tag:theconversation.com,2011:/us/topics/amazon-40118/articlesAmazon – The Conversation2024-01-30T16:07:24Ztag:theconversation.com,2011:article/2222222024-01-30T16:07:24Z2024-01-30T16:07:24ZSanction contre Amazon : comment penser la surveillance des salariés sans tomber dans l’excès ?<p>La <a href="https://theconversation.com/topics/commission-nationale-de-linformatique-et-des-libertes-cnil-137097">Commission nationale de l’informatique et des libertés</a> (Cnil) vient de condamner, après quatre années de procédure, le 23 janvier dernier la filiale française d’<a href="https://theconversation.com/topics/amazon-40118">Amazon</a> chargée des entrepôts logistiques à une amende d’un montant de 32 millions d’euros. Cela « notamment pour avoir mis en place un système de <a href="https://theconversation.com/topics/surveillance-20967">surveillance</a> de l’activité et des performance des salariés excessivement intrusif », selon le communiqué de la commission.</p>
<p>Le travail, comme l’a rapporté le quotidien <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/amazon-condamne-a-32-millions-deuros-damende-par-la-cnil-pour-surveillance-des-salaries-2070768"><em>Les Échos</em></a>, y semble en effet strictement minuté. Chaque salarié doit enregistrer les colis préparés pour les clients à l’aide d’un scanner qui enregistre les données : les managers peuvent ainsi analyser le temps de latence entre deux scans. Ils disposent par la même d’un indicateur d’inactivité. On se situe dans une stricte logique de taylorisation du travail industriel, « chronométrant chacun des éléments des divers genres de travaux et trouver ensuite le temps minimum en additionnant les temps partiels » comme l’écrivait l’ingénieur <a href="https://www.lesechos.fr/2014/07/frederick-taylor-pere-de-lorganisation-scientifique-du-travail-306063">Frederick Taylor</a> au <a href="https://www.eyrolles.com/Entreprise/Livre/organisation-du-travail-et-economie-des-entreprises-9782708111585/">début du XXᵉ siècle</a>. En France, l’introduction de ce système en novembre 1912 par Louis Renault dans huit de ses ateliers généra deux grèves successives.</p>
<p>S’agissant ainsi d’Amazon, on se situe ainsi au cœur d’une rationalisation on ne peut plus traditionnelle du travail combinée avec une innovation structurante, le commerce en ligne. Et si certaines tâches répétitives pourraient bientôt, comme l’a annoncé la firme de Seattle, être effectuées par des robots humanoïdes, ce contrôle peut s’exercer également dans un autre contexte et sous une autre forme auprès de « cols blancs ».</p>
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<p>Le cas nous conduit en effet à interroger cette problématique managériale contemporaine que constitue cet arbitrage entre confiance envers ses équipes et lâché-prise d’un côté, et contrôle parfois excessif de l’autre.</p>
<p>La surveillance et le contrôle méticuleux débordent en effet largement le cas « usinier » d’Amazon. Le déploiement du télétravail dans la période récente a pu générer des pratiques de cybersurveillance fondées sur la suspicion et la méfiance, cela même alors que sous des formes atténuées elles peuvent toutefois présenter un intérêt pour les salariés.</p>
<h2>Les ambiguïtés de la surveillance</h2>
<p>Chargés officiellement d’identifier les salariés en surcharge de travail de manière à mieux les soulager, ou de faire respecter les règles de sécurité, des <a href="https://www.eyrolles.com/Entreprise/Livre/10-cles-pour-preparer-mon-entreprise-au-travail-a-distance-9782416000980/">logiciels</a> tels Activ Trak, InterGuard, Teramind, Desk Time, InnerActiv, peuvent devenir en réalité des manières de s’assurer de la productivité des télétravailleurs en contrôlant leur activité. D’autres plates-formes enregistrent les frappes sur les claviers des employés (keyloggers), de suivre l’historique du navigateur ou les mouvements de la souris. La vérification de la présence se réalise possiblement à travers le contrôle des heures de connexion, la fréquence des conversations audio, une webcam ou des captures d’écran.</p>
<p>Une <a href="https://www.getapp.fr/blog/1822/mefiance-utilite-rapport-ambigu-salarie-surveillance">étude</a> menée en 2020 révélait déjà que 45 % de salariés travaillent dans une entreprise qui utilise des outils de surveillance. Une <a href="https://www.vmware.com/content/dam/learn/en/amer/fy22/pdf/vmw-virtual-floorplan-exec-summary_r3v2-1162603.pdf">autre</a>, un an plus tard, établissait que 63 % des entreprises françaises prévoyaient d’adopter ou ont déjà mis en œuvre des outils ayant pour objet de renforcer la supervision de leurs employés en situation de télétravail. Un manque de confiance, voire de la défiance, une forme d’infantilisation régressive ?</p>
<p>La surveillance qui s’effectue via du matériel fourni par l’entreprise (ordinateur et applications utilisées) demeure légale sous la condition que les télétravailleurs en aient été <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006900861">informés</a> par leur employeur et qu’une déclaration soit effectuée auprès de la Cnil. Comme tout autre moyen de surveillance, il doit satisfaire des dispositions générales du <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006900785">Code du travail</a> et du règlement général sur la protection des données.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1749413896367018035"}"></div></p>
<p>Selon des conclusions récentes, <a href="https://theconversation.com/8-des-teletravailleurs-seulement-se-sentent-surveilles-220717">peu de télétravailleurs se sentent surveillés</a>. Et quand bien même, cette surveillance semble <a href="https://www.getapp.fr/blog/1822/mefiance-utilite-rapport-ambigu-salarie-surveillance">relativement bien acceptée</a> : c’était le cas de 41 % des interrogés d’une enquête à la sortie des confinements qui y trouvaient même des avantages. Les salariés y voient certains avantages, en particulier le bénéfice d’une confiance mutuelle grâce aux preuves tangibles que le travail est effectivement réalisé, une motivation pour fournir des résultats ou les dépasser, et la prise en compte des heures supplémentaires. Mais pareille surveillance est assurément d’une autre nature et peut s’apparenter à un soutien managérial.</p>
<h2>Quelles réponses managériales ?</h2>
<p>Quatre pistes de réponse à pareilles problématiques peuvent être proposées.</p>
<p>Une première piste fait inévitablement référence à la « question de la <strong>confiance</strong> », laquelle a fait l’objet d’une immense <a href="https://www.jstor.org/stable/258792">littérature</a> tant académique que professionnelle. Trois ingrédients principaux lui sont attribués : les degrés de compétence, de bienveillance (altruisme) et d’intégrité (valeurs). Dans un <a href="https://www.eyrolles.com/Entreprise/Livre/le-management-par-la-confiance-9782212574319/">ouvrage</a> de 2020, un collectif de chercheurs déclinait également le concept en trois modalités, toutes trois devant être considérées par qui veut mettre en place un management par la confiance : la confiance suscitée (comment inspirer confiance), la confiance donnée (faire confiance) et la confiance en soi. Plusieurs <a href="https://newsroom.malakoffhumanis.com/actualites/malakoff-humanis-presente-les-resultats-de-son-barometre-teletravail-et-organisations-hybrides-2022-0686-63a59.html">enquêtes</a> soulignent un fort impact du télétravail en la matière et dressent un bilan encourageant.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/521343/original/file-20230417-974-5x3idt.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<p>Une seconde option réside dans ce que l’on nomme le <strong>management « dialogique »</strong>, inspiré par le philosophe <a href="https://www.seuil.com/ouvrage/la-methode-edgar-morin/9782020092579">Edgar Morin</a>. Il articule trois notions : la confiance, le contrôle et l’autonomisation. La confiance, en effet, ne s’oppose a priori ni au contrôle ni à l’autonomie, mais en constitue le complément nécessaire. En matière managériale, il s’agit alors d’imaginer au cas par cas des formes de pilotage et de contrôle conduisant à l’autonomisation des personnes et des collectifs. Elles sont en réalité de trois natures pouvant se combiner, voire se cumuler : un contrôle par les pairs notamment dans le cadre d’activités de nature collective et collaborative, un contrôle par la culture fondé sur une intériorisation individuelle et collective des valeurs prônées par l’organisation et un contrôle plus classique par les objectifs.</p>
<p>Le <strong><a href="https://academic.oup.com/sf/article-abstract/40/2/190/2227538">« contrat psychologique »</a></strong> constitue une troisième piste. Celui-ci regroupe l’ensemble des attentes, explicites ou non, cohérentes ou non avec le contrat de travail, qu’un travailleur forme sur son entreprise. Il constitue les termes spécifiques d’un échange social potentiellement bénéfique et prometteur en termes d’autonomie et de confiance. C’est ce qu’ont relevé deux <a href="https://www.annales.org/gc/2021/gc144/2021-06-04.pdf">chercheurs</a> lors d’une étude réalisée en 2021 portant sur des collaborateurs nouvellement en situation de télétravail dans un établissement d’enseignement supérieur privé. Ils mettent notamment en exergue une réponse à des « attentes réciproques » : l’employeur va au-delà de ses promesses en accordant davantage de confiance avec le télétravail ; le télétravailleur va au-delà de ses engagements en développant des comportements « hors rôle », en accroissant sa charge de travail et en augmentant son implication.</p>
<p>Le <strong>management de l’isolement professionnel</strong> est une quatrième voie envisageable, en ce qu’elle constitue l’un des aspects saillants potentiellement les plus sensibles du télétravail. Les dirigeants et les managers doivent être particulièrement attentifs à ce risque et à ses effets, sachant par ailleurs que les ressentis peuvent différer. Les individus, nous le savons, ne sont pas tous égaux devant ce phénomène, et n’ont notamment pas tous le même confort à domicile. Plusieurs recherches soulignent l’importance du <a href="https://journals.lww.com/joem/fulltext/2020/12000/teleworking_and_employee_well_being_in_corona.35.aspx">soutien social des collègues</a> et confirment que le soutien social constitue une <a href="https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7675760/">aide précieuse</a> contribuant au bien-être des télétravailleurs. Inversement, une logique de surveillance des télétravailleurs (ainsi qu’une charge de travail supplémentaire) vient compromettre ce soutien. On retiendra plus généralement qu’une approche combinant subtilement soutien, bienveillance et exigence participe, si besoin, à la construction ou au renforcement de la confiance dans la réalisation des activités et leur autonomisation.</p>
<p>À la lumière des enquêtes et recherches citées sous forme de pistes prometteuses et encourageantes, on peut à ce stade en effet mobiliser l’acronyme LAIM, pour « leadership managérial durablement augmenté et inclusif » afin de souligner à travers la légitimité et la confiance qui lui est associée, la largeur de la palette prometteuse qui est potentiellement suggérée aux managers au regard des leviers à actionner pour mobiliser et soutenir leurs équipes. Cet acronyme comporte au passage assurément des analogies avec celui de CARE, pour Confiance, Autonomie, Responsabilité, Engagement.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/222222/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jean-Pierre Bouchez ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Amazon a récemment été condamnée par la Cnil pour une surveillance trop intrusive de ses salariés : comment les gérants des entreprises peuvent-ils répondre à cette problématique ?Jean-Pierre Bouchez, Directeur de recherches en sciences de gestion, Université Paris-SaclayLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2122012023-08-24T16:51:55Z2023-08-24T16:51:55ZLes scénaristes hollywoodiens peuvent-ils terrasser les géants du streaming ?<p>Le 16 août dernier, la Writers Guild of America West (WGA), déjà en grève depuis plus de 100 jours contre les pratiques des studios de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/cinema-20770">cinéma</a>, a publié un « antitrust report » à travers lequel le syndicat des scénaristes hollywoodiens urgent les autorités américaines de la <a href="https://theconversation.com/fr/topics/concurrence-22277">concurrence</a> d’intervenir contre les acteurs du streaming que l’association accuse d’abus de position dominante.</p>
<p>Plus précisément, la WGA ne vise pas tous les acteurs du streaming, mais trois entreprises en particulier qui, à elles seules, contrôlent <a href="https://www.statista.com/statistics/496011/usa-svod-to-tv-streaming-usage/">quatre plates-formes dominantes</a> aux États-Unis : <a href="https://theconversation.com/fr/topics/netflix-53737">Netflix</a>, <a href="https://theconversation.com/fr/topics/amazon-40118">Amazon</a> (Amazon Prime Video) et The Walt <a href="https://theconversation.com/fr/topics/disney-21590">Disney</a> Company (Disney+ et Hulu).</p>
<p>Selon la WGA, la domination de ces trois entreprises sur les maillons les plus essentiels de la chaîne de valeur – production, distribution, marché de l’emploi – en ferait des « gatekeepers » de fait, c’est-à-dire qu’<a href="https://www.causeur.fr/demanteler-les-gafa-google-facebook-amazon-julien-pillot-inseec-165407">à l’instar des GAFAM</a>, ces entreprises seraient en capacité d’imposer les conditions techniques et tarifaires d’accès à ces marchés.</p>
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<p>Le problème serait, toujours selon l’association, de deux ordres. D’une part, ces conditions d’accès seraient défavorables aux intérêts du consommateur et des travailleurs du secteur, au premier rang desquels figurent bien entendu les scénaristes. D’autre part, passée la phase d’euphorie où chaque acteur majeur de l’industrie de l’entertainment s’est imaginé lancer sa propre plate-forme de streaming, le secteur entre dans une phase particulièrement <a href="https://www.forbes.com/sites/bradadgate/2021/12/17/as-svod-subscriptions-slows-industry-consolidation-is-looming/">agressive de consolidation</a> qui, outre de réduire la liberté de choix des consommateurs autant que les débouchés pour les travailleurs et studios indépendants, déséquilibre sérieusement les rapports de force dans l’industrie.</p>
<p>Si des différences stratégiques existent, notamment quant à leur positionnement, les trois entreprises ont en effet en commun de mener une <a href="https://www.ladn.eu/nouvelle-economie/netflix-decryptage-modele-economique/">intégration verticale</a> à différents niveaux. Toutes sont des producteurs – éditeurs – distributeurs qui ont tendance à se réserver leurs productions en exclusivité, et à acquérir un maximum de licences culturelles fortes pour densifier une offre propriétaire (à l’image des <a href="https://theconversation.com/podcast-disney-fox-85-milliards-uniquement-pour-tuer-netflix-109111">rachats de Star Wars, Marvel ou Indiana Jones par Disney</a>, ou de James Bond et Le Seigneur des Anneaux par Amazon). Amazon, qui dispose en plus d’une position dominante sur le segment hautement stratégique des équipements OTT avec son Amazon Fire TV (position qu’il partage avec Roku, avec 36 % de part de marché chacun aux États-Unis), a poussé encore plus loin son intégration verticale, et en ferait bénéficier sa plate-forme vidéo au détriment des offres concurrentes.</p>
<h2>Des abonnements de plus en plus chers</h2>
<p>Cette consolidation est la fois la résultante de stratégies « en silo » qui visent à gagner et retenir des abonnés via des contenus majoritairement exclusifs, mais aussi la volonté des marchés financiers en quête de performance. La consolidation est susceptible d’assécher suffisamment la concurrence pour permettre des augmentations de prix, mais aussi l’abaissement des coûts en réduisant les volumes de production ou le besoin en créativité (l’offre de films de Disney a diminué de 65 % en 2017). Autre facteur d’économies : en réduisant le nombre de débouchés possibles pour les parties prenantes de l’écosystème créatif, employés et studios et scénaristes indépendants en tête, les plates-formes de streaming sont en position de force pour négocier salaires, royalties et droits à leur avantage.</p>
<p>C’est en substance ce que nous raconte la WGA à travers son rapport. Dans un marché qui se consolide, les acteurs qui survivent finissent par avoir un tel pouvoir de marché qu’ils peuvent imposer leurs conditions à tout l’écosystème, notamment dans une optique de réduction drastique des coûts, et d’augmentation tendancielle des prix.</p>
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<p>En réalité, la financiarisation de la stratégie, dans cette industrie hautement compétitive et extrêmement intensive en capital, a créé son propre paradoxe. En effet, pour alimenter une telle stratégie, il faut mettre la main sur des capacités de production et des licences très onéreuses. Ces acquisitions, dans un contexte d’enchères entre compétiteurs suivant la même stratégie, a fini par endetter de façon massive les conglomérats. À l’image de The Walt Disney Company qui a <a href="https://edition.cnn.com/2023/02/07/investing/disney-earnings-bob-iger-preview/index.html">beaucoup de mal à digérer sa fusion avec la Fox</a>.</p>
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<p>Or, cet endettement, à plus forte raison que les potentiels de croissance de l’industrie se tarissent et que la concurrence entre géants s’installe, rend impérieux la recherche rapide de cash, les coupes massives dans les coûts et l’augmentation des prix en étant la résultante. Mais pour gagner suffisamment de pouvoir de marché pour parvenir à résoudre cette équation, il convient d’aller encore plus loin dans la consolidation et chercher de nouvelles proies.</p>
<p>Jusqu’au jour où ce jeu devient même trop intensif en capital pour ceux qui l’ont initié. <a href="https://www.dailymail.co.uk/sciencetech/article-12413239/Get-ready-iMarvel-iStar-Wars-iPixar-Apple-interested-buying-Disney-according-insiders-deal-worth-160-BILLION.html">Apple serait ainsi en embuscade pour profiter d’une potentielle défaillance de Disney ou Netflix</a>. Dans ce contexte, combien de temps des entreprises telles que Paramount, Warner Bros Discovery ou Sony Pictures, acteurs majeurs de leur industrie, mais devenues des petits poissons dans ce capitalisme ultra-financiarisé, pourront-elles encore demeurer « indépendantes » ?</p>
<h2>Un précédent dans les années 1970</h2>
<p>Avec ce rapport, les scénaristes jugent en conséquence incontournable de renforcer la régulation sur le marché du streaming. L’idée est non seulement de limiter la capacité des trois géants à augmenter encore leur pouvoir de marché, mais également de restreindre également leur capacité à en (ab)user.</p>
<p>Quant à savoir si cela peut aboutir, il ne nous revient pas de dire le droit en lieu et place d’un juge à la concurrence. Néanmoins, trois éléments semblent favorables à la WGA dans cette affaire. Le premier, c’est un <a href="https://www.latribune.fr/technos-medias/loi-antitrust-l-administration-biden-apporte-un-soutien-crucial-pour-contrer-le-monopole-des-gafam-907337.html">retour au premier plan de l’antitrust aux États-Unis</a>, sous l’impulsion de l’administration Biden.</p>
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<img alt="Homme regardant la télévision" src="https://images.theconversation.com/files/544522/original/file-20230824-17-k1ihmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/544522/original/file-20230824-17-k1ihmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=348&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/544522/original/file-20230824-17-k1ihmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=348&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/544522/original/file-20230824-17-k1ihmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=348&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/544522/original/file-20230824-17-k1ihmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=437&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/544522/original/file-20230824-17-k1ihmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=437&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/544522/original/file-20230824-17-k1ihmw.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=437&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les géants du streaming se sont imposés au prix d’une stratégie particulièrement coûteuse.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pxfuel.com/en/free-photo-qjgun">Pxfuel</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
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<p>Le deuxième concerne les signaux renvoyés par le marché. La capacité des acteurs à augmenter régulièrement les prix sans avoir à déplorer une fuite massive d’abonnés semble dessiner les contours d’une industrie où les clients sont relativement captifs. D’ailleurs, les stratégies en silo rendent les trois géants du streaming davantage complémentaires que concurrents : bien des ménages sont multiabonnés de façon à avoir accès à des contenus présents exclusivement sur l’une ou l’autre des plates-formes.</p>
<p>Enfin, le troisième élément favorable réside dans le fait qu’un précédent existe dans cette industrie. Dans les années 1970, la TV américaine était alors contrôlée par trois majors verticalement intégrées sur la production et la distribution : NBC, ABC et CBS. La Federal Communication Commission était alors intervenue à travers le règlement <a href="https://en.wikipedia.org/wiki/Financial_Interest_and_Syndication_Rules">Financial Interest and Syndication Rules</a> (Fin-Syn) pour limiter drastiquement le pouvoir de marché des trois leaders. La concurrence qui a pu se mettre en place, à la fois sur le segment de la production, mais aussi sur celui de la distribution TV et câble, avait permis l’émergence de nombreux acteurs et contenus diversifiés dont ont pu bénéficier les consommateurs et les travailleurs de cette industrie.</p>
<p>Bien que ce règlement a pu être suspendu en 1993, le secteur est demeuré depuis sous l’étroite surveillance des autorités de régulation et antitrust. Il est d’ailleurs étrange de constater qu’au titre de la <a href="https://www.fcc.gov/document/amendment-section-73658g-commissions-rules-dual-network">« dual network rule »</a>, un groupe comme Disney n’est pas autorisé à posséder deux parmi les quatre principaux réseaux TV (c’est à ce titre qu’il a dû renoncer à récupérer celui de Fox lors de la fusion de 2019), mais que rien d’analogue ne soit prévu sur le marché du <a href="https://theconversation.com/fr/topics/streaming-52254">streaming</a>, devenu pourtant incontournable. Quoi qu’il en soi, les deux situations présentent de troublantes similitudes. Reste à savoir si les mêmes causes produiront les mêmes effets.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/212201/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Pillot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Plusieurs éléments plaident la cause la Writers Guild of America, en grève depuis plusieurs mois, qui dénonce l’abus de position dominante de Netflix, Amazon et Disney sur le marché du streaming.Julien Pillot, Enseignant-Chercheur en Economie (Inseec) / Pr. associé (U. Paris Saclay) / Chercheur associé (CNRS), INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2095532023-07-30T15:05:24Z2023-07-30T15:05:24ZLa face cachée des retours produit d’Amazon<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/537003/original/file-20230712-22-4x8cqf.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=6%2C0%2C4243%2C2660&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le centre de traitement des commandes d'Amazon, d'une superficie 93 000 m², à Fife, en Écosse. </span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/scottishgovernment/6352123451/">Gouvernement d'Écosse, photo de Christ Watt</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/">CC BY</a></span></figcaption></figure><p>Si le commerce électronique peut faciliter les achats, il possède également un côté obscur que la plupart des consommateurs ne voient jamais.</p>
<p>Supposons que vous profitiez d’une promotion pour commander une brosse à dents électrique et deux chemises sur Amazon. Vous déballez votre commande et découvrez que la brosse à dents électrique ne se recharge pas et qu’une seule des deux chemises vous convient. Vous décidez donc de renvoyer la chemise à la mauvaise taille et la brosse à dents électrique.</p>
<p>Les retours de ce type peuvent sembler simples, et ils sont souvent gratuits pour le consommateur. Mais leur gestion peut s’avérer si coûteuse pour les détaillants que de nombreux articles retournés sont tout simplement jetés.</p>
<p>En 2022, les retours ont représenté <a href="https://nrf.com/research/2022-consumer-returns-retail-industry">743 milliards d’euros</a> de ventes perdues aux revendeurs, rien qu’aux États-Unis. C’est presque autant que l’<a href="https://nces.ed.gov/fastfacts/display.asp?id=66">argent public</a> alloué aux écoles et collèges publics et c’est quasi <a href="https://nrf.com/research/customer-returns-retail-industry">deux fois</a> le coût des retours en 2020. Le processus de retour, avec le <a href="https://www.nature.com/articles/s41467-020-20738-4">transport et l’emballage</a>, a également généré en 2022 environ <a href="https://4771362.fs1.hubspotusercontent-na1.net/hubfs/4771362/2022%20Impact%20Report/Optoro_2022%20Impact%20Report.pdf">24 millions de tonnes d’émissions de dioxyde de carbone</a> réchauffant plus encore l’atmosphère.</p>
<p><iframe id="dmnnN" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/dmnnN/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Ces coûts comme ces émissions créent un problème de durabilité pour les détaillants et la planète.</p>
<p>En tant que <a href="https://scholar.google.com/citations?user=fbARgoUAAAAJ&hl=en&oi=ao">chercheuse en gestion de la chaîne d’approvisionnement</a>, je suis de près l’évolution de la logistique du commerce de détail. Voici ce que l’on trouve lorsqu’on ouvre la boîte de Pandore des retours de produits.</p>
<h2>Les retours commencent par des kilomètres de transport</h2>
<p>Vous avez donc remballé la chemise et la brosse à dents électrique dont vous ne voulez plus et vous les renvoyez gratuitement grâce aux accords passés entre Amazon et les transporteurs (UPS aux États-Unis). Et maintenant ?</p>
<p>Vos articles sont acheminés <a href="https://www.mwpvl.com/html/amazon_com.html">vers les entrepôts d’Amazon</a> dédiés au traitement des retours. Cette seule étape du processus coûte de l’argent au détaillant – <a href="https://www.cbre.com/insights/viewpoints/reverse-logistics-tis-the-stressful-season-for-holiday-gift-returns">66 % du coût d’un article de 50 dollars selon une estimation</a> – et émet du dioxyde de carbone car les camions et les avions transportent les articles sur des centaines de kilomètres. Le plastique, le papier ou le carton de l’emballage de retour deviennent également des déchets.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Avion de l’entreprise DHL sur le tarmac d’un aéroport allemand" src="https://images.theconversation.com/files/537034/original/file-20230712-15-gnfy1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/537034/original/file-20230712-15-gnfy1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/537034/original/file-20230712-15-gnfy1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/537034/original/file-20230712-15-gnfy1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/537034/original/file-20230712-15-gnfy1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/537034/original/file-20230712-15-gnfy1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/537034/original/file-20230712-15-gnfy1f.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les colis renvoyés peuvent parcourir des centaines de kilomètres depuis les mains du client, vers un centre de retour, et parfois jusqu’au fabricant.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/schkeuditz-germany-29th-may-2022-many-2165816297">Gorloff-KV/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Le traitement d’un retour prend <a href="https://www.shopify.com/enterprise/reverse-logistics">deux à trois fois plus de temps</a> que l’expédition initiale de l’article car celui-ci doit alors être déballé, inspecté, réemballé et réacheminé. Ces opérations augmentent encore plus le coût pour Amazon, en particulier dans un marché du travail tendu. Les employés doivent ouvrir manuellement les colis, les étudier et, en fonction de la raison du retour, décider de la suite des opérations.</p>
<p>Si un magasinier décide que la chemise trop grande pour vous peut être revendue, elle sera alors remballée et renvoyée dans un autre entrepôt.</p>
<p>Lorsqu’un autre consommateur commandera la chemise, celle-ci sera prête à être emballée et expédiée.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Tapis roulants sur lesquels défilent des cartons" src="https://images.theconversation.com/files/538240/original/file-20230719-27-946n5c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/538240/original/file-20230719-27-946n5c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/538240/original/file-20230719-27-946n5c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/538240/original/file-20230719-27-946n5c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/538240/original/file-20230719-27-946n5c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/538240/original/file-20230719-27-946n5c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/538240/original/file-20230719-27-946n5c.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Les entrepôts de vente au détail sont souvent de vastes bâtiments équipés de tapis roulants et de piles de produits et de matériaux d’emballage.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/cardboard-boxes-on-conveyor-belt-distribution-148488479">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Remise à neuf, si la réparation coûte moins cher que le produit</h2>
<p>Si l’article est défectueux, comme la brosse à dents électrique de notre exemple, le magasinier peut la retourner au fabricant pour qu’il la répare et le remette à neuf. L’article est alors remballé et chargé dans un camion, voire un avion, pour être renvoyé au fabricant, ce qui entraîne davantage d’émissions de dioxyde de carbone.</p>
<p>Si la brosse à dents électrique peut être réparée, le produit remis à neuf est prêt à être vendu à nouveau sur le marché de la consommation, <a href="https://www.nytimes.com/wirecutter/money/buying-refurbished-products/">souvent à un prix inférieur</a></p>
<p>.</p>
<p>La remise à neuf des produits retournés permet de mettre en place une chaîne d’approvisionnement en boucle fermée dans laquelle les produits sont réutilisés au lieu d’être éliminés comme des déchets, ce qui rend le processus plus durable que l’achat d’un nouvel article.</p>
<p>Il arrive cependant que les réparations coûtent plus cher que le prix de revente du produit. Lorsqu’il est plus coûteux de réapprovisionner ou de remettre à neuf un produit, il peut être plus économique pour le détaillant de jeter l’article.</p>
<h2>Les décharges : une destination courante des retours</h2>
<p>Si l’entreprise ne peut pas revendre la chemise ou remettre à neuf la brosse à dents électrique de manière rentable, les perspectives s’amenuisent pour ces articles. Certains sont vendus en <a href="https://fr.news.yahoo.com/jai-%C3%A9t%C3%A9-lentrep%C3%B4t-vend-retours-122000206.html?guccounter=1&guce_referrer=aHR0cHM6Ly93d3cuZ29vZ2xlLmNvbS8&guce_referrer_sig=AQAAANpfljEP9yQSJu_c6x1x5YEJYA7iuAxBD7PdRQjZVnMAQN0lna3mOuy8SqJFcXCjiq06wKhwmsE6VmQzJQXUYFcm2pV2c2iUvIVr-9-COSmk_Fgu-K5_utGtNhxcS8pvYHb-cwFkQFdrMjUEYtkl0s_4LWNCWPdkSCb1nz617W4M">vrac</a> à des magasins discount. Souvent, les produits renvoyés finissent tout simplement dans des décharges, parfois à l’étranger.</p>
<p>En 2019, plus de <a href="https://info.optoro.com/hubfs/Optoro%202019%20Impact%20Report.pdf">deux milliards de kilos</a> de déchets provenant des retours ont ainsi atterri dans des décharges, selon une estimation de la plate-forme technologique de retour Optoro. En 2022, ces déchets estimés auraient presque doublé <a href="https://4771362.fs1.hubspotusercontent-na1.net/hubfs/4771362/2022%20Impact%20Report/Optoro_2022%20Impact%20Report.pdf">pour atteindre environ 4 milliards de kilos</a>.</p>
<h2>La fin de l’ère des retours gratuits ?</h2>
<p>Il y a quelques années, les clients qui souhaitaient renvoyer des articles par la poste devaient souvent le faire à leurs propres frais. Cette situation a changé quand qu’Amazon a commencé à offrir des retours gratuits et à mettre à disposition des points de dépôt faciles à utiliser dans les magasins UPS ou Kohl’s. D’autres détaillants ont alors emboîté le pas pour faire face à la concurrence, en considérant que ces retours gratuits étaient un <a href="https://info.optoro.com/report-the-anatomy-of-returns">moyen de fidéliser les clients</a>. Faire incomber au client la tâche de retourner lui-même un colis en se rendant dans un magasin physique permet certes de réduire les coûts de transport et d’entreposage, mais cette option n’est pas toujours considérée comme pratique pour le consommateur. De ce fait, <a href="https://nrf.com/research/2022-consumer-returns-retail-industry">seul un quart environ</a> des achats en ligne sont retournés en personne au magasin.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="Des ouvriers Amazon du centre de logistique de Velizy trient des colis" src="https://images.theconversation.com/files/538277/original/file-20230719-27-vhqr1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/538277/original/file-20230719-27-vhqr1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/538277/original/file-20230719-27-vhqr1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/538277/original/file-20230719-27-vhqr1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/538277/original/file-20230719-27-vhqr1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/538277/original/file-20230719-27-vhqr1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/538277/original/file-20230719-27-vhqr1.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La gestion des retours demande plus de travail que l’exécution de la commande initiale, en partie parce qu’elle implique l’inspection de l’article et son réemballage.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/france-sept-23th-2019-logistics-activity-1514808617">Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Mais ce temps est peut-être en passe <a href="https://www.cbsnews.com/miami/news/retailers-cracking-down-online-returns-charging-fees/">d’être résolu</a>, avec un pourcentage de détaillants facturant l’expédition des retours passé de <a href="https://corp.narvar.com/resources/2022-returns-policy-benchmark">33 % à 41 % en 2022</a>.</p>
<p>Les détaillants essaient plusieurs autres techniques pour réduire le taux de retour, les déchets et les pertes, qui reviennent finalement aux consommateurs sous la forme de prix plus élevés.</p>
<p>Certains détaillants ont raccourci la fenêtre de retour, limité les retours fréquents ou cessé d’offrir des retours gratuits. D’autres stratégies incluent des <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/00222437231154871">cabines d’essayage virtuelles</a> et des guides d’essayage plus clairs, qui peuvent contribuer à réduire les retours de vêtements, tout comme des photos et des vidéos de haute qualité qui reflètent fidèlement la taille et la couleur. Si les consommateurs utilisent ces outils et font attention à la taille, ils peuvent contribuer à réduire l’empreinte climatique croissante du commerce de détail.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/209553/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Simone Peinkofer ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La promesse des retours gratuits du géant Amazon a un coût financier et environnemental colossal. Par souci d’économie, un nombre croissant de colis renvoyés finissent à la décharge.Simone Peinkofer, Assistant Professor of Supply Chain Management, Michigan State UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2004742023-03-27T16:49:05Z2023-03-27T16:49:05ZLes drive, un bouleversement pour les salariés des grandes surfaces traditionnelles<p>La pandémie et les confinements promettaient des ruptures : rupture des manières de travailler, des mobilités ou des manières de consommer avec le développement rapide et forcé du <em>click and collect</em> et autre <em>drive</em>. Les transformations du commerce électronique vont-elles seulement perdurer ? Les grandes surfaces seraient-elles un modèle en déclin ?</p>
<p>Beaucoup se sont intéressés aux clients, moins peut-être aux salariés des groupes qui ont tenté de se conformer à la transformation. Pour eux, le drive constitue une <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352146516000363">innovation organisationnelle, structurelle et logistique</a>. Les pratiques quotidiennes, les routines, les valeurs et les croyances, tout ce qui façonne un sens collectif dans l’entreprise et ce que l’on nomme en sciences de gestion la <a href="https://www.hup.harvard.edu/catalog.php?isbn=9780674272286">« logique institutionnelle »</a> vont être bouleversés. Elle définit ce qui est accepté et ce qui est normal, elle est perçue par les acteurs comme étant le principe organisateur et structurant de l’activité et ne peut être remise en cause.</p>
<p>Théoriquement, lorsqu’une organisation historique met en place un nouveau service, les logiques peuvent s’articuler schématiquement de <a href="https://www.jstor.org/stable/25682424">quatre façons</a> : le nouveau service peut s’inscrire dans la continuité de ce qui se faisait avant ; lui imposer au contraire des valeurs, des croyances et des pratiques nouvelles ; deux logiques peuvent cohabiter séparément ou bien, encore, s’hybrider.</p>
<p>Ce que nous montrons à partir d’une étude de cas, réalisée par observations et entretiens durant huit mois, est que la création des points de retrait dans les structures traditionnelles de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/grandes-surfaces-108024">grand magasin</a> impose plutôt aux équipes une logique de rupture. Nos <a href="https://www.cairn.info/revue-innovations-2022-2-page-135.htm">recherches</a> mettent ainsi en évidence les difficultés rencontrées par les organisations déjà existantes dans la mise en place d’un service de commerce électronique.</p>
<h2>Être les premiers</h2>
<p>Dans notre cas, s’impose d’abord dans un premier temps un engouement pour le nouveau service, un drive implanté à côté d’un magasin historique. Les salariés se réjouissent de voir l’organisation, fidèle à l’une de ses valeurs, privilégier ce que demande le client pour le lui proposer. L’un d’entre eux explique :</p>
<blockquote>
<p>« C’est normal les gens n’ont plus le temps : le drive, c’est ce que veulent les gens ! »</p>
</blockquote>
<p>Outre l’attachement au client, le drive se voit également justifié par la figure du fondateur de la franchise. Nous avons observé dans l’organisation une croyance forte en la pertinence de ce que développent ceux qui sont érigés comme ses grands hommes, notamment ses fondateurs. Un autre poursuit :</p>
<blockquote>
<p>« M. M., c’était quelqu’un, il avait une vision, c’était un innovateur : il a fait plein de choses et ne s’est jamais trompé. »</p>
</blockquote>
<p>L’innovation est d’ailleurs affichée comme une valeur par la direction et les salariés. Tout au long de nos entretiens, les acteurs soulignent largement la modernité et la supériorité des outils nouveaux. L’allusion à la compétition est implicite mais présente : être les premiers, les plus innovants. Le directeur nous présente ainsi, enthousiaste :</p>
<blockquote>
<p>« Vous avez vu cette machine ? Cette machine, c’est la seule en France dans un drive ! »</p>
</blockquote>
<p>L’idée d’une continuité de l’un vers l’autre apparaît cependant rapidement comme illusoire.</p>
<h2>De Ikea à Amazon</h2>
<p>Un désenchantement se dessine en effet et des ruptures signalent rapidement que tout ce qui existait dans le magasin historique n’allait pas pouvoir être transposé dans la nouvelle infrastructure. L’ampleur des différences semble même alimenter un questionnement identitaire. Le même directeur, enthousiaste pour une machine, esquivera ainsi largement nos questions sur l’articulation entre le magasin et le drive. Il laisse plutôt répondre la formatrice du groupe, chargée d’accompagner la transformation.</p>
<blockquote>
<p>« C’est elle l’experte après tout. »</p>
</blockquote>
<p>À notre départ, il dressera même le constat suivant :</p>
<blockquote>
<p>« C’est simple en fait, le magasin et le drive, il n’y a rien à voir ! »</p>
</blockquote>
<p>Les grands moulinets de bras qui accompagnent la parole témoignent d’une importante perte de repères. Une grande rupture avec le magasin est notamment l’absence de mise en scène des produits qui ne vont pas être théâtralisés comme au sein des rayons entre lesquels les clients se promènent. Il ne peut en fait pas y avoir de parcours client.</p>
<p>Cet élément est inhérent à la logique du magasin mais ne peut trouver d’existence dans l’entrepôt du drive. Ce dernier est pensé dans une optique de rapidité, là où on cherche à allonger le temps passé par le client en magasin et à lui proposer des achats complémentaires.</p>
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<p>En fait, là où les salariés voyaient au départ une complémentarité entre le drive et le magasin en citant volontiers l’exemple des grandes surfaces Ikea, dans lesquelles on se promène avant de retirer ses articles à l’entrepôt, ils finissent plutôt par décrire le point de retrait à partir d’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/amazon-40118">Amazon</a>. C’est l’image des grandes étagères du géant du web qui est évoquée comme ressemblant au drive et à son organisation lors de la visite du site.</p>
<p>Le directeur de l’activité explique également que la profondeur du stock, le choix entre les produits ne peut pas être le même qu’en magasin. La gestion de ce qui est nommé « le squelette » est vérifiée quotidiennement sur le logiciel de ventes et de comparaison aux autres magasins et drive. Seules quelques rares catégories de produits présentent le même type de stock entre les deux services. Ce sont les produits ultras frais, tels que les sushis ou les poulets rôtis, ou bien le gaz.</p>
<h2>De la proximité à l’accessibilité</h2>
<p>L’Histoire de la transformation de l’organisation ne s’arrête pas là. Les ruptures engendrées par l’implantation du drive vont en effet agir rétroactivement sur l’infrastructure historique. La théâtralisation est absente de l’entrepôt ? Elle prendra encore plus d’importance au magasin. La formatrice le souligne bien :</p>
<blockquote>
<p>« C’est désormais le rôle de l’hypermarché de capitaliser sur les hommes, le métier et la théâtralisation. »</p>
</blockquote>
<p>Si la proximité, le fait de travailler avec des producteurs locaux pour des clients locaux, était importante pour ce magasin situé en zone périurbaine, le service de point de retrait bouscule l’ensemble. De l’avis de tous, l’envie de passer une journée de congé à faire ses courses a disparu et le directeur insiste :</p>
<blockquote>
<p>« La proximité est en train de devenir caduque. Ce qui compte, c’est l’accessibilité. »</p>
</blockquote>
<p>Soulignons pour conclure que les enseignements de ce travail ne sauraient s’appliquer à tous les types d’organisations. C’est la création d’un drive à côté d’un service historique que nous avons étudiée, et non l’implantation directe d’une organisation issue de l’économie numérique. Pour ces dernières, on peut faire l’hypothèse de logiques bien différentes.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/200474/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Solène Juteau ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Pour le personnel, le développement du commerce électronique a été vu comme une chance avant de provoquer tout un questionnement identitaire sur leur rôle.Solène Juteau, Enseignant Chercheur et Directrice M2 Entrepreneuriat Digital, EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/2001462023-02-21T17:46:04Z2023-02-21T17:46:04ZLes robots vont-ils remplacer les livreurs dans nos villes ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/510663/original/file-20230216-20-fye2s3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=344%2C420%2C4757%2C3403&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les robots autonomes ont l’avantage de pouvoir accéder à des zones interdites aux camionnettes.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.pexels.com/photo/delivery-robots-beside-building-8566538/">Kindel Media/Pexels</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les villes grandissent en nombre d’habitants et en taille géographique, ce qui pose des défis majeurs en termes d’habitabilité, d’écologie et d’accessibilité. Selon les prévisions actuelles, l’activité totale du secteur de transport va ainsi être <a href="https://www.itf-oecd.org/itf-transport-outlook-2021">multipliée par 2,3 pour les personnes et de 2,6 pour les biens</a> entre 2015 et 2050. La pollution ainsi que les effets néfastes pour la santé liés au transport routier devraient en outre concerner la plupart des grandes villes du monde.</p>
<p>Depuis 2017, des avancements technologiques ont permis de mener certaines expérimentations. L’un des premiers exemples fut la <a href="https://www.slashgear.com/790145/dominos-autonomous-pizza-delivery-robot-doesnt-need-tipping/">livraison de pizzas par drones</a>. Des engins volants ont ensuite été testés aux États-Unis par le géant du e-commerce Amazon dans des <a href="https://www.aboutamazon.com/news/transportation/amazon-prime-air-prepares-for-drone-deliveries">zones suburbaines</a> ou rurales. Des drones basés <a href="https://www.wired.com/2017/02/drone-slinging-ups-van-delivers-future/">sur des camionnettes</a> ont également été proposés pour augmenter l’efficacité du système de livraisons dans des zones où les points de livraisons sont espacés.</p>
<p>En parallèle, des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/robots-22774">robots</a> autonomes roulants ont été testés en milieu urbain où une utilisation significative de drones reste trop dangereuse en cas de chute de l’engin. Par exemple, un nouveau véhicule de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/livraison-63302">livraison</a> robotisé de restauration rapide a été testé en 2021 à Shanghai, en Chine. Les clients pouvaient choisir et même <a href="https://www.bloomberg.com/news/videos/2021-01-06/driverless-kfc-food-truck-video">payer leur repas directement auprès du véhicule</a>.</p>
<h2>Risque moindre d'accident</h2>
<p>Dans ces zones denses, notre <a href="https://hal.science/hal-03272606">recherche</a> récente a montré que des livraisons par ces robots autonomes peuvent être très efficaces d’un point de vue opérationnel. Ces véhicules, dont la vitesse varie typiquement entre 5 à environ 50 km/h qui peuvent transporter entre 10 et 150 kilogrammes avec une autonomie de 6 à 80 kilomètres sont en effet généralement plus petits, plus lents, plus silencieux et plus propres que les voitures ou les scooters. D’autres chercheurs ont même trouvé que la consommation d’énergie et les <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2352146520303598">émissions de CO₂ pouvaient être considérablement réduites</a> dans les zones urbaines grâce à ce type de livraisons autonomes.</p>
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<p>Dans une partie de notre étude réalisée dans la ville de Xi’an en Chine, nous avons effectué une analyse approfondie de la <a href="https://hal.science/hal-02877730">planification opérationnelle</a> de ces livraisons par robots autonomes contrôlés à distance et reliés à des opérateurs distants. Selon nos résultats, un tel système permet une réduction des coûts de plus de 10 % par rapport à des approches de livraison plus classiques.</p>
<p>Dans notre système simulé, les robots sont transportés proche de zones de livraison par les camionnettes, permettant ainsi de dépasser les limites d’autonomies et les vitesses basses des robots. Ils sont ensuite déployés dans certaines zones de la ville inaccessibles aux voitures, comme les campus ou les zones piétonnes, où ils présentent un risque moindre d’accident. Les robots reviennent ensuite à la camionnette qui les réalimente en électricité (recharge ou changement de batterie) puis reprennent des colis pour de nouvelles livraisons.</p>
<h2>Des centres urbains moins attrayants ?</h2>
<p>Les caractéristiques techniques des véhicules évoluent aujourd’hui rapidement, notamment en termes de capacité des batteries et de la conduite automatisée. Nous pouvons être optimistes quant à de très prochains développements technologiques, car les robots autonomes permettent de diminuer les coûts des livraisons et de réduire leurs impacts environnementaux négatifs.</p>
<p>Cependant, elles poseront également des questions. Tout d’abord, les interactions humaines seraient réduites, même s’il existe des idées de <a href="https://avfutures.nlc.org/jobs-and-the-economy/">combiner des convoyeurs robotisés et des humains</a> dans les zones densément peuplées pour assurer des services locaux personnalisés.</p>
<p>D’autre part, l’augmentation attendue des livraisons urbaines pourrait réduire la fréquentation des <a href="https://theconversation.com/fr/topics/commerce-20442">commerces</a> locaux et par conséquent l’attrait des centres urbains, ce qui changerait le visage de nos villes. Quel que soit le destin de la livraison, les robots autonomes entraîneront des conséquences économiques et sociétales qui transformeront nécessairement les zones urbaines.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/200146/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Jakob Puchinger est professeur rattaché au LGI de CentraleSupélec, Université Paris-Saclay.
La thèse de Shaohua Yu, encadré par Jakob Puchinger a été en partie financée par le China Scholarship Council.
Jakob Puchinger a été salarié de l'IRT SystemX co-financé par le "programme d'investissement d'avenir" français.</span></em></p>Une étude de cas en Chine montre qu’un système automatisé permet une réduction de 10 % des coûts par rapport à un système de livraison classique.Jakob Puchinger, Professor in Supply Chain Management and Logistics, EM NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1977342023-01-15T12:48:22Z2023-01-15T12:48:22ZL’intelligence artificielle pour mieux recruter… vraiment ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/504257/original/file-20230112-12-uaauy7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=59%2C23%2C7847%2C3497&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Elles promettent beaucoup, mais faire aveuglément confiance aux intelligences artificielles pour recruter le candidat idoine est loin d'être sans danger.</span> </figcaption></figure><p>Les outils intégrant des algorithmes mobilisant l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/intelligence-artificielle-ia-22176">intelligence artificielle</a> (IA) ont progressivement gagné toutes les étapes du processus de <a href="https://theconversation.com/fr/topics/recrutement-33086">recrutement</a>. En 2018, déjà, 64 % des 9000 recruteurs interrogés dans une <a href="https://business.linkedin.com/content/dam/me/business/en-us/talent-solutions/resources/pdfs/linkedin-global-recruiting-trends-2018-en-us2.pdf">étude</a> en ligne déclaraient les utiliser parfois ou souvent dans le cadre de leur activité. 76 % pensaient que cette technologie aurait dessus un impact significatif. Une <a href="https://www2.deloitte.com/content/dam/Deloitte/us/Documents/human-capital/us-cons-hr-bots-new-super-power-for-workforce.pdf">enquête</a> plus récente suggère même un lien entre IA et performance : 22 % des entreprises les plus performantes ont recours à un recrutement « prédictif » ou « augmenté », contre 6 % des organisations les moins performantes.</p>
<p>De quoi s’enthousiasmer ? Les promesses faites par les acteurs du marché sont très importantes : du temps de gagner, des profils mieux identifiés, des stéréotypes éliminés… Au-delà, se posent néanmoins de nombreuses questions techniques, éthiques et juridiques.</p>
<p>Pour y répondre, un projet de règlement de l’Union européenne (« AI-act ») est en préparation. Il classe d’ailleurs les systèmes destinés à être utilisés pour le recrutement ou la sélection de personnes physiques dans la catégorie des « systèmes d’IA à haut risque », celles qui ont des effets potentiels sur les droits fondamentaux. Des règles spécifiques d’information détaillée, de mise en conformité préalable, et d’audit régulier sont prévues pour ces systèmes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1385177267945545730"}"></div></p>
<p>Même si le <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006900847/2023-01-09">droit du travail</a> français et les <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/loda/article_lc/LEGIARTI000037090394/2018-05-25#:%7E:text=Aucune%20d%C3%A9cision%20de%20justice%20impliquant,la%20personnalit%C3%A9%20de%20cette%20personne.">textes européens</a> présentent des règles générales qui visent à protéger les candidats à l’embauche, Un règlement européen sur l’IA apparait indispensable. Le constat actuel est celui d’un vrai décalage entre les nombreuses promesses d’efficacité et d’objectivité de ces outils et les rares études scientifiques traitant de ces sujets pourtant fondamentaux. Leur capacité à réduire les <a href="https://theconversation.com/fr/topics/discrimination-21598">discriminations</a> est notamment encore largement à prouver.</p>
<h2>Plus efficace, plus rapide, plus inclusif</h2>
<p>Les solutions intégrant l’IA concernent aujourd’hui toutes les étapes du processus de recrutement, avec à la clef pour chacune d’elles des promesses d’avantages pour les organisations qui les mettent en place : avantage économique en étant plus rapide et productif au moment de choisir son futur salarié (certains développeurs de ces solutions de recrutement affirment même <a href="https://www.hirevue.com/case-studies/national-safety-apparel">diviser par quatre le temps</a> nécessaire pour finaliser un recrutement) ; avantage technique en pouvant traiter un grand volume d’information et effectuer des classements selon les critères que l’on souhaite ; avantage éthique en échappant aux <a href="https://theconversation.com/le-cv-anonyme-une-bonne-idee-trop-vite-enterree-87293">stéréotypes mobilisés par les recruteurs humains</a> lorsqu’ils découvrent un CV ou une lettre de motivation.</p>
<p>Au moment de rechercher des candidats, phase dite de « sourcing », la collecte automatisée d’informations en ligne sur les candidats potentiels (le « web scraping ») est présentée comme un gage d’amélioration de l’adéquation entre les besoins de l’entreprise qui recrute et le profil des candidats. Les algorithmes d’analyse vont rechercher des données repérables sur les CV mais aussi des informations récupérées sur les réseaux sociaux, qui sont supposées permettre d’inférer certains traits de personnalité ou compétences particulières chez les candidats potentiels.</p>
<p>Au cours de la présélection des dossiers, des <em>chatbots</em>, à l’instar de <a href="https://www.randstad.fr/randy/">Randy</a>, le robot conversationnel développé par Randstad, proposent des tests personnalisés et orientent les candidats vers les métiers les mieux adaptés. L’expérience candidat en serait améliorée, grâce notamment à la diminution du stress ressenti et à la ludification de l’expérience vécue. Pour l’entreprise, il y a là une possibilité de réorienter l’activité des recruteurs vers des tâches plus qualitatives et complexes, en les débarrassant d’étapes très chronophages.</p>
<p>En ce qui concerne la phase d’entretiens, les outils d’analyse automatique de vidéos, que le candidat peut parfois faire seul, sont en plein développement. L’entreprise américaine <a href="https://www.hirevue.com/platform/online-video-interviewing-software">HireVue</a> propose par exemple d’évaluer les réponses données sur la base des expressions faciales et de la posture corporelle. L’entreprise suisse <a href="https://cryfe.swiss/#cryfe">Cryfe</a> propose quant à elle d’analyser « l’authenticité » des personnes en étudiant leurs signaux verbaux et leur gestuelle.</p>
<p>Le tout prétendument sans activer de stéréotypes portant sur l’apparence physique ou le langage du candidat et par conséquent sans discrimination. À chaque étape du processus de recrutement donc, les promoteurs de ces solutions promettent aux entreprises qui recrutent en les utilisant un recrutement plus efficace, plus rapide et plus inclusif.</p>
<h2>Biais de jugement à tous les étages</h2>
<p>Certains signaux d’alerte, cependant, ne doivent pas être négligés. Plusieurs études ont par exemple montré que loin de réduire les biais discriminatoires, certains outils de recrutement prédictifs peuvent même engendrer de nouveaux biais de jugement.</p>
<p>Dès l’étape de la programmation de l’outil, les développeurs peuvent incorporer leurs propres préjugés. Les algorithmes associant expressions faciales, traits de personnalité et compétence, notamment, partent de postulats discutables. Plusieurs études concluent que le décodage des émotions est d’une part très complexe et d’autre part <a href="https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/30297420/">culturellement dépendant</a>. Le <a href="https://proceedings.mlr.press/v81/buolamwini18a/buolamwini18a.pdf">taux d’erreur</a> pour la reconnaissance d’une expression peut ainsi varier de 1 % pour un homme blanc à 35 % pour une femme noire.</p>
<p>Pour les algorithmes dits de « machine learning », qui s’appuient sur des données pour s’entraîner et s’ajuster, les discriminations se reproduisent en effet facilement. Les bases d’entraînement peuvent être incomplètes et biaisées et rendre les outils rendus moins performants et même discriminants pour les catégories minoritaires.</p>
<p>L’exemple le plus célèbre est celui d’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/amazon-40118">Amazon</a> qui a dû <a href="https://www.numerama.com/tech/426774-amazon-a-du-desactiver-une-ia-qui-discriminait-les-candidatures-de-femmes-a-lembauche.html">cesser l’utilisation d’un outil de tri automatique</a> de candidatures en 2018. Il discriminait systématiquement les femmes candidatant pour des emplois techniques ou de développeuses web sur la base des recrutements réalisés entre 2004 et 2014 qui avaient, eux, favorisé les hommes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1058457736713826304"}"></div></p>
<p>En ce qui concerne les tests qui se disent neutres, la <a href="https://psycnet.apa.org/doiLanding?doi=10.1037%2F0022-3514.69.5.797">« menace du stéréotype »</a> n’est jamais bien loin. Il s’agit d’un effet psychologique selon lequel face à certaines situations de test, un individu peut avoir la sensation d’être jugé à travers un préjugé négatif visant son groupe, ce qui peut provoquer un stress et une diminution des performances. Par exemple, quand une femme passe un test en mathématiques, son résultat peut être affecté par le stress causé par l’idée intériorisée selon laquelle les femmes auraient des capacités inférieures à celles des hommes dans cette discipline.</p>
<p>La passation de tests avec un chatbot, censée être plus ludique, donc moins stressante pour un candidat, pourrait être mal vécue par certaines catégories de candidats. La passation de tests avec un chatbot, censée être plus ludique, donc moins stressante pour un candidat, pourrait néanmoins être mal vécue par certaines catégories de candidats. C’est notamment le cas des candidats les moins familiarisés avec les environnements digitaux et virtuels ; ils pourraient moins bien réussir lorsqu’ils sont confrontés à une méthode de sélection digitale, et ce en raison de stéréotypes générationnels négatifs actionnés (mais aussi le manque d’habitude d’utiliser ce type d’outil, la peur d’être moins performant que les générations plus jeunes…).</p>
<p>L’algorithme peut aussi engendrer des erreurs lui-même en se fondant sur des corrélations fallacieuses, en raison de variables qui amènent de la confusion. Pratiquer le golf peut ainsi être un loisir surreprésenté dans le profil de salariés occupant un poste de cadre dirigeant. Pour autant, l’association entre ce sport et la performance au travail n’est en aucun cas pertinente. Le pire est qu’il est parfois difficile de connaître et d’identifier les raisonnements de certains algorithmes basés sur l’apprentissage profond (<em>deep learning</em>) en raison de la complexité du processus. On parle dans ce cas de modèle de « boite noire ».</p>
<h2>Un algorithme inexplicable est un algorithme inacceptable</h2>
<p>Prudence est donc de rigueur. Les spécialistes qui travaillent de longue date sur l’intelligence artificielle parlent même parfois d’ <a href="https://www.nature.com/articles/d41586-019-03013-5">« incompétence artificielle »</a> en lieu et place d’intelligence artificielle. Actuellement, les tâches semblent, la plupart du temps, réparties avec une certaine modestie dans les usages : privilégier l’intervention humaine en phase de choix final, et envisager l’usage de l’IA comme outil de présélection et comme aide à la décision.</p>
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<p>Grande s’avère cependant la tentation de céder aux sirènes des algorithmes. Comme nous le montrons dans une <a href="https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2022.895997/full">étude</a> publiée récemment, les recruteurs déclarent certes davantage faire confiance aux recommandations de leurs pairs. Dans les faits, pourtant, ils ont tendance à suivre davantage les recommandations fournies par un algorithme de présélection que celles de leurs collègues. Cela vaut d’ailleurs même quand l’algorithme propose de sélectionner le moins bon candidat.</p>
<p>Nos observations appellent donc à une extrême vigilance : si les recruteurs suivent aveuglément des recommandations, même erronées, fournies par des outils manquant de transparence et d’explicabilité, les risques juridiques et de réputation sont grands pour une entreprise qui utilise ces outils, notamment en cas de discrimination avérée. La nouvelle réglementation initiée par l’Europe, qui devrait être votée cette année, ne paraît ainsi pas dénuée de toute pertinence.</p>
<p>Un algorithme inexplicable est en principe un algorithme inacceptable. Une IA explicable devrait obéir <a href="https://ieeexplore.ieee.org/document/9007737">trois principes</a> : la <em>transparence</em> des données utilisées pour fabriquer le modèle ; l’<em>interprétabilité</em>, la capacité à produire des résultats compréhensibles par un utilisateur ; et l’<em>explicabilité</em>, la possibilité de comprendre les mécanismes ayant conduit à ce résultat avec les biais potentiels qu’ils comportent. Anticipant sans doute les difficultés à venir et l’évolution du cadre légal, certaines entreprises proposent déjà aujourd’hui des <a href="https://interviewer.ai/explainable-ai/%20;%20https:/beamery.com/explainable-ai/">ajustements</a> intégrants des IA « explicables » dites aussi transparentes, si besoin est, en pratiquant une forme de discrimination positive.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/197734/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Ce travail a bénéficié d'une aide de l'Etat gérée par l'Agence Nationale de la Recherche au titre du
programme « Investissements d'avenir » portant la référence ANR-15-IDEX-02 ».</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Alain Lacroux ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Une étude montre que les recruteurs suivent des recommandations algorithmiques de recrutement, même lorsqu’elles sont erronées… ce qui n’est pas sans risques pour les candidats.Christelle Martin-Lacroux, Professeure des universités en sciences de gestion / comportement organisationnel, Université Grenoble Alpes (UGA)Alain Lacroux, Professeur des universités en Sciences de Gestion, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1958412022-12-06T19:05:54Z2022-12-06T19:05:54ZNetflix, Amazon, Tesla… Derrière les modèles d’abonnements et de location, les déboires des clients<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/498677/original/file-20221202-15-zhfn25.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=262%2C19%2C928%2C743&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les services en ligne contribuent notamment à accroître le niveau de dépenses contraint des ménages.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://pixnio.com/media/banknote-cash-cost-investment-loan">Bicanski/Pixnio</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span></figcaption></figure><p>Les années 2010 ont consacré l’âge de l’accès : fût-ce à travers l’abonnement ou la location, les consommateurs ont progressivement pris l’habitude – et même décidé – de se passer des droits de propriété que leur transférait le producteur à l’achat d’un bien. En d’autres termes, la <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1509/jm.15.0109">valeur d’usage</a> des biens et services a progressivement supplanté la valeur d’échange de ces derniers.</p>
<p>Se sont ainsi développés des services aussi divers que ceux de streaming audio ou vidéo (location d’un catalogue auquel l’accès ne tient que tant que l’utilisateur est abonné au service – Netflix, Spotify, Deezer, etc.), l’accès à un véhicule à tout moment (Uber), à des vêtements (le Closet, Rent the Runway), ou même la location de couches lavables (Popopidoux, Coco couche).</p>
<p>Au-delà de l’accès au bien lui-même a aussi émergé, grâce à l’<a href="https://theconversation.com/fr/topics/internet-des-objets-21322">Internet des Objets</a> (IoT pour « Internet of Things »), qui renvoie à la connectivité dont peut être doté tout type d’objet afin de se connecter à d’autres objets ou systèmes applicatifs), un accès de plus en plus fin à certaines caractéristiques du bien.</p>
<h2>Revenus récurrents</h2>
<p>Cela a généré de nouveaux types de <em>business models</em>, directement inspirés du fonctionnement des smartphones et de leurs écosystèmes d’applications mobiles (j’achète mon smartphone, et j’achète ensuite auprès du fabricant ou d’autres entreprises des applications qui vont en démultiplier sa valeur d’usage). Par exemple, les <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/automobile/automobile-la-revolution-des-options-a-la-demande-1880240">constructeurs automobiles</a> proposent maintenant des options à la demande disponibles uniquement sur abonnement : le client achète son véhicule, et peut ensuite décider s’il active ou non les sièges ou le volant chauffants, l’auto-pilote, etc.</p>
<p>Ce type de modèle économique comporte de multiples avantages. Pour les entreprises, tout d’abord, il permet de sécuriser des revenus récurrents et complémentaires (l’argent continue à rentrer après la vente du bien). Les clients, quant à eux, peuvent tester des options, en vérifier l’adéquation à leurs besoins (usages), et enrichir progressivement leur bien selon l’évolution de leurs revenus ou du progrès technique (achat ultérieur d’options inabordables ou inexistantes au moment de l’achat).</p>
<p>Enfin, l’environnement a également à y gagner : une simple mise à jour durant la vie du produit permet de l’améliorer, d’en prolonger l’existence ou d’en rectifier d’éventuels défauts sans nécessairement devoir le remplacer, ce qui est bien plus écologique.</p>
<h2>Au secours, ma porte ne me laisse plus sortir !</h2>
<p>Décrits de la sorte, de tels produits et modèles économiques semblent une panacée, au vu des problèmes que permet indéniablement de résoudre l’accroissement de leur valeur d’usage. Toutefois, ils portent en leur sein de nombreuses limites, dont certaines restent fortement sous-estimées. Or, ces dernières peuvent être à l’origine de ce que nous avions qualifié, dans un article de recherche publié en 2017, de <a href="https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/2394964317726451?journalCode=jcva">destruction de valeur</a> pour le client.</p>
<p>En premier lieu, les clients ne sont pas tous prêts à entendre que le produit qu’ils ont acheté est complet, mais qu’ils ne peuvent en retirer le plein usage qu’à condition de payer à nouveau – et ce, potentiellement pendant toute la durée de vie du produit. Outre que ce point n’est pas toujours d’une immense clarté à l’achat, cela contribue à accroître le niveau de dépenses contraint, non sans conséquences sur le pouvoir d’achat et le niveau d’endettement des consommateurs.</p>
<p>Ensuite, ceci provoque un changement radical de la relation entre un client et son fournisseur. En dépit d’un transfert des droits de propriété du second au premier, ces modèles économiques créent des asymétries en donnant un pouvoir très fort au fournisseur.</p>
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<p>Philippe K. Dick l’illustre à la perfection dans son roman <em>Ubik</em>. Écrit en 1966 et publié en 1969 aux États-Unis, il y décrit la situation ubuesque de Joe Chip, un technicien dont l’endettement est tel qu’il ne peut plus sortir de chez lui, n’ayant plus les crédits nécessaires au paiement de chaque ouverture et fermeture de la porte de son logement. S’ensuit un dialogue savoureusement saugrenu entre lui et… sa porte, celle-ci étant automatisée et dotée de parole (et de capacité de prise de décision) grâce à une intelligence artificielle.</p>
<p>Surréaliste ? Tiré par les cheveux ? Vraisemblablement pas, quand on sait que <a href="https://www.theverge.com/2020/2/6/21127243/tesla-model-s-autopilot-disabled-remotely-used-car-update">Tesla a déjà retiré à distance</a>, en 2020, une fonctionnalité d’autopilote à un propriétaire ayant acheté son véhicule d’occasion, au motif qu’il n’avait pas payé le constructeur pour cette fonctionnalité lors de l’achat à l’ancien propriétaire – lequel en avait pourtant fait l’acquisition.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/498680/original/file-20221202-25-yz54vc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/498680/original/file-20221202-25-yz54vc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/498680/original/file-20221202-25-yz54vc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/498680/original/file-20221202-25-yz54vc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/498680/original/file-20221202-25-yz54vc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/498680/original/file-20221202-25-yz54vc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/498680/original/file-20221202-25-yz54vc.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">En 2020, le constructeur Tesla avait retiré à distance une fonctionnalité d’autopilote à un propriétaire de véhicule.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Fichier:Tesla,_Paris_Motor_Show_2018,_Paris_%281Y7A1919%29.jpg">Matti Blume/Wikimedia</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>De même, <a href="https://theconversation.com/fr/topics/amazon-40118">Amazon</a> a, par le passé, <a href="https://www.zdnet.com/article/why-amazon-is-within-its-rights-to-remove-access-to-your-kindle-books/">supprimé des ouvrages</a> des Kindle (liseuse électronique) de certains clients. La question est donc de savoir jusqu’où peuvent aller des entreprises dont les revenus reposent sur ces modèles économiques.</p>
<p>Ces transformations s’accompagnent donc d’une double nécessité. Tout d’abord, plus de transparence et de clarté de la part des entreprises. Elles ne doivent plus se limiter à une accumulation de pages de conditions d’utilisation, formulées en des termes abscons dans lesquelles se noient leurs clients, mais à l’inverse expliquer clairement jusqu’où elles peuvent aller en termes de modification du produit après son achat – ou durant sa location.</p>
<h2>Situations invraisemblables</h2>
<p>Cependant, cette transparence ne pourra faire l’économie d’un accroissement simultané de la régulation, qui semble indispensable pour au moins deux raisons. La première, pour éviter des situations aussi extrêmes et (en apparence) invraisemblables que celle vécue par Joe Chip, dont on ne peut pourtant s’empêcher de penser qu’elles pourraient bien survenir un jour.</p>
<p>Imaginons un immeuble en feu qui refuserait de laisser sortir ses occupants au prétexte qu’ils n’auraient pas de quoi payer l’ouverture de leur porte ! La seconde raison relève de <a href="https://www.lesechos.fr/thema/mobilites-innovations/voitures-connectees-is-big-brother-watching-you-1140451">l’accès aux données personnelles</a> sur lesquelles s’appuient les entreprises pour leurs offres actuelles et futures, et qui renseignent sur le comportement, les préférences, les usages, etc. de leurs clients.</p>
<p>Outre les <a href="https://theconversation.com/series-et-sport-en-streaming-quand-labondance-doffres-encourage-le-piratage-114754">risques liés à des piratages</a> ou fuites, ces <a href="https://theconversation.com/fr/topics/donnees-personnelles-24311">données</a> utilisées dans le cadre de modèles économiques reposant sur l’usage doivent faire l’objet d’une protection accrue, et être rendues aux clients lorsqu’ils les réclament, au risque que les entreprises ne s’en servent pour encore plus enfermer leurs clients au sein de leur écosystème d’usage – posant de gros problèmes de concurrence. Il suffit de changer (ou d’essayer de changer) de service de streaming musical et de vouloir refaire ses playlists ou autres listes d’albums pour saisir la nature du problème.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/195841/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Loïc Plé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les plates-formes proposant l’accès plutôt que la possession font florès dans tous les secteurs. Mais leurs avantages cachent de nombreuses limites, dont la portée reste largement sous-estimée.Loïc Plé, DIrecteur de la Pédagogie - Full Professor, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1865022022-09-12T22:46:27Z2022-09-12T22:46:27ZLa taxe mondiale sur les multinationales est-elle vraiment une opportunité pour l’Afrique ?<p>Avec l’essor mondial de géant comme Amazon, Facebook ou encore Netflix, les importations de services numériques ont considérablement augmenté en Afrique ces dernières années. Dans les États membres de l’Union africaine (UA), celles-ci sont ainsi passées d’un montant d’environ 19 milliards de dollars en 2007 à 37 milliards de dollars en 2017.</p>
<p><iframe id="rXnfz" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/rXnfz/2/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Cependant, les recettes fiscales prélevées sur leurs activités <a href="https://www.cfr.org/blog/when-services-trade-data-tells-you-more-about-tax-avoidance-about-actual-trade">restent faibles</a>. En effet, les entreprises numériques bénéficient de l’absence d’obligation directe de payer des impôts dans les pays où elles ne sont pas résidentes. Face à ce problème de déperdition fiscale, certains États mettent en œuvre des taxes directes sur les bénéfices de ces sociétés (dite taxe GAFA). En Afrique, le <a href="https://businessday.ng/bd-weekender/article/digital-taxation-an-infant-in-nigeria-a-giant-abroad-mobolaji-oriola/">Nigeria</a>, le <a href="https://theconversation.com/kenya-is-moving-aggressively-to-tax-digital-business-what-next-163901">Kenya</a> et le <a href="https://itweb.africa/content/kYbe97XDjgZ7AWpG">Zimbabwe</a> disposent désormais d’une législation qui impose directement les opérations numériques des multinationales non résidentes (entre 3 % et 6 %).</p>
<h2>1,3 milliard à récupérer</h2>
<p>Afin de proposer un cadre international harmonisé, le projet relatif à l’érosion de la base d’imposition et au transfert des bénéfices (BEPS), réalisé sous l’égide de Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et du G20, a permis d’approuver, en octobre 2021, un <a href="https://www.oecd.org/fr/fiscalite/beps/declaration-sur-une-solution-reposant-sur-deux-piliers-pour-resoudre-les-defis-fiscaux-souleves-par-la-numerisation-de-l-economie-octobre-2021.htm">cadre inclusif</a> reposant sur deux piliers pour relever les défis fiscaux soulevés par la numérisation de l’économie :</p>
<ul>
<li><p>Le premier pilier se concentre sur l’assiette d’imposition et a pour objectif la réaffectation des droits d’imposition vers la juridiction du marché concerné, indépendamment de la présence physique, et concerne de nombreuses entreprises du numérique (les industries extractives et services financiers réglementés sont exclus).</p></li>
<li><p>Le deuxième pilier se concentre quant à lui sur le taux d’imposition et la création de règles coordonnées répondant aux risques actuels provenant de montages financiers qui permettent aux multinationales de transférer des bénéfices vers des juridictions à faible imposition. Il propose ainsi l’adoption d’un taux d’imposition minimum de 15 % et aura peu d’impact sur les économies du continent qui ont déjà des <a href="https://data.worldbank.org/indicator/IC.TAX.PRFT.CP.ZS?locations=ZG">taux supérieurs</a> et peu de siège d’entreprises multinationales. Cependant, le <a href="https://worldinvestmentreport.unctad.org/world-investment-report-2022/chapter-3-the-impact-of-a-global-minimum-tax-on-f">rapport mondial sur l’investissement</a> note qu’en relavant le taux minimum à 15 % cela rendra relativement toutes les juridictions avec un taux supérieurs plus attractives.</p></li>
</ul>
<p>Sur les 25 pays africains membres du Cadre inclusif OCDE/G20 sur le BEPS, 23 sont signataires de la déclaration d’octobre 2021 approuvant cette solution à deux piliers (Kenya et Nigeria ne l’ont pas encore <a href="https://www.oecd.org/fr/presse/la-communaute-internationale-conclut-un-accord-fiscal-sans-precedent-adapte-a-l-ere-du-numerique.htm">signée</a>, ils devront abandonner leur taxe unilatérale s’ils participent).</p>
<p><iframe id="oNn8K" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/oNn8K/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>En s’appuyant sur la proposition du BEPS et en utilisant les données entreprises Orbis, il est possible de modéliser les scénarios du pilier 1 pour les services numériques. <a href="https://www.afd.fr/fr/ressources/taxe-sur-le-commerce-numerique-une-opportunite-pour-lafrique">Selon les estimations</a>, les recettes fiscales potentielles pour les 55 États membres de l’Union africaine (EMUA) sont de 1,3 milliard dollars américains par an, soit 0,05 % du PIB.</p>
<p>[<em>Plus de 80 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5?utm_source=inline-70ksignup">Abonnez-vous aujourd'hui</a>]</p>
<p>Comparativement, il s’agit d’un montant supérieur aux recettes qui seraient tirées d’une éventuelle taxe directe sur les services numériques fixée à 3 % des recettes brutes (800 millions de dollars). Il faudrait que celle-ci soit relevée à environ 5 % pour obtenir un montant proche.</p>
<p><iframe id="YNv3X" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/YNv3X/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Il convient de noter qu’actuellement, certaines importations de services numériques peuvent déjà être taxées de manière indirecte dans le cadre de <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/sites/9789264271401-en/index.html?itemId=/content/publication/9789264271401-en">taxes à la consommation</a>. Dix-huit des EMUA ont ainsi proposé (ou mettent déjà en œuvre) une taxe indirecte sur les opérations numériques des multinationales (de 12 à 20 %).</p>
<p><iframe id="sWtuM" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/sWtuM/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<h2>Un pilier très large</h2>
<p>Cependant, si on appliquait les taux TVA et autres <a href="https://read.oecd-ilibrary.org/taxation/revenue-statistics-in-africa-2021_c511aa1e-en-fr#page1">taxes à la consommation existantes dans les 55 pays</a> au commerce de service numérique, en moyenne les recettes potentielles pour les EMUA auraient été de 0,22 % du PIB (en 2017) si les recettes étaient <a href="https://www.brookings.edu/research/mobilization-of-tax-revenues-in-africa/">effectivement collectées</a>. Les estimations indiquent que les revenus seraient donc nettement supérieurs ceux générés par une taxe directe proposée par le pilier 1 de la déclaration.</p>
<p><iframe id="N9MSI" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/N9MSI/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Si la mise en œuvre <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/sites/9789264271401-en/index.html?itemId=/content/publication/9789264271401-en">complète et effective</a> de la collecte transfrontalière des taxes à la consommation existante sur les importations de service numérique pourrait théoriquement générer des recettes fiscales plus élevées que celles du pilier 1 du programme BEPS, il convient de noter que les propositions du premier pilier du BEPS vont au-delà des seules sociétés de services numériques et généreront probablement des revenus substantiels. En effet, ce piler 1 intègre en plus de ses sociétés numériques toutes les EMN dès lors qu’elles utilisent des canaux numériques de distribution. </p>
<p>Comment expliquer cet écart ? Le pilier 1 stipule qu’afin d’être éligibles à ce droit de taxation, les pays doivent recevoir au moins 1 million d’euros de recettes par multinationale concernée, ce qui exclut <em>de facto</em> les économies africaines de ce modèle d’allocation des recettes fiscales, à l’exception des 12 plus grandes économies du continent en termes de PIB (Soudan, Côte d’Ivoire, Tanzanie, Ghana, Kenya, Éthiopie, Maroc, Angola, Algérie, Égypte, Afrique du Sud et Nigeria).</p>
<p>Ceci dit, le cadre inclusif prévoit une exception pour les économies dont le PIB est inférieur à 40 milliards d’euros, en leur attribuant un droit d’imposition à partir d’un seuil de 250 000 euros. </p>
<h2>Une centaine des 500 plus grandes entreprises concernées</h2>
<p>En dépit de cet élargissement du périmètre, l’OCDE estime que la réattribution des bénéfices au titre du pilier 1 s’appliquera à seulement une <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/sites/ecdb6a47-en/index.html?itemId=/content/component/ecdb6a47-e">centaine de multinationales enviro</a>. Il s’agit certes des plus importantes mais la disposition prévoit d’étendre le champ d’application à d’autres EMN qu'au bout de sept ans. Cependant, cela représente la tout de même la <a href="https://worldinvestmentreport.unctad.org/world-investment-report-2022/chapter-3-the-impact-of-a-global-minimum-tax-on-fdi/">majorité des IDE</a> dans le monde. </p>
<p>Toutes les grandes sociétés de services numériques ont des marges bénéficiaires avant impôt comprises entre 13 % (Netflix) et 39 % (Facebook), et allant jusqu’à 70 % pour Amazon, ce qui impliquerait donc des bénéfices réaffectés au niveau mondial (25 % du bénéfice résiduel). Les montants imposables diffèrent toutefois considérablement, Netflix, Adobe et PayPal se situant au bas de l’échelle ; et Meta, Alphabet (anciennement Google), Amazon, Microsoft et Apple se positionnant en haut de cette échelle.</p>
<p><iframe id="5RxVy" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/5RxVy/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>La part qui est allouée aux économies africaines dans le cadre des nouvelles règles du pilier 1 semble <em>a priori</em> minime et il faudra attendre encore 7 ans avant une éventuelle extension du champ d’application de cette règle pour y inclure davantage de multinationales.</p>
<p>Il est donc primordial qu’un nombre plus important de pays du continent participe au cadre inclusif du BEPS, auquel 23 États ont jusqu’alors adhéré, les actions multilatérales étant plus propices à des résultats probants dans une économie mondialisée. D’autant que, les difficultés éprouvées par les pays du G20 lors de ces négociations montrent par analogie à quel point la capacité de négociation des EMUA seuls face aux géants du secteur serait réduite. En parallèle, les pays doivent travailler a mieux <a href="https://events.ataftax.org/index.php?page=documents&func=view&document_id=98&_ga=2.223340763.1748778267.1657606484-1483344514.1657606484">collecter</a> les <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/sites/e0e2dd2d-en/index.html?itemId=/content/publication/e0e2dd2d-en">taxes indirectes sur les services numériques</a> afin de maximiser l’ensemble de revenus (directs et indirects) <a href="https://events.ataftax.org/index.php?page=documents&func=view&document_id=155&token=b60310bc53dbc2bda82aaebdceef3d85&thankyou">potentiels</a>.</p>
<hr>
<p><em>Nicolas Köhler-Suzuki, directeur d’International Trade Intelligence, et Rutendo Tavengerwei, conseillère en politique commerciale spécialisée dans l’Afrique ont participé à la rédaction de cet article, qui s’appuie sur l’<a href="https://www.afd.fr/fr/ressources/taxe-sur-le-commerce-numerique-une-opportunite-pour-lafrique">étude</a> publiée le 9 septembre par <a href="https://theconversation.com/institutions/agence-francaise-de-developpement-afd-2711">l’Agence française de développement</a> (AFD) dans la collection « Questions de développement »</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/186502/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Le cadre inclusif international proposé fin 2021 par l'OCDE et le G20 prévoit une récupération de recettes fiscales sur les services numériques moindres qu'une taxation indirecte locale.Julien Gourdon, Economiste, Agence française de développement (AFD)Jean-Baptiste Pétigny, Coordinateur, Facilité française d'Assistance Technique auprès de l'Union africaine, Expertise France, Agence française de développement (AFD)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1877852022-07-28T19:54:42Z2022-07-28T19:54:42ZL’opération Vivendi-Hachette : une illustration de la globalisation de l’édition<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/476295/original/file-20220727-21-7rwdkj.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=0%2C18%2C4200%2C2766&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">386 millions d'euros de livres sont vendus par Amazon chaque année.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/fr/image-photo/new-york-usa-may-20-2018-1135022744">ymgerman /Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Finalement, la fusion annoncée entre le groupe d'édition Editis, propriété de Vivendi, et Hachette, filiale de Lagardère, ne devrait pas avoir lieu.</p>
<p>Après des mois de bruits divers, Vincent Bolloré, le patron du géant des médias Vivendi, a décidé de céder le très franco-français Editis à un repreneur étranger pour ne pas avoir à faire face à des problèmes de concentration que lui promettaient déjà les régulateurs européens. </p>
<p>Une façon pour lui et Vivendi de mieux garder le contrôle d'Hachette et de réaliser ses ambitions d'envergure mondiale. </p>
<h2>La plus grande librairie du monde</h2>
<p>Cet échange croisé illustre l’internationalisation de l’industrie de l’édition et témoigne de la foi du secteur en son avenir.</p>
<p>Amazon offre, par exemple, un parfait cas d’école pour analyser la mondialisation du secteur du livre.</p>
<p>L’entreprise de Jeff Bezos n’est-elle pas devenue la <a href="https://www.radiofrance.fr/mouv/podcasts/debattle/faut-il-s-inquieter-de-la-puissance-d-amazon-1986049">première librairie globale</a> ? Première à offrir une plate-forme de revente de livres dans de nombreux pays ; première par l’étendue du choix de langue écrite ; première par sa domination dans la commercialisation des livres imprimés, qu’ils soient neufs ou d’occasion. Première naturellement dans la vente de livres numériques. Première aussi, c’est moins attendu, dans le livre audio.</p>
<p>En un clic, des centaines de millions de lecteurs un peu partout sur la planète bénéficient désormais d’un accès immédiat ou après une attente de quelques jours au livre de leur choix parmi des millions de références disponibles.</p>
<p>Faut-il encore savoir quel livre choisir ! À l’image d’un Umberto Eco se dirigeant d’un pas tranquille, mais décidé, dans sa bibliothèque labyrinthique pour trouver celui qu’il cherche.</p>
<figure>
<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Czc_KjWji8E?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">La librairie personnelle d’Umberto Ecco.</span></figcaption>
</figure>
<p>Amazon est aussi la première plate-forme d’auto-édition. Elle propose plus d’un million de nouveaux titres chaque année dans plusieurs langues. Si vous faites partie des <a href="https://www.culture.gouv.fr/Thematiques/Livre-et-lecture/Actualites/Etude-sur-la-situation-economique-et-sociale-des-auteurs-du-livre-resultats">quelques 100 000 écrivains français du dimanche</a>, vous avez sans doute déjà regardé, sinon utilisé, les nombreux outils offerts par Kindle Direct Publishing, pour <a href="https://kdp.amazon.com/fr_FR?ref_=kdpgp_p_fr_psg_gt_hv_ad1">créer et publier un livre électronique, broché ou relié</a>. Vous avez sans doute aussi été déçu par les ventes de votre œuvre. <a href="https://www.nytimes.com/2010/05/27/opinion/27iht-%20edkeillor.html?scp=2&sq=garrison%20keillor&st=cse">À en croire un écrivain humoriste américain</a>, comptez en moyenne 14 exemplaires vendus dont plus de la moitié acquis par les membres de la famille.</p>
<p>Cette puissance de feu tous azimuts d’Amazon n’est pas sans inquiéter les entreprises de l’édition, d’autant qu’elle est progressivement devenue leur premier client. Leur besoin de mieux négocier leurs conditions de vente avec <a href="https://theconversation.com/logre-amazon-98896">l’ogre de Seattle</a> est d’ailleurs une motivation, affirmée avec force, de leurs projets de fusion et acquisition.</p>
<h2>Des fusions transfrontalières</h2>
<p>Une bonne illustration de ce phénomène est le rapprochement entre Penguin Random House (Bertelsman) et Simon & Schuster (Paramount Global). Cette opération, non encore finalisée, car en cours de jugement antitrust, fait suite à une vague de 30 ans de fusions et acquisitions internationales.</p>
<p>Trop nombreuses à lister ici, citons-en seulement quelques-unes : l’absorption de Collins (Royaume-Uni) – rappelez-vous de votre premier dictionnaire d’anglais ! – par Harper (États-Unis) ; celle d’Harlequin (Canada), connu pour ses romans sentimentaux publiés dans le monde entier, par Harper Collins ; le rachat de Random House (États-Unis) aux choix chanceux de publication, à l’instar de l’<em>Ulysse</em> de Joyce, par Bertelsmann (Allemagne) ; celui de Penguin House (Royaume-Uni) <a href="https://www.penguin.co.uk/articles/2020/september/penguin-books-logo-history-edward-young-allen-lane.html">au célèbre et inoxydable logo</a> par Bertelsman toujours.</p>
<p>[<em>Près de 70 000 lecteurs font confiance à la newsletter de The Conversation pour mieux comprendre les grands enjeux du monde</em>. <a href="https://theconversation.com/fr/newsletters/la-newsletter-quotidienne-5">Abonnez-vous aujourd’hui</a>]</p>
<p>Et donc aujourd’hui aussi le projet d’acquisition de Simon & Schuster, la maison d’édition de Stephen King, et John Grisham, entre autres ; sans oublier le projet de rapprochement désormais caduc entre Editis (Vivendi) et Hachette Livre (Largardère).</p>
<p>La constitution de géants de l’édition est la conséquence immédiate des fusions et acquisitions, en particulier transfrontalières. Six groupes occupent aujourd’hui le quart du marché mondial. L’industrie de l’édition n’a pas échappé au mouvement planétaire de <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/sciences-humaines/economie-et-finance/entreprises-hyperpuissantes_9782738154989.php">l’ascension commerciale d’entreprises multinationales devenant des géants</a>.</p>
<h2>Innovations technologiques et des modèles d’affaires</h2>
<p>Comme dans les autres industries, l’innovation joue un rôle clef dans l’évolution du secteur. À commencer par l’innovation technologique. Le numérique a inondé la planète du livre, que ce soit à travers l’édition électronique, la logistique de la distribution, le marketing des succès, la vente de livres audio et de bandes dessinées ou encore le segment du livre professionnel. Or le numérique se caractérise par des coûts unitaires plus faibles, mais aussi par des coûts fixes plus élevés qui doivent donc être amortis sur de plus vastes marchés. Ce sont aussi des économies de réseaux qui favorisent quelques-uns par un effet boule de neige. Un seul ou une poignée de gagnants sont sélectionnés.</p>
<p>L’innovation concerne également les formats, utilisons ici les termes anglais consacrés, et finalement plus parlants, à l’instar de <em>webtoon</em>, <em>webnovel</em>, <em>graphic novel</em>, <em>serial fiction</em>, etc. Elle concerne aussi les modèles d’affaires comme les formules par abonnements – sortes de club du livre du monde d’aujourd’hui – ou la déclinaison tous médias et tous azimuts des titres à succès : séries, films, podcasts, jeux, colifichets et autres babioles. Bref, une sorte d’universalisation des récits et de leurs héros.</p>
<p><em>Le Petit Prince</em> lui-même, livre le plus traduit au monde après la Bible, n’a pas échappé à cette commercialisation effrénée. Il a bien sûr été adapté en film et en série et sa célèbre silhouette élancée a été reproduite sur <a href="https://www.lepetitprincecollection.com/fr/">tout et n’importe quoi</a>, porte-clefs, médailles, casquettes, et même coquetiers, étuis à lunettes et gourdes. Il y a du bon, du moins bon et du très mauvais, mais ne levez pas les yeux au ciel en regrettant ce commerce hors du livre. Le personnage de Saint-Exupéry a ainsi connu de nombreuses vies nouvelles, prolongeant pour certains le bonheur de la lecture ou engageant d’autres à s’y plonger.</p>
<h2>Les livres à succès</h2>
<p>Joue également une certaine uniformisation des goûts et des modes dont témoignent de nombreux livres et genres à succès internationaux. L’anatomie des best-sellers a été étudiée en comparant les données des caractéristiques textuelles des ouvrages qui figurent dans les <a href="https://livre.fnac.com/mp35551172/Bestseller-Code">listes des meilleures ventes</a> et ceux qui n’y figurent pas. Leur dissection fait apparaître, entre autres, que le succès réclame plutôt un langage simple, proche du parler, un nombre de thèmes principaux restreint à deux ou trois, et des montées et descentes d’émotion qui se succèdent. Trop d’adjectifs et de verbes sont à éviter. Idem pour les scènes de sexe ou la description des corps, sauf s’ils sont refroidis (les romans policiers sont légion parmi les livres à succès…).</p>
<p>Bien entendu, la connaissance complète des ingrédients à incorporer ou à éviter ne fournit pas pour autant la recette du succès. De la même façon que la liste des produits dans le garde-manger des cuisiniers de Top Chef ne suffit pas pour désigner à l’avance le vainqueur. Notez qu’il n’y a pas non plus de recette miracle pour deviner les genres et sous-genres à succès à l’instar du polar scandinave ou du manga d’action. C’est ici comme l’engouement mondial pour la pizza et le hamburger, ou plus récemment pour le poke bowl.</p>
<p>Terminons de filer la métaphore culinaire en rappelant que pour le livre comme pour la cuisine, les goûts et les préférences restent encore marqués par la culture locale. Ils diffèrent d’un endroit, d’un pays, d’un continent à l’autre. Les livres traduits ne représentent par exemple en France qu’un cinquième des ventes.</p>
<p>Même s’il fait rêver nombre d’auteurs, le livre à succès et ses déclinaisons restent une exception. En proportion du nombre d’exemplaires vendus et donc du chiffre d’affaires des éditeurs, c’est une autre affaire. Prenons l’exemple des États-Unis où le nombre moyen d’exemplaires par titre s’élève à quelques centaines : les 10 livres écoulés à plus d’un million d’exemplaires font autant de recettes que le <a href="https://www.publishersweekly.com/pw/by-topic/columns-and-blogs/soapbox/article/6153-a-bookselling-tail.html">million d’autres placés à moins de 100 exemplaires</a>.</p>
<h2>Un marché mondial qui perd du poids</h2>
<p>Par ailleurs, le nombre de tirages par nouveau titre diminuant mécaniquement à mesure que le nombre de nouveaux titres gonfle – une tendance depuis de longues années – les livres à succès deviennent plus importants pour l’équilibre des comptes. En effet, à la différence notable d’autres secteurs qui se sont internationalisés, <a href="https://masterenedicion.com/wp-content/uploads/2017/11/BookMap_How-big-is-global-publishing_prel-edition_final01.pdf">l’édition ne bénéficie pas d’un marché mondial qui explose</a>. Celui-ci ne croît même pas plus vite que la population ou la richesse mesurée par le PIB. Dans les pays développés, le marché se rétrécit en euros ou en dollar constants et les pays d’économie émergente n’ont pas pris le relais, et ce malgré les progrès de l’éducation et le développement universitaire qu’ils connaissent. En tout cas pas encore.</p>
<p>Dans les années 1960, la planète comptait 1,6 livre vendu par habitant, le <a href="https://www.oxfordhandbooks.com/view/10.1093/oxfordhb/9780198794202.001.0001/oxfordhb-9780198794202-e-9">chiffre est tombé</a> à moins d’un dans les années 2000. En attendant, un retournement de tendance éventuel, on comprend pourquoi les géants de l’édition s’empressent de chercher de la croissance en dehors de leur marché géographique traditionnel et de rechercher des débouchés autres que la publication pour leurs titres imprimés ou électroniques à succès.</p>
<p>Le livre hors de ses frontières linguistiques grâce aux traductions, et textuelles grâce à ses adaptations en images, ne perd pas son âme. De même pour l’édition hors de ses bastions nationaux. Elle aide le livre à voyager. Le rapprochement entre Editis et Hachette faisait craindre à beaucoup la constitution d’un mastodonte français de l’édition écrasant tout le monde hexagonal sur son passage. Avec l’acquisition d’Hachette par Vivendi et celle future d’Editis vraisemblablement par un groupe étranger de l’édition, cette tentative va pousser finalement l’industrie française du livre à s’ouvrir encore un peu plus au monde.</p>
<hr>
<p><em>François Lévêque a publié chez Odile Jacob <a href="https://theconversation.com/bonnes-feuilles-lere-des-entreprises-hyperpuissantes-touche-t-elle-a-sa-fin-157831">« Les entreprises hyperpuissantes. Géants et Titans, la fin du modèle global »</a>. Son ouvrage a reçu <a href="https://www.melchior.fr/note-de-lecture/les-entreprises-hyperpuissantes-prix-lyceen-lire-l-economie-2021">le prix lycéen du livre d’économie 2021</a>.</em></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/187785/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François Lévêque a conseillé Vivendi à plusieurs reprises par le passé et à été consulté récemment comme économiste académique dans le cadre du rapprochement entre Vivendi et Largardère, plus particulièrement entre Editis et Hachette.</span></em></p>La globalisation du secteur de l’édition via l’émergence d’acteurs tels qu’Amazon est aussi précipitée par les rapprochements entre groupes d’édition.François Lévêque, Professeur d’économie, Mines Paris - PSLLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1746582022-02-16T22:53:23Z2022-02-16T22:53:23ZQuel est le poids exact de la France dans la « déforestation importée » qui touche l’Amazonie ?<p>Chaque année, les feux de forêt en Amazonie brésilienne rappellent que la protection des forêts tropicales reste insuffisante pour endiguer les changements d’occupation des sols contribuant au changement climatique et à la réduction de la biodiversité.</p>
<p>Dans ce contexte, les importations de soja en Europe sont <a href="https://ec.europa.eu/environment/forests/impact_deforestation.htm">depuis longtemps</a> pointées du doigt et l’Union européenne a récemment proposé un <a href="https://ec.europa.eu/environment/publications/proposal-regulation-deforestation-free-products_en">projet de règlement</a> contre la « déforestation importée ».</p>
<p>Alors que la France a décidé d’en faire une priorité de sa présidence de l’UE, qui a démarré en janvier 2022, que savons-nous précisément du <a href="https://theconversation.com/deforestation-au-bresil-que-fait-vraiment-la-france-123031">rôle de notre pays</a> dans la déforestation en Amazonie ?</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/440848/original/file-20220114-19-6wlej3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Paysage du Mato Grosso, dans lequel les grandes cultures se sont considérablement étendues au détriment des écosystèmes naturels de savane ou de forêt amazonienne.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Martin Delaroche</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<h2>Qu’est-ce que la déforestation importée ?</h2>
<p>Chaque année au Brésil, l’activité agricole – principalement l’élevage bovin extensif et la culture du soja – gagne du terrain sur les forêts d’Amazonie et sur les savanes de son biome voisin, le Cerrado.</p>
<p>Cette expansion est stimulée par la <a href="http://www.fao.org/documents/card/en/c/ca8861en">demande croissante de viande (bovine, porcine, de volaille) et de produits dérivés (œufs, produits laitiers) au niveau mondial</a>. Le Brésil est le premier exportateur mondial de viande bovine et de soja, ce dernier étant principalement destiné à l’alimentation animale.</p>
<p>La <a href="https://www.deforestationimportee.fr/fr/la-sndi-2">déforestation importée</a> en question correspond à la quantité de végétation naturelle (forêts ou savanes) détruite, directement ou indirectement, afin de produire dans le pays exportateur un bien demandé par le pays importateur.</p>
<p>Presque toutes les chaînes d’approvisionnement de matières premières ou de produits transformés provenant de pays tropicaux sont concernées (bois, huile de palme, cacao, etc.) mais, dans le cas de la France, le soja est celle dont l’<a href="https://envol-vert.org/camp/l-empreinte-foret/">« empreinte forêt »</a> est la plus grande.</p>
<p><a href="https://www.deforestationimportee.fr/fr/ressources/mettre-fin-aux-importations-de-soja-issu-de-la-conversion-decosystemes-naturels">Près de 60 % du soja</a> que nous importons provient en effet du Brésil. Par contraste, la part des importations de viande bovine provenant du Brésil est bien inférieure (1 %), mais la possibilité qu’elles <a href="https://www.gouvernement.fr/partage/11746-rapport-de-la-commission-d-evaluation-du-projet-d-accord-ue-mercosur">augmentent considérablement</a> dans le cadre de l’accord de libre-échange UE/Mercosur suscite de vives inquiétudes. La France reste, pour l’instant, <a href="https://www.europe1.fr/politique/la-france-restera-opposee-a-laccord-ue-mercosur-assure-emmanuel-macron-4064911">opposée à sa signature</a>.</p>
<h2>Pointer les responsabilités : le défi de la traçabilité</h2>
<p>Contrairement à ce que certains reportages (comme <a href="https://www.youtube.com/watch?v=AIe6paNCCCc">celui-ci</a> par exemple) sur le terrain laissent penser, démontrer de manière précise le lien entre une quantité de soja ou de bœuf importée et la destruction de forêts est bien plus complexe que de pointer une poignée d’acteurs responsables de la déforestation en lien avec des entreprises françaises.</p>
<p>Il faut en effet considérer l’ensemble des flux d’importation en jeu.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=299&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=299&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=299&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=376&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=376&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/440847/original/file-20220114-25-6x19iq.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=376&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Capture d’écran du site du projet TRASE, qui permet de retracer la municipalité d’origine de flux d’exportation.</span>
<span class="attribution"><a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Depuis 2015, le <a href="https://trase.earth/">projet Trase</a> s’attache à identifier les flux de soja et de bœuf exportés par chaque municipalité du Brésil et de faire le lien avec la présence éventuelle de déforestation. Cela permet d’estimer le risque que les produits importés en soient responsables. On parle bien ici de « risques », car dans les faits, la production peut aussi bien venir d’une ferme n’ayant pas pratiqué de déforestation depuis des décennies que d’une parcelle récemment défrichée…</p>
<p>Ainsi, tant que le traçage direct du bœuf ou des grains de soja depuis la parcelle où ils ont été produits ne sera pas possible au travers d’un système fiable et à l’abri des fraudes, il sera difficile de pointer les responsabilités avec certitude.</p>
<h2>Le soja vecteur de déforestation ? Pas si simple…</h2>
<p>Les mécanismes de la déforestation au Brésil sont complexes même si l’analyse des images satellites permet de localiser de mieux en mieux les parcelles défrichées et de préciser <a href="https://mapbiomas.org/en">l’utilisation des terres</a> qui est faite suite aux déboisements.</p>
<p>Dans le tableau ci-dessous, le soja n’est pas forcément un vecteur de déforestation directe, depuis que les agroindustriels ont signé un <a href="https://www.nature.com/articles/s43016-020-00194-5">« moratoire sur le soja »</a> qui vise à interdire la production sur des parcelles défrichées après 2008.</p>
<p>Valant pour l’Amazonie, cette règle laisse néanmoins le champ libre dans le Cerrado, où se réalise la plus grande partie de la production et où la pression sur les milieux naturels est la plus forte. On peut aussi souligner qu’un <a href="https://www.ibge.gov.br/estatisticas/economicas/agricultura-e-pecuaria/9117-producao-agricola-municipal-culturas-temporarias-e-permanentes.html">tiers de la production de soja du Brésil se réalise dans le Sud du pays</a>, loin des fronts de déforestation. Par ailleurs, en Amazonie,les fermiers peuvent <a href="https://www.theguardian.com/environment/2022/feb/10/loophole-allowing-for-deforestation-on-soya-farms-in-brazils-amazon">défricher de nouvelles terres pour d’autres cultures (coton, maïs) et réserver les terres anciennement déboisées pour le soja</a>.</p>
<figure class="align-center zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=873&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=873&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=873&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1097&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1097&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/440851/original/file-20220114-17-11zeqjx.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1097&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
<figcaption>
<span class="caption">Cartes montrant l’expansion de la production de soja au Brésil, pour la période 1985-2015. On note la forte progression vers le nord et l’Amazonie, mais aussi la persistance de grands foyers de production dans le sud et le centre du Brésil.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Martin Delaroche, données IBGE Produção Agricola Municipal</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/">CC BY-NC-ND</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Mais si le soja brésilien n’est pas toujours associé à de la déforestation récente, au contraire, l’élevage bovin est (très) majoritairement responsable de la déforestation en Amazonie. Cependant, sa production approvisionne très peu le marché français.</p>
<h2>Peut-on changer la donne en sanctionnant la déforestation importée ?</h2>
<p>La Stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SNDI), lancée par le gouvernement français en 2018, vise à éliminer la participation « complice » (intentionnelle ou non) des importations à la déforestation dès 2030.</p>
<p>Pour cela, le gouvernement a proposé toute une série de mesures visant à financer des projets de gestion durable des forêts, influencer les accords commerciaux européens pour y intégrer des exigences environnementales et, enfin, sensibiliser les acteurs privés.</p>
<p>Les importations de viande brésilienne en France étant faibles, le levier potentiel réside dans celles de soja. Toutefois, le poids décroissant de l’Europe dans les exportations de soja brésilien et le rôle limité de celui-ci dans la déforestation font que même un boycott éventuel n’aurait sans doute pas grand effet pour l’Amazonie : la France pèse à peine 2 % des exportations de soja du Brésil.</p>
<p>Ce type de solution pourrait même amener le Brésil jouer sur deux tableaux : du soja non durable produit en Amazonie pourrait aller soit vers la Chine (qui <a href="https://abiove.org.br/estatisticas/">représente 60 % de ses exportations de soja</a>), soit rester dans le pays, tandis qu’une production durable et certifiée « zéro déforestation » irait vers l’Europe (16,7 % des exportations).</p>
<h2>Les Européens face à leurs contradictions</h2>
<p>La solution de n’importer que du soja durable, traçable à 100 % et garanti sans déforestation (avec une certification de type <a href="https://responsiblesoy.org/?lang=en">RTRS</a> ou <a href="https://www.proterrafoundation.org/">Proterra</a>) est souvent mise en avant.</p>
<p>Mais outre les questions de localisation évoquées ci-dessus, cette solution implique qu’il y ait des acheteurs prêts à payer plus cher que la production classique.</p>
<p>Or il existe déjà du soja certifié « sans déforestation », mais sa part dans les importations européennes <a href="https://www.idhsustainabletrade.com/publication/european-soy-monitor-report-2019/">n’était que de 25 %</a> en 2019 (<a href="https://www.idhsustainabletrade.com/publication/european-soy-monitor-2018/">contre 19 % en 2018</a>), reflétant une faible demande de la part des consommateurs européens.</p>
<p>Les situations diffèrent certes d’un pays à l’autre : la Norvège a importé 100 % de soja durable (mais à peine 244 000 tonnes au total) en 2019, la France 16 % (sur un total de 3,8 millions de tonnes) et l’Espagne 1 % (sur un total de 4,1 millions de tonnes).</p>
<p>Cet état de fait indique une chose : arrêter la déforestation a un prix et globalement les consommateurs européens ne semblent pas prêts à le payer tant la préférence pour les produits très bon marché est forte (on constate évidemment le même phénomène vis-à-vis du textile ou de <a href="https://www.monde-diplomatique.fr/2021/10/PITRON/63595">l’électronique</a>, produits dans des pays à bas coûts, avec des conséquences sociales et environnementales sévères, et pourtant achetés en masse en Europe).</p>
<p>Il serait toutefois injuste de n’attribuer la faute qu’au « consommateur » : l’étude des chaînes d’approvisionnement montre qu’il faut mobiliser un grand nombre d’acteurs – incluant fermiers, industriels, négociants, éleveurs et grande distribution – pour parvenir à un changement.</p>
<p>Lutter contre la déforestation importée est néanmoins important, car il en va de l’exemplarité écologique des pays européens.</p>
<p>Toutefois, plutôt qu’un contrôle de la déforestation à distance, la solution se trouve certainement beaucoup plus dans une politique que mettrait en place le Brésil lui-même, <a href="https://journals.openedition.org/cybergeo/27325">ce qu’il a fait avec succès entre 2004 et 2014</a>. De nombreuses ONG ont dénoncé le relâchement actuel, le pays ayant connu en 2021, son plus haut taux de déforestation depuis quinze ans.</p>
<p>Une alternative à l’interdiction de déforestation importée serait donc de collaborer avec le gouvernement brésilien et leurs organisations professionnelles locales afin de définir un objectif commun de préservation et un partage des coûts liés au changement de modèle de production.</p>
<p>Vaste programme, autrement plus complexe à mettre en œuvre qu’un boycott !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/174658/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>François-Michel Le Tourneau a reçu des financements de l’ANR.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Martin Delaroche a reçu des financements de l’Université d’Indiana–Bloomington et du Réseau français d’études brésiliennes (REFEB).</span></em></p>Le lien entre importations et déforestation n’est aujourd’hui pas clairement établi. Les boycotts n’ont ainsi qu’un impact limité sur la déforestation alors que d’autres solutions existent.François-Michel Le Tourneau, Géographe, directeur de recherche au CNRS, Université Paris 1 Panthéon-SorbonneMartin Delaroche, Géographe, chercheur associé au Center for the Analysis of Social-Ecological Landscapes (CASEL), Indiana UniversityLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1753502022-01-25T19:44:10Z2022-01-25T19:44:10ZGAFAM : comment limiter les « acquisitions tueuses » de start-up ?<p>Le 30 novembre dernier, l’autorité de la concurrence britannique (CMA) ordonnait à Facebook de revendre la plate-forme Giphy, l’un des plus gros distributeurs de gifs sur Internet, dont elle avait fait l’acquisition quelques mois auparavant. Cette décision constitue une première en matière de contrôle des concentrations dans l’économie numérique ; alors que les « GAFAM » (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) ont fait l’acquisition de <a href="https://academic.oup.com/icc/article/30/5/1307/6365871">plus de 700 entreprises depuis 2000</a>, aucune de ces opérations n’avait jusqu’à présent été bloquée.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1465672246127734786"}"></div></p>
<p>Les autorités de la concurrence font en effet face à deux obstacles qui limitent leurs possibilités d’intervention. Premièrement, la plupart de ces opérations n’arrivent pas sur leur bureau. Le cadre légal prévoit des seuils de notification sur base du chiffre d’affaires. Or, dans l’économie numérique, beaucoup de start-up ont un chiffre d’affaires peu élevé ; leur stratégie consiste à développer un produit, une application et un réseau, et à le monétiser ultérieurement. Les seuils de notifications sont donc rarement atteints.</p>
<p>Le deuxième obstacle est l’asymétrie d’information entre le contrôleur et le contrôlé. Les autorités de la concurrence ont la charge de contrôler un marché qui gagne tous les jours en complexité et en opacité. Comme le souligne <a href="https://itif.org/publications/2021/05/24/digital-markets-act-european-precautionary-antitrust">l’économiste Jacques Crémer</a> :</p>
<blockquote>
<p>« Personne ne sait exactement comment les algorithmes déterminent les choix d’Amazon ou les classements de Booking. »</p>
</blockquote>
<p>De plus, les plates-formes bénéficient d’un avantage en termes d’accès à l’information. Les GAFAM sont au centre d’un réseau d’utilisateurs sur lesquels ils collectent des données. Combinées au développement des techniques de méta-analyse des marchés, ces données donnent aux plates-formes des outils de prévision de l’évolution des marchés supérieurs à ceux dont disposent les autorités de la concurrence.</p>
<p>Il est pourtant essentiel pour les autorités de la concurrence d’être en mesure d’éviter que ces acquisitions par les GAFAM ne menacent la concurrence saine sur les marchés. C’est particulièrement le cas dans l’industrie du numérique, du fait d’une spécificité de cette industrie que les économistes appellent « externalités de réseau » : plus les utilisateurs d’un service sont nombreux, plus ce service a de la valeur pour ces utilisateurs. Les externalités de réseau impliquent que, passé un certain seuil dans le nombre d’utilisateurs, la puissance d’une entreprise s’autorenforce jusqu’à, éventuellement, atteindre une position dominante.</p>
<h2>Acheter pour développer… ou tuer</h2>
<p>Mais qu’adviendrait-il de cette position de super puissance si quelques programmeurs dans leur garage venaient à développer un nouveau produit supérieur à celui proposé par l’entreprise dominante, au point que suffisamment de ses utilisateurs commencent à s’en détourner et créent un nouveau réseau ? La plate-forme en place aurait en effet toutes les raisons de vouloir éviter une telle situation.</p>
<p>Avec des capitaux tels que ceux détenus par les GAFAM, un moyen d’empêcher l’entrée du nouveau produit sur le marché est, tout simplement, son achat à un stade de développement précoce. Une fois propriétaire, l’acquéreur peut intégrer le produit concurrent dans son écosystème, ou bien tout simplement stopper son développement. Dans les deux cas, la concurrence potentielle ne se matérialise jamais.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1171892685550096384"}"></div></p>
<p>La stratégie d’achat-élimination de concurrents potentiels est connue sous le terme d’« acquisition tueuse » (« <a href="https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3241707">killer acquisition</a> » en anglais). Le cas Facebook/Giphy en est un bon exemple. Avant son acquisition par Facebook, la plate-forme Giphy était en train de développer un service publicitaire assez prometteur : les publicitaires pouvaient souscrire à un service payant leur permettant d’inclure leur publicité dans des gifs. À la suite de l’achat de la plate-forme, Facebook <a href="https://www.gov.uk/cma-cases/facebook-inc-giphy-inc-merger-inquiry">avait interrompu ce service</a>, se débarrassant ainsi d’un concurrent potentiel sur le marché publicitaire.</p>
<p>D’après notre <a href="http://hdl.handle.net/2268/241664">étude</a> portant sur les acquisitions des GAFAM entre 2015 et 2017, 60 % des services acquis cessent d’être proposés sous leur nom d’origine après leur achat. Bien sûr, toutes ces acquisitions n’ont pas pour objectif de « tuer » ; certaines visent au contraire à continuer le développement du produit acquis sous le nom de l’acquéreur.</p>
<p><iframe id="j7mbj" class="tc-infographic-datawrapper" src="https://datawrapper.dwcdn.net/j7mbj/1/" height="400px" width="100%" style="border: none" frameborder="0"></iframe></p>
<p>Des documents internes d’entreprises dominantes semblent en effet démontrer que, avant de se lancer dans le développement d’un nouveau produit, le <a href="https://scholar.google.com/citations?view_op=view_citation&hl=th&user=U-mWVcoAAAAJ&citation_for_view=U-mWVcoAAAAJ:p2g8aNsByqUC">recours à l’achat est envisagé</a>. Ainsi, les GAFAM pourraient externaliser une partie de leur R&D afin de <a href="https://ec.europa.eu/competition/publications/reports/kd0419345enn.pdf">bénéficier de l’agilité et de l’inventivité de start-up</a> qui elles-mêmes n’auraient pas eu les capitaux ou le réseau nécessaire pour commercialiser leur invention. Afin de pouvoir dissocier les cas – problématiques – d’« acquisitions tueuses » des cas – légitimes – d’acquisitions de R&D, les autorités de la concurrence doivent adapter leurs outils d’analyse, qu’ils soient méthodologiques ou législatifs.</p>
<h2>Mieux contrôler</h2>
<p>D’un point de vue méthodologique, l’analyse du potentiel anticoncurrentiel d’une acquisition doit être adaptée aux spécificités économiques du marché du numérique, notamment à la présence d’externalités de réseau et la possibilité d’une concurrence potentielle exercée par des start-up.</p>
<p>Prenons le cas de <a href="https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/services/facebook-a-paye-22-milliards-de-dollars-pour-whats-app_AN-201410060211.html">l’acquisition de WhatsApp par Facebook</a>, en 2014, pour 22 milliards de dollars. La Commission européenne a autorisé l’opération argumentant qu’il existait <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/IP_14_1088">suffisamment de services de messagerie alternatifs</a>, mais en sous-estimant probablement le rôle des effets de réseaux comme barrière à l’entrée. Par conséquent, l’accroissement du pouvoir de marché de Facebook résultant de cette acquisition a été sous-évalué.</p>
<p>Ensuite, alors même qu’à la date de son acquisition WhatsApp ne pouvait pas être considéré comme un concurrent direct de Facebook, puisque l’application n’offrait pas tous les services d’un réseau social, les deux entreprises avaient en commun aussi bien certaines fonctionnalités (en l’occurrence, de messagerie) que leurs bases d’utilisateurs. Ainsi, si WhatsApp avait voulu s’étendre aux autres services proposés par Facebook, la base d’utilisateurs potentiellement intéressés lui était déjà acquise. Pour cette raison, il est essentiel de considérer la dynamique du marché numérique dans l’analyse des forces concurrentielles auxquelles sont soumises les entreprises du secteur.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/441682/original/file-20220120-15-egv4lp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/441682/original/file-20220120-15-egv4lp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/441682/original/file-20220120-15-egv4lp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/441682/original/file-20220120-15-egv4lp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/441682/original/file-20220120-15-egv4lp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/441682/original/file-20220120-15-egv4lp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/441682/original/file-20220120-15-egv4lp.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">En 2014, Facebook rachetait le service de messagerie WhatsApp pour la somme de 22 milliards de dollars.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://www.flickr.com/photos/140988606@N08/25076398627">Christoph Scholz/Flickr</a>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>D’un point de vue législatif, des réformes du cadre de contrôle des concentrations dans l’économie numérique sont discutées, partout dans le monde. Pour répondre au faible nombre d’opérations effectivement examinées par une autorité de la concurrence, certains pays ont déjà mis en place une réforme de seuils légaux de notification. Par exemple, l’Autriche et l’Allemagne appliquent désormais un seuil de notification sur base du prix de la transaction.</p>
<p>Depuis mars 2021, la Commission européenne permet également aux États-membres de lui renvoyer l’examen d’opérations n’atteignant pas les seuils relatifs au chiffre d’affaires <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=uriserv%3AOJ.C_.2021.113.01.0001.01.FRA&toc=OJ%3AC%3A2021%3A113%3AFULL">lorsque ce dernier ne reflète pas le potentiel concurrentiel</a>, réel ou futur, d’au moins une des parties à la concentration.</p>
<p>Pour ce qui est des problèmes liés à l’asymétrie d’information entre plates-formes et autorités de la concurrence, la solution ne semble cependant pas encore avoir été trouvée. Certains experts envisagent le <a href="https://www.chicagobooth.edu/research/stigler/news-and-media/committee-on-digital-platforms-final-report">« renversement de la charge de la preuve »</a> ; les parties à la concentration auraient la charge de démontrer l’absence d’effets anticoncurrentiels. Mais les opposants restent nombreux. Selon ces derniers, en plus d’aller à l’encontre du principe légal fondamental selon lequel le plaignant est tenu de prouver le dommage, une telle mesure <a href="https://www.lexology.com/library/detail.aspx?g=b7159a3d-ae2e-4e87-ba37-e59f9200c2c4">risque de décourager les concentrations proconcurrentielles</a>.</p>
<p>Ainsi, les autorités de la concurrence doivent continuer de s’adapter pour pouvoir assurer le juste équilibre entre concurrence sur le marché et incitants à l’innovation, et ce à la vitesse fulgurante des développements de l’industrie du numérique.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/175350/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Laureen de Barsy a reçu une bourse d'études (Van Rompuy scholarship) et des bourses de recherche (EOS et ARC). </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Axel Gautier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’asymétrie d’information et la faible visibilité des entreprises cibles limitent aujourd’hui les possibilités des autorités de la concurrence.Axel Gautier, Professeur d'économie, HEC Liège, LCII (Liège Competition and Innovation Institute), Université de LiègeLaureen de Barsy, PhD candidate in Economics, Université de LiègeLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1650232021-07-28T19:35:18Z2021-07-28T19:35:18ZDébat : Fallait-il vraiment confier la Ligue 1 à Amazon ?<p>L’attribution à Amazon de <a href="https://investir.lesechos.fr/actions/actualites/droits-de-la-ligue-1-amazon-rafle-la-mise-canal-se-retire-1967349.php">l’essentiel des droits TV</a> du Championnat de France de football, et les multiples réactions médiatiques, <a href="https://www.sofoot.com/bein-sports-attaque-canal-en-justice-502149.html">judiciaires</a> et même <a href="https://www.lequipe.fr/Tous-sports/Actualites/Une-mission-parlementaire-sur-les-droits-tv/1260784">politiques</a> qui s’en sont suivies, nous rappelle à quel point la vie des droits TV du football français n’a jamais été un long fleuve tranquille.</p>
<p>Dernier événement en date, le tribunal de commerce de Nanterre autorisait Canal+ a <a href="https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2021/07/23/droits-televises-de-la-ligue-1-la-justice-autorise-canal-a-suspendre-son-contrat-avec-bein-sports_6089360_3236.html">suspendre son contrat de sous-licence</a>, conclu avec BeIN Sports pour la diffusion de deux matchs par journée de Ligue 1, tant que la chaîne qatarie n’assigne pas la Ligue de football professionnel (LFP) en justice ainsi que lui demande l’autre chaîne cryptée. Canal+ demande en effet une renégociation du montant des droits après que Amazon a obtenu la diffusion des huit autres matchs pour une somme inférieure. Alors que les premiers versements doivent intervenir, la LFP pourrait aussi assigner BeIN en justice pour non-paiement.</p>
<p>On se régalerait d’ailleurs volontiers de cette délicieuse série à rebondissements offerte par l’ensemble des protagonistes, si les conséquences éventuelles à moyen terme pour les finances de nos clubs n’étaient pas aussi funestes (et ce n’est pas Jean‑Marc Mickeler, le président de la Direction nationale du contrôle de gestion, gendarme financier du football professionnel, qui <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Article/-le-pire-est-a-venir-pour-jean-marc-mickeler-le-president-de-la-dncg/1270451">prétendra le contraire</a>).</p>
<p><a href="https://theconversation.com/retour-sur-droits-tv-du-foot-francais-retour-sur-une-debacle-154576">Le fiasco de Mediapro</a> a, en effet, été le pilote d’une série qui, si elle ne brille pas toujours par la cohérence économique de ses protagonistes, a le mérite de réserver son lot hebdomadaire de péripéties et coups de théâtre.</p>
<p>Le scénario à suspense qui nous est servi aura au moins eu une vertu : braquer les projecteurs sur l’économie du football. Une économie dont on sait désormais qu’elle souffre des <a href="https://www.latribune.fr/technos-medias/medias/le-fiasco-des-droits-tv-revelateur-des-travers-de-l-economie-du-foot-867772.html">failles structurelles</a> qui ont conduit à la formation d’une <a href="https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/football-la-ligue-1-vaut-elle-vraiment-1-2-milliard-d-euros-780630.html">bulle</a> qui menace aujourd’hui d’éclater.</p>
<h2>Trois enseignements, deux impensés</h2>
<p>Concernant le cas spécifique des droits TV, l’analyse de la crise actuelle nous aura appris trois choses importantes :</p>
<ul>
<li><p>L’inflation des droits TV a été largement soutenue par des <a href="https://theconversation.com/surencheres-des-droits-du-foot-plus-dargent-pour-les-joueurs-moins-pour-les-telespectateurs-52852">mécanismes d’enchères</a> et des processus de mise en concurrence, parfois artificielle, entre diffuseurs ;</p></li>
<li><p>Par manque de diversification de leurs revenus, nos clubs sont devenus <a href="https://www.sportune.fr/business/om-psg-asse-ol-losc-que-pesent-les-droits-tele-sur-les-revenus-des-clubs-de-l1-246137">ultra-dépendants des droits TV</a> ;</p></li>
<li><p>Les droits TV sont un investissement d’autant plus difficile à rentabiliser pour les diffuseurs que des mécanismes de contournement (streaming et IPTV) sont facilement accessibles, et que la facture liée au morcellement du championnat entre plusieurs diffuseurs s’avère salée pour le consommateur.</p></li>
</ul>
<p>Essentiels à la compréhension, ces éléments ne sont pas pour autant suffisants. Ils occultent en effet deux dimensions cruciales, deux impensés du processus d’attribution des droits TV sans lesquels il est difficile de se prononcer sur la pertinence du choix opéré par la LFP de confier à Amazon le soin de diffuser <a href="https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/amazon-a-propose-260-millions-deuros-pour-le-championnat-de-france-de-football-1322952">l’essentiel du championnat</a>.</p>
<h2>Des revenus plus solides</h2>
<p>Dans ce grand jeu de stratégie que constitue la préparation d’un appel d’offres et la mise en concurrence des diffuseurs, la LFP a fait le choix de remettre en jeu les seuls lots jadis obtenus par Mediapro, là où les autres diffuseurs espéraient une remise à plat intégrale.</p>
<p>Ces lots ont donc été remportés par Amazon pour quelque 250 millions d’euros annuels (quand l’accord initial avec Mediapro prévoyait le versement de 780 millions d’euros annuels). Amazon s’engage également à verser 9 millions annuels pour la diffusion de 8 matchs de Ligue 2 par journée de championnat.</p>
<p>Comme le montre le tableau ci-dessous, Amazon propose des revenus plus solides que l’offre concurrente proposée par Canal+ et BeIN Sports. Celle-ci prévoyait certes le versement de 673 millions, mais dont 78 millions étaient conditionnés au nombre d’abonnements enregistrés sur la période.</p>
<iframe title="Comparatif des offres de diffusion domestique soumise à la LFP" aria-label="table" id="datawrapper-chart-Exjyr" src="https://datawrapper.dwcdn.net/Exjyr/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="695" width="100%"></iframe>
<p>C’est mieux, mais uniquement sur le plan quantitatif. C’est ici que l’on identifie un premier impensé : <strong>où est passée la dimension qualitative de l’appel d’offres ?</strong></p>
<h2>Près de 20 euros l’abonnement</h2>
<p>Les procédures d’appel d’offres prévoient la constitution d’un dossier technique à travers lequel les attributaires potentiels décrivent les moyens qu’ils entendent déployer pour réaliser leur mission. En l’espèce, cette proposition qualitative doit préciser au moins deux points cruciaux pour saisir la pleine capacité des acteurs à promouvoir le produit que l’on s’apprête à leur confier : les moyens de production et de promotion du contenu.</p>
<p>Sur le premier de ces deux aspects, le choix d’Amazon ne semble pas particulièrement risqué dans la mesure où la compagnie de Jeff Bezos <a href="https://www.cbnews.fr/digital/image-amazon-reconduit-son-accord-diffusion-matchs-nfl-51702">a déjà fait ses preuves</a> en matière de diffusion d’événements sportifs. De plus, Amazon s’est engagé à verser 25 millions d’euros par saison <a href="https://rmcsport.bfmtv.com/football/ligue-1/ligue-1-combien-offrent-amazon-et-canal-be-in-pour-les-droits-tv_AV-202106110298.html">pour couvrir les coûts de production</a>.</p>
<p>Le second aspect est nettement plus préoccupant. Car, là où le tandem Canal+ – BeIN Sports présentait de solides garanties en matière de visibilité de la compétition du fait de leur base d’abonnés, Amazon part d’une feuille blanche. La LFP ne semble ainsi pas avoir tiré de leçon du fiasco de MediaPro qui avait <a href="https://www.lepoint.fr/sport/football/mediapro-nous-avons-600-000-abonnes-a-la-chaine-telefoot-21-10-2020-2397439_1858.php">péniblement conquis 600 000 abonnés</a>. Difficile de valoriser la « ligue des talents » quand elle n’est vue que d’une poignée de téléspectateurs.</p>
<h2>Facture alourdie pour le consommateur</h2>
<p>Et difficile d’attirer des abonnés à l’ère de l’IPTV et du streaming sans une offre compétitive sur le plan tarifaire. Le précédent Mediapro, qui proposait un abonnement à 25 euros, l’a démontré : les consommateurs ne sont pas enclins à débourser plus de quelques euros mensuels pour contempler les exploits des footballeurs de l’élite française.</p>
<p>Las, force est de constater que la LFP <a href="https://www.ouest-france.fr/sport/football/ligue-1/football-la-lfp-decue-du-prix-de-l-abonnement-a-amazon-581383a8-e5f4-11eb-a6b2-b0bf195271a0">ne semble pas avoir pris de garanties suffisantes à ce niveau</a>, sinon comment expliquer le tarif fort peu accessible proposé par Amazon pour son offre « Prime Ligue 1 » (12,99 euros mensuels auxquels s’ajoutent les 5,99 euros par mois de l’abonnement Prime, soit un total de 18,98 euros) ?</p>
<iframe title="Prix d’accès à l’intégralité de la compétition selon les offres soumises à la LFP" aria-label="table" id="datawrapper-chart-8azlm" src="https://datawrapper.dwcdn.net/8azlm/1/" scrolling="no" frameborder="0" style="width : 0 ; min-width : 100 % !important ; border : none ;" height="365" width="100%"></iframe>
<p>De ce point de vue, l’offre couplée Canal+ – BeIN Sports à 41,90 euros par mois (hors réductions) présentait l’avantage d’un contenu nettement plus diversifié, mais surtout d’une offre concentrée en un seul point de contact et d’une facture globale allégée pour le consommateur qui voudrait voir l’intégralité de la compétition en toute légalité.</p>
<h2>Délégation de service public</h2>
<p>L’autre grand impensé de cet appel d’offres concerne sans aucun doute <strong>la poursuite de l’intérêt général</strong>. En tant qu’association loi 1901, LFP a pour objet la « <a href="https://www.lfp.fr/statuts-reglements">gestion des activités du football professionnel » et la « défense des intérêts matériels et moraux du football professionnel</a> ».</p>
<p>Elle a ainsi pour mission de « développer les ressources du football professionnel dans le but d’en assurer la promotion ». A priori, rien ne s’oppose donc à ce que la LFP privilégie une approche quantitative dans le processus d’attribution des droits TV : elle maximise la valeur du produit en conformité avec ses statuts.</p>
<p>Cependant, la LFP est une association créée par la Fédération Française de Football (FFF). Elle en dépend au titre d’une <a href="https://www.senat.fr/rap/r16-437/r16-437_mono.html">convention conclue</a> entre les deux entités qui prévoit que la <a href="https://www.europe1.fr/sport/fff-lfp-qui-fait-quoi-1370132">FFF a autorité sur la LFP</a>. Autrement dit, les missions de la LFP sont confiées par la FFF et ne peuvent en aucune manière être contraires aux intérêts supérieurs de la FFF.</p>
<p>Or, en tant que fédération, la FFF assure une <a href="https://www.fff.fr/75-qui-sommes-nous-.html">mission de service public</a> qui consiste à développer et promouvoir le football, professionnel comme amateur, sur l’ensemble du territoire national. C’est donc bien au titre d’une <a href="https://www.senat.fr/rap/r16-437/r16-437_mono.html">délégation de service public</a> (DSP) que la FFF donne pouvoir à la LFP de gérer les affaires du monde professionnel.</p>
<h2>Le consommateur lésé, le contribuable aussi</h2>
<p>Nous pourrions dès lors attendre de la LFP qu’elle agisse au nom de l’intérêt général, plutôt que dans le seul intérêt des clubs de football professionnel.</p>
<p>Nous avons déjà souligné que le consommateur ne semble pas avoir été particulièrement pris en considération lors de l’appel d’offres. Le contribuable non plus ! En effet, autant Canal Plus – entreprise française, soumise à l’impôt sur les sociétés et contribuant par le <a href="https://www.telerama.fr/cinema/canal-menace-de-reduire-ses-aides-le-cinema-francais-accuse-le-coup-de-bluff-6838642.php">financement du cinéma français</a> à la politique d’exception culturelle – participe à l’effort redistributif, autant la question reste pleinement ouverte concernant Amazon.</p>
<p>Le rapport impôt payé sur chiffre d’affaires pour Amazon en France atteignait l’an passé un ratio <em>prélèvements directs/chiffre d’affaires</em> de <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/le-tour-de-passe-passe-damazon-sur-ses-impots-francais-1358147">tout juste 3,3 %</a>, ce qui place d’emblée le géant américain dans la catégorie des champions de l’optimisation fiscale.</p>
<p>La taxe mondiale prévoyant un plancher de 15 % sur les entreprises du numérique a, par ailleurs peu de chance d’infléchir le problème. En effet, celle-ci est conditionnée à un taux de profit de 10 %, qui restera longtemps hors d’atteinte pour Amazon dont la stratégie consiste à <a href="https://theconversation.com/podcast-amazon-et-la-spirale-du-low-cost-106731">privilégier la croissance de parts de marché aux profits</a>.</p>
<p>Au final, il semble que la LFP, en ayant porté son choix sur Amazon, a non seulement privilégié une multinationale qui, fort éloignée des considérations françaises, s’avèrera difficile à fiscaliser et à fidéliser dans la durée, mais a également pris le risque de se couper encore un peu plus de son public en occultant la question du coût d’accès pour le consommateur.</p>
<p>En 2009, dans le cadre <a href="https://www.docs-crids.eu/index.php?lvl=notice_display&id=13140">d’un article</a> qui figurait également en bonne place dans un <a href="https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/104000026.pdf">rapport au Premier ministre</a> d’alors (M. François Fillon), nous alertions sur un double risque « d’invisibilisation » et de dépréciation du produit phare de la LFP, découlant du morcellement des offres et de la démocratisation des moyens techniques de contournement. Les derniers rebondissements dans la saga des droits TV du foot français semblent désormais confirmer un peu plus ce scénario.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/165023/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Pillot ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Le choix du géant américain pour diffuser le championnat ne résout pas le problème du coût d'accès au football français pour le consommateur et reste discutable fiscalement.Julien Pillot, Enseignant-Chercheur en Economie (Inseec) / Pr. associé (U. Paris Saclay) / Chercheur associé (CNRS), INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1626662021-06-20T17:00:22Z2021-06-20T17:00:22ZEt si Amazon était la meilleure chose qui soit arrivée à la Ligue 1 depuis longtemps ?<p>Le 11 juin dernier, le conseil d’administration de la Ligue de Football Professionnel (LFP) a révélé que le géant du numérique Amazon serait le <a href="https://www.france24.com/fr/sports/20210611-droits-tv-entr%C3%A9e-fracassante-d-amazon-dans-la-ligue-1-canal-se-retire">principal diffuseur des matchs de Ligue 1</a> (8 matchs sur 10 par journée, et les 10 plus belles affiches de la saison dont les matchs entre l’Olympique de Marseille et le Paris Saint-Germain) et de Ligue 2 jusqu’en 2024, moyennant une enveloppe annuelle de 250 millions d’euros. Après son arrivée dans le sport français via l’obtention d’une partie des droits de diffusion du tournoi de tennis de Roland-Garros, Amazon marque là sa volonté d’élargir la nature des contenus diffusés via sa plate-forme Prime Video.</p>
<h2>Covid + Mediapro = catastrophe annoncée</h2>
<p>Cette annonce intervient dans un contexte des plus compliqués pour le football français. Déjà fortement touchée par la crise du Covid, le privant de revenus tirés de la billetterie, la défection du diffuseur sino-espagnol Mediapro l’avait plongé dans une profonde incertitude financière <a href="https://www.lci.fr/economie/ligue-1-football-prive-de-la-manne-mediapro-le-foot-francais-risque-t-il-la-faillite-2172577.html">menaçant l’existence de nombreux clubs</a>.</p>
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<a href="https://images.theconversation.com/files/406986/original/file-20210617-27-1wjaz7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/406986/original/file-20210617-27-1wjaz7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/406986/original/file-20210617-27-1wjaz7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=309&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/406986/original/file-20210617-27-1wjaz7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=309&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/406986/original/file-20210617-27-1wjaz7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=309&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/406986/original/file-20210617-27-1wjaz7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=389&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/406986/original/file-20210617-27-1wjaz7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=389&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/406986/original/file-20210617-27-1wjaz7z.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=389&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption">Évolution des produits d’exploitation.</span>
<span class="attribution"><span class="source">DNCG</span></span>
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<p>En effet, alors que la billetterie représente environ 11 % des produits d’exploitation des clubs de football français (en moyenne, avec des <a href="https://www.sportune.fr/business/om-psg-asse-ol-huis-clos-que-pese-la-billetterie-sur-les-revenus-des-clubs-de-l1-233450/2">variations importantes d’un club à l’autre</a>), les droits audiovisuels en représentent 47 %, selon un <a href="https://www.lfp.fr/-/media/Project/LFP/LFP/Documents/rapports-dncg/2018-2019/1819_rapport_financier_DNCG_DIGITAL_FR.pdf">rapport de la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) de la Ligue</a> portant sur la saison 2018/2019.</p>
<p>Certes, le montant cumulé des droits que tire la LFP de cet appel d’offres fait pâle figure comparé au précédent : 663 millions d’euros par an (en combinant Amazon, Canal+ et Free), contre 1,217 milliards. Mais cette dernière somme ne lui a jamais été réglée. En effet, Mediapro aurait dû s’acquitter d’un <a href="https://www.lequipe.fr/Football/Article/Droits-tv-mediapro-a-honore-le-dernier-des-trois-versements-prevus-dans-l-accord-avec-la-lfp/1262387">versement annuel de 830 millions</a>, mais n’a finalement versé qu’une <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/mediapro-paiera-t-il-ce-quil-doit-encore-a-la-ligue-de-football-1401504">centaine de millions</a> avant de disparaître. En pareille situation, les 250 millions proposés par Amazon pour diffuser les matchs via son service Prime Video représentent une manne plus que bienvenue.</p>
<h2>Amazon, un acteur indésirable et non crédible ?</h2>
<p>De nombreuses voix <a href="https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-lopa-damazon-sur-le-football-francais-une-mauvaise-nouvelle-1323793">s’élèvent</a> cependant contre cette arrivée tonitruante (et relativement inattendue, car la perspective de sa participation à l’appel d’offres n’a été révélée que la veille de l’annonce des résultats) d’Amazon dans le foot français, pour diverses raisons.</p>
<p>Pêle-mêle, on lui reproche son statut de GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), ses <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/44-milliards-deuros-de-ventes-0-impot-sur-les-societes-amazon-roi-de-loptimisation-fiscale-en-europe-1402119">pratiques d’optimisation fiscale</a> (légales), les <a href="https://www.theguardian.com/technology/2020/feb/05/amazon-workers-protest-unsafe-grueling-conditions-warehouse">conditions de travail</a> de ses salariés, des <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_20_2077">pratiques anticoncurrentielles</a>, etc. Bref, autant de griefs sans lien avec son incursion dans la diffusion du football professionnel français.</p>
<p>Plus directement, d’autres inquiétudes s’expriment sur les délais très courts pour monter l’offre d’ici la reprise du championnat, sur l’absence d’équipe de production pour couvrir les matchs, sur des problèmes éventuels d’accès à l’offre, sur la méconnaissance de ce métier par Amazon, sur l’accès aux matchs uniquement à travers des applications (principe de <a href="https://www.switchonshop.com/fr/index.php?route=simple_blog/article/view&simple_blog_article_id=58">l’accès OTT</a>, <em>over the top</em>), non dépendant du fournisseur d’accès et accessible par de multiples plates-formes), etc.</p>
<p>C’est toutefois oublier que l’entreprise n’est pas nouvelle dans l’acquisition de droits sportifs et la diffusion de tels événements.</p>
<p>Nous avons déjà cité le cas de Roland-Garros. Mais en mars 2021, elle a payé <a href="https://www.vox.com/recode/22338794/amazon-nfl-10-billion-tv-analysis">10 milliards de dollars</a> pour la diffusion exclusive de 15 matchs de la NFL (National Football League, la ligue de football américain) pendant 10 ans. Elle détient aussi les droits de diffusion en Inde du championnat néo-zélandais de cricket (sport majeur dans ces deux pays), une partie de la Ligue des Champions de football en Allemagne et en Italie, des <a href="https://www.independent.co.uk/sport/football/super-league-amazon-premier-league-national-football-museum-champions-league-b1854269.html">matchs de la Premier League anglaise</a> et bien d’autres événements du même type encore.</p>
<h2>Les avantages pour la LFP</h2>
<p>Une fois dépassées ces critiques, plus ou moins justifiées selon leur nature, force est de constater que ce deal avec le géant de Seattle comporte plusieurs avantages dont la Ligue 1 aurait tort de se priver.</p>
<p>Tout d’abord, elle donne l’impression de reprendre une position centrale dans l’écosystème du football français. En effet, les relations de pouvoir au sein de cet écosystème semblaient de plus en plus déséquilibrées en faveur du « diffuseur historique », à savoir Canal+. Comme nous l’avons montré dans <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/JSM-02-2019-0084/full/html">nos travaux de recherche</a>, les écosystèmes sont soumis à des jeux de pouvoir qui peuvent avoir des conséquences importantes sur les acteurs, la captation de la valeur et l’organisation de l’écosystème. La pression de Canal+ pour diminuer le nombre de clubs en Ligue 1 (à 18, sinon à 16 comme l’a <a href="https://rmc.bfmtv.com/mediaplayer/audio/invite-maxime-saada-president-du-directoire-du-groupe-canal-0906-692195.html">récemment déclaré Maxime Saada</a>, président du directoire de la chaîne) et sa volonté de jouer un rôle toujours plus fort dans l’écosystème ont certainement pesé dans la décision de la LFP.</p>
<p>Ensuite, la capitalisation boursière de <a href="https://www.google.com/finance/quote/AMZN:Nasdaq?sa=X&ved=2ahUKEwiDjrbTrZzxAhXQxYUKHXLMDOsQ3ecFMAB6BAgGEBo">1700 milliards de dollars</a> (au 16 juin 2021), son chiffre d’affaires de 386 milliards de dollars et son résultat net de 21,33 milliards font d’Amazon un acteur autrement plus sûr que Mediapro. Dans le contexte décrit plus haut, c’est un argument qui porte pour la LFP et les présidents des clubs qui en font partie.</p>
<p>En complément, Amazon a déjà fait ses preuves et démontré son expertise dans la diffusion d’événements sportifs, que ce soit <a href="https://rmcsport.bfmtv.com/tennis/roland-garros/roland-garros-chiffres-qualite-experience-amazon-prime-a-seduit-la-fft-et-la-direction-du-tournoi_VN-202106130118.html">pour Roland-Garros</a> en France, ou d’autres contenus à l’étranger. Cela ne devrait pas surprendre, tant on sait à quel point Amazon s’est construite sur un principe simple : être l’entreprise de référence sur la <a href="https://www.powerreviews.com/blog/amazon-customer-centric-strategy/">qualité du service délivré au client</a>.</p>
<p>L’accès aux matchs via Amazon pourrait aussi doper la visibilité de la Ligue 1 et de la Ligue 2. Amazon est en effet une plate-forme de vente mais aussi une marketplace qui sait comment rendre visibles les produits d’autres entreprises. Et elle a appliqué cette stratégie à son service Prime Video, lequel propose maintenant des productions exclusives Amazon, mais distribue également des chaînes et des contenus produits par d’autres.</p>
<p>Aussi, même si les interrogations liées à l’accès en OTT sont légitimes (quid des personnes n’ayant pas d’autre possibilité de recevoir la télévision que par la TNT ?), les <a href="https://www.bercynumerique.finances.gouv.fr/index.php/l-information-en-continu/etude-le-numerique-en-france-en-2020#:%7E:text=Sur%2065%2C2%20millions%20d,%2C2%25%20sur%20un%20an.">89 % de taux de pénétration de l’Internet</a> en France laissent supposer que l’accès pourrait ne pas être un problème majeur.</p>
<p>De plus, l’acquisition de droits sportifs un peu partout dans le monde, pour des durées parfois très longues, dénote une volonté stratégique de s’inscrire dans le long terme. Or, depuis une dizaine d’années, le football français a souffert de multiples changements de diffuseurs. Couplé à l’accroissement du nombre de ces derniers et au besoin de prendre plusieurs abonnements pour suivre une saison entière du fait du découpage des droits sportifs en lots, cela a troublé la lisibilité de l’offre et renchéri le coût de l’accès pour les supporters (où et comment regarder les matchs ?). Une situation qui favorise de facto la tentation du piratage.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1124117717034913792"}"></div></p>
<p>Sur ce point, la présence d’Amazon ne solutionne pas le problème – sauf si elle récupérait finalement la totalité des droits, <a href="https://www.eurosport.fr/football/ligue-1/2020-2021/retrait-de-canal-victoire-d-amazon-les-questions-que-pose-la-nouvelle-donne-des-droits-tv_sto8369729/story.shtml">Canal+ ayant annoncé son retrait</a> dans les minutes suivant la publication des résultats de l’appel d’offres. Il y aurait alors un risque de monopole, dont on connaît les effets potentiellement délétères (voir par exemple le <a href="https://www.lefigaro.fr/medias/foot-italien-dazn-triple-ses-tarifs-d-abonnements-a-29-99-euros-20210608">récent triplement de ses tarifs</a> par la plate-forme Dazn pour l’accès quasi exclusif aux matchs du championnat italien).</p>
<h2>200 millions d’abonnés dans le monde</h2>
<p>À ce jour, rien dans les pratiques d’Amazon à l’étranger ne laisse supposer que ce soit un objectif de la plate-forme. Au contraire, Prime Video a, jusqu’à présent, toujours maintenu ses tarifs (49 euros annuels ou 5,99 euros mensuels en France) alors qu’était enrichie l’offre proposée au client. En ira-t-il de même pour les droits du football français ? La question reste ouverte… Mais il faut comprendre que, contrairement aux précédents diffuseurs dont les prix étaient nettement supérieurs (29,90 euros mensuels pour Mediapro) et ne donnaient droit qu’au football, Amazon s’appuie sur cette offre Prime Video <a href="https://nypost.com/2021/04/15/inside-amazons-plan-to-transform-the-sports-broadcasting-world/">pour accroître son nombre d’abonnés Prime</a>. Ceux-ci sont aujourd’hui 200 millions <a href="https://www.statista.com/topics/4076/amazon-prime/">dans le monde</a>, <a href="https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/lombre-damazon-plane-sur-le-championnat-de-france-de-football-1322603">et environ 10 millions en France</a>.</p>
<p>Ces abonnés ont accès à une large palette de services (dont la livraison gratuite et en accéléré, des films et séries, de la musique, etc.)… qui les rend <a href="https://www.forbes.com/sites/pamdanziger/2018/01/10/amazons-customer-loyalty-is-astounding/">plus fidèles et les amène à dépenser plus</a> sur le store Amazon. Si le tarif ne change pas, cela renforcerait d’autant plus la visibilité de la Ligue 1 et de la Ligue 2.</p>
<p>Par ailleurs, des travaux ont aussi montré les conséquences néfastes d’une concurrence exacerbée quand il s’agit des droits sportifs. Soit <a href="https://unctad.org/system/files/official-document/ciclpd50_en.pdf">les clients se détournent</a> partiellement ou totalement de l’offre, car ils ne peuvent suivre qu’une partie des matchs (complexité et coût des abonnements multiples, avec une offre illisible). Soit ils s’orientent <a href="https://www.ingentaconnect.com/content/hsp/jdmm/2021/00000009/00000003/art00004">vers du piratage</a> comme souligné précédemment, <a href="https://www.researchgate.net/publication/304854227_The_Sports_Broadcasting_Market">provoquant des pertes</a> pour tous les acteurs de l’écosystème – y compris avec des externalités négatives sur d’autres types de revenus (merchandising, billetterie…) ou sur l’image de la Ligue, des clubs ou des diffuseurs.</p>
<p>Accorder l’ensemble des droits à un seul diffuseur ne comporterait donc pas que des risques – même si ces derniers seraient indéniables, surtout dans un <a href="https://www.lesechos.fr/tech-medias/medias/droits-du-foot-lere-de-la-deflation-1323029">contexte mondial de déflation</a> apparente des droits sportifs audiovisuels.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/162666/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Loïc Plé ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’arrivée du géant américain dans le football français pourrait notamment donner plus de visibilité au championnat national en proposant un accès moins cher aux téléspectateurs.Loïc Plé, DIrecteur de la Pédagogie - Associate Professor, IÉSEG School of ManagementLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1617032021-06-02T13:44:43Z2021-06-02T13:44:43ZL’achat de MGM par Amazon marquera-t-il la fin du règne de Netflix ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/403234/original/file-20210527-15-1e8tt6l.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=36%2C7%2C4852%2C3246&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">En achetant MGM, Amazon affiche clairement ses ambitions de détrôner Netflix et la course pour la première place sur le marché de la vidéo à la demande n’a jamais été aussi serrée.
</span> <span class="attribution"><span class="source">(Shutterstock)</span></span></figcaption></figure><p>L’impitoyable guerre que se livrent les leaders mondiaux de la vidéo à la demande a atteint son paroxysme avec l’acquisition du mythique studio hollywoodien MGM (Metro Goldwyn Mayer) par le géant Amazon, le 26 mai, lors d’une transaction s’élevant à 8,45 milliards de dollars.</p>
<p><a href="https://www.journaldugeek.com/2020/12/22/mgm-les-studios-derriere-james-bond-sont-a-vendre/">La vente de MGM</a> est survenue après plus de six mois de négociations. Le studio américain, symbolisé par un « lion rugissant », était déjà affaibli par d’importantes difficultés financières avant que la pandémie et la fermeture prolongée des salles de cinéma ne lui portent un coup de grâce.</p>
<p>Malgré la faible valorisation boursière du studio MGM (estimée à seulement 5,5 milliards de dollars, il y a quelques mois), plusieurs géants de l’industrie numérique, dont Apple, étaient intéressés par son rachat. Mais c’est Amazon qui a remporté la mise et marqué l’histoire en devenant le premier acteur de l’industrie du « streaming » vidéo à acquérir un studio majeur d’Hollywood.</p>
<p>Amazon affiche ainsi clairement ses ambitions de détrôner Netflix. Le service Prime Video compte déjà près de 200 millions d’utilisateurs, talonnant de près l’entreprise californienne avec ses 208 millions d’abonnés. La course pour la première place sur le marché de la vidéo à la demande n’a jamais été aussi serrée.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/403158/original/file-20210527-22-1o5lthy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/403158/original/file-20210527-22-1o5lthy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/403158/original/file-20210527-22-1o5lthy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/403158/original/file-20210527-22-1o5lthy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/403158/original/file-20210527-22-1o5lthy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/403158/original/file-20210527-22-1o5lthy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/403158/original/file-20210527-22-1o5lthy.jpeg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La bataille des géants de la vidéo sur demande.</span>
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<p>Nos intérêts de recherches portant sur la <a href="https://www.decouvrabilite-francophonie.net/">découvrabilité</a> et l’accès à une <a href="https://www.canada.ca/fr/patrimoine-canadien/services/diversite-contenus-ere-numerique/analyse-contenu-local-national.html">diversité de contenus en ligne</a> nous incitent à effectuer une veille régulière des transformations et des déséquilibres provoqués par les plates-formes de diffusion numérique qui contrôlent le marché mondial des biens et services culturels.</p>
<h2>Amazon s’offre la part du lion !</h2>
<p>À l’ère de la consommation multiplateformes, le moyen le plus efficace pour se démarquer et séduire un auditoire en quête permanente de nouveautés et d’une diversité de choix est d’étoffer et de renouveler régulièrement son catalogue. L’investissement dans l’acquisition ou la production de contenus originaux devient une munition importante dans la guerre des contenus exclusifs entre plates-formes.</p>
<p>La plate-forme qui ne peut pas offrir suffisamment et assez rapidement de contenu pour gagner et fidéliser des abonnés ne pourra pas rivaliser avec ses concurrents. D’ailleurs, le <a href="https://www.wsj.com/articles/amazon-would-add-james-bond-content-depth-in-expected-mgm-deal-11621980972?mod=article_relatedinline"><em>Wall Street Journal</em></a> observe que l’acquisition de MGM constitue un aveu de la difficulté qu’avait jusqu’ici Amazon à produire suffisamment de contenus pour satisfaire la demande des abonnés de son service Prime Vidéo.</p>
<p>Dans le <a href="https://cmf-fmc.ca/fr/futur-et-medias/articles/internet-un-gigantesque-club-video/">gigantesque club vidéo</a> qu’est devenu Internet, on ne peut plus miser uniquement sur la qualité du catalogue <a href="https://www.techradar.com/news/apple-tv-plus-is-betting-on-quality-over-quantity-for-its-shows">comme le fait par exemple Apple</a>, avec le service Apple TV+. Aux yeux des abonnés, le nombre de titres disponibles acquiert désormais autant, voire plus, d’importance que la qualité des contenus offerts.</p>
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<img alt="Logo de MGM avec le lion rugissant" src="https://images.theconversation.com/files/403236/original/file-20210527-17-ai413a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/403236/original/file-20210527-17-ai413a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/403236/original/file-20210527-17-ai413a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/403236/original/file-20210527-17-ai413a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=450&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/403236/original/file-20210527-17-ai413a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/403236/original/file-20210527-17-ai413a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/403236/original/file-20210527-17-ai413a.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=566&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le catalogue des Studios MGM contient des œuvres cinématographiques qui ont remporté plus de 180 Oscars et 100 Emmys.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>Amazon fait donc main basse sur un véritable trésor pour enrichir son catalogue, en obtenant la propriété intellectuelle exclusive de 4 000 longs métrages (dont <em>Le silence des agneaux</em>, <em>Hobbit</em>, <em>Le magicien d’Oz</em>, <em>Rocky</em>,<em>Terminator</em>, <em>La panthère rose</em>, et toute la saga James Bond). Il faut ajouter à cela environ 17 000 programmes télévisés de la MGM, avec des séries vedettes comme <em>Stargate</em>, <em>Vikings</em>,ou <em>La servante écarlate</em>. Ce catalogue contient des <a href="https://www.telerama.fr/cinema/amazon-capture-le-lion-de-la-mgm-et-son-riche-catalogue-6889487.php">œuvres cinématographiques</a> ayant gagné plus de 180 Oscars et 100 Emmys.</p>
<p>Par ailleurs, la croissance exponentielle des revenus générés par le commerce électronique et par l’utilisation des services d’infonuagique dans le contexte de la pandémie ont permis à Amazon de <a href="https://www.lapresse.ca/affaires/entreprises/2021-04-29/premier-trimestre/amazon-triple-ses-profits.php">tripler ses profits</a> en 2020 et de connaître une hausse de 44 % de son chiffre d’affaires sur un an.</p>
<p>Ces résultats lui laissent ainsi une marge de manœuvre très confortable pour investir près de 11 milliards de dollars dans la production de contenu original. Amazon augmente ainsi de près de 40 % son offre par rapport à l’année précédente. Elle a investi également près de 465 millions de dollars dans la première saison de la série <em>Le seigneur des Anneaux</em>, déjà considérée comme la série télévisée la plus onéreuse de l’histoire.</p>
<h2>Un redécoupage du paysage audiovisuel</h2>
<p>Alors que des <a href="https://www.zdnet.fr/blogs/digital-home-revolution/1-milliard-d-abonnements-en-vue-pour-la-svod-39890149.htm">prévisions</a> anticipaient déjà en 2019 que le nombre d’abonnements aux services de vidéo à la demande devrait atteindre près d’un milliard à travers le monde, ces services ont connu un essor fulgurant durant la pandémie.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-salles-de-cinema-survivront-elles-a-la-crise-sanitaire-mondiale-146801">Les salles de cinéma survivront-elles à la crise sanitaire mondiale ?</a>
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</p>
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<p><a href="https://www.csa.fr/Informer/Collections-du-CSA/Thema-Toutes-les-etudes-realisees-ou-co-realisees-par-le-CSA-sur-des-themes-specifiques/Les-etudes-corealisees-avec-le-CSA/Etude-Hadopi-CSA-La-multiplication-des-services-de-video-a-la-demande-par-abonnement">Une étude</a> récente du Conseil supérieur de l’audiovisuel en France conclut que le marché se structure désormais autour de quelques acteurs numériques mondiaux, qui renforcent leurs investissements dans la production locale. Ils poussent ainsi les acteurs historiques à revoir leurs stratégies de différenciation, grâce à d’ambitieuses opérations de rachat ou de fusion, de positionnement éditorial, d’agrégation de contenus exclusifs et de développement d’offres alternatives.</p>
<p>La démultiplication de l’offre oblige aussi les acteurs à composer avec de nouveaux profils de consommateurs (dont une forte proportion de jeunes) qui s’abonnent et se désabonnent régulièrement d’un service audiovisuel pour en tester d’autres.</p>
<p>Concurrencés par les géants du numérique, qui sont passés du statut de simples distributeurs et diffuseurs à celui de producteurs de contenus, les majors de l’industrie hollywoodienne ont dû faire preuve d’agilité et repenser leur modèle d’affaires.</p>
<h2>La course aux abonnés</h2>
<p>Le studio MGM était l’un des derniers pionniers de la production cinématographique américaine à ne pas s’être adossé à une plate-forme de vidéo en ligne ou à ne pas avoir créé son propre service de vidéo à la demande.</p>
<p>À titre d’exemple, <a href="https://www.theverge.com/2019/3/20/18273142/disney-fox-acquistion-final-hulu-marvel-streaming-21st-century">Disney a fait l’acquisition en mars 2019 de la 21st Century Fox</a> et a mis la main sur la plate-forme Hulu, avant même le lancement de son propre service Disney+. Ce dernier a passé le cap des 100 millions d’abonnés en un an, avec un catalogue enrichi des contenus des studios Fox, Pixar, Marvel ou Lucasfilm.</p>
<p>Autre exemple : après le rachat en 2018 du conglomérat Warner Media et après avoir lancé en mai 2020 sa plate-forme HBO Max, le <a href="https://www.lesaffaires.com/secteurs-d-activite/medias-et-telecommunications/warner-media-et-discovery-forment-un-nouveau-geant-mediatique/624965">géant des télécommunications AT&T vient de décider de fusionner ses activités avec Discovery</a>. Il pourra ainsi investir davantage dans des contenus originaux et proposer plus de choix aux spectateurs avec de nouvelles expériences vidéo.</p>
<p>La stratégie agressive d’Amazon a de quoi faire trembler Netflix, dont le nombre de <a href="https://fr.statista.com/infographie/24678/nombre-de-nouveaux-abonnes-payants-de-netflix-par-trimestre-et-par-region/">nouveaux abonnés diminue</a> en raison d’un manque de renouvellement des contenus et d’une saturation sur certains marchés (notamment aux États-Unis et au Canada).</p>
<p>Parallèlement, avec l’achat de MGM et l’acquisition de son riche catalogue de films, il est fort à parier que le nombre de nouveaux abonnés d’Amazon Prime Video monte en flèche dans les prochains mois ou prochaines années. Amazon pourrait également priver ses principaux rivaux (Netflix, Disney+, HBO Max, Apple TV+) de l’exploitation des contenus exclusifs autorisés sous licence de son nouveau catalogue.</p>
<h2>Netflix prépare sa riposte</h2>
<p>Pour conserver sa position de leader, Netflix est contraint d’accélérer sa croissance sur des <a href="https://www.jeuneafrique.com/1114880/culture/netflix-lorgne-lafrique-francophone/">marchés prometteurs tels que l’Afrique francophone</a> et de diversifier ses services, en proposant des contenus inédits. La multinationale <a href="https://www.protocol.com/netflix-survey-nplus-show-playlists">a récemment sondé certains de ses utilisateurs</a> concernant une nouvelle plate-forme nommée N-Plus, qui pourrait proposer les fonctionnalités d’un réseau social (avec critiques et commentaires partageables entre amis ou avec la communauté), combinées à un site d’actualités incluant des balados, des listes de lectures personnalisées et des informations sur les prochaines productions.</p>
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<img alt="Une jeune femme devant son ordinateur regarde le menu de Netflix pour choisir un film" src="https://images.theconversation.com/files/403237/original/file-20210527-20-1ahcyum.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/403237/original/file-20210527-20-1ahcyum.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/403237/original/file-20210527-20-1ahcyum.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/403237/original/file-20210527-20-1ahcyum.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/403237/original/file-20210527-20-1ahcyum.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/403237/original/file-20210527-20-1ahcyum.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/403237/original/file-20210527-20-1ahcyum.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Quelle sera la suite pour Netflix ? Il y a des rumeurs selon lesquelles la plate-forme serait intéressée à se lancer dans le jeu vidéo.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span>
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<p>D’autres rumeurs circulent selon lesquelles le groupe californien nourrirait des ambitions pour le <a href="https://www.futura-sciences.com/tech/actualites/jeux-video-jeux-video-nouveau-grand-chantier-netflix-87587/">marché du jeu vidéo</a> et envisagerait de lancer d’ici 2022 un service pour concurrencer Apple Arcade.</p>
<p>En allant au-delà de son cœur d’activité pour se positionner dans l’industrie vidéoludique, la plate-forme prendrait un risque somme toute mesuré. Cela lui permettrait d’offrir un divertissement interactif avec des contenus mêlant fiction et jeu vidéo afin de susciter davantage l’engagement des utilisateurs et l’intérêt de nouveaux publics.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/161703/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Tchéhouali Destiny ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’investissement dans l’acquisition ou la production de contenus originaux devient une munition importante dans la guerre des contenus exclusifs que se livrent les plates-formes.Tchéhouali Destiny, Professeur en communication internationale, Université du Québec à Montréal (UQAM)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1566862021-03-09T20:07:44Z2021-03-09T20:07:44ZAmazon, Airbnb, Google… La stratégie d’acquisition à part des plates-formes<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/388280/original/file-20210308-17-jj79u4.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=35%2C0%2C4000%2C2640&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Les plates-formes réalisent en moyenne leur première acquisition 3,6&nbsp;ans après leur création, contre 5,5&nbsp;ans pour les entreprises non plates-formes.</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://www.shutterstock.com/image-photo/july-1-2017-las-vegas-nv-685491736">Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>L’avènement d’Internet a permis l’émergence de plates-formes numériques de type Uber ou Airbnb, qui servent d’intermédiaires entre les fournisseurs et les consommateurs. Ces dernières sont de <a href="https://onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.1002/smj.2904">plus en plus nombreuses</a>. Ce succès résulte principalement de <a href="https://www.academia.edu/15706068/Two_Sided_Network_Effects_A_Theory_of_Information_Product_Design">l’effet réseau</a> : la plate-forme qui recense le plus large panel de fournisseurs sera celle qui attirera le plus grand nombre de clients et vice-versa.</p>
<p>Un aspect de la stratégie de croissance de ces plates-formes a été peu étudié : celui du rôle des acquisitions d’autres entreprises. Par conséquent, on appréhende mal la manière dont ces plates-formes utilisent les acquisitions ou les différences qu’il peut exister avec les stratégies d’acquisition des entreprises qui n’en sont pas.</p>
<p>Dans le cadre de notre <a href="https://misq.org/skin/frontend/default/misq/pdf/Abstracts/16374_RN_MiricPaganiElSawyAbstract.pdf">recherche</a>, (à paraître dans la revue <em>MIS Quarterly</em>) nous nous sommes donc penchés sur la stratégie d’acquisition des plates-formes. Nous avons cherché à identifier « à quel moment » ces sociétés procèdent aux acquisitions et « quels types » d’entreprises ont leur faveur. Pour cela, nous nous sommes concentrés sur les types d’acquisitions qui sont effectuées peu de temps après la création d’une entreprise puis tout au long sa progression jusqu’à maturité.</p>
<p>Nous avons ainsi passé en revue – grâce aux données issues de la base de données CrunchBase – 3 062 acquisitions réalisées par des entreprises du digital, nées à partir de l’année 2000, que nous avons comparées aux acquisitions des entreprises hors plates-formes.</p>
<h2>Acquérir plus tôt et dans le même secteur</h2>
<p>Tout d’abord, en vue d’exploiter au mieux l’effet réseau, les plates-formes en acquièrent d’autres pour consolider leur portefeuille clients et leur base de fournisseurs.</p>
<p>Il existe de nombreux exemples, en ce sens, de plates-formes dont la stratégie de croissance consiste à en acquérir d’autres qui sont majeures. C’est ainsi que Airbnb a acquis un certain nombre de sociétés en ligne de « location de particuliers » similaires dès ses débuts, afin de rapatrier leurs fournisseurs (loueurs) sur leur propre plate-forme. De la même manière, Match.com, un des principaux sites de rencontre en ligne, a fait l’acquisition de plus de 24 autres applications identiques.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/6ckYsr7Pc3M?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Comprendre les effets de réseau (Xerfi canal, 2018).</span></figcaption>
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<p>Notre première hypothèse tend ainsi à démontrer qu’il est probable que les sociétés plates-formes procèdent à leurs acquisitions plus tôt que les autres. De manière empirique, ceci implique que l’âge de ces sociétés (en années depuis leurs créations) au moment où elles procèdent à leurs premières acquisitions, serait plus bas que celui des entreprises hors plates-formes.</p>
<p>D’après nos résultats, les plates-formes réalisent en moyenne leur première acquisition 3,6 ans après leur création, alors que les sociétés hors plates-formes elles, réalisent leur première acquisition en moyenne 5,5 ans après avoir vu le jour.</p>
<h2>Conserver son pouvoir d’attraction</h2>
<p>L’une des caractéristiques notables de la concurrence dans l’économie numérique est celle du « gagnant remporte tout » (<em>winner takes all</em>) selon laquelle les plates-formes qui réussissent sur leur marché tendent à figurer comme seul leader au bout d’un certain temps.</p>
<p>Par conséquent, une fois que ces entreprises sont parvenues à maturité, il est possible que le nombre de sociétés de plates-formes à acquérir sur la même niche de marché soit moins important, et que les bénéfices résultant de l’acquisition soient moindres.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1242650138243477504"}"></div></p>
<p>Cela signifie qu’à mesure que les plates-formes gagnent en maturité, elles sont moins susceptibles d’acquérir d’autres entreprises de plates-formes dans la même niche de marché. En parallèle, il se peut que les sociétés de plates-formes souhaitent moins acquérir des entreprises situées sur le même créneau car ces actions limiteraient au bout d’un certain temps leur capacité d’accroissement, ainsi que leur pouvoir d’attraction sur les fournisseurs et les clients.</p>
<p>Ainsi, comme le suggèrent les exemples de Google lors du lancement de ses applications au sein du marché Android, ou d’Amazon en compétition avec ses propres revendeurs, déplacer la plate-forme vers le cœur de marché, en générant de nouvelles concurrences, peut <a href="https://www.hbs.edu/faculty/Pages/item.aspx?num=55899">dissuader certains fournisseurs de la rejoindre</a>. De la même manière, après le rachat d’Instagram par Facebook en 2012, la croissance de la base d’utilisateurs du premier s’est réalisée <a href="https://pubsonline.informs.org/doi/abs/10.1287/mnsc.2016.2502?journalCode=mnsc">au détriment de petites applications tierces</a> dans l’écosystème de partage de photos de Facebook.</p>
<p>Nos résultats indiquent donc qu’il est probable que les plates-formes procèdent à des acquisitions de sociétés opérant sur la même niche de marché tôt dans leur existence, puis qu’elles effectuent l’acquisition de sociétés opérant sur d’autres niches de marché une fois matures.</p>
<p>Ceci semble mettre en avant la nécessité de considérer, lors de futurs travaux de recherche, les enjeux auxquels les plates-formes font face pour maintenir l’équilibre entre « intermédiation » et « contrôle », plutôt que d’intervenir en tant que pure intermédiaire, car elles ont souvent besoin de garder le contrôle d’autres sociétés au sein de leur écosystème.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1171892685550096384"}"></div></p>
<p>Il apparaît donc nécessaire de continuer les travaux de recherche pour mieux comprendre les différentes façons dont les sociétés réalisent leurs acquisitions, et les raisons pour lesquelles elles le font.</p>
<hr>
<p><em>Cette contribution s’appuie sur l’<a href="https://misq.org/skin/frontend/default/misq/pdf/Abstracts/16374_RN_MiricPaganiElSawyAbstract.pdf">article</a> de recherche « When and Who Do Platform Companies Acquire ? Understanding the Role of Acquisitions in the Growth of Platform Companies » de Milan Miric, Margherita Pagani, et Omar A. El Sawy à paraître dans la revue MIS Quarterly</em>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/156686/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Margherita Pagani ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Après leur lancement, les géants de l’économie numérique ont commencé par racheter rapidement des entreprises de leur secteur avant d’élargir le champ tout au long de leur développement.Margherita Pagani, Professor of Digital Marketing, Director Research Center on Artificial Intelligence in Value Creation, Academic Co-Director MsSc in Digital Marketing and Data Science, EM Lyon Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1535132021-01-20T20:13:24Z2021-01-20T20:13:24ZCookie-walls : pourquoi Google et Amazon ont été sanctionnés par la CNIL<p>La Commission nationale de l’informatique et des libertés de France (CNIL) poursuit fermement sa lutte juridique contre les « cookie-walls », en tirant deux balles significatives contre deux géants Google et Amazon. Le 7 décembre 2020, la CNIL a en effet infligé des <a href="https://www.cnil.fr/en/cookies-financial-penalties-60-million-euros-against-company-google-llc-and-40-million-euros-google-ireland">sanctions de 100 millions d’euros à Google</a> (LLC et Ireland Limited) et de <a href="https://www.cnil.fr/en/cookies-financial-penalty-35-million-euros-imposed-company-amazon-europe-core">35 millions d’euros à Amazon</a> pour violation de la directive « vie privée et communications électroniques » (telle que transposée dans l’article 82 de la <a href="https://www.cnil.fr/fr/la-loi-informatique-et-libertes">loi française Informatique et Liberté du 6 janvier 1978</a>), notamment en ce qui concerne les obligations de transparence sur les cookies, la possibilité de les refuser, et l’architecture informationnelle de leur collecte (qui est accusée d’être basée sur un mécanisme opaque et défaillant d’opt-out, c’est-à-dire d’obtention de l’accord de l’usager).</p>
<p>Les violations de Google et Amazon concernent deux aspects : les devoirs d’information et la légalité des politiques en matière de cookies, ces fichiers déposés par votre ordinateur par le site pour suivre votre navigation. Ce que la CNIL semble suggérer, c’est que les deux grandes entreprises technologiques créent de facto des cookie-walls qui sont illégaux. Les cookie-walls sont les bannières placées sur un site web pour informer les visiteurs de leur utilisation des cookies, sans option de rejet : la seule façon d’afficher le contenu est d’accepter et de continuer.</p>
<p>En principe, les cookies, qui ne sont pas nécessaires au bon fonctionnement du site web, ne peuvent être installés et accessibles qu’après que la personne concernée a été correctement informée (par une communication « conviviale », conformément à la <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/ALL/?uri=CELEX:32002L0058">directive « vie privée et communications électroniques »</a>) et a donné son consentement.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1336931161621327872"}"></div></p>
<p>La CNIL observe que, lorsque les personnes concernées vont sur Google.fr, les premières informations apparaissant sur la bannière « vie privée » ne sont pas liées aux cookies. Néanmoins, plusieurs cookies (placés également à des fins publicitaires) sont immédiatement installés sur l’appareil de l’utilisateur. En outre, même en cliquant sur « plus d’informations », l’utilisateur ne peut pas comprendre immédiatement quels cookies sont collectés et à quelles fins. Il ne peut même pas désactiver ces cookies, sauf s’il fait défiler l’ensemble de la politique de confidentialité (en évitant de cliquer sur un hyperlien) et clique enfin sur « autres options ».</p>
<h2>Un système de désengagement « défaillant »</h2>
<p>Après le début de l’enquête de la CNIL, Google a modifié sa politique de transparence concernant les cookies. Cependant, la CNIL constate que, même en tenant compte de ces améliorations, les finalités déclarées pour le traitement des données liées aux cookies sont génériques et pas assez spécifiques ; les effets (par exemple, la personnalisation des annonces sur les différents services de Google) ne sont pas communiqués de manière adéquate ; les procédures de refus des cookies sont toujours cachées derrière des boutons opaques comme « options » ou « plus d’informations ».</p>
<p>De plus, la CNIL a constaté que même si l’utilisateur désactive les fonctionnalités, certains cookies inutiles restent conservés dans son dispositif : en d’autres termes, le système de désengagement est non seulement opaque mais aussi « défaillant ». Enfin, la CNIL soutient que l’expression « retirer son consentement » utilisée par Google est « abusive », puisque le consentement n’a jamais été réellement donné par les sujets, mais présumé dans le cadre d’un système d’opt-out.</p>
<p>Les raisons pour lesquelles la CNIL a imposé des sanctions à Amazon sont similaires. En particulier, lorsque la personne concernée accède à Amazon.fr, elle ne peut que lire une bannière affirmant « en utilisant ce site, vous acceptez notre utilisation de cookies pour offrir et améliorer nos services ». Il s’agit d’une violation des dernières lignes directrices de la <a href="https://www.cnil.fr/sites/default/files/atoms/files/lignes_directrices_de_la_cnil_sur_les_cookies_et_autres_traceurs.pdf">CNIL de septembre 2020</a> (et de <a href="http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?docid=218462&doclang=FR">l’arrêt « Planet49 »</a> de la Cour de justice de l’Union européenne) : il devrait y avoir une expression non ambiguë du consentement, le système d’opt-out (qui était accepté avant l’entrée en vigueur du <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:32016R0679">Règlement général sur la protection des données</a>, le RGPD, en mai 2018) n’est désormais plus acceptable.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/379461/original/file-20210119-21-17a62oa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/379461/original/file-20210119-21-17a62oa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/379461/original/file-20210119-21-17a62oa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/379461/original/file-20210119-21-17a62oa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=399&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/379461/original/file-20210119-21-17a62oa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/379461/original/file-20210119-21-17a62oa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/379461/original/file-20210119-21-17a62oa.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=501&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Le RGPD, entré en vigueur mi-2018, a durci les règles en termes de consentement des usagers.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Pe3k/Shutterstock</span></span>
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</figure>
<p>En résumé, la CNIL soutient que toute l’architecture informationnelle des deux grands acteurs de la tech pour la collecte de cookies n’est pas basée sur un système transparent d’opt-in (qui est le seul acceptable) mais sur un système opaque, ce qui entraîne une course d’obstacles pour les personnes refusant les conditions proposées.</p>
<h2>Une question de territorialité</h2>
<p>La portée territoriale de l’activité de la CNIL et de l’applicabilité du droit français a également été un sujet de discussion. Google a affirmé qu’en vertu du RGPD, le mécanisme de coopération impose que l’autorité de protection des données de l’État membre où Google a son établissement principal (Irlande) prenne la tête de la procédure d’infraction (c’est-à-dire l’autorité irlandaise de protection des données). Et Amazon a affirmé que puisque son établissement principal est au Luxembourg, il respecte les règles juridiques luxembourgeoises sur les cookies et ne devrait pas être invité à respecter les règles françaises (lesquelles, soit dit en passant, sont plus restrictives et sévères).</p>
<p>La CNIL a rejeté les deux arguments : les données personnelles liées aux cookies sont régies par la directive « vie privée et communications électroniques », où le mécanisme de coopération indiqué par le RGPD ne peut s’appliquer. En outre, cette directive permet (à l’article 15 bis) aux États membres de déterminer, en vertu de leur droit national, les procédures d’application des règles relatives à la vie privée et aux communications électroniques. En conséquence, chaque État membre peut suivre ses propres règles nationales (mettant en œuvre la directive européenne).</p>
<p>L’applicabilité de la loi française et la compétence de la CNIL sont évidentes puisque les cookies sont installés dans les dispositifs matériels des personnes concernées qui se trouvent en France : le traitement des données se fait en France et, par conséquent, le principe de territorialité de la loi française Informatique et liberté (article 3) est respecté.</p>
<h2>Une interdiction non explicite</h2>
<p>La principale conclusion que nous pourrions tirer de ces décisions est que, non seulement les cookie-walls sont (au cas par cas) susceptibles d’être illégaux, mais aussi que ils sont de facto généralement illégaux. En d’autres termes, le fait de forcer la personne concernée à gagner une difficile course d’obstacles de clics, de défilements et de boutons ambigus avant de pouvoir refuser les cookies a le même effet qu’un cookie-walls et devrait être interdit.</p>
<p>Dans une perspective plus large, cet épisode clarifie l’urgence d’une réforme de la directive sur la vie privée et les communications électroniques. L’interdiction des cookie-walls n’est pas explicite dans le droit européen (la directive « Vie privée et communications électroniques » semble les tolérer en conflit avec la notion de consentement du RGPD – telle qu’interprétée par le Comité européen de la protection des données –).</p>
<p>En outre, on ne voit pas clairement pourquoi les règles de procédure du RGPD (par exemple, le mécanisme de coopération) ne peuvent pas être appliquées aux règles de vie privée en ligne, qui sont au contraire fragmentées en de nombreuses règles nationales différentes (qui sont souvent incompatibles entre elles). Toutefois, une <a href="https://www.europarl.europa.eu/legislative-train/theme-a-europe-fit-for-the-digital-age/file-jd-e-privacy-reform">réforme des règles de l’UE en matière de vie privée en ligne</a> semble encore loin d’être approuvée.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/153513/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Gianclaudio Malgieri ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>L’autorité administrative française a estimé en décembre dernier que la politique de collecte de données sur l’usager des géants américains restait trop opaque.Gianclaudio Malgieri, Professeur Associé, Chercheur de l'EDHEC Augmented Law Institute, EDHEC Business SchoolLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1520482021-01-05T18:20:53Z2021-01-05T18:20:53ZLe digilocalisme, une réponse aux géants du numérique ?<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/376471/original/file-20201222-17-1a5sxjz.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=58%2C14%2C4785%2C3180&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Le consommateur passif a été remplacé par un consommateur acteur, qui adopte tour à tour le rôle de fournisseur, de bénévole, ou de partenaire.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Le développement des technologies numériques a favorisé l’émergence de géants du commerce de détail, tel Amazon, qui brouillent les frontières de la consommation. Or l’attrait pour l’achat local, exacerbé par la pandémie, fait émerger un autre phénomène : le « digilocalisme », grâce à des plates-formes qui combinent la consommation en ligne à l’intérêt local.</p>
<p>La pandémie a amené la fermeture des frontières et avec elle, la tentation de <a href="https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1699783/coronavirus-crise-economie-delocalisation-agriculture">« relocaliser » la production</a> et de <a href="http://geoconfluences.ens-lyon.fr/actualites/eclairage/covid19-mondialisation-demondialisation">« recontinentaliser » les chaînes d’approvisionnement</a>, tandis que les grandes plates-formes comme Amazon sont <a href="https://www.lesoleil.com/actualite/covid-19/les-geants-du-detail-sortent-grands-gagnants-de-la-crise-de-la-covid-19-9a792c3cdd72b1c7e75120efd17e48c3">critiquées pour profiter du malheur engendré par la crise</a>.</p>
<p>Ainsi ont émergé des plates-formes comme le <a href="https://www.lepanierbleu.ca/">Panier Bleu</a>, <a href="https://www.mazonequebec.com/en">Ma Zone Québec</a>, <a href="https://www.boomerangfidelite.com/">Boomerang, inc</a>, <a href="https://www.letoiledulac.com/economie/jachete-au-lac-trium-medias-lance-un-centre-dachat-virtuel-2/">J’achète au Lac</a>, ou la <a href="https://www.grenier.qc.ca/nouvelles/22102/sgm-et-mediavore-developpent-une-solution-de-commerce-electronique">première plate-forme de commerce électronique locale pour les centres commerciaux</a> et <a href="https://www.lequotidien.com/actualites/la-cooperative-de-transport-eva-fera-son-entree-a-saguenay-le-11-octobre-788306ad0e97a784e563fd63f507c6a0">EVA</a> qui permet de devenir chauffeur dans un cadre coopératif et d’avoir une influence en tant que propriétaire de l’entreprise.</p>
<p>Ces configurations ont l’avantage de <a href="http://revues.uqac.ca/index.php/revueot/article/view/1052/874">redonner du sens aux activités de consommation et de production</a>. Et, en ces temps de transition, du sens, n’est-ce pas ce que les individus cherchent de plus en plus ?</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/la-pandemie-va-t-elle-vraiment-changer-nos-habitudes-137947">La pandémie va-t-elle (vraiment) changer nos habitudes ?</a>
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<h2>L’ère du consommateur-fournisseur</h2>
<p>Que ce soit par l’intermédiaire de plates-formes de covoiturage comme Eva, d’échanges entre particuliers comme Kijiji, de sociofinancement comme Ulule, ou encore de solution de place de marché (<em>marketplace</em>) comme <a href="https://www.dvore.com/">Dvore</a>, le concept de consommateur-fournisseur est ce qui permet cette transition.</p>
<p>Depuis le début du 20e siècle, les modes de production et de consommation ont été dissociés. Le consommateur a endossé essentiellement le rôle d’acheteur. De nos jours, de nouveaux concepts croisant les deux modes apparaissent. Pensons à la <a href="https://hbr.org/2010/10/beyond-zipcar-collaborative-consumption">consommation collaborative</a>, <a href="http://oikonomics.uoc.edu/divulgacio/oikonomics/en/numero14/dossier/mErtz.html">l’économie du partage</a> ou le <a href="https://www.cairn.info/revue-rimhe-2019-2-page-92.html">capitalisme basé sur la foule</a>. Le consommateur passif est remplacé par un consommateur acteur, qui adopte tour à tour le rôle de fournisseur, de bénévole, ou de partenaire.</p>
<p>Par exemple, au sein de <a href="https://nousrire.com/">NousRire</a>, un groupe d’achat d’aliments écoresponsables en vrac québécois, le <a href="http://revues.uqac.ca/index.php/revueot/article/view/1192/1024">client adopte le rôle de fournisseur, de bénévole, et plus largement de partenaire de l’organisation</a>.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/376473/original/file-20201222-15-qebju3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/376473/original/file-20201222-15-qebju3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/376473/original/file-20201222-15-qebju3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/376473/original/file-20201222-15-qebju3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=318&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/376473/original/file-20201222-15-qebju3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/376473/original/file-20201222-15-qebju3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/376473/original/file-20201222-15-qebju3.png?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=399&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dans le groupe d’achat NousRire, le client joue tour à tour le rôle de consommateur, bénévole, fournisseur et partenaire.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Capture d’écran du site www.nousrire.com</span></span>
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</figure>
<p>La grande distribution n’est pas en reste. La <a href="https://www.ikea.com/fr/fr/customer-service/services/seconde-vie-des-meubles-pub92e7c9c0">seconde vie des meubles</a> d’<em>IKEA France</em> ou le <a href="https://www.bibamagazine.fr/mode/marks-spencer-lance-le-concept-clothes-exchange-en-france-26625.html"><em>shwopping</em></a> (contraction de <em>shopping</em> et <em>swap</em>) de Marks & Spencer, qui reprend les vêtements usagés en magasin, fonctionnent sur le même principe du consommateur-fournisseur.</p>
<p>Pour traiter de ce nouveau type de consommateurs, <a href="https://www.consoglobe.com/economie-collaborative-histoire-cg">Rachel Botsman et Roo Rogers ont popularisé la notion de consommation collaborative</a>, où le consommateur peut devenir fournisseur grâce à des plates-formes et des applications. C’est le cas avec Facebook Marketplace, Kijiji, InstaCart ou encore VarageSale.</p>
<h2>Pas seulement pour économiser</h2>
<p>Mais qu’est-ce qui motive le recours à ces types d’échanges ? Si les raisons financières et utilitaires priment pour les acquéreurs et les fournisseurs, les <a href="http://revues.uqac.ca/index.php/revueot/article/view/1195/1026">fournisseurs sont également fortement motivés par autre chose que l’unique aspect financer</a>. La valeur de ce qu’ils fournissent est souvent supérieure à la compensation obtenue en échange. Le fournisseur doit donc être motivé par autre chose que le seul gain financier pour investir des efforts dans un tel échange. Ces actions peuvent être motivées par la contrainte, la socialisation, la volonté de contribuer à la société, voire l’altruisme.</p>
<p>Les individus disposent d’une variété de plates-formes pour échanger, mais aussi pour former, conseiller, notamment avec <a href="https://www.coursera.org/">Coursera</a>, ou impartir des tâches grâce à <a href="https://www.mturk.com/">Amazon MTurk</a>, par exemple.</p>
<p>Dans la santé, s’opère actuellement une <a href="http://revues.uqac.ca/index.php/revueot/article/view/1196/1027">transition vers la santé numérique</a>, qui <a href="http://revues.uqac.ca/index.php/revueot/article/view/1196/1027">répartit mieux l’offre de santé au sein de territoires</a> et permet aux individus de <a href="https://www.uqac.ca/blog/2019/12/12/le-labonfc-etudie-les-effets-des-communautes-de-patients-en-ligne-dans-le-domaine-de-la-sante/">donner des conseils et d’intervenir</a> sur des forums, des groupes ou des communautés de patients en ligne.</p>
<h2>Démocratiser les marchés</h2>
<p>Le secteur financier s’est aussi démocratisé. Les plates-formes de sociofinancement comme Ulule permettent aux individus de donner ou d’investir dans des projets portés par d’autres personnes, tandis que les plates-formes comme <a href="https://www.etoro.com/fr/">eToro</a> démocratisent l’investissement dans les marchés financiers. Ces plates-formes permettent ainsi, par les individus, de <a href="http://revues.uqac.ca/index.php/revueot/article/view/1200/1030">drainer du capital dans des zones négligées par l’investissement public ou privé</a> pour redynamiser des économies locales.</p>
<p>Les cryptomonnaies et la chaîne de blocs constituent un autre cas d’intérêt. Des milliers de cryptomonnaies existent, comme le Bitcoin, et les mineurs se substituent aux banques centrales. Le projet de <a href="https://forex.quebec/cryptomonnaie-libra-facebook-change-nom-diem/">cryptomonnaie Diem de Facebook</a>, laisse entrevoir l’émergence d’un « écosystème numérique total », une société centrée sur l’individu, dématérialisée et démonétisée.</p>
<p>L’Inde a déjà tenté de mettre en place une <a href="https://www.capital.fr/votre-argent/inde-un-an-apres-la-demonetisation-le-cash-de-nouveau-roi-1254391">société sans argent liquide</a>, en 2016. Cette politique a eu des impacts sur les pratiques spécifiques aux pays émergents, dont le paiement comptant à la livraison, qui est devenu le <a href="http://revues.uqac.ca/index.php/revueot/article/view/1197/1028">paiement à la livraison</a>. Bonne ou mauvaise nouvelle ? Les transactions collaboratives souvent informelles devinrent certes beaucoup plus fluides, mais totalement traçables et taxables !</p>
<h2>Une économie controversée</h2>
<p>L’économie collaborative constitue probablement la manifestation la plus visible, la plus documentée, et la plus controversée de cette reconfiguration des échanges marchands. L’industrie hôtelière se plaint d’Airbnb et les taxis en ont contre Uber, car tout le monde peut désormais héberger ou transporter d’autres personnes contre rémunération. Les batailles à ce sujet se sont soldées par <a href="http://legisquebec.gouv.qc.ca/fr/showdoc/cs/E-14.2">certaines lois plus accommodantes</a>, amenant ces plates-formes à <a href="https://www.lesaffaires.com/techno/produits-electroniques/uber-veut-etendre-son-offre-de-service-partout-au-quebec/619478">renforcer leurs activités au Québec</a>.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/lempreinte-environnementale-de-leconomie-numerique-menace-la-planete-130993">L’empreinte environnementale de l’économie numérique menace la planète</a>
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<p>Pour les autorités, cette normalisation permet aussi de transférer au secteur privé la charge de satisfaire des besoins devant, autrement, être pourvus par le secteur public. Dans le transport, par exemple, l’offre de services de covoiturage permet de pallier le manque de services publics de transport en commun. Les <a href="https://onlinemba.wsu.edu/blog/how-the-sharing-economy-is-transforming-business/">citoyens sont également attachés à ces pratiques, car elles satisfont nombre de leurs besoins, tout en maximisant l’utilisation des ressources dormantes, en permettant un meilleur accès aux ressources pour les plus démunis, et en baissant le chômage</a>.</p>
<p>Toutefois, il n’est pas certain <a href="https://korii.slate.fr/biz/livre-desuberiser-reprendre-controle-uber-economie-plateformes-reflexions-solutions">dans quelle mesure ces plates-formes dégradent le travail ou si elles le réinventent en faisant du fournisseur un « entrepreneur »</a>.</p>
<h2>Une illusion de pouvoir ?</h2>
<p>Il faut également <a href="https://korii.slate.fr/biz/livre-desuberiser-reprendre-controle-uber-economie-plateformes-reflexions-solutions">comprendre les transformations que les algorithmes des plates-formes génèrent</a> en matière de gouvernance, d’inclusion et de droits des utilisateurs. En effet, la quantité exponentielle de données générée par les plates-formes accroît la capacité des firmes dominantes à <a href="https://www.cairn.info/revue-de-l-ofce-2019-4-page-47.htm">identifier très tôt les besoins des utilisateurs et à évaluer très précisément leurs capacités de paiement</a>, ce qui peut amener à de la discrimination. De plus, les plates-formes présentent une forte opacité des prix, car elles personnalisent et ajustent souvent les prix en temps réel en <a href="https://www.cairn.info/revue-de-l-ofce-2019-4-page-47.htm">fonction de chaque utilisateur</a>.</p>
<p>Par ailleurs, l’économie collaborative demeure monopolisée par des géants technologiques, laissant peu de place à l’émergence ou à la survie de plates-formes plus modestes. Donc, en somme, le consommateur a une illusion de pouvoir en devenant un fournisseur – que l’on appelle entrepreneur, flexi travailleur ou travailleur autonome – au service de méga-platesformes.</p>
<p>Le digilocalisme peut-il faire sa place dans cet univers ? Ces plates-formes nées de la pandémie dans un élan de soutien à l’économie locale ont-elles des chances de survie à plus long terme ?</p>
<p>Selon une étude de cas des plates-formes de covoiturage de petite et moyenne taille en Chine, la <a href="http://revues.uqac.ca/index.php/revueot/article/view/1194/1039">seule chance de survie des plates-formes plus modestes</a> réside dans le fait de combler les besoins non pris en compte par les géants, dont les segments de clients desservis, les partenaires essentiels, la proposition de valeur offerte, ainsi que la structure des coûts et de revenus.</p>
<p>Il est néanmoins certain que les développements récents en technologies numériques ont donné davantage d’occasions de contribution aux individus. Cette transition numérique déjà bien amorcée s’est accélérée avec la pandémie de la Covid-19 et ne s’arrêtera probablement pas de sitôt !</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/152048/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Myriam Ertz fait partie du regroupement Des Universitaires (DU) et a obtenu des subventions de recherche du Conseil de Recherches en Sciences Humaines (CRSH), du Fonds de Recherche du Québec - Société et Culture (FRQSC), de la Fondation de l'UQAC (FUQAC), ainsi que du Fonds de Développement Académique du Réseau (FODAR) de l'Université du Québec.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span><a href="mailto:imen_latrous@uqac.ca">imen_latrous@uqac.ca</a> receives funding from Université du Québec à Chicoutimi. </span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Damien Hallegatte et Julien Bousquet ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur poste universitaire.</span></em></p>La pandémie a fait émerger des plates-formes comme Le Panier Bleu ou Ma Zone Québec, qui combinent le commerce en ligne et l’achat local. Ces initiatives ont-elles un avenir à long terme ?Myriam Ertz, Professeure adjointe en marketing, responsable du LaboNFC, Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1517632020-12-10T18:24:40Z2020-12-10T18:24:40ZPourquoi les pratiques d’Amazon sur sa « marketplace » sont dans le collimateur de Bruxelles<p>Accusée de <a href="https://www.liberation.fr/france/2020/06/22/le-commerce-de-proximite-menace-par-amazon-quel-commerce-voulons-nous_1791929">ruiner le commerce de proximité</a>, de générer un <a href="https://www.courrierinternational.com/article/reportage-emplois-contre-pollution-le-dilemme-amazon-dans-le-gard">intense trafic routier</a> et de <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/les-salaries-damazon-a-bout-de-souffle-1365381">maltraiter ses salariés</a>, Amazon fait également <a href="https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/ip_20_2077">l’objet de deux enquêtes de la Commission européenne</a>. Le 10 novembre dernier, Bruxelles a en effet informé le géant américain de la distribution en ligne qu’il avait « enfreint les règles de l’Union européenne en matière de pratiques anticoncurrentielles en faussant la concurrence sur les marchés de détail en ligne ».</p>
<p>Ces deux enquêtes ont le mérite de mettre à jour les rapports qu’elle entretient avec les vendeurs tiers à qui elle propose ses services de place de marché (« marketplace »), qui assure une partie importante et en constante augmentation de son chiffre d’affaires. En 2019, si les ventes de produits avaient rapporté 160,4 milliards de dollars, celles des services, comme la mensualité de 39,99 euros prélevée aux vendeurs tiers pour avoir accès à la plate-forme, s’élevaient ainsi à <a href="http://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/rapports/cion-eco/l15b3127_rapport-information">120 milliards de dollars</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1326166472943570944"}"></div></p>
<p>Ce sont ces mêmes pratiques anticoncurrentielles qui avaient en outre été condamnées par le <a href="https://www.actualitesdudroit.fr/browse/affaires/droit-economique/23357/desequilibre-significatif-amazon-sanctionnee">tribunal de commerce de Paris le 2 septembre 2019</a> sur une action introduite par le ministère de l’Économie et des finances, en sa qualité de garant de l’ordre public économique.</p>
<h2>Des vendeurs tiers soumis à Amazon</h2>
<p>Le jugement apparaît particulièrement intéressant en ce qu’il détaille les pratiques d’Amazon vis-à-vis des vendeurs tiers, à l’origine de 80 % des biens vendus sur son site. Ces vendeurs tiers ne négocient pas les contrats souscrits avec Amazon : les plates-formes d’intermédiation ont automatisé les procédures afin d’offrir aux consommateurs des modalités, conditions et prestations identiques pour tous les produits.</p>
<p>Toutefois, les clauses restent significativement déséquilibrées au détriment des vendeurs. Elles font apparaître un pouvoir discrétionnaire de la plate-forme qui peut modifier le contrat, y compris sur des éléments essentiels comme le montant de la commission à verser par le vendeur, le suspendre, le résilier, interdire ou restreindre l’accès à tout site Amazon, retarder une mise en vente ou la refuser.</p>
<p>À chaque fois, Amazon se réserve le droit d’agir de manière discrétionnaire, sans préavis ni notification individuelle au vendeur concerné, et sans fournir les motifs de sa décision.</p>
<p>Ces clauses sont censurées par le juge comme créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Elles ne seront plus possibles à l’avenir. Le <a href="https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32019R1150">règlement européen 2019/1150 du 20 juin 2019</a>, visant à promouvoir l’équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d’intermédiation en ligne, exige en effet désormais que les décisions soient motivées, notifiées individuellement à chaque vendeur et qu’elles respectent un délai de préavis (15 jours au minimum).</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/373835/original/file-20201209-13-2ztycm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/373835/original/file-20201209-13-2ztycm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/373835/original/file-20201209-13-2ztycm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/373835/original/file-20201209-13-2ztycm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=405&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/373835/original/file-20201209-13-2ztycm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/373835/original/file-20201209-13-2ztycm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/373835/original/file-20201209-13-2ztycm.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=510&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Les vendeurs indépendants sont aujourd’hui à l’origine de 80 % des biens vendus par Amazon.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Justin Sullivan/AFP</span></span>
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<p>Cette exigence met fin aux pratiques d’Amazon qui se contentait d’informer les utilisateurs via l’interface « seller central » qu’ils étaient censés consulter régulièrement pour être informés des changements contractuels.</p>
<p>L’argument d’Amazon, consistant à se retrancher derrière la nécessaire automatisation d’une place de marché garantissant l’homogénéité des services pour gérer 170 000 vendeurs, est donc balayé par le tribunal. La justice européenne constate que, si Amazon est en capacité d’adresser par mail une notification à des millions de consommateurs pour leur indiquer que leur commande a été prise en compte et que leur compte sera débité, il doit être possible d’en faire autant pour les vendeurs tiers !</p>
<h2>Concurrence déloyale</h2>
<p>Les clauses relatives aux facteurs de performance constituent un autre sujet de discorde. Ces facteurs (taux de commandes défectueuses, taux d’annulation de commandes avant traitement, taux d’expédition en retard) rejaillissent directement sur le compte du vendeur : si son indice de performance chute, la suspension de son compte lui interdira de vendre pendant toute la période de la suspension et ses fonds seront bloqués pour les produits de ses ventes passées, pour une période allant jusqu’à 90 jours.</p>
<p>Or, non seulement les indicateurs de calcul de la performance ne figurent pas dans le contrat mais leurs critères sont jugés imprécis, instables et leur évolution totalement discrétionnaire.</p>
<p>Enfin, la clause « garantie A à Z » est également censurée : elle permet aux clients du vendeur tiers de renvoyer leurs produits et d’être remboursés du prix de leur achat dans différentes situations (produit non conforme, défectueux, livré hors délai, etc.) ; le vendeur tiers est débité sur son compte du remboursement réalisé par Amazon, et ce même si, après enquête, la réclamation est considérée comme injustifiée et même si le produit n’est pas retourné. Pourtant, Amazon, pour ses propres produits en concurrence directe avec ceux des vendeurs tiers, ne rembourse le consommateur qu’en cas de retour du produit.</p>
<p>Le Règlement sera ici peu efficace si ce n’est dans les formes de la notification individuelle de toute décision visant à restreindre ou suspendre la fourniture des services d’intermédiation en ligne à une entreprise utilisatrice. La plate-forme devra « faire référence aux faits ou aux circonstances spécifiques, y compris le contenu des signalements émanant de tiers ».</p>
<p>L’article 5 du Règlement européen consacré au classement se contente d’exiger que les principaux paramètres et les raisons justifiant l’importance relative de ces principaux paramètres par rapport aux autres paramètres figurent dans les conditions générales et s’il peut être influencé par une rémunération directe ou indirecte versée par les entreprises utilisatrices et dans ce cas décrire ces possibilités et leurs effets. La Commission européenne devrait émettre des lignes directrices relatives aux exigences de transparence.</p>
<p>L’article 7 du Règlement sur le traitement différencié vise le cas dans lequel la plate-forme propose elle-même des biens et des services en concurrence directe avec les vendeurs tiers, ce qui est le cas d’Amazon. Dans ce cas, le risque est qu’elle tire parti de sa position pour fournir des avantages techniques ou économiques à ses propres offres, avantages qu’elle pourrait refuser aux entreprises utilisatrices concurrentes.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1066876766508249088"}"></div></p>
<p>C’est exactement l’objet de l’enquête pour abus de position dominante de la Commission européenne. Bruxelles reproche à Amazon d’utiliser les données commerciales non publiques des vendeurs tiers (nombre d’unités de produits commandées et expédiées, recettes des vendeurs sur la place de marché, nombre de visites sur les offres des vendeurs, données relatives aux expéditions, aux performances passées des vendeurs) pour construire sa propre offre et la rendre plus attractive au détriment des vendeurs tiers. Mais le règlement n’interdit pas ces pratiques, il se contente d’exiger la transparence.</p>
<h2>Une avancée pour les vendeurs tiers</h2>
<p>In fine, le tribunal, après avoir procédé à une appréciation globale du déséquilibre, condamnera Amazon à une amende civile de 4 millions d’euros. Refusant la logique du géant américain qui estimait que l’ensemble des services proposés aux vendeurs contrebalance les clauses litigieuses, le tribunal met en évidence que, si les services d’Amazon sont effectivement performants, ils restent aussi payants pour les vendeurs.</p>
<p>Le juge précise en outre que « certains des manquements, notamment ceux relatifs aux indicateurs de performance commerciale, sont de nature à permettre à Amazon d’user d’une stipulation pour, après avoir testé sur un marché un nouveau produit lancé par un vendeur tiers, privilégier la vente du sien au détriment de celui du vendeur tiers après avoir aligné son prix ».</p>
<p>Ces mêmes critères de performance sont également pris en compte pour déterminer l’accès à la fameuse Buy Box qui met en avant le produit du vendeur tiers, « en concurrence pour cet accès avec ceux identiques d’Amazon ». Or, les critères d’accès à la Buy Box font précisément l’objet de la seconde enquête initiée par la Commission européenne qui cherche à savoir « si les critères fixés par Amazon pour sélectionner le vainqueur de la “boîte d’achat” et permettre aux vendeurs de proposer des produits aux utilisateurs Prime, dans le cadre du programme de fidélisation Prime d’Amazon, conduisent à un traitement préférentiel de l’activité de détail d’Amazon ou des vendeurs qui utilisent les services logistiques et de livraison d’Amazon ».</p>
<p>Au bilan, il faut saluer le travail de fourmi des juges nationaux malgré une amende au montant ridicule par rapport à la surface financière d’Amazon. Le nouveau Règlement constitue une avancée pour les vendeurs tiers, mais il est loin de constituer une forme de régulation du modèle économique des plates-formes.</p>
<p>Il semblerait bien que le Traité sur le fonctionnement de l’UE et son article 102 sur les abus de position dominante soit autrement plus efficace. Mais le facteur temps joue en sa défaveur, la durée d’une enquête dépendant de la complexité de l’affaire, du degré de coopération des entreprises en cause avec la Commission et de l’exercice des droits de la défense.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/151763/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Fabienne Muller ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La Commission européenne reproche notamment au géant américain d’utiliser les données commerciales des vendeurs tiers pour mieux leur faire concurrence avec sa propre activité de vente au détail.Fabienne Muller, Enseignant-chercheur émérite, Université de StrasbourgLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1502482020-11-19T23:30:38Z2020-11-19T23:30:38ZCe que nous apprend le débat sur la fermeture des librairies<p>A la suite du second confinement, annoncé sans grande surprise le 30 octobre dernier, la fermeture des commerces dits « non essentiels » a engendré de nombreuses levées de boucliers, aussi bien de la part les libraires, menés par le Syndicat de la Librairie Française, que de la part des Français. </p>
<p>L’enjeu de la discorde : les librairies, commerces non essentiels, doivent fermer leurs portes quand les grandes surfaces et les grands magasins spécialisés comme la Fnac restent ouverts, mettant ainsi en évidence une inégalité de traitement à l’égard des petits commerces. </p>
<p>L’annonce, quelques jours plus tard, de la <a href="https://www.lci.fr/emploi/reconfinement-fermeture-temporaire-des-rayons-livres-et-culture-des-grandes-surfaces-les-libraires-se-rebiffent-2168668.html">fermeture de l’ensemble des rayons livres</a> (y compris dans les grandes surfaces) n’a pas apaisé les débats, bien au contraire. Les réseaux sociaux croulent depuis sous les photos de librairies fermées et de rayons livres bâchés et vidés, symboles d’une censure de la Culture. </p>
<p>Comment expliquer l’ampleur de ces réactions passionnées ?</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1322467652586115073"}"></div></p>
<h2>Le livre, une singularité à la française</h2>
<p>Le livre est-il un bien essentiel ? Avec l’appui du Syndicat de la Librairie Française, de nombreux auteurs défendent cette idée. </p>
<p>Des personnalités telles que <a href="https://twitter.com/joannsfar/status/1322489032794845184?s=20">Joann Sfar</a>, <a href="https://twitter.com/DavidFoenkinos/status/1323300676781355014?s=20">David Foenkinos</a>, <a href="https://twitter.com/GrandeLibrairie/status/1327219015777968129?s=20">François Busnel</a> ou <a href="https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=1485328594992840&id=186457411546638">Riad Sattouf</a> se sont engagées en postant de nombreux messages sur les réseaux sociaux, en signant des <a href="https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/10/30/ouvrir-toutes-les-librairies-comme-toutes-les-bibliotheques-c-est-faire-le-choix-de-la-culture_6057971_3232.html">tribunes</a> et une <a href="https://www.change.org/p/monsieur-le-pr%C3%A9sident-de-la-r%C3%A9publique-monsieur-le-pr%C3%A9sident-faisons-le-choix-de-la-culture-en-rouvrant-les-librairies">pétition</a> pour le maintien de l’ouverture des librairies. </p>
<p>La Belgique, elle, a inscrit le livre dans la liste des biens essentiels et les <a href="https://www.lemonde.fr/culture/article/2020/11/03/reconfinement-en-belgique-les-livres-sont-consideres-comme-essentiels_6058364_3246.html">librairies échappent à la fermeture</a> à l’occasion de ce deuxième confinement. La France surprend en s’éloignant ainsi par cette décision de son habituel soutien marqué pour le secteur de la culture. </p>
<p>En effet, l’idée d’<a href="https://www.courrierinternational.com/article/2013/06/12/pourquoi-il-faut-defendre-l-exception-culturelle">exception culturelle</a> à la française, soutenue par des subventions, rend d’autant plus tangible ce lien privilégié à la Culture en général et au livre en particulier.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1322463064579624960"}"></div></p>
<p>Le livre tient il est vrai une place privilégiée dans les représentations culturelles, <a href="https://cfeditions.com/livre-echange/">il suscite un attachement spécifique</a>. Certains cornent les pages et les annotent avec allégresse, d’autres protègent les livres comme des trésors, ne les feuilletant qu’avec délicatesse. Chacun possède un rapport personnel au livre, mais tout le monde s’accorde à dire qu’il s’agit d’un objet « à part ». Les livres sont des objets avec lesquels les consommateurs nouent un lien particulier.</p>
<p>Pourtant, au-delà du fantasme du grand lecteur croulant sous des piles d’ouvrages, la réalité est plus prosaïque. Les lecteurs ne sont qu’une frange de la population, et parmi eux, on lit souvent moins qu’on ne le pense et <a href="http://www.slate.fr/story/196738/librairiesouvertes-combat-fantasme-livres-librairies-centre-villes-zones-commerciales-inegalites-culture-lecture">bien moins qu’on ne le dit</a>. Ce débat sur la fermeture des librairies est le symptôme d’autre chose que d’un manque de livres à bouquiner pendant le confinement. On comprend que se joue ici pour certains autant la défense des petits commerçants que l’identité culturelle française tout entière.</p>
<p>Les librairies, plus encore que le livre lui-même, bénéficient d’un statut particulier en France. En 1981, la <a href="https://www.sne.fr/prix-unique-du-livre/">loi sur le prix unique du livre</a> vient affirmer ce statut de commerce précieux, à protéger, en faisant de l’éditeur le décisionnaire quant au prix des ouvrages. Ainsi, les prix sont les mêmes dans les petites librairies indépendantes et dans les grandes surfaces (avec tout de même un rabais autorisé de 5 % maximum).</p>
<p>Cette loi permet d’assurer l’égalité des Français devant le livre, vendu partout en France au même prix, et permet surtout de sauvegarder les petites librairies indépendantes face à la menace que représentent pour elles les grandes surfaces. Si des lois similaires existent dans de nombreux pays européens, la <a href="http://www2.culture.gouv.fr/culture/dll/prix-livre/prix-1.htm">France est cependant précurseur en la matière</a>.</p>
<h2>Amazon pour le livre, Spotify pour la musique…</h2>
<p>La crise sanitaire actuelle nous en dit en réalité probablement davantage sur les usages et les modes de consommation des biens culturels face à la <a href="https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/1461444818769694">plateformisation de la culture</a> que sur le rôle du livre dans la société. À ce titre, c’est l’ensemble des acteurs culturels indépendants qui se mobilise actuellement pour la défense d’un modèle économique. L’<a href="https://appeldesindependants.fr/">« Appel des indépendants »</a> lancé le 11 mars 2020 et signé par 1600 structures françaises interpellent sur la nécessité d’« un débat sur les enjeux profonds d’une refondation du secteur de la culture et des médias » suite, notamment, aux conséquences économiques de l’épidémie de Covid-19.</p>
<p>Prendre en compte la spécificité des indépendants, c’est garantir des critères d’égalité et de justice face à la plateformisation de la production culturelle. Ces dernières semaines ont vu émerger de nombreuses critiques des secteurs culturels vis-à-vis des géants du numérique : <a href="https://next.liberation.fr/musique/2020/09/25/spotify-une-pirouette-pour-des-cacahuetes_1800590">Spotify pour la musique</a>, <a href="https://next.liberation.fr/cinema/2020/11/07/aux-rencontres-de-l-arp-le-cinema-francais-contre-les-plateformes-de-streaming_1804878">Netflix pour le cinéma</a>, <a href="https://www.idboox.com/economie-du-livre/plus-de-50-editeurs-quittent-amazon-et-retirent-leurs-livres/">Amazon pour le livre</a>…</p>
<p>Penser et comprendre la consommation et la diffusion des productions culturelles des acteurs indépendants et leurs valeurs permet d’envisager des stratégies pour la liberté artistique que réclament les créateurs, de développer des modèles économiques assurant une rémunération raisonnable aux artistes et de considérer la diversité des formes de production culturelle. L’indépendance constitue une ressource symbolique essentielle pour les acteurs des marchés de l’art et de la culture. Soumis à une concurrence importante, les plus petits producteurs culturels ont su valoriser et développer cette appellation qui constitue aujourd’hui un enjeu de lutte.</p>
<p>Pour de nombreux consommateurs et amateurs, la préférence pour les créations indépendantes constitue une forme de <a href="https://www.youtube.com/watch?v=-SxfU_AT0aY&ab_channel=AOCMedia">consommation engagée</a>. Choisir d’acheter un vinyle chez le disquaire, un livre chez le libraire de quartier ou directement auprès des éditeurs, labels, artistes et écrivains eux-mêmes c’est choisir des réseaux de vente qui assurent une meilleure rémunération aux artistes créateurs et aux plus petits producteurs. Ce type de comportement correspond à un facteur déterminant de la consommation socialement responsable : la volonté d’aider les petits commerces.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1323632272310849539"}"></div></p>
<h2>« Petits » commerces et proximité</h2>
<p>Le confinement intervient dans un contexte déjà délicat pour les centres-villes qui depuis plusieurs années font face à la <a href="https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/03/23/les-centres-des-villes-moyennes-de-france-asphyxies-par-les-centres-commerciaux-des-peripheries_5440237_3224.html">concurrence accrue des zones commerciales périurbaines</a> et qui ont été récemment mis à mal par la <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/01/04/greves-le-douloureux-bilan-pour-les-commerces_6024763_3234.html">crise des « gilets jaunes »</a>. Dès lors, il en va de leur survie de maintenir le lien avec les consommateurs. Le Click and Collect est ainsi devenu la <a href="https://www.lesechos.fr/industrie-services/conso-distribution/confinement-le-click-collect-planche-de-salut-du-petit-commerce-1260908">planche de salut des commerces de proximité</a> en proposant un système d’achat à distance et de retrait sur place.</p>
<p>Cependant, il ne s’agit pas uniquement de le considérer comme un acte marchand mais plus largement comme une pratique relationnelle. Continuer à consommer dans ces commerces indépendants s’est ainsi révélé le moyen d’apporter un soutien financier aux commerçants mais également une possibilité de maintenir une certaine proximité et des relations interpersonnelles largement mises à mal par ce confinement. On assiste alors à l’émergence de nombreuses initiatives citoyennes avec par exemple la création de sites de recensement de librairies (<a href="https://www.jesoutiensmalibrairie.com">Je Soutiens Ma Librairie</a>), de mise en relation des producteurs et des consommateurs (<a href="https://fairemescourses.fr/rejoindre">Faire mes courses</a>) ou encore d’achat de bons d’achats (<a href="https://sauvonsnoscommerces.herokuapp.com">Sauvons nos commerces</a>, <a href="https://soutien-commercants-artisans.fr">Petits Commerces</a>). On observe également un renforcement de l’engagement émotionnel de certains consommateurs qui n’hésitent pas à témoigner leur soutien sur les réseaux sociaux (#jesoutiensmalibrairie) ou directement sur les vitrines de leurs commerces de proximité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/369872/original/file-20201117-15-pe31p7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/369872/original/file-20201117-15-pe31p7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/369872/original/file-20201117-15-pe31p7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/369872/original/file-20201117-15-pe31p7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=800&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/369872/original/file-20201117-15-pe31p7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/369872/original/file-20201117-15-pe31p7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/369872/original/file-20201117-15-pe31p7.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=1005&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Photo de Marc Leemans publiée sur la page Facebook « les perles de la librairie » le 7 novembre 2020.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Les perles de la librairie/Facebook</span></span>
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</figure>
<p>Le débat sur la « non essentialité » du livre n’est donc qu’un symbole d’un mouvement bien plus profond d’attachement à certaines valeurs de consommation responsable et à une recherche de proximité qui s’est réaffirmée dans le contexte sanitaire actuel. On peut alors s’interroger sur la persistance à long terme de ces phénomènes à l’issue de cette crise.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/150248/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>Pourquoi tant de réactions passionnées après l’annonce de la fermeture des libraires françaises pendant ce deuxième confinement ?Boris Collet, A.T.E.R en Sciences de Gestion - Laboratoire NIMEC, Université de Rouen NormandieCerise Thorel, Doctorante en Sciences de Gestion - Laboratoire NIMEC, Université de Rouen NormandieKenza Marry, Doctorante en sciences de gestion - Laboratoire NIMEC, Université de Caen NormandieLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1504102020-11-18T20:22:17Z2020-11-18T20:22:17ZLes satellites Starlink nous empêcheront bientôt d’observer les étoiles<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/370163/original/file-20201118-19-wq4k1e.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Une étoile filante pendant la pluie de météores des Perséides. Bientôt, des milliers de satellites envahiront le ciel nocturne.</span> <span class="attribution"><span class="source">Shutterstock</span></span></figcaption></figure><p>Je sors de ma maison dans la campagne saskatchewanaise avant l’aube et lève les yeux, m’attendant à avoir le souffle coupé par la multitude d’étoiles. Je suis une astronome professionnelle, mais je m’émerveille encore comme un enfant devant un ciel étoilé. C’est la première fois que j’habite un endroit où il fait assez noir pour qu’on puisse voir facilement la Voie lactée, et je suis ébahie et impressionnée chaque fois que je regarde la voûte céleste.</p>
<p>Mais cette fois, je jure à voix basse. Il y a un satellite lumineux. Et un autre qui suit derrière. Et un autre. Et un autre.</p>
<p>Avant, la vue de <a href="https://www.heavens-above.com/">satellites artificiels</a> m’emballait, mais maintenant, je sais ce qui nous attend. Nous sommes sur le point de vivre un bouleversement. On ne pourra plus s’échapper de la ville pour faire du camping et voir les étoiles dans un ciel dégagé : désormais, on va regarder à travers un réseau de satellites grouillants et brillants, même dans l’endroit le plus isolé.</p>
<h2>Des orbites encombrées</h2>
<p>Si les mégaconstellations de satellites voient le jour, le ciel nocturne deviendra une autoroute de lumières mobiles qui cacheront les étoiles. Désormais, chaque fois que j’observe le reflet brillant d’un satellite au milieu des étoiles, je me rappelle ce que la <a href="https://www.fcc.gov/">Commission fédérale des communications des États-Unis</a> – l’agence qui réglemente les fréquences émises par les satellites au-dessus des États-Unis, ce qui la rend, dans les faits, responsable d’encadrer chaque lancement spatial sur la planète – a déjà approuvé.</p>
<p>SpaceX a déjà reçu l’approbation pour 12 000 satellites Starlink et a fait une <a href="https://fcc.report/IBFS/SAT-LOA-20200526-00055/2378669.pdf">demande pour 30 000 de plus</a>. D’autres entreprises la <a href="https://arstechnica.com/tech-policy/2020/05/spacex-and-oneweb-seek-licenses-to-launch-78000-broadband-satellites/">suivent de près</a>.</p>
<p>La mégaconstellation Starlink va à elle seule multiplier par plus de dix le nombre de satellites actifs : il y en a <a href="https://ucsusa.org/resources/satellite-database?_ga=2.206523283.1848871521.1598077135-464362950.1598077135">environ 3 000 en ce moment</a>. Les Starlink sont plus lumineux que <a href="https://www.01net.com/actualites/comment-les-satellites-d-elon-musk-sont-devenus-le-cauchemar-des-astronomes-1849762.html">99 % des autres satellites</a>, car ils sont sur des orbites plus basses et qu’ils sont plus réfléchissants que ne l’avaient prévu les ingénieurs.</p>
<p><a href="https://www.rocketlaunch.live/?includePast=1&tag=series-spacex-starlink">SpaceX lance</a> des groupes de 60 satellites toutes les deux semaines, et il y aura un <a href="https://www.space.com/spacex-starlink-satellites-launch-rocket-landing-oct-18-2020">millier de Starlink</a> en orbite d’ici Noël 2020.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/Y6LoQhaWl04?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Prise de vue à intervalle de la pluie de météores Lyrid d’avril 2020. À 0 :50, on peut voir une chaîne de satellites Starlink traverser le ciel.</span></figcaption>
</figure>
<p>À l’œil nu, lorsqu’on regarde un <a href="https://www.pc.gc.ca/fr/voyage-travel/experiences/ciel-sky">ciel étoilé</a>, on peut voir environ <a href="https://skyandtelescope.org/astronomy-resources/how-many-stars-night-sky-09172014/">4 500 étoiles</a>. Dans une banlieue typique, on peut en apercevoir environ 400. Des simulations montrent qu’à partir de 52 degrés de latitude nord (où se trouvent Saskatoon et Londres, au Royaume-Uni), des <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.3847/2041-8213/ab8016">centaines de Starlink seront visibles</a> pendant quelques heures après le coucher et avant le lever du soleil (ce qui est comparable au nombre d’étoiles visibles) et on pourra en observer des dizaines toute la nuit pendant les mois d’été.</p>
<p>La <a href="http://astro-canada.ca/la_pollution_lumineuse-light_pollution-fra">pollution lumineuse</a> a longtemps été un obstacle à l’observation des étoiles, mais on pouvait au moins y échapper en <a href="http://cartonumerique.blogspot.com/2019/03/cartographier-la-pollution-lumineuse.html">s’éloignant des centres urbains</a>.</p>
<p>Aujourd’hui, les satellites engendrent un phénomène mondial d’obscurcissement des étoiles, particulièrement aux latitudes des États du nord des États-Unis, du Canada et d’une grande partie de l’Europe.</p>
<h2>Les sacrifices</h2>
<p>Il faut reconnaître que SpaceX et Amazon, <a href="https://www.lesaffaires.com/techno/technologie-de-l-information/amazon-va-investir-10-milliards-dans-l-internet-depuis-l-espace/619025">qui investit aussi dans les services Internet par satellite</a>, ont volontairement accepté de participer à des discussions avec des astronomes professionnels sur les moyens d’atténuer les effets de milliers de satellites lumineux sur certaines observations, comme celles des objets interstellaires.</p>
<p>SpaceX a également essayé un revêtement moins réfléchissant appelé « darksat », <a href="https://45secondes.fr/darksats-nest-pas-assez-sombre-les-satellites-spacex-starlink-continuent-de-le-ruiner-pour-les-astronomes/">mais les mesures préliminaires des astronomes</a> ont démontré qu’il était <a href="https://www.scientificamerican.com/article/spacexs-dark-satellites-are-still-too-bright-for-astronomers/">à peine moins lumineux</a> que les autres. Pendant ce temps, on poursuit le lancement des Starlink de base.</p>
<p>Les simulations montrent que <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.3847/1538-3881/abba3e">l’astronomie professionnelle</a> et <a href="https://www.webastro.net/noctua/astronomie-amateur/starlink-visibilit%C3%A9-dans-le-ciel-et-impact-sur-lastronomie-amateur-r219/">l’astrophotographie amateur</a> seront gravement affectées par les mégaconstellations. La présence de tous ces satellites <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.3847/2041-8213/ab8016">compliquera aussi</a> la découverte d’astéroïdes proches de la Terre, laissant la planète plus <a href="https://cneos.jpl.nasa.gov/ca/">vulnérable</a> aux <a href="https://impact.ese.ic.ac.uk/ImpactEarth/ImpactEffects/">collisions cosmiques dangereuses</a>.</p>
<p>Le but de la mégaconstellation Starlink est de fournir un accès Internet partout sur la planète. Ses partisans affirment que cela permettra à des gens qui habitent dans des lieux qui ne sont pas desservis par d’autres technologies de communication d’avoir accès à Internet. Mais selon les <a href="https://korii.slate.fr/tech/starlink-elon-musk-internet-satellites-beta-cher-lent-prix-latence-debit">informations actuelles</a>, le <a href="https://iopscience.iop.org/article/10.3847/2515-5172/abc48e">coût des services sera trop élevé</a> pour presque tous les <a href="https://twitter.com/chmn_victor/status/1237493283879821314">endroits qui ne sont pas encore desservis</a>. Ainsi, Starlink ne sera probablement qu’une <a href="https://notnotrocketscience.substack.com/p/who-owns-the-greater-good">nouvelle option pour les résidents des pays riches</a> qui ont déjà Internet.</p>
<h2>Le ciel nocturne se remplit</h2>
<p>Même si SpaceX change ses plans, des entreprises <a href="https://www.scientificamerican.com/article/the-risky-rush-for-mega-constellations/">élaborent activement des mégaconstellations</a> et <a href="https://www.tomsguide.fr/oneweb-en-faillite-le-concurrent-de-spacex-souhaite-lancer-48%E2%80%89000-satellites-supplementaires/">d’autres se préparent à le faire</a>.</p>
<p>Il n’existe jusqu’ici aucune règle concernant les orbites des satellites ou les priorités de passage, et si une collision devait se produire, on ne sait pas qui en serait tenu responsable et qui devrait nettoyer les débris (si c’est possible). La <a href="https://www.persee.fr/doc/afdi_0066-3085_1971_num_17_1_1675">seule loi internationale qui s’applique aux débris de satellites</a> date de 1972 et stipule que le pays qui a lancé le satellite doit s’occuper des débris qui se retrouvent sur la Terre après l’écrasement.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/IOwv1j-fUbo?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Les débris spatiaux – ou débris orbitaux – constituent un problème croissant.</span></figcaption>
</figure>
<p>Aujourd’hui, la plupart des satellites sont lancés par des entreprises privées et non par des gouvernements, et la plupart des <a href="https://ici.radio-canada.ca/premiere/emissions/moteur-de-recherche/segments/entrevue/137485/espace-debris-spaciaux-danger-navette-orbite-satellites-simon-coude-nasa">débris de satellites restent en orbite</a>, car il n’y a aucune règle <a href="https://thewalrus.ca/space-why-we-need-to-clean-up-outer-space/">pour nettoyer l’espace</a>. Il existe des <a href="https://platform.leolabs.space/visualization">milliers de morceaux de débris spatiaux</a>, certains de la taille d’un boulon et d’autres, comme des satellites inopérants, de celle d’un autobus.</p>
<p>Avec des dizaines de milliers de nouveaux satellites dont le lancement a été approuvé et en l’absence de loi sur l’encombrement orbital, la priorité et le nettoyage de l’espace, le décor est planté pour donner lieu au <a href="https://www.futura-sciences.com/sciences/definitions/debris-spatiaux-syndrome-kessler-16593/">syndrome de Kessler</a>, une <a href="https://www.spacelegalissues.com/space-law-the-kessler-syndrome/">cascade de débris</a> qui pourrait <a href="https://www.businessinsider.com/space-junk-kessler-syndrome-chain-reaction-prevention-2018-3">détruire la plupart des satellites en orbite</a> et <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0265964617300966 ?via %3Dihub">mettre fin aux lancements</a> pour des décennies à venir.</p>
<h2>Des liens ancestraux</h2>
<p>Les humains possèdent des liens profonds avec les étoiles qui remontent à l’aube de l’humanité et sont faits de <a href="https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/astrophysique-sommes-nous-faits-poussieres-etoiles-7275/">matériaux provenant d’anciennes étoiles.</a></p>
<p>Le programme <a href="https://www.nativeskywatchers.com/about.html">Native Skywatchers</a> célèbre l’amour ancestral de l’humanité pour le ciel nocturne et permet le partage de <a href="https://medium.com/@hildingneilson/indigenizing-astronomy-reading-list-66cdec04a8af">connaissances autochtones en matière d’astronomie</a>. Au Dakota, une aînée a récemment partagé <a href="https://vimeo.com/472291678/db5b43f689">son savoir traditionnel sur les cieux</a> : l’esprit de la femme bleue <a href="http://www.kstrom.net/isk/stars/starwint.html">To Wiŋ</a> vit à <a href="https://www.nativeskywatchers.com/articles/DakotaLateFall-map-2020-10-29-20-FLAT.pdf">Wichakiyuhapi (la Grande Ourse)</a>, où elle guide les nouveaux bébés des étoiles jusque dans notre monde et accueille nos esprits lorsque nous quittons notre monde.</p>
<p>La seule façon de faire réagir de grandes entreprises comme SpaceX et Amazon, c’est par la législation – qui est lente, surtout s’il s’agit de lois internationales – et la pression des consommateurs. Est-ce que cela vaut la peine de perdre la possibilité d’observer les étoiles, pour soi et pour presque tous les habitants de la planète, simplement pour obtenir un nouvel accès à Internet ? Les humains observent les étoiles depuis des milliers d’années, souhaitons-nous vraiment perdre cette possibilité au profit de quelques grandes entreprises ?</p>
<p>Par une nuit claire, sortez et levez les yeux. Profitez des étoiles que vous pouvez voir maintenant, car sans de <a href="https://www.sciencealert.com/astonomers-have-serious-concerns-about-satellite-constellations-like-starlink">grandes transformations</a> dans les <a href="https://www.theglobeandmail.com/politics/article-canadian-led-effort-asking-united-nations-to-draw-up-global-space/">plans</a> des entreprises qui veulent lancer des mégaconstellations, le <a href="https://www.astro.princeton.edu/%7Egbakos/satellites/petition-fr.html">ciel étoilé</a> est sur le point d’être complètement transformé.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/150410/count.gif" alt="La Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Samantha Lawler reçoit un financement du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.</span></em></p>Les satellites de SpaceX vont peupler le ciel nocturne, ce qui aura une incidence sur notre façon d’observer les étoiles. Et ce n’est que le début des mégaconstellations de satellites privés.Samantha Lawler, Assistant professor of astronomy, University of ReginaLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1500002020-11-16T18:20:11Z2020-11-16T18:20:11ZLe mouvement anti-Amazon de retour avec la crise de la Covid-19<p>Depuis l’annonce du deuxième confinement et de la décision de fermeture des commerces jugés <a href="https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus/confinement">non essentiels</a>, nous assistons à une vague de contestations plaçant le géant du e-commerce Amazon dans le viseur des responsables politiques, des enseignes de distribution et des consommateurs. Amazon, en particulier, devient le responsable des maux de cette société fragilisée par la crise sanitaire de la Covid-19. Cela prend plusieurs formes allant de <a href="https://www.liberation.fr/debats/2020/03/23/pour-le-boycott-d-amazon-pour-un-soutien-massif-au-secteur-du-livre_1782744">l’appel à boycott</a> d’Amazon par des politiciens, des associations consuméristes et des enseignes de la grande distribution, jusqu’à la création d’un plugin <a href="https://amazonkiller.org/">« Amazon Killer »</a> recommandé aux consommateurs afin de chercher un livre sur Amazon et de l’acheter dans une librairie physique, ou de <a href="https://www.dismoi.io/sources/60/Amazon-Antidote/">« Amazon Antidote »</a> qui guide le consommateur vers d’autres sites proposant le même produit vendu par Amazon, à des prix plus bas.</p>
<p>L’ampleur de la tendance de boycott d’Amazon en France est jugée sans précédent. <a href="https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/confinement/la-psychose-francaise-sur-amazon-na-aucun-sens-denonce-cedric-o-secretaire-d-etat-au-numerique_4168369.html">Cédric O</a>, Secrétaire d’État chargé de la transition numérique, l’assimile à « une psychose française sur Amazon qui n’a pas beaucoup de sens ». Il précise que « Amazon, c’est 20 % du e-commerce en France », représentant le pourcentage le plus faible dans les pays de l’Union européenne. Pour cela, deux questions se posent : pourquoi s’attaque-t-on à Amazon en particulier, malgré le fait qu’il ne soit pas seul sur le marché du e-commerce français ? Et pourquoi ce mouvement anti-Amazon est-il propre à ce deuxième confinement ?</p>
<p>Pour répondre à ces questions, une étude qualitative, qui paraîtra en 2021, a été menée auprès de commerçants appartenant aux deux catégories : « commerces essentiels » et « commerces non essentiels » et de consultants en matière de RSE (responsabilité sociale des entreprises). Une étude ethnographique complémentaire a permis d’analyser une centaine de réactions clients à différentes publications écrites ou vidéo en relation avec l’appel au boycott d’Amazon. </p>
<p>Cela nous a permis d’identifier les facteurs explicatifs du mouvement de boycott d’Amazon lié au deuxième confinement, ainsi que les limites de ce mouvement.</p>
<h2>L’injustice cultivée par Amazon…</h2>
<p>Selon la théorie de la <a href="https://www.economie.gouv.fr/facileco/john-rawls">justice sociale</a> de Rawls (1971), l’homme juste est celui qui soutient les organisations justes. Or, Amazon incarne pour certaines personnes interviewées l’image du capitalisme sauvage caractérisé par un engraissement qui ne profite qu’à un très petit nombre de bénéficiaires. Ainsi, il a été pendant plusieurs années attaqué pour ses valeurs sociales et sociétales. Il a souvent fait l’objet de mouvements de contestation à l’égard de sa politique sociale caractérisée par des <a href="https://www.20minutes.fr/economie/2567555-20190719-entre-bonne-ambiance-epuisement-salaries-amazon-racontent-conditions-travail">conditions de travail</a> jugées inhumaines, par une politique salariale injuste, par la suppression de postes et la robotisation de ses entrepôts, etc.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/CBKs156BSaw?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Covid-19 : l’inquiétude des salariés d’Amazon.</span></figcaption>
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<p>De plus, Amazon a été pointé du doigt, à plusieurs reprises, à cause d’une <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/03/19/coronavirus-amazon-sous-pression-du-gouvernement-et-de-salaries_6033724_3234.html">mauvaise protection</a> de ses salariés lors de la première vague de la Covid-19, en refusant de fermer ses entrepôts malgré les nombreux cas atteints signalés. Ses salariés se sont retrouvés dépourvus de moyens de protection, seuls face à la pandémie, contribuant ainsi, injustement, à l’enrichissement du géant du e-commerce.</p>
<p>En France, on reproche à Amazon, l’opacité des informations au niveau de son chiffre d’affaires de la publicité en ligne, des places de marché et du cloud. Ces chiffres estimés à plus de 50 % du chiffre d’affaires total réalisé en France, ne sont pas taxés. Ainsi, Amazon ne contribue pas à l’économie française grâce aux <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/comment-amazon-embrouille-le-fisc-1264911">avantages fiscaux</a> dont il jouit, contrairement à d’autres géants du Web français tel que C-discount, dont les richesses générées profitent à l’économie française, et de manière indirecte aux Français. Amazon est perçu comme un opportuniste qui a énormément profité de la guerre contre la Covid-19, à travers la montée fulgurante de son chiffre d’affaires et de ses cours d’action en <a href="https://www.boursedirect.fr/fr/actualites/categorie/valeurs-us/amazon-au-plus-haut-a-wall-street-dope-par-le-coronavirus-boursier-f27ebaa516c8e09e7124a7d3e142a1e36c8eb44e">bourse</a>.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1324026621003812864"}"></div></p>
<p>Les quelques <a href="https://siecledigital.fr/2020/11/02/amazon-boutique-produits-francais/">initiatives</a> du géant du e-commerce de mettre en avant les produits fabriqués en France et de soutenir les entreprises françaises sur son site Web, sont assimilées à de « la poudre de perlimpinpin ». Amazon est considéré, par certains, comme l’un des « riches de la guerre » avec tout ce que cela porte comme symboles négatifs d’opportunisme, d’égoïsme, d’individualisme et d’injustice.</p>
<p>Les attentes de solidarité avec les Français, d’assistance aux petits commerçants et d’aide aux salariés non remplies par Amazon lors de la première vague ont contribué à ternir son image et à faire de lui une cible privilégiée lors de cette deuxième vague de la Covid-19.</p>
<h2>L’injustice cultivée par les politiciens et relayée par les médias…</h2>
<p><a href="https://www.lci.fr/social/quel-est-le-poids-reel-d-amazon-dans-l-economie-francaise-2168838.html">L’appel</a> au boycott d’Amazon par madame Roselyne Bachelot, ministre de la Culture, a fait l’effet de « la seringue hypodermique » sur certains consommateurs qui ont placé le géant du e-commerce dans l’agenda de leurs sujets de discussion. Ce discours a d’autant plus été considéré comme faisant appel au sentiment de culpabilité du consommateur et à son sens de la justice, tel qu’évoqué par le philosophe américain John Rawls (1971).</p>
<p>Cela a été accentué par les <a href="https://www.procos.org/images/procos/presse/2020/CP/cp_commun_federations_impact_coronavirus.pdf">communiqués</a> des différentes fédérations du commerce, les publicités « solidaires » diffusées par certaines enseignes de distribution, ainsi que les discours politiques contradictoires au sujet d’Amazon. Or, au lieu d’aider à rétablir la justice sociale chez les Français, la médiatisation des différents discours politiques a davantage creusé le sentiment d’injustice sociale chez eux ; elle leur a donné l’impression qu’Amazon est plus fort que l’État français. Certains commerçants se lamentent en rappelant que : « lutter contre Amazon quand on fait partie du gouvernement doit se traduire par des lois et non pas par l’appel au boycott… ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1323174185770881024"}"></div></p>
<p>Par ailleurs, lors du deuxième confinement, l’interdiction d’ouvrir les commerces jugés non essentiels, y compris les <a href="https://www.rtl.fr/actu/economie-consommation/confinement-la-liste-des-rayons-qui-ferment-dans-les-grandes-surfaces-7800916062">rayons</a> concernés chez les supermarchés et les hypermarchés français, à l’exception des e-commerçants dont Amazon, a davantage éveillé le sentiment d’injustice sociale chez les consommateurs et les commerçants français. Cela a pris la forme de deux grandes polémiques.</p>
<p>La première polémique concerne la <a href="https://www.lemonde.fr/culture/article/2020/10/30/reconfinement-les-librairies-n-echappent-pas-a-la-fermeture_6057888_3246.html">catégorisation</a> de ce qui est essentiel de ce qui ne l’est pas. La hiérarchie des biens retenue par le gouvernement ne reflète pas de manière juste et équitable celle des commerçants français qui trouvent que les biens culturels sont aussi importants que les biens alimentaires pour eux et pour leurs clients. Le président de <em>UFC que choisir</em> a d’ailleurs <a href="https://www.sudouest.fr/2020/11/02/covid-19-le-president-de-l-ufc-que-choisir-fustige-les-fermetures-de-certains-rayons-et-commerces-8032428-705.php">pointé du doigt</a> le mauvais choix du terme « biens essentiels », au lieu d’utiliser celui de « la capacité à réguler les flux, à assurer de la distanciation, etc. ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1326853490170277889"}"></div></p>
<p>La deuxième polémique concerne les inégalités dans les traitements constatées entre Amazon et tous les autres commerçants. En effet, malgré que la fermeture des commerces et des rayons « non essentiels » ne concerne pas les acteurs du e-commerce, dont ceux français, Amazon reste le plus grand bénéficiaire de cette décision avec la <a href="https://www.capital.fr/entreprises-marches/ces-incroyables-profits-damazon-pendant-la-pandemie-1376861">hausse</a> encore plus importante de son chiffre d’affaires et la préservation des mêmes avantages fiscaux non permis aux petits commerçants et aux autres acteurs français de l’e-commerce. </p>
<p>Par ailleurs, fragilisés par le premier confinement, les commerces « non essentiels » risquent la cessation de leur activité suite à ce deuxième confinement décidé à une période critique de l’année (Black Friday et fêtes de Noël). De plus, <a href="https://www.service-public.fr/professionnels-entreprises/vosdroits/F35211">l’aide</a> promise par l’État a été jugée trop faible par certains, ce qui les a amenés à se battre pour survivre, à travers leurs différentes fédérations et associations, et à médiatiser leur combat. Cette deuxième polémique alimente donc l’hypothèse selon laquelle l’État n’a pas réussi à instaurer un système de concurrence loyale et juste entre les différentes formes de commerce, par les décisions et les politiques jugées injustes.</p>
<h2>Le consommateur pour rétablir la justice sociale ?</h2>
<p>L’isolement social vécu par les Français lors du premier confinement les a poussés à revoir leurs priorités et à se rendre compte de l’importance des relations humaines dans leur enrichissement personnel et dans l’atteinte de leur bien-être personnel. La proximité humaine avec les vendeurs en magasin, l’échange de bonnes pratiques et de conseils, ou de simples discussions autour de sujets divers et variés sont devenus de véritables avantages du magasin physique de proximité, contribuant ainsi à la construction d’un <a href="https://www.persee.fr/doc/arss_0335-5322_1980_num_31_1_2069">capital social</a>, au sens de Bourdieu (1979). Ainsi, prenant conscience du combat des commerces de proximité par l’effet de la médiatisation du sujet, les consommateurs se sont mêlés de l’affaire et ont tenté de s’inscrire dans un mouvement de solidarité afin de les sauver, en désignant « À qui le crime profite ».</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1325872030550519809"}"></div></p>
<p>Ce mouvement s’est manifesté par une campagne virale de boycott d’Amazon, à travers le partage des différents supports (textes, images, photos, vidéos) mis à leur disposition par les associations consuméristes, les enseignes de distribution et les groupements de librairies, dénonçant les pratiques déloyales et non éthiques d’Amazon.</p>
<h2>Les limites du mouvement anti-Amazon</h2>
<p>Malgré les tentatives citoyennes des consommateurs afin de restreindre Amazon et de réguler socialement le marché, la hausse des chiffres enregistrés par le géant américain de l’e-commerce, en France, dans la première semaine du reconfinement, remet en question la force de ce mouvement, pointant ainsi du doigt le double discours des consommateurs. Cette situation nous pousse à supposer l’existence d’un « Amazon paradox » selon lequel les consommateurs affichent des intentions et des positions susceptibles de différer de leurs comportements réels, et ce en fonction des bénéfices générés par Amazon à chacun parmi eux (choix, praticité, prix avantageux, rapidité de livraison…).</p>
<p>Le rôle de l’État demeure donc central à assurer l’égalité entre les différents acteurs du commerce et à rétablir, par conséquent, la justice sociale en instaurant les mêmes règles pour tous.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/150000/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Hanene Oueslati ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>La fermeture des commerces « non essentiels » met le feu aux poudres et ravive la polémique autour d’Amazon. Pourquoi le géant de l’e-commerce est-il dans le viseur, pour quels résultats ?Hanene Oueslati, Maître de conférences en Marketing, Université de Haute-Alsace (UHA)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1477612020-10-16T14:45:53Z2020-10-16T14:45:53ZLe réchauffement climatique, nouvelle cause incontournable pour la philanthropie<p>En janvier 2020, les incendies dévastateurs en Australie suscitaient un <a href="https://www.lesechos.fr/monde/asie-pacifique/incendies-en-australie-pres-de-100-millions-deuros-de-dons-pour-les-pompiers-les-sinistres-et-les-koalas-1162047">élan de générosité mondial</a> de près de 100 millions d’euros, issus d’individus anonymes, d’entreprises ou de célébrités.</p>
<p>En février, le très polarisant PDG d’Amazon et désormais première fortune mondiale Jeff Bezos, annonçait son entrée en philanthropie en établissant un <a href="https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/02/18/bezos-veut-consacrer-dix-milliards-de-dollars-a-la-lutte-contre-le-rechauffement-climatique_6029898_3244.html">fonds de 10 milliards de dollars</a> pour le climat. En juin, son groupe lançait le <a href="https://www.ouest-france.fr/environnement/climat/amazon-annonce-la-creation-d-un-fonds-de-2-milliards-de-dollars-pour-le-climat-6879897#:%7E:text=Climat-,Amazon%20annonce%20la%20cr%C3%A9ation%20d%E2%80%99un%20fonds%20de%202%20milliards,l%E2%80%99%C3%A9nergie%20renouvelable%20en%202025.">Climate Pledge Fund</a>, un programme d’investissement dans les entreprises facilitant une transition vers l’ère bas-carbone.</p>
<p>Mais si la cause climatique semble s’imposer comme une urgence pour les donateurs privés et les citoyens, elle ne constitue toujours qu’une fraction infime des flux philanthropiques – un décalage surprenant avec la gravité du problème.</p>
<h2>Une cause négligée par les donateurs</h2>
<p>Le mouvement de la société civile en réponse au réchauffement climatique est considérablement monté en puissance ces dernières années. Pourtant, le climat ne représente toujours qu’une portion minime des dons privés. Lorsque l’on donne pour l’environnement, c’est d’ailleurs rarement pour « le climat » en tant que tel.</p>
<p>Celui-ci est souvent relégué à l’arrière-plan des <a href="https://ejatlas.org/?translate=fr">différents combats environnementaux</a> (préserver les océans, la qualité de l’air, les forêts, la faune sauvage, etc.) qui se rejoignent sans toutefois se superposer.</p>
<p>Le mouvement présente ainsi un visage hétérogène, y compris matière de discours et d’objectifs parfois peu compatibles : préserver la biodiversité, prôner une forme de décroissance, investir massivement dans la production d’énergie décarbonée, établir une taxe ou un marché carbone ou minimiser l’impact du changement climatique pour les populations vulnérables.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1118925539627159553"}"></div></p>
<p>Cette faible visibilité de la cause climatique s’accompagne, on l’a dit, de financements privés modestes. En 2015, les membres de l’Environmental Grantmakers Association, qui regroupe les principaux philanthropes américains spécialisés dans l’environnement, avaient donné <a href="https://ega.org/sites/default/files/page/attachment/EGA%20Tracking%20the%20Field%20Volume%206%20Executive%20Summary.pdf">1,54 milliard de dollars</a> en subventions, dont seulement 142 millions destinés au climat. D’après l’OCDE, <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/docserver/9789264085190-en.pdf">143 grandes fondations</a> opérant dans le domaine du développement n’ont dépensé qu’1,5 milliard de dollars (soit 6,5 % de leur budget agrégé) entre 2013 et 2015 pour lutter contre le changement climatique.</p>
<p>Chez les particuliers aussi, le climat reste loin derrière les causes les plus populaires. <a href="https://www.francegenerosites.org/chiffres-cles/">Les Français lui préfèrent ainsi</a> la protection de l’enfance, la lutte contre l’exclusion, ou encore la recherche médicale, tandis que les <a href="https://philanthropy.iupui.edu/news-events/news-item/giving-usa-2020:-charitable-giving-showed-solid-growth,-climbing-to-$449.64-billion-in-2019,-one-of-the-highest-years-for-giving-on-record.html?id=328">Américains ne consacrent que 3 % de leurs dons à l’environnement</a> – et donc encore moins pour le seul climat.</p>
<p>Réciproquement, les dons privés ne représentent qu’une goutte d’eau dans l’océan des fonds nécessaires pour lutter contre le changement climatique et ses conséquences. En 2015, seulement <a href="https://www.cairn.info/revue-internationale-et-strategique-2018-1-page-115.htm?contenu=article">0,1 % du financement pour le climat</a> provenait de la philanthropie. Le GIEC (<a href="https://jancovici.com/changement-climatique/croire-les-scientifiques/quest-ce-que-le-giec/">Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat</a>) estime que <a href="https://www.ipcc.ch/site/assets/uploads/sites/2/2019/02/SR15_Chapter4_Low_Res.pdf">1 600 à 3 800 milliards de dollars</a> d’investissement annuel sont nécessaires jusqu’en 2050 pour limiter le réchauffement à 1,5 degré Celsius par rapport au niveau préindustriel. Un scénario qui se focalise sur la prévention de la crise. Or l’adaptation climatique, qui consiste à ajuster les sociétés et les écosystèmes pour minimiser l’impact négatif du changement climatique, pourrait constituer un poste de dépenses bien plus important…</p>
<h2>Dissonance cognitive et prises de conscience</h2>
<p>Pourquoi un tel décalage entre l’urgence du problème et la timidité des réactions ? <a href="https://laviedesidees.fr/Peut-on-fixer-le-prix-du-futur-de.html">Préférence pour le présent</a>, <a href="https://www.cerveauetpsycho.fr/sd/psychologie-sociale/leffet-spectateur-9078.php">« effet spectateur »</a> diluant la responsabilité individuelle ou encore <a href="https://www.huffingtonpost.fr/entry/angoisse-climatique-souffrez-vous-de-solastalgie_fr_5d3eb1c0e4b0db8affaaea4c">« écoparalysie » et « solastalgie »</a>, nous sommes nombreux à souffrir de dissonance cognitive, nos comportements semblant en désaccord avec nos croyances.</p>
<p>Les <a href="https://www.weforum.org/reports/the-global-risks-report-2020">rapports prospectifs du World Economic Forum</a> positionnent ainsi le risque climatique au premier rang des risques planétaires – devançant même les pandémies du double point de vue de leur probabilité et de leur gravité.</p>
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<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/363911/original/file-20201016-19-quz416.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/363911/original/file-20201016-19-quz416.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=472&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/363911/original/file-20201016-19-quz416.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=472&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/363911/original/file-20201016-19-quz416.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=472&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/363911/original/file-20201016-19-quz416.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=593&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/363911/original/file-20201016-19-quz416.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=593&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/363911/original/file-20201016-19-quz416.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=593&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Dessin humoristique réalisé par Graeme MacKay, publié le mercredi 11 mars 2020.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Graeme MacKay</span></span>
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<p>En dépit de ces signaux alarmants, les médias ne consacrent encore <a href="https://www.reportersdespoirs.org/wp-content/uploads/2020/07/Etude_Climat_ReportersdEspoirs_07072020.pdf">qu’une place limitée aux sujets climatiques</a> dans leurs reportages ou débats : en 2019, <em>Le Monde</em> accordait par exemple 5 % seulement de ses articles au changement climatique et le climat ne constituait que 1 % des sujets sur le journal télévisé de France 2.</p>
<p>Cet écart peut aussi s’expliquer par la psychologie du don. La complexité du sujet climatique et son caractère protéiforme demande plus de réflexion aux donateurs potentiels qu’une cause simple à comprendre, comme l’aide aux victimes d’un tremblement de terre. Par ailleurs, <a href="https://psycnet.apa.org/doiLanding?doi=10.1037%2F0022-3514.40.2.290">l’empathie pour la souffrance d’autrui</a> et l’identification de <a href="https://link.springer.com/article/10.1023/A:1007740225484">victimes concrètes</a> jouent un rôle important dans le déclenchement de l’acte du don. Or, il est difficile de se sentir concerné par le changement climatique tant que celui-ci demeure une menace lointaine, diffuse, sans victime immédiate.</p>
<p>Les dernières années ont malgré tout changé la donne : des catastrophes naturelles successives et attribuées au dérèglement climatique (incendies, inondations…) ont choqué l’opinion et le mouvement pour le climat a pris de l’ampleur. Le changement climatique est désormais une <a href="https://www.edf.fr/observatoire-opinion-urgence-climatique">source d’inquiétude majeure</a> pour les citoyens du monde entier. Dans le secteur philanthropique aussi, le sujet a gagné en importance.</p>
<h2>Climat et philanthropie, une histoire liée</h2>
<p>Témoins de cette tendance, quelques engagements phares ont été fortement médiatisés, dont celui de Jeff Bezos, qui a <a href="https://theconversation.com/why-billionaire-climate-philanthropists-will-always-be-part-of-the-problem-132383">aussitôt été critiqué</a> pour son caractère flou, son envergure insuffisante et sa contradiction avec les pratiques entrepreneuriales du milliardaire.</p>
<p>En 2009 déjà, l’homme d’affaires britannique Richard Branson avait créé la <a href="https://rmi.org/carbon-war-room/">« Carbon War Room »</a> pour identifier et tester des solutions innovantes pour la transition énergétique. D’après la Fondation ClimateWorks, les dons pour le climat ont <a href="https://www.oecd-ilibrary.org/sites/9789264303973-6-fr/index.html?itemId=/content/component/9789264303973-6-fr">augmenté de 30 % entre 2015 et 2017</a>. C’est encore loin du compte, mais la tendance est à la hausse.</p>
<p>L’intérêt de la philanthropie pour le climat n’est cependant pas totalement nouveau. Dès 1987, les réunions d’experts qui jettent les bases du GIEC furent financées par le <a href="https://link.springer.com/article/10.1023/A:1005315532386">Rockefeller Brothers Fund</a>.</p>
<p>Dans les années 1990, des collectifs d’acteurs comme la <a href="https://www.ef.org/about-us/">Energy Foundation</a> se sont structurés pour promouvoir les énergies propres auprès des citoyens et des décideurs, et continuent aujourd’hui à se rassembler <a href="https://www.climateworks.org/philanthropyannouncement/">au sein d’alliances</a> pour mettre leurs capacités de financement au profit d’une stratégie commune.</p>
<p>En raison de sa diversité idéologique, la philanthropie n’a toutefois pas toujours été l’alliée du climat… Les frères Koch, <a href="https://www.newyorker.com/news/daily-comment/kochland-examines-how-the-koch-brothers-made-their-fortune-and-the-influence-it-bought">milliardaires dont la fortune s’est faite dans l’industrie pétrolière</a>, financent laboratoires d’idées et campagnes climatosceptiques aux États-Unis depuis trois décennies. Ils demeurent sans doute l’exemple le plus emblématique de l’alliance entre grande philanthropie et énergies fossiles.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1216035527260098561"}"></div></p>
<p>Qu’ils soient progressistes et soucieux de répondre aux défis du climat ou bien conservateurs et climatosceptiques, les donateurs américains ont été les fers de lance de la philanthropie climatique. Celle-ci est moins développée en Europe, où le financement des causes d’intérêt général est davantage assuré par les États.</p>
<p>En Chine, dont les émissions de gaz à effet de serre <a href="https://www.theguardian.com/environment/2007/jun/19/china.usnews">ont dépassé celles des États-Unis</a> en 2007, l’émergence d’une classe d’ultra-riches a renforcé une <a href="https://theconversation.com/la-philanthropie-chinoise-a-lassaut-de-la-maladie-120354">tradition philanthropique bien ancrée</a>, qui s’est récemment emparée du sujet climatique : le milliardaire Niu Gensheng s’est ainsi positionné comme une <a href="https://www.townandcountrymag.com/society/money-and-power/a20720193/china-philanthropists-climate-change/">figure majeure de la philanthropie climatique</a>, tandis que la femme d’affaire He Qiaonv a réalisé le <a href="https://www.bloomberg.com/news/articles/2017-10-12/beijing-philanthropist-he-qiaonv-commits-1-5-billion-to-conservation">plus grand don de l’histoire</a> pour la préservation de la biodiversité.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/363686/original/file-20201015-13-n33853.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/363686/original/file-20201015-13-n33853.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/363686/original/file-20201015-13-n33853.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/363686/original/file-20201015-13-n33853.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/363686/original/file-20201015-13-n33853.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/363686/original/file-20201015-13-n33853.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/363686/original/file-20201015-13-n33853.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Manifestation pour le climat à San Francisco (États-Unis).</span>
<span class="attribution"><span class="source">Unsplash</span></span>
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</figure>
<p>Les possibilités de la générosité privée en faveur du climat sont multiples : financement d’ONG spécialisées dans le plaidoyer, réseaux d’experts, soutien aux initiatives locales ou encore investissement dans des entreprises porteuses de solutions à la crise climatique… Malgré ses ressources limitées, la philanthropie a un rôle capital à jouer dans la transition qui s’annonce.</p>
<p>Son ralliement est d’autant plus nécessaire que les causes actuellement privilégiées, comme la santé ou l’aide aux plus vulnérables, risquent d’être affectées de plein fouet par les effets du changement climatique.</p>
<p>Reste à savoir si les acteurs de la philanthropie seront suffisamment <a href="https://www.odilejacob.fr/catalogue/sciences-humaines/economie-et-finance/vers-une-philanthropie-strategique_9782738145864.php">organisés et stratégiques</a> pour réellement <a href="https://theconversation.com/les-trois-conditions-dune-philanthropie-climatique-efficace-147762">« faire la différence »</a>.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/147761/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>La chaire « Philanthropie » de l’ESSEC a reçu des financements de la Fondation de France, de la Fondation Caritas France, des Fondations Edmond de Rothschild, de la Fondation Daniel & Nina Carasso et de la Fondation Bettencourt Schueller.
</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Charles Sellen a reçu des financements d’Indiana University et de la commission franco-américaine Fulbright pour conduire ses travaux de recherche sur la philanthropie. Il a coordonné l’édition de l’ouvrage « Climate: The Financial Challenge » publié en 2017 par l’Agence française de développement.</span></em></p><p class="fine-print"><em><span>Arthur Gautier ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Si le changement climatique a longtemps été négligé par les donateurs privés, la philanthropie se mobilise de manière croissante pour soutenir cette cause.Éléonore Delanoë, Associée de recherche, Laboratoire E&MIS, ESSEC Arthur Gautier, Professeur, directeur exécutif de la chaire « Philanthropie », ESSEC Charles Sellen, Global Philanthropy Fellow, Lilly Family School of Philanthropy, IUPUILicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1399832020-06-23T20:50:04Z2020-06-23T20:50:04ZObjets connectés, un pari pas toujours gagnant pour les clients<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/342443/original/file-20200617-94078-dgpmrk.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=179%2C29%2C4812%2C3293&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Dans le monde de l’Internet des objets, un produit a plus de valeur si ses fonctionnalités évoluent et s’enrichissent avec le temps.
</span> <span class="attribution"><a class="source" href="https://image.shutterstock.com/image-photo/on-office-man-using-his-600w-376467346.jpg">PopTika / Shutterstock</a></span></figcaption></figure><p>Alors que la PlayStation 5 vient <a href="https://www.tomsguide.fr/ps5-ce-que-lon-sait-de-la-prochaine-console-de-sony/">à peine d’être dévoilée</a>, il est probable que ses acheteurs devront, avant de pouvoir y jouer, s’armer de patience pour y faire toutes les mises à jour d’usage.</p>
<p>Même si par nature l’industrie du jeu vidéo se prête particulièrement à cette tendance, l’imbrication croissante des logiciels dans les produits physiques n’épargne a priori aucun secteur.</p>
<p>Notre vie quotidienne est ainsi de plus en plus imprégnée d’objets connectés, allant des <a href="https://theconversation.com/montres-connectees-lheure-de-la-revolution-na-pas-encore-sonne-113216">montres</a>, frigos, micro-ondes, voitures… jusqu’aux <a href="http://coolnews.fr/listes/les-10-objets-connectes-les-plus-improbables/52">plus improbables</a>, dont les <a href="https://www.frandroid.com/marques/xiaomi/635257_voici-les-toilettes-connectees-de-xiaomi">toilettes</a> ! Si ces produits apportent d’indéniables avantages, il est cependant important de s’interroger également sur les limites et les contraintes qui les accompagnent.</p>
<h2>Un marché en croissance et porteur de promesses</h2>
<p>Le marché des objets connectés grand public (communément qualifié d’Internet des objets – ou <a href="https://ieeexplore.ieee.org/abstract/document/5307747">IoT pour Internet of Things</a>) est évalué à <a href="https://www.statista.com/statistics/976313/global-iot-market-size/">248 milliards de dollars en 2020</a>, avec une estimation à 1 567 milliards à l’horizon 2025. Discutables, ces chiffres n’en révèlent pas moins une tendance lourde de connectivité des objets du quotidien.</p>
<p>En effet, outre des objets naturellement dépendants de logiciels (ordinateurs, smartphones, tablettes, liseuses numériques, etc.), tout bien matériel est aujourd’hui susceptible d’être connecté.</p>
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À lire aussi :
<a href="https://theconversation.com/les-objets-connectes-nouveaux-fetiches-du-monde-moderne-108311">Les objets connectés, nouveaux fétiches du monde moderne</a>
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<p>Côté entreprises, cela transforme profondément les <a href="https://hbr.org/2014/11/how-smart-connected-products-are-transforming-competition">dynamiques concurrentielles</a>. Côté consommateurs, nous vivons dans un monde dans lequel les fonctionnalités de produits aussi simples qu’un <a href="https://www.miroir-connecte.net/">miroir</a> ou un <a href="https://www.on-mag.fr/index.php/video-hd/news/18796-miliboo-lance-un-canape-connecte-et-immersif-notamment-dedie-aux-amateurs-de-home-cinema-et-de-jeux-video">canapé</a> peuvent évoluer et en <a href="https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S109499681730035X">accroître la valeur d’usage</a> au fil du temps.</p>
<p>Cette connectivité, et l’évolutivité qui en résulte, génèrent de multiples avantages : programmation et automatisation (pour des volets, des luminaires, etc.) qui facilitent la vie, gains de temps, dépannage à distance, etc. Sans compter que ces perfectionnements progressifs sont supposés diminuer la fréquence de remplacement des produits et induire des gains écologiques substantiels.</p>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/342439/original/file-20200617-94070-1lzvh4t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/342439/original/file-20200617-94070-1lzvh4t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/342439/original/file-20200617-94070-1lzvh4t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/342439/original/file-20200617-94070-1lzvh4t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=372&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/342439/original/file-20200617-94070-1lzvh4t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=467&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/342439/original/file-20200617-94070-1lzvh4t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=467&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/342439/original/file-20200617-94070-1lzvh4t.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=467&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">La domotique consiste à centraliser le contrôle des différents systèmes de la maison (chauffage ou prises électriques par exemple) pour notamment permettre des gains d’énergie.</span>
<span class="attribution"><a class="source" href="https://image.shutterstock.com/image-photo/woman-using-smart-wall-home-600w-774151222.jpg">goodluz/Shutterstock</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>Alors qu’il était auparavant nécessaire de racheter la nouvelle version d’un produit qui ne pouvait être mis à jour, le client peut maintenant bénéficier d’améliorations constantes – voir par exemple les casques intra-auriculaires sans fil de la marque Jabra dont la récente mise à jour en a enrichi <a href="https://www.theverge.com/21273578/jabra-elite-75t-customizable-controls-mysound-hearing-test-now-available">l’ergonomie et les fonctionnalités</a>.</p>
<h2>Le risque d’une expérience initiale dégradée</h2>
<p>Cependant, tout n’est pas rose au pays des produits connectés. Avant de bénéficier de ces améliorations futures, les clients doivent aussi être prêts à vivre tout d’abord une expérience de consommation dégradée. Ceci n’est pas un problème lorsque l’entreprise est transparente sur ce point et permet au consommateur de choisir en connaissance de cause.</p>
<p>Ainsi, certains achètent volontairement un produit dont la valeur d’usage n’est pas optimale, mais dont le fabricant promet qu’elle sera accrue au fur et à mesure. Cela est courant sur les plates-formes de financement participatif (ou crowdfunding) comme Kickstarter, Ulule ou KissKissBankBank, sur lesquelles les clients achètent des produits dont ils savent qu’ils seront mis à jour ensuite pour leur permettre d’en profiter pleinement.</p>
<p>Par exemple, les acheteurs du petit robot éducatif <a href="https://fr.ulule.com/winky-robot/">Winky</a>, dont le but est d’initier les enfants à la programmation, savaient en le commandant sur Ulule qu’ils recevraient une version non finalisée, laquelle serait ensuite dotée de modules complémentaires via des mises à jour de l’application.</p>
<p>Mais toutes les entreprises n’ont pas le même degré de transparence quant au niveau d’aboutissement initial de leur offre. Qu’il s’agisse d’une démarche volontaire ou que cela soit lié à des problèmes de développement imprévus, le résultat est finalement le même pour le client commandant un produit dont il ne peut que partiellement bénéficier.</p>
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<iframe width="440" height="260" src="https://www.youtube.com/embed/-6CaChEcRF4?wmode=transparent&start=0" frameborder="0" allowfullscreen=""></iframe>
<figcaption><span class="caption">Vidéo de la chaîne M6 présentant le robot éducatif et évolutif Winky.</span></figcaption>
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<p>Ainsi, les acquéreurs de la Volkswagen ID3 recevront en septembre 2020 un véhicule dont le système d’infotainment (infodivertissement) et d’affichage tête haute ne seront au mieux activés <a href="https://www.theverge.com/2020/6/11/21288572/volkswagen-id3-ev-delay-software-vw-herbert-diess">qu’à la fin de l’année</a> – ce qu’ils ignoraient à la commande.</p>
<h2>Attention aux mauvaises surprises ultérieures</h2>
<p>Ceci nous amène en outre à souligner la capacité qu’ont dorénavant les entreprises de limiter leurs produits après leur vente. En effet, certains peuvent être dégradés, voire devenir totalement inutilisables. Ils perdent alors tout ou partie de la valeur d’usage pour laquelle les clients ont payé. Ceci entraîne alors des phénomènes de <a href="https://www.emerald.com/insight/content/doi/10.1108/08876041011072546/full/html">codestruction de valeur</a> dommageables pour les clients. Pareils cas se sont multipliés ces dernières années.</p>
<p>C’est par exemple le cas de <a href="https://www.pocket-lint.com/fr-fr/maison-connectee/actualites/amazon/140903-qu-est-ce-que-amazon-echo-look-et-comment-cela-fonctionne-t-il">l’Echo Look</a>, une caméra à activation vocale doublée d’un haut-parleur commercialisée par Amazon mi-2017 au prix de 200 dollars. Couplé à une application et à un système d’intelligence artificielle alimenté par des spécialistes de la mode, cet appareil se voulait un assistant personnel donnant des conseils de style sur la base des photos ou vidéos prises par les utilisateurs.</p>
<p>Après l’avoir enrichi de <a href="https://www.theverge.com/2018/2/7/16984218/amazons-echo-look-collections-feature-curated-content-vogue-gq">nouvelles fonctionnalités</a> courant 2018, Amazon a cependant annoncé en mai que le <a href="https://www.amazon.com/gp/help/customer/display.html?ots=1&nodeId=201602230&tag=theverge02-20#GUID-1CDA0A16-3D5A-47C1-9DD8-FDEDB10381A3__SECTION_E5708F0A410A44289D9F719B97CC55A2">service s’arrêterait</a> le 24 juillet 2020. À cette date, l’appareil sera alors totalement inutilisable et bon à jeter, ce qui au passage ne joue pas en faveur de l’argument écologique évoqué plus haut (même si Amazon incite explicitement à les <a href="https://www.amazon.com/gp/help/customer/display.html?ots=1&nodeId=201602230&tag=theverge02-20#GUID-1CDA0A16-3D5A-47C1-9DD8-FDEDB10381A3__SECTION_E5708F0A410A44289D9F719B97CC55A2">recycler</a>).</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1266670942597480448"}"></div></p>
<p>Au-delà du cas de l’arrêt du produit ou de son support, l’intégration logicielle donne aussi au producteur un niveau de contrôle supérieur sur les usages des clients. Ceci peut lui permettre de capter une part de valeur plus importante, voire même de la capter à plusieurs reprises – par exemple, dès que le produit change de propriétaire.</p>
<p>L’entreprise Tesla a, à cet égard, défrayé la chronique à de multiples reprises. En juin 2019, par exemple, ce constructeur de véhicules électriques a informé des clients ayant acheté une Model 3 Standard Range (mais livrée avec la configuration logicielle de la version Model 3 Standard Range Plus) d’une <a href="https://electrek.co/2019/06/07/tesla-downgrading-model-3-standard-range-software-offer-upgrade/">mise à jour vers la version de base</a> pour laquelle ils avaient payé.</p>
<p>Le véhicule perdrait alors 10 % de son autonomie, ainsi que de nombreux services tels que le streaming de musique embarqué, la navigation avec visualisation du trafic en direct ou encore les sièges chauffants. Après y avoir goûté sans les avoir demandées, les clients souhaitant conserver ces fonctionnalités devaient débourser pas moins de 4 500 dollars.</p>
<p>Quelques mois plus tard, c’est un <a href="https://jalopnik.com/tesla-remotely-removes-autopilot-features-from-customer-1841472617">client ayant acheté une Tesla d’occasion</a> lors d’une vente aux enchères qui eut la désagréable surprise de constater que le fabricant en avait retiré, sans aucune notification préalable, les options de pilote automatique.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1227577546579075073"}"></div></p>
<p>À la suite d’un audit à distance de la voiture, le constructeur avait détecté que le propriétaire n’avait pas payé pour cette option, qu’il a donc retirée via une mise à jour (l’affaire, très médiatisée, s’est finie par une communication de Tesla indiquant qu’il s’agissait d’une erreur et la <a href="https://www.theverge.com/2020/2/13/21136699/tesla-autopilot-used-model-s-owner-restored-assistance-features">remise en fonction de l’autopilot</a>).</p>
<p>Le monde de connectivité dans lequel nous sommes rentrés est donc porteur de très nombreux avantages, mais ceux-ci ne doivent pas nous faire perdre notre esprit critique à leur égard ; tout comme il est important d’intégrer les <a href="https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/Publications/Vie-pratique/Fiches-pratiques/objets-connectes">risques de piratage</a> des objets connectés qui peuvent les accompagner et impliquent de prendre certaines précautions.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/139983/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Les auteurs ne travaillent pas, ne conseillent pas, ne possèdent pas de parts, ne reçoivent pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'ont déclaré aucune autre affiliation que leur organisme de recherche.</span></em></p>S’ils nous facilitent grandement la vie, ces produits reposent souvent sur des modèles économiques susceptibles d’engendrer de mauvaises surprises lors de leur utilisation.Loïc Plé, DIrecteur de la Pédagogie - Associate Professor, IÉSEG School of ManagementDidier Calcei, Professeur associé en Innovation & Entrepreneuriat, South Champagne Business School (Y Schools) – UGEILicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1362582020-04-15T17:08:07Z2020-04-15T17:08:07ZContinuité de l’activité des entreprises : l’apprentissage difficile de la négociation de crise<p>La crise du Covid-19 provoque une remise en question radicale des activités de travail sur les sites industriels et logistiques et dans la distribution. Les priorités sont complètement bouleversées, l’obsession de la rentabilité a laissé place à deux enjeux : la prévention de la contamination et le maintien d’une activité économique pour répondre aux besoins de la population et préserver les capacités productives.</p>
<p>En nous appuyant sur une enquête auprès de quelques techniciens, cadres et syndicalistes, ainsi que la lecture de la presse, nous avons essayé de comprendre comment les salariés présents sur les sites vivent ces contraintes contradictoires et tentent de les articuler.</p>
<p>Cette enquête met en évidence l’apprentissage d’une nouvelle pratique de négociation sociale qui s’inspire de la <a href="https://www.jstor.org/stable/2393339?seq=1">théorie de la résilience en situation de crise</a> : construction d’une interprétation partagée des enjeux, l’attention aux situations concrètes, priorisation partagée des activités, et adaptation aux évolutions de la situation.</p>
<h2>Construire une interprétation partagée</h2>
<p>La crise du Covid-19 remplace sur le devant de la scène un travail jusqu’alors invisible, peu considéré, délégué à des personnes peu ou pas diplômées, considérées comme une main-d’œuvre substituable. La mise en œuvre des gestes barrières et des règles de distanciation, rencontre des contraintes nouvelles et suppose une recherche de solutions ad hoc.</p>
<p>Les locaux et l’emplacement des équipements n’ont pas été prévus pour permettre la distanciation physique : il faut imaginer des circuits pour les personnes et les produits ; repenser les postes de travail pour assurer l’isolement ; définir des règles de nettoyage des surfaces potentiellement contaminées.</p>
<p>Même s’il existe des règles générales, leur mise œuvre au quotidien exige de l’initiative, de l’ingéniosité, une mobilisation et une attention de tous à tous les instants. Les travailleurs présents sur les sites de production sont en première ligne dans le risque de contamination mais aussi dans l’engagement pour la continuité de l’activité. L’activité dépend d’eux, de leur participation et de leur évaluation de la conformité des mesures de prévention.</p>
<p>C’est pourquoi le dialogue social et la relation managériale jouent un rôle essentiel. Il s’agit d’une « négociation de crise » qui, comme la gestion de crise, implique de construire une interprétation commune des menaces et des contraintes concrètes.</p>
<h2>Différentes perceptions du risque</h2>
<p>Ce travail d’interprétation est d’autant plus important que les exigences de prévention définies par les pouvoirs publics peuvent être perçues comme ambiguës. En effet, les exigences imposées dans la vie courante sont bien plus strictes que celles imposées dans le lieu de travail.</p>
<p>Au fur et à mesure de la crise, deux perceptions des risques et des mesures de prévention sont en concurrence. Pour les uns, et en particulier le gouvernement, il ne s’agit pas nécessairement de protéger les individus de toute contamination, mais de protéger les personnes à risque et de modérer la propagation. Dans cette perspective, il y a une forte priorité donnée à la continuité des activités. Au fil des jours, le ministère du Travail s’est efforcé de préciser, dans chaque métier, des règles de prévention adaptées.</p>
<p>Mais le risque n’est pas perçu de la même façon par de nombreuses personnes qui travaillent sur les sites. Avec la médiatisation des cas graves et des décès, chacun prend conscience qu’il est aussi exposé à titre individuel. Les salariés en première ligne revendiquent le droit d’être protégés, non pas seulement pour éviter la propagation dans l’ensemble de la population, mais pour ne pas être malades et ne pas contaminer leurs proches.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1243893927033344000"}"></div></p>
<p>Sur le terrain, surtout dans les premières semaines de la crise, ils constatent que les mesures de prévention ne sont pas toujours complètement applicables et il est difficile de s’assurer qu’elles sont suffisantes. Les travailleurs se sentent exposés à un danger difficile à évaluer, à apprivoiser, à gérer individuellement…</p>
<p>Les délégués du personnel ont rapidement pointé les failles dans l’application des mesures et le manque de ressources. Les instances représentatives sont fortement sollicitées. Le respect des règles suppose une organisation et une discipline peu compatibles avec des activités parfois de plus en plus intenses, par exemple dans les <a href="https://www.businessinsider.fr/des-syndicats-damazon-exigent-la-fermeture-des-entrepots-francais-184185">entrepôts d’Amazon</a>.</p>
<p>Dans la mesure où l’exposition à la contamination dépend étroitement du comportement des autres, elle dépend donc des régulations collectives que les équipes peuvent développer, mais aussi des pratiques managériales. Au sein des collectifs de travail affaiblis par la précarité des statuts et l’instabilité de la main d’œuvre, un manque de cohésion des équipes entraîne des tensions sur le respect des gestes barrières.</p>
<h2>La priorisation des activités au cœur du dialogue</h2>
<p>Compte tenu de l’incertitude vis-à-vis de leur efficacité, mais aussi des besoins de réduire l’activité pour faciliter la réorganisation des flux, le dialogue social investit aussi la question des priorités dans le maintien des activités. Dans les entrepôts d’Amazon, les syndicats revendiquent une limitation des commandes qui ne relèvent pas de la stricte nécessité de façon à réduire le volume de travail pour mieux réguler la circulation des personnes.</p>
<p>À défaut d’une liste des activités économiques de première nécessité fixée par les pouvoirs publics, certains syndicats se réfèrent à la hiérarchie des priorités fixées par le gouvernement à propos de l’ouverture des magasins (l’alimentation, l’hygiène, la santé) auxquelles il faudrait ajouter bien sûr l’ensemble des services publics indispensables et la maintenance des infrastructures.</p>
<p>Dans chaque usine et chaque entrepôt, l’encadrement se pose aussi la question de ce qui peut être arrêté ou non, reporté ou non… au regard d’un critère de « nécessité » qui ne peut pas être défini une fois pour toutes. La direction et l’encadrement cherchent à convaincre leurs salariés que leur activité est indispensable.</p>
<p>Par exemple, dans la construction d’équipement électrique, on évoquera la responsabilité vis-à-vis de la maintenance des réseaux électriques. Les discussions impliquent la prise en compte de chaînes logistiques globales et d’interdépendances économiques entre usines.</p>
<h2>Un déplacement des rapports de force</h2>
<p>Cet équilibre entre prévention et continuité de l’activité économique ne peut pas être défini par ordonnance, décret ou règlement intérieur. Il implique d’évaluer des contraintes très concrètes autant que des exigences morales contradictoires qui ne sont pas perçues de la même façon. Cet équilibre ne peut être défini et justifié qu’au plus près des situations de travail, ce qui entraîne une sorte d’inversion de la structure décisionnelle et des rapports de négociation.</p>
<p>Certes, cette inversion est très relative : dans beaucoup de configurations, le rapport de force économique reste défavorable aux travailleurs et l’activité syndicale faible ou inexistante. Mais l’enjeu de santé publique place au cœur des projecteurs ces activités jusqu’alors négligées ou déconsidérées. L’inspection du travail, dont le rôle d’appui et de contrôle dans l’application de la réglementation est essentiel, dispose de moyens d’investigation limités.</p>
<p>Sollicitée par les syndicats, la justice a arbitré en faveur de la revendication de <a href="https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/14/coronavirus-la-justice-ordonne-a-amazon-de-limiter-son-activite-et-d-evaluer-le-risque-pour-les-salaries_6036565_3234.html">priorisation des activités</a> dans les entrepôts d’Amazon, le 14 avril.</p>
<p>Le géant du e-commerce compte <a href="http://www.leparisien.fr/economie/amazon-menace-de-suspendre-l-activite-de-ses-centres-apres-la-decision-du-tribunal-de-nanterre-15-04-2020-8299971.php">faire appel</a> de cette décision et a menacé mercredi de « restreindre fortement » son service en France.</p>
<p><div data-react-class="Tweet" data-react-props="{"tweetId":"1250356214619398144"}"></div></p>
<p>Dans cette négociation de crise, le rôle de l’État reste central. Bien que les réorganisations sont négociées au niveau des entreprises (jusqu’au niveau des équipes), elles mobilisent des ressources juridiques et des possibilités financières qui viennent de l’État, qui sont aussi réinterprétées et déployées par les administrations, comme la reconnaissance du chômage technique. Chaque nouvelle mesure, chaque nouvelle règle, recompose les droits et les enjeux des acteurs sur le terrain.</p>
<h2>Une adaptation rapide aux évolutions de la crise</h2>
<p>Dans cette négociation de crise, les enjeux de temporalité sont extrêmement importants. Dans les entreprises qui n’étaient pas préparées et qui n’ont pas adapté leur organisation à temps, les salariés n’étaient pas protégés, et l’absence de dialogue social et d’adaptation de l’organisation a rapidement entraîné un arrêt de l’activité dès la première semaine de confinement.</p>
<p>Dans les entreprises qui ont anticipé les mesures publiques et mis en œuvre les règles de prévention avant qu’elles soient exigées, il n’y a pas eu nécessairement d’arrêt, ou s’il y a eu arrêt, la reprise a été possible en un ou deux jours, et plutôt bien acceptée par les salariés.</p>
<p>L’effort de réorganisation n’est pas terminé. La propagation de la contamination et l’évolution des consignes de prévention génèrent de nouvelles inquiétudes et un questionnement permanent des organisations de travail. L’usage des masques se développe pour les postes de travail où la mise en place des gestes barrières est difficile comme les lignes de production en U. Avec la reprise des activités, la négociation doit aussi prendre en considération les problématiques de disponibilité des salariés.</p>
<p>Ainsi, la première leçon de la crise est l’importance de la <a href="https://books.google.com/books/about/Managing_the_Unexpected.html?id=GU55MJOp1OcC">résilience des organisations</a> productives, leur capacité à intégrer de nouvelles contraintes, à gérer des incertitudes. Mais cette crise réhabilite le rôle du dialogue social, de la qualité de la relation managériale, la capacité à rendre compte et expliquer, à construire aussi un sens partagé autour des risques, des situations concrètes de travail, mais aussi des chaînes d’interdépendances qui lient les activités économiques entre elles. Nous en aurons besoin quand il s’agira de faire face aux autres menaces, en particulier le changement climatique et la raréfaction des ressources.</p><img src="https://counter.theconversation.com/content/136258/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Thomas Reverdy ne travaille pas, ne conseille pas, ne possède pas de parts, ne reçoit pas de fonds d'une organisation qui pourrait tirer profit de cet article, et n'a déclaré aucune autre affiliation que son organisme de recherche.</span></em></p>Les tensions entre exigences de sécurité et maintien du travail sont aujourd’hui directement gérées, dans l’urgence, au sein des organisations. Une situation inédite.Thomas Reverdy, Maître de conférences HDR en sociologie, Institut polytechnique de Grenoble (Grenoble INP)Licensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.tag:theconversation.com,2011:article/1343652020-03-24T19:20:59Z2020-03-24T19:20:59ZLa preuve par trois : Les géants du numérique à la conquête du monde<figure><img src="https://images.theconversation.com/files/322144/original/file-20200322-22610-oj6jho.jpg?ixlib=rb-1.1.0&rect=11%2C5%2C986%2C663&q=45&auto=format&w=496&fit=clip" /><figcaption><span class="caption">Amazon, simple revendeur de livres à son lancement en 1994, est aujourd’hui l’une des entreprises les plus puissantes de la planète.
</span> <span class="attribution"><span class="source">Rvlsoft / Shutterstock</span></span></figcaption></figure><figure class="align-right zoomable">
<a href="https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=1000&fit=clip"><img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=237&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=600&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/316809/original/file-20200224-24655-nzeb7o.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=754&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px"></a>
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<span class="caption"></span>
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<p><em>La preuve par 3 : les experts de The Conversation déclinent 3 aspects d’une question d’actualité en 3 épisodes à écouter, à la suite ou séparément ! Dans cette série, Julien Pillot, enseignant-chercheur en économie et stratégie à l’INSEEC School of Business & Economics, décrypte <strong>les stratégies des géants du numérique pour devenir incontournables</strong> chez le consommateur au travers l’étude de 3 cas : Uber, Amazon et Airbnb.</em></p>
<h2><a href="https://theconversation.com/podcast-airbnb-le-pari-gagne-de-leffet-volume-131414">Airbnb, le pari gagné de l’effet volume</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/322140/original/file-20200322-22594-1x6ro8j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/322140/original/file-20200322-22594-1x6ro8j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/322140/original/file-20200322-22594-1x6ro8j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/322140/original/file-20200322-22594-1x6ro8j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/322140/original/file-20200322-22594-1x6ro8j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/322140/original/file-20200322-22594-1x6ro8j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/322140/original/file-20200322-22594-1x6ro8j.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=503&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
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<span class="caption">Airbnb, qui n’était pourtant pas un pionnier sur son marché, est parvenu en un temps record à devenir le premier hôtelier planétaire.</span>
<span class="attribution"><span class="source">AlesiaKan/Shutterstock</span></span>
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</figure>
<p>Dès son lancement en 2008, la plate-forme de location de logements entre particuliers a enclenché un cercle vertueux en proposant une offre abondante qui a entraîné la demande.</p>
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<p><a href="https://open.spotify.com/episode/6ApwYaNmcO9uwYVE44m74L"><img src="https://images.theconversation.com/files/237984/original/file-20180925-149976-1ks72uy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=268&fit=clip" width="268" height="82"></a>
<a href="https://podcasts.apple.com/au/podcast/podcast-airbnb-le-pari-gagn%C3%A9-de-leffet-volume/id1516230224?i=1000476394983"><img src="https://images.theconversation.com/files/233721/original/file-20180827-75984-1gfuvlr.png" alt="Listen on Apple Podcasts" width="268" height="68"></a></p>
<h2><a href="https://theconversation.com/podcast-uber-la-croissance-plutot-que-les-profits-131498">Uber, la croissance plutôt que les profits</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/322141/original/file-20200322-22622-1xmbue3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/322141/original/file-20200322-22622-1xmbue3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/322141/original/file-20200322-22622-1xmbue3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/322141/original/file-20200322-22622-1xmbue3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=400&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/322141/original/file-20200322-22622-1xmbue3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/322141/original/file-20200322-22622-1xmbue3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/322141/original/file-20200322-22622-1xmbue3.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=502&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">La stratégie de l’entreprise américaine l’oblige à brûler énormément de cash.</span>
<span class="attribution"><span class="source">NYCStock/Shutterstock</span></span>
</figcaption>
</figure>
<p>L’opérateur de services de transport en voiture a acquis sa position de leader mondial en se constituant rapidement une base de chauffeurs très large. Une stratégie qui reste toutefois risquée.</p>
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<p><a href="https://open.spotify.com/episode/2chlGlTTBEPlLBrM9TTbxX"><img src="https://images.theconversation.com/files/237984/original/file-20180925-149976-1ks72uy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=268&fit=clip" width="268" height="82"></a>
<a href="https://podcasts.apple.com/au/podcast/podcast-uber-la-croissance-plut%C3%B4t-que-les-profits/id1516230224?i=1000476394989"><img src="https://images.theconversation.com/files/233721/original/file-20180827-75984-1gfuvlr.png" alt="Listen on Apple Podcasts" width="268" height="68"></a></p>
<h2><a href="https://theconversation.com/podcast-amazon-une-marketplace-pour-assecher-la-concurrence-131497">Amazon, une marketplace pour assécher la concurrence</a></h2>
<figure class="align-center ">
<img alt="" src="https://images.theconversation.com/files/322142/original/file-20200322-22618-1t7851m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&fit=clip" srcset="https://images.theconversation.com/files/322142/original/file-20200322-22618-1t7851m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=600&h=490&fit=crop&dpr=1 600w, https://images.theconversation.com/files/322142/original/file-20200322-22618-1t7851m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=600&h=490&fit=crop&dpr=2 1200w, https://images.theconversation.com/files/322142/original/file-20200322-22618-1t7851m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=600&h=490&fit=crop&dpr=3 1800w, https://images.theconversation.com/files/322142/original/file-20200322-22618-1t7851m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=754&h=615&fit=crop&dpr=1 754w, https://images.theconversation.com/files/322142/original/file-20200322-22618-1t7851m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=30&auto=format&w=754&h=615&fit=crop&dpr=2 1508w, https://images.theconversation.com/files/322142/original/file-20200322-22618-1t7851m.jpg?ixlib=rb-1.1.0&q=15&auto=format&w=754&h=615&fit=crop&dpr=3 2262w" sizes="(min-width: 1466px) 754px, (max-width: 599px) 100vw, (min-width: 600px) 600px, 237px">
<figcaption>
<span class="caption">Pour le fondateur Jeff Bezos, les marges de ses concurrents constituent une « opportunité » pour son entreprise.</span>
<span class="attribution"><span class="source">Steve Jurvetson/Flickr</span>, <a class="license" href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/">CC BY-SA</a></span>
</figcaption>
</figure>
<p>En offrant la possibilité à des vendeurs indépendants de faire connaître leurs produits, la plate-forme sélectionne les <em>best sellers</em> qu’il distribuera lui-même à l’avenir… en cassant les prix.</p>
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<p><a href="https://open.spotify.com/episode/40AFgxNutHJSn5v5zXGgxC"><img src="https://images.theconversation.com/files/237984/original/file-20180925-149976-1ks72uy.png?ixlib=rb-1.1.0&q=45&auto=format&w=268&fit=clip" width="268" height="82"></a>
<a href="https://podcasts.apple.com/au/podcast/podcast-amazon-une-marketplace-pour-ass%C3%A9cher-la-concurrence/id1516230224?i=1000476394977"><img src="https://images.theconversation.com/files/233721/original/file-20180827-75984-1gfuvlr.png" alt="Listen on Apple Podcasts" width="268" height="68"></a></p><img src="https://counter.theconversation.com/content/134365/count.gif" alt="The Conversation" width="1" height="1" />
<p class="fine-print"><em><span>Julien Pillot est coordinateur du think tank trans-partisan "Le Jour d'Après" qui entend participer aux débats sur les réformes structurelles nécessaires à la modernisation et l'efficacité de notre modèle social, économique et institutionnel, en dépassant les clivages partisans.</span></em></p>Les succès d’Airbnb, d’Uber ou encore d’Amazon reposent sur des modèles qui visent à les rendre incontournables chez les consommateurs. Décryptage.Julien Pillot, Enseignant-Chercheur en Economie et Stratégie (Inseec U.) / Pr. et Chercheur associé (U. Paris Saclay), INSEEC Grande ÉcoleLicensed as Creative Commons – attribution, no derivatives.