</p>
<p>Les smartphones et ordinateurs portables obtiennent ainsi de bons indices de réparabilité malgré la faible disponibilité des pièces détachées, qui rend souvent leur réparation impossible.</p>
<h2>Encore des freins à lever</h2>
<p>À ce jour, la politique en matière de pièces détachées est un élément clé dans la réparation des appareils défectueux : les grandes disparités observées dans les scores finaux des appareils proviennent en premier lieu de la politique des marques en matière de pièces détachées.</p>
<p>Une documentation claire et accessible, indispensable aux réparateurs, est par ailleurs encore trop souvent difficile à obtenir auprès de certaines marques. La pédagogie dans le milieu de la réparation est majoritairement le fait des particuliers et du monde associatif.</p>
<p>Il est enfin essentiel que les fabricants réduisent au maximum l’usage de colle et soudure dans leurs produits, principaux freins à la démontabilité des objets. Plus généralement, la miniaturisation et la compacité du design de ces équipements complexifient le processus de réparation.</p>
<p>D’après un rapport de l’association <a href="https://www.halteobsolescence.org/wp-content/uploads/2022/02/Rapport-indice-de-reparabilite.pdf">Halte à l’obsolescence programmée</a>, d’autres obstacles ne sont pas pris en compte dans l’indice, tels que la sérialisation et la compatibilité des pièces détachées. Les réparateurs indépendants ont par exemple constaté une hausse des pièces irremplaçables car associées à un appareil spécifique via leur numéro de série.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/496955/original/file-20221123-26-shdocn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/496955/original/file-20221123-26-shdocn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/496955/original/file-20221123-26-shdocn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/496955/original/file-20221123-26-shdocn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/496955/original/file-20221123-26-shdocn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=365&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/496955/original/file-20221123-26-shdocn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/496955/original/file-20221123-26-shdocn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/496955/original/file-20221123-26-shdocn.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=459&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Tableau récapitulatif des moyennes obtenues pour l’indice de réparabilité et ses critères.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un progrès réel… à affiner</h2>
<p>Soyons clairs, l’affichage de l’indice de réparabilité représente un réel progrès pour améliorer nos habitudes de consommation. Des améliorations sont néanmoins possibles en matière de calcul, de transparence, et de contrôle de l’indice, afin d’augmenter son impact.</p>
<p>Comme l’illustrent nos analyses, la grille actuelle ne permet pas d’identifier strictement les produits difficilement réparables, puisqu’un indice assez élevé peut être obtenu par un équipement électronique qui dispose d’une lacune forte en la matière.</p>
<p>D’autres méthodes de calcul pourraient être utilisées, comme une moyenne géométrique afin qu’une note proche de zéro sur un critère réduise considérablement le score final de l’indice. Cette solution aurait le mérite de pousser les fabricants à avoir des scores corrects sur tous les critères, et le score refléterait mieux la réparabilité « réelle » de l’équipement.</p>
<h2>Une meilleure transparence des fabricants</h2>
<p>Un second élément concerne la transparence du processus d’encodage des scores des différents critères. Les constructeurs adoptent des pratiques différentes, certains rapportant une même note pour une gamme de produits, alors que d’autres fixent une note spécifique par produit.</p>
<p>Il semble donc nécessaire que les fabricants fournissent en toute transparence la grille de calcul complète et détaillée ainsi que les engagements sur lesquels ils ont fondé leurs calculs – en particulier les périodes de disponibilité de leurs pièces et leurs conditions d’accès. Cela les obligerait à remplir avec sérieux cette liste et permettrait aux autres acteurs (publics et privés) d’être critiques par rapport aux notes obtenues par les appareils.</p>
<p>Notons enfin qu’un véritable contrôle de l’indice de réparabilité par le marché est difficilement réalisable. Certaines informations sont peu accessibles ; les engagements sur la disponibilité des pièces de rechange dans le temps ne sont presque jamais spécifiés ; les catalogues de pièces détachées sont rarement disponibles.</p>
<p>Et la vérification des déclarations des fabricants (par exemple concernant l’accès aux pièces détachées) requiert des interactions avec l’ensemble des acteurs concernés.</p>
<h2>Impliquer fabricants, consommateurs et acheteurs</h2>
<p>L’indice de réparabilité implique en effet une pluralité d’acteurs : il guide à la fois les fabricants dans leurs choix de design, les réparateurs dans l’anticipation des étapes clés de leurs réparations et les acheteurs dans leur souhait d’adopter une consommation responsable et durable. Dans cette optique, la charge de construire l’indice ne peut incomber uniquement aux fabricants et doit donner lieu à des discussions avec les parties prenantes.</p>
<p>L’indice associé à un produit ne devrait en outre pas être une grandeur statique établie de manière définitive à la sortie d’usine – la 1<sup>re</sup> étape de son cycle de vie où, par ailleurs, sa réparabilité n’a pas été formellement testée par des consommateurs ou des réparateurs – mais une grandeur adaptative établie à différents stades.</p>
<p>Une telle définition responsabilisant les réparateurs et les consommateurs en plus des fabricants contribuerait à ce que l’indice de réparabilité ne soit plus perçu par ces derniers comme une contrainte, mais bien comme un outil alimentant une analyse réflexive sur la conception de leurs produits.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194701/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Roisin travail pour le département d’électricité (ELEN) de l’institut ICTEAM au sein de l’UCLouvain</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jean-Pierre Raskin est professeur à l’École Polytechnique de Louvain et directeur du groupe de recherche RF-SOI au sein de l’institut ICTEAM de l’UCLouvain, Belgique.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sébastien Toussaint travaille pour le département d’électricité (ELEN) de l’institut ICTEAM au sein de l’UCLouvain et est professeur invité à l’Université Saint-Louis au sein du programme BBeng.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Valérie Swaen est professeure au LRIM, UCLouvain (Belgique) et professeure à l’Ieseg School of Management (France)</span></em></p>Mis en place début 2021, ce dispositif essentiel comporte encore dans les faits de nombreuses lacunes.Nicolas Roisin, Ph.D. Student, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Jean-Pierre Raskin, Professeur en génie électrique, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Sébastien Toussaint, Research associate, Université catholique de Louvain (UCLouvain)Valerie Swaen, Professeure ordinaire, présidente du Louvain Research Institute in Management and Organizations (LouRIM), Université catholique de Louvain (UCLouvain)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1925732022-11-21T19:26:25Z2022-11-21T19:26:25ZRecycler 100 % des métaux, un objectif atteignable ?<p>Popularisé par l’engouement autour de l’économie circulaire, le recyclage a le vent en poupe. Charriant la promesse d’un modèle fonctionnant en vase clos et marquant son indépendance par rapport à des ressources minières au bilan écologique souvent dénoncé, le recyclage multiplie les avantages théoriques sur le papier.</p>
<p>Cet apport de métaux recyclés dits secondaires se substitue en effet à une partie des besoins auparavant assurés par les mines (métaux dits primaires), et permet donc d’éviter les déchets et contaminations associés à la mine tout en diminuant notre dépendance à l’importation de métaux depuis des pays potentiellement sensibles géopolitiquement.</p>
<p>D’un point de vue énergétique, une tonne d’acier, d’aluminium ou de cuivre recyclée est en outre moins énergivore que son équivalent primaire – avec des économies d’énergie <a href="https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8607">allant de 60 à 90 %</a>. Les volumes de métaux recyclés réintroduits dans la boucle, enfin, sont autant de matières qui n’iront pas finir dans les décharges avec le lot de pollutions et de coûts qu’elles auraient pu générer.</p>
<p>Pourtant, et sans même viser la circularité parfaite, l’essor du « tout » recyclage pour l’ensemble des métaux est loin d’être aussi simple et relève davantage d’une route semée d’embûches.</p>
<h2>Comment on mesure le recyclage</h2>
<p>Commençons par préciser ce que l’on entend derrière ce vaste concept de recyclage. Quatre différentes façons de l’évaluer permettent de l’appréhender : le taux de collecte, le taux d’efficacité du recyclage, le taux de recyclage en fin de vie des éléments et le taux d’incorporation de <a href="https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8702">matière recyclée dans les produits</a>.</p>
<p>Le taux de collecte représente les quantités de métaux effectivement collectées chaque année sur le flux total qui parvient en fin de vie tandis que le taux d’efficacité du recyclage mesure la quantité recyclée sur la quantité qui est collectée. Le produit de ces deux derniers taux équivaut au taux de recyclage en fin de vie des éléments. Le taux d’incorporation, quant à lui, correspond à la part de matière recyclée dans le cycle de production.</p>
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<p>Chacun de ces indicateurs a son utilité. Pour minimiser la quantité de déchets à gérer dans les décharges, le taux de recyclage des éléments en fin de vie est plus pertinent, alors que pour réduire les ressources extraites à partir des mines (et l’énergie consommée associée), agir sur le taux d’incorporation de matière recyclée dans les produits aura plus d’incidence.</p>
<p>Si l’on exclut la possibilité d’une baisse de la production de produits (ou d’un découplage absolu), se rapprocher d’un taux d’incorporation de recyclé de 100 % nécessite un taux de recyclage des éléments en fin de vie de 100 %.</p>
<h2>Des produits complexes</h2>
<p>Jusqu’ici, les faits semblent contredire ce but. Une grande partie des métaux <a href="https://wedocs.unep.org/handle/20.500.11822/8702">ne sont pas ou peu recyclés</a>, c’est le cas de la plupart des métaux mineurs (parfois dits métaux rares, comme le lithium, le gallium ou l’indium). Et les métaux bien recyclés (acier, métaux de base et précieux) ont de leur côté atteint un plateau et ne progressent plus.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=728&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=728&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=728&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=915&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=915&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/491897/original/file-20221026-21-icnrl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=915&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution des différents taux de recyclage selon les métaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Données de Krausmann et coll. 2017</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il semblerait donc que le scénario du tout recyclé se heurte à la réalité de produits qui sont souvent : complexes (nombre de composants et d’éléments), variés et dont les concentrations en métaux – jouant à la fois sur les coûts et les recettes des recycleurs – ne sont pas toujours favorables à ces derniers par rapport à la mine classique.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/491898/original/file-20221026-21-w6q6fo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=434&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Rapport entre les concentrations dans les mines et dans les circuits imprimés d’ordinateurs (PCB) pour plusieurs métaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fizaine 2020</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>La diversité des produits et des composants complexifie le montage de lignes de recyclage adaptées et leur massification, d’autant plus que les courtes durées de vie technologique de certains produits peuvent rendre complètement caduc le modèle de recyclage auparavant pertinent.</p>
<p>Ainsi, le remplacement très rapide des lampes fluo compactes par leur équivalent en LED en quelques années a mis un terme aux expérimentations de recyclage des terres rares issues des premières, les flux traitables de déchets étant amenés à se tarir vite.</p>
<h2>Des conditions économiques parfois défavorables</h2>
<p>Pour continuer, le prix des métaux mais surtout sa volatilité associée n’est pas non plus toujours un terrain très favorable à la mise en place de chaînes de recyclage car celle-ci accentue l’incertitude sur le niveau des recettes. Quand bien même les prix des métaux atteindraient des niveaux élevés, différentes études passées ont démontré la faible réaction de l’offre secondaire des métaux <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0921344917300605?via%3Dihub">au prix de ces derniers</a>.</p>
<p>Du côté des coûts, l’extraction à partir de la « mine urbaine » n’est pas forcément un eldorado économique notamment lorsque l’on s’intéresse à la concentration des métaux mineurs. Pour ces derniers, les concentrations de la mine urbaine sont bien souvent très en deçà de celle de la mine classique. Associés à des prix moyens, ils ne représentent qu’une fraction mineure des recettes extractibles, il n’est donc pas surprenant que les métaux mineurs ne soient pas ciblés par les recycleurs.</p>
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<span class="caption">Proportion des différents métaux dans la valeur totale contenue dans les circuits imprimés d’ordinateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fizaine 2020</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=367&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/491901/original/file-20221026-4292-gkq5h3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=461&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Relation entre prix, dilution, valeur et métaux recyclés dans les circuits imprimés d’ordinateurs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fizaine 2020</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Ensuite <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/09593330.2016.1237552">d’autres études</a>) ont montré que la réduction en amont des quantités de métaux notamment précieux dans les produits électroniques (en particulier par la miniaturisation) a rendu beaucoup moins attractif le modèle du recyclage. Il y aurait alors, un arbitrage entre d’une part des produits complexes avec des concentrations faibles de métaux (donc économes en métaux) mais peu recyclables, et des produits plus simples mais plus gourmands en métaux et donc mieux recyclables. Le premier R de l’économie circulaire (c’est-à-dire diminuer) aurait ainsi tendance à chasser son dernier R (recycler).</p>
<p>Des effets similaires ont été observés pour les panneaux photovoltaïques dont les épaisseurs en baisse (et concentration) auraient des effets défavorables au recyclage des métaux contenus.</p>
<h2>Des contraintes multiples</h2>
<p>Enfin, il existe aussi d’autres obstacles, trop longs à développer ici, d’ordre technologiques, culturels et juridiques qui contraignent <a href="http://www.editionstechnip.com/fr/catalogue-detail/2166/les-metaux-rares-opportunite-ou-menace.html">l’atteinte du tout recyclé</a>.</p>
<p>Une mauvaise réaction face à ces constats consisterait à disqualifier l’intérêt du recyclage. Au contraire, le recyclage devra faire partie intégrante d’un modèle économique plus durable à la fois du point de vue des ressources et de l’environnement.</p>
<p>Comme le rappellent sans cesse les spécialistes des sciences de l’environnement, le recyclage n’est toutefois qu’une petite partie de la solution et sa maximisation est complexe, difficile et parfois incompatible avec d’autres leviers de l’économie circulaire. La recherche a donc encore du travail pour mieux comprendre comment dénouer ces contraintes et proposer de nouveaux modèles plus soutenables.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/192573/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Florian Fizaine ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La « mine urbaine » semble à première vue un eldorado afin de récupérer et réutiliser les métaux. Mais les obstacles à sa mise en œuvre demeurent nombreux.Florian Fizaine, Maître de conférences en sciences économiques, Université Savoie Mont BlancLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1718572022-01-31T19:07:33Z2022-01-31T19:07:33ZLes jeunes, plus réticents que leurs aînés à agir contre la pollution numérique ?<p>Imaginez que notre messagerie intègre un compteur calculant son impact écologique, ou un indicateur des ressources naturelles contenues dans notre téléphone ou notre portable. Comme l’agroalimentaire, qui complète le « nutri-score » par un « planet score » ou un « ecoscore », nous pourrions disposer d’indicateurs comparables pour mesurer notre pollution numérique.</p>
<p>Dans un monde où tout se quantifie, cette question apparaît essentielle pour que nous percevions davantage les conséquences de notre utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC), notamment leurs consommations énergétiques.</p>
<p>La dernière étude de l’Ademe <a href="https://librairie.ademe.fr/consommer-autrement/5226-evaluation-de-l-impact-environnemental-du-numerique-en-france-et-analyse-prospective.html">donne le numérique responsable de 10 % de la consommation électrique en France</a>. Les évolutions récentes dues au confinement, comme le télétravail, ne sont pas encore mesurées.</p>
<p>Ce sujet a été le thème d’un travail d’abord individuel puis collectif dans le cadre d’un cours d’initiation à la recherche en Bachelor à l’Essca lors du dernier trimestre 2021. À partir d’un entretien envoyé massivement, puis complété par d’autres semi-directifs : au total, 400 personnes réparties en trois tranches d’âges (génération Z, génération Y et Z et retraités) auront participé à notre étude. Penchons-nous sur les résultats.</p>
<h2>La « sobriété numérique », encore méconnue</h2>
<p>Commençons par le terme de « sobriété numérique », employé dans le premier questionnaire, qui à lui seul suscite des interrogations : le sujet de l’impact écologique du numérique semble largement méconnu, quel que soit l’âge concerné.</p>
<p>Nous avons donc commencé par des illustrations de cette pollution pour interpeller les répondants : combien avez-vous de téléphones et de chargeurs inutilisés ? Avez-vous une idée de l’impact écologique d’une visioconférence ? Nettoyez-vous votre messagerie régulièrement ? Cette courte énumération permet alors à l’interlocuteur de mieux cerner la notion et éventuellement de nous faire part de ses pratiques.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/6AVOrkbkO3Q?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Pollution : l’insoutenable croissance du numérique. (Alternatives économiques, 20 janvier 2020).</span></figcaption>
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<p>Il émerge trois profils-types parmi nos interrogés : la génération Z, les générations X et Y, et les retraités.</p>
<h2>Générations Z, X et Y : la pollution numérique secondaire</h2>
<p>Zoé et Léo sont encore étudiants, parfois aux portes du monde du travail, ou à peine entrés dedans. Bien sûr, ils sont conscients de l’importance de l’écologie et partagent les idées de Greta Thunberg. Ils ne comptent plus les téléphones, tablettes, chargeurs, câbles, enceintes et écouteurs connectés qui font partie de leur quotidien. L’écran est un élément essentiel et le temps passé à l’utiliser ne se mesure plus. Alors, quand il est question de changer les comportements et de restreindre l’usage du numérique, l’écologie devient secondaire. « Elle (la pollution) existait avant ». La réponse oscille entre « WTF » et « OK boomer ».</p>
<p>Favorable à l’économie circulaire, le portable reconditionné séduit peu : l’attrait de la nouveauté reste encore vif, les incertitudes de la vie antérieure sont un frein. La différence de prix ne semble pas être un critère décisif. Mais cela reste une bonne idée, « si les autres l’adoptent ». Surtout, le numérique véhicule une idée d’indépendance et d’autonomie qui s’assimile à une forme de liberté quasiment sacralisée : « C’est à moi ». Donc je consomme si je veux. À ce titre, la possibilité d’une taxe pour compenser l’externalité de la pollution numérique est largement rejetée.</p>
<p>Candice et Ruben sont de jeunes actifs. Entre (télé) travail et activités personnelles, les écrans sont bien présents, et leur nombre aussi. La sobriété numérique, ils connaissent car le terme a surgi dans le monde professionnel. Un téléphone reconditionné, pourquoi pas ? Mais finalement, vu l’écart de prix… Nettoyer sa boîte mail ? Quand j’ai le temps. D’ailleurs, combien en ai-je ? Le sujet de la pollution numérique et de la sobriété reste encore très théorique. Plutôt une idée intéressante qu’une pratique.</p>
<h2>Retraités, le numérique de récup’</h2>
<p>Monique et Roger quant à eux profitent de leur retraite. Les enfants et petits enfants donnent volontiers leurs anciens appareils aux aînés, qui donc n’en manquent pas. Ils font ainsi de la récupération… peut-être un peu forcée. D’ailleurs, pour eux, c’est vraiment en fin de vie qu’il faut songer à en changer. Pour eux, le numérique, c’est surtout le lien avec leurs proches. Alors, avec ce téléphone ou un autre ?</p>
<p>La sobriété numérique ne leur parle pas en tant que concept. En revanche, puisqu’ils ont le temps, ce sont eux qui nettoient le plus fréquemment leurs messageries – moins pleines que celles de leurs petits-enfants, moins nombreuses que celles de leurs enfants.</p>
<p>Finalement, comme Monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir, la sobriété numérique leur est familière dans la vie de tous les jours. Ils sont réceptifs à cette notion car ils veulent laisser un monde « pas trop pourri à leurs petits enfants ». De ce fait, le recyclage des vieux appareils leur apparaît naturel.</p>
<h2>Écarts entre la parole et le geste</h2>
<p>Au-delà du terme, il existe donc un besoin de pédagogie, de concret et d’exemples parlants. Une fois celle-ci appréhendée, les plus âgés interrogés se montrent réceptifs, conscients de l’importance du sujet, n’hésitant pas à l’approfondir et envisageant d’adapter leurs comportements au bénéfice des générations futures. La notion est encore méconnue, certes, mais elle est en bonne voie pour recevoir un accueil positif.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1234616967933448192"}"></div></p>
<p>À l’inverse, les plus jeunes se montrent plus réticents à faire œuvrer d’un effort laborieux. Il y a donc un paradoxe à explorer entre cette identification à des enjeux écologiques ambitieux et planétaires et des pratiques quotidiennes contraignantes. D’ailleurs, ceux qui marchent pour le climat sont-ils les mêmes que ceux qui rechignent changer leurs habitudes ? Ceci mérite assurément une étude afin de mieux comprendre cette situation.</p>
<p>Cette étude pose autant de questions qu’elle apporte de réponses. Elle souligne en tout cas que faute d’éducation et de pédagogie, notre consommation énergétique liée aux TIC risque fort de rester un sujet à moyen et long terme…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171857/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cet article a été rédigé par l’auteur et les étudiants en bachelor de l’Essca dans le cadre d’un cours d’initiation à la recherche.</span></em></p>Une étude réalisée par des étudiants révèle que les jeunes, plus sensibilisés à la pollution numérique que les plus âgés, semblent aussi moins enclins à agir pour la combattre.François Delorme, Maître de conférences en sciences de gestion, chercheur associé CERAG, membre du WIKISGK, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1749762022-01-19T14:22:46Z2022-01-19T14:22:46ZImpact environnemental des smartphones : le reconditionné fait de 77 à 91 % mieux que le neuf<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/441470/original/file-20220119-23-1yc241.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=197%2C86%2C7872%2C5302&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’empreinte carbone de la France due aux services numériques représente, sur un an, 16,9 millions de tonnes eqCO₂.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/repairman-removing-smartphone-screen-screws-securing-1543454333">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p><a href="https://presse.ademe.fr/2022/01/numerique-responsable-et-si-nous-adoptions-les-bons-reflexes.html">Dans deux études dévoilées ce 19 janvier 2022</a>, l’Agence de la transition écologique (Ademe) se penche sur le numérique et ses effets sur l’environnement en France. La première, menée conjointement <a href="https://www.arcep.fr/">avec l’Arcep</a>, dresse un état des lieux de <a href="https://librairie.ademe.fr/consommer-autrement/5226-evaluation-de-l-impact-environnemental-du-numerique-en-france-et-analyse-perspective.html">l’impact des services numériques en France</a>, en tenant compte de tous les éléments nécessaires à la construction d’un service numérique : réseaux et infrastructure, data centers, équipement des usagers chez les particuliers et les entreprises (smartphones, téléviseurs connectés, objets connectés).</p>
<p>Parmi les enseignements de ce travail systémique, un aspect ressort : la fabrication constitue l’étape du cycle de vie dont l’impact environnemental est le plus fort. Et la partie « terminaux » (c’est-à-dire nos appareils numériques) est de loin la partie la plus marquante. D’où l’intérêt de la seconde étude, qui consiste justement à <a href="https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/5241-evaluation-de-l-impact-environnemental-d-un-ensemble-de-produits-reconditionnes.html">mesurer les bénéfices environnementaux générés par le reconditionnement des équipements</a> – un travail mené dans un premier temps sur les smartphones et qui sera suivi par d’autres catégories d’équipements électroniques.</p>
<p>Dans ces deux démarches, l’Ademe a fait le choix d’une approche cycle de vie, qui permet de mesurer l’empreinte environnementale depuis l’extraction de matière jusqu’à la fin de vie du produit. Les travaux se penchent par ailleurs non seulement sur les indicateurs « changement climatique » mais également sur l’épuisement des ressources naturelles, l’empreinte matière et la consommation d’énergie.</p>
<h2>Le numérique, 2,5 % de l’empreinte carbone de la France</h2>
<p>Plusieurs chiffres parlants mentionnés dans ces travaux méritent d’être soulignés, chaque fois exprimés sur une année d’usage.</p>
<p>En premier lieu, l’empreinte carbone de la France – émissions de gaz à effet de serre directes et indirectes – dû aux services numériques représente, sur un an, 16,9 millions de tonnes eqCO<sub>2</sub>. Cela équivaut à 2,5 % de l’empreinte carbone totale de la France et correspond environ la même empreinte que le secteur des déchets.</p>
<p>En matière d’exploitation des ressources naturelles, l’empreinte numérique correspond quant à elle sur une année à l’équivalent de l’extraction de 21 tonnes d’or.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1234616967933448192"}"></div></p>
<p>Le secteur produit par ailleurs 20 millions de tonnes de déchets par an, essentiellement générés par l’exploitation de ressources naturelles et la production – déchets à ne pas confondre avec les déchets directement générés par les équipements, inclus dans ce volume.</p>
<p>Enfin, la part du numérique dans la consommation électrique française s’élève à 10 %, avec un volume de 48,7TWh. Par habitant et par an, ces différents impacts représentent 253kg eqCO<sub>2</sub>, 300kg de déchets produits et près de 1 tonne de matériaux déplacés.</p>
<h2>Nos terminaux, 60 à 90 % de l’empreinte numérique</h2>
<p>Ce travail d’ampleur, jamais mené de manière aussi aboutie en France, permet d’identifier que le sujet du numérique ne se réduit pas à la seule question du changement climatique et que la majorité de l’impact se situe au niveau des terminaux, c’est-à-dire des appareils que nous utilisons au quotidien.</p>
<p>Selon les indicateurs environnementaux que l’on considère, ces derniers sont responsables de 60 à 90 % de l’impact du numérique, quand les 10 à 40 % restants sont imputables aux réseaux fixes et mobiles ainsi qu’aux data centers. Si l’on prend l’exemple de l’épuisement des ressources (matériaux), on constate que 90 % de l’empreinte du numérique en la matière provient de nos terminaux fixes et mobiles.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1367056025241739264"}"></div></p>
<p>Considérons maintenant le cycle de vie : les travaux de l’Ademe révèlent que l’impact environnemental de l’étape de fabrication est très largement prépondérant au cours de l’ensemble du cycle de vie.</p>
<p>Autant d’éléments qui insistent sur la nécessité d’allonger la durée d’usage de nos équipements. Entre autres, par l’achat d’objets reconditionnés.</p>
<h2>Les bénéfices du reconditionnement</h2>
<p>Pour mesurer les bénéfices environnementaux du reconditionnement, l’Ademe a collaboré avec l’ensemble des parties prenantes du secteur en France. Elle s’est dans un premier temps concentrée sur le smartphone, d’autres résultats viendront plus tard sur d’autres équipements (ordinateurs, tablettes et consoles de jeu).</p>
<p>En ressortent plusieurs chiffres intéressants, qui constituent des moyennes variables en fonction de certains critères, comme la durée d’usage du produit antérieure à son reconditionnement ainsi que les conditions de ce reconditionnement.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1168316417743233024"}"></div></p>
<p>En moyenne, l’acquisition d’un smartphone reconditionné permettrait ainsi la réduction d’impact environnemental annuel de 77 % à 91 % par rapport à un achat neuf, en fonction des indicateurs. Sur l’empreinte « changement climatique », en particulier, l’impact chute de 87 %. Ce choix évite également l’extraction de 82 kg de matières premières et les émissions de 23 kg de gaz à effet de serre sur un an par smartphone reconditionné (versus neuf).</p>
<p>Plus l’appareil reconditionné est utilisé longtemps, plus l’économie de matière et de gaz à effet de serre est élevée – dans la mesure où l’on substitue l’appareil reconditionné à un neuf.</p>
<h2>Un choix imparfait mais toujours gagnant</h2>
<p>Soulignons que nous n’avons cherché dans cette étude ni à minimiser ni à maximiser le bénéfice environnemental, puisque nous avons tenu compte de cas où étaient changées des pièces maîtresses telles que l’écran et la batterie : même dans ces cas-là et y compris lorsque sont intégrés à la vente des accessoires neufs – chargeur et écouteurs, ce qui est souvent le cas – l’impact environnemental demeure plus de 2 à 4 fois moins important que dans la production d’un équipement neuf. Et ce, quand bien même le reconditionnement est effectué à l’étranger, dans des pays de l’Est ou en Chine, par exemple.</p>
<p>En tenant compte de ces éléments et de la place prépondérante de la phase de fabrication dans l’impact environnemental du numérique, il apparaît essentiel de limiter le suréquipement, d’allonger au maximum la durée de vie des appareils, en les entretenant, en les faisant réparer et en se tournant vers de l’occasion ou du reconditionnement lorsque l’on en change, cette dernière option offrant des garanties de fonctionnement.</p>
<h2>Bonnes pratiques pour un reconditionnement optimal</h2>
<p>Le reconditionnement n’étant pas pour autant exempt d’impacts, il est préférable pour les consommateurs de privilégier des produits issus d’un reconditionnement local et d’éviter les modèles reconditionnés trop récents <a href="https://longuevieauxobjets.gouv.fr/">afin d’encourager la logique d’allongement d’usage</a>.</p>
<p>Côté reconditionneurs, plusieurs pistes existent pour améliorer l’empreinte de leur pratique : essayer de collecter des téléphones usagés localement, favoriser des pièces de rechange de seconde main, proposer au client de ne pas fournir d’accessoires neufs systématiquement et déployer des ateliers de réparation en France plutôt qu’à l’étranger.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1252143830712942592"}"></div></p>
<p>Mais il s’agit aussi de professionnaliser le reconditionnement. D’abord en proposant une démarche de service de qualité avec un bon service après vente afin de donner confiance aux clients dans l’achat d’équipements reconditionnés.</p>
<p>Également en optimisant les processus, en développant l’innovation, en automatisant certaines tâches afin de réaliser des économies d’échelle et, par ricochet, de baisser les prix afin de rendre la différence de prix entre le neuf et le reconditionné plus attractive. Enfin, en diminuant les consommations d’énergie et d’eau du site de reconditionnement, qui pèsent dans l’empreinte de ce dernier.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174976/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raphaël Guastavi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La fabrication de nos appareils pèse significativement dans l’empreinte environnementale du numérique. En allongeant leur durée de vie, le reconditionnement a des bénéfices considérables.Raphaël Guastavi, Chef du service Ecoconception & Recyclage, Ademe (Agence de la transition écologique)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1697652021-10-20T19:40:33Z2021-10-20T19:40:33ZVos appareils électroniques sont-ils obsolètes de plus en plus rapidement ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/427214/original/file-20211019-15-1mp7047.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=24%2C9%2C2020%2C1523&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un écran cassé peut souvent se remplacer, mais ce n’est pas le cas de tous les composants de nos téléphones, tablettes et ordinateurs.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/zooboing/4668010058/in/photostream/">Patrick Hoesly, Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>En 2019, l’ADEME <a href="https://librairie.ademe.fr/cadic/1866/guide-pratique-impacts-smartphone.pdf">soulignait</a> que 88 % des Français changent de téléphone alors que le précédent est encore en état de marche et que seuls 15 % des téléphones sont collectés pour être recyclés.</p>
<p>La fabrication de dispositifs électroniques et leur remplacement rapide demandent beaucoup de ressources, notamment <a href="https://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-terres-rares-ademe/">terres rares</a> et ressources pétrolières. En effet, à l’heure même où l’<a href="https://www.lemonde.fr/blog/huet/2021/08/09/le-rapport-du-giec-en-18-graphiques/">on cherche à diminuer drastiquement son utilisation</a>, le pétrole reste un <a href="https://www.planete-energies.com/fr/medias/decryptages/la-petrochimie-une-industrie-incontournable">matériau de base</a> pour de nombreux produits de notre quotidien (plastiques, tissus synthétiques, films d’emballage notamment).</p>
<p>Ces produits représentent également une source de pollution importante : <a href="https://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-terres-rares-ademe/">80 % des déchets électroniques</a> ne peuvent pas être recyclés et sont soit incinérés, soit enfouis.</p>
<p>Même si elle ne résout pas tous les problèmes liés à la surconsommation, la lutte contre l’obsolescence programmée permet de limiter l’utilisation extensive des ressources et la pollution, tout en permettant aux consommateurs de réaliser de substantielles économies.</p>
<h2>Qu’est-ce que l’obsolescence programmée ?</h2>
<p>L’obsolescence programmée est définie en France par l’<a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032225325/">article L441-2 du code de la consommation</a> : « L’obsolescence programmée se définit par l’ensemble des techniques par lesquelles le metteur sur le marché d’un produit vise à en réduire délibérément la durée de vie pour en augmenter le taux de remplacement ».</p>
<p>Cette obsolescence programmée peut revêtir de multiples facettes. L’<strong>obsolescence technique</strong> fait suite à une faiblesse matérielle délibérée qui rend le produit inutilisable. Elle peut se manifester sous la forme de la panne d’un composant essentiel, de l’utilisation de matériaux peu robustes ou encore en introduisant un dispositif limitant la durée de vie du produit. Par exemple, certaines imprimantes indiquent que les cartouches d’impression sont vides <a href="https://www.lesnumeriques.com/imprimante/obsolescence-programmee-imprimantes-epson-ne-convainc-pas-n72957.html">alors qu’il reste encore de l’encre</a>.</p>
<p>L’<strong>obsolescence logicielle</strong> impacte les biens électroniques, principalement les smartphones, les tablettes et les ordinateurs. Certains appareils ne permettent plus l’installation des systèmes et logiciels les plus récents. Officiellement, ce blocage permet d’éviter l’installation d’un logiciel que l’appareil ne pourrait pas utiliser pleinement en raison de ses caractéristiques techniques.</p>
<p>A contrario, l’utilisateur se voit parfois imposer l’installation de la dernière version du système d’exploitation, celle-ci ralentissant considérablement le fonctionnement de l’appareil. L’entreprise Apple a été condamnée en France à 25 millions d’euros d’amende <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/apple-condamne-a-une-amende-de-25-millions-d-euros-par-l-autorite-de-la-concurrence_2117598.html">pour ce motif</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-lutte-pour-une-agriculture-libre-bricoler-et-partager-pour-semanciper-147051">La lutte pour une agriculture libre : bricoler et partager pour s’émanciper</a>
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<p>Enfin, l’<strong>obsolescence programmée indirecte</strong> rend un produit inutilisable en raison de l’indisponibilité d’un produit ou d’un composant associé. Nous retrouvons dans cette catégorie l’impossibilité de trouver un chargeur de remplacement pour un produit électronique, l’incapacité de réparer un produit en raison de l’inexistence des pièces détachées nécessaires à sa réparation ou encore l’excessivité du prix de la réparation. C’est la raison pour laquelle l’Europe <a href="https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/l-europe-veut-de-vrais-chargeurs-universels-20210923">souhaite imposer l’utilisation de chargeurs universels pour les smartphones</a>.</p>
<p>Deux autres catégories d’obsolescence viennent s’ajouter à celles-ci : l’<strong>obsolescence esthétique</strong>, qui ne repose pas sur une usure anticipée ou une impossibilité d’utiliser le produit, mais sur le recours à des techniques marketing pour créer un besoin de changement chez l’utilisateur. Le produit possédé apparaît alors comme dépassé, soit en raison de son esthétique, soit des fonctionnalités qu’il propose. Nous pouvons également citer ici l’<strong>obsolescence écologique</strong>, qui a vu le jour <a href="https://www.moustique.be/actu/2017/09/26/les-ecolos-planifient-aussi-obsolescence-168505">ces dernières années</a> : certaines entreprises incitent les consommateurs à changer un produit en état de fonctionnement par un nouveau produit qui serait plus économe en énergie.</p>
<h2>D’où vient ce concept ?</h2>
<p>Officiellement, l’obsolescence programmée est apparue suite à la crise économique de 1929 : Bernard London, un courtier new-yorkais, <a href="https://www.cairn.info/revue-du-mauss-2014-2-page-50.htm">propose</a>, alors de déterminer une durée de vie pour les produits afin d’en faciliter le renouvellement. Il ne s’agit pas précisément d’obsolescence programmée, mais plutôt d’« obsolescence planifiée ». Dans cette vision, chaque produit doit avoir une durée de vie déterminée lors de sa fabrication, et les <a href="https://www.cairn.info/revue-du-mauss-2014-2-page-50.htm">consommateurs ont l’obligation de ne plus utiliser ces produits passée cette limite</a>, même si les produits peuvent encore techniquement être utilisés. Bien que cette proposition n’ait pas été mise en œuvre, elle a contribué à l’acceptation de l’obsolescence programmée, démontrant ses atouts économiques et sociaux – les enjeux environnementaux et ceux liés à la rareté de certaines ressources n’étaient alors pas d’actualité.</p>
<p>Le premier exemple d’obsolescence programmée date cependant d’avant la crise de 1929. En 1924, les principaux fabricants d’ampoules mondiaux se sont réunis secrètement, créant le premier cartel mondial. Les ampoules fabriquées jusqu’alors avaient une durée de vie importante, la durée moyenne de fonctionnement étant de 2500 heures (une ampoule <a href="https://www.nouvelobs.com/sciences/20160607.OBS2022/la-belle-histoire-de-l-ampoule-qui-brille-depuis-115-ans.html">fonctionne depuis 1901</a> dans la caserne de pompiers de Livermore en Californie). Cette longévité limitant les revenus de ces entreprises, la décision de <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/industry-story-au-diable-la-vie-eternelle.N543299">plafonner la durée de fonctionnement à 1000 heures</a> fut prise. Chaque entreprise du cartel se devait de respecter cet engagement, et des contrôles étaient réalisés dans les sites de fabrication pour vérifier sa bonne mise en œuvre.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/e9xmn228HM0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Depuis cette époque, l’obsolescence programmée est <a href="https://journals.openedition.org/tc/12557">omniprésente</a> dans le monde économique, permettant de redynamiser des marchés saturés ou en voie de saturation.</p>
<h2>Comment lutter contre l’obsolescence programmée ?</h2>
<p>Plusieurs initiatives permettent de lutter contre l’obsolescence programmée.</p>
<p>Après la création d’un « <em>Repair Café</em> » à Amsterdam en 2009, des communautés d’utilisateurs se sont développées à travers l’Europe pour proposer des ateliers de réparation de produits défectueux ou des <a href="https://www.linfodurable.fr/technomedias/ou-trouver-des-tutoriels-en-ligne-pour-reparer-vos-objets-vous-memes-17317">tutoriels</a>. D’autres communautés permettent d’offrir une deuxième vie à des objets en leur trouvant un nouveau propriétaire, que ce soit en les vendant, par don ou par troc.</p>
<p>Les États se mobilisent aussi pour lutter contre ce phénomène. Ainsi, en France, depuis le 1<sup>er</sup> janvier 2021, les fabricants de certains produits doivent afficher un indice de réparabilité. Cet indice permet à l’acheteur de connaître les possibilités de réparation d’un produit lors de son achat.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/dans-la-fabrique-de-lindice-de-reparabilite-en-vigueur-depuis-janvier-2021-155536">Dans la fabrique de « l’indice de réparabilité » en vigueur depuis janvier 2021</a>
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<p>L’obsolescence logicielle représente un défi majeur. Une <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/numerique-et-environnement-remise-au-parlement-du-rapport-sur-lobsolescence-logicielle-prevu">étude</a> initiée par le Ministère de la Transition Écologique suggère d’imposer aux fabricants d’assurer les mises à jour pendant au moins 5 ans après la fabrication. En attendant que de telles initiatives aboutissent, les auteurs de cette étude recommandent de ne faire que les mises à jour indispensable à la sécurité pour les équipements électroniques anciens, car les mises à jour peuvent ralentir l’équipement concerné.</p>
<p>La législation française considère l’obsolescence programmée comme un délit <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006069565/LEGISCTA000032222837/#LEGISCTA000032225329">Article 441-2 du Code de la consommation</a>, mais la preuve de ce délit est presque impossible à établir. Une <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4054_proposition-loi">proposition de loi a été initiée le 7 avril 2021</a>. Celle-ci propose d’étendre la durée minimale de garantie légale sur les biens matériels de 2 à 10 ans et de garantir la disponibilité des pièces détachées sur cette durée.</p>
<p>Si celle-ci est validée, elle représentera une avancée considérable pour lutter contre le phénomène d’obsolescence programmée.</p>
<p>Une prise de conscience des utilisateurs est également nécessaire. En effet, au-delà de la problématique d’obsolescence avec une panne empêchant totalement le fonctionnement de l’appareil, d’après une étude de l’ADEME, 88 % des téléphones portables remplacés chaque année <a href="https://librairie.ademe.fr/dechets-economie-circulaire/1886-tiroirs-pleins-de-telephones-remplaces-consommateurs-et-objets-a-obsolescence-percue.html">fonctionnent encore</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169765/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Delphine Billouard-Fuentes ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>D’où viennent les pannes de nos appareils électroniques ? Sont-ils réparables ? Retour sur les différents types d’obsolescence et les outils législatifs pour contenir les abus.Delphine Billouard-Fuentes, Professeur associé, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1560652021-02-28T17:28:12Z2021-02-28T17:28:12ZQue penser de la feuille de route « Numérique et environnement » ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/386853/original/file-20210228-144318-1sq6jxw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le secteur du numérique a doublé son empreinte carbone en un peu plus de 15 ans. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-vector/energy-use-greenhouse-gas-emissions-digital-1112856647">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Le gouvernement a publié le 23 février 2021 sa feuille de route « Numérique et environnement », dont le sous-titre est : <a href="https://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/2021/Feuille_de_route_Numerique_Environnement.pdf">« Faisons converger les transitions »</a>. Disons-le d’emblée : si quelques avancées sont notables, les ambitions sont très en deçà de ce qui serait nécessaire.</p>
<p>Un tel positionnement est malheureusement cohérent avec les reculades successives du gouvernement, notamment au regard des objectifs de l’accord de Paris, raison pour laquelle il a été récemment condamné pour « carences fautives » dans la lutte contre le réchauffement climatique <a href="https://theconversation.com/affaire-du-siecle-les-promesses-climatiques-risquent-dengager-ceux-qui-les-font-154800">dans le cadre de l’Affaire du siècle</a>.</p>
<h2>Que contient la feuille de route numérique ?</h2>
<p>Cette stratégie numérique consiste en 17 mesures, regroupées sous trois chapitres : connaître les implications écologiques du numérique ; soutenir un numérique plus sobre (« Green IT ») ; « innover » dans le domaine d’un usage du numérique au service de la planète (« IT for green »). Les catégories sont classiques, ce sont les mêmes qui ont cours depuis plus de 15 ans.</p>
<p>« Connaître pour agir » consiste principalement en l’instauration d’un pouvoir de collecte de données par l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (<a href="https://www.arcep.fr/">Arcep</a>), autorisant la mise en place d’un « baromètre environnemental » pour les acteurs du numérique, et de lancer des travaux de prospective, avec l’Ademe, notamment sur l’impact de la 5G et de l’Internet des objets.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1364231063443300356"}"></div></p>
<p>« Soutenir un numérique plus sobre » désigne la diffusion de « bonnes pratiques » auprès des Français, l’amélioration des filières de recyclage et de réemploi des matériels, diverses mesures d’efficacité (centres de données, etc.) et, plus intéressant, la demande d’une analyse des pratiques commerciales et la formalisation d’engagements des acteurs du secteur.</p>
<p>Enfin l’innovation vise la « GreenTech », « à fort potentiel », avec un fonds de 300 millions dédié.</p>
<h2>Qu’en penser ?</h2>
<p>« Connaître pour agir » est évidemment nécessaire. L’histoire des controverses technologiques ne manque cependant pas d’exemples montrant que l’on peut <a href="https://www.editions-lepommier.fr/les-marchands-de-doute-poche">utiliser le prétexte du défaut de connaissances pour ne pas agir</a>.</p>
<p>Dans le domaine du numérique, les chiffres globaux ne font pas débat, et ils sont plus qu’alarmants : le secteur a <a href="https://theshiftproject.org/lean-ict/">doublé son empreinte carbone en un peu plus de 15 ans</a>, ce qui constitue la <a href="https://ourworldindata.org/emissions-by-sector">plus mauvaise performance, tous secteurs confondus</a>. Il eût peut-être fallu produire des connaissances avant le lancement de la 5G, par exemple.</p>
<p>Le chapitre sur la sobriété numérique mélange sobriété et efficacité. La sobriété renvoie à l’utilité d’un usage, quand l’efficacité se rapporte à la quantité de matière ou d’énergie nécessaire pour assurer cet usage. Faire durer les produits plus longtemps ou soutenir les centres de données « écologiquement vertueux » sont de l’ordre de l’efficacité, s’ils ne remettent pas en cause l’évolution des usages, tels que promus par les entreprises du numérique – par exemple, davantage de vidéo à haute définition, de jeu vidéo en ligne, davantage d’objets « autonomes » dont certains sont de grande taille tels que les automobiles.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/le-volume-de-dechets-electroniques-explose-et-leur-taux-de-recyclage-reste-ridicule-143701">« Collecter, recycler et réemployer »</a> les terminaux jette une lumière crue sur le retard accumulé depuis plus de dix ans en France par rapport aux objectifs de la directive sur les déchets électriques et électroniques, qui cherchait déjà à favoriser l’écoconception et dont nous <a href="https://www.lechappee.org/collections/pour-en-finir-avec/la-face-cachee-du-numerique">avions souligné les faiblesses</a> ; rappelons encore à ce sujet que la récente loi antigaspillage pour une économie circulaire <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/loi-anti-gaspillage-economie-circulaire-1">ne répond toujours pas à ces objectifs</a>.</p>
<p>La principale faiblesse des dispositifs actuels consiste à faire des producteurs les responsables de l’organisation des filières de fin de vie (réemploi, recyclage, etc.)… alors qu’ils n’y ont aucun intérêt économique : moins la filière leur coûtera cher, mieux ils se porteront. Nous avions proposé que les éco-organismes <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00957825">soient plutôt aux mains des associations ou des collectivités territoriales</a>, dont l’intérêt est très différent.</p>
<p>Les pratiques commerciales sont un point clé sur lequel on attend avec impatience de voir le contenu des propositions, <a href="https://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/2021/Feuille_de_route_Numerique_Environnement.pdf#page=23">comme y invite la feuille de route</a> « Numérique et environnement » ; savoir en particulier si ces propositions seront contraignantes, et si elles feront école dans d’autres secteurs touchés par la même fuite en avant des consommations, à l’insu des usagers.</p>
<p>Retenons que les sommes immenses dont les entreprises du numérique disposent pour développer de nouveaux usages ne sont pas considérées dans le texte de la feuille de route comme une variable pertinente d’analyse : aucune donnée chiffrée n’est fournie à ce sujet, aucune analyse du secteur n’est fournie.</p>
<p>Il semble toutefois que l’idée d’utiliser les infrastructures numériques (les centres de données notamment) pour freiner la croissance de la production et du transit des données affleure sous certaines propositions : ainsi <a href="https://www.economie.gouv.fr/files/files/PDF/2021/Feuille_de_route_Numerique_Environnement.pdf#page=23">l’idée de bonnes pratiques</a> dans tous les compartiments de l’usage des données, qui pourraient devenir juridiquement contraignantes.</p>
<p>Le chapitre sur l’innovation est une suite de vœux pieux : mettre la donnée, l’innovation numérique, etc., au service de l’environnement, sans jamais expliquer ni pourquoi ni comment. Et sans rappeler que l’innovation numérique est d’abord au service de la croissance, laquelle est le <a href="https://ec.europa.eu/transparency/regdoc/rep/1/2019/EN/COM-2019-224-F1-EN-MAIN-PART-1.PDF">facteur numéro un de ralentissement de la réduction des émissions de gaz à effet de serre</a> en Europe. </p>
<p>C’est aussi la raison pour laquelle le bilan environnemental du numérique est négatif quand on additionne les effets cumulés de l’efficacité énergétique, la « green tech » (changements sectoriels favorables à l’environnement), la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0921800919320622">croissance du secteur numérique</a> et la croissance qu’il permet dans les autres secteurs.</p>
<h2>Que faire ?</h2>
<p>D’abord, prendre la mesure de l’énorme <a href="https://www.lescahiersdelinnovation.com/vers-le-market-push/">technopush</a> issu du monde numérique, et de son pouvoir colossal de conviction.</p>
<p>L’ambition des acteurs du numérique est toujours la même : faire basculer des milliards de personnes dans une manière « digitalisée » de communiquer (espaces publics, visuels, « immersifs », « sociaux », etc.) et de commander (une action suivie d’effets), deux champs bien identifiés par le spécialiste de la cybernétique Norbert Wiener, dès les années 1950. L’ancien directeur général de l’OMC, Pascal Lamy soulignait pour sa part que la mondialisation économique, débutée dans les années 1970, repose sur deux innovations : <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2011/06/30/pascal-lamy-la-demondialisation-est-un-concept-reactionnaire_1542904_3234.html">Internet et le conteneur</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/386475/original/file-20210225-13-16iiesr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/386475/original/file-20210225-13-16iiesr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/386475/original/file-20210225-13-16iiesr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/386475/original/file-20210225-13-16iiesr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/386475/original/file-20210225-13-16iiesr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=344&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/386475/original/file-20210225-13-16iiesr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/386475/original/file-20210225-13-16iiesr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/386475/original/file-20210225-13-16iiesr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.fftelecoms.org/etudes-et-publications/etude-arthur-d-little-2020-economie-des-telecoms/)">FFT</a></span>
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<p>Dans les deux cas, nous sommes en situation de ce qu’<a href="https://maisouvaleweb.fr/ivan-illich-2-0-dissidence-dans-la-pensee-numerique/">Ivan Illich appelait le « monopole radical »</a> : une difficulté croissante à utiliser d’autres moyens – à l’image de l’usage du vélo dans les zones pavillonnaires où la voiture est reine.</p>
<p>Que vaudront les « bonnes pratiques » préconisées par la feuille de route « Numérique et environnement » dans un tel contexte ? Et le réemploi des terminaux ?</p>
<p>Ce qu’il importe d’empêcher, avant tout, c’est la numérisation de tout ce qui peut l’être. Et c’est également un enjeu de souveraineté, dans la mesure où ces systèmes sont bien <a href="https://theconversation.com/le-numerique-cet-impense-du-pacte-vert-europeen-143575">peu contrôlés par l’Europe</a>.</p>
<p>Que faire donc ?</p>
<p>L’urgent est de « socialiser les choix » en matière d’évolution des modes de vie. Parmi les mesures que nous avions proposées au Conseil national du numérique, l’obligation faite à tout metteur sur le marché, avant commercialisation, de <a href="https://materiologiques.com/fr/essais-2427-4933/315-limperatif-de-la-sobriete-numerique-lenjeu-des-modes-de-vie-9782373612585.html">produire de manière publique cette prospective que la feuille de route appelle de ses vœux</a>, afin d’éclairer les implications sociales et écologiques à long terme du produit. Gageons que Samsung vendrait moins de téléphones 5G et 8K si les acheteurs se rendaient compte des implications collectives d’un tel choix… Il pourrait aussi être question de « dénumériser » partiellement les modes de vie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/156065/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabrice Flipo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Décryptage de la stratégie du gouvernement français pour maîtriser l’empreinte environnementale de la croissance numérique.Fabrice Flipo, Professeur en philosophie sociale et politique, épistémologie et histoire des sciences et techniques, Institut Mines-Télécom Business School Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1437012020-08-18T17:55:10Z2020-08-18T17:55:10ZLe volume de déchets électroniques explose et leur taux de recyclage reste ridicule<p>Chaque année, le volume total d’équipements électriques et électroniques que l’on utilise dans le monde <a href="https://globalewaste.org/news/surge-global-waste/">augmente de 2,5 millions de tonnes</a>. Téléphones, radios, jouets, ordinateurs – s’ils disposent d’une alimentation électrique ou d’une batterie, ils rejoindront une montagne croissante de « déchets électroniques » après utilisation.</p>
<p>Rien qu’en 2019, le monde en a généré 53,6 millions de tonnes. Ce qui représente 7,3 kilogrammes par personne et l’équivalent en poids de 350 bateaux de croisière. L’Asie a produit la part du lion – 24,9 millions de tonnes – suivie par l’Amérique (13,1) et l’Europe (12), tandis que l’Afrique et l’Océanie en ont généré respectivement 2,9 et 0,7 million.</p>
<p>D’ici à 2030, cette masse annuelle planétaire devrait atteindre les 74,7 millions de tonnes. En seulement 16 ans, elle aura donc presque doublé. Ce qui en fait le flux de déchets domestiques à la croissance la plus rapide au monde, alimentée principalement par le fait que davantage de personnes achètent des produits électroniques ayant un cycle de vie plus court et offrant moins de possibilités de réparation.</p>
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<span class="caption">Les produits électriques et électroniques mis au rebut constituent le flux de déchets domestiques qui connaît la croissance la plus rapide au monde.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UNU/Unitar Scycle/Yassyn Sidki</span></span>
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<p>Ces produits contribuent à améliorer les conditions de vie, et il est bon que de plus en plus de gens aient les moyens de les acquérir. Mais la demande mondiale en flèche outrepasse désormais notre capacité à les recycler et à les détruire en toute sécurité. Une fois obsolètes et délaissés, ces objets finissent en partie par s’accumuler dans l’environnement, polluant les habitats et nuisant à la faune et aux personnes.</p>
<h2>L’Europe meilleure élève en matière de recyclage</h2>
<p>Seuls 17,4 % des déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) de 2019 ont formellement été collectés et recyclés. Depuis 2014, le volume recyclé n’a progressé que de 1,8 million de tonnes par an. La quantité totale de déchets générés a augmenté quant à elle de 9,2 millions de tonnes sur la même période. Au même moment, le volume de DEEE non documentés s’est accru.</p>
<p>Dans une <a href="https://globalewaste.org/">nouvelle recherche</a>, nous avons établi que l’Europe dispose du meilleur taux de collecte et de recyclage, puisqu’il couvre environ 42,5 % du total de déchets électroniques générés en 2019. L’Asie apparaît en second avec 11,7 %, les Amériques et l’Océanie affichent un taux proche de 9,4 % et 8,8 %, et l’Afrique recense le taux le plus bas, de 0,9 %. Ce qui se passe avec les 82,6 % restants n’est pas clair.</p>
<p>Dans les pays à forts revenus, environ 8 % des DEEE semblent jetés dans la poubelle de déchets, tandis que 7 à 20 % sont exportés. Dans les pays à faibles revenus, le panorama est plus flou, puisque ces déchets sont principalement gérés de façon informelle.</p>
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<span class="caption">Comment le monde a géré ses déchets électriques et électroniques en 2019.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UNU/Unitar Scycle/Nienke Haccoû</span></span>
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<h2>Une menace sanitaire et environnementale</h2>
<p>Sans un système fiable de gestion des déchets, les substances toxiques contenues dans les objets électroniques comme le mercure, les retardateurs de flamme bromés, les chlorofluorocarbures et les hydrochlorofluorocarbures sont plus susceptibles d’être libérées dans l’environnement et de nuire aux personnes qui vivent, travaillent et jouent dans les « parcs à ferraille » où ils atterrissent.</p>
<p>Le mercure est présent dans les écrans d’ordinateur et les éclairages fluorescents, mais l’exposition à cette substance peut provoquer des lésions cérébrales. Nous avons estimé que ces flux non documentés de déchets électroniques en contiennent environ 50 tonnes, rejetées dans la nature chaque année.</p>
<p>Les DEEE ne constituent pas seulement un risque sanitaire. Ils contribuent aussi directement au réchauffement climatique. Les équipements d’échange de température mis au rebut, que l’on trouve dans les réfrigérateurs et les climatiseurs, libèrent lentement des gaz à effet de serre. On estime qu’environ 98 millions de tonnes s’échappent des parcs à ferraille chaque année, soit 0,3 % des émissions mondiales du secteur de l’énergie.</p>
<h2>Une opportunité économique négligée</h2>
<p>Hormis ces toxines, les déchets électroniques contiennent aussi de précieux métaux et matières premières très utiles comme l’or, l’argent, le cuivre et le platine. La valeur totale de tous ces composants a été évaluée pour l’année 2019 (de façon approximative) à 57 milliards de dollars (48 milliards d’euros) – une somme supérieure au PIB de la plupart des pays.</p>
<p>Mais tandis que seuls 17,4 % des DEEE ont été collectés et recyclés en 2019, seuls 10 milliards de dollars ont été récupérés d’une façon responsable sur le plan environnemental. Seules 4 millions de tonnes de matières premières disponibles au recyclage.</p>
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<span class="caption">Les déchets électroniques abandonnés ne constituent pas seulement un problème environnemental, ils peuvent aussi représenter une opportunité économique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UNU/Unitar Scycle/Yassyn Sidki</span></span>
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<p>Heureusement, le monde s’éveille lentement à l’ampleur du problème. À la fin 2019, 78 pays couvrant 71 % de la population mondiale disposaient d’une politique de gestion de ce type de déchets ou étaient en train d’en mettre une en place – une augmentation de 5 % par rapport à 2017. Mais dans nombre de ces pays, les politiques ne sont toujours pas juridiquement contraignantes et la réglementation n’est pas appliquée.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=336&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=336&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/346613/original/file-20200709-38-idlyo7.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=336&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les gouvernements du monde entier promulguent de nouvelles lois pour mieux gérer les déchets électroniques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">UNU/Unitar Scycle/Nienke Haccoû</span></span>
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<p>En tant que chercheurs, nous continuerons à surveiller l’évolution des déchets électroniques dans le monde pour accompagner la création d’une économie circulaire et de sociétés plus durables. Nous espérons que nos efforts pour évaluer ce problème grandissant inciteront les gouvernements à agir aussi rapidement que le défi l’exige, en adoptant et en mettant en œuvre des lois qui augmentent drastiquement la proportion de déchets recyclés en toute sécurité.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été traduit de l’anglais par <a href="https://theconversation.com/profiles/nolwenn-jaumouille-578077">Nolwenn Jaumouillé</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143701/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Vanessa Forti est membre de la United Nations University (UNU) / United Nations International Training and Research (UNITAR) - SCYCLE.</span></em></p>La demande de produits électriques et électroniques dans le monde alimente l’augmentation fulgurante des déchets qui en découlent, encore trop peu recyclés.Vanessa Forti, Programme Associate at Sustainable Cycles (UNU-ViE-SCYCLE), United Nations UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1258552019-10-28T19:25:36Z2019-10-28T19:25:36ZTerres rares : notre ultra-dépendance à la Chine (et comment en sortir)<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/298602/original/file-20191024-170484-fm4jyl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C4%2C992%2C655&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La position quasi monopolistique de la Chine dans la production mondiale de terres rares permet à Pékin d'imposer des quotas ou des embargos.</span> <span class="attribution"><span class="source">Ascannio / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Si, contrairement aux idées reçues selon lesquelles les terres rares ne sont pas rares et existent ailleurs qu’en Chine, pourquoi alors tant de bruit ? La Chine ne possède en effet pas toutes les terres rares, mais elle concentre leur production, puisqu’elle produit à elle seule <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/les-terres-rares-ultime-moyen-de-pression-de-la-chine-20190522">85 % des terres rares</a> consommées actuellement.</p>
<p>L’enjeu est donc à la fois géopolitique et environnemental. La Chine est aujourd’hui incontournable pour s’approvisionner en terres rares. Bien qu’il existe de nombreux gisements de terres rares dans le monde, ils ne sont pas (encore) exploités, ce qui explique la mainmise de la Chine sur ces ressources. Or, <a href="https://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/articles/chine-monopole-production-terres-rares-51380/">il faut environ 25 ans</a> entre le début d’un projet de mine et le début de son exploitation.</p>
<p>Nous sommes donc dépendants à court terme de la volonté chinoise de fournir le monde en terres rares puisque la mise en production d’autres gisements demande un temps long et incompatible avec les cycles industriels. La Chine a aussi le quasi monopole sur d’autres métaux rares. Elle impose des quotas et des embargos. Parce que leur extraction a un impact toxique sur l’environnement. Un peu comme les pétroles de schistes, mais en <a href="https://lareleveetlapeste.fr/les-terres-rares-le-nouvel-or-noir/">plus grave</a>.</p>
<h2>Un levier de pression pour Pékin</h2>
<p>Les terres rares rejettent au moment de leur exploitation et de leur raffinage, des métaux lourds (le mercure par exemple), de l’acide sulfurique et de l’uranium. Dans les zones d’exploitation, les mines dégagent de la radioactivité, ce qui rend problématiques les systèmes industriels et les rapports avec les populations. Les États-Unis, par exemple, ont dû fermer la plupart de leurs mines à cause de la radioactivité. Ils essaient maintenant d’en rouvrir, mais c’est politiquement difficile.</p>
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<figcaption><span class="caption">« La guerre des métaux rares : l’enquête de Guillaume Pitron » (2018).</span></figcaption>
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<p>Le résultat de cette situation est que la Chine est quasiment le seul fournisseur de terres rares, avec la Corée du Nord dont elle contrôle les mines et commercialise la production (d’où la proximité entre la Chine et la Corée du Nord). C’est aussi pourquoi l’administration américaine ménage la Corée du Nord et que le Président Donald Trump vient de fouler pour la première fois son sol. Ils ont un challenger depuis peu, le <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-enjeux-internationaux/terres-rares-un-levier-strategique-invisible">Japon</a>.</p>
<p>Il existera peut-être un jour un épuisement des réserves mondiales, mais l’enjeu à court terme est bien les relations que nous entretenons avec l’empire du Milieu.</p>
<p>La Chine s’en est d’ailleurs servie comme <a href="https://notes-geopolitiques.com/geopolitique-des-terres-rares/">levier de pression</a> dans le cadre des tensions avec le Japon à propos des îles Senkaku/Diaoyu. Après un incident en 2010 entre un navire chinois et un navire japonais dans les eaux de ces îles, les Japonais virent leur approvisionnement en terres rares coupé du jour au lendemain. Cela représenta une catastrophe pour l’industrie hi-tech nippone.</p>
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<figcaption><span class="caption">« Le conflit des îles Senkaku/Diaoyu » (AFP, 2013).</span></figcaption>
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<p>De grands groupes français ne savaient pas ce qu’étaient les terres rares à l’époque, car ils achetaient des composants qui sont assemblés pour faire des produits finis. La chaîne logistique entre le minerai et l’industriel final comprend au moins une quinzaine d’intermédiaires. Celle-ci peut donner l’illusion d’une abondance. L’industriel est déresponsabilisé et le risque de manquer de métaux est transféré à ses fournisseurs. Mais il est tout le temps exposé en réalité.</p>
<p>La Chine est le premier – et quasi – seul fournisseur mondial et elle compte bien le rappeler à Donald Trump.</p>
<p>C’est ainsi qu’un déplacement du président chinois Xi Jinping, accompagné de son négociateur en chef Liu He, visitant ostensiblement le site de production de JL MAG Rare-Earth Co à Ganzhou (province du Jiangxi), spécialisé dans la recherche et le développement sur les matériaux magnétiques permanents des terres rares, a été perçu comme un avertissement au monde, Vingt-quatre heures après que Google eut annoncé que le groupe chinois Huawei n’aurait plus accès à son système d’exploitation Android.</p>
<h2>Dossier explosif</h2>
<p>En mai 2019, les autorités chinoises se sont rappelées au monde occidental, notamment, vis-à-vis des États-Unis sur le fait qu’elle produisait la majeure partie des terres rares au niveau mondial. Dans un document officiel, la menace chinoise était à peine voilée, mais elle n’a pas échappé aux industriels ni aux initiés.</p>
<p>Premier temps : le gouvernement chinois publie l’état de ses exploitations minières et notamment des terres rares. Au passage, les autorités chinoises précisent que « mine de rien » – sans jeu de mots ! – elles assurent aujourd’hui l’essentiel de la production mondiale de ces précieux métaux. Avec le quasi-contrôle de production de la Corée du Nord, les Chinois ont un monopole.</p>
<p>Deuxième temps : conscients de leurs effets, ils s’étonnent que les prix mondiaux flambent (alors qu’ils en ont le maitrise). Mais, ils expliquent qu’il n’est pas dans l’intérêt de la Chine, ni de l’économie mondiale, qu’ils bloquent ce marché, compte tenu de l’explosion de la demande. En 24 heures, on a évidemment compris qu’ils en avaient les moyens.</p>
<p>Alors personne, absolument personne, ne prend cette menace à la légère. Même si la menace vise directement la politique du président des États-Unis Donald Trump de barrer la route aux produits chinois. Le dossier est explosif. La menace est telle que la <a href="https://www.zonebourse.com/actualite-bourse/Terres-rares-Une-cartographie-des-enjeux--28684276/">flambée des prix</a> sur les marchés internationaux ne se calme pas et que les grands clients cherchent désormais à diversifier leurs approvisionnements.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/298606/original/file-20191024-170471-e604lg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/298606/original/file-20191024-170471-e604lg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/298606/original/file-20191024-170471-e604lg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/298606/original/file-20191024-170471-e604lg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/298606/original/file-20191024-170471-e604lg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/298606/original/file-20191024-170471-e604lg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/298606/original/file-20191024-170471-e604lg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/298606/original/file-20191024-170471-e604lg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution de la consommation et de la production de terres rares.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.mineralinfo.fr/ecomine/sursaut-marche-terres-rares-en-2017">Mineralinfo.fr</a></span>
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</figure>
<p>Les services de recherche sont mobilisés dans deux directions. L’une de ces deux directions est entourée de la plus grande discrétion. Les industries minières et les organismes d’État multiplient les études de prospection et d’impact sur l’environnement. En particulier dans les régions qui sont peu peuplées. Mais les risques politiques sont considérables, parce que si les populations ne supportent pas les gaz de schiste, si elles s’inquiètent du réchauffement climatique ou des dangers du nucléaire, elles rejettent en bloc tout risque d’exposition avéré à la radioactivité liée à l’exploitation des terres rares.</p>
<p>L’autre direction vise le recyclage. Le recyclage des produits digitaux usagés et surtout des batteries est évidemment une source d’approvisionnement mais qui ne peut pas répondre à la demande croissante de l’industrie. La Chine a très bien compris que, sur ce dossier, elle tenait une position de force. Dès lors, quelles sont les pistes alternatives que la France et les Européens peuvent suivre ?</p>
<h2>Diminuer la dépendance envers la Chine</h2>
<p>Nous sommes dans un système de gaspillage, il faut rationaliser les ressources. Nous savons recycler les métaux rares, mais cela coûte trop cher, car ils sont souvent sous forme d’alliages, des « composites », donc on ne le fait pas. On préfère les jeter lorsqu’ils sont usagés, plutôt que de payer un peu plus cher nos biens technologiques. Aujourd’hui, nous ne recyclons que <a href="https://lejournal.cnrs.fr/billets/les-terres-rares-et-apres">1 % des terres rares</a>, mais c’est bien 100 % de tous les métaux rares qu’il faut recycler. Toutefois, même si l’on recyclait l’ensemble des métaux utilisés aujourd’hui, il faudrait toujours aller en chercher plus, c’est inévitable.</p>
<p>Nos besoins augmentent de 5 % par an, la production est multipliée par deux tous les 15 ans. Il faut également lutter contre l’obsolescence programmée, substituer les métaux énergivores et faire de l’<a href="https://theconversation.com/mieux-responsabiliser-les-producteurs-en-matiere-deco-conception-113415">éco-conception</a>.</p>
<p>Afin de pallier les problèmes d’approvisionnement et réduire sa dépendance envers la Chine, la France mise sur la recherche de substituts aux terres rares et sur le recyclage, en complément de la diversification de ses sources d’approvisionnement.</p>
<p>Certaines technologies arrivent à substituer les terres rares. Par exemple, le véhicule électrique : certains constructeurs comme Toyota utilisent du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9odyme">néodyme</a> dans la construction de leurs modèles électriques, tandis qu’à l’inverse, Renault est parvenu à s’en affranchir pour la Zoé. C’est aussi le cas avec la création de circuit imprimé à base de molécule de champignon.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/298593/original/file-20191024-170499-387pp8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/298593/original/file-20191024-170499-387pp8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/298593/original/file-20191024-170499-387pp8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/298593/original/file-20191024-170499-387pp8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/298593/original/file-20191024-170499-387pp8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/298593/original/file-20191024-170499-387pp8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/298593/original/file-20191024-170499-387pp8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Il n’y a pas de néodyme dans le modèle Zoé de Renault.</span>
<span class="attribution"><span class="source">NeydtStock/Shutterstock</span></span>
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<p>Dans le cas des technologies de l’information et de la communication (TIC) les substitutions sont difficiles, voire impossibles : cela demanderait de revoir complètement les produits. L’indépendance pour l’approvisionnement en terres rares passe donc en partie par le recyclage. C’est ainsi que très tôt, l’Union européenne et la France se sont dotées d’un arsenal juridique conséquent pour obliger les industriels à recycler leurs déchets électroniques mais aussi à développer toutes les formes de substitution aux métaux rare.</p>
<p>Nous pouvons évidement citer la <a href="http://www.marche-public.fr/DEE-EEE/Directive-2002-96-CE-DEE.htm">directive DEEE de 2002</a>. Elle a pour objectif de favoriser le recyclage des équipements électroniques et électriques. Elle impose aux fabricants et aux importateurs d’équipements électroniques et électriques de prendre en charge les coûts de ramassage et de traitement des déchets d’équipement électriques et électroniques. Mais aussi la <a href="http://eco3e.eu/reglementations/rohs/">directive RoHS de 2003</a> relative à la limitation de l’utilisation de certaines substances dangereuses. Mais dans la réalité seul 10 % de ces déchets sont traités en France et en Europe, le reste finit <a href="https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/environnement-africain/l-afrique-reste-desarmee-face-aux-dechets-electroniques-qui-s-accumulent_3057273.html">dans les décharges africaines</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/298597/original/file-20191024-170458-15e4s2w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/298597/original/file-20191024-170458-15e4s2w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/298597/original/file-20191024-170458-15e4s2w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/298597/original/file-20191024-170458-15e4s2w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/298597/original/file-20191024-170458-15e4s2w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/298597/original/file-20191024-170458-15e4s2w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/298597/original/file-20191024-170458-15e4s2w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Environ 10 % des déchets électroniques sont aujourd’hui traités en France et en Europe.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Lucian Coman/Shutterstock</span></span>
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<p>La difficulté dans le recyclage est donc d’isoler les terres rares des autres composants de ces appareils, cela revient à chercher une aiguille dans une botte de foin ! Il y a donc d’importants défis de R&D à relever pour permettre un recyclage économiquement rentable et respectueux de l’environnement. C’est par exemple le but du <a href="https://www.brgm.fr/publication-presse/extrade-innover-mieux-recycler">projet Extrade</a> coordonné par le Bureau de recherche géologique et minière (BRGM) et financé par l’Agence nationale de la recherche, qui vise à améliorer les techniques de recyclage des terres rares contenues dans les disques durs, les haut-parleurs des enceintes, les petits moteurs électriques des TIC et les petits appareils électroménagers.</p>
<p>Une autre piste explorée par l’Europe est la valorisation des déchets des mines européennes pour produire des terres rares sur son territoire. Ces déchets sont nommés « stériles » car leur concentration en terres rares est trop faible pour présenter un intérêt. Le <a href="https://www.brgm.fr/projet/enviree-exploiter-dechets-miniers-favoriser-independance-terres-rares-europe">projet Enviree</a>, financé par la Commission européenne, a justement pour objectif la recherche de technologies permettant de les exploiter.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/125855/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Ces ressources indispensables à la fabrication de smartphones ou d’ordinateurs sont devenues une arme géopolitique pour l’empire du Milieu, qui en assure 85 % de la production mondiale.Olivier Soria, Enseignant-chercheur en droit de l'environnement , Kedge Business SchoolJuliette Grau, Doctorante, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1057212018-11-05T20:00:24Z2018-11-05T20:00:24ZPoubelles sans frontières<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/243266/original/file-20181031-122150-1wnxw97.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=54%2C23%2C5121%2C3406&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Météorite de déchets, reconstituée en 2013 dans la ville de Genêve (installation par Fresh agency).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/mickaelfonjallaz/9100399258/in/album-72157634247553538/">Mickaël Fonjallaz/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>La Chine n’accepte plus de recevoir nos déchets. Depuis un an les bateaux remplis de papiers-cartons et de plastiques à recycler n’abordent plus Hong Kong et les ports du Guandong. La Chine va perdre son rang de débouché mondial numéro 1 pour les poubelles et la ferraille, une sérieuse perturbation dans le marché international des ordures.</p>
<h2>Les déchets, un marché mondial</h2>
<p>Ne croyez pas en effet que les déchets ne voyagent pas en raison de leur poids et de la loi. Les bouteilles plastiques vides écrabouillées que vous déposez consciencieusement dans la poubelle jaune ont quelques chances de se retrouver en Asie après un long trajet en bateau. Elles y seront recyclées. Enfin… normalement, car si le plastique est un tant soit peu contaminé par d’autres matières, il ira se décomposer – compter 400 ans – dans une décharge locale de là-bas. Idem si les capacités de recyclage sont saturées ou si le <a href="https://fr.made-in-china.com/tag_search_product/Abs-Plastic-Granules_yiyreyn_1.html">prix du granulé de plastique</a> est déprimé.</p>
<p>Les téléviseurs, ordinateurs et téléphones hors d’usage parcourent aussi de longues distances en conteneur avant être désossés, certaines pièces revendues, les métaux de valeur récupérés, et le reste mis en décharge. Ils se retrouveront encore une fois en Chine ou en Inde mais aussi au Nigeria ou au Ghana. Si vous résidez dans l’Union européenne, il est toutefois très peu probable que vos déchets électriques et électroniques se retrouvent dans ces contrées lointaines. Ils y seraient alors parvenus illégalement. Leur route pour l’Afrique dans le coffre et sur les sièges de véhicules d’occasion exportés est l’une de <a href="https://www.actu-environnement.com/ae/news/dechets-electroniques-deee-transfert-illegal-europe-afrique-31079.php4">ces voies détournées</a>.</p>
<p>Les expéditions d’appareils électroniques usagés vers les pays en développement sont interdites en Europe au même titre que d’autres déchets dangereux. L’Union a en effet édicté ses propres règles en la matière et a signé la <a href="http://www.basel.int/portals/4/basel%20convention/docs/text/baselconventiontext-f.pdf">Convention de Bâle</a>, un traité international qui condamne le commerce de déchets toxiques pour la santé et l’environnement avec les pays du Sud.</p>
<h2>Un marché (plus ou moins) encadré</h2>
<p>Les États-Unis, qui n’ont pas ratifié ce traité, sont plus libres de leurs mouvements. La preuve par l’image : pour suivre leur périple, des scientifiques du MIT ont posé des mouchards sur des ordinateurs et des téléviseurs mis au rebut <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0956053X17308139">aux États-Unis</a>.</p>
<p>Un résultat parmi d’autres de <a href="http://senseable.mit.edu/monitour-app/">la carte animée ci-dessous</a> : un appareil à tube cathodique prend son départ à Chicago, il flâne deux mois avant d’arriver à New York, traverse l’Atlantique, poursuit sa croisière en Méditerranée, descend par le canal de Suez, navigue dans les eaux de la mer Rouge et du golfe d’Aden, fait escale dans un port d’Arabie saoudite avant d’être débarqué à Karachi et de terminer son voyage en camion jusqu’à Faisalabad, près du Cachemire. 186 jours, 18 015 km pas mal, non ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243233/original/file-20181031-76405-g7t072.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243233/original/file-20181031-76405-g7t072.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243233/original/file-20181031-76405-g7t072.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243233/original/file-20181031-76405-g7t072.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243233/original/file-20181031-76405-g7t072.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243233/original/file-20181031-76405-g7t072.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243233/original/file-20181031-76405-g7t072.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=446&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Pour voir les voyages des déchets à partir de ce site, il fait attendre le chargement puis cliquer sur « Explore ».</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://senseable.mit.edu/monitour-app/">http://senseable.mit.edu/monitour-app/</a></span>
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<p>Je vous accorde que poser des puces sur les ordures est une expérience moins sentimentale que de fixer une balise Argos sur les oiseaux migrateurs ou les tortues luth. Mais c’est autant instructif : un tiers des déchets ainsi tracés ont été attirés par le lointain, deux tiers ont préféré rester aux États-Unis.</p>
<p>À propos, pourquoi interdire ou autoriser le commerce Nord-Sud de déchets ?</p>
<h2>Déchets non-dangereux et déchets toxiques</h2>
<p>S’il s’agit de déchets non dangereux pour recyclage, le commerce Nord-Sud est avantageux pour tous. Prenons l’exemple du granulé de plastique issu de vieilles bouteilles d’eau. Utilisé comme matière première pour de nouveaux emballages, il diminue la production de plastique vierge. C’est la double vertu du recyclage : moins de volume en décharge ou en incinérateur et moins de pétrole ou de minerais et leurs lots d’effets négatifs sur l’environnement. C’est en principe mieux pour la Chine de faire appel également à des gisements secondaires pour étancher sa soif de matières premières et c’est en principe mieux aussi pour les pays exportateurs d’augmenter la récupération.</p>
<p>Le taux de recyclage des déchets plastiques de la planète n’atteint que 9 %. Il serait encore moindre sans les débouchés asiatiques. D’un point de vue économique rien à signaler de particulier a priori : une demande croissante dans cette partie du monde pour les déchets recyclables en fait croître le prix de vente, ce qui augmente les flux à l’export et intensifie la concurrence internationale entre recycleurs.</p>
<p>Du point de vue de l’environnement même chose. Le transport des déchets sur longue distance est certes responsable d’émissions polluantes mais les bateaux repartiraient de toute façon en Chine et vides ou pleins de bouteilles plastiques ou de papiers-cartons cela ne fait pas beaucoup de différence sur le fioul lourd consommé et les émissions de carbone et particules fines associées. Le transport de déchets représente la moitié du trafic transpacifique de conteneurs entre l’Amérique du Nord et l’Asie. Le trait est cependant volontairement forcé. Nous verrons plus bas, en particulier pour la Chine, que ce n’est pas si rose.</p>
<p>Pour les déchets dangereux, il y a une très mauvaise raison à laisser sans entrave les exportations vers le Sud. Elle a été formulée par Larry Summers, un ancien économiste en chef de la Banque mondiale. Figurez-vous qu’il la croyait bonne ! (Lawrence Summers, memo interne, Banque mondiale, <a href="https://www.jstor.org/stable/4226822?seq=1#page_scan_tab_contents">cité dans <em>The Economist</em>, 8 février 1992</a>) :</p>
<blockquote>
<p>« Je pense que la logique économique derrière la mise en décharge de déchets toxiques dans les pays à bas salaires est impeccable et qu’on doit l’accepter… J’ai toujours pensé que les pays sous-peuplés d’Afrique sont <a href="https://bit.ly/2CRleLI">considérablement sous-pollués</a>. »</p>
</blockquote>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/243268/original/file-20181031-122159-18eemx1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243268/original/file-20181031-122159-18eemx1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243268/original/file-20181031-122159-18eemx1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=230&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243268/original/file-20181031-122159-18eemx1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=230&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243268/original/file-20181031-122159-18eemx1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=230&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243268/original/file-20181031-122159-18eemx1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=288&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243268/original/file-20181031-122159-18eemx1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=288&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243268/original/file-20181031-122159-18eemx1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=288&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Chantier de destruction et.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/adamcohn/4152675722/">Adam Cohn/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Coût marginal et réglementations environnementales</h2>
<p>Pourquoi un tel propos est-il consternant et atterre-t-il aujourd’hui plus d’un économiste ? Il est choquant, bien sûr, mais surtout, il est tout simplement faux. L’efficacité économique veut en effet que la dépollution se réalise au moindre coût, là où le coût marginal est le plus bas. Mais il s’agit du coût social, c’est-à-dire par exemple ici du coût privé de l’opérateur qui assure la mise en décharge (par simplicité, je suppose que le coût de transport des déchets est nul) auquel il faut ajouter le coût des effets externes, soit le coût des dommages sanitaires et environnementaux. Comme ce dernier coût n’est pas pris en compte spontanément par le marché, la théorie économique prévoit dans ses modèles d’équilibre qu’une autorité publique l’internalise, par exemple via l’imposition d’une taxe de mise en décharge. Le flux efficace de déchets se dirige vers les zones de faible coût marginal <em>social</em>.</p>
<p>Mais patatras ! Figurez-vous que certains pays n’ont pas de réglementations environnementales ou en ont mais ne les appliquent pas. L’efficacité économique de l’échange n’est plus alors au rendez-vous. À coût privé de gestion des déchets identique entre deux pays, celui où les atteintes à la population et à l’environnement ne sont pas comptabilisées emporte indûment le marché. Interdire l’exportation de déchets dangereux vers certains pays est donc justifié d’un strict point de vue économique.</p>
<p>Notez au passage que la théorie économique n’impose pas que les réglementations environnementales soient les mêmes partout. Si les habitants autour de la décharge sont moins nombreux, ou si la population locale est moins sensible à la qualité de son environnement, ou encore si ce dernier est moins menacé, les coûts externes sont plus faibles et la réglementation doit être moins exigeante ; inversement, si la population est plus nombreuse ou soucieuse de l’environnement ou ce dernier plus fragile elle doit être plus exigeante. Ce qui choque l’économiste n’est pas de voir des enfants s’empoisonner à petit feu sur un tas de déchets toxiques (même si leur cœur aussi se serre) mais que des autorités publiques nationales ou locales n’en tiennent aucun compte.</p>
<h2>Un accord international inefficace</h2>
<p>Malheureusement, la Convention de Bâle n’a quasiment pas d’effets. Une <a href="http://faculty.georgetown.edu/aml6/pdfs&zips/WasteOfEffort.pdf">analyse économétrique approfondie</a> a montré qu’elle n’est à l’origine que d’une très faible réduction des flux de déchets dangereux du Nord vers le Sud. Ce n’est pas une surprise car, comme pour tout accord volontaire, les contraintes pour ceux qui s’engagent reviennent à faire à peine mieux que ce qu’ils font déjà ou prévoyaient de faire tout seuls. Les autres pays ne signent pas.</p>
<p>En tout état de cause, le commerce des déchets dangereux correspond majoritairement à un échange entre pays du Nord à l’instar des autres déchets, et d’ailleurs aussi <a href="https://ourworldindata.org/international-trade">des marchandises en général</a>. Ainsi les dix premiers importateurs mondiaux de déchets sont tous des pays développés à l’exception de la Chine et de la Turquie ; et la moitié parmi ces plus grands importateurs fait également partie des <a href="https://econpapers.repec.org/article/eeejeeman/v_3a64_3ay_3a2012_3ai_3a1_3ap_3a68-87.htm">dix premiers exportateurs</a>.</p>
<p>Un modèle simple dit de gravité permet d’expliquer cette situation : comme pour l’attraction des planètes, les pays s’échangent d’autant plus entre eux que leur masse économique est élevée et que la distance qui les sépare est petite (voir appendice). Or les pays du Nord sont plutôt riches et plutôt proches les uns des autres.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/243269/original/file-20181031-122174-ym075.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243269/original/file-20181031-122174-ym075.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243269/original/file-20181031-122174-ym075.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243269/original/file-20181031-122174-ym075.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243269/original/file-20181031-122174-ym075.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243269/original/file-20181031-122174-ym075.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243269/original/file-20181031-122174-ym075.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243269/original/file-20181031-122174-ym075.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Plastiques (au Tibet…).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/carsten_tb/8411786387/">Carsten ten Brink/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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<h2>Flux mondiaux et problèmes planétaires</h2>
<p>Mais, comme pour n’importe quel bien échangé, la distance et la richesse économique ne sont évidemment pas les seuls déterminants des flux de déchets. Une langue commune, une frontière partagée, ou un lien colonial passé expliquent aussi en partie le commerce entre les pays. Dans le cas des déchets une variable originale pourrait jouer un rôle : la sévérité de la politique environnementale. Dans quelle mesure un différentiel entre deux pays en la matière agit-il sur les flux ? L’effet est-il significatif ? Son poids est-il grand par rapport aux déterminants classiques des échanges internationaux ?</p>
<p>Ces questions sont d’autant plus importantes que l’exportation de déchets revient à un déplacement de pollution locale. L’émission de CO<sub>2</sub> d’une entreprise chinoise dont nous achetons le produit alors qu’il était auparavant fabriqué en France ne change rien car l’effet de serre est un problème global. Peu importe d’où est émise une tonne carbone, que ce soit en France, au Canada ou en Malaisie. En revanche, si les déchets sont mis en décharge dans un autre pays les habitants du pays exportateur sont débarrassés des effets de leur pollution. En d’autres termes, il serait bon de savoir si la sévérisation des normes environnementales, par exemple pour les décharges ou les incinérateurs en France, a surtout pour conséquence de rendre les installations moins polluantes ou surtout de se débarrasser de leur pollution en l’envoyant ailleurs.</p>
<h2>Sévérité des législations et commerce mondial</h2>
<p>On dispose d’éléments de réponse mais pas de résultats tranchés. La difficulté réside dans l’absence de données objectives pour mesurer la sévérité des réglementations environnementales. En première approximation, elle peut être estimée par la richesse par habitant. L’idée sous-jacente est que plus cette dernière est élevée, plus les citoyens demandent une qualité élevée de leur environnement et plus sévères sont les réglementations. Une <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=1395442">étude économétrique</a> a ainsi mis en évidence que plus la richesse par habitant est grande moins le pays importe de déchets dangereux. Mais cette variable indicatrice de la sévérité joue un rôle beaucoup moins important que la distance entre pays.</p>
<p>Une autre approche consiste à apprécier la sévérité environnementale plus directement à partir de données d’enquêtes. Un chercheur de l’Université du Montana a par exemple forgé un indice de sévérité croissante de 0 à 100 à partir de réponses obtenues auprès de 10 000 dirigeants d’entreprises d’une centaine de pays. Son <a href="https://econpapers.repec.org/article/eeejeeman/v_3a64_3ay_3a2012_3ai_3a1_3ap_3a68-87.htm">étude économétrique</a> établit qu’une diminution de 10 % de la distance augmente de 15 % le commerce de déchets tandis qu’une chute de l’indice de sévérité de 10 % l’augmente de 3 %. Notez que dans les deux études il s’agit d’estimations de coefficients de corrélation et non de la démonstration de liens de causalité. Or corrélation n’est pas causalité car il peut y avoir des variables cachées communes derrière les corrélations (les quantités vendues de crème solaire et de crème glacée sont fortement corrélées mais sans lien de cause à effet) ou encore parce que les variables sont accidentellement liées (le taux de divorce dans le Maine est quasi-parfaitement corrélé <a href="http://tylervigen.com/spurious-correlations">avec la consommation de margarine aux États-Unis</a>). Ne suivez pas Coluche qui recommandait, faussement naïf, que « Quand on est malade il ne faut surtout pas aller à l’hôpital : la probabilité de mourir dans un lit d’hôpital est dix fois plus grande que dans son lit à la maison. »</p>
<h2>La Chine-poubelle, c’est fini, le reste de l’Asie en « profite »</h2>
<p>Mais revenons à la décision chinoise d’interdire l’entrée de déchets étrangers sur son sol. Elle marque la fin d’une époque, celle d’une Chine atelier du monde assoiffé de matières premières et sans égard pour les pollutions locales et les populations qui les subissent. À travers sa politique industrielle en faveur des hautes technologies, la Chine ambitionne désormais de devenir le laboratoire du monde. Rester la poubelle de la planète en absorbant plus de la moitié des importations mondiales de déchets et ferrailles fait tache.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/243261/original/file-20181031-122159-1wj5v66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/243261/original/file-20181031-122159-1wj5v66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/243261/original/file-20181031-122159-1wj5v66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/243261/original/file-20181031-122159-1wj5v66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/243261/original/file-20181031-122159-1wj5v66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/243261/original/file-20181031-122159-1wj5v66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/243261/original/file-20181031-122159-1wj5v66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/243261/original/file-20181031-122159-1wj5v66.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Traitement de déchets d’imprimantes à Guiyu, en Chine, en 2013.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/basel-action-network/9260717589/in/album-72157634590265221/">baselactionnetwork/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span>
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</figure>
<p>De plus, la réduction des pollutions locales est devenue une priorité. Or le recyclage des déchets s’il est improprement mis en œuvre et n’est pas correctement contrôlé contribue significativement à la pollution. Environ 15 % du plastique importé en Chine <a href="https://econ.st/2DUXCYN">pour être recyclé ne l’est pas</a> et une partie des quantités recyclées le sont dans des conditions très préjudiciables pour la <a href="http://wedocs.unep.org/bitstream/handle/20.500.11822/19316/TFGWM_Report_GRM_Plastic_China_LR_Velis_2014.pdf?sequence=1&isAllowed=y">main d’œuvre et l’environnement local</a>.</p>
<p>Enfin, la Chine a à faire avec ses propres déchets dont les quantités sont devenues considérables avec l’essor de la consommation. Pourquoi par exemple gonfler le volume de plastiques à traiter de 10 % <a href="http://advances.sciencemag.org/content/4/6/eaat0131.full">par l’importation</a> ? D’autant que le taux de recyclage de la production domestique reste faible, d’environ 10 % aussi, et que le même pourcentage se retrouve dans l’océan, la Chine arrivant très largement en tête des pollueurs de la mer par les plastiques.</p>
<p>La décision chinoise a créé un choc économique. Elle a entraîné une réorientation partielle des flux de déchets vers d’autres pays d’Asie, notamment en Thaïlande, Malaisie et Vietnam. Mais devant cet afflux et leur capacité de traitement limitée et sans commune mesure avec <a href="https://asia.nikkei.com/Spotlight/Asia-Insight/China-s-scrap-plastic-ban-saddles-neighbors-with-piles-of-problems">leur voisin chinois</a>, ces pays envisagent à leur tour d’imposer des restrictions à l’importation. Pendant ce temps, aux États-Unis, en Europe ou <a href="https://theconversation.com/chinas-recycling-ban-throws-australia-into-a-very-messy-waste-crisis-95522">encore en Australie</a> des monceaux de déchets plastiques et de papier-cartons s’accumulent. En outre, en réduisant la demande, la fin du débouché chinois provoque un effondrement du prix des plastiques et papiers-cartons à recycler, ce qui fait le bonheur des recycleurs dont certains reçoivent de l’argent pour transformer les déchets alors qu’ils devaient auparavant en donner.</p>
<p>À plus long terme, la décision chinoise n’est pas sans avantages à Beijing comme ailleurs. Elle devrait inciter les gouvernements à adopter des politiques nationales de recyclage plus ambitieuses, les industriels à investir en R&D et dans la technologie et les consommateurs à mieux maîtriser leur production de déchets.</p>
<p>En attendant, maintenant que vous savez que vos déchets peuvent partir au loin, qu’ils font de vous dans ce cas un exportateur de pollution locale, à vous de modifier votre comportement en consommant par exemple moins d’emballages plastiques. Ou à ne rien changer de vos habitudes ! Cette chronique vise à vous faire mieux comprendre l’économie non à dicter vos règles de conduite.</p>
<hr>
<p><strong>Appendice : La gravité du commerce international</strong></p>
<p>« Les astres s’attirent de façon proportionnelle au produit de leur masse et inversement proportionnelle au carré de la distance ». Cette loi de la gravitation inspirée par la chute d’une pomme à Newton lors d’une promenade nocturne dans un verger du Lincolnshire a elle-même inspiré un économiste hollandais, Jan Tinbergen, pour décrire les échanges internationaux. Ce n’est pas une coïncidence car Tinbergen qui fut le premier récipiendaire du prix de la Banque de Suède en sciences économiques est docteur en physique.</p>
<p>Appliquée au commerce entre les nations, la loi de gravitation devient « Le volume d’échanges entre deux pays est proportionnel à leur poids économique et inversement proportionnel à la distance »..</p>
<p>Soit l’équation :</p>
<p>VAB=G(PIBAxPIBB)/d</p>
<p>Où G est une constante, PIBAle produit intérieur brut du pays A, PIBBle produit intérieur brut du pays B et d la distance entre les deux pays.</p>
<p>En réalité, l’équation de gravité est un peu plus compliquée avec PIBA, PIBB et d élevés à des coefficients de puissance, mais les travaux économétriques fondés sur les échanges observés montrent que ces coefficients sont en général proches de 1. Autrement dit, en simplifiant, le volume des échanges augmente de 10 % lorsque la richesse du pays d’origine ou du pays de destination augmente de 10 % et diminue de 10 % lorsque la distance diminue de 10 %.</p>
<p>Les trois variables, richesse du pays A, richesse du pays B et distance permettent d’expliquer une grande partie des flux bilatéraux entre les pays. Il en donne une image juste à 80 %. Pour mieux coller encore à la réalité, il faut compliquer un peu les choses. Changer la mesure de la distance par exemple. Définie comme le nombre de kilomètres à vol d’oiseau séparant les capitales, elle sous-estime le poids des réseaux de transports et les obstacles naturels qu’ils doivent franchir.</p>
<p>Dans les modèles d’aujourd’hui, la distance est mesurée dans les modèles par le coût de transport ou mieux encore par l’ensemble des coûts de transaction, c’est-à-dire y compris ceux des formalités administratives et des barrières tarifaires ou non. L’ajout d’autres variables permet également d’augmenter la précision de l’image, en particulier l’existence d’un lien colonial entre les pays, le partage d’une même langue et la présence d’une frontière commune, trois paramètres qui augmente les flux d’échanges bilatéraux. Contrairement aux astres, l’attraction ou la répulsion entre pays dans leurs échanges dépend aussi de l’histoire et de la géographie.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/105721/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<h4 class="border">Disclosure</h4><p class="fine-print"><em><span>Le laboratoire de François Lévêque reçoit des aides à la recherches de nombreuses entreprises, notamment au cours des 5 années passées d’EDF, Microsoft et Philips. Par ailleurs, François Lévêque est Conseiller de référence chez Deloitte France.</span></em></p>Les principes de l’efficacité économique des échanges et le marché des déchets… dangereux ou non.François Lévêque, Professeur d'économie, Mines ParisLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/907882018-02-01T05:39:02Z2018-02-01T05:39:02ZLa consommation durable, un levier pour l’Europe<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/204013/original/file-20180130-107713-12phjkn.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les déchets électroniques, dont le volume augmente fortement depuis dix ans, sont parmi les plus difficiles à recycler.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/green-ram-card-collection-825262/">Fancycrave/Pexels</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/183036/original/file-20170822-1066-js7jb1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est republié dans le cadre de la Fête de la Science 2018 dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez tous les débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
<p><em>Thierry Libaert est intervenu au séminaire <a href="https://www.collegedesbernardins.fr/passe-et-avenir-de-la-civilisation-europeenne">« Passé et avenir de la civilisation européenne »</a> organisé par le Collège des Bernardins.</em></p>
<hr>
<p>L’Europe ne fait plus rêver. La totale indifférence dans laquelle se sont achevées les cérémonies de commémoration du 60<sup>e</sup> anniversaire du Traité de Rome, signé en 1957, confirme que le grand rêve des pères fondateurs est derrière nous. Du pantouflage chez Goldman Sachs de l’ancien président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, aux errements publics sur le glyphosate, la confiance des citoyens s’est érodée. Comment la rétablir ? Peut-être en luttant contre les pratiques abusives, obsolescence programmée en tête.</p>
<h2>Les pistes du retour à la confiance</h2>
<p>Pour que l’Europe inspire à nouveau confiance, trois voies complémentaires s’offrent à elle. Ses institutions doivent en premier lieu modifier leurs pratiques, pour prendre davantage en considération la voix de la société civile. L’Europe doit également s’inventer un nouveau récit, porté par une politique de communication globale et cohérente qui ne doit plus seulement être l’agrégation des communications de chacune de ses institutions. Enfin, les institutions européennes doivent se positionner fortement sur les nouveaux enjeux qui préoccupent la grande majorité des citoyens européens.</p>
<p>Au nombre de ces enjeux figure l’obsolescence programmée. De nombreux citoyens européens ont vécu, au moins une fois dans leur existence, la désagréable expérience de voir un produit neuf tomber en panne <a href="https://www.euractiv.fr/section/developpement-durable/news/des-chercheurs-s-interrogent-sur-l-obsolescence-programmee/">peu après son achat</a>. De retour au magasin, le consommateur s’entend alors suggérer qu’il ferait mieux d’en racheter un autre : pièces de rechange indisponibles, trop chères, délais de réparation interminables… Voire, pour certains appareils électroniques (ordinateurs, tablettes, smartphones), produits purement et simplement irréparables.</p>
<h2>Les subtilités de l’obsolescence programmée</h2>
<p>Bien que cette situation soit une réalité, l’obsolescence programmée a trop longtemps été présentée comme une manœuvre délibérée des industriels. Ceux-ci saboteraient eux-mêmes le fonctionnement de leurs produits pour accélérer leurs taux de renouvellement. Ces pratiques ont certes pu exister, notamment dans le secteur des imprimantes ou de l’électroménager, mais elles sont désormais rarissimes. </p>
<p>En effet, aujourd’hui aucune entreprise ne peut assumer le risque réputationnel lié à la divulgation d’un mécanisme délibéré de fin de vie de ses produits. En réalité, le problème de l’obsolescence programmée concerne davantage le vieillissement accéléré : mises à jour logicielles qui retardent la vitesse d’exécution des ordinateurs, incompatibilités techniques (obligation d’achat d’un nouveau chargeur à chaque acquisition d'un nouveau modèle de tablette), et, plus fréquemment encore, freins voire impossibilité de réparabilité des produits.</p>
<h2>Épuisement des ressources, pollution, chômage et endettement</h2>
<p>Les conséquences de cette obsolescence programmée sont multiples. Environnementales tout d’abord : c’est sous cet angle que le problème a commencé à émerger au début des années 60, avec la publication du livre de Vance Packard, <a href="https://www.jstor.org/stable/pdf/3320020.pdf?refreqid=excelsior%3Aab672fb51f12d52f011e4a0c31d21719"><em>L’art du gaspillage</em></a>. Non seulement l’obsolescence programmée participe-t-elle à la raréfaction des matières premières (60 métaux différents sont nécessaires pour fabriquer un smartphone, dont des métaux rares), mais surtout elle implique l’accroissement des déchets. C’est principalement le cas dans les filières électriques et électroniques, qui sont les moins facilement recyclables. Les déchets d’équipements électriques et électroniques sont l’un des flux de déchets dont la croissance est la plus rapide dans l’Union Européenne (3 à 5 % par an). Chaque année, <a href="http://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/waste/key-waste-streams/weee">10 millions de tonnes de ces déchets (appareils électroménagers, ordinateurs, imprimantes, appareils photo numériques…) sont jetés</a>. Une tendance qui va se poursuivre dans les années à venir, puisque les douze millions de tonnes devraient être dépassés en 2020.</p>
<p><br>
<a href="http://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/waste/key-waste-streams/weee"></a></p><figure><a href="http://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/waste/key-waste-streams/weee"><img src="https://i.imgur.com/K1C9aGq.gif"></a></figure><br><p></p>
<p>L’impact de l’obsolescence programmée ne se limite pas à l’environnement. Ses conséquences sont également sociales, car avec la fin de la réparabilité, c’est toute une filière d’emplois de proximité qui disparaît. <a href="http://www.rreuse.org/wp-content/uploads/Routes-to-Repair-RREUSE-final-report.pdf">Un rapport du Parlement européen</a> a ainsi montré en 2017 que 2 000 emplois avaient été perdus en sept ans aux Pays-Bas. En Allemagne, en une seule année, 13 % des magasins de réparation radio et TV ont fermé. Enfin, en France, en l’espace de deux ans ce secteur a perdu 8 % de ses effectifs. On comprend mieux ces chiffres si l’on sait que seuls 44 % des appareils électriques et électroniques qui tombent en panne sont effectivement réparés…</p>
<p>Outre les pertes d’emploi, cette obsolescence programmée a un autre impact sociétal majeur. L’observation des pratiques de consommation indique en effet que les produits les moins chers sont, en toute logique, prioritairement achetés par les catégories professionnelles les plus défavorisées. Or, ces produits d’entrée de gamme sont souvent aussi les plus fragiles. En se retrouvant obligés de racheter fréquemment des produits même peu onéreux, les ménages les plus modestes sont entraînés dans une spirale négative qui peut les mener à un endettement massif.</p>
<h2>Une carte à jouer pour l’Europe</h2>
<p>Les problématiques liées à l’obsolescence programmée dépassent les enjeux socio-économiques, pour toucher également à la santé publique et à l’éthique professionnelle (déchets envoyés dans les pays en développement, <a href="http://geopolis.francetvinfo.fr/l-afrique-reste-desarmee-face-aux-dechets-electroniques-qui-s-accumulent-150743">par exemple</a>). Cette situation pourrait toutefois constituer un avantage pour les entreprises qui fabriqueraient des produits durables. Celles-ci pourraient espérer tirer parti de la désaffection des citoyens européens devant les produits « jetables ».</p>
<p>Pour y parvenir, les solutions ne manquent pas. La première consisterait à mettre en place un dispositif d’affichage de la durée de vie des produits. Ce dispositif présenterait l’avantage d’être peu onéreux, et surtout de redonner le pouvoir au consommateur. <a href="http://www.eesc.europa.eu/fr/news-media/press-releases/label-durable-56-de-vente-en-plus-pour-les-produits-longue-duree-de-vie-le-cese-publie-une-nouvelle-etude-sur">Testée en 2015 sur plus de 3 000 consommateurs européens</a> répartis dans quatre grandes zones géographiques, cette solution a fait ses preuves. Les consommateurs qui repèrent l’information sur la durée de vie des produits sont prêts à acheter plus cher des produits plus durables. La boucle est donc vertueuse puisqu’elle profite aussi bien au consommateur qu’à l’entreprise.</p>
<p>Extension du système de garantie, réorientation des dépenses publiques… Des solutions complémentaires existent, sur lesquelles pourraient s’appuyer les futures politiques européennes. Un groupe de travail rassemblant des représentants d’entreprises, des consommateurs, des environnementalistes et des syndicats a permis d’en identifier une vingtaine, listées dans notre dernier ouvrage, <a href="http://www.lespetitsmatins.fr/collections/deprogrammer-lobsolescence/"><em>Déprogrammer l’obsolescence</em></a>.</p>
<h2>Quasi-unanimité contre l’obsolescence programmée</h2>
<p>Aujourd’hui, toutes les composantes de la société civile et l’ensemble des formations politiques, à l’exception des mouvements populistes, s’accordent à considérer que l’obsolescence programmée est un sujet majeur que la Commission européenne doit désormais prendre en compte. Pour preuve, l’avis que nous avions proposé en octobre 2013 au Comité économique et social européen avait été voté à la quasi-unanimité. Il en a été de même en juillet 2017 lors du <a href="http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+TA+P8-TA-2017-0287+0+DOC+XML+V0//FR">vote d’une résolution du Parlement européen</a> sur le sujet.</p>
<p><a href="http://www.lemonde.fr/entreprises/article/2017/12/29/apple-s-excuse-et-reduit-le-cout-de-remplacement-de-ses-batteries_5235580_1656994.html">La récente reconnaissance par Apple</a> de ses pratiques de vieillissement anticipé, la recevabilité d’une <a href="https://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/obsolescence-programmee-enquete-ouverte-sur-le-fabricant-d-imprimantes-epson_1972203.html">plainte contre le groupe Epson</a>, tout ceci prouve, s’il en était encore besoin, la réalité des pratiques non conformes. Celles-ci sont en conflit avec l’idéal d’une Europe initiant une transition économique plus juste et plus responsable. La lutte contre ces dérives, qui concernent chaque consommateur, pourrait faire réémerger le sentiment d’une Europe proche des préoccupations de chacun, une Europe de proximité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/90788/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thierry Libaert est membre de Comité Economique et Social Européen de Fondation pour la Nature et l'Homme, de La fabrique Ecologique, de Comité d'Ethique Publicitaire.. </span></em></p>Et si la lutte contre l’obsolescence programmée permettait à l’Europe de regagner la confiance de ses citoyens ?Thierry Libaert, Conseiller au Comité Économique et Social Européen, Collège des BernardinsLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/648452016-11-02T23:01:06Z2016-11-02T23:01:06ZLe Fairphone ou les balbutiements de la téléphonie éthique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/143816/original/image-20161030-15816-gx9787.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Des enfants montrant leur récolte de cuivre, un matériau essentiel à la fabrication des téléphones portables, en République démocratique du Congo. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/fairphone/5503465235/in/photostream/">Fairphone/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span></figcaption></figure><p>Depuis une dizaine d’années, le marché mondial du <em>smartphone</em> connaît une croissance <a href="http://www.zdnet.fr/actualites/chiffres-cles-les-ventes-de-mobiles-et-de-smartphones-39789928.htm">quantitative</a> forte, globale et régulière. Le volume total d’unités vendues devrait passer de 300 millions en 2010 à quelque 2 000 millions en 2020. Pour 2016, on table sur 1 500 millions d’unités écoulées.</p>
<p>Dans le même temps, le bilan énergétique et éthique du secteur et de l’<a href="https://theconversation.com/leconomie-numerique-est-une-industrie-lourde-1-donner-ces-donnees-50674">économie numérique au sens large</a> demeure largement négatif et préoccupant.</p>
<p>La fabrication des téléphones, qui se fait désormais essentiellement en Asie, nécessite des substances à la fois toxiques et non biodégradables (arsenic, béryllium, mercure, plomb, tantale) dont l’extraction a des impacts humains et environnementaux souvent catastrophiques. De plus, ces appareils ne sont pas souvent conçus pour être réparables, ils seront donc rarement réparés !</p>
<p>Pire, <a href="http://www.arehn.asso.fr/dossiers/telephone_portable/telephone_portable.html">après une durée de vie très courte</a>, ils ne sont quasiment pas recyclés. On les retrouve soit dans nos tiroirs, soit en direction de l’Asie, Chine ou Inde en tête, pour un démantèlement dans des conditions discutables, soit en direction de l’Afrique et de ses décharges électroniques sauvages comme celle <a href="https://oooohlaa.wordpress.com/2012/05/05/agbogbloshie-plus-grande-decharge-electronique-dafrique/">du Ghana à Accra-Agbogbloshie</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/za-IAaMiHkw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Le débat «Où vont nos déchets électroniques ?» (Public Sénat, 2011).</span></figcaption>
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<h2>Un marché dominé par Samsung et Apple…</h2>
<p>Sur le front des terminaux, les deux entreprises continuent à <a href="http://www.zdnet.fr/actualites/chiffres-cles-les-ventes-de-mobiles-et-de-smartphones-39789928.htm">dominer l’offre mondiale</a> et ce malgré les récents déboires industriels de Samsung et l’infléchissement des ventes de Apple sur les marchés matures. En 2016, Samsung représente ainsi 22 % du marché mondial, Apple 12 %, Huawei 10 %, Lenovo (en incluant les marques <a href="http://www.nextinpact.com/news/98001-lenovo-abandonne-marque-motorola-pour-moto.htm">Moto et Vibe, ex-Motorola</a>) 5 %, LG 4 % et Xiaomi 1 %.</p>
<p>Les autres constructeurs sont marginaux en terme de volume : c’est le cas de Microsoft et de son Windows phone (ex-Nokia) dont l’avenir semble compromis, de HTC après la dégringolade des ventes de 35 % en 2015 et de BlackBerry qui se recentre sur le logiciel et les services plutôt que sur ses terminaux dont les ventes ont fortement chuté.</p>
<p>Concernant les <a href="http://www.tomsguide.fr/article/guide-smartphone-acheter,2-1219-3.html">systèmes d’exploitation</a>, Android (Google) fait la course en tête avec 80 % de parts du marché suivi par l’iOS (Apple), qui arrive loin derrière avec 15 %, mais devant Windows Phone 10 et BlackBerry 10.</p>
<h2>… mais avec de multiples niches</h2>
<p>Dans ce marché très agressif, il est toutefois possible de surnager – voire de se faire une place au soleil – grâce à des stratégies et des produits de niche.</p>
<p>C’est le cas des <a href="http://www.lexpress.fr/diaporama/diapo-photo/tendances/produit-high-tech/smartphone-ultra-resistant-notre-selection_1732922.html">smartphones résistants</a> des constructeurs Caterpillar, Crosscal, Kyocera, MTT ou encore Jeep. C’est aussi vrai de certains smartphones ludiques, explicitement conçus pour les enfants via les marques Wiko, Samsung ou Lumia par exemple. C’est enfin le cas de smartphones compatibles avec des appareils auditifs, dotés d’une notice bien lisible et d’une touche « urgence », plutôt destinés aux <a href="https://www.quechoisir.org/guide-d-achat-telephones-mobiles-pour-seniors-n2371/">seniors</a>. Sur ce segment, on retrouve des acteurs classiques (Samsung, Apple, LG), mais aussi des constructeurs spécialisés comme Amplicomms, Doro ou encore Emporia.</p>
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<figcaption><span class="caption">Exemple de téléphone portable conçu pour les personnes âgées (La Quotidienne, 2013).</span></figcaption>
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<p>Dans cette offre diversifiée, on regrettera toutefois que les téléphones « éthiques » (réparables, recyclables, respectueux, sobres…) représentent une niche où les constructeurs n’osent s’aventurer. Pourquoi <a href="http://www.rts.ch/info/sciences-tech/6129384-les-marques-de-telephones-portables-classees-selon-leur-ethique.html">tant de légèreté ?</a></p>
<h2>L’éthique et la durabilité à la peine</h2>
<p>À la l’heure de la transition énergétique, la modularité, et donc la réparabilité, semble être une solution intéressante. Mais Google vient de renoncer récemment à son projet de <a href="http://www.01net.com/astuces/projet-ara-google-met-son-smartphone-modulaire-au-placard-1032803.html">téléphone modulaire</a>, Ara, pour d’obscures raisons liées aux reconfigurations au sein de l’entreprise à la suite de sa prise de contrôle par Alphabet.</p>
<p>Mais dans ce segment, l’entreprise néerlandaise <a href="https://www.fairphone.com/fr/">Fairphone</a> continue, tel un irrésistible village gaulois, de creuser le sillon de l’éthique et de la durabilité. Elle s’accroche sur le marché, encore symbolique quantitativement, en proposant après son Fairphone 1 – un semi-échec – le Fairphone 2 – un semi-succès.</p>
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<figcaption><span class="caption">Fairphone, le premier smartphone éthique (Arte, 2016).</span></figcaption>
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<p>Fin 2013, le <a href="http://www.lesnumeriques.com/telephone-portable/fairphone-fairphone-p16466/test.html">Fairphone 1</a> créait une belle surprise et récoltait un joli succès d’estime sur le marché polluant et énergivore des téléphones. L’entreprise proposait pour 310 euros, hors frais de port, un appareil qui n’utilisait pas de métaux rares en provenance de pays en guerre, était assemblé dans des usines respectant les protections sociales minimales, était pensé pour être réparable et donc recyclable et dont la batterie et la connectique étaient standards.</p>
<p>Ce modèle ne remporta pas un franc succès commercial, avec seulement 60 000 exemplaires vendus. Un semi-échec probablement imputable à un manque de puissance et à un design trop classique.</p>
<p>Fin 2015, le <a href="http://www.lesnumeriques.com/telephone-portable/fairphone-fairphone-2-p26923/test.html">Fairphone 2</a> arrive sur le marché pour 525 euros. Il est présenté comme équitable et évolutif. La firme cible 100 000 à 150 000 exemplaires en 2016, ce qui reste marginal comparé aux énormes volumes des leaders du secteur.</p>
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<figcaption><span class="caption">«Les secrets inavouables de nos téléphones portables» (Cash Investigation, 2015).</span></figcaption>
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<h2>Être « fair », ça veut dire quoi ?</h2>
<p>La firme néerlandaise se positionne comme respectueuse des personnels, de la durabilité et de la sobriété. Ces trois dimensions sont largement absentes des stratégies des leaders du marché et – doit-on le regretter ? – tout aussi éloignées <a href="http://www.jeuxvideo.com/forums/42-51-42077122-1-0-1-0-decouverte-du-fairphone.htm">des préoccupations</a> des jeunes et moins jeunes acheteurs qui survalorisent le prix, le design et la performance. La prise en compte de l’<a href="http://images.cigref.fr/Publication/2014-CIGREF-Ethique-et-Numerique-une-ethique-a-reinventer-Rapport-mission-F-FISCHER.pdf">éthique dans le numérique</a> reste à balbutiante.</p>
<p>Sur son site Internet, l’entreprise s’engage donc à s’approvisionner en métaux et minéraux dans des mines convenablement exploitées. Concrètement, l’entreprise ne peut le garantir que pour l’étain, le tantale, le tungstène et l’or, mais il s’agit là d’une <a href="https://www.fairphone.com/en/2016/06/20/fairphone-2-good-vibrations-with-conflict-free-tungsten-2/">avancée symbolique</a> pour le secteur de la téléphonie.</p>
<p>Le groupe réinvestit entre outre quelque 67 euros par téléphone vendu dans des programmes sociaux et environnementaux destinés à améliorer les étapes de sa production. La firme travaille enfin au respect du bien-être des ouvriers de son sous-traitant assembleur chinois Hi-P. En fin de vie, les Fairphone hors service sont <a href="https://www.fairphone.com/fr/2015/03/26/latest-news-on-ghana-e-waste-collection-program/">recyclés sous contrôle</a> au Ghana.</p>
<p>Pour les circuits imprimés du Fairphone 2, l’or utilisé a été certifié Fairtrade, grâce à un partenariat avec Max Havelaar. C’est une première dans l’industrie électronique, qui est pourtant le troisième marché pour l’or !</p>
<p>Comme il est indiqué sur la notice et le site support, le terminal est en grande partie <a href="https://shop.fairphone.com/en/accessories/">modulaire</a> donc démontable et réparable. « Déclipsable », la coque donne accès à la batterie – qui coûte 20 euros – et au bloc-écran – qui coûte 85 euros – ainsi qu’à trois autres modules dévissables. Un premier bloc intègre le haut-parleur, le vibreur, le port USB et le micro. Un second bloc, la prise casque, l’écouteur, la LED et la caméra frontale. Un dernier est consacré au module photographique.</p>
<p>Cette modularité permet d’éventuelles réparations ou remplacements pour allonger la durée de vie l’appareil. Sa collecte et son recyclage en circuit contrôlé sont prévus… si l’utilisateur à la bonne idée de le rapporter.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le design modulaire du Fairphone 2 (Fairphone, 2015).</span></figcaption>
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<p>L’entreprise propose assez peu d’applications préinstallées, laissant l’utilisateur libre de ne pas le surcharger et donc de ne pas surconsommer d’énergie. On y trouve quand même <a href="https://fr.ifixit.com/">iFixit</a>, l’application de référence pour la réparation high-tech ainsi que Peace of mind qui permet de protéger les données.</p>
<h2>Quelle place pour des terminaux plus durables ?</h2>
<p>Outre le combat symbolique, mais utile, mené par Fairphone, il existe <a href="http://www.lesnumeriques.com/legrandforum/avis/Mobilite-Telephonie-GPS/telephone/smartphone-durable-excellentes-sujet_5951_1.htm">assez peu</a> de projets similaires. Une petite entreprise finlandaise – Circular Devices – cherche à commercialiser un PuzzlePhone composé de trois modules. Notons aussi les projets de ZTE avec son téléphone Eco-Mobius et Xiaomi avec son Magic Phone.</p>
<p>Et l’on pourra enfin tout simplement regretter les disparitions des constructeurs américains (Motorola) et européens (Nokia, Erikson, Sagem, Thomson) et noter l’apparition de <a href="http://www.latribune.fr/technos-medias/20121229trib000739801/le-premier-smartphone-africain-fait-son-apparition-au-congo.html">matériel africain</a> (Elikia). Insistons enfin sur la concentration de la production en Asie (Chine, Corée, Japon, Taiwan) ce qui augmente les coûts et impacts liés aux transports des matériels, de <a href="https://theconversation.com/rien-ne-sert-de-produire-responsable-il-faut-acheter-durable-51414">leurs matières premières et de leurs composants</a>.</p>
<p>Sur le marché de la téléphonie et de ses « milliers de millions » d’appareils vendus, comme sur les autres, l’impulsion décisive viendra certainement des consom’acteurs qui par leurs achats – ou non – orienteront peu à peu les offreurs vers une prise en compte de la durabilité, l’éthique, la sobriété ou la frugalité, aujourd’hui largement ignorées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/64845/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Bidan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le succès d’estime du téléphone Fairphone peine à masquer la difficile percée des matériels éthiques et durables sur le gigantesque marché de la téléphonie mobile mondiale.Marc Bidan, Professeur des universités, management des systèmes d’information, Université de NantesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/670062016-10-13T18:27:32Z2016-10-13T18:27:32ZEn Europe, les initiatives se multiplient pour en finir avec le tout jetable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/141637/original/image-20161013-31319-107dss8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Réparer plutôt que remplacer.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.shutterstock.com/pic-329931380/stock-photo-man-repairing-broken-smartphone-in-workshop.html?src=utJgq-9-6Ak0LXXn59ab6A-1-0">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Serait-on en train d’assister à la fin de l’ère du tout jetable ? Ces cinquante dernières années nous ont donné des grilles-pain irréparables à la moindre petite panne, des T-shirts qui rétrécissent et se délavent en un clin d’œil, des aspirateurs qu’il faut changer après quelques années d’utilisation seulement.</p>
<p>Une « obsolescence programmée » dont les smartphones sont les témoins privilégiés : qui n’a jamais constaté le <a href="http://www.theweek.co.uk/59708/does-apple-slow-old-iphones-when-a-new-model-comes-out">fonctionnement altéré</a> de son ancien appareil après l’installation d’une mise à jour « essentielle » ? Cette réalité concerne en fait tout un tas de produits, des vêtements aux lunettes, pour lesquels on propose sans arrêt de nouvelles collections visant à encourager la consommation.</p>
<h2>Des actions récentes</h2>
<p>On peut cependant se réjouir d’une décision récente du gouvernement suédois qui a décidé de faire <a href="https://www.thelocal.se/20160917/sweden-wants-to-make-repairing-things-cheaper">passer la TVA de 25 % à 12 %</a> sur les réparations. Il s’agit du dernier signe d’une remise en cause en Europe de la culture consumériste (« extraire, fabriquer, consommer, jeter ») qui se trouve au cœur de nos économies industrialisées.</p>
<p>En France, l’obsolescence programmée est depuis 2015 passible de <a href="http://www.lefigaro.fr/conso/2015/07/25/05007-20150725ARTFIG00002-l-obsolescence-programmee-est-desormais-un-delit-passible-de-prison.php">deux ans d’emprisonnement</a> et d’une amende qui peut aller jusqu’à 300 000 euros. Et l’Espagne est récemment devenue le premier pays a instaurer un objectif visant à accroître la réutilisation des produits. Pendant ce temps, l’<a href="http://www.umweltbundesamt.de/en">Agence</a> fédérale de l’environnement a commandé une étude sur la durée de vie des produits électriques dans le but de développer des stratégies anti-obsolescence.</p>
<h2>L’Europe passe à l’action</h2>
<p>Il faut replacer ces décisions dans le cadre d’initiatives européennes pour soutenir le développement durable, notamment sur les fronts des déchets et de l’économie circulaire, qui promeut l’utilisation des objets et leur recyclage aussi longtemps que possible.</p>
<p>La <a href="http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=URISERV%3Aev0010">directive relative aux déchets</a> adoptée en 2013 attend ainsi de chaque membre de l’Union qu’il mette au point un programme de prévention en ce domaine. Les autorités britanniques ont d’ailleurs été les premières à s’engager dans cette voie. Dan Rogerson, l’ex-ministre alors en charge de ces questions, a été jusqu’à <a href="https://www.gov.uk/government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/265022/pb14091-waste-prevention-20131211.pdf">déclarer</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Les objets devraient être conçus pour avoir des durées de vie longues, incluant la possibilité de la réparation et de la réutilisation. »</p>
</blockquote>
<p>Un <a href="http://eur-lex.europa.eu/resource.html?uri=cellar:8a8ef5e8-99a0-11e5-b3b7-01aa75ed71a1.0003.02/DOC_1&format=PDF">plan d’action</a> de l’Union européenne a été ajouté à ce texte en 2015, afin que la Commission s’engage à examiner l’ampleur du phénomène de l’obsolescence programmée et agisse en conséquence.</p>
<p>La <a href="http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32009L0125&from=EN">directive EcoDesign</a> de 2009 qui visait dans un premier temps à mettre en œuvre l’efficacité énergétique, s’applique désormais aux cycles de vie des produits. Ce texte exige déjà que les aspirateurs qui seront mis en vente dans l’Union à partir de septembre 2017 soient équipés de moteurs conçus pour durer au moins 500 heures. D’autres produits devraient être prochainement soumis aux mêmes impératifs.</p>
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<figcaption><span class="caption">Les principes de l’économie circulaire (Fondation Ellen MacArthur, 2013).</span></figcaption>
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<h2>Des habitudes de consommation bien ancrées</h2>
<p>Le coup de pouce suédois à l’allégement de la fiscalité sur les réparations représente toutefois un succès modeste pour les militants écologistes, compte tenu de la forte pression qui pèse sur les États de l’Union pour pratiquer les mêmes taux de TVA. Et, malheureusement, cela n’aura certainement qu’un effet modéré sur la demande de réparation.</p>
<p>Une <a href="http://www.jstor.org/stable/40647716?seq=1#page_scan_tab_contents">étude</a> suggère en effet que la réduction de taxes ne serait en mesure de faire une grosse différence sur le prix au point d’amener les consommateurs à opter pour cette option : les habitudes de consommation sont très profondément ancrées et, dans la durée, remplacer l’appareil défectueux demeure souvent la solution la moins coûteuse.</p>
<p>Mais cette initiative est un signal positif : les gouvernements européens commencent à réagir favorablement aux actions menées à Bruxelles par des <a href="http://www.eeb.org/index.cfm?LinkServID=1E2E1B48-5056-B741-DB594FD34CE970E9">ONG de défense de l’environnement</a>. D’autres évolutions peuvent être attendues, en particulier de la <a href="http://www.rreuse.org/wp-content/uploads/Routes-to-Repair-RREUSE-final-report.pdf">délivrance de manuels</a> d’entretien comportant des informations techniques pour aider les réparateurs indépendants et les usagers à faire durer les produits.</p>
<h2>Réparer, une pièce du puzzle</h2>
<p>L’initiative de l’UE dans le domaine de l’économie circulaire est très significative. Ceci étant dit, une économie authentiquement durable ne pourra se contenter seulement d’accroître le recyclage, du fait que les procédés nécessaires à la collecte, au démontage et à la réutilisation des produits usagés sont énergivores – et consomment la plupart du temps des énergies fossiles.</p>
<p>De plus, les métaux, plastiques et textiles recyclés présentent souvent certaines limitations qui menacent la qualité de la production. Dans bien des cas, il faudra ajouter des matériaux neufs… Le produit composé à 100 % de matériaux recyclés n’existe pas encore.</p>
<p>Le véritable changement nécessitera d’allonger la durée de vie des produits de sorte que <a href="https://www.theguardian.com/business/2016/jan/18/weve-hit-peak-home-furnishings-says-ikea-boss-consumerism">moins de nouveaux objets</a> soient fabriqués. Réparer et réutiliser font partie de ce processus, mais il semble tout aussi essentiel que les objets soient conçus dès le départ pour <a href="https://www.routledge.com/Longer-Lasting-Products-Alternatives-To-The-Throwaway-Society/Cooper/p/book/9780566088087">durer plus longtemps</a>.</p>
<p>Un tel programme réclame de profonds changements au niveau culturel et systémique : les entreprises devront apprendre à survivre en vendant moins et en misant sur des produits durables que les consommateurs choisiront d’acheter et de conserver.</p>
<p>Après tout, aucun bénéfice ne peut être tiré d’un appareil qui serait fabriqué pour durer et dont on se <a href="http://www.wrap.org.uk/content/study-re-use-potential-household-bulky-waste">débarrasserait prématurément</a>…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/67006/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tim Cooper a reçu des financements du EPSRC (réf. EP/N022645/1). </span></em></p>La décision de la Suède en faveur de la réparation est le signal le plus récent d’une lutte contre l’obsolescence programmée qui s’organise au sein de l’Union européenne.Tim Cooper, Professor, Head of Sustainable Consumption Research Group, Nottingham Trent UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/647882016-09-07T18:36:43Z2016-09-07T18:36:43ZDes chars aux éoliennes, irremplaçables « terres rares »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/136721/original/image-20160906-6127-tjzwg4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Plusieurs métaux appartenant aux terres rares entrent dans la fabrication des turbines des éoliennes. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/gumuz/2634719424/in/photolist-51PChY-eEHhvG-c6QUXY-pC5hDR-8zHgnk-c8rbtd-9KK5C1-a8MWhG-a9AEDz-6jNcrX-aDywKR-aDyxWB-7Bovvi-7Jdfto-GzCfrk-fQgApw-6iyLbu-4MeYMH-H7BtJ5-og81Tq-oXH68F-aDyxP2-4V6osU-yTZQdB-azJoxW-8yRkis-odbLnN-oSbhUF-9ZCF6B-o6N71Y-6JtA7m-7hL9AT-23JwVQ-otXRma-oaHwJn-o6MY2o-4m25LP-6gQAc4-6gQBdt-fmJYKp-p7is1J-sb3ug6-iS3nM-qrsPn-moDvx-sqm4nV-8vtyWQ-9mNwZb-5GJUS-8Pvkrp">Guyon Morée/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Ces éléments chimiques « stratégiques », devenus essentiels à la construction de nos équipements high-tech, font l’objet d’une attention grandissante de la part d’entreprises de hautes technologies comme d’associations de défense de l’environnement, voire de rivalités géo-économiques entre États.</p>
<p>En France, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques vient ainsi de remettre <a href="http://www.assemblee-nationale.fr/14/dossiers/enjeux_terres_rares_matieres_premieres_strategiques.asp">son rapport</a> sur « Les enjeux stratégiques des terres rares et des matières premières stratégiques et critiques » à l’Assemblée nationale.</p>
<p>La problématique des terres rares concerne aussi bien des filières industrielles comme l’<a href="http://www.ccfa.fr/Le-developpement-du-marche-de-l-163491">automobile</a>, que de <a href="https://www.senat.fr/questions/base/2014/qSEQ14020720S.html">lointains territoires français</a> comme <a href="http://la1ere.francetvinfo.fr/qu-est-ce-que-la-visite-des-rois-apporte-wallis-et-futuna-380999.html">Wallis et Futuna</a>.</p>
<h2>Pas si rares que ça</h2>
<p>Le terme désigne des métaux correspondants à 17 éléments chimiques.</p>
<p>Dans la classification périodique des éléments <a href="http://www.espace-sciences.org/explorer/animations-en-ligne/la-table-de-mendeleiev">(table de Mendeleïev)</a>, il s’agit de la famille des <a href="http://national.udppc.asso.fr/index.php/component/content/article?id=414:lanthanides-presentation">lanthanides</a>, qui regroupe 15 éléments chimiques allant du numéro atomique 57 au numéro atomique 71 (le numéro atomique désignant le nombre de protons du noyau d’un atome. Il est noté « Z »).</p>
<p>On leur ajoute le scandium (Z=21) et l’yttrium (Z=39) pour constituer le groupe des 17 éléments chimiques concernés. Ils sont ainsi regroupés du fait de leurs propriétés voisines et exceptionnelles, notamment sur les plans électrochimique et magnétique.</p>
<p>Ces éléments chimiques ne sont en réalité pas si rares, dans le sens où ils sont assez abondants dans la croûte terrestre. Mais leur grande dispersion dans les minerais rend difficiles et coûteuses leur extraction et leur séparation. Cela explique que l’identification de gisements exploitables soit un enjeu si considérable.</p>
<p>Ce groupe d’éléments chimiques se divise en terres rares « légères » (Z=57 à 62) et « lourdes » (tous les autres). Ce sont ces dernières, relativement moins répandues, que l’on retrouve fréquemment dans les applications high-tech.</p>
<p>Les terres rares sont généralement récupérées dans deux types de minéraux : la bastnaesite et la monazite. Ce sont les dépôts de ces deux minéraux qui sont recherchés par les géologues des offices nationaux spécialisés et par des opérateurs miniers privés du monde entier pour identifier des gisements potentiellement exploitables.</p>
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<figcaption><span class="caption">Reportage d’Arte sur les terres rares (Global Metal Broker, 2014).</span></figcaption>
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<h2>De remarquables propriétés</h2>
<p>Ils interviennent dans la production de composants présents dans les téléphones portables et <em>smartphones</em>, les appareils hi-fi, télé et vidéo, les écrans d’ordinateurs, les tablettes, les moteurs hybrides. Ils entrent également dans la fabrication des aimants permanents nécessaires à beaucoup de ces produits.</p>
<p>Ils sont tout aussi <a href="http://www.fas.org/sgp/crs/natsec/R41347.pdf">essentiels</a> à la production de lampes fluorescentes et à basse consommation, d’unités médicales d’examen aux rayons X, de nombreux alliages ; ils jouent également un rôle important dans le processus de raffinage du pétrole.</p>
<p>Chimiquement, on les utilise comme catalyseurs, éléments d’alliages pour en modifier les propriétés mécaniques ou électromagnétiques ; ils entrent encore dans certains processus optiques (lampes fluorescentes, lasers).</p>
<h2>Des équipements militaires aux technos vertes</h2>
<p>L’approvisionnement en terres rares impacte donc la plupart des technologies du XXI<sup>e</sup> siècle, y compris militaires qui en dépendent très largement, sinon totalement.</p>
<p>Pour l’<a href="http://www.gao.gov/new.items/d10617r.pdf">armée américaine</a>, le recours à ces éléments concerne ainsi tous les systèmes utilisant des lasers, les systèmes de communication, les munitions guidées à haute précision, les radars (l’Aegis Spy-1), les dispositifs de vision nocturne, les technologies liées aux satellites, les chars (dont le tank M1A2 Abrams, notamment par leur intervention dans les alliages utilisés pour les blindages dits « intelligents »), ainsi que dans l’aéronautique.</p>
<p>Ces éléments chimiques sont donc remarquables pour leurs qualités à la fois électrochimiques, magnétiques ou optiques ; dans l’état actuel des connaissances et des technologies, aucune autre série d’éléments chimiques ne présentent de telles propriétés : ils sont irremplaçables.</p>
<p>Les terres rares interviennent également dans la plupart des technologies existantes ou innovantes liées à l’énergie et à l’environnement ; on pense ici aux turbines des éoliennes ou à ces additifs aux carburants destinés à réduire la pollution. Autant d’actions cachées et cruciales de ces matériaux dans notre quotidien.</p>
<h2>Rares et très convoitées</h2>
<p>L’intensité des enjeux autour des terres rares provient de la combinaison de la géographie physique et de la géopolitique.</p>
<p>Il faut d’abord rappeler que la plupart des matières premières essentielles à nos économies ne sont pas réparties de manière homogène à la surface de la Terre. Ensuite, les conditions technologiques, financières, juridiques et économiques permettant l’exploitation des gisements ne sont pas toujours réunies. Cela réduit d’autant la disponibilité de chaque matière première à un moment donné.</p>
<p>Les terres rares n’échappent pas à cette problématique géographique et donc géopolitique. Quelques données statistiques simples fournies par le <a href="http://www.usgs.gov">US Geological Survey</a> permettent ainsi de contextualiser le cas des terres rares, montrant une nette domination chinoise sur ce marché (voir ci-dessous).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/136779/original/image-20160906-25244-1dued8r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/136779/original/image-20160906-25244-1dued8r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/136779/original/image-20160906-25244-1dued8r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/136779/original/image-20160906-25244-1dued8r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/136779/original/image-20160906-25244-1dued8r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=383&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/136779/original/image-20160906-25244-1dued8r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=482&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/136779/original/image-20160906-25244-1dued8r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=482&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/136779/original/image-20160906-25244-1dued8r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=482&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">US Geological Survey, Mineral Commodity Summaries, 2013, 2014 et 2015.</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Une telle situation explique que les industries concernées par les terres rares se mobilisent aujourd’hui pour trouver des alternatives d’approvisionnement et des solutions technologiques pour réduire les quantités nécessaires ou même s’en passer ; sans parler du fait que l’exploitation des terres rares constitue une activité <a href="http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2012/07/19/en-chine-les-terres-rares-tuent-des-villages_1735857_3216.html">très polluante</a>.</p>
<p>On voit ainsi émerger le <a href="http://sites.arte.tv/futuremag/fr/urban-mining-recycler-les-metaux-pourrait-valoir-de-lor-futuremag"><em>urban mining</em></a> (ou « exploitation minière urbaine ») qui consiste à recycler les métaux contenus dans nos objets technologiques.</p>
<p>Paradoxalement cela augure donc d’innovations à venir nombreuses et déterminantes qui, malgré la lenteur de leurs effets, contribueront à long terme au développement de technologies ayant moins d’impact sur l’environnement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/64788/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ludovic Jeanne ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le scandium, l’yttrium et les quinze lanthanides : des matières minérales incontournables pour les technologies du XXIᵉ siècle et dont l’exploitation soulève de nombreuses questions.Ludovic Jeanne, Directeur de l’Institut du Développement Territorial (IDéT), Laboratoire Métis, EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/575442016-04-10T20:19:29Z2016-04-10T20:19:29ZLes mauvais chiffres du recyclage des déchets électroniques en Europe<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/118054/original/image-20160410-23638-blumxd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/derekgavey/5528275910/in/photolist-9qvRPU-bLHrwi-8YLgQX-71ZqRK-r9M5u1-ppBKWa-au6fnN-5YkE1i-4AG1JM-7QP7Tr-q37HTR-dMg6xj-8VJ3c1-cPBQ9b-aoMdqA-67DZrK-8pkdHj-7MAGHG-cZeixE-664H1p-5LCQti-7RKjng-iyK6kv-8VF9je-83BuMZ-724G1R-79Fpp6-92ELV5-aEaqPS-aEaqjo-2enbb-5jvYPz-fJkuRv-5fA3Ls-fJC3Dd-6ZcL1D-9bX7qC-7MwHu6-54vopH-4G7VAo-fJkwdk-bwCBcN-aAwnhe-ec7qGE-4G3Kbi-nWQ8qM-nWQ8bi-tkNwv7-FKbvNi-EKUbmE">Derek Gavey/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/227138/original/file-20180711-27030-14gt88i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/227138/original/file-20180711-27030-14gt88i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/227138/original/file-20180711-27030-14gt88i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/227138/original/file-20180711-27030-14gt88i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/227138/original/file-20180711-27030-14gt88i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/227138/original/file-20180711-27030-14gt88i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/227138/original/file-20180711-27030-14gt88i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">DR.</span>
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<p><em>Cet article est republié dans le cadre de l’initiative « Quelle est votre Europe ? » dont The Conversation France est partenaire. Retrouvez toutes les informations, débats et les événements de votre région sur le site <a href="https://bit.ly/2qJ1aUH">quelleestvotreeurope.fr</a></em></p>
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<p>Les progrès technologiques dans le domaine des téléphones portables, tablettes, ordinateurs et autres matériels électroniques rendent ces objets, devenus aujourd’hui indispensables, de moins en moins chers et toujours plus puissants. Mais cela signifie aussi que nous en changeons plus fréquemment et qu’ils deviennent indésirables et obsolètes plus vite, finissant immanquablement à la poubelle. Ces immenses quantités de déchets électroniques sont devenues un souci environnemental, sanitaire et économique de premier plan.</p>
<p>Un <a href="http://www.cwitproject.eu/wp-content/uploads/2015/08/CWIT-Final-Summary1.pdf">récent rapport</a> du Projet CWIT (Lutte contre le commerce des déchets d’équipements électriques et électroniques), financé par l’Union européenne, souligne ainsi que seul un peu plus d’un tiers de ces déchets est pris en charge dans des circuits officiels de collecte et de recyclage. Le reste – environ 6 millions de tonnes par an – est soit exporté (1,5 million de tonnes), soit recyclé en dehors de tout cadre législatif (3,15 millions de tonnes), soit récupéré en décharge (750 000 tonnes) ou simplement mis au rebut. Compte tenu de <a href="http://unu.edu/news/news/ewaste-2014-unu-report.html">l’énorme quantité</a> de déchets électroniques produits au niveau mondial, la destination de tous ces biens de consommation constitue un vrai problème. Leur fabrication, coûteuse en énergie et en matériaux, a en outre des conséquences désastreuses sur les ressources naturelles et l’environnement.</p>
<h2>Une grave menace pour l’environnement</h2>
<p>Tous les déchets électroniques ne se valent pas. Certains peuvent contenir des centaines, voire des milliers, de substances potentiellement très toxiques ou de grande valeur. Et c’est précisément cela qui conduit au vol de matériaux : en 2012, l’UE a ainsi estimé que le vol de composants et matériaux précieux contenus dans les déchets électroniques atteignait entre <a href="http://www.cwitproject.eu/wp-content/uploads/2015/08/CWIT-Final-Summary1.pdf">800 millions et 1,7 milliard d’euros</a>. La plupart de ces déchets sont composés de métaux – or, plomb, nickel, argent, étain, zinc – ainsi que de matières plastiques réutilisables. Les éléments dangereux concernent l’amiante, les batteries, les cartes de circuits imprimés et les cartouches de toner des imprimantes.</p>
<p>La mise au rebut de ce type de matériaux de grande valeur représente un immense gaspillage. Mais l’économie de leur extraction ne fonctionne pas de façon satisfaisante en Occident. Bien souvent, les déchets électroniques sont exportés vers les pays en voie de développement et finissent dans des circuits de recyclage informels conduits par des individus ou des <a href="http://efface.eu/sites/default/files/EFFACE_Illegal%20shipment%20of%20e%20waste%20from%20the%20EU.pdf">réseaux criminels</a>. Dans certains pays, le matériel est brûlé en plein air ou traité à l’aide d’acides dangereux pour en extraire les métaux précieux.</p>
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<p>Des circuits de recyclage ont cependant vu le jour dans les pays développés ; l’UE a été pionnière sur ce terrain en adoptant le principe du <a href="https://www.gov.uk/government/collections/producer-responsibility-regulations">« producteur payeur »</a>, obligeant les constructeurs, et parfois même les importateurs et les revendeurs, à soutenir financièrement la collecte et le recyclage de leurs produits – en s’assurant d’avoir recours à des méthodes respectueuses de l’environnement.</p>
<p>Cette demande est apparue pour la première fois en 2006 avec la directive sur les déchets électroniques, qui a notamment revu à la hausse les objectifs de recyclage de ces déchets ; en 2012, une autre directive a étendu sa définition des déchets électroniques et a introduit des restrictions plus sévères sur leur exportation illégale. Chaque année, l’UE se débarrasse d’environ 9,5 millions de tonnes de déchets électroniques. On estime également que sur les 1,3 million de tonnes de déchets électroniques exportés sans documents officiels, 70 % fonctionnent et auraient pu continuer à être utilisés.</p>
<h2>Des risques sanitaires avérés</h2>
<p>Les déchets électroniques ont longtemps atterri en décharges. Mais le déversement d’éléments hautement toxiques provenant de ces objets hors des décharges – dans les nappes phréatiques par exemple – mit en avant la nécessité de renforcer les contrôles. Les problèmes liés à ce type de déchets dans les pays en développement sont plus graves encore et menacent l’environnement et la santé. L’incinération de plastiques au grand air ou encore les fraudes associées au démantèlement et au traitement non conformes des déchets électroniques tels qu’on peut les observer en Chine, au Nigéria ou en Inde représentent de sérieuses menaces sanitaires.</p>
<p>Guiyu en Chine ou Agbogbloshie au Ghana sont ainsi devenues célèbres pour leurs <a href="https://www.researchgate.net/publication/271969357_Comparative_Studies_on_E-Waste_Disposal_Practices_in_Developing_Countries_and_Their_Environmental_Effects_An_Example_between_Guiyu_China_and_Agbogbloshie_Ghana">décharges numériques non réglementées</a>, très polluées, et ayant recours à une main-d’œuvre exploitée. Les métaux ne se dégradant pas dans l’environnement, ils peuvent s’accumuler, contaminer le sol, les eaux souterraines et les créatures qui y vivent.</p>
<h2>Une addition très salée</h2>
<p>Au-delà des impacts néfastes sur l’environnement et la santé, cette absence de traitement et recyclage adéquats des déchets électroniques <a href="https://ec.europa.eu/easme/en/news/prospecting-critical-raw-materials-e-waste">coûte très cher</a>. La perte de matériaux précieux, utiles et <a href="http://ec.europa.eu/growth/sectors/raw-materials/specific-interest/critical/index_en.htm">souvent rares</a>, provenant de ces déchets non traités se chiffre, on l’a vu, en millions d’euros. </p>
<p>Il y a aussi des risques éthiques relatifs au travail des enfants, notamment en Asie et en Afrique. L’expédition illégale de ces produits des pays riches vers d’autres plus pauvres, qui ne disposent pas d’installations appropriées, est en effet très répandue. Le lien étroit entre des <a href="http://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/@ed_dialogue/@sector/documents/publication/wcms_196105.pdf">déviances d’ordre éthique</a> dans la gestion des déchets électroniques et les dommages environnementaux et sanitaires a été mise en évidence. Prévenir ces expéditions illégales pourrait ainsi atténuer ces effets néfastes.</p>
<p>Alors que la population mondiale devrait atteindre 9 milliards de personnes en 2050, conduisant à une augmentation dramatique de la quantité de déchets électroniques à traiter, il devient urgent de mettre en place des lois, des règlements et des procédures appropriées.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/57544/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ian Williams receives funding from EU and EPSRC.</span></em></p>Seul un tiers de ces déchets est pris en charge dans des circuits officiels de collecte et de recyclage.Ian Williams, Professor of Engineering and the Environment, University of SouthamptonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.