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Où en est l’enquête ?

Un bébé dans son berceau. Peter Beukema/Unsplash

Clara Robert-Motta, journaliste en formation, est l’auteure de cet article, partie d’un dossier sur l’affaire dite des « bébés sans bras ». Les éléments scientifiques des six articles que nous vous présentons ont été validés par les experts interrogés. L’ensemble a été rédigé par les étudiants et est publié sous l’égide de Pascal Guénée, directeur de l’Institut Pratique du journalisme de l’Université Paris Dauphine – PSL.


L’eau polluée, un début de piste ? Mi-avril 2019, l’affaire dite des bébés sans bras a fait l’objet d’une première tentative d’explication. Emmanuelle Amar, à l’origine de la révélation de l’affaire, estime possible une contamination de l’eau potable à l’origine des cas de malformations. Hypothèse qui reste bien entendu à étayer et à confirmer alors que l’organisme en charge de l’enquête nationale, Santé publique France, reste silencieux. Ses responsables vont-ils s’exprimer dans les prochains jours alors que le magazine Envoyé spécial diffuse ce jour son investigation ? Retour sur une enquête officielle peu communicante.

Jeudi 15 novembre dans le VIIe arrondissement de Paris. Un peu plus d’un mois après la médiatisation d’un rapport évoquant les cas de 7 bébés nés avec une malformation d’un membre supérieur, toutes les agences sanitaires nationales sont vent debout pour tenter de calmer la polémique autour « des bébés sans bras ». Santé Publique France (SPF) annonce l’ouverture d’une grande enquête nationale, en lien avec l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Il s’agit d’identifier de nouveaux cas et de possibles causes communes.

Trois mois plus tard, SPF et l’Anses promettent de premiers résultats. Mais à la date annoncée, le 31 janvier 2019, toujours rien ! Ni pour les médias, ni pour le public, et surtout, pas d’informations pour les familles directement concernées. Isabelle Taymans Grassin, présidente de l’association Assedea qui regroupe les parents dont les enfants souffrent d’agénésie, et elle-même maman de Charlotte, une des enfants « sans bras » de Guidel, dans le Morbihan, est en colère. « Malheureusement SPF et le ministère essaient de disparaître. L’heure est grave. Nous sommes indignés. » Une lettre publique a été envoyée deux jours plus tôt à la ministre par les familles de Guidel pour réaffirmer « leur impatience et leur détermination ».

Il faut encore attendre pour que les autorités sanitaires sortent partiellement de leur mutisme. Le 12 février, un point d’étape est enfin rendu public. Au-delà d’une note d’information communiquée à la ministre le 30 janvier, les informations se limitent à l’annonce de la constitution des deux comités, l’un scientifique, l’autre d’orientation et de suivi (qui ne se réuniront que le 21 février et en mars). La promesse de François Bourdillon, directeur général de SPF, faite au Parisien de « chiffrer précisément le nombre de cas de malformations » n’est pas, à ce jour, mise en œuvre.

Des données lacunaires

Isabelle Taymans Grassin fait partie du comité d’orientation et de suivi qui devrait être un outil d’information aux familles et à la population. Très impliquée sur le sujet, elle a été contactée plusieurs fois par SPF au sujet de l’enquête nationale. « SPF n’avait même pas les contacts des autres familles touchées à Guidel, c’est moi qui ait dû leur fournir. Ils essaient de faire un travail de terrain, mais ils se retrouvent confrontés à leur manque de registres. » Les six registres actuels ne couvrent que 20 % du territoire français.

Peut-on alors, pour suivre l’évolution de la situation et éventuellement repérer d’autres cas, utiliser un autre fichier, celui dit « PMSI » des données hospitalières ? Pour Elisabeth Robert-Gnansia, présidente du conseil scientifique du Remera, le registre des malformations de Rhône-Alpes, la réponse est non : « Le codage du PMSI n’est pas fait pour surveiller la population, c’est pour facturer des actes, point à la ligne. » Difficile dans ces conditions d’en savoir plus. Pour Elisabeth Robert-Gnansia, « Il se passe quelque chose d’anormal. Il faut chercher et faire quelque chose pour les familles. » Il reste encore du chemin à parcourir pour trouver enfin des réponses.

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