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Le poids des promesses non tenues… ou pourquoi les salariés désertent

Marc Hatot/Flickr, CC BY-SA

Au-delà des risques juridiques encourus dans l’exercice de ses missions quotidiennes, le DRH ne doit pas perdre de vue que le plus gros risque demeure le risque humain.

Que se passerait-il dans une organisation si tous les salariés, devant trop de promesses non tenues, quittaient le navire pour aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs ? Plus de salariés, plus de problèmes… mais plus d’entreprise !

Gérer les talents… et tenir ses promesses

Retenir les salariés ne semble pas toujours être une priorité. Cela l’a été lors de la bulle Internet (à la fin des années 1990 le développement numérique a suscité de nombreuses vocations entrepreneuriales et a engendré des recrutements massifs) où le marché tendu concernant les profils d’informaticiens obligeait les DRH à être créatifs afin d’attirer et retenir les collaborateurs compétents.

On parle beaucoup de gestion des talents, de détection des hauts potentiels : certaines grandes entreprises ont compris l’importance du coût des recrutements et des remplacements et de nombreux services RH ont mis en place des outils de fidélisation, motivation (formations, team-building, politique de gestion des carrières, politique de rémunération, entretiens réguliers). Ces outils sont efficaces quand ils sont appliqués et quand les promesses sont réelles. Ce n’est pas le cas dans toutes les organisations malheureusement.

En effet, il arrive que les engagements pris envers les collaborateurs ne soient pas toujours tenus. Ces engagements sont pris par la direction, les services RH ou les managers. Seraient-ils alors des menteurs ? Retour sur les liens qui existent entre un manager et son collaborateur.

Un contrat et des attentes réciproques

La relation salarié/employeur naît de la signature d’un contrat de travail :

« Convention par laquelle, une personne, le salarié, s’engage moyennant une rémunération en argent (le salaire) à exercer une certaine activité (le travail), au profit d’une autre personne (l’employeur) sous l’autorité de laquelle le salarié se place (le lien de subordination). »

Cependant, les droits et devoirs ne recouvrent pas l’ensemble des attentes réciproques que peuvent entretenir l’employeur et le salarié. Lors de l’embauche, le candidat doit mettre en avant ses atouts utiles pour l’employeur et le recruteur doit valoriser l’attractivité de l’entreprise. C’est le moment crucial où se joue une négociation tacite qui dépasse toute clause contractuelle. C’est à cet instant précis que l’on peut parler de mise en œuvre d’un contrat psychologique.

Dans le contrat de travail, il y a des attentes dont certaines sont en corrélation avec les missions des salariés (nature des missions et horaires de travail, rémunération, etc.), d’autres sont relatives au comportement au travail (bonne foi, loyauté, etc.).

Le contrat psychologique

Une fois le contrat de travail signé, les deux parties s’obligent réciproquement. Ensuite un lien s’établit, qui n’est plus juridique mais psychologique. Au-delà d’obligations réciproques, les deux parties ont des attentes. Le contrat psychologique est un contrat informel, non écrit. Cet échange social est basé sur des obligations et également des promesses. (Rousseau, 1989).

En fonction de la réalisation des promesses par l’employeur, un degré différent de motivation et de fidélisation est obtenu. En effet, l’employé évalue la capacité de l’entreprise à respecter les promesses faites sur le court terme. Il se forge alors une perception de la confiance qu’il peut avoir en son employeur et si elle est bonne, accepte plus facilement de s’engager dans une relation durable. Cette théorie conduit à penser que la fidélisation des employés sur le long terme passe par la prise en compte des promesses relationnelles du contrat psychologique.

Un contrat psychologique se noue entre employé et employeur et la rupture de ce contrat par des promesses non tenues peut aboutir à de nombreuses démissions ou attitudes de retrait (retards répétés, absences, démissions). Un salarié démotivé, qui n’est plus impliqué, peut rapidement « contaminer ses collègues ».

Rupture du contrat psychologique

Quitter l’entreprise… Author provided

De nombreuses recherches sur ce domaine portent sur les conséquences de la rupture ou de la violation du contrat psychologique (Robinson et Morrison, 1995 ; Lester, Turnley, Bloodgood et Bolino, 2002 ; Chen, Tsui et Zhong, 2008) Ces travaux ont montré les effets négatifs d’une différence de perception relative aux termes du contrat psychologique, sur l’implication organisationnelle, la performance au travail, les comportements de citoyenneté organisationnelle et l’intention de quitter l’entreprise.

Il y a violation ou rupture du contrat psychologique lorsque les salariés croient que leurs employeurs ont manqué à leurs obligations (Turnley et Feldman, 1999). Lorsque le salarié juge que les promesses ne sont pas honorées, cela peut mener à un sentiment d’injustice, de déception et de stress. Les promesses de sécurité et de rémunération ne suffisent plus à garantir l’engagement du salarié. L’implication du collaborateur dépend davantage de la capacité de l’employeur à aller au-delà de ses promesses et à garantir une relation durable. La situation économique, le contexte instable dans lequel évoluent les organisations ne sont probablement pas étrangers à l’impossibilité pour l’employeur de tenir ses engagements.

Concrètement, la rupture d’un contrat de travail se traduit par une volonté d’une des parties (démission ou licenciement) ou d’une volonté réciproque (rupture conventionnelle), alors que la rupture du contrat psychologique, contribue à une perte de confiance, de motivation et d’implication et présente un coût humain pour l’entreprise.

Finalement, le plus gros risque pour une entreprise est de perdre des collaborateurs pour avoir rompu un contrat tacite, le contrat psychologique, souvent sous un prétexte conjoncturel.

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