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Des relations amoureuses à la recherche d'emplois, les gens en surpoids connaissent moins de succès. Shutterstock

Stigmatiser les gros, c'est mauvais pour tout le monde!

Les personnes en surpoids sont quotidiennement victimes de réactions phobiques et humiliantes.

Ellen Maud Bennett est morte du cancer le 11 mai dernier, quelques jours après avoir reçu un diagnostic de cancer inopérable. Elle s’est servie de sa notice nécrologique pour adresser un message au corps médical: cessez de stigmatiser les obèses!

Cette terre-neuvienne n’est pas la seule. La stigmatisation des gros – qu’on appelle aussi la grossophobie – est présente dans toutes les sphères de la société, que ce soit dans les médias, dans les émissions de télévision humoristiques, ou dans les commentaires des enseignants, des professionnels de la santé, des employeurs, des amis et de la famille.

Ces gestes ne sont pas seulement blessants, mais ils sont aussi dangereux. Ils entraînent des conséquences sur le plan social. Des recherches prouvent que les femmes blanches qui ne correspondent pas à l’idéal de la minceur risquent d'avoir du mal à se trouver un amoureux, par exemple. Et que les obèses - hommes ou femmes - ont moins de chances de se trouver un emploi, ce qui ajoute des conséquences économiques aux conséquences sociales.

Stigmatiser les gens en surpoids affecte leur santé. Cela leur cause de l’anxiété, de la dépression, des pensées suicidaires, de la compulsion alimentaire…Cela les amène à éviter les contacts physiques et les soins de santé. En outre, de nombreuses recherches ont clairement démontré que leur inculquer la honte de leur corps ne les aide pas à perdre du poids. Au contraire, cela leur fait plus de tort que de bien.

Ces recherches ont des incidences pour tous les membres de la société, mais surtout pour les professionnels en milieu de santé pour qui le précepte de « ne pas nuire » est fondamental.

Bien que depuis deux décennies les efforts déployés en santé publique dans le domaine de l’obésité aient été motivés par des intentions louables, nous savons maintenant que la promotion de la perte de poids et de l’idéal de « bouger plus, manger moins » ont plutôt contribué à augmenter la discrimination et la honte du surpoids au sein de la société.

Quand votre médecin vous trouve paresseux

La grossophobie étant généralisée dans la société, en éducation, en emploi et dans les lieux publics, le secteur de la santé n'y échappe pas.

Nombreux sont ceux qui véhiculent sans le savoir des biais et jugements implicites au sujet des personnes en surpoids, dont le fait qu'ils sont inactifs. Flickr/Obésité Canada, CC BY-NC-ND

Quand un obèse visite un médecin ou une infirmière qui réagissent avec dégoût ou qui les blâment ou se fâchent à cause de leur surpoids, cela met en péril les soins de santé qu’il recevra.

Or, selon la recherche, il est fréquent que les professionnels de la santé voient les obèses comme des gens paresseux, manquant de discipline et de volonté. Certains préfèrent ne pas passer trop de temps à éduquer ces patients obèses au sujet de leur santé.

Ceci peut nuire à la santé future du patient, parce que ce dernier évitera de se faire soigner, afin de ne pas être embarrassé. La recherche prouve, par exemple, que les femmes affectées par l’obésité sont moins enclines à passer les tests de dépistage recommandés pour certains cancers.

Améliorer les guides de pratiques cliniques

Nous représentons un groupe de chercheurs et de praticiens des quatre coins du Canada. Dans le but d’attirer l’attention sur les torts causés par la grossophobie, nous travaillons avec Obésité Canada afin de réduire les préjugés liés au poids et la stigmatisation liée à l’obésité.

Globalement, nous avons exploré la gestion du surpoids à partir de plusieurs perspectives. Nous avons identifié des tensions dans le cadre des soins de santé, des discours problématiques au sein des politiques de santé publique et fédérales ainsi que le besoin criant d’initiativesvisant à réduire la discrimination contre l'obésité.

Notre travail, comme celui d’autres chercheurs, met l’accent sur la nécessité d'aller au-delà de l'information et de la prise de conscience pour augmenter les aptitudes et les compétences chez les professionnels de la santé et dans d’autres secteurs.

Intitulé « L'importance de tous les corps » ce partenariat que nous venons de former met en lumière les impacts néfastes de la discrimination en raison du poids dans le nouveau guide des pratiques cliniques qui devrait être publié cette année.

De nouvelles lignes directrices sur la pratique clinique expliqueront les répercussions du biais de poids sur le système de soins de santé. (Shutterstock)

C’est la première initiative du genre au monde, visant à intégrer des recommandations au sein d’un système national de santé. Elle servira de modèle dans le reste du monde.

Avez-vous des préjugés contre les gros?

Mais avant tout, il faut se poser une question : a-t-on, nous-mêmes, des préjugés contre les gros?

Une variété de tests et d’outils sont disponibles en ligne pour vous aider à évaluer vos préjugés face aux gros , ainsi que les préjugés en raison de la race, du genre, de l'orientation sexuelle et d'autres enjeux sociaux.

Ces tests mesurent les croyances et les attitudes que les gens peuvent épouser sans même le savoir. Grâce aux tests, ils en apprennent sur ces préjugés et cela leur permet d’y faire face.

En outre, l’un des facteurs les plus importants de cet enjeu est la méconnaissance de l’obésité, un phénomène qui ne se résume pas au simple fait de trop manger ou de ne pas faire assez d’exercice. Il faut savoir que l’environnement social dans lequel nous baignons nous incite à surconsommer et à faire moins d'exercice.

Nous devons améliorer notre compréhension de l’obésité, de façon à ce que les gens qui en sont affectés ne soient pas définis par la forme de leurs corps ou leur poids mais soient considérés comme des êtres humains à part entière, avec leur besoins physiques et affectifs comme tout le monde.

De nouvelles lignes directrices sur la pratique clinique expliqueront les répercussions du biais de poids sur le système de soins de santé. (Shutterstock)

Recentrer l’attention sur la santé et non le poids

Les gens répondent mieux à l’empathie et au soutien qu’à la stigmatisation. C’est pourquoi une série de programmes, de ressources, de webinaires et de vidéos sont destinés à réduire la stigmatisation.

Autre élément-clé, il faut s’atteler à présenter des images plus positives dans les médias, comme celles que l’on retrouve dans la banque d'images fournies par Obésité Canada, ainsi que dans cet article.

Dans sa banque d'images, Obésité Canada tente de renvoyer des images plus positives des gens en surpoids dans les médias. Flickr/Obésité Canada, CC BY-NC-ND

Nous encourageons tous les gens qui le souhaitent à travailler avec nous pour réduire la stigmatisation des gros. Vous pouvez le faire en utilisant l’outil web intitulé « la personne en premier » qui montre comment traiter avec respect les gens qui souffrent d'une maladie chronique, l'obésité, plutôt que de les étiqueter par leur maladie.

Luttons contre la grossophobie partout où elle se trouve. Nous avons tous un rôle à jouer pour nous assurer que les obèses seront traités avec respect que l’attention sera portée sur la santé et non le poids.

Les auteures veulent souligner les contributions de Ximena Ramos Salas à cet article.

This article was originally published in English

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