tag:theconversation.com,2011:/global/topics/moralisation-37121/articlesmoralisation – The Conversation2017-07-20T23:27:01Ztag:theconversation.com,2011:article/808462017-07-20T23:27:01Z2017-07-20T23:27:01ZMoraliser la vie publique ? Faisons un Pacte d'intelligence émotionnelle !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/178994/original/file-20170720-23995-cz11wm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le fronton de l'Assemblée nationale, à Paris.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/mathoov/5173395316/">Mathieu Thouvenin/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p><em>« Calcul politique, oui. Instinct politique, non. Intelligence analytique, absolument. Intelligence émotionnelle, zéro. »</em> Tony Blair, <a href="http://www.liberation.fr/planete/2010/09/02/tony-blair-se-lache-contre-gordon-brown_675987">à propos de Gordon Brown</a>.</p>
<p>Dans le monde des affaires, lorsqu’on décide de trouver un cadre dirigeant à qui l’on confiera de grandes responsabilités, on soumet les candidats au poste à une batterie de <a href="http://www.allodocteurs.fr/actualite-sante-embauche-des-tests-psychologiques-pour-cerner-la-personnalite_3485.html">tests psychologiques</a> pour, au final, ne retenir que le ou la meilleur(e). Celui ou celle dont les qualifications et la personnalité profonde correspondent le mieux au poste.</p>
<p>Ces individus catapultés tout en haut de la hiérarchie auront pour mission d’imposer un cap à leur organisation, entraînant dans leur sillage les destins des hommes et des femmes qui la composent. Une <a href="http://www.capital.fr/votre-carriere/recrutement-5-erreurs-de-casting-qui-tuent-1039910">erreur de casting</a> et c’est la catastrophe.</p>
<h2>Que sait-on vraiment des politiques ?</h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/179000/original/file-20170720-15249-1jpcroz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/179000/original/file-20170720-15249-1jpcroz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/179000/original/file-20170720-15249-1jpcroz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/179000/original/file-20170720-15249-1jpcroz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/179000/original/file-20170720-15249-1jpcroz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/179000/original/file-20170720-15249-1jpcroz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/179000/original/file-20170720-15249-1jpcroz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le président Emmanuel Macron, qui se veut « jupitérien ».</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/worldbank/35772547841/">Ibrahim Ajaja/World Bank/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Pourquoi le processus de recrutement de nos représentants politiques serait-il différent de celui d’un cadre dirigeant ? À l’heure où le Président Macron <a href="https://theconversation.com/la-societe-civile-et-le-mouvement-en-marche-linauguration-dun-nouveau-cycle-80090">mobilise la société civile</a> à l’Élysée et au Parlement, n’a-t-on pas à apprendre du monde de l’entreprise et à transposer des recettes qui marchent (sans mauvais jeu de mot) ?</p>
<p>Dirigeants d’entreprise et dirigeants politiques n’ont-ils pas de nombreux devoirs en commun ? Comme celui d’écouter, de comprendre, de sonder le climat émotionnel de leur organisation, d’être le pare-feu à certaines de nos angoisses et peurs, de libérer les énergies émotionnelles et de servir au mieux ceux qu’ils représentent et qui les paient.</p>
<p>Nous confions <a href="http://www.toupie.org/Dictionnaire/Quinquennat.htm">pendant cinq ans</a>, les manettes de la France à des représentants politiques, président et députés, qui « managent » le pays, la plus importante et noble des organisations qui soit. Et pourtant, que sait-on réellement de ces individus ? Quasiment rien.</p>
<p>Leur personnalité profonde et leurs états d’âme restent classés top-secret. Certes, quelques <a href="http://www.inaglobal.fr/presse/article/le-journalisme-d-investigation-n-existe-pas-9090">investigations journalistiques</a> tentent ici et là de percer la cuirasse des politiques ; mais cela se fonde essentiellement sur des données secondaires, des témoignages souvent erronés d’amis ou d’ennemis avérés ou larvés, et des observations anecdotiques rapportées.</p>
<p>En définitive, aujourd’hui, les politiques n’ont aucune réelle obligation en matière de transparence de leur santé, physique et psychologique. Vous trouvez cela normal ? Pas moi. Confieriez-vous vos enfants à une inconnue ou les clés de votre maison au copain du fils d’un ami ? Non.</p>
<h2>Le quotient émotionnel, dénominateur commun aux bons managers</h2>
<p>Pour pouvoir réellement cerner la nature profonde de ces « animaux politiques », il faut les « disséquer » à l’aide de « bistouris » qui sont principalement employés par les scientifiques. Comme tout manager, les politiques, devraient être contraints à passer un processus de recrutement propre, à l’occasion des élections législatives, par exemple.</p>
<p>Soit des <a href="http://affaires.lapresse.ca/cv/201508/26/01-4895402-la-vraie-nature-des-tests-psychometriques.php">tests psychométriques</a> sérieux, au premier rang desquels un test de <a href="http://www.20minutes.fr/sante/2021579-20170228-tout-monde-joue-emotions-france-2-quoi-quotient-emotionnel">quotient émotionnel</a> (QE). Car, s’il y a une compétence à « jauger » lorsque l’on occupe une position au centre de laquelle se trouvent les relations humaines, des décisions politiques impactantes pour la communauté et la morale, c’est bien celle-là.</p>
<p>Le QE est le dénominateur commun à beaucoup de bons managers. Comme semblent l’indiquer plusieurs centaines de résultats de <a href="http://www.cairn.info/revue-internationale-des-sciences-administratives-2011-2-page-405.htm">recherches scientifiques</a> à travers le monde, les managers doués d’intelligence émotionnelle motivent plus facilement leurs troupes.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/179002/original/file-20170720-24011-1x3ikjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/179002/original/file-20170720-24011-1x3ikjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/179002/original/file-20170720-24011-1x3ikjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/179002/original/file-20170720-24011-1x3ikjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/179002/original/file-20170720-24011-1x3ikjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/179002/original/file-20170720-24011-1x3ikjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/179002/original/file-20170720-24011-1x3ikjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jean d’Ormesson (à gauche), lors de la remise du prix Clara, en 2015.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/actualitte/23725740801/">ActuaLitté/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Ils ont l’honnêteté d’un Charles Ingalls. La qualité d’écoute du docteur Quinn. La clarté dans leur discours d’un <a href="http://next.liberation.fr/livres/2014/07/06/jean-d-ormesson-tout-est-bien_1058537">Jean d’Ormesson</a>. La créativité d’un <a href="http://next.liberation.fr/livres/2000/05/04/riche-et-celebre-werber-au-sixieme-ciel-bernard-werber-l-empire-des-anges-albin-michel-410-pp-135-f_324807">Bernard Werber</a>. Tel <a href="https://www.washingtonpost.com/lifestyle/style/eliot-ness-and-al-capone-the-men-the-myths-and-the-bad-man-in-the-dark/2014/02/18/8223c47a-95aa-11e3-afce-3e7c922ef31e_story.html?utm_term=.a757a9bbafd9">Eliot Ness</a>, ils restent fidèles à eux-mêmes, étant moins facilement « pervertibles » par le système de pouvoir dans lequel ils évoluent.</p>
<p>Ils ont aussi bien d’autres qualités : ils sondent par exemple plus facilement leur environnement, agissent au lieu de rester apathiques, sont respectés par autrui, aiment la vie, savent mieux gérer les situations critiques et le stress, ont l’âme d’un leader, sont courageux, capables de décider, de trancher. Mais ces oiseaux rare sont difficiles à dénicher : seulement 2 % de la population est considérée comme étant de vrais experts du QE.</p>
<h2>Pour un Pacte d’intelligence émotionnelle</h2>
<p>À l’occasion de la présidentielle de 2007, Nicolas Hulot avait appelé chaque candidat à signer et à se prononcer sur un <a href="http://www.lexpress.fr/actualites/1/societe/il-y-a-10-ans-le-pacte-hulot-installait-l-ecologie-en-politique_1873443.html">Pacte écologique</a>. Aujourd’hui, j’encourage nos politiques à adhérer à un Pacte QE, en passant un test d’intelligence émotionnelle dont le contexte se rapproche le plus du leur.</p>
<p>Je pense ici au « QE Pro », un test que j’ai co-créé et qui a été étalonné sur 1 035 managers et dirigeants d’entreprise français. Il sert précisément à évaluer la capacité d’un chef à diagnostiquer son propre état émotionnel ainsi que celui d’autrui, à comprendre, utiliser et réguler les émotions dans un contexte managérial, afin de favoriser l’épanouissement personnel ET collectif.</p>
<p>Il s’agit d’un test dit « de performance » qui mesure la performance d’un individu dans l’exécution de tâches et dans la résolution de problèmes de nature « émotionnelle ». Il y a des réponses justes et d’autres fausses.</p>
<p>En ce sens, le QE pro se distingue des tests auto-évaluatifs que l’on trouve ici et là, fortement biaisés du fait que le répondant se note lui-même, qu’il devine souvent le sens des questions et qu’il veut se montrer plus émotionnel qu’il ne l’est en réalité. Ici, vous l’aurez compris, il sera difficile aux politiques, même aux plus habiles, de tricher. À chaque question, on sait ou on ne sait pas. Notez bien que ce test est scientifiquement fiable.</p>
<p>En tant que chercheur, la déontologie m’interdirait de diffuser les résultats des politiques. Mais ces derniers pourraient le faire d’eux-mêmes, démontrant ainsi qu’ils ont les tripes pour « occuper » leur poste et qu’ils n’ont pas peur de révéler au peuple français leur « vraie » nature, bien plus profonde qu’une simple <a href="http://www.hatvp.fr/presse/pour-la-premiere-fois-la-haute-autorite-rend-publiques-les-declarations-de-patrimoine-des-candidats-a-lelection-presidentielle/">déclaration de patrimoine</a> ou qu’un bilan de santé erroné.</p>
<p>À minima, ceux qui ont de mauvais résultats ou des résultats moyens, pourraient s’engager à suivre des programmes de <a href="https://www.cairn.info/revue-humanisme-et-entreprise-2009-4-page-29.htm">développement personnel</a>, afin de muscler leur intelligence émotionnelle. Cela s’inscrirait dans une démarche que beaucoup d’entre-eux, sous le coup d’un ego surdimensionné, n’entrevoient même pas.</p>
<p><a href="http://www.latribune.fr/actualites/economie/france/20140419trib000826027/qui-est-louis-schweitzer-ancien-pdg-de-renault-et-nouveau-commissaire-general-a-l-investissement-.html">Louis Schweitzer</a>, l’ancien PDG de Renault et directeur de cabinet de Laurent Fabius, me confia un jour, en pensant à feu <a href="http://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/pourquoi-est-mort-georges-besse_476007.html">Georges Besse</a>, que le dirigeant émotionnellement intelligent est celui capable d’incarner une vision, tout en la changeant en même temps et en restant droit dans ses boites. N’est-ce pas là la vertu première qu’on attend d’un politique ? Mieux que de longs discours philosophiques, je vous propose un test psychométrique.</p>
<hr>
<p>Certains passages, parfois modifiés, sont extraits du dernier livre de Christophe Haag : <a href="http://www.albin-michel.fr/ouvrages/contre-nos-peurs-changeons-dintelligence-9782226391902">Contre nos peurs, changeons d’intelligence !</a> (Albin Michel, 2017).</p>
<p>Découvrez l’audio-MOOC « Le manager émotionnellement intelligent » de Christophe Haag <a href="http://knowledge.em-lyon.com/mooc-qe/">sur le site d’EM Lyon</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/80846/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Haag a co-créé le test QE pro, qui est commercialisé.</span></em></p>Nous confions les manettes du pays à des représentants dont nous ne savons quasiment rien. Et s’ils passaient un test psychométrique sérieux afin qu’ils découvrent leur « vraie » nature ?Christophe Haag, Professeur - Chercheur en psychologie sociale, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/805072017-07-06T18:24:25Z2017-07-06T18:24:25ZLa République exemplaire, loin de la coupe aux lèvres<p>Présenté le 14 juin dernier, en conseil des ministres, le <a href="http://www.lepoint.fr/societe/moralisation-de-la-vie-publique-le-projet-de-loi-bayrou-juge-perfectible-02-06-2017-2132407_23.php">projet de « moralisation de la vie publique »</a> n’a pas seulement changé de nom. Rebaptisé loi <em>« pour la confiance dans notre vie démocratique »</em>, il a changé de format et perdu en ambition. Ne va-t-il pas continuer à s’effilocher une fois dans l’arène parlementaire ? C’est le risque, celui de rejoindre la longue liste des textes d’abord bruyamment encensés pour leur volontarisme, puis discrètement détricotés, au fil des réécritures et des avis juridictionnels, des pressions et des « aménagements ».</p>
<p>Moraliser ? Le philosophe Alain mettait déjà en garde :</p>
<blockquote>
<p>« On parle bien de l’intérêt général ; mais je soupçonne qu’on n’y pense guère. »</p>
</blockquote>
<h2>Un chemin escarpé</h2>
<p>Les années du quinquennat Hollande n’ont pourtant pas manqué de scandales politico-financiers avec, entre autres, la destitution des ministres <a href="http://www.lci.fr/justice/affaire-cahuzac-l-ancien-ministre-du-budget-condamne-a-trois-ans-de-prison-ferme-et-5-ans-d-ineligibilite-2016358.html">Jérôme Cahuzac</a> et Thomas Thévenoud. <a href="https://transparency-france.org/actu/19122016-bilan-quinquennat/">Des lois contre la fraude fiscale et la corruption</a> ont même été adoptées dans la foulée. Mais la République parlementaire peine toujours autant à se montrer exemplaire.</p>
<p>Il ne faut pas s’y tromper. Il sera difficile, pour la nouvelle équipe au pouvoir, de pousser le législateur… à légiférer contre ses propres intérêts. Difficile de contrevenir aux passions étroites et féroces sur lesquelles, depuis longtemps, s’arc-boutent les professionnels de la politique.</p>
<p>Les déclarations de façade et discours sirupeux n’y changeront rien : la tâche sera rude. Prévention des conflits d’intérêt, limitation du cumul des mandats dans le temps, fin de la Cour de justice de la république, interdiction de l’emploi des proches dans les entourages électifs : que restera-t-il, demain, de ces belles intentions ? Certes, le président Macron a deux atouts, la menace du référendum et une Assemblée nationale renouvelée. Mais les adeptes du <em>statu quo</em> ont déjà commencé leur travail de sape.</p>
<h2>De la poutre au cure-dents</h2>
<p>Le premier à lancer des banderilles est le Conseil d’État. Pour les « sages » du Palais-Royal, la « banque de la démocratie » doit être abandonnée. Rappelons que, dans le projet du gouvernement, cette instance est chargée d’« accorder des prêts aux partis politiques et aux candidats, selon des critères objectifs de solvabilité ». Adossée à la Caisse des Dépôts, elle a vocation à égaliser les opportunités de financement en assouplissant la tutelle des partis. Une mission qui, après discussion, pourrait être dévolue… à un établissement privé désigné par appel d’offres.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/177058/original/file-20170706-26461-fuetdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/177058/original/file-20170706-26461-fuetdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/177058/original/file-20170706-26461-fuetdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/177058/original/file-20170706-26461-fuetdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=351&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/177058/original/file-20170706-26461-fuetdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/177058/original/file-20170706-26461-fuetdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/177058/original/file-20170706-26461-fuetdx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=441&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le Conseil d’État, à Paris.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/linobento/6511921025/in/photolist-re23rM-fd81xn-saFao1-gW89n8-e9L9So-fdkQnq-6Fx6Bk-ehaDdC-zLb89-aVrifr-99JPek-gjMiWt-7og52N-jZjPHZ-pnPUh6-5T9JWL-pjDRe1-f8GiHc-53Fiso-p6k8D4-r4hQdy-asyHrT-asyJ7x-asBnaf-asBmo3">Lino Bento/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Les « sages » ont aussi rejeté l’idée de confier à la Cour des comptes la certification financière des partis bénéficiant de l’aide publique. La mesure était pourtant réclamée par Jean‑Louis Nadal, ancien procureur général à la Cour de cassation, dans le rapport sur <a href="http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/154000023.pdf">« l’exemplarité des responsables publics », remis en janvier 2015</a> à François Hollande. Argument strictement juridique ? Rien n’est moins sûr.</p>
<p>La France dispose de pas moins de quatre cours suprêmes : Conseil Constitutionnel, Cour de cassation, Conseil d’État, Cour des comptes. Des instances en concurrence. Elles interviennent sur un territoire juridictionnel dont le tracé n’est pas toujours clair, ni l’action dénuée d’arrière-pensée. Contrairement à leurs homologues de l’Allemagne ou des États-Unis, ces cours ont un mode de recrutement plus politique.</p>
<p>On dira que ce ne sont là que broutilles. Que d’autres pans du projet sont plus essentiels, surtout après une campagne présidentielle marquée par l’affaire Fillon, et en pleine polémique autour du financement du Front national et du MoDem : l’interdiction pour les parlementaires comme les ministres de recruter des membres de leur famille. Ou le plafonnement à trois mandats successifs de certaines fonctions. Sans doute. Mais de détail en détail, le rabotage s’étend. Et l’on finit par se demander si la poutre de la réforme ne finira pas bientôt en simple cure-dents.</p>
<h2>Des « intérêts » contre l’intérêt général</h2>
<p>On voit déjà s’affûter les lames de canif. Pour amadouer la grogne parlementaire, l’ancien garde des Sceaux préféra rapidement parler non de suppression mais de remplacement à propos de la réserve parlementaire. D’où sa nouvelle désignation : le <a href="https://www.publicsenat.fr/article/politique/bayrou-annonce-la-suppression-de-la-reserve-parlementaire-remplacee-par-un-fonds-d">« fonds d’action pour les territoires et les projets d’intérêt général »</a>. Or, plus qu’un mot, c’est un usage qu’il faudrait combattre.</p>
<p>Les députés ont la fâcheuse tendance de devenir propriétaires de leur permanence parlementaire <a href="http://www.lefigaro.fr/politique/2015/01/27/01002-20150127ARTFIG00414-comment-des-deputes-deviennent-proprietaires-grace-a-leurs-indemnites.php">grâce à leur indemnité parlementaire représentative de frais de mandats (IRFM)</a>. Près de 150 d’entre eux ont ainsi cédé à la tentation dans l’ancienne législature, d’après l’association pour une Démocratie directe qui a conduit des recherches auprès des tribunaux de commerce et des services fonciers. Comme si ces frais de mandat – environ 5700 euros bruts par mois prévus pour les déplacements et dépenses quotidiennes des parlementaires – avaient vocation à enrichir le patrimoine de l’élu.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/177059/original/file-20170706-14235-u3je70.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/177059/original/file-20170706-14235-u3je70.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=769&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/177059/original/file-20170706-14235-u3je70.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=769&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/177059/original/file-20170706-14235-u3je70.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=769&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/177059/original/file-20170706-14235-u3je70.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=967&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/177059/original/file-20170706-14235-u3je70.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=967&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/177059/original/file-20170706-14235-u3je70.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=967&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jérôme Cahuzac, le ministre du président Hollande par lequel le scandale est arrivé.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Cyclotron/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Le diable, dit l’adage, se cache dans les détails. Ce qui est sûr, c’est que les entorses au projet initial, même prétendument « accessoires » ou « techniques », seront révélatrices. Elles constitueront un marqueur de la volonté de l’exécutif. Ce sera évident pour l’encadrement des activités de conseil des parlementaires mais aussi pour le renforcement des peines en cas de crimes ou de délits <em>« portant atteinte à la probité »</em>. Ce sera tout également vrai pour le contrôle des prêts consentis par des personnes physiques ou pour l’interdiction faite aux ministres d’exercer des fonctions à la tête d’exécutifs locaux.</p>
<p>Mettre fin à la crise de confiance des citoyens envers leurs représentants : c’est l’objectif poursuivi par cette série de mesures. Un objectif qui s’appuie sur une idée ancienne. La république doit contraindre ses représentants à se conformer à ce qu’il faut bien appeler des « vertus civiques ». À placer les devoirs constitutionnels au-dessus des intérêts personnels. Or, parvenir à cette fin, c’est dissuader chacun d’eux de recourir à la faveur et à la brigue. Une mise en garde qui s’entend, au moins depuis le XIX<sup>e</sup> siècle, contre deux figures par excellence de la corruption : le service rémunéré qui nécessairement rend servile ; le sentiment d’impunité qui éteint toute préoccupation pour le bien commun.</p>
<h2>Délits et délices du métier politique</h2>
<p>Il faut le rappeler : la France, par son histoire juridique et politique, n’applique pas une conception utilitariste et libérale de « l’intérêt commun ». Elle s’attache à une conception qu’on pourrait qualifier de rousseauiste, celle de « l’intérêt général ». Ici, la poursuite du bien public ne passe pas par la conjonction des intérêts particuliers mais par un schéma volontariste qualifié de républicain : l’effacement de l’intérêt personnel devant la loi. D’où la légitimité de l’État à réguler les activités économiques et sociales dans la poursuite de cet idéal. Aucune main invisible, ni harmonie naturelle pour en assurer l’emprise. Y supplée une intervention publique censée <a href="https://www.academia.edu/5505595/_Campagne_%C3%A9lectorale_financement_in_Yves_Deloye_dir._Dictionnaire_des_%C3%A9lections_europ%C3%A9ennes_Paris_Economica_2005">dépasser l’arithmétique des passions et des calculs</a>.</p>
<p>Reste que la fabrique de cette intervention publique est pleine de chausse-trappes et de faux semblants. C’est tout un système de financement qu’il s’agit ici de codifier. Parler de psychologie ou de moralité individuelle, c’est se tromper de diagnostic. Ce qui se joue dans l’usage politique des ressources financières tient à bien autre chose.</p>
<p>Le modèle français de financement se distingue nettement de celui des États-Unis ou d’Allemagne. Il n’est pas centré sur des candidats-entrepreneurs comme celui qui prévaut outre-Atlantique. Et il se différencie du modèle rhénan qui combine contrôle parlementaire, délégation de compétences et co-gestion partisane des ressources. Ne l’oublions pas : c’est en République fédérale d’Allemagne que fut pour la première organisé un financement public des partis, en 1959.</p>
<h2>Les slogans ne suffiront pas</h2>
<p>En France, le schéma de financement n’est ni celui – libéral – de l’autofinancement privé (avec son absence de plafond de dépenses et sa publicité en prime-time), ni celui social-démocrate de contributions d’élus et d’adhérents. C’est un modèle étatisé bénéficiant d’abord aux grands partis mais veillant à desserrer l’étau des inégalités individuelles d’accès aux carrières électives. D’où un système de subventions publiques voué à limiter les ressources mobilisées par d’autres biais comme, hier, les bureaux d’études ou, de nos jours, les moyens des collectivités locales. Plafond de dépenses, remboursement forfaitaire des frais de campagne, interdiction des dons des personnes morales : si la réglementation reste encore embryonnaire, elle suffit à caractériser la politique électorale de la V<sup>e</sup> République.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/177063/original/file-20170706-26492-1pr1czl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/177063/original/file-20170706-26492-1pr1czl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=886&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/177063/original/file-20170706-26492-1pr1czl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=886&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/177063/original/file-20170706-26492-1pr1czl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=886&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/177063/original/file-20170706-26492-1pr1czl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1114&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/177063/original/file-20170706-26492-1pr1czl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1114&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/177063/original/file-20170706-26492-1pr1czl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1114&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jean‑François Copé, l’ancien patron de l’UMP, emporté dans l’affaire Bygmalion.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Festival_automobile_international_2015_-_Photocall_-_026_(cropped_2).jpg">Thesupermat/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Aux États-Unis, on a clairement affaire à un <a href="https://www.academia.edu/5509724/Deep_pockets._Sur_le_recrutement_ploutocratique_du_personnel_politique_aux_%C3%89tats-Unis">schéma ploutocratique</a> basé sur d’importantes donations privées et une compétition intensément monétarisée. En France est privilégiée une voie partitocratique basée sur un contrôle administratif qui reste éclaté et de peu de moyens. Après d’autres, l’affaire Bygmalion à l’UMP en a montré les limites. C’est à réformer ce schéma, c’est-à-dire ces circuits de financement, que devrait s’employer le pouvoir exécutif. Pour que ces fonds et ces règles dessinent demain, selon l’expression du sociologue Max Weber, « une direction matérielle des activités partisanes » plus démocratique.</p>
<p>Depuis la législation du 11 mars 1988 sur la « transparence du financement de la vie politique », le <a href="http://www.lemonde.fr/politique/article/2016/09/06/le-financement-des-partis-politiques-depuis-1988_4993472_823448.html">cap en est fixé</a>. Petit à petit, la réglementation s’étoffe. Mieux : elle s’intègre aux pratiques même si, à défaut d’une réforme d’ensemble, celle-ci se voit infléchie par l’habileté tactique des protagonistes.</p>
<p>Une leçon, en tout cas, se dégage de ces trente dernières années : la « moralisation » ou la « confiance » ne peut servir simplement de slogan. La défiance à l’égard de la politique instituée ne se résorbera que par des résolutions tenaces et avisées. C’est, en matière de renouveau démocratique, le défi qui attend l’exécutif.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/80507/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olivier Ihl ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La « moralisation » ou la « confiance » ne peut servir simplement de slogan. La défiance à l’égard de la politique instituée ne se résorbera que par des résolutions tenaces et avisées.Olivier Ihl, Professeur de sociologie historique, Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/747682017-03-23T21:07:07Z2017-03-23T21:07:07ZPour un assouplissement de la transparence de la vie politique !<p>À rebours d’une opinion dominante, la transparence dans le droit de la vie politique, notamment électoral, devrait être assouplie.</p>
<p>Il faut toutefois souligner que la France a longtemps été une démocratie attardée sur ce plan, instaurant en 1988 seulement un dispositif législatif de transparence de la vie politique. Pour la plupart, les grandes démocraties ont mis en place les premières lois de ce type dans les années 1960-70 (Suède en 1966, États-Unis en 1972 et Italie en 1974)… et même bien avant pour le <a href="https://www.cairn.info/revue-pouvoirs-2001-4-page-185.htm">Royaume-Uni (1883)</a>.</p>
<h2>Un contrôle très efficace</h2>
<p>Depuis 1988, les <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000321646">dispositifs de transparence</a> dans le financement de la vie politique n’ont cessé de se renforcer dans notre pays au point d’atteindre un pic de rigueur.</p>
<p>On sait à cet égard que les dons des personnes morales sont interdits, les dons des personnes physiques sont plafonnés ; le plafond des dépenses électorales est en principe réévaluable sans jamais l’être en pratique ; le niveau de remboursement des dépenses électorales a également été diminué de 50 % à 47,5 % du plafond.</p>
<p>De même, la protection de la vie privée – à laquelle les politiques ont aussi droit – a été aménagée par l’obligation faite aux parlementaires de déposer une <a href="http://www.hatvp.fr/presse/pour-la-premiere-fois-la-haute-autorite-rend-publiques-les-declarations-de-patrimoine-des-candidats-a-lelection-presidentielle/">déclaration de patrimoine</a> auprès de la <a href="http://www.hatvp.fr/">Haute Autorité pour la transparence de la vie publique</a> (HATVP), cette dernière devant être consultable en préfecture par tout électeur. En outre, la plupart des élus doivent aussi déposer une déclaration d’intérêt sur le site de cette même Haute Autorité.</p>
<p>Si les Français ont l’impression que les affaires mettant en cause des personnalités politiques tendent à se multiplier, ce n’est pas par manque de cadres, mais précisément parce que les systèmes de contrôle fonctionnent.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/plaidoyer-pour-plus-dexemplarite-59401">L’affaire « Cahuzac »</a> en est l’illustration typique : l’intéressé a perçu de l’argent qu’il n’a pas déclaré et déposé sur des comptes à l’étranger dans le cadre d’une activité purement privée de médecin. C’est bien parce qu’il a exercé des activités politiques que la fraude a pu être révélée.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"844591912216657921"}"></div></p>
<h2>Ne pas prêter qu’aux riches</h2>
<p>Sur certains points toutefois, le droit des campagnes électorales devrait être moins strict.</p>
<p>Par exemple, un principe appliqué avec de plus en plus de rigueur veut que l’on sépare strictement les activités électorales des activités officielles d’élus ou de titulaires de fonction. En ce sens, un directeur de cabinet ne saurait participer à la campagne de son élu ou de son ministre. Pour satisfaire cette logique dans sa pureté, si ce directeur de cabinet compte travailler pour son patron, il est contraint soit de démissionner, soit de prendre des congés… pour travailler ! Il serait moins artificiel d’admettre que ce collaborateur puisse effectivement agir pour la campagne électorale quitte à imputer une part de son salaire sur le compte de campagne.</p>
<p>On doit admettre de même que des fonds sont nécessaires pour faire campagne. Or limiter les sources extérieures de financement aux candidats conduit à ce que leurs apports personnels financent la campagne, en pratique à hauteur de 70 %.</p>
<p>Veut-on ainsi réserver l’accès du scrutin à des chefs d’entreprise disposant d’une importante assise financière, à l’image de Silvio Berlusconi ou <a href="https://theconversation.com/famille-et-politique-donald-trump-est-il-vraiment-le-premier-president-africain-des-etats-unis-71231">Donald Trump</a> ?</p>
<p>Le montant des dons des personnes physiques à un candidat, aujourd’hui fixé à un niveau relativement bas (4 600 euros), pourrait ainsi être relevé au niveau autorisé pour les dons aux partis politiques (7 500 euros). Le tabou ultime en France des dons des personnes morales pourrait être également levé en les autorisant sous conditions : par exemple, qu’ils soient publiés ce qui permettrait de vérifier si, une fois élu, le candidat privilégie à l’entreprise donatrice.</p>
<p>Reconnaissons toutefois qu’un mouvement d’assouplissement du droit des campagnes électorales s’est déjà esquissé, à notre sens de manière opportune. <a href="http://www.vie-publique.fr/actualite/panorama/texte-vote/loi-du-14-avril-2011-portant-simplification-dispositions-du-code-electoral-relative-transparence-financiere-vie-politique.html">Les lois du 14 avril 2011</a> ont par exemple admis la modulation du remboursement public des dépenses en fonction de la gravité des irrégularités et pris en compte la bonne foi du candidat pour que ne soit pas prononcée par le juge son inéligibilité automatique.</p>
<p>Dans le même sens, il est bienvenu que la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/eli/loi/2016/4/25/INTX1527491L/jo/texte">loi du 25 avril 2016</a> ait réduit, excepté pour l’élection présidentielle, d’un an à six mois le délai pour tenir un compte de campagne dans la mesure où une campagne dure en pratique quelques mois, voire quelques semaines.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"844108904619524096"}"></div></p>
<h2>La menace du découragement</h2>
<p>Si le dispositif législatif est suffisant, un renforcement pourrait en revanche s’opérer au niveau des moyens de contrôle. Les moyens humains et financiers des autorités administratives indépendantes que sont la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et la <a href="http://www.cnccfp.fr/presse/kit/cnccfp_presentation_2017.pdf">Commission nationale des comptes de campagne et des financements de la vie politique</a> (CNCCFP) ne sont ainsi pas exagérément élevés (30 agents et un peu plus de 4 million d’euros pour la HATVP, 34 agents et 5 millions d’euros de budget pour la CNCCFP).</p>
<p>En définitive, face à l’<a href="https://theconversation.com/fr/search?utf8=%E2%9C%93&q=moralisation">exigence légitime</a> de moralisation de la vie politique de nos concitoyens, il convient de prendre garde à ne pas tomber dans une forme de surenchère visant à renforcer, sous le coup de l’émotion et au gré de la révélation de scandales politico-financiers, un arsenal législatif déjà bien corseté.</p>
<p>L’adoption récente par le Parlement d’une mesure visant à imposer un casier judiciaire vierge pour tout candidat à une élection est de notre point de vue démagogique. On ne voit pas pourquoi une prescription ou un droit à l’oubli pour un criminel ayant purgé sa peine existerait et non pour un candidat à une élection.</p>
<p>Pour une affaire Balkany ou Cahuzac – sans évoquer les récentes affaires <a href="https://theconversation.com/penelopegate-la-fin-du-on-a-toujours-fait-comme-ca-72307">Fillon</a> (pour l’heure non encore « purgée ») et <a href="http://www.liberation.fr/france/2017/03/21/bruno-le-roux-24-cdd-et-une-demission_1557435">Le Roux</a> –, l’immense majorité des politiques sont qu’on le veuille ou non des personnes engagées et honnêtes. Ceux-ci sont là pour faire avant tout de la politique et non du droit ou de la comptabilité. Veillons ainsi à ne pas décourager les femmes et les hommes politiques !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/74768/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre Esplugas-Labatut est adjoint au maire (LR) de Toulouse.</span></em></p>Si les Français ont l’impression que les affaires politico-judiciaires se multiplient, c’est justement parce que les systèmes de contrôle fonctionnent.Pierre Esplugas-Labatut, Professeur de Droit public, Université Toulouse 1 CapitoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.