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Pour devenir footballeur professionnel, soyez beau et irrégulier

Cristiano Ronaldo: Gol da vitória! (Azulejos). Charis Tsevis / Flickr, CC BY-NC-ND

James Rodriguez, Cristiano Ronaldo, Sergio Agüero, Neymar, Gareth Bale, Eden Hazard, tous ces joueurs de foot ont un point commun : ils apparaissent à la fois dans le classement des plus beaux footballeurs et des sportifs les mieux payés. Ils sont beaux et riches, que demander de plus ?

Mais cette particularité n’est pas une coïncidence. Lorsqu’on s’intéresse au physique des joueurs et à leur rémunération, on constate une corrélation évidente. Plus vous êtes beaux, mieux vous êtes payés.

Pour être riche il faut être beau

En économie, de nombreuses études, appliquées au monde de l’entreprise, montrent que, toute chose égale par ailleurs, plus un individu est beau, meilleur est son salaire. D’après Magumi Hosoda, Eugene Stone-Romero et Gwen Coats, de l’Université de San José, aux États-Unis, les personnes à l’apparence physique jugée supérieure gagnent en moyenne 15 % en plus que les autres.

Lors des entretiens d’embauche et de la négociation salariale, ces derniers sont jugés plus sûrs d’eux, dégagent plus de confiance, plus d’assurance, plus de compétences et obtiennent plus facilement le salaire désiré.

En football, c’est aussi évident. Les économistes Bastien Drut et Richard Duhautois ont montré, dans leur livre Sciences Sociales Football Club, que quasiment la moitié de la rémunération d’un joueur est liée à des critères extrasportifs : plus le nom est cité dans la presse, notamment la presse-people, plus son salaire augmente.

Et les beaux gosses ont tendance à y apparaître plus souvent. Ils s’affichent avec une amie ancienne star de la télé-réalité, mannequin ou miss, s’associent avec des célébrités, sortent régulièrement et sont « victimes » des paparazzis.

Mais la démonstration va plus loin. Les Allemands Ulrich Rosar, Jörg Hagenah et Markus Klein ont souhaité savoir si la beauté avait quelque chose à voir avec la rémunération d’un footballeur, ce qui est contraire à l’idéal économique où le salaire est égal à la productivité marginale.

Ils ont analysé l’ensemble des joueurs de Bundesliga, le championnat allemand, lors de la saison 2007-2008 et ont demandé à 365 personnes d’accorder une note entre 0 et 6 sur leur physique. Ensuite, ils ont vérifié s’il existait une causalité entre note moyenne obtenue et rémunération, quelle que soit la performance réelle.

Résultat, les beaux prennent le pouvoir. Rosar, Hagenah et Klein sont en effet arrivés à la conclusion que plus vous êtes beau, plus vous améliorez votre salaire, sans que le niveau réel n’ait eu la moindre incidence. À partir de leur résultat économétrique, à chaque point de beauté en plus obtenu, le salaire annuel augmente de 250 000 euros.

Un joueur, dans l’analyse, est apparu en contradiction avec les résultats : Frank Ribéry. Alors qu’il est arrivé avant-dernier dans le classement sur le physique, il est l’un des joueurs les mieux payés de Bundesliga et a même été élu meilleur joueur lors de la saison étudiée. En statistique, on dit qu’il est un « outlier », un point aberrant.

Ne misez pas sur la constance

Être beau ne fait pas tout pour obtenir une bonne rémunération, heureusement. Une autre variable apparaît comme autant significative : l’irrégularité sportive. Dans la mesure où le salaire dépend aussi de critères extrasportifs, les apparitions dans la presse notamment, il faut faire parler de soi. En étant beau mais aussi en réussissant d’excellentes performances sur le terrain.

Mais pour que les médias acceptent de consacrer des articles à des joueurs en particulier, il faut qu’il y ait une bonne raison. Un joueur qui ne cesse d’être moyen n’aura jamais droit à un papier dans un journal de référence. Pourquoi L’Équipe, par exemple, lui consacrerait quelques lignes ?

A l’inverse, s’il réussit un super match, si ses performances dépassent, même une fois, l’ensemble des attentes, tout le monde parlera de lui. L’idée est que la régularité est peu médiatique, puisque courante, alors que l’exceptionnel est rare, donc médiatisé.

Un joueur qui obtient la note moyenne de 5/10 sur une saison, en ayant enchaîné les matchs entre 4 et 6 sur 10, sera considéré comme tout juste moyen, la presse parlera peu de lui. Alors qu’un autre joueur, avec la même moyenne de 5, pourra récolter de nombreuses unes en obtenant, sur la moitié de ses matchs, des notes supérieures à 8/10, en réalisant des performances exceptionnelles. Tout le monde parlera de lui et personne ne citera ses autres matchs à moins de 3/10.

Puisque le salaire est négocié une fois lors de la signature du contrat ou de la prolongation, et non pas après chaque match, le joueur, suite à un super match, pourra légitimement demander une augmentation. Et ce même si, par la suite, ses performances s’amenuisent. L’irrégularité paie.

Les économistes allemands Christian Deutscher et Arne Bushemann ont cherché à vérifier ce postulat. Ils ont analysé 845 joueurs sur 5 saisons de Bundesliga, entre 2008 et 2013 et sont arrivés à la même conclusion : les footballeurs les plus irréguliers reçoivent un salaire plus élevé que les plus réguliers.

Cela pourrait expliquer, en partie, les émoluments d’Edison Cavani, le célèbre buteur du Paris Saint-Germain, connu surtout pour enchaîner des prestations convaincantes et des matchs catastrophiques.

Conclusion, si vous voulez percer dans le football et très bien gagner votre vie, misez surtout sur votre aspect physique et ne vous donnez pas à fond sur chaque match, privilégiez-en seulement quelques un. Sachez vous faire désirer…

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