tag:theconversation.com,2011:/uk/topics/efficacite-energetique-37305/articlesefficacité énergétique – The Conversation2023-12-25T20:24:35Ztag:theconversation.com,2011:article/2160922023-12-25T20:24:35Z2023-12-25T20:24:35ZPourquoi l’efficacité énergétique est un leurre sans sobriété et sans sensibilisation<p>En 2022, la sobriété était <a href="https://www.gouvernement.fr/discours/discours-de-la-premiere-ministre-elisabeth-borne-presentation-du-plan-de-sobriete">érigée en politique nationale</a>, relayée par l’ensemble des institutions et des acteurs privés et publics. Un volontarisme expliqué et incarné par le gouvernement, qui porté ses fruits en matière énergétique pour réduire la consommation électrique.</p>
<p>Si elle a <a href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2022/12/14/une-consommation-electrique-en-baisse-en-france-depuis-le-mois-de-septembre_6154363_4355770.html">atteint ses objectifs</a>, c’est en grande partie dû au renchérissement du prix de l’énergie et aux difficultés des réacteurs nucléaires pour fournir l’ensemble de la demande.</p>
<p><a href="https://www.gouvernement.fr/actualite/planification-ecologique-ce-quil-faut-retenir">Or cette rhétorique n’est plus vraiment à l’ordre du jour</a> et les mesures d’efficacité énergétique et d’investissement (rénovation énergétique, pompe à chaleur et autres formes d’investissement) semblent privilégiées pour cet automne 2023.</p>
<p>Ce qui pose la question de la place que nous voulons accorder à la sobriété. Soit une simple option conjoncturelle adaptée uniquement quand les tensions d’approvisionnement sont trop importantes soit, au contraire, un défi constant à relever sur le long terme.</p>
<h2>Sobriété et restrictions</h2>
<p>Rappelons que le <a href="https://www.ipcc.ch/languages-2/francais/">dernier rapport du Groupe intergouvernemental des experts sur l’évolution du climat</a> (GIEC) définissait la sobriété comme « un ensemble de mesures et de pratiques quotidiennes qui permettent d’éviter la demande d’énergie, de matériaux, de terres et d’eau, tout en assurant le bien-être de tous les êtres humains dans les limites de la planète ».</p>
<p>Cette définition met en lumière les mesures de diminution des ressources et de l’énergie au niveau planétaire. Si tous les acteurs publics et privés sont d’accord sur ces objectifs, sa mise en œuvre bute sur l’interprétation du bien-être au niveau individuel, collectif et national.</p>
<p>Comment concilier en effet la <a href="https://theconversation.com/la-sobriete-au-dela-du-progres-technique-et-des-changements-de-comportement-individuels-185019">rhétorique de la réduction avec le bonheur des individus</a> et comment donner du sens à une notion qui, appliquée, peut être perçue comme une restriction des libertés individuelles ?</p>
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<h2>Les pièges de l’efficacité énergétique</h2>
<p>Soulignons, tout d’abord, que si l’<a href="https://theconversation.com/efficacite-energetique-est-il-vraiment-possible-de-faire-mieux-avec-moins-113796">efficience énergétique</a> ne doit pas être ignorée, elle doit impérativement être combinée avec la sobriété énergétique.</p>
<p>La principale raison est <a href="https://theconversation.com/leffet-rebond-quand-la-surconsommation-annule-les-efforts-de-sobriete-197707">l’existence de l’effet rebond</a> inhérent à tout investissement énergétique. Ce dernier se manifeste dès que les gains de consommation énergétique sont inférieurs aux gains d’efficacité escomptés.</p>
<p>En matière d’efficacité énergétique, si les gains escomptés d’une rénovation sont de 35 % et si la baisse nette de la consommation d’énergie du ménage est de 20 %, on parle d’effet rebond, car la réduction n’est pas celle anticipée.</p>
<p>Deux facteurs peuvent l’expliquer, l’un direct, l’autre indirect.</p>
<h2>Effet rebond direct</h2>
<p>L’effet rebond direct correspond à un manquement des objectifs assignés en matière de réduction énergétique. <a href="https://econpapers.repec.org/article/eeeecolec/v_3a176_3ay_3a2020_3ai_3ac_3as0921800920306698.htm">Un grand « classique »</a> qui s’observe pour tous les ménages et plus particulièrement les plus favorisés, et s’explique de la façon suivante : si l’on ne combine pas politique de sobriété et efficacité énergétique de manière conjointe et concomitante, l’effet rebond est présent. Autrement dit, des ménages dotés d’un mode de chauffage moins consommateur vont parallèlement augmenter la température du domicile, par exemple.</p>
<p>La sobriété n’est pas un instrument conjoncturel mais un structurel qui peut permettre d’éviter, d’une part, l’effet rebond direct et qui donne, d’autre part, du sens aux investissements réalisés.</p>
<p>Il ne suffit pas d’investir pour réussir la transition énergétique : il faut aussi outiller les ménages pour qu’ils comprennent le sens de ce qu’on leur demande.</p>
<h2>Expliquer aux ménages le sens de la démarche</h2>
<p>C’est ce que nous avons mis en œuvre avec une expérimentation pilote dans la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0921800921002901">Principauté de Monaco</a>. Les résultats ont révélé que les ménages qui avaient un objectif de réduction modeste (15 %) et des outils d’apprentissage (« boosts » ou conseils envoyés régulièrement) ont atteint jusqu’à 27 % de réduction de la consommation d’énergie.</p>
<p>Cette expérience révèle que les mesures de sobriété fonctionnent lorsque les objectifs sont précis et qu’il y a un soutien concret pour y parvenir. La sobriété s’apprivoise sur le long terme avec un apprentissage permanent et s’adapte au contexte local.</p>
<p>Ainsi, dans un programme sur la réhabilitation des logements sociaux en Provence Alpes Côte d’Azur, les résultats obtenus en matière de rénovation énergétique furent atteints sans effet rebond pour les ménages ayant suivi un programme d’apprentissage et de sensibilisation sur l’énergie.</p>
<p>Ceux n’en ayant pas bénéficié ont été sujets à l’effet rebond direct, avec un processus de diminution de l’effort une fois les travaux terminés.</p>
<h2>L’effet rebond indirect, report de la consommation</h2>
<p>Mais l’efficacité énergétique se heurte à un autre écueil, l’effet rebond indirect. Il se mesure par un accroissement des dépenses énergétiques dans des domaines connexes : ainsi, les économies réalisées en matière énergétique sont dépensées dans d’autres domaines (transport, loisirs ou autres biens de consommation).</p>
<p>Cet effet, difficile à évaluer, est transverse. On l’observe lorsque les foyers diminuant leur consommation énergétique reportent cette consommation vers d’autres secteurs et compensent de manière indirecte les <a href="https://doi.org/10.1007/s00191-019-00654-7">gains antérieurs obtenus</a>.</p>
<p>La sobriété a une dimension globale et implique des changements structurels et culturels. Ces derniers doivent donc être accompagnés pour éviter d’accroître les inégalités entre les ménages.</p>
<h2>La sobriété pour qui ?</h2>
<p>Les inégalités environnementales reflètent les différences de pouvoir d’achat et de mode de vie. En matière énergétique, la précarité énergétique nous rappelle que la sobriété est aussi une contrainte pour les ménages. 20 % d’entre eux ont souffert du froid lors de l’hiver 2020-2021 : pour ces ménages, cet « inconfort » est lié à deux processus : la <a href="https://www.energie-mediateur.fr/publication/rapport-annuel-2021/">précarité financière (36 %) et une mauvaise isolation thermique (40 %)</a>.</p>
<p>Pour les plus modestes, la sobriété énergétique est donc une <a href="https://theconversation.com/sobriete-et-si-on-sinspirait-de-ceux-et-celles-qui-la-pratiquent-au-quotidien-198428">pratique régulière et permanente</a>, subie, pour boucler les fins de mois. Pour les plus aisés, elle doit s’apprendre et se conjuguer à d’autres efforts d’efficacité énergétique. Cela implique de repérer, pour tous et toutes, les postes de surconsommation et de réduire la consommation ostentatoire.</p>
<p>Nos résultats suggèrent néanmoins que les <a href="https://econpapers.repec.org/article/eeeecolec/v_3a176_3ay_3a2020_3ai_3ac_3as0921800920306698.htm">ménages les plus favorisés</a> sont les plus sujets à l’effet rebond direct. Mais que la sobriété peut être appropriée par les ménages comme l’ont souligné les expériences de terrain <a href="https://econpapers.repec.org/article/eeeenepol/v_3a108_3ay_3a2017_3ai_3ac_3ap_3a593-605.htm">à Biot (06)</a> et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0921800921002901">à Monaco</a>.</p>
<p>Sur le chantier, il faut donc redoubler d’efforts et conjuguer toutes les mesures et les actions dans un même sens afin d’obtenir des actions durables, pérennes et solidaires.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216092/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Nathalie Lazaric a reçu des financements de l’Ademe, Paca.</span></em></p>La sobriété ne doit pas être une simple réponse aux périodes de crise. Pour réussir la transition énergétique, elle doit accompagner la rénovation énergétique – et être bien expliquée.Nathalie Lazaric, Directrice de recherche CNRS Transition Ecologique et Résilience Organisationnelle, Université Côte d’AzurLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2163692023-11-08T20:45:07Z2023-11-08T20:45:07ZPrix de l’énergie en hausse, rénovation qui stagne : comment expliquer ce paradoxe ?<p>Avec une hausse des prix de l’électricité de 26 % et du gaz de 50,6 % entre janvier 2018 et décembre 2022 en France, nous aurions pu nous attendre à une progression significative de la rénovation dans le résidentiel.</p>
<p>En France, ce dernier compte pourtant <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/le-parc-de-logements-par-classe-de-performance-energetique-au-1er-janvier-2022-0">encore 36 % de chaudières au gaz et 26 % au fioul</a>. Seuls 5 % des résidences principales sont classées en étiquette A ou B en 2022, et le <a href="https://theconversation.com/le-diagnostic-de-performance-energetique-dpe-utile-mais-pas-miraculeux-pour-inciter-a-la-renovation-du-parc-locatif-prive-215906">nombre de logements mal isolés demeure considérable</a> (39 % des logements en étiquettes E, F et G).</p>
<p>Au cours de l’hiver 2021-2022, « 22 % des Français ont déclaré avoir <a href="https://theconversation.com/confinements-et-hausse-des-factures-denergie-le-risque-de-lautorestriction-151488">souffert</a> du froid pendant au moins 24h et 11,9 % des Français les plus modestes ont dépensé plus de 8 % de leurs revenus <a href="https://onpe.org/chiffres_cles/les_chiffres_cles_de_la_precarite_energetique_edition_mars_2023">pour payer les factures énergétiques de leur logement en 2021</a> ».</p>
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<p>Le secteur résidentiel reste ainsi un gisement important d’économie d’énergie, en particulier en matière de <a href="https://theconversation.com/renovation-energetique-en-france-des-obstacles-a-tous-les-etages-147978">rénovations</a> en efficacité énergétique. Et pourtant, les ménages semblent faire abstraction d’opportunités d’investissement apparemment rentables : c’est ce que l’on appelle <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/0928765594900019;https://journals.openedition.org/rei/5985;https://www.cairn.info/revue-economique-2018-2-page-335.htm">« le paradoxe énergétique »</a>.</p>
<p>Comment l’expliquer, alors que le prix de l’énergie devrait au contraire, à première vue, donner un coup de pouce à la rénovation ?</p>
<h2>Prix de l’énergie, un incitateur ?</h2>
<p>En réalité, la demande d’énergie est peu sensible au prix à court terme : pour une hausse de 100 % des prix de l’énergie en moyenne, les ménages les plus pauvres réduisent leur consommation de chauffage <a href="https://theconversation.com/chauffage-les-plus-aises-sont-aussi-ceux-qui-realisent-le-moins-deconomies-denergie-190582">entre 6 % et 11 % en fonction de leur revenu</a>.</p>
<p>Il est en effet plus facile de réduire sa consommation tant qu’une marge de manœuvre est possible et qu’il existe des solutions substituables sur le marché : pour le chauffage, par exemple, l’électricité peut se substituer au gaz dans de nombreux cas. A contrario, il n’existe pas de substitut à l’électricité pour l’éclairage ou les appareils électroménagers.</p>
<p>La réaction en revanche s’observera avec plus de force à long terme : la chute de la demande est alors bien plus importante que l’augmentation du prix. C’est le concept d’élasticité-prix de la demande : à la suite d’un choc sur les prix, les ménages n’ont pas le temps, ni d’ajuster instantanément leur comportement ni de changer leurs équipements. En revanche, ces chocs de prix influenceront leur processus de décision et de consommation à long terme. Ainsi, quand bien même on n’observe pas d’effet à court terme de la hausse des prix de l’énergie, les effets pourraient se faire sentir dans un horizon plus lointain.</p>
<h2>Un paradoxe analysé par les économistes</h2>
<p>La question du prix de l’énergie, si elle est cruciale, n’est pas le seul argument à peser dans la décision, pour les ménages, de changer ou non leurs équipements.</p>
<p>Rappelons également que pour bénéficier de la plupart des aides de l’État, les ménages doivent faire appel à un professionnel du bâtiment agréé. Dans certaines régions, la tension sur l’offre est importante et il s’avère parfois difficile de trouver un professionnel compétent rapidement disponible…</p>
<p>Pour tenter d’expliquer néanmoins ce paradoxe de la diffusion très progressive d’équipements énergétiques apparemment rentables, de nombreux économistes ont analysé la nature et l’occurrence des barrières à l’investissement. Ces dernières sont nombreuses.</p>
<h2>De multiples freins à l’adoption</h2>
<p>Parmi elles, le statut d’occupation joue un rôle : rappelons qu’en France le pourcentage de locataires <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/cache/digpub/housing/bloc-1a.html">s’établit à 35,3 % en 2021</a>. Citons également les <a href="https://www.cairn.info/revue-reflets-et-perspectives-de-la-vie-economique-2007-4-page-49.htm?ref=doi">difficultés d’accès au crédit</a>, ou bien l’hétérogénéité de revenus, de préférence et de sensibilité environnementale qui existent entre les individus.</p>
<p>Les dépenses d’investissement dans des nouvelles technologies sont en outre affectées par la combinaison entre différentes sortes d’incertitudes (incertitude sur les gains énergétiques, sur les prix de l’énergie, sur les politiques publiques ou encore sur les prix des futurs produits et des coûts d’installation) et de leur irréversibilité (car les coûts sont irrécouvrables). Ce qui pousse les ménages à retarder autant que possible les investissements, en attendant d’obtenir de nouvelles informations.</p>
<p>D’autres freins à l’adoption interviennent, tels que les coûts associés à la recherche d’information sur les technologies ou encore ceux engendrés par la gêne occasionnée durant les travaux. Tous ces éléments, non pris en compte dans la plupart des analyses coûts-bénéfices, rendent des investissements profitables à première vue, moins rentables que ce qu’ils semblent être en réalité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216369/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dorothée Charlier est membre de SOLAR ACADEMY, FAERE et FAEE.
</span></em></p>Malgré des prix qui bondissent, la rénovation énergétique reste lente en France. D’abord car les effets de la hausse ne sont pas immédiats, mais aussi car d’autres freins interviennent.Dorothée Charlier, Maîtresse de conférences en économie de l’énergie et de l’environnement, IAE Savoie Mont BlancLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2046252023-05-25T09:59:17Z2023-05-25T09:59:17ZInformatique frugale : à quand un numérique compatible avec les limites planétaires ?<p>Le <a href="https://www.ipcc.ch/reports/">réchauffement climatique</a> ainsi que l’<a href="https://multimedia.ademe.fr/infographies/infographie-terres-rares-ademe/">épuisement progressif des ressources fossiles et minérales</a> sont aujourd’hui des réalités incontestables. Ces phénomènes présagent une modification durable de nos modes de vie, particulièrement sur le plan économique. </p>
<p>Dans ce contexte de « transition écologique », la place du numérique est à débattre. En effet, si les émissions associées au numérique peuvent aujourd’hui paraître faibles, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2666389921001884">entre 2 % et 4 % des émissions globales de gaz à effet de serre</a>, elles suivent une croissance ininterrompue intenable sur le long terme.</p>
<p>Deux modèles de pensée <a href="https://link.springer.com/book/10.1007/978-94-010-0033-8">alimentent la recherche en informatique depuis plusieurs années</a>. Le premier, bien résumé dans les termes <a href="https://dl.acm.org/doi/10.5555/1809764">« Green-by-IT »</a>, considère que le numérique peut nous aider à découpler la croissance économique de son impact environnemental. C’est l’idée qui sous-tend les politiques de transition numérique. Le second, qu’on nomme souvent <a href="https://hal.science/hal-03009741/">« Green-IT »</a>, stipule que l’<a href="https://principles.green/">on peut réduire l’impact environnemental du numérique lui-même</a>. Mais ces approches sont insuffisantes face à l’ampleur des enjeux, car elles font l’impasse sur les impacts « sociétaux » du numérique.</p>
<p>En effet, les technologies numériques rendent possible, organisent, et gouvernent des pans entiers de nos modes de vie, tout en générant des effets non prémédités considérables, depuis le monde du travail – avec l’apparition de <a href="https://theconversation.com/enquete-derriere-lia-les-travailleurs-precaires-des-pays-du-sud-201503">travailleurs de l’ombre</a>, humains de chair et d’os qui valident tous les contenus sur les plates-formes vidéos – jusqu’à la culture, avec les plates-formes de streaming qui changent complètement le <a href="https://theconversation.com/leconomie-du-streaming-pourquoi-sabonner-a-deezer-apple-ou-spotify-83409">modèle économique</a> de l’industrie musicale ou cinématographique ; mais aussi la santé, avec les données et dossiers médicaux partagés et toutes les questions associées de préservation de la vie privée. </p>
<p>C’est désormais tout un imaginaire du numérique qui s’impose à nous, le faisant passer auprès du grand public comme <a href="https://www.insa-lyon.fr/fr/actualites/il-faut-developper-approche-critique-numerique-dans-formation-eleves-ingenieurs">immatériel, immédiat, neutre et absolument nécessaire</a>. </p>
<p>Prendre en compte les impacts sociétaux et environnementaux du numérique doit nous permettre de sortir de cet imaginaire articulé à la société de consommation, de questionner ses usages et, au final, de définir une informatique réellement frugale, qui nous permette de répondre aux attentes de la société, tout en restant en deçà des limites planétaires et au-delà des <a href="https://www.kateraworth.com/">« planchers sociaux »</a> dont on souhaiterait voir bénéficier l’intégralité de la population mondiale. </p>
<h2>Les angles morts de ce numérique qui « dématérialise »</h2>
<p>Le <a href="https://dl.acm.org/doi/10.5555/1809764">« Green-by-IT »</a> désigne l’idée selon laquelle l’informatique contribue à la transition écologique, en optimisant les systèmes socio-techniques existants. Par exemple, de nombreuses organisations « dématérialisent » leurs procédures et documents, ce qui a pour vertu supposée, parmi d’autres, de réduire la consommation de papier. </p>
<p>Cette vision possède plusieurs angles morts. Le plus important concerne selon nous les <a href="https://interstices.info/le-vrai-cout-energetique-du-numerique/">pollutions générées par le numérique</a> en phase de fabrication, d’utilisation ou de recyclage, qui sont encore largement méconnues et sous-estimées du grand public. Le numérique revêt un caractère « propre » fantasmé, jusque dans le vocabulaire courant utilisé pour le décrire : par exemple, le terme « nuage » laisse imaginer quelque chose de relativement inoffensif, bien loin de la <a href="https://theconversation.com/la-realite-physique-du-monde-numerique-158884">matérialité de sa réalisation physique</a>.</p>
<h2>Un numérique plus « vert » ?</h2>
<p>Le <a href="https://hal.science/hal-03009741/">« Green-IT »</a> s’intéresse lui aux impacts environnementaux des systèmes informatiques et développe des optimisations visant une forme d’efficacité écologique, ou du moins énergétique. </p>
<p>Ses méthodes prennent en compte les différentes phases du cycle de vie des objets numériques : fabrication ou construction, phase d’usage et fin de vie, qu’il s’agisse de leur éventuel recyclage ou de leur réutilisation. </p>
<p>Ce souci de faire mieux pour telle application ou telle brique informatique est bien sûr important. Néanmoins, ces activités sous-estiment souvent l’effet « rebond » qu’elles entraînent. Cet effet, aujourd’hui bien compris en économie et en sciences sociales, permet de décrire comment une augmentation de l’efficacité énergétique d’un système peut très souvent <a href="https://theconversation.com/leffet-rebond-quand-la-surconsommation-annule-les-efforts-de-sobriete-197707">entraîner une augmentation de la consommation globale d’énergie</a> ; que ce soit celle du système initial (effet rebond direct) ou même celle d’un <a href="https://gauthierroussilhe.com/articles/comprendre-et-estimer-les-effets-indirects-de-la-numerisation#les-effets-rebond">secteur socio-économique plus vaste (effet rebond indirect)</a>.</p>
<h2>Comment les technologies numériques s’imposent à la société</h2>
<p>En se concentrant sur des secteurs ou des technologies spécifiques, les approches « Green-IT » et « Green-by-IT » ignorent comment le numérique bouleverse la société à plus grande échelle. </p>
<p>Ces enjeux sociétaux sont révélés par de nombreuses <a href="https://www.istegroup.com/fr/produit/dictionnaire-du-numerique-2/">études</a> en <a href="https://www.pressesdesciencespo.fr/fr/book/?gcoi=27246100540390">sciences humaines et sociales</a>, qui mettent en lumière les rapports de force qu’implique le numérique. </p>
<p>À titre d’exemple, on pensera au déploiement de la 5G qui a suscité de larges débats récemment sur ses <a href="https://hal.science/hal-03810501">impacts environnementaux</a>, alimentés par des préoccupations citoyennes <a href="https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2021/03/Note-danalyse_Numerique-et-5G_30-mars-2021.pdf">aussi bien que par des questions économiques</a> du côté des opérateurs. </p>
<p>Entre besoins réels ou fantasmés du côté des usagers et nécessité économique du côté des fournisseurs de technologies numériques, comment émergent les objets technologiques ? </p>
<p>En réfléchissant à cette question, on peut ainsi voir comment le numérique se positionne peu à peu comme intermédiaire incontournable pour réaliser les besoins vitaux des citoyens.</p>
<h2>Quels sont nos besoins réels ?</h2>
<p>L’imposition du numérique à la société ne devrait pas faire l’impasse du questionnement des besoins réels des utilisateurs, besoins qu’il s’agît de mettre en relation avec, d’un côté, les limites planétaires (ressources énergétiques, matériaux) et, de l’autre, les <a href="https://www.kateraworth.com/">planchers sociaux</a> (santé et d’hygiène, par exemple). Il est alors crucial de faire advenir des visions du monde à la fois possibles et désirables.</p>
<p>Il n’est pas question ici d’abandonner intégralement la technologie numérique, mais d’identifier certains domaines d’application pour lesquels nous déciderons, collectivement, de conserver une technicité avancée. À l’opposé, on pourra imaginer « dénumériser » certaines activités humaines lorsque leur impact environnemental sera jugé incompatible avec les limites planétaires et/ou avec certains planchers sociaux. </p>
<p>La définition de ces besoins communs et les <a href="https://theconversation.com/quelles-orientations-numeriques-en-france-un-enjeu-democratique-et-citoyen-170053">grands arbitrages de société qui président au déploiement du numérique</a> nécessitent de comprendre les ordres de grandeur en jeu, si l’on veut éviter l’écueil des « petits gestes » – par exemple le <a href="https://ecoinfo.cnrs.fr/2022/11/09/tordons-le-cou-aux-discussions-sur-limpact-des-e-mails/">tri des e-mails</a> – qui sont dérisoires vis-à-vis de la crise écologique actuelle. </p>
<p>En particulier :</p>
<ul>
<li><p>Avec quelles ressources peut-on développer les objets numériques sans mettre en péril les conditions d’habitabilité de notre planète ? Quel est notre « budget matériel » ? Sur ces questions, les travaux de <a href="https://presse.ademe.fr/2023/03/impact-environnemental-du-numerique-en-2030-et-2050-lademe-et-larcep-publient-une-evaluation-prospective.html">prospective de l’Ademe</a> ou du <a href="https://theshiftproject.org/lean-ict/">Shift Project</a>, entre autres, vont positivement nourrir la réflexion de <a href="https://www.gdr-soc.cnrs.fr/2020/07/28/5570/">nos collègues chercheurs en matériel informatique</a> pour redéfinir le cadre soutenable de la construction des objets numériques. </p></li>
<li><p>Quels sont les usages de la technologie réellement pertinents pour la société en fonction de la conjonction des limites et des besoins ? Quel cadre pouvons-nous collectivement nous fixer dans les domaines éthique, juridique, économique, politique, social et écologique ? Ces questions fondamentales sont nourries par la critique écologique et la critique sociale, portées par des penseurs technocritiques du XX<sup>e</sup> siècle comme Lewis Mumford, Jacques Ellul, Ivan Illich, Bernard Charbonneau et d’aujourd’hui, comme <a href="https://www.lechappee.org/collections/pour-en-finir-avec/la-vie-algorithmique">Eric Sadin</a>, <a href="https://www.lechappee.org/collections/pour-en-finir-avec/la-numerisation-du-monde">Fabrice Flipo</a>, <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/en-attendant-les-robots-antonio-a-casilli/9782021401882">Antonio Casilli</a>, <a href="https://www.lespetitsmatins.fr/collections/essais/politiques-de-la-transition/229-pour-une-ecologie-numerique.html">Éric Vidalenc</a> notamment.</p></li>
<li><p>Est-il possible de concevoir des technologies logicielles permettant ces usages sans dépasser les limites de notre enveloppe globale ? Une partie de la communauté de recherche autour du génie logiciel, dont nous faisons également partie, a <a href="https://gdr-gpl.cnrs.fr/Groupes/Eco-Resp">déjà commencé de prendre cette question en considération</a>.</p></li>
</ul>
<h2>Une nouvelle approche pour la recherche en informatique</h2>
<p>Penser et développer une « informatique frugale » ne consiste pas seulement à redéfinir les méthodes et techniques au cœur de l’informatique, mais nécessite aussi de décider collectivement des usages souhaitables, qui doivent le devenir grâce à ces innovations. Ces usages doivent être identifiés comme indispensables à la vie de la société, tout en restant compatibles avec les limites planétaires et les planchers sociaux.</p>
<p>Cette question doit se poser sur chacun des aspects de la recherche en informatique. </p>
<p>En faisant par exemple l’hypothèse de services numériques indispensables, tels que l’accès à la connaissance ou la communication interpersonnelle, et en se demandant quel est l’impact des techniques de programmation utilisées pour construire le logiciel en question. </p>
<p>Pour le cas particulier des langages de programmation, comment ainsi concevoir un langage « minimal » qui serait à même de permettre de développer ces services ? Au contraire, quels concepts usuellement manipulés par les programmeurs devraient être proscrits des langages de programmation parce qu’ils rendraient les services numériques inéluctablement incompatibles avec les limites planétaires ?</p>
<p>Nous pensons que les chercheuses et chercheurs en informatique devraient oser adopter une posture de recul vis-à-vis de l’écosystème de l’innovation technologique. Ce travail, situé au croisement des disciplines d’informatique et de sciences humaines et sociales, entend favoriser une compréhension systémique des problèmes amenés par la société numérique et tenter modestement d’y répondre par le choix d’une autre voie possible.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/204625/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le numérique peut contribuer à réformer des systèmes polluants ou énergivores, mais il est lui-même grand consommateur de ressources. Peut-on sortir de ce paradoxe ?Lionel Morel, Maître de conférences en informatique, INSA Lyon – Université de LyonGuillaume Salagnac, Enseignant-chercheur (MCF) en informatique, INSA Lyon – Université de LyonLucas Chaloyard, Doctorant en informatique, INSA Lyon – Université de LyonMarie-Pierre Escudié, Enseignante-chercheuse en éthique de l'ingénierie, INSA Lyon – Université de LyonNicolas Stouls, Maître de conférences en informatique, INSA Lyon – Université de LyonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1964432022-12-25T17:01:46Z2022-12-25T17:01:46ZSobriété énergétique : un marché de quotas de l’énergie peut-il apporter des solutions ?<p>Guerre en Ukraine, tensions géopolitiques, réacteurs nucléaires à l’arrêt… De nombreux éléments convergent pour générer de fortes incertitudes quant à l’hiver qui se fait sentir. Aurons-nous <a href="https://www.alternatives-economiques.fr/energie-france-passera-t-lhiver/00104556">assez d’énergie</a> pour satisfaire toutes les demandes ? Un mot se trouve sur toutes les lèvres : « sobriété ».</p>
<p>Début octobre, le gouvernement français a présenté un <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/dp-plan-sobriete.pdf">plan de sobriété énergétique</a> qui se donne pour objectif de réduire la consommation intérieure de 10 % d’ici 2024 afin d’éviter les coupures. La campagne de communication <a href="https://www.youtube.com/watch?v=MWzSCnun9Tg">« je baisse, j’éteins, je décale »</a> a été lancée dans la foulée.</p>
<p>Il n’y aura, certes, pas de <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2022/10/05/se-chauffer-a-19-degres-d-ou-vient-la-recommandation-gouvernementale-pour-faire-face-a-la-crise-energetique_6144437_3244.html">« police des températures »</a>, martèle le gouvernement, pour vérifier que chacun, ménages comme entreprises, joue le jeu. Toutefois, si coupure il doit y avoir, qui pénaliser en priorité ? L’enjeu de l’information est primordial sur ces questions : comment savoir qui fournit les efforts ?</p>
<p>Face à ces enjeux, Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’industrie, proposait le 29 août dernier la mise en place d’un <a href="https://www.lefigaro.fr/conjoncture/economies-d-energie-la-france-reflechit-a-un-marche-de-l-energie-de-gre-a-gre-pour-les-entreprises-20220829">marché de quotas</a> de l’énergie de gré à gré. Cet instrument est bien connu des économistes depuis les contributions des professeurs <a href="https://www.cairn.info/revue-cahiers-d-economie-politique-2021-1-page-61.htm">Thomas Crocker et John Dales</a> dans les années 1960 pour lutter contre la pollution. L’idée a, semble-t-il, depuis été écartée, mais la discussion ne semble pas dénuée d’intérêt. Nos <a href="https://cv.hal.science/sonia-schwartz">travaux de recherche</a> en économie de l’environnement permettent d’en interroger la pertinence en termes de justice sociale et d’efficacité.</p>
<h2>Justice sociale ou efficacité ?</h2>
<p>Au premier abord, la demande de réduction de la consommation d’énergie de 10 % aux entreprises peut paraître légitime. On peut imaginer que les coupures à venir concerneront en priorité les entreprises non respectueuses de l’objectif, ce qui reviendrait à punir les mauvais élèves. Toutefois, ce raisonnement semble un peu trop rapide. Il ne prend notamment pas en compte l’hétérogénéité entre les entreprises.</p>
<p>Nombreuses sont en effet celles qui ont déjà, par le passé, réduit leur consommation d’énergie et même obtenu des performances environnementales au-delà des mesures indiquées par l’État. L’objectif de 10 % de réduction sera ainsi plus facilement atteint par les entreprises qui n’ont jusqu’alors réalisé aucun effort de sobriété énergétique et plus difficilement pour celles qui sont déjà les plus vertueuses. En résumé, cette politique, qui consiste à considérer de façon uniforme des entreprises différentes, peut être considérée comme injuste, et assez coûteuse à respecter.</p>
<p>De même, de nombreux fournisseurs d’énergie ont déjà annoncé la mise en place de <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/energie/plan-de-sobriete/crise-energetique-des-bonus-sobriete-pour-les-consommateurs-economes_5525535.html">« bonus sobriété »</a>, récompensant les réductions de consommation d’énergie cet hiver ou le report de consommation des périodes de pics vers les périodes creuses. Le gouvernement français réfléchit aussi à financer de tels bonus, finançant ainsi l’incitation à la réduction d’énergie collectivement via le budget de l’État. Si ces moyens peuvent s’avérer efficaces à éviter les coupures, ils récompenseront certainement les agents qui, jusqu’à présent, étaient les plus énergivores.</p>
<p>Une façon de considérer la justice sociale serait de prendre en compte le comportement passé des agents pour différencier les objectifs. Il s’agirait de fixer un objectif réduit ou d’exonérer celui qui a déjà réalisé des efforts. Cette solution peut toutefois se heurter à l’impératif d’efficacité économique, qui impose de demander davantage d’efforts à ceux qui ont le plus de facilité à réaliser des économies d’énergie.</p>
<p>Quel que soit l’objectif retenu – efficacité ou justice sociale – le régulateur va se heurter à un problème d’information. Comment distinguer les entreprises vertueuses des autres ? Comment identifier les entreprises qui peuvent réaliser des efforts à faibles coûts ?</p>
<h2>Justice sociale et efficacité : un marché de quotas de l’énergie</h2>
<p>C’est à solutionner cette problématique que la proposition du ministre Roland Lescure aurait pu participer. L’idée de quotas de l’énergie transférables permettrait effectivement de prendre en compte l’hétérogénéité des entreprises, en évitant l’épineuse question du recueil d’information.</p>
<p>Expliquons le mécanisme. L’État fixe l’objectif d’économie d’énergie à 10 %, ce qui revient à indiquer une quantité d’énergie maximale à consommer collectivement. Il fractionne ensuite ce plafond sous forme de quotas de l’énergie. Chaque entreprise a l’obligation légale de détenir un quota pour justifier une consommation d’énergie équivalente.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1564142709077573633"}"></div></p>
<p>Ces quotas sont transférables. Certaines entreprises pourraient trouver plus avantageux de réduire davantage que demandé leur consommation énergétique et de vendre leurs quotas à des entreprises éprouvant des difficultés à atteindre l’objectif de réduction. Les économies d’énergie seraient obtenues au coût collectif le plus faible possible, atteignant le fameux critère d’efficacité. Cet instrument de régulation offre donc une plus grande flexibilité aux entreprises tout en respectant l’objectif affiché par l’État.</p>
<p>Une certaine forme de justice sociale pourrait être atteinte en travaillant sur la distribution des quotas. Nos <a href="https://www.cairn.info/revue-d-economie-politique-2009-4-page-535.htm">travaux</a> sur ce sujet aboutissent à cette proposition : afin de récompenser les entreprises les plus vertueuses, les quotas pourraient être répartis de façon inversement proportionnelle aux dépenses d’énergie passées.</p>
<h2>Marché organisé versus marché de gré à gré</h2>
<p>Reste la question du prix des quotas, variable décisive pour l’efficacité du mécanisme car c’est sur celle-ci que reposeront les décisions des entreprises. Deux types de marchés sont envisageables. Dans un marché organisé, les quotas sont distribués par l’État et une bourse d’échange permet d’organiser les transactions tout en faisant apparaître un prix en continu. Cela est différent dans un marché de gré à gré.</p>
<p>Si l’on suit la suggestion du ministre, chaque entreprise devrait réduire de 10 % sa consommation d’énergie et une entreprise ne pouvant atteindre cet objectif aurait la possibilité d’acheter des quotas à une entreprise ayant davantage réduit sa consommation par rapport aux 10 % demandés. La difficulté de la rencontre des potentiels partenaires à l’échange limite, de fait, le nombre de transactions. Tous les échanges mutuellement profitables ne pourront être réalisés.</p>
<p>Comme les entreprises devront s’entendre sur un prix, il est peu probable que ce marché fasse émerger le « juste prix » du quota, surtout si des entreprises ont un poids plus important que d’autres au moment de négocier. D’après nos <a href="https://www.persee.fr/doc/rfeco_0769-0479_2006_num_20_3_1581">recherches</a> étudiant la position dominante sur les marchés de quotas de pollution, le coût collectif du respect de la contrainte d’économie d’énergie est plus élevé que sur un marché organisé.</p>
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<p>Par ailleurs, dans ce système, la dotation initiale des quotas est « implicite » et correspondrait à une réduction de 10 % de la consommation d’énergie. Elle ne peut donc plus être utilisée afin d’atteindre un objectif de justice sociale.</p>
<p>Voilà pourquoi la plupart des marchés environnementaux de type plafonnement et échange de quotas sont des marchés organisés. À titre d’exemple, on peut citer le programme américain <a href="https://scholar.harvard.edu/files/stavins/files/schmalensee_stavins_jep_2013.pdf">Acid Rain</a>, ou encore le marché européen du carbone. Des expériences d’échange de gré à gré ont eu lieu, dans les années 70 aux États-Unis dans le cadre de la lutte contre la pollution atmosphérique, avec un <a href="http://www.cepii.fr/IE/PDF/EI_82-2393_03_Godard.pdf">succès mitigé</a>. La lourdeur bureaucratique et l’incertitude sur les modalités des transactions ont considérablement affaibli l’intérêt de ce type de marché.</p>
<h2>Et à l’avenir ?</h2>
<p>Qu’en retenir ? Le recours à un marché de quotas organisé peut effectivement s’avérer intéressant pour faire face à la crise énergétique en réalisant les économies d’énergie là où elles sont les moins coûteuses. Une certaine forme de justice sociale peut aussi être atteinte par le biais de la dotation initiale. Toutefois, le problème de la concordance de l’agenda politique avec l’urgence à résoudre cette crise énergétique se pose. Il est peu probable qu’un marché de quotas organisé puisse être opérationnel dans les semaines qui viennent.</p>
<p>Si un marché de gré à gré a une efficacité moindre qu’un marché organisé, il pourrait néanmoins apporter de la flexibilité aux entreprises par rapport à une réglementation uniforme, et permettre d’éviter, à court terme, des coupures d’énergie. La justice sociale serait une dimension toutefois laissée de côté.</p>
<p>Quelle que soit la politique retenue – objectif uniforme, marché de quotas organisé ou non, bonus sobriété –, il faut garder à l’esprit les conséquences de ces différentes mesures de court terme sur les comportements futurs. L’anticipation de prochaines régulations pourrait freiner aujourd’hui les comportements vertueux des agents, de peur d’être pénalisés à l’avenir pour des efforts passés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196443/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sonia Schwartz ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le marché de quotas de l’énergie pourrait permettre plus de justice sociale qu’une réduction uniforme de 10 % pour toutes les entreprises.Sonia Schwartz, Professeur des universités en sciences économiques, Université Clermont Auvergne (UCA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1954612022-11-29T18:56:59Z2022-11-29T18:56:59ZSobriété énergétique, écoresponsabilité numérique… de quoi parle-t-on exactement ?<p>Le 14 novembre 2022, le gouvernement, en la personne du ministre Jean-Noël Barrot, a inauguré un <a href="https://www.banquedesterritoires.fr/le-numerique-ecoresponsable-son-haut-comite">Haut Comité pour un numérique écoresponsable</a>.</p>
<p>Ce dispositif vient en compléter globalement trois autres : la feuille de route « Numérique et environnement », la loi du 15 novembre visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique <a href="https://www.vie-publique.fr/loi/278056-loi-15-novembre2021-reen-reduire-empreinte-environnementale-du-numerique">(dite REEN)</a>, et la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/loi-anti-gaspillage-economie-circulaire">(dite AGEC)</a>.</p>
<p>L’ensemble s’inscrit à son tour dans un cadre européen structuré principalement autour des directives suivantes : RoHS (substances toxiques), Ecodesign (écoconception) et DEEE (déchets électroniques).</p>
<p>Un peu plus d’un mois avant, le 6 octobre, Élisabeth Borne mettait en place un <a href="https://www.vie-publique.fr/en-bref/286641-plan-de-sobriete-energetique-sortir-des-energies-fossiles">plan de sobriété énergétique</a>. Les principales mesures sont de court terme et visent la température dans les bâtiments, particuliers (ou non) ; l’utilisation de transports en commun (ou non) motorisés ; ainsi que l’éclairage.</p>
<h2>Au-delà des pénuries de gaz</h2>
<p>Ces dispositifs sont conçus pour devenir le volet « numérique » de la transition écologique, et pas seulement pour répondre de manière conjoncturelle aux enjeux dérivant de la guerre en Ukraine et ses implications sur l’approvisionnement en gaz cet hiver.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/linquietante-trajectoire-de-la-consommation-energetique-du-numerique-132532">L’inquiétante trajectoire de la consommation énergétique du numérique</a>
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<p>Pour le gouvernement, cette transition s’incarne dans les deux missions : la prévention des risques d’un côté, l’énergie et le climat de l’autre.</p>
<p>La première mission vise principalement la gestion des installations classées à la protection de l’environnement (ICPE), à savoir les usines présentant un risque de pollution important en cas d’accident. La seconde est cadrée par la <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/strategie-nationale-bas-carbone-snbc">stratégie nationale bas carbone (SNBC)</a> qui ambitionne d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.</p>
<p>Pour atteindre ces objectifs, divers moyens sont mis en avant : la décarbonation totale de la production d’énergie ; la réduction de la consommation totale d’énergie d’environ 40 % ; la diminution des émissions non liées à l’énergie (donc principalement celles issues de l’agriculture) et l’augmentation des « puits de carbone ». Cet ensemble s’inscrit dans les directives européennes rassemblées dans le <a href="https://ec.europa.eu/info/strategy/priorities-2019-2024/european-green-deal_fr">« Pacte vert »</a>.</p>
<h2>Écoconception, déconsommation d’énergie et responsabilité</h2>
<p>De quoi est-il question sur le fond ?</p>
<p>Suivant l’argumentaire proposé par le gouvernement français, le constat est fait que la fabrication représente <a href="https://www.arcep.fr/la-regulation/grands-dossiers-thematiques-transverses/lempreinte-environnementale-du-numerique.html">70 % de l’empreinte carbone du numérique</a>, le reste étant absorbé par « les usages » du matériel, à savoir les « services numériques ».</p>
<p>La loi REEN répond donc en favorisant l’allongement de la durée de vie des terminaux, les usages écologiquement vertueux et notamment l’écoconception des services numériques ; en réduisant la consommation d’énergie des centres et de données et exigeant des collectivités territoriales de mettre en place une « stratégie numérique responsable ».</p>
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<p>Le Haut Comité a commencé ses travaux en formant cinq groupes de travail, portant sur les terminaux, les centres de données, la sobriété et les usages, la contribution du numérique à la décarbonation des autres secteurs et les réseaux. Le tout entend compléter la SNBC sur le volet « numérique ».</p>
<h2>La sobriété, vertu cardinale</h2>
<p>Faut-il pour autant parler de « sobriété » ? Rien n’est moins sûr. Rappelons que ce concept dérive de ce qu’Aristote appelle la <em>sophrosunè</em>, traduit en latin par <em>sobrietas</em> et en français par « prudence », « tempérance » ou « juste mesure ».</p>
<p>Dans l’<em>Éthique à Nicomaque</em>, Aristote donne quelques exemples tirés de son époque : excès ou défaut de sport (le soldat qui meurt en revenant de Marathon car il a trop couru), de nourriture et autres. La modération règle le comportement ; en son absence ne règne que le dérèglement.</p>
<p>En ce sens elle est la vertu des vertus. Dans <a href="https://editions.flammarion.com/les-politiques/9782081358775"><em>Les Politiques</em></a> (Livre IV, chapitre XIII), le philosophe grec met en rapport les vertus avec les régimes politiques ; et la vertu du gouvernant, c’est la prudence ou tempérance. Le philosophe Thomas Princen réactualise cette analyse en <a href="https://mitpress.mit.edu/9780262661904/the-logic-of-sufficiency/">étendant le concept de sobriété (<em>sufficiency</em>) à des enjeux contemporains</a> : un excès de prélèvement sur les écosystèmes les dégrade, un défaut nous prive de leurs bénéfices ; un excès de voitures ralentit, un défaut également.</p>
<h2>Sobriété et efficacité, à ne pas confondre</h2>
<p>Remarquons dans ces différents exemples que c’est bien le rapport des usages au « Tout de la cité » ou, dans une analyse réactualisée, de l’écosystème, qui est central. Ce qui fait la sobriété, c’est la qualité du rapport à soi, certes, mais également en ce qu’il engage le rapport à autrui, notamment sous la forme de la loi, et plus largement au monde que nous habitons.</p>
<p>Est-ce bien le cas dans les textes de loi évoqués ?</p>
<p>Dans le cas du numérique, trois repères balisent le débat, comme en témoigne la <a href="https://cnnumerique.fr/files/uploads/2020/CNNum%20-%20Feuille%20de%20route%20environnement%20%26%20numerique.pdf">feuille de route</a> du Conseil national du numérique sur l’environnement et le numérique : le « Green IT », le « IT for green » et la sobriété.</p>
<p>Le premier thème recouvre celui de « l’efficacité » : à usages donnés, choisir les techniques qui permettent de réduire l’empreinte écologique du numérique. Par exemple, différentes techniques sont possibles pour échanger en visio : logiciels, machines, infrastructures. L’empreinte écologique sera plus ou moins élevée, pour le même service rendu.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/317610/original/file-20200227-24685-9uxxeo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C0%2C7392%2C4230&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/317610/original/file-20200227-24685-9uxxeo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/317610/original/file-20200227-24685-9uxxeo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/317610/original/file-20200227-24685-9uxxeo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/317610/original/file-20200227-24685-9uxxeo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/317610/original/file-20200227-24685-9uxxeo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/317610/original/file-20200227-24685-9uxxeo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les émissions de gaz à effet de serre générées par le numérique sont pour 25 % dues aux data centers, 28 % dues aux infrastructures réseau et 47 % dues aux équipements des consommateurs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/telecommunication-network-above-europe-viewed-space-1482756353">Shutterstock</a></span>
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</figure>
<p>Rendre le numérique plus « efficace » écologiquement, c’est ainsi choisir les solutions les moins consommatrices. Le second thème aborde l’intérêt du numérique pour réduire l’empreinte écologique des autres secteurs, là aussi pour un usage donné. Par exemple, se réunir en visio est moins consommateur que prendre l’avion, si les participants sont distants de plusieurs milliers de kilomètres.</p>
<p>La sobriété pose la question de l’usage lui-même (avons-nous réellement besoin de nous réunir ?). Ces distinctions montrent que la sobriété est globalement peu présente dans les textes évoqués.</p>
<h2>Une dépendance au numérique encouragée</h2>
<p>Dans le cas du numérique, les usages ne sont pas problématisés.</p>
<p>Avons-nous besoin de la 5G ? Du renouvellement des terminaux ? Avons-nous besoin des services qui rendent les terminaux nécessaires ?</p>
<p>La construction des usages est absente, par exemple quand nombre de services publics ou privés ne sont plus disponibles que par le biais d’un smartphone suffisamment performant. Ou quand le même gouvernement débloque 30 milliards d’euros pour investir notamment dans le numérique afin de relancer la <a href="https://en-marche.fr/emmanuel-macron/le-programme/numerique">croissance de la production et de la consommation</a>.</p>
<p>Dans le cas de la transition écologique, ce qui domine également est la décarbonation des usages et plus généralement le remplacement des techniques peu efficaces sur le plan écologique ou carbone par d’autres, jugées plus efficaces.</p>
<p>Le prix à payer de ces politiques – qui ne sont pas réellement tournées vers la sobriété, mais plutôt vers une compétitivité « à moindre coût écologique » – est que rien n’empêche que la dépendance des rapports sociaux au numérique s’accroisse, au contraire, puisqu’elle est encouragée !</p>
<p>Les <a href="https://theshiftproject.org/article/deployer-la-sobriete-numerique-rapport-shift/">simulations du Shift Project</a> indiquent que dans ces conditions, l’empreinte écologique du numérique sera, au mieux, stabilisée. De même, vouloir simplement remplacer les énergies fossiles par les renouvelables ou les voitures thermiques par l’électrique se traduira par une demande très importante en métaux et autres matériaux requis pour la construction. L’ONG Réseau Action climat <a href="https://reseauactionclimat.org/les-8-conditions-du-reseau-action-climat-pour-un-plan-de-sobriete-efficace-et-juste/">notait le caractère contradictoire</a> des mesures gouvernementales, en termes de résultat à atteindre.</p>
<p>Stimuler la croissance et, « en même temps », appeler à la sobriété a quelque chose de kafkaïen, qui se résout par une sobriété de second rang, que l’on appelle d’ordinaire <em>l’efficacité</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/195461/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabrice Flipo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le gouvernement vient d’adopter un plan de sobriété énergétique et de créer un Haut Comité pour un numérique coresponsable. Ils invoquent la sobriété, à raison ?Fabrice Flipo, Professeur en philosophie sociale et politique, épistémologie et histoire des sciences et techniques, Institut Mines-Télécom Business School Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1787282022-04-14T18:28:44Z2022-04-14T18:28:44ZUn nouveau programme électronucléaire est-il justifié pour la France ?<p>En octobre 2021, RTE (le gestionnaire du réseau de transport d’électricité) a dévoilé le très attendu rapport <a href="https://www.rte-france.com/analyses-tendances-et-prospectives/bilan-previsionnel-2050-futurs-energetiques">« Futurs énergétiques 2050 »</a> sur l’avenir du système électrique français.</p>
<p>Le rapport fournit de précieux éclairages sur de nombreux sujets techniques et les tendances futures, notamment à propos du coût des technologies émergentes, du potentiel d’électrification des différents secteurs, de la stabilité du réseau et des besoins de réserve dans un système électrique hautement renouvelable ; des gains d’efficacité possibles par l’électrification et des gains que la sobriété peut apporter à la transition énergétique.</p>
<p>Il conclut qu’un développement important des énergies éolienne et solaire est indispensable.</p>
<p>Selon les scénarios, en 2060, la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité ira de 50 % à 100 %, le reste étant assuré par le nucléaire. Tous ces scénarios atteignent la neutralité carbone et le même niveau de fiabilité dans la fourniture d’électricité.</p>
<h2>À l’horizon 2050, le renouvelable, pas plus cher</h2>
<p>Cette étude confirme, après celle de <a href="https://librairie.ademe.fr/energies-renouvelables-reseaux-et-stockage/1173-trajectoires-d-evolution-du-mix-electrique-a-horizon-2020-2060-9791029711732.html">l’Ademe</a> et celle <a href="https://doi.org/10.1016/j.eneco.2020.105004">que nous avons publiée en mars 2021</a>, que le coût d’un système électrique 100 % renouvelable à l’horizon 2050-2060 est proche de celui d’un système avec de nouvelles centrales nucléaires.</p>
<p>Elle réfute donc les affirmations largement diffusées (mais non basées sur des travaux scientifiques) selon lesquelles le premier coûterait <a href="https://jancovici.com/transition-energetique/renouvelables/100-renouvelable-pour-pas-plus-cher-fastoche/">plusieurs fois plus cher</a> que le second.</p>
<p>Cependant, ce rapport aboutit, sous ses hypothèses centrales, à un écart de coût en faveur des scénarios comprenant la construction de nouveaux réacteurs, de l’ordre de 15 % entre le scénario N2 (avec 23 GW de nouveau nucléaire, soit 14 centrales de type EPR, en 2050) et le scénario M23 (sans nouveau nucléaire). Certains observateurs en tirent la conclusion – non endossée par les auteurs de l’étude – que ce rapport fournit une justification économique pour lancer un programme de construction de centrales EPR en France.</p>
<p>Nous pensons, à l’inverse, qu’étant donné les incertitudes, le critère économique n’est pas discriminant entre les scénarios. Autrement dit, les estimations que l’on peut faire aujourd’hui du coût global du système électrique à l’horizon 2060 ne permettent pas de décider s’il est justifié ou non de lancer un nouveau programme nucléaire en France. En effet, plusieurs hypothèses, qui participent à l’obtention de l’écart de coût susmentionné, méritent d’être remises en cause.</p>
<h2>Pour l’éolien terrestre, un facteur de charge très bas</h2>
<p>Le facteur de charge désigne le ratio entre ce que l’éolien produit sur une période donnée et sa production s’il fonctionnait à 100 % de sa capacité.</p>
<p>Dans le rapport de RTE, ce ratio est de 23 % pour l’éolien terrestre, chiffre beaucoup plus faible que ceux (30 à 32 %) obtenus dans d’autres prospectives comme celles de l’Ademe, de <a href="https://negawatt.org/Scenario-negaWatt-2022">négaWatt</a> ou <a href="https://doi.org/10.1016/j.eneco.2020.105004">dans nos travaux</a>.</p>
<p>Or, pour une prospective à 2050-2060, il serait trompeur de se baser sur les facteurs de charge du parc actuel (22 à 26 % selon les années). Les machines qu’on installe aujourd’hui balayent une plus grande surface par unité de puissance, ce qui leur permet de mieux capter les vents modérés.</p>
<p>Cette « révolution éolienne silencieuse », pour reprendre l’expression de Bernard Chabot, un des pionniers du développement de l’éolien en France, apparaît clairement dans les données d’<a href="https://www.irena.org/publications/2021/Jun/Renewable-Power-Costs-in-2020">Irena</a> (l’Agence internationale des énergies renouvelables) qui présente les facteurs de charge selon l’année d’installation de l’éolienne (voir le graphique ci-dessous).</p>
<p>Dans tous les pays étudiés, ce facteur a augmenté rapidement au cours des dernières années. En France, pour les éoliennes installées au cours des trois dernières années, il est en moyenne de 32 % pour une année météorologique standard (voir le graphique ci-dessous).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/457465/original/file-20220411-18-d7x9n2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/457465/original/file-20220411-18-d7x9n2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/457465/original/file-20220411-18-d7x9n2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/457465/original/file-20220411-18-d7x9n2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/457465/original/file-20220411-18-d7x9n2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/457465/original/file-20220411-18-d7x9n2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/457465/original/file-20220411-18-d7x9n2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/457465/original/file-20220411-18-d7x9n2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=473&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Certes, cette estimation pessimiste du facteur de charge dans le rapport RTE est dans une certaine mesure compensée par une hypothèse de coût unitaire moindre que dans d’autres études, comme celle de l’Ademe ou nos travaux.</p>
<p>Cependant, pour une capacité installée donnée, elle réduit la production de l’éolien terrestre et augmente les capacités nécessaires dans d’autres technologies plus coûteuses et les <a href="https://doi.org/10.1016/j.eneco.2016.02.016">besoins de flexibilité</a>, renchérissant les scénarios 100 % renouvelables.</p>
<h2>Le coût du nucléaire sous-estimé</h2>
<p>Concernant le coût du nouveau nucléaire, RTE reprend les conclusions d’audits réalisés par l’État à partir d’éléments fournis par EDF. À l’horizon 2050, ce coût atteindrait 4,7 euros par watt, soit une baisse de 40 % par rapport à celui estimé pour les EPR de Flamanville et d’Hinkley Point (<a href="https://alaingrandjean.fr/2022/01/10/lecons-tirees-travaux-recents-de-prospective-energetique/">7,8 à 8,1 €/W</a>).</p>
<p>Or, premièrement, les générations précédentes de centrales n’ont pas montré une baisse aussi élevée entre les têtes de série industrielles et les centrales suivantes : parfois ces dernières se sont avérées plus coûteuses, parfois légèrement moins, que ce soit <a href="https://doi.org/10.1016/j.joule.2020.10.001">aux États-Unis</a> ou en <a href="http://dx.doi.org/10.5547/2160-5890.4.2.lran">France</a>.</p>
<p>D’ailleurs, pour son projet d’EPR à Sizewell (en Angleterre), EDF estime le coût à <a href="https://infrastructure.planninginspectorate.gov.uk/wp-content/ipc/uploads/projects/EN010012/EN010012-001678-SZC_Bk4_4.2_Funding_Statement.pdf">« environ » 20 milliards de livres</a>, soit 7,4 €/W. On est loin de la tête de série puisqu’il s’agirait des 7<sup>e</sup> et 8<sup>e</sup> EPR construits et, pourtant, le coût (annoncé) n’est guère plus faible que celui des premiers EPR.</p>
<p>Deuxièmement, les études prospectives passées ont généralement massivement sous-estimé le coût du nucléaire, comme le souligne un <a href="https://doi.org/10.1073/pnas.1917165118">article publié récemment dans la revue <em>PNAS</em></a>.</p>
<p>Inversement, et toujours selon ce dernier article, ces études prospectives ont généralement surestimé le coût du solaire photovoltaïque, de l’éolien et de l’électrolyse, trois technologies clés pour assurer une électricité 100 % renouvelable.</p>
<h2>Un même coût du capital pour toutes les technologies</h2>
<p>Comme l’indique RTE, la méthode utilisée pour l’analyse économique des scénarios « implique de préciser le coût du capital associé à chaque technologie » et ces hypothèses « peuvent être différenciées afin de refléter le coût du capital observé pour chaque technologie ».</p>
<p>En effet, plus un projet est jugé risqué par les investisseurs, plus le coût du capital est élevé. Or, le risque de surcoût et de dépassement du temps de construction est bien plus élevé pour le nucléaire que pour les renouvelables.</p>
<p>Pourtant, arguant des difficultés (réelles) pour déterminer un coût du capital spécifique à chaque technologie, <a href="https://threadreaderapp.com/thread/1453414785765216270.html">RTE utilise des taux identiques dans le scénario de référence du rapport</a>.</p>
<p>La possibilité de taux différenciée est <a href="https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/282232.pdf#page=493">traitée comme une variante</a>, qui montre que si l’on prend un coût du capital de 7 % pour le nouveau nucléaire et 4 % pour les autres technologies, la différence de coût entre les scénarios M23 et N2 disparaît.</p>
<p>Une telle différenciation n’a rien d’extrême puisque <a href="https://www.iea.org/reports/net-zero-by-2050">l’AIE</a> retient, pour l’Europe, 8 % pour le nouveau nucléaire contre 3,2 à 4 % pour les renouvelables. Pour les EPR en construction à Hinkley Point, ce taux est entre 7 et 8 % selon <a href="https://www.edf.fr/groupe-edf/espaces-dedies/journalistes/tous-les-communiques-de-presse/precisions-sur-le-projet-hinkley-point-c-1">EDF</a>, malgré un tarif d’achat de l’électricité produite garanti sur 35 ans.</p>
<p>Un écart énorme avec le taux de la dernière émission obligataire de RTE : <a href="https://www.rte-france.com/actualites/premiere-emission-obligataire-verte-levee-850-millions-euros">0,75 % sur douze ans</a>, pour 850 millions d’euros dédiés entre autres au raccordement des parcs éoliens maritimes.</p>
<h2>Un recours très modéré au biogaz</h2>
<p>Un système électrique largement renouvelable nécessite des options pilotables d’approvisionnement en énergie et des options de stockage. Le biogaz, utilisé dans des centrales électriques, constitue l’une des sources d’énergie pilotables pour gérer la variabilité à long terme des énergies renouvelables (afin d’assurer l’approvisionnement en électricité lors des journées d’hiver avec peu de soleil et de vent). Le potentiel de biogaz est fixé à 150 TWh, suivant la <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/strategie-nationale-bas-carbone-snbc">Stratégie nationale bas carbone</a>.</p>
<p>Dans l’industrie, RTE modélise un remplacement du gaz naturel par l’électricité et l’hydrogène, d’où une plus grande disponibilité du biogaz dans les autres secteurs, dont l’électricité. Pourtant, la production d’électricité à partir des bioénergies est plafonnée, dans la plupart des scénarios de l’étude, à seulement 12 TWh. Un plus grand recours au biogaz pourrait réduire le coût du système électrique en ajoutant plus de flexibilité à coût relativement modéré.</p>
<p>Pour toutes ces raisons, nous considérons qu’en toute rigueur, on ne peut pas conclure quant au coût relatif, à l’horizon 2060, d’un système électrique 100 % renouvelable et d’un système mixte, comportant également de nouvelles centrales nucléaires.</p>
<p>Le choix doit donc également s’appuyer sur d’autres critères, à commencer par la contribution aux Objectifs de développement durable de l’ONU – point sur lequel les énergies renouvelables présentent un bilan nettement plus favorable que le nucléaire, selon le <a href="https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/05/SR15_Chapter5_Low_Res.pdf">rapport « 1,5 » du GIEC</a>.</p>
<hr>
<p><em><a href="https://fr.linkedin.com/in/behrang-shirizadeh">Behrang Shirizadeh</a> est co-auteur de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/178728/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Quirion préside bénévolement l'association Réseau Action Climat France. </span></em></p>En octobre 2021, RTE a fait paraître un document de référence sur l’avenir du système électrique français. Retour sur ses principales conclusions concernant les options nucléaires et renouvelables.Philippe Quirion, Directeur de recherche, économie, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1691342021-10-05T19:17:04Z2021-10-05T19:17:04ZPrix du pétrole, du gaz et de l’électricité : bienvenue dans les montagnes russes !<p>D’abord le pétrole, puis le gaz naturel et l’électricité… La hausse du prix des énergies est au premier rang de l’attention médiatique mais aussi des préoccupations du gouvernement, qui redoute un mouvement social rappelant le mauvais souvenir des « Gilets jaunes ».</p>
<p>Pour les experts, <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/energie-5-questions-sur-la-flambee-des-prix-dans-le-monde-1350412">cette tendance est conjoncturelle</a> : à la chute des prix de l’énergie du printemps 2020 succède un rebond brutal, dû à la reprise rapide de l’économie après la quatrième vague de Covid.</p>
<p>Mais cette volatilité n’a rien d’une nouveauté : côté hydrocarbures, l’économie mondiale se souvient des bouleversements des chocs et contre-chocs pétroliers depuis le début des années 1970. Côté électricité, l’Europe a été marquée par les conséquences des réformes de libéralisation du secteur dans les années 1980.</p>
<p>Enfin, s’annonce aujourd’hui l’impact sur les prix de la nécessaire décarbonation des systèmes énergétiques dans le contexte de la lutte contre les dérèglements climatiques.</p>
<p>Décryptons ces différents facteurs d’instabilité pour mieux comprendre la situation actuelle.</p>
<h2>Facteur d’instabilité n°1 : la conjoncture et les marchés des hydrocarbures</h2>
<p>Parmi les fluctuations les plus sensibles pour les consommateurs (car très visibles à la pompe), les hydrocarbures sont instables du fait de leur dépendance au cours des marchés internationaux ; ils sont ainsi difficiles à contrôler.</p>
<p>Ces fluctuations peuvent vite devenir la bête noire des gouvernements ; c’est le cas aujourd’hui du gaz, pour lequel la <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/pourquoi-les-prix-du-gaz-augmentent-1350400">Russie semble profiter de la situation</a> en mettant la pression sur le gazoduc Nordstream 2 dont la <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/energie/energie-le-remplissage-du-gazoduc-controverse-nord-stream-2-a-debute_4794855.html">mise en service a été retardée</a>.</p>
<p>Avant le pic de 2008, qui marquait pour certains le passage à « l’après-pétrole », le début des années 2000 avait vu une importante augmentation du prix du pétrole, comme en témoigne le graphique ci-dessous.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/424302/original/file-20211002-21-i0uyc7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Variation du prix des énergies.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs, données Index Mundi</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Pour atténuer cette flambée des prix des carburants à la pompe, le gouvernement Jospin avait eu recours en 2000 et 2002 à un mécanisme dit de « taxe flottante » (<a href="https://www.huffingtonpost.fr/2018/11/27/moduler-les-taxes-sur-les-carburants-jospin-avait-deja-essaye-sans-succes_a_23602094/">« la TIPP flottante »</a>), s’appuyant sur un ajustement de la taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques en fonction des variations du cours du pétrole brut.</p>
<p>En 2010, la TIPP avait fait place à la TICPE dont la composante carbone avait été retoquée par le Conseil constitutionnel ; ce n’est qu’en 2014 que fut introduite une taxe carbone dans la fiscalité énergétique, taxe carbone dont l’augmentation programmée en 2018 a déclenché la crise des « Gilets jaunes ».</p>
<h2>Facteur d’instabilité n° 2 : les marchés de l’électricité</h2>
<p>Pour l’électricité, la constitution du marché unique de l’énergie en Europe (idée « fondatrice » de Jacques Delors lorsqu’il était président de la Commission) a été menée corrélativement à l’introduction de la concurrence dans les industries électriques.</p>
<p>Elle a profondément modifié les conditions de concurrence et de fixation des prix : nouveaux producteurs et distributeurs, marchés de gros, libre-choix du fournisseur par le consommateur…</p>
<p>Cette concurrence était censée faire baisser les prix. Dans la plupart des cas, cela se produira <a href="https://www.marianne.net/economie/consommation/marche-unique-europeen-de-lelectricite-un-grand-bienfait-sauf-pour-les-consommateurs">jusqu’au début des années 2000</a>. </p>
<p><a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/02/19/a-force-de-vouloir-deroger-aux-regles-de-la-concurrence-l-etat-voit-le-piege-se-refermer-sur-edf_6070547_3232.html">Seule la France a résisté</a> en conservant des tarifs régulés de vente avec, pour contre partie vis-à-vis de Bruxelles, l’accès de la concurrence à une partie de la production nucléaire à travers le mécanisme de l’accès régulé au nucléaire historique, l’<a href="https://www.edf.fr/entreprises/electricite-gaz/le-benefice-arenh">ARENH</a>.</p>
<p>Comme le montre le graphique ci-dessous, l’examen sur quarante ans des prix de l’électricité (en monnaie constante) pour les ménages en France, en Allemagne et au Royaume-Uni, confirme que les baisses ont cessé au début des années 2000. Il montre par ailleurs que le prix actuel de l’électricité en France reste inférieur à celui de 1980 et aussi inférieur de 38 % à celui de l’Allemagne.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=265&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=265&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=265&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=333&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=333&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/424311/original/file-20211002-25-cc8eu2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=333&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Évolution des prix de l’électricité en France, Allemagne et Royaume-Uni.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Auteurs, données Enerdata (gauche)/Statista (droite)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Facteur d’instabilité n° 3 : l’impact des objectifs bas carbone à court et moyen terme</h2>
<p>Aujourd’hui, c’est aussi en partie à cause du remplacement du charbon par le gaz naturel – une énergie dite de « transition », car carbonée mais moins que le charbon – qu’opère actuellement la <a href="https://www.liberation.fr/economie/gaz-electricite-jusquou-les-prix-de-lenergie-peuvent-ils-grimper-20210928_QTJEZ6URPJFVNE7HZZ5HSP7IYY/">Chine dans ses centrales électriques</a> que le prix du gaz augmente au niveau mondial.</p>
<p>La transition énergétique « bas carbone » impose le recours à des solutions énergétiques plus coûteuses en moyenne que le recours aux fossiles, ce qui suppose que le prix de ceux-ci soit augmenté.</p>
<p>Par ailleurs, le déploiement des énergies renouvelables variables entraîne des périodes de surabondance, au cours desquelles le prix peut même devenir négatif, et des périodes de déficit de soleil et de vent, au cours desquelles ils peuvent atteindre des sommets ; c’est actuellement le cas en <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/energie-la-flambee-des-prix-actuelle-est-inouie-1347404">Europe de l’Est avec l’éolien</a>.</p>
<p>Sans solution d’ajustement massive, les prix seront donc amenés à moyen terme à être extrêmement volatiles.</p>
<h2>Facteur d’instabilité n° 4 : l’impact des objectifs bas carbone à long terme</h2>
<p>Mais si la transition se poursuit et réussit, il faut s’attendre à ce que :</p>
<ul>
<li><p>les coûts des solutions décarbonées diminuent ;</p></li>
<li><p>la dépendance des consommateurs aux prix des marchés internationaux soit moindre ;</p></li>
<li><p>la demande pour les énergies fossiles importées se tarisse au profit des sources nationales décarbonées ;</p></li>
<li><p>les <a href="https://www.iea.org/reports/world-energy-outlook-2019">prix internationaux subissent une forte pression à la baisse</a> dans les scénarios « soutenables » à forte ambition climatique, comme en témoigne le tableau ci-dessous.</p></li>
</ul>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=389&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/424309/original/file-20211002-44812-1b84hep.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Agence internationale de l’énergie</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Cela, à moins que le sous-investissement dans la production, pour le gaz naturel comme pour le pétrole, ne se traduise par une succession de chocs et contre-chocs, avec une vulnérabilité des consommateurs qui demeurera grande dans « l’entre-deux » de la transition.</p>
<p>D’ailleurs, la flambée actuelle des prix du gaz naturel s’explique aussi par un sous-investissement prolongé dans la production : les investisseurs, qui ont subi de faibles rendements ces dernières années, ont mis la pression sur les producteurs qui ont alors été amenés à <a href="https://xn--mobilis-hya.es/la-penurie-de-gaz-naturel-et-la-flambee-des-prix-menacent-la-croissance-economique">réduire leurs dépenses d’investissement</a>…</p>
<h2>À la recherche des bonnes options</h2>
<p>La hausse du prix pour les consommateurs des énergies fossiles ne résoudra pas, à elle seule, le problème de la décarbonation. C’est cependant une nécessité et la question de l’introduction, sous une forme ou sous une autre, d’un <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2009/12/07/quel-modele-de-croissance-le-signal-prix-4-8_1276902_3234.html">« signal prix »</a> adapté ne pourra être évitée.</p>
<p>Une interrogation centrale émerge alors : comment concilier la hausse nécessaire du prix des énergies fossiles et la protection des ménages les plus défavorisés ? Comme le <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/09/03/christian-gollier-et-jean-tirole-l-objectif-de-reduction-des-emissions-de-gaz-a-effet-de-serre-doit-avoir-le-moindre-impact-social_6093286_3232.html">rappelaient</a> récemment les économistes Christian Gollier et Jean Tirole :</p>
<blockquote>
<p>« L’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre doit avoir le moindre impact social. »</p>
</blockquote>
<p>L’Europe s’oriente, dans son dernier cycle de politique climat (le <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/fit-55-nouveau-cycle-politiques-europeennes-climat">« Fit for 55 »</a>), vers la création d’un deuxième marché des quotas d’émission pour le <a href="https://www.lemoniteur.fr/article/le-batiment-sur-la-sellette-des-quotas-carbone-europeens.2133259">bâtiment</a> et les <a href="https://www.actu-environnement.com/ae/news/reforme-marche-co2-fitfor55-37904.php4">transports</a>.</p>
<p>Mais personne ne sait aujourd’hui comment ce nouveau dispositif impactera les prix et la fiscalité carbone là où elle existe, et avec quels impacts pour le consommateur final.</p>
<p>Faut-il alors assurer un mécanisme de stabilisation ?</p>
<p>Pour le gouvernement, l’ajustement par les taxes dans le <a href="https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/09/30/flambee-des-tarifs-de-l-energie-jean-castex-annonce-un-bouclier-tarifaire-l-augmentation-des-prix-du-gaz-bloquee-a-partir-de-novembre_6096644_823448.html">« bouclier tarifaire »</a> représentera un manque à gagner <a href="https://www.challenges.fr/economie/la-france-ne-peut-pas-se-permettre-une-tipp-flottante_628772">aggravant le déficit budgétaire</a>. Il ne sera en outre pas ciblé sur les ménages les plus en difficulté.</p>
<p><a href="https://www.gouvernement.fr/hausse-du-gaz-au-1er-octobre-un-cheque-energie-supplementaire-de-100-eu">L’augmentation du chèque énergie</a>, annoncée la semaine dernière, répond à la question de la protection des ménages les plus défavorisés. Mais face à l’augmentation du nombre des ménages en précarité énergétique, et en fonction de la rigueur de l’hiver à venir, ces mesures seront-elles suffisantes ?</p>
<p>Certains proposent de « s’affranchir de la dictature des marchés ». Plutôt que de subir leur volatilité, l’État pourrait fixer lui-même la trajectoire des prix des énergies carbonées, indépendamment des cours mondiaux : soit bloquer les prix pour défendre le pouvoir d’achat et <a href="https://www.lesechos.fr/elections/presidentielle/presidentielle-2022-fabien-roussel-appelle-a-bloquer-les-prix-de-lenergie-1348814">diviser par deux</a> la facture énergétique, comme le propose le Secrétaire national du PCF, Fabien Roussel ; soit plutôt programmer la hausse, pour assurer que les bonnes décisions d’investissement seront prises au bon moment. </p>
<p>Ainsi, une augmentation annuelle programmée sur trente ans de <a href="http://www.hprevot.fr/">2 centimes d’euro par litre et de 2 euros par mégawatt-heure de gaz</a> serait suffisante, selon l’expert de l’énergie Henri Prévot : cela représenterait en 2050 un supplément de 60 c€/l et 60 €/MWh.</p>
<p>Cette dernière idée est a priori séduisante, mais comment alors s’assurer de l’équilibre économique et financier des entreprises et de leur capacité à évoluer dans un monde d’incertitudes et de changements systémiques ?</p>
<p>Alors qu’aucune solution miracle ne s’impose, il faudra à l’évidence un « mix d’instruments » qui devra être accompagné de normes et d’investissements massifs dans la décarbonation et l’efficacité énergétique. Nul doute que ces questions seront amplement débattues dans les débats de la prochaine campagne présidentielle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169134/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La conjoncture post-Covid, le fonctionnement des marchés, la nécessaire décarbonation de l’économie mondiale : autant de facteurs qui expliquent les effets yo-yo des prix de l’énergie.Patrick Criqui, Directeur de recherche émérite au CNRS, Université Grenoble Alpes (UGA)Carine Sebi, Professeure associée et coordinatrice de la chaire « Energy for Society », Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1646392021-09-13T17:53:55Z2021-09-13T17:53:55ZÉlectroménager : comment encourager le consommateur à l’efficacité énergétique<p>Premier poste de dépense d’énergie, le logement représente 52 % du budget énergétique moyen par foyer, selon des <a href="https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/infographie-economiser-eau-energie.pdf">données de l’Ademe</a> rendues publiques en décembre 2020. L’usage quotidien de l’électroménager, notamment, engendre des consommations significatives, en particulier lorsque les équipements sont peu performants ou inadaptés aux besoins réels des ménages.</p>
<p>Les consommateurs en sont pourtant rarement conscients et peinent à hiérarchiser les sources de surconsommation. Ils n’ignorent généralement pas qu’un réfrigérateur exige plus d’électricité à l’année qu’un lave-linge, mais ils ne perçoivent pas ce qui caractérise l’ensemble de leur utilisation domestique, tous appareils confondus.</p>
<p>Ceci conduit à des surconsommations et à des pertes évitables, surtout lorsque l’on sait, à travers <a href="https://www.ecologic-france.com/professionnels/collectivites-locales-et-bailleurs/les-appareils-electriques-dans-les-foyers-francais-etude.html">l’étude menée par Ipsos</a> pour la filière DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques), qu’un foyer accumule en moyenne une centaine d’appareils électriques et électroniques.</p>
<p>La valeur énergétique consommée ne se reflète alors qu’à travers la facture d’énergie du foyer qui représenterait <a href="https://selectra.info/energie/guides/conso/appareils-electriques">jusqu’à 10 % du budget global des ménages</a> (ce dernier pouvant inclure les dépenses alimentaires, de transport, de loisir, etc.).</p>
<p>Améliorer l’efficacité énergétique chez soi et mieux choisir ses équipements en fonction de ses besoins permet non seulement de réduire sa facture énergétique, mais aussi de restreindre son impact écologique tout en encourageant les fabricants d’appareils à s’engager dans la transition.</p>
<p>Encore faut-il sauter le pas…</p>
<h2>Quand le changement est porté par les consommateurs</h2>
<p>La tendance à la hausse de l’équipement des consommateurs en électroménager est notamment due à la multiplication d’appareils à durée de vie limitée voués au remplacement. Or celle-ci peut difficilement être vue comme durable compte tenu des urgences climatiques et écologiques actuelles.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1205399889221496832"}"></div></p>
<p>Dans cette optique, l’implication des ménages dans la transition écologique peut représenter l’une des clés du changement. En effet, ils peuvent d’abord agir en augmentant la durée de vie de leurs appareils <a href="https://www.gifam.fr/wp-content/uploads/2019/04/Guide-ecogestes.pdf">avec des écogestes</a> souvent simples, mais également avec leur pouvoir d’achat en optant pour les <a href="https://www.guidetopten.fr/">modèles d’électroménager</a> qui permettent de réduire significativement la consommation énergétique. Les marges de progrès sont encore élevées, notamment en France.</p>
<h2>Les Français freinés par le prix</h2>
<p>Diverses études, synthétisées dans le cadre du projet <a href="https://gbrisepierre.fr/wp-content/uploads/2020/07/%C3%89tat-de-lart-Bibliographie-MECAPERF-diffusable.pdf">Mecaperf</a> montrent que les Français achètent encore peu d’appareils de la meilleure classe énergétique malgré leur bonne volonté affichée. La demande reste faible et dépasse à peine les 10 % en France, contre plus de 20 % dans des pays voisins comme l’Allemagne, l’Italie ou l’Autriche.</p>
<p>La principale raison de cet écart serait le prix, jugé trop haut en comparaison à ces modèles moins performants et moins écologiques… Or, ce prix plus élevé peut en réalité souvent être amorti sur la durée de vie du produit, grâce aux économies sur la facture énergétique si les appareils sont bien dimensionnés et optimisés, et leurs usagers bien informés.</p>
<h2>Le manque d’information, un obstacle à l’achat</h2>
<p>L’une des clés de voûte de l’efficacité énergétique dans les foyers est l’information transmise aux consommateurs. Il a été montré que les personnes qui ont le moins de connaissances en la matière sont les moins disposées à aller vers les appareils performants. Augmenter le niveau de savoir des usagers peut les aider à faire des choix plus informés et judicieux.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1366918844095336448"}"></div></p>
<p>La <a href="https://ec.europa.eu/info/energy-climate-change-environment/standards-tools-and-labels/products-labelling-rules-and-requirements/energy-label-and-ecodesign/about_fr">mise en place de l’étiquette énergétique</a> par l’Union européenne depuis plus de 25 ans a été, dans ce sens, un vrai soutien aux consommateurs pour les guider dans leurs choix. Elle leur permet de comparer les capacités des modèles en affichant des informations utiles et facilement identifiables sur une échelle de A (meilleur) à G (moins bon).</p>
<p>Toutefois, le manque d’actualisation des échelles de performance a, au fil des années, questionné la lisibilité des classifications (avec des étiquettes pour certains produits où tous les modèles sur le marché obtenaient des classes A+, A++ ou A+++).</p>
<h2>Nouvelle étiquette, aide ou source de confusions ?</h2>
<p>Pour pallier cela et remettre à niveau les informations aux consommateurs, une <a href="https://fr.label2020.eu/la-nouvelle-etiquette-energie/objectif-et-interets/">nouvelle étiquette énergétique</a> est entrée en vigueur en mars 2021 avec comme principales évolutions : le retour à une échelle de performance énergétique plus stricte de A à G, l’absence de modèles dans la classe A (et parfois B) au moment du lancement et l’apparition d’un QR code permettant aux consommateurs d’accéder à des informations complémentaires.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1336343593196400644"}"></div></p>
<p>Les consommateurs peuvent donc s’appuyer sur ces nouvelles informations qui doivent obligatoirement apparaître sur les étiquettes des réfrigérateurs, congélateurs, lave-linge, machines lavantes-séchantes, lave-vaisselle, caves à vin et écrans.</p>
<p>Ces récentes modifications peuvent toutefois créer une confusion temporaire chez les consommateurs habitués aux anciennes classifications et qui ne connaissent pas nécessairement bien les autres critères techniques à prendre en considération pour s’assurer d’un achat réellement performant.</p>
<p><a href="https://www.ecoconso.be/fr/content/une-nouvelle-etiquette-energie-pour-les-electromenagers">Pour l’association ecoconso</a>, les consommateurs devront s’accoutumer à ce qu’un appareil très performant soit classé au départ B, C ou même D sur les nouvelles étiquettes.</p>
<h2>Une partie de la solution dans la distribution</h2>
<p><a href="https://gbrisepierre.fr/wp-content/uploads/2020/07/%C3%89tat-de-lart-Bibliographie-MECAPERF-diffusable.pdf">Selon la synthèse effectuée dans le cadre du projet Mecaperf</a>, 55 % des consommateurs achètent leurs appareils ménagers dans la grande distribution, ce qui place les distributeurs en première ligne.</p>
<p>Il leur incombe de jouer un rôle d’accompagnateur vers la transition énergétique au sein des foyers, en aidant par exemple à lever la confusion des acheteurs pour qu’ils s’approprient l’étiquette énergétique et en les orientant vers les appareils les plus performants.</p>
<p>Ils peuvent se reposer sur les différents points de contact entre consommateurs et distributeurs (affichage, vendeur, chatbot, etc.), mais pour bien informer les premiers, il est nécessaire qu’ils soient eux-mêmes impliqués et organisés dans des stratégies responsables en faveur de la transition énergétique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/164639/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cette recherche bénéficie d’un financement Ademe dans le cadre du projet « Mécanique de la décision d’équipement des consommateurs en électroménager performant » (Mecaperf).</span></em></p>L’électroménager occupe une place importante dans la consommation énergétique du logement. Plusieurs obstacles restent à lever pour encourager les Français à choisir des appareils plus performants.Nil Özçaglar-Toulouse, Professeure des universités, LUMEN (ULR 4999), Université de LilleIlana Bouhafs, Chercheuse, Université de LilleMarie Beck, Maître de conférences - LUMEN (ULR 4999), Université de LilleYasmine Allouat, Doctorante en sciences de gestion - Marketing, LUMEN (ULR 4999), Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1514882021-01-21T18:14:14Z2021-01-21T18:14:14ZConfinements et hausse des factures d’énergie : le risque de l’autorestriction<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/379997/original/file-20210121-23-16ccbp3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Environ un quart des ménages français déclarent s’imposer des restrictions de chauffage. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/woman-child-wearing-colorful-pair-woolly-1196238214">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>En 2019 en France, parmi les dépenses de consommation énergétique liées au logement, 72 % concernaient uniquement le <a href="https://www.ademe.fr/eau-energie-consommations">chauffage et l’eau chaude sanitaire</a>.</p>
<p>Si de nombreuses politiques publiques sont mises en place pour inciter les ménages à rénover leur logement, une grande partie des gains en efficacité pourraient être atténués par l’augmentation de la taille des logements, mais surtout par le comportement des ménages.</p>
<p>Ainsi, dans un contexte où les taux d’occupation des logements sont plus importants, comme pendant le premier et le second confinement – qui ont eu lieu respectivement au printemps et à l’automne (période pendant laquelle on chauffe les logements, même si le climat est clément) – on aurait pu s’attendre à une hausse de la facture énergétique des ménages, même si nous ne disposons pas encore de ces données.</p>
<p>La consommation d’énergie varie en effet en fonction des préférences thermiques, de la température de chauffage et des taux moyens d’occupation. Un bon moyen pour illustrer statistiquement ce phénomène consiste à recourir à des données d’enquête comme celles de <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/enquete-performance-de-lhabitat-equipements-besoins-et-usages-de-lenergie-phebus">la base Phébus</a> de 2012.</p>
<h2>Efficacité thermique et précarité énergétique</h2>
<p>En s’appuyant sur ces données, on peut remarquer – en fonction de l’étiquette de performance énergétique (basée sur les diagnostics de performance énergétique ou DPE) et donc de la qualité énergétique du bâtiment – que les catégories les plus représentées sont les D et E et qu’en moyenne les ménages à faibles revenus vivent plutôt dans les étiquettes les plus basses.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/377364/original/file-20210106-19-158mjzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/377364/original/file-20210106-19-158mjzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/377364/original/file-20210106-19-158mjzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=275&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/377364/original/file-20210106-19-158mjzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=275&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/377364/original/file-20210106-19-158mjzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=275&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/377364/original/file-20210106-19-158mjzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=346&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/377364/original/file-20210106-19-158mjzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=346&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/377364/original/file-20210106-19-158mjzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=346&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les étiquettes énergie et climat pour les logements.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ecologie.gouv.fr/diagnostic-performance-energetique-dpe">Ministère de la Transition écologique</a></span>
</figcaption>
</figure>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/377365/original/file-20210106-17-kxzmyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/377365/original/file-20210106-17-kxzmyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/377365/original/file-20210106-17-kxzmyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=254&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/377365/original/file-20210106-17-kxzmyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=254&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/377365/original/file-20210106-17-kxzmyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=254&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/377365/original/file-20210106-17-kxzmyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=319&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/377365/original/file-20210106-17-kxzmyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=319&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/377365/original/file-20210106-17-kxzmyj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=319&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Répartition des ménages par étiquette énergétique et revenu moyen.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Phébus, calcul des auteures </span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En moyenne, la température déclarée à l’intérieur des logements en période de chauffe est plus faible (19,8 °C) dans les logements les moins bien isolés comparés aux logements les plus efficaces (20,2 °C), avec des disparités plus prononcées pour les logements de la catégorie G (+ ou -2 °C en moyenne), selon nos calculs à partir des données de Phébus.</p>
<p>Environ un quart des ménages français déclarent s’imposer des restrictions de chauffage, et cette part de la population se caractérise par un budget total plus faible (7100 euros de moins en moyenne par an). Parmi les Français, 17,7 % des ménages ont déclaré souffrir de froid pendant au moins 24 heures pendant l’hiver ; ils sont 16,1 % à vivre dans un logement classé D ou inférieur. On notera aussi que ces ménages sont ceux qui ont de nouveau les revenus les moins élevés.</p>
<h2>Confinements : l’explosion des factures ?</h2>
<p>Si on combine ces informations avec celle du taux d’occupation, on peut s’interroger sur le comportement que les ménages ont adopté pendant les deux confinements.</p>
<p>Lors d’une semaine ordinaire, plus des deux tiers des ménages déclarent s’absenter de leur logement sur une durée allant de 4 à 8 heures, au moins un jour par semaine. Un week-end ordinaire, c’est le cas de 17 % des ménages le samedi et de 15 % le dimanche.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/377366/original/file-20210106-21-wy0yjg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/377366/original/file-20210106-21-wy0yjg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/377366/original/file-20210106-21-wy0yjg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=241&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/377366/original/file-20210106-21-wy0yjg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=241&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/377366/original/file-20210106-21-wy0yjg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=241&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/377366/original/file-20210106-21-wy0yjg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=303&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/377366/original/file-20210106-21-wy0yjg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=303&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/377366/original/file-20210106-21-wy0yjg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=303&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Consommation énergétique et dépenses moyennes par ménage et par an en fonction du temps d’inoccupation par semaine ordinaire (du lundi au vendredi).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Phébus, calcul des auteures</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Lorsqu’un ménage occupe son logement quasiment toute la journée, il dépense annuellement en moyenne 1 746 euros contre 1 250 euros pour un ménage absent la moitié du temps (soit plus de 12 heures). Si on raisonne en quantité d’énergie, cela représente quasiment 40 kWh/m2/an.</p>
<p>Nous pouvons tous faire le calcul : si nous avions l’habitude de quitter notre logement la moitié de la journée et que nous nous sommes retrouvés confinés, nous pouvons nous attendre à une augmentation de notre facture énergétique d’environ 30 %.</p>
<p>Ce surcoût est lié à tous les usages confondus : l’eau chaude sanitaire que nous avons utilisée, mais également les appareils électriques que nous avons fait fonctionner, sans mentionner le chauffage que nous avons peut-être décidé d’augmenter pour accroître notre confort pendant le télétravail. En moyenne, un degré supplémentaire de chauffage, c’est 6,2 % de consommation supplémentaire. Avec un coût moyen du kilowatt-heure d’électricité de 0,1899 € TTC et du gaz de 0,0792 € TTC <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/data/database">pour le premier semestre 2020</a>, faites vos calculs !</p>
<h2>Le risque d’autorestriction</h2>
<p>Cette surconsommation énergétique liée à notre taux d’occupation plus important va par ailleurs inciter certains ménages au budget contraint à limiter ces coûts. Dans ce contexte, le comportement reste un facteur clé de la consommation.</p>
<p>Si la part des dépenses énergétiques de logement représente en moyenne <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/enquete-performance-de-lhabitat-equipements-besoins-et-usages-de-lenergie-phebus">5,7 % du budget des ménages</a>, plus de 11 % des ménages français sont concernés par un phénomène de précarité énergétique, c’est-à-dire qu’ils consacrent plus de 10 % de leur budget à leur facture énergétique pour le logement. Ces derniers sont d’autant plus vulnérables qu’ils vivent souvent dans les logements les moins bien isolés.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1330608462355689480"}"></div></p>
<p>À un moment donné, la dépense d’énergie ne peut plus excéder un certain montant sans provoquer des phénomènes d’autorestriction et donc une perte de confort thermique qui à terme peuvent générer des pathologies.</p>
<p>En 2012, par exemple, environ 15 % des ménages français déclaraient avoir périodiquement baissé la température ou éteint le chauffage de leur logement au cours de l’hiver précédent. Le phénomène touche essentiellement des personnes à bas revenu, vivant dans des logements collectifs du secteur privé, des familles nombreuses et des retraités.</p>
<h2>Un enjeu de santé publique</h2>
<p>L’inconfort hygrothermique, fortement lié à l’efficience énergétique de l’habitat, est à l’origine de nombreuses pathologies respiratoires et cardiovasculaires : l’Organisation mondiale de la santé estime qu’en dessous de 16 °C, un logement peut avoir des effets délétères <a href="https://www.euro.who.int/en/publications/abstracts/environmental-burden-of-disease-associated-with-inadequate-housing.-summary-report">sur la santé des individus</a>. Les faibles températures à l’intérieur des habitations provoquent annuellement <a href="https://www.euro.who.int/fr/media-centre/sections/press-releases/2011/06/new-evidence-from-who-inadequate-housing-causes-more-than-100-000-annual-deaths-in-europe">12,8 décès pour 100 000 habitants</a>.</p>
<p>La hausse des factures d’énergie cause à terme des dégâts plus importants : les ménages pour qui elles représentent un poids trop lourd étant tentés de réduire d’autres postes de dépenses, comme l’alimentation.</p>
<p>En cette période de crise sanitaire, la question de la maîtrise de la demande d’énergie et l’amélioration de la performance énergétique du parc résidentiel français apparaît comme un défi majeur qui combine enjeux environnementaux et sociaux.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151488/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Avec les confinements, nous pouvons nous attendre à une augmentation de notre facture énergétique d’environ 30 %.Anna Risch, Maître de conférences en sciences économiques, Université Grenoble Alpes (UGA)Dorothée Charlier, MCF HDR en économie de l’énergie et de l’environnement, Université Savoie Mont BlancLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1507852020-12-06T23:07:53Z2020-12-06T23:07:53ZPourquoi les étiquettes énergie ont-elles (encore) changé ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/373054/original/file-20201204-21-13urbjy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’autocollant informatif a été mis en place au sein de l’UE à partir des années 1990. </span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Vous l’avez peut-être remarqué en vous promenant dans les rayons ces dernières semaines, certains produits électroménagers affichent désormais une nouvelle « étiquette énergie ». </p>
<p>Mise en place par l’Union européenne en 1992, cet autocollant informatif a pour objectif d’accélérer la diffusion d’appareils et d’ampoules plus efficaces sur le plan énergétique – l’électroménager et l’éclairage représentant environ <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php?title=File:Final_energy_consumption_in_the_residential_sector_by_type_of_end-uses_for_the_main_energy_products,_EU-27,_2018_.png">60 % de la consommation d’électricité des foyers en Europe</a>.</p>
<p>L’Union européenne a pour cette raison établi des normes minimales de performance énergétique, afin que les objets les moins performants soient peu à peu éliminés du marché. Une façon de protéger les consommateurs contre des appareils certes moins coûteux à l’achat mais plus chers, si l’on tient compte des coûts de consommation d’énergie, sur leur durée de vie. </p>
<p>Pour les autres appareils, les étiquettes énergie aident les consommateurs à choisir en connaissance de cause, en les identifiant par classe d’énergie et en indiquant leur consommation annuelle en kilowattheures. </p>
<p>En Europe, il existe sept classes que l’on distingue grâce à des barres de couleurs plus ou moins longues, allant du vert au rouge. Au total, 28 catégories de produits sont couvertes par des normes minimales, et 16 doivent afficher des étiquettes énergie.</p>
<p>Plusieurs travaux indiquent que cette combinaison des normes minimales et des étiquettes a été efficace. <a href="https://www.isi.fraunhofer.de/content/dam/isi/dokumente/sustainability-innovation/2020/WP-18-2020_How_effective_are_EU_minimum_performance_standards_jos_dua_brh.pdf">Une étude empirique récente</a> menée dans huit pays européens montre par exemple que le resserrement des normes minimales et l’introduction de nouvelles classes d’énergie en 2011 ont contribué à faire progresser de 15 à 38 points (selon les pays) les parts de marché des appareils électroménagers « froids » (réfrigérateurs et combinaisons frigo-congélateur) appartenant aux classes énergie A+ et mieux.</p>
<h2>Cercle vertueux</h2>
<p>Lors du lancement de ces étiquettes au début des années 1990 en Europe, des critères fondés sur la consommation d’énergie ont été définis pour déterminer la classe de chaque appareil concerné, sur une échelle allant de la classe A (la meilleure performance) à la classe G (la pire).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1287839102751182853"}"></div></p>
<p>Après plusieurs années d’usage, les étiquettes ont atteint leurs limites sur certains appareils, la plupart des modèles disponibles sur le marché ayant atteint les meilleures classes d’énergie.</p>
<p>Pour accompagner cette évolution, l’Union européenne a introduit en 2011 trois nouvelles notations – A+, A++ et A+++ – tout en conservant les mêmes critères de classification. Lors du changement d’étiquette en 2011, tous les appareils évalués B ou en dessous ont conservé leur classement ; les appareils A sont restés en A ou passés dans les catégories supérieures.</p>
<h2>Consommateurs confus</h2>
<p>Ces dernières années, les étiquettes énergie ont à nouveau atteint leurs limites, entraînant deux conséquences majeures. </p>
<p>Sous l’effet combiné des progrès technologiques et des standards minima, les appareils à la pire performance énergétique se retrouvent pour certaines catégories d’appareils (en particulier l’électroménager du froid) classés A+. Ce qui signifie que les catégories A à E sont désormais « vides ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1103898322497036294"}"></div></p>
<p>Cette surenchère provoque également la confusion dans l’esprit du consommateur, pour qui tous les appareils classés au-delà de A sont forcément vertueux du point de vue énergétique. Avec son code couleur vert, un appareil classé A+ paraît un excellent choix, quand bien même il s’agit de l’un des moins efficaces sur le marché. L’étiquette énergie ne remplit ici plus sa fonction d’information.</p>
<h2>Nouvelles étiquettes</h2>
<p>Pour résoudre ces problèmes, l’Union européenne a décidé de <a href="https://www.linfodurable.fr/conso/evolution-de-letiquette-energie-pour-mieux-guider-les-consommateurs-21195">remplacer d’ici au 1<sup>er</sup> mars 2021 les étiquettes énergie actuelles</a>, processus qui a officiellement débuté le 1<sup>er</sup> novembre 2020. Durant cette période de remplacement, il est possible que les deux étiquettes soient apposées sur les appareils concernés par cette réforme (réfrigérateurs, lave-linges, lave-vaisselles et écrans numériques, dont les télévisions).</p>
<p>Dotées d’icônes plus efficaces et d’un code QR permettant d’accéder à davantage d’informations, les nouvelles étiquettes vont surtout reclasser tous les appareils sur le marché sur une échelle familière de A à G : les catégories A+, A++ et A+++ vont donc disparaître. Les critères de classification ont été mis à jour pour refléter le progrès technologique : un produit qui était A+++ en 2020 se retrouvera classé B ou C en 2021 ; un A++ probablement D ou E ; les moins performants, anciens A+, se retrouveront en bas d’échelle avec une classe F ou G. </p>
<p>Pour la première fois, l’étiquette sera complètement redéfinie.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1173805778458873856"}"></div></p>
<p>En prévision des progrès technologiques futurs, les classes les plus performantes seront laissées vides lors du changement en 2021 : il n’y aura donc aucun réfrigérateur classé A. Cela permettra de laisser aux producteurs le temps de progresser et de remplir les meilleures classes d’énergie au fil des années. </p>
<p>Une fois qu’au moins 20 % des appareils sur le marché seront classés A, l’étiquette sera à nouveau mise à jour.</p>
<h2>Consommateurs mieux avertis</h2>
<p><a href="https://www.isi.fraunhofer.de/content/dam/isi/dokumente/sustainability-innovation/2020/WP-11-2020_Effects%20of%20rescaling%20the%20EU%20energy%20label.pdf">Dans une étude récente</a> menée dans le cadre <a href="https://www.briskee-cheetah.eu/cheetah/">du projet H2020 Cheetah</a>, nous avons testé l’efficacité de ces nouvelles étiquettes.</p>
<p>Sur un échantillon de plus de 1 000 personnes, représentatif de la population allemande, nous avons observé les choix de réfrigérateurs faits par des consommateurs exposés soit aux étiquettes actuelles, soit aux nouvelles étiquettes, soit aux deux ensemble. </p>
<p><a href="https://www.isi.fraunhofer.de/content/dam/isi/dokumente/sustainability-innovation/2020/WP-11-2020_Effects%20of%20rescaling%20the%20EU%20energy%20label.pdf">Nos résultats</a> révèlent clairement que les consommateurs accordent davantage de valeur aux appareils les plus performants du point de vue énergétique et que le changement d’étiquette devrait donc favoriser l’adoption d’appareils à plus haute efficacité énergétique.</p>
<p>Nous avons toutefois observé que lorsque les deux étiquettes sont présentes – ce qui sera souvent le cas dans la période de transition – les consommateurs se réfèrent alors aux anciennes étiquettes pour faire leur choix. Nous recommandons donc de limiter au maximum les phases de transition lors des prochains changements d’étiquettes.</p>
<p>En résumé, les étiquettes énergie changent souvent parce qu’elles fonctionnent bien, ce qui les rend rapidement obsolètes…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/150785/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Corinne Faure a reçu des financements de la Commission européenne.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Joachim Schleich a reçu des financements de la Commission européenne. Il est membre de Fraunhofer Institute Systems & Innovation Research, Karlsruhe, Germany.</span></em></p>La progression des performances énergétiques de l’électroménager oblige à réévaluer ces autocollants informatifs.Corinne Faure, Professor of Marketing, Grenoble École de Management (GEM)Joachim Schleich, Professor of Energy Economics, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1427952020-07-21T17:42:24Z2020-07-21T17:42:24ZAprès le Covid-19, quelle énergie pour la reprise ?<p>Au-delà de ses effets catastrophiques sur la santé, le coronavirus provoque aussi d’importants remous dans l’économie mondiale et les finances publiques. <a href="https://theconversation.com/penser-lapres-la-reconstruction-plutot-que-la-reprise-137042">La durée et l’ampleur</a> de cette crise restent aujourd’hui inconnues.</p>
<p>Peu de secteurs sortiront victorieux de cet épisode inédit : il s’agit d’un choc négatif important, inattendu et persistant qui modifiera les facteurs fondamentaux du marché pour les années à venir.</p>
<p>Le besoin de fonds de relance a également exercé une pression sans précédent sur les budgets des gouvernements. Les banques centrales ont dû imprimer des milliards pour répondre à la crise. Ce « pansement fiscal » est malheureusement loin d’être suffisant.</p>
<p>Quelles doivent être les prochaines mesures ?</p>
<p>En Europe, comme ailleurs, des voix se sont élevées pour faire de cette période l’occasion de s’attaquer de front au changement climatique. L’affectation de fonds de relance à la transition énergétique représente désormais une proposition populaire parmi les décideurs politiques… qui ne fait toutefois pas l’économie de nombreuses interrogations.</p>
<p>Parmi ces questionnements : comment le Covid-19 affectera-t-il la transition énergétique ? Comment les fonds devaient-ils être mis en œuvre pour promulguer cette relance verte ?</p>
<h2>Moins d’activités, moins d’émissions</h2>
<p>Cette crise sanitaire est à l’origine de mouvements contraires affectant la transition énergétique en France et dans le monde. En premier lieu, on observe que le ralentissement économique réduit les émissions de gaz à effet de serre. Une <a href="https://www.nature.com/articles/s41558-020-0797-x">étude scientifique récente</a> montre que les émissions mondiales par habitant ont chuté de 17 % au mois d’avril, alors que les émissions de l’ensemble de l’année 2020 ne devraient être inférieures que de 4 à 7 %.</p>
<p>Pour atteindre l’objectif de 1,5 °C de l’Accord de Paris, une telle baisse annuelle serait nécessaire pendant des décennies.</p>
<p>En France, les émissions ont chuté <a href="https://theconversation.com/covid-et-baisse-des-emissions-de-co-une-nouvelle-etude-fait-le-point-secteur-par-secteur-138971">jusqu’à 34 %</a> pendant le confinement, notamment du fait du ralentissement observé dans le secteur du transport routier.</p>
<p>Par le passé, ce type de baisse momentanée a cependant été suivie d’un rebond rapide. Par exemple, les <a href="https://webstore.iea.org/weo-2015-special-report-energy-and-climate-change">émissions mondiales</a> et <a href="https://www.indicators.odyssee-mure.eu/energy-efficiency-database.html">françaises</a> de gaz à effet de serre ont mis moins de deux ans à repartir à la hausse après la baisse provoquée par la crise de 2008.</p>
<p>Un marasme économique de longue durée pourrait certainement conduire à des réductions d’émissions durables. Mais une telle récession pourrait aussi absorber les ressources nécessaires pour atteindre les objectifs climatiques, pouvant nécessiter des investissements allant jusqu’à <a href="https://www.bcg.com/publications/2018/economic-case-combating-climate-change.aspx">75 000 milliards de dollars au niveau mondial jusqu’en 2050</a>…</p>
<p>Un scénario plus optimiste souligne l’avènement de changements structurels qui pourraient mettre l’économie sur une voie différente, plus verte. Mais cela peut-il vraiment être le cas ?</p>
<h2>Covid-19 et transition énergétique</h2>
<p>Pour mieux appréhender ces questions, le récent <a href="https://en.grenoble-em.com/energy-market-barometer-report">Baromètre de l’énergie</a> de Grenoble École de management a interrogé, courant mai 2020, une centaine d’experts en France.</p>
<p>Ce groupe d’experts est composé d’universitaires, de décideurs politiques et d’entrepreneurs. Nous avons recueilli leurs points de vue sur les impacts de la crise sanitaire vis-à-vis de la transition énergétique en France.</p>
<p>En l’absence d’interventions politiques spécifiques, près de la moitié des experts (44 %) estiment que la crise sanitaire renforcera la transition énergétique dans son ensemble. Pourtant, 33 % d’entre eux s’attendent au contraire : le Covid-19 ralentirait les actions en faveur de la transition énergétique ; 23 % des experts s’attendent enfin à ce qu’il n’ait aucun effet.</p>
<h2>Des comportements en évolution</h2>
<p>Les experts prévoient des évolutions de comportement à court (1 an) et long terme (5 ans), pouvant accélérer les changements structurels vers une économie faiblement émettrice en carbone (voir la figure ci-dessous).</p>
<p>Bien que les citoyens soient souvent prompts à reprendre leurs habitudes, une crise peut offrir l’occasion d’adopter, puis de conserver, de nouveaux comportements.</p>
<p>En ce sens, les experts du Baromètre de l’énergie estiment que certains changements de comportement observés actuellement – comme la diminution de l’utilisation des transports publics ou les programmes de partage de véhicules par crainte d’infection – seront transitoires.</p>
<p>En revanche, ils s’attendent à ce que certaines tendances observées – adoption de comportements plus sobres en énergie, réduction du transport aérien pour les déplacements personnels, augmentation des déplacements à vélo – se maintiennent. Dans plusieurs villes françaises, <a href="https://www.20minutes.fr/paris/2776507-20200511-coronavirus-ile-france-deconfinement-velo-change-braquet">comme Paris</a>, <a href="https://www.francebleu.fr/infos/transports/coronavirus-ou-sont-creees-les-pistes-cyclables-provisoires-dans-la-metropole-lilloise-1588894430">Lille ou Roubaix</a>, les collectivités locales ont pris des mesures en urgence pour renforcer ces changements.</p>
<p>Dès le déconfinement, ces villes ont ainsi aménagé des pistes cyclables provisoires pour répondre au besoin de circuler de manière sécurisée et non polluante ; aménagements qu’elles n’excluent pas de rendre définitifs selon le succès rencontré.</p>
<p><strong>• Le Baromètre de l’énergie (juin 2020) : Dans votre esprit, quels seront les effets du Covid-19 dans 1 an et dans 5 ans ?</strong></p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/348664/original/file-20200721-21-1359d61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/348664/original/file-20200721-21-1359d61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/348664/original/file-20200721-21-1359d61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/348664/original/file-20200721-21-1359d61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/348664/original/file-20200721-21-1359d61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=268&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/348664/original/file-20200721-21-1359d61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/348664/original/file-20200721-21-1359d61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/348664/original/file-20200721-21-1359d61.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=337&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Baromètre de l’énergie juin 2020, Grenoble École de management</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De tels changements ne suffiront cependant probablement pas à susciter une transition énergétique soutenue. Les politiques publiques ont ici un rôle essentiel à jouer ; et la manière dont les fonds de relance de l’après-crise seront dépensés pourrait bien faire la différence.</p>
<p>Une <a href="https://www.smithschool.ox.ac.uk/publications/wpapers/workingpaper20-02.pdf">récente enquête</a> conduite auprès de plus de 200 économistes et responsables économiques mondiaux a montré un consensus sur le fait qu’une relance « verte » contribuerait à une meilleure reprise économique.</p>
<p>Pour encourager la transition vers une économie à faible intensité carbone, trois grandes catégories de politiques sont concernées : la promotion des investissements dans la recherche et développement et les nouvelles technologies ; l’investissement dans la modernisation et le développement des infrastructures énergétiques ; les investissements visant à réduire l’empreinte carbone des bâtiments.</p>
<h2>Investir dans les bâtiments basse consommation</h2>
<p>Les experts du Baromètre interrogés selon ces mêmes catégories estiment que les fonds de relance devraient être affectés en priorité à l’amélioration de l’efficacité énergétique du secteur du bâtiment (voir le tableau ci-dessous).</p>
<p>On estime en France que <a href="https://theconversation.com/a-ce-rythme-le-plan-renovation-energetique-de-la-france-natteindra-pas-ses-objectifs-126976">7 à 8 millions de bâtiments</a> ont un besoin urgent de rénovations profondes en matière d’efficacité énergétique, offrant au pays un fort potentiel d’économie d’énergie.</p>
<p>Les investissements dans les technologies et les infrastructures énergétiques existantes à faible teneur en carbone ont également été mis en avant.</p>
<p>Ces deux options joueront en effet un rôle particulièrement important si les investissements privés dans le secteur des technologies durables se tarissent en raison de la combinaison d’une récession induite par le Covid-19 et de la faiblesse des prix du pétrole et du gaz.</p>
<p><strong>• Le Baromètre de l’énergie (juin 2020) : Selon vous, parmi les mesures politiques suivantes, lesquelles aideraient au mieux ?</strong></p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/348666/original/file-20200721-33-13go8ye.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/348666/original/file-20200721-33-13go8ye.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/348666/original/file-20200721-33-13go8ye.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/348666/original/file-20200721-33-13go8ye.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/348666/original/file-20200721-33-13go8ye.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=345&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/348666/original/file-20200721-33-13go8ye.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/348666/original/file-20200721-33-13go8ye.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/348666/original/file-20200721-33-13go8ye.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=433&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Baromètre de l’énergie juin 2020, Grenoble École de management</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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</figure>
<p>Si l’efficacité énergétique est une priorité pour nos experts concernant le plan de relance de la France, elle l’est aussi pour les citoyens ayant pris part à la récente <a href="https://www.conventioncitoyennepourleclimat.fr/">Convention citoyenne pour le climat</a>.</p>
<p>Dans son discours du 14 juin, le président Emmanuel Macron qualifiait pour sa part le secteur du bâtiment de « catalyseur de changement », créateur de nouveaux emplois verts rendus possibles grâce à la « reconstruction écologique », concentrée aujourd’hui sur l’activité de <a href="https://www.batiactu.com/edito/emmanuel-macron-veut-dynamiser-renovation-thermique-59727.php">rénovation thermique</a>.</p>
<p>En plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre, une rénovation thermique étendue peut également remplir une mission d’équité sociale : en diminuant la facture énergétique des personnes les plus démunies et en apportant des avantages réels en matière de santé ; le tout en mettant au travail les petits et plus gros entrepreneurs du secteur de la construction.</p>
<p>Il faut cependant rappeler qu’il n’est pas aisé de rénover les bâtiments. Et l’on sait depuis longtemps que les aspects économiques de l’efficacité énergétique semblent souvent plus avantageux que ce qu’ils n’y paraissent en pratique. Des problèmes de qualité, une mauvaise conception et parfois même des comportements <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/immobilier-btp/les-arnaques-sur-lisolation-des-combles-a-un-euro-se-multiplient-1138201">frauduleux</a> peuvent aussi rendre cette mesure moins attrayante.</p>
<p>L’épidémie de Covid-19 a suscité des demandes pour un changement radical de notre système. Les fenêtres à triple vitrage, les pompes à chaleur efficaces et les pistes cyclables ne semblent peut-être pas aussi radicales qu’on pourrait l’espérer. Mais peu d’autres mesures, ciblant les activités les plus émettrices, ont à la fois des effets secondaires socio-économiques immédiats et souhaitables, et obtenus un large soutien. Si ce n’est pas maintenant, alors quand ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/142795/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sébastien Houde a reçu des financements de Swiss Federal Office of Energy et de la Swiss National Science Foundation.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Joachim Schleich a reçu des financements de la Commission européenne. Il est également employé a Fraunhofer Institute Systems & Innovation Research (ISI) en Allemagne.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Carine Sebi et Mark Olsthoorn ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>En réponse à la crise sanitaire, L’Europe peut-elle mettre son économie sur une voie plus verte ? Le Baromètre de l’énergie a interrogé une centaine de spécialistes pour répondre à cette question.Sébastien Houde, Associate professor, Grenoble École de Management (GEM)Carine Sebi, Associate Professor and Coordinator of the "Energy for Society" Chair, Grenoble École de Management (GEM)Joachim Schleich, Professor of Energy Economics, Grenoble École de Management (GEM)Mark Olsthoorn, Research assistant professor, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1325322020-03-02T21:13:29Z2020-03-02T21:13:29ZL’inquiétante trajectoire de la consommation énergétique du numérique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/317610/original/file-20200227-24685-9uxxeo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C0%2C7392%2C4230&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les émissions de gaz à effet de serre générées par le numérique sont pour 25 % dues aux data centers, 28 % dues aux infrastructures réseau et 47 % dues aux équipements des consommateurs.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/telecommunication-network-above-europe-viewed-space-1482756353">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Le Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies (CGEIET) a publié en novembre un <a href="https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/cge/consommation-energique-numerique.pdf">rapport sur la consommation d’énergie du numérique</a> en France. L’étude recense le parc, liste les consommations et en déduit leur montant global.</p>
<p>Les résultants sont plutôt rassurants, au premier abord. <a href="http://temis.documentation.developpement-durable.gouv.fr/docs/Temis/0063/Temis-0063194/17653.pdf">Par rapport à 2008</a>, ce nouveau document note que la consommation numérique semble stabilisée, au niveau français, tout comme l’emploi et la valeur ajoutée du secteur.</p>
<p>Les transformations massives en cours (croissance des usages vidéo, « numérisation de l’économie », « plate-formisation », etc.) ne semblent pas se traduire dans l’énergie dépensée. Un constat qui s’expliquerait par les gains en efficacité énergétique, et par le fait que la progression de la consommation des smartphones et centres de données a été compensée par le déclin des télévisions et des PC. Ces conclusions optimistes méritent toutefois un examen plus approfondi.</p>
<h2>61 millions de smartphones en France</h2>
<p>Avant tout, voici quelques repères donnés par le rapport pour appréhender l’ampleur du parc numérique français. Le pays compte 61 millions de smartphones en service, 64 millions d’ordinateurs, 42 de téléviseurs, 6 millions de tablettes, 30 millions de box… Ces volumes déjà importants sont toutefois à prendre avec des pincettes, les auteurs du rapport estimant avoir fortement sous-évalué les équipements professionnels.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/317357/original/file-20200226-24668-1h37ccd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/317357/original/file-20200226-24668-1h37ccd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/317357/original/file-20200226-24668-1h37ccd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=162&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/317357/original/file-20200226-24668-1h37ccd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=162&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/317357/original/file-20200226-24668-1h37ccd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=162&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/317357/original/file-20200226-24668-1h37ccd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=203&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/317357/original/file-20200226-24668-1h37ccd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=203&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/317357/original/file-20200226-24668-1h37ccd.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=203&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les consommations.</span>
<span class="attribution"><span class="source">CGEIET</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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</figure>
<p>Le rapport prévoit dans les prochaines années une croissance du parc de smartphones (notamment chez les personnes âgées), une baisse de celui des PC, la stabilisation des tablettes et une saturation du temps passé sur écran (qui s’établit aujourd’hui à 41h/semaine).</p>
<p>Le texte suggère néanmoins de rester attentif, notamment sur les nouveaux usages : la vidéo 4K puis 8K, les jeux sur cloud via 5G, la voiture connectée ou autonome, l’installation grandissante de centres de données en France et le stockage de données… Une hausse de 10 % de la vidéo en 4K en 2030 produirait à lui seul une hausse de 10 % de la consommation électrique globale du numérique.</p>
<p>Nous pensons que ces conclusions rassurantes doivent être pour le moins tempérées, pour trois principales raisons.</p>
<h2>L’efficacité énergétique, pas éternelle</h2>
<p>La première est l’efficacité énergétique. Le célèbre énergéticien Jonathan Koomey a établi en 2011 que la puissance de calcul par joule <a href="http://doi.org/10.1109/MAHC.2010.28.">double tous les 1,57 ans</a>.</p>
<p>Mais cette « loi » de Koomey résulte d’observations sur quelques décennies seulement : une éternité, à l’échelle du marketing. Pourtant, le principe de base du numérique est toujours le même, depuis l’invention du transistor (1947) : utiliser le déplacement des électrons pour mécaniser le traitement de l’information. La cause principale de la réduction de la consommation est la miniaturisation.</p>
<p>Or, il existe un seuil minimal de consommation d’énergie physique pour déplacer un électron, dit « minimum de Landauer ». Un tel minimum théorique ne peut être qu’approché, en termes technologiques. Ce qui signifie que l’efficacité énergétique va ralentir puis s’arrêter. Plus la technologie le côtoiera, plus les progrès seront difficiles : on retrouve en quelque sorte la loi des rendements décroissants établie par Ricardo voici deux siècles, à propos de la productivité de la terre.</p>
<p>La seule manière de surmonter la barrière serait de changer de paradigme technologique : déployer l’ordinateur quantique à grande échelle, dont la puissance de calcul est indépendante de sa consommation énergétique. Mais le saut à accomplir est gigantesque et prendra des décennies, s’il se produit.</p>
<h2>Une croissance des données exponentielle</h2>
<p>La seconde raison pour laquelle le constat du rapport est à relativiser est la croissance du trafic et de la puissance de calcul appelée.</p>
<p>Selon l’entreprise informatique américaine Cisco, le trafic décuple actuellement tous les 10 ans. Suivant cette « loi », <a href="https://www.cisco.com/c/en/us/solutions/collateral/service-provider/visual-networking-index-vni/white-paper-c11-741490.html">il sera multiplié par 1 000 d’ici 30 ans</a>. Aujourd’hui, un tel débit est impossible : l’infrastructure cuivre-4G ne le permet pas. La 5G et la fibre optique rendraient possible une telle évolution, d’où les débats actuels.</p>
<p>Regarder une vidéo sur un smartphone implique que des machines numériques – téléphone, centres de données – exécutent des instructions pour activer les pixels de l’écran, générant l’image et son changement. Les usages du numérique génèrent ainsi de la puissance de calcul, c’est-à-dire une quantité d’instructions exécutées par les machines. Cette puissance de calcul appelée n’a pas de rapport évident avec le trafic. Un simple SMS peut aussi bien déclencher quelques pixels sur un vieux Nokia ou un supercalculateur, même si bien entendu, la consommation d’énergie ne sera pas la même.</p>
<p>Dans un <a href="http://large.stanford.edu/courses/2016/ph240/vega1/docs/ritr-2015.pdf">document datant déjà de quelques années</a>, l’industrie des semi-conducteurs a tracé une autre « loi » : celle de la croissance régulière de la puissance de calcul appelée à l’échelle mondiale. L’étude montre qu’à ce rythme, le numérique aurait besoin, en 2040, de la totalité de l’énergie mondiale produite en 2010.</p>
<p>Ce résultat vaut pour des systèmes pourvus du profil moyen de performance de 2015, date de rédaction du document. L’étude envisage aussi l’hypothèse d’un parc mondial pourvu d’une efficacité énergétique 1000 fois supérieure. L’échéance ne serait décalée que de 10 ans : 2050. Si l’ensemble du parc atteignait la « limite de Landauer », ce qui est impossible, alors c’est en 2070 que la totalité de l’énergie mondiale (en date de 2010) serait consommée par le numérique.</p>
<h2>Numérisation sans limites</h2>
<p>Le rapport ne dit pas que les usages énergivores ne sont pas quelques pratiques isolées de consommateurs étourdis. Ce sont des investissements industriels colossaux, justifiés par le souci d’utiliser les fantastiques vertus « immatérielles » du numérique.</p>
<p>De toutes parts, on se passionne pour l’IA. L’avenir de l’automobile ne semble plus pouvoir être pensé hors du véhicule autonome. Microsoft envisage un <a href="https://www.digitaltrends.com/gaming/xbox-head-says-amazon-and-google-are-major-competition/">marché de 7 milliards de joueurs en ligne</a>. L’e-sport se développe. L’industrie 4.0 et l’Internet des objets (IdO) sont présentés comme des évolutions irréversibles. Le big data est le pétrole de demain, etc.</p>
<p>Or, donnons quelques chiffres. Strubell, Ganesh & McCallum ont montré, à partir d’un réseau de neurones courant utilisé pour traiter le langage naturel, qu’un entraînement <a href="https://arxiv.org/pdf/1906.02243.pdf">consommait 350 tonnes de CO₂</a>, soit 300 allers-retours New York – San Francisco. En 2016, Intel annonçait que la voiture autonome consommerait <a href="https://newsroom.intel.com/editorials/krzanich-the-future-of-automated-driving/#gs.v9g3jx">4 petaoctets… par jour</a>, sachant qu’en 2020 une personne génère ou fait transiter 2 GB/jour : 2 millions de fois plus. Le chiffre annoncé en 2020 est <a href="https://www.tuxera.com/blog/autonomous-cars-300-tb-of-data-per-year/;%20https://www.accenture.com/_acnmedia/pdf-73/accenture-autonomous-vehicles-the-race-is-on.pdf">plutôt de 1 à 2 TB/heure</a>, soit 5000 fois plus que le trafic individuel.</p>
<p>Une caméra de surveillance enregistre 8 à 15 images/seconde. Si l’image est de 4 Mo, on arrive à 60Mo/s, sans compression, soit 200 Go/heure : c’est tout sauf un détail dans l’écosystème énergétique du numérique. Le <a href="https://edna.iea-4e.org/library">rapport EDNA de l’IEA</a> pointe ce risque. La « vidéo volumétrique », à base de caméras 5K, génère un flux de 1 To… toutes les 10 secondes. Intel estime que ce format est <a href="https://www.clubic.com/pro/entreprises/intel/actualite-848816-intel-dresse-futur-hollywood-dome-geant-1-000-capte-action-360.html">« le futur d’Hollywood »</a> !</p>
<p><a href="https://www.manhattan-institute.org/green-energy-revolution-near-impossible">Le jeu en ligne consomme déjà plus</a>, en Californie, que la puissance appelée par les chauffe-eau électriques, les machines à laver, les machines à laver la vaisselle, les sèche-linge ou les cuisinières électriques.</p>
<h2>Des émissions en hausse dans tous les secteurs</h2>
<p>Tout ça pour quoi, exactement ? C’est le troisième point. En quoi le numérique contribue-t-il au « développement durable » ? À réduire les émissions de GES ? À sauver les sols, la biodiversité, etc. ?</p>
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<figcaption><span class="caption">Internet : le plus gros pollueur de la planète ? Source : Brut.</span></figcaption>
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<p>Le rapport <a href="http://www.smart2020.org/">Smart 2020</a> promettait en 2008 20 % de réduction des gaz à effet de serre, grâce au numérique. Nous sommes en 2020 et rien ne s’est produit. Le secteur TIC représente <a href="https://www.mdpi.com/2071-1050/10/9/3027">3 % des émissions de GES planétaires</a>, ce que prévoyait plus ou moins le rapport. Mais pour les autres secteurs, rien ne s’est réalisé : alors que le numérique s’est largement diffusé, les émissions augmentent partout.</p>
<p>Les techniques mises en avant se sont pourtant diffusées : les moteurs « intelligents » ont partout progressé, la logistique a massivement recours au numérique et bientôt à l’intelligence artificielle, sans parler de l’usage courant de la vidéoconférence, du e-commerce et des logiciels de guidage dans les transports. Les réseaux énergétiques sont pilotés électroniquement. Mais les réductions ne se sont pas produites, au contraire…</p>
<p>Aucun « découplage » des émissions avec la croissance économique n’est en vue, ni sous l’angle des GES ni sous celui d’autres paramètres <a href="https://eeb.org/library/decoupling-debunked/">tels que la consommation de matériaux</a>. L’OCDE prévoit que la consommation de matière triplera quasiment d’ici 2060.</p>
<h2>Effet rebond</h2>
<p>Le coupable, dit le rapport Smart 2020, est « l’effet rebond ». Celui-ci repose sur le « paradoxe de Jevons » (1865), qui énonce que tout progrès dans l’efficacité énergétique se traduit par une hausse des consommations.</p>
<p>Curieux paradoxe, à vrai dire. Les différentes formes <a href="https://www.degrowth.info/en/2017/02/digitalization-efficiency-and-the-rebound-effect/">« d’effet rebond »</a> (systémique, etc) rappellent quelque chose de connu : elles peuvent prendre les gains de productivité, tels qu’on les trouve par exemple chez Schumpeter ou même Adam Smith (1776).</p>
<p>Un article méconnu montre d’ailleurs que dans le cadre de l’analyse néoclassique, qui suppose que les agents cherchent à maximiser leurs gains, le paradoxe devient une règle, suivant laquelle tout gain en efficacité qui se doublerait d’un gain économique se traduit à coup sûr par une <a href="https://econpapers.repec.org/article/aenjournl/1992v13-04-a07.htm">consommation croissante</a>. Or les gains en efficacité évoqués jusqu’ici (« loi de Koomey », etc.) ont généralement cette propriété.</p>
<p>Un rapport de General Electric illustre très bien la difficulté. L’entreprise se félicite que l’usage des smart grids lui permette de réduire les émissions de CO<sub>2</sub> et de faire des économies ; la réduction de GES est donc profitable. Mais que va faire l’entreprise de ces gains ? Rien n’est dit à ce sujet. Va-t-elle les réinvestir dans le <em>consommer plus</em> ? Ou va-t-elle choisir d’autres priorités ? Rien ne l’indique, le document montre que les priorités générales de l’entreprise restent inchangées, il s’agit toujours de « satisfaire des besoins » qui vont évidemment croissant.</p>
<h2>Le numérique menace la planète et ses habitants</h2>
<p>Déployer la 5G sans interroger et encadrer ses usages va donc ouvrir la voie à toutes ces applications mortifères. L’économie numérique risque d’achever le climat et la biodiversité, et non pas la sauver. Vivrons-nous l’effondrement le plus grand et le mieux monitoré de tous les temps ? Elon Musk parle de se réfugier sur Mars, et les plus riches achètent des propriétés bien défendues dans les zones qui seront les moins touchées par le désastre global. Car le réchauffement climatique menace l’agriculture : entre manger et surfer, il faut choisir. Ceux qui ont capturé la valeur avec les réseaux numériques ont la tentation de s’en servir pour échapper à leurs responsabilités.</p>
<p>Que faire ? Sans doute, exactement l’inverse de ce que prévoit l’industrie : interdire la 8K ou à défaut décourager son usage, réserver l’IA à des usages restreints à forte utilité sociale ou environnementale, limiter la puissance drastiquement appelée de l’e-sport, ne pas déployer la 5G à grande échelle, assurer une infrastructure numérique restreinte et résiliente et d'accès universel permettant de conserver des usages low-tech et peu consommateurs de calcul et de bande passante. Favoriser les systèmes mécaniques ou prévoir du numérique débrayable, ne rendant pas inopérantes les <a href="https://journals.openedition.org/lectures/11712">« techniques de réserve »</a>. Prendre conscience des enjeux. Se réveiller.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a bénéficié d’échanges avec Hugues Ferreboeuf, coordinateur du volet numérique du <a href="https://theshiftproject.org/">Shift Project</a></em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/132532/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabrice Flipo a reçu des financements de la CDC et Mines-Télécom pour mener des recherches dans le domaine évoqué. </span></em></p>Même si la consommation numérique semble pour le moment stabilisée en France, les perspectives de croissance ne sont pas réjouissantes du point de vue des émissions de gaz à effet de serre.Fabrice Flipo, Professeur en philosophie sociale et politique, épistémologie et histoire des sciences et techniques, Institut Mines-Télécom Business School Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1281422020-01-20T20:41:53Z2020-01-20T20:41:53ZPour être énergétiquement performant, l’habitat doit tenir compte du facteur humain<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/309967/original/file-20200114-151848-zxelnl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=277%2C184%2C5086%2C3547&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le facteur humain joue un rôle important dans les performances effectives de l'habitat énergétiquement performant.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/house-energy-efficiency-concept-775055299">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Le secteur du bâtiment résidentiel est le second secteur consommateur d’énergie finale en France (derrière celui du transport), avec environ <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/chiffres-cles-de-lenergie-edition-2018">50 % d’énergie carbonée</a>. Pour l’accompagner dans sa mutation, l’État français a mis en place une réglementation, la RT 2012, qui fixe un seuil maximal de consommation d’énergie pour les bâtiments neufs, et des crédits d’impôt pour la rénovation énergétique des particuliers.</p>
<p>En parallèle de ces mesures, on assiste à l’émergence d’habitats énergétiquement performants : habitats passifs (supposés avoir une consommation d’énergie extrêmement faible, voire nulle) et autres bâtiments à énergie positive (qui produisent plus d’énergie qu’ils n’en consomment).</p>
<p>Les technologies numériques font également leur apparition dans nos habitats, pour nous assister dans la maîtrise de notre consommation d’énergie (affichage de la consommation en direct, relevés détaillés en ligne, applications, etc.).</p>
<p>Si cette réponse technique semble être cohérente, il est légitime, avec l’arrivée prochaine de la <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/re2020-nouvelle-etape-vers-future-reglementation-environnementale-des-batiments-neufs-plus">nouvelle norme RE 2020</a> qui remplacera la RT 2012, de se poser la question de l’efficacité de cette réponse : la technique garantit-elle la performance énergétique du bâtiment résidentiel ?</p>
<h2>Des performances décevantes</h2>
<p>Les résultats <a href="https://www.larevuedelenergie.com/quel-est-limpact-des-travaux-de-renovation-energetique-des-logements-sur-la-consommation-denergie/">d’une étude parue fin 2019</a> ont montré que la baisse de consommation d’énergie liée à la rénovation énergétique des logements est nettement inférieure aux prédictions.</p>
<p>Selon les auteurs, les habitants rénovent leur habitat dans une optique de confort thermique plus que dans un objectif de baisse de la consommation d’énergie. Dans la même veine, des <a href="http://www.batiment-energie.org/doc/01-ENERTECH.pdf">expérimentations</a> portant sur des bâtiments énergétiquement performants ont révélé que la baisse de consommation d’énergie prévue n’était pas observée.</p>
<p>Des sociologues de l’université Toulouse II <a href="https://www.unil.ch/files/live/sites/ouvdd/files/shared/URBIA/urbia_15/Decoupe_3.pdf">se sont penchés sur la question</a>. D’après eux, les habitants n’utilisent pas les bâtiments et leurs équipements comme leurs concepteurs l’avaient prévu, ce qui ne leur permet pas de diminuer leur consommation d’énergie autant qu’espéré.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1196523088726446080"}"></div></p>
<p>Dans certains cas, ils auraient même des comportements contre-performants, qui augmenteraient leur consommation. Ces résultats sont tout à fait cohérents avec ceux <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1364032117309061">d’une étude parue en 2017</a>, selon laquelle la dépense d’énergie des bâtiments peut être 3 fois plus importantes qu’attendu.</p>
<p>Les facteurs en jeu sont variés : l’environnement (fait-il froid ou chaud ?), le bâtiment (est-il bien isolé ?), les équipements (sont-ils économes ?) et les occupants. Les auteurs indiquent que le comportement de ces derniers est essentiel mais qu’il est le moins pris en compte dans la conception des bâtiments.</p>
<p>Les comportements jouent ainsi un rôle non négligeable dans la consommation d’énergie des bâtiments. Et les seuls aspects techniques paraissent insuffisants pour atteindre les objectifs de réduction d’énergie.</p>
<h2>Des usages parfois non anticipés</h2>
<p>Pour expliquer cet état de fait, intéressons-nous aux usages des résidents, dont l’essentiel des activités domestiques sont source de consommation d’énergie, comme, par exemple, de faire un gâteau.</p>
<p>Pour tenter de limiter les dépenses énergétiques générées par sa cuisson, ils peuvent mettre en place des actions de maîtrise de l’énergie : cuire le gâteau après un gratin pour économiser le temps de chauffe, acquérir un four plus économe. Mais ils peuvent aussi avoir des activités de gestion de l’énergie, en enlevant par exemple les feuilles mortes tombées sur des panneaux solaires.</p>
<p>La difficulté à atteindre les objectifs de réduction d’énergie dans l’habitat est probablement liée à l’inadéquation des systèmes techniques (ici, la maison ou l’application de suivi de la consommation d’énergie) aux utilisateurs et à leurs usages.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1196970975935565825"}"></div></p>
<p>En conception, on parle de « modèle de conception » pour qualifier la représentation que se fait le concepteur de l’utilisation probable de son objet par l’utilisateur : c’est une représentation hypothétique. On parle de « modèle d’utilisation » pour qualifier la représentation qu’a l’utilisateur lorsqu’il se sert de l’objet ; il s’agit ici d’une représentation réelle.</p>
<p>Lorsqu’il existe une différence trop importante entre le modèle de conception et le modèle d’utilisation, l’utilisation de l’objet est rendue moins efficace, plus difficile et peut être à l’origine d’usages non anticipés. <strong>Par exemple, aérer sa maison tous les matins dans un bâtiment passif</strong>. Ces usages non anticipés par le concepteur du bâtiment peuvent être à l’origine d’une surconsommation d’énergie. Il est donc primordial de bien comprendre l’activité des habitants pour imaginer des habitats et des équipements adaptés.</p>
<h2>Prendre en compte les biais cognitifs</h2>
<p>Reste que bien connaître l’activité des habitants n’est pas suffisant. Il faut aussi tenir compte du fonctionnement de leur cerveau, doté d’une rationalité limitée. Nos sens, notre mémoire et notre capacité à traiter des informations sont restreints.</p>
<p>Lorsque nous prenons des décisions, nous sommes donc soumis à ce que l’on appelle des « biais cognitifs » – des automatismes qui nous permettent de traiter rapidement une multitude d’informations, mais qui sont aussi à l’origine d’erreurs de raisonnement. Alors que nous pensons agir de façon rationnelle et en accord avec nos valeurs, nous avons parfois des comportements qui vont à leur encontre. Ces biais n’épargnent pas nos comportements en faveur de l’environnement.</p>
<p>En 2011, Robert Gifford <a href="https://www.researchgate.net/publication/254734365_The_Dragons_of_Inaction_Psychological_Barriers_That_Limit_Climate_Change_Mitigation_and_Adaptation">publiait un article</a> décrivant les 29 biais cognitifs auxquels nous sommes soumis et qui nous empêchent d’agir pour limiter et nous adapter au changement climatique. Une <a href="https://www.nature.com/articles/s41893-019-0263-9?proof=true">étude parue en 2019</a> dans la revue <em>Nature Sustainability</em>, montre que lorsqu’un individu s’engage dans un comportement pro-environnemental (acheter un four économe en énergie), cela a une influence négative sur un autre comportement positif (surveiller sa consommation d’énergie).</p>
<p>Ce mécanisme peut être induit par un effet de compensation morale (aussi appelé « effet rebond ») : lorsqu’une action moralement positive est utilisée pour légitimer une action moralement moins positive.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1070451812719837184"}"></div></p>
<p>Prenons un exemple : un individu achète une chaudière électrique nouvelle génération pour remplacer son ancien appareil fonctionnant au fioul. Elle lui permet de ne plus consommer de fioul et s’avère plus économe en énergie. On s’attend donc à une baisse de consommation pour le chauffage. Avec son ancienne chaudière à fioul, cet usager essayait de réduire l’utilisation de son chauffage, afin de moins polluer. Désormais, il s’en soucie beaucoup moins, sa chaudière étant électrique et plus économe. Il a donc augmenté la température de son domicile, pour passer de 19° à 21 °C, et chauffe désormais son hall d’entrée.</p>
<p>Ici, le remplacement d’une chaudière à fioul par une chaudière électrique économe en énergie est à l’origine de comportements énergétiquement moins sobres, qui peuvent limiter la baisse de consommation, voire entraîner une augmentation de la consommation d’énergie pour le chauffage.</p>
<p>Dans la mesure où les biais cognitifs peuvent nettement influencer notre consommation d’énergie à la maison, il est nécessaire de les prendre en compte dans la conception de l’habitat.</p>
<h2>Favoriser la collaboration</h2>
<p>Si la technique est indispensable pour améliorer l’efficacité énergétique et la maîtrise de l’énergie, elle reste insuffisante.</p>
<p>Une réflexion sur nos comportements doit être intégrée pour penser des bâtiments n’engendrant pas d’usages aux effets limitatifs, voire contre-productifs concernant la baisse de la consommation d’énergie. L’objectif n’est pas de persuader les utilisateurs d’avoir tel ou tel comportement, mais bien de concevoir des habitats et des équipements compatibles avec les résidents, pour rendre possible la réalisation des performances énergétiques escomptées, et permettre des attitudes réellement sobres.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"806748495562436608"}"></div></p>
<p>Pour cela, le bâtiment et ses équipements doivent s’intégrer à l’activité des habitants, à leurs objectifs et leur permettre de s’émanciper de leurs biais cognitifs. À cet effet, des <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1364032114007990">chercheurs autrichiens</a> proposent ainsi une liste de recommandations visant à neutraliser ces biais relativement à la consommation d’énergie dans l’habitat. Par exemple, pour tirer profit du « biais de statu quo », qui entraîne une résistance au changement, les auteurs proposent de définir par défaut les appareils sur leur mode d’utilisation le plus sobre énergétiquement. L’utilisateur doit donc fournir un effort pour utiliser un mode d’utilisation plus consommateur.</p>
<p>Il ne suffit donc pas de considérer l’habitat comme un système technique plus ou moins énergétiquement efficace, mais comme un système qui ne peut être énergétiquement efficace qu’avec ses habitants.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/128142/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Antoine Martin ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’habitat énergétiquement performant nécessite de tenir compte des habitants pour être vraiment efficace.Antoine Martin, Doctorant en ergonomie, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1269762019-11-19T22:22:41Z2019-11-19T22:22:41ZÀ ce rythme, le plan rénovation énergétique de la France n’atteindra pas ses objectifs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/301769/original/file-20191114-26273-1w1stvd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C181%2C5272%2C2896&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/success?u=http%3A%2F%2Fdownload.shutterstock.com%2Fgatekeeper%2FW3siZSI6MTU3Mzc2ODg5MCwiYyI6Il9waG90b19zZXNzaW9uX2lkIiwiZGMiOiJpZGxfMTAwOTY5Mjg4OSIsImsiOiJwaG90by8xMDA5NjkyODg5L2h1Z2UuanBnIiwibSI6MSwiZCI6InNodXR0ZXJzd">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Le bâtiment représente 39,5 % de la consommation finale d’énergie et 27 % des émissions de CO<sub>2</sub>. Il est donc la cible idéale des politiques publiques énergétique et climatique. La France s’est fixé de réduire de <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/action-france-lefficacite-energetique">28 % la consommation d’énergie finale</a> dans ce secteur en 2030, et prévoit la <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/strategie-nationale-bas-carbone-snbc">décarbonation quasi-complète du bâtiment d’ici 2050</a> – c’est-à-dire le niveau basse consommation dit « BBC ». Les statistiques officielles les plus récentes indiquaient que <a href="https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/sites/default/files/2018-10/chiffres-stats534-Phebus-juillet2014b_0.pdf">0,3 % des logements en France étaient BBC en 2012</a>. L’enjeu est donc de taille !</p>
<p>En 2018, le gouvernement s’est fixé plusieurs objectifs en la matière dans le cadre du <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/renovation-energetique-des-batiments-plan-accelerer-mobilisation-generale">Plan rénovation énérgétique des bâtiments</a>. D’une part, la rénovation thermique de 500 000 logements par an (sans spécifier la durée), dont la moitié sont occupés par des ménages aux revenus modestes. Sur ces 500 000, l’État prévoit d’avoir rénové d’ici à 2025 (objectif révisé depuis à 2028) les 7 à 8 millions de passoires thermiques (étiquettes F et G du Diagnostic de performance énergétique – DPE) habitées par des foyers propriétaires à faible revenu.</p>
<p>Ce plan annonce parallèlement que 100 000 logements sociaux devront être rénovés chaque année, permettant d’atteindre 250 000 logements occupés par des personnes aux revenus modestes. Pour les 250 000 logements restants, la rénovation devra être réalisée par les propriétaires qui auront accès à des aides financières dédiées, comme pas exemple les certificats d’économie d’énergie.</p>
<p>Dans les faits, ces objectifs apparaissent insuffisants au regard de la législation européenne, trop imprécis, et leur application s’avère difficilement contrôlable.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/301767/original/file-20191114-26237-1c3d7cl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/301767/original/file-20191114-26237-1c3d7cl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/301767/original/file-20191114-26237-1c3d7cl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=320&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/301767/original/file-20191114-26237-1c3d7cl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=320&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/301767/original/file-20191114-26237-1c3d7cl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=320&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/301767/original/file-20191114-26237-1c3d7cl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=402&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/301767/original/file-20191114-26237-1c3d7cl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=402&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/301767/original/file-20191114-26237-1c3d7cl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=402&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’objectif gouvernemental de rénovation thermique de 500 000 logements par an.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Plan%20de%20r%C3%A9novation%20%C3%A9nerg%C3%A9tique_0.pdf">Ministères de la Transition écologique et solidaire et de la Cohésion des territoires</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un objectif flou et insuffisant</h2>
<p>En juin 2018, la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32018L0844&from=EN">refonte de la Directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments</a> (EPBD), stipulait qu’un taux moyen annuel de rénovation de 3 % serait nécessaire au niveau de l’Union européenne pour concrétiser de façon rentable les ambitions de l’Union en matière d’efficacité énergétique. Pour cela, les États membres étaient tenus d’« établir des lignes directrices claires et définir des actions mesurables et ciblées ».</p>
<p>En France, la loi transposant la directive européenne a donc fixé le nombre de logements rénovés par an à 500 000. Ce qui correspond à un taux moyen annuel de rénovation de 1,7 %, bien en deçà des 3 % préconisés par la directive et nécessaires pour atteindre l’objectif gouvernemental d’un parc décarboné à 2050. Tout comme la directive européenne, la loi ne précise par ailleurs à aucun moment les gains minimaux de performance énergétique à atteindre.</p>
<p>Le parc immobilier français compte en outre <a href="https://cler.org/plan-de-renovation-energetique-beaucoup-didees-mais-peu-de-mesures-concretes-pour-la-transition-des-batiments-et-la-lutte-contre-la-precarite-energetique/">7 millions de logements « passoires énergétiques »</a> : si le gouvernement entend les éradiquer d’ici à 2028 comme indiqué dans le Plan Rénovation, il faudrait accélérer la cadence et les rénover lourdement en priorité à un rythme annuel d’1 million de logements.</p>
<p>En raison de l’absence d’une définition officielle de la rénovation énergétique en France ou au niveau de l’Union européenne, il devient difficile de recenser correctement l’activité de la rénovation énergétique. Les bases de données existantes utilisent différents niveaux d’analyse et visent des cibles différentes – certaines bases se concentrent uniquement sur le parc de logements sociaux, d’autres le parc privé – comme le montre le tableau ci-dessous.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/301764/original/file-20191114-26222-6yeghr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/301764/original/file-20191114-26222-6yeghr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/301764/original/file-20191114-26222-6yeghr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/301764/original/file-20191114-26222-6yeghr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/301764/original/file-20191114-26222-6yeghr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=282&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/301764/original/file-20191114-26222-6yeghr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/301764/original/file-20191114-26222-6yeghr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/301764/original/file-20191114-26222-6yeghr.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=355&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Bases de données et rapports d’activités sur la rénovation énergétique en France.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Carine Sebi, analyse faite en octobre 2019</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Une mise en œuvre déjà retardée</h2>
<p>Malgré des objectifs largement insuffisants, on constate que la mise en œuvre du plan gouvernemental a déjà pris bien du retard. S’il est impossible de dresser un bilan précis, une estimation grossière révèle que le compte des 500 000 rénovations énergétiques annuelles n’y est pas : en 2018, on recense <a href="https://www.union-habitat.org/actualites/dossier-la-renovation-energetique-une-priorite-nationale#content">110 000 rénovations</a> dans le logement social, <a href="https://www.anah.fr/fileadmin/anah/Mediatheque/Publications/Les_rapports_activite/Rapport-activite-2018.pdf">62 000 dans les logements privés précaires</a> et <a href="https://www.ademe.fr/travaux-renovation-energetique-maisons-individuelles-enquete-tremi">130 000</a> pour le <a href="https://www.ademe.fr/open-observatoire-permanent-lamelioration-energetique-logement-campagne-2015">parc privé</a> restant, soit un total approximatif de 300 000 rénovations annuelles concernant la période 2016-2018.</p>
<p>Même en considérant des <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/immobilier-btp/constat-dechec-pour-la-renovation-energetique-des-logements-150193">estimations plus généreuses</a> – évoquant plutôt 300 000 rénovations dans le parc privé et 100 000 dans le parc social – la France ne pourra pas à ce rythme atteindre l’objectif annoncé d’un parc de bâtiment neutre en carbone d’ici à 2050.</p>
<p>Ce retard s’explique d’une part par un coût fixe élevé des rénovations thermiques : il s’élève à <a href="https://www.ademe.fr/travaux-renovation-energetique-maisons-individuelles-enquete-tremi">environ 25 900 euros</a> par logement privé pour une rénovation thermique qui permettrait de gagner deux classes (passer d’une performance énergétique D ou C à B par exemple). D’autre part, la variation du prix de l’énergie associée rend le <a href="https://theconversation.com/renovation-energetique-du-logement-les-conditions-de-la-rentabilite-93868">retour sur investissement très lointain</a>, et peu incitatif pour les ménages – malgré les aides proposées. Sans parler du déficit d’information constaté chez les ménages sur les aides disponibles et sur les mesures de rénovation les plus efficaces.</p>
<h2>La nécessité du suivi</h2>
<p>Pour l’avenir, les toutes dernières orientations politiques du gouvernement indiquent une priorité marquée pour les ménages modestes avec le retrait du crédit d’impôts (CITE) – qui jusque-là offrait à tous les propriétaires bénéficiaires jusqu’à 30 % de réduction d’impôts sans condition de revenu du ménage (plafonné à 16 000 euros selon la composition du ménage) – et la mise en place de « Ma prime rénov » » <a href="https://www.quelleenergie.fr/magazine/fiscalite-verte/fin-du-cite-la-nouvelle-prime-ma-prime-renov-2020/">qui propose une aide forfaitaire</a> dont le montant dépend du type de rénovation.</p>
<p>Elle s’oriente davantage vers les ménages modestes en ciblant les travaux de rénovation les plus efficaces. L’avantage de cette mesure est qu’elle met l’accent sur les ménages en situation de précarité énergétique qui le plus souvent logent dans cesdites passoires thermiques. Son risque est de décourager la rénovation dans les ménages les plus aisés, qui portent aujourd’hui à eux seuls <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/renovation-energetique-maintenons-laide-fiscale-pour-les-foyers-aises-1140050">50 % de l’activité du secteur</a>.</p>
<p>Faute de données fiables et d’objectifs bien définis en France, suivre les avancées en matière de rénovation énergétique dans le pays est difficile. Or sans évaluation, il sera compliqué de satisfaire les efforts engagés. Des lacunes dont le gouvernement prend toutefois conscience, puisqu’il a lancé en septembre un <a href="https://www.banquedesterritoires.fr/aides-la-renovation-energetique-une-prime-et-une-plateforme-anah-des-2020">observatoire national de la rénovation énergétique</a>, dont les premières données seront rendues disponible entre 2020 et 2021.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/126976/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Carine Sebi a travaillé entre 2012 et 2017 sur des projets en lien avec le sujet de la rénovation énergétique financés par des fonds européens. Elle a notamment participé au lancement de l'Observatoire Européen du Bâtiment.</span></em></p>L’absence de suivi et des objectifs trop flous expliquent, entre autres, que le pays peine à tenir ses promesses.Carine Sebi, Assistant professor and Coordinator of the "Energy for Society" Chair, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1268502019-11-18T19:55:27Z2019-11-18T19:55:27ZLa rénovation thermique réduit-elle vraiment votre facture d’énergie ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/301250/original/file-20191112-178520-1rh1sug.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=126%2C58%2C5178%2C3421&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Selon une étude des auteurs, 1 000 euros de travaux en rénovation énergétique entraînent une diminution de 8,3€ par an de la facture énergétique.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/man-installing-thermal-insulation-layer-under-233789185">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>La rénovation énergétique est l’un des piliers de l’action publique en faveur de la transition énergétique. Dernière illustration en date, le plan gouvernemental de rénovation énergétique des bâtiments, qui prévoit la rénovation de <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Plan%20de%20r%C3%A9novation%20%C3%A9nerg%C3%A9tique_0.pdf">500 000 logements</a> par an pendant cinq ans. Ou le discours de politique générale de juin 2019 du premier ministre qui annonçait une réforme des aides à la rénovation. Cette priorité se manifeste par une multiplication d’instruments : éco-prêt à taux zéro, crédit d’impôt pour la transition énergétique, certificats d’économies d’énergie, diagnostic de performance énergétique, et les acronymes correspondants : éco-PTZ, CITE, CEE, DPE… Mais la rénovation énergétique des logements réduit-elle vraiment la consommation d’énergie comme elle le prétend ?</p>
<h2>Un investissement moyen rentabilisé en… 120 ans</h2>
<p>Nous venons de publier une <a href="https://www.larevuedelenergie.com/quel-est-limpact-des-travaux-de-renovation-energetique-des-logements-sur-la-consommation-denergie">étude économétrique</a> reposant sur l’observation des travaux réellement effectués par des ménages et leurs factures énergétiques avant et après travaux. Les données proviennent de l’<a href="https://ademe.typepad.fr/files/tns-sofres---me-bilan-2012---synth%C3%A8se-4-pages-3008.pdf">enquête Maîtrise de l’Énergie</a> réalisée par TNS-SOFRES pour l’Ademe. De 2000 à 2013, l’institut de sondage interrogeait chaque année un panel représentatif de 7 à 9 000 ménages sur leur dépense énergétique et sur leurs éventuels investissements dans la rénovation. Chaque ménage était sondé plusieurs années consécutives, permettant ainsi d’observer l’évolution de leurs factures après rénovation. L’enquête fut malheureusement stoppée et les enquêtes plus récentes ne fournissent plus les mêmes éléments.</p>
<p>Le modèle économétrique, que nous ne décrirons pas ici, consiste pour l’essentiel à comparer la variation de la consommation d’énergie d’un ménage réalisant des travaux avec celle des ménages n’effectuant pas de travaux ou des travaux d’un montant différent. Pour identifier un effet « toutes choses égales par ailleurs », nous effectuons cette comparaison pour une même année et entre des ménages vivant dans la même région (et donc soumis aux mêmes conditions météorologiques, macroéconomiques et réglementaires), ayant un revenu similaire et une taille de foyer identique, contrôlant ainsi l’effet de facteurs susceptibles d’affecter la consommation énergétique.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1113222583149895681"}"></div></p>
<p>Notre estimation aboutit au résultat suivant : 1 000 euros de travaux ne diminuerait en moyenne la facture énergétique que de 8,4 € par an. Pour un investissement moyen de l’enquête, cela correspond à une diminution de 2,7 % de la facture. La rénovation énergétique est alors loin d’être rentable si l’on s’en tient aux seules économies d’énergie puisque le temps de retour correspondant, c’est-à-dire le nombre d’années nécessaires pour récupérer le coût de l’investissement initial, est de 120 ans.</p>
<p>Ce résultat apparaît en décalage avec le consensus actuel des experts. Notre estimation est par exemple beaucoup plus faible que celles incluses dans les fiches des opérations standardisées utilisées pour <a href="https://calculateur-cee.ademe.fr">calculer les économies d’énergie</a> générant les Certificats d’Économie d’Énergie (CEE).</p>
<p>À titre d’illustration, la fiche CEE décrivant la pose d’une fenêtre ou d’une porte-fenêtre avec vitrage isolant – une opération notoirement moins efficace que d’autres – prédit un impact deux fois plus élevé que notre estimation de l’impact de l’investissement moyen.</p>
<h2>Une question de confort plus que d’économies</h2>
<p>Notre travail est une analyse a posteriori sur des données décrivant des comportements réels. Au contraire, le consensus d’experts a été construit en France à partir de modèles de simulation fondés sur des hypothèses de comportements. De ce point de vue, notre approche est plus proche d’une <a href="https://academic.oup.com/qje/article/133/3/1597/4828342">étude américaine</a> réalisée en 2018 qui identifie elle aussi des impacts très faibles – des économies d’énergie environ 2,5 fois inférieures à celles prédites par le modèle utilisé par les autorités publiques américaines pour piloter de nombreux programmes de soutien à la rénovation énergétique.</p>
<p>Comment alors expliquer la modestie de ces impacts ? Une première explication tient au fait que la première motivation exprimée par les ménages réalisant des travaux de rénovation énergétique n’est pas l’économie d’énergie, mais le confort. Or améliorer son confort équivaut en pratique à augmenter la température intérieure du logement. Après rénovation, rien ne dit que cette augmentation ne vienne annuler l’impact énergétique des travaux. Plus de confort, moins de déperdition d’énergie mais au total plus de consommation d’énergie. C’est « l’effet rebond ».</p>
<p>Par ailleurs, la qualité n’est pas toujours au rendez-vous dans un marché de la rénovation où prévaut une asymétrie d’information entre des ménages peu au fait des subtilités techniques de l’opération, et des professionnels qui savent que la qualité de leur prestation ne sera observée par les clients qu’une fois les travaux terminés et la facture réglée.</p>
<h2>Cibler les fournisseurs et non les consommateurs</h2>
<p>Ce résultat conduit évidemment à s’interroger sur la pertinence des subventions à l’efficacité énergétique dans le secteur résidentiel si elles sont uniquement motivées par la réduction de la consommation d’énergie. En tout état de cause, la rénovation énergétique ne constitue pas un gisement d’opérations peu coûteuses de réduction de la consommation d’énergie, et par conséquent des émissions de gaz à effet de serre.</p>
<p>L’estimation d’un temps de retour de 120 ans concerne un investissement moyen. Or il est notoire que l’impact énergétique varie beaucoup en fonction du type de travaux réalisés. Notre étude invite donc à cibler le soutien public sur les travaux les plus efficaces (en particulier, l’isolation des combles, des murs, des planchers).</p>
<p>Enfin et surtout, ce résultat invite à déplacer la focale de l’action publique des consommateurs d’énergie vers les fournisseurs de solutions de rénovation énergétique avec un double objectif : réduire les prix et améliorer la qualité de la rénovation. D’autant que la multiplication des aides allouées à leurs clients n’a pu que dégrader leur performance sur ces deux dimensions. Des dispositifs comme l’opération en cours « isolation des combles à 1 euro » rendent ainsi presque accessoires le prix et la qualité des travaux réalisés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/126850/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Matthieu Glachant ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une étude montre que la facture énergétique des ménages est bien moins sensible à la rénovation que prévu, ce qui interroge l’action publique en la matière.Matthieu Glachant, Professeur d’économie, Mines Paris - PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1137962019-04-02T22:52:59Z2019-04-02T22:52:59ZEfficacité énergétique : est-il vraiment possible de faire mieux avec moins ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/264694/original/file-20190319-60956-d97i34.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=83%2C115%2C6758%2C3782&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le remplacement des lampes à incandescence, très énergivores, par des LED, est un exemple d’efficacité énergétique.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Bien isoler sa maison, utiliser des ampoules basse consommation, investir dans des appareils électroménagers performants : autant de façons pour les particuliers de réduire leur consommation d’énergie. On parle ici de mesures d’« efficacité énergétique ». Portée au niveau d’un pays, cette efficacité se mesure via l’intensité énergétique, soit le rapport entre la consommation énergétique nationale et le produit intérieur brut.</p>
<p>L’efficacité énergétique joue un rôle clé dans la transition écologique, qui vise un recours moindre aux énergies fossiles : elle rendrait possible, selon le <a href="https://www.iea.org/weo/weomodel/sds/">scénario « développement durable »</a> de l’Agence internationale de l’énergie de novembre 2017, 44 % de réduction des émissions de CO<sub>2</sub> en 2040 – contre 36 % pour les énergies renouvelables et 6 % pour le nucléaire.</p>
<p>Un tel scénario permettrait ainsi de limiter la hausse des températures à +2 °C d’ici la fin du siècle et d’atteindre les objectifs de développement durable adoptés par les Nations unies, parmi lesquels figure l’accès universel à l’électricité.</p>
<p>Conscients de ce potentiel de l’efficacité énergétique, les États européens se sont fixés <a href="https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/action-france-lefficacite-energetique">des objectifs</a> pour diminuer leur consommation énergétique et leur empreinte carbone. La directive européenne sur l’efficacité énergétique établit un cadre commun de mesures pour sa promotion dans l’Union. L’objectif étant de l’accroître de 20 % d’ici 2020.</p>
<p>Mais qu’en est-il réellement ?</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=287&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=287&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=287&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264684/original/file-20190319-60972-1o6n6cj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=360&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Facteurs de réduction des émissions de CO₂ entre le scénario « nouvelles politiques et développement durable ».</span>
<span class="attribution"><span class="source">Perspectives énergétiques mondiales (World Energy Outlook) 2017 de l’AIE (Figure 3.15).</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>« Faire mieux avec moins »</h2>
<p>Grâce aux politiques incitatives – comme le <a href="https://www.impots.gouv.fr/portail/particulier/le-credit-dimpot-transition-energetique">crédit d’impôt à la transition énergétique</a> – ou réglementaires – comme la <a href="https://www.ademe.fr/expertises/batiment/elements-contexte/politiques-vigueur/reglementation-thermique">réglementation thermique</a> –, mises en œuvre depuis plus de vingt ans, cette efficacité est devenue l’un des principaux facteurs influençant notre consommation énergétique.</p>
<p>Mais d’autres déterminants sont aussi à l’œuvre : citons l’activité économique qui, si elle est florissante, booste la consommation (et inversement en période de crise). Il y a également l’évolution démographique et la composition des ménages qui entrent en ligne de compte.</p>
<p>Les comportements individuels peuvent également initier une baisse de la consommation, que ce soit dans une démarche de sobriété volontaire, ou une situation subie de précarité. Si les structures économiques se modifient, par la tertiarisation par exemple, la consommation diminuera également. Enfin, les aléas climatiques ont un impact, notamment sur le chauffage en hiver ou la climatisation en été.</p>
<p>Entre 2000 et 2016, l’efficacité énergétique a permis d’économiser en France 307 TWh, selon <a href="http://www.odyssee-mure.eu/">Odyssee</a>, l’outil européen de mesure de cette efficacité. Autrement dit, sans ces efforts, le niveau de consommation de 2016 aurait été 18 % plus élevé.</p>
<p>Malheureusement, ces gains ont quasiment été compensés par les autres effets évoqués, comme la démographie et l’augmentation du nombre de ménages, les niveaux de vie et d’activité, impliquant une réduction réelle de consommation énergétique de 2 % seulement au cours de cette période.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264689/original/file-20190319-60956-pdcj76.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Variation de la consommation d’énergie finale en France entre 2000 et 2016 (en TWh).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Odyssee</span></span>
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<h2>Un instrument tous secteurs</h2>
<p>Les mesures d’efficacité énergétique peuvent se décliner dans nombre de secteurs d’activité.</p>
<p>Dans l’industrie, où les <a href="http://ympact.fr/blog/2017/10/18/les-moteurs-electriques-le-gisement-defficacite-energetique-industrielle-par-excellence/">moteurs électriques</a> utilisés pour transformer de l’énergie électrique en énergie mécanique, consomment jusqu’à 70 % de l’électricité du secteur, élaborer des normes permettant d’imposer des classes d’efficacité énergétique minimale, peut rendre possible d’importantes économies.</p>
<p>Pour les transports, différentes actions ont été mises en place pour les secteurs routier (de marchandises ou de particuliers), ferroviaire, fluvial et aérien. Parmi les mesures les plus emblématiques en France, on peut citer la prime à la conversion, accordée lorsque l’on remplace un ancien véhicule (diesel ou essence) par l’achat ou la location d’un <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32487">véhicule peu polluant</a>.</p>
<p>Dans le secteur du bâtiment (résidentiel et tertiaire), l’efficacité énergétique cible différents usages : promouvoir des chaudières plus performantes, une meilleure isolation thermique du logement, l’usage de chauffe-eau pour l’eau chaude, ou encore le remplacement d’appareils électriques peu performants (éclairage, réfrigérateur, lave-linge, etc.).</p>
<p>Si l’on évoque moins souvent les sites de production d’électricité, ils sont toutefois très consommateurs et peuvent avoir des rendements très variables – de <a href="https://www.worldenergy.org/wp-content/uploads/2016/10/EnergyEfficiencyAStraightPathFullReport.pdf">100 % de rendement</a> pour la production d’électricité à partir de renouvelable à 30-40 % de rendement pour les centrales thermiques conventionnelles (fonctionnant au charbon, par exemple). Parmi les mesures mises en œuvre dans ce secteur, on peut citer la conversion de centrales thermiques conventionnelles vers des technologies plus performantes, ou l’évolution du mix électrique vers une plus forte concentration de renouvelables.</p>
<h2>Réduire la consommation (pas le confort)</h2>
<p>On entend souvent dire que l’énergie la moins chère est celle que nous ne consommons pas. Mais à niveau de service égal, est-ce vrai ?</p>
<p>En cas de remplacement d’un équipement peu onéreux, l’achat de la nouvelle technologie performante est rapidement amorti grâce aux économies d’énergie engendrées. C’est le cas lorsqu’on privilégie des lampes fluorescentes ou même mieux, <a href="https://www.geo.fr/environnement/les-lampes-led-sont-elles-meilleure-pour-la-planete-193570">des LED</a>, aux lampes à incandescence très énergivores.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1108186488758566914"}"></div></p>
<p>Dans d’autres cas, l’investissement est freiné par un <a href="https://theconversation.com/un-parc-immobilier-decarbone-pour-2050-la-route-sera-longue-102992">coût fixe très élevé</a>, que l’on ne rentabilisera qu’à long terme. L’isolation thermique ou le changement de chaudière permettent une réduction significative de la consommation énergétique à niveau de confort égal, mais à un prix très conséquent. Par exemple, le coût d’une chaudière à condensation gaz varie entre 3 000 et 7 000 euros ; les travaux d’isolation thermique entre 40 et 120 euros par m<sup>2</sup>.</p>
<p>Dans les situations les plus extrêmes, certains ménages n’ont plus les moyens de payer leur facture énergétique : ils sont alors contraints de moins chauffer leur logement, au risque de tomber dans la <a href="https://theconversation.com/la-dependance-energetique-source-dinegalites-entre-les-menages-francais-108212">précarité énergétique</a>.</p>
<p>L’enjeu est donc de proposer des mesures d’accompagnement permettant de surmonter ces contraintes et de réduire la consommation sans modifier le niveau de confort des ménages. Bien pilotée, l’efficacité énergétique peut alors générer d’importantes réductions d’émissions de CO<sub>2</sub> à faibles coûts.</p>
<h2>Un potentiel important d’économies</h2>
<p>Si beaucoup s’accordent à dire que l’efficacité énergétique représente un fort potentiel d’économies d’énergie, et qu’elle doit être à ce titre <a href="http://europa.eu/rapid/press-release_STATEMENT-18-3997_en.htm">« la première énergie »</a>, les résultats sont plutôt décevants. Les progrès enregistrés jusqu’à présent sont loin d’être à la hauteur des attentes et les objectifs européens d’efficacité énergétique de 2020 – qui pour rappel sont d’accroître d’au moins 20 % l’efficacité énergétique – seront difficilement atteignables.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=374&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/264688/original/file-20190319-60956-5yq98q.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=470&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Consommation d’énergie primaire et finale de l’UE et tendance linéaire jusqu’à l’objectif de 2020.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Eurostat</span></span>
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<p>Depuis la reprise économique en 2014 au niveau de l’Union européenne, on observe une <a href="https://www.euractiv.com/section/energy/opinion/eu-at-risk-of-missing-2020-energy-efficiency-targets-lessons-for-2030/">augmentation de la consommation énergétique</a>. Elle demeure donc très sensible au niveau d’activité économique.</p>
<p>Aujourd’hui, nous ne parvenons pas encore à « découpler » la croissance économique de notre niveau de consommation énergétique. En plus de l’adoption de comportements plus vertueux, économes en énergie, et avec le déploiement des énergies décarbonées, l’efficacité énergétique doit prendre plus de place dans la transition énergétique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/113796/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Carine Sebi ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si l’efficacité énergétique recèle un potentiel important en matière d’économies d’énergie, ses résultats demeurent tributaires de la croissance économique.Carine Sebi, Assistant Professor - Economics, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1114032019-03-19T21:18:14Z2019-03-19T21:18:14ZÉconomies d’énergie, données personnelles, autoconsommation, ondes… Où en est Linky ?<p>Fin 2017, l’Europe comptait 60 millions de compteurs communicants électriques. En France, ce sont en moyenne 30 000 de ces appareils qui sont mis en place chaque jour <a href="https://www.enedis.fr/linky-compteur-communicant">par Enedis</a>, le gestionnaire du réseau. Fin 2018, 15 millions de compteurs Linky avaient ainsi été déployés dans les foyers français.</p>
<p>Destinés à mieux connaître la consommation d’énergie (et ainsi la réduire), ces appareils nouvelle génération doivent d’autre part permettre d’intégrer toujours davantage les énergies renouvelables dans la fourniture d’électricité. Ces promesses n’ont cependant pas manqué de <a href="https://theconversation.com/compteur-electrique-linky-comprendre-la-polemique-59769">susciter des craintes et des refus</a> d’installations dans l’Hexagone.</p>
<p>Près de quatre ans après le démarrage de son déploiement, où en est Linky ?</p>
<h2>Les compteurs communicants en Europe</h2>
<p>Suivant les conclusions positives d’une analyse sur le <a href="http://www.smartgrids-cre.fr/index.php?p=compteurs-europe">rapport coûts/avantages</a> de ces compteurs, seize pays (Suède, Italie, Finlande, Malte, Espagne, Autriche, Pologne, Royaume-Uni, Estonie, Roumanie, Grèce, France, Pays-Bas, Danemark, Luxembourg, Irlande) de l’Union européenne ont décidé d’équiper d’ici 2021 tous leurs foyers en compteurs communicants électricité ; et sept pays (Italie, Autriche, Royaume-Uni, France, Pays-Bas, Luxembourg, Irlande) en compteurs gaz.</p>
<p>Si en Finlande, Suède et Italie, le déploiement de ces nouveaux appareils est achevé depuis plusieurs années, en France, le remplacement des 35 millions de compteurs électriques devrait s’étendre jusqu’en 2022.</p>
<p>La majorité des pays de l’Union européenne a opté pour le déploiement généralisé de ces appareils, en particulier dans le cas de gestionnaires de réseaux de distribution couvrant de larges parties du territoire, comme c’est le cas en <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52014DC0356&from=EN">France</a> par exemple.</p>
<p>Pour certains pays, le déploiement ne concernera dans un premier temps qu’une sélection de sites. Outre-Rhin, sont d’abord installés des compteurs communicants auprès des plus gros consommateurs d’électricité, soit environ 10 millions d’appareils d’ici 2020, pour atteindre les 44 millions en 2032 et équiper ainsi tous les ménages.</p>
<p>Précisons que les compteurs déployés au niveau européen ou mondial n’apportent pas nécessairement de nouveaux services au consommateur. La France, elle, a décidé de mettre l’accent sur de tels services.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/un-reseau-electrique-mondial-et-base-sur-les-renouvelables-ce-nest-plus-de-la-science-fiction-112976">Un réseau électrique mondial et basé sur les renouvelables, ce n’est plus de la science-fiction</a>
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<h2>La question des économies d’énergie</h2>
<p>Par rapport aux anciens appareils, les compteurs communicants permettent aux ménages d’être facturés pour leur consommation réelle, sur une base mensuelle. Il ne s’agit plus d’une estimation pour l’année, accompagnée d’une régularisation ponctuelle. Linky permet d’autre part d’accéder à des données plus précises concernant la consommation globale d’un logement (par mois, par semaine, par jour, par heure…).</p>
<p>Les différents études ou projets <a href="https://www.ademe.fr/systemes-electriques-intelligents-premiers-resultats-demonstrateurs">suivis par l’Ademe</a> montrent que l’accès à une information plus précise est une opportunité pour les consommateurs de mieux connaître, comprendre et potentiellement agir pour réduire leur consommation d’énergie. Pour les particuliers, ces économies d’électricité peuvent aller de quelques pour cent <a href="https://www.ecoco2.com/wp-content/uploads/2017/12/livre-blanc-web.pdf">jusqu’à 10 %</a> pour les plus gros consommateurs. Ces performances dépendent toutefois fortement des conditions d’accompagnement des ménages.</p>
<p>En pouvant visualiser et vérifier la puissance souscrite via leur abonnement, les consommateurs peuvent enfin l’adapter auprès de leurs fournisseurs si besoin.</p>
<p>Pour les « petits » professionnels, également concernés par le déploiement du comptage communicant, les services et fonctionnalités proposés sont les mêmes que pour les particuliers. Avec des niveaux de consommations souvent plus élevés, les bénéfices peuvent se montrer d’autant plus intéressants pour eux.</p>
<h2>Le rôle de Linky dans l’autoconsommation</h2>
<p>Depuis début 2017, toute nouvelle installation PV est équipée automatiquement du compteur Linky : ceci permet environ 600 euros TTC d’économie sur les frais de raccordement. En effet, le compteur communicant peut compter à la fois l’électricité consommée mais également l’électricité produite. Il remplace ainsi deux compteurs.</p>
<p>Tout comme pour la consommation, il est possible de suivre sur son espace personnel <a href="http://www.ademe.fr/avis-lademe-lautoconsommation-delectricite-dorigine-photovoltaique">sa production par jour</a>, par semaine ou par mois. De la même manière, il est possible d’accéder à des points 30 mn ou 1h (l’équivalent de la courbe de charge pour la consommation) de façon à suivre précisément sa production au sein même d’une journée.</p>
<p>Ces relèves plus fréquentes vont également permettre de mieux prévoir les consommations au niveau national et local. Aujourd’hui, les erreurs de prévisions dans la consommation entraînent le recours à différents mécanismes pour équilibrer le réseau, notamment des moyens de production très émetteurs de gaz à effet de serre. De meilleures prévisions devraient donc permettre de réduire le recours à ces énergies fortement carbonées, et de mieux insérer les énergies renouvelables.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"783924761676029952"}"></div></p>
<h2>Que deviennent les données des usagers ?</h2>
<p>Les compteurs relèvent par défaut une donnée globale par jour pour tout le logement (appelé « index »). Pour aller plus loin, le ménage peut, s’il le souhaite, activer la relève de données horaires (appelées « courbe de charge ») pour mieux comprendre le détail de sa consommation heure par heure. De la même façon que pour les données quotidiennes, ces données horaires sont relevées une fois par jour, dans la nuit ; il est possible d’y accéder le lendemain sur son espace personnel.</p>
<p>Comme pour les anciens compteurs, les <a href="https://www.cnil.fr/fr/linky-gazpar-quelles-donnees-sont-collectees-et-transmises-par-les-compteurs-communicants">données sont collectées</a> par les distributeurs dans le cadre de leurs missions de service public. Ces données appartiennent au particulier, qui est le seul à pouvoir y donner accès. Même son fournisseur n’a accès qu’à une donnée mensuelle pour la facturation. Pour pouvoir lui proposer des services sur la base de ses données plus précise, comme pour tous les fournisseurs de services, il est nécessaire d’obtenir un consentement clair et éclairé de la part du particulier.</p>
<p>Ces accords sont conclus pour des durées bien définies, maximum un an pour des données horaires (<a href="https://www.cnil.fr/fr/compteurs-communicants-linky-la-position-de-la-cnil-sur-le-stockage-local-de-la-courbe-de-charge-0">courbe de charge</a>) et deux ans pour des données quotidiennes (index). Les particuliers peuvent vérifier et révoquer à tout moment l’accès qu’ils ont consenti à un ou différents acteurs tiers, toujours via leur espace personnel.</p>
<p>Les distributeurs veillent à la sécurité des données et au respect de la vie privée, en totale application des lois et en respectant les recommandations de la CNIL.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-secteur-de-lelectricite-reussira-t-il-sa-mue-numerique-65390">Le secteur de l’électricité réussira-t-il sa mue numérique ?</a>
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<h2>À propos des ondes émises</h2>
<p>Pour transférer ses données de comptage au concentrateur de « quartier », un compteur communicant électrique n’utilise pas d’ondes radio mais directement le câble et le courant électriques (technologie dite des « courants porteurs en ligne » ou CPL). Cette technologie est déjà utilisée, pour l’électricité, dans la transmission des signaux heures pleines/heures creuses, et également pour des applications Internet domestiques (communications entre la « box Internet » et la « box télé » d’un logement, par exemple).</p>
<p>Comme tout appareil ou signal électrique, le compteur et le signal CPL produisent un champ électromagnétique qui se dissipe avec la distance. Les compteurs Linky « ne sont donc pas des émetteurs radioélectriques », rappelle l’Agence nationale des fréquences (ANFR), agence publique reconnue, spécialiste des champs électromagnétiques, pour qui « le compteur Linky ne conduit pas à une augmentation significative du niveau de champ électromagnétique ambiant ».</p>
<p><a href="https://www.anfr.fr/controle-des-frequences/exposition-du-public-aux-ondes/la-maison-anfr/">Les campagnes de mesure</a> réalisées sur les compteurs communicants par l’ANFR ont mis en évidence des niveaux d’exposition aux champs électromagnétiques très faibles et très inférieurs aux valeurs limites réglementaires. Ils sont ainsi comparables à ceux émis par les dispositifs électriques ou électroniques domestiques.</p>
<p>En effet, en effectuant des mesures d’ondes à 50 cm du compteur dans des situations réelles, l’ANFR mesure des expositions à des champs électriques de 0,1 V/m pour les compteurs communicants, ce qui est par exemple comparable aux champs d’un téléphone sans fil de maison, d’un ordinateur portable ou d’une tablette en wifi (0,4 V/m), et inférieur à une box wifi (2,8 V/m) ou une plaque à induction (30 V/m), toujours à 50 cm.</p>
<p>Ceci confirme les <a href="https://www.anses.fr/fr/content/compteurs-communicants-de-nouvelles-donn%C3%A9es-qui-ne-remettent-pas-en-cause-les-conclusions-de">conclusions de l’Anses</a> qui indique une « faible probabilité » que l’exposition aux champs électromagnétiques émis par les compteurs communicants, dans l’actuelle configuration de déploiement, engendre des effets sanitaires à court ou long terme.</p>
<p>Comme l’a rappelé le Conseil d’État en <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?idTexte=CETATEXT000027198463">mars 2013</a>, le compteur Linky respecte l’ensemble des normes en vigueur concernant l’exposition aux champs électromagnétiques et notamment les seuils fixés par l’OMS. L’ANFR l’a confirmé récemment. Les mesures qu’elle a réalisées en laboratoire et chez des particuliers montrent que le champ électrique varie entre 0,25 et 0,8 volt par mètre (V/m) à 20 cm, même en communication, soit très en dessous de la valeur limite réglementaire de 87 V/m et d’autres équipements du logement.</p>
<h2>Des points à faire évoluer</h2>
<p>Aujourd’hui la seule communication régulière de l’index de consommation n’est pas suffisante pour déclencher des évolutions de comportement des ménages en matière d’économies d’énergie. En effet, la consommation quotidienne est le résultat de contraintes sociales (modes de vie) et matérielles (dispositifs techniques, qualité du bâti…) qui limitent fortement les marges de manœuvre des ménages.</p>
<p>Les fournisseurs de services, les gestionnaires de réseau, les collectivités et l’État doivent donc améliorer les dispositifs d’information (espace en ligne, applications, affichage « déporté »…) mais aussi d’accompagnement pour permettre aux ménages de tout d’abord mieux évaluer sa consommation. La piste de l’autocomparaison, c’est-à-dire la comparaison avec sa consommation des périodes (années, mois…) précédentes, semble ici un recours intéressant.</p>
<p>Pour encourager les consommateurs à faire des économies d’énergie, les sources de motivation peuvent être multiples (confort, économie financière, engagement écologique…). Enfin, ils doivent pouvoir bénéficier de conseils personnalisés sur la façon de réaliser des économies d’énergie. Les études s’accordent sur le besoin de <a href="https://www.ademe.fr/compteurs-communicants-gaz-pratiques-menages-economies-denergie">conseils très précis</a> sur ce que le ménage peut faire dans sa situation (étant donné ses contraintes propres).</p>
<p>Pour les compteurs communicants, la prise en main doit ainsi parvenir à être simple et en bonne adéquation avec les besoins des particuliers.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/111403/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Raphaël Gerson ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En France, le remplacement des 35 millions de compteurs électriques devrait s’étendre jusqu’en 2022.Raphaël Gerson, Chef adjoint du service « Réseaux énergies renouvelables », Ademe (Agence de la transition écologique)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1060992018-11-01T21:19:22Z2018-11-01T21:19:22ZAutonomie des voitures électriques, quand le mieux devient l’ennemi du bien<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/243521/original/file-20181101-83632-224hhl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=20%2C234%2C6749%2C4020&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La voiture électrique représente un peu plus de 1 % des immatriculations de voitures neuves en France en 2017.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/electric-car-charging-on-parking-station-523890190?src=H7wvbyoBmvB891sLMh2avw-1-3">Nick Starichenko/Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>En 2016, un <a href="https://www.ipsos.com/fr-fr/les-francais-de-plus-en-plus-branches-la-voiture-electrique">sondage réalisé par Ipsos</a> indiquait que près de 60 % des personnes interrogées jugeaient insuffisante l’autonomie des voitures électriques ; et 30 % d’entre eux souhaitaient voir cette autonomie atteindre les 500 km.</p>
<p>Face à une telle demande, les constructeurs redoublent d’efforts pour <a href="https://www.lesnumeriques.com/voiture/renault-zoe-ze40-autonomie-doublee-a3187.html">augmenter les capacités d’autonomie</a> de leurs véhicules.</p>
<p>La voiture électrique représente aujourd’hui un maillon essentiel d’une mobilité plus respectueuse de l’environnement, même si sa part dans les ventes de véhicules neufs en France reste encore modeste. Elle offre de nombreux avantages, tout particulièrement en zone urbaine : très faibles émissions pendant le roulage, absence de bruit à faible vitesse, récupération de l’énergie de freinage.</p>
<p>Mais son bilan environnemental global doit cependant être analysé avec attention. Il faut ainsi regarder de près les émissions de gaz à effet de serre relatifs à la production électrique et, plus globalement, l’ensemble des impacts environnementaux de cette mobilité.</p>
<p>Les <a href="https://www.transportenvironment.org/publications/electric-vehicle-life-cycle-analysis-and-raw-material-availability">analyses de cycle de vie</a> (ACV) – qui portent sur l’intégralité de la vie d’un produit depuis l’extraction des matières premières jusqu’au recyclage en fin de vie – permettent de telles évaluations.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/240471/original/file-20181013-109210-1b2ivc5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/240471/original/file-20181013-109210-1b2ivc5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/240471/original/file-20181013-109210-1b2ivc5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=315&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/240471/original/file-20181013-109210-1b2ivc5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=315&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/240471/original/file-20181013-109210-1b2ivc5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=315&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/240471/original/file-20181013-109210-1b2ivc5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=395&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/240471/original/file-20181013-109210-1b2ivc5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=395&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/240471/original/file-20181013-109210-1b2ivc5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=395&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Répartition des ventes de voitures neuves en France en 2017.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ademe.fr/evolution-marche-caracteristiques-environnementales-techniques-vehicules-particuliers-neufs-vendus-france">Ademe</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Poids de la batterie et temps de recharge</h2>
<p>Parmi les différents constituants d’un véhicule électrique, c’est la <a href="https://www.ivl.se/english/startpage/top-menu/pressroom/press-releases/press-releases---arkiv/2017-06-21-new-report-highlights-climate-footprint-of-electric-car-battery-production.html">batterie qui soulève le plus de questions</a> relativement au bilan environnemental.</p>
<p>Tout d’abord, sa densité d’énergie est faible – il faut plus de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Densit%C3%A9_d%27%C3%A9nergie">60 kg de batterie lithium</a> pour remplacer un litre d’essence, ce qui limite l’autonomie des véhicules. D’autre part, la durée de recharge est trop longue. Enfin, son <a href="https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/voiture-electrique-voitures-electriques-moins-cheres-essences-ici-2025-69436/">prix est élevé</a> et sa durée de vie difficilement prévisible. Autant de limites qui expliquent les nombreux efforts de recherche réalisés actuellement pour améliorer les performances des batteries des véhicules électriques.</p>
<p>Si tout progrès en matière de prix et de durée de vie peut être salué sans ambiguïté – encore qu’il convienne de vérifier que ce ne soit pas au détriment de l’impact environnemental ou des conditions de travail dans la chaîne de production –, la situation s’avère toutefois plus complexe pour la course à l’autonomie et la rapidité de la recharge.</p>
<p>Les voitures électriques présentent en effet aujourd’hui une autonomie largement supérieure aux besoins quotidiens de la majorité des automobilistes (<a href="http://www.avere-france.org/Site/Article/?article_id=7408">80 % des déplacements</a> font moins de 50 km). Mais une surenchère dans la recherche de l’autonomie peut conduire à embarquer un poids important de batterie (plusieurs centaines de kilos) le plus souvent « inutilisé ». Ceci va clairement à l’encontre de l’efficacité énergétique.</p>
<p>Si des progrès concernant la densité d’énergie des batteries leur permettent sans aucun doute d’être de plus en plus légères, il est cependant difficile de prédire l’échéance et la marge de gain de ces futures avancées.</p>
<p>Une autonomie étendue, même avec une batterie allégée, soulève toujours la question du temps de recharge. Il n’est certainement guère utile d’avoir une autonomie de plus 500 km si l’on doit attendre plus de 24 heures pour recharger complètement sa batterie sur une prise « domestique » de puissance 3 kW.</p>
<p>Pour répondre à cette situation, on voit se développer des <a href="https://www.autoroutes.fr/fr/bornes-recharge.htm">stations de recharge rapide</a>, voire ultra-rapide, de très forte puissance. Dans ce contexte, le Conseil européen de l’innovation vient de lancer en février 2018 une action « Horizon Prize » sur des <a href="http://www.horizon2020.gouv.fr/cid127277/prix-eic-horizon-2018-batteries-innovantes-pour-vehicules-electriques.html">batteries innovantes pour véhicules électriques</a>.</p>
<p>Il y est précisé que « les prototypes réalisés devront être capables de se recharger dans un temps équivalent à celui nécessaire pour un plein d’essence ». Par ailleurs, plusieurs constructeurs de voitures et de bornes annoncent des recharges ultra-rapides de puissance comprise entre <a href="http://www.avere-france.org/Site/Article/?article_id=7316">150 et 350</a> kW.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1056817915725369345"}"></div></p>
<h2>La question des installations</h2>
<p>On le voit, la course à l’autonomie va de pair avec la course à la puissance de recharge.</p>
<p>Ce type de solutions soulève toutefois de nombreux problèmes, en premier lieu dans le domaine de la technique. Un appel de puissance de 350 kW correspond en effet pratiquement aux besoins d’un quartier de plus d’une cinquantaine d’habitations. On imagine la difficulté de gestion d’un réseau sur lequel de tels appels de puissance apparaissent à l’improviste !</p>
<p>Il faut largement surdimensionner les installations de production, de protection et de distribution de l’électricité pour éviter que le réseau disjoncte et plonge dans le noir des milliers d’usagers. Face à cela, certains constructeurs, comme <a href="https://www.automobile-propre.com/renault-charge-rapide-alimentee-batteries-usagees/">Renault</a>, imaginent doter ces stations de recharge ultra-rapide de moyens de stockage d’électricité pour soulager le réseau des appels de puissance.</p>
<p>Mais de tels dispositifs se heurtent à la difficulté de stocker, à moyen ou long terme, de l’électricité. Une citerne d’essence peut attendre sans aucun dommage le passage hypothétique d’un usager mais ce n’est pas le cas d’une batterie qui va se décharger, vieillir même sans utilisation et nécessiter une surveillance électronique, voire même un stockage climatisé.</p>
<p>À cela se rajoute une contrainte d’ordre économique. Ce réseau de stations ultra-rapides doit être suffisamment utilisé pour assurer une certaine rentabilité aux investissements colossaux – une seule borne de recharge rapide peut coûter plus de 40 000 €. Plus le réseau est dense et utilisé, plus les investissements sont élevés. En petit nombre, ces stations n’assurent pas la « continuité » de service escomptée, en grand nombre, elles peuvent mettre en danger le réseau électrique.</p>
<p>Un équilibre doit donc être trouvé entre contraintes économiques et technologiques.</p>
<h2>Changer nos comportements</h2>
<p>Vouloir favoriser le déploiement des voitures électriques par la possibilité de recharge rapide aboutit donc à un risque de surdimensionnement des technologies et des investissements qui peut remettre en cause le modèle économique et le bilan environnemental de l’électromobilité.</p>
<p>En l’état actuel, les batteries de voitures électriques sont à même d’assurer la grande majorité des besoins de mobilité urbaine, voire péri-urbaine. Leur demander de satisfaire les besoins de mobilité sur de grandes distances est un challenge technologique et scientifique motivant, mais dont les retombées sociétales et environnementales sont incertaines.</p>
<p>Le problème vient de la volonté de substituer nos véhicules à essence par des véhicules électriques. Il y a un réel danger à faire croire que la voiture électrique pourra faire tout ce que la voiture à essence fait.</p>
<p>Focaliser sur la course à l’autonomie du véhicule électrique, c’est oublier que changer l’énergie de notre mobilité n’est pas le seul objectif de la transition énergétique en cours. L’électromobilité ne sera pas durable parce qu’électrique, mais parce que conçue pour être durable.</p>
<p>Déplacer une seule personne dans un véhicule de plus d’une tonne n’est pas plus « durable » que la motorisation soit à essence ou électrique. En plus d’une réduction des émissions d’un véhicule, il est primordial de réduire les masses, d’augmenter le taux de remplissage des véhicules, de diminuer le nombre de voitures en circulation, d’adopter une conduite économe, de diversifier nos moyens de transport, etc.</p>
<p>En clair, il faut changer nos comportements de mobilité.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1053268548259364865"}"></div></p>
<h2>Développer des alternatives</h2>
<p>Les conclusions des récentes <a href="https://www.assisesdelamobilite.gouv.fr/syntheses.html">Assisses de la mobilité</a> organisées fin 2017 par le ministère de la Transition écologique et solidaire vont dans ce sens. Et dans ce cadre, la synthèse de l’atelier <a href="http://www.ppmc-transport.org/wp-content/uploads/2016/04/AssisesMobilite%CC%81France_GreenGroup.pdf">« Réduire notre empreinte environnementale – mobilités plus propres »</a>, si elle appelle à « développer le réseau de recharge des véhicules électriques » ne pointe absolument pas un besoin impérieux d’autonomie des véhicules électriques et encore moins de stations de recharge ultra-rapide.</p>
<p>Les orientations proposées sont plutôt de développer les alternatives à la voiture individuelle (marche, vélo, transport en commun…).</p>
<p>La voiture électrique possède de nombreux atouts pour transformer notre mobilité, y compris avec le niveau actuel de performance en autonomie des batteries. Vouloir à tout prix augmenter cette autonomie risque d’être contre-productif pour une mobilité durable. N’est-ce pas le moment de méditer sur l’avertissement de Jacques dans <a href="https://www.fayard.fr/pluriel/le-bluff-technologique-9782818502273"><em>Le Bluff technologique</em></a> (1988) lorsqu’il écrivait que « le progrès technologique soulève des problèmes plus difficiles que ceux qu’il résout » ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/106099/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Serge Pelissier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La course à l’autonomie des véhicules électriques va de pair avec la course à la puissance de recharge, ce qui ne manque pas de poser de nombreuses questions techniques.Serge Pelissier, Chercheur sur le stockage de l’énergie dans les transports, Université Gustave EiffelLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/948822018-04-13T04:24:13Z2018-04-13T04:24:13ZHausse du prix européen du carbone : feu de paille ou changement durable ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/214524/original/file-20180412-536-1qdtsl3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-illustration/man-turning-carbon-dioxide-knob-reduce-789727018">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Entre 2011 et 2017, le <a href="https://ec.europa.eu/clima/policies/ets_fr">marché du carbone européen</a> a gravement dysfonctionné avec un prix moyen du quota d’environ 6 €/tCO<sub>2</sub> ; c’est bien trop bas pour orienter les investissements vers les solutions bas carbone. Par exemple, dans le secteur électrique, ce prix est resté insuffisant pour décourager l’utilisation de centrales fonctionnant au charbon, de loin le combustible le plus émetteur de CO<sub>2</sub>.</p>
<p>Contrastant avec cette longue phase d’anémie, le prix du quota a plus que doublé depuis août dernier. Est-ce un feu de paille ou un changement durable d’orientation ?</p>
<p>D’après les travaux de modélisation de la chaire <a href="https://www.chaireeconomieduclimat.org/">Économie du climat</a>, ce retournement pourrait être durable car la réforme récemment adoptée à Bruxelles va fortement réduire le plafond autorisé d’émission d’ici 2030. En revanche, elle ne permettra pas au régulateur de faire face à de nouveaux chocs non anticipés qui pourraient demain déstabiliser à nouveau le marché.</p>
<h2>Les mécanismes économiques en jeu</h2>
<p>Introduit en 2005, le système d’échange de quotas européen couvre aujourd’hui un peu plus de 15 000 installations industrielles, à l’origine de la moitié des émissions européennes de CO<sub>2</sub>. Il fonctionne suivant un mécanisme de <a href="https://ec.europa.eu/clima/policies/ets/cap_fr">plafonnement du volume total des émissions</a> qui fixe l’ambition du système. Les entreprises soumises au système peuvent acheter ou vendre des quotas, avec l’obligation de restituer chaque année un volume de quotas égal à leurs émissions. Le prix d’équilibre du quota dépend donc du niveau du plafond fixé par le régulateur. Plus ce plafond est contraignant, plus la rareté de l’offre est élevée et plus le prix du quota sera haut.</p>
<p>Pour redresser le prix sur un tel marché, il suffirait donc d’accroître l’ambition du système en abaissant le plafond. Mais ce qui paraît simple n’en est pas pour autant facile à réaliser politiquement, avec 28 États membres qui ont beaucoup de difficulté à s’accorder sur un niveau commun de contrainte.</p>
<p>Face à l’impossibilité de s’entendre rapidement sur une réduction adéquate du plafond, la Commission a engagé, en 2012, un processus tortueux de réformes consistant d’abord à modifier le calendrier des enchères, puis à soumettre un paquet de mesures, d’apparence technique, définissant les règles de fonctionnement du marché sur la période 2021 à 2030 (voir le graphique ci-dessous).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/214518/original/file-20180412-549-2mgdo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/214518/original/file-20180412-549-2mgdo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/214518/original/file-20180412-549-2mgdo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/214518/original/file-20180412-549-2mgdo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/214518/original/file-20180412-549-2mgdo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/214518/original/file-20180412-549-2mgdo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/214518/original/file-20180412-549-2mgdo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/214518/original/file-20180412-549-2mgdo.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Chaire Économie du climat (d’après ICE-Futures)</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>En 2008, le prix du quota avoisinait les 25 €/tCO<sub>2</sub>. Le prix s’est ensuite délité à cause de la dégradation du contexte économique, des politiques de soutien aux renouvelables et à l’efficacité énergétique, et du choc d’offre lié à l’utilisation de crédits Kyoto. À partir de 2012, la Commission européenne lance des réformes successives dont la plus récente vient d’être adoptée. Le prix a depuis bondi pour atteindre environ 13€/tCO<sub>2</sub>, un niveau qu’il n’avait pas atteint depuis 2011.</em></p>
<p>Validées fin 2017 par le Parlement et le Conseil européens, ces règles comportent deux volets : une accélération de la baisse annuelle du plafond menant à une cible de réduction d’émission de 43 % en 2030 par rapport à 2005 ; la mise en place d’une <a href="https://ec.europa.eu/clima/policies/ets/reform_fr">« réserve de stabilité »</a> qui agit comme une pompe retirant ou remettant des quotas sur le marché en fonction de la quantité de quotas en circulation.</p>
<p>Pour anticiper correctement les effets de la réforme, il faut par conséquent évaluer l’impact de la réserve de stabilité sur le plafond d’émission, ce qui peut être fait à l’aide d’un outil de modélisation.</p>
<h2>Un modèle qui éclaire les dysfonctionnements</h2>
<p>Pour représenter correctement le futur, un modèle doit être capable de retracer le passé. Pour y parvenir, le <a href="https://www.chaireeconomieduclimat.org/publications/interviews/3-questions-a-raphael-trotignon/">modèle Zephyr</a> simule le comportement des entreprises couvertes qui décident de leurs programmes de réduction d’émission en minimisant leurs coûts de mise en conformité par une répartition de leurs efforts de réduction sur trois horizons temporels possibles : l’année courante, le moyen terme (3 ans) et le long terme (15 ans).</p>
<p>Un premier enseignement est que la demande de quotas a été fortement affectée à la baisse à partir de 2008 par trois chocs non anticipés expliquant les faibles niveaux de prix du quota alors observés.</p>
<p>Ces chocs concernent la dégradation économique à la suite de la récession de 2009 ; les politiques de soutien aux <a href="https://theconversation.com/energies-renouvelables-leolien-le-solaire-et-le-bois-sont-les-plus-competitifs-70226">énergies renouvelables</a> et à l’efficacité énergétique non-coordonnées avec la régulation du marché du carbone ; enfin, un choc d’offre qui a résulté de l’utilisation d’environ un milliard de crédits au titre du protocole de Kyoto qui sont venus s’ajouter au plafond initialement fixé.</p>
<p>Pour comprendre la formation du prix, un deuxième enseignement de la simulation concerne le rôle pivot joué par les anticipations de la contrainte de long terme par les entreprises. À la suite de la conjonction de ces trois chocs, la <a href="https://ec.europa.eu/clima/sites/clima/files/ets/reform/docs/com_2012_652_fr.pdf">masse de quotas rendue disponible</a> aurait en effet permis aux entreprises, sans anticipation d’une contrainte de long terme, de se mettre en conformité avec un prix du carbone nul.</p>
<h2>L’action de la réserve de stabilité</h2>
<p>L’utilisation du modèle en mode prospectif a été réalisée en retenant des hypothèses de croissance économique modérée et de poursuite des politiques nationales de soutien aux renouvelables et à l’efficacité énergétique non coordonnées avec la gestion du marché.</p>
<p>Sous ces hypothèses, la <a href="https://www.chaireeconomieduclimat.org/publications/policy-briefs/marche-carbone-europeen-impacts-de-reforme-de-reserve-de-stabilite-a-lhorizon-2030/">réserve de stabilité</a> agit uniquement comme une pompe aspirante : à partir de sa mise en place l’an prochain, elle retirerait des quotas du marché chaque année, ce qui équivaut à un resserrement additionnel du plafond.</p>
<p>Il en résulte dans le scénario central une hausse du prix du quota de CO<sub>2</sub> qui atteint 25 €/tCO<sub>2</sub> en 2020 et 38 €/tCO<sub>2</sub> en 2030, soit des niveaux plus de deux fois supérieurs à ceux attendus en l’absence de la réforme. La modélisation indique également que cette hausse sera plus rapide si les entreprises anticipent dès le démarrage le resserrement du plafond provoqué par l’action de la réserve (voir le graphique ci-dessous).</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/214520/original/file-20180412-584-3wsvvw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/214520/original/file-20180412-584-3wsvvw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/214520/original/file-20180412-584-3wsvvw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=409&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/214520/original/file-20180412-584-3wsvvw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=409&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/214520/original/file-20180412-584-3wsvvw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=409&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/214520/original/file-20180412-584-3wsvvw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=514&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/214520/original/file-20180412-584-3wsvvw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=514&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/214520/original/file-20180412-584-3wsvvw.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=514&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Chaire Économie du climat</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Ce graphique représente l’évolution observée du prix sur le marché (zone grise) ainsi que le prix simulé par le modèle, sans réformes (ligne grise) ou avec les réformes à partir de 2018 (zone orange). Le haut de la zone orange représente le cas où les entreprises anticipent parfaitement la baisse du plafond induite par la réserve ; le bas de la zone orange représente la même situation sans cette anticipation. Le ligne orange représente le scénario central entre ces deux extrêmes.</em></p>
<p>Cette nouvelle trajectoire d’émissions correspond à des réductions de l’ordre de 50 % en 2030 par rapport au niveau de 2005, autrement dit à une augmentation des objectifs européens jusqu’à présent fixés à 43 %. Sous cet angle, la réforme semble donc répondre aux objectifs de rehaussement de l’ambition européenne, par un curieux tour de passe-passe technocratique de la Commission qui est parvenue à introduire subrepticement de nouvelles cibles de politique climatique.</p>
<h2>Les enseignements des systèmes hybrides</h2>
<p>Mais les dysfonctionnements passés pourraient se reproduire. Nos simulations montrent qu’en cas de chocs futurs non anticipés, comme une récession économique de l’ampleur de celle de 2009 ou une accélération des politiques nationales en faveur des énergies renouvelables, la réserve de stabilité ne permettrait pas de prévenir une <a href="https://www.chaireeconomieduclimat.org/publications/policy-briefs/marche-carbone-europeen-impacts-de-reforme-de-reserve-de-stabilite-a-lhorizon-2030/">retombée prolongée du prix</a>.</p>
<p>Cela est dû au fait que le jeu de réformes décidées ne modifie en rien la gouvernance du marché qui reste marquée par une grande lourdeur des processus de décision et ne permet pas au régulateur de réagir aux chocs qui, bien que non prévisibles, ne manqueront pas de se produire.</p>
<p>C’est pourquoi les mesures récemment adoptées ne mettent pas un point final aux réflexions sur les réformes nécessaires pour solidifier le système de tarification commun de CO<sub>2</sub> en Europe. On ne doit notamment pas balayer d’un revers de la main les propositions alternatives de mise en place d’un prix plancher portées par certains États membres.</p>
<p>Comme le montre l’exemple du <a href="https://www.arb.ca.gov/cc/capandtrade/capandtrade.htm">marché californien</a>, aujourd’hui élargi au Québec et à l’Ontario, de tels mécanismes conduisent à des systèmes hybrides, où le marché se transforme en un dispositif de quasi-taxation en cas de déséquilibre structurel du marché. Dans le monde incertain dans lequel nous vivons, de tels systèmes hybrides semblent plus à même de délivrer un signal prix robuste de nature à accélérer la marche vers une <a href="https://theconversation.com/quel-climat-preparons-nous-pour-demain-87454">économie bas carbone</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/94882/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Depuis août dernier, le prix du quota sur le marché européen du carbone a connu une nette hausse qui pourrait s’avérer durable.Raphael Trotignon, Programme de recherche « Prix du CO2 et innovation bas-carbone », chaire Économie du climat, Université Paris Dauphine – PSLChristian de Perthuis, Professeur d’économie, fondateur de la chaire Économie du climat, Université Paris Dauphine – PSLSimon Quemin, Chercheur, Chaire Économie du climat et Attaché d'enseignement, Université Paris-Dauphine (PSL), Université Paris Dauphine – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/761852017-04-13T19:46:48Z2017-04-13T19:46:48ZQuelle politique énergétique pour la France ? Les experts préconisent…<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/165316/original/image-20170413-25870-34fjjv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Améliorer l'efficacité énergétique des bâtiments : une solution privilégiée.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.maroc-energies.com/wp-content/uploads/2013/02/efficacit%C3%A9-%C3%A9nerg%C3%A9tique.jpg">Maroc-Energie</a></span></figcaption></figure><p>Le Baromètre du marché de l’énergie conduit par <a href="http://www.grenoble-em.com/">Grenoble École de Management</a> interroge (de façon anonyme) une centaine de spécialistes sur ce que devraient être les priorités de la politique énergétique des cinq prochaines années. La question posée pour cette visualisation est : sur quels axes devrait se focaliser la politique énergétique française dans les cinq prochaines années ? (donnez les trois axes les plus pertinents selon vous).</p>
<iframe src="https://datawrapper.dwcdn.net/az1hC/4/" frameborder="0" allowtransparency="true" allowfullscreen="allowfullscreen" webkitallowfullscreen="webkitallowfullscreen" mozallowfullscreen="mozallowfullscreen" oallowfullscreen="oallowfullscreen" msallowfullscreen="msallowfullscreen" width="100%" height="620"></iframe>
<p>La réponse des experts est sans équivoque : améliorer l’efficacité énergétique devrait être la priorité de la politique énergétique des cinq prochaines années. Une telle politique permettrait de réduire les émissions de gaz à effet de serre, en ligne avec la Plateforme de Paris et les horizons européens. En effet, plusieurs études estiment que 50 % des objectifs de réduction d’émission de gaz à effet de serre fixés pour 2050 pour l’UE-27 peuvent être atteints en mettant en place des <a href="http://www.roadmap2050.eu/attachments/files/EnergySavings2020-FullReport.pdf">politiques d’efficacité énergétique</a>.</p>
<p>Outre lutter contre le changement climatique, améliorer l’efficacité énergétique génère également des <a href="https://www.iea.org/publications/freepublications/publication/capturing-the-multiple-benefits-of-energy-efficiency.html">bénéfices</a> à l’échelle locale : réduction des coûts pour les ménages et les entreprises, création d’emploi et diminution de la dépendance aux importations d’énergie.</p>
<p>Enfin les experts interrogés dans le cadre du baromètre estiment nécessaire de faciliter la décentralisation du secteur de l’électricité. Dans un pays où ce secteur est encore hypercentralisé et dominé par un acteur historique, ce résultat reflète un besoin de démocratisation de la transition énergétique au sein de laquelle une multitude d’acteurs doit pouvoir trouver sa place.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/76185/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une visualisation du baromètre GEM du marché de l’énergie. Aujourd’hui : la politique énergétique.Anne-Lorène Vernay, Chargée de cours en stratégie, Grenoble École de Management (GEM)Joachim Schleich, Professor of Energy Economics, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/752442017-04-10T19:22:01Z2017-04-10T19:22:01ZLa méthode BIM, un atout pour construire plus écolo<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/164578/original/image-20170409-29399-10t3s2v.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C1205%2C512&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un exemple de modélisation réalisée grâce au BIM. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.autodesk.fr/solutions/building-information-modeling/overview">Autodesk</a></span></figcaption></figure><p>La récente tenue du salon <a href="https://www.bim-w.com/">BIM World</a> à la Défense les 29 et 30 mars dernier nous donne l’occasion de revenir sur cette technique de construction, devenue obligatoire en France cette année pour les marchés publics.</p>
<p>BIM est un sigle anglophone qui désigne la « modélisation des données du bâtiment » (<em>building information modeling</em>). Il s’agit de maquettes numériques permettant d’intégrer, de produire, de gérer et de visualiser les données liées à la construction.</p>
<p>Le BIM existe depuis plus d’une décennie ; il est obligatoire et déjà <a href="https://www.researchgate.net/publication/304889522_Scotland_Global_BIM_Study_produced_for_the_Scottish_Futures_Trust">fortement implanté aux États-Unis et au Royaume-Uni</a>. Les problématiques d’échanges d’informations entre corps de métiers sont à l’origine des premières représentations numériques du bâtiment, comme le proposait l’éditeur AutoDesk. La première mise en œuvre reconnue comme relevant du BIM date de la fin des années 1980.</p>
<p>La montée en puissance de calcul des ordinateurs et des modèles mathématiques dans la conception assistée par ordinateur (CAO) ont rendu possibles des logiciels toujours plus performants et complets. Et, dans un contexte de recherche de réduction de l’impact sur l’environnement, le BIM représente un atout pour la construction et la rénovation immobilières.</p>
<p>Collectivité, particulier, entreprise, commerce… tous ont été confrontés à des problèmes et des retards lors de la construction de projets immobiliers. Lorsque la plupart des tâches sont sous-traitées par de multiples entreprises, une mauvaise organisation ou des pertes dans l’usage des matériaux peuvent survenir. Le National Institute of Standards and Technology a ainsi estimé que <a href="http://www.bfrl.nist.gov/oae/publications/gcrs/04867.pdf">16 milliards de dollars</a> pouvaient être économisés chaque année aux États-Unis si l’on utilisait un logiciel unique pour concevoir les bâtiments.</p>
<p>En France, on pense au chantier du <a href="http://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/2013/03/29/musee-des-confluences-un-chef-d-oeuvre-en-peril-224975.html">Musée des confluences à Lyon</a>, théâtre de nombreux dysfonctionnements ; au final, cette construction aura coûté 267 millions d’euros de plus qu’initialement prévu.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le BIM expliqué en moins de 5min (buildingSMART France, 2015).</span></figcaption>
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<h2>Une approche tout-en-un</h2>
<p>La modélisation via la méthode BIM permet d’éviter les interactions néfastes ou dangereuses ; elle permet aussi aux techniciens chargés de la construction et des futures réparations d’avoir toujours accès aux informations des bâtiments.</p>
<p>Cette méthode ne se limite cependant pas à cette modélisation et intègre les informations géographiques, les propriétés des éléments de construction et une arborescence spatiale de cette dernière. Ainsi, chaque corps de métier peut se reporter à une unique maquette numérique, ce qui évite les pertes de données ou les calculs obsolètes.</p>
<p>Le BIM intervient donc bien en amont du premier coup de pioche. Le bâtiment est testé et analysé, les différents coûts en jeu – matériaux, main d’œuvre, consommation future du bâtiment – sont optimisés. Les logiciels BIM intègrent d’autre part les normes en vigueur sur le lieu de construction (réglementations française et européenne, contraintes régionales ou en fonction du secteur, etc.).</p>
<h2>Un outil pour réduire l’impact environnemental</h2>
<p>Le BIM comporte différents niveaux de développement. Son niveau 2 fait ainsi intervenir un nouveau type de fichier, les IFC. Les différents modèles conçus par les architectes et ingénieurs se trouvent ici combinés en un modèle graphique unique. Ce dernier est complété par des informations relatives à l’utilisation ou la maintenance de l’ouvrage, consultables durant tout le cycle de vie du bâtiment.</p>
<p>À partir d’un BIM de niveau 2, il est possible d’optimiser de nombreux processus d’architecture et de construction et de répondre à l’obligation de limiter l’empreinte énergétique des nouvelles constructions. La réglementation thermique française de 2012 impose, par exemple, un seuil maximal de 50kWh/m<sup>2</sup>/an, soit 2 à 4 fois moins que la réglementation de 2005. Le diagnostic de performance énergétique du bâtiment peut être directement simulé au regard de cette norme via le BIM.</p>
<p>En France, <a href="https://archives.entreprises.gouv.fr/2012/www.industrie.gouv.fr/eco-industries/ccles/filiere-batiment.pdf">58 % des logements</a> (soit 19 millions) consomment 2 à 3 fois plus d’énergie qu’un bâtiment moderne. Ces constructions, bâties dans leur majorité avant 1975, représentent 75 % de la consommation d’énergie du secteur et doivent être rénovées pour correspondre aux normes européenne et française.</p>
<p>Les dernières versions des logiciels BIM intègrent ainsi les calculs énergétiques relatifs à la climatisation et au chauffage en fonction des matériaux utilisés grâce au <a href="http://www.gbxml.org/">format Green Building XML</a>.</p>
<p>Il est aussi possible de visualiser les équipements d’alarme et de sécurité, ainsi que les outils de maintenance et de sécurité incendie. Une maquette BIM est compatible avec les outils classiques de la CAO pour faire des simulations thermiques ou des tests d’ensoleillement dans le cadre de la mise en place de panneaux solaires.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/oND2RyQbFLg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Les métiers de l’ingénierie : BIM manager (Avenir Ingénierie, 2015).</span></figcaption>
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<h2>De nouveaux métiers</h2>
<p>Intégrer cette nouvelle méthode peut s’avérer complexe et bouleverse nombre de métiers. Le BIM n’est par exemple pas encore utilisé par défaut par tous les acteurs, et la non-présence d’un corps de métier rend un modèle BIM incomplet et parfois inutilisable.</p>
<p>La mise en commun d’informations par différents corps de métier posent en outre des problèmes d’ordre législatif au regard de la possession des données. Si le BIM offre de nombreux avantages, ses inconvénients liés au manque de spécialistes et à l’utilisation des données rendent son utilisation parfois trop complexe.</p>
<p>Pour dépasser ces limites, le gouvernement a lancé en 2014 le plan <a href="http://www.batiment-numerique.fr/">« Transition numérique dans le bâtiment »</a> pour fournir aux acteurs du bâtiment les ressources nécessaires pour la compréhension du BIM. Un kit BIM, encore appelé <a href="http://www.batiment-numerique.fr/uploads/DOC/Rapport%20carnet%20numerique%20de%20suivi%20et%20d%20entretien%20du%20logement.pdf">« Carnet numérique du logement »</a>, cherche à sensibiliser les acteurs et le public.</p>
<p>Une bonne utilisation du BIM requiert des mois de pratiques et un nouveau métier, « BIM manager », a ainsi vu le jour. Si ce titre n’est pas encore reconnu en France, de nombreuses formations proposent des spécialisations dans le BIM et la construction intelligente. Des <a href="https://mooc-batiment-durable.fr/">MOOC</a> et des <a href="https://www.smartuse.org/offre-de-formation/">formations complémentaires</a> sont également disponibles.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/75244/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Guillaume Guérard ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si la généralisation de la maquette numérique révolutionne les métiers de la construction, elle présente également de nombreux avantages pour le suivi énergétique des bâtiments.Guillaume Guérard, Enseignant-chercheur, département « Nouvelles énergies », ESILV, Pôle Léonard de VinciLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/739952017-03-29T19:40:45Z2017-03-29T19:40:45ZQuelles priorités en matière d’énergie pour le prochain quinquennat ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/163096/original/image-20170329-1652-yonv49.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Maîtriser la consommation d’électricité s’impose comme une priorité pour le prochain gouvernement. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/download/confirm/163864583?src=hD1GkCYLO3yM5P0rUKWu5A-1-33&size=huge_jpg">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Dans le cadre des négociations climatiques conduites lors de la COP21 en 2015, la France s’est engagée à <a href="http://www.gouvernement.fr/special-cop-21-les-engagements-nationaux-de-la-france-3390">réduire de 40 % d’ici à 2030</a> ses émissions de gaz à effet de serre par rapport au niveau de 1990.</p>
<p>Si les candidats à la présidentielle 2017 s’accordent sur l’importance de lutter contre le changement climatique, une question essentielle demeure : sur quelles sources d’énergie la France devrait-elle miser à l’avenir : le nucléaire ou les renouvelables (ENR) – et dans quelles proportions ?</p>
<p>À l’heure actuelle, avec une production d’électricité couverte à <a href="http://bilan-electrique-2016.rte-france.com/production/le-parc-de-production-national/">72 % par le nucléaire</a>, cette énergie reste encore très majoritaire et les renouvelables arrivent loin derrière, avec seulement 18 %. Cependant, la <a href="http://www.developpement-durable.gouv.fr/loi-transition-energetique-croissance-verte">loi sur la transition énergétique pour une croissance verte</a> prévoit de porter la part de ces énergies à 23 % de la consommation finale brute d’énergie en 2020 et 50 % la part du nucléaire dans la production d’électricité pour 2025.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"844888778145705984"}"></div></p>
<h2>Les propositions des candidats</h2>
<p>Si l’on regarde les <a href="https://theconversation.com/quatre-scenarios-pour-comprendre-les-programmes-des-candidats-en-matiere-denergie-72308">propositions des principaux candidats</a>, tous souhaitent voir la part des énergies renouvelables dans le bouquet électrique français augmenter, mais dans des proportions très différentes. Le rôle du nucléaire reste lui controversé et les candidats ont des opinions diamétralement opposées.</p>
<p><a href="https://theconversation.com/nucleaire-renouvelables-decentralisation-energetique-les-propositions-du-candidat-fillon-69966">François Fillon</a> et <a href="https://theconversation.com/circuits-courts-hydrogene-nucleaire-les-propositions-de-la-candidate-le-pen-73283">Marine Le Pen</a> remettent ainsi en cause l’ambition du gouvernement socialiste de faire baisser la part du nucléaire dans le mix énergétique ; ils proposent au contraire d’investir et de développer cette énergie. Tous deux ont une vision centralisée du futur secteur électrique.</p>
<p>Pour <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Rudtj9ZJONo">Jean-Luc Mélenchon</a>, la France doit suivre l’exemple de son voisin outre-Rhin et sortir complètement du nucléaire. Il imagine un secteur électrique dont la production serait décentralisée et entre les mains des citoyens. Hamon le rejoint sur ce point en <a href="https://www.benoithamon2017.fr/wp-content/uploads/2017/03/projet-web1.pdf">souhaitant</a> « favoriser une production décentralisée et citoyenne ». Ce dernier, tout comme Macron, demeure en revanche plus pragmatique sur l’avenir du nucléaire en France et propose de maintenir le cap actuellement défini par la loi.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/161202/original/image-20170316-10905-zbw124.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/161202/original/image-20170316-10905-zbw124.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=469&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/161202/original/image-20170316-10905-zbw124.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=469&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/161202/original/image-20170316-10905-zbw124.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=469&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/161202/original/image-20170316-10905-zbw124.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=589&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/161202/original/image-20170316-10905-zbw124.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=589&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/161202/original/image-20170316-10905-zbw124.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=589&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Analyse des programmes des candidats à la lumière des travaux menés dans le cadre du Débat national sur la transition énergétique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">P.Criqui/M.Colombier</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Baisser la part du nucléaire, pas une priorité</h2>
<p>Que nous dit la confrontation entre ces visions portées par les candidats et celles des experts français du secteur de l’énergie ?</p>
<p><a href="http://www.grenoble-em.com/actualite-barometre-du-marche-de-lenergie-hiver-2016">Le Baromètre du marché de l’énergie</a> conduit par Grenoble École de Management a interrogé (de façon anonyme) une centaine de spécialistes sur ce que devraient être les priorités de la politique énergétique des cinq prochaines années.</p>
<p>De manière assez surprenante, seul un tiers des experts pensent que baisser la part du nucléaire dans le mix énergétique français devrait être une priorité.</p>
<p>Ceci indique qu’ils sont nombreux à douter de la faisabilité de réduire rapidement la part du nucléaire au profit des énergies renouvelables. À ce jour, <a href="http://www.usinenouvelle.com/article/tous-les-feux-sont-au-vert-pour-fermer-fessenheim.N519969">seule Fessenheim</a>, la plus vieille centrale de France, devrait être démantelée.</p>
<h2>Une industrie plongée dans l’incertitude</h2>
<p>Il faut également souligner que seuls 14 % des experts interrogés pensent qu’améliorer la compétitivité du secteur nucléaire français devrait être une priorité.</p>
<p>Après des décennies de suprématie pour cette énergie, son futur en France et à l’étranger semble plus incertain que jamais. Malgré la construction future d’Hinkley Point C – un projet mené conjointement par EDF et l’entreprise d’État chinoise GCN – qui a obtenu le feu vert du gouvernement britannique en 2016, des problèmes techniques <a href="https://www.lesechos.fr/22/07/2016/LesEchosWeekEnd/00041-013-ECWE_epr-c-est-quoi-le-probleme-.htm">ont retardé la construction</a> des EPR de Flamenville et d’Olkiluoto en Finlande.</p>
<p>De même, des <a href="https://www.asn.fr/Informer/Actualites/Usine-Creusot-Forge-d-Areva-NP-liste-des-irregularites">anomalies détectées dans certaines cuves</a> ont récemment causé un arrêt temporaire d’un tiers de la capacité nucléaire dans l’Hexagone et les gouvernements français et américain ont ouvert des investigations sur près d’une décennie de falsification de documents relatifs à la qualité des pièces produites par la forge Areva du Creusot.</p>
<p>Enfin, il est prévu qu’EDF rachète Areva NP afin de venir en aide à ce dernier, actuellement en proie à d’importantes difficultés financières dues à une accumulation de mauvais choix stratégiques et à un marché du nucléaire en berne. Areva n’est d’ailleurs pas le seul fabricant de technologies nucléaires en difficulté. Toshiba, l’un des principaux conglomérats japonais et propriétaire du développeur nucléaire Westinghouse basé aux États-Unis, vient en effet de <a href="https://www.forbes.com/sites/unicefusa/2017/03/17/we-went-to-uganda-to-talk-with-refugee-families/#3c39ded12768">se retirer de tous nouveaux projets</a> nucléaires en dehors du Japon suite à de mauvais résultats financiers.</p>
<h2>Une transition amorcée</h2>
<p>L’industrie du nucléaire est victime d’un effet ciseau. D’un côté les demandes en termes de sécurité <a href="https://www.oxfordenergy.org/wpcms/wp-content/uploads/2015/08/EL-14.pdf">sont de plus en plus exigeantes</a>, ce qui augmente le coût de construction des centrales. De l’autre, la baisse du prix des hydrocarbures, notamment des hydrocarbures non-conventionnels comme le gaz de schiste, ont fait <a href="https://theconversation.com/le-gaz-de-schiste-americain-nouveau-prix-directeur-des-energies-53989">baisser les prix</a> de gros de l’électricité.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/163102/original/image-20170329-1670-9cur0u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/163102/original/image-20170329-1670-9cur0u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/163102/original/image-20170329-1670-9cur0u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=723&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/163102/original/image-20170329-1670-9cur0u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=723&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/163102/original/image-20170329-1670-9cur0u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=723&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/163102/original/image-20170329-1670-9cur0u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=908&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/163102/original/image-20170329-1670-9cur0u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=908&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/163102/original/image-20170329-1670-9cur0u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=908&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.rte-france.com/fr/article/panorama-de-l-electricite-renouvelable">RTE</a></span>
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<p>Il devient ainsi de plus en plus difficile pour les propriétaires de centrales nucléaires de <a href="https://www.worldnuclearreport.org/The-World-Nuclear-Industry-Status-Report-2016-HTML.html">récupérer les coûts fixes</a> de leur investissement. En même temps, le coût des énergies renouvelables, des technologies du smart-grid et des technologies de stockage a fortement chuté ces dernières années. Prenons l’exemple des batteries au lithium, élément-clé de la diffusion massive de l’énergie solaire résidentielle et des voitures électriques : leur prix, bien qu’encore élevé, a baissé de <a href="http://www.nature.com/nclimate/journal/v5/n4/abs/nclimate2564.html">14 % par an entre 2007 et 2014</a>.</p>
<p>Il est fort probable que la transition d’un marché de niche vers un marché grand public ait lieu plus rapidement que ce que les énergéticiens historiques, les politiques et les citoyens pensent.</p>
<h2>Gérer la consommation, la priorité</h2>
<p>Le défi majeur de cette transition sera d’intégrer les énergies renouvelables intermittentes comme l’éolien et le solaire dans le système électrique et de couvrir la demande en électricité, même lorsqu’il fait nuit ou que le vent ne souffle pas.</p>
<p>En France, avec une habitation sur trois équipée de chauffage électrique, il est nécessaire de gérer le pic des demandes pendant les froides journées d’hiver. Cette année, par exemple, la consommation a enregistré une pointe le <a href="http://www.rte-france.com/fr/document/apercu-mensuel-sur-l-energie-janvier-2017">20 janvier à 94,2 GW</a>, ce qui représente la pointe la plus élevée depuis février 2012.</p>
<p>Cumulé à l’arrêt de plusieurs centrales nucléaires pour cause de maintenance ou de test commandé par l’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) afin de vérifier la résistance de certain matériaux suite aux anomalies détectées dans les cuves fabriquées dans l’usine Areva du Creusot, il aura fallu que RTE, la filiale d’EDF en charge des transports d’électricité, redouble d’imagination pour éviter de recourir massivement à des coupures localisées d’électricité.</p>
<p>L’une des stratégies pour limiter les pics de consommation consiste à faire baisser la demande en électricité des ménages. Contrairement au nucléaire, l’opinion des spécialistes sur l’importance de mettre en place une politique favorisant l’efficacité énergétique est sans équivoque : près de trois experts sur quatre pensent que l’efficacité énergétique devrait être une priorité de la politique française lors du prochain quinquennat.</p>
<p>Il est d’ailleurs intéressant de noter que c’est l’une des rares thématiques sur laquelle Fillon, Hamon, Le Pen, Macron et Mélenchon se rejoignent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/73995/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le Baromètre des marchés de l’énergie de GEM a interrogé une centaine de spécialistes sur la place du nucléaire et des énergies renouvelables dans le futur mix énergétique français.Anne-Lorène Vernay, Chargée de cours en stratégie, Grenoble École de Management (GEM)Joachim Schleich, Professor of Energy Economics, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.