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sciences participatives – The Conversation
2024-02-14T14:27:25Z
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Recenser les oiseaux, identifier les plantes : les sciences participatives font-elles vraiment avancer la recherche ?
<p>Le phénomène des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/sciences-participatives-28466">sciences participatives</a> n’est pas nouveau, mais il a pris de l’ampleur au cours des de la dernière décennie. D’ailleurs avez-vous peut-être vous-même contribué en observant les oiseaux depuis votre balcon ou votre jardin pendant le confinement de 2020, ou en <a href="https://theconversation.com/plantnet-ebird-spipoll-inaturalist-ces-applis-au-service-de-li-ecologie-174383">utilisant votre smartphone pour identifier une plante</a> ou un insecte lors d’une promenade en forêt. Ce faisant, vous avez partagé vos observations avec les scientifiques qui les utilisent pour décrire la biodiversité et comprendre son évolution. Mais comment savoir à quel point vous les avez aidés ? Dans la recherche en écologie, cette démarche a un réel impact sur les publications scientifiques, surtout sur des thématiques qui font le lien entre société et environnement.</p>
<p>Les sciences participatives se définissent comme la production de connaissances scientifiques à laquelle sont associées des personnes dont ce n’est pas la profession, qui participent de manière active, délibérée et souvent bénévole. Les sciences participatives sont bien développées dans le <a href="https://www.inserm.fr/nous-connaitre/college-relecteurs-inserm/">domaine de la santé</a>, des <a href="https://francaisdenosregions.com/">sciences humaines</a>, et même en <a href="https://www.vigie-ciel.org/">astronomie</a>. C’est toutefois dans le domaine des sciences de l’environnement et de l’écologie que cette démarche d’ouverture de la pratique de la recherche aux acteurs non professionnels est la plus répandue.</p>
<h2>Pourquoi, ou pour quoi participer ?</h2>
<p>Pour les scientifiques en écologie, la participation des acteurs non professionnels à la recherche donne accès à des données qui seraient inaccessibles par ailleurs, ou à un rythme trop lent, incompatible avec le besoin de connaissances scientifiques face à l’urgence écologique. Les plates-formes <a href="https://plantnet.org/">Pl@ntNet</a> et <a href="https://www.inaturalist.org/">iNaturalist</a> s’appuient sur des photos prises par les curieux de nature, identifiées par un algorithme et validées par la communauté des utilisateurs. Elles permettent un recensement de la biodiversité à très grande échelle et sur le temps long.</p>
<p>Plusieurs auteurs ont analysé la <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-030-58278-4_13">motivation du public à s’engager dans des programmes de science participative</a>. Ce qui revient souvent, c’est la curiosité et le souhait d’en apprendre plus sur un sujet (par exemple, apprendre à <a href="https://plantnet.org/">reconnaître les plantes</a> ou les <a href="https://www.oiseauxdesjardins.fr/">oiseaux</a>), mais aussi la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0006320719313771">volonté d’être utile</a>, à la recherche d’une part, et à la préservation de l’environnement d’autre part.</p>
<p>Le lien entre l’utilité pour la recherche et l’utilité pour l’environnement doit se comprendre, très schématiquement, en suivant cette séquence : les observations fournissent des données, qui sont analysées, pour aboutir à la publication d’un article scientifique, qui permet de mettre en place des mesures concrètes pour l’environnement.</p>
<p>C’est évidemment très caricatural. Trop, parce qu’en amont de cette séquence, une somme de connaissances et des constructions théoriques orientent les scientifiques dans la manière de poser les questions de recherche et de définir les stratégies d’analyse des données permettant d’y répondre. Il est également évident, mais il faut le rappeler, que les applications des résultats de la recherche en termes de stratégie de gestion de l’environnement ne s’appuient pas sur un, mais sur un ensemble d’articles scientifiques.</p>
<p>D’où une question simple : les démarches de sciences participatives contribuent-elles à la production et à l’évolution des connaissances scientifiques dans le domaine de l’écologie ? Autrement dit : « Suis-je vraiment utile si je participe » ?</p>
<p>À noter au passage que cette question est légitime des deux côtés de la participation, pour les volontaires comme pour les scientifiques. L’acquisition de certaines données peut en effet requérir de solides connaissances naturalistes ou la manipulation de capteurs complexes ou onéreux. Dans de tels cas, <a href="https://hal.science/hal-03856478/document">on peut s’interroger sur la pertinence ou la précision des observations</a> réalisées par des personnes qui ne sont pas spécifiquement formées.</p>
<p>Cela nous amène donc à une seconde question : produit-on les mêmes connaissances lorsque la recherche est menée par des professionnels uniquement, ou au travers de la participation de volontaires dont le degré d’expertise est variable ?</p>
<h2>À quoi ma participation sert-elle vraiment ?</h2>
<p>Nous avons cherché à répondre à ces deux questions dans un article publié en accès ouvert dans la revue <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/ece3.10488"><em>Ecology and Evolution</em></a>. Nous avons utilisé une approche bibliométrique pour évaluer l’impact des sciences participatives sur l’évolution de l’écologie comme discipline scientifique.</p>
<p>Nous avons interrogé la base de données <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Web_of_Science"><em>Web of Science</em></a>, une référence au niveau international, pour retrouver tous les articles faisant mention des sciences participatives et publiés sur la période 2011-2022. Nous avons identifié plus de 3000 articles à propos des sciences participatives en écologie. Cela représentait moins de 1 % du nombre total d’articles en écologie publiés sur cette période, mais ce nombre était en constante augmentation. </p>
<p>D’un strict point de vue quantitatif, la réponse est sans appel : la science participative se publie. <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0258350">Une étude récente</a> montre non seulement que c’est le cas, mais que les articles qui s’appuient sur elles sont également cités par les chercheuses et les chercheurs. Les articles scientifiques étant à la base de la diffusion des savoirs, c’est une première indication que les sciences participatives, et donc la participation des volontaires, contribue bien à l’avancement des connaissances en écologie. Qu’en est-il dans le détail ?</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/574226/original/file-20240207-24-w3wq5s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/574226/original/file-20240207-24-w3wq5s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/574226/original/file-20240207-24-w3wq5s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=560&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/574226/original/file-20240207-24-w3wq5s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=560&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/574226/original/file-20240207-24-w3wq5s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=560&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/574226/original/file-20240207-24-w3wq5s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=704&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/574226/original/file-20240207-24-w3wq5s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=704&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/574226/original/file-20240207-24-w3wq5s.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=704&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Figure 1. Évolution du nombre d'articles sur les sciences participatives en écologie entre 2011 et 2022. L'axe horizontal représente l'année de publication. L'axe vertical indique le pourcentage d'articles en écologie s'appuyant sur les sciences participatives. Le nombre absolu d'articles de sciences participatives publiés chaque année est indiqué à l'intérieur de la figure.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bastien Castagneyrol et Baptiste Bedessem</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Pour faire simple, appelons SP le corpus d’articles s’appuyant sur les sciences participatives. Nous l’avons comparé à un corpus témoin, assemblé en tirant au hasard un même nombre d’articles parmi ceux publiés en écologie sur la période 2011-2022. Nous avons extrait les mots clés utilisés par les auteurs et autrices des articles de ces deux corpus pour les comparer. Cette approche nous a permis de déterminer si les mêmes thématiques sont abordées dans les articles qui s’appuient sur les sciences participatives (le corpus SP) et les articles disons conventionnels (le corpus témoin).</p>
<p>Nous avons constaté une certaine similitude dans les mots clés les plus fréquemment utilisés dans les deux corpus. Au cours des deux dernières années, la biodiversité (les mots clés <em>biodiversity</em>, <em>conservation</em>) et le changement climatique (<em>climate change</em>) étaient au cœur des recherches en écologie, quelle que soit l’approche employée (participative ou non) par les écologues pour aborder ces sujets. Il y a toutefois des subtilités dans le détail.</p>
<p>En examinant de plus près les différences dans l’utilisation des mots clés les plus fréquents dans chaque corpus (comment les mots clés sont associés entre eux), une différence majeure apparaît entre les articles du corpus SP et ceux du corpus témoin. Les mots clés liés aux processus écologiques (prédation, compétition, dispersion…) ou évolutifs (plasticité phénotypique, adaptation) étaient plus fréquents dans le corpus témoin, voire seulement présents dans celui-ci. Au contraire les mots clés liés aux interactions entre les êtres humains et leur environnement (socio-écosystèmes, services écosystémiques, services culturels, écologie urbaine) étaient plus fréquents, ou présents uniquement dans le corpus SP.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/574227/original/file-20240207-24-yswhv7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/574227/original/file-20240207-24-yswhv7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=540&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/574227/original/file-20240207-24-yswhv7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=540&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/574227/original/file-20240207-24-yswhv7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=540&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/574227/original/file-20240207-24-yswhv7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=679&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/574227/original/file-20240207-24-yswhv7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=679&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/574227/original/file-20240207-24-yswhv7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=679&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Figure 2. Principaux mots clés décrivant les articles du corpus SP et du corpus témoin.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bastien Castagneyrol et Baptiste Bedessem</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les associations de mots clés dans le corpus SP sont également révélatrices de la manière dont les thématiques « biodiversité » et « changement climatique » sont abordées dans les sciences participatives. Ces thèmes étaient associés à des mots clés suggérant une approche descriptive de la biodiversité, par exemple surveillance (<em>monitoring</em>), répartition des espèces (<em>species distribution</em>), ou modèle de répartition des espèces (<em>species distribution model</em>).</p>
<p>Il semble donc que lorsque les scientifiques ont recours aux démarches de sciences participatives, ce soit avant tout pour décrire l’état de la biodiversité, la manière dont elle est impactée par les changements globaux (notamment le changement climatique et l’urbanisation), et les conséquences que cela peut avoir sur le fonctionnement des <a href="https://sitesweb-tmp35.dsi.sorbonne-universite.fr/sites/default/files/media/2022-01/Couvet_socio%C3%A9cosyst%C3%A8me.pdf">socio-écosystèmes</a> (l’ensemble formé par l’écosystème et les activités humaines qui s’y déroulent). Les associations de mots clés du corpus témoin faisaient quant à elle plutôt référence aux mécanismes régissant les interactions entre espèces. On peut expliquer cette différence par le fait que les personnes contribuant à la science participative sont plus à même de s’investir dans des projets qui les touchent directement que dans des projets plus théoriques.</p>
<p>Les sciences participatives en écologie contribuent bien, de manière significative, à la production de connaissances nouvelles qui s’insèrent dans les grandes questions qui traversent l’écologie. Il y a là de quoi rassurer les personnes qui donnent de leur temps et de leur énergie en participant volontairement à ces programmes : oui, elles sont utiles. Il y a également de quoi rassurer les écologues : les sciences participatives ne sont pas en marge de la recherche traditionnelle en écologie, elles s’inscrivent parfaitement dans la boîte à outils dont les scientifiques disposent pour décrire et comprendre le monde dans lequel nous vivons.</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Science et Société se nourrissent mutuellement et gagnent à converser. La recherche peut s’appuyer sur la participation des citoyens, améliorer leur quotidien ou bien encore éclairer la décision publique. C’est ce que montrent les articles publiés dans notre série « Science et société, un nouveau dialogue », publiée avec le soutien du <a href="https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr">ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/214008/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bastien Castagneyrol a reçu, pour ses travaux sur les sciences participatives, des financements de la région Nouvelle Aquitaine, de l'ANR, de l'université de Bordeaux et de la fondation BNP Paribas au travers de son initiative pour le climat et la biodiversité.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Baptiste Bedessem a reçu des financements de l'ADEME, de l'INRAE </span></em></p>
Les sciences participatives invitent tout un chacun à apporter sa pierre à l'édifice de la recherche. Mais comment déterminer l'apport réel de cette pratique aux connaissances ?
Bastien Castagneyrol, Chercheur en écologie, Inrae
Baptiste Bedessem, Chargé de recherche, Inrae
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/222072
2024-02-11T14:44:46Z
2024-02-11T14:44:46Z
Haïti : un « séisme commémoratif » en hommage aux victimes de la catastrophe de 2010
<p>Le quotidien des Haïtiens est sans cesse confronté à des <a href="https://news.un.org/fr/story/2024/01/1142817">crises politiques</a>, économiques et sécuritaires. Parmi tous ces risques, des séismes surviennent <a href="https://www.donneesmondiales.com/amerique/haiti/tremblements-terre.php">régulièrement</a>. Souvent meurtriers, ils provoquent l’effroi et laissent la population démunie.</p>
<p>Depuis 2021, un <a href="https://theconversation.com/sismo-citoyens-et-chercheurs-du-monde-entier-sallient-pour-comprendre-le-recent-seisme-dha-ti-166787">groupe de chercheurs haïtiens et français</a> travaille sur le risque sismique en Haïti dans le cadre du projet ANR Osmose. Sismologues, géologues, mais aussi géographes, anthropologues et philosophes : de façon multidisciplinaire, ils distribuent à travers tout le pays de <a href="https://raspberryshake.org/wp-content/uploads/etudescaribeennes-24534.pdf">petits sismomètres</a>, ces appareils qui enregistrent et mesurent les tremblements de terre, à des habitants qui, bénévolement, les accueillent chez eux. Cette démarche dite de <a href="https://hal.inrae.fr/hal-02801940">« science participative »</a> permet de faire des relevés précis des mouvements de la terre, immédiatement mis en ligne <a href="https://ayiti.unice.fr/sismo-ayiti/">sur un site Internet</a>, mais aussi d’impliquer les hébergeurs (baptisés « sismo-citoyens ») dans la démarche de recherche.</p>
<p>Alors qu’on ne peut encore <a href="https://theconversation.com/seismes-pourquoi-on-ne-peut-pas-les-prevoir-58754">prédire les séismes</a>, l’accueil des sismomètres pourrait paraître superfétatoire. Pourtant, pour les sismo-citoyens, participer à un projet dont les résultats peuvent paraître lointains (des articles académiques dans des revues scientifiques) prend tout son sens.</p>
<p>Leur motivation est grande, leur fierté réelle, et ils démontrent sans cesse un grand intérêt à participer au projet. Chaque vibration du sol ressentie est « vérifiée » en ligne par l’hébergeur, pour voir si le sismomètre a bien fait son travail et mesuré la taille de l’évènement. Quand cela dysfonctionne, les scientifiques sont appelés. Quand ces derniers viennent visiter les dispositifs, pour les réparer par exemple, ils sont toujours bien reçus. Un groupe de discussion sur la plate-forme <em>WhatsApp</em> voit les hébergeurs échanger, se questionner, ou interpeller directement les sismologues quand une interrogation se présente.</p>
<h2>Un signal symbolique pour commémorer le séisme de 2010</h2>
<p>C’est justement cette forte implication qui interpelle les chercheurs. Elle a été démontrée une fois de plus le 12 janvier dernier, date anniversaire du <a href="https://www.dec.org.uk/article/2010-haiti-earthquake-facts-and-figures">séisme de 2010</a> qui a frappé l’agglomération de la capitale Port-au-Prince et provoqué la mort de dizaines de milliers de personnes et le déplacement de plus de 2 millions d’autres dans des camps de fortune.</p>
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<p>L’équipe de chercheurs a demandé aux sismo-citoyens de créer un <a href="https://www.facebook.com/p/Les-Sismo-citoyens-en-Ha%C3%AFti-100092265603680/">« séisme commémoratif »</a>. À l’heure exacte du séisme de 2010, ils devaient sauter à côté de leurs sismomètres pour créer des signaux sismiques enregistrés sur la plate-forme en ligne. L’enjeu pour les chercheurs n’était pas tant de savoir si les vibrations causées par ces sauts allaient être enregistrées – les sismomètres, s’ils sont bien branchés et connectés à Internet, sont très sensibles. Il s’agissait surtout de voir si cette idée de signal symbolique allait être acceptée et relayée par les sismo-citoyens.</p>
<p>Et ça a fonctionné ! Le 12 janvier 2024, à 16h53 précise, les sismomètres ont enregistré les vibrations provoquées par les sauts des sismo-citoyens. Certains se sont filmés lors de l’exercice, d’autres ont réuni voisins ou amis pour sauter de manière synchrone vers « la petite boîte qui fait beaucoup », tel qu’est décrit le sismomètre par un hébergeur. Dans la bonne humeur, et avec précision, le séisme commémoratif a mobilisé et a été enregistré.</p>
<h2>Un besoin de mémoire</h2>
<p>Cependant, la mémoire du 12 janvier 2010 est difficilement entretenue dans le pays : les sites mémoriels ont été délaissés, et les actions commémoratives ont été peu suivies.</p>
<p>Un <a href="https://haiti.loopnews.com/content/la-decouverte-dun-memorial-consacre-aux-disparus-du-12-janvier">mémorial</a> a laborieusement été construit près des fosses communes du séisme, mais s’est rapidement délabré. Si les autorités se recueillent annuellement au sein de leurs ministères ou devant de petites stèles, la population est peu conviée à ces temps de souvenirs, car elle est plus occupée à organiser sa survie quotidienne.</p>
<p>Décrété initialement jour férié, ce temps de souvenir et de deuil a été oublié des calendriers dès 2013. De manière générale, les <a href="https://journals.openedition.org/espacepolitique/8275">activités commémoratives sont organisées par la population</a> et au sein des familles : le saut collectif des participants au projet Osmose traduit bien le désir, et peut-être la nécessité, de rappeler la catastrophe et de la visibiliser pour ne pas qu’elle tombe dans l’oubli.</p>
<p><a href="https://journals.openedition.org/cal/3093">Haïti est un pays failli</a>, sur lequel le regard porté est souvent pessimiste. On égraine ses malheurs en les associant à des chiffres de morts dans une litanie d’un pays malade, voir « maudit ». Certes, il y a les séismes et les cyclones, l’économie vacillante et les instances politiques dépassées par une insécurité de tous les instants.</p>
<h2>Un pays disloqué par l’insécurité</h2>
<p>Depuis l’assassinat du Président Moïse, en 2021, les <a href="https://www.lemonde.fr/comprendre-en-3-minutes/article/2023/10/08/comment-les-gangs-ont-pris-le-controle-d-haiti-comprendre-en-trois-minutes_6193123_6176282.html">gangs ne cessent de s’affronter</a> et le pays vibre au son des combats qui déplacent les populations, coupent les routes (et les échanges marchands), ferment les écoles, provoquent la terreur.</p>
<p>La population a donc peu de droits respectés, de la même façon qu’elle a du mal à exercer ses devoirs citoyens. <a href="https://news.un.org/fr/story/2023/10/1139942">Les élections ne sont toujours pas organisées</a> et les autorités sont absentes, seulement incarnées par une police mal équipée et parfois défaillante.</p>
<p>L’impact sécuritaire des tirs et des affrontements qui rythment le quotidien entrave toutes les possibilités de développement, d’expression et d’exercice de la citoyenneté. <a href="https://www.banquemondiale.org/fr/news/feature/2023/11/15/school-attendance-and-a-keen-interest-in-learning-are-priorities-for-many-young-haitians">L’éducation et la santé sont difficiles d’accès</a> : seuls s’en sortent ceux qui peuvent payer. <a href="https://www.rfi.fr/fr/podcasts/journal-d-ha%C3%AFti-et-des-am%C3%A9riques/20230728-ha%C3%AFti-la-fuite-des-cerveaux-s-acc%C3%A9l%C3%A8re">Les personnes formées ont pour beaucoup fui le pays</a>, et les ONG ont des difficultés à travailler (par exemple, les hôpitaux de Médecins sans frontières <a href="https://www.msf.fr/communiques-presse/haiti-msf-condamne-fermement-la-violente-intrusion-armee-a-tabarre-et-suspend-ses-activites-a-l-hopital">ferment parfois leurs portes</a> après des attaques ou exactions de patients).</p>
<p>Une grande partie du pays est en <a href="https://fr.wfp.org/communiques-de-presse/la-faim-severe-persiste-en-haiti-alors-que-la-violence-dans-la-capitale">insécurité alimentaire</a>, non parce qu’il n’y a pas de production, mais parce que les routes sont coupées : la nourriture produite dans le pays n’accède pas aux centres urbains. Tout cela provoque <a href="https://www.iom.int/es/news/une-aide-essentielle-aux-haitiens-expulses">l’exode des Haïtiens</a> qui se retrouvent souvent en Amérique latine, d’où ils essaient de remonter vers les États-Unis.</p>
<p>Alors qu’une <a href="https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-enjeux-internationaux/le-deploiement-d-une-force-internationale-peut-il-sauver-haiti-3448257">force multinationale</a> pour rétablir la sécurité <a href="https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/01/26/au-kenya-la-justice-refuse-le-deploiement-de-policiers-a-haiti-le-president-n-abandonne-pas_6213196_3212.html">tarde à se mettre en place</a>, les Haïtiens sont toujours dans l’attente d’une solution pour pouvoir vivre dans un pays apaisé.</p>
<h2>Le désir d’agir des citoyens</h2>
<p><a href="https://www.cetri.be/Haiti-continuation-et-interruption">Les citoyens haïtiens sont pourtant là</a>. Ils luttent par le verbe notamment – la poésie, le chant, la prose, partagés lors de rencontres littéraires ou récités en ligne, <a href="https://www.haitiinter.com/">y compris par la diaspora</a>. Ils luttent aussi par leur participation sans faille à tout événement collectif, pour peu qu’on leur en donne les moyens. La voix des Haïtiens est clamée dans tous les réseaux d’entraide qu’ils organisent entre eux : on se serre les coudes pour faire des courses, circuler à travers le pays, se tenir au courant, via les réseaux sociaux, des zones qui s’enflamment pour pouvoir les éviter. On fait avancer la science également, pour le bénéfice du pays – à l’instar des « sismo-citoyens » – en s’investissant dans le projet Osmose.</p>
<p>Le séisme commémoratif est un de ces signes de « citoyenneté malgré tout ». Il démontre à quel point les citoyens haïtiens s’investissent, dès qu’on leur en donne les moyens, dans les activités collectives pour leurs pays. Il fait partie des nombreux actes de résistance – et d’existence – des habitants qui valorisent une citoyenneté qui leur est pourtant flouée au quotidien. Cette participation symbolique et scientifique est donc avant tout populaire et politique.</p>
<hr>
<p><em>Le projet <a href="https://anr.fr/Projet-ANR-21-CE03-0010">OSMOSE</a> est soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui finance en France la recherche sur projets. Elle a pour mission de soutenir et de promouvoir le développement de recherches fondamentales et finalisées dans toutes les disciplines, et de renforcer le dialogue entre science et société. Pour en savoir plus, consultez le site de l’<a href="https://anr.fr/">ANR</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222072/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Alice Corbet a reçu des financements de l'Agence nationale de la recherche (ANR) française dans le cadre du projet numéro ANR-21CE03-0010 intitulé OSMOSE. Les auteurs remercient toute l'équipe de OSMOSE sans qui tout ce travail ne pourrait être réalité. Site du projet : <a href="https://ayiti.unice.fr/osmose/fr/">https://ayiti.unice.fr/osmose/fr/</a> </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Éric Calais a reçu des financements de l'Agence nationale de la recherche (ANR) et du programme européen Interreg Caraïbes (projet PREST). </span></em></p>
À l’heure exacte du séisme de janvier 2010, des Haïtiens ont sauté à côté de sismomètres pour créer des signaux « commémoratifs » enregistrés sur une plate-forme en ligne.
Alice Corbet, Anthropologue, LAM, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
Éric Calais, Professeur, École normale supérieure (ENS) – PSL
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/202206
2023-06-21T18:37:55Z
2023-06-21T18:37:55Z
Nouvelle-Aquitaine : photographier le littoral pour en comprendre les évolutions
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/516419/original/file-20230320-20-g7v3r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C44%2C4940%2C3925&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">À Capbreton (Landes), une borne « Coastsnap » a été installée pour inviter les promeneurs à photographier le littoral.</span> <span class="attribution"><span class="source">Author provided</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><p>En France métropolitaine, plus de 25 % du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/littoral-24000">littoral</a> est confronté au risque d’érosion côtière, tandis <a href="https://observatoires-littoral.developpement-durable.gouv.fr/chiffres-cles-r9.html">que 1,4 million d’habitants seraient exposés à la submersion marine</a>. Si la façade néo-aquitaine, qui compte 839 km de rivage, est l’une des moins artificialisées de l’Hexagone, elle est aussi la deuxième façade métropolitaine la plus affectée par <a href="https://theconversation.com/fr/topics/erosion-31710">l’érosion</a>, après le Nord-Ouest.</p>
<p>Phénomène naturel à l’œuvre depuis des milliers d’années sur le littoral atlantique, le recul du <a href="http://www.observatoire-cote-aquitaine.fr/Qu-est-ce-que-le-trait-de-cote">trait de côte</a> se caractérise par un déplacement massif de sédiments sous l’effet des vagues, des vents et des marées.</p>
<p>D’ici à 2050, le littoral sableux de la Gironde et des Landes pourrait ainsi perdre en moyenne <a href="http://www.observatoire-cote-aquitaine.fr/Littoral-aquitain-de-nouvelles-projections-de-l-erosion-jusqu-en-2050">50 mètres, et les côtes rocheuses du Pays basque 27 mètres</a>. En Charente-Maritime, tout au sud de l’île d’Oléron, sur la pointe de Gatseau, la mer grignote, en moyenne, une vingtaine de mètres par an. C’est l’un des endroits d’Europe <a href="https://www.nouvelle-aquitaine.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/25_rapport_de_presentation_oleron_cle0c67ec.pdf">qui subit le plus fort recul du trait de côte</a>.</p>
<h2>Observer les côtes, accompagner les politiques publiques</h2>
<p>Créé en 1996, l’<a href="http://www.observatoire-cote-aquitaine.fr/">Observatoire de la côte de Nouvelle-Aquitaine</a> (OCNA) a pour rôle de mettre au service des acteurs du littoral un outil d’observation, d’aide à la décision et de partage de la connaissance pour la gestion et la <a href="https://theconversation.com/sur-le-littoral-notre-rapport-a-la-nature-change-en-meme-temps-que-le-climat-189582">prévention des risques côtiers</a>. L’idée est ainsi de favoriser <a href="https://theconversation.com/sur-le-littoral-notre-rapport-a-la-nature-change-en-meme-temps-que-le-climat-189582">l’adaptation au recul du trait de côte</a>.</p>
<p>Pourquoi ne pas faire appel aux promeneurs pour en documenter les évolutions ? En se baladant le long du littoral de Nouvelle-Aquitaine, ils peuvent désormais apercevoir de petits panneaux métalliques jaunes surplombant certaines plages et incitant les passants à devenir, l’espace d’un instant, acteurs du suivi du littoral.</p>
<p>Il s’agit de postes d’observation déployés dans le cadre de <a href="https://coastsnap-nouvelle-aquitaine.fr/">CoastSnap Nouvelle-Aquitaine</a>, un nouveau système de suivi participatif, installé à l’automne 2021. Son fonctionnement, particulièrement simple, est basé sur les photos prises par les citoyens à l’aide de leur smartphone, depuis un même point fixe.</p>
<p>Leur envoi, via différents canaux (formulaire web, mail ou application), va ensuite alimenter une importante base de données d’images qui seront utilisées pour mieux saisir et analyser les évolutions du littoral à différentes échelles de temps.</p>
<h2>Un outil participatif né en Australie</h2>
<p>Développée en 2017 par une équipe de <a href="https://www.coastsnap.com/">chercheurs australiens de l’Université de New South Wales</a>, l’initiative CoastSnap a pour objectif de cartographier les changements à l’œuvre à partir de contributions citoyennes.</p>
<p>Elle est complémentaire d’autres outils utilisés par les scientifiques : mesures terrain au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/GPS_diff%C3%A9rentiel">DGPS</a>, un GPS différentiel de précision centimétrique, imagerie vidéo (webcams par exemple), images satellites.</p>
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<p>CoastSnap présente l’avantage de recueillir des observations très régulières, de façon quotidienne, tout en sensibilisant les citoyens à l’évolution du littoral et aux risques existants au niveau des zones côtières. Cette nouvelle source de données reste également plus économique que les mesures classiques ou les webcams, qui consomment de l’énergie et génèrent des coûts de maintenance.</p>
<p>Cet outil participatif innovant a donc séduit l’Observatoire de la côte de Nouvelle-Aquitaine. Tout en s’inscrivant au sein du réseau international CoastSnap, il a choisi de réunir un consortium de partenaires locaux afin de développer le projet dans la région : le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), l’Office national des forêts (ONF) – principaux opérateurs techniques de l’OCNA, ainsi que le Centre aquitain des technologies de l’information et électroniques (CATIE), spécialiste des technologies du numérique.</p>
<p>Trois sites pilotes de la côte de Nouvelle-Aquitaine ont été sélectionnés pour l’installation d’un poste d’observation. L’un à Lacanau (Gironde), l’autre à Capbreton (Landes) et le dernier à Saint-Jean-de-Luz (Pyrénées-Atlantiques). Ces lieux sont implantés dans chaque département de l’ex-région Aquitaine et présentent des sites aux environnements et problématiques d’érosion différents. L’objectif est d’aménager dans les mois à venir de nouveaux postes dans la région, notamment en Charente-Maritime.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/516434/original/file-20230320-195-t9jmcc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/516434/original/file-20230320-195-t9jmcc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/516434/original/file-20230320-195-t9jmcc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=477&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/516434/original/file-20230320-195-t9jmcc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=477&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/516434/original/file-20230320-195-t9jmcc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=477&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/516434/original/file-20230320-195-t9jmcc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=599&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/516434/original/file-20230320-195-t9jmcc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=599&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/516434/original/file-20230320-195-t9jmcc.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=599&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Situation géographique (a) et photos des postes d’observation CoastSnap de Nouvelle-Aquitaine (b, c, d).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Plus de 3 000 photos reçues</h2>
<p>Résultat : près de quinze photos par semaine en moyenne sont partagées par les citoyens sur chacun des trois sites, portant ainsi le total à plus de 3 000 clichés reçus fin mai 2023.</p>
<p>La photo ci-dessous illustre les clichés « types » pris depuis ces stations. La base de données d’images constituée, le travail d’analyse et de traitement a pu débuter pour les équipes du projet dont l’œil avisé cherche à extraire les informations pertinentes.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/516435/original/file-20230320-1425-sbmzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/516435/original/file-20230320-1425-sbmzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/516435/original/file-20230320-1425-sbmzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=154&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/516435/original/file-20230320-1425-sbmzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=154&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/516435/original/file-20230320-1425-sbmzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=154&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/516435/original/file-20230320-1425-sbmzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=193&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/516435/original/file-20230320-1425-sbmzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=193&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/516435/original/file-20230320-1425-sbmzh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=193&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Photos types prises depuis les postes de Lacanau-Océan (a), Santocha à Capbreton (b) et Lafitenia à Saint-Jean-de-Luz (c).</span>
</figcaption>
</figure>
<p>Un suivi quantitatif des mouvements côtiers n’est possible qu’à partir d’images géoréférencées, dont les coordonnées des pixels dans un repère réel sont connues.</p>
<p>Ce n’est pas le cas des images brutes envoyées par les promeneurs, qui sont des images dites « obliques » (ou de biais). Un traitement technique, appelé orthorectification, est réalisé par les équipes de l’Observatoire afin d’aligner les images entre elles et de les projeter sur un plan horizontal.</p>
<p>Les images sont ainsi traitées avec une grande précision et permettent de caractériser la dynamique littorale de façon quantitative.</p>
<p><a href="https://www.paralia.fr/jngcgc/17_50_robinet.pdf">Des applications récentes de l’outil CoastSnap</a> ont permis le suivi de la hauteur de la plage en pied d’ouvrage à Lacanau (l’enrochement situé sur le front de mer), ainsi que celui de l’érosion du bourrelet sableux de protection à Capbreton. Il s’agit d’un apport de sable effectué par rechargement une fois par an et profilé avec la forme d’un merlon pour protéger la dune en arrière. Le changement d’orientation de la plage de Lafitenia à Saint-Jean-de-Luz a également pu être observé avec attention.</p>
<h2>Mieux comprendre les dynamiques littorales</h2>
<p>L’intérêt de disposer d’images aussi fréquentes (quasi quotidiennes) est de pouvoir identifier les causes d’évolution des sites à différentes échelles, de l’échelle d’une tempête à l’échelle pluriannuelle.</p>
<p>Ces suivis permettent aux scientifiques de mieux comprendre la dynamique littorale et son lien avec les conditions météo-marines, tout en fournissant aux gestionnaires des indicateurs haute fréquence sur l’état des sites.</p>
<p>Coastnap vient donc appuyer les stratégies de lutte contre l’érosion engagées par les collectivités locales.</p>
<p>Aujourd’hui, de nombreux pays dans le monde profitent des avantages de ce système, parmi lesquels l’Angleterre, l’Espagne, le Portugal, la Belgique, les Pays-Bas, le Brésil, les États-Unis, l’Inde ou encore le Mozambique.</p>
<p>Plus de 200 stations CoastSnap sont ainsi présentes dans 21 États. En France, on compte déjà plus d’une vingtaine de ces installations réparties le long du littoral métropolitain, portées par les observatoires du littoral ou les universités (notamment l’Observatoire citoyen du littoral et l’Observatoire régional des risques côtiers en Pays de Loire). Elles permettront, sans nul doute, d’améliorer la compréhension et la gestion de ces zones si fragiles.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Science et Société se nourrissent mutuellement et gagnent à converser. La recherche peut s’appuyer sur la participation des citoyens, améliorer leur quotidien ou bien encore éclairer la décision publique. C’est ce que montrent les articles publiés dans notre série « Science et société, un nouveau dialogue », publiée avec le soutien du <a href="https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr">ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/202206/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sophie Lecacheux ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Depuis l’automne 2021, un projet de science participative, baptisé CoastSnap, permet d’aider à cartographier l’évolution du littoral aquitain. Objectif : mieux le comprendre pour mieux le préserver.
Sophie Lecacheux, Ingénieur risques BRGM, BRGM
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/196885
2023-01-17T17:51:38Z
2023-01-17T17:51:38Z
Tiques : décrypter nos perceptions pour mieux se protéger ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/502125/original/file-20221220-6047-hfb971.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=26%2C39%2C2860%2C1864&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Lièvre en proie aux piqûres de tiques.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Dominique Gest – Fédération Nationale des Chasseurs</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p><a href="https://theconversation.com/fr/topics/tiques-27431">La problématique des tiques</a> revient régulièrement dans le débat public en France, que ce soit à travers les médias, la mobilisation de malades, les études scientifiques ou les propositions politiques.</p>
<p>Ainsi, l’association <a href="https://francelyme.fr/site/">France Lyme</a> a été fondée en 2008 autour de revendications de prise en charge de personnes atteintes par la borréliose ou maladie de Lyme, qui peut être <a href="https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-a-transmission-vectorielle/borreliose-de-lyme/la-maladie/">transmise par des tiques infectées</a>, et particulièrement la demande de reconnaissance d’une <a href="https://www.ouest-france.fr/sante/maladie-de-lyme-mobilisation-pour-une-meilleure-prise-en-charge-5010328">forme chronique de la maladie</a>.</p>
<hr>
<p>
<em>
<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-tiques-des-animaux-venimeux-120246">Les tiques, des animaux venimeux ?</a>
</strong>
</em>
</p>
<hr>
<p>Dans le champ politique, deux rapports de l’Assemblée nationale ont été publiés en <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/lymefin/l15b3937_rapport-information">mars 2021</a> et <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/lyme/l15b4318_rapport-information">juillet 2021</a>. Des « points de crispation » ne sont pas éludés, notamment des controverses sur la question de troubles chroniques.</p>
<p>Sur le plan de l’expertise des agences liées à l’État, la Haute autorité de santé (HAS) a publié en mars 2022 un <a href="https://www.has-sante.fr/jcms/p_3324045/fr/lyme-la-has-publie-un-guide-de-parcours-de-soins-structure-en-cas-de-suspicion-de-la-maladie">guide de parcours de soin</a>, structuré autour de la prise en charge des patients et afin de « réduire l’errance médicale ».</p>
<h2>La perception des tiques, un impensé ?</h2>
<p>Enfin, dans la presse, <a href="https://www.liberation.fr/france/2019/05/06/maladie-de-lyme-ca-tique-sur-le-diagnostic_1725323/">quotidiens</a> comme <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/tag_theme/tiques_44049/">magazines</a> se font régulièrement le relais d’experts, médecins et associatifs. Beaucoup d’articles <a href="https://theconversation.com/fr/topics/tiques-27431">publiés sur le sujet</a> mettent notamment l’accent sur la dimension de santé publique, de <a href="https://theconversation.com/maladie-de-lyme-attention-au-sur-diagnostic-117037">prévention</a>, et les <a href="https://theconversation.com/maladie-de-lyme-vers-une-reconnaissance-de-la-forme-chronique-120260">débats</a> relatifs à la maladie de Lyme.</p>
<p>Le volet des perceptions sociales, toutefois, a été moins abordé. Parmi les publications académiques d’Amérique du Nord sorties <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/31524886/">jusqu’en 2016</a>, des chercheurs ont dégagé 2 258 articles sur les tiques, parmi lesquels seuls 8,9 % portent sur les savoirs et représentations, quand 32,6 % concernent la pertinence des tests de dépistage.</p>
<p>La problématique des tiques interroge pourtant à la fois les interactions société-nature et la <a href="https://www.anses.fr/fr/content/one-health">santé globale</a>, par exemple pour <a href="https://www.anses.fr/fr/system/files/Pres2022CPA08.pdf">cartographier les zones les plus marquées d’activité des tiques</a>.</p>
<h2>Enquête de terrain dans l’Est</h2>
<p>Au sein d’un <a href="https://oscahr.unistra.fr/dossiers/d%C3%A9couvrir-le-projet-interdisciplinaire-idex-tiques">projet pluridisciplinaire</a>, nous avons étudié <a href="https://www.editionsbdl.com/produit/des-tiques-et-des-hommes-chronique-dune-nature-habitable/">d’un point de vue sociologique</a> les représentations professionnelles et sociales des tiques à partir d’un travail de terrain mené dans la <a href="https://oscahr.unistra.fr/parcours-geographiques/sites-dint%C3%A9r%C3%AAt-projet-idex-tiques">région rurale et forestière d’Argonne</a> ; cette zone de nature, qui s’étend sur les départements de la Marne, des Ardennes et la Meuse, est propice à favoriser les rencontres humains-tiques.</p>
<p><a href="https://www.zarg.fr/themes-de-recherche/themes-de-recherche,24088,39662.html">Une interface</a> associant chercheurs et <a href="https://argonne-pnr.fr/">acteurs locaux</a> y étant implantée, nous avons opté pour une démarche de <a href="http://publictionnaire.huma-num.fr/notice/sciences-et-recherches-participatives/">sciences participatives</a>, en enquêtant auprès des <a href="https://oscahr.unistra.fr/billets/rencontrer-les-partenaires-du-projet-collaboratif-idex-tiques">chasseurs, forestiers, agriculteurs, associations de nature et randonneurs</a>, à l’aide d’entretiens, d’observations directes et de questionnaires.</p>
<p>Recueillir la diversité des perceptions et des savoirs d’usage sur un même territoire vient compléter les déclarations individuelles de piqûres encouragées par ailleurs au sein du <a href="https://theconversation.com/les-sciences-participatives-et-la-demarche-scientifique-85198">projet CiTIQUE</a> porté par l’Inrae.</p>
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<figcaption><span class="caption">Une approche sociologique de la question des tiques (Aude Dziebowski/Youtube, 2023)</span></figcaption>
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<h2>« Connaissances rurales »</h2>
<p>Nous avons interrogé les différents groupes d’acteurs par rapport aux trois niveaux des connaissances, des représentations et des pratiques liées aux tiques. Les savoirs renvoient à une inscription locale dans « la ruralité », rapportée à des traditions et à des connaissances. Un technicien cynégétique avance :</p>
<blockquote>
<p>« Il y a une somme de connaissances rurales. Si je veux être un chasseur de migrateurs, il faut que je m’y connaisse un petit peu, il y a des endroits où je vais être sur des passages, etc. »</p>
</blockquote>
<p>La formation aux enjeux écologiques ou médicaux liés aux tiques n’apparaît pas première, qu’il s’agisse des fédérations de chasseurs comme des associations de sport nature. Les connaissances exprimées sont légitimées par l’observation directe de tel lieu, telle faune, telle saison.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/502120/original/file-20221220-6066-2cacbf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502120/original/file-20221220-6066-2cacbf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502120/original/file-20221220-6066-2cacbf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502120/original/file-20221220-6066-2cacbf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502120/original/file-20221220-6066-2cacbf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502120/original/file-20221220-6066-2cacbf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502120/original/file-20221220-6066-2cacbf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Observation participante au cœur d’une battue de chasse au grand gibier organisée par la Fédération des chasseurs des Ardennes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Aude Dziebowski/UMR SAGE</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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<p>Les représentations des tiques sont empreintes de ce répertoire localisé : qu’il soit question de zones de concentration, d’un sentiment de risque ou non à se rendre en forêt ou en prairie, ou encore des facteurs explicatifs perçus à la présence des tiques, il n’y a pas un unique corpus scientifique qui soit directement approprié.</p>
<p>Les modes de compréhension et d’action renvoient aux savoirs vécus dans leur diversité et à des usages au quotidien. Ainsi de la faune sauvage, et notamment du grand gibier. Servant d’hôte aux tiques, l’accroissement de sa population en Argonne peut contribuer à la prolifération des acariens.</p>
<h2>Chacun peut aller de son interprétation</h2>
<p>Selon les positions des uns et des autres, les récits produits impliquent d’abord les chasseurs (qui auraient favorisé des surpopulations de chevreuils et de sangliers pour garantir des sorties fructueuses et des lots de chasse rentables…) ou, au contraire, les propriétaires fonciers et/ou l’Office national des forêts (une gestion d’abord économique des forêts se ferait au détriment de leur entretien, sachant que c’est notamment en sous-bois, plus précisément dans les peuplements de fougères ou de ronces, que se complaisent les tiques…).</p>
<p>Il n’est alors pas surprenant que le dérèglement climatique (hivers sans gelées, intempéries, etc.) soit souvent mis en avant, car ce facteur global remet moins directement en cause des pratiques territorialisées, comme l’agrainage (nourrir artificiellement le gibier) ou les pratiques culturales intensives. Pour autant, des lectures systémiques ressortent auprès d’interviewés de différents milieux, soulevant une relation entre pratiques favorables à la biodiversité, équilibre forêt-faune et non-prolifération de tiques, à l’instar de ce chasseur :</p>
<blockquote>
<p>« Moi, je suis pas scientifique […] mais je me dis que plus j’ai de passereaux, moins j’ai de tiques. Finalement, il y a une grande corrélation entre la régulation des ongulés, la dynamique forestière et l’architecture globale d’un milieu, qui peut vraiment être intéressante en matière de capacité d’accueil multiespèces. »</p>
</blockquote>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/502126/original/file-20221220-26-ucz402.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="cervidés dans une forêt" src="https://images.theconversation.com/files/502126/original/file-20221220-26-ucz402.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502126/original/file-20221220-26-ucz402.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502126/original/file-20221220-26-ucz402.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502126/original/file-20221220-26-ucz402.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502126/original/file-20221220-26-ucz402.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502126/original/file-20221220-26-ucz402.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502126/original/file-20221220-26-ucz402.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Jeunes cervidés au parc animalier de Charleville-Mézières.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Aude Dziebowski, UMR SAGE, 08/12/2021</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Responsabilité individuelle</h2>
<p>La problématique des tiques est révélateur de transformations entre les communautés humaines et leur milieu, ainsi qu’un miroir de la société sur elle-même. C’est aussi le cas dans la construction des rapports au risque. À la dimension territoriale se superpose <a href="http://publictionnaire.huma-num.fr/notice/gouvernementalite/">une « gouvernementalisation » de l’enjeu</a>.</p>
<p>Sur ce plan, l’attention portée par les responsables cynégétiques, sylvicoles ou associatifs exprime d’abord une mise en responsabilité individuelle des chasseurs, forestiers et randonneurs : se vêtir de façon protectrice (pantalon et manches longues, chapeau, guêtres…), se munir de tire-tiques voire de répulsif, opérer sur soi un contrôle visuel systématique après l’activité, etc.</p>
<p>Notre enquête a montré des transactions permanentes par rapport à ces principes affirmés, par exemple en été quand la chaleur détourne des vêtements couvrants, ou lorsque chasseurs comme forestiers se passent de gants pour saisir un animal pouvant être porteur de tiques.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="personnes qui randonnent sur un chemin dans la nature" src="https://images.theconversation.com/files/502122/original/file-20221220-23-trarsj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502122/original/file-20221220-23-trarsj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502122/original/file-20221220-23-trarsj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502122/original/file-20221220-23-trarsj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502122/original/file-20221220-23-trarsj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502122/original/file-20221220-23-trarsj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502122/original/file-20221220-23-trarsj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Observation participante d’une sortie sport nature avec les randonneurs de la Grande Traversée de l’Argonne 2022 : de Varennes-en-Argonne à Châtel-Chéhéry.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sophie Henck, UMR SAGE, 28/05/2022</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<h2>Préserver l’image d’une nature idéalisée</h2>
<p>C’est que l’objectif préventif de « bonnes pratiques » n’est pas tout. Il ne s’agit pas d’inverser les représentations sociales positives d’une nature idéalisée, d’une forêt « productive et dynamique » pour les professions sylvicoles, d’un attachement à un imaginaire rural ou encore de loisirs familiaux ou touristiques.</p>
<p>Entendons respectivement le responsable d’un domaine forestier privé et le président d’une association de randonneurs :</p>
<blockquote>
<p>« On sait, quand on monte dans sa bagnole, qu’on a une chance de mourir sur la route mais elle est minime. […] On va à peu près avec la même philosophie en forêt. […] On sait que le soir il faut peut-être se regarder un peu. […] “Faut surtout plus aller en forêt parce que c’est un milieu hostile !” : non, on fait pas vraiment ça. […] Quand je suis en forêt, je me sens bien, c’est apaisant. » </p>
<p>« Leur dire “attention, il y a ça, ça"… On est venu pour souffler, pour avoir des contacts. […] C’est pas la peine d’affoler tout le monde. »</p>
</blockquote>
<p>Cette mise à l’écart d’expressions jugées alarmistes est la marque d’un cadrage socio-environnemental : ne pas transformer l’échelle de valeurs attachées aux espaces de nature ; et d’une mise en responsabilité : inviter tout un chacun à une attention comportementale permet de ne pas creuser des tensions territorialisées entre groupes professionnels et sociaux, avec les politiques de développement local en arrière-plan.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/502124/original/file-20221220-17-o8li8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="panneaux explicatifs dans une forêt" src="https://images.theconversation.com/files/502124/original/file-20221220-17-o8li8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/502124/original/file-20221220-17-o8li8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/502124/original/file-20221220-17-o8li8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/502124/original/file-20221220-17-o8li8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=343&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/502124/original/file-20221220-17-o8li8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/502124/original/file-20221220-17-o8li8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/502124/original/file-20221220-17-o8li8q.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=431&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Panneaux informatifs et de signalisation implantés par l’Office national des forêts (ONF) à l’entrée d’une route forestière de la forêt domaniale de Francbois-Bryas, dans les Ardennes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Aude Dziebowski/UMR SAGE</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<hr>
<p><em>Pour aller plus loin, <a href="https://www.editionsbdl.com/produit/des-tiques-et-des-hommes-chronique-dune-nature-habitable/">Des tiques et des hommes : chronique d’une nature habitable. Entre territorialisation, sanitarisation et responsabilisation</a>, de Philippe Hamman et Aude Dziebowski, éditions Le Bord de l’eau, juin 2023.</em></p>
<p><em>Carole Waldvogel, ingénieure de recherche au laboratoire Sociétés, acteurs, gouvernement en Europe (Université de Strasbourg & CNRS) a participé à la recherche sociologique évoquée dans cet article.</em></p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Science et Société se nourrissent mutuellement et gagnent à converser. La recherche peut s’appuyer sur la participation des citoyens, améliorer leur quotidien ou bien encore éclairer la décision publique. C’est ce que montrent les articles publiés dans notre série « Science et société, un nouveau dialogue », publiée avec le soutien du <a href="https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr">ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/196885/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Philippe Hamman a reçu un soutien financier de l’IdEx de l’Université de Strasbourg dans le cadre de son levier Université et Cité, pour la période du 01/09/2021 au 28/02/2023. Le projet IdEx « Impacts des modifications socio-écologiques sur les maladies à tiques et leurs représentations professionnelles et sociales » a ainsi bénéficié d’une aide de l’État gérée par l’Agence Nationale de la Recherche au titre du programme d’Investissements d’avenir.
Philippe Hamman est également titulaire de la Chaire Jean Monnet «Governance of Integrated Urban Sustainability in Europe (GoInUSE) : Scales, Actors and Citizenship» (2020-2023), financée par la Commission européenne (Réf. : 619635-EPP-1-2020-1-FR-EPPJMO-CHAIR), qui interroge les interactions entre territoires et enjeux socio-environnementaux : <a href="https://sage.unistra.fr/membres/enseignants-chercheurs/chaire-goinuse/">https://sage.unistra.fr/membres/enseignants-chercheurs/chaire-goinuse/</a></span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Aude Dziebowski a reçu un soutien financier de l’IdEx de l’Université de Strasbourg dans le cadre de son levier Université et Cité, pour la période du 01/09/2021 au 28/02/2023. Le projet IdEx « Impacts des modifications socio-écologiques sur les maladies à tiques et leurs représentations professionnelles et sociales » a ainsi bénéficié d’une aide de l’État gérée par l’Agence Nationale de la Recherche au titre du programme d’Investissements d’avenir.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sophie Henck a reçu un soutien financier de l’IdEx de l’Université de Strasbourg dans le cadre de son levier Université et Cité, pour la période du 01/09/2021 au 28/02/2023. Le projet IdEx « Impacts des modifications socio-écologiques sur les maladies à tiques et leurs représentations professionnelles et sociales » a ainsi bénéficié d’une aide de l’État gérée par l’Agence Nationale de la Recherche au titre du programme d’Investissements d’avenir.</span></em></p>
Peu étudiée, la représentation sociale des tiques joue pourtant un rôle dans la façon dont on perçoit sa présence et dont on s’en protège.
Philippe Hamman, Professeur de sociologie, Université de Strasbourg
Aude Dziebowski, Chercheuse, Université de Strasbourg
Sophie Henck, Ingénieure d'études, Université de Strasbourg
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/174383
2022-10-19T17:17:15Z
2022-10-19T17:17:15Z
PlantNet, eBird, Spipoll, iNaturalist… ces applis au service de l’i-écologie
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/488878/original/file-20221009-58516-slbhsv.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’application Pl@ntnet permet à partir d’un smartphone de reconnaître une espèce et la recenser pour contribuer à son étude. </span> <span class="attribution"><span class="source">Pl@ntnet</span></span></figcaption></figure><p>Le déclin alarmant de la biodiversité terrestre menace le bien-être futur de l’humanité, notamment <a href="https://www.nature.com/articles/nature11148">par la réduction de tous les services (dit « écosystémiques »)</a> auxquels cette biodiversité contribue.</p>
<p>L’amélioration des connaissances sur les pressions qui s’exercent sur le vivant – fragmentation des habitats, urbanisation croissante ou intensification agricole – a permis une large prise de conscience de la société civile, qui se mobilise désormais contre les causes du changement climatique et pour une meilleure conservation des espèces vivantes.</p>
<p>Le manque d’expertise taxonomique – qui désigne notre capacité à identifier les espèces – est reconnu depuis près d’une trentaine d’années <a href="https://docs.rwu.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1075&context=fcas_fp">comme un frein majeur</a> à l’application de la Convention sur la diversité biologique.</p>
<p>C’est pourquoi de nombreuses initiatives à travers le monde expérimentent de nouvelles formes d’accès à cette connaissance taxonomique.</p>
<p>Certaines d’entre elles visent à répondre à la demande croissante de connaissances, tout en impliquant la société dans la caractérisation et l’étude de son environnement. Elles participent ainsi au développement de plates-formes de sciences participatives pour le suivi des oiseaux, comme <a href="https://ebird.org/home">eBird</a>, des insectes pollinisateurs, comme <a href="https://www.spipoll.org/">Spipoll</a>, ou encore de la biodiversité dans son ensemble, comme <a href="https://www.inaturalist.org/">iNaturalist</a>.</p>
<h2>L’exemple de la plate-forme Pl@ntNet</h2>
<p>Les plantes représentant l’une des sources majeures de notre alimentation et de la structuration des écosystèmes, quelques plates-formes se sont spécialisées dans leur identification et leur recensement.</p>
<p><a href="https://hal.inria.fr/hal-01182775/document">C’est le cas de Pl@ntNet</a>, initiée il y a plus d’une dizaine d’années, par un consortium de recherche français (Cirad, Inrae, Inria, IRD), et qui mobilise des expertises complémentaires, à la frontière entre sciences informatiques et sciences du végétal.</p>
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<figcaption><span class="caption">Présentation de l’application Pl@ntNet (Inria, 2014).</span></figcaption>
</figure>
<p>Cette plate-forme de science participative, <a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/pdfdirect/10.1002/2688-8319.12023">utilisée aussi bien par le grand public que par des professionnels de la gestion et de la conservation</a>, est aujourd’hui l’une des principales sources d’information sur les plantes au sein du système d’information mondial sur la biodiversité, le <a href="https://www.gbif.org/publisher/da86174a-a605-43a4-a5e8-53d484152cd3">GBIF</a>.</p>
<p>Elle expérimente et développe des services d’identification automatisée des plantes par l’image, qui permettent à partir d’un smartphone de rapidement reconnaître une espèce et la recenser pour contribuer à son étude.</p>
<p>Avec plusieurs centaines de milliers d’utilisateurs journaliers, et un nombre croissant de contributeurs depuis sa création (<a href="https://identify.plantnet.org/fr/stats">statistiques Pl@ntNet</a>), elle permet aujourd’hui le recensement de plus de 43 000 espèces de plantes à l’échelle mondiale.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Les données qu’elle génère ont été utilisées dans un grand nombre d’études différentes, que ce soit dans le <a href="https://bsapubs.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/aps3.1029">suivi des espèces envahissantes</a>, sur les <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0232078">biais de collecte de données</a> issues des programmes de sciences participatives, dans des <a href="http://ceur-ws.org/Vol-3180/paper-153.pdf">travaux en sciences informatiques</a>, ou encore pour <a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/2041-210X.13565">l’étude des espèces à plus large échelle</a> (dont les <a href="https://www.gbif.org/resource/search?contentType=literature&publishingOrganizationKey=da86174a-a605-43a4-a5e8-53d484152cd3">publications sur les données publiées au Gbif</a>).</p>
<h2>Vers le développement d’une i-écologie</h2>
<p>La force de ces nouvelles plates-formes naturalistes repose sur trois aspects principaux :</p>
<ul>
<li><p>leur très grande accessibilité (applications web et mobiles gratuites, multilingues, avec authentification facultative) ;</p></li>
<li><p>leurs performances liées aux vastes corpus de données sur lesquelles elles s’appuient ainsi qu’à l’usage de l’intelligence artificielle qui contribue à rapidement identifier les espèces par des données multimédias ;</p></li>
<li><p>leur visibilité qui résulte de l’intérêt grandissant de la société civile pour ce type de démarche.</p></li>
</ul>
<p>Ces plates-formes contribuent ainsi au développement d’une nouvelle approche scientifique en écologie, <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S016953472030077X">intitulée l’i-Ecology</a> (i-écologie), qui permet d’apporter un soutien précieux aux approches plus conventionnelles.</p>
<p>Malgré les efforts d’initiatives comme eBird, Pl@ntNet et iNaturalist, ou encore des sites et projets universitaires, pour caractériser les espèces à l’échelle mondiale, reste que près de la moitié des plantes sur Terre n’ont certainement <a href="https://rdcu.be/cqO96">jamais été photographiées à l’état sauvage</a> !</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/-t-0xAjxakw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Présentation de l’application eBird. (Cornell Lab of Ornithology, 2018).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Mobiliser toujours plus d’observateurs</h2>
<p>Ce constat de notre méconnaissance de la biodiversité engage à poursuivre les efforts initiés pour renforcer notre capacité à recenser toutes ces espèces qui nous entourent, plus facilement et plus rapidement. Dans cet objectif, la mise en commun des expertises et des données est indispensable pour accélérer la caractérisation de la distribution de la biodiversité.</p>
<p>La numérisation des collections d’histoire naturelle, à travers des initiatives telles qu’<a href="https://www.idigbio.org/">iDigBio</a> ou <a href="https://www.recolnat.org/fr/">e-ReColNat</a>, constitue un pas important en ce sens. Elles doivent être complétées par des observations sur le terrain, produites en plus grand nombre, pour permettre de connaître tout le gradient visuel exprimé par les espèces. Comment sinon protéger les espèces en danger si on ne peut les reconnaître ? !</p>
<p><a href="https://doi.org/10.1098/rstb.2003.1442">Les techniques automatiques d’identification d’espèces</a> imaginées par Gaston et O’Neill en 2004 ont énormément progressé au cours des quinze dernières années. Elles permettent aujourd’hui d’envisager des approches intégrées au sein de dispositifs autonomes, que ce soit <a href="https://doi.org/10.1371/journal.pone.0188714">pour le suivi d’espaces naturels</a> ou <a href="https://doi.org/10.1002/aps3.11373">agricoles</a>.</p>
<p>Le passage à l’échelle de ce type d’approche nécessite toutefois un nombre bien plus important d’observations et d’observateurs de terrain. C’est pourquoi, plus que jamais, les réseaux citoyens de suivi de la biodiversité doivent poursuivre leur développement en favorisant le partage de données libres, tout en répondant aux attentes d’une meilleure connaissance de notre environnement proche.</p>
<p>Ces technologies sont au cœur de plusieurs initiatives européennes d’ampleur en cours et à venir – on peut citer <a href="https://cos4cloud-eosc.eu/">Cos4Cloud</a>, <a href="https://cordis.europa.eu/project/id/101060639">EU-MAMBO</a> et <a href="https://cordis.europa.eu/project/id/101060693">EU-GUARDEN</a> –, ce qui permettra sans nul doute leur plus large exploitation dans le futur.</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=292&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/487264/original/file-20220929-18-btga69.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=367&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Science et Société se nourrissent mutuellement et gagnent à converser. La recherche peut s’appuyer sur la participation des citoyens, améliorer leur quotidien ou bien encore éclairer la décision publique. C’est ce que montrent les articles publiés dans notre série « Science et société, un nouveau dialogue », publiée avec le soutien du <a href="https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/fr">ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174383/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pierre Bonnet est responsable du projet <a href="mailto:Pl@ntnet">Pl@ntnet</a>. Il a reçu des financements de la Fondation Agropolis, l'ANR, l'ANRU, l'Institut de convergence #DigitAG, et l'Union européenne.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Alexis Joly est responsable du projet <a href="mailto:Pl@ntnet">Pl@ntnet</a>. Il a reçu des financements de la Fondation Agropolis, l'ANR, l'ANRU, l'Institut de convergence #DigitAG, et l'Union européenne.</span></em></p>
À l’aide d’un simple smartphone, on peut contribuer à une meilleure connaissance de la biodiversité, aussi foisonnante et méconnue que menacée.
Pierre Bonnet, Chercheur en Botanique et Informatique appliqué à la biodiversité, Cirad
Alexis Joly, Docteur en informatique, Inria
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/169183
2021-10-28T18:59:11Z
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Les sciences participatives, un outil pédagogique à développer
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/428851/original/file-20211027-27-k0m6cx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=40%2C45%2C1520%2C1135&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les sciences et recherches participatives sont définies comme des « formes de production de connaissances scientifiques auxquelles des acteurs non-scientifiques-professionnels, qu’il s’agisse d’individus ou de groupes, participent de façon active et délibérée ».</span> <span class="attribution"><span class="source">Nathalie Andriamamonjy</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Science et société dialoguent en continu. Les chercheurs qui « font la science » sont aussi des citoyens, de même que les citoyens « lambda » ne sont pas pour autant dénués de savoirs à même de contribuer à la fabrique de la science. Si cette interaction entre science institutionnelle et citoyens a toujours existé, elle est aujourd’hui mise en lumière à travers les sciences et recherches participatives (SRP).</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/428853/original/file-20211027-25-12uh34w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"><em>Tree bodyguards</em> est un projet de science participative à l’échelle européenne qui implique un réseau de classes et de scientifiques dans l’étude de la résistance des arbres aux attaques d’insectes herbivores.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Nathalie Andriamamonjy</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
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</figure>
<p>Celles-ci <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02801940/">sont définies</a> comme des « formes de production de connaissances scientifiques auxquelles des acteurs non scientifiques professionnels, qu’il s’agisse d’individus ou de groupes, participent de façon active et délibérée ». Particulièrement florissantes dans le domaine de l’écologie et des sciences de l’environnement, elles apparaissent comme une façon de co-construire les savoirs. Mais elles constituent également un formidable outil de dialogue entre la science et la société, et un outil pédagogique encore sous-exploité pour l’enseignement scientifique.</p>
<p>L’enseignement des sciences à l’école revêt une triple dimension : disciplinaire, épistémologique et sociale. Les élèves doivent acquérir des savoirs, comprendre comment ils se sont construits et s’approprier ces connaissances pour agir en citoyens dans leur vie de tous les jours.</p>
<p>La pleine exploitation des SRP pour l’enseignement scientifique se heurte alors à une difficulté majeure : faire coïncider les objectifs de la recherche scientifique et ceux de l’enseignement des sciences dans toutes ses dimensions. La tâche est d’autant plus complexe que les approches de SRP sont encore peu connues des enseignants, alors que les programmes les invitent à les utiliser.</p>
<h2>Les SRP à la frontière entre science et recherche</h2>
<p>Une distinction fondamentale doit être opérée entre la science et la recherche. La science est un ensemble de savoirs et de connaissances sur lequel l’ensemble de la communauté scientifique s’accorde. La recherche, c’est la science en train de se faire : les savoirs émergent et évoluent rapidement, leurs contours se précisent, mais ils ne sont pas encore stabilisés. Faire comprendre cette distinction entre « ce que je sais que je sais » (la science) et « ce que je sais que je ne sais pas encore » (la recherche) est aussi essentiel que délicat.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1435557929218940930"}"></div></p>
<p>Or, à l’école, les SRP se situent justement à la frontière entre science et recherche : l’enseignant transpose et enseigne les savoirs savants sur lesquels se fondent les hypothèses de la recherche, en même temps que les élèves participent à cette dernière, sans pour autant que les savoirs qui en sont issus ne leur soient enseignés.</p>
<h2>Un outil encore sous-exploité</h2>
<p>Nous avons mené un travail d’<a href="https://www.researchgate.net/profile/Severine-Perron/publication/350343445_Les_projets_de_sciences_citoyennes_a_l%E2%80%99Ecole_quelles_pratiques_d%E2%80%99enseignement_Cas_du_projet_Oak_bodyguards_en_France/links/60d41c6e458515ae7da79002/Les-projets-de-sciences-citoyennes-a-lEcole-quelles-pratiques-denseignement-Cas-du-projet-Oak-bodyguards-en-France.pdf">enquête</a> auprès de 13 enseignants participant avec leur classe au projet « Tree bodyguards ».</p>
<p>Ce projet de science participative au niveau européen implique un réseau de classes et de scientifiques dans l’étude de la <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/geb.13244">résistance des arbres aux attaques d’insectes herbivores</a> en lien avec le climat et les changements globaux. Les élèves sont impliqués dans la récolte de données et de matériel biologique, lesquels sont transmis aux chercheurs, qui les analysent. Les données sont collectées selon un protocole standard, détaillé, développé par les chercheurs.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/qZogB38sAGM?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">TREE BODYGUARDS : comment les arbres se protègent-ils des insectes ? (Fondation BNP Paribas, 24 juillet 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>Pour la majorité des enseignants interrogés, le protocole de recueil de données écrit par les scientifiques est devenu la séquence d’enseignement en tant que telle, sans qu’il y ait eu de mise en contexte ou de problématisation. Pour les enseignants, l’objectif était de faire participer les élèves à un authentique projet de recherche scientifique, mais pas d’acquérir des connaissances en écologie ou de contextualiser les apprentissages.</p>
<p>Autrement dit, les dimensions disciplinaires et sociales de l’enseignement scientifique s’étaient effacées face à la dimension épistémologique. Il n’y avait pas de construction de connaissances sur les relations trophiques (mangeur mangé) dans les écosystèmes ou les conséquences des changements globaux sur ces relations.</p>
<h2>Pour les chercheurs et les profs, un défi exigeant</h2>
<p>Il y a bien sûr un fort enjeu éducatif et social à expliquer le fonctionnement de la recherche et l’on ne peut que se réjouir que les sciences et recherches participatives y participent, en favorisant les interactions entre le monde de la recherche et celui de l’enseignement.</p>
<p>Mais c’est sous-exploiter leur potentiel. La responsabilité n’en revient pas uniquement aux enseignants, elle est aussi partagée par les chercheurs pilotant les projets de SRP mis en œuvre en milieu scolaire.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"916360480792416257"}"></div></p>
<p>Pour qu’ils soient mis en œuvre avec succès en milieu scolaire, c’est-à-dire pour que les élèves contribuent à la production de données utilisables pour construire de nouveaux savoirs scientifiques, il est impératif que les protocoles de SRP soient adaptés aux compétences des élèves à un niveau donné, alignés avec le calendrier scolaire et intégrés aux programmes scolaires.</p>
<p>C’est par exemple le cas des différents projets du programme <a href="https://www.vigienature-ecole.fr/">Vigie nature école</a>. En proposant des activités clés en main aux enseignants pour le suivi de la biodiversité à partir de protocoles rigoureux (dimension épistémologique), ils permettent de faire acquérir des connaissances naturalistes aux élèves (dimension disciplinaire), tout en contribuant à les sensibiliser à leur environnement (dimension sociale).</p>
<p>Or, avoir été élève un jour ne donne pas les clés pour comprendre ce qu’est le métier d’enseignant, ses objectifs, ses contraintes. Seuls, les chercheurs peuvent avoir des difficultés à satisfaire ces exigences.</p>
<p>Il ne faut pas non plus sous-estimer la diversité des compétences implicites que doivent mobiliser les enseignants eux-mêmes pour participer aux projets de SRP. Il peut s’agir d’un minimum de connaissances naturalistes ou d’agilité avec les outils numériques. Elles peuvent constituer un frein, une autocensure, pour de nombreux enseignants.</p>
<h2>Le rôle facilitateur des maisons pour la science</h2>
<p>Ces réflexions écrivent un rôle essentiel pour un troisième acteur des SRP à l’école à l’interface entre les chercheurs et les enseignants, celui de la formation initiale et continue des enseignants.</p>
<p>Le travail mené avec les enseignants ayant participé avec leurs classes au projet <em>,Tree bodyguards</em> a clairement mis en avant le rôle des maisons pour la science comme « intermédiaires facilitateurs ». Le <a href="https://www.fondation-lamap.org/fr/reseau-lamap/maison-pour-la-science">réseau des maisons pour la science</a> a été mis en place par la fondation <a href="https://www.fondation-lamap.org/fr">La main à la pâte</a>.</p>
<p>Les Maisons sont implantées dans les universités et font le lien entre le monde de la recherche et celui de l’enseignement. Elles ont pour mission de promouvoir les démarches d’investigations scientifiques auprès des enseignants au travers d’une offre de formation continue assurée conjointement par des pédagogues et des chercheurs.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1172082359879049216"}"></div></p>
<p>Pour les enseignants comme pour les chercheurs, il s’agit d’avoir un interlocuteur privilégié capable d’appréhender à la fois les objectifs des projets de SRP en matière de production de connaissances scientifiques et d’apprentissages.</p>
<p>Nous faisons le pari que les SRP à l’école sont promises à un bel avenir sous réserve que les projets évoluent d’un mode contributif vers un mode plus collaboratif, fondé sur la co-construction des objectifs (même s’ils diffèrent selon les acteurs) et des méthodes de la recherche et de la transmission des savoirs. Et nous espérons bien gagner ce pari !</p>
<hr>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=129&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/213123/original/file-20180404-189798-1dksj9k.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=163&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Le projet de recherche « Tree bodyguards » dans lequel s’inscrit cette publication a bénéficié du soutien de la <a href="https://group.bnpparibas/decouvrez-le-groupe/fondation-bnp-paribas/environnement">Fondation BNP Paribas</a> dans le cadre du programme <a href="https://group.bnpparibas/tempsforts/climate-biodiversity-initiative">Climate and Biodiversity Initiative</a>.</em></p>
<p><em>Séverine Perron (Groupe de recherche en didactique comparée Gredic, Université de Genève), Patricia Marzin Janvier (Centre de recherche sur l’éducation les apprentissages et la didactique Cread, EA 3875, Université de Bretagne) et Mauricette Mesguich (Maison pour la science en Aquitaine) ont contribué à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169183/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bastien Castagneyrol a reçu des financements de la Fondation BNP Paribas dans le cadre du programme Climate and Biodiversity Initiative pour le projet Tree Bodyguards (www6.inrae.fr/tree-bodyguards).</span></em></p>
Si elles intègrent peu à peu l’enseignement scientifique, les sciences et recherches participatives devraient être mieux adaptées aux objectifs pédagogiques.
Bastien Castagneyrol, Chercheur en écologie, Inrae
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/163369
2021-10-19T18:37:30Z
2021-10-19T18:37:30Z
Images de science : Quand l’invisible empourpre l’océan
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/426387/original/file-20211014-18-1yxyzuz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=1%2C0%2C1276%2C731&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’océan coloré, visible depuis l’espace.</span> <span class="attribution"><span class="source">©Université de Nantes - Pierre Gernez</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p>Sur cette image satellite prise le 22 mars 2021, on voit des volutes rouges dans l’océan – ce sont des ciliés, micro-organismes du plancton, qui se sont développés massivement suite à un déséquilibre probable dans leur écosystème. Ces eaux colorées ont aussi été détectées le 23 mars 2021 depuis la plate-forme d’essais du SEM/REV au large du Croisic, et une équipe de l’École centrale de Nantes l’a signalée sur le site web participatif <a href="https://www.phenomer.org/">Phenomer</a>.</p>
<p>Ici, le pigment responsable de la coloration rouge est la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Phyco%C3%A9rythrine">phycoérythrine</a>, présente chez la plupart des algues rouges, et aussi chez certaines cyanobactéries et certains <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Cryptophyta">cryptophytes</a> (des micro-organismes vivants unicellulaires). Dans ce cas, les pigments ont été synthétisés au sein d’une cryptophyte, elle-même consommée par un micro-organisme cilié appelé <em>Mesodinium rubrum</em>, observé en Vendée le 27 mars, puis dans le port des Sables-d’Olonne le 28 mars 2021.</p>
<figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/425972/original/file-20211012-15-4g8vq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/425972/original/file-20211012-15-4g8vq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/425972/original/file-20211012-15-4g8vq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/425972/original/file-20211012-15-4g8vq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/425972/original/file-20211012-15-4g8vq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/425972/original/file-20211012-15-4g8vq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/425972/original/file-20211012-15-4g8vq5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"><em>Mesodinium rubrum</em>, un organisme cilié.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Mesodinium_rubrum.jpg">tmoita, PlanktonNet, Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Ce fragile petit cilié d’environ 40 micromètres poursuit sa croissance dans les locaux de la « <a href="https://roscoff-culture-collection.org/"><em>Roscoff Culture Collection</em></a> », à la Station Biologique de Roscoff. En l’étudiant, nous espérons notamment mieux comprendre la toxicité du dinoflagellé <em>Dinophysis</em>, dont il constitue la proie favorite : <em>Dinophysis</em> est connu pour produire des toxines induisant des symptômes diarrhéiques chez le consommateur de coquillages en cas de contamination au-delà des seuils de sécurité sanitaire, régis par l’état et surveillés par IFREMER.</p>
<h2>Le phytoplancton, poumon de notre planète</h2>
<p>Les cryptophytes, les ciliés mixotrophes, et les dinoflagellés sont différents exemples de plancton, l’ensemble d’organismes microscopiques unicellulaires dérivant au gré des courants et qui peuplent notamment les eaux marines de surface.</p>
<p>Méconnu, car invisible à l’œil nu, le phytoplancton est pourtant le poumon de notre planète. Grâce à la photosynthèse, il produit plus de la moitié de l’oxygène terrestre et consomme une partie du dioxyde de carbone d’origine naturelle ou anthropique (environ la moitié des émissions reste piégée dans l’atmosphère, le reste étant absorbé par des puits de carbone naturels, comme les océans, les forêts, les tourbières et la toundra).</p>
<p>Le phytoplancton est aussi indispensable à la vie marine, car il constitue la base des chaînes alimentaires océaniques ou « réseaux trophiques », à l’image de <em>Mesodinium rubrum</em> qui nourrit <em>Dinophysis</em>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/dans-locean-comment-le-plancton-sest-adapte-a-son-environnement-turbulent-166763">Dans l’océan, comment le plancton s’est adapté à son environnement turbulent</a>
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</p>
<hr>
<p>Le projet de sciences participatives <a href="https://www.phenomer.org/">Phenomer</a> vise à améliorer les connaissances en observant, photographiant, prélevant et signalant les eaux colorées. Il en résultera une meilleure compréhension de ces phénomènes par les scientifiques à long terme.</p>
<p>L’épisode d’eaux colorées de mars 2021 illustre la synergie des divers moyens d’observation dont nous disposons : quand les conditions météorologiques sont propices, les observations satellites permettent d’obtenir une vision d’ensemble des eaux colorées signalées dans Phenomer, fournissant ainsi un contexte géographique et chronologique plus étendu. En complément, les observations de Phenomer permettent d’obtenir de précieuses informations sur les espèces responsables des eaux colorées, améliorant ainsi le traitement des images satellites réalisé dans le cadre du <a href="https://wwz.ifremer.fr/pba/Projets/LASHA-2020-2021">projet de recherche LASHA</a> (<em>Laboratory to Satellite Experiments for Remote Sensing of Harmful Algae</em>) de l’université de Nantes, financé par le Centre National d’Études Spatiales.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/163369/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Anne Doner ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Ces eaux colorées reflètent la multiplication inhabituelle d’organismes microscopiques.
Anne Doner, Assistant scientist, Ifremer
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/161015
2021-06-22T19:16:02Z
2021-06-22T19:16:02Z
Images de science : Des yeux pour voir les poissons dans leurs habitats
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/404828/original/file-20210607-27-bwao21.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=16%2C4%2C2695%2C2492&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le STAVIRO déposé sur un fond de sable à proximité des récifs de l’Astrolabe en Nouvelle-Calédonie.</span> <span class="attribution"><span class="source">Dominique Pelletier, IFREMER</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span></figcaption></figure><p><em>Le format « Images de science » vous propose de décrypter une photographie particulièrement signifiante d’un point de vue scientifique, de la décrire et d’en comprendre les enjeux.</em></p>
<hr>
<p>Se faire discret pour observer les animaux sans les déranger est le rêve de beaucoup de naturalistes. Pouvoir le faire sous l’eau est un défi. Pour la recherche, cette discrétion présente deux avantages : découvrir de nouveaux comportements des animaux, mais aussi pouvoir les dénombrer de façon aussi neutre que possible.</p>
<p>Habituellement, les poissons sont observés et comptés par des pêches ou par des comptages visuels opérés par des plongeurs. Depuis 2007, nous utilisons aussi la vidéo sous-marine avec les systèmes STAVIRO et MICADO, que nous avons mis au point à l’IFREMER. Le STAVIRO est déposé sur le fond de la mer depuis un bateau. C’est la première méthode d’observation aussi discrète et aussi passe-partout qui récolte autant de données compréhensibles par tous grâce à l’image. Nous avons aussi développé une version automatique du système, le MICADO, qui permet d’étudier les animaux dans la durée. Dans les deux cas, aucun éclairage n’est utilisé pour ne pas perturber les observations, mais les caméras utilisées restent efficaces lorsque la lumière diminue.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=421&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/404839/original/file-20210607-8878-1ih9vo0.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=529&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les systèmes STAVIRO et MICADO ont permis d’étudier des écosystèmes dans les océans pacifique (Parc Marin de la mer de Corail et lagons autour de la Grande Terre en Nouvelle-Calédonie) et Indien (Banc du Geyzer, Parc Naturel de Mayotte, Réserve naturelle de la Réunion), en Méditerranée (Parc Marin de la Côte Bleue, Réserve naturelle de Banyuls, Corse, Var), et plus récemment dans l’océan Atlantique (Baie de Concarneau, archipel des Glénan).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Dominique Pelletier, IFREMER</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le protocole ainsi que les données sont partagés avec le grand public et s’inscrivent dans une politique de science ouverte. En particulier, nous développons actuellement avec un fab lab le <a href="https://wikifactory.com/@konkarlab/kosmos-20kal">prototype « KOSMOS »</a>, la version libre et reproductible du STAVIRO, dans l’optique d’un programme de science participative.</p>
<h2>Que nous apprennent ces systèmes ?</h2>
<p>Les animaux se comportent « au naturel », bien souvent en nage lente ou vaquant à leurs occupations sans se soucier de la caméra. Ce sont surtout des poissons, mais les tortues, les serpents ou un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Dugong">dugong</a> s’invitent régulièrement, ainsi que des seiches, poulpes ou lièvres de mer que nous découvrons dans les images de Méditerranée essentiellement.</p>
<p>Nous comptons les espèces moyennes ou grandes sur les vidéos selon une procédure toujours identique et bien rodée pour obtenir des données chiffrées fiables et comparables d’une séquence à l’autre. Les petites espèces ne sont pas dénombrées car elles ne sont pas détectables à distance de la caméra, seule leur présence est relevée.</p>
<p>La vidéo nous montre aussi le cadre de vie de ces animaux, ce qu’on appelle leur habitat. Comme les humains, les animaux marins et en particulier ceux qui dépendent du fond de la mer pour leur nourriture (on les appelle animaux « démersaux » ou « benthiques ») ont leurs préférences en matière de logement : certaines espèces sont nombreuses sur les herbiers, d’autres préfèrent les rochers. Comme nos systèmes sont déployés dans tous les habitats ou presque (la visibilité doit être suffisante, les observations dans les zones turbides comme les estuaires sont difficiles), les images nous renseignent sur ces préférences des espèces. Nous avons donc aussi mis au point une procédure pour caractériser l’habitat à partir des images.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/hVLbb-GhxYo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">À la découverte des récifs du parc naturel de la mer de Corail.</span></figcaption>
</figure>
<p>Dans une passe du lagon de Nouvelle-Calédonie, des images récoltées sur des périodes plus longues grâce au MICADO nous ont indiqué quelles espèces venaient se reproduire et à quelle époque, quels étaient leurs comportements en lien avec la reproduction, par exemple des parades nuptiales ou des poissons qui venaient se nourrir des œufs émis par d’autres espèces. En Méditerranée, nous avons pu filmer, au sein des zones protégées, des phénomènes spectaculaires de chasse de petits poissons par leurs prédateurs et observer de jeunes mérous bruns (<em>Epinephelus marginatus</em>), une espèce menacée en Europe.</p>
<p>La principale vocation du système STAVIRO est de multiplier les observations sur des zones étendues pour en cartographier les habitats et les peuplements de poissons.</p>
<h2>Comprendre et protéger les environnements marins</h2>
<p>Cette connaissance est précieuse pour la protection de l’environnement marin. Les zones côtières subissent des pressions très intenses et diverses en raison des activités humaines en mer, le long du littoral et sur les bassins versants, principalement industries, agriculture, pêche, urbanisation.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/404842/original/file-20210607-28272-vml45h.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Paysage corallien préservé des récifs de l’Astrolabe (Parc Marin de la Mer de Corail, Nouvelle-Calédonie). Au premier plan, des nasons loupe (<em>Naso tonganus</em>), une perche blanche et noire (<em>Macolor niger</em>) et à l’arrière-plan de nombreux poissons-perroquets (<em>Scaridae</em>) ainsi que d’autres espèces.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Dominique Pelletier, IFREMER</span>, <span class="license">Fourni par l'auteur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les données des STAVIRO servent à quantifier les habitats et les poissons, y compris les espèces pêchées, et ainsi elles aident à comprendre et suivre leur évolution en fonction des impacts des activités humaines et des mesures de protection comme les <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/patrimoine-marin-et-aires-marines-protegees-francaises">aires marines protégées</a> ou des mesures de gestion des pêches. Est-ce que l’aire marine protégée arrive à protéger les poissons en son périmètre ? Est-ce qu’elle fournit des poissons à l’extérieur de ses limites ? Quel est l’impact de l’ancrage de ce paquebot sur les fonds marins et leurs habitants ? Quel est l’impact de la pêche sur les poissons de cette baie ? Les questions sont nombreuses, et pour y répondre, répartir judicieusement les observations sur la zone d’étude est indispensable car il faut comparer les données en fonction de leurs positions, par exemple un endroit pêché par rapport à une zone sans pêche.</p>
<p>Ces observations des poissons n’engendrent aucun impact sur l’écosystème, au contraire de données de capture et d’effort. Du reste, les données halieutiques sont rares dans les zones très côtières. Au fil des ans, nous avons veillé à standardiser le protocole de bout en bout : collecte des données, analyse des images, analyse des données et publications scientifiques et non scientifiques des résultats. Nous espérons donc que ce protocole puisse être réutilisé le plus largement possible pour la recherche et pour la préservation des écosystèmes marins.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161015/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Dominique Pelletier a reçu des financements des Provinces et du Gouvernement de Nouvelle-Calédonie pour le projet AMBIO pendant lequel de nombreuses données vidéo ont été collectées. </span></em></p>
Observer les poissons sans perturber leurs comportements est primordial pour mieux protéger l’environnement marin.
Dominique Pelletier, Directrice de recherches, Ecologie et Modèles pour l'Halieutique, Ifremer
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/160518
2021-05-31T19:07:48Z
2021-05-31T19:07:48Z
Où et comment implanter les éoliennes pour épargner les chauves-souris ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/403579/original/file-20210531-21-1gyzo2m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C53%2C5098%2C2999&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les pales des éoliennes représentent un réel danger pour nombre d’espèces volantes. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/inspection-engineers-abseiling-rotor-blade-wind-1244999893">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Pour diminuer drastiquement le recours aux énergies fossiles et réaliser sa transition énergétique, la France s’est fixé l’objectif ambitieux de <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Synth%C3%A8se%20finale%20Projet%20de%20PPE.pdf">tripler ses installations d’éoliennes dans les 8 prochaines années</a>.</p>
<p>Si le changement climatique est devenu le symbole de l’urgence environnementale, <a href="https://theconversation.com/sauver-le-climat-sans-menacer-la-biodiversite-125596">on ne doit pas oublier les autres menaces qui pèsent sur l’environnement</a> et <a href="https://www.nature.com/news/biodiversity-the-ravages-of-guns-nets-and-bulldozers-1.20381">contribuent à l’effondrement de la biodiversité</a>.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/402627/original/file-20210525-15-ethrei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/402627/original/file-20210525-15-ethrei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/402627/original/file-20210525-15-ethrei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=667&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/402627/original/file-20210525-15-ethrei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=667&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/402627/original/file-20210525-15-ethrei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=667&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/402627/original/file-20210525-15-ethrei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=838&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/402627/original/file-20210525-15-ethrei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=838&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/402627/original/file-20210525-15-ethrei.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=838&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://assets.rte-france.com/prod/public/2021-04/Panorama%20T4-2020-V2.pdf#page=15">RTE</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Certaines énergies renouvelables, présentées comme le fer de lance de la lutte contre le changement climatique, sont paradoxalement l’une de ces menaces. II devient ainsi primordial de planifier leur développement en prenant en compte les enjeux de biodiversité.</p>
<h2>Collisions avec les pales</h2>
<p><a href="https://inis.iaea.org/search/search.aspx?orig_q=RN:24066678">Dès les années 1990</a>, plusieurs effets néfastes de l’éolien sur la faune ont en effet été constatés. On en distingue principalement deux. Le premier concerne la mortalité par collision avec les pales chez les <a href="https://link.springer.com/article/10.1007/s00267-015-0501-5">chauves-souris, les oiseaux</a> et les <a href="https://conbio.onlinelibrary.wiley.com/doi/epdf/10.1111/csp2.366">insectes</a>.</p>
<p>Ces mortalités se produisent dans des quantités qui sont en mesure de porter atteinte à la survie de certaines espèces sur le court et moyen terme. Ainsi, le développement de l’éolien pourrait conduire à <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0006320716310485">l’extinction de la chauve-souris cendrée</a>, une espèce migratrice nord-américaine.</p>
<p>En France, certaines chauves-souris – comme la Pipistrelle de Nathusius, la Noctule de Leisler et la Noctule commune – paient un lourd tribut chaque année ; leur état de conservation s’est dégradé entre 2009 et 2017.</p>
<p>La Noctule commune est désormais classée comme « vulnérable » sur la liste rouge des mammifères français ; cela est en partie lié au fait que <a href="https://inpn.mnhn.fr/docs/LR_FCE/Liste_rouge_France_Mammiferes_de_metropole_2017.pdf">« le développement de la production d’énergie éolienne a particulièrement affecté cette espèce migratrice de haut vol »</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/402602/original/file-20210525-23-1xelbrx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/402602/original/file-20210525-23-1xelbrx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/402602/original/file-20210525-23-1xelbrx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/402602/original/file-20210525-23-1xelbrx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=402&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/402602/original/file-20210525-23-1xelbrx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/402602/original/file-20210525-23-1xelbrx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/402602/original/file-20210525-23-1xelbrx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=505&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Noctules communes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Laurent Arthur</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Des habitats dégradés</h2>
<p>Les seconds effets délétères concernent la <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0006320718305469">forte diminution de la qualité des habitats</a> engendrée par la présence d’éoliennes.</p>
<p>Chez les chauves-souris, cet effet est mesurable jusqu’à une distance d’au moins un kilomètre et se traduit par une diminution progressive de l’activité au fur et à mesure qu’on se rapproche des éoliennes.</p>
<p>Or on sait que la dégradation des habitats est l’une des <a href="https://www.nature.com/articles/s41558-019-0406-z">causes majeures de déclin de nombreuses espèces</a>.</p>
<h2>Permis de construire sous conditions</h2>
<p>Toutes les espèces de chauves-souris sont protégées en France. Il est donc interdit de les perturber intentionnellement ou de les tuer.</p>
<p>Afin d’obtenir le permis de construire, le développeur éolien doit donc apporter la garantie que les impacts du futur parc sur les chauves-souris seront négligeables. Pour cela, il engage un bureau d’étude qui <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/politiques/evaluation-environnementale-et-etudes-dimpact">réalisera une « étude d’impact »</a>, avec le contrôle et l’avis des services de l’État pour la région concernée.</p>
<h2>Le bridage pour réduire les impacts</h2>
<p>Depuis quelques années, une méthode phare de réduction de l’impact éolien a été mise en place, mais n’est toujours pas appliquée de façon optimale.</p>
<p>Il s’agit d’arrêter les éoliennes – on parle de « bridage » – lorsque les conditions météorologiques sont les plus favorables à l’activité des chauves-souris. Ce bridage, lorsqu’il est mis en place, est appliqué par vent relativement faible engendrant donc une perte de production électrique très faible.</p>
<p>Bien que cette méthode soit appliquée sur les parcs les plus récents, des mortalités de chauves-souris continuent à être recensées. En effet, le bridage ne permet qu’une <a href="https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-3-319-25220-9_11">réduction partielle de la mortalité</a>. Or chez ces espèces à cycle de vie long et faible fécondité (comme par ailleurs les éléphants d’Afrique ou les grands cétacés), une faible mortalité a des conséquences importantes sur le devenir des populations.</p>
<p>Dix ans après l’évolution réglementaire qui imposait la réalisation d’une étude d’impact dans ce secteur d’activité, nous sommes encore loin de maîtriser les impacts de l’éolien sur les chauves-souris.</p>
<p>Parmi les raisons de cet échec figure probablement le fait que chaque étude d’impact de futur parc éolien est réalisée au cas par cas et sur une seule année, alors que l’activité des chauves-souris sur un site <a href="http://gmb.bzh/wp-content/uploads/2017/05/Etude-de-la-migration-des-chauves-souris-en-Bretagne_RapportFinal_2017VF.pdf">est variable d’une année à l’autre</a> et <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/ece3.3943">dépend d’une combinaison de facteurs météorologiques et paysagers</a>.</p>
<h2>Mettre la biodiversité au cœur des préoccupations</h2>
<p>Un autre problème majeur est lié au fait que les sites d’implantation sont d’abord choisis, et c’est assez logique, sur des critères de production énergétique et de contraintes liées aux activités humaines (aéronautiques notamment), et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0048969720380025">très secondairement en fonction des enjeux de biodiversité</a>.</p>
<p>Cet état de fait va à l’encontre de la séquence <a href="https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/Th%C3%A9ma%20-%20La%20s%C3%A9quence%20%C3%A9viter%20r%C3%A9duire%20et%20compenser.pdf">« éviter-réduire-compenser »</a> formalisée en juillet 2010 <a href="https://www.conseil-etat.fr/actualites/discours-et-interventions/que-change-la-loi-grenelle-2">par la loi Grenelle II</a> et qui demande que les enjeux environnementaux soient pris en compte dès la conception du projet, « alors que toutes les options sont encore possibles ».</p>
<p>Encore faut-il que des cartes des enjeux de biodiversité soient disponibles, accessibles et reconnues par les services instructeurs…</p>
<h2>L’exemple du programme Vigie-Chiro</h2>
<p>Pourtant, les données existent. La France bénéficie de tout un réseau d’observateurs de la biodiversité ; on peut citer le programme de sciences participatives Vigie-Chiro par exemple.</p>
<p>Dans le cadre de cette initiative lancée en 2006 – qui implique 500 professionnels et bénévoles coordonnés par des chercheurs du Muséum national d’histoire naturelle –, l’activité des chauves-souris est quantifiée sur tout le territoire français au moyen de détecteurs d’ultrasons.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/B4mfn3WhqT4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Vidéo de présentation de Vigie-Chiro (Vigie Nature, 2020).</span></figcaption>
</figure>
<p>Ce programme aide à évaluer l’état des populations et contribue notamment à l’établissement des listes rouges d’espèces menacées par l’UICN. Il a par exemple mis en évidence un déclin de près de 88 % pour la Noctule commune sur la période 2006-2019.</p>
<p>Ce programme permet également de prédire la distribution des principales espèces de chauves-souris en France et donc de définir les zones à enjeux importants. Ainsi, pour la Noctule commune, on est frappé de voir que les grands fleuves français et leurs affluents concentrent une large part de l’activité, de même que la région Centre-Val de Loire.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/402603/original/file-20210525-19-1rnimwg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/402603/original/file-20210525-19-1rnimwg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/402603/original/file-20210525-19-1rnimwg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/402603/original/file-20210525-19-1rnimwg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/402603/original/file-20210525-19-1rnimwg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/402603/original/file-20210525-19-1rnimwg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/402603/original/file-20210525-19-1rnimwg.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Carte de la distribution prédite des populations de Noctules communes.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://croemer3.wixsite.com/teamchiro/maps-predicted-activity?lang=fr">MNHN</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Bien orienter le choix des sites éoliens</h2>
<p>Ces cartes tiennent compte des variations de l’activité sur plusieurs années ; elles pourraient être utilisées parallèlement à la cartographie des gîtes de chauves-souris afin que ce type d’information soit pris en compte lors du choix du site d’implantation des éoliennes ; il pourrait ainsi s’additionner aux autres contraintes, comme celles de l’aéronautique.</p>
<p>Cette prise en compte permettrait d’orienter les études préimplantatoires vers des sites où les enjeux de biodiversité sont a priori moindres ; cela limiterait non seulement les impacts sur la biodiversité, mais aussi d’emblée les coûts associés à la réorientation probable du projet.</p>
<p>Le coût associé au bridage des éoliennes pourrait être anticipé de la même manière. À proximité d’un fleuve comme la Loire, par exemple, on s’attend à ce que l’étude d’impact sur le terrain révèle de forts niveaux d’activité chez la Noctule commune et donc à ce qu’il faille brider fortement les éoliennes pour réduire les collisions avec cette espèce, ce qui entraînerait une perte de production électrique plus conséquente.</p>
<h2>Redoubler de prudence, notamment outre-Mer</h2>
<p>Si ces cartes de distribution des espèces reflètent à l’heure actuelle le plus objectivement les enjeux liés aux chauves-souris en France métropolitaine, elles doivent faire l’objet d’une mise à jour régulière ; il s’agit d’intégrer les nouvelles données, les avancées méthodologiques (statistiques notamment). Un des enjeux concerne l’amélioration de la résolution spatiale (et donc du caractère opérationnel) de cette cartographie.</p>
<p>En outre-Mer, les connaissances sur la distribution spatiale et temporelle des chauves-souris sont malheureusement encore très lacunaires, alors même que ces territoires concentrent de forts enjeux de conservation en abritant des populations réduites et des espèces endémiques (comme la Roussette noire à la Réunion ou le Murin de la Martinique).</p>
<p>Dans ces zones, on a pour l’instant peu de connaissances sur l’identité des espèces de chauves-souris les plus à risque, leurs hauteurs de vol et leurs habitats préférentiels. Ces incertitudes engagent à la prudence et à l’anticipation, ainsi qu’à poursuivre les efforts pour améliorer les connaissances dans ces territoires.</p>
<p>Rappelons qu’aux prémices du développement éolien en Europe occidentale et en Amérique du Nord, on ne savait pas que les éoliennes impactaient à ce point ces mammifères volants. Aujourd’hui, c’est un fait avéré.</p>
<hr>
<p><em>Kévin Barré, Yves Bas, Jérémy Froidevaux, Jean‑François Julien, Christian Kerbiriou, Camille Leroux, Isabelle Le Viol et Julie Marmet (Centre d’écologie et des sciences de la conservation, MNHN) sont co-auteurs de cet article</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/160518/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les travaux de Charlotte Roemer sont financés par l’Office français pour la biodiversité et par Naturalia Environnement. Elle est par ailleurs bénévole au sein du groupe Chiroptères Languedoc-Roussillon et à la Société française pour l’étude et la protection des mammifères.</span></em></p>
Les installations éoliennes constituent une menace pour certaines espèces animales volantes, dont l’état de conservation se dégrade de manière alarmante.
Charlotte Roemer, Post-doctorante, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/154109
2021-01-28T18:07:01Z
2021-01-28T18:07:01Z
Débat scientifique sur le déclin des insectes : que reste-t-il à prouver ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/380985/original/file-20210127-21-bnxgg5.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C185%2C1504%2C1030&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les hyménoptères figurent parmi les catégories d’insectes les plus touchées par les pesticides. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/131075422@N07/31409966593">Luc Durocher/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span></figcaption></figure><p>Le recul de la biodiversité, le réchauffement climatique, l’origine de certaines pandémies : ces faits sont établis depuis des décennies, notamment par des panels internationaux de scientifiques qui font consensus, à l’image du GIEC ou de l’IPBES.</p>
<p>Dans ce contexte, et pour la première fois, L’Académie des sciences <a href="https://www.academie-sciences.fr/fr/Rapports-ouvrages-avis-et-recommandations-de-l-Academie/declin-insectes-urgence.html">vient d’émettre un avis très clair</a> sur le déclin des insectes et l’urgence d’agir.</p>
<p>Sur ces sujets subsistent encore des polémiques issues de sources diverses, le plus souvent sans fondement scientifique, voire au-delà de toute rationalité. Et il existe aussi des controverses entre scientifiques. Les médias s’y engouffrent, les réseaux sociaux s’en nourrissent, le public s’y perd.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1353983019070218244"}"></div></p>
<p>L’exemple actuel de la pandémie de Covid-19 et de ses nombreux « scandales » vécus par tous – que ce soit à propos des masques, de la chloroquine ou des vaccins – rend tout cela très concret.</p>
<p>C’est qu’il y a souvent une confusion entre « la science en train de se faire » – où la controverse peut occuper une place de choix, habituellement restreinte aux échanges dans les revues spécialisées et les congrès – et la médiatisation immédiate de ce processus « immature » (car en cours et non abouti).</p>
<hr>
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<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/de-la-controverse-scientifique-au-debat-de-societe-112039">De la controverse scientifique au débat de société</a>
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<hr>
<p>Les scientifiques peinent eux-mêmes parfois à s’y retrouver dans la masse de publications accessibles sur tel ou tel sujet non directement compris dans leur domaine d’expertise. Et il n’est pas rare non plus d’être démuni dans sa propre spécialité, lorsque certains confrères compliquent trop l’exercice de la science, voire font preuve de mauvaise foi.</p>
<p>Il faut alors revenir à un examen attentif, en vérifiant par exemple l’ensemble des publications pouvant servir de sources aux articles scientifiques. Le processus de <em>peer reviewing</em> (le fait pour une revue spécialisée de soumettre les articles à l’approbation de pairs qui servent d’arbitres) est censé jouer ce rôle en partie. Mais c’est aussi et avant tout le travail des auteurs de ces articles de vérifier leurs bases de données.</p>
<h2>La nécessité de la vérification</h2>
<p>C’est à ce lent et fastidieux travail de vérification que se sont attelés la chercheuse <a href="https://www.tse-fr.eu/fr/people/marion-desquilbet">Marion Desquilbet</a> (Inrae) et ses collègues au sujet d’une méta-analyse <a href="https://science.sciencemag.org/content/368/6489/417">parue en avril 2020 dans la revue <em>Science</em></a> sur le déclin des insectes. Cette étude modulait les travaux précédents et se voulait rassurante. Pas si grave ni si rapide que cela, le déclin des insectes ?</p>
<p>Il a fallu regarder de plus près et le fruit des investigations de Marion Desquilbet et de ses collègues a été <a href="https://science.sciencemag.org/content/370/6523/eabd8947/tab-pdf">publié en décembre 2020, toujours dans la revue <em>Science</em></a>.</p>
<p><a href="https://www.lemonde.fr/sciences/article/2021/01/18/vive-controverse-autour-du-declin-des-insectes_6066693_1650684.html">Des faiblesses ont ainsi été mises à jour</a> sur environ les deux tiers des publications utilisées dans la méta-analyse d’avril 2020. Le plus dérangeant étant l’agrégation d’études sur des approches spatio-temporelles très différentes (du local au global, études sur 2 ans ou à plusieurs décennies) et un mélange d’expériences naturelles (observations dans des contextes non expérimentaux) et d’expériences de type « mésocosmes » (dans des milieux reconstitués)</p>
<p>On pouvait donc légitimement penser que le résultat d’un tel amalgame conduirait à une sorte de combinaison d’effets différents – positifs, négatifs, neutres – pouvant mener à un résultat global significatif, une sorte de tendance arithmétique.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/381176/original/file-20210128-21-1iso9r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/381176/original/file-20210128-21-1iso9r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/381176/original/file-20210128-21-1iso9r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/381176/original/file-20210128-21-1iso9r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/381176/original/file-20210128-21-1iso9r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/381176/original/file-20210128-21-1iso9r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/381176/original/file-20210128-21-1iso9r3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Abeille à longue corne Eucera (France). Comme tous les hyménoptères, les pollinisateurs sauvages sont très sensibles aux pesticides.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste/MNHN</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Le rêve du <em>big data</em></h2>
<p>Mais revenons aux méta-analyses : elles se proposent d’étudier des données sur la base de connaissances établies, avec des objets parfois disparates pour lesquels on recherche des tendances générales, des corrélations originales, des associations discrètes, mais intéressantes.</p>
<p>Bref, c’est une sorte de <em>big data</em> des publications où l’on mettrait tout ensemble pour appuyer ensuite sur quelques boutons – ceux des logiciels d’analyses statistiques ou de modélisation qui permettraient de nous donner de « vrais » résultats non biaisés. C’est ici le grand rêve de ces <em>big data</em>, où la puissance de l’analyse permettrait de s’affranchir des erreurs initiales (mauvais protocoles, erreurs de saisies, statistiques inappropriées, etc.) et de méthodologie de constitution du corpus à analyser (la base de données de publications).</p>
<p>Reste que le plus important pour une information, c’est qu’elle soit exacte et vérifiée <em>avant</em> d’être incorporée dans les bases de données. Cette règle vaut évidemment pour les publications compilées dans ces méta-analyses.</p>
<p>Malgré les discussions autour de ces compilations – comme celle parue au printemps 2020 sur le recul des populations d’insectes – la tendance globale au déclin dans les milieux terrestres est bel et bien confirmée.</p>
<h2>La question des états de référence</h2>
<p>Cette controverse autour du recul des colonies d’insectes nous inspire plusieurs constats.</p>
<p>Rappelons en premier lieu que les insectes sont difficiles à étudier. Nous les connaissons mal en Europe – il y a de moins en moins d’enseignements naturalistes et taxonomiques – et ils souffrent d’un certain désintéressement. Pour eux, c’est la double peine : on a du mal à évaluer leur déclin, car ils ne nous ont <a href="https://theconversation.com/biodiversite-quand-loiseau-fait-de-lombre-a-linsecte-95629">jamais vraiment intéressés</a> ; ils sont de fait trop nombreux et mal connus puisqu’ils ne nous intéressent pas beaucoup !</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/381177/original/file-20210128-17-132049a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/381177/original/file-20210128-17-132049a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/381177/original/file-20210128-17-132049a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/381177/original/file-20210128-17-132049a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/381177/original/file-20210128-17-132049a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/381177/original/file-20210128-17-132049a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/381177/original/file-20210128-17-132049a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Prédation d’une mante religieuse sur un lézard Tarentola (France).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste/MNHN</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Second point, la disparition programmée des insectes, pourtant annoncée dès 1962 dans <em>Le Printemps silencieux</em> de Rachel Carlson, n’a jamais vraiment représenté une priorité pour la science. Autrement, les évaluations du danger des insecticides auraient reçu une tout autre attention. Quant aux études à long terme, elles auraient été lancées de longue date, s’appuyant sur des réseaux d’« observatoires » ou des sites ateliers comme on en trouve aujourd’hui.</p>
<p>Il n’existe donc, on le comprend, aucun protocole, aucune initiative à une échelle suffisamment large, et qui ai commencé suffisamment tôt, pour donner un état de référence de la situation des insectes.</p>
<p>Il est à ce titre intéressant de rappeler que c’est à une société savante d’amateurs que l’on doit les 27 années de données ayant permis à des chercheurs allemands de publier en 2017 dans la revue <em>PLOS One</em> un <a href="https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0185809">article sur le déclin global des insectes outre-Rhin</a> qui a valeur d’exemple.</p>
<p>Dernier constat : si l’on a longtemps cru que les sciences participatives pourraient résoudre bien des problèmes de recherche sur la biodiversité – chaque citoyen pouvant potentiellement contribuer à la collecte de données –, elles ne peuvent toutefois régler les questions des états de référence dans lesquels s’engouffrent les contradicteurs, qu’ils soient de bonne ou de mauvaise foi.</p>
<h2>Au-delà des controverses, un constat partagé</h2>
<p>C’est donc bien de l’absence de programmes à long terme et des états de référence qui en découlerait pour comprendre la tendance et les changements d’état de la biodiversité dont nous souffrons et qui alimente les controverses.</p>
<p>Si des problèmes spécifiques à l’exercice de la science persistent de façon évidente, comme le souligne le débat autour de la méta-analyse évoquée plus haut, des milliers d’observateurs et des dizaines d’études locales ou nationales font sur le terrain le même constat d’un recul sans précédent du vivant.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1096263125752524801"}"></div></p>
<p>Autrement dit : est-on toujours obligé d’avoir la preuve de cette action dans la nature quand on connaît les difficultés de ces expériences – dont celles liées répétons-le à l’absence d’état de référence –, et la pollution globale de nos écosystèmes</p>
<p>C’est un peu comme si nous avions la preuve d’une action délétère d’une molécule persistante sur des cultures cellulaires et que l’on doutait de son action sur l’organisme : on connaît le mode d’action de molécules comme les néonicotinoïdes, pour ne citer qu’elles ; on sait les mesurer partout dans l’environnement… Comment alors peut-on imaginer l’absence d’effet à l’échelle des biocénoses et des écosystèmes ?</p>
<p>Cette pollution généralisée (au demeurant tout à fait mesurable) réclamerait sans doute un ré-ensauvagement de la planète… A minima, une sérieuse réévaluation écotoxicologique des molécules que nous épandons par milliers de tonnes depuis des décennies. Sur les insectes, sur les biocénoses, sur les écosystèmes et sur nous-mêmes.</p>
<p>Une recherche de transition est nécessaire pour comprendre et corriger ce qui se passe dans nos écosystèmes. Elle passe par l’établissement d’états de références pour la science du futur ou de la recherche de compensation de leur absence en innovant, par exemple, dans l’étude de nos collections ; celles-ci constituent en effet des formes de références dans l’espace et le temps. Comme le souligne l’Académie des sciences dans son tout récent avis, il est désormais urgent d’agir.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/154109/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Garrouste a reçu des financements du CNRS, IPEV, Labex BCDiv, Sorbonne Université, National Geographic et MAEE.</span></em></p>
Pour la première fois, l’Académie des sciences vient d’émettre un avis très clair sur le déclin des insectes et l’urgence d’agir.
Romain Garrouste, Chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (ISYEB), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/152276
2021-01-13T18:14:25Z
2021-01-13T18:14:25Z
Pollution de l’air en ville : cartographie, microcapteurs et sciences participatives
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/377562/original/file-20210107-19-l2tzc9.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C15%2C1695%2C793&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Mesurer la pollution, alors que les sources bougent et que la météo change, n’est pas une mince affaire. Carte participative de la pollution aux particules fines (PM 10) réalisée à Rennes dans le cadre de l’opération de mesure citoyenne Ambassad’Air.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://www.wiki-rennes.fr/Capteurs_Sensor_Community">WikiRennes</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Imaginez que vous déménagiez avec votre famille et que vous soyez à la recherche d’un logement dans une grande ville que vous ne connaissez pas. Vous êtes attentif·ve au choix du quartier, mais vous vous intéressez aussi à la qualité de l’air, côté santé. En consultant le site de l’<a href="https://atmo-france.org/la-carte-des-aasqa/">organisme agréé de surveillance de la qualité de l’air de votre région</a>, vous constatez, perplexe, que des données apparaissent pour votre quartier, mais que ce dernier est pourtant dépourvu de station de mesure. Comment cela est-il possible ?</p>
<p>Les organismes en charge de la surveillance de la qualité de l’air utilisent des modèles pour « boucher les trous » entre les stations de mesures. Problème : les sources d’émission et la météo sont par nature extrêmement fluctuantes et les modèles peinent à prendre en compte ces variations permanentes. C’est pourquoi les simulations et prévisions présentent des taux d’incertitude nettement plus élevés que les données des stations de référence (<a href="https://project.inria.fr/anr-estimair/">50 % ou plus dans certains cas</a>).</p>
<p>Or, les cartes fournies sur les sites de surveillance ne montrent pas les incertitudes. Il est ainsi difficile d’organiser le trafic urbain pour réduire la pollution partout à la fois : on a vu à Paris que le manque de précision sur le niveau de pollution dans les rues avoisinantes avait conduit à des <a href="https://www.leparisien.fr/paris-75/paris-75005/voies-sur-berge-fermees-le-rapport-d-airparif-alimente-la-polemique-10-10-2017-7322295.php">débats</a>, <a href="https://actu.fr/ile-de-france/paris_75056/voies-sur-berge-fermee-paris-tribunal-administratif-paris-annule-decision_15633565.html">expertises</a> et <a href="https://www.lejdd.fr/JDD-Paris/Voies-sur-berge-fermees-une-polemique-sans-precedent-838054">contre-expertises</a> lors de la fermeture des voies sur berge de la Seine.</p>
<h2>Comment marche la surveillance de la qualité de l’air ?</h2>
<p>Les organismes agréés sont aussi appelés « AASQA » (association agréée de surveillance de la qualité de l’air). Il s’agit par exemple d’Atmosud dans la région PACA ou d’AirParif en Île-de-France. Ils ont pour mission principale de surveiller et de prévoir la qualité de l’air extérieur en continu, d’informer le public et les autorités concernées, et de réaliser régulièrement un relevé de toutes les émissions mesurées – particules fines, oxydes d’azote, ozone – pour une période donnée sur la région.</p>
<p>Ces <a href="https://www.airparif.asso.fr/methodes-surveillance/emissions">« inventaires d’émission »</a> sont produits à partir des mesures issues de stations de référence fixes, composées d’instruments professionnels. L’achat des instruments, leur maintenance et leur exploitation représentent un coût élevé, qui relève principalement des collectivités territoriales. Par ailleurs, les conditions de mesures répondent à un cahier des charges précis : hauteur au-dessus du sol, entrée de l’air dans les capteurs, échantillonnage, entre autres.</p>
<p>En complément, les organismes agréés utilisent des modèles numériques ou statistiques qui s’appuient sur les inventaires, le trafic moyen, et aussi la météo du jour pour estimer la répartition des principaux polluants dans la région considérée. C’est grâce à cette combinaison entre mesures et modélisations qu’il est possible d’établir des cartographies de la qualité de l’air qui couvrent l’ensemble du territoire, sans déployer des capteurs à chaque coin de rue. Mais il reste le problème des incertitudes liées aux fluctuations imprévisibles des sources de pollution, et de la météo.</p>
<h2>Les microcapteurs au service de cartographies dynamiques</h2>
<p>Dès lors, on comprend pourquoi les acteurs de la surveillance de la qualité de l’air dans les territoires s’intéressent à l’arrivée sur le marché depuis quelques années de petits capteurs, mobiles et de relativement faible coût (quelques centaines d’euros en général), par rapport à celui des capteurs installés dans les stations de référence (pouvant atteindre plusieurs milliers d’euros, selon le capteur, ses performances, entre autres). Ces « microcapteurs » permettraient de multiplier les points de mesure, et apportent donc l’espoir d’amélioration de la résolution spatiale des cartographies journalières et des modèles qui intégreraient leurs données.</p>
<p>Ceux-ci peuvent être déployés dans le cadre de dispositifs de mesure fixes ou expérimentaux par les organismes agréés, mais aussi acquis par des citoyens, indépendamment des réseaux de surveillance de la qualité de l’air. Dans l’idéal, les données pourraient être renvoyées aux organismes agréés pour compléter le réseau de mesure de la pollution. En pratique actuellement, certaines sont traitées directement par les entreprises fournissant les capteurs, ou sont utilisées dans le cadre de projets de recherche.</p>
<p>Mais les conditions de mesure des microcapteurs sont-elles équivalentes à celles des stations de référence ? Les <a href="https://theconversation.com/la-pollution-peut-tuer-comment-connaitre-sa-propre-exposition-151397">premiers retours d’expérience font apparaître</a> que ces microcapteurs exploitent des détecteurs de moindre qualité et qu’ils présentent le risque de ne pas être étalonnés régulièrement. En raison du manque de fiabilité des détecteurs utilisés, les données fournies sont moyennées, le plus souvent sur une minute, ce qui représente un pas de temps trop long pour être significatif quand la personne qui porte le capteur est en mouvement.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/377556/original/file-20210107-15-16tspq7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/377556/original/file-20210107-15-16tspq7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/377556/original/file-20210107-15-16tspq7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/377556/original/file-20210107-15-16tspq7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/377556/original/file-20210107-15-16tspq7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/377556/original/file-20210107-15-16tspq7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/377556/original/file-20210107-15-16tspq7.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=373&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Avec un capteur mesurant les particules toutes les minutes, que mesure t-on ? Exemple d’un trajet rue Cuvier à Paris depuis la rue Jussieu jusqu’au quai St-Bernard : le piéton perçoit les variations liées au passage d’un véhicule (à gauche) puis il s’approche du quai, où la pollution est forte. En trottinette, le passage du véhicule est occulté mais l’augmentation près du quai est détectée. A vélo, l’unique mesure ne permet pas de distinguer les événements.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Stéphane Pawlak et Laurence Eymard</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>La mise en place d’un réseau de mesure de la qualité de l’air soulève un bon nombre de difficultés (logistique, technique et scientifique). Ces difficultés sont bien sûr exacerbées quand des microcapteurs peu précis et demandant des protocoles d’utilisation stricts sont utilisés par des volontaires qui ne sont pas formés aux « contraintes » de la réalisation d’une mesure utilisable par le réseau de surveillance !</p>
<h2>Captation citoyenne et co-construction de connaissances nouvelles</h2>
<p>La mobilisation de citoyens pour mettre en place de réseaux de capteurs fait actuellement l’objet de <a href="https://caspa.fr/wp-content/uploads/2020/06/Compte-rendu_Colloque_CASPA_2019.pdf">nombreux projets de recherche</a>.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/377564/original/file-20210107-16-yp9kz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/377564/original/file-20210107-16-yp9kz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/377564/original/file-20210107-16-yp9kz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/377564/original/file-20210107-16-yp9kz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/377564/original/file-20210107-16-yp9kz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/377564/original/file-20210107-16-yp9kz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/377564/original/file-20210107-16-yp9kz3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La Frida Box permettait de mesurer le CO₂, entre autres applications connectées, développée par Arslonga.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:La_Frida_Box,_Futur_en_Seine,_place_de_la_Bastille_(3586033389).jpg">Jean‑Pierre Dalbéra, Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Certains projets portent surtout sur les usages des microcapteurs : qu’est-ce qui est mesuré, par qui, comment et pourquoi, par exemple les projets <a href="https://www.atmo-auvergnerhonealpes.fr/actualite/mobicitair-les-resultats-de-lexperimentation-citoyenne">Mobicit’Air</a> à Grenoble et <a href="https://www.airbreizh.asso.fr/le-projet-ambassadair/">Ambassad’Air</a> à Rennes.</p>
<p>D’autres, contribuent à une meilleure connaissance de la pollution par la construction d’une cartographie participative de la qualité de l’air en milieu urbain, c’est le cas du projet <a href="https://budgetparticipatif.paris.fr/bp/jsp/site/Portal.jsp?document_id=3821&portlet_id=158">Respirons mieux</a>, dans le 20e arrondissement de Paris.</p>
<p>Notre projet Expo’Ped, en partenariat avec la mairie d’Ivry-sur-Seine, explore également cette dimension de cartographie en associant un groupe de personnes à la construction de connaissances sur leur quartier, intégrant la qualité de l’air. À terme, ce projet pourrait conduire à une réorganisation de la circulation dans le quartier.</p>
<p>Pour débuter ce projet, nous avons décidé de fournir aux participant·es des bases sur la pollution qu’ils vont mesurer (composition, sources, diffusion dans l’atmosphère…). De plus, le fonctionnement, les limites techniques du capteur utilisé, et la nécessité des opérations d’étalonnage seront expliqués pour que le capteur ne soit pas une « boîte noire ». L’objectif est que les participant·es au projet se sentent libres de faire des expériences par eux-mêmes, et acquièrent un savoir empirique qui leur permettra de contribuer à l’élaboration des protocoles de mesures : hauteur de mesures, contexte, durée minimale, etc. En croisant leurs observations, et en échangeant avec des scientifiques spécialistes, les volontaires deviendront capables d’exploiter leur capteur, tant pour cartographier la pollution que <a href="https://theconversation.com/la-pollution-peut-tuer-comment-connaitre-sa-propre-exposition-151397">pour évaluer leur exposition individuelle</a>. La personne porteuse étant active et informée, elle n’est pas simplement un « support » mobile d’acquisition de données exploitées par d’autres. Autre avantage, les données collectées peuvent être exploitées scientifiquement.</p>
<p>À l’issue du projet, nous espérons que chaque participant·e, tirant des enseignements des résultats obtenus, saura adapter son comportement dans sa vie quotidienne : éviter de rester près d’une source de pollution lors de ces déplacements en ville, analyser les principales sources de pollution susceptibles d’affecter sa santé et réduire ses propres émissions.</p>
<p>La plupart des projets de sciences participatives ont cette vocation double de construction de connaissances et de mise en capacité des participant·es. Dans, cette optique, la communauté scientifique <a href="https://caspa.fr">Capteurs et Sciences Participatives</a> s’est constituée pour échanger sur les bonnes pratiques des sciences participatives utilisant des capteurs, dans divers domaines environnementaux et en particulier sur la qualité de l’air.</p>
<p>Et vous, seriez-vous prêt·e à contribuer à un projet d’observation participative de la pollution atmosphérique ?</p>
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<p><em>Cet article a été coécrit par Jeremy Hornung, de l’association <a href="https://www.helloasso.com/associations/participant-e-s-citoyen-ne-s-pour-l-environnement-et-les-sciences-particitenv-s/">PartiCitEnv’s</a>. Florence Huguenin-Richard, maîtresse de conférence en géographie dans l’unité Médiations, coordonne le projet Expo’Ped, qui est financé par Sorbonne Université</em>.</p>
<hr>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=484&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/328409/original/file-20200416-192725-wmbl1n.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=609&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<p><em>Cet article fait partie de la série « Les belles histoires de la science ouverte » publiée avec le soutien du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Pour en savoir plus, visitez le site <a href="https://www.ouvrirlascience.fr/">Ouvrirlascience.fr</a>.</em></p>
<hr><img src="https://counter.theconversation.com/content/152276/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laurence Eymard a reçu des financements de Sorbonne Université et l'institut de la transition environnementale (SU-ITE). Elle est membre de l'association PartiCitEnv'S. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Laure Turcati coordonne l'observatoire participatif de l'environnement urbain PartiCitaE <a href="http://www.particitae.upmc.fr">http://www.particitae.upmc.fr</a>, pour lequel elle a reçu des financements de l'Institut de la Transition Environnementale de Sorbonne Université <a href="https://www.su-ite.eu/">https://www.su-ite.eu/</a>. Elle est membre du projet Expo'Ped financé par Sorbonne Université. Elle est membre de l'association PartiCitEnv'S <a href="https://www.helloasso.com/associations/participant-e-s-citoyen-ne-s-pour-l-environnement-et-les-sciences-particitenv-s/">https://www.helloasso.com/associations/participant-e-s-citoyen-ne-s-pour-l-environnement-et-les-sciences-particitenv-s/</a></span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sébastien Payan a reçu des financements de la Fondation Sorbonne Université.</span></em></p>
La formation des utilisateurs de microcapteurs citoyens et l’expérimentation sont au cœur de projets participatifs, entre science de l’atmosphère, des capteurs, et méthode scientifique.
Laurence Eymard, Directrice de recherche CNRS émérite, chercheuse dans le domaine du climat et de l'environnement, Sorbonne Université
Laure Turcati, Ingénieure de recherche en sciences participatives, Sorbonne Université
Sébastien Payan, Professeur, Sorbonne Université
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/149749
2021-01-10T19:11:41Z
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Cette micro-algue qui se cache derrière les eaux colorées vertes de Bretagne Sud
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/373607/original/file-20201208-23-uoyifq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans la baie de Vilaine, le 9 Juillet 2020. </span> <span class="attribution"><span class="source">Mathilde Schapira/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>Depuis une première observation en 1982, on repère presque chaque année des eaux colorées vertes qui s’étendent <a href="https://doi.org/10.1016/j.marpol.2018.01.022">du Finistère Sud aux côtes Vendéennes</a>.</p>
<p>Sous l’influence de la Loire et de la Vilaine, cette zone est en effet la plus vulnérable du littoral Atlantique au phénomène dit « d’eutrophisation ». Ce terme désigne l’un des problèmes majeurs affectant les zones aquatiques, continentales et côtières. On peut le décrire comme une réponse des écosystèmes à des <a href="https://doi.org/10.5194/bg-16-1361-2019">apports externes de nutriments</a> issus de rejets directs d’effluents domestiques (comme les eaux usées), agricoles (comme les engrais azotés et phosphorés) et industriels.</p>
<p>Cette <a href="https://doi.org/10.1080/10641262.2011.611916">réaction des écosystèmes</a> peut se traduire par l’augmentation de la biomasse phytoplanctonique ainsi que par l’intensification et la multiplication des efflorescences d’espèces phytoplanctoniques, toxiques ou nuisibles. Ces épisodes se produisent généralement au cours du printemps et de l’été, lorsque l’ensoleillement et la température de l’eau atteignent des niveaux favorables à la prolifération de ces organismes photosynthétiques.</p>
<h2>Coloration verte et mortalités d’organismes marins</h2>
<p>Les eaux vertes observées en Bretagne Sud sont plus précisément la conséquence de la <a href="https://doi.org/10.2216/i0031-8884-35-5-381.1">prolifération d’une micro-algue, le <em>Lepidodinium chlorophorum</em></a>. Il mesure environ 20 µm et présente une forte coloration verte, observable en microscopie optique.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=501&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=501&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=501&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/373609/original/file-20201208-19-ue2avs.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=629&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Cellules de <em>L. chlorophorum</em> observées au microscope optique.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Anne Schmitt-Gallotti/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
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<p>Bien que <em>L. chlorophorum</em> <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00133/24470/">ne produise pas de toxines</a>, il peut être considéré comme une espèce nuisible. En effet, dès les années 1990, les eaux colorées vertes à <em>L. chlorophorum</em> ont été associées à des <a href="https://doi.org/10.1016/S0272-7714(06)80008-9">mortalités de poissons et de bivalves</a> le long du littoral Atlantique.</p>
<p>Des mortalités d’organismes marins – moules, huîtres, certains mollusques, crevettes, crabes et petits crustacés – ont ainsi été enregistrées au cours de l’été 1988 près des Sables-d’Olonne. En 2012, des mortalités de moules de plus de 40 % ont été identifiées.</p>
<p>Les observations réalisées par l’Ifremer à cette période ont montré la présence d’un mucus de couleur verte sur les coquillages, sans pour autant faire directement le lien de cause à effet entre ces mortalités et les efflorescences de <em>L. chlorophorum</em>.</p>
<p>En 2018, des <a href="https://archimer.ifremer.fr/doc/00457/56879/">pertes importantes d’huîtres et de moules</a> ont été rapportées sur les zones de production du Morbihan et de Loire-Atlantique suite aux eaux colorées vertes.</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=451&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/373612/original/file-20201208-19-1soxc3u.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=567&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Moules de bouchots de la baie de Pont Mahé, en juillet 2012.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Michael Retho/Ifremer</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Malgré les potentielles conséquences de la multiplication de ces eaux colorées vertes à <em>L. chlorophorum</em>, nos connaissances relatives à la dynamique des efflorescences ainsi qu’aux facteurs environnementaux les conditionnant <a href="https://doi.org/10.1016/j.hal.2015.11.016">restent encore limitées</a>. Très peu d’études ont été menées sur l’écologie de cette espèce et peu d’observations ont été recensées à travers le monde.</p>
<h2>Beaucoup d’aspects encore méconnus</h2>
<p>Une étude menée en laboratoire sur cette espèce a montré que <em>L. chlorophorum</em> pouvait produire de grandes quantités de substances à l’aspect visqueux, aussi appelées <a href="https://doi.org/10.3354/ame01187">particules exo-polymériques transparentes</a>.</p>
<p>Ces particules jouent un rôle majeur au sein des écosystèmes : riches en matière organique, elles forment de parfaits <a href="https://doi.org/10.1016/0198-0149(89)90131-3">microenvironnements, propices au développement bactérien</a>. Elles ont également tendance, en accélérant la <a href="https://doi.org/10.1016/j.pocean.2016.11.002">sédimentation de la matière organique vers les fonds marins</a>, à affecter les processus de recyclage de cette matière organique par les bactéries, et ainsi à diminuer les concentrations en oxygène à proximité du fond. Ces particules transparentes sont également <a href="https://doi.org/10.1016/S0079-6611(02)00138-6">susceptibles d’augmenter la viscosité de l’eau de mer</a>.</p>
<p>Au vu de leurs multiples effets sur les écosystèmes, il est essentiel de pouvoir quantifier les concentrations de ces particules transparentes dans l’océan.</p>
<h2>Des eaux peut-être un peu trop visqueuses</h2>
<p>On l’a vu, des mortalités importantes d’organismes marins ont suivi certaines efflorescences de <em>L. chlorophorum</em>, aussi suspecté d’être à l’origine de l’<a href="https://doi.org/10.1111/jbi.12665">arrêt de croissance chez l’huître creuse <em>Crassostrea gigas</em></a>.</p>
<p>Ces mortalités pourraient être en lien, comme évoqué plus haut, avec la production importante de particules exo-polymériques transparentes ; cela de deux manières : en diminuant les concentrations en oxygène à proximité du fond suite à la dégradation de la matière organique produite au cours de l’efflorescence ; en augmentant la viscosité de l’eau ce qui pourrait avoir un effet négatif sur le comportement de filtration et la croissance des bivalves. On pense notamment au <a href="https://doi.org/10.1016/j.jembe.2009.09.021">colmatage des branchies</a> qui pourrait altérer la respiration et l’assimilation de la nourriture chez ces organismes.</p>
<p>À ce jour, aucune étude ne s’est intéressée aux facteurs environnementaux favorisant le développement de <em>L. chlorophorum</em>. Et aucune étude n’a estimé les quantités de particules exo-polymériques transparentes produites lors d’une eau colorée verte en milieu naturel.</p>
<p>De la même manière, nous ne connaissons ni la composition de ces particules ni leur capacité à modifier significativement la viscosité de l’eau de mer. Une meilleure connaissance de ces particules exo-polymériques est le premier pas vers une compréhension plus fine des mécanismes à l’origine des mortalités observées suite aux eaux colorées vertes. Le <a href="https://wwz.ifremer.fr/lermpl/Etudes/Ecosystemes-marins/LEPIDO-PEN">projet de recherche Lepido-Pen</a> que nous conduisons tente d’apporter de premiers éléments de réponse.</p>
<h2>Un appel aux usagers du littoral</h2>
<p>Ces phénomènes d’eaux colorées ne s’annoncent pas, ils sont parfois très fugaces et localisés. Pour soutenir la recherche, un projet de science participative – <a href="https://www.phenomer.org/Participer">Phenomer</a> – propose aux usagers du littoral de signaler leurs observations d’eaux colorées.</p>
<p>Un formulaire de signalement est accessible sur le site web Phenomer et une application mobile est également téléchargeable. <a href="https://www.phenomer.org/Participer/Je-communique-mon-observation">Avec l’aide de tout à chacun</a>, les scientifiques pourront sans doute mieux cerner l’ampleur de ce phénomène et ses possibles causes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/149749/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Pauline Roux a reçu des financements de la région Pays de la Loire.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Mathilde Schapira a reçu des financements de la région Pays de la Loire.</span></em></p>
Du Finistère Sud aux côtes Vendéennes, la prolifération nuisible du Lepidodinium chlorophorum inquiète et réclame de mieux comprendre les causes et l’ampleur de ce phénomène.
Pauline Roux, Doctorante en écologie du phytoplancton, Ifremer
Mathilde Schapira, Chercheur Ifremer, Ifremer
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/151397
2020-12-10T18:24:22Z
2020-12-10T18:24:22Z
La pollution peut tuer – comment connaître sa propre exposition ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/373282/original/file-20201207-15-1l0ijc2.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C1448%2C1911%2C1135&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les stations fixes de mesure de la pollution urbaine donnent des valeurs moyennes ou extrapolées, pour les zones où elles ne sont pas installées.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/-Iyyx7x5XvU">Nathan Dumlao / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>La justice britannique a reconnu pour la première fois le <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/12/16/la-pollution-a-contribue-a-la-mort-d-une-fillette-a-londres-selon-la-justice-britannique_6063600_3244.html">rôle de la pollution dans le décès d’un enfant</a> ce mercredi 16 décembre 2020. En France, plusieurs métropoles dépassent régulièrement les seuils réglementaires et l’État français a été <a href="https://www.dalloz-actualite.fr/sites/dalloz-actualite.fr/files/resources/2019/10/c-63618.pdf">condamné à plusieurs reprises</a> pour « action insuffisante » par la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE). </p>
<p>L’OMS indique que <a href="https://www.who.int/fr/news-room/detail/02-05-2018-9-out-of-10-people-worldwide-breathe-polluted-air-but-more-countries-are-taking-action">7 millions de morts sont dus à la pollution atmosphérique</a> chaque année dans le monde, principalement via des pathologies respiratoires et cardiovasculaires. L’air que nous respirons est-il toxique ? La réponse est oui.</p>
<p>Les citadins sont les plus exposés à ce risque de surmortalité, lié aux concentrations élevées que les polluants gazeux et particulaires peuvent atteindre. Les populations urbaines subissent, en effet, non seulement les pollutions issues de sources d’émission locales (transports urbains et chauffage principalement), mais aussi les pollutions diffuses transportées par les courants aériens sur de longues distances (émissions industrielles, pesticides, pollens, aérosols divers).</p>
<p>Portant, estimer son exposition individuelle à la pollution de l’air urbaine représente encore un véritable défi, notamment en raison de limites techniques. Mais depuis quelque temps, de nouvelles démarches centrées sur l’humain viennent renouveler la façon d’aborder le problème.</p>
<h2>Des stations de référence aux microcapteurs</h2>
<p>Depuis les années 1970, un vaste réseau de surveillance et de prévision de la qualité de l’air a été progressivement déployé sur l’ensemble du territoire national. Il s’appuie sur un parc de stations dites « de référence » et est géré à l’échelle de chaque région par des structures dédiées, les <a href="https://atmo-france.org/la-carte-des-aasqa/">associations agréées de surveillance de la qualité de l’air</a>.</p>
<p>Les points de mesure sont peu nombreux, mais les instruments sont implantés dans des zones soigneusement choisies et les capteurs utilisés sont rigoureusement étalonnés et exploités. Les associations de surveillance utilisent également des modèles numériques ou statistiques pour estimer la répartition des principaux polluants dans la région considérée.</p>
<p>Cependant, si la rue dans laquelle vous habitez ne dispose pas d’une station de mesure, ce qui a de grandes chances d’être le cas, l’estimation fournie ne correspond en fait qu’à la moyenne statistique du quartier, elle-même élaborée à partir d’un inventaire des sources fixes et du trafic moyen horaire, en tenant compte de la météorologie du jour, le vent surtout.</p>
<p>Autrement dit, si vous cherchez à connaître votre exposition personnelle à la pollution de l’air à partir du dispositif de surveillance national, vous n’obtiendrez dans le meilleur des cas qu’une valeur moyenne, pour un polluant donné. Difficile d’en déduire une information fiable sur votre exposition personnelle à la « pollution de l’air » et encore moins au risque sanitaire que cette exposition représente pour vous.</p>
<p>Or, depuis quelques années, on observe l’arrivée sur le marché de « microcapteurs » qui portent avec eux la promesse d’une mesure précise et fiable de son exposition individuelle à la pollution de l’air. Ces instruments de mesure de petite taille et que l’on porte avec soi, accessibles au prix d’un smartphone, pourraient-ils changer la donne ?</p>
<h2>Des limites à la conception, à la mesure et à l’utilisation</h2>
<p>Un capteur se compose d’un système de détection pour un ou plusieurs polluants, par exemple une diode laser dont le faisceau est atténué ou diffusé par le passage des particules polluantes ; d’un système électronique pour enregistrer le signal ; d’un micro-ordinateur pour l’interpréter (par exemple, convertir l’atténuation du faisceau lumineux durant un temps donné en nombre de particules). Il collecte souvent aussi l’heure, la position, la température et l’humidité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/372810/original/file-20201203-19-7o87bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/372810/original/file-20201203-19-7o87bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/372810/original/file-20201203-19-7o87bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/372810/original/file-20201203-19-7o87bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=324&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/372810/original/file-20201203-19-7o87bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=407&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/372810/original/file-20201203-19-7o87bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=407&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/372810/original/file-20201203-19-7o87bt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=407&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les microcapteurs construits en fab lab ou fabriqués par des entreprises sont des instruments complexes.</span>
<span class="attribution"><span class="source">source ?</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Dans le cas des stations de référence, la « mesure » d’un polluant est un processus complexe qui nécessite de nombreux tests de qualification en amont ainsi qu’une maintenance coûteuse tout au long de sa durée de vie. Pour garantir la fiabilité des données générées, le capteur doit respecter des conditions d’usage particulières et doit être stationnaire le temps de la mesure notamment. Enfin, pour comparer les données de plusieurs capteurs, les conditions de mesures doivent être similaires : hauteur au-dessus du sol, entrée de l’air dans les capteurs, durée d’intégration des mesures primaires, entre autres.</p>
<p>Les microcapteurs individuels répondent à un cahier des charges différent : ils exploitent des détecteurs de <a href="https://www.atmosud.org/sites/paca/files/atoms/files/180518_biblio_microcapteur_2018.pdf">moindre qualité</a>, ils ne sont pas étalonnés régulièrement et ils fournissent des informations souvent intégrées sur une minute au moins pour avoir une précision acceptable. Leur usage est à chaque fois particulier : le capteur peut être en mouvement ou accroché différemment chaque jour par exemple.</p>
<p>Plus problématique encore, pour un modèle donné, chaque capteur se comporte différemment et il n’existe pas encore de stratégie d’étalonnage unique. De plus, tous les instruments sont sujets au phénomène de <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89talonnage_(m%C3%A9trologie)">« dérive de la mesure »</a>, qui peut intervenir à des moments différents pour chaque capteur. Dans le cas des microcapteurs, il <a href="https://lameteorologie.fr/issues/2020/111/meteo_2020_111_45">semblerait</a> selon nos études que la dérive intervienne beaucoup plus rapidement que pour les instruments homologués pour différentes raisons, notamment la robustesse des principes de détection, la miniaturisation des composants de détection, la protection vis-à-vis de perturbations environnementales (température, humidité).</p>
<p>Enfin, l’utilisation de ces microcapteurs par des personnes non formées à leurs usages introduit une source d’erreur supplémentaire : la mauvaise manipulation, par exemple capteur dans la poche ou masqué par une écharpe.</p>
<p>Lorsque l’on fait l’acquisition d’un microcapteur pour son usage personnel, il est donc important de garder à l’esprit que l’on utilise un instrument qui, <em>de facto</em>, ne respecte pas les mêmes standards de qualité que les stations de référence.</p>
<h2>Des limites à l’exploitation des mesures</h2>
<p>Pour permettre un suivi fiable de sa propre exposition, il est nécessaire de contrôler la qualité des données du capteur. L’approche la plus courante consiste à demander aux porteurs de capteurs mobiles de se rendre périodiquement près d’une station de mesure fixe ou bien de comparer systématiquement les mesures des différents capteurs lorsqu’ils sont à proximité les uns des autres, pour effectuer un inter-étalonnage.</p>
<p>Une autre difficulté vient du fait que la détection d’un pic d’exposition extrême par le capteur mobile est souvent difficile à caractériser : s’agit-il du toast qui a brûlé dans le grille-pain ? Du camion à l’arrêt moteur allumé depuis 10 minutes ? En ayant connaissance de ces éléments contextuels et en les documentant sous la forme de métadonnées, il est possible d’éliminer les faux positifs a posteriori, mais cela implique une attention accrue et un travail supplémentaire au moment de la collecte. Le traitement des données représente donc un défi en soi. On peut y répondre en partie grâce à d’un protocole rigoureux, mais il faut y sensibiliser les usagers de microcapteurs.</p>
<h2>Impliquer les individus dans l’estimation de leur exposition</h2>
<p>Si, comme on l’a relevé, la plupart des difficultés rencontrées sont de nature technique, les solutions à ces mêmes problèmes pourraient bien reposer en partie sur un recentrage des dispositifs vers l’humain, en particulier à travers des « sciences citoyennes » ou « sciences participatives ».</p>
<p><a href="http://www.mobicitair.fr/">Former</a> les usagers à l’utilisation de leur instrument et les <a href="http://www.wiki-rennes.fr/Ambassad%27Air">associer</a> à la <a href="https://aircitizen.org/">co-construction</a> de connaissances est en effet triplement vertueux : une telle démarche représente à la fois un intérêt sociétal (implication citoyenne, développement de la culture scientifique), un intérêt industriel (<em>feed-back</em> utilisateurs, mise à l’épreuve des instruments dans un contexte scientifique), et bien sûr un intérêt scientifique, car cela permet d’augmentation le volume et la représentativité des données et la sécurisation de la qualité de données : les données générées deviennent plus exploitables et plus utiles pour tous.</p>
<hr>
<p><em>Cet article a été co-écrit par Jérémy Hornung, de l’association PartiCitEnv’s (anciennement <a href="http://www.particitae.upmc.fr/fr/index.html">PartiCitaE</a>)</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151397/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laurence Eymard est membre de l'association PartiCitEnv'S (Participation Citoyenne pour l'Environnement et les Sciences). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Laure Turcati coordonne l'observatoire participatif de l'environnement urbain ParticitaE porté par Sorbonne Université.
Elle est membre de l'association PartiCitEnv'S (Participation Citoyenne pour l'Environnement et les Sciences). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Sébastien Payan a reçu des financements de la Fondation Sorbonne Université. </span></em></p>
La pollution de l’air est mesurée par un vaste réseau de surveillance, auquel s’ajoutent désormais des capteurs individuels commerciaux ou citoyens. Quelle est leur fiabilité ?
Laurence Eymard, Directrice de recherche CNRS émérite, chercheuse dans le domaine du climat et de l'environnement, Sorbonne Université
Laure Turcati, Ingénieure de recherche en sciences participatives, Sorbonne Université
Sébastien Payan, Professeur, Sorbonne Université
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/144298
2020-11-09T10:01:27Z
2020-11-09T10:01:27Z
Les vers plats prédateurs envahissent les Antilles
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/367510/original/file-20201104-21-14be88l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C14%2C3114%2C1475&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">_Amaga expatria_, une espèce spectaculaire, vient d'être signalée en Guadeloupe et Martinique</span> <span class="attribution"><a class="source" href="http://dx.doi.org/10.7717/peerj.10098/fig-5">Pierre & Claude Guezennec</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>En 2013, un amateur naturaliste de Cagnes-sur-Mer a trouvé un <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Plathelminthes">ver plat</a> dans son jardin et a eu la bonne idée d’envoyer la photographie sur les réseaux naturalistes. </p>
<p>Nous avons alors lancé une <a href="https://sites.google.com/site/jljjustine/que-faire-si-je-trouve-un-plathelminthe?">enquête de science participative en France</a> pour obtenir des informations : nous n’avons pas été déçus ! Plus de <a href="https://doi.org/10.6084/m9.figshare.1447202">dix espèces de Plathelminthes terrestres</a> venues d’ailleurs sont maintenant signalées en France métropolitaine, dont des espèces géantes de 30 centimètres de long et une espèce qui a maintenant envahi plus de 70 % du territoire métropolitain.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/obama-nungara-le-ver-venu-dargentine-qui-envahit-les-jardins-francais-131004">Obama nungara, le ver venu d’Argentine qui envahit les jardins français</a>
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<p>Un résultat inattendu de notre enquête, au départ ciblée sur la Métropole, a été de recevoir des photographies des départements d’outre-mer, et en particulier des Antilles. Nous n’avions pas prévu ça, mais là encore, nous n’avons pas été déçus : avec leur climat tropical, les Antilles peuvent héberger des espèces qui ne pourraient pas survivre dans le climat métropolitain. </p>
<p><a href="https://doi.org/10.20944/preprints202005.0023.v1">Nous publions donc aujourd'hui</a> notre étude qui recense les espèces qui ont été trouvées aux Antilles. Un bilan encore très provisoire, car nous recevons des nouveaux signalements et il semble que de nouvelles espèces envahissent en ce moment les Antilles.</p>
<h2>Le « ver à tête en forme de marteau » géant – <em>Bipalium kewense</em></h2>
<p>Commençons par le plus grand. Le « ver à tête en forme de marteau » <em>Bipalium kewense</em> est bien un géant : 30 centimètres – c’est plus long que votre chaussure, même si vous chaussez du 44. L’espèce s’appelle « kewense » ce qui signifie en latin qu’elle vient de Kew, en Grande-Bretagne, où elle a été décrite en 1878. En fait, elle vient plutôt des célèbres serres tropicales de Kew, qui abritent des plantes de tous les pays du monde. Voilà une des caractéristiques originales de ces <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Geoplanidae">Plathelminthes terrestres</a> : souvent, ils sont passés inaperçus dans leur pays d’origine, et on ne les trouve que dans les régions qu’ils ont envahies. On a déterminé bien plus tard que la zone d’origine de <em>Bipalium kewense</em> est au Vietnam.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367496/original/file-20201104-19-1jcecv3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Bipalium kewense" src="https://images.theconversation.com/files/367496/original/file-20201104-19-1jcecv3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367496/original/file-20201104-19-1jcecv3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367496/original/file-20201104-19-1jcecv3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367496/original/file-20201104-19-1jcecv3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367496/original/file-20201104-19-1jcecv3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367496/original/file-20201104-19-1jcecv3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367496/original/file-20201104-19-1jcecv3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le « ver à tête en forme de marteau » <em>Bipalium kewense</em>, le plus long des Plathelminthes envahisseurs des Antilles, ici en train de tuer un ver de terre.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierre Gros</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p><em>Bipalium kewense</em> a maintenant envahi la <a href="http://dx.doi.org/10.7717/peerj.4672">plupart des régions tropicales</a> dans le monde. Il est présent en Guadeloupe, Martinique, et dans d’autres îles des Antilles comme Cuba.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/des-vers-geants-predateurs-envahissent-les-jardins-francais-dans-lindifference-96241">Des vers géants prédateurs envahissent les jardins français. Dans l’indifférence</a>
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</p>
<hr>
<p>En quittant sa région d’origine, l’espèce a aussi abandonné… la reproduction sexuée. Les individus qu’on trouve aux Antilles n’ont pas d’organes sexuels, et ils se multiplient par un phénomène étonnant appelé <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Scissiparit%C3%A9">scissiparité</a>. Un morceau de la queue se détache, une tête lui repousse, et voilà un nouvel individu. Le jeune est donc un clone de son parent, qui était lui-même un clone de son parent. C’est le même individu qui a envahi plusieurs continents ! <em>Bipalium kewense</em> est un prédateur de vers de terre, qu’il tue avec un poison violent, la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/T%C3%A9trodotoxine">tétrodotoxine</a>.</p>
<h2>Le petit « ver à tête en forme de marteau » – <em>Bipalium vagum</em></h2>
<p><em>Bipalium vagum</em> a la même forme générale que <em>Bipalium kewense</em>, avec son corps allongé et sa tête large, mais il est beaucoup plus petit, pas plus de quelques centimètres de long, et les lignes sur son dos sont bien plus nettes. L’espèce n’a été décrite que <a href="https://doi.org/10.11646/zootaxa.1001.1.3">très récemment, en 2005</a> ; le premier spécimen a été trouvé dans une jardinerie aux Bermudes. Comme pour tous les <em>Bipalium</em>, on pense que la région d’origine est en Asie, mais on ne sait pas où exactement.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367687/original/file-20201105-17-6pcck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Bipalium vagum" src="https://images.theconversation.com/files/367687/original/file-20201105-17-6pcck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367687/original/file-20201105-17-6pcck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367687/original/file-20201105-17-6pcck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367687/original/file-20201105-17-6pcck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=377&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367687/original/file-20201105-17-6pcck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=474&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367687/original/file-20201105-17-6pcck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=474&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367687/original/file-20201105-17-6pcck.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=474&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Le petit petit « ver à tête en forme de marteau » <em>Bipalium vagum</em>, présent en Guadeloupe et Martinique, photographié ici en Guyane Française.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Sébastien Sant</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En 2018, nous avons montré que l’espèce est aussi présente en <a href="http://dx.doi.org/10.7717/peerj.4672">Martinique et Guadeloupe</a>. En anglais, l’espèce s’appelle « le ver à tête de marteau qui mange des mollusques » bien que son régime alimentaire n’ait pas été étudié de manière bien précise. L’espèce a aussi bien envahi les régions tropicales, y compris la Floride et différents pays d’Asie et Amérique du Sud.</p>
<h2>Celui qui fait partie des « 100 espèces envahissantes les plus néfastes » –<em>Platydemus manokwari</em></h2>
<p>En 2000, des scientifiques ont établi une liste des <a href="http://www.issg.org/pdf/publications/worst_100/french_100_worst.pdf">« cent espèces exotiques envahissantes les plus néfastes dans le monde »</a>. On y trouve le Moustique tigre, la Tortue de Floride et le Rat noir. Dans la liste, un seul Plathelminthe terrestre, <em>Platydemus manokwari</em>. À l’époque, c’était le seul pour lequel on avait des informations scientifiques précises sur son rôle écologique, qui est effectivement néfaste dans les régions envahies.</p>
<p><em>Platydemus manokwari</em> a été trouvé pour la première fois à Manokwari, en Nouvelle-Guinée, et c’est probablement sa région d’origine. Il a ensuite envahi de <a href="http://dx.doi.org/10.7717/peerj.1037">nombreuses îles du Pacifique</a>. Ce qu’on lui reproche, c’est qu’il mange pratiquement tout : les escargots, les vers de terre. Et dans les îles du Pacifique, les espèces d’escargots terrestres endémiques sont déjà en danger parce que rares et limitées à des petites surfaces. <em>Platydemus manokwari</em> peut mettre en danger la biodiversité des îles en détruisant les espèces rares de mollusques. Il est capable de chasser les escargots en suivant leur trace de mucus et peut même monter sur les branches des végétaux pour les pister !</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367501/original/file-20201104-23-1cfongx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Platydemus manokwari" src="https://images.theconversation.com/files/367501/original/file-20201104-23-1cfongx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367501/original/file-20201104-23-1cfongx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367501/original/file-20201104-23-1cfongx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367501/original/file-20201104-23-1cfongx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367501/original/file-20201104-23-1cfongx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367501/original/file-20201104-23-1cfongx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367501/original/file-20201104-23-1cfongx.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le fameux <em>Platydemus manokwari</em>, qui maintenant envahit aussi la Guadeloupe.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pierre Gros</span></span>
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</figure>
<p>En 2019, une très mauvaise nouvelle : nous avons reçu un <a href="https://doi.org/10.20944/preprints202005.0023.v1">signalement de <em>Platydemus manokwari</em> en Guadeloupe</a>, puis plusieurs. Mais l’espèce est déjà dans d’autres îles des Antilles, comme <a href="http://dx.doi.org/10.7717/peerj.1037">Porto-Rico</a>, et est en voie d’envahir la Floride, le Texas et la Louisiane. Aucun signalement reçu de Martinique, mais malheureusement il faut ajouter « pour le moment ».</p>
<h2>Celui qui ressemble un peu à une banane – <em>Amaga expatria</em></h2>
<p><em>Amaga expatria</em>, comme <em>Bipalium vagum</em>, a aussi été <a href="https://doi.org/10.11646/zootaxa.1001.1.3">décrit en 2005</a> à partir de spécimens trouvés aux Bermudes. En fait, à partir de deux spécimens seulement, trouvés dans un jardin botanique. Plus personne n’a retrouvé cette espèce pendant 15 ans – on pourrait penser qu’elle est rare. Et puis, nous avons reçu des signalements de Martinique et de Guadeloupe. Au total, <a href="https://peerj.com/articles/10098/">plus de 20 signalements dans les deux îles françaises</a>, soit donc dix fois plus que tous ceux qui étaient connus. <em>Amaga expatria</em> est bien implanté à peu près partout dans les deux îles.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367518/original/file-20201104-17-1t4cr2i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Amaga expatria, carte" src="https://images.theconversation.com/files/367518/original/file-20201104-17-1t4cr2i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367518/original/file-20201104-17-1t4cr2i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367518/original/file-20201104-17-1t4cr2i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367518/original/file-20201104-17-1t4cr2i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=353&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367518/original/file-20201104-17-1t4cr2i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=444&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367518/original/file-20201104-17-1t4cr2i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=444&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367518/original/file-20201104-17-1t4cr2i.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=444&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les endroits où on a trouvé le ver plat <em>Amaga expatria</em> en Guadeloupe et Martinique. Les couleurs représentent la pluviométrie.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Jessica Thévenot ; Fond de carte : Météo France</span></span>
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</figure>
<p>C’est une grande espèce, jusqu’à 15 cm de long, et, à la différence de <em>Bipalium kewense</em> qui est plus long mais très fin, <em>Amaga expatria</em> a un corps bien large et bien plat. La couleur : jaune-orange, avec des points noirs. Oui, ça ressemble un peu, en couleur et forme, à une banane coupée dans le sens de la longueur.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/367505/original/file-20201104-17-t8a0u1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="Amaga expatria" src="https://images.theconversation.com/files/367505/original/file-20201104-17-t8a0u1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/367505/original/file-20201104-17-t8a0u1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/367505/original/file-20201104-17-t8a0u1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/367505/original/file-20201104-17-t8a0u1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/367505/original/file-20201104-17-t8a0u1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/367505/original/file-20201104-17-t8a0u1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/367505/original/file-20201104-17-t8a0u1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption"><em>Amaga expatria</em>, animaux vivants photographiés en différents endroits en Guadeloupe.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Laurent Charles, Mathieu Coulis et Guy van Laere</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>D’où vient cette espèce ? le nom d’espèce « expatria » avait été choisi pour indiquer qu’elle n’était pas chez elle aux Bermudes. Le genre <em>Amaga</em> inclut une dizaine d’espèces d’Amérique du Sud, et donc l’espèce vient probablement de là – mais l’espèce <em>Amaga expatria</em> n’a pas encore été trouvée dans son pays d’origine. Est-ce que l’espèce est dans d’autres îles des Antilles, nous ne le savons pas.</p>
<p>Pour <em>Amaga expatria</em>, nous avons pu utiliser des méthodes moléculaires de pointe et caractériser son <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9nome_mitochondrial">génome mitochondrial</a>, comme nous l’avions fait pour <a href="https://doi.org/10.1080/23802359.2019.1596768">d’autres espèces</a>.</p>
<p>Résultat supplémentaire, les nouvelles méthodes de séquençage permettent de repérer l’ADN des animaux que le ver a mangé. C’est ainsi que nous avons eu la preuve qu’<em>Amaga expatria</em> mange un mollusque en Martinique, le <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Bulime">Bulime</a> octone. Des naturalistes locaux nous ont aussi rapporté que <a href="https://peerj.com/articles/10098/">l’espèce mange différents escargots et des vers de terre</a>.</p>
<h2>D’où viennent ces vers envahissants ?</h2>
<p>Chacune de ces espèces a une origine géographique différente : l’Asie continentale pour <em>Bipalium kewense</em> et <em>Bipalium vagum</em>, la Nouvelle-Guinée pour <em>Platydemus manokwari</em>, et l’Amérique centrale pour <em>Amaga expatria</em>.</p>
<p>Comment sont-elles arrivées aux Antilles, par contre, la réponse est la même pour toutes : par le transport de végétaux. Un Plathelminthe terrestre dans la terre d’un pot de fleurs, ou même collé entre deux feuilles dans un plant de bananier, est pratiquement invisible. C’est par ce moyen que ces vers ont envahi le monde. Ils ne l’ont pas fait seul et certainement pas exprès – c’est le commerce international et inter-îles qui a permis leur diffusion. Une fois arrivés dans une île, ils vont envahir très lentement, jardin par jardin, ou très vite, si des pots de fleurs ou des plants sont transportés. Quand s’est faite l’invasion, nous ne le savons pas, mais <em>Bipalium kewense</em>, par exemple, est signalé dans des <a href="http://dx.doi.org/10.7717/peerj.4672">dizaines de pays depuis des décennies</a>.</p>
<h2>Pourquoi est-ce important pour l’écologie des Antilles ?</h2>
<p>Tous ces vers plats sont des prédateurs – ils mangent des proies qu’ils vont capturer sur le sol. Or, l’écologie des sols est importante, et dépend de tous ces animaux qui vivent dans le sol et à sa surface. Ajouter à l’écosystème des sols des Antilles des nouveaux prédateurs, qui vont consommer certaines espèces mais pas d’autres, a le potentiel de perturber les équilibres écologiques. C’est comme mettre un loup dans une bergerie – il n’est pas difficile d’imaginer que le nombre de moutons va diminuer ! Mais nous n’avons pas encore de chiffres précis sur l’impact de ces espèces introduites : combien de proies elles consomment, et lesquelles précisément.</p>
<p>En Guadeloupe, <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000042382754">sont maintenant interdits</a> la détention, le transport, le colportage, l’utilisation, l’échange, la mise en vente, la vente ou l’achat de spécimens vivants de <em>Platydemus manokwari</em> et des <em>Bipalium</em>.</p>
<h2>Que faire ?</h2>
<p>Pour le moment, nous en sommes aux premières étapes d’un travail scientifique dont le but serait de savoir quel est l’impact écologique de ces animaux envahissants – ceci est actuellement inconnu. À terme, il faudrait aussi trouver des moyens de nous en débarrasser, mais ceci est un objectif lointain.</p>
<p>Dans l’immédiat, <a href="https://sites.google.com/site/jljjustine/que-faire-si-je-trouve-un-plathelminthe?">vous pouvez aider en signalant les vers plats</a> trouvés dans votre jardin ou dans vos promenades : faire une photo, noter l’endroit, et <a href="https://inpn.mnhn.fr/informations/inpn-especes">envoyer le signalement</a>. Qui sait, il y a probablement d’autres espèces pas encore repérées – malheureusement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/144298/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Lou Justine a reçu des financements du Muséum National d'Histoire Naturelle. Il est un des "Academic Editors" (bénévole) de la revue scientifique PeerJ (<a href="https://peerj.com">https://peerj.com</a>) dans laquelle ont été publiés plusieurs travaux cités dans cet article.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Hugh Jones ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
Plusieurs espèces de vers plats ont envahi les Antilles, dont certaines très spectaculaires. Nous faisons le point avec une étude publiée en même temps que cet article.
Jean-Lou Justine, Professeur, UMR ISYEB (Institut de Systématique, Évolution, Biodiversité), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Hugh Jones, Chercheur, Natural History Museum
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/146882
2020-10-13T18:12:02Z
2020-10-13T18:12:02Z
Du tracteur au carnet de comptage, un projet de sciences participatives 100 % agricole
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/361725/original/file-20201005-22-13x1dqj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un nichoir en bordure de champ pour identifier et compter les abeilles sauvages. </span> <span class="attribution"><span class="source">B.Lamouroux</span></span></figcaption></figure><p>En mai 2019, le <a href="https://ipbes.net/news/Media-Release-Global-Assessment-Fr">rapport de l’IPBES</a> désignait notre système agroalimentaire, agriculture intensive en tête, comme l’un des principaux facteurs responsables de l’érosion de la biodiversité. Les changements d’usage des sols, le travail intensif des terres, l’homogénéisation des paysages et l’utilisation d’intrants chimiques (pesticides, fertilisation minérale) y étaient pointés du doigt.</p>
<p>Si les scientifiques s’accordent aujourd’hui sur ces liens de cause à effet, relier dynamiques de biodiversité et pratiques agricoles relève d’un véritable défi dès lors qu’on se place sur de grandes échelles.</p>
<p>La plupart des études se basent en effet, pour des raisons pratiques, sur des expérimentations en laboratoire, au mieux sur une ou quelques dizaines de parcelles ; et elles se déploient sur des temps relativement courts. Ces travaux se concentrent d’autre part en général sur un groupe d’espèces unique (les abeilles, les vers de terre, les oiseaux par exemple), manquant parfois d’informations précises sur les pratiques agricoles relatives aux mesures de biodiversité.</p>
<p>Pour tirer des conclusions générales, les chercheurs se voient donc contraints de s’appuyer sur des suppositions, au mieux des extrapolations.</p>
<h2>Dans la peau d’un agriculteur-naturaliste</h2>
<p>L’Observatoire agricole de la biodiversité (OAB) est né en 2011 de cette volonté de comprendre les interactions et les interconnexions entre agriculture et biodiversité, sur un temps long et pour l’ensemble du territoire.</p>
<p>Ce programme de sciences participatives – qui s’inscrit au sein du réseau <a href="http://www.vigienature.fr/fr">Vigie-Nature</a> – est porté conjointement par le Muséum national d’histoire naturelle et le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation avec de nombreux partenaires ; il rassemble aujourd’hui près d’un millier de professionnels de l’agriculture provenant de tous horizons : viticulteurs, céréaliers, maraîchers, etc.</p>
<p>Cette initiative repose sur le volontariat : à raison de quelques jours par an, les participants doivent se mettre dans la peau d’un naturaliste afin de référencer différents groupes d’organismes vivants (appelés « taxons ») sur leurs parcelles.</p>
<p>Quatre protocoles d’observation sont proposés : abeilles sauvages, invertébrés du sol, vers de terre et papillons.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/362220/original/file-20201007-18-sosq9b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/362220/original/file-20201007-18-sosq9b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/362220/original/file-20201007-18-sosq9b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/362220/original/file-20201007-18-sosq9b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/362220/original/file-20201007-18-sosq9b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/362220/original/file-20201007-18-sosq9b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/362220/original/file-20201007-18-sosq9b.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Avec les agriculteurs volontaires de l’Observatoire agricole de la biodiversité.</span>
<span class="attribution"><span class="source">MNHN</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Nichoirs à abeilles</h2>
<p>Concernant le protocole relatif aux abeilles, chaque année à la fin de l’hiver, l’agriculteur doit fixer en bordure de champ deux structures composées de plusieurs cavités ; elles feront office de nichoir et de nurserie pour les abeilles femelles au printemps.</p>
<p>Il lui suffira ensuite de venir dénombrer les trous obstrués, à raison d’une fois par mois de mars à novembre, et d’identifier la nature des matériaux ayant servi à construire le nid – terre, feuilles mâchées, cire, paille… Ces informations donnent une indication des groupes d’espèces présents sur la parcelle.</p>
<p>Pour le protocole vers de terre, on versera un volume de moutarde diluée dans l’eau. Une fois remontés à la surface en raison du caractère urticant de la solution, il faut les identifier à l’aide d’une petite clé de détermination. On y distingue alors les vers épigés, vivant en surface, des anéciques et des endogés, vivant en profondeur.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/362221/original/file-20201007-14-22rqht.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/362221/original/file-20201007-14-22rqht.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/362221/original/file-20201007-14-22rqht.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/362221/original/file-20201007-14-22rqht.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/362221/original/file-20201007-14-22rqht.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/362221/original/file-20201007-14-22rqht.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/362221/original/file-20201007-14-22rqht.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En Vendée, lors d’un protocole de suivi des vers de terre sur les parcelles agricoles.</span>
<span class="attribution"><span class="source">RL.Preud’Homme/MNHN</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les groupes d’espèces n’ont pas été choisis par hasard : ils entretiennent des liens étroits avec l’agriculture en remplissant des fonctions écologiques indispensables.</p>
<p>Les abeilles sauvages assurent une pollinisation efficace, tandis que les vers de terre travaillent les sols, garantissant leur fertilité. De leur côté, les carabes sont des prédateurs redoutables des ravageurs (notamment certains mollusques) ; enfin, les papillons font office d’indicateurs précis de la santé paysagère d’un territoire. Cette biodiversité ordinaire, tout comme la biodiversité remarquable, constitue un atout pour l’activité agricole.</p>
<p>Ces échantillonnages réguliers, relativement peu contraignants, permettent à l’agriculteur d’évaluer la santé de son milieu. Cette boussole écologique doit naturellement le conduire à se poser des questions, à engager des réflexions sur ses responsabilités, à guider certains choix… pour valider, ajuster, voire remettre en cause certaines pratiques.</p>
<h2>Dix ans de données agricoles</h2>
<p>Toutes les données récoltées par les agriculteurs volontaires intègrent ensuite une base nationale. C’est là que nous, chercheurs, intervenons.</p>
<p>Depuis près de dix ans, des centaines d’agriculteurs issus de toute la France ont fait part de leurs rencontres avec la faune sauvage, tout en renseignant leurs pratiques et les caractéristiques des paysages qui les entourent. Nous disposons grâce eux d’une mine d’information inestimable que seule une mobilisation de cette ampleur peut offrir.</p>
<p>En nous appuyant sur les sept premières années de suivis (2011-2017), impliquant 1 216 agriculteurs sur 2 382 parcelles, nous avons pu établir des <a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/1365-2664.13746">corrélations inédites à cette échelle</a>.</p>
<p>Sans surprise, les tendances générales sont au déclin.</p>
<p>Les abeilles et papillons voient leur abondance dégringoler dans les vergers et en grande culture (entre 30 et 80 % avec toutefois une forte variation selon les contextes), et ce d’autant plus que l’utilisation d’intrants chimiques (pesticides, fertilisation minérale) augmente. Cela confirme le fait que ces produits affectent directement les organismes par intoxication ou indirectement en diminuant les ressources en fleurs et les sites de nidification.</p>
<p>Les invertébrés du sol (carabes et mollusques) souffrent d’un autre phénomène : le recul des prairies permanentes, généralement maintenues pour l’élevage. Enherbées depuis au moins 5 ans, elles renferment un écosystème stable et riche. Mais l’élevage subissant un net recul depuis plusieurs décennies dans nos contrées, les prairies, jeunes, annuelles, servent dorénavant surtout à limiter les adventices (« mauvaises herbes ») dans les rotations en grandes-culture.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Carabe doré avançant sur un sol caillouteux" src="https://images.theconversation.com/files/361724/original/file-20201005-22-mpqtio.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/361724/original/file-20201005-22-mpqtio.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=327&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/361724/original/file-20201005-22-mpqtio.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=327&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/361724/original/file-20201005-22-mpqtio.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=327&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/361724/original/file-20201005-22-mpqtio.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=411&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/361724/original/file-20201005-22-mpqtio.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=411&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/361724/original/file-20201005-22-mpqtio.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=411&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le carabe doré (Carabus auratus) est un redoutable prédateur et protecteur des cultures, indispensable au champ.</span>
<span class="attribution"><span class="source">RL. Vermeersch</span></span>
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<h2>Des perspectives collectives</h2>
<p>Derrière ce tableau noir ressortent toutefois quelques dynamiques positives.</p>
<p>Les exploitations en grande culture ayant le moins recours aux intrants chimiques voient abeilles et papillons se stabiliser dans le temps, voire croître légèrement ; d’au minimum 10 à 12 % (toujours avec de fortes variations selon les contextes). De même, les vers de terre semblent recoloniser ces exploitations qui ont diminué ou banni le travail du sol. <a href="https://besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/1365-2664.13746">L’étude révèle également</a> que les vignobles entourés de forêts sont beaucoup plus accueillants pour les abeilles, les lisières offrant gîte et couvert en abondance.</p>
<p>Des solutions existent donc pour inverser les tendances. Les agriculteurs de l’OAB le démontrent eux-mêmes depuis une décennie. Reste la mise en œuvre. C’est là qu’apparaissent de profonds dilemmes : comment cesser le travail du sol sans recourir aux herbicides pour lutter contre les adventices ? Inversement, abandonner les herbicides, comme l’exige la production biologique, c’est se voir contraint de travailler le sol pour compenser mécaniquement… En somme, faut-il choisir entre les insectes pollinisateurs et les vers de terre ?</p>
<p>Les agriculteurs de l’OAB partagent tous les ans leurs expériences, en portant un regard écosystémique sur leurs parcelles. Ils sont de fait les premières sentinelles de la biodiversité agricole. Il est donc important qu’ils puissent s’associer avec d’autres acteurs pour trouver des solutions et améliorer les pratiques agricoles. Au plan national, avec les chercheurs à l’OAB, ou en participant à des initiatives locales : replantage de haies, réduction des phytosanitaires, bandes fleuries, fauchage tardif, etc.</p>
<p>Car c’est en combinant savoirs naturalistes et savoirs agronomiques que l’agriculture pourra retrouver son rôle de producteur de biodiversité sauvage et culturale.</p>
<p><em>Hugo Struna, journaliste et rédacteur du blog de <a href="http://www.vigienature.fr/">Vigie-Nature</a>, un programme de sciences participatives porté par le Muséum national d’histoire naturelle, est co-auteur de cet article</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146882/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Olivier Billaud a reçu des financements du Crédit Agricole via un mécénat au Muséum national d'Histoire naturelle. </span></em></p>
L’Observatoire agricole de la biodiversité cherche à comprendre, sur le temps long et tout le territoire français, les interactions entre pratiques agricoles et biodiversité.
Olivier Billaud, Doctorant en écologie et sciences de gestion, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/143570
2020-10-05T22:00:12Z
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Témoignage : Compostou, une recherche-action au service des écosystèmes et de la population
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/357947/original/file-20200914-22-yprw39.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=26%2C14%2C1571%2C1183&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le Compostou, composteur partagé bioinspiré fonctionnant à froid et sur couche mince </span> <span class="attribution"><span class="source">Zéro Déchet Touraine</span>, <span class="license">Author provided</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=236&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/293181/original/file-20190919-22450-1e2zj7j.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=297&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la prochaine Fête de la science (qui aura lieu du 2 au 12 octobre 2020 en métropole et du 6 au 16 novembre en Corse, en outre-mer et à l’international) dont The Conversation France est partenaire. Cette nouvelle édition aura pour thème : « Planète Nature ». Retrouvez tous les événements de votre région sur le site <a href="https://www.fetedelascience.fr/">Fetedelascience.fr</a>.</em></p>
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<p>En janvier 2020, l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) a accordé à quatre <a href="https://www.liberation.fr/planete/2017/06/25/le-composteur-ca-eut-pue_1579039">inventeurs tourangeaux</a> un brevet français sur un composteur d’un nouveau genre, le <a href="https://compostou.org/">Compostou</a>. La délivrance de ce brevet ne récompensait pas uniquement un dispositif inventif, nouveau et industrialisable. C’était aussi l’aboutissement d’une démarche scientifique et citoyenne originale qui a vu chercheurs et militants en prévention des déchets travailler étroitement ensemble pendant trois ans.</p>
<p>Le Compostou a été conçu par une équipe pluridisciplinaire réunissant un biologiste, un ingénieur agronome, un chimiste et un menuisier. Partant du constat qu’une litière forestière dégrade efficacement et sans nuisance la matière organique, les quatre inventeurs se sont inspirés du fonctionnement d’une hêtraie pour concevoir un nouveau modèle de composteur partagé.</p>
<p>Comme la litière de la hêtraie, le Compostou accueille une microfaune abondante et diversifiée et permet une stratification des dépôts de matière organique en horizons pédologiques fonctionnels. Comme tout composteur bien géré, il permet la transformation de biodéchets, plutôt humides et azotés, et de matière sèche, plutôt carbonée, en un compost sain et équilibré. Ce qui le distingue en revanche, c’est la démarche de <a href="https://journals.openedition.org/apliut/4276">recherche-action</a> qui a abouti à sa création.</p>
<h2>Partir des représentations</h2>
<p>Dans une approche scientifique classique, les chercheurs auraient tenté de modéliser le fonctionnement d’un composteur partagé afin d’en isoler les paramètres les plus saillants et d’en optimiser le fonctionnement à petite échelle, en conditions contrôlées. À la fin d’une période d’expérimentation plus ou moins longue, les scientifiques auraient diffusé, sous la forme d’un article de recherche ou d’une conférence, une série de recommandations théoriques et pratiques censées optimiser le fonctionnement de ce type d’appareil.</p>
<p>Dans le cas du Compostou, le principe a été de partir des représentations des acteurs impliqués dans le <a href="https://www.cairn.info/revue-flux-2017-2-page-22.htm">compostage</a> de proximité (utilisateurs, élus, techniciens de collectivités, maîtres-composteurs, représentant de services de l’état…), réunis en table ronde afin que soient identifiés les freins et les leviers actuels au développement de cette pratique.</p>
<p>L’enjeu est de taille : le compostage permet en effet de <a href="https://www.ademe.fr/expertises/dechets/passer-a-laction/valorisation-organique/gestion-proximite">réduire de 25 40 %</a> le volume de nos poubelles, il est créateur de lien social et permet le retour au sol d’un amendement de qualité. Pourtant, il peine à se développer en France, en partie à cause d’un manque de formation dans la population urbaine qui peut engendrer des mésusages.</p>
<p>La température d’un composteur classique, ou « chaud », peut monter à plus de 55 °C, sous l’effet d’un fort développement de bactéries thermophiles (qui apprécient les températures élevées) grâce au potentiel énergétique des biodéchets frais. Lorsque les conditions d’humidité et d’oxygénation sont mal contrôlées, des nuisances (mauvaises odeurs, animaux indésirables) peuvent apparaître pendant ou après cette phase de prolifération bactérienne.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Dy6SYUoRQ7Q?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Présentation du Compostou sur France 3 Centre-Val de Loire.</span></figcaption>
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<p>Les inventeurs ont constaté que cette méthode de compostage, bien qu’efficace et largement préconisée par l’ADEME (agence française de la transition écologique) et le Réseau compost citoyen (principale fédération française des accompagnateurs au compostage de proximité), ne convient pas à tous les utilisateurs. En particulier, elle exige une certaine discipline et des compétences qui ne peuvent être acquises que par une pratique techniquement très encadrée.</p>
<p>En cherchant à simplifier les pratiques pour mieux intégrer les utilisateurs débutants, négligents ou trop faibles pour procéder à des brassages profonds du compost, les inventeurs du Compostou ont formulé l’idée que « moins serait peut-être mieux » : moins de bactéries, moins d’humidité, moins de brassages manuels, moins d’épaisseur de biodéchets aussi, afin que le compost ne soit pas confiné dans le composteur et puisse « respirer ».</p>
<h2>Innovation économique</h2>
<p>La méthode mise au point a ainsi abouti à une quasi-absence d’élévation de température en phase de décomposition de la matière organique. Or ce compostage « froid » s’est révélé très favorable aux animaux décomposeurs (acariens, collemboles, cloportes, insectes, myriapodes, annélides, mollusques…) qui pullulent rapidement dans le Compostou. Un compost sain également, car les organismes pathogènes semblent y être en forte compétition avec les flores intestinales des animaux décomposeurs.</p>
<p>Par sa conception et son fonctionnement, le Compostou contribue donc à deux services écosystémiques importants : la décomposition de la matière organique (service de régulation) et le maintien de la biodiversité du sol (service de soutien).</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/dechets-verts-et-alimentaires-des-detritus-sous-exploites-77112">Déchets verts et alimentaires : des détritus sous-exploités</a>
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<p>Mais l’innovation matérielle et méthodologique ne suffit pas à résoudre tous les problèmes rencontrés par le compostage partagé. Il a aussi été décidé d’innover sur le plan économique et social. En effet, la plupart des composteurs partagés vendus dans le commerce ne sont pas réparables, faute de commercialisation de leurs pièces détachées ou à cause de certains choix de conception. Ainsi, certains composteurs en bois sont constitués de planches clouées et collées, non démontables. D’autres, en plastique recyclé thermoformé ont des parois, des couvercles et des pièces de liaisons spécifiques qui ne peuvent être commandés séparément ni reproduits aisément.</p>
<p>Au-delà de ces aspects matériels, le succès d’un site de compostage partagé repose surtout sur la qualité de l’accompagnement humain dont il bénéficie. Les inventeurs du Compostou ont donc confié à une association locale, <a href="https://www.zerodechettouraine.org/">Zéro Déchet Touraine</a>, le soin d’organiser son développement commercial à travers une formule de mise à disposition, maintenance et accompagnement annuel des utilisateurs, par du personnel bénévole ou salarié qualifié. Ainsi, les Compostous restent la propriété exclusive d’un organisme à but non lucratif et constituent une nouvelle catégorie de biens communs mis au service de la population. L’autogestion joue un grand rôle dans ce modèle économique et fait appel à du salariat et à du bénévolat.</p>
<p>Ceci préfigure probablement l’avenir du travail et des moyens de production qui devront être nécessairement repensés et partagés, pour rompre avec la précarité et l’individualisme, la déconsidération des métiers essentiels, et pour dynamiser les relations sociales au sein des communautés locales. Il n’y a qu’en faisant communauté que l’on peut faire société. Cette initiative communaliste s’inscrit donc pleinement à la fois dans l’économie de la fonctionnalité, dans l’économie circulaire et dans l’économie sociale et solidaire.</p>
<h2>Science citoyenne</h2>
<p><a href="https://www.zerodechettouraine.org/files/rapports/2019/bilan-technique-projet-compostou.pdf">Le projet Compostou</a> a aussi et surtout été l’occasion de « faire science » avec créativité. Il est connu que tout observateur doit inévitablement modifier l’objet de son observation s’il veut en avoir une vision exhaustive. Pour tendre vers une supposée neutralité objective, on peut tenter de minimiser les interactions possibles avec l’objet étudié, le soustraire à son environnement, ou l’abstraire. Mais cela engendre généralement une perte de données, un réductionnisme intellectuel, ou une artificialisation excessive de l’expérimentation.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1172178199263903744"}"></div></p>
<p>Le concept de recherche-action encourage au contraire l’observateur à s’impliquer auprès de son sujet pour mieux l’appréhender et le faire évoluer. Ce faisant, l’observateur assume d’être objectivement engagé dans un processus de transformation de l’objet étudié et s’impose un engagement objectif dans la collecte de données. La recherche-action est très répandue en sciences humaines et sociales en tant que méthodologie d’enquête et moyen de transformation sociale, de la part des intellectuels les plus engagés. Il est plus rare de voir cette démarche mise en œuvre par des chercheurs issus des sciences et techniques.</p>
<p>Pourtant cette approche, transposable à bien des sujets, peut permettre de revitaliser une recherche académique parfois trop éloignée des attentes sociétales. En outre, elle oblige le scientifique à s’interroger en permanence sur le sens de son engagement et à être particulièrement attentif aux normes de son éthos (universalisme, collégialité, désintéressement et scepticisme, selon le sociologue <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Robert_King_Merton">Robert K. Merton</a>), là où une démarche plus ordinaire ne l’aurait conduit qu’à rechercher une certaine exhaustivité statistique.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/quand-chercheurs-et-citoyens-cooperent-109892">Quand chercheurs et citoyens coopèrent</a>
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<p>Non, le rôle de chercheur ne se limite pas à la comparaison de moyennes basées sur au moins 30 valeurs. Compte tenu des processus décisionnels vitaux dans lesquels il peut être engagé, des données auxquelles il a accès, de la robustesse des méthodologies et des outils d’analyse qu’il peut maîtriser, le scientifique peut pleinement apporter une contribution à la transformation positive du monde.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/143570/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sébastien Moreau a reçu des financements du Conseil Régional Centre Val de Loire, de l'ADEME et du Syndicat mixte Touraine Propre. Il est membre de Zéro Déchet Touraine. </span></em></p>
Le Compostou repose sur des innovations techniques permettant de repenser les pratiques de compostage. Mais c’est surtout le résultat d’une démarche associant chercheurs et citoyens.
Sébastien Moreau, Maître de conférences en biologie, Université de Tours
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/134698
2020-04-01T19:03:02Z
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Petit guide pour apprentis naturalistes confinés
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/324575/original/file-20200401-66140-cknx6p.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C142%2C7951%2C4761&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Copains de confinement. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/NJ7_qmkl5Js">Clint McKoy/Unsplash</a></span></figcaption></figure><p>En ces temps de confinement, même les milieux naturels semblent exclus des possibilités dérogatoires de déplacements des Français, immobilisant naturalistes amateurs et professionnels pour qui, aller dans la nature, constitue un aspect essentiel de leur travail.</p>
<p>Il existe toutefois un ensemble de milieux où la biodiversité n'est pas du tout exclue : nos intérieurs, nos abords de maisons, les jardins et espaces urbains et péri-urbains. En ce début de printemps, la nature n'a rien de confinée : les espèces commensales des humains sont bien présentes autour de nous, à l'image de nouvelles espèces invasives – comme la <a href="https://theconversation.com/la-punaise-diabolique-cette-creature-urbaine-66752">punaise diabolique</a> – qui se réveillent dans nos maisons et cherchent à sortir pour aller se reproduire. </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/encore-une-punaise-diabolique-quand-the-conversation-fait-de-la-science-participative-71197">Encore une punaise « diabolique » : quand The Conversation fait de la science participative</a>
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<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/324642/original/file-20200401-23151-1pstqx6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/324642/original/file-20200401-23151-1pstqx6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/324642/original/file-20200401-23151-1pstqx6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/324642/original/file-20200401-23151-1pstqx6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/324642/original/file-20200401-23151-1pstqx6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=388&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/324642/original/file-20200401-23151-1pstqx6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/324642/original/file-20200401-23151-1pstqx6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/324642/original/file-20200401-23151-1pstqx6.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=488&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"><em>Zelus renardii</em>.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Romain Garrouste/MNHN</span></span>
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<p>Les punaises de lits et autres espèces domestiques – psoques ou poux des livres, mites ou teignes des denrées, poissons d'argent, etc. – sont, elles, présentes de façon continue. Pour les punaises des lits, une seconde espèce est en train de s'installer en France (<em>Cimex hemipterus</em>). Et, dans les jardins, les <a href="https://theconversation.com/obama-nungara-le-ver-venu-dargentine-qui-envahit-les-jardins-francais-131004">vers plats invasifs</a> commencent à chasser les vers de terre et les reines de <a href="https://theconversation.com/le-frelon-asiatique-est-entre-dans-paris-62746">frelons asiatiques</a> vont bientôt fonder leur nids. Pour les punaises, une nouvelle invasive vient d'arriver dans nos maisons puis dans nos jardins, <a href="https://inpn.mnhn.fr/actualites/lire/10281/une-nouvelle-espece-de-punaise-invasive-decouverte-dans-le-sud-de-la-france">la réduve américaine Zelus</a>.</p>
<p>Toutes nos espèces natives recommencent ainsi leur cycle annuel. Et plusieurs nouvelles espèces invasives non encore signalées s'installent probablement plus ou moins silencieusement.</p>
<h2>Observez ce qui vous entoure</h2>
<p>Pour un naturaliste, que ce soit dans un jardin, une jardinière disposée sur un balcon, les bords des arbres d'une allée urbaine, tout est matière à examen ; et le début du printemps se révèle propice à ces observations, avec le débourrage des bourgeons des arbres et arbustes, l’arrivée des pucerons sur les nouveaux rameaux, les premières fleurs et leurs pollinisateurs précoces, les premiers papillons, le réveil des fourmilières, le chant matinal des oiseaux, la reprise de l'activité dans les mares (souvent sonores avec nos amies les grenouilles), les premières chasses des lézards.</p>
<p>Un naturaliste ne s'ennuie jamais !</p>
<p>Bien entendu, les régions chaudes – régions méditerranéennes et atlantiques – sont un peu plus propices aux observations. Les régions méditerranéennes faisant même partie de ce que l'on désigne comme un « point chaud » de biodiversité. Mais toutes nos régions présentent un intérêt naturaliste, surtout dans le contexte changeant du réchauffement climatique qu'il faut comprendre et documenter. </p>
<p>Ne taillez pas vos haies trop vite, n'arrachez pas trop vite non plus les mauvaises herbes de vos jardinières : observez d'abord ce qui s'y passe, ça grouille de vie ! Comme sous les pierres, les branches mortes, les tas de feuilles. Dans tous les cas, rien de bien méchant s'y trouve. Bannissons nos peurs ancestrales de cet inframonde logé sous nos pied, indispensable au fonctionnement des écosystèmes. Soyons curieux de cette nature qui nous entoure, même dans nos maisons. </p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/324652/original/file-20200401-23086-1ul3jvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/324652/original/file-20200401-23086-1ul3jvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/324652/original/file-20200401-23086-1ul3jvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/324652/original/file-20200401-23086-1ul3jvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/324652/original/file-20200401-23086-1ul3jvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/324652/original/file-20200401-23086-1ul3jvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/324652/original/file-20200401-23086-1ul3jvo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des plantes, un balcon… l’endroit parfait pour observer la nature en miniature.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://ccsearch.creativecommons.org/photos/e68772d9-ac47-477e-8f86-418639834a9a">Machine Made/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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</figure>
<h2>Participez à la recherche scientifique</h2>
<p>À l’heure du développement numérique, les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/sciences-participatives-28466">sciences participatives</a> ont pu prendre leur envol, en bénéficiant notamment d’une panoplie de nouveaux outils informatiques et en ligne. Le Muséum national d’histoire naturelle est en pointe dans ce domaine, grâce à un réseau unique de partenaires et d'ONG naturalistes, de sociétés savantes et de passionnés dans toutes les disciplines.</p>
<p>L'engouement de ces activités a conduit à mettre en place un programme ambitieux, appelé <a href="http://cesco.mnhn.fr/fr/65-millions-dobservateurs-6094">« 65 Millions d'observateurs »</a>, proposant des programmes très variés. Aujourd'hui, muni d'un smartphone, chacun d'entre nous est un observateur en puissance, que ce soit pour prendre des photos, compléter des questionnaires ou partager des informations. Renouer avec la nature est désormais possible, comme le propose par exemple <a href="https://www.mnhn.fr/fr/participez/actualites/rejoignez-explorateurs-nature-application-inpn-especes">l'application INPN</a>. De son côté, le <a href="https://www.mnhn.fr/fr/participez/actualites/open-portail-sciences-participatives">portail OPEN</a> regroupe toutes les initiatives des sciences citoyennes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"581766718206316544"}"></div></p>
<p>Les sciences participatives offrent une façon utile, ludique et pédagogique de nous rapprocher de la nature, depuis nos intérieurs ou nos jardins. Et tout particulièrement pour les plus jeunes d’entre nous en ces temps de confinement renforcé. </p>
<p>Pourquoi ne pas commander, par exemple, un microscope USB (on en trouve à partir de 20 euros) pour observer les insectes ou regarder des graines pousser ? Pourquoi ne pas faire un mini-potager à partir des légumes et fruits (boutures, épluchures) que vous utilisez en cuisine ? Avec l’aide d’Internet, commencer un petit élevage d’araignées (comme <a href="http://www.insectes.org/opie/pages_dyna.php?idpage=991">ici</a> et <a href="https://www.fondation-lamap.org/fr/page/11018/la-toile-daraignee">là</a>, par exemple) ressemble à un jeu d'enfant. Et pour ceux qui en possèdent un, explorer votre composteur, son contenu ne manquera pas de vous surprendre (avez-vous déjà rencontré la <a href="https://www.sciencesetavenir.fr/animaux/insectes/l-elevage-de-mouches-soldat-noires-pour-recycler-les-dechets_108218">mouche soldat noire</a> ?).</p>
<p>Si vous observez des punaises invasives (<em>Halyomorpha</em>, <em>Leptoglossus</em>, <em>Zelus renardii</em>), signalez-les sur le <a href="http://eee.mnhn.fr/">site dédié du Muséum</a>, une simple photo prise avec votre portable suffira. Pour les punaises des lits, vous pourrez adresser des échantillons (petits récipients bien fermés, morts ou vifs) à mon nom à l'adresse suivante : l'ISYEB/MNHN 45, rue Buffon 75005 Paris. Elles serviront à nos recherches sur ces espèces.</p>
<p>Pensez aussi a allez explorer les pédagogies alternatives (dites inversées ou par projets) qui vont certainement connaître une essor unique après cette période de confinement. Celles proposées par exemple par <a href="https://www.cri-paris.org/en">le CRI</a> et son <a href="https://les-savanturiers.cri-paris.org/">programme « Les Savanturiers »</a> ou le plus classique <a href="https://www.fondation-lamap.org/fr">« Main à la pate »</a>. Tous proposent des MOOCs, des <em>serious games</em> et autres ressources permettant d'améliorer nos connaissances sur les sciences de la nature.</p>
<h2>Dans le miroir de la nature</h2>
<p>En marge de sa portée tragique, la pandémie de Covid-19 nous invite aussi à réfléchir à ce qui nous a conduits dans une telle situation. Ces phénomènes émergents sont certainement le fruit de mauvaises pratiques perturbant le fonctionnement d’écosystèmes que nous ne connaissons en réalité encore que très peu et que nous cherchons à dominer, voire à faire disparaître, pour éradiquer des espèces perçues comme dérangeantes, inutiles et des milieux jugés « non productifs ». </p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/covid-19-ou-la-pandemie-dune-biodiversite-maltraitee-134712">Covid-19 ou la pandémie d’une biodiversité maltraitée</a>
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<p>Espérons que cette situation inédite donnera la priorité aux mesures qui s'imposent pour rendre à la nature la place qu'elle doit conserver dans nos vies et dans le fonctionnement de nos sociétés.</p>
<p>Commençons donc par lui faire une vraie place dans l’intimité de nos maisons, de nos jardins ; et chassons nos peurs en observant et en cherchant à mieux connaître ce monde vivant qui nous entoure. Regardons la nature de près pour nous connaître mieux.</p>
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<p><em>Cet article est publié en collaboration avec les <a href="http://isyeb.mnhn.fr/fr">chercheurs de l’ISYEB</a> (Institut de systématique, évolution, biodiversité du Muséum national d’Histoire naturelle, Sorbonne Universités). Ils proposent ici une chronique scientifique de la biodiversité, « En direct des espèces ». Objectif : comprendre l’intérêt d’explorer le Vivant et de décrire la biodiversité.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/134698/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Garrouste a reçu des financements du MNHN, CNRS, Sorbonne Université, ANR, LABEX BCDiv et National Geographic.</span></em></p>
Coincés à la maison ? C’est l’occasion d’observer certains de nos colocataires d’un peu plus près…
Romain Garrouste, Chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (UMR 7205 MNHN-CNRS-Sorbonne Univ.-EPHE-Univ. Antilles), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/132406
2020-02-26T20:29:12Z
2020-02-26T20:29:12Z
Chercheurs : quels services rendus à la cité ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/317107/original/file-20200225-24659-o2xnh3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=12%2C1%2C1180%2C591&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Conférence biennale de la Fire Island aux Etats-Unis. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.nps.gov/fiis/images/Science-and-Research-Top-Photo.jpg?maxwidth=1200&maxheight=1200&autorotate=false">National Park Service</a></span></figcaption></figure><p>Nos collègues suisses possèdent une très belle expression pour identifier ce que les universitaires doivent concevoir comme un prolongement naturel de leur activité d’enseignants-chercheurs au-delà des murs de nos universités : « service à la cité ».</p>
<p>En effet, dans l’évaluation des activités annuelles, ils sont interrogés sur la façon dont ils s’emploient à diffuser, au-delà d’un public d’étudiants et de confrères et consœurs, leurs savoirs et les fruits de leur réflexion. C’est loin d’être injustifié, surtout si on est salarié de l’État. Comment en effet imaginer que le haut niveau d’expertise acquis par les académiques ne contribue pas aussi au débat public ? Et la question vaut aussi pour la France.</p>
<p>C’est dans ce cadre que le Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation s’est associé à The Conversation pour élaborer un <a href="http://www.areyounet.com/runet/client/profilReponse?d=669717&kd=DKOsk&ID=TCF">questionnaire</a> afin d’appréhender les modalités d’interventions des chercheurs dans la cité et les formes de démocratisation du savoir, tout en comprenant mieux les pratiques, les motivations et les freins de chacun.</p>
<p>Les modalités possibles sont si nombreuses que chacun, selon son tempérament, sa discipline, ses objets précis d’étude, peut trouver matière à intervention dans la cité.</p>
<p>Nous tenterons ici d’en dresser les contours et les motivations possibles.</p>
<h2>La science hors les murs</h2>
<p>Un chercheur, par sa soif de connaissance, est forcément animé aussi de la soif de la transmettre – par des publications, des participations à des colloques, séminaires, etc. – à plus forte raison lorsqu’il est aussi enseignant et que la transmission du savoir est une obligation de service.</p>
<p>Ce désir de transmettre peut donc trouver un prolongement naturel dans l’extériorisation du savoir vers d’autres lieux, auprès d’une population de plus en plus diplômée et qui aspire à continuer à apprendre durant sa vie professionnelle ou sa retraite. On a vu ainsi se multiplier ces lieux de curiosité intellectuelle que sont les « cafés scientifiques », les <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Universit%C3%A9_populaire">« universités populaires »</a> (dont les racines historiques sont anciennes), les « universités inter-âges ». Ce sont des lieux d’une science ouverte, où des citoyens viennent écouter mais aussi débattre avec les intervenants. Débats souvent riches, parfois passionnés et engagés. Les académiques sont souvent sollicités pour ces tiers lieux de la transmission des connaissances et rendent la science plus vivante et accessible au grand public en acceptant d’y participer.</p>
<p>L’étape suivante est d’organiser une participation des citoyens motivés à la collecte collective de données, via des sciences dites participatives.</p>
<h2>La science autrement</h2>
<p>L’accès au savoir peut emprunter des voies buissonnières, en comparaison aux usages académiques. Les <a href="https://theconversation.com/je-tremble-donc-je-tweete-quand-les-citoyens-aident-a-mesurer-les-catastrophes-naturelles-127048">nouvelles technologies</a>, le <a href="https://theconversation.com/scientific-game-jam-comment-mettre-la-science-en-jeu-81698">jeu vidéo</a>, la <a href="https://theconversation.com/bd-la-guerre-des-fourmis-episode-1-95695">bande dessinée</a>, l’<a href="https://theconversation.com/quand-arts-et-sciences-des-plasmas-se-rencontrent-au-musee-enjeux-dune-mediation-croisee-98281">art</a> peuvent sembler des chemins de traverse, mais qui s’ajoutent pourtant aux explorations du chercheur.</p>
<p>Le désir de trouver de nouveaux publics, de faire passer des connaissances de façon ludique, dans un contexte d’éveil culturel (expositions) est un autre moyen de jouer la carte de l’extériorisation des savoirs. <a href="http://www.universcience.fr/fr/accueil/">Universcience</a>, à Paris, a acquis un véritable savoir-faire en la matière, mobilisant des savants pour inventer des dispositifs pédagogiques pour intéresser, pour éveiller les consciences, pour titiller la curiosité des petits mais aussi des grands.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/quand-chercheurs-et-citoyens-cooperent-109892">Quand chercheurs et citoyens coopèrent</a>
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<p>Et n’est-ce pas aussi une des missions du chercheur d’élever le niveau global de curiosité, de surprendre et de transmettre un désir de science, une vocation ? Certaines formes d’extériorisation répondent à une salvatrice logique de long terme, en entretenant la flamme du plaisir de la découverte auprès de celles et ceux qui prendront ainsi le chemin d’une formation académique les conduisant un jour à prendre la relève. Dans un monde académique où la rentabilité immédiate et court-termiste l’emporte de plus en plus, le contexte n’est hélas pas favorable à ce genre d’engagement pour le long terme, très mal reconnu dans l’évaluation des carrières. Heureusement, la passion de sa discipline, l’envie d’y croire et de convaincre contrebalancent encore, pour certains chercheurs, le contexte désincitatif.</p>
<h2>La science dans les médias</h2>
<p>Le chercheur peut aussi être sollicité pour son expertise par les médias. Le débat sur l’acceptation de ce type de sollicitation est ancien. D’un côté celles et ceux qui trouvent cela évident, prolongement logique d’une conviction que leurs compétences peuvent éclairer le débat public. De l’autre, celles et ceux qui se méfient d’une parole experte mal digérée par la machine médiatique, d’un temps de parole insuffisant pour expliquer la complexité des choses, d’une interview téléphonique qui deviendrait un répertoire de trahison au moment de sa maigre et médiocre restitution écrite.</p>
<p>Reconnaissons néanmoins que si un expert reconnu d’un sujet refuse les sollicitations médiatiques, il aura mauvaise grâce à se plaindre après coup que les médias donnent la parole à d’autres bien moins experts que lui et qui diront selon lui des « âneries ».</p>
<p>L’ambition d’un site d’information comme The Conversation est justement d’abattre ces murs entre la recherche et le journalisme, en proposant un dispositif maîtrisé d’une prise de parole experte qui a l’espace pour exposer la complexité des choses et chasser les « âneries » des colonnes des journaux.</p>
<h2>Le scientifique dans l’espace numérique</h2>
<p>D’autres dispositifs similaires peuvent exister et offrir un point de réassurance aux chercheurs qui craignent une déformation de leur parole, une mauvaise vulgarisation. Certains profitent du développement des blogs et des réseaux sociaux pour en faire leur propre média et maîtriser ainsi de bout en bout le processus de fabrication et de diffusion des informations qu’ils ont envie de transmettre au grand public.</p>
<p>Il n’y a aucune raison pour considérer les académiques comme enfermés dans une bulle professionnelle hors du temps. Si l’ère numérique permet une démocratisation de la parole par de nouveaux outils, il y a forcément des chercheurs et chercheuses qui se sentent attirés par le même désir d’exploiter ces dispositifs au profit d’une insertion personnelle dans l’espace public numérique.</p>
<p>Mais on peut aller plus loin, et se dire que c’est justement parce qu’il y a une démocratisation de la prise de parole que les chercheurs doivent être vigilants et actifs. Dans un monde où cette démocratisation vaut égalisation apparente des points de vue et vaut même, aux yeux de certains internautes, écrasement des niveaux de compétences, une parole mal assurée et mal informée peut être perçue comme ayant la même valeur qu’un discours reposant sur des faits et des preuves et non sur de simples convictions déclamées haut et fort, dans une scénographie aussi alléchante que captieuse.</p>
<p>Face à ce défi, difficile d’imaginer les savants se réfugier avec dédain dans une tour d’ivoire du savoir, laissant le terrain numérique à celles et ceux qu’ils jugent sots et crédules. L’immersion, le plongeon dans le grand bain numérique, semblent devenir une impérieuse exigence collective. Et c’est jugé d’autant plus nécessaire s’il s’agit de lutter contre les fake news et les théories complotistes, où souvent les faits et les données scientifiques sont mobilisés de façon tordue, déformée, mensongère et manipulatrice.</p>
<h2>Le scientifique dans les mondes politiques et économiques</h2>
<p>Impossible de conclure ce panorama des lieux et enjeux possibles de l’intervention du chercheur dans la vie de la cité, sans aborder le sujet qui fâche le plus : les relations avec les milieux politiques et économiques. Pas celles imposées par un contexte de quête de financements qui place le chercheur en posture de possible domination, mais celles d’une ouverture à un autre univers professionnel sur des bases réellement collaboratives.</p>
<p>Souvent par conviction idéologique, parfois à cause de mauvaises expériences passées vécues ou racontées, de nombreux chercheurs se méfient instinctivement de tout ce qui peut ressembler à une collaboration trop poussée avec des mondes aux rationalités différentes, vécues dès lors comme divergentes. La crainte d’être instrumentalisé par un pouvoir politique, la crainte d’être exploité et économiquement pillé par un univers industriel font partie de l’imaginaire de chercheurs qui privilégient le retrait prudent sur leur Aventin. Crainte liée aussi à la perception (parfois très justifiée) d’une asymétrie de pouvoirs et de moyens.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/le-dialogue-entre-scientifiques-et-politiques-difficile-mais-indispensable-89324">Le dialogue entre scientifiques et politiques : difficile mais indispensable</a>
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<p>Pour autant, la participation à la formation d’élus autour de ses thématiques de recherche, la participation à des comités de définition des priorités scientifiques d’une instance politique, l’acceptation d’être auditionné pour l’élaboration d’une loi ou la redéfinition d’une politique publique, peuvent être des moments d’échanges instructifs (fut-ce pour se rendre compte parfois hélas que le fossé mental n’est pas que dans l’imaginaire du chercheur mais bien réel). C’est aussi le moyen, sans franchir le seuil du franc engagement militant (ce qui relève de la conscience politique individuelle de chacun), de pouvoir partager ses convictions scientifiques avec un monde politique souvent généraliste dans ses approches et qui peut rater pour cela des détails pourtant fort signifiants.</p>
<p>Le dialogue avec le monde de l’entreprise oblige aussi le chercheur à décentrer son propre regard, à sortir de sa zone de confort pour accepter de voir les choses autrement, de façon plus appliquée, moins théorique souvent. De façon générale, le dialogue avec des interlocuteurs possédant un autre agenda, une autre vision du monde (on sait bien le dire pour la collaboration scientifique internationale) peut toujours être une contribution au schéma intellectuel qui sous-tend les convictions du chercheur. Et ce n’est pas fatalement signer un pacte faustien que de contribuer par sa réflexion de chercheur au développement économique et industriel d’une idée à laquelle on croit.</p>
<p>La personnalité de chacun et chacune, son expérience de vie, son parcours professionnel, l’étape où on se trouve dans sa carrière, sa discipline et ses thématiques de recherche, sont autant de motifs à se saisir de l’une ou l’autre de ses modalités d’extériorisation de la science. Choix de se rendre utile à la cité qui reste un acte de liberté académique et qui ne peut s’exiger de tous, un pistolet évaluateur sur la tempe, si l’on veut qu’il conserve sa force et sa grandeur, porté par le désir de conviction que toutes celles et ceux qui sont en quête de vérité ont chevillé au corps.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/132406/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Arnaud Mercier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>
À l’occasion du lancement d’une grande enquête sur les pratiques de communication scientifique des chercheurs, revenons sur les différents types d’implication dans la sphère publique.
Arnaud Mercier, Professeur en Information-Communication à l’Institut Français de presse (Université Paris 2 Panthéon-Assas), Auteurs historiques The Conversation France
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tag:theconversation.com,2011:article/129516
2020-01-19T20:18:50Z
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De la vérification à la discussion : les nombreuses méthodes de fact-checking
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/310470/original/file-20200116-181645-128g52u.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=18%2C18%2C2017%2C1483&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La mission Apollo a été récemment remise en question par de nombreux Américains persuadés qu'il s'agissait d'une intox. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/jurvetson/48717810172">Steve Jurvetson/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span></figcaption></figure><p>Le fact-checking ne date pas d’hier. Dès son lancement, en 1923, le magazine <a href="https://time.com/4858683/fact-checking-history/"><em>Time</em></a> avait déjà recruté une équipe de fact-checkers. Leur rôle à l’époque : vérifier scrupuleusement toutes les informations avant qu’elles ne soient publiées.</p>
<p>Mais à l’ère du numérique, l’essor des réseaux sociaux a entraîné un bouleversement du fonctionnement de l’espace public traditionnel. Comme l’explique Dominique Cardon dans son livre <a href="http://www.seuil.com/ouvrage/la-democratie-internet-dominique-cardon/9782021026917"><em>La Démocratie Internet</em></a>, la pertinence attribuée à une information ne résulte plus d’une évaluation normative de son contenu par des experts mais émane plutôt d’une « agrégation numérique ». C’est-à-dire que, désormais, les informations exposées sur la toile ne sont plus filtrées en étant au préalable passées au crible par des experts et journalistes. Elles sont à la place hiérarchisées a posteriori par des algorithmes de classement et de référencement qui dépendent en partie des clics et « likes » des internautes.</p>
<h2>Essor du journalisme de vérification</h2>
<p>Cette reconfiguration de l’espace public ouvre ainsi la porte à de nouveaux contenus, pas toujours vérifiés, ni toujours pertinents, pour le débat public, parmi lesquels certaines fake news.</p>
<p>Dans ce nouveau contexte, les rubriques de fact-checking ont largement augmenté depuis une dizaine d’années afin de valider cette fois-ci a posteriori l’exactitude des chiffres et des informations énoncées publiquement. En <a href="https://reutersinstitute.politics.ox.ac.uk/sites/default/files/research/files/The%2520Rise%2520of%2520Fact-Checking%2520Sites%2520in%2520Europe.pdf">Europe</a>, par exemple, plus de 90 % des sites de fact-checking ont été établis depuis 2010, avec une intensification accrue ces dernières années.</p>
<p>Ainsi, en France, <em>Libération</em>, via sa rubrique « Désintox » (2008), fait figure de pionnier. D’autres médias ont suivi avec notamment « Les Décodeurs » (2014) pour le journal <em>Le Monde</em>, l’émission radio dédiée de <a href="https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-vrai-du-faux/">France Info</a> « Le Vrai du Faux » (2012) ou encore « AFP Factuel » (2017) pour l’Agence France Presse.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/310323/original/file-20200115-134777-qy9od9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/310323/original/file-20200115-134777-qy9od9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/310323/original/file-20200115-134777-qy9od9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=651&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/310323/original/file-20200115-134777-qy9od9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=651&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/310323/original/file-20200115-134777-qy9od9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=651&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/310323/original/file-20200115-134777-qy9od9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=819&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/310323/original/file-20200115-134777-qy9od9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=819&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/310323/original/file-20200115-134777-qy9od9.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=819&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Les Décodeurs.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/">Le Monde</a></span>
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<h2>Info fact-checkée, info approuvée ?</h2>
<p>Face à l’émergence de ce nouveau mode de traitement journalistique de l’information, le public peut ainsi se tourner de plus en plus vers des vérifications réalisées par des experts pour s’assurer de la validité de différents contenus.</p>
<p>Un <a href="https://methodesfactchecking.family.blog/sante-et-fact-checking/">sondage</a> réalisé par les étudiants de Sciences Po auprès d’une centaine de personnes révèle d’ailleurs que 90 % d’entre elles se disent familières des méthodes de fact-checking et très favorables à leur développement.</p>
<p>Mais au-delà de cette appréciation positive du fact-checking par le grand public se pose la question de son efficacité : dans quelle mesure celui-ci permet-il réellement de discréditer certaines fake news et d’endiguer la formation de croyances infondées ?</p>
<p>À cette question, plusieurs études, et notamment une <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/10584609.2019.1668894">méta-analyse</a> – qui combine les résultats de plusieurs études scientifiques indépendantes –, indiquent un effet général significatif du fact-checking sur les opinions individuelles pour contrer certaines fausses informations.</p>
<h2>Identifier les formats et les méthodes les plus efficaces</h2>
<p>Finalement, l’enjeu actuel est surtout d’identifier les formats et méthodes les plus ajustés pour convaincre le grand public. Sur ce point, une <a href="https://journals.sagepub.com/doi/full/10.1177/2053168019870351">expérience</a> a par exemple montré qu’il pouvait être plus efficace de proposer des visualisations de données synthétisant le nombre de propos trompeurs tenus par des hommes ou femmes politiques, pour fournir aux gens des indicateurs sur la fiabilité de certains émetteurs d’information, plutôt que de procéder à des rectifications énoncé par énoncé.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/310201/original/file-20200115-151880-14dy2a1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/310201/original/file-20200115-151880-14dy2a1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/310201/original/file-20200115-151880-14dy2a1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/310201/original/file-20200115-151880-14dy2a1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/310201/original/file-20200115-151880-14dy2a1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=303&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/310201/original/file-20200115-151880-14dy2a1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=381&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/310201/original/file-20200115-151880-14dy2a1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=381&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/310201/original/file-20200115-151880-14dy2a1.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=381&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><span class="source">Alexander Agadjanian et al.2019</span>, <span class="license">Author provided</span></span>
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<p>Une autre recherche a aussi suggéré que le recours <a href="https://journals.sagepub.com/eprint/d2BGqxbzFN8hhGuyaDxV/full">à des formats vidéo</a> pouvait s’avérer particulièrement persuasif. Ainsi, bien que YouTube soit fréquemment accusé de faciliter la diffusion d’informations erronées, sans doute n’est-il pas inutile de souligner que dans le même temps cette plate-forme a aussi permis l’émergence de nombreux vidéastes dont l’objectif est précisément de démonter les fake news, comme <a href="https://www.youtube.com/channel/UC8Ux-LOyEXeioYQ4LFzpBXw">Aude Favre</a> et sa chaîne WTFake.</p>
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<figcaption><span class="caption">Le lama, mai 2019.</span></figcaption>
</figure>
<h2>La politique privilégiée au détriment des infos scientifiques</h2>
<p>Si les <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/10584609.2019.1668894">études scientifiques</a> montrent que le fact-checking peut être efficace pour lutter contrer la prolifération d’informations fallacieuses, il faut néanmoins noter que certains thèmes sont parfois moins traités par les rubriques de fact-checking.</p>
<p>Pour étudier cette question, les étudiants de Sciences Po ont récolté les 50 derniers articles de trois rubriques de fact-checking : (1) l’AFP Factuel ; (2) Les Décodeurs ; (3) Checknews. Résultats ? Ils ont trouvé que les corrections étaient souvent centrées sur les sujets d’actualité politique et économique. A contrario, la place réservée aux questions écologiques ou de santé publique était beaucoup plus faible (variant respectivement entre 2 % et 10 % et 2 % et 8 %).</p>
<p>Des initiatives associatives, telles que <a href="https://sciencefeedback.co">Science Feedback</a>, commencent cependant à émerger pour aider le grand public à mieux discerner la solidité d’énoncés scientifiques sur la santé ou le réchauffement climatique.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/310205/original/file-20200115-151829-w2aggj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/310205/original/file-20200115-151829-w2aggj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=386&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/310205/original/file-20200115-151829-w2aggj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=386&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/310205/original/file-20200115-151829-w2aggj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=386&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/310205/original/file-20200115-151829-w2aggj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=485&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/310205/original/file-20200115-151829-w2aggj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=485&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/310205/original/file-20200115-151829-w2aggj.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=485&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/310203/original/file-20200115-151862-8kyg60.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/310203/original/file-20200115-151862-8kyg60.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/310203/original/file-20200115-151862-8kyg60.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/310203/original/file-20200115-151862-8kyg60.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=430&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/310203/original/file-20200115-151862-8kyg60.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/310203/original/file-20200115-151862-8kyg60.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/310203/original/file-20200115-151862-8kyg60.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=541&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/310204/original/file-20200115-151844-qgsagz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/310204/original/file-20200115-151844-qgsagz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/310204/original/file-20200115-151844-qgsagz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/310204/original/file-20200115-151844-qgsagz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=429&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/310204/original/file-20200115-151844-qgsagz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/310204/original/file-20200115-151844-qgsagz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/310204/original/file-20200115-151844-qgsagz.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=540&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
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<h2>Les vidéos de vérification sur la santé sont-elles bien perçues ?</h2>
<p>Face à cette moindre considération des sujets de sciences dures, dont la santé au sein des rubriques de fact-checking traditionnelles, les étudiants de Sciences Po ont décidé de focaliser leur enquête sur cette thématique, en s’intéressant notamment à la force persuasive des vidéos de débunkage à propos de certaines informations scientifiquement infondées sur les vaccins.</p>
<p>Pour cela, ils ont réalisé une analyse approfondie des 130 commentaires suscités par une <a href="https://www.youtube.com/watch?v=1IWtz3zJ8sA">vidéo</a> de la chaîne <a href="https://www.youtube.com/channel/UCAcAnMF0OrCtUep3Y4M-ZPw">Youtube Hugo Décrypte</a> visant à expliquer pourquoi certaines informations circulant sur les vaccins (telles que « les vaccins favorisent l’autisme ») sont erronées. Leurs résultats montrent qu’une importante majorité de ces commentaires (67 %) étaient favorables à la vidéo.</p>
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<figcaption><span class="caption">« Les vaccins sont-ils dangereux ? » (Hugo Décrypte).</span></figcaption>
</figure>
<p>Mais une catégorisation plus fine de ces commentaires révèle que la réception de la vidéo ne se réduit pas à la seule question de la validité de son contenu dans la mesure où celle-ci a également donné lieu à des remarques plus personnelles pour remercier le vidéaste (11 %) mais aussi pour lui proférer des attaques ad hominem (9 %). Au-delà de son seul contenu, l’appréciation de la vidéo dépend donc aussi du degré de considération et de légitimité accordé à son émetteur, ce qu’indique d’ailleurs également une des six personnes interviewées par les étudiants après un visionnage de la vidéo :</p>
<blockquote>
<p>« Je pense qu’il est important de savoir qui est l’auteur, sa formation quand on regarde une vidéo de fact-checking » (femme, 49 ans, cadre)</p>
</blockquote>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/310206/original/file-20200115-151880-1tzztwh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/310206/original/file-20200115-151880-1tzztwh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/310206/original/file-20200115-151880-1tzztwh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/310206/original/file-20200115-151880-1tzztwh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=507&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/310206/original/file-20200115-151880-1tzztwh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/310206/original/file-20200115-151880-1tzztwh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/310206/original/file-20200115-151880-1tzztwh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=637&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/310207/original/file-20200115-151839-1crspge.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/310207/original/file-20200115-151839-1crspge.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/310207/original/file-20200115-151839-1crspge.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/310207/original/file-20200115-151839-1crspge.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=360&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/310207/original/file-20200115-151839-1crspge.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/310207/original/file-20200115-151839-1crspge.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/310207/original/file-20200115-151839-1crspge.PNG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=453&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption"></span>
</figcaption>
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<h2>Quand les internautes deviennent eux-mêmes fact-checkers</h2>
<p>Au-delà des méthodes de fact-checking déployées par des médias traditionnels ou des chaînes de vulgarisation scientifique, il faut aussi noter que des processus d’autorégulation peuvent se mettre en place entre les internautes sur les réseaux sociaux.</p>
<p>En effet, les commentaires qui accompagnent certaines fake news ne sont pas nécessairement le signe d’une crédulité passive de la part des internautes. Bien au contraire, ces derniers peuvent faire preuve de vigilance et prévenir les autres du caractère fallacieux d’une information en mettant en doute sa véracité par un commentaire du type « attention, vérifiez la source » ou encore en renvoyant vers un article la débunkant.</p>
<p>Parfois, il arrive même qu’ils mènent des enquêtes minutieuses pour contredire eux-mêmes certaines fausses informations, à l’instar de <a href="http://u.afp.com/JHRb">cet internaute</a> qui a effectué une recherche par image inversée pour retrouver la source originelle d’une photo (prise en nouvelle Zélande en 2016) et ainsi prouver qu’il ne s’agissait pas du tout d’une route endommagée par un séisme en vallée du Rhône.</p>
<p>L’AFP Factuel <a href="https://www.youtube.com/watch?v=JS6uTyAMqPk">recommande</a> d’ailleurs aux gens de regarder les commentaires des autres afin d’évaluer plus facilement la fiabilité des informations.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1180196117377667072"}"></div></p>
<p><a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/10410236.2017.1331312">Des études</a> ont d’ailleurs montré que les commentaires accolés aux contenus médiatiques pouvaient être des sources de corrections effectives face à certaines fausses informations ou encore que la perception d’un <a href="https://link.springer.com/article/10.3758/s13421-019-00948-y">consensus</a> au sein des commentaires d’autres internautes pouvait moduler l’attitude des individus sur les questions liées au réchauffement climatique exemple. Ainsi, une piste intéressante pour contrer le phénomène de la désinformation pourrait être de mobiliser l’intelligence collective du grand public.</p>
<h2>Le pouvoir de l’intelligence collective</h2>
<p>D’après une <a href="https://www.researchgate.net/profile/Gordon_Pennycook/publication/323460988_Crowdsourcing_Judgments_of_News_Source_Quality/links/5c06a3e292851c6ca1fd5c82/Crowdsourcing-Judgments-of-News-Source-Quality.pdf">récente étude de psychologie</a> le grand public peut discerner avec autant de justesse des sources fiables de sources moins fiables que des fact-checkers professionnels.</p>
<p>C’est le pouvoir de l’intelligence collective. En France, il est ainsi positif de noter qu’un fact-checking collaboratif est en train de se développer, avec par exemple l’intermédiaire de la plate-forme indépendante comme <em>CaptainFact</em>.</p>
<p>Dans ce cadre, les internautes collaborent pour vérifier eux-mêmes des informations présentes sur le web. Chacun peut citer une affirmation présente et la valider ou l’infirmer avec des sources. Au-delà de corrections factuelles, il pourrait ainsi être également pertinent d’encourager davantage de dispositifs facilitant les débats et échanges d’idées pour permettre aux démocraties contemporaines d’être réellement participatives et délibératives.</p>
<h2>Dialoguer pour mieux raisonner</h2>
<p><a href="https://osf.io/et7nx/">Une récente expérience</a>, menée pendant la Fête de la Science 2018 et le Forum des Sciences Cognitives 2019, suggère d’ailleurs qu’il pourrait être intéressant pour les chercheurs de s’engager davantage avec le grand public pour animer des discussions sur certains sujets controversés, comme la vaccination ou les OGMs, en expliquant au public ce que signifie une preuve en science et quel est le consensus actuel de la communauté scientifique sur ces sujets.</p>
<p>En effet, à l’issue de cette expérience, les participants étaient plus nombreux à trouver les vaccins bénéfiques pour la santé humaine, et à considérer les OGMs comme non néfastes.</p>
<p>C’est que, comme l’ont montré les chercheurs de psychologie cognitive <a href="https://www.dan.sperber.fr/wp-content/uploads/2009/10/MercierSperberWhydohumansreason.pdf">Dan Sperber et Hugo Mercier</a>, le raisonnement est une <a href="https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01484988/document">compétence sociale</a> particulièrement performante lors de contextes dialogiques, où arguments et contre arguments peuvent être échangés librement, et plus particulièrement au sein de groupes où règne une certaine diversité de point de vue.</p>
<p>Ainsi, plutôt que des « faux » estampillés au feutre rouge indélébile, comme des annotations laconiques réalisées dans les marges d’une interro surprise, à propos desquelles un élève n’aurait rien le droit de rétorquer, peut-être est-ce davantage des formats médiatiques facilitant le dialogue avec le grand public qu’il faudrait encourager. Car, comme le soulignait déjà Kant au XVIII<sup>e</sup> siècle, pour que les citoyens puissent faire un <a href="https://philosophie.cegeptr.qc.ca/wp-content/documents/Quest-ce-que-les-Lumi%C3%A8res%EF%80%A5-1784.pdf">« usage public de leur raison »</a>, il est nécessaire de garantir la liberté d’expression et de publication de tous.</p>
<hr>
<p><em>Lise Kiennemann, Alexandre Potin et Antoine Chossat, étudiants au Collège Universitaire de Sciences Po, ont contribué à cet article en menant un <a href="https://methodesfactchecking.family.blog">travail d’enquête sur le fact-cheking</a> dans le cadre du cours de <a href="http://formation.sciences-po.fr/enseignement/2019/BEXP/25F00">« Culture et enjeux du numérique »</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/129516/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Manon Berriche perçoit une rémunération de la part de la fondation Reboot dans le cadre de son doctorat.</span></em></p>
Journalisme de vérification. Chaîne de vulgarisation scientifique. Débat avec le grand public… Découvrez la diversité des méthodes de fact-checking pour contrer les infoxs.
Manon Berriche, Doctorante, Sciences Po
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tag:theconversation.com,2011:article/127035
2019-11-14T19:36:20Z
2019-11-14T19:36:20Z
BirdLab, une application pour aider les oiseaux (et la science)
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/301717/original/file-20191114-26262-1tdr1sw.png?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C10%2C1668%2C932&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Capture d’écran d’une partie de jeu BirdLab. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.mnhn.fr/fr/explorez/applications-mobiles/birdlab">BirdLab</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span></figcaption></figure><p>L’arrivée de l’hiver est toujours un moment difficile pour les oiseaux. Et tout particulièrement pour certains petits passereaux qui, contrairement aux hirondelles ou aux martinets, n’échapperont pas temporairement au froid en migrant vers des cieux plus cléments.</p>
<p>Nous pouvons les aider à traverser cette période hivernale. Le simple fait de disposer une mangeoire apporte, par exemple, un soutien non négligeable aux oiseaux des jardins, exposés à de nombreuses menaces liées aux activités humaines.</p>
<p>Installer une mangeoire, voilà donc un geste très précieux ; nous vous proposons toutefois d’aller encore un peu plus loin en alliant cette démarche de nourrissage à un véritable apprentissage. Comment ? En participant à <a href="https://www.vigienature.fr/fr/vigie-manip/birdlab">BirdLab</a>, un jeu scientifique pour smartphone et tablette conçu en 2014. Ce samedi 16 novembre, la nouvelle et sixième saison sera lancée.</p>
<h2>Suivre et reconnaître les oiseaux</h2>
<p>Le principe de BirdLab est simple et tout le monde peut y participer.</p>
<p>Commencez par installer dans votre jardin, ou sur votre balcon, deux mangeoires identiques (format « plateau » A4 ou suspendues type « silo ») – achetées dans le commerce ou fabriquées par vous-même.</p>
<p>À l’arrivée des premiers froids, garnissez-les de graines de tournesol. Patientez deux ou trois jours, le temps que les oiseaux aient bien identifié le nouveau « garde-manger ». Évidemment, plus basses seront les températures, plus vos graines sauront attirer les petits affamés. Téléchargez l’application BirdLab sur votre smartphone (ou votre tablette), inscrivez-vous, déclarez votre station de nourrissage et positionnez-vous devant une scène de repas.</p>
<p>Une partie dure 5 minutes. Pendant ce laps de temps, vous devez reproduire sur les deux mangeoires virtuelles affichées à l’écran toutes les allées et venues des oiseaux observés en temps réel. Les 27 espèces les plus courantes sont matérialisées par de petits pictogrammes en bas de l’écran. Le challenge ? Bien identifier les oiseaux en mouvement… et être assez rapide pour n’en rater aucun !</p>
<p>Pour apprendre à les reconnaître – et savoir différencier une mésange charbonnière d’une mésange bleue, un pigeon ramier d’un pigeon biset – des quizz sont proposés. Quelques séances de 5 minutes vous familiariseront rapidement avec la plupart des visiteurs du jardin.</p>
<p>En jouant à BirdLab, on découvre la diversité des espèces qui nous entourent, on apprend leurs noms et l’on peut apprécier aux premières loges leurs passionnants – et parfois surprenants – comportements alimentaires. Certains sont légers, furtifs ; d’autres moins pressés, voire collectifs.</p>
<p>BirdLab représente également une mine d’or pour nous, chercheurs. Après chaque partie, les données sont en effet transmises aux laboratoires du <a href="https://www.mnhn.fr/">Muséum national d’Histoire naturelle</a> et d’<a href="https://www2.agroparistech.fr/">AgroParisTech</a>, stockées puis interrogées à l’aide de puissants outils statistiques.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/UmcyXin8Bbk?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Observer les oiseaux avec l’application BirdLab (Vigie Nature, 2014).</span></figcaption>
</figure>
<h2>Un jeu « sérieux » pour la science</h2>
<p>Que peuvent bien nous apprendre ces milliers d’informations sur les habitudes alimentaires de nos oiseaux ? Après cinq hivers, plus de 33 000 parties et 620 000 individus enregistrés par plus deux mille participants (dont plus de 50 ont réalisé plus de 100 parties, merci à eux), nous commençons à entrevoir quelques tendances générales.</p>
<p>De grands traits comportementaux, déjà bien connus, ressortent assez nettement, ce qui nous rassure quant à la fiabilité des données récoltées via BirdLab. Par exemple, le rouge-gorge, grand solitaire, ne supporte pas la présence d’un autre, fût-il son congénère ; les chardonnerets élégants et les verdiers d’Europe sont, eux, particulièrement grégaires ; la mésange bleue agressive, etc.</p>
<p>Au-delà de ces constatations attendues, nous aimerions comprendre plus finement les interactions entre différentes espèces fréquentant les mangeoires. Existe-t-il des affinités ? Certaines espèces entrent-elles en compétition pour l’acquisition des graines ?</p>
<p>Cette dernière problématique s’est récemment posée au sujet de la perruche, imposant oiseau originaire d’Afrique et d’Inde, désormais très présente dans toutes les métropoles européennes suite à son introduction par l’homme.
Son arrivée soulève de nombreuses inquiétudes quant aux potentielles nuisances, surtout vis-à-vis des autres oiseaux. Or depuis que nous l’avons intégrée au jeu il y a deux ans, les joueurs de BirdLab nous suggèrent un début de réponse plutôt rassurant : au cours des parties, la présence de la perruche sur les mangeoires ne semble globalement pas gêner le comportement alimentaire des autres espèces.</p>
<p>À terme, grâce à toutes ces données récoltées, nous pourrons certainement identifier des réseaux d’interactions des espèces entre elles autour des mangeoires. De telles études s’annoncent passionnantes, d’autant qu’avec l’intensification du nourrissage et la raréfaction des ressources naturelles, les oiseaux passeront probablement de plus en plus de temps ensemble. Cette promiscuité nouvelle modifiera-t-elle les interactions au sein des communautés d’oiseaux ?</p>
<p>Un autre axe de recherche concerne les effets du paysage sur la diversité des oiseaux aux mangeoires. Pour l’instant, nous savons que la mangeoire est un excellent reflet de ce qui se passe tout autour. Nous voyons déjà clairement que les mangeoires placées dans des environnements très urbains ou dans des paysages d’agriculture intensive sont appauvris en espèces. Mais nous espérons aller plus loin. Grâce aux suivis des mangeoires, nous cherchons à savoir si un environnement difficile, dépourvu de nourriture, va rendre ou non les oiseaux plus agressifs, plus compétitifs sur la mangeoire.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/301722/original/file-20191114-26243-1tgft1e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/301722/original/file-20191114-26243-1tgft1e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=479&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/301722/original/file-20191114-26243-1tgft1e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=479&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/301722/original/file-20191114-26243-1tgft1e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=479&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/301722/original/file-20191114-26243-1tgft1e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=602&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/301722/original/file-20191114-26243-1tgft1e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=602&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/301722/original/file-20191114-26243-1tgft1e.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=602&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Mésange huppée.</span>
<span class="attribution"><span class="source">A. Ronning</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Des données à long terme</h2>
<p>On le voit, la base de données BirdLab s’annonce pleine de promesses. Mais, comme pour tous les programmes de sciences participatives, nous avons besoin de données sur le temps long pour faire ressortir des tendances robustes.</p>
<p>C’est pour cette raison que nous appelons tout le monde, jeunes et moins jeunes, familles, débutants et initiés à se mobiliser à partir de ce samedi 16 novembre, jour de lancement de la 6<sup>e</sup> saison de BirdLab.</p>
<p>Nous n’en doutons pas, vos mangeoires attireront rapidement une multitude de petites ailes battantes et vous assisterez à de joyeuses ripailles. Vous aurez alors jusqu’au 31 mars pour faire le maximum de parties. De quoi égayer votre hiver et celui des oiseaux, tout en participant activement à la recherche scientifique.</p>
<p>Si vous souhaitez plus d’information et échanger avec la communauté des BirdLabeurs, vous pouvez nous rejoindre dans notre groupe Facebook, <a href="https://www.facebook.com/groups/2122525277769868">BirdLab Forum</a>.</p>
<hr>
<p><em>Hugo Struna – journaliste et rédacteur du blog de Vigie Nature, un programme de sciences participatives porté par le Muséum national d’histoire naturelle – est co-auteur de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/127035/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les recherches de Nicolas Deguines sont financées par une bourse de recherche européenne : BiodivERsA3-2015-104 (BIOVEINS). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Romain Lorrilliere a reçu des financements de BiodivERsA3-2015-104 (BIOVEINS). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Carmen Bessa-Gomes et François Chiron ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>
Ce samedi 16 novembre, une nouvelle saison du jeu BirdLab s’ouvre, avec pour objectif d’aider les oiseaux à passer l’hiver et à mieux les connaître.
François Chiron, Maître de conférences en écologie, Université Paris-Saclay
Carmen Bessa-Gomes, Maitre de conférences en écologie, AgroParisTech – Université Paris-Saclay
Nicolas Deguines, Chercheur postdoctoral en écologie et biologie de la conservation, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Romain Lorrilliere, Docteur en écologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/120045
2019-09-12T22:26:02Z
2019-09-12T22:26:02Z
Débat : Enseignement supérieur, replaçons la salle de cours au cœur de la cité !
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/290882/original/file-20190904-175686-dqaf5v.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C9%2C3761%2C2582&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Il faut ouvrir sur la ville les lieux traditionnels de connaissances - universités, laboratoires, bibliothèques.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-vector/business-team-brainstorm-idea-lightbulb-jigsaw-1260595711?src=-1-74">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p><em>Ce texte s’inscrit dans une série d’articles autour de la thématique « Universités et ville durable », sujet du colloque de l’Agence universitaire de la francophonie (AUF) qui se tient les 21 et 22 octobre 2019 à Dakar, avec plus de cent cinquante acteurs francophones : établissements universitaires, représentants gouvernementaux, maires, et experts en urbanisme dans le monde francophone.</em></p>
<hr>
<p>Les infrastructures de l’Internet ont fourni un support à un rêve déjà ancien, celui de diffuser la connaissance au plus grand nombre. Mais l’ambition des <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Science_ouverte">sciences ouvertes</a> ne se limite pas aux questions d’accès que de nouveaux moyens techniques et juridiques facilitent un peu plus chaque jour. Si elles visent à faire circuler les résultats de recherche de manière bien plus fluide, il s’agit aussi d’agir en amont, en rendant la recherche plus participative.</p>
<p>L’idée est de ne pas envisager les citoyens comme de simples sujets de recherche mais également comme des partenaires des chercheurs. D’ailleurs, les initiatives de science citoyenne se propagent rapidement à travers le monde, que cela soit pour <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-018-07106-5">collecter des données</a> ou pour les analyser, parfois à travers des <a href="https://www.nature.com/news/victory-for-crowdsourced-biomolecule-design-1.9872">dispositifs ludiques</a>.</p>
<p>Ce mouvement invite à s’interroger sur la bipartition entre l’enseignement et la recherche. Les étudiants n’ont-ils pas aussi un rôle à jouer dans la construction de « communs » pédagogiques ? Dans le prolongement des sciences ouvertes et citoyennes se dessinerait aussi une « éducation ouverte ».</p>
<p>C’est l’une des hypothèses centrales de la <a href="https://www.researchgate.net/publication/333673834_Vers_une_education_ouverte_Faire_reflexivite_et_culture_pour_une_education-recherche">note</a> <em>Vers une éducation ouverte : Faire, réflexivité et culture pour une éducation-recherche</em>, qui vient d’être publiée par le think tank Research Group Collaborative Spaces (RGCS), à partir de huit expériences innovantes menées dans l’enseignement supérieur, dans des contextes assez différents – universités, écoles de management, écoles d’ingénieurs.</p>
<h2>Décloisonner les cours</h2>
<p>Promouvoir une éducation ouverte suppose d’abord de décloisonner les systèmes, en rendant les lieux traditionnels de connaissances – universités, laboratoires, bibliothèques – plus ouverts, plus transparents et plus mobiles dans la ville. La question de l’accès sans discrimination ni barrière d’âge ou de statut est centrale.</p>
<p>Dans le cours « Transformations du travail et numérique » donné à l’Université Paris-Dauphine, par exemple, il n’y a plus ni début ni fin de cours. L’enseignement est ouvert aux anciens et aux personnes tout simplement intéressées par le thème abordé. Il met en œuvre de nombreuses parties prenantes, étudiants, chercheurs, entrepreneurs, mais aussi makers, activistes, slashers, artistes.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/porter-la-pedagogie-hors-les-murs-une-experience-en-master-de-management-109316">Porter la pédagogie hors les murs : une expérience en master de management</a>
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<p>La production de connaissance dépasse les frontières temporelles et spatiales habituelles, avec notamment la diffusion du cours via des outils numériques (blogs, Twitter, articles en ligne). Le cas « Open walked event-based experimentations » (OWEE) montre qu’on peut s’appuyer également sur des démarches qui pourraient paraître anciennes. Pourquoi ne pas monter des « learning expeditions » dans la rue et sur les places publiques pour créer des narrations pédagogiques plus incertaines, et donc plus ouvertes à de véritables rencontres ?</p>
<h2>S’emparer de questions de société</h2>
<p>Le deuxième enjeu pour l’enseignement est de rester fortement connecté à la société et à ses réalités contemporaines. La co-création de connaissances et l’implication dans la cité permettent de retrouver du sens et de participer à la résolution de défis environnementaux et sociétaux.</p>
<p>Les approches par projets ou par défis doivent permettre de réintroduire l’engagement citoyen au cœur des raisons pour lesquelles on étudie.</p>
<p>Le cours « Public factory » de l’IEP de Lyon illustre cette approche. Les projets qui structurent le cours sont tous des défis réels d’innovation publique, pour lesquels les résultats du travail des enseignants, des étudiants et des professionnels vont venir contribuer au bien public. La coopération étroite avec de grands professionnels du Design des politiques publiques, notamment la <a href="http://www.la27eregion.fr/">27ᵉ région</a>, est exemplaire d’une nouvelle manière de penser la pédagogie.</p>
<h2>Démarches exploratoires</h2>
<p>Enfin, il faut renforcer la capacité de l’éducation à aller au-delà des murs. Il faut pouvoir sortir, s’impliquer dans un tissu urbain, marcher pour penser, sentir et comprendre. Cela demande aussi de repenser les espaces et la forme scolaire et universitaire, de remettre une articulation entre extérieur et intérieur, de s’approprier les nouveaux espaces et de coopérer avec les tiers lieux et de repenser la proximité.</p>
<p>Par exemple le cours « Innovation and cooperative projects » de Yncréa Hauts-de-France se déroule au cœur d’un site en reconversion où les étudiants sont amenés à se nourrir des espaces urbains pour alimenter leurs réflexions. Le groupe passe autant de temps à l’extérieur qu’à l’intérieur, dans une démarche exploratoire, en prenant des photos, en interviewant des passants, en allant dans des start-up et des entreprises.</p>
<p>Cette philosophie de réappropriation des lieux, dans une démarche d’ouverture, de mise en commun des ressources et des connaissances est aussi celle qui nourrit le vaste mouvement des tiers lieux qui se développe en France, avec des projets comme la <a href="http://hauts.tiers-lieux.org/compagnie-des-tiers-lieux/">Compagnie des tiers lieux</a>.</p>
<h2>Réintroduire du commun</h2>
<p>À partir de ces expérimentations, on peut dégager quelques propositions à destination des chercheurs et décideurs politiques afin d’évoluer vers une « éducation ouverte ».</p>
<p>La première piste serait de réintroduire du commun dans le service public d’enseignement supérieur. Chaque enseignant pourrait par exemple mettre 25 % de son forfait au service de communs de connaissances sur son territoire – ce qui reviendrait à enseigner, expérimenter, faciliter, médiatiser au sein de tiers lieux et d’espaces collaboratifs proches de son université.</p>
<p>Cela pourrait se faire sur une base volontaire et à partir d’une liste de lieux constituée de façon émergente et non validée a priori par une commission ou un acteur public. D’aucuns objecteront que dans une situation de sous-effectifs et de moyens de plus en plus limités, une telle proposition est peu réaliste. C’est que selon nous, la vision actuelle oppose trop un « dedans » à former à un « dehors » auquel s’adapter alors que ces deux parties se recouvrent.</p>
<p>Il faut former de façon permanente et discontinue, au-delà d’une logique définitive de diplomation. Une partie importante de l’enseignement supérieur s’est construite soit dans la logique de la formation initiale, soit dans celle de la formation exécutive ou encore dans la perspective de l’apprentissage. Avec l’augmentation de la durée de vie, le développement de la pluriactivité, l’engagement associatif, la multiplication des discontinuités de vie, ces délimitations sont devenues largement caduques.</p>
<h2>Publier avec les étudiants</h2>
<p>Enfin, il faudrait revenir sur la dichotomie entre enseignement et recherche, qui a des effets particulièrement néfastes. Les sciences ouvertes et citoyennes pourraient favoriser une véritable éducation-recherche où la mise en commun des connaissances serait plus que jamais le fait de nos étudiants, bien accompagnés par des enseignants-chercheurs qui co-publieraient parfois à leur côté et développeraient des interfaces de traduction et d’impact sur leurs recherches.</p>
<p>L’éducation ouverte n’est pas un phénomène nouveau. Cependant, les sciences ouvertes et citoyennes, leurs infrastructures, leurs pratiques et leurs valeurs constituent des vecteurs d’opportunités nouvelles. Les nouveaux collectifs de recherche, les coopératives, les espaces collaboratifs, les tiers lieux, les plates-formes ouvertes sont autant d’acteurs qui peuvent jouer un rôle dans la création de processus et d’entre-mondes nouveaux.</p>
<p>Dans des contextes de crise du sens au travail, de chômage structurel encore important, de grave crise écologique, de menaces démocratiques, de perte de créativité dans les pratiques et les formes managériales, il devient urgent de saisir cette opportunité.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120045/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Xavier de Vaujany est président du réseau académique RGCS (<a href="http://rgcs-owee.org/">http://rgcs-owee.org/</a>)</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Amélie Bohas est membre du réseau académique RGCS (<a href="http://rgcs-owee.org/">http://rgcs-owee.org/</a>). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Olivier Irrmann est membre du réseau académique RGCS (<a href="http://rgcs-owee.org/">http://rgcs-owee.org/</a>).</span></em></p>
Après les sciences participatives, qui mobilisent des citoyens dans des projets de recherche, l’« éducation ouverte » lance de nouvelles passerelles entre enseignement supérieur et société.
François-Xavier de Vaujany, Professeur en management & théories des organisations, Université Paris Dauphine – PSL
Amélie Bohas, Maître de Conférences en Sciences de Gestion, Aix-Marseille Université (AMU)
Olivier Irrmann, Professor of Innovation Management and Codesign, Yncréa
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/122827
2019-09-11T20:54:30Z
2019-09-11T20:54:30Z
Sciences citoyennes : des promesses pas (encore) tout à fait réalisées
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/291995/original/file-20190911-190031-518ghj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C8%2C5973%2C3979&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Un groupe à l'écoute d'un scientifique avant de réaliser leurs observations. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://unsplash.com/photos/vgZK_O2rgIU">Ravi N Jha / Unsplash</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Jamais la connaissance scientifique n’a été plus facilement accessible qu’aujourd’hui. Cela s’explique en partie par les incitations (<a href="https://www.wikiwand.com/fr/Plan_S">et bientôt l’obligation</a>) faites aux chercheurs de rendre accessibles librement et gratuitement les articles qu’ils publient. Et pourtant, de nombreux résultats scientifiques font l’objet de controverses auprès du grand public (alors qu’ils font consensus dans les milieux académiques, mais c’est une autre histoire). </p>
<p>Citons le changement climatique, l’innocuité des vaccins ou l’efficacité thérapeutique de l’homéopathie pour ne prendre que les exemples les plus clivants. Dans ce contexte d’incompréhension de la science, voire de défiance vis-à-vis de la recherche scientifique, plusieurs voix se sont élevées pour promouvoir les initiatives de <a href="https://theconversation.com/citoyens-des-sciences-quand-chercheurs-et-public-collaborent-61092">science citoyenne</a> comme un moyen de reconnecter (de réconcilier ?) le public avec la science et les chercheurs qui la font. Est-ce que ça marche ?</p>
<h2>Qu’est-ce que la science citoyenne ?</h2>
<p>Pour parler de science citoyenne, il faut trois ingrédients : une question scientifique, un (ou des) scientifiques professionnels et des volontaires. Après, tout est question de <a href="http://www.sciences-participatives.com/Rapport">dosage</a>. Mettez beaucoup de volontaires coordonnés par quelques chercheurs pour répondre à une question scientifiques, vous aurez de la science citoyenne au science strict. Les anglais parlent de <em>crowd sourcing</em>. Un exemple emblématique est le programme <a href="https://www.mnhn.fr/fr/participez/contribuez-sciences-participatives/observatoires-vigie-nature">Vigie Nature</a> du Muséum national d’Histoire naturelle. Au contraire, mettez quelques citoyens, avec quelques chercheurs qui collaborent dans la définition de la question scientifique et dans la mise en œuvre des moyens pour y répondre, vous aurez de la science participative. Par exemple plusieurs programmes de <a href="https://www.pourlascience.fr/p/contenus-sponsorises/le-citoyen-ce-scientifique-14758.php">recherche participative</a> associent très étroitement les agriculteurs et les chercheurs de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) pour la co-construction d’outils d’aide à la gestion ou le développement de nouvelles variétés de blés ou de races bovines.</p>
<p>Ceci posé, concentrons-nous sur la première catégorie, celle où les volontaires donnent de leur temps pour fournir des données qui permettront aux chercheurs de répondre à une question formulée par eux, selon une méthodologie mise en place par eux.</p>
<h2>Gagnant-gagnant… Sur le papier</h2>
<p>Pour les chercheurs (et les instituts qui les emploient…), l’intérêt premier est évident : acquérir beaucoup de données en un temps minimal. Dans les domaines de l’écologie et de l’environnement, la force de frappe apportée par les citoyens volontaires est cruciale : les chercheurs ne peuvent pas être partout à la fois. Or, s’il s’agit de cartographier l’aire de distribution d’une espèce, ou d’étudier la dynamique temporelle des populations d’oiseaux, il faudrait qu’ils le soient. De même, dans le domaine de la santé, les <a href="https://etude-nutrinet-sante.fr/">études épidémiologiques</a> ont d’autant plus de poids qu’elles se basent sur un grand nombre de patients.</p>
<p>Si l’on cherche les mots clés « citizen science » (science citoyenne) dans la base de données internationale <a href="https://www.wikiwand.com/fr/Web_of_Science"><em>Web of Science</em></a> (le <em>google</em> de la recherche scientifique) on obtient pas moins de 3 423 résultats, donc plus de 3 000 articles scientifiques s’appuyant sur des données issues des sciences citoyennes, ou discutant de ces approches. Un rapide coup d’œil sur les graphiques révèle que leur nombre est à la hausse de manière constante depuis 2010. On pourra critiquer la grossièreté de cette analyse bibliométrique, mais ces observations suggèrent que oui, les programmes de science citoyenne font avancer les connaissances scientifiques. La science est gagnante. Et les citoyens ?</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291960/original/file-20190911-190007-lkshy5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291960/original/file-20190911-190007-lkshy5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=436&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291960/original/file-20190911-190007-lkshy5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=436&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291960/original/file-20190911-190007-lkshy5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=436&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291960/original/file-20190911-190007-lkshy5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=548&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291960/original/file-20190911-190007-lkshy5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=548&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291960/original/file-20190911-190007-lkshy5.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=548&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Nombre de publications indexées avec le mot clé « citizen science » dans Web of Science.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bastien Castagneyrol, le 11 septembre 2019</span></span>
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<p>En toute bonne foi, un scientifique dira « en mettant en place ce programme de science citoyenne, je permets au public de mieux comprendre le fonctionnement de la science ». Et sa collègue ajoutera que « à l’heure des <em>fake news</em>, il est crucial que les citoyens comprennent le fonctionnement de la science pour pouvoir exercer leur esprit critique ». On ne pourra que louer leurs objectifs. (Je fais partie de ceux qui ont tenu ce discours).</p>
<h2>Et dans la réalité ?</h2>
<p>Les évaluations qui ont été réalisées sur ce que retirent les volontaires de leur participation à des programmes des science citoyenne mettent un <a href="https://par.nsf.gov/servlets/purl/10042628">petit bémol sur ces objectifs enthousiastes</a>. Du moins pour les sciences de l’environnement. Prenons l’exemple d’un programme de science citoyenne visant à l’identification des espèces de plantes exotiques envahissantes le long de chemins de randonnée. Les volontaires ont reçu un court entraînement à l’identification de ces plantes, puis ont suivi un protocole fourni par les scientifiques responsables du projet. A la fin de leur randonnée, ils ont été invités à répondre à un questionnaire, et ont été recontactés six mois plus tard. <a href="https://conbio.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/j.1523-1739.2011.01745.x">Les résultats de cette étude</a> indiquent que les volontaires ont acquis des connaissances nouvelles sur la biologie et l’écologie des plantes (un bon point !). En revanche, les chercheurs n’ont noté aucun changement dans la connaissance des participants quant au fonctionnement de la science.</p>
<p>D’autres études ont obtenu les <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/00219266.2017.1405530">mêmes résultats</a> : un effet positif de la participation à un programme ce science citoyenne sur les connaissances scientifiques, mais pas d’effet sur les connaissances sur « l’entreprise science » en général.</p>
<p>En tant que nouvelle manière de communiquer les résultats de la science, les sciences citoyennes semblent donc remplir leur contrat auprès des différents acteurs : elles créent de nouvelles connaissances scientifiques que peuvent s’approprier les volontaires. Toutefois, quand elles sont limitées à la collecte massive de données, elles ne semblent pas éclairer les participants sur le fonctionnement de la science. Comment résoudre ce problème ?</p>
<h2>Et si on importait les sciences citoyennes à l’école ?</h2>
<p><a href="https://esajournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1890/120007">Plusieurs raisons</a> peuvent être invoquées pour expliquer pourquoi l’impact des sciences citoyennes sur les volontaires qui y contribuent est plus faible qu’espéré. D’abord, ces programmes recrutent principalement parmi les individus déjà « pro-science », de sorte que dans cette population, le gain à attendre est peut-être plus faible que dans la population générale. Ensuite, le temps de la recherche est nécessairement un temps long, et plusieurs mois – voire années – peuvent s’écouler entre la collecte des données et leur présentation sous forme de résultats consolidés. Cela peut-être démotivant. Pour maintenir l’intérêt du public, les chercheurs doivent apprendre à communiquer autrement. C’est un autre métier !</p>
<p>Pour que les sciences citoyennes remplissent pleinement leurs promesses, <a href="https://www.vigienature-ecole.fr/">si on les importait à l’école</a> ? Plusieurs programmes passés et en cours ont relevé le <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1111/aec.12608">défi</a> (oui, le défi, parce que pour un chercheur, retourner à l’école, ce n’est pas toujours naturel). Outre que les élèves peuvent avoir l’opportunité d’interagir avec des chercheurs, ils sont guidés par leur(s) enseignant(s) qui les accompagne(nt) dans leurs apprentissages, tant conceptuels que méthodologiques, et qui <em>traduisent</em> les propos des chercheurs. De plus, s’ils sont importés à l’école, les programmes de science citoyenne peuvent <a href="https://www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/09500693.2015.1112048">atteindre des catégories socioculturelles</a> qui ne se seraient peut être pas tournées volontairement vers les sciences, citoyennes ou pas, parce que les élèves sont « prisonniers » du choix de leur enseignant d’y participer.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/291969/original/file-20190911-190012-1n10w2n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/291969/original/file-20190911-190012-1n10w2n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/291969/original/file-20190911-190012-1n10w2n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/291969/original/file-20190911-190012-1n10w2n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/291969/original/file-20190911-190012-1n10w2n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/291969/original/file-20190911-190012-1n10w2n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/291969/original/file-20190911-190012-1n10w2n.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Des collégiens apprennent à fabriquer et installer des chenilles en pâte à modeler sur des arbres pour étudier la prédation par les oiseaux.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Bastien Castagneyrol</span></span>
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<p>Sous leur forme la plus primaire, les sciences citoyennes ne semblent pas remplir toutes les promesses auxquelles beaucoup de chercheurs qui se lancent dans l’aventure voudraient croire. Pour autant, elles ne trahissent personne. Elles pourraient même avoir des vertus insoupçonnées. Certaines critiques se sont élevées contre ces approches, elles sont légitimes. Mais elles ont largement contribuer à faire <a href="https://theoryandpractice.citizenscienceassociation.org/">mûrir ce champ d’investigation</a>, de sorte que l’avenir des sciences citoyennes n’a jamais été aussi prometteur. Et si vous profitiez de la rentrée pour tenter l’aventure ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/122827/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bastien Castagneyrol a reçu des financements du LABEX COTE via l'agence nationale pour la recherche (ANR) dans le cadre du programme d'investissements d'avenir (ANR-10-LABX-45). Une partie des résultats du projet est consultable en ligne : <a href="https://www.biorxiv.org/content/10.1101/712638v1">https://www.biorxiv.org/content/10.1101/712638v1</a></span></em></p>
Mélanger citoyens et scientifiques pour mener à bien des projets scientifiques, comment ça marche ? Qui y trouve le plus d’avantages ?
Bastien Castagneyrol, Chercheur en écologie, Inrae
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/121412
2019-08-27T20:15:03Z
2019-08-27T20:15:03Z
La moulinette : « Hacher menu » les projets de culture scientifique
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/286798/original/file-20190803-117910-1pbkfzz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C253%2C3820%2C2425&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Séance de préparation du projet de médiation scientifique Yakaton'18 à la Haute Ecole Spécialisée de Suisse Occidentale (HES-SO) en juin 2018.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.yakaton.ch/homepage/">Richard-Emmanuel Eastes</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nd/4.0/">CC BY-ND</a></span></figcaption></figure><p>Depuis le printemps 2019, le <a href="http://www.rezoscience.ch/">Réseau romand Science et Cité</a> met à la disposition des acteurs et actrices de la culture scientifique un outil d’aide à la conception et au suivi de leurs projets : <a href="http://www.lamoulinette.ch">La moulinette</a>.</p>
<p>Cet outil inédit ne s’accompagne d’aucun conseil méthodologique, ne contient aucune recette toute faite. On pourrait s’en étonner, mais c’est ce qui constitue sa force et sa spécificité. La réflexivité et l’empowerment, tels sont en effet les objectifs de ses concepteurs.</p>
<p>Rappelons que la <a href="https://journals.openedition.org/culturemusees/749">médiation</a> n’est pas qu’une pratique d’éducation informelle d’un public béotien, consistant à simplifier des savoirs complexes. Il s’agit plus largement d’un ensemble de démarches et pratiques destinées à rapprocher la connaissance spécialisée des besoins auxquels elle pourrait répondre, à l’appliquer aux <a href="https://journals.openedition.org/dse/1593">questions socialement vives</a> et à favoriser l’élaboration commune de connaissances entre spécialistes et groupes de citoyens concernés.</p>
<h2>Réflexivité indispensable</h2>
<p>Pratiquer la médiation culturelle, c’est exercer un véritable <a href="https://www.letudiant.fr/metiers/secteur/culture/mediateur-culturel.html">métier</a>. Les connaissances techniques et académiques en sont l’un des piliers, certes. Mais la connaissance des publics, la maîtrise de la pédagogie et la compréhension des modes de production et de diffusion des savoirs y sont tout aussi essentielles. Ces missions nécessitent donc une démarche aussi <a href="https://journals.openedition.org/sociologie/1584">réflexive</a> que possible, interrogeant les objectifs de ses acteurs à l’aune des attentes et besoins de leurs publics.</p>
<p>Pourtant, cette réflexivité est difficile à atteindre, car cela suppose de remettre en question des approches intuitives, souvent mues par la passion et par le désir de partager ses propres connaissances. Pour ne pas être simplement égoïste ou prosélyte, voire condescendante et finalement contre-productive, elle doit donc miser sur une décentration radicale.</p>
<p>Dans le cas de la science et de la technologie, il est probable que le besoin de réflexivité soit encore plus fort que dans celui de toute autre forme de médiation culturelle, à proportion même de leur impact sur l’évolution de la société.</p>
<p>Tout « progrès » scientifique et technologique disruptif s’accompagne en effet de bouleversements de l’ordre social, de <a href="http://controverses.mines-paristech.fr/presentation/quappelons-nous-controverse-sociotechnique/">controverses sociotechniques</a>, d’effets secondaires d’ordres sanitaire ou environnemental, voire de questions éthiques qui interrogent <em>in fine</em> son <a href="https://journals.openedition.org/communiquer/584">acceptabilité sociale</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/apprendre-a-construire-le-desaccord-pour-reinventer-le-dialogue-societal-68865">Apprendre à construire le désaccord pour réinventer le dialogue sociétal</a>
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<h2>Mission citoyenne</h2>
<p>Dans ce processus, la médiation scientifique et technique est un acteur déterminant, au sens où elle a tout autant pour mission de promouvoir les applications vertueuses des avancées de la science que d’en interroger les éventuels effets pervers. Sans compter qu’elle tire autant sa légitimité de sa capacité à écouter les peurs et objections de ses publics qu’elle doit souvent ses financements à sa capacité supposée à fabriquer de l’acceptabilité sociale, justement.</p>
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<strong>
À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-jeux-de-discussion-comprendre-et-se-comprendre-67322">Les jeux de discussion : comprendre et se comprendre</a>
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<p>Face à tant de pressions et d’enjeux, les acteurs de la culture scientifique peuvent avoir besoin d’outils pour trouver la juste voie entre l’enthousiasme zélé qui les a probablement poussés dans cette voie professionnelle, et la prudence. Une prudence éminemment nécessaire, face à des publics qui ne souhaitent plus seulement collectionner des informations mais également les articuler à leurs valeurs, pour exercer leur pouvoir de citoyens et de consommateurs.</p>
<p>Dans ce contexte, il convient de promouvoir par tous les moyens une médiation scientifique autocritique et <a href="https://www.groupe-traces.fr/projet/manifeste-revoluscience/">responsable</a>. C’est dans cet esprit que <a href="http://www.lamoulinette.ch">« La moulinette »</a> a été élaborée par des spécialistes de la médiation scientifique <a href="http://www.lamoulinette.ch/fr/qui-sommes-nous-/">suisses et français</a>, universitaires comme acteurs de terrain.</p>
<p>Le résultat prend la forme d’un site web, structuré autour de 11 questions ou chapitres telles que : Pourquoi ? Comment ? Quand ? Avec quels risques ? Il propose à ses utilisateurs un cheminement à géométrie variable en fonction de leurs besoins.</p>
<p>Une fois les questions sélectionnées, le site génère automatiquement des fiches au format pdf, chacune comprenant à son tour des sous-questions qui invitent les utilisateurs à positionner leurs réponses sur différents diagrammes : sliders, pourcentages, matrices, QCM, etc.</p>
<h2>Accompagnement sur mesure</h2>
<p>En passant son projet au crible des catégories proposées par « La moulinette », on génère ainsi des réflexions précieuses concernant l’ensemble des facettes de l’action envisagée : de ses propres motivations initiales aux impacts escomptés et réels, de la nature des publics visés aux formes possibles de l’activité en passant par la recherche de fonds et les risques encourus.</p>
<p>Un effort particulier a notamment été porté sur l’analyse des motivations (individuelles ou institutionnelles) ayant présidé à la conception de l’activité de médiation et sur la réflexion relative à ses <a href="https://www.youtube.com/watch?v=NTih-l739w4">« non-publics »</a>, c’est-à-dire aux catégories de personnes s’en trouvant exclues pour des raisons conscientes ou inconscientes.</p>
<p>Par ailleurs, ce travail aidera les médiatrices et médiateurs scientifiques à mieux décrire leurs projets quand ils devront les présenter au grand public, à une structure de financement ou encore à un nouvel employeur. « La moulinette » est donc non seulement un outil de réflexivité, mais également un outil d’<a href="https://www.cairn.info/revue-tiers-monde-2009-4-page-735.htm">empowerment</a> des actrices et acteurs de la culture scientifique, comme doivent l’être leurs propres actions pour leurs publics.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/286800/original/file-20190803-117871-1nyd0q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/286800/original/file-20190803-117871-1nyd0q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/286800/original/file-20190803-117871-1nyd0q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/286800/original/file-20190803-117871-1nyd0q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=354&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/286800/original/file-20190803-117871-1nyd0q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/286800/original/file-20190803-117871-1nyd0q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/286800/original/file-20190803-117871-1nyd0q2.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=445&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La moulinette, site web.</span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Multiples usages</h2>
<p>Ces fiches imprimables ont été pensées pour répondre aux multiples situations auxquelles sont en général confrontés les professionnels de la médiation, seuls ou en groupes. La moulinette peut en effet être utilisée en tant qu’outil :</p>
<ul>
<li><p>d’aide à la conception d’un projet, pour n’oublier aucune de ses dimensions importantes (<em>check list</em>),</p></li>
<li><p>de suivi de projet, sous forme de <em>guidelines</em> permettant de conserver le cap initial,</p></li>
<li><p>d’évaluation <em>a posteriori</em> d’un dispositif, éventuellement par comparaison avec les réponses aux mêmes questions données lors de sa conception,</p></li>
<li><p>de formation initiale des médiateurs et médiatrices, dans leurs cursus de formation et/ou lors de leur arrivée dans une organisation de culture scientifique,</p></li>
<li><p>de documentation d’activités stabilisées, voire de formation des médiateurs et médiatrices sur un dispositif donné (rôle de transmission),</p></li>
<li><p>de formation continue pour se replacer de temps en temps dans une posture réflexive,</p></li>
<li><p>de communication avec l’équipe de médiation, la direction, les partenaires, les bailleurs de fonds… autour d’un dispositif de médiation donné.</p></li>
</ul>
<p>Mettre en pièces son projet de médiation et ses idées d’activités pour en interroger toutes les dimensions, en recenser les différentes facettes, les analyser et assumer ses choix en toute connaissance de cause, tel est le service que tente de rendre « La moulinette » à celles et ceux qui partagent leurs connaissances scientifiques au quotidien.</p>
<p>Mis gracieusement à disposition en échange de leurs retours sur <a href="http://moulinette.ch/fr/feedback/">leurs usages</a>, l’outil se veut collaboratif pour servir au mieux et le plus longtemps possible les intérêts de la communauté.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/121412/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<h4 class="border">Disclosure</h4><p class="fine-print"><em><span>Richard-Emmanuel Eastes conseille le Réseau Romand Science et Cité, association à but non lucratif, lequel a reçu des financements de la fondation Ernst Göhner et du canton de Vaud (Suisse) pour la réalisation de La moulinette. Cet outil est entièrement gratuit. Il est mis à disposition sans perspectives financières et ne collecte aucune information sur ses utilisateurs.</span></em></p>
Pour aider le grand public à comprendre les dernières avancées de la recherche, mais aussi mesurer leurs impacts, la médiation scientifique doit faire du sur-mesure. Voici un outil qui peut y aider.
Richard-Emmanuel Eastes, Head of the academic development : University of applied arts and sciences Western Switzerland (HES-SO, Suisse), Haute école spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/120993
2019-08-05T05:42:43Z
2019-08-05T05:42:43Z
Cinq façons d’aider la biodiversité depuis son transat (ou presque)
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/285819/original/file-20190726-43140-112m6vz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=82%2C31%2C4160%2C2669&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les contributions permises par la science citoyenne offrent aux chercheurs quantité de données sur des espèces présentes aux quatre coins de la France.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/download/success?u=http%3A%2F%2Fdownload.shutterstock.com%2Fgatekeeper%2FW3siZSI6MTU2NDE1NzM2NSwiYyI6Il9waG90b19zZXNzaW9uX2lkIiwiZGMiOiJpZGxfMjM0NDIyODMwIiwiayI6InBob3RvLzIzNDQyMjgzMC9odWdlLmpwZyIsIm0iOjEsImQiOiJzaHV0dGVyc3RvY2stbWVkaWEifSwia0FocGd6aDZ5U3kyT21VWWpCZGxOclB0RE5nIl0%2Fshutterstock_234422830.jpg&pi=33421636&m=234422830&src=HLqtHHh7UOhKti1Crl6ACw-1-18">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Les vacances d’été sont le moment idéal pour s’adonner à l’observation de la biodiversité. Pour cela, nul besoin d’enfiler ses chaussures de randonnée ou un masque de plongée, encore moins de traverser la planète. D’autres milieux plus accessibles sont en ce moment le théâtre d’une explosion de vie : notre jardin, notre quartier, les alentours immédiats !</p>
<p>Quel plaisir en effet d’observer, au-dessus des fleurs, une frénésie de gros bourdons flanqués de sacs de pollen. Et celui de mettre un nom sur une plante soudainement apparue au pied du lampadaire de notre rue. Là, devant chez nous, la nature est à notre porte. À nos pieds ! Encore faut-il s’y attarder un peu.</p>
<p>Le <a href="https://www.ipbes.net/news/Media-Release-Global-Assessment-Fr">dernier rapport de l’IPBES</a> nous le rappelle : la biodiversité dégringole sévèrement et à tous les niveaux. Un quart des 100.000 espèces évaluées est déjà menacé d’extinction.</p>
<p>Mais le plus inquiétant portent sur celles qu’on appelle, peut-être improprement désormais, les espèces « communes » ou « ordinaires » : insectes, oiseaux, plantes sauvages… Si on ne parle pas (encore) d’extinction, on sait que les populations se réduisent comme peau de chagrin.</p>
<p>Face à ce déclin plus discret, les chercheurs ont besoin de données massives pour affiner le diagnostic et mettre en évidence les causes précises du mal. La perte des habitats ? Les pollutions ? Le réchauffement climatique ? Les espèces exotiques envahissantes ? Il est évidemment impossible de placer un chercheur dans chaque quartier, chaque jardin ou square public, c’est pourquoi nous faisons appel à vous.</p>
<h2>À tout âge, faire avancer la connaissance</h2>
<p>Depuis plus de dix ans des milliers de contributeurs bénévoles ont intégré le programme <a href="http://www.vigienature.fr/">Vigie-Nature</a> du Muséum national d’Histoire naturelle. Ces derniers nous font parvenir quotidiennement de précieuses informations sur un grand nombre d’espèces aux quatre coins de la France.</p>
<p>Preuve que ces sciences participatives sont avant tout des sciences, nous affichons plus d’une centaine de publications scientifiques parues dans des revues internationales. Parmi les résultats acquis grâce aux participants : 50 % de papillons en moins dans un jardin utilisant des pesticides ; un changement massif des communautés de plantes à l’échelle du pays face au réchauffement climatiques ; 1/3 des populations d’oiseaux en moins dans les campagnes françaises en 25 ans…</p>
<p>Nous devons maintenir nos efforts. Vos observations sont nécessaires pour avancer dans nos recherches, produire des indicateurs, élaborer des statistiques indispensables à la mise en œuvre de politiques vertueuses.</p>
<p>Tous, de 7 à 77 ans, avec ou sans connaissances, vous pouvez donc apporter votre pierre à l’édifice tout en faisant connaissance avec le vivant qui vous entoure. D’une pierre deux coups. Voici 5 façons d’y contribuer pendant les vacances.</p>
<h2>1. Photographiez les insectes pollinisateurs</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/285817/original/file-20190726-43104-1vonhzd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/285817/original/file-20190726-43104-1vonhzd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/285817/original/file-20190726-43104-1vonhzd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/285817/original/file-20190726-43104-1vonhzd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/285817/original/file-20190726-43104-1vonhzd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/285817/original/file-20190726-43104-1vonhzd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/285817/original/file-20190726-43104-1vonhzd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/285817/original/file-20190726-43104-1vonhzd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=565&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Abeille domestique sur une inule.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Prisca</span></span>
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<p>Amateur de photo nature, le <a href="https://www.spipoll.org/">spipoll</a> (suivi photographique des insectes pollinisateurs) est pour vous ! Placez-vous devant quelques fleurs de la même espèce. Dégainez votre appareil et tentez de prendre en photo tous les insectes qui viennent les visiter pendant 20 minutes.</p>
<p>Il faut faire vite, être attentif, car les pollinisateurs ne sont pas du genre à prendre la pose… Une fois que tout ce petit monde se trouve dans la boîte, à vous de les identifier. Une clé de détermination accessible sur le site vous permettra, après examen de quelques caractères, de donner un nom à vos abeilles, bourdons, mouches et autres insectes floricoles du jardin. 600 espèces à découvrir, un monde insoupçonné à votre porte !</p>
<p>Les « spipolliens » – comme s’appellent entre eux les participants – vous aideront en ligne avant que vous-mêmes n’aidiez les futurs participants. Côté chercheur, les collections de photos visent à étudier les réseaux de pollinisation, c’est-à-dire les interactions complexes entre plantes et insectes.</p>
<h2>2. Comptez les papillons</h2>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/285686/original/file-20190725-136744-g8d48z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/285686/original/file-20190725-136744-g8d48z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/285686/original/file-20190725-136744-g8d48z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/285686/original/file-20190725-136744-g8d48z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/285686/original/file-20190725-136744-g8d48z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=398&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/285686/original/file-20190725-136744-g8d48z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/285686/original/file-20190725-136744-g8d48z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/285686/original/file-20190725-136744-g8d48z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Le tabac d’Espagne est un papillon caractérisé par son fond jaune fauve et ses lignes et tâches brun noir.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Tabac_d%27Espagne#/media/Fichier:Tabac_d'Espagne_m%C3%A2le_1.jpg">Jpaquetvence/Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>C’est le plus simple à réaliser. Dès que vous apercevez un papillon dans votre jardin, identifiez-le grâce aux fiches pédagogiques disponibles sur le site : 28 espèces ou groupes d’espèces vous attendent. Il s’agit pour vous d’évaluer pour chaque espèce identifiée le nombre d’individus présents simultanément dans votre jardin (ou une partie du jardin public pas loin de chez vous, ou de votre maison de vacances).</p>
<p>Renouvelez ces comptages chaque semaine si vous le souhaitez. L’<a href="https://www.google.com/search?client=firefox-b-ab&q=Sciences+Participatives+au+jardin">Opération papillon</a> peut se pratiquer en jardinant, en prenant l’apéritif en terrasse et même en lisant un livre sur votre transat… Il suffit parfois d’une ombre sur l’herbe, sur votre page, d’un simple battement d’ail qui vous interpelle pour découvrir un papillon jusque-là inconnu. Les comptages commencent quand vous êtes dans votre jardin et s’arrêtent quand vous n’y êtes plus. Quoi de plus simple ?</p>
<p>En participant vous apportez des informations sur l’abondance des papillons de jour. Vous aidez aussi les scientifiques à comprendre l’impact de l’urbanisation, du climat ou encore des pratiques de jardinage sur ces espèces. Et surtout, votre jardin ne sera plus jamais comme avant, égaillé de petite tortue, vulcain et autre tabac d’Espagne.</p>
<h2>3. Comptez les oiseaux</h2>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/285687/original/file-20190725-136737-1ynaodo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/285687/original/file-20190725-136737-1ynaodo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/285687/original/file-20190725-136737-1ynaodo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/285687/original/file-20190725-136737-1ynaodo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/285687/original/file-20190725-136737-1ynaodo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/285687/original/file-20190725-136737-1ynaodo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/285687/original/file-20190725-136737-1ynaodo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/285687/original/file-20190725-136737-1ynaodo.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">La fauvette à tête noire. Le mâle porte une calotte noire, d’où vient le nom de l’espèce, et la femelle une calotte rousse. On la reconnaît surtout à son chant.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/giuss95/13796271365">Le poidesans/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/">CC BY-NC-SA</a></span>
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</figure>
<p>Même principe que précédemment, le référencement portant cette fois sur les oiseaux. Le but du jeu ? Choisissez une durée d’observation – 20 minutes, 30 minutes, une heure —, installez-vous sur votre table de jardin et comptez les espèces qui se présentent. Leur diversité impressionne.</p>
<p>Sur les vingt espèces très fréquentes, combien serez-vous capable de reconnaître ? Si on vous dit troglodyte mignon, fauvette à tête noire, pouillot véloce ? Pourtant, il y a de fortes chances que certains se soient déjà aventurés chez vous… Une fois le comptage effectué, saisissez ensuite, comme toujours, vos données <a href="https://www.oiseauxdesjardins.fr">sur le site de l’observatoire</a>.</p>
<p>Ces informations permettent aux chercheurs de suivre, dans le temps, les populations d’oiseaux partout en France. Et de répondre à des questions fondamentales : quand et pourquoi les oiseaux visitent les jardins ? Quels sont les effets du climat, de l’urbanisation et de l’agriculture sur cette biodiversité ?</p>
<h2>4. Identifiez les plantes sauvages</h2>
<p>Depuis l’arrêt des produits phytosanitaires sur les voies publiques, la flore sauvage reprend ses droits dans les villes de France. <a href="http://www.vigienature.fr/fr/flore/sauvages-de-ma-rue">Sauvages de ma rue</a> vous propose de partir à leur découverte et de les démasquer.</p>
<p>Car si nous passons tous les jours devant, que savons-nous de ces petites fleurs qui jalonnent nos trottoirs ? Choisissez une rue ou une portion de rue et identifiez toutes les plantes que vous croisez. Pas de panique, vous disposez d’un outil magique : la clé d’identification.</p>
<p>Forme des feuilles, couleur des pétales… en répondant correctement à quelques questions vous obtiendrez rapidement le nom de l’espèce, accompagnée de croustillantes anecdotes sur ses vertus médicales ou gustatives, son écologie et sa biologie.</p>
<p>Grâce à vous les chercheurs parviennent petit à petit à référencer les plantes sauvages de l’hexagone. Reste à percer plusieurs secrets de cette flore des trottoirs : comment évoluent-elles avec le changement climatique ? Lesquelles apparaissent et disparaissent ?</p>
<h2>5. Explorez la laisse de mer</h2>
<p>Les chanceux qui se trouvent sur le littoral peuvent aussi mettre la main à la pâte. <a href="https://plagesvivantes.65mo.fr/">Plages-vivantes</a> propose une immersion dans la laisse de mer. Cette bande d’algue qui s’étend le long des plages mêle toutes sortes de débris apportés par les flots : algues, coquillages, déchets liés aux activités humaines…</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/285688/original/file-20190725-136781-19afw6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/285688/original/file-20190725-136781-19afw6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/285688/original/file-20190725-136781-19afw6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/285688/original/file-20190725-136781-19afw6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/285688/original/file-20190725-136781-19afw6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=338&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/285688/original/file-20190725-136781-19afw6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/285688/original/file-20190725-136781-19afw6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/285688/original/file-20190725-136781-19afw6j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=424&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">La laisse de mer sur la plage de Dossen à Santec dans le Finistère.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Santec_-_plage_du_Dossen_-_001_.jpg#/media/File:Santec_-_plage_du_Dossen_-_001_.jpg">Thesupermat/Wikipedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Un écosystème très riche qui contribue à l’équilibre naturel des plages. Afin de comprendre cet habitat peu connu et menacé (ramassage des débris, pollution…), les scientifiques vous mettent au défi : parcourez une laisse de mer sur 25 mètres et tentez d’identifier les algues grâce à une clé d’identification.</p>
<p>Les espèces d’algues diffèrent-elles d’une plage à l’autre ? À plus grande échelle, les chercheurs vont suivre leur distribution spatiale au cours du temps sur l’ensemble du littoral. Il semblerait que le réchauffement de l’océan entraîne un glissement vers le nord de certaines espèces. Mais quelles espèces sont concernées ? À quelle vitesse se déplacent-elles ?</p>
<p>À vous de jouer !</p>
<hr>
<p><em>Hugo Struna, journaliste et rédacteur du blog de <a href="http://www.vigienature.fr/">Vigie Nature</a>, un programme de sciences participatives porté par le Muséum national d’histoire naturelle, a contribué à la rédaction de cet article.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120993/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Romain Julliard est le directeur de l’UMR CESCO MNHN-CNRS-SU et le coordinateur scientifique du programme Vigie-Nature. Vigie-Nature est une plateforme de sciences participatives soutenue principalement par le MNHN et l’Agence française pour la biodiversité ainsi que le ministère de l’Agriculture.</span></em></p>
Face au déclin de nombreuses espèces ordinaires, les vacances sont l’occasion pour les citoyens de 7 à 77 ans de faire avancer la connaissance de la biodiversité… pour mieux la protéger.
Romain Julliard, Professeur d’écologie, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.
tag:theconversation.com,2011:article/120378
2019-07-22T22:49:32Z
2019-07-22T22:49:32Z
Biodiversité : et si vous profitiez des vacances pour faire de la science citoyenne ?
<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/285166/original/file-20190722-11343-1kagu7j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">À la recherche de la petite bête.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/beautiful-young-woman-photographer-wearing-black-1137098054?studio=1">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>En cette période estivale, la plage constitue un passage obligé pour nombre de vacanciers. Si beaucoup prennent plaisir aux bains de mer et de soleil, d’autres appréhendent la promiscuité, le hurlement des enceintes Bluetooth ou encore les entêtants effluves de monoï…</p>
<p>Si vous appartenez à la seconde catégorie, pas de panique, il est toujours possible de mener près des flots une activité ludique et utile, à faire seul ou en famille : participer à un programme de science citoyenne.</p>
<p>Vous vous inscrirez ainsi dans la longue tradition de <a href="https://journals.openedition.org/ocim/1119">naturalistes amateurs</a> qui ont contribué, par leurs observations avisées et parfois leurs obsessions, à la construction de la biologie et de l’<a href="https://www.cairn.info/revue-innovations-2003-2-page-27.htm?contenu=article">écologie moderne</a>, et cela bien avant même que l’on parle de « science citoyenne ». Celle-ci désigne la production de savoirs scientifiques par des citoyens dont « faire de la science » n’est pas la profession. Ici, un appareil photo et une connexion Internet peuvent suffire.</p>
<p>Si vous êtes coincé dans les bouchons en allant vers la plage, jetez par exemple un œil au programme <a href="http://www.biolit.fr/">BioLit</a> pour planifier une petite escapade scientifique entre deux baignades. Vous y apprendrez comment – en photographiant algues, crabes, et méduses – aider les scientifiques à mieux connaître la biodiversité du littoral et son évolution.</p>
<p>Mais, rassurez-vous, il n’est pas obligatoire d’aller en bord de mer pour devenir « scientifique citoyen » (à moins que ce ne soit « citoyen scientifique » !). Il existe aussi des dizaines de programmes de ce type en <a href="http://www.vigienature.fr/fr/flore/sauvages-de-ma-rue">ville</a>, à la campagne ou encore à la montagne. La science citoyenne se pratique aujourd’hui absolument <a href="http://www.vigienature.fr/fr/spipoll-0">partout</a> !</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"856825497413705730"}"></div></p>
<h2>Pas besoin d’être un expert</h2>
<p>Vous avez probablement entendu dire que les <a href="https://theconversation.com/quest-ce-qui-tue-les-insectes-111849">insectes sont en train de disparaître</a> et que les conséquences de cette disparition pourraient être catastrophiques pour notre alimentation. En même temps, vous êtes un peu sceptique et vous vous demandez si ce genre de discours est fondé, s’il n’est pas un <a href="https://undark.org/article/science-sensationalism-and-the-lessons-of-insectageddon/">peu exagéré</a>.</p>
<p>Certes, vous vous sentez concerné·e mais, pour vous, tous les insectes sont des « bestioles » et vous ne faites pas forcément la différence entre une abeille, un bourdon, un syrphe ou une cétoine. Vous vous demandez comment vous pourriez aider à déterminer s’il est vrai que les insectes disparaissent ; et si oui, pourquoi. Les programmes de science citoyenne pourront vous y aider. Mis en place à l’initiative des scientifiques professionnels, leurs protocoles sont adaptés au grand public : pas besoin d’être un expert pour être utile.</p>
<p>Si vous décidez, par exemple, de participer au SPIPOLL (<a href="http://www.vigienature.fr/fr/spipoll-0">Suivi photographique des insectes pollinisateurs</a>), vous « traquerez » à l’aide de votre appareil photo toutes les « bestioles » approchant la fleur que vous aurez choisie d’observer ; une fois les photos prises, vous apprendrez à identifier les insectes à l’aide des documents téléchargés à partir du site Internet du SPIPOLL.</p>
<p>Abeilles, bourdons, syrphes et cétoines n’auront plus de secrets pour vous et vous aurez fait progresser les connaissances scientifiques à leur sujet. C’est bien là le double enjeu des sciences citoyennes : faire avancer la connaissance et les connaissances de tous.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"956574942967009286"}"></div></p>
<h2>Science amateure sans amateurisme</h2>
<p>Vous voyez mal comment quelques photos de fleurs ou de crabes pourraient faire avancer la science ? C’est vrai. On ne fait rien en science avec une seule observation. Au mieux, c’est de l’anecdote. Au pire, c’est un biais. Mais des millions de photos, prises à des milliers d’endroits différents, pendant plusieurs années, voilà ce qui fait la différence !</p>
<p>Seule contrainte : les observations doivent être standardisées – c’est-à-dire toutes réalisées selon les mêmes critères de représentativité et de reproductibilité – pour être exploitables. C’est la partie « science » de ces initiatives citoyennes : les observations se font selon des protocoles précis mis en place par les scientifiques professionnels ; au moment de les rédiger, ces derniers ont en tête la manière dont les observations pourront être par la suite analysées.</p>
<p>C’est l’intérêt et le challenge des sciences citoyennes : cette impressionnante force de frappe qu’apportent les scientifiques amateurs, et la masse phénoménale de données qu’ils génèrent. Même si les experts professionnels sortent régulièrement de leurs laboratoires pour aller « sur le terrain », ils ne peuvent pas être partout à la fois.</p>
<p>Dans ces conditions, comment dès lors <a href="https://theconversation.com/depasser-sa-peur-des-especes-invasives-grace-a-la-science-citoyenne-118422">documenter la propagation du frelon asiatique en Europe</a> ? Seul, c’est impossible, mais avec des milliers (des millions ?) de <em>smartphones</em> déployés en réseau sur tout le territoire, <a href="http://www.bordeaux-aquitaine.inra.fr/Toutes-les-actualites/application-smartphone-sauvons-les-abeilles">cela devient possible</a>. Bien sûr, il faut ensuite pouvoir traiter les données analysées. C’est souvent là que le travail de citoyens scientifiques s’arrête, ce traitement requérant de solides compétences en statistiques. Mais <a href="https://www.openscience.fr/IMG/pdf/5_blangy_ok.pdf">des initiatives existent</a> pour impliquer les citoyens également dans cette phase importante du travail scientifique.</p>
<p>Depuis plus de dix ans maintenant que les programmes de sciences citoyennes se développent, les scientifiques ont fait parlé les données et de nouvelles publications scientifiques basées sur ces approches paraissent très régulièrement. Le suivi des papillons de jour – initié par le Muséum d’histoire naturelle dans le cadre de l’<a href="http://noe.org/reconnecter/programme/observatoires-de-la-biodiversite-des-jardins/resultats/">Observatoire des papillons des jardins</a> – a par exemple <a href="http://noe.org/Reconnecter/Observatoire-Jardins/Resultats/Muratet_2015.pdf">permis de montrer</a> que « plus la surface d’un jardin est grande ou plus la diversité des plantes à fleurs est importante, plus l’abondance des pollinisateurs augmente ».</p>
<p>Les exemples illustrant l’apport des sciences citoyennes à la connaissance scientifique sont légion. Et il faut également souligner que les scientifiques amateurs <a href="https://www.academia.edu/35209188/Knowledge_Gain_and_Behavioral_Change_in_Citizen-Science_Programs">progressent de leur côté</a>, de <a href="http://sro.sussex.ac.uk/id/eprint/60625/">récents travaux</a> ayant montré qu’ils gagnent en expertise et en confiance grâce à ces pratiques. Une raison supplémentaire pour tenter l’aventure de la science citoyenne cet été, à la plage ou ailleurs.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/120378/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Bastien Castagneyrol a reçu des financements de l'agence nationale pour la recherche.. </span></em></p>
De nombreux programmes élaborés par des scientifiques permettent à tout à chacun d’observer la nature et de contribuer à l’avancée des connaissances sur la biodiversité. Pourquoi pas vous ?
Bastien Castagneyrol, Chercheur en écologie, Inrae
Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.