tag:theconversation.com,2011:/id/topics/phobies-25944/articlesphobies – The Conversation2024-01-07T15:36:53Ztag:theconversation.com,2011:article/2190382024-01-07T15:36:53Z2024-01-07T15:36:53Z« L’envers des mots » : Glottophobie<p>Le mot <a href="https://www.cairn.info/revue-langage-et-societe-2021-HS1-page-155.htm">« glottophobie »</a> a connu depuis 2016 une large diffusion dans la société française, au point <a href="https://dictionnaire.lerobert.com/dis-moi-robert/raconte-moi-robert/mot-jour/glottophobie.html">d’entrer dans le dictionnaire Le Robert en 2023</a> et de <a href="https://journals.openedition.org/multilinguales/5768">voyager dans le monde francophone</a>. Il connait aussi des usages en <a href="https://www.lavanguardia.com/participacion/debates/20201204/49856455352/debate-glotofobia-xenofobia-linguistica-discriminacion-acento-espana-codigo-penal-francia.html">espagnol</a>, en <a href="https://www.academia.org.br/nossa-lingua/nova-palavra/glotofobia">portugais</a>, en <a href="https://www.linkiesta.it/2018/03/contro-la-glottofobia-la-discriminazione-che-avete-fatto-tutti/">italien</a>, en <a href="https://www.quora.com/Are-linguicism-and-glottophobia-the-same-thing">anglais</a>, etc.</p>
<p>Forgé sur le modèle de <em>xénophobie</em> à partir de <em>glotto</em> – signifiant « langue » et – <em>phobie</em> indiquant une hostilité, ce terme désigne le « traitement différent et défavorable d’une personne ou d’un groupe » pour un motif abusif d’ordre linguistique. Il peut s’agir de l’usage d’une langue régionale comme le corse ou le créole réunionnais ou bien d’une langue immigrée comme le kabyle ou le pachto. Il peut aussi s’agir d’une façon particulière de parler une langue, avec ses prononciations, ses mots, ses tournures, comme le français parlé à Marseille, à Québec ou à Dakar.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-glottophobie-ou-la-langue-comme-outil-de-discrimination-53345">La glottophobie ou la langue comme outil de discrimination</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Pour démontrer le caractère abusif de ce critère de différenciation négative, il a fallu rassembler un <a href="https://www.cairn.info/revue-cahiers-de-la-lcd-lutte-contre-les-discriminations-2018-2-page-27.htm">corpus de textes relatifs aux droits humains</a>, qui mentionnent explicitement la langue, au même titre que l’origine ou la couleur de la peau, dans l’interdiction des discriminations. Ces textes garantissent le droit fondamental d’utiliser librement ses propres moyens linguistiques dans ses relations humaines et sociales. Il a fallu également démontrer que la ou les langues premières sont des éléments essentiels de la personnalité, que leur mépris ou leur interdiction produit un <a href="https://histoiresdelangues.fr/app/uploads/2018/04/KRESS-changement-de-langue-Kress.pdf">traumatisme</a> et des <a href="https://www.cairn.info/revue-mouvements-2022-4-page-87.htm">inégalités déterminantes</a>.</p>
<p>Le terme « glottophobe » a été proposé pour la première fois lors d’un colloque sur les langues régionales à Amiens, en 1996, pour qualifier des discours hostiles à l’usage de ces langues. Les textes en ont été <a href="https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb36702969b">publiés en 1998</a>. Le terme a été plus largement diffusé dans un <a href="http://www.reseau-terra.eu/article748.html">article grand public</a> intitulé <em>La « mauvaise langue » des « ghettos linguistiques » : la glottophobie française, une xénophobie qui s’ignore</em>. La notion est précisément décrite dans une <a href="https://www.cairn.info/revue-cahiers-internationaux-de-sociolinguistique-2013-2-page-29.htm">publication scientifique dédiée en 2013</a> et largement diffusée par la sortie, début 2016 chez Textuel, de l’ouvrage scientifique à vocation grand public <a href="http://www.lambert-lucas.com/livre/discriminations-combattre-la-glottophobie/"><em>Discriminations : combattre la glottophobie</em></a> (réédition 2019).</p>
<p>Le succès du terme tient au fait qu’il a permis de <a href="https://www.liberation.fr/debats/2016/04/24/philippe-blanchet-rejeter-un-accent-c-est-toucher-a-l-identite-de-l-etre_1448309/">nommer un phénomène fréquemment vécu</a> mais difficile à identifier. D’une part, parce qu’il est difficile de percevoir ce sur quoi on n’est pas capable de mettre un nom, comme l’a montré Merleau-Monty. D’autre part, parce que dans nombre de sociétés, à commencer par la France, l’idée même de « droits linguistiques » n’existe pas ou se trouve réservée aux seuls usages de langue unique imposée comme nationale et révérée d’une façon religieuse. </p>
<p>Cela a permis que, fin 2016, la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000045391831">loi interdisant les discriminations en France</a> soit complétée par l’interdiction de traiter les gens différemment selon leur capacité d’usage ou leur usage effectif d’une langue autre que le français, <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/14/amendements/4141/CSEGALITE/154.asp">à l’initiative de députés défendant le droit</a> « de parler une autre langue que le français, qu’elle soit étrangère ou régionale ».</p>
<p>Le succès de la notion de glottophobie a attiré l’attention sur la question des prononciations du français qui ne correspondent pas à la norme dominante fondée sur « la conversation soignée de Parisiens cultivés » (P. Fouché, 1950). L’attitude de <a href="https://france3-regions.francetvinfo.fr/bourgogne-franche-comte/cote-d-or/dijon/trois-questions-au-linguiste-philippe-blanchet-glottophobie-1561996.html">mépris d’un député face à une journaliste toulousaine en 2018</a> ou certaines <a href="https://francaisdenosregions.com/2020/07/04/il-a-un-accent-et-alors/">réactions injurieuses à la nomination d’un Premier ministre à l’accent méridional</a> en 2019, ont provoqué des protestations contre ces attitudes désormais nommées « glottophobes ». </p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/peut-on-avoir-un-accent-en-politique-sans-etre-moque-217139">Peut-on avoir un accent en politique sans être moqué ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p><a href="https://www.lexpress.fr/societe/discrimination-a-l-embauche-moqueries-cette-france-allergique-aux-accents-regionaux_2126439.html">En 2020, une enquête révèle</a> que 50 % de la population en France dit parler français avec « un accent », que la moitié de ces 50 % a subi des stigmatisations et 16 % (soit potentiellement des millions de personnes) des discriminations à l’embauche liées à cet accent. <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/dossiers/alt/promotion_france_des_accents">Un projet de loi a même été largement voté à l’Assemblée nationale</a> fin 2020 pour interdire les discriminations au motif d’un « accent » mais n’a pas été confirmé à temps par le Sénat. </p>
<p>Si cette question entre bien dans le champ de la glottophobie, cela a laissé penser que la notion traite uniquement « des personnes ayant un accent ». C’est ce qu’on trouve dans de <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/glottophobie-comment-le-francais-sans-accent-est-devenu-la-norme-5938148">nombreux médias</a> et même Le Robert <a href="https://dictionnaire.lerobert.com/definition/glottophobie">insiste sur « l’accent »</a>. Cette tendance a été favorisée, en France, par le fait qu’en ciblant la question des accents, on s’intéresse au français, sans remettre en question sa suprématie.</p>
<p>Or il ne faut oublier qu’il y beaucoup plus de <a href="https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000189451">peuples et de personnes à qui on interdit de parler leur langue, dont on limite les usages, et avec des conséquences plus graves</a>, que de personnes à qui on reproche de parler une langue, souvent dominante, avec une prononciation non standard, ce qui reste néanmoins une des formes de glottophobie, toujours condamnable.</p>
<hr>
<p><em>Cet article s’intègre dans la série <strong><a href="https://theconversation.com/fr/topics/lenvers-des-mots-127848">« L’envers des mots »</a></strong>, consacrée à la façon dont notre vocabulaire s’étoffe, s’adapte à mesure que des questions de société émergent et que de nouveaux défis s’imposent aux sciences et technologies. Des termes qu’on croyait déjà bien connaître s’enrichissent de significations inédites, des mots récemment créés entrent dans le dictionnaire. D’où viennent-ils ? En quoi nous permettent-ils de bien saisir les nuances d’un monde qui se transforme ?</em></p>
<p><em>De <a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-validisme-191134">« validisme »</a> à <a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-silencier-197959">« silencier »</a>, de <a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-bifurquer-191438">« bifurquer »</a> à <a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-degenrer-191115">« dégenrer »</a>, nos chercheurs s’arrêtent sur ces néologismes pour nous aider à mieux les comprendre, et donc mieux participer au débat public. À découvrir aussi dans cette série :</em></p>
<ul>
<li><p><a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-technoference-199446"><em>« L’envers des mots » : Technoférence</em></a></p></li>
<li><p><a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-ecocide-200604"><em>« L’envers des mots » : Écocide</em></a></p></li>
<li><p><a href="https://theconversation.com/lenvers-des-mots-neuromorphique-195152"><em>« L’envers des mots » : Neuromorphique</em></a></p></li>
</ul><img src="https://counter.theconversation.com/content/219038/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Blanchet est membre de la Ligue des Droits de l'Homme. </span></em></p>Créé en 1996, entré dans Le Robert en 2023, le terme de glottophobie a attiré l’attention sur des discriminations liées aux usages des langues. Son concepteur revient ici sur son histoire.Philippe Blanchet, Chair professor, Université Rennes 2Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2021752023-05-04T20:16:05Z2023-05-04T20:16:05ZRéalité virtuelle et santé mentale : exit le divan, place au casque ?<p>Selon le cabinet d’analyse Counterpoint, cité par le magazine économique L’Usine Nouvelle, les <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/les-ventes-de-casques-de-realite-virtuelle-et-augmentee-devraient-decupler-d-ici-a-2025.N1174082">ventes de casques de réalité virtuelle et augmentée pourraient décupler d’ici à 2025</a>, en raison notamment de l’arrivée d’Apple dans ce secteur.</p>
<p>Lorsque nous entendons « réalité virtuelle » (RV), nous pensons généralement « jeux vidéo ». Pourtant cette technologie n’est pas réservée aux loisirs, et ses domaines d’application se sont multipliés au fil des années.</p>
<p>Déjà utilisée comme outil de formation, dans des secteurs aussi différents que le <a href="https://reality-academy.fr/management-vr/">management et la vente</a> ou la <a href="https://www.liberation.fr/sciences/espace/la-realite-virtuelle-avancee-potentielle-pour-les-astronautes-20210421_FUQDRLKF7JEFZBWRWX7U4CFKXI/">formation des astronautes</a>, elle est encore mise à contribution pour <a href="https://www.u-bordeaux.fr/actualites/une-semaine-dimmersion-en-simulation-chirurgicale-luniversite-de-bordeaux">entraîner les chirurgiens</a> dans leur pratique.</p>
<p>Et, depuis quelques années, son potentiel pour traiter certains troubles mentaux est également exploré – avec des résultats très encourageants.</p>
<h2>Réalité virtuelle, réalité augmentée : de quoi parle-t-on ?</h2>
<p>Avant de développer ce dernier point, il convient de rappeler ce qu’est la réalité virtuelle.</p>
<p>Cette technologie consiste à immerger un utilisateur dans un monde virtuel au moyen de dispositifs dédiés (casques, visiocubes, grands écrans). Les casques par exemple permettent une immersion forte grâce au couplage des mouvements de la tête de l’observateur avec les images stéréoscopiques affichées sur deux petits écrans. Une fois équipé, l’utilisateur est immergé visuellement et auditivement. Il peut même interagir grâce à des « contrôleurs » rappelant les manettes de jeu vidéo afin d’effectuer des actions, de se déplacer, etc. Des dispositifs plus élaborés peuvent aussi mettre à contribution le corps entier.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/kXsErAGOits?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>La réalité virtuelle permet donc de produire des expériences sensorielles de manière artificielle. Ces expériences peuvent concerner non seulement la vue et l’ouïe, mais aussi l’odorat ou le toucher – via des dispositifs « haptiques » (vibreurs essentiellement) pouvant procurer un retour sensoriel sur ses actions ou sa position dans l’espace.</p>
<p>Plus l’environnement virtuel sera immersif, plus l’utilisateur aura une sensation de « présence » élevée. Ladite présence peut être divisée en deux concepts distincts : <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rstb.2009.0138">l’illusion du lieu et l’illusion de plausibilité</a>. Un environnement virtuel bien réalisé et des retours sensoriels pertinents apportent de la crédibilité et donneront la sensation d’évoluer de façon similaire à ce qu’on connaît dans le monde réel.</p>
<p>En effet, si ce que nous voyons est cohérent avec nos mouvements, le cerveau va conclure qu’il s’agit de notre environnement (illusion du lieu). Et si l’environnement réagit à notre présence et à nos actions (illusion de plausibilité), ce sentiment est renforcé.</p>
<h2>Les thérapies d’exposition en santé mentale</h2>
<p>L’<a href="https://www.cairn.info/conduite-du-changement-concepts-cles--9782100769414-page-49.htm">apprentissage par l’expérience</a> est depuis longtemps une technique thérapeutique utilisée en santé mentale. C’est en 1984 que le théoricien de l’éducation David Kolb développe une application de sa théorie de l’apprentissage qui peut être divisée en quatre étapes : l’expérience concrète (immersion dans une situation réelle), l’observation réfléchie de cette expérience, la conceptualisation abstraite (où nous concevons une hypothèse explicative et de compréhension) et l’expérimentation active (qui permet de valider ou non l’hypothèse).</p>
<p>Si l’on simplifie les problèmes de santé mentale pour les considérer comme des difficultés à interagir dans le monde, le potentiel de la réalité virtuelle pour les traiter est énorme ! Par exemple, les personnes concernées pourraient bénéficier de niveaux élevés de présence dans des univers virtuels afin d’y expérimenter les situations qui les mettent en difficulté dans le monde réel afin d’apprendre à les gérer.</p>
<p>Les simulations peuvent également être graduées en difficulté et répétées jusqu’à ce que le bon apprentissage soit fait. Des situations problématiques difficiles à trouver dans la vie réelle peuvent facilement être mises en place virtuellement. Cela peut être par exemple, lors d’une phobie à l’idée de prendre l’avion : il est beaucoup plus facile de se retrouver à l’intérieur d’un avion virtuel que dans le monde réel.</p>
<p>Et le grand avantage de la RV est que les individus peuvent se souvenir qu’ils sont dans un environnement qui n’est pas réel : il leur est ainsi beaucoup plus facile de faire face à des situations qui leur posent problème, et elles seront en mesure d’essayer de nouvelles stratégies thérapeutiques.</p>
<p>Cet apprentissage peut ensuite être transféré dans le monde réel.</p>
<p>De plus, grâce à l’expérience de la RV, le thérapeute peut mieux démontrer au patient que ce qui lui semble être un fait est le résultat de son esprit, une « hypothèse individuelle inadaptée ». Une personne « hématophobe » peut associer la présence de sang à une blessure grave alors qu’elle n’est pas nécessairement le signe d’une hémorragie. Une fois ce concept compris, leur remise en question est plus simple.</p>
<h2>Les avantages de la thérapie « virtuelle »</h2>
<p>La <a href="https://www.cairn.info/revue-anthropologie-des-connaissances-2019-2-page-613.htm?contenu=article">thérapie par exposition à la réalité virtuelle</a> présente divers avantages par rapport à <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-319-10190-3_12">l’exposition réelle</a> :</p>
<ul>
<li><p>En termes de coût et de disponibilité : les situations redoutées ne sont pas toujours facilement accessibles, et l’exposition imaginaire (c’est-à-dire à des situations imaginées) est moins efficace ;</p></li>
<li><p>En termes d’engagement : l’immersion et l’interaction offertes par la RV peuvent améliorer l’engagement et l’adhésion des participants ;</p></li>
<li><p>En termes de contrôle : le contrôle de ce qui se passe dans le monde virtuel est presque total, y compris des éléments qui peuvent rendre la situation menaçante (animaux ou objets redoutés, hauteur des bâtiments, etc.). De plus, le thérapeute a un suivi complet, voit les éléments qui perturbent le plus le patient, etc. ;</p></li>
<li><p>En termes de réalisme et de présence : contrairement à l’exposition imaginaire (i·e on demande à la personne d’imaginer la situation), les utilisateurs de la RV se sentent présents et jugent leur situation comme réelle tout en sachant qu’elle ne l’est pas ;</p></li>
<li><p>En termes d’efficacité : La RV permet de construire des « aventures virtuelles » dans lesquelles la personne se sent compétente et efficace ;</p></li>
<li><p>En termes de sécurité : l’exposition réelle peut être très aversive et donner un sentiment d’insécurité, car il n’y a aucune garantie que quelque chose ne se passera pas mal (un ascenseur qui s’arrête…). Ce n’est pas le cas en réalité virtuelle, le contexte et le cadre étant contrôlés.</p></li>
</ul>
<h2>Quand la réalité virtuelle est-elle utile ?</h2>
<p>La RV peut être utilisée dans la <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2016/07/14/des-therapies-en-realite-virtuelle-pour-surmonter-ses-phobies_4969516_4408996.html">prise en charge des phobies</a> par exemple. Le patient y expérimente en toute sécurité et progressivement les situations sources d’anxiété ou peur : présence d’araignée, altitude, conduite… Ceci lui permet de s’y exposer pour, à terme, faire baisser son niveau d’anxiété.</p>
<p>La réalité virtuelle est aussi <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5964457/">utile dans le cas d’un délire de persécution (lutter contre la crainte d’être attaqué), d’addiction (résister à l’envie de prendre un autre verre), de troubles du comportement alimentaire</a>. Dans ces types de prises en charge, le rétablissement consiste à penser, à réagir et à se comporter différemment dans ces situations.</p>
<p>En mettant en place des activités sensori-motrices proches de ce qu’on expérimente dans la vie réelle, la RV permet d’évaluer de manière plus objective les processus cognitifs et symptômes en jeu chez les patients. Elle peut donc être utilisée comme un outil de détection précis des éléments perturbants. Ce qui peut être utile pour identifier un <a href="https://www.defense.gouv.fr/aid/actualites/stress-realite-virtuelle-au-service-detection-du-trouble-stress-post-traumatique">trouble du stress post-traumatique</a>.</p>
<p>Cet aspect de la RV plaide pour son emploi en « remédiation cognitive », qui a pour objectif de diminuer l’impact des difficultés d’un patient. La réalité virtuelle est alors utilisée comme <a href="https://www.youtube.com/watch?v=y8jo3Wlsv-U">outil d’entraînement</a>, en fournissant une représentation réaliste de son environnement et de ses activités quotidiennes.</p>
<p>Le logiciel de réalité virtuelle <a href="http://www.rehal-it.com/catalogue.html">R.O.G.E.R</a> permet par exemple d’explorer et de travailler les fonctions cognitives. Grâce à lui, l’utilisateur peut réaliser différentes activités de vie – tri de documents administratifs, etc. Cela permet d’exercer sa flexibilité (possibilité de passer d’une tâche à une autre pour s’adapter et adapter son comportement) et d’autres fonctions cognitives, tout en restant ancré dans le quotidien.</p>
<p>[<em>Plus de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<h2>Une technologie en progrès, mais avec des limites</h2>
<p>La recherche psychologique et la pratique clinique ont fait d’énormes progrès ces dernières années, et les <a href="http://www.rehal-it.com/roger.html">outils</a> se développent et se démocratisent.</p>
<p>Au-delà des thérapies, des recherches portent également sur l’utilisation de la réalité virtuelle pour la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5727661/">sensibilisation</a> et la <a href="https://labpsy.u-bordeaux.fr/Membres/Theses-en-cours/Tison-Emma">formation</a> en santé mentale des étudiants (en médecine, psychologie, soins infirmiers). Ces derniers peuvent se « mettre dans la peau » de personnes atteintes de troubles psychiatriques, ce qui leur donne une meilleure compréhension de ce que peuvent vivre les usagers – et <a href="https://www.researchgate.net/publication/359962958_Innovative_Technology-Based_Interventions_to_Reduce_Stigma_Toward_People_With_Mental_Illness_A_Systematic_Review_and_Meta-Analysis">diminuer leur stigmatisation</a>.</p>
<p>Il paraît clair que la réalité virtuelle peut contribuer à améliorer l’accès à des traitements et thérapies psychologiques efficaces, et constituer une méthode de choix pour les thérapeutes et les patients. Attention toutefois : le facteur humain ne peut et ne doit pas disparaître, car la <a href="https://www.cairn.info/revue-approche-centree-sur-la-personne-2005-1-page-45.htm">présence du thérapeute est en elle-même déjà thérapeutique</a>.</p>
<p>Cette technologie présente toutefois encore des limites : les scénarios sont pour le moment restreints, pour des raisons techniques mais également parce que les thérapeutes ne sont pas programmeurs, tout comme le degré d’interaction sociale possible. De plus, le <a href="https://theconversation.com/la-cybercinetose-ou-le-mal-des-casques-de-realite-virtuelle-74900">« mal des simulateurs »</a>, cette sensation de nausée causée par des informations contradictoires reçues par nos systèmes sensoriels, n’est pas totalement solutionné.</p>
<p>Une autre limite est qu’<a href="https://theconversation.com/les-avatars-peuvent-ils-remplacer-notre-corps-164965">elle isole les utilisateurs dans un monde numérique</a>. Il peut donc être intéressant d’explorer des approches en <a href="https://theconversation.com/quest-ce-que-la-re-alite-augmente-e-et-comment-fonctionne-t-elle-65585">réalité augmentée (RA)</a>, qui consiste à superposer des éléments virtuels à l’environnement réel. Au lieu d’isoler du monde réel, la réalité augmentée permet d’interagir avec des personnes réelles et non plus avec des avatars : il n’y a plus la distance sociale présente en RV. De plus, avec la RA, nous pouvons distordre la réalité et contrôler les stimuli, tout en mettant les utilisateurs dans le vrai monde physique.</p>
<p>Mais, qui sait… peut-être qu’un jour, pour certaines thérapies, nous pourrons dire <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5964457/">exit le divan, place au casque</a> !</p>
<hr>
<p><em>Emma Tison réalise actuellement sa thèse à l’Université de Bordeaux sous la direction de <a href="https://labpsy.u-bordeaux.fr/Membres/Membres-titulaires-et-associes/Prouteau-Antoinette">Antoinette Prouteau</a> et <a href="https://people.bordeaux.inria.fr/hachet/">Martin Hachet</a>. Ces derniers ont participé à la relecture de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/202175/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emma Tison a reçu des financements de l'Université de Bordeaux. </span></em></p>La réalité virtuelle reste souvent associée au jeu vidéo. Elle a pourtant aujourd’hui de nombreuses applications, y compris en santé. Voilà comment elle pourrait bientôt soigner phobies, addictions…Emma Tison, Doctorante en psychologie, Psychologue spécialisée en neuropsychologie, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2012582023-03-24T14:28:05Z2023-03-24T14:28:05ZVoici pourquoi nous avons si peur des clowns<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/516506/original/file-20230320-1833-z53pt1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C0%2C992%2C607&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La représentation négative des clowns dans la culture populaire est un facteur qui semble contribuer beaucoup plus à la coulrophobie.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Avez-vous peur des clowns ? Si oui, vous n’êtes pas seul. La coulrophobie, ou peur des clowns, est un phénomène largement reconnu. <a href="https://www.chapman.edu/wilkinson/research-centers/babbie-center/_files/full-survey-methodology-2019.pdf">Des études</a> indiquent que cette peur est présente chez les adultes et les enfants <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00207411.2022.2046925?journalCode=mimh20">dans de nombreuses cultures</a>. Pourtant, elle n’est pas bien comprise en raison d’un manque de recherches ciblées.</p>
<p>Alors que de nombreuses explications possibles de la phobie ont été avancées dans la <a href="https://www.jstor.org/stable/26899534">littérature académique</a>, aucune étude n’a spécifiquement examiné ses origines. <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2023.1109466/full">Nous avons donc entrepris de découvrir</a> les raisons pour lesquelles les gens sont effrayés par les clowns et de comprendre la psychologie qui sous-tend cette phobie. Nous voulions également explorer la fréquence de la peur des clowns chez les adultes et examiner la gravité de la peur chez celles et ceux qui l’ont signalée. </p>
<p>Pour ce faire, nous avons élaboré un questionnaire psychométrique pour évaluer la prévalence et la gravité de la coulrophobie. <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00207411.2022.2046925">Le questionnaire sur la peur des clowns</a> a été rempli par un échantillon international de 987 personnes, âgées de 18 à 77 ans. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un clown effrayant sort de derrière un arbre. Il porte un haut rouge. Il est maquillé en blanc et affiche un large sourire sinistre peint en rouge" src="https://images.theconversation.com/files/510340/original/file-20230215-15-x2wxpk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/510340/original/file-20230215-15-x2wxpk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/510340/original/file-20230215-15-x2wxpk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/510340/original/file-20230215-15-x2wxpk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/510340/original/file-20230215-15-x2wxpk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/510340/original/file-20230215-15-x2wxpk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/510340/original/file-20230215-15-x2wxpk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Avez-vous peur des clowns ? Si oui, vous n’êtes pas seul.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/closeup-scary-evil-clown-woods-emerging-503361121">(Shutterstock)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Plus de la moitié des personnes interrogées (53,5 %) ont déclaré avoir peur des clowns, au moins dans une certaine mesure, et 5 % d’entre elles ont déclaré en avoir « extrêmement peur ». Il est intéressant de noter que ce pourcentage de personnes déclarant avoir une peur extrême des clowns est légèrement plus élevé que les <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/psychological-medicine/article/abs/crossnational-epidemiology-of-specific-phobia-in-the-world-mental-health-surveys/A0EDD4B22E19CDB63269D7A34F2C21AA">proportions déclarées pour de nombreuses autres phobies « extrêmes »</a>, telles que les animaux (3,8 %), le sang/les injections/les blessures (3,0 %), les hauteurs (2,8 %), l’eau calme ou les phénomènes météorologiques (2,3 %), les espaces clos (2,2 %) et l’avion (1,3 %). </p>
<p>Nous avons également constaté que les femmes ont davantage peur des clowns que les hommes. Pourquoi ? Ce n’est pas clair. Mais cette observation fait écho aux <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/ejn.14602">résultats des recherches</a> sur d’autres phobies telles que la peur des serpents et des <a href="https://psycnet.apa.org/record/1984-06781-001">araignées</a>. Nous avons également découvert que la coulrophobie diminue avec l’âge, ce qui est également observé <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/psychological-medicine/article/abs/crossnational-epidemiology-of-specific-phobia-in-the-world-mental-health-surveys/A0EDD4B22E19CDB63269D7A34F2C21AA">pour d’autres peurs</a>. </p>
<figure class="align-right ">
<img alt="Un homme vêtu d’un costume de clown rouge, bleu, vert et jaune nous fait signe. Il a une perruque multicolore, un maquillage blanc et un gros nez rouge" src="https://images.theconversation.com/files/512852/original/file-20230301-23-3x3i35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/512852/original/file-20230301-23-3x3i35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/512852/original/file-20230301-23-3x3i35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/512852/original/file-20230301-23-3x3i35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/512852/original/file-20230301-23-3x3i35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/512852/original/file-20230301-23-3x3i35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/512852/original/file-20230301-23-3x3i35.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Tous les clowns ne sont pas censés être effrayants, mais cela ne nous empêche pas d’en avoir peur.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/full-length-clown-portrait-169753952">(Shutterstock)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Les origines de cette peur</h2>
<p>L’étape suivante consistait à explorer les origines de la peur des clowns. Un <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2023.1109466/full">questionnaire de suivi</a> a été remis aux 53,5 % de personnes qui avaient déclaré avoir au moins un certain degré de peur des clowns. Cette nouvelle série de questions proposait aux participants huit explications possibles des origines de cette peur, à savoir :</p>
<ol>
<li><p>Un sentiment étrange ou troublant dû au maquillage des clowns qui leur donne un aspect pas tout à fait humain. Une réaction similaire est parfois observée avec les <a href="https://theconversation.com/uncanny-valley-why-we-find-human-like-robots-and-dolls-so-creepy-50268">poupées ou mannequins</a>.</p></li>
<li><p>Les traits exagérés du visage des clowns transmettent un sentiment direct de menace.</p></li>
<li><p>Le maquillage des clowns dissimule les signaux émotionnels et crée de l’incertitude.</p></li>
<li><p>La couleur du maquillage de clown nous rappelle la mort, l’infection ou les lésions sanguines, et suscite le dégoût ou l’évitement.</p></li>
<li><p>Le comportement imprévisible des clowns nous met mal à l’aise.</p></li>
<li><p>La peur des clowns a été inculquée par les membres de sa famille. </p></li>
<li><p>Les représentations négatives des clowns dans la culture populaire.</p></li>
<li><p>Une expérience effrayante avec un clown.</p></li>
</ol>
<p>Étonnamment, nous avons constaté que la dernière explication, à savoir celle d’une expérience personnelle effrayante avec un clown, était la moins populaire auprès des participants. Cela indique que l’expérience personnelle ne suffit pas à expliquer pourquoi les gens ont peur des clowns. </p>
<p>En revanche, la représentation négative des clowns dans la culture populaire est un facteur qui semble contribuer beaucoup plus à la coulrophobie. Ce n’est pas étonnant, puisque certains des clowns les plus connus dans les livres et les films ont été conçus pour être effrayants. On peut par exemple penser à Pennywise, le clown effrayant du roman It de Stephen King (1986). (Ce personnage a récemment fait l’objet de deux films en <a href="https://www.warnerbros.co.uk/movies/it">2017</a> et <a href="https://www.warnerbros.co.uk/movies/it-chapter-two">2019</a>, avec Bill Skarsgård dans le rôle principal).</p>
<p>Or, certaines personnes ont peur de Ronald McDonald, la mascotte de la chaîne de restauration rapide éponyme. Le hic, c’est que ce clown n’est pas censé vous effrayer. Cela suggère qu’il y a peut-être quelque chose de plus fondamental dans l’apparence des clowns qui déstabilise les gens.</p>
<p>En fait, le facteur le plus important que nous ayons identifié est celui des signaux émotionnels cachés, ce qui suggère que pour de nombreuses personnes, la peur des clowns provient du fait qu’elles ne sont pas en mesure de percevoir leurs expressions faciales en raison de leur maquillage. Nous ne pouvons pas voir leur « vrai » visage et ne pouvons donc pas comprendre leur intention émotionnelle. Par exemple, nous ne savons pas s’ils froncent les sourcils, ce qui indiquerait de la colère. Le fait de ne pas pouvoir détecter ce qu’un clown pense ou ce qu’il pourrait faire ensuite rend certains d’entre nous nerveux en leur présence.</p>
<p>Ces recherches ont permis de mieux comprendre pourquoi les gens ont peur des clowns, mais d’autres questions demeurent en suspens. Par exemple, si le maquillage qui masque les émotions provoque la peur, les personnes qui se font peindre le visage en animal produisent-elles le même type d’effet ? Ou bien y a-t-il quelque chose de plus particulier dans le maquillage des clowns qui suscite cette peur ? C’est sur ces questions que nous poursuivons nos recherches.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201258/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Nos recherches montrent que la coulrophobie, ou peur des clowns, est principalement déclenchée par l’incapacité à comprendre leurs expressions faciales.Sophie Scorey, PhD Researcher, University of South WalesJames Greville, Lecturer in Psychology, University of South WalesPhilip Tyson, Associate Professor of Psychology, University of South WalesShakiela Davies, Lecturer in Clinical Psychology and Mental Health, University of South WalesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1663282021-08-23T13:27:55Z2021-08-23T13:27:55ZLa peur des piqûres peut freiner la vaccination contre la Covid-19. Mais il existe des stratégies pour la gérer<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/417433/original/file-20210823-23-kmkpuw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4608%2C3442&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
Une peur des aiguilles non maîtrisée est très pénible à vivre et peut influencer les choix en matière de soins de santé. Des méthodes fondées sur la science peuvent aider les gens à surmonter leur phobie et à se faire vacciner.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Pensez à la dernière fois où vous avez eu vraiment peur — je veux dire, où vous avez ressenti de la terreur : sueurs froides, tremblements, cœur qui bat à tout rompre. Maintenant, pensez à ce que ce serait de vivre cela à la seule vue d’une aiguille ou simplement en entendant quelqu’un parler des vaccins contre la Covid-19.</p>
<p>Cette réalité concerne environ une <a href="https://doi.org/10.1097/ajp.0000000000000272">personne sur dix</a> et elle n’est pas à négliger dans les campagnes de vaccination.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/413613/original/file-20210728-25-1gbj1jy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/413613/original/file-20210728-25-1gbj1jy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/413613/original/file-20210728-25-1gbj1jy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/413613/original/file-20210728-25-1gbj1jy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/413613/original/file-20210728-25-1gbj1jy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/413613/original/file-20210728-25-1gbj1jy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/413613/original/file-20210728-25-1gbj1jy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://theconversation.com/ca-fr/topics/confiance-dans-les-vaccins-au-canada-107062">Cliquez ici pour lire d’autres articles de notre série sur les vaccins</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Premièrement, lorsque quelque chose nous rend très anxieux, on a tendance à l’éviter ou à le retarder. Deuxièmement, éprouver une grande peur et une réaction au stress peut conduire à un comportement de fuite (qui fait qu’on s’éloigne ou qu’on agit de manière agressive), à vivre une grande détresse au moment de la procédure et à avoir des symptômes de <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/rapports-publications/releve-maladies-transmissibles-canada-rmtc/numero-mensuel/2020-46/numero-6-4-juin-2020/canvax-confiance-vaccins.html">réactions au stress de la vaccination</a>, comme des <a href="http://dx.doi.org/10.15585/mmwr.mm7018e3">étourdissements ou un évanouissement</a>. Troisièmement, la peur de l’aiguille peut, à son tour, être accrue par le fait d’avoir déjà vécu une réaction au stress de la vaccination ou d’avoir entendu parler d’autres personnes qui l’ont vécue.</p>
<p>Ce qu’il faut savoir, c’est que ces réactions ne résultent pas d’un défaut du vaccin. En fait, elles peuvent survenir <a href="https://www.canada.ca/content/dam/phac-aspc/documents/services/reports-publications/canada-communicable-disease-report-ccdr/monthly-issue/2020-46/issue-6-june-4-2020/ccdrv46i06a10-eng.pdf">avant, pendant et après l’injection</a> en raison du stress ressenti. Néanmoins, elles peuvent perturber les campagnes de vaccination.</p>
<p>La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des stratégies fondées sur des données scientifiques pour régler le problème.</p>
<h2>Peur des aiguilles et réticence face au vaccin</h2>
<p>La réticence à l’égard des vaccins est complexe, car il existe de nombreuses raisons de retarder ou de refuser la vaccination. <a href="https://kidsinpain.ca/wp-content/uploads/2021/06/Vaccine-Hesitancy-Survey-Executive-Summary-SKIP-and-HEC-2021.pdf">Un sondage</a> a démontré que de 6 à 7 % des Canadiens qui ne prévoient pas se faire vacciner contre la Covid ou qui ne sont pas sûrs de le faire ont déjà retardé des vaccins par peur des piqûres.</p>
<p>En tant que psychologue clinicienne, j’ai fait des recherches auprès de personnes qui présentaient différents niveaux de peur des aiguilles, allant de léger à extrême. Un certain degré de crainte des aiguilles est courant et se manifeste chez la <a href="https://doi.org/10.1111/jan.13818">plupart des enfants, jusqu’à la moitié des adolescents et de 20 à 30 % des personnes âgées de 20 à 40 ans</a>. Une grande partie de mon travail se concentre sur les enfants pour trois raisons :</p>
<ol>
<li><p>Ils reçoivent régulièrement des piqûres à cause des calendriers de vaccination.</p></li>
<li><p>Ils sont vulnérables aux expériences négatives liées à une mauvaise gestion de la douleur.</p></li>
<li><p>Ces expériences négatives peuvent avoir des effets à long terme. En fait, la plupart des adultes qui ont un niveau élevé de peur des aiguilles rapportent une <a href="https://doi.org/10.1016/0005-7967(94)90161-9">expérience antérieure négative</a>.</p></li>
</ol>
<p>Les aiguilles causent une certaine douleur, et la douleur est subjective. On a effectué <a href="https://itdoesnthavetohurt.ca/">d’importantes campagnes pour faire connaître des stratégies de gestion de la douleur</a> fondées sur des données au public. En 2015, nous avons mené une <a href="https://journals.lww.com/clinicalpain/toc/2015/10001">série d’études rigoureuses</a> pour formuler des <a href="https://doi.org/10.1503/cmaj.150391">recommandations</a> sur les meilleurs moyens de faciliter la vaccination.</p>
<h2>Stratégies fondées sur la science</h2>
<p>Le système « confort, aide, relaxation et distraction » (CARD) peut aider les <a href="https://dx.doi.org/10.14745%2Fccdr.v47i01a12">cliniques</a>, les <a href="https://immunize.ca/card-adults">particuliers</a> et les <a href="https://www.immunize.ca/card-parents">parents</a> à rendre l’expérience de la vaccination aussi agréable que possible. Si vous avez une peur qui va de légère à modérée des aiguilles et si la douleur associée au vaccin contre la Covid-19 vous inquiète, il est souhaitable d’établir un plan d’action pour avant, pendant et après l’injection.</p>
<ul>
<li><p>Que porterez-vous pour qu’il soit facile d’accéder à vos bras ?</p></li>
<li><p>Que ferez-vous en attendant à la clinique (lire, écouter de la musique, jouer à un jeu vidéo) ?</p></li>
<li><p>Devriez-vous acheter un anesthésique local pour engourdir votre peau au site d’injection ?</p></li>
<li><p>Comment voulez-vous que le clinicien signale qu’il commence, par exemple, en disant « Un, deux, trois, on y va » ?</p></li>
<li><p>Décidez si vous voulez regarder ou non pendant l’injection et dites au clinicien ce que vous voulez.</p></li>
<li><p>Pendant qu’on vous pique, voulez-vous parler d’autre chose, jouer sur votre téléphone ou écouter une imagerie guidée ?</p></li>
<li><p>Par la suite, comment allez-vous vous récompenser et vous souvenir de ce qui vous a aidé ? Vous pourriez filmer une courte vidéo où vous décrivez ce qui s’est bien passé pour vous aider la prochaine fois.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/416126/original/file-20210813-19-1me0ywh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un jeune homme regarde vers le haut pendant qu’il reçoit une injection" src="https://images.theconversation.com/files/416126/original/file-20210813-19-1me0ywh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/416126/original/file-20210813-19-1me0ywh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/416126/original/file-20210813-19-1me0ywh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/416126/original/file-20210813-19-1me0ywh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=438&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/416126/original/file-20210813-19-1me0ywh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=550&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/416126/original/file-20210813-19-1me0ywh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=550&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/416126/original/file-20210813-19-1me0ywh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=550&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Décider à l’avance si l’on veut regarder l’injection ou détourner le regard est une étape dans la gestion de la peur des aiguilles.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(AP Photo/Phil Long)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour les personnes qui ont une peur extrême des aiguilles, les stratégies décrites ci-dessus, destinées à gérer la douleur et à diminuer le niveau de peur à l’approche du moment de la piqûre, ne suffiront pas. Elles devront acquérir l’assurance que ce dont elles ont le plus peur ne se produira pas, ou que si cela se produit, elles pourront y survivre. C’est la base du traitement d’exposition pour les peurs qui sont hors de proportion avec le danger posé.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1016/j.cpr.2006.10.002">L’exposition est considérée comme l’approche de référence pour les « phobies spécifiques »</a>, catégorie dans laquelle on trouve la peur extrême des aiguilles dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux. Le terme technique est « phobie spécifique, sous-type sang-injection-accident », et on estime qu’elle touche environ 3,5 % de la population.</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1080/16506073.2016.1157204">J’ai fait valoir ailleurs</a> que l’on doit s’occuper des quelque 10 % de personnes qui ont une peur élevée, qu’elles aient ou non un diagnostic de santé mentale lié aux piqûres. En effet, <a href="https://doi.org/10.1155/2014/471340">jusqu’à 94 %</a> des gens concernés ne vont pas consulter un professionnel pour obtenir ce diagnostic, mais elles souffrent et ont besoin d’aide.</p>
<p>La thérapie par exposition peut se faire en situation réelle ou en imaginant la situation redoutée. <a href="https://rsc-src.ca/fr/voix-de-la-src/high-needle-fear-and-covid-19-vaccines">En voici un résumé</a> :</p>
<p>Tout d’abord, on demande à la personne de dresser une liste de toutes les situations et de tous les aspects de la piqûre qui lui font peur : Est-ce le fait de voir du sang ? De sentir l’aiguille pénétrer dans son corps ? La douleur ? L’étourdissement ? Autre chose ?</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un rouleau d’autocollants roses portant la mention J’ai reçu mon injection de Covid-19" src="https://images.theconversation.com/files/416127/original/file-20210813-17-oqqzsw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/416127/original/file-20210813-17-oqqzsw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/416127/original/file-20210813-17-oqqzsw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/416127/original/file-20210813-17-oqqzsw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/416127/original/file-20210813-17-oqqzsw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/416127/original/file-20210813-17-oqqzsw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/416127/original/file-20210813-17-oqqzsw.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La prise en charge de la douleur et de la peur liées aux aiguilles peut contribuer à augmenter le taux de vaccination contre la Covid-19, mais aussi à améliorer la confiance dans toutes les procédures avec aiguilles.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Lars Hagberg</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ensuite, la personne évalue sa peur pour chaque situation et crée une échelle de la peur qui commence par la situation la moins redoutée (par exemple, regarder des images d’aiguilles) et avance par petits paliers vers la plus redoutée (par exemple, l’injection d’un vaccin). Le patient répète chaque étape jusqu’à ce que sa peur diminue avant de passer à la suivante.</p>
<p>Certaines personnes se sentent étourdies ou s’évanouissent quand on leur fait des piqûres. Ce phénomène est plus fréquent chez les gens qui ont un niveau de peur élevé. Une technique appelée <a href="https://www.health.gov.on.ca/fr/pro/programs/publichealth/coronavirus/docs/vaccine/Needle_Fears_Resource.pdf">contraction musculaire</a>, qui consiste à contracter et à relâcher les muscles, peut aider à éviter la chute soudaine de tension artérielle qui entraîne des étourdissements et des évanouissements. Les gens qui ont une forte peur des aiguilles peuvent s’exercer à la contraction musculaire en franchissant les étapes de leur échelle de la peur.</p>
<h2>Plus de bien-être, plus de confiance</h2>
<p>Vous pouvez imaginer la motivation et le courage nécessaires pour affronter ses peurs, ce qui a une incidence sur <a href="https://doi.org/10.1016/j.cpr.2006.10.002">l’acceptation du traitement</a>. Avec mes collègues, je travaille à la création d’interventions par exposition plus accessibles pour les gens qui ont un niveau élevé de peur des aiguilles. <a href="https://doi.org/10.12688/f1000research.20082.1">D’autres traitements prometteurs</a>, comme l’intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires (EMDR), méritent également d’être étudiés.</p>
<p>La peur non maîtrisée des aiguilles est très pénible pour les personnes qui en souffrent et peut influencer leurs choix en matière de soins de santé. Mais le fait d’avoir peur n’est pas un choix. La pandémie de Covid-19 a attiré l’attention du public sur la peur des aiguilles comme jamais auparavant. Pourtant, pandémie ou pas, les aiguilles font toujours partie des soins de santé, tant pour la prévention, les diagnostics que les traitements.</p>
<p>Ignorer la peur des aiguilles ne la fait pas disparaître — en fait, pour la personne qui souffre de cette peur, l’éviter ne fait que l’aggraver. En gérant de manière cohérente la douleur et la peur liées aux aiguilles, nous avons la possibilité non seulement d’augmenter le taux de vaccination contre la Covid-19, mais aussi de maximiser le bien-être et la confiance dans les interactions liées aux soins de santé et les procédures avec aiguilles de manière générale.</p>
<hr>
<p><em>Vous avez une question sur les vaccins Covid-19 ? Envoyez-nous un courriel à l’adresse <a href="mailto:ca-vaccination@theconversation.com">ca‑vaccination@theconversation.com</a> et des experts répondront à vos questions dans les prochains articles.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/166328/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Meghan McMurtry a reçu des fonds des Instituts de recherche en santé du Canada, de l'Agence de la santé publique du Canada, de la Fondation canadienne pour l'innovation et du ministère de la Recherche et de l'Innovation. Elle a été membre du groupe de travail sur les réponses au stress de l'immunisation pour le Comité consultatif mondial sur la sécurité des vaccins de l'Organisation mondiale de la santé et membre du groupe de travail COVID-19 de la Société royale du Canada sur l'acceptation des vaccins.</span></em></p>Une personne sur 10 a une grande peur des aiguilles, au point de perturber les campagnes de vaccination. Mais il existe des moyens efficaces de gérer la douleur et l’angoisse.Meghan McMurtry, Associate Professor in Psychology, University of GuelphLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1621552021-06-07T15:21:05Z2021-06-07T15:21:05ZGrossophobie : un phénomène mondial aux conséquences néfastes pour tous<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/404881/original/file-20210607-27-l3uod1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=164%2C25%2C8251%2C5872&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La stigmatisation liée au poids est à la fois une injustice sociale et un problème de santé publique.
</span> <span class="attribution"><span class="source">(SIPhotography/Getty Images)</span></span></figcaption></figure><p>Paresse. Manque de motivation. Manque d'autodiscipline. Manque de volonté.</p>
<p>Ce ne sont là que quelques-uns des préjugés largement répandus et ancrés dans la société nord-américaine pour expliquer le surpoids ou la forte corpulence de certaines personnes. Connue depuis quelques années sous le nom de grossophobie, cette attitude fait que de nombreuses personnes en surpoids sont blâmées, taquinées, brimées, maltraitées et discriminées.</p>
<p>On n'échappe nulle part à la stigmatisation sociale liée au poids. Des recherches sur plusieurs décennies ont montré que la <a href="https://theconversation.com/discrimination-against-fat-people-is-so-endemic-most-of-us-dont-even-realise-its-happening-94862">stigmatisation des personnes en surpoids</a> était présente sur les lieux de travail, dans les écoles, les établissements de santé, les lieux publics et les médias, ainsi que dans les relations interpersonnelles avec les amis et les membres de la famille. Elle est omniprésente.</p>
<p>En tant que <a href="https://scholar.google.com/citations?user=bcS5xUwAAAAJ&hl=en">psychologue et chercheure</a> au <a href="https://uconnruddcenter.org/">Rudd Center</a> for Food Policy & Obesity de <a href="https://hdfs.uconn.edu/person/rebecca-puhl/">l'Université du Connecticut</a>, j'étudie depuis 20 ans avec mon équipe la stigmatisation liée au poids. Nous avons travaillé sur les origines et la prévalence de cette stigmatisation, sa présence dans différents contextes sociétaux, les dommages qu'elle cause à la santé des gens et les stratégies pour s'attaquer à ce problème.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un homme avec ses amis prenant un repas ensemble sur la terrasse d'un restaurant" src="https://images.theconversation.com/files/403232/original/file-20210527-23-xc4035.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/403232/original/file-20210527-23-xc4035.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/403232/original/file-20210527-23-xc4035.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/403232/original/file-20210527-23-xc4035.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/403232/original/file-20210527-23-xc4035.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/403232/original/file-20210527-23-xc4035.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/403232/original/file-20210527-23-xc4035.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les chercheurs ont interrogé près de 14 000 adultes qui tentaient activement de gérer leur poids dans six pays. L'étude portait sur leur expérience de la stigmatisation et des préjugés liés au poids.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com">(Martine Doucet/E+ via Getty)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nous venons de conclure une étude internationale qui montre clairement que la stigmatisation des personnes qui souffrent d'embonpoint est répandue, dommageable et difficile à éradiquer. Cette dévalorisation sociétale constitue une réelle épreuve pour les personnes en surpoids, et ce dans différents pays de langues et de cultures diverses.</p>
<h2>Un préjugé persistant</h2>
<p>Parmi les adultes américains, la stigmatisation liée au poids <a href="https://doi.org/10.1016/j.amepre.2017.04.003">est courante</a>, puisque 40 % d'entre eux déclarent avoir été victimes de moqueries, de traitements injustes et de discrimination liés au poids. Ces mauvaises expériences <a href="https://doi.org/10.1111/obr.12343">sont plus fréquentes</a> chez les personnes ayant un <a href="https://www.cdc.gov/obesity/adult/defining.html">indice de masse corporelle élevé</a> ou souffrant <a href="https://www.cdc.gov/obesity/adult/defining.html">d'obésité</a> et chez les femmes. Chez les jeunes, le poids corporel est l'une des raisons les plus courantes de taquineries et de brimades.</p>
<p>Le fait que <a href="https://www.cdc.gov/obesity/data/adult.html">plus de 40 % des Américains</a> et <a href="https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/82-625-x/2019001/article/00005-fra.htm">près de 30 % des Canadiens</a> soient obèses n'a pas amélioré l'attitude du public envers eux. Bien que les jugements défavorables de la société à l'égard d'autres groupes stigmatisés aient diminué au cours des dernières décennies, les préjugés liés au poids <a href="https://www.sciencedaily.com/releases/2019/01/190107102826.htm">n'ont guère évolué</a>. Dans certains cas, <a href="https://doi.org/10.1177/0956797618813087">ils s'aggravent</a>.</p>
<p>L'opinion dominante selon laquelle les gens sont responsables de leur poids, malgré les nombreuses preuves scientifiques des <a href="https://doi.org/10.1210/er.2017-00111">causes complexes</a> et <a href="https://doi.org/10.1038/nrdp.2017.34">multifactorielles</a> de l'obésité, est l'une des raisons pour lesquelles la stigmatisation du poids persiste. Cet état d'esprit est difficile à changer étant donné la célébration de la minceur dans la culture nord-américaine, les représentations négatives des personnes corpulentes dans les médias et l'industrie florissante des régimes. Ces facteurs renforcent le postulat erroné selon lequel le poids corporel est infiniment malléable. L'absence de législation se positionne également comme un facteur de la persistance de la discrimination basée sur le poids.</p>
<p>Contrairement à la croyance populaire, la stigmatisation liée au poids ne motive pas les gens à maigrir. Au contraire, elle <a href="https://doi.org/10.1186/s12916-018-1116-5">mine leur santé</a> et affecte leur qualité de vie. Les <a href="https://doi.org/10.1037/amp0000538">effets néfastes de la stigmatisation liée au poids</a> sont incontestables et durables. Ils vont de la détresse émotionnelle – symptômes dépressifs, anxiété, faible estime de soi – aux troubles de l'alimentation, aux comportements alimentaires malsains, à la diminution de l'activité physique, à la prise de poids, à l'augmentation du stress physiologique et à l'évitement des soins de santé.</p>
<h2>Un combat collectif</h2>
<p>La stigmatisation des personnes grosses n'existe pas qu'aux États-Unis et au Canada. Elle est répandue <a href="https://dx.doi.org/10.1186%2Fs12992-018-0337-x">dans le monde entier</a>. Cependant, peu d'études ont comparé plus précisément les effets de stigmatisation du poids dans différents pays.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/stigmatiser-les-gros-cest-mauvais-pour-tout-le-monde-109996">Stigmatiser les gros, c'est mauvais pour tout le monde!</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Dans <a href="https://doi.org/10.1038/s41366-021-00860-z">notre plus récente étude</a>, nous avons comparé les expériences vécues de stigmatisation liée au poids dans six pays : Australie, Canada, France, Allemagne, Grande-Bretagne et États-Unis. Ces pays partagent des valeurs sociétales communes qui rejettent sur l'individu la responsabilité du poids corporel et font très peu pour lutter contre la grossophobie et la maltraitance liées au poids. L'étude incluait 13 996 participants adultes (environ 2 000 personnes par pays) aux prises avec des problèmes de gestion de poids.</p>
<p>Les préjugés auxquels les personnes font face en raison de leur poids ou de leur corpulence se sont révélés remarquablement similaires dans les six pays, plus de la moitié des participants à l'étude – 58 % en moyenne – ayant été victimes de stigmatisation liée au poids. Les relations interpersonnelles associées davantage à la stigmatisation du poids impliquaient des membres de la famille (76%-87%), des camarades de classe (72%-76%) et des médecins (58%-73%). Ces expériences étaient plus fréquentes et plus pénibles pendant l'enfance et l'adolescence.</p>
<p>Nombreux sont les participants ayant intégré ces expériences stigmatisantes dans l'image qu'ils ont d'eux-mêmes. Dans ce processus d'internalisation des préjugés liés au poids, ils s'appliquent à eux-mêmes des stéréotypes sociétaux négatifs. Ils se blâment pour leur poids, se considèrent comme inférieurs et méritant la réprobation de la société.</p>
<p>Nos recherches antérieures nous ont appris que l'intériorisation des préjugés liés au poids a des conséquences néfastes sur la santé, et ce fut également le cas avec cette nouvelle étude. Dans les six pays étudiés, plus les personnes intériorisaient les préjugés liés au poids, plus elles prenaient du poids au cours de l'année précédente, utilisaient la nourriture pour gérer le stress, évitaient d'aller à la salle de sport, avaient une image corporelle malsaine et se déclaraient plus stressées. Les mêmes résultats se maintenaient, peu importe la corpulence des personnes interrogées ou leur expérience antérieure de stigmatisation.</p>
<p>De plus, dans ces six pays, les personnes <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pone.0251566">qui intériorisent le plus les préjugés</a> liés au poids font état d'une moins bonne santé et d'une moins bonne prise en charge dans le système de santé, ce qui a un impact sur leur qualité de vie. Elles évitaient de se faire soigner, subissaient des examens moins fréquents et signalaient davantage de soins de qualité inférieure que les personnes ayant moins intériorisé leur poids.</p>
<p>Grâce à cette perspective internationale unique, notre étude révèle que la stigmatisation liée au poids est vécue à grande échelle, souvent intériorisée et liée à une mauvaise santé et à des soins de santé médiocres chez les personnes qui tentent de surveiller leur poids. En ce sens, la lutte contre la grossophobie apparaît comme un combat collectif, mais c'est un combat que les gens mènent vraisemblablement individuellement.</p>
<h2>Des raisons d'être optimiste</h2>
<p>Si le chemin est encore ardu pour éliminer la stigmatisation liée au poids, les attitudes sociétales évoluent. Ces dernières années, les <a href="https://www.lapresse.ca/societe/sante/2019-09-13/mieux-comprendre-la-grossophobie">méfaits de la grossophobie</a> ont fait l'objet d'une attention accrue de la part du public, tout comme le mouvement <a href="https://doi.org/10.1177/1359105320912450">pour une image corporelle positive</a>. Ces deux phénomènes contribuent à renforcer les appels à la mobilisation pour mettre fin aux traitements injustes liés au poids.</p>
<p>La communauté médicale est également de plus en plus consciente de la nécessité d'agir. En 2020, plus de 100 organisations médicales et scientifiques de neuf pays ont signé une <a href="https://www.nature.com/articles/s41591-020-0803-x">déclaration commune</a> et un engagement à sensibiliser l'opinion sur la stigmatisation du poids et ses effets néfastes. Ces experts médicaux veulent défaire le discours culpabilisant et aider à lutter contre la stigmatisation du poids dans les médias, les soins de santé et dans les comportements publics.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une femme de forte taille rit et discute avec des amis lors d'une fête dans un jardin" src="https://images.theconversation.com/files/402991/original/file-20210526-19-5orzg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/402991/original/file-20210526-19-5orzg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/402991/original/file-20210526-19-5orzg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/402991/original/file-20210526-19-5orzg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/402991/original/file-20210526-19-5orzg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/402991/original/file-20210526-19-5orzg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/402991/original/file-20210526-19-5orzg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une majorité d'Américains estime qu'il est temps d'ajouter le poids corporel comme catégorie protégée dans les lois étatiques existantes sur les droits civils, à côté de catégories comme la race et l'âge.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com">(Thomas Barwick/Stone via Getty)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nos recherches montrent un <a href="https://doi.org/10.1038/ijo.2016.49">soutien important du public</a> en faveur de politiques visant à lutter contre la discrimination basée sur le poids. Dans une série d'études nationales, nous avons constaté que plus de 70 % des Américains sont favorables à l'ajout du critère du poids corporel, au même titre que des catégories comme les origines et l'âge, dans les lois étatiques existantes sur les droits civils. Ils sont également favorables à une <a href="https://www.washingtonpost.com/outlook/weight-discrimination-is-rampant-yet-in-most-places-its-still-legal/2019/06/21/f958613e-9394-11e9-b72d-d56510fa753e_story.html">nouvelle législation qui rendrait illégale la discrimination des employeurs à l'encontre de leurs employés en raison de leur poids</a>.</p>
<p>Cela reviendrait à faire de la stigmatisation liée au poids à la fois une injustice sociale et un problème de santé publique.</p>
<p>Je pense qu'une mobilisation collective est nécessaire pour s'attaquer à ce problème. Cela peut sembler difficile, mais il s'agit dans les faits d'un enjeu on ne peut plus simple: garantir le respect, la dignité et l'égalité de traitement pour les personnes de tous poids et de toutes corpulences.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162155/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Rebecca Puhl reçoit des fonds de recherche de WW International Inc., qui a financé les études multinationales présentées dans cet article.</span></em></p>Les préjugés à l'égard des personnes de forte taille ou obèses sont répandus en Australie, au Canada, en France, en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis.Rebecca Puhl, Professor of Human Development and Family Sciences and Deputy Director, UConn Rudd Center for Food Policy and Obesity, University of ConnecticutLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1361172020-04-14T17:14:59Z2020-04-14T17:14:59ZLe confinement va-t-il accélérer notre dépendance au smartphone ?<p>La « nomophobie », contraction de l’expression anglaise « No mobile phone phobia », désigne la peur excessive d’être séparé de son téléphone mobile. Cette angoisse, liée à un usage abusif du smartphone touche aujourd’hui en grande majorité les individus de la « génération Z », c’est-à-dire nés à partir de 1995, qui ont toujours connu un monde avec une grande présence de l’informatique et d’internet.</p>
<p>Après un mois de confinement en France il est possible de tirer les premières conclusions quant à l’impact des mesures de distanciation sociale sur nos usages digitaux. Ces mesures prises dans un contexte de crise et de grande incertitude sont à l’origine d’une augmentation généralisée de l’utilisation du smartphone.</p>
<p>Une question se pose alors : cette augmentation de l’usage du smartphone pourrait-elle provoquer une augmentation de la nomophobie en France ? Si c’était le cas, des conséquences sur la santé mentale des Français, déjà mise à rude épreuve en période de confinement, seraient à craindre.</p>
<h2>Des effets sur la santé physique et psychique</h2>
<p>Caglar Yildirim, étudiant en thèse à l’Université d’Iowa en 2014 (sous la direction du professeur Ana-Paula Correia) a développé un <a href="https://www.researchgate.net/publication/273705474_Exploring_the_dimensions_of_nomophobia_Development_and_validation_of_a_self-reported_questionnaire">outil de mesure</a> de la nomophobie. Cet outil permet d’estimer à quel point un individu est dépendant à son smartphone. Selon lui, La nomophobie repose sur quatre dimensions :</p>
<ul>
<li><p>Ne pas être en mesure de communiquer. Plus précisément c’est avoir la sensation de perdre sa capacité de communiquer instantanément avec les autres, de pas avoir la possibilité d’utiliser les services de communication instantanée et ainsi de na pas pouvoir contacter ou être contacté par les autres.</p></li>
<li><p>Perdre sa connexion. Il s’agit en fait de la peur de perdre sa capacité d’ubiquité (être en plusieurs endroits à la fois) permise par le smartphone et d’être déconnecté de son identité virtuelle (surtout sur les médias sociaux).</p></li>
<li><p>Ne pas pouvoir accéder à l’information, c’est-à-dire ne pas pouvoir aller la chercher et la récupérer via son smartphone.</p></li>
<li><p>Renoncer au confort que représente l’utilisation d’un smartphone.</p></li>
</ul>
<p>La nomophobie est une pathologie qui touche particulièrement les adolescents de 15 à 18 ans. Dans un des mes <a href="https://livre.fnac.com/a11104100/Elodie-Gentina-Generation-Z-Des-Z-consommateurs-aux-Z-collaborateurs">travaux</a> de recherche sur la « génération Z » publié en 2018, j’indiquais que 85 % des 15-18 ans souffraient de cette pathologie, contre 77 % des 18-24 ans et 68 % des 25-34 ans.</p>
<p>Les études que j’ai menées auprès de plus de 2000 jeunes (18-24 ans) issus de la France, des États-Unis, du Brésil et de la Chine, ont montré les effets néfastes de la nomophobie sur la santé physique et psychique des jeunes : troubles du sommeil, isolement, baisse de l’<a href="https://www.deepdyve.com/lp/elsevier/does-gen-z-s-emotional-intelligence-promote-icheating-cheating-with-PnSDRzrPug">intelligence émotionnelle</a>, ou encore augmentation des comportements <a href="https://www.concordia.ca/content/dam/jmsb/docs/research/2019-RBC-International-Research-Seminar-PROGRAM.pdf">matérialistes</a>, et addictifs, tels que la dépendance à la <a href="https://journals.lww.com/journaladdictionmedicine/Abstract/2018/10000/Different_Effects_of_Social_Support_on_Adolescent.7.aspx">cigarette</a>.</p>
<p>Les jeunes peuvent devenir de véritables « toxicomanes du smartphone » et développer des comportements déviants. Par exemple d’après une étude de l’institut de sondage Ipsos en 2019, un jeune sur cinq avoue répondre à un appel ou à un message alors qu’il <a href="https://www.ladn.eu/nouveaux-usages/usages-par-generation/nomophobie-etude-utilisation-smartphone-couple/">fait l’amour</a>.</p>
<h2>Tous confinés, tous dépendants ?</h2>
<p>D’après une étude menée auprès de 4 000 Français âgés de 13 à 20 ans, dans un cadre normal, avant le confinement, les jeunes passaient en moyenne plus de 4h par jour sur leur smartphone.</p>
<p>Mais après déjà un mois de confinement en France, on constate que le smartphone a été <a href="https://www.journaldugeek.com/2020/04/09/confinement-usage-smartphone/">massivement utilisé</a> dans le but de maintenir le lien avec le monde dont nous devons nous tenir à distance.</p>
<p>En période de confinement, trois jeunes (entre 15 et 34 ans) sur quatre, avouent se servir davantage de leur téléphone mobile chaque jour. Mais les autres générations sont également concernées : 62 % de l’ensemble des sondés (15 ans et plus) affirment passer plus de temps sur leur smartphone qu’en temps normal. De plus, 45 % de l’ensemble des sondés estiment y passer plus de trois heures par jour.</p>
<p>En effet, les services accessibles sur les smartphones permettent de se distraire et de garder le contact avec ses proches et la société.</p>
<p>Durant le confinement, les Français ont dû réfléchir à des solutions de « substitut » à leurs activités préférées. Beaucoup s’adonnent à des apéritifs virtuels sur l’application <a href="https://www.lepoint.fr/editos-du-point/laurence-neuer/aperos-en-confinement-houseparty-l-appli-qui-aime-vos-donnees-personnelles-27-03-2020-2369088_56.php">Houseparty</a> ; regardent simultanément des films et séries sur des plates-formes de streaming, chacun depuis chez soi, pour pouvoir interagir ensemble ; partagent sur WhatsApp, Instagram ou TikTok des contenus humoristiques permettant de garder le moral en confinement.</p>
<p>Les jeux de société en ligne mais surtout les jeux vidéo multi-joueurs sur smartphones connaissent un engouement plutôt inédit. En effet, 40 % des sondés déclarent avoir téléchargé de nouvelles <a href="https://www.journaldugeek.com/2020/04/09/confinement-usage-smartphone/">applications de jeux</a> depuis le début du confinement.</p>
<p>Au delà de l’addiction au smartphone comme objet, c’est aussi la question de l’addiction aux contenus accessibles via smartphone qui interroge.</p>
<p>Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), à ce jour, l’addiction aux jeux vidéo, et en particulier les jeux en ligne multi-joueurs, représentent une <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/06/18/l-oms-reconnait-l-addiction-aux-jeux-video-comme-une-maladie_5317185_4408996.html">maladie</a>, au même titre que l’addiction à l’alcool, la cocaïne ou aux jeux d’argent.</p>
<p>Climat anxiogène, préoccupations diverses, isolement social, ennui, restriction des modalités d’avoir du plaisir, tous les éléments pouvant déclencher une hausse de la dépendance au smartphone semblent réunis avec le confinement.</p>
<p>Espérons que les (mauvaises) habitudes d’utilisation prises dans une période de restriction des libertés ne s’installent pas durablement. Le confinement ayant déjà des <a href="https://theconversation.com/covid-19-point-par-point-des-recommandations-dexperts-pour-reduire-les-effets-psychologiques-negatifs-lies-au-confinement-133811">répercussions négatives</a> sur le mental (dépression, anxiété, stress), une tendance à la généralisation de la nomophobie pourrait venir dégrader davantage l’état de santé psychique des Français.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136117/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Elodie Gentina ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Nous n’avons jamais autant utilisé nos smartphones qu’en période de confinement. Le risque ? Devenir « nomophobe ».Elodie Gentina, Associate professor, marketing, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1298832020-01-27T17:10:59Z2020-01-27T17:10:59ZConnaissez-vous les thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/311699/original/file-20200123-162204-5rvfaa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C130%2C7951%2C5166&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/NQexDDK9P9w">Rhett Wesley/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://artlibre.org/licence/lal/en">FAL</a></span></figcaption></figure><p><em>Notre auteur, psychiatre et psychothérapeute, directeur d’enseignement à l’université Lille Nord Europe, n’est pas un comportementaliste radical ni un opposant farouche aux thérapies psychanalytiques. Pour lui, les thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles (TCCE) représentent aujourd’hui le courant majeur de la psychothérapie, et le mieux adapté pour le traitement des troubles psychiques les plus fréquents (anxiété, phobies, troubles obsessionnels compulsifs, dépression, addictions, troubles de la personnalité…). Elles restent pourtant mal connues et sont parfois considérées à tort comme une simple méthode de changement des comportements.</em></p>
<hr>
<p>Plus d’un siècle durant, des chercheurs en psychologie et des psychiatres cliniciens ont proposé de nouveaux modèles des troubles psychiques (anxiété, dépression) et de nouvelles psychothérapies. On peut schématiquement dire que trois courants se sont succédé : le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/B%C3%A9haviorisme">béhaviorisme</a> (ou comportementalisme), la thérapie cognitive et les approches centrées sur les émotions comme la méditation de pleine conscience.</p>
<h2>À l’origine, le béhaviorisme</h2>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/311560/original/file-20200123-162246-sjhuiv.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/311560/original/file-20200123-162246-sjhuiv.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=863&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/311560/original/file-20200123-162246-sjhuiv.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=863&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/311560/original/file-20200123-162246-sjhuiv.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=863&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/311560/original/file-20200123-162246-sjhuiv.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1084&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/311560/original/file-20200123-162246-sjhuiv.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1084&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/311560/original/file-20200123-162246-sjhuiv.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1084&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">John Broadus Watson.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le béhaviorisme est né aux États-Unis, peu après la psychanalyse. Et c’est <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/John_Broadus_Watson">John Broadus Watson</a> (1878-1958) qui est considéré comme l’inventeur du terme et le père du béhaviorisme (ou comportementalisme), avec la publication en 1913 d’un <a href="https://elmirmohammedmemorypsy.files.wordpress.com/2014/12/la-psychologie-telle-que-le-bc3a9havioriste-la-voit.pdf">article</a> dans <em>Psychological Review</em>.</p>
<p>Le psychologue américain défend l’idée selon laquelle la psychologie ne peut devenir une science que si elle s’en tient à l’étude des comportements observables et teste ses hypothèses par des expériences réplicables. Le béhaviorisme se définit ainsi comme une science du comportement basée sur l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Empirisme">empirisme</a>. En opposition avec la méthode de l’introspection psychologique et le courant psychanalytique pour lequel les phénomènes inconscients ne pouvant pas être observés, les démonstrations reposent sur des cas singuliers.</p>
<p>D’après John B. Watson, tous les comportements sont issus d’un conditionnement, et il donc possible de les désapprendre. Une hypothèse qu’il va tester avec son assistante <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Rosalie_Rayner">Rosalie Rainer</a> en menant une expérience peu éthique et peu concluante d’apprentissage suivie de déconditionnement d’une peur des rats blancs chez un enfant de 11 mois, le petit Albert. Et malgré les critiques justifiées, le béhaviorisme aura une influence très importante sur la psychologie américaine entre les années 1930 et 1950.</p>
<h2>Le comportementalisme à visage humain</h2>
<p>C’est le psychiatre américain <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph_Wolpe">Joseph Wolpe</a> qui propose le premier traitement comportemental chez l’humain en 1962, par la méthode de désensibilisation systématique des phobies. Elle s’appuie sur le principe de « l’inhibition réciproque », qui consiste à induire une réponse antagoniste à la peur et l’anxiété non pas par la nourriture, comme chez l’animal de laboratoire, mais par la relaxation.</p>
<p>En pratique, il s’agit de s’exposer graduellement à la phobie en faisant appel à l’imagination, puis de contrer la réponse anxieuse au moyen de la relaxation. Une thérapie comportementale que Joseph Wolpe définit comme </p>
<blockquote>
<p>« l’utilisation, dans le but de modifier un comportement, des principes de l’apprentissage établis expérimentalement. Les habitudes inadaptées sont affaiblies et éliminées, les habitudes adaptées sont installées et renforcées ».</p>
</blockquote>
<p>Offrant une alternative à la psychanalyse dans la prise en charge des phobies et plus largement des névroses, une telle thérapie est aussi plus courte et dirigée vers le problème actuel, plutôt que sur le passé et l’inconscient. Reste qu’elle est critiquée non seulement par le courant psychanalytique dominant en psychiatrie jusqu’aux années 1970, mais aussi par la psychologie cognitive : on lui reproche d’avoir délaissé les états mentaux au profit des seuls comportements.</p>
<h2>De la rationalité aux TCC</h2>
<p>La thérapie cognitive est née aux États-Unis entre la fin des années 1950 et le début des années 1960 des travaux fondateurs de deux Américains : le psychologue <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Ellis">Albert Ellis</a> (1913-2007) et le psychiatre <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Aaron_Temkin_Beck">Aaron Temkin Beck</a> (1921-).</p>
<p>Pour Albert Ellis, les problèmes psychologiques et émotionnels viennent de nos pensées illogiques et irrationnelles : nous pouvons donc les changer et tendre vers le rationnel. Et s’inspirant des philosophes grecs et des stoïciens, il met en cause notre interprétation des faits : dans le Manuel d’Epictète, n’est-il pas écrit que « Ce qui trouble les hommes ce ne sont pas les choses mais les jugements qu’ils portent sur les choses » ?</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/311647/original/file-20200123-162194-rr2vjt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/311647/original/file-20200123-162194-rr2vjt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/311647/original/file-20200123-162194-rr2vjt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/311647/original/file-20200123-162194-rr2vjt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/311647/original/file-20200123-162194-rr2vjt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/311647/original/file-20200123-162194-rr2vjt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/311647/original/file-20200123-162194-rr2vjt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Aaron Beck.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Aaron_Beck_2016.jpg">Slicata</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Influencé par son compatriote, Aaron Beck part d’un constat : tous les patients déprimés expriment des pensées négatives sur eux-mêmes, sur le monde extérieur et sur l’avenir. Et d’après lui, cette façon négative de traiter les informations est inconsciente et sous-tendue par ce qu’il appelle le « schéma cognitif ». À savoir, une sorte de disque dur de notre psychisme, qui contiendrait l’ensemble de nos connaissances et se construirait tout au long de la vie au gré de nos expériences et de nos apprentissages.</p>
<p>Pour le mettre à jour, le psychiatre va d’abord chercher à connaître les monologues intérieurs – ou « pensées automatiques » – de ses patients. Puis, il leur proposera de les rendre plus réalistes et moins négatives. Il s’agira de substituer à une pensée du type « je suis nul(le), je ne m’en sortirai jamais, je suis un poids pour mes proches… » une autre du genre « être déprimé(e) ne veut pas dire que l’on ne vaut rien, avec le temps je vais guérir, ma famille me soutient comme je le ferai pour eux ». Car selon ses dires, c’est par la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cognition">cognition</a> que l’on accède à l’émotion et au comportement.</p>
<p>In fine, traduisant la confluence de deux courants plus complémentaires qu’opposés, le terme de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9rapie_cognitivo-comportementale">thérapie comportementale et cognitive</a> (TCC) (en anglais, <em>cognitive behavioral therapy</em>) fait son entrée au début des années 1980 dans la littérature scientifique anglophone. De nombreuses études vont alors montrer l’efficacité de ces TCC, principalement dans la dépression, le trouble panique et les phobies, l’anxiété généralisée, les troubles obsessionnels compulsifs, ou encore les addictions. Au point d’en faire en psychothérapie l’approche de première intention pour ces pathologies très fréquentes (environ une personne sur cinq touchée au cours de sa vie), et un bon moyen de diminuer la consommation d’antidépresseurs et d’anxiolytiques.</p>
<h2>Se comprendre pour changer sa vie</h2>
<p>On reproche parfois au TCC d’être centrées sur les symptômes et les troubles psychiques actuels, sans prendre en compte le passé et l’histoire de l’individu. C’est ignorer la thérapie des schémas, une approche développée par <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jeffrey_Young">Jeffrey Young</a> (1950-), ancien étudiant d’Aaron Beck.</p>
<p>Ce sont aux schémas constitués très précocement dans l’enfance, à l’occasion de traumatismes et de carences affectives, que s’intéresse ce psychologue. La prise en charge qu’il propose, plus longue que la thérapie cognitive, s’attelle donc à chercher les origines du problème ciblé (par exemple, la dépression) dans les schémas de l’enfance, c’est-à-dire des traits de personnalité comme la dépendance, la peur de l’abandon, l’isolement, la peur de perte le contrôle, le sentiment de ne pas être à la hauteur…</p>
<p>S’il utilise les principes de la thérapie cognitive, Jeffrey Young y incorpore le passé : les événements et les émotions anciennement vécus sont réactualisés par visualisation mentale ou jeu de rôle – s’inspirant alors de la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Gestalt-th%C3%A9rapie">Gestalt-thérapie</a>. En ce sens, son approche est centrée sur la personne, et non sur les syndromes ou les troubles. Elle prend en compte l’histoire et les blessures de l’enfance, et propose de changer la structure psychologique et les traits de personnalité à l’origine de souffrance : il s’agit de modifier sa façon d’être et d’agir, comme l’indique le titre de son ouvrage grand public <em>Je réinvente ma vie</em>.</p>
<h2>Troisième vague</h2>
<p>À la fin des années 1990 des chercheurs en psychologie cognitive pointent le rôle central des émotions pour expliquer les troubles psychiques. Et s’ils remettent en cause certains principes fondamentaux des TCC, c’est sans les renier totalement, d’où l’appellation « 3<sup>e</sup> vague ».</p>
<p>Au lieu de vouloir changer pensées et émotions, ces psychologues s’intéressent au rapport qu’une personne entretient avec elles. Chez l’anxieux par exemple, le fait de s’inquiéter sans cesse sur les risques de l’existence (peur d’avoir un accident, une maladie) est vu comme une vaine tentative pour empêcher la survenue des imprévus. Plutôt que de chercher à modifier le contenu de son discours de façon rationnelle, ce qui est somme toute difficile le danger étant bien réel et l’avenir imprévisible, il s’agit d’accepter l’émotion irrationnelle d’anticipation et de revenir au moment présent.</p>
<p>De fait, cette 3<sup>e</sup> vague de thérapies se réfère à deux concepts du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Zen">bouddhisme zen</a> : la pleine conscience et l’acceptation. La souffrance (dukkha) y est vue comme inévitable car inhérente à l’existence humaine, mais voulant être accueillie, plutôt que rejetée, en s’ancrant dans le moment présent. Cette manière de voir les choses rappelle la philosophie stoïcienne. Il ne s’agit pas cependant de se soumettre, mais bien de s’extraire de la souffrance des émotions, à travers différentes approches.</p>
<p>Parmi elles, on peut citer la méditation de pleine conscience, la dialectique qui invite à reconnaître et accepter les opposés et rechercher le juste milieu, l’acceptation des émotions, l’observation et la prise de distance, l’action dirigée vers son bien-être et ses valeurs personnelles plus que ses souffrances. Mais on recense aussi des méthodes comportementales et cognitives classiques, d’où l’appellation de thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles (TCCE).</p>
<h2>Une psychothérapie efficace</h2>
<p>A l’origine, le béhaviorisme s’écartait de la conscience, de l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Insight_(psychologie)">insight</a> et des conflits intrapsychiques qui trouvent leurs racines dans l’histoire du sujet. Il se décrivait comme une thérapie du présent délaissant le passé, centrée sur les comportements réflexes, et non sur l’affect ou le subjectif. Or sans trahir ces fondements, les approches cognitives puis émotionnelles ont enrichi la compréhension des troubles psychiques et apporté de nouveaux et efficaces outils thérapeutiques.</p>
<p>Ainsi, les TCC ont fait leurs preuves tant sur la phobie que sur un manque d’affirmation de soi ou sur des troubles psychiatriques caractérisés (dépressifs, anxieux, addictifs, psychotiques…) où elles semblent faire mieux que des médicaments. Des approches plus récentes, comme les thérapies des schémas ou de 3<sup>e</sup> vague ont ensuite ciblé davantage la souffrance que le trouble psychiatrique. Et elles ont acquis une certaine reconnaissance dans la prise en charge des stress et des traumatismes, des histoires personnelles et familiales douloureuses, ou encore des troubles de personnalité marqués par l’impulsivité et les émotions négatives et destructrices.</p>
<p>Ces TCCE ne cherchent pas à démontrer qu’elles sont plus efficaces que les autres psychothérapies. Elles revendiquent simplement le fait d’être ouvertes à différents modèles de psychologie et en constante évolution. Et elles peuvent se prévaloir de bienfaits reconnus, tant pour soulager la souffrance que pour traiter de nombreux troubles psychiques.</p>
<hr>
<p><strong><em>Pour en savoir plus :</em></strong></p>
<p><em>- Dans <a href="https://www.elsevier-masson.fr/les-therapies-comportementales-cognitives-et-emotionnelles-en-150-fiches-9782294766619.html">« Les thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles en 150 fiches »</a>, Clément Lecomte et Dominique Servant nous révèlent l’étendue et la diversité des TCCE et proposent aux psychothérapeutes un ouvrage de référence pour leur pratique.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/129883/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dominique Servant ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Né au début du XXᵉ siècle, le béhaviorisme a évolué vers différentes approches de psychothérapie. Les plus récentes portent le nom de thérapies comportementales, cognitives et émotionnelles, ou TCCE.Dominique Servant, Psychiatre, responsable de l’unité stress et anxiété du CHRU de Lille, directeur d'enseignement, Université de Lille - initiative d'excellenceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1296372020-01-09T20:43:38Z2020-01-09T20:43:38Z« Les troubles anxieux sont fréquents, il faut les diagnostiquer »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/309307/original/file-20200109-80169-170w9n7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C25%2C4256%2C2739&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les troubles anxieux isolent souvent ceux qui en sont victimes</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/photos/personnes-%C3%A9motion-dramatiques-1492052/">1388843 / Pixabay</a></span></figcaption></figure><p><em>Antoine Pelissolo est professeur de psychiatrie à l’Université Paris Est Créteil et chef du service de psychiatrie sectorisée au CHU Henri-Mondor. Auteur de nombreux ouvrages de vulgarisation, il est spécialiste des troubles anxieux sévères.</em></p>
<hr>
<h2>Qu’est-ce qui caractérise les troubles anxieux ?</h2>
<p>Tous les troubles anxieux ont en commun la peur et les produits dérivés de la peur que sont l’angoisse et l’anxiété. C’est l’objet sur lequel se fixent ces émotions de peur qui détermine à quelle catégorie de trouble anxieux on a affaire. On en distingue trois types : les phobies, le trouble panique et l’anxiété généralisée.</p>
<p>Dans le cas des phobies, les émotions de peur se fixent soit sur des objets, soit sur des situations. On distingue les phobies simples, ou spécifiques, dans lesquelles la peur concerne un seul objet (par exemple un animal ou une situation particulière), des phobies plus complexes et plus invalidantes que sont l’<a href="https://www.doctissimo.fr/html/psychologie/stress_angoisse/articles/15914-agoraphobie-agoraphobe.htm">agoraphobie</a> (la peur des lieux d’où il serait difficile de s’échapper ou d’être secouru) et les phobies sociales.</p>
<p>Le trouble panique se traduit quant à lui par la survenue d’attaques de paniques. Si les premières fois, ces crises d’angoisse surviennent sans aucun déclencheur, elles deviennent ensuite en elle-même le motif de la peur. Autrement dit le trouble panique, c’est la peur d’avoir peur.</p>
<p>Enfin, l’anxiété généralisée concerne plutôt la peur de l’avenir en général, de tout ce qui peut arriver dans la vie : problèmes de santé, d’argent, d’accident, etc. Ces inquiétudes peuvent porter sur soi ou sur les autres, la famille, les proches… Il est question d’événements qui peuvent effectivement se produire dans la vie courante. Cependant les personnes ont tendance à ne plus pouvoir relativiser leur risque de survenue ou leur gravité.</p>
<h2>Quels sont les symptômes des troubles anxieux ?</h2>
<p>Les symptômes dépendent du type de trouble. Dans les phobies, il s’agit de comportements d’évitement des situations. Ils sont liés à la peur anticipatoire : craignent de se confronter à une situation perçue comme dangereuse et adoptent des stratégies de contournement.</p>
<p>Dans le trouble panique, les personnes subissent au moment des crises d’angoisse tous les symptômes du stress, mais de façon extrêmement intense : leur cœur s’emballe, leur respiration se bloque ou s’accélère, ils ont des troubles de l’équilibre, des bouffées de chaleur… Le fait d’avoir tendance à avoir peur de la survenue de ces symptômes les aggrave, c’est un cercle vicieux.</p>
<p>L’anxiété généralisée s’accompagne quant à elle des mêmes signes physiques que le trouble panique, mais ils sont moins « explosifs ». Les patients ressassent, ruminent, sont tendus tout le temps, hypervigilants. Ils ont des problèmes de concentration, éventuellement des douleurs, et surtout du mal à s’endormir à cause de la tension nerveuse : lors des consultations, l’insomnie est souvent leur plainte principale.</p>
<h2>Ces troubles sont-ils fréquents ? Qui concernent-ils ?</h2>
<p>On considère qu’environ 10 % de la population sera touchée par un trouble anxieux à un moment de sa vie. Celui-ci peut durer quelques mois ou quelques années. Les femmes sont environ deux fois plus concernées que les hommes. Les formes graves, sources de handicap et qui requièrent un traitement médicamenteux, concernent quant à elles environ 15 à 20 % des patients.</p>
<p>La plupart des phobies surviennent généralement au début de la vie, soit durant l’enfance soit à l’adolescence. Les attaques de panique, qui peuvent se transformer en trouble panique, se produisent plutôt vers 20 ou 30 ans. Enfin, l’anxiété généralisée se développe habituellement plus tard, vers 30 et même 40 ans, chez des gens qui étaient plutôt d’un tempérament un peu anxieux mais arrivaient à gérer jusque-là.</p>
<p>Ces troubles sont tellement fréquents qu’ils peuvent concerner tous les profils de la population, même si souvent les personnes qui en sont victimes présentent une émotivité et une sensibilité un peu plus forte que les autres, sans qu’elle soit toutefois anormale. Il pourrait y avoir des facteurs biologiques qui favorisent l’émergence d’un trouble ou d’un autre, mais on ne les connaît pas bien. Aucun facteur génétique n’a par exemple pu être clairement mis en évidence.</p>
<h2>Quelles conséquences les troubles anxieux ont-ils sur la santé et la vie des patients ?</h2>
<p>Les conséquences varient selon le degré de l’atteinte. Elles peuvent être importantes, même s’il n’y a pas de risque immédiat pour la santé. Les conséquences physiques surviennent en effet plutôt à long terme. Dans le cas de l’anxiété généralisée, par exemple, le fait d’avoir du mal à dormir peut mener à un épuisement. La dépression est aussi souvent associée aux troubles anxieux : elle concerne une personne sur deux, ce qui est plus élevé que dans la population générale. La consommation de drogues ou d’anxiolytiques est aussi un problème.</p>
<p>En outre, à long terme, le risque de maladies cardiovasculaires est accru par le stress. En effet, même s’il n’est pas suffisant pour déclencher à lui seul des infarctus ou des troubles du rythme cardiaque, il s’ajoute aux autres facteurs de risques.</p>
<p>Enfin, le handicap social peut également être important. On sait notamment que les personnes atteintes de troubles anxieux graves sont socialement moins insérées. Elles sont moins souvent en couple, atteignent des niveaux socio-économiques inférieurs à ceux des autres, etc. D’après une étude suédoise récente portant sur plus de 15 000 enfants, le fait de <a href="https://www.cambridge.org/core/services/aop-cambridge-core/content/view/1E0D728FDAF1049CDD77721EB84A8724/S0033291719003908a.pdf/much_more_than_just_shyness_the_impact_of_social_anxiety_disorder_on_educational_performance_across_the_lifespan.pdf">souffrir de phobie sociale réduit de 50 à 75 %</a> les chances de réussir sa scolarité et ses études supérieures. </p>
<p>Ce genre de trouble est souvent vécu avec honte. Les gens n’en parlent pas, par peur de ne pas être compris. En effet, si on n’est pas soi-même concerné, la première tendance peut être de banaliser les choses, de penser qu’on a tous connu quelques peurs et qu’on les a surmontées, que ce n’est pas si grave. Ces réactions isolent encore davantage les patients.</p>
<h2>Comment soigne-t-on les troubles anxieux ?</h2>
<p>On essaie généralement d’intervenir le plus tôt possible, pour éviter que le trouble ne s’aggrave.</p>
<p>Il s’agit d’appliquer des mesures dites « comportementales », qui visent à apprendre aux patients à combattre les évitements, à ne pas changer leur mode de vie parce qu’ils ont peur de certaines situations. Basées sur l’analyse des peurs et les changements des réactions émotionnelles, les thérapies comportementales et cognitives sont efficaces pour soigner la plupart des troubles anxieux sur des durées relativement courtes. D’autres formes de thérapies ou de psychothérapies peuvent y être associées. Ces méthodes permettent d’accomplir des changements en profondeur, à long terme et sans risque d’effet secondaire. Elles demandent juste un peu d’investissement.</p>
<p>Pour les patients atteints par des formes sévères, un traitement médicamenteux peut être envisagé. Il s’agit de traitements au long cours, qui ne se décident pas pour des symptômes passagers. Ils sont basés sur des antidépresseurs. Les anxiolytiques (Xanax, Temesta, Lexomil…) sont déconseillés, car s’ils soulagent sur le moment, ils n’ont pas d’effet bénéfique à long terme et peuvent entraîner des dépendances. Généralement la prise en charge se fait en médecine de ville. Il n’existe que peu de structures spécialisées dans notre pays. On peut le regretter, car il peut être bénéfique pour les patients d’avoir affaire à des professionnels spécialisés.</p>
<p>Les troubles anxieux sont fréquents, c’est pourquoi il est important de les diagnostiquer. Il faut que tout le monde sache qu’ils existent, afin de ne pas stigmatiser les personnes qui en sont atteintes, en particulier dans le milieu professionnel. Nous avons tout à gagner à aider ceux qui en souffrent. D’autant plus qu’il peut s’agir de soutiens simples, tels que des incitations à entamer des démarches de soin.</p>
<hr>
<p><em>Pour aller plus loin : Antoine Pelissolo (2017), <a href="https://editions.flammarion.com/Catalogue/hors-collection/psychologie-et-developpement-personnel/vous-etes-votre-meilleur-psy">« Vous êtes votre meilleur psy ! »</a>, Flammarion.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/129637/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
Phobie, trouble panique, anxiété généralisée : les troubles anxieux se manifestent de diverses façons. Qui concernent-ils ? Comment les soigner ? Le point sur le sujet avec le Pr Antoine Pelissolo.Lionel Cavicchioli, Chef de rubrique Santé + Médecine, The Conversation FranceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1240942019-09-24T19:01:23Z2019-09-24T19:01:23ZOlivia, 12 ans : « D’où viennent les phobies ? »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/293832/original/file-20190924-51438-utq55p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C9%2C1659%2C1519&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La peur du noir peut devenir une phobie. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.freepik.com/vecteurs-libre/garcon-scared-lunettes-realite-virtuelle_1003058.htm#page=1&query=fear&position=0">Freepik</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les phobies sont des peurs intenses de choses très spécifiques comme des objets, des lieux, des situations ou des animaux. Les phobies les plus courantes chez les enfants et les adolescents sont les phobies d’animaux en particulier comme les chiens, les chats ou les insectes.</p>
<p>Quand quelqu’un souffre d’une phobie, il a tendance à éviter ces endroits ou ces choses à tout prix. Cela peut être très difficile à faire et entraîne souvent beaucoup d’autres problèmes.</p>
<p>Il existe de nombreux facteurs différents qui peuvent rendre une personne plus susceptible de développer une phobie. Cependant, nos recherches nous indiquent que, dans une certaine mesure, des phobies spécifiques sont <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/15374416.2015.1020543">apprises</a>. De plus, des facteurs comme les expériences de vie, notre personnalité et même la façon dont les gens autour de nous font face à certaines situationtaines situation contribuent à développer une phobie ou non.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/LpOrmysNDdE?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La peur en avion – Tu mourras moins bête – ARTE.</span></figcaption>
</figure>
<h2>Comment les gens peuvent développer des phobies</h2>
<p>Les phobies spécifiques sont très fréquentes, surtout chez les enfants et les adolescents. Les recherches nous indiquent qu’environ 10 % des enfants éprouveront une <a href="https://www.childpsych.theclinics.com/article/S1056-4993(05)00054-4/abstract">phobie spécifique</a>, faisant de ce type d’anxiété l’un des troubles anxieux les plus courants chez les jeunes.</p>
<p>Voici trois principaux scénarios où l’on peut « apprendre » à développer une phobie :</p>
<ul>
<li><p>Voir d’autres personnes (comme des parents ou des amis) avoir vraiment peur dans une situation spécifique, ou autour d’un objet ou d’un animal particulier. C’est ce qu’on appelle le <em>modelage</em>. Lorsque nous voyons quelqu’un d’autre réagir avec peur à une certaine situation, on peut apprendre à avoir peur de la même chose.</p></li>
<li><p>Entendre ou lire des histoires effrayantes sur une situation, un objet ou un animal. Par exemple, un parent qui nous dit toujours : « les chiens sont dangereux », « ne t’approche jamais d’un chien », « méfie-toi des chiens », nous enseigne que <em>tous</em> les chiens sont dangereux, <em>tout</em> le temps, ce qui peut nous conduire à développer une peur ou une phobie des chiens.</p></li>
<li><p>Avoir une expérience effrayante avec un objet, un animal ou une situation particulière. C’est ce que nous appelons le « conditionnement direct ». Par exemple, il se peut que tu aies qu’un chien t’a aboyé dessus, ou même mordu. Ces expériences sont souvent très effrayantes, et certains enfants peuvent alors avoir peur chaque fois qu’ils se retrouvent face à face à un chien, même s’il n’est pas du tout agressif.</p></li>
</ul>
<p>Il est important de se rappeler, cependant, que ce ne sont pas tous les enfants qui voient, entendent ou vivent de mauvaises choses qui développent une phobie spécifique. Il y a d’autres choses qui pourraient y contribuer. Les recherches suggèrent que les phobies sont souvent familiales, il pourrait donc y avoir un lien <a href="https://www.psychologytoday.com/au/blog/fighting-fear/201209/are-some-phobias-inborn">génétique</a>. La personnalité peut même jouer un <a href="https://psycnet.apa.org/record/1999-05267-005">rôle</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291410/original/file-20190909-175700-14q8338.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291410/original/file-20190909-175700-14q8338.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291410/original/file-20190909-175700-14q8338.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291410/original/file-20190909-175700-14q8338.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291410/original/file-20190909-175700-14q8338.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291410/original/file-20190909-175700-14q8338.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291410/original/file-20190909-175700-14q8338.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une mauvaise expérience peut nous faire développer une peur ou une phobie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/child-afraid-dog-big-scares-park-1207221892">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La bonne nouvelle</h2>
<p>La bonne nouvelle, c’est qu’il existe de nombreux autres facteurs qui peuvent aider à protéger les enfants ou les adolescents contre le développement d’une phobie, même si vous avez eu une très mauvaise expérience. Par exemple, le soutien de la famille et des amis peut nous aider et nous réconforter lorsque quelque chose d’effrayant <a href="https://capmh.biomedcentral.com/articles/10.1186/s13034-017-0149-4">arrive</a>.</p>
<p>Certaines <a href="https://psycnet.apa.org/record/2000-05007-002">recherches</a> suggèrent qu’être optimiste peut nous protéger de la peur. Être quelqu’un qui pense au monde et à soi-même d’une manière vraiment positive – voir le verre à moitié plein au lieu de moitié vide – aide à réduire l’impact ou le développement de l’anxiété et des peurs.</p>
<p>Enfin, la façon la plus puissante d’empêcher qu’une peur ne se transforme en phobie est d’<a href="https://www.elsevier.com/books/pediatric-anxiety-disorders/compton/978-0-12-813004-9">affronter ses peurs</a> – même quand on se sent nerveux ou effrayé. Par exemple, tu pourrais avoir très peur de faire un discours. Mais si tutu t’exerces à parler en public, tu te rendras peut-être compte que ce n’est pas aussi dur que tu l’imaginais !</p>
<p>Tu apprendras que tu es plus courageux et plus fort que tu ne le penses.</p>
<hr>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dianerottner.com/">Diane Rottner</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : <a href="mailto:tcjunior@theconversation.fr">tcjunior@theconversation.fr</a>. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/124094/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lara Farrell ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Il est normal de ressentir des peurs, mais si elles se transforment en phobie, cela peut être très pénalisant, heureusement il existe des solutions.Lara Farrell, Associate Professor and Clinical Psychologist, Griffith UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1207722019-07-22T22:52:55Z2019-07-22T22:52:55ZPodcast : Les films de super-héros peuvent apaiser les phobies<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/285185/original/file-20190722-11333-16ahfb8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">SpiderMan</span> </figcaption></figure><p>Et si les films de super-héros pouvaient aider à diminuer les phobies ?</p>
<p>En partant de cette idée, des chercheurs israéliens ont réalisé une <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyt.2019.00354/full">étude</a> avec plus de 400 participants en utilisant des extraits des films <em>Spider-Man</em> et <em>Ant-Man</em> dans l’espoir d’apaiser les archnophobes (phobiques des arachnides) et les myrmécophobes (phobiques des fourmis).</p>
<p>Loin d’être totalement farfelue, cette approche s’inscrit dans l’idée voulant que pour surmonter une phobie, il faudrait être en contact avec ce qui provoque cette anxiété. Cette confrontation devant se faire de manière progressive et dans des contextes différents afin en quelque sorte de s’habituer et de se désensibiliser de la cause de la phobie.</p>
<p>En moins de 10 minutes, avec cet épisode, découvrez les résultats de cette étude scientifique utilisant les films de super-héros pour lutter contre les phobies.</p>
<hr>
<p><em>Un podcast en partenariat avec <a href="https://soundcloud.com/latetedanslecerveau">La tête dans le cerveau</a> dont toutes les références scientifiques sont à retrouver sur <a href="https://cervenargo.hypotheses.org/2837">Cerveau en Argot</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120772/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Rodo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Spider-Man a l'habitude de sauver New York, mais il pourrait tout aussi bien vous soigner de votre phobie des araignées.Christophe Rodo, Jeune chercheur ATER terminant une thèse en neurosciences à Aix-Marseille Université, au sein du Laboratoire de Neurosciences Cognitives, de l’Institut de Neurosciences des Systèmes et de l’Institut des Sciences du Mouvement, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1178742019-05-27T19:50:46Z2019-05-27T19:50:46ZDe l’anxiété à la stomatophobie, quand la peur du dentiste devient incontrôlable<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/276642/original/file-20190527-193522-1e3t380.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=59%2C0%2C7880%2C5304&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le simple fait de penser à cette situation peut déclencher un stress chez les personnes stomatophobes.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/man-patient-lying-on-dentist-chair-1315500446?src=Q8W5rJvGsdn_PWWSF9oy8A-1-0">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>On peut affirmer sans grand risque de se tromper que peu de gens aiment rendre visite à leur dentiste. En fait, <a href="https://files.digital.nhs.uk/publicationimport/pub01xxx/pub01086/adul-dent-heal-surv-summ-them-the8-2009-re10.pdf">plus de 45 % des Britanniques</a> affirment se sentir anxieux lorsqu’ils doivent aller chez le dentiste (_ndrl : en France, le chiffre est de 48 % <a href="https://www.ouest-france.fr/sante/pres-de-la-moitie-des-francais-ont-toujours-peur-du-dentiste-4131024">selon un sondage Opinion Way_</a>). Chez près de 12 % d’entre eux, cette anxiété atteint de tels niveaux qu’ils repoussent le moment s’y rendre jusqu’à ce que le besoin de soins se transforme en urgence. Pour ces personnes – dont on peut dire qu’elles ont une phobie des soins dentaires, ou stomatophobie – la simple perspective d’une visite à venir suscite <a href="https://www.lequotidiendumedecin.fr/fmc/article/2013/04/11/la-stomatophobie-cause-meconnue-de-mauvaise-sante-dentaire_641861">émotions terrifiantes</a> et nuits d’insomnies.</p>
<p><a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28428574">Nos recherches antérieures</a> ont confirmé que les personnes souffrant de phobie dentaire ont davantage de caries et une moins bonne santé dentaire que les autres. Cette situation peut résulter de rendez-vous manqués avec le dentiste, d’une moins bonne hygiène buccale ou de mauvaises pratiques en termes de brossage. Elle est aggravée par le tabagisme, qui entraîne des maladies des gencives, ou une consommation excessive de sucre, qui favorise la survenue de caries.</p>
<p>Une hygiène bucco-dentaire déficiente <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26564373">peut affecter la vie des individus de diverses façons</a> – en particulier en ce qui concerne les repas, la prise de parole, le fait de sourire… Les gens victimes de problèmes dentaires évitent en effet d’ouvrir la bouche, ce qui peut avoir des conséquences dans certains contextes sociaux. Le fait d’avoir des dents cassées, ou manquantes, complique également la mastication et les repas. En dépit de ces problèmes, de nombreuses personnes victimes de phobie dentaire attendent que leur douleur devienne insupportable avant de se rendre chez le dentiste.</p>
<h2>Un cercle vicieux</h2>
<p>Dans ces situations, lorsque les patients ont repoussé le moment de se rendre chez leur dentiste durant une longue période, la probabilité que les soins requis lorsqu’ils se décident à y aller soient complexes (traitement du canal radiculaire, pose de couronne, extraction chirurgicale…) augmente fortement. En effet, si une carie n’est pas traitée rapidement, elle progresse en s’attaquant à davantage de matériau dentaire – finissant par exposer le nerf situé dans la dent – et augmentant le risque d’infection</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/270950/original/file-20190425-121254-1c7y8cn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/270950/original/file-20190425-121254-1c7y8cn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/270950/original/file-20190425-121254-1c7y8cn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/270950/original/file-20190425-121254-1c7y8cn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/270950/original/file-20190425-121254-1c7y8cn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/270950/original/file-20190425-121254-1c7y8cn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/270950/original/file-20190425-121254-1c7y8cn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les personnes souffrant d’anxiété dentaire ne se rendent chez le dentiste que lorsque la douleur devient insupportable.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>À mesure que la carie progresse, le risque que la dent ne se brise s’accroît – parfois sous la gencive, ce qui complique l’extraction. Pour le patient, cela signifie souvent passer plus de temps dans le fauteuil du dentiste, et risquer de souffrir davantage après l’opération.</p>
<p>Pour les personnes souffrant de stomatophobie, la perspective du moindre soin dentaire génère de l’anxiété. Pour elles, les traitements qui nécessitent de passer plus de temps chez le dentiste ou requièrent des visites multiples peuvent s’avérer proprement terrifiants.</p>
<h2>Besoin de sédation</h2>
<p>La stomatophobie entraîne un autre problème : les individus qui en souffrent ne peuvent être soignées que si une sédation consciente leur est proposée. Certains dentistes, qui ont l’expérience de l’anesthésie, peuvent proposer ce service. Ils utilisent un <a href="http://docnum.univ-lorraine.fr/public/BUPHA_T_2015_TROMPETTE_PAULINE.pdf">mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote</a> (gaz hilarant) ou des sédatifs tels que le <a href="https://www.vidal.fr/substances/2380/midazolam/">midazolam</a> qui peuvent aider les patients à se relaxer et se sentir plus calme durant les procédures de traitement dentaire. Dans certains cas, les patients peuvent être redirigés vers un hôpital pour subir une anesthésie générale.</p>
<p><a href="https://www.nature.com/articles/sj.bdj.2018.265?proof=true&platform=oscar&draft=collection">Il existe des dentistes et des cabinets spécialisés</a> dans la prise en charge des personnes souffrant de phobies dentaires – ils sont notamment en mesure de proposer des plages de rendez-vous plus longues. Cependant les listes d’attente sont généralement conséquentes, ce qui complique la situation des patients ont des problèmes dentaires et souffrent beaucoup mais ont trop peur des traitements conventionnels.</p>
<h2>Les autres façons d’aider les patients</h2>
<p>Certains hôpitaux et praticiens proposent aux patients atteints de stomatophobie des <a href="https://www.researchgate.net/publication/273760526_Psychological_treatment_of_dental_anxiety_among_adults">thérapies cognitivo-comportementales</a> (TCC) afin de vaincre leur phobie. Une étude antérieure menée au King’s College de Londres a révélé que cette approche était très efficace – permettant aux personnes souffrant de stomatophobie de dépasser leur peur de se rendre chez le dentiste, et même d’y recevoir des traitements sans sédation.</p>
<p>Ces patients se voient également adresser des conseils plus personnalisés, visant à les faire adopter des pratiques destinées à améliorer leur hygiène bucco-dentaire : meilleure technique de brossage, conseils pour cesser de fumer… L’espoir est qu’ainsi armés des connaissances appropriées, ils auront davantage confiance dans leur hygiène bucco-dentaire, ce qui devrait aider à limiter la survenue d’autres maladies et réduire l’anxiété associée à la consultation dentaire.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/vous-vous-brossez-probablement-mal-les-dents-quatre-conseils-pour-ameliorer-votre-sante-dentaire-109812">Vous vous brossez probablement mal les dents : quatre conseils pour améliorer votre santé dentaire</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Toute phobie peut s’avérer difficile à gérer, mais lorsqu’il s’agit d’une phobie affectant la santé et la qualité de vie quotidienne, les effets peuvent être dévastateurs. Parvenir à la maîtriser permet non seulement d’aider les patients qui en sont victimes aujourd’hui, mais aussi ceux qui pourraient l’être demain : en effet, la recherche a démontré qu’il existe des <a href="https://www.health.harvard.edu/a_to_z/phobia-a-to-z">prédispositions familiales à certaines phobies</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/117874/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ellie Heidari ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Quand la peur du dentiste devient panique, la santé dentaire s’en ressent, et un cercle vicieux se met en place.Ellie Heidari, Senior Specialist Clinical Teacher at King's College London Dental Institute, King's College LondonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1076832019-01-09T15:59:01Z2019-01-09T15:59:01ZTroubles anxieux: comment faire face à ses peurs?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/252892/original/file-20190108-32139-1pkk0ad.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les troubles anxieux sont parmi les maladies mentales les plus courantes, touchant plus de 18 % de la population. Ils sont traitables, notamment par la thérapie cognitivo-comportementale. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>« Pourquoi certaines personnes souffrent-elles de maladie mentale? » </p>
<p>Voilà l’une des questions les plus fréquentes qu’entendent les psychologues et autres prestataires de soins de santé mentale. </p>
<p>Prudents, voire soucieux d’exactitude, bien des spécialistes affirmeront que « nul ne le sait ». Cela constitue la réponse simple à cette question. D’autres parleront brièvement du <a href="https://www.memoiretraumatique.org/psychotraumatismes/mecanismes.html">rôle des mécanismes neurobiologiques</a>. </p>
<p>Cela dit, des travaux effectués en laboratoire au cours des dernières décennies ont permis aux psychologues d’acquérir peu à peu une meilleure compréhension du développement et de la persistance des maladies mentales – et plus particulièrement de celles qui sont associées à l’anxiété. </p>
<p>Nous éprouvons tous de l’anxiété de temps à autre. En fait, cette émotion est essentielle à notre survie. Par contre, chez certaines personnes, elle a des effets incapacitants. Nous le savons maintenant, des facteurs autres que les processus biologiques méritent que nous leur portions une attention particulière, et ce, aux fins de la modélisation et du traitement des troubles anxieux. Précisons que nous ne faisons pas référence ici aux processus inconscients ou psychanalytiques! </p>
<h2>Les répercussions des pensées automatiques sur le ressenti</h2>
<p>Occupant une place de choix dans la littérature psychologique d’avant-garde, <a href="http://www.iusmm.ca/hopital/usagers-/-famille/info-sur-la-sante-mentale/therapie-dapproche-cognitivo-comportementale.html">la théorie cognitivo-comportementale</a> offre une explication à l’émergence et à la persistance des troubles anxieux. Elle est très simple à comprendre. Selon cette conception théorique, les pensées qui nous viennent automatiquement à l’esprit dans une situation donnée exercent une influence sur les émotions que nous éprouvons à ce moment-là. De même, le ressenti a des répercussions sur le comportement et les décisions que nous adoptons dans cette situation. </p>
<p>Illustrons notre propos par un exemple. Si quelqu’un arrive à une réception en pensant : « dès que j’ouvrirai la bouche, tout le monde remarquera à quel point je suis stupide » (pensée), il se sentira probablement très angoissé (émotion). Vraisemblablement, il décidera de rester dans son coin, de ne parler qu’aux personnes qu’il connaît ou de partir (comportement). Cet exemple montre bien ce qui arrive souvent aux gens souffrant de phobie sociale. </p>
<p>De même, à la vue d’un chien, une personne cynophobe pensera automatiquement que l’animal l’attaquera à coup sûr (pensée). Cette pensée déclenchera la peur chez elle (émotion) et exacerbera son désir de fuir le chien (comportement). </p>
<p>Dans ces deux exemples, c'est cet évitement (de la réception ou de l'animal) qui maintient ces pensées irrationnelles et cette anxiété.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/248311/original/file-20181202-194932-1h4mwou.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/248311/original/file-20181202-194932-1h4mwou.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/248311/original/file-20181202-194932-1h4mwou.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/248311/original/file-20181202-194932-1h4mwou.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/248311/original/file-20181202-194932-1h4mwou.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/248311/original/file-20181202-194932-1h4mwou.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/248311/original/file-20181202-194932-1h4mwou.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La phobie sociale se caractérise par la peur des évaluations négatives et par l'évitement de situations sociales, comme les fêtes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Photo Mauricio Mascaro</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Vous vous demandez peut-être pourquoi certaines personnes craignent qu’on les trouve stupides à une réception alors que d'autres ont peur d'être mordus par un chien. Bien sûr, il y a aussi ceux qui adorent assister à des réceptions et ceux qui caressent tous les chiens qu'ils voient passer dans la rue.</p>
<p>La théorie cognitivo-comportementale fournit la réponse à cette question. </p>
<h2>Les croyances: l’idée que l’on se fait de soi, des autres et du monde</h2>
<p>Dans une situation précise, les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Restructuration_cognitive">pensées automatiques</a> donnent parfois l’impression qu’elles surgissent de nulle part. En fait, ce schéma de pensée n’a rien d’aléatoire. </p>
<p>Selon la psychologie, chacun possède ses propres croyances sur son identité, sur autrui et sur le fonctionnement du monde et de ses nombreuses composantes. Ainsi, la personne qui a une image positive d’elle-même (« je suis aimable ») saura probablement bien s’adapter. De plus, cette croyance l’aidera à évoluer efficacement en société. </p>
<p>Par contre, celui qui exprime des croyances irrationnelles et négatives à son propre égard (« je suis stupide ») aura tendance à avoir des pensées automatiques comme « il suffit que j’ouvre la bouche pour qu’on se rende compte de ma stupidité ». Dès lors, le développement et la persistance des maladies mentales semblent découler des croyances irrationnelles qu’entretiennent les gens. </p>
<p>Quand nous connaissons les croyances particulières que nourrit une personne, nous comprenons mieux pourquoi elle souffre de tel ou tel trouble anxieux. Par exemple, l’idée que « l’avion n’est pas un mode de transport sécuritaire » sous-tend vraisemblablement un cas d’aviophobie. À l’avenant, la croyance « je suis stupide » peut corréler la présence de symptômes de <a href="http://www.iusmm.ca/hopital/usagers-/-famille/info-sur-la-sante-mentale/phobie-sociale.html">phobie sociale </a>chez un patient, tandis que la perception que « l’incertitude constitue un danger » explique généralement pourquoi un autre est angoissé par absolument tout (trouble d'anxiété généralisé).</p>
<p>Dans le cas des troubles anxieux, peu importe leurs croyances, la plupart des patients évaluent que la probabilité que se concrétise un résultat appréhendé est plus élevée qu’elle ne l’est réellement (« il est fort probable qu’une araignée se jette sur moi »). Parallèlement, ils croient généralement que leur capacité à faire face au résultat appréhendé est moins élevée qu’elle ne l’est en réalité (« si une araignée grimpe sur moi, je serai incapable de m’en débarrasser »). </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/248312/original/file-20181202-194922-e3pxxv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/248312/original/file-20181202-194922-e3pxxv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/248312/original/file-20181202-194922-e3pxxv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/248312/original/file-20181202-194922-e3pxxv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=332&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/248312/original/file-20181202-194922-e3pxxv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=418&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/248312/original/file-20181202-194922-e3pxxv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=418&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/248312/original/file-20181202-194922-e3pxxv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=418&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les phobies se caractérisent par une peur irrationnelle d'un objet ou d'une situation spécifique, comme les araignées, les aiguilles, les hauteurs ou l'avion.</span>
<span class="attribution"><span class="source">pixabay.com</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cela étant, l’origine de telles croyances reste floue. Parfois, un patient formulera sa propre hypothèse (« quand j’étais enfant, je voyais toujours ma mère fuir à l’approche d’un chien »). Il importe toutefois de comprendre que la plupart d’entre nous entretiennent, dans une certaine mesure, plusieurs croyances négatives. Par conséquent, d’autres facteurs – comme une prédisposition génétique à éprouver une vive anxiété – interagissent probablement avec ces croyances et provoquent les symptômes débilitants.</p>
<h2>Au-delà de la théorie, la science</h2>
<p>Pourquoi les psychologues sont-ils persuadés que les croyances jouent un rôle crucial dans le développement et la persistance des troubles anxieux? La réponse à cette question est fort simple: la science. La réalisation de recherches en laboratoire permet de mettre à l’essai et de perfectionner les théories. À preuve, les travaux menés sur la théorie cognitivo-comportementale montrent que si l’on fait croire à un sujet (sain) les choses que croit une personne atteinte de troubles anxieux, ledit sujet ressentira les symptômes associés à de tels troubles. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/248197/original/file-20181130-194956-10q2fzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/248197/original/file-20181130-194956-10q2fzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/248197/original/file-20181130-194956-10q2fzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/248197/original/file-20181130-194956-10q2fzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/248197/original/file-20181130-194956-10q2fzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/248197/original/file-20181130-194956-10q2fzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/248197/original/file-20181130-194956-10q2fzk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les expériences en laboratoire sont essentielles pour évaluer et affiner les théories psychologiques.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Concordia University</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans le cadre d’une expérience, <a href="http://www.concordia.ca/cunews/main/stories/2017/12/12/research-fear-of-losing-control-anxiety-disorder-ocd.html">j’ai « manipulé » des croyances relatives à la perte de contrôle</a>. De fait, j’ai suggéré à des participants qu’ils risquaient fort de perdre le contrôle de leurs pensées et de leur comportement. Puis, j’ai fait croire le contraire à d’autres sujets. </p>
<p>Les participants amenés à croire qu’ils étaient à risque de perdre le contrôle ont accompli plus de rites de vérification. Il est important de noter que la théorie cognitivo-comportementale stipule que les croyances relatives à la perte de contrôle contribuent au développement du <a href="http://www.iusmm.ca/hopital/usagers-/-famille/info-sur-la-sante-mentale/troubles-anxieux/trouble-obsessionnel-compulsif.html">trouble obsessionnel-compulsif</a> et que la vérification compulsive est le symptôme le plus fréquent de ce même trouble!</p>
<p>Dès lors, cette expérience confirme l’importance des croyances dans le développement des problèmes liés à l’anxiété. Bien entendu, ce type de recherche permet subséquemment au psychologue d’aborder ces croyances en clinique et d’aider son patient souffrant de troubles anxieux. </p>
<h2>Traiter les troubles anxieux</h2>
<p>D’après la théorie et le soutien scientifique décrits ci-dessus, il semblerait logique que le clinicien cerne les croyances irrationnelles de son patient lorsqu’il tente de trouver un traitement pour les troubles anxieux de ce dernier. </p>
<p>C’est là l’un des volets de la thérapie cognitivo-comportementale. Par exemple, le patient peut être invité à mener une petite expérience scientifique. Plus précisément, le sujet s’exposera aux objets ou aux situations qui le rendent anxieux, puis comparera ses prédictions (potentiellement irrationnelles) à la réalité des faits. </p>
<p>Ainsi, petit à petit, le patient remet en cause ses croyances ancrées et acquiert de nouvelles connaissances sur lui-même et autrui, voire sur le monde. C’est connu, la personne ayant un trouble anxieux évite délibérément l’objet de son anxiété. Par exemple, celle qui souffre de phobie sociale s’abstiendra d’assister à des réceptions, ce qui l’empêchera par contre de glaner de l’information « réelle » sur ses peurs. </p>
<p>Bien que l’approche puisse effrayer de prime abord, la thérapie cognitivo-comportementale est le traitement par excellence des problèmes liés à l’anxiété (au-delà de la médication). </p>
<p>Alors, qu’attendez-vous? Il est temps de faire face à vos peurs et de mettre vos croyances à l’épreuve!</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/107683/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Philippe Gagné ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les troubles anxieux sont parmi les maladies mentales les plus courantes, touchant plus de 18 % de la population. Ils sont traitables, notamment par la thérapie cognitivo-comportementale.Jean-Philippe Gagné, PhD Student in Clinical Psychology, Concordia UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1076202018-12-05T22:12:19Z2018-12-05T22:12:19ZLes phobies d’impulsion, ou l’obsession du coup de folie<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/249079/original/file-20181205-186079-dgz4f6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=43%2C0%2C4858%2C3214&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Obsédées par l'angoisse du passage à l'acte violent, les victimes de phobies d'impulsion ne peuvent utiliser les objets potentiellement dangereux du quotidien.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/IvQeAVeJULw">Allef Vinicius / Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Âgée de 32 ans et mère de deux enfants, Caroline est venue me consulter car elle souffrait d’une phobie particulièrement handicapante : il lui était impossible de manipuler des couteaux ou des objets dangereux à proximité d’autres personnes. Elle m’a expliqué que tout avait commencé trois ans auparavant, par un fait divers tragique :</p>
<blockquote>
<p>« Un jour, j’ai entendu à la radio qu’une mère de famille avait soudainement poignardé ses enfants avant de mettre fin à ses jours. Rien ne pouvait expliquer ni faire craindre cet acte, la femme n’étant pas connue comme malade ou violente ».</p>
</blockquote>
<p>Depuis, Caroline se trouve envahie par la peur de céder elle-même à un tel coup de folie. « Si cela peut arriver, pourquoi pas à moi ? ». La jeune femme souffre d’une forme particulière de trouble obsessionnel compulsif (TOC), les phobies d’impulsion (ou <em>obsessions impulsives</em>).</p>
<h2>La peur de la perte de contrôle</h2>
<p>Caroline n’est pas atteinte d’une simple <a href="http://www.psycom.org/Espace-Presse/Sante-mentale-de-A-a-Z/Phobies">phobie</a> des couteaux ou des ciseaux. Contrairement à ce que ressentent les personnes souffrant de phobies d’animaux ou de lieux clos, elle ne redoute pas ces objets en eux-mêmes. En revanche, elle craint les actes qu’elle pourrait commettre avec ces instruments dangereux si elle était prise d’une pulsion violente, soudaine et irrépressible.</p>
<p>Cette peur extrêmement douloureuse appartient à la catégorie des <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/troubles-obsessionnels-compulsifs-toc">troubles obsessionnels-compulsifs</a> (TOC). Toutes ces pathologies sont liées à une crainte profonde de ne pas contrôler suffisamment son comportement ou sa pensée, et de commettre ainsi des erreurs, voire des fautes graves (TOC dits de « vérification » ou de « mauvaises pensées »), de se contaminer en raison d’une mauvaise protection ou d’un mauvais nettoyage (TOC de « lavage »), ou encore de mal maîtriser son environnement (TOC « d’ordre et de rangement »).</p>
<p>Concrètement, les personnes souffrant de phobies d’impulsion redoutent de blesser les autres ou elles-mêmes, physiquement ou moralement. Elles peuvent ainsi « se voir » agresser leurs proches ou des inconnus à l’aide d’armes ou d’objets dangereux, les précipiter dans le vide, ou, moins dramatiquement, les insulter. Ces pulsions inadmissibles sont souvent reliées aux valeurs morales et aux peurs sociétales et culturelles. Aujourd’hui, on constate par exemple que les thématiques sexuelles sont de plus en plus présentes dans les phobies d’impulsion, notamment en ce qui concerne la crainte d’actes sur des enfants.</p>
<p>Les mêmes types de pulsions agressives peuvent être redoutées envers soi-même, sous la forme de gestes suicidaires impulsifs. En réponse, les patients cherchent des stratagèmes pour s’éloigner des lieux ou des objets dangereux (fenêtres, métro, aiguilles, lames, etc.) ou pour neutraliser symboliquement leurs « mauvaises pensées » (répétition de phrases, de chiffres ou d’actes conjuratoires). Tout ceci provoque des angoisses très fortes, à la hauteur de la gravité des malheurs redoutés.</p>
<h2>Plusieurs centaines de milliers de personnes concernées en France</h2>
<p>On ne dispose pas de statistiques précises sur le nombre de personnes souffrant de phobies d’impulsion. Il faut d’ailleurs bien distinguer cette pathologie, définie par un niveau important d’angoisse et de perturbations dans la vie quotidienne, de peurs du même type mais légères et transitoires, qui peuvent concerner quasiment tout un chacun, sans gravité.</p>
<p><a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/troubles-obsessionnels-compulsifs-toc">Environ 2 % des adultes</a> font l’objet d’un diagnostic de TOC avéré. Environ un quart de ces cas concernent des phobies d’impulsion. Plusieurs centaines de milliers de personnes seraient donc touchées en France par ce type de TOC, qui touche à peu près autant d’hommes que de femmes.</p>
<p>Il n’y a pas une cause unique et clairement identifiée pouvant expliquer la survenue de phobies d’impulsions. Celles-ci résultent probablement d’une conjonction de facteurs de vulnérabilité.</p>
<p>Tout d’abord, comme dans tous les TOC, il doit exister une certaine prédisposition interne, d’ordre psychologique mais reposant sans doute sur des <a href="https://icm-institute.org/fr/toc/">particularités cérébrales</a>. Ces dernières concernent les systèmes cognitifs du contrôle de l’action ou de la pensée, trop exigeants et générateurs de doutes et de besoins excessifs de maîtrise. Ceci explique qu’une personne souffrant de phobies d’impulsion peut avoir, en même temps ou à une autre période de sa vie, d’autres types de TOC, de vérification, d’ordre ou de lavage.</p>
<p>À cette vulnérabilité psycho-biologique s’ajoutent des facteurs émotionnels et les événements perturbateurs, stress divers et, parfois, véritables traumatismes. Les changements de vie, surtout quand ils s’accompagnent d’une augmentation de la responsabilité personnelle ou professionnelle, peuvent conduire à l’éclosion du trouble. Un exemple typique est la maternité, avec des formes transitoires ou plus durables de phobies d’impulsions des jeunes mères à l’égard de leurs nouveau-nés, probablement liées à l’addition des <a href="http://psychoweb.fr/articles/psychopathologie/484-le-trouble-obsessionnel-compulsif-post-p.html">facteurs hormonaux, émotionnels et psychologiques du <em>post-partum</em></a>.</p>
<p>Les phobies d’impulsions peuvent par ailleurs être favorisées par l’existence d’autres troubles psychiques, notamment la dépression ou les troubles anxieux sévères.</p>
<h2>Des traitements existent</h2>
<p>Comme tous les TOC, les phobies d’impulsion peuvent être traitées efficacement. Les personnes touchées mettent souvent du temps à consulter pour demander de l’aide, car elles ont du mal à comprendre ce qui leur arrive. De plus, elles ont généralement honte d’en parler. Par ailleurs, le diagnostic n’est pas toujours facile à poser : une ou plusieurs consultations avec un psychiatre sont souvent nécessaires pour évaluer les symptômes de manière minutieuse, et identifier le trouble ainsi que les éventuelles autres problématiques associées.</p>
<p>Les traitements sont surtout psychologiques et comportementaux, mais une prescription médicamenteuse peut s’avérer très utile en complément. Les <a href="http://www.psycom.org/Medicaments-psychotropes/Medicaments-psychotropes/Antidepresseurs">antidépresseurs</a> sont efficaces, même sans dépression associée. Ils permettent de réduire progressivement le niveau d’envahissement mental par les obsessions, ainsi que le niveau d’angoisse. Ils peuvent être prescrits sur de longues durées, sans risque de dépendance et, en général, sans effets secondaires trop gênants.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-antidepresseurs-sont-ils-de-dangereuses-drogues-76879">Les antidépresseurs sont-ils de dangereuses drogues ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Mais l’essentiel de la prise en charge repose sur les psychothérapies, et le plus souvent sur une <a href="http://www.aftcc.org/les-therapies-comportementales-et-cognitives">thérapie comportementale et cognitive</a>. Celle-ci consiste surtout à analyser les réactions du sujet face aux idées obsédantes, puis à les modifier progressivement grâce à une compréhension de ce qu’elles sont : des peurs, et rien d’autre.</p>
<p>En effet, les phobies d’impulsion ne comportent en elles-mêmes aucun risque, et notamment aucun des risques redoutés. Les personnes souffrant de phobies d’impulsion n’effectuent jamais de passage à l’acte dangereux, pour elles-mêmes ou pour les autres (sauf, bien sûr, si ces actes sont provoqués par d’autres pathologies telles qu’une dépression ou une psychose, ou encore en cas de prise d’alcool).</p>
<p>Avoir peur de commettre un acte violent, alors qu’on ne le souhaite pas, ne provoque en aucun cas une perte de contrôle. La thérapie permet de prendre conscience de cette différence essentielle entre peurs et désirs, et de retrouver confiance en soi en adoptant des attitudes plus saines et sereines face aux obsessions. Ainsi, celles-ci vont peu à peu s’atténuer.</p>
<hr>
<p><strong><em>Pour aller plus loin :</em></strong><br></p>
<p><em>Antoine Pelissolo (2017), <a href="https://editions.flammarion.com/Catalogue/hors-collection/psychologie-et-developpement-personnel/vous-etes-votre-meilleur-psy">« Vous êtes votre meilleur psy ! »</a>, Flammarion.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/107620/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Antoine Pelissolo a reçu ces trois dernières années des financements (rémunérations pour des travaux de recherche ou de formation, ou invitations à des réunions scientifiques) des laboratoires pharmaceutiques Biocodex, Otsuka et Janssen-Cilag.</span></em></p>Qui n’a jamais eu peur de perdre le contrôle de ses actes, de se laisser aller à la violence ? Généralement passager, ce sentiment peut, chez certains, se transformer en une phobie très handicapante.Antoine Pelissolo, Professeur de psychiatrie, Inserm, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1054652018-10-22T21:28:00Z2018-10-22T21:28:00ZQue risque-t-on en s’asseyant sur des toilettes publiques ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/241703/original/file-20181022-105767-1ucp8vy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C53%2C1500%2C940&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Attention aux fesses ? </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Tout le monde a déjà vécu cette situation : une envie pressante, la recherche frénétique de toilettes, et, une fois trouvées, la découverte que le siège est couvert de gouttelettes, souvenirs de l’utilisateur précédent. Dès lors, que faire ? Se comporter comme si de rien n’était et procéder comme à l’accoutumée, ou bien tenter de faire son affaire accroupi, en équilibre précaire ?</p>
<p>Notre monde est, à bien des égards, une planète de microbes. Comme tous ses habitants, nous portons en nous et sur nous nos propres forêts tropicales microscopiques, que nous échangeons en permanence non seulement avec notre environnement, mais aussi les uns avec les autres. Les microbes sont en effet abondants dans tout le corps humain, y compris sur la peau, dans la bouche, dans les yeux, dans les organes urinaires et génitaux ainsi que dans le système gastro-intestinal. La plupart des gens transportent jusqu’à un kilogramme de micro-organismes… Ces bactéries, champignons, levures, virus et parfois parasites vivent majoritairement <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4991899/">dans l’intestin</a>.</p>
<p>Les recherches ont établi que les microbes de l’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26246784">intestin constituent de 25 à 54 % des matières fécales humaines</a>. En conséquence, les fèces humaines peuvent transporter un large éventail de <a href="http://www.BBC.co.uk/Schools/gcsebitesize/science/aqa_pre_2011/Human/defendingagainstinfectionrev1.shtml">pathogènes transmissibles</a> : les bactéries <a href="http://www.inrs.fr/baobab/baobab.nsf/(allDocParRef)/Campylobacter_spp.?opendocument&format=print"><em>Campylobacter</em></a>, <a href="https://www.revmed.ch/RMS/2014/RMS-N-446/Infections-a-enterocoques-du-plus-simple-au-plus-complexe"><em>Enterococcus</em></a>, <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/escherichia-coli"><em>Escherichia coli</em></a>, <a href="http://agriculture.gouv.fr/sites/minagri/files/documents/pdf/salmonelloses_190905net.pdf"><em>Salmonella</em></a>, <a href="https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/biosecurite-biosurete-laboratoire/fiches-techniques-sante-securite-agents-pathogenes-evaluation-risques/shigella.html"><em>Shigella</em></a>, <a href="https://www.pasteur.fr/fr/centre-medical/fiches-maladies/staphylocoque"><em>Staphylococcus</em></a>, <a href="http://www.inrs.fr/baobab/baobab.nsf/(allDocParRef)/Streptococcus_spp.?opendocument&format=print"><em>Streptococcus</em></a> et <a href="https://www.pasteur.fr/fr/sante-publique/cnr/les-cnr/peste-autres-yersinioses/infections-yersinia?emkfid=EMF-22701181460-k--300988573196-b-s&gclid=EAIaIQobChMIhJ_uh8ya3gIV7BXTCh3nCgLREAAYASAAEgIPJfD_BwE"><em>Yersinia</em></a> – ainsi que les virus comme les <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/MIC2011sa0036Fi.pdf">norovirus</a>, les <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/MIC2012sa0031Fi.pdf">rotavirus</a> et les virus des <a href="http://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/hepatitis-a">hépatites A</a> et <a href="http://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/hepatitis-e">E</a>, pour n’en nommer que quelques-uns.</p>
<p>Lors d’une rencontre, dans les toilettes publiques, avec des matières fécales, il existera donc effectivement toujours un risque d’infection… Mais à quel point ce risque est-il important ?</p>
<h2>Uriner en public</h2>
<p>Il est très peu probable qu’une infection se développe à partir des fesses, même assises sur un siège de toilettes. En effet, la plupart des infections intestinales impliquent le transfert manuel de bactéries vers la bouche. Ceci se produit généralement lorsque les mains, les aliments ou certaines surfaces se retrouvent souillés par des matières fécales. Qui plus est, la couche de bactéries et de levures qui recouvre la peau humaine fonctionne comme un bouclier de protection très solide. Et enfin, en dernier recours, notre <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmedhealth/PMH0072548/">système immunitaire est particulièrement efficace</a> pour nous protéger contre les agents pathogènes. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/223825/original/file-20180619-126559-unumbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/223825/original/file-20180619-126559-unumbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/223825/original/file-20180619-126559-unumbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/223825/original/file-20180619-126559-unumbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/223825/original/file-20180619-126559-unumbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/223825/original/file-20180619-126559-unumbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/223825/original/file-20180619-126559-unumbn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Une personne moyenne visite les toilettes 2 500 fois par an.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il n’est donc pas nécessaire de grimper sur le siège des toilettes pour s’y s’accroupir. En fait, cette façon de faire peut entraîner des blessures, ou augmenter le risque d’infection. <a href="https://www.express.co.uk/life-style/life/741075/toilet-seat-public-germs-hover-squat-sit">Comme l’explique Brianne Grogan, physiothérapeute en santé des femmes</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Le problème avec le fait de “planer” au-dessus des toilettes en urinant est que les muscles de votre plancher pelvien et de votre ceinture pelvienne – vos rotateurs de la hanche, vos muscles glutéaux, votre dos et vos abdominaux – sont extrêmement tendus. Cette tension de la ceinture pelvienne rend l’écoulement de l’urine difficile, vous obligeant souvent à pousser ou à “appuyer légèrement vers le bas” pour que l’urine sorte rapidement. Or, uriner via des poussées ou des appuis fréquents vers le bas peut contribuer au <a href="https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/prolapsus-genito-urinaire/comprendre-prolapsus-genital">prolapsus des organes pelviens</a>. »</p>
</blockquote>
<p>Brianne Grogan ajoute que cette position pourrait aussi aboutir à une vidange incomplète de la vessie, ce qui pourrait entraîner une augmentation de la fréquence et de l’urgence des mictions ou, dans des cas extrêmes, contribuer à augmenter le risque d’infection urinaire.</p>
<h2>La poignée de porte sale</h2>
<p>Les défenses microbiennes et immunitaires d’un individu le protègent donc des risques d’infection liés à l’utilisation de toilettes publiques. Qui plus est, dans les pays développés la prise de conscience du risque d’infection par les matières fécales entraîne un nettoyage régulier des toilettes.</p>
<p>Pour vous rassurer, vous pouvez néanmoins tout à fait transporter avec vous des lingettes antiseptiques, et les utiliser pour nettoyer le siège des toilettes avant de vous asseoir, afin de protéger votre fondement de tout risque de contamination.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/223821/original/file-20180619-126534-10iu6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/223821/original/file-20180619-126534-10iu6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/223821/original/file-20180619-126534-10iu6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/223821/original/file-20180619-126534-10iu6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/223821/original/file-20180619-126534-10iu6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/223821/original/file-20180619-126534-10iu6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/223821/original/file-20180619-126534-10iu6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Seule une personne sur 20 se lave les mains correctement après être allée aux toilettes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les sièges de toilettes sales ne devraient toutefois peut-être pas constituer votre plus importante préoccupation. En effet, une <a href="http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0028132">étude de 2011</a> a révélé que les microbes présents dans les gouttelettes d’eau projetées lorsque la chasse d’eau est tirée colonisent rapidement une surface plutôt conséquente de la pièce, y compris l’abattant, la porte, le sol et le support du papier toilette. Pour éviter de subir cette vaporisation à base de contenu de toilettes – lequel inclut vos propres germes et ceux des utilisateurs précédents – il est recommandé de quitter la cabine immédiatement après avoir appuyé sur le bouton de la chasse d’eau.</p>
<p>Et enfin, bien sûr, tout le monde ne se lave pas les mains après être passé aux toilettes. Il est donc fort probable que les poignées de portes soient contaminées. Pour éviter de recontaminer vos mains propres lorsque vous quittez les toilettes publiques, utilisez votre coude, votre manteau ou un mouchoir pour ouvrir la porte.</p>
<h2>Maintenant, lavez-vous les mains</h2>
<p><a href="https://theconversation.com/et-vous-vous-lavez-vous-les-mains-correctement-89386">Un lavage de mains efficace</a> est la clé d’une protection complète contre les germes associés aux toilettes. Le lavage des mains élimine en effet totalement la saleté, les bactéries et les virus, ce qui empêche les microbes potentiellement infectieux de se propager à d’autres personnes et objets. Il est recommandé de se laver en frottant vigoureusement ses mains et ses doigts avec de l’eau savonneuse pendant 20 à 30 secondes, y compris sous les ongles. La friction qui résulte du frottement des mains l’une contre l’autre détache les débris sur lesquels se trouvent les microbes.</p>
<p>Il faut toutefois aussi savoir que les lavabos des toilettes publiques, les robinets et les distributeurs d’essuie-tout ou les boutons des sèche-mains <a href="http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0028132">sont tous fortement contaminés par des microbes</a>. C’est parce qu'en général, les mêmes mains qui viennent d’essuyer un fondement pressent ensuite le bouton du distributeur de savon puis touchent la poignée du robinet. Il est donc conseillé, une fois le lavage des mains terminé, de laisser le robinet ouvert pendant que vous vous séchez les mains, puis d’utiliser un morceau d’essuie-tout propre pour le fermer. Ou, si vous utilisez un sèche-mains, d’utiliser votre coude pour appuyer sur le bouton de mise en marche.</p>
<p>Il va de soi qu’il est déconseillé de manger, de boire ou de fumer à l’intérieur des toilettes publiques. Il en va de même pour l’utilisation du téléphone portable. Pourtant, des travaux ont montré que près de <a href="http://www.dailymail.co.uk/femail/article-4229044/Why-shouldn-t-use-phone-toilet.html">75 % des gens utilisent leur téléphone</a> lorsqu’ils sont aux toilettes. À ce propos, il est peut-être temps de cesser de s’inquiéter de la propreté des toilettes. Une étude menée par une équipe américaine a en effet révélé que les téléphones mobiles sont jusqu’à <a href="https://cals.arizona.edu/news/why-your-cellphone-has-more-germs-toilet">10 fois plus sales que les sièges de wc</a>…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/105465/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Primrose Freestone ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Qui ne s’est jamais contorsionné pour éviter de s’asseoir sur le siège des toilettes publiques, par peur de ce qui s’y trouve ? Pourtant cet endroit n’est pas celui dont il faut le plus se méfier…Primrose Freestone, Senior Lecturer in Clinical Microbiology, University of LeicesterLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1052652018-10-18T21:46:37Z2018-10-18T21:46:37ZTocophobie : ces femmes qui vivent avec une peur extrême de la grossesse et de l’accouchement<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/241308/original/file-20181018-67185-1f9dwy5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C0%2C3005%2C1668&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Certaines femmes ont une peur extrême de l'accouchement.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Les femmes ressentent très souvent de l’anxiété à l’égard du travail et de l’accouchement. Les inquiétudes liées à la douleur des contractions, aux interventions et à l’incertitude relative au processus sont monnaie courante. Mais chez certaines femmes, la peur du travail et de l’accouchement est si accablante qu’elle jette une ombre sur leur grossesse et nuit à leur fonctionnement quotidien.</p>
<p>Cette grande peur de l’accouchement est appelée <a href="https://www.bpas.org/about-our-charity/press-office/press-releases/new-guidance-on-support-for-pregnancy-mental-healt/">« tocophobie »</a> – terme qui signifie littéralement « phobie de l’accouchement ». Pour certaines femmes, elle s’accompagne également d’une aversion ou d’un dégoût de la grossesse.</p>
<p>La tocophobie se divise en deux types – primaire et secondaire. La tocophobie primaire est observée chez les femmes n’ayant jamais accouché. Chez ces femmes, la peur de l’accouchement provient habituellement d’expériences traumatisantes issues de leur passé – qui comprennent les sévices sexuels. Elle peut aussi découler du fait d’avoir assisté à un accouchement difficile, <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/jocn.14219">entendu des récits ou visionné des émissions</a> qui dépeignaient l’accouchement comme un épisode embarrassant ou dangereux. Les femmes qui souffrent de tocophobie secondaire ont généralement vécu une expérience traumatisante lors d’un accouchement précédent qui a provoqué en elles la peur de donner naissance à nouveau.</p>
<p>Il est difficile de savoir jusqu'à quel point la tocophobie est fréquente. Les <a href="http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/aogs.13138/full">recherches suggèrent</a> que 2,5 % à 14 % des femmes en souffriraient, alors que <a href="http://www.womenandbirth.org/article/S1871-5192(17)30025-2/abstract">certains chercheurs</a> parlent plutôt d’une proportion de l’ordre de 22 %.</p>
<p>La grande variabilité de ces chiffres tient au fait que les études concernent des femmes souffrant de tocophobie à divers degrés. Ainsi, là où certaines femmes auront une tocophobie relativement légère, d’autres présenteront un trouble nettement plus sévère. De plus, les chiffres recouvrent sans doute aussi des femmes souffrant d’anxiété et de dépression plutôt que de tocophobie.</p>
<h2>Un événement pas heureux du tout</h2>
<p>Les femmes souffrant de tocophobie sont issues de milieux très divers. Il est difficile de prédire qui sera touché, et ce, même s’il est clair que les femmes tocophobes seront aussi plus susceptibles de souffrir de troubles anxieux, de dépression, et d’éprouver d’autres problèmes de santé mentale.</p>
<p>Les <a href="http://pmj.bmj.com/content/postgradmedj/79/935/505.full.pdf">recherches indiquent</a> que certaines femmes ayant cette phobie décident d’éviter toute grossesse – ou envisageront l’avortement si elles se retrouvent dans cette situation. Enceintes, les femmes souffrant de tocophobie demandent parfois un accouchement par césarienne pour éviter le processus de mise au monde proprement dit.</p>
<p>Certaines femmes trouvent la grossesse très difficile, surtout le fait de devoir composer avec un ventre qui ne cesse de grossir et de sentir le fœtus bouger. L’anxiété, l’insomnie, les troubles alimentaires et l’apparition ou un risque accru de dépression anténatale constituent autant de conséquences connues de la tocophobie.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/206366/original/file-20180214-174973-syly55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/206366/original/file-20180214-174973-syly55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/206366/original/file-20180214-174973-syly55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/206366/original/file-20180214-174973-syly55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/206366/original/file-20180214-174973-syly55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/206366/original/file-20180214-174973-syly55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/206366/original/file-20180214-174973-syly55.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les mères souffrant de tocophobie ont parfois du mal à nouer des liens avec leurs bébés.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Un des effets de la tocophobie se manifeste durant l’accouchement : elle entraîne une prolongation du travail. Celui-ci a généralement lieu sous anesthésie péridurale, et requiert plus fréquemment l'utilisation de forceps ou d’une ventouse obstétricale – un dispositif de succion en forme de coupe qui est appliqué sur la tête du bébé pour faciliter l’accouchement. Ces interventions sont susceptibles d'avoir des conséquences pour les femmes et leurs bébés.</p>
<p>Par la suite, certaines femmes tocophobes établiront des relations moins satisfaisantes avec leurs bébés. Une expérience pénible au moment de l’accouchement rendra en outre certaines femmes plus craintives en cas de grossesse subséquente.</p>
<h2>Traitement de la tocophobie</h2>
<p>Des données empiriques révèlent que les soins cliniques prodigués aux femmes tocophobes sont inégaux. Mais la bonne nouvelle est qu'il existe de façons d'aider les femmes aux prises avec ce trouble. Certaines femmes trouvent bénéfiques de raconter en détail une expérience antérieure d’accouchement traumatisant, tandis que d’autres seront rassurées par l’obtention de renseignements sur le travail et l’accouchement. D'autres femmes, en revanche, peuvent avoir besoin d'un traitement plus ciblé – pour elles, des consultations psychologiques pourraient s'avérer utiles.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/206225/original/file-20180213-44657-1g3xw9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/206225/original/file-20180213-44657-1g3xw9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/206225/original/file-20180213-44657-1g3xw9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/206225/original/file-20180213-44657-1g3xw9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=433&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/206225/original/file-20180213-44657-1g3xw9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=544&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/206225/original/file-20180213-44657-1g3xw9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=544&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/206225/original/file-20180213-44657-1g3xw9w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=544&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Donner naissance à un enfant est une des expériences les plus intenses que le corps ait à traverser.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/success?src=MpPIs7tYol8lQ2w_S2JVkA-2-54">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Bien des femmes estiment aussi profitable de visiter le service d’obstétrique et de parler aux sages-femmes et aux obstétriciens durant leur grossesse. D’autres se sentent isolées par leur phobie, car elles ont l’impression que personne d’autre n’éprouve une peur aussi intense que la leur. Pour ces femmes, le seul fait de savoir qu’elles ne sont pas seules dans ce cas <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0266613813002404">s’avérerait réconfortant</a> et bénéfique.</p>
<h2>Surmonter une phobie</h2>
<p>Dans le district de Hull et dans le comté du Yorkshire de l'Est, où existe un service de santé mentale périnatal destiné aux femmes et à leurs familles, la nécessité d'une approche cohérente pour prendre soin et soutenir les femmes souffrant de tocophobie est bien connue. Elle a amené un groupe de médecins, d’universitaires et de patients <a href="http://www.humber.nhs.uk/news/Humber-NHS-Foundation-Trust-announces-perinatal-mental-health-conference-in-collaboration-with-the-University-of-Hull.htm">à collaborer</a> afin d'établir un inventaire des soins et de l’aide disponibles pour ces femmes – et pour aider à combler les lacunes en matière de prestation de services.</p>
<p>Ces travaux précurseurs sont à l’avant-garde de la recherche sur la tocophobie et de la fourniture de services en lien avec cette affection au Royaume-Uni. Ils visent à s’assurer que les femmes qui en souffrent obtiennent tout le soutien nécessaire, et que leurs besoins psychologiques ou en lien avec leur grossesse sont satisfaits.</p>
<p>La tocophobie peut avoir des effets invalidants sur les femmes et sur leurs familles. Certaines d'entre elles évitent la grossesse, malgré leur désir d’avoir des enfants. La tocophobie assombrit aussi la grossesse de celles qui se retrouvent enceintes, et perturbe leurs choix en matière de travail et d’accouchement. Il faut donc s'efforcer de la prévenir autant que possible – et fournir aux femmes qui souffrent de ce trouble accablant un traitement efficace.</p>
<p><em>Traduit de l'anglais par Marlène Maltais, M.A., trad.a.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/105265/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cet article a été rédigé en collaboration avec Claire Marshall, chef d'équipe de l'équipe de liaison en santé mentale périnatale.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Franziska Wadephul does not work for, consult, own shares in or receive funding from any company or organisation that would benefit from this article, and has disclosed no relevant affiliations beyond their academic appointment.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Julie Jomeen has no relevant affiliations beyond her academic appointments.</span></em></p>La tocophobie, ou peur pathologique de la grossesse, peut conduire à éviter l’accouchement, ou entraîner des complications au cours de celui-ci ou après la naissance. Retour sur une phobie peu connue.Catriona Jones, Senior Research Fellow in Maternal and Reproductive Health, University of HullFranziska Wadephul, Research Assistant, University of HullJulie Jomeen, Professor of Midwifery and Dean in the Faculty of Health Sciences, University of HullLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/999752018-08-23T21:49:22Z2018-08-23T21:49:22ZEffacer les traumatismes d’un clin d’œil : la surprenante technique EMDR<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/233236/original/file-20180823-149484-nzp6m3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C30%2C4016%2C3937&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'EMDR, une technique basée sur les mouvements oculaires pour traiter les traumatismes.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/smuS_jUZa9I">Alexandra Gorn/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Alors qu’elle traverse un parc en ruminant de sombres pensées, la psychologue américaine Francine Shapiro constate tout à coup que la charge émotionnelle de son souvenir traumatisant a diminué. Recherchant la cause, elle identifie les mouvements saccadiques de ses yeux. Elle expérimente alors l’influence des mouvements oculaires sur la réduction du stress associé aux souvenirs. Devant l’efficacité de cette technique, elle consacre dès lors sa vie à l’étude et à la promotion de l’EMDR (<a href="https://www.amazon.fr/D%C3%A9passer-pass%C3%A9-lib%C3%A9rer-souvenirs-traumatisants/dp/275787246X">Eye Movement Desensitization and Reprocessing</a>).</p>
<p>Trente ans plus tard, toutes les études scientifiques menées prouvent l’efficacité de l’EMDR dans la résolution du <a href="https://www.memoiretraumatique.org/assets/files/v1/Documents-pdf/DSM_5_Trouble_stress_post-traumatiques.pdf">trouble de stress post-traumatique</a> (TSPT). La rapidité avec laquelle l’EMDR guérit les patients de leur stress est difficile à croire : 80 % des patients avec un traumatisme simple sont soignés en une à huit séances (une séance dure habituellement une heure).</p>
<h2>Une technique facile à mettre en place</h2>
<p><a href="https://www.amazon.fr/Manuel-Int%C3%A9gration-neuro-%C3%A9motionnelle-mouvements-oculaires/dp/2100501364">La mise en œuvre est très facile</a> : le sujet se remémore l’événement traumatisant tandis que des stimulations bilatérales alternées (SBA) sont appliquées. Il s’agit de mouvements des yeux de droite à gauche et réciproquement (environ une fois par seconde), ou de sons (bip) parvenant à une oreille puis l’autre, ou de tapotements d’une partie du corps (main, genou) alternativement d’un côté puis de l’autre. Après quelques dizaines de secondes, le thérapeute arrête les SBA et le patient décrit son ressenti et/ou ce qui lui est venu à l’esprit. </p>
<p>Des souvenirs anciens peuvent survenir, des émotions, des sensations corporelles sont généralement décrites. Le thérapeute redémarre les SBA. Après quelques sessions, le sujet tout à coup affirme que le souvenir n’est plus traumatisant : il est « désensibilisé » ! Son souvenir ne sera plus jamais traumatisant. Le souvenir n’a pas disparu, il paraît souvent plus lointain – seule la charge émotionnelle a disparu. Cependant, même si la mise en œuvre est facile dans le cas de traumatismes simples, le traitement des traumatismes complexes demandera une préparation sécurisante et un accompagnement vigilant par le thérapeute.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/XZTDl3tgYj8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Reportage à propos de l’EMDR sur France 3.</span></figcaption>
</figure>
<p>Un certain <a href="https://www.emdr-france.org/">nombre de thérapeutes</a> sont formés et pratiquent l’EMDR, mais elle reste encore peu accessible (seules les séances réalisées à l’hôpital sont remboursées) et peu connue. Pourquoi ? Sans doute parce que les explications scientifiques manquaient, permettant aux tenants de thérapies plus longues et moins efficaces de rationaliser leur opposition. Cependant, de nombreuses recherches scientifiques sont désormais menées sur la thérapie EMDR, et des théories sont avancées, dont la Théorie neuronale de la Cognition.</p>
<h2>L’EMDR expliquée scientifiquement</h2>
<p>Un souvenir est une activation de quelques colonnes corticales au sein du cortex (80 % de la masse du cerveau). La colonne corticale est l’unité fonctionnelle du traitement cognitif, elle est formée d’environ 100 000 neurones. Les colonnes corticales se regroupent en carte. Il y a 360 cartes corticales (pour un total de 160 000 colonnes corticales). Chaque carte corticale code une dimension particulière du souvenir. Dans le cas d’un souvenir impliquant un cerisier, la forme de la feuille, la couleur de la cerise, son goût, la rugosité de l’écorce, l’orthographe du mot <em>cerisier</em>, les sons associés au mot <em>cerisier</em> sont codés par des colonnes appartenant à six cartes différentes. Nous pouvons y ajouter des dimensions personnelles comme un lieu, un visage, une date, etc. Les 360 cartes corticales sont autant de dimensions pour encoder nos souvenirs.</p>
<p>La valence « trauma » associée à un souvenir « traumatisant » est déterminée par l’<a href="http://lecerveau.mcgill.ca/flash/i/i_04/i_04_cr/i_04_cr_peu/i_04_cr_peu.html">amygdale</a>, située sous le cortex (le nom vient du latin <em>amande</em>, ce qui nous renseigne sur sa taille). Les amygdales (une par hémisphère) sont spécialisées dans le traitement et la réponse émotionnelle ; elles peuvent être considérées comme des cartes corticales. Elles reçoivent les mêmes entrées que le cortex et traitent donc les mêmes informations, de fait beaucoup plus vite mais beaucoup plus grossièrement.</p>
<p><a href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File :Amygdala.gif#/media/File :Amygdala.gif"><img src="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/f/f5/Amygdala.gif" alt="Amygdala.gif"></a><br>Vue 3D des amygdales en rouge, <a href="https://creativecommons.org/licenses/by-sa/2.1/jp/deed.en" title="Creative Commons attribution, share alike">CC BY-SA 2.1 jp</a>, <a href="https://commons.wikimedia.org/w/index.php ?curid=7894854">Lien</a></p>
<p>L’amygdale est un minuscule cortex dévolu à une question précise : la situation est-elle dangereuse ? Si c’est le cas, alors il faut être le mieux armé possible pour y répondre. L’amygdale provoque la libération d’adrénaline dans le système sanguin, ce qui instantanément <a href="https://www.pourlascience.fr/sd/neurosciences/le-mode-de-survie-du-cerveau-stresse-11139.php">facilite l’excitation neuronale</a>. Les neurones prennent moins longtemps pour s’activer : nous pensons donc plus vite (sensation de temps qui ralentit) ; les fuseaux neuro-musculaires sont plus nombreux à s’activer : nous sommes donc plus forts. L’adrénaline favorise aussi la mémorisation : une unique expérience de danger est suffisante pour qu’on s’en rappelle toute notre vie. Cette mémorisation facilitée tisse des liens entre amygdale et cortex, entre « danger » et « souvenir ». Cette mémorisation est à double sens et la seule évocation du souvenir (cortex) suffit dès lors à activer le stress (amygdale) – et à renforcer le lien. Le souvenir traumatisant peut alors aller jusqu’au TSPT (trouble de stress post-traumatique).</p>
<p>Si des SBA sont appliquées dans cette situation, cela revient à envoyer des informations (peu significatives) aux cartes corticales. Ces informations périodiques s’accumulent, et deviennent capables après quelque temps de faire basculer dans un état « actif » des colonnes corticales qui étaient très proches de le faire (phénomène de résonance stochastique). Parfois ces colonnes codent pour des détails de l’événement qui étaient « oubliés », ou pour d’autres souvenirs, ou des sensations. Les SBA ajoutent ainsi des dimensions à la situation ce qui complexifie sa représentation corticale. Les détails ajoutés ne sont pas a priori stressants. Ils n’activent donc pas l’amygdale. Au bout d’un certain nombre de sessions avec des SBA, la représentation de l’événement est devenue si différente de la représentation initiale (stressante) que l’amygdale ne la reconnaît plus, et ne s’active donc plus. La mise à jour du souvenir traumatisant l’a rendu « neutre ». Il n’y a pas de retour en arrière possible : le <a href="https://www.scitechnol.com/peer-review/emdr-therapy-mechanisms-explained-by-the-theory-of-neural-cognition-AgP3.pdf">patient est guéri</a> de son souvenir traumatique.</p>
<p>L’EMDR ne se réduit pas à traiter le TSPT. Elle est également utilisée dans le cas de phobies, dépression, anxiété, addiction et même certains troubles psychotiques. En situation de crise (attentat, accident, etc.), l’EMDR peut également être pratiquée immédiatement en <a href="http://www.ifemdr.fr/protocoles-emdr-pour-les-situations-durgence-en-individuel/">groupe</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/99975/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’EMDR est une technique basée sur le mouvement oculaire permettant de traiter les traumatismes.Claude Touzet, Maître de Conférences en Sciences Cognitives, UMR CNRS 7260, Aix-Marseille Université (AMU)Stéphanie Khalfa, Chercheure, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/950142018-05-23T20:53:29Z2018-05-23T20:53:29ZL’anxiété, une émotion normale, jusqu’à quel point ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/214805/original/file-20180413-540-1wwtn3f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C5060%2C3226&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'anxiété est un phénomène normal. Mais chez certaines personnes, elle devient permanente et doit être soulagée. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/QE0BJHGskDo">Nick Karvounis/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p><em>Notre auteur, psychiatre et directeur d’enseignement à l’université de Lille, consulte et enseigne sur le traitement de l’anxiété depuis 25 ans. Dans <a href="https://www.tallandier.com/livre-9791021026254.htm"><em>Se libérer de l’anxiété et des phobies en 100 questions</em></a> (éditions Tallandier), l’ouvrage dont nous publions ci-dessous un extrait, Dominique Servant distingue l’anxiété normale, éprouvée par tous, de celle qui fait souffrir et qu’il faut soulager.</em></p>
<hr>
<p>Nous ressentons tous une anxiété face aux incertitudes de l’existence. Nous avons peur de tomber malade, de perdre des êtres chers. Cette émotion est normale, et l’on peut considérer qu’elle joue un certain rôle dans notre capacité à nous adapter à ce qui nous arrive.</p>
<p>Mais pour beaucoup d’entre nous, l’anxiété n’est plus raisonnable, elle n’obéit plus à la logique, elle devient envahissante et nous rend vulnérables. Il nous est alors difficile de trouver le sommeil, de nous concentrer. Notre esprit s’accroche à des pensées que nous n’arrivons pas à mettre à distance. L’anxiété se dresse devant nous sans prévenir, et tout d’un coup la panique s’abat sur nous.</p>
<p>Nos proches ne comprennent pas toujours cette souffrance qui ne relève pas d’une anomalie observable ou d’un problème concret. Mais l’anxiété est bien là et nous gâche la vie.</p>
<h2>Quand l’anxiété devient maladive</h2>
<p>Chez certaines personnes, dans certaines situations et à certains moments de la vie, l’anxiété devient maladive. Quatre conditions doivent être réunies pour qu’elle puisse être qualifiée ainsi :</p>
<ul>
<li><p>Quand elle est disproportionnée et survient en lien avec des choses qui ne sont pas dangereuses en elles-mêmes. Elle revêt alors un caractère irrationnel, illogique qui s’oppose au bon sens. Nous sommes conscients qu’il n’y a rien de grave mais nous ne pouvons nous raisonner.</p></li>
<li><p>Quand elle est trop intense. Au lieu de nous aider à mieux nous adapter à la situation, l’anxiété devient improductive et inutile. Lorsque le seuil d’une anxiété modérée est dépassé, l’anxiété forte entrave ce que nous sommes en train de faire et nous la ressentons comme une vraie souffrance.</p></li>
<li><p>Quand elle se prolonge. L’anxiété peut devenir permanente et envahissante. Elle empêche alors de vivre normalement et ne laisse plus de répit. Nous avons l’impression qu’elle ne s’arrêtera jamais, de ne pas voir la fin du tunnel.</p></li>
<li><p>Quand elle devient incontrôlable. Quand nous ne pouvons la maîtriser, nous ressentons de l’impuissance, parfois même de la colère contre nous mêmes. Nous nous en voulons de ne pas pouvoir agir.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/214807/original/file-20180413-46652-exkdnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/214807/original/file-20180413-46652-exkdnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/214807/original/file-20180413-46652-exkdnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/214807/original/file-20180413-46652-exkdnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/214807/original/file-20180413-46652-exkdnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/214807/original/file-20180413-46652-exkdnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/214807/original/file-20180413-46652-exkdnt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Quand l’anxiété devient incontrôlable, nous ressentons de l’impuissance, parfois même de la colère contre nous-mêmes.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/w_HSOUZ6RUo">Ali Yahya/Unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une personne sur cinq est touchée</h2>
<p>Ainsi, on distingue les <a href="http://www.psycom.org/Espace-Presse/Sante-mentale-de-A-a-Z/Anxiete">troubles anxieux</a> de l’anxiété normale par la présence de plusieurs symptômes intenses, durables, qui entraînent un vrai mal-être et une gêne dans la vie de tous les jours, dans le travail ou les loisirs. Ces troubles touchent environ une personne sur cinq. Il en existe de plusieurs sortes.</p>
<p>Le trouble panique : il est défini par la répétition d’attaques de panique (crises aiguës d’angoisse), dont certaines sont imprévisibles, entraînant une gêne quotidienne et une anxiété anticipatoire (« peur d’avoir peur ») quasi permanente.</p>
<p>Les phobies : elles sont toutes caractérisées par une peur intense, et perçue comme excessive, d’objets ou de situations non réellement dangereux. Toute confrontation (réelle ou en imagination) avec l’objet ou la situation en cause provoque une anxiété qui peut être majeure, allant jusqu’à l’attaque de panique. Néanmoins l’angoisse est absente dès que le sujet se sent « à l’abri ».</p>
<p>Deux formes de phobies sont distinguées :</p>
<ul>
<li><p>les phobies spécifiques qui concernent un seul type d’objet ou de situation simple (animaux, sang, avion, etc.),</p></li>
<li><p>l’agoraphobie, définie par une peur et un évitement de situations où la personne aura du mal à s’échapper ou à trouver du secours comme la foule, les grands magasins, les salles de concert, les transports en commun.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/214804/original/file-20180413-577-1gccwgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/214804/original/file-20180413-577-1gccwgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/214804/original/file-20180413-577-1gccwgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/214804/original/file-20180413-577-1gccwgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/214804/original/file-20180413-577-1gccwgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/214804/original/file-20180413-577-1gccwgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/214804/original/file-20180413-577-1gccwgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La foule peut déclencher une grande anxiété chez les personnes touchées par l’agoraphobie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/edcUaaNaowU">Jason Wong/Unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>La peur du regard et du jugement de l’autre</h2>
<p>Les phobies sociales (que l’on appelle aussi trouble d’anxiété sociale) : elles sont caractérisées par une peur intense du regard et du jugement de l’autre. Le sujet redoute des activités quotidiennes comme parler ou agir en public. Les phobies sociales correspondent à un authentique trouble anxieux qui ne saurait être confondu avec une simple timidité.</p>
<p>Le trouble anxieux généralisé : il correspond à une inquiétude quasi permanente et durable (d’au moins six mois), concernant divers motifs de la vie quotidienne (risque d’accidents ou de maladies pour les proches ou soi-même, anticipation de problèmes financiers ou professionnels, etc.), sans possibilité de se « raisonner » et de contrôler ces ruminations. Celles-ci engendrent un état de tension permanent, physique et psychique.</p>
<p>L’anxiété, sous les différentes formes citées plus haut, est le problème psychologique le plus fréquent. Des études faites sur de très grands échantillons à travers le monde montrent qu’environ 15 à 20 % des personnes interrogées ont présenté à un moment de leur vie un trouble anxieux, selon une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/15939839">étude publiée en 2005</a>.</p>
<p>La proportion, en France, dépasse cette fourchette pour atteindre 22,4 %, un niveau plus élevé que dans les autres pays européens comme le montre l’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/15959445">étude épidémiologique ESEMed/MHEDEA</a> publiée en 2005. Les phobies spécifiques sont les plus fréquentes (11,6 %) suivies par l’anxiété généralisée (6 %), les phobies sociales (4,7 %), le trouble panique (3 %) et l’agoraphobie (1,8 %).</p>
<h2>Plus de femmes que d’hommes touchés</h2>
<p>Les études ont montré que les troubles débutaient chez l’adulte jeune (de 18 à 35 ans) et parfois même chez l’enfant (anxiété de séparation, phobie sociale…). Après une période de stabilisation au milieu de la vie, on note un nouveau pic à partir de 65 ans. Toutes les études montrent que les femmes sont deux fois plus touchées que les hommes. Cette particularité n’a pas d’explication unique et plusieurs hypothèses ont été avancées comme <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27856395">des particularités biologiques et hormonales</a>, des facteurs sociologiques (le rôle social des femmes) ou psychologiques (sensibilité).</p>
<p>Les troubles anxieux touchent toutes les catégories sociales et toutes les origines. L’anxiété semble plus fréquente dans les villes, comparativement à la campagne. On attribue cela <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21697947">au stress des villes</a> liés à l’urbanisation. La pollution également pourrait jouer un rôle sur le système neurobiologique de l’anxiété.</p>
<p>Pourquoi sommes-nous anxieux ? L’anxiété a longtemps été attribuée à une nature faible et émotive ou à un manque de volonté, avant qu’elle soit reconnue comme relevant de causes à la fois médicales et psychologiques qui restent à préciser.</p>
<h2>L’exagération d’un fonctionnement biologique normal ?</h2>
<p>Concernant la biologie, les chercheurs n’ont pas trouvé d’anomalie. Les chercheurs pensent plutôt à l’exagération d’un fonctionnement biologique normal. Aucun gène codant pour un neuromédiateur ou un enzyme impliqué dans la biologie de l’anxiété n’a été retrouvé.</p>
<p>Les nouvelles méthodes d’exploration du corps et du cerveau comme l’imagerie cérébrale (scanner, IRM), la neurobiologie et la génétique montrent des perturbations dans l’anxiété. Les structures du cerveau impliquées dans la réaction de peur seraient, dans l’anxiété, sensibilisées, comme montré <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27403679">dans cette étude publiée en 2016</a>.</p>
<p>L’intervention sur les facteurs de stress et leurs conséquences psychologiques reste donc la meilleure façon de prévenir, pour les personnes qui possèdent une vulnérabilité génétique, la survenue ou l’évolution d’un trouble anxieux.</p>
<p>Nous savons bien que l’anxiété ne peut s’expliquer uniquement par la biologie et l’hérédité. Il y a aussi des causes psychologiques comme les évènements de l’enfance, l’éducation et le vécu qui ont forgé notre personnalité. L’anxiété est une émotion fondamentale, nécessaire au développement de l’enfant, à la construction de sa personnalité et à son adaptation au monde et à ses dangers.</p>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/214798/original/file-20180413-570-1fjz66r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/214798/original/file-20180413-570-1fjz66r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/214798/original/file-20180413-570-1fjz66r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/214798/original/file-20180413-570-1fjz66r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/214798/original/file-20180413-570-1fjz66r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/214798/original/file-20180413-570-1fjz66r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/214798/original/file-20180413-570-1fjz66r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">On peut apprendre à accepter l’anxiété pour qu’elle ne soit plus un obstacle dans notre vie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/BUDr8KvVSzQ">Ian Espinosa/Unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Accepter l’anxiété, pour qu’elle ne soit plus un obstacle dans notre vie</h2>
<p>L’anxiété ne se soigne pas seulement, elle se maîtrise : on apprend à l’accepter pour qu’elle ne soit plus un obstacle dans notre vie. On peut agir sur sa propre anxiété. Quand on a une nature anxieuse, on ne va pas en changer mais peu à peu, on va réagir totalement différemment dans des circonstances dans lesquelles, auparavant, on alimentait la mécanique anxieuse. Avec le temps, on comprend mieux ses propres réactions.</p>
<p>Lorsque l’anxiété est plus forte et plus résistante, on pourra avoir recours <a href="https://theconversation.com/petit-guide-des-medicaments-a-lusage-des-anxieux-95001">à des traitements</a>. Les médicaments anxiolytiques soulagent transitoirement l’anxiété mais exposent à la dépendance. Comme traitement de fond, les antidépresseurs agissant comme un véritable filtre émotionnel sont recommandés. Il faut cependant limiter l’utilisation des médicaments et proposer d’autres méthodes tout aussi efficaces, particulièrement les psychothérapies.</p>
<p>On prescrit les médicaments quand il est nécessaire de soulager les symptômes et que ce n’est pas possible immédiatement par des moyens autres non, médicamenteux. Il ne faut pas considérer que ce n’est une fin en soi, il faut s’engager dans un autre traitement qui implique un engagement personnel comme les thérapies cognitives et comportementales (TCC). Les techniques de relaxation et de méditation permettent également de soulager les symptômes. <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/27717254">Les TCC</a> et la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/?term=Hofmann+SG%2C+Sawyer+AT%2C+Witt+AA%2C+Oh+D">méditation de pleine conscience</a> ont une efficacité équivalente aux médicaments avec l’avantage d’une meilleure stabilité dans leurs effets. Ils évitent aussi la rechute.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/95014/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dominique Servant ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’anxiété est une réaction qui facilite notre adaptation à une situation nouvelle. Mais lorsqu’elle est trop intense, elle devient paralysante. Plusieurs signes permettent d’en évaluer le niveau.Dominique Servant, Psychiatre, responsable de l’unité stress et anxiété du CHRU de Lille, directeur d'enseignement, Université de Lille - initiative d'excellenceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/965002018-05-13T19:55:50Z2018-05-13T19:55:50ZLe yoga peut-il aider à faire face aux troubles psychiques ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/218655/original/file-20180512-52177-asmj2n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C351%2C5105%2C3041&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption"></span> <span class="attribution"><span class="source">Brenkee/Pixabay</span></span></figcaption></figure><p>Si vous avez visité une grande ville dans le monde au cours des 10 ou 20 dernières années, vous avez peut-être remarqué l’incroyable poussée du yoga dans le domaine de la santé. Le yoga n’est plus perçu comme une activité seulement récréative, mais comme un moyen de renforcer et de maintenir la santé : <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26497261">environ 31 millions d’adultes américains (plus de 13 %)</a> ont utilisé le yoga pour cette raison, et des données comparables sont disponibles pour l’Europe et l’Australie.</p>
<p>Des essais cliniques ont montré que le yoga soulage la douleur en étirant les muscles et en alignant la posture, abaisse la tension artérielle en rééquilibrant le système nerveux autonome et réduit l’inflammation en régulant le stress chronique. Ces derniers temps, le yoga est de plus en plus perçu non seulement comme un moyen de réduire le stress et d’améliorer la forme physique, mais aussi de surmonter la souffrance mentale.</p>
<p>Cela ne devrait pas vraiment être une surprise : il y a environ 2 000 ans, le sage indien Patanjali, le « grand-père » du yoga moderne, définissait le yoga comme « le contrôle des fluctuations de l’esprit ». Au-delà du spirituel, il existe des preuves scientifiques fiables et des mécanismes clairs par lesquels le yoga pourrait aider dans le cas des symptômes de troubles mentaux.</p>
<h2>Stress post-traumatique</h2>
<p>Le trouble de stress post-traumatique (TSPT) est un problème majeur de santé publique affectant jusqu’à <a href="http://assets.cambridge.org/97805218/84198/frontmatter/9780521884198_frontmatter.pdf">6 % de la population mondiale</a>. Le TSPT résulte d’expériences traumatisantes importantes rencontrées beaucoup plus fréquemment chez les anciens combattants, les survivants de guerres ou de catastrophes naturelles et les victimes de violence. Le trouble est caractérisé par la réexpérience, l’évitement et l’hyperréactivité. Le TSPT est associé à une structure cérébrale appelée amygdale qui relie la mémoire de certaines expériences aux émotions – dans le cas du TSPT, l’amygdale est suractivée et produit ainsi constamment les symptômes susmentionnés.</p>
<p>En augmentant l’activité <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_nerveux_parasympathique">parasympathique</a>, le yoga réduit les effets du stress : c’est la réponse de relaxation qui <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22365651">pourrait également réduire directement</a> l’activité de l’amygdale. Cela semble être le cas notamment avec les méthodes de respiration yogiques telles que la respiration alternée des narines. D’un point de vue psychologique, le TSPT est caractérisé par le paradoxe suivant : les patients se sentent anxieux quant à l’avenir, bien que l’événement traumatique soit passé. Ceci est principalement provoqué par une surgénéralisation des expériences passées et une évaluation négative des actions personnelles, de celles des autres, ainsi que des perspectives de vie.</p>
<p>Le yoga, comprenant des aspects de pleine conscience, c’est-à-dire une attention ouverte, y compris aux émotions ou aux souvenirs désagréables, est de nature à augmenter la régulation des émotions, bien mieux que l’évitement. La conscience consciente de la nature transitoire de son expérience physique, sensorielle, et émotionnelle momentanée au cours de la pratique du yoga est <a href="http://www.aolresearch.org/pdf/Descilo_et_al_2009.pdf">supposée conduire à un changement dans l’auto-évaluation de soi</a>, réduisant ainsi les symptômes du TSPT.</p>
<p>Des études sur les deux Amériques et en Australie ont convié des vétérans ainsi que d’autres personnes ayant des expériences traumatisantes et les ont orientés au hasard soit vers des sessions de yoga réparties sur des périodes de plusieurs semaines à plusieurs mois, soit vers des groupes de contrôle pas traités du tout ou qui ont reçu de simples conseils de santé. Dans une méta-analyse de ces études, <a href="https://bmcpsychiatry.biomedcentral.com/articles/10.1186/s12888-018-1650-x">mes collègues et moi-même avons pu démontrer</a> que les participants qui pratiquaient le yoga présentaient une réduction beaucoup plus forte et cliniquement significative de leurs symptômes – même si le style de yoga n’était pas spécifiquement conçu pour les participants atteints de TSPT.</p>
<h2>Peur et anxiété</h2>
<p>D’autres études ont ciblé les troubles anxieux. L’anxiété est une réponse normale à des situations ou des événements spécifiques. Sans anxiété, l’humanité n’aurait sûrement pas survécu. Cependant, une peur ou une anxiété excessive peut indiquer un trouble anxieux. Dans le trouble anxieux généralisé (TAG), par exemple, des niveaux élevés d’anxiété, associés à des problèmes de santé, de relations, de travail et de finances, entraînent une grande variété de symptômes physiques et de changements de comportement. On estime qu’à lui seul, le <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/psychological-medicine/article/social-anxiety-disorder-and-alcohol-use-disorder-comorbidity-in-the-national-epidemiologic-survey-on-alcohol-and-related-conditions/D2E84E6B59EB8023D6C3DD162874630D">TAG</a> touche 4 % de la population aux États-Unis.</p>
<p>L’anxiété excessive a également des conséquences sur la santé à long terme, les symptômes somatiques de l’anxiété comme les palpitations et les battements cardiaques irréguliers étant associés à un <a href="http://www.scirp.org/journal/PaperInformation.aspx?PaperID=46638">risque accru de maladie cardiovasculaire</a>. Il est intéressant de constater que traiter l’anxiété est l’une des principales motivations que les gens mentionnent pour la pratique du yoga. Là encore, la vigilance semble jouer un rôle clé : les patients atteints de TAG <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25012409">sont moins « conscients » que la moyenne de la population générale</a>, ce qui indique que le travail corporel, la respiration et la méditation peuvent aider en « contrôlant les fluctuations » de l’esprit.</p>
<p>Mais ce sont surtout les techniques de respiration yogiques qui sont les <a href="https://www.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/da.22166/">plus efficaces pour traiter les troubles mentaux</a>, bien plus que les postures de yoga bien connues. Il est d’ailleurs intéressant de noter que les troubles anxieux <a href="https://scholars.houstonmethodist.org/en/publications/surprisingly-high-prevalence-of-anxiety-and-depression-in-chronic-breathing-disorders(d9ff71de-d70b-40ae-b115-9e32cc1e3a61).html">sont plus fréquents</a> chez les patients souffrant de troubles respiratoires tels que l’asthme ou la broncho-pneumopathie chronique obstructive et que la rééducation respiratoire a été une partie essentielle de nombreuses approches de thérapie cognitivo-comportementale pour les troubles anxieux.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/218656/original/file-20180512-34015-1cgwv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/218656/original/file-20180512-34015-1cgwv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/218656/original/file-20180512-34015-1cgwv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/218656/original/file-20180512-34015-1cgwv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/218656/original/file-20180512-34015-1cgwv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/218656/original/file-20180512-34015-1cgwv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/218656/original/file-20180512-34015-1cgwv7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Thérapie avec yoga dans un hôpital militaire américain.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:US_Navy_090702-N-1783P-003_Hospital_Corpsman_1st_Class_Guy_Duke,_left,_and_Electronics_Technician_3rd_Class_Joshua_Benedict_demonstrate_how_the_Physical_therapy_Department_at_Naval_Health_Clinic,_Charleston_use_the_Wii_Fit%27s_yoga.jpg">US Navy/Juan Pinalez</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Notre équipe a aussi analysé dans une autre méta-analyse les effets du yoga sur les troubles anxieux, y compris le TAG ou la phobie. Les résultats sont souvent positifs, toutefois la plupart des études sont assez anciennes et ne répondent pas aux exigences de la science moderne, de <a href="https://www.researchgate.net/publication/7463321_Yoga_for_anxiety_A_systematic_review_of_the_research_evidence">sorte qu’il est urgent de les reproduire</a>. Reste que le soulagement des symptômes d’anxiété chez les personnes en bonne santé est globalement avéré, aussi bien pour la peur quotidienne diffuse que pour l’anxiété liée à un examen ou à la performance chez les musiciens.</p>
<p>Ainsi, il est clair que le yoga peut aider à soulager les symptômes liés au traumatisme et l’anxiété, et que les exercices de respiration représentent le mécanisme principal par lequel il opère. Pour l’anxiété quotidienne mineure, les techniques de respiration yogiques simples valent la peine d’être essayées comme stratégie personnelle de soin. En revanche les patients atteints de troubles mentaux ne devraient pas pratiquer le yoga par eux-mêmes, avant d’avoir consulté leur psychiatre et leur psychothérapeute.</p>
<hr>
<p><em>Holger Cramer interviendra toute la journée avec d’autres intervenants au <a href="http://www.yogaetsante.org">« Symposium Yoga et Santé »</a> le 18 mai 2018 à la Cité des Sciences de Paris.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/96500/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Holger Cramer participe au Symposium Yoga et santé mentionné dans l'article.</span></em></p>Il existe des preuves scientifiques fiables par lesquels le yoga pourrait aider les individus souffrant de troubles mentaux.Holger Cramer, Directeur de recherches, médecine interne et intégrative, University of Duisburg-EssenLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/950012018-04-22T19:39:48Z2018-04-22T19:39:48ZPetit guide des médicaments à l’usage des anxieux<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/214729/original/file-20180413-566-yzwwt8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C189%2C5988%2C3647&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les troubles anxieux touchent une personne sur cinq. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/yy3GonY48N0">Ben White/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p><em>Notre auteur, psychiatre et directeur d’enseignement à l’université Lille Nord Europe, consulte et enseigne sur le traitement de l’anxiété depuis 25 ans. Dominique Servant n’est pas un adepte des médicaments, mais il les connaît bien et les remet à leur juste place. « L’anxiété ne se soigne pas seulement, elle se maîtrise : on apprend à l’accepter pour qu’elle ne soit plus un obstacle dans notre vie », écrit-il dans <a href="https://www.tallandier.com/livre-9791021026254.htm"><em>Se libérer de l’anxiété et des phobies en 100 questions</em></a> (éditions Tallandier), l’ouvrage dont nous publions ci-dessous un extrait</em>.</p>
<hr>
<p>Nous ressentons tous une <a href="https://theconversation.com/fr/topics/anxiete-30927">anxiété</a> face aux incertitudes et aux peurs de l’existence. Nous avons peur de tomber malade, de perdre des êtres chers, nous devons faire face à l’incertitude. L’anxiété est normale, et l’on peut considérer qu’elle joue un certain rôle dans notre capacité à nous adapter à ce qui nous arrive.</p>
<p>Mais pour beaucoup d’entre nous, l’anxiété n’est plus raisonnable, elle n’obéit plus à la logique, elle devient envahissante et nous rend vulnérables. Il nous est alors difficile de trouver le sommeil, de nous concentrer. Notre esprit s’accroche à des pensées que nous n’arrivons pas à mettre à distance de notre cerveau. Elle se dresse devant nous sans prévenir, et tout d’un coup la panique s’abat sur nous. Nos proches ne comprennent pas toujours cette souffrance qui ne relève pas d’une anomalie observable ou d’un problème concret. Mais l’anxiété est bien là et nous gâche la vie.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/214731/original/file-20180413-127631-1sihsoa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/214731/original/file-20180413-127631-1sihsoa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/214731/original/file-20180413-127631-1sihsoa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/214731/original/file-20180413-127631-1sihsoa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/214731/original/file-20180413-127631-1sihsoa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/214731/original/file-20180413-127631-1sihsoa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/214731/original/file-20180413-127631-1sihsoa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/ZC0EbdLC8G0">Stefano Pollio/Unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>On distingue les <a href="http://www.psycom.org/Espace-Presse/Sante-mentale-de-A-a-Z/Anxiete">troubles anxieux</a> de l’anxiété normale par la présence de plusieurs symptômes intenses, durables, qui entraînent un vrai mal-être et une gêne dans la vie de tous les jours, dans le travail ou les loisirs. Ces troubles touchent environ une personne sur cinq.</p>
<h2>Les médicaments, pas une fin en soi</h2>
<p>On prescrit des médicaments pour soulager les symptômes s’il n’est pas possible immédiatement de le faire par des moyens non médicamenteux. Les médicaments ne sont pas une fin en soi. Il est nécessaire de s’engager en parallèle dans un autre traitement impliquant un engagement personnel comme les <a href="http://www.aftcc.org/">thérapies comportementales et cognitives</a> (TCC). Les études montrent en effet que leur efficacité est comparable à celle des antidépresseurs sur le court terme (deux à trois mois) et qu’elle est supérieure sur le long terme (un an et plus). Avec les techniques de relaxation, cet ensemble alternatif ou complémentaire permettra de soulager les symptômes. Il a une efficacité équivalente aux médicaments, avec l’avantage de mieux éviter la rechute et de ne pas provoquer de dépendance.</p>
<p>Deux principales classes de médicaments sont indiquées dans l’anxiété et les troubles anxieux : les <a href="http://www.psycom.org/Medicaments-psychotropes/Medicaments-psychotropes/Anxiolytiques">anxiolytiques</a> et – cela peut paraître surprenant – les <a href="http://www.psycom.org/Medicaments-psychotropes/Medicaments-psychotropes/Antidepresseurs">antidépresseurs</a>, qui sont avant tout prescrits pour la dépression. Les autorités sanitaires ont accordé depuis les années 2000 aux antidépresseurs l’autorisation de mise sur le marché (AMM) pour le traitement de fond des troubles anxieux dits caractérisés (c’est-à-dire bien définis par des critères diagnostiques). En fait, si les deux types de médicaments peuvent l’un et l’autre être utilisés, ils n’ont pas les mêmes indications, et les effets recherchés ne sont pas tout à fait les mêmes.</p>
<p>Les anxiolytiques ne doivent pas être prescrits dans le traitement de fond. Ils sont indiqués dans le traitement symptomatique de l’anxiété, pour des périodes courtes d’exacerbation anxieuse. Leur prescription est en théorie (si l’on suit les recommandations) limitée à douze semaines, sevrage inclus. Autant dire que beaucoup de personnes sortent complètement de ce cadre.</p>
<p>Les anxiolytiques appartiennent principalement à la classe des benzodiazépines. Ils sont aujourd’hui essentiellement prescrits sous leur forme générique, c’est-à-dire sous le nom de la molécule chimique. Voici une liste de benzodiazépines commercialisées en France par nom de marque (la molécule, c’est-à-dire le nom générique, est entre parenthèses) : Lexomil (Bromazépam), Lysanxia (Prazépam), Nordaz (Nordazépam), Seresta (Oxazépam), Temesta (Lorazépam), Tranxène (Clorazépate dipotassique), Urbanyl (Clobazam), Valium (Diazépam), Veratran (Clotiazépam), Victan (Loflazépate d’éthyle), Xanax (Alprazolam).</p>
<p>D’autres anxiolytiques qui appartiennent à d’autres classes chimiques que les benzodiazépines sont utilisés. Ce sont les médicaments suivants : Atarax (Hydroxyzine), Stresam (Etifoxine), pour l’indication de « manifestations psychosomatiques de l’anxiété », et moins fréquemment : Buspar (Buspirone).</p>
<h2>Les antidépresseurs en traitement de fond des troubles anxieux</h2>
<p>Les antidépresseurs utilisés depuis plusieurs décennies dans les cas de dépressions ont été autorisés comme traitement de fond des troubles anxieux. Ils agissent comme une sorte de filtre des émotions négatives. Ils sont indiqués dans les différents troubles anxieux et ils ont remplacé les benzodiazépines comme traitement de fond.</p>
<p>Il existe deux classes d’antidépresseurs de nouvelle génération, distinguées selon leur mécanisme d’action sur les deux principaux neuromédiateurs impliqués dans l’anxiété, la sérotonine et la noradrénaline. Ce sont les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) : Deroxat (Paroxétine), Fluoxétine (Prozac), Seroplex (Escitalopram), Zoloft (Sertraline) ; et les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNA) : Cymbalta (Duloxétine), Effexor (Venlafaxine).</p>
<p>On débutera les antidépresseurs à demi-dose pendant trois à cinq jours, puis à dose efficace minimum (le plus souvent un comprimé/jour en une prise). Au bout de quatre à six semaines, on évaluera l’efficacité et l’on pourra augmenter les doses si l’effet est insuffisant. On augmente généralement d’un demi-comprimé pour doubler la dose. Les résultats des études montrent 50 à 75 % de réponse positive environ à trois mois pour les troubles anxieux, contre 35 à 50 % de réponse placebo, ce qui est assez élevé dans cette indication et montre bien l’effet bénéfique de la prise en charge et du simple fait de prescrire un remède.</p>
<p>À douze semaines, s’il n’y a pas d’efficacité, on pourra changer d’antidépresseur, car comme pour d’autres traitements (par exemple les antihypertenseurs), un médicament peut être plus ou moins efficace pour chaque patient. Une fois les symptômes anxieux stabilisés, on considère qu’il faut maintenir les antidépresseurs pendant six mois ou un an, parfois plus dans des formes plus sévères, récidivantes ou compliquées de dépressions. Il n’y a pas vraiment de preuves scientifiques concernant la durée du traitement.</p>
<h2>Phytothérapie, homéopathie, compléments alimentaires</h2>
<p>À côté de ces deux types de médicaments dits allopathiques, d’autres médicaments peuvent être utilisés comme les médicaments à base de plantes (phytothérapie), homéopathiques, et des compléments alimentaires. Ils sont considérés comme des traitements complémentaires de l’anxiété mineure et n’ont pas fait la preuve de leur efficacité dans les troubles anxieux.</p>
<p>Pour trois troubles anxieux, l’efficacité des médicaments allopathiques proposés (antidépresseurs et anxiolytiques, principalement benzodiazépines) a été démontrée par des essais thérapeutiques : anxiété généralisée, trouble panique et anxiété sociale. Il y a peu d’études qui comparent médicaments et psychothérapie. Ces médicaments ont des effets secondaires.</p>
<p>Schématiquement, les recommandations de la Haute Autorité de santé concernant les traitements médicamenteux pour chaque trouble sont les suivantes :</p>
<ul>
<li><p>Attaques de panique (trouble panique avec ou sans agoraphobie) : Deroxat (Paroxétine), Effexor (Venlafaxine), Seroplex (Escitalopram), Seropram (Citalopram), Zoloft (Sertraline).</p></li>
<li><p>Anxiété généralisée (inquiétude quasi permanente touchant tous les domaines de la vie) en traitement de fond : Cymbalta (Duloxétine), Deroxat (Paroxétine), Effexor (Venlafaxine), Seroplex (Escitalopram).</p></li>
<li><p>Phobie spécifique (concernant un objet ou une situation précise : peur des araignées, de l’avion, <a href="https://theconversation.com/phobie-jai-peur-de-conduire-89597">peur de conduire</a>…) : aucun traitement n’a apporté la preuve de son efficacité, et aucun médicament n’a obtenu l’AMM.</p></li>
</ul>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/214712/original/file-20180413-587-1eda5tq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/214712/original/file-20180413-587-1eda5tq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/214712/original/file-20180413-587-1eda5tq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=781&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/214712/original/file-20180413-587-1eda5tq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=781&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/214712/original/file-20180413-587-1eda5tq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=781&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/214712/original/file-20180413-587-1eda5tq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=982&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/214712/original/file-20180413-587-1eda5tq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=982&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/214712/original/file-20180413-587-1eda5tq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=982&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Couverture du livre paru aux éditions Tallandier, le 12 avril 2018.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Tallandier</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<ul>
<li><p>Anxiété sociale : le traitement recommandé (Paroxétine) est très critiqué. Il s’agit probablement d’une médicalisation excessive d’un trait de caractère. Il est bien spécifié que l’anxiété sociale ne doit en rien être confondue avec la timidité. En traitement de fond, les antidépresseurs doivent être réservés aux formes sévères avec retentissement important sur la vie professionnelle ou personnelle. Leur efficacité est relative. Ceux ayant l’AMM en France sont les suivants : Deroxat (Paroxétine), Effexor (Venlafaxine), Seroplex (Escitalopram), Seropram (Citalopram), Zoloft (Sertraline). Les benzodiazépines peuvent être prescrits en association avec le traitement de fond sur de courtes durées en cas d’anxiété aiguë invalidante. De façon ponctuelle, le Propranolol (bêta-bloquant) peut être utilisé pour des situations d’anxiété de performance, comme un entretien d’embauche.</p></li>
<li><p>Trouble de l’adaptation avec anxiété (survenant à la suite d’un événement de vie difficile) : il n’y a pas d’AMM. Compte tenu du caractère transitoire du stress, on pourra s’orienter vers un anxiolytique s’il faut vraiment un traitement. Le Stresam (Etifoxine) qui n’a pas l’AMM peut être une alternative aux benzodiazépines pour éviter la dépendance.</p></li>
<li><p>Syndrome de <a href="https://theconversation.com/quel-risque-de-developper-un-etat-de-stress-post-traumatique-a-la-suite-dun-attentat-50734">stress post-traumatique</a> : deux antidépresseurs ont obtenu l’AMM, Deroxat (Paroxétine) et Zoloft (Sertraline).</p></li>
</ul><img src="https://counter.theconversation.com/content/95001/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dominique Servant ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Il est difficile de vivre, au quotidien, avec un niveau élevé de peur. Si les médicaments ne sont pas la meilleure façon de surmonter l’anxiété ou les phobies, ils peuvent cependant jouer leur rôle.Dominique Servant, Psychiatre, responsable de l’unité stress et anxiété du CHRU de Lille, directeur d'enseignement, Université de Lille - initiative d'excellenceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/933942018-03-21T20:44:15Z2018-03-21T20:44:15ZPourquoi nos ressorts psychologiques sont aussi culturels<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/211196/original/file-20180320-31599-1pp8xxj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C19%2C1020%2C564&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">A Kyoto, deux Geisha – une Geiko et une Maiko (apprentie Geisha).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/enerva/18901592534">Sonny Abesamis/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La <a href="https://theconversation.com/fr/topics/psychologie-21636">psychologie</a>, en tant que discipline universitaire, <a href="https://web.archive.org/web/20070203084413/http://shp.yorku.ca/">a été largement développée</a> en Amérique du Nord et en Europe. D’aucuns considèrent qu’elle nous permet de comprendre ce qui motive nos comportements et nos processus mentaux, que l’on a longtemps considérés comme universels. Mais au cours des dernières décennies, certains chercheurs ont commencé à <a href="https://uk.sagepub.com/en-gb/eur/understanding-social-psychology-across-cultures/book240293">remettre en question cette approche</a>, faisant valoir que de nombreux phénomènes psychologiques sont façonnés par la culture dans laquelle nous vivons.</p>
<p>Bien sûr, les humains, où qu’ils vivent, sont très semblables – après tout, nous partageons la même physiologie et éprouvons les mêmes besoins, qu’il s’agisse d’alimentation, de sécurité ou de sexualité. Quelle influence la culture peut-elle bien avoir sur les aspects fondamentaux de notre psychisme, tels que la perception, la cognition et la personnalité ?</p>
<p>Les chercheurs en psychologie, à travers leurs expériences, étudient généralement le comportement d’un petit groupe de personnes, en partant du principe qu’il peut être généralisé à l’ensemble de la population humaine. Si l’on considère que la population est homogène, de telles inférences peuvent en effet être faites à partir d’un échantillon aléatoire.</p>
<p>Cependant, ce n’est pas le cas. Depuis longtemps, les chercheurs en psychologie mènent leurs études en expérimentant, la plupart du temps, sur des groupes composés d’étudiants de premier cycle, tout simplement parce qu’ils sont une ressource proche et disponible. Plus spectaculaire encore, <a href="https://doi.org/10.1017/S0140525X0999152X">plus de 90 % de ceux qui participent</a> à des expériences en psychologie viennent de pays occidentaux, éduqués, industrialisés, riches et démocratiques. Il est évident que ces pays ne représentent pas un échantillon aléatoire ni représentatif de la population humaine.</p>
<h2>Styles de pensée</h2>
<p><a href="http://dx.doi.org/10.1037/0022-3514.87.1.57">Un panda, un singe et une banane</a>. D’après vous, dans cette liste, quels éléments font la paire ? Les répondants des pays occidentaux choisissent couramment le singe et le panda, parce que les deux sont des animaux. Il s’agit d’un style de pensée analytique, dans lequel les objets sont perçus indépendamment de leur contexte.</p>
<p>En revanche, les participants des pays orientaux choisissent souvent le singe et la banane, parce que ces objets appartiennent au même environnement et partagent une relation (les singes mangent des bananes). Il s’agit d’un style de pensée holistique, dans lequel l’objet et le contexte sont perçus comme étant interconnectés.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/208501/original/file-20180301-152555-sjmht6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/208501/original/file-20180301-152555-sjmht6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/208501/original/file-20180301-152555-sjmht6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/208501/original/file-20180301-152555-sjmht6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/208501/original/file-20180301-152555-sjmht6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/208501/original/file-20180301-152555-sjmht6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/208501/original/file-20180301-152555-sjmht6.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">En Inde comme dans la plupart des cultures asiatiques, la pensée holistique domine.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Biswarup Ganguly/Wikipedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans une <a href="http://dx.doi.org/10.1037/0022-3514.81.5.922">étude bien connue</a> des différences culturelles associées à différents styles de pensée, on a présenté à des Japonais et à des Américains une série de scènes animées. D’une durée d’environ 20 secondes, chaque scène montrait diverses créatures aquatiques, de la végétation et des roches, dans un décor sous-marin. Après cela, on demandait aux deux groupes de se remémorer ce qu’ils avaient vu. Les deux groupes de participants se souvenaient des objets les plus marquants, à savoir les plus gros poissons. Mais les <a href="https://books.google.co.uk/books?id=525HX623L_cC&printsec=frontcover&redir_esc=y#v=onepage&q&f=false">Japonais étaient plus aptes à se remémorer des éléments de l’arrière-plan que les Américains</a>. Ils avaient noté, par exemple, la couleur de l’eau. En effet, leur style de pensée holistique se concentre à la fois sur l’arrière-plan et le contexte, et sur le premier plan.</p>
<p>Cela démontre clairement comment les différences culturelles peuvent affecter quelque chose d’aussi fondamental que notre mémoire – toute théorie sur la mémoire devrait logiquement en tenir compte. Des études ultérieures ont montré que les différences culturelles qui influencent les styles de pensée sont omniprésentes dans la cognition – elles affectent la mémoire, l’attention, la perception, le raisonnement et la façon dont nous parlons et pensons.</p>
<h2>On ne se décrit pas de la même façon en Occident et en Asie</h2>
<p>Si on vous demandait de vous décrire, que diriez-vous ? Vous décririez-vous en termes de caractéristiques personnelles – intelligence, humour – ou mentionneriez-vous des préférences, comme « J’adore la pizza » ? Ou peut-être seriez-vous plus enclin à parler de votre position sociale, en disant « J’ai un enfant » ?</p>
<p>Les psychologues sociaux soutiennent depuis longtemps que les gens sont beaucoup plus susceptibles de se décrire et de décrire les autres en termes de <a href="http://psycnet.apa.org/fulltext/1995-17405-001.html">caractéristiques personnelles stables</a>. Cependant, la façon dont les gens se décrivent semble étroitement liée à leur culture.</p>
<p>Les individus du monde occidental sont en effet plus susceptibles de se considérer comme des individus libres, autonomes et uniques, possédant un ensemble de caractéristiques fixes. Mais dans de nombreuses autres parties du monde, les gens se décrivent avant tout comme faisant partie intégrante de différentes relations sociales et fortement liés les uns aux autres. Ce phénomène est plus répandu en <a href="http://doi.apa.org/journals/psp/56/1/124.html">Asie</a>, en <a href="https://doi.org/10.1207/s15324834basp1902_7">Afrique</a> et en Amérique latine. Ces différences sont liées à d’autres façons d’aborder les relations sociales, la motivation et l’éducation.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/208499/original/file-20180301-152572-14ouvax.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/208499/original/file-20180301-152572-14ouvax.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/208499/original/file-20180301-152572-14ouvax.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/208499/original/file-20180301-152572-14ouvax.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/208499/original/file-20180301-152572-14ouvax.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/208499/original/file-20180301-152572-14ouvax.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/208499/original/file-20180301-152572-14ouvax.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les Zoulous se pensent avant tout en relation avec les autres.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/south-african-tourism/20325264550">South African Tourism/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cette différence dans la construction de l’identité a même été <a href="https://www.researchgate.net/publication/232558390_Culture_and_the_Self_Implications_for_Cognition_Emotion_and_Motivation">démontrée au niveau du cerveau</a>. Dans une étude par imagerie cérébrale (IRMf), on a montré des qualificatifs à des participants chinois et américains et on leur a demandé dans quelle mesure ils se reconnaissaient dans ces traits de caractère. On leur a également demandé de réfléchir à la façon dont ils se représentaient leur mère (les mères ne faisant pas partie de l’échantillon étudié), tandis que leur activité cérébrale était observée grâce au scanner.</p>
<p>Dans les réponses cérébrales des participants américains, on observait dans le cortex préfrontal médian – une région du cerveau habituellement associée aux représentations de soi – une nette différence entre la représentation de soi et la représentation de leur mère. Cependant, chez les participants chinois, <a href="https://doi.org/10.1016/j.neuroimage.2006.08.047">il y avait peu ou pas de différence</a> entre la représentation de soi et celle de leur mère, ce qui signifie que la représentation de soi recoupe en grande partie la représentation que l’on se fait du proche parent.</p>
<h2>La modestie peut être considérée comme de la phobie sociale dans une autre culture</h2>
<p>De même, la culture peut affecter notre compréhension de la santé mentale de multiples façons. En raison de l’existence de différences culturelles affectant le comportement des personnes, notre cadre de réflexion habituel – fondé sur la détection des comportements déviants ou non normatifs – est incomplet. Car ce qui peut être considéré comme normal dans une culture (par exemple la modestie) peut être considéré comme déviant de la norme dans une autre (et qualifié, à la place, de phobie sociale).</p>
<p>Un certain nombre de syndromes sont d’ailleurs spécifiques à une culture donnée. Par exemple, le <a href="http://www.medicaldaily.com/koro-syndrome-genital-retraction-fear-242674">syndrome de Koro</a> (surtout en Asie) touche des hommes qui croient à tort que leur pénis se rétracte et va disparaître. Le terme de <a href="http://www.bbc.co.uk/news/magazine-23182523">Hikikomori</a> (surtout au Japon) décrit quant à lui les individus solitaires qui se retirent de la vie sociale. Ailleurs, le syndrome du <a href="http://anthropology.msu.edu/anp204-us14/2014/07/14/evil-eye-in-the-mexican-and-central-american-culture/">mauvais œil</a> (surtout dans les pays méditerranéens) consiste à croire que la jalousie ou le simple fait d’envoyer un regard noir à autrui peuvent causer des malheurs à celui qui en fait les frais.</p>
<p>L’Organisation mondiale de la santé et l’Association américaine de psychiatrie ont récemment reconnu l’existence de certains de ces syndromes <a href="http://www.who.int/classifications/icd/en/bluebook.pdf">liés à une culture particulière</a>, en les incluant dans leurs classifications des maladies mentales.</p>
<p>Il est évident que la culture joue un rôle dans la façon dont nous nous percevons nous-mêmes et dont nous sommes perçus par les autres – pour l’instant, nous avons à peine commencé à explorer ce champ de connaissances. Ce domaine, connu sous le nom de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Psychologie_interculturelle">« psychologie interculturelle comparative »</a> (<em>cross-cultural psychology</em>), est de plus en plus enseigné dans les universités du monde entier. La question est de savoir dans quelle mesure elle changera la psychologie telle que nous la connaissons aujourd’hui – certains la considèrent en effet comme une dimension supplémentaire, tandis que d’autres la voient comme un élément central de l’élaboration de la théorie en psychologie.</p>
<p>En poussant plus loin nos investigations dans cette direction, nous pourrions bien constater que les différences culturelles s’étendent à de nombreux autres domaines dans lesquels le comportement humain était auparavant considéré comme universel. C’est à cette seule condition que nous serons peut-être capables, un jour, d’identifier ce qui relève de l’universel dans l’esprit humain.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/93394/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nicolas Geeraert a reçu des financements de l'ESRC et de la British Academy.</span></em></p>De nombreux phénomènes psychologiques sont façonnés par la culture dans laquelle nous vivons. La modestie sera vue comme une qualité pour les uns, tandis que les autres parleront de phobie sociale.Nicolas Geeraert, Senior lecturer, University of EssexLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/895972018-01-03T22:45:24Z2018-01-03T22:45:24ZPhobie : « J’ai peur de conduire »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/200582/original/file-20180102-26139-18vfcsk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">On peut être stressé au volant en raison d'une anxiété plus générale, du souvenir d'un accident ou bien de la crainte de commettre une faute sur la route. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/Q_Wg5fE_F5A">ezra jeffrey/unsplash</a></span></figcaption></figure><p><em>« Je n’ai rien contre les psys, et pour cause ! » écrit notre auteur, professeur de psychiatrie, en préambule de son livre <a href="https://editions.flammarion.com/Catalogue/hors-collection/psychologie-et-developpement-personnel/vous-etes-votre-meilleur-psy!"><em>Vous êtes votre meilleur psy !</em></a> (éditions Flammarion). Il a rassemblé dans cet ouvrage des principes dont l’efficacité est scientifiquement reconnue et que l’on peut appliquer par soi-même pour surmonter certaines difficultés. L’extrait que nous publions ci-dessous porte sur le stress au volant.</em></p>
<p>On trouve des noms exotiques et improbables pour toutes <a href="http://www.psycom.org/Espace-Presse/Sante-mentale-de-A-a-Z/Phobies">les phobies</a>. L’amaxophobie est de ceux-là, et désigne une crainte bien plus fréquente que ce que l’on imagine : la peur de conduire un véhicule. </p>
<p>Difficile de connaître son étendue car il n’y a pas d’enquête rigoureuse sur la question. Beaucoup de personnes n’en parlent pas, par gêne ou même par honte.
Plusieurs cas de figure sont possibles. On trouve des personnes qui ont passé le permis avec difficulté et n’ont jamais conduit régulièrement ou en se limitant à de très courts trajets ; des conducteurs aguerris qui, parfois sans raison évidente, commencent à avoir peur de conduire assez soudainement à un moment donné ; des personnes âgées qui redoutent progressivement la conduite automobile.</p>
<p>Le handicap peut être léger ; on parvient malgré tout à prendre la route dans la vie de tous les jours. Parfois, il est nettement plus lourd : la conduite est totalement impossible. Dans tous les cas, des solutions existent pour surmonter cette crainte.</p>
<h2>Une crainte moins absurde que d’autres</h2>
<p>Si <a href="https://theconversation.com/fr/topics/phobies-25944">certaines phobies</a> paraissent absolument irraisonnées et incompréhensibles, comme celles des papillons ou des poupées, la peur de conduire ne repose pas sur rien : c’est une activité à risque, qui nécessite un savoir-faire et une attention soutenue. Chaque année, le nombre d’accidents de la route est là pour nous le rappeler. </p>
<p>La peur de conduire est donc compréhensible, mais elle devient moins rationnelle et plus problématique quand elle empêche de se déplacer alors que l’on dispose des compétences normales pour le faire. L’apprentissage, l’expérience et des précautions adaptées à la situation doivent permettre de maîtriser les risques.</p>
<p>Plusieurs types de causes existent.</p>
<ol>
<li><p>Un manque de confiance en soi et une <a href="http://www.psycom.org/Espace-Presse/Sante-mentale-de-A-a-Z/Anxiete">anxiété</a> importante qui font redouter le pire.</p></li>
<li><p>Le souvenir traumatisant d’un accident qu’on a soi-même vécu, ou auquel on a assisté, qui crée l’équivalent d’une phobie post-traumatique.</p></li>
<li><p>Une peur proche de l’agoraphobie, c’est-à-dire l’anticipation d’un malaise au volant, ou d’un incident aggravé du fait de la situation de « blocage » dans le véhicule, notamment dans un embouteillage, un tunnel, un pont, une autoroute, etc.</p></li>
<li><p>Des craintes proches des troubles obsessionnels-compulsifs : peur de commettre une faute et de provoquer un accident grave sans s’en apercevoir, ou peur d’avoir une impulsion dangereuse pour soi ou pour les autres (phobies d’impulsion).</p></li>
</ol>
<p>En général, l’un ou l’autre de ces motifs d’anxiété est au premier plan, parfois plusieurs sont associés. Une personne anxieuse et peu sûre d’elle au volant sera nettement plus déstabilisée par un accident vécu, même peu grave, qu’un conducteur jusque-là très confiant.</p>
<p>Le stress de la conduite se traduit généralement par des accès d’affolement voire de panique. Le déclencheur ? Des incidents assez mineurs, comme un problème au redémarrage après un stop ou un feu rouge (la voiture qui cale), une hésitation entre deux routes à un carrefour, ou une voiture un peu pressante derrière vous. Ces pics de stress peuvent compliquer la conduite en absorbant l’attention disponible et en perturbant un peu les gestes, même si les réflexes essentiels sont le plus souvent conservés. Un cercle vicieux s’installe, l’anxiété et ses conséquences devenant en elles-mêmes un motif d’inquiétude supplémentaire : « Je vais perdre mes moyens, donc c’est dangereux ».</p>
<h2>La spirale de l’évitement</h2>
<p>Le renforcement de la peur par les évitements est un mécanisme constant, et souvent l’élément principal du problème. Ne pas se confronter à une situation redoutée accentue le réflexe de peur. Pour la conduite automobile, qui est un savoir-faire complexe, ce mécanisme très basique est aggravé par une perte de confiance en soi (« Je n’ai plus l’habitude de conduire »), voire parfois par une perte réelle de capacités. Après dix ou vingt ans sans avoir pris le volant régulièrement, les compétences peuvent en effet être émoussées.</p>
<p>Ainsi, si vous n’avez pas conduit pendant des années, ou si vous vous êtes restreint à certains parcours, il faudra travailler à la fois sur la peur de conduire et sur la conduite elle-même. Le mieux pour cela est de vous faire aider, par un proche de confiance ou même par un professionnel en auto-école, avec quelques cours de conduite le moment venu.</p>
<p>Conduire une voiture nécessite d’effectuer beaucoup de choses à la fois : les actions de pilotage de base, faire très attention à ce qui se passe à l’extérieur pour pouvoir réagir à tous les obstacles et aux autres véhicules, surveiller le compteur de vitesse, se souvenir du trajet et décider des directions à prendre, etc. La conduite nécessite donc une vigilance presque totale en permanence : impossible de consacrer, en plus, de l’énergie et du temps à gérer votre anxiété. C’est pourquoi beaucoup de choses doivent être apprises et préparées avant de prendre le volant, afin qu’elles deviennent mécaniques et applicables facilement le moment venu.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/200592/original/file-20180102-26157-1dxzl2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/200592/original/file-20180102-26157-1dxzl2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/200592/original/file-20180102-26157-1dxzl2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/200592/original/file-20180102-26157-1dxzl2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/200592/original/file-20180102-26157-1dxzl2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/200592/original/file-20180102-26157-1dxzl2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/200592/original/file-20180102-26157-1dxzl2q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=425&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La conduite nécessite d’effectuer beaucoup de choses à la fois, piloter, faire attention à ce qui se passe à l’extérieur, surveiller le compteur de vitesse…</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/ydew6pvUlHc">pan xiaozhen/unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La préparation à la reprise du volant comporte deux ingrédients importants : le contrôle du stress physique d’une part, et la lutte contre les scénarios catastrophes qui peuvent vous parasiter d’autre part.</p>
<h2>Les gênes physiques auxquelles il faut s’habituer</h2>
<p>Les symptômes physiques, classiques dans tous les types d’anxiété, n’ont rien de dangereux en eux-mêmes, et la meilleure stratégie est théoriquement de les accepter pour les ignorer. Mais en voiture, certains de ces symptômes sont plus gênants, devenant une source d’anxiété supplémentaire pour le conducteur (« Je fais un malaise, je ne vais plus pouvoir conduire », etc.), et pouvant même réellement perturber le maniement du véhicule. Une tension musculaire importante ou des tremblements peuvent ainsi avoir un effet délétère sur la coordination des gestes, et modifier la conduite, le plus souvent modérément. Et il n’est bien sûr pas possible de maîtriser ces symptômes dans le feu de l’action, par exemple en fermant les yeux pour évacuer la tension, comme on le ferait dans un autre contexte…</p>
<p>Une partie de votre préparation doit porter sur ces signes physiques, pour vous y habituer et essayer de les contrôler en partie. Pour ceci, il faut d’abord bien les identifier, dans une situation proche de la réalité concrète.</p>
<p>Si vous arrivez à conduire un peu, l’idéal est d’observer « en vrai » ce que vous ressentez au volant. En général, les symptômes physiques touchent les muscles des bras ou des jambes (crispations, tremblements, maladresse), le cœur (palpitations), la respiration (sensation d’étouffement), ou l’équilibre (sensations de vertige).
Si vous ne parvenez pas encore à conduire réellement, vous pouvez vous mettre en situation simulée, chez vous ou dans une voiture à l’arrêt (ou en étant passager avec un autre conducteur), et identifier alors les sensations qui peuvent apparaître et qui vous dérangeraient le plus.</p>
<p>Après avoir repéré ces symptômes sensibles, il va falloir les apprivoiser. Il s’agit d’abord de bien vous convaincre de leur origine : ils sont liés au stress et à rien d’autre, notamment pas une maladie physique en train de vous assaillir. Vous pouvez observer leur évolution, en visualisant bien qu’ils sont arrivés en même temps que le stress, et qu’ils disparaissent rapidement quand vous êtes plus détendus. Par ailleurs, essayez de jouer avec ces symptômes en les provoquant de différentes manières : par exemple en courant pour ressentir des palpitations et un essoufflement, en tournant rapidement sur vous-même pour déclencher des vertiges, en crispant les muscles pour ressentir une tension ressemblant à celle du stress, etc.</p>
<p>L’essentiel est de vous habituer à ces désagréments physiques passagers, pour ne pas être affolé quand vous les ressentirez en conduisant. Essayez donc de les provoquer le plus souvent possible dans la vie quotidienne. Quand ils surviennent, contentez-vous de les observer un peu comme un objet extérieur à vous : tâchez de les localiser précisément, de définir une frontière avec le reste de votre corps, de les faire grossir ou au contraire se réduire. Ce jeu vous rassurera sur leur caractère bénin, et vous permettra de vous y habituer.</p>
<h2>Des moyens simples pour déstresser au volant</h2>
<p>Il vous faut également acquérir des moyens simples pour déstresser au volant. Le principal levier est le contrôle respiratoire, qui permet de lutter contre toutes les tensions musculaires et l’emballement du cœur et du souffle. Assis en voiture, vous pourrez toujours respirer calmement, et profiter d’un feu rouge pour vous concentrer quelques secondes sur votre rythme respiratoire. Entraînez-vous pendant quelques minutes, sur un fauteuil chez vous puis en voiture, même à l’arrêt, à suivre ce schéma : inspirez doucement par le nez, faites une pause de quelques secondes, expirez également doucement par le nez, puis faites une nouvelle pause. Tout ceci plutôt rythmé par les muscles de l’abdomen (le ventre) que par le thorax, et sans aller trop loin dans le gonflement des poumons. </p>
<p>Cette manière de vous concentrer sur votre respiration deviendra naturelle si vous vous entraînez régulièrement et produira automatiquement une sensation de bien-être. Avec l’habitude, vous pourrez même continuer à l’utiliser en restant concentré sur la conduite de la voiture, par exemple sur l’autoroute.</p>
<p>La gêne principale en conduisant peut être une tension musculaire importante dans les bras. Même si vous vous êtes habitué à cette sensation grâce aux exercices précédents, il est utile de disposer d’une technique de « détente express » si cette gêne est trop forte à un moment donné. Pour cela, la méthode classique de relaxation musculaire, basée sur le contraste entre tension et relâchement, est la plus intéressante. </p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/200576/original/file-20180102-26151-oj0pfu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/200576/original/file-20180102-26151-oj0pfu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/200576/original/file-20180102-26151-oj0pfu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/200576/original/file-20180102-26151-oj0pfu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=898&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/200576/original/file-20180102-26151-oj0pfu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/200576/original/file-20180102-26151-oj0pfu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/200576/original/file-20180102-26151-oj0pfu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1129&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Conduire d’une main pendant un temps permet de diminuer la tension musculaire dans l’autre.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/ONpBjMnlJU8">mark jefferson paraan/unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Elle s’apprend d’abord sur une partie du corps, par exemple le bras gauche qui est moins actif que le droit pendant la conduite. Contractez assez fort les muscles du bras et de l’avant-bras, en vous concentrant quelques secondes sur les sensations produites, qui peuvent aller jusqu’à des tremblements et de la tétanie. Puis, relâchez lentement cette contraction, en quelques secondes également, en vous concentrant aussi sur ce que vous ressentez dans votre bras. Grâce à ce contraste entre les deux états successifs et opposés, vous pouvez reprendre le contrôle sur la motricité de votre bras, et atténuer les sensations de tension involontaires engendrées par le stress. Après avoir fait environ 10 fois l’exercice sur le bras gauche, refaites la même chose sur le bras droit, toujours de préférence à l’arrêt ou en conduite simulée chez vous. Vous pourrez ensuite refaire des séries de contraction/décontraction des deux bras simultanément. </p>
<p>Au volant, en fonction de la vitesse et des autres actions à réaliser (chercher sa route, surveiller le flot de voitures, déclencher certaines fonctions comme les essuie-glaces ou les phares, etc.), vous pourrez vous consacrer plus ou moins facilement à cette détente musculaire. Il est possible de contracter le bras et la main avec le poing fermé, donc en lâchant transitoirement le volant, ou le faire en gardant la main sur le volant, avec une contraction des doigts sur celui-ci.</p>
<h2>En route !</h2>
<p>Maintenant que vous connaissez les outils anti-paniques, vous pouvez reprendre la route dans de bonnes conditions. Mais je vous conseille de le faire par étapes et en prenant le temps nécessaire. Si vous n’avez pas conduit depuis très longtemps, il est préférable de commencer par quelques cours d’auto-école. Et dans tous les cas, vous allez pouvoir vous tester à petite vitesse, sur des trajets courts, avec la possibilité de vous arrêter facilement. Une autre solution est de le faire avec une personne de confiance, qui pourra par exemple vous accompagner d’abord en conduisant votre voiture jusqu’à des routes vous convenant mieux.</p>
<p>Assez rapidement, vous allez pouvoir combattre certaines idées automatiques injustifiées qui risquent de vous assaillir chaque fois que vous dépasserez les 30 km/heures : « Je vais perdre le contrôle », « C’est dangereux, je ne sais pas conduire », « Je ne peux pas dépasser une autre voiture », etc. Ces pensées sont injustifiées si vous avez appris à conduire et si vous restez vigilant à ce qui se passe autour de vous. </p>
<p>En dehors de situations un peu extrêmes comme la neige, le verglas ou des routes de montagne très tortueuses, l’aménagement des routes en France permet de rouler en toute sécurité quand on respecte les consignes, quelle que soit la vitesse ou le type de route. Vous ne serez pas plus en danger sur l’autoroute qu’en ville par exemple, même si la vitesse semble plus effrayante à la plupart des anxieux de la route.</p>
<h2>Vision grand angle</h2>
<p>Pour réduire votre niveau de stress, pensez à utiliser les méthodes décrites plus haut, notamment la respiration calme et la détente musculaire. La question du regard et de l’attention visuelle est également importante. En effet, l’anxiété entraîne une réduction du champ de vision, dans le but de détecter des dangers, de petites tailles ou cachés, autour de soi. En voiture, comme il faut surveiller un champ très large, cette vision focalisée est très fatigante et assez peu efficace : on passe son temps à changer de cibles en permanence (les trois rétroviseurs, le compteur de vitesse, le levier de vitesse, la route à droite, la voiture à gauche, la route devant, etc.). La fatigue oculaire et attentionnelle peut se doubler de sensations vertigineuses à force de faire ces va-et-vient peu productifs.</p>
<p>Il faut donc se forcer à adopter une vision « grand angle » ou panoramique, qui permet d’être attentif à la plupart des éléments de la route, sans grande précision mais cela n’est pas nécessaire en continu. Si quelque chose d’anormal attire notre attention, on peut alors vérifier spécifiquement de quoi il s’agit, mais sans balayer systématiquement tous les points de l’environnement. Le principe est donc de regarder la route assez loin devant soi (et non pas juste les premiers mètres devant la voiture, car ceci crée aussi des sensations hypnotiques gênantes), avec une vision légèrement floue mais large. De temps à autre, un coup d’œil aux rétroviseurs et aux compteurs permet de vérifier que tout se passe bien.</p>
<h2>Un entraînement programmé</h2>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/200589/original/file-20180102-26148-v1029h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/200589/original/file-20180102-26148-v1029h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=1016&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/200589/original/file-20180102-26148-v1029h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=1016&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/200589/original/file-20180102-26148-v1029h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=1016&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/200589/original/file-20180102-26148-v1029h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1277&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/200589/original/file-20180102-26148-v1029h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1277&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/200589/original/file-20180102-26148-v1029h.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1277&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">S’exposer à la conduite en variant les contextes, ville, campagne…</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/yCb2H6eOGAU">steve halama/unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La peur devrait s’atténuer progressivement avec l’expérience, et surtout la pratique de routes différentes dans des contextes variés : ville, routes nationales, campagne, jour et nuit, etc. Cela peut prendre quelques semaines, mais l’essentiel est de garder une certaine régularité durant cette période d’exposition à la conduite, pour ne pas perdre le bénéfice des exercices précédents. Si vous savez que certaines situations sont particulièrement angoissantes pour vous, essayez de les affronter par étapes, en commençant par des conditions facilitantes mais en augmentant le niveau de difficulté jusqu’au bout. Par exemple, si vous redoutez surtout la conduite sur autoroute, entraînez-vous d’abord sur des routes nationales à assez grande vitesse, puis sur quelques kilomètres d’autoroute, puis sur une distance plus longue, en faisant varier également la vitesse et la capacité à doubler d’autres véhicules.</p>
<p>Si vous redoutez plutôt les routes en hauteur, comme les ponts ou les voies en bretelles, habituez-vous d’abord au vide à pied sur un pont, puis empruntez des routes à des hauteurs croissantes. Cela toujours pour ne pas générer d’angoisses trop fortes mais pour vous habituer progressivement à supporter l’anxiété ressentie. Ceci peut prendre du temps et beaucoup d’exercice, mais vous allez forcément ressentir une détente et une meilleure confiance en vous avec l’expérience. Le principe de la confrontation progressive est le même pour la peur des tunnels ou d’autres routes « à risque » comme les rues très fréquentées en ville.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/196476/original/file-20171127-2077-ojg0l8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/196476/original/file-20171127-2077-ojg0l8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=947&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/196476/original/file-20171127-2077-ojg0l8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=947&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/196476/original/file-20171127-2077-ojg0l8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=947&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/196476/original/file-20171127-2077-ojg0l8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1191&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/196476/original/file-20171127-2077-ojg0l8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1191&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/196476/original/file-20171127-2077-ojg0l8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1191&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Couverture du livre, paru le 1ᵉʳ novembre 2017.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Flammarion</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Si, malgré vos efforts et votre volonté, vous ne parvenez pas seul à surmonter votre peur de conduire, une évaluation et une aide par un thérapeute, médecin ou psychologue, peut être utile. Cela est souvent nécessaire pour les personnes qui ont vécu ou ont été confrontées à des accidents de la route très graves, et qui en conservent un véritable <a href="https://theconversation.com/quel-risque-de-developper-un-etat-de-stress-post-traumatique-a-la-suite-dun-attentat-50734">syndrome de stress post-traumatique</a>. De même, des <a href="http://www.psycom.org/Espace-Presse/Sante-mentale-de-A-a-Z/Trouble-obsessionnel-compulsif-TOC">troubles obsessionnels-compulsifs</a> sévères peuvent rendre les choses nettement plus complexes et nécessiter une prise en charge spécialisée. Les <a href="http://www.aftcc.org/">thérapies comportementales et cognitives</a> sont aussi efficaces pour ces troubles, et les spécialistes peuvent aussi utiliser des supports facilitants comme des simulateurs de conduite.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/89597/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Antoine Pelissolo a reçu ces trois dernières années des financements (rémunérations pour des travaux de recherche ou de formation, ou invitations à des réunions scientifiques) des laboratoires pharmaceutiques Biocodex, Lundbeck, Servier, Janssen-Cilag, Astra-Zeneca, Medtronic France.</span></em></p>Des solutions existent pour vous aider à surmonter, vous-même, l'appréhension de prendre la voiture. Une difficulté plus répandue qu'il n'y paraît.Antoine Pelissolo, Professeur de psychiatrie, Inserm, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/848252017-11-08T21:56:26Z2017-11-08T21:56:26ZHarcèlement à l’école : apprenons aux enfants à se défendre<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/193553/original/file-20171107-1027-6fbl6u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les brimades, humiliations, intimidations répétées à l'école ou au collège sont source d'une grande souffrance. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/NcWNzEAD7Fs">jesus rodriguez/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Plus personne n’ignore, aujourd’hui, que le harcèlement existe dans les cours d’école. Ni que ces humiliations, intimidations ou agressions répétées engendrent une grande souffrance chez les élèves qui les subissent. La plupart des parents s’inquiètent à l’idée que leur enfant puisse être visé. En réponse, l’Éducation nationale avait annoncé à la rentrée 2017 le « <a href="http://cache.media.education.gouv.fr/file/DP_rentree_2017_NVB/00/2/2017_preparer_la_rentree_F13_729002.pdf">renforcement de la prévention et des sanctions</a> ». Le ministre, Jean-Michel Blanquer, se déplace le 5 mars dans un lycée de Dijon <a href="http://www.education.gouv.fr/cid127218/deplacement-de-jean-michel-blanquer-a-dijon-sur-le-theme-de-la-lutte-contre-le-harcelement-a-l-ecole.html">pour évoquer les moyens dédiés à cet objectif</a>. </p>
<p>Et si, pour une fois, on regardait le problème sous un autre angle ? Si, au lieu de convoquer les harceleurs pour les punir, on cherchait à mieux armer les harcelés pour leur donner les moyens de se défendre eux-mêmes ? Cette démarche n’est jamais le premier réflexe des adultes qui, n’écoutant que leur bon cœur, volent au secours de l’enfant harcelé – ce qu’on ne saurait leur reprocher. Cependant, en intervenant tel Zorro pour sermonner le harceleur, le responsable d’établissement ou l’enseignant renforce bien souvent, sans le vouloir, l’image de victime de l’élève harcelé. La conviction s’installe, chez lui et chez les autres élèves, qu’il est incapable de s’en sortir tout seul. Une croyance qui alimente souvent un cercle vicieux engendrant de nouvelles situations de harcèlement.</p>
<p>L’enfant ou l’adolescent harcelé a moins besoin, en réalité, de la protection des adultes que d’apprendre à se faire respecter. Ces compétences, il peut les acquérir s’il bénéficie, au bon moment, du soutien adéquat. C’est ce que propose la thérapie « brève et stratégique », développée en France par nos équipes depuis une dizaine d’années. Cette façon inédite d’aborder les situations de souffrance scolaire fait désormais l’objet <a href="http://www.u-bourgogne.fr/formation/du.html">d’un diplôme universitaire</a>, Traiter les souffrances en milieu scolaire et péri-scolaire, à l’université de Bourgogne. Nous nous appuyons sur les travaux du Mental Research Institute (MRI), à Palo Alto (Etats-Unis), héritier de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cole_de_Palo_Alto">« l’école de Palo Alto »</a>, un courant fondé dans les années 1950 par le <a href="http://spiralconnect.univ-lyon1.fr/spiral-files/download?mode=inline&data=2161278">psychologue américain Gregory Bateson</a>.</p>
<h2>Une stratégie qui permet de résoudre 85 % des cas de harcèlement vus en consultation</h2>
<p>Chaque année, les thérapeutes de notre réseau <a href="http://a180degres.com/#">Chagrin scolaire</a> reçoivent quelque 500 enfants et adolescents. Avec chacun, nous élaborons un plan d’action adapté à la situation, une sorte de scénario que l’enfant met ensuite en œuvre dans la cour de récréation au moment où le harcèlement se produit. Dans notre échantillon des enfants venus en consultation, cette stratégie permet de résoudre le problème dans 85 % des cas environ. Ces résultats sont discutés par Emmanuelle Piquet, à l’origine du réseau, dans le livre qu’elle a publié en 2017, <a href="https://www.tallandier.com/livre-9791021020191.htm"><em>Le harcèlement scolaire en 100 questions</em></a> (Éditions Tallandier).</p>
<p>Des parents ou d’autres intervenants sur la question du harcèlement ont pu juger notre approche culpabilisante pour les enfants harcelés, au motif que leur proposer de l’aide reviendrait à rejeter la faute sur eux. À les considérer, en somme, comme incompétents et responsables de la situation. Il ne faut pas se tromper de camp, s’offusquent certains parents : nos enfants ne sont pas coupables de ce qui leur arrive, ce sont les victimes ! L’école de Palo Alto, en fait, nous pousse à sortir du registre moral, celui qui désigne des méchants et des gentils. Elle nous amène à réfléchir à la manière dont l’interaction fonctionne, ou plutôt dysfonctionne, entre les personnes. L’un des penseurs et thérapeutes de l’école de Palo Alto, Paul Watzlawick, le formulait ainsi : « On ne soigne pas les personnes mais les relations ».</p>
<p>Car au fond, qu’est-ce qui est le plus accusateur : laisser entendre à un enfant harcelé, donc déjà terriblement blessé, qu’il est incapable de faire quoi que ce soit pour s’en sortir ? C’est en effet le message implicite qu’on lui envoie en cherchant à résoudre le problème à sa place. Ou bien est-ce de lui dire, comme nous le faisons, qu’il est vulnérable pour l’instant mais que nous croyons qu’il possède les ressources pour faire cesser le harcèlement ?</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/iMGLy-juSxw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Notre approche s’inscrit à contre-courant sur un deuxième point. La stratégie actuelle de prévention du harcèlement inclut l’incitation à la tolérance entre élèves. Ainsi, la séquence d’enseignement moral et civique <a href="https://www.ac-paris.fr/portail/jcms/p2_1220567/le-harcelement-scolaire">destinée à ceux de 6ᵉ</a> précise : « À travers la connaissance des mécanismes du harcèlement scolaire et ses conséquences, les élèves appréhendent la nécessité de respecter autrui et d’accepter les différences des autres à l’école ». De même, <a href="https://lectures.revues.org/19589">certains chercheurs</a> font l’hypothèse que la situation de harcèlement découle d’une différence sur le plan physique ou de la personnalité chez un individu, perçue par le groupe.</p>
<h2>Les enfants harcelés, pas plus roux ni plus gros que les autres</h2>
<p>Nous constatons, au contraire, que les enfants reçus dans nos consultations ne sont pas plus roux, gros ou « différents » que les autres. Ils ont même souvent une coiffure très étudiée, des dents blanches et alignées, un jean troué-mais-neuf de la marque à la mode et des Stan Smith aux pieds. Nous faisons l’hypothèse qu’un enfant est harcelé parce qu’il présente une vulnérabilité, une faille, à un instant t. Et que d’autres l’ont repérée et s’y sont engouffrés, souvent pour accroître à ses dépens leur popularité – cette forme de reconnaissance absolue à l’école primaire et, plus encore, au collège.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/193554/original/file-20171107-1011-17fjejg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/193554/original/file-20171107-1011-17fjejg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/193554/original/file-20171107-1011-17fjejg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/193554/original/file-20171107-1011-17fjejg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/193554/original/file-20171107-1011-17fjejg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/193554/original/file-20171107-1011-17fjejg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/193554/original/file-20171107-1011-17fjejg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/193554/original/file-20171107-1011-17fjejg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les enfants harcelés ne sont pas plus roux, gros ou « différents » que les autres.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/RlC1eHzJOFI">chuttersnap/unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’appel au « respect de la différence » entre les élèves nous paraît donc vain pour résoudre le problème de harcèlement. Ce qui fonctionne mieux, en revanche, c’est d’amener les harcelés à modifier leur réaction. Au lieu d’un timide « Arrête ! » qui laisse entendre au harceleur qu’il n’y aura aucune conséquence à ses actes, nous les amenons à envoyer le message : « Continue et tu vas t’en mordre les doigts, notamment en ce qui concerne ta popularité ».</p>
<p>Prenons l’exemple de Paul (le prénom a été changé), rapporté dans le livre <a href="https://www.enrickb-editions.com/medecine-sans-souffrance-ajoutee"><em>Médecine sans souffrance ajoutée</em></a>, publié par Nathalie Goujon aux éditions Enrick B.</p>
<h2>Des brutes dans son collège</h2>
<p>Paul m’est adressé par l’hôpital, écrit l’auteure, car l’équipe qui le suit depuis qu’on a diagnostiqué son hémophilie, est inquiète pour lui. Il vient de plus en plus souvent pour recevoir une injection suite à des coups ou des accidents divers afin d’éviter une hémorragie. Mais, régulièrement, son niveau de douleur exprimé semble au-dessus de ce que l’équipe constate au niveau clinique. En questionnant Paul, la pédiatre se rend compte qu’il n’apprécie guère ses congénères et trouve qu’il y a des brutes dans son collège.</p>
<p>Lorsque je rencontre Paul, il m’explique qu’il aime assez l’école, mais est très souvent absent. Très vite, nous entrons dans le vif du sujet :</p>
<blockquote>
<p>« Donc toi, tu aimes bien l’école et tu es très bon élève, si je comprends bien ?<br>
– Oui, ça va.<br>
– Sinon, comment ça se passe, dans la cour ? Tu as des pénibles dans ton collège, ou pas ?<br>
– Oui, il y a un groupe de populaires qui veulent trop se donner une image.<br>
– Qui est le chef ?<br>
– Définitivement Yassine. Il se déplace tout le temps avec son groupe et son but est de ridiculiser ou de taper les autres pour les rabaisser. J’en ai marre de lui et mes amis aussi.<br>
– Tu as qui comme copains, toi ?<br>
– Alors j’ai Djibril, Tom et Philippe. On est trop pareils : on a les mêmes passions. On fait des vidéos de gaming sur YouTube et puis, on parle de pas mal de trucs de science ensemble.<br>
– Et donc Yassine et son groupe de fidèles te pourrissent la vie, c’est ça ?<br>
– Oui, j’aimerais bien qu’ils arrêtent de venir nous voir.<br>
– Qu’est-ce que tu as essayé ?<br>
– Mes amis et moi, souvent, on tente de les ignorer. En général, on se met en cercle quand ils débarquent et on leur tourne le dos.<br>
– Ça marche ?<br>
– Bof, moyen : on dirait plutôt que ça les excite. Quand on se tourne, souvent, ils partent en mitraillette d’insultes et parfois, ils nous bousculent en mettant des coups de coude. L’autre jour, Yassine s’est mis à nous injurier les uns après les autres : “intello, t’es moche, tu pues”, on a tous eu notre tour.<br>
– Et pourquoi tu ne réponds pas quelque chose ? Il fait peur ?<br>
– Oui, il est super baraqué et j’ai pas envie de me battre, moi.<br>
– Il pourrait te frapper, tu crois, si on répondait quelque chose ?<br>
– Ouais, carrément, c’est une grosse brute.<br>
– Je me dis que l’idéal pour le calmer serait de faire l’inverse de ce que vous faites actuellement.<br>
– Heu… genre ?<br>
– Genre, vous essayez de le virer et de le faire taire, alors il se défoule encore plus sur vous, non ?<br>
– Si, mais bon, tu veux faire quoi ?<br>
– Je me dis que la prochaine fois qu’il vient t’attaquer alors que tu es avec tes amis, ce serait vraiment bien que tu dises haut et fort : “Attention, voilà Yassine et ses fidèles, laissez-le parler, vas-y Yassine, on t’écoute !” S’il dit : “t’es un intello de merde”, il faudra que tu continues le même mouvement en répondant : “Oui et tu as oublié que je suis con et que je pue !” Il faudrait même que vous puissiez ouvrir le cercle, avec une révérence, pour lui donner la parole.<br>
– Ouais, c’est pas mal. Mais bon, ça fait flipper.<br>
– C’est pour ça que je voulais te demander : tu crois qu’il pourrait te taper où, en premier ?<br>
– Ben, j’espère pas qu’il me tapera.<br>
– Oui, mais moi, j’aimerais bien qu’on regarde ta peur en face, parce que si on la regarde, elle va diminuer, comme si elle se dégonflait, tu vois ? »</p>
</blockquote>
<p>Ici, je choisis de lui faire imaginer le pire s’il répond quelque chose à Yassine-la-brute, car d’une part, cela peut arriver et d’autre part, tant qu’il se rassure et tergiverse, sa peur grandit. On dit souvent aux enfants que faire taire la peur revient à mettre de l’engrais dessus, contrairement à ce qu’ils croient. Pour l’instant, Paul ne dit rien à Yassine car il a trop peur. Si je parviens à lui faire baisser sa peur, alors il sera à même de réguler différemment.</p>
<blockquote>
<p>« Alors, il pourrait te frapper d’abord au visage, ou dans le ventre, à ton avis ?<br>
– À mon avis, dans le ventre et je tomberais au sol.<br>
– Oui et ensuite, il continuerait à t’asséner des coups alors que tu serais sans défense, par terre ? Tu crois qu’il pourrait te tuer en provoquant une hémorragie, ou pas ?<br>
– Ben, c’est possible. Par exemple, il me taperait derrière la nuque et là, je mourrais lentement en me vidant de mon sang à l’intérieur. Comme une hémorragie globale, quoi.<br>
– Ah oui, horrible ! D’autant plus que personne ne suspecterait la gravité de la situation, puisque ça se passerait à l’intérieur de ton corps. Et tu mourrais dans un coin de la cour, derrière l’arbre, où personne ne voit jamais rien. Affreux. On dirait ensuite : “Pauvre Paul, il est mort sous les coups de Yassine parce qu’il était hémophile… ” Ou alors quelqu’un te verrait et on appellerait les pompiers, mais ce serait trop tard : l’hémorragie interne serait impossible à arrêter et on entendrait les pompiers crier : “On le perd, on le perd !” Quelle horrible fin, surtout à cause d’un débile brutal !<br>
– Ouais, voilà.<br>
– Bon, donc je comprends parfaitement que tu n’aies pas envie de lui répondre à lui (je sais que nous avons traversé le pire à cet instant et je ne le rassure donc évidemment pas). Cela dit, si jamais tu décidais de le faire, je pense que ce serait bien d’en parler à tes amis pour qu’ils puissent écarter le cercle et regarder en souriant Yassine et ses fidèles quand ils viendront. Il faut qu’ils comprennent que l’objectif est de faire croire aux brutes que ça ne vous fait plus rien et même que vous pouvez en rajouter, tellement vous vous en moquez. Je te propose d’y réfléchir tranquillement, on n’est plus à un jour près. L’autre option, c’est de continuer à subir leurs attaques. Après tout, c’est peut-être plus supportable que de risquer sa vie pour un con.<br>
– Non, mais je vais en parler à mes amis et notamment à Tom, pour voir ce qu’ils pensent de ta stratégie. Ils nous pourrissent la vie depuis trop longtemps, sans déconner. Dire à Yassine ce que tu as proposé, ça peut le clasher grave devant son groupe et le calmer. »</p>
</blockquote>
<h2>Tous d’accord pour qu’on les clashe une bonne fois</h2>
<p>Paul est revenu me voir, quinze jours plus tard.</p>
<blockquote>
<p>« Alors, qu’as-tu décidé ? C’était dur, non ?<br>
– Oui, c’est vrai, mais bon, le lendemain, j’ai parlé avec mes amis et ils étaient tous d’accord pour qu’on les clashe une bonne fois. Yassine est venu comme d’habitude avec sa tête du gars qui va dire des horreurs et là, j’ai dit : “Écartez-vous : Yassine et ses fidèles arrivent, il veut dire quelque chose. La semaine dernière c’était : ‘tu pues, t’es con’, alors aujourd’hui ? Vas-y !” Et j’ai ajouté, vu leurs têtes : “Attendez, ça vous gêne si je prends une photo ?”<br>
– Excellent ! Et alors ?<br>
– Il a dit : “Vous êtes trop bizarres, aujourd’hui !” Sa copine Juliette, qui est une vraie pourrie aussi, a dit : “Ouais, on se casse, ils sont trop chelous !” J’étais vraiment content !<br>
– C’est super, je suis fière de toi, il fallait un sacré courage.<br>
– L’après-midi, il a retenté une action, alors j’ai dit : “Ah, tu t’es décidé ?” Il a répondu : “Vous voulez pas coopérer, je m’en vais.”<br>
– C’est dingue, c’est vraiment comme ça que fonctionnait la situation, en fait : tant que vous montriez que ça vous affectait, il était comme encouragé à vous insulter et là, d’un coup, ça n’a plus d’intérêt. Bravo, Paul, c’est la classe internationale ! »</p>
</blockquote>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/d4sOSpMfbng?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Ainsi, les adolescents constatant, comme Paul, qu’ils peuvent eux-mêmes renverser la situation et mettre fin au harcèlement vivent une « expérience émotionnelle correctrice », de nature à dissiper leur sentiment d’impuissance. Les actions individualisées que nous mettons en place auprès des enfants qui souffrent les aident à restaurer leur confiance en eux et les amènent <a href="http://www.albin-michel.fr/ouvrages/je-me-defends-du-harcelement-9782226321138">à savoir se défendre</a>. Ils peuvent alors se faire respecter lorsqu’ils rencontrent, par la suite, des situations similaires. N’est-ce pas notre rôle d’adulte de les amener à agir par eux-mêmes, plutôt que d’intervenir à leur place ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/84825/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Goujon est membre du réseau A 180° - Chagrin scolaire, responsable du centre de Lyon.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Emmanuelle Piquet détient des parts dans la société Emmanuelle Piquet Conseil, détentrice de la marque Chagrin Scolaire, spécialisée dans l'apaisement des souffrances en milieu scolaire et péri-scolaire.</span></em></p>Quand leur enfant est menacé ou humilié par d’autres élèves, les parents demandent que les harceleurs soient punis. Et si la solution consistait à mieux l’armer pour l’aider à se faire respecter ?Nathalie Goujon, Psychopraticienne, EM Lyon Business SchoolEmmanuelle Piquet, Psychopraticienne, intervenante à l'Ecole supérieure du professorat et de l’éducation, Université de Bourgogne – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/860722017-10-29T23:17:31Z2017-10-29T23:17:31ZParler en public : les dix commandements contre le trac<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/191271/original/file-20171022-13963-ilf9bg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Boule dans le ventre, légers tremblements des mains ou des jambes, bouffées de chaleur et palpitations, des signes caractéristiques avant la prise de parole en public. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/FzFH41IucIY">Paul Bergmeir/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p><em>« Je n’ai rien contre les psys, et pour cause ! écrit notre auteur, professeur de psychiatrie, en préambule de son livre <a href="http://editions.flammarion.com/Catalogue/hors-collection/psychologie-et-developpement-personnel/vous-etes-votre-meilleur-psy!">« Vous êtes votre meilleur psy ! »</a> (Editions Flammarion). Il a rassemblé dans cet ouvrage des principes dont l’efficacité est scientifiquement reconnue et que l’on peut appliquer par soi-même pour surmonter certaines difficultés. L’extrait que nous publions ci-dessous porte sur le trac en public.</em></p>
<p>À une jeune comédienne qui se vantait de ne pas avoir le trac avant de monter en scène, Sarah Bernhardt <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Sarah_Bernhardt">répondit sèchement</a> : « Ça vous viendra avec le talent ! ». Comme quoi cette appréhension du public est bien inhérente à notre condition humaine, et peut témoigner de véritables qualités. D’autres personnalités étaient connues pour leur crainte de la scène ou des caméras : Frédéric Chopin, Ella Fitzgerald, Jacques Brel ou, dans un autre domaine, Steve Jobs.</p>
<p>Avoir le trac, c’est ressentir un certain stress, ou un stress certain, avant une prestation en public. Les symptômes sont assez classiques : boule dans le ventre ou dans la gorge, légers tremblements des mains ou des jambes à cause des muscles qui se tendent, bouffées de chaleur et, toujours, les fameuses palpitations. Ces sensations, en général légères et passagères, sont plus fortes chez certaines personnes, notamment les plus émotives. Il n’existe pas d’enquête très précise sur la question, mais on estime qu’environ une personne sur deux ressent le trac régulièrement dans les situations qui s’y prêtent.</p>
<h2>La scène du crime</h2>
<p>Qu’appelle-t-on « prestation en public » ? Évidemment, on pense tout de suite à une assemblée de 3 000 personnes, devant laquelle il faudrait prendre la parole… Une épreuve, voire un cauchemar, pour la plupart d’entre nous. Mais, avouons-le, ça n’est pas une situation très courante. On peut ressentir pourtant le même type de symptômes devant un groupe d’une vingtaine ou d’une trentaine de personnes : une classe d’école, une assemblée générale de copropriétaires ou d’association, une réunion professionnelle ou un petit public de théâtre ou de conservatoire.</p>
<p>L’éducation française donne peu l’habitude aux enfants et aux adolescents de parler en public. Les éléments déclencheurs du trac sont principalement le fait de se trouver au centre de l’attention d’un groupe, avec une tâche particulière et pas forcément facile à réaliser, comme un discours, un exercice, un morceau de musique, etc.</p>
<p>Même si ça n’est pas le cas, cette configuration est alors vécue comme une situation d’examen au cours de laquelle le public devient un groupe de juges. S’entrechoquent ainsi deux anticipations négatives : peur de mal faire et peur d’un jugement négatif de l’auditoire. L’appréhension est majorée par le fait que, dans ce type de situation formelle, la communication est unidirectionnelle : vous devez faire votre prestation, tandis que le public ne fait que vous regarder, sans échange et donc sans partage des efforts ni témoignage d’approbation (avant les applaudissements du moins !).</p>
<p>Ces craintes ne sont pas toujours consciemment présentes, et souvent les symptômes physiques du trac surviennent de manière automatique, échappant à toute tentative de raisonnement, comme tous les symptômes de stress.</p>
<h2>Le pire, c’est avant !</h2>
<p>Le trac s’exprime surtout avant le début de la prestation, dans les minutes ou les heures qui le précèdent. Tout se passe généralement beaucoup mieux si on vous donne la parole tout de suite, sans avoir eu le temps de « cogiter ». En revanche, vous vous souvenez peut-être de l’attente dans le couloir avant de passer votre premier oral du bac, en voyant défiler les camarades qui passaient avant vous, et sortaient de la salle d’examen en affichant une mine variable.</p>
<p>Les sensations sont les mêmes lors d’un tour de table au cours d’une réunion, ou dans l’heure précédant l’entrée en scène pour une représentation de théâtre ou de musique. Le corps s’affole un peu (le ventre, la chaleur, le cœur) et on ne peut rien faire car ce n’est pas encore le moment. Beaucoup de questions tournent alors en boucle dans la tête : « Vais-je être à la hauteur ? », « Comment sera le public ? », « Pourvu que je n’aie pas un trou de mémoire ! », etc. Sans réponse bien sûr puisqu’on n’y est pas encore.</p>
<p>Typiquement, le niveau de trac augmente progressivement jusqu’à atteindre son maximum lors du début de la prestation. Cela peut durer encore quelques minutes, mais rapidement les choses se calment : d’une part l’esprit est concentré sur le travail à réaliser et le corps joue le rôle prévu, donc il ne reste plus beaucoup d’attention à consacrer à autre chose, et d’autre part les questions sans réponses jusqu’à présent s’éteignent d’elles-mêmes. À moins d’une catastrophe, le fait de constater que vous vous en sortez correctement, qu’aucun spectateur ne se lève en vous jetant des tomates (ce qui devient rare de nos jours…), et que vous maîtrisez donc la situation, permet de désamorcer le trac.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/191272/original/file-20171022-13979-hlxytb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/191272/original/file-20171022-13979-hlxytb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/191272/original/file-20171022-13979-hlxytb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/191272/original/file-20171022-13979-hlxytb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/191272/original/file-20171022-13979-hlxytb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/191272/original/file-20171022-13979-hlxytb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=539&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/191272/original/file-20171022-13979-hlxytb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=539&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/191272/original/file-20171022-13979-hlxytb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=539&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Après quelques minutes de présentation, généralement, le trac diminue voire disparaît.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/bzdhc5b3Bxs">teemu paananen/unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Une certaine tension peut durer pendant toute la « séance », témoin d’une vigilance accrue et d’une motivation à bien faire, mais elle n’est en général ni gênante ni vraiment pénible. Et elle se transforme en soulagement, voire en vraie euphorie, quand l’exercice se termine. Ouf, ça n’était que cela ! Mais dommage de devoir passer par ce couloir sombre du trac avant de voir la lumière de la réussite…</p>
<h2>Les dix commandements anti-trac</h2>
<p>Voici dix conseils à suivre pour que ce tunnel devienne de moins en moins long et pénible au fur et à mesure.</p>
<p><strong>1. Déculpabilisez</strong></p>
<p>Chassez de votre esprit l’idée que le trac est un signe de faiblesse ou d’incompétence. Plus de la moitié des adultes se plaignent de ressentir un trac excessif avant une prestation en public, vous n’êtes donc pas seul, et personne ne vous considérera comme un extraterrestre si on vous sent un peu ému dans ce type de situation. Le trac est avant tout un signe de motivation, d’envie de bien faire et une marque de respect pour l’auditoire. Rien de pire qu’un étudiant qui vient passer un examen oral les mains dans les poches, sans aucune attention portée à sa présentation et à l’attitude des examinateurs.</p>
<p><strong>2. Évitez de surestimer les enjeux de la situation</strong></p>
<p>En dehors de moments exceptionnels (oral décisif dans un concours, entretien d’embauche pour un poste important, etc.) pour lesquels on est généralement très entraîné, la plupart des réactions de trac surviennent dans des situations qui ne sont pas gravement déterminantes. Même si vous être très motivé par le but à atteindre, essayez de répondre objectivement aux questions suivantes : si je ne suis pas parfait, est-ce si important ? Même si je rate cette fois-ci, est-ce vraiment ma dernière chance ? Que se passerait-il réellement si tout ne marchait pas comme je le souhaite ? Pensez à ce que vous diriez à votre meilleur ami dans la même situation. Vous verrez vite qu’il est possible de relativiser, pour éviter de vous mettre une pression digne de celle d’un tireur de penalty en finale de la coupe du monde…</p>
<p><strong>3. Préparez correctement vos interventions</strong></p>
<p>Cela peut paraître une évidence mais autant le rappeler malgré tout. Le trac est en grande partie lié à la nouveauté d’une situation difficile et à un manque de confiance dans ses capacités à la gérer. Le seul moyen de réduire ces deux facteurs est de <a href="https://www.ted.com/talks/chris_anderson_teds_secret_to_great_public_speaking?language=fr#t-519466">bien maîtriser son sujet</a> : réviser, relire, approfondir, etc. Et, surtout, s’entraîner à le présenter, soit seul soit avec des spectateurs bienveillants. Plus vous aurez automatisé certaines aptitudes, plus vous aurez confiance en vous, et plus votre esprit pourra se concentrer sur les points sensibles lors de la situation réelle. Donc, répétez, répétez et répétez encore, sans honte car même les professionnels travaillent ainsi, en s’aidant si besoin d’enregistrements audio ou vidéo.</p>
<p>S’il s’agit d’un discours ou d’une intervention orale, même si vous ne préférez pas apprendre l’ensemble de votre texte par cœur, mémorisez malgré tout quelques passages clés, comme la première phrase, la dernière et quelques articulations importantes. Vous ne les restituerez pas forcément de manière exacte, mais vous serez rassuré par ce filet de sécurité pour les phases essentielles de votre présentation ; ce sont celles que le public retiendra d’ailleurs en priorité.</p>
<p><strong>4. Apprenez à utiliser votre respiration comme un calmant naturel</strong></p>
<p>L’avantage de cet anxiolytique est qu’on peut l’avoir toujours sur soi ! Et, ce qui ne gâche rien, il n’a aucun effet secondaire.</p>
<p>L’objectif est de vous concentrer durant deux minutes sur votre respiration, en essayant de la rendre lente et plutôt contrôlée par le « ventre » (les muscles de l’abdomen agissent directement sur le diaphragme et donc les poumons). Inspirez lentement, pas trop profondément, puis prenez bien conscience de l’expiration, en soufflant lentement par le nez ou par la bouche peu ouverte. À chaque expiration, percevez le relâchement des muscles du corps qui l’accompagne. Positionnez une main sur votre ventre pour bien sentir les mouvements de l’abdomen, et les amplifier si besoin. En vous entraînant régulièrement à froid à ce petit exercice, vous pourrez l’appliquer facilement à chaud, notamment dans les phases de préparation et d’attente avant la prise de parole.</p>
<p><strong>5. Visualisez la scène mentalement avant qu’elle ne commence</strong></p>
<p>Concentrez-vous uniquement sur vos propres actions : je dis ceci, je prends cela, je fais ça, je parle à untel, etc. À la manière d’un skieur qui visualise sa descente et chacun des virages les yeux fermés avant de se lancer sur la piste. Cette répétition virtuelle vous rassurera sur votre connaissance du sujet, et vous évitera les pensées parasites stressantes.</p>
<p><strong>6. « Forcez le passage » avec des images positives</strong></p>
<p>Durant l’attente, vous pouvez visualiser un souvenir précis de réussite dans un exercice similaire antérieur, ou les encouragements ou compliments de vos amis. Il ne s’agit pas là de vous convaincre que vous êtes le (ou la) meilleur(e), mais simplement d’occuper le terrain pour chasser la propagande négative de votre anxiété. Comme sur un ordinateur, il n’y a de la place que pour un seul « fond d’écran » dans votre esprit, donc faites en sorte qu’il vous soit favorable. Utilisez les minutes d’attente pour vous créer une image mentale favorable, par exemple en visualisant vos proches vous encourageant et affirmant qu’ils adorent ce que vous faites. Quitte à forcer le trait, il vaut mieux que vous commenciez votre intervention dans un climat intérieur optimiste plutôt que pessimiste.</p>
<p><strong>7. Pendant votre intervention, concentrez-vous sur le contenu de votre action</strong></p>
<p>C’est la condition essentielle de la réussite, puisque votre auditoire s’intéresse avant tout à ce que vous avez à lui dire ou à lui montrer. Donc au moins 80 % de votre concentration doit porter sur votre discours ou votre action. Il vous faut réserver 10 à 20 % de votre attention sur deux autres points : votre <a href="https://www.ted.com/talks/amy_cuddy_your_body_language_shapes_who_you_are?language=fr">expression non verbale</a> (votre position, regarder le public, sourire, parler fort et distinctement, etc.) et l’attitude du public (repérer par exemple une incompréhension manifeste ou une demande particulière).</p>
<p>Cette tâche supplémentaire est difficile, car on ne passe pas aisément d’une cible à l’autre sans perdre le fil de ses actions, mais j’insiste sur le fait que la priorité reste le contenu de votre prestation. Entre chaque paragraphe ou entre chaque séquence de votre intervention, vous pouvez donc faire un bref focus, de quelques secondes, sur votre manière de parler ou de sourire, et sur le public. Mais ne placez pas la barre trop haute sur ces points qui ne sont pas les plus importants. Ils participent à la qualité globale de votre prestation mais de manière partielle, et ils s’amélioreront mécaniquement avec l’entraînement et l’habitude.</p>
<p><strong>8. Choisissez dès le début quelles personnes vous allez principalement regarder</strong></p>
<p>Dans une grande assemblée, il est important de regarder souvent le public, mais il n’est pas indispensable ni facile de regarder chaque personne avec la même intensité. Choisissez donc quelques visages qui vous paraissent sympathiques, parce que vous les connaissez ou parce qu’ils semblent souriants et bienveillants, et tournez-vous vers eux à tour de rôle (sans les fixer en permanence bien sûr). Essayez aussi de balayer régulièrement les différentes parties du public, afin que personne ne se sente exclu de votre intérêt et finisse par ne plus vous suivre. Pour cela, sélectionnez des visages « cibles » relativement dispersés dans l’assemblée, ou au moins regardez vers le fond de la salle si vous avez du mal à repérer les personnes directement.</p>
<p><strong>9. Si la situation s’y prête, n’hésitez pas à dire quelques mots sur votre trac en début de prestation</strong></p>
<p>C’est le meilleur moyen de dédramatiser ce sujet probablement un peu tabou pour vous, voire d’en sourire. En effet, vous n’aurez ainsi <a href="https://www.ted.com/talks/megan_washington_why_i_live_in_mortal_dread_of_public_speaking?language=fr">plus besoin de le dissimuler au public</a>, puisqu’il sera déjà au courant ! Et personne ne vous en voudra d’être un peu stressé lors d’un exercice de ce type. Vous pouvez préparer des formules comme « Je suis toujours un peu stressé quand je dois monter en scène ! », ou encore « Vous m’impressionnez beaucoup, je suis très ému de vous parler, n’y prêtez pas attention… »</p>
<p><strong>10. Évitez l’autodénigrement à la fin de l’intervention ou après</strong></p>
<p>Après un exercice relativement difficile, vous risquez toujours de vous trouver médiocre ou moyen. Mais ce jugement négatif ne fera que vous déstabiliser pour la fois suivante, et vous aurez déployé beaucoup d’efforts pour rien. Pour faire baisser votre trac, repérez objectivement et gardez en mémoire après chaque prestation les éléments qui se sont bien passés, il y en a forcément.</p>
<h2>Osez !</h2>
<p>En vous exerçant régulièrement et en suivant ces conseils, votre trac devrait vite diminuer et quasiment disparaître. Pour ne pas perdre la main, prenez le parti de vous exposer au public le plus souvent possible, en osant surmonter votre petite inhibition initiale. Vous verrez, vous y trouverez probablement du plaisir.</p>
<p>Si vous ne parvenez pas à appliquer ces conseils dans les situations naturelles de votre vie, vous pouvez choisir de créer des conditions plus favorables et plus régulières. Il peut s’agir de vous inscrire à des cours de théâtre ou à une autre activité artistique, ce qui vous permettra de vous entraîner devant de petits publics initialement sans pression particulière puisque dans le cadre d’un apprentissage. Les cours de chant et les chorales sont également d’excellents moyens de combiner une activité plaisante et épanouissante, la rencontre d’autres personnes, et l’expression de soi, facilitée par le fait au début de ne pas être « seul en scène ». Il existe aussi des cours spécifiques de <a href="http://www.toastmasters.org/">prise de parole en public</a>, avec un coaching et une entreaide très utiles entre les participants.</p>
<p>Enfin, si le blocage est plus sérieux et que votre peur de la scène ou du public est trop forte et vous empêche de vous épanouir, c’est peut-être que vous souffrez d’une anxiété sociale excessive. Il s’agit d’une <a href="http://www.psycom.org/Espace-Presse/Sante-mentale-de-A-a-Z/Phobies">angoisse phobique</a> qui ne permet pas d’appliquer complètement les conseils des dix commandements anti-tracs, ou qui les rend inefficaces car le stress est trop intense et occupe trop de place dans l’esprit. La <a href="http://www.psychologies.com/Moi/Problemes-psy/Anxiete-Phobies/Articles-et-Dossiers/Phobie-sociale-vivre-dans-la-peur-de-l-autre">phobie sociale</a> est un trouble fréquent, qui touche près de 5 % de la population, et qui apparaît généralement dans l’enfance ou l’adolescence. Elle peut s’atténuer progressivement, mais son impact sur la qualité de vie et sur les activités personnelles et professionnelles est important. Il est donc préférable de se faire aider par un professionnel pour en venir à bout, d’autant que les méthodes des <a href="http://www.psycom.org/Espace-Presse/Sante-mentale-de-A-a-Z/Therapie-cognitivo-comportementale-TCC">thérapies comportementales et cognitives</a> sont très efficaces pour cela.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/194013/original/file-20171109-13303-ayue18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/194013/original/file-20171109-13303-ayue18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/194013/original/file-20171109-13303-ayue18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=947&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/194013/original/file-20171109-13303-ayue18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=947&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/194013/original/file-20171109-13303-ayue18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=947&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/194013/original/file-20171109-13303-ayue18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1190&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/194013/original/file-20171109-13303-ayue18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1190&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/194013/original/file-20171109-13303-ayue18.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1190&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Couverture du livre, paru le 1er novembre 2017.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Flammarion</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure><img src="https://counter.theconversation.com/content/86072/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Antoine Pelissolo a reçu ces trois dernières années des financements (rémunérations pour des travaux de recherche ou de formation, ou invitations à des réunions scientifiques) des laboratoires pharmaceutiques Biocodex, Lundbeck, Servier, Janssen-Cilag, Astra-Zeneca, Medtronic France.</span></em></p>Relativiser l’enjeu, répéter à l’avance, confier son trac une fois devant le public : voici plusieurs techniques qui ont fait leurs preuves pour surmonter le stress avant une prise de parole.Antoine Pelissolo, Professeur de psychiatrie, Inserm, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/725362017-02-13T21:09:58Z2017-02-13T21:09:58ZSommes-nous adophobes ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/156560/original/image-20170213-23372-70n1n6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C40%2C1911%2C1307&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ados : pourquoi nous font-ils si peur ?</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/fr/adolescentes-adolescents-urbains-238963/">miaikransen/Pixabay</a></span></figcaption></figure><p>En Occident, notre rapport aux adolescents est ambigu. Jamais nous n’avons porté autant d’importance à cette période de la vie. Les spécialistes enquêtent, les professionnels s’interrogent, les parents s’inquiètent. Des institutions spécialisées, comme les <a href="http://www.anmda.fr/">maisons des adolescents en France</a>, font de la santé des adolescents leur mission principale, pendant que des politiques jeunesses orientent des actions spécifiques à l’endroit des jeunes. Nous cherchons collectivement des moyens pour veiller à leur entrée dans la vie adulte.</p>
<p>En même temps, il ne se passe guère une semaine sans que de grands médias se fassent le relais de nouvelles donnant une piètre image des ados : manifestation et <a href="http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2015/10/25/01016-20151025ARTFIG00142-des-emeutes-urbaines-sans-precedent.php">émeutes</a>, <a href="http://www.atlantico.fr/decryptage/ice-and-salt-nouveau-challenge-dangereux-adolescents-georges-picherot-2951431.html">conduites à risques</a>, sexualité <a href="http://www.lavie.fr/famille/education/sexe-amour-et-adolescence-08-02-2017-79801_415.php">débridée</a> alors qu’en d’autres occasions la loupe grossissante est posée sur le suicide de l’un d’entre eux, sur le récit d’une agression, parfois même d’un viol ou d’un meurtre. Mais cette représentation de l’adolescence est-elle juste ? Témoigne-t-elle de ce qu’elle est véritablement aujourd’hui ? Ou ne serait-elle pas plutôt représentative de sociétés sombrant dans le piège de l’adophobie ?</p>
<h2>Qu’est-ce que l’adophobie ?</h2>
<p><a href="http://www.parcoursnumeriques-pum.ca/adophobie">L’adophobie</a> désigne la peur ancestrale que les <a href="http://www.parisdescartes.fr/CULTURE/Publications/Ces-ados-qui-nous-font-peur">adultes entretiennent à l’égard des plus jeunes</a> de leurs sociétés. Elle n’est guère nouvelle : en son temps, Platon tenait dans « La République » des <a href="http://plato-dialogues.org/fr/faq/faq003.htm">propos durs</a> à l’égard des jeunes générations !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/156372/original/image-20170210-23337-1ejql1v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/156372/original/image-20170210-23337-1ejql1v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/156372/original/image-20170210-23337-1ejql1v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/156372/original/image-20170210-23337-1ejql1v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/156372/original/image-20170210-23337-1ejql1v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/156372/original/image-20170210-23337-1ejql1v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/156372/original/image-20170210-23337-1ejql1v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Helsinki, 2014. Les adolescents menacent-ils vraiment la société des adultes ?</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/freebourg/14956577966/">ClearFrost/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le sentiment que les valeurs se perdent, que la jeunesse soit fainéante et qu’elle menace le maintien de l’ordre n’est pas bien nouveau. Nous pouvons émettre deux hypothèses à ce sujet. D’une part, nous pourrions penser que cette vision des plus jeunes est constante : chaque génération d’adultes percevrait les générations suivantes de la sorte. D’autre part, nous pourrions imaginer que ce sentiment est spécifique aux sociétés dont les membres ressentent le déclin de leurs civilisations.</p>
<p>Dans tous les cas, des moyens sont mis en place pour éviter les débordements : du rite de passage à la fréquentation obligatoire de l’école, les adultes cherchent à contenir l’éventuelle remise en question de l’ordre établi par les plus jeunes. Or nous savons bien que les <a href="https://lectures.revues.org/6043">adolescents d’aujourd’hui</a> ne deviennent plus des adultes <a href="https://rsa.revues.org/390">comme ceux d’hier</a>. L’expérimentation est ici le mot clef pour comprendre comment nos enfants progressent vers l’autonomie. C’est en multipliant les tests, les essais, les tentatives, les projets, etc., qu’ils sont amenés à faire lentement des choix… Un parcours dont les parents sont les témoins.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/156556/original/image-20170213-23380-xkpmkm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/156556/original/image-20170213-23380-xkpmkm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=848&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/156556/original/image-20170213-23380-xkpmkm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=848&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/156556/original/image-20170213-23380-xkpmkm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=848&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/156556/original/image-20170213-23380-xkpmkm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1065&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/156556/original/image-20170213-23380-xkpmkm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1065&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/156556/original/image-20170213-23380-xkpmkm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1065&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Jeux d’adolescents, « Die Kunst in der Photographie », 1901.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Louise_Binder-Mestro,_Jeux_d'adolescents,_from_Die_Kunst_in_der_Photographie,_1901.jpg">Louise Binder-Mestro/Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Un chemin souvent hasardeux qui rappelle que nous ne maîtrisons pas toujours l’avenir de nos propres enfants. Dans ce contexte, la peur pour nos ados se déploie et se mêle souvent à la peur que nous entretenons à l’égard de ces mêmes jeunes. Cette peur se manifeste notamment par le fait que des parents vont considérer de plus en plus souvent les <a href="http://www.danah.org/books/ItsComplicated.pdf">autres adolescents comme des menaces potentielles</a> pour leurs propres enfants.</p>
<h2>Le piège de la visibilité ?</h2>
<p>Les ados ne sont pas seulement menacés par l’incertitude, ils sont perçus eux-mêmes <a href="http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/07/21/l-adolescence-un-enjeu-politique_1551150_3232.html">comme une menace</a>. Mais que menacent-ils exactement aux yeux des adultes ?</p>
<p>Force est de constater que le rapport des ados à la sexualité, à la violence et à la mort est au cœur des craintes partagées par leurs aînés. Si le questionnement est légitime, si la volonté de protéger les plus jeunes n’est certainement pas à condamner, en revanche, l’émotivité que provoquent ces sujets entraîne souvent des interprétations erronées au sujet de l’adolescence.</p>
<p>Le monde des écrans favorise ces lectures « émotives ». Depuis quelques années, les ados sont devenus <a href="https://www.pulaval.com/produit/photos-d-ados-a-l-ere-du-numerique">des producteurs de photos et de vidéos</a> que nous pouvons considérer comme des fenêtres ouvertes sur leurs expérimentations. Ces traces visuelles ne nous donnent pourtant qu’un accès partiel à ce qui s’est réellement produit dans leur vie. D’autant plus que la plupart des photos et des vidéos commentées dans les grands médias concernent une fois de plus les trois grands tabous que sont la sexualité, la violence et la mort.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/156562/original/image-20170213-23380-18ufu8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/156562/original/image-20170213-23380-18ufu8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/156562/original/image-20170213-23380-18ufu8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/156562/original/image-20170213-23380-18ufu8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/156562/original/image-20170213-23380-18ufu8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/156562/original/image-20170213-23380-18ufu8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/156562/original/image-20170213-23380-18ufu8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les adolescents participent pleinement à la vie politique, ici une manifestation contre le candidat Sarkozy en 2007, à Paris.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/3/3b/Bastille_2007-05-06_anti_Sarkozy_487639963_0f610a0d4c_o.jpg">Mikael Marguerie/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ainsi, les images à caractère pornographique, les sextos, le <a href="https://theconversation.com/facebook-misogyny-slut-shaming-or-just-woman-hating-13062"><em>slut shaming</em></a>, le <a href="https://theconversation.com/cybersexisme-a-lecole-quels-enjeux-sociaux-et-educatifs-66538">cyberharcèlement</a> ou les suicides en direct sur Internet comptent parmi les sujets les plus médiatisés lorsqu’il s’agit de parler de l’adolescence. Or, cette tendance à mettre en avant ces sujets ne souligne pas seulement que nous avons peur que nos propres enfants soient « contaminés » par ces phénomènes. Elle renforce paradoxalement une image fondamentalement négative de cette période de la vie. Ainsi la peur des ados et de nos ados se nourrit inlassablement à l’ère du numérique.</p>
<h2>Dénoncer l’adophobie</h2>
<p>Pour comprendre un phénomène, il importe d’abord de le désigner. Pour dénoncer une attitude, il importe de la définir. Il fut un jour important, crucial même, d’inventer le terme <a href="http://www.unesco.org/new/fr/social-and-human-sciences/themes/international-migration/glossary/xenophobia/">xénophobie</a> pour que des citoyens puissent la reconnaître et la signaler, pour que des institutions sortent de l’indifférence afin de la combattre. Il s’avérerait même difficile de repérer les paroles et les gestes xénophobes qui se répandent autour de nous sans mot pour en penser l’existence et en analyser les conséquences.</p>
<p>Si aujourd’hui l’idée nous paraît banale, il reste que le mot xénophobie, bien connu, n’a pas toujours existé, ni dans la bouche des hommes et des femmes ni dans la conscience humaine. Ainsi, la peur de l’étranger existe depuis longtemps, mais la lutte contre elle s’est engagée depuis peu. L’histoire fut semblable lorsque des individus refusèrent de la même façon la misogynie et l’homophobie. Qu’elle prenne la forme d’une stigmatisation de la jeunesse contemporaine, d’une condamnation de ses comportements ou même d’accusations injustifiées à son égard, l’adophobie repose sur notre peur de <a href="http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Folio/Folio-essais/L-inquietante-etrangete-et-autres-essais">« l’étrangeté adolescente »</a>. Il est peut-être temps d’interroger nos craintes afin de mieux la comprendre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/72536/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jocelyn Lachance ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Notre représentation de l’adolescence est-elle juste ? Ou ne serait-elle pas plutôt représentative de sociétés sombrant dans le piège de la peur de nos enfants ?Jocelyn Lachance, Chargé d'enseignement et de recherche, Université de Pau et des pays de l'Adour (UPPA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/723332017-02-08T21:15:25Z2017-02-08T21:15:25ZAdolescents : et s’il était temps de les lâcher ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/155715/original/image-20170206-18532-nvl1x6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La léthargie de certains adolescents pourrait s'expliquer par une prise en charge excessive de la part des parents. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/sneakerphotography/3352493425/in/photolist-67fpuM-9UkCtk-dk5sCJ-eYZnSD-5HoEAi-UuPZn-fzWLLe-53tdGv-8BpkYe-fieKXP-bDPxvX-fsCj1Y-5HoFzv-asteiB-kU6Szg-3kiz1R-cfpzAj-51feHe-m28mYi-hika9B-d7nB2o-j556eV-HPKPYL-nZED7o-EeNQe-oFiCWH-6FRRng-oaGsvT-e5kjPw-59vjVQ-asvQnw-fK3CaZ-eowyMg-oJjsYX-9kCRpa-9kCVtB-8Bc9xP-jZNMCR-bBNaab-nZte42-dYuRFB-ejPY2d-aApq2s-oK1iUi-32oBv2-gSkSkW-bvdjyp-dC7AwC-9cCBzy-hYtH7W">Kick Photo/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span></figcaption></figure><p>Jusqu’où les parents devraient-ils s’investir dans la scolarité, les activités et l’épanouissement de leurs enfants ? De nombreux psychologues et sociologues dénoncent ces derniers temps le trop plein d’attention déployé par les « parents hélicoptères », ainsi désignés car ils restent en position stationnaire au-dessus de leur progéniture, à l’affût du moindre de leurs besoins. </p>
<p>La question se pose avec d’autant plus d’acuité à l’adolescence, période de l’apprentissage supposé de l’autonomie. Les <a href="http://www.semaine-sante-mentale.fr/">Semaines d’information sur la santé mentale</a> (SISM), qui débutent le 12 mars, sont consacrées cette année au thème « parentalité et enfance ». L'occasion de se pencher sur la juste distance à trouver lorsque l'on est parent d'un adolescent ou d'une adolescente. Car en lui consacrant beaucoup de temps et d'énergie, le risque existe de provoquer précisément l'inverse de l'effet escompté : sa démobilisation. </p>
<p>Notre équipe de thérapeutes s’est fait connaître par <a href="https://www.youtube.com/watch?v=iMGLy-juSxw">son approche originale du harcèlement scolaire</a>, visant à donner à l’enfant harcelé les moyens de se défendre lui-même. Depuis 2016, cette façon inédite d’aborder les situations de souffrance scolaire fait l’objet <a href="http://www.u-bourgogne-formation.fr/-Traiter-les-souffrances-en-milieu,3521-.html">d’un enseignement à l’université de Bourgogne</a>. Nous nous appuyons sur les travaux du <a href="http://mri.org/">Mental research institute (MRI)</a>, à Palo Alto (Etats-Unis), héritier de « l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cole_de_Palo_Alto">école de Palo Alto</a> », un courant fondé dans les années 1950 <a href="http://spiralconnect.univ-lyon1.fr/spiral-files/download?mode=inline&data=2161278">par le psychologue américain Gregory Bateson</a>.</p>
<p>Chaque année, dans notre réseau Chagrin scolaire, nous recevons en consultation quelque 500 enfants et adolescents, ainsi que leurs parents, pour dénouer les problèmes fréquents de relations avec l’école. Et bon nombre viennent chercher de l’aide, non pas pour une phobie scolaire, mais plutôt l’inverse, ce que nous pourrions qualifier d’apathie scolaire.</p>
<h2>La dernière ligne droite avant l’émancipation</h2>
<p>Nous entendons souvent des pères et des mères confier leurs inquiétudes quant à la léthargie académique de leur rejeton, son inconscience face à son avenir professionnel et les conséquences dramatiques auxquelles ces défauts préoccupants ne manqueront pas de l’exposer dans un futur proche.</p>
<p>D’une façon stratégique, pour ne pas les heurter dans leur volonté de faire pour le mieux, nous tentons de les amener à faire assumer les conséquences de cette inaction scolaire à leur adolescent lui-même, pour mettre en place un contexte qui le responsabilise. Avec cette idée qu’en faisant ou voulant à sa place, ils lui interdisent de prendre l’élan essentiel lors de cette dernière ligne droite que représente l’adolescence, avant la falaise qui se présentera devant lui – l’émancipation.</p>
<p>C’est ce que j’ai tenté de faire avec la maman de Léopold, 15 ans, en lui proposant de ne plus jamais insister lorsque ce dernier montrerait des signes de déconcentration pendant les devoirs, le soir. Et même d’inviter Léopold à aller plutôt jouer aux jeux vidéos au premier de ces signes, pour observer ce que cela générerait comme comportement chez son fils. Et ce pendant une semaine afin, ai-je prétendu, d’affiner mon diagnostic quant à un éventuel TDAH, le nom que les psychologues donnent à l’hyperactivité et ses troubles de la concentration. Un prétexte, en réalité, pour faire vivre à cette maman préoccupée l’expérience émotionnelle de la responsabilisation et de ses bienfaits.</p>
<h2>« Il regardait en l’air en bâillant »</h2>
<p>Cette maman revient en consultation une semaine plus tard.<br><br>
- « J’ai réussi, me dit-elle, et pourtant… Le premier jour, Léopold est parti jouer lorsque je lui ai dit que son cerveau était en train de fumer et qu’il valait mieux qu’on arrête, vu qu’il regardait en l’air en bâillant au lieu de lire les consignes de son DM [devoir à la maison]. Le deuxième jour, idem. J’aime autant vous dire que je trouvais l’exercice difficile. Deux jours sans aucun travail scolaire…<br><br>
- J’imagine, Madame.<br><br>
- Et puis le troisième jour, il s’est déconcentré pareil, mais seulement au bout de dix minutes, ce qui est une sorte de record mondial le concernant, il a eu le temps de faire un exercice d’anglais. Puis il est allé jouer quand je lui ai proposé, vu son agitation. Et le quatrième jour, grandiose : il est resté environ dix minutes à son bureau avant que je lui dise d’aller jouer parce qu’il s’agitait ; il est parti ; et revenu au bout de cinq minutes en disant : “Allez, si on s’y met sérieusement, on n’en a pas pour longtemps.” Je me suis retenue pour ne pas rire, c’est exactement ce que je lui disais à chaque fois, avant qu’on mette l’observation en place avec vous. Il a tenu une demi-heure, jusqu’au dernier exercice qui consistait à légender une carte ; là, il en avait trop marre, il a commencé à gratter le livre avec son cutter. J’ai dit : “Stop, tu es vraiment trop fatigué, Léop, regarde, ton corps le dit, va jouer.”<br><br>
- Vous avez vraiment été remarquable, Madame.<br><br>
- Oui, je sais, se rengorge-t-elle, attendez, vous allez voir le bouquet final. Le soir même, à 22 heures, il arrive en pyjama et dit : “Maman, s’il te plaît, aide-moi pour la carte, j’y arrive pas, je comprends pas ce que ça veut dire légender, c’est sans doute à cause de mon TDAH…”. Et là je dis “Chéri, je suis très fatiguée et franchement, ce n’est plus l’heure des devoirs, je trouve que tu as bien travaillé aujourd’hui ; tant pis, tu auras un zéro en géographie, ce n’est pas la fin du monde.” Et là, il s’est littéralement déchaîné, j’avais rarement vu ça. Il m’a dit que j’étais la pire mère du monde, qu’il le raconterait à tout le monde, qu’il allait contacter un avocat, Enfance et Partage et pour ça aller voir l’assistante sociale du collège le lendemain à la première heure.<br> <br>
- Waouh, la puissance de cet enfant ! Je suis impressionnée !<br><br>
- Mais j’ai tenu. Franchement, c’était vraiment difficile. Et… une heure plus tard, il est venu me voir, sa carte à la main. Il m’a demandé d’un air revêche si je voulais bien regarder. Là, c’était trop dur de dire non, alors j’ai regardé en râlant un peu. C’était franchement pas trop mal. Je lui ai dit, il avait l’air fier de lui. J’étais perturbée, parce que je me suis dit : “je ne le pensais pas capable de faire ça.” C’est dur quand même, penser ça de son fils, à tort !<br> <br>
- Alors, votre diagnostic sur son TDAH ?<br><br>
- J’ai comme l’impression que son TDAH est assez réactionnel. C’est à dire que la responsabilisation l’atténue, non ? Mais pour en être sûres à 100 %, il faudrait que nous continuions sur cette voie-là. »</p>
<h2>« Tu n’es pas capable », lui dit-on en substance</h2>
<p>La prise en charge de l’adolescent par ses parents (ce qui consiste à faire à sa place ce qu’il devrait être capable d’assumer, par exemple sa scolarité), lui envoie deux messages implicites : le premier, c’est qu’on l’aime, c’est pour cela qu’on est inquiet pour lui ; le deuxième, c’est qu’on l’estime tellement incapable – scolairement, en l’espèce – qu’il nous semble essentiel de faire les choses à sa place. En dépit de la qualité du premier message, le deuxième message qui est très confortable pour l’adolescent à court terme (il est donc générateur de cette fameuse paresse que paradoxalement on lui reproche) est en fait assez destructeur de sa confiance en lui. « Tu n’es pas capable » lui dit-on en substance.</p>
<p>Notre approche, fondée sur la <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/traiter-les-cas-difficiles-les-reussites-de-la-therapie-breve-richard-fisch/9782020606714">thérapie dite « brève et stratégique »</a> née de l’école de Palo Alto, nous amènent, nous thérapeutes, à nous poser la question suivante : est ce que ce ne seraient pas précisément toutes ces modalités de prise en charge qui génèrent la léthargie chez cet adolescent ?</p>
<p>Ainsi, au lieu de percevoir le problème de façon linéaire – c’est parce que Léopold ne fait rien qu’on est obligé de le prendre en charge – nous le regardons alors de façon circulaire. Il ne travaille pas. Donc ses parents le prennent en charge. Il se démobilise encore plus puisque il est pris en charge (et qu’en quelque sorte on se mobilise à sa place). Cette démobilisation accrue inquiète les parents qui donc le prennent encore plus en charge. Il se démobilise un peu plus. Et les parents intensifient encore la prise en charge à la culotte et ainsi de suite.</p>
<p>La démobilisation qui désole les parents et leur semble incompréhensible – en dehors d’une mauvaise volonté ou d’un problème psychique de la part de leur fils – devient, dans cette perspective circulaire, une réponse logique à une prise en charge excessive.</p>
<h2>La promesse de récompense, ou de sanction</h2>
<p>Ce changement de perspective est l’apport de Gregory Bateson, le fondateur de l’école de Palo Alto, que son collègue Paul Watzlavick désigne comme « mutation méthodologique fondamentale » dans son livre <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/les-cheveux-du-baron-de-m-nchhausen-psychotherapie-et-realite-paul-watzlawick/9782020127103">Les cheveux du Baron de Münchhausen</a> (Seuil).</p>
<p>Cette prise en charge excessive peut revêtir plusieurs formes, le parent d’adolescent inquiet étant très créatif pour la mettre en œuvre. Il y a la stimulation affectueuse et souriante : « Allez, chéri, c’est l’heure de se mettre aux devoirs, la la la la lère ! » Il y a aussi la promesse de récompense, ou de sanction, tenues ou pas.<br><br>
- « On avait dit 11 de moyenne pour le smartphone…<br> <br>
- Papa, c’est abuser, j’ai 10,78 !<br><br>
- Bon, d’accord ».<br></p>
<p>Il y a aussi les noms d’oiseaux, les cours particuliers imposés, les discours fleuves sur la crise économique et tout autre subterfuge qui consistera à prendre à son propre compte de parent, la motivation scolaire qui devrait pourtant être celle de l’adolescent.</p>
<h2>Un résultat précisément inverse de celui qui était souhaité</h2>
<p>Toutes ces manoeuvres constituent ce que les psychologues de l’école de Palo Alto appellent les « tentatives de régulation ». Elles sont mises en place pour résoudre un problème ou apaiser une souffrance et elles provoquent très précisément l’inverse de ce qui était souhaité. Ce mode d’interaction infructueux est précisément décrit dans l’article <em>Thérapie courte, résolution d’un problème circonscrit</em>, signé de quatre chercheurs de cette école et repris dans la somme collective des travaux menés de 1965 à 1974, <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/sur-l-interaction-paul-watzlawick/9782020631792">Sur l’interaction</a> (Seuil).</p>
<p>C’est sur ce concept fondateur que nous nous appuyons pour proposer à des patients chaque fois particuliers (enfants, adolescents mais aussi adultes), pour des problèmes tous différents (la phobie scolaire, le harcèlement au travail) un nouveau comportement, à 180° de ceux qui maintiennent le problème pour lequel ils sont venus chercher de l'aide. Avec cette idée, que cessant d’être alimenté par ces tentatives de régulation, le problème diminuera et la souffrance s’apaisera. Ce fut le cas avec la maman de Léopold, pour laquelle le virage à 180° a consisté à passer de la prise en charge à la responsabilisation d’un garçon par ailleurs… tout à fait représentatif de sa génération.</p>
<hr>
<p><em>Emmanuelle Piquet a publié en 2017 aux Editions Payot <a href="http://www.payot-rivages.net/livre_Mon-ado-ma-bataille-Emmanuelle-PIQUET_ean13_9782228916998.html">Mon ado, ma bataille,
comment apaiser la relation avec nos adolescents</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/72333/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuelle Piquet détient des parts dans la société Emmanuelle Piquet Conseil, détentrice de la marque Chagrin Scolaire, spécialisée dans l'apaisement des souffrances en milieu scolaire et péri-scolaire.</span></em></p>Les parents consacrent-ils trop de temps à soutenir les adolescents dans leur scolarité ? Réponses, à l'occasion des Semaines d'information sur la santé mentale, sur le thème de la parentalité.Emmanuelle Piquet, Psychopraticienne, intervenante à l'Ecole supérieure du professorat et de l’éducation, Université de Bourgogne – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.