tag:theconversation.com,2011:/nz/topics/realite-virtuelle-26557/articlesréalité virtuelle – The Conversation2024-01-16T16:20:42Ztag:theconversation.com,2011:article/2207332024-01-16T16:20:42Z2024-01-16T16:20:42ZUne école en « transition numérique », vraiment ?<p>Lorsqu’elle augmente brusquement, la fréquence d’utilisation de certains termes dans les discours politiques et institutionnels constitue une alerte significative pour identifier des prêts-à-penser et une invitation à les déconstruire.</p>
<p>Le numérique scolaire n’échappe pas à ces « buzzwords » et l’on se souvient pêle-mêle de l’enseignement assisté par ordinateur, de l’interactivité et de l’e-learning des années 1980. Puis, dans les années 2000, on a plutôt parlé de numérique, plus récemment de l’hybridation. Aujourd’hui, ce sont <a href="https://theconversation.com/fr/topics/intelligence-artificielle-ia-22176">l’intelligence artificielle</a> et la réalité virtuelle qui sont sur le devant de la scène.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/debat-pourquoi-le-numerique-doit-sapprendre-a-lecole-149801">Débat : Pourquoi le numérique doit s’apprendre à l’école</a>
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<p>Deux expressions ont acquis ces dernières années une place de choix dans le lexique des politiques publiques de l’éducation comme dans celui de tous les acteurs de l’éducation : <a href="https://theconversation.com/fr/topics/transition-numerique-27801">« transition numérique »</a> et « écosystèmes d’innovation », les deux étant souvent mobilisés conjointement. Ainsi, les institutions scolaires et universitaires seraient-elles engagées dans une transition numérique s’appuyant largement sur la dynamique d’écosystèmes le plus souvent territorialisés et favorables à l’innovation.</p>
<p>Bien que cette assertion puisse sembler évidente, elle mérite d’être confrontée d’une part à la littérature scientifique et d’autre part aux réalités de terrain. C’est à cette mise en perspective que les différents partenaires du <a href="https://techne.labo.univ-poitiers.fr/gtnum5-reve/">projet REVE</a>, soutenu par la direction du numérique pour l’éducation du ministère de l’Éducation nationale, ont travaillé entre janvier 2021 et décembre 2023. Et c’est en grande partie sur la base de leurs travaux que cet article a été rédigé.</p>
<h2>Transition numérique de l’école : fixer des objectifs clairs</h2>
<p>D’un point de vue conceptuel, la mobilisation de l’expression « transition numérique » est moins simple qu’il n’y paraît à la première lecture. Si l’on en reste à une définition classique, la transition est un processus, plus ou moins continu, qui caractérise l’évolution d’un système entre deux états stables.</p>
<p>Pourtant, s’agissant de l’évolution des institutions éducatives en lien avec le numérique, il semble aujourd’hui bien difficile d’identifier ce que pourrait ou devrait être l’état stable auquel parvenir, ni à quelle échéance, en encore moins la trajectoire pour y parvenir. Sans cet horizon, la transition change de nature.</p>
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<figcaption><span class="caption">Interview de Claudio Cimelli, directeur du Numéri’Lab, sur la place de l’intelligence artificielle à l’école (Éducation France, 2018).</span></figcaption>
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<p>On peut formuler l’hypothèse que le recours au concept de transition témoigne alors davantage d’une idéologie latente qui légitime l’accroissement continu des usages et des enjeux du numérique dans les champs de l’éducation et de la formation, sans pour autant être en mesure de l’inscrire dans des transformations aux finalités explicites.</p>
<p>On peut aussi fléchir le concept de transition pour l’envisager soit de façon rétrospective où la transition permet d’appréhender le chemin parcouru jusqu’à aujourd’hui, soit de façon prospective où le principe et le projet de changement font office d’horizon. On peut aussi y lire un souhait de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/resilience-22971">résilience</a>, la transition étant alors le processus permanent d’adaptation aux évolutions de contexte et à leurs contraintes.</p>
<p>Le principal enseignement de cette approche conceptuelle est sans doute qu’il convient de construire un horizon ou, a minima, une finalité à cette transition annoncée. Cela permettrait notamment aux acteurs de terrain, et en particulier aux enseignantes et enseignants, de donner du sens à leurs pratiques et d’inclure leurs choix pédagogiques dans une dynamique d’ensemble.</p>
<h2>Dans le numérique éducatif, des acteurs interdépendants, entre concurrence et coopération</h2>
<p>Le concept d’écosystème caractérise tout système stable constitué d’êtres vivants qui vivent en interaction dans un milieu spécifique (biotope). Il est souvent mobilisé de façon métaphorique pour désigner l’ensemble des organisations humaines agissant dans le même secteur d’activité ou un même environnement physique et partageant des infrastructures et des services, comme c’est le cas pour le numérique scolaire.</p>
<p>Ce concept est utile à l’analyse de ce qui se joue dans la transition numérique des institutions éducatives mais aussi à la conduite de cette transition. La cartographie des acteurs de l’écosystème (à ses différentes échelles territoriales) est importante. Elle permet de vérifier si toutes les compétences sont bien réunies, disponibles et mobilisées.</p>
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<figcaption><span class="caption">Edtech : un secteur comme les autres ? (Anne-Charlotte Monneret, directrice générale d’Edtech France, sur SQOOL TV, 2022)</span></figcaption>
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<p>Pour autant, c’est dans la dynamique des interactions entre les acteurs que tout se joue. On cite la collaboration et la coopération entre acteurs, souvent dans le cadre de projets au sein de partenariats privilégiés, comme un apport majeur à l’appropriation scolaire efficace des techniques numériques. La recherche scientifique montre pourtant que ces processus, souvent vertueux (pas systématiquement), ne s’enclenchent pas spontanément.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/a-lecole-apprendre-a-evaluer-linformation-dans-un-monde-numerique-215279">À l’école, apprendre à évaluer l’information dans un monde numérique</a>
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<p>On retrouve par ailleurs dans la sphère du numérique éducatif d’autres types d’interactions typiques des écosystèmes comme la symbiose, la compétition, la prédation ou le parasitisme dont la valeur peut être parfois positive et parfois négative. Chacun pourra trouver aisément des exemples…</p>
<p>Comme la transition, l’écosystème peut être considéré comme une métaphore opérante pour ce qui concerne le numérique scolaire. Elle rappelle aussi bien l’interdépendance des acteurs concernés que la nécessité d’en organiser les composantes et d’en soutenir la dynamique.</p>
<h2>Quatre conditions pour soutenir la dynamique des écosystèmes</h2>
<p>Dans le cadre du <a href="https://techne.labo.univ-poitiers.fr/wp-content/uploads/sites/63/2020/09/GTnum_Techne_REVE_portfolio_Dec2023.pdf">projet REVE</a>, plusieurs études de cas (des projets de terrain), deux enquêtes et de nombreux entretiens individuels et groupés avec tous les types d’acteurs du numérique scolaire (élèves, enseignants, cadres du système éducatif, cadres des collectivités territoriales, entrepreneurs du secteur EdTech…), confirment que les concepts de transitions et d’écosystèmes peuvent être mobilisés pour décrire et analyser les usages des techniques numériques à l’œuvre à l’école.</p>
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<p>Via l’analyse de l’expression que les acteurs de terrain proposent de leur expérience et de leurs attentes, ces travaux suggèrent des conditions qui pourraient permettre aux écosystèmes du numérique scolaire de favoriser les processus d’invention et d’innovation. Quatre apparaissent pratiquement systématiquement et répondent directement aux apports de l’analyse des concepts de transition et d’écosystème.</p>
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<li><p>Massivement citée, on retient en premier lieu l’aspiration de toutes et tous à <strong>plus de stabilité des politiques publiques</strong>, afin de pouvoir disposer du temps indispensable à la construction de projets et à l’installation de nouvelles pratiques.</p></li>
<li><p>Vient ensuite l’épineuse question de <strong>l’information</strong>. Beaucoup des enseignants rencontrés, par exemple, expriment leur méconnaissance – voire leur incompréhension – des attentes de l’institution quant aux usages qu’ils peuvent ou doivent faire des techniques numériques. Nombreux également sont les acteurs des écosystèmes qui ignorent l’existence des autres, leur rôle et leurs apports potentiels.</p></li>
<li><p>La connaissance de l’écosystème ne suffit pas, encore faut-il disposer des compétences qui permettront de l’activer, le plus souvent au travers de projets. Une formation de tous aux méthodes et outils de <strong>l’ingénierie de projet</strong> apparaît légitimement à beaucoup comme une nécessité, d’autant plus que bien des réalisations de terrain sont subordonnées au succès de réponses à des appels à projets compétitifs.</p></li>
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<p>Enfin, la transition numérique de l’école, faite par essence de changements, repose sur des initiatives des acteurs de l’écosystème. Cela suppose <strong>une définition claire du cadre d’action de chacun</strong> et du respect de ces prérogatives, avec une solidarité systémique face aux réussites comme aux échecs.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/220733/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pour les travaux de recherche ayant permis la rédaction de cet article, l'unité de recherche Techné (UR-20297) au sein de laquelle travaille Jean-François Cerisier a reçu des financements du ministère de l'Éducation nationale. </span></em></p>On parle souvent de transition numérique de l’école. Mais les objectifs à atteindre sont-ils clairement définis ? Et qu’en est-il du cadre d’action de chacun ?Jean-François Cerisier, Professeur de sciences de l'information et de la communication, Université de PoitiersLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2144932023-11-23T17:54:26Z2023-11-23T17:54:26ZComment la réalité virtuelle peut aider les sportifs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/561067/original/file-20231122-31-end0r2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C18%2C4185%2C3815&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La réalité virtuelle peut être très intéressante dans le cyclisme.</span> <span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Depuis quelques décennies seulement, des méthodes d’entraînement se développent pour se centrer sur la plasticité, c’est-à-dire la modification, du système nerveux en vue d’améliorer la performance motrice. Certaines impliquent l’usage de technologies qui vont s’avérer être un très bon stimulant. Parmi celles-ci, la réalité virtuelle (Virtual Reality, VR) tient une place de plus en plus importante. La VR consiste en la simulation par ordinateur d’un environnement tridimensionnel avec lequel une personne peut interagir de manière apparemment réelle ou physique, à l’aide d’un équipement électronique spécial tel qu’un casque avec deux écrans intégrés (un par œil). Aujourd’hui bien développée pour des applications de loisirs, voyons comment elle peut nous permettre d’optimiser la prise en charge d’un entraînement, que ce soit celle d’un patient ou d’un sportif de haut niveau.</p>
<p>La VR est utilisée pour simuler des situations réelles tout en restant dans un contexte sécuritaire, comme pour entraîner les futurs chirurgiens à pratiquer des opérations délicates ou chez des patients pour simuler des mouvements difficiles à effectuer et/ou varier les environnements de pratique tout en restant en milieu hospitalier, par exemple <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36211591/">dans le cadre de la rééducation</a>. Quel que soient le type de population et le type d’intervention, la grande majorité des auteurs s’accorde à dire que la VR accroît les bénéfices de la pratique physique. Essayons de comprendre l’effet que peut avoir la VR sur un individu dans ses différentes dimensions associées à la performance.</p>
<h2>Effets cardiovasculaires</h2>
<p>En plus des évaluations subjectives de l’état psychologique, l’enregistrement des réactions physiologiques des sujets a également montré des changements significatifs lors de l’utilisation de la VR. L’une des mesures phares utilisée en VR est l’activité électrodermale, qui est une mesure classique de l’effet d’une situation stressante sur un individu. À l’image des détecteurs de mensonges, les appareils mesurent la conductance de la peau, qui est directement liée à la sudation. Celle-ci <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/32256856/">augmente instantanément au moindre stress vécu</a>. Ainsi, être immergé dans un grand huit en VR induit immédiatement une réponse importante de stress, démontrée par le ressenti subjectif des individus, mais aussi par leur réaction physiologique, telle qu’une augmentation de la fréquence cardiaque ou bien sûr de la réponse cutanée.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/561088/original/file-20231122-23-33q5qw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/561088/original/file-20231122-23-33q5qw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/561088/original/file-20231122-23-33q5qw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/561088/original/file-20231122-23-33q5qw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/561088/original/file-20231122-23-33q5qw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/561088/original/file-20231122-23-33q5qw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/561088/original/file-20231122-23-33q5qw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une utilisatrice de VR teste un système qui simule le vide sous ses pieds pour lutter contre le vertige.</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>La VR est donc un stresseur naturel pour notre système nerveux autonome, qui contrôle les fonctions vitales du corps (fréquence cardiaque, respiration, etc.). S’appuyant sur ce fait, des applications professionnelles proposent de se préparer à un entretien d’embauche en le simulant virtuellement, ou encore d’appréhender son arachnophobie en étant confronté à des araignées virtuelles. Dans le sport, la VR est utilisée aussi pour appréhender certaines situations stressantes tout en restant en sécurité, telle qu’une descente en cyclisme à pleine vitesse. La VR peut également servir à simuler l’ambiance d’une compétition (bruit, public, musique), facteur de stress important qui met souvent à mal la performance sportive, pourtant répétée des milliers de fois au calme à l’entraînement.</p>
<h2>Effets sur les fonctions cognitives</h2>
<p>La VR semblant être un fort stimulant pour les fonctions cérébrales, nous nous sommes posé la question de son efficacité si utilisée de manière chronique sur les performances de notre cerveau. Nous avons mené au <a href="https://www.c3s.fr/">laboratoire C3S de l’Université de Franche-Comté</a> une expérimentation visant à <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37029516/">tester les effets d’un entraînement en VR couplé à de l’exercice physique</a> sur les fonctions de mémorisation, d’inhibition ou encore d’attention de notre cerveau.</p>
<p>Associer un jeu vidéo, virtuel ou non, à de l’exercice physique est appelé de l’« exergame ». Ainsi, est-ce que jouer en VR est bénéfique pour nos capacités cérébrales ? La réponse est oui. Après un entraînement de seulement 5 jours, à raison de 15 minutes par jour, l’usage d’un exergame virtuel (tel qu’un jeu de danse), permet d’augmenter des performances spécifiques de notre cerveau, telles que le temps de réaction, l’inhibition ou la capacité d’observation. Le jeu utilisé ici consistait à couper des petits cubes projetés face au joueur à plus ou moins grande vitesse et à différents endroits, à l’aide d’un sabre dans chaque main, le tout en évitant d’autres projectiles (bombes). Il implique donc des gestes précis et rapides, associés à une analyse fine des objets et des choix à faire en un temps très court (dois-je couper ou éviter ?). A contrario, pratiquer la même quantité d’activité physique seule (15min par jour pendant 5 jours de mouvements similaires, mais sans l’immersion et le jeu), n’a donné aucun résultat sur ces mêmes fonctions. La plus-value d’un jeu en VR sur les effets cognitifs de l’exercice ici est sans appel. Ces résultats peuvent être expliqués par le côté ludique et la stimulation visuelle supplémentaires apportés par la VR.</p>
<h2>Effets sur le système moteur</h2>
<p>Outre les fonctions cognitives, lorsqu’il s’agit d’utiliser une telle technologie en entraînement ou en rééducation de la fonction motrice, il vient la question de savoir si les effets peuvent aussi s’étendre sur le système neuromusculaire (qui commande les mouvements). À ce sujet, les études par électroencéphalographie (EEG) ont donné des résultats variés. Si la VR est connue pour <a href="https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.1900648116">induire une activation cérébrale importante au niveau des régions sensorielles</a>, ce phénomène est peu étudié au regard du système moteur (voie motrice de l’aire motrice cérébrale aux neurones moteurs de la moelle épinière). Il existe quelques rares études sur le sujet, réalisés lors de situations très spécifiques. Par exemple, la VR permettrait de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23197454/">faciliter l’apprentissage moteur</a> de séquences de mouvements des doigts réalisés virtuellement, ou aiderait à <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23035951/">stimuler le système moteur</a> en complément d’une rééducation classique post-AVC.</p>
<p>Ainsi, la question de savoir dans quelles mesures la réalité virtuelle peut activer le système moteur et, plus particulièrement, si elle peut affecter la performance neuromusculaire, reste ouverte. De récents résultats sont en revanche très prometteurs. Nous avons par exemple montré qu’une chute simulée virtuellement faisait varier l’activité réflexe du mollet de <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36515975/">la même manière que lors d’une vraie chute</a>. L’activité réflexe (telle que testée par le médecin grâce à une frappe du tendon avec un petit marteau), est cruciale pour le contrôle de la motricité. Cette dernière étant gérée par la moelle épinière, cela montre qu’une situation virtuelle peut induire une modulation qui va bien au-delà du cerveau. Le cerveau n’est donc pas le seul dupé par la simulation virtuelle… mais bien une large partie du système moteur. Ces résultats offrent des perspectives prometteuses pour l’utilisation de la VR sur l’entraînement des fonctions motrices. Plus particulièrement, cette dernière étude montre que les activités sportives qui impliquent des sauts ou de la course, mouvements pour lesquels l’activité réflexe des jambes est primordiale, pourraient largement bénéficier de la VR. La pratique intensive des sauts à l’entraînement étant très traumatisante, notamment pour les articulations, la VR permettrait d’augmenter les effets de l’entrainement sans toutefois augmenter la charge de travail physique.</p>
<h2>Recommandations pratiques</h2>
<p>Séduit par l’idée d’utiliser la VR dans un cadre d’entraînement ? Voici quelques trucs et astuces pour que l’expérience se déroule au mieux et soit surtout efficace. Les effets de la VR sont par exemple très dépendants de la réceptivité de l’individu à cette intervention. La manière dont une personne réagit et interagit avec les divers environnements virtuels dépend ainsi d’un certain nombre de caractéristiques technologiques et psychologiques.</p>
<p>Le degré d’immersion est par exemple déterminé par les caractéristiques technologiques de la VR telles que la résolution, la fréquence d’images, ou encore le champ de vision. Ainsi, il est prouvé que des graphiques plus réalistes dans un environnement virtuel ont un <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26340855/">effet positif sur l’immersion</a>.</p>
<p>Prêtez donc attention aux caractéristiques des appareils que vous utilisez, en prenant par exemple le plus grand champ de vision (Field of View, ou FOV : 100° étant le minimum pour avoir une meilleure immersion), un bon taux de rafraichissement (refresh rate, 60 Hz étant la norme pour voir une image fluide, mais plus élevé est encore mieux). Le poids du casque peut aussi avoir son importance, pouvant être lourd à porter sur du long terme.</p>
<p>Certains individus ont une meilleure propension à réagir à la VR : avoir une capacité à s’immerger dans des contextes variés, une capacité à ignorer les distractions, le sentiment d’être “captivé”. Cette caractéristique, qu’on appelle « le sentiment de présence », s’évalue habituellement par questionnaire.</p>
<p>Un autre facteur très important est l’ampleur de la stimulation sensorielle. L’effet d’immersion est plus grand dans le cas d’une stimulation simultanée d’un plus grand nombre de systèmes sensoriels, de la correspondance des stimulations de différentes modalités et son intensité. Faire correspondre la position de l’individu avec la situation simulée permet par exemple d’avoir des retours sensoriels proprioceptifs congruents avec la stimulation visuelle générée par la VR (par exemple être assis pour un grand huit virtuel). La possibilité de naviguer librement dans l’environnement virtuel et d’interagir avec des objets virtuels (systèmes à 6 degrés de liberté, ou DoF : degrees of Freedrom), lorsqu’ils sont modélisés de manière réaliste, contribue aussi grandement au sentiment de réalisme.</p>
<h2>Quelles contre-indications ?</h2>
<p>Outre les contre-indications inhérentes aux contenus diffusés (comme certaines vidéos ou jeux vidéos), tels que la sensibilité visuelle voire l’épilepsie si le contenu contient trop de flashs lumineux, il existe un trouble bien particulier qui est spécifique à la VR. La cybercinétose (ou « cybersickness », en anglais), est le fait de ne pas tolérer la réalité virtuelle, d’en ressentir des nausées ou des vertiges. C’est un trouble sensoriel qui est en fait la version 3.0 du mal de mer (« cinétose » du coup). La cybercinétose résulte de conflits sensoriels entre la vision et le système de l’équilibre (le système vestibulaire dans l’oreille interne). Ainsi, percevoir des mouvements qui ne correspondent pas aux mouvements réels du corps peut générer ce genre de trouble chez certains individus particulièrement sensibles.</p>
<p>La VR semble un outil très puissant pour stimuler à la fois le système cardiovasculaire, les fonctions cognitives et le système moteur. Ajoutée à l’exercice, elle permettrait par exemple d’augmenter les sollicitations cognitives, tout en rendant l’effort plus ludique. Cela résulterait en des gains significatifs sur certaines performances. Vous l’aurez compris, dans « réalité virtuelle », il y a « réalité » : plus les effets de la VR sont réalistes plus les gains seront grands. Associer à la VR des stimulations sensorielles qui correspondent à la situation stimulée permettrait aussi grandement d’augmenter le sentiment de réalisme. Par exemple, faire du vélo virtuel, tout en étant sur un vélo d’appartement avec un ventilateur face à nous qui simule le vent…</p>
<p>Attention toutefois à l’utiliser avec parcimonie, pour éviter les troubles divers ! Comme toute technologie, elle ne doit pas se substituer à l’exercice réel si celui-ci est possible, mais être un complément manipulé avec intelligence. Par exemple, même si très réaliste en réalité virtuelle, rien ne vaut une vraie promenade en forêt…</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=250&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/485612/original/file-20220920-3440-4oxruu.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=314&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la Fête de la science (qui a lieu du 6 au 16 octobre 2023 en métropole et du 10 au 27 novembre 2023 en outre-mer et à l’international), et dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition porte sur la thématique « sport et science ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214493/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sidney Grosprêtre ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>S’entraîner, non pas sur un terrain, mais dans une salle avec un casque de réalité virtuelle sur la tête peut sembler saugrenu, et pourtant des effets très bénéfiques existent.Sidney Grosprêtre, Maître de conférences en neurophysiologie, Université de Franche-Comté – UBFCLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2144112023-10-22T15:08:32Z2023-10-22T15:08:32Z« L’envers des mots » : Haptique<p>Le terme <em>haptique</em> a été proposé en 1892 par le philosophe et médecin Max Dessoir afin de désigner l’étude du toucher par un mot similaire à « optique » ou « acoustique ». Ce mot est issu du grec ἅπτομαι (haptomai) signifiant « je touche ». Il est lié à plusieurs lemmes du grec ancien : <a href="https://outils.biblissima.fr/fr/eulexis-web/">ἅπτω</a>, (háptô) qui désigne le toucher, <a href="https://outils.biblissima.fr/fr/eulexis-web/">ἁπτός</a> (haptόs) évoquant l’aspect tangible ou palpable, ou encore <a href="https://outils.biblissima.fr/fr/eulexis-web/">ἁπτικός</a> (haptikόs) qui décrit la qualité d’être propice au toucher.</p>
<p>L’étude de l’haptique est interdisciplinaire. Par exemple, les biologistes ont identifié les <a href="http://dx.doi.org/10.1121/1.397184">mécanismes</a> sous-jacents de ce sens. Leurs études révèlent que les sensations <em>tactiles</em> sont générées par quatre types de neurones sensoriels appelés <em>mécanorécepteurs</em>, caractérisés par leur taille et leur profondeur variable dans la peau. Cette diversité leur permet de détecter des déformations de la peau de vitesse et d’amplitude variées. D’autres types de capteurs situés dans les muscles, tendons, et articulations perçoivent des sensations de force, ce que l’on appelle la <em>kinesthésie</em>. Ainsi, les sensations haptiques englobent un large éventail de perceptions, incluant les vibrations, les textures, la température, la dureté, le poids et la forme à différentes échelles.</p>
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<a href="https://theconversation.com/web-immersif-et-si-nous-ressentions-internet-206648">Web immersif : et si nous ressentions Internet ?</a>
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<p>Des psychologues se penchent quant à eux sur la perception, en étudiant par exemple les <a href="https://doi.org/10.2307/1416558">seuils de perception</a> en fonction de la fréquence et de l’amplitude des signaux mécaniques. Plus généralement, la <a href="https://www.taylorfrancis.com/books/mono/10.4324/9781315740218/ecological-approach-visual-perception-james-gibson">théorie de la perception écologique</a> de Gibson <a href="https://doi.org/10.1037/h0046962">s’étend au toucher</a>. En effet, cette théorie montre que la perception n’est pas qu’une simple interprétation passive de signaux sensoriels, mais résulte également de l’exploration active de l’environnement par l’individu, influencée donc à la fois par ses sensations et ses <a href="https://doi.org/10.1016/0010-0285(87)90008-9">mouvements exploratoires</a>. Ainsi, la perception du toucher renvoie aux origines étymologiques de l’haptique qui couvrent à la fois le fait de toucher et de manipuler des objets physiques.</p>
<p>Une fois les mécanismes perceptifs et cognitifs identifiés, des roboticiennes et roboticiens se sont intéressés aux façons de générer des sensations haptiques de manière contrôlée avec des dispositifs haptiques. La conception de ces dispositifs est un compromis délicat entre les sensations haptiques qu’ils peuvent stimuler, leurs caractéristiques telles que l’intensité ou la fréquence, et les propriétés des mouvements de l’utilisateur captées par le dispositif, comme le nombre de dimensions ou la taille de l’espace de travail. Par exemple, des dispositifs à retour de force permettent de toucher des objets virtuels en <a href="http://doi.org/10.1145/259963.260039">deux</a> ou <a href="http://ai.stanford.edu/%7Ejks/pubs/1994-Massie-salisbury-asme-sohi.pdf">trois</a> dimensions, et ainsi sentir leur forme, leur dureté, et même leur poids.</p>
<p>Enfin, les informaticiennes et informaticiens, en particulier spécialistes en <a href="https://www.afihm.org/">Interaction Humain-Machine</a>, s’intéressent à la façon dont les gestes et les sensations haptiques peuvent être utilisés dans des systèmes numériques. Par exemple le retour haptique permet de compléter ou <a href="https://webpages.tuni.fi/utacs_history/micole/about.1.html">remplacer les informations visuelles</a> pour les personnes ayant des déficiences visuelles, peut être utilisé dans des <a href="https://inria.hal.science/inria-00319416/">simulations médicales</a>, ou encore de faire ressentir des objets virtuels sur des <a href="https://thomaspietrzak.com/research/happiness/">surfaces tactiles</a> et en <a href="https://hal.science/hal-04216306">réalité virtuelle</a>.</p>
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<p>Ces technologies sont progressivement intégrées dans des produits grand public. Outre les vibreurs des téléphones mobiles, les contrôleurs de jeux intègrent des <a href="https://www.razer.com/fr-fr/technology/razer-hypersense">vibreurs</a> ou des moteurs pour créer du <a href="https://www.logitechg.com/en-us/innovation/trueforce.html">retour de force</a>. Des effets plus complexes sont également envisageables, comme l’effet <a href="https://doi.org/10.1109/TUFFC.2007.596">« squeeze film »</a> qui crée un coussin d’air entre une surface tactile et le doigt, modifiant ainsi la <a href="https://www.hap2u.net/haptic-technology/">friction perçue</a> et donc permettant de <a href="https://thomaspietrzak.com/research/tactiletextures/">créer des textures</a>. Il est aussi possible de déplacer de l’air grâce à des <a href="https://www.ultraleap.com/haptics/">matrices d’actuateurs ultrasoniques</a>, stimulant ainsi la peau à distance. Des <a href="https://www.skinetic.actronika.com/">vestes haptiques</a> similaires à celles décrites dans le roman <a href="https://www.lisez.com/livre-de-poche/ready-player-one/9782266299398"><em>Ready Player One</em></a> offrent du retour sur la partie supérieure du corps.</p>
<p>L’haptique représente ainsi à la fois une discipline ancienne et une technologie émergente pleine de promesses.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214411/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Pietrzak ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’haptique, ou science du toucher, est de plus en plus mobilisée à mesure que se développement les dispositifs de réalité virtuelle.Thomas Pietrzak, Maître de Conférences HDR, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2150892023-10-10T21:12:55Z2023-10-10T21:12:55ZPourquoi le métavers peine-t-il à prendre auprès des consommateurs ?<p>Cette semaine encore, <a href="https://theconversation.com/topics/mark-zuckerberg-54121">Marc Zuckerberg</a> défendait les mérites du <a href="https://theconversation.com/topics/metavers-111662">« métavers »</a> dont il rêve. Il pourrait même nous permettre de <a href="https://www.leparisien.fr/high-tech/le-metavers-pourrait-permettre-de-discuter-avec-ses-proches-decedes-selon-mark-zuckerberg-03-10-2023-GFCWEJSHEJFJNONMFYXVSIWCHE.php">dialoguer avec des personnes décédées</a>. À quelques jours du lancement du casque de réalité virtuelle Quest 3, le fondateur de <a href="https://theconversation.com/topics/facebook-22128">Facebook</a> rappelle par la même qu’il n’a pas renoncé à ses ambitions affichées il y a un an, lorsqu’il <a href="https://theconversation.com/le-metavers-de-mark-zuckerberg-pourra-t-il-rester-sous-son-controle-171190">renommait son groupe « Meta »</a> : connecter les personnes et les entreprises via le métavers plutôt que via les plates-formes traditionnelles de médias sociaux. Des questions se posaient en effet bel et bien sur ses <a href="https://leclaireur.fnac.com/article/359380-meta-a-t-il-abandonne-son-metavers/">intentions actuelles</a>, le système qu’il défend semblant <a href="https://kotaku.com/meta-facebook-horizon-worlds-vr-mark-zuckerberg-1849669048">peu populaire</a> auprès des consommateurs.</p>
<p>Le métavers est un <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/15252019.2021.2001273">monde virtuel interactif, immersif et collaboratif</a> partagé par les internautes ou, plus précisément selon Jooyoung Kim, professeur à l’Université de Géorgie, un « réseau persistant interopéré d’environnements virtuels partagés où les gens peuvent interagir de manière synchrone par le biais de leurs avatars avec d’autres agents et objets ». Le terme provient du roman de science-fiction <em>Snow Crash</em> publié en 1992 par Neal Stephenson. Monde virtuel tridimensionnel habité par des avatars de personnes réelles, le développement du métavers est lié aux progrès de la réalité virtuelle et des technologies immersives.</p>
<p><div data-react-class="InstagramEmbed" data-react-props="{"url":"https://www.instagram.com/p/Cs87Ok2h5xq/ ?utm_source=ig_embed\u0026ig_rid=aa5d242\u003csup\u003ee\u003c/sup\u003e-21ee-4130-94e6-d463df5f1f58\"/\u003e\u003c/p\u003e\n\n\u003cp\u003eLes implications et les avantages potentiels du métavers, que d’autres entreprises à l’instar de Second Life tentent de dessiner, sont vastes. Tel Mark Zuckerberg, ses partisans affirment qu’il peut révolutionner notre façon de vivre, de travailler, d’apprendre, de jouer et de socialiser. La fusion des mondes physique et numérique offre aux individus de nouveaux niveaux de liberté et de créativité, leur permettant d’explorer des environnements virtuels intégrés au monde réel.\u003c/p\u003e\n\n\u003cp\u003eToutefois, en raison de la difficulté à réaliser ces promesses initiales, de \u003ca href=","accessToken":"127105130696839|b4b75090c9688d81dfd245afe6052f20"}"></div></p>
<h2>Des risques et des menaces</h2>
<p>Pourquoi les consommateurs seraient-ils réticents à une innovation aussi attrayante que le métavers ? Telle a été la question qui a animé notre <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/INTR-08-2022-0647/full/html">recherche récente</a>. Il ne va pas de soi que tous les consommateurs allaient parfaitement accepter une telle technologie. Les résultats d’une étude qualitative auprès 66 consommateurs indiquent qu’il existe deux grands types de barrières à l’adoption du métavers : des barrières psychologiques et des barrières fonctionnelles.</p>
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<p>Une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0019850117301955">barrière psychologique</a> se dresse lorsqu’une innovation entre en conflit avec les normes et valeurs sociales d’une personne. Elle apparaît également lorsqu’une innovation est perçue comme risquée ou menaçante. Dans le cas du métavers, <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/INTR-08-2022-0647/full/html">l’étude</a> révèle sept sous-types de barrières psychologiques : une mauvaise compréhension du métavers et de ses particularités, l’absence ou insuffisance de régulation pour superviser et gérer efficacement le métavers, des inquiétudes quant au potentiel de dépendance du métavers, la crainte que le métavers entraîne des pertes de relations sociales réelles, la peur d’être coupé du monde et déconnecté de la réalité, les problèmes de confidentialité des données personnelles que pourraient créer le métavers et enfin la perception du métavers comme quelque chose de peu éthique au niveau écologique et où tout serait en œuvre pour faire consommer les consommateurs toujours plus.</p>
<p>Un enquêté, âgé de 25 ans, a ainsi pu nous détailler ses craintes :</p>
<blockquote>
<p>« Je pense qu’il sera impossible de réglementer. Car c’est justement le principe du métavers que de donner le maximum de liberté aux gens. Mais du coup ça devient effrayant… un monde sans limites ! Je pense qu’il y a un vrai risque que cela devienne une véritable anarchie, sans aucune règle. Et dans ce cas, ça laisse la porte ouverte à beaucoup d’excès. »</p>
</blockquote>
<p>Un quadragénaire, nous a lui fait part de sa peur de devenir accro :</p>
<blockquote>
<p>« J’ai toujours l’impression qu’il vaut mieux ne pas trop mettre le doigt sur ce genre de choses. Il doit être assez facile de s’y laisser prendre et de ne pas pouvoir en sortir. À mon avis, il vaut mieux ne jamais commencer parce qu’on peut vite se retrouver piégé et dépendant. Je préfère ne pas prendre le risque. »</p>
</blockquote>
<p>Il est d’ailleurs intéressant de noter sur ce point que d’ordinaire, les freins à l’adoption d’une innovation sont liés au fait que l’innovation ne serait pas suffisamment bonne. Or ici, on observe le phénomène inverse : certains individus s’opposeraient au métavers parce qu’il serait trop bon !</p>
<h2>Peu d’intérêt, incrédulité et nausée</h2>
<p>Une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0019850117301955">barrière fonctionnelle</a> émerge dès qu’un consommateur perçoit les attributs d’une innovation comme dysfonctionnels ou inadaptés à ses besoins personnels et à ses attentes d’utilisation. Trois types de résistance fonctionnelle sont mis en évidence par <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/INTR-08-2022-0647/full/html">nos</a> travaux.</p>
<p>La première, à l’image de ce que témoigne cette enquêtée de 41 ans, réside dans l’incapacité à percevoir les avantages du métavers, notamment en comparaison à l’internet actuel :</p>
<blockquote>
<p>« C’est séduisant, c’est sûr… D’une certaine façon, ça fait un peu rêver. Mais je ne sais pas… Je ne vois pas vraiment l’intérêt de la chose. Peut-être que j’ai raté quelque chose. Mais là, j’avoue que ce n’est pas clair pour moi. Peut-être que ce n’est pas pour moi ? »</p>
</blockquote>
<p>Cet homme de 21 ans semble, lui comme bien d’autres, incrédule quant à la possibilité que le métavers soit pleinement fonctionnel dans un avenir proche :</p>
<blockquote>
<p>« Je ne pense pas que ce soit pour tout de suite. Je n’y crois pas. J’ai l’impression que Mark Zuckerberg et tous ceux qui promettent le métavers sont allés un peu vite. Avant que tout ce qui est promis soit en place et fonctionne bien, si cela arrive un jour, il faudra des décennies. »</p>
</blockquote>
<p>Un ensemble de barrières physiques (symptômes de nausée, de désorientation et de malaise) causées par les techniques de réalité virtuelle utilisées par le métavers sont enfin évoquées.</p>
<p>Cette dernière barrière, comme d’autres (un métavers qui isole du monde réel, les risques liés à l’usage des données personnelles…), semblent stables et donc très difficiles à éliminer. Elles vont sans nul doute persister dans le temps, indépendamment de la façon dont le métavers va se réaliser. Contrairement à elles, des craintes plus conjoncturelles, comme le manque de compréhension de ce qu’est le métavers ainsi que sur son utilité, peuvent être levées à moyen terme en fonction de l’évolution de la technologie et du niveau d’information des individus. Les concepteurs devraient s’y intéresser de près.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/215089/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Damien Chaney ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Qu’ils craignent de nombreux dangers ou qu’ils n’en comprennent pas l’intérêt, beaucoup se montrent réticents à se plonger dans le monde virtuel dont Mark Zuckerberg et d’autres rêvent.Damien Chaney, Professor, EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2096212023-07-12T15:38:03Z2023-07-12T15:38:03ZLa réalité virtuelle va-t-elle se démocratiser maintenant qu’Apple est de la partie ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/537022/original/file-20230712-29-ph4sqr.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C3%2C1196%2C894&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En juin 2023, Apple lançait son casque de réalité virtuelle au prix de 3500 dollars.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:AR-_Apple_Vision_Pro_%282023%29.png">Wikimedia commons/Steve Zhang</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>En 2015, le magazine <em>Time</em> avait annoncé que la technologie de la réalité virtuelle (RV) allait <a href="https://time.com/3987022/why-virtual-reality-is-about-to-change-the-world/">« changer le monde »</a>. En effet, depuis que Facebook a payé 3 milliards de dollars pour racheter le fabricant de casques Oculus VR en 2014, il a été largement proclamé que la RV était la <a href="https://fortune.com/longform/virtual-reality-struggle-hope-vr/">« prochaine grande innovation »</a> dans le divertissement grand public. Le dirigeant Mark Zuckerberg cherche notamment à assurer l’avenir de son groupe, devenu Meta fin 2021, avec cette technologie qui permet notamment d’accéder au <a href="https://theconversation.com/fr/topics/metavers-111662">« métavers »</a>, ces mondes virtuels annoncés comme étant le futur d’Internet.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1453794227154927617"}"></div></p>
<p>Malgré ces promesses ambitieuses et la disponibilité accrue des casques, la réalité virtuelle reste néanmoins loin d’être une technologie grand public. Alors que le chiffre d’affaires des ventes de jeux a dépassé 185 milliards de dollars en 2022 et devrait continuer à <a href="https://www.statista.com/outlook/dmo/digital-media/video-games/worldwide?currency=USD">croître de 8 % par an jusqu’en 2027</a>, les ventes de casques de RV ont de surcroît <a href="https://www.ecranmobile.fr/Les-ventes-de-casques-de-realite-virtuelle-chutent-de-12_a73027.html">reculé de 12 % en 2022</a>.</p>
<p>Faut-il, dès lors, ajouter cette technologie à la liste des investissements ratés, à l’image de <a href="https://medium.com/nyc-design/the-assumptions-that-led-to-failures-of-google-glass-8b40a07cfa1e">l’échec des Google Glass</a> il y a plus de 10 ans ? Pour l’instant, le métavers se résume à des appels Zoom maladroits, à quelques jeux amusants utilisant la réalité virtuelle et à des avatars numériques. En fait, le jeu vidéo en ligne <em>Fortnite</em> est peut-être ce qui s’en rapproche le plus, même si l’on prédit que les possibilités d’utilisation du métavers iront bien au-delà du jeu. Cela ne veut pas dire que ces technologies n’ont pas un potentiel énorme, mais au-delà de tout le battage médiatique, elles n’ont pas encore d’impact significatif sur nos vies. Comment cela se fait-il ?</p>
<h2>Fatigue oculaire et maux de tête</h2>
<p>L’immersion dans un monde virtuel reste donc largement réservée à certains adeptes précoces. Notre <a href="https://www.storyfutures.com/resources/audience-insight-report">étude</a> (qui a utilisé les casques Quest 2 de Meta, leader du marché) met en évidence une série de « frictions » qui empêchent l’utilisateur de terminer ou de poursuivre son utilisation du casque.</p>
<p>Ces frictions, plus ou moins importantes, comprennent :</p>
<ul>
<li><p>les facteurs contextuels : par exemple, manque de temps car la réalité virtuelle est en concurrence avec d’autres engagements et d’autres formes de divertissement médiatique ;</p></li>
<li><p>les problèmes logistiques : par exemple, espace de jeu insuffisant et problèmes de sécurité connexes ;</p></li>
<li><p>les facteurs physiques, tels que l’inconfort, le mal des transports, la fatigue oculaire et les maux de tête ;</p></li>
<li><p>la frustration sociale : la réalité virtuelle est perçue comme un facteur d’isolement et on la croit peu apte à favoriser les interactions avec d’autres personnes à distance ;</p></li>
<li><p>le manque d’un contenu varié et suffisant.</p></li>
</ul>
<p>Nous avons constaté que la réalité virtuelle exigeait un niveau élevé d’implication de la part de l’utilisateur : entrer dans l’expérience de la réalité virtuelle n’est pas sans effort. Plutôt que de regarder ou de se faire raconter une histoire, l’utilisateur se trouve à l’intérieur de l’histoire, il y participe et en fait l’expérience d’une manière plus intime. En trompant les sens des utilisateurs pour leur donner l’impression d’être présents dans le monde virtuel, la RV prélève un tribut cognitif.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/AfRMUMFK4Nc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Webinar Audience Insight Report : the users of immersive technologies (2021, en anglais).</span></figcaption>
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<p>La transition vers et hors de la réalité virtuelle est donc cruciale, ce qui souligne l’importance du soin accordé à l’expérience de l’entrée et de la sortie pour aider les utilisateurs à réussir la transition et atténuer bon nombre de ces frictions. Notre étude a montré qu’à l’heure actuelle, le casque n’était pas jugé suffisamment attrayant pour être utilisé régulièrement et qu’il était plutôt relégué aux occasions spéciales.</p>
<p>Si l’introduction du Quest Pro en 2022 a permis d’améliorer les performances, les graphismes et l’ergonomie, les critiques ont rapidement remarqué qu’il était en fait plus lourd que le Quest 2 ou encore qu’il avait une <a href="https://www.theverge.com/23451629/meta-quest-pro-vr-headset-horizon-review">durée de vie de batterie plus courte</a>.</p>
<h2>Des casques à 3 500 dollars</h2>
<p>En juin 2023, <a href="https://www.forbes.com/sites/richardnieva/2023/06/05/apple-unveils-vision-pro/?sh=39deef7811de">Apple est entré dans l’arène</a> avec un nouveau casque – bien qu’au prix ahurissant de 3 500 dollars –. La marque à la pomme va-t-elle ouvrir ainsi les portes du métavers ? En effet, l’iPhone reste le plus grand succès de l’histoire des produits de consommation, l’AppStore est l’un des modèles économiques les plus rentables et les AirPods sont probablement le dispositif portable le plus populaire avec <a href="https://www.cnbc.com/2022/01/03/apple-airpods-business-grew-like-gangbusters-over-the-holidays.html">90 millions d’exemplaires vendus au cours du trimestre des fêtes en 2021</a> (les utilisateurs les portent même lorsqu’ils ne les utilisent pas), offrant ainsi un portail vers au moins un métavers audio.</p>
<p>Apple réussira-t-il là où Meta a échoué jusqu’à présent ? Bien qu’il soit trop tôt pour le dire, il est clair qu’en donnant la priorité à l’expérience de l’utilisateur, Apple pourrait surmonter les nombreuses frictions liées à l’entrée et à la sortie du virtuel. Les <a href="https://www.inverse.com/tech/apple-vision-pro-hands-on-first-impressions">premiers retours d’expérience</a> suggèrent que le suivi précis des yeux et le contrôle des gestes de la main fonctionnent de façon harmonieuse. Il est évident qu’Apple devra investir dans le contenu et baisser le prix, mais ce casque pourrait bien être celui que l’utilisateur voudra utiliser.</p>
<p>En outre, le géant californien évite dans sa communication toute mention au métavers pour contourner <a href="https://www.coindesk.com/business/2023/02/01/facebook-parent-metas-metaverse-division-lost-137b-in-2022/">l’échec perçu</a> de son principal concurrent dans ce domaine : les investisseurs ont en effet demandé à Meta de réduire ses dépenses dans le métavers, car cela avait réduit ses bénéfices. En résumé, la magie de la conception conviviale d’Apple présente un potentiel important à long terme. Cependant, il reste aux développeurs à trouver quel pourraient être les cas d’utilisations idéaux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209621/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Chloe Preece ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le manque de contenus ou encore l’inconfort ressenti avec les casques freinent l’essor de la réalité virtuelle. Apple entre aujourd’hui sur le marché avec l’ambition de lever ces obstacles.Chloe Preece, Associate Professor in Marketing, ESCP Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2066482023-06-08T18:10:36Z2023-06-08T18:10:36ZWeb immersif : et si nous ressentions Internet ?<p>Si, aujourd’hui, nous sommes habitués à surfer sur Internet, partie émergée d’un énorme iceberg de données interconnectées, les évolutions technologiques récentes devraient bientôt nous permettre de nous immerger dans cet océan bouillonnant de big data. Ce devrait être le cas avec le nouveau casque <em>Apple Vision Pro</em> qui sort ce vendredi 2 février aux États-Unis. </p>
<p>L’immersion vise à procurer à l’utilisateur un sentiment de présence en utilisant des technologies de captation et restitution sensorielle : l’utilisateur se sent transporté dans l’environnement digital créé par des technologies numériques, à tel point qu’<a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S027249442200010X">il ressent ces objets numériques virtuels comme faisant partie de sa réalité</a>.</p>
<p>De leur côté, les <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/0144929X.2022.2156387">systèmes numériques détectent et interprètent de mieux en mieux les comportements et les émotions de leurs interlocuteurs</a>, à tel point que l’humain a l’impression que ce système est conscient de sa présence et interagit volontairement.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-robots-humano-des-peuvent-ils-nous-faire-croire-quils-ressentent-des-emotions-198460">Les robots humanoïdes peuvent-ils nous faire croire qu’ils ressentent des émotions ?</a>
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<p>Les films <em>Matrix</em> et plus récemment <em>Ready Player One</em> reflètent bien cette idée : s’interposer entre les récepteurs sensoriels de l’homme et la réalité afin de créer un monde nouveau, que l’on appelle parfois le « métaverse ». Ce concept est déjà utilisé depuis de plusieurs années pour les simulateurs d’aviation ou de conduite, ou pour des parcs de loisirs (<em>L’Extraordinaire Voyage</em> au Futuroscope par exemple).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/metavers-lheure-du-premier-bilan-197149">Métavers : l’heure du premier bilan</a>
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<p>Le web immersif fait suite à trois générations du web : du web 1.0 statique qui ressemble à une « vitrine » d’affichage, au web 2.0 participatif qui intègre les utilisateurs dans la création du contenu, et au web 3.0 dit <a href="https://theconversation.com/de-cambridge-analytica-a-chatgpt-comprendre-comment-lia-donne-un-sens-aux-mots-205534">« sémantique »</a>, qui introduit de l’ingénierie de connaissance pour structurer les données.</p>
<p>Cette quatrième génération, le « web 4.0 » ou « web immersif », doit être très accessible grâce aux <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2452414X18300037">réseaux haut débit 5G et à l’internet des objets (IoT)</a>. Le couplage du web et de la 5G nous fait entrer depuis le début des années 2020 dans l’ère d’un web « ambiant », pervasif et ubiquitaire, où de nombreux objets sont connectés et communiquent de manière autonome.</p>
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<img alt="homme avec des gants à retour haptique et lunettes de RV" src="https://images.theconversation.com/files/529580/original/file-20230601-16-gmw8i5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/529580/original/file-20230601-16-gmw8i5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=432&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/529580/original/file-20230601-16-gmw8i5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=432&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/529580/original/file-20230601-16-gmw8i5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=432&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/529580/original/file-20230601-16-gmw8i5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=543&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/529580/original/file-20230601-16-gmw8i5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=543&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/529580/original/file-20230601-16-gmw8i5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=543&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les gants à retour haptique captent les sensation tactiles et en fournissent à l’utilisateur. Ils permettent notamment de se former à la manipulation d’équipement dangereux.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/hIz2lvAo6Po">XR expo, Unplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Les technologies immersives de <a href="https://helda.helsinki.fi/handle/10138/337180">réalité virtuelle, augmentée ou mixte</a> sont considérées par plusieurs acteurs comme la quatrième révolution du numérique (après les ordinateurs personnels, les ordinateurs portables et les smartphones). Elles devraient permettre une importante métamorphose de la pratique du Web, dont les fonctionnalités risquent d’évoluer plus ou moins rapidement selon le niveau d’adoption de la technologie, du dispositif utilisé, mais aussi selon l’évolution des réglementations relatives à la protection des données.</p>
<h2>À quoi ressemblera Internet avec le web immersif ?</h2>
<p>Les agents conversationnels virtuels (comme ChatGPT) répondent de manière naturelle et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0883540323003522">précise aux requêtes des utilisateurs</a>. Dans le cadre d’un moteur de recherche, les requêtes n’ont plus besoin d’être constituées de mots clés, mais deviennent des discussions naturelles.</p>
<p>Ce type de conversations plus naturelles pour les humains pourrait avoir d’autres applications : un prototype de <a href="https://www.mdpi.com/2076-3417/11/19/9071">thérapies de groupe dans le milieu scolaire</a> a par exemple été testé par 134 étudiants à l’université National Tsing Hua University à Taiwan en 2021. Des systèmes similaires sont testés pour des <a href="https://ieeexplore.ieee.org/abstract/document/8448645">entretiens d’embauche</a> ou des <a href="https://www.mdpi.com/2079-9292/11/1/87">assistants industriels</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/realite-virtuelle-et-sante-mentale-exit-le-divan-place-au-casque-202175">Réalité virtuelle et santé mentale : exit le divan, place au casque ?</a>
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<p>Les réponses des moteurs de recherche pourraient être des objets 3D virtuels transférés à l’utilisateur, ou des visites d’environnements virtuels. Les technologies immersives sont même considérées comme une technologie de rupture qui <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0261517723000067">révolutionne la gestion et le marketing du tourisme</a>.</p>
<p>Par ailleurs, les réseaux sociaux, les chats et les forums sont en train d’être transformés en métavers (<em>second life</em>, <em>Meta Horizon worlds</em>). Les visioconférence peuvent évoluer en <a href="https://dl.acm.org/doi/abs/10.1145/2984511.2984517">« holoportation »</a> : un système développé en 2016 par Microsoft, qui permet de la reconstructions 3D de haute qualité et en temps réel d’un espace entier, y compris les personnes, les meubles et les objets qu’il contient, à l’aide d’un ensemble de nouvelles caméras de profondeur. Cette technologie a également été testée dans le domaine de l’éducation à <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-981-15-0618-5_16">travers quelques prototypes</a>, et a permis de mettre en l’évidence le rôle important de la présence (et de la télé-présence) dans l’enseignement supérieur.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/sur-quelles-technologies-les-metavers-reposent-ils-177934">Sur quelles technologies les métavers reposent-ils ?</a>
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<p>Des casques de réalité mixte autonomes <a href="https://dl.acm.org/doi/abs/10.1145/3386569.3392416">plus légers</a> et plus puissants pourraient permettre l’adoption de cette technologie à grande échelle, avec par exemple le casque <a href="https://www.numerama.com/tech/1398862-meta-grille-la-priorite-a-apple-avec-le-quest-3-son-casque-de-realite-mixte-a-500-dollars.html">Meta Quest 3</a> présenté par Mark Zuckerberg le 1 Juin 2023.</p>
<p>Côté santé, la chirurgie a connu de <a href="https://assets.cureus.com/uploads/review_article/pdf/12751/1612427913-1612427909-20210204-18268-ca29xt.pdf">nombreuses avancées technologiques</a>, depuis la première télé-chirurgie en 2001. Les chirurgiens peuvent de travailler à distance avec un écran tridimensionnel, via des jumelles haute définition – mais la latence moyenne, autour de 700 millisecondes, privilégie les usages d’<a href="https://www.thieme-connect.com/products/ejournals/html/10.5999/aps.2017.44.3.179">entraînement et de planification</a>. La <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6202760/">première opération chirurgicale</a> collaborative de l’épaule au monde à l’aide de la réalité mixte a été réalisée en 2017 à l’hopital Avicenne AP-HP en France. Le <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10439-017-1839-z">retour haptique</a> permet la transmission des informations tactiles aux chirurgiens, ce qui permet de sentir la consistance du tissu et la tension dans les sutures.</p>
<p>Aujourd’hui, plusieurs prototypes de soins médicaux faisant appel à des dispositifs haptiques et de capteurs corporels connectés permettent aussi d’envisager le <a href="https://www.scirp.org/journal/paperinformation.aspx?paperid=122927">diagnostic et les soins à distance</a>. Récemment, la NASA a même <a href="https://www.nasa.gov/feature/innovative-3d-telemedicine-to-help-keep-astronauts-healthy/">envoyé virtuellement des médecins sur l’ISS pour aider les astronautes à rester en forme</a>.</p>
<p>L’e-commerce pourrait aussi bénéficier des technologies immersives : des caméras 3D et des capteurs connectés permettraient de transmettre les mensurations exactes des clients et d’essayer (virtuellement) leurs choix dans des <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.1088/1757-899X/1098/2/022110/meta">chambres d’essayage virtuelles</a> sans se déplacer.</p>
<p>On envisage également que la navigation GPS devienne la navigation « VPS » (pour <em><a href="https://ieeexplore.ieee.org/abstract/document/7275472">Visual positioning system</a></em>) : avec des lunettes de navigation basée sur la réalité augmentée, ainsi que des retours sonores et haptiques, elle deviendrait plus intuitive. Un tel <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/0144929X.2018.1519035">prototype</a> ciblant les personnes âgées a été développé en 2018 à Telecom ParisTech en France.</p>
<p>Enfin, et bien qu’elle soit à ses balbutiements, la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC8419827/">recherche dans le domaine de la « saveur augmentée »</a> vise à développer des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1071581922001483">dispositifs olfactifs</a> pour <a href="https://ieeexplore.ieee.org/abstract/document/8943779">sentir des parfums ou goûter des plats à distance</a>.</p>
<h2>Que peut-on virtualiser ?</h2>
<p>Tous les sens font l’objet de récents progrès scientifiques et technologiques : la vision, le toucher, l’ouïe, l’odorat, le goût, mais aussi les sens du mouvement, de l’équilibre, de la chaleur par exemple. Dans ce sens, une <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-023-37678-4">interface olfactive</a> souple, miniaturisée et sans fil a été ainsi développée pour la réalité virtuelle à l’université de Hong Kong en 2023.</p>
<p>Dans la modalité visuelle, les dispositifs varient en niveau d’immersion : des écrans de smartphone peu immersifs, à des dispositifs semi-immersifs comme les écran incurvés et casques de réalités mixtes, jusqu’aux dispositifs immersifs comme les casques VR (<em>virtual reality</em>). Plus ces casques deviennent économiquement abordables, légers et autonomes, plus <a href="https://financesonline.com/virtual-reality-statistics/">l’adoption de cette technologie augmente</a>. La communauté anticipe que le casque de réalité mixte nouvelle génération <a href="https://www.numerama.com/tech/1405424-jai-essaye-lapple-vision-pro-et-je-commence-a-croire-quil-est-lordinateur-du-futur.html">Apple Vision Pro</a> annoncé le 5 juin 2023 lors de l’<em>Apple Worldwide Developers Conference</em> constitue un pas majeur vers l’adoption de la technologie immersive par le grand public, comme l’a constitué l’iPhone 2G en 2007 pour l’adoption des smartphones.</p>
<p>La modalité sonore accompagne souvent ses dispositifs d’immersion visuels à travers le <a href="https://www.google.fr/books/edition/Spatial_Audio/b3kqBgAAQBAJ?hl=fr&gbpv=0">son spatialisé 3D</a> (le son stéréo traditionnel est diffusé en deux canaux seulement, gauche et droite). Le son spatialisé ajoute une dimension supplémentaire en introduisant des informations de localisation sonore verticales, horizontales et en profondeur. Cette technologie est aujourd’hui <a href="https://www.meta-media.fr/2016/06/01/son-binaural-comment-le-produire.html">bien maîtrisée</a> et largement utilisée dans le domaine des jeux vidéo.</p>
<p>Pour le toucher, il existe des dispositifs dits « intrusifs » (car encombrants) comme les <a href="https://ieeexplore.ieee.org/abstract/document/8470813">gants haptiques</a> et les combinaisons corporelles ; et d’autres dispositifs moins invasifs <a href="https://www.epfl.ch/labs/lmts/lmts-research/haptics/feel-through-dea/">ultra-minces</a> ainsi que des <a href="https://www.caltech.edu/about/news/artificial-skin-gives-robots-sense-of-touch-and-beyond">peaux artificielles connectées</a> sont en développement.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/vous-prendrez-bien-un-sixieme-doigt-200017">Vous prendrez bien un sixième doigt ?</a>
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<p>D’autres dispositifs plus ludiques comme les <a href="https://www.journaldugeek.com/2023/03/01/cette-bouche-connectee-permet-dembrasser-votre-partenaire-a-distance/">bouches artificielles connectées</a> ou des <a href="https://www.menshealth.com/sex-women/g30189806/long-distance-relationship-sex-toys/">sex-toys connectés</a> laissent présager du développement à venir de l’industrie « adulte » sur l’internet de demain.</p>
<h2>Les risques du web immersif</h2>
<p><a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s11948-017-9979-y">Aujourd’hui, les technologies immersives posent déjà des défis éthiques importants</a>, avec des risques potentiels pour la santé mentale, notamment le trouble de dépersonnalisation/déréalisation. Elles sont aussi sujettes à de sérieuses préoccupations liées à la négligence personnelle du corps (réel) des utilisateurs, et des environnements physiques réels. Elles peuvent également être utilisées pour enregistrer des données personnelles qui pourraient être déployées de manière à menacer la vie privée et à présenter un danger lié à la manipulation des croyances, des émotions et des comportements des utilisateurs.</p>
<p>Ces défis se trouveront accentués avec le web immersif. Même si des <a href="https://vr-connection.com/fr/2021/04/29/le-comite-dethique-vr-publie-la-premiere-charte-de-recommandations-sur-lusage-de-la-realite-virtuelle-une-compilation-de-regles-de-precaution-pour-eviter-les-effets/">initiatives existent pour encadrer éthiquement l’usage de la réalité virtuelle</a>, l’aspect addictif du web et l’aspect intrusif de l’IoT posent de nouveaux défis et exigent plus d’effort pour la protection des usagers.</p>
<p>L’insécurité, l’intrusion à la vie privée, l’isolement social, les crimes pornographiques, les délits virtuels, les maux de têtes, les blessures physiques ou l’addiction, tous ces dangers se verront accentués et devront attirer l’attention à la fois des designers et des représentants des usagers pour une utilisation plus sûre et plus éthique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/206648/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ahmed Azough est membre fondateur du Centre Euro-méditerranéen pour la numérisation et la médiation du patrimoine, une association à but non lucratif.</span></em></p>Le nouveau casque de réalité virtuelle d’Apple représente une des facettes de ce que pourrait devenir le web. Où on naviguerait avec nos cinq sens.Ahmed Azough, Professeur de Réalité Virtuelle et Vision par Ordinateur, Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2021752023-05-04T20:16:05Z2023-05-04T20:16:05ZRéalité virtuelle et santé mentale : exit le divan, place au casque ?<p>Selon le cabinet d’analyse Counterpoint, cité par le magazine économique L’Usine Nouvelle, les <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/les-ventes-de-casques-de-realite-virtuelle-et-augmentee-devraient-decupler-d-ici-a-2025.N1174082">ventes de casques de réalité virtuelle et augmentée pourraient décupler d’ici à 2025</a>, en raison notamment de l’arrivée d’Apple dans ce secteur.</p>
<p>Lorsque nous entendons « réalité virtuelle » (RV), nous pensons généralement « jeux vidéo ». Pourtant cette technologie n’est pas réservée aux loisirs, et ses domaines d’application se sont multipliés au fil des années.</p>
<p>Déjà utilisée comme outil de formation, dans des secteurs aussi différents que le <a href="https://reality-academy.fr/management-vr/">management et la vente</a> ou la <a href="https://www.liberation.fr/sciences/espace/la-realite-virtuelle-avancee-potentielle-pour-les-astronautes-20210421_FUQDRLKF7JEFZBWRWX7U4CFKXI/">formation des astronautes</a>, elle est encore mise à contribution pour <a href="https://www.u-bordeaux.fr/actualites/une-semaine-dimmersion-en-simulation-chirurgicale-luniversite-de-bordeaux">entraîner les chirurgiens</a> dans leur pratique.</p>
<p>Et, depuis quelques années, son potentiel pour traiter certains troubles mentaux est également exploré – avec des résultats très encourageants.</p>
<h2>Réalité virtuelle, réalité augmentée : de quoi parle-t-on ?</h2>
<p>Avant de développer ce dernier point, il convient de rappeler ce qu’est la réalité virtuelle.</p>
<p>Cette technologie consiste à immerger un utilisateur dans un monde virtuel au moyen de dispositifs dédiés (casques, visiocubes, grands écrans). Les casques par exemple permettent une immersion forte grâce au couplage des mouvements de la tête de l’observateur avec les images stéréoscopiques affichées sur deux petits écrans. Une fois équipé, l’utilisateur est immergé visuellement et auditivement. Il peut même interagir grâce à des « contrôleurs » rappelant les manettes de jeu vidéo afin d’effectuer des actions, de se déplacer, etc. Des dispositifs plus élaborés peuvent aussi mettre à contribution le corps entier.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/kXsErAGOits?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>La réalité virtuelle permet donc de produire des expériences sensorielles de manière artificielle. Ces expériences peuvent concerner non seulement la vue et l’ouïe, mais aussi l’odorat ou le toucher – via des dispositifs « haptiques » (vibreurs essentiellement) pouvant procurer un retour sensoriel sur ses actions ou sa position dans l’espace.</p>
<p>Plus l’environnement virtuel sera immersif, plus l’utilisateur aura une sensation de « présence » élevée. Ladite présence peut être divisée en deux concepts distincts : <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/10.1098/rstb.2009.0138">l’illusion du lieu et l’illusion de plausibilité</a>. Un environnement virtuel bien réalisé et des retours sensoriels pertinents apportent de la crédibilité et donneront la sensation d’évoluer de façon similaire à ce qu’on connaît dans le monde réel.</p>
<p>En effet, si ce que nous voyons est cohérent avec nos mouvements, le cerveau va conclure qu’il s’agit de notre environnement (illusion du lieu). Et si l’environnement réagit à notre présence et à nos actions (illusion de plausibilité), ce sentiment est renforcé.</p>
<h2>Les thérapies d’exposition en santé mentale</h2>
<p>L’<a href="https://www.cairn.info/conduite-du-changement-concepts-cles--9782100769414-page-49.htm">apprentissage par l’expérience</a> est depuis longtemps une technique thérapeutique utilisée en santé mentale. C’est en 1984 que le théoricien de l’éducation David Kolb développe une application de sa théorie de l’apprentissage qui peut être divisée en quatre étapes : l’expérience concrète (immersion dans une situation réelle), l’observation réfléchie de cette expérience, la conceptualisation abstraite (où nous concevons une hypothèse explicative et de compréhension) et l’expérimentation active (qui permet de valider ou non l’hypothèse).</p>
<p>Si l’on simplifie les problèmes de santé mentale pour les considérer comme des difficultés à interagir dans le monde, le potentiel de la réalité virtuelle pour les traiter est énorme ! Par exemple, les personnes concernées pourraient bénéficier de niveaux élevés de présence dans des univers virtuels afin d’y expérimenter les situations qui les mettent en difficulté dans le monde réel afin d’apprendre à les gérer.</p>
<p>Les simulations peuvent également être graduées en difficulté et répétées jusqu’à ce que le bon apprentissage soit fait. Des situations problématiques difficiles à trouver dans la vie réelle peuvent facilement être mises en place virtuellement. Cela peut être par exemple, lors d’une phobie à l’idée de prendre l’avion : il est beaucoup plus facile de se retrouver à l’intérieur d’un avion virtuel que dans le monde réel.</p>
<p>Et le grand avantage de la RV est que les individus peuvent se souvenir qu’ils sont dans un environnement qui n’est pas réel : il leur est ainsi beaucoup plus facile de faire face à des situations qui leur posent problème, et elles seront en mesure d’essayer de nouvelles stratégies thérapeutiques.</p>
<p>Cet apprentissage peut ensuite être transféré dans le monde réel.</p>
<p>De plus, grâce à l’expérience de la RV, le thérapeute peut mieux démontrer au patient que ce qui lui semble être un fait est le résultat de son esprit, une « hypothèse individuelle inadaptée ». Une personne « hématophobe » peut associer la présence de sang à une blessure grave alors qu’elle n’est pas nécessairement le signe d’une hémorragie. Une fois ce concept compris, leur remise en question est plus simple.</p>
<h2>Les avantages de la thérapie « virtuelle »</h2>
<p>La <a href="https://www.cairn.info/revue-anthropologie-des-connaissances-2019-2-page-613.htm?contenu=article">thérapie par exposition à la réalité virtuelle</a> présente divers avantages par rapport à <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-319-10190-3_12">l’exposition réelle</a> :</p>
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<li><p>En termes de coût et de disponibilité : les situations redoutées ne sont pas toujours facilement accessibles, et l’exposition imaginaire (c’est-à-dire à des situations imaginées) est moins efficace ;</p></li>
<li><p>En termes d’engagement : l’immersion et l’interaction offertes par la RV peuvent améliorer l’engagement et l’adhésion des participants ;</p></li>
<li><p>En termes de contrôle : le contrôle de ce qui se passe dans le monde virtuel est presque total, y compris des éléments qui peuvent rendre la situation menaçante (animaux ou objets redoutés, hauteur des bâtiments, etc.). De plus, le thérapeute a un suivi complet, voit les éléments qui perturbent le plus le patient, etc. ;</p></li>
<li><p>En termes de réalisme et de présence : contrairement à l’exposition imaginaire (i·e on demande à la personne d’imaginer la situation), les utilisateurs de la RV se sentent présents et jugent leur situation comme réelle tout en sachant qu’elle ne l’est pas ;</p></li>
<li><p>En termes d’efficacité : La RV permet de construire des « aventures virtuelles » dans lesquelles la personne se sent compétente et efficace ;</p></li>
<li><p>En termes de sécurité : l’exposition réelle peut être très aversive et donner un sentiment d’insécurité, car il n’y a aucune garantie que quelque chose ne se passera pas mal (un ascenseur qui s’arrête…). Ce n’est pas le cas en réalité virtuelle, le contexte et le cadre étant contrôlés.</p></li>
</ul>
<h2>Quand la réalité virtuelle est-elle utile ?</h2>
<p>La RV peut être utilisée dans la <a href="https://www.lemonde.fr/pixels/article/2016/07/14/des-therapies-en-realite-virtuelle-pour-surmonter-ses-phobies_4969516_4408996.html">prise en charge des phobies</a> par exemple. Le patient y expérimente en toute sécurité et progressivement les situations sources d’anxiété ou peur : présence d’araignée, altitude, conduite… Ceci lui permet de s’y exposer pour, à terme, faire baisser son niveau d’anxiété.</p>
<p>La réalité virtuelle est aussi <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5964457/">utile dans le cas d’un délire de persécution (lutter contre la crainte d’être attaqué), d’addiction (résister à l’envie de prendre un autre verre), de troubles du comportement alimentaire</a>. Dans ces types de prises en charge, le rétablissement consiste à penser, à réagir et à se comporter différemment dans ces situations.</p>
<p>En mettant en place des activités sensori-motrices proches de ce qu’on expérimente dans la vie réelle, la RV permet d’évaluer de manière plus objective les processus cognitifs et symptômes en jeu chez les patients. Elle peut donc être utilisée comme un outil de détection précis des éléments perturbants. Ce qui peut être utile pour identifier un <a href="https://www.defense.gouv.fr/aid/actualites/stress-realite-virtuelle-au-service-detection-du-trouble-stress-post-traumatique">trouble du stress post-traumatique</a>.</p>
<p>Cet aspect de la RV plaide pour son emploi en « remédiation cognitive », qui a pour objectif de diminuer l’impact des difficultés d’un patient. La réalité virtuelle est alors utilisée comme <a href="https://www.youtube.com/watch?v=y8jo3Wlsv-U">outil d’entraînement</a>, en fournissant une représentation réaliste de son environnement et de ses activités quotidiennes.</p>
<p>Le logiciel de réalité virtuelle <a href="http://www.rehal-it.com/catalogue.html">R.O.G.E.R</a> permet par exemple d’explorer et de travailler les fonctions cognitives. Grâce à lui, l’utilisateur peut réaliser différentes activités de vie – tri de documents administratifs, etc. Cela permet d’exercer sa flexibilité (possibilité de passer d’une tâche à une autre pour s’adapter et adapter son comportement) et d’autres fonctions cognitives, tout en restant ancré dans le quotidien.</p>
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<h2>Une technologie en progrès, mais avec des limites</h2>
<p>La recherche psychologique et la pratique clinique ont fait d’énormes progrès ces dernières années, et les <a href="http://www.rehal-it.com/roger.html">outils</a> se développent et se démocratisent.</p>
<p>Au-delà des thérapies, des recherches portent également sur l’utilisation de la réalité virtuelle pour la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5727661/">sensibilisation</a> et la <a href="https://labpsy.u-bordeaux.fr/Membres/Theses-en-cours/Tison-Emma">formation</a> en santé mentale des étudiants (en médecine, psychologie, soins infirmiers). Ces derniers peuvent se « mettre dans la peau » de personnes atteintes de troubles psychiatriques, ce qui leur donne une meilleure compréhension de ce que peuvent vivre les usagers – et <a href="https://www.researchgate.net/publication/359962958_Innovative_Technology-Based_Interventions_to_Reduce_Stigma_Toward_People_With_Mental_Illness_A_Systematic_Review_and_Meta-Analysis">diminuer leur stigmatisation</a>.</p>
<p>Il paraît clair que la réalité virtuelle peut contribuer à améliorer l’accès à des traitements et thérapies psychologiques efficaces, et constituer une méthode de choix pour les thérapeutes et les patients. Attention toutefois : le facteur humain ne peut et ne doit pas disparaître, car la <a href="https://www.cairn.info/revue-approche-centree-sur-la-personne-2005-1-page-45.htm">présence du thérapeute est en elle-même déjà thérapeutique</a>.</p>
<p>Cette technologie présente toutefois encore des limites : les scénarios sont pour le moment restreints, pour des raisons techniques mais également parce que les thérapeutes ne sont pas programmeurs, tout comme le degré d’interaction sociale possible. De plus, le <a href="https://theconversation.com/la-cybercinetose-ou-le-mal-des-casques-de-realite-virtuelle-74900">« mal des simulateurs »</a>, cette sensation de nausée causée par des informations contradictoires reçues par nos systèmes sensoriels, n’est pas totalement solutionné.</p>
<p>Une autre limite est qu’<a href="https://theconversation.com/les-avatars-peuvent-ils-remplacer-notre-corps-164965">elle isole les utilisateurs dans un monde numérique</a>. Il peut donc être intéressant d’explorer des approches en <a href="https://theconversation.com/quest-ce-que-la-re-alite-augmente-e-et-comment-fonctionne-t-elle-65585">réalité augmentée (RA)</a>, qui consiste à superposer des éléments virtuels à l’environnement réel. Au lieu d’isoler du monde réel, la réalité augmentée permet d’interagir avec des personnes réelles et non plus avec des avatars : il n’y a plus la distance sociale présente en RV. De plus, avec la RA, nous pouvons distordre la réalité et contrôler les stimuli, tout en mettant les utilisateurs dans le vrai monde physique.</p>
<p>Mais, qui sait… peut-être qu’un jour, pour certaines thérapies, nous pourrons dire <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5964457/">exit le divan, place au casque</a> !</p>
<hr>
<p><em>Emma Tison réalise actuellement sa thèse à l’Université de Bordeaux sous la direction de <a href="https://labpsy.u-bordeaux.fr/Membres/Membres-titulaires-et-associes/Prouteau-Antoinette">Antoinette Prouteau</a> et <a href="https://people.bordeaux.inria.fr/hachet/">Martin Hachet</a>. Ces derniers ont participé à la relecture de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/202175/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emma Tison a reçu des financements de l'Université de Bordeaux. </span></em></p>La réalité virtuelle reste souvent associée au jeu vidéo. Elle a pourtant aujourd’hui de nombreuses applications, y compris en santé. Voilà comment elle pourrait bientôt soigner phobies, addictions…Emma Tison, Doctorante en psychologie, Psychologue spécialisée en neuropsychologie, Université de BordeauxLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2032132023-04-17T09:54:35Z2023-04-17T09:54:35ZConsommateurs, pourriez-vous vous empêcher d’essayer les produits ?<p>Afin d’accompagner le lancement de la nouvelle version de sa montre <em>Tank</em>, <a href="https://jai-un-pote-dans-la.com/cartier-snapchat-tank-francaise-realite-augmentee/">Cartier a fait le pari de la réalité augmentée</a> : à travers un filtre Snapchat, les utilisateurs peuvent visualiser le produit à leur poignet et découvrir son évolution au fil du temps. Comme Cartier, de plus en plus de marques proposent aujourd’hui des façons innovantes d’essayer leurs produits : des matelas vendus avec 100 jours d’essai (<a href="https://www.emma.fr/100-nuits-dessai/">Emma</a>, <a href="https://www.tediber.com/">Tediber</a>…), <a href="https://www.etam.com/tryathome.html">Etam</a> qui propose le <em>try-at-home</em>, c’est-à-dire de recevoir une sélection de produit à domicile et de ne payer que ceux que l’on décide de conserver…</p>
<p>Tout cela suggère à quel point les <a href="https://theconversation.com/topics/consommateurs-33275">consommateurs</a> ont encore besoin d’essayer. Les <a href="https://www.fevad.com/bilan-du-e-commerce-en-france-les-francais-ont-depense-pres-de-147-milliards-deuros-sur-internet-en-2022/">ventes en ligne</a> ne cessent de croître mais l’<a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0377221720309334">absence d’essai des produits</a> reste leur principale limite. Pour le client, cela limite le risque de <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/mar.21170">regretter son achat</a>. Puisqu’il n’est pas possible de mobiliser tous ses sens derrière une page web, certains ont développé des <a href="https://hal.science/hal-01301978">comportements « hybrides »</a>. C’est par exemple <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/0965254X.2021.1892163">se renseigner en ligne</a> sur un produit, puis se rendre en magasin pour l’essayer avant de l’acheter.</p>
<p>Pour les distributeurs, il s’agit de tirer le meilleur de deux mondes : celui du catalogue en ligne pour lequel l’essai est impossible contrairement au magasin où l’on ne peut cependant pas présenter une gamme entière. Cela impliquerait un maillage géographique serré, de grands espaces de vente, mais aussi beaucoup de personnel.</p>
<p>Dans ce contexte, les nouvelles formes d’essai semblent donc prometteuses. Nous avons en particulier <a href="https://www.theses.fr/2020UPSLD045">étudié</a> les perspectives ouvertes par la <a href="https://theconversation.com/topics/realite-augmentee-29517">réalité augmentée</a>.</p>
<h2>Un vêtement joli ? Oui mais pas forcément sur moi</h2>
<p>Comment un essai impacte-t-il les intentions d’achat des consommateurs ? D’où cela vient-il ? Est-ce reproductible autrement ? Pour répondre à ces interrogations, nous avons mené une <a href="https://www.theses.fr/2020UPSLD045">étude en plusieurs phases</a>.</p>
<p>Nous avons tout d’abord demandé à un échantillon de 162 jeunes femmes de choisir un rouge à lèvres parmi une gamme de 30 références. Une partie de l’échantillon devait choisir à partir de photos uniquement, comme sur Internet ; l’autre partie pouvait essayer les produits, comme dans un magasin. Les intentions d’achat ont été bien supérieures dans le second cas, 36 % plus élevées.</p>
<p>Une phase d’entretiens a ensuite permis d’expliquer les raisons de ce phénomène. 16 personnes nous ont fait le récit de leur dernier achat de vêtement ayant impliqué un essai. Nous leur avons posé des questions plus spécifiques sur les raisons les ayant poussés à essayer et sur la façon dont essayer avait influencé leur décision finale.</p>
<p>Essayer permet de valider un ensemble de caractéristiques, telles que la taille, la matière, la couleur et le confort. Une répondante nous explique :</p>
<blockquote>
<p>« C’est vraiment important pour moi d’essayer quand j’achète un vêtement. Je n’ai pas forcément une taille très standard donc je dois d’abord essayer, surtout pour les pantalons. Quand je vois un vêtement que je trouve joli, par expérience, ça ne l’est pas forcément sur moi. »</p>
</blockquote>
<p>C’est parce que l’essai permet de valider ces éléments qu’il facilite la prise d’une bonne décision par les consommateurs. Un essai réussi renforce la confiance du consommateur dans sa décision et génère ensuite une plus grande satisfaction :</p>
<blockquote>
<p>« Je suis plus satisfaite quand j’essaie, car j’ai davantage confiance dans ce que j’achète. Généralement, je ne rends pas ce que j’ai essayé en magasin. »</p>
</blockquote>
<h2>La technologie, pas la meilleure réponse</h2>
<p>Ces entretiens ont été complétés par une phase d’observations. Nous nous sommes rendus dans un <em>showroom</em> de meubles ayant la particularité de ne pas vendre directement les produits : les clients y peuvent les commander en ligne via des tablettes mais ne peuvent pas repartir avec leur achat. Il s’agit d’un espace exclusivement dédié à la visualisation et à l’essai des produits.</p>
<p>[<em>The Conversation lance Entreprise(s), sa nouvelle newsletter hebdomadaire dans laquelle nos experts présentent les clefs de la recherche pour la vie profesionnelle</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-entreprise-s-153/">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Il est apparu que l’essai peut être séquencé en trois temps : le consommateur commence par <strong>regarder le produit</strong> sous différents angles, puis il le <strong>touche des doigts</strong> avant d’<strong>interagir</strong> avec, par exemple en s’asseyant ou en s’allongeant dessus. Nous observons aussi une logique d’aller-retour entre les produits. Le premier produit essayé est souvent un produit de référence et les produits essayés ensuite vont être jugés non pas dans l’absolu mais par rapport à ce produit de référence : ce second fauteuil est-il plus ou moins confortable que le premier ? Pour qu’un essai soit « complet » et puisse conduire à une bonne décision, il semble nécessaire que ces différentes étapes soient possibles.</p>
<p>Pour ces raisons, un essai virtuel en réalité augmentée ne pourra pas se placer sur le même plan qu’un essai physique. La technologie ne semble donc pas être la meilleure réponse à l’absence d’essai en ligne et les dispositifs tels que les 100 jours d’essai ou le <em>try-at-home</em> paraissent plus à même de conduire à des bonnes décisions d’achat. Cependant, ce n’est pas non plus une recette miracle pour les marques : laisser un délai (plus ou moins long) pour essayer les produits nécessite de disposer d’une trésorerie importante, puisque la vente ne sera pas immédiatement définitive. Le <em>try-at-home</em> double par ailleurs les problématiques logistiques car une partie des produits sera renvoyée au distributeur.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/203213/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuelle Le Nagard est membre de l'association française du marketing (afm). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Philippine Loupiac ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Malgré tous les progrès accomplis par la vente en ligne et même par les outils de réalité virtuelle, l’essai d’un produit reste important pour décider le consommateur et doper sa satisfaction.Philippine Loupiac, Assistant Professor in Marketing, TBS EducationEmmanuelle Le Nagard, Professeure de Marketing, Directrice Académique du Programme Grande Ecole, ESSEC Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1918232023-02-14T15:07:51Z2023-02-14T15:07:51ZSensation de déjà-vu : voici ce qu’en dit la science<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/487856/original/file-20221003-18-3dn4yg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C1%2C988%2C664&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Comment un endroit où vous n’êtes jamais allé peut-il vous sembler si familier ?</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><hr>
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<p><strong>Pourquoi les gens vivent-ils des expériences de déjà-vu ? – Atharva P., 10 ans, Bengaluru, Inde</strong></p>
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<p>Avez-vous déjà eu la sensation bizarre d’avoir <a href="http://onlyhumanaps.blogspot.com/2008/10/">déjà vécu une situation qui correspond exactement à un événement du passé</a>, même si c’est impossible ? Parfois, on peut aussi avoir l’impression de revivre quelque chose qui s’est déjà produit. Ce phénomène, <a href="https://doi.org/10.1037/0033-2909.129.3.394">connu sous le nom de « déjà-vu »</a>, intrigue les philosophes, les <a href="https://doi.org/10.1001/archneurpsyc.1959.02340150001001">neurologues</a> et les <a href="https://www.jstor.org/stable/25118382">écrivains</a> depuis <a href="https://www.google.com/books/edition/The_Cavendish_Lecture/Dg41AQAAMAAJ?hl=en&gbpv=0">très longtemps</a>.</p>
<p>À partir de la fin des années 1800, de <a href="https://www.routledge.com/The-Deja-Vu-Experience/Cleary-Brown/p/book/9780367273200">nombreuses théories ont commencé à émerger</a> sur ce qui pourrait causer la sensation de déjà-vu. On pensait que cela pouvait provenir d’un dysfonctionnement mental ou peut-être d’un type de problème cérébral. Ou alors, qu’il s’agissait d’un événement passager dans le fonctionnement normal de la mémoire humaine. Mais le sujet n’a atteint le domaine de la science que très récemment.</p>
<h2>Passer du paranormal au scientifique</h2>
<p>Au début de ce millénaire, un scientifique du nom d’Alan Brown a décidé de procéder à une <a href="https://doi.org/10.1037/0033-2909.129.3.394">analyse de tout ce que les chercheurs avaient écrit sur le déjà-vu</a> jusque-là. Une grande partie de ce qu’il a pu trouver avait une saveur paranormale, en rapport avec le surnaturel – des choses comme les vies antérieures ou les capacités psychiques. Mais il a également constaté que des études avaient relevé des expériences de déjà-vu chez des gens ordinaires. Grâce à tous ces articles, Brown a pu glaner quelques conclusions de base sur le phénomène du déjà-vu.</p>
<p>Par exemple, il a déterminé qu’environ deux tiers des personnes ont pu connaître une expérience de déjà-vu à un moment donné de leur vie. Il a découvert que le déclencheur le plus courant du phénomène de déjà-vu était constitué par une situation ou un lieu, et que le deuxième déclencheur en importance était lié à une conversation. Il a également fait état d’allusions, à travers environ un siècle de documentation médicale, à une association possible entre le déjà-vu et certains types de crises d’épilepsie dans le cerveau.</p>
<p>L’analyse de Brown a amené le sujet du déjà-vu dans le domaine de la science plus traditionnelle, car elle est apparue à la fois dans une revue scientifique lue généralement par les experts qui étudient la cognition, et aussi <a href="https://www.routledge.com/The-Deja-Vu-Experience/Brown/p/book/9781138006010">dans un livre</a> destiné aux chercheurs. Son travail a servi de catalyseur à la communauté scientifique pour concevoir des expériences visant à explorer le déjà-vu.</p>
<h2>Test du déjà-vu en laboratoire de psychologie</h2>
<p>Poussée par les travaux de Brown, ma propre équipe de recherche a commencé à mener des expériences visant à tester des hypothèses sur les mécanismes possibles du déjà-vu. Nous en avons <a href="https://www.routledge.com/The-Deja-Vu-Experience/Cleary-Brown/p/book/9780367273200">étudié une vieille de près d’un siècle</a> qui suggérait que le déjà-vu pouvait se produire lorsqu’il y a une ressemblance spatiale entre une situation en cours et une autre qui n’a pas été mémorisée. Les psychologues ont appelé cela l’hypothèse de la familiarité de la Gestalt.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/482854/original/file-20220906-25-tky7ns.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Zone très éclairée d’un hôpital avec des intervenants et des patients" src="https://images.theconversation.com/files/482854/original/file-20220906-25-tky7ns.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/482854/original/file-20220906-25-tky7ns.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/482854/original/file-20220906-25-tky7ns.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/482854/original/file-20220906-25-tky7ns.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/482854/original/file-20220906-25-tky7ns.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/482854/original/file-20220906-25-tky7ns.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/482854/original/file-20220906-25-tky7ns.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La disposition d’un nouveau lieu est peut-être très semblable à un autre endroit où vous êtes allé, mais dont vous ne vous souvenez pas consciemment.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.gettyimages.com/detail/photo/nurses-station-in-hospital-royalty-free-image/906005394">FS Productions/Tetra images via Getty Images</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Par exemple, imaginez que vous passez devant le poste de soins infirmiers d’une unité hospitalière en allant rendre visite à un ami malade. Bien que vous ne soyez jamais entré dans cet hôpital auparavant, vous êtes frappé par le sentiment d’y être allé. La cause sous-jacente de cette expérience de déjà-vu pourrait être que la disposition de la pièce, y compris l’emplacement des meubles et des objets particuliers dans l’espace, est la même que celle d’une autre que vous avez visitée dans le passé.</p>
<p>La façon dont le poste de soins infirmiers est situé –, les meubles, les objets sur le comptoir, la manière dont il rejoint les coins du couloir – est peut-être la même que l’agencement d’un ensemble de tables d’accueil avec des affiches et des meubles à l’entrée d’un événement scolaire auquel vous avez assisté un an plus tôt. Selon l’hypothèse de la familiarité de la Gestalt, si la situation précédente, dont la disposition est semblable à celle de la situation actuelle, ne vous revient pas à l’esprit, il peut subsister un fort sentiment de familiarité envers celle-ci.</p>
<p>Pour étudier cette idée en laboratoire, mon équipe a utilisé la réalité virtuelle afin de placer des personnes dans certains contextes particuliers. De cette façon, nous pouvions manipuler les environnements dans lesquels les gens se trouvaient ; par exemple, certaines scènes partageaient la même disposition spatiale tout en étant distinctes. Comme prévu, le <a href="https://doi.org/10.1016/j.concog.2011.12.010">déjà-vu était plus susceptible de se produire</a> lorsque les individus se situaient dans une pièce dont les éléments étaient disposés de la même façon dans l’espace qu’une autre pièce qu’ils avaient déjà vue, mais dont ils ne se souvenaient pas.</p>
<p>Cette recherche suggère que l’un des facteurs contribuant au déjà-vu peut être la ressemblance spatiale d’une nouvelle situation avec une scène mémorisée, mais dont le souvenir n’est pas conscient à ce moment-là. Toutefois, cela ne signifie pas que cette similitude est la seule cause du déjà-vu. Très probablement, de nombreux éléments peuvent contribuer à ce qu’une scène ou une situation vous paraisse familière. D’autres études sont en cours pour observer de nouveaux facteurs possibles jouant un rôle dans ce phénomène mystérieux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/191823/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Anne Cleary est membre du Conseil des représentants de l'American Psychological Association.</span></em></p>Les gens s’interrogent depuis longtemps sur le déjà-vu, mais ce n’est que récemment que les scientifiques ont commencé à mener des études expérimentales sur ce qui pourrait le déclencher.Anne Cleary, Professor of Cognitive Psychology, Colorado State UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1965142022-12-20T15:58:33Z2022-12-20T15:58:33Z546 kilos de déchets dans votre salon : et si la réalité augmentée venait au secours de l’environnement ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/500690/original/file-20221213-10619-o5h4ft.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1186%2C575&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un utilisateur d'un produit conçu par un collectif de chercheurs consulte, in-situ, la quantité de déchets produits par son restaurant d'entreprise en une semaine. Les déchets sont représentés par des sacs poubelles virtuels dont le volume est équivalent à celui des déchets réels. </span> <span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Notre rapport à l’environnement se trouve souvent biaisé par la désirabilité sociale : aujourd’hui, il est par exemple difficile de se déclarer publiquement contre la préservation de l’environnement. Si la grande majorité des personnes interrogées se disent donc en faveur de la protection de la planète, cela ne se traduit pas toujours par l’adoption de modes de vie plus vertueux, de soutien plus actif aux politiques, aux organisations ou aux industries respectueuses de l’environnement.</p>
<p>En d’autres termes, nous continuons à observer un écart : le comportement réel ne <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S095937801630543X">correspond pas aux attitudes déclarées</a>.</p>
<p>Une explication de l’inertie propre à ces comportements réside dans la nature abstraite des conséquences de nos actions sur la planète : elles sont éloignées géographiquement, dans le temps, incertaines, et ne touchent pas toujours des populations que l’on côtoie. On parle ici de <a href="https://psycnet.apa.org/buy/2010-06891-005">« distance psychologique »</a> : les individus se sentent moins affectés par des événements perçus comme « plus lointains » sur le plan spatial, temporel, social ou hypothétique. Le phénomène <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1539-6924.2011.01695.x">joue à plein</a> sur les questions environnementales.</p>
<p>Outre des mesures incitatives ou contraignantes, il semble donc important d’aider les individus à mieux comprendre l’impact environnemental de leurs décisions en rendant leurs conséquences, souvent éloignés dans l’espace ou le temps, visibles et saillantes dans l’« ici » et le « maintenant ». Cela permettrait de les aider à adopter des comportements plus vertueux, et les inciter à faire pression pour la mise en place de politiques pro-environnementales. Des travaux ont montré qu’un bon moyen de promouvoir tout cela est de <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0013916511421196">proposer un ancrage dans un environnement familier</a> et réel. Et si les outils de réalité augmentée, en réduisant la distance psychologique, nous y aidaient ?</p>
<p>Telle est l’idée au cœur du projet <a href="https://beaware.inria.fr/">Be-Aware</a>. Il a été imaginé par les équipes du centre de l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) de l’Université de Bordeaux, du laboratoire d’économie expérimentale de la Burgundy School of Business de Dijon (LESSAC), et du Centre international de recherche sur l’environnement et le développement à Paris.</p>
<h2>Chacun sa poubelle géante</h2>
<p>Considérons des objets bien connus de tous : les ordures ménagères. À la ville comme à la campagne, nos déchets ne s’accumulent pas dans ou devant notre domicile. Nos services de propreté fonctionnent correctement, avec des ramassages hebdomadaires qui laissent l’opportunité à chacun de se débarrasser facilement de ses déchets.</p>
<p>Cette situation, pour confortable soit-elle, ne nous permet pas de visualiser l’ampleur des déchets que nous produisons. En France, d’après les chiffres d’Eurostat de 2019, un individu produit en moyenne <a href="https://www.cniid.org/Les-dechets-en-France-quelques-chiffres,151">546 kilos de déchets ménagers par an</a>. Mais comment se le représenter ?</p>
<p>C’est justement parce qu’il est complexe de se faire une représentation de ce chiffre qu’il est difficile d’inciter les individus à réduire cette quantité. Certaines actions œuvrent déjà dans cette direction. À Lyon par exemple, dans le cadre du projet Global Getaway, une œuvre éphémère de l’artiste Friendly Liu, représentant une <a href="https://actu.fr/auvergne-rhone-alpes/lyon_69123/c-est-quoi-cette-poubelle-geante-posee-en-plein-lyon_54847406.html">poubelle géante</a> a été exposée aux passants, afin d’essayer d’aider les individus à réfléchir sur leur production de déchets.</p>
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<p>À nos yeux, il est possible de faire encore mieux en montrant à chacun <em>sa</em> poubelle géante. Dans notre projet, nous utilisons des <a href="https://ieeexplore.ieee.org/document/7539328">outils de « visualisation située »</a> (<em>embedded data representations</em>) : des données statistiques sont visualisées à proximité des espaces physiques, des objets ou des personnes auxquels elles se réfèrent. Ainsi, nous pouvons, par exemple, afficher dans un environnement familier les quantités de déchets qu’un individu produit par semaine, par an, ou sur l’ensemble de sa vie.</p>
<p>Rendus possibles par la réalité augmentée, ils permettent aux spectateurs d’interpréter les chiffres cumulés dans leur contexte. Il s’agit de les pousser à <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01572490/document">prendre des mesures dans le monde physique</a> en réponse aux informations obtenues.</p>
<h2>Éduquer et pousser à agir</h2>
<p>Nos premiers tests en laboratoire ont montré qu’avec ces visualisations, la réponse émotionnelle s’avère plus importante que lorsque les données sont communiquées de façon plus traditionnelle avec des chiffres, graphiques ou images affichés sur un écran d’ordinateur. Les participants ont en outre trouvé les visualisations des déchets crédibles, réalistes, informatives et fiables, et il semble qu’ils les prennent en compte dans leur décision.</p>
<p>Le développement de ces outils à une échelle plus large ne paraît pas insensé : ils sont simples, facilement adaptables à la consommation de chacun, et compréhensibles par tous. Les contraintes techniques et d’équipement sont, de plus, minimales : dans certains cas, de simples smartphones peuvent être utilisés pour créer l’illusion de réalité augmentée.</p>
<p>Dans d’autres cas, des dispositifs plus immersifs encore, comme des casques de réalité augmentée, peuvent permettre d’exposer des centaines de participants à des expériences utilisateur marquantes et impactantes. Nos outils sont faciles à utiliser en salle de cours, et, dans ce sens, la réalité augmentée nous permettra de mieux expliquer aux étudiants et aux lycéens les problématiques associées au mécanisme de partage d’un « bien commun ».</p>
<p>L’action pro-environnementale est directement liée à un changement profond de nos modes de vie. Ce changement ne peut avoir lieu que s’il est compris, accepté, accompagné, et encouragé. Les nouvelles approches éducatives dans ce domaine, comme celles que nous proposons avec la réalité augmentée, semblent constituer une opportunité intéressante à saisir pour la construction d’un futur durable, équitable et désirable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196514/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Angela Sutan a reçu des financements de l'ANR, Agence Nationale de la Recherche.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Ivan Ajdukovic a reçu des financements de l'ANR, Agence Nationale pour la Recherche </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Martin Hachet a reçu des financements de l'ANR, Agence Nationale pour la Recherche </span></em></p>Permettre de voir concrètement les conséquences d’actions diffuses est un bon moyen d’éveiller les consciences, meilleur en tout cas que des chiffres ou des graphiques.Angela Sutan, Professeur en économie comportementale, Burgundy School of Business Ivan Ajdukovic, Associate professor, Burgundy School of Business Martin Hachet, Directeur de recherche, InriaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1935512022-11-22T19:26:37Z2022-11-22T19:26:37ZLa réalité virtuelle, le futur de la retransmission sportive ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/492527/original/file-20221031-15-ff7yzr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=59%2C19%2C1108%2C758&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le Qatar a misé sur la réalité virtuelle pour la promotion du Mondial 2022.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.depositphotos.com/227046820/free-stock-photo-businessman-couch-virtual-reality-headset.html">Depositphotos</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La <a href="https://theconversation.com/fr/topics/coupe-du-monde-120635">Coupe du monde</a> de football, qui a débuté le 20 novembre et se déroulera jusqu’au 18 décembre au Qatar, remet en cause l’ensemble de la structuration du secteur du sport professionnel. Si les enjeux <a href="https://www.theguardian.com/global-development/2021/feb/23/revealed-migrant-worker-deaths-qatar-fifa-world-cup-2022">humains</a>, <a href="https://www.alternatives-economiques.fr/qatar-2022-coupe-monde-greenwashing/00104636">environnementaux</a> et <a href="https://www.lanouvellerepublique.fr/a-la-une/geopolitique-au-qatar-une-strategie-risquee-a-l-approche-du-mondial-2022">géopolitiques</a> ont longtemps été évoqués, la nouvelle édition du Mondial interroge également le fonctionnement économique du secteur.</p>
<p>Pour la première fois, un évènement sportif international n’est pas pensé pour accueillir des millions de supporters. L’organisation vise une expérience « prémium » où l’accent est placé sur la qualité des supporters plutôt que sur la <a href="https://www.sofoot.com/ce-n-est-pas-une-coupe-du-monde-pour-les-supporters-512788.html">quantité</a>. Selon le magazine <em>So Foot</em>, les supporters tricolores devraient par exemple être <a href="https://www.sofoot.com/ce-n-est-pas-une-coupe-du-monde-pour-les-supporters-512788.html">12 fois moins nombreux</a> à faire le déplacement qu’en 2018 en Russie.</p>
<p>Le tournant est considérable pour l’industrie du spectacle sportif. Le Qatar n’accueillera pas une immense foule internationale sur ses terres. L’émirat compte sur la retransmission pour toucher le plus grand nombre de spectateurs tout en limitant le nombre de touristes sur le territoire.</p>
<p>L’essor de certaines nouvelles technologies offre des solutions techniques à cette stratégie singulière. Ainsi, le Qatar a <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/14775085.2022.2097942">misé sur la réalité virtuelle</a> (VR) pour sa promotion, à l’image d’une vidéo de présentation du Lusail Stadium qui accueillera la finale diffusée il y a trois ans.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/tWYC0BZDCAA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Lusail Stadium 360° Experience (Qatar 2022).</span></figcaption>
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<p>Au-delà du Mondial 2022, cet outil pourrait résoudre les difficultés à organiser des évènements sportifs de grande envergure et permettre aux utilisateurs/publics d’assister virtuellement à ces évènements.</p>
<iframe src="https://embed.acast.com/601af61a46afa254edd2b909/61d5a39b2d19fb00129bd37a" frameborder="0" width="100%" height="190px"></iframe>
<p><iframe id="tc-infographic-569" class="tc-infographic" height="100" src="https://cdn.theconversation.com/infographics/569/0f88b06bf9c1e083bfc1a58400b33805aa379105/site/index.html" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
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<a href="https://theconversation.com/comment-ecouter-les-podcasts-de-the-conversation-157070">Comment écouter les podcasts de The Conversation ?</a>
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<p>Au Moyen-Orient, cette stratégie n’est pas nouvelle. En début d’année, les Émirats arabes unis accueillaient <a href="https://www.fcbarcelona.fr/fr/club/actualites/2370073/immersive-barca-the-exhibition-travels-to-dubai">l’exposition FC Barcelone</a> à Dubaï, qui plaçait l’immersion et la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/realite-virtuelle-26557">réalité virtuelle</a> au cœur de l’expérience. En 2015, l’État fédéral émirati était déjà associé à un tel dessein, mais, cette fois-ci avec le grand ennemi du FC Barcelone : le Real Madrid souhaitait créer un <a href="https://www.sportbuzzbusiness.fr/le-real-madrid-lance-son-parc-dattraction-real-madrid-resort-island.html">immense parc d’attractions</a> s où la réalité virtuelle aurait été au cœur du projet. L’ambition pour le géant du sport espagnol était de créer un deuxième lieu de spectacle sportif pour mettre fin aux limites physiques du stade Santiago Bernabeu.</p>
<h2>Un choix infini d’angles de caméra</h2>
<p>Dans notre contribution à l’ouvrage collectif <a href="https://www.deboecksuperieur.com/ouvrage/9782807339095-marketing-international-du-sport">Marketing international du sport</a> (Éditions De Boeck Supérieur), nous avons mis en avant les stratégies et nouveaux modèles de divertissement parmi lesquels l’enjeu de la diffusion a pris une place essentielle. Il est donc devenu crucial d’innover et de se réinventer pour réussir à séduire un public de moins en moins passif devant l’écran. Les services de retransmission télévisée s’intéressent donc aux nouvelles technologies comme la VR pour survivre à l’évolution des usages mais aussi pour justifier leurs tarifs.</p>
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<p>C’est par exemple le cas dans la NBA, le championnat de basket-ball américain, dont le président Adam Silver, estime qu’une <a href="https://bleacherreport.com/articles/2685568-adam-silver-discusses-future-of-broadcasting-nba-games">nouvelle façon de diffuser le sport</a> est inévitable. La franchise des Los Angeles Clippers a ainsi développé CourtVision, une offre personnalisée combinant diffusion et réalité virtuelle qui permet aux retransmissions de gagner en valeur ajoutée grâce à une expérience dynamique et autonome.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/dl6rxqBYP5U?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Présentation de ClipperVision (LA Clippers, octobre 2022).</span></figcaption>
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<p>La plus-value apportée par la VR repose sur sa capacité d’immersion dans le match depuis chez soi. La technologie apporte du dynamisme à la retransmission, la possibilité d’interagir avec les autres ainsi que des informations permettant une meilleure compréhension du jeu. Le champ des possibles s’étend des stades pendant les matchs, au développement d’opportunités pour les sponsors.</p>
<p>Cette technologie vient également faire le pont avec le jeu vidéo, médium particulièrement populaire aujourd’hui. Le célèbre développeur Unity travaille par exemple aujourd’hui sur une nouvelle technologie qui permettra au spectateur d’adopter le point de vue des joueurs préférés et d’avoir un <a href="https://blog.unity.com/technology/experience-the-future-of-sports-in-volumetric-3d">choix infini d’angles de caméra</a>.</p>
<h2>Un décalage entre offre et demande</h2>
<p>Cependant, l’essor de la VR dans le sport semble parfois venir se heurter à la réalité. D’après une étude du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), si 41 % des Français ont déjà essayé la VR, <a href="https://www.cnc.fr/creation-numerique/etudes-et-rapports/etudes-prospectives/realite-virtuelle-et-experiences-immersives-en-france--quels-usages_978225">moins de 7 % des foyers sont équipés</a> par la technologie. La possibilité de voir la diffusion de sport en VR se démocratiser en prend un coup.</p>
<p>D’autant plus qu’en août 2020, l’European Club Association dévoilait une <a href="https://www.ecaeurope.com/media/4802/eca-fan-of-the-future-defining-modern-football-fandom.pdf">étude</a> sur les comportements de consommations des fans de sport. Il en résulte que ces derniers voient d’un œil très négatif les tarifs actuellement pratiqués dans la diffusion et l’accès au sport, avec notamment près des deux tiers qui considèrent les tarifs trop élevés.</p>
<p><iframe id="CS1k7" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/CS1k7/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Notre travail de recherche dans les <a href="https://www.deboecksuperieur.com/ouvrage/9782807339095-marketing-international-du-sport">grandes tendances dans l’industrie du sport</a> illustre que les consommateurs de sport suivent la même logique que les autres secteurs frappés par la numérisation. Comme pour la <a href="https://www.cairn.info/l-attaque-des-clones--9782724619805.htm">musique ou pour l’audiovisuel</a>, les fans souhaitent plus de flexibilité, de facilité d’accès, de personnalisation et des prix moins prohibitifs.</p>
<p>Le <a href="https://www.theses.fr/s247838">projet de doctorat</a> que nous menons vient interroger comment les nouvelles technologies et le divertissement influencent la structuration et le fonctionnement du secteur du sport professionnel. S’il y a de nombreuses dimensions, celle portée par la VR démontre donc à l’heure actuelle un décalage concret entre offre et demande sur le spectacle sportif.</p>
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<a href="https://theconversation.com/leconomie-du-football-entre-dans-une-nouvelle-ere-194706">L’économie du football entre dans une nouvelle ère</a>
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<p>La VR arrive en effet avec une offre de valeur plus grande mais avec un coût suivant la même tendance. Sauf changement majeur sur le prix et le fonctionnement de la technologie, la VR ne révolutionnera donc pas la diffusion dans l’immédiat.</p>
<p>Pour autant, cette technologie offre une réelle opportunité pour le secteur du sport. Les investissements d’agrandissement des stades ne sont <a href="https://edition.revue-banque.fr/ouvrage/creer-de-la-valeur-dans-le-football/">pas toujours rentables</a> et pour beaucoup, ils ont désormais atteint leur <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=926210">taille critique</a>. La réalité virtuelle constituera-t-elle donc un relais de développement de l’industrie du sport ou tomber aux oubliettes ? Premiers éléments de réponse fin décembre 2022.</p>
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<p><em>Cet article a été rédigé en collaboration avec Charlie Ziane et Erik Lecamp dans le cadre du Master 2 Sport Leisure and Event Management</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/193551/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Baptiste Brossillon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’organisation de la Coupe du monde au Qatar mise notamment ces technologies immersives devant lesquelles le spectateur reste encore relativement réticent.Baptiste Brossillon, Doctorant en économie et management du sport, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1905962022-10-19T17:08:54Z2022-10-19T17:08:54ZLa réalité virtuelle aide à mieux apprendre : à quelles conditions ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/489586/original/file-20221013-17-4n87i7.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=20%2C6%2C4636%2C3065&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Bloc opératoire virtuel pour la formation - Projet S3PM et SUNSET, Labex CominLabs.</span> <span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Inventés il y a déjà plusieurs décennies, les concepts de <a href="https://www.istegroup.com/fr/produit/realite-virtuelle-et-realite-augmentee/">réalité virtuelle et de réalité augmentée</a> ont reçu depuis quelques années des coups de projecteurs médiatiques très importants. Les raisons principales en sont la démocratisation importante des technologies et les très forts investissements réalisés par les GAFAMs sur ces sujets.</p>
<p>Parmi les domaines d’application susceptibles de bénéficier de ces développements se trouve la formation, domaine pour lequel la réalité virtuelle ou la réalité augmentée offrent de <a href="https://www.researchgate.net/profile/Domitile-Lourdeaux/publication/29973603_Realite_virtuelle_et_formation_conception_d%E2%80%99environnements_virtuels_pedagogiques/links/0f31753ab9d3cec6e2000000/Realite-virtuelle-et-formation-conception-denvironnements-virtuels-pedagogiques.pdf">très nombreux avantages</a>. Sans être exhaustif, on peut relever les atouts suivants :</p>
<ul>
<li><p>la possibilité de mener des expériences sans aucun danger pour l’apprenant ou pour le matériel. C’est le cas typique d’un appareil très onéreux qu’un apprenant serait susceptible d’endommager lors de sa formation ;</p></li>
<li><p>une <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01900450">mise en situation aisée de l’apprenant</a> y compris lors de situations critiques, comme le dysfonctionnement d’un équipement qui peut devenir dangereux ;</p></li>
<li><p>un contrôle total de la <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03216504">situation d’apprentissage</a> et suivi de l’apprenant. Cela permet au formateur de disposer à tout instant des données de progression d’un apprenant et dans certains cas à toutes les actions réalisées par l’apprenant en « rejouant » virtuellement la séquence de formation.</p></li>
</ul>
<p>La technologie est donc déjà ancienne et nous serions tentés de croire que tous les écueils sont répertoriés et qu’il est aisé de créer une application de réalité virtuelle par exemple dans le domaine de la formation. L’expérience montre que ce n’est pas si simple que ça et que de très nombreux risques, par ailleurs fort bien documentés dans la littérature scientifique, ne sont pas suffisamment pris en compte par les développeurs dans l’élaboration des applications.</p>
<h2>Temps de latence</h2>
<p>Pour illustrer le propos sur ces difficultés auxquelles se heurtent les concepteurs d’applications, nous allons prendre quelques exemples.</p>
<p>D’abord, pour être reproduits dans le virtuel, les phénomènes physiques, même les plus élémentaires du monde réel, doivent être simulés, qu’il s’agisse de l’effet de la gravité, de contacts ou collisions entre des objets, de la propagation de la lumière… Ces simulations résultent souvent de la résolution de système d’équations complexes qui nécessitent du temps de calcul de la part des ordinateurs, et donc des délais lors de l’interaction avec l’utilisateur.</p>
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<p>L’instantanéité des phénomènes physiques ne peut pas être reproduite dans le virtuel et ceci a des conséquences sur la perception qu’en aura l’utilisateur. En effet, le délai appelé aussi latence peut perturber le caractère naturel de l’interaction.</p>
<p>Prenons un exemple tout simple, le réflexe vestibulo-occulaire, qui lie la perception visuelle et le mouvement de la tête capté par l’oreille interne : fixez un objet et bougez la tête, le réflexe vestibulo-occulaire vous permet de stabiliser votre regard sur l’objet. En réalité virtuelle, la moindre latence dans le processus sera perçue par l’utilisateur. Il y aura perturbation de la perception : des objets supposés être fixes (bâtiments, portes, murs…) ne le seront plus en environnement virtuel. Dans certains cas, il éprouvera ce qu’on appelle le <a href="https://newsroom.unsw.edu.au/news/science-tech/why-people-get-sick-virtual-reality">mal des simulateurs</a> (Cybersickness).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/avec-la-realite-virtuelle-la-deuxieme-vie-de-notre-dame-de-paris-152764">Avec la réalité virtuelle, la deuxième vie de Notre-Dame de Paris</a>
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<p>Autre difficulté à laquelle se heurtent ceux qui veulent se servir de la réalité virtuelle à des fins de formation : la perception des distances. Des expériences scientifiques ont clairement démontré que celles-ci sont très fréquemment altérées dans le virtuel, parfois il y a sous-estimation, parfois surestimation. Il est donc logique que, dans une application pour laquelle la perception de la distance est primordiale, comme l’apprentissage du tir au basket, un utilisateur puisse avoir des difficultés à apprendre.</p>
<h2>Des contraintes à connaître</h2>
<p>Par ailleurs, le fait d’être plongé dans la réalité virtuelle perturbe le phénomène d’« accommodation vergence » : ce principe de la perception visuelle de l’homme consiste, lorsqu’on regarde un objet, d’une part à faire la mise au point (l’accommodation) sur l’objet en fonction de sa distance) et, d’autre part, à orienter les yeux pour converger sur ce même objet (vergence). Ce mécanisme est très synchronisé puisque l’accommodation et la vergence vont être réalisées en fonction de la distance à l’objet.</p>
<p>En réalité virtuelle il est très fréquent que l’accommodation soit effectuée sur une distance fixe alors que la vergence est effectuée sur une distance 3D qui va dépendre de la position de l’objet. Il y a donc une désynchronisation de l’accommodation vergence ce qui demande à l’utilisateur un effort particulier pouvant le cas échéant devenir très gênant.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/489587/original/file-20221013-18-vmj41s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/489587/original/file-20221013-18-vmj41s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/489587/original/file-20221013-18-vmj41s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/489587/original/file-20221013-18-vmj41s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/489587/original/file-20221013-18-vmj41s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/489587/original/file-20221013-18-vmj41s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/489587/original/file-20221013-18-vmj41s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Formation en format virtuel pour des acteurs de cinéma (projet Previz/FUI).</span>
<span class="attribution"><span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
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<p>Enfin, nous apprenons depuis l’enfance à interagir avec notre environnement lors de l’inspection et la manipulation d’objets. Dans un environnement 3D, si les dispositifs d’interaction et les métaphores d’interaction ne sont pas parfaitement adaptés à la tâche à réaliser par l’utilisateur alors ce dernier éprouvera des difficultés à la réaliser. Un exemple typique est l’usage d’une souris classique, qui se déplace sur un plan, pour réaliser la rotation d’un objet dans l’espace, ce n’est pas à proprement parler le moyen idéal. De manière un peu imagée, l’utilisateur éprouverait un handicap dans le virtuel en regard de ce qu’il sait faire dans le monde réel.</p>
<p>Comme nous venons de le voir, il existe quelques écueils au développement d’applications de réalité virtuelle et trop nombreux sont les développeurs qui ne sont pas conscients de ces limitations. Néanmoins, il serait trop extrême de penser que la réalité virtuelle ne marche pas. En effet, sous réserve de procéder très méthodiquement à leur analyse et à leur élaboration, il est tout à fait possible de réaliser des applications qui fonctionnent en respectant certaines contraintes :</p>
<ul>
<li><p>il est nécessaire de maîtriser la complexité des calculs afin de maîtriser la latence ;</p></li>
<li><p>il faut étudier la <a href="https://www.pressesdesmines.com/produit/les-casques-de-realite-virtuelle-et-de-jeux-video/">littérature scientifique</a> sur les incohérences perceptives afin d’éviter de se mettre dans de telles situations ;</p></li>
<li><p>concernant la naturalité de l’interaction, il faut aussi étudier la littérature scientifique pour évaluer, compte tenu du cahier des charges de l’application, les meilleures métaphores d’interaction afin que l’utilisateur puisse être à l’aise et efficace lors de la réalisation de la tâche en environnement virtuel.</p></li>
</ul>
<h2>Vérifier les apprentissages</h2>
<p>Une fois les précautions élémentaires prises, dans une application de formation, on a aussi besoin de savoir si l’apprenant a appris – c’est bien le moins que l’on puisse en attendre – et si un transfert d’apprentissage à eu lieu entre le dispositif virtuel et le dispositif réel. Cette question du transfert est fondamentale puisque c’est quand même le but premier de l’opération.</p>
<p>Dans ce cas, plutôt que d’espérer simplement que le transfert se fasse, il peut être judicieux de le vérifier expérimentalement, ça à dire prendre des utilisateurs réels et leur faire passer des tests de validation.</p>
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<a href="https://theconversation.com/evaluer-les-innovations-pedagogiques-pour-quoi-faire-101867">Evaluer les innovations pédagogiques : pour quoi faire ?</a>
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<p>Un exemple de pratique est de prendre un sous-ensemble d’utilisateurs qui apprennent de manière classique (groupe témoin) et un autre sous-ensemble qui apprend par l’application de réalité virtuelle. Des analyses appropriées sur les deux cohortes doivent permettre d’évaluer les compréhensions, les acquisitions de savoir-faire et/ou de procédure, les mémorisations au bout d’un certain temps afin de valider la qualité d’apprentissage dans le virtuel par rapport au réel. Des analyses plus poussées sont nécessaires lorsque la comparaison au réel est impossible (cas des événements rares ou dangereux pour l’apprenant et/ou le matériel).</p>
<p>En conclusion, le tableau général n’est ni totalement blanc (en réalité virtuelle tout fonctionne à merveille) ni totalement noir, (rien ne marche). Nous sommes clairement dans un entre-deux. Sous réserve de bien <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01391776">maîtriser les contraintes de réalisation</a> des applications liées aux limites intrinsèques de la perception d’un utilisateur, il est possible de <a href="https://hal.inria.fr/hal-02879073">réaliser des applications de formation</a> qui fonctionnent parfaitement.</p>
<p>Récemment une nouvelle terminologie est apparue : les <a href="https://www.lemonde.fr/blog/binaire/2022/02/25/le-metavers-quels-metavers-1-2/">métavers</a>, de plus en plus présents dans les médias et dans le marketing industriel. Cependant, le concept et les travaux scientifiques sur le sujet datent du début des années 90 et le cœur technique des métavers est bâti sur des éléments technologiques très anciens comme la réalité virtuelle, les humains virtuels, les réseaux… C’est donc un très joli coup marketing de la société qui a porté ce buzz.</p>
<p>Bien entendu, le fait de pointer les projecteurs sur ce sujet va amener plusieurs sociétés à investir et plusieurs laboratoires à prendre le sujet à bras le corps, il y a donc fort à parier que dans les mois et années à venir cette concentration de moyen va produire des effets, donc de nouveaux développements et des innovations dont la formation profitera. Il n’est pas inutile non plus de se poser la question des risques sur l’évolution de la société que les métavers nous font craindre : est-ce vraiment la société que nous voulons ? Est-ce que le jeu en vaut la chandelle ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190596/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bruno Arnaldi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si la réalité virtuelle permet de développer de nouvelles situations d’apprentissage, elle comporte aussi des biais qu’il convient de prendre en compte si l’on veut qu’elle soit réellement efficace.Bruno Arnaldi, Professeur en Informatique, INSA RennesLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1902022022-09-14T18:06:05Z2022-09-14T18:06:05ZDécryptage : Métavers, à l’aube d’une nouvelle économie ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/483481/original/file-20220908-2774-nldouv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=423%2C82%2C1621%2C901&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il est maintenant possible de promener son avatar au Metaverse Festival.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Duncan Rawlinson / FlickR</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Alerte ! Depuis janvier, les prix de l’immobilier sont en <a href="https://www.forbes.com/sites/davidwestenhaver/2022/08/14/metaverse-real-estate-under-water/?sh=7577f92760c9">chute</a> de 85 %. Les acheteurs qui – comme le rappeur Snoop Dog – se pressaient hier pour acquérir des propriétés en vue, se sont envolés. La crise, liée aux fluctuations des cryptomonnaies, ne touche pas New York, Paris ou aucune autre ville, mais un espace virtuel, <em>The Sandbox</em>.</p>
<p>Ce monde en ligne, où marques et célébrités se pressent, fait partie d’un nouvel univers en gestation. Le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/metavers-111662">métavers</a> promet d’ajouter une troisième dimension à l’Internet. Certains y voient un cauchemar dystopique. D’autres imaginent un futur paradis entrepreneurial, à la source d’une nouvelle révolution industrielle. Mark Zuckerberg figure parmi les plus enthousiastes : Facebook, l’entreprise qu’il dirige, a entamé sa mue en Meta l’an passé et se voit en leader du secteur. À ce stade, l’économie de ce « méta-univers » en construction reste cependant davantage une promesse qu’une réalité.</p>
<h2>L’ébauche d’une nouvelle économie virtuelle</h2>
<p>La galaxie Meta/Facebook n’est qu’une composante de ce que pourrait devenir cet univers virtuel. Google et Microsoft, <a href="https://www.forbes.com/sites/jackkelly/2022/01/21/the-metaverse-set-off-a-battle-between-tech-giants-google-apple-microsoft-and-meta-to-build-virtual-and-augmented-reality-headsets/?sh=6128dfce239c">entre autres</a>, y ont annoncé des plans d’investissement massifs. Il se murmure qu’Apple aurait aussi des <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2022-08-28/what-will-apple-call-its-ar-vr-headsets-reality-one-reality-pro-names-emerge">projets</a> dans ce domaine.</p>
<p>Les développeurs de jeux vidéo n’ont, eux, pas attendu les géants du secteur technologique : Roblox, Decentraland et Epic Games (le studio qui développe <em>Fortnite</em>) proposent déjà des mondes virtuels comparables à <em>The Sandbox</em>, où l’on peut se retrouver, créer, jouer, assister à un <a href="https://www.rollingstone.co.uk/music/music-metaverse-are-we-on-brink-virtual-artist-revolution-14437/">concert</a> et, demain peut-être, <a href="https://hbr.org/2022/04/how-the-metaverse-could-change-work">travailler</a>, collaborer et s’instruire. Ils s’appuient sur des « équipementiers », comme Nvidia et Unity Software, qui en développent l’infrastructure technique, matérielle et logicielle.</p>
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<p>Mais qu’est-ce que le métavers ? Faute d’une définition qui fasse référence, on peut tenter d’en esquisser a minima les contours. Le métavers offre à ses utilisateurs une expérience incarnée, en temps réel, dans des mondes virtuels persistants en trois dimensions. Chacun de ces mondes accueille des visiteurs, habituellement représentés sous la forme d’avatars qui peuvent interagir avec d’autres participants et des intelligences artificielles.</p>
<p>La nature de ces mondes permet l’émergence de droits de propriété, sécurisés par des protocoles de chaînes de blocs (<em>blockchain</em>). On peut ainsi y acheter des objets, comme des vêtements de marques pour habiller ses avatars, des terrains pour y construire des habitations et des œuvres d’art pour les décorer. Des <a href="https://theconversation.com/working-in-the-metaverse-what-virtual-office-life-could-look-like-180444">bureaux</a> et <a href="https://www.cnet.com/tech/computing/features/shopping-in-the-metaverse-could-be-more-fun-than-you-think/">espaces commerciaux</a> y sont déjà ouverts. Les grandes marques y expérimentent de nouvelles offres. Certains estiment que ces nouveaux territoires, aussi vierges que virtuels, pourraient à terme donner naissance à une nouvelle économie dont les <a href="https://www.wsj.com/articles/metaverse-spending-to-total-5-trillion-in-2030-mckinsey-predicts-11655254794">revenus</a> se chiffreraient en trillions d’euros.</p>
<h2>Une aventure aussi prometteuse qu’incertaine</h2>
<p>Il est encore trop tôt pour accorder du crédit à ces estimations : l’économie du métavers n’a guère dépassé le stade du prototype. Le potentiel est néanmoins suffisant pour attiser toutes les convoitises. À commencer par les acteurs du capital-risque qui ont <a href="https://news.crunchbase.com/start-up/metaverse-start-up-funding-investors/">investi</a> en 2021 plus de 10 milliards de dollars dans des entreprises du secteur.</p>
<p>Ce projet démiurgique suscite en effet les espoirs entrepreneuriaux les plus fous et fascine les technophiles. Les amateurs de science-fiction se souviennent toutefois que le terme « metaverse » est né en 1992 de la plume de Neal Stephenson dans un roman d’anticipation dystopique, <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Snow_Crash">Snow Crash</a>. Nombreux sont ceux qui expriment la crainte de potentielles dérives et addictions. Alors qu’Internet a été pensé dès l’origine comme un réseau ouvert, le métavers émerge aujourd’hui sous la forme de mondes propriétaires qui s’autorégulent. Les modes de gouvernance de ces nouveaux espaces d’interactions sociales et d’échanges économiques restent à définir.</p>
<p>Il incombe aux architectes du métavers de démontrer son utilité. La tâche est d’autant plus délicate que l’expérience demeure aujourd’hui inaccessible au plus grand nombre. Il faut aujourd’hui, pour faire ses premiers « pas » dans le métavers, un casque de réalité virtuelle, aussi coûteux qu’encombrant. Un Meta Quest 2, le leader actuel du marché, coûte à ce jour autour de 450 euros. Un obstacle pratique et financier considérable pour le consommateur moyen.</p>
<p>D’autres pistes sont cependant explorées, comme l’interaction holographique (voir, par exemple, le projet <a href="https://blog.google/technology/research/project-starline/">Starline</a> de Google). Demain, d’autres interfaces permettront peut-être d’accéder au métavers. Souvenons-nous qu’Internet a pris une autre dimension quand les écrans tactiles des smartphones ont supplanté les souris et les claviers.</p>
<h2>D’une galaxie à l’autre</h2>
<p>Autre obstacle de taille, les quelques mondes virtuels accessibles à ce jour sont hermétiquement clos. Un avatar Meta ne peut voyager chez Roblox – et vice versa. Pour émerger, un métavers unifié requiert une forme d’interopérabilité entre les galaxies qui le composent. L’enjeu est majeur : une paire de <a href="https://www.cnbc.com/2021/12/14/nike-buys-virtual-sneaker-maker-rtfkt-in-metaverse-push.html">Nike</a> en pixels a une tout autre valeur si votre avatar peut l’emporter d’un monde virtuel à l’autre. Nul ne sait exactement comment cela pourrait se matérialiser mais les discussions visant à définir les <a href="https://techcrunch.com/2022/06/21/metaverse-standards-forum-meta-microsoft-nvidia-unity/">standards</a> du métavers ont commencé.</p>
<p>À l’échelle mondiale, c’est ainsi une course à l’innovation tous azimuts qui est lancée. Malmenée par les marchés financiers, l’industrie technologique a trouvé dans le métavers un nouveau narratif de croissance. Dans les grandes entreprises, les stratèges sont sur le qui-vive, à l’affût d’opportunités nouvelles mais aussi de potentielles innovations de rupture qui pourraient bouleverser leurs métiers.</p>
<p>Les plus audacieux ont d’ores et déjà commencé l’exploration, participant de fait à la construction du métavers. De grands noms comme Adidas, Carrefour, Gucci et Samsung ont ainsi annoncé avoir acquis des espaces dans <em>The Sandbox</em>. Pour ces pionniers, l’aventure promet d’être aussi excitante qu’incertaine.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190202/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Jourdan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>De nombreuses entreprises commencent à investir des mondes virtuels dont l’économie constitue aujourd’hui davantage une promesse qu’une réalité.Julien Jourdan, Professeur Associé, HEC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1865282022-08-18T17:36:38Z2022-08-18T17:36:38ZSérie vidéo : Métavers, le gouffre énergétique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/475449/original/file-20220721-14484-pc9lbv.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">illustration</span> </figcaption></figure><p>2021, Mark Zuckerberg, fondateur de Facebook, annonce qu’il souhaite créer un métavers. Dans ce docufiction, Gaïa, une jeune fille achète un casque de réalité virtuelle afin de découvrir ce nouveau monde. Finira-t-elle bloquée dans le métavers ? Une métaphore de notre société bloquée dans un système aux impacts environnementaux désastreux, constitué d’un acteur discret mais majeur : le numérique.</p>
<p>Fabrice Flipo, historien des sciences et techniques à l’Institut Mines-Télécom Business School nous donne les clés pour comprendre ces impacts.</p>
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<figcaption><span class="caption">Métavers, le gouffre énergétique.</span></figcaption>
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<p><em>Un film réalisé par Marie Origas et Nawel Boulmane.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/186528/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabrice Flipo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le numérique a bien une réalité physique et un impact majeur sur l’environnement.Fabrice Flipo, Professeur en philosophie sociale et politique, épistémologie et histoire des sciences et techniques, Institut Mines-Télécom Business School Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1757952022-05-06T12:46:22Z2022-05-06T12:46:22ZMétavers : une dystopie sur les villes de demain<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/446846/original/file-20220216-21-1sbbhv8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C0%2C791%2C445&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un avenir marqué par le métavers risque de changer fondamentalement comment l'on opère au quotidien.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:10%27000_moving_cities_V3,_net-and-telepresence-based_installation,_2015.jpg">Marc Lee/Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Plusieurs compagnies, dont <a href="https://www.reuters.com/technology/apple-teases-metaverse-ar-plans-stock-jumps-2022-01-28/">Apple</a> et Microsoft, font le pari que le monde de demain se vivra, en tout ou en partie, dans le métavers. Microsoft a d’ailleurs récemment fait l’acquisition du géant du jeu vidéo Activision Blizzard pour <a href="https://bgr.com/business/microsoft-is-buying-activision-blizzard-for-68-7-billion/">68,7 milliards de dollars américains</a>.</p>
<p>À l’heure où de plus en plus d’activités sociales et culturelles prennent place dans cet univers virtuel, poussons la réflexion à l’extrême : si les citadins de demain préconisent le métavers aux infrastructures réelles, à quoi vont ressembler, et même servir, les villes du futur ?</p>
<p>Professeurs en environnement urbain et en culture numérique, respectivement, nous proposons de réfléchir à cette question, en explorant comment le métavers pourrait changer profondément nos rapports quotidiens aux espaces urbains.</p>
<p>Cette vision peut paraître dystopique, certes, mais amusons-nous à imaginer ce monde futuriste.</p>
<h2>De science-fiction à réalité</h2>
<p>Le terme « métavers » vient non pas des sciences et de la technologie, mais plutôt de la science-fiction. Neal Stephenson <a href="https://www.axios.com/metaverse-creator-neal-stephenson-facebook-name-change-a4259282-5016-4c67-a7ae-b0eb381a7773.html">l’invente en 1992</a>, dans son roman « Snow Crash », pour désigner un environnement urbain virtuel et dystopique.</p>
<p>Stephenson nous présente le métavers sous la forme d’un très long boulevard généré par de puissants ordinateurs. Celui-ci est contrôlé par le <em>Global Multimedia Protocol Group</em>, qui gère les permis de construction et réglemente le zonage délimitant les frontières des commerces, des parcs et espaces publicitaires. Ces espaces, loués ou achetés par de grandes corporations, font du métavers un environnement urbain virtuel entièrement contrôlé par des intérêts privés : ceux des géants des technologies numériques.</p>
<h2>Environnements urbains virtuels : à vos casques !</h2>
<p>Trente ans après la publication du roman de Stephenson, les enjeux relevant de la science-fiction laissent entrevoir de nouvelles réalités ainsi que de nouveaux défis urbains. Nous dépensons présentement des sommes énormes pour rendre nos villes plus équitables, durables, et viables ; mais à quoi vont servir ces investissements si les citadins de demain ne vivent la ville que de façon virtuelle ?</p>
<p>Commençons par les activités sociales. Si nous basculons vers le métavers, plusieurs points d’attraction urbains, tels les <a href="https://www.boxofficepro.fr/un-premier-cinema-dans-le-metaverse/">cinémas</a>, les <a href="https://www.forbes.com/sites/masonbissada/2022/02/09/mcdonalds-files-trademark-for-metaverse-based-virtual-restaurant/">restaurants</a>, et les musées et monuments historiques, verront une chute de la clientèle franchissant leurs portes. Déjà, <a href="https://www.provideocoalition.com/eternal-notre-dame-visit-the-cathedral-in-vr/">on peut visiter de nombreux musées virtuellement</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/vGC89oPLtao?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">L’expérience de réalité virtuelle « Éternelle Notre-Dame » a été lancée à Paris en janvier dernier, et permet de visiter la célèbre cathédrale.</span></figcaption>
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<p>L’afflux croissant aux portes du métavers demandera une augmentation importante des fonds requis pour l’achat de terrains et l’entretien d’infrastructures. Les environnements bâtis ont beau être virtuels, leurs coûts – autant en termes <a href="https://www.ledevoir.com/economie/663705/metavers-ruee-vers-le-marche-immobilier-virtuel">monétaires</a> qu’en termes <a href="https://datacenterfrontier.com/the-metaverse-will-need-a-lot-of-data-centers/">énergétiques</a> et <a href="https://reporterre.net/Les-metavers-mondes-virtuels-pollution-reelle">environnementaux</a>, sont quant à eux bien réels et ne cessent de croître. Ces fonds risquent-ils d’être prélevés de budgets dédiés auparavant à des lieux et environnements physiques ? Nos gouvernements, à l’instar de ceux de <a href="https://www.reuters.com/markets/funds/saudi-arabia-announces-64-billion-investments-future-tech-2022-02-01/">l’Arabie saoudite</a> ou de la <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2022-02-10/korea-s-200-billion-wealth-fund-bets-on-metaverse-ai-start-up">Corée du Sud</a>, se mettront-ils à investir dans des <a href="https://venturebeat.com/2021/11/18/the-metaverse-is-infrastructure/">infrastructures</a> et <a href="https://www.benzinga.com/markets/cryptocurrency/21/12/24511345/what-cities-and-countries-are-betting-on-the-metaverse">parcelles</a> de villes virtuelles ?</p>
<p>Dans les années à venir, d’autres activités sociales telles que prendre un café ou une bière entre amis auront peut-être lieu en ligne. Non seulement ces rendez-vous virtuels permettront d’éliminer la contrainte de distance, et donc de réduire notre interaction avec les infrastructures de transports urbains, mais ils permettront aussi de choisir l’emplacement, n’importe où sur la « planète », des rencontres.</p>
<p>Par exemple, un café matinal entre collègues dans le jardin virtuel de la tour Eiffel pourrait laisser place, le soir venu, à des festivités autour d’un match du Super Bowl en réalité augmentée. Ce dernier sera visible de près et s’offrira sous des angles changeant en un tour de main. La compagnie Microsoft nous propose déjà cette vision du spectacle sportif du futur avec le casque de réalité augmentée <a href="http://vrworld.com/2016/02/05/see-microsofts-super-bowl-augmented-reality-vision/">« HoloLens »</a>. Ce casque donnerait non seulement l’impression d’être assis dans le stade, mais permettrait aussi d’interagir avec l’écran à l’aide de gestes de la main.</p>
<h2>Sorties urbaines en mode virtuel</h2>
<p>La sociabilité des déambulations dans les centres d’achats, déjà virtualisée par la vente en ligne, se réincarnera-t-elle dans le métavers ? Plusieurs <a href="https://www.forbes.com/sites/theyec/2022/01/24/how-the-metaverse-will-reshape-e-commerce-forever/?sh=561d632769d9">compagnies</a> tentent de répondre à cette question, telles que <a href="https://markets.businessinsider.com/news/currencies/samsung-metaverse-decentraland-ethereum-337x-avatar-digital-asset-store-2022-1">Samsung</a> et <a href="https://www.reuters.com/technology/into-metaverse-nike-creates-nikeland-roblox-2021-11-18/">Nike</a>, qui ont déjà lancé des espaces commerciaux dans le métavers. La tendance vers le métavers a également inspiré de nouvelles collections de mode telle que celle de Ralph Lauren, <a href="https://fortune.com/2021/12/08/ralph-lauren-digital-fashion-line-roblox-metaverse/">lancée en décembre dernier</a> dans le monde virtuel <em>Roblox</em>, une plate-forme immersive servant à la fois de vitrine et d’espace virtuel de jeux vidéos.</p>
<p>Un avenir dans lequel autant de nos activités sociales prendront place dans le métavers peut sembler hâtif et même un peu exagéré, mais ces transitions sont déjà entamées. Plusieurs événements prennent maintenant aussi place dans des salles de spectacles virtuels, tels le <a href="https://www.washingtonpost.com/technology/2022/02/04/sundance-metaverse-quest-virtual-reality/">Sundance Film Festival</a> et les concerts d’artistes tels que Ariana Grande, J Balvin, et Travis Scott. Le spectacle de ce dernier, organisé sur la plate-forme de jeu vidéo Fortnite, a par ailleurs attiré plus de <a href="https://www.theverge.com/2020/4/23/21233946/travis-scott-fortnite-concert-astronomical-record-breaking-player-count">12,3 millions d’invités</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/449849/original/file-20220303-13-taenl0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="personnes virtuelles sur un plancher de danse avec de gros ballons jaunes" src="https://images.theconversation.com/files/449849/original/file-20220303-13-taenl0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/449849/original/file-20220303-13-taenl0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/449849/original/file-20220303-13-taenl0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/449849/original/file-20220303-13-taenl0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=336&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/449849/original/file-20220303-13-taenl0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/449849/original/file-20220303-13-taenl0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/449849/original/file-20220303-13-taenl0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Image du concert donné par le DJ MarshMello sur la plate-forme Fortnite en 2019.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.flickr.com/photos/whelsko/">Whelsko/Flickr</a></span>
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</figure>
<p>Tournons-nous maintenant vers nos activités physiques, qui elles aussi sont de plus en plus accomplies de façon virtuelle. Des compagnies telles Peloton offrent maintenant des montées à vélo de calibre Tour de France et Giro, sans la contrainte de devoir se rendre en Europe. Leur <a href="https://www.businessofapps.com/data/peloton-statistics/">popularité ne cesse de croître</a>, grimpant de 1,9 million d’usagers en 2019 à 5,9 millions d’usagers en 2021.</p>
<p>Un autre exemple serait la compagnie <a href="https://news.crunchbase.com/news/tempo-lands-17-5m-series-a-for-ai-powered-home-workouts/">Tempo</a>, qui utilise l’intelligence artificielle pour offrir des séances d’entraînement à domicile avec entraîneur personnel virtuel.</p>
<h2>Un nouvel exode urbain</h2>
<p>Quoique pratique, cette transition vers le métavers change la façon dont nous interagissons avec l’aménagement et l’espace urbain et nous force à revoir plusieurs priorités urbaines.</p>
<p>Encore aujourd’hui, pour se démarquer et se rendre plus attrayantes, plusieurs villes mettent l’accent sur la qualité et la quantité d’espaces verts présents sur leur territoire. Mais à quoi vont servir ces espaces – qui pour l’instant servent principalement de lieux de rencontres et d’exercice – si les citadins de demain décident d’accomplir ces activités en ligne ?</p>
<p>Sans le besoin d’espaces urbains, et sans les commerces qui les côtoient, les avantages de vivre en ville risquent aussi de diminuer. Déjà, durant la pandémie, plusieurs ménages canadiens se sont familiarisés avec le télétravail et ont choisi de <a href="https://www.cbc.ca/news/canada/urban-exodus-canada-toronto-montreal-covid-19-1.6313911">quitter la ville</a> pour tirer avantage de loyers plus abordables. Il faut croire que si, en plus de travailler de la maison, plusieurs personnes arrivent à accomplir leurs activités sociales et activités physiques à distance à partir du métavers, nous ferons face à un nouvel exode urbain.</p>
<h2>Des aménagements urbains à réinventer</h2>
<p>Apple, Meta et Microsoft ne sont pas les seules compagnies à croire que nous occuperons les espaces virtuels dans lesquelles elles investissent. Mais si elles ont raison, les villes doivent commencer à en tenir compte. Plusieurs espaces et aménagements urbains seront à revoir et même à réimaginer : un processus qui pourrait prendre plusieurs formes.</p>
<p>Par exemple, une réponse aux promesses corporatives de bonheur virtuel pourrait s’incarner dans de nouveaux projets, tels que la création de jardins communautaires et le réaménagement de rives côtières en plages urbaines. Des initiatives telles que celles-ci, ajoutées au renouvellement de l’offre des logements abordables, pourraient fort bien contrer l’exode urbain.</p>
<p>Quelles qu’elles soient, les pistes de solutions seront difficiles à envisager si elles ne proviennent pas d’efforts concertés et collectifs, émanant autant des secteurs publics que privés. Ces efforts devront impliquer les citoyennes et citoyens d’aujourd’hui afin de déterminer, d’une part, en quoi consiste le métavers et, d’autre part, quel sera son rôle dans les villes de demain.</p>
<p>Si nous ne commençons pas bientôt à réfléchir à ces questions, les entreprises de la Silicon Valley se feront un plaisir d’y répondre pour nous. Et rien n’empêcherait alors le passage de la science-fiction à la réalité du métavers dystopique imaginé par Neal Stephenson.</p>
<p>Quoi qu’il en soit, il est clair que plus les compagnies privées investissent dans leurs visions urbaines virtuelles, moins notre attention se porte vers nos espaces urbains actuels.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/175795/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les nouvelles réalités virtuelles changent la façon dont nous interagissons avec nos espaces urbains. Comment le métavers rendra-t-il certains aménagements urbains redondants et d’autres indispensables ?Mischa Young, Professeur adjoint, Université de l'Ontario françaisSarah Choukah, Professeure adjointe, pôle d'études et de recherches en cultures numériques, Université de l'Ontario françaisLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1803762022-04-11T21:04:19Z2022-04-11T21:04:19ZLe « tout-digital », garant d’une plus grande durabilité dans l’industrie de la mode ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/456125/original/file-20220404-9425-nhio4s.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C2%2C757%2C502&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le défilé Dolce&Gabbana – Crédit photo : Decentraland via Fashion Network
</span> <span class="attribution"><span class="source">Decentraland</span></span></figcaption></figure><p>L’industrie de l’habillement est l’un des plus gros pollueurs au monde. Selon <a href="https://www.unep.org/news-and-stories/press-release/un-alliance-sustainable-fashion-addresses-damage-fast-fashion">divers rapports</a>, elle est à l’origine de 10 % des émissions mondiales de carbone ; 20 % des eaux usées mondiales proviennent de la teinture des textiles. La culture du coton représente près de 25 % de l’utilisation d’insecticides et plus de 10 % des pesticides. Du côté commercial, le tableau n’est guère plus reluisant avec des <a href="https://ellenmacarthurfoundation.org/a-new-textiles-economy">habitudes de consommation</a> clairement non durables. Entre 2000 et 2015, les ventes de vêtements ont doublé pour atteindre 200 milliards de produits par an, le nombre moyen de fois où un article est porté ayant diminué, de manière générale, de près de 40 %.</p>
<p>Il est inconcevable de penser que l’industrie de l’habillement puisse ainsi continuer à produire en masse des vêtements bon marché souvent fabriqués dans des conditions de travail douteuses. Conscientes du nombre croissant de consommateurs éco-responsables, plusieurs marques tentent d’adopter une « attitude verte », certaines optent pour la facilité, le <a href="https://theconversation.com/ces-arbres-qui-cachent-des-forets-de-greenwashing-105744">« greenwashing »</a>, quand d’autres sont plus sérieuses dans leurs efforts environnementaux, bien que relativement limités.</p>
<h2>L’intelligence artificielle, outil de régulation ?</h2>
<p>Pour s’engager vers plus de durabilité, l’industrie s’oriente notamment vers la transformation numérique, en comptant, entre autres, sur les progrès de l’<a href="https://www.routledge.com/Artificial-Intelligence-Business-and-Civilization-Our-Fate-Made-in-Machines/Kaplan/p/book/9781032155319">intelligence artificielle</a> et son application dans la mode (éphémère). L’intelligence artificielle et l’analyse avancée des données, par exemple, permettent d’<a href="https://www.capgemini.com/research/building-the-retail-superstar-how-unleashing-ai-across-functions-offers-a-multi-billion-dollar-opportunity/">optimiser la gestion de la chaîne d’approvisionnement</a> et d’améliorer considérablement les prévisions des chiffres de vente, des tendances de la mode et du comportement des clients. L’industrie de l’habillement lutte depuis longtemps contre la distorsion des stocks, les surstocks fréquents entraînant une surproduction, une forte consommation d’énergie et des déchets incommensurables, en bref : une empreinte carbone élevée. L’intelligence artificielle peut contribuer à pallier ces pratiques.</p>
<p>Une autre possibilité pour réduire les émissions implique l’utilisation d’assistants pilotés par l’intelligence artificielle, capables de suggérer des articles aux clients en fonction de leurs mensurations, de leur historique d’achats et de leur style personnel. De tels systèmes augmentent la satisfaction des clients quant aux articles sélectionnés et réduisent le nombre de retours. Le grand gagnant dans un tel scénario serait le secteur en ligne, puisque <a href="https://towardsdatascience.com/artificial-intelligence-is-restyling-the-fashion-industry-c2ce29acae0d">jusqu’à 40 %</a> des achats en ligne sont finalement retournés, ce qui entraîne une forte empreinte carbone. La plupart du temps, ces articles ne sont pas revendus et finissent par être détruits.</p>
<p>L’intelligence artificielle peut également personnaliser la mode à grande échelle, c’est-à-dire appliquer le concept de <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1540-5885.2006.00190.x">personnalisation de masse</a>. En effet, l’achat d’articles de mode personnalisés augmente la <a href="https://ideas.repec.org/a/eee/jbrese/v65y2012i10p1516-1522.html">valeur émotionnelle</a> d’un produit, ce qui incite les clients à conserver ces articles plus longtemps et à les porter plus souvent. Imaginez, par exemple, que vous ayez personnalisé et acheté le même pull que vos amis, en y ayant apporté une touche personnelle – et significative. Un tel pull aura sans aucun doute une valeur émotionnelle élevée pour le groupe d’amis en question. Ils le porteront plus souvent et le garderont plus longtemps. Néanmoins, une telle approche s’aligne difficilement sur le modèle économique de la fast fashion, qui encourage la surconsommation et les cycles de vie courts des produits. Seul un changement radical du modèle économique pourrait permettre le succès d’une telle démarche.</p>
<h2>Demain, des vêtements numériques</h2>
<p>Il ne s’agit là que d’une poignée d’exemples de la manière dont l’IA peut aider la mode à s’engager vers un avenir plus écologique. Il existe également une autre alternative, plus futuriste : remplacer complètement les vêtements physiques par des vêtements numériques. En effet, de plus en plus de consommateurs achètent leurs nouveaux vêtements (principalement) pour les porter et surtout les <a href="https://qz.com/quartzy/1354651/shoppers-are-buying-clothes-just-for-the-instagram-pic-and-then-return-them/">montrer sur les réseaux sociaux</a>. Pour les influenceurs et les influenceuses mode d’Instagram, par exemple, il est inimaginable de porter les mêmes vêtements sur plusieurs photos. Semblable aux <a href="https://fr.fashionnetwork.com/news/Les-cabines-d-essayage-virtuelles-fits-me-arrivent-en-france,318754.html">cabines d’essayage virtuelles</a>, d’autres clients pourraient s’amuser à tester comment porter, assortir et combiner leurs différents vêtements (virtuels).</p>
<p>Pour être à la mode sur les réseaux sociaux, il n’est pourtant plus nécessaire d’acheter de vrais vêtements : des entreprises telles que <a href="https://dressx.com/">Dress-X</a> vendent des articles de mode entièrement numériques, dont elles vous habilleront en fonction de votre photo préférée. Le processus est infaillible : téléchargez une photo de vous, achetez le vêtement souhaité et le prestataire de services vous renvoie votre image portant (virtuellement) la nouvelle casquette, le nouveau pull ou le nouveau sac sélectionné. Vous n’avez pas besoin de physiquement acheter l’article en question ; tout est numérique. C’est certes plus durable, mais pas forcément moins coûteux : les prix vont d’environ 30-50 euros pour une robe, un pull ou une paire de chaussures stylés à plusieurs milliers d’euros pour un costume haute couture (virtuel).</p>
<p>Pour vous immerger davantage encore dans le monde virtuel, pensez au <a href="https://theconversation.com/facebook-et-son-metavers-le-cauchemar-devient-il-realite-172455">« métavers »</a>, ce monde virtuels tridimensionnel que l’on peut intégrer sous la forme d’avatars via des casques de réalité virtuelle et augmentée. Ces fameux avatars, qui représentent notamment votre « vous virtuel », voudront eux aussi être à la mode ; il leur faudra donc leur constituer une garde-robe (numérique). Si Mark Zuckerberg parle de son métavers au futur, ses prédécesseurs, à l’instar de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0007681309000895">Second Life</a>, existent depuis près de 20 ans. Les recherches montrent que ses utilisateurs vivent ces mondes sociaux virtuels comme une <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/14241270903047008">extension de leur vie réelle</a> et, il y a dix ans déjà, ils concevaient, vendaient et achetaient des <a href="https://www.jstor.org/stable/26893831">vêtements numériques</a>. Si les prédictions deviennent réalité, le métavers fera bientôt <a href="https://thechoice.escp.eu/tl-dr/play-hard-work-hard-the-metaverse-is-not-just-a-game/">partie intégrante de notre vie</a> ; nous y travaillerons et y socialiserons, le tout sous la forme d’avatars incroyablement authentiques qui imiteront nos expressions faciales et nos mouvements corporels… et porteront des vêtements numériques. Bien entendu, l’utilisateur aura le choix entre un avatar lui ressemblant parfaitement ou véhiculant une tout autre image de lui-même – selon la situation souhaitée et le contexte. Cet environnement constituera un marché de la mode (presque) entièrement nouveau à développer.</p>
<p>Une preuve supplémentaire de cette éventualité nous vient du monde des défilés de mode lui-même. Juste après la dernière semaine de la mode de Milan (la vraie), plusieurs marques de vêtements de renom se sont associées pour créer un autre type de défilé : la <a href="https://www.voguebusiness.com/technology/metaverse-fashion-week-the-hits-and-misses">Metaverse Fashion Week</a>. Organisée par et sur le monde virtuel <a href="https://decentraland.org/">Decentraland</a>, celle-ci a présenté la plus grande semaine de la mode entièrement numérique au monde. Durant les quatre jours de défilés virtuels, on a pu y admirer les collections de Dolce & Gabbana, Etro, Tommy Hilfiger, entre autres. Le défilé virtuel était entouré d’une zone commerciale haut de gamme inspirée de l’Avenue Montaigne à Paris, où les consommateurs pouvaient acheter directement les produits (numériques) souhaités auprès des marques susmentionnées.</p>
<p>Cependant, les mondes virtuels ne sont pas sans défaut. En effet, ils sont consommateurs d’énergie et, à ce titre, pollueurs – même si leur empreinte carbone n’est pas, au moins pour l’instant, comparable à celle de la fast fashion. Ce qu’on peut toutefois <a href="https://theconversation.com/facebook-et-son-metavers-le-cauchemar-devient-il-realite-172455">questionner</a> est ce que signifie vivre dans le métavers pour la société… Une vie où l’on reste cloîtré chez soi et où l’on passe le plus clair de son temps dans un environnement virtuel est-elle vraiment souhaitable ?</p>
<p>Dans le scénario fictif du métavers qu’il exploite dans son best-seller de 1992 <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/le-samourai-virtuel-a-t-il-inspire-le-metaverse-de-zuckerberg-esperons-que-non_fr_6182b385e4b0c8666bd6dfac"><em>Le Samouraï virtuel</em></a>, Neal Stephenson décrit un univers où les mondes virtuels deviennent si populaires et attrayants que certaines personnes décident d’y rester continuellement connectées et passent leur vie réelle dans des unités de stockage, entourées uniquement de l’équipement technique nécessaire leur permettant d’accéder au monde virtuel.</p>
<p>Comme souvent, la solution se trouve probablement dans un juste milieu : une évolution vers une mode lente (physique) plus durable, s’éloignant des cycles de vie courts des produits et de la surconsommation de vêtements bon marché et de mauvaise qualité, combinée à des vêtements entièrement numériques portés lors des apparitions sur les réseaux sociaux et les visites (occasionnelles) du (futur) métavers.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/180376/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Andreas Kaplan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’industrie de la mode a déjà compris l’intérêt de l’intelligence artificielle pour s’engager vers une plus grande durabilité. Et si, demain, nous achetions des vêtements numériques ?Andreas Kaplan, Rector, ESCP Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1780592022-03-24T18:41:02Z2022-03-24T18:41:02ZQuand la technologie s’invite au musée<p>La relation entre les musées et la technologie a souvent été perçue comme un gadget ou un élément d’amusement qui risquait de dégrader la dimension culturelle du lieu. Les restrictions liées à la pandémie de Covid-19 ont définitivement fait évoluer cette relation. Aujourd’hui la plupart des musées proposent une complémentarité d’offres et d’expériences entre le physique et le digital.</p>
<p>Il faut distinguer les outils technologiques enrichissant l’expérience de visite in situ et ceux se substituant à l’expérience de visite.</p>
<h2>Enrichir la visite in situ</h2>
<p>Historiquement, la première approche fut par les audioguides numériques, véritable révolution et alternative à la visite avec un guide. Le gain fut notamment en termes de langues proposées et la liberté de déambulation dans les locaux, la perte était liée à l’absence d’interaction et la présentation forcément partielle des collections.</p>
<p>D’un point de vue marketing, c’est une offre d’entrée de gamme qui répond à la majorité des demandes tout en proposant une liberté d’usage. L’évolution de ces audioguides est l’utilisation d’applications mobiles directement téléchargeables sur le smartphone des visiteurs. Ce simple transfert d’un périphérique prêté par le musée à l’usage de son propre smartphone <a href="https://www.afm-marketing.org/en/system/files/publications/20160517200945_REVAT_ROEDERER.pdf">ouvre la voie à un immense champ de services complémentaires</a>.</p>
<p>Pour les musées, le fait que l’usager utilise son propre téléphone supprime le problème de la location et de la gestion des audioguides numériques tout en renforçant l’interaction du visiteur avec les œuvres.</p>
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<p>Outre la visite audio, plusieurs technologies coexistent. Le code QR permet de proposer un texte ou un accès direct à un site web contenant des documents à télécharger ou une vidéo. Cela réduit le nombre de panneaux d’affichage devant les œuvres tout en proposant des compléments. Un seul code QR permet à chacun d’accéder aux ressources prévues dans les différentes langues.</p>
<p>L’action nécessaire <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-030-58799-4_59">lors du scan du code QR renforce l’interaction entre le visiteur et l’œuvre</a>, elle permet en outre de mesurer l’engagement des visiteurs envers les différents objets présentés, un compteur pouvant facilement être intégré au code QR.</p>
<p>Enfin les informations téléchargées via le code QR restent dans la mémoire du smartphone, cela permet au visiteur d’avoir une trace des sites visités ou des objets qu’il a particulièrement appréciés. C’est ici un élément important dans la mesure du sentiment post-visite d’un musée.</p>
<p>Plus simples à utiliser que les codes QR, les Beacons <a href="https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2019-5-page-57.htm">sont des systèmes très répandus dans les musées</a>. C’est notamment grâce à ces outils que les audioguides des musées peuvent automatiquement mettre la bonne explication lorsque le visiteur passe d’une salle à l’autre.</p>
<p>Ces beacons peuvent ainsi renvoyer des données de géolocalisation très fine (moins de 5 cm) et proposer un nouvel enregistrement audio ou vidéo, envoyer un message sur un smartphone, ouvrir un contenu en ligne, etc. Leur principal intérêt est de ne demander aucune action de la part de l’utilisateur. Ce dernier peut ainsi passer de salle en salle d’œuvre en œuvre en disposant toujours de la bonne information au bon moment. L’information proposée n’est cependant pas stockée sur le smartphone et ne peut donc pas être gardée comme souvenir de la visite.</p>
<p>L’enrichissement d’expérience via la réalité augmentée (RA) <a href="https://www.cairn.info/revue-realites-industrielles-2022-1-page-53.htm">relève d’un niveau d’interaction plus important</a>. En utilisant une application mobile qui capte des données de géolocalisation très fine et des données gyroscopiques du smartphone le scénariste de la visite peut ainsi proposer une surcouche virtuelle dans un monde réel.</p>
<p>Il suffit au visiteur de rentrer dans une salle dans laquelle une solution de RA a été mise en place pour qu’il puisse, via la caméra de son smartphone ou une tablette fournie, « voir » la pièce réelle avec une surimpression en image virtuelle. Cela permet par exemple de présenter les meubles à travers différentes époques.</p>
<p>La RA se mêle ainsi à la réalité physique en combinant deux images. Si l’immersion et l’engagement du visiteur sont plus importants, la principale limite reste l’impossibilité de garder une trace de cette réalité dans son smartphone. La RA ne peut, par définition, s’utiliser qu’in situ devant l’œuvre pour laquelle elle a été conçue.</p>
<p>Elle permet cependant de proposer des visites particulièrement vivantes en contextualisant les œuvres et les liens sans toucher réellement aux objets exposés. La créativité des scénaristes d’exposition est ainsi sans limites. Une application très ludique a vu le jour en 2016, « Pokémon Go ! » proposait d’inclure dans le monde réel des personnages virtuels, le but du jeu était « d’attraper » les Pokémons en suivant une série d’indices.</p>
<p>Des musées ont ainsi eu l’idée de proposer une visite très ludique pour les plus jeunes (d’âge ou d’esprit) en « cachant » des <a href="https://www.nouveautourismeculturel.com/blog/2016/09/24/un-pokemon-au-musee/">Pokémons dans les locaux, dans des tableaux ou derrières des œuvres</a>. Certaines villes proposent aussi des visites à énigmes mettant en avant le <a href="https://www.leparisien.fr/societe/tourisme-quand-les-villes-s-inspirent-de-pokemon-go-pour-attirer-les-visiteurs-04-06-2017-7014777.php">patrimoine architectural via des chasses aux Pokémon</a>.</p>
<h2>Une alternative à la visite réelle d’un site</h2>
<p>La réalité virtuelle (VR) permet de substituer une expérience virtuelle à la visite réelle d’un lieu. Deux approches se distinguent, la VR comme substitution à la visite réelle et la VR comme complément de l’offre de visite réelle.</p>
<p>Le cas de la substitution totale de la visite réelle par la visite virtuelle trouve son origine dans les travaux des archéologues. Ces derniers utilisent depuis longtemps la modélisation 3D pour recréer un site à partir des traces archéologiques. Il est ainsi possible de visiter d’anciennes villas de Pompéi ou l’épave d’un bateau gisant par plus de 60 mètres de fond.</p>
<p>Le passage d’une modélisation 3D (sur écran) issue de relevés topographiques à l’usage de la VR nécessite un traitement complémentaire afin de proposer les images via un casque de VR.</p>
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<p>L’archéologue ou le visiteur a ainsi la possibilité d’être immergé dans le site comme s’il se déplaçait dans les lieux réels reconstitués. On comprend facilement l’intérêt d’une telle technique pour l’exploration préventive des sites (la numérisation via un laser, la reconstruction informatique et l’exploration virtuelle ne risquent pas de détériorer un environnement sensible), le cas de la grotte de Lascaux est parlant.</p>
<p>La grotte, fermée en raison de la très grande sensibilité du milieu, a d’abord donné lieu à des facsimilés de très grande qualité Lascaux I jusqu’à Lascaux IV, la grotte est aujourd’hui visitable via un jumeau virtuel permettant une reconstitution fidèle sans les contraintes physiques de déplacement des visiteurs. On pourrait ainsi imaginer un touriste à l’autre bout du monde qui ne se rendrait jamais à Montignac mais visiterait la grotte de chez lui, avec un guide humain <a href="https://www.citedelarchitecture.fr/fr/evenement/visite-de-la-grotte-de-lascaux-11-le-jumeau-virtuel">connecté dans ce monde virtuel depuis la Dordogne !</a></p>
<p>Par extension, il est possible d’appliquer cette technique à des œuvres réellement accessibles : qui n’a jamais rêvé de passer du temps devant la Joconde ? Ou d’observer la « déconstruction » d’un mobile de Calder afin d’en comprendre le subtil équilibre ! Les applications sont nombreuses, démocratisation de l’accès à la culture, suppression des files d’attente et des contraintes logistiques sur site, visites accessibles 24h sur 24h, valorisation de l’expérience de visite via des filtres thématiques ou des interactions avec les œuvres, etc.</p>
<p>Mais cette virtualisation de la visite ouvre une réflexion sur la gestion de l’offre d’un musée. Si l’archéologie préventive est facilement acceptable car elle est le seul moyen de profiter d’un site détruit ou sensible qu’en est-il de la virtualisation d’œuvres existantes et facilement accessibles ? Les musées sont aujourd’hui face à un enjeu de gestion de leur portefeuille produit. La virtualisation de la visite peut être un produit de pure substitution à la visite physique. Durant la pandémie, le Louvre a proposé une visite virtuelle des plus belles œuvres du musée.</p>
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<p>Ce Louvre virtuel a reçu <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/services-conseils/le-louvre-a-attire-10-millions-de-visiteurs-virtuels-en-deux-mois-1205279">14 millions de visites en 2 mois (contre 10 millions de visites physiques par an au Louvre)</a>. Comment gérer cette visite virtuelle alors que les visites physiques sont de nouveau possibles ? La visite virtuelle peut être vue soit comme un produit d’appel incitant le visiteur à franchir le pas pour découvrir réellement les œuvres ?</p>
<p>C’est ici un moyen de communiquer sur une sélection d’œuvres et donc de travailler sur la notoriété d’un musée. Mais cela peut être également un moyen de proposer une visite de substitution pour une partie des visiteurs qui ne se rendront jamais physiquement dans le musée. Que ce choix soit dû à l’éloignement, au coût ou au manque de temps, la visite virtuelle permet d’apporter une nouvelle dimension à la diffusion de la culture.</p>
<p>Un grand musée virtuel regroupant les plus belles pièces des musées physiques a ainsi vu le jour avec Internet, il permet de faire le tour du monde des œuvres pour une visite qui ne sera jamais possible dans la réalité.</p>
<p>Enfin, la virtualisation des visites est un moyen pertinent pour garder une trace et diffuser des expositions temporaires. La capture de ces expositions en vidéo 360° en haute définition permet ainsi de garder une trace et de proposer un large catalogue de visites. À l’heure où le replay est une pratique normale pour les émissions télévisuelles, radio, ou les plates-formes proposent des accès au choix pour voir et revoir un immense catalogue de contenus, on peut penser qu’une partie des visiteurs sont prêts à visiter ainsi.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/178059/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stéphane Bourliataux-Lajoinie ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La plupart des musées proposent une complémentarité d’offres et d’expériences entre le physique et le digital.Stéphane Bourliataux-Lajoinie, Maitre de conférences (HDR) en Marketing Digital. Directeur du MiM2 E-business and Digital Marketing, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1784902022-03-21T20:03:52Z2022-03-21T20:03:52ZTourisme et métavers : vers une généralisation du voyage virtuel ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/453345/original/file-20220321-25-jdpr5g.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C8%2C936%2C538&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Voyager sans bouger grâce au métavers.</span> <span class="attribution"><span class="source">Unsplash</span></span></figcaption></figure><p>Le métavers occupe une place de plus en plus importante dans le paysage médiatique. Si certains se positionnent de manière prudente ou réfractaire, d’autres considèrent cette évolution technologique comme une opportunité pour développer de nouvelles offres. Le tourisme est un secteur qui évolue largement au gré des technologies de l’information et de la communication, il est alors tout à fait pertinent de questionner la manière dont il pourrait intégrer cet univers virtuel. Et c’est depuis l’annonce de la création du groupe Meta par Mark Zuckerberg que ce terme s’est massivement propagé dans le monde. Le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9tavers">métavers</a> peut être défini comme un ensemble d’espaces virtuels, persistants, partagés, indexés dans le monde réel et accessibles via interaction 3D.</p>
<p>Alors, comment le métavers pourrait-il s’emparer du tourisme, une pratique qui nécessite un déplacement physique ?</p>
<h2>Tourisme et technologie font-ils bon ménage ?</h2>
<p>On observe une corrélation évidente entre l’évolution du tourisme et celle des technologies, qui vont toujours de pair. En effet, des centrales de réservations informatisées dans les années 1970 à la domestication d’Internet vers la fin des années 1990, la technologie s’est toujours insérée dans le tourisme pour <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0261517708000162">faire émerger de nouvelles pratiques</a>. Le métavers s’inscrit dans cette évolution d’Internet qui utilise des technologies de plus en plus immersives pour proposer des expériences phygitales, c’est-à-dire où les frontières entre le réel et le virtuel sont de plus en plus perméables.</p>
<p>Qu'il s'agisse des musées, des parcs nationaux ou des sites patrimoniaux, la crise sanitaire a aussi permis à de nombreux acteurs d’amplifier et de faire perdurer l’usage d’outils technologiques pour proposer des visites en réalité virtuelle. L’application <a href="https://www.flyoverzone.com/">Fly Over Zone</a>, en plus de proposer une exploration des sites culturels du patrimoine mondial, permet de restaurer numériquement des sites endommagés. Le géant du Web Amazon a lancé « <a href="https://www.amazon.com/b?node=19419898011&ref_=ae_nav_lgo">Amazon Explore </a>» pour littéralement « voyager virtuellement autour du monde ». Ce volet commercial est un service de flux interactif diffusé en direct, qui selon eux, permet de découvrir de nouveaux endroits depuis son ordinateur. Si cette offre n’en est qu’à ses balbutiements, avec une version béta, il y a fort à parier que ce service de visites virtuelles sera amené à évoluer pour proposer des formats encore plus immersifs.</p>
<p>En matière de tourisme, l’Asie fait figure de précurseur avec des propositions déjà très avancées comme le projet « <a href="https://fr.euronews.com/next/2021/11/17/metavers-seoul-ouvre-la-porte-de-ce-nouvel-univers-numerique">Seoul Metaverse</a> » qui ambitionne de devenir la première grande ville du monde à entrer dans le métavers, avec un parcours touristique qui reproduira les principaux sites de visite de la ville. Mais c’est en France, que l’on trouve l’un des projets les plus aboutis avec <a href="https://www.moyapatrick.com/sltourisme.htm">MoyaLand</a> : un univers virtuel touristique, construit comme une reproduction artistique virtuel et immersive qui possède un office de tourisme, des musées, un aéroport, un centre historique où habitants et touristes peuvent évoluer virtuellement par le biais de leurs avatars.</p>
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<p>D’autres acteurs du tourisme pourraient leur emboîter le pas car selon l’entreprise américaine <a href="https://www.gartner.com/en/newsroom/press-releases/2022-02-07-gartner-predicts-25-percent-of-people-will-spend-at-least-one-hour-per-day-in-the-metaverse-by-2026">Gartner</a>, en 2026, 25 % des gens passeront au moins une heure par jour dans le métavers. Alors comment ces personnes expérimenteront-elles le tourisme dans cet environnement virtuel ?</p>
<h2>Le métavers pour susciter le voyage</h2>
<p>Il existe deux grandes tendances pour définir <a href="https://journals.openedition.org/viatourism/1347">l’expérience touristique</a> : la première tient de l’ordre du processuel avec une transformation du monde en connaissances, la seconde tient du moment vécu avec une place centrale accordée à l’hédonisme et au sentiment de réussite. Si par définition, le tourisme nécessite un déplacement physique, il existe de fait une contradiction avec les expériences touristiques offertes par le métavers qui peuvent néanmoins le remplacer mais surtout susciter l’envie de voyager.</p>
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<p>Rappelons que la réalité virtuelle est un environnement immersif créé à l’aide d’un dispositif technologique qui procure à l’utilisateur des sensations numériquement créées telles que la vue, l’ouïe, le toucher et même l’odorat. Pour éveiller leur sens dans les zones touristiques virtuelles du métavers, les utilisateurs devront donc être équipées de dispositifs visuels, sonores, haptiques, tactiles et olfactifs. En dehors du coût d’acquisition de ces derniers, l’usage de ces nouveaux dispositifs remet en question la perception des sens qu’entretient l’homme avec son environnement.</p>
<p>En reproduisant un décor touristique, le métavers forme un ensemble entre le dispositif, l’utilisateur qui se met dans la peau d’un touriste et les autres spectateurs. Bien que l’expérience soit virtuelle, les sens sont bien mis à contribution en stimulant certaines situations désirées mais non accessibles sur le moment. En permettant une pratique immersive, le casque de réalité virtuelle ou les capteurs haptiques permettraient de <a href="https://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2016-1-page-188.htm#s1n4">vivre des choses jusque là intangibles</a> et de renouer avec la sensorialité. Par le biais de son avatar, l’utilisateur du métavers peut incarner un touriste en construisant virtuellement un parcours de visites, interagir avec d’autres avatars et par conséquent imaginer ce qu’ils ressentent, en stimulant ce que Giacomo Rizzolatti appelle les <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/sciences/neurosciences/neurones-miroirs_9782738119247.php">neurones miroirs</a>.</p>
<h2>Des contraintes sociétales et environnementales</h2>
<p>Imités, reproduits ou simulés, il n’en reste que les voyages et les vacances représentent des pratiques touristiques qui représentent une coupure par rapport au quotidien. Ces moments sont aussi l’occasion pour certains de retrouver leurs proches ou de pratiquer des activités difficilement réalisables dans le cours habituel de la vie. Observer des animaux lors d’un safari, découvrir des sites archéologiques ou pratiquer une langue étrangère sont des activités qui produisent des sensations corporelles et spirituelles uniques, essentielles et différentes de celles produites virtuellement par les dispositifs du métavers.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/univers-paralleles-et-mondes-virtuels-la-guerre-des-metavers-est-commencee-169695">Univers parallèles et mondes virtuels : la guerre des métavers est commencée</a>
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<p>Par ailleurs, le métavers qui est en soi une évolution technologique d’Internet n’est pas encore aboutie. Il nécessite des investissements financiers et la construction d’un cadre réglementaire pour réguler les comportements des usagers. Car lorsque Mark Zuckerberg fait le souhait de créer un monde virtuel et alternatif dans lequel les utilisateurs pourront aussi voyager, il ne faut pas perdre de vue que ce sont également les données des utilisateurs qui seront mises à contribution. Et si certains observent le métavers comme une solution pour éviter de prendre l’avion et tendre vers un tourisme durable, la <a href="https://www.greenpeace.fr/la-pollution-numerique/#:%7E:text=La%20pollution%20num%C3%A9rique%20d%C3%A9signe%20toutes,biodiversit%C3%A9%2C%20production%20de%20d%C3%A9chets%20%C3%A9lectroniques.">pollution numérique</a> induite par celui-ci pourrait bien aller dans le sens contraire d’un tourisme vertueux.</p>
<p>Même si le tourisme dans le métavers ne pourra pas remplacer une expérience touristique vécue hors de chez soi, certains professionnels du tourisme pourraient en tirer profit afin de faire connaître des sites peu accessibles ou ignorés des touristes, qui les découvriront virtuellement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/178490/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Naïma Aïdi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Comment le métavers pourrait-il s’emparer du tourisme, une pratique qui nécessitait jusqu’ici un déplacement physique ?Naïma Aïdi, Doctorante en sciences de l'information et de la communication, rattachée au laboratoire Dicen-IdF. Tourisme et Smart Tourisme, Université Gustave EiffelLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1722672022-02-14T14:28:19Z2022-02-14T14:28:19ZLe métavers, une contrée numérique aux mille facettes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/440129/original/file-20220110-27-kf3qnl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C2%2C988%2C553&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il importe de souligner les avantages et dangers du métavers, surtout dans le contexte où une entreprise privée en prendrait le contrôle.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Depuis l’annonce de Facebook de créer une maison-mère au nom de Meta et de mettre en place un <a href="https://about.fb.com/news/2021/10/facebook-company-is-now-meta/">métavers</a>, ce mot est soudainement devenu à la mode, malgré les confusions entre divers dispositifs, notions et technologies.</p>
<p>En tant que chercheuse en étude du jeu depuis 20 ans, je propose d’apporter un éclairage sur la définition, les origines, certains dangers et points positifs de ce type d’univers numérique.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-metavers-de-facebook-prison-ou-revolution-171997">Le métavers de Facebook : prison ou révolution ?</a>
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<h2>Définir le métavers</h2>
<p>Le métavers est un monde en ligne, complet en soi, au sein duquel l’utilisateur se promène et interagit via un personnage appelé avatar, soit une représentation numérique de soi. Ce monde peut être réaliste ou entièrement fictionnel, mais présente la caractéristique principale d’être ouvert et persistant, c’est-à-dire qu’il évolue même en l’absence de l’utilisateur. Diverses activités peuvent y prendre place, de la socialisation au divertissement, en passant par le commerce, le travail, les arts et l’éducation. Il s’agit, en quelque sorte, d’une ville, une contrée ou même un pays représentés numériquement et habités par des résidents avatoriels.</p>
<p>Bien qu’il soit nécessairement informatique et connecté à l’internet, le métavers n’est pas associé à un support précis : il peut se dérouler sur un écran plat, avec un casque ou des lunettes de réalité virtuelle ou même éventuellement en réalité augmentée, avec des capteurs tactiles, des combinaisons, etc. Le métavers n’est pas principalement défini par une technologie, mais plutôt par l’étendue, les activités et la qualité du monde représenté.</p>
<h2>Historique du métavers</h2>
<p>Le terme a été créé par Neal Stephenson dans son roman de science-fiction <a href="https://www.penguinrandomhouse.com/books/172832/snow-crash-by-neal-stephenson/">Snow Crash (1992)</a>. Le métavers le plus abouti et le plus célèbre est probablement <a href="https://www.secondlife.com">Second Life</a>, développé en 2003 par Linden Lab. Ce monde en ligne, qui n’est pas à proprement parler un jeu vidéo, permet de personnaliser un avatar avec lequel l’usager interagit avec les autres habitants ou avec les objets numériques : bâtiments, places publiques, vêtements, etc. Une économie entière s’y est développée où des items sont conçus puis revendus pour de l’argent sonnant.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1468673713512067078"}"></div></p>
<p>Des institutions y ont eu pignon sur rue et diverses activités culturelles, politiques et même sexuelles s’y sont déroulées : par exemple, le cinéaste Peter Greenaway y a mené un <a href="https://secondlife.jeuxonline.info/actualite/24593/">projet de création</a>, une manifestation a eu lieu contre un parti français d’extrême droite <a href="https://www.nouvelobs.com/politique/elections-2007/20070112.OBS6813/manifestation-virtuelle-anti-fn-sur-second-life.html">qui y avait ouvert une vitrine</a> et même un <a href="https://www.lemonde.fr/technologies/article/2006/05/02/jeroen-degroot-le-sexe-dans-second-life-est-un-jeu-de-role_766746_651865.html">service d’escortes y est apparu</a>. L’utilisateur de Second Life a ainsi pu s’y construire une « seconde vie » au sein de ce métavers.</p>
<p>Bien que le terme ne soit pas vraiment utilisé pour parler des mondes vidéoludiques, les jeux vidéo ont eu une influence considérable sur l’évolution des métavers. Depuis l’apparition des jeux vidéo en ligne jusqu’aux jeux vidéo massivement multijoueurs tels que le célébrissime <a href="https://ww.worldofwarcraft.com">World of Warcraft (2004)</a>, le concept de métavers se développe au fil des avancées technologiques, des créations des concepteurs et des appropriations sociales.</p>
<p>D’univers entièrement consacrés au jeu, ces mondes deviennent des lieux de socialisation, de commerce et même de diffusion artistique. Par exemple, des vedettes musicales y performent désormais des concerts devant des millions de fans, chacun via leur avatar, créant ainsi de nouveaux lieux socioculturels : Travis Scott a attiré <a href="https://www.theverge.com/2021/9/28/22699014/fortnite-soundwave-series-music-concerts-mohamed-hamaki-creative-mode">12 millions de spectateurs dans le jeu <em>Fortnite</em></a> et le concert du rapper Lil Nas X a réuni <a href="https://www.theverge.com/2020/11/16/21570454/lil-nas-x-roblox-concert-33-million-views">33 millions de fans dans <em>Roblox</em></a>.</p>
<h2>Le métavers de Facebook</h2>
<p>L’industrie vidéoludique est devenue, depuis les vingt dernières années, <a href="https://www.statista.com/statistics/292056/video-game-market-value-worldwide/">l’une des plus lucratives de toutes les productions culturelles</a>. Conséquemment, l’entreprise Facebook y a sans doute flairé une occasion d’affaires en profitant de cet attrait pour les jeux vidéo ainsi que du développement de technologies très immersives comme la réalité virtuelle (RV). Facebook a d’ailleurs acquis <a href="https://www.oculus.com">Oculus Rift</a>, une marque de casque de RV, en 2014.</p>
<p>Or, l’intention de Facebook de créer <a href="https://www.about.facebook.com/fr/meta">« son propre » métavers</a> est directement liée à son modèle économique : la collecte massive de données personnelles pour vendre des profils à des entreprises publicitaires (<a href="https://www.statista.com/statistics/268604/annual-revenue-of-facebook/">86 milliards de dollars en 2020</a>).</p>
<p>La question de la surveillance de masse est centrale à la compréhension des dangers du métavers tel qu’envisagé par Mark Zuckerberg, puisque l’objectif est de centraliser toutes nos activités quotidiennes à un seul endroit appartenant à Facebook : l’utilisateur communiquerait avec ses proches, assisterait à des réunions d’affaires, visionnerait des séries ou magasinerait aux enseignes qui s’y installeraient.</p>
<p>C’est un peu comme si M. Zuckerberg devenait propriétaire de Montréal ainsi que de votre lieu de travail, votre maison, votre chambre à coucher, votre brosse à dents… Pour le moment, ce métavers demeure encore marginal et, d’un point de vue vidéoludique, peu innovateur, mais l’objectif, pour la prochaine décennie, est d’améliorer le concept <a href="https://www.statista.com/statistics/264810/number-of-monthly-active-facebook-users-worldwide">pour que les 2,9 milliards d’utilisateurs de Facebook migrent vers cette plate-forme</a>.</p>
<h2>Pour un métavers public et commun</h2>
<p>Si le métavers de Facebook représente une vision dystopique du futur, il n’en demeure pas moins que les mondes en ligne présentent de nombreux points positifs. À l’image du <a href="https://www.w3.org">World Wide Web</a>, qui est un consortium à but non lucratif visant à garder le web le plus accessible possible pour tous, un métavers public, commun et non-propriétaire aurait des avantages, notamment en termes d’accessibilité et de diffusion de contenus diversifiés : des pièces présentées par des théâtres, des formations et des conférences offertes par des écoles, des projections d’œuvres par des artistes ou même des expositions organisées par des musées.</p>
<p>Une plus grande équité culturelle serait alors possible pour des populations à mobilité réduite ou vivant dans des régions éloignées.</p>
<p>Par ailleurs, même si de nombreux chercheurs soulèvent les risques associés à une <a href="https://www.quebecscience.qc.ca/sante/effets-ecrans-que-dit-la-science/">surconsommation des écrans, particulièrement chez les enfants</a>, une utilisation équilibrée du métavers aurait également des avantages propres à la socialisation en ligne, ce que connaissent depuis bien longtemps les joueurs de jeux vidéo !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172267/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Maude Bonenfant a reçu des financements du CRSH et du FRQ. </span></em></p>Bien que la question de la surveillance de masse soit centrale à la compréhension des dangers du métavers tel qu’envisagé par Facebook, cet univers numérique comporte également certains avantages.Maude Bonenfant, Professeure titulaire en communication sociale et publique, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1761812022-02-03T17:44:32Z2022-02-03T17:44:32ZBonnes feuilles : « Le Covid-19, un accélérateur de l’adoption du métavers »<p><em>Le Covid monopolise la sphère médiatique depuis plus de deux ans au fil de ses mutations et des règles sanitaires qui tentent de la freiner. Cependant, un nouveau mot-valise est apparu, en partie favorisé par cette conjoncture particulière : celui de « métavers », ou « metaverse » en anglais. Ces espaces virtuels partagés en 3D ouvrent en effet le champ des possibles à une nouvelle révolution numérique majeure.</em></p>
<p><em>Le métavers permet d’abolir les dernières frontières qui se dressaient entre le monde physique et le monde numérique. Un monde aux possibilités infinies qui n’a de limites que l’imagination et la technique de l’humain. Aujourd’hui, ce concept fait aujourd’hui germer de nombreux projets financés majoritairement par les géants de l’industrie technologique et les grandes entreprises. Ces dernières ont déjà l’ambition de prendre la place de leader sur ce marché encore balbutiant, à l’image du groupe de distribution Carrefour qui vient d’<a href="https://www.bfmtv.com/tech/carrefour-a-achete-une-parcelle-virtuelle-dans-le-metavers-de-the-sandbox_AN-202201310211.html">acheter un terrain dans le monde virtuel</a> The Sandbox. Au-delà de cet exemple, le métavers amorce, semble-t-il, une marche irréversible et avec lui l’avenir de l’humanité tout entière.</em></p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1488107850656272386"}"></div></p>
<p><em>Cet essor et ces perspectives font aujourd’hui l’objet du récent ouvrage « <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03540223">Le consommateur à l’heure du métavers : mondes virtuels, avatars, cryptomonnaies et jetons non fongibles : la nouvelle révolution numérique</a> » (auto-édité) de Samy Mansouri et Mehdi Mansouri, dont The Conversation France publie ici une sélection d’extraits.</em></p>
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<h2>Aux prémices du métavers</h2>
<p>Le terme métavers est apparu pour la première fois dans le <a href="https://theconversation.com/metavers-le-nouvel-eldorado-169653">roman de science-fiction de Neal Stephenson</a>, <em>Snow Crash</em>, publié à l’aube du développement d’Internet en 1992. Dans cette fiction, les individus sous la forme d’avatars vivent et interagissent dans un espace virtuel en trois dimensions (3D) sensiblement semblables au monde réel mais avec plus de possibilités. Aux prémices d’Internet, Stephenson prédisait déjà la prochaine transformation importante du numérique basée sur la réalité virtuelle. Dans son roman, les humains accèdent au métavers par le biais d’ordinateurs qui projettent un affichage de réalité virtuelle sur des lunettes portées par l’utilisateur.</p>
<p>En 2003, la société Linden Lab, basée à San Francisco a lancé Second Life, une plate-forme virtuelle en ligne qui permet aux individus de mener une seconde vie dans un monde virtuel sous la forme d’un avatar. Le jeu a connu une forte notoriété et a approché le million d’utilisateurs réguliers en 2013. Les utilisateurs de Second Life, créent des projections virtuelles d’eux-mêmes, et sont en mesure d’interagir avec d’autres avatars, des lieux et des objets. Ils peuvent explorer le monde virtuel, rencontrer d’autres utilisateurs, participer à des activités individuelles ou de groupes, construire, créer, acheter et échanger des objets virtuels entre eux. La plate-forme propose ainsi des items en 3D générés par les utilisateurs eux-mêmes. Les échanges se font en Linden Dollar, la monnaie virtuelle du jeu qui est convertible en monnaie du monde réel.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/443779/original/file-20220201-25-dxdfqg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/443779/original/file-20220201-25-dxdfqg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/443779/original/file-20220201-25-dxdfqg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=313&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/443779/original/file-20220201-25-dxdfqg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=313&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/443779/original/file-20220201-25-dxdfqg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=313&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/443779/original/file-20220201-25-dxdfqg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=394&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/443779/original/file-20220201-25-dxdfqg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=394&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/443779/original/file-20220201-25-dxdfqg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=394&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Avatars dans le monde virtuel « Second Life ».</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Second_Life_11th_Birthday_Live_Drax_Files_Radio_Hour.jpg">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
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<p>Plus récemment, le jeu vidéo d’action Fortnite qui comptait <a href="https://www.numerama.com/pop-culture/473562-fortnite-atteint-les-250-millions-de-joueurs-qui-pourra-larreter.html">250 millions de joueurs</a> en 2019 a proposé le premier concert gratuit au sein du monde virtuel en partenariat avec le rappeur Travis Scott. Les concerts sur 3 jours, du 24 au 26 avril 2020, ont rassemblé 27,7 millions de joueurs. Travis Scott a ainsi gagné <a href="https://www.cnews.fr/vie-numerique/2020-12-02/le-rappeur-travis-scott-aurait-gagne-20-millions-de-dollars-grace-fortnite">20 millions de dollars</a> pour l’événement. Le lien du replay qui comptabilise plus de 179 millions de vues (Note de la rédaction : chiffre mis à jour le 1<sup>er</sup> février 2022) est disponible sur YouTube via le <a href="https://youtu.be/wYeFAlVC8qU">lien en référence</a>.</p>
<p>Le concept a été reproduit avec d’autres stars telles que Ariana Grande, qui a donné une série de concerts virtuels, du 7 au 9 août 2021.</p>
<h2>Un avènement favorisé par la pandémie</h2>
<p>Nous passons de plus en plus de temps sur nos écrans. Depuis l’arrivée des ordinateurs portables, des smartphones et des tablettes, les humains ont commencé à vivre dans une réalité alternative, notamment sur les réseaux sociaux. Cette tendance s’est fortement accentuée depuis le début de la crise sanitaire qui a forcé ou incité les individus à passer plus de temps sur Internet. Forcé, car le confinement nous a obligés à télétravailler et à se parler via des applications de messagerie à défaut de pouvoir le faire en présentiel. Incité, car la monotonie du confinement nous pousse à passer plus de temps sur Internet pour apprendre ou pour se divertir.</p>
<p>Selon le baromètre Ipsos pour le groupe Krys – Ipsos, les enfants de 3 à 10 ans passent 2h14 devant un écran, soit <a href="https://www.lsa-conso.fr/le-temps-d-ecran-quotidien-des-enfants-augmente-encore-en-2021,396711">20 minutes de plus qu’en 2019</a>. Une étude américaine a montré que depuis le début de la pandémie, le temps passé devant l’écran a plus que doublé chez les 10-14 ans, passant de 3,8 heures/jour à <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34724543/">pratiquement 8 heures journalier</a>. Une étude de l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité (Onaps) parue en 2020 a montré que <a href="https://onaps.fr/confinement-et-niveau-dactivite-physique/">69 % des adolescents ont augmenté leur temps d’écran</a> durant le premier confinement.</p>
<p>À l’heure de la normalisation du télétravail, le métavers professionnel semble être la porte d’entrée la plus logique aux nouveaux mondes virtuels. Une grande majorité des emplois dans le secteur des services se fait sur un ordinateur et ne nécessite pas de présence physique sur le lieu de l’entreprise, un terminal de travail et une connexion Internet suffisent.</p>
<p>La pandémie a également incité les organisations à avoir recours au télétravail sans dimension coercitive mais par praticité. De nombreuses réunions sont désormais organisées en ligne alors qu’elles avaient usuellement lieu en présentiel.</p>
<p>Au-delà de la vie professionnelle, le Covid a favorisé les relations sociales en distanciel. Les apéros en ligne qui pouvaient auparavant paraître totalement saugrenus ont été normalisés durant la pandémie. De nombreux amateurs et professionnels de la musique ont également donné des concerts gratuits durant les confinements. Par exemple, le DJ Français Bob Sinclar a réuni jusqu’à <a href="https://www.francebleu.fr/infos/insolite/pendant-le-confinement-le-dj-bob-sinclar-mixe-tous-les-jours-en-direct-sur-facebook-1585245633">6 millions de spectateurs</a> sur une session live de musique funk sur Facebook.</p>
<p>Tous ces éléments mis en commun favorisent fortement la migration des consommateurs vers le métavers, un monde virtuel auquel ils sont de plus en plus habitués.</p>
<h2>Des investissements importants</h2>
<p>Sans surprise les entreprises qui investissent aujourd’hui massivement dans le métavers font partie des GAMAM (Google – Amazon – Meta – Apple – Microsoft) et des BATX (Baidu – Alibaba – Tencent -Xiaomi). Pour rappel ce sont les entreprises technologiques les plus importantes au niveau mondial. Leur capitalisation frôle les 10 000 milliards de dollars soit deux fois et demie le PIB de l’Allemagne.</p>
<p>L’entreprise qui paraît la plus avancée reste Meta (anciennement Facebook). Le 28 octobre 2021, Mark Zuckerberg a présenté dans une longue vidéo sa vision et les objectifs de son métavers alliant réalité virtuelle et réalité augmentée, la vidéo est disponible via le lien en référence (voir ci-dessous).</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Uvufun6xer8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">The Metaverse and How We’ll Build It Together – Connect 2021 (Meta, octobre 2021).</span></figcaption>
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<p>Dans la foulée, Meta a lancé le 9 décembre 2021 aux États-Unis et au Canada, Horizon Worlds, une expérience de réalité virtuelle sociale où les utilisateurs peuvent créer et explorer ensemble un métavers. Pour y accéder, un casque de réalité virtuelle de la marque Oculus (entreprise rachetée en 2014 par Facebook) est nécessaire. Selon Meta, Horizon Worlds représente l’avenir des réseaux sociaux, notamment grâce aux interactions avec les autres avatars.</p>
<p>De son côté Microsoft a annoncé une nouvelle plate-forme appelée Mesh pour 2022. Mesh s’inscrit dans la <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2021-11-02/microsoft-s-own-metaverse-is-coming-and-it-will-have-powerpoint">productivité en ligne</a> en étant la suite de Teams. La nouvelle plate-forme collaborative professionnelle ambitionne de combiner la réalité augmentée et la réalité virtuelle. L’objectif est de pouvoir travailler dans un bureau virtuel en incarnant un avatar, le tout avec plus de fonctionnalités.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Jd2GK0qDtRg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Introducing Microsoft Mesh (Microsoft, mars 2021).</span></figcaption>
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<p>Du côté de la Chine, Ma Jie le vice-président de Baidu, a donné une <a href="https://www.cnbc.com/2021/12/24/baidu-says-it-could-be-6-years-before-it-can-fully-deliver-its-metaverse.html">conférence de presse</a> le 21 décembre 2021 pour présenter XiRang (en français, « terre d’espoir »), le métavers en cours de développement de la société. Ce projet devrait voir le jour dans les 6 ans à venir selon l’entreprise.</p>
<p>Plusieurs applications industrielles du métavers sont également envisagées par les grands groupes. Boeing a récemment annoncé vouloir <a href="https://www.reuters.com/technology/boeing-wants-build-its-next-airplane-metaverse-2021-12-17/">concevoir son prochain avion</a> dans le métavers. Après la crise du 737 Max, le constructeur aéronautique va investir 15 milliards de dollars sur 10 ans pour revenir à la pointe de l’ingénierie.</p>
<h2>Réel et virtuel, une frontière désormais poreuse</h2>
<p>Plusieurs entreprises développent des interfaces de connexion qui reproduisent les stimuli sensoriels. Plusieurs innovations concernent les combinaisons intégrales pour permettre de mieux ressentir l’environnement virtuel sur le corps physique et de mesurer les signes vitaux de l’utilisateur. Le but étant à terme de pouvoir aussi ressentir les chocs, la présence de liquide ou de gaz ainsi que les changements de température. Les entreprises les plus avancées du secteur sont Bhaptics, HaptX ou encore TeslaSuit.</p>
<p>Au Japon, pays souvent à l’avant-garde des nouvelles technologies, une entreprise travaille sur une plate-forme de réalité mixte qui permet de prendre en compte une réalité incluant la réalité virtuelle et la réalité augmentée. L’entreprise propose aux utilisateurs de percevoir, via des lunettes spécifiques, des contenus de réalité mixte dans des zones urbaines. En marchant dans la rue, le piéton peut voir des points d’informations ou des <a href="https://psychic-vr-lab.com/en">œuvres d’art flottantes</a> dans le ciel.</p>
<p>Des techniques de conceptions immersives dans le métavers seront utilisées. Les employés du monde entier pourront collaborer sur une même plate-forme en 3D et contrôler des robots industriels dans cette même interface.</p>
<p>De nombreuses entreprises utilisent déjà la réalité virtuelle pour les visites de chantier par exemple. Le métavers permettra une expérience, plus immersive et plus collaborative, tout en réduisant les coûts. Un ingénieur pourra faire le suivi en temps réel de plusieurs projets sans se déplacer physiquement et en partageant des informations avec les membres de son équipe, eux aussi dans le métavers.</p>
<h2>Limites et risques</h2>
<p>À l’heure actuelle, ce sont les géants de la tech qui semblent être les plus avancés dans la course au métavers au vu des investissements importants dans le secteur. Les entreprises des GAMAM et des BATX, qui sont les premiers bâtisseurs du métavers ont quasiment toutes été critiquées concernant le respect de la vie privée de leurs utilisateurs. La CNIL a récemment infligé des amendes à Google et Facebook pour leur gestion du consentement des cookies. Les deux plates-formes devront payer des amendes de respectivement 150 millions et 60 millions d’euros. En plus d’une obligation de mise en conformité sous peine d’astreintes de 100 000 euros par jour de retard.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1479023500107128833"}"></div></p>
<p>Dans le métavers, tous les comportements des humains peuvent être répliqués dans le monde virtuel. Malheureusement cela inclut les bons comme les mauvais. Lors du lancement du métavers de Meta, Horizon Worlds, une utilisatrice a été harcelée sexuellement sur la plate-forme. Elle a expliqué que son avatar a subi des attouchements par un autre avatar d’un utilisateur inconnu. Les services de modération d’Horizon Worlds se sont défendus en expliquant que la jeune femme n’avait pas activé les dispositifs de sécurité comme une <a href="https://www.lepoint.fr/sciences-nature/agression-sexuelle-le-metavers-de-facebook-au-coeur-d-une-polemique-18-12-2021-2457447_1924.php">bulle de sécurité</a> permettant de tenir à distance les autres utilisateurs.</p>
<p>D’ailleurs, Andrew Bosworth, directeur des nouvelles technologies de Meta, est lui-même inquiet au sujet du besoin de modération titanesque nécessaire au métavers, bien supérieur à celui des réseaux sociaux actuels. Il a affirmé, dans un mémo interne consulté par le Financial Times, que la réalité virtuelle pouvait souvent constituer un « environnement toxique », en <a href="https://www.ft.com/content/d72145b7-5e44-446a-819c-51d67c5471cf">particulier pour les femmes et les minorités</a>.</p>
<p>L’ère du numérique et de la dématérialisation devient aussi, paradoxalement, l’ère durant laquelle nous polluons et nous utilisons le plus de matières et d’énergie. La production d’un ordinateur portable, par exemple, requiert des métaux rares provenant du monde entier (du tantale congolais, du lithium bolivien, de l’or australien, et bien d’autres terres rares chinoises).</p>
<p>Selon une récente étude, les émissions de gaz à effet de serre du numérique se situent <a href="https://europepmc.org/article/med/34553177">autour de 3 % de la part totale</a> d’émissions mondiales de CO<sub>2</sub> anthropiques. C’est <a href="https://www.icao.int/environmental-protection/Pages/envrep2019.aspx">plus que le secteur de l’aviation</a> (transport aérien civil) qui représente 2 % des émissions mondiales de CO<sub>2</sub> selon un rapport de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) en 2019.</p>
<p>L’interface audiovisuelle du métavers provoquera inévitablement une forte consommation énergétique. On estime que le fonctionnement du métavers nécessitera près de deux fois et demie plus de ressources que le fonctionnement des réseaux Internet aujourd’hui.</p>
<h2>Conclusion</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/443781/original/file-20220201-18-1ym2768.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/443781/original/file-20220201-18-1ym2768.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/443781/original/file-20220201-18-1ym2768.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=955&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/443781/original/file-20220201-18-1ym2768.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=955&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/443781/original/file-20220201-18-1ym2768.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=955&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/443781/original/file-20220201-18-1ym2768.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1201&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/443781/original/file-20220201-18-1ym2768.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1201&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/443781/original/file-20220201-18-1ym2768.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1201&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">« Le consommateur à l’heure du métavers : Mondes virtuels, avatars, cryptomonnaies et jetons non fongibles : la nouvelle révolution numérique », de Samy Mansouri et Mehdi Mansouri.</span>
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<p>Les changements comportementaux des consommateurs, les investissements massifs dans le métavers, de même que les premiers revenus conséquents issus des nouveaux outils et applications numériques, renforcent l’idée que le métavers représente la future révolution majeure du numérique. Les contours ne sont pas encore bien définis et les différents acteurs de ce nouveau marché mènent une guerre commerciale pour capter le maximum d’utilisateurs possible.</p>
<p>Malgré les risques associés, le métavers est déjà en marche. La conjecture d’une pandémie qui pouvait être considérée comme exceptionnelle au XXI<sup>e</sup> siècle il y a deux ans, favorise fortement et même impose des éléments du métavers aux êtres humains.</p>
<p>Enfin, l’Internet traditionnel semble être arrivé à la fin de son règne laissant place au début du métavers. Plus global, plus immersif, plus sensoriel et plus expérientiel, le métavers se développe à une vitesse impressionnante où les acteurs traditionnels se disputent les premières places face aux nouveaux disrupteurs technologiques dont l’ambition n’a d’égal que la taille de cette future technologie aux possibilités infinies.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/176181/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Samy Mansouri ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En favorisant les relations sociales en distanciel, la pandémie a contribué à diffuser les usages au cœur des mondes virtuels en 3D, dont l’essor est analysé dans un récent ouvrage. Extraits.Samy Mansouri, Maitre de Conférences, IAE OrléansLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1696952022-01-02T17:22:32Z2022-01-02T17:22:32ZUnivers parallèles et mondes virtuels : la guerre des métavers est commencée<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/438957/original/file-20211223-39289-1pwewkb.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une partie de poker dans le métavers (capture d'écran de la vidéo "Le métavers et comment nous allons le construire ensemble" sur YouTube)</span> </figcaption></figure><p>Le 17 octobre 2021, Mark Zuckerberg a lancé les hostilités de manière assez théâtrale, comme s’il défiait ses concurrents d’en faire autant. Afin de concrétiser son rêve d’enfant, le métavers, il a décidé de mettre en œuvre des moyens colossaux : <a href="https://about.fb.com/fr/news/2021/10/investir-dans-les-talents-europeens-pour-aider-a-construire-le-metaverse/">10 000 ingénieurs hautement qualifiés seront recrutés</a> en Europe dans les 5 prochaines années. Cette annonce a été faite quelques jours avant celle du <a href="https://about.fb.com/fr/news/2021/10/presentation-de-meta-une-entreprise-de-technologies-sociales/">changement de nom du groupe Facebook en Meta</a>, le 28 octobre, démontrant ainsi l’engagement total du fournisseur de réseaux sociaux dans la transition vers le métavers.</p>
<p>Le 22 juillet 2021, dans une <a href="https://www.theverge.com/22588022/mark-zuckerberg-facebook-ceo-metaverse-interview">interview à <em>The Verge</em></a>, le créateur de Facebook racontait :</p>
<blockquote>
<p>« Je pense à certains de ces trucs depuis le collège quand je commençais tout juste à coder. […] J’écrivais du code et des idées pour les choses que je voulais coder quand je rentrais de l’école ce jour-là. […] L’une des choses que je voulais vraiment construire était un Internet incarné où on pourrait être dans un environnement et se téléporter à différents endroits et être avec des amis. […] Je pensais que ce serait le Saint Graal des interactions sociales bien avant d’avoir lancé Facebook. Et c’est vraiment excitant pour moi que cela se fasse sur les prochaines plates-formes ».</p>
</blockquote>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Uvufun6xer8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Mark Zuckerberg explique ce qu’est le métavers.</span></figcaption>
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<p>Les métavers <a href="https://chainlink-francophone.medium.com/quest-ce-que-le-m%C3%A9taverse-a32232c31127">nécessitent une combinaison de technologies</a> émergentes et représentent un potentiel commercial considérable. La ruée vers ce nouvel eldorado <a href="https://www.lesnumeriques.com/vie-du-net/metaverse-mark-zuckerberg-a-trop-fantasme-ready-player-one-n170651.html">peut laisser perplexe et même paraître délirante</a> car le grand public n’a pas exprimé d’engouement particulier pour les dispositifs de réalité virtuelle ou augmentée, hormis quelques exceptions comme <em>Pokémon Go</em>. Certains dénoncent déjà les dangers et les dérives inévitables, évoquant les récits de science-fiction dystopiques dans lesquels l’humanité se retrouve asservie ou anéantie par la technologie.</p>
<h2>Un métavers qui a presque 20 ans</h2>
<p>Les métavers seront des mondes virtuels dans lesquels les individus, les entreprises, les organisations, les universités et les pouvoirs publics pourront interagir via des avatars et des simulations, dans un but social, culturel, professionnel, éducatif ou créatif. Considérés comme des <a href="https://www.dpublication.com/wp-content/uploads/2021/10/41-20250.pdf">hétérotopies virtuelles</a>, les métavers seront soit des environnements numériques familiers hyperréalistes où les utilisateurs feront virtuellement tout ce qu’ils font déjà dans la vie réelle, soit des environnements fictifs imaginaires dans lesquels les utilisateurs potentiellement dotés de superpouvoirs auront une vie extraordinaire via leur avatar.</p>
<p>Si les projets de métavers se sont multipliés en 2021, ils ne sont pas nouveaux. Depuis 2003, <a href="https://secondlife.com/"><em>Second Life</em></a> offre déjà à ses résidents d’avoir une deuxième vie virtuelle sous une autre identité dans un monde numérique persistant. Ils peuvent s’y rencontrer, et même s’y marier, participer à des événements, assister à des cours ou des concerts, regarder des films, visiter des expositions, ainsi qu’acheter, créer et vendre des objets. <em>Second Life</em> a sa propre monnaie, le Linden, qui a un taux de change en temps réel avec le dollar. Bien que présenté comme le futur d’Internet, <em>Second Life</em> déclinera au fur et à mesure de la croissance des réseaux sociaux.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/iOdqaKL39ww?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Comme faire ses premiers pas sur <em>Second Life</em> ?</span></figcaption>
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<p>Dans <em>Second Life</em>, il y a une quinzaine d’années que des entreprises comme Accenture, Alstom, Areva, Axa, Capgemini, Dior, Expectra, Lacoste, L’Oréal, Mercedez ou Unilog organisent des réunions de travail, des <a href="https://www.nouvelobs.com/rue89/rue89-tech/20070531.RUE0469/second-life-bienvenue-dans-le-recrutement-2-0.html">séances de recrutement</a>, des tests et des <a href="https://www.strategies.fr/actualites/marques/r44099W/second-life-nouveau-terrain-de-jeu-des-marques-de-luxe.html">lancements de produits</a>, des levées de fonds, des <a href="https://www.carscoops.com/2007/02/mercedes-benz-opens-new-showroom-in/">expositions de voitures</a>, et des <a href="https://www.gawker.com/234078/fashion-week-in-second-life">défilés de mode</a>. La vente d’objets virtuels, les transactions immobilières et la spéculation boursière y sont banales. Cependant, les nouveaux projets de métavers prévoient d’aller beaucoup plus loin en proposant un écosystème complet d’applications, de logiciels et d’environnements intégrés destinés à remplacer complètement Internet.</p>
<h2>Une grande diversité de projets</h2>
<p>Si Facebook se positionne en pionnier du métavers, de nombreuses autres entreprises se sont déjà lancées dans des projets concurrents avec des approches diverses et des ressources plus ou moins importantes comme Microsoft (<a href="https://minecraft.fr/le-plan-de-microsoft-pour-un-metaverse-dans-minecraft/"><em>Minecraft</em>, <em>Halo</em>, et <em>Flight Simulator</em></a>), Sony et <a href="https://www.journaldugeek.com/2021/11/24/epic-games-rachete-un-studio-pour-laider-a-construire-son-metaverse/">Epic Games</a> (<a href="https://www.ladepeche.fr/2021/09/13/fortnite-et-le-metaverse-quand-le-virtuel-sempare-du-reel-9787427.php"><em>Fortnite</em></a>, <a href="https://www.digitaltrends.com/gaming/fall-guys-epic-games-metaverse/"><em>Fall Guys</em></a>), <a href="https://www.cointribune.com/tribunes/tribune-crypto-et-gaming/ubisoft-la-societe-cherche-a-investir-et-a-creer-des-jeux-blockchain/">Ubisoft</a> et Animoca Brands (<a href="https://www.sandbox.game/en/"><em>Sandbox</em></a>), <a href="https://www.lebigdata.fr/metaverse-nvidia">Nvidia et BMW</a>, <a href="https://siecledigital.fr/2021/10/06/a-son-tour-alibaba-se-lance-dans-la-course-au-metaverse/">Alibaba</a> (Ali Metaverse, Taobao Metaverse, et Ding Ding Metaverse), <a href="https://leclaireur.fnac.com/article/48751-niantic-leve-300-millions-dollars-developper-metaverse/">Niantic</a> (Lightship), <a href="https://kr-asia.com/baidu-launches-xirang-metaverse-environment">Baidu</a> (<em>Xirang</em>), <a href="https://www.scmp.com/tech/big-tech/article/3146842/bytedance-makes-another-move-metaverse-acquisition-vr-start-pico">ByteDance</a> (Pico), Huawei (<a href="https://pfw.ac/"><em>Perfect World</em></a>), Sensorium (<a href="https://sensoriumgalaxy.com/">Galaxy</a>), <a href="https://paris-singularity.fr/comment-tencent-se-positionne-en-pionnier-du-metaverse/">Tencent</a>, <a href="https://www.roblox.com/games/6674394294/Metaverse-Champions-Hub"><em>Roblox</em></a>, <a href="https://decentraland.org/"><em>Decentraland</em></a>, <a href="https://enjin.io/"><em>Enjin</em></a>, <a href="https://www.immutable.com/"><em>Immutable X</em></a>, <a href="https://greenparksports.com/"><em>Green Park</em></a>, <a href="https://metahero.io/"><em>Metahero</em></a>, <a href="https://www.cryptovoxels.com/"><em>CryptoVoxels</em></a>, <a href="https://somniumspace.com/"><em>Somnium Space</em></a>, <a href="https://getwinkies.com/fr/"><em>Winkyverse</em></a>, <a href="https://www.ovr.ai/"><em>OVRLand</em></a>, ainsi que les incontournables <a href="https://9to5google.com/2021/11/17/sundar-pichai-google-metaverse/">Google</a>, <a href="https://www.iphon.fr/post/apple-metaverse-power-on">Apple</a> et <a href="https://coinyuppie.com/amazon-the-essence-of-the-metaverse-is-still-cloud-computing/">Amazon</a>.</p>
<p>Le projet de Meta se veut une <a href="https://www.lci.fr/sciences-et-innovation/video-nouveau-logo-nouveau-nom-facebook-meta-a-quoi-va-ressembler-le-metavers-le-futur-d-internet-selon-mark-zuckerberg-2200373.html">évolution non seulement des réseaux sociaux, mais de tout Internet</a>. Le métavers tel que le voit Mark Zuckerberg reproduira le monde réel en réalité virtuelle multidimensionnelle avec des lieux de rencontre en famille ou entre amis, des boutiques où faire du shopping pour son avatar ou pour soi-même, des activités et des événements socioculturels, des espaces de jeu et de divertissement audiovisuel, des écoles et universités numériques, ainsi que des entreprises et des lieux virtuels de travail et de création. Pour atteindre l’objectif d’un milliard d’utilisateurs en 2030, Meta investit 10 milliards de dollars dans Facebook Reality Labs dès 2021, et probablement encore plus les années suivantes.</p>
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<figcaption><span class="caption">Travailler dans le métavers.</span></figcaption>
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<p>D’autres métavers ressembleraient plus au jeu <em>Oasis</em> du film <em>Ready Player One</em> : des univers vidéoludiques entièrement ouverts où les joueurs pourraient vivre de simples expériences sociales ou des aventures héroïques. Epic Games, l’éditeur de <a href="https://theconversation.com/fortnite-un-phenomene-economique-social-sportif-et-culturel-124543"><em>Fortnite</em>, le jeu le plus populaire et le plus rentable de tous les temps</a>, a déjà réussi à créer un monde virtuel persistant avec sa propre économie et sa monnaie. Les concerts virtuels de la chanteuse Ariana Grande, du rappeur Travis Scott et du DJ Marshmello y ont rassemblé des millions de spectateurs en live.</p>
<p>Epic Games est propriétaire d’Unreal Engine, le moteur de jeu tellement photoréaliste qu’il en devient presque impossible de le distinguer de la réalité. Après avoir racheté Mediatonic – le studio à l’origine de <em>Fall Guys</em> – et Harmonix – créateur de la franchise <em>Guitar Hero</em> – Epic Games <a href="https://www.epicgames.com/site/en-US/news/announcing-a-1-billion-funding-round-to-support-epics-long-term-vision-for-the-metaverse">a levé 1 milliard de dollars</a>, dont 200 millions du Groupe Sony, pour concrétiser la vision de son PDG et fondateur Tim Sweeney.</p>
<p>Microsoft considère que certains de ses jeux sont déjà des métavers, en particulier Minecraft et Halo. Thème le plus visionné sur YouTube en 2020, Minecraft est parfois présenté comme le <a href="https://www.windowscentral.com/minecraft-is-the-greatest-game-ever-made">meilleur jeu jamais créé</a> car il est devenu bien plus. Avec plus de 140 millions d’utilisateurs actifs, c’est un lieu de rencontre, de loisir, de créativité, d’apprentissage et d’entrepreneuriat. <a href="https://rsf.org/fr/actualites/rsf-inaugure-la-bibliotheque-libre-un-centre-numerique-de-la-liberte-de-la-presse-au-sein-dun-jeu">Reporters Sans Frontières a inauguré dans Minecraft sa Bibliothèque Libre</a> qui regroupe des articles et des livres censurés dans leur pays d’origine.</p>
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<figcaption><span class="caption">Reporters sans frontières aide les journalistes censurés grâce à Minecraft.</span></figcaption>
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<p>Parmi les autres projets qui se distinguent, Nvidia a commencé à <a href="https://www.lebigdata.fr/metaverse-nvidia">créer un double numérique du monde</a> qui pourra être utilisé pour des expérimentations virtuelles destinées à être déployées ensuite dans le monde réel. De son côté, Niantic développe un <a href="https://nianticlabs.com/blog/real-world-metaverse/">« métavers du monde réel »</a> en réalité augmentée via sa plate-forme Lightship dont le but est d’améliorer les expériences physiques grâce au numérique. <a href="https://www.cnetfrance.fr/news/qualcomm-snapdragon-spaces-pour-des-lunettes-intelligentes-telles-que-vous-les-vouliez-39932189.htm">Un partenariat avec Qualcomm</a> devrait donner naissance à des lunettes capables de superposer avec une très grande précision des éléments virtuels interactifs sur des éléments réels.</p>
<h2>Les progrès des technologies immersives</h2>
<p>Le métavers tel qu’il est envisagé par les géants de la Silicon Valley est devenu possible grâce aux récents progrès technologiques. Il associera la réalité virtuelle et augmentée, l’intelligence artificielle, la blockchain et les cryptomonnaies, les réseaux sociaux et la téléconférence, la simulation 3D et l’imagerie dynamique, l’e-commerce et l’e-business, la 5G et <a href="https://www.highspeedinternet.com/resources/6g-internet">bientôt la 6G</a>.</p>
<p>Avec Oculus, Meta propose des casques et des manettes de réalité virtuelle qui atteignent des niveaux de performance impressionnants, nécessaires pour évoluer dans le métavers. <a href="https://www.oculus.com/quest-2/">Le modèle Quest 2</a>, considéré comme le <a href="https://www.lesnumeriques.com/casque-realite-virtuelle/face-a-face/59017-58071.html">meilleur sur le marché</a>, est moins cher que ses concurrents de Sony, HP ou HTC, tout en étant plus puissant, plus léger, plus ergonomique, plus simple, avec une meilleure réactivité aux mouvements et une image plus nette et plus fluide.</p>
<p>Son processeur graphique ultra rapide et ses haut-parleurs intégrés qui diffusent un audio positionnel en 3D cinématographique procurent un fort sentiment d’immersion qui ne sera peut-être surpassé que par le <a href="https://www.frandroid.com/marques/apple/1150039_le-casque-de-vr-dapple-aurait-un-argument-de-taille-face-a-ses-concurrents">futur casque VR d’Apple attendu pour 2022</a>, mais qui serait 3 fois plus cher.</p>
<p>Microsoft a choisi la réalité mixte avec <a href="https://www.microsoft.com/fr-fr/hololens">sa gamme HoloLens de lunettes holographiques</a>. Destinées aux professionnels de la construction, de l’industrie, de la santé, et de l’éducation. Ce casque-ordinateur peut afficher des données et des instructions, créer et imprimer des modélisations 3D, et générer des hologrammes pour reproduire des objets ou des environnements distants.</p>
<p>La technologie haptique a beaucoup fait parler d’elle en 2020 à l’occasion de la <a href="https://theconversation.com/ps5-en-rupture-mondiale-desastre-ou-genie-marketing-150692">sortie de la PlayStation 5</a>. En effet, les manettes DualSense de la console sont réputées pour procurer des sensations extraordinaires comme percevoir les effets des gouttes de pluie. Elles génèrent des vibrations qui permettent de distinguer différentes armes dans les jeux de tir, et différentes pistes dans les jeux de courses.</p>
<p>Il y a quelques semaines, <a href="https://www.businessinsider.fr/mark-zuckerberg-utilise-les-gants-haptiques-mis-au-point-par-meta-pour-ressentir-les-objets-du-metavers-189170">Mark Zuckerberg a testé pour la première fois des gants haptiques</a> mis au point par Meta qui donnent une sensation de toucher très réaliste des objets et des textures en réalité virtuelle. Plusieurs vestes haptiques commencent à être commercialisées avec les modèles de <a href="https://optimaldesignco.com/case_studies/void/">The Void</a>, <a href="https://www.bhaptics.com/tactsuit">bHaptics</a>, ou <a href="https://www.actronika.com/post/live-the-most-immersive-vr-experience-with-the-skinetic-vr-vest">Actronika</a>.</p>
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<figcaption><span class="caption">La veste haptique Skinetic de la société française Actronika.</span></figcaption>
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<p>Cependant, ce sont de véritables <a href="https://www.bhaptics.com/">combinaisons intégrales haptiques</a> qui voient le jour et qui permettront de reproduire pleinement le sens du toucher pour ressentir les effets de l’environnement et les contacts avec des personnes et des objets. Ces combinaisons mesureront également les données biométriques en temps réel et stimuleront la mémoire musculaire ce qui ouvre des possibilités infinies d’applications sportives et militaires.</p>
<h2>Une vie parallèle totalement sous contrôle</h2>
<p>Le métavers supprimera les frontières entre réalité et fiction et donnera un fort sentiment de présence dans des lieux qui n’existent pas et avec des personnes qui peuvent être à des milliers de kilomètres, ou avec des personnages imaginaires pilotés par une IA. L’idée principale est que les individus et les organisations puissent y cohabiter et y évoluer via des avatars sans les contraintes matérielles du monde physique.</p>
<p>Plusieurs questions se posent alors. Doit-on laisser une entreprise aussi dominante que Meta, qui a fait l’objet de <a href="https://www.nytimes.com/2021/10/03/technology/whistle-blower-facebook-frances-haugen.html">plusieurs polémiques en 2021</a> et de <a href="https://www.businessinsider.com/mark-zuckerberg-scandals-last-decade-while-running-facebook-2019-12 ?IR=T">nombreuses autres controverses</a> depuis sa création, créer une plate-forme tellement puissante qu’elle permettra de contrôler tous les aspects de notre vie ? Quelles sont les garanties données aux utilisateurs des métavers que ces espaces virtuels seront sécurisés et éthiques ? Comment éviter une hypercentralisation de l’activité numérique où une seule entité privée gérera toutes nos interactions sociales et nos transactions pour en tirer profit ?</p>
<p>Ces inquiétudes sont d’autant plus légitimes que le projet de Meta conduit par nature à une situation monopolistique en voulant remplacer tout Internet. D’une part il n’est rentabilisé et ne fonctionne de manière optimale qu’au-delà d’une taille critique très grande. D’autre part les utilisateurs, qui ont un temps limité et cherchent à optimiser leurs activités numériques, vont choisir de manière quasi exclusive d’être présents dans un seul métavers.</p>
<p>La démarche de Meta semblerait donc aboutir à une <a href="https://www.protocol.com/newsletters/gaming/facebook-meta-rebrand-gaming-competition ?rebelltitem=1#rebelltitem1">propriété et un contrôle total du métavers</a> à travers le matériel et le système d’exploitation. Cependant, Meta affirme déjà que son métavers sera ouvert, collaboratif, et interopérable avec des standards universels. Comme Internet, il ne serait la propriété de personne et serait régulé par toutes les parties prenantes, dont les pouvoirs publics. Plusieurs métavers pourraient coexister et être connectés les uns aux autres, ce qui limiterait la captivité et les dérives.</p>
<p>Cependant, à défaut d’une régulation par les gouvernements qui sont toujours très en retard sur la technologie, il semble essentiel que les <a href="https://www.forbes.com/sites/cathyhackl/2020/08/02/now-is-the-time-to-talk-about-ethics%20--%20privacy-in-the-metaverse/ ?sh=6c7eb54aae6c">entreprises s’accordent sur de bonnes pratiques</a> en matière de respect de la vie privée, de cybersécurité, de lutte contre la désinformation, et de consentement éclairé des consommateurs vis-à-vis des technologies utilisées dans les métavers.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169695/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Oihab Allal-Chérif ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si Meta semble déjà être leader, des dizaines de projets très différents de métavers sont en compétition. Qui remportera cette guerre pour le contrôle total de nôtre vie numérique ?Oihab Allal-Chérif, Business Professor, Neoma Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1728822021-12-22T20:26:19Z2021-12-22T20:26:19ZRéalité virtuelle : comment l’industrie nucléaire se modernise<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/436753/original/file-20211209-21-g4nic1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C3%2C2048%2C1229&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La réalité virtuelle permet de visiter des lieux inaccessibles, comme des réacteurs nucléaires.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/d/d2/Researchers_Developing_New_Designs.jpg">Idaho National Laboratory/Wikimedia Commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>La transition numérique en cours dans la plupart des secteurs révolutionne les pratiques du monde industriel. Celui-ci deviendra <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Industrie_4.0">l’industrie 4.0</a>, ultraconnectée, bardée de capteurs, capable de s’adapter seule à un grand nombre de modifications ou de perturbations, et permettant ainsi plus d’agilité et de fiabilité. C’est d’autant plus le cas pour l’industrie nucléaire, industrie de haute technologie et dont les exigences de sûreté sont incomparables. L’utilisation de la réalité virtuelle et l’apparition de maquettes numériques des bâtiments et des processus deviendront ainsi des alliés indispensables pour la formation des personnels, permettant une maîtrise des risques associés à toute activité nucléaire.</p>
<h2>Sûreté et compétitivité : la formation au cœur de la filière nucléaire</h2>
<p>La filière nucléaire est la 3<sup>e</sup> filière industrielle française. Elle représente environ <a href="https://www.gifen.fr/le-gifen/filiere-nucleaire">220 000 emplois directs non délocalisables</a>. La part de la formation dans le chiffre d’affaires est 3 fois plus élevée que la moyenne nationale de l’industrie, ce qui correspond en moyenne à <a href="https://www.franceindustrie.org/wp-franceindustrie/wp-content/uploads/2020/04/Recto-verso-Enqu%C3%AAte-2019.pdf">9 jours/an</a> pour les employés, qu’il s’agisse de formations initiales ou de remises à niveau de leurs habilitations. En effet, la filière doit maintenir les connaissances clés nécessaires à l’utilisation contrôlée et sûre de la production d’énergie nucléaire, et assurer le renouvellement des compétences vers les jeunes générations.</p>
<p>L’État, conscient de ces enjeux, a lancé un appel à projets en 2021 sur le <a href="https://www.bpifrance.fr/nos-appels-a-projets-concours/appel-a-projets-renforcement-des-competences-de-la-filiere-nucleaire">« Renforcement des compétences de la filière nucléaire »</a>. Il s’agit d’une part d’adresser les enjeux de la sûreté nucléaire, qui nécessite une main-d’œuvre qualifiée et spécialisée devant intégrer très tôt les gestes et les comportements liés à la sûreté. Cela repose sur la conscience des risques et suppose des réactions appropriées, efficaces et intelligentes en toutes circonstances. D’autre part, dans une industrie mondialisée où la transition numérique est en marche, la formation se doit de soutenir les enjeux de compétitivité et de maîtrise des coûts. L’ingénierie nucléaire doit ainsi affronter de vrais défis avec de nouvelles méthodes de travail plus collaboratives et la mise en œuvre de technologies complexes et innovantes, dans des chantiers d’envergure.</p>
<h2>La réalité virtuelle, vers plus d’efficacité</h2>
<p>La réalité virtuelle est une réponse à ces enjeux. En privilégiant la pratique dans un contexte « pseudo-réel », elle permet un transfert direct des situations industrielles réelles et des savoir-faire technologiques, et in fine des <a href="https://www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/technologies-de-l-information-th9/realite-virtuelle-42299210/realite-virtuelle-et-formation-te5975/">gains de temps, de productivité et d’efficacité</a>.</p>
<p>Les avantages principaux de la réalité virtuelle pour la formation professionnelle sont la possibilité de réaliser des tâches en toute sécurité, de permettre de refaire les gestes industriels, de créer des scénarios pédagogiques dans des conditions rares, comme des accidents. Pour l’industrie nucléaire, il s’agit par exemple d’accéder au <a href="https://oreka-group.fr/nos-offres/le-pole-numerique-3d/">cœur d’un réacteur nucléaire</a> ou de former les travailleurs à des interventions impossibles à reproduire dans la réalité, par exemple un changement de joint défectueux en zone hautement radioactive.</p>
<p>Au CNAM par exemple, la réalité virtuelle est utilisée en parallèle des cours magistraux de physique des réacteurs en permettant aux élèves de se déplacer <a href="https://www.youtube.com/watch?v=OEgJdT2Ix-Q">dans les parties inaccessibles du cœur</a>. Les travaux pratiques de mesures nucléaires ont quant à eux été totalement virtualisés, pour permettre aux élèves de s’entraîner à leur guise en suivant des scénarios pédagogiques. Leur déroulement s’effectue de manière individuelle et collective, soit en présentiel (<a href="https://ecole-ingenieur.cnam.fr/presentation/actualites/mesurer-une-source-radioactive-a-travers-un-tp-virtuel-une-belle-avancee-pedagogique--1222801.kjsp?RH=vaeFR">avec un casque de réalité virtuelle)</a>, soit à distance (avec un ordinateur). Enfin, grâce aux dernières évolutions des technologies de réalité virtuelle, une salle virtuelle multi-activités a été créée, donnant la possibilité totalement innovante aux apprentis et enseignants <a href="https://www.aptero.co">d’interagir en partageant du contenu</a>, tel que des devoirs, des échanges oraux ou des cours.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/437992/original/file-20211216-13-y9v8za.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Environnement virtuel, montrant une machine et des capteurs associés ; une fenêtre interactive montre un agrandissant des capteurs et des données correspondantes" src="https://images.theconversation.com/files/437992/original/file-20211216-13-y9v8za.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/437992/original/file-20211216-13-y9v8za.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/437992/original/file-20211216-13-y9v8za.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/437992/original/file-20211216-13-y9v8za.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/437992/original/file-20211216-13-y9v8za.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/437992/original/file-20211216-13-y9v8za.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/437992/original/file-20211216-13-y9v8za.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=423&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La réalité virtuelle est utilisé par les étudiants du CNAM pour se former à l’instrumentation nucléaire. Ici une chaîne de mesure entièrement virtualisée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Emmanuelle Galichet</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En réalité virtuelle, tous les sens sont atteints, permettant ainsi une compréhension plus aisée des phénomènes et une meilleure intégration des gestes techniques. Cette technologie est encore nouvelle et peu d’études sont encore menées. Néanmoins les <a href="https://www.reseau-canope.fr/fileadmin/user_upload/Projets/agence_des_usages/%C3%89tat_Art.pdf">premiers résultats sont encourageants</a>.</p>
<p>L’évaluation précise et scientifique des bénéfices de la réalité virtuelle pour la formation est encore à trouver. <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0166361514002073">De nombreuses méthodes sont proposées</a> et il sera important de trouver les bons critères d’évaluation. Les traces numériques laissées par les élèves (temps d’hésitation, nombres d’essais ou d’erreurs…) pourront aider à trouver des critères objectifs pour évaluer l’apport de la réalité virtuelle en formation.</p>
<h2>Le jumeau numérique dans la filière nucléaire</h2>
<p>La filière nucléaire va encore plus loin dans sa volonté d’évolution numérique de ses projets. L’idée est désormais de concevoir, exploiter, maintenir et déconstruire à l’aide des jumeaux numériques, c’est-à-dire un ensemble de programmes informatiques interconnectés modélisant une infrastructure – une centrale nucléaire par exemple – et son comportement sur l’ensemble de son cycle de vie.</p>
<p>Le concept de jumeau numérique dans l’industrie ressemble à ce qui se fait en construction et architecture avec le BIM, appelé aussi <a href="https://buildingsmartfrance-mediaconstruct.fr/memos-pratiques-BIM/">« maquette numérique du bâtiment »</a>. Dans ce domaine, la maquette numérique est en fait le prototype du bâtiment et donne des informations sur sa géométrie, ses matériaux et ses installations techniques (l’emplacement exact des conduites d’eau, par exemple).</p>
<p>Une installation nucléaire est complexe. D’une part, les procédés industriels (production de chaleur par la radioactivité, transport de la chaleur, comportement des fluides et matériaux, chimie du recyclage…) sont nombreux. D’autre part, une installation nucléaire représente plus de 50 bâtiments, plus de 150 systèmes élémentaires comme une ventilation ou une pompe, plus de 500 trémies ou plus de 2000 kilomètres de câbles. Le tout doit être géré sur une durée d’environ 100 ans, de la conception à la déconstruction. Il est donc fondamental de conserver la mémoire de l’ensemble des données de l’installation à tout instant (référentiels sûreté, matériaux, données sur le comportement des systèmes ou issues des capteurs sur site, essais…). Pour mémoriser, organiser et prioriser ces flux de données, le jumeau numérique (donc un clone de l’installation à un instant t) doit donc être associé à une <a href="https://www.assystem.com/fr/offres/plm-product-lifecyle-management-2/">plate-forme de gestion des données</a> (en anglais Product Lifecycle Management ou PLM).</p>
<p>Mais le suivi des infrastructures et des procédés n’est pas le seul intérêt des jumeaux numériques. En intégrant la réalité virtuelle, ces clones participent également à la formation de l’ensemble des corps de métiers ayant besoin d’intervenir sur les installations nucléaires. Toutes les interventions pourront ainsi être jouées autant de fois que cela sera nécessaire, afin de supprimer toute hésitation le jour où elles seront réalisées en conditions réelles.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/437995/original/file-20211216-19-1jhc6qh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Jeune homme coiffé d’un casque de réalité virtuelles, deux manettes à la main. Derrière lui, un écran montre une installation technique. Un capteur indique la dose de radiation qu’il recevrait en réalité : 44mSv/h" src="https://images.theconversation.com/files/437995/original/file-20211216-19-1jhc6qh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/437995/original/file-20211216-19-1jhc6qh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/437995/original/file-20211216-19-1jhc6qh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/437995/original/file-20211216-19-1jhc6qh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=357&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/437995/original/file-20211216-19-1jhc6qh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/437995/original/file-20211216-19-1jhc6qh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/437995/original/file-20211216-19-1jhc6qh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=448&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le CNAM utilise également la réalité virtuelle pour permettre des visites virtuelles des installations nucléaires inaccessibles en conditions réelles, ici à cause des doses élevées de rayonnement.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Emmanuelle Galichet, Oreka Ingénierie</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Un des projets de jumeau numérique de la filière nucléaire est celui du <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-03225080/document">« Réacteur numérique »</a>. Le but affiché est de créer « un réacteur nucléaire couvrant les phases de conception, d’exploitation et de déconstruction, en fonctionnement normal, incidentel ou accidentel ». Ce projet bénéficie d’un budget de 30 millions d’euros et environ 200 personnes travailleront dessus pendant 4 ans. D’autres installations nucléaires, telles qu’une <a href="https://www.assystem.com/fr/projets/jumeau-numerique-usine-traitement-dechets-nucleaires/">usine de retraitement</a>, le projet d’enfouissement des déchets nucléaires <a href="https://www.andra.fr/transversalite-et-tracabilite-le-jumeau-numerique-un-atout-essentiel-pour-cigeo">CIGEO</a>, ou le projet <a href="https://www.egis-group.com/perspectives/digital-transition/iter-fusion-digital-models">ITER</a> pour la fusion nucléaire sont eux aussi en train de construire leur propre jumeau numérique.</p>
<p>La filière française espère ainsi gagner sur deux aspects : la sûreté et la compétitivité. C’est la formation de tous les métiers grâce à la réalité virtuelle et le jumeau numérique qui permettra d’optimiser le fonctionnement des réacteurs dans la durée, d’améliorer la qualité des interventions et de gagner en performance industrielle.</p>
<p>Deux défis attendent les acteurs de la digitalisation des installations nucléaires. Le premier est l’interopérabilité des simulations numériques (appelées aussi codes de calcul), de la physique au niveau microscopique (<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Neutronique">simulation neutronique</a>, <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Thermohydraulique">thermohydraulique</a>… du cœur du réacteur où se développe la réaction en chaine de fission) jusqu’au niveau macroscopique géométrique des bâtiments. Les échelles prises en compte dans les codes de calculs sont différentes, tout comme les langages informatiques et les formats de données. Il faudra donc créer une plate-forme de couplage informatique, où tous les codes de calculs pourront communiquer et opérer ensemble. Le second défi est la gestion optimisée des données issues de l’installation sur tout le cycle de vie de l’installation. Le choix d’une plate-forme PLM adaptée et sécurisée sera primordial. Pour la déconstruction des installations nucléaires, un <a href="https://pleiades-platform.eu">projet européen</a> a même été mis en place pour harmoniser ces aspects.</p>
<p>Si la filière nucléaire réussit ces challenges, le fonctionnement des installations nucléaires en temps réel sera accessible sur un simple ordinateur de bureau, via évidemment des <a href="https://www-pub.iaea.org/MTCD/Publications/PDF/Pub1527f_web.pdf">protocoles et des liaisons hautement sécurisées</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172882/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Emmanuelle Galichet va recevoir des financements de l’ANR dans le cadre du projet JENII « Jumeaux d’Enseignement Numériques Immersifs et Interactifs ».
Emmanuelle Galichet est membre de la Société Française de Physique (SFP), de la Société Française de l'Energie Nucléaire (SFEN) et de Women in Nuclear (WIN).</span></em></p>Entre formations en réalité virtuelle et développement de jumeaux numériques, l’industrie nucléaire est en pleine transition numérique.Emmanuelle Galichet, Enseignante chercheure en physique nucléaire, Conservatoire national des arts et métiers (CNAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1724552021-12-03T14:55:46Z2021-12-03T14:55:46ZFacebook et son « métavers » : le cauchemar devient-il réalité ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/435614/original/file-20211203-15-ywh2z0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C6%2C4608%2C2579&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une personne avec un casque de réalité virtuelle.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/xL3xDwWx7_s">Lux Interaction/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Lorsqu’il y a plus de 10 ans, en 2010, avec Michael Haenlein, professeur de marketing également à ESCP Business School, nous avons identifié les mondes virtuels comme des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0007681309001232">médias sociaux</a>, notre raisonnement a souvent été remis en question. Pour nous, cependant, le lien était plus qu’évident puisque, à l’époque, nous avons fait beaucoup de recherches sur ces mondes virtuels, notamment <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0007681309000895">« Second Life »</a>. Récemment, notre logique a été confirmée lorsque Facebook, colosse des réseaux sociaux, a annoncé son entrée dans le monde des métavers, c’est-à-dire des mondes virtuels.</p>
<p>Nos <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/14241270903047008">recherches</a> sur Second Life, un monde social virtuel tridimensionnel lancé en 2003, ont montré que nombre de ses utilisateurs, sous la forme d’avatars personnalisés ou, en d’autres termes, de représentations graphiques du caractère ou de la personnalité d’un utilisateur, considéraient ce monde virtuel non pas comme un simple jeu, mais comme une extension de leur vie réelle.</p>
<p>Dans Second Life, les utilisateurs interagissent avec d’autres personnes en temps réel, se rencontrent et se parlent, deviennent amis et cultivent leur réseau, voire <a href="https://www.jstor.org/stable/26893831">vendent et achètent des produits virtuels</a> en utilisant la monnaie virtuelle de Second Life, le linden dollar, qui peut être obtenu soit en échangeant des dollars US, soit en travaillant et en gagnant un salaire (virtuel). Une possibilité de gagner sa seconde vie est de créer des produits virtuels en les vendant dans sa propre boutique (virtuelle également). Mais aussi la spéculation immobilière semble opportune. Ainsi, Anshe Chung, alias Ailin Graef, aurait gagné un <a href="https://www.lefigaro.fr/conso/2007/04/16/05007-20070416ARTWWW90457-la_premiere_millionnaire_est_allemande.php">million de (vrais) dollars US</a> en acquérant de grands terrains virtuels qu’elle a revendus en petites parcelles pour plus cher.</p>
<p>Gagner du vrai argent est possible, car les Linden Dollars peuvent également être ré-échangés en dollars US, ce qui permet de gagner de l’argent réel, ce qui, déjà à l’époque, avait créé de sérieux maux de tête aux avocats fiscalistes et aux autorités fiscales.</p>
<h2>Un monde virtuel plus attrayant que la réalité</h2>
<p>Les utilisateurs décrivaient Second Life comme étant plus attrayante que la réalité, que leur vie réelle, leur première vie. L’utilisateur moyen de notre échantillon avait déclaré qu’il utilisait Second Life environ 4 heures par jour, avec une médiane de 2,8 heures. Pourtant, certains d’entre eux passaient plus de 16 heures par jour dans cet environnement virtuel, n’utilisant leur vie réelle que pour dormir. Pour cette <a href="https://www.proquest.com/openview/aabb755d48ae8c9cfcd797da14cfaa7f/1?pq-origsite=gscholar&cbl=36039">recherche</a>, nous nous sommes basés sur une série de 29 entretiens qualitatifs en profondeur que nous avons conduits auprès de résidents de Second Life venant de partout au monde et avec une moyenne d’âge de 35 ans.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/sazE7OdgPCM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Qu'est-ce que Second Life ?</span></figcaption>
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<p>Sur la base de nos recherches, nous avons identifié quatre motivations principales pour l’utilisation de Second Life : la recherche de distractions, le désir de nouer des relations personnelles, le besoin d’apprendre, et le souhait et la possibilité mentionnés ci-dessus de gagner de l’argent.</p>
<p>Alors que le battage médiatique autour de Second Life a rapidement diminué, le métavers de Facebook pourrait effectivement être le début d’une autre histoire, plus importante.</p>
<p>Le fait de choisir pour Facebook le nom de métavers, une combinaison de <em>méta</em>, qui signifie au-delà, et de l’<em>univers</em>, n’est en effet pas anodin. L’écrivain américain de science-fiction Neal Stephenson a utilisé ce terme exact pour décrire son monde virtuel imaginaire dans son best-seller de 1992 <a href="https://www.wired.com/2021/10/geeks-guide-snow-crash/"><em>Snow Crash</em></a>. Dans ce roman, qui se déroule au début du XXI<sup>e</sup> siècle, Stephenson raconte l’histoire du livreur de pizza : Hiro, qui vit physiquement à Los Angeles, mais qui passe virtuellement la plupart de ses journées dans le métavers, où des avatars assistent à des concerts, vont au travail ou consomment des drogues virtuelles, comme le pseudo-narcotique Snow Crash. Le métavers devient si populaire que certaines personnes décident même d’y rester connectées en permanence en passant leur vie réelle dans des unités de stockage, entourées seulement de l’équipement technique nécessaire pour entrer dans le monde virtuel.</p>
<p>Neal Stephenson décrit fictivement ce que Second Life a partiellement transformé en réalité il y a près de vingt ans et ce que Mark Zuckerberg, PDG de Facebook, semble avoir en tête pour son <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/meta-le-metaverse-de-facebook-inquiete-autant-quil-interesse_fr_617b98f5e4b079111a634224">métavers récemment annoncé</a>, qui semble devenir une version plus avancée de Second Life appliquant les dernières technologies en matière de réalité virtuelle et augmentée. Grâce à un casque de réalité virtuelle, les utilisateurs feront et verront tout en trois dimensions. Assister à un concert de son idole ou flâner aux Galeries Lafayette avec ses amis tout en restant chez soi ne sera plus aucun problème. Même les expressions faciales du porteur du casque, équipé d’un lecteur biométrique, pourront être reproduites sur le visage virtuel de l’avatar correspondant. Ainsi, pour Mark Zuckerberg, le métavers simplement révolutionnera l’idée même d’Internet.</p>
<p>Le moment est peut-être bien choisi. Au cours du Covid-19, l’état d’esprit de la société à l’égard des environnements numériques a considérablement changé, ayant connu des heures de réunions virtuelles sur Zoom, Google Meet ou Microsoft Teams. La question qui se pose est de savoir pourquoi un tel métavers pourrait devenir le cauchemar de la société ?</p>
<p>En 2010, nous avions terminé notre analyse en concluant que les utilisateurs n’avaient <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0007681309001232">« rien à perdre que leurs chaînes »</a>. Aujourd’hui, davantage semble être en jeu. En supposant que les progrès de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0007681319301260">l’intelligence artificielle</a> (IA), de l’automatisation et de la transformation numérique laisseront une part importante de chômeurs vivre avec une forme de revenu de base universel, on peut se demander comment ils rempliront leur journée ?</p>
<h2>Le métavers n'est pas pour tout de suite</h2>
<p>Il y a déjà plus de 10 ans, plusieurs utilisateurs de Second Life ont déclaré qu’ils préféraient leur vie virtuelle à leur vie réelle. Avec un environnement virtuel bien amélioré, offrant plus de fonctionnalités et d’opportunités (virtuelles), n’y a-t-il pas plus de gens qui préfèrent transférer leur vie dans le métavers ? À quelle distance sommes-nous d’un monde comme celui illustré dans le roman de Neal Stephenson ?</p>
<p>Pour l’instant, Facebook a annoncé que la réalisation complète du métavers prendra 10 ans ou plus, même s’ils dépenseront des milliards de dollars américains pour lui donner vie. On peut également se demander si Facebook réussira dans cette entreprise compte tenu de son historique de lancements de nouveaux produits – et de leurs échecs (juste pensez à Parse, Beacon, ou encore Facebook Credits). Pourtant, ce n’est peut-être pas la bonne question à se poser. Facebook a remis sur la table l’idée d’un monde virtuel. Si ce n’est pas eux, une autre entreprise prendra le relais. Les véritables questions doivent être les suivantes : que signifierait un tel développement pour notre société, et si cela est souhaitable pour l’humanité ? Comment se préparer au mieux à une telle évolution éventuelle ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/172455/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Andreas Kaplan ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le monde virtuel « Second Life » était-il un avant-goût du Métavers de Facebook ? Faut-il craindre une aggravation de dérives déjà observées ?Andreas Kaplan, Rector, ESCP Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1703462021-11-24T23:20:12Z2021-11-24T23:20:12ZDébat : Métavers, taxis volants et autres armes de destruction massive de la planète<p>5G, 8K, taxis volants et métavers fascinent tout autant qu’ils posent question, mais assez rarement, voire jamais, sous l’angle écologique.</p>
<p>Dans un récent article du quotidien <em>Le Monde</em> – paru le 18 octobre 2021 et intitulé <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/10/18/facebook-va-recruter-10-000-personnes-en-europe-pour-creer-le-metavers_6098755_3234.html">« Facebook va recruter 10 000 personnes en Europe pour créer le métavers »</a> –, sont ainsi évoqués l’emploi, la localisation du lieu de production de l’innovation, des « cas d’usage » de cette application et les expériences qu’elle permettra ; les risques soulignés concernent seulement l’addiction ou les droits de l’individu dans le métavers.</p>
<p>On retrouve <a href="https://www.lemonde.fr/la-foire-du-drone/article/2019/05/17/y-a-t-il-un-pilote-dans-le-taxi-volant_5463533_5037916.html">cette même trame narrative</a> au sujet des taxis volants : les promesses d’un côté et le rapport des individus entre eux, lorsqu’ils seront aux commandes de l’engin.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/0IKKIPZr_C0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">À Toulouse, Airbus présente son taxi volant prévu pour 2023. (AFP, 2021).</span></figcaption>
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<p>Le lien n’est toutefois jamais établi entre ces initiatives et leurs potentiels impacts sur la biosphère. Pour trouver un tel lien, il faut aller dans les pages « Planète » ou « Livres » du <em>Monde</em> : ici, le consommateur est <a href="https://www.lemonde.fr/emploi/article/2021/09/16/l-enfer-numerique-la-face-cachee-de-nos-e-mails_6094839_1698637.html">mis en cause pour ses usages excessifs</a> de vidéo ou d’emails.</p>
<p>Cette manière de « compartimenter » les débats et les enjeux ne date pas d’hier et feuilleter de vieux numéros du <em>Monde</em> conduira aux mêmes observations.</p>
<h2>Technologies <em>hype</em> vs écologie punitive</h2>
<p>La réglementation procède de façon identique. D’un côté, des lois et directives qui <a href="https://www.arcep.fr/la-regulation/telecom-et-numerique/les-textes-legislatifs.html">organisent l’expansion du numérique</a> et de ses applications ; de l’autre, celles qui s’intéressent aux implications écologiques de ces technologies, gérées par d’autres agences – comme l’Ademe (Agence de la transition écologique) en France.</p>
<p>Une première conséquence de cette partition est de faire apparaître l’écologie comme « punitive ». D’un côté, les <a href="https://www.gartner.com/en/research/methodologies/gartner-hype-cycle">innovations techniques et leur « hype »</a>, leur lot de promesses de nouvelles expériences, de joie, de bonheur, de réalisations fantastiques. De l’autre, la question écologique, qui parle déchets, efficacité énergétique, destruction de la planète et autres questions « déprimantes » et « ennuyeuses ».</p>
<p>Cela vaut aussi pour la recherche : les chercheurs avec de bonnes nouvelles » technologiques sont placés en tête de gondole, les autres restent en fond de cale. Ainsi la médiatrice de <em>France Info</em> expliqua-t-elle que le transfert du footballeur Messi <a href="https://mediateur.radiofrance.com/rendez-vous/couverture-editoriale-sur-larrivee-de-lionel-messi-au-psg/">« valait » plus de temps d’antenne</a> que le rapport du GIEC, le premier sujet relevant du feuilleton, alors que le rapport du GIEC constitue un événement ponctuel.</p>
<h2>Sobriété oblitérée</h2>
<p>Autre conséquence : la réglementation écologique reste globalement cantonnée au domaine de <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/action-france-lefficacite-energetique">« l’efficacité écologique »</a> ; ce terme technique désigne la quantité de matière et d’énergie nécessaire pour fabriquer un bien ou rendre un service.</p>
<p>Cette efficacité masque d’autres approches, essentielles dans la transition écologique : celles relatives à la sobriété. Celle-ci pose la question de savoir si nous avons vraiment besoin de ce bien ou ce service. Que ce soit pour la 8K ou de la 5G, l’association Shift Project remet ainsi en cause son intérêt, <a href="https://theshiftproject.org/article/lean-ict-pour-une-sobriete-numerique-intermediaire/">au regard de ses effets prévisibles sur la planète</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1418546682543984641"}"></div></p>
<p>Troisième conséquence de cette partition entre expansion numérique et impact environnemental, l’écologie a toujours un temps de retard. On y assiste dans les faits : en dépit des réglementations, l’impact écologique du secteur numérique ne cesse de grandir. Les applications sont développées à coup de millions, voire de milliards. Ensuite seulement se pose la question environnementale. Il est alors déjà trop tard !</p>
<h2>Des dépendances massives… et prévisibles</h2>
<p>Pourtant, dans bon nombre de cas, les effets de ces projets sont prévisibles – on peut dire bien en amont quelles sont les idées désastreuses, ou du moins fortement problématiques.</p>
<p>Mener cette réflexion en amont permettrait d’éviter des <a href="https://www.persee.fr/doc/rfeco_0769-0479_1994_num_9_1_950">situations de <em>lock-in</em> technologique</a>, telles que la dépendance massive des modes de vie à l’automobile ou au smartphone. Des situations dont il est difficile de sortir, parce qu’elles impliquent de coordonner un changement d’infrastructures et d’habitudes, à l’image de l’implantation du vélo en ville, « contre » la voiture.</p>
<p>Ces conséquences facilement anticipables, on les retrouve avec la 5G, la 8K, les taxis volants et le métavers.</p>
<p>Conçue pour favoriser une forte hausse du trafic de données, la 5G a par exemple un énorme coût énergétique, même si des gains tout aussi énormes en termes d’efficacité sont réalisés dans ce domaine depuis les années 1950. Comme le souligne le Shift Project <a href="https://theshiftproject.org/article/lean-ict-pour-une-sobriete-numerique-intermediaire/">dans son rapport</a>, ces gains d’efficacité sont cependant stables à l’échelle du système technique ; ils ne pourront donc pas compenser la multiplication des données…</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1234616967933448192"}"></div></p>
<p>Le raisonnement vaut pour la 8K et les métavers, que l’on pourrait décrire sur un plan conceptuel comme une variante améliorée de <a href="https://secondlife.com/">Second Life</a>, univers numérique persistant mis en service en 2003. À l’époque, le spécialiste de la technologie Nicholas Carr avait fait remarquer qu’un avatar sur ce réseau <a href="http://www.roughtype.com/?p=611">consommait plus d’énergie</a> qu’un Brésilien moyen.</p>
<p>Des œuvres de fiction comme <em>Virtual Revolution</em> (2016) esquissent un monde dans lequel les métavers absorberaient l’essentiel de nos interactions sociales, de même que les réseaux sociaux sont aujourd’hui un véhicule majeur des conversations quotidiennes.</p>
<p>La quantité d’information qu’il sera nécessaire de produire et de traiter est facile à anticiper, par comparaison avec ce qui existe déjà. L’entreprise informatique <a href="https://www.cisco.com/c/dam/m/en_us/solutions/service-provider/vni-forecast-highlights/pdf/Global_2020_Forecast_Highlights.pdf">Cisco prévient</a> : ces univers pourraient facilement devenir la première source de trafic sur Internet.</p>
<p>Quant aux taxis volants, ils cherchent à retrouver dans les airs la place « perdue » au sol ; bref, à encombrer l’un des derniers espaces encore disponibles, tout en sachant que monter et descendre consomme généralement plus d’énergie que de se déplacer à l’horizontale, du fait de la gravité.</p>
<h2>Notre relation à la nature</h2>
<p>On le voit, les liens entre innovation technologique et situation écologique ne sont pas compliqués à établir ; il n’y a pas ici de difficulté conceptuelle. Et l’écologie n’est pas condamnée à être en retard.</p>
<p>Marx nous expliquait déjà que la <a href="https://d-nb.info/94187897x/04">question du rapport des êtres humains à la nature, c’est la technique</a>, les choix techniques, et non l’admiration béate d’espaces supposément vierges que l’on contemplerait lors de balades le week-end…</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-nature-une-idee-qui-evolue-au-fil-des-civilisations-158045">La « nature », une idée qui évolue au fil des civilisations</a>
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<p>Les écologistes l’affirment haut et fort, depuis longtemps : certains choix techniques posent un problème de compatibilité avec les conditions d’une vie bonne sur Terre. Mais ces problèmes sont formulés dans l’espace public de manière compartimentée, ce qui empêche toute problématisation sérieuse.</p>
<h2>Pourquoi ça coince ?</h2>
<p>L’écologisme n’est pas condamné à demeurer dans le « punitif ». Vélos, circuits courts, énergies renouvelables, isolation, autoconstruction… les initiatives écologiques sont nombreuses et peuvent peser, dès lors que les différentes voies possibles sont convenablement informées, dans le débat public.</p>
<p>Qu’est-ce qui pose problème alors ? Pourquoi la <em>hype</em> bénéficie-t-elle autant à des projets dont on peut facilement montrer qu’ils poseront d’énormes problèmes dès qu’ils atteindront une certaine échelle ? Les explications sont multiples.</p>
<p>Les projets de « la tech » sont les mieux financés, bénéficiant d’une grande force de frappe en matière de puissance de persuasion. Marketing, enquêtes… le <em>storytelling</em> est savamment dosé et étroitement ciblé pour toucher les publics les plus réceptifs, avant d’être progressivement étendu vers de nouvelles franges de la population, jusqu’à saturation.</p>
<p>Ces histoires partielles s’inscrivent aussi dans l’histoire plus large des sociétés développées et leur course aux technologies les plus capitalistiques, <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1232830/f1n351.pdf">comme Marx le montra dès 1867</a>, soulignant les effets de la reproduction élargie du capital. Les socialismes ont d’ailleurs placé beaucoup d’espoir dans cette « expansion des forces productives ».</p>
<p>Rompre avec cette histoire linéaire, puisque poursuivant toujours le même but, c’est comme « régresser » et l’on préfère en quelque sorte maintenir cette narration que la vie sur Terre. Une narration où science et science-fiction se mêlent, à l’image d’Elon Musk évoquant une installation prochaine sur Mars. Le biais cognitif, <a href="https://www.puf.com/content/La_d%C3%A9mocratie_des_cr%C3%A9dules">appelé « effet Othello »</a>, joue ici à plein.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1099919194693554177"}"></div></p>
<p>Une autre explication concerne la capitalisation elle-même, qui constitue une <a href="http://www.editions-recherches.com/fiche.php?id=84">mesure de la puissance</a> des organisations. Plus la capitalisation est importante, plus les réseaux contrôlés par l’organisation s’avèrent étendus – et plus la puissance de persuasion est élevée. Elon Musk, encore lui, ambitionne de contrôler l’ensemble de la flotte de véhicules particuliers, avec ses robotaxis et ses voitures autonomes. Et ce qui est vrai des entreprises l’est aussi des États, comme le souligne François Fourquet dans l’ouvrage <a href="http://www.editions-recherches.com/fiche.php?id=84"><em>Les Comptes de la puissance</em></a>.</p>
<p>Si les <a href="https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k48039030">conceptions dominantes du socialisme</a> au XXe siècle ont toujours été fascinées par ce pouvoir collectif que le capitalisme faisait naître, et qu’elles cherchaient à mettre au service du plus grand nombre, l’écologisme soutient pour sa part <a href="http://www.editionsamsterdam.fr/nature-et-politique/">l’initiative décentralisée et les boucles de petite taille</a>.</p>
<p>Ce courant rompt ainsi fréquemment avec la « politique de puissance », expliquant notamment son opposition forte aux conservatismes. Est-ce « réaliste », dans un monde où les États cherchent à se dominer les uns les autres ? Mais, à l’opposé, la course à la grandeur peut-elle durer indéfiniment si elle mine les conditions de vie sur Terre ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170346/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabrice Flipo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour quelles raisons les effets délétères des nouvelles technologies sur l’environnement ne sont-elles pas prises en compte bien en amont ?Fabrice Flipo, Professeur en philosophie sociale et politique, épistémologie et histoire des sciences et techniques, Institut Mines-Télécom Business School Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1710182021-11-09T22:37:37Z2021-11-09T22:37:37ZDe quoi le « Meta » de Facebook est-il le nom ?<p>Facebook n’a pas changé de nom : il s’est constitué en filiale abritée par une maison-mère, Meta. Cette stratégie de conglomérat a été vue comme une façon de botter en touche face aux attaques actuelles contre le média social, concernant sa concentration verticale (avec Instagram, Messenger et WhatsApp) et surtout sa gestion douteuse de la désinformation, suite aux révélations répétées de lanceurs d’alerte comme <a href="https://www.rfi.fr/fr/podcasts/aujourd-hui-l-%C3%A9conomie-le-portrait/20211029-frances-haugen-la-lanceuse-d-alerte-qui-fait-trembler-facebook">Frances Haugen</a>. Elle a révélé, entre autres, que Facebook avait supprimé en 2020 certains filtres faisant barrage aux infox pour augmenter la fréquentation sur ses pages et donc ses profits publicitaires, préférant le profit à l’intégrité de l’information.</p>
<p>Plutôt que de répondre sur la désinformation et la sécurité de ses usagers, Facebook détourne les projecteurs de l’attention publique sur une autre actualité : celle <a href="https://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/metaverse-cinq-questions-sur-le-nouveau-monde-virtuel-de-facebook-1359667">du métavers (contraction de « meta » et « univers »)</a> un monde virtuel en ligne et immersif.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-metavers-de-mark-zuckerberg-pourra-t-il-rester-sous-son-controle-171190">Le « métavers » de Mark Zuckerberg pourra-t-il rester sous son contrôle ?</a>
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<p>Cette manœuvre présente l’avantage d’opérer la mue du média social en entreprise numérique diversifiée, tout comme Google en 2015, avec sa maison-mère, Alphabet.</p>
<p>En fait, le tournant vers le métavers a été pris par Mark Zuckerberg dès l’acquisition de Oculus VR en 2014, une filiale fabriquant des casques de réalité virtuelle, désormais renommée <a href="https://www.journaldugeek.com/2021/10/29/realite-virtuelle-facebook-veut-enterrer-la-marque-oculus/">Meta Quest 2</a></p>
<p>Ce faisant, Mark Zuckerberg s’inscrit dans la logique de l’augmentation numérique avec deux atouts qui distinguent META des autres entités en lice : la capacité de se brancher à la régie publicitaire Audience Network et donc de monétiser tous ses contenus et services ; la capacité d’agréger tous les usagers de tous ses médias sociaux (plusieurs milliards !), pour bâtir une communauté en ligne immergée mondialement. Le tout en se branchant sur les <a href="https://journals.openedition.org/questionsdecommunication/8619">utopies d’internet</a> dès les origines.</p>
<h2>Le métavers et l’imaginaire d’internet</h2>
<p>Le métavers existe dans la littérature de science-fiction dystopique depuis les années 1980. Dès 1984, William Gibson publie un roman qui marque le début du « cyberespace », <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Neuromancien"><em>Neuromancer</em></a>. Le héros, un hacker blessé, avec l’aide de son avatar, pénètre une intelligence artificielle, Wintermute, et l’augmente en l’alliant à une autre, Neuromancer, pour produire une super-conscience (en partie à son image).</p>
<p>En 1992, c’est au tour de Neal Stephenson de créer le terme « metavers » dans <em>Snow Crash</em>, traduit en français par <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Samoura%C3%AF_virtuel"><em>Le Samourai virtuel</em></a>. Là aussi le héros, un hacker livreur de pizzas, met en échec un dangereux manipulateur des cerveaux en se branchant avec une interface sur un métavers, développé par une corporation constituée en mini-pays où le code fait loi.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/430744/original/file-20211108-10108-1gbleih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/430744/original/file-20211108-10108-1gbleih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/430744/original/file-20211108-10108-1gbleih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=974&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/430744/original/file-20211108-10108-1gbleih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=974&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/430744/original/file-20211108-10108-1gbleih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=974&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/430744/original/file-20211108-10108-1gbleih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1224&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/430744/original/file-20211108-10108-1gbleih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1224&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/430744/original/file-20211108-10108-1gbleih.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1224&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Couverture du « Neuromancer », première édition, 1986.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/jvk/2827620644">John Keogh/Flickr</a></span>
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<p>L’imaginaire déjanté des origines est relancé en 2011 par le roman d’Ernest Cline, <em>Player One</em> (devenu <em>Ready Player One</em> à Hollywood). Il met en scène un système mondial de réalité virtuelle, OASIS, accessible par casque de réalité virtuelle, devenue une société virtuelle que le héros, avec son avatar, s’efforce de fermer pour <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Player_One_(roman)">redonner du sens à la vie réelle</a>.</p>
<h2>Des jeux à l’immersion</h2>
<p>Mais il faut aller regarder du côté des jeux vidéo pour se rendre compte de la réalité qui se préfigure. D’abord « Habitat », considéré comme le premier jeu de rôle à construire une communauté virtuelle commerciale à grande échelle basée sur des graphiques et des avatars, <a href="https://fr.abcdef.wiki/wiki/Habitat_(video_game)">dès 1986</a>. À noter que Facebook a aussi développé un programme Habitat 2.0 pour entraîner une intelligence artificielle à se déplacer <a href="https://siecledigital.fr/2021/07/05/facebook-habitat-2-0-ia-maison/">dans une maison</a>. Second Life va plus loin, en 3D. Créé en 2003, ce métavers permet aux usagers de créer leur propre contenu et de le monétiser avec une monnaie virtuelle, le <a href="https://secondlife.com/?lang=fr-FR">linden</a> (convertible en dollars).</p>
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<figcaption><span class="caption">Qu’est ce que Second Life ?</span></figcaption>
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<p>Depuis des plates-formes de médias sociaux en environnements virtuels immersifs se sont développées, comme VRChat, AltspaceVR ou Immersed, qui fonctionne sur <a href="https://immersed.com/">Oculus Quest</a></p>
<p>Déjà Unity s’avère être une plate-forme de jeu multiplateforme qui permet du développement 3D en temps réel et possède une entité, Unity Ads Network, pour permettre aux joueurs de monétiser leur création. Elle se pose en 3<sup>e</sup> place, après Google et Facebook, pour la <a href="https://venturebeat.com/2020/10/14/appsflyer-facebook-google-and-unity-ads-dominate-mobile-advertising/">publicité sur mobiles</a>.</p>
<p>Le concept imaginaire semble donc s’incarner dans l’industrie alors que différentes technologies arrivent à maturité : les réseaux sociaux, les jeux massifs en ligne, la réalité virtuelle immersive. Et que la superstructure d’internet est en place de manière robuste, <a href="https://theconversation.com/sans-les-cables-sous-marins-plus-dinternet-leurope-est-elle-prete-169858">sur tous les continents, les océans et dans l’espace</a>.</p>
<p>La fiction peut devenir réalité par la possibilité d’interconnecter des avatars en temps réel, dans plusieurs environnements virtuels et objets connectés. La définition du métavers se précise donc : il s’agit bien de simuler (et de monétiser) un univers en interaction avec le nôtre, qui peut transcender la réalité car il a une prise en surplomb (méta-) sur les activités du monde physique.</p>
<p>Cela est rendu possible par la <a href="https://www.objetconnecte.com/iot-2020-tendances-predictions+">traçabilité</a> de tous les sujets et de tous les objets par le numérique.</p>
<h2>Le marché du métavers est déjà là</h2>
<p>Les industries du métavers <a href="https://medium.com/building-the-metaverse/market-map-of-the-metaverse-8ae0cde89696">existent depuis plusieurs décennies</a>. Elles appartiennent à des secteurs divers qui tous relèvent des expériences ludiques en ligne (Fortnite, Valve…), de la présence à distance et des interfaces humaines (Oculus, Facebook, YouTube…) et des contenus créatifs agrégés par les usagers (Shopify, Adobe, Unity…).</p>
<p>Un coup d’œil aux compagnies du métavers montre que la chaine de la valeur repose sur l’interopérabilité entre ces divers espaces virtuels et <a href="https://medium.com/building-the-metaverse/the-metaverse-value-chain-afcf9e09e3a7">sur la monétisation</a>. L’interopérabilité, côté usagers, peut se mettre en place avec des propositions de créer son propre avatar et de faire des partenariats entre apps et développeurs comme dans le cas de ReadyPlayerMe, utilisable dans de <a href="https://readyplayer.me/fr?ref=key.chtouch.com">nombreux espaces virtuels</a>. Cela peut permettre à un usager de faire faire des actions à son avatar et de les faire sponsoriser par une marque par exemple.</p>
<p>La monétisation, quant à elle, laisse entrevoir les promesses de la blockchain et des cryptomonnaies, préfigurées par Second Life avec le linden (la monnaie développée par le jeu et convertible en dollars). Facebook s’apprête à lancer la sienne, diem (anciennement libra), pour pouvoir faire toutes sortes de transferts via les <a href="https://www.bitcoinmarketjournal.com/facebook-coin/">services numériques</a>.</p>
<h2>Un phénomène caractéristique de la « plateformisation » de la société</h2>
<p>Les caractéristiques partagées des compagnies du métavers, dans lesquelles Facebook figure en bonne place comme Unity, regroupent celles de la <a href="https://www.fnac.com/livre-numerique/a12899801/Jose-van-Dijck-The-Platform-Society">plateformisation</a>, jouant de la convergence entre l’IA, les objets connectés et les données de masse (big data), pour viser une réalité augmentée persistante et partagée.</p>
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<figcaption><span class="caption">Unity présente un forum virtuel pour les créateurs et innovateurs, été 2021.</span></figcaption>
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<p>Celle-ci se fonde sur trois mécanismes : la datafication, la marchandisation et la curation.</p>
<p>La datafication repose sur la capacité des plates-formes en réseau de transformer en données des aspects du monde qui n’avaient jamais été quantifiés auparavant comme les amitiés, les goûts, les historiques de navigation…</p>
<p>La marchandisation consiste en la transformation des objets, activités, émotions, idées en ligne et hors ligne en « marchandises », échangeables et vendables, par le biais des données personnelles, par exemple l’association d’un tarif publicitaire à un profil d’usager à atteindre ou un service de surveillance pour protéger sa vie privée.</p>
<p>La curation implique la sélection des objets, services et acteurs les plus pertinents en utilisant la personnalisation, l’influence, la réputation et les pratiques de modération comme le recours à des influenceurs par certaines grandes marques pour le placement de leurs produits.</p>
<h2>L’encastrement des biens relationnels et biens expérientiels</h2>
<p>En cela l’avantage de Facebook (et de tout autre média social amené à lui succéder ou le supplanter) est de combiner les effets de réseau des biens relationnels et des biens expérientiels, qui fondent les deux versants de l’économie numérique dite <a href="https://www.aeaweb.org/articles?id=10.1257/aer.100.4.1642">« biface »</a> (<em>multisided</em>) car elle rassemble de nombreux acheteurs et de nombreux vendeurs via une plate-forme unique et de nouveaux modèles d’affaires.</p>
<p>Les biens relationnels, au fondement des médias sociaux, sont ceux des relations interpersonnelles durables et non rivales, sans échanges commerciaux, prédiqués sur l’interaction entre les individus, particulièrement la réciprocité dans la poursuite d’intérêts communs <a href="https://www.cairn.info/revue-nectart-2017-2-page-126.htm">selon Carol Ulhaner</a>, comme une interface de tchat par exemple.</p>
<p>Les biens expérientiels reposent sur des échanges commerciaux appuyés sur la logique d’usage plutôt que celle de la propriété, avec toutes sortes de services en ligne qui relèvent plus de la location que de l’appartenance. Les développeurs sont des <a href="http://clemi.spip.ac-rouen.fr/?Penser-la-societe-de-l-ecran">« nétayers »</a>, qui partagent les revenus de leur travail avec les cyber plateformes, comme dans le cas de développeurs de jeux sur Unity. La complémentarité de ces deux biens en ligne constitue la force de frappe du numérique, et elle est augmentée dans le métavers déjà existant, qui promeut <a href="https://www.cairn.info/revue-nectart-2017-2-page-126.htm">l’activité créative</a> des usagers développeurs et agrégateurs de contenu.</p>
<h2>Un effet de réseau</h2>
<p>Ces biens numériques jouent sur <a href="https://laviedesidees.fr/Mark-Granovetter-Societe-et-economie.html">l’effet de réseau et la force des liens faibles</a> chère au sociologue Mark Granovetter. Ils ont la force de faire s’interfacer l’url (localisateur uniforme de ressource, l’adresse web) et l’IRL (« in real life »).</p>
<p>Les liens faibles, facilités par le mécanisme de mondialisation, permettent d’obtenir des résultats et des services par interactions multiples, pas toujours coordonnées, sans nécessairement rencontrer les personnes dans la vraie vie. Mark Granovetter envisage le marché biface sur la base de deux sortes d’encastrements, qui convergent avec le métavers : l’encastrement relationnel, celui des biens relationnels et expérientiels et des liens faibles, et l’encastrement structural, celui des <a href="https://journals.openedition.org/sdt/34306">institutions, des réseaux, des plates-formes et des apps</a>. Mais ce métavers encastré n’est possible qu’avec des publics prêts à devenir des « consommacteurs », à savoir des joueurs avec leurs avatars, prêts à créer et à consommer.</p>
<h2>Habituer l’usager</h2>
<p>Cela implique une compétence spécifique en réception, l’e-présence, à savoir la capacité de gérer une identité numérique complexe, avec les <a href="https://psn.univ-paris3.fr/ouvrage/penser-la-societe-de-lecran-dispositifs-et-usages">dimensions cognitive, sociale et designée</a>. D’où l’intérêt aussi de Facebook de développer des versions « junior » d’Instagram, après MessengerKids, pour recruter de nouveaux usagers <a href="https://siecledigital.fr/2021/03/21/facebook-instagram-junior/">dès le plus jeune âge</a>.</p>
<p>Le métavers repose sur la participation intégrée et active de membres du public qui se constituent en communautés de pratiques et de consommation. Il faut que les usagers soient prêts à se mettre en récit et en scène pour relater leur expérience personnelle par le biais d’une performance médiatique : c’est le rôle des selfies, stories, mèmes, pseudos et avatars depuis un moment qui ont socialisé le public à ces pratiques.</p>
<p>De même pour l’engouement pour le live et le stream et les modes d’interactions courts (tweets, posts, reels…) qui augmentent le sentiment réel d’une présence à distance. Quant au phénomène des séries, mode d’interaction long, il maintient toute une génération dans un même univers <a href="https://editions-attribut.com/wp-content/uploads/2021/07/NECTART13-presentation-dossier.png">pendant des saisons entières</a> (10 à 18 ans pour certaines d’entre elles, dont 38 saisons pour Dr Who !).</p>
<h2>Le pari Facebook : un métamédia</h2>
<p>Facebook fait le pari que par son contrôle monopolistique d’un bouquet de médias sociaux (Instagram, Messenger, WhatsApp), il a une longueur d’avance sur les concurrents en transférant son modèle d’affaires (la publicité et bientôt la cryptomonnaie) au métavers. Il le transforme en un nouveau métamédia : un écosystème immersif où les relations interpersonnelles sont liées à la création de contenus monétisés permettant le divertissement, la communication et l’information dans une navigation fluide et sans suture entre plates-formes numériques. Il amène à un marché encore fragmenté la pierre angulaire, à savoir les communautés connectées, qui confèrent désormais une acceptabilité sociale <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/la-grande-conversion-numerique-milad-doueihi/9782757824788">au tout numérique comme fait social total</a>. Il apporte aussi le nerf de la guerre, à savoir le modèle d’affaires par la publicité et la possibilité de monétiser et de mettre à portée de Diem tout ce qui est du « click and collect ».</p>
<p>La crise Covid-19 et le confinement ont servi de tremplin à cette nouvelle normalité, comme étant métamédiatisée. Sa viabilité est désormais crédible. Les usages numériques pendant la crise ont plébiscité les 4S : <em>stream, selfie, story</em> et <em>série</em>.</p>
<p>Elle repose sur des publics mondialisés, <a href="https://education.toutcomment.com/article/qui-sont-les-milleniaux-13880.html">mais au profil semblable aux milléniaux</a> dans leurs habitudes de consommation : mobiles, multimédias, multitâches et participatifs. Reste à savoir les conséquences pour des « nétayers » sans protection sociale et statut reconnu et pour des avatars et autres agents non humains sans limites éthiques.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/171018/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Divina Frau-Meigs ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Plutôt que de répondre sur la désinformation, et la sécurité de ses usagers, Facebook détourne les projecteurs de l’attention publique sur une autre actualité : les métavers.Divina Frau-Meigs, Professeur des sciences de l'information et de la communication, Auteurs historiques The Conversation FranceLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.