tag:theconversation.com,2011:/uk/topics/taux-dinteret-28453/articlestaux d'intérêt – The Conversation2024-02-20T14:40:33Ztag:theconversation.com,2011:article/2239402024-02-20T14:40:33Z2024-02-20T14:40:33ZLes prêts hypothécaires in fine peuvent-ils relancer le marché de l’immobilier ?<p>Depuis 2022, les <a href="https://theconversation.com/topics/taux-dinteret-28453">taux d’emprunts</a> ne cessent d’augmenter provoquant une <a href="https://theconversation.com/topics/crise-du-logement-132703">crise majeure</a> du <a href="https://theconversation.com/topics/immobilier-23232">secteur immobilier</a>. Si les taux étaient encore en dessous de 1 % fin 2021, ils sont en ce début d’année 2024 <a href="https://www.lemonde.fr/argent/article/2023/09/19/credit-immobilier-vers-des-taux-a-5_6189962_1657007.html">au-dessus de 4 %</a> ce qui restreint drastiquement l’accès au crédit des potentiels acheteurs. </p>
<p>En réponse à cette crise qui semble s’installer, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a annoncé lundi 12 février vouloir relancer le marché de l’immobilier avec la mise en place de <a href="https://www.lesechos.fr/finance-marches/banque-assurances/credit-immobilier-les-banques-sceptiques-face-aux-propositions-de-christophe-bechu-2075848">nouveaux dispositifs</a> tels que les prêts hypothécaires in fine. Mais que sont-ils exactement et peut-on vraiment considérer ces prêts comme <em>la</em> solution au problème des particuliers ?</p>
<h2>Une garantie et un paiement à terme</h2>
<p>Le fonctionnement du prêt hypothécaire semble relativement bien connu des Français. C’est un crédit amortissable adossé à une garantie réelle. Amortissable car l’emprunteur rembourse tous les mois les intérêts du prêt mais également une partie du capital emprunté. Adossé à une garantie car le prêteur (souvent la banque) a le droit de saisir un bien de l’emprunteur, qu’il s’agisse de celui financé par le crédit ou un autre, si celui-ci n’a plus la capacité de rembourser son prêt. Le but est pour la banque de le revendre ensuite pour récupérer ses fonds. Ce prêt a également la particularité d’avoir un taux plus élevé qu’un crédit classique car il correspond à des emprunteurs dont les dossiers sont un peu plus risqués.</p>
<p>La logique du prêt in fine est un peu différente. Sa particularité réside dans l’échéancier que doit respecter l’emprunteur. Avec un prêt in fine, seuls les intérêts sont dus pendant la durée du prêt. La somme empruntée sera remboursée en totalité à la fin du prêt. Prenons un exemple concret : vous souhaitez emprunter 1 000 euros sur 5 ans à un taux de 5 %, vous avez le choix entre un prêt amortissable ou un prêt in fine, vos simulations donnent les informations suivantes :</p>
<p><iframe id="dbhHd" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/dbhHd/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Comme nous pouvons l’observer, l’intérêt majeur du prêt in fine est de diminuer considérablement le montant des mensualités pendant les premières périodes du prêt (50€), par rapport à un prêt amortissable (221€). Cela permettant à l’emprunteur une gestion de trésorerie plus facile au quotidien.</p>
<p>Si dans le cas du prêt amortissable, le capital restant diminue, ce n’est pas la même chose pour un prêt in fine, entrainant la nécessité de la part de l’emprunteur de débourser un montant beaucoup plus important lors de la dernière mensualité. Par ailleurs, une simple somme permet d’observer que la totalité des mensualités est plus importante pour le prêt in fine que pour le prêt amortissable. Le prêt in fine est donc par construction plus cher que le prêt amortissable, et cela à taux d’emprunt identique. Or il est important de noter que les taux ne sont jamais identiques, et que les taux des prêts in fine sont toujours plus élevés que les taux des amortissables.</p>
<h2>Un combo gagnant ?</h2>
<p>La <a href="https://www.leparisien.fr/economie/plus-risque-et-plus-cher-pourquoi-le-credit-immobilier-in-fine-ne-facilitera-pas-lacces-a-la-propriete-13-02-2024-75DUQDTLLFD3BD73ZPOVLNZNDA.php">proposition</a> du ministre de la Transition écologique qui sera discutée avec les banques fin février 2024 combine le prêt hypothécaire et le prêt in fine. En quoi cela peut-il constituer une solution ?</p>
<p>Dans un contexte de taux élevés tel que ce que nous connaissons actuellement, un ménage qui souhaite emprunter pour acquérir un bien immobilier doit anticiper une charge de la dette (autre nom des intérêts) plus importante que si l’emprunt hypothécaire classique avait été contracté en 2021 quand les taux étaient plus bas. Cependant, si une partie du prêt hypothécaire est contractée sous la forme d’un prêt in fine, disons 20 % (le maximum annoncé par le ministre) alors, comme nous l’avons vu précédemment, cela contribue à diminuer la charge mensuelle de cette dette. En effet, si les 80 % entrainent un remboursement amortissable classique, les 20 % de prêt in fine permettent à l’emprunteur de ne rembourser que les intérêts, le capital étant remboursé à maturité. Si l’on reprend l’exemple précédent, en simulant un prêt hypothécaire in fine (20 %), cela nous donne les chiffres suivants :</p>
<p><iframe id="27cPj" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/27cPj/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En comparant ces chiffres aux chiffres précédents, on voit effectivement que mélanger les 2 types de crédits permet de réduire le montant des mensualités payées, permettant aux ménages de souffler un peu et donc potentiellement de pouvoir emprunter. Dans un autre exemple, on pourrait supposer que l’emprunteur ne souhaite pas nécessairement diminuer sa charge d’intérêts mensuelle. Alors le prêt hypothécaire in fine lui permettrait d’emprunter davantage et donc d’acheter plus grand pour le même remboursement mensuel.</p>
<p>Si cette option présente des avantages certains, peut-on réellement considérer ces prêts comme <em>la</em> solution au problème des acheteurs ? Les particuliers doivent-ils y souscrire ?</p>
<p>Le revers de ce type de prêt, c’est le montant total des intérêts payés qui peut très vite atteindre des sommes importantes, en plus de la contrainte financière que cela impose à l’emprunteur arrivé à la maturité de son prêt et devant rembourser l’intégralité de la somme empruntée en une fois. Cela implique que l’emprunteur ait une très bonne compréhension du mécanisme du crédit, lui permettant de gérer son épargne afin de limiter le risque de défaut et donc le risque de ne pas être en mesure de rembourser le prêt obtenu.</p>
<p>Dans un post sur LinkedIn, le gouverneur de la banque de France a lui-même rappelé que ces prêts <a href="https://www.ouest-france.fr/economie/budget/immobilier-peu-dengouement-pour-les-nouveaux-credits-promus-par-le-gouvernement-935f8638-cc1e-11ee-be0b-364738a87aaa">existent déjà</a> en France mais ne sont que très peu utilisés compte tenu du risque qu’ils représentent. Cette solution de court terme pourrait bien augmenter le risque à long terme pour l’ensemble du secteur.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/223940/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Pour répondre aux difficultés qu’ont de nombreux ménages pour contracter un emprunt immobilier, le gouvernement a proposé les prêts hypothécaires in fine en solution : que sont-ils en qu’en attendre ?Jérémie Bertrand, Professeur de finance, IÉSEG School of ManagementAurore Burietz, Professeur de Finance, LEM-CNRS 9221, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1993322023-02-07T19:34:10Z2023-02-07T19:34:10ZLa BCE poursuit son resserrement monétaire mais doit composer avec de fortes incertitudes<p>Ce 8 février 2023, les taux directeurs de la zone euro sont une <a href="https://www.ecb.europa.eu/press/pr/date/2023/html/ecb.mp230202%7E08a972ac76.fr.html">nouvelle fois relevés</a> par la Banque centrale européenne (BCE) pour atteindre 3 %. La décision était attendue : lors du forum économique de Davos le 19 janvier 2023, sa présidente, Christine Lagarde, avait annoncé que l’institution poursuivrait sur la voie dans laquelle elle s’est engagée au cours de l’année 2022, celle du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/politique-monetaire-39994">resserrement monétaire</a> pour contrer l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/inflation-28219">inflation</a> et lutter contre le danger d’une spirale prix-salaires, la hausse des premiers nourrissant celle des seconds et réciproquement.</p>
<p>En mars 2022, Francfort annonçait <a href="https://www.ecb.europa.eu/press/pr/date/2022/html/ecb.mp220310%7E2d19f8ba60.fr.html">réduire la voilure</a> de son interventionnisme sur les marchés financiers et de sa politique de <a href="https://abc-economie.banque-france.fr/quantitative-easing"><em>quantitative easing</em></a> : finis les achats massifs de titres, en particulier de <a href="https://blocnotesdeleco.banque-france.fr/billet-de-blog/deux-ans-apres-son-lancement-quel-bilan-pour-le-pepp">dettes souveraines</a>. Par la suite, <a href="https://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/inflation-la-bce-releve-ses-taux-pour-la-quatrieme-fois-depuis-juillet-944779.html">cinq hausses</a> de taux directeurs ont été décidées entre juillet et février 2023 faisant évoluer son principal taux de 0 à 3 %. Le mouvement, affirme Mme Lagarde, se poursuivra en 2023.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1621214076025053185"}"></div></p>
<p>Augmenter les taux d’intérêt vise à freiner la création de monnaie des banques en <a href="https://www.lexpress.fr/economie/hausse-des-taux-de-la-bce-quelles-consequences-pour-les-emprunteurs_2177438.html">rendant plus cher le crédit</a> : moins de crédits distribués, c’est moins de monnaie disponible à dépenser, une demande de biens et services qui s’en trouve freinée et, dans ce contexte, une tentation moindre pour les producteurs d’augmenter leur prix. Avec le risque, on le comprend, de freiner l’activité et la croissance économique.</p>
<p>Si en théorie, cette relation entre hausse des taux directeurs et baisse de l’inflation existe, la réalité de la zone euro rend incertaine l’efficacité de cette politique monétaire restrictive.</p>
<h2>Le défi de l’hétérogénéité</h2>
<p>D’abord parce que la stratégie de la BCE qui vise à réduire la masse monétaire aura peu d’effets sur la principale composante de l’inflation de la zone, celle des prix énergétiques et des matières premières agricoles : celle-ci est davantage imputable à des facteurs géopolitiques et à des problèmes d’approvisionnement qu’à un excès de monnaie, même si à terme, le <a href="https://podcast.ausha.co/afpaudio-surlefil/augmenter-les-taux-d-interet-recette-miracle-contre-l-inflation">ralentissement de l’économie</a> induit par le resserrement monétaire devrait alléger la tension sur les prix des matières premières.</p>
<p>Ensuite, parce que la BCE est confrontée à une difficulté majeure : l’hétérogénéité des situations inflationnistes en zone euro.</p>
<p>Fin 2022, les taux d’inflation s’étalent dans une fourchette allant de 6,6 % pour l’Espagne à plus de 21 % pour la Lettonie et la Lituanie. Or la BCE ne dispose que d’une série de taux directeurs, identiques pour l’ensemble des pays membres. Les gouverneurs prennent alors leur décision selon une situation moyenne, ce qui conduit parfois à des politiques inadéquates pour les pays qui en sont le plus éloignés. Ainsi, les États baltes sont soumis à un taux directeur de 3 % quand, à titre de comparaison, la Hongrie, hors zone euro, a fixé pour une inflation du même ordre de grandeur un taux à 13 %. Augmenter fortement les taux pour les aider à contrer leur forte inflation pénaliserait les pays où elle est jusqu’à trois fois plus faible, comme la France, le Luxembourg ou l’Espagne.</p>
<p><iframe id="zFc3I" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/zFc3I/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Enfin, l’efficacité de la politique de la BCE reste soumise à des contraintes extérieures qu’elle ne maîtrise pas : la politique plus restrictive de la banque centrale américaine et les anticipations des investisseurs.</p>
<p>Outre que, pour ces raisons, son efficacité semble limitée, le resserrement monétaire de la BCE risque de faire entrer la zone euro en récession et de conduire à sa fragmentation, faisant craindre une résurgence de la crise des dettes souveraines.</p>
<p>Ce sont ces questions que nous étudions dans un article à paraître dans la <em>Revue de l’Union européenne</em>.</p>
<h2>Importe-t-on de l’inflation ou des solutions ?</h2>
<p>Francfort doit composer avec le reste du monde. Sa politique joue en effet sur une variable qui lie les économies et les marchés financiers de la zone euro avec l’extérieur : le taux de change (combien l’euro vaut-il de dollars par exemple).</p>
<p>En théorie, la remontée des taux directeurs est de nature à <a href="https://www.lafinancepourtous.com/decryptages/marches-financiers/fonctionnement-du-marche/marche-des-changes-forex/#:%7E:text=Le%20march%C3%A9%20des%20changes%20est,des%20termes%20anglais%20FOReign%20EXchange.">attirer les investisseurs internationaux</a> : des taux plus élevés, c’est la promesse de rendements meilleurs à court terme. Ils vont donc se procurer des euros pour investir sur ces marchés devenus plus attractifs. Plus l’euro est demandé, plus son prix augmente : il faudra donner davantage de dollars pour s’en procurer. On dit que la monnaie européenne s’apprécie.</p>
<p>La hausse de l’euro a pour conséquence de réduire le coût des biens et services que la zone euro achète au reste du monde. Si le prix d’un produit facturé en dollar ne change pas, cela reviendra moins cher qu’avant de l’importer en zone euro. En d’autres termes, la hausse de l’euro permettrait d’importer de la désinflation, facilitant ainsi la tâche de la BCE sans sa lutte contre l’inflation.</p>
<p>Là encore, la théorie n’est pas réalité : si l’on échange avec une zone où les taux grimpent vers des cibles plus élevées, c’est l’inverse qui peut se produire. Et c’est précisément le cas avec les États-Unis depuis 2022. La Fed s’est engagée dans une lutte contre l’inflation plus agressive que la BCE : ses taux ont été relevés jusque <a href="https://investir.lesechos.fr/marches-indices/devises-taux/la-fed-releve-ses-taux-directeurs-de-25-points-de-base-dans-la-fourchette-de-45-475-1902789">4,75 % en février 2023</a>, bien au-dessus des 3 % de la BCE, rendant les rendements sur les marchés financiers américains plus attractifs pour les investisseurs.</p>
<p><iframe id="C2ApY" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/C2ApY/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Et pour y investir, ces derniers doivent se procurer des dollars. Davantage demandé, le dollar augmente et avec lui le prix des importations facturées en dollar, en particulier les hydrocarbures et une grande partie des matières premières. Pour la zone euro, cela pèse sur la croissance et dégrade le commerce extérieur qui a connu un déficit record en août 2022 (<a href="https://ec.europa.eu/eurostat/documents/2995521/15131943/6-14102022-AP-FR.pdf/86a0971f-0fa2-64ff-f5a6-ae2a495d6d6d#:%7E:text=En%20cons%C3%A9quence%2C%20la%20zone%20euro,par%20rapport%20%C3%A0%20ao%C3%BBt%202021.">50 milliards d’euros</a>). En mai, l’Allemagne, principale puissance industrielle de la zone, enregistrait même une <a href="https://www.courrierinternational.com/article/le-chiffre-du-jour-l-allemagne-enregistre-un-deficit-commercial-historique">balance commerciale négative</a> pour la première fois depuis sa réunification en 1989.</p>
<p>Le canal du taux de change joue ainsi contre la BCE : la baisse de l’euro accélère l’inflation. Si au dernier trimestre 2022, l’euro a regagné du terrain, annulant une partie de sa baisse sur les premiers mois de l’année, l’interrogation demeure quant à son évolution début 2023. Celle-ci dépendra de facteurs que la BCE ne maîtrise pas : la poursuite et l’ampleur du resserrement monétaire de la FED, la fin possible de la guerre en Ukraine et avec elle la réduction – ou non – des tensions sur les matières premières ou encore la potentielle rupture totale par la Russie des approvisionnements en gaz de l’UE. L’incertitude reste entière.</p>
<h2>Les risques de fragmentation alimentent les peurs</h2>
<p>Ce mécanisme se trouve renforcé par la résilience de l’économie américaine. Nous l’avons dit, augmenter les taux freinera l’activité économique. Or les États-Unis semblent bien résister au resserrement monétaire de la FED : fin 2022, le taux de chômage y est resté stable à <a href="https://www.latribune.fr/economie/international/etats-unis-le-chomage-au-plus-bas-depuis-cinquante-ans-947072.html">3,5 %</a>, le marché du travail a enregistré davantage de créations d’emplois que prévu et le salaire horaire a continué à progresser (+ <a href="https://www.lesechos.fr/monde/etats-unis/aux-etats-unis-lere-de-labondance-touche-a-sa-fin-pour-les-consommateurs-1900904#:%7E:text=Durant%20les%20trois%20derniers%20mois,%2C1%25%20pour%20les%20prix.">7,4 % sur un an</a>) tandis que l’inflation poursuit son ralentissement (<a href="https://investir.lesechos.fr/marches-indices/economie-politique/linflation-revient-a-65-sur-un-an-aux-etats-unis-en-decembre-comme-attendu-1896503">6,5 % sur un an en décembre</a> contre <a href="https://www.courrierinternational.com/article/consommation-a-8-5-en-mars-l-inflation-aux-etats-unis-a-t-elle-atteint-un-pic">8,5 % en mars 2022</a>). Ces indicateurs <a href="https://forex.tradingsat.com/cours-euro-dollar-FX0000EURUSD/actualites/euro-dollar-apres-les-excellents-chiffres-de-l-emploi-americain-l-euro-chute-face-au-dollar-1055405.html">restent favorables fin janvier 2023</a> et pèsent sur l’euro.</p>
<p>En comparaison, l’incertitude demeure quant à la résistance de la zone euro au resserrement monétaire et à la crise énergétique. La crainte d’une politique plus dure de la BCE en 2023 pour juguler l’inflation inquiète les investisseurs ; leurs craintes de récession pèsent sur les bourses européennes comme on a pu le voir au <a href="https://www.tradingsat.com/cac-40-FR0003500008/actualites/cac-40-les-craintes-de-recession-et-la-bce-penalisent-le-cac-40-qui-retourne-sous-les-7000-points-1053053.html">lendemain</a> de la prise de parole de Christine Lagarde à Davos.</p>
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<p>A ces inquiétudes qui pèsent sur l’euro, s’ajoute le risque d’une fragmentation de la zone du point de vue des conditions de financement des États – les dettes souveraines. Du fait de l’hétérogénéité des situations au regard des fondamentaux macroéconomiques et des finances publiques, certains résisteront mieux que d’autres à la politique monétaire restrictive et les écarts risquent de se creuser.</p>
<p>Les achats massifs de titres mis en œuvre par la BCE entre 2015 et 2022 avaient permis de rapprocher les rendements entre les dettes souveraines des États membres, notamment avec l’étalon de référence allemand. En acquérant massivement des obligations publiques, la BCE avait fait grimper leurs cours et chuter leurs taux, à des niveaux proches de zéro pour les économies les mieux notées de la zone.</p>
<p><iframe id="QF1ZX" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/QF1ZX/4/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>L’arrêt de cette politique en mars 2022 a fait <a href="https://data.oecd.org/fr/interest/taux-d-interet-a-long-terme.htm">remonter les taux souverains</a>, en particulier pour les pays les plus fragiles. La difficulté pour la BCE consistera alors à éviter une fragmentation de l’Union monétaire, comme celle qu’elle a connue au début des années 2010 : il s’agira d’éviter que les pays qui connaissent déjà le plus de difficultés, comme l’Italie, soient davantage pénalisés que les autres et peinent à se financer.</p>
<p>C’est pour limiter ce risque qu’elle a annoncé en juillet 2022 la création d’un <a href="https://www.banque-france.fr/sites/default/files/medias/documents/293tf22_final.pdf">Instrument de protection de la transmission</a> de la politique monétaire. Sa mise en œuvre visera à la fois à dissuader la spéculation contre les dettes souveraines les plus fragiles et à éviter que le resserrement monétaire ne détériore davantage la situation des pays les plus endettés de la zone euro. La mesure consiste à « acheter des titres émis spécifiquement par des pays souffrant d’une détérioration de leurs conditions de financement qui ne serait pas justifiée par leurs fondamentaux économiques ». Six mois plus tard, la BCE n’a cependant annoncé aucun montant ni calendrier sur la mise en œuvre du programme, laissant là encore les marchés dans l’incertitude.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/199332/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Lelièvre ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Face à l’inflation, la Banque centrale européenne poursuit les mesures entamées en 2022 mais fait face à la politique agressive de la Fed et à une menace de crise des dettes souveraines.Valérie Lelièvre, Maître de conférences en Sciences économiques, Université de LorraineLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1970782023-01-03T20:09:23Z2023-01-03T20:09:23ZFinance : pourquoi les obligations protégées de l’inflation souffrent quand même de la hausse des prix<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/502677/original/file-20221227-89077-t5j4h9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=5%2C5%2C1270%2C896&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'inflation monte en flèche, mais les investisseurs ne semblent pas pour autant demandeurs sur les marchés secondaires des obligations qui la prennent en considération.</span> <span class="attribution"><span class="source">Gerd Altmann / Pixabay</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La chose semble paradoxale. L’inflation a augmenté de manière inédite, à un <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/inflation/l-inflation-va-grimper-a-7-en-debut-d-annee-2023-selon-l-insee_5546121.html">taux annuel de 6,2 %</a> en 2022 en France (l’Insee anticipe même 7 % sur un an en janvier 2023) : on pourrait alors penser que des titres un peu particuliers, les obligations indexées sur cet indicateur, suivent le mouvement. Puisque leur valeur est protégée de la hausse des prix, elles devraient logiquement être plus demandées et voir leur prix augmenter.</p>
<p>Et pourtant c’est le contraire que l’on observe. L’<a href="https://www.aft.gouv.fr/en/oatis-key-figures">indice global</a> des cours des obligations publiques françaises indexées sur l’inflation, a baissé de 8,45 % depuis le début de l’année. Sur la même période, le même indice aux États-Unis a lui baissé de 11,17 %.</p>
<p><iframe id="gcV23" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/gcV23/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Comment l’expliquer ? Pour comprendre, ce qu’il se passe, il est tout d’abord utile d’examiner le cas plus simple des obligations ordinaires.</p>
<p>Une obligation est un titre de dettes, valable un temps donné, distribué lorsqu’un investisseur prête de l’argent. Elle confère à son détenteur le droit de recevoir une somme périodique nommée « coupon » et, à la maturité, le remboursement de ce que l’on appelle le « principal ».</p>
<h2>Des paramètres fixes dans le temps, mais des exigences qui évoluent</h2>
<p>Lorsque les perspectives d’inflation augmentent, l’investisseur exige des taux de rendement plus élevés pour plusieurs raisons.</p>
<p>D’une part, il essaie de préserver le pouvoir d’achat des capitaux qu’il prête. Au moment où la dette lui est remboursée, il ne faut pas qu’il puisse acheter moins avec son argent par rapport au moment où il l’a prêté, ce qui est le cas quand les prix augmentent et que le montant de cet argent reste le même.</p>
<p>D’autre part, en période d’inflation, il s’attend à ce que les banques centrales augmentent les taux courts pour lutter le phénomène. L’estimation de ce qu’il obtiendrait par une succession de placements à court terme augmente, ce qui le conduit à hausser le rendement qu’il exige sur les obligations à long terme.</p>
<p>Une obligation est souvent émise « au pair », c’est-à-dire à un prix initial égal au principal. Dans ce cas, le coupon est calibré pour qu’il représente, en pourcentage du principal, le taux de rendement exigé par l’investisseur lors de l’émission. Ce taux de rendement exigé d’une obligation ordinaire est nominal. Ce rendement est obtenu en additionnant un taux réel exigé et une perspective d’inflation.</p>
<p>Cependant, alors que ces paramètres, les montants du coupon et du principal, sont calibrés une fois pour toutes, les exigences de l’investisseur, elles, vont évoluer au cours de la durée de vie de l’obligation. La solution pour lui est alors de se tourner vers les marchés secondaires, là où les investisseurs se rachètent et revendent des titres entre eux.</p>
<p>La variable qui y permettra un ajustement aux exigences de l’investisseur est le prix de l’obligation. Pour que le coupon et le principal, qui sont tous les deux fixes, produisent le taux de rendement exigé quand celui-ci augmente, alors le cours de l’obligation doit baisser. En effet, si l’on souhaite obtenir une différence relative plus importante entre son investissement au départ et ce que l’on touche à l’arrivée, et si ce que l’on touche à l’arrivée ne peut varier, alors il faut que ce que l’on investit au départ diminue.</p>
<p>On comprend donc pourquoi, lorsque les rendements exigés par les investisseurs augmentent suite à une hausse de l’inflation, les prix des anciennes obligations diminuent sur le marché secondaire.</p>
<h2>Quand l’inflation engendre une baisse des prix</h2>
<p>Revenons maintenant à notre cas plus spécifique, celui d’une obligation indexée. Elle est également émise avec un principal et un coupon décidés à l’avance et inchangés ultérieurement mais son fonctionnement diffère d’une obligation ordinaire de plusieurs manières. D’abord, à la maturité, les détenteurs sont remboursés du principal augmenté de l’inflation cumulée depuis l’émission. Le coupon de chaque période est lui augmenté de l’inflation cumulée jusqu’alors. Un coupon réel en pour cent est en effet appliqué au principal indexé de l’obligation.</p>
<p>Pour le cas simple d’une inflation annuelle constante, cela implique que le taux de rendement nominal d’une obligation indexée est égal à l’addition du coupon réel en pour cent et du taux d’inflation réalisée, quelle qu’elle soit. Le coupon réel en pour cent, décidé à l’émission, est donc un taux de rendement réel garanti, quelle que soit l’inflation ultérieure. Il est choisi pour correspondre au taux de rendement réel exigé par les investisseurs lors de l’émission.</p>
<p>En France, environ <a href="https://www.ouest-france.fr/economie/budget/pourquoi-l-etat-a-12-de-ses-dettes-indexees-sur-l-inflation-aa83af82-3a71-11ed-b21b-a9a4fa94aa00">12 % de la dette publique</a> est émise sous cette forme, ce qui explique en partie que les intérêts à payer, le « service de la dette », aient significativement augmenté en 2022.</p>
<p>[<em>Près de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Aussi longtemps que le taux de rendement réel exigé par les investisseurs se trouve inchangé, et quelles que soient les variations de l’inflation, le prix de l’obligation indexée va donc rester constant sur le marché secondaire. Mais évidemment le taux de rendement réel exigé par les investisseurs évolue de manière continue en fonctions de toute une série de facteurs autres que l’inflation. Et comme le principal à indexer et le coupon réel en pour cent restent inchangés jusqu’à la maturité, c’est une nouvelle fois le prix de l’obligation sur le marché secondaire qui s’ajustera.</p>
<p>Si le taux de rendement réel exigé était resté constant depuis le début de l’année, le cours des obligations indexées serait resté inchangé, alors même que l’inflation a fortement augmenté. Si les obligations indexées ont baissé depuis le début de l’année, c’est parce que le taux de rendement réel exigé par les investisseurs a augmenté.</p>
<p>L’augmentation du taux de rendement réel exigé par les investisseurs peut s’expliquer partiellement par un effet indirect de l’inflation qui a détérioré les perspectives de croissance. Les investisseurs sont devenus plus sensibles au risque, les dettes des États moins solides et les taux à court terme réels attendus à la suite de la réaction des banques centrales plus élevés. Il y a bien sûr d’autres causes que l’inflation, mais cet effet paradoxal, une inflation qui engendre une baisse de prix, méritait d’être signalé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197078/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Eric Dor ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le contexte actuel devrait favoriser les produits financiers censés comporter des protections face à la flambée des prix. Or, leurs cours ne cessent de baisser. Pourquoi ?Eric Dor, Director of Economic Studies, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1950392022-11-30T17:54:33Z2022-11-30T17:54:33ZLutte contre l’inflation : les petits pays de la zone euro laissés pour compte ?<p>En 2023, la Croatie fera partie intégrante de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/zone-euro-54680">zone euro</a>, achevant son parcours au sein du mécanisme de taux de change (<a href="https://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php?title=Glossary:Exchange_rate_mechanism_(ERM)/fr">MCE-II</a>). La Bulgarie s’y trouve également depuis l’été 2020. Le MCE-II, c’est la dernière étape pour un pays avant de faire son entrée dans la zone euro. Les pays y sont engagés, pendant au moins deux ans, dans un processus de <a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1348">convergence</a> monétaire pour assurer leur résilience à leurs partenaires futurs de la zone euro.</p>
<p>Car partager sa monnaie avec d’autres pays, c’est en effet renoncer à ce que sa banque centrale puisse répondre à des chocs concernant son économie, en jouant, entre autres, sur le taux de change. La Bulgarie, en régime de change fixe, pouvait par exemple choisir de dévaluer sa monnaie, autrement dit, de diminuer sa valeur par rapport aux autres afin d’encourager les exportations et freiner les importations dans un objectif de relance de la production nationale. Ceci est d’autant plus vrai lorsque l’on fait face à un marché du travail européen relativement <a href="https://www.cairn.info/revue-regards-croises-sur-l-economie-2012-1-page-31.htm">rigide</a>, tant au niveau des salaires que de la mobilité.</p>
<p>Durant deux ans, le pays est en quelque sorte en phase de test. Il s’agit de voir s’il est suffisamment stable pour renoncer à cet outil. À la suite de l’entrée dans la zone euro, c’est la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/banque-centrale-europeenne-bce-24704">Banque centrale européenne (BCE)</a> qui prendra les commandes de la politique monétaire. Il faudra s’y accommoder, gageant que sa politique correspondra à celle qu’aurait adoptée le pays individuellement.</p>
<p>Or, nos derniers <a href="https://doi.org/10.1016/j.inteco.2022.09.004">travaux</a> en viennent à la conclusion que ce sont surtout les économies relativement plus fortes qui influencent la politique monétaire de Francfort. De leur côté, les plus petites économies subissent. En cas de désynchronisation de leur cycle économique, elles doivent alors s’appuyer sur d’autres instruments, tels que des politiques budgétaires, ou sur des institutions fortes, à l’instar de celles régulant le marché du travail.</p>
<p>Ce résultat ne semble pas anodin à l’heure où les <a href="https://www.ecb.europa.eu/stats/policy_and_exchange_rates/key_ecb_interest_rates/html/index.fr.html">taux d’intérêt clés</a> se voient régulièrement rehaussés pour lutter contre l’inflation : les 27 juillet, 14 septembre et 2 novembre, ils ont respectivement été remontés à 0,00 %, 0,75 % et 1,50 %. Des mesures et des hétérogénéités qui interrogent lorsque l’on connaît également le lien entre <a href="https://theconversation.com/fr/topics/inflation-28219">inflation</a> et <a href="https://theconversation.com/fr/topics/chomage-20137">chômage</a>.</p>
<h2>Un exercice périlleux</h2>
<p>La découverte de ce lien remonte a minima aux <a href="https://doi.org/10.2307/2550759">travaux</a> statistiques de 1958 de l’économiste néo-zélandais Alban Phillips. L’auteur donne son nom à une courbe qui montre une relation stable et inversée entre le niveau de chômage et l’évolution des prix.</p>
<p><iframe id="iNzkX" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/iNzkX/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Une inflation élevée, c’est le prix d’un taux de chômage faible, en est-on venu à considérer. De ce qui n’était à l’origine qu’une relation empirique premièrement observée au Royaume-Uni entre 1861 et 1957, certains courants de pensées économiques en ont en effet déduit un lien de causalité et un arbitrage à faire entre ces deux variables.</p>
<p>Ainsi une politique de relance budgétaire devrait-elle stimuler la demande globale : les entreprises peuvent alors produire plus et demandent des travailleurs supplémentaires, faisant baisser le chômage. Face à cette baisse du chômage, les entreprises sont donc également amenées à augmenter les salaires afin d’attirer les chômeurs de moins en moins nombreux. Les firmes répercuteraient alors ces coûts supplémentaires sur les prix, le tout nourrissant l’inflation.</p>
<p>Pour un décideur politique, comprendre cette relation et être capable de savoir à quel point il peut s’appuyer sur les autorités monétaires représente donc un atout, surtout quand ces dernières interviennent pour juguler l’inflation au sein d’une union monétaire.</p>
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<p>En effet, la politique monétaire au sein d’une union monétaire est toujours un exercice périlleux. Elle se calque sur ce qui se passe en moyenne pour l’ensemble des membres. Plus un membre est loin de cette moyenne et plus il y a de chances qu’il se voit conduit par des mesures mal calibrées pour sa situation particulière. Autrement dit, cela nécessite pour les différentes économies d’avoir, dans une certaine mesure, des cycles économiques relativement synchrones afin d’éviter que la politique monétaire ne vienne à contre-courant de leurs besoins particuliers.</p>
<p>Pour toutes ces raisons, il devient alors intéressant de dessiner la courbe de Phillips pour la zone euro, ainsi que pour chacun des 19 États membres.</p>
<h2>Effets contre-productifs</h2>
<p>Nous nous sommes focalisés dans un premier temps, sur les sept économies, relativement petites, qui au cours de ces dernières années ont connu tous les stades de l’adhésion, allant de l’entrée dans <a href="https://theconversation.com/fr/topics/union-europeenne-ue-20281">l’Union européenne (UE)</a> à l’accession à la zone euro : Chypre, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Slovénie et la Slovaquie.</p>
<p><iframe id="4VnBu" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/4VnBu/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En utilisant des données trimestrielles, nos premiers résultats montrent que l’accession progressive à la zone euro s’accompagne d’une relation inflation-chômage qui tend à s’édulcorer. C’est-à-dire que l’arbitrage entre les deux a quelque chose de plus significatif chez les douze autres membres de la zone euro. Entrer dans la zone euro semble conduire à perdre de la relation empirique observée via la courbe de Phillips, dans les plus petites économies.</p>
<p><iframe id="LkkCE" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/LkkCE/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Les politiques monétaires pourraient donc avoir des effets hétérogènes selon la taille de l’économie concernée. Ce constat suggère que les plus petites économies doivent s’assurer par d’autres canaux, notamment via les institutions du marché du travail, du maintien de l’équilibre entre les variations des prix et l’emploi, au risque de subir une politique monétaire inefficace pour elles.</p>
<p>Sous l’hypothèse que des économies relativement plus fortes peuvent faire pencher la balance (par exemple si l’on observe un ralentissement économique simultané en France et en Allemagne), l’impact de la politique monétaire peut s’avérer avoir un effet contre-productif pour de plus petites économies toujours sur une trajectoire de croissance ascendante. Elle pourrait même tendre à renforcer le déséquilibre entre l’évolution des prix et celle du marché du travail.</p>
<h2>Pourquoi un salaire minimum européen ?</h2>
<p>Cette relation empirique, la courbe de Phillips, représente en tout cas bien un enjeu pour l’évolution de la zone euro. Elle justifie l’intérêt contemporain de la Commission européenne sur les institutions domestiques du marché du travail et l’on comprend mieux l’intérêt de la proposition de directive pour un <a href="http://ermees.fr/fr/pourquoi-un-salaire-minimum-au-niveau-europeen/">salaire minimum européen</a>. L’idée : une union monétaire évolue également conjointement avec, et ne peut être dissociée de la sphère réelle.</p>
<p>Ces questionnements laissent entrevoir, par ailleurs, de nombreux travaux de recherche nécessaires pour comprendre et étayer le débat sur les politiques à mener au sein de l’union monétaire et de l’UE dans son ensemble.</p>
<p>Il est à noter que nous avons traité l’exemple de petites économies ouvertes. Il sera intéressant d’analyser l’évolution dans l’équilibre des forces lorsque des économies relativement plus fortes telles que la Pologne, la Hongrie ou la République tchèque viendront à entrer dans la zone euro. L’accession à la monnaie unique est en effet devenue obligatoire pour tout pays entrant dans l’UE. Seuls la Suède et le Danemark, arrivés précédemment, pourront faire exception.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/195039/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La Slovénie, la Bulgarie, les états baltes ou encore bientôt la Croatie pourraient subir les effets de politiques monétaires davantage adaptées à la situation de grands États membres plus influents.Pierre Lesuisse, Docteur en économie - Chercheur au BETA (Strasbourg) - Enseignant à Sciences po (Strasbourg), Université de StrasbourgJean-Louis Combes, Professeur d'économie, Université Clermont Auvergne (UCA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1948592022-11-24T22:30:43Z2022-11-24T22:30:43ZInflation ou hausse des taux ? Le dilemme des banques centrales n’a rien d’inéluctable…<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/496128/original/file-20221118-12-m38xdy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=93%2C17%2C1090%2C779&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les banques centrales comme la BCE (photo) ne contrôlent aujourd'hui qu'indirectement le volume de monnaie en circulation qui entraîne la hausse des prix.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Europäische_Zentralbank_-_European_Central_Bank_%2819190136328%29.jpg">Wikimedia commons</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>La hausse du niveau général des prix atteint actuellement, dans de nombreux pays, des niveaux inédits depuis les années 1980. Ce phénomène inflationniste s’explique généralement par une <a href="https://publications.banque-france.fr/laugmentation-de-la-masse-monetaire-pendant-la-crise-Covid-analyse-et-implications">croissance excessive de la masse monétaire</a> ; et même si d’autres causes y contribuent, l’inflation peut toujours être évitée ou corrigée par un ajustement de la quantité de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/monnaie-21214">monnaie</a> en circulation. C’est pourquoi les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/banque-centrale-45337">banques centrales</a>, qui ont pour mandat de stabiliser le pouvoir d’achat de la monnaie, entreprennent aujourd’hui de relever leurs taux pour combattre l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/inflation-28219">inflation</a>.</p>
<p>Dans nos systèmes monétaires actuels, cependant, les banques centrales ne contrôlent qu’indirectement, et très imparfaitement, le volume de monnaie en circulation. La monnaie de banque centrale, qu’elles émettent directement, ne représente en effet qu’une fraction du total des moyens de paiement, essentiellement limitée aux pièces et aux billets. La <a href="https://www.youtube.com/watch?v=6bDQG9LWwk4">masse monétaire</a> se compose surtout, aujourd’hui, de monnaie bancaire scripturale (les soldes de nos comptes courants transférables par carte bancaire ou virement), qui est <a href="https://abc-economie.banque-france.fr/leco-en-bref/qui-cree-la-monnaie">créée par les banques commerciales</a> lorsque celles-ci financent des prêts ou des investissements.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/fed-et-bce-deux-rythmes-mais-une-meme-strategie-contre-linflation-185059">Fed et BCE : deux rythmes mais une même stratégie contre l’inflation</a>
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<p>L’un des défauts de cette monnaie bancaire est qu’elle confère au moyen d’échange un comportement procyclique : le volume de monnaie augmente (ou se contracte) à mesure que les emprunteurs accroissent (ou réduisent) leur endettement auprès des banques, ce qui amplifie les bulles spéculatives là où les banques prêtent le plus – sur le <a href="https://theconversation.com/marche-immobilier-krach-ou-simple-correction-194093">marché de l’immobilier</a> notamment.</p>
<h2>Entre Charybde et Scylla</h2>
<p>Cette dépendance de la création monétaire envers les prêts bancaires explique aussi que les banques centrales, dans le système existant, soient conduites à manipuler le prix du marché des prêts (les taux d’intérêt) pour stabiliser le niveau des prix. En usant notamment du pilotage des <a href="https://abc-economie.banque-france.fr/les-taux-directeurs">taux d’intérêt directeurs</a>, auxquels elles prêtent aux banques, ou d’opérations d’achat ou vente d’actifs à destination de ces dernières, elles vont impacter les taux d’intérêt que les banques, en retour, appliqueront à leurs clients. Les banques centrales, de cette manière très indirecte, peuvent ainsi encourager ou décourager la création de monnaie bancaire, de sorte à stabiliser le pouvoir d’achat de la monnaie.</p>
<p>En période d’inflation, <a href="https://theconversation.com/fed-et-bce-deux-rythmes-mais-une-meme-strategie-contre-linflation-185059">comme actuellement</a>, cela se traduit par des hausses de taux qui, au-delà de leurs effets monétaires, sont tout sauf indolores : en renchérissant le coût de l’endettement, elles pénalisent l’investissement. C’est pourquoi les banquiers centraux naviguent maintenant entre Charybde et Scylla : si une hausse des taux insuffisamment forte laissait filer l’inflation, une hausse trop forte pourrait précipiter une récession.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/laisser-filer-linflation-ou-freiner-la-reprise-le-dilemme-des-banquiers-centraux-164813">Laisser filer l’inflation ou freiner la reprise, le dilemme des banquiers centraux</a>
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<p>Un tel <a href="https://theconversation.com/laisser-filer-linflation-ou-freiner-la-reprise-le-dilemme-des-banquiers-centraux-164813">dilemme</a>, cependant, est-il vraiment inévitable ? Loin s’en faut. Il n’y a rien d’inéluctable, en effet, à ce que la création monétaire dépende si largement des prêts bancaires. Comme l’expliquait déjà l’économiste anglais David Ricardo il y a deux siècles, <a href="https://archive.org/details/planfortheestablishmentofanationalbank/page/n9/mode/2up">il n’y a « aucun lien nécessaire »</a> entre l’émission de monnaie d’un côté, et l’avance de monnaie par voie de prêt de l’autre. Ces deux fonctions, affirmait-il, pourraient très bien être séparées « sans la moindre perte d’avantage, que ce soit pour le pays, ou pour les marchands qui bénéficient de ces prêts ». L’émission de billets, depuis lors, est d’ailleurs devenue un monopole des banques centrales dans la plupart des pays.</p>
<h2>La piste du « 100 % monnaie »</h2>
<p>Dans la même optique, plusieurs économistes ont réclamé que l’émission de monnaie scripturale, transférable par chèque ou virement, soit dissociée des prêts bancaires. Telle était l’essence de la proposition <a href="https://doi.org/10.3917/redp.325.0835">« 100 % monnaie »</a> formulée aux États-Unis, durant la Grande Dépression des années 1930, par plusieurs économistes dont l’Américain <a href="https://mises.org/library/100-money">Irving Fisher</a>. Selon ce plan de réforme, qui a fait l’objet de nos <a href="https://sites.google.com/view/samueldemeulemeester/research">travaux de recherche</a> récents, les dépôts de transaction seraient couverts par 100 % de réserves en monnaie d’État, de sorte à ce que l’autorité monétaire soit seule habilitée à créer ou détruire des moyens de paiement.</p>
<p>Un certain nombre d’économistes, parmi lesquels les prix Nobel Maurice Allais, Milton Friedman et James Buchanan, ont continué à soutenir différentes versions de cette idée de réforme. Cette dernière a cependant souvent été rejetée au motif qu’elle mettrait fin, soi-disant, <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01830363">à l’intermédiation bancaire</a> – ce qui n’est pourtant vrai que pour les versions les plus radicales, qui imposeraient 100 % de réserves sur l’ensemble des dépôts bancaires sans distinction.</p>
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<p>La version basique de ce plan de réforme ne concernerait, quant à elle, que les seuls dépôts de transaction, à finalité de paiement, laissant les banques libres d’utiliser des comptes d’épargne, à finalité d’investissement (et dont les soldes seraient convertibles à vue ou à terme mais non transférables en eux-mêmes), pour financer des prêts. L’<a href="https://www.youtube.com/watch?v=8I4sdXbgk4g">intermédiation bancaire</a> serait ainsi maintenue, mais le volume de moyens de paiement n’en serait plus affecté.</p>
<h2>Le système actuel accroît les inégalités</h2>
<p>À la suite de la crise financière mondiale de 2007-2008, divers auteurs ont soutenu une version moderne de cette idée avec la proposition de <a href="https://positivemoney.org/our-proposals/sovereign-money-introduction/">« monnaie souveraine »</a>, selon laquelle la monnaie de banque centrale serait directement utilisée, sous forme scripturale ou numérique, par l’ensemble de la communauté de paiement en remplacement de la monnaie bancaire.</p>
<p>Dans un tel système, la création monétaire cesserait de dépendre des prêts bancaires pour devenir un monopole de l’autorité monétaire. Celle-ci injecterait de la nouvelle monnaie dans la circulation soit par le canal de l’<em>open market</em> (le marché secondaire des titres sur lequel la banque centrale intervient), soit, en coopération avec le Trésor, par le canal fiscal, c’est-à-dire par une augmentation des dépenses publiques, une réduction des impôts (à niveau de dépenses égal), voire des transferts monétaires directs aux contribuables ou aux citoyens (selon le principe de la <a href="https://theconversation.com/faut-il-sinquieter-des-pertes-des-banques-centrales-193876">« monnaie hélicoptère »</a>).</p>
<p>Le volume de moyens de paiement cesserait ainsi de varier de manière cyclique au gré des décisions d’emprunt et d’investissement. L’autorité monétaire serait en position de parfaitement contrôler l’émission de monnaie et de stabiliser, à travers celle-ci, la valeur de l’unité de compte, sans avoir pour cela à interférer avec le marché des prêts.</p>
<p>Dans les années qui ont suivi la crise de 2008, un système « 100 % monnaie », ou de « monnaie souveraine », aurait représenté un atout évident lorsque, dans un contexte de surendettement généralisé, le secteur privé était réticent à s’endetter davantage (même à des taux très bas) et les banques peu enclines à prêter ou investir. Les banques centrales ont ainsi dû procéder à des achats massifs d’actifs bancaires, via leurs programmes d’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/assouplissement-quantitatif-84573">« assouplissement quantitatif »</a> (QE), pour éviter que la réduction des bilans bancaires ne se traduise en contraction monétaire. Si ces opérations ont permis d’éviter une déflation, elles ont en revanche maintenu les taux d’intérêt à un niveau artificiellement bas et gonflé les prix d’actifs, <a href="https://doi.org/10.3917/ecofi.128.0165">accroissant au passage les inégalités</a>.</p>
<h2>Éviter les distorsions monétaires</h2>
<p>Dans le contexte actuel, un système « 100 % monnaie » permettrait, symétriquement, de contrôler l’inflation beaucoup plus facilement : face à une hausse rapide du niveau des prix, l’autorité d’émission pourrait directement réduire le rythme de la création monétaire, <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-pour-une-revision-monetaire-radicale-1193673">sans avoir à manipuler les taux d’intérêt</a> de quelque manière que ce soit.</p>
<p>Cet argument fut <a href="https://mises.org/library/100-money">avancé dès 1935</a> par Irving Fisher :</p>
<blockquote>
<p>« Même lorsque le niveau des prix est, pour un temps, stabilisé avec succès, sous le système en [vigueur], l’effort même de parvenir à cette fin par une manipulation des taux d’intérêt […] implique nécessairement une certaine distorsion du taux d’intérêt par rapport à la normale, c’est-à-dire par rapport au taux que la seule offre et demande de prêts aurait établi. C’est parce que, lorsque la [banque centrale] relève ou baisse le taux d’intérêt en vue d’empêcher l’inflation ou la déflation, une telle hausse ou baisse interfère nécessairement quelque peu avec le marché monétaire naturel ».</p>
</blockquote>
<p>Sous un système « 100 % monnaie », poursuivait-il, « les taux d’intérêt s’équilibreraient d’une manière naturelle selon l’offre et la demande de prêts, et les taux réels ne seraient pas pervertis par des écarts de conduite monétaires ». Ce n’est qu’en dissociant l’émission de monnaie des prêts de monnaie, comme le propose une telle réforme, que le niveau des prix et le taux d’intérêt pourraient chacun atteindre, séparément et simultanément, leur niveau optimal.</p>
<p>Jusqu’à ce qu’un tel système soit mis en place, les autorités monétaires resteront occasionnellement confrontées au type de dilemme qu’elles subissent actuellement. L’introduction d’une <a href="https://abc-economie.banque-france.fr/monnaie-digitale-de-banque-centrale">monnaie numérique de banque centrale</a> (MNBC), dont le projet est à l’étude dans de nombreux pays, pourrait en faciliter l’adoption.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194859/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Samuel Demeulemeester ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Depuis les années 1930, de nombreux économistes appellent à ne plus conditionner l’émission de monnaie à la demande de prêts des banques commerciales pour renforcer le pouvoir de l’autorité monétaire.Samuel Demeulemeester, Doctor in Economics, ENS de LyonLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1940932022-11-09T23:43:56Z2022-11-09T23:43:56ZMarché immobilier : krach ou simple correction ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/493855/original/file-20221107-3558-tyv924.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=51%2C3%2C1214%2C841&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">À Paris, la hausse des prix des logements marque le pas depuis la rentrée après des années d’augmentation quasi continue.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pxhere.com/fr/photo/442303">PxHere</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>C’est une tendance qui s’observe de plus en plus en France : même si les débats restent vifs sur les chiffres, à <a href="https://actu.fr/ile-de-france/paris_75056/prix-de-l-immobilier-a-paris-le-metre-carre-est-il-vraiment-passe-sous-les-10-000-euros_55007810.html">Paris</a> et en <a href="https://www.challenges.fr/immobilier/immobilier-en-banlieue-leuphorie-dapres-crise-sanitaire-est-finie_833937">Île-de-France</a>, ou encore à <a href="https://www.witfm.fr/baisse-prix-de-l-immobilier-a-bordeaux-des-negociations-plus-importantes-lors-de-l-achat-de-certains-biens">Bordeaux</a>, <a href="https://www.ledauphine.com/magazine-immobilier/2022/11/04/bonne-nouvelle-les-prix-sont-en-baisse-dans-les-grandes-villes">Lyon ou Nantes</a>, une stagnation, voire une baisse des prix de l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/immobilier-23232">immobilier</a> semble bien enclenchée depuis quelques semaines.</p>
<p>Ce mouvement s’inscrit dans un contexte de forte <a href="https://theconversation.com/fr/topics/inflation-28219">inflation</a> qui génère des tensions sur le pouvoir d’achat des ménages mais aussi de relèvement des taux de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/banque-centrale-europeenne-bce-24704">Banque centrale européenne (BCE)</a>, débuté l’été dernier, qui renchérit les coûts d’emprunts proposés par les banques commerciales. Autrement dit, des taux d’intérêt plus bas ont tendance à augmenter la demande, tandis que des taux d’intérêt plus élevés font le contraire.</p>
<p>Dès lors, on peut s’interroger : sommes-nous en train de plonger dans le prochain krach du marché, qui a pourtant <a href="https://www.lepoint.fr/immobilier/immobilier-ce-qui-baisse-vraiment-20-10-2022-2494582_31.php">résisté aux dernières crises</a>, ou sommes-nous dans une fluctuation cyclique plus typique du secteur immobilier ?</p>
<h2>Bulle ou pas bulle ?</h2>
<p>Un krach du marché immobilier suit généralement la formation et l’éclatement d’une bulle immobilière, définie comme une situation dans laquelle le prix moyen d’un bien est beaucoup plus élevé que sa valeur basée sur les fondamentaux de l’évolution des prix. Or, à en croire <a href="https://www.ubs.com/global/en/wealth-management/insights/2022/global-real-estate-bubble-index.html">l’indice</a> publié en octobre dernier par la banque UBS, le marché immobilier parisien semble relativement épargné par ce risque, notamment par rapport à d’autres grandes villes mondiales comme Toronto (Canada) ou Tokyo (Japon).</p>
<p><iframe id="ur8rY" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/ur8rY/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La France reste en outre relativement épargnée par la hausse des taux immobiliers, ce qui éloigne les risques de krach soudain. Si le mouvement de relèvement des taux pour lutter contre l’inflation s’observe au niveau mondial, le taux d’intérêt moyen pour un prêt de plus d’un an est actuellement en France de 1,58 %, <a href="https://www.rohmert-medien.de/wp-content/uploads/2022/10/Der-Immobilienbrief-Nr-537.pdf">contre plus de 3,5 % en Allemagne</a>. Aux États-Unis, l’intérêt moyen pour un prêt hypothécaire de 30 ans <a href="https://fred.stlouisfed.org/series/MORTGAGE30US">dépasse 6,8 %</a>.</p>
<p>De surcroît, les taux d’intérêt étaient plus élevés dans les années 2000 et suivent un cycle récurrent d’inclinaison et de baisse. Cela n’a pas gravement affecté le marché de l’immobilier, comme le montrent les graphiques ci-dessous.</p>
<p><iframe id="tkSoG" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/tkSoG/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p><iframe id="IzGTG" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/IzGTG/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>On peut donc dire que nous ne nous dirigeons pas actuellement vers un krach du marché, mais qu’il s’agit d’un moment de correction lié davantage à l’évolution de l’offre et de la demande. La combinaison des prix actuels de l’immobilier et de l’augmentation des taux d’intérêt est trop lourde pour les consommateurs qui souffrent déjà de l’inflation, ce qui entraîne une baisse des ventes immobilières par rapport aux années précédentes, sans oublier les banques qui <a href="https://www.challenges.fr/immobilier/marche-immobilier-pourquoi-leuphorie-est-finie_833772">octroient plus difficilement des prêts</a>.</p>
<h2>L’offre reste relativement rare</h2>
<p>Cette situation pourrait donc déboucher sur un ralentissement du nombre de transactions immobilières : le marché immobilier devrait en conséquence se refroidir et les prix pourraient se corriger à court terme.</p>
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<p>Cependant, si la demande se tarit, l’offre reste également dans une situation tendue : l’inflation pousse en effet à la hausse les prix de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/construction-36380">construction</a>. L’augmentation du coût de la construction entraîne une diminution de la production d’espace habitable. En outre, le prix des terrains constructibles augmente. La pénurie d’espace habitable dans les villes devrait donc se traduire par une situation de rareté qui peut entretenir une dynamique haussière des prix.</p>
<p>Le marché immobilier, en France comme dans le rester du monde, semble donc dans une phase de correction et d’ajustement plutôt que de krach : il reste une classe d’actifs plutôt solide et stable qui reste néanmoins sujette à des fluctuations inhérentes aux cycles économiques.</p>
<p>Toutefois, il est possible qu’en raison de la hausse des taux d’intérêt, certains emprunteurs aient des difficultés à rembourser leurs prêts immobiliers, ce qui nécessite l’intervention du gouvernement pour maintenir la stabilité du marché ou, du moins, éviter des pertes importantes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/194093/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les risques d’éclatement d’une bulle immobilière restent pour l’heure relativement limités malgré la stagnation des prix enregistrée à la suite du relèvement des taux directeurs de la banque centrale.Ari Birnbaum, Doctorant DBA, Université Côte d’AzurMohamad Hassan Shahrour, Maître de Conférences en Finance, Université Côte d'Azur, IAE Nice - Université Côte d'AzurLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1909292022-09-20T18:28:20Z2022-09-20T18:28:20ZImmobilier : avec la hausse des taux, est-ce bien le moment d’acheter ?<p>Quelles conséquences le mouvement de hausse des taux enclenché par la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/banque-centrale-europeenne-bce-24704">Banque centrale européenne</a> (BCE) fin juillet aura-t-il sur les emprunts <a href="https://theconversation.com/fr/topics/immobilier-23232">immobiliers</a> ? Si l’on regarde le graphique ci-dessous, reprenant l’évolution du taux immobilier moyen octroyé aux particuliers depuis 5 ans, on peut observer une forte variation de ce dernier alors que les taux directeurs de la BCE restaient inchangés. En effet, en août 2017, le taux moyen était de 1,62 % alors qu’en décembre 2021 il est descendu jusqu’à 1,06 %. Mais pourquoi observe-t-on ces variations ?</p>
<p><iframe id="yDpcQ" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/yDpcQ/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Pour bien comprendre ces changements de taux, il est important de rappeler que le taux que l’on observe, aussi appelé taux nominal du prêt, se décompose en deux parties : d’un côté le « spread » qui correspond à la partie du taux fixé par la banque pour dégager une marge commerciale et se couvrir face au risque de non-remboursement ; de l’autre, le taux de refinancement de la banque, c’est-à-dire le taux directeur auquel cette dernière emprunte auprès de la banque centrale. C’est ce taux directeur, fixé par la banque centrale elle-même qui a évolué ces dernières semaines. La BCE, tout comme la Réserve fédérale (Fed) aux États-Unis, a en effet décidé de prêter plus cher aux banques commerciales pour restreindre le crédit et lutter ainsi contre l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/inflation-28219">inflation</a> qui atteignait, en août dernier, <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/products-euro-indicators/-/2-31082022-ap">9,1 % dans la zone euro</a> en rythme annuel.</p>
<h2>Une hausse amorcée dès janvier 2022</h2>
<p>Le jeudi 8 septembre, le Conseil des gouverneurs, qui représente le principal organe de décision de la BCE, a ainsi annoncé une <a href="https://www.bfmtv.com/economie/economie-social/union-europeenne/la-bce-augmente-ses-taux-d-interets-de-75-points-de-base_AN-202209080405.html">augmentation de ses principaux taux directeurs de 75 points de base</a>. Cette hausse intervient après un premier relèvement en juillet 2021 qui constituait une première depuis plus d’une décennie.</p>
<p>Cette situation avait, semble-t-il, été largement anticipée par les banques, au vu de la situation économique, et ces dernières l’avaient déjà répercutée sur leurs taux d’emprunt. En effet, on observe que le taux moyen du crédit hors renégociations commence à augmenter au mois de janvier 2022, passant de 1,06 % en décembre 2021 à 1,45 % en juillet 2022.</p>
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<p>Selon le mécanisme décrit précédemment, toute chose étant égale par ailleurs, une augmentation du taux de refinancement de la banque entraine donc une augmentation du taux de crédit proposé aux particuliers. En conséquence, un relèvement des taux directeurs tel que celui que l’on observe actuellement peut inciter les ménages à retarder leurs projets s’ils estiment que le coût d’emprunt est trop élevé. Même si cette augmentation du taux d’intérêt ne semble pas très élevée, cela peut malgré tout entrainer une réduction des capacités d’achats de certains emprunteurs particuliers.</p>
<h2>Moins de surfaces</h2>
<p>Prenons un exemple concret. En 2022, l’Insee a considéré que le <a href="https://business-cool.com/decryptage/analyse/salaire-moyen-median-france-2022/">salaire moyen tournait autour de 2 340 euros net</a> par mois en France. Afin de démontrer l’impact de l’augmentation des taux du crédit, nous prendrons ce montant pour 2021 et 2022. Sachant que le taux maximal d’endettement autorisé par loi en France est de <a href="https://www.service-public.fr/particuliers/actualites/A15426">35 % pour les prêts immobiliers</a>, cela veut dire que la mensualité maximale autorisée représente 819 euros/mois.</p>
<p>Comme le démontre le graphique que nous avons vu ci-dessus, le taux moyen des prêts immobiliers en juillet 2021 était de 1,08 % et ce dernier est monté à 1,45 % en juillet 2022.</p>
<p>Cela veut dire que la capacité d’emprunt de l’individu moyen est de 215 240 euros en 2021 et presque 10 000 euros de moins en 2022 (205 990 euros). Si on traduit cela en mètres carrés à l’achat, un emprunteur moyen pouvait acheter un bien de 92 m<sup>2</sup> en 2021 et de 84 m<sup>2</sup> en 2022, soit une réduction de presque 10 %.</p>
<h2>Est-ce le moment d’acheter ?</h2>
<p>Si maintenant on considère que les 75 points de base vont être impactés directement sur les taux emprunteurs, cela veut dire une réduction de la capacité d’emprunt à 188 858 euros, soit un appartement de 77 m<sup>2</sup>, équivalent à une réduction de plus de 15 % de la taille du logement.</p>
<p>Le tableau ci-dessous reprend les principaux éléments de notre simulation.</p>
<p><iframe id="RpRql" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/RpRql/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Dès lors, faut-il acheter malgré la hausse des taux ? La réponse n’est pas si évidente. Si on compare notre situation actuelle aux mois/années qui précèdent, le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/pouvoir-dachat-33467">pouvoir d’achat</a> d’un particulier a déjà commencé à diminuer. Acheter suppose donc de bien comprendre les mécanismes qui sont à l’œuvre derrière cette hausse de taux afin de renforcer son dossier de demande de prêt pour minimiser l’impact de cette hausse sur les caractéristiques du bien qu’on cherche à acquérir.</p>
<p>Si l’on ne peut pas jouer sur les taux directeurs, on peut toutefois faire en sorte de minimiser son spread. Ainsi, présenter un meilleur dossier à la banque favoriserait une hausse du taux atténuée et donc, si on suit la simulation ci-dessus, une plus faible baisse de la taille du logement. De plus, si on anticipe que la hausse des taux directeurs de la faible va se poursuivre sur les mois/années à venir, alors cette détérioration de la situation va s’aggraver davantage et le pouvoir d’achat en sera d’autant plus réduit.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/190929/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Une simulation montre qu'avec un même budget les ménages peuvent acquérir des logements plus de 15% plus petits qu'en 2021. Cependant, la situation pourrait encore se détériorer.Jérémie Bertrand, Professeur de finance, IÉSEG School of ManagementAurore Burietz, Professeur de Finance, LEM-CNRS 9221, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1874102022-09-11T16:22:38Z2022-09-11T16:22:38ZHausses des taux : 2022 s’annonce déjà comme une année morose sur les marchés<p>Jeudi 8 septembre, la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/banque-centrale-europeenne-bce-24704">Banque centrale européenne</a> (BCE) a annoncé une hausse de ses trois taux d’intérêt de 75 points de base, faisant passer son <a href="https://www.bfmtv.com/economie/economie-social/union-europeenne/la-bce-augmente-ses-taux-d-interets-de-75-points-de-base_AN-202209080405.html">taux de refinancement au-dessus de 1 %</a>. Il s’agit de la deuxième hausse depuis le début de l’année après avoir opéré son premier relèvement en 11 ans le 21 juillet dernier.</p>
<p>Cette hausse des taux directeurs renchérit le coût du refinancement pour les banques commerciales (BNP Paribas, Société générale, etc.), dissuadant ou renchérissant les crédits à la consommation ou à l’investissement. L’objectif de la BCE est donc là de ralentir une économie jugée en surchauffe, au risque de précipiter une récession. Si la BCE a décidé de frapper fort, c’est qu’elle s’attend en effet à une <a href="https://theconversation.com/fr/topics/inflation-28219">inflation</a> de 8,1 % en 2022, contre 6,8 % en rythme annuel en juin dernier. Toujours selon le grand argentier européen, la hausse des prix ne devrait ralentir qu’à partir de 2023.</p>
<p>Cette annonce n’est pas une bonne nouvelle pour les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/marches-financiers-25050">marchés financiers</a> qui, s’ils ont semblé plutôt insensibles aux crises de ces dernières années, connaîtront très probablement une année 2022 morose en raison du changement de cap amorcé dans la politique monétaire des banques centrales ces derniers mois.</p>
<h2>Des baisses inédites depuis les années 1970</h2>
<p>Depuis la crise des subprimes en 2008, les marchés financiers semblaient très calmes, sorte de remake de la <a href="https://www.federalreservehistory.org/essays/great-moderation">« great moderation »</a> observée entre 1982-2007. L’inflation était inexistante, la volatilité moyenne faible et les mesures de soutien, qui se sont amplifiées pendant la crise du Covid-19, omniprésentes. Jusqu’à la fin d’année 2021, rien ne semblait pouvoir ébranler les marchés financiers. L’élection de Donald Trump aux États-Unis en 2016 n’avait pas créé de torpeur financière durable, ni les attentats à répétition, ni le <a href="https://theconversation.com/fr/topics/brexit-24703">Brexit</a> (<a href="https://www.latribune.fr/bourse/les-marches-europeens-repartent-dans-le-vert-deux-jours-apres-le-brexit-582965.html">deux jours de baisse seulement</a>), ni la crise sanitaire, etc.</p>
<p>Cependant, cette période de calme relatif touche aujourd’hui à sa fin. Depuis le début de l’année, les principaux indices dans le monde sont tous orientés à la baisse. Sur un an, le <a href="https://www.google.com/finance/quote/PX1:INDEXEURO?sa=X&ved=2ahUKEwitwdy4l4L6AhUC_hoKHRhLA-wQ3ecFegQIFRAY&window=YTD">CAC 40 a perdu plus de 16 %</a> de sa valeur, plus de <a href="https://www.google.com/finance/quote/DAX:INDEXDB?window=YTD">20 % pour le Dax</a> en Allemagne, le <a href="https://www.google.com/finance/quote/.DJI:INDEXDJX?window=YTD">Dow Jones 15 %</a> et le <a href="https://www.google.com/finance/quote/.IXIC:INDEXNASDAQ?window=YTD">Nasdaq plus de 27 %</a> aux États-Unis. Des baisses qui n’avaient pas été observées depuis la période de stagflation des années 1970.</p>
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<p>Dans le même temps, les <a href="https://fr.investing.com/rates-bonds/world-government-bonds?maturity_from=90&maturity_to=310">obligations d’État</a> ont également dans l’ensemble plongé, perdant par exemple presque 10 % de leur valeur aux États-Unis au premier semestre 2022, soit la <a href="https://www.spglobal.com/spdji/en/indices/fixed-income/sp-us-treasury-bond-current-10-year-index/">pire performance depuis 1788</a>, juste avant que George Washington ne devienne le premier président !</p>
<p>Il est <a href="https://media.economist.com/sites/default/files/pdfs/Guide_to_Investment_Strategy_3e.pdf">rare</a> que la performance des actions et des obligations converge conjointement à la baisse un même trimestre ou un semestre. Ce premier semestre 2022 fait donc exception. Cela a rendu très complexe allocation d’actifs puisque la plupart des classes d’actifs ont grandement souffert, y compris les nouveaux actifs digitaux comme le <a href="https://www.google.com/finance/quote/BTC-EUR?sa=X&ved=2ahUKEwiQ1MrCnYL6AhUO0oUKHQkfBRkQ-fUHegQIAhAe&window=6M">bitcoin qui a perdu près de la moitié de sa valeur</a> ses six derniers mois.</p>
<p>Plus qu’aux crises de ces derniers mois, les marchés semblent avoir réagi aux hausses de taux décidées pas les banques centrales. Début 2022, le forte reprise économique post-Covid et la persistance de l’inflation sous l’effet des crises énergétiques et alimentaires liées au conflit en Ukraine les ont placées dos du mur, dans l’impossibilité de poursuivre leur politique monétaire accommodante avec des taux directeurs au plancher.</p>
<p>Au 25 juillet, la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/reserve-federale-etats-unis-120711">Réserve fédérale américaine</a> (Fed) avait ainsi déjà révisé trois fois ses taux à la hausse depuis janvier, passant de 0,25 % à 1,75 %, tandis que la Bank of England (BoE) a enchaîné cinq hausses depuis mi-décembre, pour passer de 0 % à 1,25 %. Quant à la BCE, elle avait déjà frappé plus fort que prévu lors de son premier relèvement de juillet dernier avant de confirmer le cap lors de sa deuxième annonce du 8 septembre.</p>
<h2>L’embellie microéconomique de juillet</h2>
<p>Au début de l’été, on pouvait donc s’attendre à une poursuite des baisses boursières sous le double effet de l’inflation généralisée dans la plupart des pays et son corollaire, les hausses induites des taux d’intérêt directeurs par les banques centrales. Or, aux États-Unis comme en Europe, les <a href="https://www.lecho.be/les-marches/actu/general/l-excellente-moisson-de-resultats-semestriels-masque-les-nuages-qui-s-accumulent-a-l-horizon/10409833.html">résultats d’entreprises du deuxième trimestre 2022 ont été historiquement hauts</a>.</p>
<p>Cette bonne nouvelle a constitué un fort moteur des cours au mois de juillet, dont la dynamique a été portée par des facteurs microéconomiques. Au niveau macroéconomique, les taux d’intérêt notamment immobiliers en Europe ont en outre baissé en juillet, en dépit de l’inflation, et la BCE n’a appliqué sa hausse des taux que plusieurs semaines après l’avoir annoncé, début juin. Cette conjonction étonnante d’évènements a pu également porter les cours boursiers sur le mois de juillet.</p>
<p>Au mois d’août, les index sont repartis à la baisse, sans toutefois invalider une dynamique assez positive sur l’ensemble de l’été. Les scénarios les plus noirs, avec les craintes sur l’énergie notamment cet hiver, semblent en effet désormais intégrés dans les prix de marché. Toute amélioration éventuelle de la situation énergétique ou inflationniste pourrait donc être accueillie avec des hausses des cours. En revanche, la politique monétaire et les hausses des taux encore à venir resteront un fort vent contraire.</p>
<p>En somme, la fin d’année a peu de chance d’être excellente et ne pourra donc sans doute pas effacer les pertes du premier semestre.</p>
<h2>Alertes à la récession</h2>
<p>Certes, de nombreux signaux suggèrent que le <a href="http://www.rexecode.fr/public/Analyses-et-previsions/Synthese-conjoncturelle/Un-pic-d-acceleration-de-prix-est-franchi-aux-%C3%89tats-Unis-et-peut-etre-en-zone-euro">pic d’inflation est passé aux États-Unis</a> (baisse significative des coûts logistiques, du fret, etc.). Par ailleurs, les canaux de transmission de la politique monétaire traditionnelle mettent empiriquement entre six à neuf mois à se transmettre dans l’économie réelle. Les effets des hausses des taux directeurs du début d’année en Amérique du Nord ou encore au Royaume-Uni en matière de ralentissement de la hausse des prix devraient donc se concrétiser dans les prochains mois.</p>
<p>Mais les banques centrales affichent aujourd’hui leur volonté de poursuivre leurs politiques de relèvement des taux, comme l’a encore prouvé l’annonce de la BCE du 8 septembre. Ainsi, le président de la Fed, Jerome Powell, rappelait fin août, lors du meeting annuel des banquiers centraux à Jackson Hole aux États-Unis, que l’inflation, historiquement, ne s’est jamais tarie simplement à la suite de hausses ponctuelles des taux mais plutôt après une <a href="https://www.usinenouvelle.com/article/wall-street-chute-apres-le-discours-de-powell-a-jackson-hole.N2036982">série de hausses successives</a> et durables. Son discours avait d’ailleurs aussitôt entraîné les <a href="https://www.agefi.fr/financements-marches/actualites/quotidien/20220829/discours-restrictif-jerome-powell-continue-peser-348621">marchés financiers à la baisse</a>.</p>
<p>En effet, la politique de relèvement des taux doit être mise en balance avec les <a href="https://theconversation.com/laisser-filer-linflation-ou-freiner-la-reprise-le-dilemme-des-banquiers-centraux-164813">risques de saper la croissance économique</a>. Les <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/08/30/etats-unis-europe-chine-alerte-a-la-recession-planetaire_6139462_3234.html">alertes à la récession</a> se multiplient aujourd’hui dans les grandes zones de l’économie mondiale avec notamment une consommation qui marque le pas après des mois de forte demande post-Covid. Une situation qui pèsera forcément sur les entreprises et les marchés.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/187410/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Amaury Goguel ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La fin des politiques monétaires accommodantes, confirmée par le nouveau relèvement de taux de la BCE annoncé le 8 septembre, devrait continuer à peser sur les cours dans les prochains mois.Amaury Goguel, Economist & Academic Dean of the MSc Financial Markets & Investments. Co-author of the book "Managing Country Risk in an Age of Globalization", SKEMA Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1885552022-08-19T13:40:08Z2022-08-19T13:40:08ZSix façons de se préparer à la prochaine récession<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/479706/original/file-20220817-15-6sjwfd.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C1000%2C664&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les économistes canadiens prévoient une récession dans le courant de l’année 2023.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Malgré les apparences, <a href="https://www.nationalobserver.com/2022/07/12/news/most-canadians-think-country-recession-prices-rising">et c’est ce que de nombreuses personnes croient</a>, nous ne sommes pas encore en récession. Une récession est définie comme deux trimestres successifs de croissance négative du PIB, mais il s’agit essentiellement <a href="https://www.dallasfed.org/research/economics/2022/0802/">d’une période où la croissance économique chute de manière considérable avec une augmentation du taux de chômage</a>.</p>
<p>En raison de l’absence d’une définition précise, on ne s’accorde pas toujours à dire qu’une économie est en récession. Au Canada, le gouvernement n’a pas fait de déclaration récente, mais le <a href="https://www.cdhowe.org/">C.D. Howe Institute</a>, un organisme canadien de recherche politique à but non lucratif, suit les récessions de façon indépendante.</p>
<p>Selon l’Institut, la dernière récession <a href="https://www.cdhowe.org/council-reports/cd-howe-institute-business-cycle-council-declares-end-Covid-19-recession">a commencé en mars 2020 au plus fort de la première vague de Covid-19</a>. L’Institut a déclaré la fin de la récession en août 2021. La <a href="https://www.cbc.ca/news/canada/canadians-shopping-rising-food-costs-1.6483250">crise actuelle liée au coût de la vie</a> pousse de nombreux Canadiens à se demander quand aura lieu la prochaine.</p>
<h2>Une inflation galopante</h2>
<p>Les économistes sont unanimes à penser qu’une <a href="https://www.theglobeandmail.com/business/article-canada-to-enter-moderate-and-short-lived-recession-in-2023-warns-rbc/">récession se produira probablement en 2023</a>. Cette prévision s’explique en grande partie par la hausse vigoureuse des taux d’intérêt par les <a href="https://www.nytimes.com/2022/07/17/business/economy/global-central-banks-inflation.html">banques centrales du monde entier pour lutter contre l’inflation</a>.</p>
<p>Les taux d’inflation — le taux d’augmentation des prix que nous payons pour les biens et services — ont <a href="https://www.cbc.ca/news/business/canada-inflation-rate-1.6526060">atteint des niveaux jamais vus depuis quatre décennies</a>. Les taux d’inflation élevés affectent le pouvoir d’achat et les gens ont de plus en plus de mal à se procurer les produits de première nécessité, comme les denrées alimentaires. L’inflation <a href="https://www.nber.org/digest/dec97/does-inflation-harm-economic-growth">a également des répercussions négatives sur l’efficacité économique, entraînant une diminution globale de la croissance</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un gros plan d’une pompe à essence avec un prix de 208,9 visible en arrière-plan" src="https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=391&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/477733/original/file-20220804-19-vxx1cq.JPG?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=492&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">L’inflation a fait grimper le coût de la vie pour de nombreux Canadiens, se répercutant sur le prix de l’essence, de la nourriture et du loyer.</span>
<span class="attribution"><span class="source">La Presse Canadienne/Sean Kilpatrick</span></span>
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</figure>
<p>Lorsque les taux d’intérêt augmentent, il devient plus difficile de <a href="https://www.cnbc.com/2022/07/27/how-the-federal-reserve-fights-inflation-through-interest-rate-hikes.html">financer l’achat de biens plus importants, comme les voitures, les maisons et les vacances</a>. La hausse des taux d’intérêt rend plus coûteux tout achat nécessitant un financement.</p>
<p>Les dettes existantes assorties de taux d’intérêt variables entraînent également une majoration du coût de portage de ces dettes. Par conséquent, la demande de nombreux biens et services diminue, tout comme l’inflation.</p>
<h3>Que se passe-t-il lors d’une récession ?</h3>
<p>Pendant une récession, les entreprises sont obligées de réduire l’embauche, de licencier des travailleurs et de diminuer les heures de travail. Si une récession survient, des dizaines de milliers de Canadiens se retrouveront au chômage ou verront leurs heures de travail réduites.</p>
<p>Un grand nombre de ces pertes d’emploi seront concentrées dans le secteur des services, en particulier dans l’économie de petits boulots où les <a href="https://theconversation.com/workers-in-the-gig-economy-feel-lonely-and-powerless-127188">revenus ont tendance à être plus faibles et l’emploi est précaire</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un homme portant un masque transporte une boîte d’effets personnels devant une rangée de cubicules" src="https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/477734/original/file-20220804-22-11crg9.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Une récession entraînera des pertes d’emploi pour de nombreux Canadiens.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
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</figure>
<p>Une perte de revenu signifie que les gens doivent puiser dans leurs économies — en supposant qu’ils en aient — pour payer les articles essentiels comme la nourriture, le logement et le transport. Les pertes d’emploi potentielles ou la réduction des heures de travail constituent donc la plus grande conséquence d’une récession ; la plupart des gens doivent s’y préparer.</p>
<h2>Comment se préparer</h2>
<p>Avec une récession qui semble imminente, de nombreux Canadiens s’inquiètent à juste titre de l’état de leurs finances. Voici six conseils à suivre pour y faire face :</p>
<ol>
<li><p><strong>Réduisez immédiatement vos dépenses, en particulier celles consacrées aux articles non essentiels.</strong> Profitez de l’occasion pour revoir votre budget et reconsidérer les habitudes d’achat quotidiens qui se multiplient. Plutôt que de dîner au restaurant chaque jour, pensez à préparer un repas. Réexaminez ces abonnements qui sont prélevés automatiquement de votre compte chaque mois. C’est le moment idéal pour analyser et justifier vos habitudes d’achat, et pour remanier votre budget.</p></li>
<li><p><strong>Remboursez votre dette de carte de crédit maintenant.</strong> Il est important de rembourser les dettes à intérêt élevé autant que possible, le plus tôt possible. Au cours des prochains mois, les taux d’intérêt continueront à augmenter, ce qui rendra la gestion des dettes plus ardue. Des soldes moins élevés contribuent a réduire le montant des versements d’intérêts pendant toute période de perte de revenu ou d’emploi, ce qui permet de traverser plus facilement les moments difficiles pour le portefeuille.</p></li>
<li><p><strong>Prêtez une attention particulière au paiement des factures et évitez les frais de retard.</strong> Ces frais s’accumulent également avec le temps. Établissez un plan pour vous assurer que les paiements de factures sont effectués à la date d’échéance ou avant. Payer ses factures en retard entraîne des sanctions pécuniaires, ce que vous voulez toujours éviter, mais surtout en période de récession.</p></li>
<li><p><strong>Soyez prêt à perdre votre emploi</strong>. Assurez-vous que vos CV et lettres de présentation sont à jour et que vous êtes prêt à chercher un emploi. En cas de licenciement, soyez préparés à trouver un autre poste rapidement.</p></li>
<li><p><strong>Devenez plus facilement embauchable</strong>. Comme les récessions frappent généralement plus durement les personnes ayant moins d’expérience et moins de qualifications, vous devriez mettre à jour vos compétences professionnelles. Explorez les <a href="https://learning.linkedin.com/certification-and-continuing-education-programs">options virtuelles qui offrent d’excellentes possibilités de perfectionnement</a>, ou les formations en présentiel dans les collèges et universités du pays, pour parfaire votre éducation et accroître vos compétences.</p></li>
<li><p><strong>Si possible, essayez d’obtenir un emploi à l’abri de la récession.</strong> Les emplois les mieux adaptés à un ralentissement économique dépendent du niveau de compétences, mais on les trouve généralement dans le secteur public, les soins de santé et l’éducation. Bien entendu, ces emplois ne conviennent pas à tout le monde. Chacun doit envisager les options qui correspondent à ses habiletés et à ses préférences. Cette stratégie est beaucoup plus efficace lorsque vos compétences et votre CV sont mis à jour et que vous êtes bien préparé.</p></li>
</ol>
<figure class="align-center ">
<img alt="Un homme est interviewé en virtuel sur un ordinateur" src="https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/477735/original/file-20220804-23-vq7n1r.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Soyez prêt à commencer à chercher un nouvel emploi dans l’éventualité d’un licenciement.</span>
<span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Prévoir le pire, espérer le meilleur</h2>
<p>Certaines de ces stratégies sont plus faciles à mettre en œuvre que d’autres. Mais la plus grande leçon de toutes est peut-être de toujours se préparer au pire. Les récessions, ou ralentissements économiques, font partie de ce que l’on appelle le <a href="https://www.businessinsider.com/personal-finance/what-is-business-cycle">cycle économique</a>, qui décrit les hauts et les bas de l’économie. Elles <a href="https://www.cdhowe.org/sites/default/files/attachments/research_papers/mixed/Commentary_366_0.pdf">se produisent généralement une fois par décennie</a> et parfois plus souvent.</p>
<p>Les gens devraient toujours être bien préparés à de tels ralentissements. Il est beaucoup plus facile d’appliquer les stratégies ci-dessus bien avant une récession, au lieu d’attendre le dernier moment. Plus on s’approche d’une récession et plus il est difficile de bien se préparer en appliquant ces stratégies.</p>
<p>Même en prévoyant le coup, les récessions peuvent être très pénibles à vivre. Mais la bonne nouvelle est qu’elles ne durent pas éternellement. La seule chose que nous pouvons faire est de prévoir le pire et d’espérer le meilleur.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/188555/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Avec une récession qui semble imminente, de nombreux Canadiens s’inquiètent à juste titre de l’état de leurs finances. Voici quelques moyens de vous y préparer.Walid Hejazi, Professor of International Business, Rotman School of Management, University of TorontoGeorge Georgopoulos, Associate Professor, York University, CanadaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1869732022-07-27T19:25:44Z2022-07-27T19:25:44ZMalgré la hausse des taux, les banques peuvent réaliser d’importants gains grâce à la BCE<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/473939/original/file-20220713-9316-wn9kbs.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=10%2C1%2C1187%2C795&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">La Banque centrale européenne a octroyé 2339&nbsp;milliards d’euros de prêts TLTRO 3 entre septembre 2019 et décembre 2021.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/europeancentralbank/15767318822">European Central Bank/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>De septembre 2019 à décembre 2021, la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/banque-centrale-europeenne-bce-24704">Banque centrale européenne</a> (BCE), par le biais des banques centrales nationales, a octroyé aux <a href="https://theconversation.com/fr/topics/banque-22013">banques</a> 10 séries de prêts dits TLTRO 3 (<em>Targeted Longer-Term Refinancing Operations</em>, ou opérations ciblées de refinancement de long terme) pour un montant total de 2339 milliards d’euros.</p>
<p>Ce sont des séries de prêts à 3 ans dont la maturité s’échelonne de septembre 2022 à décembre 2024. Si elles le souhaitent, les banques ont la possibilité, tous les 3 mois, de procéder à des remboursements précoces, mais elles ont très peu utilisé cette possibilité jusqu’à présent. L’encours total est encore de 2263 milliards d’euros.</p>
<h2>Taux négatifs</h2>
<p>Le taux à payer par les banques sur ces emprunts à l’Eurosystème, qui regroupe la BCE et les banques centrales nationales des États membres de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/zone-euro-54680">zone euro</a>, est fonction de la quantité de prêts éligibles qu’elles octroient au secteur privé. Jusqu’au 23 juin 2022, le meilleur taux possible sur les TLTRO 3, pour les banques qui maintiennent leur quantité de prêts au-dessus d’une certaine limite, a été de -1 %.</p>
<p>Ce meilleur taux négatif possible représentait ainsi une énorme subvention aux banques, payées pour emprunter à l’Eurosystème. Tout récemment, il impliquait une recette maximum mensuelle de 1832 millions d’euros pour les banques de la zone euro, sous l’hypothèse que toutes peuvent bénéficier du meilleur taux. Cette recette excédait le coût mensuel estimé à 1499 millions d’euros, pour les banques de la zone euro, du taux négatif de -0,5 % sur la facilité de dépôt et leurs réserves excédentaires en compte courant, après déduction par le <a href="https://www.banque-france.fr/sites/default/files/medias/documents/communique_presse_bce_2019_09_13_systeme_deux_paliers_remuneration_excedents.pdf">système de « tiering »</a> de l’excédent de liquidité non soumis au taux négatif. Il y avait ainsi un gain net pour les banques.</p>
<p>À partir du 24 juin 2022, le meilleur taux possible sur les prêts TLTRO 3 est la moyenne du taux de la facilité de dépôt, c’est-à-dire le taux d’intérêt fixé par la banque centrale auquel elle rémunère les dépôts des banques et établissements financiers placés chez elle, depuis leur émission jusqu’à leur maturité. Ce taux est différent pour chacune des 10 séries puisque leurs dates d’émission et de maturité diffèrent.</p>
<h2>Gain net certain</h2>
<p>Ce meilleur taux est donc encore inconnu puisque, s’il est partiellement fonction du taux passé déjà connu de la facilité de dépôt, il va dépendre aussi de son évolution future. Pour chaque série de prêts TLTRO 3, il convient donc d’estimer le meilleur taux possible sur base d’hypothèses sur la trajectoire que la BCE va décider pour le taux de la facilité de dépôt.</p>
<p><a href="https://www.researchgate.net/publication/361952140_How_the_banks_of_the_euro_area_may_still_earn_big_profits_from_TLTRO_loans">Nos simulations</a> considèrent d’une part un scénario de resserrement léger de la politique monétaire, et d’autre part un scénario de resserrement fort.</p>
<p>Le scénario de resserrement léger suppose des décisions d’augmentations successives du taux de la facilité de dépôt à partir de la réunion de juillet 2022, pour arriver à 0,75 % en décembre 2022, et rester là jusqu’en décembre 2024. Le 21 juillet, un premier palier a été franchi avec une hausse, supérieure aux attentes, <a href="https://www.bfmtv.com/economie/economie-social/la-bce-releve-ses-taux-de-50-points-de-base_VN-202207210533.html">de 0,5 point</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/fed-et-bce-deux-rythmes-mais-une-meme-strategie-contre-linflation-185059">Fed et BCE : deux rythmes mais une même stratégie contre l’inflation</a>
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<hr>
<p>Le scénario de resserrement fort suppose qu’ensuite la BCE déciderait encore d’augmentations supplémentaires successives du taux de la facilité de dépôt lors des réunions suivantes, pour arriver à 2 % en juin 2023, et rester là jusqu’en décembre 2024.</p>
<p>Nos simulations montrent que, quel que soit le scénario, pour chaque série de prêts TLTRO, le meilleur taux possible à payer, entre juillet 2022 et la date de maturité, reste inférieur à la moyenne du taux de la facilité de dépôt sur la même période. Les banques de la zone euro ont donc intérêt à garder leurs emprunts TLTRO 3 jusqu’à leur maturité, et les investir simplement sur la facilité de dépôt de la BCE, pour bénéficier d’un gain net certain.</p>
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<h2>Jusqu’à 21 milliards d’euros en plus</h2>
<p>Les simulations permettent de calculer les résultats d’une telle stratégie.</p>
<p>Sous les hypothèses du scénario de resserrement léger, la différence entre le meilleur taux possible sur les TLTRO 3 et la moyenne du taux de la facilité de dépôt, entre juillet 2022 et la maturité, excède 0,6 % pour certaines séries. Au total, pour toutes les séries, de juillet 2022 à décembre 2024, les banques de la zone euro pourraient dégager un gain net maximum de 14,661 milliards d’euros.</p>
<p>Sous les hypothèses du scénario de resserrement fort, la différence entre le meilleur taux possible sur les TLTRO 3 et la moyenne du taux de la facilité de dépôt, entre juillet 2022 et la maturité, excède 0,8 % pour certaines séries. Au total, pour toutes les séries, de juillet 2022 à décembre 2024, les banques pourraient dégager un gain net maximum de 21,064 milliards d’euros.</p>
<hr>
<p>Ces résultats sont détaillés sur les tableaux qui suivent.</p>
<hr>
<p><strong>Scénario d’un resserrement léger : Gain net maximum en millions d’euros pour les banques de la zone euro si elles conservent leurs emprunts TLTRO jusqu’à leur maturité et les investissent sur la facilité de dépôt</strong></p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/473935/original/file-20220713-9460-qngxgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/473935/original/file-20220713-9460-qngxgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/473935/original/file-20220713-9460-qngxgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=301&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/473935/original/file-20220713-9460-qngxgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=301&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/473935/original/file-20220713-9460-qngxgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=301&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/473935/original/file-20220713-9460-qngxgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=378&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/473935/original/file-20220713-9460-qngxgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=378&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/473935/original/file-20220713-9460-qngxgg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=378&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p><strong>Scénario d’un resserrement fort : Gain net maximum en millions d’euros pour les banques de la zone euro si elles conservent leurs emprunts TLTRO jusqu’à leur maturité et les investissent sur la facilité de dépôt</strong></p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/473936/original/file-20220713-9528-8w2uvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/473936/original/file-20220713-9528-8w2uvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/473936/original/file-20220713-9528-8w2uvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=301&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/473936/original/file-20220713-9528-8w2uvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=301&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/473936/original/file-20220713-9528-8w2uvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=301&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/473936/original/file-20220713-9528-8w2uvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=378&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/473936/original/file-20220713-9528-8w2uvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=378&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/473936/original/file-20220713-9528-8w2uvc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=378&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p class="fine-print"><em><span>Eric Dor ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les taux négatifs auxquels la banque centrale a accordé certains prêts jusqu’en juin 2022 constituent une forme de subventions aux banques pour qu’elles empruntent auprès de l’Eurosystème.Eric Dor, Director of Economic Studies, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1858722022-06-27T16:03:00Z2022-06-27T16:03:00ZLa hausse des taux d’intérêt va-t-elle déboucher sur une nouvelle crise de la zone euro ?<p>Dans le sillage de la Réserve fédérale américaine (Fed), la Banque centrale européenne (BCE) a pris la décision de <a href="https://theconversation.com/fed-et-bce-deux-rythmes-mais-une-meme-strategie-contre-linflation-185059">relever ses taux directeurs</a> de 25 points de base à compter du mois de juillet 2022, une première depuis la crise des dettes souveraines de la zone euro il y a onze ans. Conséquence, les taux d’intérêt des obligations d’État s’envolent et les écarts de taux entre les pays membres de la zone euro se creusent, ravivant les inquiétudes quant à une nouvelle crise de la dette et une entrée en récession.</p>
<p>La reprise forte et rapide de l’activité qui a suivi la mise à l’arrêt de l’économie mondiale lors des périodes de confinement durant la pandémie de Covid-19 s’est accompagnée d’une très vive hausse de la demande, nettement supérieure à l’offre dans plusieurs secteurs, entraînant d’importantes pénuries. Ce rebond économique s’est traduit, logiquement, par une forte augmentation des prix. Si un tel schéma inflationniste n’est pas surprenant dans un contexte de reprise de la consommation et a tendance à s’estomper rapidement, la situation est tout autre aujourd’hui.</p>
<p>À ce regain de l’activité économique s’ajoute en effet un choc d’ampleur majeure sur les prix des matières premières lié à la guerre en Ukraine. La Russie et l’Ukraine étant d’importants producteurs et exportateurs de matières premières, les prix de nombreux produits s’envolent, qu’il s’agisse des denrées alimentaires (blé, maïs, orge…), des métaux (nickel, palladium, aluminium, cuivre) ou encore de <a href="http://www.cepii.fr/PDF_PUB/pb/2022/pb2022-37.pdf">l’énergie (pétrole, gaz)</a>. La forte <a href="https://theconversation.com/fr/topics/inflation-28219">inflation</a> que subit actuellement la zone euro s’inscrit ainsi dans la durée – du fait du conflit russo-ukrainien – et provient de deux sources : la reprise économique plus forte que prévue, d’une part, et le choc sur les prix des matières premières, d’autre part.</p>
<h2>Vers une fragmentation de la zone euro ?</h2>
<p>Face à cette situation, les banques centrales ont décidé de relever leurs taux afin d’enrayer l’inflation galopante, pour laquelle les <a href="https://www.ecb.europa.eu/pub/projections/html/ecb.projections202203_ecbstaff%7E44f998dfd7.fr.html">projections de la BCE</a> pour l’année 2022 s’échelonnent entre 5,1 % et 7,1 % selon les scénarios, bien au-delà de la cible des 2 %. La hausse des taux d’intérêt vise à mettre un terme à cette spirale inflationniste en ralentissant la demande et la consommation. En effet, plus les taux accordés aux banques commerciales par la BCE sont élevés, plus ceux octroyés par les banques commerciales aux ménages et aux entreprises le sont aussi. L’accès au crédit devient ainsi plus onéreux pour les ménages, freinant en conséquence leur consommation, mais aussi pour les entreprises et les États pour qui il devient plus coûteux de s’endetter. Le ralentissement désiré de la demande conduit dès lors à la baisse des prix recherchée.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/restreindre-le-credit-a-la-consommation-larme-anti-inflation-de-lapres-guerre-166762">Restreindre le crédit à la consommation, l’arme anti-inflation de l’après-guerre</a>
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<p>Outre le relèvement des taux, dans sa volonté de lutter contre l’inflation, la BCE a annoncé mettre prochainement fin à son programme d’achats d’actifs classiques (APP, <a href="https://www.ecb.europa.eu/mopo/implement/app/html/index.en.html"><em>Asset Purchase Programme</em></a>) destiné à stimuler l’économie. Rappelons que ce programme de politique monétaire non conventionnelle lancé en 2014, dont l’objectif initial était de stimuler l’inflation pour qu’elle atteigne la cible de 2 %, consiste en l’achat d’obligations d’État, c’est-à-dire de titres de dette publique, mais aussi d’obligations issues du secteur privé. Un tel programme ayant pour effet d’accroître l’inflation et de réduire les taux d’intérêt, son arrêt est ainsi programmé pour juillet 2022.</p>
<p>Les effets de ce resserrement de la politique monétaire – hausse des taux et fin du programme APP – ne sont pas homogènes pour tous les pays de la zone euro. Si les taux à 10 ans allemand et français ont respectivement augmenté de 2,3 et 2,7 points entre le 1<sup>er</sup> janvier 2021 et le 14 juin 2022, les taux italien et grec ont quant à eux crû de 3,7 et 4 points sur la même période, culminant à 4,22 % et 4,66 % le 14 juin 2022 (Graphique 1).</p>
<p><iframe id="SUTMC" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/SUTMC/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Les écarts de taux (<em>spreads</em>) des pays par rapport à l’Allemagne s’accentuent – 66 points de base pour la France, 248 pour l’Italie et 292 pour la Grèce en date du 14 juin 2022 –, suscitant de vives inquiétudes quant à une fragmentation potentielle de la zone euro (Graphique 2).</p>
<p>Expliquons le mécanisme. Pour le calcul des <em>spreads</em>, le taux d’intérêt à 10 ans allemand est pris comme référence dans la mesure où l’Allemagne – dont le risque de défaut est jugé le plus faible du fait de sa rigueur budgétaire – est le pays qui emprunte au taux le plus bas au sein de la zone euro. Dans un contexte économique fragile comme celui que nous connaissons aujourd’hui, les marchés s’inquiètent de la « santé financière » de certains États fortement endettés et leur imposent des hausses de taux supérieures à celles d’autres pays : les investisseurs qui achètent des obligations souveraines de pays très endettés – donc risqués – réclament une prime de risque très élevée, ce qui accroît les taux desdits pays.</p>
<p>En conséquence, les <em>spreads</em> se creusent, signe d’un accroissement des déséquilibres économiques entre les pays de l’Union faisant resurgir le spectre de la crise des dettes souveraines de 2011. En effet, les coûts d’emprunt des pays du Sud, déjà très fortement endettés, étant plus élevés que ceux du Nord de la zone, la soutenabilité budgétaire des premiers est mise en question : le relèvement des taux alourdit la dette publique et le risque de défaut souverain émerge.</p>
<p>Il convient toutefois de souligner que <a href="https://theconversation.com/leconomie-italienne-est-aussi-malade-de-ses-elites-185520">l’Italie</a>, qui est un des principaux émetteurs de dette en zone euro, a déjà engagé une grande partie de sa dette avec des taux d’intérêt bas. La hausse des taux se répercutera à plus long terme, puisque l’Italie devra emprunter à des taux élevés, accroissant ainsi le coût de sa dette et renforçant son risque de défaut souverain.</p>
<p><iframe id="bhHU1" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/bhHU1/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Afin d’éviter la fragmentation de la zone euro et voir resurgir les craintes de la crise des dettes souveraines de 2011, la BCE a annoncé qu’elle fera preuve de souplesse dans le <a href="https://www.ecb.europa.eu/press/pr/date/2022/html/ecb.pr220615%7E2aa3900e0a.fr.html">réinvestissement des remboursements</a> des titres arrivant à échéance du programme PEPP (<a href="https://www.ecb.europa.eu/mopo/implement/pepp/html/index.en.html"><em>Pandemic Emergency Purchase Programme</em></a>) lancé en mars 2020 pour lutter contre la crise économique liée à la pandémie de Covid-19. Elle orientera ainsi les réinvestissements vers les pays les plus endettés, comme l’Italie et la Grèce, afin d’atténuer les effets de la hausse des taux sur ceux-ci en limitant leurs taux d’emprunt et « préserver le fonctionnement du mécanisme de transmission de la politique monétaire ».</p>
<p>La BCE a également indiqué réfléchir à la mise en place d’un <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/06/15/la-bce-intervient-d-urgence-pour-calmer-les-tensions-en-zone-euro_6130474_3234.html">nouvel instrument « anti-fragmentation »</a> afin de lutter contre un creusement structurel des <em>spreads</em>, sans toutefois fournir plus d’informations à ce stade.</p>
<h2>Le spectre de la récession</h2>
<p>Si un resserrement de la politique monétaire est certes à même de limiter la spirale inflationniste <em>via</em> un ralentissement de la consommation, il n’a aucune prise sur l’inflation provenant de la flambée des cours des matières premières ; les prix de l’énergie et des denrées alimentaires étant fortement dépendants de facteurs mondiaux et, désormais, du conflit russo-ukrainien.</p>
<p>Par conséquent, si la hausse des taux ne permet pas de juguler suffisamment et rapidement l’inflation, mais qu’elle réduit significativement la consommation, l’investissement des entreprises et, par ricochet, accroît le chômage, le risque est grand pour les économies européennes d’entrer, à nouveau, en récession. Tout dépendra, outre la durée de la guerre en Ukraine, du niveau et de la pérennité d’une inflation au-delà du seuil de 2 %.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/185872/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Valérie Mignon est conseiller scientifique au CEPII, membre du Cercle des économistes, présidente de la section 05 (sciences économiques) du CNU et secrétaire générale de l'AFSE.</span></em></p>Le resserrement de la politique monétaire de la BCE accroît les déséquilibres économiques entre les pays de l’Union européenne, faisant resurgir le spectre de la crise des dettes souveraines de 2011.Valérie Mignon, Professeure en économie, Chercheure à EconomiX-CNRS, Conseiller scientifique au CEPII, Université Paris Nanterre – Université Paris LumièresLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1858372022-06-26T19:49:05Z2022-06-26T19:49:05ZLes recettes classiques contre l’inflation ne peuvent pas fonctionner partout : le cas du Nigeria<p><em>L’inflation est la grande préoccupation économique du moment. Bon nombre de pays en pâtissent, à commencer par la France où l’Insee anticipe un <a href="https://www.lesechos.fr/economie-france/conjoncture/linflation-va-sinstaller-au-dessus-de-65-en-france-1415672#:%7E:text=ses%20nouvelles%20pr%C3%A9visions.-,Attendue%20%C3%A0%205%2C9%20%25%20en%20juin%2C%20l%E2%80%99augmentation,5%2C5%20%25%20en%202022.">taux de presque 7 %</a> sur un an en septembre. Une réponse classique pour tenter de la juguler est une hausse des taux d’intérêt. La <a href="https://www.publicsenat.fr/article/politique/hausse-des-taux-directeurs-de-la-bce-quels-sont-les-effets-attendus-213887">Banque centrale européenne</a> a fini par s’y résoudre en annonçant, par le biais de sa présidente, Christine Lagarde, 0,25 point supplémentaire en juillet et 0,5 de plus en septembre. Au risque, selon certains chercheurs de menacer la croissance post-pandémie. La recette n’est cependant pas adaptée à toutes les économies, ce qu’explique par exemple un article récemment publié sur The Conversation Africa à propos du Nigeria.</em></p>
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<p>La Banque centrale du Nigeria a récemment annoncé une <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2022-05-24/nigeria-central-bank-surprises-with-first-rate-hike-in-six-years">augmentation du taux d’intérêt</a>, de 11,5 % à 13 % qui a pris effet immédiatement. Chaque fois que la Banque centrale modifie ainsi sa politique monétaire, les institutions financières suivent le mouvement. Les banques augmentent les taux de leurs emprunteurs, ce qui les dissuadera pour partie de contracter un prêt. Autrement dit, la demande de monnaie se réduira.</p>
<p>La logique admise est que cela aura pour conséquence une diminution de la consommation et de l’investissement, puisqu’il y aura moins de recours au crédit. L’idée : refroidir ainsi une économie lorsqu’elle est en surchauffe.</p>
<p>Au Nigeria, <a href="https://www.cbn.gov.ng/Out/2022/CCD/Central%20Bank%20of%20Nigeria%20Communique%20No.%20142%20of%20the%20Monetary%20Policy%20Committee%20Meeting%20Held%20on%20Tuesday%2024th%20May%202022.pdf">selon la Banque centrale</a>, le taux d’intérêt a été relevé pour réduire la pression inflationniste, restaurer la confiance des investisseurs et stimuler les transferts de fonds.</p>
<p><iframe id="1Iw71" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/1Iw71/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Le taux d’inflation du Nigeria a beaucoup fluctué au cours des derniers mois. Il avait atteint un niveau record d’environ 18 % il y a un an, avant de retomber à 15 % en novembre 2021. Il était ensuite reparti à la hausse, à 16,8 % en avril. Et c’est pourquoi la Banque centrale a pris une mesure préventive pour le dompter et le faire redescendre.</p>
<p>D’après nous cependant, supposer que la politique monétaire fonctionnera au Nigeria comme elle fonctionne dans d’autres pays induit en erreur.</p>
<h2>Sources d’inquiétudes</h2>
<p>Son effet sur l’inflation reste tout d’abord incertain dans la mesure où elle a pour principale cause des problèmes d’approvisionnement : une insécurité chronique dans les zones de production alimentaire du pays, des infrastructures médiocres et la guerre en Ukraine qui fait grimper le prix de produits de base tel que le blé. Les importations sont par ailleurs en baisse et, par conséquent, la monnaie se déprécie.</p>
<p>Il faut en outre noter que l’économie nigériane repose sur un important secteur informel, source de revenus pour près de <a href="https://punchng.com/80-4-of-nigerian-employment-in-informal-sector-says-wbank/">80 % de la population</a>. Celui-ci n’entretient que de faibles liens avec le secteur financier formel.Contrairement aux ménages des pays développés, de nombreux Nigérians ne modifieront donc pas leurs décisions économiques en raison de la hausse des taux d’intérêt.</p>
<p>Le moment choisi pour cette décision suscite également des inquiétudes. Le Nigeria est confronté à des niveaux élevés de chômage et de pauvreté et une hausse des taux aura des répercussions sur l’économie en général.</p>
<h2>Hors des schémas classiques</h2>
<p>Ces craintes sont-elles fondées ? Intéressons-nous tout d’abord à ceux qui n’ont pas de raison de s’inquiéter. La hausse des taux n’aura pas d’effets significatifs sur la plupart des Nigérians à faible revenu, et ce pour plusieurs raisons.</p>
<p>Premièrement, les crédits intérieurs contractés par le secteur privé au Nigeria restent très faible : <a href="https://data.worldbank.org/indicator/FS.AST.PRVT.GD.ZS?locations=NG">12 % du produit intérieur brut (PIB)</a> en 2020, contre une moyenne de 40 % pour l’Afrique subsaharienne. Ce ratio n’est inférieur à 15 % que dans quelque 20 pays du monde.</p>
<p>Les particuliers et les ménages ne sont pas non plus de grands emprunteurs. En mai 2021, par exemple, le crédit à la consommation ne représentait que 10,2 % du crédit total au secteur privé. Les conditions onéreuses imposées par les banques rendent l’obtention de prêts presque impossible pour de nombreux Nigérians. Nombreux sont alors ceux qui ont <a href="https://punchng.com/loan-sharks-devise-underhand-tactics-inflict-pains-on-cash-strapped-nigerian-borrowers/">recours à des usuriers</a>.</p>
<p>L’impossibilité pour de nombreux Nigérians d’obtenir des prêts auprès des banques signifie qu’ils n’auront pas à s’inquiéter de payer des taux plus élevés sur les hypothèques, les cartes de crédit, les voitures et les prêts étudiants. En outre, la hausse des taux n’aura pas d’impact sur les prix des biens et services généralement consommés par les Nigérians à faible revenu. La hausse des prix de ces denrées alimentaires de base est due à d’autres facteurs déjà mentionnés.</p>
<p>Qu’en est-il de la croissance et de l’emploi ? Classiquement, une hausse du taux d’intérêt augmente les coûts d’emprunt. Ce qui, à son tour, réduit l’investissement, la production et l’emploi.</p>
<p>Le Nigeria ne correspond cependant pas à ce schéma. Une grande partie de sa croissance économique est tirée, non pas par la production de biens, mais par l’exportation de pétrole et de gaz. Bien qu’il ne représente qu’un faible pourcentage du PIB, le pétrole génère une grande partie des devises et des recettes publiques nécessaires pour soutenir les autres secteurs de l’économie.</p>
<p>Étant donné que le crédit au secteur privé au Nigeria est très faible par rapport au PIB, l’impact de la hausse des taux sur la production et l’emploi dans le secteur réel ne sera pas substantiel.</p>
<h2>Si l’économie fonctionnait bien…</h2>
<p>La méfiance doit cependant rester de mise pour d’autres acteurs, à commencer par les Nigérians du secteur public. Les gouvernements des États de ce pays fédéral empruntent régulièrement auprès des banques pour couvrir leurs énormes déficits budgétaires, et la dette publique n’a cessé d’augmenter au fil des ans. Certains ont accumulé <a href="https://nigeriannewsdirect.com/nlc-set-to-fight-govs-over-unpaid-salaries-pensions/">plusieurs mois de salaires, de gratifications et de pensions impayés</a>.</p>
<p>Avec la hausse des taux d’intérêt, une part plus importante des recettes sera allouée au service de la dette. Cela affectera la capacité du gouvernement à faire face à ses dépenses et cela pourrait exacerber les problèmes de retards de paiement voire le non-paiement.</p>
<p>Par ailleurs, si le Nigeria était une économie qui fonctionne bien, l’augmentation du taux attirerait les investisseurs et renforcerait, selon la théorie de la <a href="https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1923">parité du pouvoir d’achat</a> des taux de change, la valeur du naira, sa monnaie. Il y aurait également un mécanisme de « carry trade », des investisseurs qui empruntent là où les taux sont bas, pour investir là où ils sont élevés, comme au Nigeria.</p>
<p>Mais le Nigeria n’est pas une économie qui fonctionne bien. Insécurité, incertitude politique, et faible réglementation financière rendent peu probable que les investisseurs de portefeuille sautent sur l’appât des taux d’intérêt élevés. Au contraire, ils ont alors plutôt tendance à retirer leur argent en raison de ces incertitudes, ce qui explique en partie pourquoi le naira se déprécie inexorablement.</p>
<h2>Monétarisme ou keynésianisme ?</h2>
<p>Seuls les Nigérians des classes moyennes et supérieures profiteront en fait des retombées positives à long terme de la hausse des taux d’intérêt. C’est pourquoi, selon nous, la politique monétaire n’est pas la meilleure stratégie pour favoriser une croissance économique inclusive, génératrice d’emplois et réduisant la pauvreté au Nigeria.</p>
<p>Les défis que représentent les taux élevés de chômage et de pauvreté sont plus inquiétants que l’inflation dans le Nigeria contemporain. De nombreux observateurs estiment que le <a href="https://guardian.ng/opinion/columnists/boko-haram-and-the-harassment-hypothesis/">niveau élevé de violence et d’insécurité</a> dans le pays est un sous-produit de la déresponsabilisation économique, en particulier parmi la population jeune en plein essor au Nigeria.</p>
<p>Ce dont le pays semble avoir besoin maintenant, c’est de keynésianisme, c’est-à-dire, d’un régime de politique économique qui mobilise des fonds pour des investissements massifs créateurs d’emplois dans les infrastructures, l’agriculture, la fabrication à forte intensité de main-d’œuvre et l’agroalimentaire.</p>
<p>La Banque centrale le fait déjà, même de manière limitée. Pour stimuler la production et l’emploi dans le secteur réel, elle utilise des <a href="https://businessday.ng/financial-inclusion/article/cbn-introduces-11-intervention-schemes-for-non-interest-financial-institutions/">« fonds d’intervention »</a> pour soutenir les secteurs stratégiques de l’économie. Quelque <a href="https://www.cbn.gov.ng/rates/mnycredit.asp">385 milliards de nairas</a> (environ 1,2 milliard de dollars au taux de change officiel de 415 nairas pour 1 dollar) étaient réservés à des projets d’intervention en mars 2022.</p>
<p>Ces fonds sont utilisés pour accorder des crédits à des conditions préférentielles aux secteurs qui renforcent les capacités de production de l’économie. L’objectif est d’alléger les contraintes d’approvisionnement et d’atténuer les pressions inflationnistes. Le Nigeria a besoin de plus de cette approche.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/185837/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Stephen Onyeiwu ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Dans le pays le plus peuplé d’Afrique, l’importance du secteur informel et le faible recours des ménages et des entreprises au crédit rendent une hausse du taux d’intérêt plutôt inopportune.Stephen Onyeiwu, Andrew Wells Robertson Professor of Economics, Allegheny CollegeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1855202022-06-22T21:05:12Z2022-06-22T21:05:12ZL’économie italienne est aussi malade de ses élites<p>C’est l’une des conséquences du premier <a href="https://theconversation.com/fed-et-bce-deux-rythmes-mais-une-meme-strategie-contre-linflation-185059">relèvement des taux directeurs</a> de la banque centrale européenne (BCE) depuis une décennie, annoncé le 9 juin dernier : le taux obligataire italien à 10 ans a bondi à plus de 4 %, soit environ un <a href="https://fr.tradingeconomics.com/italy/government-bond-yield">point et demi de plus qu’un mois plus tôt</a>. Cette hausse subite a réactivé la <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/06/16/en-italie-le-grand-retour-de-la-peur-du-spread_6130552_3234.html">peur du « spread »</a>, à savoir l’écart des taux auxquels se financent les différents pays de la zone euro qui avait conduit à la crise de 2011. Si bien que la BCE s’est réunie en urgence, le 15 juin, pour annoncer la mise en place d’un « <a href="https://www.agefi.fr/financements-marches/actualites/quotidien/20220615/bce-annonce-mesures-anti-fragmentation-a-l-issue-345744">nouvel outil anti-fragmentation</a> », sans donner plus de précision. Cette communication a rassuré les marchés en contribuant à resserrer le « spread », mais le taux obligataire italien restait encore à des niveaux élevés une semaine plus tard (3,70 le lundi 20 juin) illustrant les inquiétudes marchés quant à la solvabilité du pays.</p>
<p>À près de 156 % du PIB, l’endettement public italien est près de deux fois plus lourd que celui de la moyenne des pays de la zone euro. La dette pèse sur l’économie pour trois raisons. La première raison est liée à la politique anticyclique : il devient impossible de recourir à des manœuvres de déficit budgétaire pour stimuler la croissance des revenus. Les deux autres raisons sont structurelles. Un excédent primaire élevé oblige (à dépenses égales) à maintenir un prélèvement fiscal élevé et déprime donc le rendement net du capital investi.</p>
<p><iframe id="50LbR" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/50LbR/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>D’autres facteurs entravent la croissance italienne : une économie souterraine qui perdure, de fortes disparités socio-économiques territoriales entre le Nord et le Sud, des mécanismes de décision complexes ou encore <a href="https://www.strategie.gouv.fr/publications/tableau-de-bord-de-lemploi-public-0">l’inefficience de l’État</a>. Comme l’a montré une étude récente comparative de France Stratégie, l’Italie est, avec le Japon, un des pays les moins administrés du monde, autrement dit un des pays où l’emploi public est le plus faible.</p>
<h2>« Absence de méritocratie »</h2>
<p>Plus largement, une <a href="https://voxeu.org/print/62336">étude de 2014</a>, mise à jour en octobre 2017, signée par deux économistes, Bruno Pellegrino, de l’université de Californie à Los Angeles (UCLA) et Luigi Zingales, de l’université de Chicago, a mis en avant « l’absence de méritocratie comme principale cause du problème de productivité en Italie ». Pour les deux auteurs, la gestion des firmes italiennes repose principalement sur un modèle fondé sur la loyauté plutôt que sur le mérite.</p>
<p>Ici, loyauté signifie clientélisme, copinage et prévalence des arrangements de famille ou de clan (avec une réalité variable du Nord au Sud). Ces 20 dernières années, les entreprises italiennes ont massivement sous-investi : le volume de leur investissement n’a progressé que de 40 % contre 90 % en France et en Allemagne et 150 % en Espagne. La crainte de se développer principalement parce que les actionnaires <a href="https://www.oecd.org/economy/growth/Italy-country-note-going-for-growth-2021.pdf">redoutent de perdre le contrôle</a> de l’entreprise reste très présente dans le pays.</p>
<p>Les grands groupes restent eux protégés par un capital verrouillé, familial et des participations croisées, bénéficiant du soutien direct ou indirect de l’État grâce à la dépense publique et à des dévaluations régulières. En outre, les corporations du pays sont nombreuses, puissantes et courtisées : des chauffeurs de taxi aux contrôleurs aériens, de nombreux secteurs de l’administration publique aux camionneurs, des notaires aux producteurs de lait en passant par les agents immobiliers. Ajoutons-y la recherche de rente dans des secteurs protégés : la construction ou les services publics privatisés (électricité, téléphonie, autoroutes) ; l’évitement de la concurrence globale, sur les marchés internationaux ; le refus de se focaliser sur des secteurs émergents nouveaux et risqués (bio-ingénierie, industrie de l’hydrogène), etc.</p>
<p>La crise de l’économie italienne est donc également une crise des élites italiennes. Autrement dit, la grande difficulté pour sortir l’économie italienne de sa situation réside dans le fait que les cadres organisateurs du pays sont conditionnés par la rente et la loyauté, à l’opposé de l’innovation et du mérite qui <a href="https://www.einaudi.it/catalogo-libri/problemi-contemporanei/declino-italia-andrea-capussela-9788806247386/">favorisent la croissance</a>.</p>
<p>L’économie italienne a d’ailleurs davantage souffert en 2020 que la moyenne des pays de la zone euro (-9 % contre -6 %). Les pertes ont été conséquentes, notamment dans le tourisme (-60 % de touristes étrangers en 2020, revenus passés de 44 à 17 milliards), un secteur qui encore en 2019 représentait le 13 % du PIB italien. La récession a toutefois pu être relativement contenue par la résilience de l’industrie.</p>
<p><iframe id="TWq7C" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/TWq7C/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>L’Italie conserve en effet une base industrielle bien plus importante que celle de la France : la deuxième en Europe après celle de l’Allemagne. La péninsule a ainsi conservé des qualifications et des savoir-faire importants. L’Italie reste un pays d’entreprise, qui peut se targuer de compter de nombreuses sociétés de premier plan dans le monde entier. Mais le système ne fonctionne plus et a un besoin urgent de renouvellement.</p>
<h2>Effondrement démographique</h2>
<p>Or, l’Italie reste aujourd’hui prisonnière de son déclin démographique. La natalité du pays s’est effondrée avec une population qui est passée sous la barre des 59 millions d’habitants, avec moins de 400 000 naissances par an. Si rien n’est fait, la péninsule perdra entre 5 et 8 millions d’habitants d’ici 2050.</p>
<p>Sur près de 59 millions d’habitants, <a href="https://www.lesechos.fr/monde/europe/litalie-prisonniere-de-son-declin-demographique-1406889">10,5 millions ont moins de vingt ans</a>, tandis que près de 20 millions ont 60 ans ou plus. Un peu plus de la moitié de la population seulement (52 %) sera bientôt en âge de travailler, tandis que 32 % aura cessé toute activité. L’âge moyen, en augmentation rapide, est de 45,7 ans (+2,3 ans depuis 2010). L’âge médian – le plus élevé de l’Union européenne – est de 43,1 ans, 23 % des Italiens ayant 65 ans et plus. Ce vieillissement pèsera sur la compétitivité et la soutenabilité des finances publiques.</p>
<p><iframe id="ddS9S" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/ddS9S/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>L’un des aspects qui suscitent le plus de préoccupations est le nombre de jeunes de 15 à 29 ans faisant partie de la catégorie NEET (Not in Education, Employment or Training). Ce groupe représente en Italie désormais 2,1 millions de personnes, soit une augmentation de presque 100 000 par rapport à 2019, ce qui équivaut à 23 % de la population de cette tranche d’âge et constitue le pire résultat de tous les pays de l’Union européenne (moyenne UE : 14 %).</p>
<p>Dans ce contexte, l’Italie est la <a href="https://www.governo.it/sites/governo.it/files/PNRR_0.pdf">principale bénéficiaire</a>, avec l’Espagne, du plan de relance européen post-Covid <em>Next Generation</em>. Des 807 milliards d’euros mobilisés par l’Union européenne pour les années 2021-2027, plus de 190 sont destinés à l’Italie, dont 65 sous la forme de subventions (le reste sous forme de prêts), soit l’équivalent de près de 11 % du PIB réparti sur sept ans.</p>
<p>Cependant, ces dernières années, les administrations centrales et régionales n’ont pas utilisé tous les fonds européens à disposition pour l’investissement public en raison de la préparation déficiente des projets et de la lenteur de leur exécution. Des centaines de millions d’euros n’ont ainsi pas été mobilisés, en particulier dans le sud de l’Italie, faute de capacité à concevoir et à gérer des projets.</p>
<p>Aujourd’hui encore, l’Italie éprouve des difficultés mêmes à trouver des projets à financer. Le président du Conseil, Mario Draghi, et ses ministres savent que le pays jouera une bonne partie de sa crédibilité en Europe sur la conduite des travaux et le respect des échéances. En outre, ils sont conscients du fait que – à moyen terme – la mise en œuvre rapide et effective des réformes structurelles sera la seule garantie de crédibilité afin d’attirer des investissements étrangers et éviter une envolée des « spread », qui avaient contribué au <a href="https://www.latribune.fr/entreprises-finance/banques-finance/industrie-financiere/hausse-des-taux-la-bce-tente-d-eviter-le-scenario-de-la-crise-de-l-euro-de-2011-922009.html">déclenchement de la crise de la zone euro</a> en 2011.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/185520/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>André Tiran ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le modèle économique de la péninsule, dont la solvabilité inquiète aujourd’hui les marchés, freine la méritocratie, l’innovation et la croissance.André Tiran, Professeur émérite de sciences économiques, Université Lumière Lyon 2 Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1850592022-06-15T18:26:36Z2022-06-15T18:26:36ZFed et BCE : deux rythmes mais une même stratégie contre l’inflation<p>Le 9 juin dernier, la banque centrale européenne (BCE) a annoncé qu’elle allait relever ses taux directeurs à partir du mois de juillet prochain, pour la <a href="https://www.francetvinfo.fr/economie/inflation/hausse-des-taux-directeurs-de-la-bce-pourquoi-cette-decision-est-historique_5188906.html">première fois depuis plus d’une décennie</a>, une première fois de 0,25 point puis une deuxième, de 0,25 ou 0,5 point, en septembre.</p>
<p>Cette annonce a créé des turbulences sur les marchés financiers en générant une forte hausse des taux d'intérêts sur certaines obligations d'État, notamment italiennes (de 3 % début juin à 4,3 %) ou encore françaises (de 0% à 2,4%), si bien que la BCE s'est réunie en urgence, le 15 juin, pour annoncer qu'elle réfléchissait à une politique d’ « <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/06/15/la-bce-intervient-d-urgence-pour-calmer-les-tensions-en-zone-euro_6130474_3234.html">antifragmentation</a> » qui visera à réduire les écarts de taux entre pays de la zone euro mais dont le contenu n'a pas été détaillé.</p>
<p>l’issue de cinq jours de fortes tensions sur les marchés financiers, avec des taux d’intérêt qui se sont envolés, la Banque centrale européenne (BCE) a décidé d’intervenir, mercredi 15 juin. De façon très inhabituelle, elle a réuni d’urgence son conseil des gouverneurs. Un tel rendez-vous au pied levé n’était pas arrivé depuis la panique financière du début de la pandémie de Covid-19, en mars 2020. Sans donner de détails, la BCE a annoncé la mise à l’étude immédiate d’un nouvel « instrument anti-fragmentation
».</p>
<p>Le relèvement des taux annoncée le 9 juin a été notamment motivée par le rythme de la hausse des prix, hausse alimentée par les difficultés d’approvisionnement et la flambée des prix de l’énergie accélérée par la guerre en Ukraine. Le taux d’inflation atteignait en effet <a href="https://ec.europa.eu/eurostat/documents/2995521/14636256/2-31052022-AP-FR.pdf/fcc777be-df7f-fc77-88c5-7afc124ebc08">8,1 % en mai 2022, contre 7,4 % en avril</a> (en glissement annuel) en zone euro.</p>
<p>« Le conseil des gouverneurs va s’assurer que l’inflation reviendra à 2 % à moyen terme », soit l’objectif fixé par son mandat, avait en outre souligné plusieurs fois la présidente la BCE, Christine Lagarde, en annonçant ce relèvement historique.</p>
<p><iframe id="y8bye" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/y8bye/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Même tendance aux États-Unis, mais avec un peu d’avance : la Réserve fédérale américaine (Fed) a procédé mercredi à la plus forte hausse de depuis 1994 de ses taux directeurs, de trois quarts de points. Il s'agit du troisième relèvement <a href="https://www.france24.com/fr/info-en-continu/20220612-l-inflation-grimpe-aux-etats-unis-les-taux-de-la-fed-aussi">en quelques semaines</a>. Là encore, cette hausse intervient après la publication de chiffres faisant état d’une accélération de la hausse des prix avec une nouvelle taux d’inflation de 8,6 % sur un an (et 1,0 % sur un mois), un record depuis 40 ans.</p>
<p><iframe id="uXAll" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/uXAll/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Après avoir jugé pour longtemps l’inflation comme temporaire, le 16 mars 2022, la Fed avait relevé ses taux <a href="https://www.latribune.fr/economie/international/hausse-des-taux-directeurs-l-exemple-des-decisions-de-la-fed-lors-des-dernieres-crises-916059.html">pour la première fois depuis 2018</a> pour atténuer l’augmentation des prix de l’alimentation et de l’énergie notamment. Jusqu’à présent, ces différentes hausses de taux n’ont pas enrayé la valse des étiquettes.</p>
<h2>Anticipations</h2>
<p>On pourrait supposer qu’à terme, cette politique finisse par rencontrer des résultats. Oui, mais… Il y a aussi un facteur psychologique dans l’inflation, souvent considérée comme une sorte de <a href="https://www.cnbc.com/2022/04/08/heres-how-the-fed-raising-interest-rates-can-help-get-inflation-lower-and-why-it-could-fail.html">prophétie auto-réalisatrice</a>. Lorsque les agents économiques sont enclins à penser que le coût de la vie va augmenter, ils adaptent leurs comportements. Les entreprises augmentent les prix qu’elles pratiquent et les travailleurs exigent de meilleurs salaires. Ce cycle peut faire <a href="https://www.forbes.com/sites/johnbremen/2022/04/07/why-salary-increases-do-not-keep-pace-with-inflation/?sh=9cb35bb75336">augmenter l’inflation</a>. C’est pourquoi les responsables de la Fed ont approuvé leur première hausse de taux tout en <a href="https://edition.cnn.com/2022/05/04/economy/federal-reserve-interest-rate-hike/index.html">affichant leur volonté de réduire la réduire</a> dans le but d’atténuer les attentes futures.</p>
<p>La stratégie de la banque centrale européenne a consisté à combiner deux approches – des mesures tangibles sur les taux directeurs et des indications sur la direction que prennent les choses sur le plus long terme – en espérant ainsi jouer autant sur les leviers habituels que sur les anticipations. Cela devrait permettre de décélérer l’envol marché des actions, réduire les écarts de crédit, augmenter leurs conditions d’attribution, ralentir les prix des logements et in fine atténuer la demande.</p>
<p>Néanmoins, cette réponse doit être conduite avec prudence, si l’on a en tête notamment l’épisode de stagflation, à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Face à l’emballement des prix, Paul Volcker, alors président de la Fed, avait décidé de porter le taux des fonds fédéraux à près de 20 %, <a href="https://www.thebalance.com/who-is-paul-volcker-3306157">plongeant l’économie américaine en récession</a> avant de dompter la bête inflationniste.</p>
<p>Ces dernières semaines, les économistes, à l’image de Laurence Summers dans The Conversation, ont alerté sur le risque que cette politique monétaire casse la reprise post-Covid. Mais, les banques centrales ont-elles encore le choix ?</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/etats-unis-lhistoire-montre-que-la-hausse-des-taux-de-la-fed-ne-suffira-pas-a-eviter-une-recession-182537">États-Unis : l’histoire montre que la hausse des taux de la Fed ne suffira pas à éviter une récession</a>
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<p>Théoriquement, pour contrôler l’inflation, la banque centrale peut agir soit sur son taux directeur, ce qui est aujourd’hui le choix des deux côtés de l’Atlantique, même si le rythme de relèvement diffère, soit sur la quantité de monnaie qu’elle émet. Il est très difficile d’utiliser ces deux instruments en même temps. En effet, toute variation des taux entraîne une variation de la quantité de monnaie, et réciproquement.</p>
<p>Augmenter ses taux directeurs raréfie la liquidité accessible aux classes sociales les plus pauvres pour financier prêts et hypothèques. À terme, ces décisions ont un impact négatif sur l’emploi. Des taux plus élevés découragent en outre l’investissement privé, d’autant plus que le <a href="https://www.banque-france.fr/statistiques/credit/endettement-et-titres/taux-dendettement-des-agents-non-financiers-comparaisons-internationales">niveau d’endettement</a> des ménages, des entreprises et des États – même si celui-ci commence à refluer – est comme aujourd’hui, élevé.</p>
<p>Néanmoins, si la banque centrale n’augmente pas les taux et laisse filer l’inflation, les prix des aliments, de l’énergie et du logement augmentent entraînant une crise du niveau de vie touchant plus durement les plus pauvres. Toute la question est donc de savoir si l’augmentation des prix est rapidement et efficacement compensée par une augmentation de salaire correspondante. C’est tout le dilemme.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/laisser-filer-linflation-ou-freiner-la-reprise-le-dilemme-des-banquiers-centraux-164813">Laisser filer l’inflation ou freiner la reprise, le dilemme des banquiers centraux</a>
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<p>En ce qui concerne l’émission de monnaie, le deuxième levier d’action des banques centrales, il semble difficile d’aller encore plus que pendant la crise : le taux de croissance de la masse monétaire en zone euro (en glissement annuel) avait ainsi <a href="https://publications.banque-france.fr/sites/default/files/medias/documents/bdf239-2_augmentation.pdf">plus que doublé fin 2020 par rapport à 2019 (5 % à 11 %)</a> pour retomber à 7 % fin 2021. Aux États-Unis, ce taux a quintuplé dans le même temps (de 5 % à 25 %), pour retomber légèrement en dessous de 15 % fin 2021. Décroître brutalement la masse monétaire peut avoir des conséquences très fâcheuses sur la stabilité financière.</p>
<h2>Un premier retournement aux États-Unis</h2>
<p>Alors que la Réserve fédérale américaine (Fed) continuait à promouvoir la croissance économique, les États-Unis sont sortis de la pandémie. Après avoir atteint un pic de 14,7 % en avril 2020, le taux de chômage du pays est tombé à 6,0 % à peine douze mois plus tard. En conséquence : la promotion de la croissance économique au cours de cette période a commencé à susciter une instabilité des prix.</p>
<p>L’économie américaine a donc réussi à ne pas sombrer pendant dans la récession, mais la croissance de la masse monétaire a pu contribuer à l’inflation. L’idée serait donc qu’en réduisant l’émission de monnaie, on contribuerait largement à juguler l’expansion des prix.</p>
<p>Or, ce n’est pas si simple. En effet, la raréfaction de la liquidité bancaire stimule à des comportements de resserrement excessifs aux États-Unis. Les facteurs récessifs (<a href="https://economic-research.bnpparibas.com/Views/DisplayPublication.aspx?type=document&IdPdf=46223">climat des affaires en berne</a>, <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/04/29/aux-etats-unis-le-pib-recule-de-1-4-au-premier-trimestre_6124109_3234.html">déstockage des entreprises, désinvestissement</a> public, etc.) commencent à apparaître et le PIB s’est déjà contracté de 1,4 % au premier trimestre 2022.</p>
<p>Pour ce qui est de l’Europe, le continent est aujourd’hui présenté comme l’espace politique le <a href="https://www.coface.com/News-Publications/News/Economic-consequences-of-the-Russia-Ukraine-conflict-Stagflation-ahead">plus à risque pour les conséquences de l’inflation</a>. Pourtant, la réaction de la BCE apparaît plus tardive et timorée sur une hausse des taux (même le directeur de la banque centrale allemande, historiquement attachée à la lutte contre l’inflation pour préserver les retraites des épargnants allemands, semble <a href="https://www.reuters.com/business/finance/ecb-could-raise-rates-2022-new-bundesbank-chief-says-2022-02-09/">plus réservé</a> que son homologue américaine. Par crainte d’une récession ?)</p>
<p>Le contexte inflationniste actuel est différent de « l’instant Voelker » américain des années 1970-1980. L’inflation était notamment tirée par les coûts dans les années 1970, alors qu’elle tirée par la demande actuellement. Les mesures pour lutter contre l’inflation doivent donc s’adapter pour atténuer l’inflation, protéger le pouvoir d’achat, ou encore revoir l’équilibre énergétique sans pourtant causer de nouvelles récessions économiques. D’où le dilemme. Ainsi, une combinaison du resserrement monétaire avec des restrictions budgétaires pourrait être la piste de politique monétaire désormais privilégiée des deux côtés de l’Atlantique, au risque de plonger l’économie en récession. Il faut dire qu’il n’en reste plus beaucoup…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/185059/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>En Europe, les taux directeurs vont être relevés pour la première fois depuis 10 ans. Trois mois plus tôt, la Réserve fédérale enclenchait le même mouvement. Pour quelles conséquences ?Fredj Jawadi, Professeur des Universités en finance et en économétrie, Laboratoire LUMEN, Université de LillePhilippe Rozin, Maître de conférences en finance, laboratoire LUMEN, Université de LilleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1826872022-05-09T18:38:08Z2022-05-09T18:38:08ZGuerre en Ukraine : l’économie russe est à la peine<p>Après des semaines de guerre, comment l’économie russe se porte-t-elle ? En deux mots : moins bien qu’anticipé, et le pire reste à venir.</p>
<p>Avant la guerre, l’économie russe, bien que <a href="https://www.themoscowtimes.com/2021/03/02/has-russia-beaten-boom-and-bust-a73126">stagnante</a>, était considérée comme à l’abri des crises macroéconomiques. Pour utiliser une image couramment employée par les économistes : enlisée dans une tourbière, elle était peu susceptible de chuter d’une falaise.</p>
<p>Depuis 2013, son PIB a progressé d’environ 1 % par an en moyenne. Côté face, la conjonction de la corruption, de la pesanteur de l’État, du lien intime des hommes d’affaires avec la politique et de son isolement vis-à-vis de l’économie mondiale a miné sa croissance potentielle. Mais, côté pile, d’un point de vue macroéconomique, elle a su rester stable en bénéficiant d’une dette souveraine peu importante, d’un fonds souverain conséquent et d’importantes réserves de change. Par ailleurs, son régime fiscal conservateur et sa politique monétaire de lutte contre l’inflation ont également contribué à une croissance modeste et régulière.</p>
<p>Ainsi, à l’approche de la guerre, les économistes avaient coutume de présenter l’économie russe comme une « forteresse » résistant aux sanctions. Seule une éventuelle déconnexion décidée par l’Occident du <a href="https://theconversation.com/us-eu-sanctions-will-pummel-the-russian-economy-two-experts-explain-why-they-are-likely-to-stick-and-sting-177896">système mondial de paiement interbancaire Swift</a> semblait de nature à faire vaciller le système. C’est pourquoi, après la menace proférée par les États-Unis d’exclure la Russie de Swift en 2014, Moscou a développé un système alternatif : le <a href="https://abtc.ng/russias-alternative-to-swift-what-is-spfs/">SPFS (System for Transferring Financial Messages</a>). Bien qu’imparfait et limité à la seule Russie, il est fonctionnel depuis 2017.</p>
<h2>L’Occident s’attaque à la forteresse Russie</h2>
<p>Depuis le début de la guerre, l’Occident a mis en œuvre des sanctions beaucoup plus sévères. La tour centrale de la forteresse a été réduite en ruines. Les sanctions ont également visé la Banque centrale, <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/03/10/guerre-en-ukraine-le-gel-des-reserves-de-la-banque-centrale-russe-un-coup-de-tonnerre-sur-la-planete-monetaire_6116860_3232.html">gelant les réserves de devises étrangères</a>, touchant par là même l’indispensable fonds souverain.</p>
<p>La panique financière qui s’en est suivie a conduit la Banque centrale à contrôler les capitaux, à relever son taux d’intérêt directeur de 9,5 % à 20 % et à fermer les marchés financiers pendant plusieurs semaines. Le gouvernement a également demandé aux principaux exportateurs de combustibles fossiles de rapatrier 80 % de leurs recettes d’exportation et de les convertir en roubles. Malgré ces mesures, l’inflation est montée en flèche, atteignant 2 % par semaine au cours des trois premières semaines, puis 1 % par semaine par la suite (1 % par semaine équivaut à 68 % par an).</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/TIEw4lKcvqY?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">En Russie, une population résignée face à l’inflation galopante (France 24, 28 mars 2022).</span></figcaption>
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<p>Les contrôles à l’exportation et le boycott du marché russe par les entreprises occidentales ont davantage isolé la Russie de l’économie mondiale. Les États-Unis et le Canada ont interdit l’achat de pétrole russe, et de nombreuses entreprises européennes ont suivi leur exemple. Plus important encore, les <a href="https://www.federalregister.gov/documents/2022/03/03/2022-04300/implementation-of-sanctions-against-russia-under-the-export-administration-regulations-ear">États-Unis</a> et l’Europe ont interdit l’exportation de technologies de pointe vers la Russie, et le secteur privé s’est joint à l’embargo. Des entreprises allant d’Ikea et McDonald’s à Airbus et Boeing ont suspendu leur activité en Russie.</p>
<p>Or, la plupart des industries russes dépendent de manière critique de la technologie et des apports occidentaux. Ainsi, le secteur automobile est au point mort, frappé de plein fouet par sa dépendance extrême à l’égard des composants importés jusqu’alors sous-estimée. Au mois de mars, les <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2022-04-06/russian-car-sales-collapse-as-war-leads-to-supply-price-shocks">ventes de voitures</a> ont été trois fois moins élevées qu’à la même période en 2021. Ce phénomène est d’autant plus frappant qu’en période de forte inflation, les ménages ont tendance à orienter leurs achats sur des biens durables.</p>
<h2>Des signes annonciateurs</h2>
<p>Dans ce contexte, aucune surprise à ce que les prévisions du PIB pour 2022 aient été immédiatement revues à la baisse. Avant la guerre, on s’attendait à une croissance de 3 % pour 2022, à la suite de la récession consécutive à la pandémie. Aujourd’hui, la <a href="https://interfax.com/newsroom/top-stories/76360/">Banque centrale</a> prévoit une baisse de 8 %. De son côté, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement anticipe une <a href="https://www.ebrd.com/news/2022/ebrd-sees-war-on-ukraine-causing-major-growth-slowdown.html">baisse de 10 %</a>, prévision sur laquelle s’accordent de nombreuses banques d’investissement. Une telle baisse signifierait que la Russie connaîtrait sa pire récession depuis le début des années 1990. L’Institute for International Finance, basé à Washington, annonce pour sa part une <a href="https://www.reuters.com/markets/rates-bonds/russias-gdp-fall-15-this-year-ukraine-linked-sanctions-iif-2022-03-10/">baisse de 15 %</a>.</p>
<p>Toutefois, le pire est à venir. Même si l’économie russe pourrait construire un nouvel équilibre en un an ou deux, elle ne parviendra pas de sitôt à retrouver les niveaux d’avant-guerre, et continuera de prendre du retard sur les économies développées. Premièrement, les sanctions la maintiendront isolée du marché mondial des capitaux et des technologies avancées. Deuxièmement, elle s’est tournée vers un régime hautement répressif, annihilant les perspectives des entrepreneurs nationaux. Troisièmement, dans les premières semaines de la guerre, des <a href="https://apnews.com/article/russia-ukraine-putin-immigration-kazakhstan-technology-c041eb0b7472668087bb94207de2f71d">centaines de milliers de travailleurs qualifiés</a> – spécialistes des technologies de l’information, chercheurs, ingénieurs, médecins, etc. – ont quitté la Russie, comprenant qu’y rester n’est ni prudent ni favorable à leur carrière. Cette fuite de capital humain va se poursuivre, sapant plus sérieusement et à long terme les perspectives de croissance.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1501936349980475400"}"></div></p>
<p>Enfin, il est probable que l’Occident impose des sanctions supplémentaires. Alors que les <a href="https://www.hrw.org/news/2022/04/03/ukraine-apparent-war-crimes-russia-controlled-areas">preuves des crimes de guerre présumés de la Russie</a> ne cessent de s’accumuler, une pression croissante s’exerce sur les responsables politiques européens afin qu’ils attaquent l’épine dorsale de l’économie russe – les hydrocarbures. Ces dernières années, le <a href="https://www.bbc.com/future/article/20211115-climate-change-can-russia-leave-fossil-fuels-behind">pétrole et le gaz</a> ont représenté à eux seuls 35 à 40 % des recettes du budget fédéral et 60 % des exportations russes. Le Parlement européen a déjà adopté une <a href="https://www.europarl.europa.eu/news/en/press-room/20220401IPR26524/meps-demand-full-embargo-on-russian-imports-of-oil-coal-nuclear-fuel-and-gas">résolution</a> exigeant un embargo sur les importations russes de ces combustibles. Et le plus éminent diplomate de l’Union européenne, Josep Borrell, a <a href="https://www.eeas.europa.eu/eeas/nato-remarks-high-representative-josep-borrell-upon-arrival-ministerial-meeting-0_en">déclaré</a> que « tôt ou tard – au plus tôt j’espère – cela se produira ».</p>
<h2>De sombres perspectives</h2>
<p>Lorsque l’embargo européen sur le pétrole et le gaz sera mis en place, la Russie sera confrontée à des défis budgétaires majeurs, réduisant encore son potentiel de croissance. Par ailleurs, lorsque l’Europe rejoindra les États-Unis et le Canada, l’Occident uni fera pression sur la Chine, éliminant ainsi les espoirs de la Russie en vertu desquels les <a href="https://www.themoscowtimes.com/2022/04/13/russia-china-trade-surges-in-2022-a77333">revenus et la technologie venant de Chine</a> pourraient remplacer ceux de l’Occident.</p>
<p>Même si les contrôles des capitaux et des devises mis en place par la Banque centrale permettent de soutenir le rouble et, à terme, de ralentir l’inflation, les facteurs sous-jacents susmentionnés rendront sans doute improbable le retour de l’économie russe à son niveau d’avant-guerre, sans même parler de la possibilité de rattraper ses voisins.</p>
<p>Nul ne sait à quel horizon ce choc économique débouchera sur un changement politique. Mais il est bien possible qu’au bout du compte, Vladimir Poutine finisse par manquer de ressources pour payer ses soldats, ses propagandistes, ses mercenaires ainsi que ses policiers qui contiennent le mécontentement grandissant de la population.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182687/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Sergei Guriev ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les mesures prises par les pays occidentaux à l’encontre de la Russie affecteront durement son économie, même si les efforts de la Banque centrale lui permettent pour l’instant de résister.Sergei Guriev, Professor of economics, Sciences Po Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1825372022-05-08T16:59:11Z2022-05-08T16:59:11ZÉtats-Unis : l’histoire montre que la hausse des taux de la Fed ne suffira pas à éviter une récession<p>La Réserve fédérale (Fed) devrait bientôt apprendre ce que les gymnastes savent déjà : il est toujours difficile d’atterrir en douceur. L’inflation ayant atteint son <a href="https://theconversation.com/why-the-fed-cant-stop-prices-from-going-up-anytime-soon-but-may-have-more-luck-over-the-long-term-179339">plus haut niveau depuis 40 ans</a> et <a href="https://www.bls.gov/news.release/cpi.nr0.htm">continuant à s’accélérer</a>, la banque centrale américaine a décidé le 4 mai, comme anticipé, de relever d’un demi-point de pourcentage son principal taux directeur, <a href="https://www.latribune.fr/economie/international/la-fed-augmente-ses-taux-de-maniere-agressive-une-premiere-depuis-22-ans-916576.html">soit la plus forte hausse depuis 2000</a>. Le Comité de politique monétaire (FOMC) a par ailleurs annoncé que « d’autres hausses seront justifiées ».</p>
<p>Le président de la Fed, Jerome Powell a estimé qu’il y avait de « bonnes chances » de parvenir à un « atterrissage en douceur » de l’économie américaine. Selon lui, ce relèvement des taux ne devrait pas conduire à une récession ou à une aggravation du chômage si « les conditions économiques et financières évoluent de manière cohérente » avec les attentes de la banque centrale.</p>
<p><iframe id="uXAll" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/uXAll/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Il s’agit là de la deuxième des sept hausses de taux prévues en 2022 – après une augmentation <a href="https://time.com/6157945/fed-interest-rates-inflation/">d’un quart de point en mars</a>. La Fed tente ainsi de refroidir la demande des consommateurs et de ralentir la hausse des prix. La <a href="https://www.federalreserve.gov/monetarypolicy/files/fomcprojtabl20220316.pdf">banque centrale américaine</a> et les <a href="https://www.philadelphiafed.org/surveys-and-data/real-time-data-research/spf-q1-2022">prévisionnistes</a> tablent aujourd’hui sur une inflation qui retombera en dessous de 3 % et sur un taux de chômage qui restera inférieur à 4 % en 2023.</p>
<p>Nos <a href="https://www.hks.harvard.edu/centers/mrcbg/programs/growthpolicy/history-suggests-high-chance-recession-over-next-24-months-alex">recherches récentes</a> suggèrent toutefois que cet « <a href="https://www.investopedia.com/terms/s/softlanding.asp">atterrissage en douceur</a> » reste hautement improbable et qu’il existe bel et bien une forte probabilité de récession dans un avenir proche.</p>
<p>En effet, une inflation élevée et un faible taux de chômage constituent deux puissants prédicteurs de futures récessions. Depuis les années 1950, chaque fois que l’inflation a dépassé 4 % et que le taux de chômage a été inférieur à 5 %, l’économie américaine a connu une récession dans les deux ans.</p>
<p>Or, l’inflation est aujourd’hui de <a href="https://www.bls.gov/news.release/cpi.nr0.htm">8,5 % sur un an</a> et le <a href="https://www.bls.gov/news.release/pdf/empsit.pdf">taux de chômage de 3,6 %</a>, ce qui laisse penser qu’une récession sera très difficile à éviter.</p>
<h2>La Fed en retard</h2>
<p>L’inflation reste fondamentalement causée par un <a href="https://www.investopedia.com/ask/answers/111314/what-causes-inflation-and-does-anyone-gain-it.asp">excès d’argent par rapport aux biens disponibles</a> à l’achat. Or, à court terme, l’offre de biens dans l’économie demeure plus ou moins fixe – la politique budgétaire ou monétaire ne peut rien y changer. Le travail de la Fed consiste donc à gérer la demande totale dans l’économie afin qu’elle s’équilibre avec l’offre disponible.</p>
<p>Lorsque la demande dépasse trop l’offre, l’économie commence à surchauffer et les prix augmentent fortement. Selon notre évaluation, les mesures de cette surchauffe, telles que la <a href="https://www.bea.gov/news/2022/gross-domestic-product-fourth-quarter-and-year-2021-second-estimate">forte croissance de la demande</a>, la <a href="https://fred.stlouisfed.org/series/RETAILIRSA">diminution des stocks</a> et la <a href="https://www.atlantafed.org/chcs/wage-growth-tracker">hausse des salaires</a> – ont commencé à se manifester dans l’économie tout au long de l’année 2021. Mais le nouveau cadre opérationnel que la Fed a adopté en août 2020 l’a empêchée d’agir jusqu’à ce qu’une inflation soutenue soit déjà apparente.</p>
<p>Par conséquent, la banque centrale américaine apparaît aujourd’hui très en retard dans sa réponse à la surchauffe de l’économie.</p>
<p><iframe id="V31Yk" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/V31Yk/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Pour enrayer l’inflation galopante, la Fed va désormais chercher à relever les taux d’intérêt afin de freiner la demande des consommateurs. L’augmentation des coûts d’emprunt qui en résultera peut contribuer à ralentir l’activité économique en décourageant les consommateurs et les entreprises de réaliser de nouveaux investissements. Cependant, cette hausse des coûts d’emprunt risque aussi de provoquer des perturbations économiques majeures et <a href="https://www.nber.org/system/files/working_papers/w29910/w29910.pdf">d’orienter l’économie vers une récession</a>.</p>
<p>Par « atterrissage en douceur », la Fed entend ainsi parvenir à une situation dans laquelle les taux d’intérêt augmentent et la demande diminue suffisamment pour faire baisser l’inflation, mais sans enrayer la croissance économique.</p>
<p>Néanmoins, l’histoire des « atterrissages en douceur » n’incite pas à l’optimisme. En effet, nous avons constaté que, chaque fois que la Fed avait freiné suffisamment fort pour enrayer l’inflation de manière significative, l’économie était entrée en récession. Bien que certains aient affirmé qu’il y a déjà eu <a href="https://www.federalreserve.gov/newsevents/speech/powell20220321a.htm">plusieurs exemples d’atterrissage en douceur</a> au cours des 60 dernières années, notamment en 1965, 1984 et 1994, nous montrons dans notre analyse que ces périodes ne ressemblent guère au moment actuel.</p>
<p>Dans ces trois épisodes, la Fed opérait en effet dans une économie où le chômage était nettement plus élevé, la hausse des prix moindre et la croissance des salaires plus faible. Dans ces exemples historiques, la banque centrale avait également augmenté les taux d’intérêt bien au-delà du taux d’inflation – contrairement à aujourd’hui, où l’inflation est de 8,5 % alors que les taux d’intérêt <a href="https://www.federalreserve.gov/monetarypolicy/files/fomcprojtabl20220316.pdf">devraient rester inférieurs à 3 % jusqu’en 2023</a>.</p>
<p><iframe id="mi3W6" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/mi3W6/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La Fed avait en outre agi tôt pour empêcher l’inflation de s’emballer, plutôt que d’attendre que l’inflation soit déjà excessive.</p>
<h2>Une récession plus probable qu’improbable</h2>
<p>L’une des raisons pour lesquelles le défi de la Fed apparaît particulièrement difficile à relever est que le marché du travail reste aujourd’hui plus tendu que jamais, ce qui signifie que la demande des entreprises en travail dépasse largement l’offre de main-d’œuvre disponible. Cette situation implique donc que les entreprises doivent augmenter les salaires pour attirer de nouveaux travailleurs.</p>
<p>Habituellement, le taux de chômage est utilisé comme indicateur de l’étroitesse du marché du travail. Or, le <a href="https://fred.stlouisfed.org/series/UNRATE">chômage reste très bas</a> et la Fed s’attend à ce qu’il baisse encore. Mais nos recherches montrent que la pression pour augmenter les salaires semble encore plus forte que ce qu’indique le taux de chômage. En effet, le nombre d’offres d’emploi <a href="https://fred.stlouisfed.org/series/JTSJOL">n’a jamais été aussi élevé</a> et les employés quittent leurs postes à un <a href="https://fred.stlouisfed.org/series/JTSQUL">rythme record</a>, soit deux facteurs importants pour la hausse des salaires.</p>
<p>Dans un sens, les salaires constituent la mesure ultime de l’inflation sous-jacente (c’est-à-dire corrigée des variations saisonnières). Plus des <a href="https://apps.bea.gov/iTable/iTable.cfm?reqid=19&step=3&isuri=1&nipa_table_list=56&categories=survey">deux tiers des coûts des entreprises</a> concernent aujourd’hui la main-d’œuvre. La hausse des salaires, qui atteint aujourd’hui un <a href="https://www.atlantafed.org/chcs/wage-growth-tracker">taux historique de plus de 6 %</a> et qui s’accélère, exerce donc une pression à la hausse significative sur l’inflation.</p>
<p><iframe id="YuTOF" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/YuTOF/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En conséquence, il y a peu de raisons d’être optimiste quant à la possibilité de ralentir l’inflation pour atteindre la fourchette de 2 % visée par la Fed. Selon notre analyse, la croissance actuelle des salaires implique une inflation supérieure à 5 %. L’histoire montre également que la croissance des salaires ne ralentit pas sans une augmentation significative du chômage et une récession.</p>
<p>L’économie américaine reste en outre confrontée à des pressions inflationnistes supplémentaires dues à la hausse des prix des céréales et de l’énergie en raison de la guerre en Ukraine et à de nouvelles perturbations de la chaîne d’approvisionnement, le Covid-19 imposant de <a href="https://www.cnbc.com/2022/04/16/shanghai-reports-more-covid-cases-as-china-imposes-new-lockdowns-.html">nouveaux blocages en Chine</a>. Ces facteurs menacent d’exacerber encore plus l’inflation au cours de l’année à venir.</p>
<p>Selon notre évaluation, ce problème d’inflation apparaît donc peu susceptible d’être résolu sans un ralentissement économique significatif. Dans l’ensemble, la combinaison d’une économie en surchauffe, de la hausse des salaires, du retard de la politique de la Fed et des récents chocs d’offre signifie qu’une récession dans les deux prochaines années est certainement plus probable qu’improbable.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/182537/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Lawrence H. Summers est consultant pour diverses institutions financières et Distinguished Senior Fellow au Center for American Progress. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Alex Domash ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le relèvement d’un demi-point acté lors de la dernière réunion de la Réserve fédérale américaine intervient peut-être trop tard pour prévenir un ralentissement économique.Alex Domash, Research Fellow, Harvard Kennedy SchoolLawrence H. Summers, Charles W. Eliot University Professor, Harvard Kennedy SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1818712022-04-27T10:21:57Z2022-04-27T10:21:57ZLes marges de manœuvre budgétaires particulièrement limitées du second quinquennat Macron<p>Au lendemain de la réélection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République, la presse s’accorde à dire que son second mandat devra viser à relever de « grands défis » dans une France fracturée.</p>
<p>Réduction des inégalités, transition énergétique, réindustrialisation… La tâche apparaît aujourd’hui plus compliquée à relever qu’il y a cinq ans en raison d’une trajectoire des finances publiques nettement moins favorable. En cause, le bilan du premier quinquennat et la conjoncture économique avec la remontée des taux d’intérêt des banques centrales qui réduisent considérablement les marges de manœuvre fiscales et budgétaires.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1518453171655434240"}"></div></p>
<p>Les politiques fiscale et budgétaire du quinquennat qui s’achève ont connu chacune un tempo très différent. La première a fait preuve d’une grande continuité en baissant les prélèvements obligatoires des ménages comme des entreprises conformément à la doctrine annoncée par le candidat Emmanuel Macron au cours de sa campagne électorale de 2017.</p>
<p>La seconde, qui avait débuté dans l’ambition d’une maîtrise des finances publiques, fut au contraire marquée par une hausse des dépenses dès 2019, pour calmer la colère des « gilets jaunes », puis par le spectaculaire « quoi qu’il en coûte » de mars 2020 pour éviter que la récession causée par la pandémie ne se transforme en dépression.</p>
<h2>Une pression fiscale globalement en baisse</h2>
<p>Le bilan du quinquennat s’avère très favorable aux foyers fiscaux, la baisse des impôts atteignant 28 milliards d’euros : 17,5 milliards pour la taxe d’habitation, 5,4 milliards pour l’impôt sur le revenu (IR) centrés sur la classe moyenne avec notamment la défiscalisation des heures supplémentaires, 3,2 milliards pour le remplacement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) et environ <em>1 milliard pour la _flat tax</em> (nettement moins <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2017/10/25/la-flat-tax-est-une-bombe-a-retardement-pour-les-finances-publiques_5205612_3232.html">qu’initialement anticipé</a>)_.</p>
<p>En conséquence, le pouvoir d’achat des ménages aura progressé sur le quinquennat de 24 milliards d’euros, l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) relevant que le revenu disponible net réel par unité de consommation moyen a progressé de <a href="https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/pbrief/2022/OFCEpbrief104.pdf">5,4 % de 2017 à 2021</a>, les classes populaire et moyenne (du second au septième décile) ayant même gagné plus de 7 %.</p>
<p>Pour les entreprises, le bilan est également très positif et dans le prolongement de celui de François Hollande, qui avait été marqué par une baisse surprise des prélèvements de l’ordre de <a href="https://www.ericpichet.fr/assets/files/v1/pdf/Bilan-fiscal-budgetaire-du-quinquennat-12janvier2017.pdf">40 milliards d’euros en trois ans</a> via le Pacte de responsabilité et le Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE).</p>
<p>Au final, sous le premier quinquennat du président Emmanuel Macron, la baisse annoncée de 8,2 milliards d’euros de l’impôt sur les sociétés (IS) a bien été mise en œuvre. Une baisse – inattendue bien que réclamée de longues dates par les entreprises – de 10 milliards d’euros des impôts de production a même été décidée en 2020 pour améliorer la compétitivité des entreprises industrielles et réindustrialiser le pays. Au total, les entreprises ont bénéficié de 18,2 milliards d’euros de baisse de leurs prélèvements obligatoires.</p>
<p>Sur l’ensemble du premier quinquennat Macron, les baisses d’impôt se seront élevées à près de 50 milliards euros. Cependant, selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), le taux des prélèvements obligatoires que le candidat ambitionnait de <a href="https://www.nossenateurs.fr/seance/16897">réduire d’un point sur le quinquennat</a> est resté stable entre 2018 et 2021 <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/6324844">passant de 44,7 % à 44,5 %</a>.</p>
<p><iframe id="hOQLj" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/hOQLj/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La première année du quinquennat, les dépenses publiques ont évolué à un rythme inférieur à la croissance du PIB, même si face à des dépenses étatiques sous contrôle et des dépenses locales sous contraintes, les dépenses sociales continuaient à croître plus vite que le PIB.</p>
<p>Les mesures destinées à éteindre la colère des « gilets jaunes » ont marqué le premier point d’<a href="https://www.lejdd.fr/Politique/exclusif-edouard-philippe-je-prends-des-coups-je-peux-en-donner-aussi-jaime-ca-3826445">inflexion budgétaire du quinquennat</a> fin décembre 2018. Si l’annonce du 6 décembre abandonnant définitivement toute hausse des taxes sur le carburant représentait un manque à gagner sur les recettes publiques de 4,9 milliards d’euros dès 2019, celles du 10 et 20 décembre 2018 ont eu un impact direct et durable sur les dépenses publiques d’environ <a href="https://www.ericpichet.fr/news/2019/la-doctrine-fiscale-et-budgetaire-du-quinquennat-a-l-epreuve-des-realites-sociales.html">15 milliards d’euros en 2020</a> sous forme de primes, de revalorisations et de baisses d’impôts.</p>
<h2>Un déficit structurel historiquement haut</h2>
<p>Face à l’irruption de la pandémie en mars 2020, le président Macron a annoncé un plan de soutien massif à l’économie avec le fameux « quoi qu’il coûte » qui s’est traduit par une augmentation des dépenses publiques de 140 milliards d’euros entre mars 2020 et juin 2022.</p>
<p>Conséquence de cette envolée des dépenses, la France a atteint un déficit nominal de 8,9 % du PIB en 2020 et de 6,5 % en 2021. Mais la dérive du déficit structurel, c’est-à-dire l’estimation du déficit qui écarte les effets de la conjoncture économique, apparaît beaucoup plus préoccupante.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/covid-19-a-quoi-aurait-ressemble-leconomie-francaise-sans-les-mesures-de-soutien-175088">Covid-19 : à quoi aurait ressemblé l’économie française sans les mesures de soutien ?</a>
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<p>Le <a href="https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b4482_projet-loi.pdf">projet de loi de finances pour 2022</a> offre un bel exemple de l’évaluation particulièrement erratique de ce solde structurel par le gouvernement : en son article liminaire, il l’estimait à – 1,3 % en 2020 (contre -9,1 % pour le déficit nominal), pour une prévision d’exécution de – 5,8 % en 2021 (pour un déficit nominal de – 8,4 %) et une anticipation de – 3,7 % en 2022 (pour une prévision de déficit nominal de – 4,8 %, un chiffre qui pourrait d’ailleurs être revu en raison de la guerre en Ukraine).</p>
<p><iframe id="CQKlC" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/CQKlC/3/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Pourtant, ce solde structurel est précisément celui qui devrait être le moins volatil puisque par nature insensible aux variations conjoncturelles…</p>
<p>Le ministère de l’Économie et des Finances a d’ailleurs fini par s’aligner in extremis dans le projet de loi de finances rectificatives de novembre 2021 sur les estimations de la Commission européenne pour admettre que le solde structurel se situe en réalité <a href="https://www.ericpichet.fr/assets/files/pdf/actualites/2021/Etude-PICHET-RDF-18-fevrier-2021.pdf">à 5 % du PIB</a>.</p>
<p>L’accumulation des déficits et la récession sanitaire de 2020 (avec un recul de 7,9 % du PIB) ont logiquement déclenché une hausse spectaculaire de la dette publique à 112,9 % du PIB, ce qui situe la France dans le groupe des 4 pays les plus éloignés des critères de Maastricht.</p>
<figure class="align-left zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/459437/original/file-20220425-12-1yd2jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/459437/original/file-20220425-12-1yd2jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/459437/original/file-20220425-12-1yd2jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/459437/original/file-20220425-12-1yd2jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/459437/original/file-20220425-12-1yd2jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/459437/original/file-20220425-12-1yd2jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/459437/original/file-20220425-12-1yd2jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/459437/original/file-20220425-12-1yd2jl.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=509&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Dette publique et déficit structurel des huit principaux pays de la zone euro en 2022 (en % du PIB).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.ccomptes.fr/fr/publications/le-rapport-public-annuel-2022">Cour des comptes (2022)</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>On sait qu’à la différence des particuliers et des entreprises, le niveau de la dette n’est pas l’indicateur clé de la solvabilité d’un État. Le véritable indicateur est bien la charge des intérêts de la charge rapportée au PIB, qui est actuellement très faible de l’ordre de 1,4 % du PIB.</p>
<p>Or, la hausse des taux qui <a href="https://www.ladepeche.fr/2021/12/16/les-taux-poursuivent-leur-legere-hausse-en-cette-fin-2021-9995619.php">s’est matérialisée en 2021</a> s’est accélérée en 2022. L’Obligation assimilable du Trésor (OAT) à 10 ans est ainsi passée d’un taux négatif <a href="https://www.banque-france.fr/statistiques/taux-et-cours/taux-indicatifs-des-bons-du-tresor-et-oat">à 1,4 % fin avril 2022</a>, marquant le début d’une normalisation de la courbe des taux avec la fin annoncée de la générosité des banques centrales.</p>
<h2>L’inflation, un répit de court terme</h2>
<p>L’Agence France Trésor (AFT), en charge de la dette et de la trésorerie de l’État, estime ainsi qu’une hausse d’un point des taux d’intérêt renchérirait la charge d’intérêts de 2,5 milliards d’euros la première année, 6,1 milliards d’euros la deuxième année et <a href="https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2022-02/20220223-gestion-dette-publique-et-efficience-financement-%C3%89tat-par-AFT.pdf">29,5 milliards d’euros à l’horizon de 10 ans</a>.</p>
<p>L’impact de ce choc à un horizon de 10 ans est aujourd’hui nettement plus élevé que l’estimation réalisée fin 2019 (+ 21,2 milliards d’euros). En effet, la dette de l’État à moyen et long terme qui arrivera à échéance entre 2021 et 2030 a augmenté de près de 180 milliards d’euros par rapport au niveau calculé initialement.</p>
<p><iframe id="288uS" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/288uS/5/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Il est toutefois indéniable que l’inflation allégera temporairement le coût de la hausse des taux. Au cours des prochaines années, avec un taux nominal moyen du coût de la dette publique de 1,5 %, une croissance théorique de 1 %, et une inflation de 4,5 %, le déficit primaire stabilisant la dette serait de 4 %, ce qui accordera un répit – temporaire – aux finances publiques – au moins au début du prochain quinquennat.</p>
<p>Dans ces conditions, les grands perdants seront les épargnants en obligations à taux fixe (assurance-vie en euros) et les contribuables dont les revenus ne sont pas correctement indexés sur l’inflation (les retraités et les inactifs principalement).</p>
<p>Devant la dégradation de leurs comptes publics les pays les plus laxistes emmenés par la France et l’Italie ont entamé une campagne de dénigrement du Traité de Maastricht et demandé une <a href="https://www.ft.com/content/ecbdd1ad-fcb0-4908-a29a-5a3e14185966">refonte du pacte</a> en allégeant les contraintes sur le déficit et la dette publics qui nécessité l’unanimité des pays européens.</p>
<p>Cette initiative n’a pourtant que très peu de chances d’aboutir face au refus des pays dits « frugaux », constitués initialement d’un petit club autour de l’Allemagne, des Pays-Bas, de l’Autriche de la Finlande dans la zone euro, accompagnés par la Suède et le Danemark rejoints par la Lettonie, la Slovaquie et la République tchèque. Ces pays « vertueux » ont d’ailleurs publié une <a href="https://www.politico.eu/article/eight-countries-led-by-austria-slam-calls-to-loosen-eu-fiscal-rules/">lettre</a> en septembre 2021 exigeant le respect pur et simple du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance.</p>
<p>Dans ces conditions il est évident que les marges budgétaires du prochain quinquennat seront les plus limitées depuis 1945.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/181871/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Éric Pichet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’allègement de la fiscalité durant le premier mandat, le « quoi qu’il en coûte » face au Covid ou encore la remontée des taux fragilise aujourd’hui la situation financière de l’État français.Éric Pichet, Professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1697442021-10-17T15:53:52Z2021-10-17T15:53:52ZEndettement public : problème ou solution ?<p><em>Depuis l’éclatement de la crise sanitaire au printemps 2020, les États se sont massivement endettés pour financer les mesures de soutien à l’économie. Faut-il s’en inquiéter ? Et si la situation était moins grave qu’elle n’y paraît ? Explications avec Thomas Grjebine, économiste au Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), qui répond aux questions d’Isabelle Bensidoun, économiste et adjointe au directeur du CEPII.</em></p>
<hr>
<p><strong>Avec la crise sanitaire, les dettes publiques se sont envolées, faut-il s’en inquiéter ?</strong></p>
<p>Les dépenses publiques massives engendrées par la crise du Covid-19, financées par l’endettement des États, ont fait resurgir les inquiétudes relatives à la soutenabilité de cet endettement. Il faut dire que la dette publique est passée de <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/5400034">98 % du PIB en 2019 à 118 % début 2021</a> en France, et de <a href="https://www.cbo.gov/publication/56996">79 % à 102 % aux États-Unis</a>.</p>
<p>Malgré ces très fortes augmentations, la soutenabilité des dettes nationales n’est pourtant pas remise en cause car les taux sont proches de zéro et parfois négatifs, ce qui permet d’émettre de nouvelles dettes pour rembourser les anciennes sans difficulté.</p>
<iframe title="Dette des administrations publiques françaises " aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-0aXWi" src="https://datawrapper.dwcdn.net/0aXWi/4/" scrolling="no" frameborder="0" style="width: 0; min-width: 100%!important; border: none;" height="600" width="100%"></iframe>
<p>Cet environnement de taux bas s’inscrit dans une tendance de long terme, amorcée dans les années 1980, en lien avec une abondance d’épargne au niveau mondial et de faibles opportunités d’investissement. Cet excès d’épargne puise notamment sa source dans le vieillissement démographique et la forte montée des inégalités, qui concentre la richesse dans les mains de ménages qui ne consomment qu’une faible part de leurs revenus.</p>
<p>Cette baisse tendancielle des taux d’intérêt et leur très faible niveau actuel n’excluent pas pour autant qu’un mouvement de défiance envers certains titres souverains fasse subitement remonter les taux, comme cela s’était produit dans la zone euro en 2010-2012.</p>
<p><strong>Mais les politiques mises en œuvre par les banques centrales ne permettent-elles pas de se prémunir d’une telle évolution ?</strong></p>
<p>Oui, le fait que les banques centrales n’hésitent plus à contrôler les taux d’intérêt à long terme change la donne. Même si la Banque centrale européenne (BCE) n’a pas adopté officiellement une <a href="https://theconversation.com/une-solution-a-la-japonaise-pour-eviter-la-crise-des-dettes-souveraines-137264">politique de contrôle des taux longs comme au Japon</a>, elle mène en pratique une politique qui s’en approche. On se souvient du fameux « whatever it takes » (quoi qu’il en coûte) de Mario Draghi en juillet 2012 qui avait instantanément permis de réduire les écarts de taux d’emprunt entre pays européens, une annonce qui avait été suivie par des programmes d’achats massifs d’actifs à partir de 2015 (le quantitative easing).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1254835276515553286"}"></div></p>
<p>Évidemment, officiellement, il n’est question ni de monétisation des dettes publiques – l’article 123 du traité de Lisbonne interdit à la banque centrale d’acquérir directement auprès des États les instruments de leur dette – ni d’une politique visant à réduire les spreads (les écarts de taux). Mais la frontière est mince entre un financement direct et un financement via des achats d’obligations sur le marché secondaire qui aboutissent à une baisse des spreads.</p>
<p>En pratique, la banque centrale participe de façon très active au financement des dettes publiques : aujourd’hui, près de 20 % de la dette publique française est détenue par la Banque de France ; c’est même 60 % de la dette publique émise par les pays de la zone euro entre mars et août 2020 qui a été rachetée par leurs banques centrales.</p>
<p>Par ces achats massifs d’actifs, la BCE mène ainsi implicitement une politique de contrôle des taux longs qui, si elle était pérennisée, pourrait permettre de se prémunir du risque d’une nouvelle crise des dettes souveraines. Cet édifice reste néanmoins fragile car il repose sur des compromis politiques tacites.</p>
<p><strong>Est-ce à dire qu’un risque spécifique pèse sur les pays de la zone euro ?</strong></p>
<p>La question de la dette publique se pose en des termes très différents pour les pays de la zone euro, endettés dans une monnaie qu’ils ne contrôlent pas, et des pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni ou le Japon qui sont souverains monétairement.</p>
<p>Comme le soulignait l’ancien président de la Réserve fédérale américaine (Fed), Alan Greenspan, en 2011 :</p>
<blockquote>
<p>« Les États-Unis peuvent rembourser n’importe quelle dette qu’ils ont car ils peuvent toujours <a href="https://www.cnbc.com/id/44051683">créer de la monnaie pour cela</a>. »</p>
</blockquote>
<p>C’est que, dans un État souverain monétairement, État et banque centrale ne font qu’un : la séparation de leurs bilans relève d’un artifice comptable puisqu’institutionnellement la banque centrale est une sous-entité de l’État. Aux États-Unis, l’autorité monétaire est ainsi <a href="http://www.cepii.fr/CEPII/fr/publications/em/abstract.asp?NoDoc=12934">seulement déléguée par le Congrès à la Fed</a> qui doit lui rendre des comptes.</p>
<p>La situation est très différente pour les pays de la zone euro, d’autant plus que l’indépendance de la BCE est gravée dans le marbre des traités (alors que dans la plupart des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, l’indépendance de la banque centrale peut être modifiée par une simple loi). En outre, la gestion des dettes publiques est rendue plus complexe encore par la coexistence de 19 dettes souveraines pour une banque centrale.</p>
<iframe src="https://embed.acast.com/601af1d942a1b65a0f451f54/60364d982c4f464eb3209102?cover=true&ga=false" frameborder="0" allow="autoplay" width="100%" height="110"></iframe>
<p>Si, faute d’accord politique, la BCE voyait ses marges de manœuvre limitées, on ne serait pas à l’abri d’une nouvelle crise des dettes souveraines – une probabilité faible mais qui existe. Une situation très différente de celle du Japon par exemple, où la question de la soutenabilité ne se pose pas malgré une dette publique atteignant près de 250 % du PIB car la banque du Japon peut acheter autant de dette publique que de besoin.</p>
<p><strong>Les États de la zone euro sont donc contraints dans la gestion de leur dette publique faute de souveraineté monétaire, mais ils sont souverains fiscalement ! Dès lors, des hausses d’impôts sur les entreprises ou sur les plus riches ne permettraient-elles pas d’améliorer la soutenabilité de leurs dettes ?</strong></p>
<p>Directement, non, car la faiblesse structurelle des taux provient en partie de l’excès d’épargne des plus riches qui achètent massivement de la dette publique. Une meilleure redistribution, par une telle hausse de la fiscalité, permettrait, en revanche, de soutenir la demande et de rendre ainsi la dette publique moins nécessaire, tout en réduisant les ratios d’endettement via le surcroît de croissance permis par cette demande supplémentaire.</p>
<p><strong>Finalement, les dettes publiques sont-elles un problème ou une solution ?</strong></p>
<p>Dans un environnement où l’épargne privée est abondante, la dette publique demeure un instrument privilégié pour combler les déficits de demande. En gros, on a besoin que quelqu’un consomme ou investisse : si le privé épargne, il faut que le public prenne le relais. Chercher à réduire la dette nominale par des politiques d’austérité serait catastrophique et risquerait de nous replonger dans l’engrenage infernal de 2010-2012.</p>
<p>Ce qui ne signifie pas que l’augmentation de l’endettement doit être sans limites puisque, surtout dans le contexte de la zone euro, il faut préserver la confiance de nos partenaires (pour que la BCE puisse continuer d’agir) et des marchés. Mais les taux bas actuels sont une opportunité pour emprunter, y compris à l’échelle européenne, et financer les investissements nécessaires à la transition écologique ainsi qu’au renforcement et au verdissement de notre appareil productif.</p>
<hr>
<p><em>Cet article est publié dans le cadre de la série du CEPII « L’économie internationale en campagne », un partenariat CEPII–The Conversation</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/169744/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>L’abondance de l’épargne au niveau mondial engendre une baisse des taux qui fait de la dette un outil privilégié pour aujourd’hui combler les déficits de demande.Thomas Grjebine, Économiste, CEPIIIsabelle Bensidoun, Économiste, CEPIILicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1648132021-07-25T16:25:41Z2021-07-25T16:25:41ZLaisser filer l’inflation ou freiner la reprise, le dilemme des banquiers centraux<p>Aux États-Unis, l’indice des prix à la consommation a augmenté de <a href="https://www.zonebourse.com/actualite-bourse/USA-Plus-forte-hausse-des-prix-a-la-consommation-depuis-2008%E2%80%9335846520/">0,9 % en juin</a> après avoir progressé de 0,5 % en mai, et la variation annuelle est supérieure à 5 %. Dans la zone euro, cette hausse est beaucoup moins prononcée, du moins pour l’instant. En France, par exemple, les prix à la consommation ont augmenté de <a href="https://investir.lesechos.fr/marches/actualites/france-l-inflation-augmente-a-1-5-sur-un-an-en-juin-1969795.php">1,5 % en juin</a> par rapport à l’année précédente, alors qu’en variation sur un an, ces prix n’avaient augmenté que de 0,2 % en juin de l’année dernière.</p>
<p>Ce retour de l’inflation peut s’expliquer notamment par un mécanisme économique très simple : la demande augmente et l’offre se réduit, donc les prix augmentent.</p>
<iframe title="L’inflation reste pour l’instant moins prononcée en Europe qu’aux États-Unis" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-1eLl1" src="https://datawrapper.dwcdn.net/1eLl1/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="400" width="100%"></iframe>
<p>D’une part, la pandémie a conduit de nombreux ménages à reporter leur consommation. Pour certains d’entre eux, ils ont accumulé de l’épargne. Lorsque les mesures de distanciation sociales sont levées, ces ménages peuvent à nouveau consommer. Cela correspond à une hausse de la demande.</p>
<p>D’autre part, l’offre de biens et de services subit encore des effets de la pandémie. En bref, toutes les chaînes d’approvisionnement et de production ne sont pas forcément rétablies.</p>
<h2>Une tendance durable ?</h2>
<p>Ces facteurs de demande et d’offre sont considérés comme transitoires : une fois la pandémie terminée, l’offre va se remettre en place et l’épargne accumulée sera dépensée. Ainsi, l’inflation qui en résulte <a href="https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/l-inflation-transitoire-l-hypothese-qui-plait-aux-investisseurs-n-est-pas-la-seule-credible-887708.html">ne devrait pas persister</a>, du moins en théorie. D’une certaine manière, c’est même un signe que l’économie se remet sur les rails et la hausse de la demande va permettre à l’offre de se remettre en place.</p>
<p>Toutefois, il existe un risque que l’inflation reste durablement élevée, ce qui peut constituer un problème pour la reprise. Une telle inflation plus durable pourrait avoir des conséquences pour tous les prix dans l’économie : jusqu’à présent, les hausses de prix aux États-Unis concernent seulement certains secteurs comme l’énergie – et tout spécialement les prix liés au prix du pétrole et du gaz – ou des biens durables comme les voitures, mais <a href="https://www.bls.gov/news.release/cpi.nr0.htm">nettement moins les services</a>.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/_9CQxnVc3-0?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Inflation : quels risques pour la relance ? (Académie des Sciences et Techniques Comptables et Financières, juillet 2021).</span></figcaption>
</figure>
<p>Si une telle inflation plus persistante venait à se réaliser, les banques centrales n’auront pas d’autre choix que de réagir pour les contenir. En effet, la Réserve fédérale américaine (Fed) comme la Banque centrale européenne (BCE) ont un objectif de stabilité des prix. Dans le cas de la Fed, depuis août 2020, l’inflation doit avoisiner les 2 % en moyenne. Dans le cas de la BCE, depuis sa récente revue stratégique, l’inflation doit être proche de 2 %. Un dérapage persistant des prix ne serait donc plus en accord avec le mandat de ces banques centrales.</p>
<h2>Une question de crédibilité</h2>
<p>Pour éviter un tel risque, les banques centrales devront limiter leur soutien à l’économie, ou bien en restreignant les programmes quantitatifs qu’elles ont mis en place depuis plusieurs années, ou bien en remontant si nécessaire leurs taux directeurs, aujourd’hui au plus bas.</p>
<iframe title="[Insérez le titre ici]" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-D55dr" src="https://datawrapper.dwcdn.net/D55dr/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="400" width="100%"></iframe>
<p>Paradoxalement, un éventuel retour de l’inflation est en partie lié à un risque de manque de crédibilité des banques centrales pour la combattre : si celles-ci préfèrent systématiquement ne pas ralentir l’activité économique pour combattre l’inflation, alors les marchés financiers voire, si le phénomène s’empire, les entreprises et les ménages vont penser que l’inflation risque effectivement de revenir. L’anticipation d’inflation future pousserait alors aux hausses de prix dès aujourd’hui, alimentant la spirale inflationniste.</p>
<p>Aujourd’hui, au-delà du risque pour la reprise, une raison particulière peut conduire les banques centrales à ne pas souhaiter resserrer la vis monétaire : en relevant les taux ou en limitant les achats de titres, les banques centrales peuvent également faire augmenter le coût de la dette des États. Une augmentation trop élevée des taux pourrait rendre insoutenable la dette de certains États et provoquer un défaut souverain.</p>
<p>Quelle que soit sa source, tout manque de crédibilité finirait par se traduire par les anticipations d’inflation à long terme. Dans les mois et années à venir, ce sera la variable clé à vérifier : si ces anticipations commençaient à s’écarter de l’objectif des banques centrales, ces dernières n’auraient d’autre choix que d’intervenir en ralentissant éventuellement la reprise.</p>
<p>Cette crédibilité à resserrer la vis monétaire si besoin, c’est visiblement ce qui a été testé aux États-Unis en juin dernier. La Fed a laissé ses taux inchangés, mais a annoncé que <a href="https://www.letemps.ch/economie/fed-se-prepare-une-hausse-taux-plus-rapide">deux resserrements des taux</a> sont désormais envisagés d’ici à fin 2023, alors que la date de 2024 était précédemment envisagée.</p>
<p>Avec cette communication autour d’une accélération du calendrier, les marchés financiers ont, semble-t-il, perçu que la Fed était crédible pour relever ses taux en cas de retour persistant de l’inflation. En retour, les anticipations d’inflation à plus long terme ont amorcé un léger recul aux États-Unis, laissant espérer que les marchés s’attendent effectivement à ce que la Fed intervienne si nécessaire en cas de hausse de l’inflation.</p>
<iframe title="Évolution des anticipations d’inflation à 5 ans aux États-Unis" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-uFvmx" src="https://datawrapper.dwcdn.net/uFvmx/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="600" width="100%"></iframe>
<img src="https://counter.theconversation.com/content/164813/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Éric Mengus ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>En cas de retour persistant de l’inflation, La Fed et la BCE seraient contraintes de relever leurs taux, quitte à casser la croissance, pour tenir leurs objectifs.Éric Mengus, Professeur associé en économie et sciences de la décision, HEC Paris Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1613702021-05-26T18:49:53Z2021-05-26T18:49:53ZPlan Biden : relance américaine, conséquences mondiales<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/402110/original/file-20210521-17-1uflj8y.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4608%2C3207&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Washington engage une somme équivalente à 13&nbsp;% du PIB du pays pour relancer l’économie américaine.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Nicholas Kamm / AFP</span></span></figcaption></figure><p>La récession Covid a entrainé une réponse musclée de la part des politiques économiques américaines, évitant une trop forte chute de l’activité économique. Celle-ci décroît de <a href="https://www.capital.fr/economie-politique/chute-historique-de-leconomie-des-etats-unis-en-2020-pire-annee-en-75-ans-1392359">3,5 % en 2020</a>, à comparer avec les chiffres de <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/02/02/covid-19-en-zone-euro-une-chute-historique-du-pib-de-6-8-en-2020_6068547_3234.html">6,8 % pour la zone euro</a> et de <a href="https://www.lefigaro.fr/flash-eco/royaume-uni-contraction-record-de-9-9-de-l-economie-en-2020-avec-la-pandemie-20210212">9,9 % pour le Royaume-Uni</a>.</p>
<p>La Réserve fédérale américaine (Fed) a tout d’abord <a href="https://blocnotesdeleco.banque-france.fr/billet-de-blog/laction-des-banques-centrales-pour-aider-leconomie-survivre-au-covid-19">multiplié les mesures d’assouplissement de sa politique monétaire</a> en abaissant rapidement ses taux d’intérêt directeurs à ce qu’elle considère son plancher effectif (0 %-0,25 %) et en développant des mesures non conventionnelles telles que l’achat de titres sur les marchés ou l’aide aux banques dans la fourniture de liquidités aux entreprises.</p>
<p>La réaction la plus spectaculaire est cependant venue de la politique budgétaire. Dans la foulée d’un plan de 900 milliards de dollars voté fin décembre 2020, l’administration du président Joe Biden a instigué en mars 2021 une deuxième relance à hauteur de 1 900 milliards de dollars, principalement axée sur les ménages et la hausse des dépenses publiques aux niveaux fédéral et fédéré. Le stimulus budgétaire atteint ainsi, au total, 13 % du PIB.</p>
<p>Le président Biden a ensuite annoncé dans la foulée un plan pour l’investissement, avec pour objectif de rehausser le potentiel de croissance, et un plan pour les familles et l’éducation. Les États-Unis semblent ainsi connaître un nouveau « moment Rooseveltien ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1359613161519865860"}"></div></p>
<p>Les économistes ont alors interrogé les effets d’une relance d’une telle amplitude sur l’économie américaine, en se demandant si elle n’allait pas la placer en <a href="https://theconversation.com/le-plan-de-relance-de-joe-biden-va-t-il-faire-surchauffer-leconomie-americaine-154959">surchauffe</a>. Ils commencent également à questionner les conséquences mondiales de ces deux plans.</p>
<h2>Consommateur en dernier ressort</h2>
<p>À ce jour, le PIB américain affiche au premier trimestre 2021 une croissance de 1,6 % et la croissance anticipée pour 2021 par le FMI est de l’ordre de 6,4 %. Trois points de pourcentage semblent imputables au plan Biden.</p>
<p>Du côté des prix, l’inflation a connu une poussée au mois d’avril (+4,2 %), notamment due à des effets de base (cette croissance est calculée par rapport à une base plus faible que d’ordinaire, le taux d’inflation en avril 2020, en pleine crise Covid, ne dépassant pas 0,3 %) et à des pressions haussières sur les prix de l’énergie (le prix de l’essence a crû de quasiment 50 % sur 12 mois).</p>
<p>Toutefois les anticipations d’inflation <a href="https://econofact.org/rising-inflation">restent</a> stables, laissant envisager, pour l’instant, un effet temporaire. Rien de surprenant ici, les travaux empiriques observent généralement pareils effets sur l’économie nationale d’un stimulus budgétaire, à la fois sur les prix et l’activité.</p>
<p>Au-delà des frontières américaines, les effets internationaux méritent également d’être interrogés, les États-Unis étant notamment généralement considérés comme le consommateur en dernier ressort de l’économie mondiale</p>
<p>En dépit des tentatives de relocalisation de la production et de guerre commerciale menées par l’administration Trump, l’économie américaine importe une grande partie de sa consommation, notamment de biens. En 2020, le déficit commercial américain s’élevait à <a href="https://www.bea.gov/news/blog/2021-02-05/2020-trade-gap-6787-billion">679 milliards de dollars</a>, soit 3,2 % du PIB, en hausse par rapport à 2019 (2,8 % du PIB).</p>
<figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/402115/original/file-20210521-13-xri0ul.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/402115/original/file-20210521-13-xri0ul.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/402115/original/file-20210521-13-xri0ul.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/402115/original/file-20210521-13-xri0ul.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/402115/original/file-20210521-13-xri0ul.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=390&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/402115/original/file-20210521-13-xri0ul.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/402115/original/file-20210521-13-xri0ul.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/402115/original/file-20210521-13-xri0ul.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=490&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">D’après l’OCDE, le plan Biden expliquerait 1 point parmi les 5,6 % de croissance attendus pour l’économie mondiale en 2021.</span>
<span class="attribution"><span class="source">OCDE</span></span>
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</figure>
<p>Par conséquent, lorsque le gouvernement américain effectue une relance budgétaire, se met en place une « fuite par les imports » qui va profiter à l’ensemble de l’économie mondiale, en particulier aux pays qui exportent beaucoup vers les États-Unis et qui bénéficieront d’une consommation américaine dopée. Dans son <a href="https://www.oecd.org/perspectives-economiques/">dernier rapport intermédiaire sur les perspectives économiques</a>, l’OCDE chiffre à l’aide d’un modèle macroéconomique à environ 1 point de pourcentage le gain sur la croissance du PIB mondial en 2021, qui serait ainsi proche de 5,6 %.</p>
<p>Sans surprise, le Canada et le Mexique profiteraient le plus de ce stimulus avec une hausse anticipée de leur production comprise entre 0,5 et 1 point en 2021, alors que la zone euro et la Chine connaîtraient une hausse comprise entre 0,25 et 0,50 point.</p>
<h2>Hausse des taux longs</h2>
<p>Par le passé, on a généralement pu observer une hausse du taux d’intérêt directeur de la Fed à la suite d’un stimulus budgétaire afin de juguler l’inflation. Celle-ci engendre à son tour un accroissement des taux à plus longue maturité, notamment le taux souverain à 10 ans auquel l’État américain s’endette.</p>
<p>Dans le contexte actuel, le taux nominal à 10 ans américain a gagné plus de 70 points de base (centièmes de pour cent) entre janvier et avril 2021, avant de perdre à nouveau légèrement pour <a href="https://fr.investing.com/rates-bonds/u.s.-10-year-bond-yield">s’installer autour de 1,6 % à mi-mai</a>.</p>
<p>Toutefois, ce phénomène ne semble aujourd’hui pas engendré par des anticipations de hausses des taux car la Fed a insisté à plusieurs reprises sur le fait qu’elle maintiendrait une <a href="https://www.lesechos.fr/finance-marches/marches-financiers/la-fed-prete-a-maintenir-longtemps-les-taux-bas-pour-soutenir-lactivite-1243128">politique de taux bas</a> pendant encore un moment. Notamment, selon la projection médiane du Federal Open Market Committee (FOMC), le taux d’intérêt directeur devrait rester autour de <a href="https://www.federalreserve.gov/monetarypolicy/files/fomcprojtabl20210317.pdf">0,1 % jusqu’en 2023</a>.</p>
<p>Cela n’est pas non plus lié une <a href="https://www.federalreserve.gov/newsevents/pressreleases/monetary20200827a.htm">stratégie de politique monétaire</a> que la Fed et son président Jerome Powell ont modifiée depuis le mois d’août 2020. Est désormais recherchée une inflation moyenne de 2 % au cours du temps. Puisque l’évolution des prix s’est faite en dessous de la cible sur la période récente, cela implique que la Banque centrale tolérera une hausse au-dessus des 2 % pendant un certain temps. Aussi, à moins d’une très forte poussée inflationniste et d’un décrochage des anticipations d’inflation à long terme, la Fed ne devrait pas remonter ses taux directeurs dans le moyen terme.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/402109/original/file-20210521-19-zcajg1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/402109/original/file-20210521-19-zcajg1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/402109/original/file-20210521-19-zcajg1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/402109/original/file-20210521-19-zcajg1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/402109/original/file-20210521-19-zcajg1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/402109/original/file-20210521-19-zcajg1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/402109/original/file-20210521-19-zcajg1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/402109/original/file-20210521-19-zcajg1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Jerome Powell, républicain modéré, est à la tête de la Fed depuis février 2018.</span>
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<p>Quelle explication alors ? Selon un <a href="https://www.imf.org/fr/News/Articles/2021/04/22/blog-understanding-the-rise-in-long-term-rates">travail récent du FMI</a>, deux facteurs pourraient être à la racine de la hausse du taux souverain nominal américain depuis janvier 2021.</p>
<p>D’abord, les marchés anticipent une hausse de l’inflation à moyen terme, alimentée par les perspectives de croissance américaine, la hausse des prix internationaux (matières premières, transports, etc.), des goulots d’étranglement dans certains secteurs en manque de main-d’œuvre et la politique monétaire accommodante de la Fed, même si les anticipations restent bien ancrées à long terme. Ensuite, les marchés demandent une prime de risque réelle élevée à long terme (environ 70 points de base), reflétant une forte incertitude sur le scénario économique, budgétaire et monétaire sur les 10 prochaines années.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1389495980337270787"}"></div></p>
<p>Les obligations d’État américaines sont connues pour influencer l’ensemble des titres sur les marchés internationaux. Ainsi a-t-on également observé, par <a href="https://blocnotesdeleco.banque-france.fr/billet-de-blog/effets-sur-la-zone-euro-dune-hausse-soudaine-de-la-prime-de-terme-americaine">contagion</a>, une hausse des taux longs depuis le début d’année 2021 dans les principales zones économiques, notamment en zone euro et dans les pays émergents.</p>
<p>De plus, la hausse des taux longs américains a généralement tendance à avoir des effets négatifs sur certains pays émergents qui se financent sur les marchés étrangers et voient alors leurs conditions de financement se durcir.</p>
<h2>Rebond du dollar</h2>
<p>Du côté du taux de change réel, la plupart des théories économiques affirment que celui-ci doit s’apprécier suite à une hausse des dépenses gouvernementales, une prédiction que la littérature empirique ne confirme pas de manière générale. Elle souligne que les résultats dépendent souvent des <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/j.1468-0297.2010.02362.x">caractéristiques des pays</a> tels que le niveau de développement ou le régime de changes (fixe ou flottant).</p>
<p>Dans un <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3822101">travail récent</a> sur l’économie américaine, réalisé avec deux chercheurs de la Banque d’Italie, nous avons utilisé les dépenses militaires comme variable instrumentale pour chercher à identifier sans biais la causalité entre la hausse des dépenses budgétaires et ses effets économiques. Nous montrons que, suite à un stimulus budgétaire, le taux de change réel du dollar tend à s’apprécier par rapport aux monnaies des principaux partenaires commerciaux.</p>
<iframe title="Le dollar s’était déprécié en raison des incertitudes liées aux politiques de Donald Trump pendant la crise sanitaire" aria-label="Interactive line chart" id="datawrapper-chart-KRfVC" src="https://datawrapper.dwcdn.net/KRfVC/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="400" width="100%"></iframe>
<p>Comme l’inflation est également supposée augmenter, le taux de change nominal du dollar devrait, lui aussi, s’apprécier à la suite du choc budgétaire. Pendant la récession Covid, le taux de change effectif réel du dollar s’est déprécié de quasiment 10 % en raison des inquiétudes sur la gestion de la crise sanitaire par l’administration Trump. Ce taux a repris 2 % entre janvier et mars 2021. Même si le taux de change reste une des variables économiques les plus difficiles à prévoir, selon notre modèle, il est vraisemblable d’anticiper un rebond du taux de change effectif réel du dollar dans la foulée de la mise en œuvre du plan Biden.</p>
<p>Cela contribuerait d’autant au creusement du déficit commercial en renchérissant le coût des exportations américaines. D’autre part, cette hausse pourrait mettre à mal des pays émergents fortement endettés en dollars.</p>
<h2>Cela pourrait donner des idées…</h2>
<p>D’autres canaux de transmission internationaux peuvent être à l’œuvre lors d’un choc de politique budgétaire. Plusieurs <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0165176514002705?casa_token=7P28_QbcWyoAAAAA:JhugGxFCcjb0KzSJhpG8ybxs3g4mcHmFA133tBLq2gxd7WxweLvdttfHVXtZ6Xx0P9jzZ5s5iGue">travaux de recherche</a> ont notamment montré que les États-Unis génèrent de l’incertitude au niveau mondial.</p>
<p>Ainsi, la mise en œuvre du plan Biden et ses effets positifs attendus sur la croissance vont contribuer à réduire l’incertitude de politique économique à court terme dans de nombreux pays. A contrario, la hausse de l’endettement public a fait remonter l’incertitude sur le long terme, avec de possibles implications internationales.</p>
<p>Le canal de propagation des idées keynésiennes pourrait, lui aussi, s’activer. Le fait que la plus grande économie mondiale se lance dans une politique de dépenses publiques à grande échelle pourrait bien inciter d’autres pays ou zones monétaires à relâcher significativement leurs contraintes budgétaires au vu de ce choc sanitaire inédit.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161370/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laurent Ferrara est membre du Comité Directeur de l'AFSE</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Daniele Siena est chercheur à la Banque de France</span></em></p>Importations, endettement, rebond du dollar… Le « moment keynésien » dans lequel s’engagent les États-Unis du président Joe Biden ne restera pas sans effet au-delà des frontières du pays.Laurent Ferrara, Professeur d’Economie Internationale, SKEMA Business SchoolDaniele Siena, Professeur adjoint d'économie, Università Cattolica del Sacro Cuore - Catholic University of MilanLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1600582021-05-03T18:26:10Z2021-05-03T18:26:10ZLe prix de votre brique de lait dépend aussi… de la BCE<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/397863/original/file-20210429-21-ku3sbt.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C0%2C4928%2C3260&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L'évolution des taux d'intérêt de la BCE a des effets sur l'ensemble de l'économie, dont la production laitière.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/frankfurt-germanyaugust-16-euro-sign-european-221261371">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Les membres du conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE) se réunissent toutes les 6 semaines dans une <a href="https://www.ecb.europa.eu/ecb/premises/html/index.en.html">grande tour en verre</a> à Francfort, en Allemagne. Les décisions qu’ils prennent à cette occasion ont des conséquences sur votre quotidien, notamment sur les prix que vous payez lorsque vous faites vos courses.</p>
<p>Lors de ces réunions, la BCE ajuste en effet les taux d’intérêt : les banques commerciales qui ont besoin de liquidités peuvent directement emprunter auprès de la BCE, qui leur fournira ensuite ces liquidités au taux d’intérêt de son choix. Les banques peuvent alternativement emprunter auprès d’autres banques, mais elles ne le feront que si elles arrivent à trouver un taux au moins aussi avantageux que celui de la BCE.</p>
<p>Les banques qui ont un excès de liquidité peuvent quant à elles déposer ces liquidités auprès de la BCE, qui rémunérera ces liquidités au taux d’intérêt lui aussi déterminé par la BCE. Bien sûr, aucune banque n’acceptera de prêter à une autre à un taux d’intérêt inférieur à celui qu’elle pourrait obtenir auprès de la BCE.</p>
<p>La Banque centrale européenne peut ainsi déplacer ces taux plancher et plafond afin d’essayer de guider le taux interbancaire, sur lequel se base l’ensemble des taux d’intérêt de l’économie. Ce qui explique à la fois pourquoi votre livret A vous rapporte si peu en ce moment et pourquoi vous pouvez emprunter à des <a href="http://meilleurtaux.com">taux historiquement bas</a> pour acheter une maison.</p>
<p>Bien sûr, le taux d’intérêt que vous paierez pour votre prêt immobilier ne sera pas exactement égal au taux interbancaire. Il sera certainement plus élevé, reflétant un nombre de facteurs, tels que le coût de financement pour les banques, votre risque de défaut de paiement, ainsi que l’incertitude sur l’évolution future des taux.</p>
<h2>Ricochet</h2>
<p>L’évolution des taux de la BCE va avoir un impact sur les prix des produits : lorsque les taux d’intérêt diminuent, cela fera baisser vos mensualités sur un prêt automobile ou immobilier. Plus d’acheteurs seront donc tentés par de telles acquisitions, ce qui va exercer une pression à la hausse sur les prix. Les concessionnaires et les agents immobiliers remarqueront sans aucun doute cet enthousiasme accru des acheteurs et seront moins enclins à accorder une ristourne.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/397865/original/file-20210429-23-1fxtw28.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/397865/original/file-20210429-23-1fxtw28.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/397865/original/file-20210429-23-1fxtw28.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/397865/original/file-20210429-23-1fxtw28.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/397865/original/file-20210429-23-1fxtw28.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/397865/original/file-20210429-23-1fxtw28.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/397865/original/file-20210429-23-1fxtw28.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La baisse des taux d’intérêt de la BCE entraîne une diminution des mensualités d’un prêt immobilier.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/property-sales-staff-submit-land-mortgage-1937823172">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Les effets de la baisse des taux d’intérêt se feront ensuite ressentir sur l’ensemble de l’économie, tel le ricochet d’une pierre plate lancée sur l’eau. Les usines automobiles vont pouvoir augmenter la cadence et le secteur du bâtiment va multiplier les offres d’emploi. S’ensuivra une hausse de la demande pour les matières premières, l’énergie, etc.</p>
<p>De leur côté, les producteurs de lait verront alors leurs coûts augmenter tout en pouvant trouver plus facilement acheteur. Ils seront donc tentés d’augmenter eux aussi leurs prix, ce que vous pourrez constater en déambulant dans les allées de votre supermarché habituel.</p>
<p>Actuellement, les banques qui empruntent auprès de la BCE <a href="https://www.ecb.europa.eu/stats/policy_and_exchange_rates/key_ecb_interest_rates/html/index.en.html">doivent payer 0,25 %</a> alors que la rémunération des dépôts auprès de la BCE est à – 0,5 %, c’est-à-dire que les banques doivent payer si elles souhaitent déposer l’argent auprès de la BCE.</p>
<p>Les banques centrales ne peuvent donc plus vraiment baisser les taux. En effet, si elles le faisaient, les banques seraient forcées de rémunérer les dépôts à des taux négatifs, c’est-à-dire que les déposants devraient rémunérer la banque pour pouvoir y déposer leur argent.</p>
<p>Bien entendu, cette situation ne serait pas vraiment durable. Les déposants auraient tôt fait de retirer leurs dépôts et de cacher leur argent sous le matelas. Ceci pourrait fragiliser les banques car elles ne détiennent qu’une quantité infime de liquidités et ne seraient donc pas en mesure de satisfaire ces demandes de liquidités.</p>
<p>La banque Northern Rock en Angleterre en avait par exemple fait les frais en 2007. Les déposants se sont <a href="https://www.youtube.com/watch?v=hcJ9TDdnsqM">rués vers la banque</a> pour retirer leurs dépôts, créant des files d’attente interminables. Cette panique est née d’une rumeur parue dans les journaux, selon laquelle cette banque aurait fait des investissements douteux dans l’immobilier. À la suite à cette panique, la banque a dû fermer ses portes et déclarer faillite.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/397862/original/file-20210429-16-n1l496.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/397862/original/file-20210429-16-n1l496.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/397862/original/file-20210429-16-n1l496.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/397862/original/file-20210429-16-n1l496.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/397862/original/file-20210429-16-n1l496.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/397862/original/file-20210429-16-n1l496.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/397862/original/file-20210429-16-n1l496.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Panique bancaire devant une banque Northern Rock au Royaume-Uni.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Birmingham_Northern_Rock_bank_run_2007.jpg">Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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</figure>
<p>Si la BCE ne peut baisser les taux loin en dessous de zéro sans risquer une panique bancaire généralisée, il lui reste l’option de baisser les taux d’intérêt à plus longue échéance. En effet, les prêts, dont les taux qui ont atteint leur valeur plancher, sont à très court terme, du jour au lendemain.</p>
<h2>Rendez-vous le 12 mai</h2>
<p>La BCE essaie donc actuellement de faire baisser les taux à plus longue échéance. Elle le fait en réalisant des achats massifs sur les marchés obligataires, comme l’illustre le <a href="https://www.ecb.europa.eu/mopo/implement/pepp/html/index.en.html">programme actuel</a> afin de contrer les effets de la pandémie.</p>
<p>La suite à accorder à ce programme sera d’ailleurs au cœur de la prochaine rencontre prévue le 12 mai entre les membres du conseil des gouverneurs de la BCE. Et les débats risquent d’être vifs en raison des conséquences de ces décisions sur l’inflation, c’est-à-dire justement sur le niveau des prix dans votre consommation.</p>
<p>D’un côté, les pays « du Sud », parmi lesquels la France, essaieront de convaincre leurs pairs de garder le pied sur la pédale d’accélérateur et d’éviter un ralentissement précoce du programme d’achats d’obligations. Selon eux, remonter les taux d’intérêt trop tôt pourrait mettre en danger une relance économique encore trop fragile et replonger la zone euro dans la crise.</p>
<p>En face, les pays « du Nord », réunis autour de l’Allemagne, essaieront de convaincre le conseil d’appuyer sur la pédale de frein pour ralentir les achats d’obligations d’État, ceci afin de laisser remonter les taux d’intérêt doucement pour éviter les risques d’un emballement de l’inflation. Lors de son <a href="https://www.bundesbank.de/en/press/speeches/introductory-statement-863314#nb4">discours du 31 mars 2021</a>, Jens Weidmann, le gouverneur de la Bundesbank, a par exemple attiré l’attention vers ce risque, qu’il a qualifié d’un « tigre inflationniste » qui pourrait se réveiller à tout moment.</p>
<p>Jusqu’à présent, les hommes et femmes de la BCE ont rempli leur mission avec succès. L’inflation dans la zone euro a sagement <a href="https://tradingeconomics.com/euro-area/inflation-cpi">oscillé entre 0 et 3 %</a> la plus grande partie de ces dernières décennies. Plus récemment, après avoir atteint son <a href="https://www.ecb.europa.eu/press/calendars/mgcgc/html/index.en.html">niveau le plus bas</a> à la fin de l’année 2020, le taux d’inflation a repris des couleurs et se rapproche de l’objectif principal de la BCE, d’un taux d’inflation proche mais en dessous de 2 %.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1384776280546189313"}"></div></p>
<p>Difficile de déterminer avec certitude quelle vision prévaudra. Les <a href="https://www.ecb.europa.eu/pub/projections/html/ecb.projections202103_ecbstaff%7E3f6efd7e8f.en.html">prévisions actuelles</a> suggèrent que le taux d’inflation qui pourrait approcher les 2 % d’ici la fin de l’année, pour ensuite se résorber en 2022. Mais comme on le sait, prédire l’inflation est un <a href="https://theconversation.com/previsions-dinflation-lanalyse-na-jamais-ete-aussi-complexe-159279">exercice difficile</a>, et l’inflation pourrait s’avérer plus élevée ou plus basse que prévu. Difficile en conséquence de savoir exactement combien vous paierez votre brique de lait à la fin de l’année…</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/160058/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Baptiste Massenot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Comment la fixation des taux par le conseil des gouverneurs de la banque centrale se répercute-t-elle jusque sur les prix à la consommation ? Explications.Baptiste Massenot, Professeur Associé en Economie et Finance, TBS EducationLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1502012020-11-17T20:52:52Z2020-11-17T20:52:52ZTaux d’intérêt bas et négatifs, nouveau paradigme de la finance ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/369557/original/file-20201116-23-x2cy05.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=17%2C8%2C964%2C655&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les politiques des banques centrales des pays «&nbsp;développés&nbsp;» ont conduit à une situation dont il paraît désormais difficile de sortir.
</span> <span class="attribution"><span class="source">CalypsoArt / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Il est faux de prétendre que les actuels taux d’intérêt quasi nuls et même négatifs sont sans aucun précédent dans l’histoire financière. Dans les années 1930 aux États-Unis, les obligations du Trésor étaient tombées après la crise de 1929 à « taux plancher zéro ». Dans la Confédération helvétique, en 1979, la Banque nationale avait enrayé ainsi l’appréciation du franc suisse.</p>
<p>On peut, plus près de nous, citer l’État français qui en 2012 a placé près de 6 milliards d’obligations à trois mois à – 0,0005 % et à six mois à – 0,006 %. Les exemples ne se limitent d’ailleurs pas à des emprunts d’État et aux interventions des banques centrales (qui ont été les initiateurs de la chute des taux) puisque le groupe agroalimentaire Nestlé avait en février 2015 emprunté sur les marchés financiers à – 0,008 %.</p>
<p>En outre, si l’on se souvient des périodes, pas si lointaines, de fortes hausses des prix, la situation de taux au plancher pourrait perdurer car des taux d’intérêt très bas, voire négatifs, n’apparaissent pas comme aussi inédits sur un temps long qu’il y paraît. Ce caractère négatif des taux était alors la conséquence ex post de la différence entre un taux d’intérêt fixe souscrit lors du prêt et la hausse des prix constatée au moment de son remboursement. La différence peut transformer un taux, nominalement positif, en un taux dit « réel » négatif en terme de pouvoir d’achat de la monnaie. Des années 1950 aux années 1980, les agents économiques et les acteurs financiers ont fait avec.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/369575/original/file-20201116-19-e36ljg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/369575/original/file-20201116-19-e36ljg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/369575/original/file-20201116-19-e36ljg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/369575/original/file-20201116-19-e36ljg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=419&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/369575/original/file-20201116-19-e36ljg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/369575/original/file-20201116-19-e36ljg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/369575/original/file-20201116-19-e36ljg.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=527&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En Suisse, la Banque nationale avait eu recours aux taux négatifs en 1979 pour enrayer l’appréciation du franc suisse.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pixeljoy/Shutterstock</span></span>
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<p>Le contexte nouveau est celui de taux nominaux quasi nuls voire négatifs. Concrètement, avec un taux d’intérêt négatif de – 5 % l’emprunteur d’une somme de 1 000 euros ne doit rembourser que 950 euros ; ou en remboursant 1 000 euros, il voit sa dette globale diminuer de 1050 euros.</p>
<p>Si les exemples passés correspondaient à des situations exceptionnelles, donc temporaires, l’actuel mouvement d’effondrement des taux apparaît toutefois comme une lame de fond. Le phénomène paraît s’installer dans la durée.</p>
<h2>« Le trou noir du capitalisme financier »</h2>
<p>On peut donner pour causes à cet effondrement les politiques des banques centrales des pays dits « développés » (en premier lieu la Réserve fédérale américaine, la Banque d’Angleterre, la Banque du Japon et plus tardivement la Banque centrale européenne) qui, après la crise de 2008, ont baissé leurs taux d’intérêt jusqu’à les rendre négatifs et ont rachetés de titres détenus pas les acteurs financiers, inondant ainsi de liquidités les systèmes financiers. Elles ont enclenché, non pas un « retour à une inflation modérée » comme espéré, mais une spirale baissière des taux d’intérêt.</p>
<p>Cette baisse s’est répercutée notamment sur les taux des prêts immobiliers pour les particuliers. En France, fin 2018, ils étaient tombés à 1,35 % sur 15 ans, 1,55 % sur 20 ans et 1,75 % sur 25 ans (alors que 37 % sont souscrits pour cette durée) : une chute de moitié en cinq ans. Les gouvernements en ont aussi profité pour financer (et refinancer) leurs dettes publiques à moindre coût ; et même les États paraissant les plus sûrs ont eux-mêmes emprunté à taux négatifs. La Banque centrale européenne prélève l’équivalent de 10 % des profits des banques commerciales par les taux négatifs qu’elle leur impose sur leurs réserves obligatoires et additionnelles.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/369553/original/file-20201116-13-tag418.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/369553/original/file-20201116-13-tag418.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/369553/original/file-20201116-13-tag418.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/369553/original/file-20201116-13-tag418.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/369553/original/file-20201116-13-tag418.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=899&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/369553/original/file-20201116-13-tag418.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/369553/original/file-20201116-13-tag418.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/369553/original/file-20201116-13-tag418.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1130&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
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<p>Ces taux semblent paradoxaux. En 2017, l’économiste Jacques Ninet a intitulé un <a href="https://classiques-garnier.com/taux-d-interet-negatifs-le-trou-noir-du-capitalisme-financier.html">ouvrage</a> : Taux d’intérêt négatifs, le trou noir du capitalisme financier (Éditions Classiques Garnier). Selon lui, l’entrée des taux d’intérêt en zone négative a été le symptôme d’un saut vers l’inconnu. Des taux d’intérêt bas et a fortiori nuls sont en effet contre-intuitifs ; et aux yeux de beaucoup injustes parce que le bénéficiaire du prêt devrait récompenser la privation de dépense.</p>
<p>Aussi, dans la plupart des pays, il existe une barrière psychologique et culturelle à la banalisation de ce qui serait des taux d’intérêt nuls et a fortiori négatifs. Cette barrière peut même être légale : à la différence du Danemark ou de la Suisse, prêter à taux d’intérêt négatif paraît <a href="https://www.dalloz-actualite.fr/flash/l-injuste-condamnation-des-prets-taux-negatif#.X7FGUx1Cd7M">impossible en France</a> pour les banques vis-à-vis de leurs clients, <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGIARTI000006444959/1978-07-01/">l’article 1902</a> du code civil stipulant : « L’emprunteur est tenu de rendre les choses prêtées, en même quantité et qualité, et au terme convenu ».</p>
<h2>Sécuriser les dépôts</h2>
<p>Certes, si les taux semblent aujourd’hui inexorablement se rapprocher de zéro dans la plupart des pays, les particuliers ou les entreprises qui empruntent ne bénéficient pas (encore ?) et les épargnants ne subissent pas (encore ?) de taux d’intérêt nominaux négatifs sur leurs dépôts.</p>
<p>Cette situation peut d’ailleurs apparaître comme acceptable pour le prêteur dans certaines circonstances. Il peut par exemple accepter de payer pour son dépôt si son avoir est sécurisé et qu’il est moins tenté de le dépenser alors qu’il anticipe non seulement une récession mais une déflation, donc une baisse des prix.</p>
<p>Un ménage peut également chercher à éviter les risques de vol de cash, les complications d’un transfert matériel de fonds par rapport aux paiements dits « dématérialisés », etc. Ajoutons qu’un agent convertissant une épargne en une devise étrangère peut accepter de payer un taux d’intérêt négatif pour son dépôt s’il anticipe une appréciation de cette monnaie supérieure (ou pour le moins égale) au coût de son dépôt.</p>
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<img alt="Adriaticfoto/Shutterstock" src="https://images.theconversation.com/files/369577/original/file-20201116-23-2udl8x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/369577/original/file-20201116-23-2udl8x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/369577/original/file-20201116-23-2udl8x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/369577/original/file-20201116-23-2udl8x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/369577/original/file-20201116-23-2udl8x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/369577/original/file-20201116-23-2udl8x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/369577/original/file-20201116-23-2udl8x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le prêteur peut accepter de payer pour son dépôt si son avoir est sécurisé.</span>
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<p>Outre les épargnants, les banques pourraient également s’accommoder de taux durablement bas, voire négatifs. Beaucoup imaginent que la faiblesse des taux rendrait automatiquement les établissements déficitaires sur leurs activités de prêt et que le maintien des taux à des niveaux proches de zéro ne pourrait qu’accompagner, voire provoquer, un cataclysme financier.</p>
<p>Une entreprise peut vendre à perte un bien ou un service si celui-ci n’est pas sa seule activité et que ses pertes sont compensées par d’autres gains, pour autant que la loi permette la vente à perte. Il est possible aussi pour une entreprise d’être déficitaire pendant un temps limité en attendant le retour de jours meilleurs afin de conserver ses employés et sa clientèle, autrement dit ses capacités de production et ses parts de marché.</p>
<p>Toutefois, cela paraît a priori impossible de façon permanente, sauf à imaginer que cette activité soit devenue une sorte d’article d’appel, les profits étant réalisés grâce à d’autres services.</p>
<h2>Le pouvoir de création monétaire des banques</h2>
<p>Certes, les banques ont des revenus procurés par des services diversifiés et par leurs facturations. Selon le cabinet Sémaphore Conseil, les frais de tenue de compte ont augmenté de <a href="https://www.lesechos.fr/finance-marches/banque-assurances/banques-les-frais-de-tenue-de-compte-ont-bondi-de-1000-en-dix-ans-1137216">1 000 % en dix ans</a> en France. Il existe aussi des <a href="https://www.meilleurtaux.com/credit-immobilier/actualites/2019-novembre/hausse-des-frais-de-dossier-en-2020-pour-les-emprunteurs-immobiliers.html">frais de dossiers</a> pour les prêts et les emprunteurs souscrivent des <a href="https://finance.orange.fr/finance-perso/immobilier/assurance-emprunteur-la-baisse-des-tarifs-reste-difficile-a-evaluer-CNT000001uSUX4.html">contrats d’assurance couvrant les prêts</a>. On sait également que les banques prélèvent des pénalités importantes en cas de défaillances dans le remboursement des prêts. Remarquons que pour un établissement financier offrir un prêt à – 1 % est profitable si la ressource reprêtée a été obtenue à – 5 % (par exemple auprès de la Banque centrale).</p>
<p>Ajoutons que l’apport de liquidités par les politiques de quantitative easing des banques centrales diminue les risques des prêts quand le prix des biens ainsi acquis, comme l’immobilier, augmente du fait de l’accroissement considérable des moyens pour les payer.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/369578/original/file-20201116-19-8qd5cw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/369578/original/file-20201116-19-8qd5cw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/369578/original/file-20201116-19-8qd5cw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/369578/original/file-20201116-19-8qd5cw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/369578/original/file-20201116-19-8qd5cw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/369578/original/file-20201116-19-8qd5cw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/369578/original/file-20201116-19-8qd5cw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les taux négatifs n’empêchent pas les banques d’être rentables.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Syda Productions/Shutterstock</span></span>
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<p>Mais, la capacité des banques de prêter à taux nuls voire négatifs se situe ailleurs. Contrairement à une croyance commune de tels taux ne rendent pas les banques automatiquement déficitaires (même s’ils diminuent leur rentabilité). Car un prêt bancaire, pour l’essentiel, ne se fait plus par transformation en prêt d’une épargne préalable mais par création nette de monnaie via le crédit.</p>
<p>Pour la banque, le gain de l’émission monétaire se compose de l’ensemble formé par le capital, les intérêts et les frais de dossier payés par l’emprunteur, diminué de toutes les dépenses encourues par elle dans l’activité spécifique de prêt : notamment pour l’ouverture et la gestion du crédit, les dépôts, les paiements et les transferts en relation avec celui-ci et les réserves obligatoires et excédentaires (qui s’élèvent à environ 6 % des dépôts et sont maintenant soumises à prélèvement). Même si les taux devenaient nuls et même négatifs, toute chose égale par ailleurs, l’activité bancaire pourrait rester rentable.</p>
<h2>La quadrature du cercle financier</h2>
<p>Affirmer que les dépôts et épargnes en banques des clients devraient subir un taux d’intérêt négatif, afin de compenser ce qui serait en quelque sorte une perte sèche pour elles, est donc erroné. La proposition ignore l’actuel monopole des banques de création monétaire par le crédit et le dénouement de celui-ci dont elles bénéficient par l’acquittement des intérêts et des frais de gestion mais surtout par le remboursement du capital avancé… pour autant que le prêt soit bien remboursé.</p>
<p>Les pressions à la baisse des taux et de leur maintien à des niveaux planchers sont aujourd’hui multiples. Ils expriment une anticipation négative sur l’évolution de l’économie dite « réelle » : les inquiétudes quant à l’avenir suscitent peu de projets d’investissement (donc peu d’embauche) et une faible consommation. D’où des taux d’épargne élevés qui renforcent la situation.</p>
<p>Or, pour favoriser une relance économique, les autorités monétaires pensent qu’il faut tout faire pour maintenir un crédit pas cher, de façon à encourager la dépense et favoriser ainsi l’investissement. Une illusion quand les taux d’endettement des entreprises et des ménages sont déjà élevés et que la demande effective est insuffisante du fait de la baisse continue depuis les années 1980 dans la répartition de la part des salaires par rapport aux revenus du capital.</p>
<p>On se trouve dans une sorte de quadrature du cercle financier dont la sortie ne peut spontanément résulter d’une autorégulation des marchés financiers. Paraît impossible une remontée des taux d’intérêt sans des décisions publiques (notamment fiscales et de restructuration des institutions de crédit) permettant notamment tant d’éponger l’immense masse de liquidités accumulées… que d’orienter les financements. Une décision politique que rien ne laisse présager.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/150201/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Michel Servet ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les investisseurs mais aussi les banques pourraient s’accommoder d’une situation durable de taux au plancher.Jean-Michel Servet, Honorary professor, Graduate Institute – Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1468662020-09-29T21:07:26Z2020-09-29T21:07:26ZLa politique de la BCE favorise-t-elle les riches ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/359796/original/file-20200924-25-1vadnhw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=61%2C42%2C1934%2C1318&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Certains emprunteurs ont profité de la baisse des taux pour renégocier leur crédit et économiser sur leurs mensualités.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/fufuwolf/6748966341/">FuFu Wolf / Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Prenez un cadre supérieur à Paris, dont les revenus de ménage avoisinent 10 000 euros nets par mois, qui aurait souscrit un prêt immobilier de 500 000 euros en 2013 au taux d’intérêt de 3 %. Grâce à la politique d’expansion monétaire menée depuis par la Banque centrale européenne (BCE), il a réussi à renégocier son prêt en 2017 à un taux d’intérêt de seulement 1 %.</p>
<p>En conséquence, ses mensualités sont passées de 2 300 euros à 1 800 euros, soit un « cadeau » de la BCE de 500 euros par mois. Comme il n’a pas encore fini de repayer son prêt, ce cadeau mensuel dure maintenant depuis plus de trois ans, soit un bénéfice cumulé de presque 20 000 euros.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/359793/original/file-20200924-22-bi3zyy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/359793/original/file-20200924-22-bi3zyy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/359793/original/file-20200924-22-bi3zyy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/359793/original/file-20200924-22-bi3zyy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/359793/original/file-20200924-22-bi3zyy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/359793/original/file-20200924-22-bi3zyy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/359793/original/file-20200924-22-bi3zyy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/359793/original/file-20200924-22-bi3zyy.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="source">Touchatou/Wikimedia</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span>
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<p>Imaginons que ce cadre supérieur a également investi une partie de son épargne sur les marchés boursiers. Les rendements trop bas sur les comptes épargne et obligations d’état ont en effet poussé nombre d’investisseurs à <a href="https://www.lesechos.fr/2012/12/la-chasse-aux-rendements-est-ouverte-367609">chercher des rendements plus élevés</a> sur les marchés boursiers, causant une envolée des prix boursiers.</p>
<p>Les 5 000 euros qu’il a investis dans un <a href="https://www.lerevenu.com/bourse/trackers/trackers-la-solution-pour-faire-aussi-bien-que-lindice-cac-40">fond indexé au CAC 40</a> en 2011 se sont transformés en 10 000 euros juste avant l’arrivée de la Covid, soit une plus-value de 5 000 euros, dont la majeure partie peut être considérée comme un <a href="https://graphseobourse.fr/quantitative-easing-impact-et-consequences/">cadeau de la BCE</a>.</p>
<h2>Pour la BCE, un outil de réduction des inégalités</h2>
<p>Prenez, sur la même période, un homme qui touche le revenu de solidarité active (RSA), soit environ 500 euros par mois, n’a pas connu d’amélioration de ses revenus à la suite de la politique d’expansion monétaire de la BCE. À l’inverse de certaines de ses connaissances, il n’a pas réussi à trouver un travail qui valorise son expertise dans un contexte de chômage, et à l’approche de ses 60 ans, a préféré laisse la place aux jeunes plutôt que de se reconvertir.</p>
<p>Aucune banque n’accepterait de lui prêter de l’argent, donc un taux d’intérêt plus bas n’a rien changé pour lui. Il a également décidé de ne pas risquer ses maigres économies sur les marchés boursiers, encore une occasion manquée de bénéficier des cadeaux distribués par la BCE.</p>
<p>Pourtant, un <a href="https://www.ecb.europa.eu/pub/pdf/scpwps/ecb.wp2190.en.pdf">document de travail</a> réalisé par des économistes de la BCE suggère en fait que la politique expansionniste menée par la BCE aurait réduit les inégalités de revenus, principalement en permettant aux travailleurs les plus précaires de retrouver un travail, voire d’augmenter leurs revenus.</p>
<p>Les 20 % les plus pauvres auraient bénéficié d’une augmentation de revenus d’environ 3 % grâce aux politiques de la BCE alors que les 20 % les plus riches auraient seulement bénéficié d’une augmentation de moins de 1 %.</p>
<p>Les deux cas décrits plus haut seraient-ils donc sans aucun lien avec la réalité ? La plupart des personnes précaires aurait-elle effectivement retrouvé un travail grâce aux politiques de la BCE ? Le cadre supérieur aurait-il été exceptionnellement chanceux en prenant un prêt immobilier et en investissant sur les marchés boursiers aux moments les plus opportuns ?</p>
<p>Pour essayer de mieux comprendre, j’ai converti en euros les cadeaux estimés par les économistes de la BCE. Selon leur document de travail, les 20 % des ménages aux revenus les plus faibles touchent en moyenne 9 200 euros par an. Une augmentation de leurs revenus de 3 % correspond à un cadeau de la BCE d’environ 300 euros par an. En revanche, les 20 % les plus riches touchent eux 94 900 euros par an. Grâce à la BCE, leurs revenus ont augmenté de près de 1 % ou 900 euros par an.</p>
<p>Pour résumer, les politiques de la BCE ont offert 300 euros par an aux plus pauvres contre 900 euros aux plus riches, soit 3 fois plus. Bien que moins extrêmes que les cas décrits plus haut, ces chiffres indiquent que les politiques de la BCE favorisent les plus riches.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/359783/original/file-20200924-18-vnck7c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/359783/original/file-20200924-18-vnck7c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/359783/original/file-20200924-18-vnck7c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/359783/original/file-20200924-18-vnck7c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/359783/original/file-20200924-18-vnck7c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=394&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/359783/original/file-20200924-18-vnck7c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/359783/original/file-20200924-18-vnck7c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/359783/original/file-20200924-18-vnck7c.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=495&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="attribution"><span class="source">Auteur.</span></span>
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<p>L’outil principal de la BCE pour stabiliser l’économie en période de crise repose sur une <a href="https://www.ecb.europa.eu/mopo/decisions/html/index.en.html">baisse des taux d’intérêt</a>. Traditionnellement, la BCE baisse directement les taux auxquels elle prête aux banques mais, depuis la crise de 2008, elle a expérimenté l’achat massif d’obligations d’état (quantitative easing), envoyant les taux d’intérêt à des niveaux encore plus bas.</p>
<p>Une première conséquence de ces politiques a été de stimuler l’emprunt des ménages (tout du moins, ceux qui peuvent se le permettre), par exemple, en baissant les mensualités des contrats de leasing ou des prêts immobiliers.</p>
<h2>Payer pour prêter à l’Allemagne</h2>
<p>Une seconde conséquence a été une fuite des investisseurs sur les marchés obligataires, compréhensible quand on sait qu’il faut désormais <a href="https://www.bloomberg.com/markets/rates-bonds/government-bonds/germany">payer l’État allemand</a> pour pouvoir lui prêter, et une ruée vers les marchés boursiers, provoquant l’envolement des cours boursiers et l’enrichissement des détenteurs d’actions.</p>
<p>Qu’est-ce que pourrait faire la BCE pour rendre ses politiques plus équitables ? À première vue, la BCE ne devrait rien faire. La question de la redistribution des revenus est en effet du ressort des politiciens, et non pas de la BCE, dont les missions principales restent la stabilisation de l’inflation et le secours auprès des banques en difficulté.</p>
<p>Cependant, d’autres outils sont à sa disposition, tel que <a href="https://theconversation.com/lhelicoptere-monetaire-un-outil-de-lutte-contre-les-inegalites-134670">l’hélicoptère monétaire</a>, qui serait non seulement <a href="https://voxeu.org/article/helicopter-money-time-now">au moins aussi efficace</a> que les politiques de taux d’intérêt pour stabiliser l’inflation mais qui serait également plus équitable, dans la mesure où la BCE donnerait le même montant à tous les ménages, quels que soient leurs revenus.</p>
<p>En ayant pioché un outil peu équitable et dont <a href="https://www.bis.org/publ/work628.pdf">l’efficacité reste discutable</a>, la BCE est-elle vraiment restée neutre face à la question des inégalités ?</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/146866/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Baptiste Massenot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Un rapide calcul montre que l’expansion monétaire aurait généré un surplus de revenus trois fois plus important pour les ménages les plus aisés que pour les plus pauvres.Baptiste Massenot, Professeur Associé en Economie et Finance, TBS EducationLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1414032020-06-29T19:07:34Z2020-06-29T19:07:34ZSocial bonds : changement d’échelle pour une finance durable de marché ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/343778/original/file-20200624-132961-1uq2q0w.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C15%2C10023%2C5590&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">L’arrivée de nouveaux investisseurs permet à de plus en plus d’États et d’entreprises de financer leurs projets sociaux.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://image.shutterstock.com/image-photo/growing-money-chart-rise-600w-366267482.jpg">Romolo Tavani / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>La crise sanitaire liée au Covid-19, en réduisant drastiquement la production et les échanges et donc la distribution des revenus, a entraîné une augmentation sans précédent du besoin en financement des économies.</p>
<p>Compte tenu de l’ampleur des dégâts économiques et sociaux et de la nécessité d’y répondre dans l’urgence, les secteurs publics et les entités privées se sont orientés progressivement vers de nouvelles sources de financement, notamment vers les obligations à vocation sociale, les « social bonds ». Il s’agit d’une forme de finance durable de marché responsable intégrant également une dimension sociétale.</p>
<p>Avec la crise, ce récent marché financier a ainsi profité d’une grande accélération notamment dans les pays émergents et sur le continent africain. Selon la plate-forme de données mondiales des titres à revenus fixes, <a href="http://cbonds.com/">Cbonds</a>, les émissions d’obligations vertes, durables et sociales ont augmenté de 23 % comparé à 2019 pour atteindre un volume global de 84 milliards de dollars entre janvier et avril 2020.</p>
<p>La performance record du marché des social bonds pose la question de la transformation des modes de financement et de l’intégration de la notion de finance durable au cœur des marchés financiers.</p>
<h2>Des instruments adaptés en contexte de crise</h2>
<p>Les « social bonds » sont des instruments financiers émis sur les marchés obligataires permettant aux États et entreprises de s’endetter pour financer des actions telles que l’accès à l’éducation, à la santé ou à l’emploi, notamment pour les populations défavorisées.</p>
<p>Le produit de l’émission est exclusivement utilisé pour financer ou refinancer, partiellement ou en totalité, des projets sociaux nouveaux et/ou en cours et il doit respecter les <a href="https://iilab.fr/wp-content/uploads/2019/01/II-LAB-Obligations-Sociales-FR.pdf">principes</a> des investissements socialement responsables (ISR).</p>
<p>L’avantage principal des social bonds réside dans la capacité à financer des projets à fort impact social à des coûts relativement bas. Les social bonds sont fréquemment émis à des <a href="https://www.umoatitres.org/fr/bons-social-covid-19-plus-de-1-000-milliards-de-fcfa-mobilises-sur-le-marche-">taux faibles, voire plafonnés</a>. Dans ces conditions, il s’avère difficile pour les investisseurs de spéculer sur les marchés secondaires.</p>
<p>L’autre avantage réside dans le fait que les émissions se font fréquemment par placement privé (c’est-à-dire par le biais d’une émission réservée à un nombre limité d’investisseurs), ce qui permet d’éliminer toute possibilité de spéculation sur la dette des émetteurs.</p>
<p>Les social bonds représentent un levier pour les acteurs publics et privés pour réaliser ou valoriser des missions à fort impact social.</p>
<p>Au-delà des investisseurs socialement responsables, il existe aujourd’hui sur le marché des capitaux, des prêteurs privés et publics qui investissent particulièrement sur les social bonds (gestionnaires d’actifs et fonds d’investissement, banques, institutions centrales, fonds de pension et assurances, etc.). L’élargissement de la base des investisseurs offre ainsi des opportunités aux États et entreprises pour financer leurs projets sociaux.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1263748531132784640"}"></div></p>
<p>Depuis un demi-siècle, plusieurs formes de finance durable ont été initiées partout dans le monde afin de panser les plaies des exclus et des plus démunis face aux crises et aux chocs économiques. Les formes les plus illustres restent :</p>
<ul>
<li><p>les tontines (placement collectif ou mode d’achat à plusieurs d’un bien mobilier ou immobilier) et la finance solidaire (épargne placée sur des produits financiers solidaires) : système d’entraide en Afrique, en Asie ou en France (<a href="http://www.caisse-solidaire.fr/">Caisse solidaire</a>, <a href="https://www.adie.org/">Association pour le droit à l’initiative économique</a>) ;</p></li>
<li><p>les systèmes d’épargne-crédit avec la création de la <a href="http://www.grameen.com/">Grameen Bank</a> au Bangladesh en 1983 par exemple ;</p></li>
<li><p>le microcrédit et la microfinance dans les années 1970 avec des banques de proximité (« banques villageoises ») et des institutions de microfinance (IMF) qui permettent aux exclus du système bancaire d’accéder à des services financiers ;</p></li>
<li><p>la finance éthique durant les années 1980-1990 qui intègre des critères extrafinanciers dans les décisions de placements et la gestion de portefeuille et favorise les fonds investis dans l’économie « verte et vertueuse » qui valorise la dignité humaine ;</p></li>
<li><p>plus près de nous, la finance islamique qui bénéficie d’aménagements fiscaux en France depuis 2008 et qui recouvre l’ensemble des transactions et produits financiers conformes aux principes de la charia, qui supposent notamment l’interdiction de l’intérêt, de l’incertitude ou de la spéculation.</p></li>
</ul>
<p>Mais cette finance durable reste avant tout liée à des actions de proximité portant sur des petits projets et centrée sur les individus, a priori peu compatible avec les besoins de financement urgents et spécifiques liés à la gestion de la crise sanitaire et de ses impacts.</p>
<p>En effet, l’épidémie mondiale du coronavirus a placé les États et les entreprises devant la nécessité d’emprunter massivement sur les marchés obligataires à l’échelle locale et internationale pour faire face à la hausse de leurs dépenses de fonctionnement.</p>
<h2>Intégrer la durabilité à grande échelle</h2>
<p>Entre février et mai 2020, les émissions locales de [titres Covid-19] des entreprises et banques chinoises répertoriées sur Cbonds (http://cbonds.com/) ont ainsi atteint l’équivalent de 24 milliards de dollars pour des maturités comprises entre 3 et 18 mois.</p>
<p>Sur le marché international, un pays en développement comme le <a href="https://latinlawyer.com/article/1227068/guatemala-makes-landmark-social-bonds-issuance-to-fight-covid-19">Guatemala</a> a réalisé une émission d’obligations Covid-19 d’une valeur de 500 millions de dollars US pour une maturité de douze ans.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/343799/original/file-20200624-132996-6og16e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/343799/original/file-20200624-132996-6og16e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/343799/original/file-20200624-132996-6og16e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/343799/original/file-20200624-132996-6og16e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=297&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/343799/original/file-20200624-132996-6og16e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=374&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/343799/original/file-20200624-132996-6og16e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=374&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/343799/original/file-20200624-132996-6og16e.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=374&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption"></span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://cbonds.com/">Cbonds</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En Afrique, la Banque africaine de développement a levé <a href="https://fnh.ma/article/alaune/covid-19-la-bad-emet-la-plus-importante-obligation-sociale-jamais-lancee-sur-les-marches">3 milliards de dollars</a> sur une durée de trois ans pour aider les pays africains à financer leur plan de riposte contre le Covid-19.</p>
<p>La Banque mondiale pour son compte a mobilisé <a href="https://www.worldbank.org/en/news/press-release/2020/04/15/world-bank-raises-record-breaking-usd8-billion-from-global-investors-to-support-its-member-countries">8 milliards de dollars</a> sous forme d’obligations durables destinées à aider les pays en développement à renforcer leurs systèmes de santé.</p>
<p>Sur la période allant de février à mars 2020, les taux d’intérêt appliqués varient entre 0,75 % et 7,3 % malgré le contexte de tension sur les marchés financiers.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/343797/original/file-20200624-132996-1xeec6r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/343797/original/file-20200624-132996-1xeec6r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/343797/original/file-20200624-132996-1xeec6r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/343797/original/file-20200624-132996-1xeec6r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=256&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/343797/original/file-20200624-132996-1xeec6r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/343797/original/file-20200624-132996-1xeec6r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/343797/original/file-20200624-132996-1xeec6r.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=321&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dispersion des taux d’intérêt de 198 émissions (Chine, Guatemala, pays de l’Union monétaire et économique ouest-africaine, et Banque africaine de développement).</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="http://cbonds.com/">Cbonds</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>À plus long terme, on peut imaginer que la crise du Covid-19 ne sera pas neutre sur le paradigme standard de la finance. Une finance plus durable basée sur la responsabilité sociale pourrait ainsi servir d’amortisseur des crises à venir.</p>
<p>Cette finance durable s’avère certes multiforme, mais la nouveauté est que la crise du Covid-19 l’a fait évoluer d’un modèle de finance intermédiée transitant par les banques et autres institutions de microfinance vers un modèle de finance « marchéisée » par le biais d’instruments tels que les social bonds.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/141403/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>La crise sanitaire a conduit à une émission record de ces obligations qui visent à financer l’accès à l’éducation, à la santé ou à l’emploi.Dhafer Saidane, Full Professor - Head of the Msc Corprate Financial Management - Lille and Suzhou, SKEMA Business SchoolBabacar Sène, Directeur du Centre de Recherches Economiques Appliquées (CREA) et du Laboratoire d’Ingénierie Financière et Economique (LIFE), professeur agrégé en économie spécialisé en Monnaie et Finance, Université Cheikh Anta Diop de DakarNabil Jedlane, Professeur de sciences économiques et Chef de département Management de l'École nationale de gestion et commerce de Tanger, Université Abdelmalek EssaadiLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1397802020-06-03T17:26:33Z2020-06-03T17:26:33ZAvant de demander un prêt, choisissez bien la date dans le calendrier<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/338833/original/file-20200601-95042-1kdfn8x.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=663%2C34%2C5087%2C3449&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Pour remplir leurs objectifs commerciaux, les banquiers ont tendance à octroyer plus de prêts à l’approche des clôtures comptables.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/husband-wife-sign-loan-agreement-home-1448561546">Panumas Yanuthai / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Faut-il demander un prêt en décembre plutôt qu’en janvier ? La question peut sembler incongrue puisque les décisions des banquiers sont supposées être prises en fonction de la situation de l’emprunteur et des caractéristiques du projet financé, et ne devraient nullement prendre en compte le mois de la demande.</p>
<p>Mais, ce serait oublier que les banquiers sont aussi des êtres humains : ils ont tendance à être influencés par le calendrier et la politique commerciale de leur entreprise.</p>
<h2>Quand le moral du banquier va, tout va</h2>
<p>Tout d’abord, les banquiers peuvent être soumis à des biais comportementaux qui influencent leurs décisions d’octroi de prêt. De nombreuses études en finance comportementale ont montré que les investisseurs sur les marchés boursiers étaient soumis à de <a href="https://www.cambridge.org/core/journals/journal-of-financial-and-quantitative-analysis/article/seasonality-in-the-cross-section-of-stock-returns-the-international-evidence/449422A711AB698236AD46F6BA7414D6">tels biais</a>. Leur humeur peut générer des anomalies calendaires.</p>
<p>Par exemple, on observe l’existence d’un « effet week-end », avec des rendements d’actions plus élevés en fin de semaine. Ceci pourrait s’expliquer par la déprime du retour au travail le lundi en comparaison de la bonne humeur avant la fin de semaine.</p>
<p>De façon similaire, plusieurs études ont montré de <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/016517659190173I">meilleurs rendements boursiers</a> avant les vacances ou durant les vacances religieuses qui peuvent là encore s’expliquer par la bonne humeur des investisseurs.</p>
<p>Ces biais comportementaux des investisseurs sur les marchés boursiers peuvent tout aussi bien s’observer chez les banquiers. Ainsi, les périodes associées à une meilleure humeur des banquiers s’accompagneraient d’un octroi plus aisé de prêts.</p>
<p>Ensuite, les banquiers peuvent être soumis à des motifs financiers et vouloir remplir les objectifs fixés par leur hiérarchie. Il s’agit ici de l’hypothèse de <em>trade loading</em> observée dans de nombreux secteurs économiques.</p>
<h2>Viser plutôt la fin du trimestre</h2>
<p>Le trade loading se définit généralement comme la pratique d’offrir des réductions aux clients à la fin du trimestre afin de remplir les objectifs trimestriels. Dans le cas des banques, cela signifie que pour atteindre les objectifs trimestriels (ou annuels) les banquiers sont incités à augmenter le volume des prêts lors du dernier mois du trimestre (en particulier du dernier trimestre) pour atteindre ces objectifs.</p>
<p>La conséquence en serait un octroi plus facile de prêts sur ces périodes.</p>
<p>C’est en tout cas ce que peut laisser penser le graphique ci-dessous.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/338824/original/file-20200601-95059-ojslyh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/338824/original/file-20200601-95059-ojslyh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=440&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/338824/original/file-20200601-95059-ojslyh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=440&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/338824/original/file-20200601-95059-ojslyh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=440&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/338824/original/file-20200601-95059-ojslyh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=553&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/338824/original/file-20200601-95059-ojslyh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=553&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/338824/original/file-20200601-95059-ojslyh.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=553&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Évolution du taux d’octroi de prêts à la consommation en moyenne selon le mois de l’année.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Base de données Peer-to-Peer Lending, U.S</span></span>
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</figure>
<p>Ce graphique est issu d’une <a href="https://ideas.repec.org/p/lar/wpaper/2020-02.html">étude</a> sur les prêts à la consommation aux particuliers. Il présente le taux d’acceptation pour chaque mois, c’est-à-dire le pourcentage de chances qu’a chaque demande de prêt d’être acceptée.</p>
<p>On voit clairement que les mois qui ont les taux d’acceptation les plus élevés sont, par ordre croissant, mars, juin, septembre et décembre, soient les mois de fin de trimestre. Par ailleurs, décembre présente le taux d’acceptation le plus élevé de toute l’année (37 % comparativement à mars par exemple où nous sommes aux alentours de 15 %). Ceci confirme bien la présence de trade loading.</p>
<p>Il est également intéressant de noter que la même étude montre un résultat similaire en ce qui concerne les taux d’emprunt. En effet, ceux-ci sont moins chers en fin de trimestre et tout particulièrement en décembre.</p>
<p>Décembre semble donc être le mois avec le taux d’acceptation le plus fort à un taux plus faible.</p>
<h2>Éviter les comportements opportunistes</h2>
<p>Si ces résultats sont vrais pour les particuliers, qu’en est-il des entreprises ? Peuvent-elles également bénéficier de cet effet de trade loading ?</p>
<p>Une <a href="https://www.ieseg.fr/wp-content/uploads/2012/03/2020-ACF-05.pdf">seconde étude</a> semble le confirmer. En analysant le marché des prêts aux entreprises, cette étude démontre que décembre est le mois où les chances de voir son prêt accepté sont les plus grandes, et ce quelles que soient les caractéristiques de l’emprunteur et de son projet.</p>
<p>Pour les prêts aux entreprises, le montant obtenu par l’entreprise est également plus élevé à la fin du trimestre et à la fin de l’année : le troisième mois de chaque trimestre est associé à un montant plus important que les deux autres, tandis que le quatrième trimestre reste associé à un montant plus élevé que les trois précédents.</p>
<p>Les incitations des banquiers à remplir leurs objectifs trimestriels et annuels les conduisent à adopter des conditions de prêt plus favorables à ces moments de l’année. À demande de prêt égale, les banques accepteraient plus facilement de faire un prêt, pratiqueraient un taux d’intérêt plus faible, accorderaient des montants plus importants à la fin de chaque trimestre et à la fin de chaque année.</p>
<p>Ce résultat est riche d’enseignements pour les emprunteurs et pour les banques. Le savoir devient ainsi un levier de négociation intéressant pour les emprunteurs, particuliers ou entreprises.</p>
<p>Par ailleurs, l’influence de facteurs sans rapport avec la qualité du dossier sur l’acceptation du prêt peut aboutir à de mauvaises décisions de prêt qui peuvent se révéler coûteuses pour les banques. Elles devraient donc veiller à corriger les mécanismes incitatifs qui favorisent le trade loading.</p>
<p>D’ici là, demandez plutôt un prêt en décembre qu’en janvier.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139780/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Les entreprises et les particuliers ont tout intérêt à contacter leur banque en fin de trimestre, et surtout au mois de décembre.Laurent Weill, Professeur d'Economie et de Finance, Université de StrasbourgAurore Burietz, Professeur de Finance, LEM-CNRS 9221, IÉSEG School of ManagementJérémie Bertrand, Professeur de finance, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.