tag:theconversation.com,2011:/uk/topics/game-of-thrones-27927/articlesGame of Thrones – The Conversation2023-09-25T16:49:34Ztag:theconversation.com,2011:article/2138082023-09-25T16:49:34Z2023-09-25T16:49:34ZDans « Game of Thrones », un autre regard sur le handicap<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/548798/original/file-20230822-26-ii0ulk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1803%2C1198&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Peter Dinklage dans le rôle de Tyrion Lannister dans _Game of Thrones_.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.filmaffinity.com/es/filmimages.php?movie_id=874956">FilmAffinity</a></span></figcaption></figure><blockquote>
<p>« Il y a une place particulière dans mon cœur pour les infirmes, les bâtards et choses brisées. »</p>
</blockquote>
<p>C’est par cet aveu – une véritable déclaration d’intention – que Tyrion Lannister ouvre le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Infirmes,_B%C3%A2tards_et_Choses_bris%C3%A9es">quatrième épisode de la série <em>Game of Thrones</em></a>.</p>
<p>Ces dernières années, de nombreux <a href="https://www.researchgate.net/publication/346215251_Cripples_Bastards_and_Broken_Things_Disability_in_Game_of_Thrones">universitaires</a> se sont intéressés à la pop culture, à travers l’étude des séries et des émissions de télévision les plus populaires. Des séries cultes comme <em>Breaking Bad</em> et <em>The Sopranos</em> sont des exemples notoires de productions audiovisuelles à fort impact qui, en raison de leurs connotations idéologiques ou politiques, ont suscité des réflexions dans différents domaines, clairement comparables à des approches portant sur des matériaux plus classiques (tels que des œuvres littéraires ou des œuvres philosophiques canoniques).</p>
<p>Bien que l’on ait déjà beaucoup écrit sur <em>Game of Thrones</em> selon différentes perspectives académiques, il est très intéressant d’<a href="https://journal.media-culture.org.au/index.php/mcjournal/article/view/895">analyser</a>, comme le fait Katie M. Ellis, le traitement du handicap dans la série.</p>
<h2>Jaime Lannister s’effondre</h2>
<p>Tout au long de l’histoire, de nombreux personnages de <em>Game of Thrones</em> se « brisent ». Bran se brise (il tient son surnom, le <em>Brisé</em>, de la chute qui l’a rendu paraplégique), Tyrion se brise (lui qui, en plus d’être atteint d’achondroplasie, est défiguré après une bataille), l’eunuque Varys se brise (lorsqu’il est castré), et Jaime se brise (lorsqu’il perd sa main). Tout au long de la série, la rupture est présentée comme un chemin existentiel interrompu.</p>
<p>Nous, les spectateurs, sommes témoins de l’apprentissage, de la découverte ou de l’acquisition d’un caractère moral chez des personnages qui, dans de nombreux cas, se découvrent vulnérables après s’être montrés incapables de développer de l’empathie avant leur blessure ou leur accident.</p>
<p>Par exemple le méchant, beau et invaincu Jaime Lannister <a href="https://eneltronodehierro.wordpress.com/2013/05/02/jaime-lannister-y-el-impacto-de-una-amputacion/">perd</a> sa main – main avec laquelle il se bat et tue, qui lui donne du prestige par la violence – et sa vie s’effondre…</p>
<p>Finalement, grâce aux commentaires sages et crus de Brienne, la géante elle-même discriminée pour sa taille et sa férocité au combat, l’amputation lui ouvre les yeux d’une autre manière.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/544054/original/file-20230822-23-19c1pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un homme avec une main d’acier regarde fixement devant lui alors que d’autres hommes se tiennent à quelques pas derrière lui" src="https://images.theconversation.com/files/544054/original/file-20230822-23-19c1pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/544054/original/file-20230822-23-19c1pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/544054/original/file-20230822-23-19c1pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/544054/original/file-20230822-23-19c1pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/544054/original/file-20230822-23-19c1pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/544054/original/file-20230822-23-19c1pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/544054/original/file-20230822-23-19c1pz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Nikolaj Coster-Waldau dans le rôle de Jaime Lannister dans l’un des derniers chapitres de <em>Game of Thrones</em>.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.imdb.com/name/nm0182666/mediaviewer/rm2454021632?ref_=nmmi_mi_all_sf_18">IMDB</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En fait, l’une des dernières scènes de la série, où Jaime appelle Brienne « chevalier » en tenant son épée de la main gauche, représente l’une des <a href="https://dialnet.unirioja.es/servlet/articulo?code=7418639">transgressions</a> les plus fascinantes de toute la saga : un amputé en disgrâce enfreint les règles parce qu’il nomme une femme <em>chevalier</em>, qui ne respecte pas non plus la loi écrite (en raison de son sexe, elle n’a pas pu prêter serment en tant que telle, puisqu’elle n’est <em>pas</em> un homme), bien qu’elle soit en réalité la plus loyale, la plus noble, de sa catégorie.</p>
<h2>Le « héros ambigu »</h2>
<p>Dans le cadre de l’analyse du handicap dans cette fiction, la complexité du personnage de <a href="https://www.wiley.com/en-us/Game+of+Thrones+and+Philosophy%3A+Logic+Cuts+Deeper+Than+Swords-p-9781118161999">Tyrion Lannister</a> – le « héros ambigu » – est remarquable.</p>
<p>Nous pourrions dire que ce personnage gagnerait certainement un concours de popularité parmi les fans les plus acharnés de la série, battant le noble et beau Jon Snow ou la scintillante mère des dragons, Daenerys Targaryen, entre autres.</p>
<p>Tyrion est une combinaison intéressante de vertus et de vices. Le nain difforme et parricide, parangon des « estropiés », nous émeut par sa lucidité, sa compréhension du monde et son intelligence.</p>
<p>Certes, Tyrion est né marqué par le pire et le meilleur. Sa petite taille (en plus de sa défiguration), cause un profond mépris et une grande haine même de la part de ses proches ; mais en parallèle il jouit du pouvoir qui découle du fait d’être un Lannister. À cela s’ajoute sa formidable intelligence, autant d’éléments lumineux de son caractère complexe.</p>
<p>C’est cette intelligence que Tyrion s’efforce de cultiver alors qu’il défie la masculinité hégémonique de Westeros, physiquement puissante, musclée et guerrière. Ainsi, s’adressant à Jon Snow, Tyrion déclare :</p>
<blockquote>
<p>« Mon esprit est mon arme. Mon frère a son épée, le roi Robert a son marteau de guerre, et moi, j’ai mon esprit… et un esprit a besoin de livres, car une épée a besoin d’une pierre à aiguiser pour avoir l’avantage. C’est pour cela que je lis beaucoup. »</p>
</blockquote>
<h2>Les exclus hériteront de la terre</h2>
<p>Cette superproduction, qui touche aujourd’hui plus de foyers et de cœurs que n’importe quel classique de la littérature mondiale, offre un cadre fascinant pour observer tous ces personnages appartenant à des catégories minoritaires ou <a href="https://books.google.fr/books/about/Beyond_the_Wall.html?id=6sJQMs6WyQcC&redir_esc=y">marginalisées</a>, comme nous le montrent des approches critiques contemporaines.</p>
<p>En effet, la série nous permet de l’aborder sous différentes perspectives, telles que l’<a href="https://www.cairn.info/dictionnaire-genre-et-science-politique--9782724613810-page-286.htm">intersectionnalité</a> (une approche inventée par la juriste américaine Kimberlé Crenshaw, qui met l’accent sur la relation structurelle de toutes les formes de discrimination ou d’exclusion), le concept de <a href="https://www.cairn.info/revue-multitudes-2006-3-page-133.htm">subalternité</a> chez la philosophe indienne Gayatri Spivak (qui reconnaît, dans sa critique postcoloniale, la nécessité de la valeur combative de la position subalterne face à l’hégémonique dans une structure hiérarchique), ou les différents <a href="https://ehne.fr/fr/encyclopedie/th%C3%A9matiques/genre-et-europe/f%C3%A9minismes-et-mouvements-f%C3%A9ministes-en-europe/f%C3%A9minismes-et-mouvements-f%C3%A9ministes-en-europe">féminismes</a>.</p>
<p>Dans <em>Game of Thrones</em>, le monde est <em>hérité</em>, symboliquement et matériellement, par les marginaux du système : personne de petite taille et infirme comme Tyrion ou Bran (personnes présentant des diversités fonctionnelles intrinsèques ou acquises), enfant illégitime ou « bâtard », tel qu’il est nommé dans la série, comme Jon Snow (socialement exclu pour être né hors mariage), <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/jpcu.12647">eunuques</a> comme Varys ou Grey Worm (de hommes castrés), les femmes (dans toutes leurs versions, en particulier celles qui ont des féminités non normatives) et les hommes éloignés du modèle dominant de masculinité, qui sont stigmatisés et finissent par en faire une force.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/544052/original/file-20230822-15-6ukrbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Un homme en cape s’agenouille devant un jeune homme en fauteuil roulant, tandis que deux femmes les regardent" src="https://images.theconversation.com/files/544052/original/file-20230822-15-6ukrbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/544052/original/file-20230822-15-6ukrbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/544052/original/file-20230822-15-6ukrbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/544052/original/file-20230822-15-6ukrbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/544052/original/file-20230822-15-6ukrbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/544052/original/file-20230822-15-6ukrbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/544052/original/file-20230822-15-6ukrbx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Jon Snow s’agenouille devant Bran, tandis qu’Arya Stark et Sansa Stark regardent.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.imdb.com/name/nm3652842/mediaviewer/rm395942401/">IMDB</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>On peut y voir une manière de se <a href="https://www.jstor.org/stable/20866817">réapproprier</a> de manière subversive <a href="https://ojs.ehu.eus/index.php/papelesCEIC/article/view/21839">l’imaginaire scandaleux</a> (celui qui depuis des millénaires présente le handicap comme paradigme du péché ou de la disgrâce), <a href="https://ojs.ehu.eus/index.php/papelesCEIC/article/view/21839">au sens</a> de la philosophe Melania Moscoso : « sa propre puissance offensive nous préservera de la tentation de conformer les corps à des représentations sociales ancrées dans la norme, aussi bien intentionnées soient-elles. »</p>
<p>Ainsi, et conformément à l’observation de Tyrion dans la citation d’ouverture, nous utilisons également ici des termes tels que <em>estropié</em>, <em>bâtard</em> ou <em>chose cassée</em> en nous réappropriant leur sens de manière critique et combative. Lui-même, dans le chapitre « Le loup et le lion », déclare :</p>
<blockquote>
<p>« Si on te donne un surnom, accepte-le et approprie-le-toi, ainsi, il ne peut plus te blesser. »</p>
</blockquote>
<h2>Une vie pleine de possibilités</h2>
<p>Une conversation entre les frères Lannister, Tyrion et Jaime, dans le deuxième épisode de la série (« La route royale »), montre que le handicap n’est pas la fin de l’histoire. Bien qu’ils se ressemblent à certains égards, ils sont, à ce moment du récit, aux antipodes des archétypes du désir et de l’horreur.</p>
<p>Après sa « chute » (c’est en fait Jaime qui l’a poussé du haut d’une tour, déclenchant ainsi le conflit initial), Bran est dans le coma, et les frères discutent de son sort :</p>
<p><strong>Jaime</strong> : Même si le garçon survit, il sera infirme, il sera monstrueux. La mort serait une fin appropriée.</p>
<p><strong>Tyrion</strong> : Au nom des monstres, je ne suis pas d’accord. La mort a quelque chose d’effroyablement définitif. La vie, elle, ouvre sur d’infinies possibilités. J’espère qu’il se réveillera, j’ai hâte de l’entendre raconter ce qui lui est arrivé.</p>
<p>Tyrion finit par triompher à la <a href="https://www.konbini.com/biiinge/final-game-of-thrones-analyse-epique-decevant/">fin</a> de la saga, non seulement parce qu’il a été capable de survivre contre toute attente dans un monde post-apocalyptique, mais aussi parce qu’il est devenu (une fois de plus) la Main du Roi (le bras droit) lorsque Bran le Brisé a pris le pouvoir.</p>
<p><em>Sous-fifres</em>, <em>brisés</em>… au nom du grotesque, tous deux finissent par montrer que « l’infirme », dans <em>Game of Thrones</em>, c’est autre chose.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/213808/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ester Massó Guijarro ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans « Game of Thrones », les personnages handicapés, blessés ou considérés comme des parias sont légion et tissent un vibrant éloge de la non-conformité.Ester Massó Guijarro, Profesora Titular de Filosofía Moral y miembro de la Unidad de Excelencia FiloLab, Universidad de GranadaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2014132023-03-09T18:43:08Z2023-03-09T18:43:08ZPourquoi les mondes imaginaires sont-ils de plus en plus populaires ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/514256/original/file-20230308-18-7b1gg1.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&rect=15%2C13%2C1262%2C705&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Notre appétence pour les mondes imaginaires est corrélée à notre quête de nouveauté. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=132663.html">Allociné</a></span></figcaption></figure><p>Depuis quelques décennies, nous sommes témoins d’un engouement mondial pour les mondes imaginaires. Des mondes fictifs tels que ceux que l’on retrouve dans les romans, les films, les mangas, les séries télévisées et les jeux vidéo ne cessent de gagner en popularité et en complexité. Des univers aussi riches et élaborés que ceux de <em>Star Wars</em>, <em>One Piece</em>, <em>Zelda</em>, <em>Game of Thrones</em>, <em>Elden Ring</em>, <a href="https://theconversation.com/le-quidditch-ce-sport-reel-venu-dharry-potter-64534"><em>Harry Potter</em></a> ou encore le <em>Seigneur des Anneaux</em> attirent chacun des millions de fans à travers le monde. Pourquoi tant de succès, et pourquoi aujourd’hui, et non pas plus tôt ?</p>
<p><a href="https://www.routledge.com/Building-Imaginary-Worlds-The-Theory-and-History-of-Subcreation/Wolf/p/book/9780415631204">Les mondes imaginaires existent certes depuis très longtemps</a> : l’<em>Odyssée</em>, écrite il y a presque 3000 ans, se situe souvent dans des îles qui n’existent pas, mais inspirées d’îles existantes, comme l’île des Cyclopes (ainsi nommée en hommage au texte d’Homère), au large de la Sicile. Homère n’a fait qu’y imaginer des cyclopes. En comparaison, J.-K. Rowling a inventé des territoires magiques dissimulés au sein du monde réel, avec de nombreuses descriptions précises de lieux imaginaires. Et Georges Lucas, avec <a href="https://theconversation.com/lascension-des-hero-nes-dans-star-wars-une-victoire-feministe-130222"><em>Star Wars</em></a>, a inventé des centaines de planètes.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=375&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514499/original/file-20230309-14-oz0zlx.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=471&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’exploration selon le jeu vidéo Zelda.</span>
</figcaption>
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<p>Des écrivains tels que Jules Verne et <a href="https://theconversation.com/pourquoi-edgar-allan-poe-est-lecrivain-prefere-des-incompris-198552">Edgar Allan Poe</a> ont aussi créé des univers fictifs, dès le XIX<sup>e</sup> siècle. Cependant, leurs écrits développent une intrigue qui a la primeur sur le monde créé. L’univers imaginaire est plutôt un prétexte à des aventures, pas une invention en soi. Tolkien, au début du XX<sup>e</sup> siècle, a inventé un monde avec une géographie, une végétation, des espèces, un langage et des civilisations. <a href="https://www.fabula.org/actualites/68668/a-besson-constellations-des-mondes-fictionnels-dans-l-imaginaire-contemporain.html">Ce monde imaginaire, complet, autonome, et cohérent</a>, a du sens indépendamment de l’histoire de la quête de Frodon par exemple.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-langues-elfiques-de-tolkien-plus-populaires-que-lesperanto-71388">Les langues elfiques de Tolkien, plus populaires que l’espéranto</a>
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<p>C’est depuis Tolkien, et surtout ces dernières décennies, que ces mondes imaginaires sont devenus aussi complexes et riches et se sont répandus. Pourquoi sont-ils devenus si populaires ? Nous posons l’hypothèse selon laquelle la curiosité joue un rôle central dans ce phénomène culturel d’ampleur.</p>
<h2>La curiosité pour des environnements nouveaux</h2>
<p>Dans une de ses lettres, J.R.R. Tolkien écrivait lui-même qu’une partie de l’attrait du <em>Seigneur des Anneaux</em> « repose sur le sentiment intrinsèque de récompense que nous éprouvons en regardant au loin une île non visitée ou les tours d’une ville lointaine ». Une intuition partagée par Shigeru Miyamoto, le créateur de <em>Zelda</em>, l’un des jeux vidéo les plus vendus au monde, dans lequel on peut incarner Link et explorer librement Hyrule, un monde d’inspiration médiévale. Miyamoto disait qu’il voulait créer « un univers de jeu qui transmette le même sentiment que celui que l’on ressent lorsqu’on explore une nouvelle ville pour la première fois ».</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/alice-a-lasile-60457">Alice à l’asile</a>
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<p>L’intuition de ces deux créateurs de mondes imaginaires a été indirectement confirmée par des études récentes en sciences cognitives. Le cerveau de <a href="https://www.researchgate.net/publication/245765584_Conserved_role_of_dopamine_in_the_modulation_of_behavior">toute espèce mobile</a> est en effet doté <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/9658025/">d’un système dopaminergique, qui est associé à la motivation et à la récompense</a>. Des recherches en neurosciences montrent que ce système est aussi activé <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16880131/">lorsque nous découvrons de nouveaux objets</a> ou <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29218570/">lorsque nous décidons</a> d’explorer un nouvel environnement. Il nous incite à chercher des informations nouvelles qui seront mobilisées dans le futur. Tous les animaux sont curieux de nouveaux environnements, même si le degré de curiosité diffère d’une espèce à l’autre.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514501/original/file-20230309-16-1lbjmm.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le jeu inspiré de la saga Harry Potter nous plonge dans des mondes imaginaires.</span>
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<p>C’est un des <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21702807/">systèmes cognitifs les plus anciens</a> dans l’histoire évolutionnaire de la cognition animale, car il était nécessaire à la navigation dans l’espace. Cela explique pourquoi, quand des éthologues leur présentent un objet nouveau et un objet familier, des espèces aussi différentes que les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10071-017-1103-9">dauphins</a> ou les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s10329-019-00731-2">macaques</a> observent plus longtemps les objets nouveaux – une mesure commune de la curiosité.</p>
<h2>Un avantage dans l’évolution</h2>
<p><a href="https://psycnet.apa.org/record/1992-98504-016">Cette curiosité pour des environnements nouveaux est un comportement adaptatif</a>. Au cours de l’histoire de notre espèce, la curiosité humaine a évolué en réponse aux exigences de survie et de reproduction. Les humains qui ont développé une curiosité accrue ont été mieux équipés pour explorer leur environnement et découvrir de nouvelles ressources. Cette capacité a permis à ces individus de survivre plus longtemps et donc de se reproduire davantage, menant à la lente propagation des gènes associés à cette curiosité accrue dans la population.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514502/original/file-20230309-1177-8ywoca.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le héros face à l’inconnu, une mise en scène visuelle qui attise notre curiosité dans Avatar.</span>
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<p>La curiosité se nourrit de promesses d’informations nouvelles. C’est pour cela que les environnements nouveaux sont si fascinants pour nos cerveaux : la vision d’un monde imaginaire est un indice qui nous informe qu’une grande quantité d’informations reste à découvrir. Il faut noter que cette curiosité pour les environnements nouveaux est activée même si l’environnement nouveau est fictionnel, car le mécanisme qui nous pousse à découvrir de nouveaux environnements n’a pas évolué dans un contexte où la fiction existait. Nous savons bien sûr faire la différence entre la réalité et la fiction, mais <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2022.786770/full">nos préférences héritées de l’évolution ne prennent pas en compte cette frontière : elles s’intéressent à toutes sortes d’informations</a>.</p>
<p>La promesse de découvertes nous attire dans les affiches promotionnelles des fictions dans lesquelles un personnage fait face à un large panorama d’un monde imaginaire, prêt à l’explorer. Nous aimons cette idée qu’il reste du chemin à parcourir. Des psychologues ont par exemple montré que des <a href="https://www.researchgate.net/publication/249624135_Environmental_PreferenceA_Comparison_of_Four_Domains_of_Predictors">photographies de paysage sont en moyenne plus appréciées quand elles indiquent visuellement la présence d’opportunités de découverte</a> – avec, par exemple, l’image d’une forêt au loin et un chemin sinueux qui disparaît dans les arbres.</p>
<h2>La variation de la curiosité</h2>
<p>Si la curiosité a été sélectionnée au cours de l’évolution, le degré de curiosité n’est ni fixe, ni toujours le même. On voit très bien qu’autour de nous, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0092656617301149">certaines personnes sont plus exploratrices que d’autres</a>. Un des facteurs qui expliquent ces différences est la génétique : la curiosité <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.2190/h8h6-qykr-keu8-gaq0?journalCode=icaa">fait partie intégrante de notre personnalité</a>, qui est en <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352250X15002171">partie déterminée par notre patrimoine génétique hérité de nos parents</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=768&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=768&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=768&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=965&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=965&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/514503/original/file-20230309-121-hzogbj.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=965&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Caspar David Friedrich, Le Voyageur contemplant une mer de nuages, 1818. Un avant-goût romantique du boom des fictions pleines de mondes imaginaires des 20ᵉ et XXIᵉ siècle ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span></span>
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<p>Cependant, un autre facteur important détermine le niveau de curiosité des individus. Il est important de noter que la curiosité a des conséquences qui peuvent être néfastes pour un organisme – par exemple, si l’exploration ne paye pas, le temps passé à explorer est perdu. Or, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352250X15002055">ces conséquences ne sont pas aussi négatives pour l’organisme selon s’il se trouve dans un environnement pauvre en ressources ou dans un environnement riche en ressources</a>.</p>
<p>L’évolution a donc façonné le système de la curiosité pour être flexible en fonction de l’environnement dans lequel se trouve un organisme, pour gérer ses « coûts » et ses « bénéfices ». Les scientifiques en écologie comportementale appellent cette flexibilité la <a href="https://www.edge.org/response-detail/27196">plasticité phénotypique</a>.</p>
<p>Dans des environnements prospères et donc prévisibles, les individus ont accès à davantage de ressources et sont donc moins susceptibles de faire l’expérience d’une pénurie ou d’un danger immédiat. Par conséquent, ils peuvent <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1090513821000271">se permettre d’être plus explorateurs et curieux, en prenant des risques</a> pour rechercher de nouvelles opportunités et expériences qui peuvent être bénéfiques à long terme.</p>
<p>En revanche, dans des environnements plus pauvres et plus imprévisibles, les risques associés à l’exploration sont plus élevés, car un échec peut entraîner des dommages importants. Dans de tels environnements, les individus devraient être <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1090513821000143">plus motivés à se concentrer sur l’exploitation de leur environnement pour satisfaire leurs besoins immédiats</a>, plutôt que de prendre des risques pour explorer de nouvelles opportunités.</p>
<p>Des études ont confirmé que chez des espèces aussi différentes que les <a href="https://www.researchgate.net/publication/27270675_The_Significance_of_Ecological_Factors_for_Exploration_and_Neophobia_in_Parrots">perroquets</a> et les <a href="https://www.researchgate.net/profile/Sofia-Forss-2/publication/279631853_Contrasting_Responses_to_Novelty_by_Wild_and_Captive_Orangutans/links/5a532cd30f7e9bbc10568f28/Contrasting-Responses-to-Novelty-by-Wild-and-Captive-Orangutans.pdf">orangs-outangs</a>, les individus qui ont été nourris ou ont un accès direct à de la nourriture sont plus curieux que les autres, toutes choses égales par ailleurs.</p>
<p>Chez les humains, des études montrent que les habitants de sociétés dotées d’un produit intérieur brut par habitant plus élevé (qui bénéficient donc de meilleures conditions de vie, en matière d’alimentation, d’accès au soin, et d’accès à l’éducation) sont en <a href="https://www.sociostudies.org/journal/articles/2189446/">moyenne plus ouverts à de nouvelles expériences</a>. D’autres études montrent que les individus vivant dans des familles qui bénéficient de meilleures conditions de vie <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28238826/">sont plus curieux</a>, <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/08902070221078479?journalCode=erpa">ont moins de chance de voir leur niveau de curiosité décroître</a> en grandissant, et que cela peut expliquer les <a href="https://royalsocietypublishing.org/doi/abs/10.1098/rstb.2021.0345">différences de capacités d’apprentissage qu’on observe entre des pays qui n’ont pas le même niveau de développement économique</a>.</p>
<h2>L’attrait pour les mondes imaginaires</h2>
<p>Nous avons ainsi formulé <a href="https://www.edgardubourg.fr/_files/ugd/9c54f0_80037d57932f446ba20010547087a5fc.pdf">l’hypothèse selon laquelle le succès culturel récent des mondes imaginaires s’explique par l’amélioration des conditions de vie</a> au cours des dernières décennies. Cette amélioration des conditions de vie <a href="https://www.cambridge.org/core/services/aop-cambridge-core/content/view/6CBACB4C2DFB11F5A13D3B4A5E9E2EB4/S0140525X1800211Xa.pdf/psychological-origins-of-the-industrial-revolution.pdf">aurait mené à des changements de mentalité majeurs</a>. Notamment, comme l’environnement des individus devient plus prévisible et plus sûr, les coûts liés à la curiosité pour des environnements nouveaux diminuent. Cette évolution des mentalités pourrait donc expliquer l’accroissement de la popularité et de la richesse des mondes imaginaires. Bien sûr, explorer des mondes imaginaires ne comporte aucun risque en soi, mais, encore une fois, la frontière entre la réalité et la fiction importe peu en la matière. Seule compte la sensibilité de nos préférences : il faut être curieux des environnements nouveaux dans la vie réelle pour trouver attrayants les mondes imaginaires dans les fictions.</p>
<p>Nous avons d’abord montré, dans une <a href="https://psyarxiv.com/d9uqs">étude à paraître</a>, que le niveau de curiosité des individus est en effet corrélé à leur préférence pour les mondes imaginaires : les personnes plus exploratrices aiment davantage les mondes imaginaires, les personnes moins exploratrices les aiment moins. Nous avons ensuite regardé l’évolution des mondes imaginaires dans les romans et les films : environ 10 % des films produits et 10 % des romans parus développent un monde imaginaire au début du XX<sup>e</sup> siècle, contre environ 20 % d’entre eux aujourd’hui. Cela correspond à une augmentation de 100 % en un siècle, dans les deux médias. Cette augmentation suit l’augmentation permanente du niveau de richesses des pays industrialisés tout au long du XX<sup>e</sup> siècle. Bien que cette association ne prouve pas l’existence d’un lien causal, elle tend à confirmer notre hypothèse selon laquelle la popularité croissante de ces mondes imaginaires s’explique en partie par la croissance économique et l’amélioration des conditions de vie, qui augmenterait naturellement la motivation de lecteurs et lectrices, et des téléspectateurs et téléspectatrices, à explorer ces nouveaux mondes.</p>
<p>Nos recherches s’inscrivent dans un projet plus global qui vise à une meilleure compréhension de notre attrait pour les fictions, grâce à notre compréhension de la psychologie humaine. Par exemple, en comprenant d’où vient la peur et comment cette émotion fonctionne, on peut <a href="https://academic.oup.com/book/4159">mieux comprendre notre attrait pour les films d’horreur et les attractions effrayantes</a>.</p>
<p>Inversement, ces recherches peuvent aussi mener à une meilleure compréhension de la psychologie, grâce aux fictions. Par exemple, <a href="https://www.nature.com/articles/s41562-022-01292-z">tracer l’histoire de la représentation de l’amour dans les textes littéraires permet de mieux comprendre l’histoire du sentiment amoureux et les facteurs de ses fluctuations</a>, dont les <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/1745691614561683">bases psychologiques et biologiques sont désormais bien connues</a>.</p>
<hr>
<p><em>Cet article est issu d’un <a href="https://cognition.ens.fr/fr/news/semaine-du-cerveau-2023-lens-16860">cycle de conférences proposées par l’ENS-PSL dans le cadre de la 25ᵉ édition de la Semaine du cerveau</a>, du 13 au 17 mars 2023. À cette occasion, des chercheuses et chercheurs proposent des interventions sur le thème « pensée et émotions : du réel à l’imaginaire ». Retrouvez Edgar Dubourg le 14/03 à 18h30 pour la conférence : « Comment expliquer notre fascination pour les mondes imaginaires ? »</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/201413/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Edgar Dubourg a reçu des financements de l'École Normale Supérieure-PSL.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Nicolas Baumard a reçu des financements de l'Agence Nationale de la Recherche, du CNRS et de l'université PSL. </span></em></p>La curiosité joue un rôle central dans notre engouement pour des univers fictifs riches et innovants.Edgar Dubourg, Doctorant en études cognitives, École normale supérieure (ENS) – PSLNicolas Baumard, Chercheur en études cognitives, École normale supérieure (ENS) – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1903752022-09-09T15:59:33Z2022-09-09T15:59:33ZTroubles mentaux, fausses couches et inceste : à l’instar de « House of the Dragon », les déboires des familles royales à travers l’histoire<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/483757/original/file-20220909-7504-1hr7y6.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=18%2C5%2C1736%2C1157&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le roi Viserys I Targaryen, dans House of the Dragon. </span> <span class="attribution"><span class="source">HBO</span></span></figcaption></figure><p><em>House of the Dragon</em>, le prequel de <em>Game of Thrones</em>, relate la chute de la dynastie des Targaryen quelque deux siècles avant que la vie sur le continent de Westeros ne soit bouleversée par la guerre et par une mini-période glaciaire.</p>
<p>Le premier épisode suggère que l’instabilité politique et le déclin dynastique commencent généralement par l’irruption de maladies et de crises sanitaires.</p>
<p>Le roi Targaryen Viserys I<sup>er</sup> souffre d’une large et douloureuse plaie ouverte et infectée dans le dos. Il considère qu’il s’agit d’une blessure mineure – subie en s’asseyant sur le fameux trône de fer forgé avec les épées des vaincus au fil des règnes.</p>
<p>Sa femme, la reine Aemma Arryn, enceinte, qui a déjà subi de multiples fausses couches et perdu plusieurs enfants, s’inquiète de la santé de leur futur bébé. L’accouchement montré dans cet épisode est extrêmement difficile et traumatisant.</p>
<p>Les maladies et afflictions physiques et mentales qui ont frappé les maisons régnantes de Westeros – complications de grossesse, maladies mentales et troubles génétiques – ont aussi touché les véritables familles royales d’Europe au cours de la période médiévale et du début de la période moderne. </p>
<p>Et tout comme dans <em>House of the Dragon</em>, ces afflictions ont façonné de véritables luttes dynastiques.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/DotnJ7tTA34?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<h2>Les troubles génétiques</h2>
<p>Comme les Targaryen fictifs, les vrais rois européens se mariaient fréquemment avec des parents proches, contribuant à créer des troubles génétiques dans leurs familles.</p>
<p>Le dernier roi Habsbourg d’Espagne, Charles II, est un exemple d’enfant issu d’un inceste royal. Il souffrait de multiples problèmes de santé avant sa mort à 38 ans, notamment d’un cas extrême de ce qu’on appelle la <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/archeo-paleo/evolution/inceste-et-genetique-les-difformites-faciales-de-la-dynastie-des-habsbourg-sont-bien-dues-a-la-consanguinite_139414">mâchoire de Habsbourg</a> ou mandibule malformée, qui rendait très difficile la parole et la mastication des aliments. Ses parents étaient un oncle et une nièce. Les généticiens ont fait valoir que la consanguinité, ou le fait que les parents descendent des mêmes ancêtres, était à l’origine de ce problème de santé.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/480995/original/file-20220825-21-hwjavr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/480995/original/file-20220825-21-hwjavr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/480995/original/file-20220825-21-hwjavr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=831&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/480995/original/file-20220825-21-hwjavr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=831&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/480995/original/file-20220825-21-hwjavr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=831&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/480995/original/file-20220825-21-hwjavr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1044&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/480995/original/file-20220825-21-hwjavr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1044&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/480995/original/file-20220825-21-hwjavr.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1044&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le roi Charles II d’Espagne par John Closterman.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>La reine Victoria d’Angleterre, de son côté, a transmis par le biais des mariages de ses enfants le gène à l’origine de l’hémophilie (une maladie récessive du sang) aux familles royales de Russie, d’Espagne et d’Allemagne.</p>
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<p>L’arrière-petit-fils de Victoria, Alexei Nikolaevich, Tsarevich de Russie, <a href="https://www.lalibre.be/debats/opinions/2010/07/07/la-maladie-royale-etait-une-hemophilie-b-KITHVCZZ7VGYFBTJZEXEQJOXWU/">a hérité de cette maladie</a>. Le mystique Raspoutine, qui avait été amené au palais pour soigner le tsar de Russie, en vint à se mêler des affaires du gouvernement, ce qui provoqua une montée des tensions au sein de l’aristocratie et une méfiance du public à l’égard de la famille royale. De cette manière indirecte, la « maladie des rois », comme on appelle l’hémophilie, a contribué à déclencher la révolution qui a mis fin à la monarchie des Romanov.</p>
<h2>Grossesse et fertilité</h2>
<p>Le but premier du mariage royal, tant dans l’Europe moderne qu'à Westeros, était de réunir des familles puissantes et de produire des héritiers qui perpétueraient la dynastie.</p>
<p>Les créateurs de <em>House of the Dragon</em> ont été critiqués pour la scène d’accouchement très violente dans le premier épisode, mais ils ont eu raison de dépeindre la grossesse comme dangereuse pour les membres de la famille royale. Sept reines et princesses des Asturies (héritières du trône d’Espagne) <a href="https://museoecologiahumana.org/en/obras/death-in-childbed/">ont eu des enfants entre 1500 et 1700, dont quatre sont morts de causes liées à la grossesse</a>.</p>
<p>Si l’accouchement pouvait s’avérer fatal pour les femmes royales, l’incapacité à donner naissance à un héritier pouvait également signifier la fin d’une maison dynastique. L’histoire de l’île de Westeros, qui ressemble incroyablement aux îles britanniques, reflète également une grande partie de l’histoire de la Grande-Bretagne. Le désir d’avoir un héritier mâle peut déchirer les familles royales.</p>
<p>Dans l’Angleterre du XVI<sup>e</sup> siècle, le roi Henri VIII (qui souffrait d'une plaie ulcéreuse à la jambe, qui a peut-être inspiré la blessure au dos de Viserys I<sup>er</sup>), s’est détaché de l’Église catholique de Rome et s’est marié six fois pour s’assurer des héritiers mâles qui soutiendraient la dynastie Tudor. Ironiquement, ce sont finalement les filles d’Henry, Marie I et Elizabeth I, qui ont accédé au trône après la mort de leur frère, Edward VI, à l’âge de 16 ans.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/game-of-thrones-prequel-house-of-the-dragon-confirms-there-will-be-no-sexual-violence-on-screen-heres-why-thats-important-188521">Game of Thrones prequel House of the Dragon confirms there will be no sexual violence on screen. Here's why that's important</a>
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<p><a href="https://www.hrp.org.uk/kensington-palace/history-and-stories/queen-anne/#gs.9y4yxt">La reine Anne</a> a connu au moins 17 grossesses en 17 ans. Elle donna naissance à 18 enfants, dont beaucoup furent mort-nés ; un seul d'etre eux vécut jusqu’à l’âge de 11 ans. Sans héritier, le trône fut transmis aux cousins allemands des Stuart, les Hanovriens.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/481012/original/file-20220825-19-fm2qcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/481012/original/file-20220825-19-fm2qcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/481012/original/file-20220825-19-fm2qcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=523&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/481012/original/file-20220825-19-fm2qcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=523&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/481012/original/file-20220825-19-fm2qcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=523&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/481012/original/file-20220825-19-fm2qcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=657&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/481012/original/file-20220825-19-fm2qcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=657&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/481012/original/file-20220825-19-fm2qcz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=657&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Anne (au centre) et sa sœur Mary (à gauche) avec leurs parents, le duc et la duchesse d’York, peintes par Peter Lely et Benedetto Gennari le Jeune.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h3>Santé mentale</h3>
<p>Le roi George III d’Angleterre a souffert d’épisodes maniaques qui ont entraîné l’instabilité du gouvernement et des crises de régence, à l’image d’Aerys Targaryen dans le monde de <em>Game of Thrones</em>. Diverses <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4953321/">hypothèses médicales</a> ont été proposées pour expliquer la folie du monarque, notamment la <a href="https://www.msdmanuals.com/fr/accueil/troubles-hormonaux-et-m%C3%A9taboliques/porphyries/porphyrie-aigu%C3%AB-intermittente">porphyrie</a>, une maladie génétique du sang qui peut entraîner l’anxiété et la confusion mentale, ou plus récemment, le trouble bipolaire.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/-2e-LFfTbTg?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>George a ensuite été dépeint comme un <a href="https://www.lhistoire.fr/le-roi-fou-de-windsor">roi tyrannique et fou</a> ayant provoqué la perte des <a href="https://www.cairn.info/revue-outre-terre2-2016-4-page-438.htm">colonies américaines de L’Angleterre</a>. Cependant, en réalité, la monarchie britannique était constitutionnelle à ce moment-là et George avait peu d’influence directe sur les colonies.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/481015/original/file-20220825-22-zv34k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/481015/original/file-20220825-22-zv34k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/481015/original/file-20220825-22-zv34k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=633&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/481015/original/file-20220825-22-zv34k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=633&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/481015/original/file-20220825-22-zv34k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=633&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/481015/original/file-20220825-22-zv34k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=795&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/481015/original/file-20220825-22-zv34k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=795&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/481015/original/file-20220825-22-zv34k5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=795&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Gravure par Henry Meyer de George III (1817).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<h2>Des soins bien particuliers</h2>
<p>La religion pourrait se mêler davantage de médecine à Kings Landing si les créateurs de <em>House of the Dragon</em> voulaient créer une maison royale à l’image de celles des débuts de l’Europe moderne.</p>
<p>En effet, les monarques catholiques malades et blessés croyaient aux pouvoirs de guérison des objets sacrés. Au XVII<sup>e</sup> siècle, les reines d’Espagne enceintes se voyaient prêter la « santa cinta » ou « ceinture sainte », une relique qui aurait appartenu à Marie, la mère de Jésus. Le fait de porter ou de toucher ce vêtement était censé protéger les reines enceintes et leurs fœtus.</p>
<p>Les reliques des saints – hommes et femmes – jouaient également un rôle dans la guérison des monarques catholiques et de leurs familles.</p>
<p>Lorsque le prince Don Carlos des Asturies, héritier du roi d’Espagne Philippe II, a été victime d’un <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00381-015-2693-7">traumatisme crânien</a> en 1562, des frères franciscains ont apporté le cadavre de Fray Diego de Alcalá dans la chambre du prince et l’ont placé dans son lit. Les premiers modernes ont attribué la guérison de Don Carlos à cette relique et à la chirurgie crânienne que les médecins ont pratiquée pour lui sauver la vie.</p>
<p>Dans un pays protestant comme l’Angleterre, à la fin du XVIII<sup>e</sup> siècle, les soins apportés aux malades étaient beaucoup plus conventionnels, et plus brutaux aussi.</p>
<p>Le traitement des maladies mentales, y compris la manie de George III, impliquait par exemple l’utilisation de camisoles de force et de chaises de contention, que George, qui gardait son humour malgré la maladie, appelait souvent sa « chaise de couronnement ». Pas tout à fait le trône de fer… mais un trône pour un « roi fou », néanmoins.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190375/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sarah Bendall reçoit des fonds du Conseil australien de la recherche et du Fonds de recherche Pasold.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Kristie Patricia Flannery ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les maladies et afflictions physiques et mentales qui frappent les maisons régnantes de Westeros, dans la fiction, ont bien des points communs avec l’histoire réelle des monarchies européennes.Kristie Patricia Flannery, Research Fellow, Institute for Humanities and Social Sciences, Australian Catholic UniversitySarah Bendall, Research Fellow, Gender and Women's History Research Centre, Institute for Humanities and Social Sciences, Australian Catholic UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1455232020-09-24T13:29:24Z2020-09-24T13:29:24ZQuand les séries télé nous incitent à boire<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/359778/original/file-20200924-16-wx8vzm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C0%2C1920%2C1274&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Tyrion Lannister (_Game of Thrones_), inséparable de son verre de vin. Et vous ? </span> <span class="attribution"><span class="source">HBO - DR</span></span></figcaption></figure><p>D’Homer Simpson, inséparable de sa légendaire bière Duff, à l’origine de bien des mésaventures, aux salariés de l’Agence Sterling Cooper dans <em>Mad Men</em> et leur consommation effrénée, en passant par le cocktail Cosmopolitan des personnages de <em>Sex and the City</em>, l’alcool coule à flots dans les séries populaires, lubrifiant à peu de frais les rouages de la narration.</p>
<p><a href="https://psycnet.apa.org/record/1999-11517-005">Les analyses de contenu</a> montrent que près de 90 % des films mettent en scène des évènements impliquant de l’alcool, lequel est en outre souvent introduit de manière flatteuse : les personnages qui boivent (43 %) y sont dépeints comme étant physiquement et socialement attractifs.</p>
<p>Pensons simplement à James Bond, facétieusement appelé « l’homme au foie d’or » par les auteurs d’une publication médicale <a href="https://www.bmj.com/content/347/bmj.f7255">comptabilisant les formidables volumes de boissons éthyliques consommées par le célèbre espion</a>.</p>
<h2>La valorisation de l’alcool dans les médias incite-t-elle à boire ?</h2>
<p>Une telle présence hégémonique de l’alcool dans les séries a-t-elle des conséquences sur notre façon de nous représenter l’alcool, ainsi que les effets qui lui sont imputés ? Augmente-t-elle les consommations individuelles ? Si oui, pour quelle raison ?</p>
<p>Ce type dʼeffet a été mis en évidence <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3252424/#:%7E:text=High%20exposure%20to%20movie%20smoking,1.53">pour le tabac</a> : l’exposition à des films dont les personnages fument augmente le risque de commencer à fumer. Qu’en est-il pour l’alcool ?</p>
<p>De <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19144976">nombreuses données épidémiologiques</a> vont dans le sens d’un lien entre exposition à l’alcool dans les médias et augmentation de la consommation d’alcool. <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19144976">Une étude</a> menée auprès d’un échantillon de 38 000 adolescents a par exemple conclu dans ce sens.</p>
<p>On sait que l’exposition à des personnages consommant de l’alcool a également un effet sur les attitudes vis-à-vis de l’alcool.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Daniel Craig boit un cocktail « Vesper Martini »" src="https://images.theconversation.com/files/356991/original/file-20200908-24-agh64x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/356991/original/file-20200908-24-agh64x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=270&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/356991/original/file-20200908-24-agh64x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=270&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/356991/original/file-20200908-24-agh64x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=270&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/356991/original/file-20200908-24-agh64x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=339&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/356991/original/file-20200908-24-agh64x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=339&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/356991/original/file-20200908-24-agh64x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=339&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le célèbre espion serait un alcoolique patenté. Ici James Bond (incarné par Daniel Craig) et son « Vesper Martini ».</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=18690031.html">Allociné</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Joris Van Hoof et ses collaborateurs ont <a href="https://psycnet.apa.org/record/2009-07585-006">exposé des groupes d’adolescents</a> soit à une série télévisée comportant des personnages consommant de l’alcool, soit à une série où les personnages n’en consommaient pas.</p>
<p>Il est apparu que les premiers avaient par la suite des attitudes plus favorables à la consommation d’alcool. Ils rapportaient aussi davantage d’intention de consommer de l’alcool dans le futur.</p>
<p>Dans une autre étude, <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/j.1360-0443.2010.03237.x">Rutger Engels et ses collaborateurs</a> ont émis l’hypothèse que la consommation d’alcool à la suite d’un visionnage d’un film aurait pu s’expliquer par un processus d’imitation.</p>
<p>Leurs expérimentations ont révélé que des étudiants exposés à des personnages buveurs dans un film avaient davantage tendance à consommer de l’alcool pendant son visionnage. Et ce, d’autant plus qu’ils s’identifiaient au personnage. Cependant, cet effet a uniquement été mis en évidence chez les hommes.</p>
<h2>Une série d’études françaises</h2>
<p>Nous avons conduit une <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00223980.2020.1732853">série d’études expérimentales</a> visant à répondre à la nécessité de proposer des données françaises concernant l’influence causale de la représentation de l’alcool dans les médias, quʼimposent, notamment, les débats sur les textes de loi tels que la <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000344577/">Loi Evin</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/risque-alcool-les-fondements-scientifiques-dune-politique-de-sante-efficace-104006">Risque alcool : les fondements scientifiques d’une politique de santé efficace</a>
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<p>Notre but était d’établir s’il existait ou non un effet de l’exposition dans les médias à des stimuli en lien avec l’alcool et la formation d’inclinations à en consommer. Il s’agissait de le déterminer non seulement en manipulant la nature et le degré d’exposition imposés à des individus, mais aussi – et surtout – en proposant des explications psychologiques sur la façon dont le système cognitif allait traiter ces images, les intégrer et les mémoriser. L’impact de cet apprentissage sur des outils de mesure des attitudes sensibles à ce caractère automatique (mesures indirectes) ou délibéré (mesures directes) a été évalué.</p>
<p>On appelle « mesure directes » les questionnaires sur ordinateur où l’on demande directement son opinion au participant à propos d’un objet. Les mesures indirectes sont celles où l’on infère les jugements/opinions à partir d’un comportement qui ne porte pas directement sur l’objet en question. L’individu doit classifier le plus vite possible des images ou des mots en lien avec l’objet d’intérêt (ici l’alcool) dans les catégories « bon » ou « mauvais ». On compare ensuite les temps de réaction à classifier les images.</p>
<p>Dans nos études, afin de manipuler causalement l’exposition à la représentation de l’alcool nous avons fait visionner à certains participants une vidéo montrant de l’alcool et aux autres une vidéo qui n’en montrait pas. Ensuite nous avons comparé leurs représentations vis-à-vis de l’alcool.</p>
<h2>Comprendre les mécanismes du cerveau</h2>
<p>Dans une première étude, avant de présenter les épisodes, nous avons « inhibé » la capacité des participants à puiser dans leur capacité à s’autoréguler en utilisant une tâche classique de fatigue mentale : on demande au participant d’exécuter une tâche exigeante sur le plan cognitif, autrement dit « pénible » mentalement, avant de lui faire réaliser une seconde tâche.</p>
<p>Classiquement, il est demandé de lire un texte complexe et de rayer le plus vite possible toutes les lettres « e », sauf si celles-ci sont situées à deux espaces d’une autre voyelle ou à proximité d’un espace. Cette tâche dure cinq minutes, puis les participants passent à la seconde tâche. En parallèle, un groupe contrôle réalise une tâche similaire mais beaucoup plus simple, telle que barrer toutes les lettres « e », sans autre consigne.</p>
<p>La seconde tâche à consisté à faire visionner aux participants un extrait d’une durée de quatre minutes d’un épisode, parmi deux, de la sitcom <em>How I Met Your Mother</em> ; l’un contenant de multiples occurrences de consommation d’alcool (épisode 22 de la saison 6, « The Perfect Cocktail ») et l’autre ne contenant aucune référence à l’alcool (épisode 2 de la saison 6, « Cleaning House »).</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/lPS1evrGhII?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">« The Perfect Cocktail », <em>How I Met Your Mother</em>, 2011.</span></figcaption>
</figure>
<p>Le ton des épisodes était axé sur la comédie et décrivait des événements et des situations comiques liés, pour un épisode, à la consommation d’alcool caractérisant certains des personnages. Par la suite, les participants remplissaient les questionnaires et réalisaient les tests indirects.</p>
<p>Ils étaient pour cela invités à venir au laboratoire pour participer à une étude portant sur leurs compétences cognitives générales et leur capacité à suivre et imaginer la fin d’une trame narrative : l’expérimentateur interrompait le visionnage quatre minutes avant la fin de l’épisode et leur demandait de rédiger quelques lignes sur la façon dont ils pensaient que l’épisode allait se terminer (on s’assurait au préalable que les individus n’avaient jamais vu l’épisode).</p>
<p>Les participants qui avaient été exposés à des personnages consommant de l’alcool rapportaient effectivement avoir des représentations de l’alcool plus positives après le visionnage, et ce même sur des mesures dites « indirectes », plus difficiles à fausser pour les participants par ce qu’elles contraignent à donner une réponse très rapide et spontanée.</p>
<p>Plus surprenant, le changement d’attitude semblait, dans ce cas précis, dépendre de processus plutôt délibérés, et non automatiques, spontanés.</p>
<p>En effet, lorsque les participants voyaient leurs ressources cognitives réduites, aucun effet de changement d’attitude psychologique ne survenait. L’effet de l’exposition aux séries sur des participants épuisés mentalement a été comparé à celui que la même exposition pouvait avoir sur des participants qui ne l’étaient pas. Les résultats ont révélé que cet effet ne s’observait que sur les participants qui avaient été mentalement épuisés au préalable.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/cd0kBtydM-A?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Barney et sa bière (<em>Les Simpsons</em>).</span></figcaption>
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<p>Cet effet s’inversait-il lorsque le ton du film était négatif ? Dans une <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/14659891.2020.1736662?journalCode=ijsu20">autre étude comparable</a>, nous avons utilisé des extraits de films et séries télévisées décrivant des événements anxiogènes et dramatiques associés à la consommation d’alcool, ou au contraire des événements ayant des conséquences positives.</p>
<p>Nous avons observé là encore un effet robuste de l’exposition à des personnages consommant de l’alcool sur les attitudes vis-à-vis de l’alcool, celui-ci pouvant aboutir à des attitudes plus négatives envers l’alcool quand le ton du film était négatif et plus positives quand le ton du film était positif.</p>
<h2>Implications pour la santé publique</h2>
<p>Les travaux qui démontrent l’influence des médias sur les représentations et les comportements sont aujourd’hui nombreux et bien étayés dans le domaine des pratiques de consommation touchant à la santé.</p>
<p>Toutefois, nos travaux sont parmi les premiers à porter sur les processus cognitifs sous-jacents à l’exposition à l’alcool dans les médias. Ils ont permis de mettre en lumière une relation causale entre l’exposition à des représentations de l’alcool et un changement d’attitude vis-à-vis de ce produit.</p>
<p>Nos résultats suggèrent que lorsque le spectateur est attentif aux contenus qui lui sont présentés, des modifications dans les représentations de la désirabilité de l’alcool peuvent se produire si celui-ci est présenté dans des circonstances favorables, ce qui est le plus souvent le cas.</p>
<p>Est-il possible, en rendant attentifs les spectateurs aux effets de la valorisation de l’alcool sur les pratiques de consommation, de neutraliser ce phénomène ?</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/brQADPmbapo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Samantha de <em>Sex and the City</em>, un cosmopolitan et Donald Trump : de quoi vous faire cesser de boire ?</span></figcaption>
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<p>Si cela était avéré, des voies de prévention inédites pourraient être envisagées. Bien sûr, ces perspectives ne dispenseraient pas les scénaristes de prendre conscience de l’effet sanitaire des clichés sur l’alcool qu’ils instillent dans les séries, et peut-être de mieux les maîtriser. À moins que les psychotropes ne soient un ingrédient indispensable d’une série addictive ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/145523/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Oulmann Zerhouni a reçu des financements de l'ARC 1 Santé de la Région Rhône-Alpes (2012) et de la Mission Interministérielle de Lutte contre les Drogues et les Conduites Addictives (MILDECA).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Elisa Sarda a reçu des financements de la Mission Interministérielle de Lutte contre les Drogues et les Conduites Addictives (MILDECA).</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Laurent Bègue-Shankland a reçu des financements de la Mission Interministérielle de Lutte contre les Drogues et les Conduites Addictives (MILDECA).</span></em></p>Les séries télévisées actuelles sont imprégnées de références à l’alcool. Cela perturbe notre rapport à la boisson.Oulmann Zerhouni, Maître de conférences HDR, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresElisa Sarda, Maître de conférence, Université de NantesLaurent Bègue-Shankland, Professeur de psychologie sociale, membre honoraire de l’Institut universitaire de France (IUF), directeur de la MSH Alpes (CNRS/UGA), Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1193622019-07-02T14:15:09Z2019-07-02T14:15:09ZPodcast: le phénomène Game of Thrones<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/280989/original/file-20190624-97762-1a9rxci.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1278%2C850&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">GOT </span> </figcaption></figure><p>The Conversation France a suivi l’édition inaugurale du <a href="https://festivaljeudeloie.fr/">festival de jeu de l’Oie</a> organisé par l’université d’Aix Marseille, un événement dédié aux arts, aux humanités et plus largement aux sciences humaines.</p>
<p>Le jeu, c’est aussi la capacité à réinventer le monde, notamment à travers des œuvres de fiction. Jean‑Luc Bonniol, professeur émérite en anthropologie (Université d’Aix-Marseille) nous explique les raisons d’un triomphe mondial, celui de la série <em>Game of Thrones</em>, entre goût des grands récits, échos réalistes au monde contemporain, et attrait du merveilleux.</p>
<p>J.L Bonniol remercie Sandra Laugier qui, dans son article « Retour sur Game of Thrones, une expérience personnelle augmentée », a <a href="https://aoc.media/critique/2019/06/10/retour-sur-game-of-thrones-une-experience-personnelle-augmentee/">inspiré une bonne part de ses propos</a>.</p>
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<p><em><strong>Conception et interview</strong> : Sonia Zannad <br> <strong>Montage</strong> : Lou Biasutto.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/119362/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Luc Bonniol ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Un anthropologue nous expose les raisons d'un triomphe mondial, entre goût des grands récits, échos réalistes au monde contemporain, et attrait du merveilleux.Jean-Luc Bonniol, Professeur émérite d’anthropologie , Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1180102019-07-01T21:31:48Z2019-07-01T21:31:48ZSéries : « Game of Thrones » ou le triomphe de la rareté<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/282060/original/file-20190701-105191-l20rsi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C0%2C1191%2C670&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Jouer sur l'attente, une des grandes réussites de la série. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.allocine.fr/series/ficheserie-7157/photos/detail/?cmediafile=21618523">Allociné</a></span></figcaption></figure><p><em>Game of Thrones</em>, la grande série qui aura tenu en haleine des millions de fans pendant huit ans, se sera donc refermée sur des colères et des sarcasmes et même une pétition demandant la réécriture de la saison finale. Pouvait-il en être autrement ? Probablement pas. Cette protestation relayée considérablement par les réseaux sociaux altère-t-elle la postérité de la série phare de HBO ? Non plus.</p>
<p>Si nous remettons en perspective la success-story de cette série, la vivacité des réactions des fans s’inscrit dans la longue et tumultueuse histoire des relations entre les fans et les auteurs. Nous verrons également qu’à l’heure de la bataille des contenus et de la profusion de l’offre, une proposition de récit s’articulant sur la rareté et le risque de la frustration est bien loin d’avoir fait son temps.</p>
<h2>Les fans, des gardiens du temple</h2>
<p>La construction d’une communauté de fans représente un enjeu majeur pour la vie d’une série. Leur engagement, leurs échanges, leurs conversations voire une véritable expertise permettent à celle-ci de se déployer dans le temps et de franchir le cap des saisons.</p>
<p>En 1967, <em>Star Trek</em> de Gene Roddenberry n’aurait pu survivre sans la communauté active de fans impliqués – Isaac Asimov et Harlan Ellison en tête – qui, en noyant la chaîne NBC de courriers au nom de la campagne « Save <em>Star Trek</em> », ont obtenu la poursuite de la série. Chris Carter, le showrunner de <em>The X-Files</em> incluait des fans dans certains épisodes et mentionnait au générique les idées retenues, construisant autour du site <a href="https://x-files.fandom.com/wiki/X-phile">X-philes</a> une véritable communauté symbiotique. Et plus loin encore, que dire de l’engouement incroyable, analysé par Umberto Eco, que suscitèrent <em>Les Mystères de Paris</em> d’Eugène Sue, attesté par les nombreuses lettres adressées à ce dernier pour sauver la fictive famille Morel de la misère. La communauté des fans protège et construit le temple des héros.</p>
<p>Dans la majorité des cas néanmoins, le final se passe sans faire d’histoire. Le désamour des fans signe l’arrêt d’une série, ou plus exactement sa non-reconduction, leur offrant parfois un dernier clin d’œil comme celui d’<em>Urgences</em> avec le retour des stars ou rien quand le temps a manqué pour clore le récit.</p>
<p>Cependant la structure de l’attachement des fans reste complexe et nombre de créateurs ont pu expérimenter les foudres de ceux qui s’érigent alors comme les seuls gardiens du temple.</p>
<h2>Les histoires d’amour finissent mal, en général…</h2>
<p>Rappelons quelques épisodes marquants de ces déceptions amoureuses. En 2010, le final de <em>Lost</em> a déchaîné les protestations et les récriminations et les fans, déjà, réclamaient une fin alternative. En 2007, le dernier épisode des <em>Soprano</em>, considéré pourtant comme « Peut-être le plus grand chef-d’œuvre de la culture contemporaine », projeté au Musée d’Art moderne de New York, a déconcerté les fans qui se sont sentis abandonnés. Plus loin encore, en 1968, <em>Le Prisonnier</em>, œuvre devenue culte, a <a href="https://lemondedesavengers.fr/hors-serie/annees-1960/le-prisonnier-1967-1968/le-prisonnier-1967-1968-guide-des-episodes">suscité une frustration aiguë et des menaces à l’encontre de son créateur qui dut même se cacher pendant quelque temps</a>.</p>
<p>C’est pourquoi la fin de <em>Game of Thrones</em> – qui a fait l’objet d’une vaste campagne de promotion – une série qui a connu depuis 2011 sur les réseaux sociaux une vitalité formidable, ne pouvait que difficilement faire l’unanimité.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/280270/original/file-20190619-171281-1auhfb4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/280270/original/file-20190619-171281-1auhfb4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/280270/original/file-20190619-171281-1auhfb4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=716&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/280270/original/file-20190619-171281-1auhfb4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=716&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/280270/original/file-20190619-171281-1auhfb4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=716&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/280270/original/file-20190619-171281-1auhfb4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=900&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/280270/original/file-20190619-171281-1auhfb4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=900&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/280270/original/file-20190619-171281-1auhfb4.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=900&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La déception des fans s’exprime sur Twitter.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Twitter</span></span>
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<h2>Le pari de l’attente</h2>
<p>Avec GOT, HBO a fait le pari risqué de la rareté de la production et de la diffusion. Un pari misant sur l’attente à une période où, au contraire, l’offre, portée par de nouveaux entrants, notamment Netflix, a augmenté en volume de façon spectaculaire. Une abondance qui a modifié les modes de consommation des spectateurs : de nombreuses séries à succès sont livrées par saison entière. On est entré dans l’ère du « binge watching » où le consommateur ne supporte pas d’attendre, il doit pouvoir visualiser vite, enchaîner les épisodes à son gré.</p>
<p>Or deux années séparent la saison 7 de la saison 8 de GOT. De plus, celles-ci comptent moins d’épisodes (10 épisodes de la saison 1 à 6, mais 7 épisodes pour la saison 7, et 6 épisodes pour la saison 8) alors que les budgets n’ont cessé d’augmenter (130 Millions de $ pour la saison 8) tout comme le nombre de spectateurs (16,1Millions aux US pour le 1<sup>er</sup> épisode de la saison 7, 17,4 Millions pour le 1<sup>er</sup> de la saison 8, 19,3 Millions pour le dernier).</p>
<p>La série se glorifie même du piratage comme faisant partie intégrante de sa consécration : <a href="https://www.lesnumeriques.com/vie-du-net/game-of-thrones-confirme-son-statut-champion-piratage-n86049.html">55 millions de téléchargements</a> en 24h pour le 1<sup>er</sup> épisode de la saison 8.</p>
<p>La construction des climax est le nerf de la guerre du storytelling sériel qui stimule les conversations des fans. Avec 100 millions de tweets générés pour l’ultime saison, leur attachement émotionnel est immense, ce qui explique l’importance de la déconvenue.</p>
<h2>La leçon de marketing de <em>Game of Thrones</em></h2>
<p>Il y avait bien longtemps, hors des grands événements sportifs comme celles du football, que la dimension mondiale d’une attente communautaire ne s’était pas manifestée. Noyés sous l’immédiateté des réponses à nos désirs, nous avions perdu le goût de l’impatience. Le risque de la déception, la terreur du zapping, ont transformé tout geste, tout regard en un acte de consommation que le marketing habille de son mieux. Toutefois, il a beaucoup à apprendre de <em>Game of Thrones</em>.</p>
<p>Car <em>Game of Thrones</em> nous parle aussi d’avenir.</p>
<p>La leçon de cette série porte sur la possibilité, toujours présente d’une expérience collective largement transfrontalière et transculturelle si l’on observe par exemple le niveau des téléchargements en Inde et en Chine. Elle rappelle que l’immédiateté ne constitue pas le seul mot d’ordre et que l’ultra-segmentation peut mener aussi à la dispersion.</p>
<p>Que l’on ait aimé ou détesté son final, nous reparlerons encore de <em>Game of Thrones</em> dans 10 ans, pour paraphraser, Tyron Lannister. Et c’est déjà une très belle victoire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/118010/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Monika Siejka ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La vivacité des réactions des fans s’inscrit dans la longue et tumultueuse histoire des relations entre les fans et les auteurs.Monika Siejka, Enseignante Chercheuse en storytelling et marketing, Union des Grandes Écoles Indépendantes (UGEI)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1172152019-06-25T19:44:48Z2019-06-25T19:44:48Z« Game of Thrones » et Shakespeare : entre clins d’œil et visions parallèles de l’histoire<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/280280/original/file-20190619-171281-10pa6fh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C2%2C1493%2C996&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'espoir de voir un héros triompher semble universel. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.allocine.fr/series/ficheserie-7157/photos/detail/?cmediafile=21523419">Allociné</a></span></figcaption></figure><p>La guerre des Deux-Roses est souvent citée comme une source d’inspiration à la fois pour George Martin et pour la série HBO tirée de son œuvre.</p>
<p>Quand on parle de Shakespeare et des similitudes avec <em>Game of Thrones</em>, on parle des pièces historiques de Shakespeare. Par pièces historiques, on entend les deux tétralogies, les deux séries de quatre pièces qui parlent de la matière historique. Cela correspond à la période qui couvre la 2<sup>e</sup> partie du XV<sup>e</sup> siècle à l’entrée dans la Renaissance en Angleterre, depuis la déposition de Richard II jusqu’à l’avènement des Tudors.</p>
<p>Il y a en effet un certain nombre de parallèles qui sautent aux yeux, à commencer par les noms des familles protagonistes : la famille Stark vs la famille Lannister dans la série, la famille York vs la famille Lancaster dans les pièces de Shakespeare. On peut aussi penser à l’emblème de la maison des Tyrell, une rose d’or, qui rappelle la rose blanche des York et la rose rouge des Lancaster dans la guerre des Deux-Roses.</p>
<p>On peut enfin mentionner des parallèles avec des vers shakespeariens célèbres, comme la formule d’ouverture « Winter is coming » qui reprend le « Now is the winter of our discontent » de l’ouverture de <em>Richard III</em>.</p>
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<h2>Beaucoup de similitudes et des faux semblants</h2>
<p>Le plus souvent, <em>Game of Thrones</em> prend plaisir à se jouer de l’attente du spectateur en l’entraînant sur de fausses pistes shakespeariennes. Ainsi Tyrion Lannister, dont la difformité physique rappelle l’infirmité de Richard III, n’a pourtant rien du manipulateur diabolique et du tyran sanguinaire qu’est Richard III. Il colle plutôt à la destinée du prince Hal, ce prince shakespearien mal aimé de son père et à la vie d’abord dissolue, mais qui peu à peu trouve sa voie, s’illustre au combat, et devient finalement Henri V, le grand héros de la tétralogie.</p>
<p>Avec ce personnage comme avec bien d’autres dans la série, on a donc plutôt affaire à des composites qui mélangent des bribes de références shakespeariennes sans en faire pour autant une source ou un décodeur pour les personnages ou les situations. Shakespeare sert plutôt de point de départ ou de modèle reconnaissable à partir duquel on va marquer son originalité en surprenant le spectateur par des écarts et des retournements de situations.</p>
<p>À cette manière de « faire shakespearien » sans faire du Shakespeare à proprement parler s’ajoute un certain style de jeu de la part de plusieurs acteurs emblématiques des premières saisons qui viennent de la Royal Shakespeare Company et qui de ce fait pratiquent une diction et une gestuelle qu’on associe naturellement au drame shakespearien : Sean Bean, le Ned Stark de la première saison, ou Charles Dance qui tient le rôle de Tywin Lannister sur plusieurs saisons. Mais là encore, le modèle shakespearien sert essentiellement d’arrière-plan dont on se détache au fur et à mesure que la série acquiert sa propre crédibilité et impose son propre style de jeu.</p>
<h2>Une même saga du pouvoir</h2>
<p>Au-delà de ces effets ponctuels de visions fugaces de personnages, de situations, ou d’un style qui « fait shakespearien » sans être une adaptation pour autant, la vraie ressemblance avec l’œuvre de Shakespeare est à chercher dans la vision de l’histoire qui caractérise les deux œuvres prises dans leur ensemble.</p>
<p>Dans les deux cas, l’intérêt naît de la mise en concurrence de deux visions de l’histoire : cyclique ou linéaire ? Que ce soit sous la forme de cycles historiques où un Henri tue un Richard, puis un autre Richard tue un autre Henri, et ainsi de suite, ou que ce soit sous le format de la série avec des saisons et des nombres d’épisodes préétablis, avec une génération qui chasse l’autre ou qui doit venger l’autre, on est en présence d’une même saga du pouvoir.</p>
<p>Dans les deux cas, les personnages sont condamnés à répéter les mêmes mécanismes d’ascension et de chute, comme dans ces allégories médiévales du pouvoir autour de l’image de la Fortune qui tourne sans cesse sa roue, pour changer les mendiants en rois, et les rois en morts.</p>
<p>Contre ce mécanisme de l’histoire se met en place le mécanisme de l’héroïsme. Les pièces de Shakespeare tout comme les épisodes de la série s’attardent sur ces destins héroïques, ces parcours linéaires palpitants et uniques, même s’ils sont broyés par le mécanisme de l’histoire.</p>
<p>Dans ce cadre, le destin individuel devient une tentative pour briser le cercle vicieux. Et ce qu’on regarde fasciné et ce qu’on espère à chaque fois, c’est cet écart dans un destin individuel qui puisse modifier un peu le cercle et nous faire avancer vers une résolution qu’on voudrait finale.</p>
<p>C’est la promesse de Shakespeare, où Henri Tudor, un de plus en apparence, triomphe de Richard III dans la dernière pièce de la tétralogie. Il va asseoir un État moderne et mettre fin au cycle de la féodalité, réussir à enfin créer un état centralisé, qui marquera le début de la modernité pour l’Angleterre, avec la promesse que cette fois son règne sera stable et que la paix sera définitive.</p>
<p>C’était aussi la promesse de la saison 8 de <em>Game of Thrones</em> dont on savait d’avance qu’elle serait la dernière : qui serait le dernier à unifier les 7 Royaumes, à surmonter les marcheurs blancs pour être le dernier à monter sur le trône de fer ?</p>
<p>Les paris allaient bon train : Jon Snow, Daenerys, Tyrion… c’est en tout cas ce type de héros providentiel que les fans attendaient – et l’on sait que les espoirs de certains ont été quelque peu déçus.</p>
<p>Cette aspiration-là, celle de voir finir le cycle de la violence et d’imposer une fin héroïque, semble universelle, que ce soit à l’époque de la guerre des Deux-Roses mise en scène par Shakespeare, ou pendant la période d’incertitude dynastique pendant laquelle le dramaturge écrivit ses pièces historiques, ou encore à l’époque actuelle, marquée par une certaine instabilité géopolitique. C’est ce qui nous tient en haleine devant la scène ou devant l’écran : l’espoir voir un héros qui parvienne à casser enfin le cycle de la violence et de la guerre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/117215/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ladan Niayesh ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Entre les pièces de Shakespeare et la série, un certain nombre de parallèles qui sautent aux yeux du spectateur.Ladan Niayesh, Professeure de littérature britannique, UFR d’Etudes Anglophones et laboratoire LARCA, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1187202019-06-23T20:18:22Z2019-06-23T20:18:22ZE3 2019 : une édition en demi-teinte pour le salon international du jeu vidéo<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/279179/original/file-20190612-32335-1rbsdly.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le comédien Keanu Reeves au casting de Cyberpunk 2077 (CD Red Projekt) venu enflammer la scène de la conférence Microsoft. Un feu davantage allumé avec de l'alcool qu'avec des brindilles diront certains...</span> </figcaption></figure><p>Cette année, certaines questions obsèdent professionnels et joueurs : qu’en sera-t- il de la prochaine génération de consoles, du développement du <em>cloud gaming</em> – le fait de jouer en <em>streaming</em> sur des serveurs communs –, des fusions pour contrer l’arrivée de Google sur le marché ?</p>
<p>C’est donc <a href="https://www.youtube.com/watch?v=8igzue_fNDQ">Stadia</a>, la fameuse « console » de Google, qui a ouvert les festivités. Ce service multi-écran coûte une dizaine d’euros par mois pour le pack pro et donne accès à un catalogue de jeux qui s’étoffera au fil du temps. Une trentaine de titres sera disponible à son ouverture en fin d’année 2019. En termes de hardware, une manette spéciale de plus d’une centaine d’euros sera lancée et <a href="https://www.youtube.com/watch?v=M57vTyM-iE4"><em>Baldur’s Gate 3</em></a> fera partie des jeux pionniers. Difficile d’imaginer l’intérêt des joueurs déjà équipés pour cette offre qui ne possède à l’heure actuelle aucune exclusivité.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/279178/original/file-20190612-32356-o9m2tw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/279178/original/file-20190612-32356-o9m2tw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/279178/original/file-20190612-32356-o9m2tw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/279178/original/file-20190612-32356-o9m2tw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=337&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/279178/original/file-20190612-32356-o9m2tw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/279178/original/file-20190612-32356-o9m2tw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/279178/original/file-20190612-32356-o9m2tw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La manette Stadia, le contrôleur officiel du service vidéoludique de Google.</span>
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<h2>Des contenus attendus mais sans surprise</h2>
<p>Le studio Electronic Arts se contente depuis quelques années de communiquer autour de ses licences phares et le programme des jeux abordés a été éventé en amont ; la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Ha5C7FY6C4Y">bande-annonce de <em>Fifa 20</em></a> a notamment été diffusée quelques minutes avant le lancement. Outre le retour d’un mode « foot de rue » dans cette nouvelle mouture, la majorité des simili-nouveautés proposées étaient des extensions. La <a href="https://www.youtube.com/watch?v=52Qhht6Qu4A">saison 2 d’<em>Apex Legends</em></a>, concurrent essoufflé de <em>Fortnite</em>, et le <a href="https://www.youtube.com/watch?v=N-LuNtzpvQM">nouveau contenu téléchargeable des <em>Sims 4</em></a>, un jeu datant tout de même de 2014, faisaient figures d’amuse-bouches.</p>
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<p>On retiendra de cet EA Play la démonstration de 15 minutes de <em>Star Wars Jedi : Fallen Order</em>, nouvelle adaptation de l’œuvre de George Lucas s’inscrivant directement dans les canons de la licence cinématographique. Mais pour de nombreux joueurs, le jeu est graphiquement et physiquement daté et semble bien trop facile, l’intelligence artificielle des personnages non joueurs n’étant clairement pas au niveau. Les tests de <em>Star Wars Jedi : Fallen Order</em> réservés aux professionnels semblaient toutefois plus prometteurs même si le jeu est encore en version Alpha alors qu’il sort en novembre.</p>
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<h2>Chez Microsoft, un catalogue prometteur</h2>
<p>Comme l’an dernier, la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=73kSvsQ_kkA">conférence Microsoft</a> fût extrêmement riche en contenu entre une manette technologique vendue pour la modique somme de 180 $ directement sur dle site du constructeur et le projet Scarlett daté pour la fin 2020. Microsoft a laissé défiler les bandes-annonces de jeux bien souvent attendus comme <a href="https://www.youtube.com/watch?v=YApuEWtG30w"><em>Cyberpunk 2077</em></a> enfin daté pour le 16 avril 2020, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=2yijkEeUmx0"><em>The Outer World</em></a> promettant un univers post-apocalyptique façon <em>Fallout</em> tout autant que <a href="https://www.youtube.com/watch?v=XCXdCjpBVA8"><em>Wasteland 3</em></a>, dont le premier opus en 1988 avait servi de base à la licence initiée par Tim Cain.</p>
<p>Quelques jeux indépendants et conceptuels comme l’envoûtant <a href="https://www.youtube.com/watch?v=TDjbZyvvyu0"><em>Way to the Woods</em></a>, la suite du poétique <em>Ori and the Blind Forest</em> baptisée <a href="https://www.youtube.com/watch?v=2reK8k8nwBc"><em>The Will of the Wisps</em></a> ainsi que le narratif <a href="https://www.youtube.com/watch?v=BguTVd1Fq7E"><em>12 Minutes</em></a> ont pointé le bout de leur nez entre deux super-productions. Mais c’est bien <a href="https://www.youtube.com/watch?v=MBb88gLmJZY"><em>Halo Infinite</em></a> (500 millions de dollars de budget pour le premier titre de la Scarlett) avec <a href="https://www.youtube.com/watch?v=C4tuZn3M-tc"><em>Gears 5</em></a>, soit les deux plus grosses exclusivités de Microsoft, qui ont animé la soirée.</p>
<p>La rumeur voulait, depuis quelque temps, que George R.R. Martin, l’auteur de la saga <em>A Song of Ice and Fire</em> plus connue en tant que <em>Game of Thrones</em> pour la télévision, se soit associé avec le studio japonais From Software et son directeur Hidetaka Miyazaki pour la mise en chantier d’un jeu de rôle en monde ouvert lié à la mythologie nordique. Les premières images de <em>Elden Ring</em> sont venues le confirmer avec une esthétique visuelle et sonore plus proche de ce que faisait From Software avant <em>Sekiro</em>. Son dernier titre en date se déroulait dans le Japon de l’air Sengoku et s’est retrouvé au cœur de <a href="https://www.numerama.com/pop-culture/478073-sekiro-shadows-die-twice-est-il-vraiment-trop-dur.html">quelques polémiques</a> rapidement éteintes autour de sa redoutable exigence en terme de <em>gameplay</em>, l’anglicisme désignant la façon de jouer à un jeu vidéo ainsi que ses règles intrinsèques.</p>
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<figcaption><span class="caption"><em>Elden Ring</em>, fruit de l’association entre Hidetaka Miyazaki et George R.R. Martin, serait un jeu de rôle en monde ouvert proposant plusieurs royaumes en ruines à explorer à dos de cheval dans un univers inspiré de la mythologie scandinave. From Software oblige, l’exigence sera au rendez-vous sous peine de mise à mort à répétition, mais également un haut potentiel pour les amateurs de speedrun.</span></figcaption>
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<h2>Retours en grâce ?</h2>
<p>Si l’on ne peut pas dire que l’<a href="https://theconversation.com/e3-2018-la-grand-messe-du-jeu-video-entre-retours-en-grace-et-desillusions-98602">E3 2018</a> ait été catastrophique pour les studios Bethesda, notamment grâce à une annonce en grandes pompes de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=OkFdqqyI8y4"><em>The Elder Scrolls VI</em></a>, l’année qui suivit ne fut pas de tout repos pour l’image de la firme. Son titre <em>Fallout 76</em> fut l’un des plus cuisants échecs en terme de réception critique, aussi bien par les joueurs que par les professionnels.</p>
<p>Avec l’annonce d’un désormais classique mode <em>Battle Royale</em> pour ce jeu tant décrié, mais également la présentation de deux nouvelles licences, un jeu d’action tinté d’exploration intitulé <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ZM1i5BRwqtg"><em>Ghostwire Tokyo</em></a> dont le moteur graphique semble merveilleux (mais ça n’est pas du <em>in game</em>) et le mystérieux <a href="https://www.youtube.com/watch?v=DgiMSSl2rZ0"><em>Deathloop</em></a> des Français de chez Arkane Studios, l’édition 2019 de l’Electronic Entertainment Expo a su se montrer plutôt rassurante pour les équipes de Todd Howard. Les studios soulignent un peu plus leur persistance dans le paysage vidéoludique en mettant à jour <em>Fallout 76</em>. On notera néanmoins une instrumentalisation maladroite de quelques joueurs et joueuses dans la <a href="https://www.youtube.com/watch?v=dKqGRHlL7e4">vidéo de présentation du studio</a> qui ressemble à une malheureuse propagande sentimentaliste.</p>
<p>En 2018, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=EvLrETGHEFo">Square Enix</a> avait déçu en présentant des jeux attendus mais au rendu graphique encore faible comme <em>Shadow of the Tomb Raider</em> ou tout simplement un titre que personne n’espérait, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=r25PN_hBhU0"><em>The Quiet Man</em></a>, dont la technologie datée rappelait les jeux en FMV des années 1990. En 2019, le studio se renouvelle avec une licence adaptée d’<a href="https://www.youtube.com/watch?v=LDBojdBAjXU"><em>Avengers</em></a>, dont le rendu physique et la direction artistique plutôt tièdes ne sont pas sans rappeler le manque d’âme de la réalisation des frères Russo sur le pendant cinématographique de la série. Entre cinématiques et phases de <em>gameplay</em>, le remake du septième épisode de <em>Final Fantasy</em> a pallié son absence regrettée l’an passé. Le titre proposera une aventure épisodique dont le premier serait contenu sur deux disques Blu Ray, une place conséquente appelant à imaginer un jeu gourmand nécessitant des moyens optimaux pour vivre au mieux la refonte de cette légende vidéoludique.</p>
<p>Comme <em>Final Fantasy XV</em>, ce remake ne proposera pas de combats au tour par tour mais des affrontements en temps réel avec, cette fois-ci, la possibilité de contrôler différents personnages et de suspendre le temps pour se concentrer davantage sur la stratégie.</p>
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<figcaption><span class="caption">Du catastrophique <em>Secret of Mana</em> à l’excellent <em>Resident Evil 2</em>, les remakes de jeux vidéo se multiplient. Ici, une refonte complète de l’un des titres les plus adulés de l’Histoire vidéoludique qui sortira sous format épisodique.</span></figcaption>
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<p>Alors que le Nintendo Direct de 2018 avait déçu en se focalisant essentiellement sur les personnages de son <em>Super Smash Bros Ultimate</em>, devenu depuis un véritable incontournable de sa Switch, et en ne donnant aucune nouvelle du très attendu <em>Metroïd Prime 4</em>, toujours absent cette année pour cause de <em>reboot</em> du développement, le constructeur légendaire a su cette fois-ci conclure l’E3 en beauté. <a href="https://www.youtube.com/watch?v=wb7W2OLRmEc"><em>Luigi’s Mansion 3</em></a>, le remake de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=BsE5SogHigc"><em>The Legend of Zelda : Link’s Awakening</em></a>, celui du culte <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Iqrpzuwq6ho"><em>Panzer Dragoon</em></a> et le portage de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=PfQjIfHHJv8"><em>The Witcher 3</em></a>_ sur Switch confirmaient la tendance au recyclage très présente lors de cette édition.</p>
<p>Heureusement, le traditionnel « one more thing » en fin de conférence a su ravir la communauté du constructeur nippon : <em>Breath of the Wild</em>, le titre adulé qui marqua l’arrivée de la Nintendo Switch, aura droit à une suite directe, une première dans l’histoire éditoriale de <em>The Legend of Zelda</em> dont les opus demeuraient toujours indépendants. Cette année, Nintendo s’est à nouveau imposé et a marqué les esprits en prouvant, s’il était encore nécessaire de le faire, que sa dernière machine en date n’est en rien une console d’appoint, c’est-à-dire une console sur laquelle on s’attarde dès lors que le catalogue des autres comme Xbox et PS4 n’a rien de neuf à proposer, mais bien comme un outil incontournable de la grande histoire du jeu vidéo, de par ses œuvres phares.</p>
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<figcaption><span class="caption">La suite de <em>The Legend of Zelda : Breath of the Wild</em> est en développement… une véritable bonne nouvelle pour ce titre historique ou simplement de quoi nourrir les foules par manque de véritables nouveautés, comme Bethesda l’avait fait l’an dernier avec le teaser de <em>The Elder Scrolls VI</em> ?</span></figcaption>
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<h2>Vers 2020, et au-delà</h2>
<p>Comme à son habitude, le facétieux studio Devolver a proposé une <a href="https://www.youtube.com/watch?v=BnbkORoiiXo">conférence parodique</a> taclant aussi bien la concurrence que ses propres productions à grand renfort de pastiches là où le PC Gaming Show est resté fidèle à sa réputation en proposant une <a href="https://www.youtube.com/watch?v=hru6IvgRSp4">conférence peu engageante</a> réservée à une fange de joueurs bien précise. Non sans humour, Limited Run Games s’est encore une fois lancé dans un <a href="https://www.youtube.com/watch?v=D4TVxKvnVSE">show différé</a> pour dévoiler les différents portages en cours. Enfin, le <a href="https://www.youtube.com/watch?v=YHfWkFz1l1Y">VR Showcase</a> avait la lourde tâche de convaincre public, journalistes et investisseurs que les casques de réalité virtuelle ont de beaux jours devant eux. Si de nombreux talents indépendants proposent des jeux plutôt originaux et décalés comme un <em>Team Fortress</em> invitant les joueurs à incarner des saucisses en guerre (intitulé de fait <a href="https://www.youtube.com/watch?v=t6cvIT8NCXg"><em>Meat Fortress</em></a>) ou un simulateur de destruction de chambres d’hôtel façon rockstar (<a href="https://www.youtube.com/watch?v=GmDODCqM1po"><em>Hotel RNR</em></a>), la majorité des titres demeurent de simples jeux de tir à la première personne.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/279185/original/file-20190612-32356-11hh99x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/279185/original/file-20190612-32356-11hh99x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/279185/original/file-20190612-32356-11hh99x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/279185/original/file-20190612-32356-11hh99x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/279185/original/file-20190612-32356-11hh99x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/279185/original/file-20190612-32356-11hh99x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/279185/original/file-20190612-32356-11hh99x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Actif depuis la fin des années 1990, MisterMV est assurément l’une des personnalités françaises les plus importantes lorsqu’il s’agit de traiter du jeu vidéo. Musicien mais également streamer au grand cœur capable de lever des dizaines de milliers d’euros pour Médecins Sans Frontières lors du Z-Event, il commente avec précision l’E3 depuis quelques années, toujours avec une grande dose d’humour et de dérision.</span>
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<p>Si l’on peut saluer quelques nouveautés encore non révélées mais annoncées officiellement comme le très politique <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Z6kNQrY5ydQ"><em>Watchdogs Legion</em></a> d’Ubisoft, ou <em>Avengers</em> de Square Enix, peu de surprises et peu de <em>gameplay</em> étaient au rendez-vous cette année. Cette édition fait office de transition avant que les véritables enjeux que sont le <em>cloud gaming</em>, la nouvelle génération de consoles et les différentes alliances entre les constructeurs ne soient abordés, sans doute en 2020. Au regard de l’an passé, la tendance s’est inversée : les géants ayant marqué l’E3 2018 se sont reposés sur leurs lauriers là où les firmes qui avaient déçu, comme Square Enix ou Nintendo, ont opéré une véritable opération séduction, le remake de <em>Final Fantasy VII</em> et la suite de <em>Breath of the Wild</em> ayant été deux des temps forts de ce cycle de conférences.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/118720/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Guillaume Labrude ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Après une édition 2018 riche en émotions, le salon international du jeu vidéo revient avec de nombreuses confirmations… mais peu de nouveautés.Guillaume Labrude, Docteur en études culturelles, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1191062019-06-19T21:56:21Z2019-06-19T21:56:21ZFenêtres ouvertes sur la gestion : « Game of Thrones », innovation financière, Thomas Piketty…<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/280175/original/file-20190619-171192-k3c2n6.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C101%2C572%2C358&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">« Fenêtres Ouvertes sur la Gestion » : les émissions de la lettre du 15 juin 2019.</span> <span class="attribution"><span class="source">Capture d'écran.</span></span></figcaption></figure><p>À l’affiche de cette <a href="http://t.crm.xerfi.com/nl/jsp/m.jsp?c=%40viQzWxuhkuH8Ei%2Bhk0kXBTX9jxsHxwtzz20kZYPLN1k%3D&utm_source=Mod%E8le%20diffusion%20Xerfi%20Canal&utm_medium=email&utm_campaign=">lettre datée du 15 juin 2019</a>, sept nouvelles conversations à retrouver, comme chaque semaine, avec les invités de Jean‑Philippe Denis, professeur de sciences de gestion à la faculté Jean Monnet de l’Université Paris-Sud et rédacteur en chef de la <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-gestion.htm">Revue française de gestion</a>.</p>
<p>Cette semaine, à la une : Benoît Meyronin, directeur général de Care Expérience et professeur associé à Grenoble école de management, tire les grandes leçons pour les managers de la série à succès <em>Game of Thrones</em>.</p>
<p>Bon visionnage, et à la semaine prochaine pour sept nouvelles conversations « Fenêtres ouvertes sur la gestion » !</p>
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<h2>À la une</h2>
<p><strong>Les leçons de leadership de Game of Thrones, conversation avec Benoît Meyronin, directeur général de Care Expérience et professeur associé à Grenoble École de Management</strong></p>
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<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1122990979873759232"}"></div></p>
<h2>Et aussi…</h2>
<p><strong>Raison d’être de l’entreprise : que doivent en penser les actionnaires ? conversation avec Jean‑Florent Rérolle, associé chez Morrow Sodali</strong></p>
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<p><strong>Innovation financière et recherche en finance, conversation avec Fabrice Riva et Laurent Deville, respectivement professeur à l’université Paris Dauphine et professeur à l’EDHEC Business School</strong></p>
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<p><strong>Finance : Et si on parlait des PME et des ETI ? conversation avec Didier Testot, journaliste financier et producteur audiovisuel</strong></p>
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<p><strong>Economistes néo-classiques contre hétérodoxes : ouvrir le débat académique, conversation avec André Orléan, économiste et directeur d’études à l’Ecole des hautes etudes en sciences sociales (EHESS), et Olivier Favereau, co-directeur du département Economie, homme, société au Collège des Bernardins</strong></p>
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<p><strong>De l’analyse terrain aux théories du management, conversation avec Marielle Audrey Payaud et Alain-Charles Martinet, auteurs de « l’Encyclopédie de la stratégie »</strong></p>
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<p><strong>L’impact de Thomas Piketty sur les sciences de gestion, conversation avec Rémi Jardat, directeur de la recherche à ISTEC.</strong></p>
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<p><em>Toutes les émissions <a href="https://www.xerficanal.com/fog/">« Fenêtres ouvertes sur la gestion »</a> peuvent être consultées sur Xerfi canal.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/119106/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Philippe Denis ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Retrouvez les invités de Jean‑Philippe Denis, professeur à l’Université Paris-Sud et rédacteur en chef de la RFG. À la une cette semaine, « les leçons de leadership de « Game of Thrones ».Jean-Philippe Denis, Professeur de gestion, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1178002019-05-26T22:53:22Z2019-05-26T22:53:22Z« Game of Thrones » : les raisons d’un succès<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/276439/original/file-20190525-187185-ja2woi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1599%2C891&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une série événement.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.allocine.fr/series/ficheserie-7157/photos/detail/?cmediafile=21621170">Allociné</a></span></figcaption></figure><p>Ce qui fait d’abord le succès de <em>Game of Thrones</em>, c’est sa dimension épique, avec un niveau de spectaculaire qui était plutôt associé au cinéma et qui, depuis la série, est aussi associé à la télévision.</p>
<p>De plus en plus, depuis le tournant numérique, le cinéma et les séries TV utilisent les mêmes outils : des caméras numériques lors des tournages, des entreprises spécialisées en effets spéciaux et en conception de génériques… et le fait qu’on regarde aussi nos séries sur des écrans de meilleure définition qu’il y a 15 ou 20 ans.</p>
<p>C’est aussi lié à une esthétique très soignée, qu’on qualifie souvent de « cinématographique », même si ce terme est sujet à débat parce qu’il peut instaurer une hiérarchie entre cinéma et télévision. Il n’en demeure pas moins que c’est une série qui donne à voir des scènes qu’on avait l’habitude d’en voir plutôt au cinéma : des plans larges, des scènes avec des centaines de figurants, des effets spéciaux particulièrement bien faits, des dragons qui crachent du feu sur des dizaines de navires sur l’océan. La meilleure définition de l’image permet aussi de jouer plus précisément sur la profondeur de champ ou sur les nuances de lumière. On peut prendre l’exemple de la lumière dorée et chaude des scènes qui ont lieu à King’s Landing, qui contrastent avec les couleurs froides des scènes qui ont lieu avec la Garde de Nuit et tout ce qui se passe dans le Nord.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/f94uNliI5z4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Au sein de la série, certaines scènes ressortent, notamment par ce choix porté à l’esthétique. La mise en scène y permet notamment une très forte immersion du spectateur dans la fiction, par exemple dans la Bataille des bâtards (saison 6 épisode 9). Il y a d’abord des plans larges en surplomb du champ de bataille pour qu’on comprenne la configuration, qui évoquent une technique récurrente dans les grands films de guerre, de <em>Ran</em> au <em>Seigneur des Anneaux</em>. Ensuite, il y a un plan séquence où la caméra reste très proche de Jon Snow qui se bat dans une atmosphère de parfait chaos qui rappelle la grande scène du débarquement dans le film de Spielberg <em>Il faut sauver le soldat Ryan</em>, où l’on avait la même restriction du point de vue à hauteur d’homme, qui insistait sur la proximité de l’horreur et l’illisibilité désordonnée du conflit. À ce moment dans <em>Game of Thrones</em>, grâce à ce plan-séquence, on est presque Jon Snow, tout au moins on est avec lui.</p>
<p>L’immersion ressemble alors à celle du gamer plongé dans un jeu vidéo. De la même manière, le personnage de Jon Snow se retrouve plus tard englouti sous une masse de cadavres, et l’écran devient noir pendant quelques minutes. On étouffe, dans cette obscurité, sous cette couche de morts, à entendre les bruits étouffés de la bataille qui continue et le halètement de Jon qui manque d’oxygène et tente de s’extraire. Au final, il arrive à sortir la tête de cette masse et le public reprend son souffle en même temps que lui : on arrive à respirer quand lui-même retrouve l’air libre.</p>
<p>D’autres scènes de bataille sont filmées de façon à arrêter notre regard. Les débats ont été vifs – notamment en ligne – autour de la bataille de l’épisode 3 de la saison 8, et ont essentiellement porté sur la lumière. La bataille se passe la nuit, et certains spectateurs ont trouvé que c’était beaucoup trop sombre et qu’on n’y voyait rien. Le réalisateur de la série lui-même à répondu à ces débats sur Twitter pour expliquer : « Ça a été filmé comme ça aurait dû l’être, simplement vous ne devriez pas regarder cela sur un téléphone portable ou un téléviseur mal réglé ! ». Certains sites ont aussi expliqué quels seraient les réglages de l’image idéaux pour pouvoir visionner l’épisode dans les meilleures conditions.</p>
<p>Donc, cette attention à l’image et au son, c’est ce qui fait sans aucun doute partie du plaisir sensoriel qu’on a à regarder une série comme <em>Game of Thrones</em>.</p>
<h2>Sa force ? La complexité narrative</h2>
<p>Au fil des saisons, des huit années de diffusion, on connaît de mieux en mieux un très grand nombre de personnages. Ils évoluent, changent physiquement, parfois ils meurent et ressuscitent. C’est cette complexité narrative, cette capacité qu’on acquiert au fil des saisons à maîtriser les innombrables liens de ces groupes complexes, qui participe du plaisir qu’on a à regarder la série, comme cela participe au plaisir de regarder le dernier <em>Avengers</em> car si on est fan, on maîtrise les rouages d’un monde fictionnel extrêmement complexe.</p>
<p>La complexité narrative permet par ailleurs d’aborder des thématiques très variées. Cette idée d’un monde en suspens, menacé de toutes parts, résonne avec nos peurs climatiques, politiques, avec les mouvements de population, les tensions internationales… Ce sont des thématiques universelles, rassemblées dans ce monde de fantasy qui associe des éléments de notre passé – médiéval, antique, etc. – des éléments de notre culture – avec d’innombrables références aux autres textes de fantasy comme le <em>Seigneur des anneaux</em> – et qui reflètent parfaitement les grands enjeux contemporains, politiques, sociaux, culturels de notre époque.</p>
<h2>Un mode de diffusion « à l’ancienne » qui mise sur l’événement</h2>
<p>Le succès de <em>Game of Thrones</em> réside aussi dans le type de relation que la série a réussi à instaurer avec ses fans, avec ses spectateurs. C’est une série qui suscite les échanges, la discussion, les débats, parfois assez animés et tout cela est allié à son mode de visionnage. C’est une série « à l’ancienne », que l’on aime suivre au moment où elle est diffusée à la télévision. Cela s’oppose aujourd’hui, avec l’ère Netflix, Amazon, Hulu, aux phénomènes de <em>binge watching</em> où certaines séries sont mises à disposition des spectateurs sous forme d’une saison entière de dix épisodes que l’on peut regarder quand on veut, en une seule fois même, si on le souhaite.</p>
<p>Avec <em>Game of Thrones</em>, c’est différent : on la suit sur le moment. Notamment parce qu’il y a de tels retournements de situation, de telles scènes clés choquantes qu’on ne veut pas se faire <em>spoiler</em> l’intrigue. On a donc l’impression qu’il faut absolument la voir en même temps que les autres. Ce phénomène est entretenu par les réseaux sociaux, par les discussions en ligne, par les productions de vidéos autour de la série, qui entretiennent une conversation très vivace entre fans. On voit que c’est le cas dans la saison 8 mais c’était le cas bien plus tôt dès la saison 1 avec la mort d’un des personnages essentiels. La série offre nombre de ces moments qu’on appelle en anglais des « Oh My God moment », des moments où ce qu’il se passe est tellement incroyable qu’on a envie d’en parler avec les autres… ce qui nécessite d’en être au même stade !</p>
<p>C’est l’une des qualités de <em>Game of Thrones</em> : la série fait événement. Ce type de série pourra-t-il encore exister avec l’avènement du streaming, de la diffusion en continu, avec le fait que même les séries diffusées sur des chaînes traditionnelles ont tendance à être vues de plus en plus a posteriori sous la forme de consommation un peu addictive ? Je suis sûre que ce n’est pas la dernière. Plusieurs modèles vont coexister : le modèle de la diffusion en continu et le modèle télévisé classique où on partage un événement spécifique comme un match de foot. C’est la force de la télévision : elle sait nous rassembler devant un événement, qu’il soit réel ou fictionnel.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/117800/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ariane Hudelet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Effets spéciaux spectaculaires, esthétique cinématographique, complexité narrative, mode de diffusion événementiel… « Game of Thrones » possède tous les ingrédients du succès.Ariane Hudelet, Maître de conférences en études anglophones, Université Paris CitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1162172019-05-02T21:38:17Z2019-05-02T21:38:17Z« Warming is coming » : « Game of Thrones » est aussi une fable sur la menace climatique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/272099/original/file-20190501-113855-n9i5q4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Greta Thunberg (Suède) et Arya Stark (Game of Thrones) : jeunes, frondeuses et déterminées, envers la menace du réchauffement climatique pour Greta et envers la menace venue du froid pour Arya.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/stockholm-sweden-march-22-2019-16yearold-1346536685?src=oPzUxA2FUCm1Yc8HI0J_xQ-1-2">Per Grunditz/Shutterstock et Fandom</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>La dernière saison du phénomène mondial <em>Game of Thrones</em> était attendue par des millions de fans. La série n’est pas qu’un monde d’<em>heroic fantasy</em> survitaminé par un budget hollywoodien et des personnages complexes (féminins notamment), ce sont aussi des références qui nous parlent, historiques notamment : les familles Stark et Lannister renvoient ainsi aux <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Conflit_entre_Cap%C3%A9tiens_et_Plantagen%C3%AAt">Capétiens et Plantagenêts</a> de la guerre de Cent Ans et Aerys Targaryen – dit « le roi fou » – au roi anglais Henri VI dont la mort a provoqué la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Deux-Roses">guerre des Deux-Roses</a>.</p>
<p>Même les scènes les plus marquantes de la série sont inspirées de faits historiques : la mort inattendue du Lord Commandant de la Garde de nuit rappelle Brutus et Jules César ; les traumatisantes Noces pourpres reproduisent le Dîner noir du roi d’Écosse ; et la troublante Marche de la honte de Cercei Lannister retrace l’histoire de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Jane_Shore">Jane Shore</a> condamnée pour libertinage dans les années 1480.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/pourquoi-historiennes-et-historiens-sinteressent-ils-a-game-of-thrones-115434">Pourquoi historiennes et historiens s’intéressent-ils à « Game of Thrones » ?</a>
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<h2>Face à la menace climatique</h2>
<p>Mais <em>Game of Thrones</em> n’est pas qu’un passionnant cours d’histoire : ce sont des thèmes universels (amour, religion, pouvoir, etc.) et des luttes de la société moderne qui se rejouent. Il décrit un monde multipolaire dans lequel l’unité politique s’est effondrée, faisant écho à notre réalité contemporaine depuis la fin de la guerre froide. La thématique du réchauffement climatique y est également bien présente.</p>
<p>« Winter is coming ». La célèbre devise de la maison Stark trouve son origine dans les hivers froids qui rythmèrent, à Chicago, l’enfance de George R.R. Martin, le créateur de la série. Mais pas que : en octobre 2018, ce dernier révélait dans une interview au <a href="https://www.nytimes.com/2018/10/16/t-magazine/george-rr-martin-qanda-game-of-thrones.html"><em>New York Times</em></a> les connotations politiques et les références au réchauffement climatique de son récit :</p>
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<p>« Les gens, à Westeros, livrent leurs batailles individuelles pour le pouvoir, leur position sociale et leur prospérité. Et ils sont tellement focalisés là-dessus qu’ils ignorent la menace du “Winter is coming”, qui a le potentiel de les faire disparaître et de détruire leur monde. »</p>
</blockquote>
<p>De 6 000 à 8 000 ans avant les événements qui agitent le Trône de fer, un hiver apparemment sans fin s’abattit sur le continent Westeros, faisant émerger des spectres (les Marcheurs blancs) qui auront presque anéanti le royaume des vivants lors de la longue nuit. Mais pour les héros de la fiction, ces Marcheurs blancs ne sont qu’un mythe. Pas de raison pour eux de s’en alarmer outre mesure, ni de se laisser détourner de la quête du Trône de Fer !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/272043/original/file-20190501-113852-1luns8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/272043/original/file-20190501-113852-1luns8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/272043/original/file-20190501-113852-1luns8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/272043/original/file-20190501-113852-1luns8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/272043/original/file-20190501-113852-1luns8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/272043/original/file-20190501-113852-1luns8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/272043/original/file-20190501-113852-1luns8u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dans <em>Game of Thrones</em>, la menace vient du froid, au nord du continent Westeros. Mais les rois et les reines mettent sept saisons de la série à prendre au sérieux les terribles Marcheurs blancs…</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/download/confirm/543528610?src=nEXw_yT55F9my4OA8vHgDw-1-5&size=medium_jpg">Abel Halasz/Shutterstock</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Sur Terre, il y a 56 millions d’années, lors de l’événement dit du <a href="https://www.youtube.com/watch?v=ldLBoErAhz4">maximum thermique</a> au Paléocène-Ecocène, un afflux massif de carbone a fait grimper en flèche les températures et provoqua des sécheresses, des inondations, des invasions d’insectes et des extinctions d’espèces. Les scientifiques estiment que nous en dégageons aujourd’hui à peu près autant en brûlant toutes les réserves supposées de charbon, de pétrole et de gaz naturel de la planète : depuis l’ère industrielle, la température a augmenté de <a href="https://www.lemonde.fr/mmpub/edt/zip/2018/08/21/094421081-99fda0a5539ab3ee86fa2963a45d7c2eacf1fa35/index.html">1 degré</a>.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/272080/original/file-20190501-113846-1ekhbo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/272080/original/file-20190501-113846-1ekhbo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=953&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/272080/original/file-20190501-113846-1ekhbo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=953&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/272080/original/file-20190501-113846-1ekhbo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=953&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/272080/original/file-20190501-113846-1ekhbo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1197&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/272080/original/file-20190501-113846-1ekhbo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1197&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/272080/original/file-20190501-113846-1ekhbo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1197&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cersei Lannister, égoïste et sourde à la menace venant du froid.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://gameofthrones.fandom.com/wiki/Cersei_Lannister?file=Cersei_on_Throne_Winterfell_Ep_s8.jpg">Fandom</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Quels parallèles peut-on dresser entre notre situation et celle de la série ? Et quelles raisons poussent ces deux mondes à ignorer la gravité de la situation ?</p>
<h2>Ennemis sans État et « tragédie des communs »</h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/272105/original/file-20190501-117570-oa67at.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/272105/original/file-20190501-117570-oa67at.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=960&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/272105/original/file-20190501-117570-oa67at.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=960&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/272105/original/file-20190501-117570-oa67at.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=960&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/272105/original/file-20190501-117570-oa67at.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1206&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/272105/original/file-20190501-117570-oa67at.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1206&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/272105/original/file-20190501-117570-oa67at.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1206&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Donald Trump, protectionniste et sourd à la menace climatique.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/washington-dc-april-27-2018-us-1081476917?src=sTDwAIBG7MC0BboLqoB4Aw-2-26">Nicole Glass/Shutterstock</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La menace des Marcheurs blancs (dans la série) et celle du réchauffement climatique (dans le monde réel) concernent tout le monde et il est dans l’intérêt de tous de faire les efforts nécessaires pour écarter le danger. Malheureusement, l’intérêt individuel entre en conflit avec l’intérêt général : il est plus avantageux de laisser faire les autres et de rester soi-même un « passager clandestin » profitant des efforts fournis par la communauté sans y contribuer. C’est la <a href="https://laviedesidees.fr/Elinor-Ostrom-par-dela-la-tragedie-des-communs.html">tragédie des communs</a> qui aboutit, en théorie économique, à un échec de la coopération et à un résultat perdant-perdant.</p>
<p>Au nord de Westeros, un gigantesque mur de glace régenté par l’ordre des Gardes de nuit défend le royaume des Sept Couronnes. Autrefois, les grandes familles pourvoyaient l’ordre en y envoyant leurs fils. Aujourd’hui, c’est l’endroit où l’on expédie voleurs, violeurs et vauriens. L’ordre se trouve ainsi décrédibilisé et fragilisé.</p>
<p>Sur Terre, des politiques publiques climatiques sont (théoriquement) mises en place pour réduire les gaz à effet de serre et lutter contre le réchauffement climatique. L’investissement dans les énergies décarbonées et l’efficacité énergétique font l’objet de conférences mondiales – les COP – et d’accords qui représentent autant d’actions coûteuses. Ces accords volontaires sont eux aussi fragiles et ont récemment été mis à mal avec par exemple le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris. Donald Trump défait la politique climatique d’Obama et met fin « à la guerre contre le charbon ».</p>
<hr>
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<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/explaining-the-increase-in-coal-consumption-worldwide-111045">Explaining the increase in coal consumption worldwide</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Cette action, selon lui, permettra de « protéger les travailleurs américains et les entreprises américaines » de cet accord qu’il juge contraire à la souveraineté nationale. Donald Trump est la Cercei Lannister de <em>Game of Thrones</em> qui refuse d’envoyer ses troupes au Mur de glace.</p>
<h2>Les sauvageons, nos réfugiés climatiques</h2>
<p>Certaines régions du monde sont et seront de plus en plus touchées par le réchauffement climatique qui cause des exodes de populations entières particulièrement exposées et dépendantes de l’agriculture : l’Afrique subsaharienne, qui subit des sécheresses extrêmes et la dégradation des sols, l’Asie du Sud et du Sud-Est, région la plus exposée aux typhons et autres tempêtes, et les petits États insulaires, comme ceux des archipels du Pacifique, en première ligne face à la montée du niveau de la mer.</p>
<p>Selon l’ONU, d’ici 2050, le nombre de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0959378011001403?via%3Dihub">réfugiés climatiques</a> pourrait atteindre entre 150 et 300 millions d’individus.</p>
<p>Aujourd’hui, ces personnes n’ont aucun statut au regard du droit international ; elles ne bénéficient donc pas de la même protection garantie à ceux qui fuient les guerres et les persécutions, par exemple. Pourtant, cette migration est déjà prise en compte dans les négociations internationales, comme dans le cadre de la <a href="https://www.ouest-france.fr/monde/fidji/cop23-aux-fidji-la-premiere-ecole-refugiee-climatique-5361407">COP23 de Bonn en 2017</a> ou de l’<a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1068/c1209j">Accord de Cancun</a> de 2010.</p>
<p>La métaphore des crises de migrants est également reprise dans <em>Game of Thrones</em>. Elle met en scène les Sauvageons qui vivent au-delà du Mur de glace, fuyant vers le sud pour échapper aux Marcheurs blancs.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/272112/original/file-20190501-117598-jyq6sz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/272112/original/file-20190501-117598-jyq6sz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/272112/original/file-20190501-117598-jyq6sz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/272112/original/file-20190501-117598-jyq6sz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/272112/original/file-20190501-117598-jyq6sz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/272112/original/file-20190501-117598-jyq6sz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/272112/original/file-20190501-117598-jyq6sz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les sauvageons de <em>Game of Thrones</em>, exilés au-delà du Mur de glace.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://vignette.wikia.nocookie.net/game-of-thrones-le-trone-de-fer/images/7/77/Camp_du_Peuple_libre.jpg/revision/latest?cb=20170609110451&path-prefix=fr">Fandom</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’histoire récente a montré que le populisme est la rançon de l’impuissance européenne face à la crise des migrants. Incapable de gérer efficacement la <a href="https://www.lepoint.fr/europe/crise-des-migrants-angela-merkel-isolee-en-europe-14-02-2016-2017815_2626.php">pression migratoire de l’été 2015</a>, l’Union européenne voit des <a href="https://www.liberation.fr/planete/2018/06/04/le-populisme-rancon-de-l-impuissance-europeenne-face-a-la-crise-migratoire_1656627">politiques protectionnistes</a> fleurir au sein des États membres. Ce désir de rendre les frontières étanches se retrouve de l’autre côté de l’Atlantique, au Brésil et aux États-Unis.</p>
<p>Et pourtant, cette pression migratoire n’est sans doute rien à côté de celle que pourront provoquer les conséquences désastreuses du changement climatique à moyen et long termes…</p>
<h2>Happy-end ou un désastre humanitaire ?</h2>
<p>Si les politiques climatiques internationales affichent leur bonne volonté, elles ne parviennent cependant pas à embarquer les États les plus importants dans une lutte efficace. Parviendra-t-on à mettre en place des mesures communes capables de changer à la fois notre manière de produire et de consommer l’énergie pour lutter contre cette menace planétaire ?</p>
<p>La réponse est peut-être à chercher du côté de la dernière saison de <em>Game of Thrones</em> – les Marcheurs blancs vont-ils régner et occuper le trône de fer à tout jamais ? Le salut viendra-t-il de la jeunesse frondeuse et déterminée, incarnée par Arya Stark (et Greta Thunberg dans la vraie vie) ? Les différents royaumes parviendront-ils à s’unir pour combattre ensemble la menace ? – ou dans cette sentence pleine de sagesse et de courage que l’instructeur Syrio Farel fit à Arya Stark, la jeune héroïne de la série :</p>
<blockquote>
<p>« Il n’existe qu’un seul dieu, et il s’appelle la mort. Et nous ne disons qu’une seule chose à la mort : Pas aujourd’hui. »</p>
</blockquote><img src="https://counter.theconversation.com/content/116217/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Lutte contre le danger venu du froid pour eux, venant du chaud pour nous. Entre la série et notre réalité, les enjeux se croisent : ouvrir ou fermer les yeux, s’unir ou non, agir ou retarder l’action.Carine Sebi, Assistant Professor - Economics, Grenoble École de Management (GEM)Laurent Muller, Directeur de recherche à l'INRAE au laboratoire GAEL - spécialiste en économie expérimentale et économie comportementale, InraeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1160022019-04-29T20:16:10Z2019-04-29T20:16:10ZLes managers ont beaucoup à apprendre de « Game of Thrones »…<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/270929/original/file-20190425-121233-12z7kd5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=34%2C19%2C844%2C630&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans « Game of Thrones », Daenerys Targaryen peut compter sur ses dragons...et sur ses compétences de manager. </span> <span class="attribution"><span class="source">Faiz Zaki / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p><em>Benoît Meyronin, co-auteur avec Benoît Aubert du livre « Quand les séries TV nous enseignent le management. De McGyver à Mad Men », publié aux éditions Dunod en 2017, propose de compléter ces travaux avec une lecture managériale de l’avant-dernière saison de « Game of Thrones ».</em></p>
<hr>
<p>La diffusion de la 8<sup>e</sup> et dernière saison de <em>Game of Thrones</em> est un évènement qui intéresse les <a href="https://theconversation.com/pourquoi-historiennes-et-historiens-sinteressent-ils-a-game-of-thrones-115434">historiens</a>, les spécialistes de la pop culture, ou encore les <a href="https://www.philomag.com/hors-series/game-of-thrones-38080">philosophes</a>. Mais la série télévisée américaine peut également être analysée au travers du prisme du management. En effet, plusieurs scènes des saisons précédentes peuvent rappeler des évènements de la vie des entreprises.</p>
<p>En premier lieu, il est intéressant de rapprocher la situation pour le moins tendue de la fin de la 7<sup>e</sup> saison, qui voit les horrifiques soldats morts-vivants traverser le fameux mur pour envahir Westeros, de l’aveuglement que des pans entiers de l’industrie ont pu connaître – ou connaissent. Nous assistons ainsi à la mort lente des téléphones à touches, de l’industrie du disque, de la télévision et notamment de la TV à péage traditionnelle (disruptée par la puissance des Netflix, Apple, et autres Amazon) ou encore des grands quotidiens, pour ne parler que de l’univers des industries culturelles et apparentées.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/270914/original/file-20190425-121258-6c8ptn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/270914/original/file-20190425-121258-6c8ptn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=654&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/270914/original/file-20190425-121258-6c8ptn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=654&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/270914/original/file-20190425-121258-6c8ptn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=654&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/270914/original/file-20190425-121258-6c8ptn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=822&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/270914/original/file-20190425-121258-6c8ptn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=822&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/270914/original/file-20190425-121258-6c8ptn.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=822&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jon Snow maîtrise l’art d’hybrider pour mieux innover.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Christian Bertrand/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Au-delà d’un certain manque de lucidité, c’est surtout à mon sens l’incapacité à sortir des réflexes sectoriels, voire corporatistes, qui freinent les mutations inévitables : on continue à guerroyer entre pairs, à se benchmarker et à s’imiter, quand la disruption dont on parle tant ne peut venir, à mon sens, que d’une hybridation avec d’autres métiers, que d’un jeu d’alliances a priori improbables – comme Jon Snow y parvient en rassemblant les Nordiens et les Sauvageons, mais pas seulement…</p>
<p>En ce sens, l’étonnante posture de Carglass, qui a lancé début 2019 <a href="http://www.lefigaro.fr/societes/2019/01/30/20005-20190130ARTFIG00286-apres-l-auto-carglass-entre-dans-la-maison.php">Carglass Maison</a> en rachetant un acteur du secteur de l’entretien et des petites réparations au domicile, me semble éclairante de cette posture certes surprenante en première lecture, mais finalement porteuse de sens et de synergies plus évidentes qu’il n’y paraît ex ante… alors que l’enseigne est de plus en plus concurrencée sur son cœur de métier historique.</p>
<h2>Daenerys, ou l’art de bien s’entourer</h2>
<p>Dans l’ouvrage collectif dont j’ai initié la publication, je traite notamment du cas des <em>Soprano</em> et de l’incapacité chronique de Tony Soprano à <a href="https://theconversation.com/savoir-sentourer-comment-bien-choisir-son-bras-droit-115320">savoir s’entourer des « bonnes personnes »</a> pour l’aider à prendre les bonnes décisions. Si l’art du management est d’abord l’art de bien arbitrer, il implique en amont de coconstruire les décisions pour créer de l’engagement, et donc de bâtir un processus décisionnel qui permette au/aux dirigeant(s) de créer autour d’eux, avec eux, les conditions de cet engagement et d’une décision portée de façon collégiale – au moins par leurs N-1.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/270920/original/file-20190425-121237-1fj2f9u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/270920/original/file-20190425-121237-1fj2f9u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/270920/original/file-20190425-121237-1fj2f9u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=813&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/270920/original/file-20190425-121237-1fj2f9u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=813&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/270920/original/file-20190425-121237-1fj2f9u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=813&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/270920/original/file-20190425-121237-1fj2f9u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1021&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/270920/original/file-20190425-121237-1fj2f9u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1021&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/270920/original/file-20190425-121237-1fj2f9u.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1021&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dunod.com/entreprise-economie/macgyver-mad-men-quand-series-tv-nous-enseignent-management">Éditions Dunod, 2017.</a></span>
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<p>Parce qu’il est entouré de semblables, de « lieutenants » issus comme lui de la minorité italo-américaine, des quartiers populaires et d’une culture de la violence physique qui s’acquière dès le plus jeune âge, Tony Soprano prend rarement la bonne décision… parce qu’il est mal entouré, mal conseillé, sans avis contrevenant à l’atavisme qu’il partage avec ses proches (parfois des parents). Je répète souvent que le premier rôle, la première responsabilité d’un dirigeant, c’est de savoir s’entourer des personnes qui vont l’aider à prendre, puis à décliner, les décisions les meilleures dans un contexte donné.</p>
<p>En ce sens, Daenerys Targaryen est celle qui, parce qu’elle opte pour une autre forme d’alliance improbable, est en capacité de modérer ses ardeurs pour les tiédir à l’aune d’une raison plus froide et plus machiavélique – via notamment les conseils que lui prodigue sa « main », Tyrion Lannister, frère honni de sa pire ennemie, la reine Cersei… Parce qu’elle sait l’écouter, tout en prenant parfois des décisions contraires aux convictions qu’il défend, elle est en capacité non seulement de fédérer autour d’elle (j’y reviendrai) mais aussi de vaincre alors même qu’elle est sans conteste possible la protagoniste qui disposait, au début de l’histoire, de la probabilité de survie la plus faible…</p>
<p>Ainsi, en acceptant sur les conseils de sa main une alliance qui va être si stratégique (mais pas seulement) avec Jon Snow, alors que tant de choses les opposent au départ, elle sait se montrer à l’écoute, faire évoluer sa position et faire le pas initial qui rend tout possible ensuite. C’est en s’associant le concours sincère de deux personnages dont tout semble l’éloigner a priori qu’elle crée, du moins jusqu’à cette 7<sup>e</sup> saison, les conditions du succès.</p>
<h2>L’art « d’embarquer »</h2>
<p>À l’heure où la question du « on-boarding », pour parler ce merveilleux franglais du management, devient si fondamentale dans les démarches de transformation, créer les conditions d’une large adhésion et bien plus, d’un réel engagement, est plus que jamais un facteur clé de succès dans toute entreprise – et ceci dans la sphère privée comme dans celle du public. À ce titre encore, notre héroïne est celle qui, avec son allié Jon Snow, est la seule candidate au pouvoir suprême dont le mobile n’est pas simplement le pouvoir – pour le pouvoir de l’exercer – mais bien le pouvoir pour ce qu’il rend possible, au service du peuple et notamment des plus démunis.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/270917/original/file-20190425-121258-auscp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/270917/original/file-20190425-121258-auscp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=641&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/270917/original/file-20190425-121258-auscp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=641&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/270917/original/file-20190425-121258-auscp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=641&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/270917/original/file-20190425-121258-auscp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=805&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/270917/original/file-20190425-121258-auscp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=805&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/270917/original/file-20190425-121258-auscp4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=805&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’écoute, une arme managériale que Daenerys Targaryen manie avec brio.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Christian Bertrand/Shutterstock</span></span>
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<p>Ses troupes, et la 7<sup>e</sup> saison le manifeste de façon exemplaire, explicite, ne la suivent ni pas intérêt ni par crainte, mais parce qu’elles l’ont « choisie », tout simplement ; choisie pour ses qualités, pour ce qu’elle a réalisé, et non pour son pedigree, parce qu’elle est la « fille de » (d’une grande famille en l’occurrence, mais ce pourrait être en entreprise de telle ou telle grande école !). Bien sûr, en entreprise on ne choisit qu’exceptionnellement (dans le cadre des coopératives) ses dirigeants, et tout aussi rarement ses managers. Mais l’adhésion et l’engagement des équipes n’en demeurent pas moins un levier essentiel pour avancer, et ni le bâton ni la seule carotte ne suffisent plus, ou alors pour un temps seulement, à fédérer et faire se mouvoir tout un corps social. Dans ces conditions, Daenerys nous ouvre quelques perspectives intéressantes à « mâchonner » :</p>
<ul>
<li><p>Elle dit ce qu’elle va faire et elle fait ce qu’elle a dit qu’elle ferait : sa parole est forte, crédible, et elle va au bout de ses engagements.</p></li>
<li><p>Elle est courageuse, elle n’hésite pas à partir au feu, au premier rang, pour conduire ses troupes – où il est question du courage managérial et de l’exemplarité.</p></li>
<li><p>Elle est lucide sur ses forces, travaille sur des jeux d’alliance, ne se repose pas seulement sur ses puissants dragons. Elle va d’étape en étape, et construit peu à peu sa puissance et son influence en partant… de rien ! L’entreprise est un jeu d’alliance, de coopération, ou alors on joue le jeu mortifère des silos.</p></li>
<li><p>Elle ose aller « contre », contre certaines règles, certaines pratiques, certaines traditions… Elle est la « briseuse de chaînes », celle qui rompt le cycle infernal de l’esclavage pour certaines populations par exemple. Un manager ou un leader, pour moi, est aussi celui qui « ose », qui transgresse parfois les règles pour créer une saine rupture.</p></li>
<li><p>Elle est authentique, sincère, parfois trop entière mais toujours alignée avec elle-même et cette forme de transparence, rare parmi ses pairs, lui vaut le respect de son entourage.</p></li>
<li><p>Elle a confiance en elle, croit en ses chances, ne se laisse pas décourager ni détourner de son objectif – prendre le pouvoir pour créer un monde meilleur.</p></li>
<li><p>Et elle sait s’entourer, comme on l’a vu.</p></li>
</ul>
<h2>Le mot de la fin…</h2>
<p>Game of Thrones_, on le voit, n’éclaire pas seulement les enjeux géopolitiques, philosophiques ou historiques de notre temps ! Cette lecture (trop) rapide montre que la série la plus populaire de tous les temps ouvre pour le monde de l’entreprise un riche éventail d’interprétations et d’analyses pour aider les dirigeants, les leaders, les managers, à réfléchir sur leurs postures et leurs pratiques. En s’appuyant sur quelques extraits, il devient possible de donner la parole à un collectif et de partager quelques fondamentaux autour de la prise de décision, de la capacité à embarquer, de l’écoute, de la coopération ou encore de la lucidité face aux transformations qui s’opèrent autour de nous…</p>
<p>Si j’ai ici développé une lecture essentiellement centrée sur le personnage de Daenerys, Jon Snow fournit la figure d’un leader aux qualités tout aussi inspirantes, alors que lui-même n’apparaissait pas à l’origine de la série comme un protagoniste qui pourrait « finir sur le podium » : par sa sincérité, son courage, sa fidélité aux siens, sa capacité à fédérer mais aussi à aller « contre » (en venant comme il le fait dans la 7<sup>e</sup> saison au-devant de Daenerys contre tous les avis rassemblés !), par son talent à dialoguer et à convaincre (les Sauvageons de le suivre, Daenerys de s’allier à lui pour combattre les Marcheurs Blancs) par sa modestie et son respect de quelques valeurs fortes (lui aussi veut le pouvoir pour être utile à son peuple)ale, il devient le « roi du Nord ».</p>
<p>L’un et l’autre partagent de nombreuses qualités, dont la moindre n’est pas la ténacité face à l’adversité. Ils sont deux remarquables figures d’entrepreneurs…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/116002/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Benoît Meyronin travaille en tant que professeur à Grenoble Ecole de Management dont il préside également la Fondation, et il dirige une filiale du Domplus Groupe, Care Expérience. Il est membre de l'AMARC et de l'association Esprit de Service France. </span></em></p>Capacité à bien s'entourer, sens de l'écoute, leadership… Les héros de la série à succès peuvent se targuer de qualités plus qu'utiles en entreprise.Benoît Meyronin, Professeur senior à Grenoble Ecole de Management, Grenoble École de Management (GEM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1154342019-04-14T11:22:20Z2019-04-14T11:22:20ZPourquoi historiennes et historiens s’intéressent-ils à « Game of Thrones » ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/269163/original/file-20190414-76840-ehofhb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C0%2C986%2C663&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption"> Missandei, interprétée par Nathalie Emmanuel (_Game of Thrones_, HBO, 2011-).</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://thefanboyseo.com/2017/08/06/missandei-great-traitor-game-thrones/">thefanboyseo.com</a></span></figcaption></figure><p>La série <em>Game of Thrones</em> (HBO, 2011-), tirée des romans de George R.R. Martin, n’est pas du tout une reconstitution historique du passé, mais une œuvre de fiction et de fantasy. Elle suscite pourtant un très vif intérêt de la part des historiennes et des historiens.</p>
<h2>A quoi s’intéressent les historiens ?</h2>
<p>Le magazine <em>Historia</em> (avril-juin 2019) vient de <a href="https://www.historia.fr/parution/hors-serie-9">publier un hors-série</a> dont le titre a, de prime abord, de quoi intriguer : « Game of Thrones, la série événement à la lumière de l’Histoire ». Le numéro est cosigné par une palette d’universitaires : deux spécialistes de littérature (ce qui n’a rien d’étonnant, puisque George R.R. Martin est un romancier) ; et douze chercheuses et chercheurs en histoire, offrant un assez large éventail, allant de la jeune post-doctorante au professeur émérite. On y trouve une majorité de médiévistes, mais aussi des spécialistes de l’Antiquité et de l’époque moderne.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/3q2uVakCUAA?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
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<p>Bien sûr, les historiens n’étudient pas seulement des textes écrits avant eux par d’autres historiens. Ils peuvent aussi se pencher sur des œuvres littéraires, des objets artistiques, des films… Dans ce sens, tout est historique, ou peut le devenir, dès lors qu’on l’aborde avec une certaine méthode et au travers de questionnements propres aux sciences humaines.</p>
<p>Il est ainsi possible d’étudier l’<em>Iliade</em> ou la Bible à la lumière de l’histoire, c’est-à-dire, par exemple, en tentant de faire la part entre ce qui s’est réellement passé, il y a trois mille ans, et ce qui a été inventé. L’historien y parvient notamment par la confrontation des sources. C’est ainsi qu’on a vu le développement <a href="http://www.lavie.fr/actualite/monde/archeologie-et-bible-les-12-dernieres-decouvertes-majeures-26-12-2017-87057_5.php">d’une archéologie biblique</a> ; ou encore de recherches sur l’Âge du bronze dans le monde égéen, initiées <a href="http://www.lefigaro.fr/histoire/2018/07/26/26001-20180726ARTFIG00001-heinrich-schliemann-l-aventurier-de-la-cite-perdue.php">par Heinrich Schliemann</a>, qui découvrit l’ancienne Troie, prouvant qu’il y avait bien un fond historique sous les récits épiques élaborés plus tard.</p>
<p>La Bible ou l’<em>Iliade</em>, qui ne sont pas des textes écrits dans une perspective historique, nous livrent donc de précieuses informations sur l’histoire des Hébreux ou des Grecs dans l’Antiquité.</p>
<h2>Mais quel est l’intérêt historique de <em>Game of Thrones</em> ?</h2>
<p>Par contre, <em>Game of Thrones</em> ne nous dit rien du passé, du moins pas de manière directe, puisqu’il s’agit d’une œuvre contemporaine. Le premier tome <a href="https://www.babelio.com/livres/Martin-Le-Trone-de-Fer-Integrale-1--A-Game-of-Thrones/158547">du <em>Trône de fer</em></a> (« A Song of Ice and Fire ») a été publié par George R.R. Martin en 1996 et le premier épisode de la série a été diffusé par HBO en 2011.</p>
<p>Autant dire qu’au regard de l’histoire de l’humanité, ces œuvres littéraires ou filmées sont extrêmement récentes : l’auteur de la saga, les réalisateurs de la série (David Benioff et Daniel Brett Weiss) ou encore les acteurs sont tous parfaitement connus et identifiés. Rien à voir avoir <a href="https://culturebox.francetvinfo.fr/arts/expos/homere-le-mysterieux-poete-s-expose-au-louvre-lens-287072">avec Homère</a> ni avec les rédacteurs de la Bible.</p>
<p><em>Game of Thrones</em> est une œuvre qui nous parle d’abord d’aujourd’hui : de « nous », lecteurs si nombreux qui au cours des dernières années avons lu les romans de George R.R. Martin et qui, encore plus nombreux, avons vu la série et en attendons la fin, avec une impatience grandissante, un peu partout sur notre planète.</p>
<p>Car <em>Game of Thrones</em> est un phénomène mondial, unique ou du moins premier en son genre (à n’en pas douter, d’autres œuvres prendront le relai). La série est de toute évidence la plus regardée de nos années 2010 ; elle a été diffusée dans plus de 170 pays, sans compter les visionnages illégaux, difficile à estimer précisément. Le trailer de la saison 8, dont la diffusion doit débuter en avril 2019, <a href="https://www.vanityfair.fr/actualites/articles/le-trailer-de-lultime-saison-de-game-of-thrones-a-ete-vu-plus-de-81-millions-de-fois/73235">aurait été vu</a> par quelque 80 millions de personnes en 24 heures à peine.</p>
<p>Ce succès traduit l’étonnante adéquation entre la série et les attentes d’un public international. Ce qui en fait assurément une source historique majeure pour les chercheuses et chercheurs qui s’intéressent ou s’intéresseront plus tard à notre époque.</p>
<h2>Que dit de nous <em>Game of Thrones</em> ?</h2>
<p>Si la série <em>Game of Thrones</em> ne dit rien du Moyen Âge ni de l’Antiquité à proprement parler, elle nous révèle, en tout premier lieu, que les fantasmes humains n’ont guère changé depuis des siècles, voire des millénaires. Les thèmes qui nous fascinent sont toujours les mêmes, qu’on le veuille ou non : luttes pour le pouvoir, meurtres, complots, trahisons, prostitution, viol, inceste, torture…</p>
<p>À ces ingrédients, vieux comme l’humanité, s’ajoutent des thèmes en lien étroit avec les défis d’aujourd’hui. C’est pourquoi le succès de <em>Game of Thrones</em> dépasse largement le cercle des passionnés de <em>fantasy</em>. On y trouve des métaphores du dérèglement climatique et de la crise des migrants. Le long hiver menaçant l’humanité fait directement écho à des craintes liées aux changements du monde dans lequel nous vivons et à la peur de l’Autre. L’angoisse est matérialisée par le mur, édifié par Brandon Stark dit « le Bâtisseur » : une fortification de glace, longue d’environ 480 kilomètres et haute de plus de 200 mètres. De quoi faire pâlir d’envie Donald Trump dont le projet de séparation, bien réel, à la frontière mexicaine, oscille entre 5 et 9 mètres de haut. Une dimension tout de même importante d’un strict point de vue historique, puisque la muraille édifiée au IIe siècle par l’<a href="https://www.marianne.net/culture/le-mur-d-hadrien-rempart-de-l-empire">empereur romain Hadrien</a>, qui inspira George R.R. Martin, atteint au mieux 4,60 mètres.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/trump-aurait-il-pu-construire-son-mur-au-moyen-age-109820">Trump aurait-il pu construire son mur au Moyen Âge ?</a>
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<p>Rappelons que ni George R.R. Martin – qui imagina le Mur de Bandon, il y a plus de 20 ans déjà – ni les réalisateurs de la série ne pouvaient bien sûr prévoir l’élection de Donald Trump. Mais le livre et la série se révèlent d’une étonnante actualité, comme si, d’une certaine manière, c’était finalement l’histoire qui était en passe de rattraper la fiction. <em>Game of Thrones</em> parle de nous aujourd’hui et peut-être même de notre avenir.</p>
<p><em>Historia</em> propose ainsi une comparaison entre les barrières de séparation depuis Hadrien jusqu’à celle de Trump (non encore construite), en passant par la muraille de Chine et le mur de Berlin. Rien qui soit susceptible de nous rassurer : en établissant un lien aussi direct, bien qu’il soit involontaire, <a href="https://www.chroniclelive.co.uk/business/business-news/lets-invite-donald-trump-see-15698898">entre l’Empire romain et les États-Unis</a>, <em>Game of Thrones</em> donne (du moins jusqu’à la saison 7) le sentiment d’une humanité qui a décidément bien du mal à évoluer et dont l’avenir fait écho à son passé. Comme un serpent qui se mord la queue.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/269164/original/file-20190414-76834-hex2b5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/269164/original/file-20190414-76834-hex2b5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=801&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/269164/original/file-20190414-76834-hex2b5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=801&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/269164/original/file-20190414-76834-hex2b5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=801&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/269164/original/file-20190414-76834-hex2b5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1007&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/269164/original/file-20190414-76834-hex2b5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1007&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/269164/original/file-20190414-76834-hex2b5.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1007&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Yara Greyjoy interprétée par Gemma Whelan (<em>Game of Thrones</em>, HBO 2011-).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://gameofthrones.fandom.com/fr/wiki/Yara_Greyjoy?file=Yara_Greyjoy.png">fandom</a></span>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/game-of-thrones-au-prisme-de-la-theorie-politique-82412">« Game of Thrones » au prisme de la théorie politique</a>
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<h2>Chercher les ressemblances : une activité pédagogique et ludique</h2>
<p>De manière moins sombre, <em>Game of Thrones</em> offre aussi à tous les passionnés d’histoire un vaste terrain d’entraînement, constitué de deux immenses continents et doté d’une longue histoire fantaisiste ; car George R.R. Martin a non seulement créé des lieux et des personnages, mais aussi une chronologie qui voit se succéder les règnes, les invasions et les empires. Dès lors, il est tentant de chercher à identifier, sous la fiction, les nombreux emprunts qu’a pu faire l’auteur à l’histoire depuis l’Antiquité gréco-romaine jusqu’à, par exemple, la guerre des Deux-Roses qui, au XVe siècle, opposa les York aux Lancastre, comme les Stark aux Lannister.</p>
<p>Chercher les ressemblances entre les personnages de George R.R. Martin et des figures historiques bien réelles peut offrir aux enseignants et à leurs élèves ou étudiants une activité aussi passionnante que féconde. <em>Game of Thrones</em> est susceptible de servir de prétexte à l’étude de nombreux thèmes historiques. Missandei est une porte d’entrée qui permet d’aborder l’esclavage et l’affranchissement dans l’Antiquité. On pourra la comparer à la femme de Spartacus qui joua un rôle de conseillère auprès du célèbre chef des esclaves en révolte contre Rome, en 73-71 av. J.-C.</p>
<p>Les Fer-nés peuvent introduire un cours sur les Vikings ; d’autant plus que l’analyse, en 2017, d’un squelette retrouvé dans une nécropole à Birka, en Suède, vient de prouver que <a href="https://www.nationalgeographic.fr/histoire/lun-des-plus-grands-guerriers-vikings-etait-une-femme">des femmes cheffes ont parfois commandé les peuples du Nord</a>, il y a environ mille ans. A la lumière de cette découverte, Asha (ou Yara dans la série) Greyjoy en devient encore plus crédible.</p>
<p><em>Game of Thrones</em>, ou une bien fantastique invitation à explorer de l’histoire…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/115434/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christian-Georges Schwentzel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>« Game of Thrones » n’est pas du tout une reconstitution historique du passé, mais suscite pourtant un très vif intérêt de la part des historiennes et des historiens.Christian-Georges Schwentzel, Professeur d'histoire ancienne, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/824122017-08-17T17:40:54Z2017-08-17T17:40:54Z« Game of Thrones » au prisme de la théorie politique<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/182422/original/file-20170817-28151-1ft3ndb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une carte représentant Essos, l'un des quatre continents imaginaires de _Game of Thrones_</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File%3AEssos.jpg">Wikimedia Commons</a></span></figcaption></figure><p><em>Attention, spoilers !</em></p>
<p>Adaptée des livres de George R. R. Martin, la série <em>Game of Thrones</em> connaît un succès mondial. Produite par le géant américain HBO, elle réussit le pari de tenir en haleine depuis six saisons des millions de téléspectateurs à travers le monde. Comment expliquer un tel succès ?</p>
<p>La théorie politique peut apporter un éclairage sur l’engouement suscité par cette dystopie glaçante. Outre le divertissement qu’elle offre, <em>Game of Thrones</em> semble renvoyer à des interrogations sur la nature des institutions politiques de l’Occident et exprimer les angoisses contemporaines quant à la stabilité de l’ordre mondial. La série met en scène un monde imaginaire où règne le chaos et où la violence est quotidienne. Alors que la mort peut survenir à chaque instant, les principaux protagonistes de la série sont unis par un même dessein : mettre fin à ce climat de désordre en montant sur le « trône de fer ».</p>
<h2>« Hobbes au pays des dragons »</h2>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/182425/original/file-20170817-28132-1ebgdo5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/182425/original/file-20170817-28132-1ebgdo5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=922&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/182425/original/file-20170817-28132-1ebgdo5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=922&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/182425/original/file-20170817-28132-1ebgdo5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=922&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/182425/original/file-20170817-28132-1ebgdo5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1159&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/182425/original/file-20170817-28132-1ebgdo5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1159&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/182425/original/file-20170817-28132-1ebgdo5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1159&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Frontispice du <em>Leviathan</em> de Thomas Hobbes, gravure d’Abraham Bosse.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File%3ALeviathan_by_Thomas_Hobbes.jpg">Wikimedia Commons</a></span>
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<p>Dominique Moïsi résume l’atmosphère de la série : elle représenterait avec brio <a href="https://static.independent.co.uk/s3fs-public/styles/article_small/public/thumbnails/image/2017/03/17/08/thrones-dragon.jpg">« Hobbes au pays des dragons »</a>. Nous retrouvons dans l’univers qu’elle dépeint les éléments de la promesse faite par la notion de souveraineté telle que le philosophe anglais l’a théorisée. Considéré comme le penseur de la modernité politique, ce dernier entreprend dans son <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/le-leviathan-de-thomas-hobbes-14-lanthropologie-ch"><em>Léviathan</em></a> de faire tenir la communauté politique sur un pacte passé par les membres du peuple pour se donner un souverain.</p>
<p>Par un monopole sans partage de la force, le Léviathan doit imposer la paix et bannir la violence privée. <em>Games of Thrones</em> active cet univers hobbesien de guerre civile dans lequel tous les hommes sont des ennemis en puissance. La série décrit au fil des saisons la lente et sanglante sortie du féodalisme pour advenir à la constitution d’un pouvoir central assez fort pour tenir en respect les ambitions de chacune des « Maisons » (autrement dit les différentes familles en présence). Elle peut se lire comme un récit téléologique vers l’avènement de la modernité politique.</p>
<h2>Jon Snow est-il antimoderne ?</h2>
<p>La pensée politique s’attachant à expliquer la formation de l’État s’est employée à décrire la sortie du féodalisme, caractérisé par un émiettement du pouvoir et un ensemble de liens hiérarchiques fondés sur la dépendance entre les vassaux et les seigneurs. La « déféodalisation » implique ainsi pour le sociologue <a href="http://www.persee.fr/doc/arss_0335-5322_1997_num_118_1_3222">Pierre Bourdieu</a> un processus de « défamilialisation » défini comme une « rupture progressive des liens naturels et des loyautés primaires fondées sur l’appartenance à la famille ». Cette modernité politique est porteuse d’une rationalité nouvelle qui commande un transfert des loyautés du clan vers l’État.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/182423/original/file-20170817-28132-esx2th.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/182423/original/file-20170817-28132-esx2th.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/182423/original/file-20170817-28132-esx2th.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/182423/original/file-20170817-28132-esx2th.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/182423/original/file-20170817-28132-esx2th.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/182423/original/file-20170817-28132-esx2th.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/182423/original/file-20170817-28132-esx2th.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Jon Snow.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.allocine.fr/series/ficheserie-7157/photos/detail/?cmediafile=21434467">Allociné</a></span>
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<p>Dans cette perspective, la figure de Jon Snow incarnerait une rationalité prémoderne construite sur l’allégeance au clan familial et d’élection, soit celui de la Garde de Nuit. Son attitude morale est marquée par un refus de toute compromission au nom d’une finalité politique. L’épisode 9 de la saison 6 illustre cette clé de lecture. Les enjeux sont déterminants : la prise de Winterfell, bastion du Nord est à sa portée. Ce château appartient à la famille Stark dont Jon Snow est considéré comme le fils illégitime. Il est toutefois aux mains de Ramsey Bolton qui y règne dans la terreur après s’être autoproclamé « Roi du Nord ». </p>
<p>Lors de la bataille qui les oppose, Jon Snow doit faire face à un choix : aller sauver son frère au risque de sacrifier son armée ou laisser Ramsey Bolton l’abattre comme un vulgaire gibier. Ce dilemme fait écho à celui auquel fait face ce dernier à l’épisode 2 de la saison : Bolton décide alors d’assassiner son père afin d’accaparer son pouvoir. Il fait preuve par là d’un conséquentialisme poussé à l’extrême : les actions ne sont évaluées qu’en fonction de leurs conséquences. La vie d’autrui représente peu de choses face à ce rouleau compresseur moral : le sacrifice de celle-ci n’est plus un obstacle si la finalité l’exige. Sa quête de pouvoir personnel n’est tempérée par aucune valeur.</p>
<p>Jon Snow choisit au contraire de sauver son frère, « dussent périr tous les scélérats de ce monde ». Cette décision est en cohérence avec la ligne de conduite éthique déontologique qu’il poursuit au long de la série. Ce principe d’évaluation morale vise à analyser une action en fonction de sa conformité à une norme considérée comme acquise. Emmanuel Kant en donne une formalisation théorique dans le <em>Fondement de la métaphysique des mœurs</em> lorsqu’il discute le prétendu <a href="https://www.cairn.info/revue-etudes-2004-2-page-189.htm">« droit de mentir »</a>. Aujourd’hui, plusieurs philosophes moraux s’inspirent de cette approche. <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=1906850">Jeremy Waldron</a> parle « d’absolutisme » pour qualifier le refus de transiger avec certaines valeurs érigées comme absolues – ici, les traditionnelles notions d’honneur et de respect pour sa famille.</p>
<p>Les déboires réguliers de Jon Snow illustrent l’aspect funeste de la pureté morale. La série porte une charge importante contre cette attitude antipolitique qui ne semble pas être de ce monde (l’on soulignera à ce propos que Jon Snow lui-même a été ressuscité à une saison précédente). L’art de s’emparer et d’exercer le pouvoir est celui de la mise en balance des moyens et des fins. Il ne fait donc pas bon ménage avec les absolus moraux.</p>
<h2>La ruse vaut-elle mieux que la force ?</h2>
<p><em>Game of Thrones</em> mettrait donc en scène le conflit entre la pureté morale prémoderne et antipolitique et un conséquentialisme confinant au cynisme selon lequel la fin vaut les moyens. Il se traduit dans le choix des moyens employés pour combattre. Jon Snow opte pour un style qui reflète des valeurs guerrières mettant à l’honneur le combat d’homme à homme. Il proposera à Ramsey Bolton un duel. Ce choix met en valeur la bataille et les prouesses martiales : il fait ainsi écho dans l’imaginaire contemporain aux chevaliers.</p>
<p>À l’opposé de cet idéal, les personnages utilisant la ruse et la perfidie semblent discrédités moralement. Le génie maléfique de Cersei est à cet égard saisissant. Son astuce retorse est associée à la dénaturation et à la perversité morale. La série charrie alors la rhétorique de la légende noire attachée à la ruse <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/deux-minutes-papillon/la-ruse-et-la-force-une-autre-histoire-de-la-strategie-de-jean">analysée par Jean‑Vincent Holeindre</a>.</p>
<p>Ce dernier propose une interprétation alternative à celle, culturelle, développée par <a href="https://rha.revues.org/6779">Victor Davis Hanson</a> pour lequel l’opprobre attaché à la ruse s’expliquerait par un « orientalisme militaire ». Selon lui, la force « vertueuse » des Occidentaux traduirait une supériorité de leur régime politique alors que la ruse « perfide » est historiquement l’apanage des « Barbares ». Sa disqualification comme tactique acceptable est une manière de délégitimer l’ennemi. Jean‑Vincent Holeindre relativise ses travaux en montrant qu’en réalité, ruse et force vont toujours de pair dans l’histoire de la stratégie militaire occidentale.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/182426/original/file-20170817-28151-12qwio4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/182426/original/file-20170817-28151-12qwio4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/182426/original/file-20170817-28151-12qwio4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/182426/original/file-20170817-28151-12qwio4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/182426/original/file-20170817-28151-12qwio4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/182426/original/file-20170817-28151-12qwio4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/182426/original/file-20170817-28151-12qwio4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La perfide Cersei Lannister.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.hbo.com/game-of-thrones/cast-and-crew/cersei-baratheon/index.html">HBO</a></span>
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<h2>Vers une « bonne » raison d’État ?</h2>
<p>Au cours de la saison 6, un modèle alternatif se dégage, incarné par deux femmes : Daenerys Targaryen et Sansa Stark. Elles symboliseraient une figure positive de la modernité politique et une résolution du conflit entre ruse et force, entre loyauté au clan et avidité du pouvoir personnel. Participent-elles d’une version positive de la raison d’État et d’un bon usage de l’art politique ? <a href="https://www.cairn.info/revue-les-etudes-philosophiques-2003-3-page-315.htm">Concept apparaissant au Moyen Âge</a>, la raison d’État pose les jalons d’une autonomie du politique : gouverner est un art spécifique qui obéit à ses propres règles morales. </p>
<p>L’héritière des Targaryen le rappelle : son but est de rendre le monde meilleur tout en étant consciente de ce qu’il est. Sansa, héritière légitime des Stark qui fut mariée de force à Ramsey Bolton, n’est pas en reste. Dans un dénouement surprenant, elle sauve Jon Snow lors de l’épisode 9 de la saison 6 en demandant secrètement à Lord Baelysh que les armées du Val prêtent main-forte à son frère. Leur arrivée inattendue brise l’encerclement ennemi. Ces deux figures féminines délivrent une morale pragmatique témoignant d’une approche réaliste du politique.</p>
<h2>Réinterpréter l’histoire politique</h2>
<p>Comme le souligne le philosophe <a href="https://www.theguardian.com/film/2006/oct/06/documentary">Slavoj Zizek</a>, les œuvres culturelles fonctionnent comme une sorte de condensé de réalité qui offrirait davantage à voir que nos expériences quotidiennes. Elles réinterprètent l’histoire politique à l’aune d’interrogations contemporaines. <em>Game of Thrones</em> pourrait par exemple être suspecté de reconduire le récit vantant la supériorité de l’État centralisé comme forme d’organisation politique en produisant un contre-exemple effrayant. En outre, par l’ampleur de la diffusion, le cinéma et les séries TV offrent un contact non partisan des spectateurs avec des dilemmes d’éthique politique, par-delà les frontières nationales. </p>
<p>Les échanges ardents des « fans » peuvent d’ailleurs s’appréhender comme un espace de délibération démocratique cosmopolite qui n’est pas sans rappeler celui que <a href="https://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2008-1-p-39.htm">Jürgen Habermas</a> appelait de ses vœux. Les représentations artistiques procurent dans cette perspective un terrain culturel commun permettant d’échanger sur des grandes questions politiques et morales. Elles sont donc un objet d’études riche et original qui oblige à une pensée neuve.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/82412/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Amélie Férey ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La série « Game of Thrones » fait-elle l’apologie de la souveraineté moderne ?Amélie Férey, Doctorante en Théorie politique et Relations internationales, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/602222016-05-31T20:37:25Z2016-05-31T20:37:25ZLa résurrection vue par la mythologie grecque, la Bible et… « Game of Thrones »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/124613/original/image-20160531-1959-sunptv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Andrea Mantegna, « La Résurrection », XVᵉ siècle.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://mini-site.louvre.fr/mantegna/acc/xmlfr/section_3_3.html">Louvre</a></span></figcaption></figure><p><em>Attention : cet article contient des spoilers sur la saison six de « Game of Thrones ».</em></p>
<p>La <a href="http://www.hbo.com/game-of-thrones">série à succès de HBO</a> a remis au goût du jour le retour d’entre les morts. Si la résurrection semble être chose commune à Westeros – en témoigne la « prêtresse rouge », Melisandre, qui ramène Jon Snow à la vie – que nous enseignent la Bible et la mythologie à ce sujet ? La résurrection était un phénomène plutôt rare à l’époque de Jésus. Et chez les Grecs, braver Hadès était réservé aux héros comme <a href="http://mythologica.fr/grec/heracles0.htm">Héraclès</a> ou <a href="http://www.persee.fr/doc/bude_1247-6862_1953_num_12_4_5040">Protésilas</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/123953/original/image-20160525-25205-1q66duw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/123953/original/image-20160525-25205-1q66duw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/123953/original/image-20160525-25205-1q66duw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/123953/original/image-20160525-25205-1q66duw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/123953/original/image-20160525-25205-1q66duw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/123953/original/image-20160525-25205-1q66duw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/123953/original/image-20160525-25205-1q66duw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/123953/original/image-20160525-25205-1q66duw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">« Orphée et Eurydice » d’Auguste Rodin (1893).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Metropolitan Museum of Art de New York</span></span>
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<p>Un exemple particulièrement célèbre est celui d’<a href="http://www.universalis.fr/encyclopedie/orphee/">Orphée</a>. Le héros eut l’autorisation de descendre aux Enfers secourir sa bien-aimée Eurydice, en échange d’une promesse à Perséphone, la déesse du monde souterrain : sur le chemin du retour à la vie, il ne devait jamais regarder en arrière. Alors qu’il conduisait la nymphe hors des ténèbres, il se retourna pour l’observer, rompant ainsi sa promesse… Eurydice retomba dans les profondeurs à tout jamais. Ce mythe, très populaire dans l’Antiquité et maintes fois représenté dans les beaux-arts, est encore vivace de nos jours.</p>
<h2>Lazare, un mortel devenu immortel ?</h2>
<p>À l’image de certains héros antiques, Jésus doit sa résurrection au fait d’être le fils de Dieu. Le retour à la vie ne constituait pas au début du judaïsme une caractéristique essentielle des messies ; il l’est devenu après l’avènement du christianisme. Jésus n’a d’ailleurs dans la Bible pas le monopole de la résurrection et même si l’histoire de Lazare figure uniquement dans l’<a href="https://www.aelf.org/bible-liturgie/Jn/Evangile+de+J%C3%A9sus-Christ+selon+saint+Jean/chapitre/11">Évangile selon saint Jean</a>, elle inspire des représentations artistiques depuis deux millénaires.</p>
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<figcaption><span class="caption">David Bowie, « Lazare », album <em>Blackstar</em> sorti en 2016.</span></figcaption>
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<p>À Béthanie, Jésus découvre que Lazare, le frère de Marie et de Marthe, est mort depuis quatre jours et déjà enterré. Il affirme à Marthe que « quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais » <a href="http://saintebible.com/john/11-26.htm">(Jean 11 :26)</a>, puis ordonne à Lazare de sortir de sa tombe, vivant mais toujours enveloppé dans son linceul (Jean 11 :43–44).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/123957/original/image-20160525-25213-1hk4k2s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/123957/original/image-20160525-25213-1hk4k2s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/123957/original/image-20160525-25213-1hk4k2s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/123957/original/image-20160525-25213-1hk4k2s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/123957/original/image-20160525-25213-1hk4k2s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/123957/original/image-20160525-25213-1hk4k2s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/123957/original/image-20160525-25213-1hk4k2s.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Un sarcophage sculpté datant du IVe siècle représente Jésus qui relève Lazare (à droite). Montrer Jésus utilisant une baguette pour réaliser des miracles était courant aux premiers siècles du christianisme.“ zoomable="true”/>
Certains disciples de Jésus ont semblé croire que Lazare ne mourrait plus jamais après sa résurrection. Le dernier chapitre de l’évangile de Jean, considéré par les spécialistes comme un <a href=</span>
<span class="attribution"><span class="source">Dr Meredith J C Warren</span></span>
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</figure>ajout postérieur, indique par exemple que « le bruit courut donc parmi les frères que ce disciple ne mourrait pas » <a href="https://www.aelf.org/bible-liturgie/Jn/Evangile+de+J%C3%A9sus-Christ+selon+saint+Jean/chapitre/21">(Jean 21 :21–23)</a>. La question est désormais : quelqu’un qui a été ressuscité peut-il mourir à nouveau ? Est-ce que, comme on le pense dans les Îles de Fer de <em>Game of Thrones</em>, « ce qui est mort ne saurait mourir » ?<p></p>
<h2>Renaissances mystiques</h2>
<p><em>Si vous n’avez pas regardé tous les épisodes de la saison six, il est peut-être mieux d’arrêter ici la lecture.</em>
</p><p>Revenir à la vie n’est pas atypique dans le monde créé par George R.R. Martin. À part le retour spectaculaire de Jon Snow, la saison en cours met en scène les <a href="http://fr.gameofthrones.wikia.com/wiki/Marcheurs_Blancs">Marcheurs Blancs</a>, armée de cadavres qui menace les Sept Royaumes ; la résurrection frankensteinesque de La Montagne <a href="http://www.lagardedenuit.com/wiki/index.php?title=Gregor_Clegane">Gregor Clegane</a> par le mestre <a href="http://www.lagardedenuit.com/wiki/index.php?title=Qyburn">Qyburn</a> ; la seconde échappée des flammes de Daenerys Targaryen, et la noyade d’<a href="http://www.lagardedenuit.com/wiki/index.php?title=Euron_Greyjoy">Euron Greyjoy</a>, telle un baptême au Dieu Noyé des Îles de Fer. Ce qui est mort ne saurait mourir, en effet.</p>
<p>Du côté de ceux qui redonnent la vie, Melisandre aide Jon Snow à retrouver la sienne ; les <a href="http://www.lagardedenuit.com/wiki/index.php?title=Pr%C3%AAtres_rouges">prêtres et prêtresses rouges</a>, qui servent le dieu R’hllor, maître de la Lumière, semblent capables de rappeler les morts à leur gré ; le meilleur résurrecteur est probablement Thoros, qui a ramené <a href="http://www.lagardedenuit.com/wiki/index.php?title=Beric_Dondarrion">Béric Dondarrion</a> à six reprises, en priant à chaque fois le maître de la Lumière. Dans <em>A Storm of Swords</em>, troisième livre de la saga du <em>Trône de fer</em> – qui diffère de la série télévisée – Catelyn Stark revient aussi en <a href="http://www.lagardedenuit.com/wiki/index.php?title=Catelyn_Stark">Lady Cœurdepierre</a> grâce à Béric Dondarrion. Comme Lazare, Jon Snow a péri depuis un bon moment quand il ressuscite.</p>
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<figcaption><span class="caption">La résurrection de Jon Snow (saison 6, épisode 2).</span></figcaption>
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<p>Parmi les aspirants au trône de fer, Jon Snow, Daenerys Targaryen et Euron Greyjoy sont tous revenus d’entre les morts. Melisandre et la dernière prêtresse rouge à rejoindre la série, <a href="http://fr.gameofthrones.wikia.com/wiki/Kinvara">Kinvara</a>, connaissent l’existence d’une prophétie à propos d’un certain <a href="http://www.lagardedenuit.com/wiki/index.php?title=Prince_qui_fut_promis">« prince qui fut promis »</a>. Melisandre a longtemps cru qu’il s’agissait de Stannis Baratheon, mais voit désormais Jon Snow endosser ce rôle – la mort (permanente) de Stannis l’a chassé de la course, alors que le retour de Jon Snow semble confirmer son éligibilité. Comme nous l’avons appris très récemment, Kinvara pense que la prophétie concerne Daenerys, « l’imbrûlée », qui est revenue d’une mort certaine dans les flammes non pas une, mais deux fois.</p>
<h2>Messies 2.0</h2>
<p>L’idée d’un sauveur ressuscité, dont le règne préserverait le monde des armées des ténèbres, s’inspire clairement de la tradition chrétienne où le souverain divin triomphe de la mort. Mais d’autres questions restent en suspens : les personnages revenus à la vie peuvent-ils à nouveau mourir ? Ou, par exemple, Jon Snow possédera-t-il désormais des capacités particulières pour contrer les Marcheurs Blancs morts-vivants ?</p>
<p>Plus important encore : la résurrection conditionne-t-elle l’accès au gouvernement des Sept Royaumes ? Et si tel est le cas, les jeunes promis à un bel avenir comme <a href="http://www.lagardedenuit.com/wiki/index.php?title=Gendry">Gendry</a> se retrouveront-ils hors de la course pour de bon ?</p>
<p>Une certitude demeure cependant : la représentation des messies dans la culture actuelle s’appuie sur une longue tradition artistique et religieuse. Et la mort de ce phénomène n’est sûrement pas pour demain.</p>
<p><em>Traduit de l'anglais par Diane Frances.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/60222/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>M J C Warren ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Quel est le point commun entre Orphée, Jésus et un certain héros de « Game of Thrones » ? Tous sont revenus du royaume des morts, phénomène religieux et culturel très populaire depuis des millénaires.M J C Warren, Lecturer in Biblical and Religious Studies, University of SheffieldLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.