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Le laboratoire créatif

Une tactique simple pour chasser une mauvaise habitude

Dernière cigarette ?

Cette chronique est dans la droite ligne et se nourrit des recherches et rencontres publiées sur mon site Les cahiers de l’imaginaire.


Plus de 40 % de nos actions quotidiennes ne sont pas le résultat de prises de décisions conscientes, mais sont plutôt dictées par des automatismes. Bref, pendant plus de 40 % de notre vie active, nous sommes sous l’emprise de nos habitudes !

Il y a de bonnes raisons à cela.

Notre cerveau cherche par tous les moyens à dépenser le moins d’énergie possible

Si nous voulons amorcer des changements durables de comportement, nous ne pouvons que nous en remettre à notre cerveau, même s’il semble vouloir se satisfaire de la loi du moindre effort. En matière d’habitudes et de comportements, il demeure notre meilleur allié.

Pour se débarrasser de nos vieilles habitudes, rien de tel que d’en développer de nouvelles. Il serait donc important de s’interroger sur la manière dont notre cerveau procède lorsqu’il encode un nouvel apprentissage.

C’est l’hippocampe, une région spécifique du cerveau, qui entre tout d’abord en scène. L’hippocampe capte les données d’information en provenance de nos sens et la transmet à notre mémoire. Il agit en quelque sorte d’un enregistreur.

Si on imagine l’hippocampe lorsque celui-ci est en plein travail, et qu’on souhaite lui faciliter la tâche, il faut le laisser se concentrer sur une seule activité à la fois. Contrairement à ce que certains prétendent, notre cerveau n’est pas une machine multitâche.

Même si l’hippocampe dispose d’une attention optimale, en le laissant se concentrer sur une seule activité à la fois, sa capacité de stockage est limitée. Après 20 minutes d’une attention soutenue, il aura besoin d’un temps de récupération, quelques minutes environ, pour traiter l’information captée et la transmettre à la mémoire à court terme.

Par conséquent, afin d’optimiser un apprentissage, il est préférable de concevoir des blocs d’une durée maximale de 15 minutes environ, ponctués de courtes pauses pendant lesquelles l’information enregistrée est digérée soit par des discussions ou, par exemple, des exercices pratiques.

Une connaissance bien comprise facilite la rétention de l’information et la mise en application de cette connaissance grâce à des exercices qui permettent de développer des habitudes de substitution durables.

Ensuite, un transfert de données se produit de la mémoire à court terme vers la mémoire à long terme. Pour faciliter cette passation, un mot-clé à retenir : connexions. Nos réseaux neuronaux se construisent peu à peu à partir de connexions multiples. Ces connexions constituent des schémas de plus en plus élaborés qui s’enrichissent, au fur et à mesure de nos apprentissages, de concepts ou d’exemples concrets qui viennent consolider un savoir.

La construction de ces réseaux se fait en leur greffant progressivement des concepts associés à des expériences pratiques.

Notre mémoire n’est pas un bloc statique. Elle doit être constamment revisitée. Pour qu’il soit efficace, un réseau de connaissances doit être périodiquement stimulé de différentes manières :

  • En partageant ce que vous savez avec autrui.

  • En vous adonnant à une activité qui met en pratique ce savoir.

  • En mettant à l’épreuve vos connaissances : soumettez-vous, si possible, à des quiz périodiques qui testeront vos connaissances.

Le sommeil joue aussi un rôle de consolidation. Pendant que nous dormons, notre cerveau intègre les données de notre mémoire à court terme et les transfère à notre mémoire à long terme, ce qui a pour effet d’enrichir nos réseaux neuronaux. Pendant le sommeil, le cerveau procède également à des opérations de nettoyage en éliminant certaines données qui n’ont pas été activées depuis un certain temps et qui sont par conséquent jugées inutiles.

Britt Andreatta nous rappelle que la plupart de nos apprentissages visent à provoquer un changement durable de comportement.

Et voici la tactique simple !

Il serait plus efficace de substituer une bonne habitude à une mauvaise, plutôt que de tenter de supprimer la mauvaise. La substitution est préférable à une vaine tentative de suppression.

Une étude allemande récente s’interroge sur la façon dont notre cerveau procède pour développer ces fameuses habitudes dont nous aimerions tant nous débarrasser.

Lorsque nous faisons l’apprentissage d’un nouveau comportement, deux processus sont simultanément à l’œuvre et, dans une certaine mesure, ils se concurrencent :

  • Lorsque nous comprenons qu’un comportement dans un contexte donné résulte en une conséquence, une association est établie dans certaines régions de notre cerveau. Il s’agit d’un prérequis pour tout apprentissage d’un comportement qui vise à réaliser un objectif. Lorsque le résultat est conforme à l’objectif fixé, nous renforçons ce comportement en le répétant.

  • Simultanément, une autre association se forme entre le stimulus et sa réponse, une association qui est indépendante du résultat escompté et qui mise uniquement sur la répétition.

Ces deux mécanismes, la première centrée sur les résultats, la seconde sur la répétition sont la base neurologique de la construction d’une habitude.

Comment notre cerveau module-t-il ces mécanismes ?

Pour y voir plus clair, les chercheurs allemands ont eu recours à l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) qui permet de visualiser en temps réel l’activité cérébrale.

53 individus ont participé à une expérience conçue selon les trois étapes suivantes :

  • La création, à l’extérieur du scanneur, d’une série de tâches orientées vers la réalisation d’un objectif.

  • L’induction des habitudes, par l’exécution de la série de tâches, à l’intérieur du scanneur.

  • Les deux mécanismes (mécanisme centré sur les résultats ; mécanisme centré sur la répétition) ont été mis en concurrence à l’intérieur du scanneur.

Les résultats démontrent, en analysant l’activité des zones du cerveau concernées, qu’il serait plus efficace d’atténuer la dépendance à un comportement donné en utilisant le mécanisme d’apprentissage d’un comportement misant sur les résultats, plutôt que de supprimer une mauvaise habitude en tentant de réduire la répétition des mêmes tâches. En d’autres mots, pour se libérer d’une mauvaise habitude, il faut tenter de la remplacer par une bonne habitude, et de faire l’apprentissage de cette nouvelle habitude en mesurant constamment ses effets en fonction des objectifs. L’évaluation rationnelle et constante des effets produits par la mise en œuvre d’une nouvelle habitude est plus efficace à long terme que la simple répétition aveugle des tâches qui constituent la nouvelle habitude dont il faut faire l’apprentissage.

Voilà qui est intéressant. Depuis un certain temps, on entend qu’il vaudrait mieux répéter certaines tâches et oublier nos objectifs ! Bien que les processus, faisant une place importante à la répétition soient essentiels, il demeure important de se fixer des objectifs. Pour aller plus loin, voir l’article sur ce sujet si vous ne l’avez pas encore lu. Comment atteindre ses objectifs ?

Une des façons les plus efficaces d’apprendre, souligne Jeffrey White, est de faire appel à la propension qu’a notre cerveau de penser en images. White rappelle la technique utilisée par les astronautes de la mission Apollo : l’entraînement visio-moteur. Chaque tâche prévue au programme de la mission est d’abord visualisée mentalement, étape par étape. Les analyses de biofeedback qui ont été réalisées pendant l’entraînement démontrent que les stimuli musculaires sont exactement les mêmes qu’il s’agisse d’une visualisation lors de l’entraînement ou de l’exécution réelle des tâches.

Nick Karvounis, Unsplash.

Afin de casser nos mauvaises habitudes et les substituer par de nouvelles, il serait certainement avantageux d’associer à l’apprentissage centré sur les objectifs un entraînement visio-moteur, consistant à visualiser le plus clairement possible toutes les tâches que constituent une nouvelle habitude ainsi que les résultats précis escomptés. J’explique ce concept dans mon article de la semaine dernière « Pourquoi anticiper aide-t-il à réussir ? »_

D’ailleurs, le système que les participants mettront en place pendant le cours en ligne Dessinez votre futur repose sur ces bases.

Si vous souhaitez vous débarrasser d’une mauvaise habitude, lisez également « Ces objets qui vous prennent par les émotions ».

Vous connaissez maintenant la tactique et quelques bons conseils, ne reste plus qu’à mettre tout cela en pratique. Donnez-moi des nouvelles de vos résultats ! Je suis curieuse de savoir en combien de temps vous réussirez à chasser votre mauvaise habitude et par quelle bonne habitude vous l’aurez remplacée !

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