tag:theconversation.com,2011:/uk/topics/reves-20429/articlesrêves – The Conversation2023-12-13T20:37:12Ztag:theconversation.com,2011:article/2146072023-12-13T20:37:12Z2023-12-13T20:37:12ZLa science des rêves et des cauchemars : que se passe-t-il dans notre cerveau quand nous dormons ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/550970/original/file-20230830-27-ozyppi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=35%2C0%2C5946%2C3979&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il est très difficile d’étudier les rêves parce qu’on ne peut pas observer ce qui se passe quand les gens dorment.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/photo-of-a-woman-sleeping-near-fluffy-clouds-8264248/">Pexel/Ron Lach</a></span></figcaption></figure><p>La nuit dernière, vous avez sans doute dormi <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352721816301292">sept ou huit heures</a>. Vous avez probablement eu une ou deux heures de sommeil profond, surtout si vous êtes jeune ou actif physiquement. En effet, le sommeil <a href="http://apsychoserver.psych.arizona.edu/jjbareprints/psyc501a/readings/Carskadon%20Dement%202011.pdf">se modifie avec l’âge</a>, et <a href="https://www.hindawi.com/journals/apm/2017/1364387/">l’exercice physique</a> affecte l’activité cérébrale. Vous avez également eu environ trois ou quatre heures de sommeil léger.</p>
<p>Le reste du temps, vous étiez vraisemblablement dans la phase de sommeil paradoxal (REM pour <em>rapid eye movement</em>). Bien qu’il ne s’agisse pas du seul moment où le cerveau rêve – c’est possible durant d’autres phases –, c’est celui où il est le plus probable qu’on se souvienne de l’activité cérébrale et qu’on puisse la raconter.</p>
<p>C’est possible parce que des pensées ou des sentiments bizarres nous réveillent ou parce que la dernière heure de sommeil est presque entièrement constituée de <a href="https://www.researchgate.net/profile/Elizaveta-Solomonova/publication/320356182_Dream_Recall_and_Content_in_Different_Stages_of_Sleep_and_Time-of-Night_Effect/links/5a707bdb0f7e9ba2e1cade56/Dream-Recall-and-Content-in-Different-Stages-of-Sleep-and-Time-of-Night-Effect.pdf">sommeil paradoxal</a>. Quand un songe ou une alarme nous réveillent, on sort généralement du sommeil paradoxal et les images d’un rêve peuvent nous habiter encore quelques minutes. On en garde alors le souvenir.</p>
<p>Si le songe est étrange ou intéressant, il se peut qu’on en parle à quelqu’un d’autre, ce qui permet de mieux l’<a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00426-022-01722-7">encoder</a> dans la mémoire.</p>
<p>Les rêves et les cauchemars sont mystérieux, et nous n’avons pas fini d’en apprendre sur eux. Ils font rouler notre cerveau, nettoient les pensées liées aux événements de la journée à l’échelle moléculaire et peuvent nous aider à imaginer ce qui est possible pendant nos heures d’éveil.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/etre-pourchasse-perdre-ses-dents-tomber-ce-que-la-science-dit-des-reves-recurrents-160505">Être pourchassé, perdre ses dents, tomber… Ce que la science dit des rêves récurrents</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<h2>Que savent les scientifiques sur le sommeil paradoxal et les rêves ?</h2>
<p>Il est très difficile d’étudier les rêves parce qu’on ne peut pas observer ce qui se passe quand les gens dorment. L’imagerie cérébrale a révélé que certains <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1087079216300673#sec3">schémas d’activité cérébrale</a> sont associés au rêve (et aux phases du sommeil qui y sont davantage associées). Mais ces essais reposent sur des témoignages personnels sur l’expérience du rêve.</p>
<p>Tout ce à quoi l’on consacre autant de temps permet sans doute d’atteindre plusieurs objectifs.</p>
<p>Au niveau physiologique de base, tous les mammifères rêvent (comme l’indiquent <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1053810021001409">l’activité cérébrale, le comportement pendant le sommeil et des études sur la conscience</a>) – même l’ornithorynque et l’échidné font probablement l’expérience de quelque chose de similaire au rêve (à condition que leur corps soit à la <a href="https://www.wired.com/2014/07/the-creature-feature-10-fun-facts-about-the-echidna/#:%7E:text=It%20was%20long%20thought%20that,re%20at%20the%20right%20temperature.">bonne température</a>). On peut voir une ressemblance entre leur activité cérébrale et leurs phases de sommeil et le <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1053810021001409#b0630">sommeil paradoxal humain</a>.</p>
<p>Ce n’est pas le cas des espèces moins évoluées. Certaines <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2468867319301993#sec0030">méduses</a> – qui n’ont pas de cerveau – font l’expérience de ce que l’on pourrait qualifier de sommeil sur le plan physiologique (selon leur position, leur calme, leur manque de réactivité et leur « réveil » rapide en cas de nécessité), mais sans les éléments physiologiques et comportementaux qui rappellent le sommeil paradoxal.</p>
<p>Chez les êtres humains, on considère que le sommeil paradoxal se produit cycliquement toutes les 90 à 120 minutes au cours de la nuit. Il nous empêche de dormir trop profondément et d’être <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4972941/">vulnérables aux attaques</a>. Certains scientifiques avancent que nous rêvons pour éviter que notre cerveau et notre corps se refroidissent. Notre température centrale est généralement <a href="https://www.thelancet.com/journals/laneur/article/PIIS1474-4422(22)00210-1/fulltext">plus élevée pendant ces phases du sommeil</a>. Si l’on doit réagir à des signaux externes ou à des dangers, il est plus facile de se réveiller <a href="https://www.tandfonline.com/doi/pdf/10.2147/NSS.S188911">au milieu d’un songe</a> qu’à d’autres moments.</p>
<p>Pendant le sommeil paradoxal, le cerveau se met en mode actif pour un certain temps, à la manière d’un périscope qui donne accès à la conscience en nous permettant d’observer ce qui se passe à la surface, pour replonger si tout va bien.</p>
<p>Certaines données indiquent que les « rêves de fièvre » sont beaucoup moins fréquents qu’on ne le pense. En effet, on atteint moins la <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2020.00053/full">phase du sommeil paradoxal</a> quand on est fiévreux, même si les songes qu’on fait alors ont tendance à être <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3830719/">plus sombres et étranges</a>.</p>
<p>Le fait de passer alors moins de temps en sommeil paradoxal pourrait s’expliquer par la difficulté à réguler sa température corporelle pendant cette phase. Pour nous protéger, le cerveau tente de réguler la température corporelle en « sautant » cette phase du sommeil. <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/23744731.2020.1756664">C’est aussi pour cette raison</a> que nous rêvons généralement moins quand il fait chaud.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="bed in pink landscape" src="https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/545459/original/file-20230830-17-n6ash3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Notre cerveau se nettoie quand il rêve.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/bed-on-colorful-flowers-on-cape-10079452/">Pexels/Mo Eid</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un nettoyage en profondeur du cerveau</h2>
<p>Le sommeil paradoxal est important pour assurer le bon fonctionnement du cerveau, comme l’indiquent des études qui utilisent l’<a href="https://www.cell.com/current-biology/pdf/S0960-9822(17)31329-5.pdf">électroencéphalographie</a> pour mesurer l’activité du cerveau.</p>
<p>De la même manière que le sommeil profond aide le corps à restaurer ses capacités physiques, le sommeil de rêve <a href="https://www.cell.com/current-biology/pdf/S0960-9822(17)31329-5.pdf">« rince »</a> nos circuits neuronaux. À l’échelle moléculaire, les substances chimiques qui étayent la pensée sont déformées par l’activité cognitive de la journée. Le sommeil profond leur permet de retrouver leur forme initiale. Le cerveau est <a href="https://www.science.org/doi/abs/10.1126/science.1241224">« lavé »</a> par du liquide céphalo-rachidien que contrôle le <a href="https://theconversation.com/on-your-back-side-face-down-mice-show-how-we-sleep-may-trigger-or-protect-our-brain-from-diseases-like-als-181954">système glymphatique</a>.</p>
<p>À un autre niveau, le sommeil paradoxal « met de l’ordre » dans nos souvenirs et nos sentiments récents. Pendant <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC534695/">cette phase</a>, notre cerveau consolide les souvenirs procéduraux (la façon d’accomplir une tâche) et les émotions. Les <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC534695/">autres phases</a> de sommeil, au cours desquelles nous rêvons moins, sont importantes pour la consolidation des souvenirs épisodiques (les événements).</p>
<p>À mesure que la nuit avance, notre production de cortisol, <a href="https://psycnet.apa.org/record/2005-01907-021">l’hormone du stress</a>, augmente. On pense que la quantité de cortisol peut influencer le type de souvenirs que nous consolidons et peut-être le type de songes que nous faisons. Cela signifie que les rêves de fin de nuit ont tendance à être <a href="https://learnmem.cshlp.org/content/11/6/671.full.pdf">plus fragmentés ou bizarres</a>.</p>
<p>Les différents types de sommeil permettent de <a href="https://www.researchgate.net/profile/Jb-Eichenlaub/publication/313545620_Daily_Life_Experiences_in_Dreams_and_Sleep-Dependent_Memory_Consolidation/links/5c532b0ba6fdccd6b5d76270/Daily-Life-Experiences-in-Dreams-and-Sleep-Dependent-Memory-Consolidation.pdf">consolider</a> l’activité cérébrale utile de la journée et d’éliminer les informations de moindre importance.</p>
<h2>Pensées aléatoires, sentiments réorganisés</h2>
<p>Ce classement et cette élimination des activités de la journée se déroulent pendant que nous dormons. C’est pourquoi nous rêvons souvent de choses qui se sont produites <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0264574">pendant la journée</a>.</p>
<p>Parfois, lorsque les pensées et les sentiments sont réorganisés et jetés à la <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3921176/">« poubelle »</a> pendant le sommeil, nous pouvons ressentir de la conscience. Des pensées et des sentiments aléatoires sont mélangés de façon insolite et merveilleuse. Le fait que nous ayons conscience de ce processus peut expliquer l’étrangeté de certains songes. Nos expériences diurnes peuvent aussi engendrer des cauchemars ou des rêves angoissants après un <a href="https://www.sleepfoundation.org/dreams/how-trauma-can-affect-dreams">événement traumatisant</a>.</p>
<p>Certains rêves semblent <a href="https://rai.onlinelibrary.wiley.com/doi/pdfdirect/10.1111/j.1467-9655.2010.01668.x">prédire l’avenir ou sont porteurs d’un symbolisme fort</a>. Dans plusieurs sociétés, les rêves sont considérés comme une fenêtre sur une <a href="https://digitalcommons.ciis.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1050&context=ijts-transpersonalstudies">réalité alternative</a> où l’on peut envisager diverses possibilités.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=355&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=447&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=447&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/545460/original/file-20230830-29-3jrotm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=447&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Les souvenirs peuvent être cimentés par les rêves et les cauchemars et les alimenter.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/assorted-photos-on-table-1989747/">Pexels/Suzy Hazelwood</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Les rêves ont-ils un sens ?</h2>
<p>Nous avons une <a href="https://www.nature.com/articles/nrn2716">bonne compréhension</a> des aspects thermorégulateurs, moléculaires et neuronaux des rêves. Mais leurs aspects psychologiques et spirituels restent largement méconnus.</p>
<p>Notre cerveau est peut-être conçu pour essayer de donner un sens aux choses. Les sociétés humaines ont toujours interprété des phénomènes aléatoires – le vol des oiseaux, les feuilles de thé ou les planètes – et cherché leur signification. Presque toutes les sociétés humaines considéraient les rêves comme étant plus qu’un simple fonctionnement neuronal aléatoire.</p>
<p>L’histoire des sciences nous apprend que certains phénomènes que l’on croyait magiques peuvent être compris et maîtrisés par la suite, pour le meilleur et pour le pire.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214607/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les rêves font fonctionner notre cerveau. Ils nettoient les pensées des événements de la journée. Ils peuvent même nous aider à imaginer ce qui est possible pendant nos heures de veille.Drew Dawson, Director, Appleton Institute, CQUniversity AustraliaMadeline Sprajcer, Lecturer in Psychology, CQUniversity AustraliaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2161092023-11-16T17:24:18Z2023-11-16T17:24:18ZSommeil : il est possible de dialoguer avec les rêveurs<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/559715/original/file-20231115-19-szdbgp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=8%2C0%2C5982%2C3889&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il n’est pas facile pour les scientifiques d’explorer le monde des rêves, mais les connaissances progressent.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/fond-decran-numerique-de-bateau-a-voile-noir-DKix6Un55mw">Johannes Plenio/Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Dans le film <a href="https://www.youtube.com/watch?v=LtxtwPoVzqI"><em>Inception</em></a> de Christopher Nolan, le personnage principal est capable d’infiltrer les rêves d’autres personnes, et même d’influencer leur contenu. Et si cette fiction n’était pas si éloignée de la réalité ?</p>
<p>Nos travaux suggèrent en effet qu’il est possible d’interagir avec des volontaires pendant leur sommeil, voire de dialoguer avec eux, à certains moments propices. Explications.</p>
<h2>La science des rêves : une discipline difficile</h2>
<p>Si l’on se réveille parfois avec des souvenirs vifs de nos aventures nocturnes, à l’inverse il arrive que l’impression d’une nuit sans rêves prédomine lorsqu’arrive le matin, comme si le temps s’était évanoui.</p>
<p>En effet, si nous nous souvenons en moyenne <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fneur.2012.00106/full">d’un à trois rêves par semaine</a>, nous ne sommes pas tous égaux face au souvenir de nos rêves. Ainsi, les gens qui disent ne jamais rêver constituent environ <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1389945702002551">2,7 à 6,5 % de la population</a>. Souvent, cependant, ces gens ont déjà rêvé dans le passé, quand ils étaient enfants par exemple. La proportion de gens qui dit n’avoir jamais rêvé de toute sa vie est très faible : 0,38 %.</p>
<p>Le fait de se rappeler des rêves dépend de <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fneur.2020.00724/full">nombreux facteurs</a> tels que le sexe (les femmes se rappellent plus fréquemment de leurs rêves) ou l’intérêt pour les rêves, ainsi que de la <a href="https://www.researchgate.net/publication/326900077_Researching_Dreams_The_Fundamentals">façon dont on collecte les rêves</a> (en tenant un « carnet de rêve », ou en les enregistrant au dictaphone, par exemple).</p>
<p>De par leur nature privée et évanescente, les rêves sont difficiles à capturer par les scientifiques. Certes, aujourd’hui, grâce aux connaissances acquises dans le domaine des neurosciences, il est possible, en analysant l’activité cérébrale d’un individu, son tonus musculaire et ses mouvements oculaires, de classifier son état de vigilance. Les scientifiques peuvent ainsi déterminer si une personne dort, et dans quel stade de sommeil elle se trouve : phase d’endormissement, sommeil lent léger, sommeil lent profond ou sommeil paradoxal.</p>
<p>Mais ces mesures physiologiques ne permettent pas de savoir si un dormeur rêve (les rêves pouvant se produire dans tous les stades de sommeil), et encore moins à quoi il rêve… Les chercheurs n’ont typiquement pas accès à l’expérience de rêve au moment même où elle est vécue. Ils sont donc contraints de se fier au récit de rêve collecté après la bataille – au moment du réveil – sans garantie que ce récit soit fidèle à ce qu’il s’est passé dans la tête du dormeur.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Photo d’une femme qui dort dans une caravane, de dos." src="https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/559967/original/file-20231116-25-axyh3v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Déterminer à quoi rêvent les gens durant leur sommeil reste encore hors de la portée des scientifiques….</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/fr/photos/donna-che-dorme-sulla-roulotte-ffustAcaX0E">Михаил Калегин/Unsplash</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En outre, pour comprendre ce qui se passe dans le cerveau lors des rêves – et à quoi ils servent – il faudrait pouvoir comparer l’activité cérébrale lors des moments où les rêves se produisent avec ceux où ils sont absents. Par conséquent, il est impératif de déterminer avec précision quand les rêves surviennent pour progresser dans la science des rêves.</p>
<p>Pour y parvenir, l’idéal serait de pouvoir communiquer avec les dormeurs. Impossible ? Pas pour tout le monde : c’est ici qu’entrent en scène les rêveurs lucides.</p>
<h2>Les rêves lucides : une clé pour ouvrir la porte des songes</h2>
<p>La plupart d’entre nous réalisent avoir rêvé seulement au réveil. Les rêveurs « lucides », eux, ont la capacité unique d’être conscients de rêver, alors même qu’ils sont endormis en sommeil paradoxal, une période du sommeil durant laquelle l’activité cérébrale est plus proche de celle de la phase d’éveil.</p>
<p>Encore plus étonnant : les rêveurs lucides peuvent parfois même exercer un contrôle partiel sur le déroulement de l’histoire de leurs rêves ! Ils sont alors capables de s’envoler, de faire apparaître ou disparaître des personnes, de changer la météo, de se transformer en animaux… Bref, les possibilités sont infinies.</p>
<p>De tels rêves lucides peuvent survenir spontanément ou être provoqués par un entraînement spécifique. L’existence des rêves lucides est connue depuis l’Antiquité, mais elle a longtemps été considérée comme ésotérique, et indigne d’une exploration scientifique.</p>
<p>Cette vision des choses a changé grâce à une <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.2466/pms.1981.52.3.727">expérience astucieuse</a> mise en place par le psychologue Keith Hearne et le psychophysiologiste Stephen Laberge, dans les années 1980. Ces deux chercheurs se sont mis en tête de prouver scientifiquement que les rêveurs lucides sont bien endormis quand ils prennent conscience de rêver. Partant du constat que le sommeil paradoxal est caractérisé par des mouvements oculaires rapides, yeux fermés (d’où son nom de « Rapid Eye Movement sleep » en anglais), ils se sont posé la question suivante : serait-il possible d’utiliser cette propriété pour demander au dormeur d’envoyer un « télégramme » au monde alentour, depuis son rêve ?</p>
<p>Hearne et Laberge ont recruté des rêveurs lucides pour tenter d’obtenir une réponse. Ils se sont mis d’accord avec eux avant qu’ils ne s’endorment sur le télégramme à envoyer : les participants devraient faire des mouvements oculaires spécifiques, comme déplacer leur regard de gauche à droite trois fois, lorsqu’ils prendraient conscience qu’ils rêvaient. Et, alors qu’ils étaient objectivement en sommeil paradoxal, les rêveurs lucides l’ont fait !</p>
<p>Grâce à ce code de communication, les chercheurs pouvaient désormais détecter en temps réel des moments de rêve. Ces travaux ont ouvert la voie à de nombreuses recherches où les rêveurs lucides agissent comme des agents infiltrés du monde onirique, réalisant des missions (comme <a href="https://www.nature.com/articles/s41598-018-21067-9">retenir sa respiration</a> en rêve) et les signalant aux expérimentateurs grâce au code oculaire.</p>
<p>À l’heure actuelle, il est possible de combiner de telles expériences avec des techniques d’imagerie cérébrale, afin d’étudier les régions cérébrales sollicitées lors des rêves lucides. Ceci constitue un énorme progrès dans la quête pour mieux comprendre les rêves et leur mécanisme de formation.</p>
<p>En 2021, près de 40 ans après les travaux pionniers de Hearne et Laberge, une <a href="https://www.cell.com/current-biology/pdfExtended/S0960-9822(21)00059-2">étude</a> réalisée par notre équipe, en collaboration avec des chercheurs du monde entier a permis d’aller encore plus loin.</p>
<h2>De la fiction à la réalité : dialoguer avec le rêveur</h2>
<p>Nous savions déjà que les rêveurs lucides étaient capables d’envoyer des informations depuis leur rêve. Mais peuvent-ils en recevoir également ? Autrement dit, serait-il possible de dialoguer avec un rêveur lucide ? Pour en avoir le cœur net, nous avons exposé un rêveur lucide à des stimuli tactiles durant son sommeil. Nous lui avons aussi posé des questions fermées, telles que « Aimez-vous le chocolat ? »</p>
<p>Ce dernier a été en mesure de répondre en souriant pour signifier un « oui » et en fronçant les sourcils pour un « non ». En outre, dans le cadre de ces travaux, des rêveurs lucides se sont vu présenter verbalement des équations mathématiques simples. Ils ont réussi à fournir des réponses appropriées tout en restant endormis.</p>
<p>Évidemment, les rêveurs lucides ne répondaient pas toujours, loin de là. Mais le fait qu’ils puissent le faire parfois (18 % des cas dans notre étude) ouvrait la porte à une communication entre expérimentateurs et rêveurs.</p>
<p>Cependant, le rêve lucide reste un phénomène rare et même les rêveurs lucides ne sont pas lucides tout le temps ni durant tout le sommeil paradoxal. Le portail de communication que nous avions ouvert était-il limité au seul sommeil paradoxal « lucide » ? Pour le déterminer, nous avons entrepris de nouveaux travaux.</p>
<h2>Élargir le portail de communication</h2>
<p>Pour savoir si nous pouvions communiquer de la même façon avec n’importe quel dormeur, quel que soit le stade de sommeil, nous avons mené des expériences avec des volontaires non rêveurs lucides sans troubles du sommeil, ainsi qu’avec des personnes atteintes de narcolepsie. Cette maladie, qui se caractérise par de nombreux endormissements (le plus souvent en sommeil paradoxal), est associée avec une <a href="https://academic.oup.com/sleep/article/38/3/487/2416990">propension accrue</a> aux rêves lucides.</p>
<p>Lors de <a href="https://www.nature.com/articles/s41593-023-01449-7">cette nouvelle expérimentation</a>, nous avons présenté verbalement aux participants des mots existants (par exemple « pizza ») et des mots inventés (par exemple « ditza ») dans tous les stades de sommeil. Nous leur avons demandé de sourire ou de froncer les sourcils en fonction du type de mot (inventé ou non). Sans grande surprise, les personnes narcoleptiques ont pu répondre quand elles étaient lucides en sommeil paradoxal, confirmant nos résultats de 2021.</p>
<p>Plus surprenant, en revanche, est le fait que les deux groupes de participants se sont aussi avérés capables de réagir à nos stimuli verbaux dans la plupart des stades du sommeil, même en l’absence de rêve lucide ! Les volontaires ont été capables de répondre de manière intermittente, comme si des fenêtres de connexion avec le monde extérieur s’ouvraient temporairement à ces moments précis.</p>
<p>Nous avons même pu déterminer la composition du cocktail d’activité cérébrale propice à ces moments d’ouverture vers le monde extérieur : en analysant l’activité cérébrale des dormeurs avant la présentation des stimuli, nous avons été en mesure de prédire s’ils allaient nous répondre ou non.</p>
<p>Pourquoi de telles fenêtres de connexion avec le monde extérieur existent-elles ? On peut émettre l’hypothèse que le cerveau s’est développé dans un contexte où un minimum de traitement cognitif était nécessaire durant le sommeil : on peut par exemple imaginer que nos ancêtres devaient rester attentifs aux stimuli extérieurs lorsqu’ils dormaient, en cas d’approche d’un prédateur. Dans le même ordre d’idée, on sait que le cerveau d’une mère réagit préférentiellement aux pleurs de son bébé pendant le sommeil…</p>
<p>Nos résultats suggèrent qu’il est désormais envisageable de « dialoguer » avec n’importe quel dormeur, quel que soit le stade de sommeil dans lequel il se trouve. En affinant les marqueurs cérébraux qui prédisent les moments de connexion avec le monde extérieur, il devrait être possible d’optimiser davantage les protocoles de communication à l’avenir.</p>
<p>Cette avancée ouvre la voie à un dialogue en temps réel avec les dormeurs, offrant ainsi aux chercheurs la possibilité d’explorer les mystères des rêves au moment même où ils surviennent. Mais si la frontière entre la science-fiction et la réalité s’amincit, rassurez-vous : les neuroscientifiques sont encore loin de savoir décoder le contenu de vos rêves. Vous pouvez donc continuer à rêver sur vos deux oreilles !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/216109/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Accéder aux rêves des autres, un fantasme de science-fiction ? Pas si sûr : des scientifiques sont récemment parvenus à communiquer avec des dormeurs. Un pas de plus vers l’obtention de la clé des songes…Başak Türker, Chercheuse postdoctorale, Institut du Cerveau (ICM)Delphine Oudiette, Chercheure en neurosciences cognitives, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2076492023-06-13T18:00:00Z2023-06-13T18:00:00ZPourquoi notre cerveau nous fait peur en créant des cauchemars ?<p>Il est tout à fait normal d’être effrayé par un rêve. Mais notre cerveau n’élabore pas de plans secrets pour nous faire peur avec des cauchemars.</p>
<p>Autrefois, beaucoup de gens pensaient que les rêves étaient une fenêtre ouverte sur un autre monde. Les gens vivaient deux vies inséparables : l’une dans un monde éveillé et l’autre dans un monde de rêve.</p>
<p>Ils pensaient que le monde des rêves contenait un mélange de passé et d’avenir, de dieux et de déesses, et qu’il aidait les gens à trouver un but à leur vie. Ces rêves révélaient souvent de nouvelles idées, faisaient rencontrer de nouvelles personnes, pas forcément bienveillantes, ce qui explique pourquoi certaines personnes les trouvaient effrayants. D’autres y voyaient un signe ou une prophétie des dieux.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/180485/original/file-20170801-766-gyvwbi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/180485/original/file-20170801-766-gyvwbi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/180485/original/file-20170801-766-gyvwbi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/180485/original/file-20170801-766-gyvwbi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/180485/original/file-20170801-766-gyvwbi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/180485/original/file-20170801-766-gyvwbi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/180485/original/file-20170801-766-gyvwbi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/180485/original/file-20170801-766-gyvwbi.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">L’attrapeur de rêves est une invention amérindienne utilisée pour protéger les gens pendant leur sommeil.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/bsheets/294218008/">Bsheets/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/">CC BY-NC</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Lorsque les scientifiques ont commencé à étudier les rêves, il y a environ 200 ans, ils pensaient que les rêves étaient un type particulier d’histoire que le cerveau se racontait à lui-même. Ils pensaient qu’il s’agissait d’un langage spécial dans lequel les idées et les émotions étaient expliquées à l’aide de symboles et de signes. Dans cet état de rêve, différentes parties du cerveau discutaient entre elles.</p>
<p>Imaginons que vous rêvez que votre maison est endommagée, cette dernière était censée représenter le rêveur et le cerveau essaye de vous dire que vous ou votre ego avez été endommagé. Le Dr Sigmund Freud, considéré par beaucoup comme le fondateur de la psychanalyse, a écrit en 1900 un livre très célèbre sur les rêves intitulé « L’interprétation des rêves ».</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/180483/original/file-20170801-12621-762qqs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/180483/original/file-20170801-12621-762qqs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/180483/original/file-20170801-12621-762qqs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/180483/original/file-20170801-12621-762qqs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/180483/original/file-20170801-12621-762qqs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=900&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/180483/original/file-20170801-12621-762qqs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/180483/original/file-20170801-12621-762qqs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/180483/original/file-20170801-12621-762qqs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1131&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Sigmund Freud a écrit un livre très célèbre sur les rêves intitulé L’interprétation des rêves.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/Category:Sigmund_Freud#/media/File:Sigmund_Freud_1926.jpg">Wikimedia</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il y a une centaine d’années, les gens ont commencé à expliquer les choses de manière plus approfondie grâce à la science et à la technologie. Cela a permis de comprendre différemment ces processus. Mais cela ne signifie pas que la façon dont leurs ancêtres expliquaient les rêves était nécessairement erronée.</p>
<p>Selon les scientifiques, il existe deux types principaux de sommeil, et les rêves se produisent pendant une phase appelée sommeil paradoxal. En anglais on le nomme <em>Rapid Eye Movement</em> (mouvements rapides des yeux) parce qu’à ce moment de la nuit, les gens bougent rapidement leurs yeux d’avant en arrière. C’est pendant cette phase de la nuit que nous rêvons.</p>
<p>Si vous observez des chats ou des chiens en train de dormir, vous verrez parfois leurs yeux bouger et leurs pattes s’agiter. Cela indique qu’ils sont en phase de sommeil paradoxal et qu’ils pourraient peut-être rêver. Mais nous ne savons pas vraiment à quoi rêvent les chats et les chiens, car ils ne peuvent pas nous le dire.</p>
<iframe src="https://giphy.com/embed/HhRGUdBJ5RVT2" width="100%" height="270" frameborder="0" class="giphy-embed" allowfullscreen=""></iframe>
<p><a href="https://giphy.com/gifs/dreaming-cat-HhRGUdBJ5RVT2"></a></p>
<p>L’autre grand type de sommeil est le sommeil non paradoxal, appelé sommeil profond ou sommeil lent. Dans ce type de sommeil, les personnes dorment très profondément. Mais elles ne semblent pas rêver à ce moment-là.</p>
<p>Au cours des 50 dernières années, certains scientifiques ont cru que le rêve était la façon dont le cerveau décidait chaque jour de ce qu’il fallait garder et de ce qu’il fallait jeter. D’une certaine manière, c’est comme si vous faisiez le ménage dans votre chambre : votre cerveau décide de ce que vous avez besoin de savoir et met à la poubelle ce qui n’est pas important.</p>
<p>Les scientifiques pensent que les enfants ont plus de mal à séparer le monde de l’éveil et le monde du rêve et qu’ils confondent souvent les deux.</p>
<p>Les cinéastes ont porté cette confusion à l’écran à maintes reprises au fil des ans. De nombreux films traitent de la façon dont les rêves peuvent nous effrayer et nous troubler.</p>
<p>Comme vous pouvez le constater, de nombreuses personnes se demandent pourquoi les rêves sont effrayants. La vérité, c’est que nous n’en sommes pas certains.</p>
<p>Ce que nous savons, c’est que tout le monde rêve, et que tout le monde pense que les rêves peuvent être bizarres, effrayants et parfois déroutants. Nous pourrions partager la capacité de rêver avec tous les animaux à sang chaud, et il est donc probable que cette capacité joue un rôle important dans notre santé.</p>
<p>Je suppose que tout le monde essaie de donner un sens à ses rêves, même les scientifiques. Mais nous sommes toujours incapables de voir à l’intérieur du cerveau d’une autre personne pour savoir de quoi elle rêve. Et c’est probablement une bonne chose.</p>
<hr>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dianerottner.com/">Diane Rottner</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : <a href="mailto:tcjunior@theconversation.fr">tcjunior@theconversation.fr</a>. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/207649/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Drew Dawson ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les rêves et les cauchemars se déroulent pendant le sommeil paradoxal, mais leurs interprétations sont toujours soumises à débat.Drew Dawson, Director, Appleton Institute, CQUniversity AustraliaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1993392023-02-08T19:50:58Z2023-02-08T19:50:58ZRêverie compulsive : quand une capacité bénéfique devient pathologique<p>Malgré ce que l’on entend souvent, la <a href="https://theconversation.com/ne-vous-empechez-pas-de-revasser-120091">rêverie diurne peut être extrêmement utile</a>. Non seulement elle peut être un moyen de gérer l’ennui voire une source de plaisir, mais des recherches montrent que notre capacité à nous échapper mentalement du présent peut également stimuler la créativité, la résolution de problèmes et la planification, et <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26192399/">fournir un antidote à la solitude</a>.</p>
<p>Le « rêve éveillé », lorsque défini comme les pensées qui ne sont pas liées à ce que vous faites en temps réel, occupe une <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.2190/7K24-G343-MTQW-115V">bonne partie de votre vie éveillée</a> – en moyenne <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1053810013001396">environ 30 % de votre temps</a> (d’après nos enquêtes). Cela fait partie de notre expérience consciente ordinaire et quotidienne. Il pourrait même s’agir d’un <a href="https://academic.oup.com/scan/article/12/7/1047/3574671?login=false">mode de fonctionnement par défaut de notre cerveau</a> auquel nous revenons, en particulier lorsque nous effectuons des tâches qui ne demandent pas beaucoup d’énergie cérébrale, de réflexion – simples, automatiques comme étendre le linge, etc.</p>
<p>Mais on estime que <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC9091653/">2,5 % des adultes</a> sont confrontés à des rêveries qui peuvent être considérées comme excessives, un trouble potentiel qui reste discuté et qui est connu sous le terme de « rêverie compulsive » (<em>maladaptive daydreaming</em>, en anglais). Les personnes concernées connaissent des épisodes de rêveries si nombreux et envahissants qu’ils interfèrent avec leur vie quotidienne. Ils altèrent la capacité d’attention (par exemple lors de la lecture d’un texte), influent sur la mémoire, etc.</p>
<h2>Qu’est-ce que la rêverie compulsive</h2>
<p>Cette forme de « rêve éveillé inadapté » diffère du simple rêve éveillé à plusieurs égards.</p>
<p>Contrairement aux rêveries typiques qui peuvent être fugaces (<a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2013.00415/full">quelques secondes</a>), les « rêveurs inadaptés » peuvent passer plusieurs heures d’affilée dans une seule rêverie. Selon une étude, ils passeraient en moyenne <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1053810016300460">près de la moitié de leurs heures d’éveil</a> immergés dans des mondes imaginaires qu’ils ont progressivement construits. Ces mondes inventés sont souvent riches et complexes, avec des intrigues et des scénarios à plusieurs niveaux qui évoluent sur des années.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Ces mondes alternatifs sont vivants et peuvent être gratifiants pour celui qui les développe… Mais le besoin de poursuivre ce fantasme <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0003448719302665">peut devenir compulsif, au risque possible d’entraîner une dépendance</a>. Dans le cas de la rêverie compulsive, l’envie de revenir à cet univers virtuel peut être forte et se muer en agacement lorsque cela n’est pas possible ou que cette activité est interrompue. Beaucoup ont d’ailleurs du mal à arrêter ou même à réduire le temps qu’ils passent « dans la Lune ».</p>
<p>Mais outre ce ressenti, le fait de donner autant d’importance (voire dans certains cas extrêmes la priorité) à des réalités alternatives et imaginaires au détriment des besoins physiques et sociaux peut créer des problèmes au travail, à l’école et dans le maintien de relations étroites. <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/15299732.2016.1160463">De nombreuses personnes souffrant de rêverie inadaptée</a> déclarent ainsi éprouver une détresse psychologique, des difficultés à dormir et un sentiment de honte à l’égard de cette activité, qu’elles peuvent être amenées à cacher aux autres.</p>
<p>Il est important de noter que ces rêveries éveillées et autres activités mentales immersives ne sont pas problématiques par définition. Ce qui rend la rêverie « inadaptée », c’est lorsqu’il devient difficile de la contrôler, lorsque le temps qui lui est consacré devient si important qu’il commence à empiéter sur celui de la vie réelle et lorsque son côté compulsif vient interférer avec des relations et des objectifs concrets importants.</p>
<h2>Pourquoi cela se produit-il ?</h2>
<p>Des chercheurs soupçonnent que les personnes confrontées à ces rêves éveillés compulsifs ont une aptitude innée aux <a href="https://journals.lww.com/jonmd/Abstract/2016/06000/Childhood_Antecedents_and_Maintaining_Factors_in.9.aspx">« fantaisies » immersives</a>. Beaucoup découvrent cette capacité tôt dans l’enfance, en réalisant que ces fantasmes peuvent être utilisés pour réguler la détresse. En créant un monde intérieur de confort, ils sont capables d’échapper à la réalité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une jeune fille est assise à son bureau à l’école, tout en regardant par la fenêtre en rêvassant" src="https://images.theconversation.com/files/499559/original/file-20221207-12015-bao1r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/499559/original/file-20221207-12015-bao1r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/499559/original/file-20221207-12015-bao1r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/499559/original/file-20221207-12015-bao1r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/499559/original/file-20221207-12015-bao1r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/499559/original/file-20221207-12015-bao1r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/499559/original/file-20221207-12015-bao1r8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Beaucoup découvrent leur capacité à développer mondes imaginaires et fantasmes dans l’enfance.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/little-sad-ukrainian-girl-sitting-classroom-2137605633">Halfpoint/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Certains rêveurs inadaptés, mais pas tous, peuvent utiliser ce moyen comme une <a href="https://link.springer.com/article/10.1023/A:1020597026919">stratégie d’adaptation</a>. Par exemple, cette activité peut permettre de se distraire d’une réalité désagréable, ce qui peut aider à faire face à un traumatisme, à des événements de vie difficiles ou à l’isolement social. Mais cela peut conduire à un <a href="https://psycnet.apa.org/record/2022-69800-001">cercle vicieux</a> – le fait d’y recourir pour faire face à des émotions négatives alimentant le besoin de s’y plonger.</p>
<p>Cette pratique peut alors devenir un comportement addictif qui alimente les problèmes qu’elle était censée atténuer. Il n’est peut-être pas surprenant que la rêverie compulsive ait tendance à <a href="https://journals.lww.com/jonmd/Abstract/2017/07000/The_Comorbidity_of_Daydreaming_Disorder.4.aspx">se manifester parallèlement à d’autres troubles</a>, les plus courants étant le TDAH, l’anxiété, la dépression et les troubles obsessionnels compulsifs (TOC).</p>
<p>Il semble par ailleurs y avoir un <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0022395621000844">lien possible entre les TOC et la rêverie compulsive</a>. Une étude a révélé que plus de la moitié des participants souffrant de leurs rêves éveillés trop fréquents présentaient également des signes de TOC. Cela peut suggérer l’existence de mécanismes communs entre ces types de troubles, notamment les pensées intrusives, la dissociation et le manque de contrôle cognitif.</p>
<h2>Un trouble qui reste discuté</h2>
<p>Bien que la rêverie compulsive fasse l’objet d’une <a href="https://www.popsugar.co.uk/fitness/what-is-maladaptive-daydreaming-49001435">attention croissante en ligne</a> et dans les médias sociaux, elle n’est pas encore officiellement reconnue comme trouble dans les manuels de diagnostic psychiatrique.</p>
<p>Cela signifie que de nombreux professionnels de santé peuvent ne pas l’identifier, ce qui conduit à des diagnostics erronés ou au rejet des symptômes. Avec en conséquence le risque de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S1053810011002030">davantage de détresse, d’isolement et de honte</a> pour les personnes concernées. Nombreux sont ceux qui se tournent vers les <a href="https://wildminds.ning.com/">forums en ligne</a> pour obtenir le <a href="https://www.reddit.com/r/MaladaptiveDreaming/">soutien et la reconnaissance de leurs pairs</a>, une pratique qui a ses propres risques.</p>
<p>Le fait que la rêverie compulsive ne soit pas reconnue comme un trouble psychiatrique signifie également que nous en savons peu sur les options de traitement.</p>
<p>Il existe une <a href="https://www.researchgate.net/profile/Eli-Somer/publication/322152657_Maladaptive_Daydreaming_Ontological_Analysis_Treatment_Rationale_a_Pilot_Case_Report/links/5a487f71a6fdcce1971c8750/Maladaptive-Daydreaming-Ontological-Analysis-Treatment-Rationale-a-Pilot-Case-Report.pdf">étude de cas documentée</a>, publiée par Éli Somer (qui a décrit ce trouble en 2002) dans une revue à comité de lecture, montrant qu’un homme de 25 ans a réussi à réduire de moitié le temps qu’il passait dans cette activité – de près de trois heures par jour à moins d’une heure et demie. Cette réduction a été réalisée sur une période de six mois en utilisant une combinaison de traitements psychologiques tels que la thérapie cognitivo-comportementale et la pleine conscience.</p>
<p>Bien que le traitement n’ait pas eu d’effet sur le caractère gratifiant de ses rêveries, il a signalé des améliorations dans son travail et son fonctionnement social, ainsi que dans ses obsessions sous-jacentes. Il est à espérer que la reconnaissance et la compréhension croissantes de ce phénomène permettront de proposer davantage d’options de traitement aux personnes qui en souffrent.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199339/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Giulia Poerio ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le rêve diurne est une activité mentale normale… mais elle peut se faire pathologique lorsqu’elle est excessive. Qu’est-ce que la rêverie compulsive ? Quand peut-elle être devenir un trouble ?Giulia Poerio, Associate lecturer, University of SussexLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1911502022-11-22T14:22:46Z2022-11-22T14:22:46ZUne nouvelle étude associe les cauchemars fréquents à un risque de démence<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/485979/original/file-20220921-15503-ke25fp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C4%2C991%2C658&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Faire régulièrement de mauvais rêves et des cauchemars à un âge moyen et avancé peut être lié à un risque accru de développer une démence plus tard dans la vie.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Nous passons un tiers de notre vie à dormir. Et un quart de ce temps est consacré aux rêves. Ainsi, pour une personne dans la moyenne vivant en 2022, avec une espérance de vie d’environ <a href="https://www.who.int/data/gho/data/themes/mortality-and-global-health-estimates/ghe-life-expectancy-and-healthy-life-expectancy">73 ans</a>, cela représente un peu plus de six ans de rêve.</p>
<p>Pourtant, malgré le rôle central que jouent les rêves dans nos vies, nous en savons encore très peu sur la raison pour laquelle nous rêvons, sur la façon dont le cerveau génère les rêves et, surtout, sur leur signification pour notre santé – en particulier la santé de notre cerveau.</p>
<p>Ma dernière étude, publiée dans le <a href="https://www.thelancet.com/journals/eclinm/article/PIIS2589-5370(22)00370-4/fulltext">journal eClinicalMedicine</a> de <em>The Lancet</em>, montre que nos rêves peuvent révéler une quantité surprenante d’informations sur la santé de notre cerveau. Plus précisément, elle dévoile que la fréquence des mauvais rêves et des cauchemars (mauvais rêves qui vous font vous réveiller) à un âge moyen ou avancé peut être liée à un risque accru de développer une <a href="https://www.nhs.uk/conditions/dementia/symptoms/">démence</a>.</p>
<p>Dans cette étude, j’ai analysé les données de trois grandes études américaines sur la santé et le vieillissement qui incluaient plus de 600 personnes âgées de 35 à 64 ans et 2 600 âgées de 79 ans et plus.</p>
<p>Aucun des participants ne souffrait de démence au début de l’étude et ils ont été suivis pendant une moyenne de neuf ans pour le groupe d’âge moyen et de cinq ans pour les répondants plus âgés.</p>
<p>Au début de l’étude (décembre 2002), les participants ont rempli une série de questionnaires, dont un qui les interrogeait sur la fréquence de leurs mauvais rêves et cauchemars.</p>
<p>J’ai analysé les données afin de déterminer si les participants faisant des cauchemars plus régulièrement au début de l’étude étaient plus susceptibles de connaître un déclin cognitif (un déclin rapide de la mémoire et des capacités de raisonnement au fil du temps) et de recevoir un diagnostic de démence.</p>
<h2>Cauchemars hebdomadaires</h2>
<p>J’ai découvert que les participants d’âge moyen qui faisaient des cauchemars chaque semaine couraient quatre fois plus de risques de connaître un déclin cognitif (un <a href="https://alz-journals.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/alz.12704">précurseur de la démence</a>) au cours de la décennie suivante, tandis que la probabilité de recevoir un diagnostic de démence était deux fois plus élevée chez les répondants plus âgés.</p>
<p>Fait intéressant, le lien entre les cauchemars et une éventuelle démence était beaucoup plus marqué chez les hommes que chez les femmes. Par exemple, les hommes âgés se plaignant de cauchemars sur une base hebdomadaire présentaient cinq fois plus de risques de développer une démence que ceux ne mentionnant aucun mauvais rêve. Chez les femmes, cependant, l’augmentation du risque n’était que de 41 %. J’ai observé un schéma très comparable dans le groupe d’âge moyen.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Adulte âgé atteint de démence" src="https://images.theconversation.com/files/485843/original/file-20220921-27-5x8mr9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/485843/original/file-20220921-27-5x8mr9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/485843/original/file-20220921-27-5x8mr9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/485843/original/file-20220921-27-5x8mr9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/485843/original/file-20220921-27-5x8mr9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/485843/original/file-20220921-27-5x8mr9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/485843/original/file-20220921-27-5x8mr9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le lien entre les cauchemars et une éventuelle démence était beaucoup plus marqué chez les hommes que chez les femmes.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/retired-couple-holding-hands-looking-each-1272275779">(Shutterstock)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans l’ensemble, ces résultats laissent supposer que les cauchemars fréquents pourraient être l’un des premiers signes de la démence, lesquels peuvent précéder de plusieurs années, voire de plusieurs décennies, le développement de problèmes de mémoire et de raisonnement – surtout chez les hommes.</p>
<p>Il se peut également que des cauchemars et de mauvais rêves récurrents puissent contribuer à l’apparition de la démence.</p>
<p>Vu la nature de cette étude, il n’a pas été possible de déterminer avec certitude laquelle de ces théories est juste (bien que mes soupçons portent sur la première). Toutefois, quelle que soit l’hypothèse qui s’avère être la bonne, l’implication majeure de l’étude reste la même, à savoir que faire régulièrement de mauvais rêves et des cauchemars à un âge moyen et avancé peut être lié à un risque accru de développer une démence plus tard dans la vie.</p>
<p>La bonne nouvelle est que les cauchemars récurrents sont <a href="https://jcsm.aasm.org/doi/10.5664/jcsm.7178">traitables</a>. Il a déjà été démontré que le traitement médical de première intention pour les cauchemars permet de réduire l’accumulation de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0197458012004666?via%3Dihub">protéines anormales</a> liée à la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Maladie_d%27Alzheimer">maladie d’Alzheimer</a>. Il existe également des <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyt.2022.803220/full">rapports de cas</a> montrant des améliorations de la mémoire et des capacités de raisonnement après le traitement des cauchemars.</p>
<p>Ces résultats laissent penser que le traitement des cauchemars pourrait contribuer à ralentir le déclin cognitif et à prévenir la manifestation de la démence chez certaines personnes. Il s’agira d’une voie importante à explorer dans le cadre de recherches futures.</p>
<p>Les prochaines étapes de ma recherche consisteront à examiner si les cauchemars chez les jeunes peuvent aussi être liés à un risque accru de démence. Cela pourrait aider à déterminer si les cauchemars provoquent la démence ou s’ils sont simplement un signe précoce chez certaines personnes. Je compte également étudier les autres caractéristiques des rêves, telles que la fréquence à laquelle nous nous souvenons de nos rêves et la vivacité de ceux-ci, afin d’établir la probabilité de développer une démence dans un horizon plus lointain.</p>
<p>Cette recherche pourrait non seulement aider à faire la lumière sur la relation entre la démence et le rêve, et fournir d’autres possibilités de diagnostics plus précoces – peut-être même des <a href="https://www.thelancet.com/article/S0140-6736(20)30367-6/fulltext">interventions plus rapides</a> –, mais elle pourrait également jeter un nouvel éclairage sur la nature et la fonction du phénomène mystérieux que nous appelons le <a href="https://health.clevelandclinic.org/why-do-we-dream/">rêve</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/191150/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Abidemi Otaiku ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une nouvelle étude révèle que les personnes d’âge moyen qui font des cauchemars chaque semaine sont quatre fois plus susceptibles de connaître un déclin cognitif.Abidemi Otaiku, NIHR Academic Clinical Fellow in Neurology, University of BirminghamLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1913762022-10-02T16:33:02Z2022-10-02T16:33:02ZAu musée Jacquemart-André, explorer notre part d’ombre avec Füssli<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/487592/original/file-20221002-3041-k4x57w.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C51%2C1096%2C900&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Johann Heinrich Füssli (1741 – 1825), Le Cauchemar, après 1782, huile sur toile, 31,5 × 23 cm.</span> <span class="attribution"><span class="source"> The Frances Lehman Loeb, Art Center, Vassar College, Poughkeepsie, New York, photo : Frances Lehman Loeb Art Center, Vassar, Poughkeepsie, NY / Art Resource, NY</span></span></figcaption></figure><p>Au musée Jacquemart André, à Paris, se tient actuellement une <a href="https://www.musee-jacquemart-andre.com/">exposition consacrée au peintre anglais d’origine suisse, J. H. Füssli</a> (1741-1825). La dernière rétrospective de ce type, en France, remontait à près de cinquante ans. C’est dire la portée de l’événement. L’occasion est donc toute trouvée de formuler deux propositions. La première porte sur la capacité qu’aura eue un artiste étranger de se fondre dans le creuset de l’art anglais, en surmontant pour cela une double résistance : résistance du peintre que son tempérament ne portait pas à l’assimilation, et résistance d’une nation volontiers xénophobe, mais qui n’en oublie cependant pas que ses grands peintres ont souvent été d’origine étrangère. Ainsi que l’écrivait Jean-Jacques Mayoux, auteur en 1969 d’une histoire de <em>La peinture anglaise</em> qui n’a pas pris une ride : « De Holbein à Lucien Pissaro, tout étranger ‘s’anglicise’, tout apport étranger est intégré. Une force, dont on serait tenté de dire qu’elle est plus naturelle et instinctive que culturelle se met à l’œuvre et assure cette intégration, par-delà les inévitables réactions de défense organique. »</p>
<h2>Faire parler de soi</h2>
<p>C’est en 1779 que le natif de Zurich, que son père destinait à la profession de pasteur, est de retour à Londres, après diverses péripéties qui l’ont conduit, d’abord à Berlin puis à Paris, où il fait la connaissance de Jean-Jacques Rousseau, et enfin à Rome, pour y découvrir Michel Ange. Commence alors une série de coups de force artistiques, dont l’exposition rend compte dans le détail. Ambitieux, il entreprend de concurrencer sur son propre terrain nul autre que <a href="https://www.nationalgallery.org.uk/artists/sir-joshua-reynolds">Joshua Reynolds</a>, Président de la Royal Academy, qui lui avait pourtant mis le pied à l’étrier, dès 1768. Avec sa propre version de <em>La mort de Didon</em> (1781), Füssli se démarque du même motif peint par Reynolds quelques mois auparavant. D’instinct, il a compris que pour percer dans la profession, il faut faire parler de soi. De fait, tous les regards écarquillés s’étaient immédiatement tournés vers l’impudent trublion… pour ne plus le lâcher des yeux. Il faut dire que jusqu’à sa mort, l’amoureux impénitent, s’éprenant de chacune de ses modèles, dont l’écrivain féministe <a href="https://www.slate.fr/societe/femmes-de-dessein/mary-wollstonecraft-ecrivaine-philosophie-badass-lumieres-fondatrice-feminisme-anticonformiste">Mary Wollstonecraft</a>, la mère de la future autrice de <em>Frankenstein</em>, n’aura cessé de porter la contestation au cœur de l’Establishment, quand bien même ce dernier le nourrissait.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487594/original/file-20221002-27186-syk3mn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487594/original/file-20221002-27186-syk3mn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487594/original/file-20221002-27186-syk3mn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487594/original/file-20221002-27186-syk3mn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=393&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487594/original/file-20221002-27186-syk3mn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487594/original/file-20221002-27186-syk3mn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487594/original/file-20221002-27186-syk3mn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=494&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Johann Heinrich Füssli, La mort de Didon, détail.1781.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Yale Center for British Art, Paul Mellon Collection, New Haven</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>L’art de l’appropriation</h2>
<p>Mais l’essentiel de la stratégie menée par cet étranger nommé Johann Heinrich Füssli, et qui lui vaudra d’être renommé John Henry Fuseli, tient dans un mot, aujourd’hui malvenu, mais c’était moins vrai hier : appropriation. Füssli s’approprie sans vergogne Milton, Shakespeare, Cowper, etc. Certes, il prend aussi son inspiration chez Homère, Wieland ou les légendes nordiques. Mais c’est en illustrant les grandes gloires britanniques qu’il devient plus anglais que les Anglais. Ses motifs, il les puise à des sources autochtones, ce qui est bien utile pour se faire accepter. Mais Füssli ne s’encombre pas plus de flatterie que d’utilité. Sa quête est autre : l’intensité, d’où qu’elle vienne, l’excentricité, le bizarre, la fantaisie entre « rêve et fantastique », la folie, voilà ce qui le sollicite. Il est bien plus que l’interprète de génie d’une littérature qui lui est a priori étrangère, il en l’unique et véritable héraut, le médium halluciné. Shakespeare le « Barde » parle par son intermédiaire comme il ne l’a jamais fait depuis les élisabéthains. Füssli se découvre ainsi des filiations, des ascendances qui se seront imposées à lui, et dans lesquelles il se sera coulé, avec l’apparence de la facilité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487595/original/file-20221002-6015-n34jhn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487595/original/file-20221002-6015-n34jhn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=756&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487595/original/file-20221002-6015-n34jhn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=756&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487595/original/file-20221002-6015-n34jhn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=756&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487595/original/file-20221002-6015-n34jhn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=950&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487595/original/file-20221002-6015-n34jhn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=950&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487595/original/file-20221002-6015-n34jhn.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=950&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Johann Heinrich Füssli, Autoportrait, 1780-1790, Pierre noire sur papier.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Victoria and Albert Museum, Londres</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il faut dire que l’étrangeté qu’il apporte dans ses bagages, et c’est souvent la clef d’une intégration réussie, rejoint celle de la terre d’accueil, en l’espèce une terre de brumes et de précipices surgis « au milieu du salon » (Annie Le Brun). </p>
<p>Mais qu’on ne se méprenne pas. À regarder de près son <em>Autoportait</em> (1780-1790), on mesure les tourments intérieurs de qui n’a d’autre patrie, d’autre asile, en vérité, que celle, celui, que lui offrent ses songes. Et puis il y a cet aveu paradoxal, sous forme d’aphorisme : « Nature puts me out »/« La nature me déroute ». C’est dire si on ne trouvera pas grand-chose, chez lui, qui doive à la <em>mimesis</em>, à l’imitation du réel, de la Nature, telle que l’ont théorisée Platon et Aristote, plus positivement chez le second que chez le premier. Une fois encore, Füssli navigue à contre-courant de la tradition, en l’espèce paysagiste, pastorale, mais également empiriste et positiviste, de la peinture anglaise.</p>
<p>Au risque de dérouter le commun des mortels, mais il n’en a cure, il fait des incubes, succubes et autres démons maléfiques ses fidèles compagnons de route. Loin de les mettre en fuite, il les invite à partager sa couche. Ou plutôt celle des femmes plongées dans le sommeil, et qu’il se plaît à représenter, dans les toiles reprises du <em>Cauchemar</em> de 1781, en proie à une forme de funeste et suintante incubation. S’y manifeste sourdement, par grimaçant incube interposé, l’imminence d’un viol, désiré autant que craint.</p>
<h2>Le choix de la noirceur</h2>
<p>La deuxième proposition touche à son choix, pour le moins radical, de la noirceur. Elle saute aux yeux, quand on emprunte le parcours tracé au sein de l’œuvre. Elle se veut autant idéologique que tactique. Qui dit noir, en effet, se déclare par la même occasion en guerre ouverte contre les phénoménales prétentions nourries par le siècle dit des Lumières, de <a href="https://www.cairn.info/revue-etudes-germaniques-2012-3-page-507.htm">l’Aufklärung kantienne</a> et autre. Avec Füssli, c’est l’imposture d’un mode artistique conçu comme exclusivement diurne qui vole en éclats. Hors de la terreur, de l’effroi, de la noirceur, hors du « nocturne » donc, point de salut. Les thèses <a href="https://www.youtube.com/watch?v=BvzG_p_sdOQ">sur le sublime de l’Irlandais Edmund Burke</a> – encore un étranger assimilé –, formulées en 1757, Füssli les adopte, comme personne avant lui. Sous ses coups de butoir, l’empire de la raison soi-disant émancipatrice et du sens commun froid et tempéré – néoclassique en cela – s’effondre, laissant place à un romantisme de la nuit et de l’excès des plus forcenés. Avec Füssli, un vent de sorcières, un cortège de « femmes à la puissance invaincue » dirait de nos jours Mona Chollet, emporte tout sur son passage, à l’image de la très horrifique <em>Sorcière de la nuit rendant visite aux sorcières de Laponie</em> (1796).</p>
<p>Nombreuses d’ailleurs sont les figures sur ses toiles, s’efforçant, mais en pure perte, de repousser les assauts des puissances de la Nuit. Parfois, c’est une paume de main tendue à la verticale, celle de <em>Lady Macbeth somnambule</em> (1784) par exemple, qui oppose un dérisoire obstacle à la nuit qui vient. Ailleurs, ce sont au contraire des doigts, d’une longueur démesurée, qui se tendent, comme pour mieux pointer et appréhender, à tous les sens du terme, les ténèbres. À chaque fois, le motif surgit de l’obscurité, au prix d’un arrachement, d’un décollement de ce qu’on pourrait presque appeler une peau, l’épiderme du jour tiré loin en arrière.</p>
<p>L’écarlate rideau de scène – Füssli avait une vraie fascination pour la gestuelle, le jeu, la dramaturgie des acteurs et actrices de son temps – se déchire, et au travers de la brèche s’engouffre le fantasme, érigé en nouveau maître des lieux. Il s’impose sans l’ombre d’une résistance, à l’image d’un autre rapt, celui perpétré dans <em>Achille saisit l’ombre de Patrocle</em>, aquarelle datant de 1810. Il n’est pas de barrage qui tienne contre la marée montante de la « matière noire », ainsi que la qualifierait Annie Le Brun. Pour mémoire, <a href="https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-heure-bleue/annie-le-brun-recherche-ce-qui-n-a-pas-de-prix-1387416">Annie Le Brun</a>, essayiste restée proche des surréalistes, poète, spécialiste de Sade et du roman gothique anglais, a fait du noir sa couleur de prédilection. En cela, elle se réclame de Victor Hugo : « L’homme qui ne médite pas vit dans l’aveuglement, l’homme qui médite vit dans l’obscurité. Nous n’avons que le choix du noir. » (<em>William Skakespeare</em>, 1864).</p>
<p>Sans cette nouvelle lumière paradoxalement surgie des profondeurs « pour redessiner le paysage poétique, dramatique, social et politique », insiste Le Brun, « le corps reste prisonnier de son existence organique ». Pis, sans le noir, l’organisme est soustrait « à ses pouvoirs érotiques, symboliques et métaphoriques. » L’apport de Füssli, rejoint en cela par son ami, l’artiste visionnaire William Blake, c’est d’avoir compris en quoi le rêve nocturne agit comme le ferait une thérapie à libération prolongée. Il élève, en délivrant de la gravité, de la pesanteur (<em>Le rêve de la reine Catherine</em>, 1781). Il répare l’infirmité de l’homme et de la femme amputés de leur part d’ombre.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487596/original/file-20221002-7902-uaxnem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487596/original/file-20221002-7902-uaxnem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=763&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487596/original/file-20221002-7902-uaxnem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=763&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487596/original/file-20221002-7902-uaxnem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=763&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487596/original/file-20221002-7902-uaxnem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=959&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487596/original/file-20221002-7902-uaxnem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=959&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487596/original/file-20221002-7902-uaxnem.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=959&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Johann Heinrich Füssli,Roméo et Juliette, 1809.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Collection particulière (en dépôt au Kunstmuseum à Bâle)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Füssli s’abandonne au noir chimiquement pur, au noir contrastant avec le blanc le plus éclatant (<em>Roméo et Juliette</em>, 1809), comme il s’abandonne au rêve. Et il faut savoir gré au scénographe Hubert le Gall d’avoir voulu faire de la dernière salle de l’exposition un laboratoire, grandeur nature, de l’onirisme füsslien. Le dispositif adopté y est frontal, comme cela se fait au théâtre. Chacun sur son mur, et se faisant face, deux bergers endormis, en proie à leurs rêves. À gauche, occupant tout l’espace ou presque, une ronde de jeunes femmes diaphanes, en état de lévitation et se tenant par le bras (<em>Le songe du berger</em>, 1793) ; à droite, rien d’autre au-dessus de la tête prostrée de Lycidas (1799) que le vide, le néant d’une nuit sans lune, ou presque. Au trop-plein de visions (érotiques, comprend-on) s’oppose l’absence. Tout se passe comme si Füssli avait fini par se ranger du côté de la litote, après avoir beaucoup sacrifié à l’hyperbole. En donnant moins à voir, le peintre n’en sollicite que davantage le spectateur, appelé à se faire sa propre représentation, à tourner son propre cinéma intérieur. Et si l’invisible, tout compte fait, ne se voyait jamais mieux… qu’en ne se montrant pas ?</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487597/original/file-20221002-12-6lu4ah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487597/original/file-20221002-12-6lu4ah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=758&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487597/original/file-20221002-12-6lu4ah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=758&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487597/original/file-20221002-12-6lu4ah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=758&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487597/original/file-20221002-12-6lu4ah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=953&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487597/original/file-20221002-12-6lu4ah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=953&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487597/original/file-20221002-12-6lu4ah.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=953&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Johann Heinrich Füssli, Lycidas, 1796-1799.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Collection particulière Studio Sébert Photographes</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Aux sources de la psychanalyse</h2>
<p>Étrangement ou pas, d’ailleurs, tout le temps que dure la visite, c’est à Freud que l’on pense. Sigmund Freud, dont le patronyme commence aussi par un F. Freud, dont la <em>Traumdeutung</em> (interprétation du rêve), les leçons sur la psychanalyse, la découverte de l’inconscient, la science des jeux de mots, souvent d’ordre sexuel, en <a href="https://www.cairn.info/revue-savoirs-et-cliniques-2002-1-page-75.htm">lien avec le Witz</a>, n’auraient sans doute jamais vu le jour ( !) sans les toiles de Füssli (dont le nom en allemand signifie « petit pied »). On ne sort de la confusion, de l’ambiguïté, qu’à ses dépens, dit-on.</p>
<p>La rétrospective du Musée Jacquemart André est l’exception qui confirme la règle. S’y voit mis en abyme le recouvrement du nom de Füssli par celui de Freud, et vice-versa, tant l’ironie voudrait que le premier ait eu, lui, le second sur le bout de la langue. Nulle toile mieux que <em>Les trois sorcières</em> (1783), inspiré du <em>Macbeth</em> de Shakespeare, n’en fait la démonstration. Le « trouble » dans l’anatomie (ainsi que dans le genre, mais cela est une autre histoire) y est tel qu’on ne sait trop si c’est un doigt, ou un gros bout de langue rose et pendante, vaguement obscène, qu’au moins l’une des trois femmes à barbe porte à la bouche. Ce sont sans aucun doute et l’un et l’autre, preuve, si besoin était, que Füssli en connaissait, lui aussi, un rayon sur la question du <em>lapsus linguae</em>. De la langue qui trébuche et, ce faisant, en dit long sur le fonctionnement du psychisme et de ce qui le préoccupe, à l’insu de la raison claire. Si elles sont loin de n’être que ça, ce qui serait assurément réducteur au regard de l’histoire de la peinture anglaise, les toiles de Füssli, certaines plus que d’autres en tout cas, s’emploient à traduire, moyennant une transposition visuelle, les énoncés échappés de cette « bouche d’ombre » qu’est l’inconscient (Hugo, encore, <em>Les Contemplations</em>, Livre VI, XXVI).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/486843/original/file-20220927-22-zczgu0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/486843/original/file-20220927-22-zczgu0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=435&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/486843/original/file-20220927-22-zczgu0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=435&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/486843/original/file-20220927-22-zczgu0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=435&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/486843/original/file-20220927-22-zczgu0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=547&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/486843/original/file-20220927-22-zczgu0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=547&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/486843/original/file-20220927-22-zczgu0.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=547&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les trois sorcières. Inspirée du célèbre Macbeth, cette peinture, réalisée vers 1783, est une huile sur toile (H. 65 ; L. 91,5 cm) conservée aujourd’hui à la Kunsthaus Zürich (Suisse).</span>
</figcaption>
</figure>
<p>En sortant de l’exposition, à l’instar d’un Roland Barthes <a href="https://www.persee.fr/doc/comm_0588-8018_1975_num_23_1_1353">« sortant du cinéma »</a>, on se retrouve à marcher au hasard dans les rues, ne comprenant pas grand-chose à ce qui se passe autour de soi. Invoquera-t-on l’hypnose (« vieille lanterne psychanalytique », précise Barthes) ou l’expérience du rêve éveillé ? C’est à la fois plus simple, et plus retors : Füssli vous a jeté un sort et vous cheminez désormais en somnambule dans l’ombre d’un géant. Qui s’en plaindra ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/191376/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Marc Porée ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Peintre de l’intensité, du bizarre et du fantastique, Füssli sut se fondre dans le creuset de l’art anglais et explorer en images les plus sombres méandres de l’âme humaine.Marc Porée, Professeur émérite de littérature anglaise, École normale supérieure (ENS) – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1813522022-04-15T07:06:07Z2022-04-15T07:06:07ZJames : « Quand un aveugle rêve, qu’est-ce qu’il voit ? »<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/458115/original/file-20220414-26-xrkzlw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">shutterstock</span> </figcaption></figure><p>La perception du monde chez les humains passe principalement par la vue. Près de la <a href="https://www.rochester.edu/pr/Review/V74N4/0402_brainscience.html">moitié de notre cerveau est consacrée au traitement des informations visuelles</a> et la plupart des réseaux cérébraux responsables de la vision <a href="https://faculty.washington.edu/chudler/plast.html">s’établissent dès le début de la vie</a>.</p>
<p>Cela signifie que, dès la naissance et tout au long de notre vie, nous accumulons des <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3722610/">expériences et des souvenirs qui dépendent fortement de la vision</a>. Nous associons la plupart de nos interactions à des images visuelles plutôt qu’à des expériences issues de nos autres sens, tels que l’ouïe ou l’odorat.</p>
<p>Pour ceux d’entre nous qui ont une vision normale, les <a href="https://doi.org/10.1016/j.tics.2009.12.001">rêves sont remplis des images visuelles que nous expérimentons pendant notre vie éveillée</a>. Pour comprendre ce que les aveugles vivent dans leurs rêves, nous devons distinguer les expériences de ceux qui étaient aveugles à la naissance de ceux qui sont devenus aveugles plus tard dans leur vie.</p>
<h2>Tout aussi vifs et imaginatifs</h2>
<p>Les êtres humains nés sans la vue ne sont pas en mesure de recueillir des expériences visuelles, de sorte qu’ils comprennent le monde <a href="https://www.scientificamerican.com/article/superpowers-for-the-blind-and-deaf/">entièrement par leurs autres sens</a>. Par conséquent, les personnes atteintes de cécité à la naissance développent une étonnante capacité à comprendre le monde grâce à l’ensemble des expériences et des souvenirs qui proviennent de ces sens non visuels.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Femme se réveillant dans son lit" src="https://images.theconversation.com/files/394333/original/file-20210409-21-1n9k6kp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/394333/original/file-20210409-21-1n9k6kp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/394333/original/file-20210409-21-1n9k6kp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/394333/original/file-20210409-21-1n9k6kp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/394333/original/file-20210409-21-1n9k6kp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=539&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/394333/original/file-20210409-21-1n9k6kp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=539&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/394333/original/file-20210409-21-1n9k6kp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=539&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les rêves des personnes qui développent une cécité plus tard dans leur vie deviennent moins visuels à mesure que leur temps sans vision augmente.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Kinga Cichewicz/Unsplash)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les rêves d’une personne aveugle depuis sa naissance peuvent être tout aussi vifs et imaginatifs que ceux d’une personne ayant une vision normale. Ils sont cependant uniques car leurs <a href="https://wtamu.edu/%7Ecbaird/sq/2020/02/11/do-blind-people-dream-in-visual-images/">rêves sont construits à partir des expériences et des souvenirs non visuels qu’ils ont recueillis</a>.</p>
<p>Alors qu’une personne dotée d’une vision normale rêvera d’un ami familier en utilisant des souvenirs visuels de forme, d’éclairage et de couleur, une personne aveugle associera le même ami à une combinaison unique d’expériences issues de ses sens non visuels qui agissent pour représenter cet ami.</p>
<p>En d’autres termes, les personnes aveugles à la naissance ont des expériences oniriques globales similaires, mais <a href="https://www.bbc.com/news/blogs-ouch-28853788">elles ne rêvent pas en images</a>.</p>
<p>L’expérience onirique d’une personne qui a perdu la vue plus tard dans sa vie est très différente de celle d’une personne qui n’a jamais eu de vision. Les personnes qui perdent la vue plus tard dans leur vie ont la capacité de recueillir de nombreuses expériences visuelles qui peuvent apparaître dans leurs rêves et d’une manière très similaire à celle d’une personne voyante.</p>
<p>Il est intéressant – et peut-être attendu – que les <a href="https://doi.org/10.1016/j.sleep.2013.12.008">rêves des personnes qui deviennent aveugles plus tard dans leur vie deviennent moins visuels à mesure que le temps passé sans vision augmente</a> et qu’elles accumulent plus d’expériences sans vision.</p>
<hr>
<figure class="align-left ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/251779/original/file-20181220-103676-bvxzth.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.dianerottner.com/">Diane Rottner</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Si toi aussi tu as une question, demande à tes parents d’envoyer un mail à : <a href="mailto:tcjunior@theconversation.fr">tcjunior@theconversation.fr</a>. Nous trouverons un·e scientifique pour te répondre</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181352/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Kevin Duffy a reçu des financements du Natural Sciences and Engineering Research Council of Canada, et du Canadian Institutes of Health Research. </span></em></p>Outre des images, les rêves peuvent contenir d’autres sensations comme des sons ou des odeurs.Kevin Duffy, Professor, Department of Psychology and Neuroscience, Dalhousie UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1701252021-11-08T20:39:10Z2021-11-08T20:39:10ZExiste-t-il un remède au bovarysme du XXIᵉ siècle ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/430747/original/file-20211108-17-rw8aem.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C4%2C1581%2C1282&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Ramon Casas y Carbó, _Après le bal_, </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.artrenewal.org/artworks/after-the-ball/ramon-casas-y-carbo/48162">Art renewal</a></span></figcaption></figure><p><em>La littérature, ce stéthoscope ultra sensible, permet d’explorer de nouveaux imaginaires et nous renseigne aussi sur l’état de notre société, son passé, ses rêves, ses aspirations. À travers cette série, « Imaginer le réel », on a ainsi observé comment <a href="https://theconversation.com/que-peut-la-fiction-litteraire-face-aux-scandales-des-ehpad-178223">le grand âge est représenté en fiction</a>. Ce troisième épisode revient le succès du bovarysme.</em></p>
<hr>
<p><a href="https://www.lefigaro.fr/culture/2013/10/17/03004-20131017ARTFIG00511-les-mots-nouveaux-du-grand-robert.php">« Rêver d’un autre destin plus satisfaisant »</a> : telle est la définition du verbe « bovaryser ». Il est entré dans le Larousse en 2013. Un verbe de base anthroponymique, dérivé du nom de l’héroïne du roman de Flaubert, <em>Madame Bovary</em>, paru en 1856 dans le journal <em>La Presse</em>. Sa description d’une épouse insatisfaite cherchant le bonheur auprès de ses amants a été condamnée pour non-respect des bonnes mœurs et de la morale en 1857. Cependant, son succès ne se dément pas ; le roman a donné lieu à de nombreuses adaptations au cinéma ou en bande dessinée, comme <em>Gemma Bovery</em> de Posy Simmonds.</p>
<p>Dès le XIX<sup>e</sup> siècle, Barbey d’Aurevilly utilise, par dérivation, le nom « bovarysme » pour évoquer cette insatisfaction qui pousse à rêver d’une autre vie et à chercher l’évasion dans le romanesque. Le verbe bovaryser connaît aujourd’hui un regain de popularité. La propension à la rêverie amoureuse est-elle plus que jamais actuelle ? Et surtout, est-elle typiquement féminine ?</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/YhV6nSqBAAc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<h2>Emma, femme d’aujourd’hui</h2>
<p>Fille de paysans, Emma Bovary a reçu une éducation supérieure à celle de sa classe sociale au couvent : elle y a appris la musique, la danse et la lecture. Elle a lu <em>Paul et Virginie</em> puis Chateaubriand, mais surtout les romans d’amour de la lingère du couvent, lus en cachette dans son lit.</p>
<blockquote>
<p>« Elle frémissait en soulevant de son haleine le papier de soie des gravures […]c’était derrière la balustrade d’un balcon, un jeune homme en court manteau qui serait dans ses bras une jeune fille en robe blanche. »</p>
</blockquote>
<p>Une fois mariée à Charles Bovary – un veuf, médecin de campagne – elle continue à se nourrir d’histoires romantiques en souscrivant à des cabinets de lecture, ancêtre des bibliothèques. Avec Walter Scott ou Hugo, elle rêve d’amours dans des châteaux. Avec Eugène Sue, auteur réaliste, elle imagine le décor d’un bel appartement parisien. Elle dévore tous les magazines qui parlent de la vie culturelle des Parisiennes :</p>
<blockquote>
<p>« Elle s’abonna à la Corbeille, journal des femmes, et au Sylphe des salons. Elle dévorait, sans en rien passer, tous les comptes rendus des premières représentations, de courses et de soirées, s’intéressait aux débuts des chanteuses, à l’ouverture d’un magasin. Elle savait les modes nouvelles, l’adresse des bons tailleurs, les jours de bois ou d’opéra. »</p>
</blockquote>
<p>Emma vit donc sa vie par procuration. La lecture romanesque distille un puissant « poison » dans l’esprit des femmes, une sorte d’opium, diront les juges lors du procès du roman.</p>
<p>L’identification du lecteur, qui est au cœur des analyses d’Umberto Eco dans <a href="http://litterature.ens-lyon.fr/litterature/dossiers/theories-litteraires/reception/eco"><em>Lector in Fabula</em></a> ou de <a href="https://arlap.hypotheses.org/1738">Vincent Jouve</a>, a été souvent considérée comme un trait de la lecture <a href="https://journals.openedition.org/clio/219">féminine</a>. Les médecins du XVIII<sup>e</sup> évoquent la délicatesse de l’esprit, la sensibilité exacerbée voire l’hystérie des lectrices. Tandis que les censeurs mettent les maris en garde contre la comparaison avec des <a href="https://ehne.fr/fr/encyclopedie/th%C3%A9matiques/genre-et-europe/%C3%A9duquer-des-europ%C3%A9ens-et-des-europ%C3%A9ennes/lectrices-et-lecture-f%C3%A9minine-en-europe">héros de roman</a>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/litterature-francaise-pourquoi-les-autrices-sont-elles-encore-releguees-au-second-plan-129653">Littérature française : pourquoi les autrices sont-elles encore reléguées au second plan ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Aujourd’hui, les femmes lisent toujours plus de littérature que les hommes, et elles sont même majoritaires quand il s’agit de <a href="https://www.lexpress.fr/culture/livre/pourquoi-les-femmes-lisent-elles-davantage_1916107.html">romans sentimentaux</a>. Les jeunes Emma contemporaines lisent des <a href="https://www.vanityfair.fr/culture/voir-lire/diaporama/chick-litt-les-20-romans-culte/19671">romans de « chick lit »</a>, <a href="https://www.ouest-france.fr/culture/livres/pourquoi-les-romans-d-amour-plaisent-toujours-6736795">qui sont les collections Harlequin modernes</a>.</p>
<p>Elles plébiscitent des romans qui font rêver d’amour, signés Marc Lévy ou Aurélie Valognes. Elles regardent des séries et des films romantiques sur leur ordinateur dans leur lit, telle Bridget Jones. En couple, elles continuent avec de <em>l’erotic romance</em>, comme <em>Cinquantes nuances de Grey</em> <a href="https://www.wsj.com/articles/SB10001424052702304450004577279622389208292">dissimulé</a> dans leurs <a href="https://www.lettresnumeriques.be/2016/03/25/mais-qui-est-donc-le-lecteur-numerique-en-2016/">liseuses</a>. Elles suivent les célébrités – dans des magazines, sur Instagram ou TikTok –, et rêvent d’amour devant les émissions de téléréalité (43 % de femmes regardent ces programmes, contre <a href="https://www.20minutes.fr/arts-stars/television/3012935-20210407-telerealite-20-ans-pres-deux-tiers-jeunes-regardent-moins-telerealite-avant">18 % des hommes</a>).</p>
<h2>Une femme qui cherche l’amour</h2>
<p>Cependant, après avoir vécu par procuration, Emma sombre dans la dépression. Elle croyait trouver le bonheur dans la maternité, mais la réalité est décevante, et elle cherche le réconfort auprès de ses amants Rodolphe, puis Léon, qui la délaissent à leur tour quand elle devient trop romanesque.</p>
<p>Le constat de Flaubert est là encore d’une extrême modernité. La quête éperdue de l’amour se fait aujourd’hui à travers des sites de rencontres qui mêlent modèles de consommation et quête d’idéal, et aboutissent souvent à des <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-conseil-conso/franceinfo-conso-sites-de-rencontres-trop-de-deceptions-selon-l-enquete-de-60-millions-de-consommateurs_4651485.html">désillusions</a>. De même, les voix commencent à se délier sur la maternité et le post-partum, comme celle d’Illana Weizmann, créatrice du hashtag <a href="https://www.marabout.com/ceci-est-notre-post-partum-9782501154055">#Monpostpartum</a> ou les témoignages liés au hashtag <a href="https://madame.lefigaro.fr/bien-etre/regret-detre-mere-hashtag-twitter-tu-te-sentiras-seule-mais-tu-ne-le-seras-plus-jamais-310321-195955">#RegretMaternel</a> réunis dans <a href="https://madame.lefigaro.fr/bien-etre/orna-donath-femmes-regret-etre-mere-tabou-secret-emporte-dans-la-tombe-261119-178468"><em>Mal d’être mère</em></a> (2021) de Stéphanie Thomas.</p>
<h2>Une femme qui consomme pour compenser</h2>
<p>Enfin, Emma Bovary, pour combler ses manques affectifs, se livre à des achats qui la mènent à la ruine. Elle commande les accessoires nécessaires pour jouer le rôle de ses rêves : écharpes, robes, et même « une papeterie, un porte-plume et des enveloppes, quoiqu’elle n’eût personne à qui écrire ». Elle se rêve en héroïne de roman écrivant son histoire jusqu’au grand rôle final : son suicide, en avalant de l’arsenic qui a « l’affreux goût de l’encre ».</p>
<p>Dans son essai <em>Beauté fatale</em>, paru en 2012, Mona Chollet étudiait comment les médias poussent les femmes à dépenser toujours plus pour être conformes au modèle dominant de séduction féminine. Eva Illouz, dans <a href="https://www.furet.com/ebooks/la-fin-de-l-amour-eva-illouz-9782021430370_9782021430370_1.html"><em>La Fin de l’amour, Enquête sur un désarroi contemporain</em></a> (2020) constate quant à elle que nos contemporains idéalisent la relation amoureuse tout en revendiquant leur liberté. C’est l’ère de ce qu’elle appelle les <em>emodities</em> (marchandises émotionnelles) qui compensent le manque d’émotions dans les relations : des petits cadeaux, des moments <em>feel good</em> (voyages, moment bien être) pour se sentir – ou se dire – heureux.</p>
<p>Emma Bovary est donc toujours parmi nous : c’est une lectrice en quête d’amour et victime de la mode, <a href="https://www.dailymotion.com/video/x2kovxh">comme le disait Jean Rochefort</a>.</p>
<h2>Le bovarysme est-il typiquement féminin ?</h2>
<p>Évidemment, ni le désir d’amour ni la rêverie ne sont proprement féminins.</p>
<p>Flaubert aurait d’ailleurs déclaré « Madame Bovary, c’est moi » car adolescent, il cultivait ce goût du romanesque, s’identifiant à Don Quichotte rêvant d’idéal.</p>
<p>Julien Sorel, dans <em>Le Rouge et le noir</em>, lit <em>le Mémorial de Sainte Hélène</em> et s’identifie à Napoléon. Il rêve d’action, il est « ambitieux », ce qui est connoté positivement contrairement au bovarysme, assimilé à une forme de passivité. S’ils ne réussissent pas, on parle pour les hommes, d’<em>Illusions perdues</em>. Le roman de Balzac est actuellement adapté au cinéma, tout comme <em>Eugénie Grandet</em>, l’histoire d’une fille unique très riche rêvant d’amour et se sacrifiant pour son cousin. Les femmes ne pouvaient avoir d’autre ambition au XIX<sup>e</sup> que de soutenir un homme, mais – heureusement – ces modèles littéraires sont datés.</p>
<p>Les femmes aujourd’hui ont bien d’autres moyens de se réaliser, mais on les invite encore à penser que l’amour serait la seule aventure qui leur permettrait d’exister. Mona Chollet, dans <a href="https://www.editionsladecouverte.fr/reinventer_l_amour-9782355221743"><em>Réinventer l’amour, ou comment le patriarcat sabote les relations hétérosexuelles</em></a>, analyse comment l’amour, en 2021, est toujours idéalisé dans les films, les livres, les magazines ou la publicité. Au nom de l’amour, les femmes sont invitées à se dévouer, à se faire petites et se taire pour être aimées, à tenir pour normal d’être seules dépositaires de la charge mentale du couple.</p>
<p>Elles acceptent d'aider leur conjoint à progresser, d'offrir leur amour, parfois <a href="https://www.vie-publique.fr/en-bref/280594-victimes-de-violences-conjugales-bilan-de-lordonnance-de-protection">jusqu’à la violence morale ou physique</a>. L’homme viril est lui invité à se méfier de l’amour et à garder son argent, tel Rodolphe le séducteur d’Emma qui refuse de l’aider. Pour Mona Chollet, les femmes modernes ne trouvent plus leur compte dans ces relations trop souvent inégales : à l’homme l’action, à la femme le soutien inconditionnel.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/wZbudU2fVjc?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<h2>Des modèles de femmes d’action plutôt que d’amoureuses</h2>
<p>Rêver d’idéal et de succès est tout à fait louable, Daniel Pennac parle à ce propos d’une « maladie textuellement transmissible » et d’un droit au bovarysme dans <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Comme_un_roman"><em>Comme un roman</em></a>. Mais il faut ensuite pouvoir se battre pour réaliser ses rêves. Emma rêvait d’accomplissement à travers Charles qui se révélait un docteur médiocre lors de son opération du pied bot et un mari hors des codes classiques de la virilité (non binaire, dirait-on aujourd’hui), mais aimant et dévoué.</p>
<p>Emma Bovary était en lutte pour son <a href="https://www.doctorales.fr/articles/actes-5/74-repenser-l-agentivite-feministe-relationalite-vulnerabilite-et-performativite-chez-judith-butler">« agentivité »</a>, autrement dit sa capacité d’action en tant que femme. Mais elle n’avait pas de modèle féminin actif, pas de Napoléon dans ses lectures. C’est en <a href="https://editions-iconoclaste.fr/livres/les-grandes-oubliees/">redonnant leur place à toutes les femmes</a> qui ont agi dans l’Histoire, que l’on permettra aux jeunes lectrices du XXI<sup>e</sup> siècle d’avoir des modèles forts et inspirants.</p>
<p>Disney a fait évoluer ses héroïnes avec Elsa, Vaiana, Tiana, Mérida dans <em>Rebelle</em>, Raiponce ou <a href="https://www.cosmopolitan.fr/princesses-disney-leur-evolution,2024621.asp">Mulan</a>. Désormais, les héroïnes prennent leur destin en main. Dans la littérature jeunesse, la série <a href="https://www.mortelleadele.com/les-livres/la-serie/"><em>Mortelle Adèle</em></a> met en valeur une antihéroïne qui n’aime pas l’amour mais l’action. Elle a beaucoup de succès chez les jeunes garçons et filles, qui s’identifient à Adèle.`</p>
<p>L’Anglaise Posy Simmonds a donné avec <em>Gemma Bovary</em> une version du roman dans laquelle les rôles sont inversés : c’est le boulanger normand qui rêve de sa belle voisine anglaise Gemma, avec ses souvenirs de Flaubert. Gemma est une femme moderne, qui prend l’Eurostar et retrouve son amant dans son van aménagé… tandis que Raymond rêve et lit dans sa chaumière.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/gJoAVPevyX8?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Lire des autrices qui ont fait de leurs rêves et idéaux des créations puissantes permet de sortir également des représentations éculées. Maryse Condé, Margaret Atwood ou Annie Ernaux comptaient parmi les autrices pressenties pour le prix Nobel de littérature cette année. Le prix Nobel doit être attribué à un auteur « qui a fait la preuve d’un puissant idéal » dans sa réflexion sur le monde, selon les directives d’Alfred Nobel. Toutes trois portent une réflexion nouvelle sur le monde et les femmes, avec des héroïnes modernes, inscrites dans les réflexions féministes du XXI<sup>e</sup> siècle.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/170125/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sandrine Aragon ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le terme « bovarysme » est entré par dérivation dans notre lexique. En quoi est-il terriblement actuel ? Et bovaryser est-il propre aux femmes ?Sandrine Aragon, Chercheuse en littérature française (Le genre, la lecture, les femmes et la culture), Sorbonne UniversitéLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1696632021-10-21T21:11:35Z2021-10-21T21:11:35ZComment l’Orient-Express traverse le cinéma et la littérature<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/426243/original/file-20211013-15-5a6dm0.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">orient express</span> </figcaption></figure><p>Cent vingt-six ans. Tel est l’âge de l’Orient-Express lorsqu’il s’éteint sur son ultime parcours de Strasbourg à Vienne le 12 décembre 2009, après être né, le 4 octobre 1883, d’un premier voyage de Paris gare de l’est à Giurgiu (en Roumanie). Près d’une décennie après sa disparition, le train mythique fascine toujours, comme en atteste le franc succès au box-office du film de Kenneth Branagh, <a href="https://www.youtube.com/watch?v=i6cwPGPh61g"><em>Le Crime de l’Orient-Express</em></a> (2017) ou encore les expositions et reconstitutions européennes. L’évolution constante de l’Orient-Express entre 1883 et 2009 en fait un espace collectif variable, voire insaisissable : songer à l’Orient-Express ne consiste pas uniquement à découvrir des lieux, des paysages et des nations inconnus, mais également à se plonger dans des époques révolues (la fin de siècle, les guerres mondiales, l’entre-deux-guerres, etc.).</p>
<p>Ce ne sont pas seulement ses sièges, ses couchettes, sa vitesse, ses itinéraires ou encore ses odeurs que l’on soumit à moult altérations, mais également sa fonction et son symbolisme, national comme international. Le tout premier mythe ne consiste-t-il pas à croire que l’Orient-Express désigne un seul et même train plutôt qu’un trajet entre une partie l’Europe occidentale, voire septentrionale (avec l’Angleterre) et une partie de l’Europe orientale et méridionale (Istanbul) ?</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427747/original/file-20211021-25-xutwgl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427747/original/file-20211021-25-xutwgl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427747/original/file-20211021-25-xutwgl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427747/original/file-20211021-25-xutwgl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=380&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427747/original/file-20211021-25-xutwgl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427747/original/file-20211021-25-xutwgl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427747/original/file-20211021-25-xutwgl.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=477&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le train de légende a cessé de circuler en 2009.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://timesofindia.indiatimes.com/travel/destinations/murder-on-the-orient-express-and-the-tale-of-amazing-destinations-therein/as61691099.cms">Orient-Express</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les multiples métamorphoses de l’Orient-Express en font un mythe abstrait : associé au voyage, il incarne les diverses mentalités d’une Europe culturellement hétérogène, voire en proie à des conflits internationaux où vainqueurs et vaincus entretiennent une relation de domination sociopolitique. Témoin des guerres mondiales et emblème de triomphe ou de défaite, de richesse ou d’indigence (étant régi par un système de classes), objet de fantasme littéraire puis cinématographique, l’Orient-Express ne désigne pas un seul espace de voyage collectif cohérent, mais un ensemble de visions qui se croisent. Les artistes de l’Orient-Express, quant à eux, oscillent entre un portrait tantôt réaliste, tantôt chimérique du train surnommé plus tard <a href="https://www.cairn.info/revue-guerres-mondiales-et-conflits-contemporains-2017-1-page-133.htm">« monstre bienfaisant »</a> (Alexandre Hepp).</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427752/original/file-20211021-15-7o50je.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427752/original/file-20211021-15-7o50je.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427752/original/file-20211021-15-7o50je.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427752/original/file-20211021-15-7o50je.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427752/original/file-20211021-15-7o50je.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427752/original/file-20211021-15-7o50je.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427752/original/file-20211021-15-7o50je.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=500&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">L’Orient-Express désigne plusieurs trains et plusieurs lignes.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Luxe, raffinement et célébration artistique de l’Orient-Express</h2>
<p>Inspiré des <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouvelles-de-leco/les-nouvelles-de-leco-du-lundi-05-mars-2018">trains américains Pullman</a>, alors dotés de couchettes, l’Orient-Express offre d’emblée à ses passagers aisés la possibilité de se déplacer sur de longues distances tout en se délectant d’un confort et d’un luxe sans parangon. En guise de commodités, l’eau chaude, le chauffage (« excessif » selon les personnages d’Agatha Christie) et l’éclairage procurent une sensation d’abondance appréciable, étayée de surcroît par de fastueux matériaux décoratifs : on y bénéficie de soie pour les draps, de marbre pour les lieux d’aisances et de cristal ou d’argent pour le service de tables. </p>
<p>C’est précisément cette opulence qu’inspire le train à Ian Fleming pour son roman <a href="https://gutenberg.ca/ebooks/flemingi-fromrussiawithlove/flemingi-fromrussiawithlove-00-h.html"><em>Bons baisers de Russie</em></a> (1957), où les évocations orientalistes et le choix d’y placer deux scènes d’amour entrecoupées d’une seule scène d’action trouvent un écho dans l’<a href="https://www.youtube.com/watch?v=JELm6NkF7yY">adaptation cinématographique de Terrence Young</a> (1963), deuxième opus de la saga James Bond. Dans les deux œuvres, sur un trajet Istanbul-Paris, ce sont les couchettes de l’Orient-Express, espace privé, qui se transforment en salon de beauté et où se tiennent deux scènes de badinage entre l’agent 007 et Tatiana Romanova, ancien agent du KGB interprété par l’actrice <a href="https://www.allocine.fr/personne/fichepersonne_gen_cpersonne=72873.html">Daniela Bianchi</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/427749/original/file-20211021-13-1xrtcyy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/427749/original/file-20211021-13-1xrtcyy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/427749/original/file-20211021-13-1xrtcyy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/427749/original/file-20211021-13-1xrtcyy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/427749/original/file-20211021-13-1xrtcyy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/427749/original/file-20211021-13-1xrtcyy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/427749/original/file-20211021-13-1xrtcyy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Un personnage à part entière dans <em>Bons baisers de Russie</em>.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fenetresurecran.wordpress.com/2014/06/25/critique-et-analyse-bons-baisers-de-russie/">Fenêtre sur écran</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Concernant l’aspect extérieur du train, <a href="https://www.allocine.fr/personne/fichepersonne_gen_cpersonne=5192.html">Terrence Young</a> opte tantôt pour de gros plans, tantôt pour des perspectives plus panoramiques, deux procédés opposés à l’issue desquels le grand James Bond, alias <a href="https://www.allocine.fr/personne/fichepersonne_gen_cpersonne=1541.html">Sean Connery</a>, occupe à l’écran une place dérisoire, comme éclipsé par la taille démesurée du train. C’est précisément ce confort et la sélectivité des passagers qui font de l’Orient-Express bien plus qu’un simple train, d’où son surnom : « le roi des trains, le train des rois ».</p>
<h2>L’Orient-Express dans la littérature : d’objet à sujet</h2>
<p>D’abord célébré par les décadents comme le triomphe de l’artifice sur la nature, comme la victoire de la mécanique sur l’organique, le train est, peu à peu, traité comme un sujet à part entière, lequel est animé de diverses ambiances, d’affects, d’ingestions et d’excrétions (combustible, fumée, sanitaires, etc.). Dans son roman <a href="https://www.gutenberg.org/cache/epub/56149/pg56149-images.html"><em>A rebours</em></a> (1884), paru un an après l’inauguration de l’Orient-Express, l’écrivain et critique d’art Joris-Karl Huysmans <a href="https://www.gutenberg.org/files/56149/56149-h/56149-h.htm">compare l’homme à Dieu</a> en précisant que la création d’une locomotive transcende ou égale la création de la femme :</p>
<blockquote>
<p>« Il n’est certainement pas, parmi les frêles beautés blondes et les majestueuses beautés brunes, de pareils types de sveltesse délicate et de terrifiante force ; à coup sûr, on peut le dire : l’homme a fait, dans son genre, aussi bien que le Dieu auquel il croit. »</p>
</blockquote>
<p>Bien des auteurs se plaisent à dresser le portrait d’un train vivant sous les traits organiques d’un sujet, animé par des pulsions de vie et de mort. Dans son roman de 1957, Ian Fleming décrit l’Orient-Express comme « l’unique train doté de vie » en gare d’Istanbul, les autres étant qualifiés de divers suffixes privatifs, et précise que son arrêt correspond à « la mort d’un dragon souffrant d’asthme ».</p>
<p>Espace animé par la mobilité autant que par une mutabilité constante où se succèdent entrées et sorties, le train est susceptible de manifester divers symptômes : pannes, crimes, interruptions du fait d’une Nature indomptable, etc. Quant à son inlassable mouvement binaire (marche/arrêt), il reflète le cycle de l’existence, des saisons et des batailles européennes. C’est pourquoi bien des passagers aisés, voire illustres, rêvent de monter à bord de ce microcosme socioculturel.</p>
<h2>L’Orient-Express : le train des célébrités</h2>
<p>En 2020, <a href="https://madame.lefigaro.fr/personnalite/kate-moss-1">Kate Moss</a> et <a href="https://www.voici.fr/bios-people/emma-bunton">Baby Spice</a> partagent sur Instagram leur expérience à bord de l’Orient-Express (ou plutôt sa version VSOE, le Venise-Simplon-Orient-Express), prolongeant une coutume datant des premiers voyages du train, qui devient, dès 1883, prisé par les célébrités les plus appréciées.</p>
<p>Dès ses débuts, la renommée de l’Orient-Express est immédiate, <a href="https://www.histoire-des-belges.be/quelques-celebrites-belges/georges-nagelmackers">Georges Nagelmackers</a> ne s’étant pas uniquement limité à la seule conception du train, mais également à son rayonnement, par le truchement d’une presse dithyrambique, notamment sous la plume de Georges Boyer, envoyé spécial pour <a href="https://www.lefigaro.fr/histoire/archives/2017/12/12/26010-20171212ARTFIG00235-en-1883-l-emerveillement-du-journaliste-du-figaro-a-bord-de-l-orient-express.php"><em>Le Figaro</em></a>, de son symbolisme déjà mythique, ou plutôt mythifié par la présence de ses passagers aux fonctions illustres (la plupart originaire de l’ouest de l’Europe : journalistes, hommes d’affaires, ingénieurs, diplomates, militaires, ecclésiastiques, journalistes, artistes, hommes de lettres ou de sciences, etc.) et surtout de personnalités influentes et célèbres : Lawrence d’Arabie et Mata Hari, associés à la découverte et au mystère ; le roi Ferdinand de Bulgarie ; l’actrice américaine Marlene Dietrich ; ou encore les écrivains Léon Tolstoï, Joseph Kessel, Ernest Hemingway et Agatha Christie, qui y rencontre son futur époux et trouve l’inspiration pour son roman non moins mythique, nommément, <a href="https://archive.org/details/MurderOnTheOrientExpress_201803"><em>Le Crime de l’Orient-Express</em></a> (1934).</p>
<p>Inspiré d’un crime et d’une interruption en Turquie, du fait d’un blizzard, des services du Simplon-Orient-Express, ce train de la victoire conçu par les Alliés victorieux de 1919, qui est en réalité une imitation de l’Orient-Express original. C’est précisément ce beau monde que rassemble Kenneth Branagh dans son adaptation de 2017, film dont le casting époustouflant (Johnny Depp, Michelle Pfeiffer, Penélope Cruz, Judi Dench, Willem Dafoe, etc.) reflète, somme toute, les personnalités influentes à bord de l’Orient-Express à l’époque d’Agatha Christie.</p>
<h2>Multilinguisme et transnationalisme</h2>
<p>Le multilinguisme des personnages dans les œuvres littéraires et cinématographiques se déroulant à bord de l’Orient-Express étaye la vision d’un train aussi mobile que l’identité de ses passagers européens de l’Est et de l’Ouest, qui franchissent les frontières spatiales, linguistiques et socioculturelles du continent d’Istanbul jusqu’à Calais – d’où, peut-être, les prémices d’un transnationalisme (échanges socio-économiques entre les Européens) aussi bien à bord du train mythique qu’au sein des romans de l’Orient-Express, dont la graphie reflète la diversité de l’Europe de l’entre-deux-guerres. </p>
<p>Dans le roman d’Agatha Christie, il s’agit des sonorités arabophones évoquées à Alep ou encore des idiosyncrasies de l’intonation italienne (« That whatta I say alla de time »). Hercule Poirot n’est-il pas lui-même, dans l’excipit (les dernières lignes du roman), transformé par ces échanges au même titre que les personnages de <em>Bons baisers de Russie</em> ? Relativement fidèle au roman dont elle s’inspire, l’adaptation cinématographique de Branagh se conclut avec une décision inattendue du célèbre détective sherlockien, dont la morale et l’humanité ont été profondément ébranlées à bord de l’Orient-Express.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/VtXpcwWdqlo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Le roman de Ian Fleming insiste tout autant sur la « fusion » opérée entre deux personnages pourtant « antagonistes », l’un (l’agent britannique James Bond) appartenant au bloc de l’Ouest ; et l’autre (l’agent russe Tatiana), au bloc de l’Est. Le sentiment d’amour (« l’extraordinaire fusion de leurs yeux et de leur corps ») unissant les deux agents initialement ennemis reflète ainsi la porosité des frontières internationales à bord du train, où chaque passager peut être influencé par plusieurs cultures étrangères.</p>
<p>Après l’avoir fantasmé à travers les films et la littérature, les amateurs du train de luxe peuvent aussi le découvrir en montant à bord, ou par le truchement d’expositions.</p>
<h2>Orient-Express et actualité</h2>
<p>Une visite à bord de l’un des mythes de l’Orient-Express, nommément, le <a href="https://www.traindeluxe.com/trains/28-venice-simplon-orient-express?gclid=Cj0KCQjwwNWKBhDAARIsAJ8HkhcvbFHQKxtm2e3zm7Hmu6Jn6y8vEgDytQ7I_2D-Lq5nLf19P9zU1acaAtMeEALw_wcB">Venice Simplon-Orient-Express</a> (VSOE), est encore possible aujourd’hui : environ une fois par semaine entre mars et novembre, il est envisageable pour les amateurs du train de devenir passagers, moyennant la modique somme de 2765 euros entre Paris et Venise, repas compris. Ils sauront alors apprécier le travail de reconstitution des fourgons, des sièges et en particulier des toilettes.</p>
<p>La SNCF, quant à elle, disposant d’un train composé de sept voitures restaurées et arborant un style Art déco, propose des voyages privatisés, à titre exceptionnel, et partage son goût du patrimoine ferroviaire dans ses <a href="http://openarchives.sncf.com/">archives</a>.</p>
<p>Pour celles et ceux qui n’auraient pas fait partie de ses 300 000 visiteurs, l’exposition parisienne proposée à l’Institut du Monde Arabe en 2014 (<a href="https://www.imarabe.org/fr/expositions/il-etait-une-fois-l-orient-express">« Il était une fois l’Orient-Express »</a>) a, depuis décembre 2020 et jusqu’en janvier 2022, changé de destination : c’est à <a href="https://www.gardensbythebay.com.sg/en/things-to-do/calendar-of-events/orientexpress.html">Singapour</a> que les amateurs de l’Orient-Express pourront apprécier son luxe, et ce, en dépit de la crise sanitaire. </p>
<p>Après Paris et Singapour, qui marquent ainsi le début d’une série d’expositions sur l’Orient-Express (coorganisées par Visionairs in Art, Orient-Express et l’Institut du Monde Arabe), il reviendra à la Chine puis à Venise d’accueillir le « roi » de plus de 200 tonnes. Pour qui le voyage intérieur est préférable, bien des lectures sont disponibles, en particulier <a href="https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb453675360"><em>L’Orient-Express. Du voyage extraordinaire aux illusions perdues</em></a> (avril 2021, 650 pages), riche anthologie de Blanche El Gammal mêlant récits littéraires, archives et essais.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169663/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stéphane Sitayeb ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les multiples métamorphoses de l’Orient-Express en font un mythe abstrait : associé au voyage, il incarne les diverses mentalités d’une Europe culturellement hétérogène.Stéphane Sitayeb, Professeur agrégé et Docteur en littérature anglaise, Université d’Evry – Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1605052021-07-27T13:41:49Z2021-07-27T13:41:49ZÊtre pourchassé, perdre ses dents, tomber… Ce que la science dit des rêves récurrents<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/409720/original/file-20210705-27-13i7y47.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C18%2C6230%2C4128&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans certains cas, des rêves récurrents qui émergent durant l’enfance peuvent même persister jusqu’à l’âge adulte.</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>Rêver, encore et encore, au même scénario est un phénomène connu – près du <a href="https://psycnet.apa.org/record/1996-98816-016">deux tiers de la population</a> rapportent avoir déjà connu un épisode de rêves récurrents. Être poursuivi, se retrouver nu dans un endroit public, faire face à un désastre naturel, perdre ses dents ou oublier d’aller à un cours pendant tout un semestre sont des <a href="https://psycnet.apa.org/record/1996-98816-016">thématiques typiques de ces rêves récurrents</a>.</p>
<p>D’où vient ce phénomène, dont les thématiques reviennent d’une personne à l’autre ? La science des rêves indique que les rêves récurrents feraient peut-être écho à des conflits non résolus dans la vie du rêveur.</p>
<p>Je travaille au Laboratoire des rêves et des cauchemars du Centre d’études avancées en médecine du sommeil de l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal. En tant que doctorante en neurosciences, je m’intéresse à la manière dont notre mémoire est réactivée, transformée et incorporée dans nos rêves.</p>
<p>Les rêves récurrents sont des rêves qu’un individu peut faire à répétition. On remarque qu’ils <a href="https://link.springer.com/article/10.1023/A:1021152411010">surviennent souvent en période de stress</a> ou sur de longues périodes de temps, parfois même sur plusieurs années, voire une vie entière. Ces rêves mettent en scène non seulement une même thématique, mais aussi un récit particulier qui peut se répéter d’une nuit à l’autre.</p>
<p>Bien que le contenu exact des rêves récurrents soit unique à chaque personne, il existe des <a href="https://psycnet.apa.org/record/1959-09900-001">thématiques communes entre les individus</a>, et même entre les cultures et les différentes époques. Par exemple, se faire pourchasser, tomber, être mal préparé pour une évaluation, arriver en retard ou essayer de faire quelque chose à répétition comptent parmi les <a href="http://dreamscience.ca/en/documents/publications/_2003_Nielsen_Reprint_D_13_211-235_TDQ.pdf">scénarios les plus prévalents</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une femme semble léviter près d’une falaise" src="https://images.theconversation.com/files/410225/original/file-20210707-27-18yhy6z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/410225/original/file-20210707-27-18yhy6z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/410225/original/file-20210707-27-18yhy6z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/410225/original/file-20210707-27-18yhy6z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/410225/original/file-20210707-27-18yhy6z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/410225/original/file-20210707-27-18yhy6z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/410225/original/file-20210707-27-18yhy6z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les rêves récurrents n'ont pas tous une connotation négative. Certains, comme avoir la capacité de voler, peuvent même avoir un effet euphorisant.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>La majorité des rêves récurrents ont un <a href="https://psycnet.apa.org/record/1996-98816-016">contenu plutôt négatif</a>, comportant des émotions comme la peur, la tristesse, la colère et la culpabilité ; et plus de la moitié mettent en scène une situation ou le rêveur est en danger. Mais certaines thématiques récurrentes peuvent aussi être positives, voire euphorisantes, comme les rêves où l’on découvre de nouvelles pièces à notre maison, les rêves érotiques ou ceux où l’on a la capacité de voler.</p>
<p>Dans certains cas, des rêves récurrents qui émergent durant l’enfance peuvent persister jusqu’à l’âge adulte. Ces rêves peuvent disparaître pendant quelques années, resurgir en présence d’une nouvelle source de stress et se dissiper de nouveau lorsque la situation est passée.</p>
<h2>Des conflits non résolus</h2>
<p>Pourquoi notre cerveau joue-t-il ces mêmes rêves en boucle ? Des études suggèrent que les rêves, en général, nous aident à <a href="https://psycnet.apa.org/record/2009-12487-003">réguler nos émotions</a> et à nous adapter aux événements stressants – le fait d’intégrer du contenu émotionnel dans les rêves permettrait au rêveur d’assimiler un événement douloureux ou difficile.</p>
<p>Dans le cas des rêves récurrents, un contenu répétitif pourrait représenter une tentative infructueuse d’intégrer ces expériences difficiles. <a href="https://www.proquest.com/docview/2490256841?pq-origsite=gscholar&fromopenview=true">Plusieurs théories</a> s’accordent pour dire que les rêves récurrents seraient reliés à des difficultés ou des conflits non résolus dans la vie du rêveur.</p>
<p>La présence de rêves récurrents a aussi été associée à un <a href="https://psycnet.apa.org/record/1986-19838-001">plus bas niveau de bien-être psychologique</a> et à la présence de <a href="https://www.semanticscholar.org/paper/Dream-Content%2C-Dream-Recurrence-and-Well-Being%3A-A-a-Zadra-O%27Brien/af492efdd0bcdee15c4b5d743df9deb530e2daa0">symptômes d’anxiété et de dépression</a>. Ces rêves ont tendance à <a href="https://link.springer.com/article/10.1023/A:1021152411010">réapparaître lors de situations stressantes</a> et à cesser lorsque la personne a <a href="https://psycnet.apa.org/record/1996-98816-016">résolu son conflit personnel</a>, indiquant ainsi une amélioration du bien-être.</p>
<p>Les rêves récurrents reflètent souvent de manière métaphorique les préoccupations émotionnelles des rêveurs. Par exemple, <a href="https://archive.org/details/dreamsnightmares0000hart_k4s6">rêver à un tsunami</a> est courant à la suite d’un traumatisme ou d’un abus. C’est un exemple typique de métaphore pouvant représenter des émotions d’impuissance, de panique ou de peur vécues à l’éveil.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un homme affolé court avec son ordinateur sous le bras" src="https://images.theconversation.com/files/410226/original/file-20210707-21-drq5zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/410226/original/file-20210707-21-drq5zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/410226/original/file-20210707-21-drq5zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/410226/original/file-20210707-21-drq5zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=401&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/410226/original/file-20210707-21-drq5zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/410226/original/file-20210707-21-drq5zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/410226/original/file-20210707-21-drq5zk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Certaines personnes, lors d’une situation stressante ou face à un nouveau défi, peuvent rêver de nouveau qu’elles arrivent en retard ou non préparées à un examen de mathématiques, et ce, même des années après avoir mis les pieds dans une école.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De manière similaire, être habillé de manière inappropriée dans son rêve, être nu ou de ne pas pouvoir trouver de toilettes privées ont en commun de représenter des scénarios d’embarras ou de pudeur.</p>
<p>Ces thèmes peuvent être considérés comme des <a href="https://psycnet.apa.org/record/2011-11210-004">scripts</a> ou des scénarios « prêt-à-rêver » qui offrent un espace pour digérer nos émotions conflictuelles. Un même scénario peut ainsi être réutilisé dans des situations différentes où nous vivons des émotions similaires. C’est pourquoi certaines personnes, lors d’une situation stressante ou face à un nouveau défi, peuvent rêver de nouveau qu’elles arrivent non préparées à un examen de mathématiques, et ce, même des années après avoir mis les pieds dans une école. Bien que les circonstances soient différentes, un sentiment similaire de stress ou de désir de se surpasser peut déclencher à nouveau ce scénario de rêve.</p>
<h2>Un continuum de répétitions</h2>
<p>William Domhoff, chercheur et psychologue américain, propose l’existence d’un <a href="https://dreams.ucsc.edu/Library/domhoff_2000b.html">continuum de répétition dans les rêves</a>. À l’extrême, il y a les cauchemars traumatiques qui reproduisent directement un trauma vécu, comme un « flashback », et dont la présence est l’un des symptômes principaux du trouble de stress post-traumatique.</p>
<p>Ensuite, il y a les rêves récurrents, où le même contenu du rêve est rejoué en partie ou dans son entièreté. Contrairement aux rêves traumatiques, les rêves récurrents reproduisent rarement un événement ou un conflit directement, mais les reflètent plutôt de manière métaphorique à travers une émotion centrale.</p>
<p>Plus loin, sur le continuum, se retrouvent les thèmes récurrents dans les rêves. Ces rêves ont tendance à rejouer une situation similaire, comme être en retard, se faire poursuivre ou être perdu, mais le contenu exact du rêve diffère d’une fois à l’autre (être en retard pour prendre le train plutôt qu’à un examen).</p>
<p>Finalement, à l’autre bout du continuum, on retrouve la répétition chez une même personne de certains éléments de rêves, comme des personnages, des actions ou des objets. Tous ces rêves refléteraient, à différents niveaux, une tentative de résoudre certaines préoccupations émotionnelles.</p>
<p>Passer d’un niveau intense à un niveau plus faible dans le continuum de répétition est souvent signe d’une amélioration de l’état psychologique d’une personne. Par exemple, des <a href="https://www.jstor.org/stable/43853181">changements progressifs et positifs</a> dans le contenu des cauchemars traumatiques sont souvent observés au fur et à mesure que les personnes qui ont vécu un traumatisme se rétablissent de leurs difficultés.</p>
<h2>Des phénomènes physiologiques</h2>
<p>Pourquoi les thématiques sont-elles souvent communes d’une personne à l’autre ? Une explication possible est que certains de ces « scripts » auraient été conservés chez l’humain en raison de leur avantage évolutif. En permettant de <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/behavioral-and-brain-sciences/article/reinterpretation-of-dreams-an-evolutionary-hypothesis-of-the-function-of-dreaming/EE0E7DB39E361540D2DDA79C262EDA7E">simuler une situation menaçante</a>, le rêve d’être pourchassé, par exemple, offre un espace pour se pratiquer à percevoir et échapper à ses prédateurs tout en dormant.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Une jeune femme dans son lit se tient les joues" src="https://images.theconversation.com/files/410227/original/file-20210707-15-16ptuyb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/410227/original/file-20210707-15-16ptuyb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/410227/original/file-20210707-15-16ptuyb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/410227/original/file-20210707-15-16ptuyb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/410227/original/file-20210707-15-16ptuyb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/410227/original/file-20210707-15-16ptuyb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/410227/original/file-20210707-15-16ptuyb.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Certains rêves récurrents, comme celui de perdre ses dents, peuvent être liés au serrement des dents durant le sommeil ou à l’inconfort dentaire au réveil.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Certaines thématiques typiques pourraient aussi s’expliquer en partie par des phénomènes physiologiques qui ont lieu lorsque nous dormons. Une étude conduite en 2018 par une équipe de recherche en Israël a constaté que le fameux rêve de <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2018.01812/full">perdre ses dents</a> ne serait pas particulièrement lié à des symptômes d’anxiété chez le rêveur, mais plutôt au serrement des dents durant le sommeil ou à l’inconfort dentaire au réveil.</p>
<p>Lorsque nous dormons, notre cerveau n’est pas complètement coupé du monde extérieur. Il peut continuer à percevoir des stimuli externes, tels que des sons ou des odeurs, ou encore des sensations corporelles internes. Ainsi, d’autres thématiques, comme être incapable de trouver une toilette ou se retrouver nu dans un espace public, pourraient être liées au fait d’avoir besoin d’uriner durant la nuit ou de porter un pyjama ample dans son lit.</p>
<p>Certains phénomènes physiques propres au sommeil paradoxal, le stade du sommeil où nous rêvons le plus, pourraient aussi entrer en jeu. En sommeil paradoxal, nos muscles sont paralysés, ce qui pourrait provoquer les rêves d’avoir les jambes lourdes ou d’être paralysé dans son lit.</p>
<p>De même, certains auteurs ont proposé que les <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21570/">rêves de tomber ou de voler soient causés par notre système vestibulaire</a>, qui contribue à notre équilibre et qui se réactiverait spontanément durant le sommeil paradoxal. Bien entendu, ces sensations corporelles ne sont pas suffisantes pour expliquer la récurrence de ces rêves chez certaines personnes et leur survenue soudaine en période de stress, mais elles ont probablement une influence significative dans la construction de nos rêves les plus typiques.</p>
<h2>Sortir de la boucle</h2>
<p>Les personnes qui vivent l’expérience d’un cauchemar récurrent sont en quelque sorte figées dans une manière de répondre au scénario du rêve et de l’anticiper. Certaines thérapies ont été développées pour tenter de résoudre cette récurrence et briser le cercle vicieux des cauchemars.</p>
<p>L’une des techniques consiste à visualiser le cauchemar à l’éveil et à le réécrire, c’est-à-dire à en modifier le scénario en changeant un aspect, <a href="https://psycnet.apa.org/record/2016-40667-001">par exemple la fin du rêve, pour quelque chose de plus positif</a>. Se pratiquer à <a href="https://www.academia.edu/6707271/Lucid_Dreaming_as_a_Treatment_for_Recurrent_Nightmares">devenir lucide dans les rêves</a> pourrait aussi être une solution.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-reves-lucides-levent-le-voile-sur-les-mysteres-de-la-conscience-53173">Les rêves lucides lèvent le voile sur les mystères de la conscience</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Les rêves lucides sont les rêves où nous devenons conscients d’être en train de rêver et où nous pouvons parfois même influencer le contenu du rêve. Devenir lucide dans un rêve récurrent pourrait permettre de réfléchir ou de réagir différemment face au rêve et ainsi d’altérer la nature répétitive de ces rêves.</p>
<p>Toutefois, tous les rêves récurrents ne sont pas néfastes en soi et peuvent même être utiles dans la mesure où ils nous informent sur nos conflits personnels. Porter attention aux éléments répétitifs de nos rêves pourrait ainsi être une manière de mieux comprendre et résoudre nos plus grands désirs et tourments.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/160505/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Claudia Picard-Deland a reçu des financements du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Tore Nielsen a reçu des financements de Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. </span></em></p>Les rêves aident à réguler nos émotions et à nous adapter aux événements stressants. Un contenu répétitif pourrait représenter une tentative infructueuse d’intégrer des expériences difficiles.Claudia Picard-Deland, Candidate au doctorat en neurosciences, Université de MontréalTore Nielsen, Professor of Psychiatry, Université de MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1620432021-06-03T19:50:38Z2021-06-03T19:50:38ZTrois clés de philosophes pour apprendre à surmonter un échec<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/404081/original/file-20210602-15-1g75ke5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=32%2C19%2C4288%2C2777&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Si l'obstacle, comme l'échec, force à un temps d'arrêt, il ne stoppe pas définitivement une trajectoire.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Avec les premiers verdicts du site d’orientation post-bac <a href="https://theconversation.com/orientation-post-bac-linevitable-stress-de-parcoursup-161036">Parcoursup</a>, voilà que commence la période des résultats de concours et d’examens. Beaucoup de jeunes verront leurs souhaits se réaliser. Mais beaucoup d’autres seront déçus. L’impossibilité d’intégrer l’école pour laquelle ils se préparaient, ou la filière qui leur semblait idéale pour réaliser leurs projets personnels représente un échec, parfois difficile à supporter.</p>
<p>Est-il alors possible d’apprendre à ses enfants à surmonter ce type de déception ? Trois grands philosophes peuvent nous éclairer, en nous donnant des éléments pour une économie rationnelle du désir.</p>
<h2>Avec Descartes, cerner les limites de ses désirs</h2>
<p>Dans le dictionnaire, l’échec est tout simplement défini comme l’opposé de la réussite. Mais, au-delà de cette évidence, que signifie réussir, sinon précisément obtenir le résultat que l’on espérait ? Il n’y aurait donc de réussite que par référence à une attente. Si bien que l’échec n’existe pas dans l’absolu. Comme la réussite, il est toujours relatif à un but particulier, préalablement valorisé.</p>
<p>On peut donc déjà s’interroger sur la pertinence de cette valorisation, en fonction des ressources (de tous ordres) dont on dispose, et de la probabilité objective d’atteindre le but. Il ne s’agit nullement de s’interdire tout rêve, ou toute ambition. Mais tous nos désirs peuvent-ils être satisfaits ?</p>
<p>Car l’échec est d’une certaine façon l’horizon de l’action humaine, dans la mesure où la réussite met en jeu beaucoup de choses qui ne dépendent pas de nous. Il faut savoir faire son deuil de l’omnipotence, et se délivrer de l’illusion que tout est possible. Telle est la sagesse, d’inspiration stoïcienne, que <a href="http://www.la-pleiade.fr/Catalogue/GALLIMARD/Bibliotheque-de-la-Pleiade/OEuvres-et-lettres">Descartes</a> préconise dans la « troisième maxime » de sa « morale par provision », dans le <em>Discours de la méthode</em> :</p>
<blockquote>
<p>« Ma troisième maxime était de tâcher toujours plutôt à me vaincre que la fortune, et à changer mes désirs que l’ordre du monde… en sorte qu’après que nous avons fait notre mieux touchant les choses qui nous sont extérieures, tout ce qui manque de nous réussir est au regard de nous absolument impossible. »</p>
</blockquote>
<p>Pour celui qui a fait de son mieux, l’échec n’est jamais qu’un événement, certes malheureux, en tant que contraire à ses espoirs, mais dont il n’y a pas lieu d’être soi-même malheureux. L’essentiel est d’avoir fait tout son possible. Cela suffit pour connaître ce que Spinoza nommera le « contentement de l’âme », synonyme de « béatitude ».</p>
<h2>Avec Pascal, hiérarchiser ses rêves</h2>
<p>Certains échecs ne sont-ils pas plus graves que d’autres ? On pourra apprécier la gravité à l’aune de la valeur accordée au but. Mais cette valeur peut être jugée soit à la lumière de simples préférences subjectives (je serais si heureux de devenir membre du prestigieux « Grand Corps » des Inspecteurs des finances !) ; soit dans le cadre d’une échelle hiérarchisée, définissant des « ordres » de réussite, plus ou moins importants selon un principe clair et défendable.</p>
<p>La gravité de l’échec, comme l’importance de la réussite, sera alors fonction de la valeur propre de « l’espace de réussite » où ils surviennent. C’est ce que Pascal, dans ses <a href="http://www.penseesdepascal.fr/"><em>Pensées</em></a>, nous invite à comprendre avec sa distinction des <a href="https://www.cairn.info/revue-l-enseignement-philosophique-2015-1-page-7.htm">« trois ordres »</a> : « L’ordre des corps, l’ordre des esprits, l’ordre de la charité. ». Chaque « ordre » a sa grandeur propre :</p>
<blockquote>
<p>« La grandeur des gens d’esprit est invisible aux rois, aux riches, aux capitaines, à tous ces grands de chair.</p>
<p>La grandeur de la sagesse… est invisible aux charnels, et aux gens d’esprit. Ce sont trois ordres différents de genre. » (Pensées)</p>
</blockquote>
<p>Les « grands de chair » voient par les yeux du corps ; les « grands génies », par les yeux de l’esprit ; les sages et les saints, par les « yeux du cœur ». Qu’est-ce qu’un échec à un concours de grande école, aux yeux de l’esprit ? Et, bien plus encore, aux « yeux du cœur » ?</p>
<p>« Grandeurs charnelles », grandeurs « spirituelles », « sagesse » : il faut savoir ce que l’on « admire », dans quel “ordre” on souhaite se situer, et donc apprendre à voir les choses avec les bons yeux.</p>
<h2>Avec Spinoza, apprendre à se réinventer</h2>
<p>Mais un échec, même dans l’ordre de la charité, n’en reste-t-il pas moins un échec ? L’échec, en quelque sorte, ralentit le cours du désir. N’est-il pas, pour cela, mauvais en soi ? Nous sommes invités à mieux définir le désir. Avec son <em>Ethique</em>, Spinoza va nous aider à progresser dans sa connaissance.</p>
<p>Pour lui, « le désir est la tendance accompagnée de la conscience de cette même tendance ». La « tendance (appetitus) » n’est « rien d’autre que l’essence même de l’homme ». Si bien que « Le désir est l’essence même de l’homme… c’est-à-dire l’effort par lequel l’homme persévère dans son être ».</p>
<p>L’essentiel est donc de préserver le « conatus », ou effort de l’être pour <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance/l-ethique-de-spinoza-34-parties-iii-et-iv-affects">persévérer dans son être</a>. Le désir est toujours, en soi, positif, à tel point que « le bonheur consiste pour l’homme à pouvoir conserver son être ». Que nous recommande alors la raison ?</p>
<blockquote>
<p>« La raison demande que chacun s’aime soi-même, qu’il cherche ce qui est réellement utile pour lui, qu’il désire tout ce qui conduit réellement l’homme à une perfection plus grande, et, d’une manière générale, que chacun, selon son pouvoir, s’efforce de conserver son être. »</p>
</blockquote>
<p>Mais alors, aucun échec ne doit pouvoir éteindre le désir. L’échec n’est qu’un coup de frein passager. S’il marque un temps d’arrêt sur une ligne particulière de développement, il ne signifie nullement un arrêt du développement lui-même. Celui-ci se poursuivra en contournant l’obstacle, comme le cours d’eau contourne et dépasse le rocher qui ne le retarde qu’un court instant.</p>
<p>L’essentiel est de vivre, et d’aller de l’avant, avec le souci de se perfectionner (dans un « ordre » digne d’être valorisé). Il faut apprendre à son enfant à conserver l’envie d’avoir envie, pour tenter de se dépasser toujours, et connaître ainsi un bonheur durable…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162043/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Charles Hadji ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Comme la réussite, l’échec est toujours relatif à un but particulier, préalablement valorisé. En période de résultats de concours et d’examens, quelques pistes pour aider un enfant ou un proche déçu.Charles Hadji, Professeur honoraire (Sciences de l’éducation), Université Grenoble Alpes (UGA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1540122021-02-19T14:50:20Z2021-02-19T14:50:20ZCe je-ne-sais-quoi qui fait rêver dans les photos de voyage enfin expliqué<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/383806/original/file-20210211-21-1dhzn2w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=471%2C0%2C3727%2C1871&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La majorité des consommateurs de produits touristiques se basent sur les conseils d'influenceurs en ligne pour prendre des décisions de voyage.</span> <span class="attribution"><span class="source">shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Imaginez un peignoir jeté sur une chaise longue savamment placée aux abords de la piscine d’un hôtel chic, dont la terrasse surplombe la mer… La scène donne envie de voyager, et fait surtout rêver, en ces temps de confinement. Mais pourquoi certaines images évoquent-elles l’envie de partir plus que d’autres ?</p>
<p>C’est ce à quoi s’est intéressée notre équipe de chercheurs, experts dans le domaine de l’expérience utilisateur (UX) et l’expérience client multisensorielle.</p>
<p>Nous avons réalisé une étude en collaboration avec le <a href="https://tech3lab.hec.ca/en/accueil2-0/">Tech3lab</a> et le Centre de recherche <a href="https://www.ithq.qc.ca/expertise-et-recherche/recherche/experisens/">ExperiSens</a> de l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec dans laquelle nous avons demandé à 335 consommateurs de répondre à un questionnaire sur une série de photos hôtelières et touristiques trouvées dans Internet. Les participants ont été invités à évaluer différentes photos en fonction des sentiments provoqués, la crédibilité de l’image et sa qualité. À la fin du questionnaire, ils devaient se prononcer sur leurs intentions d’achat.</p>
<p>Les résultats de cette étude nous ont permis d’identifier les éléments qui font en sorte que certaines images se démarquent et font rêver les consommateurs plus que d’autres. Les professionnels de l’industrie hôtelière et touristique devraient en tenir compte lors de la sélection de photos à partager en ligne.</p>
<h2>Les meilleures photos à partager</h2>
<p>Les résultats ont montré l’importance d’une <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/009365087014005005">présence sociale</a> dans l’image. La présence sociale est la capacité d’une image de transmettre une perception de présence et de chaleur humaine. Toutefois, il n’est pas nécessaire qu’elle soit représentée par un individu. Une présence sociale dite « suggérée » (des objets personnels dans la photo, mais sans individu) a une portée égale, voire supérieure, sur les intentions d’achat que les photos avec une présence sociale « observée » (des personnes dans la photo).</p>
<p>Dans tous les cas, une certaine présence sociale sera plus efficace qu’une photo qui n’en a aucune. Ceci indique aux professionnels de l’industrie touristique qu’il n’est pas nécessaire d’investir dans le recrutement de modèles humains pour la prise de photos promotionnelles afin d’obtenir l’impact désiré. Les frais s’en trouvent donc réduits.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/382408/original/file-20210204-14-1hlnlpg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/382408/original/file-20210204-14-1hlnlpg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=296&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/382408/original/file-20210204-14-1hlnlpg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=296&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/382408/original/file-20210204-14-1hlnlpg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=296&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/382408/original/file-20210204-14-1hlnlpg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=372&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/382408/original/file-20210204-14-1hlnlpg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=372&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/382408/original/file-20210204-14-1hlnlpg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=372&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">De gauche à droite : 1) Présence sociale non observée : aucune indication que des humains ont été présents dans la photo, 2) Présence sociale suggérée : les objets personnels suggèrent que des humains ont été présents dans la photo récemment, 3) Présence sociale observée : un ou plusieurs humains sont visibles dans la photo.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Nos résultats montrent que les photos prises par les clients incitent plus à acheter que celles prises par les hôteliers, à condition qu’elles soient de bonne qualité. En fait, les photos les plus efficaces sont celles prises par les clients, qui ont une présence sociale suggérée et une mise en scène soignée ou « élevée ». Une mise en scène élevée signifie qu’elle est planifiée et préparée dans un contexte approprié et de manière à renforcer l’esthétique et l’attrait émotionnel du produit touristique.</p>
<p>C’est ce type de photos que les entreprises qui ont recours au marketing de contenu devraient encourager à partager en ligne. Les photos ci-dessous en sont de bons exemples :</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/382133/original/file-20210203-19-1a9e1ed.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/382133/original/file-20210203-19-1a9e1ed.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=181&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/382133/original/file-20210203-19-1a9e1ed.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=181&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/382133/original/file-20210203-19-1a9e1ed.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=181&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/382133/original/file-20210203-19-1a9e1ed.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=228&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/382133/original/file-20210203-19-1a9e1ed.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=228&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/382133/original/file-20210203-19-1a9e1ed.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=228&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Toutefois, notre étude a aussi révélé qu’il faut éviter d’utiliser des photos prises par le consommateur, mais dont la mise en scène est faible, peu importe le type de présence sociale. Une photo de moins bonne qualité ou mal cadrée, par exemple, n’aura jamais l’impact désiré, même avec la présence du plus joli des modèles.</p>
<p>Les images prises par l’entreprise, sans présence sociale et avec une mise en scène faible, ont également un faible impact. Dans ce cas, il est essentiel que les photos soient soignées et qu’elles soient perçues comme ayant soit une présence sociale suggérée ou observée. Voici des exemples de photos à éviter :</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/382134/original/file-20210203-17-1mr7b83.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/382134/original/file-20210203-17-1mr7b83.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=180&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/382134/original/file-20210203-17-1mr7b83.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=180&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/382134/original/file-20210203-17-1mr7b83.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=180&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/382134/original/file-20210203-17-1mr7b83.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=226&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/382134/original/file-20210203-17-1mr7b83.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=226&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/382134/original/file-20210203-17-1mr7b83.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=226&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>L’influence des influenceurs</h2>
<p>Malgré l’importance accordée aux photos dans le secteur de l’hôtellerie et du tourisme, il existe très peu de directives concernant les types de photos à partager en ligne afin d’obtenir les meilleurs résultats.</p>
<p>Ces informations sont pourtant cruciales, car Internet a profondément modifié la façon dont les consommateurs se renseignent et achètent des produits dans l’industrie hôtelière et touristique. Lorsque les consommateurs effectuent des recherches en ligne pour leur prochaine destination de voyage, ils se tournent désormais vers les <a href="https://ojs.lib.unideb.hu/apstract/article/view/6145">sites tiers comme TripAdvisor, les réseaux sociaux et les blogues d’influenceurs</a> afin de poser des questions, se renseigner sur les expériences vécues, et pour prendre des décisions d’achat.</p>
<p>En fait, plus de <a href="https://medium.com/socialmedia-market/influencer-marketing-in-tourism-4d67551a18f0">80 %</a> des consommateurs de produits touristiques se basent sur les conseils d’influenceurs en ligne pour prendre des décisions de voyage (agences, hôtels, compagnies aériennes, destinations, itinéraires de voyage). L’information échangée entre consommateurs est maintenant considérée comme étant <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/JHTT-09-2016-0058/full/html">plus fiable</a> que toute information donnée par les entreprises touristiques et les agences de voyages.</p>
<p>De plus, une étude interne menée par TripAdvisor a révélé que les <a href="https://fredericgonzalo.com/en/2014/09/03/photos-impact-bookings-more-than-reviews-on-tripadvisor/">photos de consommateurs sont encore plus importantes pour les réservations en ligne</a> que les commentaires. Avec l’essor des médias sociaux et la popularité des contenus générés par les utilisateurs, les photos sont devenues un moyen de communication très populaire pour toutes informations liées aux voyages.</p>
<p>Dans ce contexte, sur quels critères est-ce que les professionnels du secteur hôtelier et touristique devraient se baser pour choisir les photos à partager en ligne ? Est-ce que les influenceurs et les consommateurs devraient être encouragés à partager des photos et, si oui, quelles lignes directrices devraient-ils suivent afin de générer les meilleurs résultats ? Quelles sont les photos qui influencent le mieux l’intention d’achat en ligne ?</p>
<p>Les réponses à ces questions, à la base de notre étude, permettront aux professionnels de cette industrie de prendre de meilleures décisions d’affaires quant aux choix de photos à diffuser en ligne.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/154012/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Cette étude a été réalisée dans le cadre d’une collaboration entre le Tech3Lab et ExperiSens, le CCTT de l’Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec (ITHQ) grâce au financement du Fonds de recherche du Québec - Natures et technologies (FRQ). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sarah Cosby a reçu une bourse de recherche du Fond de recherche du Quebec - Natures et technologies (FRQ)</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Cette étude a été réalisée dans le cadre d’une collaboration entre le Tech3Lab et ExperiSens, le CCTT de l’Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec (ITHQ) grâce au financement du Fonds de recherche du Québec - Natures et technologies (FRQ).</span></em></p>Avec l’essor des médias sociaux et la popularité des contenus générés par les utilisateurs, les photos sont devenues un moyen de communication très populaire pour les informations liées aux voyages.Pierre-Majorique Léger, Professeur en TI, HEC MontréalSarah Cosby, M.Sc. en marketing, Tech3lab - recherche UX, HEC MontréalSylvain Senecal, Professor of Marketing, HEC MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1366672020-04-30T15:35:55Z2020-04-30T15:35:55ZVoyage au pays des rêves confinés<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/331818/original/file-20200430-42913-1idh5mg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C0%2C1595%2C938&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Extrait du film « Rêves », d’Akira Kurosawa.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://twitter.com/ddoniolvalcroze/status/1198449240260788225/photo/1">Warner Bros.</a></span></figcaption></figure><p>Le confinement, qui est entré dans sa sixième semaine, devrait bientôt toucher à sa fin pour la majorité de la population. </p>
<p>Après plus de 50 jours d’enfermement, vous avez peut-être l’impression de rêver davantage. Vous n’êtes pas seul dans ce cas. </p>
<p>Si vous posez la question autour de vous, il y a fort à parier que vos proches auront fait le même constat : depuis le confinement, nos rêves semblent plus intenses, voire plus inquiétants. </p>
<p>Comment l’expliquer ?</p>
<h2>Le sommeil, trop souvent négligé</h2>
<p>Tout au long de notre vie, le sommeil constitue cette parenthèse majeure pendant laquelle notre cerveau se construit, se répare, élimine les déchets et prépare nos lendemains. Hippocrate, déjà, considérait que bien dormir est l’une des clés de la santé, avec une alimentation saine, un exercice physique régulier et une sexualité heureuse.</p>
<p>Les connaissances actuelles lui donnent raison : de l’élimination des déchets au renforcement des défenses immunitaires en passant par le maintien d’une bonne humeur ou la consolidation de la mémoire, le sommeil joue un rôle dans bon nombre de processus physiologiques majeurs. On est si bien après une bonne nuit de repos ! </p>
<p>Pourtant, notre sommeil est souvent malmené par nos obligations, quand ce n’est pas par nos loisirs. Celles et ceux qui doivent, chaque matin, se lever tôt pour faire une heure de route afin de se rendre sur leur lieu de travail se privent souvent d’un morceau de sommeil. </p>
<p>L’usage massif des écrans entraîne quant à lui une restriction du sommeil chronique dont les conséquences se font sentir à plus long terme : augmentation de l’obésité, du risque de diabète et d’hypertension.</p>
<p>Ce léger manque quotidien de sommeil affecte notre vigilance et notre attention, ce qui a son importance en conduite automobile par exemple. Or, ce déficit n’est que partiellement rattrapé par les grasses matinées du week-end. </p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/peut-on-rattraper-le-sommeil-en-retard-cinq-experts-repondent-102667">Peut-on rattraper le sommeil en retard ? Cinq experts répondent</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<h2>En confinement, nous dormons plus</h2>
<p>Depuis le début du confinement, de nombreuses personnes ont pu apprécier ce plaisir d’ordinaire réservé à la fin de la semaine ou aux retraités : dormir une heure de plus. Le télétravail a mis fin, pour ceux qui ont pu y avoir recours, au mouvement pendulaire quotidien. Autant de temps supplémentaire pour se reposer !</p>
<p>Qui plus est, dans les villes les nuits sont plus calmes. Les bruits de voitures et de motos qui perturbaient le silence se sont faits plus rares, le matin on entend enfin les oiseaux chanter en pleine ville… Conséquence : le sommeil est moins interrompu. À l’hôpital, certains de nos malades vont mieux, car ils sont plus reposés. Or le souvenir que nous gardons de nos rêves est fortement corrélé avec le nombre d’heures de sommeil que comptent nos nuits.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/XTxsrR4iUuI?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Le matin, l’allongement d’une heure de sommeil que nous procure le confinement profite surtout au sommeil paradoxal, la phase la plus riche en rêves. Les plus longs épisodes sont réalisés en toute fin de nuit : ils peuvent alors durer entre 30 et 60 minutes. En conséquence, en confinement les Français rêvent plus, un peu comme en vacances, et leurs rêves sont longs, comme l’a montré récemment Perrine Ruby, chercheuse à l’Inserm, à Lyon.</p>
<p>Ces rêves sont-ils différents de nos rêves habituels ? </p>
<h2>De quoi sont faits nos rêves ?</h2>
<p>Qu’y a-t-il dans nos rêves de sommeil paradoxal, d’ordinaire, quand on n’est pas confiné ? Les grandes collections de rêves révèlent que le contenu de nos aventures onirique est plutôt ordinaire, surtout visuel et auditif. Les émotions y sont nombreuses, mais plus souvent négatives (peur, colère, tristesse) que positives. Nous y avons de fréquentes interactions humaines, mais peu de sexualité. Et ces contenus prennent massivement leur source massive dans notre quotidien : nous y croisons nos proches, nos collaborateurs, nous évoluons dans nos décors familiers, y exerçons notre métier, y revivons nos soucis. </p>
<p>Les évènements banals de la veille et l’avant-veille y prédominent, mais sur un mode préoccupé, légèrement dramatisé. Cette continuité entre le réel et le rêve constitue l’étoffe de la majorité de nos rêves. Même s’il y a quand même, parfois, des bizarreries, des mondes jamais entrevus, des actions jamais vécues. Qui n’a jamais expérimenté en rêve le plaisir de voler ? Ces étrangetés sont peu nombreuses, cependant elles nous marquent durablement et confèrent au mot « rêve » sa dimension extraordinaire. </p>
<p>Nos rêves confinés vont-ils chercher ce qui nous manque, comme le pensait Freud ? Privé de notre liberté de mouvement, de nos proches, rêverons-nous de grands espaces, de sociabilisation, ou de la nourriture que nous ne pouvons plus nous procurer ? Pas sûr : dans les années 1970, le chercheur californien Bill Dement avait privé des personnes d’eau pendant 48 heures <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/13563767">pour voir si cela ferait apparaître des fontaines dans leurs rêves</a>. Cela n’avait pas été le cas.</p>
<p>Alors, de quoi rêve-t-on en confinement ?</p>
<h2>De quoi rêve-t-on en confinement ?</h2>
<p>Précisons avant tout que nous ne parlerons ici que d’anecdotes et d’expérience clinique, pas encore de science : pour cela, il faudra attendre les résultats des études bien contrôlées qui sont actuellement en cours.</p>
<p>Le contenu des rêves confinés est variable : si la vie quotidienne récente et les proches ont toujours fait partie inhérente de nos rêves, et s’il y a bien quelles évasions mentales dans de belles campagnes, la menace du virus, qui flotte autour de nous, qui envahit nos journées, nos écrans (et pour nous, médecins, notre activité à l’hôpital), envahit aussi notre monde onirique. </p>
<p>Depuis le confinement, les visages masqués et les tenues bleues des soignants sont apparus dans les rêves de nos patients. Nombre de personnes, et pas forcément les plus stressées, se réveillent brutalement la nuit avec la sensation de suffoquer, d’avoir de la fièvre, ou d’échapper de justesse à un scénario catastrophe. Ces mauvais rêves sont très classiques en situation stressante, et accréditent l’une de théories récentes sur les fonctions du rêve : simuler la menace de façon virtuelle, <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18325788">pour mieux y faire face le jour</a>. </p>
<p>Ainsi, les étudiants en médecine de Sorbonne Université rêvent-ils quasi tous, la veille du concours de médecine, d’y échouer : ils arrivent en retard, ils sont brutalement atteints d’appendicite, ils ne trouvent pas le chemin de la salle d’examen, ils ne comprennent plus les questions ou ignorent les réponses. Pourtant, nous avons montré que <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25108280">plus ils échouent en rêve, meilleures sont leurs notes au concours</a>.
Comme s’ils étaient moins stressés en conditions réelles après une telle nuit. Comme s’ils avaient anticipé, tels des joueurs d’échecs, les mauvais coups possibles du sort. </p>
<p>Ces rêves de difficultés et d’échec sont légion dans chaque profession : l’acteur oublie son texte en rêve avant une première, le sportif n’a pas ses baskets la veille d’une épreuve olympique, le chauffeur de taxi ne retrouve plus les rues dans ses rêves. Un virus menace l’humanité : l’humanité en rêve. Une façon, aussi, de le combattre.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136667/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Arnulf a reçu des financements du Plan National Maladies Rares, la Fondation Kleine-Levin syndrome, l'Académie des Sciences, IHU@ICM, la Société Française de Médecine et de Recherche sur le Sommeil, FUI Banque Publique France, et UCB Pharma</span></em></p>Des rêves plus vifs, plus nombreux, dont on se souvient mieux… Le confinement semble aussi avoir perturbé nos mondes oniriques. Et ce n’est pas qu’une impression.Isabelle Arnulf, Neurologue, professeur de médecine, Institut du Cerveau et de la Moelle épinière - U1127, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1350942020-04-13T19:45:28Z2020-04-13T19:45:28ZPodcast : Faire de mauvais rêves pour mieux affronter la vie<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/324050/original/file-20200330-146666-1rcspbp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/smuS_jUZa9I">Alexandra Gorn/unsplash</a></span></figcaption></figure><p>Nous passons une partie assez conséquente de notre vie à dormir. Loin d’être une occupation passive et inutile, le sommeil bien qu’encore énigmatique semble être un état participant de manière cruciale à un grand nombre de fonctions physiologiques. Si de nombreuses interrogations subsistent autour du sommeil, le rêve se révèle encore plus mystérieux.</p>
<p>Certains <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0165178198000894?via%3Dihub">travaux scientifiques</a> proposent que les rêves puissent nous préparer aux expériences que nous vivons lors de notre vie éveillée notamment afin de nous aider à gérer nos émotions. Mais de nombreuses interrogations persistent.</p>
<p>Les régions cérébrales activées pendant les émotions sont-elles les mêmes pendant le rêve et l’éveil ? Existe-t-il un lien entre les émotions ressenties dans les rêves et les réponses du cerveau au cours de l’éveil ?</p>
<p>C’est pour essayer de répondre à ces questions que des chercheurs suisses ont très récemment réalisé une étude en s’intéressant à la peur.</p>
<p>En un peu plus de 10 minutes, avec cet épisode, découvrez en détail les résultats de cette intéressante <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/hbm.24843">étude</a> qui pourraient bien vous faire voir les mauvais rêves d’une nouvelle façon.</p>
<hr>
<p><em>Un podcast en partenariat avec <a href="https://soundcloud.com/latetedanslecerveau">La tête dans le cerveau</a> dont toutes les références scientifiques sont à retrouver sur <a href="https://cervenargo.hypotheses.org/3412">Cerveau en Argot</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/135094/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Rodo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Des travaux scientifiques proposent que les rêves puissent nous préparer aux expériences que nous vivons lors de notre vie éveillée notamment afin de nous aider à gérer nos émotions.Christophe Rodo, Jeune chercheur ATER terminant une thèse en neurosciences, au sein du Laboratoire de Neurosciences Cognitives, de l’Institut de Neurosciences des Systèmes et de l’Institut des Sciences du Mouvement, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1231852019-09-09T17:31:23Z2019-09-09T17:31:23ZPodcast : Cerveau rêveur… et clairvoyant<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/291574/original/file-20190909-109957-1t6uam1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixabay.com/photos/spiritual-nice-bali-jungle-temple-1920251/">Apic/pixabay</a></span></figcaption></figure><p>Au travail, à la maison, ou dans les transports, il nous arrive parfois de lâcher la réalité pour nous perdre dans nos pensées et laisser divaguer notre imagination. Ces moments de rêveries passagers pourtant si agréables peuvent être assez mal perçus dans nos sociétés hyperactives. Dans la salle de cours ou de réunion, pas de place pour ces moments, comme si être ailleurs était le signe révélateur de performances ou de capacités inférieures…</p>
<p>Mais amis rêveurs, rassurez-vous ! Une étude américaine a montré que plus votre niveau de rêverie serait important, plus votre créativité et vos facultés intellectuelles le seraient également.</p>
<p>En moins de 10 minutes, avec cet épisode, découvrez les intéressants résultats de cette étude qui pourrait bousculer quelques stéréotypes sur les « personnes dans la lune ».</p>
<hr>
<p><em>Un podcast en partenariat avec <a href="https://soundcloud.com/latetedanslecerveau">La tête dans le cerveau</a> dont toutes les références scientifiques sont à retrouver sur <a href="https://cervenargo.hypotheses.org/2685">Cerveau en Argot</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/123185/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Rodo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une étude américaine montre que les personnes rêveuses seraient plus créatives, et étonnamment, plus intelligentes.Christophe Rodo, Jeune chercheur ATER terminant une thèse en neurosciences à Aix-Marseille Université, au sein du Laboratoire de Neurosciences Cognitives, de l’Institut de Neurosciences des Systèmes et de l’Institut des Sciences du Mouvement, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1200912019-07-14T19:22:34Z2019-07-14T19:22:34ZNe vous empêchez pas de rêvasser !<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/283231/original/file-20190709-51292-58pf47.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=22%2C302%2C3768%2C2500&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><span class="source">Jessica Joseph/Unsplash</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p><em>Cette chronique se nourrit des recherches et rencontres publiées sur mon site <a href="https://www.cahiersdelimaginaire.com/votrelaboratoirecreatif-sylviegendreau">Les cahiers de l’imaginaire</a>.</em></p>
<hr>
<p>La définition que donne le dictionnaire du terme « rêvasser » est quelque peu péjorative : « laisser la pensée, l’imagination se perdre en des rêveries vagues, changeantes et souvent chimériques ».</p>
<p>En réalité, en l’absence de stimuli externes (sonneries de téléphone, bruits de conversation), il est vrai que le cerveau glisse dans la rêverie, mais il est faux de prétendre que cette activité soit inutile, bien au contraire. Depuis des temps immémoriaux, la soi-disant inactivité cérébrale a mauvaise presse. On la confond avec la paresse qui, selon l’adage, est mère de tous les vices.</p>
<p>À Vancouver, au Canada, le laboratoire <a href="http://www.christofflab.ca/">Cognitive Neuroscience of Thought</a>, spécialisé dans l’étude de la rêverie, lève un certain nombre d’idées reçues.</p>
<h2>Repos de façade</h2>
<p>Lorsque le cerveau, en apparence, cesse de focaliser son attention sur une activité, le réseau du « mode par défaut » entre en opération. Ce réseau joue un rôle fondamental dans le traitement des souvenirs personnels et de la construction de l’identité. Loin d’être au repos, le cerveau est donc actif.</p>
<p>S’adonner à la rêverie recoupe en réalité une palette étendue d’activités cognitives, des pensées fantasmatiques jusqu’à la planification ou la génération d’idées créatives. Mais, dans tous les cas, la rêverie produit un débit chaotique d’idées de toutes sortes qui franchit les seuils de la conscience de manière inopinée et incontrôlable.</p>
<p>La fondatrice du laboratoire, Kalina Christoff, compare l’esprit humain à un système musculaire basé sur l’activité de forces opposées. Lorsque vous contractez les muscles de votre bras, par exemple, un muscle se contracte en même temps qu’un autre se détend. Étirer le bras, et c’est le processus inverse qui s’enclenche.</p>
<p>Notre culture occidentale encourage la concentration, souligne le professeur Christoff, et décourage tous les autres modes de pensée que nous pratiquons lorsque nous sommes seuls et livrés à nous-mêmes.</p>
<h2>Associations d’idées</h2>
<p>La flânerie a ses vertus, dont l’une des principales, rajoute Kalina Christoff, est d’éliminer la censure. La flânerie permet d’établir des connexions que l’esprit ne serait pas en mesure de faire autrement.</p>
<p>Jean‑Jacques Rousseau, dans <a href="https://www.amazon.fr/gp/product/2266286188/ref=as_li_qf_asin_il_tl?ie=UTF8&tag=lescahideli00-21&creative=6746&linkCode=as2&creativeASIN=2266286188&linkId=91b54f973e48ad40ec4990c876377d61"><em>Les Rêveries du promeneur solitaire</em></a>, décrit la jouissance qu’il éprouve à rêvasser et indique un des rôles importants de la rêverie : la place qu’elle laisse à l’imagination.</p>
<blockquote>
<p>« Quelquefois mes rêveries finissent par la méditation, mais plus souvent mes méditations finissent par la rêverie, et durant ces égarements mon âme erre et plane dans l’univers sur les ailes de l’imagination, dans des extases qui dépassent toute autre jouissance. »</p>
</blockquote>
<p>En fait, rêvasser est essentiellement un processus créatif. Dans l’imagination du flâneur, de multiples possibilités s’offrent à lui, certaines originales, voire bizarres. La rêverie s’oppose à la pensée analytique qui occupe encore dans les corpus pédagogiques actuels toute la place.</p>
<p>Einstein lui-même avait parfaitement compris les pouvoirs que recelait la rêverie. Il pensait que cette capacité de l’esprit humain lui permettait de relier différents concepts, qu’il s’agissait d’une des seules voies possibles pour la production d’idées nouvelles.</p>
<h2>Un équilibre à trouver</h2>
<p>Existe-t-il des lieux propices à la rêverie ? Des moments dans la journée qui se prêtent plus que d’autres à cette pratique ? Pour certains, ce sera au lever du jour. Le lieu et le moment varieront selon chaque individu. Il est important de se rappeler que la rêverie est une pratique qui devrait être tolérée et reconnue pour ses bienfaits. Le cerveau a besoin de ces moments de pause et de réflexions chaotiques pour contrebalancer l’influx de données de toutes sortes qui nous bombardent quotidiennement.</p>
<p>En fait, où que nous soyons, notre esprit se prête tout naturellement à cette activité cognitive singulière (car il s’agit bien d’une activité), comme le souligne Rousseau :</p>
<p>« La rêverie peut se goûter partout où l’on peut être tranquille, et j’ai souvent pensé qu’à la Bastille, et même dans un cachot où nul objet n’eût frappé ma vue, j’aurais encore pu rêver agréablement. »</p>
<p>Comment pratiquer la rêverie de manière plus active (et sans culpabilité) ? C’est l’exercice de la semaine, _<a href="https://www.cahiersdelimaginaire.com/cahier-d-exercices/de-sylvie-exercice-117">Rêveries et autres gourmandises</a> !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120091/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<h4 class="border">Disclosure</h4><p class="fine-print"><em><span>Sylvie Gendreau, intervenante à Polytechnique Montréal, accompagne des dirigeants, des entrepreneurs et des créateurs dans la conduite de leurs projets et offre des cours en ligne dans le cadre de son entreprise, La Nouvelle École de Créativité.</span></em></p>La rêverie est une pratique qui devrait être tolérée et reconnue pour ses bienfaits.Sylvie Gendreau, Chargé de cours en créativité et innovation, Polytechnique MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1092742019-01-03T00:22:10Z2019-01-03T00:22:10ZMon enfant a un ami imaginaire : et si ça l’aidait à grandir ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/252168/original/file-20181230-47292-6alen8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=4%2C2%2C899%2C621&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En général, c'est entre trois ans et cinq ans que les enfants commencent à s'inventer des amis imaginaires.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p><em>Les amitiés de jeunesse s'écrivaient autrefois dans les cours d'école ou sur les terrains de sport, lors d'un goûter d'anniversaire ou une colonie de vacances. Mais à coup de « tchats » et de « likes », les réseaux sociaux font bouger les lignes. Comment les enfants et les adolescents définissent-ils et considèrent-ils l'amitié aujourd'hui ? De la psychologie à la sociologie, les chercheurs tentent de percer dans cette série « les lois de l'amitié ». Après deux épisodes sur les amitiés adolescentes, <a href="https://theconversation.com/lamitie-fait-elle-toujours-du-bien-aux-adolescents-183288">leur importance</a>, et <a href="https://theconversation.com/que-veut-dire-etre-amis-a-lere-dinstagram-183287">la manière dont les réseaux sociaux les influencent</a>, après <a href="https://theconversation.com/comment-les-enfants-choisissent-ils-leurs-amis-142319">un regard sur les ressorts des amitiés pendant l'enfance</a> et <a href="https://theconversation.com/ecole-primaire-comment-aider-un-enfant-a-se-faire-des-amis-111375">quelques réflexions sur le contexte scolaire</a>, on se penche sur une situation plus atypique, celle des amitiés fictives.</em></p>
<hr>
<p>Si les psychologues ont commencé à se pencher au début du XIX<sup>e</sup> siècle sur la question des « amis imaginaires », c’est d’abord parce qu’ils craignaient que ce soit le symptôme d’une <a href="http://psycnet.apa.org/record/2007-10398-001">instabilité émotionnelle</a> ou de problèmes psychologiques. Au vu des avancées de la recherche depuis deux décennies, il est devenu évident que c’est tout le contraire : de tels amis manifesteraient en fait un progrès de l’enfant dans son développement.</p>
<p>Le fait d’avoir un ami imaginaire est un phénomène étonnamment répandu. La plupart des gens connaissent quelqu’un qui a eu un camarade de jeu imaginaire quand il était jeune, ou en ont eu un eux-mêmes. Des études ont révélé que <a href="https://pdfs.semanticscholar.org/f996/22810b3936b0cb2150ed31e546a1a38b9b75.pdf">65 % des enfants</a> sont concernés.</p>
<p>En général, c’est entre trois ans et cinq ans qu’ils commencent à s’inventer des amis imaginaires. Ce phénomène a été observé <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0044463">dans le monde entier</a>, chez des enfants de culture anglophone, comme chez des enfants du Kenya, du Japon ou encore du Népal. Et cela ne concerne pas seulement les enfants dont le développement psychologique suit un schéma classique, <a href="http://psycnet.apa.org/record/2018-12483-001">mais aussi ceux qui sont atteints de trisomie 21 ou d’autisme</a>.</p>
<p>Les raisons pour lesquelles ils vont s’inventer des amis sont nombreuses et variées. De plus, chacun de ces compagnons de jeu fictif est unique, et signifie quelque chose de spécial pour son créateur. Mais l’une de leurs premières fonctions est tout simplement de soulager la solitude. Avec ces personnes imaginaires, on a toujours quelqu’un avec qui jouer. C’est pour cela que les aînés ou les enfants uniques sont plus susceptibles de se créer ce genre d’amis.</p>
<p>Autre motif classique du recours à un ami imaginaire : avoir quelqu’un à accuser de ses maladresses ou de ses bêtises. Selon leurs créateurs, les amis imaginaires peuvent être <a href="http://psycnet.apa.org/record/2001-06861-000">montrés du doigt en cas de vitres cassées</a> ou de chambres mal rangées.</p>
<h2>Mieux se connaître</h2>
<p>Des recherches ont révélé que les enfants ayant des amis imaginaires sont plus à l’aise en société. Ils ont par exemple plus de facilité à <a href="https://www.researchgate.net/publication/266795315_Imaginary_companions_theory_of_mind_and_emotion_understanding_in_young_children">se mettre à la place des autres</a>. En clair, ils sont capables de concevoir que d’autres aient une manière différente d’envisager les choses, ce qui peut les aider <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21848753">dans leurs relations sociales</a>.</p>
<p>D’autres études ont montré que les enfants qui ont des amis imaginaires <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/icd.1869">se concentrent davantage sur les traits de caractère que sur l’apparence des autres</a>. Quand on leur demande de décrire certains de leurs amis réels, par exemple, ils sont plus enclins à évoquer leur personnalité que des caractéristiques physiques. Ils ont aussi une meilleure connaissance d’eux-mêmes et comprennent que leurs pensées ne sont pas visibles de l’extérieur – ce que les enfants ont souvent du mal à percevoir.</p>
<p>D’autres études encore ont montré que les enfants ayant des amis imaginaires <a href="https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/10400419.2005.9651477">sont plus créatifs que les autres</a>. Cependant, à l’heure actuelle, il est difficile de dire précisément si les amis imaginaires sont la cause de tous ces bénéfices, ou si, en fait, ce sont les enfants les plus créatifs et sociables qui sont tout simplement plus susceptibles d’avoir ce genre d’amis. Cela dit, il est probable que jouer avec un ami imaginaire renforce au fil du temps les compétences sociales de l’enfant, même si celles-ci étaient déjà bonnes au départ.</p>
<h2>Une étape de l’enfance</h2>
<p>Toutes ces conclusions mettent en avant des enjeux sociaux et émotionnels importants dans l’enfance. En grandissant, on a en général plus de possibilités de se faire de nouveaux amis et on passe moins de temps seul. On comprend aussi mieux les relations sociales.</p>
<p>Toutefois, si la plupart des enfants cessent de jouer avec des amis imaginaires au bout de quelques années, d’autres continuent de leur consacrer du temps. Et les chercheurs ont découvert que les effets positifs des amis imaginaires se maintiennent. Les adolescents atteints de troubles du comportement qui ont des amis imaginaires <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20677857">arrivent à s’adapter plus facilement</a> que les autres.</p>
<p>Les adultes aussi peuvent avoir des amis imaginaires, mais c’est rare. Certains prétendent d’ailleurs que les <a href="https://www.researchgate.net/publication/247871526_The_Illusion_of_Independent_Agency_Do_Adult_Fiction_Writers_Experience_Their_Characters_as_Having_Minds_of_Their_Own">auteurs en ont à travers leurs personnages</a> qui peuvent faire des choses auxquelles leurs créateurs ne s’attendaient pas quand ils se sont mis à écrire. De quoi les aider à construire leurs propres histoires.</p>
<h2>Quelle attitude pour les parents ?</h2>
<p>Les parents se demandent souvent comment ils doivent réagir par rapport à ces amis imaginaires. Les résultats de la recherche suggèrent que la meilleure chose à faire est d’accepter ce camarade fictif et de jouer le jeu avec son enfant.</p>
<p>Si, par exemple, votre enfant est en train de s’amuser avec son ami avant l’heure du dîner, vous pouvez lui suggérer de lui préparer un couvert à lui aussi. Les parents dont les enfants ont des amis imaginaires <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1002/icd.349">ont tendance à mieux décrire les jeux de leurs enfants</a>, ce qui laisse penser qu’ils sont plus attentifs à leurs faits et gestes.</p>
<p>Il arrive que les amis imaginaires <a href="https://experts.umn.edu/en/publications/autonomy-and-control-in-childrens-interactions-with-imaginary-com-2">soient taxés de mauvais comportements</a>. Ainsi, certains ne voudraient pas partager leurs jeux, ou faire ce que l’enfant demande, d’autres tiendraient des propos méchants.</p>
<p>Dans ces situations, il est important, en tant que parent, d’écouter ce que l’enfant a à dire et de l’aider à résoudre son problème. Même si ces amis peuvent ne pas sembler très sympathiques, ils permettent à l’enfant à comprendre le fonctionnement des relations sociales, tout comme avec un ami imaginaire plus gentil.</p>
<p>Bien sûr, il se peut que les parents aient raison de s’inquiéter, notamment quand leur enfant pense que leur ami fictif existe vraiment. Mais la plupart des enfants font la différence entre leur propre imagination et la réalité. Par conséquent, dans la grande majorité des cas, ces amis invisibles ne sont qu’une manifestation des incroyables <a href="https://theconversation.com/five-ways-to-make-your-child-a-creative-genius-71170">capacités d’imagination</a> des enfants – qui peuvent d’ailleurs leur être bien utiles.</p>
<hr>
<p><em>Traduction de l’anglais par Aurélie Djavadi.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/109274/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Paige Davis ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Faut-il s’inquiéter lorsqu’un enfant s’invente un compagnon de jeu ? Des études montrent au contraire que les amis imaginaires stimuleraient la créativité et l’empathie des plus jeunes.Paige Davis, Lecturer in Psychology, York St John UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/948312018-04-16T21:50:18Z2018-04-16T21:50:18ZPodcast : le déroutant déjà-rêvé<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/214965/original/file-20180416-540-1eddn4c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=2%2C0%2C374%2C374&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dreamcatcher Mobile Oeuvres D Art Carr</span> </figcaption></figure><p>Le déjà-rêvé - comparable au déjà-vu et pourtant bien différent - est la sensation de revivre un rêve déjà vécu, mais en étant éveillé. Ce phénomène étrange semble se produire chez certains patients épileptiques. Une <a href="http://www.brainstimjrnl.com/action/consumeSharedSessionAction?JSESSIONID=aaal2wTi5Ujp_-t2BUalw&MAID=MYcpMfxRPKTgZ5eXbyh1Qg%3D%3D&SERVER=WZ6myaEXBLG6pxqSoAU3BQ%3D%3D&ORIGIN=961897850&RD=RD&rtc=0">étude scientifique récente</a> vient d'établir que ce déjà-rêvé pourrait être bien plus complexe que ce qui était initialement imaginé. En effet, derrière le déjà-rêvé pourrait se cacher plusieurs manifestations aux caractéristiques bien particulières. Entre souvenir spécifique, réminiscence assez vague et sensation de rêve, le déjà-rêvé n'a pas encore livré tous ses secrets.</p>
<p>En moins de 10 minutes, grâce à cet épisode, découvrez ce qui se cache derrière ce curieux phénomène.</p>
<hr>
<p><em>Un podcast en partenariat avec <a href="https://soundcloud.com/latetedanslecerveau">La tête dans le cerveau</a> dont toutes les références scientifiques sont à retrouver sur <a href="https://cervenargo.hypotheses.org/1917">Cerveau en Argot</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/94831/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Christophe Rodo ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Rêver en étant éveillé c'est possible. Nous ne parlons pas des personnes ayant la tête dans la Lune, mais de l'étrange phénomène du déjà-rêvé.Christophe Rodo, Jeune chercheur ATER terminant une thèse en neurosciences à Aix-Marseille Université, au sein du Laboratoire de Neurosciences Cognitives, de l’Institut de Neurosciences des Systèmes et de l’Institut des Sciences du Mouvement, Aix-Marseille Université (AMU)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/916852018-02-28T21:10:04Z2018-02-28T21:10:04ZCe que les dormeurs « agités » nous apprennent sur les rêves<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/207907/original/file-20180226-122025-ukiu8z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=51%2C362%2C5760%2C3233&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Durant le sommeil, un « verrou » dans le cerveau nous empêche de réaliser pour de bon les actions que nous effectuons en rêve. Mais chez certains patients, celui-ci ne fonctionne plus. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/young-sleepy-man-suffering-sleepwalking-home-623085458?src=rHBl8OHeqJKHScPjqqN8NA-2-31">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>« Docteur, j’ai fait un rêve cette nuit. Dans ce rêve, j’étais assis à l’arrière d’un bus. Et voilà que monte un grand type, méchant, costaud… Il s’avance, va au premier rang et étrangle le premier passager. Puis il va au second rang et tue le passager suivant. Moi je suis au fond, j’ai peur, je me cache derrière mon siège. Je me dis que je vais mourir. Je me glisse entre ses jambes, la porte du bus s’ouvre, je saute. Je me réveille sur ma descente de lit, par terre. Je me suis fracturé le poignet ».</p>
<p>Ce rêve nous a été raconté par un patient, dans notre service des pathologies du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/sommeil-20272">sommeil</a>, à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. Est-il normal de faire un tel cauchemar ? Oui. Contrairement à ce qu’on peut penser, nos rêves dramatisent beaucoup notre quotidien, ils simulent souvent des menaces – on pense même qu’ils servent aussi à ça, anticiper les épreuves et nous y préparer.</p>
<p>Ce qui n’est pas normal, en revanche, c’est de tomber du lit. Habituellement quand on dort, on est calme, on ne bouge pas. Mais alors que se passe-t-il ? Prenons l’exemple d’un autre patient, endormi dans notre laboratoire et filmé durant son sommeil. Il rêve qu’il est attaqué par des ptérodactyles (voir les images dans la vidéo). Il protège son visage avec ses bras, puis il se défend avec son oreiller.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/fb_5MWYP_l4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>Ce patient est dans le sommeil paradoxal, celui où on fait des rêves déjantés. Le sommeil paradoxal a été découvert par <a href="http://sommeil.univ-lyon1.fr/articles/listes/fr/jouvet.php">Michel Jouvet</a>, grand scientifique qui <a href="http://histoire.inserm.fr/les-femmes-et-les-hommes/michel-jouvet">nous a quittés en 2017</a>. On l’appelle « paradoxal » car normalement, durant cette phase, le cerveau demeure en ébullition alors que les muscles, eux, sont activement bloqués. Cette phase dure au plus 20 minutes, sur un cycle de sommeil de 90 minutes.</p>
<p>Les réactions de l’individu sont alors inhibées. Dans le cerveau, une sorte de « verrou » paralyse les muscles et empêche le dormeur d’extérioriser son rêve. Ce verrou <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26920675">a été identifié en 2016</a> par notre équipe à l’Institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM). Il est situé au milieu du tronc cérébral, dans la partie basse du cerveau, et permet que nos rêves restent dans notre tête.</p>
<p>Or chez certaines personnes, ce verrou ne fonctionne plus. On ne sait pas encore le réparer, mais on peut malgré tout apaiser leurs nuits, éviter qu’elles se blessent ou blessent leur conjoint.</p>
<h2>Des cauchemars agités vers la cinquantaine</h2>
<p>Depuis 20 ans, nous suivons ces personnes <a href="http://www.lepoint.fr/sante/dr-arnulf-il-existe-un-lien-entre-reves-agites-et-maladie-de-parkinson-28-09-2017-2160431_40.php">qui ont des cauchemars agités vers l’âge de la cinquantaine</a>. Dans la journée elles sont très bien, et aussi très bien dans leur peau. Ce qu’on a découvert, c’est que quelques années après, une partie d’entre eux développe la <a href="https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/parkinson-maladie">maladie de Parkinson</a>, caractérisée par la destruction d’une population spécifique de neurones. Celle-ci se manifeste généralement par une lenteur des mouvements et des tremblements.</p>
<p>Dans les six ans qui suivent le diagnostic de ces cauchemars agités, la moitié des patients déclare une maladie de Parkinson, selon l’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24587002">étude publiée par une équipe de Barcelone</a> en 2014. D’un côté, c’est une mauvaise nouvelle, car ça veut dire que le trouble est souvent annonciateur de cette maladie.</p>
<p>Mais de l’autre, c’est une bonne nouvelle, car avec la personne concernée, on va avoir une fenêtre de six ans environ pour essayer tout ce qui peut la protéger du développement de cette maladie, par exemple de l’exercice physique. Les chercheurs testent ainsi un anticorps pour essayer d’attraper le produit toxique – l’<a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Alpha-Synucl%C3%A9ine">alpha-synucléine</a> – qui s’accumule dans le cerveau et provoque la maladie.</p>
<h2>Attaqué par des caïmans, il brandit sa table de nuit</h2>
<p>Une fois que cette maladie est installée, les cauchemars agités continuent. Six parkinsoniens sur dix crient dans leur sommeil, bougent, vivent leurs rêves, comme montré <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22447623">dans l’article que j’ai publié en 2012</a>. En interrogeant et en examinant ces patients, nous avons eu une autre surprise.</p>
<p>Ainsi, dans mon bureau, un patient parkinsonien m’a raconté son rêve, dans lequel il était attaqué par des caïmans. « J’étais sur un canoë et je tapais avec ma pagaie pour me défendre », m’a-t-il rapporté. Assise à ses côtés, sa femme m’a dit : </p>
<blockquote>
<p>« C’est incroyable, il était dans le lit, il criait : “il y a des caïmans !” Il a pris la table de nuit en chêne, il l’a brandi. Mais ça, il n’est pas capable de le faire dans la journée ! Et même pour parler… Avec son niveau de Parkinson, il a une toute petite voix. Tandis que là, il criait distinctement ».</p>
</blockquote>
<p>Ce <a href="https://www.lexpress.fr/actualite/le-mystere-de-nos-reves-enfin-devoile_1562868.html">phénomène de guérison transitoire</a>, nous l’avons exploré <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17235126">chez une centaine de patients</a> : c’est toujours vrai ! Quand on les examine la nuit, au moment de ces comportements, la maladie de Parkinson a disparu…</p>
<h2>L’espoir de faire disparaître les symptômes de Parkinson</h2>
<p>Vous imaginez l’espoir que ça représente. Cela veut dire qu’il y a dans le cerveau un circuit alternatif qui là est démasqué – avec la perte du verrou. Ce circuit fait que le système moteur refonctionne correctement pour un moment. Il ne s’agit pas d’un miracle, simplement de la preuve qu’il existe d’autres voies de signalisation motrice qui ne sont pas affectées par la maladie de Parkinson.</p>
<p>Si on réussissait à activer ce système volontairement, on pourrait peut-être faire disparaître les symptômes de la maladie. Ainsi, avec cette <a href="https://www.youtube.com/watch?v=rbuWKzY1WZM">nouvelle neurologie des rêves</a>, on a un espoir immense de réussir à protéger des personnes contre l’arrivée de la maladie, et peut être à les guérir.</p>
<p>Nous avons filmé un autre de nos patients durant son sommeil. On voit cet homme en train de mimer le fait qu’il mange un sandwich (voir les images dans la vidéo). On voit à quoi il rêve, même si lui ne s’en rappelle pas au réveil. Ces comportements nocturnes nous apportent, pour la première fois dans l’histoire de la recherche, la vision en direct de l’action du rêve.</p>
<p>De plus, l’imagerie cérébrale, l’électro-encéphalogramme, et le récit du rêve par le patient à son réveil sont utilisés pour ces recherches en psychologie cognitive et neurosciences dont les implications vont bien au-delà du traitement des pathologies du sommeil.</p>
<h2>Les « non-rêveurs » rêvent mais ne s’en souviennent pas</h2>
<p>On pourrait donc, grâce à ces patients, <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/sciences/neurosciences/une-fenetre-sur-les-reves_9782738130464.php">découvrir beaucoup de choses</a> sur les rêves. Par exemple, savoir s’il existe vraiment des personnes qui ne rêvent jamais, ou bien si ces personnes, en fait, rêvent mais ne s’en rappellent pas une fois réveillées. C’est plutôt la deuxième hypothèse <a href="https://icm-institute.org/fr/actualite/la-science-des-reves/">qui serait la bonne</a>. En effet, nous avons observé chez nos patients que mêmes ceux qui se disent « non rêveurs » <a href="http://www.lemonde.fr/festival/video/2017/08/29/tout-le-monde-reve-mais-tout-le-monde-ne-s-en-souvient-pas_5177992_4415198.html">ont des comportements agités la nuit</a>.</p>
<p>On espère aussi savoir, un jour, <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/la-methode-scientifique/le-reve-le-cauchemar-des-neurosciences">à quoi servent les rêves</a>. Est-ce qu’ils servent à consolider nos apprentissages de la journée ? Pour cela, on pourrait faire apprendre quelque chose aux patients avant de dormir, et voir si ils refont les mêmes gestes dans leur sommeil. Par exemple, nous avons fait apprendre un texte avant de dormir à 18 patients, et l’un d’entre eux en a intégré des éléments dans l’un de ses rêves agités filmé la nuit même, comme <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24349492">rapporté dans notre article</a>.</p>
<p>Autre piste : est ce que les rêves servent à mémoriser et à nous constituer des souvenirs ? Les mimes nocturnes de nos patients sont, en tout cas, un outil fantastique pour essayer de comprendre leur fonction.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/91685/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Isabelle Arnulf a reçu des financements de UCB Pharma pour du conseil scientifique et comme oratrice invitée, sans aucun lien avec cet article. Elle est membre et ancienne présidente de la Société Française de Recherche et de Médecine du Sommeil, et membre et ancienne présidente du International REM sleep Behavior Study Group. Les recherches citées dans cet article ont été en partie financées par France Parkinson, le prix NRJ Institut de France 2012, la Fédération pour la recherche sur le cerveau.</span></em></p>Certaines personnes se mettent à mimer leurs actions lorsqu’elles font des cauchemars. Ce trouble, qui peut annoncer une maladie de Parkinson, révèle le contenu de nos songes aux chercheurs.Isabelle Arnulf, Neurologue, professeur de médecine, Institut du Cerveau et de la Moelle épinière - U1127, InsermLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/896402018-01-07T20:26:26Z2018-01-07T20:26:26ZUn rêve pour les sciences sociales<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/200800/original/file-20180104-26166-1773cm8.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Albert Joseph Moore, « Les rêveurs ».</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b9/Albert_Joseph_Moore_-_Dreamers_-_Google_Art_Project.jpg">Wikimédia</a></span></figcaption></figure><p><em>Objet indissociable de la psychanalyse, étudié par la psychologie et les neurosciences, le rêve reste largement ignoré des sociologues. Ce que propose Bernard Lahire dans l’ouvrage dont nous publions l’introduction (« L’interprétation sociologique des rêves », Éditions de La Découverte), est de faire entrer le rêve dans le champ des sciences humaines, briser le monopole de la psychanalyse et permettre de relier les rêves aux expériences que les individus ont vécues dans le monde social</em>.</p>
<hr>
<blockquote>
<p>« Un rêve est un hachoir à saucisse qu’on alimente en y pressant sa vie. »<br>(Benjamin Whitmer, « Pike », Gallmeister, Paris, 2017, p. 58.)</p>
</blockquote>
<p>Le rêve est un objet à la fois très séduisant et très inquiétant pour le sociologue. Séduisant, il l’est par l’idée qu’on peut se faire d’un pan de notre expérience qui nous intrigue et reste le plus souvent spontanément indéchiffrable. Pour tout chercheur ayant le goût de l’aventure, tenter de comprendre l’incompréhensible constitue un défi scientifique exaltant.</p>
<p>Mais la curiosité et l’excitation intellectuelle que suscite un tel objet font rapidement place à l’inquiétude.</p>
<p>Celle-ci est tout d’abord liée à plusieurs caractéristiques de l’objet. Le rêve est un phénomène mental, qui se déploie pendant que les sujets dorment et qu’ils sont, de ce fait, dans l’incapacité de parler. Il est un produit de l’imagination mais que les rêveuses ou rêveurs vivent comme s’ils étaient plongés dans la réalité la plus vivante. Il n’est pas toujours remémoré au réveil et, lorsqu’il l’est, il est souvent rapidement altéré ou oublié, ce qui rend la tâche de l’enquêteur infiniment plus difficile que lorsqu’il a pour objectif de faire parler des activités éveillées. Enfin, le rêve apparaît bizarre, incohérent, délirant ou incongru aux yeux mêmes de celui ou de celle qui l’a produit. La tâche est ainsi théoriquement et méthodologiquement très rude pour les chercheurs, et l’étude du rêve peut rapidement tourner au cauchemar.</p>
<h2>Tentatives d’interprétation</h2>
<p>Ce n’est pas tout. Comme le château du conte de fées dans lequel on voudrait pénétrer, l’objet-rêve est entouré de ronces et protégé par un dragon. Ces ronces, ce dragon, qui rendent l’accès au rêve difficile, ce sont toutes les tentatives passées d’interprétation des rêves et, tout particulièrement, celle que représente la psychanalyse. Pour un chercheur du XXI<sup>e</sup> siècle, le rêve est difficilement dissociable du nom de Sigmund Freud. L’étendue de l’œuvre freudienne et ses inflexions assumées ou non dites, le foisonnement des commentaires auxquels elle a donné lieu, les écoles ou les courants qui se sont partagé son héritage, tout cela peut refroidir plus d’une volonté de savoir et tenir à distance les curieux.</p>
<p>Les sciences sociales sont les grandes absentes dans l’histoire de l’étude savante du sommeil et du rêve. Comparée à l’engagement soutenu de toutes les formes de psychologie, de la psychanalyse à la psychologie cognitive, ou plus récemment des neurosciences, de la neuropsychiatrie à la neurobiologie, la contribution des sciences sociales en général, et de la sociologie en particulier, demeure très marginale.</p>
<p>D’aucuns penseront que cela n’a rien que de très normal : le rêve n’est-il pas l’activité à la fois universelle (tout le monde rêve), individuelle (chacun rêve de choses très singulières) et involontaire par excellence ? Que sociologues, anthropologues ou historiens puissent s’interroger sur la manière dont il a été conçu, traité, interprété par des époques, des sociétés ou des groupes différents, cela va de soi. Mais qu’ils essaient d’entrer dans la logique de sa fabrication, qu’ils le considèrent comme le résultat d’un processus en rapport avec la situation des rêveuses ou des rêveurs dans le monde social, cela n’a, en revanche, rien d’une évidence.</p>
<h2>Vingt ans de travail</h2>
<p>Imaginé en 1997 lors d’un séjour à l’université de Berkeley où je découvrais avec curiosité, par les hasards de la lecture, les <a href="http://www.jstor.org/stable/10.1525/si.1993.16.2.95">prémices d’une sociologie des rêves</a>, le programme de recherche dont on lira ici la première formulation scientifique a nécessité vingt ans de lectures et de travail parallèle à d’autres recherches, pour pouvoir commencer à prendre forme. Cette connaissance des travaux sur le rêve, passés et présents, issue de disciplines très différentes (psychanalyse, psychologies, neurosciences, linguistique, sociologie, anthropologie, histoire, etc.) m’a permis d’élaborer une nouvelle théorie intégratrice qui, partant des acquis du modèle d’interprétation synthétique proposé par Freud en son temps, s’efforce d’en corriger les faiblesses, les manques et les erreurs, en tirant parti de nombreuses avancées scientifiques accomplies depuis l’extraordinaire effort de connaissance que représenta son livre <em>L’Interprétation du rêve</em>, à la charnière du XIX<sup>e</sup> et du XX<sup>e</sup> siècle.</p>
<p>Si l’on considère l’objet-rêve comme un problème à résoudre, alors il faut parvenir à définir l’ensemble des termes de ce problème et à les articuler d’une manière cohérente en vue d’une solution satisfaisante, tant du point de vue théorique que de celui de sa compatibilité avec les faits empiriques. Activité psychique involontaire durant le sommeil, le rêve peut être ainsi caractérisé comme une forme d’expression spécifique par laquelle le rêveur fait travailler les problèmes de tous ordres qui le préoccupent plus ou moins consciemment au cours de la vie éveillée.</p>
<p>Je m’efforcerai de montrer qu’une telle forme d’expression symbolique ne se comprend vraiment qu’en prenant en compte une série d’éléments ayant trait au passé incorporé du rêveur, aux circonstances récentes de sa vie ainsi qu’au cadre du sommeil dans lequel le rêve se déploie et qui se caractérise notamment par le retrait du flux des interactions et des sollicitations sociales ordinaires, par l’affaiblissement du contrôle réflexif de l’activité mentale et la mise en œuvre d’une communication de soi à soi à dominante visuelle et à fort implicite.</p>
<h2>Continuum expressif</h2>
<p>Ces différents éléments seront explicités, détaillés et articulés dans une <em>formule générale d’interprétation</em> des rêves permettant de penser de façon dynamique le processus de fabrication du rêve. Le rêve sera plus généralement pensé comme une <em>forme d’expression</em> spécifique située dans un continuum expressif (rêve, rêverie éveillée, délire, hallucination, jeu, création littéraire ou expression artistique, etc.) qui varie en fonction des conditions dans lesquelles l’activité psychique est amenée à se déployer. L’analogie pratique, qui est, avec l’association par contiguïté, l’une des formes élémentaires de la vie psychique humaine, caractéristique de sa nature historique, sera placée au cœur des opérations oniriques (de symbolisation, de condensation, de métaphorisation, de substitution, etc.) qui rendent l’expression du rêve si singulière. Et l’on montrera, en fin de compte, comment le rêve peut être scientifiquement interprété dès lors qu’il est articulé à un hors-rêve qui en constitue l’arrière-plan existentiel.</p>
<p>Cette théorie de l’expression onirique formulée depuis la sociologie, mais qui intègre de multiples connaissances pluridisciplinaires mises en cohérence, permet au rêve de faire son entrée dans les sciences sociales à partir d’une perspective à la fois dispositionnaliste et contextualiste. Parvenir à constituer le rêve en objet d’étude pour les sciences sociales est une manière d’étendre le domaine d’étude de ces sciences en donnant accès à ce qui demeure aujourd’hui très largement une terra incognita.</p>
<h2>Un tiers de notre vie passé à rêver</h2>
<p>Norbert Elias soulignait les limites que se sont longtemps imposées, sans toujours en être conscients, les chercheurs en sciences sociales en étudiant des « sociétés » dans des limites nationales, et en se concentrant sur des individus-adultes déjà socialement constitués, comme s’ils n’avaient jamais été enfants. Mais la liste des domaines et dimensions éludés ne s’arrête pas là. Car les chercheurs ont jusqu’ici concentré quasi exclusivement leur attention sur les comportements les plus collectivement organisés d’individus éveillés, en négligeant le fait qu’un tiers de leur temps environ est consacré au sommeil et que des rêves accompagnent ces temps de sommeil.</p>
<p>Que nous disent ces rêves sur la vie des individus et des sociétés dans lesquelles ils vivent ? Comment les expériences sociales des rêveurs contribuent-elles à tramer leur imaginaire, même dans les moments où la conscience intentionnelle ne gouverne plus le flux des images ? Voilà des questions cruciales qui se posent, et auxquelles les sociologues n’ont guère cherché à répondre. Lorsque les enquêtés s’endorment, les sociologues ferment les yeux.</p>
<p>Mais une théorie de l’expression onirique permet aussi et surtout de contribuer à la transformation des sciences sociales en leur redonnant des ambitions légitimes que la spécialisation et une forme standardisée de professionnalisation ont tendance à réviser à la baisse. En se penchant sur un objet aussi étrange, et en acceptant de quitter leurs zones de confort pour intégrer des savoirs multidisciplinaires, ce sont des questions scientifiques cruciales qui s’imposent aux chercheurs : celle des mécanismes psychiques fondamentaux propres aux êtres historiques et langagiers que sont les êtres humains socialisés ; celle de l’intériorisation des régularités sociales de toute nature sous la forme de <em>dispositions</em> ou de <em>schèmes incorporés</em>, prêts à s’exprimer à la moindre occasion, jusque dans le sommeil ; celle des rapports entre passé et présent dans l’expérience humaine ; celle de la part respective de la conscience et de l’inconscience, du volontaire et de l’involontaire, du contrôle et du non-contrôle, dans le fonctionnement psychique et le comportement humain ; celle, enfin, de la liberté et du déterminisme qui agite, aujourd’hui plus que jamais, les esprits sur les « raisons » de nos actes ou de nos pensées. Si le rêve fait son entrée dans la grande maison des sciences sociales, ce n’est pas pour laisser le lieu en l’état, mais pour en déranger les habitudes et en agencer autrement l’espace.</p>
<h2>Un espace délivré de la censure</h2>
<p>Le rêve apparaîtra finalement, à l’opposé de ce que crut Freud pour des raisons qui seront examinées de près, comme l’espace de jeu symbolique le plus complètement délivré de toutes les sortes de censure, tant formelles que morales, qui saisissent impitoyablement les rêveuses et les rêveurs dès leur réveil. La communication de soi à soi dans laquelle s’exprime le rêve, bouleversant les conventions langagières et narratives, libérant les rêveurs de toute espèce de retenue, constitue en quelque sorte le plus intime des journaux intimes, l’expression la plus franche de toutes les formes de franc-parler. Le rêve livre de ce fait, à qui veut s’y intéresser, des éléments de compréhension profonde et subtile de ce que nous sommes. Son étude permet, au fond, de savoir <em>ce qui nous travaille obscurément</em>, et de comprendre <em>ce qui pense en nous</em> à l’insu de notre volonté.</p>
<p>Dans toute recherche scientifique, un équilibre doit être trouvé entre, d’une part, l’élaboration d’un modèle théorique général ainsi que des méthodes qui lui sont associées, et, d’autre part, la mise au jour de structures, de processus, de mécanismes ou de logiques sociohistoriques propres à tels individus ou groupes d’individus dans la réalité sociale. Un tel équilibre nécessite la publication des résultats de la recherche sous la forme de deux volumes séparés.</p>
<p>Du fait de son caractère inédit, l’interprétation sociologique du rêve, comme forme d’expression et processus singulier, imposait, dans un premier temps, de construire une théorie intégratrice et empiriquement pertinente – c.-à-d. tenant compte des connaissances théorico-empiriques déjà produites – permettant de faire entrer le rêve (les logiques de sa production et pas seulement ses usages ou ses interprétations) dans l’univers des sciences sociales. À ce stade de la réflexion, les cas de rêves ou d’extraits de rêves mobilisés n’ont alors pour objectif que de prouver la pertinence et la fécondité du modèle théorique ou des outils méthodologiques associés. Cela ne signifie pas que ces cas sont de simples illustrations, mais qu’ils sont utilisés pour montrer la capacité du modèle à se saisir de n’importe quel type de cas et mettre l’accent sur la manière dont il est effectivement mis en œuvre à partir de méthodes déterminées. Tel est l’objectif de ce premier volume.</p>
<p>Étudier systématiquement des corpus précis de rêves, comme j’ai commencé à le faire pour élaborer et soutenir ma réflexion théorique et méthodologique, suppose, en revanche, que le modèle théorique établi, même s’il est toujours susceptible d’améliorations et de transformations, soit mis au service de la compréhension d’un matériau empirique bien délimité. C’est alors la réalité étudiée et ses propriétés qui prédominent. Le modèle théorique comme les outils méthodologiques se font plus discrets pour laisser place au spectacle de cette réalité dont ils ont rendu possible la compréhension. Tel sera l’objectif du second volume.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/200798/original/file-20180104-26142-1ewckn4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/200798/original/file-20180104-26142-1ewckn4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=934&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/200798/original/file-20180104-26142-1ewckn4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=934&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/200798/original/file-20180104-26142-1ewckn4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=934&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/200798/original/file-20180104-26142-1ewckn4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1173&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/200798/original/file-20180104-26142-1ewckn4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1173&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/200798/original/file-20180104-26142-1ewckn4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1173&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le rêve peut-il être appréhendé par les sciences sociales ?</span>
<span class="attribution"><span class="source">éditions la Découverte</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Il est important, de mon point de vue, de ne pas penser cette séparation en deux volumes comme une opposition entre théorie et empirie, car théorie et empirie seront présentes dans les deux ouvrages. Elles n’y prennent simplement pas la même place dans l’économie de la restitution du travail scientifique accompli. Si l’on tenait absolument à qualifier ces deux temps de la recherche, mieux vaudrait alors parler d’un <em>temps expérimental</em> de l’invention théorico-méthodologique empiriquement fondée (par la prise en compte, dans la construction du modèle théorique synthétique, des connaissances empiriques accumulées) et d’un <em>temps de l’exploration systématique</em>, théoriquement et méthodologiquement guidée, sur des corpus empiriques déterminés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/89640/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bernard Lahire a reçu des financements de l'Institut Universitaire de France. </span></em></p>Pour le sociologue Bernard Lahire, la création d’une théorie des rêves, ces objets étranges, permet aussi et surtout de contribuer à la transformation des sciences sociales.Bernard Lahire, Professeur de sociologie, ENS de LyonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/881612017-11-27T20:20:54Z2017-11-27T20:20:54ZAvant l’idée<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/196455/original/file-20171127-2066-1b79ljx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Quand on rêve... </span> </figcaption></figure><p><em>Cette chronique est dans la droite ligne et se nourrit des recherches et rencontres publiées sur mon site <a href="http://www.cahiersdelimaginaire.com/votrelaboratoirecreatif-sylviegendreau/amenager-son-espace-pour-etre-plus-creatif">Les cahiers de l’imaginaire</a>.</em></p>
<hr>
<p>Au cours des prochaines semaines, nous explorons le thème du rêve. Deux façons de l’observer, le regard du scientifique et celui de l’artiste. L’esprit créatif aime les interstices. Il vit souvent aux abords du chaos. Sur le fil. Entre le visible et l’invisible. Il cherche à voir au point de se faire mal aux yeux. Il scrute le ciel et la lumière. Il en va de même du rêveur. Il cherche à voir ce que les autres ne voient pas. Les plus doués y arrivent. Le jour, ils inventent. La nuit, ils apprennent. Les surdoués contrôlent même leurs rêves. Les plus grands créateurs sont souvent de fabuleux rêveurs comme les célèbres scientifiques <a href="https://www.slowdowntoleap.com/blog/einsteins-dreams">Albert Eintein</a> et <a href="https://www.slowdowntoleap.com/blog/neils-bohr-from-dream-to-discovery-by-sylvie-gendreau">Niels Borh</a>. Tentons d’apprendre à voir ce qu’ils voient.</p>
<h2>De fabuleux rêveurs</h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/196426/original/file-20171127-2016-bwdt56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/196426/original/file-20171127-2016-bwdt56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=273&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/196426/original/file-20171127-2016-bwdt56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=273&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/196426/original/file-20171127-2016-bwdt56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=273&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/196426/original/file-20171127-2016-bwdt56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=343&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/196426/original/file-20171127-2016-bwdt56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=343&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/196426/original/file-20171127-2016-bwdt56.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=343&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">« Cette exposition s’attache à ce qui se situe en bordure de nos sens et de notre connaissance, de notre imagination et de nos attentes. je m’intéresse à l’horizon, qui pour chacun de nous sépare le connu de l’inconnu », Olafur Eliasson.</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Olafur Eliasson compte parmi mes artistes préférés tant par sa démarche profondément humaniste que par ses œuvres et ses propos qui ajoutent de la profondeur à nos réflexions. Ses origines nordiques ont inscrit en lui des gènes d’intelligence collective comme on en rencontre encore trop rarement. Dans son studio à Berlin, 85 personnes dont des artisans, des techniciens spécialisés, des architectes, des archivistes, des administrateurs, des historiens d’art, des web designers, des graphistes, des réalisateurs et des cuisiniers collaborent. Les différents travaux d’Eliasson, qu’il s’agit de sculpture, de peinture, de photographie, de cinéma ou d’installation, ont été largement exposés à travers le monde : <a href="http://olafureliasson.net/archive/publication/MDA104414/chaque-matin-je-me-sens-different-chaque-soir-je-me-sens-le-meme"><em>Chaque matin je me sens différent, chaque soir je me sens le même</em></a> au MAM, Paris (2002), <a href="http://www.tate.org.uk/whats-on/tate-modern/exhibition/unilever-series/unilever-series-olafur-eliasson-weather-project-0"><em>The Weather Project</em> (2003)</a> à la Tate Modern de Londres, <a href="http://olafureliasson.net/archive/artwork/WEK100345/the-new-york-city-waterfalls"><em>The New York City Waterfalls</em></a>, <a href="https://www.moma.org/calendar/exhibitions/31"><em>Take your time</em> au MOMA de New York (2008)</a>, <a href="http://olafureliasson.net/archive/exhibition/EXH102282/riverbed"><em>Riverbed</em></a> au Louisiana Museum de Copenhague (2014). Ce qui me plaît, c’est que sa pratique de l’art n’est pas limitée aux musées et aux galeries, elle touche une communauté beaucoup plus large à travers des projets architecturaux et des interventions dans l’espace public.</p>
<h2>En bordure du visible et de l’invisible</h2>
<p>En nous déstabilisant « juste assez » l’artiste nous fait faire de petits sauts de conscience. Où sommes-nous ? Dans quelle réalité ? Ces moments privilégiés avant qu’une idée naisse, quand nous n’avons ni la forme, ni le mot, mais seulement le ressenti, l’émotion de l’avant… sont des territoires précieux que nous devons chérir. Ces territoires en bordure du visible et de l’invisible, il nous les rappelle avec chacune de ses œuvres. En 2015, avec l’<a href="http://www.cahiersdelimaginaire.com/conversationsurlart/2015/1/18/mind-of-the-unthought-thougt?rq=contact">exposition « Contact »</a>, l’expérience était encore plus audacieuse puisqu’il « a fait exploser les frontières dans une tentative de faire entrer l’univers à travers une œuvre d’art totale » comme l’a expliquée la commissaire générale de l’exposition présentée à l’occasion de la deuxième phase inaugurale de la Fondation Louis Vuitton.</p>
<blockquote>
<p>« Portant une attention renouvelée à la situation de l’homme dans son milieu, Olafur Eliasson aime s’appuyer sur les avancés les plus récentes de la pensée. Jouant sur la capacité d’empathie du visiteur l’artiste s’attache à le rendre partie prenante et à l’amener à vivre une expérience multisensorielle complexe remettant en cause sa perception visuelle et, à travers elle, ses certitudes, dans une oscillation|lumière, présence|absence, affirmation|doute », analyse Suzanne Pagé, directrice de la Fondation Louis Vuitton.</p>
</blockquote>
<p>C’est grâce au Musée d’art moderne de la ville de Paris en 1998, que les œuvres d’Olafur Eliasson ont été découvertes en France lors de l’exposition collective, <a href="https://www.abebooks.fr/rechercher-livre/titre/nuit-blanche-scenes-nordiques-les-annees-90/">« Nuit blanche, scènes nordiques : les années 1990 »</a>. Pour Eliasson, Paris présentait un mélange fécond d’aménagement formel et informel qui a toujours attiré son attention. Pour cette exposition, les artistes s’étaient demandé quelle serait la prochaine étape pour la ville ?</p>
<blockquote>
<p>« Nous avions conclu que cela se passerait à l’ouest de Paris, à Nanterre, juste à côté de la Défense. À l’époque, ce quartier était une sorte d’extension utopique de Paris, pensée pour préparer le siècle à venir, ce qu’il a plus ou moins réussi à faire. J’ai conçu le projet en lien avec ce contexte de réussite et d’échec urbain. Les blocs de glace étaient placés à Nanterre sans indication aucune de leur nature artistique, même si nous les avions photographiés. En parallèle, j’avais exposé des blocs de glace au MAM, qui étaient remplacés une fois fondus. Cet aspect éphémère et ludique de la glace lui confère toute sa beauté. De façon générale, je pense que le succès d’une œuvre d’art ne dépend pas de sa situation, du fait qu’elle soit placée en intérieur ou en extérieur, dans un musée ou dans la rue. L’art peut être partout. Le contexte est toujours une composante de l’œuvre plutôt qu’une limite. »</p>
</blockquote>
<h2><em>Design thinking</em> et contribution à une œuvre en cours</h2>
<p>En septembre dernier, j’ai invité mes étudiants au Musée d’Art Contemporain de Montréal. Les doctorants de Polytechnique, en atelier de créativité, avaient travaillé à identifier un problème et à trouver une idée originale pour le résoudre en découvrant la méthode du <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Design_thinking"><em>design thinking</em></a>. À la fin de l’atelier, les équipes devaient présenter leur problème et solution au cœur de l’œuvre d’Olafur Eliasson, <em>La Maison des ombres multiples</em>. Une expérience qui a provoqué plaisir et rire, mais surtout l’étonnement de pouvoir communiquer l’essentiel avec quelques gestes. Au moment de deviner quelle innovation était proposée par l’équipe, les étudiants ont été surpris de la clareté des messages. Pour les plus curieux parmi vous, je vous laisse découvrir le résultat.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/48hV_cLWGRQ?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Une super intelligence.</span></figcaption>
</figure>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/hIfFAGU2LwM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La vie au-delà de la Terre.</span></figcaption>
</figure>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/SZyZ2CrXbDs?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">En finir avec la pollution causée par les voitures.</span></figcaption>
</figure>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/-xWsyGz_ZSw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">En finir avec la pollution causée par les voitures.</span></figcaption>
</figure>
<p>Dans tous ses projets, Eliasson demande toujours aux spectateurs de contribuer à l’œuvre d’une manière ou d’une autre, d’en être une partie constituante. Pour lui, une œuvre d’art ne se termine jamais. Elle a un début, mais jamais une fin. C’est un flux. Comme de la pré-naissance de l’idée à l’idée. Comme du rêve à la pensée.</p>
<p>En s’intéressant à ce qu’il y a avant l’idée, les expériences et la pensée d’Olafur Eliasson nous passionnent d’autant plus. Cela rejoint notre réflexion sur la créativité et le mouvement.</p>
<p>Que le rêveur dorme ou qu’il soit éveillé, les moments vécus ou imaginés se produisent dans un flux. Il n’y a ni limite, ni frontière. Le territoire est fertile et mérite une réflexion. Plusieurs questions se posent. Quelles portes permettent d’y accéder ? Comment entre-t-on dans un rêve ? Comment l’interpréter ? Comment entre-t-on dans une œuvre d’art ? Pistes à suivre et à venir dans mes prochaines chroniques.</p>
<p>Et peut-être avez-vous des pistes à me proposer ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/88161/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
En nous déstabilisant « juste assez » l’artiste nous fait faire de petits sauts de conscience. Où sommes-nous ? Dans quelle réalité ? Ces moments privilégiés avant qu’une idée naisse.Sylvie Gendreau, Chargé de cours en créativité et innovation, Polytechnique MontréalLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/713782017-02-02T21:14:38Z2017-02-02T21:14:38ZEntendre des voix, plus fréquent qu’on ne le croit<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/155362/original/image-20170202-1652-1nu97bh.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il est fréquent pour les veufs ou les veuves, après un certain âge, d'entendre leur partenaire leur parler.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.shutterstock.com/pic-50772586/stock-photo-old-men-sitting-on-the-bench-by-the-sea.html?src=57UMYjkcsfi-UQArfbu4XQ-1-14">VVO/Shutterstock.com</a></span></figcaption></figure><p><a href="http://future.arte.tv/fr/entendeurs-de-voix-pour-aller-plus-loin">Entendre des voix que les autres n'entendent pas</a>
est une expérience significative. De la même façon que les rêves, <a href="http://future.arte.tv/fr/des-voix-dans-la-tete">ces voix</a> font partie intégrante de l’histoire personnelle des personnes concernées. Pourtant, dans les services de santé mentale, le modèle dominant veut que les soignants ne se préoccupent que de la présence ou de l'absence des voix, et pas du tout de leur sens.</p>
<p>Quand on se réfère aux bibles des diagnostics psychiatriques,<a href="https://theconversation.com/uk/topics/dsm-5-2189">le DSM-5</a> américain ou l’ICD-10 de l’Organisation mondiale de la santé, les hallucinations auditives sont décrites comme les symptômes d’une maladie mentale, la schizophrénie. La plupart des spécialistes pensent que les voix sont dues à des <a href="http://pb.rcpsych.org/content/28/11/401">facteurs génétiques et biochimiques</a>, et ne les envisagent jamais comme des réponses pleines de sens à certains événements de la vie, dans certains contextes. Bien que moins d’1 % de la population soit diagnostiquée comme « entendant des voix », des enquêtes internationales menées sur différentes populations dans le monde montrent qu’une personne sur huit a déjà expérimenté une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21574793">hallucination auditive</a> au moins une fois dans sa vie.</p>
<p>Je fais partie des personnes qui ont eu une telle expérience une seule fois dans leur vie (enfin, une seule fois pour le moment). Le jour qui a suivi la mort d’un de mes amis dans un accident de voiture, il y a des années de cela, il m’a parlé. Bien que j’aie travaillé pendant des années comme psychologue clinicien, aidant les autres à interpréter les voix qu’ils entendaient, mon premier réflexe a été de penser que je devenais fou. Et puis, je me suis rendu compte qu’il était simplement venu me dire au revoir, et que le fait que ce soit le fruit de mon imagination avait peu d’importance.</p>
<p>Hormis la question de la fréquence des voix, il en existe aussi de mille et une sortes. Certaines personnes n’entendent que de « méchantes » voix. D’autres n’ont affaire qu’à des voix sympathiques, qui les soutiennent et les rassurent. Beaucoup entendent alternativement les unes ou les autres. Pour certains, les voix sont celles de personnes qu’ils connaissent. D’aucuns entendent une seule voix quand d’autres en entendent une foule. Les voix apparaissent parfois dans l’enfance, un peu comme des amis imaginaires, tandis que d’autres entendent leur première voix plus tard dans leur vie.</p>
<p>Mais les entendeurs de voix ont un point commun, cependant : la plupart d’entre eux, quand on leur pose la question, attribuent <a href="https://books.google.fr/books?id=BRcv3whgAsIC&dq=making+sense+of+madness&hl=fr&sa=X&redir_esc=y">un sens aux voix</a> et rejettent l’idée selon laquelle elles ne seraient que la manifestation <a href="https://moh-it.pure.elsevier.com/en/publications/what-people-with-schizophrenia-think-about-the-causes-of-their-di">d’un déséquilibre biochimique dénué de sens</a>. De nombreuses études prouvent que la plupart des personnes âgées de plus de 60 ans qui perdent leur partenaire de vie l’<a href="https://www.researchgate.net/publication/19141943_Hallucinations_of_Widowhood">entendent peu de temps après sa disparition</a> : c’est le cas le plus courant et le plus connu de voix associées à un sens évident.</p>
<p>Les voix négatives, quant à elles, sont souvent associées à des événements difficiles. Quatre études menées sur des adultes soignés pour une maladie mentale ont prouvé qu’au moins la moitié des voix qu’entendent les personnes qui ont été maltraitées ou abusées sexuellement sont en lien avec leur agression. On a découvert en <a href="https://www.researchgate.net/publication/21083263_Persisting_Hallucinations_Following_Childhood_Sexual_Abuse">étudiant</a> les dossiers psychiatriques de personnes ayant subi un inceste l’exemple d’un homme et d’une femme qui avaient été abusés sexuellement dans leur petite enfance, et qui entendaient des voix les accusant de se comporter bizarrement. D’autres études font mention de voix qui sont celles des agresseurs. L’<a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/12689431">une de ces recherches évoque</a> quelqu'un qui subissait les agressions sexuelles d’une personne de sa famille, et qui entendait la voix de ce parent lui intimer l’ordre de se suicider. Dans ce genre de situation, il est généralement bien plus efficace de demander aux personnes ce qui leur est arrivé plutôt que de balayer la voix du revers de la main en disant qu'elle n’est que le symptôme vide de sens d’une maladie mentale.</p>
<p>Il existe, à travers l’histoire, une multitude de récits qui attribuent du sens aux voix entendues – Jésus et Jeanne d’Arc en font partie, pour ne citer que les deux plus célèbres. En fait, l’idée que les voix sont les manifestations hasardeuses d’un cerveau malade, vides de sens, est un <a href="http://dx.doi.org/10.1080/17522430903420711">concept récent</a>, propre aux cultures où domine le modèle médical dans le traitement de la souffrance humaine.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/142505/original/image-20161020-8849-1u4cg8n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/142505/original/image-20161020-8849-1u4cg8n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/142505/original/image-20161020-8849-1u4cg8n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/142505/original/image-20161020-8849-1u4cg8n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/142505/original/image-20161020-8849-1u4cg8n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/142505/original/image-20161020-8849-1u4cg8n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/142505/original/image-20161020-8849-1u4cg8n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Jeanne d’Arc – ou quand entendre des voix n’était pas encore une maladie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://www.shutterstock.com/pic-212819017/stock-photo-old-monument-of-jeanne-darc-joan-of-arc.html?src=B7tjqGlncneB2Ec93JkGZg-1-9">Denis Kuvaev/Shutterstock.com</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Un élément ordinaire de la vie</h2>
<p>Dans beaucoup de cultures, entendre des voix est complètement naturel. Quand je vivais en Nouvelle-Zélande, un des mes collègues maori a réalisé des entretiens <a href="https://researchspace.auckland.ac.nz/handle/2292/3367">avec 80 maoris</a> pour comprendre dans quelles circonstances les gens entendaient des voix. Pour eux, c’était là un élément tellement ordinaire de la vie que les questions de mon collègue leur semblaient absurdes. L’une des personnes interrogées lui a dit ainsi : « Pour moi, entendre des voix, c’est comme dire bonjour à ma famille le matin. Cela n’a rien d’étonnant. »</p>
<p>Il est enthousiasmant de constater qu’un peu partout dans le monde au cours des deux dernières décennies, des groupes de soutien entre entendeurs de voix ont vu le jour, <a href="http://www.revfrance.org/spip.php?rubrique4">notamment en France</a>. <a href="https://www.youtube.com/watch?v=hPYissZZ8cg">Les membres de ces groupes</a> ont beaucoup à apprendre aux professionnels de santé, en particulier quant à la façon dont nous pouvons les écouter avec respect et les aider à trouver le sens de leurs voix plutôt que de considérer leurs expériences comme les symptômes <a href="https://www.letemps.ch/sciences/2016/10/28/entendre-voix-nest-forcement-un-symptome-folie">d’une maladie imaginaire</a> et d’essayer de supprimer ces expériences avec des psychotropes.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/syjEN3peCJw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
</figure>
<p>La transcription en français des propos d'Eleanor Longden dans sa vidéo peut être lue <a href="https://www.ted.com/talks/eleanor_longden_the_voices_in_my_head/transcript?language=fr">ici</a>. </p>
<p>Les voix, de même que les rêves, sont des messagers qui nous permettent de repérer un problème à résoudre, comme par exemple quand on a vécu un <a href="http://dx.doi.org/10.1080/17522430903384305">traumatisme</a>. Il serait temps que les professionnels de la santé mentale demandent un peu plus souvent « Que disent vos voix ? », et comme le dit l’entendeuse de voix britannique Eleanor Longden <a href="https://www.ted.com/talks/eleanor_longden_the_voices_in_my_head?language=en">dans une conférence TED</a>, ils devraient aussi demander : « Que vous est-il arrivé ? ».</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/71378/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>John Read est membre du comité exécutif de la Société Internationale pour la psychologie et les approches sociales de la psychose (<a href="http://www.isps.org">www.isps.org</a>). Il est aussi l'éditeur du journal scientifique de cette société, « Psychosis ». Il soutien le réseau international des entendeurs de voix. </span></em></p>Une personne sur huit a déjà eu des hallucinations auditives. Ce n'est pas forcément synonyme de maladie mentale, et cela peut servir, au contraire, à identifier le problème à résoudre.John Read, Professor of Clinical Psychology, University of East LondonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/531732016-01-15T06:09:55Z2016-01-15T06:09:55ZLes rêves lucides lèvent le voile sur les mystères de la conscience<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/108152/original/image-20160114-2349-drrk06.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/obataille/3532670818">Olivier Bataille/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Nous passons environ <a href="http://www.bbc.co.uk/news/magazine-34115092">six années de notre vie en train de rêver</a> – soit 2 190 jours ou 52 560 heures. Bien que nous pouvons percevoir les sensations et émotions qui traversent nos rêves, nous ne sommes pas conscients de la même façon que pendant l’éveil. Ceci explique pourquoi nous ne savons pas que nous sommes en plein rêve et que nous prenons souvent ses récits bizarres pour la réalité.</p>
<p>Mais certaines personnes – les rêveurs lucides – ont la capacité de ressentir une sorte de prescience pendant leurs rêves en « réveillant » certains aspects de leur conscience éveillée. Ils peuvent même prendre le contrôle et agir avec une intention dans le monde des songes (pensez à Leonardo DiCaprio dans le film Inception).</p>
<p>Le rêve lucide est encore un sujet peu étudié, mais de récentes recherches suggèrent qu’il s’agit d’un état hybride de conscience éveillée et de sommeil.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/106266/original/image-20151216-25603-lwhk82.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/106266/original/image-20151216-25603-lwhk82.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/106266/original/image-20151216-25603-lwhk82.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/106266/original/image-20151216-25603-lwhk82.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=415&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/106266/original/image-20151216-25603-lwhk82.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/106266/original/image-20151216-25603-lwhk82.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/106266/original/image-20151216-25603-lwhk82.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=522&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Paralysie du sommeil. Mon rêve, mon mauvais rêve, 1915.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Fritz Schwimbeck/wikimedia</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le rêve lucide est l’une des nombreuses « anomalies » qui peuvent survenir pendant que nous dormons. La <a href="https://theconversation.com/understanding-sleep-paralysis-a-terrifying-but-unique-state-of-consciousness-48509">paralysie du sommeil</a>, par exemple, on l’on se réveille terrifié et paralysé alors que l’on est plongé dans un stade de sommeil. On peut aussi expérimenter de <a href="http://journals.ub.uni-heidelberg.de/index.php/IJoDR/article/view/9085">faux réveils</a>, où l’on croit que l’on s’est réveillé alors que l’on est en train de rêver. Tout comme les rêves lucides, ces expériences reflètent une hausse de la conscience subjective pendant le sommeil. Pour en savoir plus au sujet des phases de transitions entre ces états – et nous l’espérons, sur la conscience elle-même – nous avons lancé un <a href="http://bit.ly/SleepExperiences">questionnaire en ligne à large diffusion</a> sur le sommeil pour examiner les relations entre ces différents états de conscience hybride.</p>
<h2>Le cerveau, rêveur lucide</h2>
<p>Environ la <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/21466083">moitié d’entre nous</a> expérimenterons au moins une fois dans leur vie un rêve lucide. Et cela pourrait être intéressant à examiner de près parce qu’il permet à chacun de simuler des scénarios désirés, par exemple rencontrer l’amour de sa vie ou gagner une bataille au Moyen-Age. Il y a des indices qui indiquent que le <a href="http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S1053810012001614">rêve lucide peut être volontairement lancé</a>, et un grand nombre de communautés en ligne se sont créées où les utilisateurs s’échangent des tuyaux pour arriver à être le plus lucide possible pendant leurs rêves (par exemple, avoir des « totems » de rêve, objets familiers du monde éveillé qui peuvent aider à déterminer si l’on est dans un rêve, ou bien servir de pivot pour empêcher la lucidité de s’envoler).</p>
<p>Une <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23220345">étude récente</a> où l’on a demandé aux participants de rapporter en détail leurs rêves les plus récents a montré que, comparé aux rêves non lucides, ceux qui l’étaient étaient caractérisés par une conscience beaucoup plus forte du fait que le dormeur était en train de rêver. Les personnes de l’étude qui ont expérimenté des rêves lucides ont également indiqué qu’elles avaient un plus grand contrôle sur leurs pensées et actions dans le rêve, la capacité de penser logiquement, et étaient même plus à même de se remémorer des faits réels de leur vie éveillée.</p>
<p>Une autre étude examinant la <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24427149">capacité de personnes à prendre des décisions conscientes</a> à l’éveil tout aussi bien que pendant les rêves, lucides ou non, a montré qu’il y avait un recouvrement entre les capacités de volonté pendant que nous sommes réveillés et pendant que nous rêvons lucides. Cependant, la capacité de planifier est bien moins forte pendant le rêve lucide, comparée à la vie active.</p>
<p>Les rêves lucides et non lucides sont ressentis différemment et cela suggérerait qu’ils sont associés à différents modèles d’activité cérébrale. Mais confirmer cette hypothèse n’est pas si facile. Les participants étudiés doivent être placés toute la nuit dans un scanner et les chercheurs doivent détecter le moment où le rêve lucide se déclenche pour pouvoir comparer l’activité cérébrale pendant cette phase et pendant un rêve ordinaire.</p>
<p>Des études bien conçues qui s’intéressent à ce point précis ont imaginé un code de communication entre rêveurs lucides et chercheurs pendant la phase de sommeil dite paradoxal ou REM (caractérisée par des mouvements rapides des yeux, une <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/19794431">période-clé pour les rêves</a>). Avant de s’endormir, le cobaye et le scientifique s’accordent sur un mouvement spécifique de l’œil (par exemple deux coups d’œil à gauche puis deux à droite) qui est accompli pour signifier que la personne est lucide.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/106271/original/image-20151216-25637-13svh37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/106271/original/image-20151216-25637-13svh37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/106271/original/image-20151216-25637-13svh37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/106271/original/image-20151216-25637-13svh37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=371&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/106271/original/image-20151216-25637-13svh37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/106271/original/image-20151216-25637-13svh37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/106271/original/image-20151216-25637-13svh37.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=466&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Cortex préfrontal.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Natalie M. Zahr, Ph.D., and Edith V. Sullivan, Ph.D. -- Natalie M. Zahr, Ph.D., and Edith V. Sullivan, Ph.D.</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En utilisant cette approche, des expérimentations ont montré que le passage d’un sommeil REM non lucide à lucide était associé à une <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2737577/">activité accrue des zones frontales du cerveau</a>. De façon significative, ces aires sont associées à des fonctions cognitives « supérieures » comme le raisonnement logique et le comportement volontaire qui sont classiquement observés uniquement en état d’éveil. Le type d’activité cérébrale enregistrée, des ondes gamma, est connu pour signaler différents aspects de l’expérience humaine ; les sensations, émotions, pensées et mémoires sont <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/11349422">“liées” ensemble</a> dans la perception d’une conscience intégrée. <a href="http://www.nature.com/neuro/journal/v17/n6/full/nn.3719.html">Une étude de suivi</a> a indiqué
qu’une stimulation électrique de ces zones provoquait une augmentation du degré de lucidité vécu pendant un rêve.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/106269/original/image-20151216-25630-16uj010.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/106269/original/image-20151216-25630-16uj010.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=601&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/106269/original/image-20151216-25630-16uj010.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=601&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/106269/original/image-20151216-25630-16uj010.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=601&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/106269/original/image-20151216-25630-16uj010.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=755&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/106269/original/image-20151216-25630-16uj010.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=755&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/106269/original/image-20151216-25630-16uj010.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=755&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Le précuneus, situé sur la face interne du lobe pariétal du cortex.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Geoff B Hall/wikimedia</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Une autre étude a plus spécialement <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/22754049">examiné les régions du cerveau</a> impliquées dans les rêves lucides, et a montré une activité accrue dans des régions comme le cortex préfrontal et le précunéus (face interne du lobe pariétal, dans le cortex). Ces zones sont associées, là encore, à des savoir-faire cognitifs dits supérieurs comme le <a href="http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16399806">traitement des pensées autoréférentielles</a>, faisant supposer que le rêve lucide est un stade hybride de la conscience.</p>
<h2>A la découverte de la conscience</h2>
<p>Comment la <a href="https://theconversation.com/uk/topics/consciousness">conscience</a> émerge dans le cerveau est l’une des questions les plus mystérieuses des neurosciences. Mais <a href="https://journals.ub.uni-heidelberg.de/index.php/IJoDR/article/view/403/pdf_1">il a été suggéré</a> que l’étude des rêves lucides pourrait conduire à de nouvelles découvertes dans le domaine de la conscience.</p>
<p>Cela parce que le sommeil paradoxal lucide et ordinaire sont deux états où l’expérience consciente est nettement différente, alors que l’état global cérébral reste le même (nous sommes dans le sommeil paradoxal dans les deux cas, souvent en train de rêver). En comparant les différences spécifiques de l’activité du cerveau en train d’avoir les deux types de rêves, on pourrait examiner les éléments qui faciliteraient cette conscience augmentée que les rêveurs lucides expérimentent.</p>
<p>De plus, en utilisant les signaux des yeux comme un marqueur de rêve lucide chez un dormeur, il est possible d’étudier l’activité neurobiologique pour comprendre, non seulement ce qui caractérise et maintient cette conscience augmentée, mais comment émerge-t-elle au tout début.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/53173/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dan Denis a reçu, dans le cadre de son doctorat, des financements de l'ESRC, Economic and Social Research Council. Il est également chercheur pour le Sleep Paralysis Project</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Giulia Poerio a reçu des financement de l'ERC, European Research Council dans le cadre d'un projet sur la cognition humaine (EU-project-646927-WANDERINGMINDS). Elle collabore également au projet Hubbub, qui est financé par The Wellcome Trust.</span></em></p>C’est un aspect troublant de l’expérience onirique : certains rêves sont dits lucides car ils peuvent être manipulés par le dormeur. Un état hybride qui pourrait révéler la mystérieuse conscience.Dan Denis, PhD student in Psychology, University of SheffieldGiulia Poerio, Post-doctoral Researcher and Hubbub Collaborator , University of YorkLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/530022016-01-12T05:39:30Z2016-01-12T05:39:30ZCerveau et apprentissage, ou les bienfaits de la neuroéducation<p>Aimeriez-vous savoir ce qui se produit dans le cerveau de vos élèves lorsqu’ils apprennent ? Aimeriez-vous connaître les effets qu’ont vos interventions pédagogiques sur le cerveau de vos élèves ? Aimeriez-vous savoir pourquoi certains élèves ont plus de difficultés que d’autres à réaliser certains apprentissages ? Aimeriez-vous appuyer vos décisions pédagogiques sur des fondations solides découlant des recherches de pointe sur le cerveau ?</p>
<p>Voici quelques questions que pose <a href="http://example.comhttp://www.associationneuroeducation.org">l’Association pour la Recherche en Neurosciences (ARN)</a> avec le groupe <a href="http://groupeeduco.com">EDUCO</a> et l’Université du Québec à Montréal (UQAM).</p>
<p>Une problématique importante se pose donc : <a href="http://www.neuroeducation2016.org">connaître le cerveau</a> pour mieux enseigner et intervenir auprès des élèves.</p>
<h2>Cerveau et pratiques pédagogiques</h2>
<p>La « neuroéducation », néologisme si l’on voulait, aiderait, donc, à comprendre de quelle façon les nouvelles connaissances sur le cerveau peuvent guider les pratiques pédagogiques des enseignants, orthophonistes, psychologues scolaires et les autres intervenants de l’éducation scolaire.</p>
<p>Depuis plusieurs années, déjà, nombre de chercheurs ont recours à des technologies d’imagerie cérébrale et à diverses mesures neurophysiologiques pour tenter de répondre à des problématiques liées aux domaines de l’éducation et d’approfondir nos connaissances sur les processus cognitifs cérébraux impliqués dans des tâches scolaires.</p>
<p>L’objectif est d’étudier ce qui se produit dans le cerveau des élèves lors des apprentissages et de mieux comprendre, aussi, évidemment, les causes des difficultés particulières de certains élèves, ce qui permettrait d’évaluer <a href="http://www.college-de-france.fr/site/stanislas-dehaene/_course.htm">l’impact de différentes méthodes d’enseignement utilisées ou à proscrire</a>.</p>
<p>D’autres institutions (en France), comme <a href="http://www.collegedesbernardins.fr/">le Collège des Bernardins</a> à Paris se penchent, aussi, sur les apports que peuvent faire les sciences à l’éducation et un <a href="http://www.collegedesbernardins.fr/fr/recherche/societes-humaines-et-responsabilite-educative/ecole-et-republique.html">séminaire</a> est prévu sur l’apport des neurosciences (1).</p>
<p>L’originalité du séminaire des Bernardins, « École et République », est de mieux comprendre le pourquoi de la situation actuelle de l’école française et d’encourager fortement l’égalité des chances, objectif majeur de notre démocratie.</p>
<h2>Architecture initiale</h2>
<p>Dans la connaissance du cerveau le fait, aussi, de connaître son architecture initiale, permet de comprendre que le cerveau, bien qu’il soit flexible, ne se modifie pas avec autant de facilité, quel que soit le type d’intervention pédagogique.</p>
<p>Cette architecture initiale définit un éventail de possibilités à partir desquelles peut se réaliser un nouvel apprentissage. Il serait, donc, important de réfléchir et de planifier des enseignements adaptés à chacun des cerveaux…</p>
<p>Quant à la différence des cerveaux due au sexe, Catherine Vidal nous le dit bien dans un <a href="https://theconversation.com/la-fabrique-des-filles-et-des-garcons-des-cerveaux-differents-1-52588">article</a> paru dans The Conversation France : un travail important de recherche reste à mener sur les interactions mutuelles entre les facteurs de l’environnement et les processus biologiques de développement chez les jeunes enfants. Ces problématiques sont importantes à résoudre pour tenter de comprendre l’origine des troubles du langage et du comportement : dyslexie, hyperactivité, autisme, qui affectent davantage les garçons que les filles.</p>
<p>Aujourd’hui, s’il est possible de mesurer l’activité dans le cerveau pendant des tâches comportementales en laboratoire, il est, aussi, possible de simuler informatiquement les hypothèses formulées sur ces mécanismes. La robotique apparaît…</p>
<h2>Cerveau et robot</h2>
<p>Il est, donc, possible de tester sur un robot des programmes d’apprentissages appliqués à l’humain et de voir si ces programmes permettent au robot d’apprendre de la même manière que nous.</p>
<p>Le robot est utilisé comme plateforme de test d’hypothèses biologiques. Ce qui aidera à affiner la compréhension du fonctionnement du cerveau. Et les interactions entre roboticiens et neuroscientifiques vont croissant. Reste à intégrer les chercheurs en éducation et les pédagogues. A suivre donc…</p>
<p>En neurosciences, on associe, aussi, de plus en plus, l’évolution et le développement des processus cognitifs au raffinement des fonctions sensori-motrices.</p>
<p>Le neurologue Rodolfo Llinás, à l’Université de New York, a donné pour exemple celui de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Ascidiacea">l’ascidie</a>, petit animal marin qui, après avoir nagé vers le rocher où il s’installera, digère son cerveau, devenu inutile dès lors qu’il n’a plus à se déplacer !</p>
<p>De même, l’interaction physique et dynamique avec l’environnement, le contrôle du mouvement, poussent la robotique au-delà du domaine conceptuel classique de l’intelligence artificielle, du cerveau dans une « boîte ».</p>
<h2>Le corps ou la tête</h2>
<p>En guise de conclusion, terminons avec le livre de Thomas Mann, <a href="https://books.google.fr/books/about/Les_t %C3 %AAtes_interverties.html ?hl=fr&id=iEQKGwAACAAJ">Les têtes interverties</a> et la légende hindoue de Sita, la belle princesse.</p>
<p>Dans une Inde rêvée, on part à la rencontre de deux hommes jeunes. L’un Shridaman, le marchand qui a une tête noble et savante, mais un corps mou caché sous des vêtements amples ; l’autre, Nanda, le berger, qui a un visage commun, mais un corps superbe, frotté d’huile et paré de fleurs sauvages.</p>
<p>Le premier s’éprend follement de Sita, une jeune femme « aux yeux de perdrix, aux couleurs splendides et aux flancs magnifiques ». Trop timide pour se déclarer, il envoie son double, aux biceps vigoureux, demander à sa place la main de l’aimée.</p>
<p>L’ami fidèle s’acquitte de la tâche et les noces sont bientôt célébrées. Mais Sita aux belles hanches, dans la couche conjugale, ne cesse de rêver de l’homme de l’ombre qui a réveillé ses désirs pour la livrer à l’étreinte d’un mari trop délicat.</p>
<p>Survient alors le hasard, évidemment suivi de ses facéties. Il prend les traits de Maya, la déesse de l’illusion, c’est-à-dire du désir. Après leur suicide et retour à la vie, entre Shridaman et Nanda il y aura échange par maladresse : la tête de l’un sur le corps de l’autre et réciproquement…</p>
<p>Drame de Sita. Comment reconnaître le mari ? Celui avec la tête, le cerveau…ou avec le corps… ?</p>
<p>Est-ce le corps, est-ce la tête qui décide de l’être ?</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/214295/original/file-20180411-540-1kr15nd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Fabien Dworczak a intervenu dans le séminaire sur les neurosciences du Collège des Bernardins le 17 mars 2016. <a href="https://www.collegedesbernardins.fr/">Le Collège des Bernardins</a> est un lieu de formation et de recherche interdisciplinaire. Acteurs de la société civile et religieuse entrent en dialogue autour des grands défis contemporains, qui touchent l’homme et son avenir.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/53002/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabien Dworczak a reçu des financements de l'organisation ANR.</span></em></p>Pour mieux enseigner et intervenir auprès des élèves, il faut mieux comprendre le cerveau. C’est l’objet de la neuroéducation.Fabien Dworczak, PhD, chercheur associé neurosciences et éducation, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/466492015-09-20T14:49:14Z2015-09-20T14:49:14ZLes mouvements oculaires pendant le sommeil : une fenêtre sur les rêves ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/94818/original/image-20150915-16971-zukmni.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Oeuvre du plasticien Thierry Ehrmann, auteur de La demeure du chaos.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/home_of_chaos/">Thierry Ehrmann/flick</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Une nuit tranquille. Dans la pièce voisine, une personne dort, équipée de capteurs. Le corps est immobile. L’enregistrement indique un tonus musculaire faible, une respiration profonde, un pouls lent. Pourtant, depuis quelques minutes, <a href="http://lecerveau.mcgill.ca/flash/d/d_11/d_11_p/d_11_p_cyc/d_11_p_cyc_1a.jpg">l’activité cérébrale</a> du dormeur a changé. Alors que de grandes ondes lentes étaient auparavant visibles sur l’écran de contrôle de l’électroencéphalogramme, le cerveau montre désormais une activité proche de l’éveil. Soudain, le pouls et la respiration s’accélèrent. Derrière les paupières closes du dormeur, on peut voir ses yeux bouger. Réveillées à cet instant, les personnes rapportent en général le souvenir d’un rêve, des images, des émotions. Un cerveau éveillé dans un corps endormi, tel est le sommeil paradoxal. </p>
<p>Ce sommeil, différent du sommeil dit « lent » où les rêves se font rares, se reconnaît à ces mouvements oculaires rapides qui l’accompagnent, d’où son nom en anglais : sommeil REM (Rapid Eye-Movement). Depuis 80 ans et l’invention des premières techniques d’enregistrement cérébral, ces mouvements oculaires pendant le sommeil ont suscité bien des questions : sont-ils en rapport avec la <a href="http://wardakhan.org/notes/Original%20Studies/Physiological%20Psychology/William-Dement-and-Nathaniel-Kleitman.pdf">scène rêvée ?</a> </p>
<p>À l’éveil, nos yeux bougent sans cesse pour appréhender les alentours. L’œil a en effet ses limites : seul le centre de la rétine permet une vision nette et en couleurs. Les mouvements oculaires permettent de déplacer ce centre dans le champ visuel et d’explorer au mieux notre environnement. Entre chaque mouvement, donc entre chaque image ainsi formée sur la rétine, l’information visuelle, floue et peu informative, est inhibée. Ainsi, la vision est une série de captures d’images plus qu’un flux continu. Mais alors, pourquoi observe-t-on ces mouvements oculaires pendant le sommeil, lorsque les yeux sont clos et qu’il n’y a rien à voir ? </p>
<h2>L’étoffe des rêves</h2>
<p>Les mouvements oculaires exploreraient-ils une scène rêvée ? Construite par le cerveau mais tout aussi visuelle que notre vie éveillée ? Une telle proposition a d’importantes implications. Non seulement elle contredit l’hypothèse souvent avancée que les rêves ne sont qu’une (re)construction faite au réveil, mais elle précise « l’étoffe dont sont faits les rêves ». Bien que séduisante, cette hypothèse, dite du balayage (<a href="http://www.architalbiol.org/index.php/aib/article/view/1246/">scanning hypothesis</a>) a longtemps été controversée. </p>
<p>Il y a en effet d’autres explications possibles. Notamment, ces mouvements oculaires pourraient traduire un changement physiologique sans rapport avec le contenu des rêves. De la même façon que les hommes connaissent des érections (elles se produisent pendant 80 % du temps de sommeil paradoxal) sans pour autant que cela soit toujours en relation avec un contenu onirique érotique. Par ailleurs, n’oublions pas que les aveugles de naissance ou encore des animaux sans vision comme les taupes produisent de tels mouvements oculaires. </p>
<p>Depuis quelques années pourtant, la piste du balayage semble étayée par l’observation clinique. Lorsque la paralysie du sommeil paradoxal est abolie (cela arrive aux personnes affectées par le syndrome dit du trouble du comportement en sommeil paradoxal ou TCSP), les mouvements effectués par ces dormeurs concordent avec les mouvements oculaires ainsi qu’avec le <a href="http://brain.oxfordjournals.org/content/133/6/1737.short">récit du rêve</a>. Ainsi, si l’on parvenait à lever la paralysie musculaire liée au sommeil paradoxal, il est possible que nous nous agiterions comme des pantins dans nos lits. Mais sommes-nous de simples poupées de chiffon dans notre sommeil ou des marionnettes sensibles ? </p>
<h2>Réponse neuronale</h2>
<p>Dans une <a href="http://www.nature.com/ncomms/2015/150811/ncomms8884/full/ncomms8884.html">étude récente</a> publiée dans la revue <em>Nature Communications</em>, nous avons tenté d’explorer cette question en examinant l’activité cérébrale associée à ces mouvements oculaires pendant l’éveil et le sommeil. Pour cela, nous avons analysé des enregistrements de neurones uniques et de populations de neurones chez des individus humains atteints d’épilepsie et temporairement implantés d’électrodes intracrâniennes, dans le cadre de leur traitement. </p>
<p>Nous avons comparé les réponses des neurones aux mouvements oculaires effectués pendant l’éveil et le sommeil paradoxal. Ces réponses ont également été comparées aux réponses associées à la présentation d’images sans mouvement oculaire. En effet, les régions cérébrales prises en compte (amygdale, hippocampe…) ont un rôle central dans la reconnaissance des objets et l’exploration visuelle. </p>
<p>Il apparaît que les mouvements oculaires ont des effets similaires, à l’éveil comme pendant le sommeil, sur l’organisation de l’activité de ces aires visuelles et mnésiques. À l’échelle individuelle, certains neurones réduisent leur activité juste avant les mouvements oculaires et l’augmentent juste après : cela constituerait la base du traitement séquentiel de l’information visuelle. De plus, la hiérarchie cérébrale semble être conservée de l’éveil au sommeil : les neurones les plus sélectifs (permettant la reconnaissance d’images très spécifiques comme la Tour Eiffel, par rapport à des neurones moins sélectifs s’activant pour les bâtiments en général) sont ceux qui s’activent le plus tardivement. </p>
<p>À l’échelle des populations de neurones, les oscillations électriques dans la bande de fréquences autour de 4-8 Hertz (dites oscillations thêta) notamment impliquées dans l’exploration visuelle et la mémoire, sont comme remises à zéro suite aux mouvements oculaires. À l’éveil comme pendant le sommeil.</p>
<p>Enfin, non seulement l’organisation de l’activité cérébrale pendant les mouvements oculaires est conservée de l’éveil au sommeil, mais elle est similaire à celle associée à la visualisation d’images sans mouvement oculaire. En revanche, cette activité ne se retrouve pas à l’éveil lorsque des mouvements oculaires sont réalisés dans l’obscurité. Que nous dormions ou que nous explorions notre environnement, tout se passe comme si les mouvements oculaires conservaient la même fonction. </p>
<p>Il semble que les mêmes processus cérébraux sous-tendant la vision se reproduisent pendant le sommeil. Les mouvements oculaires pourraient donc ouvrir une fenêtre sur les rêves : ils indiqueraient, certes de façon imparfaite, quand des images sont visualisées. Des neuro-scientifiques sont déjà parvenus à décoder des <a href="http://www.cse.iitk.ac.in/users/se367/14/Readings/papers/horikawa-tamaki-kamitani-13_neural-decoding-of-dreams.pdf">éléments de rêve</a> via l’imagerie cérébrale. Ici, les séquences de mouvements oculaires pourraient être utilisées pour détecter la survenue de cauchemars récurrents et réveiller le dormeur à temps. Les applications concrètent d’une telle découverte sont bien sûr encore lointaines. Reste le plaisir d’en savoir un peu plus sur la nature des rêves.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/46649/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Andrillon a reçu des financements du Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche ainsi que de la Socitété Française de Recherche et Médecine du Sommeil (SFRMS). </span></em></p>Pourquoi nos yeux roulent-ils dans leurs orbites durant notre sommeil alors même que nos paupières sont closes ? Peut-être parce qu’ils explorent la scène de nos rêves.Thomas Andrillon, PhD Student, École normale supérieure (ENS) – PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.