tag:theconversation.com,2011:/global/topics/open-labs-33713/articlesopen labs – The Conversation2020-06-22T17:13:31Ztag:theconversation.com,2011:article/1357072020-06-22T17:13:31Z2020-06-22T17:13:31ZPourquoi les chercheurs ouvrent-ils leurs recherches ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/342447/original/file-20200617-94036-1uc9hk1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=156%2C0%2C6791%2C3968&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">On peut vouloir ouvrir pour partager les savoirs, être plus transparents, faire progresser la recherche plus rapidement... </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-vector/freedom-concept-hand-drawn-man-flying-722190496">Drawlab19/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Aux origines de la science ouverte, il y a une convergence de la pensée des <a href="https://fr.scribd.com/doc/270306844/A-Note-on-Science-and-Democracy-by-Robert-K-Merton">intellectuels d’après-guerre</a> favorables à la libre diffusion des savoirs scientifiques vers la société, comme <a href="https://www.nsf.gov/od/lpa/nsf50/vbush1945.htm">rempart aux totalitarismes</a>. La science ouverte, ou <a href="https://journals.openedition.org/cdst/277"><em>open science</em></a> aujourd’hui, <a href="https://books.openedition.org/oep/1707">se présente</a> d’abord par des valeurs de partage, de collaboration, de libre circulation des savoirs, de reproductibilité, de libre débat d’idées, de transparence et d’intégrité scientifique.</p>
<p>Qualifiés par certains d’utopie, <a href="https://royalsociety.org/topics-policy/projects/science-public-enterprise/report/">ses principes deviennent possibles</a> grâce au développement sans précédent des outils de communication et infrastructures numériques de la recherche. Mais sa mise en œuvre par les chercheurs reste, sans mauvais jeu de mots, une question ouverte. Car entre l’engagement des chercheurs dans des pratiques ouvertes et la reconnaissance de ces dernières pour l’évolution de leur carrière par leurs instances scientifiques et institutionnelles, un chemin reste à parcourir.</p>
<h2>Une tension entre pratiques des chercheurs et critères d’évaluation</h2>
<p>La science ouverte est le lieu d’une tension entre les injonctions des décideurs de la recherche et les pratiques réelles des chercheurs. Elle est souvent présentée à partir d’une approche « top-down » : des managers recommandent, rédigent des politiques dédiées et développent des discours prescriptifs. La rhétorique ainsi construite permet de justifier les efforts consentis à la mise en place d’infrastructures numériques, nationales ou <a href="https://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=ES_041_0177">européennes</a>, et permet de comprendre les <a href="https://www.wiley.com/en-fr/Re+Thinking+Science%3A+Knowledge+and+the+Public+in+an+Age+of+Uncertainty-p-9780745657073">dynamiques contemporaines complexes entre science et société</a>.</p>
<p>Une approche « bottom-up » décrit les pratiques des chercheurs dans leur travail quotidien. Elle prend en compte les intentions et les représentations individuelles ou collectives des chercheurs pour la mise en œuvre concrète de ce qu’ils estiment, eux, être une « science ouverte ». Car lorsqu’ils commentent les politiques en faveur de l’<a href="https://muse.jhu.edu/article/556221">« openness »</a>, les chercheurs pointent souvent des injonctions contradictoires : libérer la circulation des publications et des données peut s’opposer frontalement au principe de l’<a href="https://theconversation.com/chercheurs-_vs_-managers-la-guerre-des-mots-138384">évaluation des travaux de recherche</a> fondée sur la production de résultats originaux, positifs, exclusifs et publiés dans des revues de prestige. L’injonction à l’ouverture achoppe d’autant plus avec les domaines disciplinaires où la recherche repose sur des partenariats industriels (par exemple la chimie) requérant la confidentialité, tant pour les protocoles de recherche, les résultats et <em>a fortiori</em> les <a href="https://www.collexpersee.eu/projet/datacc/">données produites</a>.</p>
<h2>Au fondement des pratiques des chercheurs : éthique et intégrité de la science</h2>
<p>En Chine, en Europe et aux États-Unis, les premiers arguments avancés par les chercheurs pour expliquer leurs pratiques « ouvertes » sont d’ordre éthique. D’abord comme un contre-pied aux dérives provoquées par l’<a href="https://theconversation.com/chercheurs-_vs_-managers-la-guerre-des-mots-138384">hypercompétition</a> de la science, la course aux financements et la loi du <a href="https://theconversation.com/recherche-publish-or-perish-vers-la-fin-dun-dogme-128191"><em>Publish or Perish</em></a>. Les chercheurs présentent donc leurs pratiques d’ouverture comme une contribution à une science intègre et éthique : <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/leap.1169">ceux qui publient en Libre Accès</a> le font pour permettre à toutes et à tous d’<a href="https://theconversation.com/acces-a-la-litterature-scientifique-des-inegalites-encore-inacceptables-134848">accéder aux résultats de la recherche scientifique</a>, y compris dans les pays du Sud. Ceux qui décrivent de manière détaillée et exhaustive leur protocole de recherche le font pour en permettre la reproductibilité et donc le partage de leur expertise. Ceux qui participent à des processus d’évaluation ouverte (<a href="https://theconversation.com/science-ouverte-en-temps-de-coronavirus-publication-en-temps-reel-136397"><em>open peer reviewing</em></a>), ou acceptent de rendre publics leurs rapports, adhèrent à une vision transparente de la discussion scientifique.</p>
<p>Indifférents ou ignorants des arguments politiques faisant valoir la <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/amsterdam-call-for-action-on-open-science/">stimulation et l’accélération de l’économie</a>, les praticiens de la science ouverte sont soucieux d’une science « propre », qui véhicule des valeurs auxquelles ils s’identifient (diversité, accessibilité, reproductibilité, réutilisation). Dans ces cas de figure, les chercheurs ne se disent pas militer pour une science ouverte, mais pour une science intègre et éthique.</p>
<h2>La manufacture de la science ouverte</h2>
<p>Les disciplines ne sont pas homogènes en termes de pratiques ouvertes. Il existe des disciplines où l’ouverture se pose naturellement, car inscrite dans les structures et normes sociales de la communauté, par exemple la physique des hautes énergies est pionnière dans les pratiques de partage de pré-publications et de données de la recherche. <em>A contrario</em>, des disciplines plus « conservatrices », comme la chimie, qui en raison des enjeux économiques de ses avancées, accueille moins favorablement les invitations d’ouverture. Or, la recherche est aujourd’hui menée dans des collectifs, souvent pluridisciplinaires. L’observation des pratiques dans ces collectifs montre sur quels arguments la discussion – parfois l’âpre négociation – se fait pour intégrer des possibilités d’ouverture. Car les chercheurs disent ne pas décider de monter un projet de « science ouverte », mais faire « de la science » en y incluant de l’ouverture, là où c’est possible, sans compromettre leurs chances de reconnaissance scientifique.</p>
<p>Le projet de recherche est ainsi le creuset, la « manufacture », dans lequel sont mises en œuvre des pratiques d’ouvertures, dont certaines sont rodées (déposer une pré-publication dans une <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Archive_ouverte">archive ouverte</a>) et d’autres sont plus expérimentales (mettre en place un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Plan_de_gestion_des_donn%C3%A9es">plan de gestion de données</a>, apprendre à paramétrer un <a href="https://edutechwiki.unige.ch/fr/Cahiers_de_Laboratoire_%C3%89lectroniques">carnet de laboratoire numérique</a>). Quelle que soit leur discipline, les chercheurs acquièrent leurs pratiques d’ouverture <a href="https://content.iospress.com/articles/information-services-and-use/isu190069">toujours en regard d’une expérience</a>, dans l’interaction avec le collectif, et dans la contrainte circonscrite au projet.</p>
<h2>Des sciences ouvertes, et non une seule</h2>
<p>L’ouverture ne s’avère <a href="https://journals.openedition.org/rfsic/5522">ni homogène ni pérenne</a> : certains favorisent l’ouverture dans <a href="https://jussieucall.org/">leurs modes</a> de communication scientifique (réseaux sociaux, archives ouvertes ou serveurs de pré-publications) ; d’autres se mobilisent autour des données (enrichissement par des métadonnées, partage sur des archives pour en permettre la réutilisation…), ou bien l’ouverture et de la mise à disposition des codes.</p>
<p>Selon le contexte de recherche, l’étape de leur carrière, le niveau de formation aux outils numériques, les chercheurs se spécialisent aussi dans leurs pratiques d’ouverture, comme ils se spécialisent dans un domaine scientifique. Ils <a href="https://www.talyarkoni.org/blog/2019/07/13/i-hate-open-science/">réfutent</a> donc souvent la dénomination <a href="https://content.iospress.com/articles/information-services-and-use/isu190069">estimée trop floue</a> d’« open scientists ».</p>
<p>L’exemple des données de la recherche est le plus illustratif : le chercheur peut opter pour des stratégies différentes pour « ouvrir » ses données selon le financement (ou son absence), l’objet de recherche, le collectif impliqué, l’avancement de sa carrière, le besoin de reconnaissance, le niveau de connaissance et de maîtrise des principes éthiques et techniques de l’ouverture des données. Et plus fondamentalement, selon la conviction du chercheur de la <a href="https://hdsr.mitpress.mit.edu/pub/jduhd7og/release/7">valeur de réutilisation de ses propres données</a>. Autant de paramètres qui entrent en compte dans la constitution de pratiques, qui se révéleront dans la forme et dans le temps.</p>
<h2>L’avenir de la science ouverte dépend de la reconnaissance des pratiques d’ouverture dans l’évaluation des carrières</h2>
<p>Même si des pratiques ouvertes se développent, le défi du déploiement de la science ouverte à large échelle relève encore du projet pour la plupart des domaines disciplinaires. Nos travaux nous apprennent que le chemin à parcourir ne dépend pas tant de la défense des valeurs de la science ouverte auxquelles les chercheurs adhèrent ou de la maîtrise des infrastructures numériques dans leur travail. Le chemin dépend surtout de la reconnaissance par les politiques d’évaluation de leurs <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/types-de-documents-productions-et-activites-valorisees-par-la-science-ouverte-et-eligibles-a-une-evaluation/">efforts pour l’ouverture</a> même s’il ne donne pas lieu à des résultats.</p>
<p>L’observatoire international des pratiques que nous avons mené a permis de <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01973467/document">pointer ce nœud gordien</a> de manière particulièrement prégnante <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/leap.1284">chez les jeunes chercheurs</a>. Alors que ces derniers adhèrent et partagent les valeurs de la science ouverte, alors qu’ils montrent une réelle maîtrise des infrastructures numériques associées et qu’ils en voient le potentiel, ils n’envisagent pas d’y souscrire tant que les critères d’évaluation ne changent pas. L’avenir réaliste de la science ouverte dépend donc de l’intégration des pratiques et principes d’<em>openness</em> par les instances d’évaluation officielles et institutionnelles de la recherche.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Cet article fait partie de la série « Les belles histoires de la science ouverte » publiée avec le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Pour en savoir plus, visitez le site <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/">Ouvrirlascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/135707/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Chérifa Boukacem-Zeghmouri ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les motivations des chercheurs pour ouvrir leurs recherches sont multiples, mais les jeunes s’interrogent sur la prise en compte de ces pratiques dans l’évaluation, en particulier à l’embauche.Chérifa Boukacem-Zeghmouri, Professeure des Universités, Université Claude Bernard Lyon 1Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1354652020-04-04T16:45:19Z2020-04-04T16:45:19ZComment le coronavirus a réveillé l’intelligence collective mondiale<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/324961/original/file-20200402-74900-45jt1r.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=3%2C19%2C1233%2C734&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Réseau des compétences des projets Covid-19 sur la plateforme JOGL.</span> <span class="attribution"><span class="source">Marc Santolini/JOGL</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>Partout dans le monde, <a href="https://www.nytimes.com/2020/03/13/science/coronavirus-social-networks-data.html">épidémiologistes</a>, praticiens, ingénieurs (et tant d’autres) exploitent sans relâche le flot de données sur l’épidémie pour <a href="https://www.epicx-lab.com/covid-19.html">modéliser</a> sa progression, prédire <a href="https://www.mobs-lab.org/2019ncov.html">l’impact des interventions</a> possibles ou <a href="https://app.jogl.io/project/130">développer des solutions</a> aux pénuries de matériel médical. </p>
<p>Ils génèrent des modèles et des codes ouverts et réutilisés par d’autres laboratoires.</p>
<p>Le monde de la recherche et de l’innovation semble s’être pris d’une frénésie de collaboration et de production de connaissances ouvertes tout aussi contagieuse que le coronavirus. </p>
<p>Serait-ce donc ça, la fameuse « intelligence collective » censée résoudre nos problèmes planétaires majeurs ?</p>
<h2>La science, un réseau bâti sur les épaules des géants</h2>
<p>En 1675, Newton écrivait déjà : « Si j’ai vu plus loin, c’est en me tenant sur les épaules des géants. » </p>
<p>Depuis, la reconnaissance de cet héritage intellectuel collectif est devenue standard dans la recherche scientifique. En science et ingénierie, aujourd’hui, 90 % des publications sont d’ailleurs <a href="https://science.sciencemag.org/content/316/5827/1036">écrites par des équipes</a>. </p>
<p>Ces trois dernières décennies, l’avènement d’internet puis des réseaux sociaux a participé à l’effacement des limitations traditionnelles de l’intelligence collective, des sociétés « des savants » exclusives aux revues à accès payant, en passant par l’opacité du système de revue par les pairs. </p>
<p>La recherche académique vit une facilitation technologique et une ouverture sans précédent permettant à une grande diversité d’acteurs d’interagir de manière immédiate et distribuée. On observe une croissance sans précédent des revues en accès ouvert et de sites d’archivage d’articles.</p>
<p>Hors du système académique, des communautés non institutionnelles voient le jour : <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hacker_(sous-culture)">hackers</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Biologie_participative">bio-hackers</a> ou encore <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_maker">makers</a> s’auto-organisent en ligne et participent à l’effort collectif de production de connaissance. C’est ce terreau fertile qui permet une réaction sans précédent à la crise de Covid-19.</p>
<h2>Le Covid-19 réveille l’intelligence collective</h2>
<p>Au départ de l’épidémie, on a pu voir la recherche « traditionnelle » s’accélérer et ouvrir considérablement ses moyens de production. Des journaux prestigieux, comme <a href="https://www.sciencemag.org/coronavirus-research-commentary-and-news">Science</a>, <a href="https://www.springernature.com/gp/researchers/campaigns/coronavirus">Nature</a>, ou encore <a href="https://www.thelancet.com/coronavirus">The Lancet</a>, qui font d’habitude payer pour l’accès à leurs articles, ont ouvert l’accès aux publications sur le coronavirus et le Covid-19. </p>
<p>Des données sur la progression de l’épidémie sont mises à jour quotidiennement – celles de l’Université John Hopkins par exemple sont le fruit d’un <a href="https://github.com/CSSEGISandData/Covid-19">travail ouvert et collaboratif</a> et ont déjà été réutilisées près de 9 000 fois sur la plate-forme de collaboration <a href="https://github.com/">Github</a> par des projets tiers. </p>
<p>Des résultats sont publiés immédiatement sur des serveurs de pré-publication en accès ouvert ou sur les <a href="https://www.epicx-lab.com/covid-19.html">sites des laboratoires</a> mêmes. Algorithmes et <a href="https://picorana.github.io/align_covid/index.html?fbclid=IwAR24Tj3Njeo0dZTJUoFKBOGI6MBIljMkq39WWxUnGKSRh8UczHjGA__-6Ho">visualisations interactives</a> sont en ligne sur GitHub ; vidéos éducatives et de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=gxAaO2rsdIs">vulgarisation</a> sur YouTube. </p>
<p>Les chiffres donnent le vertige, avec à ce jour plus de <a href="https://www.kaggle.com/allen-institute-for-ai/CORD-19-research-challenge">45,000 articles académiques</a> académiques publiés sur le sujet.</p>
<p>Plus récemment, des <a href="https://opencovid.care/category/citizen-science-project/">initiatives populaires</a> réunissant des acteurs variés ont émergé hors des cadres institutionnels, utilisant des plates-formes en ligne. Par exemple, une communauté de biologistes, d’ingénieurs et de développeurs a émergé sur la plate-forme de collaboration <a href="https://app.jogl.io/program/opencovid19">Just One Giant Lab</a> (JOGL) afin de développer des outils à bas coût et open-source contre le virus. Cette plate-forme, que nous avons conçue avec Léo Blondel (Harvard) et Thomas Landrain (La Paillasse, PILI) au cours de ces trois dernières années, a pour vocation d’être un institut de recherche virtuel, ouvert et distribué autour de la planète. </p>
<p>La plate-forme permet à des communautés de s’auto-organiser pour apporter des solutions innovantes à des problématiques urgentes et requérant des compétences fondamentalement interdisciplinaires ainsi que des connaissances « de terrain ». Elle agit comme clé de voûte afin de faciliter la coordination par la mise en relation entre besoins et ressources au sein de la communauté, l’animation autour de programmes de recherche, et l’organisation de challenges. </p>
<p>En particulier, l’utilisation d’algorithmes de recommandation permet de filtrer l’information pour que les contributeurs puissent suivre l’activité et les besoins de la communauté les plus pertinents, fluidifiant la collaboration et facilitant la mise en place d’une intelligence collective.</p>
<p>Lorsque le <a href="https://app.jogl.io/project/118">premier projet</a> lié au Covid-19, un test de diagnostic open source et à bas coût, y est né il y a quatre semaines, on a pu assister à une véritable ruée sur la plate-forme. Le nombre de contributions par minute n'a cessé d'augmenter : des centaines d’interactions, création de projets, échanges… Si bien que le serveur hébergeant la plate-forme ne tenait plus ! En seulement un mois, ce furent plus de 60 000 visiteurs venant de 183 pays, dont 3000 contributeurs actifs générant plus de 90 projets, allant de designs de masques de protection à des prototypes de ventilateurs à bas coût.</p>
<p>Cette communauté massive s’est rapidement organisée en sous-groupes de travail, mêlant des compétences et des univers variés : data scientists de grandes entreprises, chercheurs en anthropologie, ingénieurs et biologistes se côtoient ainsi dans cet univers virtuel. </p>
<p>La personne la plus active, coordinatrice émergente de la communauté s’avère même être… une lycéenne de 17 ans de Seattle ! Cette initiative est aujourd’hui un programme de recherche à part entière, <a href="https://app.jogl.io/program/opencovid19">OpenCOVID19</a>, avec 100 000 euros de financements de Axa Research Fund à redistribuer aux projets émergents selon un système de revue par la communauté, en partenariat avec l’AP-HP pour faciliter l’évaluation et la validation des designs destinés à un usage hospitalier, et plusieurs axes majeurs : diagnostique, prévention, traitement, ou encore analyse de données et modélisation.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=529&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=529&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=529&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=664&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=664&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/324962/original/file-20200402-74904-daifih.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=664&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Carte des compétences partagées par les participants à la plate-forme JOGL sur les projets Covid-19, et leurs interactions.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Marc Santolini, JOGL, CRI</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’auto-organisation de communautés a été l’apanage du monde open-source et l’origine de projets massifs tel que Linux. Elle devient aujourd’hui apparente dans la résolution de problèmes globaux et multi-disciplinaires, mettant la diversité des compétences au service de la complexité.</p>
<h2>L’intelligence collective, c’est quoi ?</h2>
<p>Si nous pouvons mesurer une intelligence individuelle via la performance à diverses tâches et ainsi dériver un « quotient intellectuel » individuel (le fameux QI), alors pourquoi ne pas mesurer l’intelligence d’un groupe d’individus par leur performance à des tâches collectives ?</p>
<p>Des chercheurs <a href="https://science.sciencemag.org/content/330/6004/686">ont</a> <a href="https://science.sciencemag.org/content/330/6004/686">démontré</a> en 2010 l’existence d’un « facteur c » d’intelligence collective prédictif de la performance de groupe aux diverses tâches. </p>
<p>Pour qu’un groupe maximise son intelligence collective, nul besoin d’y regrouper des gens avec un fort QI. Ce qui compte, c’est la sensibilité sociale des membres, c’est-à-dire leur <em>capacité à interagir efficacement</em>, leur capacité à prendre la parole de manière équitable lors des discussions, ou encore la diversité des membres, notamment la proportion de femmes au sein du groupe. </p>
<p>Autrement dit, un groupe intelligent n’est pas un groupe formé d’individus intelligents, mais d’individus variés qui interagissent convenablement. Et les auteurs de conclure : « il semblerait plus facile d’augmenter l’intelligence d’un groupe que celle d’un individu. Pourrait-on augmenter l’intelligence collective, par exemple, grâce à de meilleurs outils de collaboration en ligne ? »</p>
<p>C’était l’esprit à l’instauration de la plate-forme JOGL : on peut mesurer en temps réel l’évolution de la communauté et l’avancée des projets, ce qui permet de mettre en place une meilleure coordination des différents programmes, dont bien sûr les programmes Covid-19. </p>
<p>Les données offrent aussi un étalon quantitatif de « bonnes pratiques » facilitant l’intelligence collective, permettant l’avancée de recherches fondamentales sur les collaborations que nous menons au sein de <a href="https://research.cri-paris.org/teampage?id=5cde7f999a474e4a9f93b281">mon équipe de recherche</a> au Centre de Recherches Interdisciplinaires de Paris. En effet, en mettant en action les outils de la science des réseaux, nous étudions <a href="https://science.sciencemag.org/content/359/6379/eaao0185">comment ces dynamiques collaboratives</a> sous-tendent l’avancée des connaissances.</p>
<h2>Réveil éphémère ou bouleversement à long terme ?</h2>
<p>Comment faire en sorte que ces révolutions se pérennisent ? S’il est un enseignement que nous apprennent les « hackathons », ces événements mettant en œuvre les principes de l’intelligence collective pour générer des projets sur un ou deux jours, c’est qu’il est difficile de stabiliser l’activité de ces projets dans le temps, après l’effervescence de l’événement. </p>
<p>Même s’il est tôt pour tirer des conclusions à ce sujet dans le cas d’OpenCOVID19, plusieurs pistes existent pour penser le futur de telles collaborations massives.</p>
<p>Un <a href="https://press.princeton.edu/books/paperback/9780691160191/reinventing-discovery">point commun</a> des communautés qui deviennent rapidement immenses est qu’on y est rapidement perdus ! Qui contacter pour résoudre tel problème ou répondre à telle question ? La solution : une « architecture de l’attention » permettant de guider les individus là où leur talent serait le plus apte à la progression du projet. Autrement dit, c’est dans les <em>systèmes de recommandation</em>, ces mêmes algorithmes qui ont fait le succès des réseaux sociaux tels que Twitter, Instagram ou Facebook, que réside le graal de ces communautés.</p>
<p>Une telle approche, basée sur les fondamentaux de la <a href="https://hci.stanford.edu/publications/2017/flashorgs/flash-orgs-chi-2017.pdf">science des équipes</a> et la <a href="https://arxiv.org/abs/2001.01296">science des réseaux</a>, permet d’utiliser les traces digitales laissées par la communauté (interactions, discussions, projets réalisés, compétences déclarées) pour présenter dans un flux d’activité quelle serait la meilleure personne à contacter, le projet le plus pertinent à aider, ou encore la tâche la plus logique à produire par la suite. </p>
<p>Au cœur de l’architecture de JOGL, de tels algorithmes permettent ainsi de favoriser <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/S%C3%A9rendipit%C3%A9">ces rencontres hasardeuses qui s’avèrent être de manière inattendue bénéfiques à un projet</a>.</p>
<p>Le développement de tels algorithmes de recommandation au profit de collaborations massives nécessite l’apport de disciplines variés, allant de l’informatique aux sciences sociales, en passant par les mathématiques ou l’éthique. Finalement, le futur de l’intelligence collective se retourne sur lui-même : car c’est bien l’intelligence collective qui devra se mettre au service de son propre devenir.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Cet article fait partie de la série « Les belles histoires de la science ouverte » publiée avec le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Pour en savoir plus, visitez le site <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/">Ouvrirlascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/135465/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Santolini est co-fondateur et Directeur Recherche de Just One Giant Lab.</span></em></p>Individuellement, nous sommes tous démunis devant la crise du coronavirus. Un boom collaboratif mondial est en train de changer la manière dont la science se fait.Marc Santolini, Research Fellow, UMR1284 INSERM et Université de Paris au CRI, chercheur invité au Center for Complex Network Research (Northeastern University), et co-fondateur de Just One Giant Lab, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1302242020-02-17T18:14:01Z2020-02-17T18:14:01ZLes stratégies d’écosystème des grandes entreprises en Asie<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/315324/original/file-20200213-10995-1d2gzh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C7616%2C3970&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les grandes entreprises mettent en place des stratégies d’écosystèmes d’innovation pour préserver leur leadership économique et technologique.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/large-group-businessperson-business-technology-concept-1055216327">Metamorworks / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Comment une entreprise peut-elle générer des innovations radicales ? Pour répondre à cet enjeu, les grandes entreprises deviennent les chefs d’orchestre de nouveaux écosystèmes capables de soutenir leur recherche de ruptures.</p>
<p>Elles ne cherchent pas seulement à travailler avec des start-up mais tentent aussi de travailler avec tous les talents qui peuvent contribuer à atteindre cet objectif. Elles s’emploient à impulser de nouveaux cadres collaboratifs. Les nouveaux écosystèmes sont plus diversifiés. Ils couvrent l’ensemble de la chaîne de valeur tant pour explorer les idées nouvelles que pour en exploiter les conséquences.</p>
<p>L’Asie représente un terrain de jeu particulier car de grandes entreprises y ont créé de nouveaux écosystèmes sur les <a href="https://www.bpifrance.fr/A-la-une/Actualites/DansNotreJargon-la-Deep-Tech-40252"><em>deep techs</em></a> : big data, IA, etc. Une compétition larvée s’exerce entre firmes occidentales et asiatiques pour construire leurs sphères d’influence. Une <a href="http://innovasia.newpic.fr">étude</a> réalisée par la <a href="http://www.newpic.fr/02home.html">chaire newPIC</a> de <a href="https://www.psbedu.paris/">PSB</a> et cofinancée par <a href="https://www.bpifrance-lelab.fr/">BPIfrance le Lab</a> et <a href="http://www.innovationfcty.fr/">Innovation Factory</a> a analysé ces stratégies.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1215548195641659393"}"></div></p>
<h2>Faire émerger un écosystème créatif</h2>
<p>En Asie, les grandes entreprises ont deux objectifs quand elles mobilisent leur <a href="https://www.metiseurope.eu/2017/01/15/le-rle-des-open-labs-dans-les-processus-cratifs-des-organisations/"><em>open lab</em></a> : accélérer les projets de start-up et créer un réseau d’acteurs prêts à développer des projets novateurs en relation avec les <em>business units</em> de l’entreprise.</p>
<p>Des villes comme Singapour illustrent bien ces nouvelles dynamiques : Unilever y a créé la <a href="https://www.theunileverfoundry.com/">Foundry</a> ; la banque DBS y a installé <a href="https://www.dbs.com/innovation/dbs-innovates/spaces-dax.html">DBS Dax</a> ; et Thales y anime un <a href="https://www.aviationtoday.com/2014/10/14/thales-opens-innovation-hub-in-singapore-to-design-asia-centric-products/"><em>innovation hub</em></a> spécialisé.</p>
<p>Les open labs ont vocation à faire émerger de nouveaux modes de collaboration autour de thématiques prioritaires pour l’entreprise. La <a href="https://www.theunileverfoundry.com">Foundry d’Unilever</a> permet d’illustrer ces éléments. Elle se situe au cœur d’un nouvel écosystème sur le « big data » et l’intelligence artificielle. Elle repense la logistique, le commerce électronique et les technologies de l’agriculture en lien avec les problèmes alimentaires de demain.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/MpZGN3vu7wU?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« What is the Unilever Foundry ? » (The Unilever Foundry, juillet 2015).</span></figcaption>
</figure>
<p>Sur ces thématiques, l’open lab permet de mobiliser une variété d’acteurs dans la durée. Les employés de l’entreprise pourront interagir avec des acteurs qu’ils ne côtoient pas usuellement dans leurs activités opérationnelles : étudiants, associations, start-up de la tech, investisseurs, représentants du gouvernement (local ou national), sous-traitants et, aussi, d’autres grandes entreprises opérant dans des secteurs qui partagent des préoccupations similaires.</p>
<p>Comment animer ces écosystèmes ? Les open labs proposent une variété d’événements qui se déroulent dans leurs espaces physiques, facilitant de nouvelles rencontres. L’agencement et la localisation du lieu physique jouent un rôle majeur : convivial et facile d’accès pour tirer parti de la proximité physique, il doit ouvrir la porte à des rencontres improbables et permettre de développer des liens forts. Le foisonnement et la concentration des open labs génèrent une dynamique d’innovation qui, au final, transforme la ville de Singapour en un point focal d’attractivité et d’innovation sur certaines thématiques.</p>
<p>Certains open labs d’entreprises vont même jusqu’à proposer des services de coworking : ils monétisent leurs espaces sous forme de « flex office » ouvert à une variété d’acteurs qui peuvent y développer librement leurs projets.</p>
<p>La démarche va même jusqu’à les y laisser travailler avec leurs propres partenaires à la condition que ceux-ci ne soient pas des concurrents directs. Pour les personnes qui utilisent ce service, l’open lab d’entreprise est finalement un moyen d’accélérer des projets en participant à une communauté qui partage des préoccupations communes.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/gtD3OlfuEkk?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« Le rôle essentiel des plates-formes d’innovation en régions » avec Valérie Mérindol (Xerfi Canal, avril 2018).</span></figcaption>
</figure>
<p>Ceux qui acceptent de participer aux activités de l’open lab sont conscients que les éventuelles opportunités d’exploitation de leur projet auront toutes les chances de s’inscrire dans le cadre de la stratégie globale de l’entreprise qui héberge l’open lab si le projet devient un succès.</p>
<p>Un entrepreneur installé à la Foundry d’Unilever précise :</p>
<blockquote>
<p>« Ce n’est pas une obligation. […] On peut bien entendu quitter le lieu librement si on se rend compte que le projet d’exploration ne fait plus sens avec la stratégie d’entreprise. […] Mais quand on participe à ce type d’open lab, on a tous en tête qu’une des options se trouve précisément dans le partenariat avec le grand groupe. »</p>
</blockquote>
<h2>La structuration d’écosystèmes territoriaux</h2>
<p>Certaines entreprises vont parfois beaucoup plus loin et structurent l’ensemble d’un écosystème en relation (directe ou implicite) avec des acteurs institutionnels régionaux. Cela conduit à gérer l’implantation physique sous la forme d’un « tech park ».</p>
<p>C’est le cas d’Alibaba à Hangzhou, capitale de la province du Zhejiang en Chine à 180 km de Shanghai. Cette <a href="https://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/blablacar-est-une-licorne-une-quoi_1716931.html">licorne</a> structure un nouvel écosystème dédié à l’intelligence artificielle et au « big data » en lien, au départ, avec les <a href="https://solutions.lesechos.fr/com-marketing/c/marketing-faire-difference-entre-b2b-b2c-6782/">solutions de distribution</a> en B2B, B2C et B2B2C, et qui s’élargit sur les <em>smart cities</em>. L’Innovation Center d’Alibaba anime un réseau d’échanges créatifs avec des espaces de coworking et d’autres open labs qui s’implantent dans les districts de la ville.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/315300/original/file-20200213-11040-gs9tsz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/315300/original/file-20200213-11040-gs9tsz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/315300/original/file-20200213-11040-gs9tsz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/315300/original/file-20200213-11040-gs9tsz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/315300/original/file-20200213-11040-gs9tsz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/315300/original/file-20200213-11040-gs9tsz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/315300/original/file-20200213-11040-gs9tsz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Jack Ma, PDG « emblématique » de l’entreprise de e-commerce Alibaba.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/bangkok-thailandapr7jack-ma-founder-giant-alibabameets-1077118370">Feelphoto/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les pouvoirs publics locaux et régionaux accompagnent cette évolution par un plan de développement économique qui aménage le territoire, fait sortir de terre des quartiers ultramodernes, des bâtiments dédiés aux entreprises ou aux personnes, et tous les services attendus par les porteurs de projets et les start-up. La ville de Hangzhou a été totalement transformée en l’espace de dix ans.</p>
<p>La démarche repose aussi sur un concours mondial de start-up organisé par Alibaba, dont la finale se déroule à Hangzhou avec tous les acteurs privés, publics et les financeurs de leur réseau. Les dotations du concours sont le plus souvent limitées à des moyens de s’intégrer dans l’écosystème local, en plus de l’accès à des services informatiques (dont le cloud d’Alibaba) et à des possibilités de tester les idées ou les prototypes sur les usagers locaux, en utilisant les données d’Alibaba ou en travaillant avec les acteurs de leur chaîne d’approvisionnement.</p>
<p>Alibaba anime aussi un campus de formation (en particulier à l’entrepreneuriat) et facilite la mise en relation des start-up avec un réseau d’investisseurs privés, sans jamais investir directement à ce stade. La force de cet écosystème repose sur le rôle d’Alibaba en tant qu’acteur local. Les start-up sont incitées à s’installer à proximité de son <em>innovation center</em> pour intégrer leurs produits ou services à l’offre d’Alibaba ou pour entrer dans sa chaîne d’approvisionnement. L’enjeu est toujours de renforcer l’écosystème d’innovation de la ville d’Hangzhou en y ramenant les talents et les compétences critiques.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/314969/original/file-20200212-61929-xiznsm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/314969/original/file-20200212-61929-xiznsm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/314969/original/file-20200212-61929-xiznsm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/314969/original/file-20200212-61929-xiznsm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/314969/original/file-20200212-61929-xiznsm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/314969/original/file-20200212-61929-xiznsm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/314969/original/file-20200212-61929-xiznsm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Finale du concours mondial de start-up organisé par Alibaba à Hangzhou.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.alibabacloud.com/fr/startup/create-2018#guid-1257215">Alibaba</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le concours de projets et de start-up organisé au niveau mondial conduit à installer une dynamique « glocale », globale et locale, qui renforce cet écosystème sur tout les sujets « deep techs » (intelligence artificielle, biotechs, etc) et prépare la concurrence avec les autres firmes comme Amazon ou Google.</p>
<p>Le concours <a href="https://www.alibabacloud.com/fr/start-up">« Create@Alibaba Cloud Startup Contest »</a> repose sur des finales régionales organisées un peu partout dans le monde (Paris et Berlin sont parmi les plus anciennes villes organisatrices). Le fonds d’investissement géré par un des seize associés fondateurs d’Alibaba illustre également cette stratégie « locale ».</p>
<p>Ces exemples ne sont pas uniques. Les grandes entreprises ont bien compris qu’un écosystème peut être autant une <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1002/smj.821">source de contraintes que d’opportunités pour innover</a>. Elles travaillent pour en faire une force. Les grandes entreprises internationales mettent en place des stratégies d’écosystèmes d’innovation pour élaborer les capacités clés capables de préserver leur leadership économique et technologique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/130224/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Mérindol a reçu des financements pour réaliser ce projet de recherche de Bpifrance le LAB et Innovation Factory.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>David W. Versailles a reçu des financements de Bpifrance le Lab et Innovation Factory pour réaliser ce projet</span></em></p>Les entreprises n’innovent pas seules, en particulier dans un environnement où les opportunités de marché s’accélèrent. Pour faire face, elles renouvellent les écosystèmes dans lesquels elles opèrent.Valérie Mérindol, Enseignant chercheur en management de l'innovation et de la créativité, PSB Paris School of BusinessDavid W. Versailles, Chair professor, strategic management and management of innovation, PSB Paris School of BusinessLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1290832020-01-09T20:44:09Z2020-01-09T20:44:09ZCollaboration start-up–grands groupes : les leçons des « open labs » d’entreprises en Asie<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/309035/original/file-20200108-107255-b018c5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C12%2C1196%2C675&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La Société générale a installé un « open lab » baptisé Catalyst en Inde, en 2018.</span> <span class="attribution"><span class="source">Société générale / D.R.</span></span></figcaption></figure><p>Dans un monde globalisé où leur leadership peut être à tout moment remis en cause, les grandes entreprises développent de nouvelles stratégies d’innovation ouverte. Elles doivent impérativement se trouver « là où cela se passe », c’est-à-dire au cœur des écosystèmes de start-up les plus dynamiques. Elles visent non seulement à identifier les idées nouvelles mais aussi à rester les architectes de leur transformation en préservant leur capacité à créer de la valeur.</p>
<p>Le continent asiatique représente un enjeu majeur à la fois en termes d’innovation et de débouché. La création de start-up en <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/1097198X.2013.10845635">Inde, en Malaisie, en Chine ou à Singapour</a> démontre aujourd’hui une dynamique incontestable. La Chine permet d’accélérer le tempo du processus d’innovation pour obtenir un « time-to-market » inégalé dans le reste du monde pour les entreprises du digital ou de certains domaines des <em>Deep Techs</em> (entreprises qui innovent en repoussant les frontières technologiques, <a href="https://start.lesechos.fr/innovations-start-up/tech-futur/comprendre-la-deeptech-en-4-questions-14764.php">selon la définition donnée par BPIFrance</a>).</p>
<p>Quel que soit le secteur d’activités, les grandes entreprises occidentales cherchent à capter les dynamiques locales en Asie pour rester dans la course à l’innovation. Pour les start-up, l’enjeu est souvent de gérer le changement d’échelle de leurs activités en accédant à un marché mondial grâce à la collaboration avec une grande entreprise.</p>
<h2>Gagner en agilité</h2>
<p>L’étude que nous avons menée sur la <a href="http://innovasia.newpic.fr">comparaison France-Asie sur les plates-formes d’innovation et open labs</a>, réalisée par la chaire newPIC de <a href="https://www.psbedu.paris/en">PSB</a> et cofinancée par <a href="http://www.innovationfcty.fr/">Innovation Factory</a> et <a href="https://www.bpifrance-lelab.fr/">Bpifrance Le Lab</a> a permis de mieux comprendre les stratégies mises en place par les grandes entreprises.</p>
<p>Les grandes entreprises occidentales mettent en place des <a href="http://www.newpic.fr/02group2015openlabsdownload.html">« open labs »</a> dans les principaux pays asiatiques : ces dispositifs permettent de développer de nouvelles approches de l’innovation plus agiles et souvent centrées sur l’usager. Animés par des petites équipes au sein des entreprises, ces open labs sont implantés au cœur des écosystèmes asiatiques les plus dynamiques. Ils fonctionnent comme des incubateurs ou des accélérateurs.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/309041/original/file-20200108-107224-1tzfqtk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/309041/original/file-20200108-107224-1tzfqtk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/309041/original/file-20200108-107224-1tzfqtk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/309041/original/file-20200108-107224-1tzfqtk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/309041/original/file-20200108-107224-1tzfqtk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=246&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/309041/original/file-20200108-107224-1tzfqtk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=309&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/309041/original/file-20200108-107224-1tzfqtk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=309&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/309041/original/file-20200108-107224-1tzfqtk.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=309&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Carte des plates-formes d’innovation et open labs étudiés en Asie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.newpic.fr/newpicopendoc/rapport-plateformes_innovation-2019-asie-full-size-1p.pdf">Auteurs.</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les illustrations sont nombreuses. À Bangalore en Inde, la Société Générale a installé <a href="https://www.societegenerale.com/en/digital-and-innovation/open-innovation/global-innovation-network/catalyst">Catalyst</a> en 2018 et SAP son <a href="https://news.sap.com/2018/07/sap-start-up-studio-nurturing-indian-start-up-ecosystem/">Startup Studio</a> en 2018. Chacun d’eux vise à capter les dynamiques entrepreneuriales dans le digital et a permis d’accélérer plus de 50 start-up au cours de ces 3 dernières années.</p>
<p>Les entreprises américaines ne sont pas en reste : Microsoft a installé son <a href="https://www.crunchbase.com/organization/microsoft-ventures-accelerator-beijing-2">Accelerator</a> à Pékin en 2013 puis à Shanghai en 2016. Le plus souvent, l’open lab ne développe pas d’activités de cocréation mais installe des ressources et du mentoring au profit des entrepreneurs sélectionnés.</p>
<p>Pour ces entreprises, l’open lab permet de gagner concrètement en agilité dans sa relation avec les start-up, en testant et adaptant la solution de la start-up aux métiers de l’entreprise, et aussi en décidant rapidement sur les suites à donner en termes de commercialisation.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"479058441240322048"}"></div></p>
<p>Les phases de montée en maturation sont courtes. Le grand groupe doit donc se mettre en capacité de permettre aux start-up d’adapter rapidement leur projet à ses activités. Au sein de Catalyst, les start-up ont 10 semaines pour adapter leurs solutions aux contraintes des entités opérationnelles de la Société Générale. Dans 70 % des cas, elles réussissent la transformation et commercialisent leurs solutions avec l’entreprise.</p>
<h2>L’open lab installe une relation dans la durée</h2>
<p>Ces bons résultats s’expliquent surtout par le travail de l’open lab. Pour permettre cette réactivité, le grand groupe doit savoir décider rapidement et réaliser un gros travail de préparation. En amont, l’open lab doit identifier les sujets d’intérêts majeurs des unités opérationnelles pour s’engager dans une collaboration avec une start-up et clarifier les besoins exprimés par les entités opérationnelles.</p>
<p>Une fois les thématiques définies, le travail de préparation peut durer jusqu’à 6 mois pour que les entités opérationnelles et l’open lab identifient des scénarios, des jeux de tests et des données à transmettre aux start-up. Ensuite, les start-up sont sélectionnées par itérations entre les entités de l’entreprise et l’open lab. Dans la suite des travaux, l’open lab va orchestrer les relations entre la start-up et les autres entités du groupe. Ces dernières restent toujours impliquées dans l’adaptation de la solution entrepreneuriale aux besoins internes.</p>
<p>Les open labs ne sont pas seulement en charge de construire des modèles flexibles de collaboration. Ils apportent aussi une réponse concrète sur la relation dans la durée entre la start-up et la grande entreprise. Deux options sont envisageables : se faire racheter par le grand groupe opérant l’open lab, ou travailler en synergie avec lui dans son écosystème.</p>
<p>Deux leviers sont disponibles ici. Le premier passe par le développement de la fonction d’investisseur. L’open lab installe clairement les collaborations dans une stratégie de rachat en cas de succès. C’est l’option retenue par l’Accelerator de Microsoft à Shanghai. Parfois, la fonction investisseur se gère dans un cadre plus large, quand l’entreprise présente les start-up à son réseau de financeurs.</p>
<p>Le second vise à faire de la start-up un sous traitant de l’entreprise. Ce faisant, les start-up excluent la possibilité de travailler avec les concurrents directs du grand groupe. C’est le choix retenu par les open labs mis en place par la Société Générale et SAP. Les règles de propriété intellectuelle sont alors définies dans cette logique.</p>
<h2>Un outil de gestion des écosystèmes</h2>
<p>SAP Startup Studio précise en amont de la collaboration que les start-up resteront les propriétaires de leurs solutions mais que les améliorations apportées au cours de l’accélération seront principalement appliquées dans le cadre d’accords de commercialisation avec l’entreprise. Ces règles sont ensuite affinées au cas par cas si les acteurs décident de poursuivre la relation. Les open labs proposent un cadre clair à la start-up et conservent des options ouvertes pour s’adapter au degré d’intégration de la solution technique de la start-up dans l’offre commerciale du grand groupe.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/tM_WBxIiwVg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Présentation du SAP Startup Studio (YourStory, 2017).</span></figcaption>
</figure>
<p>Catalyst de la Société Générale prévoit un dispositif encore plus souple. Toute amélioration de la solution proposée par la start-up durant la phase d’accélération reste la propriété de la start-up. À l’issue de la montée en maturation, la start-up peut décider de commercialiser sa solution avec l’entreprise de son choix si la Société Générale ne prend pas de décision de commercialisation assez vite ou si la start-up trouve des conditions d’exploitation plus intéressantes avec d’autres opérateurs, y compris chez les concurrents de la Société Générale. Tout dépend de la capacité du grand groupe à être réactif et attractif dans sa prise de décision.</p>
<p>Pour les grandes entreprises, l’innovation ouverte n’est donc pas seulement un moyen de repenser la génération des idées. Elle représente aussi un outil de gestion des écosystèmes d’innovation dans des pays à fort potentiel de compétence. Elle donne aussi un moyen de redéfinir le périmètre du réseau de sous-traitance.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/129083/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Mérindol a reçu des financements de Innovation Factory et Bpifrance le Lab pour soutenir la réalisation de cette étude.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>David W. Versailles a reçu des financements de Bpifrance Le Lab et Innovation Factory pour soutenir la réalisation de cette étude </span></em></p>Les entreprises occidentales cherchent à capter les dynamiques entrepreneuriales asiatiques pour déployer rapidement de nouvelles solutions sur les marchés. Cet article présente les stratégies clés.Valérie Mérindol, Enseignant chercheur en management de l'innovation et de la créativité, PSB Paris School of BusinessDavid W. Versailles, Chair professor, strategic management and management of innovation, PSB Paris School of BusinessLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/928882018-04-11T23:06:54Z2018-04-11T23:06:54ZLa créativité aussi se manage, surtout dans les grandes entreprises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/214309/original/file-20180411-584-g7hru0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C449%2C5882%2C2998&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Fab labs, open labs, tiers-lieux... Autant d'endroits où se développe la créativité.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/pleasant-students-using-3d-printer-414455506?src=Piq7roIIRQGNuwj6yApT0Q-1-17">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Dans un environnement turbulent en perpétuelle et rapide évolution, la préservation de la compétitivité des grandes entreprises passe par le renouvellement de leurs approches. À ce titre, la créativité est essentielle. Elle permet de produire des idées nouvelles, en décalage par rapport aux schémas existants au sein l’organisation, tout en étant utiles à son activité. Pour développer cette créativité en entreprise, il est nécessaire de mettre en place des capacités dédiées, constituées d’un ensemble de dispositifs et ressources dont le fonctionnement s’éloigne des routines de l’organisation. Comment s’y prendre ?</p>
<h2>La montée en puissance des <em>open labs</em></h2>
<p>Ces dernières années, les grandes entreprises ont multiplié les initiatives destinées à améliorer la créativité de leurs salariés. En France, cette tendance s’est traduite par la mise en place par les grands groupes de nombreux laboratoires d’innovation ouverte ou <a href="http://www.newpic.fr/02group2015openlabsdownload.html"><em>open labs</em></a>. De nouvelles méthodes d’exploration, centrées sur l’expérience usager, ont ainsi été introduites, facilitant l’adoption de <a href="https://www.forbes.fr/management/les-intrapreneurs-a-la-conquete-de-lentreprise/">comportements d’intrapreneurs</a>, permettant de travailler autrement sur des projets nouveaux pour l’entreprise.</p>
<p>À travers une série de travaux sur les <em>open labs</em> d’entreprises, nous avons pu identifier les challenges liés au management de la créativité dans les entreprises établies, et construire des comparaisons qui dépassent les spécificités sectorielles.</p>
<h2>Manager la créativité : une approche renouvelée de la gestion des connaissances</h2>
<p>Les dispositifs favorisant la créativité visent à gérer les connaissances selon des principes opposés aux approches traditionnelles existant dans l’entreprise. <a href="http://www.managementinternational.ca/catalog/developper-des-capacites-hautement-creatives-dans-les-entreprises-le-cas-des-laboratoires-d-innovation-ouverte.html">Manager la créativité dans un grand groupe</a> revient à organiser les dispositifs autour de trois logiques complémentaires :</p>
<p><strong>Accéder des connaissances variées, éloignées des expertises de l’organisation</strong></p>
<p>Fondée sur un principe d’innovation ouverte, cette approche suppose de construire des partenariats avec des acteurs nouveaux (start-up, <a href="https://www.forbes.fr/management/les-tiers-lieux-s-imposent/">tiers lieux</a>, etc.), ainsi que de disposer d’équipes dont les principales qualités sont l’ouverture d’esprit, la curiosité, voire la possession d’une double spécialisation. Le <a href="https://www.usine-digitale.fr/article/bouygues-fait-de-son-e-lab-le-fer-de-lance-de-sa-transformation-numerique.N389489">e-lab</a> de <a href="https://www.bouyguestelecom.fr/">Bouygues</a> a par exemple construit un partenariat avec le <a href="https://www.ideas-laboratory.com/">Ideas Laboratory</a> de Grenoble. </p>
<p>Cette collaboration permet d’accéder à de nouveaux domaines d’expertise : collaborer avec des grands groupes de secteurs différents, des étudiants issus de multiples formations (ingénieurs, sociologues, architectes, designers…) ou des entrepreneurs. Bouygues se donne ainsi les moyens de réfléchir sur des thématiques futures telle que la ville intelligente. Cette solution permet de casser les <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-177235-de-lentreprise-en-silos-a-lentreprise-plateforme-bienvenue-dans-lere-de-lentreprise-intelligente-2138848.php">silos organisationnels</a>.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/m2AW1qQ-nAQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Tiers-lieux, fab lab, living labs, espace de co-making ou de co-working : quelques exemples.</span></figcaption>
</figure>
<p><strong>Articuler les nouveaux champs de connaissances pour stimuler la créativité</strong></p>
<p>Il ne suffit pas d’accéder à des connaissances nouvelles, il faut également développer des méthodes de créativité (<a href="https://theconversation.com/reapprendre-a-setonner-et-a-innover-avec-le-design-thinking-83164">design thinking</a>, <a href="http://parisinnovationreview.com/article/la-theorie-c-k-ou-comment-modeliser-la-creativite">C-K</a>, <a href="https://www.cairn.info/revue-l-expansion-management-review-2006-1-page-79.htm#pa16">méthode des « six chapeaux » d’Edward de Bono</a>…), et savoir matérialiser très vite les idées proposées pour évaluer rapidement la valeur des nouveaux concepts. Parmi les outils clés, la gestion de l’espace physique, les outils de prototypage, la sociologie, le design et l’<a href="http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/ethnographie/31410">ethnographie</a> facilitent la construction de nouvelles formes de multidisciplinarité et de réflexivité des équipes. Ils permettent de créer des ponts entre les différents mondes dont sont issus les individus impliqués.</p>
<p>Au sein des entreprises, ce type d’approche modifie complètement les démarches fondées sur des processus très structurés comme le <a href="https://www.stage-gate.com/resources_stage-gate.php"><em>stage gate process</em></a>. Ainsi, le <a href="http://www.groupeseb.com/fr/content/politique-et-enjeux">Seblab</a>, fondé par le groupe SEB, permet à l’entreprise de construire des projets sur un mode multidisciplinaire. Il ne se substitue pas aux processus structurés, mais apporte des capacités nouvelles et complémentaires aux équipes en charge du développement de nouveaux produits.</p>
<p><strong>Préserver la redondance des idées produites</strong></p>
<p>Toutes les idées nouvelles et originales ne seront pas exploitées par l’entreprise, mais elles constituent une source d’apprentissage pour l’organisation. Elles pourront être remobilisées ultérieurement dans d’autres projets. Préserver la mémoire des idées produites permet alors d’éviter de réinventer la roue à chaque nouvelle exploration. L’enjeu est majeur, mais complexe à traiter. Il repose sur des dynamiques de communautés (favoriser et soutenir les échanges autour des projets passés) et des actions de communication (construire la communication de l’entreprise autour des projets de créativité). Dans bien des cas, il s’agit aussi de codifier les idées pour construire une bibliothèque d’idées créatives mobilisables par l’entreprise : mettre en place des <a href="http://eduscol.education.fr/ecogest/ressources/outils-collabor/le_wiki_pour_travail">wiki</a> sur les projets réalisés, préserver et stocker les prototypes, filmer les pitches des projets. Le <a href="http://ilab.airliquide.com/">i-Lab</a> d’Air Liquide et les <a href="https://3dexperiencelab.3ds.com/fr">Ideas Lab de Dassault Systèmes</a> (3DS) sont emblématiques d’une politique active de capitalisation des idées produites.</p>
<p>Grâce à la mise en place d’un lieu, l’<em>open lab</em>, permettant de construire une « fluidité organisationnelle » et de favoriser les rencontres entre spécialistes différents, les entreprises peuvent désormais mobiliser rapidement des ressources. Développer leur créativité n’est plus une difficulté majeure pour elles. En revanche, l’inscription de ces initiatives dans la durée représente un nouveau défi majeur pour le management. Ce défi se matérialise par deux challenges.</p>
<h2>Premier challenge : gérer « le bazar dans la cathédrale »</h2>
<p>La relation entre l’<em>open lab</em> et le reste de l’entreprise repose sur un subtil équilibre. Bernard Lledos, <a href="https://www.ccmp.fr/collection-ccmp/cas-i-lab-dair-liquide-manager-la-creativite-dans-les-grandes-entreprises">responsable du I-Lab d’Air Liquide</a>, précise que, par rapport au groupe, le i-Lab <a href="http://docplayer.fr/56673691-Le-livre-blanc-des-open-labs.html">est un satellite qui</a></p>
<blockquote>
<p>« […] doit être sur une orbite géostationnaire. C’est-à-dire que si on est trop près de la Terre, la Terre étant le groupe et la maison mère, on va se faire rattraper, s écraser et se retrouver au contact d’eux. Par contre si on part de l’autre côté trop loin on va être complètement perdu, satellisé, plus de communications possibles avec le groupe. »</p>
</blockquote>
<p>Les <em>open labs</em> sont des dispositifs atypiques dans l’organisation. Ils apportent un degré de liberté et de « bazar » dans un univers très structuré et contrôlé, « la cathédrale » qu’est l’entreprise. L’autonomie reste la clé, à condition de ne pas se déconnecter des préoccupations de l’entreprise. Le management y est fondé sur le leadership et l’effet d’entraînement des équipes ; il n’est pas basé sur le contrôle.</p>
<h2>Second challenge : construire et piloter l’exploitation des idées créatives</h2>
<p>Le second challenge est indéniablement lié à la capacité de l’entreprise à transformer en valeur les idées nouvelles. Au-delà de la mise en place de nouvelles capacités destinées à produire de nouvelles idées, le défi pour les grandes entreprises, est d’acquérir des <a href="https://www.wiley.com/en-us/Dynamic+Capabilities%3A+Understanding+Strategic+Change+in+Organizations-p-9781405135757">capacités dynamiques</a> leur permettant de l’exploiter rapidement les résultats de leur créativité nouvelle. L’exploitation des idées créatives représente un challenge particulier lorsque leur exploitation modifie le <em>business model</em> de l’entreprise ou impacte ses compétences. Tout l’enjeu pour l’organisation est donc d’acquérir une agilité lui permettant de réorganiser rapidement ses ressources et partenariats. Il s’agit de faire percoler le nouvel état d’esprit dans le reste de la structure.</p>
<h2>Préserver les soutiens de l’<em>open lab</em>, condition <em>sine qua none</em> à sa survie</h2>
<p>Le risque majeur pour les <em>open lab</em> porte sur le rejet du dispositif à moyen et long termes. Celui-ci peut survenir si les dirigeants de l’entreprise ou les employés ne sont pas convaincus de la contribution de l’<em>open lab</em> à la création de valeur. Salariés comme dirigeants doivent être convaincus que les capacités créatives de cette structure permettent à l’entreprise de « penser autrement ». <a href="https://www.cairn.info/revue-entreprendre-et-innover-2016-4-p-52.htm">Construire la légitimité</a> des <em>open labs</em> constitue un challenge quotidien pour leurs managers. Pour y parvenir, ils doivent mettre en place des actions de communication et impliquer les salariés dans les projets créatifs qui y sont développés. </p>
<p>Il leur faut également trouver des sponsors (au niveau de la direction) et des ambassadeurs (au niveau des salariés). Ils seront en effet les relais les plus efficaces pour construire la légitimité de l’<em>open lab</em>. Si l’un de ces piliers est perdu, l’<em>open lab</em> court le risque de la fermeture. Ce fut le cas pour <a href="http://www.newpic.fr/02expertcontrib.html">LCL Factory, l’<em>open lab</em> de LCL</a> : le changement de direction de l’entreprise a été fatal à la petite structure.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/92888/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les grandes entreprises seraient incapables de créativité. Une idée renforcée par la vision des managers, qui considèrent que cette capacité ne se manage pas. Des a priori à remettre en cause d’urgence…Valérie Mérindol, Enseignant chercheur en management de l'innovation et de la créativité, PSB Paris School of BusinessDavid W. Versailles, Chair professor, strategic management and management of innovation, PSB Paris School of BusinessLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/875482017-12-03T20:59:14Z2017-12-03T20:59:14ZDes transformations du travail aux mutations du management : le paradoxe du 51ᵉ état américain<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/196520/original/file-20171127-2077-1oj7nve.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans un espace de co-working…</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/eyebee/4454314853/in/album-72157653040857006/">Ian May/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Conférence FNEGE-PWC <a href="http://www.fnege.org/actualites/1334/conference-gratuite-fnege-pwc-les-organisations-demain">« Les organisations demain : transformation du monde ancien ou irruption du monde nouveau »</a> dont The Conversation France est partenaire.</em></p>
<hr>
<p>« Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à paraître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres. » Cette citation célèbre tirée des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cahiers_de_prison">cahiers de prison</a> d’Antonio Gramsci semble parfaitement à propos pour décrire les transformations du travail.</p>
<p>Pour certains, nous serions entrés dans une société post-salariale, faite désormais de freelancers, d’indépendants et d’entrepreneurs. Le contrat de travail serait devenu un luxe, une exception, sur fond de précarité inéluctable. Depuis le début des années 2000, il y a bien sûr un fond de vérité dans ce discours souvent construit à partir d’une réalité américaine.</p>
<h2>Les transformations du travail : de quoi parle-t-on ?</h2>
<p>Pour le cas de la France, il est cependant utile de rappeler que les salariés n’ont jamais été aussi nombreux. 90 % de la population active possède aujourd’hui un contrat de travail, avec cependant une tendance très nette vers le contrat à durée déterminée (CDD), qui concerne aujourd’hui quasiment un jeune sur deux. Les contrats à durée limitée sont ainsi passés de 6 % en 1982 à 15 % de l’effectif salarié total en 2016.</p>
<p>Comme le rappelle une <a href="http://www.strategie.gouv.fr/publications/salarie-independant-une-question-de-metiers">étude récente de France Stratégie</a>, le <strong>nombre d’indépendants a diminué de 883 000 personnes</strong> entre 1982 et 2016. La tendance correspond surtout aux agriculteurs et certaines professions libérales. En l’espace de trente ans, la part des « indépendants traditionnels » est ainsi descendue à 13 % de l’emploi total. En parallèle, le nombre de freelancers et de néo-artisans connaît une augmentation significative sur la période récente (+4 % entre 2005 et 2014). Six fois sur dix, il s’agit d’entrepreneurs individuels.</p>
<p>Cette transformation récente masque elle aussi des réalités très diverses. Le consultant indépendant spécialisé n’est pas le livreur de Deliveroo. Chacun s’efforce d’équilibrer à sa façon ses aspirations à la liberté et ses besoins de sécurité. Avec un taux de chômage à 23,3 % chez les plus jeunes, l’équation est devenue difficile à résoudre.</p>
<p>Comment alors caractériser cette situation plus complexe qu’il n’y paraît ? Je pense que l’on peut pointer deux tendances centrales dans les transformations du travail : l’entrepreneuriat collaboratif et la pluriactivité. Elles sont indissociables l’une de l’autre.</p>
<p>La première tendance, l’<strong>entrepreneuriat collaboratif</strong>, est liée à l’individualisation du travail. L’horizontalité, le don, le contre-don, l’entre-aide, la rencontre, la solidarité, le nomadisme collectif, la construction et l’entretien de communautés, sont plus que jamais présents. Dans une société faite de plus en plus de salariés précaires, d’indépendants, de salariés intra-preneurs et autonomes, le travail s’individualise et se liquéfie.</p>
<p>Plus que jamais, les acteurs de cette économie que l’on dit « collaborative » sont à la recherche de nouveaux collectifs auxquels ils pourront se connecter. Les pratiques de l’entrepreneuriat collaboratif, les nouveaux lieux d’entrepreneuriat et d’innovation, les mythes de l’entrepreneuriat collaboratif et les plateformes numériques vont permettre de se retrouver et de construire des équilibres fragiles entre sécurité et liberté. C’est dans un faire et un entreprendre ensemble que se reconstituent des liens sociaux affaiblis par un monde du travail de plus en plus précaire et individuel. La communauté est au cœur de toutes les démarches. Le management devrait l’être sans doute davantage…</p>
<p>La seconde tendance est la <strong>pluriactivité</strong>. Afin de construire une sécurité, d’augmenter son niveau de revenu, de préparer l’avenir ou de survire difficilement dans le présent, on ne met plus tous « ses œufs dans le même panier ». Les pluriactifs (également appelés <a href="https://theconversation.com/leconomie-numerique-va-t-elle-nous-transformer-en-slashers-71728">« slashers »</a>) sont de trois types : salariés multiples, salariés complétant leur revenu par une activité d’entrepreneur ou encore freelancers multiples. Une <a href="https://www.mckinsey.com/global-themes/employment-and-growth/independent-work-choice-necessity-and-the-gig-economy">étude du McKinsey Global Institute de 2016</a> montre ainsi que 56 % des entrepreneurs européens et américains sont des pluriactifs.</p>
<p>Le développement de l’entrepreneuriat collaboratif et la généralisation de la pluriactivité correspondent à un éclatement radical des cadres spatiaux et temporels traditionnels du travail. Dans tous les cas, le travailleur est de plus en plus isolé, exposé à un stress parfois élevé, et la flexibilité des uns reste la précarité et la pauvreté des autres.</p>
<p>Le stade le plus avancé et le plus clair de ces évolutions est incarné par les États-Unis. Avec un tiers d’actifs freelancers, la société américaine est plus que jamais composée d’acteurs <a href="https://repositories.lib.utexas.edu/bitstream/handle/2152/28331/SpinuzziWorkingAloneTogether.pdf?sequence%3D2">« seuls ensemble »</a>. A l’individualisation du travail doit correspondre des mécanismes (le plus souvent marchands) qui vont permettre de faire fonctionner tant les processus organisationnels, les projets d’innovation et d’entrepreneuriat que la vie de la cité. Les plateformes globales, souvent américaines, revendiquent parfois ce rôle.</p>
<h2>Des transformations du travail aux mutations du management</h2>
<p>Qu’en est-il des transformations du management ? Sont-elles tirées elles aussi par la réalité américaine et les <a href="https://modcalifornien.wordpress.com/a-propos/le-modele-californien/">mythes californiens</a> ? Il serait tentant d’associer à la fin du travail la fin simple et brutale du management. Si le management correspond à l’ensemble des pratiques et des techniques qui est mobilisé afin d’animer et de guider une activité collective, le « nouveau monde » remet en cause cette perspective. Que gère et qui gère le travailleur indépendant, l’entrepreneur solitaire de l’espace de coworking, le manager-intrapreneur, les salariés réassemblés en permanence au fil de projets ? S’il est de moins en moins question de structures, d’organigrammes voire de techniques, il y a bien toujours des pratiques de management. Elles empruntent plus que jamais à l’entrepreneuriat collaboratif, et pour l’heure, ses sources californiennes.</p>
<p>Nous sommes tous les citoyens de ce 51<sup>e</sup> état américain qui n’est autre que le reste du monde. Nous en sommes conscients et nous aimons cela. Mais le capitalisme a développé des formes de travail collectif qui sont assez éloignées des mythes californiens. Les coopératives sont l’une de ces formes d’activité collective déjà anciennes. Elles sont nées en Europe au XIX<sup>e</sup> siècle, dans un contexte de crise du rapport au travail. Les coopératives d’activité et d’emploi (CAE) telles que <a href="http://www.coopaname.coop/article/comment-ca-marche">Coopaname</a> sont les héritières de cette forme juridique. Le « salarié-entrepreneur » peut y « être autonome sans être indépendant ». Il peut également « changer de statut pour rejoindre un projet collectif ».</p>
<p>Les coopératives sont également un des principes mis en avant par l’Organisation internationale du travail dans sa <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9claration_de_Philadelphie">fameuse déclaration de mai 1944</a>. Déclaration faite à Philadelphie, une des villes symboliques du « nouveau monde ». Il incombe aujourd’hui aux transformations du management de savoir saisir les opportunités de ces « anciennes » transformations du travail. Au-delà du droit et du politique, il revient aussi à chacun de s’interroger sur le type de travail et de management qu’il souhaite pour lui et ses proches et par addition, le type de société qui en découlera dans 10 ans.</p>
<p>Dans le clair-obscur, les monstres sont peut-être déjà là, mais il ne tient qu’à nous de les remplacer par des anges. Des anges libres et solidaires qui peuvent aussi venir de l’ancien monde. Dans tous les cas, je continue à rêver d’un 51<sup>e</sup> état qui soit le plus libre et le plus responsable de tous.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/87548/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Xavier de Vaujany est président du réseau académique et think tank RGCS (<a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/">https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/</a>). </span></em></p>Faut-il analyser les transformations du travail et les mutations du management à la seule lumière de la trajectoire des États-Unis ?François-Xavier de Vaujany, Professeur, PSL-Université Paris-Dauphine (DRM), Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/849392017-10-04T21:07:42Z2017-10-04T21:07:42Z« Slashers », pluriactivité et transformations du travail : opportunité ou menace pour le management ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/188366/original/file-20171002-12107-1n5nxk0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pluriactif !</span> </figcaption></figure><p>Les exemples abondent autour de nous : journaliste-écrivain, chauffeur privé-gérant d’une supérette, infirmier-professeur de yoga, enseignant en anglais-traducteur, freelancer multiple… Les pluriactifs n’ont jamais été aussi nombreux. Ils incarnent à la fois un espoir (dans la lutte contre le chômage et l’augmentation du niveau de revenu) et une inquiétude (notamment celle d’une société faite de travailleurs <a href="http://info.arte.tv/fr/slahers-la-generation-precaire">plus fragiles et plus dépendants</a>).</p>
<h2>La pluriactivité : un phénomène complexe et difficile à quantifier</h2>
<p>Une <a href="http://www.salonsme.com/espace-telechargements/CP_Slasheurs_15092015.pdf">étude du salon des microentreprises</a> en dénombrait 4,5 millions en 2015. Ils sont plutôt jeunes (22 % des actifs de moins de trois ans auraient au moins deux activités) et pour 64 % d’entre eux motivés par la recherche de revenus complémentaires. Freelancers pour 10 %, associés pour 6 % ou dirigeants d’entreprise à hauteur de 5 %, ils sont 7 % à tester une idée en mode pluriactivité avant de créer une entreprise. La pluriactivité peut donc être une phase de transition avant un engagement entrepreneurial plus fort.</p>
<p>Si <a href="http://dares.travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2016-060.pdf">d’autres études récentes</a> arrivent à des chiffres plus modestes que l’enquête précédente (notamment l’Insee qui comptait 1,4 million de pluriactifs en 2014…), la tendance à la pluriactivité est incontestablement massive et en très forte augmentation sur les vingt dernières années. Elle est aussi partagée par la plupart des pays occidentaux. Une <a href="https://www.mckinsey.com/global-themes/employment-and-growth/independent-work-choice-necessity-and-the-gig-economy">enquête du McKinsey Global Institute</a> réalisée en 2016 sur un échantillon de 8000 entrepreneurs nord-américains et européens montrait que 56 % d’entre eux étaient sur un entrepreneuriat de complément de revenu par rapport à une activité principale et à 70 % choisi.</p>
<p>Il est important tout d’abord de bien qualifier le phénomène. Les différences de définition puis de modalités d’opérationnalisation dans les études (en particulier privées) expliquent en grande partie les écarts de mesure sur une même année ou à deux ans d’intervalle. Les pluriactifs également appelés « slashers » sont des personnes qui cumulent plusieurs activités professionnelles.</p>
<p>Il peut s’agir d’emplois salariés chez des employeurs différents (à 80 %), de personnes qui cumulent une ou plusieurs activités d’indépendantes en plus d’un emploi salarié (500 000 personnes selon l’<a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/2415511">étude Insee 2013</a>). Il peut également s’agir de freelancers multiples, de personnes qui cumulent plusieurs emplois d’indépendants.</p>
<p>Je ne me livrerai pas ici à une comparaison systématique des études, de leur définition et mode d’opérationnalisation de la pluriactivité, mais on doit constater que peu d’enquêtes françaises ou internationales convergent sur un critère ou des critères clairs de catégorisation.</p>
<p>Pour la réflexion qui suit, je définirai (dans le prolongement de l’étude Insee 2013 ou encore des travaux de <a href="http://www.orientation-paysdelaloire.fr/mediatheque/index.php?lvl=notice_display&id=13213">Benoît et Gerbaux</a>) un pluriactif comme une personne cumulant plusieurs emplois salariés, ou un emploi salarié et un ou plusieurs emplois d’indépendant, ou encore plusieurs emplois d’indépendants. La période de référence est généralement une année. En lien avec les <a href="https://collaborativespacesstudy.files.wordpress.com/2016/10/synthese_des_recherches_rgcs_2015_2016_vff.pdf">travaux du think tank RGCS</a>, j’insisterai sur la dimension temporelle de la pluriactivité. Un pluriactif pourra aussi être une personne qui alterne sur plusieurs années contrats de travail et entrepreneuriat ou freelancing, une forme d’<a href="https://collaborativespacesstudy.files.wordpress.com/2016/10/synthese_des_recherches_rgcs_2015_2016_vff.pdf">« entrepreneuriat-alterné »</a>. Les motivations peuvent être multiples : nécessité financière, construction de compétences, élaboration d’un réseau personnel, etc.</p>
<p>Au-delà du cas des saisonniers abordés par l’<a href="http://www.pluriactivite.org/">Insee et d’autres organismes</a>, on constate aujourd’hui l’émergence de nouvelles séquences d’emplois salariés et/ou indépendants. Elles constituent de véritables stratégies de carrière, dans un contexte où les entreprises apprécient les qualités des entrepreneurs pour leur management, et où l’entrepreneuriat repose sur des qualités de gestion de projet et des réseaux que le salariat permet d’approfondir (voir la <a href="https://collaborativespacesstudy.files.wordpress.com/2016/10/synthese_des_recherches_rgcs_2015_2016_vff.pdf">note de recherche RGCS 2016</a> sur ce sujet). Je différencierai donc les pluriactifs synchrones (qui cumulent des logiques de salariat et d’entrepreneuriat sur une même année), de pluriactifs asynchrones (qui enchaînent des formes d’emplois au-delà d’une année, par nécessité ou <a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/publications/white-paper-rgcs2016/">selon un schéma de carrière</a>).</p>
<h2>Un constat : de l’hybridation croissante d’espaces, de temps et d’émotions auparavant distincts</h2>
<p>Qu’est-ce qui se cache derrière ce phénomène complexe, au cœur des transformations du travail ? J’aimerais insister sur un aspect central. Si le freelancing et l’entrepreneuriat se développent massivement dans nos sociétés, cela n’est pas toujours de façon exclusive et antagoniste avec le salariat. Dans nombre de pays, on assiste à des hybridations croissantes qui ont largement été favorisées par le législateur lui-même. Pour le cas de la France, la création du statut d’autoentrepreneur en 2009, ou encore encore celle de Coopérative d’Activité et d’Emploi (CAE) en 2014 (voir la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029313296&categorieLien=id">loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire</a>) ouvrent la voie à des combinaisons et des hybridations que les chercheurs en sciences sociales comme les organismes d’étude ont encore peu explorées. La CAE a créé de fait un statut paradoxal d’entrepreneur-salarié, dans la logique de mutualisation qui est celle des coopératives.</p>
<p>Plus largement, des tendances sociales, économiques et technologiques sont à l’origine de ces évolutions.</p>
<p>La société a connu une explosion majeure de ses cadres spatiaux et temporels traditionnels. On hybride plus que jamais des espaces et des temps auparavant distincts (maison-travail, privé-public, intime-social, voyage-travail…). On « allait travailler » chaque matin il y a encore vingt ans. On « travaille aujourd’hui en bougeant ». Cela m’amène parfois à me questionner sur la notion de <a href="https://theconversation.com/les-tiers-lieux-quelles-opportunites-pour-comprendre-et-transformer-les-pratiques-de-travail-75650">tiers lieux</a>, ces espaces et ces temps transitionnels entre la maison et le travail qui sont également en forte augmentation dans les pays occidentaux.</p>
<p>N’entre-t-on pas dans une « tiers-lieuisation » de toute nos vies ? Ne sommes-nous pas de plus en plus dans un entre-deux permanent ? La maison s’hybride (on y travaille de plus en plus). Le lieu de travail habituel se « gamifie », s’ouvre à des pratiques privées (salle de sport, cours de yoga, événements culturels…). Le portable permet des appels et des échanges personnels sur le lieu de travail. Les émotions et les pratiques deviennent de plus en plus imbriquées. Un associé d’un très grand cabinet de conseil me disait récemment avec fierté que le parrain de sa fille était son plus gros client…</p>
<p>Pour comprendre ce phénomène complexe qu’est la pluriactivité, j’aimerais maintenant mettre en avant cinq dimensions qui peuvent être utiles pour son analyse.</p>
<h2>Occupation, cognition, émotion, organisation et institution : des dimensions de la pluriactivité</h2>
<p>La pluriactivité peut avoir des dimensions occupationnelles, cognitives, émotionnelles, organisationnelles et institutionnelles.</p>
<p>Les <strong>dimensions occupationnelles</strong> ont été évoquées précédemment. Il s’agit de mieux comprendre les types d’emplois (salariés et entrepreneuriaux) qui sont cumulés ou alternés. De façon purement descriptive, je reste étonné par le manque de données, en particulier de données contextualisées. Quelle est la distribution des slashers en France par ville ? Par régions (<a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/2882124?sommaire=2882138&q=pluriactivit%C3%A9">certaines études de l’Insee</a> mériteraient d’être répliquées sur d’autres régions et d’autres problématiques) ? Comment évolue sur le long terme la pluriactivité ? Quels liens avec la configuration du ménage ? Quels sont les pourcentages et les profils de slashers dans les grands groupes publics ou privés français ? Quelles sont les tendances d’un secteur à un autre ?</p>
<p>Il est vrai que l’<a href="http://www.cee-recherche.fr/publications/document-de-travail/combinaison-dactivites-professionnelles-et-multifonctionnalite-de-lagriculture-une-resurgence">hétérogénéité des statuts</a> ne facilite pas les comparaisons. Quelles relations avec les activités associatives ? Quels sont les effets du développement de l’économie du partage et de l’économie collaborative sur ces dynamiques (un <a href="http://dares.travail-emploi.gouv.fr/dares-etudes-et-statistiques/etudes-et-syntheses/document-d-etudes/article/l-economie-des-plateformes">rapport récent de la DARES</a> aborde le problème mais il soulève également de nombreuses questions statistiques) ? Plus que tout, quels liens avec le management ? La gestion de l’innovation, la gestion des ressources humaines, le management des systèmes d’information ? Pour quelles dynamiques systémiques ?</p>
<p>La pluriactivité peut-être également une question <strong>cognitive</strong>. On est plus que jamais dans une <a href="http://www.lemonde.fr/m-perso/article/2017/09/22/tous-victimes-des-pirates-de-l-attention_5189799_4497916.html">économie de l’attention</a>. Les tâches se cumulent sur un même temps. Les possibilités d’interruption (emails, WhatsApp, réseaux sociaux, SMS, MMS…) également. La pluriactivité induit de plus en plus de difficultés cognitives.</p>
<p>Elle est aussi indissociablement une problématique <strong>émotionnelle</strong>. L’hybridation d’espaces-temps auparavant distincts amène assez naturellement à combiner des émotions auparavant très dissociées. On doit s’amuser en travaillant avec le DIY, le DIT, la gamification du travail et des espaces de travail, les logiques de co-production.</p>
<p>On doit plus que jamais être dans un état émotionnel potentiellement professionnel à la maison avec le développement du télétravail qui induit une autre forme de pluriactivité. La combinaison d’activités domestiques (garder les enfants, répondre aux sollicitations de l’environnement de l’appartement ou de la maison, être dans un contexte de tentations domestiques comme la télévision ou la cuisine…) avec des activités professionnelles (travailler dans un bureau qui n’existe pas toujours à la maison, répondre à des appels professionnels, recevoir des clients…) change alors radicalement le cadre de vie.</p>
<p>La pluriactivité a également des dimensions <strong>organisationnelles</strong>. L’émergence d’une économie des plateformes et les logiques d’innovation ouverte (amenant souvent à regrouper sur les mêmes plateaux des salariés-intrapreneurs avec des startuppers et des freelancers) sont des formes organisationnelles d’hybridation qui n’induisent pas forcément une évolution des chiffres de l’Insee.</p>
<p>L’hybridation est ici surtout un contexte qui se généralise avec les <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2016-1-page-163.htm">espaces de coworking</a>. Cela semble évident pour les espaces de coworking corporate, mais c’est également vrai dans les espaces de coworking indépendants. Pour les espaces de coworking externes que j’ai pu étudier en région parisienne, 10 % des membres étaient ainsi des salariés (avec des variantes importantes en fonction du ou des secteurs couverts par l’espace de coworking). Il s’agissait de télétravailleurs (selon le <a href="https://www.blog-emploi.com/nouveaux-modes-de-travail-age/">baromètre OpinionWay</a> 20 % des télétravailleurs français mènent leurs activités dans des tiers-lieux), de salariés dont le projet était excubé ou encore de startups à maturité ayant recruté un ou plusieurs salariés.</p>
<p>Enfin, la pluriactivité a une dimension <strong>institutionnelle</strong>. Si la pluriactivité fait l’objet de <a href="http://www.pluriactivite.org/spip.php?article242">règles déjà anciennes à respecter</a>, le législateur a récemment mis en place un cadre juridique plus propice au développement de pratiques d’hybridation. J’ai déjà cité le statut d’autoentrepreneur et les CAE. J’aurais également pu mentionner les problèmes de charges sociales et de caisses de cotisation (voir le cas des chauffeurs de taxi dont les cotisations sont également hybrides).</p>
<p>Les acteurs du droit social et du droit du travail élaborent plus que jamais des outils juridiques qui favorisent des formes hybrides de travail. La levée du plafond pour les autoentrepreneurs ou l’évolution des procédures de télétravail avec les récentes <a href="http://droit-finances.commentcamarche.net/download/telecharger-431-ordonnances-macron-texte-des-ordonnances">ordonnances Macron</a> me semblent aller largement dans ce sens.</p>
<h2>Enjeux de la pluriactivité pour le management : opportunité ou menace ?</h2>
<p>On critique parfois les politiques publiques pour leur faible intégration des transformations du travail, en particulier celles évoquées dans cet article. J’aimerais pour terminer surtout interpeller le management et les managers. Je pense en effet que le monde des organisations (entreprises, administrations, associations, école de commerces…) se pose assez peu la question de la pluriactivité. On est dans un implicite de contrat de travail : « le salarié travaille pour moi, il n’a pas à avoir d’autres activés, ou alors, je n’ai pas à le savoir… ». Lorsque le sujet est abordé, c’est souvent sous l’angle de la suspicion.</p>
<p>Que faire de ces <em>slashers</em> qui existent dans vos murs ? Que faire de ces pluriactifs qui sont peut-être vous lecteur ?</p>
<p>À l’heure de l’open innovation « externe » (on va chercher de l’énergie « extérieure » pour l’« intérieure ») ou « plaquée » (on cherche et on créé des « intrapreneurs »), pourquoi ne pas exploiter d’avantage ces énergies indirectes ? Au-delà de logique type « un jour par semaine sur un projet personnel », pourquoi ne pas héberger les activités de slashers, même si elles sont souvent lointaines par rapport aux métiers de l’organisation ?</p>
<p>Pourquoi ne pas ouvrir d’avantage (certaines entreprises le font) l’innovation lab, l’espace de coworking corporate, l’accélérateur, le <em>maker space</em>… à des activités professionnelles externes et pas seulement à des bricolages ou des « projets » ? Pourquoi ne pas faire un community management de slashers internes, et assumé comme tel ? La pratique existe mais elle est encore rare et assez peu affichée. Au-delà de logiques de fidélisation, comment intégrer la pluriactivité synchrone et asynchrone dans la gestion des carrières ? Comment exploiter ces compétences et ces réseaux liminaux de l’entreprise ? Comment faire émerger une partie de la stratégie des entreprises à partir de cette pluriactivité ?</p>
<p>Pour le <a href="http://www.pluriactivite.org/spip.php?article241">cas des PME et des TPE</a>, la pluriactivité (en particulier des formes de temps partiels qui leurs sont associées) peut être une formidable opportunité afin de mobiliser de nouvelles compétences ou de développer des projets en sommeil. En effet, beaucoup de petites structures sont bloquées par ce que représenterait le coût d’un salarié supplémentaire à temps plein. La pluriactivité et le travail en temps partagé permettent d’acquérir des profils techniques ou managériaux à temps réduit. Mais comment mieux accompagner les dirigeants de PME et TPE sur ces problématiques ? Avec quels outils RH collaboratifs et mutualisés sur un territoire ?</p>
<p>Les enjeux sont également importants pour les écoles de commerce et les facultés de gestion. Comment penser une pédagogie différente (la problématique ne peut pas être uniquement celle des départements initiaux ou des départements exécutifs mais elle suppose une démarche concertée) ? Comment élaborer une offre qui prépare d’avantage les étudiants à ce monde du freelancing, de l’entrepreneuriat et leurs hybridations avec le salariat ? Quels services proposer afin d’accompagner les anciens étudiants sur ces boucles de pluriactivité synchrone ou asynchrone et les aspects connexes de ces évolutions (télétravail, travail mobile, « tiers-lieuisation ») ?</p>
<p>Le chantier est vaste. Il suppose de revoir notre conception du management, en particulier celle des systèmes de « contrôle », et de repenser les pratiques managériales à l’aune des nouvelles pratiques de travail. To be continued…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/84939/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Xavier de Vaujany est président du réseau académique et think tank RGCS (<a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/">https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/</a>)</span></em></p>Qu’est-ce qu’un « pluriactif » ou « slasher » ? Analyse de cette transformation majeure du monde du travail et ses enjeux pour le management.François-Xavier de Vaujany, Professeur, PSL-Université Paris-Dauphine (DRM), Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/850382017-10-04T21:07:32Z2017-10-04T21:07:32ZLes espaces de coworking : nouveaux intermédiaires de l’innovation ouverte ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/188937/original/file-20171005-9802-xlp2y9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La vie dans un espace de coworking</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://visualhunt.com/photo/69432/">luc legay via VisualHunt.com </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p><em>Cet article est publié dans le cadre de la vitrine inaugurale de la <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion.htm">Revue française de gestion</a>, « Innovation et numérique : quelles implications managériales ? » qui s’est tenue le 27 septembre 2017 en partenariat avec le <a href="https://www.list.lu/">Luxembourg Institute of Science and Technology</a> et The Conversation France. Il s’appuie sur un article paru dans le dossier spécial de la <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2016-1.htm"><em>Revue française de gestion</em> (n°254)</a>.</em></p>
<hr>
<p>Aujourd’hui, la question n’est plus de savoir s’il faut innover seul ou avec les autres, mais plutôt de savoir comment faire pour innover avec les autres. A l’heure de l’innovation ouverte, les entreprises sont pour la plupart convaincues de la nécessité d’innover avec leurs fournisseurs, leurs clients, et même leurs concurrents, mais elles ne savent pas toujours comment s’y prendre.</p>
<p>Dans cet <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion-2016-1-p-163.htm">article</a>, nous avons analysé une démarche originale d’innovation ouverte consistant pour une petite entreprise de services à être localisée pendant plusieurs mois dans des espaces de coworking aux côtés d’entrepreneurs innovants. Cette entreprise a ainsi élaboré des offres innovantes en s’inspirant du mode de fonctionnement des espaces de coworking testés et en tirant parti des nouvelles collaborations nouées sur place.</p>
<h2>Le succès mondial des espaces de coworking</h2>
<p>Grâce à un terminal connecté à Internet, les travailleurs de la société d’information du XXI<sup>e</sup> siècle sont devenus fortement mobiles. Ils peuvent travailler de presque n’importe où, devenant ainsi des <a href="https://www.lesechos.fr/11/03/2015/LesEchos/21895-524-ECH_bruno-marzloff---les---sans-bureau-fixe----pionniers-de-la-mutation-du-monde-du-travail.htm">sans bureau fixe</a> selon l’expression de Bruno Marzloff. Or, depuis le début des années 2010, de nouveaux types d’espaces physiques de travail se sont développés massivement en France et à l’international.</p>
<p>Les plus connus et les plus nombreux sont les espaces de coworking. Apparus au début des années 2000, ils permettent à des travailleurs indépendants, isolés, ou nomades de mutualiser des mètres carrés et des services. La <a href="http://zevillage.net/2017/01/la-meteo-2017-du-coworking-par-deskmag/">dernière enquête mondiale de Deskmag</a> en recense plus de 11 000 dans le monde. Le succès fulgurant des espaces de coworking interroge.</p>
<p>Au-delà du rapport qualité-prix et de la proximité du domicile, qu’est-ce qui motivent les coworkers à localiser leurs activités dans de tels espaces ? Qu’ont-ils à y gagner ? Pour répondre à ces questions, nous avons étudié le cas d’une agence de communication innovante d’une quinzaine de personnes, Opinion Valley (OV), qui a travaillé pendant plusieurs mois dans trois espaces de coworking successifs.</p>
<h2>L’itinérance d’Opinion Valley, une agence de communication aux méthodes innovantes</h2>
<p>Créée en 2004 à Paris, <a href="http://www.opinionvalley.com/">OV</a> est une agence de conseil en communication qui conçoit et met en œuvre des stratégies de communication pour le compte d’une vingtaine de clients de tous secteurs d’activité. Les missions réalisées sont diverses, aussi bien dans le champ de la communication (relations presse, <em>community management</em>…), que dans celui du conseil en management (veille, gestion de crise…). OV développe également une offre plus novatrice, le Lab. Sur une thématique donnée, l’agence détecte les principales tendances au niveau mondial, cartographie les parties prenantes locales et émet des recommandations en lien avec l’activité de son client.</p>
<p>Fin 2012, OV décide d’aller plus loin dans ses pratiques d’innovation et de créativité en s’engageant volontairement dans une démarche d’innovation ouverte, à la fois tangible et originale. OV quitte les locaux historiques de l’agence pour s’installer temporairement dans différents espaces de coworking et ainsi côtoyer au quotidien des entrepreneurs innovants. Cette forme d’hébergement a certes l’avantage de paraître économique et adaptable. Pour les associés, cette <a href="https://www.strategies.fr/actualites/agences/224406W/opinion-valley-agence-itinerante.html">itinérance</a> est l’« occasion de créer de nouvelles collaborations concrètes, d’échanger des idées et d’explorer de nouvelles approches et technologies ».</p>
<p>OV se domicilie d’abord à <a href="https://la-ruche.net/">La Ruche</a>, espace de coworking pour entrepreneurs sociaux. 6 mois plus tard, OV s’installe chez <a href="http://www.residencecreatis.fr/">CREATIS</a>, résidence pour entrepreneurs culturels. Enfin, OV rejoint <a href="https://paris.numa.co/">Numa</a>, haut lieu de l’innovation numérique, à son ouverture fin novembre 2013.</p>
<h2>De nouvelles offres résultant de la stratégie de localisation</h2>
<p>S’installer dans des espaces de coworking pour entrepreneurs innovants a permis à OV de renforcer et d’enrichir son offre de service en s’appuyant sur de nouveaux partenaires, hors du champ de la communication. L’agence a par exemple amélioré sa méthodologie du Lab. Les techniques de veille et de prospective de l’équipe ont été grandement facilitées par leur présence dans des espaces dont les populations offrent en soi des panels intéressants des champs d’innovation concernés et avec qui il est plus facile d’entrer en contact.</p>
<p>De nouveaux services qui capitalisent sur les opportunités détectées sur place et sur les viviers que constituent les espaces de coworking pour entrepreneurs ont également été lancés. OV propose par exemple désormais à ses clients grands groupes des déjeuners animés avec des <em>pitch startups</em>. Des porteurs de projet repérés par OV disposent alors de quelques minutes pour présenter leurs concepts.</p>
<p>Les offres innovantes développées par OV pendant cette période peuvent être qualifiées d’innovations ouvertes, dans la mesure où elles sont réalisées en collaboration avec des entrepreneurs rencontrés dans les espaces de coworking ou les équipes de ces espaces.</p>
<h2>Les espaces de coworking comme intermédiaires d’innovation ouverte</h2>
<p>La localisation d’OV dans ces espaces de travail multi-entreprises a indéniablement facilité son accès à de nombreuses startups et à des entrepreneurs aux profils variés, avec qui elle a su développer de nouvelles offres dans une logique d’innovation ouverte. L’un des associés déclare avoir rencontré plus de nouvelles personnes pendant cette année de coworking que pendant ces cinq dernières années.</p>
<p>Parmi les personnes et entreprises découvertes dans ces espaces, certaines sont devenues clientes de l’agence. Toutefois, ce type de concrétisation reste mineur. Les collaborations de l’agence avec des entrepreneurs prennent essentiellement deux formes. Soit l’agence identifie ceux avec qui elle pourrait travailler en direct pour augmenter son offre commerciale. Soit elle repère ceux qu’elle pourrait mettre en relation avec ses clients et partenaires.</p>
<p>Ces espaces de coworking peuvent être caractérisés d’<a href="http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0048733306000497">intermédiaires d’innovation ouverte</a> puisqu’ils servent d’interfaces entre les entreprises hébergées et leur environnement à différentes étapes du processus d’innovation. Plusieurs types d’intermédiaires contribuant aux processus d’innovation ont été identifiés dans la littérature : <em>brokers, bridgers, gatekeepers, boundary spanners, technology scouts</em>… comme les cabinets de conseil en innovation, les communautés d’innovation en ligne, les plateformes de <em>crowdsourcing</em>, etc. <strong>Dans cette recherche, nous mettons en lumière un type original d’intermédiaire d’innovation puisqu’il s’agit d’un espace physique de travail multi-entreprises.</strong> Les espaces de coworking ont alors pour mission d’instaurer des relations de confiance entre les acteurs, de faciliter la circulation des ressources et des connaissances à l’intérieur et à l’extérieur du groupe de coworkers, et d’animer ce groupe.</p>
<h2>Les composantes d’intermédiation des espaces de coworking</h2>
<p>Nous avons identifié <strong>quatre composantes d’intermédiation de l’innovation ouverte</strong> spécifiques aux espaces de coworking qui contribuent à soutenir leur rôle d’intermédiaire d’innovation ouverte. Elles reposent sur des caractéristiques de fonctionnement qui facilitent la mise en relation des personnes et entreprises en coprésence : le recours à des outils de communication simples et directs, le choix d’organisation de l’espace et de placement des membres au sein de celui-ci, l’organisation d’événements internes et externes, et les échanges avec l’équipe de mangement de l’espace de coworking.</p>
<p>Les outils de communication employés par les espaces de coworking paraissent relativement pauvres à l’ère numérique. Ce sont finalement des mécanismes simples et non technologiques, comme l’affichage, l’échange verbal informel ou la réputation, qui semblent être les plus importants dans les modes de fonctionnement de ces espaces. Et ce même pour des espaces de coworking récents et tournés vers le numérique comme Creatis et Numa ouverts en 2013.</p>
<p><strong>Les choix d’aménagement de l’espace</strong> (présence de lieux de convivialité, de salles de réunion en nombre suffisant par rapport au nombre de coworkers) et d’installation des entrepreneurs au sein de cet espace (qui est à côté de qui, dans quelle partie de l’espace de coworking…) stimulent les interactions interpersonnelles (entre voisins de bureau, lors des déplacements au sein de l’espace). Cette composante d’intermédiation est probablement la plus originale et spécifique aux espaces de coworking.</p>
<p><strong>Les événements organisés par les espaces de coworking</strong> portent sur des thématiques et des formats variés en fonction de la spécialité des espaces (sessions de formation, cycles de conférences-débat, ateliers participatifs…). Ils constituent la composante d’intermédiation la plus visible de leur fonctionnement. Les événements permettent aussi bien aux membres de faire connaissance (notamment pour les nouveaux venus et les non membres) que de garder contact (participation d’anciens membres), d’acquérir de nouvelles connaissances ou actualiser des connaissances existantes (événements ressemblant à des modules de formation, permettant une activité de veille).</p>
<p>Ces trois premières modalités d’intermédiation mettent en valeur l’importance de la quatrième modalité : les interactions directes avec <strong>les équipes de management des espaces de coworking</strong>. Ainsi, les coworkers peuvent bénéficier de leurs connaissances du domaine d’innovation et de leurs recommandations auprès des membres de l’espace et de leurs réseaux au-delà des murs de l’espace de coworking (anciens membres, entrepreneurs du domaine ayant fait d’autres choix de localisation, représentants des pouvoirs publics concernés par la problématique…). Les équipes de management des espaces de coworking sont les acteurs du processus d’intermédiation d’innovation ouverte dans ce type de lieux. Elles instaurent et incarnent les relations de confiance nécessaires entre les membres pour qu’ils innovent de façon ouverte.</p>
<h2>De l’avantage de rejoindre des espaces de coworking spécialisés</h2>
<p>En tant qu’intermédiaires d’innovation ouverte, la fonction des espaces de coworking consiste à établir des connexions entre différents types d’acteurs. Les espaces de coworking éprouvés par OV sont d’autant plus efficaces dans ce rôle qu’ils sont <a href="http://www.cairn.info/revue-entreprendre-et-innover-2016-4-page-8.htm">spécialisés dans un champ d’innovation spécifique</a> (l’innovation sociale pour La Ruche, l’innovation culturelle pour CREATIS…). Ce sont des acteurs clés de la promotion et la structuration de ce champ. Ils en deviennent des vitrines, des passages obligés où il fait bon être et être vu.</p>
<p>Mais pour ce faire, l’équipe de management de l’espace doit jouer son rôle à plein. Il est donc crucial pour les créateurs et dirigeants d’espaces de coworking de prendre la mesure du rôle de cette équipe et de ne pas confier cette responsabilité uniquement à des stagiaires. Il est important de s’interroger sur le profil des personnes requises pour animer l’espace, en fonction notamment de sa taille et du champ d’innovation dans lequel il est spécialisé, le cas échéant. La question de la formation de ces nouveaux types de managers reste également ouverte.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/85038/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>A l’heure de l’innovation ouverte, les entreprises sont souvent convaincues de la nécessité d’innover avec leurs fournisseurs, clients, et même leurs concurrents, mais ne savent pas toujours comment.Julie Fabbri, Professeur en stratégie et management de l'innovation, EM Lyon Business SchoolFlorence Charue-Duboc, Directeur de recherche au CNRS au PREG-CRG Professeur chargée de cours, École polytechniqueLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/789782017-08-15T15:52:56Z2017-08-15T15:52:56ZQuelle place pour l’art dans les plateformes d’innovation ouverte ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/179626/original/file-20170725-26586-1v93cqo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le 104 à Paris.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/dalbera/7188961377">Flickr/Jean-Pierre Dalbéra</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Fab labs, living labs, design labs, hackerspaces, makerspaces, coworking spaces… Les espaces d’innovation ouverte se sont multipliés ces dernières années et prennent des formes variées : lieux de prototypages rapides, d’incubation, d’accélération, de réflexion sur les usages. Ils partagent néanmoins des caractéristiques communes comme le souligne la définition proposée dans le <a href="http://www.newpic.fr/wbopenlabs/anrt-newpic-livreblancopenlabs-hd.pdf">livre blanc sur les <em>open labs</em></a> :</p>
<blockquote>
<p>« Un lieu et une démarche portés par des acteurs divers, en vue de renouveler les modalités d’innovation et de création par la mise en œuvre de processus collaboratifs et itératifs, ouverts et donnant lieu à une matérialisation physique ou virtuelle »</p>
</blockquote>
<p>Ainsi les processus d’innovation dans ce type d’espace sont marqués par des logiques communes d’ouverture, de décloisonnement, d’échanges au sein d’une communauté large. Ils sont portés par des acteurs multiples (entreprises, institutions publiques, associations…) et essaiment dans des secteurs variés (industriels, santé, académiques, culturels…).</p>
<p>C’est dans ce cadre qu’apparaissent des espaces ouverts et collaboratifs dédiés à l’innovation et la créativité artistique et culturelle. De plus en plus d’organisations artistiques développent des lieux d’innovation et, en écho à ce phénomène, l’art est de plus en plus perçu comme un vecteur d’innovation dans les entreprises traditionnelles. Ce phénomène résonne avec d’autres initiatives déjà anciennes de l’autre côté de l’Atlantique comme le celle du <a href="http://www.slate.fr/tribune/86537/histoire-black-mountain-college">Black Mountain College</a>.</p>
<p>Qu’en est-il de ce développement croissant de l’art comme vecteur d’innovation ? Quelles sont les spécificités de la place et du rôle de l’art dans les open labs ?</p>
<p>J’ai eu l’occasion d’instruire ces questions à travers deux études successives menées avec mes collègues de la <a href="http://www.newpic.fr/">chaire NewPic</a> de Paris School of Business. La première, menée avec l’<a href="http://www.anrt.asso.fr/">ANRT</a> (Association Nationale de la Recherche et de la Technologie) et consacrée à une exploration large des open labs en France. La seconde dans le cadre d’un partenariat avec <a href="http://www.bpifrance-lehub.fr/">BPI Hub</a>, <a href="http://www.parisandco.paris/">Paris&Co</a> et l’<a href="http://www.innovationfcty.fr/">Innovation Factory</a> sur l’exploration plus spécifique des plateformes d’innovation franciliennes.</p>
<h2>Quatre dynamiques</h2>
<p>L’étude spécifique que j’ai menée dans le champ artistique et culturel m’a d’abord amené à observer quatre dynamiques différentes de développement des projets artistiques dans les open labs. La première dynamique se caractérise par l’intégration de laboratoires d’innovation ou d’incubateurs pour des startups créatives au sein de grandes institutions culturelles, par exemple, la <a href="http://www.104factory.fr/">104Factory</a> du 104, le <a href="http://www.cite-sciences.fr/fr/au-programme/lieux-ressources/carrefour-numerique2/">Carrefour Numérique à la Cité des Sciences</a> ou encore les initiatives de <a href="http://www.erasme.org/-Museolab-">Muséolab d’Érasme</a> au sein des musées de la métropole du Grand Lyon, ou encore de nouvelles initiatives comme le Gaîté lab de la Gaîté Lyrique ou (feu) le projet de <a href="http://museumlab.fr/">Museum Lab</a> du Louvre.</p>
<p>À côté des initiatives portées par de grandes institutions culturelles se sont développées deux dynamiques connexes.</p>
<p>L’une marquée par la mise en place de laboratoires d’innovation ouverte dédiés à l’art et la culture au sein d’institutions ou d’entreprises orientées plus largement vers l’industrie et les services comme, par exemple, l’<a href="https://www.orange.com/fr/actualites/2016/juin/La-Art-Factory-d-Orange-c-est">Art Factory d’Orange</a>, le <a href="http://www.google.fr/intl/fr/culturalinstitute/thelab/">lab du Google art & culture</a>, ou l’<a href="http://www.atelier-arts-sciences.eu/#">Atelier Arts Sciences du CEA Tech</a>, voire le CARGO de l’agence de développement et d’innovation de <a href="http://www.latribune.fr/technos-medias/innovation-et-start-up/paris-co-le-bras-arme-de-l-innovation-de-la-ville-de-paris-613820.html">la Ville de Paris</a>, Paris&Co.</p>
<p>L’autre se caractérise par l’émergence d’espaces de créativité dans des entreprises ou associations privées orientées vers le marché de l’art et les médias comme l’<a href="http://www.digitalarti.com/fr/tag/lab-au/">Artlab de Digitalarti</a> ou <a href="http://scintillo.eu/fr/outils/creatis/">Creatis du groupe Scintillo</a>.</p>
<p>Une dernière dynamique met en évidence le déploiement de projets créatifs et artistiques dans des lieux autonomes, mais non dédiés à l’art, comme les initiatives multiples menées au sein de <a href="https://paris.numa.co/">NUMA</a>, du <a href="https://liberte.paris/">Liberté Living Lab</a>, d’<a href="http://www.icimontreuil.com/">Ici Montreuil</a> ou de <a href="https://lapaillasse.org/">La Paillasse</a>, pour citer les plus connus.</p>
<h2>Les rôles spécifiques de l’art</h2>
<p>La mobilisation de l’art et des artistes dans les open labs peut être d’abord source d’une nouvelle vision qui enrichit les processus d’innovation. C’est particulièrement le cas dans les open labs intégrés dans des grandes institutions innovantes (non dédiés à l’art) qui, en mobilisant des artistes au cours des processus de recherche et développement, vont créer ce que Michel Ida du CEA Tech appelle du « décentrement ». Par exemple l’une des premières expériences menées avec la chorégraphe Annabelle Bonnery sur la relation homme-machine a conduit à l’amélioration de capteurs de mouvement permettant de transformer les mouvements du danseur en son, mais également à des applications industrielles importantes. En effet à côté du spectacle <a href="http://www.atelier-arts-sciences.eu/Virus-Antivirus">Virus/Antivirus</a> est née la start-up Movea qui a été à l’origine du développement des capteurs intégrés notamment dans certaines consoles de jeux vidéo.</p>
<p>Le développement des open labs autonomes met ensuite en évidence une logique complémentaire de recherche non seulement de disruption, mais surtout de construction voire de renouvellement de modèles économiques. En effet le développement de ce type de labs cherche à offrir de nouvelles perspectives aux projets artistiques ou créatifs en poussant l’artiste à repenser les modèles économiques autour de sa création. Ce renouvellement peut se caractériser par l’ouverture à de nouveaux marchés, clients ou services, comme le propose l’<a href="http://www.digitalarti.com/fr/artlab/">ArtLab de Digital Arti</a>. Ce lab a notamment développé la location d’œuvres à des entreprises ou des processus de coproduction plus proches des industries créatives que des logiques du marché de l’art.</p>
<p>Enfin, dans le cas des open labs intégrés à une grande institution culturelle, la démarche développée dans le lab apparaît comme un catalyseur des missions de l’institution et un moyen de faire converger démarches artistiques, économiques et sociales. C’est particulièrement le cas au 104, qui à travers son incubateur, crée des passerelles entre des mondes parfois perçus comme antagonistes. On peut citer parmi la trentaine de start-ups incubés, le cas de la <a href="http://www.lafabriquedeladanse.fr/">Fabrique de la Danse</a> qui permet de développer et valoriser les compétences entrepreneuriales des chorégraphes à la fois à travers des formations, une application et la réalisation d’ateliers et de spectacles en lien avec l’écosystème du 104 (artistes, associations, écoles du quartier).</p>
<p>Ces rôles différents donnés aux projets artistiques dans les open labs invitent à repenser plus largement le rôle de l’artiste à la fois en tant qu’innovateur et passeur de frontières esthétiques, économiques et sociales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/78978/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Il est chercheur associé au CGS Mines ParisTech</span></em></p>La multiplication des « open labs » dédiés à l’art met en évidence différentes dynamiques de construction des projets artistiques au sein des lieux d’innovation ouverts.Nicolas Aubouin, Enseignant Chercheur en Management et Créativité, PSB Paris School of BusinessLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/767652017-06-26T19:34:23Z2017-06-26T19:34:23ZUn fab lab, ça sert à quoi ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/167041/original/file-20170427-15081-9b93ym.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ultimaker History Fablab Protospace</span> <span class="attribution"><span class="source">Guy Sie, Utrecht, Netherlands / Wikimedia</span></span></figcaption></figure><p>C’est un chercheur du célèbre <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Massachusetts_Institute_of_Technology">Institut de technologie du Massachusetts</a>, Neil Gershenfeld, qui dans les années 2000 a inventé le concept de fab lab – contraction de <em>fabrication laboratory</em>, qui signifie « laboratoire de fabrication ». Depuis, des fab lab se sont installés aux quatre coins du monde, dans des contextes aussi différents que ceux de la Norvège, les Pays-Bas, la France, l’Afghanistan, l’Inde, ou encore l’Afrique du Sud…</p>
<h2>Illustrer l’air du temps</h2>
<p>Les fab lab représentent un mouvement d’un ensemble plus large appelé « open labs ». Ces lieux ouverts rassemblent diverses communautés qui se retrouvent autour de valeurs partagées, d’échanges de connaissances, astuces ou pratiques. Les processus de (co-)création qui y sont mis en œuvre sont largement soutenus par les technologies les plus récentes. Quant à leur succès et à leur diversité, on peut les expliquer par la convergence de plusieurs phénomènes.</p>
<p>Tout d’abord, une véritable démocratisation des savoirs et des technologies numériques a rendu accessible au plus grand nombre des possibilités nouvelles. Ensuite, la société subit de profondes mutations (prise de conscience écologique, transition numérique, questionnement démocratique, évolution du rapport au travail, etc.), tout en opérant une sorte de révolution autour du « do it yourself ». Et ce principe du « Fais-le toi-même », intimement lié à notre système de production, a été appliqué dans les sociétés agraire (le local), industrielle (le global) et l’est maintenant dans la société post-industrielle, ou société de l’information (le global et le local).</p>
<p>In fine, les fab lab constituent donc des espaces de réalisation de nos aspirations nouvelles. Une sorte « d’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9t%C3%A9rotopie">hétérotopie</a> », un lieu de réalisation de nos utopies, où l’imaginaire se libère et les inspirations prennent forment.</p>
<h2>Faire à sa mesure et innover</h2>
<p>Tourné vers la fabrication numérique, le fab lab entend rassembler dans un même espace toutes les ressources pour réaliser un projet de A à Z, de l’intention jusqu’à sa matérialisation. La fabrication numérique permet notamment de produire des pièces complexes (pièces techniques, mécanismes, etc.) sans passer par le circuit industriel. Dans un fab lab, on peut réparer, détourner, hacker, fabriquer, monter ou démonter à peu près n’importe quoi.</p>
<p>En pratique, le fab lab donne au grand public un accès à des moyens de fabrication historiquement réservés à l’industrie. Il s’adresse aux entrepreneurs qui veulent passer plus vite du concept au prototype ; aux designers et aux artistes qui trouvent de nouveaux moyens d’expression ; aux étudiants désireux d’expérimenter et d’enrichir leurs connaissances pratiques en électronique, en <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Conception_et_fabrication_assist%C3%A9es_par_ordinateur">conception et fabrication assistées par ordinateur</a>, en design ; aux bricoleurs du XXI<sup>e</sup> siècle…</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167013/original/file-20170427-15110-4ll1rb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Lorraine Fab Living Lab.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Stimulant l’innovation <em>bottom up</em>, le fab lab participe finalement à la réappropriation des technologies par les citoyens et les utilisateurs. Il contribue à spatialiser le numérique, l’ancrer sur un territoire et élargir les capacités de participation et d’intervention des citoyens sur leur quotidien, leur environnement immédiat et leur espace de vie. Il est l’endroit où s’inventeront, plus sûrement que dans les grandes entreprises et les laboratoires, les objets et les lieux de demain.</p>
<p>Concrètement, pour être appelé fab lab, un atelier de fabrication numérique doit respecter la charte fab lab, mise en place par la <a href="http://fabfoundation.org/">Fab Foundation</a>. Le lieu doit ainsi être ouvert au public et en termes d’équipements, a minima d’une machine de découpe laser, d’une machine de découpe vinyle, d’une CNC (machine à commande numérique), d’une imprimante 3D et d’un scanner 3D (une <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Kinect">Kinect</a> fait l’affaire !).</p>
<h2>Des fab lab sur-mesure</h2>
<p>Chaque fab lab prend une « couleur » propre à son contexte d’implantation, en fonction des besoins et des ressources locales. Il y a des fab lab en extension des campus, d’autres à visée éducative, d’autres orientés vers l’humanitaire, d’autres encore vers le développement artistique et le design… Ces lieux sont passionnants. Car ils se situent précisément au croisement entre la nécessité sociale d’innover « différemment » pour répondre à des problématiques locales, et une culture de la collaboration et de l’innovation ouverte issue du Web 2.0.</p>
<p>Tous combinent, chacun à leur manière, cinq fonctions correspondant à cinq publics : la simple découverte du pouvoir de faire, de fabriquer, qui s’adresse aux enfants ou aux bricoleurs ; l’éducation par l’action, qui s’adresse plutôt aux écoles et universités ; le prototypage rapide, qui s’adresse aux entrepreneurs et créateurs ; la production locale, qui répond notamment aux besoins de pays en développement, mais aussi à ceux d’artistes, designers ou bricoleurs qui ne cherchent pas la grande série ; et l’innovation, l’invention des objets, des espaces, des formes de demain.</p>
<h2>Le fab lab augmenté</h2>
<p>L’expérience est encore plus intéressante lorsque le fab lab est « augmenté », quand il est relié à la recherche, aux entreprises, aux associations, aux citoyens. Ou encore quand il devient mobile Lab. Trop souvent, les plateformes d’innovation, espace de <em>co-working</em> et tiers lieux sont en effet installés en ville. Est-ce à dire que nos territoires ruraux ne sont pas créatifs ? Qu’ils n’ont pas envie de s’inscrire dans cette aventure collective ?</p>
<p>Loin s’en faut ! C’est pourquoi, à l’initiative d’une école d’ingénieurs, l’<a href="http://www.ensgsi.univ-lorraine.fr">ENSGSI (École nationale supérieure du génie des systèmes et de l’innovation)</a>, et d’un laboratoire de recherche, l’<a href="http://laboratoire-erpi.wikispaces.com/home">ERPI (Équipe de recherche sur les projets innovants)</a> de l’Université de Lorraine, le <a href="http://www.lf2l.fr">Nomad’Lab</a> a été créé en 2014 avec le soutien financier du Conseil Régional de Lorraine et la CGPME Lorraine.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167221/original/file-20170428-12979-1brv59c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">NomadLab.</span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167220/original/file-20170428-12984-c29a71.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167220/original/file-20170428-12984-c29a71.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167220/original/file-20170428-12984-c29a71.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167220/original/file-20170428-12984-c29a71.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167220/original/file-20170428-12984-c29a71.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167220/original/file-20170428-12984-c29a71.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167220/original/file-20170428-12984-c29a71.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">NomadLab.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il entend pallier ce manque et se rendre au plus près des écoliers, des lycéens, du grand public et des entreprises (en particulier les PME) situés dans des territoires inter-urbains.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=411&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167014/original/file-20170427-15081-hls9e8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=517&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Lorraine Fab Living Lab.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Fabrique de la Société ?</h2>
<p>Bref, pour faire simple : un fab lab, c’est un lieu où :</p>
<ul>
<li><p>Les étudiants apprennent à matérialiser les idées qu’ils ont pu co-créer lors de sessions de créativité,</p></li>
<li><p>Les chercheurs cherchent et trouvent ( !) de nouveaux matériaux moins polluants pour réaliser les prototypes,</p></li>
<li><p>Les bidouilleurs viennent s’en donner à cœur joie en bricolant sur les machines pour les faire devenir des « monstres » tridimensionnels digne d’un épisode de <em>Men in Black</em> !</p></li>
<li><p>Les entreprises y trouvent une solution à leur gestion de stocks et au renouvellement sur mesure de pièces de modèles anciens qui ne sont parfois plus commercialisés…</p></li>
<li><p>Les citoyens peuvent se saisir de ressources nouvelles pour faire eux-mêmes la société de demain en passant du « Fais-le toi-même » au « Faisons le ensemble »</p></li>
</ul>
<h2>Donc un fab lab, c’est quoi ?</h2>
<p>Pour nous, aucune définition unique ne s’impose vraiment… Nous constatons que c’est un lieu où des publics éclectiques peuvent prototyper plus rapidement qu’avant et à moindre coût leurs idées, les tester et les enrichir en bénéficiant d’un collectif bienveillant. Nous espérons que ce type de lieux devienne ce que les communautés y participant veulent bien en faire… Et nous avons une certitude : c’est un lieu où l’on ne s’ennuie pas et où le savoir n’est pas corrélé à l’âge ou au diplôme… C’est peut-être cela, en fait, la 4<sup>e</sup> révolution (industrielle).</p>
<hr>
<p><em>Pour aller plus loin, visitez les sites du <a href="http://www.LF2L.fr">Lorraine Fab Living lab</a> et <a href="http://laboratoire-erpi.wikispaces.com/home">L’ERPI</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76765/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laure Morel a reçu des financements du Ministère de la Recherche, CPER 2018-2022, Région Lorraine.
Laure Morel est membre fondateur de l'Association France Living Lab.
Le Laboratoire ERPI est membre de l'association internationale des Fab Lab, la Fab Foundation et du Réseau français des Fab Lab,le RFFL.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Pascal Lhoste a reçu des financements de Conseil Régional de Lorraine, Université de Lorraine, CGPME, AGEFA PME. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Laurent Dupont ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Étudiants, chercheurs, bidouilleurs, citoyens, entrepreneurs… dans un fab lab chacun peut apprendre, innover, tester et enrichir rapidement des idées en bénéficiant d’un collectif bienveillant.Laurent Dupont, Ingénieur de Recherche , Université de LorraineLaure Morel, Professeur en Génie Industriel, Université de LorrainePascal Lhoste, Directeur ENSGSI - Université de Lorraine; cofondateur du LF2L, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/778122017-06-19T19:49:44Z2017-06-19T19:49:44ZRemixer l’éducation, c’est possible !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/174522/original/file-20170619-22138-1nm5wi1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Team Edumix.</span> </figcaption></figure><p>À l’heure de la transition numérique, l’école au sens large se retrouve à la croisée des chemins et parfois prise en étau. Entre modernes et anciens, entre les promesses d’une éducation « numérique », les peurs de se faire ubériser et les aspirations des nouvelles générations, nées avec le numérique. Pour répondre aux défis de l’école, différents passionnés de l’éducation ont créé <a href="http://www.edumix.fr/">Edumix</a>. Un format d’innovation ouverte et collaborative, sous forme d’un marathon créatif qui propose aux acteurs de l’éducation, quels qu’ils soient, de relever ensemble et en seulement trois jours de créativité intensive les grands défis auxquels l’école est confrontée aujourd’hui.</p>
<h2>Un mix dédié à l’éducation</h2>
<p>Le principe des mix a démarré sous l’impulsion de deux innovateurs de la Métropole de Lyon, Yves-Armel Martin et Christophe Monnet qui ont d’abord lancé <a href="http://www.museomix.org/">Museomix</a>, qui s’est ensuite décliné avec <a href="https://vimeo.com/127912184">Gare Remix</a> et l’année dernière avec <a href="http://www.hackmychurch.com/fr/">Hackmychurch</a>. Un musée, une gare, une église. Il ne manquait plus que l’école. </p>
<p>Cette petite équipe s’est associée avec le <a href="http://www.learninglab-network.com/">réseau des Learning Labs,</a> un ensemble de lieux d’innovation pédagogique qui compte aujourd’hui près de 70 membres, en France et à l’étranger et dans différents lieux d’éducation et de formation : collèges, lycées, universités, écoles de commerce ou d’ingénieur, centres de formation d’agents public ou privé. Ce collectif a défini le contenu et le format d’Edumix comme un bien commun utilisable par tous et dont les résultats sont ouverts et accessibles.</p>
<h2>Idéation collective et prototypage rapide</h2>
<p>Tout commence par l’accueil d’une centaine de participants au cœur d’une école. Après un briefing rapide des organisateurs, des équipes pluridisciplinaires (c’est à dire composées par exemple d’enseignants, de parents, d’élèves, de designer, d’artistes ou de codeurs informatiques) se constituent autour de projets qui les inspirent pour relever une dizaine de grands défis. Une phase d’idéation collective se met alors en place pour définir une idée forte qui pourra être réalisée.</p>
<p>L’équipe se met ensuite en action pour trois jours et deux nuits de travail intense afin d’être en mesure de présenter au grand public un prototype de son projet. Une équipe logistique et de facilitateurs, soit près de la moitié des participants assurent la bonne tenue de l’évènement en fournissant aux équipes du matériel, des conseils mais aussi de la nourriture et des moyens de communication.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/174225/original/file-20170616-10505-17wainu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/174225/original/file-20170616-10505-17wainu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/174225/original/file-20170616-10505-17wainu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/174225/original/file-20170616-10505-17wainu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/174225/original/file-20170616-10505-17wainu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/174225/original/file-20170616-10505-17wainu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/174225/original/file-20170616-10505-17wainu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Edumix : présentation.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Répondre aux grands défis de l’école</h2>
<p>Edumix propose à chaque école de définir elle-même ses défis. Par exemple, renouveler les lieux et les rythmes d’apprentissage car avec le savoir en ligne, le temps et l’espace éducatif sont bouleversés. Revoir également les questions d’évaluation, de notes, de mesure de l’apprentissage à l’heure de l’<em>adaptive learning</em>, de l’enseignement personnalisé et des big data. C’est aussi l’occasion d’explorer la question de la connectivité des élèves avec les opportunités et les risques que cela comporte. Au total, une dizaine de défis sont proposés allant de l’apprentissage de l’entreprenariat à la gouvernance de l’école en passant par la redéfinition de la pause méridienne.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/174271/original/file-20170617-18169-16530hr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/174271/original/file-20170617-18169-16530hr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/174271/original/file-20170617-18169-16530hr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/174271/original/file-20170617-18169-16530hr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/174271/original/file-20170617-18169-16530hr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/174271/original/file-20170617-18169-16530hr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/174271/original/file-20170617-18169-16530hr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Edumix presentation.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Des réalisations matérielles ou immatérielles</h2>
<p>Les prototypes qui sont présentés à la fin de l’évènement ne doivent pas être « hors-sol » mais ils doivent s’incarner dans le lieu qui est remixé et être tangibles. Ces prototypes peuvent en revanche être de plusieurs natures : numériques comme une application mobile ou sur Internet, un logiciel, une base de donnée, un jeu vidéo ou matériels comme un prototype de table, de chaise, de tableau ou d’un autre support pédagogique. Les participants peuvent aussi produire une méthode, un processus, matérialisé dans une charte, un guide, une vidéo, une bande dessinée.</p>
<p>Il n’y a pas de limites à la créativité proposée et aux formats de restitution. On peut imaginer par exemple un boîtier qui allume et coupe la connexion dans une classe, une application qui permette d’évaluer le plaisir d’apprendre, de collecter ses émotions, ses expériences et ses compétences au fil des heures, un guide pratique pour rendre sa classe mobile et évolutive, une formation à l’entrepreneuriat avec les entreprises du quartier, la création d’une cantine bio impliquant les habitants…</p>
<p>Les idées foisonnent et le principe est de ne pas s’auto-censurer et de s’appuyer sur la force collective. Une idée géniale est surtout une idée qui devient réalité grâce à l’implication et aux talents de chacun.</p>
<h2>Des prototypes et une expérience humaine à vivre</h2>
<p>Au-delà de la production de prototypes, dont certains seront sûrement très innovants et utilisables après cette phase de prototypage, Edumix est aussi une formidable opportunité de faire bouger les lignes de l’école, de façon positive et collective. C’est une expérience apprenante où chaque participants ressort différent et grandi. La mixité revendiquée et imposée des équipes permet de faire travailler ensemble des gens différents ayant sans doute une vision différente mais complémentaire de l’école. C’est aussi une expérience humaine très forte, stimulante, créative et enthousiasmante qui permet des rencontres improbables, soude des liens et féconde des projets d’avenir.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/174223/original/file-20170616-14532-wo9igx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/174223/original/file-20170616-14532-wo9igx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/174223/original/file-20170616-14532-wo9igx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/174223/original/file-20170616-14532-wo9igx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/174223/original/file-20170616-14532-wo9igx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/174223/original/file-20170616-14532-wo9igx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/174223/original/file-20170616-14532-wo9igx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">retour sur le 1ᵉʳ Edumix.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un mouvement plus large va-t-il naître ?</h2>
<p>La première édition s’est tenue en février dans un <a href="http://www.edumix.fr/2017-le-lieu/">collège du quartier des Minguettes à Vénissieux dans le Rhône</a>. Et une deuxième édition est prévue du <a href="http://www.edumix.fr/octobre-2017-evenement-a-venir/">11 au 13 octobre à Telecom Saint-Étienne</a>, une école d’ingénieur du numérique qui a l’ambition d’être une école de son temps avec de nouveaux espaces de formation et de nouvelles manière d’apprendre. Une centaine de participants ont envoyé leur candidature de toute la France et d’horizons très divers.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/174222/original/file-20170616-545-1gp3vo4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/174222/original/file-20170616-545-1gp3vo4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=209&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/174222/original/file-20170616-545-1gp3vo4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=209&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/174222/original/file-20170616-545-1gp3vo4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=209&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/174222/original/file-20170616-545-1gp3vo4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=263&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/174222/original/file-20170616-545-1gp3vo4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=263&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/174222/original/file-20170616-545-1gp3vo4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=263&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Remix.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>De nombreux membres du réseau des <em>learning labs</em> souhaitent aussi prévoir des Edumix un peu partout en France dans une grande diversité de lieux d’éducation. Sans doute le début d’une petite révolution dans le monde éducatif.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/77812/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean Pouly est co-fondateur du hackathon EDUMIX avec ERASME et le réseau des Learning Labs.</span></em></p>Le format de hackathon Edumix permet de relever les grands défis de l’éducation en associant différents talents dans des équipes pluridisciplinaires : rythmes, lieux, évaluation, terrain, etc.Jean Pouly, Expert en économie numérique, Université Jean Monnet, Saint-ÉtienneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/769052017-06-01T22:15:34Z2017-06-01T22:15:34ZInnover aujourd’hui dans les grandes entreprises<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/171417/original/file-20170530-16280-1447242.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Innnovation.</span> <span class="attribution"><span class="source">Pixabay</span></span></figcaption></figure><p>Les travaux qui ont donné le <a href="http://www.institut-entreprise.fr/les-publications/innover-en-entreprise-de-lincantation-laction">récent rapport de l’Institut de l’entreprise sur l’innovation</a> que j’ai rédigé mettent en perspective les nouvelles pratiques pour manager l’innovation dans les grandes entreprises. Leur capacité à relever les défis d’aujourd’hui repose sur l’adoption d’une nouvelle culture d’entreprise propre à les aider à se transformer en profondeur.</p>
<h2>Innover : un défi sans cesse renouvelé</h2>
<p>Contrairement à des idées reçues, l’innovation ne s’improvise pas et son management évolue en fonction des défis auxquels les entreprises sont confrontées. Les enjeux sont aujourd’hui multiniveaux et le temps d’adaptation est de plus en plus contraint modifiant bien des repères pour les entreprises. Il s’agit de changements technologiques comme la connectivité, le big data, intelligence artificielle ainsi que des changements sociétaux liés aux nouveaux usages et aspirations individuels et collectifs. <a href="https://www.researchgate.net/profile/David_Masse/publication/286346617_L'economie_collaborative_entre_utopie_et_big_business/links/57f76e2608ae8da3ce58f0c9/Leconomie-collaborative-entre-utopie-et-big-business.pdfhttp://example.com/">L’économie collaborative</a> illustre l’imbrication de ces changements. Il ne s’agit plus seulement de développer de nouveaux produits ou services mais plus largement de repenser toutes les fonctions, pratiques et schémas de pensée pour créer de la valeur.</p>
<p>Quelle est la réponse des grandes entreprises françaises face à ces défis ? Elle passe par l’adoption de stratégies d’<a href="http://s3.amazonaws.com/academia.edu.documents/30503779/open_innovation.pdf?AWSAccessKeyId=AKIAIWOWYYGZ2Y53UL3A&Expires=1496130010&Signature=tooCOzvXRzBfGrozYuKK%2F09oxKs%3D&response-content-disposition=inline%3B%20filename%3DOpen_innovation_The_new_imperative_for_c.pdf">innovation ouverte</a> c’est-à-dire de dispositifs qui permettent une combinaison systématique d’actifs et de ressources internes et externes à l’entreprise. Les initiatives sont aujourd’hui à la fois nombreuses et variées : <a href="http://www.newpic.fr/02group2015openlabsdownload.html">open labs</a>, crowdsourcing, hackathons, accélérateurs et corporate venture… Si on constate une professionnalisation croissante de ces dispositifs, les résultats en termes de création de valeur sont encore rarement au rendez-vous. Plus inquiétant, on observe que ces initiatives aboutissent à des organisations « duales ». Cohabitent sans toujours se comprendre au sein de la même entreprise, des cultures fondamentalement différentes. D’un côté, de nouvelles entités orientées « innovation ouverte » tournées vers le futur, la créativité, la prise de risques et les nouveaux modèles de relations services-produits. Dans les autres entités, les activités sont drivées par la rentabilité de court terme et le plus souvent enfermées dans des schémas d’action éprouvés, la verticalisation et la spécialisation des fonctions ainsi que le contrôle managérial.</p>
<p>Comment sortir de l’impasse ? Tout d’abord, on oublie trop souvent que l’innovation ouverte doit rimer avec une capacité d’adaptation continue de l’entreprise à son environnement. Or celle-ci est souvent sous-estimée par les entreprises. Elle passe par une modification en profondeur de la culture d’entreprise.</p>
<h2>Une nouvelle culture d’innovation, oui, mais laquelle ?</h2>
<p>La <a href="http://s3.amazonaws.com/academia.edu.documents/34816857/schein.pdf?AWSAccessKeyId=AKIAIWOWYYGZ2Y53UL3A&Expires=1496130440&Signature=IJ2LsT9QLTyZUPzBjL85GBGHLrs%3D&response-content-disposition=inline%3B%20filename%3DOrganizational_Culture.pdf">culture d’entreprise</a> repose sur un ensemble de valeurs et de schémas d’actions jugés comme légitimes et sources d’efficacité pour l’organisation. Ciment de l’entreprise, elle lui permet en tant que communauté humaine de répondre rapidement aux besoins du marché. L’étude récente de l’institut de l’entreprise met en évidence comment les responsables d’entreprises perçoivent aujourd’hui les dimensions clés de la culture de l’entreprise pour s’adapter aux défis technologiques et économiques.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/171322/original/file-20170529-25219-1l4mpzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/171322/original/file-20170529-25219-1l4mpzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/171322/original/file-20170529-25219-1l4mpzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/171322/original/file-20170529-25219-1l4mpzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/171322/original/file-20170529-25219-1l4mpzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/171322/original/file-20170529-25219-1l4mpzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/171322/original/file-20170529-25219-1l4mpzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/171322/original/file-20170529-25219-1l4mpzb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Source : Mérindol (2017), « Innover en entreprise : de l’incantation à l’action », note de l’Institut de l’entreprise</em></p>
<h2>Comportement entrepreneurial, autonomie et prise de risque</h2>
<p>On l’oublie trop souvent : l’innovation est avant tout une aventure humaine qui requiert de l’engagement, de la motivation, de la prise de risque, de la créativité. Elle requiert des talents qui se définissent autant par leurs domaines de compétences que par leurs états d’esprit… La capacité d’adaptation continue de l’entreprise est ainsi intrinsèquement liée à l’adoption de <a href="https://books.google.fr/books?hl=en&lr=&id=T_L_1ZnMRLMC&oi=fnd&pg=PR5&dq=bouchard+intrapreneuriat&ots=7_JnJOcJUz&sig=Gsv9jtijxaGNW4fdUrS6Jgp44nI#v=onepage&q=bouchard%20intrapreneuriat&f=false">comportements entrepreneuriaux</a>.</p>
<p>Pour tenter de développer de tels comportements, les entreprises mettent en place une variété d’initiatives : incubateurs internes, hackathons, actions de sensibilisation aux démarches entrepreneuriales ou encore au design thinking… De plus en plus, les entreprises cherchent à faire travailler leurs salariés en mode startups dans des <em>open spaces</em> où ils vont pouvoir directement échanger avec des entrepreneurs, espérant ainsi une « contagion » progressive de l’état d’esprit entrepreneurial. C’est le cas du <a href="https://www.airbus-bizlab.com/">Bizlab d’Airbus</a> ou encore des programmes intrapreneuriaux développés par <a href="http://www.engie.com/groupe/strategie/">Engie</a>.</p>
<h2>Transversalité/flexibilité, ouverture externe et approche fondée sur les usagers</h2>
<p>Plus que jamais l’innovation a besoin de diversité. Pour cela, il faut créer de la transversalité dans l’organisation. Combiner des domaines de connaissances qui ne sont pas a priori mis en relation de manière structurelle constitue un défi autant cognitif qu’organisationnel. Il faut de la flexibilité structurelle pour faire travailler ensemble les individus a priori aux extrémités opposées de la création de valeur. Ainsi la frontière des projets ne doit plus être figée. Les règles doivent permettre d’en modifier facilement les frontières en termes de compétences, de fonctions, d’objectifs. Développer la transversalité c’est aussi promouvoir un état d’esprit qui tend à privilégier une approche transdisciplinaire des problèmes et des solutions à une approche focalisée sur l’expertise spécialisée.</p>
<p>Cette transversalité est essentielle pour réussir les collaborations avec les acteurs extérieurs. Ainsi les partenariats avec les startups ne doivent pas se réduire aux relations avec les centres de R&D de l’entreprise mais ils doivent inclure les entités en charge de la commercialisation et de la production. L’entreprise doit en quelque sorte organiser le continuum entre l’interne et l’externe comme c’est le cas pour IBM. La plateforme Bluemix permet à IBM de proposer non seulement ses solutions technologiques mais aussi celles des startups avec lesquelles elle entretient des collaborations de recherche.</p>
<p>Cette transversalité est ainsi indispensable pour prendre en compte l’<a href="https://deepblue.lib.umich.edu/bitstream/handle/2027.42/35225/20015_ftp.pdf">expérience usager et la cocréation avec les clients</a>. Ces nouvelles approches sont à la fois la source de l’identification des opportunités nouvelles et un élément central des processus de conception des produits et services. Pour cela il ne suffit pas seulement de construire des plateformes de <a href="https://riunet.upv.es/bitstream/handle/10251/56904/Towards%20an%20integrating%20crowdsourcing%20definition%20-%20Enrique%20Estell%E9s%20%20Fernando%20Gonz%E1lez_.pdf?sequence=3http://example.com/">crowdsourcing</a> mais aussi de repenser les modes de travail dans l’entreprise.</p>
<blockquote>
<p>« Embarquer l’interne dans les changements représente la clé de succès. Il faut décloisonner en [interne] et penser l’expérience client comme une chaîne continue entre la conception et la relation finale avec le client » précise Jérôme Bergeret, directeur du Fashion lab de Dassault Systèmes dans le cadre du rapport de l’institut de l’entreprise sur l’innovation.</p>
</blockquote>
<h2>Acquérir une nouvelle culture de l’innovation : oui mais comment ?</h2>
<p>Changer la culture de l’entreprise ne repose pas nécessairement sur des méthodes complexes mais plutôt sur des actions concrètes quotidiennes impliquant une évolution des pratiques managériales.</p>
<p>Tout d’abord il faut convaincre les salariés que faire autrement est possible. Pour cela l’important est de donner du sens aux actions individuelles et collectives. L’étude de l’institut de l’entreprise montre à quel point la perte de sens au sein des grandes entreprises constitue un défi majeur. Donner du sens c’est aider le salarié à situer sa contribution dans la stratégie et création de valeur de l’entreprise. Elle passe par une communication continue sur le pourquoi et le résultat de l’action des salariés par rapport aux projets d’entreprise. Donner du sens c’est aussi aider les individus à concrétiser leurs idées.</p>
<blockquote>
<p>« Quand on aide les gens à concrétiser leurs idées, ils se sentent au cœur de la stratégie de l’entreprise… Une forte motivation émerge qui créé de la mobilisation. » précise Frédéric Allard, IBM, dans le cadre du rapport de l’institut de l’entreprise sur l’innovation.</p>
</blockquote>
<p>Ensuite, le management doit être « inclusif ». Innover ne doit pas être l’apanage de quelques spécialistes. C’est la condition pour réussir la transversalité. Du juridique, au marketing en passant par les ingénieurs, la logistique et le commercial, l’innovation est l’affaire de tous. « L’inclusivité » peut être managée aussi bien à travers les projets qu’à travers l’espace de travail : par exemple les open space gomment les différences hiérarchiques et réduisent les obstacles pour travailler avec d’autres fonctions. Dans un <em>open space</em>, l’organisation de l’espace et des métiers mobilisés dépend du projet et non pas des relations hiérarchiques existant entre les individus.</p>
<p>La fonction de manageur évolue alors : celui-ci devient plus un coach qui challenge les salariés que celui qui contrôle et organise les tâches. Pour cela, il doit pouvoir s’appuyer sur une politique des ressources humaines qui favorise la gestion des talents et non les carrières linéaires. Le manageur a aussi pour fonction de créer des ponts entre les entités et les fonctions. Ainsi il n’est plus celui qui participe à la création de silos dans l’entreprise mais celui qui organise la fluidité des échanges et la transversalité. Enfin il doit être l’acteur d’une gestion explicite et positive de l’échec.</p>
<p>L’échec ne doit pas être caché et vécu comme un évènement négatif mais il doit être considéré comme une étape (nécessaire) qui permet d’apprendre et qui contribue au processus de réadaptation de l’entreprise. Manager l’échec veut donc dire que le manageur doit aider les salariés à en tirer les leçons tout en évitant que les conséquences de l’échec soient visibles à l’extérieur de l’entreprise.</p>
<h2>Changer de culture d’entreprise pour adopter quel modèle d’organisation ?</h2>
<p>Changer de culture de l’entreprise reviendrait-il à dire que les grandes entreprises doivent adopter le modèle d’<a href="http://www.hbrfrance.fr/chroniques-experts/2015/05/7130-les-7-points-qui-differencient-une-entreprise-liberee-dune-organisation-classique/">entreprise libérée</a> ? En partie oui, car les principes évoqués précédemment y sont similaires. Toutefois on ne doit pas oublier que l’entreprise libérée peut difficilement s’appliquer en l’état dans des entreprises de très grande taille où la rationalisation et la stabilité vont de pair avec une capacité d’investissement…</p>
<p>Les grandes entreprises sont surtout face aux défis de reconstruire leur modèle organisationnel en cherchant à guérir d’un mal qui s’est généralisé : la création de silos, une bureaucratisation galopante qui rend l’entreprise adverse au risque et qui implique une perte de sens de l’action quotidienne.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76905/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Mérindol, responsable de la chaire newPIC de Paris School of Business (PSB), a été rapporteur de l'observatoire de l'innovation de l'institut de l'entreprise en 2015-2016.</span></em></p>Comment passer de la mise en place de dispositifs dédiés d’innovation ouverte à une nouvelle culture de l’innovation qui impacte l’ensemble de l’organisation ?Valérie Mérindol, Enseignant chercheur en management de l'innovation et de la créativité, PSB Paris School of BusinessLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/768812017-05-21T19:49:37Z2017-05-21T19:49:37ZFab lab : do it yourself, hackers et autres open source<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/167774/original/file-20170503-20192-i0e9k0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le fab lab est a votre service.</span> </figcaption></figure><p>Si vous parlez de fab lab à un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Nerd">nerd</a> ou à un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Geek">geek</a>, vous verrez sûrement la lueur de l’innovation dans ses yeux. De prime abord, il s’agit d’un espace ouvert où se côtoient diverses machines, certaines incontournables tels que les scanners et <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Impression_3D">imprimantes 3D</a> mais aussi des machines à découpe laser, ou encore des ateliers d’électroniques. Ces espaces sont également déroutants lorsqu’on y aperçoit des ingénieurs et des designers manipuler des objets traditionnellement réservés à l’éveil des enfants (pâte à modeler,legos…). Mais attention, il serait réducteur d’y voir une évolution 2.0 des garages californiens des années 1970. Si l’esprit que l’on y trouve ne peut se dérober à cette lignée, il s’agit avant tout de nouveaux espaces pour l’industrie de demain.</p>
<p>Depuis peu, les fab lab poussent dans nos villes comme des champignons. Ils s’inscrivent dans une mutation plus large de nos sociétés, où la collaboration et la mise en commun fondent une nouvelle forme d’industrie. Si les potagers communautaires de nos villes permettent à nouveau de tisser des liens entre les habitants d’un même quartier, les fab lab réinventent un riche et dense tissu industriel, où les start-up remplacent la traditionnelle recherche et développement. Les usagers forment une population extrêmement diversifiée, depuis l’étudiant en ingénierie ou en design en passant par le créateur de start-up jusqu’à l’industriel aguerri. Mais en ce lieu, tous partagent un même espace, les mêmes outils, les mêmes matières premières… et leur savoir-faire.</p>
<h2>De l’innovation naît l’éducation</h2>
<p>Les fab lab sont nés à la fin des années 1990 au Media Lab de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Massachusetts_Institute_of_Technology">Institut de technologie du Massachusetts</a> (MIT), sous la tutelle du Professeur Neil Gershenfeld, du Center for Bits and Atoms. Il est alors question de révolutionner notre modèle industriel. Et la mouvance des fab lab s’appuie sur un corpus de doctrines où se marient éducation, économie circulaire et innovation. L’idée ? Permettre à chacun d’expérimenter pour apprendre, et de créer pour recycler. Différents courants technophilosophiques se sont cristallisés en ces lieux, mais la liste ne saurait en être exhaustive. Les trois suivantes ont cependant transcendé leur espace-temps.</p>
<ul>
<li><p>Le <em>do it yourself</em> pousse chacun à concevoir son objet lui-même. Outre le fait d’inventer un objet unique, son créateur développe alors ses compétences pratiques et théoriques. Lors du processus de création, il est en effet amené à élaborer sa propre formation, en faisant lui-même sa veille technologique. Les <em>workshops</em> largement déployés dans les entreprises en sont une résultante, où les participants apportent de nouvelles idées en les développant.</p></li>
<li><p>Le courant <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hacker_(programmation)">hacker</a> incite à démonter et à détourner l’usage d’anciens biens de consommation afin de leur donner une nouvelle vie. Ils inversent l’ordre établi du productivisme, en faisant du produit la source de la matière à retransformer. Un événement majeur et aujourd’hui incontournable de cette mouvance : le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Hackathon">hackathon</a>. Il s’agit de répondre à une problématique donnée dans un temps imparti et à partir de matières premières à recycler. Par exemple : « Comment fabriquer une porte des étoiles à partir d’un grille-pain usagé ? »</p></li>
<li><p>La communauté <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Open_source"><em>open source</em></a> joue un rôle capital dans la dynamique des fab lab. Il s’agit d’une philosophie et d’un modèle économique où le savoir est gratuit et échangé librement, afin d’améliorer les produits. La plus-value économique ne réside donc plus dans le produit, mais dans le service associé. Elle apporte d’une part la matière première immatérielle tels que les logiciels, langages informatiques, et d’autre part des tutoriels pour partager le savoir-faire.</p></li>
</ul>
<p>La démocratisation de ces espaces est le combustible de cette révolution en marche. Les communautés d’usagers de ces lieux en font des sphères d’apprentissage, de partage et d’innovation, où le challenge consiste en un jeu face à soi-même, face à sa capacité de créer, d’innover. Chaque usager devient à la fois ingénieur, designer et inventeur explorant l’innovation en y mêlant plusieurs disciplines… Il fait des fab lab le lieu privilégié de la pluridisciplinarité, non loin de la philosophie d’antidisciplinarité du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/MIT_Media_Lab">Media Lab</a>…</p>
<h2>De la diversité naît une nouvelle économie</h2>
<p>Ce nouvel espace de l’innovation par le partage et l’autoréalisation ouvre une nouvelle ère pour l’économie de demain. Il met à mal notre industrie actuelle, fondée en un bloc monolithique où chaque département est intégré dans une structure pyramidale pilotée par le management, et où les cycles linéaires de développement d’un produit se trouvent tous dans une économie de marché. </p>
<p>La mouvance autour des fab lab change drastiquement ce paradigme, par une structure industrielle plane, circulaire et décentralisée. En d’autres temps, la réalisation d’un produit nécessitait son incubation au sein d’une structure fournissant les services supports utiles à la réalisation. Désormais, Internet ouvre la porte au <em>crowd concept</em>, <em>funding</em>, <em>sourcing</em>, et autres dérivés de l’émergence participative.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167190/original/file-20170428-12979-120twv8.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Jerrys sous Emmabuntüs lors de l’anniversaire des deux ans du fab lab de Gennevilliers (France).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Vallade/Wikimedia</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Aujourd’hui une idée naît, se transforme en prototype au sein d’un fab lab, prototype qui permettra de promouvoir l’idée initiale à travers une brève vidéo explicative, vidéo qui servira de support à la communication, communication qui incitera des donateurs potentiels à financer le projet et donc à forger un premier marché de consommateurs. La production en série est alors sous-traitée et pilotée à distance, tandis que les relais de livraison sont désormais sur les plateformes de livraison à domicile. Mais il ne faut pas oublier que cet objet est né dans un fab lab. Et pour s’assurer l’attrait de la communauté, cet objet devra pouvoir être <em>hacké</em> à son tour afin de construire un nouveau produit.</p>
<p>Ainsi l’objet se verra augmenté par des interfaces de communication open-source et des tutoriels. Dans ce modèle, toutes les phases sont gérées par des entités commerciales et industrielles disjointes. Le financement et la promotion sont assurés par les consommateurs eux-mêmes et la communauté des fab lab, tandis que la communauté Open Source se voit nourrie par un nouveau produit muni de tutoriels. L’explosion des imprimantes 3D en est un parfait exemple. Un grand nombre de ces projets tels que <a href="https://formlabs.com/blog/ship-a-kickstarter-product/">Formlabs</a> ont été financés par une plateforme de <em>crowdfunding</em> et sont désormais des outils incontournables dans les fab lab eux-mêmes.</p>
<h2>De la consommation naît le recyclage</h2>
<p>Cette mouvance s’inscrit également dans une économie durable où les objets, depuis la table en bois jusqu’aux dispositifs électroniques les plus sophistiqués, entrent dans des cycles de vie circulaires. Les objets sont soit réparés, recyclés ou hackés. C’est désormais possible grâce aux récents développements des approches modulaires tant en électronique qu’en informatique. Les célèbres kits <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Arduino">Arduino</a> permettent d’interchanger les composants électroniques et leurs codes logiciels associés, entre différents fabricants ou même entre différents objets. Si à l’origine cette technologie a été conçue pour prototyper rapidement, elle a pris depuis une dimension industrielle où les composants modulaires s’intègrent directement dans les produits finis tels que les mini-PC de type <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Raspberry_Pi">Raspberry Pi</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=406&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=406&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=406&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167777/original/file-20170503-21649-12wsgih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Sensor module kit.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’emballage n’est pas en reste. Si certaines matières sont naturellement retransformables tels que le bois ou les métaux, le plastique lui aussi a désormais un cycle de vie circulaire. De nombreuses entreprises se spécialisent dans le recyclage plastique pour produire la matière première des imprimantes 3D. Il ne faudra plus attendre longtemps désormais pour voir apparaître des compacteurs où nos objets plastiques usagés seront broyés pour produire des bobines de plastique prêtes à imprimer. </p>
<p>La prolifération des fab lab dans chaque pays, villes et quartiers laisse entre-apercevoir un monde où les objets seront téléchargés et imprimés dans le fab lab du coin par nos soins, à partir d’anciens objets dont nous n’avons plus l’utilité. Ces mêmes plans d’impression et de conception seront eux-mêmes améliorés par chaque usager, qui pourra alors s’empresser de le partager avec la communauté et gagner en notoriété.</p>
<p>Finalement les questions d’éducation, d’économie, d’industrie et de déchets n’ont jamais été aussi proches, en un même lieu, avec les mêmes outils et la même matière première. Les fab lab ne demandent qu’à être adoptés par la nouvelle génération.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76881/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Clément Duhart ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Il serait réducteur de voir dans les fab lab une simple évolution 2.0 du garage californien des années 70. Car il s’agit avant tout de nouveaux espaces pour l’industrie de demain.Clément Duhart, Enseignant Systèmes Embarqués, Docteur en Informatique, Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/767232017-05-15T19:08:46Z2017-05-15T19:08:46ZLes tiers lieux 2.0, une nouvelle façon d’appréhender le monde ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/169207/original/file-20170514-3678-3tbzub.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C107%2C2038%2C1367&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Makespace.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://visualhunt.com/f/photo/9425952261/609f085dcf/">LaurieJ/Visual Hunt </a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Pourquoi parle-t-on de tiers lieux ? Dans le premier chapitre de son ouvrage <a href="https://books.google.fr/books/about/The_Great_Good_Place.html"><em>The Great Good Place</em></a>, paru en 1989 le sociologue américain Ray Oldenburg souligne ce qu’il nomme le « problème de lieux » aux États-Unis (« problem of place in America ») ; la vie des Américains est fragmentée et partagée entre le lieu de travail (<em>second place</em>) et celui de résidence (<em>first place</em>).</p>
<p>Il n’existe pas de lieux intermédiaires, des lieux de socialisation informelle permettant de vivre en communauté. Ceci a, selon Oldenburg, des répercussions sur la démocratie mais aussi la santé publique et la productivité des travailleurs américains.</p>
<h2>Les tiers lieux : de quoi parle-t-on ?</h2>
<p>Il manque donc un lieu informel d’exercice de vie publique à savoir un lieu se situant entre le lieu de travail et celui de résidence, un troisième lieu, un tiers lieu (<em>third place</em>). Pour Oldenburg, le tiers lieu prend, par exemple, la forme du café en France. C’est le lieu de l’exercice d’une vie publique à l’instar de l’agora athénienne.</p>
<p>Selon le même auteur, le tiers lieu a plusieurs caractéristiques remarquables : c’est un terrain neutre (ni chez soi, ni chez quelqu’un d’autre) qui égalise les statuts sociaux et où l’activité principale est la conversation.</p>
<p>Le tiers lieu se doit d’être facile d’accès. Le tiers lieu n’existe vraiment que par ses habitués. Ainsi, le tiers lieu attire plus par ceux qui le fréquentent que par ses qualités intrinsèques d’autant que ce lieu garde une apparence plutôt simple ; ni le lieu, ni les habitués ne cherchent à se distinguer.</p>
<p>Quoi qu’il en soi l’ambiance générale est plutôt joyeuse et conviviale notamment par opposition à l’ambiance au travail. En définitive le tiers lieu est une maison loin de la maison (<em>a home away from home</em>) où l’on peut être soi-même.</p>
<p>Oldenburg dresse une liste de tiers lieux dès le titre de son ouvrage : <em>The Great Good Place : Cafes, Coffee Shops, Bookstores, Bars, Hair Salons and Other Hangouts at the Heart of a Community</em>.</p>
<p>Tous ces lieux contribueraient à revivifier les communautés, à dynamiser la vie politique, à contrebalancer le délitement des liens sociaux. Ils seraient un lieu d’expression de la démocratie, un espace public où les idées peuvent circuler librement.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167744/original/file-20170503-21649-1h8pdza.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Makers.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>De nouveaux tiers lieux à l’ère du numérique ?</h2>
<p>L’espace public a trouvé une nouvelle dimension à l’ère numérique notamment à travers les réseaux sociaux. Pour autant l’importance de la dimension physique des tiers lieux n’a pas disparu. Dans la lignée du mouvement des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Culture_maker"><em>makers</em></a> des <em>fabrication laboratories</em> (fab labs) ont vu le jour inspirés par le cours du professeur du Massachusetts Institute of Technology (MIT) Neil Gershenfeld : <em>How to Make (Almost) Anything</em>.</p>
<p>En France, le <a href="http://wiki.fablab.is/wiki/Main_Page">wiki des fab labs</a>, en répertorie 99, un record mondial. Un fab lab se doit de respecter quatre critères définis par la <a href="http://fabfoundation.org/about-us/">FabFoundation</a> : accessibilité, adhésion à la <a href="http://fab.cba.mit.edu/about/charter/">charte des fab labs</a> (du MIT), mise à disposition de machines (découpeuse laser, imprimante 3D, etc.) et contribution au réseau international des fab labs.</p>
<p><em>Makerspace</em>, <em>hackerspace</em>, <em>hacklab</em> sont des appellations qui renvoient à des réalités voisines (mise à disposition de matériel, fonctionnement sur un principe de communauté de pratiques, éthique valorisant la liberté d’accès, la collaboration, l’autonomie, la solidarité). Les <a href="http://hackerspaces.org">hackerspaces</a> sont plutôt orientés vers le partage de ressources et de savoirs liés à l’informatique (software et/ou hardware).</p>
<p>Le <a href="https://wiki.hackerspaces.org">wiki des hackerspaces</a> recense plus de 1 271 hackerspaces actifs dans le monde. Quant aux <a href="http://blog.coworking.com/about/">espaces de coworking</a> qui rompent l’isolement du travailleur indépendant naissent à San Francisco en 2005. Le site <a href="http://coworking.com">coworking.com</a> souligne les valeurs du mouvement coworking : <em>community, openness, collaboration, sustainability, et accessibility</em>. Toujours selon ce site plus de 10 000 espaces de coworking sont répertoriés dans le monde.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167746/original/file-20170503-21641-3rx7qy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ces différents lieux partagent les spécificités qui caractérisent les tiers lieux selon l’approche d’Oldenburg (accessibilité, convivialité, égalitarisme, discussion). Ces spécificités ne peuvent être rencontrés, comme il se doit, ni dans le lieu de résidence, ni dans le lieu de travail.</p>
<p>Pourtant les personnes travaillent dans ces nouveaux tiers lieux. Mais l’on ne fait pas que travailler, on se forme, à la programmation dans les hackerspaces, à l’utilisation de nouvelles machines (découpeuse laser, imprimante 3D) dans les fab labs et à beaucoup d’autres choses car la démarche d’apprentissage est au cœur de ces nouveaux tiers lieux comme elle était au cœur du premier fab lab du MIT.</p>
<p>L’apprentissage entre égaux suppose la collaboration. Cette dernière est facilitée par la structuration de communautés (d’usagers, de coworkers, d’adhérents, etc.). Se côtoyer ne suffit pas, encore faut-il adhérer à un minimum de valeurs communes que certains qualifient de « californiennes » (méritocratie, liberté d’entreprendre, liberté d’accès) et d’autres comme relevant d’une éthique de hacker/maker (décrite par Michel Lallement, dans l’<em>Age du faire</em>, 2015).</p>
<p>On forme ainsi des communautés réunies par une volonté plus ou moins exprimée d’expérimenter, de tester, de bricoler (selon la formule de Claude Lévi-Strauss tirée de La Pensée sauvage) de nouvelles façons de faire. Dans le développement de logiciel on dirait « forker » c’est-à-dire de prendre un chemin de traverse (de ce nouvel embranchement naît une fourche – <em>fork</em> en anglais). Dans le langage usuel, on parlerait plutôt d’innover.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=577&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=577&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=577&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=725&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=725&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/167747/original/file-20170503-21612-15e9avc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=725&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Des tiers-lieux 2.0 ?</h2>
<p>Internet a profondément changé les tiers-lieux. Le Web 1.0 était une collection de pages interconnectées sur Internet qu’il était possible uniquement de lire. Le <a href="http://darcyd.com/fragmented_future.pdf">Web 2.0</a> a tout changé. Les évolutions techniques ont permis aux utilisateurs-lecteurs de devenir producteurs de contenu (d’être proactif), de former des communautés et de collaborer. La proactivité (l’autonomie), la construction de communautés et la collaboration semblent être aujourd’hui la norme dans ces nouveaux tiers lieux, que l’on peut qualifier de « 2.0 ». Côtoyer ces tiers lieux 2.0 ouvre des perspectives.</p>
<p>Ni tout à fait chez soi, ni tout à fait un lieu de travail (traditionnel). Un entre-deux qui reflète la manière dont la conception du travail change chez des travailleurs dont la matière première à utiliser/transformer est avant tout le savoir et qui sont, qui plus est, souvent natifs du monde numérique (<em>digital native</em>). Ces travailleurs ne peuvent plus se satisfaire des formes organisationnelles héritées du taylorisme.</p>
<p>Quoi de mieux alors que des organisations qui fonctionnent comme des espaces de rencontre, de mise en réseau et dont les valeurs croisent celles des tiers lieux canoniques (espace d’expression démocratique) avec celles de l’éthique hacker (méritocratie, liberté, confiance, coopération, réciprocité, collaboration, ouverture, autonomie, responsabilité). Nous retrouvons ici une approche de l’organisation qui se centre sur les individus et en particulier leur liberté, leur responsabilité, leur bien être au travail et ce, dans une ambiance joyeuse où l’on peut être soi-même.</p>
<p>Tout n’est sans doute pas parfait dans les tiers-lieux 2.0. Ils ne révolutionnent pas de fond en comble notre manière de penser. Ils sont juste les témoins actifs de changements de société et nous permettent d’ancrer physiquement nos questionnements en matière <a href="https://theconversation.com/du-collaboratif-a-luniversite-les-academiques-doivent-ils-devenir-des-makers-71494">d’apprentissage et d’éducation</a>, <a href="https://theconversation.com/les-tiers-lieux-quelles-opportunites-pour-comprendre-et-transformer-les-pratiques-de-travail-75650">d’avenir du travail</a>, de <a href="https://theconversation.com/les-collectifs-artistes-comme-heterotopies-organisationnelles-un-modele-a-suivre-66373">management des organisations</a> ou même <a href="https://theconversation.com/la-politique-ne-se-fait-pas-a-la-corbeille-doit-elle-se-faire-dans-les-tiers-lieux-76648">d’exercice de la politique</a>.</p>
<p>Ils font, en tout cas, l’objet d’une attention croissante des chercheurs qui les voient pour ce qu’ils sont, un <a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com">très convivial et très puissant laboratoire d’idées</a>.</p>
<p>Pour en savoir plus sur ces travaux et réflexions, nous vous invitons à lire la note de synthèse publiée par le groupe RGCS sur ce sujet, <a href="https://collaborativespacesstudy.files.wordpress.com/2016/10/synthese_des_recherches_rgcs_2015_2016_vff.pdf">« Nouvelles pratiques de travail : la fin du clivage salariat-entrepreneuriat ? »</a> ainsi que l’article <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01512929">« Que peut-on apprendre des tiers lieux 2.0 ? »</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76723/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>David Vallat ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En quoi les tiers lieux 2.0 questionnent fondamentalement notre façon de concevoir le monde.David Vallat, Maître de conférences en économie, Université Claude Bernard Lyon 1Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/756502017-04-06T20:38:22Z2017-04-06T20:38:22ZLes tiers-lieux : quelles opportunités pour comprendre et transformer les pratiques de travail ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/163812/original/image-20170404-5725-z6kymz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">« L'Expérience Tiers-Lieux Fork The World. » Biennale Internationale Design, Saint Etienne 9 mars - 9 avril 2017.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/sylviafredriksson/33762022555/in/photolist-Trrc4a-RWJiiw-Tmm36b-Snw6hd-SsSMNh-TpVnBa-ScAqhg-RB4u26-Srftxn-RU4AuA-S5stoK-Sag3Uq-TrrggP-SK8GZL-RWAtZg-SZjQXo-Sag18y-Sp3gbz-TrqZ3g-cKVmVw-T5v7tJ-cKViKu-RB4vNH-Sp3M7M-Sp3zeJ-Sp3VVP-SNWMcm-TpVCeB-SMr4T7-RERwfV-RWAFFT-Sp3H2c-Tb3us1-T7Ximq-SBfxcJ-T7iEXs-RPigBd-SafzkN-TdsD5F-TrsSfz-ScQrjB-S5sAMn-ScBZuX-RPhR6u-RWAuTR-9AaXmA-TnPeX7-S8pVo9-SRtvpy-SkmVrw">Sylvia Fredriksson / Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Il y a bientôt trois ans, j’ai commencé à explorer le « nouveau monde » des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tiers-lieu">tiers-lieux</a> d’entrepreneuriat et d’innovation. Après des années de recherches sur des grands groupes, des universités, des administrations, des grands projets digitaux, je découvrais alors un objet particulièrement enthousiasmant. De nouvelles formes d’incubation et d’intermédiation, des <a href="http://bit.ly/2m2X7kF">espaces de coworking indépendants et corporate</a>, des <a href="http://bit.ly/2n6Isqi"><em>fab labs</em></a>, des <a href="http://bit.ly/2fnm4FJ">maker spaces</a>, des <a href="http://hackerspaces.org/"><em>hacker spaces</em></a> ont été et sont toujours l’occasion d’observations, d’entretiens, d’expériences de photographie et d’ateliers de co-création. Quelques années plus tard, mon enthousiasme est intact, mais les intuitions sur les tendances en cours ont peut-être gagné en précision et en distance critique.</p>
<p>C’est ce parcours scientifique, social et émotionnel, que j’aimerais évoquer ici. Il est indissociable d’une aventure plus collective : celle liée à la construction d’un réseau académique sur les nouveaux acteurs et les nouveaux lieux d’entrepreneuriat et d’innovation (en particulier les coworkers, les makers et les hackers) : le <a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com">Research Group on Collaborative Spaces</a> (RGCS)*.</p>
<h2>Sous l’écume : la guerre des mots, un moindre mal ?</h2>
<p>Avec le recul, je suis d’abord frappé par le décalage entre les discours des acteurs de l’écosystème des tiers-lieux en général et les tendances d’intérêts plus large des Français. Un petit détour par Google Trend (avec des requêtes centrées uniquement sur le cas de la France) l’illustre assez clairement.</p>
<p>Tout d’abord, la faiblesse des requêtes sur le terme « tiers-lieux » m’a beaucoup étonnée.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=306&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163648/original/image-20170403-21938-5jnj7b.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=384&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Évolution des requêtes sur le terme tiers-lieux en France (de 2004 à 2017).</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les termes alternatifs sont encore plus rares voire inexistants (« espaces collaboratifs », « open labs », « open creative labs », « communautés collaboratives »…) sur la période observée. Les résultats sont plus intéressants (et massifs) si l’on s’intéresse aux termes parfois associés (de façon inclusive) au vocabulaire de « tiers-lieu » (cf. figure ci-dessous).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=317&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163909/original/image-20170404-5736-108aka7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Analyse des requêtes sur les objets-tiers-lieux pour la période 2004-2017 sur la zone France.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>La première tendance qui a attiré mon attention concerne les « fabs labs ». Le nombre de requêtes (en particulier comparé à celui d’autres types de tiers-lieux) est clairement en très forte augmentation depuis 2013. Les notions de « hacker spaces » et de « maker spaces » (quel que soit l’orthographe que j’ai pu tester) sont en croissance très relative sur la période.</p>
<p>La seconde tendance porte sur les espaces de coworking et le coworking. Si l’intérêt pour les espaces de coworking se traduit par une augmentation mineure (avec ou sans tiret) en particulier relativement au vocabulaire de fab lab, la notion de « coworking » (dans le périmètre des requêtes centrées sur la France) est en très force hausse, on pourrait presque dire en situation d’explosion. On comprend ici qu’il faut s’intéresser également aux tiers-lieux comme une « pratique » au sens sociologique.</p>
<p>Cela m’a amené à d’autres séries de requêtes (en français) sur des termes davantage liés aux pratiques qui peuvent correspondre aux tiers-lieux.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=356&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163915/original/image-20170404-5729-8bgnz0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Analyse des requêtes sur les pratiques-tiers-lieux de la période 2004-2017 pour la zone France.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Google Trends</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’« innovation » est de loin la tendance la plus forte (et la plus stable) sur la période (loin en volume de la notion d’entrepreneuriat). Le « coworking » se détache également par rapport aux autres notions, avec un point de décrochage plus net en 2015.</p>
<p>Plus généralement, c’est une véritable guerre des mots et des pratiques à laquelle nous assistons ces dernières années. Guerre de légitimation, d’inclusion, d’exclusion, et de différenciation entre des acteurs qui cherchent pour beaucoup à se positionner en positionnant le phénomène (ce processus de co-opétition sera détaillé prochainement dans une note de recherche RGCS ainsi qu’une publication académique). La problématique n’est pas nouvelle. J’ai connu des tendances proches au début des années 2000 avec la « nouvelle économie ». Et au passage, les universitaires (moi compris) ont sans doute une part de responsabilité dans l’inflation sémantique.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163814/original/image-20170404-5725-1tqatnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Exposition « L’Expérience Tiers-Lieux Fork The World. » Biennale Internationale Design, Saint Étienne 9 mars–9 avril 2017.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/sylviafredriksson/32289014733/in/photolist-RcgD9z-ScC3uK-TrsP1t-ScBCWc-Tf4hc2-SRsXPj-SrhutB-SvsgUq-Svsg5E-SRtahu-S9VyTL-SzabPV-RhtpuY-SzaaPt-Rhtnhb-Sza95M-TrswgB-RZkUd5-SvsoLS-RZkSyd-SkhXGs-Rk7zYr-Rk7yze-Rhtr3Y-RZkLUY-ScuLvJ-RcbQvx-SRrNTA-SRrMd1-R9ycpo-Svshob-Tf3eWn-ScAuKz-SRsWbQ-TrszY6-TnQnaG-SRsKwd-SRsET5-TrsgLp-Tf3d5M-S9W8fQ-Ski5XE-SnRMPn-Ski4zj-SnRLw2-Ski2Uq-Ski29N-Ski1rq-Tf2C5H-TrrjZk">Sylvia Fredriksson/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une parenthèse historique sur l’entrepreneuriat : de l’accompagnement à la co-création ?</h2>
<p>Prenons maintenant un peu de recul. Comme toujours, je crois dans la clé que peut donner une posture historique et la perspective du long terme, en particulier lorsqu’il s’agit de comprendre des phénomènes managériaux (très sujets aux modes et grands retours) comme l’entrepreneuriat et son accompagnement.</p>
<p>Depuis une vingtaine d’années, on assiste à un glissement ou à la superposition d’une logique d’expertise verticale à une logique d’entre-aide plus horizontale dans l’<a href="http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=19&cad=rja&uact=8&ved=0ahUKEwiD8OHukI7TAhXKVhoKHdXKCm04ChAWCEowCA&url=http%3A%2F%2Fwww.erudit.org%2Fen%2Fjournals%2Fmi%2F2013-v17-n3-mi0805%2F1018269ar.pdf&usg=AFQjCNGSBYrOnqTP7Ipd3KdWHTlPa5hMfA">accompagnement entrepreneurial</a>. Les entrepreneurs (que leur projet soient proches ou pas) sont gérés en mode « communauté ». Le don et le contre-don, la dynamique collective seraient alors au cœur du processus entrepreneurial. <strong>L’expert-accompagnant cède en partie la place au « community manager ».</strong></p>
<p>Aux incubateurs, accélérateurs et financeurs traditionnels s’ajoutent ainsi les acteurs du coworking, l’émergence de l’open innovation, les modes de financement de plus en plus participatifs (crowdfunding), des infrastructures digitales qui valorisent la désintermédiation (avec la blockchain), et des environnements de travail de plus en plus ouverts et horizontaux.</p>
<p>Cela est cohérent avec l’idéologie qui domine de plus en plus l’entrepreneuriat d’aujourd’hui. La posture de l’expertise et de la transmission deviennent un non-sens. Toute connaissance de la structure industrielle devient quasi-instantanément obsolète dans un monde qui valorise l’« innovation permanente », la « disruption », la « liquidité ». Le processus entrepreneurial lui-même devient « idéation » collective et « co-création ». Cela n’est pas <a href="http://bit.ly/2owGtMt">sans conséquence politiques sur la cité et la société en générale</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163816/original/image-20170404-5736-evoy96.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Exposition « L’Expérience Tiers-Lieux Fork The World. » Biennale Internationale Design, Saint Étienne 9 mars – 9 avril 2017.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/sylviafredriksson/32918797094/in/photolist-S9Vrv9-TmhXhE-SDGEox-RcautR-S9VzgE-S8oUDW-SRtspL-T7TzQk-Sp3URz-Sp3jt6-ScAFTX-ScQjJx-SkmR5q-R9sojG-RB2KjK-SvsfKG-SkgHqJ-RPhEKj-Trr9BM-S9VzCG-Tmif1u-SnQC6M-ScQsQ2-TpV8ta-Srg95c-R7jRFo-RcgD9z-ScC3uK-TrsP1t-ScBCWc-Tf4hc2-SRsXPj-SrhutB-SvsgUq-Svsg5E-SRtahu-S9VyTL-SzabPV-RhtpuY-SzaaPt-Rhtnhb-Sza95M-TrswgB-RZkUd5-SvsoLS-RZkSyd-SkhXGs-Rk7zYr-Rk7yze-Rhtr3Y">Sylvia Fredriksson/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Des lieux, des acteurs, des plateformes et des pratiques</h2>
<p>Comment alors qualifier aujourd’hui ce phénomène de l’entrepreneuriat et ses nouveaux modes d’émergence ? La plupart des études ont pris le parti d’une vision en termes de « lieux », d’« acteurs » et de « plates-formes ». J’aimerais proposer un complément davantage qu’une alternative avec un retour sur la notion de « pratiques entrepreneuriales ». De façon générale, les entrepreneurs semblent de plus en plus investis dans des pratiques d’« entrepreneuriat collaboratif ».</p>
<p>Pour commencer, on peut définir la notion de « pratique entrepreneuriale » comme regroupant des comportements, des postures, des normes et des modes de relation signifiants par rapport aux différents champs de l’entrepreneuriat, et en lien avec des pairs entrepreneurs et des apprentis entrepreneurs. Une pratique est donc un schéma de comportement qui a du sens et « produit » du sens sans devoir trop « en dire ». Elle est indissociable du flux matériel et symbolique d’activités quotidiennes qui vont l’entretenir ou la transformer.</p>
<p>Les pratiques entrepreneuriales se déclinent aujourd’hui sous des formes multiples aux imbrications (inclusives, complémentaires) variables : pratiques du « pitch », pratiques du « coworking », pratiques du « crowdfunding », pratiques du « design thinking », pratiques d’« open knowledge », pratiques de travail en mobilité, pratiques de « bricolage » (fascinantes pour les fab labs et les hackathons que j’ai pu observer), etc.</p>
<p>Ces pratiques ont une corporéité. Comme l’ont souligné <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-de-philosophie-2008-2-page-167.htm">Merleau-Ponty</a> puis <a href="http://www.persee.fr/doc/arss_0335-5322_1977_num_14_1_2554">Bourdieu</a>, elles sont signifiantes émotionnellement, de façon incarnée. Elles sont également de nouvelles formes d’habitus, sans doute plus fluctuants, que valorisent des champs eux-mêmes de plus en plus émotionnels et fluctuants.</p>
<p>La découverte (ou plutôt redécouverte de Merleau-Ponty) a ainsi été une autre surprise de ces trois dernières années. Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_Merleau-Ponty">Merleau-Ponty phénoménologique</a>, mais également ontologique et politique, donnent des clés précieuses afin de comprendre des situations de coprésence émotionnelle, qui loin de s’opposer à la dynamique des plates-formes digitales, en favorisent peut-être la régulation. La philosophie politique de Merleau-Ponty permet également de mieux comprendre les « infrastructures » (ou « plates-formes »), les « dialectiques » et les paradoxes qui sont à l’œuvre dans l’économie du partage.</p>
<p>Les <strong>pratiques entrepreneuriales « collaboratives »</strong> vont correspondre aux pratiques spécifiques qui vont joindre, articuler, réguler les solitudes et les projets indépendants des entrepreneurs ainsi que des autres personnes en résidence ou en mobilité sur le tiers-lieu. Le paradoxe est qu’il va falloir faire collaborer tout en maintenant fortement l’autonomie et la singularité de chacun. <a href="https://www.linkedin.com/pulse/les-transformations-du-travail-vers-un-capitalisme-de-vaujany">Cela est typique du capitalisme d’assembleurs dans lequel nous entrons</a>. Les communautés des tiers-lieux et les plates-formes offrent chacune des ressources et des contraintes qui vont permettre aux entrepreneurs de gérer le paradoxe.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163818/original/image-20170404-5725-1vd2nm0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Fab Lab Adolfo Ibáñez University, Chili.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/michellemilla/29458983975/in/photolist-LTbZAP-DGvgvs-QGGKhm-LXK3dU-EYfvsE-KdCg42-L7gXod-KdCfer-FfhzKn-F4ABLd-EMHsd5-F4ACYy-EhV6Lg-EhV6ck-EMHpc5-EhzoyA-Ehzobb-EMHsKs-FcYZbu-EhzpCE-EhzqK9-F6Tirv-EMHtMN-Ehzqh5-JrAoFP-Jvn4nA-HCcN9F-JrAnpv-RZ8gfg-RwaRPU-KTECSX-RVwx9Q-RZ8k9Z-JXhhXn-KQRsLb-HCcPHc-KAEztS-KAEzgC-KjTPnb-KjTLrb-JPCeX2-KAEz2j-KL2cJg-KjTLQh-JPCePB-KDafwx-KAEyBG-KH8atm-KL2ckv-JPsmR3">Michelle Milla/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Quelles opportunités pour les chercheurs en management et en économie ?</h2>
<p>Qu’ai-je finalement l’impression d’avoir découvert ces trois dernières années, au fur et à mesure d’observations qui m’ont mené à Paris, Barcelone, Berlin, Londres, San Francisco, Singapour, Syndey, Rome, Stockholm, Montréal et dans bien d’autres villes encore ?</p>
<p>Tout d’abord, <strong>un formidable « objet-valise »</strong>, celui que j’ai longtemps recherché (du côté des consultants et de nouvelles formes pédagogiques notamment).</p>
<p>Dans tous ces lieux, à l’approche de ces pratiques, au contact de ces communautés, j’ai souvent été frappé de croiser des docteurs, d’anciens doctorants, des personnes avec une sensibilité de sciences humaines et sociales. Plus largement, j’ai été souvent impressionné par le niveau de réflexivité des débats et des échanges auxquels j’ai eu le plaisir tantôt d’assister, tantôt de participer. La culture, les communautés collaboratives (quand elles existent), les mouvements sociaux, les pratiques, sont ou peuvent être de très précieux tiers-lieux et tiers-temps entre les universitaires, les praticiens, les politiques, les activistes et les journalistes. Dans, entre, et au-delà des frontières organisationnelless traditionnelles, ils permettent une véritable co-construction des savoirs.</p>
<p>Ces objets sont également <strong>une fenêtre pour rendre visible</strong> des phénomènes complexes. S’immerger dans des maker spaces, des espaces de coworking, des hacker spaces, est une opportunité unique d’aller au contact des nouvelles pratiques de travail (entrepreneuriat, télétravail, nomades digitaux, DIY…). Les tiers-lieux permettent de rencontrer des indépendants, d’observer de près les modes de formation des communautés, de comprendre les <a href="https://theconversation.com/lentrepreneuriat-alterne-en-finir-avec-le-mythe-dune-societe-post-salariale-73636">modes d’hybridation du salariat et de l’entrepreneuriat</a>, les nouvelles formes collectives de bricolage, etc. Cela ne signifie pas que ces processus et ces pratiques se forment « là-bas » ou uniquement là-bas. Mais cela offre une fenêtre aux chercheurs et aux citoyens soucieux de mieux comprendre l’émergence et la légitimation de nouvelles pratiques de travail. Ils pourront trouver dans les tiers-lieux des acteurs pertinents pour des récits de vie, un point de départ pour un shadowing, la mise en œuvre d’une quasi-expérimentation, etc. <a href="http://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/0170840616685354">Les mécanismes de développement et d’animation des communautés</a> pourront être observés à une échelle raisonnable. Pour reprendre le mot de Merleau-Ponty, les activités et les pratiques des acteurs liés aux tiers-lieux permettent de rendre visible les transformations du travail, et avec elles tout un territoire, ses savoir-faire, ses pratiques et ses acteurs.</p>
<p>Les acteurs, pratiques, communautés et cultures des tiers-lieux sont enfin un formidable espace de transformation, <strong>un levier politique</strong>. Il n’est pas toujours possible, pour les universitaires, de lancer un grand projet politique à partir de l’université et dans ses murs. Les tiers-temps et les tiers-lieux (qui peuvent aussi exister « à l’intérieur » des entreprises traditionnelles) sont ainsi des contextes précieux pour les projets académiques de transformation. Il est possible de « hacker » ensemble des processus RH, des modes d’organisation voire des stratégies.</p>
<p>Toujours pour reprendre les mots de Merleau-Ponty (« La science manipule des choses et renonce à les habiter », l’Oeil et l’esprit), les tiers-lieux sont une belle opportunité d’« habiter » les objets des sciences humaines et sociales, en particulier ceux du management. Les événements de RGCS (notamment le <a href="https://www.youtube.com/watch?v=UedXrARWjEg&t=4s">premier symposium en décembre 2016</a> et l’événement <a href="https://www.youtube.com/watch?v=bsSUHIkIHqk&feature=youtu.be">#collday2017</a> organisé à Berlin en mars 2016) ont permis de précieuses expérimentations sociales, pédagogiques, scientifiques et politiques. Monter ces tiers-temps (séminaires ouverts à tous, workshops de co-création, learning expeditions) avec les acteurs des tiers-lieux, expérimenter une marche collective ensemble dans la ville, a induit de nombreuses micro-collaborations. On peut plus ou moins choisir la place où l’on s’assied dans une salle de réunion. Il est quasiment impossible de ne pas être « brassé » par la marche collective et de ne pas se retrouver tôt ou tard (dans le bus, sur un banc, dans un ascenseur…) à côté d’une personne à laquelle on n’a pas encore parlée. Ou pas souhaiter parler.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/bsSUHIkIHqk?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">#collday2017seminar and learning expedition in Berlin.</span></figcaption>
</figure>
<h2>En conclusion : sens et jeu au cœur de l’entrepreneuriat collaboratif et de la recherche</h2>
<p><strong>Connecter, rendre visible, expérimenter</strong>… les tiers-lieux, les tiers-temps, la culture et les pratiques du collaboratif qui peuvent être associés à l’émergence de plus en plus forte et profonde (culturellement) de l’entrepreneuriat collaboratif, ré-ouvrent le champ des possibles tant entrepreneurial qu’académique. Aux universitaires (en particulier en management, en économie et en sociologie) de savoir saisir cette opportunité.</p>
<p>N’ayons pas peur… <strong>j’ai aussi compris avec cette expérience que création de sens vraiment partagé et amusement n’était pas incompatibles.</strong> Ils sont même au cœur des processus entrepreneuriaux et scientifiques. <a href="https://halshs.archives-ouvertes.fr/hal-00644401/document">Ils l’ont toujours été</a>.</p>
<p>To be continued…</p>
<hr>
<p><em>Un grand merci au <a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/rgcs-coordinators/">collectif des coordinateurs</a> du réseau RGCS avec lesquels je partage cette aventure incroyable.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/75650/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Xavier de Vaujany est président du réseau académique et think tank RGCS (<a href="https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/">https://collaborativespacesstudy.wordpress.com/</a>). </span></em></p>Une première synthèse de trois années de recherches sur le phénomène des tiers-lieux d’entrepreneuriat et d’innovation (fab labs, espaces de coworking, makers spaces, hacker spaces, etc).François-Xavier de Vaujany, Professeur, PSL-Université Paris-Dauphine (DRM), Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/694552016-12-02T00:56:17Z2016-12-02T00:56:17ZLe rôle des open labs dans les processus créatifs des organisations<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/147924/original/image-20161129-10961-11ag50.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Co-création de meubles dans le fab lab Tricity (Gdańsk, Pologne).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/mananasoko/9130752510/in/photolist-eURuBq-dNr4Qa-6H6U9L-eUEacv-mQ9wFu-eURuwC-6YrS3M-nV8gsu-eURuSw-eURuc3-nEFrwC-h1TfLP-nEGdQa-9jtrb1-bkayXs-eioK4z-8u2goW-gZYqDE-oWzQXL-8u28vw-ngHFDC-oAjKWC-fhwice-ngHFWo-9jtm81-8tYatn-qQ7kMP-bkazNN-oC91X7-oUzLUb-9jtqjQ-oE7tDp-5PtNxH-ngHvrp-8u27o3-8uboc1-5PtP5P-9jtjYh-ngHFTf-dtB8Dy-eiuyNm-8tYbSc-psK5VB-oC98Uy-eioQ8M-oAjzwj-oC5ZUZ-oXN1GG-8u2bMj-8u2fXL">Maciej Wojnicki</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Au cours de la dernière décennie, de <a href="http://www.anrt.asso.fr/fr/futuris/pdf/rapport-projetlab_web.pdf">nombreux nouveaux espaces collaboratifs</a> ont émergé, au sein d’organisations ou portés par des entrepreneurs indépendants. Au-delà de la diversité de dénominations (fab labs, living labs, hackerspaces, makerspaces, techshops, espaces de coworking), le terme open lab défini d’une manière plus englobante et générique ce phénomène.</p>
<h2>Le phénomène open labs</h2>
<p>Un open lab fait référence à</p>
<blockquote>
<p>« un lieu et une démarche portés par des acteurs divers, en vue de renouveler les modalités d’innovation et de création par la mise en œuvre de processus collaboratifs et itératifs, ouverts et donnant lieu à une matérialisation physique ou virtuelle » (<a href="http://www.newpic.fr/fr02group2015openlabsdownload.html">Mérindol et al., 2016</a>).</p>
</blockquote>
<p>Certains open labs se sont développés par des initiatives privées soutenus par un petit groupe d’entrepreneurs (par exemple la plupart des espaces de coworking) ou par une communauté intéressée par un domaine spécifique (comme c’est le cas des hackerspaces où se rassemblent des « bidouilleurs »).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/147899/original/image-20161129-10969-1ns5w4v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/147899/original/image-20161129-10969-1ns5w4v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/147899/original/image-20161129-10969-1ns5w4v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/147899/original/image-20161129-10969-1ns5w4v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/147899/original/image-20161129-10969-1ns5w4v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/147899/original/image-20161129-10969-1ns5w4v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/147899/original/image-20161129-10969-1ns5w4v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/147899/original/image-20161129-10969-1ns5w4v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Betahaus Barcelona, un espace de coworking et d’innovation ouverte.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://barcelonanavigator.com/barcelona-co-working-spaces/">Barcelona Navigator</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans d’autres cas, les open labs ont été créés dans des organisations, soit dans des institutions publiques – comme des universités –, soit dans des entreprises. De nombreuses entreprises en France (Air Liquide, Alcatel Lucent, Bouygues, Dassault systèmes, EDF, PSA, Renault, SEB, SNECMA, SNCF…) ont créé un open lab au sein de leur organisation dans une démarche d’innovation ouverte, pour faciliter la collaboration entre leurs employés et pour aider au développement de nouvelles idées et prototypes qui potentiellement pourraient aboutir à un produit exploitable commercialement.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/147657/original/image-20161127-32054-1mmyynj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/147657/original/image-20161127-32054-1mmyynj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/147657/original/image-20161127-32054-1mmyynj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=491&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/147657/original/image-20161127-32054-1mmyynj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=491&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/147657/original/image-20161127-32054-1mmyynj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=491&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/147657/original/image-20161127-32054-1mmyynj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=617&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/147657/original/image-20161127-32054-1mmyynj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=617&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/147657/original/image-20161127-32054-1mmyynj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=617&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Open Labs.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Le Libre blanc des Open labs</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Open labs d’entreprise</h2>
<p>La création des open labs d’entreprise peut être à l’origine d’une démarche des salariés (dynamiques <em>bottom up</em>) ou des gestionnaires (dynamiques <em>top-down</em>). Dans tous les cas, le succès des open labs requiert de la combinaison des deux dynamiques : d’un côté, de la motivation et participation active des employés et, de l’autre, du support des managers.</p>
<p>Ces initiatives contribuent à mettre en œuvre l’ambidextrie organisationnelle, en renforçant les activités d’exploration, invention et idéation, qui pourront potentiellement donner lieu à l’exploitation commerciale des résultats.</p>
<p>Néanmoins, ce ne sont pas seulement les open labs installés dans des organisations qui contribuent au développement de la créativité collective des entreprises. Les open labs qui se sont développés hors des entreprises participent souvent aussi à alimenter la créativité des organisations. Dans un contexte d’innovation ouverte, les entreprises visent à détecter et utiliser la créativité distribuée dans leur environnement local pour alimenter leurs processus d’innovation.</p>
<h2>Quand l’entreprise s’ouvre aux open labs de son environnement</h2>
<p>Pour cela, de nombreuses entreprises collaborent avec des open labs de leur environnement pour renouveler leurs approches de la créativité et de l’innovation. Par exemple, des open labs de la région parisienne comme ICI Montreuil, UsineIO, ou Liberté Living Lab collaborent avec des entreprises pour co-développer des nouveaux produits en mobilisant leurs experts et les membres de leurs espaces.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/147901/original/image-20161129-10945-jfy1ds.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/147901/original/image-20161129-10945-jfy1ds.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/147901/original/image-20161129-10945-jfy1ds.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/147901/original/image-20161129-10945-jfy1ds.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/147901/original/image-20161129-10945-jfy1ds.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/147901/original/image-20161129-10945-jfy1ds.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=472&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/147901/original/image-20161129-10945-jfy1ds.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=472&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/147901/original/image-20161129-10945-jfy1ds.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=472&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Un des ateliers de ICI Montreuil.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par exemple, dans le cas d’<a href="http://www.icimontreuil.com/">ICI Montreuil</a>, les gestionnaires de l’espace mettent leurs membres en relation avec des entreprises pour le co-développement de projets innovants, d’une manière ouverte et multidisciplinaire. Comme l’affirme Nicolas Bard (co-fondateur d’ICI Montreuil) :</p>
<blockquote>
<p>« [Les open labs dans les grandes firmes] ont 60 m², ils ont quelques machines, ils ont quelques employés. Ils n’ont pas 20 % des machines qu’on a. Ils ont 10 % des savoir-faire qu’on a. Ces lieux dans les entreprises leur permettent de faire quelques trucs mais ils viennent ici pour chercher des machines et des compétences qu’ils n’ont pas. »</p>
</blockquote>
<p>Dans le cas d’<a href="http://www.usine.io/">UsineIO</a>, l’approche est différente. Dans ce cas, des experts spécialisés employés par l’espace offrent leurs services aux entreprises pour les introduire au monde des <em>makers</em> et les aider à développer de nouveaux produits, tout en assurant une totale confidentialité de leurs projets. Comme l’explique Benjamin Carlu (co-fondateur d’Usine IO) :</p>
<blockquote>
<p>« Beaucoup de porteurs de nouveaux projets arrivent, ne savent pas vraiment quelles vont être les grandes étapes de la vie d’un produit depuis la conception jusqu’à l’industrialisation. Il y a un vrai chantier à mettre en place pour développer un produit et là on les aide. On a créé une méthode de développement de produits qui est une sorte de checklist dans laquelle ils peuvent se mettre. Ils voient la <em>timeline</em>, les ressources qu’il va falloir mettre en face, etc. Ils sont vraiment accompagnés dans cette dynamique de développement de produit. »</p>
</blockquote>
<p>Les open labs permettent aux entreprises d’introduire une nouvelle culture digitale en favorisant l’esprit « maker » dans leurs équipes. Une approche exploratoire interdisciplinaire basée sur le prototypage rapide et l’essai-erreur permet également de gagner en flexibilité et en efficacité, ainsi que de réduire le time-to-market.</p>
<p>Aussi, en participant dans les communautés de makers au sein des open labs extérieurs, les entreprises peuvent sortir de leur zone de confort et alimenter leurs processus créatifs avec les nouvelles idées et connaissances fruits de rencontres imprévisibles.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/147921/original/image-20161129-10957-1istf7p.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/147921/original/image-20161129-10957-1istf7p.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/147921/original/image-20161129-10957-1istf7p.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/147921/original/image-20161129-10957-1istf7p.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/147921/original/image-20161129-10957-1istf7p.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/147921/original/image-20161129-10957-1istf7p.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/147921/original/image-20161129-10957-1istf7p.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Amsterdam Fab Lab dans The Waag Society.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span></span>
</figcaption>
</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/69455/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ignasi Capdevila ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Comment tirer parti du phénomène des « open labs » pour stimuler l’innovation dans les entreprises ?Ignasi Capdevila, Associate Professor in Management & Strategy, PSB Paris School of BusinessLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/693882016-12-02T00:56:12Z2016-12-02T00:56:12ZGrand Paris, Donald Trump et les fab labs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/148312/original/image-20161201-25656-baoxz8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'assemblée des participants au lancement de l'association Fab City Grand Paris, à Volumes (Paris XIXᵉ).</span> <span class="attribution"><span class="source">@baptistebernie2</span></span></figcaption></figure><p>Quel rapport entre le Grand Paris, l’élection de Donald Trump et les Fablabs ?</p>
<p>Le mouvement des fab labs s’étend, et les <a href="http://fab.city/whitepaper.pdf">Fab Cities</a> proposent de créer un réseau de mégapoles <a href="http://www.citylab.com/housing/2016/04/cities-drive-the-new-world-order-parag-khanna-connectography-maps/480165/?utm_source=SFFB">localement productives, mondialement connectées</a>. Le 15 novembre 2016, étaient présentés les statuts de l’association Fab City Grand Paris.</p>
<h2>Transformer le Grand Paris en Fab City</h2>
<p>Cette <a href="http://www.makery.info/2016/11/15/fabcity-grand-paris-lance-son-association/">association</a> a plusieurs objectifs.</p>
<p>Le premier est de court terme (deux ans tout de même !) : préparer la conférence Fab Cities 2018, qui aura lieu après <a href="http://actu.cotetoulouse.fr/toulouse-fab14-accueil-congres-mondial-fablabs-2018-artilect_43057/">Fab14 (conférence des fab labs qui se déroulera à Toulouse</a>).</p>
<p>Le second est à plus long terme (20-30 ans ?). Il s’agit d’accompagner la transformation du Grand Paris en « Fab City ». En résumant un peu vite, le concept de Fab City est la transposition à la fabrication de ce qu’est l’idée de Smart City pour l’énergie : une ville dans laquelle chaque citoyen deviendrait producteur et consommateur de ce dont il a besoin. Cette utopie semble rendue accessible par les réseaux Internet, le triomphe des logiciels libres, la diffusion de machines Open Source. Comme la Smart City, la Fab City se veut écologique grâce à la circularisation de l’économie (on recycle tout) et autonome.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/147460/original/image-20161124-15330-1rwrdjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/147460/original/image-20161124-15330-1rwrdjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/147460/original/image-20161124-15330-1rwrdjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/147460/original/image-20161124-15330-1rwrdjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=407&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/147460/original/image-20161124-15330-1rwrdjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/147460/original/image-20161124-15330-1rwrdjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/147460/original/image-20161124-15330-1rwrdjd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=512&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le modèle « DIDO » (data in, data out) des Fab City remplacerait le modèle « PITO » (product in, trash out).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Note blanche Fab City par Tomas Diez</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>On peut avoir des réticences, pour des raisons physiques, technologiques ou économiques. Ce sont des enjeux sur lesquels nous reviendrons ultérieurement. Mais le concept est séduisant : il est déjà appliqué à certains quartiers de Barcelone. Il est promu, partout dans le monde par Tomas Diez, pilier du réseau mondial des fab labs, urbaniste et designer. De nombreuses villes souhaitent adopter la démarche, <a href="http://www.makery.info/2016/02/24/paris-veut-devenir-la-cite-des-makers/">et en particulier Paris</a>.</p>
<p>L’objectif est donc de produire localement, au sein du tissu urbain, de quoi <a href="http://magazine.ouishare.net/fr/2016/11/la-fab-city-cest-bien-plus-quune-ville-remplie-de-fab-lab/">satisfaire la population</a>. Sont explicitement visés : énergie, nourriture, objets manufacturés. On y voit que des avantages : meilleure exploitation des ressources, réduction des déchets (et des impacts environnementaux en général), libération des espaces naturels de l’empreinte humaine, meilleure résilience (économique, climatique, sécuritaire). L’hypothèse implicite est que cela est rendu possible grâce au « branchement » de la ville sur la communauté Open Source mondiale : les codes, les données voyagent (avec une empreinte nulle ?), sont partagés en confiance.</p>
<p>Au delà de la soupe de mots-clés que cela constitue, où est donc le problème me direz vous ?</p>
<h2>Connectées, mais à qui ?</h2>
<p>Le problème est dans le slogan : <em>locally productive, globally connected</em>, et l’imaginaire sous-jacent qu’illustre bien l’image choisie en bannière du site web Fab City.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/147462/original/image-20161124-15351-crisp8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/147462/original/image-20161124-15351-crisp8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=260&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/147462/original/image-20161124-15351-crisp8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=260&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/147462/original/image-20161124-15351-crisp8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=260&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/147462/original/image-20161124-15351-crisp8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=327&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/147462/original/image-20161124-15351-crisp8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=327&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/147462/original/image-20161124-15351-crisp8.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=327&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La bannière du site de l’initiative Fab City : les mégapoles, lumières du monde plongé dans l’obscurité comme métaphore politique ?</span>
</figcaption>
</figure>
<p>La réunion de l’association Fab City Grand Paris a eu lieu le lendemain de la publication des résultats de l’élection américaine. Ce résultat est assez largement perçu comme la manifestation de la déconnexion des élites des côtes des USA, riches, mondialisées, éduquées et progressistes, mobiles mais écolos, densément urbanisées, d’avec leur Hinterland, en récession, rustre et rétrograde, pollueur et campagnard.</p>
<p>Les cartes des états remportés par chacun des deux candidats suggèrent en effet une vraie rupture.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/147463/original/image-20161124-15362-19jtcfg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/147463/original/image-20161124-15362-19jtcfg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=382&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/147463/original/image-20161124-15362-19jtcfg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=382&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/147463/original/image-20161124-15362-19jtcfg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=382&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/147463/original/image-20161124-15362-19jtcfg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=480&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/147463/original/image-20161124-15362-19jtcfg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=480&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/147463/original/image-20161124-15362-19jtcfg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=480&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’« archipel » du vote Clinton.</span>
<span class="attribution"><span class="source">T. Wallace, _New York Times_.</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Et cela n’a pas manqué ! Dans les jours qui ont suivis, <a href="http://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/0211495665579-et-si-la-californie-faisait-vraiment-secession-2042884.php">Gaspard Koenig a généralisé l’analyse</a>, en faisant le parallèle avec le Brexit et la montée des populismes en Europe. Partout dans le monde, se creuserait le fossé entre d’un côté, une jeunesse multiculturelle, les GAFA et start-up de la nouvelle révolution industrielle ; de l’autre, les tenants blancs de la Nation, des industries dépassées et désormais donc, inutiles…</p>
<p>Le diagnostic frappe par sa généralité. Mais Tocqueville nous a prévenus : on est toujours trop facilement séduit par les diagnostics généraux. Par ailleurs, <a href="http://geographiesenmouvement.blogs.liberation.fr/2016/11/14/les-bouseux-ne-savent-pas-voter-la-geographie-electorale-la-derive/">Manouk Borzakian</a> (géographe à l’EPFL) a rapidement souligné que les villes américaines où Trump n’a pas gagné ont tout de même voté à 35 % pour lui… Et que les campagnes ont tout de même voté un peu Clinton aussi. Gardons-nous donc de tout simplisme.</p>
<p>Cette question est cependant cruciale et appelle à affiner la façon de parler des <a href="http://citiesforlife-latribune.paris/">Fab Cities</a>.</p>
<p>Une ville connectée à l’échelle mondiale, mais autonome et déconnectée de son environnement immédiat, c’est l’assurance d’un rejet au moins par le « hinterland », et peut-être aussi par les banlieues ou les 35 % précités d’urbains qui restent exclus de la mondialisation (proportion à discuter bien sûr).</p>
<h2>Se retrousser les manches</h2>
<p>Plusieurs tâches urgentes s’imposent.</p>
<p>Il nous faut bâtir un <strong>discours « inclusif »</strong> <a href="http://www.telos-eu.com/fr/non-a-la-secession-des-progressistes.html">sur les Fab Cities</a>. Le concept, né dans le cercle restreint de la FabAcademy me semble très techniciste, très focalisé sur la technologie et l’économie des projets. Si l’on veut parler de développement durable, au-delà du pilier environnemental (évident) et du pilier économique, n’oublions pas son troisième pilier : le social. L’association Fab City Grand Paris ne devrait pas avoir de mal à développer un tel discours car elle est elle-même constituée d’associations diverses. Garder la ville high-tech connectée au commun des mortels passe aussi par l’éducation et la formation du plus grand nombre (et pas juste d’une élite).</p>
<p>Ensuite, nous devons lire (ou relire) les nombreux travaux qui ont déjà été conduits par les communautés scientifiques sous l’angle de l’aménagement du territoire à <strong>plusieurs échelles</strong> : géographes, sociologues, écologues, on pense notamment à <a href="http://veltz.fr/pierre_veltz/pierre_veltz_livres.html">Pierre Veltz (la grande transition)</a></p>
<p>Enfin, il nous faut construire une vision <strong>interdisciplinaire</strong> partagée par le plus grand nombre, pour identifier les limites et les potentiels blocages de ce projet ambitieux. Il ne faudra pas se tromper de cible ou décevoir, car il n’y aura pas de deuxième tentative.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/69388/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian Simon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le mouvement « Fab Cities » propose de créer un réseau de mégapoles localement productives, mondialement connectées, tandis que l’élection de Trump semble révéler la rupture villes/« arrière-pays ».Christian Simon, Maitre de conférence, HDR, Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.