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Le rover Perseverance atterrira sur la planète rouge un peu après 15h40 le 18 février 2021 (heure de New York). SuperCam est l’œil en haut du mât. NASA/JPL-Caltech

Une nouvelle caméra pour traquer des traces de vie sur Mars

Le 17 juillet 2020 décollera la prochaine mission martienne de la NASA, Mars2020. À son bord, le rover Perseverance part chercher des traces de vie fossile et identifier les échantillons qui pourraient revenir vers la Terre dans de futures missions. Sur Perseverance, la caméra SuperCam est un couteau suisse de l’espace qui permet d’analyser le sol martien.

Ce qu’on sait déjà de l’eau et des potentielles traces de vie sur Mars

Quand on regarde une image de Mars, on est frappé par la ressemblance avec la Terre. On y reconnaît facilement des restes de lacs, de rivières, de deltas. La Terre et Mars partagent un passé commun : lors de leurs formations dans le disque d’accrétion autour du Soleil il y a 4,5 milliards d’années, Mars et la Terre étaient des planètes « magma » qui se sont lentement refroidies jusqu’à permettre l’apparition d’eau liquide sur leur surface sous forme de lacs et d’océans. Mais tandis que notre planète a su maintenir ses océans et permettre ainsi la prolifération de la vie, la planète Mars s’est asséchée pour devenir ce monde froid et sec qu’on observe aujourd’hui – une divergence de destins qui date d’il y a environ 3 milliards d’années. Comme les plus anciennes traces de vie sur Terre remontent à environ 3,7 milliards d’années, période où les deux planètes n’avaient pas encore évolué de manière différenciée, on pense que des conditions favorables à l’apparition de la vie sur Mars ont existé.

Site d’atterrissage de Mars2020, dans le cratère martien Jezero. Dans le passé, il existait sur Mars des canaux creusés par l’eau, qui transportaient des sédiments, formant des deltas au fond de lacs. L’image contient les données de deux instruments de la mission Mars Reconnaissance Orbiter, de la NASA : la caméra de contexte et le spectromètre d’imagerie. NASA/JPL/JHUAPL/MSSS/Brown University

Depuis le début des années 2000, un nombre important de missions spatiales en orbite ou à la surface de la planète Mars fournissent des informations précieuses. Ce vaste programme d’étude de la planète s’articule autour de trois axes scientifiques : déterminer si la vie a pu émerger, comprendre les processus et l’histoire du climat, comprendre l’évolution de la surface et de l’intérieur de la planète.

Les missions américaines telles que Mars Odyssey ou Mars Reconnaissance Orbiter mais également la mission européenne Mars Express ont permis entre autres de faire une cartographie des minéraux hydratés, des carbonates, des sulfates par exemple, de faire l’analyse de la surface et de l’intérieur des calottes polaires et d’étudier les processus atmosphériques mettant en évidence le cycle de l’eau ou des poussières qui contribuent aux processus atmosphériques.

L’habitabilité d’une planète, notion-clef

Ces premiers indices sont un premier pas important vers la notion d’habitabilité de Mars. Le terme d’habitabilité désigne le fait qu’une planète a pu réunir à un moment de son histoire l’ensemble des conditions favorables de l’apparition de la vie. Même si les indices recueillis par les premières missions ont donné espoir à la communauté scientifique martienne que la vie aurait pu émerger sur cette planète, ils ne suffisent pas pour en faire la démonstration. En s’appuyant sur ce que l’on connaît sur Terre, et même si ce n’est pas le seul modèle possible, on considère que la preuve pourrait être faite si plusieurs paramètres sont réunis au même endroit, et au même moment géologique. On peut citer parmi ces paramètres la présence d’eau liquide salée à pH modéré sur une longue période géologique, la présence d’une source d’énergie pour initier des réactions chimiques, la présence de matériaux organiques et de biosignatures. De plus, de manière à pouvoir observer les biosignatures aujourd’hui, ces dernières doivent avoir été préservées de la biodégradation due par exemple aux processus de fossilisation ou aux rayonnements cosmiques.

En août 2012, la mission américaine Mars Sample Laboratory a déposé sur Mars le célèbre rover Curiosity. Ce rover embarquant dix instruments scientifiques dont deux français, a comme mission de démontrer l’habitabilité du site d’atterrissage, de caractériser la géologie du site d’atterrissage et le climat de Mars. Le site choisi pour la mission, le cratère Gale, est un cratère d’impact daté de 3,8 à 3,5 milliards d’années avec la présence de couches sédimentaires indiquant la présence passée d’une grande quantité d’eau liquide. Grâce à l’ensemble de ses instruments, cette mission est un grand succès puisqu’elle a maintenant démontré l’habitabilité du site. Ces résultats posent néanmoins de nouvelles questions d’abord sur le cratère Gale lui-même : combien de temps est-il resté habitable ? est-il le seul cratère de Mars à l’avoir été ? Plus globalement : pourquoi l’habitabilité s’est-elle arrêtée ? Et surtout, habitabilité ne signifiant pas forcément que la vie a réellement existé : est-ce que la vie s’est développée sur Mars à un moment de son histoire ?

Un plan ambitieux : ramener des échantillons contenant des biosignatures

La prochaine mission américaine vers la planète Mars, nommée Mars2020 déposera à nouveau sur Mars un rover similaire à Curiosity et nommé Perseverance, de la taille d’une petite voiture, embarquant sept instruments dont un instrument français. Le lancement est programmé pour juillet 2020 et l’atterrissage dans le cratère Jezero est prévu en février 2021. L’objectif principal cette fois est la préparation au retour d’échantillons de traces de vie fossile. L’ensemble des instruments du rover identifieront les meilleurs échantillons susceptibles de renfermer des biosignatures. Grâce à son bras motorisé, une quarantaine de prélèvements seront effectués et mis dans des conteneurs laissés sur place. La mission suivante, en cours de programmation, ira les récupérer pour les ramener sur Terre afin de les analyser en laboratoire. Le site d’atterrissage Jezero a été choisi avec soin pour optimiser les chances de trouver des biosignatures. Il s’agit à nouveau d’un cratère d’impact du même âge que Gale. Il abrite un delta argileux riche en minéraux hydratés, indiquant la présence autrefois d’une grande quantité d’eau liquide.

Le cratère Jezero, où atterrira la mission Mars2020. Les couleurs claires représentent les altitudes plus élevées. L’ellipse indique le site d’atterrissage. NASA/JPL-Caltech/MSSS/JHU-APL/ESA

Parmi les 7 instruments scientifiques de la mission Mars2020 se trouve l’instrument SuperCam développé conjointement par un ensemble de laboratoires, universités et industriels français et américains. Véritable couteau suisse, cet instrument permet d’associer plusieurs techniques permettant l’analyse de la composition chimique des roches par la technique LIBS qui utilise un laser qui les pulvérisent, l’analyse des minéraux et de la matière organique par la technique RAMAN qui analyse la lumière émise par les vibrations des molécules excitées par un laser, ou spectroscopie passive visible et infrarouge. Une caméra de contexte permettra de voir les zones analysées en détails : par exemple une zone sur laquelle on a tiré avec le laser ou encore des veines minéralogiques intéressantes. Enfin, un microphone permettra d’enregistrer les sons. Toutes ces techniques contribuent à faire de l’analyse minéralogique de terrain. Elles sont complémentaires. Si la zone observée est propice, d’autres instruments de la mission feront également des analyses, qui seront toutes utilisées pour identifier des échantillons intéressants à ramener sur Terre.

SuperCam succède à l’instrument ChemCam, qui était embarqué sur le rover Curiosity. Il a été largement amélioré et contribuera à remplir les objectifs scientifiques de la mission.

Avec la mission Mars2020 et le retour d’échantillon de la mission suivante, nous sommes à l’aube de découvrir pour la première fois qu’une autre planète que la nôtre aurait pu dans son histoire favoriser le développement de la vie. La Terre et Mars ne sont que deux petites planètes orbitant autour d’une étoile banale à la périphérie d’une galaxie composée de centaines de milliards d’étoiles accueillant pour la plupart des planètes, parmi des centaines de milliards de galaxies. La recherche de la vie dans notre système solaire et dans l’univers ne fait donc que commencer.


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