tag:theconversation.com,2011:/global/topics/entrepreneuriat-25460/articlesentrepreneuriat – The Conversation2024-03-25T10:51:38Ztag:theconversation.com,2011:article/2261442024-03-25T10:51:38Z2024-03-25T10:51:38ZEntrepreneurs, comment faire face à la solitude du dirigeant ?<p>La vie d’un entrepreneur n’est pas un long fleuve tranquille, notamment lors des premières années suivant la création de son organisation. Le créateur d’entreprise se trouve notamment confronté à un fort sentiment d’isolement, généré par l’incertitude et la complexité de l’environnement, la peur de l’échec, le poids des responsabilités, les préjugés à l’égard des chefs d’entreprise et la difficulté à concilier vie personnelle et vie professionnelle. En effet, une <a href="https://presse.bpifrance.fr/download?id=17144&pn=a63a9cc8e1d38a3ef0fca1a0169b52bd.pdf">étude</a> montre que 45 % des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/dirigeants-dentreprise-143599">dirigeants</a> de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/petites-et-moyennes-entreprises-pme-21112">petites et moyennes entreprises</a> (PME) ou d’entreprise de taille intermédiaire (ETI) déclarent se sentir isolés pour ces raisons.</p>
<p>Dans la littérature, le sentiment d’isolement est décrit comme une émotion néfaste qui affecte le bien-être de l’individu. En psychologie, la solitude est perçue comme un <a href="https://psycnet.apa.org/record/2006-21836-011">ensemble de sentiments complexes</a> ressenti lorsque les besoins d’un individu ne sont pas satisfaits. Cette solitude peut être inhérente à la personnalité de l’entrepreneur, telle que la timidité, la faible estime de soi, ou résulter de facteurs personnels ou professionnels.</p>
<h2>« J’avais besoin de soutien »</h2>
<p>La solitude peut être à la fois <a href="https://www.cairn.info/revue-de-l-entrepreneuriat-2010-1-page-82.htmUR">objective et/ou subjective</a>. La solitude objective se manifeste par une privation de compagnie humaine, tandis que la solitude subjective est un état d’âme ressenti émotionnellement. Nos études sur les <a href="https://www.cairn.info/les-faces-cachees-de-l-entrepreneuriat--9782376873341-page-160.htm">entrepreneurs marginalisés et/ou précaires</a> ont notamment mis en évidence la vulnérabilité de ces individus, notamment les <a href="https://www.taylorfrancis.com/chapters/edit/10.4324/9781315794570-11/supporting-training-female-necessity-entrepreneurs-walid-nakara-nesrine-bouguerra-alain-fayolle">femmes</a> ou les <a href="https://www.amazon.fr/Perception-lEntrepreneuriat-chez-jeunes-difficult%C3%A9s/dp/6202261242">jeunes issus de quartiers défavorisés</a>. Quelle que soit sa forme, la solitude ressentie par les entrepreneurs et chefs d’entreprise peut et doit être endiguée ou minimisée.</p>
<p>Pour lutter contre l’isolement des entrepreneurs, une première approche consiste à réduire la solitude objective par la solidarité entrepreneuriale. Ainsi, les espaces de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/coworking-27599">coworking</a>, les chambres de commerce et d’autres réseaux professionnels favorisent une meilleure intégration des entrepreneurs et peuvent contribuer à surmonter l’isolement.</p>
<p>Un entrepreneur que nous avons rencontré dans le cadre de nos recherches en témoigne :</p>
<blockquote>
<p>« Travailler dans un espace de coworking m’a permis d’échanger avec mes pairs […] j’ai réalisé que je n’étais pas seul […] j’ai trouvé mon premier client grâce à un contact rencontré lors d’un événement réseau organisé par la chambre de commerce ».</p>
</blockquote>
<p>Le deuxième conseil pour combattre la solitude subjective est de privilégier l’entrepreneuriat collectif. Les structures d’accompagnement, telles que les coopératives d’activités et les sociétés de portage, réduisent le risque juridique et offrent un contrat d’entrepreneur salarié, conciliant autonomie de l’entrepreneur et protection sociale.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/582778/original/file-20240319-16-yj9a8d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/582778/original/file-20240319-16-yj9a8d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/582778/original/file-20240319-16-yj9a8d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/582778/original/file-20240319-16-yj9a8d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=392&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/582778/original/file-20240319-16-yj9a8d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/582778/original/file-20240319-16-yj9a8d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/582778/original/file-20240319-16-yj9a8d.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=493&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’entrepreneuriat collectif, un levier pour limiter la solitude subjective.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://pxhere.com/fr/photo/1432563">Pxhere</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p>Notre recherche auprès d’une société coopérative et participative (SCOP) révèle que, sur les 100 nouveaux porteurs de projets intégrant la coopérative, 30 se sont immatriculés principalement pour rompre l’isolement et tisser des partenariats. Un entrepreneur détaille son choix :</p>
<blockquote>
<p>« Je ne pouvais plus tout gérer seul […] j’avais besoin de soutien […] mon comptable et mon assurance étaient onéreux […] seul, je ne pouvais pas répondre à certaines demandes ou viser d’autres marchés ».</p>
</blockquote>
<p>Le modèle de cette SCOP illustre le succès de l’entrepreneuriat collectif dans la réduction de l’isolement. Alors que les faillites inquiètent parmi les très petites entreprises (TPE), le taux de pérennité à 5 ans des SCOP augmente, atteignant <a href="https://www.les-scop.coop/chiffres-cles-2023">76 % en 2023 contre 61 %</a> pour l’ensemble des entreprises françaises.</p>
<h2>Mieux accepter l’échec</h2>
<p>Ce succès s’explique notamment par un meilleur accompagnement, un réseau solide et un soutien efficace aux entrepreneurs. Le mode de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/entrepreneuriat-25460">l’entrepreneuriat</a> collectif prôné par ces coopératives montre une vraie réussite dans l’accompagnement, le réseautage et le soutien aux entrepreneurs luttant par là même contre l’isolement des entrepreneurs.</p>
<p>Au-delà de la lutte contre l’isolement, il reste par ailleurs essentiel de s’appuyer sur d’autres leviers pour renforcer l’activité entrepreneuriale.</p>
<p>À court ou moyen terme, cela passe en particulier par un changement des mentalités et une meilleure acceptation de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/echec-47709">l’échec</a>. Diminuer l’écart entre ceux qui aspirent à entreprendre et ceux qui franchissent le pas nécessite une valorisation accrue du risque et une meilleure protection des entrepreneurs.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/226144/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>En plus de ses activités d'enseignant, Farba Ndour est directeur général de la coopérative d'entrepreneurs Crealead.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Walid A. Nakara ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La recherche a identifié plusieurs pistes pour limiter le sentiment d’isolement que de nombreux créateurs d’entreprise peuvent ressentir au moment de prendre une décision qui les engage.Walid A. Nakara, Professeur, Directeur de la Chaire BEST, Montpellier Business SchoolFarba Ndour, Professeur, ESI Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2237652024-03-04T11:17:54Z2024-03-04T11:17:54ZComment le sport pratiqué par les étudiants façonne-t-il leur carrière ?<p>Sur les réseaux sociaux professionnels, chaque début de semaine arrive avec son lot de publications de cadres et dirigeants qui vantent leurs performances sportives du week-end. À grand renfort de photos, ils montrent l’endurance (marathon, trail, cyclisme, triathlon…) ou l’agilité (escalade, surf, kite…) dont ils ont fait preuve en pratique libre ou en compétition, comme autant de compétences qu’ils jugent utiles dans le contexte de leur travail. Les mérites du <a href="https://theconversation.com/topics/sport-20624">sport</a> sur la santé physique et mentale ne sont plus à démontrer. Il est devenu aussi un moyen de se développer personnellement et professionnellement.</p>
<p>Alors que l’on pointe parfois une génération rivée à ses écrans, 2600 étudiants d’écoles de commerce nous ont détaillé leur pratique sportive, la manière dont elle a façonné leur <a href="https://theconversation.com/topics/personnalite-46122">personnalité</a> et les <a href="https://theconversation.com/topics/competences-80203">compétences</a> qu’elle leur a permis de développer en lien avec leur <a href="https://theconversation.com/topics/carrieres-32607">projet professionnel</a>. Il s’agissait aussi de comprendre comment le poste occupé dans un sport d’équipe peut permettre d’optimiser ses choix de carrière et son épanouissement au travail. L’étude a été menée par le <a href="https://www.edhec.edu/fr/recherche-et-faculte/centres-et-chaires/edhec-newgen-talent-centre">NewGen Talent Centre</a>, centre d’expertise de l’EDHEC sur les aspirations, comportements et compétences des nouvelles générations de diplômés. Nous y explorons ce qui développe les compétences et façonne la personnalité des jeunes générations pour favoriser leur investissement et épanouissement professionnels.</p>
<h2>Des différences de genre</h2>
<p>Les jeunes générations définissent presque à l’unanimité leur rapport au sport comme un plaisir et comme une pression stimulante. Trois jeunes sur quatre le pratiquent de façon régulière, ce pour se dépasser plus que pour gagner. Ils sont deux tiers à savoir se motiver seuls, sans besoin d’un coach. S’ils préfèrent néanmoins concourir pour un club, c’est notamment pour le lien social.</p>
<p><iframe id="DdtHh" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/DdtHh/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Quelques différences de genre apparaissent dans le rapport que les jeunes générations entretiennent avec le sport : les jeunes femmes s’y adonnent plus encore que les hommes pour se dépasser plutôt que pour gagner. Les hommes exercent de façon plus régulière et concourent plutôt pour un club que pour eux-mêmes.</p>
<h2>Quels sports pour quelles compétences ?</h2>
<p>Pour identifier des compétences clés, les sports ont été regroupés par catégorie selon la façon de les pratiquer : en équipe pour les sports collectifs (football, basketball, rugby…) ; à deux ou en double face-à-face pour les sports de combats ou d’adversaires (tennis, judo, escrime…) ; individuels et évalués sur une mesure physique (temps, distance) pour les sports chronométrés ou mesurés (natation, athlétisme, tir à l’arc…) ; individuels et notés par un jury pour les sports artistiques ou acrobatiques (danse, patinage artistique, plongeon…).</p>
<p>Globalement, les sports individuels, notamment les sports chronométrés ou mesurés, ont été plus structurants pour les femmes et les sports d’opposition ou collectifs pour les hommes. Un étudiant explique :</p>
<blockquote>
<p>« L’esprit d’équipe retrouvé dans le football m’a appris à savoir défendre mes intérêts personnels tout en œuvrant à l’accomplissement d’un collectif. De plus, les notions de dépassement de soi d’un point de vue physique, accompagné à la créativité nécessaire, notamment pour le dribble, m’ont permis d’acquérir des valeurs qui me sont aujourd’hui indispensables. »</p>
</blockquote>
<p><iframe id="PxyKu" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/PxyKu/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Le sport semble agir comme catalyseur du développement des compétences en management chez les jeunes diplômés. Résilience, enthousiasme et agilité sont les compétences que les jeunes générations nous indiquent avoir les plus développées quel que soit le sport, des traits recherchés par les recruteurs. Ce trio de compétences est celui que les pratiquants du tennis ont le plus développé. À noter également que 38 % des joueurs de tennis ont renforcé leur pensée critique</p>
<p>Le football renforce avant tout les qualités collaboratives pour 83 % des joueurs et la fiabilité pour près de la moitié des pratiquants. Quant à la danse, elle développe l’attention aux détails de 80 % des adeptes et la précieuse créativité de 55 % d’entre eux.</p>
<p><iframe id="o7SKj" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/o7SKj/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Selon les étudiants, si tous les sports développent enthousiasme et agilité, chaque type de sports est plus particulièrement propice à l’acquisition de certaines compétences en particulier.</p>
<p><iframe id="lV9f0" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/lV9f0/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<h2>Quel positionnement sur le terrain ?</h2>
<p>En imaginant, l’entreprise comme un sport d’équipe, 32 % des répondants se projettent dans le rôle de capitaine, 27 % dans le rôle d’entraîneur, 19 % seraient attaquant, 14 % défenseur et 8 % arbitre.</p>
<p>Pour mieux comprendre les ambitions que sous-entendent ces choix, il leur a aussi été demandé de s’identifier selon trois profils d’ambition professionnelle issus d’une <a href="https://www.edhec.edu/sites/default/files/2022-10/ETUDE_NEWGEN-Newgen_newjob_rapport_detude-Mars2022.pdf">étude précédente</a>. Le premier, les compétiteurs, est centré sur le développement ambitieux de sa carrière, motivé par la perspective d’un poste de dirigeant, une responsabilité hiérarchique et une rémunération attractive. Le second, les engagés, est orienté sur les enjeux du monde, motivé par l’intérêt général, la culture et les valeurs de l’entreprise, l’utilité de sa mission. Le dernier profil est animé de l’envie d’innover, motivé par le challenge, la liberté d’action, l’autonomie dans les missions confiées et la conduite de projets. Il s’agit des entrepreneurs.</p>
<p>En fonction de leur genre et de leurs profils d’ambition, les étudiants se positionnent ainsi :</p>
<p><iframe id="fu059" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/fu059/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223765/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Par les compétences qu’il permet de développer, le sport que vous pratiquez entre aussi en interaction avec vos aspirations professionnelles.Geneviève Houriet Segard, Docteur en démographie économique, Directrice adjointe et ingénieur de recherche à l’EDHEC NewGen Talent Centre, EDHEC Business SchoolManuelle Malot, Directrice Carrières et NewGen Talent Centre, EDHEC Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2197332024-01-30T16:10:40Z2024-01-30T16:10:40ZL’éducation, nouvel eldorado pour les entrepreneurs ?<p>La privatisation de l’éducation est une <a href="https://link.springer.com/book/10.1007/978-3-031-37853-9">réalité désormais mondiale</a>. Prenant racine dans les politiques de dérégulation de l’économie et des services engagées à partir des années 1980, ce processus controversé pousse le champ éducatif et le rapport à l’éducation des sociétés vers une marchandisation toujours plus grande.</p>
<p>Au cœur de ces transformations figure l’arrivée de nouveaux acteurs : les « édupreneurs ». Contraction d’« entrepreneurs » et d’« éducateurs », le terme renvoie à une réalité nouvelle. Celle d’entrepreneurs qui proposent de révolutionner l’éducation dans son organisation (en la rendant moins bureaucratique), son modèle économique (en hybridant public et privé), ses normes (à travers une évaluation permanente), ses outils (numériques) comme dans ses pratiques pédagogiques (en valorisant l’innovation et la rupture), tout en dégageant des bénéfices pour leurs actionnaires.</p>
<p>Qui sont ces édupreneurs ? Comment s’organisent-ils dans ce qui s’apparente à un marché planétaire ? Quels sont les enjeux en termes de politiques éducatives ou d’égalité sociale et territoriale ? Que penser de cette promesse disruptive de penser et faire autrement l’éducation ?</p>
<h2>Le quasi-marché de l’éducation, terreau de l’édupreneuriat</h2>
<p><a href="https://www.dunod.com/histoire-geographie-et-sciences-politiques/geographie-education-concepts-enjeux-et-territoires">Présentée comme le plus grand marché du XXIᵉ siècle</a> (12 000 milliards de dollars en 2022), l’éducation mérite plutôt d’être qualifiée de quasi-marché. Placé sous autorité gouvernementale, le secteur combine en effet principes marchands et régulation publique. L’adoption de politiques de type <em>new public management</em> dans les années 1990 a mis en concurrence des « opérateurs de l’éducation » publics et privés.</p>
<p>La transformation du monopole public d’éducation en quasi-marché a favorisé l’émergence de nouveaux acteurs qui n’ont que peu à voir avec les habituels acteurs privés de l’éducation – écoles privées, congrégations religieuses. Issus du monde de l’entreprise, souvent soutenus par des investisseurs (fonds d’investissement, banques, investisseurs privés), ils voient dans la dérégulation de l’éducation un marché porteur.</p>
<p>Les premiers édupreneurs sont apparus aux États-Unis à la faveur de la réforme de 2001 autorisant la conversion d’écoles publiques en difficulté en <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/question-d-education/usa-l-irresistible-montee-des-charter-schools_1762397.html"><em>charter schools</em></a>, soit des écoles confiées à un opérateur privé qui a mandat pour améliorer les résultats et une liberté d’action pour le faire. Ils transforment des écoles publiques en entreprises promettant de faire mieux avec moins et d’en tirer des bénéfices.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/yvir2PqkXuQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Reportage de Vice News sur la montée du modèle des <em>charter schools</em> dans le Michigan, aux États-Unis (février 2020).</span></figcaption>
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<p>Leur modèle est simple : bénéficiant de subventions publiques pour gérer une ou plusieurs écoles, ils ont une liberté pédagogique et une liberté de recrutement, et sont tenus d’atteindre des objectifs chiffrés en termes de réussite scolaire. Ils s’organisent sous la forme de <em>chain schools</em>, à l’image des franchises commerciales (systématisant programmes, méthodes pédagogiques et marketing).</p>
<p>Scolarisant 7,5 % des élèves étatsuniens, le modèle s’est exporté notamment dans les pays des Suds. <a href="https://www.banquemondiale.org/fr/topic/education/overview">La Banque mondiale</a> l’impose comme un modèle réformateur des systèmes éducatifs publics conditionnant l’aide au développement.</p>
<h2>Les édupreneurs, des entrepreneurs comme les autres ?</h2>
<p>Surfant sur l’image positive de l’entrepreneur, l’édupreneur est présenté par ses promoteurs – gouvernements, institutions internationales ou fondations – comme la clé du changement et de la modernisation de systèmes éducatifs supposément en crise.</p>
<p>Assimilés à des « penseurs visionnaires » missionnés pour répondre aux défis de l’éducation et inventer de nouveaux modèles éducatifs, ils agissent dans quatre champs : la création et la gestion d’établissements, du primaire au supérieur), la fourniture de biens et de services éducatifs (aides aux devoirs, cours en ligne, orientation, etc.), la consultance auprès des autorités éducatives et enfin la fourniture de programmes et de matériels éducatifs.</p>
<p>Les édupreneurs répondraient à un double mot d’ordre : perturber et transformer l’éducation. Sont valorisés la souplesse de leur modèle économique (modèles hybrides associant entreprises à but lucratif et non lucratif), l’esprit de réforme permanente qui les animerait et une capacité à développer de l’innovation permettant d’améliorer productivité, efficacité et qualité de l’éducation.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lecole-en-panne-de-projet-politique-212040">L’école, en panne de projet politique ?</a>
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<p>À l’instar des entrepreneurs de la Silicon Valley auxquels ils sont comparés, les édupreneurs font l’objet d’une abondante médiatisation dont témoigne le classement annuel des édupreneurs <a href="https://www.forbes.com/sites/monicasager/2023/11/28/the-2024-30-under-30-education-entrepreneurs-are-bringing-digital-solutions-to-all-of-education-from-music-to-mental-health-to-special-ed/"><em>Forbes</em></a>. Héritiers d’une culture de l’entrepreneuriat, leur modèle éducatif serait fait d’audace, d’efficacité et répondrait aux enjeux éducatifs du XXI<sup>e</sup> siècle autour de la massification d’un enseignement de qualité.</p>
<h2>De la multinationale à l’auto-entrepreneur, une variété d’entreprises de l’éducation</h2>
<p>L’image du visionnaire de l’éducation qui crée son entreprise est trompeuse. Difficile à définir tant est sa diversité est grande, la réalité de l’édupreneuriat repose davantage sur des formes multiples d’entreprises que de structures individuelles, finalement peu nombreux. Trois grandes catégories se dégagent :</p>
<ul>
<li><p>Les <em>global édupreneurs</em>, des multinationales de l’éducation ayant investi dans l’enseignement supérieur et certaines niches considérées comme les plus rentables (management, informatique, santé hors médecine), puis diversifiées (<em>Edtech</em>, formation des enseignants, enseignement à distance).</p></li>
<li><p>Les entreprises de l’éducation, spécialisées dans l’enseignement primaire et secondaire possédant un portefeuille d’établissements à échelle régionale et nationale. Ce secteur très dynamique est l’objet de mouvements de type fusions et acquisitions.</p></li>
<li><p>Les auto-édupreneurs : petits entrepreneurs de l’éducation qui prospèrent dans les nouvelles technologies (start-up des <a href="https://theconversation.com/edtechs-quelle-place-dans-le-monde-dapres-132713"><em>Edtech</em></a>) et aux marges des systèmes éducatifs (écoles alternatives dans les Nords, écoles ou universités dans les zones rurales isolées ou urbaines périphériques des Suds).</p></li>
</ul>
<p>Derrière ce classement, on trouve de fortes différenciations géographiques. Aux États-Unis, les chaines d’écoles des édupreneurs entrent en concurrence frontale avec le secteur public. Investissant autant dans les quartiers pauvres que riches, fortement volatiles, au gré de leur rentabilité elles peuvent se déployer ou quitter un territoire, laissant derrière elles de <a href="https://www.revue-urbanites.fr/les-villes-americaines-obama-et-lecole-neoliberalisation-et-marchandisation-des-districts-scolaires-urbains">véritables déserts éducatifs</a>.</p>
<p>En Afrique de l’Ouest ou en Inde, les édupreneurs suppléent littéralement les écoles publiques. Le modèle <em>low cost</em> des édupreneurs y renforce les inégalités d’accès à l’éducation, sur les plans financier et géographique. En France, c’est dans le supérieur que les édupreneurs se développent le plus, grâce aux réformes sur l’apprentissage, et dans les <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/emploi/carriere/formation/alternance/hausse-du-nombre-d-apprentis-en-2022-ce-sont-essentiellement-des-apprentis-du-superieur-explique-le-syndicat-national-de-l-enseignement-technique-action-autonome_5690570.html">écoles primaires alternatives</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/2C3DAnqmtQQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Portrait d’une édupreneuse à Madagascar.</span></figcaption>
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<p>Le panorama très divers des entreprises laisse entrevoir des modèles éducatifs à bas coûts, encore peu rentables, surfant sur des niches d’opportunité (demande de <a href="https://theconversation.com/au/topics/pedagogies-alternatives-33357">pédagogies alternatives</a>, évitement de <a href="https://theconversation.com/parcoursup-les-adolescents-face-au-stress-des-choix-dorientation-203018">Parcoursup</a>) dont ressort une couverture sociale et territoriale très inégale qui joue aussi sur l’évitement scolaire et la peur des parents.</p>
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<p>Pour les promoteurs de l’édupreneuriat, l’éducation serait entrée dans l’ère des édupreneurs, alternative à la crise des systèmes éducatifs. Derrière la promesse d’innovations disruptives à visée transformative de l’éducation, on perçoit surtout des formes plurielles de privatisation, renforçant les inégalités éducatives.</p>
<p>Les édupreneurs, figures de proue de ces changements, s’apparentent davantage à des vitrines de paysages éducatifs concurrentiels où les établissements sont des opérateurs d’éducation et les familles des consommatrices, où nous serions ainsi tous responsables autant qu’entrepreneurs de notre formation – ce qui à l’évidence questionne le rapport de nos sociétés à l’éducation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/219733/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La privatisation de l’éducation est une réalité désormais mondiale. Elle fait émerger une figure souvent idéalisée, celle l’« édupreneur », et interroge le rapport de nos sociétés à l’éducation.David Giband, Professeur des Universités, Urbanisme et aménagement du territoire, Université de PerpignanKevin Mary, Maître de conférences en géographie, Université de PerpignanNora Nafaa, Chargée de recherche CNRS au laboratoire TELEMMe, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2164912023-11-06T11:16:28Z2023-11-06T11:16:28ZEn avoir marre de son job, faire un tour sur LinkedIn et se lancer en freelance pour doubler ses revenus ? L’envers du décor<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/556152/original/file-20231026-22-d69nb3.JPG?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C537%2C4031%2C2438&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un discours largement répandu sur Linkedin fait l'éloge de l'entreprenariat comme synonyme de revenus importants et de liberté.</span> <span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Un discours lancinant traverse la société : il en serait fini du salariat. Vive l’indépendance, le freelancing, l’entrepreneuriat ; fini la soumission, l’arbitraire, le manque de sens, les salaires ridicules. Les influenceurs LinkedIn rejoignent là les discours institutionnels de la BPI. À les entendre parfois, tout le monde pourrait être « solopreneur » à 10 000 euros par mois, nouveau graal des jeunes diplômés comme des reconversions de milieu de carrière. Puisqu’il est de bon ton de parler anglais pour son storytelling, permettez-nous de répondre « disclaimer : non ».</p>
<p>En effet, nos recherches conduisent à apporter de la nuance à ces affirmations, bien qu’elles s’inscrivent dans un réel enjeu du monde du travail. S’il n’est sans doute pas majoritaire, nous avons identifié qu’un réel sentiment de désillusion du salariat peut effectivement apparaître. Toutefois, si elles s’embarquaient ensuite dans une transition professionnelle vers le travail indépendant, elles seraient confrontées à un parcours fort différent de celui espéré.</p>
<h2>Des attentes déçues</h2>
<p>Pour analyser ce phénomène de « désillusion du salariat », nous sommes partis d’un modèle bien connu : celui de la <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/BF01384942">« brèche dans le contrat psychologique »</a>, proposé par Denise Rousseau, professeur à la Carnegie Mellon University. Le <a href="https://www.lavoisier.fr/livre/economie/contrat-psychologique-et-organisation/rousseau/descriptif_2947337">contrat psychologique</a>, c’est l’ensemble des attentes qu’un travailleur forme sur son entreprise. Celles-ci peuvent être explicites ou non et alignées ou non avec le contrat de travail.</p>
<p>Au fil de l’expérience de la relation d’emploi, des insatisfactions peuvent apparaître, créant alors progressivement le sentiment que ce contrat psychologique n’est plus rempli : un « coup de canif au contrat », appelé dans cette approche une « brèche ». La littérature académique a largement démontré que cette brèche aura ensuite des conséquences négatives : démotivation, intention de quitter l’entreprise, comportements nocifs et autres.</p>
<p>Devant l’ampleur de certains <a href="https://theconversation.com/quiet-quitting-au-dela-du-buzz-ce-que-revelent-les-demissions-silencieuses-192267">phénomènes récents</a> (croissance continue de l’activité entrepreneuriale, « big quit ») nous nous sommes demandé s’il ne pourrait pas exister une extension de ce modèle : un contrat psychologique avec le salariat en tant que système. Par extension, une brèche dans ce contrat pourrait donc inciter à quitter le salariat plutôt que de rechercher une amélioration de ses conditions de travail ou un autre poste. Nous avons fait l’hypothèse que de mauvaises conditions de travail pouvaient notamment pousser vers le travail indépendant.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1655829957665521670"}"></div></p>
<p>Le <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/JMD-10-2022-0257/full/html">premier test</a> que nous avons conduit semble la confirmer : dans le cas d’un management non-exemplaire, les personnes auraient simplement tendance à quitter leur entreprise, alors que dans le cas d’un équilibre vie privée/vie professionnelle insatisfaisant, elles seraient incitées à quitter le salariat. Enfin, un manque d’autonomie, de sens ou une surcharge de travail pourrait influer sur les deux possibilités : quitter son employeur ou sortir du salariat.</p>
<h2>Comment résister aux promesses ?</h2>
<p>Quel serait ensuite le parcours d’une personne déçue du salariat au point de chercher à retrouver un nouveau contrat psychologique satisfaisant en devenant indépendante professionnellement ? Elle serait alors portée à s’emballer devant la <a href="https://journals.openedition.org/rfsic/13000">prégnance d’un discours sur l’indépendance et l’entrepreneuriat fortement idéologique</a> et certainement trop optimiste.</p>
<p>Nous faisons en effet l’hypothèse que ces discours laudatifs sur les déroulements de carrière hors du salariat relèvent d’une <a href="https://www.persee.fr/doc/arss_0335-5322_1976_num_2_2_3443">« idéologie dominante »</a> au sens des sociologues Pierre Bourdieu et Luc Boltanski : une agrégation d’idées pas toujours cohérentes entre elles mais qui donnent à voir le monde d’une certaine manière et réduisent l’univers des possibles. Cette idéologie s’entretient dans ce qu’ils nomment des « espaces communs » – oui, nous prenons le parti d’appliquer un cadre théorique de 1976 au <em>copywriters</em> et autres <em>growthhackers</em> qui inondent vos flux LinkedIn.</p>
<p>Au delà du microcosme des métiers du digital, le discours sociétal actuel défend l’ensemble du travail indépendant et valorise la sortie du salariat, comme l’a <a href="https://journals.openedition.org/rfsic/13000">montrée notre analyse de corpus médiatique et Internet</a>. Quelqu’un frappé d’une brèche dans son contrat psychologique avec le salariat sera confronté à des affirmations séduisantes telles que :</p>
<blockquote>
<p>« <em>Parce que devenir Auto-Entrepreneur, c’est vivre de sa passion.</em> »</p>
</blockquote>
<p>Ou encore :</p>
<blockquote>
<p>« <em>Vous êtes demandeur d’emploi et vous souhaitez créer une entreprise ? La période de recherche d’emploi peut être le moment idéal pour vous lancer.</em> »</p>
</blockquote>
<p>Comment résister à une telle promesse lorsqu’on ne croit plus au modèle proposé par l’emploi salarié ?</p>
<blockquote>
<p>« <em>Dans un monde qui avance vite, les indépendants ou les freelances se démarquent et séduisent par leur mode de vie et de travail. Ils sont flexibles, mobiles et surtout libres »</em></p>
</blockquote>
<h2>Des parcours à tâtons</h2>
<p>Nous avons essayé de confronter ces discours à la réalité des parcours d’accès à l’indépendance. Nous avons tout d’abord vérifié que la majorité des personnes interrogées s’engageaient dans ce parcours non pas par « volonté d’entreprendre » (moins de 5 % des réponses), mais bien en opposition au monde salarié : (re) trouver du sens ou de l’autonomie, s’accomplir, équilibrer son temps professionnel… Rappelons néanmoins que la <a href="https://classiques-garnier.com/socio-economie-du-travail-2021-1-n-9-varia-entre-emploi-atypique-et-entrepreneuriat.html">majorité de ces parcours seront brefs et peu concluants</a>.</p>
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<p>Un des principaux enseignements a été le « tâtonnement » important des personnes, notamment au niveau statutaire. Loin d’être un schéma linéaire de transition rapide, nous avons montré que de très nombreuses configurations différentes d’étapes menant à l’indépendance sont possibles : avec ou sans passage par le chômage, avec ou sans formation complémentaire, souvent avec le test successif de plusieurs statuts juridiques différents (autoentreprise, entreprise, portage salarial)… Nous avons aussi identifié que les parcours qui « passent » par le statut d’autoentreprise tendent à s’y arrêter. C’est-à-dire que ce statut n’est pas un « tremplin » vers l’entrepreneuriat mais <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/4189659">plutôt une voie sans issue</a> – contrairement à l’entreprise classique et au portage salarial.</p>
<p>Nos travaux montrent ainsi qu’il est normal que des personnes soient attirées par les discours qui vantent des transitions vers l’indépendance présentées comme faciles et désirables : dès lors que leurs conditions de travail sont problématiques, elles peuvent expérimenter une brèche dans leur contrat psychologique avec le salariat. Toutefois, il est alors important pour elles de garder à l’esprit que non seulement, ce ne sont que des discours, <a href="https://www.erudit.org/en/journals/lsp/1900-v1-n1-lsp01577/1027211ar/abstract/">mais qu’ils ne sont pas neutres : ils supportent une idéologie</a>. La réalité d’une transition professionnelle pour quitter le salariat sera plus difficile, moins linéaire, et confrontera ces personnes à d’autres difficultés…</p>
<p>Si vous n’avez pas à accepter de subir des conditions de travail insatisfaisantes, dans ce cas, simplement changer d’employeur reste une possibilité pertinente et légitime. Même si vous ne gagnerez peut-être pas 10 000 € par mois.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216491/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Yves Ottmann est freelance. Il a comme clientes des entreprises du secteur des services aux travailleurs indépendants.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Cindy Felio, Emmanuel Abord de Chatillon et Fabienne Bornard ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Contrairement aux promesses de nombreux discours présents notamment sur LinkedIn, se lancer dans l’entrepreneuriat n’apporte pas forcément liberté et revenus mirobolants…Jean-Yves Ottmann, Chercheur en sciences du travail, Université Paris Dauphine – PSLCindy Felio, Psychologue, Chercheuse en Sciences de l’Information et de la Communication, Laboratoire MICA (EA 4426), Université Bordeaux MontaigneEmmanuel Abord de Chatillon, Professeur, Chaire Management et Santé au Travail, CERAG, INP Grenoble IAE, Grenoble IAE Graduate School of ManagementFabienne Bornard, Enseignant-chercheur en entrepreneuriat, INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2140112023-10-09T10:11:37Z2023-10-09T10:11:37ZRéussir sa start-up par l’échec accéléré : mode d’emploi des tests A/B<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/549318/original/file-20230920-27-rwxzyc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C567%2C3510%2C2411&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Tester, c’est se protéger de coûts en cas d’échecs.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/technologie-ecran-ecran-tactile-tablette-numerique-6476590/">Mikael Blomkvist / Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Aucun entrepreneur ou manager peut se vanter de ne s’être jamais trompé. L’échec fait partie du cours normal de la vie des entreprises et des organisations en général. Qu’il s’agisse d’innovation en termes de produit, de communication, de prix, de distribution, ou même de procédures logistiques, le taux d’échec importe moins que le <a href="https://hbr.org/2011/04/failing-by-design#:%7E:text=Principle%203%3A%20Be%20quick%20about%20it%E2%80%94fail%20fast.&text=Third%2C%20the%20sooner%20you%20can,in%20it%20is%20not%20large">risque associé à ces échecs</a>. Autrement dit, mieux vaut se tromper de nombreuses fois à petites échelles que de se tromper sur une décision d’envergure qui entrainera des dépenses déterminantes pour le futur de l’entreprise.</p>
<p>Parce qu’un échec peut coûter cher (argent, temps, réputation…), les entreprises peuvent se montrer réticentes à innover ou alors se contentent-elles de se réfugier dans des améliorations assez marginales de produits existants. L’enjeu est donc d’échouer rapidement et à moindre coût : « fail fast, fail cheap » comme on dit outre-Atlantique.</p>
<p>L’<a href="https://hbr.org/2023/07/its-ok-to-fail-but-you-have-to-do-it-right">échec accéléré</a> est une philosophie qui consiste à tester ses idées dans le cadre d’un processus itératif pour déterminer si elles ont ou non du potentiel. Cette approche permet de lancer à grande échelle les idées qui ont donné des résultats encourageants lors des tests et de retravailler (voire abandonner) les idées qui ne produisent pas les résultats attendus. On <a href="https://www.entrepreneur.com/growing-a-business/4-times-fail-fast-fail-cheap-is-the-wrong-advice/294308">réduit ainsi le coût et le temps</a> dédiés aux idées qui ne sont pas susceptibles de réussir.</p>
<p>Prendre la peine de tester ses idées avant d’engager des ressources potentiellement importantes n’est pas incompatible avec l’esprit entrepreneurial et la prise de risque, au contraire. Considérons un dirigeant d’entreprise d’expérience qui décide de pénétrer un marché international dont il pressent assez bien les évolutions. Certes, il n’aurait peut-être pas besoin de tests pour valider cette stratégie. Néanmoins, ceux-ci pourraient trouver leur utilité pour répondre à la question du « comment » mettre cette stratégie en œuvre (comment communiquer auprès du marché local par exemple) : si le but peut paraître clair, la façon de l’atteindre ne l’est pas forcément.</p>
<h2>Trois principes pour mener un bon test</h2>
<p>Le test A/B est une méthodologie utilisée dans divers domaines, notamment dans le domaine du marketing numérique et du développement de produits. Cette technique consiste à comparer deux versions ou plus d’une page Web, d’une application ou d’un produit pour déterminer laquelle est la plus performante sur des objectifs spécifiques tels que le taux de clics, le nombre de téléchargements ou d’achats.</p>
<p>En présentant différentes versions à des groupes d’utilisateurs distincts et en mesurant méticuleusement le comportement qui en résulte, les tests A/B dévoilent des informations sur ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas auprès du public ciblé. Ce processus permet aux organisations d’optimiser leurs produits, services ou contenus à partir de preuves empiriques plutôt que de se fier à l’intuition des managers.</p>
<p>L’exercice repose sur trois principes essentiels. Premièrement, il requiert un échantillon représentatif des clients ou des utilisateurs de l’organisation. Deuxièmement, les individus faisant partie de l’échantillon (autrement appelés les « participants ») doivent être assignés aléatoirement entre les différentes versions qui sont comparées dans le cadre du test A/B, une étape généralement automatisée à l’aide d’un logiciel comme <a href="https://support.google.com/optimize/answer/6197440">Google Optimize</a>, <a href="https://business.adobe.com/products/target/adobe-target.html">Abode Target</a> ou <a href="https://www.facebook.com/business/help/1159714227408868">Meta for Business</a>.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Chaque lundi, que vous soyez dirigeants en quête de stratégies ou salariés qui s'interrogent sur les choix de leur hiérarchie, recevez dans votre boîte mail les clés de la recherche pour la vie professionnelle et les conseils de nos experts dans notre newsletter thématique « Entreprise(s) ».</em></p>
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<p>Il ne faudrait pas qu’une éventuelle différence observée dans les réponses soit due à la façon dont a été constitué l’échantillon. Par exemple, prenons le cas d’un site Web utilisant un fond vert dans le pays A et un fond bleu dans le pays B. Si l’on observe davantage de clics dans un pays plutôt que dans l’autre, on ne peut pas être certains que la différence est attribuable au changement de couleur ou au pays dans lequel vivent les participants.</p>
<p>Troisièmement, un test A/B ne doit compter qu’un changement entre versions à la fois, au risque de ne pas être en mesure d’identifier précisément la cause d’une différence entre les versions. Soumettre une comparaison entre deux versions où varient à la fois le texte et la couleur et observer une préférence marquée pour l’une ne permet pas de tirer de conclusion : est-ce dû au texte ou à la couleur ? On ne peut isoler pas la cause des préférences.</p>
<h2>Une méthode en quatre étapes</h2>
<p>Dans le cadre de nos <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/14707853231165635">travaux</a>, nous avons développé une méthode permettant de conduire des expérimentations terrains (c’est-à-dire en conditions réelles, à la différence d’expérimentations en laboratoire où les conditions sont artificielles) à partir d’applications mobiles. Nous illustrons la procédure ici à l’aide d’un test A/B dont le but est d’établir quel format publicitaire est le plus efficace dans un jeu mobile entre la bannière (la publicité apparaît en bas ou en haut de l’écran) et l’interstitielle (la publicité couvre tout l’écran avant d’être fermée par l’utilisateur, généralement après un délai de cinq secondes).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/549312/original/file-20230920-27-2acicj.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/549312/original/file-20230920-27-2acicj.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/549312/original/file-20230920-27-2acicj.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/549312/original/file-20230920-27-2acicj.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/549312/original/file-20230920-27-2acicj.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/549312/original/file-20230920-27-2acicj.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/549312/original/file-20230920-27-2acicj.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/549312/original/file-20230920-27-2acicj.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Parce que les publicités bannières restent discrètes, elles ne dérangent pas vraiment les utilisateurs. Dans le même temps, elles sont peu susceptibles de générer des clics, alors qu’il s’agit d’une source importante de revenus pour les développeurs qui comptent sur la publicité pour monétiser leur app. Les publicités interstitielles, à l’inverse sont susceptibles d’agacer les utilisateurs. Mais précisément parce qu’elles sont très visibles, les chances que les utilisateurs cliquent dessus sont plus importantes. La question pour un développeur de jeux mobiles est donc de savoir s’il vaut mieux utiliser des publicités bannières ou interstitielles.</p>
<p>Pour répondre à cette question, nous avons lancé un test A/B en suivant les étapes suivantes :</p>
<ul>
<li>Identifier les éléments à tester et le nombre de versions</li>
</ul>
<p>Nous avons ici deux versions du même jeu mobile qui varie selon le format publicitaire. Une version A où les utilisateurs sont confrontés à des publicités bannières à l’écran d’accueil et une version B où les utilisateurs sont confrontés à des publicités interstitielles après avoir perdu et avant de retourner à l’écran d’accueil. La variable manipulée est ici le format publicitaire.</p>
<ul>
<li>Identifier les comportements à observer</li>
</ul>
<p>Nous avons choisi de comparer les deux formats sur trois mesures : le taux de clics publicitaires, le revenu publicitaire et l’engagement des utilisateurs mesuré par le nombre de parties jouées.</p>
<ul>
<li>Échantillonner et collecter les données</li>
</ul>
<p>Cette étape qui semble technique est en vérité automatisée par des outils en ligne dont l’usage ne requiert pas une expertise technique avancée.</p>
<ul>
<li>Analyser et interpréter les données</li>
</ul>
<p>De même, l’analyse des données peut être automatisée. Il faut néanmoins être en mesure de faire sens des résultats affichés à l’écran.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/549310/original/file-20230920-23-cx5jvs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/549310/original/file-20230920-23-cx5jvs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/549310/original/file-20230920-23-cx5jvs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=237&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/549310/original/file-20230920-23-cx5jvs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=237&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/549310/original/file-20230920-23-cx5jvs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=237&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/549310/original/file-20230920-23-cx5jvs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=298&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/549310/original/file-20230920-23-cx5jvs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=298&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/549310/original/file-20230920-23-cx5jvs.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=298&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ici, la ligne grise obtenue avec Google Optimize représente le format bannière (« Baseline »), et la ligne bleue le format interstitiel (« Variant A »). Les régions ombrées représentent les intervalles de confiance : il y a 95 % de chances que la véritable valeur d’une métrique (celle que l’on observerait en sondant toute la population) se situe dans la région ombrée. Moins les régions ombrées se chevauchent, plus on peut avoir confiance dans les résultats indiquant ici que le format interstitiel est plus performant que le format bannière.</p>
<p>La partie gauche du tableau porte sur les données observées alors que la partie droite fournit des statistiques sur les données modélisées à partir des données observées. On lit qu’il y a plus de 99,9 % de chance que le format interstitiel génère plus de revenus publicitaires que le format bannière à l’échelle de l’ensemble des utilisateurs. La différence entre les deux versions est estimée à plus de 1000 %.</p>
<p>Notre article donne davantage d’explications sur l’exploitation des statistiques calculées automatiquement par Google Optimize et fournit une procédure pour les calculer soi-même.</p>
<p>Les tests A/B sont particulièrement intéressants pour les entreprises du numérique en raison des dépenses limitées liées au changement d’un élément du service (changer le format publicitaire d’une app ne requiert que du code). Il devient donc possible de mener de nombreux tests en parallèle sur des échantillons différents et de maximiser la satisfaction des utilisateurs en testant continuellement des changements sur des aspects différents du service.</p>
<p>Dans ce cas, le coût réel de l’expérimentation est le coût d’opportunité qui consiste à fournir un service sous-optimal aux clients. Mais ne pas expérimenter signifie risquer de continuer à fournir un service qui ne satisfait pas autant les clients qu’une version alternative le ferait.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214011/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jamel Khenfer ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Puisqu’un échec peut s’avérer coûteux par une entreprise, autant l’avoir anticipé en testant ses idées. Une recherche récente propose une feuille de route à suivre.Jamel Khenfer, Associate Professor of Marketing, ExceliaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2134242023-10-05T17:48:21Z2023-10-05T17:48:21ZEntrepreneurs : faut-il toujours vouloir accélérer ?<p>Bien que les <a href="https://theconversation.com/topics/entrepreneuriat-25460">entrepreneurs</a> soient particulièrement touchés par la frénésie du travail, ils peuvent se positionner différemment par rapport à l’<a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/avec-philosophie/le-temps-peut-il-vraiment-s-accelerer-9389170">accélération du temps</a>. Ce concept a notamment été popularisé par les <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/resonance-9782707193162">ouvrages</a> du philosophe allemand Hartmut Rosa qui met en avant un paradoxe entre évolution des technologies et organisation du quotidien :</p>
<blockquote>
<p>« Plus on économise le <a href="https://theconversation.com/topics/temps-24254">temps</a>, plus on a la sensation d’en manquer. »</p>
</blockquote>
<p>À partir d’entretiens menés auprès de 54 entrepreneurs, âgés de 27 à 64 ans et évoluant dans des secteurs d’activité variés, nous montrons dans nos <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10551-023-05502-0">travaux</a> que ces derniers donnent un sens différent à leur activité selon qu’ils acceptent ou non l’accélération du temps. Les entrepreneurs qui composent avec elle perçoivent leur activité comme un moyen de rester occupés, d’éviter les questions existentielles, de s’amuser ou d’être efficaces, tandis que ceux qui y résistent peuvent voir dans l’entrepreneuriat un moyen de poursuivre des objectifs <a href="https://theconversation.com/topics/ethique-20383">éthiques</a>, de mieux faire leur travail, d’avoir des rencontres inattendues ou d’être <a href="https://theconversation.com/topics/creativite-33763">créatifs</a>.</p>
<p><iframe id="7MkOv" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/7MkOv/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<h2>Acceptation de l’accélération du temps</h2>
<p>Soucieux de rester occupés, certains entrepreneurs disent de manière explicite que « le travail sert à ne pas s’ennuyer ». L’un d’entre eux raconte avec humour qu’en raison de sa peur de l’ennui, il n’envisagerait pas de ralentir le rythme de travail, même s’il gagnait au loto.</p>
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<p>La crainte de se confronter à des questions existentielles peut également amener certains entrepreneurs à se réfugier dans un travail intense et à le considérer comme une thérapie :</p>
<blockquote>
<p>« Ne pas penser à autre chose. C’est un peu ça. J’ai besoin de travailler parce que si je ne travaille pas, je déprime. »</p>
</blockquote>
<p>Sur une note plus positive, certaines personnes interrogées décrivent le travail comme un moyen de s’amuser. Ainsi, le temps n’est pas perdu lorsqu’il est utilisé pour se divertir :</p>
<blockquote>
<p>« Le travail : c’est quelque chose qui nous permet de passer le temps et, dans la société dans laquelle nous vivons, de gagner notre vie. C’est pourquoi je veux qu’il soit amusant. Je ne veux pas m’ennuyer. »</p>
</blockquote>
<p>Enfin, certains entrepreneurs associent l’entrepreneuriat et l’efficacité :</p>
<blockquote>
<p>« Je veux que ça aille plus vite. En fait, je me dis : les gens veulent-ils changer le monde, changer la société, changer leur façon de faire ? »</p>
</blockquote>
<p>Dans cet espoir de conquérir des marchés ou d’être le plus utiles possible, certains d’entre eux affirment prendre des risques importants :</p>
<blockquote>
<p>« Nous en vendons 1000, puis nous allons à l’usine pour créer le produit. Cela nous permet d’aller beaucoup plus vite. »</p>
</blockquote>
<h2>Résistance à l’accélération du temps</h2>
<p>Résister à cette frénésie, au contraire, est présenté comme un moyen de regagner en sérénité :</p>
<blockquote>
<p>« Avant, si je prenais une heure pour moi, je culpabilisais. Aujourd’hui, si je m’accorde une journée, je ne culpabilise pas. Je vais aller me promener dans la forêt et je vais être bien. »</p>
</blockquote>
<p>Plutôt que de participer à une course contre la montre, certains répondants affirment consacrer du temps pour définir et atteindre des objectifs qu’ils jugent prioritaires. Un des entrepreneurs explique comment une période de recul lors d’un voyage à l’étranger lui a fait voir différemment sa mission dans le secteur de l’énergie :</p>
<blockquote>
<p>« Un soir, j’étais sur une colline à Conakry et j’observais la ville. Pour allumer un quartier, ils en éteignaient un autre : ils n’ont pas assez d’énergie pour tous. On redécouvre des problèmes en se rendant à douze mille kilomètres. »</p>
</blockquote>
<p>D’autres interviewés disent résister à la pression afin de prendre « le temps de bien faire les choses ». Prendre son temps est alors une condition de la qualité du travail :</p>
<blockquote>
<p>« Quand on court dans tous les sens, un des premiers sentiments qu’on a est de ne pas faire du bon travail car, quand on a quarante tâches en même temps, on va à l’essentiel. Pour moi, un travail bien fait, c’est avoir le temps de le faire, de bien le faire dans tous ses aspects et détails. »</p>
</blockquote>
<p>Quelques entrepreneurs remarquent qu’en résistant à l’accélération du temps, ils peuvent faire des rencontres fructueuses, qui permettent l’avancement de certains projets professionnels :</p>
<blockquote>
<p>« Par hasard, un soir, j’étais en Pologne et le responsable après-vente m’appelle. Avant de raccrocher, il m’a dit ceci : “Vous devez être au chaud parce que je suis frigorifié.” J’ai dit : “Où êtes-vous ?” Il m’a répondu : “A Varsovie”. J’ai dit : “Écoutez, je suis à cent kilomètres de Varsovie. Je fais un détour et vous retrouve là-bas.” Nous nous sommes retrouvés au Novotel de Varsovie et c’est là que le projet a pu émerger. »</p>
</blockquote>
<p>Enfin, certaines personnes interrogées profitent des périodes de solitude pour trouver l’inspiration et développer leur créativité :</p>
<blockquote>
<p>« Il y a eu une crise du travail en 2009. Alors, nous sommes partis en Chine en nous disant : “On va trouver une idée, on va trouver un projet, et on va pouvoir lancer notre entreprise à notre retour”. C’est ce qui s’est passé. »</p>
</blockquote>
<h2>Pour une intelligence des rythmes</h2>
<p>Notre étude montre que, chez les entrepreneurs les deux discours ne s’opposent pas forcément, mais se complètent. Certains interviewés ont cherché à échapper à l’ennui en se précipitant dans une activité entrepreneuriale intense, puis ont pris conscience des dangers de la suractivité et des vertus de la décélération du temps.</p>
<p>Hartmut Rosa montre que les moments d’ennui peuvent être des opportunités pour entrer en résonance avec le monde. De même nous observons que les moments de décélération peuvent être des moments de réorientation, permettant aux entrepreneurs de réaliser qu’il y a des tâches auxquelles ils ne souhaitent pas consacrer d’attention, et des tâches auxquelles ils souhaitent profondément s’adonner.</p>
<p>Nous ne cherchons pas à condamner l’accélération en tant que telle. L’accélération peut être nécessaire, vitale et bonne. Notre étude vise plutôt à promouvoir une intelligence des rythmes, un équilibre délicat, fragile et personnel entre décélération et accélération, permettant aux entrepreneurs de construire et de renouveler le sens de leur activité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213424/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Parmi les jeunes entrepreneurs, certains aspirent à aller toujours plus vite pour éviter l’ennui, être efficaces ou éviter les questions existentielles. D’autres valorisent la prise de temps.Sandrine Frémeaux, Professeur, AudenciaFrançois Henry, Chaire Sens & Travail, IcamLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2095552023-09-10T14:54:39Z2023-09-10T14:54:39ZL’intrapreneuriat, un subtil équilibre entre organisation et désorganisation<p>L’iLab, Léonard, The Garage, Google Labs, l’Atelier, Innovation Factory, la Fabrique… tous sont des dispositifs intrapreneuriaux, définis comme « un ensemble de ressources, d’actions, de processus, d’outils managériaux et de formes organisationnelles mis en place pour <a href="http://lelibellio.com/wp-content/uploads/2013/01/Le-Libellio-d-volume-16-num%C3%A9ro-1-Printemps-2020.pdf">favoriser l’adoption d’approches entrepreneuriales</a> au sein d’entreprises établies ».</p>
<p>Construit à partir de mythes entrepreneuriaux, l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/intrapreneuriat-46490">intrapreneuriat</a>, au départ, s’est formalisé au sein des organisations <a href="https://www.institut-entreprise.fr/sites/default/files/document/Note_Intrapreneuriat.pdf">depuis les années 2010</a> en France. Ces dispositifs visent à <a href="https://www.theses.fr/2020IPPAX022">susciter l’innovation</a> ou le renouvellement stratégique au sein de celle-ci.</p>
<p>Cependant, l’innovativité des projets intrapreneuriaux peut-être décevante pour plusieurs raisons. Tout d’abord, on constate une sélection des projets de plus en plus en <a href="https://www.strategie-aims.com/conferences/31-xXIXe-conference-de-l-aims/communications_by_author?author=Maniak+R%C3%A9mi">lien avec la ligne stratégique de l’entreprise</a>. Les intrapreneurs répondent ainsi à des problématiques d’innovation pré-identifiées par le top management, ce qui restreint le champ d’action par définition large des entrepreneurs.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>De plus, même si l’on sait depuis des années que trouver des indicateurs de performance de l’innovation est un vœu pieu, la recherche de rentabilité des investissements reste un objectif pour les organisations. Les dispositifs d’intrapreneuriat n’échappent pas à la règle et doivent justifier de leur contribution économique au reste de l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/entreprises-20563">entreprise</a>.</p>
<p>Enfin, on constate un contrôle de plus en plus important du temps dédié au développement du projet intrapreneurial. Au début, les dispositifs intrapreneuriaux n’affichaient pas de réels objectifs de temps pour les projets hébergés, puis au fur et à mesure, on a pu constater que le temps alloué se réduisait et que des organes de gouvernance de plus en plus formalisés et standardisés émergeaient. Ce contrôle du temps de développement des projets intrapreneuriaux est justifié pour optimiser les coûts.</p>
<h2>« Comment faire cohabiter ces deux logiques ? »</h2>
<p>Cette rigidification des dispositifs intrapreneuriaux est une forme de contamination des activités d’exploration par les activités d’exploitation davantage valorisées au sein des entreprises.</p>
<p>Les travaux consacrés à l’intrapreneuriat se sont intéressés aux conséquences que peut amener cette tension entre contrôle et liberté sur les individus et les organisations. Cette double tension contrôle-liberté peut notamment mener à une « <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2006-9-page-225.htm">schizophrénie individuelle et/ou organisationnelle</a> » du fait de la cohabitation de différentes logiques contradictoires.</p>
<p>Ainsi, selon <a href="https://theconversation.com/profiles/alain-fayolle-388724">Alain Fayolle</a>, professeur et directeur du centre de recherche en <a href="https://theconversation.com/fr/topics/entrepreneuriat-25460">entrepreneuriat</a> à EM Lyon Business School :</p>
<blockquote>
<p>« L’intrapreneur est sur une logique d’exploration (création d’un marché, d’un produit, d’un service, développement d’innovation, etc.), quand le management se situe plus sur un système d’exploitation : une logique de continuum qui fait tourner l’existant pour l’optimiser au mieux et dans un souci de rendement. Le challenge est là : comment faire cohabiter ces deux logiques ? »</p>
</blockquote>
<h2>« Zones structurées et contrôlées »</h2>
<p>Les deux livres blancs de la plate-forme dédiée à l’entrepreneuriat social Makesense, publiés en <a href="https://france.makesense.org/wp-content/uploads/sites/6/2021/03/typologie-intrapreneuriat-makesense.pdf">2021</a> et <a href="https://france.makesense.org/wp-content/uploads/sites/6/2022/09/livre-blanc-intrapreneuriat.pdf">2022</a>, identifient deux types de leviers de réussite des dispositifs intrapreneuriaux : des leviers organisés et des leviers que nous qualifierons de « désorganisés ».</p>
<p>Ainsi, les principaux leviers de réussite « organisés » de l’implémentation et de l’institutionnalisation des dispositifs intrapreneuriaux au sein des organisations seraient les suivants :</p>
<ul>
<li><p>Définir les objectifs du dispositif intrapreneurial en fonction des ambitions stratégiques de l’organisation. Par exemple, si une entreprise cherche à innover de manière disruptive – ainsi, potentiellement à faire face à un désalignement entre le projet intrapreneurial et l’activité traditionnelle de l’entreprise – il faudra réfléchir à un dispositif qui permet un éloignement de l’entreprise. À l’inverse, une organisation qui cherchera à produire des innovations incrémentales (pas à pas, à partir de l’existant) pourra facilement introduire le projet dans les processus connus de l’organisation.</p></li>
<li><p>Penser aux scénarios de sorties. Il est important pour les organisations de réfléchir à la forme que peut prendre le projet en sortie de dispositif intrapreneurial (filiale, nouvelle unité d’activité, intégration du projet dans une équipe existante, etc.).</p></li>
<li><p>Accompagner les intrapreneurs. Afin de permettre le ré-arrimage de l’individu au sein de l’organisation, il est important de réfléchir à la <a href="https://www.cairn.info/revue-innovations-2021-2-page-247.htm">trajectoire individuelle de l’intrapreneur lui-même</a> (réintégration de sa direction d’origine, évolution de poste, changement de poste, etc.)</p></li>
</ul>
<p>À l’inverse, les leviers de réussite désorganisés d’un dispositif intrapreneurial seraient le fait de :</p>
<ul>
<li><p>Laisser vivre un dispositif au moins 3 ans pour avoir du recul sur les résultats. Les travaux de Makesense mettent en avant l’importance de laisser du temps – soit une liberté sur un temps donné – au dispositif intrapreneurial pour « faire ses preuves » et comprendre les apports de celui-ci.</p></li>
<li><p>Accepter l’échec comme faisant partie de l’apprentissage sur l’intégration des dispositifs intrapreneuriaux dans l’organisation notamment dans les démarches exploratoires.</p></li>
</ul>
<p>L’identification de ces leviers apporte des premiers éléments de réponses pratiques pour résoudre cette tension entre liberté et contrôle. Les dispositifs intrapreneuriaux tendent ainsi à devenir des « zones structurées et contrôlées ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209555/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les projets entrepreneuriaux intégrés dans les grandes entreprises pour faire émerger l’innovation n’atteignent pas systématiquement leurs objectifs.Frédérique Blondel, Maître de conférences en sciences de gestion , Université Paris-SaclayÉlodie Loubaresse, Maître de conférences en sciences de gestion, Université Paris-SaclayValentine Georget, Maître de conférences en management, Université Côte d’AzurLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2110122023-09-04T08:56:03Z2023-09-04T08:56:03ZLes « Pépite » ont-ils trouvé leur légitimité ? Regards d’étudiants-entrepreneurs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/541054/original/file-20230803-27-zz1ie7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1266%2C852&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les Pépites ont vocation à accompagner les étudiants-entrepreneurs, statut créé en 2014.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Magnet.Me / Pixabay</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>En octobre 2013, Geneviève Fioraso, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche lançait ce qui devait être un vaste plan en faveur de l’<a href="https://www.vie-publique.fr/discours/189373-genevieve-fioraso-22102013-entrepreneuriat-etudiant-creation-entreprise">entrepreneuriat étudiant</a>. Celui-ci s’est notamment traduit par le lancement en 2014 des Pôles étudiants pour l’innovation, le transfert et l’<a href="https://theconversation.com/topics/entrepreneuriat-25460">entrepreneuriat</a>, ce à quoi correspond l’acronyme <a href="https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr/poles-etudiants-pour-l-innovation-le-transfert-et-l-entrepreneuriat-pepite-46301">« Pépite »</a>.</p>
<p>Ce dispositif s’inscrit, au même titre que le <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32313">statut d’étudiant-entrepreneur</a> dans le prolongement des assises de l’entrepreneuriat organisées en 2013 qui avaient mis en lumière la fragilité voire la précarité de l’entrepreneuriat étudiant. Les Pépite, au nombre de <a href="https://www.pepite-france.fr/trouver-mon-pepite-pepite-france/">33</a> en Métropole et en outre-mer, ont pour mission la sensibilisation, la formation et l’accompagnement des étudiants qui se lancent.</p>
<p>Près de 10 ans plus tard, nous avons tenté d’établir un bilan de ces outils toujours en vigueur. En 2019, une <a href="https://www.education.gouv.fr/la-formation-de-l-esprit-entrepreneur-evaluation-du-plan-pepite-en-faveur-de-l-entrepreneuriat-41177">première évaluation</a>, tout en soulignant le bienfondé de ce dispositif, mettait en lumière un déficit de notoriété notamment vis-à-vis des <a href="https://theconversation.com/topics/etudiants-23904">étudiants</a> et des <a href="https://theconversation.com/topics/entreprises-20563">entreprises</a>. Ce rapport recommandait notamment de renforcer les liens avec les acteurs de l’écosystème entrepreneurial territorial, objet de nos <a href="https://eelab.fr/?p=1028">recherches</a>.</p>
<h2>Des structures jugées utiles</h2>
<p>Certes, aujourd’hui, la France est reconnue pour les actions mises en œuvre pour soutenir l’entrepreneuriat étudiant. Dans l’étude du <a href="https://www.gemconsortium.org/reports/latest-global-report">Global Entrepreneurship Monitor</a>, la France se classe 7<sup>e</sup> parmi les 22 pays les plus riches pour la promotion de l’entrepreneuriat dans les études supérieures mais seulement 17<sup>e</sup> au primaire et au secondaire. Qu’en pensent les principaux intéressés qui sont accompagnés au sein des pôles ?</p>
<p>Dans le cadre de la chaire <em>Entrepreneurial Ecosystem Lab</em> du Labex Entreprendre, nous avons mené une étude sur la légitimité des Pépite auprès de 151 étudiants-entrepreneurs issus de 15 pôles en France. Par « légitimité », nous désignons l’adéquation perçue d’un acteur avec un écosystème entrepreneurial en termes de règles, de valeurs, de normes et de définitions.</p>
<p>Une échelle de mesure tente de la capter et vise ainsi à apprécier l’aptitude perçue des Pépite à encourager une dynamique de marché (dimension utilitaire), favoriser une dynamique entrepreneuriale (dimension existentielle) et contribuer au développement de l’écosystème (dimension socio-économique). Les 18 items qui la composent ont été évalués de 0 (« pas du tout ») à 100 (« tout à fait »). Selon les étudiants interrogés, les Pépite présentent globalement un bon niveau de légitimité (score moyen de 74,36/100) mais on note des différences selon les trois dimensions de l’échelle.</p>
<p><iframe id="IC1Cm" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/IC1Cm/5/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Le score le plus élevé concerne la dimension socio-économique (78,92/100). Selon les répondants, les Pépite sont bien reconnus par les autres acteurs de l’écosystème. Ils soulignent leur bon ancrage au sein des écosystèmes entrepreneuriaux territoriaux et considèrent qu’ils participent bien à leur animation ainsi qu’à leur gouvernance.</p>
<p>Le score pour la dimension utilitaire s’avère un peu plus faible (73,17/100). Si les Pépite sont considérés comme utiles au sens de la création de valeur globale pour les étudiants-entrepreneurs, ces derniers estiment qu’ils pourraient participer davantage à l’apport de ressources, en particulier financières (levées de fonds, rencontres d’investisseurs, etc.) et immatérielles (mentorat, formations, etc.). Leur contribution en termes d’évaluation d’opportunités est assez reconnue.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Le score le plus faible est observé pour la dimension existentielle (70,97/100). Les étudiants interrogés considèrent que les Pépite sont indispensables dans l’écosystème mais ils sont cependant un peu plus réservés sur l’expérience entrepreneuriale des équipes et sur la capacité des Pépite à prendre des risques dans les activités stratégiques et quotidiennes (sélection des projets, etc.).</p>
<h2>Une légitimité source de performance</h2>
<p>Notre étude montre, de plus, que cette légitimité perçue favorise la confiance (85/100) et la satisfaction (76/100) envers les Pépite auprès des étudiants-entrepreneurs. Cette deuxième dimension, d’ailleurs, semble davantage influencée par la légitimité. Elle explique environ les deux tiers de la variation de la satisfaction contre 57 % pour la confiance.</p>
<p>Ces résultats soulignent l’intérêt de mesurer la légitimité comme levier de performance des structures. Un Pépite perçu comme légitime par les étudiants-entrepreneurs aura davantage de chances d’obtenir un bon niveau de satisfaction et de confiance. Ainsi pouvons-nous penser que les étudiants-entrepreneurs qui perçoivent le Pépite comme légitime seront plus enclins à participer et s’impliquer dans ses activités et pourront ainsi mieux apprécier les services et l’accompagnement proposés.</p>
<p>De manière générale, ces structures ont tout intérêt à travailler sur leur stratégie de légitimation pour obtenir un meilleur niveau de satisfaction et de confiance auprès des étudiants-entrepreneurs. Une voie de progrès identifiée pour cela réside dans le renforcement de leur capacité à faciliter l’accès aux ressources.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/211012/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cette recherche, financée par le Labex Entreprendre, bénéficie d’une aide de l’État gérée par l’Agence Nationale de la Recherche au titre du programme Investissements d’Avenir portant la référence ANR-10-LABX-11-01.</span></em></p>Les étudiants-entrepreneurs accompagnés par les Pépite reconnaissent largement leur utilité. Elles gagneraient néanmoins à renforcer leur capacité à les faire accéder à des ressources financières.Karim Messeghem, Professeur des universités, Université de MontpellierAbdelaziz Swalhi, Maître de Conférences en sciences de gestion, Université de MontpellierConstance Banc, Docteure en Sciences de gestion et du management / Ingénieure de recherche au LabEx Entreprendre, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2121512023-08-27T19:00:45Z2023-08-27T19:00:45ZMettre fin au mythe du jeune entrepreneur : les plus de 50 ans seraient les innovateurs les plus radicaux<p><a href="https://www.forbes.com/sites/maggiemcgrath/2021/06/04/founder-of-therealreal-julie-wainwright-proves-unicorns-arent-just-for-young-tech-bros/">Julie Wainwright</a>, qui a travaillé comme PDG pendant près de vingt ans, avait une cinquantaine d’années lorsqu’elle a créé la plate-forme de luxe de seconde main The RealReal. <a href="https://www.europe1.fr/culture/la-vie-du-colonel-sanders-faux-grade-et-vrai-createur-de-kfc-4099862">Harland Sanders</a> avait 62 ans lorsqu’il a créé la chaîne de restaurants Kentucky Fried Chicken (KFC), et <a href="https://www.journaldemontreal.com/2023/01/05/le-fondateur-de-home-depot-vide-son-sac">Bernie Marcus</a> avait 50 ans lorsqu’il a ouvert le premier magasin de bricolage Home Depot.</p>
<p>Dans quelle mesure un tel potentiel d’innovation est-il courant chez les entrepreneurs plus âgés ? Alors que la population vieillit dans de nombreux pays développés et que l’on y travaille de plus en plus tard, il paraît important de savoir comment tirer le meilleur parti de l’expérience des personnes plus âgées.</p>
<p>Dans une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0048733323000471">étude</a> publiée récemment, nous montrons que les entrepreneurs plus âgés ont beaucoup à offrir : ceux qui <a href="https://theconversation.com/topics/creation-dentreprise-46800">créent une entreprise</a> à un <a href="https://theconversation.com/topics/seniors-38909">âge avancé</a> (50 ans et plus) paraissent plus susceptibles d’apporter des <a href="https://theconversation.com/topics/innovation-21577">innovations</a> radicales sur le marché que leurs homologues plus jeunes grâce à leurs compétences et à leur expérience. De surcroît, ces nouveaux produits et services sont très bénéfiques pour l’économie.</p>
<h2>Plus de nouveautés (et de chiffre d’affaires)</h2>
<p>En explorant une base de données incluant 2 900 fondateurs de nouvelles <a href="https://theconversation.com/fr/topics/entreprises-20563">entreprises</a> en Allemagne entre 2008 et 2017, nous avons constaté que, en moyenne, la probabilité qu’un fondateur introduise une nouveauté sur le marché augmente de 30 % lorsque son âge augmente de 10 ans. Les entrepreneurs en fin de carrière sont ainsi plus de trois fois plus susceptibles d’introduire des nouveautés sur le marché que la moyenne de l’échantillon.</p>
<p>En termes de chiffre d’affaires, dix années d’âge supplémentaires se traduisent par une augmentation d’environ 35 000 euros par an du chiffre d’affaires généré par les innovations, soit environ 26 % de plus que la moyenne de l’échantillon pour la tranche d’âge la plus élevée. L’impact positif de l’âge du fondateur sur les nouveaux produits et/ou services se poursuit jusqu’à la retraite.</p>
<p>Les jeunes fondateurs, eux, introduisent un plus grand nombre d’innovations dans l’ensemble, mais il s’agit d’innovations déjà répandues ailleurs. Elles ne concernent souvent que leur entreprise. Elles visent à améliorer les processus et l’offre de produits d’une entreprise particulière, par exemple en créant un nouveau logiciel pour réduire les coûts, en utilisant une nouvelle technologie pour réduire le temps de production ou en introduisant de nouvelles fonctionnalités pour rendre un service plus convivial.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Ces résultats s’expliquent principalement par l’expérience des fondateurs plus âgés ainsi que par leur richesse personnelle plus élevée lorsqu’ils créent leur propre entreprise. Les personnes qui passent d’un emploi salarié à l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/entrepreneuriat-25460">entrepreneuriat</a> plus tard dans leur vie sont également plus susceptibles d’embaucher des employés plus instruits. La combinaison de tous ces facteurs modifie les motivations des entrepreneurs et leur capacité à créer des innovations et fait que les fondateurs plus âgés réussissent à développer des produits et/ou des services novateurs qui perturbent les marchés.</p>
<h2>Favoriser l’entrepreneuriat à un âge avancé</h2>
<p>Nos résultats remettent en question le stéréotype dominant selon lequel les fondateurs plus âgés ne sont pas très innovants. Nous montrons qu’il est important de faire la distinction entre les innovations qui sont simplement nouvelles pour une entreprise particulière et celles qui sont nouvelles sur le marché.</p>
<p>Pour que les États puissent bénéficier de la capacité des entrepreneurs âgés à développer des innovations réellement nouvelles, il faut briser le mythe selon lequel l’esprit d’entreprise est réservé aux jeunes. En pratique, cela nécessite des régimes de retraite qui encouragent les entrepreneurs à travailler plus longtemps. Il s’agit également d’encourager la mobilité professionnelle, afin que les individus puissent passer à l’entrepreneuriat plus tard dans leur vie.</p>
<p>En ce qui concerne la gestion des entreprises établies, nos conclusions suggèrent que les travailleurs plus âgés ont un grand potentiel d’innovation. Actuellement, ces travailleurs peuvent quitter leur emploi et devenir entrepreneurs afin de poursuivre des idées radicalement nouvelles et commercialement fructueuses. Les dirigeants devraient donc remettre en question les stéréotypes sur les travailleurs âgés et créer des environnements de travail où les travailleurs âgés, avec leurs idées novatrices et leurs compétences étendues, peuvent faire avancer l’innovation.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212151/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Virva Salmivaara ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une étude récente montre que ceux qui se lancent dans une aventure entrepreneuriale en fin de carrière apportent des innovations plus radicales (et plus rémunératrices).Virva Salmivaara, Assistant professor in business administration and entrepreneurship, AudenciaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2120272023-08-27T18:14:27Z2023-08-27T18:14:27ZY a-t-il une part d’inconscient dans l’entrepreneuriat ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/544238/original/file-20230823-15-5mi7lc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=61%2C16%2C1137%2C732&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’entrepreneur, un sujet agissant de façon tout autant inconsciente que consciente.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/illustrations/dessin-anim%C3%A9-la-peinture-fantaisie-5123447/"> Cdd20/Pixabay</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Lorsqu’on aborde le sujet de l’entrepreneuriat, il vient habituellement à l’esprit des éléments comme la création d’entreprise, la performance, le succès, l’échec, le financement, l’importance des réseaux, etc. Bref, autant d’éléments qui ont largement leur place pour comprendre l’entrepreneuriat certes, mais dans sa dimension observable, autrement dit celle de la face visible de l’iceberg.</p>
<p>Dès lors, il convient de nous demander s’il n’existe pas d’autres voies à explorer en dehors de ce cadre, susceptibles d’apporter un regard différent et pertinent sur l’entrepreneuriat.</p>
<p>C’est dans cette perspective que nous travaillons au sein du <a href="https://r2e.univ-lorraine.fr/">Think Tank R2E</a>* (Recherche & Expertise en Entrepreneuriat) pour explorer de nouvelles approches. L’un des axes prioritaires de ces dernières années s’inscrit au cœur du concept de « l’agir entrepreneurial » et, plus particulièrement, dans le sillage d’un programme de recherche-action portant sur « l’intentionnalité » comme voie/voix de l’entrepreneuriat.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/comprendre-lentrepreneuriat-a-laune-de-lagir-entrepreneurial-76958">Comprendre l’entrepreneuriat à l’aune de l’agir entrepreneurial</a>
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<p>Ce qui nous a amenés à développer une lecture psychanalytique de l’entrepreneuriat dans une perspective pluridisciplinaire mettant en avant la fonction de l’inconscient dans l’agir entrepreneurial : désir, avancée, entraves, syndrome de l’imposteur, Idéal du Moi, Moi Idéal, peur, prise de risque, etc.</p>
<h2>L’intentionnalité, un accès à l’inconscient</h2>
<p>L’intentionnalité n’est pas directement accessible en tant que telle. Elle est la frontière entre l’inconscient et la conscience de l’<a href="https://www.universalis.fr/encyclopedie/martin-heidegger/2-la-structure-du-dasein/">« être-là »</a>, pour reprendre le terme du philosophe allemand Martin Heidegger. Elle est immanente, subjective et dynamique dans le sens où c’est elle qui vectorise la conscience de l’individu vers un objet dans le monde. Autrement dit, elle constitue le tremplin de l’expression du désir de l’« être-au-monde » ; c’est elle qui guide les actions des uns et des autres, en l’occurrence celles des entrepreneurs par rapport à leur projet.</p>
<p>Si l’intentionnalité correspond à la face immergée de l’iceberg, l’enjeu en est, par conséquent, de faire faire une prise de conscience de leur intentionnalité aux personnes désireuses d’entreprendre. Ces dernières pourront alors se comprendre et comprendre leur agir, notamment en termes de projet porté, de décisions prises et d’actions entreprises.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Appliquée à l’entrepreneuriat, ce concept d’intentionnalité s’inscrit dans le <a href="https://www.cairn.info/revue-projectique-2017-2-page-9.htm">courant de recherche</a> qui envisage le sens que construit l’entrepreneur, notamment au travers du respect de ses propres valeurs et des rapports avec son écosystème.</p>
<p>Ce courant de recherche ambitionne non seulement de comprendre la place de l’intentionnalité dans le processus entrepreneurial mais aussi la manière dont on peut l’aborder en la rendant explicite aux yeux de l’entrepreneur. Il s’agit donc de permettre à l’entrepreneur d’en prendre conscience afin de mieux se comprendre et de favoriser son agir entrepreneurial.</p>
<p>Ce changement de perspective n’est pas neutre. Il favorise la prise en considération de l’inconscient dans les recherches en entrepreneuriat, là où seul le conscient l’est. Il amène aussi à ne plus se limiter à définir l’entrepreneur comme un simple acteur, mais à le considérer aussi comme un sujet pensant, agissant de façon tout autant inconsciente que consciente.</p>
<p>Comme il n’est pas possible d’avoir un accès direct à cette intentionnalité, seules les traces liées aux actions en cours ou passées permettraient de la comprendre. Pour déceler ces traces et trouver un fil rouge entre elles, nous avons établi un questionnaire, que nous soumettons aux entrepreneurs. Cet accompagnement personnalisé permet de prendre conscience du fait que les projets sont essentiellement mus par un vecteur intentionnel propre à chaque individu.</p>
<h2>Conforter son estime de soi</h2>
<p>Nous avons accompagné, par exemple, un jeune entrepreneur, Olivier, à la tête d’une start-up du secteur de la santé. Olivier, titulaire d’un master en sciences de gestion, se tenait alors au croisement de deux décisions antagonistes à prendre : céder sa start-up, laquelle pourtant était en train de gagner en rayonnement, ou y rester à condition d’entamer en parallèle le projet d’une thèse de doctorat.</p>
<p>Hésitant entre l’une et l’autre des deux décisions dont les motivations intimes semblaient lui échapper, Olivier s’est alors tourné vers nous. L’accompagnement entrepreneurial axé sur le travail sur son intentionnalité lui a permis de comprendre qu’il était aux prises avec le syndrome de l’imposteur. En effet, toute son équipe était constituée de professionnels de la santé, pendant que lui venait du monde du management.</p>
<p>Les entraves à la poursuite de son projet émanent donc de son sentiment d’illégitimité et de sa peur inconsciente d’être démasqué. Obtenir un doctorat lui apparaissait comme pouvant peut-être donner le change. L’accompagnement proposé lui a permis dès lors de cesser de développer des stratégies inconscientes d’auto-sabotage et de conforter son estime de soi, afin de rester à la tête de sa start-up tout en étant à la fois fier de son projet et fier de sa personne. Aujourd’hui, sa start-up est inscrite dans la durée et dans le succès.</p>
<h2>Un entrepreneur n’entreprend pas par hasard</h2>
<p>Le travail d’accompagnement effectué, dans ce sillage, avec l’entrepreneur sur les « origines » de son ambition d’entreprendre, sur ses projets passés, actuels et futurs, permet à terme à celui-ci de prendre conscience de l’intentionnalité qui l’habite, qui l’amène à porter un projet entrepreneurial, à chercher à l’ancrer dans un écosystème, en vue de le partager avec le monde, dans lequel et sur lequel il voudrait agir, muni de valeurs communes, ou croisées et harmonisées et d’un sens mutualisé.</p>
<p>En somme, la mise en lumière de l’intentionnalité a ceci de très important : elle conforte, d’une part, la cohérence interne du projet porté par l’entrepreneur, en favorisant sa propre compréhension approfondie des raisons pour lesquelles il voudrait entreprendre ; et, d’autre part, elle génère une meilleure traduction de ce même projet auprès des parties prenantes concernées, en en consolidant donc la cohérence externe.</p>
<p>De la sorte, deux trajectoires se retrouvent raffermies, celle qui lie le Moi de l’entrepreneur au projet qu’il porte et celle qui, pour sa part, lie le projet en tant que tel à ceux que l’on désigne par les acteurs de l’écosystème à construire. Un entrepreneur n’entreprend pas par hasard : son intentionnalité est bien le fruit d’une rencontre entre l’interne et l’externe, entre sa représentation du monde (externe) dans lequel il évolue et sa compréhension (interne) de ce même monde.</p>
<p>*<em><a href="https://r2e.univ-lorraine.fr/">R2E</a> : Recherche et Expertise en Entrepreneuriat – Structuration d’une communauté scientifique en entrepreneuriat par une plate-forme collaborative au service des acteurs de l’écosystème entrepreneurial de la Région Grand Est" est cofinancé par l’Union européenne dans le cadre du Programme opérationnel FEDER-FSE Lorraine et Massif des Vosges 2014-2020</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212027/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Schmitt est membre du Think Tank R2E (Recherche & Expertise en Entrepreneuriat). La recherche présentée a fait l'objet d'un financement de la Région Grand Est et de l'Union Européenne dans le cadre des fonds FEDER.
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Nicole Saliba-Chalhoub est membre du Think Tank R2E (Recherche & Expertise en Entrepreneuriat).</span></em></p>Les aspirations profondes des individus constituent un moteur essentiel mais peu étudié de l’entrepreneuriat.Christophe Schmitt, Professeur des Universités en entrepreneuriat, IAE Metz School of Management – Université de LorraineNicole Saliba-Chalhoub, Full Professor - Ph.D. Literature & Applied Psychoanalysis, Université Saint-Esprit de Kaslik (USEK) – AUFLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2097412023-08-08T13:56:47Z2023-08-08T13:56:47ZLe « blanchiment responsable » en innovation en santé est tout aussi néfaste que l’écoblanchiment. Voici comment y mettre fin<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/539331/original/file-20230725-21-3zft7l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1920%2C960&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour développer des innovations responsables dans le secteur de la santé, il faut de bons outils et des conseils pratiques, de la conception de l’innovation jusqu’à la fin de son cycle de vie. </span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Selon le PDG d’Apple, Tim Cook, <a href="https://www.popularmechanics.com/technology/a40823587/guest-editor-tim-cook/">« le futur, c’est l’innovation responsable »</a>. Toutefois, des chercheurs en gestion prédisent depuis 10 ans <a href="https://www.worldscientific.com/worldscibooks/10.1142/8903#t=aboutBook">l’arrivée du « blanchiment responsable »</a> et le temps leur a donné raison. Par exemple, des outils d’IA générative, tels que ChatGPT, ont récemment <a href="https://theconversation.com/the-ai-arms-race-highlights-the-urgent-need-for-responsible-innovation-200218">soulevé des inquiétudes de blanchiment responsable</a>.</p>
<p>De la même manière que l’écoblanchiment donne la fausse impression qu’un produit est écologique, le blanchiment responsable crée l’impression qu’une innovation est responsable, sans que des pratiques concrètes soient mises en place pour résoudre des enjeux de responsabilité sociale, tels que l’équité en matière de santé, le caractère abordable et la durabilité. </p>
<p>L’innovation responsable (IR) <a href="https://econpapers.repec.org/bookchap/wsiwsbook/8903.htm">vise à réduire les impacts négatifs d’une innovation à court et à long termes</a> en <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0048733313000930?via%3Dihub">transformant la manière dont elle est développée</a>. Cependant, il manque une définition reconnue de l’IR, ainsi que d’outils pratiques et de critères d’évaluation clairs. Ces lacunes peuvent mener au blanchiment responsable d’une innovation, de manière intentionnelle ou non.</p>
<p>Par conséquent, tout comme <a href="https://www.canada.ca/fr/bureau-concurrence/nouvelles/2022/01/soyez-a-laffut-de-lecoblanchiment.html">l’écoblanchiment a nui au développement durable</a> avant l’établissement de normes et de standards reconnus (telle que la <a href="https://www.iso.org/fr/iso-14001-environmental-management.html">norme ISO 14001 Management environnemental</a>), le blanchiment responsable peut nuire à l’IR. </p>
<p>Les innovations en santé soulèvent des enjeux économiques, sociaux et environnementaux complexes, en plus des préoccupations d’innocuité et d’efficacité clinique. Voilà pourquoi notre équipe de recherche experte en IR s’attaque au blanchiment responsable dans ce secteur.</p>
<h2>Pourquoi le secteur de la santé aurait-il besoin de l’IR ?</h2>
<p>Les innovations en santé sont très réglementées pour limiter les risques et les inconvénients. Après tout, leur but est de sauver des vies et d’aider les gens à se sentir mieux. De bonnes technologies sont développées par les équipes cliniques en collaboration avec des patients afin de mieux répondre à leurs besoins. Ne sont-elles donc pas déjà responsables ?</p>
<p>En 2015, notre équipe de recherche canadienne et brésilienne s’est fixé comme objectif de mieux comprendre comment l’IR s’applique au secteur de la santé dans une économie mature et une économie émergente. À cet effet, nous avons mené :</p>
<ul>
<li><p>une recension exhaustive des travaux scientifiques ; </p></li>
<li><p>plus de 85 entrevues auprès d’experts et expertes œuvrant dans les domaines de l’entrepreneuriat, du génie, du design industriel et de l’évaluation des technologies en santé ; </p></li>
<li><p>une étude approfondie d’une durée de quatre ans avec de petites et moyennes entreprises, et</p></li>
<li><p>un processus collaboratif avec des experts et des expertes pour identifier des conseils pratiques. </p></li>
</ul>
<p>Ces travaux de recherche ont alimenté le <a href="https://link.springer.com/book/10.1007/978-981-19-3151-2">cadre conceptuel de l’Innovation responsable en santé (IRS)</a>, qui vise à développer « des innovations sécuritaires et de hautes qualités qui, à la fois, renforcent l’équité et la pérennité des systèmes de santé, apportent plus de valeur aux utilisateurs et utilisatrices, utilisent moins de ressources, sont bonnes pour l’environnement et sont économiquement viables. »</p>
<p>L’IRS rassemble cinq domaines de valeurs et chacun est défini par un objectif précis et des attributs (éléments) de responsabilité qui vont au-delà des standards d’innocuité et d’efficacité clinique : la valeur pour la santé des populations, le système de santé, l’économie, l’organisation et l’environnement. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/539328/original/file-20230725-15-phzsln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/539328/original/file-20230725-15-phzsln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/539328/original/file-20230725-15-phzsln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/539328/original/file-20230725-15-phzsln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/539328/original/file-20230725-15-phzsln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/539328/original/file-20230725-15-phzsln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/539328/original/file-20230725-15-phzsln.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’innovation responsable en santé rassemble cinq domaines de valeur et chacun est défini par un objectif et des attributs de responsabilité qui vont au-delà des standards d’innocuité et d’efficacité clinique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(In Fieri)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Après avoir défini ce qu’est l’IR dans le secteur de la santé, notre équipe a développé un guide pratique pour concevoir une innovation responsable en santé et un outil d’évaluation pour mesurer son degré de responsabilité.</p>
<p>Le <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-981-19-3151-2_3">Cahier des charges de l’IRS</a> explique comment intégrer de manière tangible les neuf attributs de responsabilité de l’IRS tout au long du développement de l’innovation : de sa conception à la fin de son cycle de vie.</p>
<p>Ensuite, <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-981-19-3151-2_8">l’Outil d’évaluation IRS</a> mesure le niveau auquel chaque attribut de responsabilité est rencontré. Cet outil <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S2211883718301485?via%3Dihub">a été validé par des experts et expertes à l’échelle internationale</a> et a été démontré <a href="https://www.ijhpm.com/article_3778.html">fiable</a>.</p>
<p>Ces deux outils reposent sur des échelles d’évaluation à quatre niveaux, propres à chaque attribut, où A implique un degré de responsabilité élevé et D, aucun signe particulier de responsabilité.</p>
<p>Par exemple, regardons de plus près les échelles de l’inclusivité et de l’éco-responsabilité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/539329/original/file-20230725-23-n4nt02.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/539329/original/file-20230725-23-n4nt02.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=342&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/539329/original/file-20230725-23-n4nt02.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=342&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/539329/original/file-20230725-23-n4nt02.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=342&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/539329/original/file-20230725-23-n4nt02.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=429&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/539329/original/file-20230725-23-n4nt02.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=429&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/539329/original/file-20230725-23-n4nt02.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=429&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’outil d’évaluation utilise une échelle à quatre niveaux, où A implique un degré de responsabilité élevé et D, aucun signe particulier de responsabilité.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(In Fieri)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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</figure>
<p>L’inclusivité mesure si l’équipe qui développe l’innovation a consulté de manière formelle un groupe diversifié de personnes pouvant être affectées par celle-ci (les détenteurs d’enjeux) et a expliqué comment leurs rétroactions ont été intégrées concrètement dans le produit final. Les méthodes formelles incluent les consultations (p. ex., questionnaires) et les méthodes d’engagement (p. ex., tables rondes).</p>
<p>L’éco-responsabilité mesure le nombre d’étapes clés du cycle de vie de l’innovation où l’équipe de développement a appliqué des pratiques éco-responsables, incluant <a href="https://www.ijhpm.com/article_3778.html">l’approvisionnement en matières premières, la fabrication, la distribution, l’utilisation et la fin de vie utile</a>. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/539326/original/file-20230725-17-re3qbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/539326/original/file-20230725-17-re3qbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/539326/original/file-20230725-17-re3qbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/539326/original/file-20230725-17-re3qbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=381&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/539326/original/file-20230725-17-re3qbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=479&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/539326/original/file-20230725-17-re3qbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=479&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/539326/original/file-20230725-17-re3qbf.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=479&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’éco-responsabilité mesure le nombre d’étapes clés du cycle de vie où l’équipe de développement de l’innovation a appliqué des pratiques éco-responsables, incluant l’approvisionnement en matières premières, la fabrication, la distribution, l’utilisation et la fin de vie utile.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(In Fieri)</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<h2>Pour un futur réellement responsable</h2>
<p>Pour prévenir le blanchiment responsable, l’IRS pave une nouvelle voie pour l’innovation, de sa conception à son utilisation, et ce, sans oublier sa fin de vie. </p>
<p>En travaillant avec les attributs de l’IRS dès la conception d’une innovation en santé, les équipes de développement peuvent identifier et réduire de manière tangible et mesurable les enjeux économiques, sociaux et environnementaux soulevés par leur innovation. </p>
<p>Pour bien outiller les équipes dans cette démarche, le Cahier des charges IRS offre des conseils pratiques et un exercice de réflexion sur les enjeux de responsabilité, soit la <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-981-19-3151-2_2">Boussole de la conception responsable</a>. De plus, une <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-981-19-3151-2_6">boîte à outils multidisciplinaire</a> explique comment les équipes peuvent rencontrer les critères de l’IRS en appliquant des outils déjà reconnus, tels que l’<a href="https://www.fda.gov/regulatory-information/search-fda-guidance-documents/applying-human-factors-and-usability-engineering-medical-devices">ingénierie des facteurs humains de la FDA</a>, le <a href="https://www.designkit.org/methods/photojournal.html">photojournal d’IDEO</a> ou <a href="https://www.bcorporation.net/en-us/programs-and-tools/b-impact-assessment/">l’évaluation de l’impact de B Corp</a>.</p>
<p>Les décideurs politiques, les gestionnaires de la santé, les investisseurs, les bureaux de transfert des technologies, les fondations philanthropiques et les groupes de patients peuvent également utiliser les résultats de l’Outil d’évaluation IRS afin d’informer des décisions d’investissement, d’achat ou d’implantation. </p>
<p>Avec les outils et les conseils pratiques de l’IRS en main, les innovateurs et innovatrices en santé peuvent bâtir dès aujourd’hui un futur réellement responsable, et ce, de manière délibérée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209741/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pascale Lehoux a obtenu du financement des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC). Son groupe de recherche, le CReSP, est soutenu financièrement par les Fonds de la recherche du Québec-Santé (FRQ-S).
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Hudson Silva et Lysanne Rivard ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Les nouvelles technologies de la santé soulèvent de nombreuses questions complexes. Tout comme l’écoblanchiment a terni le développement durable, il menace l’innovation dans le domaine de la santé.Lysanne Rivard, Senior Research Advisor, Center for Public Health Research, Université de MontréalHudson Silva, Senior Research Analyst, Fieri Research Program on Responsible Innovation in Health, Université de MontréalPascale Lehoux, Professor of Health Management, Evaluation and Policy, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2100252023-07-20T15:54:15Z2023-07-20T15:54:15ZPourquoi tant de start-up adoptent-elles la même philosophie de développement ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/538081/original/file-20230718-17-w5pqfn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C27%2C889%2C557&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Aux États-Unis, neuf initiatives entrepreneuriales se solderaient aujourd’hui par un échec.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Follow_the_Leader_2004.jpg">Doug Coldwell/Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les jeunes start-up ont le dos au mur. Les statistiques de 2023 révèlent notamment que <a href="https://www.founderjar.com/start-up-statistics/">neuf initiatives américaines sur dix se solderaient par un échec</a> et que seuls 9 % d’entre elles franchissent le cap des dix ans. Les fondateurs et fondatrices s’adonnent donc à un jeu risqué, mais tout le monde joue-t-il selon les mêmes règles ? Notre <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/1911-3846.12806">recherche</a> a en tout cas démontré que les personnes, structures et systèmes qui évoluent autour des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/start-up-23076">start-up</a> tendent à donner de l’ampleur à une philosophie connue sous le nom de « lean start-up ».</p>
<p>Le lean start-up désigne une approche formalisée en 2012 par l’entrepreneur américain Eric Ries dans son ouvrage <a href="https://theleanstartup.com/"><em>The lean start-up :</em> <em>How Today’s Entrepreneurs Use Continuous Innovation to Create Radically Successful Businesses</em></a>. Elle encourage les start-up à développer leur modèle commercial de façon itérative, c’est-à-dire pas à pas et à partir de l’existant, afin de leur permettre de prendre une décision rapide : « pivoter », en changeant de stratégie, ou persévérer.</p>
<p>Visiblement, l’écosystème entrepreneurial, qui se compose, entre autres, d’incubateurs, d’institutions d’enseignement supérieur, d’organismes non gouvernementaux (ONG), d’agences web, de fournisseurs de services, de mentors, d’investisseurs et de clients, pousse les jeunes start-up à internaliser et à adopter la philosophie du lean start-up.</p>
<h2>Entendre la même histoire en boucle</h2>
<p>Au début, nous cherchions à comprendre comment les jeunes start-up gèrent et orientent leur entreprise. Sur quelles données appuient-elles leurs décisions ? Comment motivent-elles leur personnel, le cas échéant ? Comment poussent-elles leur organisation à aller de l’avant ?</p>
<p>Nous avons rapidement remarqué que toutes les personnes avec qui nous échangions, indépendamment du type d’entreprise ou de marché, à Berlin, Munich ou Paris, nous faisaient les mêmes réponses : les termes utilisés, tels que « produit minimum viable » ou « faire pivoter le modèle commercial » apparaissaient, de surcroît, caractéristiques de la philosophie du lean start-up.</p>
<p>En substance, cette approche va à l’encontre de la philosophie plus traditionnelle qui promeut le développement, puis l’exécution d’un business plan clairement défini dès le départ. Comme l’a dit un jour le boxeur Mike Tyson :</p>
<blockquote>
<p>« On a tous un plan, jusqu’à ce qu’on prenne son premier uppercut. »</p>
</blockquote>
<p>Née dans la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/silicon-valley-32446">Silicon Valley</a> à la fin des années 2000, la philosophie du lean start-up se caractérise par une nature expérimentale et itérative, à savoir bâtir quelque chose, mesurer son succès et en tirer des leçons. L’objectif ? Créer un modèle commercial qui conçoit et vend des produits ou services via un cycle de développement le plus court possible.</p>
<p>Au lieu de se concentrer sur des business plans prédéfinis, cette philosophie, qui incite à « créer, mesurer et apprendre », encourage les start-up à développer des systèmes de contrôle de gestion qui les aident à structurer un processus d’apprentissage flexible et à l’accélérer. Le but est de rassembler des données principalement centrées sur les clients et de promouvoir la responsabilité, la collaboration et la transparence au sein du personnel, ainsi que dans la prise de décisions.</p>
<h2>« Créer, mesurer, apprendre »</h2>
<p>Afin de contribuer à la documentation, nous avons volontairement étudié les start-up qui en étaient encore aux prémices de leur développement et, pour des raisons pratiques, nous nous sommes concentrés sur la région du Grand-Paris.</p>
<p>Les start-up avaient, en moyenne, deux ans. Pour en apprendre plus sur leurs systèmes de gestion, notre approche principale a consisté en une série d’entretiens avec des fondateurs-gérants et fondatrices-gérantes, puis avec des acteurs et actrices de l’écosystème et enfin, avec des maîtres-penseurs et maîtres-penseuses de la philosophie du lean start-up.</p>
<p>Les start-up étudiées avaient toutes structuré leur entreprise sur le même cycle : « créer, mesurer, apprendre ». Cette approche leur permettait d’obtenir rapidement des informations sur le potentiel succès (ou échec) de leur modèle commercial. Elle les encourageait également à exploiter des données centrées sur les clients, plutôt que financières. Pour une entreprise numérique, par exemple, cela se traduisait par une focalisation sur les taux de clics de leur site Internet, le temps de rétention et l’utilisation d’outils comme ceux de Google Analytics afin de mieux comprendre les interactions en ligne des clients.</p>
<hr>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<hr>
<p>Nous avons également retrouvé des valeurs de la philosophie du lean start-up intégrées d’office aux entreprises que nous avons étudiées. Ces start-up aspiraient à davantage de transparence et de responsabilités pour leurs actions. Elles cherchaient également à collaborer un maximum avec les autres (au sein de leur incubateur ou à travers l’écosystème en général).</p>
<p>Nous étions impatients de découvrir pourquoi la philosophie du lean start-up était devenue aussi prédominante. Quels facteurs poussaient vers cette approche ?</p>
<p>Nous nous sommes donc tournés vers l’écosystème entrepreneurial, autrement dit, tout ce qui entoure et affecte les start-up, des incubateurs et investisseurs aux espaces de locaux partagés et flexibles, en passant par les autres structures de soutien.</p>
<p>Si nous savions déjà que l’écosystème entrepreneurial joue un rôle clé dans le développement des start-up, son influence sur leurs pratiques de gestion demeurait plus obscure. Nous avons ainsi enquêté au sein de l’écosystème parisien (comme l’incubateur HEC, à Station F) et avons également triangulé nos découvertes dans les écosystèmes similaires en Allemagne.</p>
<h2>Suivre les règles</h2>
<p>Nous avons identifié trois mécanismes principaux qui poussent les start-up à adopter la philosophie du lean start-up. En effet, les jeunes entreprises semblent encouragées à suivre certaines règles si elles souhaitent trouver leur place dans un écosystème.</p>
<p>Un exemple de règle est que les start-up ont généralement besoin du soutien des incubateurs pour grandir. Ces plates-formes spécialisées aident les structures les plus jeunes à survivre aux aspects les plus difficiles du lancement. Or, dans leurs processus de sélection, les incubateurs exigent un produit minimum viable (MVP) et demandent à constater un certain succès auprès des clients (la soi-disant « traction »). Des concepts qui, eux-mêmes, sont inspirés de la philosophie du lean start-up.</p>
<p>Par exemple, une start-up œuvrant à la création d’un produit numérique devra présenter à un incubateur son site Internet initial et une preuve qu’il a connu suffisamment d’activité, telle que des commentaires positifs de clients existants ou une liste de clients potentiels ayant signalé une demande pour la proposition commerciale.</p>
<p>De cette façon, la start-up se retrouve déjà engagée sur la voie du lean start-up. Les incubateurs recommandent en effet des logiciels et systèmes gratuits imprégnés des autres principes clés de la philosophie du lean start-up, comme des outils pour mesurer les indicateurs clés de performance (ou KPI, <em>key performance indicator</em>, en anglais), lesquels favorisent encore ces idées, au point qu’il devient difficile d’y échapper.</p>
<h2>Adhérer à la norme</h2>
<p>Ensuite, nous avons identifié des valeurs, normes et obligations perçues qui sont communiquées aux start-up lors des premières étapes de leur développement, parfois même avant que le fondateur ou la fondatrice ait créé son entreprise. Les termes tendance qui illustrent l’approche du lean start-up, tels que « pivot », « agilité de développement » ou « KPI », sont omniprésents, des cours d’enseignement aux ouvrages d’affaires en vogue, en passant par le mentorat et les évènements destinés à promouvoir le réseau.</p>
<p>Très rapidement, le vocabulaire du lean start-up en vient à faire partie du langage quotidien des personnes qui pénètrent dans l’écosystème entrepreneurial.</p>
<p>Enfin, il existe un certain degré de compréhension partagée constamment échangée entre les acteurs de l’écosystème. Il s’agit de pratiques influentes et considérées comme acquises, comme l’échange de pair-à-pair, ou le partage d’expérience, de la part de fondateurs et fondatrices qui ont connu le succès, sur les débuts de leurs start-up.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/210025/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les start-up présentent une image de petites entreprises innovantes, animées par des idées inédites. Or, une grande partie tend à adopter la même philosophie du « lean start-up », théorisée en 2012.Christoph Endenich, Professeur associé, Comptabilité et Contrôle de Gestion, ESSEC Sebastian D. Becker, Professeur associé, Comptabilité et Contrôle de Gestion, HEC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2077752023-06-21T18:36:30Z2023-06-21T18:36:30ZStart-up, comment surmonter les incompréhensions lors des levées de fonds ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/532003/original/file-20230614-18844-xqi4ez.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=16%2C8%2C1177%2C738&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour les entrepreneurs, la recherche de financement constitue un enjeu essentiel.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.wallpaperflare.com/business-cooperation-handshake-people-agreement-man-contract-wallpaper-eqqct">Wallpaperflare.com</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Trouver les moyens de se lancer et de croître constitue un enjeu clé pour les start-up. En conséquence, leur sort est lié à leur capacité à lever des fonds pour poursuivre leur développement. Différents types d’investisseurs peuvent intervenir : les business angels, souvent des anciens chefs d’entreprise ayant revendu leur affaire, apportent leurs fonds propres mais aussi une expertise ; les investisseurs en capital-risque (ou venture capitalists), généralement professionnel (banques, compagnies d’assurance, institutions financières, fonds d’investissement, etc.) cherchent eux, à rentabiliser leur investissement sur une période de 3 à 5 ans.</p>
<p>Si les business angels interviennent généralement en amont des capital-risqueurs dans les trajectoires de financement, il n’est pas rare de les voir intervenir en co-investissement. Or, les modes de fonctionnement et les objectifs étant différents, une coordination entre ces acteurs devient nécessaire. Un des risques soulevés par la littérature est en effet une <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11365-015-0357-4">mauvaise compréhension entre acteurs</a>, pouvant mener à l’échec de la levée de fonds pour l’entrepreneur. Comme nous l’a confié un entrepreneur que nous avons rencontré dans le cadre de nos recherches :</p>
<blockquote>
<p>« J’ai discuté avec des investisseurs pour préparer le tour de table de financement. Finalement, cela ne s’est pas fait, je n’étais pas une force d’entraînement car ce n’était pas mon domaine de compétence. Je n’avais pas de crédibilité auprès d’eux ».</p>
</blockquote>
<p>Comment, dès lors, limiter ce risque d’échec ? Pour le savoir, nous avons cherché à identifier, dans une <a href="https://www.cairn.info/revue-de-l-entrepreneuriat-2022-1-page-93.htm">recherche récente</a>, les compétences requises chez les différents partenaires pour parvenir au succès des levées de fonds malgré des objectifs divergents. Nous relevons notamment que ce succès est lié à la capacité à mettre en place une coordination efficace.</p>
<h2>Etablir un pacte d’actionnaires</h2>
<p>Nous avons étudié deux start-up de la région de Grenoble (Isère). La première dirigée par une équipe de trois personnes dont un entrepreneur expert et compétent dans le domaine de l’industrie, est spécialisée dans la micro-nanotechnologie et les textiles intelligents. La seconde, dirigée par un entrepreneur novice et sans expérience dans le domaine de la santé, est spécialisée dans la biotechnologie et l’imagerie de fluorescence.</p>
<p>Les deux start-up sont en relation avec le réseau de business angels de la région Rhône-Alpes Auvergne et des capital-risqueurs. Dans le premier cas, une structuration des différents investisseurs et le dirigeant-entrepreneur a été mise en place pour faciliter les interactions au travers l’établissement de règles et de normes communes.</p>
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<p>Les business angels ont notamment établi un pacte d’actionnaires similaire à celui des capital-risqueurs et ont obtenu un siège au conseil d’administration. Outre le poids dans la gouvernance de l’entreprise, cette représentation permet d’être au meilleur niveau d’information sur le devenir du projet et d’accompagner au mieux le dirigeant. Un représentant des business angels a apprécié cette initiative :</p>
<blockquote>
<p>« On a eu la capacité d’être un acteur significatif en termes de montant et d’ambition, tout en étant aussi au même niveau que les capital-risqueurs en termes de droits, de représentation, de montants investis et, assez naturellement, en termes de participation dans la gouvernance de la société ».</p>
</blockquote>
<p>Un autre délégué du réseau le confirme :</p>
<blockquote>
<p>« Il faut toujours quelqu’un qui soit assez moteur dans les instructions […] C’est très clair, si on veut aboutir à coup sûr, la présence d’un leader est très important lorsqu’on va faire un co-investissement. »</p>
</blockquote>
<p>Dans l’autre cas, faute de la mise en place d’une telle structuration portée par un intermédiaire adéquat, les acteurs n’ont pas réussi à travailler sur une même longueur d’ondes.</p>
<h2>Réduire les mésententes</h2>
<p>La société n’est pas parvenue à lever des ressources financières et managériales supplémentaires. Un business angel en témoigne :</p>
<blockquote>
<p>« Le représentant est censé jouer le rôle d’intermédiaire entre le groupe des business angels et des capital-risqueurs et donne de la crédibilité au projet vis-à-vis des capital-risqueurs. Or, dans le cas de cette start-up, il n’a pas été une force d’entraînement car ce n’était pas son domaine de compétence. Il n’a pu être crédible ni auprès des business angels ni des capital-risqueurs ».</p>
</blockquote>
<p>Notre étude vient ainsi conforter l’idée que la mise en place d’une structure de coordination entre les différents acteurs de la levée de fonds permet effectivement de <a href="https://www.researchgate.net/publication/273509102_The_conflict_potential_of_the_entrepreneur%27s_decision-making_style_in_the_entrepreneur-investor_relationship">réduire les mésententes</a> de <a href="https://www.theses.fr/2017LYSE3073">soutenir ainsi la croissance des start-up</a>. Il s’agit donc d’un élément de feuille de route à prendre en compte pour un entrepreneur désireux de développer efficacement son activité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207775/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Un travail de recherche rappelle l’importance de créer une structure pour superviser les relations entre des investisseurs qui peuvent avoir des intérêts divergents.Kirsten Burkhardt-Bourgeois, Maître de conférences, IAE Dijon, Université de Bourgogne – UBFCLaurence Cohen, Maître de conférences en Finance, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2060142023-06-16T12:56:57Z2023-06-16T12:56:57ZIndustrie spatiale : comment réguler le « New space » ?<p>ClearSpace, Loft Orbital, ShareMySpace… Ces noms ne vous disent peut-être rien : ils font pourtant partie d’une constellation de start-up liées aux technologies spatiales dont le nombre a presque <a href="https://www.nasa.gov/sites/default/files/files/SEINSI.pdf">quintuplé sur une période de 10 ans</a>. Le chiffre d’affaires du secteur, en 2019, pèse pour près de <a href="https://www.oecd.org/innovation/the-space-economy-in-figures-c5996201-en.htm">300 milliards de dollars</a> en 2019.</p>
<p>Elle dessine ce qu’est le « New Space », qui lui-même complète un « Old Space » dans lequel les activités spatiales étaient essentiellement gouvernées par des acteurs publics tels que les États. Le lancement du satellite soviétique Sputnik l’avait incarné dès 1957.</p>
<p>Depuis le début des années 2000, c’est ainsi à un fort développement de l’entrepreneuriat que l’on assiste dans le secteur. L’évolution s’est produite sous l’influence conjointe de facteurs culturels, économiques, politiques et technologiques, qui ont permis une <a href="https://theconversation.com/le-rover-emirati-rashid-doit-se-poser-sur-la-lune-pour-une-mission-ephemere-204283">facilité d’accès à l’espace extra-atmosphérique pour les entrepreneurs</a>. De nouveaux entrants dans cet écosystème <a href="https://theconversation.com/lindustrie-spatiale-mondiale-a-laube-dune-decennie-de-bouleversements-majeurs-152338">ont bouleversé le fonctionnement traditionnel du secteur</a> à plusieurs niveaux. Cela appelle de nouvelles régulations auxquelles les jeunes pousses ne sont pas toujours bien préparées.</p>
<h2>Le spatial, un secteur chamboulé au tournant des années 2000</h2>
<p>Les dynamiques entrepreneuriales récentes sont fortement corrélées à un changement culturel et économique promu par les entrepreneurs de la Silicon Valley dans le <a href="https://www.ifri.org/sites/default/files/atoms/files/nardon_new_space_2017_p.pdf">domaine des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC)</a>. Ces derniers ont exercé une pression toute particulière sur le secteur spatial, de plus en plus demandeurs de services reposant sur ses technologies, ce qui a ouvert de nouvelles opportunités en matière de modèles commerciaux. La start-up franco-américaine <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/qui-est-loft-orbital-cette-start-up-spatiale-franco-americaine-qui-a-leve-125-millions-d-euros.N1166892">Loft Orbital</a> propose aujourd’hui, par exemple, de louer des satellites afin que les entreprises ne soient plus contraintes de posséder et d’exploiter le leur.</p>
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<p>Qui dit nouveaux entrepreneurs dit aussi nouveaux besoins de financement. Le développement d’investisseurs privés tels que <a href="https://seraphim.vc/">Seraphim Space IT</a> est alors venu en réponse à des <a href="https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2002-2-page-205.htm">problèmes de légitimité politique</a> sur le développement des activités spatiales à la fin des années 1990, alors que la guerre froide et les rivalités spatiales liées touchaient à leur fin. Les fonds provenaient alors surtout des États, autrement dit des contribuables. Le contexte devient alors propice pour voir apparaître les <a href="https://www.nasa.gov/content/cots-commercial-partners">premiers partenariats public-privé opérés par la National Aeronautics and Space Administration (NASA)</a>, avec SpaceX notamment.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/spacex-vers-une-nouvelle-ere-de-la-conquete-spatiale-139591">SpaceX : vers une nouvelle ère de la conquête spatiale</a>
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<p>Outre ces facteurs économiques et politiques, l’accessibilité croissante et la baisse des coûts des technologies et des infrastructures spatiales ont également joué un rôle important dans l’essor du <em>New Space</em>. On peut citer des avancées telles que l’impression 3D, les fusées réutilisables et les <a href="https://theconversation.com/les-cubesats-un-exemple-dinnovation-low-cost-dans-lindustrie-spatiale-129375">nanosatellites ou « cubesats »</a>, plus petits et moins coûteux. Elles ont permis aux entreprises privées d’entrer dans le secteur grâce à des coûts de production qui ont <a href="https://youtu.be/7a4UJnJJnJs">facilité l’accès à l’espace</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/retour-des-humains-sur-la-lune-artemis-figure-de-proue-dune-competition-globale-150153">Retour des humains sur la Lune: Artemis, figure de proue d’une compétition globale</a>
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<p>L’ensemble a fait basculer les acteurs du spatial vers des logiques nouvelles. Ils ont notamment dû repenser leurs activités en fonction des besoins des utilisateurs finaux, et moins selon des impératifs de défense ou des objectifs scientifiques. Les principales agences spatiales du monde, telles que la NASA, l’Agence spatiale européenne (ESA) ou le CNES, ont mis en place d’importantes mesures d’incitation à l’entrepreneuriat. <a href="https://www.spaceappschallenge.org/">Challenges</a>, <a href="https://entreprises.cnes.fr/fr/actinspace">hackathons</a>, <a href="https://commercialisation.esa.int/esa-business-incubation-centres/">incubateurs</a> et <a href="https://air-cosmos.com/article/cosmicapital-un-fonds-ddi-aux-technologies-du-new-space-en-france-et-en-europe-25472">financements</a> en capital-risque ont ainsi vu le jour.</p>
<p><iframe id="BYfhf" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/BYfhf/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Les récents plans d’investissement public, à l’image du <a href="https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2021/10/12/presentation-du-plan-france-2030">plan national d’investissement France 2030</a>, indiquent qu’une « attention particulière sera accordée aux projets portés par les acteurs émergents (start-up et PME-ETI innovantes) » dans <a href="https://www.bpifrance.fr/nos-appels-a-projets-concours/appel-a-projets-spatial-developpement-et-industrialisation-de-constellations-de-satellites-et-de-leurs-technologies-habilitantes">l’appel à projets opéré la BPI</a> sur le développement et l’industrialisation de constellations de satellites et les technologies associées.</p>
<h2>Quelle place pour la soutenabilité ?</h2>
<p>Ce développement doit aussi répondre de ses conséquences. Un défi majeur réside ainsi dans la gestion des déchets spatiaux, provoqués par le nombre croissant d’objets lancés en orbite autour de la Terre et dont la fin de vie demeure problématique. Plus de débris, c’est potentiellement plus de collisions avec des objets fonctionnels, donc plus de débris avec des effets en chaîne : c’est ce que l’on appelle le <a href="https://www.cite-espace.com/centre_ressources/le-syndrome-de-kessler/">syndrome de Kessler</a>.</p>
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<p>Pour pallier un <a href="https://theconversation.com/pollution-dans-lespace-et-si-on-taxait-144744">manque de régulation</a>, la communauté spatiale internationale se concerte ainsi dans le cadre de diverses initiatives telles que l’<a href="https://www.iadc-home.org/"><em>Inter-Agency Space Debris Coordination Committee</em></a> et le <a href="https://moonvillageassociation.org/"><em>Moon Village Association</em></a> qui proposent des directives de bonne conduite. Plusieurs start-up proposent aussi de répondre à la problématique des débris spatiaux, telle que <a href="https://clearspace.today/">Clearspace</a>, qui ambitionne de devenir le prochain <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/air-defense/spatial-clearspace-en-piste-pour-devenir-le-premier-eboueur-du-ciel-1269956">« éboueur du spatial »</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/destruction-dun-satellite-russe-de-nouveaux-debris-menacent-la-station-spatiale-internationale-151789">Destruction d’un satellite russe : de nouveaux débris menacent la Station Spatiale Internationale</a>
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<p>Les <a href="https://theconversation.com/les-satellites-starlink-nous-empecheront-bientot-dobserver-les-etoiles-150410">États</a> tentent également de répondre à ces enjeux de <a href="https://theconversation.com/comment-les-activites-spatiales-peuvent-elles-evoluer-vers-plus-de-durabilite-200396">soutenabilité</a>, en fixant des <a href="https://theconversation.com/quel-cadre-juridique-pour-les-conflits-spatiaux-de-demain-153244">normes contraignantes</a>. On peut citer notamment la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000018931380">loi française de 2008 relative aux opérations spatiales (loi LOS)</a>, <a href="https://entreprises.cnes.fr/fr/consultation-actualisation-los-2023">actuellement en cours d’actualisation</a>. Elle a la particularité en droit spatial d’obliger les opérateurs de satellites français à libérer les orbites utilisées dans les 25 ans qui suivent la fin de leur mission par désintégration dans l’atmosphère terrestre ou placement sur une orbite cimetière. Elle fixe en outre des <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX%3A52021XC0218%2801%29">critères d’impacts socio-environnementaux dans les appels à projets publics</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pollution-dans-lespace-et-si-on-taxait-144744">Pollution dans l’espace : et si on taxait ?</a>
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<p>Les <a href="https://www.unoosa.org/oosa/en/ourwork/access2space4all/index.html">questions d’impacts sociaux</a> méritent tout autant d’être pris en compte dans le développement des activités entrepreneuriales spatiales. Un travail pour les identifier est à poursuivre mais le bureau des affaires spatiales des Nations unies a déjà défini un certain nombre de <a href="https://www.unoosa.org/oosa/en/ourwork/space4sdgs/index.html">thématiques</a> s’inspirant des 17 objectifs de développement durable de l’ONU. On peut notamment citer l’accès aux données spatiales pour tous auquel la start-up française <a href="https://www.sharemyspace.space/">ShareMySpace</a> s’attelle.</p>
<h2>Légiférer sans entraver la compétitivité ?</h2>
<p>Néanmoins, qui dit régulation dit aussi enjeu de compétitivité lorsque l’on touche à un secteur mondialisé. Les critères posés semblent aujourd’hui trop différer d’un pays à l’autre, ce qui peut conduire à un phénomène dit de « forum shopping » : les entreprises vont tenter de profiter de la juridiction la plus susceptible de donner raison à leurs propres intérêts.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/pourquoi-la-chine-tient-tant-a-gagner-la-nouvelle-course-aux-etoiles-155581">La Chine</a>, les <a href="https://theconversation.com/le-rover-emirati-rashid-doit-se-poser-sur-la-lune-pour-une-mission-ephemere-204283">Émirats arabes unis</a>, les <a href="https://theconversation.com/retour-des-humains-sur-la-lune-artemis-figure-de-proue-dune-competition-globale-150153">États-Unis</a>, <a href="https://www.lefigaro.fr/societes/l-inde-s-impose-comme-une-grande-nation-spatiale-20221118">l’Inde</a> et le <a href="https://www.lexpress.fr/sciences-sante/sciences/l-exploitation-privee-des-ressources-de-l-espace-autorisee-au-luxembourg_1932344.html">Luxembourg</a> contribuent ainsi à un marché spatial international hautement compétitif avec des cadres légaux flexibles, en plus d’offrir parfois des solutions techniques et commerciales souvent moins chères qu’en France. C’est ce qu’a souligné Stanislas Maximin, PDG de la start-up Latitude lors des Assises du <em>New Space</em> à Paris, le 7 juillet 2022 à propos de la loi LOS :</p>
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<p>« Le problème c’est qu’on est un tout petit pays. Il y a aussi les États-Unis, la Chine, l’Allemagne… Que toute l’Europe légifère ? Pourquoi pas : ça ferait plus ou moins entre 20 et 30 % de l’économie spatiale mondiale. La France seule ? Je le vois surtout comme un risque ».</p>
</blockquote>
<p>Dans le contexte international hautement concurrentiel du <em>New Space</em>, les résultats de nos <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/radm.12547">travaux de recherche</a> indiquent que multiplier des critères socio-environnementaux sans accompagnement dédié spécialisé sur le sujet semble aller à l’encontre du développement de l’entrepreneuriat spatial. Cela peut réduire la compétitivité des nouveaux entrants, et plus particulièrement des start-up.</p>
<p>Cela n’implique pas que ces critères de soutenabilité doivent être absents du cahier des charges des appels à projets ou des normes juridiques en vigueur. Néanmoins, nous pensons qu’il est plus pertinent de les introduire de les adapter à la maturité des entreprises qui ne sont pas toutes en mesure de répondre aux mêmes contraintes. Plusieurs start-up ont pu nous l’indiquer, comme ce dirigeant :</p>
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<p>« Aujourd’hui, on ne va pas se mentir, on essaie d’abord de développer un produit. Quand on en fera 5 000 par an, on lancera plus sérieusement la réflexion sur ces sujets qui sont intéressants, mais il faudra que cela intervienne au bon moment ».</p>
</blockquote>
<p>Nous avons également remarqué dans nos recherches qu’il existe un fossé entre les attentes institutionnelles envers les start-up et les moyens à disposition pour accompagner ces jeunes pousses vers un développement soutenable. L’accompagnement entrepreneurial des nouveaux entrants en matière de soutenabilité demeure marginal et ne prépare pas suffisamment ces derniers à répondre aux contrats et appels à projets en matière d’impacts socio-environnementaux ainsi qu’à leur ouverture à de nouveaux marchés. Renforcer cet accompagnement permettrait de développer des activités spatiales plus compétitives et plus soutenables, sans pour autant réduire l’attractivité des territoires et des organisations orchestrant ces activités.</p>
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<p><em>La Chaire academico-industrielle Sirius, portée par Airbus Defence and Space, le Centre national d’études spatiales (CNES), Thales Alenia Space ainsi que par TBS Education et l’Université Toulouse 1 Capitole s’attache dans ses <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/radm.12547">travaux</a> à analyser les aspects légaux et managériaux du « New Space »</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206014/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Aveline Cloitre a reçu des financements de la Chaire SIRIUS portée par Airbus Defence and Space, le Centre national d’études spatiales (CNES), Thales Alenia Space ainsi que par TBS Education et l’Université Toulouse 1 Capitole</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Victor Dos Santos Paulino a reçu des financements de la Chaire SIRIUS portée par Airbus Defence and Space, le Centre national d’études spatiales (CNES), Thales Alenia Space ainsi que par TBS Education et l’Université Toulouse 1 Capitole</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Christina Theodoraki ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le secteur spatial a connu un vaste bouleversement depuis le début des années 2000 avec l’arrivée massive d’acteurs privés. Comment organiser ce marché pour éviter les externalités négatives ?Aveline Cloitre, PhD student, space entrepreneurship, TBS EducationChristina Theodoraki, Professeur Associé en Entrepreneuriat et Stratégie, TBS EducationVictor Dos Santos Paulino, Professeur associé en management de l'innovation et stratégie, Chaire Sirius, TBS EducationLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2068102023-06-08T18:00:53Z2023-06-08T18:00:53ZL’université doit-elle se mettre au service de l’économie ? Retour sur un débat vieux de plusieurs siècles<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/529367/original/file-20230531-27-kzkj67.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C1%2C1162%2C740&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Au Moyen Âge, on observe des liens robustes entre des universités et certaines sphères de l’activité économique.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/levanrami/42046662921">Flickr/Levan Ramishvili</a></span></figcaption></figure><p>Depuis le milieu du XX<sup>e</sup> siècle, les deux principales missions de l’université communément identifiées sont l’enseignement et la recherche. Cependant, il existe une troisième mission, moins connue, qui amènerait l’université à adopter une approche dite « entrepreneuriale », et qui depuis les années 2000 fait l’objet d’un engouement croissant.</p>
<p>Selon les partisans de la troisième mission, l’université doit s’engager – au-delà de ses fonctions d’éducation et de recherche – dans des activités entrepreneuriales, et <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11187-016-9755-4">avoir des impacts bénéfiques sur le développement socio-économique</a>, notamment au niveau local. La troisième mission de l’université consiste ainsi à transférer des connaissances produites dans la sphère académique vers la société, au travers essentiellement de la valorisation de sa propriété intellectuelle, et d’activités d’essaimage, c’est-à-dire la création d’entreprises issues de connaissances universitaires.</p>
<p>Aux États-Unis, la volonté de soutenir la mission entrepreneuriale de l’université s’incarne au travers de la loi emblématique <a href="https://shs.hal.science/halshs-00780699/document">Bayh Dole</a> votée en 1980. Ce texte a été répliqué, en partie, en France en 1999 avec la promulgation de la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000759583">loi sur l’Innovation et la recherche</a>, et de manière plus ou similaire dans d’autres états de l’Union européenne. Dans les tous les cas, il s’agit de construire des ponts entre d’un côté des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0040162520311100">savoirs universitaires et de l’autre côté des activités économiques et sociales</a>.</p>
<p>Depuis les années 2000, on observe chez différents acteurs – politiques et économiques – un intérêt accru envers la <a href="https://www.mondedesgrandesecoles.fr/paris-dauphine-psl-house-of-entrepreneurship/">dimension entrepreneuriale de l’université</a>, la littérature académique notamment en sciences économiques et de gestion s’en est fait largement l’écho. Selon cette perspective, le transfert et la valorisation des connaissances académiques peuvent contribuer à la <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11187-016-9721-1">création d’entreprises</a>, d’emplois, à l’émergence d’innovations (technologiques, organisationnelles, sociales…), et plus généralement à la croissance économique.</p>
<h2>Les universités, des tours d’ivoire ?</h2>
<p>Parmi les critiques bien connues adressées aux universités, on retrouve l’argument selon lequel ces dernières seraient enfermées dans des tours d’ivoire, insensibles aux difficultés économiques et aux défis sociétaux. Ces reproches conduiraient à favoriser une ouverture des universités au monde extérieur.</p>
<p>Cependant, l’engouement pour une mission entrepreneuriale est loin de faire consensus au sein de la sphère académique. Nous pouvons regrouper les arguments contre une intensification des liens entre les universités et les activités marchandes dans deux sous-ensembles : premièrement, certains chercheurs restent sceptiques quant à la faisabilité des objectifs associés à cette troisième mission, <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10961-014-9357-8">même au niveau régional</a>.</p>
<p>[<em>Plus de 85 000 lecteurs font confiance aux newsletters de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://memberservices.theconversation.com/newsletters/?nl=france&region=fr">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Deuxièmement, d’autres chercheurs font part de leurs craintes concernant la qualité de la recherche scientifique : la nature heuristique de la recherche pourrait être <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10961-014-9348-9">affectée par des pressions économiques</a> venant du secteur privé. En d’autres termes, favoriser une recherche appliquée en lien avec des intérêts économiques de court terme pourrait perturber des processus de recherche fondamentale qui visent, à long terme, des répercussions favorables sur l’ensemble de la société et l’économie. Ce dernier argument fait référence au <a href="https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2013-3-page-32.htm">principe de sérendipité</a>, c’est-à-dire de découverte liée au hasard, principe crucial pour de nombreux scientifiques.</p>
<h2>Un vieux débat</h2>
<p>Selon une croyance répandue, <a href="https://journals.openedition.org/cdst/206">l’université entrepreneuriale</a> serait un phénomène relativement récent. Ce terme est apparu en 1983 dans l’ouvrage d’Etzkowitz, qui, dès les années 1980, soulignait la mise en œuvre de transformations majeures dans le monde universitaire. Cependant, des traces de l’existence d’un intérêt porté par les universités à l’environnement économique sont en réalité très anciennes. Le premier signe d’une université dite entrepreneuriale remonte au XI<sup>e</sup> ou XII<sup>e</sup> siècle en France, en Italie et au Royaume-Uni.</p>
<p>Au Moyen Âge, on observe déjà des <a href="https://www.cairn.info/revue-marche-et-organisations-2019-1-page-11.htm">liens robustes</a> entre des universités et certaines sphères de l’activité économique. Un des objectifs associés à la création d’universités est alors la formation de professionnels qui seraient davantage compétents qu’une partie de l’administration royale et des élites.</p>
<p>Plus tard, à la Renaissance, le mécénat joue un grand rôle dans le financement de recherches scientifiques. De son côté, le début du XIX<sup>e</sup> siècle est marqué par l’apparition, outre-Rhin, du modèle de <a href="https://journals.openedition.org/pyramides/804?lang=en">Humboldt</a> qui met l’accent sur l’éducation et la recherche comme étant les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S004873331400105X">deux activités clés des universités</a>. L’université de Berlin, créée en 1810 sur la base de ce modèle est considérée comme l’une des institutions d’enseignement et de recherche les plus prestigieuses au monde, générant de nombreux prix Nobel et de célèbres étudiants, tels que Karl Marx, Max Weber, Arthur Schopenhauer, Albert Einstein et Otto von Bismarck. Le modèle de l’université de Berlin s’est largement répandu notamment en Europe continentale.</p>
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<img alt="Bâtiment principal de l’université Humboldt à Berlin" src="https://images.theconversation.com/files/529387/original/file-20230531-21-7g4mhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/529387/original/file-20230531-21-7g4mhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/529387/original/file-20230531-21-7g4mhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/529387/original/file-20230531-21-7g4mhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/529387/original/file-20230531-21-7g4mhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/529387/original/file-20230531-21-7g4mhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/529387/original/file-20230531-21-7g4mhp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Bâtiment principal de l’université Humboldt à Berlin.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/dalbera/9634657735">Jean-Pierre Dalbéra/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Néanmoins, au cours de la même période, on observe comme un contrepoids, l’émergence d’établissements d’enseignement supérieur purement utilitaristes axés sur l’enseignement, sans préoccupation pour la recherche. L’objectif principal de ces établissements est alors de répondre à des besoins industriels et sociétaux, c’est notamment le cas <a href="https://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwjM0JXqjp__AhXCU6QEHUSmAFAQFnoECCgQAQ&url=https%3A%2F%2Fshs.hal.science%2Fhalshs-01366484%2Fdocument&usg=AOvVaw3AwOjPiN10Dtqi_X85EUb3">du modèle des grandes écoles en France</a>.</p>
<p>Cependant, on peut relever le rôle clé joué par les universités lors de la première révolution industrielle : de nombreuses inventions émergent de collaborations entre les universités et l’industrie. Cela a notamment donné lieu à des avancées technologiques majeures apparues en Allemagne dans les secteurs de l’électricité et de la chimie. Au Royaume-Uni, au XIX<sup>e</sup> siècle, <a href="https://publimath.univ-irem.fr/glossaire/LO027.htm">Lord Kelvin</a> incarne à la fois un physicien reconnu et un membre de la direction de la filiale britannique de la société américaine Kodak. Un autre exemple illustre français demeure celui de Marie Curie, lauréate de deux prix Nobel, et <a href="https://www.persee.fr/doc/rei_0154-3229_1997_num_79_1_1659">à l’origine d’une toute nouvelle industrie</a>.</p>
<p>Ce n’est qu’au cours du XX<sup>e</sup> siècle, après les deux guerres mondiales, un changement conséquent se produit avec l’apparition d’un <a href="https://www.cairn.info/revue-marche-et-organisations-2019-1-page-87.htm">certain éloignement</a> entre le monde universitaire et le monde industriel. Les universités semblent moins enclines à se rapprocher des entreprises privées, notamment pour y trouver des financements. Cela est dû, au moins en partie, à la forte croissance, à la fois des activités économiques et de la richesse du monde occidental.</p>
<p>En Europe continentale, la perception selon laquelle les missions de recherche et d’éducation doivent être à la fois prépondérantes et corrélées devient une opinion dominante. En effet, à cette époque de nombreux opposants à la valorisation économique de la recherche affirment que recherche et formation représentent le modèle souhaité de ce que devrait être une université. Ils défendent ainsi un modèle d’université indifférent à toute préoccupation économique.</p>
<h2>Et maintenant ?</h2>
<p>Finalement, si on considère les siècles passés plutôt que les dernières décennies, la période pendant laquelle les universités ont été étrangères à toute considération sociale et économique demeure assez limitée. Ainsi, il n’y aurait pas eu de passage récent d’un mode de production de connaissances purement académique à un mode plus utilitariste de production de connaissances, <a href="https://www.torrossa.com/en/resources/an/5017649">comme certains ont pu l’affirmer</a> dès les années 1990. Ces deux modes co-existent simultanément depuis longtemps.</p>
<p>Cependant, leur poids, leurs influences respectives, et leurs configurations varient au cours du temps, en fonction de valeurs sociales, économiques et politiques. Aujourd’hui, les grands défis sociétaux auxquels nous sommes confrontés, tels que la transition écologique, le vieillissement de la population, la souveraineté technologique et industrielle, l’impact de la digitalisation et de l’intelligence artificielle (IA), appellent premièrement à un renouvellement de la réflexion sur les interactions au sein des universités entre recherche, enseignement et engagement entrepreneurial.</p>
<p>Deuxièmement, dans la continuité des travaux sur la <a href="https://www.cairn.info/revue-projectique-2012-2-page-13.htm">recherche et l’innovation responsable (RIR)</a>, on peut également s’interroger sur l’importance de construire des relations fortes entre les universités d’un côté et la société de l’autre. En effet, face à des défis complexes, changeants, combinant des enjeux technologiques et sociétaux, et caractérisés par une forte incertitude, la question du rôle et des missions des organisations de <a href="https://academic.oup.com/spp/article/45/4/448/4915392">création</a> de savoirs tels que les universités, est plus que jamais d’actualité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206810/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’intérêt des universités pour leur environnement économique est apparu au XIᵉ siècle avant un recentrage sur les missions de recherche et d’enseignement à partir de la Renaissance.Valérie Revest, Professeure des universités en sciences économiques, centre de recherche Magellan, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3Jean-Régis Kunegel, Docteur en économie, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2042382023-06-08T16:08:26Z2023-06-08T16:08:26ZL'IA profite d'une couverture partiale des médias<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/523618/original/file-20230501-18-8b9nej.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=14%2C0%2C1902%2C1066&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Peu de voix critiques à l’égard de l’IA se font entendre dans la couverture des médias traditionnels sur le sujet.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Les médias d’information jouent un rôle déterminant dans la perception qu’a le public de l’intelligence artificielle. Depuis 2017, année où Ottawa a rendu publique sa <a href="https://ised-isde.canada.ca/site/strategie-ia/fr">Stratégie pancanadienne en matière d’intelligence artificielle</a>, <a href="https://yvesgingras.uqam.ca/wp-content/uploads/sites/150/Note_2020-07_IA.pdf">l’IA est présentée et promue comme une ressource clé</a> pour l’économie canadienne.</p>
<p>Ayant engagé plus d’un <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=4089932">milliard de dollars en financement public</a>, le gouvernement fédéral décrit l’IA comme un outil <a href="https://ised-isde.canada.ca/site/strategie-ia/fr">dont il faut impérativement tirer parti</a>. Certains organismes financés par l’État comme <a href="https://www.scaleai.ca/fr/">Scale AI</a> et <a href="https://forumia.quebec/">Forum IA Québec</a> existent pour faire la promotion de l’adoption de l’IA dans tous les secteurs de l’économie.</p>
<p>Au cours des deux dernières années, notre équipe de recherche <a href="https://www.shapingai.org/#media">Shaping AI</a> a étudié la couverture médiatique canadienne de l’IA. Nous avons analysé les articles de journaux publiés sur le sujet entre 2012 et 2021 et mené des entrevues avec des journalistes canadiens affectés à la couverture de l’IA durant cette période.</p>
<p><a href="https://espace.inrs.ca/id/eprint/13149/1/report_ShapingAI_verJ.pdf">Selon notre étude</a>, les articles de médias généralistes sur l’IA reflètent étroitement les intérêts des affaires et du gouvernement. La couverture de l’IA fait l’éloge de ses futurs avantages économiques et politiques. Elle aborde très peu les dynamiques de pouvoir qui sous-tendent ces intérêts.</p>
<h2>Les mêmes sources</h2>
<p>Notre étude révèle que les journalistes technos ont tendance à interviewer sans cesse les mêmes experts favorables à l’IA, en particulier des informaticiens. « Qui est la meilleure personne pour parler d’IA, si ce n’est celui qui la conçoit ? », nous expliquait un pigiste. Or, lorsque les journalistes font appel à un nombre restreint de sources, leurs reportages sont plus susceptibles d’omettre certaines informations importantes ou d’être partiaux.</p>
<p>Les informaticiens et les entrepreneurs oeuvrant dans le secteur technologique Yoshua Bengio, Geoffrey Hinton, Jean-François Gagné et Joëlle Pineau sont sollicités outre mesure par les médias traditionnels. Le nom de Yoshua Bengio – pionnier de l’apprentissage profond et fondateur de l’<a href="https://mila.quebec/personne/bengio-yoshua/">Institut d’intelligence artificielle Mila</a> – <a href="https://1drv.ms/f/s!Agwflj4HlSHJ9GV2_kegBc8ijuIw?e=Oxrlbt">apparaît près de 500 fois</a> dans 344 articles journalistiques différents.</p>
<p>Seule une poignée de politiciens et de leaders du secteur des technologies, comme Elon Musk ou Mark Zuckerberg, sont mentionnés plus souvent que ces experts dans les reportages canadiens sur l’IA.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Deux hommes, l’un portant un veston et l’autre une tenue décontractée, sont assis et discutent.Des drapeaux canadiens apparaissent en arrière-plan" src="https://images.theconversation.com/files/521370/original/file-20230417-1000-lgpo0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521370/original/file-20230417-1000-lgpo0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521370/original/file-20230417-1000-lgpo0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521370/original/file-20230417-1000-lgpo0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521370/original/file-20230417-1000-lgpo0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521370/original/file-20230417-1000-lgpo0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521370/original/file-20230417-1000-lgpo0a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le premier ministre Justin Trudeau rencontre Jean-François Gagné, cofondateur et à l’époque chef de la direction de la société Element AI, en marge du Fortune Global Forum, à Toronto, en octobre 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="source">LA PRESSE CANADIENNE/Chris Young</span></span>
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</figure>
<p>Peu de voix critiques à l’égard de l’IA se font entendre dans la couverture des médias traditionnels sur le sujet. Les opinions critiques les plus fréquemment citées sont celles du regretté physicien Stephen Hawking, à qui on attribue 71 mentions. Les spécialistes des sciences sociales brillent par leur absence.</p>
<p>Yoshua Bengio, Geoffrey Hinton et Joëlle Pineau sont des autorités dans leur domaine d’expertise, mais à l’instar d’autres scientifiques, ils ne sont pas neutres ni exempts de parti pris. En entrevue, ils <a href="https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/tout-un-matin/segments/entrevue/438367/moratoire-intelligence-artificielle-arrivee-nucleaire">font la promotion du développement</a> et du <a href="https://ici.radio-canada.ca/info/videos/media-8258004/entrevue-avec-yoshua-bengio?isAutoPlay=true">déploiement de l’IA</a>. Comme ils ont consacré leur vie professionnelle au développement du champ de l’IA, ils ont intérêt à favoriser son adoption.</p>
<h2>Chercheurs et entrepreneurs en IA</h2>
<p>Plusieurs scientifiques spécialisés en IA sont non seulement des chercheurs, <a href="https://doi.org/10.1080/0953732032000046024">mais aussi des entrepreneurs</a>. Ces deux rôles sont distincts : un chercheur produit des savoirs, tandis qu’un entrepreneur se sert de la recherche et du développement pour attirer les investissements et vendre ses innovations.</p>
<p>Les <a href="https://doi.org/10.1016/S0048-7333(99)00055-4">frontières entre l’État, l’industrie des technologies et le milieu universitaire sont de plus en plus poreuses</a>. Au Canada, au cours de la dernière décennie, les agences gouvernementales, les entreprises publiques et privées, les chercheurs et les industriels ont contribué à la mise en place d’un écosystème lucratif en IA. Les chercheurs du domaine sont étroitement intégrés à ce <a href="https://yvesgingras.uqam.ca/wp-content/uploads/sites/150/Note_2020-07_IA.pdf">réseau tricoté serré</a>, partageant leur temps entre des laboratoires financés par l’État et des <a href="https://www.cs.mcgill.ca/%7Ejpineau/">géants de la technologie comme Meta</a>.</p>
<p>Les chercheurs en IA occupent des postes de pouvoir clés au sein des <a href="https://forumia.quebec/a-propos">organismes qui font la promotion de l’adoption de l’IA</a> <a href="https://ivado.ca/gouvernance/">dans toutes les industries</a>. De plus, un grand nombre d’entre eux occupent ou ont occupé des postes décisionnels à l’<a href="https://cifar.ca/fr/ia/">Institut canadien de recherches avancées (CIFAR)</a>, un organisme qui achemine des fonds publics vers des chaires de recherche en IA un peu partout au Canada.</p>
<p>Lorsque les informaticiens s’expriment dans les médias, ils le font non seulement à titre d’experts en IA, mais aussi en tant que <a href="https://shs.hal.science/halshs-00081741">porte-paroles de ce réseau</a>. Ils confèrent une crédibilité et une légitimité aux reportages sur l’IA en raison de leur expertise reconnue. Mais ils sont également en position de promouvoir leurs propres attentes relativement à l’avenir de l’IA, sans avoir à être imputable quant à la réalisation de ces visions d’avenir.</p>
<h2>Promotion de l’IA responsable</h2>
<p>Les experts cités dans les médias traditionnels abordent rarement les détails techniques de la recherche en IA. Les techniques d’apprentissage automatique – communément regroupées sous le terme parapluie IA – sont jugées trop complexes pour le grand public. « Il y a très peu d’espace consacré à l’approfondissement des aspects techniques », nous a dit un journaliste.</p>
<p>Les chercheurs en IA profitent plutôt de l’attention médiatique pour façonner les attentes et la compréhension du public en matière d’IA. La couverture récemment accordée à une <a href="https://futureoflife.org/open-letter/pause-giant-ai-experiments/">lettre ouverte réclamant un moratoire de six mois sur le développement de l’IA</a> en est un bon exemple. Les reportages ont surtout relayé des clichés alarmistes sur ce que l’IA pourrait devenir, citant de « <a href="https://www.nytimes.com/2023/03/29/technology/ai-artificial-intelligence-musk-risks.html">graves risques pour la société »</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un homme d’âge moyen à la chevelure frisée fixe la caméra, le menton appuyé dans la main. À côté de lui se trouve un écran où l’on voit une tête humaine baignée dans une lumière bleue éclatante ; les mots « l’IA et l’apprentissage profond » apparaissent dans la partie supérieure de l’écran" src="https://images.theconversation.com/files/521102/original/file-20230414-16-dbxzys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521102/original/file-20230414-16-dbxzys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521102/original/file-20230414-16-dbxzys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521102/original/file-20230414-16-dbxzys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=376&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521102/original/file-20230414-16-dbxzys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521102/original/file-20230414-16-dbxzys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521102/original/file-20230414-16-dbxzys.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le professeur d’informatique Yoshua Bengio devant son domicile de Montréal, en 2016.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse canadienne/Graham Hughes</span></span>
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</figure>
<p><a href="https://yoshuabengio.org/2023/04/05/slowing-down-development-of-ai-systems-passing-the-turing-test/">Yoshua Bengio</a>, qui a signé la lettre, avertit que l’IA a le potentiel de <a href="https://www.theglobeandmail.com/business/article-ai-pause-elon-musk/">déstabiliser la démocratie</a> et <a href="https://ici.radio-canada.ca/ohdio/premiere/emissions/tout-un-matin/segments/entrevue/438367/moratoire-intelligence-artificielle-arrivee-nucleaire">l’ordre mondial</a>.</p>
<p>Ces interventions ont façonné le discours sur l’IA de deux façons. Premièrement, elles ont associé les débats sur l’IA à des <a href="https://theconversation.com/lets-base-ai-debates-on-reality-not-extreme-fears-about-the-future-203030">visions alarmistes d’un futur lointain</a>. La couverture de la lettre ouverte réclamant un moratoire de six mois sur le développement de l’IA <a href="https://www.dair-institute.org/blog/letter-statement-March2023">a passé sous silence les dangers réels et bien documentés</a> liés à l’IA, comme ceux relatifs à <a href="https://academic.oup.com/book/5264">l’exploitation de la main-d’œuvre</a>, au <a href="https://proceedings.mlr.press/v81/buolamwini18a.html">racisme</a>, au <a href="https://youtu.be/E-O3LaSEcVw">sexisme</a>, à la désinformation et à la <a href="https://www.publicaffairsbooks.com/titles/shoshana-zuboff/the-age-of-surveillance-capitalism/9781610395694/">concentration du pouvoir entre les mains des géants de la technologie</a>.</p>
<p>Deuxièmement, la lettre présente la recherche en IA selon une <a href="https://www.britannica.com/topic/Manichaeism">dichotomie manichéenne</a> : la vision négative que « personne […] ne peut comprendre, maîtriser, prédire ou contrôler de façon fiable » et une vision positive – la soi-disant IA responsable. La lettre ouverte visait autant à façonner notre vision de l’avenir de l’IA qu’à <a href="https://www.latimes.com/business/technology/story/2023-03-31/column-afraid-of-ai-the-start-up-selling-it-want-you-to-be">vanter l’IA responsable</a>.</p>
<p>Mais si l’on en croit les normes de l’industrie de l’IA, ce qui a été jusqu’ici qualifié d’« IA responsable » consiste en des <a href="https://doi.org/10.1007/s43681-022-00209-w">principes vagues, volontaristes et non contraignants qui sont impossibles à mettre en œuvre dans le milieu des entreprises</a>. L’IA éthique n’est souvent qu’un <a href="https://time.com/6247678/openai-chatgpt-kenya-workers/">stratagème de marketing</a> à des fins de profit qui n’a pas grand-chose à offrir pour éliminer les systèmes d’exploitation, d’oppression et de violence déjà associés à l’IA.</p>
<h2>Recommandations de l’étude</h2>
<p>Notre étude comporte cinq recommandations visant à encourager un journalisme d’enquête critique en sciences et technologie ainsi que la mise en lumière des controverses de l’IA.</p>
<ol>
<li><p><strong>Promouvoir et investir dans le journalisme techno.</strong> Nous invitons les salles de rédaction et les journalistes à se méfier des cadrages économiques naïfs de l’IA et à enquêter plutôt sur les externalités qui sont généralement laissées de côté dans les reportages économiques : les exclusions sociales, les inégalités et les injustices créées par l’IA.</p></li>
<li><p><strong>Éviter de traiter l’IA comme une prophétie.</strong> Les projections futures de l’IA doivent être distinguées des réalisations actuelles.</p></li>
<li><p><strong>Suivre l’argent.</strong> Les médias canadiens ont peu couvert les proportions inhabituelles du financement gouvernemental gargantuesque qui a été consacré à la recherche sur l’IA. Nous conseillons aux journalistes d’examiner minutieusement les réseaux de personnes et d’organismes qui travaillent à la mise en place et au maintien de l’écosystème de l’IA au Canada.</p></li>
<li><p><strong>Diversifier les sources.</strong> Les experts en IA et leurs établissements de recherche occupent une place démesurée dans la couverture médiatique de l’IA au Canada, tandis que les opinions critiques y font cruellement défaut.</p></li>
<li><p><strong>Encourager la collaboration entre les journalistes, les salles de nouvelles et les équipes responsables des données.</strong> La prise en compte de différents types d’expertises aide à mettre en lumière les considérations sociales et techniques en matière d’IA. L’omission de l’une ou l’autre de ces expertises risque de rendre la couverture de l’IA déterministe, inexacte, naïve ou exagérément simpliste.</p></li>
</ol>
<p>L’adoption d’une attitude critique face à l’IA ne veut pas dire que l’on soit contre son développement et son déploiement. Cette posture a plutôt pour effet d’inciter les médias d’information et leur lectorat à s’interroger sur les dynamiques culturelles, politiques et sociales qui rendent l’IA possible, et à examiner les incidences globales de la technologie sur la société, et vice versa.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204238/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Guillaume Dandurand est financé par le Conseil de recherche en sciences humaines.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Fenwick McKelvey reçoit des fonds du Conseil de recherches en sciences humaines et du Fonds de recherche du Québec - Société et Culture (FRQSC).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Jonathan Roberge reçoit des fonds du Conseil de recherches en sciences humaines et des Fonds de recherche du Québec - Société et Culture (FRQSC).</span></em></p>La couverture médiatique de l’intelligence artificielle reflète davantage l’engouement du milieu des entreprises et du gouvernement que les opinions critiques.Guillaume Dandurand, Postdoctoral Fellow, Shaping AI, Institut national de la recherche scientifique (INRS)Fenwick McKelvey, Associate Professor in Information and Communication Technology Policy, Concordia UniversityJonathan Roberge, Professor, Institut national de la recherche scientifique (INRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2069552023-06-05T09:53:52Z2023-06-05T09:53:52ZJeunes entrepreneurs : faut-il suivre vos aspirations profondes ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/529793/original/file-20230602-27-dxf9uz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5472%2C3645&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Se lancer dans une aventure entrepreneuriale implique de ne pas se laisser griser par les idées que l'on aurait couché sur le papier.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pxhere.com/fr/photo/911893">pxhere</a></span></figcaption></figure><p>L’<a href="https://theconversation.com/topics/entrepreneuriat-25460">entrepreneuriat</a> a toujours le vent en poupe. D’après l’Insee en 2022, <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/6692134">1 071 900 entreprises</a> ont vu le jour. Ces dernières années, la création de nouveaux statuts a contribué à ce dynamisme (<a href="https://theconversation.com/entrepreneurs-et-autoentrepreneurs-la-grande-confusion-199816">microentreprises</a>, <a href="https://www.economie.gouv.fr/entreprises/societe-actions-simplifiee-SAS">société par actions simplifiée</a>, <a href="https://www.economie.gouv.fr/entreprises/societe-par-actions-simplifiee-unipersonnelle-sasu#:%7E:text=La%20SASU%20(soci%C3%A9t%C3%A9%20par%20actions,en%20num%C3%A9raire%20ou%20en%20nature.)">société par actions simplifiée unipersonnelle</a>).</p>
<p>Il y a également derrière les <a href="https://theconversation.com/topics/motivation-60842">motivations entrepreneuriales</a> des aspirations profondes qui ont fait l’objet de notre <a href="https://www.cairn.info/revue-de-l-entrepreneuriat-2023-1-page-29.htm">travail de recherche</a> récemment publié dans la <em>Revue de l’entrepreneuriat</em>. À partir d’entretiens menés auprès de 55 entrepreneurs, quatre grands types d’aspirations profondes, susceptibles de s’entremêler dans la pratique, ont été identifiés : la quête du bien ; la quête de la perfection ; la quête de l’aventure ; la quête du « métier-passion ».</p>
<p>L’enjeu, comme nous le montrons également, est de ne pas se laisser griser par ces aspirations. Il ne s’agit ni de les dénier ni de leur donner une place démesurée. Les entrepreneurs qui donnent du sens à leur travail sont ceux qui parviennent à rester sur une ligne de crête, pas toujours évidente à suivre, qui constitue un équilibre entre ces deux attitudes. Entre avril 2022 et mars 2023, la Banque de France a dénombré <a href="https://www.banque-france.fr/statistiques/defaillances-dentreprises-mar-2023">45 120 défaillances d’entreprises</a> contre 30 285 un an plus tôt.</p>
<h2>La quête du bien et de la perfection</h2>
<p>La <strong>quête du bien</strong> consiste à vouloir humaniser la société. Un entrepreneur dans le secteur de l’énergie n’a pas hésité à nous affirmer par exemple :</p>
<blockquote>
<p>« Nous avons un impact sociétal fort, nous travaillons pour un souverain bien ».</p>
</blockquote>
<p>Son objectif est de permettre aux employés de se déployer humainement en répondant à des besoins précis qu’ils sont parvenus à identifier :</p>
<blockquote>
<p>« J’ai envoyé deux collègues en Afrique en leur disant : “C’est compliqué, faites attention à la nourriture, ne mangez pas ceci et cela. Les logements, c’est très basique”. Ils sont revenus deux semaines plus tard avec le sourire aux lèvres : “On y retourne quand vous voulez. Quand on a redémarré la machine pour fournir l’électricité aux habitants, le village entier nous a remerciés. Ils n’avaient plus d’énergie depuis quatre ans et demi.” Là, on a trouvé le sens de notre travail, c’est pourquoi je travaille dans le secteur de l’énergie. »</p>
</blockquote>
<p>Cela dit, ces entrepreneurs soucieux d’accomplir un bien pour les autres admettent le risque d’une quête par trop idéaliste :</p>
<blockquote>
<p>« Mon but est un peu “bisounours”, abstrait. Les gens ont un peu de mal à y croire. »</p>
</blockquote>
<p>De même, en visant la <strong>perfection</strong>, les entrepreneurs cherchent à être fiers d’un travail qu’ils ont accompli avec rigueur et soin. Ceux-ci encouragent leurs collaborateurs à prendre le temps « d’être en accord avec ce qui est fait » et même de contempler le résultat obtenu qu’ils considèrent être de qualité et durable.</p>
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<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Chaque lundi, que vous soyez dirigeants en quête de stratégies ou salariés qui s’interrogent sur les choix de leur hiérarchie, recevez dans votre boîte mail les clés de la recherche pour la vie professionnelle et les conseils de nos experts dans notre newsletter thématique « Entreprise(s) ».</em></p>
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<hr>
<p>C’est une « orientation qui peut être partagée avec toutes les parties prenantes » mais aussi un risque financier qu’il n’est pas toujours pertinent de prendre :</p>
<blockquote>
<p>« Les 10 % qui vont te différencier vont me coûter 80 % en plus ».</p>
</blockquote>
<p>La quête de la perfection peut conduire à négliger certaines réalités économiques au nom de la qualité du travail et à justifier des activités non rentables.</p>
<h2>Aventure et passion</h2>
<p>La <strong>quête de l’aventure</strong>, elle, crée une dynamique collective particulièrement forte à laquelle chacun des collaborateurs peut prendre part :</p>
<blockquote>
<p>« Pour moi, le plus bel accomplissement est d’avoir fait évoluer des personnes dans l’entreprise, de voir l’entreprise se développer, de voir qu’elle permet à 250 familles de vivre et de voir qu’un ancien alcoolique, en travaillant chez nous, est en train de redevenir un homme debout ».</p>
</blockquote>
<p>Cependant, la recherche de l’aventure perpétuelle peut amener les entrepreneurs à poursuivre de nouveaux défis en ne consolidant pas les projets déjà mis en place :</p>
<blockquote>
<p>« Le succès n’a pas de goût pendant longtemps. Dès le lendemain, on se demande quel est le prochain challenge. On oublie vite, on n’arrête jamais. »</p>
</blockquote>
<p>Enfin, la <strong>quête du « métier-passion »</strong> peut autoriser le rapprochement libre et spontané entre des personnes partageant la même passion ainsi qu’un management souple, celui-là même qui est parfois promu dans les entreprises libérées :</p>
<blockquote>
<p>« Les congés sont illimités. Ils arrivent et partent quand ils veulent. Cela marche bien, c’est ma plus grande satisfaction ».</p>
</blockquote>
<p>Cela peut néanmoins aboutir à formuler des injonctions à être libre et heureux au nom de la passion partagée et à négliger certaines difficultés relationnelles ou même économiques.</p>
<h2>Ressources, obstacles et philosophie</h2>
<p>L’objectif de notre étude ne consiste pas à hiérarchiser les aspirations profondes selon leur nature mais à montrer, comme nous le suggérons déjà, que chacune d’elles recèle à la fois ressources et obstacles.</p>
<p><iframe id="QggM3" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/QggM3/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Notre étude rejoint de manière sous-jacente la notion philosophique d’« aspiration profonde ». Utilisée par des philosophes comme <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/soi-meme-comme-un-autre-paul-ric-ur/9782020114585">Paul Ricœur</a>, elle relate un désir intime et durable qui s’oppose aux désirs superficiels et apparents. Alors que les désirs superficiels ne causent que du plaisir, les aspirations profondes peuvent être à l’origine d’une véritable joie, continue, permanente, compatible avec l’effort et les contraintes, celle-là même qui était évoquée par Henri Bergson, prix Nobel de littérature en 1927, dans <em>L’Énergie spirituelle</em> (1919) :</p>
<blockquote>
<p>« Le commerçant qui développe ses affaires, le chef d’usine qui voit prospérer son industrie, est-il joyeux en raison de l’argent qu’il gagne et de la notoriété qu’il acquiert ? Richesse et considération entrent évidemment pour beaucoup dans la satisfaction qu’il ressent, mais elles lui apportent des plaisirs plutôt que de la joie, et ce qu’il goûte de joie vraie est le sentiment d’avoir monté une entreprise qui marche, d’avoir appelé quelque chose à la vie. »</p>
</blockquote>
<p>En cherchant à échapper à une vision excessivement réductrice du sens, les entrepreneurs peuvent néanmoins basculer dans une poursuite démesurée de leurs aspirations. En s’enfermant dans une quête idéaliste, naïve, épuisante ou contraignante, ils risquent de perdre de vue les autres aspects du travail. C’est en étant soucieux de trouver cet équilibre qu’ils peuvent aussi aider leurs collègues à donner du sens à leur travail.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206955/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Certes, rechercher le bien, la perfection, l’aventure ou de vivre de sa passion donne aux entrepreneurs un sens à leur organisation. Il ne faudrait pas néanmoins basculer dans la démesure.Sandrine Frémeaux, Professeur, AudenciaFrançois Henry, Chaire Sens & Travail, IcamLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2049872023-05-22T10:44:14Z2023-05-22T10:44:14ZEntrepreneurs, comment exister sur LinkedIn ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/524173/original/file-20230503-25-qx3amz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C0%2C1276%2C960&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Briller sur les réseaux sociaux peut être décisif pour installer son entreprise.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Blogtrepreneur / Wikimedia commons</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>En 2022, la France a enregistré <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/6692134">1 071 900 nouvelles créations d’entreprises</a> selon les chiffres de l’Insee : un record. Ces chiffres témoignent du dynamisme de l’<a href="https://theconversation.com/topics/entrepreneuriat-25460">entrepreneuriat</a> dans notre pays, un dynamisme qui s’étend jusqu’aux jeunes générations : une <a href="https://www.cic.fr/partage/fr/CC/telechargements/communiques-de-presse/2021/OpinionWay-pour-Moovjee-Barom%C3%A8tre-des-%C3%A9tudiants-et-de-l-entrepreneuriat-18-mai-2021.pdf">étude</a> réalisée en 2021 par l’institut OpinionWay pour Moovjee et CIC estime qu’ils sont 42 % à vouloir un jour lancer ou reprendre une entreprise et 70 % à envisager le faire à court terme après leurs études.</p>
<p>Si l’aventure entrepreneuriale fait plus que jamais rêver, et a été grandement facilitée par l’apparition de statuts adaptés (<a href="https://theconversation.com/entrepreneurs-et-autoentrepreneurs-la-grande-confusion-199816">micro-entrepreneurs</a>, <a href="https://www.economie.gouv.fr/entreprises/societe-par-actions-simplifiee-unipersonnelle-sasu#:%7E:text=La%20SASU%20(soci%C3%A9t%C3%A9%20par%20actions,en%20num%C3%A9raire%20ou%20en%20nature.)">société par actions simplifiée unipersonnelle</a>, elle reste semée d’embûches, notamment en phase de lancement, quand les ressources financières sont réduites et la notoriété reste à bâtir. Entre avril 2022 et mars 2023, la Banque de France a ainsi dénombré <a href="https://www.banque-france.fr/statistiques/defaillances-dentreprises-mar-2023">45 120 défaillances d’entreprises</a> contre 30 285 un an plus tôt.</p>
<p>Pour éviter d’en arriver là, les réseaux sociaux professionnels – au premier rang desquels <a href="https://theconversation.com/topics/linkedin-28621">LinkedIn</a> – peuvent constituer un allié de poids. Ils portent en effet la promesse d’être des accélérateurs de business, permettant la promotion de contenus de marque et proposant des mécaniques de prospection avancée.</p>
<p>C’est en interrogeant 17 entrepreneurs dans le cadre de l’ouvrage collectif <a href="http://www.ma-editions.com/documents/4-ma-editions/87-gestion---commerce/4902/lentrepreneuriat/"><em>L’entrepreneuriat</em></a>, publié chez MA Éditions, qu’une équipe de cinq professeurs, experts dans leurs domaines respectifs, a analysé les étapes à suivre et les facteurs clés de succès d’une aventure entrepreneuriale. Ont notamment été questionnés les apports réels ou présumés des réseaux sociaux professionnels dans les premiers mois de lancement d’une activité.</p>
<h2>Exister dans la jungle LinkedIn</h2>
<p>Une des priorités des entrepreneurs concerne la promotion de leur image professionnelle afin de contribuer à la visibilité et au développement économique de leur start-up. C’est ce qu’on appelle le <em>social selling</em>. La démarche, toutefois, emprunte plus à la séduction qu’à la vente. Elle consiste à exploiter sa marque dans le but de susciter l’intérêt d’acheteurs potentiels et d’établir avec eux des relations de confiance.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Chaque lundi, que vous soyez dirigeants en quête de stratégies ou salariés qui s’interrogent sur les choix de leur hiérarchie, recevez dans votre boîte mail les clés de la recherche pour la vie professionnelle et les conseils de nos experts dans notre newsletter thématique « Entreprise(s) ».</em></p>
<p><a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-entreprise-s-153/"><em>Abonnez-vous dès aujourd’hui</em></a></p>
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<p>Cela pourrait sembler simple… Et pourtant, les « nouveaux » entrepreneurs, bien qu’immergés depuis toujours dans l’univers du multimédia et des réseaux sociaux, ont des approches souvent désordonnées et approximatives en la matière.</p>
<p>Il faut aussi avoir conscience du caractère foisonnant de l’espace que représentent les réseaux sociaux. Selon l’entreprise d’analyse des médias sociaux <a href="https://blog.digimind.com/fr/tendances/linkedin-chiffres-incontournables-france-et-monde">Digimind</a>, LinkedIn, le principal réseau social professionnel, compte en 2023 en France plus de 26 millions de membres, dont 13 millions de membres actifs mensuels. 500 000 entreprises françaises y animent d’ailleurs une page. Comment exister, comment se différencier dans cette jungle ? L’entrepreneur n’a d’autre choix que de partager régulièrement du contenu afin d’attirer et de fidéliser les personnes importantes au développement de son activité.</p>
<p>Les entrepreneurs interrogés sont unanimes quant à l’importance d’utiliser LinkedIn dans leurs missions de business développement. Ils considèrent que c’est un canal d’augmentation d’audience, et surtout, le canal de prospection idéal pour faire découvrir et mettre en avant leur savoir-faire. Vu des entrepreneurs, le profil gagnant, c’est d’abord un profil qui permet d’atteindre le ou les objectifs fixés : gagner en visibilité, réussir sa campagne de financement participatif, identifier et entrer en contact avec des clients potentiels, augmenter son nombre de rendez-vous…</p>
<p>Avant de se lancer dans l’aventure des réseaux sociaux, les entrepreneurs insistent sur la nécessité d’échanger au préalable avec leur cible afin de bien comprendre qui elle est et quel est le contenu qui l’intéresse. Selon eux, il faut consacrer au moins une heure par jour pour être présent dans l’esprit de leurs abonnés et fédérer une communauté.</p>
<h2>Établir, trouver, informer et construire</h2>
<p>Une démarche entrepreneuriale de <em>social selling</em> qui ressort des entretiens peut être synthétisée par l’acronyme ÉTIC afin d’<strong>é</strong>tablir son profil professionnel, <strong>t</strong>rouver les personnes utiles pour constituer son réseau, <strong>i</strong>nformer ce dernier et <strong>c</strong>onstruire des relations de confiance durables. Comme il nous l’a été exprimé au cours d’un entretien :</p>
<blockquote>
<p>« Il n’y a jamais de solution miracle avec le social selling mais des prérequis à suivre »</p>
</blockquote>
<p>L’entrepreneur commence ainsi par définir sa marque professionnelle. C’est le point de départ afin de positionner son activité au travers de son profil. Les interrogés ont, pour la plupart, construit leurs marques autour de leurs histoires personnelles.</p>
<p>Il trouve ensuite les bonnes personnes. C’est une étape de prospection destinée à alimenter son carnet d’adresses en identifiant les profils à contacter. La finalité est de créer un réseau qualifié et actif, et surtout de se créer une communauté de professionnels engagée et fidèle. Au début, les entrepreneurs privilégient d’inviter toutes leurs connaissances à les rejoindre pour atteindre au moins 500 abonnés. Et puis très rapidement, ils commencent à recevoir de nombreuses demandes de connexion à leurs réseaux, par effet de buzz. À ce stade, voici ce que suggère un de nos enquêtés :</p>
<blockquote>
<p>« Je déconseille d’accepter toutes les demandes de mise en relation sur LinkedIn mais de se concentrer sur des contacts en lien avec son activité. »</p>
</blockquote>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/524171/original/file-20230503-25-snfdyf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/524171/original/file-20230503-25-snfdyf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/524171/original/file-20230503-25-snfdyf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=907&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/524171/original/file-20230503-25-snfdyf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=907&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/524171/original/file-20230503-25-snfdyf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=907&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/524171/original/file-20230503-25-snfdyf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1140&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/524171/original/file-20230503-25-snfdyf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1140&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/524171/original/file-20230503-25-snfdyf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1140&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>En parallèle, l’entrepreneur informe son réseau de contacts. C’est la diffusion régulière d’un contenu pertinent qui incite à l’échange. Il se doit d’être perçu comme une source de communication reconnue au travers de posts, d’articles, de vidéos publiées, de commentaires, de <em>likes</em>… Plus le contenu qu’il publie est fréquent et en lien avec son savoir-faire, plus sa visibilité augmentera et plus il intéressera des prospects éventuels. La fréquence de publication est en moyenne d’un post tous les deux jours. Les contenus les plus populaires sont des informations sur les produits, l’actualité de la start-up, les ressentis du créateur… D’ailleurs, les entrepreneurs constatent que leurs abonnés sont principalement intéressés par leur authenticité et le suivi de leur projet entrepreneurial.</p>
<p>Enfin, l’entrepreneur cherche à construire des relations dans la durée. Cela demande du temps, de la méthode et de la patience. Il s’agit de transformer un maximum d’opportunités, en se connectant avec de nouveaux abonnés, en pérennisant son réseau, en animant une communauté fiable et en étant informé sur l’actualité de ses contacts.</p>
<p>En conclusion, même s’il est peut-être encore un peu tôt pour l’affirmer, les réseaux sociaux professionnels semblent devenir le premier outil de prospection des entrepreneurs. Se positionner comme un <em>social seller</em> efficace apparaît comme un prérequis. Cela requiert surtout une bonne gestion de son temps, de la rigueur dans son approche, de l’agilité dans sa communication et des échanges fréquents à la fois avec sa communauté d’abonnés et avec d’autres entrepreneurs afin de capitaliser sur leurs retours d’expérience.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204987/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre-Olivier Giffard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Comment trouver son audience au sein de la vaste jungle que constituent les réseaux sociaux professionnels ? Un ouvrage propose une démarche en quatre points.Pierre-Olivier Giffard, Enseignant et directeur du département Marketing, Entrepreneuriat et Développement commercial à l’ESCE, ESCE International Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2048772023-05-09T18:23:59Z2023-05-09T18:23:59ZQatar : l’entrepreneuriat pour sortir de la dépendance aux hydrocarbures<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/524083/original/file-20230503-22-t16e6x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1280%2C852&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les politiques économiques décidées par Doha portent leurs fruits mais du chemin reste à parcourir.
</span> <span class="attribution"><span class="source">ilfioredellavita / Pixabay</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La dernière <a href="https://theconversation.com/fr/topics/coupe-du-monde-qatar-2022-130239">Coupe du monde de football</a>, organisée fin 2022, a été l’occasion de mieux connaitre le <a href="https://theconversation.com/topics/qatar-39492">Qatar</a>, pays organisateur, et ses 2,9 millions d’habitants. De nombreux <a href="https://theconversation.com/coupe-du-monde-au-qatar-quand-les-sponsors-se-mettent-a-la-geopolitique-195227">articles</a>, études et enquêtes ont été relayés sur des sujets de société, sur son <a href="https://theconversation.com/la-coupe-du-monde-une-simple-etape-de-lambitieux-plan-de-developpement-du-qatar-192794">économie</a>, sur l’utilisation du sport comme outil de <a href="https://theconversation.com/apres-le-qatar-larabie-saoudite-joue-la-carte-du-soft-power-par-le-sport-201513"><em>soft power</em></a>, éclairant moult polémiques autour de l’événement. À nos yeux, un aspect est toutefois resté peu abordé : comment le Qatar ambitionne-t-il de sortir de sa dépendance aux hydrocarbures en développant l’entrepreneuriat ?</p>
<p>Lancé en 2008, l’ambitieux plan de développement <a href="https://www.gco.gov.qa/en/about-qatar/national-vision2030/">« Qatar National Vision 2030 »</a> vise à modifier le pays en profondeur en l’engageant dans une transition vers l’économie de la connaissance et de l’entrepreneuriat. Cette volonté gouvernementale s’est traduite par des réformes et des politiques incitant les Qataris à créer des entreprises. Ainsi, sous l’impulsion de l’État, un écosystème entrepreneurial favorable a-t-il vu le jour : développement de pépinières et d’incubateurs, de centres de recherche en entrepreneuriat, de fonds d’investissement, a même été créée une Banque de Développement du Qatar en 1997, qui a mis en route le Qatar Business Incubation Center en 2014.</p>
<p>La <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/978-1-80071-517-220221003/full/html?skipTracking=true">recherche</a> que nous avons menée permet de mieux se saisir du sujet, d’observer les premiers résultats des politiques mises en place et de cibler les défis qui restent à relever.</p>
<h2>6 % d’entrepreneurs établis</h2>
<p>Pour saisir la dynamique dans toutes ses nuances, le <em>Global Entrepreneurship Monitor</em> (<a href="https://www.heg-fr.ch/fr/recherche-et-services/projets/global-entrepreneurship-monitor-gem/">GEM</a>), étude menée chaque année dans 60 pays par plusieurs institutions pour appréhender les phénomènes entrepreneuriaux, a mis au point une méthodologie. Nous l’avons reprise dans notre étude pour distinguer trois types d’entrepreneurs correspondant à trois phases de développement.</p>
<p>Les <em>entrepreneurs naissants</em> sont ceux engagés dans les premières phases du processus de création et qui ont versé entre 0 et 3 mois de salaire ; les <em>nouveaux entrepreneurs</em>, ceux engagés dans un processus depuis moins de 42 mois et qui ont payé des salaires entre 4 et 41 mois ; enfin, les entreprises des <em>entrepreneurs établis</em> fonctionnent depuis plus de 42 mois et qui ont versé au moins 42 mois de salaire.</p>
<p><iframe id="V66vl" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/V66vl/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Depuis 2016, les taux des trois phases de la création d’entreprise connaissent une croissance continue au Qatar. Un pic semble avoir été atteint en 2020 avant un ralentissement en 2021, conséquence de la pandémie. Sur cette période, le taux d’entrepreneurs naissants a plus que doublé, passant de 4,3 % à 10,1 % de la population du pays. Les nouveaux entrepreneurs progressent aussi sur la même période pour passer de 3,6 % à 6 %. Ces changements indiquent qu’au Qatar de plus en plus de personnes se lancent dans l’aventure entrepreneuriale.</p>
<p>Le taux d’entrepreneurs établis permet, lui, de mesurer la transformation de ces projets entrepreneuriaux en entreprises plus pérennes. Là aussi, ce taux progresse sur la période pour passer de 3 % en 2018 à 6,1 % en 2021. Il semble clair que les différentes politiques mises en place pour encourager l’entrepreneuriat portent leurs fruits.</p>
<h2>Qui sont les entrepreneurs et pourquoi se lancent-ils ?</h2>
<p>Au Qatar, la population des entrepreneurs a de particulier d’être fortement représentée parmi les segments les plus âgés de la population (55-64 ans) même si ces dernières années, les 25-34 ans constituent le premier groupe d’entrepreneurs. Les plus jeunes (18-24 ans) sont les moins nombreux à tenter l’aventure entrepreneuriale. Le faible taux de chômage et donc, les nombreuses opportunités de trouver un emploi stable à un âge où l’on ressent souvent le besoin de se forger une première expérience professionnelle et un capital de départ peuvent constituer des pistes d’explications.</p>
<p>Les motivations des entrepreneurs naissants et nouveaux pour créer une entreprise au Qatar sont restées inchangées depuis 2019. La volonté de devenir riche est de loin le facteur numéro 1, puis viennent respectivement le besoin de gagner sa vie car les emplois sont rares, le souhait de faire une différence dans le monde et enfin la volonté de perpétuer une tradition familiale. À titre de comparaison, les résultats du GEM 2021 en <a href="https://www.gemconsortium.org/report/gem-france-2021-report">France</a> placent le besoin de gagner sa vie en première <a href="https://theconversation.com/la-culture-entrepreneuriale-est-elle-vraiment-plus-developpee-ailleurs-quen-france-195770">position</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>De façon peut-être contre-intuitive, l’écart entre les genres était minime, en 2019, pour les entreprises établies et quasiment à parité pour les entreprises naissantes et nouvelles. Le Qatar faisait alors figure d’exception. Reste que cette situation n’a pas duré. Depuis 2020, on observe une différence notable entre les hommes et les femmes sur toutes les phases de la création d’entreprise. Alors que la perception des opportunités est haute et quasiment à parité entre les hommes et les femmes, les différences se creusent sur la perception de leurs compétences entrepreneuriales et sur la peur de l’échec. Les femmes ont une perception moindre de leurs capacités à entreprendre et une peur de l’échec plus élevée. En cela, la population des entrepreneuses au Qatar n’a rien de spécifique.</p>
<p>Les aspirations et les motivations des entrepreneuses sont dans le même ordre que leurs homologues masculins avec la volonté de devenir riche en première position mais elles sont plus nombreuses que les hommes à voir la création d’entreprise comme un moyen de gagner leur vie. Enfin, si les femmes ont souvent des intentions entrepreneuriales plus élevées que les hommes il semblerait qu’elles aient plus de difficultés à transformer ces intentions en entreprises pérennes.</p>
<h2>Quel avenir pour cette transition économique ?</h2>
<p>Le dernier <a href="https://www.qdb.qa/en/Documents/Qatar_GEM_2021_en.pdf">rapport</a> du <em>Global Entrepreneurship Monitor</em> sur l’année 2021 au Qatar note que les politiques publiques durant la pandémie du Covid n’ont pas toujours été particulièrement propices au soutien de l’activité entrepreneuriale. En dépit d’un écosystème toujours considéré comme favorable avec notamment un large réseau d’incubateurs efficaces et des politiques fiscales encourageantes, les experts considèrent que la facilité et la rapidité d’accès à l’information pour les entrepreneurs auprès des agences gouvernementales restent limitées.</p>
<p>Une transition économique de cette ampleur demande du temps non seulement pour mettre en place un écosystème incitatif mais surtout pour insuffler un esprit entrepreneurial au sein de la population afin de considérer la création d’entreprise comme un choix de carrière possible et valorisé. Il apparait aussi important d’accompagner spécifiquement les entrepreneuses dès les premières phases de la création afin de réduire l’écart avec leurs homologues masculins.</p>
<p>S’il est encore trop tôt pour mesurer un éventuel effet Coupe du monde sur la création d’entreprise au Qatar, les politiques publiques possèdent ainsi d’ores et déjà des indications claires sur les différents points de friction à atténuer.</p>
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<p><em>Ahmad Hawi, Directeur général adjoint Gestion des données et gouvernance à la Banque de Développement du Qatar, a également contribué à la rédaction de cet article</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204877/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Garonne ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les politiques qataries portent leurs fruits : la dynamique entrepreneuriale semble bien enclenchée dans le pays mais uniquement auprès de populations spécifiques.Christophe Garonne, Professeur d'entrepreneuriat, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2039862023-05-09T10:33:26Z2023-05-09T10:33:26ZEntrepreneurs, comment réussir vos « pitchs » devant vos futurs investisseurs ?<p>Un peu comme dans l’émission <em>Qui veut être mon associé ?</em>, beaucoup de jeunes entrepreneurs à la quête de nouveaux financements se sont un jour retrouvés à « pitcher » leur projet devant des investisseurs. Moments clés de la vie d’entreprises naissantes, les pitchs entrepreneuriaux contribuent à la construction d’une <em>identité entrepreneuriale</em>. Les créateurs s’engagent dans une communication verbale et non verbale qui leur permet de se présenter aux investisseurs en tant que personnes légitimes pour développer leurs idées.</p>
<p>Gérer ce processus de présentation de soi fait partie du catalogue d’un large réseau de consultants, programmes de formations, conférenciers et organisations de support à l’entrepreneuriat. Tous ces acteurs affirment offrir les meilleures réponses au fameux «<em> how to pitch ? </em>». La littérature académique n’est cependant pas en reste. Elle témoigne d’un intérêt grandissant pour les indices comportementaux de personnalité et de cognition ainsi que pour la rhétorique. Les attitudes qui influenceraient favorablement les investisseurs potentiels sont ainsi mises en évidence.</p>
<p>Pour résumer cette littérature, il convient de puiser dans l’approche dramaturgique introduite en 1959 par le sociologue américain Erving Goffman dans un ouvrage intitulé <em>La présentation de soi dans la vie quotidienne</em>. Il y explique que nous empruntons régulièrement à ce qui relève de performances théâtrales afin de donner un sens aux situations de la vie quotidienne et créer une identité « situationnelle ». Le pitch entrepreneurial n’y échapperait pas : l’entrepreneur « acteur » utilise un dispositif rhétorique, son « texte », des manifestations gestuelles et émotionnelles, son « interprétation », devant les investisseurs, son « public ». C’est sur ces éléments scénographiques que nous revenons dans <a href="https://www.cairn.info/revue-de-l-entrepreneuriat-2023-0-page-I69.htm?contenu=resume">article</a> récemment publié dans la <em>Revue de l’Entrepreneuriat</em>.</p>
<h2>Être pitcheur, c’est être acteur</h2>
<p>Parmi l’ensemble de traits étudiés par les chercheurs, c’est l’importance de la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0883902616300180">« passion »</a> pour son entreprise, la manifestation d’un lien affectif intense et d’une forte implication personnelle, qui a suscité le plus fort consensus. Elle génère un engagement neuronal plus fort auprès des investisseurs et accroît leur volonté de débloquer des fonds. Ceux-ci apprécient en outre les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0883902617300101">attitudes positives</a> qui signalent une personnalité optimiste et une forte confiance en soi.</p>
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<p>Quand elles virent au <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2021-6-page-139.htm">narcissisme</a>, l’issue s’avère cependant plus ambiguë. Si les investisseurs sur les plates-formes de crowdfunding ne sanctionnent pas les entrepreneurs qu’ils perçoivent comme arrogants et égocentrés, les investisseurs plus impliqués dans la stratégie de l’entreprise, tels que les <em>business angels</em> et les capital-risqueurs, anticipent les difficultés de collaboration future et se montrent plus réservés face à ces profils. Dans tous les cas, à l’encontre du stéréotype populaire de l’entrepreneur fanatique, obtus et déterminé, à la Steve Jobs ou Elon Musk, les études montrent que les investisseurs préfèrent des <a href="https://www.wsj.com/articles/humility-can-really-help-an-entrepreneur-win-over-investors-11635512755">entrepreneurs humbles</a> qui manifestent une ouverture aux autres, une écoute attentive des suggestions et une forte disposition à suivre les conseils de leurs partenaires présents et à venir.</p>
<h2>Faire appel aux émotions</h2>
<p>Le choix rhétorique de l’entrepreneur a également un impact considérable sur sa probabilité d’obtenir des ressources financières. Les entrepreneurs qui se présentent comme des <a href="https://www.researchgate.net/profile/Thomas-Allison-3/publication/327539135_User_entrepreneurs%E2%80%99_multiple_identities_and_crowdfunding_performance_Effects_through_product_innovativeness_perceived_passion_and_need_similarity/links/60d4d46892851ca944843a82/User-entrepreneurs-multiple-identities-and-crowdfunding-performance-Effects-through-product-innovativeness-perceived-passion-and-need-similarity.pdf">usagers</a> concernés par le produit/service développé par leur start-up sont perçus comme plus convaincants. Ceux qui utilisent un <a href="https://journals.aom.org/doi/10.5465/amj.2018.1417">langage figuratif</a>, riche en anecdotes, analogies et métaphores, obtiendraient également plus souvent satisfaction.</p>
<p>Plusieurs <a href="https://www.researchgate.net/publication/325163993_Extending_Signaling_Theory_to_Rhetorical_Signals_Evidence_from_Crowdfunding">études</a> montent également que, contrairement à l’idée rationaliste selon laquelle seuls l’argumentation logique (<em>logos</em>) et les propos conférant de la crédibilité au narrateur (<em>ethos</em>) sont à même de convaincre, l’appel aux émotions (<em>pathos</em>) a toute sa place dans un pitch. L’entrepreneur peut ainsi susciter la colère, l’indignation, la pitié, la joie ou l’espoir des investisseurs potentiels pour les convaincre de le suivre dans son projet. À faire cela, il faudrait cependant <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11187-020-00334-y">éviter d’insister sur les étapes passées</a>, comme celle de l’émergence du projet, pour se focaliser sur l’état actuel de développement ainsi que sur le potentiel de croissance de la start-up.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><em>Chaque lundi, que vous soyez dirigeants en quête de stratégies ou salariés qui s’interrogent sur les choix de leur hiérarchie, recevez dans votre boîte mail les clés de la recherche pour la vie professionnelle et les conseils de nos experts dans notre newsletter thématique « Entreprise(s) ».</em></p>
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<p>Survaloriser son produit en le qualifiant de disruptif, c’est-à-dire capable de changer la « manière dont les humains, les écosystèmes ou les sociétés fonctionnent », semble également, et peut-être contre-intuitivement, apprécié. L’<a href="https://hbr.org/2010/04/is-it-ok-for-entrepreneurs-lie">exagération</a> s’avère en fait facilement pardonnée et reste perçue comme légitime dans le cadre d’un pitch tant que l’entrepreneur ne dérive pas vers une déformation pure et simple des faits.</p>
<p>À tout cela se mêlent également des stéréotypes. Selon une étude, le style de communication procure un avantage aux hommes entrepreneurs qui parlent généralement de manière plus <a href="https://hbr.org/2022/12/research-men-speak-more-abstractly-than-women">abstraite</a> que leurs collègues féminins dont le style est plus concret et pragmatique.</p>
<h2>Sur scène, sourire (mais pas trop)</h2>
<p>Peut-être cela est-il en partie lié avec la mise en scène du discours de l’entrepreneur. Les gestes et l’expression faciale des émotions sont à même d’influencer positivement la réaction des investisseurs. À projet et discours égaux, l’usage d’une gestuelle métaphorique et les sourires, surtout en début et en fin de pitch, accentuent l’image d’un entrepreneur passionné et investi et influent ainsi sur la décision des investisseurs.</p>
<p>La <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/S0733-558X20220000080003/full/html">sonorité de la voix</a> a ainsi son importance. Les fréquences basses semblent plus appréciées par les investisseurs que les sons aigus. <a href="https://theconversation.com/whats-behind-the-obsession-over-whether-elizabeth-holmes-intentionally-lowered-her-voice-177961">Elizabeth Holmes</a>, fondatrice de l’entreprise américaine de santé Theranos, condamnée à 11 ans de prison en 2022 pour escroquerie après avoir été longtemps vue comme un « prodige » (c’était le qualificatif employé par l’ancien président Bill Clinton), avait ainsi prétendument travaillé avec un coach pour <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/en-vue/elizabeth-holmes-tests-negatifs-1376548">abaisser la tonalité</a> dans laquelle elle s’exprimait.</p>
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<p>La fréquence et la durée des sourires doivent, elles, être maîtrisées. Dans une <a href="https://www.usf.edu/news/2019/too-much-smiling-in-sales-pitch-could-kill-deal.aspx">étude</a> analysant 1460 pitchs déposés sur la plate-forme Kickstarter, des chercheurs montrent que des financements supérieurs sont obtenus avec 3 secondes de sourire sur un pitch moyen de 82 secondes qu’avec plus de 5 secondes en temps cumulé ou, à l’inverse, presque pas de sourire. L’effet négatif du sourire trop fréquent ou trop long est dû notamment à la perception des investisseurs d’un entrepreneur peu authentique ou qui manque de sérieux.</p>
<h2>Pour le public, un pitch idéal ?</h2>
<p>Toute pièce de théâtre n’existerait pas sans un public. Il prend une importance particulière dans le pitch notamment car tous comportent une partie interactive lors de laquelle les investisseurs posent des questions et discutent avec l’entrepreneur.</p>
<p>La réaction des investisseurs peut être soumise à deux phénomènes complémentaires : l’homophilie, soit la préférence pour ceux qui nous ressemblent et, les attentes stéréotypées, soit la préférence pour les profils qui sont en adéquation avec le préjugé de ce qu’est un bon entrepreneur. Une nouvelle fois, les images préconçues interviennent. Des <a href="https://hbr.org/2017/06/male-and-female-entrepreneurs-get-asked-different-questions-by-vcs-and-it-affects-how-much-funding-they-get">travaux</a> montrent que, sans s’en rendre compte, les investisseurs posent des questions relatives à la croissance et à l’avantage concurrentiel (le « comment gagner ? ») aux hommes et des questions relatives au risque et aux barrières à l’entrée (le « comment ne pas perdre ? ») aux femmes. Dans la même veine, plusieurs études confirment que les femmes et les personnes issues des minorités sont mieux évaluées lorsqu’ils pitchent une start-up sociale plutôt qu’une start-up commerciale.</p>
<p>Les propos présentés ici laissent entendre qu’il est possible d’atteindre le pitch idéal qui serait parfaitement préparé et performé. Une prémisse fondamentale de l’approche dramaturgique est bien l’idée que la présentation de soi peut être maîtrisée et adaptée pour la scène. Des illustrations pratiques de cette idée figurent ainsi dans tous les modules sur la méthodologie du pitch inclus dans les programmes de formation et accompagnement à l’entrepreneuriat.</p>
<p>Cette vision conduit alors à une <a href="https://theconversation.com/le-piege-du-pitch-124230">standardisation grandissante de la pratique de pitch</a>. Si on peut se réjouir de la possibilité d’avoir des entrepreneurs mieux formés et plus performants, point avec cette homogénéisation le risque d’alimenter encore davantage les stéréotypes entrepreneuriaux, freinant le développement d’une certaine diversité dans l’univers entrepreneurial.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203986/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ivana Vitanova ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une recherche fait le point sur les bons conseils identifiés par les chercheurs. Saviez-vous par exemple que trop sourire n'est pas une bonne idée?Ivana Vitanova, MCF en Finance, Université Lyon 2, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1983342023-05-02T10:44:15Z2023-05-02T10:44:15ZEntreprendre, est-ce bon pour la santé ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/506791/original/file-20230127-3270-6vw6f7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=44%2C64%2C1153%2C732&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’attachement des entrepreneurs à leur projet contribue à leur bien-être.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/achievement-confident-free-freedom-6945/">Snapwire/Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Quand un dirigeant de grand groupe décède, l’effet sur l’entreprise reste généralement mineur. Le <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/le-titre-apple-en-hausse-malgre-la-mort-de-steve-jobs.N160287">décès pour cause de longue maladie de Steve Jobs</a>, fondateur d’Apple, et la <a href="https://www.boursier.com/actions/actualites/news/michelin-le-titre-limite-son-recul-apres-la-disparition-d-edouard-michelin-187131.html">disparition brutale d’Édouard Michelin</a> n’ont quasiment pas eu d’impact sur la valeur de l’action des entreprises en bourse. Christophe de Margerie, dirigeant de Total, <a href="https://www.lejdd.fr/Economie/Thierry-Desmarest-et-Patrick-Pouyanne-vont-assurer-l-interim-a-Total-pour-remplacer-Christophe-de-Margerie-695852-3178769">a été remplacé 48 heures</a> après son tragique accident. <em>Too big to fail</em>.</p>
<p>Or, cette vérité pour une grande entreprise n’est pas transposable pour les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/petites-et-moyennes-entreprises-pme-21112">petites et moyennes entreprises (PME)</a> où la disparition du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/dirigeants-62811">dirigeant</a> a de fortes chances de remettre totalement en cause la survie de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/entreprises-20563">l’entreprise</a>. C’est la raison pour laquelle nous affirmons que la santé de l’entrepreneur est le premier capital immatériel de la PME.</p>
<p>Malgré cette évidence, la recherche en entrepreneuriat s’est tardivement intéressée à la santé. Les résultats actuels mettent en évidence que la santé des entrepreneurs est contrastée. La majorité des études montrent que la santé des entrepreneurs semble bonne <a href="https://journals.openedition.org/travailemploi/5806">voire meilleure que celle des salariés</a> ou que celle de la population générale. Mais en même temps, d’autres travaux, nettement moins nombreux, semblent <a href="https://www.proquest.com/openview/514036a9c5d0ff8180fb267bbeb291a2/1?pq-origsite=gscholar&cbl=49244">montrer l’inverse</a> (en matière d’épuisement et de stress professionnel, de rapport au sommeil, etc.)</p>
<p>Ces résultats contradictoires conduisent de nombreux chercheurs à conclure à une absence de consensus. Nous ne croyons pas à ce constat. À y regarder de près, ces résultats sont moins contradictoires que complémentaires. Ils révèlent selon nous une seule et même facette qui caractérise le rapport étroit que les entrepreneurs nouent à leur travail, et surtout à leur entreprise, rapport singulier qui finalement impacte doublement la santé à la fois dans sa dimension pathogène et dans sa dimension salutogène.</p>
<p>Cette facette est l’existentialisme, qui considère que l’individu a la charge de son destin et que nous avons étudiée dans un récent <a href="https://www.cairn.info/revue-de-l-entrepreneuriat-2022-Hors%20S%C3%A9rie%202-page-11.htm">article</a> de recherche, est responsable de ses actes et libre de décider des valeurs et des normes qui le guident.</p>
<h2>« Pas le temps d’être malade »</h2>
<p>Depuis quinze ans, nous auscultons la santé des entrepreneurs au sein de <a href="http://www.observatoire-amarok.net/sites/wordpress/">l’Observatoire Amarok</a>, membre du Portail du Rebond. Au fil de l’accumulation des connaissances (10 thèses soutenues entre 2014 et 2021), une évidence est apparue. Les entrepreneurs, notamment patrimoniaux, n’ont pas un rapport au travail comme tout le monde.</p>
<p>Du fait de leur investissement en capital (effet de propriété) et en raison de longues heures de travail – (<a href="https://www.ouest-france.fr/economie/entreprises/entreprise-souffrance-au-travail-des-dirigeants-un-sujet-tabou-13c7a316-bcec-11ed-95d7-ae0463183236">52 heures par semaine</a> versus 36 heures pour un salarié en France, selon Eurostat) – les dirigeants considèrent en grande majorité que leur travail et surtout leur entreprise sont des éléments essentiels de leur existence. Les Allemands ne s’y trompent pas en qualifiant le créateur d’entreprise d’<em>existenzgründer</em>, littéralement un fondateur d’existence.</p>
<p><iframe id="yo2Is" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/yo2Is/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Ce rapport existentiel va avoir trois conséquences sur le plan de la santé. La première est ce que nous appelons le phénomène de subordination. Le terme subordination a un double sens. Il suggère d’abord l’idée d’une hiérarchie implicite où l’entreprise et le travail priment sur la santé et toutes autres considérations extra-professionnelles. Mais la subordination induit aussi un rapport de pouvoir. Dans de nombreuses situations, l’entreprise a une forte emprise sur l’existence de l’entrepreneur. À l’instar d’un aimant, l’entreprise exerce un pouvoir d’attraction qui oriente en permanence l’attention et le comportement de l’entrepreneur. La centralité de l’entreprise est telle qu’elle exerce une domination intellectuelle, émotionnelle et morale sur l’existence même de l’entrepreneur.</p>
<p>De nombreux résultats attestent de ce phénomène de subordination. La plupart des dirigeants disent ne pas avoir le temps d’être malade et quand ils le sont, <a href="https://www.theses.fr/2016MONTD065">ils vont quand même au travail</a> (phénomène de surprésentéisme). Ils ont tendance à moins dormir, à moins se reposer les week-ends, à moins partir en vacances, à moins pratiquer le sport. Les entrepreneures ont tendance à <a href="https://hal.science/hal-03958673/">reprendre le travail plus vite</a> après un accouchement que les salariées et il n’est pas rare que certains entrepreneurs continuent à travailler dans leurs lits d’hôpital.</p>
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<p>Ils sont constamment à dire qu’il y a un <a href="https://iaap-journals.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/apps.12021">« bon stress » et un « mauvais stress »</a>. Dire qu’il y a un bon stress est en partie vraie pour la performance, mais totalement erronée pour la santé. En reprenant notre approche existentialiste, lorsqu’un entrepreneur vit un « bon » stress, cela signifie que les retombées seront positives pour l’entreprise, c’est pourquoi il l’interprète comme stimulant ; encore une fois, c’est le travail avant la santé. De même, accorder du temps à la récupération et au détachement – le fait de ne plus penser au travail en dehors du travail – leur est très difficile. Au final, leur entreprise passe avant leur santé.</p>
<h2>Souffrance bien réelle</h2>
<p>La deuxième conséquence est d’occasionner des situations de souffrance qui peuvent résulter de ce lien trop fort entre l’entreprise et la vie de l’entrepreneur. La souffrance est un thème peu abordé par les chercheurs en entrepreneuriat plus enclins à valoriser le succès de l’entrepreneur plutôt que l’échec.</p>
<p>Pourtant des formes de souffrance sont bien réelles. Le licenciement d’un salarié, la transmission ou la liquidation de son entreprise sont des évènements qui affectent les fondements de la propriété et remettent en cause la gestion de l’entrepreneur et de ce fait mettent en jeu aussi sa santé mentale. Ces évènements peuvent être vécus comme une perte (perte de la relation salariée, perte de l’objet entreprise, perte de contrôle face aux évènements). Les ressorts existentiels sont si forts que les théoriciens de l’entrepreneuriat mobilisent les théories du deuil, parlent de traumatismes, abordent des risques existentiels comme le suicide ou le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/burn-out-106874">burn-out</a>.</p>
<p>L’observatoire Amarok a mis en évidence un risque de burn-out plus élevé chez les entrepreneurs que pour les salariés et la nécessité d’y remédier de manière préventive avec le <a href="http://www.observatoire-amarok.net/sites/wordpress/wp-content/uploads/2023/02/DOSSIER-de-presse-Amarok-e-Sant%C3%A9-agri-VF.pdf"><em>dispositif Amarok e-Santé</em></a> qui se diffuse aujourd’hui dans de nombreux Services de Prévention en Santé au Travail ou dans le monde agricole.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1425489706272235526"}"></div></p>
<p>Dans les cas les plus dramatiques comme le risque suicidaire, dont la <a href="https://econpapers.repec.org/paper/haljournl/hal-04009471.htm">prévalence augmente sensiblement dans les situations de liquidation</a>, il importe de continuer à promouvoir les dispositifs anti-suicide dans le monde patronal comme <a href="https://www.apesa-france.com">Apesa</a> ou <a href="https://agriculture.gouv.fr/agriecoute-mal-etre-solitude-idees-suicidaires-parlez-en">Agri-écoute</a>.</p>
<p>Mais, il serait réducteur, voire contre-productif de limiter la question de la santé des entrepreneurs à la seule dimension pathogène. Il est également important de se pencher sur les ressources et les capacités qui permettent à une personne d’être en bonne santé. Cette salutogenèse découle d’un état de bien-être où la personne est en forte cohérence avec sa condition d’existence.</p>
<h2>Emprise existentielle</h2>
<p>La troisième conséquence repose sur l’interprétation existentielle de la salutogenèse. Les spécialistes décrivent le fonctionnement salutogénique comme la capacité d’un individu de <a href="https://psycnet.apa.org/record/1988-20161-001">voir les stimuli de l’environnement d’une manière positive</a> et constructive, d’utiliser l’information pour prendre des décisions efficaces, d’interpréter les stimuli comme ayant du sens et comme autant de défis qui dirigent son énergie à faire face, à résoudre des problèmes et à obtenir des résultats.</p>
<p>Comment ne pas voir le profil type de l’entrepreneur dans cette description du comportement salutogène ? Voir d’une manière positive et constructive, prendre des décisions efficaces, motivation intrinsèque, percevoir les stimuli comme des défis, résoudre des problèmes, obtenir des résultats. Rien ne ressemble tant à la salutogenèse que l’entrepreneuriat.</p>
<p>Pour vérifier cette concordance, nous avons présenté une liste de 39 facteurs salutogènes (optimisme, résilience, sagesse, auto-efficacité, etc.) à 1224 entrepreneurs français en leur demandant pour chaque facteur s’ils avaient augmenté ou baissé au cours de leur carrière. Les résultats ont montré que les facteurs salutogènes ont quasiment tous augmenté. La capacité de s’adapter et la capacité d’assumer les conséquences de ses propres actions apparaissent en tête de ce palmarès. De manière générale, le fait d’être entrepreneur a un effet bénéfique pour la santé.</p>
<p>Finalement, bien que l’entrepreneur ait tendance à subordonner sa santé personnelle à la santé économique de son entreprise, l’emprise existentielle qui le lie à son travail a pour effet d’amplifier l’intensité et la fréquence des états de bonne santé mentale existentielle (la salutogenèse entrepreneuriale) mais parfois, hélas, d’engendrer des situations de souffrance aiguë.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/198334/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les fondateurs, propriétaires ou gérants de petites entreprises se soignent moins que les employés. Ils bénéficient cependant d’un sentiment d’accomplissement qui engendre des effets positifs.Olivier Torrès, Fondateur d'Amarok, observatoire de la santé des dirigeants, Professeur des Universités, Université de MontpellierFlorence Guiliani, Professeure adjointe, Université de Sherbrooke Roy Thurik, Professeur émérite en Économie, Erasmus School of Economics, Rotterdam, Full Professeur en Entrepreneuriat, Montpellier Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1998162023-02-28T18:14:36Z2023-02-28T18:14:36ZEntrepreneurs et autoentrepreneurs, la grande confusion<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/509794/original/file-20230213-24-a1ald3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=73%2C95%2C1962%2C1437&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
Depuis 2009, au moins la moitié des créations d'entreprises en France se font sous le statut de « microentreprise ».
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/harry_nl/49470038047">Flickr/École polytechnique</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Depuis les années 1970, la France a <a href="https://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=GEN_095_0027">multiplié les politiques publiques</a> visant à favoriser l’entrepreneuriat pour stimuler la croissance. Ces deux dernières décennies, le nombre de créations annuelles d’entreprises a doublé, notamment sous l’effet de l’apparition du statut d’autoentrepreneur en 2009 (renommé « microentrepreneur » en 2017). Depuis, au moins la moitié des créations se font sous ce statut et aujourd’hui, un entrepreneur sur deux exerce sous ce régime. Le développement des plates-formes numériques <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-socio-economie-2020-2-page-175.htm">qui recourent à des sous-traitants au lieu de salariés</a>, comme Uber ou Deliveroo, a en effet accentué la tendance.</p>
<p><iframe id="SBz4x" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/SBz4x/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Pour autant, peut-on dire que tout travailleur indépendant sous le régime de l’autoentrepreneuriat est un entrepreneur ? Comme nous l’avons montré dans nos récents <a href="https://www.cairn.info/revue-entreprendre-et-innover-2017-3-p-57.htm">travaux</a>, certainement pas.</p>
<p>Le statut d’autoentrepreneur a été créé pour encourager l’entrepreneuriat en réduisant les formalités administratives et en proposant des facilités économiques (exemption de TVA et de faibles cotisations sociales). S’il est tout à fait adapté à des activités complémentaires ou occasionnelles (se posant ainsi en incitation à « l’entrepreneuriat hybride », c’est-à-dire au cumul entre un emploi salarié et une création d’entreprise), il semble <a href="https://www.cairn.info/revue-entreprendre-et-innover-2017-3-p-57.htm">important de rappeler</a> l’écart entre entrepreneur et autoentrepreneur dès lors qu’il s’agit d’une activité principale.</p>
<h2>Pas d’autres emplois à la clef</h2>
<p>Un entrepreneur a une volonté de croissance et devrait, à terme, créer des emplois et dynamiser l’économie de son territoire (si ce n’est de son pays). À l’inverse, la majorité des autoentrepreneurs, qui ne font que créer leur propre activité, ne peuvent pas ou ne veulent pas croître, n’auront pas d’employés et n’ont probablement qu’un effet limité sur le dynamisme économique local (notamment en raison de <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/1374690?sommaire=1374698">leurs faibles revenus</a>).</p>
<p>S’il s’agit bien de la création d’un emploi, il n’y en aura pas d’autres à la clef, c’est même implicite dans le nom originel du statut. Les « emplois » actuellement créés par les plates-formes (chauffeurs, livreurs, petits travaux, etc.) <a href="https://books.google.fr/books?hl=fr&lr=&id=F7haDwAAQBAJ">accentuent encore cet état de fait</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-culture-entrepreneuriale-est-elle-vraiment-plus-developpee-ailleurs-quen-france-195770">La culture entrepreneuriale est-elle vraiment plus développée ailleurs qu’en France ?</a>
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<p>Au fil du temps, plusieurs modèles ont essayé de définir ce qu’est un entrepreneur. Traditionnellement, il a été défini comme une personne qui <a href="https://academic.oup.com/qje/article-abstract/79/3/373/1923759">porte une innovation</a>, qui <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-institutional-economics/article/frank-knight-uncertainty-and-knowledge-spillover-entrepreneurship/F300A918645A049FA78307C3FABE5865">assume le risque</a> de l’activité ou encore qui assure la <a href="https://www.taylorfrancis.com/books/mono/10.4324/9780203068489/social-economics-jean-baptiste-say-evelyn-forget">coordination d’une activité nouvelle</a>. Plus récemment, la recherche a proposé pour de compléter ce profil avec la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/088390269090023M">volonté de croissance</a>, <a href="https://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1177/104225879101500405">certains traits de personnalité</a> ou de l’analyser dans une <a href="https://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1177/104225870102500404">perspective évolutionniste</a> (selon laquelle l’entrepreneuriat s’explique par la culture d’une société).</p>
<p>Or, il est facile de constater que le simple fait de travailler à son compte ne correspond aucunement à certaines de ces définitions, et seulement de manière partielle à d’autres :</p>
<p><iframe id="gbliG" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/gbliG/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Un travailleur indépendant n’a pas à être innovant ou orienté vers la croissance. Il peut parfaitement assurer sa subsistance en réalisant seul et de manière constante dans le temps une activité classique, qualifiée (artisanat d’art, graphisme, conseil aux entreprises, etc.) ou non (artisanat simple, services aux particuliers, taxi, etc.).</p>
<p>La réalité pratique et juridique va d’ailleurs en ce sens, puisque la majorité des aides financières à la création d’entreprise, notamment toutes celles à l’innovation, ne peuvent être obtenues sous statut d’autoentrepreneur.</p>
<p>Il est donc nécessaire de clarifier la différence entre entrepreneuriat et travail indépendant, de distinguer leurs effets, leurs intérêts et leurs difficultés, et de mettre en place des politiques publiques distinctes.</p>
<h2>Un besoin de mesures plus précises</h2>
<p>Que pouvons-nous faire pour cela ? Il est possible d’apporter des réponses en tant que chercheurs, décideurs publics ou même simples citoyens.</p>
<p>En tant que chercheurs, il semble nécessaire de distinguer dans nos travaux entrepreneurs et travailleurs indépendants (« self-employed »). Comment espérer influer sur les politiques publiques lorsque le champ académique lui-même n’est pas capable de dépasser ces limites conceptuelles ? Ce déficit de distinction conduit à survaloriser l’entrepreneuriat comme une <a href="https://www.cairn.info/revue-de-l-entrepreneuriat-2017-1-p-7.html">réponse « héroïque »</a> et viable aux difficultés rencontrées par certaines populations, en construisant des conclusions sur la prégnance du travail indépendant.</p>
<p>Or, si le travail indépendant constitue une réponse possible et viable au chômage, il a aussi d’importantes limites en termes de revenus, de sécurité et de capacité à démultiplier le gain économique. En l’état de la littérature, le champ de la recherche sur l’entrepreneuriat n’est aujourd’hui que peu capable de traiter les questions soulevées par le statut d’autoentrepreneur (contrairement par exemple à nos collègues sociologues, qui se sont saisis avec pertinence de ses ambiguïtés).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1215878610382475268"}"></div></p>
<p>Au niveau des décideurs publics, il semble nécessaire de mesurer de manière plus précise les résultats et les externalités des politiques publiques associées à l’entrepreneuriat. Cela passe par distinguer systématiquement création d’entreprise et création d’autoentreprises. De même, mesurer le niveau de vie à moyen terme des personnes ayant bénéficié d’aides à la création semble nécessaire. N’aurait-il pas été plus pertinent de les aider à trouver un emploi « classique » ? Est-il souhaitable de créer une classe de « faux entrepreneurs précaires » sous prétexte de faire baisser le taux de chômage ?</p>
<h2>Des services classiques, simples et locaux</h2>
<p>La récente réforme de l’assurance chômage va-t-elle pousser davantage de personnes <a href="https://theconversation.com/le-maintien-dans-lemploi-des-seniors-lenjeu-oublie-de-la-reforme-des-retraites-128960">notamment des seniors</a>, vers ces statuts précaires, peu rémunérateurs et peu créateurs de valeur pour le système économique ? De nouveaux questionnements et de nouveaux indicateurs sont nécessaires pour répondre à ces questions. Et ces indicateurs doivent aussi exister au niveau des organismes non gouvernementaux. Par exemple, aujourd’hui, l’OCDE mesure l’entrepreneuriat et l’emploi indépendant comme des synonymes.</p>
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<p>Enfin, en tant que citoyens, nous pouvons bien sûr réclamer une meilleure évaluation des politiques publiques liées à l’entrepreneuriat. Quel est le montant des fonds distribués par la BPI, pour combien d’emplois créés et à quel terme ? Quels sont les fonds réellement consacrés à l’accompagnement de travailleurs indépendants à l’activité potentiellement pérenne ? Doit-on subventionner des plates-formes pour qu’elles créent des autoentrepreneurs paupérisés ?</p>
<p>Il s’agit aussi de faire la part des choses : certes, le contexte médiatique sature l’opinion publique d’histoires d’entrepreneurs héroïques et multimilliardaires, ou encore de start-up disruptives et révolutionnaires. Mais l’immense majorité des travailleurs indépendants s’efforce tout simplement de fournir des services classiques, simples et locaux. Ces derniers méritent certainement davantage de considération.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199816/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Yves Ottmann travaille en tant que prestataire pour plusieurs entreprises de services aux travailleurs indépendants.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Andrés Davila Valdiviezo, Cindy Felio et Fernanda Arreola ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Les travailleurs des plates-formes numériques sont-ils des entrepreneurs comme les autres ?Jean-Yves Ottmann, Chercheur en sciences du travail, Université Paris Dauphine – PSLAndrés Davila Valdiviezo, Psychologue, chercheur en management, ESCE International Business SchoolCindy Felio, Psychologue, Chercheuse en Sciences de l’Information et de la Communication, Laboratoire MICA (EA 4426), Université Bordeaux MontaigneFernanda Arreola, Dean of Faculty & Research, ISC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2005552023-02-27T18:11:41Z2023-02-27T18:11:41ZDéveloppement durable : le levier du financement participatif pour les entrepreneurs<p>L’engagement de l’Union européenne vers une réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici 2030 avec un objectif de neutralité carbone d’ici 2050 mobiliserait au moins <a href="https://visionsforeurope.eu/v4e-articles/the-european-green-deal-and-sustainable-business-growth/">1000 milliards d’euros d’investissements durables</a> privés et publics dans les dix prochaines années. Ceci se traduit également par un changement de position et d’attitude de la population face à la consommation durable. En France, <a href="https://www.statista.com/statistics/1328926/consumer-attitudes-towards-sustainability-francea">60 %</a> des personnes interrogées ont déclaré que leurs critères d’achat prennent désormais en compte les pratiques durables des marques ainsi que leurs engagements sociétaux.</p>
<p>Certes, l’application des 17 Objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies ne progresse pas comme prévu. Le dernier <a href="https://www.oecd.org/wise/the-short-and-winding-road-to-2030-af4b630d-en.htm">rapport</a> de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) alerte sur le retard et la quasi-impossibilité de les atteindre d’ici 2030. Malgré de bonnes <a href="https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/environnement-la-france-fait-plutot-bonne-figure-dans-les-classements-mondiaux-1385045">prestations sur quelques indices climatiques</a>, la France a de son côté accumulé du retard et doit à présent <a href="https://www.geo.fr/environnement/apres-la-cop26-la-france-doit-rehausser-ses-objectifs-selon-le-haut-conseil-pour-le-climat-207536">réviser de manière plus ambitieuse</a> son plan de développement durable.</p>
<p>Le déficit de financement du développement durable afin de réaliser les ODD des Nations unies a encore augmenté de 35 % au cours de 2022 pour atteindre <a href="https://finance.yahoo.com/news/force-good-reveals-funding-gap-083008051.html?guce_referrer=aHR0cHM6Ly93d3cuZ29vZ2xlLmNvbS8&guce_referrer_sig=AQAAAKBod4uq5n6knRb6VCF2I1GTcbHaDOfJelQO6l-GcagVHdU8UyYNby6RRJJhVgkLqox4a_gvRQSJkYUQDxNlg0ZBvzaLiXp3BDp4BaSPf2gB0eM0MxakzEzT5q56IW2TAlKe-Z6GjqEwXctI0kPlMPyJGMNLEW1Z1Wg0qP8y6PwB&guccounter=2">135 000 milliards de dollars</a>. À la hauteur de ce défi se trouve également l’identification de plusieurs opportunités pour créer de la valeur à travers l’entrepreneuriat. En effet, les recherches indiquent que les <a href="https://journals.sagepub.com/doi/pdf/10.1111/j.1540-6520.2010.00426.x">entrepreneurs « durables</a> » ont le potentiel de résoudre les problèmes de développement durable auxquels le monde est confronté aujourd’hui.</p>
<h2>Une alternative pour les projets jugés risqués</h2>
<p>L’entrepreneuriat durable constitue une branche de l’entrepreneuriat qui cherche à rallier la création de valeur sociale, environnementale et économique tout en répondant aux besoins actuels. Par exemple, les entrepreneurs durables développent leurs activités dans la gestion des déchets, à la protection de la biodiversité et des écosystèmes naturels entre autres.</p>
<p>Or, ces entrepreneurs durables sont aujourd’hui confrontés à des <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10551-017-3646-8">difficultés supplémentaires</a> lorsqu’ils recherchent des fonds par le biais des canaux de financement traditionnels, car ils doivent justifier de la viabilité de leur modèle économique qui vise non seulement des objectifs économiques mais aussi un cap sociétal et environnemental au-delà du profit. Les institutions de financement traditionnelles peuvent en outre refuser d’octroyer des prêts, car les règles bancaires peuvent ne pas correspondre aux exigences de production de l’entreprise durable, à la quantité de production ou aux installations disponibles dans l’usine.</p>
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<p>Dans ce contexte, nous avons <a href="https://doi.org/10.1108/IJEBR-05-2021-0321">mené une recherche</a> qui explore le rôle du financement participatif pour les entrepreneurs durables. Pour rappel, le « crowdfunding » (financement par la foule en français) permet aux entrepreneurs de financer leurs projets en collectant des contributions financières via des plates-formes en ligne (comme <a href="https://fr.ulule.com/">Ulule</a> ou <a href="https://fr.lita.co/fr">Lita.co</a>). En France, il a connu une forte croissance de plus de 84 % en 2021 avec <a href="https://financeparticipative.org/wp-content/uploads/2022/02/BAROMETRE_CROWDFUNDING-2021_FPF-MAZARS.pdf">1,8 milliard d’euros</a> collectés et plus de 5 milliards depuis son émergence en 2015. Ceci pourrait être particulièrement utile pour les projets innovants de développement durable qui sont jugés trop risqués par les investisseurs traditionnels.</p>
<p>Notre recherche a permis de dégager plusieurs usages sur la façon dont ce mode de financement pourrait aider les entrepreneurs durables à réaliser leurs objectifs au-delà de la collecte de fonds. Tout d’abord, il permet également d’éviter les retards et les défis posés par les institutions de financement traditionnelles. En fonction du secteur et du type de <em>crowdfunding</em> choisi, l’objectif peut être atteint entre <a href="https://financeparticipative.org/wp-content/uploads/2022/02/BAROMETRE_CROWDFUNDING-2021_FPF-MAZARS.pdf">3 heures et 72 jours</a>.</p>
<h2>Créer de l’engouement</h2>
<p>En outre, les fonds collectés aident les entrepreneurs durables à éviter les risques personnels et financiers supplémentaires liés au remboursement, aux taux d’intérêt élevés ou à un défaut de paiement. D’autres types d’exigences telles que le contrôle de l’entreprise ou l’obtention d’une part du capital peuvent également être évitées en choisissant le bon type de crowdfunding.</p>
<p>La start-up <a href="https://nofilter.eco/">NoFilter</a> a par exemple réussi le pari via le financement participatif de son projet afin de s’engager auprès des agriculteurs français en transformant leurs écarts de tri en jus artisanaux et en les accompagnant dans leur conversion vers l’agriculture bio et la transition écologique plus globalement.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/QCulgSduImU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Lutter contre le gaspillage alimentaire avec NoFilter (Gouvernement, 2022).</span></figcaption>
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<p>Le <em>crowdfunding</em> aide également les entrepreneurs durables à créer l’engouement en commercialisant et en communiquant librement sur leurs produits, services ou projets durables auprès d’un large spectre de parties prenantes. Il permet également d’attirer, de multiplier et de construire des relations à long terme avec des clients et de poursuivre les aspects traditionnels du marketing tels que la création d’une image de marque, le gain de visibilité, la promotion de produits, ou l’offre de remises par le biais de précommandes.</p>
<p>Par exemple, <a href="https://lamarqueenmoins.fr">La marque en moins</a> a su non seulement se financer mais aussi créer un mouvement autour de ses produits ménagers innovants avec une approche durable.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/OTJYbFghZCE?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Brut X : la marque en moins (2021).</span></figcaption>
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<p>Le <em>crowdfunding</em> peut aussi servir aux entrepreneurs durables de tremplin pour d’autres projets : l’investissement dans des produits de substitution, la production et la vente d’autres produits dérivés durables ou l’injection de capitaux pour construire une plate-forme en ligne. De tels projets non définis peuvent souvent être considérés comme incertains et donc poser une ambiguïté dans l’esprit des investisseurs traditionnels qui visent à obtenir un retour sur investissement.</p>
<h2>Choisir la bonne plate-forme</h2>
<p>Contrairement aux moyens traditionnels de collecte de fonds, la plate-forme de <em>crowdfunding</em> offre aux entrepreneurs durables une occasion de tester leurs idées, produits, services ou projets. Elle permet de vérifier si la vision, les buts et les objectifs des entrepreneurs en matière de durabilité sont acceptés ou rejetés par leurs clients potentiels. Ainsi, le taux de réussite de la campagne de financement permet de tester l’appétit du segment de marché ciblé.</p>
<p>De plus, celle-ci peut générer une légitimité pour les entrepreneurs durables et servir de preuve de crédibilité et de source d’information sans manipulation ni discordance. Ainsi, son lancement constitue un argument de vente supplémentaire lorsqu’il s’agit de solliciter des fonds, des partenariats ou d’autres collaborations avec des tiers. <a href="https://actu.fr/bretagne/lannion_22113/lannion-des-ventes-exceptionnelles-pour-endro-cosmetiques-en-2022_57005271.html">Endro Cosmétiques</a>, une start-up bretonne, a par exemple testé le marché et les arguments de vente avant de lancer son déodorant zéro déchet à travers une campagne de <em>crowdfunding</em>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/8AjCwlCBZP4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Présentation d’Enduro cosmétiques (Endro, 2020).</span></figcaption>
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<p>Cependant, outre les avantages que les entrepreneurs durables peuvent exploiter pour lever des fonds, ces derniers doivent cependant faire attention à choisir la bonne plate-forme parmi les quelque 180 en France et le bon type de <em>crowdfunding</em>. Ils doivent notamment se tourner vers celles ayant de solides antécédents en matière de développement durable. Ainsi, les plates-formes qui ont déjà rassemblé des communautés de personnes engagées pourront susciter davantage d’engouement et participer ainsi à la visibilité et la croissance de la start-up bien au-delà de la levée de fonds.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/200555/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le « crowdfunding » offre des avantages différents des canaux de financement traditionnel pour des projets dans la gestion des déchets ou la protection des écosystèmes naturels.Ghassan Paul Yacoub, Professor of Innovation, Strategy, and Entrepreneurship, IÉSEG School of ManagementPaulami Mitra, Assistant Professor in Management; Academic Director, IÉSEG School of ManagementTiago Ratinho, Associate Professor in Entrepreneurship, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1972482023-01-05T19:22:29Z2023-01-05T19:22:29ZComment faire face sereinement aux incertitudes de 2023 ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/503059/original/file-20230104-26-z69osu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=64%2C93%2C986%2C695&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Nous cherchons généralement à éliminer l’aléa dans nos vies alors que l’incertitude s’impose pourtant comme la norme.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/closeup-photo-of-two-red-dices-showing-4-and-5-965875/">Jonathan Petersson/Pexels</a></span></figcaption></figure><p>« Bonne année, bonne santé ! » Ces deux incantations, presque magiques, accompagnent nos premières interactions en ce début de mois de janvier. Comme une façon de se rassurer, elles visent à faire oublier l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/incertitude-23726">incertitude</a> qui grandit devant une actualité qui a parfois de quoi bouleverser.</p>
<p>Osons l’avouer, nous cherchons très souvent à éliminer l’aléa dans nos vies alors que l’incertitude s’impose pourtant comme la norme. Les exemples ne manquent pas pour nous en convaincre, que l’on pense à la situation économique relative aux variations du prix de l’énergie, aux ruptures dans les chaînes de production, à la santé, à l’environnement, au politique ou à la géopolitique. Il devient très difficile de se projeter.</p>
<h2>Pas tous égaux face à l’incertain</h2>
<p>Les conséquences de l’incertitude sont d’ailleurs parfois préoccupantes. Certains <a href="https://www.lefigaro.fr/vox/societe/sante-mentale-les-francais-ne-vont-pas-bien-et-leurs-troubles-vont-s-inscrire-dans-la-duree-20221011">s’inquiètent</a> de <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/dossiers/coronavirus-Covid-19/enjeux-de-sante-dans-le-contexte-de-la-Covid-19/articles/sante-mentale-et-Covid-19">l’état de santé mentale</a> de bon nombre de nos concitoyens. Santé publique France précise que les indicateurs de la santé mentale (état anxieux ou dépressif) ne sont pas bons et se sont <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2022/impact-de-la-pandemie-Covid-19-sur-la-sante-mentale-des-francais.-le-dossier-de-la-sante-en-action-n-461-septembre-2022">largement dégradés</a>.</p>
<p>Cependant, nous ne sommes pas tous égaux face à l’incertain. Pour simplifier, moins je me sens capable de changer quoi que ce soit à ce qui se passe, plus l’incertitude m’est difficile à supporter. Inversement, plus je sais que je dispose de marges de manœuvre, moins j’en souffrirai. La relation entre anxiété et absence de contrôle est primordiale ici.</p>
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<p>Le référentiel pour gérer les situations vise plus souvent à éliminer l’incertitude qu’à l’apprivoiser. Les entrepreneurs n’échappent pas à la règle. Ce sont aussi des gens ordinaires. Mais alors que nous enseigne l’observation des entrepreneurs à propos du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/controle-48442">contrôle</a> ?</p>
<h2>Les trois postures du contrôle</h2>
<p>Tout d’abord que le contrôle n’est rien d’autre que la capacité d’agir dans une situation pour éventuellement la modifier. Les chercheurs américains en gestion Robert Wiltbank, Nicholas Dew, Stuart Read et Saras D. Sarasvathy ont décrit dans un article publié en 2006 des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/smj.555">postures</a> distinctes pour envisager le contrôle. On peut les simplifier en 3 postures : la première est celle qui tend à considérer que ce qui se passe ne dépend pas de soi ; la deuxième consiste à croire que tout dépendra de soi et non pas de l’environnement ; la troisième que tout dépend à la fois de l’environnement et de soi.</p>
<p>Analyser ce qui fonde ces trois croyances peut aider n’importe qui à tirer des conclusions utiles pour mieux appréhender l’incertitude dans son quotidien.</p>
<p><strong>Posture 1 : l’environnement-roi</strong></p>
<p>Si rien de ce qui se passe ne dépend de moi, par conséquent, je dois me positionner face à ce qui m’arrive ou ce que je crois qui va m’arriver. C’est l’environnement qui dicte sa loi. Ceci confère un caractère objectif à la situation en niant toute subjectivité. Il s’agit là d’une posture adaptative à des faits ou à une prédiction.</p>
<p>Ici le contrôle se réduit à la capacité à s’adapter à une situation pour en tirer profit ou s’en défaire. Par exemple : je choisis de changer de travail car l’activité de mon entreprise est trop dépendante du coût de l’énergie.</p>
<p><strong>Posture 2 : le visionnaire</strong></p>
<p>Si tout dépend de moi, je suis un visionnaire qui croit qu’il a un pouvoir sur son environnement et qu’avec de la persuasion, il est possible d’embarquer les autres vers le futur que je souhaite.</p>
<p>Cette approche pourrait par exemple caractériser l’action de l’entrepreneur milliardaire <a href="https://theconversation.com/fr/topics/elon-musk-30803">Elon Musk</a>, patron de SpaceX, Tesla et désormais Twitter. C’est bien lui qui veut rendre désirable l’idée d’habiter un jour sur la <a href="https://geeko.lesoir.be/2022/08/16/elon-musk-veut-creer-une-nouvelle-civilisation-sur-la-planete-mars/">planète Mars</a>. Le contrôle s’exerce principalement sur les moyens de convaincre et de tout mettre en œuvre pour influencer le cours des choses. Rien à ce jour ne permet de dire qu’il soit possible de vivre sur la planète Mars, ni même de s’y rendre en toute sécurité. Le projet naît de la subjectivité de celui qui conduit l’action.</p>
<p>Par exemple : je choisis de changer de travail parce que ce travail ne me convient pas. Le fait d’avoir investi dans un nouveau logement n’y changera rien. Je suis certain de l’impact positif que ce changement aura sur moi et mes proches.</p>
<p><strong>Posture 3 : la co-décision à propos d’un effet atteignable</strong></p>
<p>Enfin, considérer qu’il est possible d’influencer autant que de me laisser influencer et envisager ainsi des futurs proches désirables avec ceux qui m’entourent. Ceux-ci n’étaient pas anticipables puisqu’ils naissent de la rencontre. C’est notamment la posture que décrit la théorie de l’effectuation développée par <a href="https://www.jstor.org/stable/259121#metadata_info_tab_contents">Saras D. Sarasvathy en 2001</a>, qui fait l’objet de nos <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2022-3-page-11.htm">travaux</a> récents, qui n’imagine que des buts communs à partir d’un ensemble de moyens disponibles.</p>
<p>Ici, la posture du contrôle s’exerce pour chacun des acteurs concernés selon 5 principes : (1) partir de ce que l’on a ; (2) n’accepter que des risques acceptables ; (3) s’appuyer sur les autres et co-créer avec eux ; (4) tirer parti des surprises ; (5) ne s’engager que si je le veux.</p>
<p>Cette dernière posture s’appuie donc sur une représentation non déterministe et non autoritaire de la marche du monde. Exemple : Imaginons que je sache intégrer des bases de données à des outils de développement de logiciel dit « no code ». En plus de mon travail salarié, j’aime développer des applications et aussi échanger sur ma pratique. Aussi, je communique sur mes expériences via les réseaux sociaux. Je m’aperçois que cette compétence intéresse d’autres développeurs. Ils me confient des missions d’intégration et me demandent des formations. Ces demandes étant récurrentes et suffisamment rémunératrices, je décide de quitter mon job pour développer cette activité.</p>
<h2>Faire avec</h2>
<p>Avouons-le, nous nous sommes retrouvés à un moment ou à un autre dans l’une des trois postures. Le problème, c’est de s’enfermer dans l’une des deux premières et de ne pas basculer dans la troisième. Pourquoi ? Parce que la dernière est la plus adaptée à un haut niveau d’incertitude dans la mesure où elle permet d’avancer à partir des données du présent et non pas d’un futur hypothétique objectivé ou subjectivé.</p>
<p>Peu enseignées, ces trois postures pourraient avantageusement aider un plus large public à repérer celle qui relève de l’incertitude. Elles sont applicables sur le plan personnel mais aussi au sein des organisations et même en politique. Elles font réfléchir sur la manière d’affronter les changements importants qui sont devant nous.</p>
<p>Ces trois postures nous parlent aussi de trois manières d’entreprendre des projets mais nul besoin de lancer une <a href="https://theconversation.com/fr/topics/start-up-23076">start-up</a> pour entreprendre. Devenir entrepreneur est avant tout une attitude qui fonde notre manière d’agir. Adopter la troisième posture, « effectuale », c’est aussi une chance de diminuer le niveau d’anxiété des individus qui pourront se réapproprier des marges de manœuvre qui n’ont pas disparu, quelle que soit la situation à laquelle ils font face. Si l’incertitude est désormais perçue comme incontournable, apprenons à faire avec elle au lieu de faire contre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197248/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dominique Vian ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Voici quelques clés issues de la recherche en entrepreneuriat que tout le monde peut appliquer pour décider au quotidien…Dominique Vian, Enseignant chercheur en cognition entrepreneuriale chez SKEMA Business School, SKEMA Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1957702023-01-02T19:09:50Z2023-01-02T19:09:50ZLa culture entrepreneuriale est-elle vraiment plus développée ailleurs qu’en France ?<p>L’entrepreneuriat constitue un moteur essentiel de la santé et de la richesse de la société. Il est également un formidable moteur de la croissance économique. Il favorise l’innovation nécessaire pour non seulement exploiter de nouvelles opportunités, promouvoir la productivité et créer des emplois, mais aussi pour relever certains des plus grands défis de société, tels que les <a href="https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/objectifs-de-developpement-durable/">objectifs de développement durable (ODD)</a> des Nations unies.</p>
<p>La promotion de l’entrepreneuriat figure ainsi au cœur des préoccupations de nombreux gouvernements dans le monde. En France, les chiffres de la création d’entreprise ont atteint de nouveaux records, avec près <a href="https://www.gouvernement.fr/actualite/pres-d-1-million-d-entreprises-ont-ete-creees-en-france-en-2021">d’un million de nouvelles entreprises en 2021</a>, même si ce chiffre peut être relativisé en raison de la part du micro-entrepreneuriat et de l’entrepreneuriat lié aux plates-formes. Est-ce le reflet d’une culture entrepreneuriale qui s’est développée et installée ces dernières années ? Et comment se situe la France par rapport aux autres pays dans son rapport à l’entrepreneuriat ?</p>
<p>Pour répondre à ces questions, nous avons mené, en 2021, deux études pour le <a href="https://www.gemconsortium.org/file/open?fileId=51019">Global Entrepreneurship Monitor</a> (GEM) dans le cadre du LabEx Entreprendre de l’Université de Montpellier : la première porte sur l’activité entrepreneuriale et est menée auprès de la population française de 18 à 64 ans (Étude APS) ; la seconde porte sur l’écosystème entrepreneurial national et est réalisée auprès d’un panel d’experts (Étude NES). Ces deux études sont répliquées dans d’autres pays par des équipes nationales adhérentes au GEM, permettant ainsi une comparaison internationale.</p>
<h2>La France dans la moyenne</h2>
<p>L’étude menée auprès des experts montre notamment que, parmi les pays du G7, il existe une certaine proximité sur la perception de l’écosystème entrepreneurial, qui est vu comme globalement favorable. Seuls les États-Unis (5,3/10) se distinguent légèrement. On peut noter une forte similarité entre des pays comme l’Allemagne, le Canada et la France (5,1/10) pour lesquels les conditions sont perçues globalement comme assez favorables. Ces conditions sont en revanche perçues comme moins favorables pour l’Italie et le Japon (4,7/10).</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/500723/original/file-20221213-16138-3sffsh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/500723/original/file-20221213-16138-3sffsh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/500723/original/file-20221213-16138-3sffsh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=198&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/500723/original/file-20221213-16138-3sffsh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=198&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/500723/original/file-20221213-16138-3sffsh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=198&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/500723/original/file-20221213-16138-3sffsh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=248&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/500723/original/file-20221213-16138-3sffsh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=248&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/500723/original/file-20221213-16138-3sffsh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=248&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gemconsortium.org/file/open?fileId=51019">Global Entrepreneurship Monitor (2022)</a></span>
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<p>Parmi les 19 pays les plus riches participant au GEM, la France se distingue en termes de politiques gouvernementales (4e/19). Les efforts réalisés au niveau national et régional depuis une vingtaine d’années pour favoriser l’entrepreneuriat sont donc reconnus et ont contribué à faire émerger un écosystème de l’accompagnement entrepreneurial particulièrement dynamique.</p>
<p>La France reste toutefois en retrait sur les normes culturelles et sociales (18e/19) et sur l’éducation entrepreneuriale au niveau du primaire et du secondaire (17e/19). La révolution entrepreneuriale ne semble donc pas encore faire sentir tous ses effets sur la société et des efforts sont encore nécessaires pour diffuser une culture entrepreneuriale. De même, la question de l’accès au marché apparaît comme un point faible (17e/19) de l’écosystème entrepreneurial français, ce qui fragilise le développement des entreprises émergentes.</p>
<h2>Représentation positive</h2>
<p>La valorisation de l’activité entrepreneuriale dans un pays, et donc le poids de la culture entrepreneuriale, peut être appréciée à l’aide de quatre indicateurs. Il s’agit d’évaluer : si l’entrepreneuriat est perçu comme un choix de carrière souhaitable, s’il confère un statut social élevé, s’il est valorisé dans les médias et si finalement il est facile d’entreprendre en France. C’est ce que nous avons fait dans l’enquête auprès de la population générale.</p>
<p>Si l’on compare la France par rapport aux économies du G7, elle se situe là encore dans la moyenne. Pour un peu plus des deux tiers des Français interrogés, l’entrepreneuriat constitue un choix de carrière souhaitable. Pour autant, seule une courte majorité (55,4 %) considère qu’il s’agit aujourd’hui d’un statut social élevé.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/500724/original/file-20221213-18124-oz0t5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/500724/original/file-20221213-18124-oz0t5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/500724/original/file-20221213-18124-oz0t5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=173&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/500724/original/file-20221213-18124-oz0t5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=173&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/500724/original/file-20221213-18124-oz0t5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=173&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/500724/original/file-20221213-18124-oz0t5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=217&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/500724/original/file-20221213-18124-oz0t5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=217&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/500724/original/file-20221213-18124-oz0t5e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=217&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gemconsortium.org/file/open?fileId=51019">Global Entrepreneurship Monitor (2022)</a></span>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gemconsortium.org/file/open?fileId=51019">Global Entrepreneurship Monitor (2022)</a></span>
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<p>Cette représentation positive est un marqueur de l’évolution de la culture entrepreneuriale. Cette dernière est influencée par les médias qui contribuent à diffuser une image plus ou moins favorable de l’entrepreneuriat. Les Français ont le sentiment dans une large majorité, que ce soit dans les médias ou sur Internet, que les histoires de nouvelles entreprises qui réussissent sont mises en valeur (Figure 8).</p>
<p>On peut citer par exemple le programme « Qui veut être mon associé » sur M6 qui met en scène des entrepreneurs à la recherche de fonds. Ce programme de téléréalité, présent depuis une vingtaine d’années dans d’autres pays, a été diffusé en France pour la première fois en 2021 et contribue à démocratiser l’entrepreneuriat et la question de la levée de fonds.</p>
<p>Au-delà de la désirabilité perçue, la question de la faisabilité perçue est importante. Selon les pays et les époques, les barrières perçues qui tiennent à la facilité d’enregistrement, au poids de la bureaucratie peuvent freiner l’intention et le comportement entrepreneurial. Une courte majorité considère qu’en France, il est facile de démarrer une entreprise (Figure 9).</p>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gemconsortium.org/file/open?fileId=51019">Global Entrepreneurship Monitor (2022)</a></span>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gemconsortium.org/file/open?fileId=51019">Global Entrepreneurship Monitor (2022)</a></span>
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<p>Depuis une vingtaine d’années, les pouvoirs publics adoptent en effet des mesures pour simplifier la création d’entreprise. Cette perception varie fortement d’un pays à l’autre : les États-Unis, le Canada et le Royaume-Uni se distinguent avec le sentiment qu’il est facile d’entreprendre par opposition avec le Japon, l’Italie ou l’Allemagne.</p>
<h2>« Gagner sa vie »</h2>
<p>Cependant, selon notre étude, la motivation la plus forte des entrepreneurs est de « gagner sa vie car les emplois sont rares » (51,2 %). Ce résultat laisse à penser qu’une majorité d’entre eux se lance dans l’aventure entrepreneuriale par nécessité. Ce score est plus élevé au Canada (70,7 %), en Italie (61,3 %) ou au Royaume-Uni (63,8 %). Il est en revanche plus en retrait aux États-Unis (45,8 %), en Allemagne (40,9 %) et au Japon (40,1 %).</p>
<p>Les entrepreneurs visent dans une moindre mesure la carrière entrepreneuriale pour « bâtir une grande richesse ou obtenir un revenu très élevé » (39,4 %). Les deux autres motivations ne concernent qu’un quart à un cinquième des entrepreneurs. La création d’entreprise motivée par la volonté de faire une différence dans le monde n’est exprimée que par 25,8 % des entrepreneurs interrogés alors qu’aux États-Unis (71,2 %) et au Canada (70,4 %), les proportions sont beaucoup plus élevées. Il en va de même de la motivation pour « perpétuer une tradition familiale » qui ne concerne que 22,9 % des entrepreneurs en France contre 41,5 % aux États-Unis et 50 % au Canada.</p>
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<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gemconsortium.org/file/open?fileId=51019">Global Entrepreneurship Monitor (2022)</a></span>
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<p>L’étude confirme donc l’idée que la France devient une société entrepreneuriale. Pour autant, la culture entrepreneuriale ne semble pas imprégner toute la société. Des actions restent nécessaires pour lever certains freins. Comme le soulignent les experts du panel, la France est en retard par rapport aux autres pays les plus riches sur la question de l’éducation entrepreneuriale au niveau du primaire et du secondaire.</p>
<p>Des assises sur l’éducation entrepreneuriale au niveau du primaire et du secondaire pourraient par exemple permettre d’une part de mieux comprendre les bonnes pratiques en France et l’étranger, et d’autre part de concevoir une stratégie adaptée à la diversité des contextes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/195770/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Karim Messeghem a reçu des financements de l'ANR (PIA - 10-LABX-0011). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Frank Lasch et Justine Valette ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>Un rapport situe la France parmi les pays où le contexte apparaît le plus propice à la création d’entreprise. Cependant, une grande partie des entrepreneurs se lancent avant tout par nécessité.Karim Messeghem, Professeur des universités, Université de MontpellierFrank Lasch, Full professor in Entrepreneurship, Montpellier Business SchoolJustine Valette, Maître de conférences en sciences de gestion, Université de MontpellierLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.